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Ahmed Bahri1
Alger / Montpellier
Résumé
L’auteur invite, à travers ce papier, à réfléchir sur quelques problèmes que peut poser la
mesure de la pauvreté, dans le contexte africain. Si un indice basé sur le revenu, exprimé en
unités monétaires, est bien commode, on peut se demander s’il rend compte d‘une réalité
bien complexe. Qu’elle soit absolue ou relative, la pauvreté n’a pas seulement une dimension
économique. De plus, selon la finalité des instruments mis en œuvre pour lutter contre la
pauvreté, la mesure n’est pas neutre. L’auteur ne propose pas un ou des indices alternatifs,
opératoires, simples et pertinents, mais donnent l’occasion au lecteur de lire avec précaution
ceux qui existent.
Introduction
l’avait déjà noté dans la Richesse des Nations: « est pauvre celui qui n’a pas
le moyen de participer à la vie sociale ». D’Adam Smith à Sen Amartya
(1988), divers auteurs ont noté que l’aspect économique n’est qu’une des
dimensions de la pauvreté. Pour l’examiner, on doit tenir compte également
du contexte social, des valeurs et pratiques culturelles, de l’environnement
et des relations internationales.
On devine que ces actions sont sensibles aux jeux politiques, aux
pouvoirs et aux ambitions, aux rapports de force. Dans ce cadre très large
des interventions, dont certaines sont hors sujet, peut-on disposer d’un
instrument pour trier celles des mesures qui pourraient, plus ou moins,
réussir, de fait, à faire reculer la pauvreté ? Par ailleurs, un environnement
de plus en plus global amène certains critiques à y voir une machine à
fabriquer plus de pauvreté. Il mérite alors un suivi et la définition de profils
régionaux et locaux pour relativiser les situations diverses qui existent.
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Ahmed BAHRI : Sur la définition de la pauvreté
Rappel historique
Mais la réalité fut autre et les inégalités entre pays, et au sein même des
pays, subsistaient, voire s’accentuaient ! On a, alors, pensé que pour cette
catégorie de pays, l’attention devait porter plus spécifiquement sur des
actions ciblées, comme la satisfaction des besoins essentiels (Basic Needs
Approach). Cela sous-entendait que l’Etat providence prenait en charge les
demandes des catégories sociales qui sont dans le besoin. Or, avec les
récessions et les crises consécutives à la période faste, l’Etat providentiel
n’était plus en mesure de mettre en œuvre une politique de redistribution en
faveur des plus pauvres. Il n’était plus question que chacun soit servi selon
ses besoins.
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Le PNUD, alors qu’il a, par le passé, fourni une évaluation critique des
éléments importants du développement, expose ,dans son rapport de 1997
sur le Développement Humain, consacré à l’éradication de la pauvreté, le
même point de vue que les institutions financières internationales. L’indice
de pauvreté humaine du PNUD est basé sur « les dimensions les plus
fondamentales de la privation : une vie courte, le manque d’éducation de
base, et l’absence d’accès aux ressources publiques et privées ».
Une autre critique de cette méthode réside dans les double standards
dans la mesure ‘scientifique’ de la pauvreté : le critère de 1 dollar par jour de
la Banque ne s’applique qu’aux pays en développement. Celle-ci et le
PNUD oublient l’existence de pauvreté en Europe de l’Ouest et en Amérique
du Nord. En outre, ce critère n’est pas en conformité avec les méthodologies
utilisées pour définir la pauvreté dans les pays développés. Dans ces
derniers, les méthodes de mesure se basent sur des niveaux minimaux de
dépenses pour faire face aux coûts de nourriture, habillement, santé et
éducation. Aux USA, le Social Security Administration (SSA) a établi, dans
les années 60, un seuil de pauvreté basé sur le prix d’une ration alimentaire
minimale adéquate, multipliée par trois pour les autres dépenses. Cette
mesure était basée sur un large consensus au sein de l’Administration
américaine. Ainsi, le seuil US pour une famille de 4 personnes (dont 2
enfants) en 1996 était de $16036, soit 11 dollars par jour. En 1996, pas moins
de 13.1 % de la population américaine et 19.6 % des habitants des grandes
agglomérations étaient au-dessous du seuil de pauvreté.
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Le rapport 1997 du PNUD indique, par ailleurs, une baisse d’un tiers
ou de moitié de la mortalité infantile dans certains pays d’Afrique sub-
saharienne, malgré la baisse des dépenses publiques et des revenus. Le
rapport oublie de mentionner que la fermeture de cliniques, le départ de
professionnels de la santé et leur remplacement par des agents peu formés
pour compiler les données de mortalité ont entraîné, de fait, une baisse
fictive de la mortalité enregistrée. Les réformes sponsorisées par les
institutions financières internationales ont aussi conduit à la ‘ruine’ du
processus de collecte des données.
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Pour la mise en œuvre de l’Agenda 21, les Nations Unies (1966) ont
proposé une batterie d’indicateurs. Au chapitre 3, intitulé «combattre la
pauvreté », la connaissance du chômage est mise en relief. Il est proposé de
suivre les grandeurs suivantes : recensement des pauvres ; indicateur de
‘gap’ de la pauvreté ; carré de l’indice du ‘gap’ de pauvreté ; l’Indice Gini de
l’inégalité de revenus. L’avantage de ces indicateurs est qu’ils sont
relativement faciles à comprendre, donc susceptibles d’être adoptés.
- l’approche monétaire ;
- l’approche des capacités humaines ;
- l’approche de l’exclusion sociale et
- l’approche de la participation.
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Conclusion
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Références
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