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Méthode des Éléments Finis

et Problèmes Elliptiques

Hatem ZENZRI et Mohamed AIDI

École Nationale d’Ingénieurs de Tunis

16 septembre 2011
Avant-propos

1
Table des matières

1 Introduction à la méthode des éléments finis par des exemples en thermique et en élastic
1.1 Exemple 1 : Étude d’un problème d’équilibre thermique . . . . . . . . . . . 5
1.1.1 Problème aux limites et formulation variationnelle . . . . . . . . . 5
1.1.2 Résolution du problème variationnel discret . . . . . . . . . . . . . 7
1.1.3 Espace éléments finis, maillage, nœud et degré de liberté . . . . . . 8
1.1.4 Illustration de l’approximation pour un problème unidimensionnel . 13
1.1.5 Illustration pour un problème bidimensionnel . . . . . . . . . . . . 15
1.2 Exemple 2 : Étude d’un problème d’équilibre en élasticité . . . . . . . . . . 16
1.2.1 Problème aux limites et formulation variationnelle . . . . . . . . . . 17
1.2.2 Résolution par la méthode des éléments finis . . . . . . . . . . . . . 19
1.3 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

2 Problèmes variationnels et espaces de Sobolev 25


2.1 Le théorème de Lax-Milgram . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
2.2 Problèmes variationnels symétriques et problèmes de minimisation . . . . 26
2.3 Les espaces de Sobolev . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
2.3.1 L’espace L2 (Ω) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
2.3.2 Rappels sur les distributions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
2.3.3 L’espace de Sobolev H 1 (Ω) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
2.3.4 L’espace de Sobolev H 2 (Ω) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
2.3.5 L’espace (H 1 (Ω))N . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
2.4 Récapitulatif des principaux résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
2.5 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41

3 Etude de quelques problèmes aux limites elliptiques 44


3.1 Problèmes du laplacien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
3.1.1 Le problème de Dirichlet homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
3.1.2 Le problème de Dirichlet non homogène . . . . . . . . . . . . . . . 46
3.1.3 Le problème de Neumann homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
3.1.4 Problème mêlé de Dirichlet-Neumann . . . . . . . . . . . . . . . . 49
3.2 Le problème de l’équilibre en élasticité tridimensionnelle . . . . . . . . . . 50

2
3.3 Un problème elliptique du quatrième ordre . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52
3.4 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

4 Quelques éléments finis usuels 57


4.1 Définition d’un élément fini . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
4.2 Quelques éléments finis de Lagrange . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
4.2.1 Rappels sur les coordonnées barycentriques . . . . . . . . . . . . . . 58
4.2.2 Exemples d’éléments finis unidimensionnels . . . . . . . . . . . . . . 59
4.2.3 Exemples d’éléments finis plans . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
4.2.4 Exemples d’éléments finis tridimensionnels . . . . . . . . . . . . . . 63
4.3 Quelques éléments finis de Hermite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
4.3.1 Un exemple unidimensionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
4.3.2 L’élément fini plan de Zienckiewich . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
4.3.3 L’élément fini plan d’Argyris . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
4.3.4 L’élément fini rectangle de Bogner-Fox-Schmit . . . . . . . . . . . . 68
4.4 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

5 Espaces éléments finis et estimations d’erreur 69


5.1 Construction d’espaces éléments finis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
5.1.1 Maillage ou Triangulation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
5.1.2 Espace éléments finis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
5.1.3 Interpolation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
5.1.4 Classe d’un élément fini . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
5.2 Estimations d’erreur pour l’approximation par la méthode des éléments finis conforme 72
5.2.1 Dimension de l’espace éléments finis Xh pour n = 2 . . . . . . . . . 76

3
Chapitre 1

Introduction à la méthode des


éléments finis par des exemples en
thermique et en élasticité

La méthode des éléments finis est une méthode numérique utilisée pour le calcul de
solutions approchées de problèmes définis par des équations aux dérivées partielles et des
conditions aux limites. Ces problèmes aux limites apparaissent constamment en physique
et il en existe particulièrement trois grandes classes, illustrées chacune par un problème
typique. Le phénomène de propagation des ondes conduit à un problème aux limites
du type hyperbolique. Les problèmes paraboliques sont représentatifs des problèmes de
diffusion, par exemple de la chaleur. Enfin, les problèmes elliptiques apparaissent dans les
études de régime stationnaire en thermique, en mécanique ou en électricité.
Pendant longtemps, l’outil le plus utilisé pour la résolution des équations aux dérivées
partielles a été la méthode des différences finies. Peu à peu, et en raison de sa rigueur et de
sa souplesse d’emploi, la méthode des éléments finis a connu un essor remarquable. Pour
un problème aux limites donné, la méthode des différences finies part de l’approximation
des opérateurs différentiels en utilisant les développements de Taylor, alors que la méthode
des éléments finis part d’une formulation intégrale dite variationnelle.
L’invention de la méthode des éléments finis est attribuée à Courant en 1943 [1].
Quelques années plus tard, les ingénieurs l’ont réinventée pour résoudre des problèmes de
calcul de structures, et ceci indépendamment du travail de Courant ; les plus anciennes
références citées dans la littérature sont celles d’Argyris [2] qui datent de 1954. Ensuite et
dés le début des années soixante, de nombreux travaux mathématiques ont été menés sur
cette méthode. Actuellement, et dans le champ d’application des sciences de l’ingénieur,
la méthode des éléments finis est intégrée dans la plupart des logiciels de calcul et de
conception assistée par ordinateur.
Dans ce chapitre nous introduisons la méthode des éléments finis en la mettant en

4
œuvre dans l’étude de problèmes d’équilibre en thermique et en élasticité. Certains as-
pects mathématiques concernant la régularité des fonctions considérées, sont volontaire-
ment ignorés dans ce chapitre et sont traités dans les chapitres suivants. Les exemples en
thermique sont choisis pour être traités analytiquement. Les exemples en élasticité sont
traités en ayant recours à un logiciel d’éléments finis.

1.1 Exemple 1 : Étude d’un problème d’équilibre ther-


mique
Le problème considéré consiste à déterminer le champ de température dans un milieu
occupant une géométrie Ω (Ω ⊂ RN , N ∈ {1, 2, 3}) de frontière ∂Ω. Le matériau consti-
tuant le milieu est homogène et isotrope. Il obéit à la loi de Fourier pour la conduction
de la chaleur et son coefficient de conductivité thermique est λ > 0. La température est
imposée nulle sur ∂Ω et le milieu est soumis à une densité volumique de taux de chaleur
s définie dans Ω.

1.1.1 Problème aux limites et formulation variationnelle


La détermination du champ de température T revient alors à résoudre le problème
aux limites (
−λ∆T = s dans Ω
(1.1)
T = 0 sur ∂Ω,
dans lequel l’équation aux dérivées partielles est appelée équation de la chaleur en régime
stationnaire.

Proposition 1.1 Si T est une solution ”suffisamment régulière” de (1.1) alors T est
solution du problème variationnel suivant :

 Trouver T ∈ V tel que

(1.2)


a(T, θ) = L(θ) ∀ θ ∈ V

où :
V = {τ : Ω → R, τ suffisamment régulière et τ = 0 sur ∂Ω} , (1.3)
Z
~ ∇θ
a(T, θ) = λ ∇T. ~ dΩ , (1.4)

et Z
L(θ) = sθ dΩ . (1.5)

5
Preuve. Nous rappelons que la formule d’intégration par parties de Green s’écrit :
Z Z Z
∂U ∂V
V dΩ = U V ni dΓ − U dΩ (1.6)
Ω ∂xi ∂Ω Ω ∂xi

où U et V sont deux fonctions définies sur Ω, xi est une coordonnée cartésienne par
rapport à une base orthonormée (e~1 , e~2 , ..., e~N ) de RN (~x = xi e~i ) 1 et ni est la composante
selon e~i du vecteur ~n unitaire et normal extérieur à ∂Ω (~n = ni e~i ).
Si T est une solution suffisamment régulière du problème (1.1), alors pour toute fonc-
tion θ suffisamment régulière on a :
Z Z
− λ ∆T θ dΩ = sθ dΩ (1.7)
Ω Ω

et 2 comme ∆T = T,ii , l’application de la formule de Green conduit à :


Z Z Z
∂T ∂θ ∂T
λ dΩ − λ ni θdΓ = sθ dΩ (1.8)
Ω ∂xi ∂xi ∂Ω ∂xi Ω

et la restriction de (1.8) aux fonctions θ appartenant à l’espace V (θ = 0 sur ∂Ω) conduit


immédiatement au résultat proposé. 

Le problème (1.2) est une formulation variationnelle de (1.1) sur l’espace V . L’écriture
d’une telle formulation intégrale constitue la première étape de la mise en œuvre de la
méthode des éléments finis. En précisant la définition de l’espace V , les résultats du
chapitre 3 nous permettront de montrer que la solution du problème (1.2) existe et est
unique.

La résolution de (1.2) serait immédiate si V était de dimension finie. Or, en général


cet espace est de dimension infinie. La seconde étape de la méthode des éléments finis
consiste alors à chercher une solution approchée en se limitant à un sous-espace de V de
dimension finie. Pour un sous-espace V k de dimension finie k, ceci conduit alors à définir
le problème variationnel discret suivant :
hnb,ç 
k k
 Trouver T ∈ V tel que

(1.9)

 k k k k k
a(T , θ ) = L(θ ) ∀ θ ∈ V .
Il est à noter que le remplacement de l’espace fonctionnel V par un sous-espace de
dimension finie V k constitue la base d’une méthode générale d’approximation, appelée
méthode de Galerkin, et la méthode des éléments finis en est un cas particulier.
1. La convention de sommation sur les indices répétés est utilisée dans tout le livre.
∂2A
2. Notation : A,kl =
∂xk ∂xl

6
1.1.2 Résolution du problème variationnel discret
Proposition 1.2 La solution T k du problème variationnel discret (1.9) existe et est
unique.
Étant donnée une base (τ1 , τ2 , ..., τk ) de V k dans laquelle T k (~x) = Tik τi (~x), le vecteur
 
colonne T k de composantes T1k , ..., Tkk est solution du système linéaire suivant :
 k  k  k
R . T = F , (1.10)
   
où les composantes de la matrice 3 Rk et celles du vecteur colonne F k sont :
k
Rij = a(τi , τj ) i, j ∈ {1, 2, ..., k}, (1.11)
Fik = L(τi ) i ∈ {1, 2, ..., k}. (1.12)
Preuve. Pour des fonctions T k et θk dans V k
T k (~x) = Tik τi (~x) et θk (~x) = θjk τj (~x)
et étant donné que T k est solution de (1.9) on a :
a(Tik τi , θjk τj ) = L(θjk τj ).
L et a étant des formes respectivement linéaire et bilinéaire sur V , on obtient :
Tik Rij
k k
θj = Fjk θjk
 
La symétrie de la matrice Rk , qui découle de la symétrie de la forme bilinéaire a, conduit
alors à :
k

Rji Tik θjk = Fjk θjk
d’où :
         
Rk . T k − F k . θ k = 0 ∀ θk ∈ Rk
ce qui conduit au système linéaire (1.10).
La forme bilinéaire a est aussi définie positive :
∀τ ∈ V a(τ, τ ) ≥ 0 et (a(τ, τ ) = 0 ⇒ τ = 0) .
En effet, Z
a(τ, τ ) = λ ~ ∇τ
∇τ. ~ dΩ ≥ 0

et
a(τ, τ ) = 0 ⇒ τ = constante dans Ω
lorsque Ω est connexe 4 . Et comme τ = 0 sur ∂Ω, la constante est donc nulle et τ = 0
dans Ω.
La définie positivité de la forme bilinéaire a entraı̂ne la définie positivité de la matrice
 k
R , ce qui prouve l’existence et l’unicité de la solution du système linéaire (1.10). 
 
3. Les matrices Rk sont appelées matrices de rigidité.
4. Ω est connexe signifie qu’il n’est pas la réunion de deux ouverts non vides disjoints

7
1.1.3 Espace éléments finis, maillage, nœud et degré de liberté
La détermination de l’approximation T k de T revient à calculer les scalaires
Tik (i = 1, ..., k) en inversant le système linéaire (1.10). Cette approximation ne serait
pertinente que si k est ”suffisamment grand” pour que l’espace V k soit ”proche” de V .
Autrement dit, il faudrait que T k converge vers T lorsque k tend vers l’infini ; cette ques-
tion de convergence fait l’objet du chapitre 5.
Le choix des sous-espaces de dimensions finies V k constitue la troisième étape de la
mise en œuvre de la méthode des éléments finis. Dans cette méthode, les sous-espaces V k
sont appelés espaces éléments finis.
Le choix des espaces éléments finis V k revient à un choix d’une base (τ1 , τ2 , ..., τk )
qui permet entre autre de fixer l’interprétation des inconnues Tik . Les fonctions τi sont
appelées les fonctions de base de l’approximation par éléments finis. La construction de ces
fonctions repose sur les notions de maillage, nœuds et degrés de liberté. La formalisation de
ces notions fait l’objet du chapitre 4 et nous nous contentons dans ce chapitre introductif
d’en donner des définitions sommaires et des exemples simples couramment utilisés en
pratique.

Maillage
Le maillage d’un domaine Ω correspond à un découpage de Ω en éléments géométriques
simples Ke , e = 1..Ne . Ces éléments géométriques sont appelés éléments finis ou mailles
S
et constituent un recouvrement de Ω : Ke = Ω.
e=1..Ne

– Pour un domaine unidimensionnel le maillage est un découpage en segments tel que


l’intersection de deux éléments finis distincts est soit vide, soit réduite à un point
extrémité d’un segment.

– Pour un domaine bidimensionnel les éléments finis les plus courants sont les triangles
et les quadrangles. L’intersection de deux éléments finis distincts est soit vide, soit
réduite à un sommet, soit réduite à une arête complète.

oui non non

Figure 1.1 – Maillages bidimensionnels acceptables/non acceptables.

– Pour un domaine tridimensionnel les éléments finis les plus courants sont les tétraèdres,
les hexaèdres (appelés éléments cubiques) et les prismes à bases triangulaires. L’in-
tersection de deux éléments finis distincts est soit vide, soit réduite à un sommet,
soit réduite à une arête complète, soit réduite à une face complète.

8
Nœuds d’un maillage et degrés de liberté d’une fonction
Dans un maillage, les nœuds sont des points particuliers des éléments finis ; par exemple
les sommets des mailles, les centres de gravité des mailles, les milieux des arêtes,...
Pour une fonction g définie sur le domaine Ω et pour un nœud Ai du maillage de Ω, la
valeur de g en Ai définit un exemple de degré de liberté (ddli ) de g associé au nœud Ai .

ddli (g) = g(Ai ) (1.13)

Dans ce chapitre, nous nous limitons aux degrés de liberté du type (1.13). D’autres
types de degrés de liberté sont présentés dans le chapitre 4.

Les fonctions de base d’un espace éléments finis


A chaque nœud Ai du maillage, et donc à chaque degré de liberté ddli , est associée une
fonction de base τi définie par :
1. τi est une fonction continue sur Ω et polynomiale par maille,
2. τi est complètement définie (de façon unique) par l’ensemble de ses degrés de liberté.
Ces degrés de liberté sont tous nuls excepté le ième qui est fixé à la valeur 1 :

ddlj (τi ) = τi (Aj ) = δij (1.14)

où δ désigne le symbole de Kronecker (δij = 1 si i = j et δij = 0 si i 6= j).

Ainsi, les composantes Tik de l’approximation T k dans un espace éléments finis V k =


V ect{τ1 , ..., τk } correspondent aux degrés de liberté de T k . En effet, et en vertu de (1.14),
on a :
ddli (T k ) = T k (Ai ) = Tjk τj (Ai ) = Tjk δji = Tik .
En outre, l’approximation T k est une fonction continue sur Ω et polynomiale par maille.

La définition des fonctions de base implique aussi que sur une maille l’espace poly-
nomial considéré et les degrés de liberté par maille sont tels que : Tout polynôme est
complètement défini par la donnée de ses degrés de liberté sur la maille. Ce qui est aussi
équivalent à : Tout polynôme est complètement défini par la donnée de ses valeurs aux
nœuds de la maille.
En particulier, il est nécessaire que la dimension de l’espace polynomial considéré sur
une maille soit égale au nombre des degrés de liberté de la maille, et donc égale au nombre
des nœuds de la maille.

Exemples d’espaces éléments finis pour un domaine unidimensionnel


Considérons le maillage obtenu suite à un découpage régulier du domaine Ω =] 0, L [ en
k + 1 segments [Si , Si+1 ] i = 0, ..., k (figure 1.2). Ces segments constituent les éléments
finis du maillage.

9
– Pour une approximation affine par maille, l’espace éléments finis est l’espace des
fonctions continues sur Ω et affines par maille. Dans cet espace, les degrés de liberté
d’une fonction sont ses valeurs aux sommets Si . Ces sommets constituent alors les
nœuds du maillage. Les graphes des fonctions de base sont donnés dans la figure
(1.2).

L/(k+1)
0=S0 S1 ..... Sk+1 =L
-x

6τ 6τ
0 k
1 1
\ \
\  \
\ -  \-

6τ 6τ
1 k+1
1 1
\ 
 \ 
 \ -  -

Figure 1.2 – Maillage de Ω =] 0, L [ et fonctions de base affines par maille.

L’élément fini à 2 degrés de liberté est dénommé le segment P1 (pôlynome de degré


≤ 1)(figure 1.4).

– Pour une approximation par des fonctions continues sur Ω et polynomiales de degré
deux par maille, les nœuds du maillage sont les extrémités (Si ) et les milieux des
segments. Ces nœuds sont donc les points Aj (j = 0..2k + 2) définis par :

1
A2i = Si i = 0..k + 1 et A2i+1 = Si ∗ Si+1 = (Si + Si+1 ) i = 0..k.
2
Les graphes des fonctions de base τ1 , τ2 , τ3 et τ4 sont donnés dans la figure (1.3).
L’élément fini à 3 degrés de liberté est dénommé le segment P2 (figure 1.4).

Exemples d’espaces éléments finis triangulaires pour un domaine bidimen-


sionnel
Considérons le maillage obtenu suite à un découpage régulier du domaine Ω = ] 0, L [×] 0, L [ ,
par des triangles. Ces triangles constituent les éléments finis du maillage.

– Pour une approximation affine par maille, l’espace éléments finis est l’espace des
fonctions continues sur Ω et affines par triangle. Dans cet espace, les degrés de
liberté d’une fonction sont ses valeurs aux sommets Si des triangles. Ces sommets

10
Figure 1.3 – Fonctions de base pour l’élément fini segment P2 .

Segment P1 Segment P2

• • • • •

Figure 1.4 – Schématisation d’éléments finis unidimensionnels P1 et P2 .

constituent alors les nœuds du maillage. La figure 1.5 présente des exemples de
maillages de Ω par des triangles. A chaque nœud Si est associée une fonction de
base τi continue sur Ω, affine par maille et vérifiant τi (Sj ) = δij . Les triangles repérés
par des étoiles dans la figure 1.5 (a) constituent le support 5 de la fonction τi associée
au nœud Si . L’élément fini triangulaire à 3 degrés de liberté est dénommé le triangle
P1 (figure 1.6).
Pour le maillage à quatre triangles (K1 , K2 , K3 , K4 ) de la figure 1.5 (b), la fonction
de base τ1 associée au degré de liberté du nœud S1 a pour expression :
 y

 2 dans K1


 L




 x


 2(1 − ) dans K2
 L
τ1 (x, y) = (1.15)

 y
 2(1 − ) dans K3




 L



 2x


dans K4 .
L
– Pour une approximation par des fonctions continues sur Ω et polynomiales de degré
deux par maille, les nœuds du maillage sont les sommets des triangles et les milieux
5. Le support d’une fonction est l’ensemble des points en lesquels cette fonction est non nulle.

11
6y
L
@ @ @ @ @ K3
@ @ @ @ @
@ @ @ @ @ @
@ @@ @ @
@ * @ @ @
@ *
@ * @ Si @ @
@ K4
@ S1
K2
@@ @ @
@
@ @ * @ * @ @
@ @ *@ @ @
@ @ @@ @
@ @ @ @
@ @
@ @ @ @
@ @ @ K1 @ x
@ @ @
@ @ @-
0 L
(a) (b)

Figure 1.5 – Maillage de Ω = ] 0, L [×] 0, L [ par des éléments triangulaires.

de leurs arêtes. Cet élément fini triangulaire à 6 degrés de liberté est dénommé le
triangle P2 (figure 1.6).

• •
A A
 A  A
 A • A•A
 A 
 A  A
• A• • • A•

P1 P2

Figure 1.6 – Schématisation d’éléments finis triangulaires P1 et P2 .

Exemples d’espaces éléments finis quadrangulaires


Considérons le maillage obtenu suite à un découpage régulier du domaine Ω = ] 0, L [×] 0, L [ ,
par des carrés (figure 1.7). Ces carrés constituent les éléments finis du maillage.

– Pour une approximation dans laquelle les nœuds du maillage sont les sommets des
quadrangles, l’espace élément fini est l’espace des fonctions continues sur Ω et po-
lynômiales par maille, les polynômes étant de degré ≤ 1 par rapport à chacune des
variables. L’espace de ces polynômes est :
 
Q1 R2 = Vect{1, x, y, xy}.

L’élément fini quadrangulaire à 4 degrés de liberté est dénommé le quadrangle Q1


(figure 1.8).

12
Figure 1.7 – Maillage de Ω = ] 0, L [×] 0, L [ par des éléments quadrangulaires.

– Pour une approximation dans laquelle l’espace polynomial considéré est celui des
polynômes de degré ≤ 2 par rapport à chacune des variables :
 
Q2 R2 = Vect{1, x, y, xy, x2 , y 2 , x2 y, xy 2 , x2 y 2 },

les nœuds du maillage sont les sommets des quadrangles, les milieux des arêtes et
les centres des quadrangles (9 degrés de liberté par maille). L’élément fini quadran-
gulaire à 9 degrés de liberté est dénommé le quadrangle Q2 (figure 1.8).

• • • • •

• • •

• • • • •
Q1 Q2

Figure 1.8 – Schématisation d’éléments finis quadrangulaires Q1 et Q2 .

1.1.4 Illustration de l’approximation pour un problème unidi-


mensionnel
Pour un domaine unidimensionnel Ω =] 0, L [ , nous reprenons le problème aux limites
(1.1) et sa formulation variationnelle (1.2) dans l’espace

V = {τ : Ω → R, τ suffisamment régulière et τ (0) = τ (L) = 0} .

Nous recherchons pour ce problème une approximation par éléments finis affine par maille.
Le maillage considéré est un maillage régulier en k + 1 segments [Si , Si+1 ] i = 0, ..., k
(figure 1.2). Ces segments constituent les éléments finis du maillage et leurs extrémités

13
sont les nœuds de la formulation éléments finis considérée. L’espace éléments finis est
l’espace V k = Vect{τ1 , ..., τk }. Les graphes des fonctions de base τ1 , ..., τk sont ceux de la
figure (1.2). Il est à noter que V k est bien un sous-espace de V dans la mesure où toutes
les fonctions de base considérées (τ1 , ..., τk ) vérifient les conditions aux limites contenues
dans la définition de V . (Les fonctions τ0 et τk+1 , de la figure (1.2), ne vérifient pas ces
conditions aux limites.)
 
Les composantes de la matrice de rigidité Rk se calculent aisément à partir des
relations (1.11) qui s’écrivent ici :
Z L
k dτi dτj
Rij = λ dx i et j ∈ {1, .., k} (1.16)
0 dx dx

et on obtient :  
2 −1
0 ··· 0
 −1 2 . . . . . . ... 
 
k+1 
 0 ... ... ... 0  .
 k  
R =λ (1.17)
L  
 .. . . . . . . 
 . . . . −1 
0 · · · 0 −1 2
 k
Il est à noter que les matrices R ont de faibles largeurs de bande. Ceci est dû au fait
que les fonctions de base ont des supports réduits à quelques mailles. Le support d’une
fonction de base correspond aux mailles contenant le nœud associé à cette fonction. Ainsi,
de nombreux couples de fonctions de base (τi , τj ) ont des supports disjoints ce qui entraı̂ne
k
que pour ce couple la composante Rij = a(τi , τj ) est nécessairement nulle. En numérotant
judicieusement les nœuds, il est alors possible de minimiser la largeur de bande de la
 
matrice Rk .
Les composantes du vecteur F k se calculent à partir des relations (1.12) qui s’écrivent
ici : Z L
Fik = τi s dx i ∈ {1, .., k}, (1.18)
0
et en prenant à titre d’exemple :
x2
s(x) = λT0 , (1.19)
L4
on obtient :  
7
  ..



 .
 k λT0  2 
F = 3
 6i + 1 . (1.20)
6(k + 1) L  .. 
 . 
 
2
6k + 1
 k  k  k
La résolution du système linéaire R . T = F permet alors de déterminer l’ap-
proximation T k de T .

14
Dans cet exemple simple, la solution exacte T est facile à déterminer et elle s’écrit :
 
x x3
T (x) = T0 1− 3 . (1.21)
12L L
Une comparaison de cette solution exacte avec la solution obtenue par la méthode des

0.04
T/To
Solution exacte
Solution par la M.E.F
0.03

0.02

0.01

S1 S2 S3 x/L
0 0.25 0.5 0.75 1

Figure 1.9 – Comparaison entre la solution exacte et une solution obtenue par la M.E.F.

éléments finis en prenant k = 3 est présentée dans la figure (1.9). Il est à remarquer que
dans cet exemple les valeurs prises par T k aux points Si et calculées par la méthode des
éléments finis, coı̈ncident avec celles de la solution exacte (T k (Si ) = T (Si )). Ce résultat
est propre aux problèmes unidimensionnels et il est prouvé dans l’exercice II-3 du chapitre
2.

1.1.5 Illustration pour un problème bidimensionnel


Pour le domaine Ω = ] 0, L [×] 0, L [ , nous recherchons une approximation par éléments
finis affine par maille du problème aux limites (1.1) de formulation variationnelle (1.2).
Afin d’éviter les longs calculs, nous nous limitons dans cette illustration à la recherche
d’une solution approchée construite à partir du maillage à quatre triangles (K1 , K2 , K3 , K4 )
de la figure 1.5 (b).
A cause de la condition aux limites T = 0 sur ∂Ω, l’espace élément fini déduit de ce
maillage est un espace de dimension 1 et sa fonction de base, τ1 , associée au degré de
liberté du nœud S1 est la fonction définie dans l’équation (1.15).
Le calcul par la méthode des éléments finis consiste alors à déterminer une approxi-
mation, T 1 , de la température au point S1 (de coordonnées x = y = L/2). Cette approxi-
1
mation est alors solution de : R11 .T 1 = F 1 où
Z
1
R11 = λ ~ 1 .∇τ
∇τ ~ 1 dxdy = 4λ. (1.22)
K1 ∪K2 ∪K3 ∪K4

En prenant, à titre d’exemple,


λT0 x2 + y 2 − L(x + y)
s(x, y) = −32 , (1.23)
L2 L2

15
on obtient après quelques lignes de calcul
Z
1 32
F = s(x, y) τ1 (x, y) dxdy = λ T0 , (1.24)
K1 ∪K2 ∪K3 ∪K4 15
8
et l’approximation de la température au point S1 est T 1 = T0 .
15
Dans cet exemple simple, le choix du champ s défini par (1.23) fait que la solution
exacte T s’écrit :
xy x y
T (x, y) = 16 T0 1− 1− (1.25)
LL L L
et la température exacte au point S1 est T0 . On observe ainsi que contrairement au cas
unidimensionnel la solution obtenue par la méthode des éléments finis et la solution exacte
ne coı̈ncident pas aux nœuds du maillage.
Dans cet exemple bidimensionnel et vu la forme polynomiale de la solution exacte
(1.25), celle ci pourrait être exactement retrouvée par la méthode des éléments finis. Il
suffirait pour cela de considérer un maillage constitué d’un seul élément, qui n’est autre
que le carré ] 0,L[×] 0, L[ , et l’espace élément fini serait l’espace engendré par le polynôme
xy x y
16 1− 1− . Ce polynôme correspond à la fonction de base associée au nœud
LL L L
S1 .

Il est à noter que dans toutes les illustrations présentées ci-dessus, les calculs d’intégrales
ont été menés de façon analytique alors qu’en pratique l’intégration numérique, ou qua-
drature numérique est largement utilisée dans les logiciels d’éléments finis. La méthode
de quadrature de Gauss (cf. annexe 1) est la méthode numérique la plus utilisée.

1.2 Exemple 2 : Étude d’un problème d’équilibre en


élasticité
Le problème considéré consiste à déterminer les champs de déplacement et de contrainte
dans un solide occupant une géométrie cylindrique Ω de rayon R, d’axe oz et de hauteur h.
Le solide est constitué d’un matériau non pesant, homogène, isotrope et élastique linéaire
de module d’Young E et de coefficient de Poisson ν. Le solide est supposé en contact sans
frottement avec des supports rigides et fixes placés sur sa surface latérale (r = R) et sur
sa base inférieure (z = 0). La base supérieure (z = h) du solide est soumise à une pression
p exercée sur une zone circulaire de rayon a (figure 1.10).
Sous l’effet de ce chargement, le solide est supposé évoluer de façon quasi-statique
depuis son état d’équilibre initial à un état d’équilibre final. Dans cette évolution les
hypothèses des petites perturbation sont supposées vérifiées. Ces hypothèses consistent
à supposer que les déplacements sont très faibles devant les dimensions du solide ce qui
permet de négliger les changements de géométrie. Elles supposent aussi que les gradients
des déplacements sont faibles devant 1.

16
z

r
R

Figure 1.10 – Géométrie et conditions aux limites du problème d’équilibre

1.2.1 Problème aux limites et formulation variationnelle


Dans ce problème d’équilibre les inconnues sont le champ de contrainte σ (tenseur
d’ordre 2 symétrique) et le champ de déplacement ~u (vecteur de R3 ). Ces champs vérifient
les équations du problème aux limites suivant :

div σ = ~0 dans Ω (1.26)


1
ε(~u) = (∇~u +t ∇~u) dans Ω (1.27)
2
σ = λ T r(ε(~u)) δ + 2 µ ε(~u) dans Ω (1.28)
σrz = σθz = 0, uz = 0 pour z = 0 (1.29)
ur = 0, σrz = σrθ = 0 pour r = R (1.30)
σrz = σθz = 0, σzz = −p pour z = h et 0 ≤ r ≤ a (1.31)
σrz = σθz = σzz = 0, pour z = h et a < r ≤ R (1.32)

L’équation (1.26) est l’équation d’équilibre. L’équation (1.27) définit le tenseur de


déformation linéarisé ε. L’équation (1.28) correspond à la loi de comportement élastique
linéaire et isotrope dans laquelle δ désigne le tenseur identité. Les coefficients de Lamé λ
et µ sont :

17
ν E
λ=E , µ= (1.33)
(1 + ν)(1 − 2ν) 2(1 + ν)
Et il est à rappeler que les constantes élastiques E et ν vérifient :
1
E>0 et −1<ν < (1.34)
2
ce qui entraı̂ne que :
µ>0 et 3λ + 2µ > 0 (1.35)
Les équations (1.29-1.32) constituent les conditions aux limites écrites en fonction des com-
posantes des champs de contrainte et de déplacement dans la base orthonormée (~er , ~eθ , ~ez )
des coordonnées cylindriques.

Une formulation variationnelle en déplacement


Si (σ, ~u) est une solution suffisamment régulière du problème (1.26-1.32), alors pour
tout champ ~v suffisamment régulier l’équation d’équilibre (1.26) entraı̂ne :
Z
(div σ).~v dΩ = 0 (1.36)

ce qui, en considérant les composantes des tenseurs dans une base orthonormée cartésienne,
conduit à Z
σij,j vi dΩ = 0 (1.37)

et en utilisant la formule de Green (1.6) on obtient :
Z Z
σij nj vi dΓ − σij vi,j dΩ = 0. (1.38)
∂Ω Ω

La symétrie de σ entraı̂ne alors 6 :


Z Z
− σ : ε(~v ) dΩ + (σ.~n).~v dΓ = 0 (1.39)
Ω ∂Ω
| {z } | {z }
Wint (~v ) Wext (~v )

La relation (1.39) correspond en mécanique au théorème des travaux virtuels ([7], [8])
qui énonce que pour une structure à l’équilibre la somme du travail virtuel des efforts
intérieurs Wint (~v ) et du travail virtuel des efforts extérieurs Wext (~v ) est nulle pour tout
champ de déplacement virtuel ~v .
En tenant compte de la relation de comportement (1.28) et des conditions aux limites
(1.29-1.32), on obtient à partir de (1.39) la formulation variationnelle en déplacement
suivante : 
 Trouver ~u ∈ V tel que

(1.40)


a(~u, ~v ) = L(~v ) ∀ ~v ∈ V
6. Pour 2 tenseurs d’ordre 2 on note A : B = T r(A.B) = Aij Bji

18
où


 V = {~v suffisamment régulier / vz (z = 0) = 0 et vr (r = R) = 0}




 R
a(~u, ~v ) = Ω (λ T r(ε(~v )) T r(ε(~u)) + 2 µ ε(~v ) : ε(~u)) dΩ (1.41)





 L(~v ) = −p R

v dΓ.
0≤r≤a,z=h z

En se limitant aux champs de déplacement respectant la symétrie de révolution du


problème d’équilibre (uθ = 0 et ~u indépendant de θ) et en précisant la définition de l’espace
V , les résultats du chapitre 3 nous permettront de démontrer l’existence et l’unicité de la
solution ~u du problème variationnel (1.40-1.41).

1.2.2 Résolution par la méthode des éléments finis


En procédant comme dans l’exemple du problème thermique, la détermination d’une
approximation par éléments finis de ~u consiste à résoudre un problème variationnel discret
défini sur un espace élément fini V k de dimension finie, sous espace de V , construit à partir
d’un maillage du domaine Ω et une formulation élément fini. La résolution du problème
variationnel discret revient alors à inverser un système linéaire dans lequel les inconnues
sont les composantes du déplacement (selon e~r et e~z ) aux nœuds du maillage.
z
R=3a=h/2=75mm

R
a

(1) (2)

Figure 1.11 – Maillage de la configuration initiale (1) et géométrie déformée (2) amplifiée
4 fois.

L’approximation par la méthode des éléments finis est ici construite en utilisant le code
de calcul Cast3M [3]. La symétrie de révolution du problème d’équilibre nous permet
de limiter les calculs à la section médiane rectangulaire définie par : 0 ≤ r ≤ R et

19
0 ≤ z ≤ h. Le maillage choisi est à base d’éléments quadrangulaires avec une formulation
élément fini du type Q1 . Ce maillage comporte 450 éléments et 1441 nœuds qui sont les
sommets des quadrangles (figure 1.11.(1)). Avec la formulation élément fini ainsi choisie,
les composantes ur et uz de la solution approchée sont des fonctions continues sur Ω et
polynomiales par maille ; les polynômes étant de degré ≤ 1 par rapport à chacune des
variables r et z.
Au niveau du code de calcul, et après avoir défini la géométrie et le maillage, les
données à introduire sont les suivantes :
– le type de problème étudié : symétrie de révolution, mécanique et élasticité isotrope,
– les caractéristiques des matériaux : E = 1 M P a et ν = 0.3,
– les conditions aux limites : blocage de ur en r = R et uz en z = 0,
– le chargement : pression p = 0.1M P a sur la surface z = h et 0 ≤ r ≤ a.

La résolution numérique fournit alors, par inversion d’un système linéaire, les compo-
santes du déplacement selon e~r et e~z aux nœuds du maillage. La figure 1.11.(2) présente
la déformée de la section médiane avec un facteur d’amplification de 4. La figure 1.12
fournit les isovaleurs des composantes ur et uz du champ de déplacement.

R=3a=h/2=75mm
−3.22E−02 0.26
−0.23 0.22
−0.42 0.19
−0.61 0.15
−0.81 0.11
−1.00 6.94E−02
−1.
2 3.05E−02
−1.
4 −8.33E−03
−1.
6 −4.72E−02
−1.
8 −8.60E−02
−2.
0 −0.12
−2.
2 −0.16
−2.
4 −0.20
−2.
5 −0.24
−2.
7 −0.28
−2.
9 −0.32
−3.
1 −0.36
−3.
3 −0.40
−3.
5 −0.44
−3.
7 −0.47
−3.
9 −0.51
−4.
1 −0.55

uz ur

Figure 1.12 – Isovaleurs des déplacements uz et ur en mm.

Les outils de post-traitement du code de calcul permettent ensuite de remonter aux


composantes des déformations et des contraintes. La figure 1.13 présente les isovaleurs des
contraintes de Von Mises, σV M , qui sont définies par :
r
3 1
σV M = s:s où s = σ − T r(σ)δ
2 3

20
Il est à noter que dans ce calcul par éléments finis et étant donné la définition de
l’espace éléments finis, les champs de contrainte et de déformation approchés sont définis
à l’intérieur des mailles et ne sont définis ni sur les arêtes ni aux nœuds du maillage. En
effet, les déplacements étant juste continues sur le maillage, leurs dérivées ne sont pas
forcément définies sur les arêtes et aux nœuds. Ceci étant, les isovaleurs de la figure 1.13
sont générées à partir d’un lissage utilisant les contraintes calculées aux points de Gauss
des mailles. La définition des points de Gauss est donnée dans l’annexe 1.

R=3a=h/2=75mm

7.12E−02
6.78E−02
6.45E−02
6.11E−02
5.78E−02
5.44E−02
5.11E−02
4.77E−02
4.43E−02
4.10E−02
3.76E−02
3.43E−02
3.09E−02
2.76E−02
2.42E−02
2.08E−02
1.75E−02
1.41E−02
1.08E−02
7.42E−03
4.07E−03
7.10E−04

Figure 1.13 – Isovaleurs des contraintes de Von Mises en MPa.

Pour le problème (1.26-1.32), et avec les données géométriques : R = 3a = h/2 =


75mm, la valeur du déplacement uz au centre de la surface chargée (r = 0 et z = h)
obtenue par éléments finis est : uz (0, h) = −4.1mm.
Pour une géométrie où R = 0.9a = h/2 = 75mm, un deuxième calcul par éléments
finis conduit à un déplacement au centre de la surface chargée uz (0, h) = −10mm.
Ces valeurs peuvent être comparées au déplacement de référence suivant :
p 1 − 2ν
uoz = −h (1 + ν) = −12, 8mm.
E 1−ν
où uoz est le déplacement en r = 0 et z = h pour le problème (1.26-1.32) (figure 1.10)
lorsque a = R. Dans ce dernier problème, la solution exacte est immédiate. Les contraintes
et les déformations y sont homogènes et le champ de déplacement est :
p 1 − 2ν
~u = − (1 + ν) z ~ez
E 1−ν
.

21
Lorsque le solide cylindrique n’est plus soumis à la pression p mais est en contact sans
frottement, en z = h et 0 ≤ r ≤ a, avec un piston rigide qui s’enfonce avec un déplacement
imposé uz = −d, le nouveau problème d’équilibre est similaire au problème (1.26-1.32)
sauf que la condition aux limites (1.31) doit être remplacée par :

σrz = σθz = 0, uz = −d pour z = h et 0 ≤ r ≤ a

Pour une valeur donnée de d, les calculs par éléments finis permettent de déterminer la
force F nécessaire pour réaliser ce déplacement d. La linéarité du problème permet alors
de déduire l’enfoncement d1 du piston qui résulterait d’une force imposée F1 .
Pour les données géométriques R = 3a = h/2 = 75mm et une force imposée F1 =
2
π a p avec p = 0.1M P a, les calculs conduisent à un enfoncement du piston uz = −d1 =
−3.1mm.
Pour une géométrie où R = 10a = h/2 = 250mm et une force imposée F1 = π a2 p
avec p = 0.1M P a, un deuxième calcul conduit à un enfoncement uz = −d1 = −3.3mm.
Ces valeurs peuvent être comparées au déplacement de référence suivant :
π p
u∞
z = −a (1 − ν 2 ) = −3, 6mm (1.42)
2 E
où u∞z correspond au déplacement d’une plaque rigide, circulaire de rayon a, soumise à
une pression uniforme p, et placée à la surface d’un milieu semi infini, homogène, isotrope
et élastique de module d’Young E et de coefficient de Poisson ν [10].

22
1.3 Exercices
Exercice I-1 On considère le problème aux limites défini par

 T
−λ∆T + λ 2 = s dans Ω =]0, L[
L (1.43)
 T = 0 sur ∂Ω,

où λ est une constante strictement positive.


1. Donner une formulation variationnelle du problème (1.43).

Nous cherchons à déterminer une solution approchée de (1.43) par éléments finis
en utilisant des fonctions de base continues sur Ω et polynomiales de degré deux
par maille. Le maillage de Ω est choisi régulier et est constitué de k + 1 segments
[Si , Si+1 ] i = 0, ..., k. Une fonction de base est dans ce cas complètement définie par
ses valeurs aux extrémités et aux milieux des segments. Les nœuds du maillage sont
donc les points Aj (j = 0..2k + 2) définis par :
1
A2i = Si i = 0..k + 1 et A2i+1 = Si ∗ Si+1 = (Si + Si+1 ) i = 0..k.
2
2. Tracer les graphes de quelques fonctions de base.
 
3. Calculer les composantes de la matrice de rigidité R2k+1 (matrice (2k + 1) × (2k +
1)).
4. En considérant l’expression (1.19) pour la fonction s :
 
– Calculer les composantes du vecteur colonne F 2k+1 .
– Pour k = 2, superposer le graphe de la solution exacte de (1.43) à celui de la
solution approchée.

Exercice I-2 Nous reprenons le problème aux limites défini par (1.1), Ω =]0, L[ et (1.19)
et nous cherchons à comparer la solution éléments finis de la section 1.4 à une deuxième
solution approchée que nous allons construire par la méthode des différences finies.
Nous utilisons le maillage régulier de la figure 1.2 et nous notons h = L/(k + 1) le pas
de la discrétisation. Nous rappelons que la méthode des différences finies (la plus simple
et la plus courante) utilise la formule de Taylor suivante :

T (Si−1 ) − 2T (Si ) + T (Si+1 ) h2 (4)


T ′′ (Si ) = + T (Si + θi h) avec |θi | < 1 (1.44)
h2 12
1. En utilisant (1.1), en applicant (1.44) pour tous les sommets Si du maillage, et
en négligeant les termes en h2 dans les formules de Taylor, déterminer le système
linéaire vérifié par les T (Si ).
2. Résoudre ce système linéaire pour k = 3 et comparer les approximations ainsi
trouvées avec les valeurs de la figure 1.9.

23
Exercice I-3 Nous reprenons le problème d’équilibre en élasticité de la section (1.2) avec
toutes ses hypothèses et données sauf que la surface latérale du solide cylindrique est
maintenant supposée libre.
1. Calculer par éléments finis le déplacement uz au centre de la surface chargée (r = 0
et z = h) pour chacune des géométries suivantes :
– R = 3a = h/2 = 75mm,
– R = 0.9a = h/2 = 75mm.
2. Comparer les déplacements calculés dans la question 1. à ceux d’un essai de com-
p
pression simple (R = a) dans lequel le déplacement est tel que : uz (z) = − z .
E
3. Dans cette question le solide cylindrique n’est plus soumis à la pression p mais
est en contact sans frottement, en z = h et 0 ≤ r ≤ a, avec un piston rigide qui
s’enfonce avec un déplacement imposé uz = −d et la force nécessaire pour réaliser ce
déplacement d est notée F . Déduire de calculs par par éléments finis l’enfoncement d
du piston pour une force imposée F = π a2 p avec p = 0.1M P a et cela pour chacune
des géométries suivantes :
– R = 3a = h/2 = 75mm,
– R = 10a = h/2 = 250mm.
4. Comparer les enfoncements calculés dans la question 3. à l’enfoncement donné par
l’équation (1.42) d’une plaque rigide, circulaire de rayon a, soumise à une pression
uniforme p, et placée à la surface d’un milieu semi infini, homogène, isotrope et
élastique de module d’Young E et de coefficient de Poisson ν.

24
Chapitre 2

Problèmes variationnels et espaces


de Sobolev

De nombreux problèmes aux limites admettent des formulations variationnelles qui


ont la forme suivante : 
 Trouver u ∈ V tel que

(2.1)


a(u, v) = L(v) ∀ v ∈ V
où a est une forme bilinéaire définie sur l’espace vectoriel fonctionnel V et L est une
forme linéaire sur V . Ces formulations variationnelles sont bien adaptées à l’approximation
numérique par la méthode des éléments finis introduite dans le chapitre I.
Ce chapitre est dédié à une présentation de résultats mathématiques permettant
l’étude de l’existence et l’unicité des solutions de problèmes variationnels du type (2.1).
Les espaces de Sobolev 1 sont des espaces fonctionnels apparaissant dans de nombreux
problèmes variationnels elliptiques comme ceux de l’équilibre thermique ou élastique.
Dans ce chapitre certains résultats mathématiques sont énoncés sans démonstrations
car celles ci nécessiteraient des développements importants qui ne sont pas essentiels pour
les objectifs et la suite de ce livre. Néanmoins, le lecteur pourra trouver ces démonstrations
dans des ouvrages de référence tels que [4], [5] et [6].

2.1 Le théorème de Lax-Milgram


Théorème 2.1 Sous les hypothèses suivantes :
– l’espace V est un espace de Hilbert sur R de norme k.kV ,
– la forme linéaire L est continue sur V , c’est-à-dire

∃M >0 / ∀v ∈ V | L(v) |≤ M kvkV , (2.2)


1. Serguei Lvovitch Sobolev est un mathématicien et physicien atomique russe (1908-1989).

25
– la forme bilinéaire a est continue sur V , c’est-à-dire

∃ β > 0 / ∀ u, v ∈ V | a(u, v) |≤ βkukV kvkV , (2.3)

– la forme bilinéaire a est V -elliptique (on dit aussi que a est coercive sur V ), c’est-
à-dire
∃ α > 0 / ∀ v ∈ V a(v, v) ≥ αkvk2V , (2.4)
la solution u du problème (2.1) existe et est unique.

Preuve. Conférer par exemple l’une des références ([4]-[6]). 

Dans le théorème de Lax-Milgram 2 , la continuité de a et sa coercivité entraı̂nent que


√ p p
∀v ∈ V αkvkV ≤ N (v) = a(v, v) ≤ βkvkV ,

ce qui implique que N et k.kV sont deux normes équivalentes de V .

2.2 Problèmes variationnels symétriques et problèmes


de minimisation
Lorsque dans un problème variationnel de la forme (2.1) la forme bilinéaire a est
symétrique et positive, le problème variationnel devient équivalent à un problème de mini-
misation d’une fonctionnelle quadratique. La proposition suivante précise cette équivalence.

Proposition 2.1 Si la forme bilinéaire a est positive et symétrique, alors u est une so-
lution de (2.1) si et seulement si u vérifie :
1
J(u) = M in J(v) où J(v) = a(v, v) − L(v).
2 (2.5)
v ∈V

Preuve. En vertu de la linéarité de L, de la bilinéarité de a et de sa symétrie, on a


1
J(v) − J(u) = a(v − u, v − u) + a(u, v − u) − L(v − u).
2
Ainsi, si u est une solution de (2.1) et v est un élément quelconque de V alors

a(u, v − u) = L(v − u)
2. Peter Lax est un mathématicien hongrois et américain né en 1926. Arthur Norton Milgram est un
mathématicien américain (1912-1960).

26
et
1
J(v) − J(u) = a(v − u, v − u) ≥ 0,
2
ce qui prouve la condition nécessaire de la proposition 2.1.
Réciproquement, supposons que u réalise le minimum de J sur V . Pour tout réel x et
tout élément v de V , on a alors :
x2
0 ≤ J(u + xv) − J(u) = a(v, v) + x (a(u, v) − L(v))
2
Le polynôme de degré 2 en x qui apparaı̂t dans la précédente inégalité est ainsi toujours
positif et il s’ensuit que nécessairement

a(u, v) − L(v) = 0

et u est une solution de (2.1). 

Dans le cas où la forme bilinéaire a est non symétrique, l’équivalence entre le problème
variationnel (2.1) et le problème de minimisation de la fonctionnelle J (2.5) n’est plus
assurée alors que le théorème de Lax-Milgram demeure applicable.

Le théorème de Lax-Milgram est un théorème qui donne des conditions suffisantes pour
assurer l’existence et l’unicité de la solution du problème variationnel (2.1). Lorsque la
forme bilinéaire a est symétrique, les conditions du théorème de Lax-Milgram deviennent
nécessaires et suffisantes pour assurer l’existence et l’unicité de la solution du problème
variationnel (2.1)([6]).

En outre, dans le cas symétrique le théorème de Lax-Milgram peut être vu comme une
situation particulière du théorème suivant :

Théorème 2.2 Sous les hypothèses suivantes :


– V est un espace de Banach et U est un ensemble fermé et convexe de V ,
– la forme bilinéaire a est symétrique, continue sur V et V -elliptique,
– la forme linéaire L est continue sur V ,
il existe un unique u ∈ U tel que :
1
J(u) = M in J(v) où J(v) = a(v, v) − L(v)
2 (2.6)
v ∈U

Preuve. Conférer le premier chapitre de ([4]). 

Ainsi, et dans le cas d’une forme bilinéaire symétrique, le théorème de Lax-Milgram


correspond à la situation U = V du théorème 2.2.

27
2.3 Les espaces de Sobolev
Les espaces de Sobolev sont des espaces fonctionnels intervenant fréquemment dans
les problèmes elliptiques issus des modèles mathématiques de l’ingénieur. Ces espaces sont
des espaces de Hilbert et nous rappelons que :
– un espace de Hilbert est un espace vectoriel normé, complet (espace de Banach)
muni d’un produit scalaire,
– tout sous-espace fermé d’un Hilbert est un Hilbert,
– si A et B sont deux espaces de Hilbert pour les normes respectives k kA et k kB ,
l’espace A × B est un espace de Hilbert pour la norme définie par
1/2
(u, v) ∈ A × B k(u, v)kA×B = kuk2A + kvk2B .

2.3.1 L’espace L2 (Ω)


Étant donné un ouvert Ω de RN , l’espace L2 (Ω) des fonctions de carré sommable sur
Ω, relativement à la mesure de Lebesgue dΩ dans RN , est un espace de Hilbert pour le
produit scalaire Z
(u, v)0,Ω = uv dΩ. (2.7)

La norme correspondante est notée
Z 1/2
2
kvk0,Ω = v dΩ . (2.8)

Cette norme vérifie l’inégalité de Cauchy-Schwarz :


Z
| uv dΩ| ≤ kuk0,Ω kvk0,Ω ∀ u, v ∈ L2 (Ω). (2.9)

Il est aussi à rappeler que l’espace 3 D(Ω) , qui désigne l’espace des fonctions à valeurs
réelles indéfiniment différentiables sur Ω et à support compact dans Ω, est dense dans
L2 (Ω) . Cette densité signifie que tout élément de L2 (Ω) peut être approché par une suite
d’éléments de D(Ω) :

∀u ∈ L2 (Ω) ∃(ϕun ) une suite dans D(Ω) / ku − ϕun k0,Ω → 0


3. Un exemple classique de fonction ϕ ∈ D(RN ) est donné par

 1 N
!1/2

 X
 e kxk − 1 , pour kxk =
 2
 x2i <1
ϕ(x1 , x2 , ..., xN ) = i=1





 0, pour kxk ≥ 1 .

28
L’espace L2 (Ω) est bien utile pour l’étude des problèmes aux limites mais il est in-
suffisant pour principalement deux raisons. D’abord, il n’y est pas possible de parler de
conditions aux limites. En effet, la norme de cet espace ne permet pas de distinguer deux
fonctions qui ne diffèrent que sur la frontière. Ensuite, les problèmes variationnels (voir par
exemple (1.4)) font souvent apparaı̂tre des intégrants contenant des dérivées de fonctions,
or les dérivées de fonctions de L2 (Ω), qui ne sont définies qu’au sens des distributions, ne
sont pas toujours des fonctions.

2.3.2 Rappels sur les distributions


L’espace D′ (Ω) des distributions sur Ω est l’espace des formes linéaires continues sur
D(Ω). D′ (Ω) est ainsi l’espace dual de D(Ω) et le produit de dualité est noté < , >.
Pour T ∈ D′ (Ω) on a
T : D(Ω) → R
ϕ → < T, ϕ > .
La continuité d’une distribution T est à considérer au sens suivant :

ϕn → ϕ dans D(Ω) =⇒ < T, ϕn >→< T, ϕ > dans R.

La convergence dans D(Ω) de la suite (ϕn ) vers ϕ a lieu lorsque le support de ϕn reste
dans un compact fixe de Ω et lorsque toute dérivée partielle d’ordre quelconque k de ϕn
converge uniformément vers la dérivée partielle d’ordre k de ϕ sur R.

Dans la théorie des distributions les deux exemples suivants sont fondamentaux :
– Exemple 1. La masse de Dirac δa au point a (a ∈ Ω) est la distribution définie par :

< δa , ϕ >= ϕ(a). (2.10)

– Exemple 2. Pour une fonction u ∈ L2 (Ω), on définit la distribution Tu par :


Z
< Tu , ϕ >= uϕ dΩ . (2.11)

L’exemple 2 permet d’identifier l’espace L (Ω) à un sous-espace de D′ (Ω). En effet, l’ap-


2

plication
L2 (Ω) → D′ (Ω)
u → Tu
est injective en vertu de la densité de D(Ω) dans L2 (Ω). Ainsi, on pourra identifier u et
Tu .

Enfin, et pour T ∈ D′ (Ω), il est rappelé que par définition de la dérivation au sens
∂T
des distributions, la distribution est telle que :
∂xi
∂T ∂ϕ
∀ ϕ ∈ D(Ω) < , ϕ >= − < T, >. (2.12)
∂xi ∂xi

29
Cette définition conduit aisément au fait que toute distribution, et en particulier toute
fonction de L2 (Ω), est infiniment dérivable au sens des distributions. Pour une fonction
∂u ∂Tu
u dans L2 (Ω), la dérivée au sens des distributions (= ) n’est pas en général dans
∂xi ∂xi
L2 (Ω). Considérons par exemple la fonction d’Heaviside sur Ω =] − 1, 1[ définie par :
(
1 pour 0 < x < 1
H(x) =
0 pour −1 < x < 0.

H est bien dans L2 (Ω) et on a


Z 1 Z 1
dH dϕ dϕ dϕ
< , ϕ > = − < H, >= − H(x) (x) dx = − (x) dx
dx dx −1 dx 0 dx

= ϕ(0) =< δ0 , ϕ > .

dH dH
Ainsi, = δ0 et n’est pas dans L2 (Ω).
dx dx
Proposition 2.2 Si (vn ) est une suite convergente vers v dans L2 (Ω), alors cette suite
∂vn ∂v
converge vers v dans D′ (Ω) et la suite ( ) converge vers ( ) dans D′ (Ω).
∂xi ∂xi

Preuve. Précisons d’abord que la convergence dans D′ (Ω) d’une suite (Tn ) vers T est à
considérer au sens suivant :

∀ ϕ ∈ D(Ω) < Tn , ϕ > −→ < T, ϕ > .

Et comme on a :
Z
| < vn − v, ϕ > | = | (vn − v)ϕ dΩ| ≤ kvn − vk0,Ω kϕk0,Ω

et Z
∂vn ∂v ∂ϕ ∂ϕ
|< − , ϕ > | = |− < vn − v, >|=| (vn − v) dΩ|
∂xi ∂xi ∂xi Ω ∂xi

∂ϕ
≤ kvn − vk0,Ω k k0,Ω ,
∂xi
la proposition 2.2 est prouvée. 

2.3.3 L’espace de Sobolev H 1 (Ω)


L’espace de Sobolev d’ordre 1 sur Ω (⊂ RN ) est défini par :
 
1 2 ∂v 2
H (Ω) = v ∈ L (Ω) / ∈ L (Ω), 1 ≤ i ≤ N . (2.13)
∂xi

30
Cet espace est muni du produit scalaire suivant :
Z Z X N
∂u ∂v
(u, v)1,Ω = uv dΩ + dΩ . (2.14)
Ω Ω i=1 ∂xi ∂xi

La norme associée à ce produit scalaire est notée


1/2 1/2
kvk1,Ω = (v, v)1,Ω = kvk20,Ω + |v|21,Ω (2.15)

où | |1,Ω est la semi-norme de H 1 (Ω) définie par :

N
!1/2
X ∂v 2
|v|1,Ω = k k . (2.16)
i=1
∂xi 0,Ω

Proposition 2.3 L’espace H 1 (Ω) est un espace de Hilbert pour le produit scalaire (2.14).

Preuve. Il est aisé de voir que H 1 (Ω) est euclidien pour le produit scalaire (2.14) et il reste
à montrer qu’il est complet pour la norme (2.15).
Considérons (vn ) une suite de Cauchy dans H 1 (Ω). La définition (2.15) de la norme
∂vn
de H 1 (Ω) implique alors que (vn ) est une suite de Cauchy dans L2 (Ω) et ( ) est une
∂xi
suite de Cauchy dans L2 (Ω) pour tout i ∈ {1, .., N }. L2 (Ω) étant complet, la suite (vn )
∂vn
converge vers un élément v de L2 (Ω) et pour tout i ∈ {1, .., N } la suite ( ) converge
∂xi
vers un élément wi de L2 (Ω).
∂vn
La proposition 2.2 implique que pour tout i ∈ {1, .., N } la suite ( ) converge vers
∂xi
∂v
dans D′ (Ω) et cette même suite converge vers wi dans D′ (Ω).
∂xi
Ainsi
∂v
= wi dans D′ (Ω).
∂xi
∂v
Et comme wi ∈ L2 (Ω), est alors dans L2 (Ω) et la suite de Cauchy (vn ) converge vers
∂xi
v dans H 1 (Ω). L’espace H 1 (Ω) est ainsi complet pour la norme (2.15). 

Théorème 2.3 (Théorème de trace dans H 1 (Ω)) Ω est un ouvert borné de RN de


frontière ∂Ω assez régulière (il suffirait qu’elle soit C 1 par morceaux) et Γ est une partie
de ∂Ω de mesure non nulle.
En notant D(Ω) l’espace des restrictions à Ω des fonctions de D(RN ), l’application

γ : v ∈ D(Ω) → γ(v) = v|Γ ∈ C 0 (Γ)

se prolonge en une application linéaire continue de H 1 (Ω) dans L2 (Γ).

31
Preuve. Conférer le chapitre 4 (volume 3) de ([5]) dans lequel il est aussi démontré que
l’espace D(Ω) est dense dans H 1 (Ω). 

L’application de H 1 (Ω) dans L2 (Γ) définie à partir du théorème 2.3 est encore notée
γ et est appelée application trace. La continuité de γ se traduit par

∃ cT > 0 / ∀ v ∈ H 1 (Ω) kvk0,Γ ≤ cT kvk1,Ω . (2.17)

Ainsi, pour u = v dans H 1 (Ω) on a nécessairement u|Γ = v|Γ dans L2 (Γ). Ceci donne un
sens aux conditions aux limites du type u = h sur Γ (où h est une fonction donnée) pour
une fonction u appartenant à H 1 (Ω). Par ailleurs, et en introduisant l’espace

VΓ = γ −1 ({0}) = v ∈ H 1 (Ω) / v = 0 sur Γ , (2.18)

la continuité de l’opérateur γ entraı̂ne que VΓ est un sous-espace fermé de H 1 (Ω) et est


par conséquent un espace de Hilbert pour la norme k k1,Ω . Lorsque Γ = ∂Ω, l’espace VΓ
est noté H01 (Ω) :

H01 (Ω) = v ∈ H 1 (Ω) / v = 0 sur ∂Ω . (2.19)

Théorème 2.4 (La formule de Green dans H 1 (Ω)) Ω est un ouvert borné de RN de
frontière ∂Ω assez régulière .
Pour tout u et v dans H 1 (Ω), on a
Z Z Z
∂u ∂v
v dΩ = uvni dΓ − u dΩ (2.20)
Ω ∂xi ∂Ω Ω ∂xi

où xi est une coordonnée cartésienne par rapport à une base orthonormée (e~1 , e~2 , ..., e~N )
de RN (~x = xi e~i ) et ni est la composante selon e~i du vecteur ~n unitaire et normal extérieur
à ∂Ω (~n = ni e~i ).

Preuve. La formule (2.20) est vraie pour des fonctions u et v dans D(Ω) et se prolonge
aux fonctions de H 1 (Ω) grâce à la densité de D(Ω) dans H 1 (Ω). 

Théorème 2.5 (Théorème de compacité dans H 1 (Ω)) Ω est un ouvert borné de RN


de frontière ∂Ω assez régulière.
L’injection canonique de H 1 (Ω) dans L2 (Ω) est compacte.

Preuve. Conférer le chapitre 4 (volume 3) de ([5]). 

Le théorème 2.5 entraı̂ne que de toute suite bornée de H 1 (Ω) on peut extraire une
sous-suite convergente dans L2 (Ω).

32
Théorème 2.6 (Inégalité de Poincaré-Friedrichs) Ω est un ouvert borné, connexe
de RN , et Γ est une partie de ∂Ω de mesure non nulle.
Il existe une constante cp > 0, telle que
Z 2 !1/2
∀ v ∈ H 1 (Ω), N (v) = |v|21,Ω + v dΓ ≥ cp kvk1,Ω . (2.21)
Γ

Preuve. Nous adoptons un raisonnement par l’absurde et nous supposons que


1
∀n ∈ IN∗ ∃vn ∈ H 1 (Ω) / N (vn ) ≤ kvn k1,Ω .
n
vn
Posons wn = . La suite de fonctions (wn ) vérifie alors
kvn k1,Ω
  2 1/2
2
R 1


 |w |
n 1,Ω + w
Γ n
dΓ = N (wn ) ≤
n
(2.22)



kwn k1,Ω = 1.

En vertu du théorème de compacité de l’injection canonique de H 1 (Ω) dans L2 (Ω), et étant


donné que la suite (wn ) est bornée, on peut en extraire une sous-suite (wn′ ) convergente
vers w dans L2 (Ω). La proposition 2.2 implique que pour tout i ∈ {1, ..., N }, (wn′ ,i )
converge vers w,i dans D′ (Ω). Or l’inégalité écrite dans (2.22) implique que :

N
!1/2
X 1
|wn′ |1,Ω = kwn′ ,i k20,Ω ≤
i=1
n′

ce qui montre que (wn′ ,i ) converge vers 0 dans L2 (Ω). Ainsi, pour tout i ∈ {1, ..., N } on a
w,i = 0. Et comme Ω est supposé connexe alors w = constante et par suite w ∈ H 1 (Ω).
La convergence de (wn′ ) vers w est donc dans H 1 (Ω).
En outre, on a
R 2 R 2 R 2
| Γ wn′ dΓ − w2 mes2 (Γ)| = | Γ wn′ dΓ − Γ w dΓ |

≤ mes2 (Γ)kwn′ − wk0,∂Ω kwn′ + wk0,∂Ω

≤ c2T mes2 (Γ)kwn′ − wk1,Ω kwn′ + wk1,Ω ,

où cT est la constante introduite dans l’inégalité (2.17) du théorème de trace. La dernière
inégalité entraı̂ne que : Z 2
wn′ dΓ −→ w2 mes2 (Γ).
Γ

33
Et comme (2.22) implique que
Z 2
wn′ dΓ −→ 0,
Γ

il s’ensuit que w = 0. Ainsi, la suite (wn′ ) converge vers 0 dans H 1 (Ω) alors que chacun
de ses termes a une norme égale à 1. Ceci est absurde et l’inégalité de Poincaré-Friedrichs
est ainsi prouvée. 

Remarques
– En utilisant l’inégalité de Cauchy-Schwarz et l’inégalité (2.17) découlant du théorème
de trace dans H 1 (Ω), on a
 R 2 1/2 1/2
N (v) = |v|21,Ω + Γ v dΓ ≤ kvk21,Ω + mes2 (Γ) kvk20,Γ
(2.23)
≤ (1 + mes2 (Γ) c2T )1/2 kvk1,Ω .

Les inégalités (2.21) et (2.23) montrent que la norme N est une norme sur H 1 (Ω)
équivalente à la norme k k1,Ω .
– En remarquant que
∀ v ∈ H01 (Ω) N (v) = |v|1,Ω ,
il s’ensuit que | |1,Ω et k k1,Ω sont deux normes équivalentes sur H01 (Ω).
– Un raisonnement similaire à celui adopté dans la démonstration du théorème de
l’inégalité de Poincaré-Friedrichs, permet de prouver que la norme
Z 2 !1/2
M(v) = |v|21,Ω + v dΩ , (2.24)

est une norme sur H 1 (Ω) équivalente à la norme k k1,Ω .

2.3.4 L’espace de Sobolev H 2 (Ω)


L’espace de Sobolev d’ordre 2 sur Ω est défini par :
 
2 1 ∂ 2v 2
H (Ω) = v ∈ H (Ω) / ∈ L (Ω), 1 ≤ i, j ≤ N . (2.25)
∂xi ∂xj

Cet espace est muni du produit scalaire suivant :


Z X
∂ 2u ∂ 2v
(u, v)2,Ω = (u, v)1,Ω + dΩ . (2.26)
Ω 1≤i,j≤N ∂xi ∂xj ∂xi ∂xj

La norme associée à ce produit scalaire est notée


1/2 1/2
kvk2,Ω = (v, v)2,Ω = kvk21,Ω + |v|22,Ω , (2.27)

34
où | |2,Ω est la semi-norme de H 2 (Ω) définie par
!1/2
X ∂ 2v 2
|v|2,Ω = k k . (2.28)
1≤i,j≤N
∂xi ∂xj 0,Ω

Proposition 2.4 L’espace H 2 (Ω) est un espace de Hilbert pour le produit scalaire (2.26).

Preuve. Un raisonnement similaire à celui adopté dans la démonstration de la proposition


2.3, conduit facilement à la preuve de la présente proposition. 

Il est clair que la définition des espaces H 1 (Ω) (2.13) et H 2 (Ω) (2.25) peut être
généralisée et conduire à la définition d’espaces de Sobolev d’ordre m, H m (Ω), pour tout
entier m ≥ 3.

Théorème 2.7 (Théorème de trace dans H 2 (Ω)) Ω est un ouvert borné de RN de


frontière ∂Ω assez régulière et Γ est une partie de ∂Ω de mesure non nulle.
L’application linéaire
∂v
~γ : v ∈ H 2 (Ω) → ~γ (v) = (v|Γ , ) ∈ L2 (Γ)xL2 (Γ)
∂n |Γ
est continue.

Preuve. Conférer le chapitre 4 (volume 3) de ([5]). 

Le théorème de trace dans H 2 (Ω) donne un sens aux conditions aux limites du type
∂u
= g sur ∂Ω (où g est une fonction donnée) pour une fonction u appartenant à H 2 (Ω).
∂n
Une telle condition aux limites n’a évidemment pas de sens pour une fonction qui n’est
que dans H 1 (Ω).
Par ailleurs, en introduisant l’espace WΓ défini par :
 
−1 2 ∂v
WΓ = ~γ ({(0, 0)}) = v ∈ H (Ω) / v = = 0 sur Γ , (2.29)
∂n

la continuité de l’opérateur ~γ entraı̂ne que WΓ est un sous-espace fermé de H 2 (Ω) et est


par conséquent un espace de Hilbert pour la norme k k2,Ω .
Lorsque Γ = ∂Ω, l’espace WΓ est noté H02 (Ω)
 
2 2 ∂v
H0 (Ω) = v ∈ H (Ω) / v = = 0 sur ∂Ω . (2.30)
∂n

35
Théorème 2.8 (La formule de Green dans H 2 (Ω)) Ω est un ouvert borné de RN de
frontière ∂Ω assez régulière.
Pour tout u dans H 2 (Ω) et tout v dans H 1 (Ω), on a
Z Z Z
∂u ~ ∇v
~ dΩ
− ∆u v dΩ = − v dΓ + ∇u. (2.31)
Ω ∂Ω ∂n Ω

Preuve. Les dérivées premières u,i et la fonction v étant dans H 1 (Ω), ce théorème est une
conséquence immédiate de la formule de Green dans H 1 (Ω). En effet, on a
R R R R
− Ω
∆u v dΩ = − Ω
u,ii v dΩ = − ∂Ω
u,i ni v dΓ + Ω
u,i v,i dΩ
Z
R ∂u ~ ∇v~ dΩ
=− ∂Ω
v dΓ + ∇u. 
∂n Ω

Théorème 2.9 (Théorème de compacité dans H 2 (Ω)) Ω est un ouvert borné de RN


de frontière ∂Ω assez régulière.
L’injection canonique de H 2 (Ω) dans H 1 (Ω) est compacte.

Preuve. Soit (vn ) une suite bornée de H 2 (Ω) et montrons qu’on peut en extraire une
sous-suite convergente dans H 1 (Ω).
La suite (vn ) est aussi bornée dans H 1 (Ω) et on peut, grâce à la compacité de l’injection
de H 1 (Ω) dans L2 (Ω) ( théorème 2.5), en extraire une sous-suite (vn′ ) convergente vers v
dans L2 (Ω).
En outre, (vn ) étant bornée dans H 2 (Ω) il vient que pour tout i ∈ {1, .., N }, la suite
∂vn′ 1 ∂vn′′
( ) est aussi bornée dans H (Ω) et on peut donc en extraire une sous-suite ( )
∂xi ∂xi
convergente vers wi dans L2 (Ω).
Par ailleurs, la convergence de la suite (vn′′ ) vers v dans L2 (Ω), implique la convergence
∂v ′′ ∂v ∂v ∂v
de ( n ) vers dans D′ (Ω). Il s’ensuit alors que = wi et est dans L2 (Ω). La
∂xi ∂xi ∂xi ∂xi
suite (vn′′ ) est ainsi une sous-suite de (vn ) convergente dans H 1 (Ω). 

Proposition 2.5 | |2,Ω et k k2,Ω sont deux normes équivalentes sur H02 (Ω).

Preuve. Cette équivalence se démontre aisément en utilisant le théorème de compacité


dans H 2 (Ω), et en procédant comme dans la démonstration du théorème de Poincaré-
Friedrichs. 

36
2.3.5 L’espace (H 1 (Ω))N
Pour tout entier N = 2 ou 3, l’espace (H 1 (Ω))N est un espace de fonctions à valeurs
dans RN et dont chacune des composantes (dans une base de RN qui sera considérée
orthonormée cartésienne) est dans H 1 (Ω). Cet espace est un espace de Hilbert pour la
norme définie par :
N
!1/2
X
k~v k(H 1 (Ω))N = kvi k21,Ω . (2.32)
i=1

Théorème 2.10 (Inégalité de Korn) Ω est un ouvert borné de RN , de frontière assez


régulière.
En notant  
1 t
 1
ε(~v ) = ∇~v + ∇~v , εij (~v ) = (vi,j + vj,i ) (2.33)
2 2
on a
X
∃ cK > 0 / ∀ ~v ∈ (H 1 (Ω))N k~v k2(L2 (Ω))N + kεij (~v )k20,Ω ≥ cK k~v k2(H 1 (Ω))N . (2.34)
1≤i,j≤N

Preuve. Conférer le chapitre 7 (volume 4) de ([5]).

A partir du théorème de Korn il est immédiat d’établir que l’application


!1/2
X
~v → k~v k2(L2 (Ω))N + kεij (~v )k20,Ω
1≤i,j≤N

définit une norme sur (H 1 (Ω))N équivalente à la norme k k(H 1 (Ω))N .

Proposition 2.6 En considérant une partie Γ de ∂Ω de mesure non nulle et en introdui-


sant l’espace VΓ défini par
n o
VΓ = ~v ∈ (H 1 (Ω))N / ~v = ~0 sur Γ ,

on a
X
∃ ck > 0 / ∀ ~v ∈ VΓ M 2 (~v ) = kεij (~v )k20,Ω ≥ ck k~v k2(H 1 (Ω))N , (2.35)
1≤i,j≤N

et M est une norme sur VΓ équivalente à la norme k k(H 1 (Ω))N .

Preuve. Nous commençons d’abord par vérifier que M définit bien une norme sur VΓ . En
effet, si ~v ∈ (H 1 (Ω))N et ε(~v ) = 0 alors ~v est de la forme

~ ~a, ~b ∈ R3
 ~v (~x) = ~a + b ∧ ~x,
 pour N = 3,



~v (~x) = (a1 + bx2 )~e1 + (a2 − bx1 )~e2 , a1 , a2 , b ∈ R, ~e1 , ~e2 ∈ R2 pour N = 2.

37
Si en plus ~v est nul sur Γ, qui est de mesure non nulle, alors ~v = ~0. Ainsi, M est bien une
norme sur VΓ .
Pour démontrer l’inégalité (2.35) nous adoptons un raisonnement par l’absurde et nous
supposons que
1
∀ n ∈ IN∗ ∃ ~vn ∈ VΓ / M (~vn ) ≤ k~vn k(H 1 (Ω))N .
n
~vn
Posons w~n = . La suite de fonctions (w ~ n ) vérifie ainsi
k~vn k(H 1 (Ω))N

1
 M (w

 ~ n) ≤
n
(2.36)



kw~ n k(H 1 (Ω))N = 1.

En vertu du théorème de compacité de l’injection canonique de H 1 (Ω) dans L2 (Ω) (théorème


2.5), et étant donné que pour tout i = 1, ..., N la suite (wni ) est bornée, on peut en extraire
une sous-suite (wn′ i ) convergente vers wi dans L2 (Ω).
La proposition 2.2 implique que la suite (wn′ i,j ) converge vers wi,j dans D′ (Ω) pour
tout i et j ∈ {1, ..., N } et (ε(w~n′ )) converge vers ε(w) ~ dans (D′ (Ω))N ×N . Or l’inégalité
écrite dans (2.36) implique que ε(w~n′ ) converge vers le tenseur 0 dans (L2 (Ω))N ×N . Ainsi,
ε(w)
~ = 0 et l’inégalité de Korn (2.34) implique que w ~ est dans (H 1 (Ω))N . La convergence
de (w ~ ′ n ) vers w
~ est donc dans (H 1 (Ω))N . w ~ est alors dans VΓ et comme ε(w) ~ = 0, alors
M (w)~ = 0 et w ~ = ~0.
Ainsi, la suite (w ~ ′ n ) converge vers ~0 dans (H 1 (Ω))N alors que chacun de ses termes a
une norme égale à 1. Ceci est absurde et l’inégalité (2.35) est ainsi prouvée. Il est alors
facile d’établir que M est une norme sur VΓ équivalente à la norme k k(H 1 (Ω))N . 

L’espace (H 1 (Ω))N et l’inégalité de Korn seront bien utiles pour l’étude du problème
de l’équilibre en élasticité tridimensionnelle (cf. chapitre 3).

38
2.4 Récapitulatif des principaux résultats
Le théorème de Lax-Milgram 
 Trouver u ∈ V tel que

Pour le problème variationnel


a(u, v) = L(v) ∀ v ∈ V
où a est une forme bilinéaire et L est une forme linéaire et sous les hypothèses :
– l’espace V est un espace de Hilbert sur R de norme k.kV ,
– L est continue sur V : ∃ M > 0 / ∀ v ∈ V | L(v) |≤ M kvkV ,
– a est continue sur V : ∃ β > 0 / ∀ u, v ∈ V | a(u, v) |≤ βkukV kvkV ,
– a est V -elliptique ( V -coercive) : ∃ α > 0 / ∀ v ∈ V a(v, v) ≥ αkvk2V ,
la solution u existe et est unique.
 R
L’espace L2 (Ω) = v : Ω −→ R / Ω v 2 dΩ < +∞
L2 (Ω) est un espace de Hilbert pour le produit scalaire et la norme :
Z Z 1/2
2
(u, v)0,Ω = uv dΩ, kvk0,Ω = v dΩ .
Ω Ω
R
Inégalité de Cauchy-Schwarz : | Ω
uv dΩ| ≤ kuk0,Ω kvk0,Ω ∀ u, v ∈ L2 (Ω).

Les distributions
D(Ω) est l’espace des fonctions C ∞ sur Ω et à support compact dans Ω. L’espace D′ (Ω)
des distributions sur Ω est l’espace des formes linéaires continues sur D(Ω). Exemples :
– La masse de Dirac δa au point a : < δa , ϕ >= ϕ(a). Z
– Pour une fonction u ∈ L2 (Ω) : < Tu , ϕ >=< u, ϕ >= uϕ dΩ .

∂T ∂ϕ
Pour T ∈ D′ (Ω) : , ϕ >= − < T,
< >.
∂xi ∂xi
 
1 2 ∂v 2
L’espace de Sobolev H (Ω) = v ∈ L (Ω) / ∈ L (Ω), 1 ≤ i ≤ N .
∂xi
H 1 (Ω) est un espace de Hilbert pour le produit scalaire et la norme :
Z Z X N
∂u ∂v 1/2
(u, v)1,Ω = uv dΩ + dΩ , kvk1,Ω = kvk20,Ω + |v|21,Ω
Ω Ω i=1 ∂xi ∂xi

N
!1/2
X ∂v 2
où | |1,Ω est la semi-norme de H 1 (Ω) : |v|1,Ω = k k .
i=1
∂xi 0,Ω
Théorème de trace dans H 1 (Ω)
Γ est une partie de ∂Ω de mesure non nulle : ∃ cT > 0 / ∀ v ∈ H 1 (Ω) kvk0,Γ ≤ cT kvk1,Ω .
L’espace VΓ = {v ∈ H 1 (Ω) / v = 0 sur Γ} , est un espace de Hilbert pour k k1,Ω .

39
La formule de Green dans H 1 (Ω)
Z Z Z
1 ∂u ∂v
∀ u, v ∈ H (Ω), v dΩ = u v ni dΓ − u dΩ
Ω ∂xi ∂Ω Ω ∂xi

Inégalité de Poincaré-Friedrichs
Γ est une partie de ∂Ω de mesure non nulle
Z 2 !1/2
∃ cp > 0 / ∀ v ∈ H 1 (Ω), N (v) = |v|21,Ω + v dΓ ≥ cp kvk1,Ω .
Γ

– La norme N (.) est une norme sur H 1 (Ω) équivalente à k k1,Ω .


– | |1,Ω et k k1,Ω sont deux normes équivalentes sur H01 (Ω) = {v ∈ H 1 (Ω) / v = 0 sur ∂Ω}.
 R 2 1/2
– M(v) = |v|21,Ω + Ω v dΩ , est une norme sur H 1 (Ω) équivalente à k k1,Ω .
 
2 1 ∂ 2v 2
L’espace de Sobolev H (Ω) = v ∈ H (Ω) / ∈ L (Ω), 1 ≤ i, j ≤ N
∂xi ∂xj
H 2 (Ω) est un espace de Hilbert pour le produit scalaire et la norme
Z X
∂ 2u ∂ 2v 1/2
(u, v)2,Ω = (u, v)1,Ω + dΩ, kvk2,Ω = kvk21,Ω + |v|22,Ω ,
Ω 1≤i,j≤N ∂xi ∂xj ∂xi ∂xj

!1/2
X ∂ 2v 2
où | |2,Ω est la semi-norme de H 2 (Ω) : |v|2,Ω = k k .
1≤i,j≤N
∂xi ∂xj 0,Ω
 
2 ∂v
-WΓ = v ∈ H (Ω) / v = = 0 sur Γ est un espace de Hilbert pour k k2,Ω .
∂n  
2 2 ∂v
-| |2,Ω et k k2,Ω sont deux normes équivalentes sur H0 (Ω) = v ∈ H (Ω) / v = = 0 sur ∂Ω .
∂n
La formule de Green dans H 2 (Ω) Pour tout u dans H 2 (Ω) et tout v dans H 1 (Ω),
Z Z Z
∂u ~ ∇v~ dΩ
− ∆u v dΩ = − v dΓ + ∇u.
Ω ∂Ω ∂n Ω

N
!1/2
X
L’espace (H 1 (Ω))N (N = 2 ou 3) est un Hilbert pour la norme k~v k(H 1 (Ω))N = kvi k21,Ω .
i=1
Inégalité de Korn
X
∃ cK > 0 / ∀ ~v ∈ (H 1 (Ω))N K2 (~v ) = k~v k2(L2 (Ω))N + kεij (~v )k20,Ω ≥ cK k~v k2(H 1 (Ω))N .
1≤i,j≤N

K(.) définit une norme sur (H 1 (Ω))N équivalente à k kn(H 1 (Ω))N . o


Pour une partie Γ de ∂Ω de mesure non nulle et VΓ = ~v ∈ (H 1 (Ω))N ~
/ ~v = 0 sur Γ :
X
∃ ck > 0 / ∀ ~v ∈ VΓ M 2 (~v ) = kεij (~v )k20,Ω ≥ ck k~v k2(H 1 (Ω))N ,
1≤i,j≤N

et M est une norme sur VΓ équivalente à la norme k k(H 1 (Ω))N .

40
2.5 Exercices
Exercice II-1 Toutes les questions de cet exercice sont indépendantes.
1. Montrer qu’un espace vectoriel normé (respectivement de Banach) est euclidien
(respectivement de Hilbert) si et seulement si sa norme k k vérifie :

kf + gk2 + kf − gk2 = 2 kf k2 + kgk2 .

Montrer alors que l’espace L1 (]0, 2π[) n’est pas un Hilbert pour la norme :
Z 2π
kf k = |f | dx.
0
R1
2. Montrer que l’espace C 0 (] − 1, 1[), muni du produit scalaire : (f, g) = −1
f g dx ,
n’est pas complet. Utiliser pour cela la suite (ϕn )n∈IN∗ définie par :

 1

 −1, pour −1 ≤ x ≤ −


 n




1 1
ϕn (x) = nx, pour − ≤x≤


 n n





 1
 1, pour ≤x≤1.
n
3. On note Ω le disque ouvert de R2 de centre (0, 0) et de rayon 1/2 . Montrer que la
fonction u, définie sur Ω par :

u(x, y) = Log(−Log(x2 + y 2 )),

est dans H 1 (Ω) alors qu’elle n’est ni continue ni bornée .


4. Montrer que la suite de fonctions (ϕn )n∈IN∗ , définies sur ] − π, π[ par : ϕn (x) =
sin(nx), est faiblement convergente dans L2 (]−π, π[) et qu’elle n’est pas (fortement)
convergente dans L2 (] − π, π[).
5. Ω est un ouvert borné de Rn . Montrer que l’application A, définie par : A(v) =
R 1/2
|v|21,Ω + ∂Ω v 2 dΩ , définit une norme sur H 1 (Ω) équivalente à la norme usuelle
de H 1 (Ω).

Exercice II-2 Une démonstration du théorème de trace sur H 1 (R2 ) est ici présentée.
Cette démonstration repose sur la densité de D(Ω) dans H 1 (Ω) lorsque Ω = Rn . (Cette
densité n’est pas toujours assurée pour des ouverts Ω quelconques.)
1. On considère l’application trace définie par :
γ : D(R2 ) → L2 (R)
f → γf où γf (x) = f (x, 0)
Z 0
2 ∂f
Montrer que : (γf (x)) = 2 f (x, y) (x, y) dy.
−∞ ∂y

41
2. Montrer que : ∀f ∈ D(R2 ) kγf k0,R ≤ kf k1,R×R∗− .
3. En utilisant la densité de D(R2 ) dans H 1 (R2 ), montrer que γ admet un unique
prolongement continu : γ : H 1 (R2 ) → L2 (R) .

Exercice II-3 Cet exercice a pour but de justifier un résultat rencontré dans la section
4 du chapitre 1. Ce résultat concerne la coı̈ncidence, aux nœuds du maillage, entre la
solution exacte et celle par éléments finis pour un problème elliptique unidimensionnel
(cf. Figure 1.9).
1. Pour y ∈ ] − 1, 1[, déterminer la solution, qu’on notera E(., y), du problème aux
limites suivant : 
 d2 u

 − = δy dans ] − 1, 1[
dx2



u(−1) = u(1) = 0.

2. Pour f ∈ L2 (] − 1, 1[), montrer que la solution, u, du problème



 d2 u

 − =f dans ] − 1, 1[
dx2
(2.37)



u(−1) = u(1) = 0.

est telle que : Z 1


u(x) = E(x, y)f (y) dy. (2.38)
−1

3. Écrire une formulation variationnelle dans H01 (] − 1, 1[) du problème (2.37). On as-
sociera à ce problème variationnel, un problème variationnel discret utilisant un
espace élément fini contenant les fonctions affines par maille et continues. En notant
S i les sommets du maillage, les fonctions E(S i , .) sont alors dans cet espace élément
fini. En utilisant (2.38), la formulation variationnelle de (2.37) et le problème varia-
tionnel discret, montrer que la solution exacte, u, et la solution éléments finis, uEF ,
vérifient : u(S i ) = uEF (S i ).
4. Reprendre les questions précédentes pour le problème aux limites suivant :

 d4 u

 − =f dans ] − 1, 1[


 dx4



du du
 (−1) = (1) = 0


 dx dx





u(−1) = u(1) = 0.

42
Exercice II-4 Pour λ > 0, on considère le problème aux limites

 −∆u = λ u dans Ω =]0, 1[×]0, 1[

(2.39)


u = 0 sur ∂Ω.

1. Écrire une formulation variationnelle de (2.39) et montrer que si u est une solution
|u|21,Ω
non nulle de (2.39) alors : λ = .
kuk20,Ω
2. Pour p et q deux entiers non nuls, on pose : upq (x, y) = sin(pπx)sin(qπy). Déterminer
le réel λpq pour que upq soit une solution du problème (2.39) associé à λpq .
3. On rappelle que l’inégalité de Poincaré-Friedrichs s’écrit :

∃ c > 0 ∀ v ∈ H01 (Ω) |v|1,Ω ≥ c kvk1,Ω .

En utilisant les questions précédentes, proposer un majorant de la constante c.

43
Chapitre 3

Etude de quelques problèmes aux


limites elliptiques

L’étude de quelques problèmes aux limites elliptiques classiques en physique et en


mécanique est abordée dans ce chapitre. Il s’agira principalement de la construction de
formulations variationnelles de ces problèmes et de l’étude, basée sur le théorème de Lax-
Milgram, de l’existence et l’unicité des solutions.

3.1 Problèmes du laplacien


Il s’agit de problèmes aux limites dans lesquels la fonction inconnue, u, vérifie l’équation
aux dérivées partielles suivante : −∆u = f dans Ω. Le domaine Ω est un ouvert borné
et connexe de RN de frontière ∂Ω suffisamment régulière (par exemple C 1 par morceaux ).
La fonction f est supposée dans L2 (Ω). Dans les conditions aux limites nous distinguerons
∂u
les conditions de Dirichlet qui portent sur u de celles de Neumann qui portent sur .
∂n

3.1.1 Le problème de Dirichlet homogène


Ce problème aux limites consiste à trouver une fonction u telle que

 −∆u = f dans Ω

(3.1)


u = 0 sur ∂Ω.

Ce problème est dit homogène en ce sens que la condition aux limites est homogène.

Formulation variationnelle du problème (3.1). En supposant que ce problème admet une


solution u dans H 2 (Ω), cette solution vérifie nécessairement
Z Z
− ∆u v dΩ = f v dΩ ∀ v ∈ H 1 (Ω),
Ω Ω

44
et la formule de Green dans H 2 (Ω) (2.31) conduit à
Z Z Z
∂u ~ ~
− v dΓ + ∇u.∇v dΩ = f v dΩ ∀ v ∈ H 1 (Ω). (3.2)
∂Ω ∂n Ω Ω

Et en se restreignant dans (3.2) à des fonctions v dans H01 (Ω) on obtient la formulation
variationnelle suivante du problème de Dirichlet homogène :
  R
∈ 1 ~ ~

 Trouver u H 0 (Ω) tel que  a(u, v) = Ω ∇u.∇v dΩ

où (3.3)

 
 R
a(u, v) = L(v) ∀ v ∈ H01 (Ω) L(v) = Ω f v dΩ.

Existence et unicité des solutions du problème (3.3). En utilisant l’inégalité de Cauchy-


Schwarz, la forme linéaire L vérifie

|L(v)| ≤ kf k0,Ω kvk0,Ω ≤ kf k0,Ω kvk1,Ω , (3.4)

et la forme bilinéaire a vérifie


Z X N N
∂u ∂v X ∂u ∂v
|a(u, v)| = | dΩ| ≤ k k0,Ω k k0,Ω ≤ N kuk1,Ω kvk1,Ω . (3.5)
Ω i=1 ∂xi ∂xi i=1
∂x i ∂x i

Les inégalités (3.4) et (3.5) prouvent la continuité, sur H01 (Ω) muni de la norme k k1,Ω , de
L et a, respectivement. En outre, l’inégalité de Poincaré-Friedrichs (2.21) conduit à
N 
Z X 2
∂v
∀v ∈ H01 (Ω) a(v, v) = dΩ = |v|21,Ω ≥ c2p kvk21,Ω ,
Ω i=1 ∂xi

ce qui prouve la coercivité de a sur H01 (Ω) muni de la norme k k1,Ω . Ainsi, le problème
variationnel (3.3) vérifie les hypothèses du théorème de Lax-Milgram et sa solution u
existe et est unique dans H01 (Ω).

Interprétation de la solution u en terme de solution du problème (3.1). La solution u de


(3.3) n’étant que dans H01 (Ω), ses dérivées secondes ne peuvent être considérées qu’au
sens des distributions et elles vérifient
R
< −∆u, ϕ > =< −u,ii , ϕ >=< u,i , ϕ,i >= Ω ∇u. ~ ∇ϕ~ dΩ

R
= a(u, ϕ) = L(ϕ) = Ω
f ϕ dΩ (3.6)

=< f, ϕ > .

Ainsi, −∆u = f dans D′ (Ω) et comme f est dans L2 (Ω) on obtient

−∆u = f dans L2 (Ω).

La condition aux limites u = 0 sur ∂Ω est ici immédiate puisque u est dans H01 (Ω).

45
3.1.2 Le problème de Dirichlet non homogène
Ce problème aux limites consiste à trouver une fonction u telle que

 −∆u = f dans Ω

(3.7)


u = u0 sur ∂Ω.

où u0 est une fonction donnée dans H 1 (Ω). En supposant que ce problème admet une
solution u dans H 2 (Ω), cette solution vérifie nécessairement
Z Z
− ∆u v dΩ = f v dΩ ∀ v ∈ H 1 (Ω),
Ω Ω
2
et la formule de Green dans H (Ω) (2.31) conduit à
Z Z
~ ~
∇u.∇v dΩ = f v dΩ ∀ v ∈ H01 (Ω).
Ω Ω

En posant w = u − u0 , on obtient la formulation variationnelle suivante


  R
 Trouver w ∈ H 1
(Ω) tel que 
 a(w, v) = ~ ∇v
∇w. ~ dΩ
 0  Ω
où (3.8)
  R  
 1
a(w, v) = L(v) ∀ v ∈ H0 (Ω)

 L(v) = f v − ~ 0 .∇v
∇u ~ dΩ,

qui ne diffère de celle obtenue pour le problème de Dirichlet homogène que par la définition
de la forme linéaire L. Il est aisé d’établir la continuité de cette forme linéaire sur H01 (Ω)
et de conclure à l’existence et l’unicité de la solution w de ce problème.

3.1.3 Le problème de Neumann homogène


Ce problème aux limites consiste à trouver une fonction u telle que


 −∆u = f dans Ω

(3.9)
 ∂u


= 0 sur ∂Ω.
∂n

Il est clair que si u est une solution du problème (3.9), alors u + constante est aussi
une solution. Réciproquement, supposons l’existence dans H 2 (Ω) de deux solutions, u1 et
u2 , de (3.9). Ces solutions vérifient alors ∆(u1 − u2 ) = 0 et
Z
− ∆(u1 − u2 ) (u1 − u2 ) dΩ = 0. (3.10)

Par application de la formule de Green (2.31) dans H 2 (Ω), l’égalité (3.10) conduit à
Z
~ 1 − u2 ).∇(u
∇(u ~ 1 − u2 ) dΩ = 0,

46
ce qui entraı̂ne que u1 − u2 est une constante. Ainsi, en cas d’existence d’une solution dans
H 2 (Ω) du problème (3.9), cette solution serait unique à une constante près. Par ailleurs, si
u est une solution de (3.9), alors l’application de la formule de Green dans H 2 (Ω) entraı̂ne
que u vérifie Z Z
~ ~
∇u.∇v dΩ = f v dΩ, ∀ v ∈ H 1 (Ω). (3.11)
Ω Ω
En prenant v ≡ 1 dans (3.11) on obtient
Z
f dΩ = 0, (3.12)

ce qui constitue une condition nécessaire sur la donnée f pour l’existence de solutions.
Nous supposerons dans la suite que la condition (3.12) est vérifiée.

Formulation variationnelle du problème (3.9). L’unicité des solutions de (3.9) ne pou-


vant être assurée qu’à une constante près, nous sommes amenés à introduire l’espace
H 1 (Ω)/R, quotient de H 1 (Ω) par R . Ceci signifie que sur H 1 (Ω) nous définissons la re-
lation d’équivalence suivante : deux fonctions de H 1 (Ω) sont équivalentes si et seulement
si leur différence est une constante. H 1 (Ω)/R est l’espace des classes d’équivalence. Pour
v ∈ H 1 (Ω),

v̂ = w ∈ H 1 (Ω) / w − v = constante
désigne la classe de v ( v̂ ∈ H 1 (Ω)/R). Une formulation variationnelle de (3.9) dans
H 1 (Ω)/R s’écrit alors
  R
∈ 1 ~ ~

 Trouver û H (Ω)/R tel que  a(û, v̂) = Ω ∇u.∇v dΩ

où (3.13)

 
 R
a(û, v̂) = L(v̂) ∀ v̂ ∈ H 1 (Ω)/R L(v̂) = Ω f v dΩ.

Existence et unicité des solutions du problème (3.13). Il est aisé d’établir que, muni de la
norme
kv̂kH 1 (Ω)/R = Inf kv + ck1,Ω ,
c∈R
l’espace H 1 (Ω)/R est un espace de Hilbert. Le produit scalaire associé à cette norme est
défini par
1 2 2 2

(û, v̂)H 1 (Ω)/R = kû + v̂kH 1 (Ω)/R − kûkH 1 (Ω)/R − kv̂kH 1 (Ω)/R
2
En vertu de la condition (3.12), la forme linéaire L vérifie
Z
∀c ∈ R |L(v̂)| = | f (v + c) dΩ| ≤ kf k0,Ω kv + ck0,Ω ≤ kf k0,Ω kv + ck1,Ω ,

d’où
|L(v̂)| ≤ kf k0,Ω kv̂kH 1 (Ω)/R ,

47
et L est continue sur H 1 (Ω)/R.
La forme bilinéaire a vérifie
N
R X ∂(u + c) ∂(v + d)
∀ c, d ∈ R |a(û, v̂)| = | Ω dΩ|
i=1
∂x i ∂x i

N
X ∂(u + c) ∂(v + d)
≤ k k0,Ω k k0,Ω
i=1
∂xi ∂xi

≤ N ku + ck1,Ω kv + dk1,Ω ,

d’où
|a(û, v̂)| ≤ N kûkH 1 (Ω)/R kv̂kH 1 (Ω)/R ,
et a est continue sur H 1 (Ω)/R.
Pour établir la coercivité de a sur H 1 (Ω)/R nous rappelons que l’inégalité de Poincaré-
Friedrichs (2.21) s’écrit
Z 2 !1/2
∃ cp > 0 / ∀ v ∈ H 1 (Ω) N (v) = |v|21,Ω + v dΓ ≥ cp kvk1,Ω
∂Ω

Cette inégalité permet alors d’écrire

≤ Inf N 2 (v + c)
c2p kv̂k2H 1 (Ω)/R
c∈R
 R 2 
= Inf |v|21,Ω + ∂Ω (v + c) dΓ
c∈R

R 2
= |v|21,Ω + Inf c mes(∂Ω) + ∂Ω
v dΓ
c∈R
= |v|21,Ω

= a(v̂, v̂)

ce qui prouve la coercivité de a sur H 1 (Ω)/R muni de la norme k kH 1 (Ω)/R . Ainsi, le


problème variationnel (3.13) vérifie les hypothèses du théorème de Lax-Milgram et sa
solution û existe et est unique dans H 1 (Ω)/R.

Interprétation de la solution û en terme de solution du problème (3.9). Pour une fonction


u ∈ û, un raisonnement analogue à celui adopté lors de l’étude du problème de Dirichlet
homogène, conduit à −∆u = f dans L2 (Ω).

48
En supposant que u est dans H 2 (Ω), la formule de Green dans H 2 (Ω) (2.31) et le
problème (3.13) impliquent que
Z
∂u
v dΓ = 0 ∀ v ∈ H 1 (Ω),
∂Ω ∂n

et en invoquant la densité dans L2 (∂Ω) de l’espace des traces sur ∂Ω des fonctions de
R ∂u ∂u
H 1 (Ω) on obtient ∂Ω v dΓ = 0 ∀ v ∈ L2 (∂Ω), et = 0 sur ∂Ω.
∂n ∂n

3.1.4 Problème mêlé de Dirichlet-Neumann


Ce problème aux limites consiste à trouver une fonction u telle que


 −∆u = f dans Ω






u = 0 sur Γ0 (3.14)





 ∂u = g sur Γ1 .


∂n
où Γ0 est une partie de ∂Ω de mesure non nulle, Γ1 = ∂Ω\Γ0 et g est une fonction dans
L2 (Γ1 ).

Formulation variationnelle du problème (3.14). En supposant que ce problème admet une


solution u dans H 2 (Ω), alors cette solution vérifie nécessairement
Z Z
− ∆u v dΩ = f v dΩ ∀ v ∈ H 1 (Ω),
Ω Ω

ce qui, en utilisant la formule de Green dans H 2 (Ω) (2.31), entraı̂ne


Z Z Z
∂u ~ ~
− v dΓ + ∇u.∇v dΩ = f v dΩ.
∂Ω ∂n Ω Ω

En se restreignant à des fonctions v nulles sur Γ0 et en tenant compte de la condition au


limite de Neumann, on obtient la formulation variationnelle suivante du problème mêlé


 VΓ0 = {v ∈ H 1 (Ω) / v = 0 sur Γ0 }
 

 Trouver u ∈ VΓ0 tel que
 

 R
où ~ ∇v
a(u, v) = Ω ∇u. ~ dΩ (3.15)

 

a(u, v) = L(v) ∀ v ∈ VΓ0 


 L(v) = R f v dΩ + R gv dΓ.

Ω Γ1

Existence et unicité des solutions du problème (3.15). L’espace VΓ0 est un sous-espace fermé
de H 1 (Ω) et est donc un espace de Hilbert pour la norme induite par celle de H 1 (Ω). En

49
utilisant l’inégalité de Cauchy-Schwarz et l’inégalité (2.17) traduisant la continuité de
l’opérateur trace sur Γ1 , la forme linéaire L vérifie

|L(v)| ≤ kf k0,Ω kvk0,Ω + cT kgk0,Γ1 kvk1,Ω

≤ (kf k0,Ω + cT kgk0,Γ1 ) kvk1,Ω ,

ce qui prouve la continuité de L sur VΓ0 muni de la norme k k1,Ω . La forme bilinéaire
a vérifie l’inégalité (3.5), ce qui prouve sa continuité sur VΓ0 . En outre, l’inégalité de
Poincaré-Friedrichs (2.21) conduit à

∀ v ∈ VΓ0 a(v, v) = |v|21,Ω ≥ c2p kvk21,Ω ,

ce qui prouve la coercivité de a sur VΓ0 muni de la norme k k1,Ω . Ainsi, le problème
variationnel (3.15) vérifie les hypothèses du théorème de Lax-Milgram et sa solution u
existe et est unique dans VΓ0 .

Interprétation de la solution u en terme de solution du problème (3.14). Un raisonnement


analogue à celui adopté lors de l’étude du problème de Dirichlet homogène, conduit
immédiatement à −∆u = f dans L2 (Ω).
En supposant que u est dans H 2 (Ω), la formule de Green dans H 2 (Ω) (2.31) et le
problème (3.15) impliquent que
Z  
∂u
− g v dΓ = 0 ∀ v ∈ VΓ0 ,
Γ1 ∂n

∂u
d’où = g sur Γ1 .
∂n
Il est à remarquer que dans les problèmes du laplacien la condition aux limites de
Dirichlet apparaı̂t explicitement dans la définition des espaces fonctionnels de la formu-
lation variationnelle alors qu’il n’en est rien de la condition de Neumann. Les conditions
de Dirichlet sont dites essentielles alors que celles de Neumann sont dites naturelles.

3.2 Le problème de l’équilibre en élasticité tridimen-


sionnelle
On considère un milieu continu tridimensionnel occupant l’ouvert borné et connexe
Ω. Ce milieu est constitué d’un matériau dont le comportement élastique linéaire est
caractérisé par le champ de tenseur (d’ordre 4) R des modules élastiques. Les forces
extérieures appliquées à ce milieu sont définies par une densité volumique de force f~
agissant dans Ω et une densité surfacique de force ~g agissant sur une partie Γ1 de la
frontière ∂Ω. Sur Γ0 = ∂Ω\Γ1 , supposée de mesure non nulle, le milieu est encastré

50
dans un support fixe et rigide. Dans le cadre des hypothèses des petites perturbations
(les changements de géométrie sont négligés) et d’une évolution quasi-statique (les forces
d’inertie sont négligées), le champ de contrainte σ (tenseur d’ordre 2 symétrique), et le
champ de déplacement ~u vérifient les équations du problème aux limites suivant :

div σ + f~ = ~0 dans Ω (3.16)


1
ε(~u) = (∇~u +t ∇~u) dans Ω (3.17)
2
σ = R : ε(~u) dans Ω (3.18)
σ.~n = ~g sur Γ1 (3.19)
~u = ~0 sur Γ0 . (3.20)

Une formulation variationnelle en déplacement. En supposant que le problème d’équilibre

admet une solution σ dont toutes les composantes sont dans H 1 (Ω), l’équation d’équilibre
(3.16) entraı̂ne alors
Z
(div σ + f~).~v dΩ = 0 ∀ ~v ∈ (H 1 (Ω))3 , (3.21)

ce qui, en considérant les composantes des tenseurs dans une base orthonormée cartésienne,
conduit à Z
(σij,j vi + f~.~v ) dΩ = 0 ∀ ~v ∈ (H 1 (Ω))3 . (3.22)

En utilisant la formule de Green dans H 1 (Ω) (2.20) on obtient
Z Z Z
σij nj vi dΓ − σij vi,j dΩ + f~.~v dΩ = 0 ∀ ~v ∈ (H 1 (Ω))3 , (3.23)
∂Ω Ω Ω

ce qui, en tenant compte de la symétrie de σ, devient


Z Z Z
− σ : ε(~v ) dΩ + (σ.~n).~v dΓ + f~.~v dΩ = 0 ∀ ~v ∈ (H 1 (Ω))3 . (3.24)
| Ω {z } | ∂Ω {z Ω
}
Wint (~v ) Wext (~v )

La relation (3.24) correspond en mécanique au théorème des travaux virtuels ([8], [7]),
qui énonce que pour une structure à l’équilibre la somme du travail virtuel des efforts
intérieurs Wint (~v ) et du travail virtuel des efforts extérieurs Wext (~v ) est nulle pour tout
champ de déplacement virtuel ~v .
En tenant compte de la relation de comportement (3.18) et des conditions aux limites
(3.19) et (3.20), on obtient à partir de (3.24) la formulation variationnelle suivante pour
le problème de l’équilibre
 n o

 V Γ0 = ~v ∈ (H 1
(Ω)) 3
/ ~
v = ~
0 sur Γ 0
 

 Trouver ~u ∈ VΓ0 tel que
 


R
où a(~u , ~
v ) = ε(~v ) : R : ε(~u) dΩ (3.25)
  Ω
 
a(~u, ~v ) = L(~v ) ∀ ~v ∈ VΓ0 


 R R
L(~v ) = f~.~v dΩ +

Ω Γ1
~g .~v dΓ.

51
Existence et unicité des solutions du problème (3.25). L’espace VΓ0 est un sous-espace fermé
de (H 1 (Ω))3 et est donc un espace de Hilbert pour la norme induite par celle de (H 1 (Ω))3 .
D’autre part, il est clair que la forme linéaire L est continue sur VΓ0 dès que f~ est dans
(L2 (Ω))3 et ~g est dans (L2 (Γ1 ))3 . De même, la forme bilinéaire et symétrique a est continue
sur VΓ0 si, par exemple, les composantes du tenseur R sont dans L∞ (Ω).
La coercivité de a est par contre non triviale et découle de l’inégalité (2.35) déduite
du théorème de Korn. Dans VΓ0 , cette inégalité s’écrit
X
∃ ck > 0 / ∀ ~v ∈ VΓ0 M 2 (~v ) = kεij (~v )k20,Ω ≥ ck k~v k2(H 1 (Ω))3 ,
1≤i,j≤3

La forme bilinéaire a est alors coercive dès que les composantes du tenseur des modules
élastiques vérifient les propriétés d’ellipticité suivantes :
X
∃ cR > 0 / ∀ {Eij }1≤i,j≤3 Eij Rjikl Elk ≥ cR |Eij |2 . (3.26)
1≤i,j≤3

Ainsi, le problème variationnel (3.25) vérifie les hypothèses du théorème de Lax-Milgram


et sa solution ~u existe et est unique dans VΓ0 .
Par ailleurs, la forme bilinéaire a étant symétrique, la solution ~u de (3.25) est telle que
1
J(~u) = M in J(~v ) où J(~v ) = a(~v , ~v ) − L(~v ).
2 (3.27)
~v ∈ VΓ0

On retrouve ainsi le théorème, bien connu en mécanique ([8], [7]), du minimum de l’énergie
potentielle. L’énergie potentielle pour un champ de déplacement ~v cinématiquement ad-
missible (c’est à dire vérifiant les conditions aux limites en déplacement) est la quantité
J(~v ) définie par (3.27) et (3.25).

3.3 Un problème elliptique du quatrième ordre


Nous considérons le problème aux limites qui consiste à trouver une fonction u telle
que 

 ∆∆u = f dans Ω






u = 0 sur ∂Ω (3.28)





 ∂u = 0 sur ∂Ω.


∂n
Ce problème aux limites correspond par exemple au problème d’équilibre, dans le cadre
des hypothèses des petites perturbations, d’une structure -(plaque de plan moyen Ω dans
le cas bidimensionnel, et poutre de fibre moyenne Ω dans le cas unidimensionnel ([9])-
constituée d’un matériau élastique, homogène et isotrope, encastrée sur son contour et

52
soumise à des forces perpendiculaires à Ω. Le champ u désigne dans ce cas le déplacement
de flexion qui est perpendiculaire à Ω. Le second membre, f , correspond au rapport des
forces de flexion par la rigidité flexionnelle.

Une formulation variationnelle du problème (3.28). En supposant l’existence d’une solu-


tion u dans H 4 (Ω), cette solution vérifie nécessairement
Z Z Z
∆∆u v dΩ = u,iijj v dΩ = f v dΩ ∀ v ∈ H 2 (Ω).
Ω Ω Ω

Une première intégration par parties, utilisant la formule de Green dans H 1 (Ω) (2.20),
conduit à Z Z Z
u,iij nj v dΓ − u,iij v,j dΩ = f v dΩ.
∂Ω Ω Ω
En intégrant une deuxième fois par parties on obtient
Z Z Z Z
u,iij nj v dΓ − u,ij ni v,j dΓ + u,ij v,ij dΩ = f v dΩ. (3.29)
∂Ω ∂Ω Ω Ω
∂v
En se restreignant à des fonctions v dans H02 (Ω), c’est à dire qui vérifient v = =0
∂n
sur ∂Ω, la première intégrale de frontière de (3.29) est nulle. La deuxième intégrale de
frontière est aussi nulle dans les cas N = 1 et N = 2. Le cas unidimensionnel est trivial
et le cas bidimensionnel découle de la propriété suivante :


 v=0 sur ∂Ω

2
Ω⊂ R , =⇒ v,i = 0 (i = 1, 2) sur ∂Ω.
 ∂v = 0 sur ∂Ω


∂n
En effet, en notant s une abscisse curviligne sur ∂Ω, la condition v(s) = 0 sur ∂Ω implique
∂v ~ = ∂v ~t + ∂v ~n, où ~t est le vecteur tangent
que (s) = 0 sur ∂Ω. Et comme, sur ∂Ω, ∇v
∂s ∂s ∂n
~ = ~0 et v,i = 0 pour i = 1, 2.
à ∂Ω, il s’ensuit que ∇v
Ainsi, en se restreignant aux cas N = 1, 2 la relation (3.29), écrite avec des fonctions
v dans H02 (Ω), conduit à la formulation variationnelle suivante du problème (3.28) :
  R
2

 Trouver u ∈ H 0 (Ω) tel que  a(u, v) = Ω u,ij v,ij dΩ

où (3.30)

 
 R
a(u, v) = L(v) ∀ v ∈ H02 (Ω) L(v) = Ω f v dΩ.

Existence et unicité des solutions du problème (3.30). La continuité de a et celle de L sur


H02 (Ω) muni de la norme k k2,Ω sont aisées à établir. La coercivité de a découle du fait que
a(v, v) = |v|22,Ω et du fait que la semi-norme | |2,Ω est une norme sur H02 (Ω) équivalente
à la norme k k2,Ω . Le théorème de Lax-Milgram permet alors de conclure à l’existence et
l’unicité de la solution u du problème (3.30).

L’interprétation de cette solution u en terme de solution du problème aux limites


(3.28) est aussi immédiate.

53
3.4 Exercices
Exercice III-1 Ω est un ouvert borné de Rn , f ∈ L2 (Ω) , et α et β sont deux réels
strictement positifs. Donner une formulation variationnelle dans H 1 (Ω) du problème aux
limites suivant : 

 −∆u + αu = f dans Ω

 ∂u + βu = 0 sur ∂Ω.


∂n
Montrer que ce problème variationnel admet une solution unique et interpréter cette
solution en terme de solution du problème aux limites écrit ci-dessus.

Exercice III-2 Ω est un ouvert borné de R2 , et f ∈ L2 (Ω). Donner une formulation


variationnelle dans H 1 (Ω) du problème aux limites suivant :

 ∂ 2u ∂ 2u ∂ 2u
 − 2+

 − 2 = f dans Ω
∂x ∂x∂y ∂y



 u = 0 sur ∂Ω.

Montrer que ce problème variationnel admet une solution unique u et interpréter cette
solution en terme de solution d’un problème d’équations aux dérivées partielles. Enfin,
établir que :
∃ c > 0 / kuk1,Ω ≤ c kf k0,Ω
.

Exercice III-3 Énoncer un problème variationnel équivalent au problème de minimisa-


tion suivant :


 Trouver u ∈ H 1 (]0, 1[) tel que




 J(u) = M in J(v)

v ∈ H01 (]0, 1[)
où f est dans L2 (]0, 1[) et
Z 1 Z 1  Z 1 
1 ′ 2 2
J(v) = (v ) dx + (v) dx − f v dx + v(0)
2 0 0 0

Montrer que ce problème variationnel admet une solution unique et interpréter cette
solution en terme de solution d’un problème aux limites.

54
Exercice III-4 Ω est un ouvert borné de R2 , f ∈ L2 (Ω) , g ∈ L2 (∂Ω) et on considère
le problème variationnel suivant :

1
 Trouver û ∈ H (Ω)/R tel que

(3.31)

 1
a(û, v̂) = L(v̂) ∀ v̂ ∈ H (Ω)/R
où   
 R
~ ~
R ∂u ∂v ∂u ∂v
 a(û, v̂) = Ω ∇u.∇v dΩ + Ω ∂x ∂y − ∂y ∂x dΩ



 L(v̂) = R f v dΩ + R gv dΓ.

Ω ∂Ω

Montrer qu’une condition nécessaire pour l’existence de solutions de (3.31) est que :
Z Z
f dΩ + g dΓ = 0.
Ω ∂Ω

Montrer que dans ce cas le problème variationnel (3.31) admet une solution unique et
interpréter cette solution en terme de solution d’un problème aux limites.

Exercice III-5 On étudie dans cet exercice une méthode de pénalisation pour la prise
en compte de la condition aux limites de Dirichlet non homogène lors de la résolution du
problème suivant : 
 −∆u = f dans Ω

(3.32)


u = g sur ∂Ω.
où Ω est un ouvert borné de RN , f est dans L2 (Ω) et g est dans L2 (∂Ω). Cette méthode
de pénalisation permet la résolution par éléments finis du problème de Dirichlet non
homogène sans avoir à utiliser le prolongement à Ω de la fonction g comme il est fait dans
le problème (3.8) de la section 3.2.1.
On suppose que le problème (3.32) admet une solution u dans H 2 (Ω) et qu’il existe h
∂u
dans H 1 (Ω) tel que sur ∂Ω on a : h = .
∂n
1. Écrire une formulation variationnelle dans H01 (Ω) du problème aux limites suivant :

 −∆w + w = 0 dans Ω

(3.33)


w = h sur ∂Ω.
et montrer que ce problème variationnel admet une solution unique.
2. Pour λ > 0, on introduit le problème variationnel suivant :

1
 Trouver uλ ∈ H (Ω) tel que

(3.34)

 1
bλ (uλ , v) = Lλ (v) ∀ v ∈ H (Ω)

55
où  Z
 R
~ ∇v~ dΩ + 1

 bλ (u, v) = Ω ∇u. uv dΓ

 λ ∂Ω
 Z

 R 1
 Lλ (v) = Ω f v dΩ +
 gv dΓ.
λ ∂Ω
Montrer que ce problème variationnel admet une solution unique et interpréter cette
solution en terme de solution d’un problème d’équations aux dérivées partielles.
3. On pose vλ = uλ − u + λw où uλ est la solution de (3.33), u est celle de (3.32) et w
est celle de (3.34).
R
~ ∇w
– Montrer que : bλ (vλ , v) = λ Ω ∇v. ~ dΩ ∀v ∈ H 1 (Ω).
– Montrer qu’il existe une constante K indépendante de λ telle que : kvλ k1,Ω ≤ λ K,
et en déduire que uλ tend vers u dans H 1 (Ω) lorsque λ tend vers zero.

Exercice III-6 Reprendre le problème de l’équilibre en élasticité tridimensionnelle de la


section 3.2, en remplaçant la condition aux limites homogène sur Γ0 par une condition de
contact élastique ; c’est à dire que sur Γ0 le milieu est considéré lié à un support rigide
et fixe par l’intermédiaire de ressorts élastiques répartis sur Γ0 . Sur Γ0 la condition aux
limites est alors : σ.~n = −k ~u, où la constante strictement positive k désigne la raideur
des ressorts.
Écrire une formulation variationnelle de ce problème d’équilibre et montrer que le
problème variationnel ainsi obtenu admet une solution unique.

56
Chapitre 4

Quelques éléments finis usuels

4.1 Définition d’un élément fini

Définition 4.1 Un élément fini de Rn est un triplet (K, Σ, P ) où :



1. K est élément géométrique de Rn d’intérieur non vide (K 6= ∅).
2. P est un espace de fonctions (souvent polynomiales) définies sur K.
3. Σ = {σ1 , σ2 , ..., σN } est un ensemble de formes linéaires, σi , définies sur P . Ces
formes linéaires sont appelées les degrés de liberté (d.d.l) de l’élément fini.
4. Σ est P -unisolvant ; c’est à dire que pour tout (α1 , α2 , ..., αN ) ∈ RN il existe un
unique p ∈ P tel que (σ1 (p), σ2 (p), .., σN (p)) = (α1 , α2 , .., αN ).

En dimension 1 (n = 1), les éléments géométriques usuels sont les segments. Dans le
plan (n = 2), les triangles et les quadrangles sont couramment utilisés. Pour n = 3, les
éléments géométriques usuels sont les tétraèdres, les cubes et les prismes.
La propriété d’unisolvance revient à dire que l’application :

P −→ RN
p −→ (σ1 (p), .., σN (p))

est bijective ; ce qui nécessite que N (= card Σ) = dim P . Cette propriété signifie donc
qu’une fonction p de l’espace P est complètement déterminée par ses N d.d.l. Il est alors
immédiat d’établir les propositions suivantes :

N ≥ dim P et ∃ (pi )1≤i≤N ∈ P N / σi (pj ) = δij ⇒ Σ est P -unisolvant. (4.1)

N ≤ dim P et ∀p ∈ P (σi (p) = 0 i = 1..N ⇒ p ≡ 0) ⇒ Σ est P -unisolvant. (4.2)


Ces propositions sont bien utiles pour prouver l’unisolvance des éléments finis. Il est à
noter que dans ces propositions, la Σ − P unisolvance implique aussi que N = dim P .

57
Dans (4.1), les fonctions pi i = 1, ..N sont appelées les fonctions de base de l’élément fini.
L’intérêt de ces fonctions de base apparaı̂t dans la propriété suivante :
N
X
∀p ∈ P p= σi (p)pi
i=1

qui illustre bien le fait qu’un élément de P est complètement déterminé par ses d.d.l.

4.2 Quelques éléments finis de Lagrange


Un élément fini de Lagrange est un élément (K, Σ, P ) dont la définition des d.d.l ne
fait intervenir que des valeurs prises par les fonctions de P en des points de K. Pour de
tels éléments, la vérification de la propriété d’unisolvance est généralement immédiate car
il y est facile d’exhiber les fonctions de base (pi ) définies dans (4.1). Pour des éléments
finis tels que P est l’espace des fonctions polynomiales de degré inférieur à k sur Rn ,
P = Pk [Rn ], ces fonctions de base s’expriment aisément à partir des fonctions coordonnées
barycentriques.

4.2.1 Rappels sur les coordonnées barycentriques


Définition 4.2 Une famille de n + 1 points, (Ai )1≤i≤n+1 , est une base barycentrique de
−−−→
Rn affine si et seulement si les n vecteurs (A1 Ai )2≤i≤n+1 sont linéairement indépendants.

Ainsi, pour n = 1 deux points non confondus forment une base barycentrique de la
droite des réels. Dans le plan affine, n = 2, trois points non alignés forment une base
barycentrique. Dans l’espace affine tridimensionnel, une base barycentrique est constituée
de 4 points non coplanaires.

Définition 4.3 Par rapport à une base barycentrique (Ai )1≤i≤n+1 de Rn affine, les coor-
données barycentriques d’un point M sont les n + 1 scalaires (λi (M ))1≤i≤n+1 solution du
système linéaire suivant :
 n+1
 X −−→ −−→



 λi (M ) OAi = OM

 i=1
(4.3)

 n+1

 X


 λi (M ) = 1
i=1

où O est un point quelconque de Rn affine.


Remarques

58
– Dans la définition 4.2 les points Ai , i = 1..n + 1 ont le même rôle. En effet, en rem-
plaçant dans l’énoncé de cette définition A1 par tout autre point Ai , on obtiendrait
un énoncé équivalent au précédent.
– La définition 4.3 est indépendante du choix du point O. En effet, en remplaçant
dans le système linéaire 4.3 le point O par tout autre point de Rn affine, on obtient
un système linéaire équivalent au précédent.
– Les coordonnées barycentriques, (λi )1≤i≤n+1 , sont bien définies par le système linéaire
(4.3). En effet, ce système linéaire est un système de Cramer puisque son déterminant
−−−→
n’est autre que le déterminant des vecteurs (A1 Ai )2≤i≤n+1 . Ce dernier déterminant
est par hypothèse non nul puisque (Ai )1≤i≤n+1 est une base barycentrique.

Proposition 4.1 Par rapport à une base barycentrique (Ai )1≤i≤n+1 de Rn affine, les fonc-
tions coordonnées barycentriques, λi : M → λi (M ), i = 1..n + 1, vérifient les propriétés
suivantes :
λi (Aj ) = δij , i, j = 1...n + 1 (4.4)
λi ∈ P1 [Rn ], i = 1...n + 1. (4.5)

Preuve. Le résultat (4.4) est immédiat à partir du système linéaire (4.3). Le fait que λi (M )
est affine en fonction de M est aussi immédiat à partir de (4.3). 

Une formule utile : Dans le plan, et pour un triangle K non dégénéré, les fonctions
coordonnées barycentriques vérifient la formule suivante :
Z
2 k! l! m!
λk1 λl2 λm
3 dS = aire(K) ∀ k, l et m entiers > 0 (4.6)
K (k + l + m + 2)!

4.2.2 Exemples d’éléments finis unidimensionnels


Dans ces exemples l’élément géométrique est un segment K = [A1 , A2 ] et A1 6= A2 .
1. P = P1 [R], Σ = {p(A1 ), p(A2 )} 1
Les fonctions de base de cet élément sont :
x − A2 x − A1
p1 (x) = λ1 (x) = − , p2 (x) = λ2 (x) = .
A2 − A1 A2 − A1
Cet élément est schématisé par : •−−−−•, et est dénommé le segment P1 ou le
segment de Lagrange à 2 d.d.l.

1. La notation condensée Σ = {p(A1 ), p(A2 )} signifie que l’élément fini comporte 2 d.d.l définis par :
σi : p → p(Ai ) i = 1, 2.

59
 
1 2 A1 + A2
2. P = P2 [R], Σ = p(A ), p(A ), p( )
2
Les fonctions de base de cet élément sont :
(x − A2 ) A1 + A2
p1 (x) = λ1 (x)(2λ1 (x) − 1) = 2 (x − )
(A2 − A1 )2 2

(x − A1 ) A1 + A2
p2 (x) = λ2 (x)(2λ2 (x) − 1) = 2 (x − )
(A2 − A1 )2 2

(x − A1 )(x − A2 )
p12 (x) = 4λ1 (x)λ2 (x) = −4 .
(A2 − A1 )2
Cet élément est schématisé par : •−−•−−•, et est dénommé le segment P2 ou le
segment de Lagrange à 3 d.d.l.
 
1 2 2A1 + A2 A1 + 2A2
3. P = P3 [R], Σ = p(A ), p(A ), p( ), p( )
3 3
Les fonctions de base de cet élément sont :
1
p1 (x) = λ1 (x)(3λ1 (x) − 1)(3λ1 (x) − 2)
2

1
p2 (x) = λ2 (x)(3λ2 (x) − 1)(3λ2 (x) − 2)
2

9
p12 (x) = − λ1 (x)λ2 (x)(3λ1 (x) − 2)
2

9
p21 (x) = λ1 (x)λ2 (x)(3λ1 (x) − 1).
2
Cet élément est schématisé par : •−−•−−•−−•, et est dénommé le segment P3 ou le
segment de Lagrange à 4 d.d.l.

4.2.3 Exemples d’éléments finis plans


Éléments triangulaires
Dans ces exemples, l’élément géométrique, K, est un triangle non dégénéré de som-
mets : A1 , A2 et A3 . Ces trois points étant non alignés, ils forment une base barycentrique
du plan affine.
1. P = P1 [R2 ], Σ = {p(Ai ), i = 1, 2, 3}.
Les fonctions de base de cet élément sont :

pi (M ) = λi (M ), i = 1, 2, 3.

Cet élément est dénommé le triangle P1 ou le triangle de Lagrange à 3 d.d.l.

60
2
 i kl Ak + Al kl
2. P = P2 [R ], Σ = p(A ), i = 1, 2, 3; p(A ), 1 ≤ k < l ≤ 3 , A = .
2
Les fonctions de base de cet élément sont :
pi (M ) = λi (M )(2λi (M ) − 1), i = 1, 2, 3

pij (M ) = 4λi (M )λj (M ), 1 ≤ i < j ≤ 3.

Cet élément est dénommé le triangle P2 ou le triangle de Lagrange à 6 d.d.l.



3. P = P3 [R2 ], Σ = p(Ai ), i = 1, 2, 3, 4; p(Akl ), k, l = 1, 2, 3, k 6= l ,

kl2Ak + Al A1 + A2 + A3
4
A = , A = .
3 3
Les fonctions de base de cet élément sont :
1
pi (M ) = λi (M )(3λi (M ) − 1)(3λi (M ) − 2), i = 1, 2, 3
2

p4 (M ) = 27λ1 (M )λ2 (M )λ3 (M )

9
pij (M ) = λi (M )λj (M )(3λi (M ) − 1), i, j = 1, 2, 3, i 6= j.
2
Cet élément est dénommé le triangle P3 ou le triangle de Lagrange à 10 d.d.l.

• • • •
A A A A
 A  A • A• • A•
 A • A•A  A  A
 A   • A • • A•
 A  A • •A • • • A•
• A• • • A• • • • A• • • • • A•
P1 P2 P3 P4

Figure 4.1 – Schématisation d’éléments finis du type triangle Pk .

Étant donné que : dim Pk [R2 ] = (k + 1)(k + 2)/2, la construction d’éléments finis du
type triangle Pk conduira à des triangles de Lagrange à (k +1)(k +2)/2 d.d.l. Les premiers
éléments de ce type sont schématisés dans la figure 4.1.
Éléments quadrangulaires
Pour simplifier l’écriture des fonctions de base, nous nous limiterons dans les exemples
ci-dessous au cas où K est un carré de côté 1 : K = [0, 1]×[0, 1]. Les sommets A1 , A2 , A3 , A4
de ce carré ont pour coordonnées respectives (0, 0), (1, 0), (1, 1) et (0, 1).

61
Dans ces éléments, les espaces P sont des espaces du type Qk [R2 ]. Qk [R2 ] est l’espace
des fonctions polynomiales de degrés inférieur ou égal à k par rapport à chacune des
variables. Ainsi,
Q1 [R2 ] = V ect{1, x, y, xy}
et
Q2 [R2 ] = V ect{1, x, y, xy, x2 , y 2 , xy 2 , x2 y, x2 y 2 }.
Et il est aisé de voir que
dim Qk [Rn ] = (k + 1)n .
1. P = Q1 [R2 ], Σ = {p(Ai ), i = 1, 2, 3, 4}.
Les fonctions de base de cet élément sont :
p1 (x, y) = (1 − x) (1 − y), p2 (x, y) = x (1 − y)

p3 (x, y) = x y, p4 (x, y) = y (1 − x)
Cet élément est dénommé le quadrangle Q1 ou le quadrangle de Lagrange à 4 d.d.l.

2. P = Q2 [R2 ], Σ = {p(Ai ), i = 1...9}. Les points (Ai )i=5..8 sont les milieux des arêtes
du quadrangle et le point A9 est son centre.
Les fonctions de base de cet élément sont :
p1 (x, y) = (1 − x) (1 − y) (1 − 2x) (1 − 2y), p2 (x, y) = −x (1 − y) (1 − 2x) (1 − 2y)

p3 (x, y) = x y (1 − 2x) (1 − 2y), p4 (x, y) = −y (1 − x) (1 − 2x) (1 − 2y)

p5 (x, y) = 4 x (1 − x) (1 − y) (1 − 2y), p6 (x, y) = −4 x y (1 − y) (1 − 2x)

p7 (x, y) = −4 x y (1 − x) (1 − 2y), p8 (x, y) = 4 y (1 − y) (1 − x) (1 − 2x)

p9 (x, y) = 16 x y (1 − x) (1 − y).
Cet élément est dénommé le quadrangle Q2 ou le quadrangle de Lagrange à 9 d.d.l.
( 4 8
)
X X
3. P = Q′2 [R2 ] = p ∈ Q2 [R2 ] / 4p(A9 ) + p(Ai ) − 2 p(Ai ) = 0
i=1 i=5
i
Σ = {p(A ), i = 1...8}.
Cet élément est construit en éliminant le nœud central (A9 ) du quadrangle Q2 . Les
fonctions de base de cet élément fini sont notées p′i , i = 1..8 et elles se déduisent
aisément des fonctions de base, pi , i = 1..9 du quadrangle Q2 . Ces fonctions sont :
p′i (x, y) = pi (x, y) − 41 p9 (x, y) i = 1..4

p′j (x, y) = pj (x, y) + 12 p9 (x, y) j = 5..8.

62
La construction de ces fonctions de base prouve bien l’unisolvance de cet élément
fini et elle confirme aussi que la dimension de l’espace Q′2 , qui est un sous-espace
stricte de Q2 et donc dim Q′2 ≤ 8, est exactement 8. Cet élément est dénommé le
quadrangle Q′2 ou le quadrangle de Lagrange à 8 d.d.l.
Remarque

Le choix des coefficients 4,1 et (-2), qui apparaissent dans la relation linéaire vérifiée
par les éléments de Q′2 [R2 ], fait que :

P2 [R2 ] ⊂ Q′2 [R2 ].

• • • • • • • •

• • • • •

• • • • • • • •
Q1 Q2 Q′2

Figure 4.2 – Schématisation d’éléments finis du type quadrangle Qk .

4.2.4 Exemples d’éléments finis tridimensionnels


Éléments tétraèdriques
L’élément géométrique, K, est ici un tétraèdre non dégénéré de sommets A1 , A2 , A3 et
A4 . Ces points étant non coplanaires, ils définissent une base barycentrique de R3 affine.
Étant donné que :
dim Pk [R3 ] = (k + 1)(k + 2)(k + 3)/6,
la construction d’éléments finis du type tétraèdre Pk pour k = 1, 2 et 3 conduira à des
tétraèdres de Lagrange à 4, 10 et 20 ddl respectivement. Les premiers éléments de ce type
sont schématisés dans la figure 4.3.

1. P = P1 [R3 ], Σ = {p(Ai ), i = 1, 2, 3, 4}.


Les fonctions de base de cet élément sont :

pi (M ) = λi (M ), i = 1, 2, 3, 4.

63
P1 P2 P3

Figure 4.3 – Schématisation d’éléments finis du type tétraèdre Pk .


(Pour le cas P3 , les ddl relatifs à une seule face sont indiqués)

Cet élément est dénommé le tétraèdre P1 ou le tétraèdre de Lagrange à 4 d.d.l.

Ai + Aj
2. P = P2 [R3 ], Σ = {p(Ai ), i = 1, 2, 3, 4; p(Aij ), i ≤ j < l ≤ 4} , Aij = .
2
Les fonctions de base de cet élément sont :

pi (M ) = λi (M )(2λi (M ) − 1), i = 1, 2, 3, 4

pij (M ) = 4λi (M )λj (M ), 1 ≤ i < j ≤ 4.

Cet élément est dénommé le tétraèdre P2 ou le tétraèdre de Lagrange à 10 d.d.l.



3. P = P3 [R3 ], Σ = p(Ai ), i = 1, 2, 3, 4; p(Aij ), i, j = 1, 2, 3, i 6= j; p(Aijk ), 1 ≤ i < j < k ≤ 4 ,

2Ai + Aj Ai + Aj + Ak
Aij = , Aijk = .
3 3
Les fonctions de base de cet élément sont :
1
pi (M ) = λi (M )(3λi (M ) − 1)(3λi (M ) − 2), i = 1, 2, 3
2

9
pij (M ) = λi (M )λj (M )(3λi (M ) − 1), i, j = 1, 2, 3, i 6= j
2

pijk (M ) = 27λi (M )λj (M )λk (M ).

Cet élément est dénommé le tétraèdre P3 ou le tétraèdre de Lagrange à 20 d.d.l.


Éléments prismatiques à base rectangulaire
L’élément géométrique est ici un prisme droit à base rectangulaire et les espaces P
sont des espaces du type Qk [R3 ]. Le premier élément est le prisme Q1 à 8 d.d.l (appelé
cube 8) dans lequel les nœuds sont les sommets du prisme. Le deuxième élément est le
prisme Q2 à 27 d.d.l (appelé cube 27) dans lequel les nœuds sont les 8 sommets du prisme,
les milieux de ses 12 arêtes, les centres de ses 6 faces et le centre du prisme. En éliminant
le centre du prisme et les centres de ses 6 faces on obtient un élément fini prismatique à
20 d.d.l (appelé cube 20).

Éléments prismatiques à base triangulaire

64
L’élément géométrique est ici un prisme droit à base triangulaire. Le premier élément
est le prisme à 6 d.d.l (appelé prisme 6) dans lequel les nœuds sont les sommets du prisme.
En supposant que le prisme a pour axe z, l’espace P est :

P = V ect {1, x, y, z, xz, yz}

Le deuxième élément est le prisme à 15 d.d.l (appelé prisme 15 ) dans lequel les nœuds
sont les 6 sommets du prisme et les milieux de ses 9 arêtes. Pour cet élément, l’espace P
est :

P = V ect 1, x, y, z, xz, yz, xy, x2 , y 2 , z 2 , xyz, x2 z, y 2 z, xz 2 , yz 2

65
4.3 Quelques éléments finis de Hermite
Un élément fini de Hermite est un élément (K, Σ, P ) dont la définition des d.d.l fait
intervenir des valeurs prises par les dérivées de fonctions de P en des points de K. Pour
de tels éléments, la vérification de la propriété d’unisolvance est généralement menée en
utilisant la proposition (4.2), ce qui revient à montrer qu’une fonction de P dont tous les
d.d.l sont nuls est nécessairement nulle.

4.3.1 Un exemple unidimensionnel


Dans cet exemple l’élément géométrique est un segment non dégénéré, K = [A1 , A2 ].
L’ensemble des d.d.l est

Σ = p(A1 ), p(A2 ), p′ (A1 ), p′ (A2 ) (p′ est la dérivée de p)

et l’espace des fonctions est P = P3 [R].


L’unisolvance de cet élément fini est immédiate. En effet, considérons un élément p
de P dont les 4 d.d.l sont nuls. Ce polynôme de 3ème degrés a alors 2 racines doubles
(A1 et A2 ) et est donc identiquement nul.

4.3.2 L’élément fini plan de Zienckiewich


Cet élément à 10 d.d.l est représenté schématiquement dans la figure (4.4). L’élément
géométrique est un triangle non dégénéré, K = [A1 , A2 , A3 ] et on notera A4 son isobary-
centre.
L’ensemble des d.d.l est :
 
i ∂p j ∂p j
Σ = p(A ), i = 1..4; (A ), (A ), j = 1..3
∂x1 ∂x2
où (x1 et x2 ) sont des coordonnées cartésiennes dans le plan.
L’espace des fonctions est
P = P3 [R2 ]
.
Preuve d’unisolvance :
Considérons un polynôme p de P dont tous les degrés de liberté sont nuls et montrons
que ce polynôme est nécessairement nul.
Notons q la restriction de p à la droite [A1 , A2 ] et s une abscisse curviligne définie sur
cette droite. q est alors un polynôme de degrés inférieur ou égal à 3 en s nul en A1 et A2
et on a :
dq ∂p dx1 ∂p dx2
= + .
ds ∂x1 ds ∂x ds

66
dq
Ainsi, est aussi nul en A1 et A2 et ces points sont donc 2 racines double du polynôme
ds
q. Ce dernier étant de degrés inférieur ou égal à 3, il ne peut qu’être nul. Il en découle que
le polynôme p est nul sur la droite [A1 , A2 ] et donc la fonction barycentrique λ3 divise p.
En raisonnant de la même façon sur les droites [A1 , A3 ] et [A2 , A3 ] on obtient :

∃ α ∈ R / p(x1 , x2 ) = α λ1 (x1 , x2 ) λ2 (x1 , x2 ) λ3 (x1 , x2 )

et comme p(A4 ) = 0 et λi (A4 ) = 1/3, i = 1, 2, 3 il vient que α = 0 et p = 0. 

Zienckiewich 10 d.d.l Argyris 21 d.d.l Bogner-Fox-Schmit 16 d.d.l

Figure 4.4 – Exemples d’éléments finis de Hermite.

4.3.3 L’élément fini plan d’Argyris


Cet élément à 21 d.d.l est représenté schématiquement dans la figure (4.4). L’élément
géométrique est ici un triangle non dégénéré, K = [A1 , A2 , A3 ]. Pour 1 ≤ i < j ≤ 3 on
note Aij le milieu du segment [Ai , Aj ].
L’ensemble des d.d.l est
 
j ∂p j ∂p j ∂ 2 p j ∂ 2 p j ∂ 2p j ∂p ij
Σ = p(A ), (A ), (A ), (A ), (A ), (A ), j = 1..3, (A ), 1 ≤ i < j ≤ 3
∂x1 ∂x2 ∂x21 ∂x22 ∂x1 ∂x2 ∂n
où (x1 et x2 ) sont des coordonnées cartésiennes dans le plan.
L’espace des fonctions est

P = P5 [R2 ] (dimP = 21)

.
Preuve d’unisolvance :
Considérons un polynôme p de P dont tous les degrés de liberté sont nuls et montrons
que ce polynôme est nécessairement nul.
Notons q la restriction de p à la droite [A1 , A2 ] et s une abscisse curviligne définie sur
cette droite. q est alors un polynôme de degrés inférieur ou égal à 5 en s nul en A1 et A2
et on a :
dq ∂p dx1 ∂p dx2
= + ,
ds ∂x1 ds ∂x2 ds

67
et, étant donné que x1 et x2 sont affines en s et donc d2 xi /ds2 = 0,
 2  2
d2 q ∂ 2 p dx1 ∂ 2 p dx2 dx1 ∂ 2 p dx2
= +2 + 2 .
ds2 ∂x21 ds ∂x1 ∂x2 ds ds ∂x2 ds

dq d2 q
Ainsi, q, et 2 sont nulles en A1 et A2 et ces points sont donc 2 racines triple du
ds ds
polynôme q. Ce polynôme de degrés 5 est par conséquent nul. Par ailleurs, sur la droite
∂p
[A1 , A2 ] le polynôme est un polynôme de degrés inférieur ou égal à 4 en s puisque :
∂n
∂p ∂p dx2 ∂p dx1
=− + ,
∂n ∂x1 ds ∂x2 ds
et on en déduit aussi que :
 2   
d ∂p ∂ p ∂ 2 p dx1 dx2 ∂ 2p dx2 2 dx1 2
( )= − 2 − ( ) −( ) .
ds ∂n ∂x22 ∂x1 ds ds ∂x1 ∂x2 ds ds
∂p
Ainsi, le polynôme , de degré inférieur ou égal à 4 et nul en A12 , s’annule aussi
∂n
doublement en A1 et A2 ; il est donc identiquement nul sur la droite [A1 , A2 ].


Finalement, en notant t le vecteur unitaire tangent à la droite [A1 , A2 ] et − →
n sa
dp −→ −→ ∂p −→ −
normale, le polynôme p et ses dérivées = ∇p. t et = ∇p.→ n sont nulles sur la
−→ ds ∂n
droite [A1 , A2 ]. Il s’ensuit que p et ∇p sont nuls sur [A1 , A2 ]. La fonction coordonnée
barycentrique λ3 divise alors le polynôme p et divise son gradient. Ainsi, la fonction λ23
divise p et il en est de même des fonctions λ21 et λ22 . Or, p est degrés inférieur ou égal à 5,
donc p est nul. 

4.3.4 L’élément fini rectangle de Bogner-Fox-Schmit


Cet élément à 16 d.d.l est représenté schématiquement dans la figure (4.4). L’élément
géométrique est ici un rectangle non dégénéré, K = [A1 , A2 , A3 , A4 ].
L’ensemble des d.d.l est
 
j ∂p j ∂p j ∂ 2p j
Σ = p(A ), (A ), (A ), (A ), j = 1..4
∂x1 ∂x2 ∂x1 ∂x2

où (x1 et x2 ) sont des coordonnées cartésiennes dans le plan.


L’espace des fonctions est

P = Q3 [R2 ] (dimP = 16)

La preuve d’unisolvance de cet élément fini est laissé au soin du lecteur à titre d’exercice.

4.4 Exercices

68
Chapitre 5

Espaces éléments finis et estimations


d’erreur

5.1 Construction d’espaces éléments finis


5.1.1 Maillage ou Triangulation

Définition 5.1 Maillage ou Triangulation


Soit Ω un domaine de Rn ; Ω est un segment pour n = 1, un polygone pour n = 2 et un
polyèdre pour n = 3. Un maillage (ou triangulation ) Th de Ω est un ensemble fini de
parties Ki ( Ki est un segment pour n = 1, un polygone pour n = 2 et un polyèdre pour
n = 3) fermées de Ω vérifiant :
S ◦ ◦ ◦
1. Ω = Ki , Ki 6= ∅ et Ki ∩ Kj = ∅ pour i 6= j
i
2. Ki ∩ Kj = ∅ ou un sommet ou une arête (pour n > 1) ou une face (pour n = 3).

La figure (5.1) illustre les situations acceptables/non acceptables pour l’exigence du


point 2.

oui non non

Figure 5.1 – Maillages bidimensionnels acceptables/non acceptables.

69
5.1.2 Espace éléments finis
S
En considérant un maillage Th de Ω (Ω = Ki ) et des éléments finis Ei = (Ki , ΣKi , PKi ),
i
on note : [
Σh = ΣKi = {Φhi , 1 ≤ i ≤ M }
i

où M désigne le nombre des d.d.l, Φhi , définis sur le maillage.

Définition 5.2 Espace éléments finis


 
S
Etant donnés un maillage Th de Ω Ω = Ki et des éléments finis Ei = (Ki , ΣKi , PKi ),
i
l’espace éléments finis Xh associé à Th et (Ei ) est défini par :

Xh = {v : Ω → R tel que : 1) v est continue sur Ω et ∀ Ki ∈ Th , v/Ki ∈ PKi

2) v est complètement déterminée par ses d.d.l Φhi (v) i = 1..M }

Définition 5.3 Fonctions de base dans Xh


Xh est un espace vectoriel de dimension M = Card(Σh ). On définit les fonctions de base
de Xh (wih )1≤i≤M par :

wih ∈ Xh , Φhj (wih ) = δij ∀j ∈ {1, ..., M }

Exemple : Pour le maillage et les éléments finis triangles P1 de la figure (5.2) la fonction
de base w3 associée au d.d.l défini par le nœud A3 a pour support :

Support(w3 ) = K1 ∪ K2 ∪ K3 ∪ K4 ,

pour le nœud A6 : Support(w6 ) = K5 ∪ K6 ,


pour le nœud A7 : Support(w7 ) = K6 .

A5
A4 A6
K2
K5
K1 A3 K4
K3 K6
A1 A7
A2

Figure 5.2 – Un exemple de maillage et d’éléments finis

Remarque : Une fonction de base wih associée à un nœud Ai appartenant à différentes


mailles Kp de Xh , coı̈ncide sur chacune de ces mailles Kp avec la fonction de base de
l’élément fini Ep = (Kp , ΣKp , PKp ). En dehors de ces éléments, wih est nulle.

70
5.1.3 Interpolation

Définition 5.4 Interpolation sur l’élément fini (K, Σ, P )


Soit (K, Σ, P ) un élément fini de degrés de liberté σiK et de fonctions de base pK i (i =
1, ...N )
L’opérateur ΠK d’interpolation sur K est défini sur l’espace F (K) des fonctions v
suffisamment régulières pour que les d.d.l σiK (v) soient bien définis. ΠK est défini par :
N
X
v ∈ F (K) ΠK (v) = σiK (v)pK
i
i=1

Remarques :
1. ΠK (v) ∈ P
2. σiK (ΠK (v)) = σiK (v)
3. Pour tout p ∈ P , ΠK (p) = p

Définition 5.5 Interpolation sur l’espace éléments finis Xh


L’opérateur Πh d’interpolation sur l’espace éléments finis Xh est défini sur l’espace
F (Ω) des fonctions v suffisamment régulières pour que les d.d.l Φhi (v) soient bien définis.
Πh est défini par :
XM
v ∈ F (Ω) Πh (v) = Φhi (v)wih
i=1

Il est à noter que : ∀K ∈ Th , (Πh (v))/K = ΠK (v)

5.1.4 Classe d’un élément fini

Définition 5.6 Classe d’un élément fini


Un élément fini (K, Σ, P ) est un élément fini de classe V si et seulement si pour toute
triangulation Th d’un domaine Ω générée par cet élément fini, l’espace éléments finis Xh
est inclus dans V (Xh ⊂ V ). Cela revient encore à dire que :

Πh (v) ∈ V ∀v ∈ F (Ω) (i.e. ∀v tel que les Φhi (v) existent)

En pratique, pour montrer qu’un élément fini est de classe C k , il faut et il suffit de prouver
la continuité des dérivées d’ordre ≤ k sur l’arête commune à deux éléments adjacents pour
toute fonction interpolée Πh (v).

71
Théorème 5.1 Soit un élément fini (K, ΣK , PK ) tel que PK ⊂ H 1 (K). Alors si cet
élément fini est de classe C 0 , il est également de classe H 1 .

Preuve. Soit v ∈ Xh . Sur chaque maille K de la triangulation Th , v/K ∈ H 1 (K) et on a :


Z Z Z
∂v/K K ∂ϕ
ϕdΩ = v/K ϕ ni dΓ − v/K dΩ ∀ ϕ ∈ D(Ω)
K ∂xi ∂K K ∂xi
Introduisons la fonction w définie presque partout dans Ω par :
∂v/K
w= sur chacune des mailles K de la triangulation Th
∂xi
On a alors w ∈ L2 (Ω) et :
Z X Z Z
∂ϕ
w ϕdΩ = v/K ϕ nK
i dΓ − v dΩ
Ω K∈Th ∂K Ω ∂xi
X Z ∂v
= v/K ϕ nK
i dΓ+ < ,ϕ >
K∈Th ∂K ∂xi
Or, l’élément fini (K, ΣK , PK ) étant de classe C 0 , v ∈ C 0 (Ω) et :
X Z
v/K ϕ nK i dΓ = 0
K∈Th ∂K

∂v ∂v
Ainsi = w dans D′ (Ω) avec w ∈ L2 (Ω), d’où ∈ L2 (Ω) et v ∈ H 1 (Ω). 
∂xi ∂xi
Théorème 5.2 Soit un élément fini (K, ΣK , PK ) tel que PK ⊂ H 2 (K). Alors si cet
élément fini est de classe C 1 , il est également de classe H 2 .

Preuve. Analogue à la preuve du théorème précédant.

Pour les éléments finis décrits dans le chapitre précédant, il est aisé d’établir que :
- Les éléments finis de Lagrange sont de classe C 0 (et donc H 1 ).
- L’élément fini de Hermite à 10 d.d.l est de classe C 0 (et donc H 1 ).
- L’élément d’Argyris est de classe C 1 (et donc H 2 ).
- L’élément rectangle de Hermite à 16 d.d.l est de classe C 1 (et donc H 2 ).

5.2 Estimations d’erreur pour l’approximation par la


méthode des éléments finis conforme
Dans un domaine Ω, considérons le problème variationnel elliptique abstrait suivant :

 Trouver u ∈ V tel que

(P ) (5.1)


a(u, v) = L(v) ∀ v ∈ V

72
A ce problème (P ), est associé un problème discret (Ph ) posé dans un espace Vh de
dimension finie :

 Trouver uh ∈ Vh
 tel que
(Ph ) (5.2)


a(uh , v) = L(v) ∀ v ∈ Vh

Nous nous limitons ici à donner quelques résultats “d’estimations d’erreur a priori” pour :
– des problèmes du second ordre (i.e. tels que V ⊂ H 1 (Ω)),
– Vh ⊂ Xh où Xh désigne un espace éléments finis associé à un maillage Th ,
– une méthode d’éléments finis conforme (i.e. telle que Xh ⊂ V ).

Notons :
– u la solution du problème (P )
– uh la solution du problème (Ph )
– ũh l’interpolée de u dans Xh : ũh = Πh (u)

L’estimation d’erreur a priori est obtenue en deux étapes :


– dans un premier temps, et par le Lemme de Céa, il est établi que l’erreur d’approxi-
mation ku − uh kV est majorée par l’erreur d’interpolation ku − ũh kV ,
– dans un deuxième temps, une borne sur l’erreur d’interpolation est obtenue.

Lemme de Céa : Il existe une constante c > 0 indépendante de Vh telle que :

ku − uh kV ≤ cku − ũh kV

Ce qui signifie que l’erreur d’approximation est majorée par l’erreur d’interpolation.
Preuve. u et uh étant respectivement solution de (P ) et de (Ph ), on a :

 a(u, wh ) = L(wh )

∀wh ∈ Vh


a(uh , wh ) = L(wh )
ce qui implique :
a(u − uh , wh ) = 0 ∀wh ∈ Vh
Ainsi ∀vh ∈ Vh ,

a(u − uh , u − uh ) = a(u − uh , u − vh )+ a(u − uh , vh − uh )


| {z }
=0
La coercivité et la continuité de a permettent alors d’établir que : ∀vh ∈ Vh ,
1 1 M
ku − uh k2V ≤ a(u − uh , u − uh ) = a(u − uh , u − vh ) ≤ ku − uh kV ku − vh kV
|{z} α α |{z} α
coerc. cont.

73
En prenant vh = ũh (= Πh (u)), on obtient :
M
ku − uh kV ≤ ku − ũh kV
α
d’où le lemme. 

Définition 5.7 Triangulation régulière - Famille de triangulations régulières


Pour une triangulation Th constituée d’éléments K on note :

hK = diamètre de K = Sup{kx − yk, x, y ∈ K}


ρK = diamètre de la plus grande boule inscrite dans K hK

= 2 sup{r / ∃a ∈ K, B(a, r) ⊂ K}
r∈R
ρK
h = sup (hK ) (h définit la finesse du maillage)
K∈Th

Cette triangulation Th est dite régulière si il existe σ tel que :


hK


 ≤σ pour les éléments K triangulaires (n=2) ou tétraèdriques (n=3)
 ρK

∀K ∈ Th

 h


 pK ≤ σ pour les éléments K quadrilatéraux ou cubiques
ρK 1 − ρK

Cette dernière condition interdit les mailles “aplaties”.


Une famille de triangulation (Th )h est dite régulière si σ est indépendant de Th .

Théorème 5.3 (de Bramble-Hilbert)


Soit (Th )h une famille régulière de triangulations de Ω, constituée d’éléments (K, Σ, P )
de classe C 0 .
Si
P1 [K] ⊂ PK ⊂ H 1 (K)
alors
lim ku − ũh k1,Ω = 0
h→0

De plus, en notant s l’ordre de dérivation maximal apparaissant dans ΣK (s=0, 1 ou 2


pour les éléments passés en revue dans le chapitre 4), et

 s
 si n = 1

s =


s + 1 si n = 2 ou 3

74
et si ∃ k ≥ s′ tel que :
(1) Pk [K] ⊂ PK ⊂ H 1 (K)
(5.3)
(2) u ∈ H k+1 (Ω)
alors on a l’estimation asymptotique suivante

ku − ũh k1,Ω ≤ c hk kukk+1,Ω

Il s’agit alors d’une convergence d’ordre k et on note :

ku − ũh k1,Ω = O(hk )

Preuve. Conférer le troisième chapitre de ([4]). 

Avec le Lemme de Céa, ces résultats de comportement de l’erreur d’interpolation


ku − ũh k1,Ω tiennent aussi pour l’erreur d’approximation ku − uh k1,Ω .
Le tableau 5.1 synthétise l’application de ces résultats à quelques uns des éléments
finis passés en revue dans le chapitre 4.

Tri3P1 Tri6P2 Tri10P3

éléments
Quad4Q1 Quad9Q2 Zienckiewich
10ddl, P3

Quad8Q’2 Rectangle
16ddl, Q3

s′ = 1 1 1, 1, 2
PK ⊃ P1 P2 P3
k=1 k=2 k=3

Si u ∈ H 2 (Ω) H 3 (Ω) H 4 (Ω)

erreur ku − uh k1,Ω = O(h) O(h2 ) O(h3 )

Tableau 5.1 – Estimation d’erreur pour quelques éléments finis

75
Pour une résolution par éléments finis de type Lagrange dans R2 (s′ = 1), supposons
que la solution recherchée u ∈ H m (Ω) et que Pk [K] ⊂ PK ⊂ H 1 (K). Le comportement
de l’erreur est :
ku − uh k1,Ω = O(hl )
où
l = min(m − 1, k).
La convergence optimale est obtenue en prenant k = m − 1, et il est inutile d’approcher
avec un ordre (plus) élevé (k > m − 1), une solution de régularité H m (Ω).

5.2.1 Dimension de l’espace éléments finis Xh pour n = 2


Afin de pouvoir comparer les différents éléments finis entre eux en termes de “coût de
résolution“, nous donnons dans ce paragraphe quelques résultats qui permettent d’estimer
asymptotiquement la dimension de l’espace éléments finis Xh quand la finesse du maillage
h tend vers zéro et cela pour des problèmes bidimensionnels.

Proposition 5.1 Pour un maillage d’un domaine ouvert simplement connexe par des
triangles, et en notant :
nt le nombre de triangles
na le nombre d’arêtes
ns le nombre de sommets,
on a la relation d’Euler Poincaré :

ns + nt = na + 1. (5.4)

De plus, quand la finesse du maillage h → 0, on vérifie asymptotiquement :

nt ≈ 2 ns , na ≈ 3 ns (5.5)

Preuve. La relation d’Euler Poincaré peut s’établir par


récurrence. Elle est vraie pour un simple triangle. Sup-
Triangle nt + 1
posons qu’elle soit encore vraie pour une triangulation
par nt triangles. Le passage à nt + 1 triangles tout en
conservant le caractère ”ouvert simplement connexe“ du
domaine couvert par la triangulation ne peut se faire que Triangulation nt

par ajout d’un triangle partageant un côté avec un tri-


angle frontière. Cela se traduit par les variations :

δnt = 1, δns = 1, δna = 2

76
On vérifie ainsi que pour le passage de nt à nt + 1

δnt + δns = δna ,

ce qui permet d’établir la relation d’Euler Poincaré pour le maillage nt + 1.


Par ailleurs il est assez simple d’établir que pour une triangulation, on a :

Σ angles = Π nt = 2 Π ns (intérieurs) + Contribution des sommets sur ∂Ω.

Quand h → 0, le nombre de sommets frontières devient négligeable devant le nombre de


sommets et on déduit de la relation précédente qu’on a asymptotiquement :

nt ≈ 2 ns

La relation d’Euler Poincaré donne alors pour na :

na ≈ 3 ns

Commentaires.
- Les d.d.l à l’intérieur des triangles sont deux fois plus coûteux que ceux des sommets,
et ceux sur les arêtes le sont trois fois plus.
- Pour un maillage par des triangles, la taille du système linéaire à résoudre sera
asymptotiquement de :
- n ≈ ns pour des éléments finis Tri3P1
- n ≈ ns + na ≈ 4ns pour des éléments Tri6P2.
Sur une même triangulation, l’élément fini Tri6P2, avec deux fois plus de d.d.l que
l’élément Tri3P1, conduit ainsi à une taille de système 4 fois plus importante.
- Pour le passage de l’élément fini ”quadrangle Q2 à 9 ddl“ à l’élément ”quadrangle
Q′2 à 8 ddl“, on remarquera que l’élimination du nœud intérieur répond à trois
exigences :
- réduire la taille du système à résoudre,
- conserver le caractère ”Classe C 0 “ de l’élément ; il faut ainsi garder les d.d.l
sur les arêtes bien qu’ils soient plus coûteux que le d.d.l intérieur,
- éliminer le nœud en s’assurant que P2 [R2 ] ⊂ Q′2 [R2 ] pour assurer une conver-
gence d’ordre 2 quand la solution recherchée u ∈ H 3 (Ω).

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Bibliographie

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