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ESQUISSE D’ANALYSE DE LA PROBLEMATIQUE DE

FINANCEMENT DES PME AU MAROC

Khalid ROUGGANI & Nabil BOUAYAD AMINE

Professeurs de l’Enseignement Supérieurs Habilités


Faculté Polydisciplinaire - Khouribga
Université Hassan I- Settat

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Résumé
Les résultats de la réforme financière au Maroc, entamée depuis plus d’une trentaine d’années
avec la mise en place du programme d’ajustement structurel, s’ils restent positifs au niveau de
certains marchés et compartiments (secteur bancaire, secteur des assurances, financement du
trésor…) ainsi qu’au niveau du cadrage macroéconomique (maitrise du taux d’inflation et du
taux du déficit budgétaire), demeurent moins satisfaisants au niveau de la dynamique de
croissance globale qu’est appelée à sous-tendre toute réforme du système financier. En effet, la
réallocation attendue des ressources pour un financement adéquat de l’économie marocaine
n’est pas encore atteinte. La preuve en est que des secteurs déterminant pour le décollage
économique souffrent de manque de financement que les banques, pour des raisons
structurelles, ne peuvent pas combler. L’efficacité de tout système financier se mesure par sa
capacité à financer toutes les parties qui composent le tissu économique et social.
En s'intéressant à l'efficacité allocative du secteur bancaire, on constate que la libéralisation
financière ne s'est pas traduite par une allocation optimale des crédits au profit des entreprises,
et plus particulièrement les PME, où la vulnérabilité en matière des crédits est plus notable. En
effet, depuis la libéralisation intégrale des taux d'intérêt, seules les plus grandes entreprises ont
bénéficié des conditions bancaires avantageuses au détriment des PME.
Cette situation est due à plusieurs facteurs, parmi lesquels la contrainte financière qui pèse sur
le développement de la PME, sa position concurrentielle et sa structure financière. En effet,
plus de 60% des PME nationales ont une structure financière dominée par les dettes à court
terme. Cette domination constitue une entrave à la bonne marche de l’entreprise qui voit ses
immobilisations financées en grande partie par les dettes à court terme. Résultat : Le fonds de
roulement est largement négatif, situation due essentiellement à la difficulté d’accès aux
concours bancaires notamment, pour les entreprises en phase de création.
Les banquiers quant à eux, cherchent toujours des garanties et des solutions leur permettant de
minimiser le risque et se faire rembourser dans les meilleures conditions possibles alors que les
autres modes de financement demeurent moins utilisés par manque d’information ou de
vulgarisation mais et par la méfiance des entrepreneurs vis-à-vis de ces nouvelles formules.

Mots clés

Système Financier, allocation des ressources, financement du Développement, PME, Maroc.

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INTRODUCTION

Le Maroc peut être considéré comme le modèle type de pays réformateur dans le domaine
financier selon les Institutions Financières Internationales. En effet, les résultats de la réforme
financière au Maroc, s’ils restent positifs au niveau de certains marchés et compartiments ainsi
qu’au niveau du cadrage macroéconomique, demeurent moins satisfaisants au niveau de la
dynamique de croissance globale qu’est appelée à sous-tendre toute réforme du système
financier.
Ainsi, ces différentes réalisations ne doivent pas cacher une limite de taille. En effet, la
réallocation attendue des ressources pour un financement adéquat de l’économie n’est pas
encore atteinte. La preuve en est que des secteurs déterminant pour le décollage économique
souffrent de manque de financement que les banques, pour des raisons structurelles, ne peuvent
pas combler.
En s'intéressant à l'efficacité allocative du secteur bancaire, on constate que la libéralisation
financière ne s'est pas traduite par une allocation optimale des crédits au profit des entreprises,
et plus particulièrement les PME, où la vulnérabilité en matière des crédits est plus notable. En
effet, depuis la libéralisation intégrale des taux d'intérêt, seules les plus grandes entreprises ont
bénéficié des conditions bancaires avantageuses. Il faut noter que l'allocation des crédits pour
les PME est compromise par l'aggravation des créances en souffrances.
L’efficacité de tout système financier se mesure par sa capacité à financer toutes les parties qui
composent le tissu économique et social. Parmi elles, les PME souffrent d’un manque énorme
de ressources financières, principalement faute de communication suffisante. Cette partie du
tissu productif national doit être traitée d’une manière assez spéciale de la part du système
financier national.
En effet, en plus du secteur bancaire, comme source de financement éventuelle, le marché
boursier, le capital risque ou encore les différentes lignes de financement et de garanties
internationales ne suffisent pas à combler les lacunes du financement des PME marocaines.
Avant justement de voir en quoi consiste le contenu des sources de financement dont bénéficient
les PME au Maroc et leurs limites, on va essayer de présenter l’importance des PME dans le
tissu économique marocain, les divergences à propos des définitions de la PME avant de
terminer par présenter une esquisse de quelques recommandations pour améliorer les marché
du financement de ces entreprises au Maroc.
Ce travail essayera de s’atteler à la problématique du financement des PME au Maroc. Après
une présentation de l’état des lieux des définitions des concepts liés à la PME au Maroc, il sera
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procédé à la présentation des contraintes au financement des PME avant de conclure par des
propositions de pistes de réflexion à même de drainer les flux financiers nécessaires aux PME
et donc de permettre le décollage d’une assez importante partie du tissue économique marocain

I- DEFINITION DE LA PME
Qu’est ce qui distingue une PME d’une entreprise de grande taille ? Il n’existe pas à l’heure
actuelle un consensus entre les chercheurs dans ce domaine. En effet, une définition standard
et universelle de la PME a fait l’objet de nombreuses tentatives et recherches mais a été
néanmoins rapidement abandonnée au profit des définitions propres à chaque pays.
L’une des études les plus connues dans ce domaine, a été réalisée dans le rapport Bolton. Edité
dans les années 70, ce travail avait pour objectif de trouver une explication derrière la
diminution du nombre des PME en Grande Bretagne. Selon ce rapport trois critères essentiels
pourraient être utilisés pour déterminer une PME :
 Direction personnalisée par les propriétaires de l’entreprise : un organigramme souvent
plat qui manque de hiérarchie et de structure formalisée.
 Une part de marché restreinte : selon le rapport, la PME a une part de marché réduite et
n’est pas suffisante pour influencer les prix.
 L’indépendance de la PME : selon le rapport, pour qu’une entreprise soit considérée
comme PME, elle ne doit appartenir à aucun groupe plus important même si sa taille est
très réduite.
En outre, cette analyse a été plus tard enrichie par plusieurs approches qui essayaient de trouver
les caractéristiques essentielles qui pourraient différencier les PME. Il en ressort que deux
familles de critères sont utilisés pour décrire les PME : les critères quantitatifs et qualitatifs.

1. Les Critères Quantitatifs


L’approche quantitative fait référence aux aspects représentatifs de la taille de l’entreprise. Les
indicateurs les plus couramment utilisés sont ceux qui touchent aux différentes composantes de
l’activité de l’entreprise. Ce sont généralement des données quantitatives relatives par exemple
à l’effectif global permanent, le chiffre d’affaires, l’endettement, le total bilan, la valeur ajoutée,
le capital social et la part de marché occupée par l’entreprise en question.
Cependant, il est apparent que cette méthodologie d’analyse ne permet pas d’avoir une
définition unifiée et homogène des PME principalement à cause de la diversité économique et
financière des entreprises entre les pays et entre les différents secteurs d’activités.

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2. Les Critères Qualitatifs
La deuxième famille des critères qui servent à définir les PME a un caractère descriptif de
l’entreprise et de son environnement social et économique. Cette approche se base sur des outils
théoriques et analytiques qui mettent en avant la dimension humaine de l’entreprise. Selon cette
famille, l’aspect humain est considéré comme étant l’élément fondamental qui pourrait être
utilisé pour décrire la PME.
3. La Définition de la PME au Maroc
Au Maroc, il n’existe pas une seule définition de la PME mais plusieurs.
a- La définition de la charte de la PME1
Trois critères sont pris en considération dans la définition officielle de la PME définie
dans la Charte qui lui est consacrée :
 Le premier est relatif à la gérance ou l’administration de l’entreprise qui doit être
assurée directement par des personnes physiques (propriétaires, ou actionnaires).
 Le second critère est relatif à la propriété du capital ou au droit de vote qui ne peut être
détenu à plus de 25% par une entreprise ou un ensemble d’entreprises qui ne
correspondent pas à la définition de PME.
 Le troisième critère est celui de la taille avec une distinction entre les entreprises
existantes (plus de deux années d’ancienneté) et celles qui sont nouvellement créées.
Pour être qualifiées de PME, les sociétés existantes doivent obligatoirement avoir un effectif
inférieur à 200 employés permanents, avoir un chiffre d’affaires annuel hors taxe qui ne dépasse
pas 75 Millions MAD, et/ou un total bilan limité à 50 Millions MAD.
Pour les nouvelles PME, la loi stipule qu’elles doivent avoir un programme d’investissement
initial inférieur ou égal à 25 Millions MAD et respecter un ratio d’investissement par emploi
inférieur à 250.000 MAD.
b- La nouvelle définition de l’ANPME2
La nouvelle définition de la PME élaborée par l’ANPME tient compte uniquement du critère
du chiffre d’affaires et fait abstraction de l’effectif de l’entreprise. Selon cette définition, trois
types d’entreprises sont distingués :
 La très petite entreprise : moins de 3 Millions MAD.
 La petite entreprise : entre 3 et 10 Millions de MAD.
 La moyenne entreprise : entre 10 et 175 Millions MAD

1 Voir l’article premier du bulletin officiel N° 5036 du 27 Joumada II 1423 (5 septembre 2002), page 921.
2 Voir les publications de l’Agence Nationale pour la Promotion des PME.

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c- La définition de la Banque Centrale
Dans le cadre de la mise en place des approches avancées « Bâle II » au titre du risque de crédit,
les seuils de segmentations de la banque centrale du Maroc (BAM) ont été revus et une nouvelle
définition a émergé. Deux critères déterminants sont retenus : le chiffre d’affaires annuel et le
montant des crédits bancaires dont la PME bénéficie. 3
La circulaire n° 8/G/2010 relative aux exigences en fonds propres pour la couverture des risques
de crédit, de marché et opérationnels, a établi les critères de segmentation prudentiels que les
établissements de crédits doivent appliquer pour les besoins de détermination des exigences en
fonds propres au titre du risque de crédit. Il s’agit des critères suivants :
 La grande entreprise : le chiffre d’affaire hors taxes ou celui du groupe d’intérêt auquel
elle appartient, est supérieur à 175 Millions MAD.
 La petite et moyenne entreprise : y compris les entrepreneurs individuels est celle qui
répond à l’une des deux conditions suivantes :
- Le chiffre d’affaires hors taxe ou celui du groupe d’intérêt auquel elle appartient est
supérieur à 10 Millions MAD et inférieur ou égal à 175 Millions MAD;
- Le chiffre d’affaires hors taxe est inférieur à 10 Millions MAD et le montant global des
créances que détient l’établissement de crédits à son égard ou du groupe d’intérêt auquel
elle appartient, est supérieur à 2 Millions MAD.
 La très petite entreprise : le chiffre d’affaires hors taxe ou celui du groupe auquel elle
appartient est inférieur à 10 Millions MAD et le montant global des créances détenues
à son égard est inférieur à 2 Millions MAD.

Cette segmentation va de paire avec la nouvelle définition de la PME utilisée par l’ANPME
pour ses programmes d’appui.

II- L’IMPORTANCE DU FINANCEMENT POUR LES PME ET LES DEFIS


POUR CELLES MAROCAINES
1. Les Besoins en Financement selon le Cycle de vie d’une PME…
Avant de se pencher sur la problématique de financement des PME marocaines, il est nécessaire
de comprendre les modes de financement qui correspondent aux différentes phases du
développement de la PME. En effet, la typologie faite par certains spécialistes, présentant la vie
de l’entreprise fait ressortir 5 étapes :

3 Voir l’annexe 1 de la circulaire N° 8/G/2010 de BAM, Rabat, 31 décembre 2010, page 26.

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- La phase de faisabilité ou de définition qui sera financée par une combinaison d’apports
personnels (ou autofinancement) et éventuellement de quelques appuis publics ;
- La phase de création (start-up) où le financement est assuré essentiellement par le capital de
départ et d’éventuels fonds ;
- La phase de la première croissance où le financement public reste important, mais il cède
progressivement la place aux fonds privés spécialisés de haut bilan (capital-risque) et
éventuellement aux participations industrielles ;
- La phase de développement présentant aussi bien des projets ayant une meilleure visibilité
que des garanties de chiffre d’affaires ;
- La phase de sortie qui est nécessaire aux entreprises qui veulent préserver leur développement
ou aller sur le marché international.
Selon la majorité des analystes, et les conclusions des études menées dans ce sens, le décalage
de croissance du marché des PME entre les pays serait principalement dû aux difficultés des
PME à trouver un financement adéquat et suffisant durant les premières étapes de leur
développement.
Au delà du capital initial nécessaire pour développer et créer l’entreprise, toutes les PME ont
fait face dans les premières années de leurs vies à un besoin de financement, nécessaire pour
développer leurs offres et investir dans de nouvelles recrues. C’est principalement cette étape
qui représente le défi majeur des PME : obtenir un financement adéquat auprès des banques ou
des bailleurs de fonds, ou même avoir accès aux marchés financiers qui sont généralement plus
frileux et moins ouverts à leurs demandes qu’à celles des entreprises de plus grande taille.

2. … et le cas des PME Marocaines ?


Malgré leur dominance en nombre dans le tissu économique marocain, la contribution des PME
marocaines à la croissance réelle du pays demeure en deçà des pays industrialisés 4. Le dispositif
statistique actuel n’est pas en mesure de permettre une bonne visibilité sur le comportement des
PME mais nous pourrions néanmoins dénombrer les grandes lignes directrices qui permettent
de détecter les faiblesses de ces entreprises qui constituent le noyau de l’économie marocaine.
En effet, beaucoup de contraintes se dressent devant l’évolution des PME marocaines. Ces
contraintes pourraient être classées en deux catégories : des facteurs intrinsèques à l’entreprise
elle-même et des facteurs externes.

4 « Le financement des PME au Maroc », Conseil Déontologique des Valeurs Mobilières du Maroc (CDVM), Mai 2011, page 13.

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a. Facteurs Intrinsèques
Dans la première famille on pourrait lister plusieurs facteurs qui n’encouragent pas le
développent des PME. Il s’agit en premier lieux de la fragilité de leurs structures et d’une sous-
capitalisation presque généralisée. De plus, les PME manquent de moyens techniques et
financiers et elles ont souvent un capital humain en manque d’encadrement, de formation et de
compétences. Ceci se traduit le plus souvent par une sous-performance des PME marocaines,
un manque de compétitivité et un taux d’échec élevé.
b. Facteurs externes
S’agissant de la deuxième catégorie, les sources de faiblesse des PME pourraient également
être dues aux lourdeurs administratives et à la fiscalité désavantageuse dont souffrent ces
entreprises. Les problématiques liées aux financements sont également très importantes et
souvent citées parmi les premiers challenges face aux développements des PME au Maroc. Ces
défis rendent le développement de la PME et son évolution très difficiles, et la poussent à se
focaliser sur la survie à la place de l’innovation contrairement aux pays développés.
Le problème de financement constitue la contrainte la plus visible des PME marocaines, et un
important élément de blocage de leur croissance. Les difficultés que rencontrent les PME par
rapport à l’offre de financement, sont dues à plusieurs facteurs.
 Le premier est lié à la prudence des banques à financer les PME dans un contexte de
manque de liquidité et de concurrence élevés pour les crédits surtout s’il s’agit de
financer les PME lors de la phase de création ou d’expansion.
 Le second est en rapport avec la méconnaissance des entrepreneurs et dirigeants de PME
de la palette des produits financiers disponible au Maroc.
 Un troisième facteur pourrait être le manque d’adaptation de ces produits financiers aux
besoins d’une grande population de PME, d’autant plus que la grande majorité de ces
dernières sont en effet des TPE (très petites entreprises).
 Un autre facteur qui contribuerait négativement aux financements des PME serait lié à
l’existence d’une forte asymétrie d’information5 entre l’investisseur et la PME et le
manque de transparence souvent lié à la fragilité de la structure de cette dernière.

5
« L'idée générale de l'asymétrie d'information est la suivante : il y a sur les marchés financiers des intervenants mieux informés
que les autres. Ils peuvent tirer avantage de ce supplément d'information pour faire des profits (en utilisant leur situation d'initié,
en manipulant les autres intervenants…)», Voir la thèse de doctorat « la reforme financière selon les institutions financières
internationales : le cas du Maroc », Khalid ROUGGANI, Université Hassan II, Casablanca, Maroc page 257.

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III- LES OUTILS CLASSIQUES DE FINANCEMENT DES PME

Plusieurs outils de financements sont traditionnellement à la disposition pour les PME, dont le
financement par endettement, celui par les fonds propres, le capital investissement et le recours
aux marchés financiers.

1. Financement par l’Endettement


Les PME se financent traditionnellement et en grande partie par des sources internes, dont les
fonds propres de l’entrepreneur et les bénéfices non distribués de la PME elle-même.
Les crédits bancaires restent néanmoins la source de financement externe principale des PME.
Ces financements peuvent prendre des formes variées allant des lignes de crédits aux prêts à
long terme. Les crédits-bails sont utilisés pour faciliter les problèmes de financement et
améliorer l’autofinancement de la PME. Les PME peuvent également avoir recours à
l’affacturage qui permet un financement immédiat des créances et transforme la trésorerie
potentielle en une trésorerie réelle.

2. Financement par Fonds Propres


Les fonds propres permettent aux PME d’investir en capacité, en production et dans
l’innovation. Ils représentent également une barrière contre l’entrée d’investisseurs vautours en
permettant aux PME de garder leur indépendance et leur autonomie.
Le financement via les fonds propres peut provenir de plusieurs sources différentes. Le plus
souvent, il provient en partie des promoteurs de la PME en question.
Les investisseurs externes pourraient également intervenir sous forme d’investisseurs privés ou
des sociétés d’investissement. Ce type de financement permet d’améliorer la capitalisation de
l’entreprise sans pour autant diluer le pouvoir des créanciers par emprunt. Plusieurs formes de
financement par fonds propres existent :
 Financement mezzanine : La dette mezzanine est un instrument financier, aussi appelé
financement subordonné ou quasi-fonds propres, qui combine les caractéristiques d’un
prêt et celles d’un financement par actions.
 Appel public à l’épargne : généralement destiné aux grandes entreprises dans le cas de
besoins massifs des capitaux pour soutenir une croissance. L’entreprise émet des actions
sur le marché. Ces actions peuvent être accompagnées de bons de souscription ou
d’options.

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 Le Capital investissement : plus connu sous le nom du Private Equity, il consiste pour
l’investisseur à prendre des participations en fonds propres ou quasi-fonds propres des
sociétés non cotées.

3. Le Capital Investissement
Le capital investissement est une technique de financement de haut de bilan des entreprises à
fort potentiel. La société recherche un profit maximum sous forme de plus value au moment de
la cession. Les contributions du capital investissement sont nombreuses, non seulement dans le
financement des créations d’entreprises, leur accompagnement ou leur développement
stratégique mais aussi dans la pérennisation du tissu économique principalement lorsqu’il s’agit
de financement de PME. En effet, les études dans ce sens mettent en avant un impact
particulièrement important du capital investissement tant sur les performances financières et
commerciales des entreprises financées, que sur leur capacité à créer des emplois.
La société de capital investissement apporte également conseil et appui financier et stratégique.
En tant qu’actionnaire, l’investisseur ne bénéficie pas de garanties pour son intervention et en
cas de liquidation de l’entreprise, il n’est pas assimilé aux créanciers prioritaires.
Le capital investissement peut intervenir à n’importe quelle étape du développement de
l’entreprise. On pourrait néanmoins distinguer plusieurs types6 d’interventions du capital
investissement :
 Le capital-amorçage : aussi appelé le « Seed Capital » : intervient avant ou juste après
le réel démarrage d’activité d’une nouvelle entreprise (Recherche et développement,
mise au point des prototypes, etc).
 Le capital-création : « Start-Up » : intervient au démarrage d’une nouvelle entreprise
ou lors de son tout premier développement pour financer le développement du produit
et sa commercialisation.
 Le capital transmission : plus connu sous l’appellation anglaise LBO (Leverage Buy
out), Il consiste à acquérir la totalité du capital d’une entreprise mature et rentable en
ayant recours à l’endettement bancaire avec un apport minimal de capitaux.
A chaque étape correspond un niveau de risque spécifique impliquant des mesures
d’intervention et d’intermédiation différentes. Etant donné les niveaux de risque relativement
importants, les fonds de capital investissement ne peuvent s’intéresser qu’aux projets
d’entreprises porteurs de forte croissance actuelle ou potentielle.

6 CDVM, op cité, page 15.

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4. Marchés Financiers
L’accès des PME à un financement diversifié est une condition essentielle de leur
développement. Les marchés boursiers procurent aux PME de nouvelles ressources pour
financer leur développement et leur assurent un surcroît de visibilité.
Vers la fin des années 70, plusieurs pays européens avaient une attitude institutionnelle
structurante et ont créé des compartiments boursiers spécialement réservés aux petites et
moyennes entreprises. Les autorités européennes ont essayé de reproduire l’exemple américain
des Small Caps du NASDAQ en créant des places financières sur-mesure qui ont pour objectif
de renforcer les fonds propres des PME.
Ces structures de marché ont pour objectif de faciliter l’accès des PME au marché des capitaux,
et plus particulièrement leur permettre ainsi de renforcer leurs fonds propres en ayant accès aux
marchés boursiers d’une manière plus simplifiée avec des conditions plus souples et une
fiscalité avantageuse.
Ces marchés non réglementés disposent de plusieurs mesures permettant des conditions
d’admission et des règles de négociations plus simplifiées et plus adaptées aux tailles modestes
des PME. Ces règles moins contraignantes présentent un atout majeur pour les PME qui ne
disposent pas toujours de moyens humains et financiers adaptés pour faire face aux contraintes
des marchés réglementés.

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IV- LE FINANCEMENT DES PME AU MAROC
En l’absence d’outils statistiques fiables, il semblerait qu’il existe au Maroc de 40.000 à 50.000
PME, dont 6.000 industrielles et plusieurs centaines de milliers de TPE, 400.000 à 500.000
selon certains, voire plus de 1.000.000 si on inclut l’artisanat. Par ailleurs, selon les estimations
avancées par le gouvernement, la Direction générale des impôts et le Haut Commissariat au
Plan, les TPE constituent 3 millions d’unités dans le royaume. La situation actuelle fait
aujourd’hui état d’une large part des TPE qui évoluent dans le secteur informel, le
gouvernement ne recense ainsi que 30.000 parmi les 3 millions, qui sont inscrites à la CNSS.
Les PME qui pèsent plus de 95% du tissu productif et un peu moins de 20% du PIB continuent
à privilégier l’autofinancement et le crédit bancaire et n’accèdent que de manière limitée aux
financements par les marchés.
Quelles sont alors les principales modalités de financement dont disposent les PME
marocaines ?

1. Le Secteur Bancaire et le Financement des PME


Les PME et TPE marocaines privilégient les voies de financement bancaires car elles ne
peuvent pas recourir aux marchés des capitaux aussi facilement que les grandes entreprises.
Selon un rapport des Nations Unies élaboré en 2010, le total des crédits accordés par les banques
au secteur privé s’élève à 468 milliards MAD. Selon la Direction de la Supervision Bancaire de
BAM, la quotte part des PME dans ces crédits est située à seulement 18% en 2008, soit un
montant global de 54 milliards MAD, le reste étant alloué aux grandes entreprises.
Cette situation de la très faible participation du secteur bancaire dans le financement des
besoins en trésorerie et/ou investissement des PME marque toute la région MENA dans
laquelle le taux de la pénétration des financements bancaires est à peine de 8% du total des
crédits bancaires7.
Le marché de financement marocain a tendance à prendre une forme presque oligopole avec
une offre concentrée par un nombre limité d’acteurs (les grandes banques) et une demande
composée de grandes entreprises et une large population de PME et TPE.
Le faible niveau de transparence des PME au niveau de leurs communications financières est
la principale raison invoquée par les banques pour expliquer leur réticence à financer ces
entreprises.

7M’fadel El Halaissi, « Financements bancaires des TPE/PMI-PME dans la région Mena », Directeur Général BMCEBank, le journal
L’Economiste, 26 novembre 2013, P. 26-27.

97
En effet, du point de vue des banques8, les PME ont des difficultés à trouver un financement
adéquat mais ces difficultés ne sont pas directement liées à la réticence ni une frilosité de la part
des fournisseurs de crédits. Les difficultés d’accès aux financements rencontrées sont
principalement dues, à la fragilité même des PME et au déséquilibre du couple
Risque/Rentabilité.
De plus, les PME marocaines se caractérisent généralement par une faiblesse des fonds propres
et une sous capitalisation qui est généralement due à un manque de réinvestissement dans
l’entreprise. Sans oublier également, toujours selon les banquiers marocains, l’inefficacité
organisationnelle et le style de management de l’entreprise, le manque de transparence dans les
états financiers et aux défaillances au niveau du capital humain.

Ce tableau nous démontre d’une part un taux moyen des financements bancaires inférieurs à 8% pour toute la région,
et d’autre part, une dispersion très importante entre les pays de la région, où le Maroc arrive en tête avec un taux de
24%
Le secteur bancaire, qui «demeure déterminé à partager l’effort collectif et la responsabilité
commune de conférer aux PME les moyens supplémentaires de relever les défis d’une ouverture
économique croissante», considère, au non du Président de son groupement professionnel, que
pour l’économie nationale en générale et les PME en particulier, «si le taux d’intérêt est une
variable de l’investissement, il n’est pas la seule ni la plus déterminante. L’investissement est
en effet tributaire d’autres variables que résume le terme d’environnement de confiance, de
transparence et de visibilité économique»9.
Selon la vision du GPBM, les PME marocaines ont plus besoin de conseil et d’assistance, que
de moyens financiers, pour la multi-dimensionnalité et la multiplicité de leurs fonctions et de
leurs préoccupations. Dans ce cadre, la communauté bancaire avait proposé, au nom de son

8 Voir les différentes interventions du Président du GPBM (Groupement professionnel des banques du Maroc).
9 Benjelloun Othman, Président du GPBM, intervention à la huitième session du CNME, jeudi 6 mai 1999, Rabat, 4 p.

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président en marge de la dixième réunion du CNME (conseil national de la monnaie et de
l’épargne), «l’adoption d’un -Master Plan- reflétant une vision stratégique globale et cohérente
de la part des autorités publiques afin de mettre à la disposition de la PME marocaine les outils
de financement, d’assistance et de conseil à même de lui permettre de répondre aux exigences
de la mise à niveau». Par ailleurs, il ne faut pas oublier de mentionner certaines défaillances
du secteur bancaire dans sa relation avec les PME comme la faible ou inexistence
décentralisation des décisions de crédits. Dans les banques les plus décentralisées, les
délégations de pouvoirs n’excèdent pas 1 Million MAD. En plus, les crédits à moyen et long
terme sont très fortement assortis de sûretés mais ne générant qu’un taux de récupération sur
contentieux bruts d’ordre de 50% sur les PME et de 20% sur les TPE, après des procédures, qui
en fonction de l’état d’un système judiciaire assez lent, peuvent s’étaler sur des durées de 3 à 5
ans.
La logique et la doctrine du financement bancaire doit nécessairement s’adapter aux structures
du tissu productif d’une économie et non l’inverse! Attendre que l’entreprise PMI-PME,
évolue et devienne éligibles aux regards de cette logique bancaire envahie par les notions
multiples de risques est un «gâchis-économique».10
Pour pallier au manque d’accès au financement bancaire qui, selon l’avis de plusieurs experts,
demeure très exigeant, les bailleurs de fonds ont créé de nouveaux instruments qui inciteraient
les banques à assister financièrement les PME en surmontant les difficultés traditionnellement
invoquées. En effet, le conseil trimestriel de la politique monétaire tenu fin 2013 au siège de
BAM a décidé la création d’un fonds de soutien pour les PME et les entreprises de taille
intermédiaire en difficulté. À travers cette mesure, BAM veut élargir la base des entités éligibles
au financement, en révisant enfin la définition même de la PME. Ceci devra mobiliser la
participation de nombreux acteurs. Ce fonds sera domicilié à la Caisse de dépôt et de gestion
(CDG), avec un approvisionnement de départ fixé à un 1 Milliard MAD à partir du Fonds de
garantie des dépôts et devrait être concrétisé courant le 1er trimestre 2014. Des banques
nationales et institutions financières internationales devraient également prêter main forte, afin
de faire passer le fonds à 3, puis 4 Milliard MAD.
Par ailleurs, l’année 2013 a été marquée par de nouvelles signatures de partenariats entre les
banques locales et les structures internationales.
C’est le cas notamment de la Banque centrale populaire (BCP), qui rappelons-le a signé l’été
dernier, un accord de partenariat avec la BERD, portant création d’une facilité de financement

10 M’Fadel El Halaissi, op cité.

99
des échanges de 50 millions de dollars. C’est aussi, dans une différente mesure, le cas
d’Attijariwafa bank, qui a signé il y a quelques jours un accord avec Citibank et Opic.
Cet important accord vise à soutenir l’octroi de crédits aux PME au Maroc et dans un certain
nombre de pays de présence du groupe Attijariwafa bank en Afrique subsaharienne.

2. Le Capital -Risque
Le capital risque a été introduit au Maroc en 1989 par le biais de la Banque Européenne
d’Investissement (BEI) qui a accordé entre 1987 et 1996 un total de 40 Millions d’euros sous
forme de concours sur capitaux à risque financés grâce aux ressources budgétaires de l’Union
Européenne. Parmi les moyens les moins utilisés ou mal connus permettant de diversifier l’offre
de financement, le capital-risque reste un instrument coûteux mais flexible et ne nécessite pas
trop de garanties. Cette formule de financement qui connaît l’implication de plusieurs
opérateurs propose des crédits à long terme sous différentes formes : prêts participatifs, actions
privilégiées, obligations convertibles en actions et certificats d’investissement.
Le marché du capital investissement au Maroc en général a connu deux phases de
développement. La première, entre 1993 et 1999, marquée par une timide pénétration du
marché. La deuxième entre 2000-2010, caractérisée par une hausse importante des fonds sous
gestion et des volumes investis.
Actuellement, le Maroc compte 31 fonds de capital investissement affiliés, appartenant à 19
sociétés de gestion, et malgré la conjoncture économique peu favorable, trois nouveaux fonds
ont été créés entre 2009 et 2010, dont deux sectoriels (Santé, et NTIC). Selon le rapport annuel
de l’association marocaine des investisseurs en capital (AMIC), le montant des investissements
cumulés s’élève à 2.6 Milliards MAD à fin 2010. Notons que le capital risque et le capital
amorçage ont progressé et représentent 8% des montants investis entre 2006 et 2010.
L’activité du capital risque au Maroc est encore à ses débuts. La majorité des intervenants dans
le marché ciblent principalement des entreprises existantes, à fort potentiel et souhaitant se
développer. Il s’agit donc essentiellement des activités de capital développement; l’activité du
capital risque (la création et l’amorçage) est très marginale. Ceci s’explique facilement du côté
de l’investisseur, qui préfère avoir une meilleure visibilité sur l’entreprise cible, des états
financiers déjà établi et un potentiel de taux de rentabilité interne élevé
Du côté des PME, ce dispositif financier apparait peu adapté car :
 La part des PME éligibles pour l’obtention d’un financement capital-risque est très
faible. Ceci s’explique par l’insuffisance de leur encadrement financier et technique qui
limite leur accès à ce type de financement ;

100
 Les critères d’éligibilité des sociétés de capital-risque sont rigides. Leur prise de risque
est limitée souvent à l’accompagnement du développement des PME ;
Les PME marocaines se caractérisent par une structure financière déséquilibrée, une
organisation centralisée et personnalisée, le manque de transparence, un très faible encadrement
ce qui n’encourage pas les investisseurs de capital risque. Face aux défis au niveau national et
international, la PME marocaine doit se mettre à niveau afin d’encourager ce types
d’investissements.

3. Le Marché Financier
On essayera de voir successivement au sein du marché financier celui obligataire et celui des
actions.
a. Le Marché Obligataire
Au Maroc, les émissions de titres de dettes pourraient prendre la forme des titres de créances
négociables composés de :
 Certificats de Dépôts : émises par les banques
 Bons des sociétés de financement par les sociétés de financements
 Billets de trésorerie par les entreprises non financières. Les PME ne peuvent être
concernées que par ces derniers outils.

L’encours à fin décembre 2010 des obligations privées est de 30,5 Milliards MAD11, soit 25%
de l’encours global. Cet encours est composé de 26 émetteurs presque tous, à quelques
exception, de grandes entreprises cotées en bourse. L’encours des billets de trésorerie est de 1,7
Milliards MAD, soit seulement 1% de l’encours global à fin décembre 2010. Cet encours
correspond à des émissions effectuées par 4 émetteurs tous des grandes entreprises marocaines.
Le financement par le marché de la dette privée (obligations, billets de trésorerie, etc.) présente
d’indéniables avantages, notamment en termes de coût dans un environnement marqué par la
baisse continue des taux des bons du Trésor et la résistance des taux bancaires. Ainsi, pour une
émission de 1 an, 3 ans et 5 ans de 100 Millions MAD aux taux des bons de Trésor et de base
bancaire observés actuellement au Maroc, en tenant compte des frais, commissions et primes
de risque, un emprunteur pourrait réaliser des économies de 1,4 Millions MAD à 1 an, 5
Millions MAD à 3 ans et 6,9 Millions MAD à 5 ans en recourant au marché de la dette privée

11
CDVM, op cité, page 34.

101
au détriment du financement bancaire. En plus des économies de coût, l’emprunt obligataire
offre de multiples autres avantages : absence de garanties, amélioration de la capacité de
négociation vis-à-vis des banques, flexibilité et souplesse (diversité des maturités, taux fixe ou
variable, etc.), changement de dimension et de perception par les principaux partenaires de la
société, possibilité de recourir régulièrement au marché, etc. Les entreprises craignent la
transparence et manifestent souvent une réticence à communiquer leurs chiffres financiers, leurs
parts de marché et leurs stratégies en général.
Les entrepreneurs croient à tort qu’en s’introduisant en bourse, ils risqueraient de perdre le
contrôle de leurs sociétés.
b. Le Marché des Actions
La bourse des valeurs au Maroc est composée de trois compartiments, chacun avec des
caractéristiques et des conditions d’admissions différentes. Le tableau suivant résume ces
conditions:
Les différents compartiments du marché boursier marocain
Compartiments boursiers Conditions
Avec 47 valeurs et 95,5% de la capitalisation globale
 Société avec un capital entièrement libéré
Premier compartiment (marché principal)  Emission d’un montant minimal de 75 MMAD
 Au moins 250000 titres de capital
 Capitaux propres >= 50 MMAD
Avec 13 valeurs et 1% de la capitalisation globale
Deuxième compartiment (marché de  Société avec un capital entièrement libéré
développement)  Emission d’un montant minimal de 25 MMAD
 Au moins 100000 titres de capital
 CA au cours des 2 derniers exercices >= 50 MMAD
Avec 14 valeurs et 3,5% de la capitalisation globale
Troisième compartiment (marché de  Société avec un capital entièrement libéré
croissance)  Emission d’un montant minimal de 10 MMAD
 Au moins 30000 titres de capital
Source : CDVM, op cité, page 35

Pour l’entreprise, la Bourse des valeurs représente une alternative plus efficace et moins chère
pour supplanter les financements bancaires. Elle présente plusieurs avantages aux entreprises
désireuses de s’y inscrire. Elle propose trois compartiments aux sociétés. Le troisième
compartiment offre une nouvelle alternative au financement des jeunes entreprises et
particulièrement dans les nouvelles technologies.

102
L’objectif de la création du deuxième et troisième compartiment est d’inciter les entreprises
moyennes à s’introduire en bourse. Actuellement, on compte 15 sociétés cotées appartenant au
marché de croissance qui représente environ 3.6% de la capitalisation globale. Il est clair
néanmoins, que la cotation des entreprises reste en général très faible par rapport aux autres
pays émergents. A part quelques exceptions, la grande majorité des PME marocaines ne
présentent pas les critères requis pour pouvoir accéder au troisième compartiment de la bourse.
De plus, la proportion des petites et moyennes entreprises qui peut faire appel public à l’épargne
pour un montant supérieur à 10 Millions MAD demeure faible. Hormis les seuils qui sont
problématiques et très élevés pour une grande population d’entreprises marocaines, les PME ne
sont pas en mesure de respecter les implications de l’introduction en bourse en termes de
communication financières et de bonne gouvernance.
Le financement des PME marocaines via les marchés financiers, capitaux et dette, est très
marginal en raison de l’étroitesse et des conditions exigées par ces marchés. Malgré les
incitations fiscales et financières adoptées, les mécanismes mis en place ne sont pas
particulièrement adaptés aux besoins des PME. Le facteur institutionnel constitue aussi une
importante barrière d’accès pour ces entreprises au marché boursier, en raison notamment de la
complexité des règles boursières comparées aux moyens des PME marocaines.

4. Les Fonds de Garanties


En tant qu’acteur incontournable de l’opération de financement et malgré son désengagement
progressif au profit du secteur privé, l’Etat doit jouer un rôle déterminant pour faciliter l’accès
aux ressources de financement en garantissant des projets créateurs d’emplois et de richesses à
travers la Caisse Centrale de Garantie ou Dar Addamane.
A cet effet, plusieurs fonds ont été crées:
 Fonds de garantie pour la mise à niveau (FOGAM) spécialement pour la mise à niveau
des entreprises, y compris les PME ;
 Al Mouhajir : réservé aux entreprises dont au moins 20% du capital sont détenus par un
Marocain Résident à l’Etranger ;
 Crédit Oxygène : fonds de garantie auquel l’USAID participe à hauteur de 50 Millions
MAD. Géré par Dar Addamane, il offre la possibilité aux PME d’accéder aux concours
bancaires pour leurs besoins en crédits de fonctionnement sans recourir à l’hypothèque.
En outre, la CCG gère certains fonds de garantie profitant aux secteurs du tourisme, de
l’industrie et de la culture. Il s’agit de :
 Renovotel : pour le secteur touristique ;

103
 Fortex : fonds de restructuration du textile ;
 FGIC: fonds de Garantie des Industries Culturelles qui est initié par l’Agence
intergouvernementale de la francophonie et destiné à apporter une garantie au
financement bancaire des entreprises du secteur pour favoriser le développement des
industries à caractère culturel tout en leur facilitant l’accès au financement.
De sa part, l’ANPME a entrepris un certains nombre de mesures en mettant en place des
programmes d’appui à la compétitivité en faveur des PME marocaines. Les deux programmes
phares de l’ANPME sont : Imitiaz et Moussanada

 Imitiaz : Une des mesures prises par le pacte national de l’émergence industrielle
(PNEI) est le programme Imtiaz. Ce dernier a comme objectif d’aider les PME à
renforcer leurs actifs corporels et incorporels. Il prévoit d’accompagner 50 entreprises
à fort potentiel chaque année sur la période 2009-2015 en leur attribuant une prime à
l’investissement matériel et immatériel qui couvre 20% du montant total de
l’investissement et peut atteindre la somme de 5 Millions MAD.
Jusqu’à aujourd’hui12 116 projets de développement ont été retenus lors des 6 éditions
d’appels à projets lancées, au titre de la période 2010-2012. En termes d’impacts
attendus, les 116 entreprises bénéficiaires à ce jour dudit programme, permettront de
générer sur 5 ans un chiffre d’affaires additionnel cumulé de 26 Milliards MAD, une
valeur ajoutée additionnelle cumulée de 8,5 Milliards MAD, la création de 8721 emplois
et une contribution de plus de 2630 Millions MAD au titre de l’impôt sur les sociétés,
soit près de 5 fois la prime octroyée.
 Moussanada : Le programme Moussanada est un programme d’accompagnement des
entreprises dans leur démarche de modernisation et d'amélioration de leur compétitivité.
Il vise à accompagner 500 entreprises par an à améliorer leurs systèmes d’information
sur les cadences de production et de commercialisation et peut, par ailleurs, couvrir des
domaines variés, tels que la qualité, la logistique et le marketing. La contribution
financière du programme MOUSSANADA est de 60% du coût total de la prestation,
plafonnée à 1 Millions MAD par entreprise (l’apport de l’entreprise étant de 40%). Près
de 1224 projets d’accompagnement des entreprises ont été lancés depuis l’année 2010
jusqu’à fin juin 2013.

12 Note de présentation de la loi de finances 2014 au Maroc.

104
5. Les Lignes de Crédit Extérieures
Les PME disposent également d’une panoplie de lignes de crédit extérieures permettant de
financer à moyen terme, voire long terme, les investissements en matériel de production.
Seulement, le promoteur de la PME doit faire face à un long délai de traitement du dossier et
en cas d’accord, il doit acheter du matériel du pays qui propose la ligne, ce qui réduit son choix.
Plusieurs lignes de crédit étrangères sont ou seront mises à la disposition des PME marocaines.
Nous citons entre autres : une ligne de crédit française de 305 Millions MAD ; une ligne de
crédit italienne de plus de 158 Millions MAD ; une ligne de crédit portugaise de 102 Millions
MAD; une ligne de crédit espagnole de 180 Millions MAD et une ligne de crédit allemande de
500 Millions MAD.
Il faut tout de même mentionner que malgré l'unification, en février 2003, de leurs taux d'intérêt
applicables à 5% et l'approbation de leur distribution par l'ensemble des banques, ces lignes
demeurent faiblement utilisées, avec des taux d’utilisation ne dépassant pas 35% pour la ligne
française, 12% pour l’espagnole, 7% pour l’italienne et 0% pour la portugaise et ce, malgré les
conditions avantageuses qu'elles présentent.
Ceci est du, entre autre, au faible niveau de communication autour de ces produits en plus de la
lenteur des procédures de certains services proposés. Pour ce, il parait urgent de penser à la
restructuration des services financiers offerts aux PME.

V- VERS UNE REFONTE DE L’ARSENAL INSTITUTIONNEL DE


L’ACCOMPAGNEMENT DES PME

S'il parait évident qu'il faut structurer l'offre de services financiers aux PME, deux principales
questions restent posées quant à la mise en œuvre de cette décision :
 Faut-il structurer ce pôle de compétence à partir des structures existantes ou créer une
structure ex-nihilo?
 Si l'on décide de partir de l'existant, faut-il structurer l'offre à partir d'un seul
établissement ou de plusieurs?
Des structures publiques d'aide et de financement de la PME existent dans les pays les plus
libéraux. Ces institutions existent aux Etats-Unis (Small Business Administration), en
Allemagne, en France (Oséo), au Portugal etc. Le moment n'est-il pas venu pour le Maroc de
créer une institution de financement et de garantie de la PME ? Le paysage bancaire marocain
se compose en plus des banques commerciales, d'un certain nombre d'établissements publics
comme Bank AI Amal, la CCG, Dar Ad Damane, la Caisse Marocaine de Marchés qui œuvrent

105
pour la PME. L'accompagnement de ces entités devrait être réexaminé pour assurer le maximum
de sécurité et d'efficacité.
Cette restructuration appelle un réexamen de tout le système d'accompagnement de la PME,
tant pour le financement que pour la garantie. Une proposition pourrait consister à créer une
institution dédiée à la PME afin de simplifier le paysage et asseoir le système sur deux pôles -
le financement et la garantie - étroitement imbriqués pour un maximum d'efficacité, parce que
les PME peuvent se trouver désorientées par la multiplicité des intervenants. µ
Cette institution, éventuellement un établissement à capital mixte, doté d'une mission de service
public pour financer la PME, serait au cœur d’un pôle composé des autres institutions de
garantie.
Ceci dit, la gestion du pôle garantie doit résoudre quelques lacunes existantes dans le système
actuel. Ainsi, par exemple :
 Il faut abandonner la technique de la garantie adossée sur fonds propres qui mène par
construction à l’apparition de pertes d’exploitation et à la nécessité de recapitalisation
(termes générateurs de méfiance du monde bancaire) ;
 Il faut également constituer des fonds de garantie facilement assimilables par l’ensemble
du monde bancaire, ce qui n’est pas le cas actuellement, des fonds qui s’articuleraient
autour des principales étapes de la vie d’une entreprise ;
 Il faut aussi revoir les conditions générales des garanties (rémunération, délais,
modalités de règlement…) pour les rendre plus ou moins compatibles avec les réalités
de l’organisation des banques ;
 Et enfin il faut accentuer la proximité avec les exploitants bancaires au travers des
implantations régionales des organismes de garantie. L'institution dédiée au
financement agirait en tant que banque de la place et son capital sera ouvert aux banques
commerciales.
De ce fait, elle ne serait pas la concurrente des établissements bancaires, elle s’engagerait au
contraire, avec eux par des mécanismes de cofinancement. Certes, ces mécanismes impliquent
un partage des risques. Il reste que l'accompagnement par la garantie est indispensable, car le
traitement des dossiers sera partagé et donc mené simultanément par le pôle de financement et
le pôle en charge de la garantie. Cette démarche permettrait de conforter la décision de
financement. La configuration du système sera donc bipolaire et chapeautée par un centre
décisionnel unique.

106
Par ailleurs, le rôle de l’Etat dans la préparation du terrain pour un accroissement de la part des
financements bancaires dans les besoins financiers des PME est fondamental13. L’Etat doit
agir en concomitance avec une vraie compétition dans le système bancaire et libéralisation du
système financier. Comment l’Etat doit agir et par quel mode opératoire doit-il s’y prendre ?
Une déclaration de politique générale visant à promouvoir la PME? L’instauration d’une prime
d’encouragement aux investissements de ces entreprises? Une taxation différenciée avec
des exonérations fiscales ciblées? etc…
La structuration d'une offre financière aux PME doit également s'accompagner d'une
modernisation de certains volets du cadre juridique marocain. Parmi les domaines concernés, il
convient de citer: le statut fiscal des sociétés de capital risque, le cadre réglementaire des
transmissions d'entreprises et l'évolution du statut des prêts bonifiés. Ces quelques exemples
ont le mérite de montrer que la dynamisation du financement des PME marocaines est un
processus global qui nécessite la définition d'un cadre stratégique d'ensemble.

13
M’Fadel El Halaissi, op cité.

107
CONCLUSION

Après plus de 50 de l’indépendance du Maroc, et après plus d’une trentaine d’années des
premiers débuts des réformes financières menées au Maroc, la problématique du financement
des PME reste toujours d’actualité.
En effet, l’importance des PME comme une partie du tissu économique et social marocain n’a
cessé de prendre de l’ampleur dans le cadre d’une économie où le système de la rente rend
difficile le règne des conditions de l’efficience des marchés.
Ainsi, malgré les efforts accomplis par les autorités pour remédier à cette problématique de
financement des PME, des efforts qui ont touché tous les compartiments du système financier,
en commençant par le secteur bancaire et en passant par le marché du capital risque, celui
boursier ainsi que la panoplie des garanties et des lignes de financements internationales dédiées
aux PME, malgré tous ces efforts ces entreprises demeurent loin de la satisfaction de leurs
besoins de financement.
Les causes de cet échec, qui sont dues aussi bien à des éléments endogènes liés aux PME elles
mêmes (manque d’organisation manageriel, crainte de l’ouverture sur les exigences
communicationnelles du marché boursier, manque de transparence de la gestion financière…)
qu’à d’autres éléments exogènes aux PME et liés plutôt aux contraintes du système financier
marocain (contraintes imposées par les banques qui ne préfèrent financer que les grandes et
solides entreprises, un marché boursier non encore adaptée aux contraintes des PME, des lignes
de financements internationales non adaptées et insuffisamment communiquées aux PME…).
Nul ne peut ignorer l’évidence que là où la problématique de financement des PME a été résolue
c’était grâce au rôle central joué par les pouvoirs publics, d’où l’importance de la création d’une
entité publique ou à capital mixte chargée de l’accompagnement du financement des PME en
plus d’une panoplie de mesures d’ordre juridique, fiscal et communicationnel qui doivent
accompagner tout effort de redynamisation du marché de financement des PME au Maroc.

108
BIBLIOGRAPHIE

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 Banque Magazine, « Banques-PME : la bonne entente ? », N° 619, Novembre 2000.
 Banque Centrale du Maroc, « Circulaire N° 8/G/2010 », Rabat, 31 décembre 2010.
 Bulletin officiel N° 5036 du 27 Joumada II 1423 (5 septembre 2002).
 Caisse Centrale de Garantie, « Guide sur les produits de la Caisse Centrale de Garantie
à l’usage des entreprises ».
 Centre des jeunes dirigeants d’entreprises, « Reconnaitre l’importance des PME pour
mieux stimuler leur développement », 2002.
 Chambre Française de Commerce et d’Industrie au Maroc, « Les Clefs de la mise à
niveau », Décembre 2002.
 Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement, « Améliorer
l’accès des PME au Financement au Maroc », Mai 2010.
 Conseil Déontologique des Valeurs Mobilières du Maroc, « Le financement des PME
au Maroc », Mai 2011.
 G. Chertok ; P.A. Malleray ; P. Pouletty, « Le financement des PME », 2009.
 Ministère de l’Economie sociale, des Petites et moyennes entreprises et de l’Artisanat
chargée des Affaires Générales du Gouvernement, « La Petite et moyenne entreprise,
moteur de la croissance économique : Le livre blanc », 2002.
 Ministère de l’économie sociale, des PME et de l’artisanat, « Rapport sur le financement
des petites et moyennes entreprises au Maroc », document réalisé par les experts de la
Caisse de Dépôts et de Consignation et la Banque de Développement des PME de la
France, Rabat, mars 2002.
 Ministère des Finances et de la privatisation, « Evaluation du financement de la PME
au Maroc », Document de travail n°91, Direction de la Politique Economique Générale,
Rabat, août 2003.
 Ministère des finances et de la privatisation, « Evaluation du financement de la PME au
Maroc », document de travail N° 91, Aout 2003.
 Publications de l’Agence Nationale pour la Promotion des PME (ANPME).

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