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2) L'argent fait vraiment le bonheur d'un individu ou d'une nation lorsqu'il les fait
passer du dénuement total à un relatif confort : celui qui se nourrit convenablement, est
logé, accède à l'eau courante, à l'électricité et au chauffage, après avoir été privé de ces
besoins fondamentaux, se sent heureux.
L’argent et le bonheur
L'argent fait votre bonheur lorsque vous passez de rien à quelque chose et lorsqu'il vous
donne une possibilité, fût-elle limitée, de choisir entre deux biens (poisson ou viande,
légume ou fruit, par exemple).
Mais les pas suivants, qui conduisent à une vie beaucoup plus confortable ou plus
luxueuse, ne procurent pas toujours et pas forcément du bonheur ou autant de bonheur :
autrement dit, le bonheur ne grandit pas avec la prospérité.
Il arrive même, et plus souvent qu'on ne le pense, que plus de prospérité engendre de
nouvelles aspirations : à un moment donné, le luxe et le superflu en viennent à être
considérés comme des besoins, et ne pas pouvoir les satisfaire est alors ressenti comme
une frustration.
En tout cas, les citoyens des États-Unis, ceux du Japon ou des pays de l'Europe
occidentale et du Nord, dont le revenu a été multiplié par trois ou quatre au cours des
soixante dernières années, n'ont pas vu leur degré de bonheur ou de satisfaction suivre la
même progression. Conclusion : plus d'argent n'apporte pas plus de bonheur et
beaucoup plus d'argent ne vous donne en aucun cas beaucoup plus de bonheur.
L’argent et le bonheur
3) Si on ne sait toujours pas qui de l'oeuf ou de la poule précède - et
fait - l'autre, on sait en revanche, grâce aux chercheurs qui se sont
consacrés à la question, que les personnes qui se sentent heureuses
gagnent plus d'argent. C'est qu'elles travaillent mieux, ont une
meilleure productivité, un moral de gagnant et une stabilité propice au
progrès social.
Dans leur cas, qui n'est pas aussi rare qu'on le croyait, le bonheur aide
puissamment à gagner plus d'argent voire à s'enrichir.
4) La découverte la plus intéressante de nos chercheurs permet
d'introduire le facteur politique dans la relation dialectique entre
argent et bonheur :
L’argent et le bonheur
Les nations qui se sont enrichies au point de devenir prospères ont, à
un moment ou à un autre de cet itinéraire, accédé à la démocratie.
Si toutes les démocraties ne sont pas riches - la majorité des citoyens
du Sénégal, de l'Inde, de l'Afrique du Sud sont encore pauvres -, tous
les pays riches, ceux dont le revenu global et par habitant est élevé,
sont des démocraties bien établies.
Les droits de l'homme, de la femme et de l'enfant y sont (en général)
respectés, la justice y est indépendante et on y vit sous le règne de la loi
; le système de santé et de sécurité sociale protège les citoyens. De tout
cela il résulte un sentiment général de sécurité et de bien-être qui
contribue plus que l'argent au bonheur des gens.
L’argent et le bonheur
5) Mais la médaille a son revers. Les gouvernants de ces mêmes
nations démocratiques étant élus et ne pouvant se maintenir au
pouvoir que si leurs concitoyens les réélisent, ils seront tentés « d'aller
dans le sens du vent ».
Dès lors que plus d'argent ne donne pas à leurs électeurs-citoyens plus
de bien-être et de bonheur, les dirigeants des démocraties riches
auront tendance à consacrer plus d'attention au social qu'à
l'économique et voudront de plus en plus répartir les richesses
acquises, au détriment de l'effort qui permet d'en produire de
nouvelles.
C'est le danger qui guette :
- les socio-démocrates de tous les pays lorsqu'ils sont au pouvoir ;
- et, plus grave, les démocraties les plus avancées et la démocratie en
tant qu'idéologie.
L’argent et le bonheur
Dans leur majorité, les citoyens de ces démocraties en arrivent à vouloir
travailler de moins en moins (dans la semaine comme dans leur vie) pour
bénéficier de plus de temps de loisirs, au cours de leur vie active. Et d'une
retraite prise plus tôt...
Ils se font alors rattraper puis distancer par des nations, démocratiques ou
moins démocratiques, mais qui ont plus de jeunesse et d'énergie.
Non rassasiées, ces dernières « en veulent » encore et trouvent du bonheur
dans le progrès économique et... l'accès à plus de richesse.