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Introduction Au Droit - Phillipe Malaurie
Introduction Au Droit - Phillipe Malaurie
INTRODUCTION AU DROIT
Philippe Malaurie
Professeur émérite de l’Université Panthéon-Assas (Paris II)
Patrick Morvan
Professeur à l’Université Panthéon-Assas (Paris II)
6e édition
Ouvrages parus
Introduction au droit
Droit des personnes – La protection des mineurs et des majeurs
Droit des biens
Droit des obligations
Droit des contrats spéciaux
Droit des sûretés
Droit de la famille
Droit des successions et des libéralités
Droit des régimes matrimoniaux
De Philippe Malaurie, avec la collaboration de Philippe Delestre
Droit civil illustré, Defrénois, 2011
De Philippe Malaurie
Dictionnaire d’un droit humaniste, Université Panthéon-Assas, Paris II,
LGDJ, 2015
Anthologie de la pensée juridique, Cujas, 2e éd., 1996
Droit et littérature, Une anthologie, Cujas, 1997
De Patrick Morvan
Le principe de droit privé, éd. Panthéon-Assas, 1999
Droit de la protection sociale, LexisNexis, 7e éd., 2015
Restructurations en droit social, LexisNexis, 3e éd., 2013
Criminologie, LexisNexis, 2e éd., 2016
ISBN
SOMMAIRE
LIVRE I
LIVRE II
RÉALISATION DU DROIT
TITRE I. – ORGANISATION DE LA JUSTICE
Chapitre I. – JURIDICTIONS
Chapitre II. – JUGEMENTS
Chapitre III. – GENS DE JUSTICE
TITRE II. – LA PREUVE
LIVRE III
SOURCES DU DROIT
TITRE I. – SOURCES ÉCRITES
Chapitre I. – LA LOI
Chapitre II. – AU-DESSUS ET AU-DESSOUS DE LA LOI
TITRE II. – SOURCES NON ÉCRITES
Chapitre I. – LA COUTUME
Chapitre II. – LA JURISPRUDENCE
Chapitre III. – LA DOCTRINE
Juridictions
CA = arrêt de la Court of Appeal (Grande-Bretagne)
CA = arrêt d’une cour d’appel
CAA = arrêt d’une cour administrative d’appel
Cass. Ass. plén. = arrêt de l’assemblée plénière de la Cour de cassation
Cass. ch. mixte = arrêt d’une chambre mixte de la Cour de cassation
Cass. ch. réunies = arrêt des chambres réunies de la Cour de cassation
Cass. civ. = arrêt d’une chambre civile de la Cour de cassation
Cass. com. = arrêt de la chambre commerciale et financière de la Cour de cassation
Cass. crim. = arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation
Cass. soc. = arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation
CE = arrêt du Conseil d’État
CEDH = arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme
CJCE = arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes
CJUE = arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne
Cons. const. = décision du Conseil constitutionnel
Cons. prud’h. = Conseil des prud’hommes
JAF = décision d’un juge aux affaires familiales
J.d.t. = décision d’un juge des tutelles
KB = arrêt du King’s bench (Banc du roi) (Grande-Bretagne)
QB = arrêt du Queen’s Bench (Banc de la reine) (Grande-Bretagne)
Réf. = ordonnance d’un juge des référés
Req. = arrêt de la chambre des requêtes de la Cour de cassation
Sent. arb. = sentence arbitrale
Sol. impl. = solution implicite
TA = jugement d’un tribunal administratif
T. civ. = jugement d’un tribunal civil
T. com. = jugement d’un tribunal de commerce
T. confl. = décision du Tribunal des conflits
T. corr. = jugement d’un tribunal de grande instance, chambre correctionnelle
T.f. = arrêt du Tribunal fédéral (Suisse)
TGI = jugement d’un tribunal de grande instance
TI = jugement d’un tribunal d’instance
TPICE = Tribunal de première instance des communautés européennes
Acronymes
AFNOR = Association française de normalisation
CCI = Chambre de commerce internationale
Ccne = Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé
CEE = Communauté économique européenne
DASS = Direction de l’action sanitaire et sociale
DPU = Droit de préemption urbain
IRPI = Institut de recherche en propriété intellectuelle
OPE = offre publique d’échange de valeurs mobilières
POS = plan d’occupation des sols
PUAM = Presses universitaires de l’Université d’Aix-Marseille
PUF = Presses universitaires de France
SA = société anonyme
SARL = société à responsabilité limitée
SAS = société anonyme simplifiée
SCI = société civile immobilière
SNC = société en nom collectif
TUE = Traité sur l’Union européenne
TFUE = Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne
Abréviations usuelles
A. = arrêté
Adde = ajouter
Aff. = affaire
al. = alinéa
Ann. = annales
Appr. = approbative (note)
Arg. = argument
Art. = article
Art. cit. = article cité
Av. gal. = avocat général
cbné = combiné
cf. = se reporter à
chron. = chronique
col. = colonne
comp. = comparer
concl. = conclusions
cons. = consorts
Contra = solution contraire
crit. = critique (note)
DIP = Droit international public/Droit international privé
doctr. = doctrine
éd. = édition
eod. vo = eodem verbo = au même mot
Et. = Mélanges
ib. = ibid. = ibidem = au même endroit
infra = ci-dessous
IR = informations rapides
loc. cit. = loco citato = à l’endroit cité
m. n./ déc./ concl. = même note/ décision/ conclusion
n. = note
n.p.B. = non publié au Bulletin des arrêts de la Cour de cassation (inédit)
op. cit. = opere citato = dans l’ouvrage cité
passim = çà et là
préc. = précité
pub. = publié
rapp. = rapport
Sect. = section
sté = société
somm. = sommaires
supra = ci-dessus
TCF DIP = Travaux du Comité français de DIP
th. = thèse
V. = voyez
v = versus = contre
Vº = verbo = mot (Vis = verbis = mots)
*et** = décisions particulièrement importantes
Sauf indication contraire, les articles cités se réfèrent au Code civil.
BIBLIOGRAPHIE GÉNÉRALE
J.-L. AUBERT et E. SAVAUX, Introduction au droit et thèmes fondamentaux du droit civil, Sirey,
15e éd., 2014
J.-L. BERGEL, Méthodologie juridique, PUF, coll. Thémis droit, 2e éd., 2016
J. CARBONNIER, Introduction, PUF, Thémis, 27e éd., 2002
P. DEUMIER, Introduction générale au droit, LGDJ, 3e éd., 2015
J. GHESTIN, G. GOUBEAUX et M. FABRE-MAGNAN, Traité de droit civil. Introduction générale, LGDJ,
4e éd., 1994
Ph. MALINVAUD, Introduction à l’étude du droit, LexisNexis, 15e éd., 2015
Fr. TERRÉ, Introduction générale au droit, Dalloz, 10e éd., 2015.
PREMIÈRES VUES QU’EST-CE QUE LE DROIT ?
12. Droit et temps 66. – Le temps est l’un des maîtres du droit mais un
maître ambigu : tantôt inhibant ou érosif, lorsqu’il efface ou détruit une
prérogative légale (donnant par exemple naissance à un droit à l’oubli
via l’amnistie ou la prescription extinctive), tantôt statique, lorsqu’il
joue un rôle conservateur (ex. : la nuit, durant laquelle le travail ou les
perquisitions sont en principe interdits 67), tantôt dynamique, lorsqu’il
crée ou modifie une situation juridique. Le temps est extincteur,
protecteur (ex. : le mineur est protégé en droit civil, en droit pénal et en
droit du travail) ou créateur.
Il est un maître dont les pouvoirs et les effets dépendent de l’usage que l’homme en fait.
L’écoulement du temps n’est créateur de droit que si à sa durée s’ajoute une activité humaine, telle la
possession en matière de prescription acquisitive (art. 2258 et 2261) ou la possession d’état d’enfant
dans le droit de la filiation (art. 311-1). Au contraire, son écoulement est destructeur si à sa durée
s’associe une inactivité, comme en matière de prescription extinctive (souvent dénommée
prescription libératoire) ou de forclusion.
Ce qui est éphémère n’est pas juridique : le droit, comme la société
humaine, s’inscrivent dans le temps. La règle de droit est, par définition,
permanente 68. Le phénomène est évident pour la coutume, forgée par la
répétition d’usages 69, ainsi que, d’une autre façon, pour la
jurisprudence, de nature « sédimentaire » 70. Pour autant, la règle ne
s’accommode que difficilement de la perpétuité. Sans doute, le droit de
propriété est perpétuel, mais non les autres droits réels ; surtout, le droit
civil prohibe les engagements perpétuels (art. 1210). En droit pénal, la
réclusion criminelle à perpétuité, même déclarée « incompressible »,
n’est jamais réellement perpétuelle en raison des aménagements de peine
qui, tôt ou tard, doivent être offerts aux condamnés.
Ce qui est instantané engendre ou éteint une existence juridique (ex. :
naissance ou mort d’une personne, fait ou acte générateur d’une
obligation), même si ce processus peut être graduel (ex. : formation
progressive d’un droit, contrat à exécution successive). L’urgence
justifie qu’il soit dérogé à la règle 71. Les règles relatives à l’entrée en
vigueur ou à l’abrogation des lois 72 ainsi que les dispositions du droit
transitoire (destinées à trancher les conflits de lois dans le temps au
regard du principe de non-rétroactivité) 73 prennent le temps pour objet.
14. Lois mémorielles 80. – Une controverse est née des lois dites
« mémorielles ».
Selon la loi no 2001-70 du 29 janvier 2001, « la France reconnaît publiquement le génocide
arménien » (commis par l’Empire ottoman en 1915). Selon la loi no 2001-434 du 21 mai 2001, « la
République française reconnaît que la traite négrière transatlantique ainsi que la traite dans
l’océan Indien d’une part, et l’esclavage d’autre part, perpétrés à partir du XVe siècle, aux
Amériques et aux Caraïbes, dans l’océan Indien et en Europe contre les populations africaines,
amérindiennes, malgaches et indiennes constituent un crime contre l’humanité » (art. 1er) 81. Enfin,
la loi no 2005-158 du 23 février 2005 prévoyait (art. 4, al. 2 anc.) que « les programmes scolaires
reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en
Afrique du Nord, et accordent à l’histoire et aux sacrifices des combattants de l’armée française
issus de ces territoires [c’est-à-dire les « Harkis »] la place éminente à laquelle ils ont droit ». Le
trouble suscité par ce texte incita le président de la République à saisir le Conseil constitutionnel qui
reconnut à ces dispositions un caractère réglementaire, ouvrant la voie à leur abrogation par décret,
sans plus de débats 82.
Dans cette controverse, les historiens avaient revendiqué leur liberté d’expression et de
critique tandis que les juristes avaient critiqué le dévoiement de la loi. Le Conseil constitutionnel
leur a donné satisfaction, à tous, en censurant le texte qui assortissait de sanctions pénales la négation
de tous les génocides (arménien, en particulier) reconnus par les lois précédentes : d’une part, « la
loi a pour vocation d’énoncer des règles et doit par suite être revêtue d’une portée normative », ce
qui n’est pas le cas lorsqu’elle « reconnaît » un crime de génocide ; d’autre part, en imposant une
telle qualification juridique, le législateur a porté atteinte à l’exercice de la liberté d’expression et de
communication 83. La Cour de cassation a confirmé qu’une loi mémorielle n’avait pas de caractère
normatif 84.
Cette censure aboutit à un résultat troublant : le droit pénal ne traite pas de façon égale tous les
génocides et n’incrimine (depuis la loi Gayssot du 13 juillet 1990) que la négation du génocide des
Juifs commis par les nazis durant la Seconde guerre mondiale (la Shoah). Cette différence de
traitement répressif a été assumée. La Cour EDH a estimé que la condamnation pénale d’un
négationniste violait la liberté d’expression (Conv. EDH, art. 10) dans la mesure où celui-ci avait
contesté le génocide arménien et non la Shoah 85. Dans la même ligne, le Conseil constitutionnel a
exclu une atteinte au principe d’égalité devant la loi pénale 86. Le droit se doit de réprimer le
négationnisme lorsqu’il est l’expression d’une idéologie raciste qui menace la démocratie. Les
politiques mémorielles s’avèrent utiles dans ce contexte (comme en Allemagne où, après la guerre,
elles ont forgé un consensus démocratique sur le respect des droits de l’homme et la dignité
humaine).
Le droit peut, en sens inverse, instituer un droit à l’oubli. Ainsi, une ordonnance de 1944 a interdit
à la personne poursuivie du chef de diffamation publique de rapporter la preuve de la vérité des faits
diffamatoires (exceptio veritatis qui, en principe, peut exonérer le prévenu de sa responsabilité
pénale), dès lors que ces faits remontent à plus de dix ans, sont amnistiés ou sont prescrits 87. Mais
cette restriction, qui entendait préserver la paix sociale, a été jugée contraire à la liberté
d’expression par la Cour européenne des droits de l’homme 88.
17 à 19. réservés.
CHAPITRE I
LE DROIT EST UN PHÉNOMÈNE SOCIAL ET NORMATIF
SECTION I
LE DROIT EST UN PHÉNOMÈNE SOCIAL
21. Pas de droit (jus) sans société. – Un individu isolé, tel Robinson
Crusoë (avant d’être rejoint par Vendredi), a peut-être une morale, mais
pas de droit, faute de nouer des relations avec autrui 99. Le droit a
précisément pour objet de régir les rapports sociaux entre des personnes.
En latin, le mot jus (la norme juridique) comme le mot fas (la norme
religieuse) renvoient au partage et à la parole 100.
Il n’y a pas non plus de droit dans une collectivité inorganisée d’individus. Un tel groupement
serait une société anarchique dont les membres jouiraient d’une absolue liberté : il n’y aurait pas
davantage de rapports juridiques. Or, c’est par des relations juridiques qu’une juxtaposition
d’individus constitue une société. La société anarchique est une contradiction dans les termes. Elle
est d’ailleurs imaginaire ; la réalité n’en offre aucun exemple. Nombre de prétendus anarchistes,
attachés à l’idée de Justice, se bornent à contester l’ordre imposé par la religion, l’État (la loi
étatique) voire le contrat mais récusent l’« anomie » (absence complète de norme), tel Joseph
Proudhon 101.
De très nombreuses définitions ont été données du droit 102. Le
Digeste (compilation du droit romain établie à l’initiative de l’empereur
Justinien au VIe siècle ap. J.-C.) s’ouvre sur la plus célèbre, celle de
Celse, jurisconsulte du IIe siècle ap. J.-C. : « jus est ars boni et æqui »
(D. 1, 1, 1 : le droit est l’art du juste et du bien).
Selon Michel Villey, qui prônait un retour aux sources de la philosophie, c’est-à-dire selon lui à
Aristote, le droit (en grec to dikaïon, en latin jus, substantifs neutres renvoyant à un objet à la
différence des féminins dikaïosunê et justitia qui désignent la vertu morale de justice propre à un
sujet) est un partage des choses extérieures (non des biens spirituels qui touchent à l’être), telles que
les richesses, les droits, devoirs et charges. Ce partage, qui fait intervenir un tiers impartial
(notamment le juge, dikastes ou judex), s’effectue à l’intérieur d’un groupe social selon une juste
proportion : le droit est par essence un « juste milieu » dans les choses (to méson en grec, medium in
re en latin). En revanche, il ne désigne pas un ensemble de propositions normatives, impératives,
« déontiques ». L’évolution de la pensée moderne, sous l’influence du positivisme juridique (à partir
de Thomas Hobbes) et l’« agression des sciences », auraient dénaturé le sens originel aristotélicien
en définissant le droit sur le modèle de la morale, comme un ensemble de règles de conduite 103.
Thomas Hobbes (1588-1679) dont l’œuvre principale est Leviathan or the Matter, Form and
Power of a Commonwealth ecclesiastical and civil (1651), décrit l’État comme une personne
artificielle absorbant tous les individus qui, par convention réciproque (covenant), ont aliéné à son
profit (sorte de stipulation pour autrui) les libertés absolues (rights of nature) dont ils jouissaient
dans l’« état de nature » (état mythique où l’homme était un « loup pour l’homme » et régnait « la
guerre de tous contre tous », source d’insécurité permanente). Les individus attendent ainsi de l’État
qu’il leur redistribue ces droits naturels sous la forme de « droits civils », restreints et conditionnés,
et qu’il contraigne chacun au respect de ce contrat social. Le Léviathan est une sorte de Dieu (la
religion même lui est soumise), souverain absolu doté d’un pouvoir illimité et indivisible 104. Il n’est
d’autres lois que celles qu’il édicte. Ce droit positif ne peut être accusé d’injustice : l’État est au-
dessus de la loi et a tous les droits. Les hommes qui l’ont institué portent la responsabilité d’un
éventuel dévoiement de ses prérogatives et n’ont d’autre choix que de le subir, sauf à retourner à
l’état de nature. Hobbes est l’anti-Aristote.
22. Pas de société sans droit. – S’il est vrai que le droit n’existe qu’à
l’intérieur d’une société, la réciproque l’est également : toute société
obéit à un droit ou, selon un adage classique, ubi societas ibi jus. Seules
des sociétés purement idéales, mythiques ou prophétiques peuvent
ignorer les règles.
L’antiquité suméro-babylonienne puis les religions juive et chrétienne ont connu le mythe de l’âge
d’or ou du paradis terrestre, évoquant une époque d’innocence où chaque individu portait en lui-
même sa propre justice et ignorait toute espèce de droit 105. Ce genre de mythe n’a pas de réalité
historique. Il est l’expression sublimée d’un espoir en un avenir radieux, le refuge d’esprits inquiets
en quête d’un ordre cosmique harmonieux. En fait, toute société est soumise au droit. Les sociétés
primitives sont régies par des règles de droit très formalistes, très abondantes et très subtiles.
Certaines prophéties, religieuses ou athées, annoncent aussi des sociétés sans droit. La prophétie
chrétienne annonce les corps glorieux. La théorie marxiste prédit la destruction de l’État capitaliste
bourgeois et donc l’évanouissement du droit : dans cette société promise, les hommes entretiendront
des rapports harmonieux régis par la seule observance spontanée des règles de la vie socialiste.
24. Religion 108, laïcité 109, sécularisation, Islam et droit 110. – 1º) Le
sentiment religieux constitue le tréfonds le plus intime de la
personnalité humaine : un chemin dans la profondeur du cœur et de
l’intelligence ; qui engage la totalité de l’être ; la transcendance que,
toujours et partout, recherchent les hommes, à leur manière, variable
selon les temps et les lieux.
2º) En Occident, la religion relève de la sphère privée. Le droit s’est
progressivement détaché de ses origines religieuses : les sociétés
politique et religieuse sont désormais distinctes 111 ; à la différence de
l’Ancien droit, le Code civil garde le silence sur la religion, consacrant
la laïcité (le mariage civil, le divorce) et l’égalité des personnes (dans les
successions). Ce phénomène capital, la laïcisation du droit occidental, a
été consacré en France par la loi « concernant la séparation des Églises
et de l’État » du 9 décembre 1905 affirmant que « la République assure
la liberté de conscience » et « garantit le libre exercice des cultes »
(art. 1er) mais « ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun
culte » (art. 2). Le mot de laïcité n’apparaîtra que plus tard, dans
l’ancienne Constitution du 27 octobre 1946 (IVe République) et celle du
4 octobre 1958 (Ve République) dont l’article 1er proclame que « La
France est une République [...] laïque ».
La laïcité signifie que la religion est une liberté fondamentale, la
liberté de conscience et de choix entre les différents cultes – ou de
n’embrasser aucune religion. Elle implique aussi la neutralité de l’État
qui se doit « d’enregistrer la présence d’une religion dès qu’il constate
qu’à l’élément subjectif de la foi se réunit l’élément objectif d’une
communauté, si petite soit-elle », et ne peut distinguer entre les
religions selon leur importance, leur ancienneté ou le contenu de leurs
dogmes 112.
Le mot laïcité recouvre des approches diverses : l’une est
intransigeante, refusant à toutes les religions toute espèce d’influence,
fût-elle indirecte ; l’autre est apaisée, admettant que la religion puisse
influencer le droit. De nos jours, la laïcité s’oppose aux extrêmismes
religieux, en particulier islamistes.
3º) Entre la laïcité et la sécularisation, il est des ressemblances et des
différences qui, d’ailleurs, furent évolutives. Longtemps, la
sécularisation désigna, dans l’Église catholique, un changement de
condition d’une personne ou d’un bien qui passe de l’état ecclésial (du
clergé régulier, vivant selon la règle d’un ordre, dans un couvent ou un
monastère, par ex.) à l’état séculier (au clergé séculier, vivant dans le
siècle, c’est-à-dire parmi les « laïcs »). Aujourd’hui, dans son acception
la plus courante, la sécularisation revêt une dimension sociologique.
Elle désigne une désacralisation du monde, une émancipation de la
société – des personnes, des biens, des valeurs, des consciences – qui la
fait échapper aux autorités religieuses, un désenchantement du monde,
une société construite en dehors de la religion, une laïcité 113.
4º) Au contraire, de nombreux pays d’Islam (ex. : Iran, Arabie
Saoudite, Soudan, etc.) ne distinguent pas le droit et la religion : la loi
religieuse (coranique) régit la vie civile (par ex., le droit de la famille qui
affirme l’infériorité civile de la femme, autorise la polygamie et la
répudiation, exclut la filiation hors mariage, etc.). En outre, ces droits
tendent à être figés puisqu’ils sont issus d’une révélation divine, alors
que les droits occidentaux ont un caractère évolutif 114. En Occident, la
laïcité elle-même est flexible et évolutive.
5º) Le droit n’est pas une religion parce qu’il ne partage pas les
mêmes fins. Cependant, entre ces deux ordres normatifs, l’influence est
réciproque, profonde et diffuse. D’une manière générale, le droit protège
la liberté de croyance de chaque individu (Conv. EDH, art. 9) ainsi que
le pluralisme religieux. Mais il refuse de consacrer le précepte religieux
en tant que norme collective opposable juridiquement.
Ainsi, l’article 1er de la Constitution (précité) interdit « à quiconque de se prévaloir de ses
croyances religieuses pour s’affranchir des règles communes régissant les relations entre
collectivités publiques et particuliers » ; de même, des droits collectifs ne peuvent être reconnus « à
quelque groupe que ce soit, défini par une communauté d’origine, de culture, de langue ou de
croyance » 115 : la laïcité combat le communautarisme.
D’autres illustrations de ce refus d’opposabilité de la norme religieuse peuvent être trouvées dans
la loi du 12 juin 2001 tendant à réprimer les sectes manipulatrices 116, et dans la reconnaissance par
la Cour européenne des droits de l’homme de « l’incompatibilité de la charia avec les principes
fondamentaux de la démocratie » 117. Les convictions religieuses n’entrent pas, sauf convention
expresse, dans le champ contractuel 118 ; l’absence de virginité de la femme n’est pas une cause de
nullité du mariage 119.
Il y a une quarantaine d’années, un débat s’était ouvert dans des entreprises (dites « de
tendance ») qui entendaient imposer à leurs salariés le respect de certaines convictions religieuses et
du « caractère propre » de l’entreprise. Avait alors été approuvé le licenciement d’une institutrice
employée au sein d’un établissement privé d’enseignement catholique au motif qu’elle s’était
remariée après avoir divorcé 120. De nos jours, ce sont les salariés qui revendiquent auprès de leur
employeur le droit de pratiquer des rites confessionnels ou d’arborer des signes religieux sur leur
lieu de travail. Suscitant l’incompréhension, la Cour de cassation avait jugé discriminatoire le
licenciement de la salariée d’une crèche associative (Baby Loup) qui avait contrevenu au règlement
intérieur (prônant la laïcité et la neutralité dans les relations avec le public) en décidant de porter un
voile islamique 121. Les juges se sont finalement ravisés en approuvant le licenciement pour faute
grave de cette salariée 122. Une régression dangereuse du principe de laïcité a été évitée : un précepte
religieux ne peut être opposé au même titre qu’une norme collective.
Ainsi, la loi du 15 mars 2004 interdit, « en application du principe de laïcité », « le port de
signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse »
dans les écoles, collèges et lycées publics (C. éduc., art. L. 141-5-1). Cette disposition, qui ne vise
en réalité qu’à condamner le port du voile 123 ou du foulard islamique (ayant pour origine une
jurisprudence du Conseil d’État 124), élargit le champ de l’interdiction à tous les signes religieux non
discrets – trouvant aussi attentatoire au principe de laïcité le port d’une grande croix catholique,
d’une kippa, du turban sikh (qui n’est pourtant pas un signe religieux) 125 – par crainte de susciter un
rejet brutal d’une loi controversée.
La Cour européenne des droits de l’homme a reconnu aux États une « marge d’appréciation » sur
les questions religieuses qui permet, par exemple, à la Turquie d’interdire le voile dans les collèges
ou lycées publics 126 et même dans les universités 127 ; a aussi été admise la présence obligatoire d’un
crucifix au mur des salles de classe des écoles publiques en Italie 128. Si la CEDH a validé la loi
française du 15 mars 2004 sur le voile 129, en revanche, elle a condamné, au nom de la liberté de
conscience et de religion, l’interdiction du port de tenues religieuses « dans des lieux publics
ouverts à tous comme les voies ou places publiques » par des citoyens ordinaires qui ne se livrent à
aucun acte de prosélytisme 130. La France n’a guère prêté attention à cette dernière jurisprudence : la
loi no 2010-1192 du 11 octobre 2010, inspirée par la volonté politique d’interdire, jusque dans la rue,
le port de la burqa, du niqab ou du tchadri (des voiles islamiques couvrant intégralement la tête de
la femme), affirme d’une manière générale que « Nul ne peut, dans l’espace public, porter une tenue
destinée à dissimuler son visage » (sauf pour des raisons de santé ou professionnelles et dans des
manifestations sportives, artistiques ou traditionnelles – notamment à la mosquée) 131. Mais, encore
une fois, la CEDH a reconnu que la France disposait en l’espèce d’une « ample marge
d’appréciation » et, de plus, que l’interdiction posée par la loi du 11 octobre 2010 se justifiait « par
la préservation des conditions du “vivre ensemble” » 132.
6º) Enfin, les grandes sociétés religieuses possèdent des juridictions
et un droit propres : la Sharî’a pour l’Islam (dont les sources sont le
Coran et la Sunna), le droit hébraïque pour le judaïsme (dont les sources
sont la Torah [ou Pentateuque], la Mishnah et son commentaire la
Gemara qui forment tous deux le Talmud, puis la Halakha 133), le droit
canonique pour le catholicisme (Code de droit canon, appliqué en
France aux personnes et institutions catholiques par les juridictions
ecclésiastiques). Le droit canonique a joué un rôle considérable dans la
formation du droit civil français. Le droit musulman, comme toute loi
étrangère, s’applique en France en vertu des règles du droit international
privé mais ne peut heurter des principes fondamentaux, comme en
témoigne la jurisprudence sur les « répudiations musulmanes » 134.
SECTION II
LE DROIT OBJECTIF
§ 1. DROIT ET NON-DROIT
26. Non-droit. – Le droit doit être distingué d’autres règles sociales
(des normes sociales de conduite) qui ne présentent pas un caractère
juridique, quoique les individus soient aussi tenus de les observer. Si les
règles juridiques sont toutes sociales, la réciproque n’est pas vraie :
toutes les règles sociales ne sont pas juridiques 136.
Ce que Jean Carbonnier 137 avait nommé « l’hypothèse du non-droit » 138. En certains lieux (ex. :
principe d’inviolabilité du domicile, droit d’asile, immunité pénale accordée aux toxicomanes dans
les « salles de shoot » 139), à certaines périodes (interdiction des perquisitions de nuit ou des
expulsions en période hivernale), en certaines matières (principe de la légalité des délits en droit
pénal), le droit est tenu à l’écart. La généralité de la loi et son inflation la rendent difficilement
compréhensible, la lenteur de la justice (outre les exigences en matière de preuve) favorise son
inapplication et les faits résistent en de nombreux domaines au droit, en particulier dans les relations
entre individus (concubinage hors mariage, entraide bénévole hors contrat).
L’hypothèse du non-droit met en lumière l’existence d’un « pluralisme normatif » :
d’innombrables règles sociales non juridiques ordonnent la société (rapports d’amitié 140, mœurs,
convenances, règles de politesse, accords amiables, règles religieuses, etc.) 141. Ces règles auraient
pu être juridiques mais ne le sont pas parce qu’elles excluent toute autorité officielle et tout recours à
la contrainte étatique ou judiciaire. Elles trouvent ailleurs leur sanction : dans le for intérieur de
l’être humain 142. Cette observation conduit à préconiser une politique législative empreinte de
réserve et de sobriété : le législateur devrait se garder d’intervenir dans les affaires relevant des
consciences individuelles. À ce titre, le non-droit trouve une place privilégiée dans les relations
extrapatrimoniales ; la politique législative suivie en droit de la famille durant un temps, entre 1963
et 1990, sous l’impulsion de Jean Carbonnier exprime ce désengagement juridique 143 et un certain
scepticisme envers les vertus sociales et pédagogiques de la loi.
Le non-droit coexiste toujours avec le droit : il n’y a pas de société sans loi 144. Mais la loi ne se
résigne jamais à la modération : le juge et le législateur n’ont de cesse de consacrer des règles
sociales issues du non-droit 145.
Le droit objectif comporte deux éléments caractéristiques qui
permettent de le distinguer des autres règles sociales : une contrainte (I)
et un idéal de justice et d’ordre (II).
I. — Contrainte
B. PRESCRIPTIONS MORALES
33. Analyse économique du droit 204. – Dans les années 1960 est
apparue aux États-Unis, à l’université de Chicago, la théorie de
l’analyse économique du droit (Economic analysis of law, ou
mouvement Law and Economics). Les pionniers de ce courant qui, en
cinquante ans, a produit des milliers d’articles sont le prix Nobel
Ronald Coase 205 et Richard Posner 206. Il prétend imprimer au droit un
utilitarisme marqué, au-delà du droit économique (notamment du droit
de la concurrence où cette analyse a prospéré). Le droit serait un
instrument de « maximisation » des utilités ou des satisfactions
individuelles et collectives. Puisque la loi influence les comportements
(c’est-à-dire que les sujets de droit s’adapteraient à la loi en prenant des
mesures préventives, au travers d’arrangements privés – un postulat bien
illusoire), ce serait l’efficacité économique (efficiency), la recherche des
meilleurs profits et des moindres coûts (la minimisation des « coûts de
transaction », qui rendent les échanges moins fructueux) par des
individus ou des entreprises dont la rationalité est postulée (ce qui est
aussi illusoire) qui devrait guider la règle de droit.
L’économie déterminerait ainsi les conceptions juridiques : « la méthode rappelle furieusement
la critique marxiste du Droit » 207, sous cette réserve que les lois du marché (selon le libéralisme de
l’École de Chicago) ont remplacé la lutte des classes comme cause de détermination universelle (ou
« infrastructure »). Sous l’influence de l’économiste Friederich Hayek, défenseur de l’« ordre
spontané », en lutte contre les doctrines de Keynes et de l’État providence, puis surtout dans les
années 1980, la doctrine du Law and Economics a été mise au service d’une conception libérale de
l’économie. Écho du patriotisme messianique qui imprègne la culture américaine, elle dépeint
(naturellement) la Common Law comme le meilleur système juridique à offrir au monde 208.
De même, selon la formule du juge Holmes, dont le réalisme
préfigurait au XIXe siècle ce courant 209, « le devoir de respecter un
contrat signifie que vous devez prévoir de payer des dommages-intérêts
si vous ne le faites pas et rien de plus » (ex. contemporain de violation
fructueuse du contrat [efficient breach] : le surbooking dans le transport
aérien où la compagnie préfère payer des dommages-intérêts plutôt que
de ne pas vendre un billet d’avion). En matière de responsabilité civile,
la Learned Hand Formula vise à accroître l’efficacité économique de la
prévention du dommage en assignant un coût supérieur à la réparation
qui risque d’être due 210. En 2002, dans le contexte de la « guerre contre
le terrorisme » consécutive aux attentats islamistes du 11 septembre
2001, R. Posner avait affirmé que « si les enjeux sont assez élevés, la
torture est admissible » 211. L’analyse économique passe à la moulinette
de l’efficiency toutes les notions juridiques, les désagrège et les réduit à
une loi de l’économie (par ex. la nullité pour vice du consentement ne
protège pas la libre volonté d’une partie mais lui permet d’échapper au
contrat annulé et donc de minimiser les coûts liés à sa formation).
Si l’analyse économique du droit a peu à peu séduit hors des États-
Unis (en Allemagne, aux Pays-Bas, en Italie puis en France), la tradition
juridique européenne n’admet pas qu’un calcul de rendement ignore
voire bafoue les principes fondamentaux, les droits de l’homme et les
valeurs morales, humanistes ou culturelles, bref, toute la Justice 212. Elle
n’admet pas non plus le sacrifice systématique du raisonnement aux
conséquences de la décision (« conséquentialisme juridique ») : le
raisonnement déductif et le syllogisme demeurent dominants (au moins
comme modèles de raisonnement) dans les pays de droit civil. En outre,
la doctrine du Law and Economics n’a pas de méthode. Elle abonde de
postulats arbitraires : le sujet de droit (l’homo economicus) serait un
être parfaitement rationnel ; le droit modifierait les conduites, l’individu
adaptant toujours son comportement afin de réduire l’incidence du
fardeau (coût) que le droit lui impose (ex. : le vendeur à qui incombent
les risques de la vente souscrira une assurance) ; le législateur se
préoccuperait d’éviter les gaspillages ; les arrangements privés seraient
supérieurs à la réglementation par l’État, etc. En rupture avec la réalité,
accaparés par la construction d’un schéma purement idéal, les
économistes américains décrivent le calcul de l’efficience à grand renfort
de modèles mathématiques très abstraits (parfois peu compréhensibles).
Privilégiant l’augmentation des richesses, ils ne se soucient pas de leur
répartition ou de leur distribution équitable – au cœur des concepts de
justice et de progrès social qui se trouvent occultés, précisément, parce
qu’ils ne sont pas scientifiques. L’analyse juridique est certes plus
arbitraire mais elle est plus complexe et globale 213.
Il ne faut pas exagérer l’influence de l’Analyse économique du droit ni l’écart entre la méthode du
juge américain et celle de son homologue français. Le professeur Posner n’aurait convaincu que le
juge fédéral Posner (il était à la fois universitaire et magistrat) et ses épigones. Rares sont les
décisions, aux États-Unis, qui s’appuient sur une motivation économique explicite 214. De multiples
courants et variantes privent d’ailleurs la théorie d’unité (Chicago school, institutionnalistes et néo-
institutionnalistes, école autrichienne, Behavorial Law & Economics, école du Public choice ou des
choix collectifs...) tandis que les libertariens américains ont dénoncé le sacrifice des droits
fondamentaux qu’elle réalise 215. De son côté, le droit français, comme tant d’autres, a incorporé des
concepts à visée utilitaire ou économique (ex. : l’obligation précontractuelle d’information 216 ou les
clauses abusives ; le caractère dissuasif de la peine en droit pénal ; les taxes fiscales sanctionnant
certaines conduites...). De même, le juge français se laisse couramment guider par des considérations
utilitaires ou de politique juridique au détriment de la technique et de la cohérence du droit positif
(par ex. lorsqu’il tord la notion de cause ou sanctionne la violence économique). Peut-être le juge
tend-il seulement aujourd’hui à se préoccuper de façon plus systématique et plus visible de l’effet
économique ou social de ses solutions 217.
En définitive, l’analyse économique du droit est une savante et
complexe construction intellectuelle pour économistes. Pour les juristes,
qui ne peuvent dialoguer avec ces derniers faute d’un langage et d’une
pensée communs, elle est un simple outil de réflexion 218.
§ 2. SOURCES DU DROIT
I. — Sources idéales
37. Les forces créatrices du droit 236. – Les forces créatrices du droit
sont complexes. Il en est de purement matérielles, d’autres plus idéales.
François Gény 237 appelait « donné » un fonds de vérités, accessible à la seule intuition, dont le
rôle serait de fournir au droit positif des directives, de lui imprimer un mouvement vers le droit idéal
(le « juste objectif ») et de l’inciter à s’adapter aux évolutions de la société 238. Une fois ce droit
idéal aperçu, le juriste peut recourir à un ensemble de techniques juridiques artificielles (tels les
fictions ou le formalisme), conçues par sa propre intelligence (d’où le nom de « construit »), pour le
mettre concrètement en œuvre. Le « donné de Gény » connaît quatre manifestations 239 : le donné
historique, legs de l’histoire (droits anciens, vicissitudes sociales, économiques et politiques) au
système juridique contemporain ; le donné réel ou naturel, constitué des données brutes de la réalité
factuelle ou physique (géographie, physiologie ou psychologie humaine), prépondérante dans certains
domaines (par ex. le droit de la filiation) ; le donné rationnel, soit les catégories a priori de la
raison humaine, la logique formelle, l’évidence, la non-contradiction, qui ont leurs limites 240. Le
donné le plus important est le donné idéal, fruit d’un jugement de valeur déterminé par nos
conceptions morales, religieuses ou philosophiques, formé par nos sentiments intimes d’humanité et
d’équité, par notre sens du but et des exigences de la société.
Les sources idéales du droit sont elles-mêmes diverses. Le donné
idéal se répand dans le droit : outre les valeurs morales 241, il y a le droit
naturel (A) et l’équité (B) 242.
44. L’équité n’est pas une règle. – En France, l’équité n’est pas une
source du droit ni, en elle-même, une règle de droit. Une règle de droit
est par essence abstraite, générale et permanente, ce qui en garantit la
sécurité et la prévisibilité, alors que l’équité est par nature concrète,
particulière et éphémère, ce qui engendre incertitude et imprévisibilité,
sans compter le risque d’arbitraire du juge : le contraire d’une règle de
droit.
Le juge ne peut donc se fonder sur l’équité aux lieu et place d’une loi
claire 318, ni faire échec aux clauses d’un contrat dépourvues
d’ambiguïté 319.
Cependant, le juge civil (C. pr. civ., art. 12, al. 5) 320 ou l’arbitre (ibid., art. 1474) peut être
investi par les parties de la « mission de statuer comme amiable compositeur » : il est alors
affranchi des règles de droit et tenu de statuer en équité 321. Mais, selon une pente fatale, l’amiable
compositeur (notamment dans le commerce international) tend à « juridiciser » l’équité. Avide de
références normatives, il puise aux sources qui lui sont les plus familières : les règles de son droit
national 322. Un tel renversement trahit sa mission : l’arbitre statuant comme amiable compositeur qui
se prononce exclusivement par application des règles de droit doit s’expliquer sur leur conformité à
l’équité 323 en s’y référant expressément 324.
impliquant la force, dont l’État était le détenteur exclusif. L’erreur de ce postulat a été dénoncée par
les adeptes du pluralisme juridique. D’une part, l’État n’est pas la seule source du droit : la coutume
ou le « droit spontané » en sont une également 360, de même qu’il existe des sources informelles du
droit 361 et des droits propres à des groupements ou corporations privés. D’autre part, la contrainte
n’est pas une condition indispensable à l’existence d’une règle de droit. D’abord, une règle ne
connaît une application effective que si elle est spontanément reconnue comme obligatoire (par ex.,
les règles du Code de la route sont respectées plus parce qu’elles semblent raisonnables que par la
peur du gendarme) ; sa mise en œuvre requiert une réception par son destinataire qui doit, d’une
certaine façon, y adhérer 362. Ensuite, il existe un droit international privé et public alors que, dans
l’ordre international, nul n’est à même d’imposer une contrainte sans le relais des autorités d’un État.
Dans l’ordre interne, en revanche, une règle de droit sans la moindre contrainte ne se conçoit
guère 363 ; les règles non sanctionnées sont des règles infirmes (ex. : les règles d’interprétation du
Code civil 364). Si une contrainte est nécessaire, il importe peu qu’elle soit d’origine étatique ou
privée (ex. : une sanction disciplinaire).
49. Soft law : flou, doux et mou. – 1º) Toute règle non sanctionnée
n’est pas nécessairement une règle de « droit souple », lequel présente
des caractères spécifiques. La doctrine a souligné à partir des
années 1970 365 le développement d’un « droit souple » (soft law), c’est-
à-dire un droit flou (sans précision), doux (sans obligation) et mou (sans
sanction ni contrainte) 366. Celui-ci dirigerait les conduites de façon non
autoritaire (en orientant ou en recommandant), exprimerait le
souhaitable plutôt que l’obligatoire (en incitant ou en déclarant),
nouerait un dialogue permanent avec ses destinataires dont l’adhésion
serait recherchée. Il serait la traduction juridique d’un soft power
(pouvoir de persuasion), opposé au hard power (pouvoir de la
contrainte).
Ce droit souple serait nourri de résolutions, recommandations, déclarations, chartes et
directives... nombreuses en droit international public où la contrainte étatique ne peut s’exercer mais
qui se développent aussi dans les lois internes 367. Il est également constitué par les codes de bonne
conduite, chartes éthiques 368 et les différents types d’avis 369. Il aurait pour pendant une justice souple
incarnée par les modes de résolution amiable des litiges 370.
Le Conseil d’État a consacré son rapport public 2013 au « droit souple » 371. Il relève l’existence
d’une « échelle de normativité graduée entre le droit souple et le droit dur » (la règle la plus souple
étant celle qui se borne à exiger de son destinataire qu’il l’applique ou bien qu’il explique pourquoi
il ne l’applique pas, selon la technique comply or explain. V. ci-après). Le Conseil d’État formule
vingt-cinq propositions pour un « emploi raisonné du droit souple », dont l’utilité lui paraît
indéniable. Le droit souple pourrait servir à la mise en œuvre du droit (public) dur ou même se
substituer à lui. Il s’agirait, notamment, de rédiger des textes législatifs et réglementaires plus courts
en renvoyant leur application technique au droit souple (directives, recommandations de bonnes
pratiques). Encore faudrait-il vérifier au préalable, au travers d’un triple « test », que la règle de
droit souple sera utile, efficace (par ex., les normes techniques standardisées ou les contrats-types
sont généralement adoptés par les acteurs économiques qui, au contraire, ignorent les
recommandations des autorités publiques) et légitime (l’autorité qui édicte la règle de droit souple
devant, par définition, susciter l’adhésion de ses destinataires).
2º) La soft law a pour avatars la « régulation » et l’« auto-
régulation » 372.
La première désigne, dans un sens restreint, une forme assouplie de réglementation couvrant des
secteurs économiques qui relevaient d’anciens monopoles publics et furent ouverts à la libre
concurrence (ex. : télécommunications, électricité, transports). Le « droit de la régulation » est donc
d’abord le fruit des autorités administratives indépendantes (dites aussi de « régulation ») 373. Il
exprimerait à ce titre un « nouveau rapport entre le droit et l’économie, [...] détaché du passage
nécessaire par l’État et son organisation administrative » 374. Le concept de régulation sert aussi à
habiller des phénomènes connus : ineffectivité de la règle de droit, utilisation de standards, influence
des sources idéales du droit (morale, déontologie...), rôle du « non-droit » (ou droit spontané) 375 etc.
Dans un sens plus large que retient la doctrine anglo-saxonne, la « régulation » renvoie à une
analyse socio-économique de l’intervention de l’autorité publique (l’État). La théorie (non plus le
droit) de la régulation est une théorie libérale de l’intervention de la puissance publique, examinant
les effets que celle-ci déploie dans le tissu économique, scrutant les équilibres en présence,
soucieuse d’obtenir une efficacité maximale tout en respectant la loi du marché 376. La régulation est,
à ce titre, une notion-clef des doctrines américaines de l’Analyse économique du droit 377.
En tout état de cause, la régulation n’intervient que sur un marché, pour organiser la production ou
la distribution de biens et de services intrinsèquement licites : on ne « régule » pas le meurtre ou le
viol 378.
L’auto-régulation recouvre des normes secrétées par des organismes privés non institutionnels
(ex. : règlement intérieur d’une entreprise ou d’un ordre professionnel ; codes de bonne conduite
élaborés par des syndicats patronaux à l’usage des sociétés cotées ; règles édictées par des
organismes internationaux privés dans le secteur financier ou dans le domaine de l’internet) ; elle est
souvent associée au concept de « gouvernance » (privée). De façon plus originale, des organismes
non institutionnels peuvent être constitués auprès d’institutions publiques afin d’inspirer leur action
législative : ce phénomène se nomme la « comitologie » 379.
Les normes de régulation auraient plusieurs vertus : elles afficheraient
une proximité avec leurs destinataires qui éprouveraient en retour une
confiance accrue envers le régulateur ; elles seraient plus faciles (c’est-
à-dire, en termes d’analyse économique, moins coûteuses) à
comprendre, à accepter et à appliquer ; elles soulageraient l’État
d’interventions normatives (en réalité, si la régulation est née de la
libéralisation ou « déréglementation » de certains secteurs, elle n’a pas
engendré moins de droit mais bien davantage).
3º) Toutefois, la soft law tend inexorablement à se durcir et à
s’étatiser : les directives de l’Union européenne fixent des obligations
extrêmement précises 380 ; le Conseil d’État a progressivement admis que
des circulaires, de simples « lignes directrices » édictées par
l’Administration 381 ainsi que « les avis, recommandations, mises en
garde et prises de position adoptés par les autorités de régulation »
soient frappés d’un recours pour excès de pouvoir, sous certaines
conditions 382 ; les principales autorités administratives indépendantes
(de régulation) exercent d’ailleurs un pouvoir réglementaire et
disciplinaire ; les codes de déontologie majeurs sont approuvés par
arrêté ministériel ; les déclarations d’objectifs que faisait le législateur
l’exposent à la censure du Conseil constitutionnel au motif que « la loi
a pour vocation d’énoncer des règles et doit par suite être revêtue
d’une portée normative » 383. La soft law est largement institutionnelle.
Le déclin de la norme impérative, étatique et autoritaire est une illusion.
Quant à l’« auto-régulation » – qui a accompagné la
« déréglementation » –, son incapacité à prévenir les abus et les conflits
d’intérêts (notamment dans les sociétés cotées ou le secteur financier) a
incité les législateurs nationaux et communautaire – qui s’étaient laissés
séduire par cette soft law importée des États-Unis 384 – à plus de
méfiance et au rétablissement de règles contraignantes 385.
Le mouvement de balancier est incessant. Lorsque la soft law se durcit ou échoue à influencer les
comportements, elle tend à se renouveler voire à accentuer ses traits caractéristiques. Ainsi, la
difficulté d’harmoniser les législations nationales par voie de directive dans une Union européenne
élargie à vingt-huit États membres et inhibée par des procédures législatives complexes, plus le
constat de l’inefficacité des avis, recommandations et autres déclarations, ont conduit à inventer la
« méthode ouverte de coordination » (MOC). Conçue comme un outil informel de définition
d’objectifs communs, la MOC conduit le Conseil européen (depuis celui de Lisbonne des 23-24 mars
2000) – et non la Commission, cantonnée dans un rôle d’appui 386 – à édicter des normes non
contraignantes (« lignes directrices ») en divers domaines (social, notamment 387). Elle se singularise
par une flexibilité et une subsidiarité accrues par rapport aux normes obligatoires. Mais l’absence de
contrôle comme de sanction en cas de non-respect et la légitimité incertaine du Conseil européen
(organe politique) lui confèrent une faible autorité 388, ce qui reste la grande faiblesse de la soft law.
SECTION III
LES DROITS SUBJECTIFS
50. Ce qui est à moi est à moi. – Les individus ont un certain
nombre de prérogatives, des droits individuels. En termes plus
techniques, les « sujets de droit » jouissent de « droits subjectifs » 389.
Ces prérogatives sont la traduction juridique d’un sentiment très
instinctif : le tien et le mien (ce qui est à moi est à moi). Si instinctif,
naturel et primitif qu’il paraisse, il a suscité de nombreuses controverses
(§ 1). Sa mise en cause apparaît aussi en droit positif : l’usage des droits
est limité par l’abus des droits (§ 2).
Les libertés se distinguent des droits subjectifs. En premier lieu, la liberté est une « prérogative
discrétionnaire, qui peut s’exercer dans toutes directions, parce que précisément elle est la
liberté » 390. Ainsi la liberté matrimoniale suppose-t-elle celle de se marier ou de ne pas se marier, la
liberté du travail implique de pouvoir travailler comme de demeurer oisif, la liberté contractuelle est
celle « de contracter ou de ne pas contracter » (art. 1102). En revanche, il n’existe pas de droit au
mariage, de droit au travail ou de droit au contrat. En deuxième lieu, l’attribution d’une liberté est
inconditionnée et égalitaire : tout le monde en est titulaire, sans conditions. En revanche, l’octroi d’un
droit subjectif obéit à des conditions définies, reposant sur une cause de préférence, et s’avère donc
inégalitaire 391. Ces différences expliquent qu’il n’y a pas d’abus de libertés 392 : l’abus ne saisissant
que des droits définis, il est inapte à saisir une virtualité indéfinie de droits 393. Toutefois, cette
distinction peut sembler artificielle. Certains droits subjectifs ne confèrent-ils pas aussi à leur
titulaire une liberté (ainsi le droit de propriété rend le propriétaire libre d’user ou de ne pas user de
sa chose) ? De même, les droits de la personnalité (ex. : le droit au respect de la vie privée, art. 9)
sont accordés à tous sans conditions. Mais un droit peut offrir une faculté d’agir ou de ne pas agir
librement sans pour autant devenir une liberté ; en outre, les droits de la personnalité ne sont ni des
libertés publiques ni des droits subjectifs mais des libertés civiles.
La notion de « droit fondamental » renvoie à une autre réalité (v. infra, no 333).
52. Summum jus summa injuria. – L’abus des droits est une très
vieille notion 407, même si la théorie ne s’est édifiée qu’à partir du
XIX siècle . Une maxime de Cicéron en résume l’esprit : Summum jus
e 408
73. Droit privé. – Le droit privé a pour objet les rapports des
particuliers entre eux. Il se subdivise, lui aussi, en trois branches : le
droit civil, la procédure civile, le droit international privé.
1o) Le droit civil 441 comprend les règles de fond qui régissent ces
rapports. L’étendue de son domaine et son perfectionnement affiné au fil
des siècles lui confèrent une grande valeur. Au-delà de son objet, il est
le droit commun, c’est-à-dire un droit général et résiduel 442. Il est
général en ce que toutes les autres branches du droit sont, face à lui, des
droits d’exception, spéciaux : par exemple, le droit commercial ou le
droit du travail ne renferment qu’un ensemble de dérogations au droit
civil (général) des obligations, cantonnées dans leur domaine. Il est
résiduel dans la mesure où, si un droit spécial vient à manquer d’une
règle précise, les principes généraux du droit civil retrouvent
application. Le droit civil se présente ainsi comme le tronc commun et la
matrice de toutes les branches du droit qui n’acquièrent jamais une
autonomie complète à son égard.
Toutefois, au XXIe siècle, le droit civil dépend souvent de droits non civils, spéciaux et fragmentés,
qui l’imprègnent fortement (ex. : droits bancaire, de la consommation, du travail, fiscal...). En outre,
face au « vrai » droit commun se développent des droits communs fragmentés (ex. : droits communs
des sociétés, des contrats, des relations de travail...). Le droit civil n’est plus le seul « droit
fondamental », gouvernant les institutions essentielles de la société (la famille, la propriété, les
successions...) : les fondements du droit se trouvent aussi dans la Convention européenne des droits
de l’homme, dans le droit constitutionnel tandis que de nouveaux concepts sont issus de droits
étrangers (principes de précaution, de proportionnalité, de loyauté...) 443.
Les Institutes de Gaïus (IIe siècle) et de Justinien (VIe siècle) 444
embrassaient toute l’activité humaine en suivant un plan classique : les
personnes (personæ), les choses (res) et les actions (actiones). De
même, le Code civil traite des personnes (Livre Ier), des biens (Livre II) et
des obligations (au sein du Livre III qui renferme en outre les
successions et libéralités, les régimes matrimoniaux et les sûretés). Et
c’est ainsi qu’est divisé le droit civil.
— Le droit des personnes repose sur la distinction des hommes et des choses sans laquelle
l’homme serait réduit à l’état d’esclave et perdrait sa dignité. Au sens étymologique, la personnalité
juridique est un masque 445. Elle est conférée de nos jours 446 à toute personne physique, depuis sa
naissance jusqu’à sa mort. Elle rend apte à être titulaire de droits – sauf incapacité de jouissance
(toujours partielle) – et à les exercer – sauf incapacité d’exercice (telles celles qui frappent le mineur
et le majeur protégé). Par ailleurs, certains groupements organisés de biens ou de personnes sont
revêtus de la personnalité morale, qui offre les mêmes attributs. Une personne morale de droit public
(ex. : l’État ou une collectivité locale) ou de droit privé (ex. : une société anonyme ou une
association) dispose ainsi d’un patrimoine propre et du droit d’agir en justice pour la défense d’un
intérêt collectif par l’intermédiaire de ses représentants.
Le droit des personnes se subdivise en trois branches. Le droit de la famille, au sens strict, régit
les relations personnelles ou extrapatrimoniales qui s’y nouent (la filiation et le mariage). Les
relations pécuniaires ou patrimoniales sont quant à elles l’objet du droit des régimes matrimoniaux
(entre les époux) et du droit des successions (entre le défunt et ses héritiers), parfois réunis sous
l’appellation de droit patrimonial de la famille.
— Les biens sont des choses, des richesses contenues dans un patrimoine.
Le patrimoine est une notion-clef du droit civil, indissociable de la personnalité juridique 447 :
dans notre tradition juridique (aujourd’hui ébranlée) toute personne a un patrimoine – un seul – même
si, littéralement, elle n’a rien ou est criblée de dettes. Il se définit comme un ensemble indivisible
(une « universalité ») de biens et de dettes dans lequel l’actif répond du passif (art. 2284), ce qui
signifie que les créanciers ont la faculté de saisir les biens (l’actif) de leur débiteur pour obtenir le
paiement de leur créance (le passif). Le patrimoine ne se cède pas, sauf à cause de mort puisque
l’héritier « ayant cause universel » est présumé « continuer » la personne du défunt. Néanmoins, tous
les droits n’entrent pas dans le patrimoine. Il est des biens « hors commerce » ou indisponibles (ex. :
le corps humain), sur lesquels s’exercent des droits extrapatrimoniaux.
Le droit civil opère diverses classifications parmi les biens figurant à l’actif du patrimoine. À cet
égard, le droit des biens détermine le régime des meubles et des immeubles (art. 516), suivant une
distinction ancienne devenue moins utile en raison de l’extension de la catégorie des meubles
(valeurs mobilières, fonds de commerce, etc.).
Les biens ou richesses ne sont pas seulement susceptibles d’appréhension. Une personne n’est pas
seulement titulaire de « droits réels » (le droit réel est un pouvoir direct sur une chose visant à en
retirer une certaine utilité ; ex. : le droit de propriété ou le droit d’usufruit). Les biens donnent aussi
lieu à des relations entre les personnes, qui sont au cœur du droit des obligations. Dans ce cas, un
lien de droit se noue entre un débiteur et un créancier qui oblige le premier à exécuter une
« obligation » (par le paiement de sa dette) et confère au second un « droit personnel » (ou « droit
de créance ») sur le patrimoine de celui-ci. Un tel lien, tissé entre deux patrimoines, découle tantôt
d’un contrat (ex. : le contrat de prêt oblige le débiteur emprunteur à rembourser le montant emprunté),
tantôt d’un délit civil (un dommage accidentel, qui oblige son auteur à réparation envers la victime).
De surcroît, l’obligation peut être affectée de modalités (ex. : le terme ou la condition. V. art. 1304
et s.). Enfin, elle s’éteint de différentes manières (paiement, prescription, remise de dette, etc.
V. art. 1342 et s.).
— Selon le langage de la doctrine, les obligations naissent d’actes ou de faits juridiques
(art. 1100-1 et 1100-2). L’« acte juridique » est une manifestation de volonté accomplie en vue de
produire des effets juridiques (ex. : la convention ou le contrat, acte bilatéral, et le testament, acte
unilatéral). Le « fait juridique » est un agissement ou événement qui produit lui aussi des
conséquences juridiques, qui n’ont été ni voulues ni recherchées (ex. : un délit civil ou la mort).
Dans le Code civil, l’obligation a trois sources possibles : le contrat, le délit ou le quasi-délit, et
le quasi-contrat. Premier versant du droit des obligations, le droit des contrats repose sur quatre
piliers : la force obligatoire du contrat (art. 1103, anc. art. 1134, al. 1er), la liberté contractuelle
(art. 537, al. 1er et 1102), le consensualisme (art. 1109 et 1172 : la validité d’un contrat n’est
subordonnée à aucune condition de forme, sauf si la loi édicte un formalisme, ce qu’elle fait
généralement pour protéger l’un des cocontractants) et le principe de l’effet relatif des conventions
(art. 1199, anc. art. 1165 : une convention n’a d’effet qu’entre les parties et ne lie ni ne profite à des
tiers). Un acte juridique irrégulier, auquel manque une condition de validité (de fond ou de forme) est
frappé de nullité. Second versant du droit des obligations, le droit de la responsabilité délictuelle
trouve son fondement dans l’article 1240 (anc. art. 1382), selon lequel « tout fait quelconque de
l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le
réparer ». Un délit civil (fait juridique) engage la responsabilité de son auteur s’il a commis une
faute ou, selon une certaine jurisprudence, s’il a créé un risque par son activité. L’abus de droit 448,
par exemple, constitue une faute. Enfin, le troisième versant du droit des obligations correspond à une
catégorie hybride, qui se situe entre le contrat et le délit civil : le quasi-contrat. Il s’agit d’un fait
juridique volontaire de l’homme d’où résultent des obligations (art. 1300). Il en existe
principalement trois espèces : la gestion d’affaires (art. 1301 et s.), la répétition de l’indu (art. 1302
et s.) et l’enrichissement sans cause (art. 1303 et s.) 449.
De toutes les branches du droit civil, le droit des obligations est la
plus importante. Il domine le droit bancaire, le droit maritime, le droit
de la protection sociale, le droit des régimes matrimoniaux, le droit des
contrats administratifs, etc. Surtout, les situations les plus ordinaires de
la vie quotidienne (prendre le métro, acheter du pain) utilisent sans
cesse ses concepts. Le droit des obligations est la lingua franca des
juristes.
2o) La procédure civile détermine les formes que les particuliers
doivent suivre pour obtenir d’un juge la protection juridique de leurs
prérogatives 450. Cette réalisation des droits subjectifs s’accomplit le plus
souvent à l’amiable. Lorsqu’un conflit surgit, elle devient contentieuse
et intéresse alors la procédure civile. Un auteur du XIXe siècle avait écrit
à son propos qu’elle était « le droit sur le pied de guerre » 451. À Rome,
elle fut à l’origine de tout le droit privé (selon l’ancien adage « pas
d’action, pas de droit ») 452.
L’office du juge dans le procès civil s’est transformé. Le Code de procédure civile de 1806 lui
imposait une totale neutralité : la procédure était accusatoire, abandonnée à l’initiative des parties. À
partir d’un décret du 9 septembre 1971, fixant les « principes directeurs du procès », elle prend un
aspect de plus en plus inquisitoire. Le Code de procédure civile issu du D. 5 déc. 1975 reconnaît au
juge un rôle actif : il « veille au bon déroulement de l’instance ; il a le pouvoir d’impartir les
délais et d’ordonner les mesures nécessaires » (C. pr. civ., art. 3) telles que des mesures
d’instruction pour la recherche des preuves (ib., art. 10). Il a parfois tendance à se décharger sur les
parties de son office juridictionnel 453.
3o) Le droit international privé régit les relations privées à caractère
international, celles qui comportent un « élément d’extranéité ».
— La condition des étrangers (ex. : un étranger peut-il se marier en France et quelle nationalité
auront ses enfants ?). Le droit de la nationalité et des étrangers a subi, depuis 1804, de très
nombreuses réformes législatives.
— Les conflits de juridictions (ex. : quel tribunal est compétent pour connaître des litiges entre
époux de nationalité différente ou relatifs à une succession internationale ?).
— Les conflits de lois (ex. : si une personne étrangère se marie en France, quelle loi régira son
mariage et son divorce éventuel ? Quelle loi s’applique à un contrat conclu par un Français à
l’étranger, et inversement ? Quelle loi gouverne la succession d’un Français décédé à l’étranger qui
laisse des biens situés en France et à l’étranger ?). La jurisprudence a construit un important
monument prétorien sur la base de l’article 3, texte laconique qui se borne à énoncer trois règles de
conflits (les lois de police obligent tous ceux qui habitent le territoire français ; les immeubles qui y
sont situés sont régis par la loi française ; les lois sur l’état et la capacité des personnes régissent les
Français, même à l’étranger). La Cour de cassation a commencé par bilatéraliser ces trois règles
(pour les étendre, par analogie, aux lois étrangères) avant de les compléter. De son côté, le
législateur a ajouté quelques règles de conflit lors de réformes du droit de la famille (art. 309,
L. 11 juill. 1975 sur le divorce ; art. 311-14 et s., L. 3 janv. 1972 sur la filiation).
La règle de conflit désigne la loi applicable dans chaque situation. Les biens, meubles 454 ou
immeubles 455, sont soumis à la loi du pays dans lequel ils se situent (lex rei sitæ) : c’est le statut réel.
L’état et la capacité des personnes relèvent de la loi du pays d’origine du sujet (art. 3, al. 3) 456 : c’est
le statut personnel. Les contrats sont soumis, sur le fond, à la loi choisie par les parties (lex
contractus) 457 : c’est la loi d’autonomie ; la forme d’un contrat est régie par la loi du pays où il a été
conclu (locus regit actum), sauf si les parties en ont désigné une autre 458. La responsabilité civile
délictuelle est régie par la loi du pays où s’est produit le dommage (lex loci delicti) 459.
La méthode conflictualiste commande de qualifier au préalable une règle de droit ou une situation
de fait, notamment pour savoir s’il s’agit d’une question de fond, de forme ou personnelle. Cette
qualification s’apprécie d’après la lex fori, loi du juge saisi 460. Le juge peut refuser d’appliquer la
loi étrangère que désigne la règle de conflit s’il l’estime contraire à l’ordre public international
français 461 ou constate une fraude à la loi (fraus legis : la loi qui aurait dû trouver application a été
éludée par l’interposition volontaire d’une loi étrangère ou manipulation de l’élément de rattachement
pertinent au regard de la règle de conflit 462).
Droit complexe, subtil et souvent influencé par la doctrine, le droit
international privé a pris de l’importance à la faveur de trois
phénomènes récents : le développement de l’immigration, qui rend
applicables en France des règles provenant de droits étrangers et qui est
le ferment d’une société multiculturelle ; l’essor du commerce
international ; la mondialisation.
À cet égard, deux politiques sont concevables. La tendance nationaliste privilégie les intérêts
français : il faut donner le moins de droits possibles aux étrangers pour les inciter à s’assimiler à la
communauté nationale (condition des étrangers), appliquer la loi française le plus souvent possible
(conflits de lois) et étendre au maximum la compétence des juridictions nationales (conflits de
juridictions). La tendance internationaliste – aujourd’hui dominante après des siècles de
nationalisme juridique – entend développer les rapports internationaux : les Français et les étrangers
ont les mêmes droits, la loi française et la loi étrangère sont obligatoires presque autant l’une que
l’autre ; à un moindre degré, les juridictions françaises et étrangères ont une compétence presque
similaire. À son point extrême, cette doctrine défend l’existence de règles dépourvues de
rattachement national ; ces règles « transnationales » forment la lex mercatoria, sorte de coutume
propre aux marchands et banquiers qui ne se rattache à aucun droit étatique et s’affranchit par ce biais
des conflits de lois 463.
SECTION I
ANCIEN DROIT
§ 1. MOYEN ÂGE
82. L’unité brisée. – Le droit romain était parvenu à établir une unité
juridique quasi complète au sein de l’Empire, sous réserve d’importants
particularismes locaux (ex. : le droit de l’Égypte n’était pas identique à
celui de la Gaule). Les invasions barbares ont brisé cette harmonie en
bouleversant la communauté latine de langue et de civilisation. Un
morcellement du droit s’ensuivit, en deux étapes : la personnalité des
lois (I) puis la territorialité de la coutume (II).
I. — Personnalité des lois
A. TERRITOIRES ET COUTUMES
B. LE DROIT COUTUMIER
86. Âge d’or de la coutume. – Le haut Moyen Âge fut l’âge d’or de
la coutume. Entre les derniers capitulaires carolingiens au IXe siècle et
les premières ordonnances des rois de France au XIIe siècle s’étendit une
période de décadence politique et culturelle au cours de laquelle la
législation et l’écrit n’existaient plus que chez les clercs. Victime de cet
illettrisme, le droit romain sombra dans un quasi-oubli, sauf quelques
vestiges, tel le Bréviaire d’Alaric (où le droit romain était mal compris).
Dès lors, la coutume demeura l’unique source du droit laïc, seule apte à
régir les rapports entre les hommes, qu’il s’agît de rapports de vassalité
(entre les nobles) ou de servage.
Le droit canonique subsista (les tribunaux ecclésiastiques profitant de la décomposition des
juridictions laïques pour étendre leur compétence) en tant que seul droit écrit et savant. Mais il ne
s’appliqua qu’aux ecclésiastiques (en vertu du privilegium fori ou privilège de clergie) et à certaines
matières religieuses par nature (par ex., le mariage – qui est un sacrement –, la violation d’un serment
et certaines infractions contre la religion – hérésie, sacrilège, usure, adultère...).
87. Définition et source de la coutume. – La coutume se définit
comme un ensemble d’habitudes, d’usages continuellement suivis et
répétés dans un groupe social ou sur un territoire donné, devenus peu à
peu obligatoires. Le fondement de ce caractère contraignant reste obscur.
Certains auteurs évoquent l’effet de la prescription acquisitive ou d’une
convention tacite 482, autant de concepts inadéquats puisque empruntés
au droit romain. Selon la théorie dite romano-canonique, la coutume
n’aurait eu autorité qu’en vertu de la patientia principis, une permission
tacite et générale du Prince. Cette construction était aussi habile
politiquement qu’inexacte historiquement 483 : la coutume ne devait pas
sa genèse au pouvoir royal.
L’autorité juridique du droit coutumier, comme son contenu, ne pouvait résulter d’un acte implicite
et fictif du souverain. Elle découla toujours d’attitudes populaires : la coutume puisa avant tout sa
juridicité dans la force de la tradition, dans le respect que les hommes portent spontanément à leurs
ancêtres. Les coutumes venaient donc du peuple, du moins le peuple tel que les praticiens le faisaient
parler. Elles ne venaient ni du roi ni de ses vassaux (ducs, comtes) qui, selon certains auteurs, ne
devaient pas interférer dans leur genèse 484. Il importa peu que le roi se fût réservé le droit d’abroger
les coutumes « mauvaises » et non « raisonnables » (abominabilis, corruptela, execrabilis,
inhonesta), c’est-à-dire archaïques et contraires à la raison ou à la foi chrétienne (à l’ordre public,
en termes plus modernes) 485.
§ 2. TRIOMPHE DE LA RAISON
§ 3. LÉGISLATION ROYALE
SECTION II
DROIT INTERMÉDIAIRE
SECTION I
VOLONTÉ D’UN CODE CIVIL
SECTION II
ESPRIT DU CODE CIVIL
122. Esprit de la codification ; influences philosophiques 578. — Le
Discours préliminaire du Projet de Code civil prononcé par Portalis
offre le meilleur témoignage de l’esprit du Code civil. Ce texte 579 est
l’un des plus beaux et des plus profonds qui ait jamais été écrit sur le
rôle de la loi dans le gouvernement des hommes 580. Le Code civil s’y
révèle inspiré par une idéologie conservatrice 581 et surtout – après la
tempête révolutionnaire – modérée 582, mû par une volonté d’unité
nationale et une croyance dans le droit naturel 583. Le législateur y fait
montre de prudence, d’humilité, voire de scepticisme quant à la
perfection de son œuvre 584.
L’esprit républicain a supplanté celui de l’Ancien Régime. Le souffle
de la Révolution habite le Code : le principe de la sécularisation est
latent dans l’article 165 (célébration obligatoire du mariage par l’officier
d’état civil), la haine de la féodalité et la nuit du 4 août motivent
l’article 686 (défense de créer des droits immobiliers imposés à la
personne, c’est-à-dire des droits féodaux), l’attachement à la liberté
individuelle fonde l’article 1780 (prohibition du contrat de travail
perpétuel) et l’article 1123 (pas d’incapacité sans loi). Seuls quelques
excès de l’idéologie révolutionnaire sont condamnés (telle la liberté du
divorce introduite par la Convention ; mais le divorce pour faute
demeure).
La philosophie des Lumières (que Portalis détestait 585) exprime une foi en l’homme (cf. le mythe
du « bon sauvage » dont l’innocence originelle serait corrompue par la société civile) et en la raison.
Elle voue un culte à la liberté et à l’égalité. Au contraire, rejetant les Lumières et l’humanisme, le
jansénisme (Pascal, Domat, d’Aguesseau ou Pothier) exprime une vision pessimiste, méfiante et
inquiète de la nature humaine. Il se traduit par un esprit austère, laïc et rationnel qui ouvre la porte au
positivisme juridique (par ex., la liberté contractuelle et la propriété sont affirmées mais
subordonnées au respect de l’ordre public ou de la bonne foi : art. 6 et art. 1104 [anc. art. 1134,
al. 3]). De même, les rédacteurs du projet de Code voulurent restaurer une hiérarchie politique
et sociale traditionnelle, autoritaire, rejetant les idées d’égalité politique et de souveraineté du
Peuple, sans souhaiter pour autant un retour à la monarchie. Les années de Terreur avaient dissous le
lien social et rétabli l’état de nature : ils voulaient restaurer les valeurs fondatrices de la société
civile, la famille, en particulier la puissance maritale et paternelle et la propriété.
En dépit de ces mutations idéologiques, certaines règles et de
nombreuses techniques de l’Ancien droit ont survécu à son abrogation.
inégaux traitent Des personnes (Livre I), Des biens et des différentes
modifications de la propriété (Livre II) et Des différentes manières dont
on acquiert la propriété (Livre III, livre énorme renfermant tout le reste,
notamment le droit des successions et des régimes matrimoniaux et celui
des obligations et des contrats).
3o) Le style du Code civil est gravé sur le marbre, à mi-chemin entre la
décision et le principe. Ex. : « La propriété est le droit de jouir et
disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en
fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements »
(art. 544) ; « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à
ceux qui les ont faites » (anc. art. 1134, al. 1er, devenu art. 1103) ; « Tout
fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige
celui par la faute duquel il est arrivé le réparer » (ancien art. 1382,
devenu art. 1240).
SECTION I
PRESTIGE ET CRITIQUES (1804-1900)
SECTION II
BOULEVERSEMENTS ET INTERVENTIONS LÉGISLATIVES
(DEPUIS 1880)
SECTION III
NOUVELLES CODIFICATIONS (DEPUIS 1950) 665
SECTION I
JUSTICE PUBLIQUE
I. — Juridictions du fond
§ 2. JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES
164. Séparation des pouvoirs. – La loi des 16-24 août 1790 766 et le
décret du 16 fructidor an III 767 ont posé le principe de la séparation des
pouvoirs défendu par Montesquieu, entendue ici comme la séparation
des fonctions judiciaire et administrative (ou exécutive) 768. L’essor de la
juridiction administrative au XIXe siècle 769 a modifié la signification de ce
principe. Désormais, il n’est plus question de séparer le juge de
l’administration (au contraire, dans un État de droit, l’administration
doit habituellement être soumise au contrôle des tribunaux), mais
seulement d’assigner aux ordres de juridictions judiciaire et
administratif des compétences étanches, exclusives les unes des
autres 770.
Le tracé de la frontière entre le contentieux administratif et le contentieux judiciaire soulève
parfois des difficultés : il revient au Tribunal des conflits de trancher ces conflits de compétences,
tantôt « négatifs », tantôt « positifs ». Créé par la L. 24 mai 1872 (mod. L. 16 févr. 2015 ; D. nº 2015-
233, 27 févr. 2015), composé de quatre conseillers à la Cour de cassation et de quatre conseillers
d’État, le Tribunal des conflits est saisi : 1) par le préfet en cas de « conflit positif » (= une
juridiction judiciaire a retenu sa compétence et le préfet, estimant que le litige ressortit à la
compétence de la juridiction administrative, « élève » le conflit) ; 2) par la dernière juridiction saisie
dans un but de « prévention de conflit négatif » (= l’une des deux juridictions a d’ores et déjà décliné
sa compétence et la seconde ne compte pas retenir la sienne) ; 3) par les parties en cas de « conflit
négatif » (= les juridictions des deux ordres se sont déclarées irrévocablement incompétentes sans
renvoyer au Tribunal des conflits) ; 4) en cas de « contrariété » de décisions « conduisant à un déni
de justice » ; 5) un nouveau cas, beaucoup plus souple, a été ajouté en 2015 : une juridiction de l’un
ou l’autre ordre peut renvoyer directement au Tribunal une question de compétence soulevée dans un
litige. Le Tribunal des conflits rend moins de cinquante arrêts par an.
SECTION II
JUSTICE PRIVÉE
SECTION I
ACTION EN JUSTICE
170. Remedies precede rights. – En droit romain comme en Common Law, une personne ne
pouvait invoquer un droit en justice que si une action (une actio legis ou un writ) avait été
spécialement prévue pour en assurer la défense : « pas d’action, pas de droit » (remedies precede
rights). Un droit n’avait d’existence que dans la mesure où une action, un remède procédural,
permettait de sanctionner sa méconnaissance. À Rome, le progrès juridique a consisté à créer de
nouvelles actions ouvertes devant la juridiction du préteur, non à renverser l’adage. En Angleterre,
l’essor des juridictions d’Equity, concurrentes de celles de Common Law, n’a pas non plus conduit à
rompre avec cette tradition formaliste dans laquelle la procédure est la mère du droit 816 et le droit
s’est « secrété dans les interstices de la procédure » 817.
SECTION II
PRONONCÉ DES JUGEMENTS
§ 1. VOIES DE RÉFORMATION
§ 2. VOIES D’ANNULATION
§ 3. VOIES DE RÉTRACTATION
1) Évolution
202. Idem est non esse... – Un droit méconnu ou violé ne peut être
protégé par l’autorité publique si son existence n’est pas établie. N’être
titulaire d’aucun droit ou ne pouvoir démontrer l’existence d’un droit
véritable sont, en pratique, équivalents : pas de preuve, pas de droit ou,
selon un adage traditionnel, « Idem est non esse et non probari » (c’est
la même chose que de ne pas être et ne pas être prouvé). Ihering affirmait
à cet égard que « la preuve est la rançon des droits ».
Il faut donc ne pas confondre la preuve d’un droit et son existence
même ; il convient de distinguer trois catégories de règles de forme.
1º) Les formalités ad probationem ne sont exigées que pour la preuve d’un droit (ex. : selon
l’art. 1359, le contrat qui n’est pas passé par écrit demeure valable mais ne peut être prouvé par
d’autres moyens tels que des témoignages).
2º) Certaines formalités sont nécessaires à la validité même de l’acte 899. Ce formalisme ad
validitatem a pour finalité la protection d’une personne (ex. : selon l’art. 931, une donation est nulle
si elle n’est pas constatée par un acte notarié : le donateur est ainsi protégé contre lui-même) ou
l’information d’une partie présumée faible (ex. : les mentions obligatoires dans les contrats régis par
le Code de la consommation, tels que les prêts mobiliers ou immobiliers consentis à un
consommateur ; ce dernier est présumé faible devant le professionnel).
3º) D’autres formalités, enfin, assurent une publicité légale et l’opposabilité aux tiers de l’acte
(ex. : C. civ., art. 1589-2, prescrivant l’enregistrement des promesses unilatérales de vente
immobilière).
3) Preuve et procédure
4) Preuve et vérité
L’histoire du droit de la preuve, notamment au Moyen-Âge et sous
l’Ancien Régime (supra), montre que la quête de la vérité fut longtemps
une préoccupation secondaire. Aujourd’hui encore, le droit ne recherche
pas toujours la vérité, même s’il interdit le mensonge et le faux.
204. Mensonge et faux. – La vérité est une réalité objective : elle est
indépendante de toute appréciation subjective car elle est l’exactitude ;
il y a le vrai et le faux. Elle n’est pas nécessairement telle que la
décrivent les autorités publiques ; Mussolini ha sempre ragione,
disaient au contraire les fascistes mussoliniens, selon une devise typique
du totalitarisme, adepte d’une « vérité objective » pouvant masquer un
mensonge 904. La recherche de la vérité n’est pas non plus un jeu ni une
affaire d’esthète 905 : elle est une obligation de la justice. Le mensonge,
au contraire, est source d’injustice, le ferment de la violence et des
révoltes. Le faux, quant à lui, est un instrument de fraude 906.
Le droit interdit le mensonge : le dol par réticence (ou réticence
dolosive) est une cause de nullité du contrat (art. 1116) ; les obligations
d’information ou de conseil abondent en législation (ex. : C. civ.,
art. 1602 ; C. consom., art. L. 111-1 et suivants) et en jurisprudence,
souvent à la charge de professionnels 907 ; la publicité mensongère et la
tromperie sont des délits (C. consom., art. L. 121-2 et L. 441-1) 908, etc.
Une preuve falsifiée est toujours irrecevable 909.
Bien plus, le droit ordonne aux citoyens de contribuer à l’éclosion de
la vérité : dans le procès civil, « chacun est tenu d’apporter son
concours à la justice en vue de la manifestation de la vérité », fût-ce
sous la contrainte (C. civ., art. 10, al. 1er) 910 ; dans le procès criminel, les
témoins prêtent le serment « de dire toute la vérité, rien que la vérité »
(C. pr. pén., art. 331, al. 3), à peine de « témoignage mensonger »
(C. pén., art. 434-13) 911.
SECTION I
UN FAIT, PAS LE DROIT
SECTION II
UN FAIT PERTINENT
SECTION I
LÉGALITÉ DE LA PREUVE DES OBLIGATIONS CIVILES
§ 1. NUMERUS CLAUSUS
§ 2. MODES DE PREUVE
236. Acte authentique 1129. – « L’acte authentique est celui qui a été
reçu, avec les solennités requises, par un officier public ayant
compétence et qualité pour instrumenter » (art. 1369, anc. art. 1317).
L’authenticité est, par excellence, l’affaire du notariat, même s’il existe
d’autres autorités habilitées à recevoir des actes authentiques, d’une
nature particulière.
Constituent des actes authentiques, d’une part, les décisions judiciaires (C. pr. civ., art. 457 : « Le
jugement a la force probante d’un acte authentique »), d’autre part, les actes reçus par des officiers
ministériels (huissiers, commissaires-priseurs...) ou des agents publics (préfet, maire, officier d’état
civil, ambassadeur, policier, inspecteur du travail...) à condition qu’ils agissent dans l’exercice de
leurs compétences (par ex., un huissier ne peut procéder à une audition 1130). De même, certaines
énonciations d’une sentence arbitrale, interne ou internationale, font foi jusqu’à inscription de
faux 1131.
L’acte notarié suppose le respect des formes prévues par le décret
no 71-941 du 26 novembre 1971 (mod. D. no 2005-973, 10 août 2005).
Une formalité essentielle réside dans la signature de l’acte et son
paraphe sur chaque page par le notaire.
Les procurations (qui peuvent être données à un clerc de notaire) obéissent aussi à des règles
précises : elles doivent figurer en annexe de l’acte authentique ou être « déposées aux minutes du
notaire ». Toutefois, « les irrégularités affectant la représentation conventionnelle d’une partie à
un acte notarié ne relèvent pas des défauts de forme que l’article [1370] du Code civil sanctionne
par la perte du caractère authentique, et partant, exécutoire de cet acte » ; ces irrégularités (à
savoir la nullité du mandat, un dépassement ou une absence de pouvoir) sont sanctionnées par la
nullité relative de l’acte que la partie représentée peut seule demander, à moins qu’elle ait ratifié ce
qui a été fait pour elle hors ou sans mandat 1132. En tout état de cause, l’obligation d’annexer les
procurations ne s’applique pas à la « copie exécutoire » que délivre le notaire ; elle ne s’applique
qu’à l’acte authentique original (v. ci-dessous) 1133.
Aucun palliatif n’est admis en cas de non-respect de ces exigences 1134.
Le coût de ce formalisme est, pour les parties, la rançon d’une
sécurité et d’une efficacité juridiques considérables. « Tous actes
notariés [...] seront exécutoires dans toute l’étendue de la République »
(L. 25 ventôse an XI, art. 19). Alors qu’un acte sous signature privée ne
peut donner lieu à une exécution forcée sans qu’un jugement l’ordonne,
l’acte authentique s’exécute sur simple remise d’une copie exécutoire
(naguère appelée la « grosse » par opposition à la « minute », à savoir
l’acte original 1135) par le notaire au créancier 1136.
Le notaire est tenu d’un devoir de vérification. Il vérifie d’abord
l’identité, l’état civil et le domicile des parties. Deux notaires sont
mêmes tenus de vérifier leurs pouvoirs respectifs 1137. Il vérifie ensuite les
éléments d’ordre factuel que celles-ci lui fournissent 1138. Il est également
tenu d’un devoir de conseil envers elles et astreint au secret
professionnel.
Ce devoir de conseil explique que les actes authentiques aient été soustraits du champ de
certaines règles protectrices des consommateurs (telles les formules manuscrites obligatoires,
art. 1369, al. 3), soit par la loi (par ex., les prêts mobiliers), soit par la jurisprudence (par ex.,
l’art. 1376 leur est inapplicable). Mais cette confiance envers le notariat n’est pas toujours de mise.
Les actes de vente immobilière notariés sont soumis à un délai de réflexion comme de vulgaires actes
sous signature privée afin de protéger les acquéreurs non professionnels (CCH, art. L. 271-1, al. 3,
L. 13 déc. 2000). Le législateur s’est méfié du recours à la forme authentique et a douté du
professionnalisme des notaires. Au contraire, les avocats ont réussi à le convaincre de leur capacité à
éclairer les parties sur les conséquences juridiques des actes qu’ils signent : l’« acte d’avocat » est
dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi, comme un acte authentique notarié (art. 1374,
al. 3) 1139.
L’authenticité est soit une condition de forme requise ad validitatem,
c’est-à-dire prescrite à peine de nullité (ex. : pour un contrat de
mariage), soit une formalité ad probationem, facultative (ex. : pour des
statuts de société, un bail), soit une formalité légale de publicité et
d’opposabilité aux tiers (ex. : pour les actes soumis à publicité
foncière 1140) d’un acte juridique 1141, selon ce que prévoit la loi
applicable 1142.
L’acte authentique infecté d’une irrégularité de forme perd sa valeur
probatoire. Il est alors déclassé au rang d’acte sous signature privée,
voire frappé de nullité si l’authenticité ou la formalité omise était
requise ad validitatem 1143.
II. — L’aveu
SECTION II
LIBERTÉ DE LA PREUVE
244. Preuve par tout moyen. – « Hors les cas où la loi en dispose
autrement, la preuve peut être apportée par tout moyen » (art. 1358,
issu ord. 10 févr. 2016). Le principe est donc celui de la liberté de la
preuve. Cette liberté existe en droit civil – en dehors des actes
juridiques – et plus largement dans les matières commerciale, sociale,
pénale et administrative.
1º) « À l’égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se
prouver par tous moyens à moins qu’il n’en soit autrement disposé par
la loi » (C. com., art. L. 110-3 1193). La règle vaut seulement « à l’égard
des commerçants ». Un choix s’ouvre lorsqu’un litige oppose un
commerçant à un non-commerçant : le premier devra se soumettre aux
règles du droit civil (art. 1359 et s.) si ce dernier est défendeur à
l’action ; en sens inverse, le non-commerçant, agissant en qualité de
demandeur, pourra opter pour l’application de ces règles ou accepter que
la preuve se fasse par tous moyens. C’est la « théorie de l’acte mixte »
selon laquelle, « dans un acte mixte, les règles de preuve du droit civil
s’appliquent envers la partie pour laquelle il est de caractère civil » 1194.
Au-delà des commerçants, « les registres et documents que les professionnels doivent tenir ou
établir ont, contre leur auteur, la même force probante que les écrits sous signature privée ; mais
celui qui s'en prévaut ne peut en diviser les mentions pour n'en retenir que celles qui lui sont
favorables » (C. civ., art. 1378, issu ord. 10 févr. 2016).
La preuve par tous moyens peut également être érigée en règle
matérielle dans le droit du commerce international (ex. : CVIM,
art. 11 1195).
Mais la liberté de la preuve en droit commercial a été conçue pour une
société de boutiquiers et de négociants. La règlementation du
capitalisme moderne, financier et mondialisé, voit au contraire fleurir
partout l’écrit : les contrats commerciaux les plus importants (assurance,
prêt d’argent, cession de fonds de commerce, de parts sociales ou de
brevets...), les informations obligatoires communiquées dans un but de
transparence aux actionnaires, aux autorités administratives
indépendantes ou aux clients, les relations avec l’administration fiscale
ou sociale, etc. doivent être formalisés par écrit 1196. De tous temps,
l’obligation légale de tenir une comptabilité – dont les écritures
enregistrent l’ensemble des opérations patrimoniales et sont admises en
justice « pour faire preuve » (C. com., art. L. 123-23. Adde C. civ.,
art. 1378) – a beaucoup relativisé la liberté de la preuve en ce domaine.
L’essor de l’écrit électronique achève de réduire cette liberté à une peau
de chagrin.
2º) De même, « en matière prud’homale, la preuve est libre » 1197 à
condition qu’elle ne soit pas illicite (v. ci-après). Bien plus, « la
procédure prudhomale est orale » (C. trav., art. R. 1453-3) : en théorie,
il n’est même pas besoin de formuler une demande écrite.
3º) En matière pénale 1198, « hors les cas où la loi en dispose autrement, les infractions peuvent
être établies par tout mode de preuve et le juge décide d’après son intime conviction » (C. pr. pén.,
art. 427. Adde l’article 353, qui formule le serment des jurés de la cour d’assises). En réalité, aucune
loi ne restreint véritablement ce principe : selon la Cour de cassation, l’édiction par le législateur de
modes de preuve spécifiques n’exclut pas le recours à tous autres moyens 1199. Seule la « preuve
contraire » se trouve éventuellement encadrée mais d’une façon souple. Ainsi, les contraventions sont
prouvées par procès-verbaux ou, à défaut, par témoins ; « la preuve contraire ne peut être rapportée
que par écrit ou par témoins » (C. pr. pén., art. 537).
4º) La preuve en droit administratif 1200 est également libre et
gouvernée par l’intime conviction du juge. Dans le contentieux de la
légalité des actes administratifs (recours pour excès de pouvoir),
notamment, le Conseil d’État a, très tôt, été conscient de la difficulté de
prouver contre l’Administration. L’inégalité des parties l’a conduit
d’une manière générale à accroître l’interventionnisme du juge et à
aménager la charge de la preuve au profit des usagers ou requérants. La
procédure civile, longtemps fidèle au modèle accusatoire, s’est
rapprochée de ce modèle inquisitorial 1201.
SECTION I
DÉFINITION DE LA LOI
285. 4º) Maux de la loi. – « La loi est un mal nécessaire » 1407. Aussi
imparfaite soit-elle, elle est la condition de la liberté ; celle, d’abord,
des faibles, selon la formule de Lacordaire : « entre le pauvre et le riche,
c’est la liberté qui opprime et c’est la loi qui affranchit » ; mais aussi
celle de tous : il n’existe pas de vraie liberté sans contrainte 1408, il faut
perdre un peu de liberté pour en avoir beaucoup.
Toutefois, certaines lois souffrent de tares congénitales, soit des
défauts innés et indépendants de la valeur des règles posées (qui peuvent
être bonnes sur le fond), révélant en outre les mauvaises habitudes prises
par le gouvernement – presque toujours à l’origine de ces textes – et le
Parlement. Plusieurs catégories de maux législatifs peuvent être données
en exemple 1409.
1) Les lois obèses ou lois « supermarchés » sont faites d’enflure et de
verbalisme alors que la sobriété devrait être une vertu de la loi 1410. Il y a
les lois « portant diverses dispositions », c’est-à-dire les lois « DDOS »
(portant diverses mesures d’ordre social) 1411 et « DDOEF » (portant
diverses dispositions d’ordre économique et financier), qui renfermaient
des dispositions hétéroclites, sans cohérence, en quantité considérable.
Si cette pratique extrême a été abandonnée, sous la menace du Conseil
constitutionnel qui censure les « cavaliers législatifs », de nombreuses
lois (pénales, sociales, commerciales...) remplissent encore des dizaines
de pages au Journal officiel. Les parlementaires votent des projets dont
ils ignorent le contenu ; la loi n’exprime plus la volonté générale (même
fictivement), mais celle des services de ministères 1412.
2) Les lois de circonstances régissent des cas particuliers et octroient
des privilèges (de privata lex, loi privée) 1413. Un groupe de pression (un
lobby) influent peut obtenir l’adoption de « sa » loi 1414, fût-ce au mépris
d’une liberté fondamentale 1415. Les raisons de cette influence sont
multiples : de plus en plus, la réalité est complexe, les experts sont
omniprésents, les groupes d’entreprises internationaux sont puissants,
les associations expriment leurs revendications. La loi est parfois
« négociée » avant que le Parlement ne l’adopte (l’article L. 1 du Code
du travail impose même au gouvernement de laisser les syndicats
représentatifs négocier avant d’engager une réforme en droit du travail).
Les lobbyistes disent fournir des informations utiles aux parlementaires.
Mais parfois, en favorisant des intérêts particuliers, le législateur perd
de vue l’intérêt général, multiplie les exceptions qui rompent l’égalité
devant la loi ou les charges publiques et abuse de sa légitimité 1416.
Honteux (le lobbying a en France mauvaise presse), le législateur préfère
masquer les privilèges qu’il accorde derrière une généralité de façade 1417.
Un pas vers la transparence a été accompli, en s’inspirant de pratiques en vigueur au sein du
Congrès américain et de la Commission européenne (car, à Washington comme à Bruxelles, les
lobbies pullulent). Depuis 2009, le bureau de l’Assemblée nationale impose aux « représentants
d’intérêts » d’agir à visage découvert dans ses couloirs en s’inscrivant sur une liste, en arborant un
badge (sic) et en respectant un « code de conduite » qui proscrit notamment les démarches
frauduleuses, trompeuses ou publicitaires vis-à-vis des députés 1418. Afin de prévenir les conflits
d’intérêts, les députés sont eux-mêmes soumis à un code de déontologie, tenus de remplir une
déclaration d’intérêts en début de mandat, le tout sous la surveillance d’un « déontologue ». Cet
encadrement reste insuffisant.
D’autres lois de circonstance naissent de la réaction émotive du
législateur à un fait divers : un texte est voté, afin d’apaiser
l’indignation d’une partie de l’opinion, qui ne connaît ensuite aucune
application 1419.
3) Les lois temporaires 1420 traitent la loi comme un produit
périssable 1421. Elles ne doivent pas être confondues avec les lois
expérimentales (ayant vocation à la pérennité) : le législateur ne veut
consacrer qu’une pratique éprouvée et se préoccupe d’abord des
conséquences de sa réforme 1422 ; la loi se construit selon un processus
ascendant, du bas de la pyramide des normes vers le haut, à partir d’une
pratique 1423 ou d’une convention collective 1424. Mais, en fait, toutes les
lois « expérimentales » ont été confirmées : il s’agit, en réalité, d’un
procédé, d’un « truc », pour faire passer une loi qui suscitait
d’insurmontables oppositions.
La Constitution elle-même prévoit, depuis une révision (L. const. no 2003-276 du 28 mars 2003),
que « la loi et le règlement peuvent comporter, pour un objet et une durée limités, des dispositions
à caractère expérimental » (art. 37-1). De même, les collectivités territoriales peuvent « déroger, à
titre expérimental et pour un objet et une durée limités, aux dispositions législatives ou
réglementaires qui régissent l’exercice de leurs compétences », à condition de ne pas mettre en
cause « les conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique ou d’un droit
constitutionnellement garanti » (Const., art. 72, al. 4 ; adde CGCT, art. L. O. 1113-1 s.).
L’expérimentation permet un essor prudent de la décentralisation administrative 1425.
4) Les lois rétroactives et les lois de validation favorisent l’insécurité
juridique et empiètent sur la sphère de l’autorité judiciaire 1426.
5) Les lois symboliques ne modifient pas le droit positif mais se
bornent à des incantations 1427. Les lois dites « mémorielles » 1428 ou celles
qui interdisent le port de signes ou de tenues religieux 1429 sont de cette
nature. D’une manière générale, nombre de lois sont dépourvues de
portée normative (une carence qui les expose désormais à une censure
constitutionnelle) 1430. Au lieu d’affronter les réalités fondamentales
(chômage, pauvreté, délinquance, crise économique, urbanisme...), le
législateur se réfugie dans le symbolisme.
6) Les lois correctrices de lois promulguées quelques mois
auparavant trahissent la mauvaise qualité de la législation et la hâte de
leur fabrication 1431.
SECTION II
CONFLITS DE LOIS DANS LE TEMPS 1449
289. Le temps des conflits. – Les conflits de lois dans le temps ont
eux-mêmes une histoire 1450. Mais l’inflation 1451 et l’instabilité
législatives ont accru leur importance avec celle du « facteur temps ».
Le changement de lois est-il un bien ? La question est sempiternelle. Des voix nombreuses
l’affirment : rien ne serait pire que la sclérose ; le changement serait source de progrès et signe de
vitalité 1452 ; la loi nouvelle serait meilleure que la loi ancienne (c’est au moins ce que pensent ses
auteurs). D’autres le nient : une société a besoin d’ordre, de sécurité et de permanence ; la
discontinuité du droit serait un mal en soi 1453.
§ 1. THÉORIES
297. Que vaut « l’effet immédiat des lois nouvelles ? » – Ces lignes
directrices aboutissent à des résultats similaires à ceux découlant de la
doctrine antérieure. Cependant, elles connaissent des brisures, des
exceptions (s’agissant notamment des effets d’un contrat conclu sous
l’empire de la loi ancienne, qui restent soumis à celle-ci). Enfin, la
notion de « situation juridique » s’avère aussi malléable que celle de
« droit acquis ».
Mais Paul Roubier a eu le mérite de renverser le principe de base du
droit transitoire : non plus l’absence de rétroactivité mais au contraire
l’application immédiate de la loi nouvelle aux droits, actes et faits qui se
produisent au cours de son entrée en vigueur 1480 ; l’avenir prédomine et
non plus le passé. La Cour de cassation s’est ralliée à ce système en
1960 1481. Elle fait preuve, néanmoins, d’éclectisme : la notion de droit
acquis n’est plus une théorie mais demeure un correctif usuel 1482.
Depuis lors, il n’est guère d’auteur qui se soit aventuré sur le terrain de la théorie des conflits de
lois dans le temps : l’analyse structuraliste de Jacques Héron est la seule à être parvenue à innover en
introduisant une complexité supplémentaire qui peut rebuter 1483.
A. LOIS RÉTROACTIVES
SECTION I
SOURCES SUPÉRIEURES
§ 1. NORMES CONSTITUTIONNELLES
§ 2. NORMES INTERNATIONALES
I. — Généralités
SECTION II
SOURCES INFÉRIEURES
De nombreuses règles de droit écrit sont en dessous de la loi : ce sont
les « petites sources » du droit 1878. Ce rang inférieur se justifie par la
subordination de leur autorité (§ 1) ou l’ambiguïté de leur nature (§ 2).
§ 1. AUTORITÉS SUBORDONNÉES
§ 2. NATURE AMBIGUË
358. Avis. – L’avis est une opinion donnée sur une question
particulière, posée dans un domaine institutionnel tracé par la loi ou le
règlement. Cette catégorie juridique a connu un essor impressionnant et
revêt des formes multiples 1933.
Les « avis » émanent d’autorités administratives (ex. : ministres ;
innombrables comités et commissions consultatifs, nationales ou
locales ; AAI 1934), juridictionnelles (ex. : le Conseil d’État 1935) ou
simplement judiciaires (ex. : le procureur de la République), de
personnes physiques (ex. : un expert judiciaire, l’amicus curiæ 1936) et
morales (ex. : le comité d’entreprise) de droit privé. Ils se distinguent
des « recommandations », « communiqués » et « communications » qui
jouissent parfois d’une forte autorité (ex. : les communications de la
Commission européenne) mais sans avoir été sollicités au préalable.
Le décret no 2006-672 du 8 juin 2006 a procédé à une purge des commissions administratives à
caractère consultatif placées auprès des autorités de l’État (autres que celles dont l’avis est requis
par la loi ou qui sont composées exclusivement d’agents de l’État). À la date du 9 juin 2009, des
centaines de commissions administratives (à l’exception de celles dont l’utilité fut expressément
soulignée par les ministères et qui purent être sauvées in extremis) ont disparu de plein droit, avec
l’abrogation des dispositions réglementaires prévoyant leur consultation 1937. 64 autres commissions
ont été supprimées par décret du 23 mai 2013.
La demande d’avis est facultative ou obligatoire (à peine de nullité de
l’acte soumis) et lui-même revêt un caractère facultatif ou obligatoire
(ex. : avis rendu sur question préjudicielle) à l’égard du demandeur. Sa
finalité peut être, à l’inverse, de lier l’émetteur (ex. : le certificat
d’urbanisme 1938 et surtout les rescrits 1939 fiscal 1940, boursier 1941
et social 1942).
L’avis comporte l’interprétation d’un point de droit ou l’appréciation
d’une situation de fait. Il joue un rôle de conseil, de contrôle, de
légitimation ou de régulation 1943 à l’égard de celui qui exerce le pouvoir
de décision. La croissance de cette catégorie altère la nature de la règle
de droit : non plus un acte d’autorité qui contraint mais un acte
« autorisé » qui persuade 1944.
359. réservé.
TITRE II
SOURCES NON ÉCRITES
SECTION I
DÉFINITION DE LA COUTUME
§ 1. CONCEPTIONS EXTRÊMES
Il existe deux conceptions opposées de la coutume, l’une
sociologique, l’autre positiviste, avec des variantes.
SECTION II
RÔLE DE LA COUTUME
372. Quantité. – Les théories sur les sources du droit sombrent dans
l’oubli doctrinal lorsqu’elles ne parviennent pas à prendre appui sur une
réalité tangible, mesurable de manière quantitative (ex. : le droit naturel
ou, sous ses aspects théoriques, la lex mercatoria). La coutume essuie
ainsi l’ironie d’un auteur qui note que ses partisans « font penser aux
ramasseurs de coquillages sur une plage après le passage de plusieurs
colonies de vacances ; ils exhibent d’autant plus leurs trouvailles
qu’elles sont rares ! » 1984. Selon une autre expression doctrinale aussi
sarcastique, la coutume serait devenue une « source vénérable évincée
par la modernité » 1985.
Aussi marginale soit-elle au regard des règles législatives ou
jurisprudentielles, la coutume apparaît en droit constitutionnel 1986,
administratif 1987, civil et surtout commercial. Son rôle est indéniable
lorsque la loi y renvoie expressément (coutume secundum legem) (§ 1).
Celui de la coutume præter legem (§ 2), agissant au-delà de la loi pour
en combler les lacunes et, plus encore, celui de la coutume contra
legem, combattant les textes légaux (§ 3), sont plus controversés.
SECTION I
CONTROVERSE SUR LA NATURE DE LA JURISPRUDENCE
SECTION II
POUVOIR CRÉATEUR DE LA JURISPRUDENCE
§ 2. REVIREMENTS DE JURISPRUDENCE
§ 3. JURISPRUDENCE RÉFORMATRICE
Le juge peut utiliser son pouvoir créateur comme un instrument de
réforme. Une divergence peut exister à l’intérieur d’une juridiction
suprême, telle que la Cour de cassation ; elle peut aussi être tournée
contre l’autorité de la loi.
SECTION III
FONDEMENTS DU POUVOIR CRÉATEUR DE LA
JURISPRUDENCE
SECTION IV
CARACTÈRES DE LA JURISPRUDENCE
§ 1. PSYCHOLOGIE JUDICIAIRE
§ 2. ÉVOLUTION DE LA JURISPRUDENCE
421. Genres 2344. – Les ouvrages qui composent la doctrine sont les
traités, les manuels, les répertoires ou encyclopédies (depuis 1846 2345) et
les monographies. Parmi celles-ci, les thèses de doctorat (avec leur
préface, souvent de la main du directeur de thèse et presque toujours
élogieuse) forment un genre particulier : toutes ne sont pas publiées
(elles l’étaient jusqu’en 1942). S’y ajoutent les articles (ou
« chroniques ») et les notes d’arrêts publiés dans des revues (il en existe
des centaines, toujours plus nombreuses et plus spécialisées) 2346.
Ce fut en 1859, avec Joseph-Émile Labbé, professeur à la Faculté de droit de Paris 2347, que la
note d’arrêt prit son éclat et devint une caractéristique de l’esprit juridique français 2348. Ce
commentaire accompagnant une récente décision judiciaire concilie l’analyse théorique et la
discussion pratique. Chaque arrêtiste a sa méthode qui n’obéit à aucune règle 2349.
Durant la première moitié du XIXe siècle, la doctrine universitaire s’était réfugiée dans des revues
distinctes des recueils de jurisprudence qui avaient été fondés ou étaient dirigés par des praticiens
(Ledru-Rollin et le Journal du Palais où Labbé écrivit sa première note en 1859 ; Désiré Dalloz et
la Jurisprudence générale du Royaume ; Jean-Baptiste Sirey et le Recueil général des lois et
arrêts...)2349a. Elle dédaignait l’étude de la jurisprudence et l’accusait volontiers de méconnaître les
« vrais principes » (c’est-à-dire une vérité dont elle croyait être détentrice). Ces professeurs
ignoraient délibérément les précédents et leur substituaient leurs propres analyses, nourries de
références doctrinales ou historiques. En se livrant à l’exercice de la note d’arrêt, au Sirey ou au
Dalloz, Labbé réconcilia l’École et le Palais, le droit et le fait, les principes et la pratique 2350.
Néanmoins, une confusion des genres apparaît lorsqu’un universitaire publie sous forme de note
ou de chronique une consultation qu’il a rédigée à la demande d’une des parties à l’affaire jugée 2351.
SECTION I
LA PENSÉE DOCTRINALE
§ 1. PHYSIONOMIE DE LA DOCTRINE
§ 2. RÔLE DE LA DOCTRINE
427. Enseignement et critique. – 1º) La doctrine est avant tout un
agent de diffusion et d’enseignement du droit positif. Ainsi, en droit
administratif, le Conseil d’État ne s’est jamais laissé influencer par une
proposition doctrinale en particulier. En revanche, les traités
systématiques des professeurs de droit public ont joué un rôle
considérable dans la compréhension de la matière par les magistrats :
cette action est plus diffuse mais plus efficace que celle d’une doctrine
théorique 2386. La loi et la jurisprudence ne témoignent évidemment pas
d’un tel souci didactique. De même, il n’est que les auteurs pour
conceptualiser, rationaliser et systématiser le droit. Ils critiquent aussi le
droit, mais ils ne sont pas les seuls.
Cette tâche paraît aujourd’hui démesurée à l’échelle d’un seul homme. La complexité de la
société moderne, l’inflation législative et jurisprudentielle incitent la plupart des auteurs à se
cantonner dans des spécialités. Ils risquent de se couper des autres disciplines juridiques et de ne pas
voir qu’une société et son droit forment un ensemble cohérent.
2º) Plus grave, l’activité critique et la controverse sont en recul dans la littérature juridique 2387.
Elles cèdent la place à un bourdonnement de commentaires sur les commentaires, privilégiant
l’événement, la règle ou l’arrêt le plus récent – fût-il éphémère. À l’inflation normative s’ajoute une
inflation doctrinale 2388. Les causes en sont multiples : il n’y a pas seulement plus de normes à
commenter mais aussi plus de revues, plus de manuels et de thèses publiés, plus de bases de données
informatiques et de « blogs » juridiques, plus d’étudiants (amateurs d’informations concises), plus
d’universitaires (sommés ou avides de publier) 2389. La qualité de cette prose est faible. Le style
dominant se nivelle, s’affadit : il est neutre, sec, descriptif, dépouillé de références historiques ou
d’analyses critiques. L’argument quantitatif menace de l’emporter sur l’argument d’autorité 2390.
Comme trop d’impôts tue l’impôt, trop de doctrine tue la doctrine.
Il faut toutefois se garder d’un mélange des genres : il n’y a que très peu d’« écrits doctrinaux »
dans ce flot d’informations ; ce n’est pas de la doctrine 2391.
I. — Travail critique
429. Doctrine de combat. – Le droit positif peut être contesté en
raison de son incohérence logique ou pour des raisons d’ordre moral,
économique, social ou politique. Selon les cas, la critique doctrinale se
situe sur le terrain de la technique ou celui de l’opportunité.
Certains arguments sont récurrents. L’usure d’une institution juridique peut être annoncée en jouant
les Cassandre : la doctrine prédit son déclin 2393. De façon plus insidieuse, la discussion peut être
menée au moyen de distinctions. Quelle que soit l’arme rhétorique, le travail de sape aboutit parfois à
un revirement de jurisprudence 2394 ou une réforme législative.
433. Postérité. – L’incapacité d’un auteur à influer sur l’évolution du droit positif ne préjuge pas
de sa renommée. Des opinions iconoclastes sont restées gravées dans le marbre de la pensée
juridique. Ainsi, il n’est guère d’universitaires qui n’évoquent et ne critiquent la théorie des droits
réels, l’analyse de la nature du droit au nom ou la critique de l’abus de droits bâties par Planiol à
l’encontre de la loi ou de la jurisprudence ; la rigueur intellectuelle et la langue de Planiol lui ont
valu la postérité, même s’il n’a pas convaincu 2433.
436. La doctrine de la jurisprudence ? – À l’évidence, les écrits d’un magistrat, détachés de tout
litige particulier, se placent dans la doctrine, celle des praticiens. Le doute est permis, en revanche,
lorsque des conseillers-rapporteurs et des avocats généraux à la Cour de cassation ou des
« rapporteurs publics » (anciens commissaires du gouvernement) devant les juridictions
administratives publient leur rapport ou leurs conclusions : ces écrits participent d’une décision
judiciaire à venir, même s’ils contiennent une réflexion doctrinale. La frontière est encore plus
trouble quand un magistrat annote un arrêt rendu en sa présence ou sous sa présidence 2459. D’une
manière générale, les membres du Conseil d’État ou de la Cour de cassation commentent avec
beaucoup de prudence les décisions rendues par ces juridictions et osent à peine les critiquer.
Toute juridiction suprême, dans son ensemble, tend à arborer une image doctrinale 2460. Les arrêts
dits de principe offrent un intérêt théorique pur 2461. Quelques arrêts adoptent un style solennel et
dogmatique 2462. Selon une formule de style riche d’ambiguïtés, est irrecevable le pourvoi qui invite
la Cour de cassation « à revenir sur la doctrine affirmée » dans un premier arrêt de cassation
« lorsque la juridiction de renvoi s’y est conformée » 2463. La Cour a même inventé un adage pour
résumer cette fin de non-recevoir : pourvoi sur pourvoi ne vaut 2464.
Par ailleurs, le rapport annuel de la Cour de cassation qui sélectionne les arrêts les plus
importants de l’année écoulée s’ouvre sur des « suggestions » de modifications législatives ou
réglementaires qui sont autant de critiques doctrinales. Des « communiqués » paraissent sur les sites
internet des différentes juridictions suprêmes, livrant un résumé et, parfois, un commentaire d’une
décision publiée 2465 ; le Conseil d’État précise qu’il ne lui appartient pas de se prononcer sur les
commentaires que publie le Conseil constitutionnel sur son site internet relatifs à la portée de ses
décisions 2466. De façon innovante, le Service de documentation et d’études (SDE) de la Cour a
publié de sa propre initiative des questions-réponses relatives à une loi nouvelle 2467, sur le modèle
d’une circulaire ministérielle interprétative, tout en prenant soin d’éviter leur assimilation à des avis
officiels 2468.
SECTION II
L’INTERPRÉTATION
§ 1. QUI INTERPRÈTE ?
§ 2. QUAND INTERPRÉTER ?
I. — Règle écrite
II. — Clarté
449. Lacunes en droit. – Si la clarté exclut l’interprétation, celle-ci est à nouveau requise en
présence d’une lacune dans le droit (c’est-à-dire une absence de règle). Même si elle apparaît
clairement à l’interprète, la lacune doit être comblée. Elle se définit de deux façons différentes.
La lacune objective reflète la situation dans laquelle une règle nécessaire à la solution du cas
litigieux fait défaut. Une antinomie, l’absence d’un décret d’application ou de désignation de
l’autorité habilitée à trancher le différend peuvent en être la cause.
La lacune subjective a été définie par Kelsen, reprenant une conception allemande du XIXe siècle
bâtie sur le postulat de la complétude du droit : il n’y a lacune dans le droit (Lücken im Recht) que
« lorsque l’organe d’application du droit considère le défaut d’une norme juridique comme
regrettable d’un point de vue de politique juridique et qu’en conséquence il repousse l’idée
d’appliquer le droit en vigueur ». Dans ces conditions, il n’existerait aucune authentique lacune
(eigentliche Lücken) mais seulement des prétendues lacunes (uneigentliche Lücken) 2552.
§ 3. COMMENT INTERPRÉTER ?
453. Simples conseils. – Quelle que soit leur source, les règles
d’interprétation n’ont qu’une valeur facultative pour l’interprète qui se
voit ainsi proposer des directions contradictoires car « il n’a jamais été
possible de les hiérarchiser de façon telle que l’on puisse indiquer, a
priori, à quelle technique d’interprétation il faut accorder la priorité
quand les interprétations divergentes sont opposées les unes aux
autres » 2570. Optionnelle, indicative, non contraignante, la règle
d’interprétation est une directive, une recommandation, un conseil
adressé à l’interprète, qui se met au service de sa politique juridique et
ne le lie pas.
Ces règles figurent dans la loi (A) et dans des arguments (B), ou
résultent de méthodes générales (C).
A. RÈGLES LÉGALES
454. Infirmités. – Il arrive que la loi (ex. : art. 1188 à 1191, anc.
art. 1156 à 1164, sur l’interprétation des conventions 2571) ou un traité
international (ex. : Convention de Vienne du 23 mai 1969 « sur le droit
des traités », art. 31 à 33 2572) énoncent des règles d’interprétation.
Celles-ci souffrent d’une double infirmité normative. En premier lieu,
la règle d’interprétation présuppose une disposition – équivoque ou
obscure – à interpréter dont elle n’est que l’accessoire ; l’interprétation
s’incorpore à la disposition dont elle éclaire le sens : la règle
d’interprétation est ainsi dénuée d’autonomie, de valeur juridique
propre. En second lieu, elle ne possède aucun caractère obligatoire et,
par conséquent, est insusceptible de fonder un pourvoi en cassation 2573.
B. ARGUMENTS
[Sur les adages en général, v. nos 123, 368, 373, 412, 431, 455]
Actori incumbit probatio : 213
Actus interpretandus est potius ut valeat quam ut pereat : 455
Appliquer ou expliquer (apply or explain) : 49
Ce qui est à moi est à moi : 50
Ce qui nous unit ce sont nos différences : 15
Cessante ratione legis cessat ejus dispositio : 455, 457
Comply or explain : 49
Contra non valentem agere non currit prescriptio : 402, 432
Da mihi factum dabo tibi jus : 221
Dubia in meliorem partem interpretari debent : 214, 455
Ejus est interpretari legem cujus est condere : 442, 443
Error communis facit jus : 123, 412
Exceptio est strictissimæ interpretationis : 455, 456
Ex facto oritur jus : 36
Fraus omnia corrumpit : 29, 402
Idem non esse et non probari : 202
In dubio pro reo : 214
In obscuris minimum est sequendum : 455
Inclusione unius fit exclusio alterius : 455
Interpretatio cessat in claris : 448
Jura novit curia : 221
Jus est ars boni et aequi : 21
Le juge de l’action est juge de l’exception : 446
Locus regit actum : 73, 3o, 101, 318
Lex posterior derogat priori : 455
Neminem laedit qui suo jure utitur : 54
Nemo censetur ignorare legem : 281
Nemo tenetur edere contra se : 212
Nul en France ne plaide par procureur : 123, 171, 412
Nul ne peut se constituer une preuve à lui-même : 246
Nul ne peut se contredire au détriment d’autrui : 246
Nul ne peut se faire justice à soi-même : 166
Pater is est quem nuptiae demonstrant : 205, 216
Plurimae leges corruptissima respublica : 6, 261, 335
Pourvoi sur pourvoi ne vaut : 436
Princeps legibus solutus est : 5, 102
Qui dicit de uno negat de altero : 455
Que Dieu nous protège de l’équité des Parlements : 43
Quid leges sine moribus ? : 29
Quieta non movere : 215, 293, 390
Qui peut le plus peut le moins : 455
Remedies precede rights : 170
Res judicata pro veritate habetur : 173
Reus in excipiendo fit actor : 213
Specialia generalibus derogant : 455, 456
Summum jus summa injuria : 52
Suum cuique tribuere : 31
Tempus regit actum : 296, 318
Ubi eadem est legis ratio eadem est legis dispositio : 458
Ubi lex non distinguit nec debemus distinguere : 458
Ubi societas ibi jus : 22
INDEX DES ARTICLES DU CODE CIVIL 2650
Articles Nos
1 47, 277, 280
2 292, 293, 305, 308
3 73
4 404, 405, 407
5 144, 405
6 28, 122, 286, 407, 455
9 245
10 204
16-1-1 40
16-10 253
16-11 245
30 215
255 168
259-1 245
266 8
309 73
311-1 12
311-12 232, 253
311-14 73
312 204, 216
371 8
373-2-10 168
516 73
544 106
900 8
931 202
1128 215
1174 239
1175 238
1132 s. 281
1137 204
1162 286
1162 125
1103, 1104 73, 122, 375, 448
1125 à 1126 238
1127-4 à 1127-6 238
1127-5 240
1176 238
1177 238
1194 45, 375
1188 454
1199 s. 73
1222 166
1240 73, 402, 413, 426
1242 217
1300, 1303 73, 238
1301 s. 73
1302-1 73
1304 73
1310 378
1231-5 8
1302, 1342 28
1342-10 378
1342-9 241
1343-2 378
1342 s. 73
1353 215
1353 à 1386-1 203
1354 216
1354 205, 217, 233, 238, 246
1354 215, 392, 400
104, 174, 213, 231, 232 à 235, 237, 241, 244,
1359
252
1361, 1362 233, 237, 238, 240
1360, 1379 232, 233, 237
1365 236
1365 à 1368 238
1366 238, 246
1368 234, 253
1367 237, 238
1369 236, 239
1369 à 1371 231
1370 236
1371 251
1372 252
1372 à 1378-2 231
1372 252
1373 252
1375 237
1376 237, 241
1377 252
1378 246
1378-1 246
1382 217
1383 à 1383-2 241
1383-1 241
1383-2 241
1384 242, 250
1385 242
1385-1 242
1385 242
1385-1 242
1385-3 242
1386-1 242, 250
1386 242
1602 204
1780 122
1906 378
1907 378
1965 125
2044 169
2052 169
2059 à 2061 168
2059 168
2060 168
2061 168
2219 à 2279 435
2222 315
2234 431
2238 167
2258 12
2261 12
2276 216
2284 73
INDEX DES PRINCIPALES DÉCISIONS JUDICIAIRES 2651
a) Index alphabétique
G
GISTI, CE, 25 juin 1990 : 342
Institut des frères des écoles chrétiennes, Cass. civ., 7 juin 1901 : 301, 310
b) Index chronologique
c) Index analytique
§ 2. – Un fait pertinent
Chapitre I. – La loi
§ 1. – Normes constitutionnelles
§ 2. – Normes internationales
I. – Généralités
§ 1. – Attitudes réflexives
§ 3. – Comment interpréter ?
I. – Règles d’interprétation
Abrogation : 278
— par désuétude : 278, 377
— tacite : 278.
Abus des droits : 49 et s., 432
Acte authentique : 236, 251 V. Preuve
Acte d’avocat : 236, 237, 252
Action de groupe, v. Class action
Action en justice : 170 et s.
Adages : 123, 368, 373, 412, 431, 455 V. Interprétation, Traduction
Allemagne, v. Droit allemand, État de droit
Amicus curiæ : 222
Amitié : 26
Analyse comportementale du droit : 8 V. Analyse économique du droit
Analyse économique du droit : 7, 33, 222, 355 V. Régulation
Anarchie : 21
Ancien droit : 81 et s., 123 et s.
Antinomies : 10
Appel : 177
Arbitrage : 167 et s.
ARISTOTE : 5, 21, 25, 31, 38, 42, 166
Arrêts de règlement, v. Jurisprudence
Attractivité du droit français : 13, 34
AUBRY et RAU : 134, 206, 435
Authenticité, v. Preuve
Autorégulation : 49
Autorité de la chose interprétée :
— Conseil constitutionnel : 338
— CEDH : 348
Autorité de la chose jugée : 221, 407
Autorités administratives indépendantes : 276, 355
Auxiliaires de justice : 192
Avis : 358
— Conseil d’État : 165
— Cour de cassation : 163, 406, 436
— V. Droit souple
Avocats : 192
— acte d’avocat : 236, 237, 252
— secret d’avocat : 227
E-mail : 240
École du droit historique, v. Savigny
Électronique : 238 et s.
Empreinte génétique : 253
Environnement, v. Précaution (Principe de –)
Équité : 42 et s., 413
— satisfaction équitable : 350
— V. Procès équitable (droit à un –)
Equity : 42 et s., 170, 389
Estoppel : 47, 246, 426
Erreur de droit : 281
Errata : 286
Erreur matérielle : 287, 451
Espérance légitime : 306
Estopppel : 246
État
— de droit : 5, 47
— de siège : 5
— d’urgence : 5
États-Unis d’Amérique, v. Droit américain, Réalisme américain
Éthique : 28
— comités d’éthique : 30
Études d’impact : 279
Euphémisme : 374
Europe, v. Convention européenne des droits de l’homme, Union européenne
Euthanasie : 40
Évaluation, v. Études d’impact
Évidence : 225
Exception : 456 V. Droit commun
Exégèse : 134, 460
Fait :
— et droit : 36, 179, 221 et s.
Faux, v. Preuve
Fictions : 205, 281
Filtrage des recours :
— CEDH : 348
— Cour de cassation : 175
— QPC : 334
Fondamentalisation : 332, 407
Fraude : 73, 402, 456
Habitude : 370
HAYEK (Friedrich August von) : 7, 33
HEGEL (Georg Wilhem Friedrich) : 9
Héroïsme : 28, 440
Hiérarchie des normes : 142, 270, 332 et s., 357, 445
Histoire : 13
— et coutume : 369
— du droit : 81 et s.
— et droit : 13, 15
— donné historique : 37
HOBBES (Thomas) : 21
HOLMES (Oliver Wendel) : 33, 135, 390
Honneur : 28
Huissier : 215, 240, 246
HUME (David) : 36
Humilité : 2
IHERING (Rudolf von) : 1, 11, 13, 15, 51, 133, 135, 137, 202
Imaginaire : 205
Index de la sécurité juridique (ISJ) : 34
Inflation :
— avis : 163
— doctrinale : 427, 432
— jurisprudentielle : 415
— législative : 2, 6, 136, 139, 261, 279
Informatique juridique : 373, 415
Injustice : 10
Institutes : 73, 139
Instructions : 354
Instruments optionnels de droit européen : 434
Interdisciplinarité : 70
Interessenjurisprudenz : 135
Interprétation : 438 et s.
— acte clair (théorie de l’–) : 442, 448 et s.
— adages ou directives : d’– : 442, 455 et s.
— analogie : 458
— arguments a fortiori, a contrario : 459
— conforme au droit européen : 345
— distinctions : 388, 431
— évolutive : 377, 461
— et hiérarchie des normes : 357, 445
— induction, v. Analogie
— principe d’– conforme : 345
— ratio legis : 456 et s.
— réserves d’– : 337
— stricte : 407
— téléologique : 459
— théorie réaliste de l’interprétation, v. Troper
V. Avis, Coutume contra legem, Questions préjudicielles, Raisonnement juridique, Syllogisme
Islam : 24
Jansénisme : 122
V. D’Aguesseau, Domat, Pothier
JOSSERAND (Louis) : 52
Journal officiel : 277
Juge :
— Judge-made law : 388
— office : 174, 212, 221
— pouvoirs : 346
— responsabilité, v. Magistrats
— vertus : 462
Jugements : 170 et s., 173
Juridictions : 155 et s.
— de proximité : 158
— judiciaires : 158 et s.
— administratives, v. Séparation des pouvoirs : 164 et s.
Jurisprudence : 385 et s.
— arrêts de règlement : 399, 405 et s.
— constante : 334
— contra legem : 402
— divergences de jurisprudence : 401
— doctrinale : 436
— évolution : 410 et s.
— revirements : 396 et s.
— théorie des trois plans : 404
— « virale » : 410
V. Déni de justice
Jus commune : 97, 98, 435
Justice : 31
— lenteur : 175
— et ordre : 31
— participative : 169
— publique : 156 et s.
— privée : 166 et s.
— restauratrice : 169
— transitionnelle : 169
V. Équité
Magistrats : 190
— responsabilité des – : 191
MAGNAUD (le bon juge –) : 42
MARX (Karl) : 12, 13, 33, 41, 49
Médiation : 168
Médecin : 227
Mémorielles (lois –) : 14
Mensonge : 204
MERLIN DE DOUAI (Philippe-Antoine) : 132
Méthode ouverte de coordination (MOC) : 48
Modernité : 11
MONTESQUIEU : 5, 6, 104, 164, 284, 331, 392
Morale : 29 et s.
— donné idéal : 37
Mort : 40
Motifs (exposé des –) : 279
Motivation des décisions de justice :
— CEDH : 350
— Cour de cassation : 161, 350, 407
Mythe : 22, 371, 430
Paix : 1, 10
Pandectisme : 133
Parlements : 43
Patrie : 13
PERELMAN (Charles) : 29, 464
Personnalité des lois : 83
PLANIOL (Marcel) : 53 à 55, 135, 420, 433
Pluralisme juridique :
— juridique : 47, 70, 261, 367, 377, 392
— doctrinal : 422
— linguistique : 442, 450
— normatif (non-droit) : 26
— religieux : 24
V. Soft law
Plurijuridisme : 270
PORTALIS (Jean, Étienne, Marie) : 6, 42, 102, 120 et s., 281, 285, 392, 405, 438
Positivismes : 367, 375
POSNER (Richard) : 33
POTHIER (Robert, Joseph) : 102
POUND (Roscoe) : 135, 286
Précaution (principe de –) : 41, 214, 253, 426
Présomptions : 215 et s.
Preuve : 200 et s.
— acte authentique : 236, 251
— acte d’avocat : 252
— acte sous signature privée : 237, 252
— aveu : 245
— biologique : 205, 253
— blanc et blanc-seing : 243
— cachet de la poste faisant foi : 240, 252
— charge de la preuve : 210 et s.
— commencement de preuve par écrit : 233
— conflit de lois : 203
— copie : 238
— date certaine : 252
— déloyale : 246
— droit de ne pas témoigner contre soi, droit au silence : 212
— et droit transitoire : 203, 314
— écrit :
– papier : 235 et s.
– électronique : 238
— évidente : 225
— faux : 243
— force probante : 250 et s.
— illicite : 245
— impossible : 228
— inopérante : 226
— inscription de faux : 251
— interdite : 227
— littérale : 236 et s.
— loyauté de la preuve : 246
— mesures d’instruction in futurum : 203, 212
— objet : 220 et s.
— obtention des preuves à l’étranger : 212
— paiement (preuve du –) : 232
— par tous moyens : 244
— photocopie : 233
— prêt : 213
— et procédure, v. Procédure
— recevabilité : 230 et s.
— et règle de fond : 218, 227
— secret : 227
— serment : 204, 242 et s.
— signature : 237
— simulation (preuve de la –) : 232
— et vérité : 204 et s.
— vérification des écritures : 243
Principe(s) :
— coutumiers contra legem : 378
— en « suspension », v. Analogie : 403, 458
— fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR) : 337 et s.
— généraux du droit : 39, 292, 338, 341, 345, 350, 402, 403, 414, 458
— de précaution : 41, 214, 426
— de proportionnalité : 227, 350, 352
— et preuve : 246
— visas de – : 403
V. Adages, Jurisprudence (contra legem)
Procédure :
— civile : 73
— concentration des moyens : 221
— et preuve : 203, 211
— et droit transitoire : 313
— participative : 168
Procès équitable (droit à un –) : 47, 349 et s.
— divergences de jurisprudence : 401
— filtrage des recours : 334
— lois de validation législative : 306
— motivation des décisions : 407
— preuve : 230, 246 et s.
Professeurs de droit : 101, 412, 420 et s., 432, 435 V. SIPROJURIS
Prostitution : 29
PROUDHON (Joseph) : 21
Pluralisme juridique : 26, 46, 261
Union européenne : 15
— Cour de justice : 344, 397, 450
— directives : 345 et s.
— droit communautaire ou de l’Union européenne (sources) : 345
— droit transitoire : 319
— institutions : 344
— règlements : 345
V. Sécurité juridique
Urgence : 12, 5
Usages, v. Coutume
Utile : 32
— effet utile : 455, 461
(525) P. HÉBRAUD, « Observations sur l’évolution des rapports entre le droit et l’action dans la
formation et le développement des systèmes juridiques », Études P. Raynaud, Dalloz, 1985, p. 237,
spéc. p. 250 et 253 : « Nous vivons sous le principe de la liberté contractuelle et du consentement,
et de l’autonomie de la volonté, ignorés du droit romain classique, qui pratiquait le système des
contrats formalistes et nommés ; la notion de cause est au cœur de notre théorie du contrat, alors
qu’elle était inconnue du droit romain. La responsabilité de l’art. 1382 [devenu art. 1240] repose
sur une notion de faute subjective et psychologique ; il n’existait en droit romain que des cas
objectivement déterminés de responsabilité, sous l’égide de la loi Aquilia. La transmission de la
propriété par l’effet des contrats se produit, chez nous, de plein droit et immédiatement sans
requérir, en outre, comme en droit romain, l’accomplissement d’un acte réel distinct [...]. Il n’est
pas un domaine, pas une matière, où les principes du Code civil et de notre droit actuel ne soient
en contradiction absolue avec ceux du droit romain ». Au contraire, le Code civil allemand (le
BGB) est proche du droit romain classique : « Tout en admettant la liberté contractuelle, il écarte
le principe de l’autonomie de la volonté ; il ignore la théorie de la cause, de sorte que le contrôle
du contrat ne se fait pas de l’intérieur, par l’action en nullité, mais de l’extérieur, par des actions
distinctes qui rappellent les condictiones du droit romain ; la responsabilité est déterminée par la
définition d’une série d’actes objectifs illicites, selon la méthode aquilienne ; le transfert de
propriété suppose un acte réel distinct ; la vente est simplement créatrice d’obligations. Ainsi le
droit allemand est resté plus proche de son point de départ, donc en retard sur le droit français,
dans le processus de maturation ».
(526) V. infra, no 133.
(527) V. infra, no 122, en note. V. LASSERRE-KIESOW, La technique législative. Étude sur les codes
civils français et allemand, th. Paris II, LGDJ, 2002, préf. M. Pédamon.
(528) V. infra, no 434.
(529) Ph. MALAURIE, « Vers un ordre judiciaire de la Méditerranée ? », in Vers la création d’un ordre
juridique pour la Méditerranée, Bruylant, 2012, dir. S. Ferré-André ; JCP G, 2009, 1319.
(530) H. GROTIUS (1583-1645), De jure belli ac pacis libri tres, quibus jus naturæ et gentium, item
jurispublici præcipue explicantur (Le droit de la guerre et de la paix...), 1625, trad. J. Barbeyrac,
Amsterdam, 1729, Discours préliminaire, § VIII, p. 11 : le droit « se réduit en général à ceci : qu’il
faut s’abstenir religieusement du bien d’autrui, et restituer ce que l’on peut en avoir entre les
mains, ou le profit qu’on en a tiré ; que l’on est obligé de tenir sa parole ; que l’on doit réparer le
dommage qu’on a causé par sa faute. Et que toute violation de ces règles mérite punition, même de
la part des hommes ». Mêmes propos chez l’allemand S. PUFENDORF, De jure naturæ et gentium (Le
droit de la nature et des gens), 1672, trad. J. Barbeyrac, 1732, L. II, Chap. I et IV.
(531) GROTIUS, extraits cités supra, no 37, en note.
(532) Sur les caractères du droit naturel, v. supra, nos 38 et s.
(533) GROTIUS, cité supra, no 38, en note.
(534) G.-W. LEIBNIZ, Nouvelle méthode pour l’étude du droit (1668). Dans cette Nova methodus,
Leibniz allie droit et mathématiques.
(535) I. NEWTON, Philosophiæ naturalis principia mathematica, 1687.
(536) La préface du Droit de la guerre et de la paix de Grotius comme celle des Lois civiles dans
leur ordre naturel de Domat donnent parfois au lecteur l’impression de lire le Discours de la
méthode, pourtant postérieur.
(537) J.-L. SOURIOUX, « La science du droit durant la période classique française », RTD civ. 2008,
p. 387.
(538) J. DOMAT, Les lois civiles dans leur ordre naturel, in Œuvres complètes de J. Domat par
J. Rémy, 1828, Préface de l’éditeur, p. VI.
(539) Sur d’Aguesseau : Les penseurs du Code civil, Doc. fr., 2009, spéc. p. 15 à 105 (divers
articles).
(540) Fr. OLIVIER-MARTIN, « Les professeurs royaux de droit français et l’unification du droit civil
français », Mélanges Sugiyama, 1939, p. 263. L’un des plus illustres et des plus humbles, Pothier
(infra, no 101), occupera cette chaire à Orléans. Échappant à l’interdiction d’enseigner le droit
français prononcée par la décrétale Super Specula, l’université de cette ville jouissait alors d’un
grand rayonnement.
(541) J.-L. THIREAU, « La doctrine civiliste avant le Code civil », La doctrine juridique, PUF, 1993,
p. 13, spéc. p. 36.
(542) Sur l’histoire de la doctrine à Rome, v. infra, nº 423.
(543) Biblio : Robert-Joseph Pothier, D’hier à aujourd’hui (colloque célébrant le tricentenaire de
sa naissance), Economica, 2001, spéc. : J.-L. SOURIOUX, p. 15 (la vie de Pothier, repris in Écrits du
prof. J.-L. Sourioux, LexisNexis, 2011, p. 451) ; J.-L. THIREAU, p. 35 (sa méthode) ; Ph. MALAURIE,
p. 77 (sa place dans la doctrine et la jurisprudence au XXe siècle) ; J. CARBONNIER (conclusion,
reproduite dans Écrits, PUF, 2008, p. 155). – E. GOJOSSO, « Pothier et le Code civil », Études
M. Carlin, éd. La Mémoire du droit, 2008, p. 403. – J.-L. SOURIOUX, « Les exemples de Pothier »,
Écrits du prof. J.-L. Sourioux, préc., p. 451.
(544) Coutumes des duché, baillage et prévôté d’Orléans et ressorts d’iceux [...], 1740
(2e éd. remaniée en 1760).
(545) Pandectæ Justinianæ in novum ordinem digestæ (Pandectes justiniennes rédigées dans un
ordre nouveau), 3 vol., 1748-1752.
(546) Au XIXe siècle, ce cliché avait un arrière-fond politique (cf. J.-L. HALPÉRIN, in Robert-Joseph
Pothier, D’hier à aujourd’hui, op. cit., p. 65, spéc. p. 71 ; E. GOJOSSO, art. cit.). En réalité, le Code
civil a eu plusieurs pères (Domat, D’Aguesseau, Portalis, Bonaparte... v. infra, nos 120 et s.). Chacun
dans leur siècle, Pothier et Portalis, témoignèrent d’une hostilité aux Lumières, très marquée chez
Pothier.
(547) Il se proclame aussi seule source ou « fontaine » de justice (Rex est fons omnismodi justitiæ) :
toute justice émane du roi, qu’il l’exerce lui-même par l’intermédiaire de son Conseil (justice
retenue) ou qu’il la délègue à d’autres juges (justice déléguée), tels que les Parlements.
(548) Selon l’adage emprunté par les romanistes à Ulpien au Digeste (D. 1, 2, 31).
(549) V. Cass. 2e civ., 11 janv. 1989, Bull. civ. II, no 11 : « Vu [...] l’article 111 de l’ordonnance
d’août 1539 ; à peine de nullité, tout jugement doit être motivé en langue française ». Sur le droit
de la langue, v. infra, no 440.
(550) V. infra, no 201, en note, et no 231.
(551) Cf. J. B. COLBERT, Mémoire sur la réformation de la justice, 1665 : « Sa Majesté nous ayant
donc dit qu’elle veut réduire en un seul corps d’ordonnances tout ce qui est nécessaire pour
établir la jurisprudence fixe et certaine et réduire le nombre des juges, comme le seul moyen qui
n’a pas encore été tenté jusqu’à présent d’abréger les procès [...] ».
(552) Ord. sur les donations, Préambule : « Louis [...]. La justice devrait être aussi uniforme dans
ses jugements que la loi est une dans ses dispositions, et ne pas dépendre de la différence des
temps et des lieux, comme elle fait gloire d’ignorer celle des personnes [...] notre amour pour la
justice, dont nous regardons l’administration comme le premier devoir de la royauté, et le désir
que nous avons de la faire respecter également dans tous nos États, ne nous permettent pas de
tolérer plus longtemps une diversité de jurisprudence qui produit de si grands inconvénients
[...] ». Ord. sur les testaments, Préambule : « Notre intention n’est point de faire, dans cette vue, un
changement réel aux dispositions de lois qu’ils ont observées jusqu’à présent » (ainsi
D’Aguesseau laissa-t-il subsister deux régimes successoraux distincts, l’un pour les pays de droit
écrit, l’autre pour les pays de droit coutumier).
(553) J. VAN KAN, Les efforts de codification en France. Étude historique et psychologique, 1929 ;
J. VANDERLINDEN, Le concept de code en Europe occidentale du XIIIe au XIXe siècle, Essai de
définition, Bruxelles, J. L. B., 1967.
(554) Ex. : J.-J. ROUSSEAU, Considérations sur le gouvernement de Pologne (1772) : « Il faut trois
codes, l’un politique, l’autre civil, et l’autre criminel ». Adde J. CARBONNIER, Essais sur les lois,
Defrénois, 2e éd., 1995, « La passion des lois au siècle des Lumières », p. 239.
(555) Esprit des lois, L. XXIX, Chap. 19 : « Lorsque les citoyens suivent les lois, qu’importe qu’ils
suivent les mêmes ? ».
(556) L’idée d’un droit commun se heurta aux chartes de privilèges (de libertés et de franchises)
octroyées aux provinces et aux villes, ainsi qu’à l’indépendance des Parlements.
(557) J. BOUINEAU, Les toges du pouvoir, th. Paris I, 1982.
(558) Biblio. : M. GARAUD, Histoire générale du droit privé, Sirey, t. I, La Révolution et l’égalité
civile, 1953, t. II, La Révolution et la propriété française, 1959, t. III, La Révolution et la famille,
1978. Cf. la conclusion de Ph. SAGNAC, La législation civile de la Révolution française (1789-1804),
1898, p. 397 : « Elle (la Révolution) a essayé de donner à la France un Code d’une unité parfaite,
opposée au droit écrit. Ses lois ont un caractère violent, contraire à la marche ordinaire, toujours
lente et sûre du droit civil ».
(559) Décret du 4 août 1789, art. 1er : « L’Assemblée nationale détruit entièrement le régime féodal
et décrète que tous les droits et devoirs tant féodaux que censuels, ceux qui tiennent à la
mainmorte réelle ou personnelle et à la servitude personnelle et ceux qui les représentent, sont
abolis sans indemnités, et tous les autres déclarés rachetables, et que le prix et le mode de rachat
seront fixés par l’Assemblée nationale [...] ».
(560) L. 2-17 mars 1791 (d’Allarde), art. 7 : « À compter du 1er avril prochain, il sera libre à toute
personne de faire tel négoce, ou d’exercer telle profession, art ou métier qu’elle trouvera bon ;
mais elle sera tenue de se pourvoir auparavant d’une patente, d’en acquitter le prix suivant les
taux ci-après déterminés, et de se conformer aux règlements de police qui sont ou pourront être
faits ».
(561) Décret du 20 sept. 1792, Tit. I, art. 1er : « Les municipalités recevront et conserveront à
l’avenir les actes destinés à constater les naissances, mariages et décès ».
(562) Décret du 20 sept. 1792, Tit. IV, Sect. V, art. 1er : « Aux termes de la Constitution, le mariage
est dissoluble par le divorce ».
(563) Cf. J.-L. HALPÉRIN, L’impossible Code civil, PUF, 1992.
(564) Décision du 5 juill. 1790 selon laquelle « les lois civiles seraient revues et réformées par le
législateur et il en serait fait un Code général de lois simples, claires et appropriées à la
Constitution ».
(565) 1er projet (719 articles) ; séance de la Convention du 9 août 1793 (dominée depuis juin par les
Jacobins, les Montagnards, elle estima le projet trop long et pas assez révolutionnaire), rapport de
Cambacérès : « Ô vous enfants de la patrie ! [...] voyez le Code de lois civiles que la Convention
prépare pour la grande famille de la nation, comme le fruit de la liberté. La nation le recevra
comme le garant de son bonheur ; elle l’offrira un jour à tous les peuples, qui s’empresseront de
l’adopter lorsque les préventions seront dissipées, lorsque les haines seront éteintes ». 2e projet
(297 articles), séance de la Convention du 23 fructidor an II (redevenue girondine après le coup
d’État contre Robespierre du 9 thermidor an III, elle trouva le projet trop court et trop
révolutionnaire), rapport de Cambacérès, au style emphatique : « [...] placé entre l’amour de la vie
et l’amour des lois, Socrate préféra la ciguë. C’est être libre en effet que d’être esclave des lois ».
3e projet (1 104 articles), discours préliminaire présenté à nouveau par Cambacérès au Conseil des
Cinq-cents (sous le Directoire), messidor an IV, au style concis : « Sans aspirer à tout dire, le
législateur doit poser des principes féconds qui puissent d’avance résoudre beaucoup de doutes,
et saisir des développements qui laissent peu de questions ». La grandiloquence s’atténue à mesure
que les revers se succèdent.
(566) Un Code de police correctionnelle et un Code pénal furent promulgués en 1791. La Convention
approuva, à la veille de sa dissolution en raison de l’entrée en vigueur de la Constitution de l’an III
qui instaura le Directoire, en 1795, un Code des délits et des peines, œuvre dogmatique et trop
exhaustive d’un seul homme, Merlin de Douai (v. infra, no 134).
(567) J. CARBONNIER, « Le Code civil des Français a-t-il changé la société contemporaine ? », D.
1975, p. 171 (reproduit dans Écrits, PUF, 2008, p. 624).
(568) Étymologie : du latin codex, icis = petit livre, code. L’origine du mot est étrange. Codex
signifiait à l’origine tronc d’arbre, d’où planchette à écrire, d’où petit livre. Le mot livre a parfois le
même sens que le mot code (ex. en France, le « Livre des procédures fiscales » est un code ; ex. en
Allemagne, le Code civil s’appelle le Bürgerliches Gesetzbuch – Buch = livre).
(569) D. 24 thermidor an VIII, art. 1er : « Le ministre de la Justice réunira dans la maison du
ministère MM. Tronchet, président du Tribunal de cassation, Bigot-Préameneu, Commissaire du
gouvernement près ce tribunal et Portalis, Commissaire du gouvernement du conseil des prises,
pour y tenir des conférences sur la rédaction du Code civil ». A. 2 : « Il appellera à ces
conférences M. Malleville, membre du Tribunal de cassation, lequel remplira les fonctions du
secrétaire-rédacteur ». A. 4 : « MM. Tronchet, Bigot et Portalis compareront l’ordre suivi dans la
rédaction des projets du Code civil, publiés jusqu’à ce jour, et détermineront le plan qu’il leur
paraîtra le plus convenable d’adopter ». A. 5 : « Ils discuteront ensuite, dans l’ordre des divisions
qu’ils auront fixées, les principales bases de la législation en matière civile [...] ».
(570) Biblio. sélective. Ouvrages : Éd. LEDUC, Portalis, éd. Panthéon, 1990 ; J.-B. D’ONORIO,
Portalis : l’esprit des siècles, Dalloz, 2005 ; Portalis le juste (colloque), PUAM, 2004. Articles :
B. OPPETIT, « Portalis philosophe », D. 1995, chr. 331 ; B. BEIGNIER, « Portalis et le droit naturel dans
le Code civil », Rev. hist. fac. dr. sc. jur. 1988, p. 77 ; J.-F. NIORT, « Portalis, le père du Code civil ?
À propos du rôle de Portalis dans la confection du Code civil de 1804 », RRJ 2005, p. 479.
(571) PORTALIS, Discours préliminaire, in Locré, t. I, p. 271 : « Nous avons fait, s’il est permis de
s’exprimer ainsi, une transaction entre le droit écrit et les coutumes, toutes les fois qu’il nous a
été possible de concilier leurs dispositions, ou de les modifier les unes par les autres, sans rompre
l’unité du système, et sans choquer l’esprit général ».
(572) PORTALIS, ib. : « Il faut changer, quand la plus funeste de toutes les innovations serait, pour
ainsi dire, de pas innover ».
(573) PORTALIS, ib., in Locré, t. I, p. 257-258 : « Nous nous sommes également préservés de la
dangereuse ambition de vouloir tout régler et tout prévoir. [...] L’office de la loi est de fixer, par
de grandes vues, les maximes générales du droit ; d’établir des principes féconds en
conséquences, et non de descendre dans le détail des questions qui peuvent naître sur chaque
matière ».
(574) Le Livre préliminaire du Code civil, conçu par Portalis, fut retiré du projet parce qu’il
énonçait des « vérités abstraites [...] qui paraîtraient mieux placées dans un traité du droit que
dans un Code » (obs. du Tribunal d’appel de Paris, in Fenet, t. II, p. 91). Cambacérès émit la même
critique (in Locré, t. I, p. 45). Portalis se résigna (in Locré, t. I, p. 328 et 343). Maleville le
déplorera (cf. J.-F. NIORT, art. cit., spéc. p. 481). Adde P.-Y. GAUTHIER, « Pour le rétablissement du
Livre préliminaire du Code civil », Droits 2005, no 41, p. 37 (avec le texte en annexe).
(575) Ces lettres et cahiers de doléances ont été rassemblés : Les Français et leur Code civil, Les
éditions du JO, 2004.
(576) Les travaux préparatoires du Code civil ont été publiés par J. G. LOCRÉ (La législation civile,
commerciale et criminelle de la France, 31 vol.) et P.-A. FENET (Recueil complet des travaux
préparatoires du Code civil, 15 vol., 1836 : les cinq premiers volumes contiennent les projets
antérieurs – trois de Cambacérès, celui de Jacqueminot et le projet de l’an VIII – ainsi que les
observations des tribunaux). Pour des extraits choisis, cf. Naissance du Code civil. Travaux
préparatoires du Code civil, Flammarion, 2004.
(577) La touche personnelle de Bonaparte transparaît notamment à l’art. 11 C. civ. (qui refuse aux
étrangers la jouissance des droits civils) ainsi que dans l’adoption et du divorce par consentement
mutuel (deux institutions qui devaient lui permettre d’avoir un héritier après son mariage infertile
avec Joséphine ; il n’eut besoin que de la seconde, Marie-Louise ayant enfanté). Cf. J.-L. SOURIOUX,
« Le rôle du Premier consul dans les travaux préparatoires du Code civil », in 1804-2004. Le Code
civil. Un passé, un présent, un avenir, Dalloz, 2004, p. 107 (reproduit in Écrits du prof. J.-
L. Sourioux, LexisNexis, 2011, p. 496).
(578) Biblio. : A.-J. ARNAULD, Les origines doctrinales du Code civil français, LGDJ, 1969 ;
M. PENA, « Jansénisme et Code civil », RRJ 1992, p. 817 ; X. MARTIN, « Mythologie du Code
napoléon », DMM, 2003 ; du même auteur, « Fondements politiques du Code Napoléon », RTD civ.
2003, p. 247. V. surtout : J.-L. HALPÉRIN, L’impossible Code civil, PUF, 1992 ; du même auteur,
« L’histoire de la fabrication du Code. Le Code : Napoléon ? », Pouvoirs 2003, no 107, « Le Code
civil », p. 11 ; J.-F. NIORT, Homo civilis. Contribution à l’histoire du Code civil français, PUAM,
2004 ; du même auteur, « L’anthropologie politique des rédacteurs du code », in Jus et le Code civil,
Droits et cultures (revue), 2004/2, no 48, p. 77 ; du même auteur, « Le Code civil dans la mêlée
politique et sociale », RTD civ. 2005, p. 257. Adde Les penseurs du Code civil, Doc. fr., 2009.
(579) Le texte du Discours préliminaire a été reproduit dans l’ouvrage collectif : Le discours et le
Code. Portalis, deux siècles après le Code Napoléon, Litec, 2004, p. XXI s.
(580) Contra, dénonçant l’hypocrisie qu’aurait eue le Discours : X. MARTIN, « L’individualisme
libéral en France autour de 1800 : essai de spectroscopie », Rev. hist. fac. dr. 1987, p. 87, spéc.
p. 139 ; du même auteur, « Nature humaine et Code Napoléon », Droits 1985, no 2, p. 117 ;
« L’insensibilité des rédacteurs du Code civil à l’altruisme », RHD 1982, p. 569.
(581) PORTALIS, op. cit., in Locré, t. I, p. 254-255 : « Il faut être sobre de nouveautés en matière de
législation, parce que s’il est possible, dans une institution nouvelle, de calculer les avantages que
la théorie nous offre, il ne l’est pas de connaître tous les inconvénients que la pratique seule peut
découvrir ; qu’il faut laisser le bien si on est en doute du mieux ».
(582) PORTALIS, op. cit., in Locré, t. I, p. 272 : « Nous avons trop aimé, dans nos temps modernes,
les changements et les réformes ; si, en matière d’institutions et de lois, les siècles d’ignorance
sont le théâtre des abus, les siècles de philosophie et de lumières ne sont que trop souvent le
théâtre des excès ». Les rédacteurs avaient le souci de revenir aux valeurs morales traditionnelles et
à l’Ancien droit, cf. P. BONASSIES, « À travers le Fenet. Observations sur les sources et l’idéologie du
Code civil », Études Béguet, 1985, p. 29.
(583) PORTALIS, Discours préliminaire, in Locré, t. I, p. 265 : « Le droit est la raison universelle, la
suprême raison fondée sur la nature même des choses. Les lois sont ou ne doivent être que le droit
déduit en règles positives, en préceptes particuliers ».
(584) Cf. PORTALIS, précité : « Un Code quelque complet qu’il puisse paraître, n’est pas plus tôt
achevé, que mille questions inattendues viennent s’offrir au magistrat. Car les lois, une fois
rédigées, demeurent telles qu’elles ont été écrites. Les hommes, au contraire, ne se reposent
jamais » (ib., p. 258). « C’est à l’expérience à combler successivement les vides que nous laissons.
Les Codes des peuples se font avec le temps ; mais, à proprement parler, on ne les fait pas » (ib.,
p. 265).
(585) Portalis dénonça la philosophie des Lumières dans un ouvrage intitulé De l'usage et de l'abus
de l'esprit philosophique durant le XVIIIe siècle (1820, réimp. Dalloz, 2007). Mais il sut dépasser et
concilier les antagonismes.
(586) Portalis présente ainsi cet article : « La dernière disposition du projet (celle qui abroge les
lois antérieures) nous rappelle ce que nous étions et nous fait apprécier ce que nous sommes. Quel
spectacle s’offrait à nos yeux ! On ne voyait devant soi qu’un amas confus et informes de lois
étrangères et françaises, de coutumes générales et particulières, d’ordonnances abrogées et non
abrogées, de maximes écrites et non écrites, de règlements contradictoires et de décisions
opposées ; on ne rencontrait partout qu’un dédale mystérieux, dont le fil nous échappait à chaque
instant ; on était toujours prêt à s’égarer dans un immense chaos » (séance du 28 ventôse an XII, in
Locré, t. I, p. 342).
(587) L’abrogation est radicale dans les matières du Code civil. Ex. : Cass. civ., 3 nov. 1812, S.,
1813, I, 152.
(588) CAMBACÉRÈS : « On ne peut se dissimuler, en effet, qu’il est au-dessus de la prévoyance
humaine, de tout embrasser dans les lois. C’est donc un avantage de ne pas ôter aux tribunaux le
secours qu’ils peuvent trouver dans les lois antérieures pour se fixer, lorsque le Code civil ne leur
offrira point de lumières ». Adde : « Le consul Cambacérès consent à ce que l’infraction aux lois
anciennes ne donne pas ouverture à cassation, pourvu qu’on ne refuse pas d’ailleurs, aux juges, la
faculté de les prendre pour guide » (séance du 15 ventôse an XII, in Locré, t. I, p. 101 et s.).
(589) Cass. civ., 13 germinal an XII, Jur. gén., Vo Loi, no 533-2o, p. 209, reconnaissant la qualité
d’héritier apparent ; Cass. req., 18 janv. 1830, S., chr. 1828-1830, 1, 430 : « Le principe qui avait
servi de fondement aux lois romaines sur l’erreur commune avait été adopté dans l’ancienne
législation française et par les anciennes Cours et tribunaux du royaume, comme il est attesté par
tous les auteurs, et il l’a été également dans la législation actuelle » ; Cass. req., 6 mai 1874, DP
1874, I, 412, rap. Connely : « Ce principe admis par notre Ancien droit, n’a pas cessé d’être en
vigueur depuis la promulgation du Code civil ».
(590) C. pr. civ. anc., art. 1041 : à compter 1er juill. 1807, « toutes lois, coutumes, usages et
règlements relatifs à la procédure civile, seront abrogés ».
(591) Cass. civ., 21 brumaire an XII, in MERLIN, Recueil alphabétique des questions de droit, 4e éd.,
1829, t. XII, Vo Prescription, § XV, p. 47 : la Cour opère ici un revirement remarquable, cinq mois
avant la L. 30 ventôse an XII ; Cass. req., 6 avr. 1831, DP 1831, 1, 137 ; Jur. gén., vo Droit maritime,
no 1843, p. 647 : « bien que la maxime qu’on ne plaide pas par procureur ne soit littéralement
écrite dans aucune disposition du Code de procédure civile, néanmoins cette maxime, consacrée
dans plusieurs textes du droit romain [...] a constamment été maintenue par la jurisprudence tant
antérieurement que postérieurement à la législation nouvelle ».
(592) A. de TOCQUEVILLE, L’Ancien Régime et la Révolution, 1856.
(593) A. ESMEIN, « L’originalité du Code civil », in Le Code civil 1804-1904. Livre du centenaire,
1904, t. I, p. 5, spéc. p. 16 : les rédacteurs du Code « n’ont guère créé ; dégageant seulement de
temps à autre un résultat qui était seulement en germe dans le droit antérieur ou généralisant
quelque règle particulariste, comme dans les articles 1138 et 2279 ; mais ils ont tout mis à sa
place et au vrai point. Ils ont dosé les éléments divers avec un coup d’œil sûr et une main habile ».
Adde : J.-Ph. LÉVY, « Courants dominants et courants secondaires dans l’évolution du droit », Études
J. Imbert, PUF, 1989, p. 365.
(594) J. CARBONNIER, « Le Code civil », Écrits, PUF, 2008, p. 662, spéc. p. 679.
(595) V. supra, no 100.
(596) GAÏUS, Institutes, I, 8 : « De juris divisione. Omne autem jus quo utimur vel ad personas
pertinet vel ad res vel ad actiones » (Division du droit. Tout le droit que nous utilisons s’applique
aux personnes, aux choses ou aux actions). Adde M. VILLEY, Leçons d’histoire de la philosophie du
droit, Dalloz, 2e éd., 1962, p. 167-168 : « Le droit décrit la vie juridique comme une action
dramatique, examinant successivement les acteurs, les décors et les mouvements de scène » (mais
Michel Villey jugeait abusif le rapprochement opéré entre les plans de Gaïus et celui du Code civil
car le droit romain n’avait pas l’idéologie rationaliste et individualiste qui, à ses yeux, imprègne le
Code civil). La différence majeure tient à la troisième partie : non plus les actions (la procédure)
mais les actes juridiques, entendus comme une manière d’acquérir la propriété. Le plan est plus
concret et plus systématique mais le troisième livre devient démesuré.
(597) Les Institutes (Institutiones, de instituo, ere = établir, instruire) étaient des manuels simples,
destinés à l’enseignement, contenant une étude d’ensemble du droit privé romain. Les Institutes de
Gaïus (IIe siècle ap. J.-C.) ont largement inspiré celles de Justinien (VIe siècle ap. J.-C.).
(598) Comp. Ph. RÉMY, « La recodification civile », Droits 1997, no 26, p. 3.
(599) J. BENTHAM, Traité de législation civile et pénale, trad. E. Dumont, An X (1802), t. I, p. 146 :
« Un corps de lois est comme une vaste forêt ; mieux il est percé, plus il est connu ». Jeremy
Bentham (1748-1832) dénonça les inconvénients des lois non écrites et souhaita un corps de lois
complet (droit « intérieur » et droit des gens ; droit pénal et droit civil) qui fût l’œuvre d’un seul
homme, jusqu’à un code universel dénommé Pannomion. Bentham écrira même au Président des
États-Unis Madison pour lui proposer un code à la française. Mais, mise à part la Louisiane (qui se
dota en 1808 d’un Code civil sous l’influence française), le courant de pensées favorable à la
codification restera superficiel. Il connaîtra en revanche un essor spectaculaire au XXe siècle lors de
la rédaction du Restatement of the Law, entre 1923 et 1944, un vaste ensemble d’ouvrages
doctrinaux (les Restatements) présentant les règles des Common Law d’État sous une forme
systématique et uniforme (Restatement of the Law of Conflict of Laws, Restatement of the Law of
Contracts, Restatement of the Law of Property, Restatement of the Law of Torts etc.). D’autres
séries de Restatements suivront.
(600) Les Codes civils italien (1865), roumain (1865), égyptien (1875), espagnol (1888), de
plusieurs pays d’Amérique latine (Argentine, 1869 ; Paraguay, 1889 ; Uruguay, 1893) et même thaï
(1925) ou, en partie, nippon (1890) prirent pour modèle le Code civil. Le Code civil allemand
(1900) puis le Code civil suisse (1907) fourniront ensuite des modèles concurrents (Brésil et
Venezuela, 1916 ; Mexique, 1926 ; Pérou, 1936). Biblio. sélective sur la diffusion du Code français :
Le Code civil 1804-1904. Livre du centenaire, t. II, Le Code civil à l’étranger, 1904 ; Code civil et
modèles. Des modèles du Code au Code comme modèle, dir. Th. Revet, LGDJ, 2005, spéc. p. 437 s.
(en Belgique, Amérique latine, au Liban, Québec, en Afrique francophone) ; Le Code civil 1804-
2004. Livre du bicentenaire, Dalloz, Litec, 2004, spéc. p. 477 s. ; Université Panthéon-Assas (Paris
II), 1804-2004. Le Code civil. Un passé, un présent, un avenir, Dalloz, 2004, p. 789 s. ; Le Code
Napoléon, un ancêtre vénéré ?, Mélanges J. Vanderlinden, Bruylant, 2004.
(601) Trois auteurs entreprirent même de le mettre en vers, au XIXe siècle (A. LECA, La lyre de Thémis
ou la poésie du droit, PUAM, 2011). Le résultat a été bien moins clair que la prose originale.
(602) Biblio. (ouvrages collectifs parus à l’occasion du bicentenaire) : Université Panthéon-Assas
(Paris II), 1804-2004. Le Code civil. Un passé, un présent, un avenir, Dalloz, 2004 ; Le Code civil
1804-2004. Livre du bicentenaire, Dalloz, Litec, 2004 ; Le discours et le Code. Portalis, deux
siècles après le Code Napoléon, Litec, 2004 ; Pouvoirs 2003, no 107, « Le Code civil ».
(603) Ph. MALAURIE, « L’utopie et le bicentenaire du Code civil », in 1804-2004. Le Code civil. Un
passé, un présent, un avenir, Dalloz, 2004, p. 1, qui évoque les mythes du caractère populaire du
droit, de la sécurité juridique, de la perfection, de l’esprit de compromis incarnés par le Code ; mais
« l’utopie n’est ni un mal ni un bien : elle est toujours une attente ».
(604) V. infra, no 138.
(605) V. infra, nos 340 s.
(606) Ord. 17 juill. 1816 de Louis XVIII : « Nous sommes trop convaincus des maux que
l’instabilité de la législation peut causer dans un État pour songer à une révision générale des
cinq codes qui étaient en vigueur dans notre royaume au moment où nous avons donné à nos
peuples la charte constitutionnelle ».
(607) Ex. : H. de BALZAC, Le curé du village : « Vous avez mis le doigt sur la grande plaie de la
France, reprit le juge de paix. La cause du mal gît dans le titre des successions du Code civil, qui
ordonne le partage égal des biens. Là est le pilon dont le jeu perpétuel émiette le territoire,
individualise les fortunes en leur ôtant la stabilité et qui, décomposant sans recomposer jamais,
finira par tuer la France ».
(608) E. GAUDEMET, L’interprétation du Code civil en France depuis 1804, Sirey, 1935. A.-
J. ARNAUD, Les juristes face à la société, du XIXe siècle à nos jours, PUF, 1975, qui reprend les
analyses de Gaudemet en y plaquant ses convictions marxistes : les juristes du début du XIXe siècle
auraient été des bourgeois qui auraient protégé les intérêts de leur classe, etc. V. la réplique de
Ph. RÉMY (« Éloge de l’Exégèse », RRJ 1982, p. 254 et Droits 1985, t. I, p. 115) : « Et c’est en effet
un truisme de dire qu’un professeur de Code Napoléon, doyen d’une Faculté de province et
bâtonnier de l’Ordre des avocats à la fois (Demolombe), est un “bourgeois” ; le même qualificatif
s’applique, tout aussi évidemment, à un président de la Cour de cassation. Mais un biographe
scrupuleux fera aussi remarquer que Delvincourt, premier vrai doyen de la Faculté de droit de
Paris, commença sa carrière comme employé à la comptabilité de la marine pendant douze ans ;
que Bugnet, qui a passé dans la légende comme l’archétype de l’Exégèse du milieu du XIXe siècle,
fut d’abord garçon vacher en Franche-Comté, ce qui ne l’empêcha pas d’être agrégé à 28 ans ;
que Troplong qui présidera la Cour de cassation sous le IIe Empire, fut un étudiant pauvre, dont le
portrait, dira Gaudemet, aurait pu tenter la plume de Balzac (parce qu’il préférait plutôt lire que
dîner). Il y a donc “bourgeois” et “bourgeois” ».
(609) V. infra, no 410.
(610) G. ANTONETTI, « La faculté de droit de Paris à l’époque où Boissonade y faisait ses études »,
RID comp. 1991, p. 333.
(611) Auteur d’un vaste Répertoire universel et raisonné de jurisprudence (36 vol., 5e éd., 1825-
1828) et d’un Recueil alphabétique des questions de droit (an XI, 4e éd., 1828-1830).
(612) L. GRUFFY, La vie et l’œuvre juridique de Merlin de Douai, th. Paris, 1934 ; H. LEUWERS, Un
juriste en politique. Merlin de Douai (1754-1838), Artois Presse Université, 1996. Cf.
E. GAUDEMET, art. préc., spéc. p. 19 : « Merlin était un admirable juriste, mais il n’était que cela. Je
veux dire que l’application des principes, leur adaptation aux cas concrets, l’intéressait seule.
Quant aux principes eux-mêmes, il les accepte passivement, sans critique, tels que son temps les
lui offre. Et si son temps change, il change avec le temps. “Je suis jurisconsulte, écrit-il dans un
de ses premiers ouvrages, je dois donc parler d’après les principes”. Entendez par là qu’il
s’interdit de les discuter ».
(613) O. JOUANJAN, Vº « École historique du droit, Pandectisme et codification en Allemagne
(XIXe siècle) », in Dictionnaire de la culture juridique, Lamy-PUF, 2003, p. 571.
(614) Sur ce courant de pensées, v. aussi infra, no 135.
(615) Cette expression est de G. F. PUCHTA dans son ouvrage Das Gewohnheitsrecht (Le droit
coutumier), Erlangen, 1828-1838, L. II, Chap. 2, § 1. Savigny la reprend dans son Traité de droit
romain (System des heutigen römischen Rechts. Sachen und Quellenregister von Heuser, Berlin,
1840-1850, trad. Guenoux, 1re éd., 1841-1856, 2e éd., 1855-1860, t. I, 1855, p. 14) : « C’est dans la
commune conscience du peuple que vit le droit positif ; aussi peut-on l’appeler le droit du peuple.
[...] Le droit positif sort de cet esprit général qui anime tous les membres d’une nation » ; p. 38 :
« la loi est l’expression du droit populaire. [...] placé au centre de la nation, (le législateur) en
réfléchit l’esprit, les opinions, les besoins, et doit être regardé comme le véritable représentant de
l’esprit national ».
(616) F. C. von SAVIGNY, Vom Beruf unserer Zeit für Gesetzgebung und Rechtswissenschaft (De la
vocation de notre époque pour la législation et la science du droit), publié en 1814 à Heidelberg dans
sa revue Zeitschrift für geschichtliche Rechtswissenschaft, 1814, t. I, p. 6, trad. E. Laboulaye in
Histoire du droit de la propriété foncière, 1839 et trad. A. Dufour, PUF, 2006, Préface : « L’école
historique admet que la substance du droit est donnée par le passé tout entier d’une nation, non
point de manière arbitraire et déterminée par le hasard seul, mais sortant des entrailles même de
la nation et de son histoire ». V. aussi son Histoire du droit romain au Moyen Âge (Geschichte des
römischen Rechts in Mittelalter), 7 vol., Heidelberg, 1834-1851, trad. Ch. Guenoux. Adde
A. DUFOUR, « Rationnel et irrationnel dans l’École du droit historique », Arch. phil. dr., t. XXIII,
Sirey, 1978, p. 161 ; du même auteur, La théorie des sources du Droit dans l’École du droit
historique, Arch. phil. dr., t. XXVII, Sirey, 1982, p. 98 ; J. GAUDEMET, « Histoire et système dans la
méthode de Savigny », in Sociologie historique du droit, PUF, 2000, p. 21.
(617) Sur cette critique de la codification, v. infra, no 135.
(618) A. F. THIBAUT, Über die Nothwendigkeit eines allgemeinen bürgerlichen Rechts für
Deutschland (Sur la nécessité d’un droit civil général pour l’Allemagne), Heidelberg, 1814
(67 pages). Le pamphlet en réponse de Savigny (le « Vom Beruf... », précité) paraît la même année
dans la même ville (v. supra).
(619) À partir des années 1830-1840, l’École historique se scinde entre germanistes et romanistes.
Les premiers s’attachent au droit (et à la patrie) germanique (tels le linguiste Jacob Grimm ou
Georg Beseler), les seconds au droit romain (tels G. Hugo, Savigny puis son disciple Puchta qui se
rapproche des pandectistes). Sur ces juristes, cf. J.-M. TRIGEAUD, « Notices pour l’histoire de la
science juridique », Rev. hist. fac. dr. 1987, no 5, p. 125 et 1988, no 8, p. 205.
(620) Les Pandectes désignaient la compilation du droit romain ordonnée par Justinien (v. supra,
no 91).
(621) J. HUMMEL, « La volonté dans la pensée juridique de Jhering », Droits 1999, no 28, p 71.
(622) R. von IHERING, L’esprit du droit romain dans les diverses phases de son développement, 4
vol., t. I, 1873, trad. sur la 3e éd. par O. de Meulenaere, 1877 (rééd. Forni Editore Bologna, 2004)
spéc. § 1, p. 2 : « Un seul mot suffit pour définir toute l’importance et la mission de Rome dans
l’histoire universelle : Rome représente le triomphe de l’idée d’universalité sur le principe des
nationalités » ; § 1, p. 14 : « Dans le fond comme dans la forme, toutes les législations modernes
se basent sur le droit romain : il est devenu pour le monde moderne, comme le christianisme,
comme la littérature et l’art grec et romain, un élément de civilisation. Son influence n’est
nullement restreinte aux institutions que nous avons empruntées au droit romain. Notre pensée
juridique, notre méthode, notre forme d’intuition, toute notre éducation juridique, en un mot, sont
devenues romaines ». Cf. J. GAUDEMET, « Organicisme et évolution dans la conception de l’histoire
du droit chez Ihering », in Sociologie historique du droit, PUF, 2000, p. 37 (Ihering reste néanmoins
fidèle à la vision organiciste – biologique et anatomique – du droit, fort en vogue à cette époque).
(623) O. JOUANJAN, « Savigny et le “tournant philologique” de la pensée allemande : pour une lecture
métaphysique de la science historique du droit », in Études G. Timsit, Bruylant, 2004, p. 108.
(624) R. von IHERING, L’évolution du droit (Der Zweck im Recht, 1892), trad. O. de Meulenaere,
1901. Sur la pensée de Ihering, v. supra, no 1 et no 10, au sujet de la force et de la lutte dans le droit ;
no 51 et infra, no 135, sur sa définition du droit subjectif et la notion de but ou d’intérêt.
(625) J. HUMMEL, « La codification en Allemagne (XIXe-XXe siècles) : une cristallisation du droit
national entre romanité et germanité », RHD fr. étr. 2007, p. 105.
(626) Z. KRYSUTUFEK, « La querelle entre Savigny et Thibaut », RHD 1966, p. 59, spéc. conclusion :
« La renommée de Savigny estompe complètement le nom de Thibaut et pourtant ce fut l’idée de
Thibaut qui, en fin de compte, emporta la victoire ». La pensée historiciste, critiquée par Hegel, n’a
guère eu de postérité en Allemagne. Cf. J. HUMMEL, Vo « Allemagne (Doctrines allemandes de l’État
et du droit de Hegel à Jellinek) », in Dictionnaire de la culture juridique, Lamy-PUF, 2003, p. 38.
(627) MARCADÉ, Explication théorique et pratique du Code Napoléon, t. I, 1838, Préface, p. XV :
« Dans la méthode exégétique, on suit le texte pas à pas ; on dissèque chacun des articles pour
l’expliquer phrase par phrase, mot par mot ; on précise par ce qui précède et par ce qui suit le
sens et la partie de chaque proposition, de chaque terme, et l’on en fait remarquer la justesse ou
l’inexactitude, l’utilité ou l’insignifiance ; puis, quand on a compris cet article en lui-même, on
étudie son harmonie ou sa discordance avec les autres articles qui s’y réfèrent, on en déduit les
conséquences, on en signale les lacunes ».
(628) Ex. : MOURLON, Répétitions écrites sur le Code civil, 1872, t. I, p. 59 : « Rien n’est au-dessus
de la loi et c’est prévariquer qu’en éluder les dispositions sous prétexte que l’équité naturelle y
résiste. En jurisprudence, il n’y a pas, il ne peut y avoir de raison plus raisonnable, d’équité plus
équitable que la raison ou l’équité de la loi ». Cette diatribe n’avait rien de très original (v. déjà
chez D’Aguesseau, supra, no 42 en note) : il n’y a pas lieu d’en faire le trait caractéristique d’une
prétendue école de pensée.
(629) Selon la formule prêtée à Bugnet, professeur à la faculté de droit de Paris vers 1870 : « Je ne
connais pas le droit civil, je n’enseigne que le Code Napoléon ».
(630) Critique émanant notamment de : Fr. GÉNY, Méthode d’interprétation et sources en droit privé
positif, préf. R. Saleilles, t. I, 1re éd., 1899, et 2e éd., 1954 [réédition LGDJ, 1996], désireux de
mieux asseoir sa propre méthode d’interprétation (v. infra, no 137) ; J. BONNECASE, « L’École de
l’exégèse en droit civil. Les traits distinctifs de sa doctrine et de ses méthodes d’après la profession
de foi de ses plus illustres représentants », Revue générale du droit et de la législation 1918, p. 212
et éd. de Boccard, 2e éd., 1924 ; du même auteur, La pensée juridique française de 1804 à l’heure
présente. Ses variations et ses traits essentiels, Delmas, t. I, 1933. L. HUSSON, « Analyse critique de
l’école de l’exégèse », Arch. phil. dr., 1972, p. 115 ; du même auteur, « Examen critique des assises
doctrinales de la méthode de l’exégèse », RTD civ. 1976, p. 431.
(631) Ph. RÉMY, « Éloge de l’Exégèse », RRJ 1982, p. 254 et Droits 1985, t. I, p. 115, qui montre la
vitalité, la diversité de méthodes et le libéralisme qui animent les auteurs de cette époque. V. aussi
A. DESRAYAUD, « Notes historiques. École de l’exégèse et interprétations doctrinales de
l’article 1137 », RTD civ. 1993, p. 535, conclusion : « Nombre d’auteurs se référaient explicitement
au droit naturel, à l’équité et à la morale et n’hésitaient pas à s’en remettre à la conviction du
juge. Et il s’en faut de beaucoup que tous les juristes se découvrent comme les ministres d’une
orthodoxie légaliste et étatiste ».
(632) Ex. : TOULLIER, Le droit civil français suivant l’ordre du Code civil, t. 1er, 1re éd., 1811,
Préface, p. iv : « Ma méthode n’est point celle des hommes savants qui m’ont précédé. J’ai
d’abord cherché les principes de la théorie, et j’ai tâché de les puiser, non seulement dans
l’histoire, dans la comparaison de nos nouvelles lois avec les anciennes, avec les lois romaines, et
même quelquefois avec les législations voisines ; mais encore, suivant le précepte d’un des plus
beaux génies de l’ancienne Rome (Cicéron), jusque dans leur source première, dans le sein de la
vraie philosophie. [...] Après l’établissement des principes, je suis entré dans le développement
des conséquences, et j’ai donné des détails fort étendus sur leur application aux cas particuliers :
car la jurisprudence n’est rien sans la pratique, et la pratique sans la théorie n’est qu’une routine
aveugle qui égare ». Sur le traité de Toullier (14 volumes, 1811-1831) et l’éclectisme de ses
sources, cf. S. BLOQUET, RTD civ. 2015, p. 475.
(633) Les premiers exégètes (Maleville, Toullier, Delvincourt...) étaient plus attachés à l’Ancien
droit que le furent leurs successeurs (Delvincourt, Demante, Duranton, Demolombe, Larombière,
Mourlon...). C’est une question de génération. Toullier (1752-1835), par exemple, était professeur à
la faculté de droit de Rennes depuis 1778, soit avant même la Révolution, et il avait plus de
cinquante ans lorsque fut promulgué le Code civil.
(634) TOULLIER et DUVERGIER, Le droit civil français suivant l’ordre du Code, t. XX, 1839, no 382,
p. 448. V., dans le même sens, TROPLONG, Du contrat de société civil ou commercial, 1843, no 58,
p. 75. Sur l’hétéroclisme de la méthode de Troplong (devenu Premier président de la Cour de
cassation en 1852) qui rejette l’Exégèse, cf. D. HOUTCIEFF, « Sic transit gloria mundi. Regards
jubilaires sur l’œuvre de Raymond-Théodore Troplong », RRJ 2003, p. 2277.
(635) Cass. 2e civ., 28 janv. 1954, cité infra, no 413.
(636) F. LAURENT, Principes de droit civil français, 3e éd., 1878, t. XX, no 639, p. 693.
(637) Civiliste belge, Laurent fustigea les libertés prises par les « exégètes » : « Les interprètes ont
oublié qu’il y a un texte qui les lie, dont ils sont les esclaves. J’ai écrit trente-deux volumes pour
le leur rappeler [...]. Il est certain que ce n’est pas le respect du texte qui règne dans la doctrine et
dans la jurisprudence. [...] Dans mon long travail sur les “Principes de droit civil”, j’ai constaté,
à chaque page, pour ainsi dire, que les auteurs et les magistrats procèdent comme s’ils étaient les
successeurs d’Ulpien et de Pothier : ils font la loi, au lieu de se contenter de l’interpréter. [...]
c’est dans la loi que les principes ont leur fondement ; ils ne sont autre chose que les dispositions
du code, ou les règles qui en découlent » (Cours élémentaire de droit civil, t. I, 1878, Préface, p. 5.
Les 32 volumes auxquels se réfère Laurent sont ses Principes de droit civil français, 3e éd., 1878).
(638) V. par ex. : A. DURANTON, Cours de droit français suivant le Code civil, 2e éd., t. II, 1828,
no 462, p. 426 ; Ch. DEMOLOMBE, Cours de Code Napoléon, 4e éd., t. XXI, 1872, no 220, p. 213 ;
LAROMBIÈRE, Théorie et pratique des obligations, nouv. éd., t. IV, 1885, art. 1317, no 7, p. 475.
(639) Fr. GÉNY, Méthode d’interprétation..., op. cit., t. I, nos 21-22, p. 42-43.
(640) V. aussi MARCADÉ, « Le Code civil et ses interprètes », Rev. crit. lég. jur. 1846, p. 284, qui
prône déjà une libre interprétation du Code Napoléon. J. BONNECASE, La Pensée juridique française
de 1804 à l’heure présente, Delmas, 1933. Ph. MALAURIE, Anthologie de la pensée juridique, Cujas,
2e éd., 2001, spéc. Vº Demolombe, p. 186-188.
(641) Charles-Antoine AUBRY et Frédéric-Charles RAU, Cours de droit civil français traduit de
l’allemand de M. C. S. Zachariæ revu et augmenté avec l’agrément de l’auteur, 1re éd., 5 vol.,
1839-1846. Ces « traducteurs » s’émanciperont vite du texte allemand original (celui du Handbuch
des französichen Civilrechts, en deux volumes, de Carl Salomon Zachariæ von Lingenthal, paru en
1808 à Heidelberg, dont Aubry et Rau traduisent la 4e éd. de 1837) pour faire de leur Cours de droit
civil français un traité original.
(642) Notamment à propos de leur théorie du patrimoine : « Le Code Napoléon n’a point consacré
de titre particulier aux généralités sur le patrimoine. Les principes que nous allons développer
[...] se trouvent disséminés dans ce Code » (Ch. AUBRY et Ch. RAU, op. cit., 3e éd., 1857, t. V, § 573,
p. 1, no 1). A. SÉRIAUX, « Heurs et malheurs de l’esprit de système : la théorie du patrimoine d’Aubry
et Rau », RRJ 2007, p. 89.
(643) Pour un panorama biographique des exégètes, professeurs ou praticiens, Ph. JESTAZ et
Ch. JAMIN, La doctrine, Dalloz, 2004, spéc. p. 73 s.
(644) E. GAUDEMET, L’interprétation du Code civil en France depuis 1804, Sirey, 1935, spéc. p. 26 :
« Nous savons que Proudhon (professeur à Dijon, mort en 1838, dont le traité sur l’usufruit fut la
grande réussite) lors de ses débuts en l’an V, excita par des déclarations spiritualistes faites au
cours d’une introduction philosophique à ses leçons des susceptibilités qui pouvaient devenir
dangereuses. On le prévint. Il répondit en affirmant plus haut ses convictions et s’imposa à ses
adversaires [...]. (Nous savons aussi que Toullier, mort en 1835, doyen de la Faculté de droit de
Rennes), en face des inspecteurs de Napoléon ou des censeurs de Louis XVIII, sut maintenir haute
et ferme sa volonté d’indépendance scientifique et n’hésita pas à encourir ainsi la suspension de
ses fonctions de doyen. Tous deux ont par là contribué à établir, dès les débuts de nos Facultés de
droit, cette tradition de dignité morale qui est plus précieuse qu’une doctrine juridique et qui fait
qu’aujourd’hui, après tant de progrès des méthodes, nous devons encore être fiers de nous dire
leurs héritiers ».
(645) Ph. RÉMY, « “La Thémis” et le droit naturel », Rev. hist. fac. dr. 1987, no 4, p. 145.
(646) J. POUMAREDE, « Défense et illustration de la coutume au temps de l’exégèse (Les débuts de
l’école française du droit historique) », in La coutume et la loi. Études d’un conflit, PU de Lyon,
1985, p. 95.
(647) Biblio. sélective : « Les revues juridiques du XXe au XXIe siècle », RTD civ. 2002, p. 643 et s.,
notamment Chr. JAMIN, p. 646 et J.-L. HALPÉRIN, p. 656 ; N. HAKIM, L’autorité de la doctrine civiliste
française au XIXe siècle, LGDJ, 2002 ; Paris, capitale juridique (1804-1950). Étude de socio-
histoire sur la Faculté de droit de Paris, dir. J.-L. Halpérin, éditions rue d’Ulm, 2011. Sur le rôle de
J.-E. Labbé (annotateur d’arrêts dans les revues) et de M. Planiol, v. infra, respectivement, nos 421
et 434.
(648) L’Interessenjurisprudenz est la « science des intérêts juridiquement protégés », incarnée par la
dernière œuvre de Ihering (R. von IHERING, L’évolution du droit [Der Zweck im Recht, 1892], trad.
O. de Meulenaere, 1901). Selon Ihering, les hommes poursuivent avant tout un intérêt propre et
égoïste ; ils s’allient entre eux par le commerce juridique, que l’État vient garantir par la contrainte ;
celle-ci (relevant du droit objectif) s’exerce par l’intermédiaire du juge, par le moyen d’un procès
visant à la défense des droits subjectifs ; la justice est donc judiciaire et contentieuse, et le juge un
arbitre de conflits d’intérêts. Sur Ihering en général, v. supra, no 133.
(649) V. supra, no 133.
(650) Le Freirechtslehre ou « mouvement du droit libre » était représenté par Ehrlich (Freie
Rechtsfindung und freie Rechtswissenschaft, 1903), Stampe (Freirechtsbewegung, 1911) et
Kantorowicz (Der Kampf um die Rechtswissenschaft, Le combat pour la science du droit, 1906).
Pour le Freirechtslehre, la logique formelle, rationnelle et déductive (cultivée par la
Begriffsjurisprudenz depuis Puchta. V. supra, no 133), est une fiction. Lorsque la loi produit un effet
néfaste (Massenkalamität, une calamité générale, écrit Stampe), le juge est libre de l’ignorer et de la
modifier en recourant à des concepts issus de l’histoire, de l’économie ou des sciences sociales
(psychologie, sociologie). Gény s’inscrit dans cette ligne mais sans lancer un appel aussi radical à la
désobéissance à la loi (v. ci-après).
(651) M. VILLEY, Philosophie du droit, Dalloz, t. I, 4e éd., 1986 (rééd. 2001), no 224.
(652) V. infra, no 390.
(653) V. infra, no 286 et la note. Les réalistes les plus connus furent B. N. Cardozo, L. D. Brandeis,
F. Frankfurter, K. N. Leewellyn ou Jerome Frank. Cf. F. MICHAUT, Vo « États-Unis (Grands courants de
la pensée juridique américaine contemporaine) », in Dictionnaire de la culture juridique, Lamy-
PUF, 2003, p. 661 s.
(654) Fr. GÉNY, Méthode d’interprétation et sources en doit privé positif. Essai critique, préf.
R. Saleilles, 1re éd., 1899 (2e éd., 1954, réédition LGDJ, 1996), spéc. no 183, p. 221 ; du même
auteur, Science et technique en droit privé positif. Nouvelle contribution à la critique de la
méthode juridique, LGDJ, 1922-1924. Adde N. DISSAUX, « L’influence de Bergson sur les idées du
doyen Gény », RTD civ. 2008, p. 417. Gény (1861-1959) est contemporain – et non réellement
disciple – de Bergson (1859-1941) dont le concept d’« intuition » a seulement conforté la distinction
du civiliste entre le « donné » et le « construit » (v. supra, no 37).
(655) M. PLANIOL, Traité élémentaire de droit civil, 1re éd., 1900-1901 (G. Ripert collabora aux
10e et 11e éd. puis refondit le Traité avec J. Boulanger). L’ouvrage marque, avec celui de Gény, la
naissance de la doctrine moderne. Adde Ph. RÉMY, « Planiol : un civiliste à la Belle Époque », RTD
civ. 2002, p. 31. Civiliste, historien, libéral, passeur des solutions du BGB, Planiol est un partisan de
la codification conçue comme un outil pratique et un positiviste. Il réconcilie l’École et le Palais
(v. infra, no 434).
(656) A. ESMEIN, « La jurisprudence et la doctrine », RTD civ. 1902, p. 5.
(657) Dans sa préface à la Méthode [...] de Gény, Saleilles (1855-1912) marque sa différence : « Je
ne saurais mieux finir que par cette forte devise, inspirée d’un mot analogue d’Ihering, et autour
de laquelle converge, qu’enveloppe ou que développe, comme l’on préfère, tout le livre de
M. Gény. Par le Code civil, mais au-delà du Code civil. Je serais de ceux peut-être qui en eussent
volontiers retourné les termes : au-delà du Code civil mais par le Code civil ». Adde R. SALEILLES,
« École historique et droit naturel d’après quelques ouvrages récents », RTD civ. 1902, p. 80
(commentant les ouvrages de Stammler, Gény, Duguit et Savigny) ; M. XIFARAS, « La veritas juris
selon Raymond Saleilles. Remarques sur un projet de restauration du juridisme », Droits 2008, nº 47,
p. 77.
(658) R. Demogue (1872-1938) et H. Capitant (1865-1937) seront animés par ce même souci
d’étudier le droit vivant, au plus près des réalités pratiques, sociales et économiques, notamment au
travers de la jurisprudence. Capitant cultive davantage l’esprit de système (comme le ferait un
exégète) tandis que Demogue cède aux attraits du « solidarisme » (Chr. JAMIN, « Henri Capitant et
René Demogue : notation sur l’actualité d’un dialogue doctrinal », Mélanges F. Terré, L’avenir du
droit, Dalloz, 1999, p. 125 ; du même auteur, « Le rendez-vous manqué des civilistes français avec le
réalisme juridique », Droits 2010, no 51, p. 137, sur R. Saleilles, R. Demogue et G. Ripert). Adde
N. OLSZAK, « L’utilisation politique du droit des obligations dans la pensée de la belle époque », RRJ
1995, p. 31 (solidarisme d’A. Fouillée et de L. Bourgeois ; socialisme juridique d’E. Lévy).
(659) Le renouveau de la doctrine française. Les grands auteurs de la pensée juridique au
tournant du XXe siècle, Dalloz, 2009 (sur H. Capitant, Fr. Gény, H. Lévy-Ullmann, P. Pic, E.-E.
Thaller, H. Berthélémy, L. Duguit, A. Esmein, M. Hauriou et L. Michoud). – Ph. MALAURIE,
Anthologie de la pensée juridique, Cujas, 2e éd., 2001.
(660) D. HALÉVY, La fin des notables, t. II, La république des ducs, Grasset, 1937, p. 370 : « On
peut dire, en termes sommaires, qu’à travers les régimes divers des trois premiers quarts du
XIX e siècle, le noble avait gardé son rang au village, comme il avait gardé, comme il gardera
longtemps encore, sa place à l’église : la première, au fréquent dépit du meilleur bourgeois, qui
n’avait droit qu’à la deuxième. Nous avons dit : le noble ; nous dirons aussi bien : le notable, car
le possesseur du château acquerrait, par usage, le droit à occuper la place [...]. La révolution des
mairies (résultant des élections de 1874) affecte le tissu même de la société, elle atteint et change
les mœurs. De ce changement donnons un signe. Il y a cinquante ans, dans toutes les campagnes,
le paysan saluait le notable. Où est gardée la tradition de ce que Montaigne appelait la
“bonnetade” ? Aujourd’hui, lorsque le notable croise le paysan, il arrive que sa main hésite et que
le paysan s’amuse à le faire saluer d’abord ».
(661) V. infra, no 374.
(662) R. CABRILLAC et J.-B. SEUBE, « Pitié pour le Code civil ! », D. 2003, chr. 1058.
(663) G. TARDE, Les transformations du droit. Étude sociologique, 1893, Berg International, 1994.
(664) Sur cette période de la jurisprudence de la Cour de cassation, v. infra, no 412.
(665) Biblio. sélective sur les codifications : R. CABRILLAC, Les codifications, PUF, coll. Droit,
éthique et société, 2002. La codification et l’évolution du droit, XVIIIe Congrès de l’institut
international de Droit d’expression française, Revue juridique et politique. Indépendance et
Coopération 1986 (v. not. le rapport historique de J. GAUDEMET, p. 239, repris dans : Sociologie
historique du droit, PUF, 2000, p. 121). A. VIANDIER, Recherches de légistique comparée, Springer-
Verlag, 1988, p. 35 et s. B. OPPETIT, Essai sur la codification, PUF, 1998. La codification, Droits
1996, no 24, Droits 1997, no 26 et Droits 1998, no 27 ; Le Code Napoléon, un ancêtre vénéré ?,
Mélanges offerts à J. Vanderlinden, Bruylant, 2004 (sur des expériences étrangères) ; Qu’en est-il
de la simplification du droit ?, Presses de l’université de Toulouse 1 Capitole, 2010 (not. sur la
codification à droit constant, P. DEUMIER, p. 53).
(666) G. CORNU, « La refonte dans le Code civil français du droit des personnes et de la famille », in
La codification et l’évolution du droit, op. cit., p. 674.
(667) R. SAVATIER, « L’inflation législative et l’indigestion du corps social », D. 1977, chr. 43, qui
dénonce la complexité croissante des lois, l’invasion des règlements, le désordre des lois de
procédure, la prolifération du droit social et du droit fiscal, l’instabilité de la législation
économique... J. CARBONNIER, « L’inflation des lois », in Essais sur les lois, Defrénois, 1979, p. 271 ;
La loi, Revue Pouvoirs, no 114, 2005. Sur la dénonciation de l’excès de lois tout au long de
l’histoire, v. infra, no 261.
(668) B. OPPETIT, « La décodification du droit commercial », Études R. Rodière, Dalloz, 1981,
p. 197 ; du même auteur, « L’expérience française de codification en matière commerciale », D. 1990,
chr. 1 ; F. TERRÉ et A. OUTIN-ADAM, « Codifier est un art difficile (à propos d’un Code de
commerce) », D. 1994, chr. 99.
(669) B. OPPETIT, art. cit.
(670) Ph. RÉMY, « Regards sur le Code », in Le Code civil 1804-2004. Livre du bicentenaire,
Dalloz, Litec, 2004, p. 99.
(671) Sur la politique administrative et législative de « simplification » du droit : M. GAST-MEYER,
« La simplification du droit », RRJ 2005, p. 1183.
(672) H. MOYSAN, « À propos de l’inflation des chiffres mesurant l’inflation des lois », D. 2007, chr.,
3029 (le Conseil d’État a multiplié par 6 le nombre de lois et règlements dans son rapport public
2006 et évalué le nombre de codes à 59 seulement !).
(673) R. CABRILLAC, Les codifications, PUF, 2002, p. 308 : « "Ah, ma pauvre dame, les codes ne sont
plus ce qu’ils étaient ! Il est loin le bon vieux temps du Code civil de 1804", pourrait-on entendre
au café du commerce de la doctrine ».
(674) J.-L. SOURIOUX, « Codification et autres formes de systématisation du droit à l’époque
actuelle », Journées de la Société de législation comparée, 1988, p. 145, spéc. p. 154 (in Écrits du
prof. J.-L. Sourioux, LexisNexis, 2011, p. 247). Adde J. MOREAU et Fr. TERRÉ, « La simplification du
droit », Études offertes à J. Béguin, Litec, 2005, p. 533, dénonçant le « mythe » et le « slogan » de la
simplification du droit.
(675) V. supra, no 123.
(676) Sur cette constante recherche d’unité et ce besoin éternel de sécurité juridique dans l’histoire
du droit et celle de la codification, v. supra, nos 73 et s. Adde R. CABRILLAC, Les codifications, PUF,
2002.
(677) Rapport du Conseil d’État, L’influence internationale du droit français, Doc. fr., 2001, p. 104
(disponible sur http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr).
(678) V. infra, no 142.
(679) Sur cette controverse, N. MOLFESSIS, « Le Code civil et le pullulement des codes », in 1804-
2004. Le Code civil. Un passé, un présent, un avenir, Dalloz, 2004, p. 309.
(680) À l’exception du Code de justice militaire (L. 8 juill. 1965), du Code du service national
(L. 10 juin 1971), du Code de la nationalité (L. 9 janv. 1973).
(681) La partie législative d’une vingtaine de codes fut ainsi validée par le législateur (ex. : la
L. no 58-346 du 3 avril 1958 valide une série de codes, dont le Code rural, né du D. 16 avr. 1955, et
le Code de la famille et de l’aide sociale, né du D. 24 janv. 1956 ; le Code des tribunaux
administratifs, né du D. 13 juill. 1973, fut validé par la L. 16 juin 1976 ; le Code de la Sécurité
sociale, né d’un décret de 1985, fut validé par la L. 30 juill. 1987...).
(682) Par ex., le juge pénal décida que le décret du 15 sept. 1981 portant codification du Livre des
procédures fiscales avait irrégulièrement transféré dans ce code (LPF, art. L. 47) des dispositions
législatives du Code général des impôts sur le contrôle fiscal inopiné (Cass. crim., 23 janv. 1989,
Bull. crim., no 25, précisant ensuite que la loi de validation du 29 déc. 1982 ne rétroagissait pas
avant l’entrée en vigueur dudit décret). Le Conseil d’État rencontra souvent ce type de difficultés, à
propos du Code des communes ou du CGI (cf. R. CHAPUS, Droit administratif général,
Montchrestien, t. I, 15e éd., 2001, no 111-1o).
(683) Le Code rural a connu les trois méthodes de codification : ses Livres II, IV et V, d’origine
réglementaire (1980), furent validés par la L. 15 avril 1991 ; ses Livres I, III, VI et VIII furent
adoptés directement par le Parlement entre 1992 et 1998 ; ses Livres VII et IX résultent d’une
ordonnance du 15 juin 2000 (v. infra, no 142).
(684) Ex. : Codes de déontologie médicale (quatre se sont succédé : D. 27 juin 1947, D. 28 nov.
1955, D. 28 juin 1979, D. 6 sept. 1995), des chirurgiens-dentistes (D. 22 juill. 1967 in C. santé publ.,
art. R. 4127-201 s.), des sages-femmes (D. 30 sept. 1949), des vétérinaires, des architectes, de la
police nationale (D. 18 mars 1986).
(685) G. CORNU, « L’élaboration du Code de procédure civile », Rev. hist. fac. dr. 1995, p. 241.
(686) Ex. : CE, Ass., 4 févr. 1966, JCP G, 1966.II.14610 ; AJDA, 1966, p. 420 : « Le Code de
l’administration communale [...] qui n’a pas été validé (par la loi), n’a pu ni abroger, ni modifier
au fond aucune des dispositions législatives en vigueur au moment de son intervention ».
(687) 1er ex. : CE, Ass., 12 oct. 1979, Rassemblement des nouveaux avocats de France, D. 1979,
606, n. A. Bénabent ; JCP G, 1980, II, 19288, concl. M. Franc, n. J. Boré ; Gaz. Pal. 1980.I.6, n. P.
Julien ; RTD civ. 1980, p. 145, obs. J. Normand ; AJDA 1980, p. 248, n. C. Debouy. Saisi d’un
recours pour excès de pouvoir dirigé contre l’art. 33 D. 5 déc. 1975, qui avait restreint le champ de
l’art. 16 C. pr. civ., le Conseil d’État annula ce premier texte en affirmant que le pouvoir du juge de
relever d’office des moyens de droit (soustrait par ce décret au respect du contradictoire prévu par
l’art. 16) devait « s’exercer dans le respect des principes généraux du droit », notamment du
principe du caractère contradictoire de la procédure. 2e ex. : CE, Ass., 4 oct. 1974, Dame David,
Rec. CE, p. 464, concl. Gentot ; D. 1975, 369, n. J.-M. Auby ; JCP G, 1975, II, 17967, n. R. Drago :
« La publicité des débats judiciaires est un principe général du droit ; il n’appartient, dès lors,
qu’au législateur d’en déterminer, d’en étendre ou d’en restreindre les limites » (annulation de
l’art. 83 D. 20 juill. 1972 restreignant la publicité des débats, dont la teneur dut donc être reprise par
la L. 9 juill. 1975 – modif. l’art. 11, al. 3, L. 5 juill. 1972).
(688) V. à cet égard la circulaire du 30 mai 1996 relative à la codification des textes législatifs et
réglementaires (JO 5 juin 1996, p. 8263 et obs. Chr. Jamin in RTD civ. 1996, p. 732).
(689) CE, 2 avr. 2003, Dr. adm. 8-9/03, comm. 163 (absence du décret d’application prévu par
l’ordonnance).
(690) Cons. const., 23 janv. 1987, décis. no 86-224, Loi transférant à la juridiction judiciaire le
contentieux des décisions du Conseil de la concurrence, consid. 24 ; Trib. conflits, 19 mars 2007,
RJS 2007, no 645.
(691) CE, 27 mai 2002, D. Aff. 2002, 2188 ; RTD civ. 2002, p. 592, obs. N. Molfessis.
(692) Y. GAUDEMET, « Sur l’abus ou sur quelques abus de la législation déléguée », in La confection
de la loi, PUF, 2005, p. 157 (v. aussi in Mélanges P. Pactet, Dalloz, 2003, p. 617). La législation
déléguée (dir. Ph. Lauvau et J. Massot), Soc. de législation comparée, 2014. Le Conseil
constitutionnel considère que « l'urgence est au nombre des justifications que le Gouvernement
peut invoquer pour recourir » à l’art. 38 Const. et qu'en l'espèce, « l'encombrement de l'ordre du
jour parlementaire » l’empêche de réaliser son programme de codification dans des délais
raisonnables (Cons. const., 26 juin 2003, décis. no 2003-473 DC, Rec., p. 382).
(693) Ex. : ord. no 2005-759, 4 juill. 2005, portant réforme de la filiation ; ord. no 2006-346, 23 mars
2006, relative aux sûretés ; ord. nº 2016-131, 10 févr. 2016, portant réforme du droit des contrats, du
régime général des obligations et de la preuve des obligations.
(694) Ex. : ord. no 2003-1235, 22 déc. 2003 supprimant le droit de timbre devant les juridictions
administratives ; ord. nº 2016-520, 28 avr. 2016 relative aux bons de caisse.
(695) Tel est le cas des contraventions de police existantes en toutes matières qui, depuis le nouveau
Code pénal, ressortissent à la compétence du règlement. Sur l’ensemble de ces difficultés, v. A.
LIENHARD et C. RONDEY, « Incidences juridiques et pratiques des codifications à droit constant »,
D. aff. 2000, chr. 521.
(696) L. no 99-1071 du 16 déc. 1999 « portant habilitation du gouvernement à procéder, par
ordonnances, à l’adoption de la partie législative de certains codes ». Cette formule fut reprise et
pérennisée par l’art. 3 de la loi no 2000-321 du 12 avril 2000 « relative aux droits des citoyens dans
leurs relations avec les administrations » : « La codification législative rassemble et classe dans
des codes thématiques l’ensemble des lois en vigueur à la date d’adoption de ces codes. Cette
codification se fait à droit constant, sous réserve des modifications nécessaires pour améliorer la
cohérence rédactionnelle des textes rassemblés, assurer le respect de la hiérarchie des normes et
harmoniser l’état du droit ».
(697) CE, 13 juill. 2006, Dr. adm. 2006, comm. 161 : la loi d’habilitation qui autorise le
gouvernement à abroger des dispositions devenues sans objet ne l’autorise pas à abroger des
dispositions législatives pour les mettre en conformité avec la hiérarchie des normes (not. des
dispositions de forme législative adoptées sur une matière réglementaire).
(698) Cons. const., 16 déc. 1999, décis. no 99-421 DC, JO 22 déc. 1999, p. 19041. obs.
N. Molfessis, RTD civ. 2000, p. 186.
(699) Ord. no 2000-387 du 4 mai 2000, ratifiée par l’art. 31 L. no 2003-591 du 2 juill. 2003.
(700) Ord. no 2000-548 du 15 juin 2000. Il compte environ 2 300 articles. Pour la partie
réglementaire : D. no 2003-461 et no 2003-462, 21 mai 2003 et D. no 2004-802, 29 juill. 2004.
(701) Ord. no 2000-549 du 15 juin 2000 (ratifiée par la L. no 2003-339, 14 avr. 2003) ; D. no 2004-
702 et no 2004-733, 13 juill. 2004.
(702) Ord. no 2000-550 du 15 juin 2000. En réalité, seuls les livres VII et IX ont été adoptés ; les
livres Ier, III et VI ont seulement fait l’objet d’une « mise à jour » conformément à la L. 16 déc. 1999.
Trois livres datent de la L. 15 avril 1991 et quatre autres furent adoptés entre 1992 et 1998.
(703) Ord. no 2000-912 du 18 sept. 2000, ratifiée par l’art. 50 L. no 2003-7 du 3 janv. 2003 (loi
corrigeant en outre 54 bévues de rédaction dans les textes de ce code). Il a fallu attendre sept années
pour que le Code de commerce reçoive sa nouvelle partie réglementaire (D. no 2007-431, 25 mars
2007, qui abroge 90 décrets et 3 lois anciennes).
(704) Ord. no 2000-914 du 18 sept. 2000 (ratifiée par l’art. 31 L. no 2003-591 du 2 juill. 2003). Il
compte environ 975 articles (outre la partie réglementaire : D. no 2005-491, 18 mai 2005 ;
D. no 2005-935, 2 août 2005).
(705) Ord. no 2000-930 du 22 sept. 2000. Il compte 163 articles.
(706) Ord. no 2000-1223 du 14 déc. 2000 (ratifiée par l’art. 31 L. no 2003-591 du 2 juill. 2003) ;
D. no 2005-1007, 2 août 2005.
(707) Ord. no 2000-1249 du 21 déc. 2000. Pour la partie réglementaire : D. no 2004-1136 et no 2004-
1137, 21 oct. 2004 codifiant quelque 175 décrets. Il remplace l’ancien Code de la famille et de l’aide
sociale.
(708) Non sans commettre quelques bévues involontaires. Devinrent ainsi caducs (abrogés mais non
repris, par erreur, dans le nouveau code) l’art. 631 anc. C. com. (fondant la compétence matérielle
des tribunaux de commerce ! V. infra, no 159, en note) et l’art. R. 47, al. 1er, C. trib. (affirmant le
caractère d’ordre public de la compétence territoriale des tribunaux administratifs). Ensuite, certains
textes ont été « oubliés » (ni codifiés ni abrogés), telle la L. 23 juin 1989 sur le courtage matrimonial
qui aurait déjà dû trouver place dans le Code de la consommation. Enfin, des déplacements
intempestifs sont intervenus (ex. : le délit d’usure, réprimé de façon générale par la L. 28 déc. 1966,
s’est trouvé enfermé dans une partie du C. consom. applicable aux seuls prêts consentis à des non-
professionnels).
(709) Trois exemples figurent dans le Code de commerce. 1er ex. : est abrogé et non repris l’art. 194
L. 25 janv. 1985 que le Conseil constitutionnel (Cons. const., 15 mars 1999, décis. no 99-410 DC, réf.
complètes in D. 2000, som. p. 199) avait déclaré contraire à la Constitution mais sans pouvoir le
censurer (le texte étant en vigueur depuis 1986). 2e ex. : l’art. L. 463-7 C. com. exclut la présence des
rapporteurs au délibéré de l’Autorité de la concurrence, conformément à la jurisprudence de la Cour
de cassation fondée sur l’art. 6, § 1, CEDH (Ass. plén., 5 févr. 1999, JCP G, 1999.II.10061 ;
Cass. com., 5 oct. 1999, JCP G, 2000, II, 10255). 3e ex. : l’art. L. 627-1 « ressuscite » l’art. 173
D. 27 déc. 1985 que le Conseil d’État avait déclaré illégal par voie d’exception au motif que cette
disposition (édictant une insaisissabilité des sommes déposées à la Caisse des dépôts et
consignations dans le cadre d’une procédure collective) ressortissait à la compétence du législateur
selon l’art. 34 de la Constitution (CE, 9 févr. 2000, JCP G, 2000.II.10314) ; cette déclaration
d’illégalité n’ayant pas retiré le texte de l’« ordonnancement juridique », sa codification pouvait
intervenir afin d’assurer le respect de la hiérarchie des normes (CE, 27 mai 2002, D. Aff. 2002,
2188).
(710) Ex. : dans le Code de la route, les peines complémentaires ont été harmonisées avec celles du
Code pénal.
(711) Ex. : dans le Code de commerce, les termes « faillite » et « banque » sont remplacés par leur
équivalent moderne (« redressement ou liquidation judiciaires » et « établissement de crédit ») et
les infractions pénales sont rédigées selon le style et d’après les principes généraux du nouveau Code
pénal ; dans le Code de l’action sociale et des familles, furent abrogées des « dispositions mineures
qui n’étaient à l’évidence pas indispensables à la claire exposition du droit » (euphémisme !),
ayant « épuisé leurs effets juridiques » ou qui « figurent selon des rédactions identiques ou plus
actuelles dans d’autres codes » (Rapport au Président de la République, JO 23 déc. 2000,
p. 20467).
(712) Ord. no 2004-178, 20 févr. 2004 (partie législative) ; D. no 2011-573 et no 2011-574, 24 mai
2011 (partie réglementaire).
(713) Ord. no 2004-545, 11 juin 2004.
(714) Ord. no 2004-1391, 20 déc. 2004.
(715) Ord. no 2004-1374, 20 déc. 2004 (partie législative) ; D. no 2011-280, 16 mars 2011 (partie
réglementaire).
(716) Ord. no 2006-673, 8 juin 2006 (partie législative) ; D. no 2008-522, 2 juin 2008 (partie
réglementaire).
(717) Ord. no 2004-1248, 24 nov. 2004 (prise en vertu de la L. no 2003-1119, 26 nov. 2003, art. 92).
(718) Ord. no 2006-460, 21 avr. 2006 (prise en vertu de la L. no 2005-842, 26 juill. 2005, art. 48)
(partie législative) ; D. no 2011-1612, 22 nov. 2011 (partie réglementaire).
(719) Ord. no 2006-460, 1er juin 2006 (prise en vertu de la L. no 2004-1343, 9 déc. 2004) (partie
législative) ; D. no 2007-759, 10 mai 2007 (partie réglementaire). Pour une erreur de codification due
à une abrogation intempestive, cf. B. BOULOC, D. 2008, chr., 1490.
(720) Ord. no 2009-901, 24 juill. 2009 (prise en vertu de la L. no 2009-258, 5 mars 2009, art. 71).
(721) Ord. no 2010-1307, 28 oct. 2010 (prise en vertu de la L. no 2009-526, 12 mai 2009, art. 92),
mod. ord. no 2011-204, 24 févr. 2011 ; D. no 2014-530, 22 mai 2014 (partie réglementaire). La
correction par une seconde ordonnance a été possible car le délai imparti par la loi d’habilitation
n’était pas expiré. La loi du 12 mai 2009 ratifie par ailleurs 52 ordonnances.
(722) Ord. no 2011-91, 20 janv. 2011 (prise en vertu de la L. no 2009-526, 12 mai 2009, art. 92).
(723) Ord. no 2011-504, 9 mai 2011 (prise en vertu de la L. no 2009-526, 12 mai 2009, art. 92).
(724) Ord. no 2011-1895, 19 déc. 2011 (prise en vertu de la L. no 2010-1609, 22 déc. 2010, art. 7) ;
D. no 2012-783, 30 mai 2012 (partie réglementaire).
(725) Ord. no 2012-92, 26 janv. 2012 (prise en vertu de la L. no 2010-874, 27 juill. 2010, art. 69).
(726) Ord. no 2012-351, 12 mars 2012 (prise en vertu de la L. no 2011-267, 14 mars 2011, art. 102) ;
D. nº 2013-1112 et 1113, 4 déc. 2013 (partie réglementaire).
(727) Ord. no 2015-1341, 22 oct. 2015 (prise en vertu de la L. no 2013-1005, 12 nov. 2013, art. 3).
(728) L. no 2008-67, 21 janv. 2008 ratifiant l’ord. no 2007-329 du 12 mars 2007 prise en vertu de la
loi d’habilitation no 2004-1343, 9 déc. 2004 (prorogée par la L. no 2006-1770, 30 déc. 2006). La
partie réglementaire est issue du D. no 2008-244, 7 mars 2008 (dont une centaine d’articles furent
rectifiés par le D. no 2009-289, 13 mars 2009).
(729) B. TEYSSIÉ, « La recodification du droit du travail français : le bal des illusions », Études
B. Oppetit, Litec, 2009, p. 629.
(730) Cité infra, no 279 (v. spéc. Fiche 1.4.2. sur la codification).
(731) Cons. const., 17 janv. 2008, décis. no 2007-561 DC.
(732) Pour une liste, cf. H. MOYSAN, D. 2007, chr., 3029, Annexe 3. L’auteur donne une liste des
codes formellement en vigueur au 1er juillet 2007 et la liste de ceux pour lesquels l’hésitation est
permise (Code du blé, Code de la famille, Code de l’enseignement catholique).
(733) Pour un bilan, « Codification : Bilan et perspectives », JCP G, Supplément au no 7, 13 févr.
2012.
(734) Ord. nº 2016-301, 14 mars 2016.
(735) Cass. crim., 16 oct. 1996, cité à la note suivante.
(736) Cass. crim., 16 oct. 1996, Bull. crim., no 367 ; Dr. pén. 1997, comm. 47 : « les arrêtés ou
règlements légalement pris par l’autorité compétente revêtent un caractère de permanence qui les
fait survivre aux lois dont ils procèdent, tant qu’ils n’ont pas été rapportés ou qu’ils ne sont pas
devenus inconciliables avec les règles fixées par une législation postérieure » (à propos du
transfert dans le Code de la consommation de certains délits réprimés auparavant par des lois
éparses ; un prévenu ne saurait tirer profit de l’abrogation – rétroactive en matière pénale – de ces
lois codifiées ni invoquer à leur endroit l’absence de textes d’application). Sur cette solution, v. aussi
infra, nos 280 et 301 (lois rétroactives).
(737) Cass. soc., 27 janv. 2010, RJS 4/10, no 322.
(738) Cass. soc., 22 mai 1975, Bull. civ. V, no 268 : « le décret du 15 novembre 1973 qui n’était
qu’une œuvre de codification des textes antérieurs n’avait pas eu pour objet de modifier les
dispositions contenues dans ceux-ci et, par suite, la substitution de la conjonction “ou” à la
conjonction “et” [...] était dépourvue de conséquence ». – Cass. soc., 3 juin 1977, Bull. civ. V,
no 374 : « la codification n’a pas modifié la réglementation en vigueur ». Ce dernier propos est
remarquable en ce qu’il semble considérer que l’œuvre de « codification » (tout court) est, par
nature, une compilation à droit constant.
(739) P. MORVAN, « Le Code du travail a-t-il été refait à droit constant ? », in Nouveau Code du
travail, Semaine sociale Lamy Supplément 24 déc. 2010, no 1472, p. 34.
(740) PORTALIS, Discours préliminaire, in Locré, t. I, p. 262 : « La justice est la première dette de la
souveraineté ».
(741) Biblio. : S. GUINCHARD, A. VARINARD et Th. DEBARD, Institutions juridictionnelles, Dalloz,
13e éd., 2015.
(742) Jean FOYER, « La justice : un pouvoir refusé », Pouvoirs 1981, no 16, p. 17, spéc. p. 22 : « Le
corps judiciaire, dans le système napoléonien, a l’aspect d’un corps militaire. [...] ».
(743) M.-L. GUINAMANT, « Les juridictions du XXIe siècle : plaidoyer en faveur d’un ordre
juridictionnel unique », JCP G, 2014, Libres propos, 87.
(744) Aucun texte n’a fondé la compétence d’attribution des tribunaux de commerce pendant dix
années, alors qu’il s’agit de la plus ancienne des juridictions françaises (créée par un édit de Charles
IX en 1563, elle fut la seule que le législateur révolutionnaire conserva dans la loi des 16-24 août
1790). L’ord. 18 sept. 2000 relative à la partie législative du nouveau Code de commerce avait
abrogé l’art. 631 anc. C. com. sans qu’il fût repris dans le nouveau code. La bévue serait, en réalité,
imputable à la L. 17 déc. 1991 modifiant le Code de l’organisation judiciaire qui, par un renvoi
maladroit, aurait abrogé l’art. 631 (cf. Th. Le BARS, JCP G, 2000, Actualités p. 2163). La L. 15 mai
2001 est venue rétablir la compétence matérielle de ces juridictions et valider rétroactivement les
décisions rendues (C. com., art. L. 411-4 et s.).
(745) V., en droit administratif, depuis la L. no 2000-597 du 30 juin 2000 : C. just. adm., art. L. 521-1
(référé suspensif « lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer [...]
un doute sérieux quant à la légalité de la décision »), L. 521-2 (le juge des référés ordonne « toutes
mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale [...] ») et L. 521-3 (référé
conservatoire « en cas d’urgence [...] même en l’absence de décision préalable »). Sont juges des
référés les présidents des tribunaux administratifs, des cours administratives d’appel et de la section
du contentieux du Conseil d’État (C. just. adm., art. L. 511-2).
(746) L’appel circulaire des arrêts de condamnation de cours d’assises ainsi que le « juge des
libertés et de la détention » sont des créations de la L. no 2000-516, 15 juin 2000.
(747) Règl. 28 juin 1738, Tit. 4, al. 1 : « Les demandes en cassation d’arrêts ou de jugements
rendus en dernier ressort seront formées par une requête en forme de vu d’arrêt, qui contiendra
les moyens de cassation ». Adde DENISART, Collection des décisions nouvelles, 7e éd., 1771,
vo Cassation, p. 293 : « Le roi peut seul casser les arrêts des cours souveraines parce que dans sa
personne réside la plénitude de la justice et que les magistrats ne tiennent que de lui le pouvoir de
la rendre à ses sujets. [...] (La cassation) est une voie extraordinaire à laquelle on ne doit avoir
recours qu’après avoir épuisé toutes les autres » (v. aussi infra, no 179).
(748) J.-L. HALPÉRIN, Le Tribunal de cassation et les pouvoirs sous la Révolution (1790-1799),
LGDJ, 1987. Le Tribunal conquit son indépendance, non sans plusieurs crises, pendant la période
révolutionnaire.
(749) Sén.-cons. du 28 floréal an XII (18 mai 1804), art. 36 (Sénatus-consulte organique de la
Constitution du premier empire).
(750) Sur les cours suprêmes d’autres pays, v. RID comp. 1978, p. 482 et 1979, p. 509.
(751) C. org. jud., art. L. 411-1.
(752) Commission nationale de réparation des détentions et Commission de révision des
condamnations pénales.
(753) Sur ces divergences, que la possibilité de constituer des chambres mixtes ou des Assemblées
plénières n’a pas permis de résorber, v. infra, no 401.
(754) V. infra, no 179.
(755) C. org. jud., art. L. 411-3 : la cassation est prononcée sans renvoi lorsqu’il n’y a plus rien à
juger sur le fond ou lorsque les faits, tels qu’ils ont été souverainement constatés par les juges du
fond, permettent à la Cour régulatrice d’appliquer la règle de droit appropriée. L’essor de la
cassation sans renvoi favorise une dérive de la mission légale de la Cour du droit vers le fait
(v. infra, no 179).
(756) C. org. jud., art. L. 431-4. Au contraire, « lorsque l’affaire fait l’objet d’un second pourvoi en
cassation, le Conseil d’État statue définitivement sur cette affaire » (C. just. adm., art. L. 821-2,
al. 2).
(757) Sur la motivation des arrêts de la Cour de cassation, dont la réfonte a été envisagée en 2015,
v. infra, nº 407.
(758) D. TRICOT (ancien président de la chambre commerciale), « L’élaboration d’un arrêt de la Cour
de cassation », JCP G, 2004.I.108.
(759) Sur le filtrage des pourvois, v. infra, no 175.
(760) Ancien art. L. 151-1, issu de la L. no 91-491 du 15 mai 1991. La loi du 6 août 2015 permet, en
outre, de saisir la Cour de cassation pour un avis sur l'interprétation d'une convention ou d'un accord
collectif de travail.
(761) Cass. avis, 8 janv. 2016, D. 2016, Act., 133, obs. P. Deumier.
(762) C. pr. pén., art. 706-55 et s. (issus de la L. organique no 2001-539 du 25 juin 2001).
(763) Sur les avis en droit, v. infra, nº 358.
(764) http://www.courdecassation.fr (dans la rubrique « Avis »).
(765) Sur ces « avis spontanés », v. infra, no 436.
(766) L. 16-24 août 1790 sur l’organisation judiciaire, Titre II, art. 13 : « Les fonctions judiciaires
sont distinctes et demeureront toujours séparées des fonctions administratives. Les juges ne
pourront, à peine de forfaiture, troubler, de quelque manière que ce soit, les opérations des corps
administratifs, ni citer devant eux les administrateurs pour raison de leurs fonctions ».
(767) Décret du 16 fructidor an III : « Défenses itératives sont faites aux tribunaux de connaître des
actes d’administration, de quelque espèce qu’ils soient, aux peines de droit ».
(768) MONTESQUIEU, De l’esprit des lois (1748), L. XI, Chap. 6 : « Il n’y a point encore de Liberté si
la puissance de juger n’est pas séparée de la puissance législative et de l’exécutrice. [...] Tout
serait perdu si le même homme ou le même Corps des Principaux, ou des Nobles, ou du Peuple,
exerçaient ces trois pouvoirs, celui de faire des Lois, celui d’exécuter les résolutions publiques, et
celui de juger les crimes ou les différends des particuliers ».
(769) Constitution du 22 frimaire an VIII (15 déc. 1799), Tit. IV, art. 52 : « Sous la direction des
Consuls, un Conseil d’État est chargé de rédiger les projets de lois et les règlements
d’administration publique, et de résoudre les difficultés qui s’élèvent en matière administrative ».
La loi du 24 mai 1872 (art. 9) concède au Conseil d’État le pouvoir officiel de statuer
« souverainement sur les recours en matière contentieuse administrative » sans qu’il doive se
borner à proposer une solution aux ministres compétents, marquant ainsi le passage d’une « justice
retenue » (par le gouvernement) à une « justice déléguée » (au juge administratif).
(770) Le principe de la séparation des pouvoirs interdit à l’autorité administrative d’empiéter sur les
compétences de l’autorité judiciaire (CE, 11 déc. 1942, Champsavoir, Rec. CE, p. 344 ; CE, 26 janv.
1944, Fisselier, Rec. CE, p. 29) et fonde l’existence de deux ordres de juridictions dont les
compétences respectives ne peuvent être modifiées que par la loi (CE, 30 mars 1962, Association
nationale de la meunerie, D. 1962, 630 et S., 1962, 178, concl. M. Bernard ; CE, 27 avr. 1981, SA
Les fils de Jules Bianco, Rec. CE, p. 504). Le Conseil constitutionnel a, à son tour, affirmé que si le
« principe de séparation des autorités administratives et judiciaires » n’a pas valeur
constitutionnelle, il existe en revanche un « principe fondamental reconnu par les lois de la
République » fondant l’existence et la compétence exclusive d’une juridiction administrative aux
côtés de la juridiction judiciaire (Cons. const., 23 janv. 1987, Transfert du contentieux du Conseil
de la concurrence, décis. no 86-224 DC, D. 1988, 117, note F. Luchaire ; JCP G, 1987.II.20854, note
J.-F. Sestier et I, 3200, chron. R. Drago ; RDP 1987, p. 1341, note Y. Gaudemet).
(771) Créés par la L. 11 juill. 1953 et le D. 30 sept. 1953 pour remplacer les anciens « Conseils de
préfecture » (L. 28 pluviôse an VIII) et soulager le Conseil d’État d’une partie des recours
contentieux qui l’engorgeaient.
(772) Créées par la loi du 31 déc. 1987, à nouveau pour désengorger le Conseil d’État.
(773) V. infra, no 179.
(774) C. just. adm., art. L. 113-1. Cette procédure, issue de la L. no 87-1127 du 31 déc. 1987
(art. 12), fut étendue à la Cour de cassation par la L. no 91-491 du 15 mai 1991 (v. supra, no 144).
(775) Ex. : Conseil supérieur de la magistrature, Commission bancaire. La plupart comportent deux
degrés de juridiction, l’un régional, l’autre national. Ex., dans l’ordre national : Conseil supérieur de
l’Éducation nationale, Conseil national de l’ordre des médecins (section disciplinaire ou section des
assurances sociales), Chambre nationale de discipline des architectes ou des commissaires aux
comptes, etc.
(776) Ex. : Commission centrale d’aide sociale, Commission de recours de l’OFPRA (réfugiés),
Cours régionales des pensions militaires d’invalidité, Conseil des prises (D. 9 mai 1859, en matière
maritime, dernier vestige de justice retenue), etc.
(777) Biblio. sélective : TAHC, t. XVIII, « Nul ne peut se faire justice à soi-même ». Le principe
et ses limites, 1966, Dalloz, 1969 ; D. ALLAND, Vo « Justice privée (Droit de se faire justice à soi-
même) », in Dictionnaire de la culture juridique, Lamy-PUF, 2003, p. 907 (paru in Droits 2001,
no 34, p. 73) ; Faire justice soi-même. Études sur la vengeance, PU de Rennes, 2010 ; La
vengeance, éd. Panthéon-Assas, 2011.
(778) D. ALLAND, Justice privée et ordre juridique international, Pedone, 1994.
(779) V. supra, no 5.
(780) G. M. LABRIOLA, « Jean Barbeyrac et la théorie du droit de résistance », Droits 2001, no 34,
p. 131 (sur Grotius, Pufendorf et leur traducteur-annotateur français qui, lui, était influencé par
Locke).
(781) E. DESMONS, Droit et devoir de résistance en droit interne, LGDJ, 1999, préf. S. Rials ;
Vº « Droit de résistance », in Dictionnaire de la culture juridique, Lamy-PUF, 2003, p. 459 (et la
biblio citée). Sur l’École du droit naturel, v. supra, nos 43 et 98.
(782) Art. 2 : « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et
imprescriptibles de l'Homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à
l'oppression ».
(783) Cass. crim., 5 janv. 1821, S. 1821.I.358 : le système qui conduirait à « autoriser chaque
particulier à se constituer juge des actes émanés de l’autorité publique serait subversif de tout
ordre public » (à propos du délit de rébellion, C. pén., art. 433-6 nouv.).
(784) Cass. crim., 15 sept. 1864, S. 1865, 1, 152.
(785) * Cass. crim., 19 nov. 2002, aff. José Bové, D. 2003, 1315, n. D. Mayer ; ce « faucheur
d’OGM » s’était fait une spécialité de la « désobéissance civique » à laquelle il consacra un livre.
(786) Ex. : * Cass. crim., 13 oct. 2004, Préfet Bonnet, Bull. crim., no 243 : un colonel de
gendarmerie aurait dû désobéir au préfet de Corse qui lui avait ordonné illégalement de détruire, de
nuit et en laissant sur place de faux indices destinés à égarer les enquêteurs, une paillote construite
sur le domaine public maritime.
(787) Ce fut au nom de la désobéissance civique que le maire de Bègles célébra un mariage civil
homosexuel, aussitôt annulé (CA Bordeaux, 19 avr. 2005. Pour un autre exemple, P. MORVAN, note
sous TA Bordeaux, 15 juin 2006 : JCP G, 2007, I, 145, no 1).
(788) M. GRANET, La pensée chinoise, 1934, rééd. Albin Michel, 1968, p. 376.
(789) Sur la pensée confucéenne, v. supra, no 29.
(790) Li ZHANG, « Les recours administratifs en Chine », Dr. adm. 2012, chr. 6.
(791) Étymologie : du latin arbiter, tri = témoin, arbitre, lui-même dérivé du verbe arbitror, ari
= observer, juger, penser. Biblio. : Ch. JARROSSON, La notion d’arbitrage, LGDJ, 1987 ; M. de
BOISSÉSON, Le droit français de l’arbitrage, éd. Joly, 2e éd., 1990.
(792) Genèse, XXXI, 36 : « Jacob adressa ainsi la parole à Laban : “Quel est mon crime, quelle
est ma faute, que tu te sois acharné après moi ? Tu as fouillé toutes mes affaires : as-tu rien trouvé
de toutes les affaires de ta maison ? Produis-le ici devant mes frères et tes frères, et qu’ils jugent
entre nous deux !” ».
(793) L. 16-24 août 1790, Tit. I, art. 1er : « L’arbitrage étant le moyen le plus raisonnable de
terminer les contestations entre les citoyens, les législateurs ne pourront faire aucune disposition
qui tendrait à diminuer soit la faveur, soit l’efficacité du compromis ». L’arbitrage devait être le
mode de résolution privilégié des conflits familiaux (Tit. X, art. 12).
(794) C. just. adm., art. L. 311-6.
(795) V., pour un cas particulier, C. trav., art. L. 2524-1 : « La convention ou accord collectif de
travail peut prévoir une procédure contractuelle d’arbitrage » (selon l’art. L. 2524-7, une « Cour
supérieure d’arbitrage » connaît des recours pour excès de pouvoir formés contre les sentences
arbitrales).
(796) Ex. : les litiges portant sur le montant des honoraires d’un avocat doivent d’abord être soumis à
l’arbitrage du bâtonnier (D. 27 nov. 1991, art. 175. V. aussi art. 142) ; la Commission d’arbitrage des
journalistes évalue le montant de l’indemnité de licenciement d’un journaliste ayant 15 ans
d’ancienneté (C. trav., art. L. 7112-4).
(797) Selon l’ancien art. 2061 C. civ. (avant sa réécriture par la L. no 2001-420 du 15 mai 2001),
« la clause compromissoire est nulle s’il n’est disposé autrement par la loi ». À ce titre, l’art. 631
ancien C. com. autorisait expressément les commerçants à soumettre leurs contestations à des
arbitres.
(798) Étymologie : du latin concilio, are = assembler, d’où concilier puisque c’est dans les
assemblées que se terminent les différends.
(799) Adde, sur la recherche d’une conciliation : C. pr. civ., art. 127 et s. (« tout au long de
l’instance »), 281 (expertise), 768 (TGI), 830 et s. (trib. d’instance), 863 (trib. com.), 941 (cour
d’appel), etc. Les « conciliateurs de justice » sont des auxiliaires de justice, bénévoles, institués
auprès du tribunal d’instance (D. 20 mars 1978 modifié).
(800) Étymologie : du latin medius, a, um = qui est au milieu.
(801) L. no 95-125, 8 févr. 1995, art. 22-1. Adde : D. 24 mars 1978 mod. – pour les conciliateurs,
bénévoles – et C. pr. civ., art. 131-1 et s. – pour les médiateurs, rémunérés.
(802) C. pr. pén., art. 41-1 : « [...] le procureur de la République peut, préalablement à sa décision
sur l’action publique, directement ou par délégation : [...] 5o Faire procéder, avec l’accord des
parties, à une mission de médiation entre l’auteur des faits et la victime ».
(803) G. FLÉCHEUX et Ph. LAFARGE, « La médiation », Mélanges P. Drai, Dalloz, 2000, p. 301.
(804) B. OPPETIT, « Les modes alternatifs de règlement des différends de la vie économique »,
Justices, nº 1, janv.-juin 1995.
(805) H. KENFACK, « La reconnaissance des véritables clauses de médiation et de conciliation
obligatoire hors de toute instance », D. 2015, 384.
(806) Depuis 2007, une avalanche de textes en appelle à la médiation (médiation bancaire
obligatoire au profit des consommateurs ; médiateur de l’énergie ; médiation en matière de droit au
logement opposable) que plusieurs rapports préconisent comme une panacée des maux de la justice
civile (cf. obs. Th. CLAY, D. 2008, Pan., 3119).
(807) La conciliation civile et la médiation pénale prennent place dans des « Maisons de la justice
et du droit » créées auprès (et non à l’intérieur) de tribunaux de grande instance. Elles « assurent une
présence judiciaire de proximité et concourent à la prévention de la délinquance, à l'aide aux
victimes et à l'accès au droit. Les mesures alternatives de traitement pénal et les actions tendant à
la résolution amiable des litiges peuvent s'y exercer » (C. org. jud., art. R. 131-1 et s.).
(808) Cass. 2e civ., 21 oct. 2010, D. 2011, 493, n. S. Chassagnard-Pinet.
(809) CE, Ass. (avis), 6 déc. 2002, Dr. adm., 2003, comm. 20 et comm. 44.
(810) La « composition pénale » (C. pr. pén., art. 41-2, issu de la L. 23 juin 1999) et par-dessus tout
la « comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité » (C. pr. pén., art. 495-7 s., issus de la
L. 9 mars 2004) ont introduit en France la procédure du plea bargaining largement pratiquée aux
États-Unis : une sorte de marché conclu entre le Ministère public et l’accusé aux termes duquel ce
dernier peut voir la peine requise par le premier réduite à condition de plaider coupable devant le
juge qui homologue leur accord. Le risque d’un marché de dupe n’est pas exclu. Une transaction
pénale peut également être proposée par un OPJ ; une fois acceptée, elle est homologuée par le
président du TGI (C. pr. pén., art. 41-1-1, issu de la L. 15 août 2014).
(811) V. infra, nos 236, 237 et 252.
(812) Bertrand Russell, philosophe, mathématicien et prix Nobel de littérature (1950) britannique,
avait, en 1966-1967, constitué un tribunal révolutionnaire à Stockholm pour juger les activités de
guerre des États-Unis au Vietnam, dans un procès où l’accusé était Lyndon Johnson, alors président
des États-Unis. Cf. J. CARBONNIER, « La justice saisie par son ombre », in Flexible droit, LGDJ,
10e éd., 2001, p. 446 : « Tous les phénomènes de simili-justice, que ce soient jeux d’enfants ou
Sainte-Vehme, tribunaux de fous ou tribunaux Russell, tous attestent l’importance cruciale que
l’humanité attache à la justice. [...] si la justice avait été un fait insignifiant, personne ne l’aurait
imitée ». Pour des exemples récents de ces tribunaux, liés aux crimes contre l’humanité commis dans
divers pays, Rev. sc. crim. 2006, p. 170.
(813) Cf. P. MORVAN, Criminologie, LexisNexis.
(814) Justice et Gacaca. L’expérience rwandaise et le génocide, PU de Namur, 2003 ; S. VAN
BILLOEN, Les juridictions gacaca au Rwanda : une analyse de la complexité des représentations,
Bruylant, 2008 ; F. SOBO, art. in Rev. sc. crim. 2009, p. 763.
(815) Cass. crim., 9 juill. 2008, D. 2009, 2640, censurant l’avis favorable d’une cour d’appel à
l’extradition vers le Rwanda de l’auteur soupçonné de crimes contre l’humanité, au motif qu’elle
n’avait pas recherché si les droits de la défense avaient été garantis devant la juridiction gacaca. Il
aurait fallu tenir compte de la spécificité du procès relevant d’une justice restauratrice et non
classique.
(816) Sur l’histoire du droit romain et de la Common Law, v. infra, nos 387 et s.
(817) H. MAINE, Early Law and Custom, 1861, p. 389.
(818) P. HÉBRAUD, « Observations sur l’évolution des rapports entre le droit et l’action dans la
formation et le développement des systèmes juridiques », Études P. Raynaud, Dalloz, 1985, p. 237 ;
H. MOTULSKY, « Le droit subjectif et l’action en justice », Arch. phil. dr., 1964, p. 215 et in Écrits.
Études et notes de procédure civile, Dalloz, 1973, t. I, p. 85.
(819) Cons. const., 9 avr. 1996, décis. no 96-373 DC, AJDA, 1996, p. 371 : « En principe, il ne doit
pas être porté d’atteintes substantielles au droit des personnes intéressées d’exercer un recours
effectif devant une juridiction ». Ce droit se déduit également de l’art. 6, § 1, Conv. EDH.
(820) Sur le droit subjectif, v. supra, no 50 et s.
(821) C. pr. civ., art. 30 : « L’action est le droit, pour l’auteur d’une prétention, d’être entendu sur
le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée ». Au XIXe siècle, au contraire, le droit
était confondu avec l’action : « L’action, enfin, c’est le droit lui-même mis en mouvement ; c’est le
droit à l’état d’action, au lieu d’être à l’état de repos ; le droit à l’état de guerre, au lieu d’être à
l’état de paix » (Ch. DEMOLOMBE, Cours de Code Napoléon, 2e éd., t. IX, 1861, no 338).
(822) Cass. soc., 11 juill. 2000, JCP E, 2001, p. 379 : « l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la
démonstration préalable du bien-fondé de l’action ».
(823) C. pr. civ., art. 31 : « L’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou
au rejet d’une prétention [...] ».
(824) Ainsi le Ministère public agit toujours dans l’intérêt général. De même, en droit administratif,
le recours pour excès de pouvoir (v. infra, no 180) s’exerce dans l’intérêt de la légalité à laquelle
l’administration aurait porté atteinte ; c’est plus un « procès fait à un acte » qu’un « procès fait à une
personne » ; mais un intérêt minimum doit être démontré : il n’existe pas d’actio popularis.
(825) Au XIIIe siècle (comme à Rome), « Nus procurators n’est receüz en cort laie » (Les
Établissements de Saint-Louis, Livre II, Chap. IX, publiés par P. Viollet, t. II, p. 344 et commentaire
t. IV, p. 222). La « cort laie » est la juridiction royale : à l’exception du roi lui-même (et certaines
personnes publiques), nul n’était admis à plaider par procureur, c’est-à-dire sans comparaître en
personne devant le juge royal. Au XVIe siècle, la maxime a pris la signification admise aujourd’hui
(sur l’adage et ses exceptions, v. H. SOLUS et R. PERROT, Droit judiciaire privé, t. III, Procédure de
première instance, Sirey, 1991, nos 34 et s.).
(826) La class action admise aux États-Unis et au Canada est introduite par un particulier qui
sollicite du juge une condamnation au profit d’une classe sociale homogène (unie par une
commonality de préjudice) à laquelle il prétend appartenir (ex. : les fumeurs de cigarettes atteints
d’un cancer) ; en cas de succès, chacun des membres de cette classe pourra réclamer, à titre
individuel, des dommages-intérêts (ce qui peut prendre des décennies). Dans la législation française,
une association ou un syndicat exerce soit une action collective pour réclamer la réparation d’un
préjudice collectif qui lui est propre, soit une action en représentation conjointe dans l’intérêt
individuel d’un adhérent. V. F. CABALLERO, « Plaidons par procureur ! De l’archaïsme procédural à
l’action de groupe », RTD civ. 1985, p. 247 (favorable) ; H.-P. GLENN, « À propos de la maxime “Nul
ne plaide par procureur” », RTD civ. 1988, p. 59 (hostile).
(827) C. pr. civ., art. 53.
(828) C. pr. civ., art. 11. Ex. : l’acheteur assigné en paiement du prix réplique que la marchandise
vendue est défectueuse ou ne lui a pas été livrée.
(829) C. pr. civ., art. 64. Ex. : la femme réplique à la demande de divorce formée par le mari par une
demande reconventionnelle de divorce pour faute à ses torts.
(830) C. pr. civ., art. 73. Ex. : le tribunal saisi est incompétent, l’assignation est nulle...
(831) C. pr. civ., art. 122. Ex. : défaut de qualité pour agir, prescription, autorité de chose jugée...
(832) La formule exécutoire, apposée sur les « expéditions » des jugements civils (C. pr. civ.,
art. 502), est ainsi rédigée : « En conséquence, la République française mande et ordonne à tous
huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt (ou ledit jugement, etc.) à exécution, aux
procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y
tenir la main, à tous commandements et officiers de la force publique de prêter main-forte
lorsqu’ils en seront légalement requis » (D. no 47-1047 du 12 juin 1947). La formule exécutoire
apposée sur les expéditions des jugements administratifs est moins péremptoire à l’égard de
l’administration, parce qu’elle est à l’abri d’une exécution forcée : « La République mande et
ordonne au (ministre ou préfet) en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en
ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de
la présente décision » (C. just. adm., art. R. 751-1).
(833) V. infra, no 220.
(834) « La fonction de juger », Droits 1989, no 9, spéc. S. Rials, p. 3.
(835) V. infra, no 231.
(836) Sur le droit de la procédure civile, v. supra, no 73-2o.
(837) V. supra, no 164.
(838) Sur les arrêts de règlement, v. infra, no 405.
(839) LA BRUYÈRE, Les caractères, De quelques usages : « Le devoir des juges est de rendre la
justice : leur métier de la différer. Quelques-uns savent leur devoir et font leur métier ».
(840) Rapport annuel de la Cour de cassation, disponible sur : www.courdecassation.fr.
(841) C. just. adm., art. L. 822-1 (L. 31 déc. 1987) et R. 822-1 et s. En outre, depuis le 1er janvier
2007, les recours manifestement mal fondés peuvent être rejetés directement par ordonnance devant
les tribunaux administratifs, les cours administratives d’appel et le Conseil d’État (C. just. adm.,
art. R. 222-1, 7o et R. 122-12, réd. D. 23 déc. 2006).
(842) La L. no 97-395 du 27 avr. 1997 (C. org. jud., art. L. 131-6 anc.) avait généralisé la formation
restreinte à trois conseillers (au lieu de cinq). La Loi organique no 2001-539 du 25 juin 2001 a
permis que « cette formation déclare non admis les pourvois [...] non fondés sur un moyen sérieux
de cassation ». L’article L. 431-1 C. org. jud. (ord. 8 juin 2006) dispose que « cette formation statue
lorsque la solution du pourvoi s'impose. Dans le cas contraire, elle renvoie l'examen du pourvoi à
l'audience de la chambre ». En outre, elle « déclare non admis les pourvois irrecevables ou non
fondés sur un moyen sérieux de cassation » (C. pr. civ., art. 1014, réd. D. 2 juin 2008 ; C. pr. pén.,
art. 567-1-1, ord. 8 juin 2006). – Sur le régime de la non-admission, V. VIGNEAU, D. 2010, chr. 102.
(843) F. DESCORPS DECLÈRE, « Les motivations exogènes des décisions de la Cour de cassation »,
D. 2007, chr., 2822, à propos de la controverse doctrinale qui avait suivi un énigmatique arrêt de
rejet pour non-admission laissant libre cours à toutes les interprétations et que le conseiller à la Cour
de cassation rapporteur sur cette décision a expliqué a posteriori dans une revue.
(844) V. VIGNEAU, « Le régime de la non-admission des pourvois devant la Cour de cassation »,
D. 2010, chr. 102.
(845) V. infra, no 348.
(846) J. MORISSETTE, « Les lenteurs de la justice considérées sous un angle qui les avantage », Revue
de droit de Mc Gill (Canada) 1987, vol. 33, p. 137, spéc. p. 147 : « Ayez moins de tribunaux, vous
aurez moins de litiges. L’exemple de l’Angleterre est édifiant à cet égard ».
(847) Sur le déni de justice, v. infra, no 404.
(848) Juridictions judiciaires : selon l’art. L. 141-1 C. org. jud., « l’État est tenu de réparer le
dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice. Sauf dispositions
particulières, cette responsabilité n’est engagée que par une faute lourde ou par un déni de
justice » ; constitue un déni de justice le retard apporté sans raison légitime à une procédure qui
empêche le prononcé d’une décision dans un « délai raisonnable » imparti par l’art. 6 Conv. EDH
(TGI Paris, 8 nov. 1995, D. 1997, Somm. p. 149, obs. J. Pradel). V. aussi Cass. 1re civ., 29 juin 1994,
Bull. civ. I, no 227, visant l’art. L. 781 (anc.) C. org. jud. et l’art. 6 Conv. EDH, au sujet d’une
information judiciaire inutilement longue. Juridictions administratives : l’art. L. 781-1 anc. (devenu
art. L. 141-1) C. org. jud. étant inapplicable à ce contentieux, le Conseil d’État engage la
responsabilité de l’État pour faute simple (et non plus une faute lourde) sur le fondement des art. 6,
§ 1, et 13 Conv. EDH et des « principes généraux qui gouvernent le fonctionnement des
juridictions administratives » (CE, ass., 28 juin 2002, Magiera, Rec. CE, p. 247, concl. F. Lamy ;
CE, 25 janv. 2006, JCP E, 2006, 2216, n. C. Guettier). Ce type d’action est mentionné à l’art. R. 311-
1 C. just. adm. Lorsqu’une procédure d’une « durée totale excessive » s’est déroulée devant les
deux ordres de juridictions, judiciaire et administratif, le Tribunal des conflits est compétent pour
connaître de l’action en indemnisation du préjudice qui en découle (L. 24 mai 1872, art. 16 issu
L. 16 févr. 2015).
(849) Cass. civ., 17 vendémiaire an VIII, S., chr. 1791-an XII, 1, 255 : devait être annulée la décision
en appel qui « a forcé les parties à parcourir plus de deux degrés de juridiction » en renvoyant les
parties devant le premier tribunal. Adde : Cass. req., 13 janv. 1879, DP 1879, 1, 307, invoquant le
« principe qui défend de soumettre aucune affaire à un troisième degré de juridiction ».
(850) Exode, XVIII, 21 à 26. Jethro conseille à son gendre Moïse, qui juge seul du matin au soir une
foule de croyants, de s’adjoindre les services de juges inférieurs : « Choisis-toi parmi tout le peuple
des hommes capables, craignant Dieu, sûrs, incorruptibles et établis les sur eux comme chefs de
milliers, chefs de centaines, chefs de cinquantaines et chefs de dizaines. Ils jugeront le peuple en
tout temps. Toute affaire importante, ils te la déféreront et toute affaire mineure, ils la jugeront
eux-mêmes ».
(851) Historique : Jur. Gén., vo Appel civil.
(852) Loyseau déplorait ces « procès immortels » qui maintenaient le justiciable « toute sa vie en
alarme et dans les appréhensions continuelles d’être ruiné ».
(853) L’appel des arrêts de condamnation rendus par la cour d’assises est porté devant une autre cour
d’assises (C. pr. pén., art. 380-1, L. no 2000-516, 15 juin 2000).
(854) En cas d’intervention forcée en appel d’un tiers à la première instance (C. pr. civ., art. 331 et s.
et art. 555).
(855) Lorsque sont présentées en appel des prétentions nouvelles (C. pr. civ., art. 565 et 566) ou
lorsque la cour d’appel « évoque » le fond de l’affaire (C. pr. civ., art. 89 et 90, art. 568. En matière
pénale : C. pr. pén., art. 221-1 et 520. En matière administrative, l’évocation a toujours été admise
par le Conseil d’État).
(856) Ex. : C. pr. pén., art. 546 (pour les contraventions).
(857) Biblio. : E. FAYE, La Cour de cassation. Traité de ses attributions, de sa compétence et de la
procédure observée en matière civile, 1903, rééd. Librairie E. Duchemin, 1970 ; J. BORÉ et L. BORÉ,
La cassation en matière civile, Dalloz, 4e éd., 2008 ; J. BORÉ, La cassation en matière pénale,
Dalloz, 3e éd., 2012. Adde J.-F. WEBER, « Comprendre un arrêt de la Cour de cassation en matière
civile », BICC nº 702, 15 mai 2009 : www.courdecassation.fr (fiche méthodologique).
(858) C. org. jud., art. L. 411-2 : « La Cour de cassation ne connaît pas du fond des affaires, sauf
disposition législative contraire ».
(859) G. MARTY, La distinction du fait et du droit. Essai sur le pouvoir de contrôle de la Cour de
Cassation sur les juges du fait, Sirey, 1929 ; J. JONQUÈRES, Le contrôle des constatations de fait par
le juge de cassation (aspect de droit civil), Journées de la société de législation comparée, 1980,
p. 117.
(860) Sur ce débat, v. infra, nº 407.
(861) H. CROZE, Recherches sur la qualification en droit processuel, th., Lyon, 1981.
(862) F. LUXEMBOURG, « La Cour de cassation, juge du fond », D. 2006, 2358.
(863) C. pr. civ., art. 604 : « Le pourvoi en cassation tend à faire censurer par la Cour de cassation
la non-conformité du jugement qu’il attaque aux règles de droit ».
(864) Il y a manque ou défaut de base légale lorsque les motifs des juges du fond donnent une
« exposition incomplète du fait » (E. FAYE, La Cour de cassation, 1903, no 119, p. 134). L’arrêt de
cassation ordonne en quelque sorte un supplément d’instruction ; « C’est une cassation pour
insuffisance ou imprécision des motifs de fait » (G. MARTY, op. cit., no 139, p. 282). Adde H.
MOTULSKY, « Le “manque de base légale”, pierre de touche de la technique de cassation », JCP G,
1949.I.775. Un magistrat avait souhaité la suppression de ce cas d’ouverture (J. BEL, D. 1989, chr.
105 et D. 1994, chr. 136), un autre, au contraire, en avait vanté les mérites (A. PERDRIAU, note in
JCP G, 1990.II.21509). Par sa plasticité, il a le don de révéler et de préciser la règle de droit
(cf. D. FOUSSARD, « Manque de base légale et création de la règle », in La Cour de cassation et
l’élaboration du droit, Economica, 2004, p. 69).
(865) Le défaut de motivation prend la forme soit d’une absence de motifs, soit d’une contradiction
de motifs (de fait), soit d’un recours à des motifs hypothétiques ou dubitatifs, soit d’un défaut de
réponse à conclusions.
(866) T. cass., 22 messidor an IX et 2 germinal an X, S., chr. 1791-an XII, 1, 495 et 615). Ce cas
d’ouverture était admis par la loi mais en matière criminelle uniquement (L. 16-19 sept. 1791, Tit.
VIII, art. 23).
(867) T. cass., 3 germinal an X, S., chr. 1791-an XII, 1, 616 (fausse qualification d’un contrat).
(868) Cass. crim., 22 mai 1812, S., chr. 1812-1814, 1, 104.
(869) Cass. civ., 20 janv. 1868, DP 1868, 1, 12 ; * Cass. civ., 15 avr. 1872, Veuve Foucauld et
Coulombe, DP 1872, 1, 176 ; S., 1872, 1, 232 (cité infra, no 252). Sur ce contrôle, v. infra, no 448.
(870) Sur le référé législatif, institué par la L. 16-24 août 1790, v. infra, no 442.
(871) Le Conseil d’État, à la différence de la Cour de cassation, contrôle la matérialité des faits –
mais tels qu’ils ressortent du dossier de la procédure et sans investigation supplémentaire. Autre
différence : le Conseil d’État contrôle la dénaturation d’un fait, qu’il soit ou non incorporé dans un
écrit (R. CHAPUS, Droit du contentieux administratif, Montchrestien, 13e éd., 2008, no 1432 et
no 1451).
(872) Par exception, en matière pénale, la « demande en révision » est adressée à une commission
puis à une cour de révision instituées au sein de la Cour de cassation (C. pr. pén., art. 623 à 625).
Comp. la procédure de réexamen d’une décision pénale définitive à la suite d’une condamnation de la
France par la Cour européenne des droits de l’homme (C. pr. pén., art. 626-1 et s., L. 15 juin 2000).
(873) Histoire : Jean FOYER, « La justice : un pouvoir refusé », Pouvoirs 1981, no 16, p. 17 ;
P. OURLIAC, « La puissance de juger : le poids de l’histoire », Droits 1989, no 9, « La fonction de
juger ».
(874) Les membres du Parquet sont les suivants. Cour de cassation : procureur général près la Cour
de cassation (qui n’exerce aucune autorité sur les parquets de cours d’appel) ; premier avocat
général ; avocats généraux. Cours d’appel : procureur général près la cour d’appel ; avocats
généraux ; substituts généraux. TGI : procureur de la République près le TGI (voire procureurs
adjoints) ; substituts du procureur (voire premiers substituts).
(875) Dans l’ordre judiciaire, seuls les juges de cours d’appel et de la Cour de cassation portent le
titre de « conseillers » (conseillers de cours d’appel et conseillers à la Cour de cassation).
(876) C. just. adm., art. L. 231-3 (L. 6 janv. 1986).
(877) Cf. les explications données dans le Rapport d’activité annuel du CSM : http://www.conseil-
superieur-magistrature.fr. Le CSM a publié un « Recueil des obligations déontologiques des
magistrats » (Dalloz, 2010).
(878) CSM, 27 sept. 2005, décis. S140 : http://www.conseil-superieur-magistrature.fr (non-lieu à
sanction en raison d’un trouble psychique d’un magistrat qui se masturbait à l’audience...).
(879) CSM, 29 et 30 avr. 2014. Cf. J. GICQUEL, "Twitter ou juger ?" : JCP G, 2014, 604.
(880) Sur la responsabilité de l’État en cas de violation du droit international et européen, v. infra,
no 340. Adde H. ADIDA-CANAC, « L’erreur du juge : entre réparation, indemnisation et responsabilité »,
D. 2009, chr. 1288.
(881) Le Conseil constitutionnel a censuré la disposition de la loi organique no 2007-287 du 5 mars
2007 qui, suivant les recommandations de la commission d’enquête parlementaire constituée après
l’affaire d’Outreau, avait étendu la responsabilité disciplinaire des magistrats à leur activité
juridictionnelle en prévoyant qu’« une violation grave et délibérée [...] d’une règle de procédure
constituant une garantie essentielle des droits des parties » engageait une telle responsabilité ; il
aurait fallu que cette violation eut été constatée préalablement par une décision de justice définitive
(Cons. const., 1er mars 2007, JCP G, 2007, II, 10044, n. J.-E. Schoettl ; D. 2007, 1401, n. D. Ludet et
A. Martinel ; adde chron. F. LAURIE, RRJ 2007, p. 1801).
(882) Cass. crim., 9 déc. 1981, Bull. crim. no 308. V. déjà, dans un style solennel, Cass. civ., 5 mai
1847 (cité in RRJ 2006, p. 1759).
(883) Cass. crim., 9 mars 1983, Bull. crim. no 75.
(884) * Cass. Ass. plén., 23 févr. 2001, aff. Christine Villemin, D. 2001, 1752, chron. Ch. Debbasch.
Le petit Grégory Villemin, âgé de quatre ans, fut assassiné en 1984 (son corps avait été retrouvé
ligoté dans la Vologne, une rivière des Vosges). Son père tua en 1985 l’oncle de l’enfant qu’il
soupçonnait d’avoir commis le crime. Sa mère fut ensuite mise en examen pour l’assassinat de son
fils et obtint un non-lieu en 1993. Ces errements dramatiques de la justice avaient pour origine
l’attitude ambiguë d’un jeune juge d’instruction fasciné par les médias (et, semble-t-il, par la mère).
Sa responsabilité ne fut jamais engagée.
(885) Cass. 2e civ., 14 sept. 2006, Bull. civ. II, no 222 ; JCP G, 2006, II, 10189, avis R. Kessous : le
juge (non professionnel siégeant au sein d’une juridiction de proximité) avait eu des « termes
injurieux » à l’égard d’une partie (v. les termes saisissants de l’arrêt) et statué par des « motifs
inintelligibles [...] en écartant par une pétititon de principe certains des éléments de preuve »
produits par elle.
(886) Étymologie : du latin advoco, are = appeler auprès de lui, lui-même dérivé de ad = auprès de
+ voco, vocare = appeler. La profession d’avocat est régie par la L. no 71-1130 du 31 déc. 1971
modifiée par les L. no 90-1258 et no 90-1259 du 31 déc. 1990 (qui opèrent la fusion de la profession
avec celle de conseil juridique et introduisent le salariat).
(887) V. supra, no 169 et les notes.
(888) J. DOMAT, Les lois civiles dans leur ordre naturel, Œuvres complètes de J. Domat par J. Rémy,
1828, Première partie, L. III, Tit. VI, p. 137 et 141. Biblio. : E. VERGÈS, G. VIAL et O. LECLERC, Droit
de la preuve, PUF, 2015 ; X. LAGARDE, Réflexions critiques sur le droit de la preuve, LGDJ, 1994 (le
droit de la preuve n’aurait pas pour objet l’établissement de la vérité) ; « La preuve », dir. Cath.
Puigelier, Economica, 2004 ; « La preuve », Revue de droit Henri Capitant 2013, no 6, pp. 1 à 235. –
Sur les modifications introduites par l’ordonnance nº 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme
du droit des contrats : dossier Réforme du droit de la preuve, Dr. et patr., sept. 2015, p. 36 ; chron.
G. LARDEUX, D. 2016, 850 ; chron. E. VERGÈS, JCP G, 2016, 486.
(889) Histoire : J. Ph. LEVY et A. CASTALDO, Histoire du droit civil, Dalloz, 2e éd., 2010, nos 579
et s. – La preuve, Recueils de la société Jean Bodin, t. XVII à XIX, 1963-1965. – La preuve en
droit, Travaux du Centre national de recherche de langue (dir. Ch. Perelman et P. Foriers), Bruxelles,
1981. – L’évolution des modes de preuve. Du duel de Carrouges à nos jours (dir. B. Hervouët), PU
Limoges, 2014 (cf. note de lecture de O. Leclerc in RTD civ. 2015, p. 237).
(890) Ex. : l’Assyrien subit l’épreuve du fleuve Euphrate ; le juge lui donne raison s’il parvient à le
traverser sans se noyer. Variantes (notamment en Europe) : une partie était jetée pieds et poings liés à
l’eau (elle était reconnue coupable si elle ne surnageait pas) ou devait plonger la main dans une eau
bouillante sans se brûler.
(891) Les ordalies de l’eau et du feu (celle-ci consistant à tenir un fer rouge dans la main sans se
brûler) sont dites unilatérales par opposition au duel ou au jugement de croix (imposant aux deux
parties de rester les bras en croix jusqu’à ce que l’une d’elles baisse les bras de fatigue) qui sont
bilatérales.
(892) Ex. : Exode, XXII, 9 : « Si quelqu’un confie à la garde d’un autre un âne, un taureau, une
bête de petit bétail ou tout autre animal, et que la bête crève, se brise un membre ou est enlevée
sans témoins, un serment par Yahvé décidera entre les deux parties si le gardien a porté la main
sur le bien de l’autre ou non ». Le parjure s’exposait à un châtiment divin. Le Code civil a conservé
la preuve par serment (art. 1358 et s. v. infra, no 242).
(893) Dans la Grèce antique, le plus fameux des duels judiciaires opposa Pâris à Ménélas pour la
conquête d’Hélène. HOMÈRE, Iliade, Chant III, v. 85 : « Ménélas, favori d’Arès, et lui, Pâris,
combattront seul à seul entre les deux armées ; ils auront pour enjeu Hélène et tous ses biens. Le
meilleur, le vainqueur, aura le droit de prendre et d’emmener chez lui la femme et ses biens. Et
tous, nous conclurons un pacte d’amitié ». Ce n’est pas ce qui s’est passé ; Pâris, protégé par
Aphrodite, a fui le combat, et la guerre de Troie s’est déchaînée.
(894) V. supra, no 89.
(895) VOLTAIRE, Lettre à Damilaville sur l’affaire Calas, 3 mai 1763 : « J’ai appris une des raisons
du jugement de Toulouse qui va bien étonner votre raison : ces Wisigoths ont pour maxime que
quatre-quarts de preuve et huit-huitièmes font deux preuves complètes, et ils donnent à des ouï-
dire les noms de un quart de preuve et de un-huitième ».
(896) J.-Ph. LÉVY, La hiérarchie des preuves dans le droit savant du Moyen Âge, Annales de
l’Université de Lyon, 1939 ; du même auteur, « Les classifications des preuves dans l’histoire du
droit », in La preuve en droit, Travaux du Centre national de recherche de langue (dir. Ch. Perelman
et P. Foriers), Bruxelles, 1981, spéc. p. 35.
(897) J.-Ph. LÉVY, Coup d’œil d’ensemble sur l’histoire de la preuve littérale, Index (revue
napolitaine) 1987, t. XV, p. 473. Le tournant est pris par l’ordonnance de Moulins (1566), art. 54 :
« Pour obvier à la multiplication de faits que l’on a vu ci-desvant estre mis en avant en jugement,
et reproche d’iceux, dont adviennent plusieurs inconvénients et involutions de procès : avons
ordonné et ordonnons que doresnavant de toutes choses excedans la somme ou valeur de cent
livres pour une fois payer, seront passez contrats pardevant notaires et témoins, par lesquels
seulement sera faite et reçue toute preuve ès dites matières, sans recevoir aucune preuve par
témoins, outre le contenu au contrat, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit ou convenu avant
icelui, lors et depuis. En quoi n’entendons exclure les preuves des conventions particulières et
autres qui seraient faits sous leurs seings, sceaux et écritures privées ». L’art. 1359 reprend ce
texte (v. infra, no 231).
(898) Sur l’écrit électronique, v. infra, no 238.
(899) Pour une distinction claire entre les formalismes ad probationem et ad validitatem,
v. Cass. 3e civ., 13 févr. 1991, Bull. civ. III, no 58 ; Cass. 1re civ., 14 févr. 1995, JCP G,
1995.II.22402, note Y. Chartier ; D. 1995, 341, note S. Piédelièvre.
(900) Sur les règles de conflit de lois dans le temps, v. Cass. 1re civ., 28 avr. 1986, Bull. civ. I,
no 106 : « Si, en général, les règles gouvernant les modes de preuve sont celles en vigueur au jour
où le juge statue, il en est autrement en ce qui concerne les preuves préconstituées, qui sont
soumises aux règles en vigueur au jour de l’acte qu’il s’agit de prouver » (sur la règle de principe,
v. aussi Cass. 1re civ., 28 avr. 2008, JCP G, 2008, II, 10132 ; D. 2008, 2121 : l’art. 16-11, qui interdit
l’identification par empreintes génétiques post-mortem sans le consentement du défunt, est
« immédiatement applicable aux situations en cours ») ; Cass. com., 7 nov. 1989, Bull. civ. IV,
no 281 : « Les règles relatives à la charge de la preuve ne constituent pas des règles de procédure,
applicables aux instances en cours, mais touchent le fond du droit » (dans le même sens,
Cass. soc., 13 déc. 2007, Bull. civ. V, no 208, qui en déduit que des faits de harcèlement moral
doivent être prouvés conformément à la loi ancienne dès lors que l’instance a été engagée avant son
entrée en vigueur).
(901) Sur les règles de conflit de lois dans l’espace, Cass. 1re civ., 24 févr. 1959, Bull. civ. I, no 116
(preuve d’un mariage juif en Turquie rapportée au moyen d’un certificat rabbinique) ; Cass. 1re civ.,
25 nov. 1981, Bull. civ. I, no 350 ; Cass. 1re civ., 5 janv. 1999, Bull. civ. I, no 4 : « S’il appartient au
juge français d’accueillir les modes de preuve de la loi du for, c’est sans préjudice pour les
parties de se prévaloir également des règles de preuve du lieu d’accomplissement de l’acte » ;
Cass. 1re civ., 28 juin 2005, D. 2006, Somm., 1498, obs. P. Courbe : la loi applicable à la force
probante des mentions d’un acte notarié (dressé en Allemagne) est déterminée par la loi du lieu de
l’acte (locus regit actum, selon la méthode du conflit de lois, et non auctor regit actum, qui tranche
un conflit d’autorités. Comp. art. 47, pour les actes de l'état civil français) ; Cass. 1re civ., 4 juill.
2007, Bull. civ. I, no 255 (loi applicable aux mesures d’instruction in futurum, v. infra, no 212).
(902) Règlement CE no 867/2007, 11 juill. 2007, sur la loi applicable aux obligations non
contractuelles (« Rome II »), art. 22, et règlement no 593/2008, 17 juin 2008, sur la loi applicable aux
obligations contractuelles (« Rome I »), art. 18 : la loi régissant l’obligation non contractuelle ou
contractuelle s’applique dans la mesure où, en cette matière, « elle établit des présomptions légales
ou répartit la charge de la preuve » ; par ailleurs, les actes juridiques peuvent être prouvés par tout
mode de preuve admis soit par la loi du for, soit par la loi selon laquelle l’acte est valable quant à la
forme, pour autant que la preuve puisse être administrée selon ce mode devant le tribunal saisi.
Biblio. : T. H. GROUD, La preuve en droit international privé français, PUAM, 2000 ; E. FONGARO,
La loi applicable à la preuve en droit international privé, LGDJ, 2004.
(903) V. supra, no 73.
(904) P. HÉBRAUD, La vérité dans le procès et les pouvoirs d’office du juge, Annales Univ. sc.
sociales Toulouse, t. XXXVI, 1988, p. 379, spéc. p. 404 : « On doit redouter aussi bien l’idéologie
de la vérité absolue que celle du règne de la loi, car elles sont, aussi bien l’une que l’autre,
et souvent ensemble, le germe de tous les despotismes ».
(905) L. PIRANDELLO, Cosi e (Si vi pare), À chacun sa vérité, La Pléiade, Acte III, Scène 9,
Mme Ponza : « Pour moi, je suis celle qu’on croit que je suis » ; Laudizi : « Et voilà, mesdames et
messieurs, comment parle la vérité ! Vous voilà contents ? Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! ».
(906) J.-J. SUEUR (dir.), Le faux, le droit et le juste, Bruylant, 2009 (sur la sanction du faux et
l’interprétation du droit).
(907) V. Droit des obligations, coll. Droit civil.
(908) V. en général, Le mensonge en droit pénal, AJ pénal, 2008, p. 111.
(909) V. infra, no 245.
(910) V. aussi, C. pr. civ., art. 218, 231. Adde, C. pr. pén., art. 81, al. 1er : « Le juge d’instruction
procède, conformément à la loi, à tous les actes d’information qu’il juge utiles à la manifestation
de la vérité ».
(911) Adde le délit de faux défini comme « toute altération frauduleuse de la vérité » (C. pén.,
art. 441-1). Mais un simple mensonge ne suffit pas à constituer des manœuvres frauduleuses au sens
du délit d’escroquerie (C. pén., art. 313-1. Cf. D. 1981, chr. 17).
(912) P. HÉBRAUD, « Rapport introductif aux travaux du Ve colloque des IEJ », in La logique
judiciaire, PUF, 1969, p. 23 et s., spéc. p. 25 : « Le droit ne se propose pas la recherche de la vérité
dans la connaissance, mais celle de la justice dans l’action ».
(913) M. DOAT et G. DARCY (dir.), L’imaginaire en droit, Bruylant, 2011. Rapp. J.-L. SOURIOUX, « La
pensée juridique en images », Études B. Oppetit, Litec, 2009, p. 597 (sur les emblèmes et symboles
en droit).
(914) Biblio. : A.-M. LEROYER, Les fictions juridiques, th. Paris II, 1995 ; G. WICKER, Les fictions
juridiques. Contribution à l’analyse de l’acte juridique, LGDJ, 1997 ; D. COSTA, Les fictions
juridiques en droit administratif, LGDJ, 2000 ; J.-L. BERGEL, Méthodologie juridique, PUF, coll.
Thémis droit, 2e éd., 2016, nos 41 et s. (les fictions ont une fonction de technique juridique et une
fonction de politique juridique) ; Les fictions en droit. Les artifices du droit : les fictions (dir. A.-
B. Caire), Centre Michel de l'Hospital (PU Clermont), 2015.
(915) V. supra, no 173. Adde H. ROUSSEAU, note au S., 1939, 2, 16 : « Le but d’un procès n’est pas
plus la découverte de la vérité que le but de la guerre n’est le triomphe du droit. On fait la guerre
pour imposer la paix, on fait un procès pour aboutir à la chose jugée ».
(916) Ex. : Cass. req., 11 août 1874, DP 1876, 5, 93 ; Cass. 1re civ., 3 nov. 1966, JCP G,
1966.II.14880 : « L’irrégularité dont peut être entachée une décision judiciaire, celle-ci eût elle-
même statué extra ou ultra petita, ne saurait faire obstacle à ce que cette décision acquière
l’autorité de la chose jugée, si elle n’a point été attaquée par les voies de droit ».
(917) Sur la loyauté de la preuve, v. infra, no 246. Droit civil illustré, no 60.
(918) V. Droit de la famille, coll. Droit civil.
(919) G. VIAL, La preuve en droit extrapatrimonial de la famille, Dalloz, 2008.
(920) Biblio. : E. TRUILHÉ-MARENGO (dir.), Preuve scientifique, preuve juridique, Larcier 2012.
(921) Ch. AUBRY et Ch. RAU, Cours de droit civil français, 5e éd., 1897-1922, par E. Bartin, t. XII,
1922, spéc. § 749, note 2 bis : « La preuve judiciaire se rapproche bien de la preuve historique, en
ce sens que l’une et l’autre se ramènent invariablement à des inductions fondées sur le
témoignage humain, et aussi en ce sens que les qualités d’esprit que l’on exige de l’historien
ressemblent à celles que doit posséder le juge [...]. La preuve, au sens général et de pure logique
de l’expression, suppose la pleine liberté de l’investigation sur la question à résoudre [...] ; elle
implique, d’autre part, la possibilité de ne pas conclure et la nécessité de conclure au moins
provisoirement [...]. La preuve judiciaire, au moins dans les contestations de droit privé ou de
droit administratif, par opposition aux poursuites à fin de répression, présente des caractères tout
opposés. La détermination de l’objet et de l’étendue de la preuve à faire, le choix des moyens et
des procédés de preuve à employer ou à fournir, appartiennent exclusivement aux plaideurs, avec
distribution précise à chacun d’eux de son rôle. Quant au juge, il n’a pas l’initiative en matière de
preuve (ce qui aujourd’hui n’est plus exact. V. supra, no 211). D’autre part, il ne peut, en cette
qualité, se dérober à l’obligation de statuer [...]. Enfin, sa décision, quelle qu’elle soit, est mise à
l’abri de toute critique ultérieure, dans la mesure où l’autorité de la chose jugée s’y oppose ».
(922) Ch. AUBRY et Ch. RAU, Cours de droit civil français, 6e éd., 1936-1958, par E. Bartin et
P. Esmein, t. XII, par P. Esmein, 1958, § 749 et s.
(923) Ch. AUBRY et Ch. RAU, Cours de droit civil français d’après la méthode de Zachariæ, 4e éd.,
1869-1879 (la dernière de la main de ces auteurs).
(924) J. HAMBURGER, De l’art de raisonner en biologie et en médecine, Diogène, no 138, 1987,
p. 43 : « La vérité scientifique n’est jamais une vérité absolue, elle est relative, esclave des
conditions, explicites ou tacites, dans lesquelles elle fut établie ».
(925) Sur la preuve illicite, v. infra, no 245.
(926) Biblio. : dossier Le cerveau, nouvel avocat de la justice ?, Sciences Psy mai 2015, nº 3. –
Centre d’analyse stratégique, « Le cerveau et la loi : éthique et pratique du neurodroit », Document
de travail nº 2012-07, sept. 2012 (http://archives.strategie.gouv.fr). – Pour la bibliographie en langue
anglaise (notamment les travaux dirigés depuis 2007 par O. D. Jones au sein du réseau international
Neurolaw qui étudie l’apport des neurosciences au système judiciaire pénal), cf. www.lawneuro.org.
(927) Cf. L. PIGNATEL, « L’émergence du neurodroit dans le monde », Sciences Psy, mai 2015, nº 3,
p. 43.
(928) V. infra, no 404.
(929) Biblio. : J. DEVÈZE, Contribution à l’étude de la charge de la preuve en matière civile, S. R.
T., Grenoble, 1980 ; N. HOFFSCHIR, La charge de la preuve en droit civil, Dalloz, 2016.
(930) Cass. soc., 31 janv. 1962, Bull. civ. IV, no 105 : « [...] l’incertitude et le doute subsistant à la
suite de la production d’une preuve devant être nécessairement retenus au détriment de celui qui a
la charge de cette preuve ».
(931) Cass. 1re civ., 2 avr. 2009, Bull. civ. I, no 60. L’action de in rem verso (auj. action en
enrichissement injustifié) a, en effet, un caractère subsidiaire (art. 1303-3).
(932) A. TISSIER, « Le centenaire du Code civil et les projets de réforme », RTD civ. 1906, p. 608 : le
juge serait « un automate à qui l’on fournit les matériaux du procès pour retirer un jugement ». Sur
la question, v. J. NORMAND, Le juge et le litige, LGDJ, 1965.
(933) P. OURLIAC, « L’office du juge dans le droit canonique classique », Mélanges P. Hébraud, Univ.
sc. sociales Toulouse, 1981, p. 627, spéc. p. 644 : « Le juge n’est pas un simple porteur de
balance : il doit être impartial – nec ira nec furor selon Gratien – mais sa neutralité ne peut être de
l’indifférence ; il doit pour remplir son office rechercher la vérité mais aussi l’équité sans laquelle
il ne peut y avoir de justice ».
(934) H. VIZIOZ, Études de procédure, 1956, nos 230 et s., p. 441 et s. (ensemble de chroniques des
années 1940 consacrées au principe dispositif, lato sensu) ; H. MOTULSKY, « Prolégomènes pour un
futur Code de procédure civile : la consécration des Principes directeurs du procès civil par le
décret du 9 septembre 1971 », D. 1972, chr. 91 (écrit posthume reproduit in Écrits. Études et notes
de procédure civile, Dalloz, 1973, t. I, p. 275).
(935) L. CADIET, Droit judiciaire privé, Litec, 3e éd., 2000, no 870.
(936) Cf. J. NORMAND, Le juge et le litige, LGDJ, 1965, no 176, p. 168.
(937) Cf. G. CORNU et J. FOYER, Procédure civile, PUF, 3e éd., 1996, no 96.
(938) H. MOTULSKY, op. cit., no 9, p. 93.
(939) Notamment, « la procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver
l’équilibre des droits des parties » ; elle doit garantir la séparation des autorités de poursuite et de
jugement, le respect de la présomption d’innocence, le droit à un double degré de juridiction.
(940) Cass. 2e civ., 28 juin 2006, Bull. civ. II, no 174 ; RTD civ. 2006, p. 821, obs. R. Perrot (sous le
visa de l’art. 4 C. civ., interdisant le déni de justice).
(941) I. DESPRÉS, Les mesures d’instruction in futurum, Dalloz, 2004.
(942) Ex. : Cass. civ., 26 mars 1946, D. 1946, 254 ; Cass. 2e civ., 10 juill. 1968, Bull. civ. II, no 206
(lettres adressées au juge à l’insu des parties) ; Cass. 2e civ., 25 févr. 1976, Bull. civ. II, no 67. Sur ce
thème, cf. J. CHEVALLIER, « Remarques sur l’utilisation par le juge de ses informations personnelles »,
RTD civ. 1962, p. 5.
(943) J. CHEVALLIER, op. cit.
(944) Sur la notoriété en général : L.-C. HENRY, « Le régime de l’acte de notoriété selon la
jurisprudence récente », RTD civ. 1994, p. 11 ; N. RAYNAUD de LAGE, « La notoriété », D. 2000, chr.
513.
(945) Cass. 1re civ., 10 mars 1969, Bull. civ. I, no 105 ; D. 1969, 305 : « les juges d’appel se sont
bornés, comme ils le pouvaient, à faire état de leurs connaissances d’ordre général » (valeur de
terrains agricoles).
(946) H. BATIFFOL et P. LAGARDE, Droit international privé, LGDJ, 8e éd., t. I, 1993, no 331-1.
(947) CEDH, 25 févr. 1993, Funke c/France, D. 1993, 457 et somm., 387, obs. J.-F. Renucci ;
JCP G, 1993, II, 22073 ; Cass. crim., 11 mai 2011, JCP G, 2011, 819, n. X. Pin.
(948) J.-J. DAIGRE, La production forcée des pièces dans le procès civil, PUF, 1979.
(949) Cass. 2e civ., 2 juill. 1974, Bull. civ. II, no 212 ; Cass. 2e civ., 14 nov. 1979, D. 1980, 365, note
J. Lemée.
(950) La Rule 26 du Federal Code of Civil Procedure impose aux parties de se révéler (disclose)
mutuellement leurs preuves. Cette règle, contraire à la Common Law d’Angleterre, a été imposée aux
USA par le législateur.
(951) Pour une première application pénale, Cass. crim., 12 déc. 2007, JCP E, 2008, 2016, n. M.
Danis ; JCP G, 2008, I, 181, no 8, obs. J.-H. Robert. L’arrêt n’examine pas la conformité de cette loi
à l’art. 6, § 1 Conv. EDH (droit à un procès équitable), pourtant discutable depuis qu’est reconnu un
« droit à la preuve » (infra, no 230).
(952) Ex. : Cass. 1re civ., 19 avr. 1977, aff. Dodo, Bull. civ. I, no 171 : « Il appartenait à Dodo (le
demandeur, auteur d’une donation à sa maîtresse dont il demandait l’annulation pour cause immorale
au motif que cette libéralité avait pour raison d’être le maintien des relations avec la donatrice)
d’établir le caractère immoral ou illicite de la cause de la libéralité litigieuse ».
(953) Adde C. pr. civ., art. 9 : « Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les
faits nécessaires au succès de sa prétention » (sur ce texte, v. aussi infra, no 245).
(954) Ex. : Cass. 1re civ., 6 nov. 1990, Bull. civ. I, no 234 (prétendu débiteur d’EDF niant avoir
souscrit un contrat d’abonnement) ; Cass. 1re civ., 28 mars 1995, D. 1995, 517, note J. Huet ; JCP G,
1995.II.22539, note A. Bénabent : « Il incombe à France Télécom de démontrer l’existence et le
montant de sa créance » (avec l’enregistrement des communications) ; Cass. 1re civ., 21 mars 2006,
Bull. civ. I, no 166 : en l’absence de bon de commande ou de devis, c’est à l’entrepreneur de
démontrer que le client avait commandé ou accepté les travaux tels que ceux-ci ont été exécutés.
(955) Comp. Cass. soc., 11 janv. 2006, Bull. civ. V, no 6 : il incombe « à l'employeur de rapporter la
preuve du paiement du salaire conformément au droit commun » ; il ne lui suffit pas de produire des
bulletins de paie ou des attestations d’ouvriers témoignant de la paie.
(956) Ex. : Cass. 1re civ., 18 sept. 2008, Bull. civ. I, no 207 : « si les juges du fond sont tenus de
relever d'office la fin de non-recevoir tirée de la forclusion édictée par l'article L. 311-37 [ancien]
du Code de la consommation lorsque celle-ci résulte des faits soumis leur examen, c'est à la partie
intéressée qu'il incombe d'invoquer et de prouver ces faits ».
(957) M. BUCHBERGER, « Le rôle de l’article 1315 du Code civil en cas d’inexécution d’un contrat »,
D. 2011, chr. 465.
(958) Cass. 1re civ., 19 nov. 1996, JCP G, 1997.II.22862, note J. Huet. L’art. 1315 (devenu art. 1353)
n’est pas visé et l’art. 1612 dit même le contraire : le juge a tranché en faveur de l’acheteur.
(959) Cass. 1re civ., 12 nov. 1975, Bull. civ. I, no 322.
(960) Cass. 1re civ., 14 janv. 2010, JCP G, 2010, 380, 2e esp., n. N. Dissaux ; D. 2011, 1649, obs.
D. R. M. (avec les autres réf.). Pourtant, le prêt consenti par un particulier à un particulier est un
contrat réel (et non consensuel) de sorte que la remise n’en est pas un effet mais une condition de
validité (qui n’a pas à être prouvée).
(961) Cass. com., 12 juill. 2005, Bull. civ. IV, no 159 ; Cass. 1re civ., 8 oct. 2009, D. 2010, 128,
n. V. Rebeyrol. Ces arrêts s’appuyaient sur l’ancien article 1132 C. civ. (auj. abrogé) alors que ce
texte ne régissait pas la charge de la preuve ; il se bornait à écarter la nullité d’une convention du
seul fait qu’elle n’exprime pas sa cause, en présumant son existence. Toutefois, une reconnaissance
de dette ne pouvait faire présumer la cause de l'obligation de l'emprunteur lorsque la remise était
intervenue après sa signature car le prêt n’existait pas encore à cette date (Cass. 1re civ., 9 févr. 2012,
D. 2012, 497).
(962) V. infra, no 231 in fine.
(963) Aubry et Rau avaient voulu exprimer la règle de l’art. 1353 (anc. art. 1315) en termes simples
(t. XII, 4e éd., 1877, § 749) : « La partie à laquelle incombe la charge de la preuve, soit comme
demanderesse, soit comme défenderesse, doit établir chacun des éléments de fait et de droit ou le
bénéfice légal qu’elle entend faire valoir suppose le concours ». Ultérieurement Bartin considéra
dans une note ajoutée à la 5e édition (§ 749, note 20 bis), qu’il était impossible de se fonder sur une
règle aussi générale : il faut « se borner à rapprocher les unes des autres les solutions fournies par
la pratique sur les questions de preuve, et arriver ainsi à classer, dans des catégories distinctes et
relativement nettes, les différentes sortes de litiges où les questions de droit les plus étrangères les
unes aux autres supposent, pour l’établissement du fait dont la solution du procès dépend,
l’emploi d’un raisonnement semblable et d’un même procédé de démonstration ». Paul Esmein
l’approuva dans la 6e édition (1958, § 749, note 91) : « D’autres considérations entrent en jeu pour
déterminer la charge de la preuve, comme il résulte de nos développements tirés des présomptions
que permet l’expérience, de la possibilité pour une partie de se ménager une preuve préconstituée,
de l’impossibilité pour l’autre partie d’apporter la preuve qui lui incombe en théorie ».
(964) V. infra, nos 221 et s.
(965) P. MIMIN, note sous Cass. soc., 10 avr. 1941, DC, 1942, p. 36, spéc. p. 39, 2e col.
(966) Elle peut être imprudente à un autre égard. V. Cass. 2e civ., 6 mars 1958, Bull. civ. II, no 178 ;
JCP G, 1958.II, 10902, note J. Chevallier : « Celui qui prend l’initiative de prouver ne saurait se
plaindre de ce que la charge de la preuve ait été intervertie à son détriment ».
(967) J.-F. CESARO, Le doute en droit privé, éd. Panthéon-Assas, 2003.
(968) En matière de licenciement : C. trav., art. L. 1225-3, L. 1235-1 et art. L. 1333-1 ; ... de temps
de travail effectif : C. trav., art. L. 3171-4 ; ... de harcèlement : C. trav., art. L. 1154-1. La Cour de
cassation a étendu ce raisonnement à la preuve de la discrimination (d’abord syndicale : Cass. soc.,
28 mars 2000, RJS 5/00, no 498 ; puis en matière d’égalité de rémunération : Cass. soc., 10 oct. 2000,
RJS 12/00, no 1253) sous l’influence du droit communautaire (Dir. no 97/80/CE du 15 déc. 1997
« relative à la charge de la preuve dans les cas de discrimination fondée sur le sexe » ; Dir.
no 2000/43/CE du 29 juin 2000 contre les discriminations raciales, art. 8, transposée par la L. du
30 déc. 2004, art. 19).
(969) Droit des obligations, coll. Droit civil.
(970) Sur les sources et le sens du principe de précaution, v. infra, nº 253.
(971) * Cass. 3e civ., 18 mai 2011, D. 2011, p. 1483, 2089, 2679 et 291 et les obs. : « La charte de
l'environnement et le principe de précaution ne remettaient pas en cause les règles selon
lesquelles il appartenait à celui qui sollicitait l'indemnisation du dommage à l'encontre du
titulaire de la servitude d'établir que ce préjudice était la conséquence directe et certaine de
celui-ci et cette démonstration, sans exiger une preuve scientifique, pouvait résulter de
présomptions graves, précises, fiables et concordantes » (absence de preuve d’un lien de causalité
entre les courants électromagnétiques émanant de lignes électriques à très haute tension et la
mauvaise santé d’animaux d’élevage). Droit civil illustré, no 4.
(972) M. BOUTONNET, Le principe de précaution en droit de la responsabilité civile, LGDJ, 2005.
(973) C. RADÉ, « Le principe de précaution : une nouvelle éthique de la responsabilité ? », Rev. jur.
env. 2000, p. 78.
(974) Ex. : Cass. 1re civ., 30 oct. 2007, Bull. civ. I, no 308.
(975) Ex. : Cass. soc., 25 mars 2009, Bull. civ. V, no 85 : « il appartient à l'employeur de rapporter
la preuve d'une éventuelle violation de la clause de non-concurrence et [...] la clause
contractuelle disposant du contraire était inopérante ».
(976) Ex. : Cass. 2e civ., 1er oct. 2009, Bull. civ. II, no 228 : la lettre d'un huissier de justice indiquant
que Mme X... ne demeurait pas en un lieu, où elle ne justifiait pas non plus être domiciliée, il lui
incombait de fournir l'indication de son domicile réel.
(977) Cass. soc., 31 mars 2016, nº 14-22292, inédit : « aucune lettre de licenciement n'a été
notifiée au salarié, l'enveloppe devant la contenir étant vide comme l'a reconnu l'employeur et
comme cela résultait du constat d'huissier ».
(978) Cass. civ., 5 févr. 1894, DP 1894, 1, 134 ; S., 1894, 1, 277 : « Les conventions légalement
formées sont la loi des parties, à moins que le consentement de l’une d’elles ne soit le résultat de
l’erreur, de la violence ou du dol ; l’un de ces cas échéant, c’est à celle qui invoque un de ces
moyens de nullité d’établir l’existence des faits dont ils peuvent dériver ». Mais la solution est
inverse dans les contrats régis par le Code de la consommation : le professionnel qui en réclame
l’exécution doit établir leur régularité (Cass. 1re civ., 17 févr. 1993, Bull. civ. I, no 79 ; démarchage à
domicile).
(979) Ch. AUBRY et Ch. RAU, Cours de droit civil français, 5e éd., par E. Bartin, t. XII, 1922, § 749
bis, note 19 bis : « La preuve complète en pure logique, ce serait la preuve totale, aussi bien celle
de l’absence de toutes insuffisances, déchéances ou restrictions à la naissance ou au maintien du
droit prétendu, que celle de la réunion des éléments de fait nécessaires à son existence [...]. Il est
le plus souvent impossible d’exiger du demandeur la preuve rigoureusement complète de tous les
faits constitutifs ou générateurs de son droit ».
(980) M. PLANIOL et G. RIPERT, Traité pratique de droit civil français, LGDJ, t. VII, « Les
obligations » (2e partie), par P. Esmein, J. Radouant et G. Gabolde, 2e éd., 1954, no 1420 : supporte la
charge de la preuve « celui qui avance comme demandeur ou défendeur une proposition contraire à
l’apparence ». Ex. : Cass. soc., 7 janv. 1997, JCP G, 1997.II.22931 : « En présence d’un contrat de
travail apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif (en l’espèce, Pôle Emploi)
d’en rapporter la preuve ».
(981) Cass. 1re civ., 5 nov. 2014, D. 2014, 2308 et 2541, obs. Th. Clay.
(982) Ex. : C. civ., art. 1731 : « S’il n’a pas été fait d’état des lieux, le preneur est présumé les
avoir reçus en bon état de réparation locatives [...] ».
(983) Ex. : en matière d’assurance, l’art. L. 121-8 C. assur. distingue entre la guerre étrangère et la
guerre civile qui, toutes deux, excluent la garantie due par l’assureur. C’est à l’assuré de prouver que
le dommage subi n’est pas imputable à une guerre étrangère pour obtenir la couverture du risque.
C’est à l’assureur de prouver l’exclusion de garantie découlant d’une guerre civile (v. pour une
application rigoureuse de cette dernière règle : Cass. 1re civ., 24 mars 1992, aff. de la guerre civile
au Liban, D. 1994, 441, note B. Beignier ; RTD civ. 1993, p. 157, obs. crit. P.-Y. Gautier).
(984) Ex. : Cass. soc., 2 févr. 1999, Bull. civ. V, no 48 ; Dr. social 1999, p. 255 : « L’employeur doit
prouver le paiement du salaire » que la remise de la fiche de paie au salarié ne fait pas présumer.
(985) Selon une formule très générale, « celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une
obligation particulière d’information, doit rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation »
(Cass. 1re civ., 25 févr. 1997, Gaz. Pal. 1997, 1, 274, rap. P. Sargos ; RTD civ. 1997, p. 434, obs.
P. Jourdain (médecin) ; Cass. 1re civ., 29 avr. 1997, JCP G, 1997.II.22948 (avocat)). L’art. 1112-1,
al. 4 C. civ. consacre cette jurisprudence. Adde F. VINEY, « À propos de la preuve de l’exécution de
l’obligation d’information », JCP G, 2014, 879.
(986) Ex. : Cass. 1re civ., 24 sept. 1999, D. 2010, 2672 (avec les autres réf.) : « il appartenait à
chacun des laboratoires [ayant fabriqué la molécule ayant entraîné des malformations du fœtus
durant la grossesse] de prouver que son produit n'était pas à l'origine du dommage ».
(987) Ex. : Cass. 1re civ., 30 mars 1999, JCP E, 1999, p. 793, obs. P. Morvan ; JCP G,
2000.II.10334, note Cl. Ghica-Lemarchand ; RTD civ. 1999, obs. P.-Y. Gautier ; D. 2000, 596, note
D. Ammar. Recevant une facture d’eau exorbitante (11 415 francs), un abonné de la Compagnie
générale des eaux avait estimé ne devoir payer que la somme de 5 000 francs, eu égard à sa
consommation habituelle. Les juges du fond avaient reproché à la société concessionnaire de n’avoir
pas justifié le montant élevé de sa facture en prouvant « que des modifications substantielles sont
intervenues dans la consommation (de l’abonné) ou qu’une fuite d’eau après compteur existait sur
les installations ». Au contraire, la Cour de cassation estime que la preuve de la créance était
rapportée par le chiffre figurant sur le compteur d’eau et qu’il incombait à l’abonné, conformément à
l’art. 1315, al. 2, « d’établir le fait ayant produit l’extinction de son obligation ».
(988) 1º) En droit fiscal, le Conseil d’État affirme que la charge de la preuve de l’« acte anormal de
gestion » incombe à l’administration fiscale, à condition toutefois que le contribuable ait
préalablement établi l’exactitude de ses écritures comptables litigieuses. En outre, le juge
administratif pose des présomptions d’anormalité de l’acte litigieux, soit de non-conformité à
l’intérêt de l’entreprise, soit d’absence de contrepartie (A. FAUCHON, « La preuve de l’acte anormal
de gestion », in La preuve, Economica, 2004, p. 141). 2º) En droit pénal, le juge judiciaire interprète
de la même façon les éléments constitutifs du délit d’abus de biens sociaux (qui recouvre les mêmes
agissements).
(989) Étymologie : du latin præsumptio, onis = conception première, idée anticipée, lui-même
dérivé de sumo, ere = saisir + præ = avant. Biblio : R. DECOTTIGNIES, Les présomptions en droit
privé, LGDJ, 1950 ; Ch. PERELMAN et P. FORIERS, Les présomptions et les fictions en droit, Bruylant,
1974 ; A.-B. CAIRE, « Les présomptions par delà l’article 1349 du Code civil », RTD civ. 2015,
p. 311, et les références citées à la note 1 (l’auteur distingue les « présomptions-preuves », les
« présomptions-postulats » et les « présomptions-concepts »).
(990) V. supra, no 205.
(991) Sur ces arrêts, v. infra, no 413.
(992) Cass. 1re civ., 16 févr. 1988, Bull. civ. I, no 42 ; 2 janv. et 2 févr. 1994, JCP G, 1994.II.22294,
note Ph. Delebecque : « L’obligation de résultat emporte à la fois présomption de faute et
présomption de causalité entre la prestation fournie et le dommage invoqué ». Le juge prive
parfois la victime du bénéfice de cette présomption de causalité, l’obligeant ainsi à prouver le lien
de causalité par présomptions (au sens de l’art. 1382) ; il en est ainsi des personnes victimes de
contamination transfusionnelle par le virus de l’hépatite C (cf. D. JACOTOT, RRJ 2000, p. 509, spéc.
no 8), moins bien traitée de ce point de vue que les victimes du SIDA (L. 31 déc. 1991, art. 47, créant
un fonds d’indemnisation).
(993) Sur l’exigence (venant de la jurisprudence de la Conv. EDH puis constitutionnalisée) en droit
pénal d’un respect des droits de la défense, garanti par le caractère réfragable des présomptions de
culpabilité : Const. const., 16 juin 1999, décis. no 99-411 DC, D. 1999, 589, note Y. Mayaud (à
propos de l’art. L. 121-3 C. route).
(994) V. par ex. CGI, art. 39-4 : sont exclues des charges déductibles du bénéfice imposable les
dépenses ayant trait à l'exercice de la chasse ou de la pêche et celles relatives à la disposition de
résidences de plaisance ou d'agrément (ces « charges somptuaires » sont présumées non conformes à
l’intérêt de l’entreprise).
(995) Ex. : Cass. civ., 7 janv. 1935, DH 1935, 131 ; S., 1935, 1, 128, déduisant, dans un style
tourmenté, la preuve d’un paiement effectué par une femme pour le compte de son mari de
« présomptions démonstratives de la volonté que l’acheteur apparent avait eue d’agir comme
mandataire occulte, ou prête-nom [...] » de sa femme.
(996) Ch. AUBRY et Ch. RAU, Cours de droit civil français, 5e éd., par E. Bartin, t. XII, 1922, § 750,
note 1 bis : « La présomption légale n’est, au fond, qu’une présomption de fait généralisée
et systématisée par la loi ».
(997) V. supra, no 203.
(998) V. supra, nos 211 et 212.
(999) Comp. Cons. const., 19 févr. 1998, Loi organique portant recrutement exceptionnel de
magistrats de l’ordre judiciaire, décis. no 98-396 DC, JCP G, 1998.II.10104, note A. Quint, qui
valide cette loi sous cette réserve : le pouvoir réglementaire devra « prévoir des épreuves de
concours de nature à vérifier [...] les connaissances juridiques » des candidats et, pour ceux qui
siégeront en cour d’appel, « veiller à ce que soient strictement appréciées, outre la compétence
juridique des intéressés, leur aptitude à juger, ce, afin de garantir au second degré et dernier
degré de juridiction la qualité des décisions rendues, l’égalité devant la justice et le bon
fonctionnement du service public de la justice » (quel verbiage !).
(1000) Ex. : Cass. 1re civ., 6 janv. 1994, cité infra, no 277 ; Cass. crim., 21 juin 1995, Bull. crim.,
no 232 : « L’opposabilité des textes législatifs et réglementaires résulte [...] de leur seule
publication au Journal officiel et de l’écoulement des délais fixés par » l’art. 2 du D. 5 nov. 1870.
(1001) C. pr. civ., art. 9 : « Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits
nécessaires au succès de sa prétention ».
(1002) C. pr. civ., art. 12, al. 1er : « Le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui
lui sont applicables ».
(1003) La Cour de cassation n’exerce en principe qu’un contrôle de droit sur les décisions frappées
d’un pourvoi et rejette en conséquence les moyens « mélangés de fait et de droit » (v. supra, no 179).
(1004) S. GUINCHARD et al., Procédure civile, Dalloz, 30e éd., 2010, no 606.
(1005) Cass. soc., 19 févr. 2003, RJS, 5/03, no 646. V. aussi Cass. soc., 10 déc. 2002, JCP G,
2003.II.10065.
(1006) * Ex. : Cass. Ass. plén., 7 juill. 2006, Cesareo, JCP G, 2007, II, 10070, n. G. Wiederkehr ;
RTD civ. 2006, p. 825, obs. R. Perrot ; Cass. 1re civ., 28 mai 2008, JCP E, 2008, 1814, obs.
J. Béguin, en matière d’arbitrage.
(1007) Contra Cass. Ass. plén., 21 déc. 2007, JCP G, 2008, II, 10006, n. L. Weiller : l’art. 12 ne fait
pas obligation au juge, sauf règles particulières, de changer la dénomination ou le fondement
juridique des demandes.
(1008) Biblio. sélective : Y. LAURIN, « L’amicus curiæ », JCP G, 1992.I.3603 ; G. FRANÇOIS,
« L’amicus curiæ et la Cour de cassation », RRJ 2007, p. 237 ; L. BURGORGUE-LARSEN, « Les
interventions éclairées devant la CEDH et le rôle stratégique des amici curiæ », Mélanges J.-
P. Costa, Dalloz, 2011, p. 69 (très favorable aux amici curiæ) ; S. MENÉTREY, L’amicus curiæ, vers
un principe commun de droit procédural, thèse, Dalloz 2010.
(1009) Sur les class actions, v. supra, no 171.
(1010) Paris, 21 juin et 6 juill. 1988, D. 1989, 341, note Y. Laurin ; JCP G, 1989.I.3413, annexe I ;
RTD civ. 1989, p. 138, obs. crit. J. Normand : le juge est « libre d’organiser cette recherche suivant
la démarche qu’il souhaite et suivant les modalités qui n’ont pas à lui être dictées [...] ; l’amicus
curiæ qui n’est ni un témoin, ni un expert, n’est pas soumis aux règles du C. pr. civ., sur la
récusation » sous réserve du respect des droits de la défense. Le conseil de l’ordre des avocats de la
cour d’appel de Paris a pris une délibération favorable à cette pratique pourvu que les avocats
puissent formuler leurs observations après l’amicus, pour assurer le respect du contradictoire.
(1011) Paris, 16 oct. 1992, D. 1993, 172, note Y. Laurin : « La cour [...] invite le Professeur Luc
Montagnier [...] à se présenter à son audience [...] pour qu’en sa qualité d'“amicus curiæ”, il
fournisse, en présence des parties, toutes informations propres à l’éclairer dans sa recherche de la
solution du litige ».
(1012) Cass. Ass. plén., 31 mai 1991, cité infra, no 413 : « [...] après avoir entendu M. le professeur
Jean Bernard, président du Comité consultatif d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé
en une communication [...] ».
(1013) Cass. Ass. plén., 29 juin 2001, JCP G, 2001.II.10569, rap. P. Sargos, concl. J. Sainte-Rose,
note M.-L. Rassat, qui rejette l’incrimination d’homicide involontaire à l’égard d’un « enfant à
naître ». Le conseiller-rapporteur, l’avocat général et l’avocat du demandeur avaient, d’un commun
accord, sollicité l’avis donné par écrit de l’Académie de médecine et de diverses personnalités sur
la définition de la personne humaine.
(1014) CE, 6 mai 2015, nº 375036, Dr. adm. 2015, 66, n. G. Eveillard (un universitaire de la faculté
de droit de Nantes avait été chargé d’indiquer si le requérant justifiait d’un titre de propriété
antérieur à l'édit de Moulins de février 1566 ; la cour a méconnu son office en se fondant
exclusivement sur cette opinion).
(1015) V. supra, no 33.
(1016) Cass. ch. mixte, 23 nov. 2004 (cinq arrêts) : JCP G, 2005.I.111, chron. J. Ghestin, Annexes.
L’absence d’aléa eût entraîné la requalification du contrat d’assurance-vie en contrat de
capitalisation et soumis les sommes en jeu aux règles du droit des successions et des régimes
matrimoniaux. Le flux des primes aurait été détourné des entreprises d’assurance. V. A. BÉNABENT,
RDC 2005.297.
(1017) P. DEUMIER, « Les motifs des motifs des arrêts de la Cour de cassation », Mélanges J.-F.
Burgelin, Dalloz, 2008, p. 125.
(1018) Dans Le Marchand de Venise, de Shakespeare, un procès oppose le Juif Shylock au Chrétien
Antonio. Pour s’éclairer, le doge fait comparaître, en qualité d’amicus curiae, un soi-disant « jeune
docteur de Rome », en réalité Portia, une amie d’Antonio. Le procès devient truqué. Sans doute,
l’amicus curiae prononce d’admirables paroles : « La nature de la miséricorde n’est pas qu’on la
force. Elle vient du ciel et tombe comme une douce pluie [...] Elle bénit celui qui la donne et celui
qui l’a reçue » (A. IV, Sc. 1).
(1019) V. LASSERRE, « Investiture de la société civile au Parlement. Analyse d’une nouvelle méthode
législative », JCP G, 2016, 181. – Q. MONGET, « La législation participative », JCP G, 2016, suppl.
au nº 7, 15 févr. 2016, p. 5 ; « Le projet de loi pour une République numérique », ibid., p. 10 (seul ce
projet de loi a fait l’objet d’une consultation innovante et ambitieuse).
(1020) Ex. : en vertu de l’art. 310, le juge français qui prononce le divorce d’un Allemand résidant
en Allemagne et d’une Française résidant en France doit appliquer la loi allemande.
(1021) Cass. 1re civ., 12 mai 1959, Bisbal, GAJDIP, nº 32 (avec les réf.).
(1022) Cass. 1re civ., 22 avr. 1986, JCP G, 1987.II.20878, note E. Agostini ; Rev. crit. DIP 1988,
p. 302, note J.-M. Bischoff ; JDI 1986, p. 1025, note H. Sinay-Cytermann.
(1023) Cass. 1re civ., 21 juill. 1987, Sfez, Bull. civ. I, no 240 ; Rev. crit. DIP 1988, p. 329, note
B. Ancel : « [...] notamment par un certificat de l’autorité religieuse compétente au regard du droit
confessionnel qui a été appliqué ».
(1024) Cass. 1re civ., 17 juin 1958, Peugeot, Bull. civ. I, no 315 ; Rev. crit. DIP 1958, p. 704, note
Ph. Francescakis.
(1025) Cass. req., 4 juin 1872, S., 1872, 1, 160 ; Cass. civ., 18 juill. 1876, S., 1876, 1, 451 ; Cass. 1re
civ., 21 nov. 1961, Montefiore, GAJDIP, nº 36 (avec les réf.). Le contrôle de la dénaturation est un
contrôle de fait, donc exceptionnel. Il s’étend à la jurisprudence étrangère, qualifiée de « source du
droit positif » au même titre que la « loi étrangère » (Cass. 1re civ., 1er juill. 1997, Africatours, cité
infra, no 396, en note).
(1026) * Cass. 1re civ., 27 janv. 1998, Ababou, JCP G, 1998.II.10098, note H. Muir Watt. L’arrêt a
été rendu sous le visa de l’art. 12 C. pr. civ. (cité supra, no 220), mais il est douteux que la loi
étrangère fasse partie des « règles de droit » dont ce texte confie l’application au juge ; la « règle de
droit » serait ici la règle de conflit. V. toutefois : Cass. 1re civ., 13 janv. 1993, Bull. civ. I, no 14 : « la
loi étrangère [...], malgré l’absence de contrôle par la Cour de cassation, est une règle de droit
qui ne relève pas des prescriptions de l’art. 7 C. pr. civ. ».
(1027) Cass. com. et Cass. 1re civ., 28 juin 2005, Bull. civ. IV, no 138 et I, no 299 ; D. 2006, Somm.
1495, obs. P. Courbe (arrêts simultanés mettant fin à une divergence entre ces deux chambres).
(1028) Comme l’exigeait : Cass. 1re civ., 4 déc. 1990, Sté Coveco, Bull. civ. I, no 272 ; Rev. crit. DIP
1991, p. 558, note M.-L. Niboyet ; JDI 1991, p. 371, note D. Bureau.
(1029) À moins que la loi étrangère ne soit identique à la loi française. V. Cass. 1re civ., 13 avr. 1999,
JCP G, 1999.II.10261 ; Rev. crit. DIP 1999, p. 698, note B. Ancel et H. Muir Watt (identité des
art. 1385 [devenu art. 1243 dans le Code civil français] dans les Codes civils belge et français : le
juge peut appliquer l’une ou l’autre loi).
(1030) Comp. C. DAVID, La loi étrangère devant le juge du fond, Dalloz, 1965, no 381, p. 297, qui
note toutefois que « le juge reste extérieur à l’ordre juridique étranger, mais non au droit
coutumier ».
(1031) V. aussi en droit administratif : G. TEBOUL, Usages et coutumes dans la jurisprudence
administrative, LGDJ, 1989, p. 75.
(1032) Ph. LANGLOIS, « Les usages (dans les transformations du droit du travail) », Étude Gérard
Lyon-Caen, Dalloz, 1989, p. 285.
(1033) Cass. soc., 11 juin 1987, D. 1987, IR, 155. Contra : Cass. soc., 22 avr. 1966, Bull. civ. IV,
no 367 : le juge « doit recourir à une mesure spéciale d’instruction en vue de rechercher s’il
n’existait pas un usage applicable ».
(1034) Cass. req., 22 déc. 1902, DP 1903, 1, 149 : « s’il est de principe que le juge ne peut tenir
les faits pour avérés qu’autant qu’ils ont été établis devant lui, selon les règles et formes
prescrites par la loi, il ne saurait lui être interdit, en matière de commerce, de constater un usage
pour en faire le fondement de sa décision ». L’incertitude qui entoure chaque usage interdit au juge
de soulever d’office son application sans le soumettre à la libre discussion des parties (T. civ.
Toulouse, 11 janv. 1939, DH 1939, 159. Comp. Cass. civ., 4 nov. 1918, DP 1923, 1, 102).
(1035) Tel est le cas dans le délit de tromperie (C. consom., art. L. 441-1) lorsque le produit sur
lequel porte la fraude ne contrevient à aucune réglementation. Ex. : Cass. crim., 7 oct. 1998, Dr. pén.
1999, comm. 60 : « en matière de fraude commerciale portant sur [...] un produit non réglementé,
il appartient aux juges du fond de se référer aux usages commerciaux en vigueur dont ils
apprécient souverainement l’existence » (emploi abusif par un conchyliculteur de la dénomination
« moules de bouchot », selon les avis d’un organisme professionnel et de l’Ifremer).
(1036) Ex. : Cass. com., 9 janv. 2001, Bull. civ. IV, no 9, appliquant un usage établi par les
attestations de la chambre des métiers de la Gironde et du Groupement des lamineurs et fileurs
d’aluminium.
(1037) En ce sens : Cass. com., 22 juin 1955, Bull. civ. IV, no 222.
(1038) Cass. civ., 14 oct. 1957, Bull. civ. I, no 297 ; Cass. com., 3 mai 1966, Bull. civ. IV, no 201 ;
Cass. 1re civ., 27 nov. 1973, Bull. civ. I, no 326 (la cour d’appel n’était « pas tenue de préciser les
éléments d’où résultait l’usage ») ; Cass. 1re civ., 6 janv. 1987, Bull. civ. I, no 2 ; JDI 1987, p. 638,
note B. Goldman : « Il n’appartient pas à la Cour de cassation de contrôler l’existence et
l’application des principes et usages du commerce international ».
(1039) La Cour de cassation censure les vices de motivation, tels que le manque de base légale (ex. :
Cass. soc., 2 juill. 1968, Bull. civ. V, no 349 ; le défaut de réponse à conclusions (ex. : Cass. com.,
14 juin 1977, Bull. civ. IV, no 148) ou la dénaturation d’écrits servant de preuve (ex. : Cass. civ.,
12 janv. 1938, DH 1938, 197).
(1040) V. supra, no 212.
(1041) Cass. 1re civ., 18 avr. 2000, Bull. civ. I, no 111. V. déjà Cass. 3e civ., 9 mars 1988, Bull. civ. III,
no 53 : l’absence de « réserve ou protestation [...] n’établit pas l’existence d’un contrat entre les
parties ».
(1042) Sur l’aveu, v. infra, no 241.
(1043) Ex. : Cass. 2e civ., 29 juin 1967, Bull. civ. II, no 237.
(1044) Ex. : il est inopérant, afin d’établir la faute d’un conducteur de véhicule, de vouloir démontrer
sa passion pour le tiercé ou la vie dissolue de sa femme.
(1045) Ch. AUBRY et Ch. RAU, Cours de droit civil français, 5e éd., par E. Bartin, t. XII, 1922, § 749
bis, note 10 bis : « En pure logique, la preuve ne devrait jamais avoir pour objet que les faits qui
ont donné naissance au droit invoqué en justice. En réalité, pareille exigence est inadmissible [...].
La force des choses conduit à substituer à la preuve des faits générateurs du droit prétendu, qu’il
est pratiquement impossible d’atteindre, la preuve de faits voisins et connexes [...]. L’objet de la
preuve se déplace, en quelque sorte, et je propose, en effet, de qualifier du nom de déplacement de
preuve ce trait essentiel de la preuve judiciaire ».
(1046) Ex. : Cass. civ., 18 janv. 1813, Jur. Gén., Vo Dispositions entre vifs et testamentaires,
no 2513 : il est inopérant, pour celui qui se prétend légataire, de vouloir prouver que le de cujus
l’avait verbalement gratifié à cause de mort puisque, en droit français, le testament verbal est
dépourvu d’effet.
(1047) Ex. : il est inopérant de demander qu’une enquête soit ordonnée pour établir qu’un événement
a eu lieu sans témoin.
(1048) Ex. : Cass. 2e civ., 12 mars 1970, Bull. civ. II, no 96 : « Le juge n’est pas tenu d’ordonner une
mesure d’instruction quand sa conviction est formée » ; en l’espèce, « l’enquête civile s’avérait
sans intérêt ».
(1049) Ex. : Cass. com., 4 nov. 1965, Bull. civ. IV, no 557.
(1050) Ex. : Cass. com., 21 oct. 1963, Bull. civ. IV, no 425 : les juges du fond ont pu rejeter la
demande d’enquête formulée par le soi-disant créancier, « ayant relevé le caractère invraisemblable
de la créance alléguée ».
(1051) Pour la force probante, v. infra, no 253. Sur l’aveu judiciaire invraisemblable, v. infra,
no 241, 1º.
(1052) V. infra, nos 230 et s.
(1053) Ex. : Cass. com., 13 juin 1995, Bull. civ. IV, no 172 ; RTD com., 1995, p. 818, obs.
M. Cabrillac : « Le secret professionnel auquel est tenu un établissement de crédit constitue un
empêchement légitime opposable au juge civil », au sens des art. 10 C. civ. et 11 C. pr. civ. (sur ces
textes, v. supra, no 212).
(1054) Cass. 2e civ., 29 mars 1989, aff. de l’archevêque de Nouméa, D. 1990, 45, note M. Robine
(cassant Nouméa, 28 sept. 1987, JCP G, 1988.II.20994, note J.-L. Vivier) : « Nul ne peut être
contraint à produire en justice des documents relatifs à des faits dont il a eu connaissance dans
l’exercice de ses fonctions et touchant à l’intimité de la personne » (l’archevêque de Nouméa avait
refusé de communiquer au juge civil des pièces extraites d’une procédure ecclésiastique en
annulation de mariage).
(1055) Cass. crim., 4 déc. 1891, DP 1892, 1, 139 : les ministres du culte (quel qu’il soit) sont tenus
au secret professionnel dont la violation constitue le délit de l’art. 226-13 C. pén. Adde Cass. crim.,
6 juill. 1894, DP 1899, 1, 171 : le témoin tenu au secret professionnel a le droit et le devoir de ne
donner aucune explication sur des faits dont il n’aurait eu connaissance qu’à raison de sa profession
et qui ne lui auraient été révélés qu’à titre confidentiel. V. toutefois T. corr. Caen, 4 sept. 2001,
D. 2002, Som. 1803, obs. G. Roujou de Boubée, condamnant l’évêque de Caen qui n’avait pas
dénoncé les faits de pédophilie imputables à un prêtre de son diocèse, cette information ne relevant
pas de la confession (l’évêque ne confesse pas les prêtres de son diocèse).
(1056) Le canon 1388, § 1, du Code de droit canonique menace d’excommunication « le confesseur
qui viole directement le secret sacramentel » (le secret de la confession, mais non les autres
secrets). Cf. H. MOUTOUH, « Secret professionnel et liberté de conscience : l’exemple des ministres
du culte », D. 2000, chr. 431.
(1057) Cass. 1re civ., 4 juin 2014, Bull. civ. I, nº 101 : « le droit à la preuve découlant de l'article 6
de la Convention EDH ne peut faire échec à l'intangibilité du secret professionnel du notaire,
lequel n'en est délié que par la loi, soit qu'elle impose, soit qu'elle autorise la révélation du
secret ». Pour une critique, G. LARDEUX, note sous CJCE, 16 juill. 2015, aff. C-580/13, Coty
Germany GmbH, D. 2016, 96 (faisant prévaloir le droit à la preuve d’une contrefaçon sur le secret
bancaire).
(1058) * Cass. crim., 19 déc. 1885, aff. du peintre Bastien-Lepage, DP 1886, 1, 347 ; S., 1886, 1,
86 : en l’espèce, le peintre Bastien-Lepage avait été soigné par le docteur Watelet pour un cancer des
testicules ; après son décès, le journal Le Matin avait publié une nécrologie insinuant qu’il était mort
d’une maladie vénérienne mal soignée ; son médecin voulut rétablir la vérité par un nouvel article ; il
fut condamné pour violation du secret professionnel.
(1059) Le docteur Gubler, médecin personnel de François Mitterrand, avait publié un livre de
révélations sur la santé du défunt président, intitulé « Le grand secret », qui fut interdit de diffusion
(Cass. 1re civ., 16 juill. 1997, D. 1997, 452 ; JCP G, 1997.II.22964). Ultérieurement, la France fut
condamnée pour violation de l’article 10 Conv. EDH en raison du trop long maintien de l’interdiction
et alors que le médecin avait été condamné pénalement et disciplinairement (CEDH, 18 mai 2004,
D. 2004, 1838, note A. Guedj).
(1060) V. infra, nº 230.
(1061) Ex. : Cass. 1re civ., 26 mai 1964, D. 1965, 109, note R. Le Bris ; JCP G, 1964.II.13751, concl.
R. Lindon.
(1062) 1er ex. : C. pén., art. 226-14 : l’art. 226-13 n’est pas applicable à celui qui informe les
autorités de privations ou sévices infligés à un mineur de quinze ans ou à une personne vulnérable.
De facultative, la dénonciation devient obligatoire pour les professionnels de l’enfance en danger, à
peine de poursuites pénales. 2e ex. : l’Administration fiscale et les organismes de sécurité sociale
disposent d’un « droit de communication » qu’ils exercent auprès d’un grand nombre de personnes
privées et publiques (LPF, art. 81 et s. ; CSS, art. L. 114-19 et s.). Nul secret professionnel ne peut y
faire obstacle.
(1063) Ex. : l’art. 35 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse interdit la preuve de la
vérité du fait diffamatoire (l’exceptio veritatis est un moyen de défense pour le diffamateur)
« lorsque l’imputation concerne la vie privée de la personne ».
(1064) J. LARGUIER, « La preuve d’un fait négatif », RTD civ. 1953, p. 1.
(1065) Ex. : Cass. 3e civ., 13 déc. 1989, Bull. civ. III, no 234 : c’est au bailleur qui souhaite résilier le
bail conclu avec un couple de boulangers de démontrer que le nouveau four de ses locataires cause
des nuisances aux tiers et non aux époux boulangers de prouver qu’il n’en cause pas, « ce qui
conduirait à exiger d’eux une preuve négative ».
(1066) Cass. com., 5 mars 1996, Bull. civ. IV, no 77. Une société anonyme affirmait ne pas être en
mesure de prouver que son président n’avait pas été autorisé par le conseil d’administration à
souscrire un cautionnement et, sous ce prétexte, refusait de communiquer le registre des délibérations
du conseil : « Le juge doit tirer toute conséquence d’une abstention ou d’un refus par une partie
d’apporter son concours à la justice, en vue de la manifestation de la vérité » (C. civ., art. 10 ;
C. pr. civ., art. 11), ce qui « rendait possible la preuve du fait allégué ».
(1067) Ex. : Cass. req., 29 oct. 1940, DH 1940, 195 : « Il incombait à la veuve (d’un homme mort
noyé après avoir souscrit une assurance-décès) de rapporter la preuve, non seulement que le décès
de son mari était dû à une immersion, mais que cette immersion était involontaire » (afin de
conserver le bénéfice de la police d’assurance, qui eût été écartée en cas de suicide, selon l’art.
L. 132-7, C. assur.).
(1068) 1er ex. : je peux démontrer que je n’étais pas là à tel instant en prouvant que j’étais ailleurs
(sens étymologique du mot alibi). 2e ex. : Cass. req., 17 févr. 1913, S., 1913, 1, 260 : la preuve de la
non-consommation du mariage, cause de divorce, résulte d’un certificat attestant la virginité de
l’épouse et de documents montrant qu’elle n’avait « jamais opposé de résistance à
l’accomplissement du devoir conjugal ».
(1069) Ex. : Cass. 1re civ., 2 mai 1955, Bull. civ. I, no 176 : pour écarter l’hypothèse d’un suicide
conscient et réfléchi du souscripteur d’une assurance-décès, le bénéficiaire réunira des indices
d’inconscience tels que l’état mélancolique du défunt avant sa mort ou ses difficultés familiales et
professionnelles...
(1070) Ex. : Cass. 1re civ., 18 nov. 1997, Bull. civ. I, no 313 ; RTD civ. 1998, p. 402, obs. P.-Y.
Gautier : « Il incombe au prestataire, en sa qualité de demandeur, d’établir le montant de sa
créance et, à cet effet, de fournir les éléments permettant de fixer ce montant, et il appartient au
juge d’apprécier celui-ci en fonction notamment de la qualité du travail fourni » (contestation par
un client des honoraires dus à un expert-comptable). Comment le prestataire peut-il prouver la qualité
de son travail ?
(1071) Cass. com., 15 mai 2007, Bull. civ. IV, no 130 : « le fait d’interdire à une partie de faire la
preuve d'un élément de fait essentiel pour le succès de ses prétentions constitue une atteinte au
principe de l'égalité des armes résultant du droit au procès équitable garanti par l'article 6 de la
Conv. EDH » ; parallèlement, « une atteinte à la vie privée peut être justifiée par l'exigence de la
protection d'autres intérêts, dont, antérieurement, celle des droits de la défense, si elle reste
proportionnée » (la production de pièces relatives à l’état de santé d’un dirigeant d’entreprise
pouvait être justifiée par la nécessité de savoir s’il n'avait pas été empêché d'exercer ses fonctions).
Dans le même sens, Cass. 1re civ., 5 avril 2012, D. 2012.1596, note G. Lardeux : la production d’une
correspondance privée par le demandeur pouvait être « indispensable à l'exercice de son droit à la
preuve, et proportionnée aux intérêts antinomiques en présence ».
(1072) G. GOUBEAUX, « Le droit à la preuve », in La preuve en droit, Bruylant, 1981, p. 301.
(1073) A. BERGEAUD, Le droit à la preuve, thèse, LGDJ, 2010 (ce droit serait autonome par rapport
au principe du respect du contradictoire, au droit à un procès équitable ou à l’égalité des armes et au
droit d’agir en justice).
(1074) V. supra, no 201.
(1075) Étymologie : du latin litteralis, is, e = relatif aux lettres de l’alphabet, dérivé de littera,
æ = lettre.
(1076) Cass. 1re civ., 19 déc. 1995, Bull. civ. I, no 473 : « la preuve d’un mandat, même verbal, ne
peut être reçue que conformément aux règles générales sur la preuve des conventions ».
(1077) Ces deux catégories de preuves seront étudiées plus en détail infra, nos 235 et s.
(1078) V. infra, nº 232, 1º.
(1079) Cass. 1re civ., 9 févr. 2012, D. 2012, 640 (2e esp.).
(1080) Cass. 1re civ., 9 févr. 2012, D. 2012, 640 et 993, n. A. Donnette (3e esp.). La notion de
« cause » a disparu du Code civil après la réforme du droit des contrats (ord. 10 févr. 2016).
(1081) Cass. req., 18 juill. 1906, DP 1907, 1, 111 ; Cass. civ., 24 déc. 1919, DP 1920, 1, 12 ; S.,
1922, 1, 6 ; RTD civ. 1921, p. 259, obs. R. Demogue (la Cour de cassation appelait « fait juridique »
et « fait matériel », respectivement, l’acte juridique et le fait juridique). Adde : Cass. 1re civ., 27 avr.
1977, D. 1977, 413 ; Cass. com., 13 mars 1984, Bull. civ. IV, no 99 ; D. 1985, 244, note Y. Reinhard :
« La preuve d’une société de fait, qui n’a d’autre objet que de déterminer les rapports qui ont pu
exister entre les associés, peut être rapportée par tout moyen » ; Cass. 1re civ., 9 déc. 1986,
Bull. civ. I, no 292 (preuve d’une intention libérale) ; Cass. 1re civ., 23 févr. 1994, Defrénois 1995,
p. 876 (la preuve d’un vice du consentement, simple fait extérieur à un acte notarié, est libre mais
elle ne doit pas aller à l’encontre du contenu de l’acte) ; Cass. 1re civ., 24 sept. 2002, Bull. civ. I,
no 220 : « Tout rapport amiable peut valoir, à titre de preuve, dès lors qu'il est soumis à la libre
discussion des parties » (preuve d’un vice caché) ; Cass. 1re civ., 4 janv. 2005, cité infra, no 232
(preuve du refus d’un examen médical) ; Cass. soc., 25 sept. 2013, cité infra, nº 240, 4º (preuve par
courriel des pressions exercées par un employeur sur son salarié).
(1082) Ex. : Cass. 3e civ., 23 oct. 2013, Bull. civ. III, nº 134 : « la faute résultant de la violation
d'une règle d'urbanisme et recherchée sur le fondement de l'article 1382 [anc., devenu art. 1240]
du Code civil, pouvait être établie par tous moyens ».
(1083) L. SIGUOIRT, La preuve du paiement des obligations monétaires, thèse, LGDJ, 2010.
(1084) Il fut d’abord jugé que « celui qui excipe du paiement d’une somme d’argent est tenu d’en
rapporter la preuve conformément aux règles édictées par les art. [1359] et s. » (Cass. 1re civ.,
19 mars 2002, Bull. civ. I, no 101) ; néanmoins, « le paiement de l’indu, simple fait juridique, peut,
s’agissant d’un quasi-contrat, être prouvé par tous moyens » (Cass. 1re civ., 29 janv. 1991,
Bull. civ. I, no 36) ; de même, « aucune disposition n’impose qu’un ordre de virement, même
émanant d’un non-commerçant, soit rédigé par écrit » (Cass. com., 29 janv. 1985, Bull. civ. IV,
no 36).
(1085) Cass. 1re civ., 6 juill. 2004, Bull. civ. I, no 202.
(1086) Cass. req., 18 juill. 1906, DP 1907, 1, 111 ; Cass. 3e civ., 25 janv. 1984, Bull. civ. III, no 20 ;
D. 1985, 117, note J. Héron : « irrecevabilité de la demande d’enquête formée par (une indivisaire)
pour prouver que, contrairement aux termes d’une quittance notariée, elle n’avait pas reçu sa part
du prix d’adjudication ». – Cass. 1re civ., 4 nov. 2011, JCP E, 2012, 184 ; D. 2012, 63, n. J. François
et 2831, obs. I. D.-C : « si celui qui a donné quittance peut établir que celle-ci n'a pas la valeur
libératoire qu'implique son libellé, cette preuve ne peut être rapportée que dans les conditions
prévues par les articles 1341 [anciens] et suivants du Code civil ». Sur le cas où la quittance
mentionne une somme payée « en dehors de la comptabilité du notaire », v. infra, nº 251.
(1087) Cass. 1re civ., 15 sept. 2010, Bull. civ. I, no 160, précisant que « l'absence de rigueur [du
créancier vis-à-vis de son débiteur] au cours de l'exécution du bail ne permettait pas de dire que
les parties avaient passé une convention simulée ».
(1088) Cass. 1re civ., 17 déc. 2009, JCP G, 2010, 315, n. L. Leveneur (preuve de la dissimulation du
prix de vente d’un immeuble – un « dessous-de-table »).
(1089) Ex. : Cass. 1re civ., 2 févr. 1988, Bull. civ. I, no 30 ; Cass. 1re civ., 9 mai 1996, Bull. civ. I,
no 189 : la preuve d’une clause de tacite reconduction stipulée dans un contrat d’assurance est libre
dans les rapports entre assureurs et soumise à l’art. 1359 (anc. art. 1341) « dans les rapports entre
les parties au contrat et à l’égard de la victime ». – Cass. 1re civ., 3 juin 2015, nº 14-19825,
D. 2016, 172, obs. A. Aynès : « le banquier dépositaire, qui se borne à exécuter les ordres de
paiement que lui transmet le mandataire du déposant, peut rapporter la preuve par tous moyens du
contrat de mandat auquel il n'est pas partie ».
(1090) Il faut tenir compte ici des effets de la représentation. V. Cass. 1re civ., 19 déc. 1995,
Bull. civ. I, no 473 : les règles civiles de preuve « sont également applicables dans les rapports du
mandant avec les tiers qui ont traité avec le prétendu mandataire ».
(1091) Ex. : Cass. 1re civ., 18 mai 1994, Bull. civ. I, no 175 : « La révocation d’un contrat par
consentement mutuel des parties peut être tacite et résulter des circonstances de fait
souverainement appréciées par les juges du fond, sans qu’il soit nécessaire d’en rapporter la
preuve par écrit ».
(1092) Cass. com., 25 juin 2002, Bull. civ. IV, no 110.
(1093) Cass. 1re civ., 7 mai 1980, Bull. civ. I, no 142 : la renonciation tacite à un droit n’est assujettie
à aucun mode particulier de preuve. Cf. Fr. DREIFUSS-NETTER, Les manifestations de volonté
abdicatives, LGDJ, 1985, nos 81 et s. et nos 160 et s. – La Cour de cassation avait décidé de contrôler
la qualification de renonciation (Cass. ch. mixte, 26 avr. 1974, D. 1975, 249, note J. Boré ; JCP G,
1975.II.18157, concl. Gégout : « La renonciation à un droit ne résulte que d’actes manifestant sans
équivoque la volonté de renoncer »).
(1094) Cass. 1re civ., 20 févr. 1996, Bull. civ. I, no 92 ; 11 janv. 2000, D. 2001, 890 ; RTD civ. 2002,
p. 121, obs. Th. Revet.
(1095) Cass. 3e civ., 20 juill. 1988, Bull. civ. III, no 136.
(1096) Cass. civ., 10 juill. 1945, D. 1946, 181, note P. Mimin ; Cass. 1re civ., 20 janv. 1969,
Bull. civ. I, no 30 ; Cass. 1re civ., 27 avr. 1977, Bull. civ. I, no 192 ; Cass. 3e civ., 30 mai 1996,
Bull. civ. III, no 122 (l’appréciation de la « consistance exacte des biens loués » est souveraine).
(1097) Cass. 1re civ., 25 janv. 1989, deux arrêts, Bull. civ. I, nos 41 et 42. V. cependant, Cass. 1re civ.,
26 janv. 2012, Bull. civ. I, nº 13 : « s'il n'est reçu aucune preuve par témoins ou présomptions
contre et outre le contenu des actes, cette preuve peut cependant être invoquée pour interpréter un
acte obscur ou ambigu » (admettant que l’existence d’une « erreur matérielle évidente » entachant un
acte notarié soit déduite du silence opposé par l’un des cocontractants à l’affirmation de l’autre).
(1098) L’objet que cette preuve rend vraisemblable doit être bien identifié. Ex. : Cass. 1re civ., 3 juin
1998, JCP E, 1998, p. 1072, note P. Morvan ; Defrénois 1999, p. 99, note S. Piédelièvre ; D. 1999,
453 ; JCP G, 1999.II.10062 : « L’endossement de chèque démontre seulement la réalité de la
remise de fonds », non l’existence d’un contrat de prêt.
(1099) Cass. 1re civ., 16 juin 1993, Bull. civ. I, no 219 ; D. 1995, 406, note R. Raffi (rature apposée
par le créancier sur la signature du débiteur dans une reconnaissance de dette).
(1100) Cass. 1re civ., 12 juill. 2005, Bull. civ. I, no 328 : « en l'absence d'écrit constatant
l'abonnement (téléphonique), le relevé informatique émanant de la société France Telecom ne
pouvait constituer un commencement de preuve par écrit de la créance litigieuse ».
(1101) Cass. 1re civ., 27 mai 1986, Bull. civ. I, no 141 ; RTD civ. 1987, p. 765, obs. J. Mestre. La
copie carbone était aussi une copie au sens de l’ancien art. 1334 C. civ. (Cass. 1re civ., 17 juill. 1980,
Bull. civ. I, no 225).
(1102) Cass. 1re civ., 14 févr. 1995, JCP G, 1995.II.22402, note Y. Chartier ; D. 1995, 341, note
S. Piédelièvre.
(1103) J. HUET, « La valeur juridique de la télécopie (ou fax), comparée au télex », D. 1992, chr. 33.
Sur la télécopie, v. aussi la note suivante et infra, no 244, en note.
(1104) Cass. req., 10 déc. 1810 et 31 août 1831, reproduits in D. AMMAR, note au JCP G,
1995.II.22512. L’enjeu (aujourd’hui dépassé) était relatif à la validité de l’accomplissement d’une
formalité procédurale par télécopie là où la loi exige un écrit.
(1105) Ex. : Cass. 1re civ., 23 janv. 1996, Bull. civ. I, no 41 : « En retenant des présomptions tirées
du refus (d’une partie) de s’expliquer sur le sens qu’elle entend donner à sa signature, et de ses
réticences et arguties, la cour d’appel, [...] ne s’est pas fondée sur des éléments intrinsèques au
document ».
(1106) Ex. : Cass. 1re civ., 13 mai 1964, Bull. civ. I, no 251 : le titulaire d’un livret de caisse
d’épargne étant « incapable d’écrire », l’autorisation délivrée à un tiers de retirer de l’argent se
prouve par tous moyens.
(1107) Ex. : Cass. 1re civ., 18 sept. 2008, no 06-21384, inédit (« relation sentimentale ») ; CA Paris,
Pôle 5, ch. 1, 12 janv. 2011, nº 09/16085, inédit : « Les parties entretenaient des rapports
particuliers de confiance et d’affection dans le cadre d’une relation intime établie depuis plus de
deux années. L’appelante [l’écrivain Calixthe Belaya] se trouvait, en de telles circonstances, dans
l’impossibilité morale de se constituer la preuve littérale de l’obligation pour l’intimé
[l’animateur Michel Drucker] de lui octroyer une rémunération en contrepartie du travail
accompli » (la rédaction d’un livre).
(1108) Cass. 1re civ., 20 mai 2009, Bull. civ. I, no 97 (« liens de parenté et d’affection »). Pour des
exemples devant des cours d’appel : D. 2008, Pan., 2825, obs. Ph. Delebecque.
(1109) Ex. : Cass. 3e civ., 7 janv. 1981, Bull. civ. III, no 7, des « liens particuliers et quasi familiaux
d’estime et d’affection » avaient mis un débirentier « dans l’impossibilité morale de se procurer
une preuve littérale du paiement de la rente viagère qu’il devait ».
(1110) Cass. 1re civ., 17 mars 1982, Bull. civ. I, no 114 ; Cass. com., 22 mars 2011, RTD civ. 2011,
p. 493, obs. P. Deumier (usage agricole de conclure verbalement des ventes d’aliments pour le bétail,
notamment par téléphone). La jurisprudence semblait admettre que l’usage déroge directement à
l’article 1359 (anc. art. 1341) sans caractériser l’impossibilité morale. Il est vrai que les usages
professionnels auraient, selon une doctrine, une nature conventionnelle (v. infra, no 375) ; or, une
convention peut écarter l’art. 1359 (v. infra, no 234).
(1111) Cass. 1re civ., 12 nov. 2009, Bull. civ. I, no 227 (irrecevabilité de la photocopie certifiée
conforme d’un testament olographe, l’original n’ayant pas été perdu à la suite d’un cas fortuit ou de
force majeure).
(1112) Cass. 1re civ., 14 et 29 janv. 2014, D. 2014, 709, n. E. Garaud : « l'exception qu'institue
[l’art. 1348] n'est pas subordonnée à l'existence d'un commencement de preuve par écrit »
(2e esp.).
(1113) V. infra, nº 238, 1º.
(1114) Cass. 1re civ., 30 avr. 1969, D. 1969, 412 ; JCP G, 1969.II.16057, note M. A. : si, en principe,
la copie d’un acte sous signature privée n’a aucune valeur légale et ne peut suppléer à la
représentation de l’original, il n’en est pas de même lorsque l’existence de l’original et la conformité
de la copie ne sont pas déniées ; Cass. 1re civ., mai 2006, Bull. civ. I, no 211 : en raison des
discordances affectant les copies produites, le juge ne peut se prononcer sur l'incident de faux sans
ordonner la représentation de l'original de l'acte qui en est l'objet ; Cass. 1re civ., 24 oct. 2006,
Bull. civ. I, no 436 (même si la copie produite a été certifiée conforme par le notaire).
(1115) Cass. 1re civ., 25 juin 1996, Bull. civ. I, no 270.
(1116) Cass. 1re civ., 6 oct. 1998, Bull. civ. I, no 271 : à défaut d’acte original, dont il lui appartient
d’ordonner la production dès lors qu’une partie conteste la conformité de la copie, le juge doit
« rechercher si la copie versée aux débats (est) une reproduction fidèle et durable de l’original ou
si celui-ci (a) disparu par suite d’un cas fortuit ou d’une force majeure » ; Cass. 1re civ., 28 mars
2000, Bull. civ. I, no 106 : lorsqu’une partie soutient qu’une télécopie est un « montage destiné à
faire croire à l’existence d’un original qu’elle n’avait pas établi », le juge décide par une
appréciation souveraine que la preuve du contrat n’est pas rapportée ; Cass. 1re civ., 30 mai 2000,
JCP G, 2001.II.10505, qui conclut, à l’inverse, que la photocopie était une « copie sincère et fidèle »
en l’absence de « trace de falsification par montage » et en présence de « grande similitudes »
avec l’écriture du débiteur.
(1117) Cass. 1re civ., 19 févr. 2013, D. 2013, 1041, n. É. Garaud : la photocopie ne contenait pas,
conformément à l’art. 1325 ancien (devenu art. 1375), « la mention du nombre des originaux qui
avaient été faits de la convention synallagmatique et ne pouvait dès lors valoir que comme
commencement de preuve par écrit » (sur les exigences des art. 1375 et 1376, v. infra, nº 237).
(1118) Cass. 1re civ., 13 déc. 2005, Bull. civ. I, no 503. Comp. Cass. 1re civ., 12 nov. 2009, JCP G,
2009, 584, n. J.-R. Binet, qui n’applique que l’art. 1348, alinéa 1er du C. civ. et semble ne pas vouloir
prendre appui sur son alinéa 2.
(1119) Ex. : Cass. 1re civ., 29 juin 1960, Bull. civ. I, nº 355 : en participant sans réserve à une mesure
d’instruction judiciaire (enquête), une partie avait admis que l’offre de preuve portant sur un fait
matériel (et non sur la servitude litigieuse, qui aurait dû être prouvée par écrit) était pertinente et ne
pouvait plus contester la recevabilité de la preuve testimoniale à ce sujet.
(1120) Ex. : Cass. req., 20 mars 1876, DP 1877, 1, 254 ; S. 1877, 1, 338 (partie ayant déclaré qu’elle
s’en rapportait aux livres de compte du notaire : « cette convention [...] ne porte aucune atteinte à
l’ordre public »).
(1121) Cass. 1re civ., 8 nov. 1989, Crédicas, deux arrêts, Bull. civ. I, no 342 ; Bull. inf. C. cass. 1990,
no 296, p. 21, rap. C. Bernard ; D. 1990, 369, note Chr. Gavalda ; JCP G, 1990.II.21576, note
G. Virassamy ; D. 1990, somm. 327, obs. J. Huet ; D. 1991, somm. 38, obs. M. Vasseur.
(1122) Cass. 1re civ., 19 oct. 1999, Bull. civ. I, no 285 : le titulaire de la carte de crédit qui
communique à un hôtelier le numéro de sa carte délivre un ordre de paiement du prix convenu par
débit de son compte ; il lui incombe de se ménager la preuve qu’il a annulé à temps sa réservation.
(1123) V. supra, no 213.
(1124) Y. FLOUR et A. GHOZI, « Les conventions sur la forme », in Le formalisme, Defrénois 2000,
p. 866 et s., art. 37211. Sur la force probante, v. infra, nos 250 et s.
(1125) Cass. 2e civ., 10 mars 2004, Bull. civ. II, no 101 : « la preuve du sinistre, qui est libre, ne
pouvait être limitée par le contrat » d’assurance (qui, en l’espèce, énumérait les indices d’effraction
admissibles). L’arrêt s’appuie sur l’art. 6, § 1, Conv. EDH.
(1126) V. supra, no 233.
(1127) Ph. MALAURIE, « Regards sur le formalisme en droit privé », Defrénois 2005, art. 38129,
p. 481.
(1128) V. supra, no 231.
(1129) L’authenticité (rapp. collectif à la demande du Conseil supérieur du notariat), dir. L. Aynès,
La Doc. fr., 2013 (cf. la présentation de ce rapport par L. AYNÈS, JCP, G 2013, 1066 et M. MEKKI,
ibid., 1064). La sécurité juridique, la force probante et la force exécutoire de l’acte authentique
expliquent sa diffusion mondiale, sauf dans les pays anglo-saxons. Adde J.-M. OLIVIER,
« L’authenticité en droit positif français », in Modernité de l’authenticité, LPA, 28 juin 1993, no 77,
p. 12 ; Y. LAUTHIER, RDC 2012, p. 44.
(1130) Cass. soc., 29 oct. 2002, Bull. civ. V, no 326 : « aux termes de l'art. 1er de l'ordonnance du
2 novembre 1945 les huissiers de justice peuvent être commis en justice pour effectuer des
constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit
qui peuvent en résulter ; (ils) ne peuvent être commis pour procéder à des auditions de témoins qui
relèvent de la procédure d'enquête prévue par les art. 204 et s. C. pr. civ. et ils ne peuvent dès lors
recueillir des témoignages qu'aux seules fins d'éclairer leurs constatations matérielles ».
(1131) Cass. 2e civ., 12 déc. 1990, Rev. arb. 1991, p. 317, n. Ph. Théry. V. d’ailleurs C. pr. civ.,
art. 1477, 1478, 1500 qui mentionnent la « minute de la sentence ».
(1132) Cass. 1re civ., 2 juill. 2014, Bull. civ., nº 118 ; Cass. ch. mixte, 21 déc. 2012, Bull. civ. ch.
mixte, nº 4. Contra, Cass. 2e civ., 7 juin 2012 (5 arrêts), D. 2012.1557 et 1789, n. M. Mekki ; JCP N,
2012, 11311, n. Ph. Théry ; RDC 2012, 1209, obs. R. Libchaber. Sur cette controverse, v. les
chroniques de : Ph. DELEBECQUE, JCP G, 2012, 263 ; L. AYNÈS, D. 2012, 890 ; Ph. THÉRY, JCP G,
2012, 471. Sur le « déclassement » de l’acte authentique irrégulier, v. infra, nº 251.
(1133) Cass. 1re civ., 10 sept. 2015, nº 14-13237, Bull. civ., à paraître.
(1134) Ex. : Cass. 1re civ., 5 nov. 2009, D. 2010, 938, n. N. Dissaux : « le mandat apparent ne peut
être admis pour l'établissement d'un acte par un notaire instrumentaire avec le concours d'un
confrère, les deux officiers publics étant tenus de procéder à la vérification de leurs pouvoirs
respectifs » (un des deux notaires n’avait plus mandat de son client).
(1135) La « grosse » (copie exécutoire) était rédigée en grosses lettres par opposition à la « minute »
(l’original), rédigée en petits caractères (minuta scripta).
(1136) L. no 76-519 du 15 juin 1976, art. 1er : « Pour permettre au créancier de poursuivre le
recouvrement de sa créance, le notaire établit une copie exécutoire, qui rapporte littéralement les
termes de l’acte authentique qu’il a dressé. Il la certifie conforme à l’original et la revêt de la
formule exécutoire ». Cette formule exécutoire est identique à celle apposée sur les jugements
(D. no 71-941 du 26 nov. 1971, mod. D. 10 août 2005, art. 33. Sur son libellé, v. supra, no 173).
L. no 91-650 du 9 juill. 1991, portant réforme des procédures civiles d’exécution, art. 3 : « Seuls
constituent des titres exécutoires : [...] 4o Les actes notariés revêtus de la formule exécutoire ».
(1137) Cass. 1re civ., 5 nov. 2009, préc. Jurisprudence constante.
(1138) Cass. 1re civ., 6 janv. 1994, Bull. civ. I, no 6 ; 20 janv. 1998, Bull. civ. I, no 21 : « Le notaire
est tenu, en tant que rédacteur d’un acte, de procéder préalablement à la vérification des faits et
conditions nécessaires pour en assurer l’utilité et l’efficacité » juridiques (dans ces deux espèces,
en vérifiant la sincérité au moins apparente de la signature figurant sur une procuration sous signature
privée). V. cependant, Cass. 1re civ., 23 févr. 2012, Bull. civ. I, nº 39 : le notaire n’est « pas tenu de
contrôler la véracité des informations d’ordre factuel fournies par les parties en l’absence
d’éléments de nature à éveiller ses soupçons ».
(1139) Infra, no 237.
(1140) D. no 55-22 du 4 janv. 1955, portant réforme de la publicité foncière, art. 4, al. 1er.
(1141) Sur cette triple distinction, v. supra, no 202.
(1142) En droit international privé : Cass. 1re civ., 23 janv. 2001, JCP G, 2001.II.10620, note
G. Legier : « Selon la règle de conflit française, la loi applicable à la forme des actes est celle du
lieu de leur conclusion » (nullité de la donation faite en France par acte sous signature privée, peu
important que les biens fussent déposés en Suisse). La règle est résumée par l’adage locus regit
actum.
(1143) Infra, no 251.
(1144) Mais une empreinte digitale (Cass. civ., 15 mai 1934, DP 1934, 1, 113 ; S., 1935, 1, 9) ou une
croix (Cass. 1re civ., 15 juill. 1957, Bull. civ. I, no 331) ne sont pas des signatures.
(1145) Cass. com., 8 oct. 1996, D. 1997, 504, note A. Fauchon : « Aucun principe ni aucun texte ne
prohibe l’usage d’un crayon dans la rédaction d’un acte sous seing privé ». Au contraire, lorsqu’un
acte notarié « est établi sur support papier, le texte doit être indélébile et la qualité du papier doit
offrir toute garantie de conservation » et « les signatures et paraphes qui y sont apposés doivent
être indélébiles » (D. no 71-941 du 26 nov. 1971, mod. D. 10 août 2005, art. 11).
(1146) Cass. 1re civ., 30 oct. 2008, no 07-20001, inédit, qui rappelle qu’« en dehors des exceptions
prévues par la loi, l'acte sous seing privé n'est soumis à aucune autre condition de forme que la
signature de ceux qui s'y obligent ».
(1147) Cass. 1re civ., 15 avr. 1992, Bull. civ. I, no 131 ; D. 1992, somm. 395, obs. J. Kullmann (mais
la preuve de l’accord de chaque partie sur cette modalité, qui est une exception à la règle de
l’art. 1325, doit être rapportée par l’autre). Adde Cass. 1re civ., 13 janv. 1993, Bull. civ. I, no 16 :
l’art. 1325 « cesse d’être applicable lorsque, au moment de la rédaction de l’acte, l’une (des
parties) ayant exécuté toutes ses obligations, la possession d’un original serait sans intérêt pour
l’autre partie laquelle n’a plus aucun droit à faire valoir ».
(1148) V. infra, no suivant.
(1149) Cass. 1re civ., 13 mars 2008, JCP G, 2008.II.10081, n. E. Putman ; JCP E, 2008, 2089,
n. Ph. Stoffel-Munck ; D. 2008, 1956, n. I. Maria. – Cass. 1re civ., 28 oct. 2015, JCP G, 2016.II.114,
n. N. Dissaux.
(1150) Cass. 3e civ., 13 févr. 1991, Bull. civ. III, no 58 (à propos de l’art. 1325). La formule
manuscrite de l’art. 1326 est devenue une règle de fond sanctionnée par la nullité de l’acte. La Cour
de cassation avait jugé que « les exigences relatives à la mention manuscrite ne constituent pas de
simples règles de preuve mais ont pour finalité la protection de la caution » afin d’annuler les
cautionnements irréguliers au regard de l’art. 1326 (Cass. 1re civ., 30 juin 1987, Bull. civ. I, no 210).
Un revirement a mis un terme à cette bizarrerie (Cass. 1re civ., 15 nov. 1989, D. 1990, 177, note Chr.
Mouly : « Ces règles de preuve ont pour finalité la protection de la caution »...). V. Droit des
sûretés, coll. Droit civil.
(1151) 1) Directive CE no 1999-93 du 13 déc. 1999 « sur un cadre (sic) communautaire pour les
signatures électroniques », D. 2000, Lég., 95. 2) Directive CE no 2000-31 du 8 juin 2000, « sur le
commerce électronique », D. 2000, Lég., 333 transposée par la loi no 2004-575 du 21 juin 2004, puis
par l’ordonnance no 2005-674 du 16 juin 2005.
(1152) Biblio. sélective : « Étude par un groupe d’universitaires », JCP G, 1999.I.182 ; J. HUET,
D. 2000, chr. 95 ; P.-Y. GAUTIER et X. LINANT de BELLEFONDS, JCP G, 2000.I.236.
(1153) V., avant la réforme, rappelant cette double exigence à propos d’une télécopie, expressément
admise comme « écrit » en droit bancaire : Cass. com., 2 déc. 1997, D. 1998, 192, note
D. R. Martin ; JCP G, 1998.II.10097, note L. Grynbaum ; JCP E, 1998, p. 178, note Th. Bonneau.
Adde P. CATALA et P.-Y. GAUTIER, JCP G, 1998, nos 21-22, Actualités. – Après la réforme :
Cass. 2e civ., 4 déc. 2008, Bull. civ. II, no 259 : la « copie informatique » d’un courrier adressé par
une caisse de sécurité sociale à un employeur doit remplir les conditions posées par les
articles 1334, 1348 et 1316-1 (les deux premiers textes paraissent pourtant exclusifs l’un de l’autre
puisqu’ils supposent que l’original ait été ou n’ait pas été conservé).
(1154) Selon le décret no 2001-272 du 30 mars 2001, des « prestataires de services de certification
électronique », eux-mêmes « qualifiés » (agréés) après évaluation, mettent en place des « dispositifs
sécurisés de création » et des « dispositifs de vérification » (par délivrance de « certificats
électroniques qualifiés ») de signature électronique. Ces dispositifs doivent garantir la
confidentialité, l’absence d’altération et de falsification des actes ou signatures ainsi que l’identité
des signataires. Le décret no 2002-535 du 18 avril 2002 réglemente la « qualification » de ces
prestataires qui leur est accordée par des « centres d’évaluation » eux-mêmes agréés par un service
du Premier ministre (après avis du comité directeur de la certification) et accrédités par un comité
français d’accréditation (COFRAC. Cf. Arr. 31 mai 2002, JO 8 juin 2002, p. 10223). Sur ces règles
techniques, cf. E. A. CAPRIOLI, Signature électronique et dématérialisation, LexisNexis, 2014.
(1155) Conformément au D. no 2001-272, 30 mars 2001, précité, le Conseil supérieur du notariat
(CSN) a reçu, le 16 octobre 2007, de la société d’accréditation LSTI, la qualification de prestataire
de services de certification électronique qui lui permet désormais de certifier la signature
électronique des notaires.
(1156) Le notariat s’est doté en 1998 d’un réseau intranet sécurisé, baptisé REAL, qui servait déjà de
cadre aux échanges électroniques de documents administratifs ou fiscaux et, aujourd’hui, d’actes
authentiques dématérialisés.
(1157) Sur la date certaine de la preuve littérale, v. infra, no 252.
(1158) I. RENARD, « Le courrier recommandé électronique », JCP G, 2011, 772 : le papier n’offre
plus de garantie depuis qu’il n’est plus qu’une copie de données informatiques.
(1159) Cass. soc., 22 mars 2011, no 09-43307, inédit : sachant qu’il est possible de modifier un mail
existant ou de créer de toutes pièces un mail antidaté, « les courriels dont l'authenticité n'était pas
avérée, n'étaient pas probants ».
(1160) Cass. 1re civ., 30 sept. 2010, Bull. civ. I, no 178.
(1161) Cass. soc., 25 sept. 2013, JCP S, 2013, 1488, n. B. Bossu. Sur la libre preuve d’un fait
juridique, v. supra, nº 232, 1º.
(1162) Cass. 3e civ., 4 mai 1976, Bull. civ. III, no 182 ; Cass. 1re civ., 26 mai 1999, Bull. civ. I, no 170.
(1163) Cass. 2e civ., 28 mars 1966, D. 1966, 541 ; Cass. com., 13 déc. 1983, Bull. civ. IV, no 346.
(1164) Cass. 3e civ., 22 mars 1989, Bull. civ. III, no 72.
(1165) Sur la notion de force probante, qui doit être distinguée de la valeur probatoire, v. infra,
no 250.
(1166) Cass. soc., 22 mars 2011, Bull. civ. V, no 77 : la mention figurant dans les motifs du jugement
selon laquelle « le salarié reconnaît et ne conteste plus les faits » ne suffit pas à établir un aveu
judiciaire, en l’absence de note d’audience contenant ses déclarations précises.
(1167) Cass. 1re civ., 28 janv. 1981, Bull. civ. I, no 33.
(1168) C. civ., art. 1924 : « Lorsque le dépôt étant au-dessus du chiffre prévu à l'article 1341
[devenu art. 1359] n'est point prouvé par écrit, celui qui est attaqué comme dépositaire en est cru
sur sa déclaration [...] ». V. par ex. Cass. 1re civ., 31 oct. 2012, D. 2013, 209, n. G. Lardeux (l’auteur
relève l’anachronisme de cette règle très favorable au dépositaire).
(1169) Au contraire, en matière pénale, « l’aveu, comme tout élément de preuve, est laissé à la libre
appréciation des juges » (C. pr. pén., art. 428). Sur la preuve pénale, v. infra, nos 244 et s.
(1170) Cass. 1re civ., 12 mars 1991, Bull. civ. I, no 88 : un paysan reconnaît avoir reçu une certaine
quantité d’avoine et affirme avoir réglé au vendeur la totalité du prix ; le tribunal ne peut se fonder
sur l’aveu de la réception de la marchandise pour condamner l’avouant à payer un complément de
prix.
(1171) Cass. 1re civ., 17 juin 1968, Bull. civ. I, no 172 : « le principe de l’indivisibilité de l’aveu
souffrant exception lorsque les juges trouvent la preuve de son inexactitude dans la contradiction
et l’invraisemblance des déclarations des parties ». – À l’inverse : Cass. 1re civ., 28 nov. 1973,
Bull. civ. I, no 327 : « s’il s’agit [...] d’un fait présenté comme constant et indiscuté par les parties,
celle qui le reconnaît ne peut se prévaloir de son aveu, pour soutenir que sa déclaration sur un
autre point en est inséparable ».
(1172) Sur la vraisemblance, v. infra, no 253.
(1173) Ex. : Cass. com., 2 nov. 2011, Bull. civ. IV, nº 176 (aveu judiciaire d’une banque non
révocable).
(1174) Cass. 1re civ., 22 oct. 2008, no 05-19451, inédit.
(1175) Cass. com., 30 juin 1980, D. 1982, 53, n. G. Parléani.
(1176) Cass. 1re civ., 7 mai 2008, D. 2008, Pan., 2826, obs. J.-D. B : en réponse à une sommation
interpellative, le défendeur avait proposé un échéancier de remboursement, ce qui établissait la
preuve d’un contrat de prêt.
(1177) Cass. 1re civ., 24 mai 2007, Bull. civ. I, no 209.
(1178) Cass. Ass. plén., 29 mai 2009, Bull. civ. Ass. plén., no 6 : « ne peuvent constituer un aveu des
conclusions par lesquelles, après avoir invoqué la prescription, une partie conteste, à titre
subsidiaire, l'existence ou le montant d'une créance » (le créancier voyait dans ce raisonnement
l’aveu d’un non-paiement).
(1179) V. supra, no 212.
(1180) Biblio. : Le serment, éd. CNRS, 1991, spéc. B. BEIGNIER, « De l’évolution du serment
probatoire en droit civil français », p. 419.
(1181) Ex. : Cass. 3e civ., 10 mars 1999, Bull. civ. III, no 63 ; D. 2001, 817.
(1182) Cass. 1re civ., 11 juin 1991, Bull. civ. I, no 199.
(1183) Le serment, règle de preuve, ne saurait être admis pour combattre une présomption
irréfragable, règle de fond : Cass. com., 30 juin 1998, Bull. civ. IV, no 211 (présomption de l’art. 130,
al. 6, anc. C. com. en matière d’aval de lettre de change).
(1184) Cass. 2e civ., 6 mai 1999, Bull. civ. II, no 87 : « Le serment décisoire déféré à une personne
morale ne peut être prêté que par son représentant légal en exercice ».
(1185) Cass. 1re civ., 14 mars 1966, D. 1966, 541 ; JCP G, 1966.II.14614, note J. A. ; RTD civ. 1966,
p. 595, obs. P. Raynaud (irrecevabilité de l’appel).
(1186) Cass. 3e civ., 22 févr. 1978, Bull. civ. III, no 100.
(1187) CE, 29 nov. 1851, Pélissier, Rec. CE, p. 720 ; S. 1852.II.154.
(1188) P. JULIEN, « Propos sur le serment : un chrétien peut-il jurer ? », in Mélanges S. Guinchard,
Dalloz, 2010, p. 280 : « l’homme, à des fins diverses, a toujours juré ; Dieu lui-même a juré »
(dans l’Ancien Testament).
(1189) Cass. civ., 3 mars 1846, DP 1846, 1, 103. Cette jurisprudence a permis d’empêcher une
ségrégation des Juifs en France : un refus du communautarisme.
(1190) Cass. req., 4 mai 1936, DH 1936, 332.
(1191) Cass. crim., 6 mai 1987, Bull. crim., no 182.
(1192) Cass. civ., 28 févr. 1938, DC, 1942, 99, note G. Holleaux : « La délation du serment
décisoire constitue une convention transactionnelle par laquelle une partie offre de renoncer à sa
prétention si l’autre partie consent à affirmer sous serment que le fait allégué sur lequel est
fondée cette prétention est inexact ».
(1193) Ancien art. 109, C. com.
(1194) Cass. 1re civ., 2 mai 2001, Bull. civ. I, no 108. Ex. : Cass. soc., 16 juill. 1987, Bull. civ. V,
no 495 : dès lors que le contrat de travail est commercial à l’égard de l’employeur, le salarié est
recevable à en prouver le contenu par tous moyens ; Cass. 1re civ., 8 févr. 2000, Bull. civ. I, no 35 :
« À l’égard du garage, en sa qualité de commerçant, les actes de commerce peuvent se prouver par
tous moyens ».
(1195) Convention de Vienne sur les contrats de vente internationale de marchandises (CVIM),
11 avr. 1980, art. 11 : « Le contrat de vente n'a pas à être conclu ni constaté par écrit et n'est
soumis à aucune autre condition de forme. Il peut être prouvé par tous moyens, y compris par
témoins ».
(1196) L. GODON, « La liberté de la preuve en droit commercial : une illusion ? », D. 2015, 2580.
(1197) Cass. soc., 27 mars 2001, Dr. social 2001, p. 679. Biblio. : D. BOULMIER, Preuve et instance
prud’homale, LGDJ, 2002.
(1198) Sur la preuve pénale : R. MERLE et A. VITU, Traité de droit criminel. Procédure pénale,
éd. Cujas, 5e éd., 2001, nos 140 et s., p. 177 et s.
(1199) Ex. : Cass. crim., 12 avr. 1995, Dr. pén. 1995, comm. 189 : quoique le Code de la route eût
réglementé la preuve du délit de conduite en état d’ivresse (en désignant des moyens scientifiques de
dépistage de l’alcoolémie), les juges peuvent, « en cas d’inobservation de ces dispositions, recourir
à tous autres moyens de preuve pour se prononcer d’après leur intime conviction sur la culpabilité
du prévenu » : haleine sentant l’alcool, bégaiements, yeux brillants...).
(1200) Biblio. : P. PACTET, Essai d'une théorie de la preuve devant la juridiction administrative,
Pedone, 1952 ; La preuve, dir. C. Puigelier, Economica, 2004, spéc. G. DARCY, p. 99 s., F.-C.
BERNARD, p. 121 ; H. de GAUDEMAR, « La preuve devant le juge administratif », Dr. adm. 2009, Études,
12.
(1201) V. supra, nos 211 s.
(1202) Cass. 1re civ., 25 févr. 1997, JCP G, 1997.II.22873, note J. Ravanas : la lecture partielle à une
audience d’un manuscrit viole le droit moral qui confère à l’auteur le droit de divulguer seul son
œuvre (dans un procès pour violation du droit au respect de la vie privée à la suite de la publication
d’un roman, les demandeurs avaient produit un manuscrit de l’auteur).
(1203) Cass. 1re civ., 29 janv. 1997, D. 1997, 296 ; Cass. 2e civ., 6 mai 1999, JCP G, 1999.II.10201 ;
D. 2000, 557. – Dans le même sens, CEDH, 13 mai 2008, no 65097/01, qui rejette la violation de
l’art. 8 Conv. EDH.
(1204) Cass. 1re civ., 17 juin 2009, JCP G, 2010, 34, no 5 (avec les autres réf.).
(1205) * Paris, 6 nov. 1997, aff. Y. Montand, D. 1998, 122, n. Ph. Malaurie ; adde P. CATALA,
Dr. famille 1997, chr. 12 : « Il est de l’intérêt essentiel des parties d’aboutir dans toute la mesure
du possible à une certitude biologique » ; en conséquence, la cour a ordonné l’exhumation de la
dépouille d’Yves Montand afin de prélever ses empreintes génétiques et de les comparer à celles de
sa fille naturelle prétendue (épilogue : Paris, 17 déc. 1998, D. 1999, 476 : Montand n’était pas le
père).
(1206) V. supra, no 230.
(1207) Cass. 1re civ., 25 févr. 2016, D. 2016, 884, note J.-Chr. Saint-Pau ; JCP G, 2016, 583, note
A. Aynès (jugeant disproportionnées les enquêtes privées, surveillances et filatures au cours de
plusieurs années, commanditées par un assureur désireux de prouver l’absence de préjudice corporel
subi par la victime d’un accident). Adde Cass. 2e civ., 3 juin 2004, Bull. civ. II, no 273 : constitue une
immixtion disproportionnée dans la vie privée le recours, par un homme divorcé, aux services d’un
détective privé afin d’épier son ex-femme pendant plusieurs mois. – En droit pénal : Cass. crim.,
7 mai 1996, Bull. crim., no 189 : la constatation des contraventions d’excès de vitesse au moyen d’un
cinémomètre (radar) associé à un appareil de prise de vue ne viole pas le droit au respect de la vie
privée garanti par l’art. 8 Conv. EDH (l’argument était saugrenu).
(1208) Cass. soc., 8 oct. 2014, Bull. civ. V, nº 230, jugeant sans cause réelle et sérieuse le
licenciement d’une salariée à qui son employeur reprochait une utilisation excessive de la messagerie
électronique à des fins personnelles, alors que le dispositif de contrôle des flux de courriels n’avait
pas encore été déclaré à la CNIL (conformément à la L. nº 78-17, 6 janv. 1978).
(1209) Cass. 1re civ., 13 juill. 2004, D. 2004, 2524, note N. Léger : « le listing informatique des
opérations d'enregistrement qui est établi après présentation de divers documents par le client, et
remise d'autres documents à celui-ci par la compagnie d'aviation, ne constitue pas un document
unilatéral insusceptible de constituer une preuve, mais vaut comme présomption simple de l'heure
à laquelle les clients se sont présentés à l'enregistrement ».
(1210) Cass. 1re civ., 2 avr. 1996, Bull. civ. I, no 170 ; LPA, 24 janv. 1997, no 11, p. 19, note
D. Gutmann : le juge ne pouvait s’appuyer sur des données techniques et des déclarations de salariés
de la SNCF pour exonérer celle-ci de sa responsabilité au titre de l’obligation de sécurité.
(1211) Cass. 1re civ., 16 juin 2011, Bull. civ. I, nº 112. Plus contestable : Cass. 1re civ., 4 déc. 2008,
Bull. civ. I, no 257 : les écritures certifiées par l'agent comptable d’une caisse de sécurité sociale
peuvent être produites à l'appui de sa demande.
(1212) C. civ., art. 1362 : le commencement de preuve par écrit doit émaner « de celui qui conteste
un acte » ; art. 1378 (anc. art. 1329) : « Les registres et documents que les professionnels doivent
tenir ou établir ont, contre leur auteur, la même force probante que les écrits sous signature
privée » ; art. 1378-1 (anc. art. 1330) : « Les registres et papiers domestiques ne font pas preuve au
profit de celui qui les a écrits ».
(1213) Cass. 1re civ., 4 janv. 2005, Bull. civ. I, no 6 : « s'agissant d'un fait juridique, le médecin
prouve par tous moyens la délivrance de l'information permettant au patient d'émettre un
consentement ou un refus éclairé » quant aux investigations ou soins proposés ; la preuve du refus
par le patient d’un examen était valablement rapportée par le courrier que le médecin avait adressé à
un confrère et le dossier médical qu’il tenait ; Cass. soc., 19 mars 2014 et Cass. 2e civ., 6 mars 2014,
JCP G, 2014, 679, n. P. Lemay (l’inspecteur du travail établit par tous moyens l’emploi illicite qu’il
entend faire cesser ; des victimes peuvent produire les courriers qu’ils ont adressés et les dépôts de
plainte effectués).
(1214) V. d’ailleurs en sens contraire, Cass. com., 31 janv. 2006, Bull. civ., IV, no 25.
(1215) Cass. soc., 23 oct. 2013, Bull. civ. V, nº 245 (contra Cass. soc., 11 mai 1999, JCP G,
2000.II.10269, qui opposait le « principe » mentionné).
(1216) Cass. ch. mixte, 28 sept. 2012, D. 2013, 275 et 2805.
(1217) V. supra, nº 244, 1º.
(1218) Cass. 1re civ., 7 juin 2005, D. 2005, 2570, n. M.-E. Boursier. Adde M.-E. BOURSIER, Le
principe de loyauté en droit processuel, Dalloz, 2003.
(1219) Cass. 2e civ., 7 oct. 2004, Bull. civ. II, no 447.
(1220) Ex. : Cass. soc., 20 nov. 1991, Bull. civ. V, no 519 ; D. 1992, 73, concl. Y. Chauvy (caméra
dissimulée dans une caisse) : Droit civil illustré, no 30 ; Cass. soc., 4 févr. 1998, RJS 4/98, no 415
(comptes rendus de filature de salariés par un détective privé, moyen de preuve illicite) ; Cass. soc.
14 mars 2000, RJS 4/00, no 386 (écoutes téléphoniques dont les salariés avaient été « dûment
avertis », mode de preuve valable). Mais l’employeur peut produire les relevés de facturation
téléphonique adressés par France Télécom (Cass. soc., 11 mars 1998, RJS 4/98, no 415) ou un constat
d’huissier qui ne constitue pas un procédé clandestin de surveillance nécessitant l’information
préalable du salarié (CE, 7 juin 2000, RJS 2000, no 971 ; Cass. soc., 10 oct. 2007, RJS 2007,
no 1242).
(1221) Cass. soc., 23 mai 2007, JCP S, 2007, 10140 : « si l'enregistrement d'une conversation
téléphonique privée, effectué à l'insu de l'auteur des propos invoqués, est un procédé déloyal
rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue, il n'en est pas de même de l'utilisation par
le destinataire des messages écrits téléphoniquement adressés, dits SMS, dont l'auteur ne peut
ignorer qu'ils sont enregistrés par l'appareil récepteur » (la salariée, victime de harcèlement sexuel
de la part de son patron, avait produit un SMS explicite que celui-ci lui avait envoyé). – Cass. com.,
10 févr. 2015, nº 13-14779, Bull. civ. IV, à paraître (adoptant la solution de la chambre sociale).
(1222) Cass. soc., 2 déc. 1998, JCP G, 1999.II.10166 ; D. 1999, 431. La Chambre criminelle retenait
au contraire la qualification de vol (Cass. crim., 8 déc. 1998, Dr. pén. 1999, comm. 67). Elle s’est
finalement alignée en exigeant cependant que les documents soient « strictement nécessaires à
l’exercice des droits de la défense » (Cass. crim., 11 mai 2004, Bull. crim., nos 113 et 117). Il
incombe alors au salarié d’apporter cette preuve et non à l’employeur d’établir un risque d’utilisation
des documents à des fins commerciales (Cass. soc., 31 mars 2015, nº 13-24410, Bull. civ. V, à
paraître).
(1223) CE, 16 juill. 2014, nº 355201, Dr. adm. 2014, 73, note G. Eveillard : « tout employeur public
est tenu, vis-à-vis de ses agents, à une obligation de loyauté ; il ne saurait, par suite, fonder une
sanction disciplinaire à l'encontre de l'un de ses agents sur des pièces ou documents qu'il a
obtenus en méconnaissance de cette obligation, sauf si un intérêt public majeur le justifie ». Mais,
en l’espèce, le juge approuve une commune d’avoir confié à une agence de détectives privés le soin
de réaliser des investigations sur un agent qui exerçait une double activité : le procédé ne serait donc
pas déloyal.
(1224) Cass. com., 25 févr. 2003, RTD civ. 2004, 92 (l’enregistrement clandestin est irrecevable
« sous sa forme sonore ou écrite ») ; Cass. com., 13 oct. 2009, D. 2010, 2673 (est tout aussi déloyal
le fait de permettre à un tiers d'écouter la conversation téléphonique pour qu’il en retranscrive lui-
même les termes dans une attestation).
(1225) Sous le triple visa de l’art. 9 C. pr. civ., de l’art. 6 § 1 Conv. EDH et du « principe de loyauté
dans l’administration de la preuve » : Cass. Ass. plén., 7 janv. 2011, D. 2011, p. 157, 562, 618 et
2893 et les notes et obs. (v. déjà : Cass. com., 3 juin 2008, D. 2008, 2476, n. M.-E. Boursier).
(1226) Cass. com., 30 mai 2000, Bull. civ. IV, no 118. Pour une critique, Chr. ATIAS, « Admissibilité
et pertinence ou force des preuves », D. 2009, chr. 2056.
(1227) Cass. com., 20 sept. 2011. Cf. C. MARÉCHAL, article in D. 2012, chr. 167 (avec les autres
réf.) ; Cass. soc., 22 sept. 2015, Dr. soc. 2015, p. 945, n. J. Mouly. Contra, Cass Ass. plén., 27 févr.
2009, D. 2009, 1245, n. D. Houtcieff ; JCP G, 2009, II, 10073, n. P. Callé : « la seule circonstance
qu’une partie se contredise au détriment d’autrui n’emporte pas nécessairement fin de non-
recevoir ».
(1228) CE, avis, 1er avr. 2010, nº 334465, Dr. adm. 2010, 102 (dans le contentieux de l’impôt). – CE,
2 juill. 2014, nº 368591, AJDA 2014, p. 1897, concl. G. Dumortier : « il n'existe pas, dans le
contentieux de la légalité, de principe général en vertu duquel une partie ne saurait se contredire
dans la procédure contentieuse au détriment d'une autre partie ».
(1229) Ex. : « La preuve par écrit ne peut résulter de la correspondance échangée entre le prévenu
et son avocat » (C. pr. pén., art. 432). Mais le législateur punit d’emprisonnement le refus de se
soumettre à un prélèvement biologique destiné à identifier l’empreinte génétique (C. pr. pén.,
art. 706-56, II) et admet même le témoignage anonyme au stade de l’instruction (C. pr. pén., art. 706-
57).
(1230) Ex. : Cass. crim., 30 mars 1999, D. 2000, 391 ; 11 juin 2002, Bull. crim., no 131 (validant la
preuve tirée d’une opération de « testing » effectuée à l’entrée d’une discothèque par des membres de
l’association SOS Racisme pour établir une discrimination raciale).
(1231) Ex. : la victime de persécutions téléphoniques peut produire les cassettes sur lesquelles elle a
enregistré les appels de son agresseur (bien que ces enregistrements constituent deux délits : C. pén.,
art. 226-1 et 226-13). V. aussi Cass. crim., 27 nov. 2013, JCP G, 2013, 139, n. S. Dettraz :
« l’autorité publique n’était pas intervenue dans la confection ou l’obtention » d’une liste
informatique de 3 000 noms de Français clients d’une banque suisse, suspects de fraude fiscale.
(1232) Ph. CONTE, « La loyauté de la preuve [...] : vers la solution de la quadrature du cercle ? »,
Dr. pén. 2009, Études, 8.
(1233) * Cass. crim., 27 févr. 1996, aff. Schuller-Maréchal, JCP G, 1996.II.22629, note M.-
L. Rassat : « L’interpellation de Jean-Pierre Maréchal a procédé d’une machination de nature à
déterminer ses agissements délictueux et, par ce stratagème, qui a vicié la recherche et
l’établissement de la vérité, il a été porté atteinte au principe de la loyauté des preuves » ;
Cass. crim., 9 août 2006, Bull. crim. no 202 : « Vu le principe de la loyauté des preuves ».
(1234) Cass. Ass. plén., 6 mars 2015, nº 14-84339, D. 2015, 711 et 1738, n. J. Pradel : « au cours
d'une mesure de garde à vue, le placement, durant les périodes de repos séparant les auditions, de
deux personnes retenues dans des cellules contiguës préalablement sonorisées, de manière à
susciter des échanges verbaux qui seraient enregistrés à leur insu pour être utilisés comme preuve,
constitue un procédé déloyal d'enquête mettant en échec le droit de se taire et celui de ne pas
s'incriminer soi-même et portant atteinte au droit à un procès équitable ».
(1235) Hypnose : Cass. crim., 12 déc. 2000, D. 2001, 1340, note D. Mayer et J.-F. Chassaing ;
JCP G, 2001.II.10495, note C. Puigelier ; adde chron. C. PUIGELIER, RRJ 2003, p. 1003, no 8 : la mise
sous hypnose d’un témoin, même avec son consentement, viole les « dispositions légales relatives au
mode d’administration des preuves » et « compromet l’exercice des droits de la défense ».
Torture : L’art. 3 Conv. EDH interdit la torture et les traitements inhumains ou dégradants. Cf.
CEDH, 1er juin 2010, Gäfgen c/Allemagne, no 22978/05 ; CEDH, 17 janv. 2012, Othman c/Royaume-
Uni, no 8139/09. La House of Lords affirme que la preuve (des aveux) obtenue sous la torture est
irrecevable, peu important en l’espèce que le terroriste ait été torturé par les autorités d’un pays tiers
et non britanniques (House of Lords, 8 déc. 2005, [2005] UKHL 71).
(1236) Ex. : Cass. crim., 25 avr. 1995, Dr. pén. 1996, chr. 14 (écoutes téléphoniques illégales) ;
Cass. crim., 5 nov. 1996, Bull. crim., no 392 ; Dr. pén. 1997, comm. 14 (procès-verbaux irréguliers) ;
Cass. crim., 31 janv. 2012, Bull. crim., nº 27 (recevabilité des écoutes clandestines effectuées par le
majordome de la milliardaire Liliane Bettencourt, victime d’un abus de faiblesse commis par son
entourage).
(1237) Cass. crim., 19 janv. 1999, JCP G, 1999.II.10156, note D. Rebut : un avocat avait tenté de
corrompre un policier qui enregistra secrètement la conversation ; selon les juges, l’enregistrement
clandestin ne violait pas le principe de la loyauté des preuves ; il « ne constituait pas un acte de
procédure susceptible d’annulation, mais seulement un moyen de preuve soumis à la libre
discussion des parties, ayant été effectué par le fonctionnaire de police, non dans l’exercice de ses
fonctions [...] mais en tant que victime de faits de corruption pour se constituer une preuve des
sollicitations dont il était l’objet ».
(1238) Cass. com., 6 oct. 2009, D. 2010, 2675 : « les éléments d'un rapport d'expertise judiciaire
annulé peuvent être retenus à titre de renseignement s'ils sont corroborés par d'autres éléments du
dossier ».
(1239) Cass. 2e civ., 9 avr. 2009, Bull. civ. II, no 96.
(1240) Ex. : Cass. 1re civ., 5 févr. 2014, D. 2014, 856, n. G. Lardeux.
(1241) CEDH, 12 juill. 1988, Schenk c/Suisse, nº 10862/84, § 47-48 (enregistrement téléphonique
illicite).
(1242) Cass. soc., 15 févr. 1979, Bull. civ. V, no 142 : l’inobservation des règles de forme auxquelles
l'article 202 C. pr. civ. soumet les attestations produites par les parties n’est pas assortie de nullité ;
les juges du fond doivent donc en apprécier la valeur probante.
(1243) Supra, no 241.
(1244) Supra, no 242.
(1245) Sur cette analyse, v. infra, no 252.
(1246) Supra, no 242.
(1247) Cass. 1re civ., 28 oct. 1970, Bull. civ. I, no 287 ; Cass. com., 19 avr. 1985, Bull. civ. IV,
no 117 : les « juges du fond disposent d’un pouvoir souverain pour affirmer la valeur des éléments
de preuve qui leur sont soumis [...] lorsqu’ils ont à déterminer leur conviction » (ici en matière
d’aveu extrajudiciaire).
(1248) C. civ., art. 1316-3 (L. 13 mars 2000) : « L’écrit sur support électronique a la même force
probante que l’écrit sur support papier ».
(1249) Cass. 1re civ., 11 juin 2003, D. 2004, 830, n. F. Auberson : « les dispositions spéciales et
d'ordre public des art. 306 et 314 du C. pr. civ. » excluent l'application de l’art. 145 du même Code
(mesures d’instruction in futurum) ; ne peut être ordonnée sur ce fondement une expertise « qui avait
pour effet de mettre en cause la force probante d'un acte authentique ».
(1250) Cass. 1re civ., 26 mai 1964, D. 1964, 627 ; JCP G, 1964.II.13758, note R. L.
(1251) Ex. : Cass. 1re civ., 11 mars 2009, Bull. civ. I, no 58 : il incombe alors au tiers à l'acte qui
conteste la mention du paiement du prix « de démontrer par tous moyens l'absence de paiement
effectif ».
(1252) Cass. 1re civ., 25 mai 1987, Bull. civ. I, no 171 ; D. 1988, 79, note A. Breton : la mention par
laquelle le notaire indique que « le testateur apparaît sain de corps et d’esprit » ou « jouit de
toutes ses facultés mentales » ne fait pas foi jusqu’à inscription de faux (il n’appartient pas au
notaire d’apprécier l’état de santé de ses clients) ; Cass. 1re civ., 6 juin 1990, Bull. civ. I, no 149.
(1253) Ex. : Cass. 1re civ., 3 juin 1998, cité supra, no 236, en note : une promesse de vente notariée
avait mentionné que le bénéficiaire avait versé une somme de 120 000 F au promettant (à titre
d’indemnité d’immobilisation) en dehors de la comptabilité de l’office ; il appartient au promettant,
qui prétend n’avoir pas reçu cet argent, « d’établir que la quittance de la somme de 120 000 F
donnée dans la promesse de vente n’avait pas la valeur libératoire qu’impliquait son libellé » ;
Cass. 3e civ., 27 févr. 2008, Bull. civ. III, nº 35 : « si la quittance d'une somme payée en dehors de
la comptabilité du notaire ne fait foi que jusqu'à preuve contraire, celle-ci ne peut être rapportée
que dans les conditions prévues par les articles [1349] et suivants du Code civil ».
(1254) V. supra, nos 233 et 234.
(1255) Cass. 1re civ., 28 sept. 2011, Bull. civ. I, nº 154 ; D. 2011, 2471 et 2894 et les obs. ; RDC
2012, 41, obs. Y.-M. Laithier : en l’absence de signature d’une partie dans un acte authentique de
cession de parts sociales, cet instrumentum vaut comme acte sous signature privée, par « défaut de
forme » (authentique) ; en revanche, il n’est pas nul car cette signature n’était pas nécessaire à sa
validité.
(1256) Cass. 1re civ., 28 oct. 1986, Bull. civ. I, no 245 (la nullité de toute surcharge, interligne ou
addition au texte est expressément prévue par les art. 13 et 19 D. 26 nov. 1971, mod. D. 10 août
2005 ; cette mention n’a pas valeur d’acte sous signature privée) ; Cass. 2e civ., 5 juill. 2006,
Bull. civ. I, no 85 : l’acte ayant été déclaré faux par jugement, ce vice ne constituait pas un simple
« défaut de forme » privant l'acte notarié de son caractère authentique.
(1257) Cass. 1re civ., 19 juin 2001, Bull. civ. I, no 180. Sur le défaut d’annexe des procurations à
l’acte authentique, v. supra, no 236.
(1258) Sur la règle « le cachet de la poste faisant foi », dans les relations avec l’administration,
cf. L. no 2000-321, 12 avr. 2000, art. 16. Adde D. BOULMIER, « La crise de foi dans le cachet de la
poste », JCP G, 2003.I.131. – Sur l’horodatage de la lettre recommandée électronique, v. supra,
no 240.
(1259) Cass. 3e civ., 14 avr. 2010, Bull. civ. III, no 87 ; D. 2010, 1208 et 2677 et les obs. : l'acte
authentique fait « foi de sa date vis-à-vis des tiers sans avoir à être soumis à l'enregistrement ».
(1260) Cass. 3e civ., 9 mars 2005, Bull. civ. III, no 64 : « le juge n'a pas à procéder à la vérification
d'écriture prévue par les art. 287 à 298 C. pr. civ. lorsqu'une partie invoque la fausseté de
l'écriture d'un tiers sur un acte produit aux débats ». – Cass. com., 1er oct. 2013, Bull. civ. IV,
no 145 : « la contestation par le débiteur de l'identité du signataire d'une déclaration de créance
ne s'analyse pas en une dénégation ou un refus de reconnaissance de signature » (il s’agit d’un
tiers et c’est son identité qui est contestée).
(1261) Cass. 1re civ., 6 mars 2001, Bull. civ. I, no 51 : « La seule absence de contestation de sa
signature devant le tribunal, par le débiteur auquel on oppose son engagement [...] n'équivaut pas
à un aveu judiciaire de l'authenticité de celle-ci ».
(1262) Cass. 2e civ., 21 janv. 1999, deux arrêts, Bull. civ. II, no 18 ; RTD civ. 1999, p. 461, obs.
R. Perrot : « Le juge des référés peut procéder incidemment à une vérification d’écritures sous
seing privé dès lors que la contestation n’est pas sérieuse » (ce revirement met un terme à des
manœuvres dilatoires).
(1263) V. supra, no 233.
(1264) Chr. JAMIN, « L’acte d’avocat », D. 2011, chr. 960.
(1265) Cass. com., 28 févr. 2006, Bull. civ. IV, no 54. Adde A. GANZER, « Les mentions en blanc dans
les contrats », RRJ 1995, p. 473 ; A. LE GOFF, « Les actes en blanc en droit privé », RRJ 2006,
p. 1299.
(1266) Cass. com., 1er déc. 1981, Bull. civ. IV, no 422 ; Cass. crim., 18 mai 1994, Bull. crim., no 187 ;
Dr. pén. 1994, comm. 205.
(1267) Ex. : Cass. 1re civ., 26 janv. 2012, Bull. civ. I, nº 13 : « s'il n'est reçu aucune preuve par
témoins ou présomptions contre et outre le contenu des actes, cette preuve peut cependant être
invoquée pour interpréter un acte obscur ou ambigu ; c'est dans l'exercice de son pouvoir
souverain d'interprétation que la cour d'appel [...] a constaté que l'acte notarié était entaché
d'une erreur matérielle évidente ».
(1268) * Cass. civ., 15 avr. 1872, Veuve Foucauld et Coulombe, DP 1872, 1, 176 ; S., 1872, 1, 232 ;
GAJ civ., nº 161 : « Il n’est pas permis aux juges lorsque les termes de ces conventions sont clairs
et précis de dénaturer les obligations qui en résultent et de modifier les stipulations qu’elles
renferment ». Sur ce contrôle, v. infra, no 448.
(1269) B. HEMERY, « Pour un contrôle de la dénaturation des faits par la Cour de cassation », in
Mélanges J. Boré, Dalloz, 2007, p. 289.
(1270) D. AMMAR, « Preuve et vraisemblance. Contribution à l’étude de la preuve technologique »,
RTD civ. 1993, p. 499. V. aussi supra, nº 241, 1º (l’aveu en partie invraisemblable peut être divisé
contre son auteur).
(1271) Toutefois, l’art. 1362 exclut d’emblée la recevabilité, à titre de commencement de preuve par
écrit, de l’écrit qui ne rend pas « vraisemblable ce qui est allégué » (v. supra, no 233).
(1272) Ex. : Cass. 3e civ., 3 févr. 1993, Bull. civ. III, no 14 : quoique l’acte authentique fasse pleine
foi de la convention qu’il renferme (art. 1319), les juges du fond doivent rechercher « si les éléments
offerts en preuve (par le vendeur d’un immeuble) ne rend(ent) pas vraisemblable l’inexactitude des
énonciations des actes de vente ».
(1273) C. PUIGELIER, « Vrai, véridique et vraisemblable », in La preuve, Economica, 2004, p. 195.
(1274) Cass. 1re civ., 28 mars 2000, JCP G, 2000.II.10409, concl. Petit, note Monsallier ; D. 2000,
731, note Th. Garé.
(1275) Textes : TFUE, art. 191, § 2 ; L. constit. nº 2005-205, 1er mars 2005 relative à la Charte de
l'environnement, art. 5 ; C. environnement, art. L. 110-1 : la protection de la nature s’inspire du
« principe de précaution, selon lequel l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances
scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et
proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement
à un coût économiquement acceptable ».
(1276) M. MEKKI, « Le droit privé de la preuve... à l’épreuve du principe de précaution », D. 2014,
chr. 1391.
(1277) Comp. C. GUÉRY, « Les paliers de la vraisemblance pendant l’instruction préparatoire »,
JCP G, 1998.I.140. La procédure pénale évolue par étapes, jalonnées de « raisons plausibles »,
d'« indices », d'« indices graves et concordants » puis de « charges ».
(1278) 1er ex. (droit social) : Cass. soc., 26 mai 1994, Bull. civ. V, no 181 : « il appartient à celui
qui prétend avoir été victime d'un accident du travail d'établir autrement que par ses propres
affirmations les circonstances exactes de l'accident et son caractère professionnel ». 2e ex. (droit
fiscal) : CE, 16 nov. 1988, Dr. fisc. 1989, no 9 : de simples allégations ne suffisent pas à établir
l’existence d’une contrepartie à l’acte litigieux exclusive d’un acte anormal de gestion. 3e ex. (droit
pénal) : bien que l’art. 430 C. pr. pén. dispose que les procès-verbaux « ne valent qu’à titre de
renseignements », le tribunal répressif ne peut, sans méconnaître la foi qui leur est due, écarter une
infraction sur la base des seules dénégations du prévenu (Cass. crim., 2 avr. 1929, DH 1929.268 ;
Cass. crim., 23 mai 1950, D. 1950.470).
(1279) Déjà pour l’Ancien droit : v. supra, no 104.
(1280) V. supra, no 135.
(1281) Sur les audaces de la jurisprudence dès la fin du XIXe siècle, v. infra, no 412.
(1282) V. notamment supra, no 26 (sur le non-droit) et no 49 (sur la soft law). Adde Droit et
pluralisme (colloque), Nemesis, Bruylant, 2007. Le pluralisme juridique caractérise surtout le droit
contemporain de la famille où un modèle familial chasse l’autre (J. CARBONNIER, « À chacun sa
famille, à chacun son droit », Essais sur les lois, 2e éd., Defrénois, 1995, p. 181 ; Y. LEQUETTE,
« Quelques remarques sur le pluralisme du droit de la famille », Mélanges G. Champenois,
Defrénois, 2012, p. 523, très critique).
(1283) Ph. MALAURIE, « La révolution des sources », Defrénois 2006, art. 38465, p. 1552 : « les
sources du droit sont ailleurs que dans le droit positif, tantôt dessus, tantôt dessous ; elles sont
dans notre culture, l'histoire de notre nation, les bases de notre civilisation, les exigences
profondes de l'esprit, de la raison, tout ce qui entend maîtriser les puissances de l'instinct : les
forces créatrices du droit, avait autrefois dit Georges Ripert » (sur ces sources créatrices, v. supra,
no 37).
(1284) R. LIBCHABER, L’ordre juridique et le discours du droit, LGDJ, 2013, spéc. nos 68-78.
(1285) A. HOLLEAUX, « Mort ou renaissance du droit », Mélanges D. Holleaux, Litec, 1990, p. 191,
n. p. 192 : « Le droit de l’urbanisme par exemple est un réservoir inépuisable d’écrits littéraires,
graphiques ou mathématiques en couches superposées, territoriales, locales, zonales ou
parcellaires. Dans beaucoup de matières, la règle est propre à un territoire défini
topographiquement : villes, communes ou villages, hameaux, lieux-dits, montagne, littoral, etc. ».
Sur les circulaires, réponses ministérielles, avis, règles déontologiques et autres sources informelles
du droit, v. infra, nos 354 et s.
(1286) ISOCRATE, Aréopagitique, « Le nombre et la précision de nos lois est un signe que notre ville
est mal organisée [...] ; ce n’est pas par les décrets mais par les mœurs que les cités sont bien
réglées » ; TACITE, Annales, III, 27, 3 : (au début de l’Empire, du temps de Trajan) « on ne se borna
plus à ordonner pour tous ; on statua même contre un seul, et jamais les lois ne furent plus
multipliées que quand l'État fut le plus corrompu » (« Plurimae leges corruptissima respublica ») ;
Droit civil illustré, no 2 ; R. von IHERING, L’esprit du droit romain, trad. O. de Meulenaere, t. I,
3e éd., 1886 (rééd. Forni, Editore Bologna, 2004), § 3, p. 42 : « La quantité des règles du droit est
un signe de faiblesse » ; Ihering dénonce l’impuissance des codes casuistiques à « extraire la
quintessence logique de la somme des règles », là où le droit romain offre un petit « alphabet du
droit » qui permet de déchiffrer « toutes les modalités nouvelles de la vie ». Sur l’époque
contemporaine, v. supra, no 138.
(1287) Ph. MALAURIE, art. cit.
(1288) V. supra, nos 37 et 46.
(1289) V. supra, no 88.
(1290) Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, art. 6 : « La loi est
l’expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou
par leurs représentants, à sa formation ». Adde R. CARRÉ DE MALBERG, La loi expression de la
volonté générale, 1931 (rééd. Economica, 1984), no 15 : « La Constitution de 1875 ne s’est pas
bornée à reconnaître au Parlement une primauté hiérarchique de qualité et de rang parmi les
diverses autorités constituées, mais elle l’a assimilé au souverain ».
(1291) H. KELSEN, Théorie pure du droit, 2e éd., 1960, trad. Ch. Eisenmann, Dalloz, 1962, rééd.
Bruylant, LGDJ, 1999.
(1292) H. KELSEN, op. cit., § 35 : « L’ordre juridique n’est pas un système de normes juridiques
placées toutes au même rang, mais un édifice à plusieurs étages superposés, une pyramide ou
hiérarchie formée pour ainsi dire d’un certain nombre d’étages ou couches de normes
juridiques ».
(1293) Parmi les critiques postérieures : P. AMSELEK, « Réflexions critiques sur la conception
kelsénienne de l’ordre juridique », RDP 1978, p. 5 (en réplique : M. TROPER, « La pyramide est
toujours debout. Réponse à P. Amselek », RDP 1979, p. 1523) ; du même auteur, « Le rôle de la
volonté dans l’édiction des normes juridiques selon Hans Kelsen », RRJ 1999, p. 37 (très sévère).
(1294) M. TROPER, Pour une théorie juridique de l’État, PUF, 1994, p. 94 ; du même auteur, « Le
problème de l’interprétation et la théorie de la supralégalité constitutionnelle », Études Ch.
Eisenmann, Cujas, 1975, p. 133, spéc., p. 143 : « Dire qu’un texte peut être porteur de plusieurs
sens, c’est dire qu’il peut contenir plusieurs normes entre lesquels l’organe d’application doit
choisir celle qu’il appliquera. [...] On sait que ce choix est le résultat dans tous les cas d’une
opération de la volonté, qu’elle est la manifestation du libre arbitre de l’organe d’application.
C’est donc lui qui, à proprement parler, pose lui-même la norme qu’il appliquera. Peu importe que
cette activité le conduise à poser une norme différente de celle que l’auteur du texte voulait « en
réalité » poser. Dès lors que l’interprétation est soustraite à tout contrôle et qu’elle a un
caractère authentique, la norme qu’elle conduit à poser est la seule efficace et valable. C’est donc
seulement par une fiction que l’on peut parler d’une supériorité de la constitution sur les actes
par lesquels elle est appliquée. [...] il n’y a pas de hiérarchie et il n’y a pas d’actes contraires à la
constitution. Celle-ci n’a pour contenu que les normes posées par l’interprétation des organes
d’application et ces derniers ne sont jamais soumis qu’à leur propre volonté » ; du même auteur,
« Kelsen, la théorie de l’interprétation et la structure de l’ordre juridique », Revue internationale de
philosophie 1981, no 138, p. 518.
(1295) Pour une théorie en droit privé, infra, no 404 in fine.
(1296) Ph. MALAURIE, « La révolution des sources », Defrénois 2006, art. 38465, p. 1552. L’image de
la source du droit (qui jaillit) n’est pas seulement approximative. « Le sens véritable de la source est
donné par l'étymologie, non par la poésie : source, du verbe latin surgere = être debout, qui a
donné regere = diriger, rex = roi et directus = droit. La source du droit c'est le droit et le pouvoir.
Le droit, c'est le droit ».
(1297) V. notamment infra, no 337 (théorie de la loi-écran) et no 347 (paralysie partielle du Conseil
constitutionnel face au droit de l’Union européenne).
(1298) P. AMSELEK, « Une fausse idée claire : la hiérarchie des normes juridiques », RRJ 2007,
p. 557, qui, après avoir dénoncé les pétitions de principe et l’irréalisme de Kelsen, estime qu’il n’y a
pas de hiérarchisation pyramidale, « directe et délibérée », de l’ordre juridique mais « un certain
aménagement des compétences normatrices des autorités publiques » qui produit une hiérarchie
subtile et complexe entre les normes. Adde F. OST et M. VAN DE KERCHOVE, De la pyramide au
réseau ? Pour une théorie dialectique du droit, Facultés universitaires Saint Louis, 2002.
(1299) Sur le pluralisme juridique, v. supra, no 261.
(1300) Le plurijuridisme, PUAM, 2005, spéc. J.-L. BERGEL, « Rapport introductif », p. 11.
(1301) V. infra, no 347.
(1302) V. infra, no 353.
(1303) Ex., dans l’ex-URSS : A. TUMANOV, Le contrôle de la constitutionnalité des actes normatifs
en Union soviétique, Journées de la société de législation comparée, 1988, p. 185.
(1304) Biblio. très sommaire : J.-P. CAMBY, La loi, LGDJ, 2015 ; M. COUDERC, J.-L. HERIN et J.-
Cl. BÉCANE et al., La loi, Dalloz, 2e éd. 2010 ; La loi, Arch. phil. dr., t. XXV, 1980.
(1305) Étymologie : du latin lex qui semble lui-même venir du verbe lego ; mais il y a deux verbes
correspondant : legare et legere. Legare signifie « lier », obliger : la loi désignerait toute règle qui
lie, écrite ou non. Legere signifie « ramasser, cueillir » et a donné « lire » (peut-être parce que le
lecteur amasse les lettres avec les yeux) : la loi serait la règle que l’on lit, écrite par une autorité
supérieure aux hommes, religieuse dans les premiers temps (ex : les Tables de la loi ont été écrites
par Moïse et Aaron sous la dictée divine) ; en ce sens, elle s’opposerait à la coutume, non écrite et
qui puise son autorité dans une acceptation tacite des hommes. La loi s’opposerait aussi au jus (qui a
donné juste, justice et juridique) dont l’origine n’est pas moins obscure : ce serait une formule
religieuse ayant force de loi, d’origine indo-européenne (A. ERNOUT et A. MEILLET, Dictionnaire
étymologique de la langue latine, 1932, Vo Jus) ou bien « le juste, l’objet de la justice » (M.
VILLEY, « Les origines de la notion de droit subjectif », Leçons d’histoire de la philosophie du droit,
Dalloz, 1957, p. 244, spéc. p. 258). Adde J.-L. SOURIOUX, « Quand lire et faire la loi, c’est tout un »,
Écrits du prof. J.-L. Sourioux, LexisNexis, 2011, p. 407 : le binôme lex-legere est très ancien ; ainsi,
la loi est adoptée par le Parlement après une première puis une seconde « lectures ».
(1306) G. BURDEAU, « Le déclin de la loi », Arch. phil. dr., t. VIII, « Le dépassement du droit », 1963,
p. 35, spéc. p. 36 : « Nulle part, on n’a osé qualifier de loi des actes qui n’auraient pas été adoptés
par un vote des assemblées. On parlera de statutory orders, d’arrêtés-royaux, de
Rechtsverordnungen, de Proclamations, d’Executive orders, d’ordonnances ou de décrets, mais le
titre de loi, de statute ou de Gesetz demeure réservé aux règles par où s’exprime la volonté
politique du peuple souverain ».
(1307) V. infra, no 355.
(1308) Sur l’édiction de la loi et l’expression de l’autorité dans l’histoire : Le pouvoir en actes.
Fonder, dire, montrer, contrefaire l’autorité, Archives nationales, Somogy éditions d’art, 2013.
(1309) Étymologie : du latin promulgo, are = promulguer, lui-même (peut-être) dérivé de provulgo,
are = divulguer, lui-même dérivé de pro = devant + vulgus = le peuple. Biblio. : Y. GAUDEMET, J.-Cl.
civil, art. 1er ; E. SAUVIGNON, « La promulgation des lois », RDP 1981, p. 989 (sous l’empire des
anciennes règles).
(1310) CE, Ass., 8 févr. 1974, Commune de Montory, JCP G, 1974.II.17703 (2e esp.), n. G. Liet-
Veaux : « La promulgation est l’acte par lequel le chef de l’État atteste l’existence de la loi et
donne l’ordre aux autorités publiques d’observer et de faire observer cette loi ». La forme du
décret de promulgation est fixée par un décret du 19 mai 1959, modifié. Sur la question de savoir si
le président de la République peut refuser de promulguer une loi votée ou a compétence liée :
D. GUIGNARD, « La promulgation des lois : une prérogative du chef de l’État en quête d’identité
juridique », RRJ 2008, p. 2043.
(1311) * CE, 3 nov. 1933, Desreumeaux, DP 1934, 3, 36, n. crit. Gros ; S., 1934, 3, 9, n. crit.
R. Alibert : « Les décrets de promulgation des lois [...] sont des actes relatifs aux rapports des
pouvoirs exécutifs avec le Parlement ; comme tels, ils ne peuvent faire l’objet d’un recours
contentieux devant le Conseil d’État ». En l’espèce, le requérant soutenait que les textes adoptés par
le Parlement étaient différents de la version publiée au Journal officiel ; si le décret de promulgation
ne peut être frappé d’un recours pour excès de pouvoir, le juge doit néanmoins vérifier l’existence
d’une erreur matérielle (v. infra, no 287).
(1312) Auparavant, la loi était « réputée connue » et entrait en vigueur un jour franc après sa
publication. Mais cette règle ne s’appliquait qu’à Paris ; partout ailleurs, dans chaque département,
l’art. 2 D. 5 nov. 1870 faisait courir ce même délai après que le Journal officiel fut parvenu au chef-
lieu, condition qui devait être certifiée par les administrateurs sur un registre préfectoral prévu par la
loi du 12 vendémiaire an IV. Délibérément la Cour de cassation avait ignoré cette distinction et
neutralisé cette formalité anachronique (* Cass. 1re civ., 6 janv. 1994, JCP G, 1994.II.22216, n. Y.
Gaudemet ; Cass. crim., 21 juin 1995, Bull. crim., no 232). Au lendemain du Code civil, la solution
était contraire (Sect. réunies, 7 août 1807, Jur. gén., t. XXX, Vo Loi, no 153) avant que la Cour
n’admette la liberté de la preuve de la distribution effective du Journal officiel (Cass. civ., 26 janv.
1938, DH 1938, 147).
(1313) Sous l’empire du D. 5 nov. 1870 (art. 2), une publication par voie d’affichage était possible
en cas d’urgence ; la loi entrait alors en vigueur le lendemain de cet affichage (Cass. civ., 17 févr.
1932, Gaz. Pal. 1932.I.636). Le gouvernement pouvait en outre « ordonner l’exécution immédiate
d’un décret », dès sa publication.
(1314) Infra, no 354.
(1315) Sur les conséquences de cette distinction : R. CHAPUS, Droit administratif général,
Montchrestien, 15e éd., 2001, no 1335.
(1316) CE, 24 févr. 1999, Meyet, RFDA 1999, p. 428.
(1317) CE, 28 déc. 2007, JCP G, 2008, II, 10066.
(1318) Cass. 1re civ., 31 janv. 1989, Bull. civ. I, no 50.
(1319) V. infra, no 336.
(1320) V. supra, no 125.
(1321) Ex. : Cass. crim., 21 janv. 1944, Bull. crim., no 27 ; Cass. crim., 21 mai 1992, JCP G,
1993.II.21985, n. J. Pannier : « Cessent d’être applicables aux poursuites en cours les dispositions
des lois ou règlements, même non expressément abrogées, dans la mesure où elles sont
inconciliables avec celles d’une loi nouvelle ». Dans le même sens, devant le juge administratif :
CE, 6 mai 1998, Lebsir, Dr. adm. 1998, no 342.
(1322) Ex. : Cass. crim., 12 juin 1995, Bull. crim., no 213 (l’acte d’adhésion de l’Espagne à la
Communauté européenne abroge implicitement les infractions douanières commises entre ce pays et
la France).
(1323) CE, 4 nivôse an VIII (25 déc. 1799), D. 1999, 705, n. P. (de la Gironde) (= B. Pacteau) :
« C’est un principe éternel, qu’une loi nouvelle fait cesser toute loi précédente, ou toute
disposition de loi précédente contraire à son texte ; principe applicable, à plus forte raison, à la
Constitution qui est la loi fondamentale de l’État » (une loi nouvelle n’était donc pas nécessaire
pour abroger trois lois révolutionnaires violant les principes d’égalité et de liberté proclamés dans la
Constitution de l’an VIII) ; CE, ass., 16 déc. 2005, Dr. adm. 2006, comm. 29 et 61 : s’il n’appartient
pas au juge administratif d’apprécier la conformité d’une loi aux dispositions constitutionnelles en
vigueur à la date de sa promulgation (sur le rejet de l’exception d’inconstitutionnalité, v. infra,
no 337), il lui revient de constater l’abrogation, fût-elle implicite, de dispositions législatives dont le
contenu est inconciliable avec un texte postérieur, qu’il soit de valeur législative ou
constitutionnelle. – Adde Sénat, JO 4 juin 2015, p. 1299, QE nº 16713 : le délit de blasphème, prévu
par le Code pénal allemand de 1871 et resté applicable en Alsace-Moselle, a été implicitement
abrogé à la suite de la décision du Conseil constitutionnel du 30 nov. 2012 qui censura une
disposition du droit local rédigée en langue allemande (v. infra, nº 440).
(1324) Cass. crim., 12 mai 1960, Bull. crim., no 265 ; JCP, 1960.II.11765, n. R. Rodière : « Les lois
et règlements ne peuvent tomber en désuétude par suite d’une tolérance plus ou moins prolongée
et ne peuvent être abrogés que par des dispositions supprimant expressément celles en vigueur, ou
inconciliables avec elles » ; CE, 24 mai 1948, Jacquemet, Rec. CE, p. 562 (règlement municipal).
Sur les tempéraments à ce principe, v. infra, no 377.
(1325) Ex. : L. no 2007-1787, 20 déc. 2007 « relative à la simplification du droit » dont l’art. 27
dispose que « sont et demeurent abrogées » quelques 126 lois.
(1326) V. infra, no 335.
(1327) CE, 28 oct. 2009, SCA L’Armorique maraîchère, Dr. adm. 2009, 166, qui ajoute qu’« une
telle remise en vigueur ne peut intervenir que si l'autorité compétente le prévoit expressément ; il
ne peut en aller autrement que, par exception, dans le cas où une disposition a pour seul objet
d'abroger une disposition qui n'avait elle-même pas eu d'autre objet que d'abroger ou de modifier
un texte et que la volonté de l'autorité compétente de remettre en vigueur le texte ou la disposition
concerné dans sa version initiale ne fait pas de doute ».
(1328) Ex. : Cass. soc., 16 mai 1979, Bull. civ. V, no 421 : « les dispositions abrogées ne peuvent,
en principe et à défaut de stipulation législative particulière, redevenir en vigueur du seul fait de
la modification ou de l’abrogation ultérieures des textes qui les avaient remplacés ».
(1329) P. DEUMIER, « Abrogation sur abrogation ne vaut », obs. in RTD civ. 2010, p. 55.
(1330) Biblio. sélective : D. RÉMY, Légistique, éd. Romillat, 1994 ; A. VIANDIER, Recherches de
légistique comparée, Springer Verlag, 1988 ; J.-P. DUPRAT, « Genèse et développement de la
légistique », La confection de la loi, PUF, 2005, p. 9 ; J.-L. BERGEL, Méthodologie juridique, PUF,
coll. Thémis droit, 2e éd., 2016, nos 174 et s. V. aussi la bibliographie sur la loi, citée supra, nº 275.
(1331) Circulaire du Premier ministre du 30 janvier 1997 « relative aux règles d’élaboration, de
signature et de publication des textes au Journal officiel [...] » (JO 1er févr. 1997, p. 1720 ; Adde obs.
Chr. JAMIN, RTD civ. 1997, p. 537 et N. MOLFESSIS, ib., p. 780) rappelant, entre autres évidences, que
la rédaction d’un texte doit être « grammaticalement correcte » ( !). Cette circulaire reprend la
substance d’une circulaire du 2 janvier 1993, succédant elle-même à des circulaires de 1974, 1983,
1984, 1985... Adde Circ. 30 sept. 2003 « relative à la qualité de la réglementation », JCP G,
2003.II.20098 ; Circ. 29 févr. 2008 « relative à l’application des lois », JO 7 mars 2008, p. 4233, qui
veut accélérer l’application des lois dans les ministères ; Circ. 7 juill. 2011, « relative à la qualité du
droit », JORF no 0157, 8 juill. 2011.
(1332) Guide pour l’élaboration des textes législatifs et réglementaires, Doc. fr., 2e éd., 2007
(549 pages). Le guide est mis à jour en permanence sur : http://www.legifrance.gouv.fr/Droit-
francais/Guide-de-legistique.
(1333) Circ. 20 oct. 2000, « relative au mode de décompte des alinéas lors de l’élaboration des
textes », JO 31 oct. 2000, p. 17302 ; JCP G, 2000.III.20385.
(1334) V. obs. N. MOLFESSIS, in RTD civ. 1997, p. 796.
(1335) La pratique de l’étude d’impact, venant du droit de l’environnement, a été généralisée par une
circulaire du Premier ministre du 26 janvier 1998 (JCP G, 1998.III.20034, remplaçant la circulaire
« expérimentale » du 21 nov. 1995).
(1336) Cons. const., 9 avr. 2009, décis. no 2009-579 DC (l’exposé des motifs accompagnant le projet
de loi refléterait « une tradition républicaine qui a pour objet de présenter les principales
caractéristiques de ce projet et de mettre en valeur l'intérêt qui s'attache à son adoption »).
(1337) Le Parlement avait introduit le concept d’« évaluation de la législation », aux fins
d’« évaluer l’adéquation de la législation aux situations qu’elle régit » (L. no 96-516 du 14 juin
1996 « tendant à créer un Office parlementaire d’évaluation de la législation »). Mais le bilan
d’activité de l’Office parlementaire d’évaluation fut quasiment nul (cf. N. MOLFESSIS, obs. in RTD civ.
1997, p. 783). Il ne disposait pas des moyens de la « Commission supérieure de codification », que
les parlementaires avaient voulu concurrencer en instituant cet « Office ».
(1338) Circ. 17 févr. 2011 « relative à la simplification des normes concernant les entreprises et les
collectivités territoriales ». Un « commissaire à la simplification » est créé auprès du secrétariat
général du gouvernement (SGG) qui reçoit les fiches d’impact.
(1339) La simplification du droit (dir. D. Bert, M. Chagny et A. Constantin), Institut Universitaire
Varenne, 2015.
(1340) Pour d’autres propositions, A. LAMBERT et J.-Cl. BOULARD, Rapport de la mission de lutte
contre l’inflation normative, 26 mars 2013 : www.ccen.dgcl.interieur.gouv.fr.
(1341) Pour un inventaire : « Les organismes chargés de simplification normative », JCP G, 2015,
suppl. au nº 4, 26 janv. 2015, p. 5.
(1342) CGCT, art. L. 1211-4-2, réd. L. fin. rectificative pour 2007 ; D. no 2008-994. – Sur l’activité
du CCEN : http://www.ccen.dgcl.interieur.gouv.fr.
(1343) L. nº 2013-921, 17 oct. 2013.
(1344) Cass. crim., 1er mars 1990, Bull. crim., no 102. V. déjà : Cass. civ., 18 mars 1952, D. 1952,
417.
(1345) Ex. : Cass. soc., 5 nov. 1981, Bull. civ. V, no 864 : « si une loi est immédiatement applicable,
il n’en est pas ainsi lorsque sa mise en application est subordonnée à la publication d’un acte
réglementaire ultérieur ».
(1346) Cass. com., 28 déc. 1949, D. 1950, 159 : « Si, en principe, une loi est immédiatement
exécutoire, même au cas où elle prévoit des actes réglementaires relatifs à son exécution, dès
l’instant qu’elle n’a pas spécifié que son application serait subordonnée à la publication desdits
actes, cettesubordination peut être implicite et doit différer la mise en vigueur de la loi quand le
texte de celle-ci, ne se suffisant pas à lui-même, a besoin d’être complété ».
(1347) Ex. : Cass. crim., 18 sept. 1990, Bull. crim., no 315 ; 9 juill. 2003, Bull. crim., no 138 (la loi
prévoyait qu'un décret en Conseil d'État préciserait « en tant que de besoin » ses conditions
d'application, « par ailleurs suffisamment claires et précises pour être appliquées
immédiatement »). Ces solutions sont transposables à un règlement qui prévoit des mesures
d’application (CE, 7 oct. 1988, Dr. adm. 1988, no 574). Comp. Cass. crim., 3 oct. 1994, Bull. crim.,
no 311 : « lorsqu’une loi abroge une incrimination et prévoit que cette abrogation ne prendra effet
qu’après publication d’un décret à intervenir dans un délai déterminé, l’abrogation, à défaut de
décret, devient effective à l’expiration dudit délai » (résumé).
(1348) CE, avis, 4 juin 2007, RJS 10/07, no 1127 ; JCP S, 2007, 1840, note G. Vachet, qui applique
de nouvelles dispositions législatives dont l’application n’est pas « manifestement impossible en
l’absence d’un texte réglementaire – que d’ailleurs elles ne prévoient pas ».
(1349) V. supra, no 277.
(1350) CE, 23 oct. 1992, D. 1992, 511, concl. H. Legal : la L. 10 juillet 1989 créant le permis à
points devait entrer en vigueur à une date « fixée par décret en Conseil d’État » mais ne pouvant
« être postérieure au 1er janvier 1992 » ; bien que le décret d’application (qui devait établir le
barème des points retirés par catégorie d’infraction au Code de la route) ne fût pris que le 25 juin
1992, il n’encourt pas la nullité de ce chef.
(1351) CE, 5 déc. 1952, Vasnier, Rec. CE, p. 559. La nullité est également encourue lorsque, au
terme du délai imparti par la loi, le pouvoir réglementaire est dessaisi de sa compétence (ex. : selon
l’art. 38 Const., les lois d’habilitation permettent au gouvernement de prendre « par ordonnances,
pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi »).
(1352) CE, 30 juill. 2003, Gemtrot, Dr. adm. 8-9/03, comm. 162.
(1353) Const., art. 21 : « Le Premier ministre [...] assure l’exécution des lois ». Sur le thème
classique du retard des textes d’application des lois, v. la doctrine citée par R. Libchaber in RTD civ.
1998, p. 788. Adde J.-C. VENEZIA, « Les règlements d’application », Mélanges R. Chapus,
Montchrestien, 1992, p. 673.
(1354) La Cour de cassation (Cass. crim., 20 mai 1887, DP 1888, 1, 96 ; v. aussi supra, no 143, pour
la codification à droit constant) le Conseil d’État (CE, 11 févr. 1907, Jacquin, Rec. CE, p. 152 ; DP
1908, 3, 92 ; CE, ass., 16 avr. 1943, Lanquetot, S., 1943, 3, 41) affirment que les règlements
légalement pris pour l’application d’une loi survivent à son abrogation tant qu’ils n’ont pas été
rapportés ou ne sont pas devenus inconciliables avec une législation postérieure.
(1355) Ex. : Cass. soc., 22 mars 1989, Bull. civ. V, no 242 : en l’absence de décrets d’application
fixant la tarification des frais de soins remboursables par la CPAM, il convient de se référer au
« système antérieur » à la loi.
(1356) Ex. : CE, 3 déc. 1999, Association ornithologique et mammalogique de Saône-et-Loire,
JCP G, 2000.II.10319 (2e esp.) (autres références in JCP G, 2000.I.151, no 2) : illégalité du refus du
ministre chargé de la chasse d’exercer sa compétence réglementaire (pour fixer la date d’ouverture
de la chasse au gibier d’eau) dans le respect des objectifs d’une directive communautaire, sans qu’il
puisse tirer argument d’une loi française contraire à cette directive.
(1357) CE, 12 déc. 2003, Syndicat des commissaires de la police nationale, Dr. adm., 2004, comm.
19 et chron. Larcher, chr. 3 ; AJDA 2004, p. 442 et chron. p. 762 (enjoint au ministre de l’Intérieur de
publier dans les trois mois au JO un arrêté signé en 1983).
(1358) CE, 10 mars 1967, sté Les Ardoisières d’Angers, Rec. CE, p. 116 : « [...] négligence fautive
de nature à engager la responsabilité de l’État ».
(1359) CE, 13 juill. 1951, Union des anciens militaires titulaires d’emplois réservés à la SNCF,
Rec. CE, p. 403 : « l’exercice du pouvoir réglementaire comporte non seulement le droit, mais
aussi l’obligation de prendre dans un délai raisonnable les mesures qu’implique nécessairement
l’application de la loi ». Le délai raisonnable s’apprécie, notamment, en fonction de la difficulté à
élaborer les mesures d’application de la loi (en moyenne jusqu’à quinze mois).
(1360) C. just. adm., art. L. 911-1 et L. 911-3. Ex. : CE, 26 juill. 1996, Rec. CE, p. 293, concl.
C. Maugüé (l’abrogation d’un décret d’application ayant rendu impossible l’application de l’art. 36
L. 1er sept. 1948, le Conseil d’État ordonne l’édiction d’un nouveau décret dans le délai d’un an).
(1361) Sur les obstacles dressés par le Conseil constitutionnel, cf. B. GENEVOIS, « Les contraintes
d’ordre constitutionnel pesant sur l’entrée en vigueur des lois », Mélanges P. Avril, « La
République », Montchrestien, 2001, p. 243.
(1362) Ex. : Paris, 26 sept. 1997, D. 1997.IR.236 : le décret d’application de la loi du 10 juin 1994,
réformant celle du 25 janvier 1985 en matière de procédures collectives, est paru le 21 octobre 1994
alors que la nouvelle loi déclarait s’appliquer aux procédures ouvertes à compter du 1er octobre
1994 ; la cour d’appel applique à une procédure ouverte entre le 1er et le 21 octobre les anciennes
règles du décret du 27 décembre 1985 dans la mesure où elles sont compatibles avec les nouvelles
dispositions législatives. Adde Cass. com., 15 févr. 2000, D. Aff. 2000, AJ, p. 127, appréciant
article par article les dispositions de la loi du 10 juin 1994 qui peuvent faire l’objet d’une
application directe.
(1363) Ex. : l’art. 5 de l’ordonnance (dite « Juppé ») no 96-345 du 24 avril 1996 a incité de
nombreux médecins âgés de 56 ans ou plus à cesser leur activité de façon anticipée ; mais aucun
d’entre eux n’a perçu l’allocation de remplacement promise (se retrouvant ainsi privé de tout revenu)
jusqu’à la parution du décret d’application le 21 avril 1997 (D. 1997, Lég., 249).
(1364) Pour un autre exemple, cf. D. BUREAU, « L’art législatif sur le vif. À propos du nantissement de
compte d’instruments financiers », D. 1997, chr. 73 (au sujet des art. 29 et 29-1 nouv. L. 3 janv. 1983,
issus de la loi du 2 juillet 1996, dont le décret d’application n’est paru que le 21 mai 1997,
entretenant dans l’intervalle une insécurité juridique autour de cette innovation).
(1365) Plusieurs circulaires « sur la qualité de la loi » ou « de la réglementation » ont été édictées
par les Premiers ministres successifs de 2003 à nos jours (v. supra, no 279, en note).
(1366) Selon les termes de la Circulaire du Premier ministre du 29 févr. 2008 « relative à
l’application des lois », JO 7 mars 2008, p. 4233.
(1367) Sur le bilan de la commission et les rapports publiés depuis 1998,
http://www.senat.fr/commission/capl/index.html.
(1368) Biblio. : G. DEREUX, « Étude critique de l’adage “Nul n’est censé ignorer la loi” », RTD civ.
1907, p. 513 ; R. GUILLIEN, « Nul n’est censé ignorer la loi », in Mélanges P. Roubier, Dalloz, 1961,
t. I, p. 253 ; J. CARBONNIER, « La maxime "nul n’est censé ignorer la loi" en droit français », Journées
de la société de législation comparée, 1984, p. 321.
(1369) Ex. : Cass. soc., 30 janv. 2003, RJS 4/03, no 525 : l’ignorance d’un droit ne constitue pas une
impossibilité d’agir faisant obstacle à la prescription.
(1370) PORTALIS in Fenet, t. VI, p. 350 : « La loi prend les hommes en masse. Elle parle non à
chaque particulier, mais au corps entier de la société. Il suffit que les particuliers aient pu
connaître la loi ».
(1371) J. CARBONNIER, art. cit., spéc. p. 322 : « Le principe, conçu pour des siècles de sobriété et
d’immuabilité juridiques, est-il encore adapté à une époque d’inflation et d’effervescences
législatives ? ».
(1372) C. pén., art. 122-3 : « N’est pas pénalement responsable la personne qui justifie avoir cru,
par une erreur sur le droit qu’elle n’était pas en mesure d’éviter, pouvoir légitimement accomplir
l’acte ». L’art. 4 D. 5 nov. 1870 accueillait déjà « l’exception d’ignorance alléguée par les
contrevenants, si la contravention a eu lieu dans le délai de trois jours francs, à partir de la
promulgation » (la publication en réalité) ; l’exception, limitée aux contraventions de police, est très
étroite.
(1373) Le prévenu doit avoir été trompé sur le sens de la réglementation applicable par une
information erronée fournie par un haut responsable de l’administration compétente (tel le ministre du
Travail : Cass. crim., 9 oct. 1958, Bull. crim., no 615 ; ou un médiateur désigné par le gouvernement :
Cass. crim., 24 nov. 1998, JCP G, 1999.II.10208). La Cour de cassation exige, en outre, qu’il n’ait
disposé d’aucun recours juridictionnel ou administratif en interprétation, qu’il n’ait pu éprouver le
moindre doute sur la véracité de l’information, voire qu’il n’ait pu prendre l’avis de « juristes
qualifiés » (Cass. crim., 19 mars 1997, Bull. crim., no 115, pour un chef d’entreprise). Est également
punissable celui qui n’a pas su anticiper une interprétation, voire un revirement de jurisprudence
(Cass. crim., 2 mars 1961, JCP G, 1961.II.12095). Sur le cas d’une divergence de jurisprudences,
v. infra, no 401.
(1374) Comp. Cass. 1re civ., 4 nov. 1975, D. 1977, 105, n. J. Ghestin : « Si l’erreur de droit peut
justifier l’annulation d’un acte juridique pour vice du consentement ou défaut de cause, elle ne
prive pas d’efficacité les dispositions légales qui produisent leurs effets en dehors de toute
manifestation de volonté de la part de celui qui se prévaut de leur ignorance ».
(1375) Cass. 1re civ., 25 nov. 1997, Bull. civ. I, no 328 ; RTD civ. 1998, p. 210, obs. N. Molfessis :
« Les éventuels manquements d’un notaire à ses obligations professionnelles ne peuvent
s’apprécier qu’au regard du droit positif existant à l’époque de son intervention, sans qu’on
puisse lui imputer à faute de n’avoir pas prévu une évolution ultérieure du droit » ; les premiers
juges ne pouvaient lui « reprocher [...] de n’avoir pas prévu un revirement de jurisprudence ».
Cass. civ., 21 juill. 1921, DP 1925, 1, 29 : un notaire ignorant une jurisprudence constante et non
controversée engage sa responsabilité civile.
(1376) Comp. J. PARAIN-VIAL, « La crise de la notion de la loi en biologie et en droit », Arch. phil.
dr., t. XXV, « La loi », 1980, p. 249.
(1377) V. supra, nos 47 et s.
(1378) La Constitution envisage l’empiètement de la loi sur le domaine du règlement : art. 37, al. 2 :
« Les textes de forme législative intervenus en ces matières (réglementaires) peuvent être modifiés
par décrets pris après avis du Conseil d’État. Ceux de ces textes qui interviendraient après
l’entrée en vigueur de la présente Constitution ne pourront être modifiés par décret que si le
Conseil constitutionnel a déclaré qu’ils ont un caractère réglementaire [...] » ; art. 41 : « S’il
apparaît au cours de la procédure législative qu’une proposition ou un amendement n’est pas du
domaine de la loi [...], le gouvernement peut opposer l’irrecevabilité ». De son côté, le juge
administratif doit annuler sur recours pour excès de pouvoir les règlements qui empiètent sur le
domaine de la loi.
(1379) R. CARRÉ DE MALBERG, La loi expression de la volonté générale, 1931 (rééd. Economica,
1984), no 505 : « La matière éventuelle de la loi s’étend à l’infini ». Comp. avec l’adage de droit
anglais : « Parliament can do anything, except changing a man into a woman ».
(1380) Ex. de ponctuation ambiguë : art. 10 L. 17 mars 1909 (auj. C. com., art. L. 142-3), sur le
nantissement de fonds de commerce (v. N. MOLFESSIS, obs. RTD civ. 1997, p. 781) ; art. 40 L. 25 janv.
1985 mod. L. 10 juin 1994 (auj. C. com., art. L. 622-17), sur le rang des sûretés réelles en cas de
liquidation judiciaire (v. RTD com. 1997, p. 330) ; anc. art. 68, al. 2, Const. 4 oct. 1958, sur la
responsabilité pénale des ministres (abrogé par la L. const. 27 juill. 1993. Cf. R. MERLE et A. VITU,
Traité de droit criminel. Procédure pénale, Cujas, 5e éd., 2001, no 41, p. 59) ; Code des débits et
boissons, art. L. 17 ; C. com., art. L. 233-10 (modifié par la L. 11 déc. 2001. cf. RTD com. 2001,
p. 720).
(1381) MONTESQUIEU, De l’esprit des lois, L. XXIX, Chap. XVI, « Choses à observer dans la
composition des lois » : « Ceux qui ont un génie assez étendu pour pouvoir donner des lois à leur
nation ou à une autre, doivent faire de certaines attentions sur la manière de les former. Le style
doit en être concis [...] Le style des lois doit être simple : l’expression directe s’entend toujours
mieux que l’expression réfléchie [...]. Les lois ne doivent point être subtiles : elles sont faites pour
des gens de médiocre entendement ; elles ne sont point un art de logique, mais la raison simple
d’un bon père de famille. Lorsque dans une loi les exceptions, limitations, modifications ne sont
point nécessaires, il vaut beaucoup mieux n’en point mettre : de pareils détails jettent dans de
nouveaux détails ». G. CORNU, Linguistique juridique, Montchrestien, 3e éd., 2005 ; Les mots de la
loi, Economica, 1999.
(1382) D. GUTMANN, « “Le juge doit respecter la cohérence du droit”. Réflexions sur un imaginaire
article 4 ½ du Code civil », Le Titre préliminaire du Code civil, Economica, 2003, p. 109.
(1383) A. VIANDIER, « La crise de la technique législative », Droits 1986, no 4, p. 75 :
« Médiocrement rédigées, obscures, souvent ineffectives, à faible durée de vie, les lois
contemporaines donnent le triste spectacle d’une déchéance qui s’accélère » ; p. 76 : « On n’a
jamais témoigné autant de mépris pour la plastique du droit ».
(1384) G. RIPERT, Le déclin du droit, LGDJ, 1949, Chap. III, « Sous la servitude des lois », spéc.
p. 68 : « L’État s’est assigné tant de tâches nouvelles que pour les remplir il lui a fallu légiférer
sans cesse [...]. L’État est seul et veut être seul » ; p. 78 : « On peut faire dans les textes
réglementaires son instruction dégustative et son éducation culinaire ». Le phénomène s’est
amplifié avec les textes communautaires ou européens, d’une technicité et d’un détail parfois
effrayants.
(1385) Sur les renvois de texte à texte : La législation par référence, RRJ 1997, p. 1189 et s. La
technique du renvoi d’un texte à un autre peut avoir pour vertus de coordonner, de simplifier ou
d’unifier le droit. Mais ses vices prédominent : il existe trop de renvois circulaires, en cascade,
inintelligibles, obsolètes ou erronés. Cette technique n’est qu’une facilité rédactionnelle. Le juge
accepte parfois de corriger les erreurs du législateur mais, si ce dernier n’a pas mis à profit plusieurs
« sessions de rattrapage », il y renonce et s’en tient à une lecture littérale du renvoi. Pire, en cas de
codification postérieure de la jurisprudence, l’erreur législative non rectifiée par le juge devient
vérité (pour un ex., P. MORVAN, Restructurations en droit social, LexisNexis, 3e éd., 2013, no 1391).
(1386) L. BORÉ, « L’obscurité de la loi », Mélanges J. Boré, Dalloz, 2007, p. 27. Jean Carbonnier
l’avait déjà dit.
(1387) Cons. const., 19 déc. 2000, décis. no 2000-437 DC. Cette dernière formule était apparue pour
justifier la codification à droit constant par ordonnances (v. supra, no 142). En matière pénale,
« toute infraction doit être définie en des termes clairs et précis pour exclure l’arbitraire et
permettre au prévenu de connaître exactement la nature et la cause de l’accusation portée contre
lui » (Cass. crim., 1er févr. 1990, Bull. crim., no 56, reprenant les termes de Cons. const., 19-20 janv.
1981, Sécurité et liberté, cité infra, no 305. V. aussi Cass. crim., 16 janv. 2002, D. 2002, 1225, qui
va jusqu’à écarter une loi imprécise). Sur l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et
d’intelligibilité de la loi, cf. P. de MONTALIVET, in La confection de la loi, PUF, 2005, p. 99 ;
Ph. MALAURIE, « L’intelligibilité des lois », Pouvoirs, 2005, p. 131 s.
(1388) Cons. const., 12 janv. 2002, décis. no 2001-455 DC, Loi de modernisation sociale : « Le
principe de clarté de la loi, qui découle de l’article 34 de la Constitution, et l’objectif de valeur
constitutionnelle d’intelligibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration
(de 1789), lui imposent, afin de prémunir les sujets de droits contre une interprétation contraire à
la Constitution ou contre le risque d’arbitraire, d’adopter des dispositions suffisamment précises
et des formules non équivoques » ; le Conseil reconnaît la clarté des dispositions éclairées par les
travaux préparatoires.
(1389) Cons. const., 29 déc. 2005, décis. no 2005-530 DC, Loi de finances pour 2006, consid. 77,
qui invoque également les art. 4 et 5 de la Déclaration de 1789 ; de plus, « en matière fiscale, la loi,
lorsqu'elle atteint un niveau de complexité tel qu'elle devient inintelligible pour le citoyen,
méconnaît l'article 14 de la Déclaration de 1789 » (selon lequel tous les citoyens ont le droit,
notamment, de constater la nécessité de la contribution publique).
(1390) Ex. : CJCE, 9 juill. 1981, SA Gondrand Frères et SA Garancini, aff. 169/80, Rec. CJCE,
p. 1931 : « Le principe de sécurité juridique exige qu’une réglementation imposant des charges au
contribuable soit claire et précise, afin qu’il puisse connaître sans ambiguïté ses droits et
obligations et prendre ses dispositions en conséquence » ; CJCE, 25 sept. 1984, Könecke c/Balm,
aff. 117/83, Rec., p. 3291 : il exige aussi qu’« une sanction, même de caractère non pénal, [...]
repose sur une base légale claire et non ambiguë » ; CJCE, 15 déc. 1987, Irlande c/Commission,
aff. 325/85, Rec., p. 5041 : « cet impératif de sécurité juridique s’impose avec une rigueur
particulière lorsqu’il s’agit d’une réglementation susceptible de comporter des conséquences
financières ».
(1391) 1er ex. : L. no 98-657 du 29 juill. 1998 « d’orientation relative à la lutte contre les
exclusions », art. 140 : « L’égal accès de tous, tout au long de la vie, à la culture, à la pratique
sportive, aux vacances et aux loisirs constitue un objectif national. Il permet de garantir
l’exercice effectif de la citoyenneté. [...] ». 2e ex. : L. no 99-478 du 9 juin 1999, art. 1er :
« l’exploitation des enfants par le travail doit être fermement combattue et dénoncée par tous les
moyens légaux [...] ».
(1392) Études et documents du Conseil d’État. Rapport public pour 1991, no 43, Doc. fr., 1992,
p. 32 à 34 : « Trop de textes ne permettent pas de distinguer l’intention de l’action, le possible du
souhaitable, l’accessoire de l’essentiel, le licite de l’illicite. [...] Un premier élément de la
dégradation de la norme réside dans le développement des textes d’affichage, un droit mou, un
droit flou, un droit “à l’état gazeux”. [...] le Conseil d’État a vu passer un nombre non négligeable
de lois et décrets dont l’article 1er est dépourvu de tout contenu normatif (et) de plus en plus, le
discours philosophique, l’exposé de bonnes intentions, s’étend aux articles suivants, quand il
n’envahit pas le texte tout entier, réduit à une simple formulation d’objectifs. [...] ».
(1393) Cons. const., 22 août 2002, décis. no 2002-460 DC, JO 30 août 2002, p. 14411. L’art. 1er de la
loi no 2002-1094 du 29 août 2002 affirme que « les orientations de la politique de sécurité
intérieure figurant à l’annexe I sont approuvées ». Ces orientations, selon le juge constitutionnel,
« ne sont pas revêtues de la valeur normative qui s’attache à la loi ».
(1394) Cons. const., 29 juill. 2004, décis. no 2004-500 DC, RFDC 2004, p. 798, note L. Philip ; RDP
2004, p. 1739, note D. Chamussy.
(1395) Cons. const., 21 avr. 2005, décis. no 2005-512 DC, JO 24 avr. 2005, p. 7173, qui censure
l’article de la « loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école » selon lequel « l'objectif
de l'école est la réussite de tous les élèves »... Sur la censure d’une « loi mémorielle », v. supra,
no 14.
(1396) Cf. le rappel d’un Premier ministre : Circ. 19 janv. 2006 relative au respect des articles 34
et 37 de la Constitution, JO 20 janv. 2006, texte no 2.
(1397) Cons. const., 21 avr. 2005, préc.
(1398) N. MOLFESSIS, « Le titre des lois », Études P. Catala, « Le droit privé français à la fin du
XXe siècle », Litec, 2001, p. 47.
(1399) Ex. : « Loi... instituant... », « Loi... modifiant... », « Loi... autorisant... », « Loi... portant
adaptation... », « Loi... de modernisation... », etc.
(1400) Ex. : « Loi... tendant à... », « Loi... visant à... » ; « Loi... relative à la lutte contre... » parfois
suivie d’une « Loi... relative au renforcement de la lutte contre... » (par ex. le travail clandestin).
(1401) Cf. N. MOLFESSIS, art. cit., note 89, p. 65.
(1402) Ex. : L. no 92-3 du 3 janv. 1992 « sur l’eau » ; L. no 2000-698 du 26 juill. 2000 « relative à la
chasse ».
(1403) Ex. : la L. no 85-677 du 5 juill. 1985 est devenue la loi « Badinter » (sur les accidents de la
circulation) ; les L. no 98-461 du 13 juin 1998 et no 2000-37 du 19 janv. 2000 sont devenues les lois
« Aubry I » et « Aubry II » (sur la réduction du temps de travail).
(1404) Ex. : L. no 2001-420 du 15 mai 2001 « relative aux nouvelles régulations économiques » est
devenue la loi « NRE ».
(1405) Ex. : la L. 8 juin 1970 fut baptisée loi « anti-casseurs » et la L. no 81-82 du 2 févr. 1981 fut
baptisée loi « Sécurité et liberté » par les adversaires de la politique répressive (de droite) que ces
textes incarnaient.
(1406) Cass. civ., 20 avr. 1920, DP 1923, 1, 87 : « Les indications résultant de l’intitulé des lois,
lequel n’est pas soumis au vote du Parlement, n’ont pas de force obligatoire ».
(1407) Ch. BEUDANT, Le droit individuel et l’État, 1891, p. 148. Comp. J. CARBONNIER, « Toute loi en
soi est-elle un mal ? », in Essais sur les lois, Defrénois, 2e éd., 1995, p. 315.
(1408) Par exemple, le livre IV du Code de commerce, qui intègre l’ordonnance du 1er déc. 1986
relative à la liberté des prix et de la concurrence, commence par sanctionner des « pratiques
anticoncurrentielles » (C. com., art. L. 420-1 et s.).
(1409) Pour un panorama plus large, Ch. JARROSSON, « Le législateur peut-il avoir tort ? », Études
Bruno Oppetit, Litec, 2010, p. 349.
(1410) Ph. MALAURIE, « La sobriété », in Études Gérard Champenois, Defrénois, 2012, p. 12 ;
Dictionnaire d’un droit humaniste, Université Panthéon-Assas-LGDJ, 2015, Vº « Sobriété ».
(1411) Ex. : L. no 95-116 du 4 févr. 1995 « portant DDOS ». Les variantes sont infinies ; ex. :
L. no 96-451 du 28 mai 1996 « portant diverses mesures d’ordre sanitaire, social et statutaire ».
(1412) Ex. : la L. no 96-314 « portant DDOEF » du 12 avr. 1996 (JO 13 avr. 1996, p. 5707) contient
99 articles remplissant 17 pages au Journal officiel (v. obs. Th. REVET in RTD civ. 1996, p. 724). La
L. no 98-546 « portant DDOEF » du 2 juill. 1998 compte 114 articles.
(1413) Ex. : la L. du 14 sept. 1941, dite « loi du jardinier » (celui du maréchal Pétain en
l’occurrence, auquel le Maréchal voulut venir en aide), avait admis la légitimation d’enfants
adultérins en présence d’enfants légitimes.
(1414) Biblio. Sur le phénomène – très ancien – des groupes de pression : J. LAPOUSTERLE,
L’influence des groupes de pression sur l’élaboration des normes. Illustration à partir du droit de
la propriétaire littéraire et artistique, Dalloz, 2009, qui souligne, parmi les effets pervers de cette
influence, favorisée par l’essor de la soft law (v. supra, no 47), une représentation déséquilibrée des
différents groupes au profit des mieux structurés qui peuvent d’ailleurs se neutraliser et empêcher
l’adoption d’une loi nécessaire. La force et l’influence normative des groupes d’intérêt.
Identification, utilité et encadrement, Lextenso éditions, 2011. Adde M. MEKKI, même intitulé, JCP
G, 2009, 370 et 392. Pour deux exemples de lois visant à permettre les courses automobiles de
Formule 1 en France, cf. N. MOLFESSIS, « La loi de la course », RTD civ. 1998, p. 778 (loi du 6 mars
1998) et D. BAKOUCHE, « La loi de la course », JCP G, 2012, 397 (loi du 12 mars 2012).
(1415) Ex. : L. no 98-146 du 6 mars 1998, « relative à la sécurité et à la promotion d’activités
sportives » est le fruit des pressions exercées par l’« Association des constructeurs de formule un »
(FOCA) qui menaçait de ne plus organiser le grand prix de France à Magny-Cours si n’était
condamnée une jurisprudence de la Cour de cassation (Cass. 1re civ., 6 févr. 1996, reproduit in J.-
C. GALLOUX, JCP G, 1997.I.4046, Annexe) s’appuyant sur la liberté d’information (Conv. EDH,
art. 10) afin de limiter le monopole de la retransmission d’images de courses automobiles ; la loi
octroie même un pouvoir réglementaire aux fédérations sportives en ce domaine.
(1416) PORTALIS, Discours préliminaire, in Locré, t. I, p. 258 : « L’office de la loi est de fixer, par
de grandes vues, les maximes générales du droit ; d’établir des principes féconds en
conséquences, et non de descendre dans le détail des questions qui peuvent naître sur chaque
matière » ; p. 264 : « La loi statue sur tous ; elle considère les hommes en masse, jamais comme
particuliers ; elle ne doit point se mêler de faits individuels ni des litiges qui divisent les citoyens.
S’il en était autrement, il faudrait journellement faire de nouvelles lois : leur multitude étoufferait
leur dignité et nuirait à leur observation. [...] Les intérêts particuliers assiégeraient la puissance
législative ; ils la détourneraient, à chaque instant, de l’intérêt général ».
(1417) Outre l’exemple précédent, voir P. MORVAN, « Responsabilité pénale et droit social, avant et
après la loi du 10 juillet 2000 », RJS 2001, p. 283, spéc. no 2 : la L. 10 juill. 2000 vise à conférer une
immunité pénale aux agents publics et élus locaux ; cette offensive législative contre les juges,
d’origine sénatoriale, n’est pas la première.
(1418) http://www.assemblee-nationale.fr/representants-interets/index.asp. Cf. P. DEUMIER, obs. RTD
civ. 2010, p. 62.
(1419) Ex. : la loi du 18 mars 2003 a créé le délit d’outrage public à l’hymne national ou au drapeau
tricolore (C. pén., art. 433-5-1) après que des supporters algériens eurent sifflé la Marseillaise lors
d’un match de football joué le 6 octobre 2001 entre la France et l’Algérie ; la loi no 2008-582 du
20 juin 2008 a créé l’homicide involontaire commis avec un chien (C. pén., art. 221-6-2).
(1420) 1er ex. : L. no 97-60 du 24 janv. 1997 « tendant, dans l’attente du vote de la loi instituant
une prestation d’autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre aux besoins
des personnes âgées par l’institution d’une prestation spécifique dépendance ». 2e ex. : L. no 2003-
6 du 3 janv. 2003, qui suspend (l’abrogation ayant été exclue pour des raisons politiques) pour une
durée déterminée des dispositions de la L. no 2002-73 du 17 janv. 2002 « de modernisation
sociale ».
(1421) G. BURDEAU, « Le déclin de la loi », Arch. phil. dr., t. VIII, « Le dépassement du droit », 1963,
p. 35, spéc. p. 38 : « Dans cette évolution de son usage, la loi a perdu son prestige. Partisane et
tatillonne, transitoire parce que liée aux contingences, condamnée souvent à rester lettre-morte,
elle n’apparaît plus digne du marbre où l’on songeait autrefois à la graver ni du respect qui
faisait inscrire son nom au fronton des monuments publics ».
(1422) Évaluation législative et lois expérimentales, PUAM, 1993, préface J.-L Bergel qui parle
d’une « sorte de “darwinisme” juridique » marquant un « déclin de la mystique de la loi, qui n’est
jamais que du droit transitoire ».
(1423) Ex. : la pratique de la médiation pénale est née de plusieurs expériences conduites dans des
tribunaux au début des années 1980 ; une circulaire de « cadrage » du 2 oct. 1992 a ensuite énoncé la
politique du ministère de la Justice sur ce sujet ; un décret du 4 nov. 1992 en a organisé le
financement ; enfin, la loi no 93-2 du 4 avr. 1993 l’a introduite dans le Code de procédure pénale
(art. 41 devenu art. 41-1. V. chr. C. LAZERGES in Rev. sc. crim. 1997, p. 186). L’exemple est d’autant
plus remarquable que l’art. 34 Const. confie à la loi seule le soin de fixer « les règles concernant la
procédure pénale ».
(1424) En droit du travail, d’importantes réformes (not. en matière de licenciements collectifs ou sur
le statut des VRP) ont repris la substance d’accords nationaux interprofessionnels (ANI) conclus
entre les syndicats ; l’« élaboration conventionnelle » de la loi est un gage de consensus et de
pertinence. Ex. : L. no 96-985 du 12 nov. 1996, art. 6 : « À titre expérimental, pour atteindre
l’objectif de développement de la négociation collective (énoncé par) l’ANI du 31 octobre 1995 »,
des accords pourront être conclus jusqu’au 31 octobre 1998 avec des représentants du personnel
autres que les syndicats.
(1425) Le Conseil constitutionnel (17 janv. 2002, Loi relative à la Corse, décis. no 2001-454 DC)
avait, au contraire, exclu que le législateur « fût-ce à titre expérimental, dérogatoire et limité dans
le temps » puisse autoriser une collectivité territoriale à prendre des mesures relevant du domaine de
la loi.
(1426) V. infra, nos 303, 305 et 306.
(1427) Ex. : L. no 96-296 du 9 avr. 1996, « tendant (sic) à faire du 20 novembre une Journée
nationale des droits de l’enfant ».
(1428) V. supra, no 14.
(1429) V. supra, no 24.
(1430) V. supra, no 284.
(1431) Par ex., la lutte contre le travail dissimulé et contre la fraude au détachement de travailleurs
dans l’Union européenne (le « dumping social ») a donné lieu quasiment à une loi par an depuis 2005
(P. MORVAN, « Travail dissimulé, velléités et impunités en droit », in La norme pénale et les relations
de travail, Éd. Panthéon-Assas, 2015, p. 147).
(1432) Biblio. sélective sur le standard (auquel il faut identifier les termes de « concept mou »,
« notion-cadre », « notion floue », « notion confuse », « notion à contenu variable », « notion sans
critère », « notion fonctionnelle », etc.) : J. BECQUART, Les mots à sens multiples en droit civil
français. Contribution au perfectionnement du vocabulaire juridique, th. Lille, 1928 ; J. MAURY,
« Observations sur les modes d’expression du droit : règles et directives », Études Éd. Lambert,
Sirey, LGDJ, 1938, t. I, p. 421 ; A. TUNC, « Standards juridiques et unification du droit », RID comp.
1970, p. 247 ; G. CORNU, L’apport des réformes récentes du Code civil à la théorie du droit civil,
Cours de doctorat, 1970-1971, Les Cours du droit, p. 219 ; Ch. PERELMAN, « L’usage et l’abus des
notions confuses », (Revue) Logique et analyse mars 1978, no 81, p. 3 ; E. MACCKAY, Les notions
floues en droit ou l’économie de l’imprécision, Langages mars 1979, no 53, p. 33 ; Les notions à
contenu variable, Études publiées par Ch. Perelman et R. Vander Elst, Travaux du centre national de
recherches de logique, Bruylant, 1984 ; M.-A. HERMITTE, « Le rôle des concepts mous dans les
techniques de déjuridicisation. L’exemple des droits intellectuels », Arch. phil. dr., t. 30, « La
jurisprudence », Sirey, 1985, p. 331 ; Ph. COËT, Les notions-cadre dans le Code civil, étude des
lacunes intra legem, th. Paris II, 1985 ; Ph. DELEBECQUE, « Les standards dans les droits romano-
germaniques », RRJ 1988, p. 871 ; S. NÉRON, « Le standard, un instrument juridique complexe », JCP
G, 2011, 1003.
(1433) Ex. : art. 375-2 (« Chaque fois qu’il est possible »...), 270, 408, 832 (« Autant que
possible »...).
(1434) Le « délai raisonnable » est une notion majeure (outre les art. 5, § 3, et 6, § 1, Conv. EDH,
voir les art. 144-1 et 175-2 C. pr. pén., art. 134-7 C. com., art. L. 47 LPF, art. L. 1234-17 C. trav., art.
L. 111-3 C. org. jud., etc.). L’ancien art. 1112 C. civ. définissait la violence par rapport à une
« personne raisonnable ». La Cour de cassation a introduit l’« ignorance raisonnable » dans les
chaînes de contrats (Cass. 1re civ., 6 févr. 2001, JCP E, 2001, p. 1238, n. D. Mainguy et J.-B. Seube).
(1435) Ex. : C. consom., art. L. 212-1 (la clause abusive est celle qui introduit un « déséquilibre
significatif » dans le contrat conclu entre un professionnel et un consommateur).
(1436) Le Code civil utilisait ce standard à dix reprises (anciens art. 601, 627, 1137, 1374, 1728,
1729, 1766, 1806, 1880 et 1962) avant que la loi nº 2014-873 du 4 août 2014 « pour l’égalité réelle
entre les femmes et les hommes » (art. 26) ne le supprime au nom de la lutte contre le sexisme.
(1437) Le Code civil utilise ce standard à vingt-cinq reprises (not. art. 57, 232, 264, 350, 371-1,
371-4, 373-2-6).
(1438) S. RIALS, Le juge administratif français et la technique du standard (Essai sur le traitement
juridictionnel de l’idée de normalité), LGDJ, 1980, no 93, p. 120.
(1439) M. HAURIOU, « Police juridique et fond du droit. À propos du livre d’Al Sanhoury : les
restrictions contractuelles à la liberté du travail dans la jurisprudence anglaise et à propos des
travaux de l’Institut de droit comparé de Lyon », RTD civ. 1926, p. 265, spéc. p. 269.
(1440) R. POUND, The administrative application of legal standards, Reports of American bar
association, 1919, t. XLIV, p. 445. Roscoe Pound (1870-1964), Doyen de la School of law de
Harvard, a opposé dès 1908 à la « mechanical jurisprudence » (ce dernier terme désignant la
théorie ou philosophie du droit) du droit continental, de nature abstraite et conceptuelle, logique et
déductive, dont le Code civil français serait le fleuron, la « sociological jurisprudence » du juge de
Common Law en quête d’un équilibre entre des intérêts antagonistes (balancing of interests), de
types économiques ou sociaux, publics ou privés. Le juge opère comme un « ingénieur social »
(social engineering), scrutant la société, évaluant les facteurs sociologiques, économiques et sociaux
en constante évolution pour élaborer la solution la plus opportune dans ses conséquences. La
« jurisprudence sociologique » opère, selon Pound, avec quatre instruments normatifs : les « règles »,
les « principes », les « conceptions » et les « standards ». Le standard est décrit comme l’instrument
privilégié et caractéristique de l’œuvre d’adaptation que réalise la jurisprudence sociologique.
(1441) La pensée de Pound fut importée en France quand deux disciples égyptiens du comparatiste
Édouard Lambert consacrèrent leurs thèses au standard, en utilisant l’exemple des « restraints of
trade » (A.A. AL-SANHOURY, Les restrictions contractuelles à la liberté individuelle du travail dans
la jurisprudence anglaise. Contribution à l’étude comparative de la règle de droit et du standard
juridique, th. Lyon, 1925, qui sera l’artisan du Code civil égyptien qui influencera lui-même les
codes du Moyen-Orient ; M.A. EL-ARABY, La conscription des neutres dans les luttes de la
concurrence économique, th. Lyon, 1924).
(1442) M. HAURIOU, op. cit., p. 268.
(1443) Cass. crim., 28 mai 1968, D. 1968, 509 : « S’agissant d’une omission matérielle évidente, la
légalité et la valeur obligatoire du texte rectifié ne peuvent être sérieusement contestés » ;
Cass. soc., 8 mars 1989, Bull. civ. V, no 187 : « La rectification d’une erreur purement matérielle
dans la publication d’un texte législatif ou réglementaire s’incorpore à la rédaction de ce texte et
a force probante obligatoire dès la date de mise en vigueur du texte primitif » (dans le même sens :
Cass. com., 5 avr. 1960, Bull. civ. III, no 141).
(1444) V. infra, no 451.
(1445) CE, 19 févr. 2010, Dr. adm. 2010, 63.
(1446) Cass. ch. réunies, 5 févr. 1947, D. 1947, 177 ; JCP, 1947.II.3478 : « La cour d’appel a
considéré, à bon droit, ce rectificatif comme sans valeur légale ; en effet, il apparaît non pas
comme destiné à réparer une simple erreur matérielle ou une omission évidente, mais comme une
disposition nouvelle ayant pour but de restreindre considérablement la portée du texte primitif
publié au Journal officiel ». Adde M. FRÉJAVILLE, « La pratique des "errata" au Journal officiel »,
JCP, 1948.I.677 ; J. LAFERRIÈRE, « De l’authenticité du texte publié au Journal officiel », RDP 1949,
p. 113.
(1447) Ex. : l’art. L. 225-22 du Code de commerce reprend « à droit constant » la règle contenue à
l’art. 93 L. 24 juill. 1966 (admettant le cumul d’un contrat de travail et d’un mandat social dans une
société anonyme à la condition que le premier soit antérieur au second, même d’un jour) mais dans sa
version antérieure à la L. 11 févr. 1994 (ce qui aboutit à rétablir un délai d’antériorité de deux ans) ;
le garde des Sceaux a estimé qu’il s’agissait d’une « erreur matérielle » qui ne devrait pas modifier
le droit positif (Rép. min. justice no 30569, JO Sénat Q, 1er mars 2001, p. 757 ; RTD com. 2001,
p. 463, obs. J.-P. Chazal et Y. Reinhard) ; encore fallait-il qu’elle fût corrigée (en l’occurrence par la
L. no 2001-1168 du 11 déc. 2001, art. 33-II).
(1448) Cass. crim., 13 juin 1891, Plumeau, DP 1892, 1, 77 : « L’arrêt attaqué prétend vainement
que c’est par suite d’une erreur manifeste que l’art. 48 (de la loi du 29 juill. 1881 sur la liberté de
la presse) a été visé dans l’art. 60 au lieu de l’art. 49 auquel le législateur aurait eu l’intention de
se référer ; lors de la dernière délibération prise sur la loi par la Chambre des députés, les art. 48
et 60 ont été adoptés sans observation dans le cours de la même séance et le texte de l’art. 60 a été
définitivement adopté avec la référence à l’art. 48 ».
(1449) Biblio. sélective. 1º) Ouvrages en droit civil : P. ROUBIER, Le droit transitoire (conflits des
lois dans le temps), Dalloz-Sirey, 2e éd., 1960 (1re éd. publiée en 1929 ; v. du même auteur, en guise
de résumé : « Distinction de l’effet rétroactif et de l’effet immédiat de la loi », RTD civ. 1928,
p. 579) ; P. LEVEL, Essai de systématisation du conflit de lois dans le temps, LGDJ, 1959 ; Fr.
DEKEUWER-DÉFOSSEZ, Les dispositions transitoires dans la législation contemporaine, LGDJ, 1977 ;
Th. BONNEAU, La Cour de cassation et l’application de la loi dans le temps, PUF, 1990 ; J. HÉRON,
Principes du droit transitoire, Dalloz, 1996. 2º) Hors du droit civil : A. VITU, Des conflits de lois
dans le temps en droit pénal, th. Nancy, 1945 ; E. DOCKÈS, L’application dans le temps des règles
du droit du travail. Contribution à l’étude du droit transitoire, th. Lyon III, 1992 (résumé in RTD iv.
1993, p. 936) ; J. PETIT, Les conflits de lois dans le temps en droit public interne, LGDJ, 2002 ;
G. EVEILLARD, Les dispositions transitoires en droit public français, Dalloz, 2007. 3º) Articles :
MERLIN DE DOUAI, Répertoire universel et raisonné de jurisprudence, 5e éd., t. X, 1826, Vo Effet
rétroactif ; Comte de VAREILLES SOMMIÈRES, « Une théorie nouvelle sur la rétroactivité des lois.
Critique de la distinction universellement admise entre les droits acquis et les simples expectatives »,
Rev. crit. lég. jur. 1893, p. 444 et 492 ; G.-A. BORDA, « Portée et limitations du droit transitoire »,
Mélanges P. Roubier, Dalloz-Sirey, t. I, 1961, p. 75 ; E.-L. BACH, « Contribution à l’étude du
problème de l’application des lois dans le temps », RTD civ. 1969, p. 405 ; J. HÉRON, « Étude
structurale de l’application de la loi dans le temps (à partir du Code civil) », RTD civ. 1985, p. 277.
(1450) De nombreux textes issus de la compilation de Justinien condamnent la rétroactivité des lois
(notamment dans le Code et les Novelles, présentés supra, no 91 ; ex. : C. 1, 14, 7, De legibus). À
l’époque médiévale, la question ne suscita guère de débats bien que plusieurs textes (des
ordonnances royales ou, en droit canonique, des décrétales, ainsi que des coutumes) fûssent déclarés
rétroactifs au nom de l’essence divine de leur auteur (P. ROUBIER, op. cit., no 14, p. 49). À la fin du
XVIIIe siècle, alors que le pouvoir normatif puisait de plus en plus sa légitimité dans le contrat social,
la rétroactivité des lois essuya des critiques. La Constitution fédérale américaine du 17 sept. 1787
l’interdit aux lois des États : « No bill of attainder or ex post facto law shall be passed » (A. 1er,
Sect. 9, § 3 ; mais l’interdiction fut de faible portée. Cf. G.-A. BORDA, op. cit., p. 86). Au contraire, à
la Révolution française apparut un courant de pensée favorable à une rétroactivité absolue des lois
révolutionnaires, courant qui détournait une pensée de Domat relative au seul droit naturel (Les lois
civiles dans leur ordre naturel, Livre prélim., Tit. I, Sect. I, § 12 à 15 : les lois naturelles « règlent
également et tout l’avenir, et tout ce qu’il peut y avoir de passé qui reste indécis » alors que les
lois arbitraires « ne règlent que l’avenir, sans toucher au passé », « sans donner atteinte au droit
qui était acquis à quelques personnes »). Mais la rétroactivité illimitée du décret du 17 nivôse an II
(réouvrant des successions déjà liquidées depuis le 14 juill. 1789. V. infra, no 290) s’avèra
dévastatrice ; il fut rapidement abrogé et la Constitution du 5 fructidor an III (art. 14) passa à un
extrême inverse : « Aucune loi, ni criminelle, ni civile, ne peut avoir d’effet rétroactif ». Le Code
civil (art. 2) cantonne finalement le principe de non-rétroactivité aux lois civiles ; il n’a plus valeur
constitutionnelle et n’est qu’un « précepte pour le législateur et pour le juge » (BERLIER in Locré,
t. I, p. 554 ; v. les paroles admirables, mais un peu emphatiques, de Portalis, in Locré, t. I, p. 476
et s., spéc. p. 577 : « Partout où la rétroactivité des lois serait admise, non seulement la sûreté
n’existerait plus, mais son ombre même »).
(1451) P. HÉBRAUD, « Observations sur la notion du temps dans le droit civil », Études P. Kayser,
PUAM, 1979, t. II, p. 1.
(1452) G. LEBRETON, « Y a-t-il un progrès en droit ? », D. 1991, chr. 99.
(1453) G. RIPERT, Le déclin du droit, LGDJ, 1949, Chap. V : « La discontinuité du droit », spéc.
p. 154.
(1454) Ex. : Cass. civ., 20 mai 1806, S., Refonte, 245 : « Les lois qui règlent et modifient l’état des
personnes en améliorant leur sort, doivent, par la nature même des choses, et à raison de la faveur
due à l’état des personnes, recevoir leur application du jour qu’elles ont été promulguées » ; en
l’espèce, un individu déclaré prodigue avant la promulgation du Code « a cessé d’être dans un état
d’interdiction » par la suite et se trouva désormais soumis à une semi-incapacité, le Code civil le
soumettant à un régime d’assistance et non de représentation. (La loi de 2007 a supprimé la
protection du prodigue).
(1455) Le principe fut posé en 1805 par : Cass. crim., 24 ventôse an XIII, S., chr. an XIII-1808, 1, 86.
Dès le 28 prairial an VIII (18 juin 1800), un avis du Conseil d’État à valeur législative en avait
proposé le fondement suivant : « Il est de principe en matière criminelle qu’il faut toujours adopter
l’opinion la plus favorable à l’humanité comme à l’innocence ». Adde Cass. crim., 14 janv. 1876,
Bull. crim., no 17 ; S. 1876, 1, 433, n. E. Villey. V. aussi infra, no 305.
(1456) Sur les caractères du droit naturel (invariable, supérieur, évident et moral), v. supra, no 38.
(1457) L. 17 nivôse an II, « sur les donations et successions », art. 61 : « Toutes lois et coutumes,
usages ou statuts relatifs à la transmission des biens par succession ou donation sont également
abolis, sauf à procéder au partage des successions échues depuis et y compris le 14 juillet 1789
(jour « où les droits de la nature ont repris leur empire »), et de celles à venir, selon les règles qui
vont être ci-après établies ». Cette « superissime rétroactivité » a entraîné de grands désordres : il
fallut liquider à nouveau des successions déjà liquidées. Mais la Convention rejeta une pétition
demandant que la loi de nivôse remonte au-delà du 14 juillet 1789 : « on ne saurait s’arrêter à
l’objet dont il s’agit sans mettre l’effet rétroactif en question et que s’il n’y en a point à dater du
14 juillet 1789, parce que la loi n’a fait que développer les principes proclamés dès lors par un
grand peuple qui se ressaisissait de ses droits, l’effet rétroactif commencerait là seulement où on
dépasserait cette limite » (D. 22 ventôse an II, in Jur. gén., Vo Succession, p. 154).
(1458) Bien que nul auteur n’eût songé un seul instant, avant 1964, au risque de l’impunité collective
engendré par le cours des prescriptions (Cl. LOMBOIS, « Un crime international en droit positif
français. L’apport de l’affaire Barbie à la théorie française du crime contre l’humanité », Mélanges
A. Vitu, Cujas, 1989, p. 367, spéc. no 17, p. 373), tous justifièrent par la suite la rétroactivité de la loi
de 1964 par son caractère interprétatif et déclaratif d’un droit manifestement [...] préexistant,
invoquant les uns le « droit naturel », les autres les « principes généraux du droit criminel reconnus
par les nations civilisées » (v. les articles de : J. GRAVEN, Revue pénale suisse 1965, p. 113 ;
G. LEVASSEUR, JDI 1966, p. 259 ; J.-B. HERZOG, RID pén. 1966, p. 487). L’art. 7, al. 2, Conv. EDH se
réfère dans le même esprit aux « principes généraux du droit ».
(1459) Le rapporteur de la loi (P. Coste-Floret) jugea ainsi « inutile » l’amendement qui instituait
une rétroactivité expresse (Séance du 16 déc. 1964, JOAN 17 déc. 1964, p. 6142). D’abord
dubitative, la Cour de cassation admit finalement que la loi de 1964 s’était « bornée à confirmer
qu’était déjà acquise en droit interne [...] l’intégration à la fois de l’incrimination dont s’agit et
de l’imprescriptibilité (des crimes contre l’humanité) en raison de la nature (de ces) crimes »
(Cass. crim., 26 janv. 1984, Barbie II, JCP G, 1984.II.20197, rap. Chr. Le Gunehec, concl.
H. Dontenwille, n. D. Ruzié).
(1460) CE, 25 juin 1948, société du journal l’Aurore, Rec. CE, p. 289 ; D. 1948, 437, n. M. Waline ;
S., 1949, 3, 69, concl. M. Le Tourneur ; JCP, 1948.II.4427, n. A. Mestre : « L’arrêté attaqué a violé
le principe en vertu duquel les règlements ne disposent que pour l’avenir ». Avant 1940, le Conseil
d’État visait l’art. 2, C. civ. ; pour s’émanciper de l’interprétation judiciaire de ce texte et exercer un
contrôle de légalité des actes administratifs, il s’est ensuite appuyé sur un principe général du droit
(J. PETIT, Les conflits de lois dans le temps en droit public interne, LGDJ, 2002, nos 72 s.). Le
principe s’applique aux actes réglementaires (arrêt préc.), décisions individuelles, actes des autorités
décentralisées et contrats administratifs (R. CHAPUS, Droit administratif général, Montchrestien,
15e éd., 2001, no 1336). Il interdit d’anticiper sur la date d’entrée en vigueur normale de l’acte
(v. supra, no 277).
(1461) Ex. : Cass. soc., 5 juin 1975, Bull. civ. V, no 313 (écartant l’effet rétroactif d’une décision de
l’Urssaf de procéder à un redressement de cotisations sociales sur la base d’une interprétation
nouvelle de dispositions réglementaires préexistantes).
(1462) Cass. 1re civ., 13 janv. 1982, Bull. civ. I, no 22 ; Rev. crit. DIP 1982, p. 551, n. H. Batiffol ;
Cass., avis, 22 mars 1999, Bull. civ. avis, no 2 : « Vu les principes généraux du droit transitoire ».
Comp. Cass., avis, 29 nov. 1993, JCP G, 1994.II.22203, n. H. Croze et T. Moussa : « En l’absence
de dispositions transitoires, il doit être répondu à la question posée par application des principes
qui gouvernent les conflits des lois dans le temps ».
(1463) Le premier à avoir utilisé le concept de droit acquis semble avoir été H. Blondeau (Essai sur
ce qu’on appelle l’effet rétroactif des lois, Sirey, anc. coll., 1809, 2, 277 ; Thémis, t. 7, 1825,
p. 289) qui parla d’« attentes » plus ou moins fortes des sujets de droit. De nombreuses variantes
furent ensuite proposées (le droit acquis serait un droit dont l’exercice dépend de la volonté, un droit
entré dans le patrimoine, conféré par une loi d’intérêt général, résultant de l’exercice d’une faculté,
etc.).
(1464) 1er ex. : *Cass. civ., 20 févr. 1917, Gabrielle Dominicé, DP 1917, 1, 81 (1re esp.), concl.
L. Sarrut, n. H. Capitant ; S., 1917, 1, 73, n. Ch. Lyon-Caen : « Vu l’art. 2 C. civ. ; toute loi nouvelle
régit, en principe, même les situations établies ou les rapports juridiques formés dès avant sa
promulgation ; il n’est fait échec à ce principe par la règle de non-rétroactivité des lois formulée
dans l’art. 2 qu’autant que l’application de la loi nouvelle porterait atteinte à des droits acquis
sous l’empire de la législation antérieure ; l’art. 340 (ancien) prohibant, sauf dans un cas
particulier, la recherche de paternité, conférait éventuellement au père naturel la faculté d’opposer
une fin de non-recevoir à l’action en déclaration de paternité qui serait intentée contre lui ; ce
texte ne lui faisait pas acquérir pour toujours le droit de se soustraire à la constatation du lien
l’unissant à son enfant et à l’exécution des obligations naturelles en dérivant ». 2e ex. : Cass. civ.,
29 déc. 1942, DC, 1943, 85, n. J. Carbonnier : « Toute loi nouvelle s’applique aux situations
établies et aux rapports juridiques formés dès avant sa promulgation quand cette application n’a
pas pour résultat de faire échec à des droits acquis ».
(1465) DICEY, Conflicts of Laws, 1896 : « Le juge n’applique pas, à proprement parler, la loi
étrangère ; il donne effet à un droit acquis (vested right) par une personne en territoire étranger et
qui suit cette personne partout où elle va ».
(1466) V. déjà : Comte de VAREILLES SOMMIÈRES, « Une théorie nouvelle sur la rétroactivité des lois.
Critique de la distinction universellement admise entre les droits acquis et les simples expectatives »,
Rev. crit. lég. jur. 1893, p. 444 et 492. L’auteur critique cette distinction et se propose de rétablir
« les vrais principes » (op. cit., p. 444). Il faut, selon lui, considérer non le droit que la loi
rétroactive nous enlève mais chercher pourquoi elle nous l’enlève (op. cit., no 43, p. 463 et no 56,
p. 493).
(1467) Ex. : Cass. 2e civ., 22 nov. 1961, Bull. civ. II, no 775 : « La cour d’appel observe, avec
raison, qu’il n’est pas possible, sans attribuer à ses dispositions un caractère rétroactif, prohibé
par l’art. 2, de faire application du décret du 20 janv. 1955, lorsque le retard de paiement des
cotisations remontait à une période antérieure à sa publication » (ce décret interdisait à un
employeur d’obtenir de la Sécurité sociale le remboursement de prestations servies à des salariés
s’il n’avait lui-même payé ses cotisations ; jugé que cette nouvelle règle ne s’appliquait pas à un
défaut de paiement antérieur).
(1468) Ex. : Cass. soc., 30 avr. 1965, Bull. civ. IV, no 340 ; JCP G, 1965.II.14410 (1re esp.) : « Le
congé n’ayant été délivré que pour le 1er oct. 1962, les (propriétaires) n’avaient un droit acquis à
la reprise (des lieux loués) qu’à cette date, et auparavant le congé et les actes de procédure ne
pouvaient leur conférer qu’une simple expectative ».
(1469) Ex. : Cass. civ., 8 mars 1865, DP 1865, 1, 28 ; S., 1865, 1, 260 : « Pour être éventuel
et subordonné, quant à son exercice, à la réalisation d’événements futurs et encore incertains, le
droit n’en existe pas moins en principe [...] ; ainsi, bien qu’il ne soit pas actuellement ouvert, ce
droit n’en constitue pas moins un droit acquis par le seul effet du mariage ».
(1470) Ex. : le droit d’exercer l’autorité parentale ou le droit au respect de la vie privée n’est jamais
acquis.
(1471) M. PLANIOL, Traité élémentaire de droit civil, 8e éd., t. I, 1914, no 241, p. 93 : « Cette
distinction [...] a le tort de ne fournir aucun criterium. On dit "il y a droit acquis", quand la loi
ancienne s’applique à l’exclusion de la nouvelle, et "simple expectative" quand les intéressés
subissent l’effet du changement de législation. Ces expressions traduisent les résultats de la
distinction et ne donnent en réalité aucun moyen de la faire ». Fr. Gény prit l’exemple des conflits
de lois dans le temps pour illustrer le rôle de « l’instinct juridique » et du « sentiment d’équité » sur
lesquels doit s’appuyer l’interprète lorsqu’il n’aperçoit aucun « principe rationnel » (Méthode
d’interprétation et sources en doit privé positif, t. II, 2e éd., 1954 [réédition LGDJ, 1996], no 163,
p. 111).
(1472) V. les exemples cités infra, no 297.
(1473) Ex. : Cass. soc., 11 juill. 2000, D. 2001, p. 149, n. Ch. Radé : « Un accord collectif [...] ne
peut priver un salarié de droits qu’il tient de la loi pour la période antérieure à la signature d’un
accord ».
(1474) Ex. : Cass. soc., 23 nov. 1999, arrêt AGIRC, D. 2000, p. 290 ; Dr. social 2000, p. 333, concl.
Ph. de Caigny (p. 322), n. Ph. Langlois (p. 412). Dans cet arrêt : 1) La Cour annule, sur le fondement
du principe d’intangibilité des pensions de retraite déjà liquidées, la clause d’un accord de révision
de la convention collective nationale du 14 mars 1947 (relative au régime de retraite complémentaire
des cadres que gère l’AGIRC) qui prévoyait une « diminution du nombre de points (de retraite)
acquis par cette catégorie de retraités » (l’accord litigieux réduisait les majorations familiales des
retraités de façon rétroactive). L’AGIRC fut condamnée à rembourser 2,714 milliards de francs aux
pensionnés dépouillés de leurs droits acquis (sans doute l’arrêt le plus cher de l’histoire du droit
français !). 2) En revanche, la Cour valide la clause de ce même accord qui repousse de 50 à 60 ans
l’âge ouvrant droit à pension de réversion au profit des veuves de cadres (afin de placer les veufs et
les veuves sur un pied d’égalité), au motif qu’elle ne vise qu’une « catégorie de personnes qui
n’étaient pas encore titulaires d’une pension et dont seul le droit éventuel à pension a été
retardé ». V. P. MORVAN, Droit de la protection sociale, LexisNexis.
(1475) Ex. : Cass. soc., 13 mars 2001, Dr. social 2001, p. 571, obs. Ch. Radé : « Un avantage
individuel acquis au sens de l’art. L. 132-8 (art. L. 2261-13 nouv.) C. trav. est celui qui, au jour de
la dénonciation de la convention ou de l’accord collectif, procurait au salarié une rémunération
ou un droit dont il bénéficiait à titre personnel et qui correspondait à un droit déjà ouvert et non
simplement éventuel ». Cette définition ne livre aucun critère utilisable. En outre, la jurisprudence a
varié (cf. Y. AUBRÉE, RJS 11/00, p. 699, spéc. no 38).
(1476) P. ROUBIER, Le droit transitoire (conflits des lois dans le temps), Dalloz-Sirey, 2e éd., 1960
(1re éd. publiée en 1929) ; du même auteur, en guise de résumé : « Distinction de l’effet rétroactif et
de l’effet immédiat de la loi », RTD civ. 1928, p. 579.
(1477) La notion de droit subjectif serait « en crise » et impuissante à régler les conflits de lois. Sur
ce renouvellement des concepts, v. supra, no 50, en note.
(1478) Il convient néanmoins de distinguer ici les situations contractuelles et les situations légales ou
extracontractuelles : les effets à venir d’un contrat conclu avant l’entrée en vigueur de la loi nouvelle
demeurent régis par la loi ancienne, qui survit donc par principe ; les effets à venir des situations
légales ou extracontractuelles en cours obéissent à la loi nouvelle, sous réserve parfois du respect de
droits acquis.
(1479) Sur la méthode conflictualiste en droit international privé et l’adage Locus regit actum,
v. supra, no 73-3o.
(1480) En ce sens : P. HÉBRAUD, « Observations sur la notion du temps dans le droit civil », Études
P. Kayser, PUAM, 1979, t. II, p. 1, spéc. p. 8.
(1481) * Cass. 1re civ., 29 avr. 1960, Vve Auterbe, D. 1960, 429, n. G. Holleaux ; RTD civ. 1960,
p. 454, obs. H. Desbois : « Si sans doute une loi nouvelle s’applique aussitôt aux effets à venir des
situations juridiques non contractuelles en cours au moment où elle entre en vigueur, et cela même
quand semblable situation est l’objet d’un litige judiciaire, en revanche elle ne saurait, sans avoir
effet rétroactif, régir rétrospectivement les conditions de validité ni les effets passés d’opérations
juridiques antérieurement achevées ».
(1482) 1er ex. : Cass. 2e civ., 23 févr. 1962, Bull. civ. II, no 235 : « Si la loi nouvelle, de caractère
impératif, s’applique, en principe, même aux situations établies ou aux rapports juridiques formés
dès avant sa promulgation, c’est à la condition de ne point léser les droits acquis » (les titulaires
d’une pension d’invalidité pour longue maladie en conservent le bénéfice après que la réglementation
a exclu ce cas d’ouverture aux droits). 2e ex. : Cass. 1re civ., 9 janv. 1980, D. 1980, 293, n. A.
Breton ; RTD civ. 1981, p. 666, obs. J. Patarin : « En déclarant la loi du 31 déc. 1976 applicable
aux indivisions existant au jour de son entrée en vigueur, l’art. 19 de cette loi n’a pu avoir pour
effet de lui conférer un caractère rétroactif, permettant par l’application des dispositions
nouvelles qu’elle contient de porter atteinte à des droits acquis [...] ». 3e ex. : Cass. 3e civ., 29 janv.
1980, Bull. civ. III, no 25 (cité infra, no 310).
(1483) J. HÉRON, « Étude structurale de l’application de la loi dans le temps (à partir du Code
civil) », RTD civ. 1985, p. 277 ; du même auteur (avec une évolution de sa pensée), Principes du
droit transitoire, Dalloz, 1996. La structure de la règle de droit s’articule autour d’un « présupposé »
et d’un « effet de droit ». La rétroactivité ne s’oppose pas seulement à l’application immédiate de la
loi nouvelle : Héron distingue cette dernière de la « rétrospectivité », un troisième concept confondu
à tort avec l’effet immédiat. Ainsi, la loi qui régit les effets futurs d’un contrat conclu avant son entrée
en vigueur (ce qui constitue un présupposé) n’est pas rétroactive (tel serait le cas si elle affectait le
présupposé et les effets passés) ni d’application immédiate (tel serait le cas si le présupposé et les
effets étaient postérieurs) : elle est rétrospective. – P. FLEURY-LE GROS, Contribution à l’analyse
normative des conflits de lois dans le temps en droit privé interne, Dalloz, 2005 : ce disciple de
Héron se réfère à la « date de réalisation des faits » pour distinguer entre la rétroactivité, la non-
rétroactivité et la « rétroactivité partielle » (v. du même auteur, article in Mélanges J. Héron, LGDJ,
2008, p. 221).
(1484) 1er ex. : D. no 53-960 du 30 sept. 1953, sur le statut des baux commerciaux, art. 39 (non repris
dans le nouv. C. com.) : « Les dispositions du présent décret [...] sont applicables de plein droit aux
baux en cours, ainsi qu’à toutes les instances introduites avant sa publication et en cours à cette
date ». 2e ex. : L. no 65-570 du 13 juill. 1965 « portant réforme des régimes matrimoniaux », art. 9,
al. 2 : les dispositions de l’art. 1er « régiront tous les époux, sans qu’il y ait lieu de considérer
l’époque à laquelle le mariage a été célébré, ou les conventions matrimoniales passées ». 3e ex. :
la L. no 75-597 du 9 juill. 1975, qui modifie les art. 1152 et 1231 relatifs à la clause pénale, est
applicable « aux contrats et aux instances en cours » (art. 3).
(1485) Ex. : L. no 85-1372 du 23 déc. 1985, relative à l’égalité des époux dans les régimes
matrimoniaux, art. 59 : « Sous réserve des accords amiables déjà intervenus et des décisions
judiciaires passées en force de chose jugée, les règles nouvelles relatives aux récompenses, aux
prélèvements et aux dettes entre époux seront applicables dans tous les régimes matrimoniaux non
encore liquidés à la date de l’entrée en vigueur de la présente loi ».
(1486) Ex. : L. no 66-500 du 11 juill. 1966 « portant réforme de l’adoption », art. 13.
(1487) Fr. DEKEUWER-DÉFOSSEZ, Les dispositions transitoires dans la législation contemporaine,
LGDJ, 1977, no 129 et s., p. 157 et s.
(1488) Fr. DEKEUWER-DÉFOSSEZ, op. cit., no 190, p. 229.
(1489) Fr. DEKEUWER-DÉFOSSEZ, op. cit., no 117, p. 145 : « Il est [...] impossible d’imiter le
législateur dans ses dérogations relativement fréquentes aux principes de non-rétroactivité et
d’effet immédiat de la loi nouvelle » ; notamment, il ne saurait exister une loi d’autonomie – comme
en droit international privé – permettant aux parties d’opter entre la loi ancienne et la loi nouvelle
(v. toutefois Cass. 3e civ., 23 mars 1977, D. 1978, 163, n. E. Agostini : il est loisible aux parties de
soumettre leurs conventions aux dispositions d’une loi déjà publiée mais non entrée en vigueur).
(1490) V., de façon révélatrice, « Les dispositions transitoires », RRJ 1999, no spécial, p. 1405 et s.
(1491) Selon les conclusions respectives des thèses de J. PETIT et G. EVEILLARD (citées supra, no 288,
note bibliographique).
(1492) H. MOUTOUH, « La rétroactivité des lois fiscales », JCP G, 1999.I.102. Il y eut 38 lois fiscales
rétroactives adoptées entre 1988 et 1993. En outre, chaque loi de finances est rétroactive puisqu’elle
assujettit aux impôts directs les gains réalisés au cours de l’année écoulée.
(1493) * Cass. civ., 7 juin 1901, Institut des frères des écoles chrétiennes, DP 1902, 1, 105 ; S.,
1902, 1, 153, n. A. Wahl (cité infra, no 309) : « Le législateur peut, il est vrai, déroger à la règle
ordinaire de la non-rétroactivité, en vue d’un intérêt supérieur d’ordre public ; mais s’il n’a pas
manifesté nettement sa volonté en ce sens dans la loi nouvelle, celle-ci doit être appliquée par le
juge conformément à l’art. 2 ».
(1494) Ex. : CE, 29 janv. 1971, Emery, Rec. CE, p. 80 ; AJDA 1971, p. 409, concl. G. Vught.
(1495) V. supra, nos 138 et s.
(1496) Cass. crim., 16 oct. 1996, cité supra, no 143. Cass. 1re civ., 27 févr. 2001, Bull. civ. I, no 50.
Cass. com., 4 avr. 2006, Bull. civ. IV, no 93 : les conclusions d'appel qui se réfèrent à un texte abrogé
et codifié ne méconnaissent pas l’art. 954 C. pr. civ. exigeant qu’elles formulent expressément les
moyens de droit.
(1497) Cass. soc., 23 oct. 1941, DA 1942, 70. Cass. 2e civ., 20 févr. 1963, Bull. civ. II, no 174 : « À
défaut d’une disposition expresse lui conférant un tel caractère, une loi ne peut être considérée
comme interprétative qu’autant qu’elle se borne à reconnaître, sans rien innover, un état de droit
préexistant qu’une définition imparfaite a rendu susceptible de controverse » (n’est pas
interprétative la loi qui substitue à la formule : la contrainte délivrée par la Sécurité sociale « est
exécutée dans les mêmes conditions qu’un jugement », la formule selon laquelle « la contrainte [...]
comporte tous les effets d’un jugement et confère notamment le bénéfice de l’hypothèque
judiciaire ») ; Cass. 1re civ., 7 mars 1995, Bull. civ. I, no 117. V. en particulier Cass. 3e civ., 27 févr.
2002, D. 2002, 1147, jugeant que la loi « MURCEF » du 11 déc. 2001 « n’a fait que préciser » le
caractère dérogatoire de l’art. L. 145-38, al. 3, C. com. (relatif à la fixation des loyers de baux
commerciaux), « alinéa qui donnait lieu à un abondant contentieux »... ; en réalité, la loi est venue
censurer une jurisprudence très décriée de la Cour de cassation qui, par cette affirmation, s’humilie.
(1498) 1er ex. : Cass. soc., 15 févr. 1978, Bull. civ. V, no 110 : la L. du 6 déc. 1976, relative aux
accidents du travail, « ayant créé des droits nouveaux n’est pas interprétative de ce chef » (elle ne
s’applique donc pas à un accident antérieur). 2e ex. : Cass. soc., 13 mai 1985, Bull. civ. V, no 291 :
« Ce nouveau texte, qui se borne à reconnaître, sans rien innover, un état de droit préexistant
qu’une définition imparfaite avait rendu susceptible de controverse, revêt un caractère
interprétatif des dispositions anciennes et se trouve applicable à la procédure pendante devant la
Cour de cassation ».
(1499) CE, Avis, 7 juill. 1989, Rec. CE, p. 162 ; Dr. fisc. 1990, no 11, comm. 553, concl. Ph. Martin
(prenant à la lettre les propos tenus lors des travaux préparatoires).
(1500) Ex. : Cass. com., 7 avr. 1992, JCP G, 1992.II.21939, n. C. David ; Defrénois 1992, p. 1274,
n. crit. A. Chappert : « L’art. 10 de la L. du 29 déc. 1989, qui n’a pas un caractère interprétatif dès
lors qu’il tend à substituer de nouvelles conditions d’imposition à celles résultant du texte
prétendument interprété, est sans influence sur la solution du litige ».
(1501) En revanche, si un accord international conclu par la France avec un État étranger « se
présente expressément comme ayant un caractère interprétatif, [...], il n’appartient pas au juge
judiciaire de discuter ce caractère » (Cass. 1re civ., 18 oct. 1988, Bull. civ. I, no 291) ; cette
interprétation authentique d’un précédent traité « s’impose au juge à tout stade de la procédure »
(Cass. 1re civ., 6 nov. 1990, Bull. civ. I, no 233).
(1502) Ex. : La Cour de cassation (Cass. civ., 16 nov. 1920, Aff. des résines, DP 1920, 1, 169, n. R.
Savatier ; S., 1922, 1, 97, n. L. Hugueney) avait étendu l’art. 1384 [devenu art. 1242], al. 1er, aux
dommages causés par une communication d’incendie depuis un immeuble, faisant peser sur les
propriétaires et locataires le poids de la présomption de responsabilité du fait des choses qu’elle
avait elle-même créée en 1896 (v. infra, no 412). Adoptée sous la pression du lobby des assureurs, la
L. du 7 nov. 1922 inséra dans l’ancien art. 1384 un deuxième alinéa disposant que, « toutefois », le
détenteur d’un bien dans lequel a pris naissance un incendie « ne sera responsable vis-à-vis des tiers
des dommages causés par cet incendie que s’il est prouvé qu’il doit être attribué à sa faute ». Loin
de prendre ombrage de cette censure, la Cour de cassation y vit une reconnaissance du nouveau
principe prétorien de la responsabilité du fait des choses en affirmant que la loi de 1922 était
interprétative (Cass. civ., 4 juill. 1925, DH 1925, 573 ; Cass. req., 6 mars 1928, DP 1928, 1, 97,
n. L. Josserand ; S. 1928, 1, 225, n. L. Hugueney : « La disposition du paragraphe premier de
l’art. 1384 est d’une généralité absolue ; [...] ce texte distingue si peu les choses mobilières des
choses immobilières que la loi interprétative du 7 nov. 1922, qui précise l’exception qu’il convient
d’apporter en cas d’incendie au principe général qu’il énonce, prévoit expressément le dommage
causé par l’incendie des immeubles, exception qui n’aurait aucune raison d’être si le gardien d’un
immeuble n’était pas soumis, comme le gardien d’un meuble, à la règle édictée par
l’article 1384 »). Ce qui est révélateur du pouvoir créateur du juge (Ph. MALAURIE, « La
jurisprudence combattue par la loi », in Mélanges R. Savatier, Dalloz, 1965, p. 603, spéc. p. 604 : le
pouvoir prétorien de la jurisprudence « est éclatant lorsqu’elle s’affirme contra legem : le
législateur en reconnaît alors la supériorité et s’incline devant elle lorsqu’il vient, au courant de
l’histoire, apporter des exceptions à une jurisprudence qui est la subversion de la lettre d’une loi
vieillie »).
(1503) Cass. 3e civ., 1er févr. 1984, Bull. civ. III, no 25 : « En spécifiant que l’art. 6 de la L. 4 janv.
1980 a un caractère interprétatif, le législateur a nécessairement donné un caractère rétroactif à
cette disposition ».
(1504) Cass. civ., 23 déc. 1845, S., 1846, 1, 456 ; Cass. 2e civ., 16 juin 1961, Bull. civ. II, no 470 :
« Les dispositions du décret du 7 déc. 1959 qui font corps avec les textes qu’elles interprètent
doivent s’appliquer à toutes les instances en cours, y compris celles pendantes devant la Cour de
cassation ».
(1505) Cass. com., 4 janv. 1964, Bull. civ. IV, no 6 : « La Cour de cassation, pour décider si la
décision qui lui est déférée a violé la loi, ne peut tenir compte que de la législation en vigueur au
moment où cette décision a été rendue et ne saurait appliquer un texte postérieur, sauf lorsque
celui-ci le prévoit expressément ». Comme l’indique ce dernier membre de phrase, la loi rétroactive
peut être rendue super rétroactive par le législateur afin qu’elle s’applique à tous les litiges en cours
non terminés par une décision irrévocable (ex. : L. no 85-677 du 5 juill. 1985, sur les accidents de la
circulation, que l’art. 47 déclare applicable « aux affaires pendantes devant la Cour de cassation »
sans remettre en cause « les transactions et les décisions de justice irrévocablement passées en
force de chose jugée »). Dans le même sens : Cass. soc., 29 janv. 1965, Bull. civ. V, no 84 ;
Cass. com., 16 déc. 1975, Bull. civ. IV, no 306 ; JCP G, 1976.II.18248 (à propos de la L. 9 juill. 1975
ayant modifié les art. 1152 et 1231 sur la clause pénale et rendu applicable par son art. 3 « aux
contrats et aux instances en cours »).
(1506) Cass. Ass. plén., 21 déc. 1990, JCP G, 1991.II.21640, concl. H. Dontenwille.
(1507) La juridiction de renvoi saisie après cassation devra appliquer la loi nouvelle si elle est
rétroactive. Pourquoi, dans ces conditions, prononcer une cassation sous le visa de la loi ancienne ?
La Cour de cassation élude parfois cet inconvénient en opérant un revirement « par anticipation » :
elle attribue à la loi ancienne le sens de la loi nouvelle (v. infra, no 400).
(1508) Ex. : un prélèvement fiscal prévu par un règlement ou une circulaire (ce qu’exclut la
Constitution) se voit rétroactivement doté d’une base légale (v. par ex. Cass. com., 18 oct. 1994,
D. 1995, 154, n. B. Matthieu).
(1509) Ex. : L. no 96-1077 du 11 déc. 1996 « relative au contrat de concession du Stade de France
à Saint-Denis », art. unique : « Est validé le contrat de concession conclu le 29 avril 1995 [...]
entre l’État et la société Consortium Grand Stade SA [...] pour le financement, la conception, la
construction, l’entretien et l’exploitation du grand stade ». Cette loi a été déclarée
inconstitutionnelle parce qu’elle n’indiquait pas le motif précis d'illégalité dont elle entendait purger
l'acte contesté (Cons. const., 11 févr. 2011, décis. no 2010-100 QPC).
(1510) Ex. : l’affaire du « tableau d’amortissement » (infra, no 306).
(1511) V. infra, no 305.
(1512) V. infra, no 306.
(1513) 1er ex. : L. 17 nivôse an II, « sur les donations et successions », art. 61 (cité supra, nos 289
et 290). 2e ex. : L. no 76-1036 du 15 nov. 1976, « complétant les dispositions transitoires de la
L. no 72-3 du 3 janv. 1972 sur la filiation », dont l’art. 1er ouvre l’action en recherche de paternité
prévue par les art. 340 et s. C. civ. aux enfants adultérins et incestueux « sans que puisse être
opposée aucune forclusion même constatée par une décision de justice devenue irrévocable, dans
le délai d’un an à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi [...] ». Cf. H. MAZEAUD,
« L’enfant adultérin et la superrétroactivité des lois », D. 1977, chr. 1.
(1514) Cons. const., 29 déc. 1986, L. fin. rectificative pour 1986, décis. no 86-223 DC : « Le
pouvoir du législateur de modifier rétroactivement la législation fiscale ne saurait [...] être
restreint du seul fait de l’existence de droits nés sous l’empire de la loi ancienne ».
(1515) Cons. const., 7 nov. 1997, décis. no 97-391 DC.
(1516) Cons. const., 17 janv. 1989, CSA, décis. no 88-248 DC, citée ci-dessous.
(1517) CJCE, 10 juill. 1984, Kent Kirk, aff. 63/83, Rec. CJCE, p. 2689 : « Le principe de non-
rétroactivité des dispositions pénales est un principe commun à tous les ordres juridiques des
États membres, consacré par l’art. 7 (Conv. EDH), comme un principe fondamental qui fait partie
intégrante des principes généraux du droit dont la Cour assure le respect ».
(1518) Cons. const., 17 janv. 1989, CSA, décis. no 88-248 DC, RFDA 1989, p. 215, n. B. Genevois
(sanctions infligées par une autorité administrative indépendante).
(1519) Ex. : Cass. com., 7 nov. 1989, Bull. civ. IV, no 280 (sanction fiscale, donc non pénale) ;
Cass. com., 8 oct. 1996, Bull. civ. IV, no 225 (sanction commerciale d’interdiction de gérer en matière
de « faillite ») ; Cass. com., 26 janv. 1999, Bull. civ. IV, no 23 (sanction civile d’une pratique illicite
au regard du droit de la concurrence).
(1520) Sur la jurisprudence des origines, v. supra, no 290.
(1521) CE, 23 juill. 1976, Dame Ruffenach, Rev. adm. 1977, p. 38 (en matière de contravention de
grande voirie) ; CE, 9 déc. 1977, De Grailly, Rec. CE, p. 493 (en matière disciplinaire) ; CE, Avis,
5 avril 1996, Houdmond, Dr. fisc. 1996, no 25, comm. 765, concl. J. Arrighi de Casanova ; RJF
1996, no 607, p. 356 et chr. S. Austry, p. 311 (pour les sanctions fiscales présentant « le caractère
d’une punition » et qui « n’ont pas pour objet la seule réparation d’un préjudice » ; dans le même
sens : Cass. crim., 9 nov. 1978, Bull. crim. no 310).
(1522) Cons. const., 19-20 janv. 1981, Sécurité et liberté, décis. no 80-127 DC, D. 1981, 102, n. J.
Pradel ; D. 1982, 441, n. A. Dekeuwer ; JCP G, 1981.II.19701, n. C. Franck.
(1523) Ex. : Cass. crim., 3 févr. 1986, Bull. crim. no 41 ; Cass. crim., 6 févr. 1997, Dr. pénal, 1997,
comm. 80.
(1524) A. DEKEUWER, « La rétroactivité in mitius en droit pénal. Un principe encore et toujours
contesté », JCP G, 1997.I.4065.
(1525) Cons. const., 29 déc. 1986, L. fin. rectif. pour 1986, décis. no 86-223 DC. La formule fut
reprise par la Cour de cassation (Cass. com., 15 mai 1990, Bull. civ. IV, no 151). Adde Cons. const.,
29 déc. 2005, L. fin. rectif. pour 2005, décis. no 2005-531DC, censurant, au nom du principe de la
séparation des pouvoirs et de la garantie des droits, la loi qui privait d’effet un arrêt de la CJCE et
une décision du Conseil d’État.
(1526) Cons. const., 24 juill. 1991, Loi portant DDOEF, décis. no 91-298 DC.
(1527) Cons. const., 9 avril 1996, Loi portant DDOEF, décis. no 96-375 DC.
(1528) Cons. const., 9 avril 1996, Loi portant DDOEF, préc.
(1529) Depuis : Cons. const., 14 févr. 2014, SELARL PJA, décis. nº 2013-366 QPC, consid. nº 3. Le
Conseil constitutionnel se contentait auparavant d’exiger un « motif d’intérêt général » (ex. : Cons.
const., 28 déc. 1995, L. fin. pour 1995, décis. no 95-369 DC, jugeant que « la seule considération
d’un intérêt financier [...] ne constitu(e) pas un motif d’intérêt général autorisant le législateur à
faire obstacle aux effets d’une décision de justice déjà intervenue et le cas échéant d’autres à
intervenir »). En 2014, il a adopté la même formule que la Cour EDH qui, dans plusieurs affaires,
l’avait désavoué en raison de son indulgence excessive à l’égard du législateur français (v. infra,
no 306).
(1530) Cons. const., 14 déc. 2006, L. fin. séc. soc. pour 2007, décis. no 2006-544 DC.
(1531) Cons. const., 21 déc. 1999, L. fin. séc. soc. pour 2000, décis. no 99-422 DC : « Si le
législateur peut, dans un but d’intérêt général suffisant, valider un acte dont le juge administratif
est saisi, afin de prévenir les difficultés qui pourraient naître de son annulation, c’est à la
condition de définir strictement la portée de cette validation, eu égard à ses effets sur le contrôle
de la juridiction saisie ; une telle validation ne saurait avoir pour effet, sous peine de méconnaître
le principe de la séparation des pouvoirs et le droit à un recours juridictionnel effectif, qui
découlent de l’art. 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, d’interdire tout
contrôle juridictionnel de l’acte validé quelle que soit l’illégalité invoquée par les requérants ».
Le Conseil constitutionnel, qui a senti le souffle du boulet après la condamnation de la France par la
CEDH (aff. Zielinski, citée infra, no 306, en note), a durci ses exigences.
(1532) Cons. const., 14 févr. 2014, précité.
(1533) * Cons. const., 10 juin 1998, Loi relative à la réduction du temps de travail (loi « Aubry
I »), décis. no 98-401 DC : « En l’espèce, les incidences de l’entrée en vigueur (de la loi) sur les
contrats de travail ainsi que sur les accords collectifs en cours, lesquelles sont au demeurant
inhérentes aux modifications de la législation du travail, ne sont pas de nature à porter une telle
atteinte à cette exigence » (la réduction de 39 à 35 heures de la durée légale du travail affectait les
contrats et accords collectifs de travail en cours). Mais le juge constitutionnel censura par les mêmes
motifs les dispositions de la loi « Aubry II » visant à remettre en cause la validité de clauses
stipulées dans des accords de RTT conclus en conformité avec la loi « Aubry I », en l’absence d’un
« motif d’intérêt général suffisant » (Cons. const., 13 janv. 2000, décis. no 99-423 DC).
(1534) Cons. const., 19 févr. 1998, décis. no 98-396 DC. V. déjà : Cons. const., 7 nov. 1997, décis.
no 97-391 DC.
(1535) Cons. const., 11 oct. 1984, Loi visant à limiter la concentration [...] des entreprises de
presse, décis. no 84-181 DC, qui condamne la rétroactivité d’une loi abaissant le seuil de contrôle
des quotidiens nationaux par un même groupe de presse ; l’objectif de pluralisme ne justifie pas cette
atteinte à la liberté de la presse.
(1536) Cons. const., 19 déc. 2013, décis. nº 2013-682 DC, consid. nos 14 et 17, D. 2014, 1518 : les
contribuables ayant respecté la durée minimale requise de conservation de contrats d’assurance-vie
« pouvaient légitimement attendre l'application d'un régime particulier d'imposition lié au respect
de cette durée légale ».
(1537) Le Conseil constitutionnel se refuse à examiner la conformité de la loi qui lui est déférée à la
Conv. EDH, notamment son art. 6, § 1 (Cons. const., 9 avril 1996, Loi portant DDOEF, préc.).
(1538) L. SERMET, « Rétroactivité des lois et Convention européenne des droits de l’homme », RFDA
1998, p. 990 ; X. PRÉTOT, « Les validations législatives et le droit au procès équitable », RDP 2001,
p. 23
(1539) CEDH, 9 déc. 1994, Stran et Stratis Andreadis c/Grèce (aff. des raffineries grecques),
nº 13427/87. Dans le même sens : CEDH, 22 oct. 1997, Papageorgiou c/Grèce, Gaz. Pal. 19-
21 juill. 1998, p. 16 (inconventionalité d’une loi ayant annulé toute procédure engagée contre un
organisme de sécurité sociale, à un moment « crucial » où la Cour de cassation allait statuer et alors
que sa jurisprudence « clarifiait déjà » en faveur du requérant le sens de la loi modifiée).
(1540) Deux arrêts de la Cour de cassation (Cass. 1re civ., 16 mars et 20 juill. 1994) avaient admis la
nullité des offres préalables de crédit immobilier faites aux consommateurs qui ne comportaient pas
un tableau d’amortissement conforme aux exigences du Code de la consommation. Sous la pression
des banques, l’art. 87-I de la loi no 96-314 du 12 avril 1996 mit obstacle à l’annulation des offres qui
avaient été formulées avant que cette jurisprudence ne fût connue des banquiers. Le Conseil
constitutionnel estima que cette disposition répondait bien « à un but d’intérêt général » (Cons.
const., 9 avr. 1996, cité supra, no 305, 3o). Certains juges du fond considérèrent cependant que
l’art. 87-I violait l’art. 6, § 1, Conv. EDH (sur les épisodes successifs de ce feuilleton : Th. REVET,
obs. RTD civ. 1996, p. 724 et s. ; N. MOLFESSIS, obs. RTD civ. 1999, p. 236 ; J.-P. MARGUÉNAUD, obs.
in RTD civ. 1999, p. 492). Mais la Cour de cassation trancha en sens contraire (Cass. 1re civ., 20 juin
2000, D. Aff. 2000, 699, n. M.-L. Niboyet ; JCP E, 2000, p. 1663, n. S. Piédelièvre ; JCP G,
2001.II.10454, n. A. Gourio). Puis la Cour européenne des droits de l’homme désavoua le Conseil
constitutionnel et la Cour de cassation (CEDH, 14 févr. 2006, Lecarpentier, JCP G, 2006, II,
10171. – CEDH, 2 mai 2006, Saint-Adam et Millot c/France, cité infra). Celle-ci répliqua en
écartant la jurisprudence de la CEDH (Cass. 1re civ., 30 sept. 2010, Bull. civ. I, no 180) !
(1541) Cass. 1re civ., 20 juin 2000, préc. Dans le même sens, à propos d’une loi interprétative :
Cass. 1re civ., 22 févr. 2000, Bull. civ. I, no 53.
(1542) * Cass. Ass. plén., 23 janv. 2004, RTD civ. 2004.598, obs. P. Deumier ; D. 2004, 1108, n. P.-
Y. Gautier ; JCP G, 2004.II.10030, n. M. Billiau (v. infra).
(1543) V. supra, no 302. L’arrêt du 23 janv. 2004 marque un infléchissement dans le contexte
particulier des litiges en cours. De « super-rétroactive », la loi interprétative devient non rétroactive
et ne se distingue plus d’une loi rétroactive ordinaire. Cf. obs. P. DEUMIER, préc.
(1544) La Cour européenne abandonna ensuite, à son tour, cette condition (CEDH, 11 avr. 2006,
Cabourdin c/France).
(1545) Ex. : CEDH, 28 oct. 1999, Zielinski c/France, D. 2000, som. 184, obs. N. Fricero ; RTD civ.
2000, p. 436, obs. J.-P. Marguénaud (cité infra).
(1546) CE, 5 déc. 1997, Lambert, LPA 15 juin 1998, no 71, p. 11 : l’arrêt admet l’applicabilité de
l’art. 6, § 1, Conv. EDH à une loi de validation (concernant une prestation familiale) tout en affirmant
la conventionalité de l’article litigieux qui « a été édicté dans un but d’intérêt général » ; CE, 5 déc.
1997, Ministre de l’Éducation nationale, LPA, 27 mai 1998, p. 27 : cet autre arrêt reproduit la
jurisprudence européenne mais qualifie la loi d’interprétative et nie qu’elle ait pour objet de réduire
rétroactivement les obligations financières de l’État ; est ensuite rejeté l’argument puisé dans
l’art. 1er du Prot. no 1 additionnel à la Conv. EDH (v. ci-après). Comp. CE, 8 déc. 2000, Hoffer,
RFDA 2001, p. 458 : la légalité d’une ordonnance ratifiée (au sens de l’art. 38 Const.) ne peut plus
être contestée devant la juridiction administrative à moins que la loi de ratification méconnaisse le
droit au procès équitable garanti par l’art. 6 Conv. EDH (ce qui a été exclu en l’espèce).
(1547) * Cass., Ass. plén., 23 janv. 2004, préc.
(1548) * Cass. Ass. plén., 23 janv. 2004, préc. (écartant la loi dite « MURCEF » du 11 déc. 2001 qui
censurait une jurisprudence antérieure de la Cour de cassation relative à la révision du loyer du bail
commercial).
(1549) Cass. 2e civ., 8 nov. 2006, Bull. civ. 2006, II, no 302 : « obéit à d'impérieux motifs d'intérêt
général l'intervention du législateur qui [...] est destinée à éviter le développement d'un
contentieux de nature à mettre en péril le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et par
suite la pérennité du système de protection sociale ».
(1550) CEDH, 28 oct. 1999, Zielinski c/France, D. 2000, som. 184, obs. N. Fricero ; RTD civ. 2000,
p. 436, obs. J.-P. Marguénaud, rejetant l’argument du gouvernement français invoquant un risque
financier à l’appui d’une intervention législative (L. no 94-43 du 18 janv. 1994, art. 85) en faveur
d’organismes de sécurité sociale. Au contraire, le Conseil constitutionnel avait admis cet argument en
se bornant à un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation (Cons. const., 13 janv. 1994, décis.
no 93-332 DC ; adde Cass. soc., 15 févr. 1995, Bull. civ. V, no 58 (no 1), observant que le texte « a été
déclaré conforme à la Constitution »). – CEDH, 14 févr. 2006, Lecarpentier et 2 mai 2006, Saint-
Adam et Millot c/France, écartant, dans l’affaire précitée du « tableau d’amortissement »,
l’« impérieux motif d’intérêt général » qui « résulterait de la nécessité de sauvegarder l’équilibre
financier du système bancaire et de l’activité économique en général » ; « en principe, un motif
financier ne permet pas à lui seul de justifier une telle intervention législative », surtout « en
l’absence d’évaluation crédible du coût virtuel des procédures en cours et futures, lesquelles n’ont
pas davantage été recensées ». Le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation s’étaient encore
laissés convaincre par l’argument des Cassandre de l’économie. Le Conseil d’État a finalement
admis qu’un « intérêt financier ne peut suffire à caractériser un motif impérieux d’intérêt
général » (CE, Ass., 8 févr. 2007, Gardedieu, cité infra, no 340 in fine).
(1551) CEDH, 20 nov. 1995, Pressos Compania Naviera c/Espagne. La Cour observe que « L’État
aurait [...] eu tout le loisir d’anticiper, par des mesures respectueuses de la Convention, ce qui
n’était que le développement d’une tendance jurisprudentielle amorcée il y a quelques années » ;
« les considérations financières invoquées par le gouvernement [...] pouvaient justifier, pour
l’avenir, une législation dérogeant, en cette matière, au droit commun de la responsabilité. Ils ne
pouvaient pas légitimer une rétroactivité dont le but et l’effet étaient de priver les requérants de
leurs créances en indemnisation ». V. aussi, CEDH 9 janv. 2007, Aubert et autres c/France (cité
infra).
(1552) Cass. 1re civ., 24 janv. 2006, JCP S 2006, 1502, note P. Morvan : en prohibant l'action de
l'enfant né handicapé (à la suite d’une erreur de diagnostic commise par un gynécologue lors d’une
échographie prénatale ayant privé les futurs parents de la possibilité d’envisager un avortement
thérapeutique) et en limitant le préjudice réparable des parents, l’art. 1er-I de la L. no 2002-303 du
4 mars 2002 (devenu CASF, art. L. 114-5), censurant la jurisprudence Perruche (Cass. Ass. plén.,
17 nov. 2000, suivi par : CE, 14 févr. 1997, Quarez) qui ouvrait droit au contraire à réparation
intégrale de ces préjudices, viole l’art. 1er Prot. no 1 Conv. EDH. Dans le même sens : CE, 24 févr.
2006, Levenez, JCP G, 2006, 10062. La France venait d’être condamnée dans cette affaire par la
Cour européenne (CEDH, 6 oct. 2005, Draon et Maurice c/France, JCP G, 2006, II, 10061) mais
les deux Hautes juridictions françaises poussèrent bien au-delà la paralysie de la loi anti-Perruche.
(1553) Cass. 1re civ., 15 déc. 2011, JCP G, 2012, 265, no 18 (et les références citées) ; RTD civ.
2012, p. 75, obs. P. Deumier, où le juge civil estime ne pas être lié par le motif figurant dans la
décision du Conseil constitutionnel no 2010-2 QPC du 11 juin 2010 car il n’était pas le « support
nécessaire » du dispositif de la décision. Sur l’autorité des décisions du Conseil constitutionnel,
v. infra, no 338.
(1554) CE, ass., 13 mai 2011, nº 329290, RTD civ. 2012, p. 71, obs. P. Deumier (avec les autres
réf.).
(1555) CEDH, 9 janv. 2007, Aubert et autres c/France (aff. dite des heures d’équivalence), JCP G,
2007, II, 1919, condamnant la solution retenue par : * Cass. Ass. plén., 24 janv. 2003, D. 2003, 1648,
selon laquelle « obéit à d’impérieux motifs d’intérêt général l’intervention du législateur destinée
à aménager les effets d’une jurisprudence nouvelle de nature à compromettre la pérennité du
service public de la santé et de la protection sociale ». L’art. 29 L. 19 janv. 2000 (loi « Aubry II »)
avait censuré une jurisprudence de la Cour de cassation sur les horaires d’équivalence au profit des
associations gérant un service public d’accueil d’handicapés. L’arrêt de l’assemblée plénière
désavoua la chambre sociale qui, par un arrêt du 24 avril 2001, avait jugé cette disposition contraire
à l’art. 6, § 1, Conv. EDH. La Cour européenne désavoua à son tour l’assemblée plénière.
(1556) CE, Ass., 8 févr. 2007, Gardedieu, cité infra, no 340 in fine.
(1557) Cass., Ass. plén., 14 juin 1996, JCP G, 1996.II.22692, concl. Y. Monnet : « Si le droit de
toute personne à un procès équitable, garanti par l’art. 6, § 1, (Conv. EDH) peut être invoqué
devant toute juridiction civile statuant en matière fiscale, les juges du fond ont pu, sans violer ce
texte, faire application d’une loi nouvelle rétroactive entrée en vigueur au cours de l’instance, dès
lors qu’elle n’avait pour objet que de valider une réglementation antérieure conforme au droit
communautaire ».
(1558) V. supra, no 292.
(1559) V. cependant, Cass. 2e civ., 19 mars 2009 : Bull. civ. II, no 80 ; JCP G, 2010, 428, no 4, notant
qu’une société et ses coassureurs « avaient convenu de déroger au principe de non-rétroactivité de
la loi ». En réalité, l’arrêt cherche à établir une rétroactivité in favorem du contrat d’assurance (ici
au profit de salariés victimes de l’amiante).
(1560) Cass. civ., 24 nov. 1955, D. 1956, 522. – Cass. 3e civ., 21 janv. 1971, JCP G, 1971.II.16776,
n. P. Level. Dans le même sens, pour le contentieux administratif : CE, 8 nov. 1968, Menez, Rec. CE,
p. 557.
(1561) * Cass. 1re civ., 29 avril 1960, Vve Auterbe, D. 1960, 429, n. G. Holleaux ; RTD civ. 1960,
p. 454, obs. H. Desbois (la validité et l’efficacité d’une reconnaissance et d’une légitimation d’enfant
adultérin s’apprécient donc au regard de la loi sous l’empire de laquelle elles ont été accomplies qui,
en l’occurrence, les déclaraient nulles).
(1562) Ex. : Cass. civ., 27 mai 1861, DP 1861, 244 ; S., 1861, 1, 207 : « Les contrats passés sous
l’empire d’une loi ne peuvent recevoir aucune atteinte par l’effet d’une loi postérieure » (malgré
l’abrogation du monopole du syndicat de la boucherie de Paris, le contrat de vente antérieur « du
sang des bœufs et des vaches » tués dans les abattoirs, conclu pour six années avec les syndics,
demeure valable et obligatoire pour l’acheteur, « à moins que l’exécution n’en soit devenue
impossible ») ; Cass. 3e civ., 7 nov. 1968, JCP G, 1969.II.15771 : « La loi nouvelle ne s’applique
pas, sauf rétroactivité expressément stipulée par le législateur, aux conditions de l’acte juridique,
conclu antérieurement » (promesse de vente) ; Cass. com., 11 oct. 1988, Bull. civ. IV, no 274 (contrat
de location-gérance de station-service échappant à un nouvel arrêté sur les prix des carburants) ;
Cass. 3e civ., 10 févr. 1999, Bull. civ. III, no 34 : « La loi nouvelle ne pouvait frapper de nullité des
actes valablement passés avant sa promulgation » (en l’occurrence, la clause de fermage d’un bail
rural).
(1563) * Cass. civ., 7 juin 1901, Institut des frères des écoles chrétiennes, DP 1902, 1, 105 ; S.,
1902, 1, 153, n. A. Wahl : « Les effets d’un contrat sont régis en principe par la loi en vigueur à
l’époque où il a été passé ; notamment, les causes de nullité ou de résolution dérivant d’une loi
nouvelle ne touchent pas aux droits contractuels légalement acquis sous l’empire de la loi
ancienne [...] » (l’interdiction faite aux communes, par une loi de 1886, de subventionner des écoles
privées ne remet pas en cause le contrat de jouissance gratuite d’un immeuble conclu en 1819 entre la
ville de Paris et l’Institut précité) ; Cass. 1re civ., 10 févr. 1998, D. 2000, 442, n. L. Gannagé : la
cause d’un contrat de présentation de clientèle d’astrologue est illicite dès lors que l’art. R. 34,
7o anc. C. pén., alors en vigueur, condamnait cette activité (peu important que ce texte ait été abrogé
par la suite avec le nouveau Code pénal ; il n’y a donc pas de « rétroactivité in mitius » ; pourtant, le
caractère immoral de la cause s’apprécie au jour où le juge statue).
(1564) Cass. ch. mixte, 22 sept. 2006, JCP G, 2007, II, 10180, n. D. Houtcieff, écartant l’application
d’une nouvelle règle (C. consom., art. L. 314-18) interdisant au créancier professionnel de se
prévaloir d’un cautionnement disproportionné et qui le reste lorsque la garantie est appelée (une telle
règle ne pose donc pas une condition de validité).
(1565) Ex., pour un contrat de société : Cass. 3e civ., 20 juin 1968, D. 1968, 749 ; JCP G,
1969.II.15938, n. B. Boccara ; Cass. 3e civ., 3 juill. 1979, JCP G, 1980.II.19384, n. crit. Fr.
Dekeuwer-Défossez. Ex., pour le bail : Cass. 3e civ., 11 juin 1997, Bull. civ. III, no 129. Ex., dans le
crédit à la consommation : Cass. 1re civ., 1er juin 1999, Bull. civ. I, no 187. Ex., pour une promesse
unilatérale de vente (stock options), Cass. 2e civ., 20 sept. 2005, JCP S 2005, 1417, n. R. Vatinet.
V. toutefois Cass. 1re civ., 18 déc. 2001, Bull. civ. I, no 319 : la loi nouvelle qui impose
« l’accomplissement d’une simple formalité » (une mise en demeure préalablement à l’exclusion
d’un assuré) s’applique aux contrats en cours.
(1566) Cass. 3e civ., 10 juin 1998, Bull. civ. III, no 119 : « le bail tacitement reconduit constituant
un nouveau contrat », la loi nouvelle lui est applicable.
(1567) S. GAUDEMET, « Dits et non-dits sur l’application dans le temps de l’ordonnance du 10 février
2016 », JCP G, 2016, 559, qui envisage l’application dans le temps des nouvelles règles relatives à
la formation, à la cession et à l’inexécution du contrat, aux quasi-contrats et à la preuve.
(1568) 1er ex. : Cass. soc., 31 janv. 1958, Bull. civ. V, no 175 : « [...] le droit au maintien (dans les
lieux) issu de la loi (du 1er sept. 1948) elle-même, pouvant être à tout moment modifié ou supprimé
par une loi nouvelle sans que l’occupant puisse se prévaloir d’un droit définitivement acquis ».
2e ex. : Cass. com., 7 mars 1983, Bull. civ. IV, no 95 : la L. 12 mai 1980, qui rend opposable à la
« faillite » la clause de réserve de propriété insérée dans un contrat de vente, a « seulement consacré
un effet indépendant de la volonté des parties » et s’applique aux contrats en cours. 3e ex. :
Cass. ch. mixte, 13 mars 1981, D. 1981, 309, n. A. Bénabent ; JCP G, 1981.II.19568 (la L. 31 déc.
1975 créant au profit du sous-traitant une action directe contre le maître d’ouvrage trouve son
fondement dans la volonté du législateur et non dans les contrats conclus). 4e ex. : Cass. 3e civ.,
22 mars 1989, Bull. civ. III, no 69 : « Le droit au renouvellement (du bail) a sa source dans la loi et
que, même acquis dans son principe, il se trouve dans ses modalités demeurant à définir affecté
par la loi nouvelle, laquelle régit immédiatement les effets des situations juridiques ayant pris
naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées ». Pour un rejet de ce
raisonnement : Cass. com., 10 mai 2005, D. 2005, Pan., 2748, obs. H. Kenfack.
(1569) Cass., avis, 16 févr. 2015, RTD civ. 2015, 569, obs. P. Deumier (avec les autres réf.) : « la loi
nouvelle régissant immédiatement les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance
avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées, il en résulte que l'article 24 de la loi
du 6 juillet 1989 modifié par la loi du 24 mars 2014 en ce qu'il donne au juge la faculté d'accorder
un délai de trois ans au plus au locataire en situation de régler sa dette locative s'applique aux
baux en cours à la date d'entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2014 » (pourtant, l’art. 14 de cette
loi énumérait, de façon a priori limitative, les dispositions applicables aux contrats en cours sans
citer l’art. 24).
(1570) Cass. 3e civ., 28 juin 2005, JCP G, 2006, II, 10027 : même déclarée « d'application
immédiate aux baux en cours », la loi du 9 juillet 1999 (qui reporte au terme du bail rural le droit du
preneur ayant réalisé des travaux de mise en conformité à une indemnité versée par le bailleur) ne
s'applique pas « aux situations nées antérieurement à l'entrée en vigueur de cette loi » (les actes
effectués par le contractant sont détachés du contrat en cours).
(1571) Ex. : Cass. 3e civ., 7 nov. 1968, JCP G, 1969.II.15771, n. P. L. ; Cass. 3e civ., 1er juill. 1987,
Bull. civ. III, no 138 ; Cass. com., 26 févr. 1991, Bull. civ. IV, no 86 ; Cass. 1re civ., 17 mars 1998,
Bull. civ. I, no 115 ; Cass. 1re civ., 4 déc. 2001, Bull. civ. I, no 307.
(1572) Cass. 1re civ., 4 déc. 2001, Bull. civ. I, no 307.
(1573) Ex. : Cass. soc., 20 mars 1952, D. 1952, 453 : en interdisant les sous-locations ou cessions de
bail, « le législateur a marqué sa volonté de mettre fin immédiatement à une pratique qu’il tenait
pour abusive ». Souvent la Cour de cassation ne donne aucune explication (ex. : Cass. soc., 8 févr.
2001, RJS 4/01, no 488).
(1574) CE, ass., 8 avr. 2009, Cne d’Olivet, RTD civ. 2010, p. 58, obs. P. Deumier (avec les autres
réf.) : sauf dispositions expresses contraires et sous réserve de mesures transitoires, une loi nouvelle
ne s’applique à une situation contractuelle en cours « que si un motif d'intérêt général suffisant lié à
un impératif d'ordre public le justifie et que s'il n'est dès lors pas porté une atteinte excessive à la
liberté contractuelle ». La formule est très lourde.
(1575) Sur la jurisprudence, assez fluctuante, cf. N. BAREÏT, « Ordre public et droit transitoire.
Exploration d’un lieu commun », RRJ 2010-1, p. 113.
(1576) V. déjà, Cass. civ., 17 févr. 1937, DH 1937, 219 : « S’il est vrai que les effets d’un contrat
de louage de services à durée indéterminée sont régis en principe par la loi en vigueur au moment
où il a été passé, le fait pour des ouvriers, employés ou apprentis, de n’avoir pas droit à un congé
payé sous l’empire de cette loi ne saurait conférer à leurs employeurs un droit acquis qui puisse
leur permettre de se soustraire à l’application d’une loi nouvelle, qui, dans un intérêt social, a
rendu, sous certaines conditions, le congé payé obligatoire ».
(1577) Cass. soc., 12 juill. 2000, Bull. civ. V, no 278.
(1578) Cass. civ., 17 oct. 1939, DH 1940, 2 : « C’est [...] l’accident qui fixe les droits des parties,
et une loi postérieure ne peut, en l’absence de dispositions contraires, en modifier la portée ou
l’étendue » (en matière d’accident du travail) ; Cass. 2e civ., 18 juill. 1967, D. 1968, 297 ;
Cass. 3e civ., 23 janv. 2002, Bull. civ. III, no 14. La L. no 85-677 du 5 juill. 1985 sur les accidents de
la circulation, qui décide de son application immédiate (art. 47), reconnaît implicitement cette règle.
(1579) CE, avis, 4 juin 2007, RJS 10/07, no 1127 ; JCP S 2007, 1840, note G. Vachet : sont
d’application immédiate « les règles qui régissent l'imputation sur la dette du tiers responsable des
créances des caisses de sécurité sociale [CSS, art. L. 376-1 et L. 454-1], lesquelles, compte tenu
des caractéristiques propres au mécanisme de la subrogation légale, sont applicables aux
instances relatives à des dommages survenus antérieurement à leur entrée en vigueur et n'ayant
pas donné lieu à une décision passée en force de chose jugée ».
(1580) 1er ex. : la suppression des droits féodaux (nuit du 4 août, D. 4 août 1789) s’est appliquée à
tous ceux existant à cette date. 2e ex. : Cass. civ., 31 déc. 1810, Jur. gén., Vo Servitude, no 670 :
l’art. 673 C. civ., qui permet de faire couper les branches avançant depuis un fonds voisin, prime sur
un usage ancien de Monaco, antérieur au Code civil, qui obligeait le propriétaire à supporter
l’empiètement sur son fonds des branches du voisin. 3e ex. : Cass. 3e civ., 13 nov. 1984, Bull. civ. III,
no 189 : « Une loi nouvelle s’applique immédiatement aux effets à venir des situations juridiques
non contractuelles en cours au moment où elle entre en vigueur » (la SAFER qui avait manifesté
son intention d’exercer son droit de préemption après la promulgation de la L. 4 juill. 1980 doit se
conformer à ses prescriptions). 4e ex. : Cass. soc., 8 nov. 1990, Bull. civ. V, no 540 (qui décide, sous
le même attendu, que le titulaire d’une pension de retraite liquidée avant l’entrée en vigueur d’un
décret instituant une bonification familiale peut prétendre à celle-ci pour l’avenir).
(1581) Ex. : Cass. 3e civ., 29 janv. 1980, Bull. civ. III, no 25 : « L’art. 3 de la loi du 8 avril 1898, en
disposant que le lit des rivières non navigables ni flottables appartient aux propriétaires des deux
rives (et n’est plus, comme avant, une res nullius), a consacré un principe nouveau et n’est
applicable aux situations et aux rapports juridiques établis ou formés avant sa promulgation
qu’autant qu’il n’en doit pas résulter la lésion des droits acquis » (v. déjà : Cass. civ., 11 déc.
1901, DP 1902, 1, 353).
(1582) Cass. crim., 19 mars 1926, DP 1927, 1, 25 ; S., 1926, 1, 145. Les peintres Corot, Courbet et
Sisley avaient vendu des tableaux que les acquéreurs avaient ensuite cédé à la librairie Hachette avec
le « droit de reproduire cette œuvre par la gravure ». Une loi du 9 avril 1910 décida que
l’aliénation d’une œuvre d’art n’entraînait plus, sauf convention contraire, transfert du droit de
reproduction. Cette loi ne pouvait s’appliquer aux ventes antérieures. La solution serait différente
aujourd’hui (v. Cass. 1re civ., 18 juill. 2000, cité ci-dessous).
(1583) Ex. : Cass. com., 12 avr. 1976, D. 1976, 695 : « Le régime légal de la publicité (du contrat
de crédit-bail), qui n’a existé qu’à l’entrée en vigueur du décret du 4 juillet 1972, ne pouvait avoir
effet sur les opérations de crédit-bail antérieurement conclues et porter atteinte à l’opposabilité
des droits de propriété alors acquis par les entreprises de crédit-bail ».
(1584) Cass. 1re civ., 18 juill. 2000, D. 2000, 821, n. P.-Y. Gautier : « En matière de droits d’auteur,
la loi qui a vocation à s’appliquer est celle qui est en vigueur à la date de l’acte qui provoque la
mise en œuvre de la protection légale » (en l’espèce, au jour où fut commise la contrefaçon).
(1585) V. supra, no 306.
(1586) 1er ex. : Cass. 1re civ., 20 avr. 1982, Bull. civ. I, no 135 : un texte relatif à l’acquisition de la
nationalité s’applique aux personnes nées avant son entrée en vigueur (sans que ses effets remontent
au-delà). 2e ex. : Cass. 1re civ., 3 avril 1984, Bull. civ. I, no 126 : « La loi et le règlement
s’appliquent, en principe, immédiatement aux situations existant lors de leur entrée en vigueur »
(au sujet de l’art. 66 de la L. 31 déc. 1971 créant une incompatibilité entre la profession de conseil
juridique et celle d’agent immobilier). 3e ex. : Cass. 1re civ., 28 avril 1987, Bull. civ. I, no 133 : les
L. 6 août et 9 sept. 1948 créant le statut légal de « déportés » et la L. 24 mai 1951 créant le statut
légal de « personnes contraintes au travail » sont « applicables immédiatement aux situations
juridiques en cours, même lorsqu’elles ont pris naissance antérieurement à leur entrée en
vigueur ».
(1587) Ex. : Cass. soc., 25 févr. 1988, Bull. civ. V, no 145 : les dispositions introduites dans la
L. 2 janv. 1968 par la loi du 13 juill. 1978 « sont relatives à l’existence même des droits qui [...]
découlent des inventions des salariés » et n’édictent pas des règles de procédure.
(1588) 1er ex. : Cass. com., 3 oct. 2006, Bull. civ. IV, no 202 : « Les voies de recours dont un
jugement est susceptible sont régies par la loi en vigueur à la date de celui-ci » (v. toutefois
Cass. 1re civ., 14 mai 1996, Bull. civ. I, no 205 : l’abrogation par la L. no 93-22 du 8 janv. 1993 des
fins de non-recevoir à l’action en recherche de paternité prévues par l’art. 340-1 C. civ. est
immédiatement applicable). 2e ex. : Cass. soc., 25 nov. 1993, Bull. civ. V, no 291 : les nouvelles
règles de l’art. L. 141-2 CSS relatives à l’expertise technique de la Sécurité sociale sont
« d’application immédiate ». 3e ex. : Cass. 1re civ., 25 avr. 2007, Bull. civ. I, no 160 : « une loi de
procédure, en l'absence de dispositions contraires, régi[t] les affaires en cours à partir de sa mise
en application » (à propos d’une loi qui, en réalité, attribuait compétence aux juridictions
administratives, ce qui est assez différent d’une loi de procédure).
(1589) Cass. com., 23 nov. 1976, Bull. civ. IV, no 298. L’instance doit être en cours au moins devant
la cour d’appel lorsque survient la loi nouvelle.
(1590) CEDH, 19 déc. 1997, Brualla Gomez de la Torre, Rec. CEDH 1997-VIII ; D. 1998, som.
p. 210, obs. N. Fricero : « Un principe généralement reconnu selon lequel, sauf disposition
expresse en sens contraire, les lois de procédure s’appliquent immédiatement aux procédures en
cours ».
(1591) 1er ex. : Cass. 2e civ., 4 juin 1980, Bull. civ. II, no 133 : « Les lois et décrets nouveaux,
relatifs à la procédure et aux voies d’exécution, s’ils sont immédiatement applicables aux
instances en cours, n’ont pas pour conséquence, hors le cas d’une disposition législative expresse,
d’annuler ou de destituer de leurs effets définitifs ou provisoires, les actes qui ont été
régulièrement accomplis sous l’empire du texte ancien » (un texte édictant un nouveau cas
d’insaisissabilité ne peut s’appliquer « à une saisie faite antérieurement à sa mise en vigueur »).
2e ex. : Cass., Avis, 29 nov. 1993, JCP G, 1994.II.22203, n. H. Croze et T. Moussa : « La loi de
compétence est d’application immédiate, la compétence de la juridiction initialement saisie étant
toutefois conservée lorsqu’une décision intéressant le fond a été rendue avant l’entrée en vigueur
des dispositions nouvelles ».
(1592) En matière d’astreinte, la Cour de cassation utilise la notion de droit acquis comme un
correctif du principe de l’effet immédiat (J. NORMAND, obs. RTD civ. 1998, p. 733).
(1593) Cass., Avis, 22 mars 1999, Bull. civ. Avis, no 2 : « Vu les principes généraux du droit
transitoire, selon lesquels, en l’absence de disposition spéciale, les lois relatives à la procédure et
aux voies d’exécution sont d’application immédiate ; cependant, si elles sont applicables aux
instances en cours, elles n’ont pas pour conséquence de priver d’effet les actes qui ont été
régulièrement accomplis sous l’empire de la loi ancienne ».
(1594) Cass. 1re civ., 22 nov. 2005, D. 2006, 277, n. T. Le Bars et P. Callé ; Rev. arb. 2005, p. 1012,
n. D. Bureau : la clause compromissoire stipulée dans les contrats conclus en raison d'une activité
professionnelle, nulle sous l’empire de l’ancien art. 2261 et valable depuis la loi du 15 mai 2001,
« peut être invoquée à l'occasion d'un litige portant sur l'exécution de ces contrats, peu important,
à cet égard, qu'ils aient ou non pris fin avant l'entrée en vigueur de la loi nouvelle ».
(1595) Ex. : Cass. 1re civ., 14 mars 2000, Bull. civ. I, no 91 : « La loi nouvelle a vocation à régir les
effets des situations légales postérieures à son entrée en vigueur » (les nouvelles dispositions de
l’art. 66-5 L. 31 déc. 1971 qui découlent de la L. 7 avril 1997 suivant lesquelles les correspondances
entre avocats sont couvertes par le secret professionnel sont applicables à des correspondances
antérieures à cette loi).
(1596) Cass. 1re civ., 28 avril 1986, Bull. civ. I, no 106 (texte cité supra, no 203) : le D. 15 juill. 1980
qui élève de 50 à 5 000 francs (1 500 €) le seuil prévu par l’art. 1359 (v. supra, no 231) ne
s’applique pas à la preuve d’un contrat de prêt antérieur.
(1597) Cass. req., 18 nov. 1807, Jur. gén., Vo Lois, no 250 : la preuve d’un paiement, au moyen d’un
billet signé en 1773, est admise sur la foi de présomptions prévues par l’Ancien droit qu’écarte le
Code civil, pour des faits antérieurs à son entrée en vigueur.
(1598) Ex. : L. no 65-570 du 13 juill. 1965 « portant réforme des régimes matrimoniaux », art. 13
(relatif à la modification des effets de la présomption d’acquêts) : « Le nouvel art. 1402 sera
applicable toutes les fois que les faits ou actes à prouver seront postérieurs à l’entrée en vigueur
de la présente loi ».
(1599) Cass. req., 13 oct. 1808, Jur. gén., Vo Dépôt-sequestre, no 144 : « La question de savoir si,
en l’espèce, la preuve testimoniale était admissible, était une question de droit qui devait être
jugée par les lois existantes à l’époque du prétendu dépôt ».
(1600) Cass. com., 7 nov. 1989, Bull. civ. IV, no 281 : « les règles relatives à la charge de la preuve
ne constituent pas des règles de procédure applicables aux instances en cours, mais touchent au
fond du droit ».
(1601) F. HAGE-CHAHINE, Les conflits de lois dans l’espace et dans le temps en matière de
prescription. Recherches sur la promotion du fait au droit, th. Paris II, Dalloz, 1977, préf.
H. Batiffol.
(1602) C. civ., art. 2281 anc. : « Les prescriptions commencées à l’époque de la publication du
présent titre seront réglées conformément aux lois anciennes ».
(1603) Ex. : Cass. 2e civ., 13 nov. 1963, Bull. civ. II, no 724. Comp., en droit du travail, Cass. soc.,
19 nov. 1997, JCP G, 1998.II.10043, n. M. Rousseau : à la date du dépôt d’une convention collective
fixant une durée de période d’essai plus courte que celle stipulée dans le contrat de travail, cette
disposition plus favorable se substitue à la clause moins favorable du contrat.
(1604) Ex. : Cass. 1re civ., 28 nov. 1973, D. 1974, 112, n. J. Massip ; Cass. com., 22 oct. 1991,
Bull. civ. IV, no 307 ; Cass. soc., 19 déc. 2007, RJS 3/08, no 315.
(1605) Ex. : Cass. 1re civ., 27 sept. 1983, Bull. civ. I, no 215 ; RTD civ. 1985, p. 205, obs.
J. Normand : « En l’absence d’une volonté contraire expressément affirmée, la loi ne peut produire
effet que pour l’avenir et il résulte de ce principe que, lorsque le législateur modifie le délai d’une
prescription, cette loi n’a point d’effet sur la prescription définitivement acquise » ; la L. du
23 déc. 1980 modifiant l’art. 10 C. pr. pén., qui « désolidarise » les prescriptions civile et pénale ne
réouvre pas le délai dont disposait la victime pour se constituer partie civile (allongé de 3 à 30 ans,
en l’espèce).
(1606) La succession de plusieurs lois de prescription peut créer un enchevêtrement complexe. Il en
a été ainsi en droit pénal (cf. C. GUÉRY, « La prescription des infractions contre les mineurs : un
nouvel état des lieux », D. 1999, chr. 38) où la prescription obéit aux mêmes règles transitoires qu’en
droit civil.
(1607) C. civ., art. 2222 : « La loi qui allonge la durée d'une prescription ou d'un délai de
forclusion est sans effet sur une prescription ou une forclusion acquise. Elle s'applique lorsque le
délai de prescription ou le délai de forclusion n'était pas expiré à la date de son entrée en vigueur.
Il est alors tenu compte du délai déjà écoulé. En cas de réduction de la durée du délai de
prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en
vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi
antérieure ».
(1608) L. no 2008-561, 17 juin 2008, art. 26, I et II.
(1609) V. Droit de la famille, coll. Droit civil.
(1610) Cass. civ., 20 févr. 1917, Gabrielle Dominicé, cité supra, no 293. L’arrêt fut rendu sous
l’influence de la théorie des droits acquis ; en réalité, la loi était d’effet immédiat à une situation
légale en cours.
(1611) L. no 76-1036 du 15 nov. 1976, art. 1er, cité supra, no 304.
(1612) Sur le critère du « plus favorable » dans les conflits de lois dans le temps, v. supra, no 290.
(1613) Fr. GRANET-LAMBRECHTS et J. HAUSER, « Le nouveau droit de la filiation », D. 2006, chr., 17,
spéc. p. 24.
(1614) Ex. : Cass. civ., 27 janv. 1840, Jur. gén., Vo Contrat de mariage, no 515 ; S., 1840, 1, 257.
(1615) V. Droit des régimes matrimoniaux, coll. Droit civil.
(1616) Cass. 1re civ., 14 déc. 1971, D. 1972, 117 ; Cass. 1re civ., 13 juin 1984, D. 1985, 42, n. A. B. :
« Les conditions de l’attribution préférentielle de droit d’une exploitation agricole doivent être
appréciées en fonction de la législation en vigueur au jour de l’ouverture de la succession ».
(1617) Cass. 1re civ., 13 janv. 1982, Bull. civ. I, no 22 ; Rev. crit. DIP 1982, p. 551, obs. H. Batiffol
(au sujet de la règle de conflit unilatérale posée par l’art. 310 – auj. art. 309).
(1618) H. BATIFFOL, « Conflits de lois dans l’espace et dans le temps », Choix d’articles, LGDJ,
1976, p. 179.
(1619) P. LEVEL, Essai de systématisation du conflit de lois dans le temps, th. Paris, LGDJ, 1959,
préf. H. Batiffol, spéc. no 6, p. 10 et nos 83 et s., p. 148 et s. Adde F. HAGE-CHAHINE, Les conflits de
lois dans l’espace et dans le temps en matière de prescription. Recherches sur la promotion du fait
au droit, th. Paris II, Dalloz, 1977, spéc. no 356.
(1620) Ex. : CJCE, 15 févr. 1978, SA anc. Maison Marcel Bauche, aff. 96/77, Rec. CJCE, p. 383 :
« Selon un principe généralement reconnu, les lois modificatrices d’une disposition législative
s’appliquent, sauf dérogation, aux effets futurs de situations nées sous l’empire de la loi
ancienne » ; CJCE, 16 mai 1979, Tomadini, aff. 84/78, Rec. CJCE, p. 1801 : « Le champ
d’application du principe de la confiance légitime ne saurait être étendu jusqu’à empêcher, de
façon générale, une réglementation nouvelle de s’appliquer aux effets futurs de situations nées
sous l’empire de la réglementation antérieure ».
(1621) CJCE, 22 mars 1961, SNUPAT, aff. 42 et 49/59, Rec. CJCE, p. 103. – 22 sept. 1983, Verli-
Wallace, aff. 159/82, Rec. CJCE, p. 2711 : « Le retrait à titre rétroactif d’un acte légal qui a
conféré des droits subjectifs ou des avantages similaires est contraire aux principes généraux du
droit ».
(1622) CJCE, 24 févr. 1987, Continentale Produkten Gesellschaft, aff. 312/84, Rec. CJCE, p. 841 :
« En règle générale, les dispositions modifiant une procédure administrative et désignant les
autorités compétentes sont applicables aux procédures pendantes, sans que les administrés
puissent prétendre à un “droit acquis” à voir leur cas traité par l’autorité désignée comme
compétente par les dispositions antérieures ».
(1623) Sur le thème de l’entrée en vigueur : CJCE, 13 déc. 1967, Neumann, aff. 17/67, Rec. CJCE,
p. 571 : « On ne pourrait, sans porter atteinte à un légitime souci de sécurité juridique, recourir
sans motif au procédé de la mise en vigueur immédiate » ; CJCE, 22 févr. 1984, Gerda
Kloppenburg, aff. 70/83, Rec. CJCE, p. 1075 : le principe de sécurité juridique s’oppose au report
de l’entrée en vigueur d’un acte de portée générale dont la date initiale d’entrée en vigueur est déjà
passée ; CJCE, 1er avril 1993, Diversinte SA et Iberlacta SA, aff. C. 260 et 261/91, Rec. CJCE,
p. 1885 : « Si, en règle générale, le principe de la sécurité des situations juridiques s’oppose à ce
que la portée dans le temps d’un acte communautaire voie son point de départ fixé à une date
antérieure à celui de sa publication, il peut en être autrement, à titre exceptionnel, lorsque le but à
atteindre l’exige et lorsque la confiance légitime des intéressés est dûment respectée » ; le principe
de confiance légitime exige que l’acte fasse « apparaître, de façon claire et non équivoque, le
raisonnement de l’autorité » (v. aussi CJCE, 1er févr. 1984, Ilford SpA, aff. 1/84 R, Rec. CJCE,
p. 423 : « Si [...] un effet rétroactif des décisions communautaires n’est pas nécessairement exclu,
il faut toutefois que les décisions ayant un tel effet comportent dans leurs motifs les indications
qui justifient l’effet rétroactif recherché »).
(1624) Sur le principe de sécurité juridique, v. supra, no 47.
(1625) CJCE, 12 juill. 1957, Algera, aff. 7/56 et 3 à 7/57, Rec. CJCE, p. 81, qui exclut le retrait d’un
acte administratif (sauf s’il est illégal) créateur de droits subjectifs en raison de la « nécessité de
sauvegarder la confiance dans la stabilité de la situation ainsi créée ».
(1626) CJCE, 13 juill. 1965, Lemmerz Werke, Rec. CJCE, p. 835.
(1627) CJCE, 3 mai 1978, Töpfer, aff. 112/77, Rec. CJCE, p. 1019.
(1628) CJCE, 15 mai 1976, CNTA, aff. 74/74, Rec. CJCE, p. 797 ; Cass. com., 22 oct. 2002,
Bull. civ. IV, no 150 : « le principe du respect de la confiance légitime a pour objet de protéger les
ressortissants communautaires contre des changements exagérément brutaux de la réglementation
économique ».
(1629) CJCE, 4 févr. 1975, Compagnie Continentale France, aff. 169/73, Rec. CJCE, p. 117.
(1630) CJCE, 19 mai 1983, Mavridis, aff. 289/81, Rec. CJCE, p. 1731.
(1631) En droit interne, Cass. com., 22 oct. 2002, Bull. civ. IV, no 147 : une décision de la CJCE
« s’impose à la juridiction nationale sans que puisse lui être opposé un principe général du droit,
tel que le principe de la confiance légitime ».
(1632) Ex. : CJCE, 26 nov. 1998, Covita AVE, aff. C. 370/96, Rec. CJCE, p. 7711 : un importateur
professionnel « doit s'assurer, par la lecture des journaux officiels pertinents, du droit
communautaire applicable aux opérations qu'il effectue ». – CJCE, 1er févr. 1978, Lührs, aff. 78/77,
Rec. CJCE, p. 169, estimant que des « opérateurs économiques prudents et avertis devaient prévoir
l’adoption de mesures plus rigoureuses ».
(1633) V. supra, no 305, 5º.
(1634) V. supra, no 306.
(1635) V. supra, no 270.
(1636) Const. 4 oct. 1958, art. 3, al. 1er : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui
l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum ».
(1637) Éd. LAMBERT, Le gouvernement des juges et la lutte contre la législation sociale aux États-
Unis, Sirey, 1921, rééd. Dalloz, 2005. V. aussi la prohibition des arrêts de règlement par l’art. 5
(infra, no 405).
(1638) M. TROPER, La séparation des pouvoirs et l’histoire constitutionnelle française, LGDJ, 1973
(rééd. 1980), p. 121. Sur la L. 16-24 août 1790 et le D. 16 fructidor an III, v. supra, no 164.
(1639) Ch. JARROSSON, « Le législateur peut-il avoir tort ? », in Mélanges B. Oppetit, Litec, 2009,
p. 349.
(1640) La fondamentalisation du droit privé, Revue de droit d’Assas, oct. 2015, nº 11, p. 32 et s.
(articles de J.-P. Marguénaud, G. Loiseau, F. Chénedé, M. Mekki, S. Mekki, W. Dross et J. Mouly).
(1641) Malgré l’analogie sémantique, la fondamentalisation du droit n’a rien à voir avec le
fondamentalisme, courant théologique intégriste qui tend à une interprétation littérale des Écritures.
(1642) E. DREYER, « Du caractère fondamental de certains droits », RRJ 2006, p. 551, qui critique
l’opportunisme du juge judiciaire dans les références aux droits fondamentaux.
(1643) V. supra, no 41.
(1644) X. DUPRÉ DE BOULOIS, « Les notions de liberté et de droits fondamentaux en droit privé », JCP
G, 2007, I, 211, spéc. no 35 : « il n’existe pas un concept de liberté fondamentale ou de droit
fondamental à même de rendre compte de l’ensemble des solutions du droit positif français ». Adde
Les droits fondamentaux. Une nouvelle catégorie juridique ?, AJDA 1998, no spécial ; M. -L. PAVIA,
« Éléments de réflexions sur la notion de droit fondamental », LPA 6 mai 1994, no 54, p. 6 ;
M. LEVINET, Théorie générale des droits et libertés, Bruylant, 3e éd., 2010, spéc. p. 92, qui déclare
n’être pas « convaincu [...] de l’utilité de l’emploi du terme fondamental ».
(1645) V. infra, no 347.
(1646) Cour de cassation. Ex. : Cass. crim., 18 fructidor an V, Jur. gén., Vo Loi, no 478 : « Les
termes dans lesquels est conçue pour les corps administratifs et judiciaires la défense d’arrêter ou
de suspendre l’exécution des lois (C. pén., anc. art. 127, cité infra no 404 in fine, en note), ne
peuvent admettre ni exception, ni prétexte ». En l’espèce, la Constitution du 5 fructidor an III (sous
le Directoire) s’achevait par un texte grandiloquent : « Le peuple français remet le dépôt de la
présente constitution à la fidélité [...] des juges, à la vigilance des pères de famille, aux épouses et
aux mères, à l’affection des jeunes citoyens, au courage de tous les Français » (on croirait lire du
J.-J. Rousseau) ; estimant que ce texte lui conférait le pouvoir de contrôler la constitutionnalité des
lois, le tribunal criminel départemental de la Dyle (auj. en Belgique) avait refusé d’appliquer une loi
pénale promulguée par le Directoire au motif qu’elle n’« avait pas le caractère » d’une loi.
Cassation : « L’effet immédiat d’une conséquence aussi fausse serait [...] de confondre tous les
pouvoirs et de renverser cette Constitution qu’il (le tribunal) a feint de soutenir ». V. toutefois
Cass. crim., 15 mars 1851, DP 1851, 1, 142. – 17 nov. 1851, S., 1851, 1, 707 : ces arrêts jugèrent
recevable, avant de le rejeter sur le fond, un « moyen pris de l’inconstitutionnalité » d’une loi créant
une juridiction pénale extraordinaire (v. aussi, en plus contradictoire, Cass. crim., 11 mai 1833, DP
1833, 1, 227). Sur cette singulière parenthèse (qui se referma avec : Cass. crim., 13 juin 1879, DP
1879, 1, 277), cf. J.-L. MESTRE, « Données historiques », in La Cour de cassation et la Constitution
de la République, PUAM, 1995, p. 35. Conseil d’État. Ex. : CE, 6 nov. 1936, Arrighi, DP 1938, 3,
1, n. Ch. Eisenmann ; S., 1937, 3, 33, concl. R. Latournerie, n. A. Mestre. Un justiciable avait soutenu
que la loi autorisant le gouvernement à légiférer par décrets (décrets-lois) était inconstitutionnelle ; le
Conseil d’État rejeta le recours : « En l’état du droit public français, ce moyen n’est pas de nature
à être discuté devant le Conseil d’État statuant au contentieux ». Adde R. CARRÉ DE MALBERG, La
loi, expression de la volonté générale, Sirey, 1931 (rééd. Economica, 1984), p. 51. V. cependant le
cas de l’abrogation implicite, supra, no 278.
(1647) J. BONNET, Le juge ordinaire et le contrôle de constitutionnalité des lois. Analyse critique
d’un refus, Dalloz, 2009. Selon l’auteur, le légicentrisme et le culte de la loi ont vécu ; le juge
ordinaire n’hésite plus à l’écarter en s’appuyant sur le droit international.
(1648) R. CHAPUS, Droit administratif général, Montchrestien, 15e éd., 2001, nos 51 et s.
(1649) La doctrine publiciste des années 1910-1920 (H. Berthélémy, G. Jèze, M. Hauriou, L. Duguit,
P. Duez) ou de l’après-guerre (H. Kelsen, Ch. Eisenmann) souhaitait l’avènement d’une justice
constitutionnelle s’opposant aux lois arbitraires et songeait à la confier aux juges de droit commun.
(1650) M. FROMONT, « La diversité de la justice constitutionnelle en Europe », Mélanges Ph. Ardant,
Droit et politique à la croisée des cultures, LGDJ, 1999, p. 47. Le contrôle de constitutionnalité est
apparu en Autriche (1867) et en Suisse (1874) devant les juridictions ordinaires. Puis furent créées
des cours constitutionnelles (Autriche, 1920 ; Espagne, 1931). Le fédéralisme de type germanique a
été un moteur tandis que le centralisme français était un frein.
(1651) J. RIVÉRO, « Fin d’un absolutisme », Pouvoirs 1980, no 13, « Le Conseil constitutionnel »,
p. 5, spéc. p. 14. Adde J.-Cl. BÉCANE et M. COUDERC, La loi, Dalloz, 1994 (qui décrivent le passage
de la loi prééminente à la loi contestée).
(1652) Sur les neuf membres (les « neuf Sages de la rue Montpensier », voisine du Palais-Royal où
siège le Conseil d’État) élus pour neuf ans que compte le Conseil constitutionnel, trois sont « nommés
par le Président de la République, trois par le président de l’Assemblée nationale, trois par le
président du Sénat » ; les anciens présidents de la République en « font de droit partie à vie »
(Const. 4 oct. 1958, art. 56).
(1653) Cons. const., 23 août 1985, Loi sur l’évolution de la Nouvelle-Calédonie, décis. no 85-197
DC : « La loi votée [...] n’exprime la volonté générale que dans le respect de la Constitution ».
(1654) Le droit de saisir le Conseil constitutionnel appartient au président de la République, au
Premier ministre, au président de chaque assemblée, à 60 députés ou 60 sénateurs (Const., art. 61).
(1655) Const. 4 oct. 1958, art. 61. Avec une importante réserve : « La régularité au regard de la
Constitution des termes d’une loi promulguée peut être utilement contestée à l’occasion de
l’examen de dispositions législatives qui la modifient, la complètent ou affectent son domaine » ;
« Il ne saurait en être de même lorsqu’il s’agit de la simple mise en application d’une telle loi »
(Cons. const., 25 janv. 1985, décis. no 85-187 DC, Loi relative à l’état d’urgence en Nouvelle-
Calédonie, JCP G, 1985.II.20356, n. C. Franck ; D. 1985, 361, n. Fr. Luchaire ; AJDA 1985, p. 362,
n. P. Wachsmann).
(1656) Cons. const., 7 nov. 1997, Loi portant réforme du service national, décis. no 97-392 DC,
LPA, 22 déc. 1997, no 153, p. 13, n. P. Jan : « Une loi promulguée, même non encore publiée, ne peut
être déférée au Conseil constitutionnel ». Ce qui n’a pas empêché le Conseil, en 1999, de dénoncer
l’inconstitutionnalité d’une loi promulguée treize années plus tôt, incitant le législateur à la réformer
(Cons. const., 15 mars 1999, Loi organique sur la Nouvelle-Calédonie, décis. no 99-410 DC, citée
supra).
(1657) D. nº 2010-148, 16 févr. 2010, modifiant le Code de justice administrative (art. R. 771-3 s.),
le Code de l’organisation judiciaire (art. R. 461-1), le Code de procédure pénale (art. R. 49-21 s.) et
le Code de procédure civile (art. 126-1 s.) ; D. no 2010-149, 16 févr. 2010, relatif à l’aide
juridictionnelle.
(1658) Cass. 3e civ., 27 sept. 2011, no 11-14363 (QPC contre un édit du 16 décembre 1607).
(1659) V. infra, nº 347.
(1660) Depuis : Cons. const., 6 oct. 2010, décis. no 2010-39 QPC.
(1661) L’« interprétation jurisprudentielle constante » doit émaner d’une juridiction « placée au
sommet de l’ordre juridictionnel » (le Conseil d’État ou la Cour de cassation), non d’une juridiction
du fond, même si elle est unique (cf. Cons. const., 8 avr. 2011, décis. no 2011-120 QPC, consid. no 9,
RTD civ. 2011, p. 495, obs. P. Deumier).
(1662) Sur la doctrine du droit vivant dont les bases furent jetées par une décision de la Cour
constitutionnelle italienne du 15 juin 1956 : C. SEVERINO, La doctrine du droit vivant, Economica,
PUAM, 2003 ; N. MAZIAU, D. 2011, chr. 529.
(1663) Cass. 1re civ., 27 sept. 2011, JCP G, 2011. 1197, n. Fr. Chénedé : « la contestation doit
concerner la portée que donne à une disposition législative précise l'interprétation qu'en fait la
juridiction suprême de l'un ou l'autre ordre de juridiction » ; Cass. 1re civ., 8 déc. 2011, D. 2012,
765, obs. E. Dreyer. Adde P. DEUMIER, obs. in RTD civ. 2015, p. 85. Par ailleurs, la Cour de cassation
et le Conseil d’État ont repoussé le grief tiré de leur manque d’impartialité, résultant du fait que la
QPC peut viser une jurisprudence qu’ils ont appliquée et seraient enclins à défendre
(Cass. Ass. plén., 20 mai 2011 et CE, 12 sept. 2011, Dr. adm. 2011, 93 : la Cour de cassation
rappelle qu’elle est unique).
(1664) Cass. 1re civ., 18 juin 2014, JCP G, 2014, 743, obs. J. Dubarry : une QPC ne peut contester
« la constitutionnalité de la portée donnée par la décision rendue dans la même instance à une
disposition législative ».
(1665) Cons. const., 1er août 2013, décis. no 2013-336 QPC, RTD civ. 2014, p. 71, obs. P. Deumier
(avec les autres réf.) : « le législateur (sic) méconnaîtrait la garantie des droits proclamée par
l'article 16 de la Déclaration de 1789 s'il portait aux situations légalement acquises une atteinte
qui ne soit justifiée par un motif d'intérêt général suffisant » (en fait, c’est l’interprétation de la loi
par la Cour de cassation, en particulier un revirement de jurisprudence imprévisible, qui pourrait
avoir cette portée).
(1666) Cf. P. DEUMIER, obs. in RTD civ. 2010, p. 504 (à propos du filtrage). Sur un autre filtrage
critiqué, v. supra, no 175.
(1667) Pour des exemples, cf. chron. N. MAZIAU, D. 2011, 2811 et D. 2012, 1833. Cette révision de la
jurisprudence est un autre aspect de la « doctrine du droit vivant » (précitée).
(1668) Sur l’autorité, en droit, des décisions du Conseil constitutionnel, v. infra, no 337.
(1669) . CEDH, 25 août 2015, Renard c/France, JCP G, 2015, 1297, n. F. Sudre : « en l’espèce, la
Cour constate que la Cour de cassation a motivé ses décisions au regard des critères de non-
renvoi d’une QPC ».
(1670) Cons. const., 3 déc. 2009, décis. no 2009-595 DC, Loi organique relative à l'application de
l'article 61-1 de la Constitution, consid. no 21.
(1671) Sur l’exception d’inconventionalité, v. infra, nos 341 et 342 (droit de l’Union européenne) et
nº 348 (Conv. EDH).
(1672) Cons. const., 3 déc. 2009, décis. no 2009-595 DC, Loi organique relative à l'application de
l'article 61-1 de la Constitution, consid. no 14.
(1673) Sur le récit des épisodes successifs : M. GAUTIER, « QPC et droit communautaire. Retour sur
une tragédie en cinq actes », Dr. adm. 2010, Études, 19.
(1674) Cass. QPC, 16 avr. 2010, no 10-40002. Cf. P. DEUMIER, obs. in RTD civ. 2010, p. 501, « La
question et la figure de l’interprétation hypothétique ».
(1675) Cons. const., 12 mai 2010, décis. no 2010-605 QPC, JCP G, 2010, 576, n. B. Mathieu ; CE,
14 mai 2010, no 312305.
(1676) CJUE, 22 juin 2010, aff. C. 188/10 et C. 189/10, Melki et Abdeli.
(1677) CJUE, 22 juin 2010, préc., points 52 à 56.
(1678) Cf. P. CASSIA, chron. D. 2010, 1229, spéc. p. 1241.
(1679) CE 14 mai 2010, no 312305, préc.
(1680) Cass. Ass. plén., 29 juin 2010, no 10-40001, n. pub. Bull.
(1681) Cons. const., 4 avr. 2013 et 14 juin, décis. nº 2013-314 QPC, RTD civ. 2013, p. 564, obs.
P. Deumier (avec les autres réf.). Étaient en cause les mots figurant à l'article 695-46 C. pr. pén. selon
lequel la chambre de l’instruction statue sur la remise de la personne visée par un mandat d’arrêt
européen « sans recours ». Ces mots, qui ne découlent pas nécessairement de la décision-cadre sur le
mandat d’arrêt européen, « apportent une restriction injustifiée au droit à exercer un recours
juridictionnel effectif ».
(1682) Selon le protocole nº 16 additionnel à la Conv. EDH. V. infra, no 348.
(1683) Cons. const., 15 janv. 1975, cité infra, nº 340.
(1684) CJUE, gde ch., 6 oct. 2015, aff. C-650/13, Delvigne, JCP G, 2015, 1338, n. D. Berlin (à
propos de l’interdiction automatique et perpétuelle du droit de vote en cas de condamnation à une
peine criminelle) ; Cass. 1re civ., 5 sept. 2013, nº 13-40043, inédit : « la question posée ne présente
pas un caractère sérieux ».
(1685) V. supra, no 6. Droit civil illustré, no 2.
(1686) V. Les grandes décisions du Conseil constitutionnel, Dalloz, 17e éd., 2013. L’intégralité des
décisions du Conseil, avec les références de leurs publications, est sur : http://www.conseil-
constitutionnel.fr Adde Les grandes décisions des cours constitutionnelles européennes, Dalloz,
2008.
(1687) Cons. const., 16 juill. 1971, Liberté d’association, décis. no 71-44 DC, JCP G,
1971.II.16823 ; AJDA 1971, p. 537, n. J. Rivero ; RDP 1971, p. 1171, n. J. Robert : « Vu la
Constitution, et notamment son préambule ». Le « bloc de constitutionnalité » englobe la
Constitution du 4 oct. 1958, le Préambule de la Constitution du 27 oct. 1946 et la Déclaration des
droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789.
(1688) L. FAVOREU, « La décision de constitutionnalité », RID comp. 1986, p. 622 ; Th. DI MANNO,
« L’influence des réserves d’interprétation », in La légitimité de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel, Economica, 1999, p. 189. Ces auteurs distinguent les réserves « directives »
(adressant des injonctions au législateur, au pouvoir réglementaire ou aux sujets de droit), les
réserves « minorantes » ou « neutralisantes » (qui amputent la portée d’un texte, technique
d’« extraction de venin ») et les réserves « constructives » (ajoutant au texte les précisions
nécessaires ou modifiant sa portée). Adde A. VIALA, Les réserves d’interprétation dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel, LGDJ, 1999.
(1689) V., par ex., N. MOLFESSIS, « La réécriture de la loi relative au PACS par le Conseil
constitutionnel », JCP G, 2000.I.210. La décision no 99-419 du 9 nov. 1999 sur la L. 15 nov. 1999
instituant le pacte civil de solidarité (C. civ., art. 515-1 et s.) recèle un nombre impressionnant de
réserves d’interprétation qui ont permis au Conseil de ne pas censurer la loi, se conformant à l’air du
temps, plus qu’à la Constitution.
(1690) CE, 15 mai 2013, nº 340554, Cne de Gurmençon.
(1691) Ex. : Cons. const., 25 juill. 1979, Droit de grève à la radio et à la télévision, décis. no 79-
105 DC, D. 1980, 101 ; JCP G, 1981.II.19547 : si le droit de grève se voit reconnaître une valeur
constitutionnelle par le Préambule de 1946 (al. 7), le législateur peut lui apporter des limitations,
allant jusqu’à l’interdiction du droit de grève, au nom du principe constitutionnel de la continuité du
service public (qui pourtant est non écrit).
(1692) Ex. : l’art. 4 de la Déclaration de 1789, selon lequel « la liberté consiste à pouvoir faire tout
ce qui ne nuit pas à autrui », a servi de support à la liberté d’entreprendre (Cons. const., 16 janv.
1982, décision no 81-132 DC, D. 1983, 169 ; JCP G, 1983.II.19788), à la liberté d’aller et venir
(Cons. const., 12 juill. 1979, décis. no 79-107 DC), à la liberté du mariage (Cons. const., 13 août
1993, décis. no 93-325 DC, sol. impl.), au droit au respect de la vie privée (Cons. const., 18 janv.
1995, décis. no 94-352 DC), voire à la liberté contractuelle (Cons. const., 10 juin 1998, décis. no 73-
51 DC, citée supra, no 305, 4o).
(1693) Il s’agit de libertés puisées par le Conseil constitutionnel dans « la législation républicaine
intervenue avant l’entrée en vigueur du préambule de la Constitution de 1946 », donc sous la
IIIe République (Cons. const., 20 juill. 1988, décis. no 88-244 DC). Quatorze « PFRLR » ont été
dégagés entre 1971 et 2011, tels la liberté d’association consacrée par la L. 1er juill. 1901 (Cons.
const., 16 juill. 1971, préc.), la liberté individuelle (sans texte précis ! Const. const., 12 janv. 1977,
décis. nº 76-75 DC) ou les principes qui régissent la responsabilité et la justice pénales des mineurs,
« constamment reconnus par les lois de la République depuis le début du vingtième siècle » (Cons.
const., 29 août 2002, décis. nº 2002-461 DC). Cf. J. RIVERO, « Les “principes fondamentaux reconnus
par les lois de la République” : une nouvelle catégorie constitutionnelle ? », D. 1972, chr. 265 ;
V. CHAMPEIL-DESPLATS, Les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République,
Economica, 2001.
(1694) Ex. : Cons. const., 19 janv. 1995, décis. no 94-359 DC : « La possibilité pour toute personne
de disposer d’un logement décent est un objectif de valeur constitutionnelle » ; Cons. const.,
11 juill. 2001, décis. no 2001-450 DC : « Le pluralisme des courants d’expression socioculturels
est en lui-même un objectif de valeur constitutionnelle ».
(1695) G. DRAGO, « La conciliation entre principes constitutionnels », D. 1991, chr. 265.
(1696) Le Conseil veille à la régularité des élections présidentielle (art. 58) et parlementaire
(art. 59), examine la constitutionnalité des lois organiques, des règlements des assemblées (art. 61) et
des traités internationaux (art. 54), délimite le domaine de compétence de la loi et du règlement
(art. 41).
(1697) G. VEDEL, « De Maastricht à Schengen », RFDA 1992, p. 173.
(1698) Const., art. 89. Ainsi, la L. constit. no 93-1256 du 25 nov. 1993 (Const., art. 53-1 nouv.)
condamne la décision no 93-325 DC, du 13 août 1993 (réf. in D. 1994, som. p. 111) qui invalidait les
dispositions de la loi « Pasqua » « sur la maîtrise de l’immigration » relatives au droit d’asile.
(1699) Biblio. sélective (pour le droit privé). Monographies : M. FRANGI, Constitution et droit
privé. Les droits individuels et les droits économiques, Economica, PUAM, 1992 ; N. MOLFESSIS, Le
Conseil constitutionnel et le droit privé, th. Paris II, LGDJ, 1997, préf. M. Gobert ; O. DESAULNAY,
L’application de la Constitution par la Cour de cassation, Dalloz, 2009. Ouvrages collectifs : La
Cour de cassation et la Constitution de la République (colloque), PUAM, 1995 ; La légitimité de la
jurisprudence du Conseil constitutionnel (colloque), Economica, 1999 ; Le préambule de la
Constitution de 1946, Dalloz, 2001.
(1700) 1er ex. : le Conseil d’État (CE, Ass., 7 juill. 1950, Dehaene, D. 1950, 538, n. A. Gervais ;
JCP G, 1950.II.5681, concl. Gazier ; S. 1950, 3, 109, obs. J.-D. ; RDP 1950, p. 691, concl. Gazier,
n. M. Waline) puis la Cour de cassation (Cass. soc., 28 juin 1951, Dr. social 1951, p. 532 ;
Cass. soc., 25 avr. et 26 juin 1952, Dr. social 1953, p. 533 ; Cass. soc., 5 mars 1953, D. 1954, 109 ;
JCP, 1953.II.7553) se sont référés à l’alinéa 7 du Préambule de 1946 (« Le droit de grève s’exerce
dans le cadre des lois qui le réglementent ») bien avant que le Conseil constitutionnel ne
reconnaisse à ce dernier une valeur juridique, en 1971 (v. supra, no 338, en note). 2e ex. : la Cour de
cassation s’est conféré, sur le fondement de l’art. 66 Const. (« L’autorité judiciaire, gardienne de la
liberté individuelle [...] »), le pouvoir d’apprécier la régularité des contrôles d’identité
administratifs en méconnaissant le principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs
(Cass. crim., 25 avr. 1985, Bogdan et Vuckovic, JCP G, 1985.II.20465, concl. H. Dontenwille, n. W.
Jeandidier), même si cette jurisprudence trouve un appui fragile dans celle du Conseil constitutionnel
(Cons. const., 12 janv. 1977, Loi autorisant la visite des véhicules, décis. no 76-75 DC, D. 1978,
173, n. J. Léauté).
(1701) Ex. : Cass. 1re civ., 10 juin 1986, JCP G, 1986.II.20683, rap. P. Sargos ; RFDA 1987, p. 92,
n. J. Buisson : « Vu l’article L. 781-1 (anc.) C. org. jud., les principes régissant la responsabilité de
la puissance publique et, notamment, le principe constitutionnel de l’égalité devant les charges
publiques » ; Cass. Ass. plén., 30 juin 1995, JCP G, 1995.II.22478, concl. M. Jéol ; D. 1995, 513,
concl. M. Jéol, n. R. Drago : « Vu le principe du respect des droits de la défense ; la défense
constitue pour toute personne un droit fondamental à caractère constitutionnel » ; Cass. soc.,
19 nov. 1996, Dr. social 1997, p. 95, obs. G. Couturier : « Vu l’article 7 de la loi des 2-17 mars
1791 et le principe constitutionnel de la liberté du travail ». Cass. crim., 9 déc. 1981, D. 1983,
352, n. W. Jeandidier : « En vertu du principe constitutionnel qui garantit l’indépendance des
magistrats du siège, leurs décisions juridictionnelles (ne peuvent être) constitutives par elles-
mêmes d’un crime ou d’un délit ».
(1702) * CE, Ass., 3 juill. 1996, Moussa Koné, D. 1996, 509, n. F. Julien-Laferrière ; LPA, 20 déc.
1996, no 153, p. 19, n. G. Pellissier ; JCP G, 1996.II.22720, n. X. Prétot ; AJDA 1996, p. 805 et chr.
D. Chauvaux et T.-X. Girardot, p. 722 ; RFDA 1996, p. 870, concl. J.-M. Delarue et obs. de
L. Favoreu, P. Gaïa, H. Labayle et P. Delvolvé ; RDP 1996, p. 1751, n. C. Braud ; RGD int. publ.
1997, p. 237, n. D. Alland ; adde B. MATHIEU et M. VERPEAUX, D. 1997, chr. 219 ; E. PICARD, Rev.
adm. 1999, no 1, p. 15. L’arrêt invente le « principe fondamental reconnu par les lois de la
République selon lequel l’État doit refuser l’extradition d’un étranger lorsqu’elle est demandée
dans un but politique ». Le premier PFRLR (la liberté d’association) avait été reconnu par le
Conseil d’État bien avant la décision du Conseil constitutionnel de 1971 (CE, Ass., 11 juill. 1956,
Amicale des Annamites de Paris, Rec. CE, p. 317).
(1703) Cons. const., 16 janv. 1962, décis. no 62-18 L, S. 1963, 303, n. L. Hamon. Adde Cons. const.,
8 juill. 1989, décis. no 89-258 DC, JCP G, 1990.II.21409, n. C. Franck, étendant l’autorité de la
chose jugée par le Conseil aux dispositions d’une loi qui, « bien que rédigées sous une forme
différente, ont, en substance, un objet analogue » à celles précédemment censurées.
(1704) Ex. : Cons. const., 5 août 1993, Loi relative aux contrôles et vérifications d’identité, décis.
no 93-323 DC (à rapprocher de : Cass. crim., 10 nov. 1992, D. 1993, 36, n. D. Mayer). La Cour de
cassation est d’autant plus encline à l’adopter qu’elle en est l’inspiratrice (Cass. 2e civ., 28 juin
1995, D. 1996, 102, n. F. Julien-Laferrière).
(1705) Cette indépendance n’est pas remise en cause par la « réunification » (formelle) du droit
public applaudie par la doctrine publiciste depuis que, dans les années 1990, le Conseil d’État a
entrepris de se référer aux textes constitutionnels. Cf. R. CHAPUS, Droit administratif général,
Montchrestien, 15e éd., 2001, no 14.
(1706) V., pour des exemples de transposition littérale d’un motif du Conseil constitutionnel même en
dehors du contexte normatif de sa saisine : Cass. crim., 1er févr. 1990, Bull. crim., no 56, cité supra,
no 284 ; Cass. com., 15 mai 1990, Bull. civ. IV, no 151, cité supra, no 305, en note.
(1707) Ex. : Cass. soc., 25 mars 1998, Bull. civ. V, no 175 : « Vu l’article 62 de la Constitution ; les
décisions du Conseil constitutionnel s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités
administratives et juridictionnelles ; par décision du 28 décembre 1990, le Conseil constitutionnel
a décidé que la (CSG entre) dans la catégorie des impositions de toute nature au sens de
l’article 34 de la Constitution ».
(1708) Const., art. 53 : « Les traités de paix, les traités de commerce, les traités ou accords relatifs
à l’organisation internationale, ceux qui engagent les finances de l’État, ceux qui modifient des
dispositions de nature législative, ceux qui sont relatifs à l’état des personnes, [...] ne peuvent être
ratifiés ou approuvés qu’en vertu d’une loi ». V. Cass. 1re civ., 29 mai 2001, Bull. civ. I, no 149 : « Il
appartient au juge de vérifier la régularité de la ratification des traités internationaux » ; l’accord
franco-sénégalais du 16 février 1994 n’ayant pas été ratifié par une loi bien qu’il touchât aux
principes fondamentaux du régime de propriété, il n’a pas été régulièrement approuvé au sens de
l’art. 55 Const. (l’arrêt opère un revirement à la suite du Conseil d’État : CE, Ass., 18 déc. 1998,
Blotzheim et Haselaecker, Rec. CE, p. 483). De même, en l’absence de ratification, la simple
publication au JO de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 ne lui a pas conféré
de valeur obligatoire (CE, 3 févr. 1999, Nodière, RFDA 1999, p. 435). Mais, dès lors que la
ratification ou approbation a été autorisée par une loi, la théorie de la loi écran (supra, no 337)
interdit au juge de se prononcer sur le moyen tiré de que cette loi serait contraire à la Constitution
(CE, 8 juill. 2002, Cne de Porta, LPA, 20 févr. 2003, no 37, p. 20).
(1709) L’acte international peut entrer en vigueur à une date antérieure à celle de sa publication, de
façon rétroactive (v. concl. P. FOMBEUR sous CE, 28 juill. 2000, JCP G, 2001.II.10521).
(1710) Const. 27 oct. 1946, art. 25 : « Les traités régulièrement ratifiés et publiés ont force de loi
dans le cas même où ils seraient contraires à des lois internes françaises [...] ».
(1711) Ex. : Cass. civ., 4 févr. 1936, DH 1936, 145 : « Vu l’article 19 de la loi du 30 juin 1926 ; les
dispositions de ce texte refusant aux commerçants ou industriels de nationalité étrangère, établis
en France, le bénéfice de la loi du 30 juin 1926 (sur la propriété commerciale) réservent
nécessairement le cas où l’étranger peut invoquer une convention internationale le dispensant de
cette dernière condition ».
(1712) Cass. civ., 22 déc. 1931, Sanchez, DP 1931, 1, 113, concl. P. Matter, n. A. Trasbot ; S., 1932,
1, 157, n. J.-P. Niboyet. V. les conclusions demeurées célèbres du procureur Matter : « Vous ne
connaissez ou ne pouvez connaître d’autre volonté que celle de la loi, c’est le principe même sur
lequel reposent nos institutions judiciaires ». Cette règle fut appelée la « jurisprudence Matter » (il
y a d’autres jurisprudences « Matter », notamment une sur les clauses monétaires. V. Droit des
obligations, coll. Droit civil).
(1713) CE, 1er mars 1968, Syndicat général des fabricants de semoules de France (dit :
« jurisprudence des semoules »), D. 1968, 285, n. M. L. ; JCP G, 1968.II.15675 ; Rev. crit.
DIP 1968, p. 516, n. R. Kovar ; AJDA 1968, p. 235, concl. N. Questiaux ; RGD int. publ. 1968,
p. 1128, n. C. Rousseau : le Conseil d’État avait décidé d’appliquer une ordonnance à valeur
législative sans vérifier sa conformité (douteuse) à un règlement communautaire. En revanche, la
supériorité des traités sur les règlements fut admise, dans le recours pour excès de pouvoir, après
l’entrée en vigueur de la Constitution de 1946 (CE, Ass., 30 mai 1952, Dame Kirkwood, RDP 1952,
p. 781, concl. M. Letourneur, n. M. Waline).
(1714) Cons. const., 15 janv. 1975, Loi relative à l’interruption volontaire de grossesse, décis.
no 74-54 DC, D. 1975, 529, n. L. Hamon. Le Conseil considère que ses décisions relevant du contrôle
de constitutionnalité « revêtent un caractère absolu et définitif » tandis que « la supériorité des
traités sur les lois, dont le principe est posé à l’article 55 (Const.), présente un caractère à la fois
relatif et contingent, tenant, d’une part, à ce qu’elle est limitée au champ d’application du traité
et, d’autre part, à ce qu’elle est subordonnée à une condition de réciprocité dont la réalisation
peut varier selon le comportement du ou des États signataires et le moment où doit s’apprécier le
respect de cette condition » ; « une loi contraire à un traité ne serait pas, pour autant, contraire à
la Constitution ». En conséquence, la loi sur l’avortement n’a pas été jugée contraire au droit à la vie
proclamé par l’art. 2 Conv. EDH. L’argument n’a jamais convaincu car le droit européen (CEDH et
droit de l’Union européenne) s’applique sans condition de réciprocité. Sur la condition de
réciprocité, v. infra, nº 342.
(1715) ** Cas. ch. mixte, 24 mai 1975, Jacques Vabre, D. 1975, 497, concl. A. Touffait ; JCP G,
1975.II.18180 bis, concl. A. Touffait ; Rev. crit. DIP 1975, 124, n. P. Lagarde et 1976, p. 347, n. P.
Lagarde et D. Holleaux ; JDI 1975, p. 801, n. D. Ruzié ; RDP 1975, p. 1335, n. L. Favoreu et
L. Philip ; AJDA 1975, p. 567, n. J. Boulouis ; RTD eur. 1975, p. 336, concl. A. Touffait ; Cah. dr.
eur. 1975, p. 632, n. R. Kovar ; RGD int. publ. 1976, p. 347, n. J. Foyer et D. Holleaux et p. 960,
n. Ch. Rousseau. Adde : F.-Ch. JEANTET, « La Cour de cassation et l’ordre juridique communautaire »,
JCP G, 1975.I.2743. L’arrêt reconnaît que le Traité fondateur de la Communauté européenne a
institué « un ordre juridique propre intégré à celui des États membres ».
(1716) ** CE, Ass., 20 oct. 1989, Nicolo, JCP G, 1989.II.21371, concl. B. Frydman ; D. 1990, 135,
n. P. Sabourin ; RFDA 1989, p. 813, concl. B. Frydman, n. B. Genevois ; RTD eur. 1989, p. 787, n. G.
Isaac ; AJDA 1989, p. 788, n. Simon ; Rev. Marché commun 1990, p. 384, n. J.-F. Lachaume ; RGD
int. publ. 1990, p. 91, n. J. Boulouis ; Rev. crit. DIP 1990, p. 139, n. P. Lagarde ; RTD eur. 1989,
p. 771, n. G. Isaac. Adde les chr. de H. CALVET, JCP G, 1990.I.3429 ; R. KOVAR, D. 1990, chr. 57 ;
L. FAVOREU, RFDA 1989, p. 993 et L. DUBOUIS, ib., p. 1 000. L’incompatibilité de la loi avec un traité
international peut apparaître après son entrée en vigueur, à la suite d’un changement des circonstances
de droit, mais non de fait (CE, 2 juin 1999, Meyet, RFDA 1999, p. 873 ; RDP 2000, p. 563, n. G.
Desmoulin : la L. 19 juill. 1977 qui interdit les sondages dans la semaine précédant un scrutin n’est
pas contraire à l’art. 10 Conv. EDH quoique la diffusion de sondages à l’étranger sur internet la
rende obsolète).
(1717) Ph. MALAURIE, « La jurisprudence combattue par loi [...] », Defrénois 2005, art. 38203,
p. 1205.
(1718) Ex. : Cass. crim., 12 déc. 2007, Dr. pén. 2008, comm. 34 : l’appréciation de la conformité de
sanctions fiscales, édictées par le Code général des impôts, avec le « principe conventionnel de
proportionnalité relève du contrôle de leur constitutionnalité » et échappe donc à la compétence du
juge judiciaire.
(1719) CJCE, 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame, aff. C. 46 et 48/93, Rec. CJCE,
p. 1029 : la violation d’une obligation découlant du droit communautaire ouvre droit au profit des
particuliers à exercer une action en responsabilité contre l’État défaillant. Cette action relève du droit
national (qui ne doit pas l’entraver) et est soumise à trois conditions : la règle violée doit conférer
des droits aux particuliers, sa violation doit être suffisamment caractérisée et un lien de causalité
direct doit exister entre cette violation et le dommage. Ex. : Cass. com., 21 févr. 1995, Bull. civ. IV,
no 52 : constitue une faute lourde au sens de l’art. L. 781-1 (devenu art. L. 141-1) C. org. jud.
l’adoption d’une circulaire du ministre de la Justice, invitant les procureurs de la République à
engager des poursuites pénales, qui déforme le sens d’arrêts de la CJCE. Adde CJCE, 19 nov. 1991,
Francovich, aff. C. 6 et 9/90, cité infra, no 345 (en cas de non-transposition de directives).
(1720) CJCE, 30 sept. 2003, Köbler, aff. C. 224/01, Rec. CJCE, p. 10239.
(1721) CE, 14 janv. 1938, SA des produits laitiers La Fleurette, Rec. CE, p. 25.
(1722) CE, Ass., 30 mars 1966, Cie Gale d’énergie radio-électrique, Rec. CE, p. 257 ; CE, 11 févr.
2011, Dr. adm. 2011, 42, n. F. Melleray ; JCP G, 2011, 625, n. M.-C. Rouault (seulement la
3e application positive de cette jurisprudence en 50 ans). – CE, 23 juill. 2014, Dr. adm. 2015, 9 : au
nombre de ces engagements internationaux « figure le respect des principes de sécurité juridique et
de confiance légitime » reconnus par le droit de l’Union européenne.
(1723) CE, Ass., 8 févr. 2007, Gardedieu, JCP G, 2007, II, 10045, n. M.-C. Rouault ; adde chron.
M. GAUTIER et F. MELLERAY, Dr. adm. 2007, Études, 7. V. aussi infra, no 450 (sur les obstacles
insidieux dressés par le juge national aux questions préjudicielles).
(1724) CE, 18 juin 2008, Robert G., Dr. adm. 2008, 120, n. M. Gautier : la responsabilité de l’État
pour faute lourde commise dans l’exercice de la fonction juridictionnelle ouvre droit à indemnité
même si la faute lourde découle du contenu d’une décision définitive (cas normalement exclu par :
CE, ass., 29 déc. 1978, Darmont) dès lors que cette décision est « entachée d’une violation
manifeste du droit communautaire ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers » (selon
les termes de : CJCE, 30 sept. 2003, Köbler, précité). C’est une nouvelle exception à la
jurisprudence Darmont, à l’image de celle introduite afin d’assurer le respect de l’art. 6 § 1 Conv.
EDH (CE, ass., 28 juin 2002, Magiera, cité supra, no 175 en note).
(1725) 1er ex. : CE, 20 avr. 1984, Valton et Crépeaux, Rec. CE, p. 148 : l’art. 4, § 4, de la Charte
sociale européenne du 18 oct. 1961 selon lequel « les parties contractantes s’engagent [...] à
reconnaître le droit de tous les travailleurs à un délai de préavis raisonnable, dans le cas de
cessation de l’emploi [...] ne produit pas d’effet direct à l’égard des nationaux des États
contractants ». 2e ex. : CE, 5 mai 2000, RJS 7-8/00, no 888 : ne produit pas d’effet direct à l’égard
des particuliers l’art. 11, § 1, PIDCP selon lequel les États prennent les mesures appropriées pour
assurer la réalisation du « droit à un niveau de vie suffisant ». 3e ex. : Cass. crim., 5 mars 1998,
Bull. crim., no 88, écartant « la violation des Accords généraux sur les tarifs et le commerce, qui,
directement négociés par la Communauté, n’ont aucun effet direct dans les États membres ».
(1726) V. infra, nº 345, 2º (au sujet des directives européennes).
(1727) D. ALLAND, « L’applicabilité directe du droit international considérée du point de vue de
l’office du juge », RGD int. publ. 1998, p. 203.
(1728) Ainsi, la Cour de cassation considérait que « les dispositions de la Convention relative aux
droits de l’enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 (la « CIDE », publiée par le D. 8 oct.
1990), ne peuvent être invoquées devant les tribunaux, cette Convention, qui ne crée des
obligations qu’à la charge des États parties, n’étant pas directement applicable en droit interne »
(Cass. 1re civ., 10 mars 1993, Le Jeune, D. 1993, 361, n. J. Massip). Elle avait réitéré cette
jurisprudence malgré de vives critiques en doctrine (v. not. Cl. NEIRINCK et P.-M. MARTIN, JCP G,
1993.I.3677 ; M.-Cl. RONDEAU-RIVIER, D. 1993, chr. 203 ; A.-D. OLINGA, RTDH 1995, p. 673). Le
Conseil d’État, au contraire, reconnaissait un effet direct (et du même coup une invocabilité directe) à
certaines dispositions de cette convention, pourtant peu précises (CE, 22 sept. 1997, Cinar, JCP G,
1998.II.10052 ; D. 1998, som., 297 et les références, annulant une décision préfectorale violant
l’art. 3 CIDE, lequel impose la prise en considération de « l’intérêt supérieur de l’enfant » dans les
décisions des autorités publiques). Suivant la chambre criminelle de la Cour de cassation qui
appliquait déjà la CIDE (Cass. crim., 16 juin 1999, no 98-84.538, inédit), la première chambre civile
opéra un revirement (Cass. 1re civ., 18 mai et 14 juin 2005, JCP G, 2005, II, 10115, concl. C. Petit,
n. C. Chabert ; Cass. 1re civ., 8 et 22 nov. 2005, D. 2006, 554, n. Fr. Boulanger).
(1729) Ainsi, l’art. 12 de la CIDE (précitée) consacre le droit du mineur à être entendu dans les
procédures qui l’intéressent, ce dont le droit français ne se souciait guère à l’origine.
(1730) CE, ass., 11 avr. 2012, GISTI et FAPIL, nº 322326, RTD civ. 2012, p. 487, obs. P. Deumier
(avec les autres réf.) : une stipulation d’un traité « doit être reconnue d'effet direct par le juge
administratif lorsque, eu égard à l'intention exprimée des parties et à l'économie générale du
traité invoqué, ainsi qu'à son contenu et à ses termes, elle n'a pas pour objet exclusif de régir les
relations entre Etats et ne requiert l'intervention d'aucun acte complémentaire pour produire des
effets à l'égard des particuliers ; l'absence de tels effets ne saurait être déduite de la seule
circonstance que la stipulation désigne les Etats parties comme sujets de l'obligation qu'elle
définit ». – CE, 27 oct. 2015, nº 393026, Dr. adm. 2016, 12, n. G. Eveillard, qui ajoute une
restriction à l’effet direct des traités : le juge ne peut être saisi « d’un moyen tiré de ce que la
procédure d’adoption de la loi n’aurait pas été conforme aux stipulations » d’un traité (pourtant,
l’art. 55 Constit. ne limite pas la primauté des traités aux questions de légalité interne).
(1731) Cass. soc., 16 déc. 2008, Bull. civ. V, no 251 : est « directement applicable en droit interne »
l'article 6.1 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) du
16 décembre 1966 « qui garantit le droit qu'a toute personne d'obtenir la possibilité de gagner sa
vie par un travail librement choisi ou accepté ». Ce Pacte renferme d’autres dispositions très
vagues, manifestement inapplicables en droit interne.
(1732) Ex. : Cass. 1re civ., 25 avr. 2006, JCP G, 2007, II, 10179, n. G. Mahinga : « si les résolutions
du Conseil de Sécurité des Nations Unies s'imposent aux États membres, elles n'ont, en France,
pas d'effet direct tant que les prescriptions qu'elles édictent n'ont pas, en droit interne, été rendues
obligatoires ou transposées ; à défaut, elles peuvent être prises en considération par le juge en
tant que fait juridique ».
(1733) Ex. : CE, Ass., 6 juin 1997, Aquarone, JCP G, 1997.II.22945, n. G. Teboul ; RFDA 1997,
p. 1068, concl. G. Bachelier : ni l’art. 55 Const. ni l’al. 14 du Préambule de 1946 « ne prescrit ni
n’implique que le juge administratif fasse prévaloir la coutume internationale sur la loi » ; CE,
28 juill. 2000, D. 2001, 387, écartant « même un principe général de droit international ».
V. toutefois : CE, 23 oct. 1987, sté Nachfolger Navigation Company Ltd, RDP 1988, p. 836, n. J.-
M. Auby ; RFDA 1987, p. 963, concl. J. Massot ; RFDA 1988, p. 345, n. D. Ruzié, énonçant qu’une
autorité publique maritime a pu ordonner la destruction d’une épave dangereuse en haute mer « sans
méconnaître aucun principe de droit international » ; CE, 14 oct. 2011, Dr. adm. 2011, 101, qui
engage la responsabilité de l’État français au titre du préjudice grave et spécial causé par
l’application de la « règle coutumière du droit public international » de l’immunité d’exécution des
États étrangers ; CE, Ass., 23 déc. 2011, JCP E, 2011, 1101, Annexe, évoquant les « principes du
droit coutumier relatifs à la combinaison entre elles des conventions internationales ». Cf.
O. DEBBASCH, « Les juridictions françaises et les principes généraux du droit international »,
Mélanges J. Boulouis, « L’Europe et le droit », Dalloz, 1991, p. 139 ; G. TEBOUL, « Nouvelles
réflexions sur le droit international non écrit dans la jurisprudence du juge administratif et du juge
judiciaire », RDP 2001, p. 122.
(1734) * Cass. crim., 13 mars 2001, Khadafi, D. 2001, 2631, n. J.-F. Roulot : « Vu les principes
généraux du droit international ; la coutume internationale s’oppose à ce que les chefs d’État en
exercice puissent, en l’absence de dispositions internationales contraires s’imposant aux parties
concernées, faire l’objet de poursuites devant les juridictions pénales d’un État étranger »
(confirmation de l’ordonnance de refus d’informer prise en faveur du colonel Kadhafi, alors chef de
l’État lybien).
(1735) Il déclare inopérant le moyen pris de la violation de principes généraux du droit
communautaire soit parce que l’acte attaqué « n’est pas au nombre des actes pris par le
gouvernement français pour la mise en œuvre du droit communautaire », soit parce que la matière
est « uniquement régie par le droit interne ». Dans les deux cas, ces principes ne s’incorporent pas
complètement au droit interne : ils y sont tolérés et parqués dans le champ du droit communautaire.
Cf. J.-M. MAILLOT, La théorie administrativiste des principes généraux du droit. Continuité et
modernité, Dalloz, 2003, nos 307 s.
(1736) J.-M. MAILLOT, préc. nos 286 s.
(1737) Cons. const., 30 déc. 1980, Loi de finances pour 1981, décis. no 80-126 DC, JCP G,
1984.II.20160 : « La règle de réciprocité [...], si elle affecte la supériorité des traités ou accords
sur les lois, n’est pas une condition de la conformité des lois à la Constitution » (le législateur peut
donc harmoniser la législation avec un traité qui n’est pas appliqué par tous les États parties).
(1738) CE, Ass., 29 mai 1981, Rekhou, D. 1982, 137, n. G. Calonnec ; Rev. crit. DIP 1982, p. 65,
n. P. Lagarde ; RDP 1981, p. 1707, concl. J.-F. Théry.
(1739) CEDH, 13 févr. 2003, Chevrol c/France, D. 2003, 931, n. H. Moutouh ; AJDA 2003, p. 308,
n. C. de Montecler et p. 1984, n. T. Rambaud, qui ne condamne pas le principe du renvoi au ministre
des Affaires étrangères mais la position du Conseil d’État qui s’était considéré comme lié par cet
avis sans « prendre en compte des éléments de fait qui pouvaient être cruciaux pour le règlement in
concreto du litige » ; partant, la cause « n’a pas été entendue par un « tribunal » de pleine
juridiction » au sens de l’art. 6 Conv. EDH : condamnation de la France.
(1740) CE, 9 juill. 2010, Cheriet-Benseghir, Dr. adm. 2010, 131, n. M. Gautier.
(1741) Cass. 1re civ., 6 mars 1984, Bull. civ. I, no 85 ; Rev. crit. DIP 1985, p. 108, n. G. Droz ; JDI
1984, p. 859, n. J. Chappez : « en l’absence d’initiative prise par le gouvernement pour dénoncer
une convention, il n’appartient pas aux juges d’apprécier le respect de la condition de réciprocité
prévue dans les rapports entre États par l’article 55 de la Constitution ». Dans le même sens :
Cass. 1re civ., 16 févr. 1994, Bull. civ. I, no 65 ; Cass. 1re civ., 23 mars 1994, Bull. civ. I, no 105 : « Le
fait qu’aux termes de la lettre du ministre des Affaires étrangères du 13 décembre 1979, le
gouvernement vietnamien ne s’estimait pas lié par les Accords conclus en 1954 entre la France et
l’ex-République du Vietnam, avait pour conséquence de priver, désormais, ces accords d’une
autorité supérieure à celle de la loi du 31 décembre 1971 » relative à l’exercice de la profession
d’avocat. Adde S. LEMAIRE, « Le juge judiciaire et le contrôle de la réciprocité dans l’application des
traités internationaux », D. 2007, chr., 2322.
(1742) Ch. réunies 27 avr. 1950, JCP, 1950.II.5650, n. P. Lerebours-Pigeonnière ; S., 1950, 1, 165,
concl. Rey, n. J.-P. Niboyet (v. déjà : Cass. civ., 24 juin 1839, DP 1839, 1, 257 ; S., 1839, 1, 577). La
Cour de cassation considérait même que « l’ordre public monétaire » relevait de la politique
étrangère (Cass. com., 7 mars 1983, JCP G, 1984.II.20213). En droit administratif : CE, 23 juill.
1823, Princesse Murat, Rec. CE, p. 545 : « Il s’agit de l’application de l’acte diplomatique du
15 juillet 1806 et les questions auxquelles peut donner lieu l’interprétation desdits actes ne
peuvent être portées devant nous, en notre Conseil d’État, par voie contentieuse ».
(1743) Conseil d’État : CE, 29 juin 1990, GISTI, Rec. CE, p. 171, concl. R. Abraham ; D. 1990,
560, n. P. Sabourin ; JCP G, 1990.II.21579, n. J. Tercinat ; AJDA 1990, p. 621, concl. R. Abraham,
n. G. Teboul ; RDP 1990, p. 1579, n. F. Sabiani ; RFDA 1990, p. 923, n. J.-F. Lachaume ; JDI 1990,
p. 965, n. F. Julien-Laferrière ; RGD int. publ. 1991, p. 109, n. M.-F. Buffet-Tchakaloff. Cour de
cassation : Cass. soc., 29 avr. 1993, Gaz. Pal. 1994, 1, 279, concl. Y. Chauvy ; * Cass. 1re civ.,
19 déc. 1995, Banque africaine de développement, Bull. civ. I, no 470 : « Il est de l’office du juge
d’interpréter les traités internationaux invoqués dans la cause soumise à son examen sans qu’il
soit nécessaire de solliciter l’avis d’une autorité non juridictionnelle ». Cette formule a pour
origine un arrêt de la CEDH : CEDH, 24 nov. 1994, Beaumartin c/France, Série A, no 296-B ;
D. 1995, 273, n. X. Prétot, jugeant la jurisprudence du Conseil d’État (antérieure au revirement de
l’arrêt GISTI) contraire à l’art. 6, § 1, Conv. EDH au motif qu’une juridiction s’estimant liée par
l’interprétation du ministre des Affaires étrangères n’était pas un tribunal indépendant du pouvoir
exécutif.
(1744) Cass. crim., 11 févr. 2004, Bull. crim., no 37 (qui reprend la formule citée supra à la note
précédente). – Cass. crim., 15 janv. 2014, Dr. pén. 2014, 113. Contra auparavant : Cass. crim.,
24 mars 1953 (deux arrêts), D. 1953, 365 et 425, n. R. Savatier ; JCP, 1953.II.7659, n. A. Weill ; Rev.
crit. DIP 1953, p. 573, n. J. Brouchot ; JDI 1953, p. 644, n. B. Goldman : « Les conventions
internationales sont des actes de Haute administration qui ne peuvent être interprétés [...] que par
les puissances entre lesquelles elles sont intervenues ».
(1745) Cass., avis, 16 déc. 2002, Bull. civ. Avis, no 6 (à propos de la Conv. EDH). Sur la saisine
pour avis, v. supra, no 163.
(1746) V. infra, no 447.
(1747) * CE, Ass., 30 oct. 1998, Sarran, RFDA 1998, p. 1081, concl. C. Maugüé ; RDP 1999,
p. 919, n. J.-F. Flauss ; D. 2000, 152, n. E. Aubin ; RTD civ. 1999, p. 232, obs. N. Molfessis ; adde
RFDA 1998, p. 1094, chr. D. Alland ; RFDA 1999, p. 57, chr. L. Dubouis, p. 67, chr. B. Mathieu et
M. Verpeaux, p. 77, chr. O. Gohin ; RRJ 1999, p. 285, chr. J.-Cl. Ricci ; Europe mars 1999, p. 4, chr.
D. Simon ; RTD eur. 1999, p. 395, chr. F. Chaltiel : « La suprématie conférée aux engagements
internationaux ne s’applique pas, dans l’ordre interne, aux dispositions de valeur
constitutionnelle » ; est, en conséquence, rejeté le grief tiré de la non-conformité au Pacte
international sur les droits civils et politiques et à la Convention européenne des droits de l’homme
du D. 20 août 1998 relatif à la consultation des populations de Nouvelle-Calédonie (qui
surreprésente les Canaques dans le corps électoral), pris en application de la L. 9 nov. 1988 à
laquelle l’art. 76 Const. (issu de la L. constit. 20 juill. 1988) a octroyé une valeur constitutionnelle.
La Constitution fait « écran » entre le juge et le décret (de simple exécution). La Cour de cassation a
repris cette formule à la lettre (toujours dans la question calédonienne) : Cass. Ass. plén., 2 juin
2000, D. 2000, 865 ; JCP G, 2001.II.10453.
(1748) V. supra, no 338.
(1749) D. ALLAND, « Consécration d’un paradoxe : primauté du droit interne sur le droit
international », RFD adm. 1998, p. 1094. La conception du monisme avec supériorité du droit
international n’a pas de sens en droit interne.
(1750) CJCE, 15 juill. 1964, Flaminio Costa c/E.N.E.L., aff. 6/64 (cité infra, no 345, en note). Le
Conseil constitutionnel a lui-même affirmé qu’une « loi organique (devrait) respecter les
prescriptions édictées à l’échelon de la Communauté européenne », en vertu du renvoi opéré par
l’art. 88-3 Const. (Cons. const., 2 sept. 1992, Traité sur l’Union européenne, décis. no 92-312 DC.
Adde à propos de cette décision : E. PICARD, « Vers l’extension du bloc de constitutionnalité au droit
européen ? », RFDA 1993, p. 47).
(1751) CEDH, 28 oct. 1999, Zielinski c/France, cité supra, no 306.
(1752) Cons. const., 10 juin 2004, cité infra, no 347.
(1753) Il y avait à l’origine trois « Communautés européennes » : la Communauté économique (CE),
la CECA (CE du charbon et de l’acier) et EURATOM (CE de l’énergie atomique, qui subsiste seule
après le traité de Lisbonne).
(1754) Le deuxième pilier de l’Union européenne résultait de la « politique étrangère et de sécurité
commune » ou PESC (TUE, Titre V) et le troisième pilier de la « coopération policière et judiciaire
en matière pénale » (TUE, Titre VI). L’Union européenne était confédérale et à caractère « inter-
gouvernemental » : au sein de ses institutions, les décisions se prenaient à l’unanimité. La
Communauté européenne était de nature fédérale : les institutions communautaires statuaient en
principe à la majorité qualifiée (Conseil) ou simple (Commission). C’est ce dernier modèle que
généralise le traité de Lisbonne.
(1755) C. HAGUENAU, L’application effective du droit communautaire en droit interne, Bruylant,
1995.
(1756) * CJCE, 15 juill. 1964, Flaminio Costa c/ENEL, aff. 6/64, Rec. CJCE, p. 1141, spéc.
p. 1158 : « Issu d’une source autonome, le droit communautaire né du traité ne pourrait donc, en
raison de sa nature spécifique originale, se voir judiciairement opposer un texte interne quel qu’il
soit, sans perdre son caractère communautaire et sans que soit mise en cause la base juridique de
la Communauté elle-même ». Ce principe a pour présupposés logiques le principe de l’applicabilité
directe du droit communautaire en droit interne (CJCE, 5 févr. 1963, Van Gend En Loos, aff. 26/62,
Rec. CJCE, p. 1 ; D. 1963, 621, n. J. Bréban ; JCP G, 1963.II.13177, n. F.-C. Jeantet) et le principe
de l’unité de l’ordre juridique communautaire.
(1757) V. supra, nº 340.
(1758) V. supra, no 340.
(1759) ** CE, Ass., 20 oct. 1989, Nicolo, préc.
(1760) CE, 24 sept. 1990, Boisdet, Rec. CE, p. 250 ; RFDA 1991, p. 172, n. L. Dubouis.
(1761) CE, Ass., 28 févr. 1992, SA Rothmans International France et SA Philip Morris France,
Rec. CE, p. 80, concl. M. Laroque ; JCP G, 1992.II.21859, n. G. Teboul. L’autorité administrative
compétente saisie d’une demande tendant à l’abrogation d’un règlement contraire à une directive est
tenue d’y déférer (CE, Ass., 3 févr. 1989, Cie Alitalia, Rec. CE, p. 44 ; AJDA 1989, p. 387 ; RFDA
1989, p. 391 ; RJF 3/1989, no 299 et concl. N. Chahid-Nouraï, p. 125).
(1762) Ex. : Cass. crim., 29 mars 2000, Bull. crim., no 147, au sujet d’une décision du Comité mixte
CE/Danemark-Îles Féroe fixant le prix du saumon : « les décisions d’un organe créé par une
convention conclue entre la Communauté et un État (tiers) ont une valeur supérieure à celles des
lois internes ».
(1763) Ex. : Cass. com., 20 oct. 1998, Bull. civ. IV, no 253 : « Vu l’article 55 de la Constitution ; il
résulte de la jurisprudence de la CJCE (Simmenthal, 9 mars 1978, aff. 106/77, cité infra, nº 346)
que serait incompatible avec les exigences inhérentes à la nature même du droit communautaire,
toute disposition d’un ordre national ou toute pratique législative, administrative ou judiciaire,
qui aurait eu pour effet de diminuer l’efficacité du droit communautaire par le fait de refuser au
juge compétent pour appliquer ce droit, le pouvoir de faire, au moment même de cette application,
tout ce qui est nécessaire pour écarter les dispositions législatives nationales formant
éventuellement obstacle, même temporaire, à la pleine efficacité des normes communautaires ».
(1764) Traité FUE, art. 288, al. 2 : « Le règlement a une portée générale. Il est obligatoire dans
tous ses éléments et il est directement applicable dans tout État membre ».
(1765) Traité FUE, art. 288, al. 4 : « La décision est obligatoire dans tous ses éléments. [...] ».
(1766) Traité FUE, art. 288, al. 3 : « La directive lie tout État membre destinataire quant au
résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et
aux moyens ». Les moyens idoines sont la loi et le règlement (voire une convention collective
nationale, en droit du travail) ; une pratique administrative, une circulaire ou une jurisprudence
n’offrent pas la sécurité juridique à laquelle les sujets de droit peuvent prétendre.
(1767) C. ZOLYNSKI, Méthode de transposition des directives communautaires. Étude à partir de
l’exemple du droit d’auteur et des droits voisins, th. Paris II, Dalloz, 2007, préf. P.-Y. Gautier.
(1768) CJCE, 18 déc. 1997, Inter-Environnement Wallonie, aff. C. 129/86, Rec. CJCE, p. 7411 ;
AJDA 1998, p. 451, n. Couvert-Castéra.
(1769) CJCE, 19 nov. 1991, Francovich, aff. C. 6 et 9/90, Rec. CJCE, p. 5357 ; JCP G,
1991.II.21783. Dépassant la jurisprudence communautaire, le Conseil d’État a consacré d’une façon
générale la responsabilité pour faute de l’État qui adopte une loi en méconnaissance de ses
engagements internationaux (CE, Ass., 8 févr. 2007, Gardedieu, cité supra, no 340 in fine). V. aussi
infra, no 450 (sur les obstacles dressés par le juge national aux questions préjudicielles).
(1770) V., pour plus de détails, CJCE, 12 juill. 1990, Foster, aff. C. 188/89, Rec. CJCE, p. 3313.
(1771) CJCE, 26 févr. 1986, Marshall, aff. 152/84, Rec. CJCE, p. 723 (un salarié ne peut invoquer
la directive contre son employeur que si celui-ci est l’État) ; CJCE, 14 juill. 1994, Faccini Dori, aff.
C. 91/92, JCP G, 1995.II.22358, n. P. Level.
(1772) Sur ces diverses solutions, v. CJCE, 19 janv. 1982, Becker, aff. 8/81, Rec. CJCE, p. 53.
(1773) CJCE, 22 nov. 2005, Mangold, aff. C. 144/04, JCP G, 2006, II, 10107, n. O. Dubos, qui
impose, de façon inédite, aux juridictions nationales de laisser « inappliquée toute disposition
éventuellement contraire de la loi nationale, et ce alors même que le délai de transposition de la
directive n’est pas encore expiré », qui plus est dans une relation horizontale (employeur-salarié),
mais pour assurer le respect du principe général de non-discrimination en raison de l’âge.
(1774) Cass. soc., 17 févr. 2010, JCP S, 2010, 1170 (prescriptions d’une directive sur le temps
minimal de repos des salariés).
(1775) CJUE, 15 janv. 2014, aff. C. 176/12, Assoc. de médiation sociale, pt 49, D. 2014, 705, n. S.
de La Rosa : bien que l’art. 27 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne
garantisse aux salariés « une information et une consultation en temps utile » et que la directive
nº 2002/14 du 11 mars 2002 ait consacré un « droit à l’information et à la consultation des
travailleurs », l’article de la Charte ne peut être invoqué dans un litige entre particuliers afin de
laisser inappliquée la disposition du Code du travail français qui est incompatible avec cette
directive. La différence avec la jurisprudence précitée tient à ce que le principe de non-
discrimination en fonction de l’âge « se suffit à lui-même pour conférer aux particuliers un droit
subjectif invocable en tant que tel » (pt 47).
(1776) CE, Ass., 22 déc. 1978, Rec. CE, p. 524 ; D. 1979, 161, concl. B. Genevois, n. B. Pacteau ;
JDI 1979, p. 591, n. B. Goldman ; JCP G, 1979.II.19158, n. R. Kovar.
(1777) Ce que le Conseil constitutionnel a affirmé en 2004 (v. infra, no 347).
(1778) CE, Ass., 30 oct. 2009, no 298348, Perreux : JCP G, 2009, 542, n. S. Corneloup ; adde M.
GAUTIER, Dr. adm. 2009, Étude, 21. Une magistrate exerçant des activités syndicales contestait son
refus de nomination à un poste d’enseignant à l’ENM et invoquait le bénéfice d’une directive contre
les discriminations.
(1779) CJCE, 10 avr. 1984, Von Colson et Kamann, aff. 14/83, Rec. CJCE, p. 1891 ; CJCE, 13 nov.
1990, Marleasing, aff. C. 106/89, Rec. CJCE, p. 4135 ; JCP G, 1991.II.21658 (cité dans le texte,
précisant que l’interprétation conforme s’applique aux textes aussi bien antérieurs que postérieurs à
la directive) ; CJCE, 27 juin 2000, Oceano Grupo Editorial, aff. C. 240 et 244/98, JCP G,
2001.II.10513.
(1780) Ex. : Cass. 1re civ., 9 juill. 1996, Bull. civ. I, no 304 (reprenant la formule de l’arrêt Von
Colson, précité) ; Cass. 1re civ., 28 avr. 1998, Bull. civ. I, no 158 : « Vu les art. 1147 et 1384, al. 1er,
[anciens] du C. civ., interprétés à la lumière de la directive [...] du 25 juillet 1985 » ; Cass. soc.,
7 juill. 1998, RJS 11/98, no 1346 ; Dr. social 1998, p. 948 : « Vu l’art. L. 122-12, al. 2, [anc., devenu
art. L. 1224-1] du C. trav. ; selon ce texte, tel qu’interprété au regard de la directive [...] du
14 février 1977 [...] » (l’arrêt reprend ensuite une formule empruntée à la CJCE). Par la suite, la
Cour s’est référée à une directive non transposée dont le délai de transposition n’était pas encore
expiré : Cass. soc., 10 oct. 2000, Bull. civ. V, no 320 (dir. no 98/50 du 29 juin 1998 modifiant celle du
14 févr. 1977, à transposer avant le 1er juill. 2001).
(1781) Ex. : CJCE, 26 sept. 1996, Arcaro, aff. C. 168/95, Rec. CJCE, p. 4705. L’arrêt excepte le cas
où l’interprétation conforme aboutirait à engager ou aggraver la responsabilité pénale – en l’absence
de loi de transposition – de celui qui a violé la directive : le principe de légalité des délits prime le
principe d’interprétation conforme.
(1782) CJCE, 11 juin 1987, Pretore di Salo, aff. C. 14/86, Rec. CJCE, p. 2545.
(1783) CJCE, 7 janv. 2004, aff. C. 60/02, Rec. CJCE, p. 651.
(1784) CJCE, 15 avril 2008, Impact, C. 268/06, Rec. p. I-2483, point 100.
(1785) Cass. soc., 17 déc. 2013, Bull. civ. V, nº 307. – Cass. 1re civ., 15 mai 2015, RTD civ. 2015,
p. 635, obs. P. Jourdain (avec les autres réf.) : « il résulte de la jurisprudence constante de la CJUE
(arrêts du 4 juillet 2006, Adeneler, C-212/04 et du 15 avril 2008, Impact, C-268/06) que
l'obligation pour le juge national de se référer au contenu d'une directive lorsqu'il interprète et
applique les règles pertinentes du droit interne trouve ses limites dans les principes généraux du
droit, notamment les principes de sécurité juridique ainsi que de non-rétroactivité, et que cette
obligation ne peut pas servir de fondement à une interprétation contra legem du droit national ».
(1786) V. par ex. Cass. com., 22 oct. 2002, Bull. civ. IV, nº 147 et nº 150, appliquant « le principe de
la sécurité juridique » et « le principe du respect de la confiance légitime ».
(1787) CJCE, 28 mars 1979, Saunders, aff. 175/78, Rec., p. 1129. Pour les principes de sécurité
juridique et de confiance légitime, v. par ex. CJCE, 18 mai 2000, Max Rombi, aff. C. 107/97, Europe
2000/7, no 197.
(1788) CJCE, 17 juill. 1997, Leur-Bloem, aff. C. 28/95, D. 1998, 215, n. M.-C. Bergerès.
(1789) * CJCE, 15 juill. 1964, Flaminio Costa c/E.N.E.L., précité supra, nº 345.
(1790) Cass. 1re civ., 13 oct. 1993, 9 arrêts dont un publié in Contrats Concurrence consommation
1993, no 12, comm. 220 ; n.p.b. : « Vu le principe de la primauté du droit communautaire ».
(1791) Cons. const., 30 déc. 1977, décis. no 77-90 DC : « La répercussion de la répartition des
compétences ainsi opérée entre les institutions communautaires et les autorités nationales au
regard tant des conditions d’exercice de la souveraineté nationale que du jeu des règles de
l’article 34 de la Constitution relatives au domaine de la loi ne sont que la conséquence
d’engagements internationaux souscrits par la France qui sont entrés dans le champ de
l’article 55 de la Constitution ». Les auteurs de la saisine contestaient l’applicabilité directe des
règlements communautaires, prévue par l’art. 189 anc. (art. 249 nouv.) du traité de Rome.
(1792) V., déjà en ce sens, les conclusions de l’avocat général Touffait sous l’arrêt Jacques Vabre
(préc. supra, no 340) : « Je vous demande de ne pas fonder votre argumentation sur l’article 55 de
la Constitution ; vous reconnaîtrez ainsi que le transfert opéré par les États de leur ordre
juridique interne au profit de l’ordre juridique communautaire dans la limite des droits et
obligations correspondant aux dispositions du Traité, entraîne une limitation définitive de leurs
droits souverains contre laquelle ne saurait prévaloir un acte unilatéral ultérieur incompatible
avec la notion de Communauté ».
(1793) Cons. const., 20 déc. 2007, décis. no 2007-560 DC, Traité de Lisbonne, consid. no 7.
(1794) CJCE, 9 mars 1978, Simmenthal, aff. 106/77, Rec. CJCE, p. 629 ; AJDA 1978, p. 323, n. J.
Boulouis ; RTD eur. 1978, p. 540, concl. G. Reischl (repris par Cass. com., 20 oct. 1998, cité supra,
no 345, en note).
(1795) CJCE, 13 mars 2007, Unibet, aff. C. 432/05, Rec. CJCE, p. 2271 ; Cl. BLUMANN, D. 2007, chr.
175, qui s’appuie sur le « principe de protection juridictionnelle effective des droits conférés aux
justiciables par le droit communautaire ».
(1796) CJCE, 16 mars 2006, Kapferer, aff. C. 234/04, Rec. CJCE, p. 2585.
(1797) Pour un panorama, cf. M. MASSÉ, « L’influence du droit communautaire sur le droit pénal
français », Rev. sc. crim. 1996, p. 935.
(1798) CJCE 13 sept. 2005, aff. C. 176/03, D. 2005, 3064, n. P.-Y. Monjal. – CJCE 23 oct. 2007, aff.
C. 440/05, JCP G, 2007, II, 10207.
(1799) CJCE, 22 oct. 1987, Foto-Frost, aff. 314/85, Rec. CJCE, p. 4199. Sous cette réserve, le
Conseil d’État a pu apprécier (et affirmer) la validité d’actes communautaires au regard d’autres
normes communautaires de droit dérivé ou de principes généraux du droit communautaire, en se
référant le cas échéant à des arrêts de la CJCE ; il transpose d’ailleurs à ces actes les cas d’ouverture
du recours pour excès de pouvoir (P. CASSIA, « Le juge administratif français et la validité des actes
communautaires », RTD eur. 1999, p. 409). En tout état de cause, l’incompétence du juge national ne
s’étend pas à la procédure de référé ou à la prise de mesures conservatoires (CJCE, 21 févr. 1991,
Zuckerfabrik, aff. 143/88, Rec. CJCE, p. 415).
(1800) Comp. P. CASSIA, art. cit., spéc. p. 420 et 427 et s. De plus, le Conseil d’État entrave par
divers artifices de droit interne la possibilité d’invoquer l’invalidité d’un texte communautaire dans
le cadre d’un recours pour excès de pouvoir (soit en affirmant que l’acte administratif est
inattaquable dans la mesure où il ne fait pas grief – avis, lettre informative... –, soit en jugeant qu’il
n’est pas une mesure d’exécution de la norme communautaire). La CJCE exige pourtant des
juridictions internes qu’elles assurent la mise en œuvre des droits reconnus aux particuliers par le
droit communautaire ; le recours direct aux juridictions communautaires reste exceptionnel et
restreint.
(1801) Le juge ordinaire ne peut apprécier la constitutionnalité de la loi (v. supra, no 337) ni donc
d’un règlement qui l’applique fidèlement.
(1802) En principe, le juge ordinaire ne peut apprécier la constitutionnalité d’un traité international à
la place du Conseil constitutionnel (supra, no 343) ni donc d’un règlement français qui applique
fidèlement ce traité.
(1803) B. OPPETIT, « L’omnipotence technocratique et eurocratique », Droit et modernité, PUF, 1988,
p. 31.
(1804) Cons. const., 10 juin 2004, décis. no 2004-496 DC, Loi pour la confiance dans l’économie
numérique. Cf. chron. B. GENEVOIS, RFDA 2004, p. 655 ; M. GAUTIER et F. MELLERAY, AJDA 2004,
p. 1537. L’interdiction s’applique aussi dans le cadre du contrôle a posteriori de constitutionnalité
(sur QPC) : Cass. soc., 15 févr. 2011, no 10-40063, n. pub. Bull.
(1805) Cons. const., 27 juill. 2006, décis. no 2006-540, Loi DADVSI, consid. 20. Sur la QPC,
v. supra, nos 334 s.
(1806) En 2013, le Conseil a accepté, pour la première fois, de poser une question préjudicielle à la
CJUE en dépit du court délai qui lui est imparti pour statuer (v. supra, nº 335 in fine).
(1807) Cons. const., 12 mai 2010, décis. no 2010-605 QPC, préc. supra, no 335, consid. no 19.
(1808) V. supra, no 340.
(1809) Cons. const., 30 mars 2006, décis. no 2006-535 DC, Loi pour l’égalité des chances, consid.
28 : « si la transposition en droit interne d'une directive communautaire résulte d'une exigence
constitutionnelle, il n'appartient pas au Conseil constitutionnel [...] d'examiner la compatibilité
d'une loi avec les dispositions d'une directive communautaire qu'elle n'a pas pour objet de
transposer en droit interne ». Sur les décisions de 2004 et 2006, cf. Y. LAURANS, chron in RRJ 2007,
p. 691.
(1810) Cons. const., 10 juin 2004, préc.
(1811) Sur la situation après le traité de Lisbonne, infra, no 353.
(1812) S. PLATON, La coexistence des droits fondamentaux constitutionnels et européens dans
l’ordre juridique français, LGDJ, 2008, qui propose de résoudre les concours de normes en
recourant au « principe de faveur », comme en droit du travail.
(1813) Cons. const., 27 juill. 2006, décis. no 2006-540, Loi DADVSI, consid. 19. Solution transposée
dans le contrôle de constitutionnalité a posteriori (sur QPC) : Cons. const., 17 déc. 2010, décis.
no 2010-79 QPC.
(1814) Selon le Conseil d’État et la Cour de cassation, l’art. 55 Const. n’affirme pas la suprématie du
droit international sur la Constitution (v. supra, no 343).
(1815) V. supra, no 346.
(1816) La Cour de cassation et le Conseil d’État ont leur jurisprudence constitutionnelle. V. supra,
no 338.
(1817) CE, Ass., 8 févr. 2007, Sté Arcelor, RFDA, 2007, p. 384, concl. M. Guyomar ; D. 2007, 2272,
n. M. Verpeaux ; JCP G, 2007, II, 10049, n. P. Cassia ; adde les chron. de M. GAUTIER et F. MELLERAY,
Dr. adm. 2007, Études, 7 ; D. SIMON, Europe 2007, Études, 3 ; F. MICHÉA, RRJ 2008, p. 255 : « si le
contrôle des règles de compétence et de procédure ne se trouve pas affecté, il appartient au juge
administratif, saisi d'un moyen tiré de la méconnaissance d'une disposition ou d'un principe de
valeur constitutionnelle, de rechercher s'il existe une règle ou un principe général du droit
communautaire qui, eu égard à sa nature et à sa portée, tel qu'il est interprété en l'état actuel de
la jurisprudence du juge communautaire, garantit par son application l'effectivité du respect de la
disposition ou du principe constitutionnel invoqué ; dans l'affirmative, il y a lieu pour le juge
administratif, afin de s'assurer de la constitutionnalité du décret, de rechercher si la directive que
ce décret transpose est conforme à cette règle ou à ce principe général du droit communautaire ; il
lui revient, en l'absence de difficulté sérieuse, d'écarter le moyen invoqué, ou, dans le cas
contraire, de saisir la CJCE d'une question préjudicielle [...] ; en revanche, s'il n'existe pas de
règle ou de principe général du droit communautaire garantissant l'effectivité du respect de la
disposition ou du principe constitutionnel invoqué, il revient au juge administratif d'examiner
directement la constitutionnalité des dispositions réglementaires contestées ». Presque toujours, la
règle constitutionnelle aura son équivalent dans le droit de l’Union européenne car tous les droits et
libertés garantis par la Conv. EDH ont valeur de « principes généraux du droit de l’Union
européenne » (v. infra, no 353) ; le juge administratif devra donc saisir la CJUE et renoncer à un
contrôle de constitutionnalité au profit d’un contrôle de conventionalité (d’« unionité » plus
exactement). La règle du « traité-écran » (v. supra, no 346) en sort affaiblie car l’écran conventionnel
n’empêche pas un contrôle de constitutionnalité très poussé. Une situation inédite reste à trancher :
celle où une loi s’intercalerait entre la directive et le règlement attaqué.
(1818) CE, ord., 3 juin 2005, Olziibat, Dr adm. 2005, comm. 143 : la mise en œuvre du règlement
communautaire no 343/2003 sur le droit d’asile « doit être assurée à la lumière » de l’art. 53-1 de la
Constitution.
(1819) Sur cette critique, accablant particulièrement le normativisme de Kelsen, v. supra, no 270.
(1820) F. SUDRE, « La subsidiarité, “nouvelle frontière” de la CEDH... », JCP G, 2013, 1086.
(1821) CEDH, 23 juill. 1968, aff. Linguistique belge, GACEDH, nº 9, § 10 : la Cour « ne saurait se
substituer aux autorités nationales compétentes, faute de quoi elle perdrait de vue le caractère
subsidiaire du mécanisme international de garantie collective instauré par la Convention ». Elle
l’a ensuite perdu de vue mais son engorgement la contraint à y revenir.
(1822) En procédure pénale : Cass. crim., 29 nov. 2000, Dr pén. 2001, comm. 54 : « Vu l’art. 6 de la
Conv. EDH ; la durée excessive d’une procédure, à la supposer établie, ne saurait entraîner sa
nullité ». En droit administratif : CE 4 oct. 2012, Dr adm. 2013, nº 8, n. J. Sirinelli : l’exécution d’un
arrêt de la CEDH « ne peut avoir pour effet de priver les décisions juridictionnelles de leur
caractère obigatoire », en l’absence de procédure organisant le réexamen d’une affaire
définitivement jugée.
(1823) V. C. pr. pén., art. 626-1 et s. (L. 15 juin 2000). La procédure de réexamen d’une décision
pénale définitive, à la suite d’une condamnation de la France par la Cour européenne des droits de
l’homme, n’est ouverte que si elle répare l’atteinte subie par le requérant. En pratique, la Cour de
cassation ne casse jamais l’arrêt de condamnation qui violait la Conv. EDH et le réexamen s’avère
stérile (cf. la critique de E. DREYER, D. 2008, chr., 1705).
(1824) Notamment depuis : Cass. 1re civ., 10 janv. 1984, JCP G, 1984.II.20210, concl. Gulphe ; RTD
civ. 1984, p. 771, obs. R. Perrot, se référant à l’art. 6, § 1, Conv. EDH « tel qu’interprété par un
arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme ». De façon plus inhabituelle, la Cour s’est aussi
référée à un article du Code civil « tel qu’il doit être interprété au regard » d’articles de la Conv.
EDH (Cass. 1re civ., 29 janv. 2002, Bull. civ. I, no 12 ; RTD civ. 2002, p. 865, obs. J.-P. Marguénaud).
(1825) * Cass. Ass. plén., 15 avr. 2011, no 10-17049, RTD civ. 2011, p. 725, obs. J.-P. Marguénaud
(avec les autres réf.).
(1826) Fr. SUDRE, « La réécriture de la Convention par la CEDH », in Mélanges J.-P. Costa, Dalloz,
2011, p. 596.
(1827) L. SERMET, Convention européenne des droits de l’homme et contentieux administratif
français, Economica, 1996 ; S. BRACONNIER, Jurisprudence de la Cour européenne des droits de
l’homme et droit administratif français, Bruylant, 1997.
(1828) V. infra, no 414.
(1829) La Cour européenne (suivie par les juges français) a rangé dans la « matière pénale » : la
répression disciplinaire dans les armées (CEDH, 8 juin 1976, Engel, Série A, no 22) et en milieu
pénitentiaire (CEDH, 28 juin 1984, Campbell et Fell, Série A, no 80) ; ... la répression administrative
en matière économique (CEDH, 27 févr. 1980, Deweer, Série A, no 35) ou de contraventions
routières (CEDH, 21 févr. 1984, Oztürk, Série A, no 7) ; ... la répression fiscale (CEDH, 24 févr.
1994, Bendenoun, Série A, no 284) et douanière (CEDH, 2 févr. 1995, Welch, Série A, no 307-A),
etc. En droit interne, le Conseil constitutionnel a entrepris une démarche parallèle en étendant à
« toute sanction ayant le caractère d’une punition » les principes fondamentaux (substantiels) du
droit pénal (v. supra, no 305).
(1830) La conception européenne a été adoptée par la Cour de cassation (Cass. Ass. plén., 6 nov.
1998, JCP G, 1998.II.10198, rapp. P. Sargos ; D. 1999, 1, concl. J.-F. Burgelin ; RTD civ. 1999,
p. 494, obs. J.-P. Marguénaud : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un
tribunal impartial ; cette exigence doit s’apprécier objectivement »). Adde CEDH, 24 nov. 1994,
Beaumartin c/France, cité supra, no 343, en note.
(1831) V. supra, no 306.
(1832) V. infra, no 416.
(1833) CEDH, 21 mars 2000, Dulaurans, JCP G, 2000.II.10344 ; D. 2000, 883 : la Cour de
cassation prive de son droit à un procès équitable l’auteur d’un pourvoi déclaré irrecevable à raison
de la nouveauté du moyen (qui, selon la Cour européenne, avait bien été soulevé devant les juges du
fond).
(1834) Comp. CEDH, 29 août 2000, Jahnke et Lenoble, JCP G, 2000.II.10435 : « Optant pour une
réponse laconique, l’arrêt (de la Cour de cassation) peut en effet prêter à confusion » ; mais, après
examen de l’espèce, il s’avère qu’elle n’a pas commis d’« erreur manifeste d’appréciation ». Sur la
motivation des décisions de justice, v. infra, nº 407.
(1835) 1er ex. : CEDH, 19 mars 1997, Hornsby c/Grèce, cité infra, no 353. 2e ex. : CEDH, 31 mars
1998, Reinhard et Slimane-Kaïd c/France, D. 1999, 281 ; JCP G, 1999.II.10074, condamnant, sur le
fondement de l’art. 6, § 1, une pratique en vigueur devant la Cour de cassation (communication du
rapport du conseiller-rapporteur au seul avocat général) qui rompt « l’égalité des armes » au profit
du Parquet général. 3e ex. : CEDH, 7 juin 2001, Kress c/France, D. 2001, 2619, n. R. Drago,
condamnant, pour le même motif, la participation au délibéré devant le Conseil d’État du
commissaire du gouvernement. Sa seule présence, qu’elle soit active ou même simplement passive,
doit être bannie (CEDH, 12 avr. 2006, Martinie c/ France, D. 2006, p. 1129, obs. M.-C. de
Montacler). Le Conseil d’État, qui est passé par toutes les attitudes, de la résistance à la demande
d’indulgence auprès de la CEDH, n’est pas parvenu à faire son deuil de la présence de ce magistrat
au délibéré (d’ailleurs rebaptisé « rapporteur public » par le D. 7 janv. 2009). Finalement, la CEDH
en a admis la spécificité (CEDH, 4 juin 2013, Marc-Antoine c/France, Dr. adm. 2013, 74). 4e ex. :
CEDH, 10 juill. 2008, Medvedyev c/France : le procureur de la République n’est pas une « autorité
judiciaire » indépendante du pouvoir exécutif (ici au sens de l’art. 5). Le Conseil constitutionnel
affirmait le contraire. Adde S. GUINCHARD, « L’influence de la Convention EDH et de la jurisprudence
de la Cour EDH sur la procédure civile », LPA, 12 avr. 1999, no 72, p. 4.
(1836) Ex. : CEDH, 1er févr. 2000, Mazurek c/France, D. 2000, 332 ; JCP G, 2000.II.10286 ; RTD
civ. 2000, p. 429, obs. J.-P. Marguénaud : l’art. 760 C. civ., qui amputait les droits successoraux de
l’enfant adultérin en concours avec le conjoint et les enfants légitimes, violait les art. 1er du Prot. no 1
et 14 CEDH en ce qu’il établissait une discrimination injustifiée.
(1837) Sur l’infléchissement de cette jurisprudence depuis 1991, cf. M. LEVINET, n. sous trois arrêts
CEDH, JCP G, 2001.II.10503.
(1838) CEDH, 17 oct. 2013, Winterstein c/France, D. 2013, 2678, n. J.-P. Marguénaud et J. Mouly :
« La perte d’un logement est une atteinte des plus graves au droit au respect du domicile. Toute
personne qui risque d’en être victime doit en principe pouvoir faire examiner la proportionnalité
de cette mesure par un tribunal indépendant à la lumière des principes pertinents qui découlent de
l’article 8 de la Convention, quand bien même son droit d’occuper les lieux aurait été éteint par
l’application du droit interne » (viole l’art. 8 l’évacuation judiciaire d’un campement illégal de
« gens du voyage » [Roms] constitué de caravanes) (§ 148 et 155). La Cour de cassation a mis en
œuvre ce contrôle de proportionnalité ; il lui a offert l’occasion de développer la motivation de ses
arrêts, comme le souhaitaient certains magistrats (v. infra, nº 407,1º).
(1839) Cass. Ass. plén., 11 déc. 1992, JCP G, 1993.II.21991, concl. M. Jéol, n. G. Mémeteau
(revirement opéré sous l’influence de CEDH, 25 mars 1992, D. 1993, 101, n. J.-P. Marguénaud ;
JCP G, 1992.II.21955, n. Th. Garé). La Cour européenne a ensuite adopté cette solution qui allait au-
delà de son arrêt de 1992 (CEDH, 11 juill. 2002, Goodwin c/Royaume Uni, D. 2003, p. 2032).
(1840) CEDH, 9 déc. 1994, Lopez Ostra c/Espagne, Série A, no 303-C, affirmant que des « atteintes
graves à l’environnement » peuvent nuire à la vie privée et familiale. Adde obs. J.-P. MARGUÉNAUD,
RTD civ. 1996, p. 507. Le droit à la vie (Conv. EDH, art. 2) est également invoqué (CEDH, 20 mars
2008, Budayeya c/ Russie). La protection de l’environnement a acquis une telle valeur qu’elle tend à
se détacher des textes de la Convention (CEDH, 27 nov. 2007, Hamer, D. 2008, 884, n. J.-
P. Marguénaud et 2469, obs. N. R.-M.).
(1841) CEDH, 17 févr. 2005, in M. FABRE-MAGNAN, D. 2005, chr. 2973. La cour d’appel de Grenoble
a résisté à cette jurisprudence : 11 mars 2009, JCP G, 2009, 29 juin 2009, p. 8.
(1842) CEDH, 13 sept. 2005, B. et L. c/Royaume-Uni, Dr. famille 2005, p. 234, obs. crit.
A. Gouttenoire et M. Lamarche ; RTD civ. 2005, p. 735, obs. approb. J.-P. Marguénaud et p. 758, obs.
approb. J. Hauser. V. aussi, Cass. 1re civ., 4 déc. 2013, JCP G, 2014, 93 : le prononcé de la nullité du
mariage d’un beau-père avec sa belle-fille, divorcée d’avec son fils (mariage interdit par
l’article 161 du Code civil), revêt à l’égard de cette dernière, « le caractère d’une ingérence
injustifiée dans l’exercice de son droit au respect de sa vie privée et familiale dès lors que cette
union, célébrée sans opposition, avait duré plus de vingt ans ».
(1843) CEDH, 20 nov. 1995, Pressos Compania Naviera c/Espagne, cité supra, no 306.
(1844) CEDH, 16 sept. 1996, Gaygüsüz c/Autriche, D. 1998, 438, n. J.-P. Marguénaud et J. Mouly.
Dans le même sens : Cass. soc., 21 oct. 1999, RJS 12/99, no 1539. Sur la question, cf. P. MORVAN,
Droit de la protection sociale, LexisNexis.
(1845) Ex. : CEDH, 25 juin 2013, Trévalec c/Belgique, D. 2013, 2139, n. crit. O. Sabard et ibid.,
2166, n. P.-Y. Gautier (un journaliste français blessé par la police belge avait obtenu d’importants
dommages-intérêts d’un fonds de garantie français ; la Belgique est condamnée à lui verser une
indemnité supplémentaire de 50 000 euros au titre du dommage moral).
(1846) Fr. SUDRE, « À propos du dynamisme interprétatif de la Cour EDH », JCP G, 2001.I.335
(1847) V. infra, no 403.
(1848) K. GRABARCZYK, Les principes généraux dans la jurisprudence de la CEDH, PUAM, 2008.
(1849) La Cour européenne impose aux États parties des obligations positives (assortissant chaque
droit ou liberté) de ne pas laisser les particuliers violer la Convention, alors même que ces
violations ne seraient pas imputables directement aux autorités publiques. V. par ex. CEDH, 25 janv.
2000, Ignaccolo-Zenide, JCP G, 2001.I.291, no 32, obs. F. Sudre : il « appartient à chaque État
contractant de se doter d’un arsenal juridique adéquat et suffisant pour assurer le respect des
obligations positives qui lui incombent en vertu de l’art. 8 de la Convention ». V. obs. J.-
P. MARGUÉNAUD, RTD civ. 1999, p. 498.
(1850) 1er ex. : Cass. 3e civ., 6 mars 1996, JCP G, 1997.II.22764 ; D. 1997, 167, n. B. de Lamy : les
clauses d’un bail d’habitation ne peuvent, au regard de l’art. 8 Conv. EDH, « avoir pour effet de
priver le preneur de la possibilité d’héberger ses proches ». 2e ex. : Cass. soc., 12 janv. 1999,
Bull. civ. V, no 7, décidant, sous le visa de l’art. 8 Conv. EDH, qu’une restriction de la liberté de
choix du domicile du salarié par son employeur « n’est valable qu’à condition d’être indispensable
à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise et proportionnée, compte tenu de l’emploi
occupé et du travail demandé, au but recherché ».
(1851) Le droit à un procès équitable (Conv. EDH, art. 6, § 1) est l’appui privilégié des censures de
la loi par la Cour de cassation. Par exemple, le principe de légalité pénale (Conv. EDH, art. 7) a
permis de condamner quelques incriminations, surtout en droit de la presse (ex. : Cass. crim., 20 févr.
2001, D. 2001, 908 : « La possibilité pour chacun d’apprécier par avance la légalité de son
comportement touchant, comme en l’espèce, à l’exercice de libertés essentielles implique une
formulation particulièrement rigoureuse des incriminations et ne saurait résulter que de
définitions légales claires et précises » ; est ainsi écarté l’art. 38 L. 29 juill. 1881 punissant le fait
de reproduire « tout ou partie des circonstances d’un crime »). Cf. E. DREYER, « L’assimilation par
le juge judiciaire de la Conv. EDH », RRJ 2004, p. 861.
(1852) V. supra, no 336.
(1853) Ph. MALAURIE, « La jurisprudence combattue par la loi [...] », Defrénois 2005, art. 38203,
p. 1205 ; du même, « Jean Foyer et la Cour européenne des droits de l’homme », cité supra, no 350 :
« La Cour de Strasbourg exerce une admirable mission qu’elle a trahie à cause de son
infaillibilité et son omnipotence, le travers de tous les cléricalismes ».
(1854) Ph. MALAURIE, « La Conv. EDH et le droit civil français », JCP G, 2002.I.143 ; du même,
« Grands arrêts, petits arrêts et mauvais arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme »,
Defrénois 2007, art. 38550, p. 348 ; du même, « Jean Foyer et la Cour européenne des droits de
l’homme », in Jean Foyer. In memoriam, Litec, 2010, p. 203. – A. DEBET, L’influence de la Conv.
EDH sur le droit civil, th. Paris II, Dalloz, 2002. – F. SUDRE, « La mystification du “consensus”
européen », JCP G, 2015, 1369.
(1855) Fr. CHENÉDÉ, « Le droit à l’épreuve des droits de l’homme », Mélanges G. Champenois,
Defrénois, 2012, p. 139.
(1856) J. CARBONNIER, Droit et passion du droit sous la Ve République, Flammarion, 1996, p. 121-
122, critiquant « l’exaltation permanente des droits de l’homme qu’accompagne un certain recul
des valeurs collectives (le peuple, la démocratie, la République) » ; p. 56 : « Manifestement, la
Cour de Strasbourg est sortie de son lit. L’ennui est qu’on ne voit pas comment l’y faire rentrer ».
(1857) V. infra, nº 407.
(1858) CJCE, 28 mars 1996, aff. 2/94, D. 1996, 449, n. J.-F. Renucci : la CJCE est d’avis que la
Communauté n’a pas compétence pour adhérer à la Conv. EDH ; une telle adhésion soumettrait la
Cour de Luxembourg à la juridiction de la Cour européenne, ce que ne prévoit pas le traité de Rome.
(1859) Dans sa jurisprudence antérieure, la CJCE avait été contrainte par certaines cours
constitutionnelles nationales (not. allemande et italienne) de jeter un pont entre l’ordre juridique de la
Convention européenne et l’ordre juridique communautaire afin de doter celui-ci de règles
protectrices des droits fondamentaux (cf. P. MORVAN, Le principe de droit privé, th. Paris II,
éd. Panthéon-Assas, 1999, nos 709 et s.).
(1860) Ex. : CJCE, 7 janv. 2004, K. B. c/National Health Service pensions Agency, aff. C. 117/01,
D. 2004, 675 et 979 ; RTD civ. 2004, p. 373, obs. J. Raynard : viole l'article 141 ancien du traité CE
(égalité de rémunération entre travailleurs féminins et masculins) la législation qui, en violation du
droit au mariage garanti par l’article 12 Conv. EDH tel qu’interprété par l’arrêt Goodwin de la Cour
EDH du 11 juillet 2002, empêche un couple composé d’une femme et d’une transsexuelle opérée (née
femme et devenue homme) de remplir la condition de mariage nécessaire pour obtenir une pension de
réversion.
(1861) CJUE, avis 2/13, 18 déc. 2014, RTD civ. 2015, obs. L. Usunier (avec les autres réf.) ; chron.
F. PICOD, in JCP G, 2015.145.
(1862) CJCE, 27 juin 2006, aff. C. 540/03, Rec. CJCE, p. 5769, qui déclare aussi tenir compte du
Pacte international relatif aux droits civils et politiques pour l’application des « principes généraux
du droit communautaire ».
(1863) Sur l’articulation entre la Charte, les Constitutions nationales et la Convention EDH : CJUE,
26 févr. 2013, aff. C-617/10, Åkerberg Fransson, RTD civ. 2014, p. 312, obs. L. Usunier (avec les
autres réf.).
(1864) Ex. : Cass. soc., 17 mai 2011, Bull. civ. V, nº 108 ; CE, 4 juin 2014, nº 370515, Halfa. Cf.
P. CASSIA et S. VON COESTER, « L’application de la Charte des droits fondamentaux de l’Union
européenne par le juge national », JCP G, 2012, 298.
(1865) Ex. : Cass. soc., 15 juin 2000, Bull. civ. V, no 232 : la solution découlant des arrêts de la
CJCE du 15 févr. 2000 (relatifs à la CSG et à la CRDS) ne crée pas un traitement discriminatoire
prohibé par l’art. 14 Conv. EDH.
(1866) V. supra, no 346.
(1867) CE 10 avr. 2008, CNB, Dr. adm. 2008, comm. 83, n. M. Gautier ; JCP G, 2008, II, 10125,
n. R. Tinière ; RTD civ. 2008, p. 444, obs. P. Deumier (et les références). – Sur l’hypothèse de la
« loi-miroir », qui serait le reflet exact d’une directive, v. supra, no 347.
(1868) CJCE, 30 sept. 1987, Demirel, aff. 12/86, Rec., p. 3719.
(1869) CE, ass., 23 déc. 2011, JCP E, 2011, 1101, Annexe. M. GAUTIER, « Le Conseil d’État et les
conflits entre conventions internationales », Dr. adm. 2012 chr. 11.
(1870) Ex. : CJCE, 2 août 1993, Lévy, aff. C. 158/91, D. 1995, 577, n. Ch. Pettiti. Le Code du
travail, en France, interdisait le travail de nuit des femmes en application de la Convention no 89 de
l’Organisation internationale du travail (OIT, relevant de l’ONU) du 9 juillet 1948 ; or, cette
interdiction méconnaît la directive no 76-207 du 9 févr. 1976 (art. 5) qui impose, quant à elle,
l’égalité entre hommes et femmes dans l’accès à l’emploi. En l’espèce, la France dénonça la
Convention OIT no 89. Mais, ayant laissé subsister dans son Code du travail le texte litigieux (qu’elle
asurait ne plus appliquer dans les faits), elle fut condamnée par la CJCE pour violation du principe
de sécurité juridique (CJCE, 13 mars 1997, aff. C. 197/96, JCP G, 1997.II.22939). Cette décision,
contraire à l’humanisme, révèle les excès auquel mène le juridicisme des juges.
(1871) CJCE, 13 nov. 1964, aff. 90 et 91/63, Rec. CJCE, p. 1217 : le principe de réciprocité et
l’exception d’inexécution ne peuvent être admis dans les relations entre États membres.
(1872) CJCE, 16 juin 1998, A. Racke GmbH, aff. C. 162/96, JCP G, 1999.II.10022, n. E. Leray et
A. Potteau ; adde Y. PETIT, D. 1999, chr. 184.
(1873) CJCE, 3 sept. 2008, Kadi, aff. C. 402/05 P, Dr. adm. 2008, comm. 151, spéc. points 287, 292,
299, 306 et 326. Au contraire, le tribunal de première instance des CE (TPICE) avait voulu
restreindre le contrôle de légalité du juge communautaire au seul examen de la compatibilité de la
résolution onusienne avec les normes du jus cogens (ordre public international absolu).
(1874) V. supra, no 343.
(1875) CEDH, 18 févr. 1999, Matthews c/Royaume Uni, RTD eur. 1999, p. 793 ; Cah. dr. eur. 2000,
p. 141, chr. O. de Schutter et O. L’Hoest. V. spéc. § 32 de l’arrêt : « Les actes de la Communauté
européenne ne peuvent être attaqués en tant que tels devant la Cour (EDH), car la Communauté en
tant que telle n’est pas Partie contractante. La Convention n’exclut pas le transfert de
compétences à des organisations internationales, pourvu que les droits garantis par la Convention
continuent d’être “reconnus”. Pareil transfert ne fait donc pas disparaître la responsabilité des
États membres ».
(1876) CEDH, 19 mars 1997, Hornsby c/Grèce, JCP G, 1997.II.22949, n. O. Dugrip et Fr. Sudre :
« L’exécution d’un jugement ou arrêt, de quelque juridiction que ce soit, doit être considérée
comme faisant partie intégrante du “procès” au sens de l’article 6 », texte qui garantit le droit à un
procès équitable. Il s’agissait, en l’espèce, d’un arrêt de la CJCE.
(1877) CEDH, 12 nov. 2008, Demir et Baykara, JCP S, 2009, II, 1154 : la Cour interprète la
Convention EDH en prenant en considération « les dénominateurs communs des normes de droit
international ou des droits nationaux des États européens » et « le consensus émergeant des
instruments internationaux spécialisés et de la pratique des États contractants » (par ex. la Charte
sociale européenne et la jurisprudence de ses organes de contrôle) ; dans cette « recherche de
dénominateurs communs », elle s’inspire même des conventions internationales qui n’ont pas été
signées ou ratifiées par les États membres du Conseil de l’Europe ou qui n’ont pas de valeur
contraignante.
(1878) S. GERRY-VERNIÈRE, Les « petites » sources du droit (À propos des sources étatiques non
contraignantes), th. Paris II, Economica, 2012, préf. N. Molfessis.
(1879) V. supra, no 276.
(1880) J.-M. OLIVIER, Les sources administratives du droit privé, th. Paris II, 1981, ronéo., nos 25
et s.
(1881) V. la circulaire du Premier ministre du 15 juin 1987 « relative aux circulaires ministérielles »
qui relève, parmi d’autres vices, que « leur nombre est excessif – leur qualité laisse à désirer ».
V. ensuite Circ. 25 févr. 2011, « relative aux circulaires adressées aux services déconcentrés » de
l’État qui veut éviter que ces services soient « exposés à un flot de circulaires, émanant de
multiples signataires, et diffusées de manière indifférenciée ».
(1882) Ex. : Cass. com., 23 oct. 1950, D. 1951, 4 ; Gaz. Pal. 1950.II.389 : « Les instructions et
circulaires administratives, sans lier les juges, n’obligent que les fonctionnaires auxquels elles
sont adressées et dans les sphères (sic) de leurs fonctions ».
(1883) Le Conseil d’État distinguait traditionnellement entre les circulaires interprétatives
(insusceptibles de recours pour excès de pouvoir) et les circulaires réglementaires, seules ces
dernières pouvant être annulées par le juge administratif lorsqu’elles ajoutaient au droit existant ou
prônaient une interprétation du droit erronée (CE, Ass., 29 janv. 1954, Institution Notre-Dame du
Kreisker, Rec. CE, p. 64). La nouvelle formulation élargit la recevabilité du recours aux circulaires
qui se bornent à réitérer une règle déjà contenue dans une disposition législative ou réglementaire
(CE, 18 juin 1993, IFOP, Rec. CE, p. 178. – 18 déc. 2002, Duvignères, Dr. adm. 2003, 73).
(1884) CE, 4 févr. 2015, nº 383267, Dr. adm. 2015, 38, n. G. Eveillard. La circulaire détermine les
moyens, les lignes directrices s’intéressent au résultat (en l’espèce, la circulaire du ministre de
l’Intérieur traitait de la régularisation des étrangers « sans-papiers », lesquels n’ont aucun droit à
obtenir un titre de séjour).
(1885) Cf. X. PRÉTOT, Mélanges F. Moderne, Dalloz, 2004, p. 357.
(1886) Cass. com., 23 nov. 1993, Bull. civ. IV, no 428 ; Cass. soc., 20 oct. 1994, Bull. civ. V, no 286
(considérant cependant qu’une circulaire de l'ACOSS ne peut être opposée à l'administration au titre
du décret de 1983 dans la mesure où elle viole l’art. 2 du Code civil).
(1887) V. infra, no 358.
(1888) Ancien D. no 2008-1281, 8 déc. 2008, mod. D. 28 avr. 2009 et D. 6 sept. 2012.
(1889) Pour une telle abrogation : CE, 16 avr. 2010 : RJS 7/2010, no 636 ; CE, 23 févr. 2011 : JCP E,
2011, 1446 : la mise en ligne de la circulaire sur ce même site à une date postérieure au 1er mai 2009
n'a pas eu pour effet de la remettre en vigueur.
(1890) Cf. H. MOYSAN, obs. in JCP G, 2010, 915 et JCP G, 2011, 801 ; P. DEUMIER, obs. RTD civ.
2009, p. 487 (avec les autres réf.). Pour une autre abrogation massive et aveugle qui suscite des
difficultés (celles des commissions administratives à caractère consultatif), v. infra, no 358.
(1891) B. OPPETIT, « Les réponses ministérielles aux questions écrites des parlementaires et
l’interprétation des lois », D. 1974, chr. 107 (reproduit dans Droit et modernité, PUF, 1988, p. 137).
(1892) Ex. d’une telle réserve (qui tend à disparaître) : JO déb. AN, 10 sept. 1977, p. 5514 « Ce
point ne paraissant pas en effet avoir été jusqu’à maintenant tranché par les tribunaux, la
Chancellerie ne saurait émettre un avis qui, par son caractère officiel, serait de nature à porter
atteinte à la souveraineté des juridictions qui peuvent être éventuellement saisies ». L’avis est
officieux et ne lie pas le juge.
(1893) Ex. : Cass. soc., 31 janv. 1980, Bull. civ. V, no 96 : c’est à bon droit que « les juges du fond
ont dit sans portée une lettre et une réponse (ministérielles) à une question écrite » ; CE, 2 nov.
1955, Rev. prat. dr. adm. 1955, p. 242 : « Un requérant ne peut utilement se prévaloir devant le
juge administratif d’une réponse donnée à une question écrite posée par un député, pour prétendre
que l’administration avait pris certains engagements, une réponse de cette nature ne pouvant
produire par elle-même aucun effet juridique ».
(1894) V. infra, nos 442-443.
(1895) Ph. MALAURIE, « Les réactions de la doctrine à la création du droit par le juge », Defrénois
1980, art. 32345, no 8.
(1896) Ex. : Cass. soc., 4 mai 1966, Bull. civ. IV, no 416 : ... « au surplus, le ministre du Travail a
admis dans des circulaires [...] » ; CA Limoges, 19 mars 1971, JCP G, 1972.II.17029 : « Il est
constant et a été confirmé dans plusieurs réponses ministérielles [...] ». Cette influence s’est surtout
manifestée dans le droit de la filiation (G. CHAMPENOIS, La loi du 3 janvier 1972 a-t-elle supprimé la
présomption pater is est quem nuptiæ demonstrant ?, JCP G, 1975.II.2686, spéc. no 41 : « On est
bien en présence d’une nouvelle forme de droit prétorien dans lequel les circulaires de la
Chancellerie font figure d’arrêts de règlement “au petit pied” »). Adde J.-M. OLIVIER, op. cit.,
spéc. nos 406 et s. ; C. BLUMAN, « L’application des circulaires administratives par le juge
judiciaire », AJDA 1972, p. 263.
(1897) Ex. : l’Instruction générale relative à l’état civil du 11 mai 1999 (JO 28 juill. 1999, p. 11272,
Annexe) méconnaît des dispositions du Code civil (v. obs. in RTD civ. 1999, p. 900).
(1898) Biblio. sélective : Les autorités administratives indépendantes, dir. C.-A. Colliard et
G. Timsit, PUF, 1988 ; Conseil d’État. Rapport public 2001. Jurisprudence et avis de 2000. Les
autorités administratives indépendantes, Doc. fr., coll. Études et documents, no 52, 2001, p. 253
et s. (qui recense 34 AAI dont 13 sont ainsi dénommées par la loi ou la jurisprudence). Pour un
tableau exhaustif tiré d’une réponse ministérielle (recensant 36 AAI) : JCP E, 2006, 1985 (adde
JCP E, 2006, 295). Sur la critique : M.-A. FRISON-ROCHE, « Les autorités administratives
incomprises », JCP G, 2010.1166.
(1899) Commission nationale de l’informatique et des libertés (L. 6 janv. 1978).
(1900) Comité consultatif national d’éthique (v. supra, no 30).
(1901) Commission des infractions fiscales (L. 29 déc. 1977).
(1902) Commission des clauses abusives (L. 10 janv. 1978).
(1903) Commission de la sécurité des consommateurs (L. 21 juill. 1983).
(1904) Commission consultative du secret de la Défense nationale (L. 8 juill. 1998).
(1905) Commission d’accès aux documents administratifs (L. 17 juill. 1978).
(1906) L. 19 juill. 1997.
(1907) Autorité de régulation des télécommunications (L. 26 juill. 1996).
(1908) Commission de régulation de l’électricité (L. 10 févr. 2000).
(1909) Autorité de contrôle prudentiel (C. mon. fin., art. L. et R. 612-1 et s. ; C. assur., art. L. 310-12
et s. ; C. mut., art. L. 510-1 et s. ; CSS, art. L. 951-1 et s.).
(1910) Autorité de régulation des jeux en ligne (L. no 2010-476, 12 mai 2010).
(1911) L’Autorité des marchés financiers a remplacé l’ancienne Commission des opérations de
bourse ou COB (ord. 28 sept. 1967) à la suite de la L. 1er août 2003 (cf. C. mon. fin., art. L. 621-1 s.).
(1912) L. no 2008-776, 4 août 2008 (ancien Conseil de la concurrence, né de l’ord. 1er déc. 1986).
Cf. C. com., art. L. 461-1 et s.
(1913) Conseil supérieur de l’audiovisuel (L. 17 janv. 1989).
(1914) L. 23 mars 1999.
(1915) Sur le danger de voir naître une morale d’État sous couvert des attributions consultatives du
Comité consultatif national d’éthique, v. supra, no 30.
(1916) Ex. : la COB n’avait pas la personnalité juridique ; mais l’AMF, qui lui a succédé, est une
« autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale » (C. mon. fin., art. L. 621-1).
(1917) V. infra, no 358.
(1918) Ex. : la clause de restitution en nature des cuves par les pompistes de marque fut qualifiée de
pratique anti-concurrentielle par le Conseil de la concurrence avant que la Cour de cassation ne
conclue à sa nullité (Cass. com., 18 févr. 1992, Bull. civ. IV, no 78). V. Droit des obligations, coll.
Droit civil.
(1919) CE, 30 oct. 2001, D. 2002, 1869, n. M. Audit : une délibération de la CNIL peut faire l’objet
d’un recours pour excès de pouvoir dès lors qu’elle « ne se borne pas à commenter les règles que la
CNIL a pour mission de mettre en œuvre, mais qu’elle ajoute à l’ordonnancement juridique ».
(1920) Sur la régulation et la Soft Law, v. supra, no 49.
(1921) Ph. NEAU-LEDUC, La réglementation de droit privé, Litec, 1998.
(1922) A.-M. PENNEAU, Les règles de l’art et normes techniques, th. Paris II, LGDJ, 1989 ;
Université de Liège, Commission droit et vie, Le droit des normes techniques et professionnelles
(colloque), Bruylant, 1993.
(1923) V. infra, no 374.
(1924) J.-M. AUBY, « Le pouvoir réglementaire des ordres professionnels », JCP G, 1973.I.2545.
(1925) Ex. : Cass. 1re civ., 29 oct. 1984, Bull. civ. I, no 285 : « La mission d’édicter des règles
déontologiques obligatoires pour l’ensemble des membres d’une profession (en l’espèce, celle des
commissaires-priseurs) dont le statut est légalement fixé, ne peut être reconnue qu’à une autorité
ayant reçu de la puissance publique un pouvoir exprès, qui ne peut résulter que de dispositions
explicites et non d’une interprétation extensive des textes ».
(1926) CE, Ass., 2 avr. 1943, Bouguen, D. 1944, 52, concl. M. Lagrange, n. J. Donnedieu de Vabres ;
JCP, 1944.II.2565, n. C. Célier ; S., 1944, III, 1, concl. M. Lagrange, n. A. Mestre.
(1927) CE, 29 juill. 1950, RDP 1951, p. 212, concl. R. Odent, n. M. Waline ; Dr. social 1950, p. 391,
n. J. Rivéro : les pouvoirs attribués à l’ordre des experts-comptables « trouvent une limite dans les
libertés individuelles qui appartiennent aux membres de l’ordre comme à la généralité des
citoyens ».
(1928) Sur le procédé, courant en droit du travail, de l’élaboration conventionnelle de la loi,
v. supra, no 285.
(1929) P. DURAND (Traité de droit du travail, Dalloz, t. I, avec le concours de R. Jaussaud, 1947,
no 140, p. 179) classe ce phénomène parmi « les principes généraux susceptibles de modifier la
hiérarchie des sources ».
(1930) Une convention ou un accord de branche est de niveau (professionnel) inférieur à une
convention ou un accord interprofessionnel ; un accord de branche local, départemental ou régional
est de niveau (territorial) inférieur à un accord ou une convention de branche national.
(1931) Le Conseil d’État considère qu’il s’agit d’un « principe général du droit du travail » (CE,
Avis, 22 mars 1973, Dr. social 1973, p. 514 ; CE, Ass., 8 juill. 1994, CGT, RJS 12/94, no 1386).
Comp. Cass. soc., 17 juill. 1996, JCP G, 1997.II.22798, n. J. Chorin ; Dr. social 1996, p. 1049,
concl. P. Lyon-Caen, n. J. Savatier. – 27 mars 2001, RJS 6/01, no 801 : « Vu le principe fondamental
en droit du travail, selon lequel, en cas de conflit de normes, c’est la plus favorable aux salariés
qui doit recevoir application ».
(1932) P. MORVAN, « L’articulation des normes sociales à travers les branches », Dr. soc. 2009,
p. 679 ; « L’articulation des conventions et accords collectifs. Essai d’“ostéopathie” juridique », in
L’articulation des normes en droit du travail, Economica, 2011, p. 7.
(1933) Biblio. sélective : L’inflation des avis en droit, dir. Th. Revet, Economica, 1998 : selon
l’inventaire (p. 129 et s.), l’inflation apparaît principalement en droit social, dans la bioéthique et
dans le droit de la vie familiale, en droit pénal, en procédure civile ou pénale, en droit de l’Union
européenne, en droit de la concurrence ou de la consommation.
(1934) Sur les autorités administratives indépendantes, v. supra, no 355.
(1935) Le Conseil d’État exerce une double activité, consultative et contentieuse. En outre, dans le
domaine contentieux, le législateur a introduit une procédure de saisine pour avis (v. supra, no 165)
étendue à la Cour de cassation (v. supra, no 163). La Cour de justice de l’Union européenne émet des
avis (appelés, à tort, « arrêts ») sur les recours préjudiciels (v. supra, no 344).
(1936) V. supra, no 222.
(1937) V. P. DEUMIER, obs. RTD civ. 2009, p. 81 et 487 ; H. MOYSAN, art. in JCP S, 2010, 109 (sur les
incertitudes soulevées par cette abrogation massive).
(1938) C. urb., art. L. 410-1, al. 5 : si une demande de permis de construire est déposée dans le délai
d’un an à compter de la délivrance d’un certificat d’urbanisme et respecte les dispositions
d’urbanisme mentionnées par ce certificat, « celles-ci ne peuvent être remises en cause ».
(1939) Sous l’Empire romain, le rescrit était une réponse fournie par le Conseil impérial à un
particulier, un fonctionnaire ou un magistrat ayant sollicité une consultation de l’Empereur sur un
point de droit à l’occasion ou en dehors d’un litige (rescriptum, du latin re-scribere, car la réponse
était inscrite au bas de la demande). Par leur autorité, les rescrits concurrencèrent les consultations
des jurisconsultes mais leur foisonnement entraîna des contradictions et donc leur déclin. B. OPPETIT,
« La résurgence du rescrit », D. 1991, chr. 105 (reproduit in Droit et modernité, PUF, 1998, p. 153).
(1940) Ex. : LPF, art. L. 80 A : « Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon
l’interprétation que l’administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires
publiées [...], elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation
différente » ; LPF, art. L. 80 B : cette garantie vaut aussi « lorsque l’administration a formellement
pris position sur l’appréciation d’une situation de fait au regard d’un texte fiscal » (v. aussi art.
L. 64 B, en matière d’abus de droit).
(1941) Le règlement no 90-07 « relatif à la procédure de rescrit de la Commission des opérations de
bourse » (homologué par arrêté du 5 juill. 1990) permet de consulter l’Autorité des marchés
financiers « sur une question relative à l’interprétation de ses règlements » (art. 1er) ; « dans la
mesure où le demandeur se conforme de bonne foi au rescrit », l’opération soumise ne peut donner
lieu à sanction ni poursuite (art. 8). Cf. B. OPPETIT, art. cit.
(1942) Le principal rescrit social est un avis de l’Urssaf portant sur l’assujettissement d’une
personne physique au régime général de la Sécurité sociale (CSS, art. L. 311-11) ou au régime social
des indépendants (CSS, art. L. 133-6-9 et R. 133-10-11) ainsi que sur les dispositifs d’exonérations
de cotisations (CSS, art. L. 243-6-3 et R. 243-43-2). Son champ a été progressivement élargi
(cf. P. MORVAN, Droit de la protection sociale, LexisNexis).
(1943) J. RAYNARD, « Domaine et thèmes des avis », in L’inflation des avis en droit, op. cit., p. 11.
(1944) Fr. ZÉNATI, « La portée du développement des avis », in L’inflation des avis en droit, op. cit.,
p. 101, spéc. p. 109. Ce caractère est, plus généralement, celui de la Soft Law et de la régulation :
v. supra, no 49.
(1945) Sur ces deux thèses, v., respectivement, infra, nos 367 et 394.
(1946) Biblio. sélective : A. LEBRUN, La coutume, ses sources, son autorité en droit privé, th. Caen,
1932 ; D. ACQUARONE, La coutume. Réflexions sur les aspects classiques et contemporains d’une
source du droit, th. Nice, 1987, p. 155 ; J. CARBONNIER, « La genèse de l’obligatoire dans l’apparition
de la coutume ; Scolie sur la Coutume », in Flexible droit, LGDJ, 10e éd., 2001, p. 118 et 131 ;
P. HAGGENMACHER, « Coutume », Arch. phil. dr., t. 35, « Vocabulaire fondamental du droit », Sirey,
1990, p. 27 ; nos spéciaux de Droits 1986, no 3 ; Société Jean Bodin, t. LI à LIV, 1990 et s., Bruxelles,
de Boeck ; P. DEUMIER, Le droit spontané, th. Toulouse, Economica, 2002, préf. J.-M. Jacquet.
(1947) Étymologie : du latin consuetudo, inis = coutume, dérivé de suesco, ere = s’accoutumer à,
lui-même dérivé de sui = ce qui est propre à un individu, à un groupe d’hommes (A. ERNOULT et
A. MEILLET, Dictionnaire étymologique de la langue latine, Klincksieck, 1939). Cf. aussi
« costume » = manière d’être extérieure.
(1948) Ph. FOUCHARD, « Les usages, l’arbitre et le juge », Études B. Goldman, Litec, 1982, p. 67,
spéc. p. 68 : « Aujourd’hui, la coutume proprement dite a perdu toute sa consistance en droit privé,
et c’est le terme d’usage qui est employé pour désigner l’ensemble du phénomène coutumier ».
Dans le même sens : B. OPPETIT, « Sur la coutume en droit privé », Droits 1986, no 3, « La coutume »,
p. 39 (reproduit dans Droit et modernité, PUF, 1998), cité infra, nº 377.
(1949) A. LEBRUN, art. préc., no 1.
(1950) Supra, no 27.
(1951) P. HAGGENMACHER, op. cit., p. 28 : « C’est cette métamorphose d’un Sein (l’être) en un Sollen
(le devoir) qui passe pour le mystère central du droit coutumier ».
(1952) Cf. HÉRODOTE, Histoires, II, 3 : « La coutume est la reine du monde ». L’apologue raconte
que Darius, le grand empereur perse, demanda aux Grecs, qui brûlaient leurs morts, à quel prix ils
consentiraient à manger leurs pères morts ; bien entendu, les Grecs refusèrent. Puis Darius demanda
aux Indiens, qui mangeaient leurs morts, à quel prix ils accepteraient de brûler leurs pères morts ;
bien entendu, les Indiens refusèrent.
(1953) B. PASCAL, Pensées, éd. Brunschwig, no 93 : « La coutume est une seconde nature qui détruit
la première. Mais qu’est-ce que la nature ? J’ai grand peur que cette nature ne soit elle-même
qu’une première coutume, comme la coutume est une seconde nature » ; no 287 : « Montaigne a
tort : la coutume ne doit être suivie que parce qu’elle est coutume, et non parce qu’elle est
raisonnable ou juste » ; no 230 : « La coutume fait toute l’équité par cette seule raison qu’elle est
reçue ; c’est le fondement mystique de son autorité. Qui la ramène à son principe l’anéantit. Rien
n’est si fautif que ces lois qui redressent les fautes ; qui leur obéit parce qu’elles sont justes, obéit
à la justice qu’il imagine, mais non pas à l’essence de la loi : elle est toute ramassée en soi : elle
est loi et rien davantage ». Pour Pascal, la seule justice est la justice divine ; aucune loi humaine
n’est juste ; la loi n’a de fondement qu’en elle-même ; ainsi en est-il de la coutume.
(1954) V. supra, no 13.
(1955) Sur les glossateurs et post-glossateurs, v. supra, no 91.
(1956) Sur l’École du droit historique allemande, v. supra, no 133.
(1957) Fr. GÉNY, Méthode d’interprétation et sources en droit privé positif. Essai critique, LGDJ,
2e éd., 1954 (1re éd., 1899, réédition LGDJ, 1996), t. I, nos 109 et s., p. 316 et s. En France, le
positivisme légaliste triomphant au XIXe siècle avait conduit les exégètes à bannir la coutume de leurs
traités. Gény la réhabilita en s’inspirant de la pensée de l’École historique allemande (sur la critique
historiciste puis scientifique, v. supra, no 135).
(1958) V. infra, no 392.
(1959) V. supra, no 87. Le pouvoir d’abroger les « mauvaises coutumes » permettait surtout
d’asseoir la primauté de la législation royale, impériale ou pontificale sur les coutumes concurrentes.
L’exigence d’un consentement du législateur qui confère seul force obligatoire à la coutume est de
plus en plus affirmée à partir du XVIe siècle, à mesure que s’accroissent le prestige de la loi et
l’absolutisme politique. Ce positivisme légaliste atteint son apogée au XIXe siècle partout en Europe
(le Code civil ignore la coutume et ne renvoie qu’à de rares « usages » ; le Code de commerce en
consacre plusieurs mais ne renvoie aux « usages » qu’à deux reprises).
(1960) V. infra, no 378.
(1961) Éd. LAMBERT, Études de droit commun législatif ou de droit civil comparé. Première série :
le régime successoral. Introduction. La fonction du droit civil comparé, t. I, Les conceptions
étroites ou unilatérales, 1903, p. 802. En sens inverse, a été soutenue la thèse de la nature
coutumière de la jurisprudence (v. infra, no 394) : un chassé-croisé.
(1962) Éd. LAMBERT, op. cit., p. 803.
(1963) Éd. LAMBERT, op. cit., p. 799. Partisan de la conception romano-canonique, Gény se refusa au
contraire à « reconnaître aux créations scientifiques, tant à celles émanées des auteurs, qu’à celles
sanctionnées par les tribunaux, la puissance de constituer, en elles-mêmes, un véritable droit
coutumier » (Fr. GÉNY, op. cit., no 123, p. 385).
(1964) Ex. : la contrepassation par le banquier des effets de commerce impayés à l’échéance, qui
résultait d’une coutume bancaire et commerciale, fut d’abord condamnée par la Cour de cassation
(Cass. req., 9 janv. 1838, Jur. Gén., vo Effets de commerce, no 220) avant qu’elle ne l’admît par un
revirement (Cass. civ., 28 juill. 1937, DP 1939, I, 10).
(1965) J. CARBONNIER, Droit civil. Introduction, PUF, 1re éd., 1955, rééd. 2004, no 137, p. 251 et
no 138, p. 253.
(1966) C. civ., art. 388-1-1 et 408, réservant « les cas dans lesquels la loi ou l'usage autorise le
mineur à agir lui-même ».
(1967) Sur l’histoire de la coutume : J. GAUDEMET, Les naissances du droit. Le temps, le pouvoir et
la science au service du droit, Montchrestien, 3e éd., 2001, p. 46 et s.
(1968) P.-C. TIMBAL, Introduction au congrès de Dijon sur la coutume, Mémoires de la Société pour
l’histoire du droit des institutions des anciens pays bourguignons, 1983.
(1969) V. supra, nos 86 et s.
(1970) L’altération vient ici de ce que le droit romain influença la rédaction des coutumes (v. supra,
no 93 in fine et les renvois en note).
(1971) V. supra, nos 103 et s.
(1972) Statut de la Cour internationale de justice, art. 38, § 1, b) : « La Cour [...] applique [...] : la
coutume internationale comme preuve d’une pratique générale, acceptée par les nations civilisées
comme étant le droit ». Cf. G. CAHIN, La coutume internationale et les organisations
internationales : l'incidence de la dimension institutionnelle sur le processus coutumier, Pedone,
2001 (droit international public).
(1973) Sur la lex mercatoria, v. infra, no 375.
(1974) G. TARDE, Les lois de l’imitation, Alcan, 1890, spéc. p. 268 : « L’imitation engagée dans les
courants de la mode n’est donc qu’un bien faible courant à côté du grand fleuve de la coutume ».
Sur la théorie de Tarde, v. infra, no 371.
(1975) Biblio. : E.-H. PERREAU, « Le rôle de l’habitude dans la formation du droit », RTD civ. 1911,
p. 229 ; G. ENDRÉO, « L’habitude », D. 1981, chr. 313 ; G. VIRASSAMY, « Regards sur le phénomène de
la réitération en droit privé français », D. 1989, chr. 279 ; Les habitudes du droit (dir. N. Dissaux et
Y. Guenzoui), Dalloz, 2015 (sur la coutume et les habitudes du législateur, du juge, des professeurs de
droit, etc.).
(1976) Étymologie : habitudo, inis = manière d’être, lui-même dérivé d’habeo, ere = se tenir (puis :
avoir).
(1977) 1er ex. : « Lorsqu’il se prononce sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, le juge
prend notamment en considération : 1º La pratique que les parents avaient précédemment suivie
[...] » (art. 373-2-11). 2e ex. : la notion de « résidence habituelle » dans le droit de la nationalité
(art. 21-7, 21-12, 21-17, 22-1, 23-5), en droit des personnes ou de la famille (art. 88, 285-1, 287,
311-15), en droit international privé (C. consom., art. L. 231-1), en droit fiscal (CGI, art. 150 C,
259...), en droit pénal (C. pén., art. 131-22, 227-7), etc.
(1978) Ex. : « Sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur
profession habituelle » (C. com., art. L. 121-1).
(1979) G. TARDE, Les lois de l’imitation, Alcan, 1890 ; Les transformations du droit. Étude
sociologique, 1893, Berg International, 1994. Juge d’instruction à Sarlat devenu professeur au
Collège de France, Gabriel Tarde (1843-1904) fonda la « psychologie sociale ». À la différence de
Durkheim – père de la sociologie – pour qui les faits sociaux sont déterminés par une « conscience
collective », Tarde affirma que l’« imitation » d’un modèle était inhérente à tout fait social
(religieux, politique, juridique, scientifique, économique, linguistique, artistique ou culturel). Elle se
propagerait comme une onde magnétique d’individu en individu, chacun imitant ou faisant exactement
le contraire du modèle qui le fascine, comme dans un état hypnotique. Adde M.-H. FRAYSSINET, « Les
lois de l’imitation chez Tarde ou un processus normatif atypique », RRJ 2003, p. 2311.
(1980) J. CARBONNIER, Flexible droit, LGDJ, 10e éd., 2001, p. 122 : du mythe de Cérès dériverait la
propriété individuelle du sol, du mythe d’Œdipe les règles de l’eugénisme, de l’histoire d’Isaac et
d’Ismaël l’infériorité du statut d’enfant adultérin, du conte de Cendrillon la protection des enfants du
premier lit. V. Droit civil illustré, no 103.
(1981) Les biologistes ont même conçu des explications génétiques, évolutionnistes, de type néo-
darwinien. Cf. J.-F. MALIGNON, Théorie générale des droits spontanés objectifs, th. Paris II, 2000,
spéc. t. I, qui dresse un inventaire des théories classiques en ce domaine (de type « holiste » ou
« individualiste ») et développe ensuite des analyses inspirées des sciences dures (théories
mathématiques des jeux, des automates...).
(1982) B. STARCK, « À propos des "accords de Grenelle". Réflexions sur une source informelle du
droit », JCP G, 1970.I.2363, spéc. no 22 : « Le temps n’est qu’un cadre, un contenant de la matière
qui forme la substance de la coutume. Cette substance, c’est la généralité des comportements
jointe à l’opinio necessitatis [...] Lorsqu’il s’agit d’états sociaux à évolution lente ou de
comportements relativement peu nombreux à l’intérieur d’une période limitée, il est bien naturel
d’élargir le contenant, de dilater le temps, de manière à permettre que par leur répétition, ces
pratiques et ces comportements puissent atteindre un niveau suffisant pour changer de nature et
passer ainsi de la situation subjective d’actes isolés à la règle de droit objectif gouvernant
désormais toutes les situations identiques. Mais il en est autrement lorsque les usages et les
comportements se propagent au rythme torrentiel des sociétés contemporaines ».
(1983) V. infra, no 374.
(1984) J.-L. SOURIOUX, « “Source du droit” en droit privé », Arch. phil. dr., t. 27, « “Sources” du
droit », Sirey, 1982, p. 33, spéc. no 5, p. 35 ; « Le concept de source du droit », Écrits du prof. J.-
L. Sourioux, LexisNexis, 2011, p. 207. – P. HÉBRAUD, « Le juge et la jurisprudence », Mélanges
P. Couzinet, Univ. sc. sociales Toulouse, 1974, p. 329, spéc. p. 331 : « La coutume, dont on n’a pu
découvrir, en droit civil, aucune manifestation significative, est en réalité, chez nous, à peu près
inexistante et l’on n’a pu lui reconnaître artificiellement un rôle important qu’en la nourrissant de
la jurisprudence au prix de la déformation et de l’altération de sa spécificité ».
(1985) R. LIBCHABER, L’ordre juridique et le discours du droit, LGDJ, 2013, spéc. nº 270, p. 361, qui
propose plusieurs explications à l’éclipse de la coutume (mainmise de l’État sur le droit,
inadaptation de la coutume à notre société...).
(1986) R. CAPITANT, « Le droit constitutionnel non écrit », Études Gény, Sirey, 1935, t. III, p. 1 ; du
même auteur, « La coutume constitutionnelle », RDP 1979, p. 959. Le général de Gaulle, en 1962 et
en 1968, avait décidé de soumettre à référendum des révisions de la Constitution, ce qu’elle ne
prévoyait pas. Une coutume constitutionnelle était-elle née du fait que le peuple avait, une fois,
approuvé cette initiative ? 1º) Oui : G. VEDEL, Le Monde, 27 juill. 1968 : « Il existe une morale
professionnelle du juriste. Elle lui commandait, en 1962, de dire que le recours direct au
référendum était inconstitutionnel ; elle lui commande encore, en 1968, de dire que les textes ne
souffrent pas une autre interprétation. Mais elle lui commande aussi de dire que, bonne ou
mauvaise, une pratique que sa réussite et l’assentiment populaire ont transformé en coutume a
modifié le droit constitutionnel de la France ». V. aussi D. LÉVY, « Le rôle de la coutume et de la
jurisprudence dans l’élaboration du droit constitutionnel », Mélanges M. Waline, LGDJ, 1974, t. I,
p. 39. 2º) Non : S. RIALS, « Réflexions sur la notion de coutume constitutionnelle », Rev. adm. 1979,
p. 266, qui impute la controverse à un manque de rigueur dans la définition de la coutume. V. BOUVIER,
« Le Conseil constitutionnel et la coutume », Droits 1986, no 3, « La coutume », p. 87, qui juge
coutumiers les « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République » (sur lesquels,
v. supra, no 337).
(1987) G. TEBOUL, Usages et coutume dans la jurisprudence administrative, LGDJ, 1989. Les
règles et principes non écrits en droit public, éd. Panthéon-Assas, 2000.
(1988) Secundum, en latin = selon, conformément à.
(1989) Biblio. : J.-L. SOURIOUX et P. LERAT, Le langage du droit, PUF, 1975 ; G. CORNU, Linguistique
juridique, Montchrestien, 3e éd., 2005. Adde J.-L. SOURIOUX, « Y a-t-il lieu de distinguer le langage
du droit et le langage juridique ? », Études Ph. Malinvaud, Litec, 2007, p. 577, repris in Écrits du
prof. J.-L. Sourioux, LexisNexis, 2011, p. 397 (le premier serait celui du droit positif, le second
celui de la doctrine) ; J.-F. WEBER, « Digressions sur le sens des mots à la Cour de cassation », in
Mélanges J. Boré, Dalloz, 2007, p. 499.
(1990) V. infra, no 440.
(1991) Ex. : Arrêté du 26 févr. 1901 : dans les examens ou concours dépendant du ministère de
l’Instruction publique, il ne sera pas tenu compte des fautes d’orthographe lorsqu’on aura usé des
tolérances indiquées dans une annexe. Par la suite, le Conseil supérieur de la langue française a
préconisé des « rectifications » de l’orthographe.
(1992) Ex. : circulaire du Premier ministre du 6 mars 1998 sur la féminisation des titres
(v. N. MOLFESSIS, obs. in RTD civ. 1998, p. 792).
(1993) H. BATIFFOL, « Observations sur la spécificité du vocabulaire juridique », in Mélanges
G. Marty, Univ. sc. sociales Toulouse, 1978, p. 35, spéc. p. 36 : « La légitimité d’un vocabulaire
spécifiquement juridique apparaît quand des faits surviennent dont la rareté relative dispense la
langue usuelle d’avoir un terme pour les désigner, alors qu’ils posent au juriste des problèmes qui
obligent celui-ci à “en parler” donc à avoir un terme pour les désigner. Considérons par exemple
le terme “Comourants” [...] » ; L. FOUGÈRE, La modernisation du langage juridique, EDCE, 1984-
1985, p. 120, met en garde contre la tendance à vouloir « rédiger les textes de lois et de décrets “en
langage contemporain” c’est-à-dire accessible au plus grand nombre de Français », au risque de
ne plus « s’exprimer complètement et convenablement ».
(1994) P. CATALA, « Linguistique et informatique juridique », Écrits G. Cornu, PUF, 1994, p. 79,
concl. p. 88.
(1995) La référence étant : Vocabulaire juridique, Assoc. Henri Capitant, dir. G. Cornu, PUF, coll.
Quadrige.
(1996) J.-L. SOURIOUX et P. LERAT, op. cit., no 1, p. 9 : « Et il est bien évident que le droit s’exprime
dans des idiomes nationaux. En ce sens, il n’y a pas de langue de droit. La question qui se pose, en
revanche, est celle de l’existence d’un langage juridique, en prenant “langage” au sens de “façon
particulière de s’exprimer” (Robert). Cette définition implique, pour qu’il y ait langage du droit,
l’existence d’usages spécifiques de la langue commune et d’éléments étrangers au système de
celle-ci. C’est précisément ce caractère composite qui explique en partie ce paradoxe : le droit est
un phénomène aussi largement social que la langue elle-même, mais qui suscite un sentiment
d’étrangeté chez le plus grand nombre ».
(1997) DICODEX. Réflexions sur les définitions juridiques codifiées, dir. J. Lefebvre, PUF, 2015.
(1997a) S. BALIAN, La définition dans la loi. Essai de linguistique juridique, La maison du
dictionnaire, 2014.
(1998) J.-L. SOURIOUX et P. LERAT, op. cit., no 15, p. 31 : « On peut appeler ainsi (séquences figées)
des unités dont le statut linguistique est celui du “discours répété”, c’est-à-dire des groupes
complexes ne se prêtant à aucune modification formelle ».
(1999) Ex. : « clause exorbitante du droit commun », « constitution de partie civile », « autorité de la
chose jugée », « commencement de preuve par écrit »... outre les locutions latines : de cujus, clause
rebus sic stantibus, entreprise in bonis, obligation propter rem, action ut singuli, etc. (cf. H. ROLAND
et L. BOYER, Locutions latines du droit français, Litec, 4e éd., 1998).
(2000) J. de DAMHOUDÈRE de BRUGES, L’enrichidion ou manuel ès causes crimineles, 1555 (adages
du droit criminel) ; A. LOYSEL, Institutes coutumières ou manuel de plusieurs et diverse règles,
sentences et proverbes, tant anciens que modernes du droit coutumier et plus ordinaire de la
France, nouv. éd. par M. Dupin et Éd. Laboulaye, 1846 (1re éd. en 1601 et rééd. commentée par E. de
Laurière en 1710) ; P. de l’HOMMEAU, Maximes générales du droit français, 1614 (505 adages
longuement commentés) ; Cl. POCQUET de LIVONNIÈRE, Règles du droit françois, 1730 (711 pages).
(2001) A. JOUANNEAU, Recueil de maximes et citations latines à l’usage du monde judiciaire, 1912
(4 000 adages et locutions) ; A. DAGUIN, Axiomes, aphorismes et brocards de droit français avec
indication de la source, 1926 (1 559 adages).
(2002) H. ROLAND et L. BOYER, Adages du droit français, Litec, 4e éd., 1999.
(2003) E.-H. PERREAU, Technique de la jurisprudence en droit privé, préf. Fr. Gény, 1923, t. I, p. 148
et s. – G. CORNU, Linguistique juridique, Montchrestien, 2e éd., 2000, nos 103 et s. ; Vº « Adages et
brocards », in Dictionnaire de la culture juridique, Lamy-PUF, 2003, p. 21.
(2004) J.-L. SOURIOUX et P. LERAT, op. cit., no 44, p. 69 : l’effet « Thémis » est l’impression subjective
produite sur le public par l’emploi de formules juridiques brèves, fixes et stéréotypées : « Parce que
le sens des mots n’est pas seulement lexical mais encore culturel, la façon dont ils sont reçus par
le public revêt une importance considérable [...]. Dans le langage du droit se manifeste un des
caractères les plus constants et les plus importants de l’activité juridique : la tendance à se
réduire en formules » ; no 45, p. 72 : « La concision de certains adages, et notamment l’absence de
déterminant, leur donne un air de maximes intemporelles [...]. Le fait que beaucoup de ces adages
soient en latin accentue cette impression d’intemporalité et de formules gravées dans le marbre ».
(2005) 1er ex. d’euphémisme ou de périphrases : la loi du 17 janvier 1975 sur l’interruption
volontaire de grossesse (IVG) légalise et organise l’avortement ; le législateur ouvre le texte sur une
profession de foi de pur verbalisme : « La loi garantit (sic) le respect de tout être humain dès le
commencement de la vie » (art. 1er). 2e ex. : afin d’imposer aux communes l’accueil des Tsiganes,
Gitans et Manouches itinérants, la loi gomme leur origine ethnique en les baptisant « gens du
voyage » (L. no 69-3, 3 janv. 1969) et même « personnes dites gens du voyage » (L. no 2000-614,
5 juill. 2000). En droit de la famille, les euphémismes sont encore plus nombreux, cf. L. LEVENEUR, in
Les mots de la loi, Economica, 1999, p. 11.
(2006) Sur les standards juridiques, v. supra, no 286.
(2007) C. civ., art. 590 (« usages des lieux ») et art. 674. Comp. art. 663, qui envisage des « usages
constants et reconnus ». Aujourd’hui, la matière rurale est régie par le Code rural, le Code forestier
et le Code de l’environnement qui se réfèrent quelquefois aux usages locaux.
(2008) Ex. : art. L. 134-5 (agents commerciaux), L. 145-14 (baux commerciaux) et L. 441-6
(concurrence).
(2009) Ex. : art. L. 145-47 et L. 511-15.
(2010) Ex. : art. L. 442-6, I, 5º.
(2011) Ex. : CGCT, art. L. 2223-28, al. 2 : « Dans les localités où les familles pourvoient
directement ou par les soins de sociétés charitables laïques, en vertu d’anciennes coutumes, au
transport ou à l’enterrement de leurs morts, les mêmes usages peuvent être maintenus, avec
l’autorisation du conseil municipal et sous la surveillance du maire ».
(2012) Cass. 1re civ., 1er déc. 2010, Rev. crit. DIP 2011, p. 610, n. V. Parisot ; JDI 2011, p. 589 (le
droit coutumier kanak peut donc valablement ignorer la prestation compensatoire en cas de divorce).
(2013) Cass. com., 14 oct. 1981, D. 1982, 301, note M. Vasseur ; JCP G, 1982.II.19815, note Chr.
Gavalda et J. Stoufflet ; 7 oct. 1987, Bull. civ. IV, no 213 ; D. 1988, 265, note M. Vasseur ; JCP G,
1988.II.20928, note J. Stoufflet : « Vu les articles 1134 [devenu art. 1103] du Code civil et 3 des
“Règles et usances uniformes relatives au crédit documentaire” ».
(2014) Biblio. : Les usages : l’autre droit de l’entreprise, dir. P. Mousseron, LexisNexis, 2014. –
A. KASSIS, Théorie générale des usages dans le commerce, LGDJ, 1984. – Ph. KAHN, Rapport
français de droit commercial, TAHC, t. XXXIV « Le rôle de la pratique dans la formation du droit »,
Economica, 1983, p. 237.
(2015) Ex. : Cass. com., 9 janv. 2001, Bull. civ. IV, no 9 : fait une exacte application des art. 1134 et
1135 (anciens, devenus art. 1103 et 1194) la cour d’appel qui soumet à un usage professionnel des
cocontractants exerçant dans le même secteur la même activité.
(2016) Ex. : Conv. de Vienne « sur les contrats de vente internationale de marchandises » du 11 avril
1980, art. 9, al. 2 : « 1. Les parties sont liées par les usages auxquels elles ont consenti et par les
habitudes qui se sont établies entre elles. 2. Sauf convention contraire des parties, celles-ci sont
réputées s’être tacitement référées dans le contrat et pour sa formation à tout usage dont elles
avaient connaissance ou auraient dû avoir connaissance et qui, dans le commerce international,
est largement connu et régulièrement observé par les parties à des contrats de même type dans la
branche commerciale considérée ».
(2017) Ph. FOUCHARD, « Les usages, l’arbitre et le juge », Études B. Goldman, Litec, 1982, p. 67 ;
P. BELLET, Le rôle des usages en matière d’arbitrage international devant la jurisprudence
française, Journées de la société de législation comparée, 1985, p. 231.
(2018) Article fondateur : B. GOLDMAN, Frontières du droit et « lex mercatoria », Arch. phil. dr., t. 9,
Sirey, 1964, p. 177. Adde B. OPPETIT, « La notion de source du droit et le droit du commerce
international », Arch. phil. dr. 1982, t. XXVII, p. 43 ; D. BUREAU, Les sources informelles du droit
dans les relations privées internationales, th. Paris II, 1992. La lex mercatoria vient du droit anglais
du XVIIe siècle (Old law merchant), un bricolage de concepts antérieurs. Cf. J. BART, « La Lex
Mercatoria au Moyen-Âge : mythe ou réalité ? », Mélanges Ph. Kahn, Litec, 2000, p. 10 ; D. de
RUYSSCHER, « La lex mercatoria contextualisée : tracer son parcours intellectuel », RHD 2012, p. 499.
(2019) V. supra, no 73, in fine.
(2020) V. par ex. : J.-D. BREDIN, « La loi du juge », Études B. Goldman, Litec, 1983, p. 15 ;
P. LAGARDE, « Approches critiques de la lex mercatoria », ib., p. 185 ; Lord MUSTILL, « The New Lex
Mercatoria : the first twenty five years », in Liber amicorum for Lord Wilberforce, Oxford,
Clarendon Press, 1987, p. 149.
(2021) V. infra, no 434.
(2022) P. DEUMIER, « La lex mercatoria entre ordre et désordre », Écrits Jean Foyer, Economica,
2008, p. 305, qui regrette une « surestimation de la perfection de la codification » doctrinale issue
des Principes Unidroit.
(2023) Fr. GÉNY, Méthode d’interprétation et sources en droit privé positif. Essai critique, LGDJ,
2e éd., 1954 [réédition LGDJ, 1996], t. I, nos 130 et s., p. 418 et s. (repris par : M. PÉDAMON, « Y a-t-il
lieu de distinguer les usages et coutumes en droit commercial ? », RTD com. 1959, p. 335). 1) La
formation d’un usage se réaliserait « nécessairement selon un processus conventionnel » (Pédamon)
– même en l’absence de contrat écrit – et à l’intérieur d’une profession, d’une entreprise ou d’une
corporation déterminée ; l’usage n’aurait qu’une valeur supplétive, les parties devant aussi prouver
son existence (comme tout élément de fait). 2) Au contraire, la coutume naîtrait en dehors de la
volonté des parties, par l’effet de l’opinio juris, et sa portée est générale ; elle peut avoir une valeur
impérative – le juge devant alors l’appliquer d’office, comme toute règle de droit – et même déroger
à la loi (v. infra, no 378). Subsiste cependant la possibilité d’une mutation d’un usage en coutume.
(2024) C. assur., art. L. 111-4 : « L’autorité administrative peut imposer l’usage de clauses types
de contrats » (en l’occurrence, le ministre de l’Économie et des Finances : C. assur., art. R. 111-2).
(2025) R.-J. DUPUY, « Coutume sage et coutume sauvage », Mélanges Ch. Rousseau, « La
communauté internationale », Pédone, 1974, p. 74, spéc. p. 76 : en droit international public naissent
« des coutumes sauvages dont l’excroissance soudaine puise sa racine plus dans les volontés
alertées que dans des esprits assoupis par une longue habitude ».
(2026) G. HÉNAFF, Les usages en droit des obligations, th. Bordeaux I, 1993, no 29, p. 44.
(2027) Cass. com., 9 janv. 2001, Bull. civ. I, no 8 : « selon un usage constant entre commerçants, les
prix s’entendent hors taxes, sauf convention contraire ». Par ce revirement (contra Cass. com.,
8 oct. 1991, Contrats conc. consomm. 1992, comm. 1, obs. L. Leveneur, affirmant au contraire qu’un
tel usage « ne peut être retenu que lorsque les parties ont entendu expressément l’adopter »), la
Cour détache l’usage commercial de la volonté des parties (v. aussi Cass. com., 9 janv. 2001,
Bull. civ. IV, no 9).
(2028) Sur la preuve d’un usage, v. supra, no 224.
(2029) V. supra, no 179.
(2030) Præter, en latin = à côté de, le long de.
(2031) V. supra, no 354.
(2032) J. DÉPREZ, « Pratique juridique et pratique sociale dans la genèse et le fonctionnement de la
norme juridique », RRJ 1997, p. 799.
(2033) J.-L. SOURIOUX, Recherches sur le rôle de la formule notariale dans le droit positif, th. Paris,
préf. J. Boulanger, Librairie du journal des notaires et avocats, 1967. – S. TORRICELLI-CHRIFI, La
pratique notariale, source du droit, thèse, Defrénois, Doctoriat et Notariat, t. 55, 2015.
(2034) V. Droit des personnes, coll. Droit civil.
(2035) Cass. 1re civ., 4 juin 2009, Bull. civ. I, no 115 ; RTD civ. 2009, p. 490, obs. P. Deumier. La
règle découlait de l’ordonnance royale de la Marine d’août 1681 ; abrogée par mégarde en 2006, elle
a été ressuscitée par cet arrêt sous les traits de la coutume.
(2036) Cass. 1re civ., 28 mars 2013, Bull. civ. I, no 62 ; RTD civ. 2014, p. 319, obs. L. Usunier (avec
les autres réf.).
(2037) Ex. : Cass. com., 13 mai 2003, D. Affaires 2004, 414, n. J.-M. Bahans et M. Menjucq, qui
reconnaît l’existence d’un « usage ancien et constant en Bordelais » applicable à la vente par
l’intermédiaire d’un courtier ; l’arrêt conclut que la cour d’appel a « légalement justifié sa
décision », sans se réfugier derrière le pouvoir d’appréciation des juges du fond.
(2038) Cass. soc., 3 déc. 1996, Bull. civ. V, no 412 : « Vu l’article 1134 [ancien] du Code civil et les
règles de la dénonciation des usages de l’entreprise ; [...] pour que cette dénonciation soit
opposable à l’ensemble des salariés concernés, il est nécessaire que cette décision de l’employeur
soit précédée d’une information, en plus de celle donnée aux intéressés, aux institutions
représentatives du personnel, dans un délai permettant d’éventuelles négociations ». Le visa de
l’ancien art. 1134 (devenu art. 1103) ne signifie pas que l’usage d’entreprise ait une nature
contractuelle mais qu’il a force de loi comme le contrat de travail.
(2039) * Cf. Cass. crim., 13 mars 2001, Kadhafi, cité supra, no 341.
(2040) * Cass. crim., 17 juin 2003, JCP G, 2003.II.10146 ; D. 2004, 92, note J. Daniel. Adde M.
MASSÉ, chron. in Rev. sc. crim. 2004, p. 894 : l’absence d’incrimination par la loi, sous la
qualification de crimes contre l’humanité, des tortures commises en Algérie (amnistiées par une loi
du 31 juill. 1968) ne peut être palliée par le recours à une coutume internationale.
(2041) V. supra, no 341.
(2042) Contra = à l’encontre de.
(2042a) La désuétude, entre oubli et mort du droit ?, dir. L. Guéraud, Cahiers de l'institut
d'anthropologie juridique, no 36, Pulim, 2013 (en histoire du droit).
(2043) Cour de cassation : Ex. : Cass. crim., 12 mai 1960, JCP G, 1960.II.11765, note R. Rodière :
« Les lois et règlements ne peuvent tomber en désuétude par suite d’une tolérance plus ou moins
prolongée, et ne peuvent être abrogés que par des dispositions supprimant expressément celles en
vigueur ou inconciliables avec elles ». Conseil d’État : CE, 18 nov. 1983, inédit : en l’espèce,
l’administration avait refusé de supprimer une ligne blanche continue sur une route ; jugé que la
« circonstance, à la supposer établie, que d’autres riverains de la voie publique bénéficieraient
d’une tolérance de franchissement n’est pas de nature à entacher d’illégalité la décision
attaquée ».
(2044) PORTALIS, Discours préliminaire, in Locré, t. I, p. 269-270 : « Si nous n’avons pas
formellement autorisé le mode d’abrogation par la désuétude ou le non-usage, c’est qu’il eût peut-
être été dangereux de le faire. Mais peut-on se dissimuler l’influence et l’utilité de ce concert
indélibéré, de cette puissance invisible, par laquelle sans secousse et sans commotion, les peuples
se font justice des mauvaises lois, et qui semblent protéger la société contre les surprises faites au
législateur, et le législateur contre lui-même ? ». V. aussi, cent ans plus tard, un auteur qui était déjà
un sociologue du droit : J. CRUET, La vie du droit et l’impuissance des lois, Flammarion, 1908,
p. 259 : « Ce serait une erreur de croire qu’une loi endormie pendant des années peut se réveiller
un jour, vivante et sans ride comme la Belle au Bois dormant ».
(2045) 1er ex. : C. trav., anc. art. L. 224-4 : « Les chefs d’établissement occupant plus de cent
femmes de plus de quinze ans peuvent être mis en demeure d’installer dans leurs établissements ou
à proximité, des chambres d’allaitement » (texte repris en substance à l’art. L. 1225-32 du nouveau
Code du travail, sauf la condition d’âge de 15 ans). 2e ex. : C. civ., anc. art. 55, décidant qu’à
l’occasion de la déclaration de naissance à l’officier d’état civil, « l’enfant lui sera présenté » (texte
inappliqué bien avant qu’il ne fût abrogé par la L. 20 nov. 1919).
(2046) G. TEBOUL, Usages et coutume dans la jurisprudence administrative, LGDJ, 1989, p. 156
et s.
(2047) J. CARBONNIER, Droit civil. Introduction, PUF, 1re éd., 1955, rééd. 2004, no 130 et no 138 :
« Le moment serait peut-être favorable à une révision de la position légaliste : depuis que la loi
est devenue si largement technocratique, la désuétude est un des rares moyens qui restent au
peuple pour la contrôler ».
(2048) B. OPPETIT, « Sur la coutume en droit privé », Droits 1986, no 3, « La coutume », p. 39, spéc.
p. 43 (reproduit dans Droit et modernité, PUF, 1998) : « Le problème ne soulève pas de difficultés
dans une perspective pluraliste, qui récuse le monopole étatique de production des règles du droit,
mais non pas la primauté du droit étatique sur d’autres règles de droit ».
(2049) Arrêt de principe : Cass. civ., 25 janv. 1841, S., 1841, I, 108 : « Si sous un régime où la
coutume était loi, l’usage pouvait abroger une loi, il n’en saurait être ainsi dans un temps où la loi
toujours écrite est rendue légalement notoire à tous ; la Cour de cassation, dont le devoir est de
veiller à l’exacte application de la loi et de la maintenir, ne peut que sanctionner un abus qui la
viole ouvertement ». En matière pénale, où règne le principe de légalité des délits : Cass. crim.,
4 août 1824, S. 1824, I, 409 : « on ne peut prescrire contre l’exécution des lois ». Sur l’histoire du
droit : A. DESRAYAUD, « Depuis quand les lois ne tombent-elles plus en désuétude en France ? », RRJ
2008, p. 41.
(2050) Cass. ch. réunies, 5 mars 1924, DP 1924, 1, 81. La Chambre criminelle de la Cour de
cassation avait condamné des bouchers en grève sur le fondement d’un édit de Turgot de 1776 ; les
chambres réunies la désavouèrent en invoquant que la raison d’être de cet édit avait disparu (selon
l’adage cessante ratione legis, cessat ipsa lex). Turgot avait supprimé le monopole des corporations
et établit la liberté du commerce ; devant le danger, provisoire, de troubles dans la distribution des
aliments, l’art. 6 de l’édit avait interdit « aux maîtres actuels des communautés de bouchers,
boulangers [...] » d’interrompre leur activité sans respecter un préavis d’un an. La Cour juge que « la
défense de l’art. 6, a manifestement pour but de ménager la transition entre l’ancien régime
d’industrie étroitement réglementée et un régime de liberté [...] au moins jusqu’à ce que la libre
concurrence ait suscité la fondation d’établissements nouveaux et écarté ainsi tout danger de
famine et de trouble ; par suite, cette disposition pénale, à supposer qu’elle n’ait pas été abrogée
par des lois postérieures, aurait cessé de produire ses effets à la disparition du dernier des
maîtres-bouchers existants lors de la promulgation de l’édit au mois de février 1776 ».
(2051) Cass. civ., 22 mars 1944, Rev. crit. DIP 1946, p. 107, note J.-P. Niboyet ; DC, 1944, I, 145
rap. et note P. Lerebours-Pigeonnière.
(2052) Cass. 1re civ., 28 janv. 2015, JCP G, 2015, 318, n. L. Gannagé ; RTD civ. 2015, p. 91, obs.
P. Deumier, p. 343, obs. L. Usunier et p. 359, obs. J. Hauser (avec les autres réf.), jugeant
« manifestement incompatible avec l'ordre public » international la loi marocaine qui s'oppose au
mariage entre personnes de même sexe. En 2012, l’opinion du juge était contraire mais, entretemps,
la loi du 17 mai 2013 a autorisé le mariage entre personnes de même sexe en France.
(2053) CEDH, 25 avr. 1978, Tyrer, Série A, no 26 ; CEDH, 1er févr. 2000, Mazurek c. France, cité
supra, no 350 (en note) qui condamne une disposition du Code civil français devenue anachronique.
Contra : CE, 2 juin 1999, Meyet, cité ci-après. Comp. Cons. const., 16 janv. 1982, Loi de
nationalisation, décis. no 81-132 DC, D. 1983, 169 ; JCP G, 1983.II.19788 : « Si, postérieurement à
1789 et jusqu’à nos jours, les finalités et les conditions d’exercice du droit de propriété ont subi
une évolution [...] ».
(2054) CEDH, 6 févr. 2003, Mamatkulov et Abdurasulovic, D. 2003, Somm., 2277.
(2055) CEDH, 4 févr. 2005, Mamatkoulov et Askarov c/Turquie : « Sans que la Cour soit
formellement tenue de suivre ses arrêts antérieurs, il est dans l'intérêt de la sécurité juridique et
de la prévisibilité qu'elle ne s'écarte pas sans motif valable de ses propres précédents. Cependant,
il est d'une importance cruciale que la Convention soit interprétée et appliquée d'une manière qui
en rende les garanties concrètes et effectives et non pas théoriques et illusoires. En outre, elle est
un instrument vivant à interpréter à la lumière des conditions actuelles » (point 121).
(2056) CE, 10 janv. 1930, Despujol, DP 1930, III, 16, note P.-L. J. ; S., 1930, III, 41, note R. Alibert.
Cf. R. CHAPUS, Droit administratif général, Montchrestien, 15e éd., 2001, no 890. La règle a été
consacrée par la L. no 2007-1787, 20 déc. 2007 (C. relations pub. admin, art. L. 243-2 :
« l'administration est tenue d'abroger expressément un acte réglementaire illégal ou dépourvu
d'objet, que cette situation existe depuis son édiction ou qu'elle résulte de circonstances de droit
ou de fait postérieures, sauf à ce que l'illégalité ait cessé »). S’applique en outre « le principe
selon lequel la légalité d'un acte administratif s'apprécie au regard des dispositions en vigueur à
la date de sa signature » (CE, 30 juill. 2003, Dr. adm. 8-9/03, comm. 162).
(2057) CE, 2 juin 1999, Meyet, RFDA 1999, p. 873 ; RDP 2000, p. 563, n. G. Desmoulin : la
L. 19 juill. 1977 qui interdit les sondages dans la semaine précédant un scrutin n’est pas contraire à
l’art. 10 Conv. EDH quoique la diffusion de sondages à l’étranger et sur internet la rende obsolète.
Mais la Cour de cassation statua en sens contraire : Cass. crim., 4 sept. 2001, JCP G, 2001.II.10623.
Le législateur est alors intervenu pour moderniser la loi de 1977 (L. no 2002-214, 19 févr. 2002).
(2058) La coutume internationale, en tant que partie du droit international public, devrait l’emporter
sur la loi interne. Mais le Conseil d’État se montre réservé (v. supra, no 341).
(2059) Cass. civ., 12 déc. 1815, S., chr. 1815-1818, 1, 122 : « Il y a eu tradition réelle [...] ce qui
suffit pour la validité des donations de cette nature ».
(2060) M. PLANIOL et G. RIPERT, Traité pratique de droit civil français, t. V, Donations et
testaments, par A. Trasbot et Y. Loussouarn, LGDJ, 2e éd., 1957, no 379, p. 501 : « La justification
qui semble la meilleure est celle qui considère le don manuel comme une institution autonome
d’origine coutumière. Le don manuel n’est plus une véritable exception au principe de
l’authenticité des donations. Il est une institution indépendante parallèle à celle de la donation
authentique ».
(2061) M. PLANIOL, note sous Pau, 13 mai 1890, DP 1890, II, 345 : « Le don manuel, sans preuve,
sans règles, sans contrôle, est dans notre droit un irrégulier, une sorte d’insoumis. [...] On peut
dire de lui qu’il a exercé de véritables ravages dans un code qui soumet la donation entre vifs à
des règles d’une sévérité rigoureuse. Il donne aux particuliers un moyen sûr et commode de
tourner toutes les barrières. Toute jurisprudence qui lui mettra des bornes doit être reçue comme
un bienfait ». V. aussi J.-E. LABBÉ, note sous Paris, 30 déc. 1881, S., 1883, II, 241 : les dons manuels
sont une pratique illégale qui viole l’art. 931, « un mal qu’on ne peut guérir et que l’on supporte ».
(2062) Cass. 1re civ., 31 janv. 1978, D. 1979, 182, note R. Savatier ; JCP G, 1979.II.19035, note
P. Nérac. La référence à l’édit d’Amboise est d’autant plus révélatrice que cet édit n’a jamais existé
(sur « la légende de l’édit de 1555 », cf. A. LEFEBVRE-TEILLARD, Le nom. Droit et histoire, PUF, 1990,
p. 96). La Cour de cassation s’y réfère pourtant ; elle cite aussi l’art. 211 de l’ordonnance
de janvier 1629, dit « Code Michaux » (Cass. req., 17 déc. 1860, DP 1861, I, 176), qui n’a pas plus
de valeur juridique. Quelles meilleures preuves de la force juridique de la coutume ? Adde
Cass. req., 16 nov. 1824, S., chr. 1822-1824, I, 561 : « c’est une maxime de notre droit public qu’au
roi seul il appartient d’autoriser les changements de nom ; cette maxime est fondée sur un usage
fort ancien, et cet usage prouvé par de nombreux exemples a d’autant plus d’autorité qu’il a son
origine dans l’édit d’Amboise de 1555 ».
(2063) Cass. 1re civ., 21 févr. 1978, D. 1978, 505, note R. Lindon ; JCP G, 1978.II.18836, concl.
Gulphe ; RTD civ. 1978, p. 900, obs. R. Savatier ; Defrénois 1978, art. 31764, no 35, p. 866, obs.
G. Champenois : les « souvenirs de famille [...] échappent aux règles de la dévolution successorale
et du partage établies par le Code civil ».
(2064) L’aîné mâle conservait les titres de la famille, les portraits de famille, les manuscrits et livres
notés du père commun, les marques de dignité des ancêtres, etc. (R.-J. POTHIER, Traité des
successions, Chap. II, Sect. I, art. II, § IX, in « Œuvres de Pothier » par Bugnet, t. VIII, p. 681 ;
LEBRUN, Traité des successions, 1775, L. IV, Chap. I, no 45, p. 255).
(2065) Riom, 9 janv. 1885, Gaz. Pal. 1885, I, 137 : « Il était d’un usage constant dans l’Ancien
droit, usage qui s’est perpétué même en l’absence de tout texte, de soustraire aux règles ordinaires
de transmission des biens certains objets qui, en raison de leur nature et des souvenirs qui s’y
rattachent, sont la propriété de la famille, et dont la conservation importe à l’honneur et la
dignité de cette famille ».
(2066) Cass. com., 20 avr. 1948, DP 1948, 375 ; S., 1948, I, 129 : « Vu [...] les principes
applicables en matière de compte-courant ». La Cour de cassation s’est toujours référée aux
« règles qui dominent en matière de compte » (Cass. req., 7 janv. 1828, DP 1828, I, 70), aux
« règles ordinaires du compte-courant » (Cass. civ., 19 nov. 1888, S., 1889, I, 159 ; DP 1889, 1,
409), aux « principes régissant le fonctionnement du compte-courant », etc.
(2067) Cass. req., 22 juin 1822, Jur. Gén., Vo Compte courant, no 99, p. 591 : « Les règles et usages
particuliers du commerce ont toujours autorisé la capitalisation des intérêts dans les comptes
courants » ; Cass. req., 12 mars 1851, DP 1851, I, 290, statuant « d’après les usages qui font loi
dans le commerce ».
(2068) M. VASSEUR et X. MARIN, Banques et opérations de banque. Les comptes en banque, Sirey,
1966, no 366, p. 627 : « Les règles du compte-courant méritent par excellence présentement le
qualificatif de règles coutumières au sens propre, c’est-à-dire de règles de même ordre que les
règles légales ».
(2069) Cass. req., 20 oct. 1920, S., 1922, I, 201.
(2070) V. supra, no 357.
(2071) Biblio. sélective. Monographies : M. CHRÉTIEN, Les règles de droit d’origine
juridictionnelle, leur formation, leurs caractères, th. Lille, 1936 ; M. SALUDEN, Le phénomène de la
jurisprudence. Étude sociologique, th. Paris II, 1983 ; E. SERVERIN, De la jurisprudence en droit
privé. Théorie d’une pratique, PU de Lyon, 1985 ; M. CAPPELLETTI, Le pouvoir des juges, trad.
R. David, Économica, 1990, spéc. p. 23 et s. ; P. MORVAN, Le principe de droit privé, th. Paris II,
Éditions Panthéon-Assas, 1999. Ouvrages collectifs : Études sur le rôle du juge, TAHC, t. V,
Dalloz, 1950 ; « Nature et rôle de la jurisprudence dans les systèmes juridiques », RRJ 1993, no 4 ;
« La jurisprudence », Arch. phil. dr., t. 30, Sirey, 1985 ; L’image doctrinale de la Cour de cassation
(colloque déc. 1993), Doc. fr., 1994 ; « La création du droit par le juge », Arch. phil. dr. 2007, t. 50,
Dalloz. Articles : Ph. MALAURIE, « La jurisprudence parmi les sources du droit », Defrénois 2006,
art. 38352, p. 476 ; P. MORVAN, « En droit, la jurisprudence est une source du droit », RRJ 2001/1,
p. 77 ; L. BACH, « La jurisprudence est-elle, oui ou non, une source du droit ? », Mélanges J. Héron,
LGDJ, 2008, p. 47 (il conclut que non) ; O. DUPEYROUX, « La doctrine française et le problème de la
jurisprudence source de droit », Mélanges G. Marty, Univ. sc. sociales Toulouse, 1978, p. 463 ; « La
jurisprudence, source abusive de droit », Mélanges J. Maury, Dalloz & Sirey, 1960, t. I, p. 349 ;
P. ESMEIN, « La jurisprudence et la loi », RTD civ. 1952, p. 17 ; P. HÉBRAUD, « Le juge et la
jurisprudence », in Mélanges P. Couzinet, Univ. sc. sociales Toulouse, 1974, p. 329 ; Ph. JESTAZ, « La
jurisprudence : réflexions sur un malentendu », D. 1987, chr. 11 ; « La jurisprudence, ombre portée du
contentieux », D. 1989, chr. 149 ; J. MAURY, « Observations sur la jurisprudence en tant que source du
droit », Études G. Ripert, LGDJ, 1950, t. I, p. 28 ; M. WALINE, « Le pouvoir normatif de la
jurisprudence », Études G. Scelle, LGDJ, 1950, t. II, p. 613.
(2072) Par exemple, lorsqu’un créancier (tel un bailleur) réclame en justice le paiement de sa dette
(un loyer) le plus souvent, aucune question de droit ne se pose. La décision judiciaire se borne à
vaincre la résistance du débiteur ; elle ne contribue pas à former une jurisprudence, d’autant moins
qu’elle émane d’une juridiction inférieure. Certains auteurs, toutefois, soutiennent que la masse des
décisions émanant des juges du fond pourrait enrichir le droit jurisprudentiel (v. infra, no 415 in
fine).
(2073) Étymologie : de jurisprudentia, æ = science du droit, dérivé de jus, juris = droit + prudens,
prudentis = prévoyant, puis « celui qui sait ».
(2074) Sur l’évolution de la jurisprudence en France, v. infra, nos 410 et s.
(2075) Les « actions de la loi » étaient des procédures extrêmement formalistes établies par le droit
législatif strict (le jus civile) auxquelles tout plaideur devait se soumettre pour défendre son droit
(mais seulement l’un de ceux reconnus par les actiones legis). L’adage « pas d’action, pas de droit »
résume cette conception de la réalisation des droits ; en droit français, tout au contraire, « pas de
droit, pas d’action ».
(2076) Albus, a, um = blanc.
(2077) J. GAUDEMET, Les institutions de l’Antiquité, Montchrestien, 5e éd., 1998, p. 166 : le préteur,
apparu en 367 av. J.-C., détenait l’imperium, soit un « pouvoir de commandement fondé sur la force
et le prestige du chef » lui conférant le droit de commander les armées et de rendre la justice.
(2078) Biblio. : J.-A. JOLOWICZ, « La jurisprudence en droit anglais. Aperçus sur la règle du
précédent », in « La jurisprudence », Arch. phil. dr., t. 30, Sirey, 1985 ; du même auteur, Droit
anglais, Dalloz, 2e éd., 1992, nos 53 et s. ; C. JAUFFRET-SPINOSI, « Le juge anglais », Droits 1988, no 9,
p. 57 ; CROSS, On precedent, Clarendon Press, Oxford, 4e éd., 1990.
(2079) William Blackstone (1723-1780) est l’auteur des Commentaries of the laws of England
(1765-1769).
(2080) Si les juges répugnent à déclarer ouvertement que leur prédecesseur a commis une erreur, ils
constatent volontiers que celui-ci « ne pouvait avoir à l’esprit » une situation telle que celle qui est
ensuite apparue (J.-A. JOLOWICZ, « Les décisions de la Chambre des Lords », RID comp. 1979,
p. 521, spéc. p. 525). Cette subtilité a permis de masquer un abandon de la règle du précédent
obligatoire.
(2081) Le précédent obligatoire (binding precedent, qui est une authoritative source) s’oppose au
précédent non obligatoire (persuasive source) lequel a diverses origines (obiter dicta, precedents de
juridictions subalternes, dissenting opinions ou opinions dissidentes émises par les juges mis en
minorité, doctrine...). La règle du précédent obligatoire est le pilier de la theory of case-law.
(2082) F. GRIVART DE KERSTRAT, « Common Law et analogie », RRJ 1996, p. 1087 ; H.-A. SCHWARZ-
LIEBERMANN VON WAHLENDORF, « Le juge “législateur”. L’approche anglaise », RID comp. 1999,
p. 1109.
(2083) Practice Statement (Judicial Precedent), (1966) 3 All ER 77 ; I WLR 1234. Cette
déclaration, lue par le Lord Chancellor (était-ce d’ailleurs en sa qualité de speaker [président] de la
House of Lords ou de membre du gouvernement ?), en dehors de toute instance judiciaire mais au
nom des Lords of Appeal in Ordinary (cf. J. FLAUSS-DIEM, « Le Practice Statement de 1966 et la règle
du précédent à la House of Lords », Justices 1997, p. 356) s’apparente fort à un arrêt de règlement au
sens du droit français. Elle prévoit que « Les Lords reconnaissent [...] qu’une adhésion trop
rigoureuse à la règle du précédent peut conduire à de l’injustice dans un cas déterminé et aussi
entraver exagérément l’évolution régulière du droit. Ils se proposent par conséquent de modifier
leur pratique actuelle, et, tout en tenant les décisions antérieures de cette chambre pour des
précédents obligatoires, de s’écarter d’une décision ancienne quand ils penseront devoir le faire
[...]. La présente déclaration n’entend pas porter atteinte à l’application de la règle du précédent
ailleurs que dan cette chambre ». Cette déclaration, qui rompt avec une jurisprudence datant de
1898, fut interprétée de façon extensive par la House of Lords. Plus encore, elle a reconnu après
l’adhésion de la Grande-Bretagne à la Communauté européenne en 1972 la primauté du droit et de la
jurisprudence communautaires. Le Constitutional Reform Act du 24 mars 2005 a créé une Supreme
Court du Royaume-Uni qui hérite de la compétence juridictionnelle de la House of Lords et en est
indépendante.
(2084) Malgré la « croisade » de Lord Denning (Master of the Rolls) qui entreprit dès 1967 de
convaincre la Court of Appeal de prendre à son tour quelques libertés à l’égard de la règle du
précédent (J. FLAUSS-DIEM, art. cit., spéc. p. 360) et s’insurgea contre une application trop rigide de
celle-ci qui imposerait de « suivre un mauvais précédent » (Lord DENNING, The discipline of law,
Londres, Butterworths, 1979, spéc. Conclusion, p. 314).
(2085) Sur les règles d’Equity, Droit civil illustré, no 5, v. aussi supra, no 43.
(2086) F. NIVET, « Équité et légalité », Justices 1998, no 9, p. 157. Adde : R. DAVID et C. JAUFFRET-
SPINOSI, Les grands systèmes de droit contemporain, Dalloz, 11e éd., 2002, nos 280 et s.
(2087) F. W. MAITLAND, The forms of action at Common Law, Oxford, 2e éd., 1948, p. 2 : « Nous
avons aboli les formes d’action mais elles nous gouvernent encore de leurs tombeaux ».
(2088) Selon le mot de Maitland, « l’Equity a cessé d’être l’équité » (v. A. TUNC, Aux frontières du
droit et du non-droit : l’Équité in « Jalons. Dits et écrits d’André Tunc », Société de législation
comparée, 1991, p. 391).
(2089) La règle a pour origine une opinion du président Marshall dans l’affaire Cohens v. Virginia en
1821 (19 US (6 Wheat.) 264 (1821)).
(2090) Au XVIIe siècle, lorsque la Common Law anglaise fut introduite par les colons en Amérique, la
règle du précédent n’avait pas encore atteint sa maturité en Angleterre (acquise vers 1775) d’où sa
faible autorité par la suite en droit américain. En outre, les pèlerins (pilgrims) de la Nouvelle-
Angleterre ne tardèrent pas à rejeter les institutions anglaises, quand ils devinrent des insurgés.
(2091) E. ZOLLER, « Le judiciaire américain, l’interprétation et le temps », Droits 2000, no 30, p. 97 ;
du même auteur, Vo « États-Unis (Culture juridique) », in Dictionnaire de la culture juridique, Lamy-
PUF, 2003, p. 653 s. (avec une bibliographie) ; Fr. MICHAUT, Vo « États-Unis (Grands courants de la
pensée juridique américaine contemporaine) », in Dictionnaire... (préc.).
(2092) Une « omniprésence ruminante » (cité par H.-P. GLENN, « Sur l’impossibilité d’un principe de
stare decisis », RRJ 1993, p. 1073).
(2093) V. infra, no 398.
(2094) The Common law, 1881, I. Sur le réalisme américain, v. aussi supra, nos 135 et 286.
(2095) A. et S. TUNC, Le droit des États-Unis d’Amérique. Sources et techniques, Dalloz, 1955, no 6,
p. 14.
(2096) Pour une comparaison des trois droits : A. et S. TUNC, préc., no 66, p. 183 et no 92, p. 239.
Adde : A. de TOCQUEVILLE, De la démocratie en Amérique, I, 2e partie, chap. VIII. Tocqueville montre
l’importance des juristes dans la société américaine : « Les légistes forment aux États-Unis une
puissance qu’on redoute peu, qu’on aperçoit à peine, qui n’a point de bannière à elle, qui se plie
avec flexibilité aux exigences du temps et se laisse aller sans résistance à tous les mouvements du
corps social ; mais elle enveloppe la société tout entière, pénètre dans chacune des classes qui la
composent, la travaille en secret, agit sans cesse sur elle et à son insu et finit par la modeler
suivant ses désirs ».
(2097) A. DE TOCQUEVILLE, loc. cit.
(2098) B. OPPETIT, « L’affirmation d’un droit jurisprudentiel », Droit et modernité, PUF, 1998, p. 65.
(2099) PORTALIS, Discours préliminaire, in Locré, t. I, p. 265. Adde, p. 258-259 : « Chez toutes les
nations policées, on voit toujours se former, à côté du sanctuaire des lois, et sous la surveillance
du législateur, un dépôt de maximes, de décisions et de doctrines qui s’épure journellement par la
pratique et par le choc des débats judiciaires, qui s’accroît sans cesse de toutes les connaissances
acquises, et qui a constamment été regardé comme le vrai supplément de la législation [...]. Il
serait, sans doute, désirable que toutes les matières pussent être réglées par des lois. Mais à
défaut de texte précis sur chaque matière, un usage ancien, constant et bien établi ; une suite non
interrompue de décisions semblables ; une opinion ou une maxime reçue, tiennent lieu de loi ».
(2100) Ass. constituante, séance du 18 nov. 1790 : « Ce mot est l’expression des tribunaux, dans
l’acception qu’il avait dans l’Ancien Régime, ne signifie plus rien dans le nouveau : il doit être
effacé de notre langue. Dans un État qui a une constitution, une législation, la jurisprudence des
tribunaux n’est autre chose que la loi ; alors il y a toujours identité de jurisprudence ». V. surtout
MONTESQUIEU, De l’esprit des lois, L. XI, Chap. 6 : il faut que « les juges de la nation » ne soient que
« la bouche qui prononce les paroles de la loi, des êtres inanimés qui n’en peuvent modérer ni la
force ni la rigueur [...]. Les jugements ne doivent jamais être qu’un texte de loi ». Si, dans l’Ancien
droit, les juges se qualifiaient souvent eux-mêmes de « bouche » ou « esclave de la loi », c’était sans
humilité : ils se considéraient comme les gardiens de la Loi divine, incarnée dans leurs jugements
et supérieure au roi lui-même... (M.-F. RENOUX-ZAGAMÉ, « “Royaume de la loi” : équité et rigueur du
droit selon la doctrine des parlements de la monarchie », Justices 1998, no 9, p. 17, spéc. p. 29).
(2101) Deux fictions commodes ont été employées à cette fin. Soit l’interprétation jurisprudentielle
était réputée s’incorporer à la loi : violer ou appliquer la jurisprudence, c’était violer ou appliquer la
loi. Soit le législateur était réputé avoir implicitement délégué ses pouvoirs au juge et ratifié son
œuvre créatrice (M. WALINE, « Le pouvoir normatif de la jurisprudence », Études G. Scelle, LGDJ,
1950, t. II, p. 613, spéc. no 18).
(2102) Fr. GÉNY, Méthode d’interprétation et sources en droit privé positif. Essai critique, LGDJ,
2e éd., 1954 [réédition LGDJ, 1996], t. II, no 149, p. 49 ; M. PLANIOL, Traité élémentaire de droit
civil, 6e éd., t. I, 1911, no 11, p. 4, texte et note 1 ; A. LEBRUN, La coutume, ses sources, son autorité
en droit privé, thèse, Caen, 1932, nos 207 et s., p. 215 et s. et nos 253 et s., p. 260 et s. ; L. JOSSERAND,
Cours de droit civil positif français, 3e éd., 1938, t. I, no 99, p. 78, qui, énumérant les « différents
visages de la coutume », conclut : « 4o) Mais surtout il y a la jurisprudence, qui n’est pas autre
chose que le droit coutumier moderne. [...] son rôle d’interprète doit fatalement tendre à celui de
créateur ; en fait la jurisprudence est devenue une des sources du droit qui est ce qu’elle veut
qu’il soit ». V. aussi, insistant sur l’assentiment tacite de la communauté des juristes, opinio juris
d’un nouveau type : J. MAURY, « Observations sur la jurisprudence en tant que source du droit »,
Études G. Ripert, LGDJ, 1950, t. I, p. 28, spéc. p. 43 et 48 ; Ph. JESTAZ, « La jurisprudence :
réflexions sur un malentendu », D. 1987, chr. 11. En sens inverse, Éd. Lambert rapprochait la coutume
de la jurisprudence (v. supra, no 367).
(2103) La jurisprudence, résultant de cas d’espèces, n’est pas assimilable à la loi qui procède par
règles abstraites et condamne parfois cette dernière (Ph. MALAURIE, « La jurisprudence combattue par
la loi », Mélanges R. Savatier, Dalloz, 1965, p. 603 et une version actualisée examinant aussi la loi
combattue par la jurisprudence, Defrénois 2005, art. 38203, p. 1205). Elle n’est pas non plus une
forme de coutume puisqu’elle contraint les assujettis sans se préoccuper de leur adhésion et se forme
parfois en un instant.
(2104) Bien que l’art. 4 (sur lequel, v. infra, no 404) soit toujours appelé au soutien de cette opinion,
la volonté de réconcilier la théorie des sources et la réalité factuelle hante davantage cette école de
pensée : « De cette liberté théorique du juge [de faire table rase de ce que d’autres ont jugé], on a
conclu que la jurisprudence n’était pas une source de droit [...] Nous ne sommes pas très sûrs que,
par rapport à la jurisprudence, ce problème des sources du droit ait été examiné avec un souci
suffisant de la réalité » (J. BOULANGER, Rép. civ., Vo Jurisprudence, 1re éd., no 22) ; « C’est trop
méconnaître la réalité que de refuser d’y voir une source de droit » (P. ESMEIN, « La jurisprudence
et la loi », RTD civ. 1952, p. 17, spéc. p. 20) ; peu importe la « dénégation de juristes rigoureux, qui
entendent rester fidèles dans leur analyse "aux principes " ; ils concéderont bien qu’en fait il
arrive que le juge statue "hors les règles légales" [...] Il est donc parfaitement exact de parler de
droit jurisprudentiel, de règles jurisprudentielles dès que l’on se préoccupe de faire apparaître le
fonctionnement effectif de l’ordre juridique, la vie juridique réelle » (Ch. EISENMANN, « La justice
dans l’État », in La justice, PUF, 1961, p. 11, spéc. p. 37-38) ; les auteurs classiques « témoignent
d’un irréalisme remarquable » (O. DUPEYROUX, « La jurisprudence, source abusive de droit »,
Mélanges J. Maury, Dalloz & Sirey, 1960, t. I, p. 349).
(2105) Fr. GÉNY, op. cit., t. II, no 146, p. 35 et no 149, p. 49 ; R. CARRÉ de MALBERG, Contribution à la
théorie générale de l’État, Sirey, t. I, 1920, no 246, p. 741 et s. ; G. RIPERT, Les forces créatrices du
droit, LGDJ, 1955, nos 159 et s., p. 383 et s. Avec des nuances : J. CARBONNIER, Droit civil.
Introduction, PUF, 1re éd., 1955, rééd. 2004, no 144, p. 273.
(2106) Ce schisme a été mis en évidence par : O. DUPEYROUX, « La doctrine française et le problème
de la jurisprudence source de droit », Mélanges G. Marty, Univ. sc. sociales Toulouse, 1978, p. 463
(l’auteur oppose le « formalisme » des classiques au « réalisme » des modernes).
(2107) En l’occurrence, le premier postulat, pluraliste et réaliste, implique nécessairement
l’admission de la jurisprudence parmi les sources du droit tandis que le second, moniste et juridique,
implique nécessairement son exclusion. La conclusion a été introduite en fraude dans le postulat de
départ.
(2108) P. ESMEIN, « La jurisprudence et la loi », RTD civ. 1952, p. 17, spéc. p. 19. Des auteurs
opposent de même « La négation de jure du pouvoir normatif » à « La reconnaissance de facto du
pouvoir normatif » (B. STARCK, H. ROLAND et L. BOYER, Introduction au droit, Litec, 4e éd., 1996,
nos 887 et s., p. 338 et s.). Cette distinction du fait et du droit rejoint celle du sein et du sollen, de
l’efficacité et de la validité, dans la pensée de Kelsen (A. VIALA, « De la dualité du sein et du sollen
pour mieux comprendre l’autorité de la chose interprétée », RDP 2001, p. 777).
(2109) Cass. 1re civ., 25 nov. 1997, Bull. civ. IV, no 328 ; RTD civ. 1998, p. 210, obs. N. Molfessis
(notaire) ; Cass. 1re civ., 15 déc. 2011, JCP G, 2012, 169 (avocat). Pour une rédaction plus sévère
imposant de prédire cette évolution : Cass. 1re civ., 14 mai 2009, JCP G, 2009, 94 ; RTD civ. 2009,
p. 725, obs. P. Deumier (exonérant l’avocat qui n’avait pas anticipé un « revirement de
jurisprudence » à l’origine d’une « évolution imprévisible du droit positif » ; il est toutefois
condamné pour avoir omis de « faire valoir une évolution jurisprudentielle acquise » depuis un
arrêt rendu un an plus tôt). V. déjà, Cass. civ., 21 juill. 1921, DP 1925, 1, 29 (un notaire ignorant une
jurisprudence constante et non controversée engage sa responsabilité). Comp. Cass. soc., 28 mai
1953, D. 1953, 735, note crit. P. Hébraud (« les juges ont pour mission d’interpréter la loi et les
erreurs d’interprétation qu’ils en donnent ne sauraient être imputées à faute à la partie » ayant
obtenu gain de cause en appel).
(2110) * Cass. 1re civ., 21 mars 2000, Le Collinet, D. 2000, 593 ; RTD civ. 2000, p. 592, obs. P.-Y.
Gautier et p. 666, obs. N. Molfessis (jurisprudence plusieurs fois réitérée).
(2111) Cass. soc., 31 janv. 2012, Bull. civ. V, nº 37.
(2112) Cass. soc., 15 déc. 2010, RJS 4/2011, no 359.
(2113) Cass., avis, 8 janv. 2016, cité infra, nº 163 (irrecevabilité d’une demande d’avis).
(2114) Cass. com., 8 févr. 2011, Bull. civ. IV, no 20 ; RTD civ. 2011, p. 493, obs. P. Deumier (avec les
autres réf.) : « les conséquences ainsi tirées du texte susvisé, qui s'écartent de celles retenues depuis
un arrêt du 24 février 1976, sont conformes à l'exigence de sécurité juridique au regard de
l'évolution du droit des sociétés ». Le revirement est assumé ouvertement mais la formule finale ne
dit rien de clair. – Cass. com., 15 janv. 2013, D. 2013, 342 : « l’arrêt rendu le 4 mai 2010 par la
Cour de cassation ne constitue ni un revirement, ni même l’expression d’une évolution
imprévisible de la jurisprudence ».
(2115) V. supra, no 348.
(2116) Notamment depuis : Cass. 1re civ., 17 févr. 1987, Bull. civ. I, no 58 : « il résulte de l’arrêt du
11 juin 1985 de la CJCE [...] ».
(2117) Ex. : Cass. com., 20 oct. 1998, Bull. civ. IV, no 253 (texte reproduit supra, no 346) : « Vu
l’article 55 de la Constitution ; il résulte de la jurisprudence de la CJCE [...] ».
(2118) Cass. 1re civ., 1er juill. 1997, Africatours, D. 1998, 104, note M. Menjucq ; JCP G,
1998.II.10170, note B. Fillion-Dufouleur ; Cass. 1re civ., 16 mars 1999, Rev. crit. DIP, 1999, p. 713.
(2119) CE, Ass., 6 févr. 1998, Tête ; Assoc. de sauvegarde de l’Ouest lyonnais, RJDA 5/98, no 669
et concl. H. Savoie, p. 383 ; AJDA, 1998, p. 458, chron. F. Raynaud et P. Fombeur ; JCP G,
1998.II.10109, note P. Cassia.
(2120) Cons. const., 6 oct. 2010, décis. no 2010-39 QPC (v. supra, no 334).
(2121) L’art. 7 Conv. EDH édicte le principe de légalité des délits et des peines.
(2122) CEDH, 26 avr. 1979, Sunday Times, Série A, no 30 (§ 47) ; CEDH, 15 nov. 1996, Cantoni,
Série A, no 20 ; JCP G, 1997.II.22836, note É. Fouassier et D. Vion ; Dr. pén. 1997, comm. 11, obs.
J.-H. Robert ; Rev. sc. crim. 1997, p. 646, note J.-P. Delmas Saint-Hilaire (§ 29, cité dans le texte).
Adde : « Aussi clair que le libellé d’une disposition légale puisse être, dans quelque système
juridique que ce soit, y compris le droit pénal, il existe immanquablement un élément
d’interprétation judiciaire » (CEDH, 22 nov. 1995, S. W. c/Royaume-Uni, Série A, no 335-B, § 36).
(2123) V. la jurisprudence citée infra, no 416.
(2124) J.-J. ROUSSEAU, Lettre à Mirabeau (26 juill. 1767) in Correspondance générale, A. Colin,
t. XVI, p. 157.
(2125) La collaboration entre le juge et le législateur a parfois lieu. Ainsi le pouvoir du juge de
réviser les clauses pénales « manifestement excessives » (art. 1152, al. 2) découle d’une loi du
9 juill. 1975 ayant mis en œuvre une suggestion du rapport annuel. V. Droit des obligations, coll.
Droit civil.
(2126) Cass. soc., 28 juin 1995, Bull. civ. V, no 219.
(2127) Rapport de la Cour de cassation 1991, Doc. fr., 1992, p. 35 : « Il serait donc souhaitable
que le mot “juridique” soit supprimé » dans les art. L. 412-16, L. 423-16 et L. 433-14 (anc.) du
Code du travail. Ce qui fut fait par l’arrêt précité.
(2128) Rapport de la Cour de cassation 1995, Doc. fr., 1996, p. 19.
(2129) Rapport de la Cour de cassation 1996, Doc. fr., 1997, p. 15.
(2130) Cass. crim., 6 mai 1997, JCP G, 1998.II.10056, note J.-Y. Lassalle ; D. 1998, 223, note
A. Cerf (écartant l’art. 546, al. 3, C. pr. pén. en tant que contraire au « principe de “l’égalité des
armes” tel qu’il résulte de l’exigence d’un procès équitable au sens de l’article 6 de la
Convention européenne des droits de l’homme », conformément aux termes du rapport précité).
(2131) V. aussi Cass. soc., 18 nov. 2003, Bull. civ. V, no 285 et la 8e suggestion du Rapport 2002 ;
Cass. 2e civ., 29 mars 2006, JCP S 2006, 1423, n. G. Vachet et la 2e suggestion du Rapport 2005.
(2132) Rapport annuel de la Cour de cassation 2008, Doc. fr., 2009 (au sujet des délégués
syndicaux supplémentaires).
(2133) L’art. 10, 2o de la L. no 99-515 du 23 juin 1999 renforçant l’efficacité de la procédure pénale
(JCP G, 1999.III.20110) supprime le dernier alinéa de l’art. 546, ce qui marque un retrait par rapport
à la suggestion formulée dans le rapport pour 1995 (en l’occurrence d’ouvrir pleinement la voie de
l’appel en matière contraventionnelle et non de la fermer à tous les intéressés).
(2134) Étymologie : de virer, lui-même dérivé de giro, girare = tourner. Comp. chavirer : tourner la
tête en bas. Trop de revirements feraient chavirer le droit.
(2135) Sur les revirements de la CEDH, de plus en plus francs, cf. J.-P. MARGUÉNAUD, obs. à la RTD
civ. 2002, p. 862 ; K. LUCAS-ALBERNI, Le revirement de jurisprudence de la CEDH, Bruylant, 2008.
(2136) P. VOIRIN, « Les revirements de jurisprudence et leurs conséquences », JCP G, 1959.I.1467.
(2137) Selon O. FOUQUET (président de section au CE), in RTD com. 2008, p. 642. H. Le BERRE, Les
revirements de jurisprudence en droit administratif de l’an VIII à 1998, LGDJ, 1999.
(2138) CJCE, 24 nov. 1993, Keck et Mithouard, aff. C. 267 et 268/91, Rec. CJCE, p. 6097, spéc.
p. 6131 : la prohibition communautaire des « restrictions quantitatives à l’importation ainsi que
toutes mesures d’effet équivalent » ne frappera plus désormais que des réglementations portant sur
la « commercialisation des produits ».
(2139) Ex. : en 1985, malgré les critiques, la chambre sociale abandonna (pour un temps) au pouvoir
souverain des juges du fond le contrôle de la cause réelle et sérieuse de licenciement pour réduire
l’engorgement de la chambre (Cass. soc., 10, 11 et 12 déc. 1985, D. 1986, 120, note crit. J. Boré ;
Dr. social 1986, p. 209. – 16 déc. 1986, Dr. social 1987, p. 89, concl. G. Picca).
(2140) Cass. 2e civ., 21 juill. 1982, D. 1982, 449, concl. Charbonnier, note Chr. Larroumet ; JCP G,
1982, II, 19861, note F. Chabas ; RTD civ. 1982, p. 606, obs. G. Durry. Adde : J.-L. AUBERT, « L’arrêt
Desmares : une provocation à quelles réformes ? », D. 1983, chr. 1
(2141) Cass. 2e civ., 6 avr. 1987, JCP G, 1987.II.20828, note Fr. Chabas ; D. 1988, 32, note Chr.
Mouly ; RTD civ. 1987, p. 767, obs. J. Huet.
(2142) Biblio. sélective. – Articles : P. MORVAN, « Le revirement pour l’avenir : humble adresse aux
magistrats ayant franchi le Rubicon », D. 2005, chr. 247 ; Chr. MOULY, « Le revirement pour
l’avenir », JCP G, 1994.I.3776 ; du même auteur, « Comment rendre les revirements de jurisprudence
davantage prévisibles ? », LPA, 18 mars 1994, no 33, p. 15 ; du même auteur, « Comment limiter la
rétroactivité des arrêts de principe et de revirement ? », LPA, 4 mai 1994, no 53, p. 9 ; A. et S. TUNC,
Le droit des États-Unis d’Amérique. Sources et techniques, Dalloz, 1955, nos 80 et s., p. 210 et s. ;
A. G. L. NICOL, Prospective overruling : a new device for English Courts ?, Modern Law Review
1976, p. 39.542. – Ouvrage collectif : Les revirements de jurisprudence, Litec, 2005 (rapport remis
le 30 nov. 2004 au Premier président de la Cour de cassation par un groupe de travail présidé par
N. Molfessis). V. spéc. le rapport général (p. 1 s.) et les rapports de droit comparé (H. MUIR WATT,
p. 53, sur la Common Law ; F. FERRAND, p. 81, sur le droit allemand) ; adde la critique de V. HEUZÉ,
JCP G, 2005, I 130.
(2143) V. Cass. 2e civ., 21 oct. 2004, Bull. civ. II, no 465 : « le juge se prononce en application du
droit objectif en vigueur au moment où il statue et la déclaration d'illégalité du texte
réglementaire sur lequel était fondée la clause litigieuse (clause-type réglementaire d’un contrat
d’assurance), prononcée à l'occasion d'une autre instance, s'imposait à lui » (l’arrêt écarte aussi
l’erreur, vice du consentement, et une atteinte aux droits acquis ou à l'objectif de sécurité juridique).
Cass. 1re civ., 2 juin 2004, Dr. adm. 6/04, comm. 116.
(2144) L’arrêt fondateur de la Cour suprême des États-Unis a été rendu dans l’affaire Great Northern
Railway v. Sunburst Oil & Refining Co (1932). Le prospective overruling est donc souvent
dénommé Sunbursting. Il est davantage pratiqué par les Cours suprêmes des États fédérés.
(2145) Cf. CJCE, 13 janv. 2004, Kühne et Heitz NV, aff. C. 453/00, Dr. adm. 2004, comm. 38 : le
principe de coopération (traité CE, art. 10 ancien) impose à une autorité administrative de
réexaminer une décision qui est devenue définitive à la suite d’un arrêt d’une juridiction nationale
fondé sur une interprétation du droit communautaire qu’un arrêt postérieur de la CJCE a jugé erronée.
V. aussi, dans le même but de donner un plein effet à la jurisprudence communautaire, l’art. L. 243-6
du Code de la sécurité sociale (prescription de l’action en répétition de l’indu).
(2146) CJCE, 8 avr. 1976, Defrenne, aff. 43/75, Rec. CJCE, p. 455 ; CJCE, 17 mai 1990, Barber,
aff. C. 262/88, Rec. CJCE, p. 1889. Adde le rappel des conditions posées in CJUE, 21 oct. 2010, aff.
C. 242/09, Albron Catering, nos 36-37.
(2147) L’ancien art. 231 traité CE ne le prévoyait que pour les règlements. V. par ex. CJCE, 25 févr.
1999, aff. C. 164 et 165/97, Rec. CJCE, p. 1139 : « les effets des règlements annulés seront
intégralement maintenus jusqu'à ce que le Conseil arrête, dans un délai raisonnable, de nouveaux
règlements ayant le même objet ».
(2148) Ex. : CEDH, 13 juin 1979, Marckx c. Belgique Série A, no 31 (§ 58) (vocation successorale
des enfants naturels).
(2149) CEDH, 14 janv. 2010, Atanasovski c. République de Macédoine, pt 38 : « the well-
established jurisprudence imposed a duty on the Supreme Court to make a more substantial
statement of reasons justifying the departure ».
(2150) O. DUBOS et F. MELLERAY, « La modulation dans le temps des effets de l’annulation d’un acte
administratif », Dr. adm. 2004, chr. 15. Ce pouvoir est expressément reconnu par l’art. 140 § 6 de la
Constitution autrichienne et l’art. 282 § 4 de la Constitution portugaise.
(2151) Cass. 1re civ., 9 févr. 1988 et Cass. com., 12 avr. 1988, JCP G, 1988.II.21026, note Chr.
Gavalda et J. Stoufflet : les effets de la nouvelle règle « ne remontent pas au-delà de la date
d’entrée en vigueur du décret » dont la Cour déduit ici une règle nouvelle. Ce décret a servi de
prétexte.
(2152) Depuis : Cass. 1re civ., 21 mars 2000 et 9 oct. 2001, cités supra, no 396, en note.
(2153) Cass. crim., 30 janv. 2002, Bull. crim., no 16 ; Dr. pén. 2002, comm. 43. Contra CA Toulouse,
13 nov. 2007, JCP G, 2008, II, 10114.
(2154) Sur ces aspects du droit anglais, v. supra, no 390.
(2155) * CE, Ass., 11 mai 2004, Association AC !, Dr. adm. 2004, no 115 ; Dr. soc. 2004, p. 766, note
X. Prétot ; RFDA 2004, p. 437, concl. C. Devys, note J.-H. Stahl et A. Courrèges : lorsque l’effet
rétroactif de l'annulation d’un acte administratif « est de nature à emporter des conséquences
manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont
pu se constituer lorsqu'il était en vigueur que de l'intérêt général pouvant s'attacher à un maintien
temporaire de ses effets », le juge administratif doit « prendre en considération, d'une part, les
conséquences de la rétroactivité de l'annulation pour les divers intérêts publics ou privés en
présence et, d'autre part, les inconvénients que présenterait, au regard du principe de légalité et
du droit des justiciables à un recours effectif, une limitation dans le temps des effets de
l'annulation ». Cet arrêt s’inscrit dans le feuilleton dit des « recalculés » de l’assurance chômage
(cf. P. MORVAN, Droit de la protection sociale, LexisNexis).
(2156) CJUE, 28 févr. 2012, aff. C-41/11, Inter-Environnement Wallonie. Cf. J.-Cl. BONICHOT, JCP
G, 2013, 2012, spéc. nº 25.
(2157) CE, 28 mai 2014, nº 324852, Assoc. Vent de Colère, JCP G, 2014, 1356, nº 9 et les réf. Adde
CE, 23 juill. 2014, nº 349717, Sté Octapharma, ibid. (qui accepte au contraire de moduler dans le
silence de l’arrêt de la CJUE, à l’égard d’une autre partie).
(2158) * Cass. 2e civ., 8 juill. 2004, Radio France D. 2004, 2956, qui soumet à une règle de
prescription inédite (précédemment condamnée) l’action civile fondée sur une atteinte à la
présomption d’innocence.
(2159) Cass. com., 13 nov. 2007, Bull. civ. IV, no 243 : « l'application immédiate, à l'occasion d'un
revirement de jurisprudence, de cette règle d'irrecevabilité, dans une instance en cours aboutirait
à priver le demandeur au pourvoi d'un procès équitable, en lui interdisant l'accès au juge ». –
Cass. 1re civ., 6 avr. 2016, nº 15-10552, Bull. civ. I, à paraître : « le juge doit procéder à une
évaluation des inconvénients justifiant qu'il soit fait exception au principe de la rétroactivité de la
jurisprudence et rechercher, au cas par cas, s'il existe, entre les avantages qui y sont attachés
et ses inconvénients, une disproportion manifeste ».
(2160) Cass. crim., 19 oct. 2010, trois arrêts, Bull. crim. nos 163, 164 et 165 : « l'arrêt n'encourt pas
la censure, dès lors que ces règles de procédure [le droit à l’assistance d’un avocat] ne peuvent
s'appliquer immédiatement à une garde à vue conduite dans le respect des dispositions législatives
en vigueur lors de sa mise en œuvre, sans porter atteinte au principe de sécurité juridique et à la
bonne administration de la justice » (sur ces raisons, cf. concl. M. ROBERT in Dr. pén. 2010, chr.
10).
(2161) * Cass. soc., 17 déc. 2004, Bull. civ. V, no 246 ; JCP G, 2005.I.166, no 11, obs. P. Morvan :
« l'exigence d'une contrepartie financière à la clause de non-concurrence [résultant d’un
revirement du 10 juill. 2002] répond à l'impérieuse nécessité d’assurer la sauvegarde et
l'effectivité de la liberté fondamentale d'exercer une activité professionnelle ».
(2162) Cass. soc., 26 janv. 2005, Dr. soc. 2005, p. 567, obs. A. Jeammaud.
(2163) *CE, 16 juill. 2007, Sté Tropic Travaux Signalisation, JCP G, 2007, II, 10156, n. M. Ubaud-
Bergeron et 10160, n. B. Seiller ; Dr. adm. 2007, comm. 142, n. Ph. Cossalter (sur les revirements
prospectifs, cf. Mélanges B. Genevois, Dalloz, 2009, art. F. Moderne, p. 805 et art. B. Seiller,
p. 977). L’arrêt ouvre un nouveau recours de pleine juridiction, au profit du concurrent évincé de la
conclusion d’un contrat administratif, qui ne pourra être « exercé qu'à l'encontre des contrats dont la
procédure de passation a été engagée postérieurement » à la date de la décision. Dans la ligne de
l’arrêt AC !, il permet aussi au juge de différer l’annulation éventuelle d’un tel contrat.
(2164) CE, 6 juin 2008, Dr. adm. 2008, comm. 118 ; JCP G, 2008, I, 191, no 7, obs. B. Plessix : le
Conseil d’État reproche à une cour administrative d’appel de n’avoir pas opéré elle-même le
revirement pour l’avenir ; ensuite, il voit dans ce procédé le moyen de préserver le « droit au
recours » du requérant alors que celui-ci n’aurait subi qu’un préjudice symbolique.
(2165) V. supra, nos 334 s.
(2166) Cons. const., 19 juin 2008, décis. no 2008-564 DC, Dr. adm. 2008, comm. 114, n. Ch. Fardet.
En l’espèce, une déclaration immédiate d’inconstitutionnalité aurait laissé subsister la violation de
l’exigence constitutionnelle de transposition des directives (sur laquelle v. supra, no 347) et exposé
la France à une astreinte de 345 millions d’euros infligée par la Commission européenne. Le Conseil
n’en est pas à son coup d’essai ; dans une réserve d’interprétation, il avait reporté dans le temps la
censure d’une loi contraire à une loi organique sous la condition qu’elle soit mise en conformité :
Cons. const., 15 déc. 2005, décis. no 2005-528 DC, consid. 24 (cf. chron. W. SABETE, RRJ 2007,
p. 719).
(2167) Depuis : Cons. const., 30 juil. 2010, décis. no 2010-14/22 QPC.
(2168) Ex. : Cass. 1re civ., 28 janv. 2015, JCP G, 2015, 361, n. P. Deumier.
(2169) Ex. : Cass. soc., 15 mars 2016, D. 2016, 864, n. P.-Y. Gahdoun.
(2170) Ex. : Cass. soc., 11 févr. 2015, JCP S, 2015, 1141, étude Ph. Coursier. Cette solution,
contraire aux termes très clairs de la censure constitutionnelle (Cons. const., 13 juin 2013, décis.
nº 2013-672 DC), avait été préconisée par le Conseil d’État (CE, avis, 26 sept. 2013, nº 387895).
(2171) Ex. : Cass. crim., 31 mai 2011, D. 2011, 2084, n. H. Matsopoulou (annulant immédiatement
des gardes à vue sur le fondement de l’art. 6 § 1 Conv. EDH alors que le Conseil constitutionnel avait
reporté l’abrogation de la loi française au 1er juillet 2011) ; Cass. 1re civ., 9 avr. 2013, D. 2013, 1106
et 2014, 689, n. M. Douchy-Oudot, jugeant contraire à l’art. 6 § 1 Conv. EDH une disposition légale
dont le Conseil avait différé l’abrogation au 1er janvier 2014.
(2172) Sur la portée de cette prohibition, v. infra, no 405.
(2173) Art. 6 § 1 : V., dans le contentieux relatif à l’indemnisation des victimes de transfusions
sanguines contaminées par le virus du SIDA, CEDH, 4 déc. 1995, Bellet c/France, JCP G,
1996.II.22648 ; D. 1996, 357 ; RTD civ. 1996, p. 509, obs. J.-P. Marguénaud. Selon la Cour, « ni le
texte de la loi du 31 décembre 1991 ni ses travaux préparatoires ne permettaient à l’intéressé de
se douter des conséquences juridiques que la Cour de cassation allait déduire de son acceptation
de l’offre » du fonds de garantie institué par cette loi, si bien que le requérant n’a « pas bénéficié
d’un droit d’accès concret et effectif devant un tribunal ». La Cour de cassation s’est inclinée
(Cass. 1re civ., 6 juin 2000, Bull. civ. I, no 179). Art. 7 (matière pénale) : CEDH, 22 nov. 1995, C. R.
et S. W. c/Royaume-Uni ; CEDH, Gde ch., 22 mars 2001, Streletz, Kessler et Krenz c/ Allemagne ;
CEDH 10 oct. 2006, D. 2007, 124 ; JCP G, 2007, 10092. J.-Chr. SAINT-PAU, « Le revirement
d'interprétation », in Histoire et méthodes d'interprétation en droit criminel, Dalloz, 2015, p. 175
(la prévisibilité s'apprécie au regard de critères subjectifs et objectifs).
(2174) CEDH, 14 janv. 2010, Atanasovski c/ « l’ex-République yougoslave de Macédoine »,
no 36815/03, § 38 : « the well-established jurisprudence imposed a duty on the Supreme Court to
make a more substantial statement of reasons justifying the departure ».
(2175) CEDH, 17 janv. 2006, Aoulmi c/France, JCP G, 2007, II, 10152.
(2176) V. supra, no 377. Adde CEDH, 18 déc. 2008, Unédic c. France, no 20153/04, § 74 : « les
exigences de la sécurité juridique et de la protection de la confiance légitime des justiciables ne
consacrent pas un droit acquis à une jurisprudence constante ». – CEDH, 14 janv. 2010,
Atanasovski, préc. : une évolution de jurisprudence n’est pas en soi contraire à une bonne
administration de la justice dans la mesure où l’absence d’une approche dynamique et évolutive
serait susceptible d’entraver tout changement ou amélioration. CEDH, 26 mai 2011, Legrand
c/France, no 23228/08, § 36 s.
(2177) V. supra, no 306.
(2178) P. MORVAN, « Le revirement pour l’avenir : humble adresse aux magistrats ayant franchi le
Rubicon », D. 2005, chr. 247, spéc. no 15. Sur la méthode suivie par le Conseil d’État (dans le
contentieux de l’annulation), cf. J. SAISON-DEMARS, « L’office du juge administratif face au temps »,
Dr. adm. 2012, Études, 4, spéc. nos 18 et s.
(2179) Sur le (prétendu) principe de sécurité juridique, v. supra, no 47.
(2180) V. supra, no 42.
(2181) Sur cette distinction, cf. P. MORVAN, art. cit.
(2182) V. toutefois CE, 6 juin 2008, préc., où le Conseil d’État reproche à une cour administrative
d’appel de n’avoir pas opéré elle-même le revirement pour l’avenir.
(2183) Cass. com., 6 déc. 1994, Bull. civ. IV, nos 365 et 367 ; Rev. proc. coll., 1995, p. 211, obs.
B. Soinne (alignement sur l’art. 115-1 nouv. L. 1985) ; Cass. com., 3 janv. 1995, Bull. civ. IV, no 1 ;
RTD com., 1995, p. 849, obs. A. Martin-Serf (alignement sur l’art. 55, al. 2, nouv. L. 1985) ;
Cass. com., 14 juin 1994, D. 1995, 105, rap. J.-P. Rémery, note F. Derrida (alignement sur l’art. 38
nouv. L. 1985, avant même l’entrée en vigueur de la loi de 1994).
(2184) Cass. Ass. plén., 9 juill. 1982, Law King, JCP G, 1983.II.19993, concl. J. Cabannes ;
Gaz. Pal. 1982, 2, 513, note J. Massip ; GAJ civ., nos 46-47 : « L’article 334-8 du Code civil, dans
sa rédaction antérieure à la loi du 25 juin 1982 [...] ne fait pas obstacle à la constatation [...] de
la possession d’état d’enfant naturel ».
(2185) Ex. : Cass. crim., 29 nov. 1994, Bull. crim., no 385 ; JCP E, 1995.I.450, no 2, obs. O. Godard.
(2186) Ex. : Cass. 1re civ., 29 janv. 2002, Bull. civ. I, no 12, étendant l’art. 1527, al. 2, C. civ. aux
enfants hors mariage nés d’une précédente liaison sur le fondement du principe de non-discrimination
(Conv. EDH, art. 14) alors qu’il eût suffi d’appliquer les dispositions transitoires de la L. 3 déc.
2001 ; surgit alors le risque d’une remise en cause vertigineuse des successions déjà liquidées et
partagées (cf. chron. de J.-P. MARGUÉNAUD et B. DAUCHEZ, Défrénois, 2002, art. 37615, p. 1366 ; adde
obs. J.-P. M. in RTD civ. 2011, p. 732).
(2187) Si le législateur a modifié la loi ancienne, c’est justement qu’il considérait qu’elle ne
contenait pas déjà la solution posée par la loi nouvelle. La Cour de cassation affirme le contraire.
(2188) Biblio. : Les divergences de jurisprudence, dir. P. Ancel et M.-Cl. Rivier, Public. de l’univ.
de St-Étienne, 2003 (sur les divergences entre les différentes juridictions suprêmes : Cour de
cassation, Conseil d’État, Conseil constitutionnel, CJCE, CEDH ainsi qu’en droits anglais, allemand
et suisse) ; P. DEUMIER, « Accès à la Cour de cassation et traitement des questions
jurisprudentielles », D. 2015, 172 (constatant que toutes les procédures existantes – saisine pour
avis, formation solennelle, chambre mixte ou assemblée plénière – n’ont pas permis de réduire les
divergences de jurisprudence ; par ailleurs, l’absence de motivation explicite des arrêts ne permet
pas d’identifier la question de droit en amont et l’existence d’une jurisprudence clairement établie en
aval ; la jurisprudence de la Cour de cassation est donc peu lisible et mal respectée par les juges du
fond).
(2189) La justice, comme l’erreur, est humaine. Un conseiller adepte de nouvelles expériences
(qu’une doctrine universitaire aura séduit) peut être à l’origine d’une jurisprudence dissidente. Tel fut
le cas, notamment, en matière de cautionnement, dans le débat concernant la portée de la formule
manuscrite requise par l’article 1326 du Code civil qui opposa, entre 1983 et 1989, la première
Chambre civile à la Chambre commerciale (v. Droit des sûretés, coll. Droit civil)). Tel fut encore le
cas lorsque la première Chambre civile mit en œuvre la théorie des ensembles contractuels en 1988,
se heurtant à l’hostilité de la troisième Chambre civile avant qu’une Assemblée plénière ne désavoue
cette innovation (v. Droit des obligations, coll. Droit civil).
(2190) Comment expliquer autrement que deux chambres (Cass. 1re civ. et Cass. com.) aient
accompli, chacune, deux revirements de jurisprudence, ralliant successivement la position de l’autre
et créant par ce chassé-croisé une nouvelle divergence inverse de la première (cf. P. MORVAN, note
sous Cass. com., 18 mai 1999, JCP E, 1999, p. 1127, à propos du rôle de la faute de l’appauvri dans
l’enrichissement sans cause) ?
(2191) CEDH, 20 oct. 2011, no 13279/05, Nejdet Şahin et Perihan Şahin c/Turquie, § 57.
(2192) Bundesarbeitsgericht ou BAG (droit du travail) à Erfurt ; Bundessozialgericht ou BSG (droit
public social) à Kassel ; Bundesfinanzhof ou BFH (droit fiscal) à Munich ;
Bundesverwaltungsgericht ou BverwG (droit administratif) à Leipzig. Le Bundesgerichtshof (BGH)
a son siège à Karlsruhe.
(2193) Sur le droit allemand, F. FERRAND, Cassation française et révision allemande, PUF, 1993.
(2194) En procédure civile, la question de savoir si le juge peut, doit ou ne doit pas relever d’office
les moyens de droit que les parties ont omis de soulever devant lui a longtemps été tranchée par les
cinq chambres civiles de la Cour de cassation, sans souci d’unité (J. VINCENT et S. GUINCHARD,
Procédure civile, Dalloz, 27e éd., 2003, nos 559 et s., p. 496 et s.). Ce « serpent de mer » du droit
processuel a trouvé son épilogue (Cass. Ass. plén., 21 déc. 2007, JCP G, 2008, II, 10006,
n. L. Weiller).
(2195) « Le renvoi devant l'assemblée plénière peut être ordonné lorsque l'affaire pose une
question de principe, notamment s'il existe des solutions divergentes soit entre les juges du fond,
soit entre les juges du fond et la Cour de cassation [...] » (C. org. jud., art. L. 431-6 ; anc. art. 131-
2, al. 2, issu de la L. 3 juill. 1967).
(2196) Ainsi, l’abus de fonctions du préposé en matière de la responsabilité civile des commettants
en témoigne, dans lequel la Chambre criminelle a triomphé d’un arrêt des chambres réunies et de
quatre arrêts de l’assemblée plénière ; aujourd’hui, l’unité est loin d’être rétablie (v. Droit des
obligations, coll. Droit civil).
(2197) C. org. jud., art. L. 431-5 (anc. art. L. 131-2, al. 1, issu de la L. 3 juill. 1967) : « Le renvoi
devant une chambre mixte peut être ordonné lorsqu’une affaire pose une question relevant
normalement des attributions de plusieurs chambres ou si la question a reçu ou est susceptible de
recevoir devant les chambres des solutions divergentes [...] ».
(2198) C. pr. civ., art. 1015-1 et s. : « la chambre saisie d’un pourvoi peut solliciter l’avis d’une
autre chambre sur un point de droit qui relève de la compétence de celle-ci. Les parties en sont
avisées » et « peuvent présenter des observations devant la chambre appelée à donner son avis ».
(2199) Paris, 9 nov. 2000, Dr. pén., 2001, comm. 57.
(2200) Respectivement : Cass. civ., 27 nov. 1844, DP 1845, I, 13 ; S., 1844, I, 811 (sous le visa des
art. 544 et 1382 ancien C. civ.) ; Cass. civ., 16 juin 1896, DP 1897, I, 433, note R. Saleilles, concl.
L. Sarrut ; S., 1897, 1, 17, note A. Esmein (sous le visa non moins fictif de l’art. 1384 ancien C. civ.).
V. Droit des obligations, coll. Droit civil.
(2201) Cass. req., 28 mars 1810, S., chr. 1809-1811, I, 170. Le Conseil d’État suivit la Cour de
cassation (CE, 27 janv. 1814 : Jur. gén., t. XX, Vo Effets de commerce, no 359, p. 185). La Chambre
criminelle avait déjà statué en ce sens dans le silence du Code d’instruction criminelle (Cass. crim.,
19 janv. 1809, S., chr. 1809-1811, 1, 8).
(2202) CE, Ass., 17 févr. 1950, Lamotte, Rec. CE, p. 110 ; RDP 1951, p. 478, concl. Delvolvé, note
M. Waline (l’art. 4, al. 2 de la L. 23 mai 1943 déclarait que l’acte déféré « n’était susceptible
d’aucun recours » ; pourtant, le recours pour excès de pouvoir est accueilli). Cass. crim., 17 mai
1984, JCP G, 1985.II.20332, note J. Borricand ; D. 1984, 536, note W. Jeandidier ; Gaz. Pal. 1984,
II, 779, rap. Cruvellié ; Rev. sc. crim. 1984, p. 804, obs. Cl. Lombois (écartant l’art. 16 L. 10 mars
1927 afin d’ouvrir le pourvoi en cassation contre l’avis d’extradition). Cass. 1re civ., 25 mai 1992,
Rev. arb., 1992, p. 91 et chron. M. de Boisséson, p. 3 ; JDI 1992, p. 974, note É. Loquin ; Rev. crit.
DIP, 1992, p. 699, note B. Oppetit (écartant l’art. 1507 C. pr. civ. en matière d’arbitrage). V. M.
MARTEAU-PETIT, « Les voies de recours prétoriennes en procédure civile », RRJ 1999, p. 703. La
jurisprudence communautaire a même ouvert au Parlement européen, au nom du principe de
l’équilibre institutionnel, un recours en annulation que ne prévoyaient pas les textes (CJCE, 22 mai
1990, aff. C. 70/88, Rec. CJCE, p. 1041 ; D. 1990, 445).
(2203) Cass. 1re civ., 21 févr. 1978, cité supra, no 378 (l’exception est née de la coutume).
(2204) Cass. req., 3 juill. 1817, S., chr. 1815-1818, I, 342 ; Cass. req., 27 nov. 1893, DP 1894, 1,
342 ; Cass. 3e civ., 12 oct. 1971, Bull. civ. III, no 486.
(2205) Cass. com., 6 juill. 1981, Bull. civ. IV, no 303. – 21 janv. 1997, Dr. sociétés 1997, no 55, obs.
Th. Bonneau : « Vu le principe fraus omnia corrumpit ». L’autonomie du principe a été consacrée en
droit administratif et fiscal : CE 27 sept. 2006, Sté Jeanfin, Dr. fisc. 2006, comm. 744, concl.
L. Olléon et chron. O. Fouquet, p. 65 ; adde chron. P. DIBOUT, JCP E, 2006, I, 2820.
(2206) O. TOURNAFOND, « Considérations sur les nouveaux arrêts de règlement », Mélanges
Ph. Jestaz, Dalloz, 2006, p. 547, spéc. p. 557, qui cite les arrêts Chronopost, Perruche
(extrapolation d’une règle légale) et Desmares, Lorthioir, Costedoat (violation de la loi)...
(2207) Cass. com., 20 avr. 1948, DP 1948, 375 ; S., 1948, 1, 129 : « Vu l’article 443 du Code de
commerce et les principes applicables en matière de compte-courant ».
(2208) Les formules les plus répandues sont : « Vu le principe de... », « Vu le principe selon
lequel... », « Vu les principes régissant (ou : qui régissent)... » et parfois « Vu la règle... ».
(2209) Exemples : « Vu le principe fraus omnia corrumpit » (Cass. com., 6 juill. 1981, Bull. civ. IV,
no 303) ; « Vu [...] les principes de l’action de in rem verso » (Cass. 1re civ., 19 janv. 1953, D. 1953,
234) ou « Vu les principes régissant l’enrichissement sans cause » (Cass. 1re civ., 15 mars 1967,
Bull. civ. I, no 102) ; « Vu le principe du respect des droits de la défense » (Cass. 1re civ., 7 déc.
1953, Bull. civ. I, no 353) ; « Vu le principe de l’autorité absolue de la chose jugée au criminel »
(Cass. 2e civ., 5 janv. 1956, JCP G, 1956.II.9140) ; « Vu le principe fondamental en droit du travail,
selon lequel, en cas de conflit de normes, c’est la plus favorable aux salariés qui doit recevoir
application » (Cass. soc., 17 juill. 1996, JCP G, 1997.II.22798) ; « Vu le principe “à travail égal
salaire égal” » (Cass. soc., 18 mai 1999, Bull. civ. V, no 213) ; « Vu les principes de l’arbitrage
commercial international » (Cass. 1re civ., 13 oct. 1981, Bull. civ. I, no 287 ; JDI 1982, p. 931, note
B. Oppetit) ; « Vu le principe de l’immunité de juridiction des États étrangers » (Cass. 1re civ.,
4 févr.1986, JDI 1987, p. 112 ; Rev. crit. DIP, 1986, p. 718) ; « Vu le principe de la séparation des
pouvoirs » (Cass. 2e civ., 23 oct. 1957, Bull. civ. II, no 642) ; « Vu le principe non bis in idem »
(Cass. crim., 6 janv. 1999, Bull. crim., no 6 : le premier arrêt de la chambre criminelle à recourir à un
visa de principe) ; « Vu le principe de la loyauté des preuves » (Cass. crim., 9 août 2006, Bull. crim.
no 202) ; « Vu le principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui »
(Cass. com., 20 sept. 2011, cité supra, no 246) ; « Vu [...] le principe selon lequel les lois spéciales
dérogent aux lois générales » (Cass. 1re civ., 9 mars 2016, cité infra, nº 456, in fine).
(2210) Sur les principes visés entre 1948 et 1997, cf. P. MORVAN, Le principe de droit privé, Éd.
Panthéon-Assas, 1999, nos 79 et s., p. 70 et s. ; du même, « Les visas de principe dans la
jurisprudence de la Cour de cassation, inventaire d’un droit “hors-la-loi” », LPA, 8 juin 2005, no 113,
p. 5 ; « Les principes généraux du droit et la technique de cassation » (conférence à la Cour de
cassation), in Droit et technique de cassation (CD Rom), coll. Droit in-situ, 2007 et sur
www.courdecassation.fr ; du même, « La production de principes par la Chambre sociale de la Cour
de cassation », in Les principes dans la jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de
cassation, Dalloz, coll. Thèmes & commentaires Actes, 2008, p. 5. Depuis 1997, 54 nouveaux
principes ont été visés, dont certains étaient déjà formulés comme tels par des arrêts dans des
chapeaux intérieurs.
(2211) H. LAUTERPACHT, Private law Sources and Analogies of International Law, Longmans, Green,
London, 1927. Adde la série d’articles, not. de L. LE FUR, A. VERDROSS, CH. DE VISSCHER et G. SCELLE,
aux Mélanges Gény, Sirey, t. III, 1935 ; BIN CHENG, General principles of law as Applied by
International Courts and Tribunals, 1953, réed. Grotius Publications, Cambridge University Press,
1994.
(2212) Article fondateur : P. REUTER, « Le recours de la CJCE à des principes généraux du droit »,
Mélanges H. Rolin, Pédone, 1964, p. 263 (v. biblio citée in P. MORVAN, Le principe de droit privé,
éd. Panthéon-Assas, 1999, no 93, p. 86).
(2213) B. JEANNEAU, Les principes généraux du droit dans la jurisprudence administrative, Sirey,
1954. Plus récemment, J.-M. MAILLOT, La théorie administrativiste des principes généraux du droit.
Continuité et modernité, Dalloz, 2003.
(2214) J. BOULANGER, « Principes généraux du droit et droit positif », Études G. Ripert, LGDJ, 1950,
t. I, p. 51 ; G. RIPERT, Les forces créatrices du droit, LGDJ, 1955, Chap. VI : « Les
principes juridiques » ; J. LÉAUTÉ, « Les principes généraux relatifs aux droits de la défense », Rev.
sc. crim. 1953, p. 47 ; B. OPPETIT, « Les principes généraux en droit international privé », Arch. phil.
dr., 1987, t. 32, Sirey, p. 179 ; G. LYON-CAEN, « Du rôle des principes généraux du droit civil en droit
du travail (première approche) », RTD civ.1974, p. 229 ; du même, « Les principes généraux du droit
en droit du travail », in Études G.-H. Camerlynck, Dalloz, 1978, p. 35. V. récemment, Les principes
en droit, Economica, 2008, spéc. p. 49, A. JEAMMAUD, « De la polysémie du terme “principe” dans les
langages du droit et des juristes » (l’auteur reste fidèle à la théorie romantique en assignant aux
principes deux caractères : la généralité et la « proximité avec les valeurs réputées inspirer l’ordre
juridique positif »).
(2215) J. CARBONNIER, Droit civil. Introduction, PUF, coll. Thémis, 1re éd., 1955, no 29, p. 101.
(2216) P. MORVAN, thèse et articles précités. Dans le même sens, S. CAPORAL, « Le recours aux
principes fondamentaux et généraux est-il un indice d’une référence au droit naturel ? », in Un
dialogue juridico-politique : le droit naturel, le législateur et le juge, PUAM, 2010, p. 491.
(2217) Selon la formule de J. LÉAUTÉ, art. cit. Sur la critique de l’approche idéaliste, v. aussi infra,
no 458 (à propos de l’analogie).
(2218) V. par exemple les arrêts cités supra, no 396 et no 402.
(2219) Pour l’adoption de cette analyse en doctrine, v. not. C. PÉRÈS, D. 2009, chr., 381 (sur le
principe de la liberté contractuelle).
(2220) P. LESCOT, « Les tribunaux face à la carence du législateur », JCP 1966, I, 2007.
(2221) Formellement, à partir de : CE, Ass., 26 oct. 1945, Aramu, Rec. CE, p. 213 ; DP 1946, 158,
note G. Morange ; S. 1946,3,1, concl. R. Odent : « il résulte [...] des principes généraux du droit
applicables même en l’absence de texte, qu’une sanction ne peut [...] être prononcée légalement
sans que l’intéressé ait été mis en mesure de présenter utilement sa défense ».
(2222) G. VEDEL et P. DELVOLVÉ, Droit administratif, PUF, t. I, 12e éd., 1992, p. 474.
(2223) Selon la formule de R. CHAPUS, « De la valeur juridique des principes généraux du droit et des
autres règles jurisprudentielles du droit administratif », D. 1966, chr. 99.
(2224) V. supra, no 350.
(2225) De façon générale, « le juge pénal ne peut accorder au prévenu le bénéfice du doute, au
motif que la loi visée par la prévention est obscure ou que son interprétation est incertaine, sans
méconnaître ses obligations et violer l’art. 4 C. civ. » (Cass. crim., 12 mars 1984, Bull. crim.,
no 102). Auparavant, la Chambre criminelle avait estimé au contraire que « l’incertitude ou
l’obscurité des textes doit aussi bien s’interpréter en faveur du prévenu que l’incertitude sur les
faits » (Cass. crim., 5 juill. 1900, S., 1903, 1, 549).
(2226) Il s’agit des magistrats composant les juridictions d’attribution (conseils de prud’hommes et
tribunaux de commerce). Par ailleurs, l’art. 1er L. 20 avr. 1932 prévoit que les décisions définitives
rendues par les juridictions administratives et judiciaires présentant une « contrariété conduisant à
un déni de justice » peuvent être déférées au Tribunal des conflits.
(2227) V. supra, no 191.
(2228) Cass. soc., 25 janv. 2005, D. 2005, 1540 ; JCP G, 2006, II, 10185.
(2229) PORTALIS, séance du 23 juill. 1801 devant le Conseil d’État : P.-A. FENET, Recueil complet des
travaux préparatoires du Code civil, t. VI, 1827, p. 15 : « Cet article a pour objet d’empêcher les
juges de suspendre ou de différer arbitrairement leurs décisions par des référés au législateur ».
(2230) P. HÉBRAUD, « Le juge et la jurisprudence », Mélanges P. Couzinet, Univ. sc. sociales
Toulouse, 1974, p. 329, spéc. nos 3 et 4, p. 333-334.
(2231) P. HÉBRAUD, op. cit., no 4, p. 335.
(2232) PORTALIS, ib., p. 359-360 : « Il est nécessairement une foule de circonstances dans
lesquelles un juge se trouve sans loi. [...] Rien ne serait plus puéril que de vouloir prendre des
précautions suffisantes pour qu’un juge n’eût jamais qu’un texte précis à appliquer. Pour prévenir
les jugements arbitraires, on exposerait la société à mille jugements iniques, et, ce qui est pis, on
l’exposerait à ne pouvoir plus se faire rendre justice ; et avec la folle idée de décider tous les cas,
on ferait de la législation un dédale immense, dans lequel la mémoire et la raison se perdraient
également. [...] Pour que les affaires de la société puissent marcher, il faut donc que le juge ait le
droit d’interpréter les lois et d’y suppléer ».
(2233) L’art. 3 du décret des 27 nov.-1er déc. 1790 (qui ne fut abrogé que par la L. no 2007-1787,
20 déc. 2007) avait défini étroitement la mission du Tribunal de cassation : « Il annulera toutes
procédures dans lesquelles les formes auront été violées et tout jugement qui contiendra une
contravention expresse au texte de la loi ». Mais le Tribunal puis la Cour de cassation rompirent ces
chaînes en inventant, contra legem, d’autres cas d’ouverture à cassation (v. supra, no 179).
(2234) Sur cet âge d’or de la jurisprudence, v. infra, no 413.
(2235) Développements in P. MORVAN, « En droit, la jurisprudence est une source du droit », RRJ
2001, p. 77. Pour une amélioration de la « théorie des trois plans », cf. E. VERGÈS, La catégorie
juridique des principes directeurs du procès judiciaire, th. Aix-Marseille III, 2000.
(2236) C. pr. civ., art. 12 : « Le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont
applicables ». C. pr. civ., art. 604 : « Le pourvoi en cassation tend à faire censurer par la Cour de
cassation la non-conformité du jugement qu’il attaque aux règles de droit ». L’ancien art. 1020
C. pr. civ. (« L’arrêt [qui censure] vise le texte sur lequel la cassation est fondée ») n’avait pas été
respecté puisque la Cour de cassation vise des principes (v. supra, no 403) ; mais, depuis le
D. 22 mai 2008, l’art. 1020 mentionne « la règle de droit... » non plus « le texte... ».
(2237) V. supra, no 402.
(2238) L’abrogation de l’art. 127 ancien du Code pénal, qui punissait pour crime de forfaiture les
magistrats qui s’étaient « immiscés dans l’exercice du pouvoir législatif, soit par des règlements
contenant des dispositions législatives, soit en arrêtant ou en suspendant l’exécution d’une ou de
plusieurs lois », a accentué cette liberté.
(2239) Biblio. sélective sur les arrêts de règlement : G. DETEIX, Les arrêts de règlement du
Parlement de Paris, th. Paris, 1930 ; Ph. PAYEN, Les arrêts de règlement du Parlement de Paris au
XVIIIe siècle : dimension et doctrine (thèse), PUF, 1997 ; A. AUDINET , « Faut-il ressusciter les arrêts
de règlement ? », in Mélanges J. Brethe de la Gressaye, éd. Brière, 1967, p. 99 ; B. BEIGNIER, « Les
arrêts de règlement », Droits 1989, no 9, p. 45 ; O. TOURNAFOND, « Considérations sur les nouveaux
arrêts de règlement », Mélanges Ph. Jestaz, Dalloz, 2006, p. 547 ; R. LIBCHABER, « Les articles 4 et 5
du Code civil ou les devoirs contradictoires du juge civil », Le titre préliminaire du Code civil,
Economica, 2003, p. 143.
(2240) RŒDERER, séance du 23 juill. 1801 devant le Conseil d’État in Fenet, t. VI, 1827, p. 22-23 :
« La circonspection n’est pas naturelle aux juges, surtout lorsqu’ils sont éclairés et qu’ils ont le
sentiment de leurs lumières ».
(2241) Portalis présente ainsi l’art. 5, après l’exposé de l’art. 4 : « Un juge est associé à l’esprit de
législation : mais il ne saurait partager le pouvoir législatif. Une loi est un acte de souveraineté,
une décision n’est qu’un acte de juridiction ou de magistrature. Or, le juge deviendrait législateur,
s’il pouvait, par des règlements, statuer sur les questions qui s’offrent à son tribunal. [...] Il y
aurait bientôt autant de législations que de ressorts. [...] L’esprit de judicature, qui est toujours
appliqué à des détails, et qui ne prononce que sur des intérêts particuliers, ne pourrait souvent
s’accorder avec l’esprit du législateur, qui voit les choses plus généralement et d’une manière plus
étendue et plus vaste » (op. cit. t. VI, p. 361).
(2242) Ib.
(2243) Cass. 2e civ., 16 juin 1955, Bull. civ. II, no 346 ; RTD civ. 1955, p. 696, obs. P. Hébraud. Cet
arrêt marque le renouveau de l’art. 5, C. civ. qui n’avait été appliqué que six fois entre 1897 et 1933
et aucunement entre 1934 et 1955 (H. SINAY, « La résurgence des arrêts de règlement », D. 1958, chr.
85).
(2244) Cass. req., 1er févr. 1882, DP 1882, I, 113.
(2245) Cass. req., 19 juin 1929, DH 1929, 377.
(2246) P. HÉBRAUD, « Le juge et la jurisprudence », Mélanges P. Couzinet, Univ. sc. soc. Toulouse,
1974, p. 329, spéc. no 10, p. 339.
(2247) 1er ex. en droit civil : Cass. 1re civ., 20 mai 1969, D. 1969, 429 ; RTD civ. 1969, p. 607, obs.
P. Hébraud (étendant aux enfants naturels simples l’action alimentaire ouverte par l’ancien art. 342,
al. 2, C. civ. aux enfants adultérins). 2e ex. en droit pénal : Cass. crim., 9 janv. 1958, D. 1958, Somm.
79 ; Gaz. Pal. 1958.I.220 : la chambre criminelle « ne peut que constater l’irrecevabilité de ce
pourvoi » à défaut de qualité pour agir du demandeur « tout en constatant que c’est à tort que la
cour d’appel a refusé de faire application de l’art. 224 C. pén. » ; l’obiter dictum sert à critiquer
une décision inattaquable des juges du fond. V. aussi supra, no 336 et les obs. P. Deumier, RTD civ.
2010, p. 503 (avec les réf. en droit constitutionnel). S. TOURNAUX, « L’obiter dictum de la Cour de
cassation », RTD civ. 2011, p. 45.
(2248) 3e ex. en droit international privé : l’abandon du « pouvoir de révision » des jugements
étrangers par le juge français lorsqu’il accorde l’exequatur fut annoncé par un obiter dictum dans un
arrêt où la question de la révision ne se posait pas : le juge doit exercer son contrôle sur la décision
étrangère « en dehors de toute révision au fond, toujours exlue » (Cass. 1re civ., 8 janv. 1963, aff. du
Roi Carol, D. 1963, 341, note Ph. M. ; JCP G, 1964.II.3470, note Ph. F. ; Rev. crit DIP, 1963, p. 109,
note G. H.). 4e ex. en droit social : « En l’absence de refus par le salarié d’une mise à pied
disciplinaire, laquelle n’a pas pour effet de suspendre l’exécution du mandat de représentant du
personnel, l’employeur n’est pas tenu de mettre en œuvre la procédure » spéciale de licenciement
(Cass. soc., 23 juin 1999, JCP G, 1999.II.10216, note F. Duquesne). Cet obiter dictum, sans rapport
avec le litige, exprime ou annonce un revirement.
(2249) L. no 91-491 du 15 mai 1991 (C. org. jud., art. L. 441-1 et s., art. R. 441-1), pour les
juridictions civiles ; L. organique no 2001-539 du 25 juin 2001 (C. pr. pén., art. 706-55 et s.), pour
les juridictions pénales.
(2250) C. org. jud., art. L. 441-3 : « L’avis rendu ne lie pas la juridiction qui a formulé la
demande » ni les chambres de la Cour de cassation statuant au contentieux qui viendraient à être
saisies du même type de litige.
(2250a) Le droit mis en barème, dir. I. Sayn, Dalloz, 2014.
(2251) M. SALUDEN, « La jurisprudence, phénomène sociologique », Arch. phil. dr., t. 30, « La
jurisprudence », Sirey, 1985, p. 191, spéc. p. 194.
(2252) Ex. : Cass. crim., 3 nov. 1955, D. 1956, 557, note R. Savatier.
(2253) Ex. : Cass. 1re civ., 23 oct. 2013, RTD civ. 2014, p. 77, obs. P. Deumier (avec les réf.),
reprochant à un juge des affaires familiales d’avoir fixé une pension alimentaire en « fondant sa
décision sur une table de référence, fût-elle annexée à une circulaire ».
(2254) M. ROBINEAU, « Le statut normatif de la nomenclature Dintilhac des préjudices », JCP G,
2010, 612 ; L. MAURIN, « Le droit souple de la responsabilité civile », RTD civ. 2015, p. 517.
(2255) Ex. : Cass. soc., 12 mai 1965, aff. Coquatrix, Bull. civ. V, no 371 ; D. 1965, 583.
(2256) C. pr. civ., art. 455 : « Le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives
des parties et leurs moyens [...]. Le jugement doit être motivé ».
(2257) L’exigence d’une motivation des décisions de justice est affirmée depuis la Révolution :
L. 16-24 août 1790, Tit. V., art. 15, Const. 5 fructidor an III, art. 208 puis L. 20 avr. 1810, art. 7.
(2258) Pour certaines décisions (actes d’administration judiciaire, prononcé d’astreintes...), le juge
dispose d’un pouvoir discrétionnaire. cf. T. BARTHOUIL, « Essai sur le pouvoir discrétionnaire des
juges du fond en droit privé », RRJ 1992, p. 341 et s. et 619 et s.
(2259) H. KELSEN, Théorie pure du droit, trad. Eisenmann, Dalloz, 1962, p. 338.
(2260) Pour les droits romain et anglo-américain, v. supra, nos 387 et s.
(2261) Les cas d’ouverture à cassation relevant du contrôle de la motivation sont les suivants :
absence de motifs, contradiction entre des motifs (de fait), motifs dubitatifs ou hypothétiques, défaut
de réponse à conclusions et, surtout, manque de base légale (v. supra, no 179).
(2262) Sous l’Ancien droit, la jurisprudence se devait d’être une science secrète, privilège des cours
souveraines, en toutes matières. Cf. T. SAUVEL, « Histoire du jugement motivé », RDP 1955, p. 5.
(2263) L. WELAMSON, « La motivation des décisions des Cours judiciaires suprêmes », RID comp.
1979, p. 509.
(2264) A. TOUFFAIT et A. TUNC, « Pour une motivation plus explicite des décisions de justice,
notamment celles de la Cour de cassation », RTD civ. 1974, p. 487.
(2265) V. d’ailleurs en ce sens : A. et S. TUNC, Le droit des États-Unis d’Amérique. Sources et
techniques, Dalloz, 1955, no 41 et no 62.
(2266) J.-E. LABBÉ, note S., 1887.I.93 : « D’une décision il n’y a qu’un bon motif ; le bon motif est
gâté par le contact des autres ; les arrêts concentrés dans un motif sont les meilleurs, ils dirigent
mieux pour l’avenir et n’engendrent point la perplexité ».
(2267) P. DEUMIER, « Les motifs des motifs des arrêts de la Cour de cassation », Mélanges J.-F.
Burgelin, Dalloz, 2008, p. 125. Cf. Cass. req., 16 mai 1838, Jur. Gén. Dalloz, Vº Jugement, nº 950 :
« les jugements et arrêts résident entièrement dans leur dispositif et la loi n’a pu exiger et n’a pas,
en effet, exigé nulle part les motifs des motifs ».
(2268) Sur la « doctrine » de la jurisprudence qui se dégage de ces écrits de nature hybride, v. infra,
no 436.
(2269) CEDH, 29 août 2000, Jahnke et Lenoble, JCP G, 2000.II.10435 : « Optant pour une réponse
laconique, l’arrêt (de la Cour de cassation) peut en effet prêter à confusion » ; mais, après examen
de l’espèce, il s’avère qu’elle n’a pas commis d'« erreur manifeste d’appréciation ».
(2270) CEDH, 13 janv. 2009, Taxquet c/Belgique, D. 2009, 1058, n. J.-F. Renucci. La L. no 2011-
939, 10 août 2011 a introduit la motivation des arrêts de cour d’assises (C. pr. pén., art. 365-1).
(2271) S. GJIDARA, « La motivation des décisions de justice : impératifs anciens et exigences
nouvelles », LPA 26 mai 2004, no 105, p. 3.
(2272) Cass. 2e civ., 31 janv. 1985, Bull. civ. II, no 26 ; Gaz. Pal. 1985, Somm. 124, note crit.
S. Guinchard : le recours à des motifs établis d’avance sur un formulaire n’est pas incompatible avec
l’art. 6 Conv. EDH.
(2273) Cf. « Entretien avec Bertrand Louvel », JCP G, 2015, 1122 ; B. LOUVEL, art. in D. 2015, 1326.
(2274) Cass. 3e civ., 22 oct. 2015 et 17 déc. 2015, JCP G, 2016, 189, n. P.-Y. Gautier (validant et
condamnant, respectivement, l’expulsion de gens du voyage de leur campement illicite, après un
examen poussé des circonstances de l’espèce).
(2275) Cass. 1re civ., 4 déc. 2013, D. 2014, 179, n. F. Chénedé ; RTD civ. 2014, p. 307, obs. J.-
P. Marguénaud (arrêt considéré comme fondateur de cette nouvelle méthode de raisonnement).
(2276) Sur la mission légale de la Cour de cassation, v. supra, nº 179 et nº 401.
(2277) Contre cette nouvelle motivation : P.-Y. GAUTIER, « Éloge du syllogisme », JCP G, 2015,
902 ; art. in D. 2015, 2189 ; note précitée sous Cass. 3e civ., 22 oct. et 17 déc. 2015 ; Ph. MALAURIE,
« Pour : la Cour de cassation, son élégance, sa clarté et sa sobriété. Contre : le judge made law à la
manière européenne », JCP G, 2016, 318 ; F. CHÉNEDÉ, « Contre-révolution tranquille à la Cour de
cassation ? », D. 2016, 796 ; A. BÉNABENT, obs. in D. 2016, 137 ; P. PUIG, obs in RTD civ. 2015,
p. 70. Pour cette nouvelle motivation ou sans opinion tranchée : Ph. JESTAZ, J.-P. MARGUÉNAUD et
Chr. JAMIN, art. in D. 2014, 2061 ; Ph. THÉRY, art. in « Regards d’universitaires sur la réforme de la
Cour de cassation », JCP G, 2016 (suppl. au nº 1-2, 11 janv. 2016), 10 ; C. CHAINAIS, ibid., 11 ;
P. DEUMIER, art. in D. 2015, 2022.
(2278) V. supra, no 332.
(2279) Pour les premiers coups d’essai : Cass. crim., avis, 29 févr. 2016, JCP G, 2016, 324, note
P. Deumier ; Cass. com., 22 mars 2016, nº 14-14218, Bull. civ. IV, à paraître, affirmant qu’il y a lieu
pour la chambre commerciale d’abandonner sa précédente jurisprudence et « d’adopter la même
position » que la troisième chambre civile ; Cass. 1re civ., 6 avr. 2016, nº 15-10552, Bull. civ. I, à
paraître. Cette référence à des arrêts antérieurs, afin de mieux motiver, fait songer aux « cailloux du
Petit Poucet » ; l'inconvénient est qu'elle peut inspirer des arguments pour contester la solution
(R. LIBCHABER, art. in JCP G, 2016, 63).
(2280) P. HÉBRAUD, obs. in RTD civ. 1955, p. 69. Cass. soc., 9 mai 1995, Bull. civ. V, no 149 ;
Dr. ouvrier 2005, p. 149 : « en vertu du principe de l'autorité relative de la chose jugée et de
l'interdiction faite aux juges de se prononcer par voie de disposition générale et réglementaire sur
les causes qui leur sont soumises, l'employeur ne peut se prévaloir de décisions antérieures
rendues dans d'autres instances et entre des parties différentes ».
(2281) P. HÉBRAUD, obs. in RTD civ. 1969, p. 607.
(2282) Lord DEVLIN : « Les juges, comme toute autre catégorie d’hommes d’un certain âge qui ont
vécu en général des existences peu aventureuses, tendent à être traditionalistes dans leurs idées.
C’est là un fait de nature » (Judges and Lawmakers, Modern Law Review, 1976, p. 1). G. RIPERT,
Les forces créatrices du droit, LGDJ, 1955, no 3, p. 9 : « C’est par la formation même de son esprit
que le juriste est un conservateur ». A. DE TOCQUEVILLE, De la démocratie en Amérique I, deuxième
partie, Ch. VIII « Le juge est un légiste, qui indépendamment du goût de l’ordre et des règles qu’il
a contractées dans l’étude des lois, puise encore l’amour de la stabilité dans l’inamovibilité de ses
fonctions ».
(2283) V. supra, no 391.
(2284) P. MORVAN, « La jurisprudence virale », JCP G, 2013, 2.
(2285) Ph. MALAURIE, « La Cour de cassation au XXe siècle », in Rapport de la Cour de cassation
1999, Doc. fr., 2000.
(2286) C. GAU-CABÉE, « La jurisprudence et les silences du Code civil. Lecture d’une carence
originelle », Droits 2008, nº 47, p. 3.
(2287) La L. 30 ventôse an XII (24 mars 1804) ordonnant la réunion des nouvelles lois civiles en un
code unique, le Code civil des Français, dispose en son art. 7 qu'« à compter du jour où ces lois
seront exécutoires, les lois romaines, les ordonnances, les coutumes générales ou locales, les
statuts, les règlements, cessent d’avoir force de loi générale ou particulière, dans les matières qui
forment l’objet desdites lois composant le présent code ». Une disposition similaire fut introduite
dans le Code de procédure civile (C. pr. civ., art. 1041, v. ci-dessous), pour le Code de commerce
(L. 15 sept. 1807, art. 2) et dans le Code forestier de 1827 (art. 218). Comp. art. 484 du Code pénal
de 1810.
(2288) Civ., 13 germinal an XII, Jur. Gén., t. XXX, Vo Loi, no 533-2o, p. 209.
(2289) CE, Avis (à valeur législative), 2 juill. 1807, Jur. Gén., t. II, Vo Actes de l’état civil, no 23,
p. 508 : « De tout temps, et dans toutes les législations, l’erreur commune et la bonne foi ont suffi
pour couvrir, dans les actes et même dans les jugements, des irrégularités que les parties
n’avaient pu ni prévoir ni empêcher ».
(2290) Cass. req., 18 janv. 1830, S., chr. 1828-1830, I, 430. Adde : Cass. req., 6 mai 1874, DP 1874,
1, 412, rap. Connely ; Cass. req., 12 déc. 1882, DP 1883, 1, 264.
(2291) « Toutes lois, coutumes, usages et règlements relatifs à la procédure civile, seront
abrogés ».
(2292) Civ., 21 brumaire an XII, in MERLIN, Recueil alphabétique des questions de droit, 4e éd.,
1829, t. XII, Vo Prescription, § XV, p. 47.
(2293) Cass. req., 6 avr. 1831, DP 1831, I, 137 ; Jur. Gén., t. XVIII, Vo Droit maritime, no 1843,
p. 647.
(2294) Ex. : Cass. civ., 31 mai 1813, S., chr. : « Vu les lois 36 et 38, D., de contrahenda emptione ;
la loi 6, pro donato et les lois 3 et 6, C. de contr. empt. ; vu pareillement l’art. 911, C. Nap. »
(validité des donations déguisées non conclues entre époux).
(2295) Ex. : Cass. req., 6 mars 1861, Syndicat Vollot, DP 1861, 1, 417 ; S., 1861, 1, 73 : « Sous
l’empire de l’ancienne législation, le caractère purement personnel et mobilier du droit que le bail
confère au preneur n’a jamais été mis en question, ainsi que l’atteste un de ses plus sûrs et fidèles
interprètes et dans le silence qu’il a gardé à cet égard, il est impossible d’admettre que le Code
Napoléon, en reproduisant la définition que Pothier donne du bail, ait entendu transformer la
nature de ce contrat, pour en changer et en modifier les effets ».
(2296) Ed. MEYNIAL, « Les recueils d’arrêts et les arrêtistes », in Le Code civil 1804-1904. Livre du
centenaire, 1904, t. I, p. 172, spéc. p. 184 : « Les progrès des dernières années de l’Empire (le
premier) furent bien vite détruits. Ce fut la haute magistrature qui prit modèle sur cette tourbe
d’anciens juges seigneuriaux, d’anciens procureurs d’officialités, dont la pratique fournissait
encore bien des survivants. La difficulté redevint grande de ne faire goûter aux juges que ce qui
n’était appuyé que sur des autorités modernes. Il fallut les servir à leur gré, remonter de nouveau
aux autorités de l’Ancien Régime, citer le Corpus de Justinien, de préférence au Code civil, ou
justifier le Code civil par l’ancienne coutume de Paris ».
(2297) S. BLOQUET, « Quand la science du droit s’est convertie au positivisme », RTD civ. 2015,
p. 59.
(2298) Pour un tableau spirituel des magistrats et des arrêts cette époque : F. BÉRENGER, « Éloge de la
magistrature », RRJ 2006, p. 1751.
(2299) Cass. req., 15 juin 1892, Patureau-Miran c/Boudier (aff. des engrais), DP 1892, I, 596 ; S.,
1893, I, 281, note J.-E. Labbé : un fermier insolvable ayant répandu des engrais sur des terres
affermées n’avait pu payer son vendeur ; le bailleur, enrichi sans cause, fut tenu de lui verser le
montant de la plus-value procurée à ses terres. V. Droit des obligations, coll. Droit civil.
(2300) Cass. civ., 16 juin 1896, Teffaine (aff. du remorqueur Marie), DP 1897, I, 433, note
R. Saleilles, concl. Sarrut ; S. 1897, I, 17, note A. Esmein (l’explosion de la machine à vapeur d’un
remorqueur circulant sur la Loire avait tué un mécanicien ; jugé que le défaut de soudure à l’origine
du dommage était un vice de la chose dont le propriétaire devait répondre de plein droit, même s’il
en avait ignoré l’existence). V. Droit des obligations, coll. Droit civil.
(2301) Trib. conflits, 8 févr. 1873, Blanco, DP 1873, III, 17 et S., 1873, III, 153, concl. David.
(2302) V. supra, nos 288 et s.
(2303) V. supra, no 73, 3o.
(2304) Cass. req., 3 août 1915, Clément Bayard, DP 1917, 1, 79 ; S., 1920, 1, 300. V. aussi les arrêts
Chollet c/Dumoulin en droit des successions (Ch. réunies, 5 déc. 1907, DP 1908, 1, 113, note
A. Colin ; S., 1908, 1, 5, note Ch. Lyon-Caen, concl. Beaudouin) et Caisse rurale de la commune de
Manigod en droit des sociétés (Ch. réunies, 11 mars 1914, DP 1914, 1, 257, note L. Sarrut ; S., 1918,
1, 103).
(2305) V. encore l’affirmation que la personnalité morale « n’est pas une création de la loi »
(Cass. 2e civ., 28 janv. 1954, D. 1954, 217, note G. Levasseur ; JCP G, 1954.II.7978, concl.
Lemoine ; Arch. phil. dr., 1959, p. 140, note J. Carbonnier. V. Droit des personnes, coll. Droit civil).
Le point d’achèvement est situé sans doute au milieu des années 1960, notamment lorsque la Cour de
cassation institua une présomption irréfragable de mauvaise foi à l’encontre du vendeur professionnel
l’obligeant à payer tous dommages-intérêts envers l’acheteur par l’effet de l’article 1645 C. civ.
(Cass. 1re civ., 19 janv. 1965, aff. du pain de Pont Saint-Esprit, D. 1965, 389. V. Les contrats
spéciaux, coll. Droit civil).
(2306) **Cass. ch. mixte, 24 mai 1975, Jacques Vabre, cité supra, no 340.
(2307) V. supra, no 351.
(2308) Cass. Ass. plén., 29 mars 1991, Blieck, JCP G, 1991.II.21673, concl. H. Dontenwille, note
J. Ghestin ; D. 1991, 324, note Chr. Larroumet ; RTD civ. 1991, p. 541, obs. P. Jourdain. V. Droit des
obligations, coll. Droit civil.
(2309) Cass. Ass. plén., 31 mai 1991, D. 1991, 417, rap. Y. Chartier, note D. Thouvenin ; JCP G,
1991.II.21752, commun. J. Bernard, concl. H. Dontenwille, note Fr. Terré ; RTD civ. 1991, p. 517,
obs. D. Huet-Weiller et 1992, p. 489, chron. M. Gobert.
(2310) Cass. Ass. plén., 12 juill. 1991, Besse, D. 1991, 549, note J. Ghestin ; JCP G, 1991.II.21743,
note G. Viney ; RTD civ. 1991, p. 750, obs. P. Jourdain. V. Droit des obligations, coll. Droit civil.
(2311) Cass. Ass. plén., 11 déc. 1992, JCP G, 1993.II.21991, concl. M. Jéol, note G. Mémeteau.
(2312) Cass. Ass. plén., 1er déc. 1995, D. 1996, 13, concl. M. Jéol ; JCP G, 1995.II.22565, concl.
M. Jéol, note J. Ghestin.
(2313) Cass. Ass. plén., 30 juin 1995, JCP G, 1995.II.22478, concl. M. Jéol, D. 1995, 513, concl.
M. Jéol, note R. Drago : « Vu le principe du respect des droits de la défense ; la défense constitue
pour toute personne un droit fondamental à caractère constitutionnel ; son exercice effectif exige
que soit assuré l’accès de chacun, avec l’assistance d’un défenseur, au juge chargé de statuer sur
sa prétention ».
(2314) J.-L. BERGEL, « La loi du juge, dialogue ou duel ? », Études P. Kayser, PUAM, 1992, t. I,
p. 22.
(2315) Ph. MALAURIE, « La jurisprudence combattue par la loi », Mélanges R. Savatier, Dalloz, 1965,
p. 603 ; puis dans Defrénois 2005, art. 38203, p. 1205 où est évoquée « la loi combattue par la
jurisprudence » (ex. : la loi dite « anti-Perruche », supra, no 306, texte et note).
(2316) Sur l’influence du courant américain de l’Analyse économique du droit, v. supra, no 33.
(2317) Aux États-Unis : D. L. HOROWITZ, The Courts and Social Policy, Washington, The Brookings
Institution, 1977 (les décisions n’interviennent que de façon épisodique, piecemeal). Pourtant, une
des bases du droit américain, presque un leitmotiv de la pensée juridique, est que « all law is judge-
made law ».
(2318) Lord DEVLIN, Judges and Lawmakers, 39 Modern Law Review, 1976, p. 1, spéc. p. 10.
(2319) Éd. LAMBERT, Le gouvernement des juges et la législation sociale aux États-Unis.
L’expérience américaine du contrôle judiciaire de la constitutionnalité des lois, Girard, 1921,
rééd. Dalloz, 2005 (à propos de la jurisprudence de la Cour suprême des États-Unis dans les
années 1910 et 1920, très anti-sociale).
(2320) V. supra, no 336.
(2321) V. par ex. Y. LEQUETTE, « Des juges littéralement irresponsables... », Mélanges J. Héron,
LGDJ, 2008, p. 309.
(2322) V. supra, no 398.
(2323) Portalis a fait justice de cette accusation dans son Discours préliminaire (in Locré, t. I,
p. 258-259) : « On a fait à ceux qui professent la jurisprudence le reproche d’avoir multiplié les
subtilités, les compilations et les commentaires. Ce reproche peut être fondé. Mais dans quel art,
dans quelle science ne s’est-on pas exposé à le mériter ? Doit-on accuser une classe particulière
d’hommes de ce qui n’est qu’une maladie générale de l’esprit humain ? Il est des temps où l’on est
condamné à l’ignorance parce qu’on manque de livres ; il en est d’autres où il est difficile de
s’instruire, parce qu’on en a trop ».
(2324) Cf. Ph. CONTE, « L’arbitraire judiciaire : chronique d’humeur », JCP G, 1988.I.3343 : « Si les
juges estiment eux-mêmes que rien ne leur est interdit, qu’ils ne s’étonnent pas et encore moins
s’indignent, si d’autres viennent à en inférer que l’on peut, alors, tout obtenir d’eux ».
(2325) P. DURAND, « La connaissance du phénomène juridique et les tâches de la doctrine moderne de
droit privé », D. 1956, chr. 73 ; A. DUNES, « La non-publication des décisions de justice », RID
comp. 1986, p. 757.
(2326) Sur les banques de données jurisprudentielles : Ch. LARCHER-LOYER, « La jurisprudence
d’appel », JCP G, 1989.I.3407 ; G. MAZET, « Les systèmes informatisés de documentation
juridique », RID comp. 1986, p. 775 ; A. PERDRIAU, « Les arrêts de la Cour de cassation au regard de
l’informatique », JCP G, 1990.I.3436.
(2327) Les Anglo-Saxons déplorent l’« orgie » de créativité jurisprudentielle, non moins dangereuse
que l’« orgie » législative contemporaine (D. L. HOROWITZ, op. cit., p. 4-12 ; M. CAPPELLETTI, Le
pouvoir des juges, trad. R. David, Économica, 1990, no 840).
(2328) Sur les vertus scientifiques de la publication d’arrêts inédits au sein de « Mégacodes »,
X. HENRY, « La jurisprudence accessible. Mégacode civil : théorie d’une pratique », RRJ 1999,
p. 631 et 979. L’étude de M. Henry montre que le déchet jurisprudentiel (arrêts laconiques, ambigus
ou de pure espèce) est aussi énorme qu’inévitable et devrait rester dans l’ombre.
(2329) V. supra, no 394.
(2330) La Cour EDH recherche, en matière pénale, si « le texte de la disposition légale, lue à la
lumière de la jurisprudence interprétative dont elle s’accompagne » est clair et prévisible afin de
respecter le principe de légalité des délits (CEDH, 15 nov. 1996, Cantoni, préc. supra no 396). À
l’inverse, elle a jugé, sur une question de droit public, que « l’extrême complexité du droit positif,
telle qu’elle résulte de la combinaison de la législation [...] avec la jurisprudence [du Conseil
d’État] était propre à créer un état d’insécurité juridique » privant le requérant « d’une possibilité
claire, concrète et effective » d’accéder à un tribunal selon l’art. 6 § 1 Conv. EDH (CEDH, 16 déc.
1992, Geouffre de la Pradelle, D. 1993, 561, note F. Benoît-Rohmer).
(2331) CE, 6 mai 2015, nº 377487, RTD civ. 2015, p. 575, obs. P. Deumier (avec les autres réf.) :
« selon la jurisprudence de la Cour EDH, [les stipulations de l’art. 1er prot. nº I], en mentionnant
"les conditions prévues par la loi", visent à la fois le droit écrit et le droit non écrit, et exigent
seulement que ce droit soit, d'une part, suffisamment accessible et, d'autre part suffisamment
précis et prévisible [...] ».
(2332) La Cour de cassation n’avait pas hésité à affirmer que « la notion de bref délai énoncée à
l’art. 1648 C. civ. (limitant le droit de l’acheteur à agir en garantie des vices cachés), si elle
n’indique pas une durée précise, n’en est pas moins claire dans son objectif et d’application
simple selon une jurisprudence constante ; cette disposition ne saurait donc constituer une
restriction inadmissible au droit d’agir » garanti par l’art. 6 § 1 Conv. EDH (Cass. 1re civ., 21 mars
2000, D. 2000, 593 ; RTD civ. 2000, p. 592, obs. P.-Y. Gautier et p. 666, obs. N. Molfessis). Le
propos ne manque pas de sel. Dans son rapport annuel pour 1998 (Doc. fr., 1999), la Cour de
cassation dénonçait au contraire l’insécurité juridique qui enrobe cette notion obscure, qu’aucune
« jurisprudence constante » ne vient éclaircir...
(2333) Depuis : Cons. const., 19-20 janv. 1981, Loi Sécurité et liberté, décis. no 80-127 DC,
D. 1981, 102, note J. Pradel ; D. 1982, 441, note A. Dekeuwer ; JCP G, 1981.II.19701, note
C. Franck ; RDP 1981, p. 651, obs. L. Philip ; AJDA, 1981, p. 275, note J. Rivéro et p. 278, note
C. Gournay ; Rev. adm. 1981, no 201, p. 266, note M. de Villiers. Ce motif fut repris par la Cour de
cassation (Cass. crim., 1er févr. 1990, Bull. crim., no 56).
(2334) Cons. const., 16 déc. 1999, décis. no 99-421 DC, JO 22 déc. 1999, p. 19041.
(2334a) Sur la définition qui sera finalement proposée, v. infra, no 437.
(2334b) Étymologie : du latin doceo, ere = enseigner. Biblio. sélective. Articles : A. ESMEIN, « La
jurisprudence et la doctrine », RTD civ. 1902, p. 5 ; P. DURAND, « La connaissance du phénomène
juridique et les tâches de la doctrine moderne en droit privé », D. 1956, chr. 73 ; G. CORNU, « Aperçu
de la pensée juridique française contemporaine », Annales de l'Université de Poitiers, 1960, no 1 ;
Ph. MALAURIE, « Les réactions de la doctrine à la création du droit par le juge », Defrénois 1980,
art. 32345 ; H. BATIFFOL, « La responsabilité de la doctrine dans la création du droit », RRJ 1981,
p. 175 ; J.-D. BREDIN, « Remarques sur la doctrine juridique », in Mélanges P. Hébraud,
Univ. sc. sociales Toulouse, 1981, p. 111 ; M. GOBERT, « Le temps de penser de la doctrine », Droits
1994, p. 97 ; N. MOLFESSIS, « Les prédictions doctrinales », in Mélanges F. Terré, « L'avenir du
droit », Dalloz, PUF, éd. Juris-classeur, 1999, p. 141 ; A. ORAISON, « Le rôle de la doctrine
académique dans l'ordonnancement juridique international contemporain », RRJ 2000, p. 285 ;
Ph. MALAURIE, « La pensée juridique du droit civil au XXe siècle », JCP G, 2001.I.283 ; P.-Y. GAUTIER,
« Les articles fondateurs (réflexions sur la doctrine) », Études P. Catala, « Le droit privé français à
la fin du XXe siècle », Litec, 2001, p. 295 ; A. SUPIOT, « Ontologie et déontologie de la doctrine »,
D. 2013, chr. 1421. Monographie : Ph. JESTAZ et Chr. JAMIN, La doctrine, Dalloz, 2004 (des mêmes
auteurs, « L'entité doctrinale française », D. 1997, chr. 167 ; pour une critique de leur conception
purement civiliste, française et tronquée de la doctrine : P. MORVAN, « La notion de doctrine (à propos
du livre de MM. Jestaz et Jamin) », D. 2005, chr., 2421) ; N. HAKIM, L'autorité de la doctrine
civiliste française au XIXe siècle, LGDJ, 2002 ; F. AUDREN et J.-L. HALPÉRIN, La culture juridique
française. Entre mythes et réalités. XIXe-XXe siècles, CNRS, 2013. Ouvrages collectifs : Les
réactions de la doctrine à la création du droit par les juges, TAHC, t. XXXI, Economica, 1982
(cf. n. Ph. MALAURIE, Rapport français (droit civil), p. 81 ; Cl. CHAMPAUD, Rapport général (droit des
entreprises), p. 191 ; P. MAYER, Rapport français (droit international privé), p. 385) ; La doctrine
juridique, CURAPP et CHDRIP de Picardie, PUF, 1993 ; L'image doctrinale de la Cour de
cassation (colloque déc. 1993), Doc. fr., 1994 ; Doctrine et recherche en droit, Droits 1994, no 20 ;
Doctrine et droit de l'Union européenne, dir. F. Picod, Bruylant, 2010 ; La doctrine en droit
administratif, LexisNexis Litec, travaux de l'AFDA, no 3, 2010 (cf. J. CHEVALLIER, Rapport de
synthèse, p. 235). Adde Ch. ATIAS, Épistémologie juridique, Dalloz, 2002, nos 249 s. (« les savants
juristes »).
(2334c) V. infra, no 435.
(2334d) E. DESMONS, « La rhétorique des commissaires du gouvernement près le Conseil d'État »,
Droits 2002, no 36, « Rhétorique et droit », p. 39.
(2334e) F. AUDREN et J.-L. HALPÉRIN, La culture juridique française. Entre mythes et réalités. XIXe-
XX e siècles, CNRS, 2013 ; J.-L. HALPÉRIN, « L'idée de culture juridique française est-elle utile au droit
comparé ? », in Le droit comparé au XXIe siècle. Enjeux et défis, Sté de législ. comp., 2016, p. 155,
qui ajoute que « le singulier est intenable : on ne peut admettre l'existence d'une seule culture à
travers le temps », en France comme dans tout pays ; par exemple, les ordres d'avocats ne remontent
pas au-delà du XVIIe siècle, la magistrature française a été dépendante du pouvoir politique jusqu'au
XXe siècle, le plan en deux parties a été inventé dans les facultés de droit dans les années 1940 ; il n'y
a pas une « culture de la codification » en France ni une culture particulière du droit au respect de la
vie privée aux États-Unis, etc.
(2344) Histoire des manuels de droit. Une histoire de la littérature juridique comme forme du
discours universitaire (dir. A.-S. Chambost), LGDJ, coll. Contextes – Culture du droit, 2014.
(2345) En 1846 commença la publication de la Jurisprudence générale Dalloz (44 volumes en
1870), le plus admirable répertoire alphabétique de droit jamais publié en France.
(2346) Sur l’une des revues les plus célèbres, le recueil Dalloz : Chr. ATIAS, « Avant le Dalloz... »,
RRJ 2006, p. 437 (sur les revues antérieures au Dalloz) ; P.-Y. GAUTIER, « Les auteurs du recueil
Dalloz », RRJ 2006, p. 445.
(2347) Sur le style de Labbé, cf. G. COHENDY, La méthode d’un arrêtiste au XIXe siècle, Labbé, th.
Lyon, Rousseau, 1910, spéc. p. 74 : « Il élimine tout ce qui est secondaire, il aperçoit
immédiatement les données générales du problème, il nous présente les traits caractéristiques, met
pleinement en lumière ses arêtes vives, dégage les idées directrices et leur donne une netteté, un
relief saisissant [...]. Une fois entré dans la discussion même, Labbé va avancer dans sa
démonstration avec une dialectique robuste, des déductions serrées, une logique inéluctable. Mais
la rigueur de son raisonnement évite de tomber dans la brutalité grâce à l’art infini avec lequel il
présente toute chose [...]. Ajoutons que sa langue, d’une méticuleuse netteté, d’une parfaite
précision, est en même temps assez ornée, assez parée, assez richement colorée pour faire de lui
un véritable écrivain de race ».
(2348) Éd. MEYNIAL, « Les recueils d’arrêts et les arrêtistes », Le Code civil 1804-1904. Livre du
centenaire, 1904, t. I, p. 172, spéc. p. 196 : « Moins abstraite, moins raide et moins froide que la
pure spéculation dogmatique, plus désintéressée, plus générale et d’une plus sereine impartialité
que la consultation ou la plaidoirie, ou même que le rapport judiciaire. Peu de genres conviennent
mieux à la souplesse et à la finesse de bon sens du tempérament français ».
(2349) Comp. J. CARBONNIER, « Note sur des notes d’arrêt (de R. Savatier) », D. 1970, chr. 137.
(2349a) B. PACTEAU, Jean-Baptiste Sirey (1762-1845). Un père de l'étude et de l'édition du
contentieux moderne, Dalloz, 2014.
(2350) V. supra, no 135.
(2351) A. SUPIOT, « Ontologie et déontologie de la doctrine », D. 2013, chr. 1421 (trés critique).
(2352) H. BOUTHINON-DUMAS, A.-S. COURTIER et V. REBEYROL, « Un classement des revues
juridiques », JCP G, 2016, 64. Critère retenu (par des professeurs de droit en école de commerce) :
une revue est classée si les enseignants-chercheurs utilisent largement cette revue.
(2353) Cette histoire du droit romain fut rapportée par Pomponius ; elle figure dans le Digeste (D. 1,
2, 2, 48 et s.). Sur cette évolution et les méthodes doctrinales, J.-P. CORIAT, Vo Jurisconsultes
romains, Dictionnaire de la culture juridique, Lamy-PUF, 2003, p. 880. Sur l’histoire de la doctrine,
J. GAUDEMET, Les naissances du droit. Le temps, le pouvoir et la science au service du droit,
Montchrestien, 3e éd., 2001, p. 83 s.
(2354) V. supra, nos 99 à 101.
(2355) V. supra, no 388.
(2356) C. civ. suisse (10 déc. 1907), art. 1er : « 2. – À défaut d’une disposition légale applicable, le
juge prononce selon le droit coutumier et, à défaut d’une coutume, selon les règles qu’il établirait
s’il avait à faire acte de législateur. 3. – Il s’inspire des solutions consacrées par la doctrine et la
jurisprudence ».
(2357) Statut CIJ, art. 38, § 1, d : « La Cour [...] applique : [...] les décisions judiciaires et la
doctrine des publicistes les plus qualifiés des différentes nations, comme moyen auxiliaire de
détermination des règles de droit » (mais « détermination » n’est pas « création »).
(2358) R. CHAPUS, Droit administratif général, Montchrestien, 14e éd., 2000, no 46 : « La doctrine
peut ainsi, non créer le droit, mais aider à sa création par les ressources de son imagination et de
sa réflexion sur l’état du droit ».
(2359) J.-D. BREDIN, « Remarques sur la doctrine juridique », Mélanges P. Hébraud, Univ. sc.
sociales Toulouse, 1981, p. 111, spéc. p. 112 : « Le vrai travail de la doctrine, c’est la critique,
l’idée, la réflexion, l’invention, l’imagination novatrice ».
(2360) Le positivisme normativiste de Hans Kelsen visait ainsi à élaborer une « théorie pure du
droit », c’est-à-dire débarrassée des apports des sciences humaines (telle la sociologie), de toute
donnée empirique et du droit naturel (v. supra, no 270, en note). Les positivismes légaliste et
jurisprudentiel, quant à eux, tirent le droit de l’État (v. supra, nos 367 et 375).
(2361) Ph. MALAURIE, « Les grands juristes », Mélanges R. Drago, LGDJ, 1994 ; du même auteur,
Anthologie de la pensée juridique, Cujas, 2e éd., 2001 (une galerie de portraits) ; Dictionnaire d’un
droit humaniste, Université Panthéon-Assas – LGDJ, 2015, Vº « Doctrine ».
(2362) M. MILET, Les professeurs de droit citoyens. Entre ordre juridique et espace public.
Contribution à l'étude des interactions entre les débats et les engagements des juristes français
(1914-1995), th. Paris II, 2000.
(2363) J. SAVATIER, « Le regard de la doctrine sur la jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour
de cassation », in Le Tribunal et la Cour de cassation. 1790-1990. Volume jubilaire, Litec, 1990,
p. 169.
(2364) Ex. : A. JEAMMAUD, « Propositions pour une compréhension matérialiste du droit du travail »,
Dr. social 1978, p. 338 ; G. LYON-CAEN, « À propos de quelques ouvrages de doctrine », Dr. social
1978, p. 292.
(2365) M. BONNECHÈRE, « Doctrine et droit du travail : éléments pour un débat », Dr. ouvrier, 2002,
p. 471 : « La doctrine peut-elle trouver place dans une publication syndicale sans faillir à ses
devoirs de critique scientifique et d’indépendance d’analyse ? ».
(2366) A. SUPIOT, Le juge et le droit du travail, th. Bordeaux, 1979, spéc. p. 961.
(2367) R. CHARVIN, « De la prudence doctrinale face aux nouveaux rapports internationaux »,
Mélanges J.-A. Touscoz, France Europe Éditions, 2007, p. 64.
(2368) G. RIPERT, Les forces créatrices du droit, LGDJ, 1955, no 3, p. 9 : le juriste ne pense qu’à
maintenir des règles qui n’existent que par la stabilité et la continuité ; « Je suis celui qui modifie »
dit le serpent de Paul Valéry.
(2369) Ex. : M. PLANIOL, « Études sur la responsabilité civile. Deuxième étude », Rev. crit. lég. jur.
1906, p. 80, spéc. p. 82-83 : « Moi qui ne crois pas plus à la responsabilité objective qu’aux
revenants [...] ». Henri Mazeaud continuera à militer en faveur de la faute, cette fois à l’encontre
d’une jurisprudence bien établie (H. MAZEAUD, « La faute dans la garde », RTD civ. 1925, p. 793).
Mais René Rodière parlera d’« un hommage rendu à la faute purement verbal » (Ch. BEUDANT et
P. LEREBOURS-PIGEONNIÈRE, Cours de droit civil français, 2e éd., t. IX bis, Les contrats et les
obligations, par R. Rodière, 1952, no 1563, p. 187).
(2370) V. supra, no 378.
(2371) V. supra, no 378. Pour une réfutation de chaque théorie : M.-Th. CALAIS-AULOY, Le compte-
courant en droit français, Sirey, 1969, nos 22 et s., p. 20 et s.
(2372) R. SAVATIER, « Une personne morale méconnue : la famille en tant que sujet de droit », DH
1939, chr. 49.
(2373) R. DEMOGUE, Traité des obligations en général, 1924, t. IV, no 721, p. 416 ; R. CHAPUS,
Responsabilité publique et responsabilité privée. Les influences réciproques des jurisprudences
administrative et judiciaire, th. Paris, LGDJ, 1957, no 336, p. 339.
(2374) L. JOSSERAND, Cours de droit civil positif français, 3e éd., 1939, t. II, no 10, p. 7.
(2375) V. Droit des obligations, coll. Droit civil.
(2376) V. Droit des sûretés, coll. Droit civil.
(2377) J. CARBONNIER, Droit civil. Introduction, PUF, 1re éd., 1955, rééd. 2004, no 31, b) : « À beau
mentir qui vient de loin ».
(2378) V. supra, no 240.
(2379) T. S. KUHN, La structure des révolutions scientifiques, 1962, Flammarion, 1983.
(2380) V. Droit des obligations, coll. Droit civil.
(2381) Cf. not. G. VINEY et P. KOURILSKY, Le principe de précaution. Rapport au Premier ministre,
O. Jacob, Doc. fr., 2000. Sur le principe de précaution, v. supra, nos 214, 1º et 253. Droit civil
illustré, no 4.
(2382) L. HUGUENEY, L’idée de peine privée en droit contemporain, th. Dijon, 1904, p. 305 et s.
(2383) E.-H. PERREAU, Le droit au nom en matière civile, Sirey, 1910, p. 37. Sur les multiples autres
thèses (droit de propriété, droit de la personnalité, marque de l’état des personnes, institution de
police civile...), v. Droit des personnes, coll. Droit civil.
(2384) E. THALLER et J. PERCEROU, Traité élémentaire de droit commercial, 8e éd., 1931, no 1662,
p. 1002.
(2385) E. FEITU, Traité du compte-courant, 1873, no 56, p. 71.
(2386) Y. GAUDEMET, Les méthodes du juge administratif, LGDJ, 1972, p. 147 et s.
(2387) Chr. ATIAS, « La controverse et l’enseignement du droit », Rev. hist. fac. dr. 1985, p. 106.
(2388) Ph. MALAURIE, Rapport français (droit civil), TAHC, t. XXXI, « Les réactions de la doctrine à
la création du droit par les juges », Economica, 1982, p. 81, spéc. no 16, p. 88 : « Un droit
réglementaire transforme la doctrine en répertoire ». R. SAVATIER, « L’inflation législative et
l’indigestion du corps social », D. 1977, chr. 4, spéc. no 13 : les impératifs financiers des éditeurs,
qui privilégient la mise à jour sur la réflexion, favorisent les publications sur « feuillets mobiles ».
(2389) D. BUREAU et N. MOLFESSIS, « L’asphyxie doctrinale », Études B. Oppetit, Litec, 2009, p. 45.
(2390) H. CROZE, « Le droit malade de son information », Droits 1986, no 4, p. 87.
(2391) Infra, no 437.
(2392) V. supra, no 396.
(2393) N. MOLFESSIS, « Les prédictions doctrinales », Mélanges Fr. Terré, L’avenir du droit, Dalloz,
PUF, éd. Juris-classeur, 1999, p. 141, spéc. no 19 et s. : la prédiction peut aussi être du genre
catastrophique, soulignant une conséquence néfaste et inattendue.
(2394) Ex. : Cass. 1re civ., 7 nov. 2000, JCP E, 2001, p. 419, n. G. Loiseau ; JCP G, 2001.II.10452,
n. Fr. Vialla, qui admet la validité de la cession de clientèle civile (par ex. médicale) et du « fonds
libéral » ; une doctrine unanime dénonçait depuis des décennies l’incohérence et surtout l’hypocrisie
de la jurisprudence antérieure (v. Droit des biens, coll. Droit civil).
(2395) J. CARBONNIER, « Le mythe comme support de la règle de droit ». Cours de doctorat, Faculté de
droit de Paris (1977-1978), extraits, Écrits, PUF 2008.1202 : « Le mythe a pour fonction de
conférer une validité, une autorité, à une croyance, une fonction politique (p. 1205) [...] Un
processus d’ex-emplification [...] Un personnage exceptionnel dont l’imitation s’impose au
commun des hommes (p. 1206) [...]. Le mythe établit un lien entre le droit et la religion (p. 1207).
Ex. : Lycurgue, le législateur de Sparte présentait ses lois comme ayant été inspirées par Apollon
(p. 1208) [...]. Un mythe qui vient soutenir une coutume particulière ou même une institution
concrète (p. 1212) [...]. Déméter passait pour être l’inventrice du droit à travers l’invention de la
propriété (p. 1213) ». Dans la mythologie grecque, il y a, à la place du droit, un ordre éthique fait de
vertus et de coutumes que l’homme doit respecter. Dans l’Iliade d’Homère, Agamemnon a violé cet
ordre en s’emparant de Briséis qui était le butin d’Achille ; de là, la colère d’Achille, évoquée dès la
première phrase de l’Iliade et qui explique tout ce mythe : une vision de la condition humaine
regardant la réalité en face, la « finitude » de l’homme (B. MONTAY, « L’Iliade entre éthique et
justice », Droits 2012, nº 55, p. 1581).
(2396) MOLIÈRE, Les femmes savantes, Acte II, scène V : « Qui veut noyer son chien l’accuse de la
rage ».
(2397) Ex. : G. RIPERT, Le déclin du droit. Études sur la législation contemporaine, LGDJ, 1949,
Préface, p. VI : « Je crois qu’il existe des principes juridiques qui sont liés à notre état de
civilisation et en assurent le maintien. Le droit décline s’ils sont méconnus ». Ripert songeait à des
textes fondateurs du Code civil, tels que l’art. 544 ou l’ancien 1134, al. 1er ; p. VII : « Pourquoi faut-
il que le simple rappel de ces lois donne la désolante impression de l’oubli de tant de principes
juridiques ? ».
(2398) Cf. M. CABRILLAC, « Les ambiguïtés de l’égalité entre créanciers », Mélanges A. Breton et
F. Derrida, Dalloz, 1991, p. 31, critiquant la tendance à attribuer « à l’idée d’égalité des règles
égalitaires qui lui doivent peu ou, à la limite, qui ne lui doivent rien ».
(2399) P. DIDIER, « L’égalité des actionnaires : mythe ou réalité ? », Entretiens de Nanterre 1994,
Cah. dr. ent. 1994/5, p. 20, spéc. p. 25-26 : « L’égalité des actionnaires est-elle un mythe ou une
réalité ? [...] Si, par égalité, on entend seulement cette égalité absolue qui existait jadis, paraît-il,
quand les sociétés n’étaient que des indivisions successorales, que les associés étaient unis par
l’affectio societatis et gouvernés par le jus fraternitatis, et que le partage se faisait par part virile,
alors, oui, l’égalité des actionnaires est un mythe. Si, à l’opposé, on entend par égalité des
actionnaires l’égalité formelle qui interdit à quiconque de se soustraire à la loi commune, alors
oui, l’égalité existe dans le droit et dans les faits ».
(2400) L. JOSSERAND, « La personne humaine dans le commerce juridique », DH 1932, chr. 1. En
réalité, le principe n’édicte aucune indisponibilité absolue ; il soumet l’acte juridique portant sur le
corps humain à un contrôle de proportionnalité de l’atteinte au but légitime poursuivi, enserrant la
volonté créatrice d’obligations dans un statut protecteur (cf. A. JACK, « Les conventions relatives à la
personne physique », Rev. crit. lég. jur. 1933, p. 362, spéc. p. 394).
(2401) Biblio. : Th. TAURAN, « Les distinctions en droit privé », RRJ 2000, p. 489 ; Les grandes
distinctions du droit privé, Revue de droit d’Assas 2013, nº 7.
(2402) Ex. : Cass. req., 12 juill. 1905, Le Cohu c/Morvan, DP 1907, I, 141, rap. Potier ; S., 1907, I,
273, n. A. Wahl : « Malgré la généralité des termes de l’art. 2262 C. civ., qui décide que toutes les
actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par trente ans, ce texte ne s’applique pas à
l’action en revendication intentée par le propriétaire dépossédé de son immeuble » (l’action en
revendication immobilière est imprescriptible). Il aura suffi de l’affirmer pour le démontrer.
(2403) V. supra, no 388.
(2404) V. Droit des obligations, coll. Droit civil. Cette distinction fut proposée par Y. LOUSSOUARN,
« La condition d’erreur du solvens dans la répétition de l’indu », RTD civ. 1949, p. 212.
(2405) V. Droit des sûretés, coll. Droit civil.
(2406) Cass. ch. réunies, 13 févr. 1930, Jand’heur, DP 1930, I, 57, rap. Le Marc’Hadour, concl.
P. Matter, n. G. Ripert ; S., 1930, I, 121, n. P. Esmein : le principe s’applique, que la chose comporte
ou non un vice inhérent à sa nature, qu’elle soit ou non actionnée par la main de l’homme, qu’elle soit
meuble ou immeuble, dangereuse ou non, mobile ou inerte.
(2407) L. JOSSERAND, « Le travail de refoulement de la responsabilité du fait des choses inanimées »,
DH 1930, chr. 5.
(2408) La distinction entre empêchement de fait et empêchement de droit (auquel l’adage aurait dû se
limiter) fut défendue en matière civile par Duranton (Cours de droit français suivant le Code civil,
t. XXI, 1837, no 324, p. 546) puis par Aubry et Rau (Cours de droit civil français, 6e éd., par
P. Esmein, t. II, 1935, § 214, p. 467 et s.) et, en matière pénale, par Faustin Hélie (Traité de
l’instruction criminelle, 2e éd., 1866, t. II, no 1072, p. 694 et 698). Mais la force majeure fut
constamment admise parmi les causes de prorogation des délais (Cass. req., 5 août 1817, S. chr.
1815-1818, 1, 358 ; Cass. crim., 8 juill. 1858, DP 1858, 1, 431).
(2409) Au XIXe siècle, la Cour de cassation se refusait encore à ajouter des causes personnelles de
relèvement de déchéance aux art. 2251 et s. C. civ., en se fondant sur l’intention limitative du
législateur – qu’elle venait pourtant de trahir en réintroduisant l’adage en droit positif – (Cass. req.,
31 déc. 1866, S., 1867, I, 153, n. A. Boulanger ; DP 1867, I, 350). L’obstacle est tombé (ex. :
Cass. 2e civ., 10 févr. 1966, D. 1967, 315 ; Cass. 1re civ., 18 févr. 1992, Bull. civ. I, no 54).
(2410) J.-L. BERGEL, « Différence de nature (égale) différence de régime », RTD civ. 1984, p. 272,
cité par J.-L. SOURIOUX, « Cent ans d’articles (de la RTD civ.) », RTD civ. 2002, p. 681, spéc. p. 688.
(2411) J.-L. BERGEL, Théorie générale du droit, Dalloz, 4e éd., 2003, nos 180 s., p. 209 s. (« Concepts
et catégories juridiques »).
(2412) G. Ripert qualifia la thèse de L. Josserand de « soviétique », lequel lui reprocha de l’avoir
présenté comme un « apôtre du bolchévisme en France ». Les autres auteurs exprimèrent des
critiques plus techniques (v. supra, no 53, en note).
(2413) E. THALLER, Traité élémentaire de droit commercial, 8e éd. par J. Percerou, 1931, no 294,
p. 215 et la note : « La jurisprudence a en elle une foi inébranlable, elle n’a pas l’air de
soupçonner seulement les autres constructions que lui oppose la doctrine ».
(2414) Cette controverse a connu son épilogue. Cf. J. CARBONNIER, Droit civil. Les biens, 1re éd.,
1956, rééd. 2004, no 834, p. 1792 : « Un arrêt pourrait rendre vaines, désormais, toutes les
constructions doctrinales : [...] c’est un principe sans texte qui est le fondement de la solution,
une coutume savante autoproclamée » (à propos de Cass. 2e civ., 13 nov. 1986, Bull. civ. II, no 172 :
« Vu le principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage »). V.,
dès avant, R. RODIÈRE, obs. in RTD civ. 1965, p. 642 : la théorie des troubles du voisinage révèle,
« face aux incertitudes de la doctrine, la constance de la jurisprudence ».
(2415) D. FOUSSARD, « Le juge et la doctrine. Le regard d’un avocat aux conseils », Droits 1994,
no 20, « Doctrine et recherche en droit », p. 133, spéc. p. 136.
(2416) Ex. : après avoir soutenu que la responsabilité du fait des choses reposait sur une présomption
de faute de surveillance édictée à l’encontre du gardien, H. Capitant (« Les fluctuations de la théorie
de la responsabilité du dommage causé par le fait des choses inanimées (article 1384, al. 1, du Code
civil »), DH 1927, chr. 49), dut abandonner cette opinion (in DH 1930, chr. 29, spéc. p. 32) démentie
une nouvelle fois par l’arrêt Jand’heur.
(2417) G. THUILLIER, Vº Obsolescence des travaux juridiques et Penser par soi-même en droit, in
Dictionnaire de la culture juridique, Lamy-PUF, 2003, p. 1102 et 1145.
(2418) V. Droit des obligations, coll. Droit civil.
(2419) V. Droit des personnes, coll. Droit civil.
(2420) Ph. MALAURIE, « Les éclipses du droit », Études offertes à Cl. Lombois, PU Limoges, 2004,
p. 27.
(2421) A. TOUFFAIT (ancien procureur général près la Cour de cassation), « Conclusions d’un
praticien (à une étude comparative des cours judiciaires suprêmes) », RID comp. 1978, p. 473, spéc.
p. 484 : « Il n’y a que les noms de quelques professeurs, qu’on compte sur les doigts d’une seule
main, qui passent la rampe dans une discussion à la Cour de cassation et aucun dont l’autorité
serait invoquée dans un arrêt ».
(2422) Ex. : B. CHENOT (commissaire du gouvernement), concl. sous CE, 10 févr. 1950, Gicquel, Rec.
CE, p. 100. Réplique : J. RIVERO, « Apologie pour les faiseurs de système », D. 1951, chr. 99.
(2423) Ex. : S. GUINCHARD, « Le droit a-t-il encore un avenir à la Cour de cassation ? (Qui cassera les
arrêts de la Cour de cassation ?) », Mélanges Fr. Terré, « L’avenir du droit », Dalloz, PUF, éd. Juris-
classeur, 1999, p. 761. L’arbitraire judiciaire et l’instabilité de la jurisprudence font le miel des
chroniques d’humeur (v. par ex. les articles de Ph. CONTE et Ph. LANGLOIS, cités supra, no 415, en
note).
(2424) Deux exemples de réactions indignées de conseillers à la Cour de cassation : 1o) « zéro
pointé » donné par un professeur à la Cour de cassation dans le titre d’une note d’arrêt ; 2o) la
« bévue » reprochée à cette même Cour qui, dans ce dernier cas, opéra un revirement). Cf. obs.
R. LIBCHABER, RTD civ. 2000, p. 679.
(2425) Y. GUENZOUI, « Les querelles doctrinales », RTD civ. 2013, p. 47, qui illustre, par de
nombreux exemples, l’arrogance et l’agressivité de certains universitaires.
(2426) La déclaration fut signée par 237 universitaires (cf. A. BÉNABENT, D. 2002, 651 ; R. LIBCHABER,
RTD civ. 2002, p. 608).
(2427) Une lettre ouverte contre le mariage des couples de même sexe fut adressée par 170
universitaires aux sénateurs. Sur la controverse qui s’ensuivit : P. BRUNET et al., D. 2013, chr. 784 ;
B. DAUGERON et al., D. 2013, chr. 933 ; Ph. BRUN, JCP G, 2013, 404.
(2428) Ainsi, après l’arrêt Perruche rendu par la Cour de cassation le 17 nov. 2000 (v. supra,
no 306).
(2429) Sur l’inflation doctrinale, v. supra, nº 427, 3º.
(2430) Cass. civ., 16 juin 1896, DP 1897.1.433, concl. L. Servant, n. R. Saleilles ; S. 1898.1.17,
n. A. Esmein.
(2431) En 1680, Bossuet prêcha les sœurs visitandines : « mes bien chères sœurs, ne soyez pas trop
subtiles ».
(2432) Ph. MALAURIE, « Du nouveau dans la doctrine civiliste : Virevoltes et masques », avec la
réponse de Jacques Ghestin, Droit et patrimoine, sept. 2009, p. 20.
(2433) Ph. MALAURIE, « La pensée juridique du droit civil au XXe siècle », JCP G, 2001.I.283, spéc.
no 7 ; Anthologie de la pensée juridique, Cujas, 2e éd., 2001, p. 255.
(2434) M. PLANIOL, Traité élémentaire de droit civil, 1re éd., t. I, 1900, Préface, p. IX : « Quand le
code était nouveau, l’École avait ses opinions qu’elle enseignait, et souvent chaque professeur
avait les siennes ; de son côté, la jurisprudence cherchait un peu à l’aventure la solution des
questions qu’on lui donnait à résoudre. Ainsi s’est formée dans nos Facultés une doctrine
originale, mais rarement suivie en pratique [...]. Nous avons mieux à faire : nous pouvons suivre
la jurisprudence dans son développement historique, montrer comment des constructions
considérables, élevées à la longue par l’accumulation des arrêts, ont parfois une base fragile
et sont sorties de solutions inexactes, de règles mal comprises ou de formules trop larges ou trop
étroites ». Adde A. ESMEIN, « La jurisprudence et la doctrine », RTD civ. 1902, p. 5, spéc. p. 11 : « Il
faut que la doctrine aille plus loin et prenne la jurisprudence pour son principal objet d’étude ».
Sur ce débat, v. supra, no 135.
(2435) Ph. MALAURIE, Rapport français (droit civil), TAHC, t. XXXI, « Les réactions de la doctrine à
la création du droit par les juges », Economica, 1982, p. 81, spéc. no 24, p. 92-93 : lorsque la
doctrine approuve au lieu de critiquer, il y a « une entente profonde entre la doctrine et la
jurisprudence, un échange constant, une interaction, voire un chassé-croisé ».
(2436) Certains auteurs (par exemple, au XIXe siècle, Bartin) font dire aux arrêts le contraire de ce
qu’ils affirment.
(2437) P.-Y. GAUTIER, « Les articles fondateurs (réflexions sur la doctrine) », Études P. Catala, « Le
droit privé français à la fin du XXe siècle », Litec, 2001, p. 295.
(2438) B. OPPETIT, « Le droit international privé, droit savant », RCADI 1992, t. III, p. 331 ; « Droit
commun et droit européen », Études Y. Loussouarn, Dalloz, 1994, p. 311. Sur la lex mercatoria,
d’origine essentiellement doctrinale, v. supra, no 45.
(2439) Sur le droit romain et le droit canonique, v. supra, nos 91-92.
(2440) Ex. : Y. LEQUETTE, « Du Code civil européen à la révision de l’acquis communautaire. Quelle
légitimité pour l’Europe ? », in L’amorce d’un droit européen du contrat, dir. D. Mazeaud et al., Sté
lég. comp. 2011. Adde P. Puig, obs. RTD civ. 2012, 443 : « un droit sans âme, un droit sans culture,
venu d’ailleurs et de nulle part, un droit « a-culturel », « a-philosophique », un droit marchand qui
aura bien mérité son triple « A » au tableau d’honneur du déclin du droit ».
(2441) B. FAUVARQUE-COSSON, « Le rôle de la doctrine en droit privé européen », Études G. Viney,
LGDJ, 2008, p. 419 ; du même auteur et sur le même sujet, articles in D. 2010, chr. 1362 et D. 2012,
chr. 34 ; B. FAUVARQUE-COSSON et P. DEUMIER, « Un nouvel instrument de droit souple international, le
projet de Principes de La Haye sur le choix de la loi applicable en matière de contrats
internationaux », D. 2013, 2185.
(2442) Sur le « droit commun » en droit romain et jusqu’à la Renaissance, v. supra, no 98.
(2443) B. FAUVARQUE-COSSON et M. BÉHAR-TOUCHAIS, Mise en œuvre des instruments optionnels dans
le domaine du droit civil en Europe, Parlement européen, Direction générale des politiques internes,
2012.
(2444) Cass. req., 15 juin 1892, Patureau-Miran c/Boudier, DP 1892, 1, 596 ; S., 1893, 1, 281,
n. J.-E. Labbé.
(2445) Ch. AUBRY et Ch. RAU, Cours de droit civil français d’après la méthode de Zachariæ, 4e éd.,
t. VI, 1873, § 578-4o, p. 246.
(2446) V. aussi les exemples cités à propos des distinctions doctrinales, supra, no 431.
(2447) B. GOLDMAN, La détermination du gardien responsable du fait des choses inanimées, thèse,
Lyon, 1946, no 143, p. 220.
(2448) Cass. 2e civ., 5 janv. 1956, aff. de l’Oxygène liquide, D. 1957, 261 ; JCP, 1956.II.9095 ;
Cass. 2e civ., 10 juin 1960, JCP, 1960.II.11824 ; D. 1960, 609 (v. Droit des obligations, coll. Droit
civil).
(2449) Y. LEQUETTE, L’influence de l’œuvre d’Henri Batiffol sur la jurisprudence française,
Travaux du comité de droit international privé, 1991-1992, Pédone, 1994, p. 32. Adde P. MAYER,
Rapport français (droit international privé), TAHC, t. XXXI, « Les réactions de la doctrine à la
création du droit par les juges », Economica, 1982, p. 385, spéc. p. 389 : la doctrine porte
aujourd’hui un jugement « très laudatif » sur la jurisprudence française qui a fait preuve de beaucoup
de hardiesse ; au contraire, au XIXe siècle, Pillet et Bartin, mécontents de ne pas voir leurs thèses
consacrées, s’étaient montrés fort critiques.
(2450) V. Droit des régimes matrimoniaux, coll. Droit civil.
(2451) V. Droit des régimes matrimoniaux, coll. Droit civil.
(2452) V. Droit de la famille, coll. Droit civil. Sur le « non-droit », v. supra, no 26.
(2453) J. FLOUR, « Sur une notion nouvelle de l’authenticité », Defrénois 1972, art. 30159, p. 977.
L’auteur doutait de la régularité d’une pratique répandue chez les notaires consistant à laisser un clerc
donner lecture de l’acte et recueillir la signature des parties. Devant l’inquiétude suscitée, l’art. 10
L. 25 ventôse an XI fut modifiée par la L. 25 juin 1973 et l’art. 11 D. 26 nov. 1971 par le D. 28 déc.
1973 pour autoriser cette commodité.
(2454) J. FOYER, « Le droit communautaire, droit de professeurs français ? », Rev. hist. fac. dr. 1992,
p. 201.
(2455) Ph. MALAURIE, « La réforme de la prescription civile », JCP G, 2008, I, 134. En dernier lieu,
J. KLEIN, Le point de départ de la prescription, th. Paris II, Economica, 2013, préf. N. Molfessis : le
droit français est présenté comme un contre-modèle.
(2456) Sur cette organisation juridictionnelle, v. infra, no 401.
(2457) Cf. G. CANIVET, « Des “professeurs-juges” aux “juges-professeurs” », Mélanges A. Ponsard,
Litec, 2003, p. 115. Aubry et Rau furent les troisième et quatrième professeurs à devenir conseillers à
la Cour de cassation en 1871. P. Lescot (1942), A. Ponsard (1973) et D. Tricot devinrent présidents
de chambre. La Cour compte environ 6 professeurs sur environ 120 conseillers et parfois 1 ou 2
autres dans les rangs du parquet général.
(2458) P. DEUMIER, « Les motifs des motifs des arrêts de la Cour de cassation », Mélanges J.-F.
Burgelin, Dalloz, 2008, p. 125.
(2459) Ex. : Cass. crim., 13 déc. 1956, Laboube, D. 1957, 349, n. M. Patin. Maurice Patin était le
président de la chambre criminelle dont il annotait volontiers les arrêts importants en signant de ses
initiales. Sur les controverses doctrinales qui peuvent naître d’arrêts de rejet pour non-admission,
dénués de tout motif, ensuite expliqués par des conseillers à la Cour de cassation, v. supra, no 175, en
note.
(2460) Biblio. : L’image doctrinale de la Cour de cassation (colloque déc. 1993), Doc. fr., 1994 ;
G. CANIVET (ancien Premier président de la Cour), « La Cour de cassation et la doctrine. Effets
d’optique », Mélanges J.-L. Aubert, Dalloz, 2005, p. 373, qui relativise l’objectivité et le crédit de
la doctrine ; G. CANIVET et N. MOLFESSIS, « La politique jurisprudentielle », Mélanges J. Boré,
Dalloz, 2007, p. 80 ; Ph. MALAURIE, « Le style des "cours suprêmes françaises" », JCP G, 2012, 689.
Sur la « doctrine » supposée de la Cour de cassation : R. LIBCHABER, RTD civ. 2000, p. 197 ;
N. MOLFESSIS, RTD civ. 2003, p. 567 ; P. DEUMIER, RTD civ. 2006, p. 73.
(2461) Chr. ATIAS, « L’ambiguïté des arrêts de principe en droit privé », JCP G, 1984.I.3145, spéc.
no 1 : les arrêts de principe sont « des décisions univoques, dénuées d’ambiguïté, tranchant
nettement et solennellement, c’est-à-dire durablement, le débat entre deux opinions à valeur
générale, soutenues ou soutenables ».
(2462) 1er ex. : Cass. req., 28 déc. 1826, S., chr. 1825-1827, 1, 492 ; Cass. civ., 4 juin 1904, DP
1904, 1, 475 ; S., 1905, 1, 93 ; Cass. 1re civ., 11 juill.1984, Bull. civ. I, no 227, qui s’appuient sur le
« principe que nul ne peut se faire justice à soi-même » pour étendre les effets de l’action
possessoire en réintégrande. 2e ex. : Cass. civ., 7 mars 1855, DP 1855, 1, 81 ; S., 1855, 1, 439, qui
justifie par une dissertation juridique de 39 lignes (au Dalloz) d’une étonnante portée doctrinale
l’admission du principe de l’autorité absolue de la chose jugée au pénal sur le civil (not. : « L’ordre
social aurait à souffrir d’un antagonisme qui, en vue seulement d’un intérêt privé, aurait pour
résultat d’ébranler la foi due aux arrêts de la justice criminelle »).
(2463) Cass. ch. mixte, 30 avr. 1971, JCP G, 1971.II. 16800, n. R. Lindon ; Cass. Ass. plén., 21 déc.
2006, JCP G, 2007.II.10016 ; n. H. Guyader.
(2464) Depuis : Cass. com., 1er avr. 2008, no 06-20940, inédit.
(2465) Concernant la Cour de cassation, cf. P. DEUMIER, obs. in RTD civ. 2006, p. 510 (pour un ex. de
communiqué à portée doctrinale : P. MORVAN, obs. sous Cass. soc., 11 janv. 2006, JCP S, 2006,
1136 ; RTD civ. 2005, p. 773).
(2466) CE, 9 nov. 2005, Mortry, Dr. adm. 2006, comm. 9.
(2467) N. MOLFESSIS, « Les avis spontanés de la Cour de cassation », D. 2007, chr., 37 (au sujet de
deux séries de questions soulevées par la L. 26 juill. 2005 et le D. 28 déc. 2005 réformant le droit
des procédures collectives).
(2468) Sur la procédure de saisine pour avis, v. supra, no 47.
(2469) Trésor de la langue française (CNRS), Vo « Raisonnement » : http://atilf.atilf.fr.
(2470) Sur la loi, v. supra, no 275.
(2471) Sur la thèse en ce sens de MM. Jestaz et Ch. Jamin, v. supra, no 420.
(2472) P. MORVAN, « La notion de doctrine (à propos du livre de MM. Jestaz et Jamin) », D. 2005,
chr., 2421. Comp. Fr. TERRÉ, « La doctrine de la doctrine », Études Ph. Simler, Dalloz, Litec, 2006,
p. 59, qui adopte cette analyse (p. 74 : la doctrine « peut être comprise comme un corpus [...]
d’œuvres ») en notant que Jean Carbonnier lui-même définissait la doctrine comme la « littérature du
droit ». L’« écrit doctrinal » est précisément celui qui compose la « littérature du droit » ; ce statut
n’est pas donné à tout le monde. V. aussi D. BUREAU et N. MOLFESSIS, « L’asphyxie doctrinale »,
Études B. Oppetit, Litec, 2009, p. 45, spéc. no 28 : « nombre de publications ne peuvent prétendre,
et ne le revendiqueraient probablement pas, au statut d’écrits doctrinaux. L’information n’est pas
l’opinion ».
(2473) V. par ex. M. DOAT, « L’ordre du discours doctrinal », Études J.-A. Mazières, LexisNexis
Litec, 2009, p. 275 : reprenant l’approche de Michel Foucault (L’ordre du discours, 1971), l’auteur
juge que le discours doctrinal est « discipliné » par des interdits et des frontières et « formé », c’est-
à-dire qu’il revêt une forme « parfaite » et « lissée » (lissage qui neutralise la controverse et
l’éloigne du réel).
(2474) Étymologie : du latin interpres, etis = intermédiaire, courtier, puis celui qui explique ; lui-
même dérivé de inter (= entre) + un verbe latin probablement disparu signifiant acheter (-pres
s’apparente à pretium = le prix). Biblio. Sélective : L’interprétation dans le droit, Arch. phil. dr.,
t. XVII, Sirey, 1972 ; TAHC, t. XXXIX, 1978 ; L’interprétation en droit. Approche
pluridisciplinaire, sous la dir. de M. van de Kerchove, Bruxelles, Facultés universitaires Saint-
Louis, 1978 ; Y. PACLOT, Recherches sur l’interprétation juridique, th. Paris II, 1988 ; La découverte
du sens en droit, ARSP (Archiv für Rechts und Sozialphilosophie) 1992, no 48, Franz Steiner Verlag
Stuttgart, 1992, p. 61 (spéc. Y. Paclot, p. 51, sur l’histoire ; B. Oppetit, p. 61 ; J.-L. Bergel, p. 67) ;
J. CARBONNIER, Sociologie juridique, PUF, 2e éd., 2004, p. 267 (l’interprétation comme phénomène
sociologique) ; Interprétation et Droit, sous la dir. de P. Amselek, Bruylant, PU d’Aix-Marseille,
1995.
(2475) H. KELSEN, Théorie pure du droit, 2e éd., 1960, trad. Ch. Eisenmann, Dalloz, 1962, rééd.
Bruylant, LGDJ, 1999, spéc. p. 453 : « Si un organe juridique doit appliquer le droit, il faut
nécessairement qu’il interprète ces normes. L’interprétation est donc le processus intellectuel qui
accompagne nécessairement le processus d’application du droit dans sa progression d’un degré
supérieur à un degré inférieur ».
(2476) PORTALIS, Discours préliminaire, in Locré, t. I, p. 257-258 : « Quoi que l’on fasse, les lois
positives ne sauraient jamais entièrement remplacer l’usage de la raison naturelle dans les
affaires de la vie. Les besoins de la société sont si variés, la communication des hommes est si
active, leurs intérêts sont si multipliés, et leurs rapports si étendus, qu’il est impossible au
législateur de pourvoir à tout. [...]. Un Code, quelque complet qu’il puisse paraître, n’est pas plus
tôt achevé que mille questions inattendues viennent s’offrir au magistrat. Car les lois, une fois
rédigées, demeurent telles qu’elles ont été écrites. Les hommes, au contraire, ne se reposent
jamais ; ils agissent toujours ; et ce mouvement qui ne s’arrête pas, et dont les effets sont si
diversement modifiés par les circonstances, produit à chaque instant quelque combinaison
nouvelle, quelque nouveau fait, quelque résultat nouveau. Une foule de choses sont donc
nécessairement abandonnées à l’empire de l’usage, à la discussion des hommes instruits, à
l’arbitrage des juges ».
(2477) Ph. MALAURIE, « L’interprétation des contrats hier et aujourd’hui », JCP G, 2011, 1402.
(2478) V. en ce sens la « théorie réaliste de l’interprétation du droit » de Michel Troper (supra,
nº 270, 2º). Adde P. WACHSMANN, « La volonté de l’interprète », Droits 1999, p. 29 ; du même,
« Réflexions sur l’interprétation “globalisante” de la Convention EDH », Mélanges J.-P. Costa,
Dalloz, 2013, p. 667.
(2479) H. BATIFFOL, « Questions de l’interprétation juridique », in Choix d’articles, LGDJ, 1976,
p. 408, spéc. p. 416, souligne cette dualité d’acceptions.
(2480) DESCARTES, Discours de la méthode, Première partie : « Le bon sens est la chose du monde
la mieux partagée [...]. La puissance de bien juger, et distinguer le vrai d’avec le faux, qui est
probablement ce que l’on nomme le bon sens, ou la raison, est naturellement égale en tous les
hommes ».
(2481) B. FRYDMAN, Le sens des lois. Histoire de l’interprétation et de la raison juridique,
Bruylant, LGDJ, 3e éd., 2011, qui schématise l’histoire en modèles rhétorique, biblique, patristique,
scolastique, géométrique, philologique, sociologique et économique, avant le tournant linguistique et
le modèle pragmatique au XXe siècle.
(2482) V. supra, no 136.
(2483) Sur la critique historiciste et scientifique, v. supra, no 137.
(2484) V. supra, nos 334 et s.
(2485) V. supra, no 270.
(2486) Biblio. sélective : Interpréter et traduire, Bruylant, 2007 ; Traduction du droit et droit de la
traduction, Dalloz, coll. Thèmes & commentaires, 2011 ; S. GLANERT, De la traductibilité du droit,
thèse, Dalloz, 2011.
(2487) Ph. MALAURIE, « Le droit français et la diversité des langues », JDI 1965, p. 565. Cass. com.,
25 juin 1968, Bull. civ. IV, no 203 (deux arrêts) ; JDI 1969, p. 96, n. Ph. Kahn : « La traduction d’un
contrat rédigé en langue étrangère comporte de la part de la cour d’appel une interprétation qui
relève de son pouvoir souverain ». Limite : Cass. 1re civ., 19 mars 1991, Bull. civ. I, no 93, censurant
la dénaturation des termes clairs et précis de la loi étrangère applicable tels qu’ils résultaient d’une
traduction française établie par deux traducteurs assermentés.
(2488) Cass. crim., 19 oct. 1984, Bull. crim., no 310 : le juge d’instruction pose une « question
d’ordre technique » rendant applicables les règles sur l’expertise pénale (C. pr. pén., art. 156 et s.)
lorsqu’il demande à un traducteur de traduire un document en français et, en outre, s’il s’avère
impossible de donner une « traduction littérale », de donner « le sens général du texte ». Adde
Y. PACLOT, op. cit., nos 459 et s.
(2489) V. aussi la difficulté de traduire des adages ou locutions latins dans les différentes langues
européennes : P. DUPARC PORTIER et A. MASSON, « La traduction du latin à la CJCE », RRJ 2008,
p. 2249 (constatant qu’il existe « différents latins »...).
(2490) R. DAVID, « Les sources du Code civil éthiopien », RID comp. 1962, p. 497.
(2491) Cons. const., 30 nov. 2012, décis. nº 2012-285 QPC, Dr. adm. 2013, 12, n. F. Hoffmann (à
propos de deux articles du Code des professions, issu d’une loi du 26 juillet 1900 de l’empire
allemand, qui imposaient aux artisans l’affiliation à une corporation). Une version officielle en
langue française des lois et règlements de droit local maintenus en vigueur a ensuite été publiée
(D. 14 mai et 27 août 2013). Autre conséquence inattendue : le délit de blasphème a été
implicitement abrogé (v. supra, nº 278).
(2492) Sur l’ordonnance de Villers-Cotterêts, v. supra, no 104.
(2493) Ex. : Cass. com., 27 nov. 2012, Bull. civ. IV, nº 213 : « si l'ordonnance de Villers-Cotterêts
d'août 1539 ne vise que les actes de procédure, le juge, sans violer l'article 6 de la Convention
[EDH], est fondé, dans l'exercice de son pouvoir souverain, à écarter comme élément de preuve un
document écrit en langue étrangère, faute de production d'une traduction en langue française ».
(2494) Cass. 2e civ., 11 janv. 1989, Bull. civ. II, nº 11 : « à peine de nullité, tout jugement doit être
motivé en langue française » (l’arrêt vise « l’article 111 de l’ordonnance d’août 1539 »).
(2495) Cass. crim., 8 févr. 2012, Bull. crim., nº 39 : « tout avocat, même de nationalité étrangère,
plaidant devant les juridictions répressives françaises, est tenu de le faire en français, seule
langue de procédure admise ».
(2496) N. KANAYAMA, « Qu’est-ce que le “civil” ? De la Révolution française au Code civil »,
Mélanges Ph. Jestaz, Dalloz, 2006, p. 273, qui cite le rapport de l’abbé Grégoire « sur la nécessité
et les moyens d’anéantir les patois et d’universaliser l’usage de la langue française » présenté le
4 juin 1794, en pleine Terreur, au nom du Comité d’instruction publique.
(2497) Biblio. sur le droit de la langue : Ph. MALAURIE, « Le droit français et la diversité des
langues », JDI 1965, p. 565 ; C. H. TESTUT, « Le statut juridique de la langue française », Études
G. Cornu, PUF, 1994, p. 441 et s. ; Y. CLAISSE, « Le droit et la langue française », LPA, 22 avr. 1994,
no 48, p. 19 ; J. JULIEN, « La langue française et le contrat », Mélanges Ph. Le Tourneau, Dalloz,
2008, p. 465. La loi « Toubon » du 4 août 1994 impose l’usage du français sous peine de sanctions
pénales (par exemple, dans le contrat de travail ou les conventions collectives : C. trav., art. L. 1221-
3 et L. 2231-4). Demeure aussi en vigueur le décret du 2 thermidor an II (20 juill. 1794) portant que
nul acte public ne pourra être écrit qu’en langue française.
(2498) A. SUPIOT, « Les langues de travail », Semaine sociale Lamy 3 mars 2008, no 1343, p. 6, à
propos de CJCE, 12 sept. 2000, Geffroy, aff. C. 366/98, D. 2001, 1458, note J.-M. Pontier, qui exclut
« qu'une réglementation nationale [...] impose l'utilisation d'une langue déterminée pour
l'étiquetage des denrées alimentaires, sans retenir la possibilité qu'une autre langue facilement
comprise par les acheteurs soit utilisée ou que l'information de l'acheteur soit assurée par
d'autres mesures » (des agents de la DGCCRF avaient dressé procès-verbal dans un supermarché à
l’encontre de bouteilles de soda et de « cider » étiquetées en langue anglaise, dont il est difficile de
croire qu’elle est « facilement comprise par les acheteurs » français).
(2499) Sur l’attractivité du droit, v. supra, no 34.
(2500) G. GUILLAUME, « De l’emploi des langues à la Cour internationale de Justice », Mélanges
J. Salmon, Bruylant, 2007, p. 1277. L’art. 39 du Statut de la CIJ dispose que « les langues officielles
de la Cour sont le français et l’anglais ». La tradition, qui simplifie la procédure, est encore
respectée.
(2501) Fr. de FONTETTE, « C’est le français qu’on assassine », Mélanges P. Drai, Dalloz, 2000,
p. 555.
(2502) Sur la « novlangue », v. supra, nº 10, 2º.
(2503) V. KLEMPERER, LTI – Lingua Tertii Imperii : Notizbuch eines Philologen (la langue du
IIIe Reich : carnet d'un philologue), 1947. Le titre est ironique puisqu’il désigne aussi la novlangue
nazie par un acronyme (LTI). V. aussi, Chr. DELPORTE, Une histoire de la langue de bois, Flammarion,
2009.
(2504) Ordonnance civile d’avril 1667 « touchant la réformation de la justice » (Recueil général des
anciennes lois françaises, t. XVIII, 1829), Tit. I, art. 7 : « Si dans les jugements des procès qui
seront pendants en nos cours de parlements et autres nos cours, il survient aucun doute ou
difficulté pour l’exécution de quelques articles de nos ordonnances, édits, déclarations et lettres-
patentes, nous leur défendons de les interpréter, mais voulons qu’en ce cas elles aient à se retirer
par-devers nous pour apprendre ce qui sera notre intention ».
(2505) L. 16-24 août 1790 « sur l’organisation judiciaire », Titre II, art. 12 : « Ils (les juges)
s’adresseront au corps législatif toutes les fois qu’ils croiront nécessaire d’interpréter la loi ».
Biblio. : Y. HUFTEAU, Le référé législatif et les pouvoirs du juge dans le silence de la loi, PUF,
1965 ; J.-L. HALPÉRIN, « Le Tribunal de cassation sous la Révolution (1790-1799) », in Le Tribunal
et la Cour de cassation. 1790-1990. Volume jubilaire, Litec, 1990, p. 25 ; M. LEMOSSE, « La Cour de
cassation au XIXe siècle », ib., p. 53.
(2506) À partir du Directoire, le Tribunal de cassation annula de nombreux jugements de référé
législatif en relevant que le sens de la loi s’avérait « clair et précis » et n’appelait donc « aucune
interprétation ». En outre, il estimait que le référé ne pouvait porter que sur des « questions
générales et indéterminées » (ex. : Trib. cass., 21 fructidor an VII : la disposition de l’art. 12 L. 16-
24 août 1790 « n’est relative qu’à des questions générales et indéterminées, et ne peut être étendue
aux affaires particulières dont les tribunaux sont saisis »).
(2507) V. supra, no 404.
(2508) Le référé avait encore lieu si, après deux cassations identiques, le tribunal ou la cour de
renvoi rejetait une nouvelle fois la position de la Cour de cassation. La loi du 30 juillet 1828 accorda
le dernier mot à la juridiction de renvoi.
(2509) La L. 1er avril 1837 décide qu’en cas de second pourvoi, la Cour de cassation pourra imposer
une solution définitive à la juridiction de renvoi par un arrêt rendu « toutes les chambres réunies »
(en Assemblée plénière, depuis la L. 3 juill. 1967).
(2510) V. supra, no 302.
(2511) V. supra, no 354.
(2512) V. supra, no 358.
(2513) M. VILLEY, Préface in Arch. phil. dr., t. XVII, « L’interprétation dans le droit », Sirey, 1972,
p. 6 : « Il y a bien entendu (en droit romain) d’autres signes que les signes écrits : l’augure romain
interprétait le vol des oiseaux, et l’aruspice, les viscères des bêtes sacrifiées où seraient les signes
du destin. De même, le juriste romain interprète, en l’absence d’écrit (sine scripto), dans le livre
qu’est la nature, les institutions et les mœurs de la société (mores populi romani) dans lesquelles
se déchiffre le plan d’un ordre naturel ».
(2514) M. TROPER, Vo Interprétation, Dictionnaire de la culture juridique, Lamy-PUF, 2003, p. 843,
spéc. p. 845.
(2515) V. infra, nos 452 s.
(2516) V. supra, nos 334 et s.
(2517) V. supra, no 337.
(2518) Sur ce débat, à propos des conventions collectives de travail, v. supra, no 357.
(2519) Le principe est consacré en procédure civile par les art. 49, 50 et 51 C. pr. civ., en procédure
administrative par l’art. R. 48 C. trib. adm. et en procédure pénale par les art. 384, 522 C. pr. pén. et
l’art. 111-5 C. pén. (v. ci-dessous).
(2520) V. supra, no 336.
(2521) Ex. : C. civ., art. 29, al. 2 : « Les questions de nationalité sont préjudicielles devant toute
autre juridiction de l’ordre administratif ou judiciaire à l’exception des juridictions répressives
comportant un jury criminel ».
(2522) Pour une vue d’ensemble : H. SOLUS et R. PERROT, Droit judiciaire privé, t. II, La compétence,
Sirey, 1973, nos 453 et s. ; R. MERLE et A. VITU, Traité de droit criminel. Procédure pénale, Cujas,
5e éd., 2001, nos 712 et s. ; R. CHAPUS, Droit du contentieux administratif, Montchrestien, 11e éd.,
2004, nos 312 et s.
(2523) V. supra, no 164.
(2524) ** T. confl., 16 juin 1923, Septfonds, S., 1923, III, 49, n. M. Hauriou ; DP 1924, III, 41, concl.
P. Matter : « S’il (l’acte réglementaire) constitue un acte administratif en raison du caractère des
organes dont il émane, et si, dès lors, à ce titre, il appartient à la juridiction administrative seule
d’en contrôler la légalité, il participe du caractère de l’acte législatif, puisqu’il contient des
dispositions d’ordre général et réglementaire et qu’à ce dernier titre les tribunaux judiciaires
chargés de l’appliquer sont compétents pour en fixer le sens, s’il se présente une difficulté
d’interprétation au cours d’un litige dont ils sont compétemment saisis ».
(2525) T. confl., 16 nov. 1964, Clément, D. 1965, 669, en sous-note ; JCP G, 1965.II.14286
(1re esp.) ; AJDA, 1965, p. 221.
(2526) Cass. com., 6 mai 1996, Bull. civ. IV, no 125 ; AJDA 1996, p. 1033, n. M. Bazex ; RFDA 1996,
p. 1168, chr. B. Seiller, p. 1161 : « C’est en se référant à la primauté des principes de droit
communautaire sur le droit national [...] et sans apprécier la légalité de l’art. R. 10-1 du Code des
postes et télécommunications [...] que la cour d’appel a justement décidé que les dispositions de
ce texte réglementaire ne pouvaient faire obstacle au libre exercice de la concurrence » (France
Télécom, à qui l’art. R. 10-1 réserve le monopole de la liste orange, avait reçu injonction du juge
judiciaire de communiquer les noms y figurant à des éditeurs d’annuaires concurrents de celui publié
par l’entreprise publique).
(2527) Ex. : Cass. Ass. plén., 22 déc. 2000, cité supra, no 350, en note ; Cass. civ.1re, 3 avr. 2001,
Bull. civ. I, no 97 : cassation de l’arrêt de la cour d’appel qui a sursis à statuer dans l’attente de la
décision de la juridiction administrative « alors qu'il lui appartenait de dire si les dispositions [de
l’art. 1187 CPC] sont compatibles avec l'article 6.1 de la CEDH [...], a confondu exception de
légalité et exception de conventionalité ».
(2528) T. confl., 19 janv. 1998, Union française de l’Express c/La Poste, D. 1998, 329, concl.
J. Arrighi de Casanova.
(2529) V. supra, no 347.
(2530) T. confl., 17 oct. 2011, SCEA du Chéneau c/INAPORC et M. C. c/CNIEL, D. 2011, 3046, n. F.
Donnat ; RTD civ. 2011, p. 735, obs. P. R.-C. Le Tribunal des conflits fut influencé par l’arrêt rendu
par la Cour de justice (CJUE, 22 juin 2010, Melki et Abdeli) au sujet de la QPC, qui rappela les
obligations du juge national (v. supra, no 334 s.).
(2531) T. confl., 17 oct. 2011, préc. Dans le même sens, Cass. 1re civ., 24 avr. 2013, Dr. adm. 2013,
comm. 57, n. M. Distel.
(2532) CE, 23 mars 2012, Fédération Sud santé sociaux, no 331805, Dr. adm. 2012.56, note
F. Melleray (en l’espèce, la question de la légalité d'une convention collective de travail ne pouvait
être résolue au vu d'une jurisprudence établie et ne mettait pas en cause sa conformité au droit de
l'UE).
(2533) T. confl., 30 oct. 1947, Barinstein, DP 1947, 476, n. P.-L. J. ; JCP, 1947.II.3966, n. M.
Fréjaville ; S., 1948, III, 1, n. A. Mestre ; RDP 1948, p. 86, n. M. Waline. G. VEDEL, « De l’arrêt
Septfonds à l’arrêt Barinstein », JCP, 1948.I.682. La voie de fait, que le juge judiciaire a le pouvoir
de faire cesser par voie d’injonction et de décision ordonnant une réparation, résultait
essentiellement d’une « atteinte grave au droit de propriété ou à une liberté fondamentale » causée
par un acte manifestement insusceptible de se rattacher à l’exercice des pouvoirs que détient
l’administration. Adde C. pr. pén., art. 136, al. 3 et 4 : « [...] dans tous les cas d’atteinte à la liberté
individuelle, [...] les tribunaux de l’ordre judiciaire sont toujours exclusivement compétents »
(texte interprété restrictivement par le Tribunal des conflits. V. par ex. : T. confl., 12 mai 1997, Ben
Salem et Taznaret, D. 1997, 567, n. A. Legrand ; JCP G, 1997.II.22861, rap. P. Sargos ; RFDA 1997,
p. 514).
(2534) Cass. 1re civ., 25 mai 1992, Bull. civ. I, no 163 : « Vu les principes régissant la voie de fait » ;
la Cour de cassation condamne le stratagème de certains juges des référés consistant à omettre la
dernière condition de la voie de fait pour soumettre tout acte administratif manifestement illégal qui
porte atteinte à une liberté au contrôle du juge judiciaire (not. en matière de séjour des étrangers). Le
Tribunal des conflits avait déjà lancé des mises en garde (ex. : T. confl., 4 juill. 1991, Gaudino,
AJDA 1991, p. 737).
(2535) T. confl., 17 juin 2013, Bergoend, JCP G, 2013, 1359, nº 3 (avec toutes les réf.) : la voie de
fait suppose désormais que la décision de l'administration porte une atteinte (dont la gravité n’a plus
à être constatée) à la « liberté individuelle » (et non à toute liberté) ou aboutisse à l’extinction du
droit de propriété (ce qui suppose une perte définitive de ce droit) et qu’elle soit « manifestement
insusceptible d'être rattachée à un pouvoir appartenant à l'autorité administrative » (condition
inchangée) ; tel n’est pas le cas de l’implantation d’un ouvrage public (ici un poteau électrique) sur le
terrain d’une personne privée.
(2536) L’art. 111-5 C. pén. consacre (et étend à plus d’un titre) une jurisprudence de la chambre
criminelle entrée en rébellion contre le Tribunal des conflits (T. confl., 5 juill. 1951, Avranches et
Desmarets, D. 1952, 271 ; JCP, 1951.II.6623 ; S., 1952, 3, 1 : « La compétence de la juridiction
pénale ne connaît de limite [...] que quant à l’appréciation de la légalité des actes administratifs
non réglementaires, [...] réservée à la juridiction administrative en vertu de la séparation des
pouvoirs ». Contra : Cass. crim., 21 déc. 1961, Dame Leroux, D. 1962, 102 ; JCP, 1962.II.12680 ;
S., 1962, 1, 89 ; Cass. crim., 1er juin 1967, Canivet, JCP G, 1968.II.15505). L’art. 111-5 suppose
néanmoins que « la solution du procès pénal » dépende de la légalité de l’acte administratif contesté
(c’est-à-dire que sa violation soit pénalement sanctionnée ou qu’il puisse servir de moyen de
défense). En marge de ce texte, la Cour de cassation permet aussi au juge pénal de contrôler la
validité d’un contrat administratif lorsqu’il constitue un élément constitutif de l’infraction
(Cass. crim., 25 sept. 1995, Bull. crim., no 279).
(2537) Cass. civ., 12 janv. 1938, DH 1938, 197 : est ambiguë la clause « dont la rédaction prêtait à
des interprétations opposées ».
(2538) Contra Ch. PERELMAN, « L’interprétation juridique », in Éthique et droit, Université de
Bruxelles, 1990, p. 742 : la maxime serait inexacte car une règle, même claire, est susceptible
d’interprétation s’il existe des besoins et des intérêts à satisfaire. Cette opinion ne peut être admise
de façon aussi radicale : ainsi, la loi qui prohibe la peine de mort formule une règle claire qui ne
souffre aucune interprétation, fût-elle justifiée par un besoin social.
(2539) Ex. : Cass. civ., 22 nov. 1932, DH 1933, 2 : « Si en principe le recours aux travaux
préparatoires est permis lorsqu’un texte nécessite une interprétation, le juge doit, au contraire, se
l’interdire lorsque le sens de la loi, tel qu’il résulte de sa rédaction, n’est ni obscur ni ambigu et
doit, par conséquent, être tenu pour certain ».
(2540) E. LAFERRIÈRE, Traité de la juridiction administrative, Berger-Levrault, t. I, 1887, p. 448.
(2541) C’est en 1808 (Sect. réunies, 2 févr. 1808, S., chr. an XIII-1808, 1, 480) que la Cour de
cassation a abandonné le contrôle de l’interprétation du contrat aux juges du fond.
(2542) Sur le contrôle de la dénaturation de l’écrit : J. BORÉ et L. BORÉ, La cassation en matière
civile, Dalloz, 3e éd., 2003, nos 79.01 et s. V. aussi supra, no 252.
(2543) Ex. : l’art. 1110 C. civ. érige en cause de nullité du contrat l’erreur « sur la substance même
de la chose » ; le mot « substance » paraît simple à comprendre ; pourtant, son interprétation a suscité
des opinions très diverses (v. Droit des obligations, coll. Droit civil).
(2544) 1er ex. : Cass. 3e civ., 8 oct. 1974, D. 1975, 189 : la clause d’indexation stipulée dans un
contrat prévoyait que l’indice de référence serait de 197 ; la cour d’appel estima qu’il s’agissait
plutôt de l’indice en vigueur au jour du contrat, soit 216 ; le pourvoi lui reprocha d’avoir dénaturé
une clause claire et précise ; la Cour de cassation approuve la cour d’appel qui a retenu, « par une
appréciation souveraine de l’intention commune des parties [...] que la mention de cet indice était
le résultat d’une erreur provenant d’une “rédaction hâtive et maladroite” ». 2e ex., contradictoire
avec le premier : Cass. 1re civ., 5 mars 1968, Bull. civ. I, no 85 : un peintre avait donné un mandat
exclusif de vente à une galerie d’exposition « pour une durée illimitée » ; la cour d’appel estima que
cette expression avait été improprement employée et qu’il fallait comprendre « pour une durée
indéterminée » ; cette fois-ci, la Cour de cassation juge que « l’arrêt attaqué a dénaturé la clause
claire et précise de la convention litigieuse ».
(2545) Ex. : Cass. 1re civ., 4 janv. 1960, Bull. civ. I, no 1. La jurisprudence a été étendue aux
conclusions et assignations.
(2546) Ex. : Cass. com., 24 mars 1965, Bull. civ. IV, no 230.
(2547) V. supra, no 222.
(2548) Ex. : Cass. 1re civ., 28 mai 1974, JCP G, 1975.II.17986, n. M. Dagot ; Cass. 1re civ., 8 mars
1978, Bull. civ. I, no 96.
(2549) Ex. : Cass. soc., 1er mars 1967, Bull. civ. V, no 191 ; Cass. com., 1er juill. 1975, Bull. civ. IV,
no 191.
(2550) J. VOULET, « Le grief de dénaturation devant la Cour de cassation », JCP G, 1971.I.2410,
spéc. no 16 ; A. PERDRIAU, « Visas, “chapeaux” et dispositifs des arrêts de la Cour de cassation en
matière civile », JCP G, 1986.I.3257, spéc. no 44.
(2551) Cass. com., 2 déc. 1986, Bull. civ. IV, no 227 : « Vu l’obligation pour le juge de ne pas
dénaturer les documents de la cause » (en l’espèce, un avis de la Commission de la concurrence).
Le visa se réfère à un principe depuis : Cass. com., 5 avr. 1993, no 89-21236, inédit : « Vu le
principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les éléments de preuve qui lui sont soumis »
(sur les visas de principe, v. supra, no 403). La mutation du visa ne fut pas purement esthétique ; elle
scelle l’unité retrouvée au sein de la Cour de cassation après une longue divergence. Par un arrêt du
7 mars 1961 (Bull. civ. III, no 124), la chambre commerciale avait décidé de ne plus censurer la
dénaturation des écrits qui ne sont pas revêtus de force obligatoire à l’égard du juge ; à défaut d’un
texte imposant leur respect, ils ne constituaient que des éléments de fait abandonnés à l’appréciation
discrétionnaire des juges du fond. Ainsi, la dénaturation des rapports d’expertise (Cass. com.,
7 mars 1961, préc.) ou des lettres missives (Cass. com., 8 nov. 1967, Bull. civ. IV, no 359) bénéficiait
d’une impunité pour ce motif que tout « acte qui ne form(e) pas un contrat entre les parties ne peut
faire l’objet d’un grief de dénaturation » (Cass. com., 21 mai 1973, Bull. civ. IV, no 178). Cette
dissidence prit fin en 1982 (Cass. com., 15 mars 1982, Bull. civ. IV, no 99, qui censure sous le visa de
l’ancien art. 1134 [devenu art. 1103] la dénaturation d’un rapport d’expert). Mais, lors d’un second
assaut, la chambre commerciale tenta d’étrangler la notion de dénaturation en la redéfinissant comme
une « reproduction inexacte », une « altération » formelle des termes d’un écrit et non, de façon plus
large, comme la méconnaissance de sa portée (Cass. com., 9 juill. 1991, Bull. civ. IV, no 251). De
nouveau, la rébellion fit long feu (Cass. com., 31 janv. 1995, JCP G, 1995.II.22385, n. A. Perdriau :
l’arrêt met un terme à cette seconde dissidence).
(2552) H. KELSEN, Théorie pure du droit, trad. Ch. Eisenmann, Dalloz, 1962, p. 330. La conception
allemande fondait la « plénitude logiquement nécessaire de la législation écrite » (die logische
Geschlossenheit des Rechts) sur ce postulat que tout ce qui n’est pas interdit est permis. Or, cette
directive est erronée (v. infra, no 459). Adde A.-G. CONTE, « Décisions, complétude, clôture », in Le
problème des lacunes en droit, Travaux du Centre national de recherches de logique, Bruylant, 1968,
p. 67.
(2553) Cass. req., 13 mai 1824, S., 1822-1824, 1, 460 : lorsque « l’acte paraît n’offrir ni
équivoque, ni obscurité, ni doute (les juges) doivent retenir la cause et la juger » (s’agissant de
l’interprétation d’un acte administratif individuel opérant restitution d’un fonds de commerce
confisqué) ; Cass. civ., 13 déc. 1922, S., 1923, 1, 310 : le juge civil peut interpréter les clauses d’un
contrat administratif « quand elles sont claires et précises ». V. par ailleurs Cass. 1re civ., 19 juin
1985, D. 1985, 426, rap. P. Sargos : « La juridiction de l’ordre judiciaire à qui est opposée une
exception d’illégalité d’un texte réglementaire n’est tenue de surseoir à statuer que si cette
exception présente un caractère sérieux et porte sur une question dont la solution est nécessaire
au règlement du litige ». À ses débuts, le Tribunal de cassation avait mis à profit la théorie de l’acte
clair pour faire échec au système du référé législatif (v. supra, no 442).
(2554) Le juge interne est l’interprète naturel du droit européen. En revanche, la CJUE a seule
compétence pour apprécier la légalité d’un acte émanant d’un organe ou d’une institution de l’Union
européenne (v. supra, no 346).
(2555) Sur les différents recours, v. supra, no 344.
(2556) CJCE, 6 oct. 1982, CILFIT, aff. 283/81, Rec. CJCE, p. 3415 : « L’application correcte du
droit communautaire peut s’imposer avec une évidence telle qu’elle ne laisse place à aucun doute
raisonnable sur la manière de résoudre la question posée. [...] Toutefois, l’existence d’une telle
possibilité doit être évaluée en fonction des caractéristiques propres au droit communautaire, des
difficultés particulières que présente son interprétation et du risque de divergences de
jurisprudence à l’intérieur de la Communauté ».
(2557) Ex. : Cass. crim., 5 janv. 1967, D. 1967, 465 ; Cass. crim., 14 oct. 1992, Bull. crim., no 326 :
« L’application à l’espèce de la réglementation européenne ne soulève aucune difficulté sérieuse
et il n’y a pas lieu, dès lors, d’en demander l’interprétation à la Cour de justice des Communautés
européennes ». La chambre criminelle fait un usage abusif de la théorie de l’acte clair pour éluder la
question préjudicielle de l’art. 267 TFUE (Traité CE, art. 177 anc.). Feignant d’ignorer les difficultés
importantes que suscite l’application du droit communautaire en droit pénal interne, la chambre
criminelle a parfois contredit les interprétations données par la CJCE (G. BRIEUC DE MASSIAC, « Droit
pénal et droit communautaire : une cohabitation difficile », RJDA 1993, p. 587). Alors que la
question préjudicielle a été régulièrement posée par les chambres civiles depuis 1967 (Cass. 2e civ.,
27 avr. 1967, D. 1967, 541, concl. Schmelck) et par le Conseil d’État dès 1970 (CE, 10 juill. 1970,
Rec. CE, p. 10), la chambre criminelle n’a interrogé la CJCE pour la première fois qu’en 1994
(Cass. crim., 30 janv. 1994, Dr. pénal 1994, comm. 124).
(2558) 1er ex. : CE, 19 juin 1964, société des pétroles Shell-Berre, AJDA, 1964, p. 440 ; RDP 1964,
p. 1019, concl. N. Questiaux ; JDI 1964, p. 800 (déclinant la demande de renvoi préjudiciel avant
d’affirmer une solution rapidement condamnée par : CJCE, 4 févr. 1965, Albatros, aff. 20/64, Rec.
CJCE, p. 41). 2e ex. : CE, Ass., 22 déc. 1978, Cohn-Bendit, cité supra, no 345, en note (rejetant une
question préjudicielle avant de contredire : CJCE, 28 oct. 1975, Rutili, aff. 36/75, Rec. CJCE,
p. 1219).
(2559) V. supra, no 344.
(2560) La CJCE affirme que la violation d’une obligation découlant du droit communautaire ouvre
une action en responsabilité contre l’État défaillant devant les juridictions nationales (CJCE, 5 mars
1996, Brasserie du pêcheur et Factortame, aff. C. 46 et 48/93, cité supra, no 345, en note). En
France, le refus abusif de saisir la CJCE serait ainsi sanctionné sur le fondement de l’art. L. 141-1
C. org. jud. (v. supra, no 175) s’il émane de la Cour de cassation et sur le fondement de la
jurisprudence Darmont (CE, Ass., 29 déc. 1978, D. 1979, 279 ; RDP 1979, p. 1742) s’il émane du
Conseil d’État ; dans les deux cas, une faute lourde de la justice (non couverte par l’autorité de la
chose jugée, ajoute le Conseil d’État) devrait être établie, ce qui est trop restrictif. Mais le Conseil
d’État a évolué en 2008 (v. supra, no 340).
(2561) Comm. EDH, 12 mai 1993, Sté Divagsa c/Espagne, Décisions et rapports 74, p. 274 : « Il
n’est pas exclu d’emblée que, dans certaines circonstances, le refus opposé par une juridiction
nationale appelée à se prononcer en dernière instance (de renvoyer une affaire à titre préjudiciel
devant la CJCE), puisse porter atteinte au principe de l’équité de la procédure, tel qu’énoncé à
l’art. 6-1 de la Convention ». Comp. CEDH, 4 oct. 2001, Canela Santiago, inédit (décision
d’irrecevabilité) : le refus du Tribunal suprême espagnol « de poser une question préjudicielle
n’apparaît pas entaché d’arbitraire » lorsqu’il « a estimé de manière raisonnée que les questions
préjudicielles [...] relevaient de son champ de compétence », dans la mesure où « il ne subsistait
aucun doute quant à la réponse à fournir » (allusion à l’arrêt CILFIT de la CJCE, précité). Dans le
même sens, au sujet du refus de transmettre une QPC au Conseil constitutionnel, v. supra, nº 334, 4º.
Sur la position du Conseil d’État, v. supra, no 340.
(2562) Cons. const., 4 avr. 2013, décis. nº 2013-314 QPC, commenté supra, nº 335 in fine.
(2563) Ex. : Cass. crim., 8 mars 1930, DP 1930, 1, 101, n. P. Voirin : un décret du 11 nov. 1917 sur la
police des chemins de fer interdisait aux voyageurs « de descendre ailleurs que dans les gares, et
lorsque le train est complètement arrêté » ; pris à la lettre, il eût obligé chaque voyageur à
descendre en marche ; un contrevenant défendit cette interprétation littérale, en vain : « Le tribunal a
décidé à bon droit que ce dernier texte devait être interprété comme interdisant aux voyageurs de
monter dans les voitures ou d’en descendre avant l’arrêt complet du train ». V. aussi T. civ. Seine,
24 avr. 1952, JCP, 1952.II.7108. – CE 4 déc. 2013, nº 027985 : « en l'absence de doute [...], il y a
lieu pour le Conseil d'Etat, afin de donner le meilleur effet à sa décision, non pas d'annuler les
dispositions erronées de cet article », mais de rectifier l'erreur matérielle commise en prévoyant la
publication au Journal officiel d'un extrait de sa décision.
(2564) Ex. d’absurdité à proscrire, du point de vue des conséquences : un règlement municipal
imposait la fermeture des commerces à 20 h ; un commerçant ne peut prétendre fermer à 20 h et
réouvrir à 20 h 01 (R. v. Liggets – Finlay Drug Stores (1919), 3 W. L. R. 1025).
(2565) Sir R. CROSS, Statutory interpretation, 3e éd., 1992, par J. Bell et G. Eagle, Londres,
Butterworth ; Th. PLUCKNETT, Statutes and their interpretation.
(2566) Comp. F. GRIVART DE KERSTRAT, « Les formulations d’objectifs et l’interprétation de la loi en
Angleterre », RRJ 1989, p. 961.
(2567) Ex. : Cass. crim., 14 janv. 1971, Le Pen, D. 1971, 101, rap. F. Chapar, estimant que le
phonogramme entre dans la catégorie des « écrits et imprimés », seule visée par les art. 23 et 24 anc.
L. 29 juill. 1881 réprimant l’apologie de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité commise
sur certains supports de communication (l’art. 23 fut ensuite modifié par la L. 1er juill. 1972, pour
moderniser la liste).
(2568) Ex. : l’art. 333 ancien C. civ. admettait la légitimation d’enfant par autorité de justice « s’il
apparaît que le mariage est impossible entre les deux parents » ; certains juges du fond avaient
déduit cette impossibilité du simple refus des parents de se marier, ce qui rendait la condition légale
inconsistante (v. Droit de la famille, coll. Droit civil). Le droit de la filiation a souvent connu des
interprétations déformantes (v. infra, no 459).
(2569) F. OST et M. VAN DE KERCHOVE, « Les directives d’interprétation en théorie du droit et en droit
positif belge », in Les règles d’interprétation, sous la dir. de J.-F. Perrin, Fribourg (Suisse), 1989 ;
des mêmes auteurs, Entre la terre et l’esprit, Bruxelles, 1989.
(2570) Ch. PERELMAN, Logique juridique. Nouvelle rhétorique, Dalloz, 2e éd., 1979 [rééd. Dalloz,
1999], no 48, p. 95 (citant l’allemand G. STRUCK, Topische Jurisprudenz, Frankfurt, 1971, no 48,
p. 95-96).
(2571) V. notamment art. 1188 : « Le contrat s'interprète d'après la commune intention des parties
plutôt qu'en s'arrêtant au sens littéral de ses termes. Lorsque cette intention ne peut être décelée,
le contrat s'interprète selon le sens que lui donnerait une personne raisonnable placée dans la
même situation ».
(2572) V. notamment art. 31 : « 1. Un traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens
ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet ou de son
but [...]. 4. Un terme sera entendu dans un sens particulier s’il est établi que telle était l’intention
des parties ». La France n’a pas ratifié cette convention. Cf. M. K. YASSEEN, « L’interprétation des
traités d’après la Convention de Vienne sur le droit des traités », Rec. cours La Haye 1976, t. 151.
(2573) Ex. : Cass. req., 18 mars 1807, S. chr., an XIII-1808, 1, 361 : les règles des anciens art. 1156
et s. (devenus art. 1188 à 1191) « sont plutôt des conseils donnés aux juges, en matière
d’interprétation des contrats, que des règles plus rigoureuses et impératives, dont les
circonstances, même les plus fortes, ne les autoriseraient pas à s’écarter » ; Cass. 1re civ., 19 déc.
1995, Bull. civ. I, no 466 : « l’art. 1156 C. civ. [ancien] ne formulant pas, pour l’interprétation des
conventions, une règle à caractère impératif, sa méconnaissance ne peut, à elle seule, donner
ouverture à cassation ». V. cependant infra, nº 456 in fine (à propos de la règle lex specialia
generalibus derogant).
(2574) Un acte doit être interprété dans le sens où il produit un effet, non dans celui où il n’en
produirait pas.
(2575) Sur le principe d’« effet utile », v. infra, no 461.
(2576) V. infra, no 457. Lorsque la raison d’être d’une loi disparaît, la loi ne doit plus s’appliquer.
(2577) V. infra, no 456. Une exception doit être restrictivement interprétée.
(2578) V. infra, no 459. Citer l’un c’est exclure l’autre. Qui affirme pour l’un nie pour l’autre.
(2579) V. infra, no 459.
(2580) Le doute profite au défendeur ou à la partie la plus faible (v. supra, no 213).
(2581) Dans les cas obscurs, on doit se régler sur le minimum.
(2582) Là où la loi ne distingue pas, il ne faut pas distinguer. Ex. : Cass. req., 30 déc. 1879, S., 1880,
I, 64 ; DP 1880, I, 338 : « Les dispositions de l’article 2257 (C. civ.) étant générales et exclusives
de toute distinction, on doit les appliquer aux tiers détenteurs de l’immeuble hypothéqué aussi
bien qu’au débiteur principal ». L’art de la distinction est l’outil privilégié du juge comme de la
doctrine (v. supra, no 431).
(2583) Le premier adage (= la loi postérieure déroge à la loi antérieure) peut aller jusqu’à produire
un effet abrogatoire (abrogation tacite de la norme plus ancienne, présumée moins bonne ; sur
l’abrogation tacite, v. supra, no 278). Le second (la règle spéciale déroge à la règle générale) ne
produit qu’un effet dérogatoire. Cf. A. SIRI, « Des adages lex posterior derogat priori & specialia
generalibus derogant [...] », RRJ 2009-4, p. 1781. Sur ce dernier adage, v. infra, nº 456, in fine.
(2584) La convention ayant pour objet des intérêts privés ne doit pas déroger à l’ordre public.
(2585) Premier en date, meilleur en droit.
(2586) Nul ne peut transférer à autrui plus de droits qu’il n’en a.
(2587) Les droits du possesseur sont meilleurs que ceux du revendiquant.
(2588) Ne pas déranger ce qui est paisible. Traduction libre : ne réveillez pas le chat qui dort. C’est
une des règles juridiques majeures.
(2589) Qui lutte pour éviter une perte doit être préféré à celui qui lutte pour obtenir un gain.
(2590) Le risque de la perte est pour le propriétaire.
(2591) Le risque de la perte est pour le débiteur.
(2592) L’accessoire suit le principal.
(2593) Ex. : l’art. 122-7 C. pén. érige l’état de nécessité en cause d’irresponsabilité pénale.
(2594) Ex. : les « pouvoirs exceptionnels » de l’art. 16 de la Constitution.
(2595) Selon l’adage Fraus omnia corrumpit : la fraude fait exception à toutes les règles (v. supra,
no 402).
(2596) Biblio. : F. SAINT-BONNET, Vº Exception, nécessité, urgence, Dictionnaire de la culture
juridique, Lamy-PUF, 2003, p. 673 ; du même auteur, L’État d’exception, PUF, 2001. La norme et
ses exceptions. Quels défis pour la règle de droit ?, Bruylant, coll. À la croisée des droits, 2014.
Sur la notion d’urgence, v. supra, no 12.
(2597) 1er ex. : Cass. crim., 3 mars 1859, Bull. crim. no 69 : « Aux termes des règles générales du
droit, nul n’est pénalement responsable qu’à raison de son fait personnel ; si, en certaines
matières, des exceptions [...] sont admises contre ce principe, elles doivent être rigoureusement
restreintes aux cas qu’elles régissent ». 2e ex. : Cass. req., 26 juill. 1928, S., 1929, 1, 70 :
« L’application des lois spéciales doit être strictement renfermée dans les limites fixées par leurs
dispositions » (à propos de la L. 8 nivôse an VI déclarant insaisissables les rentes sur l’État
français). 3e ex. : Cass. 2e civ., 30 juin 1971, D. 1971, 477 : « La disposition spéciale figurant à
(l’art. 425, dern. al. 1, C. pr. civ.) étant dérogatoire au droit commun en la matière [...] doit être
interprétée restrictivement et ne saurait trouver application en dehors du cas visé ». Cf. L. ROBINE,
L’interprétation des textes exceptionnels en droit civil français, th. Bordeaux, 1933.
(2598) Ex., l’art. 2262 C. civ. anc. énonçait une règle de principe selon laquelle le délai de
prescription de l’action en justice était de trente ans. L’art. 1304 du même code énonçait donc une
règle d’exception selon laquelle le délai de prescription de l’action en nullité relative était de cinq
ans. Mais ce dernier texte ne disposait lui-même ainsi que « dans tous les cas où l’action en nullité
ou en rescision d’une convention n’est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière ».
Au regard d’une telle exception (par ex., de l’art. 1676 selon lequel l’action en rescision pour lésion
de la vente d’immeubles se prescrit par deux ans), la règle d’exception de l’art. 1304 se muait en
règle de principe. Seul le rapport d’une règle à une autre permet d’en déterminer la nature (règle de
principe ou règle d’exception).
(2599) Ex. : Cass. 3e civ., 15 févr. 1972, D. 1972, 339 ; JCP G, 1972.II.17094, n. J.-Ph. Lévy : « Les
dispositions de l’ordonnance du 30 décembre 1958 (art. 79, limitant la validité des clauses
d’indexation dans les contrats) doivent être interprétées restrictivement comme dérogatoires à la
liberté des conventions ».
(2600) Ex. : Cass. 1re civ., 12 juin 1979, Bull. civ. I, no 173 ; Defrénois 1980, art. 32421, no 72,
p. 1215, n. J.-L. Aubert : « Vu l’article 2001 du Code civil et le principe de la gestion d’affaires ;
par extension du texte susvisé le gérant d’affaires a droit à l’intérêt de ses avances du jour où
elles ont été constatées » (l’art. 2001, qui s’applique au mandat et que la Cour étend ici au gérant
d’affaires par voie d’analogie, est lui-même une exception à la règle de principe posée par l’ancien
art. 1153, al. 3, devenu art. 1344-1).
(2601) M. LEBEAU, De l'interprétation stricte des lois. Essai de méthodologie, th. Paris II,
Defrénois, 2012, préf. P.-Y. Gautier.
(2602) Ex. : Cass. crim., 1er juin 1992, Bull. crim., no 214.
(2603) Ph. MARCHESSOU, L’interprétation des textes fiscaux, Economica, 1980.
(2604) Ex. : Cass. 2e civ., 17 févr. 1993, Bull. civ. II, no 66 : « En édictant le principe général
suivant lequel l’action en responsabilité civile, fondée sur une faute constitutive d’une infraction
pénale, se prescrit selon les règles du droit civil, l’art. 10, al. 1er, C. pr. pén. (L. 23 déc. 1980),
laisse subsister la disposition spéciale de l’art. 65 L. 29 juill. 1881, prévoyant une prescription de
trois mois » en matière de délits de presse.
(2605) Cass. 1re civ., 9 mars 2016, nº 15-18899, JCP E, 2016, 1260 : « Vu [...] le principe selon
lequel les lois spéciales dérogent aux lois générales ». Sur le phénomène des visas de principe,
v. supra, nº 403.
(2606) C. civ., art. 1105 (réd. ord. 10 févr. 2016) : « Les règles générales s’appliquent sous réserve
[des] règles particulières ».
(2607) Biblio. : G. CORNU, « Le règne discret de l’analogie », Mélanges A. Colomer, Litec, 1993,
p. 129 et RRJ 2005, no spéc., p. 2661 ; P. DELNOY, « En quel sens le juriste raisonne-t-il aujourd’hui
par analogie ? », RRJ 1996, p. 1023 ; M.-A. FRISON-ROCHE, « Une typologie des analogies dans le
système juridique (« bonnes » et « mauvaises » analogies en droit) », RRJ 1996, p. 1043 ;
B. FRYDMAN, « Les formes de l’analogie », RRJ 1996, p. 1053.
(2608) 1er ex. : Cass. 1re civ., 12 juin 1979, préc. 2e ex. : les règles de conflits de lois dans l’espace
prévues par l’art. 3 C. civ. pour les lois françaises ont été étendues par analogie aux situations
étrangères, c’est-à-dire « bilatéralisées » (v. supra, no 73, 3o).
(2609) Encyclopédie philosophique universelle, vol. II, Les notions philosophiques, t. II, PUF,
1990, Vo Interprétation – Induction, p. 1279.
(2610) 1er ex. : le principe infans conceptus aurait été induit des art. 725-1o, 906 et 961 C. civ. en
matière de successions et de libéralités. 2e ex. : l’action prétorienne en enrichissement sans cause
(v. supra, no 413) aurait été induite des art. 554 à 556, 861-862, 1673, 1947, 2080, 2175, 1312 et
565 qui remédient à un appauvrissement injuste. 3e ex. : un droit de rétention général aurait été induit
des art. 862, 1612, 1653 et 1673, 1749, 1948, 2082 et 2087, 2280 ainsi que de lois postérieures au
Code civil qui attribuent à divers créanciers un droit de rétention spécifique.
(2611) G. MARTY et P. RAYNAUD, Introduction générale à l’étude du droit, Sirey, 2e éd, 1972, no 126,
p. 234. Adde Fr. GÉNY, Méthode d’interprétation et sources en doit privé positif, 2e éd., 1954
[réédition LGDJ, 1996], t. II, no 166, p. 124 : « L’analogie peut s’élever, jusqu’à constituer, [...] en
condensant un esprit général, qui planerait sur notre organisation juridique, des théories comblant
de véritables lacunes légales » ; J. BOULANGER, « Principes généraux du droit et droit positif »,
Études G. Ripert, LGDJ, 1950, t. I, p. 51, spéc. no 21, p. 67 : « L’énoncé d’un principe non écrit est
la manifestation de l’« esprit » d’une législation ».
(2612) Les jusnaturalistes contemporains ont pratiqué le genre spiritualiste sinon chamanique. V. par
ex. G. DEL VECCHIO, « Essai sur les principes généraux du droit », Rev. crit. lég. jur. 1925, p. 153 et s.
et 231 et s., spéc. p. 165 : « Le juriste, et particulièrement le juge, doivent, autant que possible,
dominer et pour ainsi dire revivre le système entier, en se pénétrant de son unité spirituelle [...]
comme s’ils étaient l’auteur du tout, et qu’en eux la loi parle réellement ».
(2613) J. CARBONNIER, Droit civil. Introduction, PUF, 1re éd., 1955, no 29, p. 101 et rééd. 2004,
no 137, p. 252 : « La doctrine et la jurisprudence ont formulé ces principes généraux. Mais elles ne
les ont pas créés. Elles les ont trouvés en suspension dans l’esprit de notre droit, tel que semblaient
le leur révéler certains textes fragmentaires ».
(2614) Ex. : Cass. civ., 1er avril 1846, DP 1846, 1, 81 ; S., 1846, 1, 273 : « Dans l’absence d’un
texte formel et absolu de la loi, c’est dans son esprit et dans les principes essentiels et
fondamentaux de notre législation qu’il faut rechercher s’il existe quelques traces de cette
incapacité » (celle de l’enfant naturel reconnu) ; or, on ne peut considérer que « l’intention du
législateur ait été de frapper d’incapacité les enfants naturels reconnus ».
(2615) M. PUECH, Les principes généraux du droit (aspect pénal), Journées de la société de
législation comparée, « Les principes généraux du droit », RID comp., no spécial, vol. 2, année 1980,
p. 337, spéc. p. 338.
(2616) Cf. P. MORVAN, Le principe de droit privé, éd. Panthéon-Assas, 1999 ; du même,
Vo « Principes », Dictionnaire de la culture juridique, Lamy-PUF, 2003, p. 1201. V. aussi supra,
nos 402 s.
(2617) 1er ex. : le principe selon lequel le juge de l’action est juge de l’exception (v. supra, no 446).
2e ex. : Cass. civ., 21 mai 1856, DP 1856, 1, 208 : « Le Ministère public qui, aux termes de
l’article 184, a le droit d’agir pour faire prononcer en justice la nullité du second mariage, doit
avoir, à plus forte raison, le droit de s’opposer à l’accomplissement de ce second mariage ».
(2618) Ex. : Cass. 1re civ., 20 mai 1969, D. 1969, 429 ; JCP G, 1969.II.16113 ; RTD civ. 1969, p. 544
et 607, qui admet par un argument a fortiori (exclu dix ans plus tôt afin de provoquer le législateur à
une réforme, finalement introduite par la L. 3 janv. 1972 modifiant l’art. 342 C. civ. dans le sens de
ce revirement...) que l’enfant naturel simple peut exercer une action alimentaire de subsides, étant
donné que l’enfant adultérin en a lui-même la possibilité depuis la L. 15 juill. 1955.
(2619) P. AMSELEK, Méthode phénoménologique et théorie du droit, LGDJ, 1964, p. 193-195.
(2620) Cf. P. H. STEINAUER, « L’interprétation des silences du législateur à l’aide des arguments a
contrario, a simili et a fortiori », in Les règles d’interprétation, sous la dir. de J.-F. Perrin, Fribourg
(Suisse), 1989. L’auteur donne l’exemple de l’écriteau apposé sur la porte d’un médecin : « Interdit
aux chiens ». Interprété par analogie (et a fortiori d’ailleurs), ce texte signifie « Interdit aux loups ».
Interprété a contrario, il signifie « Permis aux loups » (qui ne sont pas visés). Seul le bon sens de
l’interprète (qui se soumet à la ratio legis) l’incite à retenir la première interprétation.
(2621) J. FLOUR, « Pot-pourri », Defrénois 1975, art. 30854, spéc. p. 190 : « Il y a une place pour
l’analogie. Il y en a une autre pour l’a contrario ».
(2622) Sur la présentation de l’École de l’exégèse et la réalité, v. supra, no 136.
(2623) Sur les titres ou intitulés de la loi, v. supra, no 284.
(2624) Ex. : * Cass. crim., 19 déc. 1885, aff. du peintre Bastien-Lepage, cité supra, no 226 : « En
imposant à certaines personnes, sous une sanction pénale, l’obligation du secret, comme un devoir
de leur état, le législateur a entendu assurer la confiance qui s’impose dans l’exercice de certaines
professions et garantir le repos des familles qui peuvent être amenées à révéler leurs secrets par
suite de cette confiance nécessaire ; ce but de sécurité et de protection ne serait pas atteint si la
loi se bornait à réprimer les révélations dues à la malveillance, en laissant toutes les autres
impunies » (le délit de violation du secret professionnel est donc une infraction volontaire qui ne
suppose pas une intention de nuire, un dol spécial).
(2625) Sur les travaux préparatoires du Code civil, v. supra, no 123.
(2626) V. toutefois Cass. civ., 22 nov. 1932, DH 1933, 2 : « Si en principe le recours aux travaux
préparatoires est permis lorsqu’un texte nécessite une interprétation, le juge doit, au contraire, se
l’interdire lorsque le sens de la loi, tel qu’il résulte de sa rédaction, n’est ni obscur ni ambigu et
doit, par conséquent, être tenu pour certain ».
(2627) Cass. Ass. plén., 23 janv. 2004, cité supra, no 306, qui recherche dans les termes de la loi et
les « travaux parlementaires » l’« impérieux motif d’intérêt général » autorisant la rétroactivité
d’une loi civile dans un litige en cours. – Cass. soc., 10 févr. 2004, Bull. civ. V, no 43 : « il résulte de
ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi [...] ».
(2628) Ex. : Cons. const., 21 avr. 2005, décis. no 2005-512 DC, JO 24 avr. 2005, p. 7173 (cité supra,
no 284).
(2629) Ex. d’analyse lexicale de la loi : Cass. 1re civ., 9 janv. 1974, JCP G, 1974.II.17806, n. J.-
Ph. Lévy : « L’objet de la convention, au sens de l’article 79 de l’ordonnance du 30 décembre 1958
(fixant les conditions de validité des clauses d’indexation), doit s’entendre dans son acception la
plus large » (c’est-à-dire dans le sens commun d’objectif et non dans le sens juridique de chose objet
du contrat). Ex. d’analyse lexicale d’un contrat : Cass. com., 13 mai 1974, JCP G, 1974.IV.244, se
référant à la définition d’un mot (« signet ») donnée par le dictionnaire, qui « rejoignait celle admise
de manière générale dans le public ».
(2630) 1er ex. : l’art. 68 Const. dispose : « Le Président de la République n’est responsable des
actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions qu’en cas de Haute trahison. [...] ; il est jugé par
la Haute Cour de justice ». Si la seconde phrase découle de la première, le Président ne relève de la
Haute Cour que s’il est soupçonné d’un acte de Haute trahison ; pour le reste, il relève des
juridictions de droit commun. Si la seconde phrase édicte une règle autonome, le président relève de
la Haute Cour même pour les infractions de droit commun (ex. : trafic d’influence, meurtre, excès de
vitesse...). Le Conseil constitutionnel a choisi cette dernière interprétation qui, de fait, confère au
Chef d’État une immunité pénale durant son mandat (Cons. const., 22 janv. 1999, décis. no 98-408
DC, réf. in D. 2000, som. 196). 2e ex., ancien, quant au sens de l’art. 896 C. civ. : Cass. req., 18 janv.
1808, Jur. Gén., Vo Substitution, no 230 : « Il résulte de cette addition (qui autrement serait inutile),
que le législateur a eu l’intention d’enlever au donataire, à l’institué, au légataire, l’avantage qui
leur est fait et par conséquent il annule leur donation, institution ou legs ».
(2631) Ex. : Cass. ch. réunies, 2 juill. 1903, Ménard, DP 1903, 1, 353 ; S., 1904, 1, 65, n. Ch. Lyon-
Caen, statuant en raison « tant des termes de l’article 747 (anc. du C. civ.) que la rubrique sous
laquelle cet article se trouve placé ». Pour les contrats, C. civ., art. 1161 : « Toutes les clauses des
conventions s’interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de
l’acte entier ».
(2632) V. supra, no 236.
(2633) C. civ., art. 1157 : « Lorsqu’une clause est susceptible de deux sens, on doit plutôt
l’entendre dans celui avec lequel elle peut avoir quelque effet, que dans le sens avec lequel elle
n’en pourrait produire aucun ».
(2634) H. LAUTERPARCHT, « L’interprétation des traités », Rec. cours La Haye, t. XLIII, 1950, p. 368,
spéc. p. 402. Comp. K. PARROT, L’interprétation des conventions de droit international privé,
Dalloz, 2006.
(2635) CJCE, 29 nov. 1956, Fédération charbonnière de Belgique, aff. 8/55, Rec. CJCE, 1955-
1956, p. 291, spéc. p. 304 : « Il est permis, sans se livrer à une interprétation extensive,
d’appliquer une règle généralement admise tant en droit international qu’en droit national
et selon laquelle les normes établies par un traité international ou par une loi impliquent les
normes sans lesquelles les premières n’auraient pas de sens ou ne permettraient pas une
application raisonnable et utile » ; une argumentation a contrario « n’est admissible qu’en dernier
ressort et quand aucune autre interprétation ne s’avère adéquate ou compatible avec le texte, le
contexte ou leur finalité ». Sur les méthodes d’interprétation de la CJCE, J. BOULOUIS, Grands arrêts
de la CJCE, Dalloz, t. I, 6e éd., 1994, nos 19 et s.
(2636) V. supra, no 377.
(2637) Un « éclectisme tactique » écrivait Jean Carbonnier (Droit civil. Introduction, PUF, 1re éd.,
1955, rééd. 2004, no 160, p. 307). Ex. Cass. 1re civ., 29 janv. 2002, Bull. civ. I, no 33 : une cour
d’appel « ne saurait se voir reprocher de ne s’être pas livrée à une recherche (dans les travaux
préparatoires) qui relevait de sa liberté quant aux méthodes d’interprétation de la loi ».
(2638) Sur l’Exégèse et la critique scientifique (not. les travaux de Fr. Gény), v. supra, nos 137-138.
(2639) Ainsi, lorsque François Gény fit une étude de droit positif postérieure à sa Méthode
d’interprétation... (Des droits sur les lettres missives étudiées principalement en vue du système
postal français, 1911), ses méthodes d’interprétation se révélèrent aussi classiques que celles de ses
contemporains.
(2640) H. BATIFFOL, « Questions de l’interprétation juridique », in Choix d’articles, LGDJ, 1976,
p. 408, spéc. p. 415 : « Au souci de la vérité se joint celui du loyalisme : inégal chez les
particuliers, il est un devoir fondamental chez ceux qui parlent au nom de l’État ».
(2641) Biblio. : M.-L. MATHIEU, Logique et raisonnement juridique, PUF, coll. Thémis droit, 2e éd.,
2015 ; du même auteur, Les représentations dans la pensée des juristes, IRJS éditions, 2014 (sur les
figures de style, les nombres, les paradigmes, l'espace, la structure...) ; J.-L. BERGEL, Méthodologie
juridique, PUF, coll. Thémis droit, 2e éd., 2016, nos 80 et s. (sur les méthodes de raisonnement
juridique). – Le raisonnement juridique. Recherches sur les travaux préparatoires des arrêts, dir.
P. Deumier, Dalloz, 2013. – L’argumentation des juristes et ses contraintes, Droits 2011, nº 54 et
Droits 2012, nº 55. Adde F. GÉA, Contribution à la théorie de l’interprétation jurisprudentielle.
Droit du travail et théorie du droit dans la perspective du dialogisme, LGDJ, 4 vol., 2009 (la
perspective « dialogique » conduit à étudier le problème de l’interprétation tel qu’il est exprimé dans
les discours des conseillers rapporteurs ou avocats généraux à la Cour de cassation ainsi que celui de
la doctrine ; elle remettrait en cause bien des présupposés).
(2642) Ch. PERELMAN, Logique juridique. Nouvelle rhétorique, Dalloz, 2e éd., 1979 [rééd. Dalloz,
1999] ; Ch. PERELMAN, L. OLBRECHTS-TYTECA et M. MEYER, Traité de l’argumentation. La nouvelle
rhétorique, éd. Université de Bruxelles, 5e éd., 1992.
(2643) V. Droit des obligations, coll. Droit civil.
(2644) V. Droit des successions, coll. Droit civil.
(2645) Comp. Ch. DEMOLOMBE, Cours de Code Napoléon, t. I, 2e éd., 1860, no 115 : « En théorie,
l’interprétation c’est l’explication de la loi ; interpréter, c’est découvrir, c’est élucider le sens
exact et véritable de la loi. Ce n’est pas changer, modifier, innover ; c’est déclarer, c’est
reconnaître. L’interprétation peut être plus ou moins ingénieuse et subtile ; elle peut même parfois
prêter au législateur des vues, des intentions qu’il n’avait pas [...], meilleures ou moins bonnes ;
mais enfin il faut qu’elle n’ait pas la prétention d’avoir inventé ; autrement, elle ne serait plus de
l’interprétation ».
(2646) J. GIRAUDOUX, La guerre de Troie n’aura pas lieu, Acte II, Scène V, Hector : « Le droit est la
plus puissante des écoles de l’imagination. Jamais poète n’a interprété la nature aussi librement
qu’un juriste la réalité ». Hector tente de convaincre Busiris, « expert de droit international » de
mauvaise foi, qu’au lieu de voir un casus belli dans l’attitude des navires Grecs arrivant sur les
rivages de Troie comme il l’avait jusqu’alors proposé sous l’influence des Grecs bellicistes, il
l’interprète, en pacifiste, comme un comportement pacifique ; Giraudoux connaissait les habitudes
intellectuelles des diplomates et du Quai d’Orsay (le personnage de Busiris est inspiré de Nikolaos
Politis, diplomate, homme politique grec et professeur de droit international public à Paris, qui était
la bête noire de Giraudoux et qui fut influent au Quai d’Orsay dans les années 1900 à 1930). V. Droit
civil illustré, no 12.
(2647) A. SCALIA et B. A. GARNER, Reading Law. The Interpretation of Legal texts, Thomson/West
(États-Unis), 2012.
(2648) Éphésiens, III, 6.
(2649) Les chiffres renvoient aux numéros, non aux pages.
(2650) Les chiffres renvoient aux numéros de paragraphe et non aux pages.
(2651) Les chiffres renvoient aux numéros, non aux pages.
(2652) Les chiffres renvoient aux numéros, non aux pages.