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MAYAN HAIM La générosité au cœur de la construction du michkan (Elie LELLOUCHE) - Le tabernacle et ses ustensiles,... (Israël ARIEL) -
Boire à Pourim c’est agréable (Yossef HARROS) - Vingt planches au nord et huit à l’ouest (Yo’hanan NATANSON)

PARACHAT TEROUMA
Un
Samedi Beth
9 FÉVRIER 2019
MAYAN HAIM
Hamidrach
4 ADAR 5779 parisien EDITION
entrée chabat : 17h41
sortie chabat : 18h50

LA GÉNÉROSITÉ AU CŒUR DE LA CONSTRUCTION DU MICHKAN

Rav Elie LELLOUCHE

À plusieurs reprises la Torah met l’accent sur la générosité qui
devra prévaloir quant à l’offrande des différents matériaux qui
serviront pour la construction du Michkan. Ainsi, au début de
la Paracha Térouma, l’ordre est intimé à Moché de parler aux
Béné Israël afin que soit prélevée une offrande «de tout homme
dont le cœur l’incitera à donner» (Chémot 25,2). Cet aspect lié
à la spontanéité du don en faveur du Michkan est de nouveau
précisé lors de l’offrande effective des Béné Israël, après que
furent données les secondes Tables de l’Alliance. Ainsi le Texte
Sacré relate-t-il que «Tout homme que portait son cœur et
toute personne, animée d’un esprit de générosité, offrirent un
prélèvement en faveur d’Hachem» (Chémot 35,21). Plus loin
dans le texte le verset répète encore:«Tout homme et toute
femme dotés d’un cœur généreux quant à l’ouvrage ordonné par
Hachem par l’entremise de Moché apportèrent spontanément
leur offrande» (Chémot 35,29).           Comment parvenir à une telle «identification» avec le Divin? Nos
Cette insistance de la Torah, quant à la générosité et à la
spontanéité qui devaient caractériser l’offrande collectée pour la
construction du Michkan, semble rentrer en contradiction avec
l’enseignement de nos Sages relatif à l’état d’esprit qui doit être le
notre lors de l’accomplissement des Mitsvot. En effet, la Guémara
(Avoda Zara 3a) affirme que celui qui accomplit une Mitsva
parce qu’il y est contraint est plus grand que celui qui prend sur
lui spontanément de l’observer. Les Ba’alé HaTossfot explique
cette assertion, apparemment surprenante, de nos Sages,
par le sentiment qu’engendre chez la personne concernée le
caractère contraignant d’un acte. Étant habité par la conscience
de son obligation, l’homme s’efforcera d’accomplir la Mitsva de
la manière la plus fidèle et la plus pure qui soit. À contrario, en
n’étant pas soumis au commandement qu’il prend sur lui de faire,
l’individu ne peut en mesurer toute l’importance et tout l’impératif.           de donner vie au microcosme que constituera le Michkan. Il ne
S’il en est ainsi, comment expliquer le fait que la construction
du Michkan, dont l’existence témoignait de la force du lien qui
unissait Israël à son D-ieu, puisse dépendre de l’élan manifesté
par ceux qui accepteront d’y contribuer? Pour le Saba MiKelem,
rapporté par le Sifté ‘Haïm, la réponse à cette question tient à
la différence essentielle entre l’édification d’un Sanctuaire pour
Hachem et tous les autres commandements. La construction du
Michkan ne répond pas au même enjeu que les autres Mitsvot.
Certes, comme le rapporte le Ba’al HaTanya au nom du Zohar,
toute Mitsva a pour objectif et pour vertu de nous unir au Créateur.
C’est le sens même du mot Mitsva qui, selon le Zohar, est à
rapprocher du terme Tsavta qui signifie union en araméen.      
Cependant, alors que toutes les autres Mitsvot permettent, à
chacun d’entre nous, de tisser un lien intime avec Hachem, en
nous offrant la possibilité de nous élever vers Lui, le Michkan vise,
quant à lui, à faire «descendre» la Providence Divine au sein de
l’ensemble du peuple d’Israël. Obtenir du Maitre du monde qu’Il
accepte de résider parmi nous requiert de notre part plus qu’un
lien intime, c’est un attachement absolu qu’il s’agit, ici, de nouer
avec Lui. Or, une telle union avec le Créateur n’est réalisable qu’au
prix d’une «identification», autant qu’il est possible de s’exprimer
ainsi, à son Être.          
Sages (Sota 14a), en référence au verset affirmant: «Vous suivrez
L’Éternel Votre D-ieu» (Dévarim 13,5), se posent une question
similaire. Est-il possible pour l’homme de suivre la Providence
Divine? N’est-il pas enseigné, dans un autre verset, qu’Hachem
est «un feu dévorant» (Dévarim 4,24)? Nos Maîtres de répondre
qu’il s’agit ici pour nous de veiller à s’attacher aux conduites
divines: «De même que le Créateur est miséricordieux, sois, toi
aussi, rempli de miséricorde. De même qu’Il est plein de grâce,
sois, toi aussi, animé du même sentiment».         
Ainsi, s’attacher à Hachem c’est suivre Ses voies. Or, nous
expliquent nos Sages, les voies d’Hachem se résument à la
générosité et à l’altruisme. Ce sont ces voies, comme l’attestent
les Téhilim (Téhilim 89,3), qui ont concouru à la Création du
monde lui-même et ce sont ces mêmes voies qui sont à même
s’agit même plus ici d’un attachement, mais bien plutôt d’une
véritable ressemblance avec le Créateur. Car, à la différence de la
fusion matérielle entre deux objets, l’attachement, s’agissant de la
dimension spirituelle, relève de la capacité à s’identifier à l’autre.
Ainsi, en appelant le ‘Am Israël à témoigner d’une générosité
sans bornes afin de contribuer à l’édification du Michkan et rendre
possible, par là-même, Sa Présence au milieu de nous, Hachem
invite son peuple à Lui ressembler et cette ressemblance s’inscrit,
à l’instar du don qu’a constitué l’œuvre de la Création, dans la
générosité la plus absolue.

Article et contenu réalisés par TORAT HAIM VECHALOM - 35, rue Emile Lepeu 75011 PARIS - 01.44.93.51.50
Association reconnue d’utilité générale habilitée à recevoir les DONS et les LEGS. Directeur : Rav Elie LELLOUCHE
LE TABERNACLE ET SES USTENSILES,
UN OUVRAGE CHER AUX YEUX D’HACHEM
Dès que Moïse descend du mont
Sinaï, Hachem ordonne par sa voix
à Israël :
« Ils me feront un sanctuaire, et Je
résiderai en eux. »
Le Midrach Tan’houma explique
en effet qu’après que Moïse eut
supplié l’É.ternel de pardonner la
faute du veau d’or, « l’expiation leur
fut accordée le jour de Kipour. Et
ce jour même, Israël reçut l’ordre
de construire le tabernacle »
(Térouma 8). Le peuple se remplit
d’une joie créative, et depuis cette
heure on vit, aux quatre coins
du camp, des artisans : les uns
fabriquaient le chandelier d’or, les
autres préparaient des planches
revêtues d’or, et dans les tentes
d’Israël les femmes tissaient les
tentures et les vêtements des
prêtres.
Cet ouvrage saint est une
condition indispensable pour que
la Présence divine réside sur le
peuple. Rabbi Éléazar ben Azarya
a dit : « Grand est le travail ! Car
la Présence divine ne reposa sur
Israël qu’à partir du moment où
l’on fit l’ouvrage du tabernacle  »
(Mekhilta de Rabbi Chim’on bar
Yo’haï 20, 9). On trouve encore
dans le Midrach : « Combien cher
est le travail ! Car pendant six mois
le Saint béni soit-Il occupa nos
pères à l’ouvrage du tabernacle,
dans le désert. Or cet ouvrage
aurait pu être créé de main divine
en un clin d’œil. Mais D.ieu ne
voulut faire résider sa Présence
sur Israël que du sein du travail »
(Michnat Rabbi Eliézer 20).
Voilà donc l’objet de la mitsva  :
le C.réateur du monde attend
de voir Israël, hommes, femmes
et enfants, faire l’effort, dans le
désert, de préparer une résidence
pour la Présence divine. Ce labeur
est cher aux yeux de l’É.ternel, et
c’est cette activité même qui attire
la Présence divine dans le monde.
Au traité ‘Erouvin (54b), le
Talmud rapporte que Rabbi Prida
étudiait régulièrement avec un
élève qui avait des difficultés
d’apprentissage.
Un jour, pendant la leçon qu’il lui
donnait, on vint demander Rabbi
Prida pour accomplir quelque
mitsva. A partir de ce moment,
l’élève ne parvint plus à assimiler
ce qu’on lui enseignait.
Son maître lui demanda : « Que se
passe-t-il aujourd’hui ? » L’élève
lui répondit : « Depuis que l’on est
venu te solliciter pour cette mitsva,
j’ai du mal à comprendre. Je me dis
à tout moment que tu vas te lever. »
Le maître lui dit : « Prends patience,
je suis entièrement disponible
pour toi. » Il lui répéta sa michna
quatre cents fois supplémentaires,
et l’élève finit par l’assimiler. Une
voix céleste se fit alors entendre :
«  Rabbi Prida  ! Choisis l’une de
ces deux récompenses : veux-
tu que l’on t’ajoute quatre cents
années de vie, ou bien que toi et
ta génération ayez part au monde
futur ? » Il répondit : « Que toute
cette génération ait part au monde
future  !  » Le Saint béni soit-Il dit
aux anges : « Donnez-lui les deux
récompenses. »
Par cette histoire, nos maîtres, de
mémoire bénie, nous enseignent
une grande chose : la mitsva
n’est pas jaugée à l’aune de la
quantité mais de la qualité ; de
l’action, de l’effort, de l’amour de
la mitsva. Certes, le jeune élève
n’a appris qu’une unique michna ;
dans le même temps, Rabbi Prida
aurait pu étudier des centaines de
règles, accomplir des centaines
de préceptes. Mais l’attachement
à la mitsva, l’ardeur à l’accomplir
malgré les difficultés, voilà ce qui
est déterminant ; comme le disent
nos sages  : «  Léfoum tsa’ara
agra », la récompense est fonction
de l’effort (Maximes des Pères 5).
Ainsi du tabernacle, et telle est
son essence. Tout le propos de
cet ouvrage est d’être fait devant
Rav Israël ARIEL
l’É.ternel, et ce n’est que de cette
façon que la Présence divine
repose sur Israël.
Quant à toi, lecteur, face aux versets
et aux sources de nos maîtres, si,
au long de ces semaines où sont
lues les chapitres du sanctuaire,
quelqu’un murmure à ton oreille
des légendes où l’on parle d’un
Temple qui descendra directement
du ciel, bouche-toi les oreilles  !
Celui qui parlerait ainsi est un
rêveur  ! Souviens-toi des paroles
de Maïmonide : « Sache qu’il existe
des orateurs… dont j’ai entendu
dire… qu’ils tenaient toute chose
impossible pour nécessaire…
Miséricorde pour leur sottise  !...
De telles gens portent atteinte à la
splendeur de la Torah… Puissent-
ils se taire  !  » (Hilkhot Sanhédrin
chap. 10).
Il arrive que des orateurs pimentent
leurs discours en les agrémentant
de paraboles dont le contenu n’est
pas conforme à la Torah d’Israël.
Pour toi, accomplis la maxime
de nos sages : « Aime le travail »
(Maximes des Pères 1, 10)…
et prends en haine les vaines
rêveries. Sois fidèle à la promesse
d’Israël, au mont Sinaï  : «  Nous
ferons et nous écouterons ». Alors
tes oreilles entendront la voix
divine qui proclame : « Donnez-lui
les deux récompenses. »
Paru dans Chabbat bechabbato,
adar 5773
Le Rav Israël Ariel préside l’Institut
du Temple de Jérusalem.
Traduction : Jean-David Hamou
BOIRE A POURIM C’EST AGRÉABLE
«C’est un devoir religieux pour
chaque Juif à Pourim de  boire
jusqu’à ne plus pouvoir distinguer
entre les mots maudit soit Haman
et béni soit Mordékhaï »
Pour quelles raisons accordons
nous tant d’importance a la boisson
ce jour là  ? Pourquoi et comment
en arriver à cet état de bénir le
mauvais et maudire  le tzadik ?
Comme pour tout, cette loi trouve
son origine dans la guemara
Meguila daf 7b :
«  Rava dit : «  une personne
est obligée de boire à Pourim
jusqu’à ce qu’il ne puisse plus voir
la différence entre ‘maudit soit
Haman’ et ‘béni soit Mordé’haï’.
S’ensuit tout un charmant récit ou
Rabbi Zera invita Rava a passer
le Michte en sa compagnie , et
s’enivrant plus que de mesure ,
lui coupa la tète . il pria finalement
pour sa guérison et le lendemain
Rava ressuscita . L’année d’après,
Rabbi Zera réinvita Rava qui
déclina en justifiant qu’il ne fallait
pas abuser des miracles.
De nombreux commentateurs
expliquent ici de manière
métaphorique que trancher la
gorge veut en réalité signifier qu’il
lui aurait fait honte ou encore qu’il
l’aurait blessé a l’œil .
Ainsi, dans la même logique les
avis sont partagés quand au sens
des propos de Rava sur le minimum
de consommation d’alcool
Tout d’abord il nous faut
comprendre quelle est cette idée
de s’enivrer a Pourim
Le rav Wolbe (Alei Chour) de nous
dire que le sens profond du fait de
boire à Pourim est de retourner à
l’état d’Adam avant la faute où l’on
ne distinguera plus le bien du mal.
En effet, en mangeant de l’Arbre
de la Connaissance, le bien devint
tragiquement mélangé au mal.
En buvant au point de «  ne pas
connaître le bien du mal  », nous
exprimons notre désir de retourner
à un état où le bien et le mal ne
sont plus mélangés, un état où tout
est pur bien.
Le Rav Yérou’ham Leibovitz
(Daat ‘Ho’hma ouMoussar) nous
enseigne que boire à Pourim libère
le corps du contrôle de l’esprit afin
de voir si le corps peut être élevé
au niveau de l’âme.
Le Rav Mordé’haï Becher
(Gateway to Judaism) explique
lui ,que l’ivresse conduit une
personne à révéler des éléments
de sa personnalité qui sont
habituellement cachés [«  Quand
entre le vin, les secrets sortent »
(guémara Erouvin 65a)].
A Pourim, ce qui transparaît c’est
l’amour de D. pour le Peuple juif,
un amour qui avait été caché à
l’époque de l’exil perse. »
Selon le Maharal, nous devons
boire au point de ne plus avoir de
discernement, et en venir à prendre
conscience que ce n’est pas notre
compréhension qui est source de
succès, car tout ne provient que de
D.
Les avis diffèrent sur la limite a
atteindre :
Certains expliquent qu’il faut
boire jusqu’à ne plus être
capable de faire la Guématria
(valeur numérique) de ces deux
expressions (Agouda, Maguen
Avraham, Cha’ar Hatsioun).
Le Knesset Haguedola rapporte
qu’il ne faut plus reconnaitre
l’ordre logique entre les deux
expressions Selon le Taz, jusqu’à
ne plus savoir si notre niveau
spirituel est du à «Harour Haman»
ou à «Baroukh Mordékhai».
Le Rambam tranche (lois
de Méguila, ch. 2, par. 15)
qu’il faudra boire du vin et
Yossef HARROS
s’endormir pour ne plus discerner
«Harour Haman» et «Baroukh
Mordékhai». Il faudra agir ainsi
(Maharil, Ramah, Pri Mégadim,
Michna Beroura, par. 5).
Rabbi Yossef Karo avait
l’Habitude de boire plus que le
Chabbat a savoir 14 verres
D’autres Rabbanim sont plus
stricts à propos du seuil d’ivresse :
Le Itouré Torah explique que nous
ne devons pas nous laisser enivrer
par la boisson, mais par l’essence
de Pourim : la joie des mitsvot et
l’allégresse d’avoir été sauvé d’une
mort certaine par Hachem.
Le Or’hot Haim (Pourim, par. 38)
écrit qu’il est absolument défendu
de tomber dans l’ivresse car ceci
peut entrainer l’homme à enfreindre
les plus graves interdictions de la
Torah.
Il faudra juste boire plus qu’à
l’accoutumée (Méguila 7b ; Kolbo ;
Ramah, par. 2). D’ailleurs, Eliahou
Hanavi a enseigné à Rav Yéouda :
«Ne bois pas et tu ne fauteras pas»
(Brakhot, 29b).
En définitif, Si l’homme sait
qu’il risque de rater une Mitsva
quelconque ou de transgresser la
plus légère des ‘Avérot, il n’aura
pas le droit de boire plus qu’une
quantité minime (‘Hazon Ovadia,
Pourim, p. 180), à plus forte raison,
si cela peut le conduire à faire du
‘Hilloul Hachem, car il n’y a pas de
‘Avéra plus grande !
VINGT PLANCHES AU NORD ET HUIT A L’OUEST
« Ils Me feront une maison de Qedousha et
Je résiderai au milieu d’eux »
Shemot 25,8
Le Midrash nous rapporte, à la manière
savoureuse de nos Sages de mémoire bénie,
le dialogue entre Ha Qadosh Baroukh Hou
et Moshé Rabbénou (Shemot Rabba 34,1) :
« Quand Ha Qadosh Baroukh Hou a ordonné
d’ériger le Mishkan, Moshé a questionné :
‘La Gloire de Hashem emplit les mondes
supérieurs et inférieurs, et Il demande qu’on
lui bâtisse un Mishkan ?’ Il vit aussi que le
roi Shelomo édifierait plus tard le Temple,
bien plus vaste que le Mishkan du désert,
et qu’il dirait alors : ‘Mais est-ce qu’en vérité
D.ieu résiderait sur la terre ? Alors que le ciel
et tous les cieux ne sauraient Te contenir,
combien moins cette maison que je viens
de construire  !’ (I Mélakhim 8,27). Moshé
s’est dit : ‘Si Shelomo pourra faire un tel
commentaire au sujet du Temple […] son
observation devrait s’appliquer davantage
encore à celui-ci !’ Ha Qadosh Baroukh Hou
lui répondit : ‘Mes pensées ne sont pas tes
pensées  ! Tu mettras vingt planches au
nord et vingt au sud, […] et Je descendrai et
concentrerai Ma Présence dans un espace
d’une coudée sur une coudée !’ »
Ce Midrash met en évidence le paradoxe
essentiel de toute notre existence, et en
vérité de toute destinée humaine, dans sa
relation avec la transcendance.
Le problème est posé dès le premier verset
de la Torah : «  Au (ou par, ou avec un)
commencement, Éloqim créa le ciel et la
terre. » (Bereshit 1,1)
Comment un Être infini et immuable dans
Sa parfaite unité, «  sans corps ni forme de
corps » comme l’enseigne Rambam, a-t-il pu
créer un monde matériel et fini, où nos sens
perçoivent tant de multiplicité ?
Plus encore, comment un tel Être peut-Il se
manifester dans Sa création par des attributs
qui témoignent d’apparents changements ?
Que signifient des expressions comme
« la colère de D.ieu », Sa « jalousie », Son
« amour », Sa « bonté » ?
Nos Maîtres ont donné différentes réponses
à ces questions très difficiles. Dans son
Moré Nevoukhim (le « Guide des égarés »),
Rambam explique en détail chacun des
anthropomorphismes dont la Torah fait usage
(la face, la main, l’œil, l’arrière...) comme des
métaphores destinées à faire saisir une idée.
Ce feuillet d’étude est offert pour l’élévation de l’âme de notre regretté
Eliahou Ben ‘Haya TOUITOU
La pensée de la Kabbale moderne, issue
du Zohar haQadosh et de l’enseignement
du Arizal a été reprise par des auteurs
plus récents, comme le Nefesh ha’Haïm
(côté lituanien) ou le Tsema’h Tsedek
(version ‘Hassidout). Il y a des différences
significatives dans leurs approches mais
leur but est le même : expliquer le passage
a priori incompréhensible entre l’infini divin et
la finitude de Sa Création.
Quels que soient leurs efforts, qui sont
merveilleusement utiles, ne serait-ce que
pour approfondir et renforcer notre émouna,
la capacité intellectuelle de l’être humain se
heurte à une impasse.
Celle-là même qu’exprime Moshé dans le
Midrash : comment l’infini peut-il entrer dans
le fini, comment ce qui est qadosh, c’est-à-
dire précisément séparé du fait de sa nature
spirituelle, peut-il s’associer à des objets
matériels, fussent-ils aussi coûteux que l’or,
l’argent, ou le bois de cèdre (Shemot 25,3-
5) ?
«  La matière, enseigne Rambam, est un
grand voile qui nous empêche de percevoir
la divinité telle qu’elle est, fût-ce même la
matière la plus noble […], et à plus forte
raison cette matière obscure et trouble qui
est la nôtre. » (Guide, 3,9)
Le prolongement, presque évident, c’est
la question de l’association d’une âme
spirituelle à un corps matériel.
Un midrash compare la Néshama à une
princesse obligée de quitter le somptueux
palais de son Père et la vie qu’elle y menait,
entourée du luxe le plus raffiné, pour vivre
dans une masure délabrée auprès d’un
homme sale et grossier.
Ce mariage est impossible. À moins d’un
miracle.
C’est le sens de la bénédiction que nous
disons après la satisfaction des besoins
naturels  : «  Rofé khol bassar oumafli
la’assote » (Qui guérit toute chair et accomplit
des prodiges). De quel prodige s’agit-il ? Du
« simple » fait de maintenir ensemble l’âme
et le corps !
Il en va de même du Mishkan. Il y faut en
effet un prodige.
Mais ce prodige est conditionné  : «  La
proximité protectrice et bénissante de la
Shekhina, écrit le Rav Shimshon Raphaël
Hirsch, n’est pas simplement le fruit de
Yo’hanan NATANSON
l’édification et de l’entretien correct du
Sanctuaire, mais ne peut être obtenue
qu’avec la sanctification de toute notre vie
privée et publique » qui doit être consacrée
à l’étude et à l’accomplissement de la Torah.
Tâche immense, proprement impossible,
quotidienne du Juif  : associer le Saint et
le profane, en restant conscients de leur
distinction.
Mariage permanent, invraisemblable, célébré
à chaque instant de la vie juive. Depuis le
moment où nous mettons en premier la
chaussure droite, jusqu’à la récitation du
Shem’a avant de dormir.
Et le miracle le plus extraordinaire est sans
doute celui-ci : c’est à notre portée !
La Pessikta éclaire cette « sortie de crise » :
Moshé commence par les mêmes questions,
mais les réponses diffèrent quelque peu :
Ha Qadosh Baroukh Hou répond  : «  Je ne
demande pas [un Mishkan] à Ma mesure,
mais à la mesure de leurs capacités : tu
mettras vingt planches au nord et huit à
l’ouest. »
Chacun n’est tenu de faire que ce qui est en
son pouvoir, commente le ‘Hafets ‘Haïm. De
même, le plus sage des hommes a dit : « Tout
ce que tes propres moyens permettront à ta
main de faire, fais-le ». Selon, tes moyens,
sans plus !
Le Rav Hirsch définit la Qédousha comme
« liberté absolue de l’Être ».
Une telle liberté, on le comprend, ne peut être
attribuée qu’à D.ieu, dont la Volonté et l’action
sont une seule et même chose.
Mais voilà que dans Son immense bonté, Il
nous fait partager une part de cette liberté, de
cette Sainteté.
Notre vocation n’est donc pas celle des
«  êtres pour la mort  », que décrivait certain
philosophe allemand, qui voulait réduire toute
l’humanité à un ‘Essaw affamé, incapable de
sortir de l’angoisse de la faute : «  Voici, je
marche à la mort ! » (Bereshit 25,32)
Notre vocation est celle des êtres pour la
vie et la liberté «  Wayotsi ete ‘amo Israël
mitokham le’hérout ‘olam » (Il a fait sortir son
peuple Israël du sein [de l’Égypte] pour une
liberté éternelle!)
Shabbat Shalom ! ‘Hodesh tov !