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Projet de réflexion autour de l'oeuvre de Nicolas Maigret: The Pirate Cinéma.
Dans le cadre d'études d'art à Paris8.
Conclusion :
Roland Barthes dans La mort de l'auteur, critique la vision d’un artiste ne devant sa création qu’à lui seul. il relativise la part d’originalité qui lui est propre à l’échelle d’une histoire qui le dépasse, sa lecture est plus archéologique. Walter Benjamin a, quant à lui, pensé les modifications sociales émanant des transformations industrielles permettant une reproductibilité technique36. Elle a engendré une perte de l’objet unique et de son aura qui validait jusqu’alors le geste de l’artiste dans sa production. Cette vision bourgeoise issue d’une histoire de reconnaissance du talent est mise à mal par l’apparition de technologies dépassant ces capacités. Les ready-made de Duchamp sont des objets trouvés, anonymes, appropriés pour un nouvel usage qui les décontextualise et fait œuvre grâce à celui qui les regarde. il a pour ainsi dire démystifié le geste de l'artiste tout en relativisant la notion de savoir faire qui l'accompagne.
la démocratisation des outils donne à chacun la possibilité d’être auteur bien qu'amateur et de s’approprier les contenus d’autrui. en outre, le principe d’horizontalité sur internet, offre une accessibilité et une compréhension des outils, ainsi plus faciles à détourner. la liberté vis- à-vis des outils de production rend la création d’autant plus composite, issue d’un tissu d’autres histoires, d’autres origines que celle de l’auteur-dieu37. internet, dans l'immédiateté d'accès aux contenus qu’il rend possible, sans rendre visibles ses moyens structurels, renforce cette impression d’être défait des conventions sociales communes.
Mais surtout, en dédoublant un objet à l’identique, en le rendant disponible en deux lieux et temps, ce dernier est appauvri symboliquement. Cet ajout diminue l’impression de rareté du produit sur le marché. la pratique du screenerg est emblématique du détournement de l’œuvre au sein des étapes de diffusion marchande standard. Cette technique est une sorte de Pirate Cinéma au sein même du cinéma pour le défaire de sa raison d’être. alors que le cérémonial spécialisé des salles de cinéma permet dans un temps donné d'apprécier une œuvre, les dispositifs individuels et anonymes, domestiques, libèrent le spectateur de ces contraintes. le cinéma, dans ses conventions cérémonielles, coupe par exemple la fiction de ce qui lui est extérieur. Les différentes formes de glitch, tel le data-moshing, produisent une esthétique du dérèglement de l’outil numérique. Son apparition défait le spectateur de son état de regardeur accueilli dans un lieu masquant ses moyens de production au profit de la narration. La perte du contexte narratif des films, dans The Pirate Cinéma, par le montage chaotique, organise autrement la relation sensée à l’image. ainsi The Pirate Cinéma s’approprie des figures issues d’une culture populaire en les défaisant de leur potentiel narratif. Le flux généré est ainsi fédérateur sans hiérarchiser les contenus. il offre un panel d’images d’une consommation importante au sein d’un réseau parallèle tout en rendant visibles les moyens d’une telle économie horizontale.
Titre original
Réflexion - The pirate cinéma de Nicolas Maigret, les dépendances d'un flux dans la creation d'un mashup
Projet de réflexion autour de l'oeuvre de Nicolas Maigret: The Pirate Cinéma.
Dans le cadre d'études d'art à Paris8.
Conclusion :
Roland Barthes dans La mort de l'auteur, critique la vision d’un artiste ne devant sa création qu’à lui seul. il relativise la part d’originalité qui lui est propre à l’échelle d’une histoire qui le dépasse, sa lecture est plus archéologique. Walter Benjamin a, quant à lui, pensé les modifications sociales émanant des transformations industrielles permettant une reproductibilité technique36. Elle a engendré une perte de l’objet unique et de son aura qui validait jusqu’alors le geste de l’artiste dans sa production. Cette vision bourgeoise issue d’une histoire de reconnaissance du talent est mise à mal par l’apparition de technologies dépassant ces capacités. Les ready-made de Duchamp sont des objets trouvés, anonymes, appropriés pour un nouvel usage qui les décontextualise et fait œuvre grâce à celui qui les regarde. il a pour ainsi dire démystifié le geste de l'artiste tout en relativisant la notion de savoir faire qui l'accompagne.
la démocratisation des outils donne à chacun la possibilité d’être auteur bien qu'amateur et de s’approprier les contenus d’autrui. en outre, le principe d’horizontalité sur internet, offre une accessibilité et une compréhension des outils, ainsi plus faciles à détourner. la liberté vis- à-vis des outils de production rend la création d’autant plus composite, issue d’un tissu d’autres histoires, d’autres origines que celle de l’auteur-dieu37. internet, dans l'immédiateté d'accès aux contenus qu’il rend possible, sans rendre visibles ses moyens structurels, renforce cette impression d’être défait des conventions sociales communes.
Mais surtout, en dédoublant un objet à l’identique, en le rendant disponible en deux lieux et temps, ce dernier est appauvri symboliquement. Cet ajout diminue l’impression de rareté du produit sur le marché. la pratique du screenerg est emblématique du détournement de l’œuvre au sein des étapes de diffusion marchande standard. Cette technique est une sorte de Pirate Cinéma au sein même du cinéma pour le défaire de sa raison d’être. alors que le cérémonial spécialisé des salles de cinéma permet dans un temps donné d'apprécier une œuvre, les dispositifs individuels et anonymes, domestiques, libèrent le spectateur de ces contraintes. le cinéma, dans ses conventions cérémonielles, coupe par exemple la fiction de ce qui lui est extérieur. Les différentes formes de glitch, tel le data-moshing, produisent une esthétique du dérèglement de l’outil numérique. Son apparition défait le spectateur de son état de regardeur accueilli dans un lieu masquant ses moyens de production au profit de la narration. La perte du contexte narratif des films, dans The Pirate Cinéma, par le montage chaotique, organise autrement la relation sensée à l’image. ainsi The Pirate Cinéma s’approprie des figures issues d’une culture populaire en les défaisant de leur potentiel narratif. Le flux généré est ainsi fédérateur sans hiérarchiser les contenus. il offre un panel d’images d’une consommation importante au sein d’un réseau parallèle tout en rendant visibles les moyens d’une telle économie horizontale.
Droits d'auteur :
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Projet de réflexion autour de l'oeuvre de Nicolas Maigret: The Pirate Cinéma.
Dans le cadre d'études d'art à Paris8.
Conclusion :
Roland Barthes dans La mort de l'auteur, critique la vision d’un artiste ne devant sa création qu’à lui seul. il relativise la part d’originalité qui lui est propre à l’échelle d’une histoire qui le dépasse, sa lecture est plus archéologique. Walter Benjamin a, quant à lui, pensé les modifications sociales émanant des transformations industrielles permettant une reproductibilité technique36. Elle a engendré une perte de l’objet unique et de son aura qui validait jusqu’alors le geste de l’artiste dans sa production. Cette vision bourgeoise issue d’une histoire de reconnaissance du talent est mise à mal par l’apparition de technologies dépassant ces capacités. Les ready-made de Duchamp sont des objets trouvés, anonymes, appropriés pour un nouvel usage qui les décontextualise et fait œuvre grâce à celui qui les regarde. il a pour ainsi dire démystifié le geste de l'artiste tout en relativisant la notion de savoir faire qui l'accompagne.
la démocratisation des outils donne à chacun la possibilité d’être auteur bien qu'amateur et de s’approprier les contenus d’autrui. en outre, le principe d’horizontalité sur internet, offre une accessibilité et une compréhension des outils, ainsi plus faciles à détourner. la liberté vis- à-vis des outils de production rend la création d’autant plus composite, issue d’un tissu d’autres histoires, d’autres origines que celle de l’auteur-dieu37. internet, dans l'immédiateté d'accès aux contenus qu’il rend possible, sans rendre visibles ses moyens structurels, renforce cette impression d’être défait des conventions sociales communes.
Mais surtout, en dédoublant un objet à l’identique, en le rendant disponible en deux lieux et temps, ce dernier est appauvri symboliquement. Cet ajout diminue l’impression de rareté du produit sur le marché. la pratique du screenerg est emblématique du détournement de l’œuvre au sein des étapes de diffusion marchande standard. Cette technique est une sorte de Pirate Cinéma au sein même du cinéma pour le défaire de sa raison d’être. alors que le cérémonial spécialisé des salles de cinéma permet dans un temps donné d'apprécier une œuvre, les dispositifs individuels et anonymes, domestiques, libèrent le spectateur de ces contraintes. le cinéma, dans ses conventions cérémonielles, coupe par exemple la fiction de ce qui lui est extérieur. Les différentes formes de glitch, tel le data-moshing, produisent une esthétique du dérèglement de l’outil numérique. Son apparition défait le spectateur de son état de regardeur accueilli dans un lieu masquant ses moyens de production au profit de la narration. La perte du contexte narratif des films, dans The Pirate Cinéma, par le montage chaotique, organise autrement la relation sensée à l’image. ainsi The Pirate Cinéma s’approprie des figures issues d’une culture populaire en les défaisant de leur potentiel narratif. Le flux généré est ainsi fédérateur sans hiérarchiser les contenus. il offre un panel d’images d’une consommation importante au sein d’un réseau parallèle tout en rendant visibles les moyens d’une telle économie horizontale.
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LES DPENDANCES D'UN FLUX DANS LA CREATION D'UN MASHUP PROJET TUTOR prsent M. Patrick NARDIN dans le cadre de la licence 3 Arts plastiques ralis par M. Vincent BONNEFILLE Le mardi 22 avril 2014 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 LA TABLE DES MATIRES ORGANISATION DES NOTES DANNEXES 1 LINTRODUCTION 2 LE CONTEXTE DE CAPTATION ET DE RESTITUTION DU FLUX VIDO 2.1 Le dispositif logiciel l'origine de la captation des ressources 2.2 Organisation des changes, hirarchie daccs et de diffusion des contenus 2.3 La structure de limage altre, plasticit d'un drglement 2.4 La scnographie multi-cran : une narration elle-mme morcele 3 LE MASHUP, UN GESTE PERFORMATIF 3.1 La dcontextualisation des fgures narratives dans un fux autognr 3.2 Point dobservation des consommations au sein du rseau 3.2.1 Lart de lappropriation - partielle ou complte 3.2.2 Mashup numrique et remontages : quelle implication de l'artiste ? 4 LAPPROPRIATION DE CONTENUS 4.1 Modration et accessibilit des fux dinformation sur internet 4.2 Lidentit physique et l'anonymat relatif 4.3 Lusage raisonn des contenus pour un partage culturel 4.3.1 ther Mashup, anonymat et pratique de la copie pirate 5 CONCLUSION LES PAGES D'ANNEXES BIBLIOGRAPHIE WEBOGRAPHIE, FILMOGRAPHIE ILLUSTRATIONS (IMAGES ET SCHMAS) GLOSSAIRE p.1 p. 1 p. 1 p. 2 p. 3 p. 4 p. 5 p. 5 p. 6 p. 6 p. 7 p. 9 p. 9 p. 10 p. 11 p. 13 p. 12 i ii iv viii Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 ORGANISATION DES NOTES DE PAGES DANNEXES Les diffrents dispositifs scnographiques sont dtailles en annexe. Dans le texte, les appellations (disp. A) ou "(fg. A)", par exemple, renvoient au dispositif A et la fgure A" qui se trouvent dans les annexes. Les termes prsents dans le glossaire, qui se trouvent en annexe, sont mentionns leur premire apparition par un g en exposant ct du mot ou de labrviation (exemple : bug g ). propos des rfrences des sites internet, ils taient tous accessible aux adresses indiques le 20 avril 2014. page 1/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 1 LINTRODUCTION La production de Nicolas Maigret, artiste contemporain, lengage dans des rfexions protiformes ayant pour point commun lappropriation doutils technologiques. Dans son installation The Pirate Cinema, il utilise une matire dont il ne possde pas les droits. Ce found footage g ou plutt mashup g est le rsultat d'une numrisation de flms en transfert sur les rseaux peer-to-peer g ( pair pair en franais, abrg en P2P), eux-mmes, de fait, copies doriginaux. La captation et la diffusion de ces vidos modifent leur composition graphique, leur rle narratif ou encore leur statut en tant quuvres. Ces glissements rsultent dune succession dinterventions autonomes entre elles qui affectent la perception fnale du spectateur. De par les outils utiliss, linstallation sinscrit doffce dans une conomie globale et interconnecte, et cest prcisment cet aspect performatif de restitution du contenu qui nous intresse ici. Exposer un fux vido dans le mme temps de sa production lui donne priori un caractre documentaire. En comprenant les mcanismes luvre dans la restitution de ce fux vido, nous pourrons dterminer la position de lartiste dans le processus dappropriation des contenus. Nous dlimiterons ainsi le contexte de captation de ces donnes et lconomie dchange dont elle dpend. Or, si le found footage dfnit une pratique dappropriation dobjets trouvs afn de les transformer, quel statut donner un fux manant dune activit en cours ? Que sous-tend cette utilisation dune matire non fge dans le temps comme base dune ralisation plastique ? Ce fux dtourn et ininterrompu, issu du cinma pirat, ne sapparenterait-il pas plus une forme de documentaire sur une activit parallle ? Quelle est la part d'appropriation dans The Pirate Cinema ? En quoi la source de ce mashup vido traduit-elle galement une autre relation loriginal, et donc aux droits qui y sont rattachs ? 2 LE CONTEXTE DE CAPTATION ET DE RESTITUTION DU FLUX VIDO 2.1 Le dispositif logiciel l'origine de la captation des ressources L'installation de Nicolas Maigret The Pirate Cinema est expose la Maison populaire Montreuil (disp. A) o il rside entre janvier et dcembre 2013 ; durant le Sight and Sound Festival Eastern Bloc, Montral (disp. A, fg. B.C.D.) et le And Festival Liverpool la mme anne (disp. B, fg. G.H.) ; elle a galement t dcline au Cmoda (China Museum of Digital Arts) Pekin sous le nom ther Mashup (Disp. B, fg. F). Linstallation est constitue de plusieurs crans sur lesquels sont retransmis, en direct, des fragments de vidos manant du rseau peer-to-peer. Ce dernier se fonde sur lchange de fchiers entre deux ordinateurs via internet. Ladresse-IP g respective de chaque appareil ainsi que le pays dorigine qui sy rattache sont lisibles sur les crans. Le logiciel mis en place avec laide de Brendan Howell 1 capture les vidos issues du top-100 g des tlchargements journaliers 1 Dveloppeur amricain de logiciel. HOWELL, Brendan. 2013, http://wintermute.org/brendan/?e=228 page 2/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 enregistrs par le site web The Pirate Bay g . Les vidos de The Pirate Cinema se succdent selon lactivit dchanges et de contenus qui a lieu dans le mme temps sur le rseau P2P. Les contenus sont dorigines varies ; des images de flm ou de srie (tlvisuelle) peuvent ctoyer des productions pornographiques. Les ventuelles pistes audio sont restitues de faon synchronise dans lespace dexposition. La structure des changes produit une forme de dfaillance lcran, de perte de structure des images. Elle dcontextualise les sources vido par leur enchanement ininterrompu bien que fragment. Les composants qui constituent le dispositif de captation et de retransmission du fux dans linstallation fonctionnent grce des logiciels essentiellement issus de lidologie du libre g . Les modifcations sur ces outils sont ainsi possibles et soutenues par un partage des savoirs de faon horizontale au sein de communauts ouvertes, participant une comprhension des codes sources g mis disposition. Les logiciels sont, dune certaine faon, combinatoires entre eux. Cette ide de la cration doutils, dadaptabilit, est lun des fondamentaux de la pratique des hackeurs g si nous les considrons pour ce quils sont la base avant dtre diaboliss, cest- -dire pour des bidouilleurs g doutils. Ce rapport la cration de logiciels et de hardwares g
nest, bien sr, pas anodin dans la pratique de Nicolas Maigret, consistant principalement en la rappropriation doutils quil modife. Cette notion de cration composite est, en dfnitive, proche de la pratique du mashup, modulaire, combinatoire 2 . Le logiciel est programm sur Pure Data g ; Python g , LibTorrent g et GStreamer g permettent de traiter et de distribuer les donnes issues du top 100 journalier tabli par le site internet The Pirate Bay. Le tout est stock sur des ordinateurs de petite taille, sans cran et peu volumineux, qui fonctionnent sur un systme dexploitation libre bas sur GNU/Linux g : Xubuntu g 3 . La place centrale du dispositif au sein de la scnographie (disp. a) indique au spectateur l'origine et les moyens non standardiss pour restituer le fux composite qui lui est prsent. 2.2 Organisation des changes, hirarchie d'accs et de diffusion des contenus Des sites internet tels que The Pirate Bay recensent les informations permettant de tlcharger des fchiers via le protocole BitTorrent g , en P2P. Ces dernires sont publies par des internautes qui rendent les donnes qu'ils partagent accessibles par cet outil. Des utilisateurs qui ne se connaissent pas forcment se mettent ainsi en relation pour changer des contenus numriques ; ici de la vido, des uvres flmiques. Les informations mises disposition par The Pirate Bay sont distribues dans des fchiers peu volumineux appels torrents g . Ils indiquent au logiciel client g , capable de dcrypter les informations uniques quils contiennent, o se trouve le fchier demand et procdent son tlchargement (en contactant un Tracker g ). D'autres moyens tels que le standard Magnet g sont de plus en plus utiliss. Ce dernier fonctionne comme 2 TURNER, Fred. Aux sources de l'utopie numrique : De la contre-culture la cyberculture, Stew- art Brand, un homme d'infuence", ed. C & F. p. 14 : "Les histoires savantes dinternet ont minutieusement montr comment des valeurs trs spcifques ont t intgres dans larchitecture du rseau des rseaux : les options militaires de lARPA en faveur dun rseau distribu, les vertus mritocratiques du milieu universitaire, les principes douverture et de coopration des hackers, la revendication dune appropriation individuelle de lordinateur par les computer hobbyists". 3 VISNJIC, Filip. The Pirate Cinema reveals hidden activity of Peer-to-Peer fle sharing. 2013. http://creativeapplications.net/sound/the-pirate-cinema-reveals-hidden-activity-of-peer-to-peer-fle-sharing/ page 3/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 une adresse URL g classique. Ces liens mettent disposition les informations contenues dans les fchiers ".torrent" lus par le logiciel client, sans pour autant tre stocks sur des serveurs g . En nhbergeant pas les fchiers ".torrent" permettant ces transactions, les sites tels que The Pirate Bay se prmunissent davantage des poursuites judiciaires par exemple dayants droits ou de leurs diffuseurs relatives au stockage de telles donnes incitant des activits illgales. La plateforme The Pirate Bay est donc un intermdiaire, un catalogue dentre pour partager et tlcharger des contenus en P2P via le protocole BitTorrent. Il donne accs un type dchanges particuliers en dehors de la Toile g . Ce rseau dcentralis organise la transaction entre les deux parties (peers g ) : le destinataire (receveur, leecher g ) qui demande le fchier pour le tlcharger, et destinateur (metteur, seeder g ) qui lui envoie. Le premier est dpendant du second en tant que source g . Si aucun metteur ne dispose de la partie ncessaire la composition du fchier, le destinataire peut en tlcharger une autre. Une fois toutes les parties tlcharges, le fchier est assembl par le logiciel (client). Cette temporalit de partage diffre grandement des tlchargements directs, par dfaut sur internet, qui noffrent qu'un nombre rduit de points d'accs aux donnes (le plus souvent unique). Le rapport entre le serveur, qui peut envoyer le contenu rclam, et celui qui le reoit, y est unilatral. Sur les rseaux P2P, celui qui tlcharge, reoit, peut galement envoyer du contenu tant qu'il le met disposition (mme partiellement durant son tlchargement) et qu'il est rclam (pour le tlcharger) par dautres utilisateurs connects au mme moment. L'ambivalence des utilisateurs multiplie ainsi la localisation du fchier chang ; les sources sont multiples et s'interpntrent. Toutefois, pareillement aux serveurs de tlchargement direct, les fchiers doivent rester accessibles. Le rseau P2P, maillage g , produit une autre temporalit et cre un rapport pour ainsi dire social tout en dcentralisant lorigine des donnes. Cette diffusion horizontale rappelle davantage la mentalit cooprative des communauts de lopensource g sur internet, mais aussi dans le milieu informatique ses dbuts 4 . Cette longvit initie par la structure de lchange garantit au logiciel de The Pirate Cinema un accs aux donnes du fait de la multitude de sources. Cette multiplicit de sources changeant le mme contenu joue galement un rle dterminant dans l'apparition des images, dans leur rptition. De telles donnes, partielles, plus rapides acqurir quune totalit volumineuse, sont galement plus rapides retransmettre l'cran sous la forme d'chantillons. 2.3 La structure de limage altre, plasticit d'un drglement Les changes via le protocole BitTorrent en P2P ne donnent pas, en dfnitive, la priorit une continuit linaire de restitution du fchier celui qui le tlcharge ou le partage. Le logiciel embarqu dans linstallation The Pirate Cinema capture ainsi une matire vido en cours de transfert, de ce fait morcele. Le contexte de captation du fux affecte directement limage restitue, sans post-production ou modifcation. Le mashup est alliment par une multitude de sources provennant elles-mmes d'changes de fux de donnes. Ces processus contraignant, mis bout bout, produisent des images intermdiaires durant le traitement des donnes, c'est cet entre deux en calcul qui est prsent, en l'tat, sur les crans. 4 BROCA, Sbastien. Utopie du logiciel libre Du bricolage informatique la rvolution sociale, page 22. 1980, insuf par Richard Stallman, militant du logiciel libre, afn de protger le partage au sein du dveloppement logiciel devenu concurentiel l'arrive de l'ordinateur personnel. page 4/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Les vidos sont composes dimages qui se succdent, par exemple, au rythme de 25 par seconde. Ces images, par leur disposition, constituent une suite de points cls g (I-frames g
et P-frames g ). Elles renseignent le logiciel charg de leur lecture sur leurs rapports entre elles au sein de la timeline g . Elles contiennent des informations sur leur propre organisation interne des pixels sur une trame et sur les relations de lune lautre 5 . Du fait de la quantit d'informations qu'elles contiennent, les I-frames sont plus lourdes que les P-frames. Elles sont aussi moins nombreuses et dlimitent dans le temps la structure de l'image, alors que les P-frames sont nombreuses entre chaque I-frame. Cette alternance permet, structurellement, une diminution des informations dchiffrer pour le logiciel, et donc une demande de ressources moindre. Elle garantit galement une fuidit la lecture. En rcuprant les vidos l'tat de fux, cette structure initie par les I-frames est altre car le fchier restitu lcran est incomplet. Cette altration est visible sous la forme d'artefacts g qui varient selon le format 6 du fchier numrique d'origine. Les chantillons de vidos s'interpntrent au sein de la trame de l'image. Les P-frames crent par exemple des mouvements de pixels d'une trame d'image sur une autre, un autre plan, normalement rinitialise par une I-frame. Des mouvements persistent dans un espace qu'ils destructurent car ils n'y sont pas destins. Plastiquement, la fragmentation, morcelant la totalit du fchier, se traduit lcran par une rapidit dapparition de ces vidos de courte dure. 2.4 La scnographie multi-cran : une narration elle-mme morcele La scnographie organise lassemblage alatoire des contenus restitus au spectateur. Le titre de l'installation de Nicolas Maigret formule ce qu'est le "cinma pirate", l'espace d'exposition, la mise en place de ce dispositif nonc comme une faon diffrente de faire ou de voir un flm. L'installation propose une autre consommation des images. Elle instruit une rfexion sur lattitude du spectateur diffrente de celle quil pourrait avoir au cinma, face lcran 7 . Si l'cran de cinma est un lment unique qui englobe par son format et sa taille la vision du spectateur, les crans disposs dans The Pirate Cinema lui proposent de visionner une narration fragmente dans lespace de lexposition entre plusieurs crans. Chacun dentre eux est clair par la projection dun fux qui lui est propre. Et chacun des projecteurs (Disp. A) ou des moniteurs (disp. B) est reli son propre systme de captation et de projection des donnes. De la sorte, chaque cran donne voir un fux autonome des autres. Dans The Pirate Cinema, cette multiplicit produit une forme de dialogue entre ces supports de projection. Des correspondances en termes de contenu, dimage, peuvent avoir lieu au sein de ce dsordre. Cette multiplicit de sources ddouble la fgure du mashup lui-mme constitu duvres varies. Ainsi, le spectateur nest pas dans une position confortable, frontale face lcran et relative la linarit classique de linstallation et du mdia projet dans une salle de cinma. Lespace visionner est morcel. Dans le cas dune installation sur grands crans (disp. A), lorganisation et la taille de ces derniers permettent une certaine frontalit mais divise l'espace en trois temps, en trois espaces d'crans autonomes. Ils font tat de trois changes au mme moment qui, rassembls, semblent complmentaire entre eux. 5 The Beauty of Glitch. http://bitsynthesis.com, 2009. 6 "Format" fait ici rfrence au type d'encodage de la vido (.avi, .mp4, .mkv etc.) son "conteneur", "container" en anglais. 7 BARTHES, Roland. En sortant du cinma. Dans l'ouvrage : Communications, 23, 1975. pp. 104-107 page 5/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Dans sa restitution, le son est synchronis avec limage. Il amplife la prsence de limage. Dans le dispositif par projection (disp. A.), les sorties audio sur haut-parleurs sont multiples. Le son traverse lespace d'exposition socialement apprciable. Il capte lattention des spectateurs et accentue lalternance dapparition de limage. Linstallation est de ce fait plus spectaculaire que dans le cas dune rpartition des points dcoute au casque (disp. B). Cette organisation rend linstallation plus intimiste. Le systme dcoute est directement raccord sa propre source vido restitue sur des moniteurs de petite taille. Le son et les diffrents fux vido sont dissocis. Cette organisation induit un autre rapport lespace et la forme de rptition de lcran en tant quobjet, et non pas comme lment dun tout. Ce rapport lcran voque davantage un dispositif domestique, appropri un visionnage individuel, lordinateur avec lequel lutilisateur est en train de le tlcharger son flm. Les chantillons projets sont affects par le fux lui-mme, ses modifcations durant le dcodage et transfert de la vido. 3 LE MASHUP, UN GESTE PERFORMATIF 3.1 La dcontextualisation des fgures narratives dans un fux autognr L'autognration dans le non-montage des contenus extraits par le logiciel est lie une activit tout autant automatise, logicielle. La double opration entre ces diffrents intermdiaires produit une composition chaotique dans la transmission et la rception des donnes. La structure du fux, utilis plutt comme matire, rend visible sa fragilit au travers du mdium vido quil transporte. La restitution est brivement interrompue durant la recherche dun nouveau fchier de partage sur le rseau qui se traduit par une alternance du signal (positif/ngatif) tel des fashs. Malgr la rapidit de ce traitement entre chaque vido, elle-mme courtes, la multiplicit des crans permet de restituer une continuit visuelle. Lesthtisme dune dfaillance perptuelle, dune latence, dun chargement des contenus incomplet, fait merger limage de loutil informatique ne remplissant pas correctement accompli sa tche. Cette ide d'un outil performant dans l'excution d'une tche qui n'est bien accomplie qu'une fois fnie, s'appuie davantage sur le rsultat que sur le process, l'intermdiaire du traitement. Le spectateur fait face une image phmre, un signal court. Le dispositif invite le visiteur faire une exprience cognitive plutt qu'intellectuelle vis--vis de l'image. Il en ressort une cohrence plastique et une atemporalit qui permettent paradoxalement une sorte de contemplation dun langage protiforme issu dune multitude de sources. La temporalit de linstant lie une activit informatique de traitement, ce vocabulaire de la perte, peut s'apparenter une forme de vanit, la ruine. Limage enregistre est dj perdue, peine elle semble tre capture. Cette sensation de perte, d'un temps court voque une relation au temps prsent du spectateur. L'absence de fn dans ce fux, uniquement contextualis par la prsence des adresses IP qui dtermine l'origine de la source vido, est accentue par l'absence de titre ou de gnrique, dlimitant normalement la dure d'un flm. Le mashup fait rfrence une activit de l'instant, uniquement renseigne gographiquement. Les contenus ne sont pas rfrencs. page 6/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Les images sont saccades et ne crent pas de fl conducteur dans une narration. The Pirate Cinema ne possde pas, au premier abord, de fgure dominante, d'acteur ou de situation inscrite dans une histoire. Il ne cre pas non plus de thmatique comme cela peut tre le cas dans des supercut g . Le mashup autognr, fruit de requtes multiples menant au tlchargement, centralise une quantit d'iconographies identifables, de microsituations dfaites de leur contexte nonc au sein d'un flm, introduisant narrativement le spectateur. Elles rappellent certes l'utilisateur des fgures connues du cinma, des actions et strotypes forgs par un imaginaire commun, sans pour autant induire un rapport dempathie un vcu, une fction. 3.2 Point dobservation des consommations au sein du rseau Lalatoire dans la juxtaposition des contenus, leur rapidit denchanement, est l'image d'un prsent organique capt avec omniscience. Les univers qui s'y ctoient visuellement produisent une sensation d'avoir accs la totalit fragmente des changes du P2P. Or le top 100 rduit le contexte de captation sur la base des donnes rcupres sur The Pirate Bay. Ce point de dpart relate les plus fortes demandes sur une priode rduite dune semaine. Cette criture du logiciel propose un contexte historique. Ce mashup est issu dune conomie dchanges volontaires et cibls, dans la recherche dun contenu particulier. Malgr la prsence d'adresse IP qui difrencie les sources l'cran, le sentiment d'une uniformit, d'une rptition dans le montage, donne parfois l'impression d'une absence de pluralit de contenus. Nicolas Maigret matrialise une ralit culturelle dans la priorit des fchiers changs. Cette conomie parallle dchanges refte ainsi une certaine actualit, une tendance culturelle dans un cadre historiquement dfni. La consommation des productions culturelles industrielles est ainsi expose en dehors de toute hirarchisation culturelle. Le mashup produit une forme autonome digestive o tous les contenus sont mis sur la mme chelle. Linformation nest pas traite dans une phase de post-production, ou mme dcriture. Les proccupations du public pirate sont multiculturelles, labsence dun montage raisonn autour dune narration de situation proposant une construction logique. Restituer de la sorte, sans prise de partie, permet une certaine neutralit propre aux protocoles scientifques bass sur des contextes dfnis. Ce champ dtude fait tat dune surabondance de contenus, de productions culturelles une chelle mondiale dj rduite par le logiciel autour du top 100. Nicolas Maigret rcupre ainsi une matire jamais puise tant l'offre et la demande sont exponentielles sans en modifer factuellement l'activit. 3.2.1 Lart de lappropriation - partielle ou complte Julien Prvieux et Jean-Pascal Princiaux, artistes contemporains, ont tous deux utilis limaginaire dune culture de masse au cinma : James Bond, alias 007. Le premier de ces artistes ralise Post-post-production 8 , dans laquelle il travaille sur le flm Le monde ne sufft pas, envahissant la narration dexplosions jusqu une totale disparition de limage dorigine. Le second, dans un premier temps avec The Shakespear Machine (installation, logiciel de montage, 2007) 9 , 8 PRVIEUX, Julien. Post-post production. Vido couleur, 120. 2004 Accessible au visionnagele 1er avril 2014 : http://previeux.net/html/videos/PostPostProd.html 9 EXERTIER, Nicolas. La guerre des modles (Entretien avec Jean-Pascal Princiaux). 2008 page 7/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 met en place un logiciel de montage li une base de donnes constitue dextraits de flms rfrencs pour leur contenu afn de produire un vocabulaire. Son appropriation autour de flms de la saga James Bond est dcrite par lui comme une post-post-production 10 . Il entend ajouter aux phases de production des modifcations permettant dautres lectures et narrations. Lappropriation par lajout lexistant induit un autre rapport loriginal, aussi bien pour les artistes que pour le regardeur 11 de tels contenus. La tolrance face de telles pratiques varie en fonction du contexte mais aussi du type de dplacement opr par les artistes. Julien Prvieux dfend une approche ludique vis--vis de cette rappropriation 12 . La notion dappropriation se dfnit selon diffrents critres qui nuancent les possibilits dusage de lutilisateur vis--vis du droit intellectuel. Lappropriation cognitive, la plus rpandue, lie la connaissance et sa transmission ; la citation extrait le contenu de son contexte mais y fait rfrence ; l'appropriation dans un objectif de mmoire, tel les photographies de tourisme ; sont des appropriations immatrielles ou symboliques 13 . Ces procds ne modifent pas luvre ou lobjet original, elles sont mme encourages dans le cadre dune diffusion par exemple culturelle. Une appropriation opratoire est de fait moins lgitime, et est davantage encadre. La notion de mmoire dans l'enregistrement d'images touristiques, par exemple de monuments, est intriguante dans le fait que celui qui enregistre ddouble la mmoire du lieu qu'il s'en faisait dj. L'appropriation est souvent, dans ce cas, une forme d'appropriation par le geste mme de sa captation 14 . 3.2.2 Mashup numrique et remontages : quelle implication de l'artiste ? Comme nous lavons vu, techniquement, le logiciel qui capte les fchiers au sein du dispositif de Nicolas Maigret fait tat dun chantillonnage d, d'un ct au protocole dchange qui redistribue les donnes par petites parties et, de lautre, la dcomposition structurelle des images qui en dcoule. Le logiciel tente de capturer des vidos en temps rel et peut, du fait de cette multiplicit de sources, diffuser plusieurs fois le mme fragment de flm, soit que le destinateur ou le destinataire (ou les deux) soient diffrents, soit que le fchier du mme flm soit identif diffremment (par son nom, son format 15 ). Le logiciel peut aussi revenir sur un change qui s'tait arrt et reprend. De la sorte, une image peut tre rpte de faon redondante. L'activit du rseau infue directement sur ce montage autonome.
http://atlas-eclipticalis.blogspot.fr/2008/12/la-guerre-des-modles-entretien-avec.html 10 PRINCIAUX, Jean-Pascal. propos de la narration en post-post-production. http://s141374098.onlinehome.fr/site/data/cg_inten.html 11 DUCHAMP, Marcel. Cest le regardeur qui fait luvre". Confrence propos de "Fontaine", 1975. 12 PREVIEUX, Julien. Cergy : Confrence lENSAPC, 2007. 13 GUNTHERT, Andr. Luvre dart lre de son appropriabilit numrique. 2011. http://culturevisuelle.org/icones/2191 14 ROSSET, Clment. Le Rel et son double, ed. Gallimard, Coll. Folio essais. Prose autour de la diffcult d'accepter la ralit, la virtualisation du prsent au travers de projections mentales. 15 cf. note de bas de page numro 6 (p. 6) page 8/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Une telle relation l'original, altr dans sa linarit, fait penser la pratique du scratching g
employe par les DJ et VJ (Disc/Vido Jockey g ). Les deux pratiques modifent un contenu qui, comme dans The Pirate Cinema, est directement retransmis sur des enceintes (dans la pratique du DJing) ou sur un cran (dans la pratique du VJing). L'original, s'il est numris, peut tre modif en utilisant un logiciel. Le DJ peut aussi raliser cette opration directement sur un support physique, un vinyle par exemple, en vido ce processus exprimental peut tre excut sur bande magntique ou de la pellicule. Les pratiques telles que le sampling g , le scratching, ou l'enchanement de diffrentes sources mlanges entre elles sont runies sous le terme vernaculaire de "mashup". Ce procd de mlange de sources varies entre elles est ralis en direct 16 . Ces pratiques sont relativiser dans le rapport que nous faisont ici avec l'uvre qui nous intresse car elles relvent d'une intervention consciente de l'artiste qui les applique. Nicolas Maigret ralise galement des performances de modifcation du son et de l'image vido en direct : 8_Silences (au Cube en 2012) ralis par Art of failure (collectif avec Nicolas Montgermont). Dans le cadre de cette performance le logiciel utilise un fux de donnes envoyes sur un rseau auquel il est raccord. Il interprte ensuite de faon audible ce mme fux qu'il est en train de gnr. De plus en plus de matire sonore et donc d'changes sur ce rseau est ainsi produit ; le son est directement retransmis et formalis l'cran dans une criture chronologique liant les deux mdiums entre eux 17 . The Pirate Cinema connat une version performative qui permet l'utilisateur de cet outil de choisir parmi les changes en cours sur le rseau P2P 18 . Martin Arnold ralise Passage l'acte 19 , utilise lui des found footage. Il remonte une squence sous la forme d'un scratching en rptant d'incessants retours dans le temps sur la timeline. Il distend la temporalit originelle de la scne. Matthias Mller avec Home Stories 20
s'intresse lui aussi au dtournement d'images issues de l'industrie du cinma holywoodien 21 . Il ralise un collage de plans de diffrents flms qui, monts entre eux, racontent une histoire sur les strotypes de la femme seule, inquite sans prsence masculine. Ces diffrentes utilisations de found footage reftent une approche bien diffrente de celle de Nicolas Maigret avec The Pirate Cinema. Le geste n'est pas le mme. Il n'intervient pas dans une phase de post-production, de remontage, d'organisation des contenus entre eux. Le contrle des contenus est certes dirig par l'criture du logiciel mais, dans l'installation sous sa forme non performative, il ne fait pas de choix, il ne cre pas de requte cible sur un type de contenu, de thmatique. 16 En anglais, la presence du suffxe -ing indique une action en cours qui va de paire avec les pratiques mentionnes dans ce paragraphe. 17 Interview vido : Le Cube, 2012. http://dailymotion.com/video/xoqdii_8-silences-art-of-failure-sys- tem-introspection_creation 18 Sur le site offciel de The Pirate Cinema : http://thepiratecinema.com 19 ARNOLD, Martin. Passage l'acte. 1993, flm noir et blanc, 16mm, 12'. 20 MLLER, Matthias, Home Stories, 1990, flm couleur, 6'. http://sixpackflm.com/en/catalogue/ show/1271 21 Ces deux rfrences relatives au found-footage sont issues du mmoire de GANEM, Mller Maria. 2012, Found Footage, mouvement cinmatographique contemporain, p. 4, puis approfondies p 64 (2.2.1 Peter Kubelka et lcole autrichienne.) propos de Martin Arnold et p.78 propos de Mathias Mller (3.1.1 Found footage et les nouvelles technologies du cinma, entre autre). page 9/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Baser une ralisation sur des paramtres alatoires, sur des activits autonymes, relve en quelque sorte des ralisations thtrales, des performances ou de toute autre pratique induisant un temps de prsentation et non pas de reprsentation. Le geste ralis lors d'une performance d'acteur de thtre et celle d'un acteur au cinma peut tre la mme, c'est pourtant cette nature de l'action, pouvant ou non tre reproductible, dplace ou encore dcontextualise, qui le qualife en tant quunique en tant que mmoire. Les crations inscrites dans le temps sous une forme fnalise produisent des objets. Le cinma a pour fnalit de diffuser dans un second temps de la captation, une uvre fnie diffusable au plus grand nombre, aux masses. The Pirate Cinema ne cre pas d'objet de mmoire, de sauvegarde de l'activit en cours, de document. 4 LA MODRATION DE L'APPROPRIATION DE CONTENUS SUR INTERNET 4.1 Modration et accessibilit des fux dinformation sur internet La fragilit technique de The Pirate Cinema rside dans sa dpendance un contenu quil capte et restitue mais quil ne produit pas. Le fux est par ailleurs tributaire des infrastructures qui permettent son accs au rseau P2P et, avant cela, la base de donnes rcupre par The Pirate Bay, sur internet. Lutilisation dun systme dchange horizontal non centralis (ici le P2P) garantit linstallation une longvit accrue. Autrement dit, les capacits de restreindre lutilisation illicite ou non de tels rseaux, dans un cadre par exemple juridique, semblent utopiques du fait de sa structure maille. La longvit apparente des contenus sur internet est intrinsquement lie aux infrastructures qui permettent le bon fonctionnement de cette technologie, mais aussi de leur accessibilit, notamment dans une conomie marchande, dans laquelle peut se dcider tout moment la diminution d'accs aux bases de donnes 22 . Cette modration oriente une stratgie interne qui refte des dcisions politiques. Dominic Gagnon ralise RIP in Pieces America 23 . Il extrait alors des contenus sur les serveurs de YouTube (plateforme web de publication de vidos pour grand public) ayant un sujet commun : les survivalistes aux Etats-Unis. Ces found footages montrent ces personnes derrire leur webcam. Maqus, ils font tat de leur mfance envers leur pays, la superpuissance amricaine et engagent les internautes se prparer au pire, une survie individuelle. Ces contenus sont rcuprs avant leur suppression par les services de la plateforme web en question. Par leurs contenus, ces vidos, broadcasts g , sont indiques comme non appropries par dautres internautes qui les marquent, les fag g , pour appeler leur modration, voire leur disparition. Juste avant leur suppression dfnitive, ces futurs dchets vido, dans une phase intermdiaire daccessibilit sur internet, sont utiliss par lartiste pour raliser un montage. Ce qui nous intresse dans cet exemple, cest la porosit et la longvit des contenus sur internet. Il illustre bien une logique d'administration des donnes et laccessibilit organise que les sites permettent ou non. 22 CHATONSKY, Gregory. La fragilits des mashups. 2009. http://chatonsky.net/fux/la-fragilites-des-mashups 23 GAGNON, Dominic. Rip in pieces America. vido couleur, 2057. Ed. DVD : La Famille Digitale, Poitier, 2009. page 10/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Louverture des API g , par exemple, informe une logique d'interpntration des bases de donnes de manire elle-mme autoadministre. The Pirate Cinma et RIP in Pieces America se focalisent sur le processus de perte systmatique des contenus. Linstallation de Nicolas Maigret met en avant les diffcults inhrentes une archologie du numrique, fuctuante au sein de structures administres. Les deux propositions font tat dun rebut, inhrent la relative prennit des donnes sur internet ; celle de Dominic Gagnon est toutefois lie une dcision administre, une rgulation. Ils informent un internet underground, politiquement dangereux pour la socit qui craint les drives autour des contenus sur internet. Cette mfance scuritaire engendre une standardisation des pratiques sur internet, un contrle et lespionnage des internautes par la collecte dinformations leur sujet. Le DarkNet g "hors-les-cartes", pour reprendre la mythologie pirate, fascine autant quil effraie pour lespace hors de contrle que cet internet anonymis offre 24 . De tels outils rpondent une sorte fragilit juridique que certains internautes saisissent, eux, pour dtourner ou sapproprier des uvres dont ils ne possdent pas les droits 25 . Les rseaux permettant des changes horizontaux et non plus verticaux comme au dbut de linternet, alors intranet g , quand il se cantonnait des applications dans les domaines universitaire, scientifque, puis militaire 26 , augmentent lopacit des activits du fait de leur grand nombre. 4.2 Lidentit physique et l'anonymat relatif Nicolas Maigret propose un titre vocateur de lambigut mme de sa proposition, dans le respect du copyright g . Le contenu captur est intrinsquement li une activit illicite, rprhensible au regard de la loi. Pour lapplication du droit relatif la copie dans le cadre des changes illgaux de donnes numriques en P2P, pour traiter du contexte qui nous intresse ici, les autorits sont bien obliges de lier lactivit observe l'individu qui les pratique. Ladresse IP permet cette identifcation. Une adresse IP est une identit unique attribue par les fournisseurs daccs Internet (FAI) g ; signaler que celle-ci renseigne galement, indirectement, sur la localit physique d'o se connecte l'utilisateur depuis son ordinateur. Ces informations, au mme titre quun client BitTorrent, sont rcupres par le logiciel de The Pirate Cinema qui ladjoint lisiblement aux images projetes sur les crans. En haut gauche, en vert, sinscrit ladresse IP de l'metteur avec son pays dorigine (ex. : From France 192.168.20.1) ; et, en haut droite, en rouge, celle du destinataire (ex. : To England 172.16.254.1). Cette uvre permet de restituer une production formelle qui fait tat de l'change de fchiers un moment o ils ne sont normalement pas visibles. Ces adresses IP se substituent au titrage du flm, la vido gnre et assemble automatiquement crant un catalogue d'identits, anonymes en l'tat. Ces informations sont une rfrence physique aux utilisateurs. Ainsi, The Pirate Cinema offre un point d'observation qui pourrait documenter formellement certains changes sur internet. Ce logiciel espionne une 24 REA, Andrea (Universit Libre de Bruxelles-GERME). Contrler les indsirables la frontire-rseau. 2014. http://antiatlas.net/blog/2014/04/08/colloque-rea 25 GUNTHERT, Andr. La culture du partage ou la revanche des foules. 2013. http://culturevisuelle.org/icones/2731 26 BROCA, Sbastien. Utopie du logiciel libre - Du bricolage informatique la rinvention sociale. Ed. Le Passager clandestin, 2013. page 11/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 activit souvent illgale, de la mme manire que dautres machines automatises observent les rseaux P2P. Des dispositifs automatiss tels que Hadopi g sappuient en France sur de telles informations pour lutter contre le piratage sur internet. Lautomatisation de telles tches induit une forme de contrle semblable au Panopticon g , dans une forme informatise : celle-ci permet lautorit charge de la surveillance des dtenus de tout voir depuis un seul point sans tre vue. La prsence des adresses IP verbalise une ralit concrte pouvant, par exemple, mener du fchage. Lexposer dans The Pirate Cinema voque cette potentialit de poursuite dont il tait question plus tt et, de fait, une incapacit stopper cette activit populaire, rpandue, dans son immdiatet. Le fait que le contenu propos au sein de The Pirate Cinema soit diffus sur plusieurs crans fait penser des dispositifs de vidosurveillance permettant d'avoir accs dun seul coup d'il un large ventail de fux vidos relatant une activit en cours. Nicolas Maigret dveloppe un systme de captation comparable. Il ajoute pour ainsi dire un troisime acteur qui, bien que spectateur et parallle ce rseau, s'intgre au systme d'change P2P. Il fait dailleurs rfrence au Cin-il de Dziga Vertov (1923) : Je suis la machine qui vous montre le monde comme elle seule peut le voir 27 . Le fonctionnement du logiciel est lui-mme ambivalent, la fois client qui rceptionne le fux et serveur qui met en relation les utilisateurs. Nicolas Maigret sest prmuni, lui ainsi que les lieux qui accueillent son installation dont les changes sont lis leur connexion internet , de poursuites judiciaires en dlocalisant les transferts effectus par son installation. Les changes transitent par un systme de protection des donnes personnelles VPN g (rseaux privs virtuels) provenant de Sude o la lgislation en cours est moins regardante. 28 La lgislation applique est en effet celle du pays o la connexion est effective. Les VPN permettent, au mme titre qu'un proxy g , de faire transiter une connexion par un autre ordinateur afn de prendre son identit. Utiliser de tels moyens induit une perte d'identit mais diminue galement l'aspect localis des utilisateurs leur ordinateur, leur interface de navigation web. Dans ce cas, Nicolas Maigret cache pour ainsi dire son implication et se dfait de sa responsabilit lie au dtournement des uvres quil utilise dans son mashup. 4.3 Lusage raisonn des contenus pour un partage culturel Contrairement au found footage, le mashup tire sa source de donnes en lextrayant dun fux dinformation, par exemple grce une API. Cet art de lappropriation de contenus par collage, et donc du dtournement, est encadr dans le droit amricain par plusieurs lois dfnissant le fair use g . Le fair use peut se traduire par usage raisonnable 29 ; il constitue une forme de tolrance au regard de la loi qui permet dautres usages de contenus, tout en visant faire respecter le droit dauteur. Le fair use est une marque dposable (TradeMark g ) qui 27 LECHNER, Marie. Montrer le fux numrique lchelle mondiale (2013) http://next.liberation.fr/ cinema/2013/10/08/montrer-le-fux-numerique-a-l-echelle-mondiale_937985 28 WATERCUTTER, Angela. The Pirate Cinema Transforms Film Torrents Into Illicit Interactive Art. (2013) So they went to Sweden channeling their connection through the VPN service IPredator g . http://www.wired. com/2013/05/the-pirate-cinema-p2p-art/ 29 Article et proposition de traduction. http://fr.wikipedia.org/wiki/Fair_us page 12/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 identifie un produit vis--vis des droits relatifs son auteur et donc aux usages autoriss de ce produit. Plusieurs critres sont examins par la justice pour dterminer si lusage est loyal vis--vis de luvre utilise. Le contexte et lusage de ce dtournement sont donc tudis, valus. Ainsi le contexte dusure par exemple ducatif, ou la partialit de luvre, utilise en tant quextrait, sont valus. Les usages compris par le droit dauteur et de copie sont galement mis en parallle pour dterminer si cet usage est autoris par les ayants droit. Le fair use sinscrit dans la common law g (ou droit commun), une idologie sociale et politique considrant louverture au partage culturel comme salvatrice au sein dun encadrement protgeant entre autres cette dynamique de partage. Les licences Creative Commons g et leurs drivs copyleft g tendent prserver les crateurs de contenu peu importe le domaine du non-respect de leur paternit ou encore d'une commercialisation non souhaite. De telles licences protgent les uvres et permettent une diffusion plus sereine des contenus protgs tout en restant accessibles. Le P2P, en multipliant les sources, les points d'accs aux fchiers, en distribuant les ressources de stockage et aussi, par exemple, de bande passante, en fait un outil trs apprci par des communauts favorables la libre diffusion de leur uvre. La dmatrialisation apparente des changes pirates sur internet explique entre autres l'utilisation de cet imaginaire fantasm. Les pirates vivent d'activits parallles, hors des systmes marchands tablis ; ils sont perus comme des voleurs. Ils ne participent pas une mancipation culturelle ou une rappropriation permettant une diffusion de contenu. Il est de fait comprhensible que leur fonctionnement individualiste, non compensatoire drange. Le pirate est, en cela, un hors-la-loi, un marginal de la socit voire un anonyme par choix 30 . L'attachement un lieu neutre, dfait de contraintes autoritaires limitatives, est dfendu au proft de la libert d'expression. Lintervention de Nicolas Maigret via son logiciel le place en troisime acteur dans les changes entre utilisateurs au sein du rseau P2P, le met hors la loi du fait du rle intermdiaire qu'excute son logiciel. Sil ne stocke pas de contenus illicites sur les disques dur du dispositif, la retransmission est transitoire sous la forme dun stream g , ce qui, en soit, nest pas un dlit. Il met cependant en relation les utilisateurs du P2P. The Pirate Cinema nest pas un systme client autonome, il rcupre certes des donnes, mais il met galement en relation dautres utilisateurs changeant des contenus illicites. Il nest pas lorigine de la pratique quil rend visible. De plus, au regard de la rapidit dapparition et de l'approptiation partielle des uvres projetes, ne sont pas atteintes dans leur intgralit. 30 BEY, Hakim. TAZ Zone Autonome Temporaire. Paris : de lclat, 1997. Entre autres de dcrire une cy- berculture, l'auteur dessine le fonctionnement des "rseaux d'information" des pirates au XVIIIe. Dans la partie "La Volont de puissance comme Disparition" il voque Foucault, Baudrillard, est propose une stratgie d'anony- misation comme outil de lutte, de rappropriation de l'espace public. page 13/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 4.3.1 ther Mashup, anonymat et pratique de la copie pirate ther Mashup est une dclinaison de The Pirate Cinema expose en Chine, elle montre la proccupation de Nicolas Maigret vis--vis de l'anonymat sur internet qui, dans un climat de contrle rpressif, est d'autant plus vitale pour les internautes. Appliquant cette position dobservateur voire despion, il rcupre un fux issu des changes locaux sur internet. Le contexte est moins cibl quavec The Pirate Cinema dont le fux est issu dchanges P2P. Les contenus restitus font tat dune activit en cours, mais plus personnelle, dchanges de conversations en ligne, de pages web visionnes. Le Wif g localis utilis comme source inscrit galement une autre relation entre lespace dexposition et cette matire projete in situ g . Il propose ici une archologie du prsent environnant, davantage intrusive dans les activits prives lies la navigation sur le web, aux donnes personnelles et laccs lintgralit de linformation qui y est parfois crypte. Une fois encore, Nicolas Maigret sintroduit tel un hackeur. En dplaant le lieu de la rception dans une sphre publique, il formalise une utilisation de ces donnes en transite et l'abus tatique de contrle qui peut en dcouler. Il ne possde pas de droits d'utilisation. Il voque galement une autre consommation de la culture en Chine autour de la commercialisation de flms pirats, dune culture gnralise du junckware g 31 . Cette dernire consiste en la copie de contenus soumis copyright. Gnralise, cette pratique introduit un autre rapport la culture de masse, et surtout dfait ou cre dautres liens entre les consommateurs et lindustrie qui produit cette culture. Comme les changes illgaux en P2P, le consommateur se substitue la diffusion standard de l'industrie dtourne. La contrefaon a galement touch la production artistique, atteignant dailleurs des proportions industrielle 32 . Les ready-made g de Marcel Duchamp servent aujourdhui de rfrence artistique pour illustrer une connivence entre la production industrielle et le milieu de lart. Mais, dans le cas de The Pirate Cinema, cest le dplacement de luvre flmique dtourne qui induit un rapport similaire au ready-made, lobjet est sorti de son contexte et, de fait, par son exposition change de statut dj modif en premier lieu par sa copie et diffusion en P2P. La position de Nicolas Maigret est politiquement ose dans le sens o il utilise directement des productions issues de lindustrie du cinma. Comme elle le fait avec la dmocratisation des VHS g leur apparition dans les annes 1980 dans un cadre domestique, lindustrie du cinma considre le partage avant tout comme un manque gagner, plutt que les fonctions auteur comme une opportunit de diffusion. Il en va de mme pour les pratiques du sampling non encadr, qui produit pourtant une continuit, une ractivation de luvre en dehors de sa diffusion dorigine. Internet, tout comme le support VHS, permet la sauvegarde de donnes en dehors des circuits de distribution classique proposs par lindustrie du cinma. La dure de vie des contenus numriques pose la question de leur restitution historique. Y parvenir en incluant, entre autres, leur interactivit ou manipulation rajoute une diffcult technique, mais aussi pdagogique. L'invention de nouvelles plateformes (langage) ou supports de stockage complexifent la sauvegarde d'une culture numrique dj fragile par l'infrastructure de calcul qui la sous-tend 33 . 31 MILLER, Ben. Artist's Statement: Nicolas Maigret talks spying on BitTorrent in The Pirate Cinema. 2013. http://culture24.org.uk/art/new-media/art455273 32 EPSTEIN, Marc. A Dafen, on peint la chane, 2007. http://lexpress.fr/informations/ a-dafen-on-peint-a-la-chaine_681238.html 33 OWENS, Trevor. Digital Preservations Place in the Future of the Digital Humanities, prose, 2014. http:// trevorowens.org/2014/03/digital-preservations-place-in-the-future-of-the-digital-humanities/ page 14/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Dans une prochaine dclinaison de The Pirate Cinema, Nicolas Maigret envisage une narration oriente autour daffaires politiques. Si le sujet varie et sloigne du divertissement, il nen reste pas moins attach donner une autre comprhension de loutil de production quil dtourne. Les affaires mdiatiques de dtournement de linformation telles que Snowden g (WikiLeaks g ) radicalisent la transparence d'accs ces contenus tout en protgeant leurs sources. notre poque o linformation sinterpntre et se partage, chacun devient potentiellement apte apprendre et sinterroger sur les technologies qui lentourent. La dmocratisation des savoirs, de la culture oblige une ractivit des majors g , qui se voient dpossds de leur monopole de producteur.
5 CONCLUSION Roland Barthes dans La mort de l'auteur 34 , critique la vision dun artiste ne devant sa cration qu lui seul. Il relativise la part doriginalit qui lui est propre lchelle dune histoire qui le dpasse, sa lecture est plus archologique 35 . Walter Benjamin a, quant lui, pens les modifcations sociales manant des transformations industrielles permettant une reproductibilit technique 36 . Elle a engendr une perte de lobjet unique et de son aura qui validait jusqualors le geste de lartiste dans sa production. Cette vision bourgeoise issue dune histoire de reconnaissance du talent est mise mal par lapparition de technologies dpassant ces capacits. Les ready-made de Duchamp sont des objets trouvs, anonymes, appropris pour un nouvel usage qui les dcontextualise et fait uvre grce celui qui les regarde. Il a pour ainsi dire dmystif le geste de l'artiste tout en relativisant la notion de savoir faire qui l'accompagne. La dmocratisation des outils donne chacun la possibilit dtre auteur bien qu'amateur et de sapproprier les contenus dautrui. En outre, le principe dhorizontalit sur internet, offre une accessibilit et une comprhension des outils, ainsi plus faciles dtourner. La libert vis- -vis des outils de production rend la cration dautant plus composite, issue dun tissu dautres histoires, dautres origines que celle de lauteur-dieu 37 . Internet, dans l'immdiatet d'accs aux contenus quil rend possible, sans rendre visibles ses moyens structurels, renforce cette impression dtre dfait des conventions sociales communes. 34 BARTHES, Roland, La mort de lauteur, uvres compltes, Tome 3, 1968-1971, Seuil, Paris, 2002 35 FOUCAULT, Michel. LArchologie du savoir. Gallimard, Paris, 1969. 36 BENJAMIN, Walter. Luvre dart lre de son appropriabilit technique. 1939. 37 BARTHES, Roland. Ds lors que tout le monde devient facilement crateur et que les spectateurs deviennent acteurs , la notion d'auteur est alors plus que jamais branle. La mort de l'auteur. 1968. http://culturevisuelle.org/icones/2191 page 15/15 Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Mais surtout, en ddoublant un objet lidentique, en le rendant disponible en deux lieux et temps, ce dernier est appauvri symboliquement. Cet ajout diminue limpression de raret du produit sur le march. La pratique du screener g est emblmatique du dtournement de luvre au sein des tapes de diffusion marchande standard. Cette technique est une sorte de Pirate Cinma 38 au sein mme du cinma pour le dfaire de sa raison dtre. Alors que le crmonial spcialis des salles de cinma permet dans un temps donn d'apprcier une uvre, les dispositifs individuels et anonymes, domestiques, librent le spectateur de ces contraintes. Le cinma, dans ses conventions crmonielles, coupe par exemple la fction de ce qui lui est extrieur. Les diffrentes formes de glitch g , tel le data-moshing g , produisent une esthtique du drglement de loutil numrique. Son apparition dfait le spectateur de son tat de regardeur accueilli dans un lieu masquant ses moyens de production au proft de la narration. La perte du contexte narratif des flms, dans The Pirate Cinma, par le montage chaotique, organise autrement la relation sense limage. Ainsi The Pirate Cinma sapproprie des fgures issues dune culture populaire en les dfaisant de leur potentiel narratif. Le fux gnr est ainsi fdrateur sans hirarchiser les contenus. Il offre un panel dimages dune consommation importante au sein dun rseau parallle tout en rendant visibles les moyens dune telle conomie horizontale. 38 Collectif de Cinma Pirate en espace public revendiquant un droit la culture pour tous. http://en.wiki- pedia.org/wiki/Pirate_Cinema, 2014. Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 LES PAGES D'ANNEXES i Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 LES ANNEXES BIBLIOGRAPHIQUES BIBLIOGRAPHIE BEY, Hakim. TAZ Zone Autonome Temporaire. Paris : de lclat, 1997. Professeur en piratologie, crivain, cet auteur propose des modes daction dans des espaces de libert autoproclams, en dehors de toute considration de proprit, dans une dure limite par autodestruction. Ses recherches portant sur les imaginaires pirate et les relations quentretient une socit productivit vis--vis des marginaux, des clandestins hors de son rseau. Il permet notamment de comprendre une mythologie et diabolisation de toute forme d'entit sociale autonome. BROCA, Sbastien. Utopie du logiciel libre - Du bricolage informatique la rvolution sociale. Prface de Christopher M. Kelty. Neuvy-en-Champagne : Le Passager clandestin, 2013. Propose des outils de comprhension des principes du logiciel libre et, au-del, une ouverture dautres domaines, avec le souhait de diffuser ses prceptes sociaux. Les outils et concepts du libre sont penss comme outils dune utopie concrte. DOCTOROW, Cory. Pirate Cinema. New York : Tom Doherty Associates Book, 2012. Site web sur les creative commons, revenu pour tous, la licence globale, le parti Pirate Nouvelle de fction dont le hros compose, partir de flms quil tlcharge, dautres crations dans une socit o le copyright est utilis comme une arme pour limiter les liberts communes. Ce texte, bien que relatant une fction, interroge les limites entre sphres public que et prive. Labsurdit de certaines situations de contrle se rendant par elles-mme ncessaire, permet un recul critique. GANEM MLLER, Maria. Found Footage, mouvement cinmatographique contemporain. Mmoire prsent la Facult des tudes suprieures, 2012. - Ce mmoire organise un propos autour du found footage, du recyclage, limpact motionnel de flms populaires sur lappropriation de contenus. Ladite partie appuie sur la russite dun mashup identifable et mmorisable. 3.2.2 Le mashup et le remix numrique, p. 86: Le mcanisme de recyclage du mashups et du remix numrique repose presque entirement sur la force de la mmoire des matriaux repris. Il est fondamental ce genre de flm que les images soient reconnues par le grand public, quelles portent en elles le ton dramatique ou comique de leur contexte original. - Histoire du found footage, de lavant-garde et autres pratiques exprimentales, linvention de techniques de montage et thorisation autour de ces dernires. HRABAL, Bohumil. Une trop bruyante solitude. Paris : Robert Laffont, 2007. Roman narrant les aventures dun hros enferm au fond dune cave, occup nettoyer une matire faite de papier et de mmoires. Il produit, avec le temps, un sens du got pour ces objets composites, ces dchets culturels quil collectionne avec fascination. ii Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 MARCUSE, Herbert. Le Problme du changement social dans la socit technologique. Traduction franaise par Blanche Baker, Paris, ditions Homnisphres, 2007. - Page 54 : Ceux qui commandent lconomie commandent galement la cration des besoins et les moyens de leur satisfaction. Tout ceci est extrieur la technologie. Mais, la relation entre la technologie et la politique de la socit industrielle avance nest pas celle dune force extrieure applique un ensemble purement technique. Par sa taille, son organisation interne, et sa fonction dans le prcs de reproduction socitale, lensemble technique lui-mme devient un ensemble politique - pas seulement le mdium par lequel les contrles sociaux sont exercs sur et lintrieur des individus mais galement un appareil de contrle social en tant que tel. La rationalit technologique fonctionne en tant que rationalit politique. [...] - Herbert Marcuse sintresse aux rapports quentretiennent nos socits avec la science et la technologie. Il arrive la conclusion que cette dernire prdomine sur les modifcations sociales vers un asservissement ou, du moins, une interdpendance. Il montre ainsi une mfance vis--vis de la technologie exponentielle qui, en tant quoutils rendus souvent indispensables, transforme les rapports de lindividu dans son environnement. TURNER, Fred. Aux sources de lutopie numrique. Caen : C&F, 2012. Retrace historiquement les diffrentes tapes dlaboration dinternet tel que nous le connaissons aujourdhui. Propos autour de la cration de rseaux intranet puis ouverts. Parle des utopistes et de leurs principes de partages pour smenciper dun monde hirarchis daprs-guerre, synonyme d'une technologie de destruction massive. Il explique notamment lambigut de cette jeunesse terrife par la bombe atomique mais sre des bienfaits des technologies pour transformer la socit. Il fait galement un parallle avec la consommation de LSD comme outil technologique afn de changer lindividu comme point de dpart dune nouvelle socit. WEBOGRAPHIE - FILMOGRAPHIE ANDY. Pirate bay user downloads visualized in real-time art installation. 2013. http://torrentfreak.com/pirate-bay-user-downloads-visualized-in-real-time-art-installation-130521/ CHATONSKY, Gregory. Readymade et API. 2008. http://chatonsky.net/fux/readymade-et-api Thorisation autour de la notion dAPI et des dpendances dinstallations artistiques connects des fux dinformation externe (bases de donnes). Interview de Nicolas Maiget, informations relatives au logiciel, lusage dun VPN. iii Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 GAGNON, Dominic. Rip in pieces America. La Famille digitale, 2010, 2057. Vidos rcupres sur internet, YouTube, avant suppression. Temporalit lie laccessibilit des donnes sur serveur / modration. Approche documentaire autour de cette rcupration de contenus monts, organiss. GUNTHERT, Andr. Luvre dart lre de son appropriabilit numrique. 2011. http://culturevisuelle.org/icones/2191 GUNTHERT, Andr. La culture du partage ou la revanche des foules. 2013. Deux articles au sujet des transformations inities par les pratiques de publication en amateur sur internet, notions relatives au droit dans le domaine de lapropriation, laspect social et la modration des utilisateurs entre eux. JOHNSEN, Andreas, CHRISTENSENS Ralf et MOLTKE Henrik. Good Copy Bad Copy. Vido distribue sous licence libre, 2009, 59. La pratique du sampling, du remix, conomie du libre travers plusieurs exemples dappropriation. Recherches autour dune seconde vie des contenus sous copyright. Rapport d'chelle locale vis--vis d'une matire issue d'une culture marchandise l'chelle mondiale. LECHNER, Marie. Montrer le fux numrique lchelle mondiale. 2009. http://next.liberation.fr/cinema/2013/10/08/montrer-le-fux-numerique-a-l-echelle-mondiale_937985
Interview trs complte de Nicolas Maigret au sujet de The Pirate Cinma. PRINCIAUX, Jean-Pascal. Shakespeare Machine. 2004. http://shakespearemachine.com Extraits vidos, information sur son dispositif de narration autognrative inspir de la Shakespeare Machine. DE LA PORTE, Xavier. Place de la Toile (mission de radio, podcast, France Culture) Mythologies du Darknet, 2013, GUITON Amaelle, TESQUET Olivier, ZIMMERMANN Jrmie Sur les relations de frontires et la diabolisation mdiatique des espaces hors contrle, non recenss sur Internet. REGINE. The Pirate Cinema, A Cinematic Collage Generated by P2P Users. 2013. culturevisuelle.org http://we-make-money-not-art.com/archives/2013/05/the-pirate-cinema.php?utm_source=feedburner#.U1ZhcaJTC2q Analyse de Nicolas Maigret. "A cet gard, Michael Bauwens et la Fondation P2P tudient et communiquent les alternatives. Ils explorent aussi le potentiel transformatif du P2P des niveaux sociaux, politiques, conomiques, culturelles et ducatifs. Il s'agit d'une tendance idologique trs srieuse qui pourrait prendre une part de plus en plus importante dans les dbats actuels." iv Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Figure B : The Pirate Cinema - exhibition at Eastern Bloc | Sight and Sound Festival 2013 Source : Flickr de Nicolas Maigret : n1c0la5ma1gr3t Figure A : Schma de la scnographie du dispositif A Source : Projet tutor - Vincent Bonneflle ILLUSTRATIONS (IMAGES ET SCHMAS) DISPOSITIF A : v Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Figure C : The Pirate Cinema - exhibition at Eastern Bloc | Sight and Sound Festival 2013 Source : site "Flickr" de Nicolas Maigret : n1c0la5ma1gr3t Figure D : The Pirate Cinema - exhibition at Eastern Bloc | Sight and Sound Festival 2013 Source : Justin Desforges - Eastern Bloc site "Flickr" de Nicolas Maigret : n1c0la5ma1gr3t vi Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 DISPOSITIF B : Firugre F : ther Mashup | Cmoda - China Millenium Monument, museum of digital arts Cmoda Beijing | Source : Flickr de Nicolas Maigret : n1c0la5ma1gr3t Figure E : Schma de la scnographie du dispositif B Source : Projet tutor - Vincent Bonneflle vii Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Figure H : @ And Festival - Liverpool 2013 And Festival - Source : Flickr de Nicolas Maigret : n1c0la5ma1gr3t Figure G : And Festival - Liverpool 2013 And Festival - Source : Flickr de Nicolas Maigret : n1c0la5ma1gr3t viii Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 LE GLOSSAIRE Adresse IP : numro d'identifcation attribu chaque appareil connect un rseau informatique utilisant l'IP (Internet Protocol). L'adresse IP est la base du systme d'acheminement (le routage) des messages sur internet. Application Programming Interface (angl.), API (abrviation), ou application programmable interface ( traduire par interface pour l'accs programm aux applications) : langage document fourni par une application connecte permettant daccder ses donnes par un accs administr, dans le but dtre mise en relation avec dautres. BitTorrent : protocole de communication, de transfert et de partage de fchiers en pair pair travers un rseau informatique. Chaque client informatique ayant tlcharg l'information devient aussitt serveur son tour. Blockbuster : terme issu du jargon thtral amricain, qui qualifait une pice remportant un fort succs. Au cinma, il qualife les flms gros budgets et gros revenus. Broadcast : dfnit la diffusion de donnes un ensemble de machines connectes un rseau. la notion de broadcast est employe par les techniciens en informatique et en rseaux ; il s'agit proprement parler de transmission ou de liaison. Bug (angl.), bogue (fr.) : dfaut de conception d'un programme informatique l'origine d'un dysfonctionnement. Client : qualife aussi bien l'ordinateur que le logiciel ou la personne qui oprent une demande un serveur, dans un rseau informatique. Code source : contient le code qui a permis l'criture du programme dans son propre langage. Il est souvent comment, document. Common Law (angl.), droit commun (fr.) : systme bti essentiellement sur le droit jurisprudentiel (comme aux Etats-Unis) par opposition au droit civiliste ou codif (comme en France). Copyright : Dsigne un dpt procurant aux auteurs une preuve d'antriorit concernant leurs crations. Droit relatif la copie. Creative Commons : organisation but non lucratif dont lobjectif est de proposer une solution alternative lgale aux personnes souhaitant librer leurs uvres des droits de proprit intellectuelle standards de leur pays. Darknet : une partie du web dans laquelle les adresses IP sont caches l'aide d'un logiciel. Ce sont des rseaux privs anonymes construits entre pairs de confance : ami ami ou friend-to-friend (F2F). Dans les mdias, le darknet fait souvent cho un internet non rfrenc, non modr et li divers trafcs. ix Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Datamoshing : se rfre une technique d'exploiter les frames des images provenant de fux de donnes vido en les compressant pour crer des artefacts et des distorsions dans la vido (cf. Frames ci-aprs). Disc/Vido Jockey (ang.) ou DJ/VJ : Pratiques souvent lies au divertissement elles trouvent aussi des applications dans les arts vivants, la danse, le thtre. Elles consistent en l'assemblage et la modifcation de musique (DJ) ou de vido (VJ), ou leur enchanement plus ou moins harmonieux afn de crer des ambiances ou d'appuyer un aspect scnique. La production est retransmise en direct (performative). FAI (fournisseur daccs Internet) Flag : dans le sens de to fag (angl.) pour marquer (fr.). Le bouton fag sur des sites web permet aux utilisateurs un contenu qu'ils jugent inappropri pour qu'il soit ventuellement supprim, modr. Il est souvent accompagn d'un petit drapeau (orange), "fag" en anglais. Found footage (angl.), traduit littralement par enregistrement trouv : rcupration de pellicule impressionne, abandonne ; ce terme sest gnralis dautres supports et dsigne un recyclage, dans un processus de cration. Frames : signife littralement "cadre", en l'occurrence la trame de l'image. Les I-frames contiennent notamment les informations sur les valeurs colorimtriques des pixels prsents l'image. Les key frames (angl.), ou points cls (fr.) sont prsents de manire ponctuelle et chaque changement de trame de l'image pour initialiser la suivante (par exemple, au changement d'un plan). Les images cls sont des points depuis lesquels l'animation est interpole. Les P-frames renseignent le logiciel sur le mouvement des pixels au sein de la trame de l'image. Glitch: dfaillance lectronique entranant un dysfonctionnement du hardware, qui occasionne son tour des rpercussions sur les logiciels. Le mot glitch en est venu dsigner tout type de problme en informatique. GNU/Linux : Linux, nom donn tout systme d'exploitation libre associant des lments du projet GNU et un noyau Linux. Ce systme est n de la rencontre entre le mouvement du logiciel libre et le modle de dveloppement collaboratif et dcentralis via Internet. Gstreamer : bibliothque logicielle de manipulation de sons et d'images, distribu sous licence libre initialement dveloppe pour proposer une solution capable de concurrencer QuickTime et DirectShow sur Linux. Hadopi (Haute Autorit pour la diffusion des uvres et la protection des droits sur internet): autorit publique indpendante franaise qui veille par plusieurs procdures lapplication de la loi cration et internet. Cette dernire a pour but de favoriser la diffusion et la protection de la cration sur internet, de mettre un terme aux partages de fchiers de pair pair lorsque quils sont en infraction avec les droits d'auteur. x Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Hack/hackeur ou hacker/hackability ou bidouilleur/bidouillage : le hack est une manipulation d'un systme. Le mot hackability (angl.), issu de hacker et qui se traduit par bidouillabilit (fr.), correspond la capacit pour quelque chose (systme, objet technique, outil, etc.) tre dtourn de sa vocation initiale pour de nouveaux usages. Le hakeur (angl.) ou bidouilleur (fr.) est donc quelquun qui manipule, bidouille. Hardware (angl.), matriel informatique (fr.) : ensemble des pices dtaches des appareils informatiques, aussi bien l'intrieur qu' l'extrieur. Internet Access Provider (IAP, angl.), Fournisseur daccs internet (FAI, fr.) : organisme (gnralement une entreprise mais parfois aussi une association) offrant une connexion au rseau informatique mondial. In situ : expression latine qui signife "sur place" ; elle est utilise en gnral pour dsigner une opration ou un phnomne observ, l'endroit o il se droule (sans le prlever ni le dplacer), par opposition ex situ. Intranet : ensemble de services internet restreint, uniquement accessibles partir des postes d'un rseau local. IPredator : fournit un tunnel crypt qui cache ladresse IP dun ordinateur en le faisant transiter par une adresse IP fournit par le service IPredator. Junkware : classe des logiciels jugs inadquats ou peu utiles (obsoltes, trop voraces en ressources, version de dmonstration trop limite). Junk (angl.) signife dchet, et ware (angl.), produit. Leecher (de l'anglais leech, sangsue) : personne qui tlcharge, receveur de fchiers, ou personne n'tant pas l'origine de la mise disposition du fchier sur une plateforme de tlchargement. Libre : rfrence au copyleft, lopen source, par opposition au copyright ou au ct privatis de quelque chose. Free (ang.) fait la fois rfrence gratuit et libre et cre une ambigut ; un contenu dit "libre" n'est pas forcment gratuit, il autorise une certaine diffusion sous conditions. Libtorrent : est une implmentation open source du protocole BitTorrent. Magnet : lien URL se rfrant au contenu plutt qu' l'emplacement dun fchier. Il est trs utilis dans le cadre d'changes peer-to-peer, la source tant rfrence sans ncessiter une disponibilit continue de l'hbergement source. Maillage : procde la simplifcation d'un systme par un modle reprsentant ce systme. Major : mot utilis pour parler des plus grosses entreprises dans leur secteur (ex : major du cinma). Mashup, ou mash-up : mlange ralis principalement par informatique entre deux fchiers existants (par exemple, une bande son ajoute une vido qui ne lui correspond normalement pas). xi Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Opensource (angl.), code source ouvert (fr.) : s'applique aux logiciels dont la licence permet sa libre redistribution, laccs son code source comme base d'autres dveloppements logiciels. Panopticon : modle panoptique de prison invent par Jeremy Bentham en 1787, systme de contrle comportemental sur les dtenus les contraignant par apprhension de la surveillance mme. Peer-to-peer (angl.), P2P (abrviation), pair pair (fr.) : est un modle de rseau informatique proche du modle client-serveur, c'est--dire de manire mutualise, mais o chaque client est aussi un serveur. Peers (angl.), pairs (fr.) : utilisateurs qui transmettent tout ou une partie de l'archive (seeders ou bien leechers disposant d'une partie de l'information). Personal computer (angl.), ordinateur personnel (fr.) : ordinateur destin l'usage d'une personnel Pirate Bay (The) : systme de serveurs informatique permettant le partage de fchiers en pair pair ; cet change est rendu possible par le protocole de communication BitTorrent. Cr en Sude en 2003, il se dclarait le plus grand serveur torrent du web. Il est rgulirement mentionn dans les journaux car il symbolise la rsistance contre les actions des majors d'Hollywood et une certaine rforme des droits d'auteur. Proxy : composant logiciel informatique qui joue le rle d'intermdiaire en se plaant entre deux autres pour faciliter ou surveiller leurs changes. Il est trs utilis sur internet. Pure Data (PD) : logiciel de programmation avec interface graphique spcialis dans la musique assiste par ordinateur. Python : langage de programmation objet. Il est plac sous une licence libre et fonctionne sur la plupart des plateformes informatiques. Il est conu pour optimiser la productivit des programmeurs en offrant des outils de haut niveau et une syntaxe simple utiliser. Ready-made : littralement "pr fabriqu", dsigne un geste initi par Marcel Duchamp, qui consiste en le dplacement d'un objet trouv, manufactur, dans un espace d'exposition afn de changer son statut. L'artiste a ainsi boulevers la reprsentation de l'acte de cration en le rsumant une convention sociale et sa reconnaissance en tant que telle du fait du contexte d'exposition. C'est le regardeur qui fait l'uvre, qui la tolre et valide ce statut. Scratching (ang.) : procd qui conciste en l'application d'un mouvement de va et vient par un mouvement rpt sur un vinyle afn d'altrer la lecture. En rsulte une distortion du son dans sa linarit. Sampling : en musique, dsigne l'chantillonnage et la numrisation de documents sonores intervalles rguliers, ainsi que la procdure d'utilisation de samples dans la cration de nouvelles compositions artistiques. Screener (de l'anglais screen : cran) : la copie sur support vido qu'un studio fait de l'un de ses flms alors qu'il est encore exploit en salles, voire avant mme qu'il ne soit sorti, destin aux critiques de cinma. xii Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Seeder : dit d'un utilisateur partageant du contenu sur le rseau P2P. Serveur : ordinateur qui excute des oprations la demande d'autres ordinateurs, surnomms clients. De ce fait, on parle d'architecture rseau client-serveur. Ex. : un serveur HTTP fournit des pages web la demande d'un navigateur. Snowden : Edward Joseph Snowden est un informaticien amricain, ancien employ de la CIA et de la NSA qui a rvl les dtails de plusieurs programmes de surveillance de masse amricains et britanniques. Suite cela, il a t inculp (2013) par le gouvernement amricain pour espionnage, vol et utilisation illgale de biens gouvernementaux. Stream : mthode de transfaire d'un fux vido sur un rseau pouvant tre lu en l'tat, sans tlchargement complet du fchier. Le processus d'envoi et de visionnage ne sont pas difrs dans le temps. Supercut (ang.) : pratique consistant monter bout bout des squences issues d'uvres originales, afn de rassembler une thmatique commune sur un sujet. Tlchargement direct (fr.), direct download (angl.) : pratique de mise disposition de fchiers tlchargeables directement sur l'infrastructure d'un site web, suivant le modle client-serveur, contrairement au tlchargement P2P. Timeline : peut tre traduit par le terme chronologie (fr.), utilis dans le montage vido. Toile (fr.), web (angl.) : le World Wide Web (WWW), littralement la toile (daraigne) mondiale, communment appel le web, est un systme hypertexte public fonctionnant sur internet. Le web permet de consulter, avec un navigateur, des pages accessibles sur des websites. Top 100 : un catalogue qui hirarchise des flms, par exemple, selon un critre donn souvent li aux meilleures ventes, ceux les plus visionns ou encore les plus tlchargs. Le top 100 de The Pirate Bay s'appuie sur ce dernier critre. Torrent (ou fchier d'extension ".torrent") : dsigne un type de fchier utilis par le protocole d'changepair pair BitTorrent. Le torrent est un fchier qui pointe l'endroit o se trouvent les parties du fchier rel sur internet. Il contient galement l'adresse IP d'un tracker qui coordonne les changes entre pairs. Tracker : serveur qui sait en permanence quels seeds et quels peers se trouvent dans le swarm. Les clients lui envoient rgulirement des informations. En change, ils reoivent des informations sur d'autres clients auxquels ils peuvent se connecter. Le tracker n'est pas impliqu dans le transfert de donnes et ne possde pas de copie du fchier. Uniform Resource Locator (URL, angl.), littralement localisateur uniforme de ressource (fr.), plus couramment appel adresse web : cette adresse sert dsigner une ressource prsente sur le web. xiii Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014 Video Home Cinema (VHS, angl.), systme vido domestique (fr.) : dsigne une norme denregistrement de signaux vidos sur bande magntique de pouce mis au point par la marque japonaise JVC la fn des annes 1970. Virual Private Network (VPN, angl.), rseau priv vituel (fr.) : un VPN permet d'aller d'un rseau priv un autre rseau priv en traversant Internet dans un tunnel scuris. Wif (le) : permet de relier sans fl plusieurs appareils informatiques au sein d'un rseau informatique afn de permettre la transmission de donnes entre eux. WikiLeaks : est une association dont le site web lanceur d'alerte publie des documents ainsi que des analyses politiques et sociales. Sa raison d'tre est de donner une audience aux fuites d'information, tout en protgeant ses sources. Xubuntu : le projet Xubuntu est une distribution Linux drive dUbuntu. Te Pirate Cinma de Nicolas Maigret, les dpendances d'un fux dans la creation d'un mashup Vincent BONNEFILLE | 22 avril 2014