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ISSN : 2509-0097
VOL.6 (2) 2021 (PP.104-125)
http://revues.imist.ma/?journal=RAM
DOI: https://doi.org/ 10.48424/IMIST.PRSM/ram-v6i2.25019
Résumé
L’objectif de cet article est de tester la pertinence des hypothèses de la théorie du compromis (TOT)
et de la théorie du financement hiérarchique (POT), visant à expliquer la structure financière des
grandes entreprises cotées dans les pays développés, appliquées aux choix de financement et à la
spécificité des PME innovantes dans les pays sous-développés. Il s’agit de vérifier empiriquement sur
un échantillon de 77 PME innovantes sur une période de trois ans laquelle des théories explique
l’endettement dans un contexte particulier de PME à haut risque au Bénin. Selon nos résultats, la théorie
du compromis est confirmée au regard de la relation entre l’endettement et les variables explicatives que
sont : la rentabilité, la garantie, la croissance, la structure du capital et l’innovation.
Mots clés : PME – Innovation – théorie du compromis – théorie du financement hiérarchique.
Abstract
The aim of this article is to test the relevance of the hypotheses of compromise theory (TOT) and
hierarchical financing theory (POT), aimed at explaining the financial structure of large listed
companies in developed countries, applied to financing choices and the specificity of innovation SMEs
in underdeveloped countries. The aim is to empirically verify a sample of 77 innovative SMEs over a
three-year period that explains theories of debt in a particular context of high-risk SMEs in Benin.
According to our results, the theory of compromise is confirmed in relation to the relationship between
debt and the explanatory variables that are: profitability, guarantee, growth, capital structure and
innovation.
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1. Introduction
Dans la plupart des économies du monde, les PME sont considérées comme les
véritables vecteurs de la création d’emplois et de la croissance. Selon le rapport de
l’Organisation de Coopération et de Développement Economique, (OCDE, 2018) de la
conférence des ministres en charge des PME, elles représentent une priorité pour les
pays de l’OCDE.
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économique moderne, son analyse doit distinguer les différents objets sur lesquels elle
peut porter. Cette distinction est importante dans l’analyse des facteurs qui
déterminent leur financement.
Les PME innovantes sont caractérisées par une rentabilité incertaine, un système
d’information asymétrique, un niveau de risque élevé dû à un très faible niveau de
garanties matérielles.
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Pour la TOT, l’analyse de la structure financière est basée sur le ratio du coût
d’opportunité entre les ressources internes et externes à l’entreprise. Il s’agit donc d’un
arbitrage en terme d’avantages et inconvénients de deux principales sources de
financement en prenant en compte les diverses incidences qui prédéterminent cet
arbitrage, entre autre : la fiscalité, les coûts de défaillance ou ceux de mandat, etc.
c’est en fait le prolongement du modèle de (Modigliani et Miller, 1958) prônant la
neutralité de la structure financière des entreprises. Plusieurs auteurs se sont penchés
sur la question relative à la problématique de la théorie de la TOT, en l’occurrence de
(Jensen et Meckling, 1976), de (Harris et Raviv, 1990). Leurs travaux laissent entendre
que si les entreprises sont rentables, elles devraient préférer la dette pour bénéficier de
la déductibilité des intérêts financiers. En outre, si la rentabilité passée est un bon
indicateur pour la rentabilité future, les entreprises rentables seront moins soumises au
rationnement et aux autres contraintes financières.
2.3.3. Quelques conclusions des travaux empiriques sur les théories POT et la TOT
Un grand nombre d’études a eu la vocation de déterminer, parmi les théories que
nous venons de présenter, celles qui expliquent au mieux le choix de financement
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réalisé par les entreprises. Si nous nous basons sur les résultats des études ci-dessous,
nous observons un désaccord au sein de la communauté scientifique.
(Fama et French, Les auteurs concluent à l’existence d’une relation négative entre la
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profitabilité et l’endettement, ce qui tend à valider la POT et à invalider la
TOT.
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Source : extraits des études sur les conclusions de la POT et de la TOT, d’après (Colot et
Croquet,2007) cité par (Benabdelmoula, 2017)
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son résultat fiscal. Par ailleurs, si la rentabilité passée est une bonne approximation de
la rentabilité future, une entreprise très rentable aura une probabilité plus forte de
rembourser ses dettes (Myers, 2001). La théorie statique prédit donc une relation
2.4.3. La croissance
Plusieurs études sur les PME innovantes ont souligné l’importance de cette
variable, (Chevallier et Miloudi, 2014) ; (Adair et Adaskou, 2014). Ils constatent une
influence positive du taux de croissance de l’entreprise sur l’endettement. Ils
expliquent ce résultat par le fait que les entreprises à forte croissance ont de plus en
plus recours au financement externe. Cela est d’autant plus vrai que la croissance peut
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être source d’asphyxie financière si elle n’est pas financièrement assurée. Selon les
tenants de la Pecking Order Theory, les firmes en croissance utiliseront davantage la
ette car l’augmentation de capital n’est utilisée qu’en dernier recours.
Notre troisième hypothèse (H3) vise donc à tester les prédictions de la théorie du
financement hiérarchique (POT) et est formulée ainsi :
Dans le cadre des PME, les dirigeants propriétaires sont très réticents quant à
l’ouverture de leur capital à d’autres personnes étrangères en raison du caractère
familial de ces entreprises et du souci de préserver l’autonomie financière en matière
de gestion et de décision (Colot et Croquet, 2007). Nous restons dans cette même
logique et testons les conclusions de la théorie du financement hiérarchique qu’un
manager, propriétaire de l’entreprise qu’il dirige, préfère l’autofinancement à
l’endettement et l’endettement à l’ouverture du capital à de nouveaux investisseurs.
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Par contre plusieurs autres auteurs concluent à une relation positive entre la
capacité à innover et le financement externe. En effet, les firmes ayant un niveau
relativement important de croissance, donc un accroissement de leur besoin de
financement externe, auront tendance à avoir recours au financement externe pour
soutenir cette croissance. Ces entreprises sont considérées être plus rentables et
bénéficient de la confiance des bailleurs de fonds. Selon (Carpentier et Suret, 2000), et
dans le cadre de la TOT, le financement de l’innovation dépasse la capacité
d’autofinancement et génère de l’endettement. Dans ce sens, (Planès et al. 2002)
arrivent au même résultat, ils constatent que le niveau d'endettement des PME
innovantes est supérieur à celui des entreprises non innovantes. De même, (Hadriche
et al. 2014) aboutissent à la conclusion selon laquelle, pour les PME ne faisant pas de
la R&D, l’endettement est significativement lié à l’innovation, mais avec un
coefficient positif.
En somme, les avis du financement sur l’innovation sont très partagés. Dans le
cadre de cette étude nous retenons l’hypothèse suivante conformément aux prédictions
du financement hiérarchique :
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Les mesures utilisées dans cette étude ont été inspirées de plusieurs auteurs
comme indiqué dans le tableau ci-après :
Nous avons dans cette étude, relevé les quatre formes d’innovation définies par
l’OCDE (2005) dans le manuel d’Oslo. La première forme d’innovation réalisée au
Bénin est l’innovation de produit (72%). La deuxième forme d’innovation est celle
marketing (24%). La troisième forme est celle organisationnelle (4%). L’innovation de
procédé est quasi- inexistante.
Nous constatons que les variables sont faiblement corrélées. En effet, tous les
coefficients de corrélation de Pearson entre les variables indépendantes sont
sensiblement inférieurs à 0,8 ; limite à partir de laquelle le phénomène de colinéarité
devient de plus en plus prononcé. En fait, nous avons retenu, comme Kennedy (1985)1,
une valeur critique de 0,8. Par conséquent, le problème de colinéarité entre les
variables indépendantes ne se pose pas. Nos variables peuvent donc se prêtées sans
1
D’après Kennedy, (1985), ce coefficient doit être inférieur à 0,8 et est significativement différent de
zéro. Dansce cas, on peut confirmer l’absence de colinéarité.
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Standardized OIM
[95%
Structural Coef. Std. Err. t P>t
Conf.Interval]
Endettement <-
Rentabilité .2602116 .0993895 2.62 . 0.009 .0654117 .4550115
Garantie .052409 .120233 3.44 0.003 1832434 .2880614
Structure de
.2829612 .0989546 2.86 0.004 .0890137 .4769087
propriété
innovation .1031849 .1051835 2.98 0.003 -.1029709 .3093407
Croissance -.0169175 .1208266 -2.14 0.009 -.2537333 .2198983
2010) nous soutenons à travers cette étude que la théorie POT ne s’applique pas aux
petites entreprises à haut potentiel de croissance. L’ensemble des résultats de
régressions nous conduit à considérer que le pouvoir explicatif d’une approche en
termes de ratio d’endettement cible (théorie du compromis) se révèle davantage
explicative des comportements d’endettement dans les PME innovantes dans un pays à
revenu faible qu’une approche fondée sur le financement hiérarchique.
Les résultats sont consignés dans le tableau ci-dessous :
H2 : « La relation entre
l’endettement et les actifs
tangibles de la PME Positive (+) et valide la TOT Positive (+) et valide la
TOT
innovante est positive ».
H3 : « la relation entre la croissance
Positive (+) et valide la POT Négative (-) et valide la
des PME innovantes et l’endettement
TOT
est positive »
H4 : « la relation entre la structure de
propriété et l’endettement des PME Négative (-) et valide la POT Positive (+) et valide la
innovantes est négative » TOT
H5: « la relation entre l’innovation et négative (-) et valide la POT Positive (+) et valide la
l’endettement est négative » TOT
Conclusion
Nous avons tenté d’expliquer les déterminants du taux d’endettement des PME
innovantes au Bénin sur un échantillon de 77 PME observées sur une période de trois
ans. Notre objectif était de tester la pertinence des hypothèses de la théorie du
compromis (TOT) et de la théorie du financement hiérarchique (POT), visant à
expliquer la structure financière des grandes entreprises cotées, appliquées aux choix
de financement et à la spécificité financière des PME innovantes au Bénin. Nous
notons que la théorie du compromis (TOT) explique mieux les déterminants de la
structure financière des PME innovantes dans un contexte de pays pauvre où la plupart
des entreprises sont sous-capitalisées et sont rationnés au financement externe. Toutes
les hypothèses ont été validées par la théorie du compromis. Par ailleurs, les variables
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