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Caractérisation des PME n’offrant pas de régimes de retraite à leurs employés

Par Gilles Bernier, Nabil Khoury et Marko Savor 1

Dans cette chronique, nous présentons le profil des PME québécoises qui
n’offrent aucun régime de retraite à leurs employés. Ceci fait suite à une analyse des
résultats de l’enquête téléphonique menée par « Question Retraite » entre le 28 avril et le
21 mai 2005 auprès d’un échantillon de 1 009 PME québécoises qui font toujours ce
choix. 2 Il est important de mentionner que cet échantillon est stratifié selon la taille des
PME mesurée par le nombre d’employés qui va de 1 à 300, alors que les répondants ont
été choisis au hasard à l’intérieur de ces strates. Aussi, la taille de l’échantillon permet de
conclure que le pourcentage d’erreur global des résultats se situe à ± 3,6%, 19 sur 20.

Plus spécifiquement, nous nous appuyons sur l’analyse de regroupement


(« Cluster Analysis ») effectuée à partir des cinq variables de classement dont la
variabilité permet de discriminer entre des regroupements de PME sur la base de leurs
comportements actuels et futurs en matière de sécurité financière à la retraite pour leurs
employés. Il s’agit de la contribution perçue d’un régime de retraite :

1) au recrutement des employés ;


2) à la rétention des employés actuels ;
3) à la planification des départs à la retraite ;
4) à donner un avantage concurrentiel à l’entreprise ;
5) et de l’intention d’implanter un régime de rente dans l’entreprise au cours
des 5 prochaines années.

De cette analyse, il ressort trois groupes distincts de PME qui n’offrent aucun
régime de retraite à leurs employés. Le premier groupe qui représente 62 % de
l’échantillon (584 entreprises) réunit des PME qui très majoritairement ne perçoivent

1
Gilles Bernier est professeur et titulaire de la Chaire d’assurance et de services financiers L’Industrielle-
Alliance à l’Université Laval et membre de Question Retraite. Nabil Khoury, en tant que titulaire, et
Marko Savor en tant que professeur, sont tous les deux rattachés à la Chaire Desjardins en gestion des
produits dérivés de l’UQAM, laquelle s’intéresse particulièrement à la réalité financière des PME
opérant au Québec.
2
Le sondage a été effectué par la firme Jolicoeur et associés de Montréal pour le compte de Question
Retraite en partenariat avec la Chaire d’assurance et de services financiers L’Industrielle-Alliance de
l’Université Laval. Après avoir obtenu les données colligées par la firme de sondage, le professeur
Bernier a sollicité la collaboration des professeurs Khoury et Savor pour analyser plus en détail les
diverses caractéristiques propres aux PME qui composent l’échantillon. Compte tenu de certaines
données manquantes, nous avons été en mesure d’analyser un échantillon final de 945 firmes.
presque pas de bénéfices aux régimes de retraite, n’ont pas envisagé dans le passé d’offrir
un régime de retraite à leurs employés et n’ont manifesté aucune intention à en offrir dans
les 5 prochaines années. Les entreprises de ce regroupement ont majoritairement un
chiffre d’affaires annuel de 1 million $ et moins, une main-d’œuvre composée
majoritairement de femmes et une proportion importante d’employés ayant un traitement
annuel inférieur à 20 000 $. La majorité de ce groupe connaît peu ou pas du tout les
régimes de retraite offerts sur le marché, considère que l’employeur n’a pas à contribuer à
la sécurité financière des travailleurs, ni à administrer un régime de retraite. Ces PME
sont proportionnellement plus nombreuses à n’offrir à leurs employés aucun programme
d’assurance collective (vie, invalidité et santé).

Le second groupe qui représente 26 % de l’échantillon (241 entreprises) réunit des


PME qui sont susceptibles d’offrir un régime de retraite à leurs employés car elles
perçoivent que ces régimes pourraient leur procurer des bénéfices en termes de
recrutement et de rétention d’employés, de planification des départs à la retraite et
d’avantages concurrentiels. De plus, elles sont plus nombreuses que celles du
regroupement précédent à avoir reçu une demande provenant d’un syndicat ou de leurs
employés à cet égard. Cependant, elles sont significativement plus nombreuses à trouver
que les coûts associés à un régime de retraite sont un facteur déterminant à leur refus d’en
offrir. Ces PME, pour la grande majorité, n’ont pas envisagé dans le passé d’offrir un
régime de retraite à leurs employés et ne manifestent aucune intention à en offrir dans les
5 prochaines années. Comparativement au groupe précédent, on y retrouve une plus
grande proportion d’entreprises qui ont un chiffre d’affaires annuel supérieur à
1 million $, une plus petite proportion de femmes dans la main-d’œuvre et une proportion
moins importante de travailleurs gagnant moins de 20 000 $ annuellement. Par ailleurs,
elles ne se distinguent pas des PME du groupe précédent sur la base de la connaissance
des régimes de retraite offerts sur le marché, elles sont toutefois significativement moins
nombreuses que les entreprises du groupe précédent à considérer que l’employeur n’a pas
à contribuer à la sécurité financière des travailleurs ni à administrer un quelconque
régime. Elles sont cependant moins nombreuses par rapport aux PME du groupe
précédent à n’offrir à leurs employés aucun régime d’assurance collective.
Le troisième et dernier groupe représente 13 % de l’échantillon (120 entreprises).
Les PME de ce groupe perçoivent plusieurs bénéfices aux régimes de retraite et,
contrairement aux entreprises des deux regroupements précédents ont envisagé dans le
passé offrir un tel régime à leurs employés et ont l’intention d’en implanter dans leur
entreprise au cours des 5 prochaines années. De façon générale, elles ont un chiffre
d’affaires annuel supérieur à 10 millions $, comptent relativement moins de femmes au
sein de leur main-d’œuvre, ont la proportion la plus faible d’employés dont le revenu
annuel est inférieur à 20 000 $ et la proportion la plus importante d’employés dont le
revenu annuel est supérieur à 40 000 $. Les PME de ce regroupement sont
proportionnellement plus nombreuses à affirmer que l’employeur a un rôle important à
jouer en matière de sécurité financière des travailleurs, à cotiser à un régime de retraite et
à participer à son administration. Elles sont significativement plus nombreuses que les
PME des deux regroupements précédents à considérer qu’il est important pour les
employés de choisir le type de placement au sein de leur régime de retraite et
significativement moins nombreuses à n’offrir aucun régime d’assurance collective.
Enfin, c’est dans ce groupe que l’on retrouve la plus forte proportion de PME qui
connaissent les différents régimes de retraite offerts sur le marché et qui ont reçu, de la
part d’un syndicat ou de leurs employés, une demande d’implantation d’un tel régime.

En conclusion, il ressort de cette analyse que les autorités publiques devraient,


afin de promouvoir la sécurité financière à la retraite des travailleurs des PME
québécoises, cibler prioritairement les entreprises qui offrent déjà à leurs employés un
programme d’assurance collective (vie, invalidité et santé) pour leur faire valoir les
bénéfices d’un régime de retraite dans lequel chaque employé gère ses propres
placements et pour les aider à en réduire les coûts d’administration et de cotisation.

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