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Jeanine Munyeshuli BarBé

Concerto pour
flûte de Péan :
Variations sur un thème de Faurisson1

«Ceàquoijepensedeplusenplussouvent,désormais,
c’estàtouslesmoyensquelesgénocidairesontmisenplace
pourparveniràleursfins–c’est-à-direlanôtre»2
Esther Mujawayo,
rescapée du génocide des Tutsi du Rwanda de 1994

Mercredi, 24 Septembre 2008, Tribunal correctionnel de Paris


(17ème chambre), 2ème jour d’audiences du « procès Péan ». Les
associations SOS Racisme et Ibuka attaquent Pierre Péan et son édi-
teur Claude Durand (PDG des éditions Fayard), pour participation à
la diffamation raciale et incitation à la haine raciale dans son
ouvrage Noires fureurs, blanc menteurs.

Il est presque 14 heures lorsque j’arrive devant le Palais de Justice de


Paris. Je n’ai guère le loisir de m’attarder devant cet imposant monument
d’architecture. Tout juste ai-je le temps de pester dans l’interminable
queue devant les portiques de sécurité. Je n’aime ni les files d’attente, ni
les barrières…
Là, dans cette grande artère parisienne, les indications sont claires : à
gauche « direction Tribunal », à droite « direction Sainte-Chapelle ». Je
tiens donc ma gauche en imaginant, aux sens propre et figuré, l’océan qui
me sépare des touristes japonais sur ma droite. L’incongruité de la situa-
tion a le mérite de me faire oublier le nœud au ventre qui m’habite
depuis ce matin.

La NuIT RwaNdaISE N°3 1


arrivée dans la salle d’audience, je salue furtivement quelques visages
familiers avant de m’installer à une petite place trouvée sur le bloc de
gauche – toujours – non loin du banc des accusés. L’huissier nous aboie :
« Mesdames,Messieurs,leTribunal! » dans un rituel solennel, nous voilà tous
debout comme un seul homme tandis que les trois juges prennent place en
face de la salle divisée en deux.
d’un côté, les accusés : Messieurs Péan, durand et leurs avocats, dont je
devine qu’il s’agit de Me Florence Bourg et Me Jean-Yves dupeux. Ce der-
nier est également l’avocat de l’abbé wenceslas Munyeshyaka, un génoci-
daire présumé poursuivi par le TPIR3. En face d’eux, les plaignants. Je
reconnais dominique Sopo, président de SOS Racisme. À ses cotés, les avo-
cats des parties civiles : Me Bernard Maingain et Me Lev Forster.
Le décor est planté. Il est désormais gravé dans ma mémoire, comme
moult détails de cette après-midi de mercredi ainsi que de la longue audi-
tion du jeudi suivant4.

De la nécessité D’être là, De l’impératif D’en témoigner


Je n’ai pris aucune note, c’était une décision délibérée.
Je me suis rendue à ce procès pour y être, tout simplement, car les Parties
civiles, en quelque sorte, me représentaient. Les femmes tutsi, «versdansle
fruit»,«tellementbellesqu’ellesnouscolonisent»5, et dont parle Pierre Péan à
longueur de pages, c’est moi. Cette diaspora qu’il décrit en des termes tout
aussi injurieux6, j’en suis.
Les Tutsi, ce sont aussi un million d’enfants, de femmes et d’hommes
tués en 1994 au Rwanda simplement parce que nés tutsi. Ces morts géno-
cidés7 sont les témoins invisibles de ce procès. Invisibles autrement que par
les yeux du cœur de ceux qui se sentent reliés à eux par une humanité
commune.
Il n’était pas dans mon intention, disais-je, de vous raconter ce procès,
mais je me suis surprise à griffonner à la hâte l’une ou l’autre phrase d’un
témoin. Ces tirades, je les ai lues et relues car il m’est arrivé de douter de
ce que mes oreilles avaient entendu.
J’éprouve à présent l’impérieux besoin de partager mon film intérieur.
La trame de ce texte est une logique subjective, née de diverses associations
d’idées et d’émotions générées en particulier lors des auditions des témoins
de la défense. avec une intensité que je n’avais pas anticipée, ce face à face
avec la Negationnist Set a réactivé en moi bien des blessures. Il a eu le très
grand mérite de faire émerger dans mon esprit – que je croyais pourtant

2 La NuIT RwaNdaISE N°3 •JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo...


très au fait – une vision plus nette et plus large du négationnisme
aujourd’hui.
Mon récit est destiné à rappeler que ce qui s’est joué là, dans un prétoire
de la République française, c’est l’humanité des vivants et pas seulement
celle des Tutsi.
Il s’agit directement de vous tous qui me lisez et vous reconnaissez
« humains ». Il s’agit de vos enfants et des enfants de vos enfants, d’où que
vous soyez, car l’humanité n’a ni frontières ni couleur. au cœur de ce pro-
cès, se jouait la survie, très immédiate celle-là, des rescapés tutsi au Rwanda.
Ni blanche ni noire, l’idéologie raciste anti-tutsi sévit et tue encore
aujourd’hui. Elle avance masquée, délibérément opacifiée – entre autres –
par les enquêtes scabreuses de journaleux, théâtralisée parfois, par des indi-
vidus dont le cynisme n’a d’égal que leur arrogance ! Je vais vous en repar-
ler de cette arrogance !

le négationnisme De péan: une Dérive sémantique


réglée comme Du papier à musique
En 1994, au Rwanda, les auteurs du génocide8 des Tutsi n’ont pas entre-
pris de les exterminer parce qu’ils croyaient que c’étaient «desmenteurs,des
manipulateursoudessuppôtsduFPrenvahisseurvenudel’ouganda ». Ils nous
ont étiquetés ainsi pour pouvoir légitimer notre extermination, de la façon
la plus radicale et la plus méthodique qui soit.
Et que fait Pierre Péan ? Il écrit :
« Kagame a planifié l’attentat, donc planifié aussi sa conséquence
directe : le génocide des Tutsi perpétré en représailles. »9
« Peut-on encore ne parler que du génocide des Tutsi alors que, depuis
1990, le nombre de hutu assassinés par les policiers ou les militaires
obéissant aux ordres de Kagame est bien supérieur à celui des Tutsi
tués par les miliciens et les militaires gouvernementaux ? »10
« On a compté quelque 280.000 Tutsis massacrés, et plus d’un million
de hutu tués depuis 1990. Le trucage a consisté à prendre le chiffre
global de morts et à affirmer qu’ils étaient tous tutsi.»11
« Je sais que je serai classé, au mieux parmi les révisionnistes, au pire
chez les négationnistes. Mon espoir étant de ne figurer que dans la
première catégorie. Ce que j’assume (…) »12
Ce florilège pourrait encore s’allonger tant le pavé dont il est tiré est
volumineux. Ce révisionnisme assumé, c’est le costume de ville que s’est

JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo... • La NuIT RwaNdaISE N°3 3


taillé sur mesure Pierre Péan, le négationniste inavoué13. En niant l’absence
d’intention d’extermination des Tutsi pour ce qu’ils sont, Pierre Péan dis-
qualifie le crime de génocide et le requalifie en légitime guerre de « repré-
sailles ». au passage, les victimes sont diabolisées, les statistiques sont révi-
sées à la baisse, les témoignages invalidés dès lors qu’ils ne concourent pas
à la conclusion préétablie par Péan l’enquêteur. Mais ce n’est pas tout…
Pierre Péan ne tient pas des propos racistes anti tutsi parce qu’il pense
que cela est discutable ou scientifiquement défendable. Non, bien au
contraire ! L’objectif pour le raciste comme pour le négationniste est clair
et net dès le départ : dévaloriser, humilier, déshumaniser, justifier la discri-
mination pour le premier et, pour le négationniste, « éluder une responsa-
bilité directe ou indirecte dans la perpétration d’un génocide »14. En
quelque sorte, l’un des triomphes de l’idéologie raciste – l’idéologie génoci-
daire en est une – c’est de la rendre « discutable et défendable » et le néga-
tionnisme est avéré dès lors que le caractère arbitraire et planifié du crime
est discuté. Ces processus ne laissent guère de place à l’improvisation, et
Péan, comme ses défenseurs, savent ce qu’ils font : beaucoup de bruit pour
noyer un énorme poisson. Et pourtant, face à ce tintamarre négationniste,
notre exigence de justice est irrecevable devant des tribunaux français.

un procès très singulier


Quinze ans après la reconnaissance par l’ONu du génocide des Tutsi15,
il n’existe toujours pas de cadre légal pour porter devant la justice des pro-
pos qui, à teneur équivalente s’agissant de la négation de la Shoah, tombe-
raient sous le coup de la loi Gayssot.16
La négation du génocide des Tutsi n’est donc pas, en tant que telle, un
délit selon le droit français. Il est déplorable que le législateur français n’ait
tiré aucun enseignement des mécanismes qui l’ont rendu possible. Il ignore
– ou feint d’ignorer – que ce vide est un microphone tendu à tous ceux qui,
encore aujourd’hui, font de l’incitation à la haine anti tutsi. Les mêmes
causes (la haine raciale) pouvant conduire aux mêmes effets (le génocide),
aussi bien les victimes tutsi du génocide que leurs descendants sont les
grands oubliés de la justice française. En 2009, ils ne sont toujours pas pro-
tégés de la répétition possible d’actes de génocide à leur encontre.
Ce vide juridictionnel abyssal donne une idée de l’importance que revêt
ce procès pour les victimes du génocide des Tutsi.
de façon indirecte – car seule la nature raciste des écrits anti tutsi est sus-
ceptible d’être condamnée par les lois de la République française – les pro-

4 La NuIT RwaNdaISE N°3 • JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo...


pos négationnistes de Pierre Péan peuvent enfin être portés devant un tri-
bunal français. Par le biais de cette action, des hommes et des femmes
meurtris dans leur chair, en colère mais néanmoins dignes, vont enfin por-
ter leur exigence de justice et de vérité devant des tribunaux français.
À cet instant précis, ce ne sont plus seulement des victimes, rescapés
d’une tentative d’extermination, mais des acteurs de leur propre survie.
L’identité de la vingtaine de témoins cités à comparaître pour la défense
ajoute une autre dimension à ce procès : le déséquilibre des forces en pré-
sence. Bien avant le déroulement du procès, nous savons que derrière
Pierre Péan, des personnalités de la République défileront à la barre.
un calenDrier pour le moins surprenant
À ce procès, je suis donc allée concernée, combative et lucide quand aux
motivations de Mr Péan dont le livre, faut-il le rappeler, est sorti en
Novembre 2005, peu après les plaintes contre X déposées par des victimes
rwandaises au Tribunal des armées de Paris (TaP). Ces plaintes contre X
pour viol, complicité de crime contre l’humanité et/ou de crime de géno-
cide visent essentiellement des militaires français en opération dans la zone
Turquoise. Elles sont toujours en cours d’instruction et leur historique est
documenté sur le site de la Commission d’Enquête Citoyenne pour le
Rwanda17. Comme le relate un article paru dans le journal Le Monde dans
son édition du 5 Novembre 2005, Mme Brigitte Raynaud, juge d’instruc-
tion au TaP se rendant au Rwanda pour interroger les parties civiles est
avertie par le ministère de la défense de la parution du livre de Mr Péan en
ces termes : «(…)Celivredevraitaussimettreenvaleurlesforcesfrançaisesenga-
géessurleterrainde1990à1994». Voilà qui a le mérite d’être clair.
Revenons à nos moutons. Nous sommes le 25 Septembre 2008, Tribunal
de Grande Instance de Paris. Cette fois c’est Pierre Péan qui est sur le banc
des accusés. J’y étais et, à sa défense, ils sont venus. Tous, ou presque…
Ils, c’est la longue liste de témoins à décharge que va produire la défense.
la flûte
Citant et récitant Pierre Péan tel un mantra, Me Florence Bourg lira la
phrase «Laculturedumensongeetdeladissimulationdominetouteslesautreschez
lesTutsi,etdansunemoindrepart,parimprégnation,chezlesHutu»avec une jubi-
lation à peine contenue ! un des témoins de la défense, Stephen Smith, ira
même jusqu’à suggérer que cette « discussion » – voilà, le terme est consacré
– devrait se tenir autour d’une table ronde et non dans un tribunal ! À ce

dOSSIER PéaN • La NuIT RwaNdaISE N°3 5


moment précis, le plaisir pervers qu’il tire à prononcer cette phrase est tout
à fait comparable à la mine réjouie de l’avocate de la défense.
Entendons nous bien, je ne suis pas masochiste ! Je ne me suis pas ren-
due à ce procès pour écouter jouer du Péan en direct !
concerto allegro
«Jenecomprendspasleprocèsensorcelleriequel’onintenteàPierrePéan»,
s’est indigné Bernard debré, ancien ministre français de la Coopération et
témoin de la défense.
de la sorcellerie, je ne connais que la fiction de J.K. Rowling qui m’a fait
entrer dans l’univers fantastique de la saga harry Potter. Me remémorant le
défilé des témoins de la défense dans ce procès, l’image qui me vient est
bien celle d’un ballet. un étrange ballet auquel la République était
conviée : le ballet « des mangemorts »18. dans le rôle de maîtres du ballet,
les avocats de la défense, avec en tête, Me Florence Bourg. Elle donne le la,
vite relayée par Me Jean-Yves dupeux. avec force effets de manche, le duo
va faire danser, ou plutôt gesticuler, la troupe des témoins autour d’asser-
tions telles que «culture tutsi de la dissimulation», «enfant tutsi élevé dans le
mensonge» ou encore «éducationtutsiquiélèvelemensongeaurangd’art», etc.
Même après avoir lu19 Bernard debré, je dois reconnaître que sa décon-
traction à la barre me sidère. une de ses premières sorties est une phrase
du style : «Cesgens-là,lorsqu’ilsaccèdentàlaculture...». Le «cesgens-là» sug-
gère que lui et d’autres seraient, quant à eux, issus d’un monde où la cul-
ture protégerait de la barbarie, de «cesmassacresinterethniques» comme il se
plaît à le répéter. Outre le mépris contenu dans de tels propos xénophobes,
debré insulte l’intelligence des personnes alors présentes qui ne sont pas
sans savoir qu’une abondante production culturelle européenne a, en
encensant l’idéologie nazie, activement participé à ouvrir les voies condui-
sant vers auschwitz ! La barbarie génocidaire n’est ni inculte ni étrangère à
la société occidentale ! Grand seigneur, l’ancien ministre continue sur sa
lancée et balaie les « doutes » de l’avocate de la défense. Il soutient que c’est
un lieu commun d’affirmer que les Tutsi sont foncièrement menteurs. Il
rajoute : «Ilssontd’ailleurstrèsintelligents.Cettephraseest-elleraciste,Maître? ».
Se tournant vers les avocats de la partie civile, il s’enhardit, il tente l’hu-
mour avec des blagues belges. Plaisanteries auxquelles Me Maingain lui
répondra : «Çatombebien,figurez-vousquejesuisbelge;quepenseriez-vousdela
phrase:“LesWallonssontparesseuxetlesFlamandssontfachos”?» demi-silence
embarrassé vite comblé par une autre tirade déplorant le peu d’humour de
la Cour.

6 La NuIT RwaNdaISE N°3 • JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo...


au tour maintenant d’hubert Védrine de passer à la barre. L’ancien
Secrétaire général de la présidence sous François Mitterrand – puis minis-
tre des affaires Etrangères sous Jospin – fera quelques sorties de la même
teneur que celles de debré. En les griffonnant à la hâte, j’ai rêvé d’avoir un
jour accès aux minutes du procès. au passage, Védrine – consultant de son
état déclaré - omet de préciser qu’il préside l’Institut François Mitterrand.
S’agissant des passages incriminés du livre de Pierre Péan, lui aussi mini-
mise, presque outré : « PierrePéanasansdoutestigmatisédefaçonsimplistela
culturetutsi(…)» ; ou encore : «Lareprisedeclichésd’uneautreépoquedévelop-
pésdansdifférentsécritsnejustifiepassonassignationpourincitationàladiscri-
minationraciale». «D’uneautreépoque…», rien n’est plus vrai ! a l’instar de
Gobineau au 19ème siècle ou de Paul dresse20 – que Péan cite abondam-
ment –, nos ministres invoquent à la barre des déterminismes biologiques
rwandais justifiant des haines interethniques séculaires. Ces messieurs ne
reculent devant aucun cliché. Ils parlent de la femme tutsi en des termes
nauséabonds. L’un prononce le mot « hirondelle » en claquant la langue –
dans un geste suggérant la dégustation – et l’autre évoque un objet qui
enserre la tête de la femme « tutsi manipulatrice ». Cet objet, Mr le minis-
tre, c’est urugori : une parure de tête, symbole par excellence de la mater-
nité, porté par toutes les femmes rwandaises. dans un tour de passe-passe
qui me laisse pantoise, debré, qui a, dans ses livres, largement théorisé le
concept de double génocide, essaye là de nous faire croire que son usage de
l’expression « les génocides » ne se serait appliqué qu’à celui des Tutsi de
1959 et 1994 ! Il n’est toutefois pas inutile de rappeler à cet endroit que ce
n’est pas son propre livre qui est ici incriminé.
de « lieux communs » en « atavismes », les deux hommes multiplient les
références à l’imagerie coloniale avec une désinhibition déconcertante. Ce
sont ces mêmes termes que l’on retrouve dans la fantasmagorie génocidaire
à l’œuvre en 1994 au Rwanda. Me Maingain en fera la magistrale démons-
tration, images et extraits du journal Kangura21 à l’appui. Rappelons que,
dans son édition du 6 décembre 1990, le journal Kangura (« Réveillez-le »),
un périodique extrémiste proche du pouvoir, publia les «10commandements
duHutu» parmi lesquels celui-ci : «ToutMuhutudoitsavoirqueUmututsikazi
[unefemmetutsi]oùqu’ellesoittravailleàlasoldedesonethnietutsi.Parconséquent
esttraîtretoutMuhutuquiépouseuneUmututsikazi,quifaitd’uneUmututsikazi
saconcubine,quifaitd’uneUmututsikazisasecrétaireousaprotégée » un com-
mandement qui n’est pas sans rappeler la prose de Pierre Péan. Et pour par-
faire le tableau des correspondances, n’oublions pas la photo du président
Mitterrand qui avait fait la couverture de cette édition spéciale. avec, en

JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo... • La NuIT RwaNdaISE N°3 7


guise de sous-titre : «Unvéritableamidurwanda.C’estdanslemalheurqueles
véritablesamissedécouvrent». Procès en sorcellerie ou pas, l’ombre pesante du
fantôme de Solutré pèse sur les témoins de la défense.
Le Péan est une sacrée reprise de textes génocidaires Interahamwe, mati-
née de sauce coloniale.
un exercice D’auto-Défense granDeur nature
L’armée française se joint à cet étrange ballet qui s’éternise. Je me
demande d’ailleurs pourquoi il n’y a pas une limite au nombre de témoins
de la défense ! appelés pour témoigner, nous entendrons tour à tour le
général Jean-Luc Lafourcarde (Commandant en chef de l’Opération
Turquoise), l’amiral Lanxade (chef d’état-major particulier du président de
la République et coresponsable avec François Mitterrand du
Commandement des opérations spéciales) et le major Robardey. Ce der-
nier était conseiller technique pour la gendarmerie nationale de 1990 à
1993, trois années clés pendant lesquelles le génocide se prépare activement
au sein des Forces armées Rwandaises – FaR entraînées par des cadres
militaires français. Les officiers vont commencer par se défendre âprement
bien avant de témoigner pour Péan. Ils font des déclarations incroyables
telles que : «Cen’estquerécemmentquej’aicomprisqu’àBiseserolapopulation
hystériquedebonheurétaitessentiellementhutu» ; ou encore : «j’aidécouvertà
Biseseroquel’onpeutmourirdedésespoir» ; quel scoop mon général ! Michel
Robardey vociférant, expliquera sans ambages que le génocide des Tutsi, ce
ne sont que de justes représailles de l’attaque du Front Patriotique
Rwandais (FPR), ces envahisseurs venus de l’armée ougandaise ! La posture
extrêmement défensive des militaires me surprend quelque peu mais
lorsque l’amiral Marin Gillier (responsable du détachement Turquoise à
Gishyita) prend la parole pour parler des «cervellesdecadavres», je n’en peux
plus de tant de cynisme déployé et m’accorde une pause. Je ne suis plus vrai-
ment en état de réfléchir, c’est un peu la tempête sous mon crâne. J’ai
récemment mis la main sur la citation de Primo Lévi qui résume assez bien
ce que je pense à cet instant précis. «Ilestpossiblequecestentativesde“réduc-
tion”nedissimulentpasseulementlarechercheduscandale,maisl’autreâmedela
France, celle qui a expédié Dreyfus en Guyane, qui a accepté Hitler et suivi
Pétain. »22
de plus, les militaires ont tous, sans exception, nié l’implication fran-
çaise dans le génocide des Tutsi. Il est vrai qu’en plus de nombreux travaux
et d’ouvrages publiés23, l’ombre de l’accablant rapport de la commission
d’enquête rwandaise Mucyo24 plane également au-dessus de la Cour.

8 La NuIT RwaNdaISE N°3 • JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo...


changement De costume
la musique, elle, tourne en boucle
une religieuse s’est glissée parmi les uniformes : Madeleine Raffin.
arrivée au Rwanda en 1968, elle a d’abord été enseignante puis respon-
sable de Caritas (Secours catholique) à Gikongoro. dans la préfecture de
Gikongoro, située dans la fameuse zoneTurquoise, se trouve aujourd’hui l’un
des plus grands charniers du génocide des Tutsi de 1994 : l’école de
Murambi. déjà en 1963, Gikongoro avait été le théâtre du petitgénocidedes
Tutsi dont Madeleine Raffin semble se souvenir. ainsi, lorsque Me Forster
lui demande «où disparaissaient ses collègues tutsi?», elle répondra laco-
nique : «Ils étaient probablement tués», tout en insistant sur le fait qu’elle
avait été expulsée du Rwanda en 1998 ! au passage, Mme Raffin omet
quelques précisions, notamment sur sa gestion discriminatoire de l’argent
de la Caritas – qui lui a valu son expulsion –, son lien avec l’abbé Raffin
(son frère, ami de génocidaires), l’affaire des machettes de la Caritas25, le
meurtre des employés tutsi de son évêché livrés aux miliciens ainsi que les
réfugiés tutsi affamés volontairement dans son diocèse… Mme Raffin a la
mémoire bien sélective encore lorsqu’elle affirme, sans sourciller, que «les
enfantstutsiontlaculturedumensonge», alors que quelques minutes plus tôt
elle se disait «incapablededistinguerparmisesancienscollèguesenseignants,les-
quels étaient tutsi ou hutu». aujourd’hui, Madeleine Raffin est très active
dans la défense de génocidaires présumés tels que Mr Ntawukuriryayo, fina-
lement transféré au TPIR en juin 2008 après moult péripéties. Elle est éga-
lement vice-présidente de l’association France-Turquoise, créée par le géné-
ral Lafourcade. association dont le but déclaré est de «défendreetpromou-
voir,partouslesmoyensappropriés,lamémoireetl’honneurdel’arméefrançaiseet
desmilitairesfrançaisayantserviaurwanda». Par tous les moyens…
Je passerai rapidement sur l’audition d’un autre militaire, le colonel
belge Luc Marchal (commandant du secteur Kigali de la Minuar). de tous
les militaires, il sera le moins assuré à la barre, il m’a l’air psychologique-
ment très fragile, j’ai presque pitié de lui et j’ai la tête qui tourne. au pro-
pre comme au figuré, ce ballet macabre m’a donné le vertige.
Du Déni De soi à la haine De l’autre
Il y a un autre citoyen belge au rang des témoins de la défense. d’origine
rwandaise celui-là, son nom est antoine Nyetera.
Nyetera va soliloquer longuement sur «lemensongecongénitaldesTutsi»,
dont il précisera qu’il ne l’est plus puisqu’il est Belge ! Il va parler de «l’en-
fanttutsi» ainsi que de «l’éducationtutsi» qui récompense le mensonge ; une

JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo... • La NuIT RwaNdaISE N°3 9


terminologie que Me Bourg ne va pas se priver de reprendre lui-même
abondamment. Comble du cynisme, Nyetera parlera d’une rescapée «men-
teuse» – parce que Tutsi donc – qui aurait réussi à se cacher sous un lavabo
– «alorsqueceuxcachésdanslesplafondsétaienttousdébusqués» – et dont les
trois enfants ont été tués. Ladite femme serait « auteure ». Nul besoin d’être
érudit pour reconnaître là le portrait de Yolande Mukagasana, assise à mes
côtés à cet instant précis.
Quant à savoir comment le témoin est, lui, parvenu à échapper à cette
culture du mensonge dans laquelle il aurait été élevé, ce dernier répondra
que c’est grâce à l’enseignement catholique. Plus précis encore, Me Forster
lui posera la question de savoir pourquoi cet antidote à l’éducation n’a pas
marché pour les autres tutsi ou hutu – «menteursparimprégnation» – quand
on sait que le Rwanda est le pays le plus catholique du continent africain ?
Là, décontenancé, Nyetera reconnaîtra devant les juges, cette fois agacés,
qu’il ne sait pas s’il est ou non menteur. autre moment cocasse : incapable
d’avancer à la Cour le moindre argument sérieux concernant ses compé-
tences – autres que ses multiples apparitions à arusha au TPIR à la
demande de la défense des génocidaires présumés – Nyetera soutiendra
sans sourciller qu’il n’est pas diplômé car il n’y avait pas d’université au
Rwanda. Me Forster lui demande alors la date à laquelle a été créée l’uni-
versité nationale du Rwanda ? Nyetera murmure « 1956 ». Il avait donc
vingt ans, ou tout au moins l’âge de commencer l’université ! Pour complé-
ter son argumentation, Me Forster rajoutera que le TPIR avait refusé le sta-
tut de témoin-expert à Nyetera compte tenu de son niveau d’éducation, de
formation et d’expérience, jugés insuffisants.
En écoutant Nyetera, je suis passée de la colère au rire – cet homme de
70 ans passés gesticule comme un pantin pour ponctuer ses propos décou-
sus – et à la tristesse enfin. Nyetera, j’en avais déjà entendu parler dans la
bouche de mon père, évoquant «lesnôtresdevenusunpeufous». Saura-t-on
un jour quel drame a traversé son existence pour le plonger dans une telle
névrose, dans une telle haine de lui-même finalement ?
le riDicule ne tue pas ?
À la barre, nous verrons défiler également des Rwandais. L’ancien ambas-
sadeur et ancien ministre des affaires étrangères, Jean-Marie Vianney
Ndagijimana, ainsi que le général Emmanuel habyarimana, ancien minis-
tre de la défense. Sont venus témoigner également à leurs côtés, Messieurs
Joseph Matata (du Centre de lutte contre l’injustice et l’impunité au

10 La NuIT RwaNdaISE N°3 • JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo...


Rwanda, CLIIR) ainsi que Joseph Ngarambe (co-auteur de l’ouvrage Les
médiasdugénocide). Je n’ai pas retenu leurs propos dans le détail. de Joseph
Ngarambe, je retiendrai l’argument le concernant de «génétiquementmixte»,
c’est à dire de mère tutsi. une mère dont il refuse de dire explicitement
qu’elle l’a mal élevé – il en est presque touchant – tout en s’étalant longue-
ment, sur «l’éducation au mensonge chez les Tutsi». Là, dans ce prétoire, il
finit par s’auto-contredire avec la critique virulente faite de la propagande
dans Lesmédiasdugénocide. Le témoin est peu convaincant et peu sûr de lui.
arrive alors Matata, en transe. Il crie plus qu’il ne parle. Ce qui lui vaut
une remarque polie de Me Maingain qui n’arrive plus à l’écouter tant ses
tympans vrillent. Matata implore l’assistance de l’aider et appelle de tous
ses vœux la création d’une «journéeinternationaledumensonge» pour guérir
ce qu’il appelle «lemalrwandais». S’encombrant de peu de cohérence, le
témoin survolté est un spécimen rare qui aurait ainsi pu échapper à une
grave tare génétique ! Il faut relever ici le glissement qui s’est opéré dans les
argumentations de la défense. Nous sommes passés d’une prétendue discus-
sion sur la culture à des assertions pseudo-scientifiques sur l’être humain
(avec les vocables «génétiquement» ou «atavismes»). Je rirais allègrement de
Matata et de Nyetera si je ne reconnaissais pas dans leur discours la rhéto-
rique génocidaire. Matata, avec son diagnostic alarmiste («lemal»), appelle
à un traitement radical. Cela n’est pas sans rappeler le langage du bestiaire
des génocidaires – «Inyenzioucancrelat» – ou encore plus récemment dans
la prose de Péan : «verdanslefruit» ou contamination «parimprégnation».
diaboliser, créer la psychose du risque d’infection, suggérer un traitement
radical (l’extermination) sont les piliers de la propagande génocidaire.
Cette rhétorique déshumanisante et pathologisante a légitimé l’exclusion26
sociale des Tutsi, leur déportation27 ainsi que la torture (nourrissons jetés
vivants dans les latrines, viols systématiques des femmes, émasculation des
hommes entre autres sévices). Le ridicule de ces hommes à la barre ne les
tue pas eux, mais il a déjà tué, il tue encore, il entretient la folie génocidaire.
Du racisme Décomplexé au négationnisme DébriDé
Parlons un petit peu de Charles Onana. Mr Onana refuse de répondre
à la question de l’accusation dont «ilnesaisitpaslesous-entendu». La ques-
tion était : «LemassacredesBagogwevousévoque-t-ilquelquechose?» Elle fai-
sait suite à son affirmation péremptoire selon laquelle les Tutsi de l’inté-
rieur n’auraient jamais été inquiétés au Rwanda avant 1994 ! Le même
Onana revendique appartenir, lui, à une grande chefferie camerounaise où
la vérité serait érigée en vertu, contrairement à ce qui se passerait chez les

JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo... • La NuIT RwaNdaISE N°3 11


Tutsi. Et d’ajouter : «jecomprends», l’air de dire qu’après tout, il ne s’agirait
là que d’un système de valeurs différent. Le relativisme culturel s’invite
donc au procès. Onana poursuit et s’indigne de n’avoir pas été attaqué en
justice, «lui», alors qu’il tient dans son livre les mêmes thèses que Péan –
comme si cela exonérait Péan ! Il suggère à son ami Péan que cela doit être
dû à sa couleur de peau plus foncée. dominique Sopo rappelle aussitôt que
SOS-Racisme est la première association à avoir attaqué en justice l’humo-
riste dieudonné. Ce dernier étant plus bronzé que Mr Péan, l’accusation à
peine voilée de racisme tombe à l’eau. Comme cela s’est produit tout au
long de ce procès, la surenchère d’arguments racistes est la norme.
En résumé, la démonstration des témoins de la défense consiste à prou-
ver l’absence d’intention raciste chez Pierre Péan en s’appuyant sur des asser-
tions toutes plus racistes les unes que les autres. L’autre axe de la défense
consiste à proposer une soi-disant réécriture du génocide des Tutsi dont ces
derniers seraient eux-mêmes responsables. C’est énorme mais, après tout,
c’est exactement la thèse que Pierre Péan déroule dans son ouvrage.
dans la même veine, Me Jordi Palou Loverdos, l’avocat espagnol vient
témoigner pour la défense, et ce, totalement à charge contre le Rwanda.
L’avocat parle très longuement pour nous décrire les officiels rwandais, au
pouvoir à Kigali, tous génocidaires à l’en croire. Le propos n’argumente pas
plus que ne le fait la centaine de pages du réquisitoire du Juge andreu.
Fréquemment, Me Loverdos – qui s’exprime dans un excellent français –
fait appel à son traducteur. Ces intermèdes lui accordent un peu de répit,
le temps pour lui de préparer sa réponse. Il passera le reste de l’audience à
faire la sieste dans le prétoire ! Passons…

au relais Du racisme orDinaire,


les négrophobes ne peuvent pas manquer.
Christophe Nick, hervé deguine et Stephen Smith sont là.
Ils se relaient naturellement avec le reste de la troupe. d’ailleurs, dans les
ouvrages des uns et des autres, lorsqu’ils n’écrivent pas ensemble, ils se ser-
vent mutuellement de référence. de nouveau, des variations autour de «cul-
turetutsidumensongeetdeladissimulation» aux attaques en règle contre le
« pouvoir sanguinaire de Kigali» qui «aurait provoqué le génocide en abattant
l’avion», en passant par le «génocidespontané» se multiplient.
L’argumentation est aussi intellectuellement pauvre et brouillonne que
dans l’ouvrage de Péan. Le négationnisme tout aussi outrancier. Ce para-
digme de l’avion, c’est la signature des négationnistes s’il ne fallait en gar-
der qu’une.

12 La NuIT RwaNdaISE N°3 • JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo...


Je passe sur hervé deguine, venu représenter reportersSansFrontières. Il
reprend mot pour mot un de ces articles publiés quelques mois auparavant
pour soutenir l’ouvrage de Péan. deguine est confondant de bêtise avec ses
sorties sur l’ubwenge, la soi-disant fourberie « congénitale tutsi ». ubwenge
cela se traduit par intelligence et je me demande toujours dans quel esprit
malade est né ce délire sémantique !
Voilà enfin Stephen Smith à la barre. Il dit : «J’ai fait le rwanda après
l’AfriqueduSud,leLibériaetleSierraLeone», comme autant de trophées à sa
gloire de spécialiste autoproclamé de l’afrique. Il est vrai que son témoi-
gnage est dans la droite logique de son livre négrologie, pourquoi l’Afrique
meurt, dans lequel il affirme en préambule que «l’AfriqueestunUbulandsans
frontières, terres de massacres, de famine, mouroir de tous les espoirs». Stephen
Smith va donc continuer en dressant un portrait au vitriol du pouvoir de
Kigali dont il disait hier que c’était un «gouvernementissudesfossescommunes
»28. Toujours dans son pavé négrophobe, Smith écrit que «si six millions
d’Israélienspouvaientparunéchangestandarddémographiqueprendrelaplacedes
Tchadiensàpeineplusnombreux,leTibestifleurirait». Notez le «sixmillions»…
Il faudra attendre la publication aux arènes de l’ouvrage Négrophobie :
réponse aux négrologues, journalistes françafricains et autres falsificateurs
de l’information, pour donner une réponse cinglante à Smith. L’ouvrage est
collectivement rédigé par Boubacar Boris diop, Odile Tobner et François-
Xavier Verschave. À la barre, Smith insiste : «J’aibienditgénocidedesTutsi».
Malheureux qui se gargarise du sang des miens !
Je me suis également posée la question de savoir dans quelle mesure,
lorsque Smith reconnaît à la barre que son ami Péan lui a offert d’écrire un
chapitre de son livre29, cela n’est pas contradictoire avec la déclaration sur
l’honneur qu’il a faite avant de témoigner. Il jure qu’aucune des parties
dans le Tribunal n’est ni parente ni alliée. alliés, Smith et Péan le sont
pourtant de façon incontestable !
avec Smith, nous atteignons un pic dans la surenchère d’arguments
racistes assenés de sang froid. La voix est grave, le débit des phrases est maî-
trisé. après avoir allègrement tenté de démontrer à la Cour que les spécia-
listes du Rwanda se divisent en pro-hutu ou pro-tutsi, Stephen Smith se
définit lui-même comme l’exception qui déroge à sa vision ethniste du
monde. après avoir été au Monde et à Libération, le sieur Smith n’est pour
autant pas plus de gauche que de droite. Tout comme l’avocate de la
défense qui compte démontrer l’absence de racisme par des questions
racistes, c’est avec une vision on ne peut plus raciste de l’afrique que le

JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo... • La NuIT RwaNdaISE N°3 13


journaliste veut nous convaincre de son impartialité. dans la foulée, il se
lâche sur l’armée française. Il parle d’un «colonel français» qui l’aurait
coincé derrière une porte et menacé de lui «refaireleprofilen1993». Cela
se serait produit du temps où il faisait ami-ami avec Paul Kagame, anglo-
phone comme lui ! Nous entendrons avec stupéfaction Stephen Smith met-
tre en avant sa nationalité américaine dont il aurait tiré un avantage « natu-
rel » au Rwanda ! Et le voilà qui nous sort la naphtaline de Fachoda30 de
derrière les fagots !
Pour la petite histoire, lorsque Stephen Smith a fini de témoigner, il
prend place à ma gauche. de nouveaux arrivants se pressent bientôt sur ma
droite. Je lui demande poliment de se décaler. Il me répondra sèchement :
«Vousn’avezqu’àm’enjamber» !
ambiance…
Cette promiscuité physique me pèse. J’en ai plus qu’assez des provoca-
tions de Christophe Nick, qui, après nous avoir agressés en dehors du pré-
toire me traite de «MmeMeinKampf»31. agression imbécile s’il en est, sen-
sée j’imagine, être une riposte au passage à la barre de Benjamin abtan,
l’ancien président de l’union des Etudiants Juifs de France, quelques ins-
tants plus tôt !
variations sur le même thème
dans un article publié dans l’édition du CorrieredellaSera du 3 Janvier
1979, Primo Lévi s’indigna, en son temps, de la tribune offerte au négation-
niste Robert Faurisson dans Le Monde (éditions du 19 et 30 décembre
1978). une tribune s’ouvrant sur un texte intitulé : «Leproblèmedescham-
bresàgazoularumeurd’Auschwitz».
Lévi écrit : «Qu’ontdoncfaitenFrancelesautoritésuniversitairesetlajustice?
Ilsonttoléréquevous,niantlesmorts,vouslestuiezunesecondefois». Robert
Faurisson, universitaire de son état, a multiplié les publications chocs aux-
quelles se succédaient des conférences tout aussi théâtrales et des procès
voulus spectaculaires. depuis 1981, année de sa première condamnation
jusqu’à ce jour, Faurisson continue son tapage nauséabond. Combien de
Péan aura-t-il inspiré ?
le chemin parcouru
dernière étape de cette journée interminable. Tous les témoins sont pas-
sés à la barre. C’est l’heure des plaidoyers. dans l’ordre, les plaignants, le
Procureur de la République puis la défense.

14 La NuIT RwaNdaISE N°3 • JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo...


Bernard Maingain prend le premier la parole à la reprise des audiences.
de sa voix douce, il demande l’indulgence de l’auditoire pour la digression
qu’il veut faire avant son plaidoyer. Il tient à nous parler du chemin par-
couru par la plainte32 qui aujourd’hui débouche sur ce procès. Il tient à
nous dire pourquoi, lui, un avocat au barreau de Bruxelles, est là, au côté
d’une association française, SOS Racisme, et des rescapés rwandais réunis
au sein d’Ibuka.
Il nous parle de cette justice que nous sommes venus réclamer mais
devant laquelle nous ne sommes de facto pas égaux avec d’autres citoyens
victimes du même imprescriptible crime. En effet, en France, seul le néga-
tionnisme contre la Shoah est puni par la loi.
Me Maingain évoque avec tendresse ses amis disparus, dont agathe
uwilingiyimana, Premier ministre rwandaise, assassinée le 7 avril 1994.
Point d’effet de manche. un homme debout prend son temps pour dire
les choses, avec les mots justes. Il sait que les mots sont importants. Il sait
à quel point la symbolique de ce procès est importante pour nous. Lui aussi
voit les témoins invisibles à cette tentative d’auto-réhabilitation dans
laquelle nous nous sommes lancés.
Il les voit. Il rappelle à Pierre Péan qu’il a bien entendu que ce dernier
s’inclinait devant la douleur d’Esther Mujawayo à la barre. Quel sens tou-
tefois donner à ces mots-là quand d’autres, bien plus nombreux et gravés de
surcroît dans le papier, continuent eux, selon Esther, «detuer» ?
Est-ce enfin le retour en humanité de ce procès qui me bouleverse à ce
point ? Est-ce la tension trop longtemps retenue ? La bienveillance incarnée
ici par Bernard Maingain me touche. Son plaidoyer me va droit au cœur.
une digue en moi se rompt. Je me vois sanglotante et parfaitement incapa-
ble de me retenir. J’entends dernière moi une voix amicale me proposant
de sortir, et j’entends ma voix intérieure me dire : «Mêmesitucries,c’esttrès
bien, jamais tu ne seras comme eux». Je sens surtout les bras de Souâd qui
m’enveloppent, mes sanglots viennent de très loin.
dans les écrits de Péan, dans la bouche de toute sa clique, l’atteinte déli-
bérée à la dignité humaine est d’une violence inouïe. atteinte à la dignité
des vivants, à leur culture, à leur intelligence, atteinte à la mémoire des
innocents assassinés parce que « nés Tutsi ». Nous ne pouvons tolérer cela
en toute impunité ! Lev Forster poursuit le plaidoyer avec les vingt-cinq pas-
sages incriminés du livre où les clichés ethnicistes et fascisants se disputent
la vedette à un néo-colonialisme décomplexé.

JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo... • La NuIT RwaNdaISE N°3 15


les mots sont importants
Le réquisitoire du Procureur de la République arrive à point nommé.
Mme le procureur rappelle qu’«on peut écrire toute chose mais pas n’importe
quoinin’importecomment».
Elle note au passage le caractère raciste et pour le moins inconsistant du
syllogisme que suggère Mr Péan : «TouslesTutsisontmenteurs,Kagameestun
Tutsi,Kagameamenti» ; ou alors : «Kagameestunmenteur,KagameestTutsi,
touslesTutsisontmenteurs».
Mme le Procureur va recentrer l’attention sur le motif de la plainte.
Reprenant les passages incriminés, elle va s’attacher à démontrer que la dif-
famation raciale et l’incitation à la haine raciale sont des délits constitués.
Elle prendra le temps de relever les clins d’œil aux relents antisémites tel
que «l’anprochainàKigali» pour «l’anprochainàJérusalem» ? Ou encore la
répétition de façon presque incantatoire de « les Tutsi » à longueur de page.
Elle fera également mention du témoignage d’Esther Mujawayo lorsqu’elle
évoquera la violence faite aux rescapés «qui n’ont même pas de porte pour
cacherleurmisère». Laissant finalement la teneur de la peine à l’appréciation
du Tribunal, Mme le Procureur requiert la condamnation des accusés et la
publication de la décision de justice dans trois quotidiens nationaux.
la Défense D’une libre agression
dans un pavé mal écrit, très peu documenté et compilant une tonne de
critiques ad hominem, Pierre Péan défend une certaine France en repre-
nant la thèse des génocidaires, presque mot pour mot. Il n’hésite pas non
plus à nous servir de l’antisémitisme à peine voilé. Il sort les chantres de la
colonisation des malles poussiéreuses. Tout ce petit monde se fait du pied
sous la table dans son livre. En arriver à défendre les génocidaires pour
défendre la France, le procédé n’est guère flatteur. Et lorsqu’on voit le gra-
tin de la République qui a défilé à la barre, on se demande si elle n’est pas
bien mal en point cette République !
La lecture de cet ouvrage m’a fait bondir et m’a mise en colère pendant
quelques jours. Jamais auparavant je n’ai été dans un tel état de choc après la
lecture d’un livre. Passé ce choc émotionnel, à mon sens souhaité par l’auteur
avec ses formules à l’emporte-pièce, je me suis dit que ce pavé était parfaite-
ment indéfendable sur le terrain du racisme. Et puis voilà, j’ai vécu ce procès…
du racisme à qui mieux mieux à un négationnisme débridé, la défense a
joué du Péan à nous en faire exploser les tympans.
Si l’ouvrage de ce dernier s’avère finalement pouvoir être commis au
nom de la liberté d’expression, alors il ne sera pas moins qu’une idéologie
de la terreur en vente libre.

16 La NuIT RwaNdaISE N°3 • JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo...


pour ne jamais conclure : résister
«Sortirdumensongeestuneaventure.C’estaussiuneépreuve:onnesortpas
indemned’uneexplorationdel’actiondelaFranceenAfriquedepuisles“indépen-
dances”.» François-Xavier Verschave, l’homme qui tint ces propos, n’est
plus. Jean-Paul Gouteux, non plus. Ils n’auront jamais atteint leur soixante-
dixième année, comme c’est le cas de Faurisson ou Péan…
L’humanité est orpheline de ces deux courageux résistants. Ils ont peut-
être payé de leur vie leur acharnement à démonter ces connivences affi-
chées au procès de Pierre Péan, ces noces funestes du néocolonialisme mili-
taire et de la mafia françafricaine.
La réhabilitation de la colonisation ne passera pas par nous ! L’amnésie
non plus !
En kinyarwanda, «ibisa birasabirana» exprime que «ce qui se ressemble
s’assemble».
Nul besoin d’avoir l’œil averti pour constater la forte connivence entre
tous les témoins de la défense : d’anciens ministres français et rwandais, des
journalistes, une religieuse, des chercheurs.
Sur le fond, le spectacle que nous ont donné à voir ces hommes n’est pas
d’un genre nouveau. Cette collusion politico-médiatique sans frontière a
rendu possible la réalisation du génocide des Tutsi en 1994. Elle en est
aujourd’hui le principal outil de négation. Les mêmes moyens – le racisme
d’Etat – servant les mêmes fins – l’extermination massive de populations
innocentes –, il y a sérieusement lieu de s’inquiéter.
Les préjugés persistant, les crimes n’étant pas reconnus, par quel miracle
cesseraient-ils ?
Sur la forme, leur obscénité n’est pas d’un genre nouveau non plus. À la
suite de ce procès, j’ai lu MeinKampf, ce livre n’est pas d’une plus grande
finesse littéraire que Kangura. des témoins rapportent du reste, que des
exemplaires de MeinKampf ont été trouvés dans la demeure de l’ancien pré-
sident du Rwanda, Juvénal habyarimana, dont les deux fils assistaient éga-
lement au procès aux côtés de la défense.
Il appartient à chaque citoyen, dès lors, de veiller à ne pas laisser anesthé-
sier sa conscience, à se renseigner, à approfondir les questions et s’engager.
Sur la question précise de l’implication française dans le génocide des
Tutsi, de nombreux citoyens informés ont formulé une légitime exigence de
justice. Verschave et Gouteux ont creusé un sillon. dans leur sillage ont
émergé de nouvelles formes de résistances, des synergies se créent.

JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo... • La NuIT RwaNdaISE N°3 17


Certes, le courage n’est exigible de personne mais il est peut-être utile de
rappeler que des collectifs existent et qu’individuellement, nous pouvons
interpeller ceux qui, en notre nom, ont armé et soutenu un régime génoci-
daire, avant, pendant et après le génocide.

notes

1. Robert Faurisson, auteur négationniste qui conteste l’existence des chambres à gaz et des
camps d’extermination. Faurisson nie la réalité de la Shoah et a été condamné à plusieurs
reprises en France pour «contestationdecrimecontrel’humanité». Sa dernière condamnation
date de l’été 2007.
2. Esther Mujawayo et Souâd Belhaddad, SurVivantes,rwanda-Histoired’ungénocide, Ed. de
l’aube, 2005, page 216.
3. Tribunal Pénal International pour le Rwanda.
4. de 9h30 à 22h.
5. «Il[Charrier]découvreàcetteoccasionque“le ver est dans le fruit” :lesystèmefuitdetoutes
parts,notammentparl’infiltrationdefemmestutsiauprèsdenombreuxFrançais.“Chez les civils,
seul l’ambassadeur était irréprochable…”,raconteCharrier,toutenajoutantavecunbrindepro-
vocation:“ellessonttellementbellesqu’ellesnouscolonisent.”noiresfureurs,blancsmenteurs,p. 169
6.«Cetteculturedumensonges’estparticulièrementdéveloppéedansladiasporatutsi.Pourrevenir
“l’anprochainàKigali”celle-ciapratiquéavecefficacitémensongesetmanipulations.Lesassocia-
tionsdeTutsihorsdurwandaontfaitainsiuntrèsefficacelobbyingpourconvaincrelesacteurspoli-
tiquesdumondeentierdelajustessedeleurcause.ellesontinfiltrélesprincipalesorganisationsinter-
nationales,etd’aucuns,parmileursmembres,ontsuguiderdetrèsbellesfemmestutsiversdeslits
appropriés...Leurbrillanteintelligenceasuparfaitementsejouerdenombreuxmilieuxintellectuels.»
Pierre Péan, noiresfureurs,blancsmenteurs, Rwanda 1990-1994, Editions Mille et une nuits
(Fayard), Paris Novembre 2005, page 40.
7. Néologisme emprunté à mon ami Révérien Rurangwa, auteur de Génocidé, Presses de la
Renaissance, 2006.
8. Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, article II : «Legéno-
cides’entenddel’unquelconquedesactesci-après,commisdansl’intentiondedétruire,entoutouen
partie,ungroupenational,ethnique,racialoureligieux,commetel:a)meurtredemembresdugroupe ;
b)atteinteàl’intégritéphysiqueoumentaledemembresdugroupe;c)soumissionintentionnelledu
groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ; d)
mesuresvisantàentraverlesnaissancesauseindugroupe;e)transfertforcéd’enfantsdugroupeàun
autregroupe.»Convention sur l’imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre
l’humanité, article 1b : «Lescrimessuivantssontimprescriptibles,quellequesoitladateàlaquelle
ilsontétécommis:Lescrimescontrel’humanité(…)ainsiquelecrimedegénocide,telqu’ilestdéfini
danslaConventionde1948.»
Code pénal français article 211-1 : «Constitueungénocidelefait,enexécutiond’unplanconcerté
tendantàladestructiontotaleoupartielled’ungroupenational,ethnique,racialoureligieux,oud’un
groupedéterminéàpartirdetoutautrecritèrearbitraire,decommettreoudefairecommettre,àl’en-
contredemembresdecegroupe,l’undesactessuivants:–atteintevolontaireàlavie;–atteintegrave
àl’intégritéphysiqueoupsychique;–soumissionàdesconditionsd’existencedenatureàentraînerla
destructiontotaleoupartielledugroupe;–mesuresvisantàentraverlesnaissances;–transfertforcé

18 La NuIT RwaNdaISE N°3 • JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo...


d’enfants.Legénocideestpunidelaréclusioncriminelleàperpétuité.»
9. Pierre Péan, noiresfureurs,blancsmenteurs, page 17
10. Pierre Péan, op.cité, page 20.
11. Ibid., page 177.
12. Interview réalisée par Vincent hugeux - rwanda.LaFaceCachée, L’Express, 1er décembre 2005.
13. Pour reprendre le titre de l’ouvrage de Patrick de Saint-Exupéry L’inavouable.LaFrance
aurwanda, Les arènes, 2004.
14. Yves Ternon http://www.imprescriptible.fr/dossiers/ternon/negationnisme
15. Conformément aux conclusions du rapporteur spécial de la Commission des droits de
l’homme de l’ONu, René degni-Segui dans son rapport du 28 juin 1994
(E/CN.4/1995/7) qui établissent que les massacres sont un génocide perpétré à l’encontre
des Tutsi. S’ensuivront la même année deux autres résolutions de l’ONu. La résolution 935
portant sur la création d’une commission d’experts qui conclura qu’il y a eu génocide des
Tutsi mais pas de génocide des hutu et la résolution 955 portant sur la création d’un tribu-
nal ad-hoc, le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (le TPIR). La lettre datée du 15
/12/1999 (S/1999/1257) adressée au président du conseil de sécurité par le secrétaire géné-
ral de l’ONu précise : «LeTribunalaétabliquelemassacredeTutsisaurwandaen1994consti-
tuaitungénocide,enl’espèceungénocideplanifiéetmisàexécutionparlesextrémisteshutusàl’en-
contredesTutsis.»
16. L’article 24bis, dit « loi Gayssot », de la loi de 1881 sur la liberté de la presse, sanctionne
l’expression publique des discours négationnistes à savoir la contestation de l’ampleur ou de
la réalité de la Shoah.
17. http://cec.rwanda.free.fr/pilotage/plaintes.htm
18. Les mangemorts sont de sinistres personnages de la saga fantastique harry Potter, écrite
par J.K. Rowling. Le terme Mangemort est une traduction littérale de l’anglais « death
Eaters ». C’est en fait un groupe de sorciers organisés comme une secte. Ils sont au service
de «Celui-Dont-on-ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-nom» ou «Vous-Savez-Qui» de son vrai nom Tom
Elvis Jedusor, il se fait également appeler Lord Voldemort. Les mangemorts sont à la fois fas-
cinés et terrorisés par Voldemort. Ils lui ont fait allégeance pour diverses raisons : conviction
idéologique, peur, ensorcellement, intérêt pécunier ou tout simplement bêtise. Voldemort
n’a qu’une obsession : la pureté du sang. Tout à sa quête d’immortalité, il mutile son âme
en divers fragments (les horcruxes) mais son arrogance le perdra. Il sous-estime l’intelligence
et la force de ceux qui le combattent regroupés autour de harry Potter. au terme de nom-
breuses intrigues, le lecteur découvre que Tom Jedusor est lui-même « un sang mêlé », il
mourra tué par ses propres maléfices.
19. Il est l’auteur entre autres livres sur le Rwanda de LaVéritableHistoiredesgénocidesrwan-
dais (éd. Jean-Claude Gawsewitch, 2006) dans lequel il défend la thèse du « double génocide »
20. Paul dresse, né en 1902 publie, au terme d’un unique voyage au Rwanda, Le Rwanda,
d’aujourd’hui, préfacée par Pierre daye, député d’un parti fasciste belge, le mouvement
Rexiste. L’ouvrage fourmille de formules racistes jointes à la plainte. Notamment : «…c’estce
quifaitdecetterace[lesTutsis]l’unedesplusmenteusesquisoientsouslesoleil».
21. Il montre les caricatures du journal Kangura montrant le général dallaire et les femmes tutsi
dans des postures lascives. Le rédacteur en chef de Kangura, hassan Ngeze, sera en 2003,
condamné à perpétuité par le TPIR pour incitation à la haine ethnique avant et durant la
période le génocide de 1994. Sa peine est passée à 35 ans de prison ferme après appel.
22. La citation est tirée d’une série de textes réunis par Catherine Coquio au sein d’un
ouvrage paru chez L’harmattan intitulé Des Crimes contre l’humanité en république française
(mars 2006).

JEaNINE MuNYEShuLI BaRBé, ConCerTo... • La NuIT RwaNdaISE N°3 19


23. Signalons entre autres ouvrages :
• Complicitédegénocide?LapolitiquedelaFranceaurwanda- François-Xavier Verschave, La
découverte, 1994
rwanda,ungénocidefrançais – Mehdi Ba, L’esprit frappeur, 1997
• UnGénocidesurlaconscience – Michel Sitbon, L’esprit frappeur, 1998
• L’inavouable.LaFranceaurwanda– Patrick de Saint-Exupéry, Les arènes, 2004
• Imprescriptible,l’implicationfrançaisedanslegénocidetutsiportéedevantlestribunaux – Géraud
de la Pradelle, Les arènes, 2005
• L’horreurquinousprendauvisage – Rapport de la Commission d’enquête citoyenne sous la
direction de Laure Coret & François-Xavier Verschave, Karthala, 2005
• Lanuitrwandaise,L’implicationfrançaisedanslederniergénocidedusiècle – Jean-Paul Gouteux,
• L’esprit frappeur, 2002
• Lanuitrwandaise, Revue annuelle - Collectif, N°1 et 2 - avril 2007 / avril 2008
24. Le rapport est téléchargeable dans son intégralité sur le site http://www.lanuitrwan-
daise.net. Ce site est La référence sur la question de l’implication française dans le génocide
des Tutsi de 1994.
25. Jean-Paul Gouteux Lerôledel’égliseaurwanda, dans la revue Lanuitrwandaise N°1, 7
avril 2007.
http://izuba.info/Nuitrwandaise/spip.php?article16
Pour creuser la question, l’ouvrage de Jean-damascène Bizimana : L’egliseetlegénocideau
rwanda,LespèresBlancsetlenégationnisme(L’harmattan, 2001) est incontournable.
26. Les cartes d’identité nationales ont institué le fichage ethnique. Sur cette base, les Tutsi
étaient officiellement discriminés (accès à l’instruction et à l’emploi très limités)
27. Comme de nombreuses familles tutsi dans les années 1960, celle de Scholastique
Mukasonga a été déportée dans la région hostile de Nyamata (infestée par la mouche tsé tsé).
Elle en témoigne dans son ouvrage Inyenzi ou les Cafards, Collection Continents noirs,
Gallimard, 2006. Elle tient un blog.
http://www.scholastiquemukasonga.com
28. Stephen Smith in Libération du 11 et 12 Mars 2000 dans un article intitulé «Lapisteenter-
réeparl’onU».
29. Le chapitre s’intitule «StephenSmithrépondàSurviequiaécritsurluinégrophobieunpam-
phlethonteux».
30. À la fin du 19ème siècle, la France et l’Empire britannique, deux puissances coloniales
s’affrontent pour conquérir le Soudan actuel. La France échouera générant une montée
nationaliste et un vif ressentiment en France. Les défaites militaires qui suivront (en 1940
et à la libération), le déclin relatif de la France (après les décolonisations) vont contribuer à
nourrir ce sentiment. Le complexe de Fachoda est l’expression qui consacre ces vieilles ran-
cunes dans une tentative d’explication générique de la rivalité « séculaire » entre les deux
puissances coloniales.
31. Les larmes de Pierre Péan ont provoqué un moment de diversion indue, largement com-
menté dans la presse.
32. Je souhaite qu’en son temps, paraisse, un écrit détaillé sur l’histoire de cette plainte
(déposée en Octobre 2006) que je ne fais ici qu’évoquer.

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