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et la reconnaissance
du génocide
arménien en France
RÉDIGÉ PAR
Ikhlass ARABAT et Maïlys GARON
Sommaire
Introduction p.2
institutionnalisation du rite ?
Conclusion
Annexe
Bibliographie
Ikhlass ARABAT, Maïlys GARON
Introduction
Les deux tiers de la population arménienne est morte durant le génocide réalisé par les
Ottomans en 1915. Un génocide qui sera orchestré au plus haut grade de l’Empire ottoman
avec comme principal leader Talaat Pacha, grand vizir de l’époque. La reconnaissance de ce
génocide a pris du temps, tout d’abord car la notion de génocide n’existait pas avant la Shoah.
Effectivement, le génocide juif qui a eu lieu lors de la Seconde Guerre mondiale et les procès
de Nuremberg qui ont suivi ont permis de mettre en place une définition de ce qu’est un
génocide par l’ONU en 1948. Cela a permis un réel éveil de la mémoire arménienne, qui au
départ « ne voulaient pas revenir sur le passé », ce qui permettra dès 1965 le début des
commémorations mais aussi de la reconnaissance de ce génocide comme tel à l’échelle
internationale. Le pays de la Céleste est le premier à reconnaître le génocide arménien par le
biais d’une loi. Il ne sera reconnu par l’ONU qu’en 1985, une reconnaissance tardive
principalement due à la pression turque. La Turquie au départ ne voulait pas nier sa
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responsabilité dans cet évènement. Cela s’observe en 1919 lors de la mise en place des procès
des unionistes. Des «procès donnent les détails du massacre, et de son organisation, de sa
préméditation ». Ce processus a été arrêté lors de l’ascension à la tête de la République de
Turquie en 1923 de Mustafa Kemal ‘Atatürk’, père de la nation turque. Ce dernier mettra en
place une politique négationniste, qui perdure encore aujourd’hui, due au fait que le régime de
Mustafa Kemal était principalement composé de fonctionnaires du régime des jeunes-turques,
principaux instigateurs du génocide arménien. Cette position turque a ainsi influencé celle de
la communauté internationale, qui craignait de dégrader ses relations avec la Turquie. À la fin
de la Seconde Guerre mondiale et au début de la guerre froide, avec l’intégration de la Turquie
dans l’OTAN et de l’Arménie dans le bloc soviétique, « il n’est plus question de demander des
comptes à la Turquie, parce qu’elle devient un pion essentiel face à la Russie » nous explique
l’historien au CNRS Philippe Videlier.
Cet évènement qui touche le monde entier à travers la participation des États
occidentaux dans la non-reconnaissance de ce dernier mais aussi le grand nombre d’Arméniens
en diaspora nous montre l’importance de la commémoration mais aussi l’étude des moyens qui
ont permis de mettre en place un tel rite commémoratif. Nous nous poserons la question
suivante : alors qu’un rite communautaire est institutionnalisé, en quoi ce changement de
dimension affecte-t-il le rituel sur différents aspects ?
Pour cela nous verrons dans un premier temps comment le rite de commémoration du
24 avril sera instauré. Puis dans un second temps nous étudierons son passage de ce dernier
d’un rite communautaire à un rite national et donc à son institutionnalisation. Enfin, nous
essaierons quand même de remettre en question cela dans une dernière partie.
Depuis 1965, les Arméniens du monde entier et de France ont décidé de sortir du
domaine intime et personnel qu’est le deuil afin de mettre en place un rite de mémoire aux yeux
du public par le biais de la commémoration, le 24 avril.
eu lieu bien avant le début du 20e siècle, c’est bien le 24 avril 1915 que cette discrimination va
prendre un tournant dramatique avec la rafle des intellectuels arméniens qui étaient environ
270. À la suite de l'ordre de Talaat Pacha (annexe 1), les intellectuels arméniens qui avaient été
réunis à Constantinople furent arrêtés à 20 heures. Leur arrestation marquera l’arrestation de
nombreux notables arméniens et le début des massacres qui ne se termineront qu’en 1923. Le
24 avril est donc important car il marque en quelques sortes le début du génocide arménien.
La création de ces nombreux mémoriaux est due à la forte pression faite par la troisième
génération d’Arméniens en diaspora, qui malgré l’éloignement de ses terres, reste très soudée.
Ils le sont souvent à travers des associations, chargées d’organiser la commémoration du 24
avril en France.
Cette nouvelle génération d’Arméniens va dans les années 1960 et 1970 permettre la création
d’une nouvelle élite qui réussira à obtenir une certaine influence sur le plan national français.
Cela peut s’illustrer avec les nombreux jeux d’alliances qui vont voir le jour entre les partis
politiques arméniens et français.
L’évènement du 24 avril est organisé par différentes associations chaque année. Ce ne sont pas
les mêmes associations qui s’occupent de l’organisation. Parfois, elles collaborent ensemble.
Les principales associations participatives dans toute la France sont : la Fédération
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On remarque une certaine colère, plus que de la tristesse dans l'événement. On voit donc une
vraie envie de se défaire du deuil. La commémoration est plus une manière d’exprimer la colère
qu’ont les Arméniens qui ne demandent qu’une reconnaissance. Une reconnaissance qui pour
beaucoup pourrait permettre de diminuer les attaques constantes en cours par l’Azerbaïdjan
dans le cadre du conflit concernant le Haut-Karabakh.
Au lieu de pleurer les morts avec le rite de deuil dans lequel les premiers Arméniens étaient
afin de « reconstruire leur vie, les premières générations, notamment celle des exilés qui ont
vécu le génocide, ne voulaient pas revenir sur le passé ». Préférant garder cela dans l’ordre de
l’intime comme le deuil le veut. Ils vont dans les années 60 décider d’exprimer leur colère. Une
colère face à la non-action des États occidentaux qui avaient promis de les protéger et de les
aider après le génocide, des États qui ont préféré céder à la pression turque mise en place dès
la création de la République Turque.
Cela va s’illustrer en France par une institutionnalisation de ce rite grâce à la prise en main du
24 avril par l’État Français.
Emmanuel Macron s’est ainsi engagé dans une démarche commémorative et fraternelle
avec l’Arménie. Lors de ce même voyage diplomatique en 2018, donc avant l’instauration
dans lequel il disait : « Il nous avait appris à admirer, à aimer votre peuple singulier,
dont il a été victime ». Ici, il parle de Charles Aznavour - décédé peu de temps avant - mais
c’est au nom de la nation tout entière qu’il affirme la grandeur du peuple arménien et de sa
diaspora présente en France. À travers son discours sur le sol Arménien, il souhaite rappeler
les liens qui unissent les deux pays, des liens qui prennent en compte parfaitement le génocide
qui avait visé les Arméniens en 1915. En tant que représentant de la France, il énonce à nouveau
Ainsi, lors de ces trois moments du voyage diplomatique de 2018, Emmanuel Macron
prend position en faveur de la reconnaissance internationale du génocide arménien. Il inscrit la
France en tant qu’allié commémoriel de l’Arménie, entrant encore davantage dans une
démarche de devoir de mémoire qu’avaient pu le faire ses prédécesseurs. En effectuant lui-
même le rite de commémoration arménien, il fait entrer la population française dans cette
dimension rituelle, puisqu’il en est l’allégorie. Une allégorie qui se dessine à travers son statut
de représentant ou des rappels qu’il est là au nom de la France et de la population française
notamment.
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donc dans un raisonnement moral, éthique ou encore philosophique, faisant donc entrer dans
le cadre législatif des dimensions nouvelles.
Il y a pourtant eu, à deux reprises, des tentatives d’introduction d’une normativité dans
la reconnaissance du génocide arménien. Le 23 janvier 2012, une loi punissant la contestation
du génocide arménien de 1915 avait été définitivement adoptée par le Parlement, soutenu par
le président Nicolas Sarkozy. Cependant, à peine un mois après, le Conseil constitutionnel l’a
censurée, affirmant qu’elle allait à l’encontre de la liberté d’expression. Selon un communiqué
de Nicolas Sarkozy, « Le Conseil a jugé qu’en réprimant la contestation de l’existence et de la
qualification juridique de crimes qu’il aurait lui-même reconnus et qualifiés comme tels, le
législateur a porté une atteinte inconstitutionnelle à l'exercice de la liberté d’expression et de
la communication ». Bien que la légitimité du Conseil constitutionnel à revenir sur des lois
votées ne soit pas à remettre en cause, la volonté profonde de l’État français à éradiquer toute
forme de négationnisme ou de révisionnisme peut être interrogée. De plus, en 2016, un nouveau
texte avait été promulgué contre tout négationnisme, mais le Conseil constitutionnel a de
nouveau abrogé cette loi, au même motif qu’en 2012. Au nom de la liberté d’expression, les
institutions françaises peuvent donc autoriser les atteintes à la mémoire de victimes de crimes
contre l’humanité. La France reconnaît et commémore à titre national le génocide arménien de
1915, mais n’interdit pas formellement la négation de l’existence du génocide, en résumé.
part. Les commémorations faites par les communautés arméniennes en France n’avaient pas
sont toujours dans la majorité des cas. Par exemple, en 2017 en Poitou-Charentes, l’association
Sèvres, avec aussi de nombreux Mélusins. Les représentants locaux de la République française
pouvaient déjà prendre part, de leur propre initiative, aux commémorations. Le public n’a
cependant pas changé, ce sont toujours les communautés arméniennes qui commémorent, le
reste de la population ne sachant même pas pour la majorité que le 24 avril est le jour national
Conclusion
Annexe
Sources
Bibliographie
● El KENS, David et François-Xavier NÉRARD (dir.) « Le monument commémoratif de
Dzidzernagapert à Erevan : l'invention d'un « haut lieu » de 1967 à nos jours », dans
Commémorer les victimes en Europe, xvie – xxie siècles, Champ Vallon, Seyssel, 2011.
● LATTÉ, Stéphane. Le choix des larmes. La commémoration comme mode de
protestation [en ligne]. Politix, 2015/2 (n°110), p.7-34. Disponible sur :
https://www.cairn.info/revue-politix-2015-2-page-7.htm
● DONABEDIAN Patrick, « Spécificité typologique des khatchkars diasporiques : les
petites plaques à croix murales » [en ligne] in Armenia between Byzantium and the
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Disponible sur : https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-
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20Petites%20plaques%20murales.%202020.pdf
● MASSERET, Olivier. La reconnaissance par le Parlement français du génocide
arménien de 1915 [en ligne]. Revue d’histoire. 2002/1 (no 73). Disponible sur :
https://www.cairn.info/revue-vingtieme-siecle-revue-d-histoire-2002-1-page-139.htm
● La nouvelle république. La Commémoration du génocide arménien [en ligne].
26/04/2017. Disponible sur :
https://www.lanouvellerepublique.fr/vienne/commune/lusignan/commemoration-du-
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● Amicale des arméniens de Toulouse midi-pyrénnes. Le Khatchkar [en ligne].
Disponible sur : https://www.guiank.org/le-khatchkar.html
● La reconnaissance par la France du génocide arménien: un acte tardif, incomplet et
quelque peu opportuniste. [en ligne]. Madaniya, 24/04/2019. Disponible sur :
https://www.madaniya.info/2019/04/24/la-reconnaissance-par-la-france-du-genocide-
armenien-un-acte-tardif-incomplet-et-quelque-peu-opportuniste/
● Génocide arménien : Macron devant un mémorial pour la journée nationale de
commémoration [en ligne]. Le Parisien avec AFP, 24/04/2021 . Disponible sur :
https://www.leparisien.fr/politique/genocide-armenien-macron-devant-un-memorial-
pour-la-journee-nationale-de-commemoration-24-04-2021-
GXYV7QF3BNGF5PQS2XEOLY5Y4Y.ph
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