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LE DÉTAIL, L’UNIQUE : UNE PENSÉE DE LA RECONNAISSANCE

Tiphaine Samoyault

Belin | « Po&sie »

2010/3 N° 133 | pages 94 à 102


ISSN 0152-0032
ISBN 9782701157481
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Tiphaine Samoyault

Le détail, l’unique :
une pensée de la reconnaissance1
Si, en France comme ailleurs, Auerbach est considéré comme un classique des études
littéraires, Mimésis, traduit tardivement, y est lu de manière isolée, indépendamment
des Studi su Dante par exemple, traduites en 1999 seulement et ignorées du public fran-
çais, et sans référence aux articles qui ont fait l’objet de traductions encore plus tardives
et de publications dispersées2. L’ouvrage est certes admiré, mais il est tenu pour exem-
plaire des grandes synthèses dont la critique germanique et anglo-saxonne semble s’être
faite une spécialité, qui envisagent les textes dans l’espace élargi du monde – même si
la littérature mondiale, dans ce livre, est exclusivement européenne3 et dans la tempo-
ralité étendue de l’histoire. La perspective culturaliste n’est guère promue par les études
littéraires qui, pour devenir plus contextuelles et historiques ces dernières années, res-
tent marquées dans certains cas par la clôture du texte, dans d’autres par le positivisme
des rapprochements. Seule une critique subjective qui s’autorise généralement d’une

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posture d’écrivain est admise, et encore l’est-elle dans des publications qui se font aux
marges de l’université où une critique d’auteur – de Bataille à Pascal Quignard, de
Sollers à Philippe Forest – retient dans la littérature un discours qui sert l’œuvre propre.
Ainsi par exemple, on lit sous la plume de Philippe Forest : « J’appelle roman tout récit
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qui saisit son lecteur sans merci ni répit et dont chaque page, chaque phrase lui renou-
vellent la même promesse d’une révélation touchant au nerf le plus vif de sa vie.4 »,
qui fait écho à la méthode pré-théorique d’Auerbach qui propose de mettre en avant
un bouleversement avant tout travail d’élaboration conceptuelle, ou qui écrit dans « Le
langage littéraire et son public » : « ce que nous comprenons et que nous aimons dans
un livre, c’est l’existence d’un être qui est une possibilité de notre être.5 » La méfiance
de l’institution française à l’égard de ce qu’on appelle encore ailleurs la philologie, la
codification de l’exercice de l’explication de texte par la rhétorique, la stylistique et la
narratologie n’ont pas favorisé non plus la diffusion ou la généralisation d’une méthode
contextualiste, recherchant sinon fondant l’articulation du théorique et de l’historique.
Il y a bien en France des recherches singulières qui tentent ces « généralisations inter-
médiaires », capables de généraliser sans abstraire, sans renoncer au particulier et à l’his-
toire, notamment chez ce grand critique littéraire longtemps oublié et récemment redé-
couvert que fut Albert Thibaudet6, mais dans l’ensemble, le poids des oppositions
binaires (jusque dans la structure du structuralisme), l’importance de la dialectique et
le prestige de la pensée abstraite continuent de distinguer la synthèse de l’analyse, le
général du particulier et la masse du détail. Si l’ouvrage de l’historien de l’art Daniel
Arasse sur le détail a connu un relatif succès critique, alors qu’il le considère dans la
perspective classique ou néo-classique de son rapport avec la composition ou avec la
masse, l’ouvrage de Naomi Schor, Lectures du détail, pourtant traduit en 1994, n’a reçu
qu’un très faible écho alors qu’il tente de montrer que l’opposition néo-classique du
sublime et du détail n’est pas insurmontable grâce à la promotion, voire à la sublimation

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ou à la sacralisation du détail par le réalisme.7 Afin de réfléchir à ce qui nous regarde


encore dans Mimésis aujourd’hui tout en traitant de l’infléchissement de son statut dans
un certain ordre de la pensée, je retiendrai cette relation au choix du passage significa-
tif d’un texte, au détail retenu par le critique pour servir de point de départ à son ana-
lyse. À la croisée de deux régimes discursifs – l’histoire, la fiction –, Auerbach fait du
détail à la fois un choix de méthode, un objet spécifique (le spécifique étant ce qui per-
met de dépasser l’opposition du général et du particulier puisqu’à la fois l’un et l’autre),
et un cadre signifiant puisque le détail apparaît aussi comme un indice de réalité. On le
voit ainsi fonctionner à la fois au plan de la forme et au plan du propos. Il se peut même
qu’il dise quelque chose de l’implication existentielle et identitaire du critique lui-même,
par la manière dont il apparaît au début et à la fin du livre comme marque du retour
(possible ou impossible) en situation d’exil. À la fin du parcours, je rencontrerai une
pensée de la reconnaissance dont il me semble qu’elle est implicitement à l’œuvre dans
le texte d’Auerbach, qu’elle justifie une part de la référence qui y est faite dans les études
culturelles ou postcoloniales et qu’elle donne ainsi un sens a contrario au statut qu’il
confère au détail dans ses analyses.

Le détail

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Il faut s’arrêter un instant sur la préférence de la modernité littéraire pour le détail,
le fragment (que l’on peut toutefois distinguer du détail) par laquelle la partie n’est
plus soumise au tout, le détail à la masse. Cette dilection est connue, a fait l’objet de
suffisamment d’études et d’interprétations pour qu’on n’y insiste pas. Il me paraît cepen-
dant intéressant de s’attarder sur des questions de méthode pour montrer que l’atten-
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tion au détail permet de résorber l’opposition – ce que tente aussi de montrer Naomi
Schor. Elle voit par exemple dans le fameux article de Barthes sur « l’effet de réel »,
non pas simplement la valorisation du détail insignifiant et la lutte contre l’herméneu-
tique que cette valorisation instruit, mais l’archéologie d’un passage, du classicisme
au réalisme : « “L’effet de réel” est une sorte de récit mythique des origines de la moder-
nité, qui nous raconte comment le “détail concret” est passé du domaine de l’histoire –
où l’avait confiné Aristote – à celui de la fiction, c’est-à-dire comment une vraisem-
blance nouvelle, le réalisme, a commencé d’émerger d’une référence ancienne, le clas-
sicisme.8 » Or Mimésis nous offre une sorte d’espace discursif intermédiaire situé à la
croisée de ces deux domaines : l’histoire, la fiction. Le texte y est traité comme matière
linguistique marquée par un style spécifique mais l’ensemble auquel il renvoie est moins
la totalité du texte de laquelle l’extrait a été prélevé que la masse plus ou moins dis-
tincte d’une époque dont le texte permet de réordonner les données. Du point de vue
de la méthode, le détail, qui est ici assimilable au fragment, s’inscrit dans une démarche
classique puisqu’il est reconductible à un tout, mais avec un écart cependant : ce tout
n’est pas le même que celui auquel il a été arraché. Le détail fonctionne alors comme
une synecdoque (dont la dialectique est celle du fragment/pars pro toto). Mais de quel
tout, de quelle totalité ? Sa valeur de métonymie est donc problématique puisque le
détail peut être la partie de plusieurs « touts » distincts. On prélève le détail d’un texte
et il est révélateur non pas du domaine de départ, mais de celui d’arrivée. On pourra
m’objecter qu’il y une relation d’inclusion du texte comme totalité dans l’époque comme
totalité. Pourtant, ce qui me fait maintenir cet espace problématique, c’est que cette

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prétendue relation d’inclusion ne tient pas compte des régimes discursifs distincts des
deux totalités dont il est question. Tantôt le fragment est reconduit à l’espace d’où il
vient : la fiction ; tantôt, il est amené dans cet espace où il va : l’histoire. Sans être abso-
lument étanches – et c’est tout l’intérêt de la méthode d’Auerbach de montrer cela –
ces deux espaces ne sont pas isomorphes. Tout se passe comme s’il y avait de la méta-
phore dans la métonymie : on prélève, mais le prélèvement est révélateur dans la trans-
lation (ce qui dit déjà quelque chose de la reconnaissance dont je parlerai plus loin : ce
que je reconnais, c’est la valeur métaphorique du détail comme révélateur métonymique
de l’époque). De cet écart, ou plutôt de ce saut, de la métonymie à la métaphore, découle,
me semble-t-il, une deuxième fonction assignée au détail qui joue cette fois au plan du
contenu et fait passer d’une conception classique du détail héritée d’Aristote à une
conception réaliste où il vaut pour lui-même, dans sa plénitude signifiante. Le réalisme
apparaît bien alors comme discours sur le détail autant que discours du détail et la réa-
lité, quand elle veut être représentée, a besoin d’un concret qui ne puisse s’abstraire.
Ainsi, pour formuler autrement ma thèse, je pose que la richesse de Mimésis pour nous
aujourd’hui tient à cette disjonction par laquelle le détail joue à la fois sa partie dans le
devoir de synthèse que s’assigne Auerbach (donc pour le discours d’histoire), et dans
la démonstration analytique du devoir de représentation que s’assigne la littérature. Aussi
ce qui a été arraché à la fiction pour devenir discours historien est-il finalement ramené
de façon moins explicite à la fiction par la réflexion sur les modalités de la représenta-

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tion. Le détail vaut par son extension (le passage d’un domaine – la fiction – à un autre
– l’histoire), mais aussi par son intention (sa signification ou significativité). Mais
comme il y a du métaphorique dans la translation métonymique, ce qui se joue nous
ramène d’emblée aux conditions mêmes du sens. Ce qui nous donne peut-être la clé,
on y reviendra, du rapport entre Mimésis et Figura : car le détail est une figure, une figu-
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ration dans la métonymie. Mais n’anticipons pas. Cette différence de statut mais aussi
de fonction du détail tient à sa place dans l’argumentation. Au plan de la méthode, le
détail, le fragment, apparaît au début. Il est inséparable de cet Ansatzpunkt – le bon point
de départ, la bonne prise – duquel tout va pouvoir rayonner et dont Auerbach fait le
principe de sa démarche.9 Éloigné de son origine, le fragment doit pouvoir constituer
un point de départ suffisamment lumineux pour établir une nouvelle origine capable
de donner forme au discours. « Ce point de départ doit être un ensemble de phénomènes
nettement circonscrits, aisément saisissables ; et leur interprétation doit posséder un
rayonnement qui le rende capable d’ordonner et d’interpréter par contagion une aire
bien plus vaste que celle de départ.10 » Énoncée à plusieurs reprises par Auerbach, cette
métaphore du rayonnement dit exactement ce que permet cet Ansatzpunkt, « qui se défi-
nit à la fois par sa “concrétude” et par sa capacité de déploiement : c’est un fil d’Ariane
que l’on “déroule”, un “rayonnement partant de peu”.11 » Les vingt explications de textes
qui inaugurent les chapitres de Mimésis sont ainsi autant d’entrées dans les époques aux-
quelles ces fragments introduisent, elles ont valeur d’exemple et de mise en œuvre de
l’hypothèse de Vico selon laquelle on peut embrasser une époque par n’importe laquelle
de ses parties. Le fragment, l’Ansatzpunkt, est donc sélectionné, découpé et choisi. Il
est frappant, à cet égard, que l’auteur ne renvoie presque jamais à d’autres fragments
du livre, par le biais de la citation par exemple, mais qu’il préfère recourir à la compa-
raison avec d’autres œuvres, d’autres fragments. Lorsqu’il est question de La Chanson
de Roland, par exemple, dans le chapitre V – et l’œuvre est ainsi souvent dans son entier
référencée par son titre – c’est à partir des cinq laisses du chant 58 citées en ouverture

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qu’elle est entièrement résumée. Inversement, le détail tout aussi concret qui sert de
révélateur de la réalité représentée par un texte, apparaît presque inopinément, et ne
fait pas l’objet d’une sélection ni d’une élection particulières. Sa fonction est d’être là,
de façon significative ou indiciaire, mais irrécupérable. Son champ d’action n’est plus
le spécifique (la généralisation intermédiaire), mais l’unique. La cicatrice d’Ulysse, si
visible qu’elle en vient à recouvrir le dernier chant de l’Odyssée sans pour autant le
représenter par métonymie, « les corps usés par l’âge et généralement mutilés par les
blessures » des soldats chez Tacite (p. 46), le bâillement de Mathilde de la Mole dans
les dîners de la maison aristocratique de son père (p. 450), « les yeux de Chinoise [de
Lily chez Woolf] qui se bridaient dans sa petite figure blanche et plissée » (p. 521), « les
bouches ouvertes, fendues jusqu’aux oreilles » chez Zola (p. 502) et plus encore – parce
que l’auteur l’expose dans une entreprise de sublimation du détail presque aussi révo-
lutionnaire que son arrachement contemporain à toute totalité – le « jupon de laine tri-
cotée, qui dépasse sa première jupe faite avec une vieille robe, et dont la ouate s’échappe
par les fentes de l’étoffe lézardée » de Madame Vauquer chez Balzac (p. 466), sont
autant de signes linguistiques dénotant la réalité représentée mais ils sont aussi des
espaces propres, des sortes d’isolats irréductibles à l’interprétation. Tout en faisant
système avec le reste et en permettant à Auerbach de dessiner les contours de l’époque
qu’il cherche chaque fois à cerner, ils arrêtent aussi le mouvement de la démonstration
en rendant visible un monde en quelque sorte plus grand que celui qu’il représente : plus

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grand parce que déformé (la cicatrice est plus grande que le corps, le jupon plus large
que la dame, le bâillement occupe tout le visage). La focalisation sur le détail crée des
effets d’anamorphose qu’Auerbach exploite parfois (dans le premier chapitre notam-
ment) et dont d’autres fois il semble ne savoir que faire. Ainsi chez Balzac, malgré la
thèse de l’harmonie entre la personne de Madame Vauquer et les lieux qu’elle dirige
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(sa pension), les détails sont si exubérants qu’ils saturent le texte et semblent dresser
un écran entre le monde de la représentation et le monde représenté :
La succession des objets mentionnés – bonnet, coiffure, pantoufles, jupon – ne laisse
deviner aucune trace de composition. On n’observe pas non plus de distinction entre
corps et vêtements, entre traits physiques et signification morale. La description tout
entière, jusqu’au point où nous l’avons examinée, s’adresse à l’imagination du lecteur,
aux souvenirs qu’il peut avoir de personnes et de milieux analogues ; la thèse de
l’« unité de style » du milieu, qui inclut les gens qui s’y meuvent, n’est pas rationnel-
lement établie, mais présentée comme un fait qui s’impose directement aux sens, d’une
manière purement suggestive, sans preuve. (p. 467)

L’effet est celui d’un désordre d’abord (absence de composition, absence de dis-
tinction, absence de démonstration par la preuve) mais aussi celui d’une unidimen-
sionnalité par quoi la description ramène tout au premier plan, dessine un monde sans
profondeur et sans envers qui peut ainsi littéralement faire écran. Il est intéressant de
noter qu’il n’y a dès lors pas de différence matérielle entre le monde du texte antique
et le monde du texte dit réaliste. Dans les deux cas, le commentaire met l’accent sur
l’absence d’arrière-plan (« ce style [le style homérique] ne connaît que le premier plan,
qu’un présent également éclairé, également objectif ; » p. 16), même si cette absence
n’est pas attribuée aux mêmes causes et ne fait pas l’objet de la même interprétation
chez Auerbach. Mais alors que dès le premier chapitre, les modalités anciennes de la
narration sont comparées et opposées à ses modalités modernes, réalistes, des romans
français et russe du XIXe siècle, on voit se jouer, dans le parcours chronologique, du

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premier chapitre au dix-huitième, une autre partie où le récit et sa représentation ne sont


plus saisis dans une perspective évolutionniste, voire progressive ou progressiste (ou,
pour le dire autrement, hégélienne), mais où le texte et sa représentation constituent le
plus souvent un espace plan, un écran, un corps limité par son apparence ou par sa
peau et « qui s’impose directement aux sens » : texte qui est reconduit à sa dimension
matérielle de texte comme agrégat de signes linguistiques, qui ne disparaît plus entiè-
rement dans la synthèse et qui n’est plus, grâce au détail suggestif et adressé à l’ima-
gination, entièrement assimilable au tout. De même que le corps de Madame du Chas-
tel pensant au sacrifice de son fils ne peut plus connaître aucun repos et se fragmente
en autant de morceaux non recomposables (« Reposer, dist-elle hellas, Monseigneur,
je n’ay cuer, œul, ne membre sur mon corps qui en soit d’accord… », p. 246), de même
le détail réaliste ne colle plus au tout parce qu’il tend vers une autre figure, qui est
l’hyperbole. Il a, en se détachant, une manière d’excéder le tout qui l’en éloigne défi-
nitivement. Ainsi, pour conclure ce premier point, on voit la métonymie, dans le détail,
être transportée dans deux autres figures : premièrement la métaphore, qui conduit le
détail vers l’avant, dans l’histoire, en se transformant en figure – l’’observation de ce
transport donne une clé de la méthode d’Auerbach ; deuxièmement l’hyperbole, qui
conduit le détail à excéder le tout dans lequel il s’inscrivait et, en quelque sorte le recou-
vrir et l’obscurcir (comme lorsqu’on sélectionne le détail d’une étoffe dans un tableau
et que l’œil ne devine plus la figure qu’elle recouvrait). Ces deux mouvement appa-

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raissent comme contraires en ceci que le premier introduit la figure quand le second la
fait disparaître. Il faut maintenant s’arrêter sur les conséquences de cette relative, ou
provisoire, disparition.
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L’échappée

La grande fortune de la première analyse de Mimésis, à quoi le texte est d’ailleurs


souvent réduit, celle de la cicatrice d’Ulysse, a peut-être à son tour eu un effet défor-
mant sur ma lecture dans la mesure où elle m’a conduite à être frappée par la récurrence
du motif de la blessure, de la fente, de l’entrebâillement, dans les textes littéraires choi-
sis par Auerbach pour ses analyses. Je veux y voir néanmoins le choix du détail allé-
gorique de la méthode, ou plutôt le choix du détail comme allégorique de la méthode.
Avant d’en reprendre certains d’entre eux pour en proposer une réinterprétation, je vou-
drais poser les étapes du cheminement qui donne à ce détail spécifique une dimension
allégorique. Si l’on tient que le détail concret, dans la représentation réaliste, a comme
résultat d’opacifier la matière, de la rendre presque abstraite, de faire disparaître la figure,
il faut bien se donner les moyens de la retrouver. Quoi de mieux que la cicatrice ou l’ou-
verture pour faire office de coupures dans le plan qui vont permettre l’échappée de
l’interprétation. C’est là me semble-t-il que le cercle de la méthode se referme et que
cette dernière se justifie. En acceptant que la représentation elle-même (le texte), par
métonymie-hyperbole, fasse disparaître ce qu’elle a représenté (l’interprétation), par
métonymie-métaphore, Auerbach ne conduit pas sa démarche du côté de l’absolu du
sens, ne se donne pas une autorité totalitaire sur le vrai. Il conserve à la littérature son
autorité propre, sa part d’obscur, sa capacité d’excès. Mais en faisant finalement appa-
raître que le texte lui-même offre le détail allégorique qui permet l’échappée vers l’in-
terprétation, il réagence la méthode en la voyant inscrite comme possibilité dans le texte

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lui-même. C’est ainsi qu’il pourrait tenir, en dernière analyse, et comme le fait Derrida
dans Psyché, le détail comme lieu ultime de la révélation, ici de l’œuvre de Barthes :
«… c’est à un détail que je demandais l’extase révélatrice, l’accès instantané à Roland
Barthes (lui-même, lui seul), un accès gracieux, étranger à tout labeur. Je l’attendais
d’un détail à la fois très visible et dissimulé (trop évident), plutôt que des grands
thèmes, des contenus, des théorèmes ou de la stratégie des écritures que je croyais
connaître et facilement reconnaître depuis un quart de siècle… Je cherchais comme
lui… Comme lui je cherchais la fraîcheur d’une lecture dans le rapport au détail…12 »
Citant cette communauté formée par Derrida et Barthes autour du détail, je veux sou-
ligner que même si chez Auerbach, les grands thèmes ou les amples synthèses parais-
sent constituer la visée de la lecture, quelque chose s’origine et s’abîme – et l’on verra
pour finir jusqu’où – dans ce détail allégorique, donc intensément révélateur, de l’en-
trebâillement ou de la cicatrice.
Ainsi, ce sont la cicatrice d’Ulysse, les étroits passages où chevauchent les barons du
roi Charles dans La Chanson de Roland, les corps usés par l’âge et généralement muti-
lés par les blessures des soldats chez Tacite, le corps écorché de l’enfant sur le point
d’être sacrifié chez Antoine de La Sale (p. 247), le bâillement de Mathilde de la Mole,
les yeux de Chinoise [de Lily chez Woolf] qui se bridaient dans sa petite figure blanche
et plissée » (p. 521), les « fentes de l’étoffe lézardée » chez Balzac, « les bouches
ouvertes, fendues jusqu’aux oreilles » chez Zola, auxquels il faut ajouter la bouche de

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Pantagruel, « laquelle, en dépit de ses dimensions colossales, ne perd pas tout à fait le
caractère de bouche » (p. 270), mais aussi les yeux soudain grand ouverts d’Alypius
chez Augustin (p. 78), le coup de couteau dans le flanc gauche dont Candide « porte
encore la marque » (p. 406), l’étroit sentier de l’Enfer sur lequel cheminent Virgile et
Dante (p. 185), et enfin, d’une façon plus symbolique mais qui ne perd pas son carac-
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tère concret, les nombreuses allusions aux plaies du Christ et au lieu de l’enfantement
qui peuvent instruire, pour les unes, toutes les cicatrices et pour les autres, toutes les
fentes ou ouvertures étroites. Par ces trouées, quelque chose revient de la figure parce
que l’hyperbole est en quelque sorte empêchée d’occuper tout l’espace, son excès est
libéré par une ouverture qui peut permettre d’en libérer le trop-plein, ce qu’exprime
clairement la bouche de Pantagruel : « Le monde que renferme la bouche de Pantagruel »
peut apparaître à première lecture comme un microcosme du monde que cette bouche
inclut ; mais il est aussi, comme détail et non plus comme reproduction, possibilité
pour ce monde de se libérer, ce dont témoigne l’insistance du texte sur les modalités
de l’absorption et de l’évacuation (« – D’où viens-tu ? Alcofrybas ? – Je luy responds :
De votre gorge, Monsieur. – […] – Où chioys tu ? – En votre gorge, Monsieur, dis-je »
(cité p. 269). Ce plein du récit mimétique a moins à voir avec la plénitude qu’avec
l’excès, le trop-plein, une forme de débordement où le récit est toujours menacé de se
perdre, de perdre sa forme et de voir son monde s’effondrer. Au lieu de le faire reve-
nir au superflu, à l’inutile ou à l’insignifiant, Auerbach choisit de lire ce trop-plein
comme ce par quoi un texte est et n’est pas un monde en même temps en le faisant
retourner à l’histoire. Il montre ainsi à l’inverse comme un texte est et n’est pas le
monde. Avec la notation superflue, qui participe du trop-plein, le récit bascule dans le
réel, dans le monde quand ce monde n’est plus le sien, ou, comme l’écrit Barthes dans
La Préparation du roman, « l’évanouissement du langage au profit de la certitude de
réalité : le langage se retourne, s’enfouit et disparaît, laissant à nu ce qu’il dit. »13 Fai-
sons l’hypothèse que cette « certitude de réalité » est autorisée chez Auerbach par cette

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récurrence du détail de la déchirure par quoi la représentation peut être à la fois litté-
rale et figurative. Mais le devenir métaphorique de la métonymie n’est pas simple : pour
que les deux pôles de la figure, « dont l’un ne représente pas seulement lui-même mais
aussi l’autre » (p. 84) redit Auerbach dans Mimésis en reprenant les termes du texte de
193814, il faut que le détail concret, celui qui a tendance à déborder, à devenir hyper-
bolique puisse devenir récupérable, puisse lui aussi être soumis au mouvement à l’in-
térieur de l’histoire. Or, dans ce cadre, quoi de plus pertinent que le corps, soumis à un
mouvement perpétuel de croissance, de dégénérescence, de disparition et de reproduc-
tion, d’absorption et de déjection, de maladie et de régénérescence, pour montrer com-
ment la matérialité elle-même, le concret le plus concret, peut être susceptible de trans-
port et de réinterprétation. L’insistance du texte sur le corps en guerre, le corps blessé,
le corps sacrifié, le corps malade, le corps en train d’enfanter ou le corps mourant peut
permettre d’aller dans cette direction. Et pourtant il reste dans ces objets – en particu-
lier dans le détail de la marque ou de la brèche –, une part d’irrécupérable pour la figure,
une part de littéralité qui reconduit nécessairement à l’allégorie. Où le choix d’objet
n’est pas seulement allégorique de la méthode mais aussi d’un destin.

La reconnaissance

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Le propre de la cicatrice est son caractère indélébile, ineffaçable. Elle est le signe
d’une non-réparation, un des rares lieux du corps sur lequel – l’exemple d’Ulysse le
montre bien – le temps n’a pas de prise. Elle ressortit plus à l’unique qu’au détail pro-
prement dit dans la mesure où elle n’est pas arrachée à un tout auquel, en dernière ana-
lyse, elle pourrait être reconduite, mais parce qu’elle creuse dans le tout, le réduit, le
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diminue. Comme marque, elle implique la reconnaissance d’une identité qui distingue,
qui différencie, qui sépare. C’est le rôle que lui donne Paul Ricœur dans Parcours de
la reconnaissance : il accorde en effet un rôle central à la reconnaissance que vit Ulysse
lors de la deuxième étape de recouvrement de son identité, lorsqu’il révèle, en soule-
vant son manteau, sa cicatrice : « La symbolique est forte, écrit-il. Le signe de la cica-
trice vient comme en contrepoint du déguisement. Ce signe est marque dans la chair,
le déguisement, enveloppe opportune. »15 Dans cette analyse, le corps lésé porte la
marque d’un conflit entre le dedans et le dehors, le soi et l’autre, le familier et l’étran-
ger. L’identité implique tout un parcours de reconnaissance qui va de la reconnais-
sance de soi (par l’aventure) à la reconnaissance par l’autre (la cicatrice). Or cette dia-
lectique heureuse de la reconnaissance est précisément ce qu’à mon sens Auerbach
refuse, en ce qu’elle implique de distinction. Ce faisant, il refuse en même temps cette
préoccupation moderne qui joint l’identité à la reconnaissance, où le particularisme
paraît moins discriminatoire que l’universalisme.16 Il la refuse d’abord pour des rai-
sons personnelles, inexprimées, quoique au moment où il écrit Figura, puis Mimésis,
dans les circonstances d’exil à Istanbul que l’on sait, il soit en train d’en sentir les tra-
giques développements. Mais c’est un homme qui se voit avant tout comme un érudit
et un chercheur, « repoussant affects personnels et motifs identitaires derrière le prisme
ordonnateur de la science et de son objectivité. »17 Il la refuse aussi – et ce refus plus
objectif est peut-être une conséquence de la raison intime que je viens d’évoquer –
pour des motifs intellectuels et historiques qui tiennent au choix qu’il fait d’une philo-
sophie de l’histoire où chaque rupture doit apparaître aussi comme une continuité, et

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donc à partir de la scission, si lourde de conséquence, entre judaïsme et christianisme


où la lecture figurative vient supplanter l’allégorisme. Je fais donc l’hypothèse que le
motif de la cicatrice ou de la brèche, comme détail non récupérable, vient enrayer par
moments la logique littéraire du détail dans laquelle ce dernier doit être récupéré comme
figure et apparaît comme l’expression d’une identité juive à l’œuvre dans le texte. Je
m’inspire, pour faire cette analyse, d’un passage du Périple structural de Jean-Claude
Milner sur le choix d’objets chez Benveniste où il se sert de l’argument herméneutique
de Léo Strauss (les opinions gisent entre les lignes) pour livrer le commentaire sui-
vant : Benveniste a toujours cherché à maintenir des distinctions là où les propriétés sont
indistinctes. « Le lecteur se convaincra aisément de ce qui caractérise le moment ben-
venistien par excellence : parvenir à démontrer que deux objets linguistiques indiscer-
nables par leurs propriétés dans la langue, doivent être néanmoins comptés pour deux
au regard de l’analyse ».18 Cette ontologie de la différence – il n’y a pas d’instance
externe pour en décider –, qui peut conclure à la différence complète à partir de la res-
semblance complète, est une façon pour Benveniste de définir l’être linguistique par
sa position dans un système de différences – ce qui apparaît à Jean-Claude Milner
comme « la question juive par excellence, transposée en formalisme linguistique. »19
Le travail auquel Auerbach est conduit par l’histoire paraît exactement inverse puisqu’il
est amené progressivement à voir dans le réalisme un système de l’indifférenciation,
où la reconnaissance par la distinction est empêchée. C’est pourquoi, au-delà de toutes

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les variations dans la représentation de la réalité qui peuvent faire conclure à l’existence
de plusieurs réalismes, il n’y a qu’un seul réalisme, l’accomplissement du réalisme chré-
tien réalisé par le roman français du XIXe siècle et que Mimésis accomplit littéralement
sa démonstration dans l’avènement de l’insignifiant et du quelconque. Ce dernier est
l’accomplissement de la logique du détail contre celle de l’unique et contre la pensée
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de la reconnaissance. Here comes everybody : la promotion de l’égalisation qui est faite


à la fin du livre apparaît comme le signe de cet accomplissement. « Plus on le met en
relief, plus clairement se manifestent les choses élémentaires que nos vies ont en com-
mun ; plus les individus qui viennent en un tel instant sont nombreux, divers et simples,
plus ce qu’ils ont en commun doit apparaître avec force. » (p. 548)
Dès lors, la reconnaissance métaphorique empêchée assure le triomphe du détail dans
sa puissance égalisatrice, voire obscurcissante. Ce triomphe pourrait vouloir dire qu’il
n’y a plus grand chose à identifier. Néanmoins, le repérage d’une autre logique, plus
souterraine, a permis de voir comment ce texte raconte implicitement une autre histoire,
qui vient croiser la première de façon sinon contradictoire du moins stimulante pour
l’esprit.

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Notes

1. Ce texte est issu d’une conférence prononcée rable », Littérature, n° 124, décembre 2001, pp. 38-
au Colloque « Mimesis di Auerbach : per un bilancio 49 ; « Le roman a le temps », Poétique, n° 132,
critico 60 anni dopo », Pise, Scuola Normale Super- novembre 2002, pp. 387-400 et « Les deux ordres
iore, 16 mars 2007. Les références au texte d’Auer- (Albert Thibaudet) », Fabula-LHT (Littérature, his-
bach dans le corps de l’article sont tirées de l’édi- toire, théorie), n° 0, « Théorie et histoire littéraire »,
tion suivante : Erich Auerbach, Mimésis. La juin 2005, URL : http://www.fabula.org/lht/0/Pra-
représentation de la réalité dans la littérature occi- deau.html
dentale, trad. de l’allemand par Cornélius Heim, 7. Daniel Arasse, Le Détail, Paris : Flammarion,
Paris : Gallimard, coll. « Tel », 1968. coll. « Champs », Naomi Schor, Lectures du détail,
2. On doit pourtant signaler une évolution des pré- trad. Luce Camus, Nathan, coll. « Le Texte à
occupations éditoriales ces dernières années. Figura l’œuvre », 1994.
a été traduit deux fois, en 1993 par Marc André Ber- 8. Naomi Schor, Lectures du détail, op. cit.,
nier (Belin, coll. « L’Extrême contemporain ») et en p. 127.
2003 par Diane Meur (Macula). Le Haut langage a 9. Sur ce sujet, voir Wolfgang Holdheim, « The
été traduit par Robert Kahn en 2004 (Belin) et deux Hermeneutic Significance of Auerbach’s Ansatz »,
recueils d’articles ont été constitués, traduits et pré- New Literary History, vol. XVI, n° 3, Spring 1985,
facés par Diane Meur: Le Culte des passions (Essais p. 627-631 et Christophe Pradeau, « Présentation de
sur le XVIIe siècle français), Macula, 1998 et Écrits sur “Philologie de la littérature mondiale” », in Où est
Dante (Macula, 1999). la littérature mondiale ?, Christophe Pradeau et
3. Ce qu’on ne se fait pas faute de lui reprocher Tiphaine Samoyault éd., Saint-Denis : Presses Uni-
aux États-Unis. Voir par exemple Herbert Linden- versitaires de Vincennes, 2005, p. 15-23. Voir aussi
berger, « On the Reception of Mimesis », dans Lite-
Edward Said, Beginnings : Intention and Method,
rary History and the Challenges of Philology. The
New York : Basic Books, 1 975.

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Legacy of Erich Auerbach, Seth Lerer éd., Palo Alto :
10. Erich Auerbach, « Philologie de la littérature
Stanford University Press, 1996, pp. 195-213 : « In
mondiale », trad. Diane Meur, in Où est la littérature
our present critical climate, in which multicultura-
mondiale ?, op. cit., pp. 25-37, p. 34.
lism has emerged within American universities as a
allying point for progressive thought, Mimesis must 11. Christophe Pradeau, art. cit., p. 19.
look particularly vulnerable for its exclusive focus 12. Jacques Derrida, « Les morts de Roland
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upon the European literary tradition. » (p. 204) Barthes », Psyché : Inventions de l’autre, Paris : Gali-
Aujourd’hui, la perspective américaine s’intéresse lée, 1987.
principalement à l’exil stambouliote de Auerbach, 13. Roland Barthes, La Préparation du roman I
qu’elle compare avec Spitzer et presque toujours à et II. Cours et séminaire au collège de France (1978-
l’avantage de ce dernier (cf. Emily Apter, « Transla- 1979 et 1979-1980), Nathalie Léger éd., Seuil/Imec,
tio globale : l’invention de la littérature comparée, 2002, p. 137.
Istanbul 1933 », trad. Marielle Macé, Littérature 14. E. Auerbach, Figura, trad. de l’allemand par
n° 144, décembre 2006, pp. 25-55) Diane Meur, Macula, 2003.
4. Philippe Forest, De Tel Quel à l’Infini, Allaph- 15. Paul Ricœur, Parcours de la reconnaissance,
bed 2, Nantes : Cécile Defaux, 2005, p. 317. trois études, Stock, 2004, pp. 127-128.
5. Erich Auerbach, « Le langage littéraire et son 16. Cf. Charles Taylor, « Poétique de la recon-
public », cité par Hans Ulrich Gumbrecht, « Pathos naissance », dans Multiculturalisme, différence et
of the Earthly Progress : Erich Auerbach’s Every- démocratie, Flammarion, 1994.
day », dans Literary History and the Challenges of 17. Diane Meur, préface à Figura, op. cit., p. 6.
Philology. op. cit., pp. 13-35. 18. Jean-Claude Milner, Le Périple structural,
6. Notamment dans Réflexions sur la littérature, Figures et paradigme, Paris : Seuil, 2002, p. 89. Voir
rééd. Antoine Compagnon, Paris : Gallimard, coll. l’article que lui a consacré Martin Rueff, « Comme
« Quarto », 2007. Voir le travail de Christophe Pra- des écailles », dans Po&sie, n° 106, pp. 112-135.
deau : « Albert Thibaudet : la dynamique du mémo- 19. Ibid., p. 91.

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