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Déficit en Glucose-6-Phosphate déshydrogénase

Déficit en Glucose-6-Phosphate déshydrogénase.


Glucose-6-Phsphate dehydrogenase deficiency
Y.Bellouche
INTRODUCTION

Au cœur du fonctionnement du corps humain, le milieu intérieur représente un secteur


indispensable dans le maintien de l’homéostasie, de part de sa capacité de transport des
nutriments vers les tissus périphériques et des déchets métaboliques vers les centres
d’épuration (rein, poumon et foie) assurée par sa phase sérique, il s’agit d’une plateforme
de communication sur son versant endocrine par l’immense quantité de substances
informatives qu’il contient (hormones, messagers primaires………). La phase cellulaire
du sang contient plusieurs lignées à fonctions diverses (immunité, hémostase,
inflammation, transport……) dont la plus importante quantitativement est l’érythrocyte,
cellule anucléée à forme discoïde, ces éléments -dépourvus qu’ils soient de l’ADN- abritent
un arsenal enzymatique hautement spécifique et efficace nécessaire pour leur survie dans
les conditions physico-chimiques hostiles de la circulation afin d’assurer le transport de
l’oxygène (élément incontournable du métabolisme énergétique) par le biais de
l’hémoglobine à partir du centre d’échange (Poumon) vers les centres de consommation.
Majoritairement de nature protéique, les enzymes catalysent une gamme très étendue de
réactions biochimiques qui interfèrent avec toutes les fonctions cellulaires possibles avec
un coût énergétique d’activation très réduit par rapports aux réactions spontanées au même
régime thermodynamique, au prix d’une plus grande susceptibilité aux mutations
génétiques et aux déficits, cela est très vraie pour le matériel génétique des érythrocytes,
on compte actuellement plus de 36 déficits (quantitatifs et qualitatifs) qui touchent
l’hémoglobine, la membrane érythrocytaire ou l’une des enzymes clé dans les voies
métaboliques avec une prévalence qui dépasse les 300 millions.
Parmi ces enzymes, la Glucose-6-phosphate déshydrogénase, dont le déficit représente la
plus fréquente pathologie érythrocytaire dans le monde (30 à 45 % des déficits
enzymatiques érythrocytaires), dû à une mutation qui touche un locus sur le chromosome
X, ce déficit réduit la résistance des globules rouges au stress oxydant, et diminuant leur
durée de vie, provoquant ainsi, des crises de destruction globulaire avec libération de
l’hémoglobine.
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Déficit en Glucose-6-Phosphate déshydrogénase

DEFINITIONS

Le déficit en Glucose-6-Phosphate déshydrogénase est un état pathologique caractérisé


par un défaut de dégrée variable en activité de l’enzyme en question, réalisant dans
l’extrême un favisme. Malgré l’expression ubiquitaire de cette protéine, l’existence de
plusieurs voies de production du NADPH, H+ dans la cellule nucléée permet de limiter
l’effet de son absence, or cela n’est pas le cas des érythrocytes qui deviennent très fragiles
et sensibles aux agents oxydants (O2-, H2O2…..) avec une réduction importante de leur
durée de vie, l’anémie en est la traduction biologique dans la majorité des cas, avec une
diminution des paramètres hématimétriques : hématocrite (le rapport entre le volume
cellulaire des éléments figurés et le volume sanguin total), nombre des globules rouges, ou
le taux de l’hémoglobine qui est inférieur à 10g/100ml (les limites changent avec l’âge),
ce dernier étant le plus important compte tenu de son implication vitale dans le transport
gazeux. Parfois, le tableau est dominé par un ictère, un état qui reflète une coloration
jaunâtre des téguments et des muqueuses par un excès de la bilirubine circulante, cette
dernière, étant un produit du catabolisme de l’hémoglobine érythrocytaire lors une crise
hémolytique.

HISTORIQUE

Dès l’Antiquité, le déficit en G6PD était connu depuis des siècles, surtout par ses
conséquences, illustré par le philosophe grec Pythagore qui déconseillait à ses élèves de
manger des fèves (Vicia faba) probablement pour leur effet potentiellement pathogène. Au
début du 20e siècle, le terme « favisme » fut son apparition devant des crises d’anémie
aigue consécutives à l’ingestion de fèves décrites par des médecins italiens où on remarqua
déjà le caractère familial et la prédominance masculine. Toutefois, ces caractères
n’apparaissaient pas systématiquement, on pensa alors plutôt à un mécanisme toxique ou
allergique.
En 1952, Le Colonel Américain Hockwald constata chez plusieurs soldats d’ethnie noire
une anémie aigues où l’agent déclenchant a été identifié comme la primaquine, un
antipaludéen utilisé par les soldats, quatre ans après, Carson découvre la réduction de
l’activité d’une enzyme « Glucose-6-Phosphate déshydrogénase » dans les globules rouges

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de ces mêmes soldats. Alors que le lien entre l’anémie causée par les fèves et celle par
primaquine a été mis en évidence par Cros dans la même année.
En 1958, Childs détecte l’aberration génétique en cause de ce problème et localise le locus
dans le chromosome X, expliquant la prédominance masculine d’atteinte, suivi par Beutler
qui décrit pour la première fois le mécanisme de l’anémie.
En 1966, l’OMS réunit un groupe de travail pour étudier cette maladie avec ses différentes
variantes, pour publier en 1989 le premier bulletin qui contient une étude multidisciplinaire
sur ce déficit décrivant la répartition, le polymorphisme, les mécanismes et la prévention
de la maladie.
En 1996, on développe le modèle du déficit en G6PD humaine en trois dimensions, où
l’analyse moléculaire des variantes biochimiques montrait qu’en réalité, le nombre est aux
environs de 120 mises en évidence.
On comprend désormais pleinement la physiopathologie de cette maladie et on continue à
découvrir des variantes moléculaires. Toutefois, hormis chez les spécialistes, cette
pathologie reste assez méconnue à l’échelle publique.

ASPECTS EPIDEMIOLOGIQUES (I) : DANS LE MONDE

Il s’agit du déficit le plus répandu dans le monde, la plus grande méta-analyse faite jusque-
là (Nkhoma et al. 2009) estime la prévalence mondiale à 4.9 p100, soit plus de 330 millions.
Le bulletin de L’OMS parle d’une prévalence qui avoisine les 7.5 p100, qui comprend les
hommes hémizygotes, et les femmes avec les trois variétés : homozygote, hétérozygote
saine, et malade.
Chez l’homme hémizygote, le déficit est toujours parlant vu l’absence d’un allèle
secondaire, cela explique la prédominance masculine accrue de l’atteinte qui dépasse 90%
des cas, chez la femme homozygote, les deux allèles occupant le locus sont défectueux,
donc l’expression du déficit sera inévitable (à des dégrée variables), dans le reste des cas,
l’hétérozygotie est d’expression variable, soit de phénotype sain par compensation
allélique, soit pathologique, expliquée par la lyonization de l’X fonctionnel (phénomène
génétique caractérisé par l’hyper-méthylation des acides nucléiques de l’ADN avec une

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tendance à la polymérisation dans une hétérochromatine inaccessible à la transcription dans


un petit corpuscule périphérique appelé « corpuscule de Barr » ).

Figure-1- : La prévalence du déficit en Glucose-6-Phosphase déshydrogénase dans le monde

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Les zones les plus touchées du globe sont l’Afrique, l’Europe du Sud, le Moyen‐Orient,
l’Asie du Sud‐Est, l’Inde, les îles du Pacifique Sud et Central. Du fait des migrations de
populations, la prévalence a récemment augmenté dans certains pays d’Europe du Nord, en
Amérique du Nord et du Sud.
Sur le plan moléculaire, il existe plusieurs variétés de ce déficit (voir. Plus bas), la variété
A reste de loin, la plus fréquente Parmi les nombreuses variantes moléculaires du déficit en
G6PD connues, elle concerne 90 % des patients déficitaires en Afrique tropicale. Elle est
également fréquente là où l’on trouve des personnes originaires d’Afrique tropicale : en
Amérique du Nord, du Sud et dans les Antilles. Mais on la rencontre aussi en Italie, aux
Îles Canaries, en Espagne, au Portugal, dans le Moyen‐Orient et le Proche‐Orient.
La deuxième variante la plus répandue est la variante Méditerranéenne. Elle est présente
dans tous les pays du pourtour de la Méditerranée. Elle est également répandue au Moyen‐
Orient. C’est quasiment la seule variante présente chez les Juifs kurdes ainsi qu’en Inde et
en Indonésie.
Dans beaucoup de populations, on note la coexistence des deux variantes A et
variante Méditerranéenne : c’est le cas des pays du Golfe Persique.
Les deux autres principales variantes sont les variantes Seattle et Union, qu’on trouve en
Italie du Sud, en Sardaigne, en Grèce, aux îles Canaries, en Algérie, en Allemagne et en
Irlande. On rencontre également la variante Union en Chine et au Vanuatu.
Par ailleurs, la comparaison entre les patterns de répartition géographique du déficit en
G6PD et ceux des zones d’endémie paludéenne, suggère un effet paradoxalement
bénéfique : une résistance à l’infestation par le plasmodium, les mécanismes ne sont pas
jusque-là bien élucidés, plusieurs hypothèses tentent d’expliquer cette relation, le même
phénomène est observé avec la répartition de la drépanocytose, Certains avancent même
qu’il y a un avantage à la coexistence de ces deux pathologies chez un patient : puisque le
déficit en G6PD favorise une élimination plus précoce des hématies, les malades
présentent une régénération médullaire accrue. Cela se traduit par une plus grande
proportion de jeunes hématies, moins sujettes aux crises de falciformisation.
L’association avec d’autres pathologies hémolytiques comme les thalassémies et les
anomalies de la membrane érythrocytaire ne sont guère rares, donnant lieu souvent à des
tableaux inhabituellement sévères d’hémolyse.

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ASPECTS EPIDEMIOLOGIQUES (II) : EN ALGERIE

En l’absence d’études récentes sur ce déficit, une prévalence exacte est impossible à
trouver, et l’étendue de la maladie en Algérie reste méconnue, toutefois, les estimations du
groupe de travail de l’OMS parlent d’une prévalence du gène déficitaire qui avoisine les
7%, tandis que moins de 3% sont atteints à un moment donnée de leur vie, Constantine
présente la fréquence la plus faible alors qu’on constate la plus haute fréquence au niveau
de la région Kabyle. On marque par ailleurs, l’hétérogénéité des variantes du
déficit méditerranéen, A, Seattle et Union étant les variantes les plus fréquentes.

PHYSIOLOGIE DU GR, LA VOIE DES PENTOSES-P-

Figure-2- : Structure et fonctions du GR

Le globule rouge, l’élément cellulaire le plus important du sang, est une cellule anucléée,
de forme discoïde qui dérive d’un progéniteur commun à toute les lignées sanguines
(cellules souches pluripotentes de la moelle osseuse rouge hématogène). La perte de son
noyau durant son ontogénèse suppose une durée de vie réduite, la moyenne de la vie d’un
GR est de 120 jours, une fois jugés trop séniles par le système réticulo-endothélial
(ensemble tissulaire d’origine embryologique mésenchymateuse, qui se localise au niveau
de la rate, le foie et la moelle osseuse rouge hématogène. Constitué principalement par des
macrophages sidérophages), ils seront piégés à son niveau pour être détruits, libérant leur
contenu cytoplasmique, dont l’hémoglobine, principale protéine fonctionnelle des GR, il
s’agit d’une structure hautement spécifique qui contient en plus d’éléments de base
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(aminoacides), de l’hème, pigment qui abrite un ion de fer en son sein, responsable des
réactions d’oxydo-réduction, donnant la capacité de l’hémoglobine à fixer l’oxygène et de
le libérer. En plus, le GR, contient un pool enzymatique non renouvelable très basique,
avec absence de la majorité des organites subcellulaires habituels d’où le mode
anaérobique de son métabolisme et la fragilité accrue aux déficits génétique par absence
d’effet de redondance.
En plus de son rôle de transport des gaz, les GR assurent une fonction majeure dans
l’équilibre acido-basique, hydro-électrolytique, l’hémostase et même dans les phases
précoces de la réponse immunitaire non spécifique et la réaction inflammatoire, notamment
par leur participation dans la libération d’agents oxydants toxique pour les tissus, délimitant
ainsi la zone délétère périfocale, indispensable au recrutement des monocytes et des
granulocytes.
Dans les cellules eucaryotes standards, l’énergie est extraite par le biais des réactions de
glycolyse et du cycle de Krebs, pour être emmagasinée dans les liaisons de haute énergie
de l’Adénosine triphosphate (ATP), alors que la voie des pentoses phosphates joue un rôle
anabolique essentiellement, cette voie, phylogéniquement très ancienne (apparition
synchrone avec la voie de la glycolyse), débute par la séquestration intracellulaire du
glucose internalisé, ou néosynthétisé, pour aboutir après plusieurs réactions d’oxydo-
réduction à la production du ribose-5-Phosphate (substrat de base pour la synthèse des
bases nucléiques), d’érythrose-4-Phosphate (substrat de synthèse des aminoacides
aromatiques) avec la réduction d’un agent cytoplasmique antioxydant clé dans les
processus de défense cellulaire contre le stress oxydant, le NADPH,H+ (Nicotinamide
Adénine Dinucléotide Phosphate) ainsi que le porteur de protons et la source d’énergie
dans plusieurs autres voies métaboliques, cet agent représente l’essentiel des réducteurs de
la Glutathion (agent antioxydant contre les radicaux libre, surtout l’H2O2).
Dans le GR, dépourvue d’un cycle de Krebs, qui génère des taux très importants d’agents
antioxydants (dont NADH, H+ et le FADH2), le NADH, H+ semble jouer un rôle
indispensable dans l’homéostasie cytoplasmique et membranaire de l’érythrocyte, exposé
naturellement à des agents toxiques divers, étant sa seule source, la voie des pentoses est
une chaine de réaction finement régulée, qui implique une dizaine de complexes
enzymatiques, qui catalyse des réactions, de réduction, oxydation, épimérisation et de
phosphorylation, l’enzyme clef étant la Glucose-6-Phosphate déshydrogénase, qui
catalyse de façon quasi- irréversible la réduction du glucose activé par héxokinase et
amorce la séquence des réactions de la voie .

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LA GLUCOSE-6-PHOSPHATE DESHYDROGENASE

Il s’agit d’une des enzymes les plus conservées, et les plus précoce phylogéniquement, on
l’a déjà constatée au niveau de plusieurs espèces bactériennes, d’un point de vue structural,
l’enzyme est homoprotéique, constitué principalement de la polymérisation d’un
monomère qui contient plus de 500 AA, et qui contient un site de liaison du Glucose-6-
Phosphate, un site liaison du NADP et un site catalytique, in vivo, l’enzyme peut exister
sous une forme monomérique, dimèrique, ou tétramèrique selon le pH du milieu, la
température, le stress oxydant, la concentration des substrats et le type cellulaire, la liaison

Figure-3- : Structure de la G-6-PD en 3D

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au NADP étant un facteur favorisant à la dimèrisation. L’activité de cette enzyme, obéit


parfois au modèle linéaire de Mickaelis-Menten, alors qu’elle se comporte de façon

allostérique dans quelques isoformes (chez l’homme, il y’a deux isoformes


principalement), elle est régulée classiquement par la concentration du G6P et du NADP
qui augmentent son expression aussi, alors qu’elle est inhibée par le NADPH, H+. Sa courte
demi-vie, suppose une expression génétique importante pour éviter une éventuelle
déplétion. Or, les GR, dépourvus du nucleus, n’ont qu’à consommer leur pool de cette
enzyme, la senescence étant principalement l’achèvement de plus de quatre fois la demi-
vie de l’enzyme avec une diminution de son activité, cela représente un signal de
destruction pour le système réticulo-endothélial, faisant de cette enzyme, le facteur limitant
de la durée de vie des globules rouges et de leur circulation.

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D’un point de vue génétique, la G6PD est codé par un gène qui présente treize exons (le
premier étant un exon d’adressage), qui code pour la chaine du monomère à 500 AA,

Figure-5- : Structure du gène est topographie des mutations les plus fréquentes

chacun, relie un NADP et/ou un G6P pour exercer son activité catalytique associée avec
une polymérisation.
L’étude de transmission génétique des formes familiales suggère une liaison au
chromosome X, les avancées en matière de biologie moléculaire et les génomics
permettaient de localise le gène sur le bras long (Bande Xq28). Cette liaison à l’X, a des
implications majeures, au respect du déficit en G6PD, d’abord, chez l’homme, il n’existe
que deux génotypes possibles : hémizygote normal ou atteint, cela implique une fréquence
de portage de l’allèle défectueux et celle de l’atteint de la maladie identiques (intérêt
épidémiologique). Alors qu’on en constate trois chez la femme : homozygote atteint,
homozygote normal, et l’hétérozygote, ce dernier, représente une mosaïque génique à cause
de l’inactivation de l’X dans les corps de Barr, ceci dit, l’hétérozygote peut exprimer la
maladie si l’allèle sain est inactivé, et vice versa.
Tenant compte des données précédentes, un père atteint de la maladie, donnera
obligatoirement lieu à des filles porteuses de l’allèle muté avec des garçon strictement sains
(en supposant une mère saine), alors que les garçons d’une mère porteuse, seront dans la
moitié des cas hémizygote atteint et alors, ils exprimeront la maladie tandis que les filles
seront dans la moitié des cas porteuses, et saines dans l’autre moitié, soit de phénotype
potentiellement sain dans tous les cas.

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Figure-6- : L’arbre généalogique typique de la transmission des gènes du déficit en G6PD

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Toutes les mutations connues (à l’exception de la variante A) sont associées à un déficit


plus ou moins sévère sans toutefois être complet (probablement à cause de la létalité
potentielle d’un tel déficit), à noter qu’une seule mutation nonsense a été identifiée chez
une femme hétérozygote, le reste étant surtout des mutations ponctuelles qui touchent l’un
des sites de liaison, le site catalytique ou le site de dimèrisation, elles résultent surtout d’un
remplacement d’un AA par un autre, on note parfois l’association de plusieurs mutations
ponctuelles. Exceptionnellement, des délétions ont été observées, enfin, on décrit une
association génétique marquante avec les mutations qui touchent le complexe polygénique
IKBKG/ NEMO responsables de L'incontinentia pigmenti (syndrome de Bloch-
Sulzberger) expliquée par la distance infime qui sépare les deux complexes.
Ainsi, et avec l’hétérogénéité des mutations, et de leur impact tant qualitatif que quantitatif
sur l’activité enzymatique, une classification sommaire a été établie, qui tient compte en
plus de la sévérité des manifestations clinico-biologiques, du rapport entre l’activité de la
variante, et celle de l’allèle sauvage (B).

CONSEQUENCES PHYSIOPATHOLOGIQUE DU DEFICIT


EN G6PD

Les milieux biologiques, étant le siège des réactions biochimiques diverses, respectent les
lois régissant la chimie, on définit le pouvoir oxydant d’un composé comme sa capacité à
arracher les électrons soit son attractivité aux électrons des orbitales superficielles, cela
implique la satisfaction de son équilibre, au prix de la déstabilisation structurale des
molécules réductrices (qui sont au contraire apte à donner des électrons) avec des
changement conformationels d’adaptation, et comme le suppose le modèle d’adaptation
induite qui décrit le comportement enzymatique, ces changements s’accompagneront,
d’une diminution voire une perte totale de la fonction de la molécule en question. D’où la
nécessité d’un système de protection contre l’oxydation, vue la nature protéique de la quasi-
totalité des molécules fonctionnelles in vivo. Parmi ces agents, le glutathion, l’un des plus
importants, surtout au milieu cytoplasmique, il a pour tâche surtout, de réduire les radicaux
libres toxiques produits par métabolisme cellulaire ou exogène apportés par l’alimentation
(ou iatrogène). Son action, nécessite une réduction continue, qui permet son recyclage avant
sa réutilisation, cela est possible grâce au NADPH, H+ le cofacteur de la glutathion
réductase qui suppose un équilibre parfait entre production et consommation du
NADPH,H+.
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Au niveau des GR, la voie des pentoses phosphate étant l’exclusive source du NADPH,H+,
le déficit en G6PD se manifeste par une déplétion cytoplasmique en ce dernier, entrainant
un cumule en glutathion oxydé (GSSG), et limitant les capacités de résistance au stress
oxydant des globules rouges, avec une impossibilité de surexpression de l’enzyme par

Figure-7- : Mise en évidence des corps de Heinz.


A : par marquage surpavital par Méthyl Violet
B : Visualisés par Microscopie électronique

défaut de l’ADN, avec une accumulation accrue des radicaux libres toxiques (dont
l’H2O2principalement). L’hémoglobine, la protéine prédominante dans le cytoplasme des
GR, fera l’objet de l’agression de ces radicaux, provoquant sa dénaturation, et sa
précipitation dans des vacuoles (sacs membranaires) appelés les corps de Heinz
caractéristiques de la maladie.
Par ailleurs, la dénaturation du reste des protéines de structure du GR, amorce la séquence
de senescence et active le signal de captage (expression ou internalisation de protéines
membranaires), et donc, l’activation du système réticulo-endothélial qui détruit les GR,
c’est l’hémolyse tissulaire.

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Figure-8- : La voie des pentoses phosphate


A : En présence de la G6PD la production du NADPH permet de résister au stress causé par la
Primaquine
B : En absence de la G6PD, le stress cause des dommages cellulaires étendus 14
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L’hémolyse accélérée, due à la réduction de la durée de vie des érythrocytes, va créer un


état d’anémie, avec diminution de l’hématocrite, de l’hémoglobine et du nombre des GR,
avec des conséquences métaboliques relatives au rôle de transport de l’O2, dont l’hypoxie
chronique, le remodelage cardiaque et l’hypermitose médullaire d’entrainement transitoire.
Par ailleurs, l’hémoglobine, une fois libérée, sera le substrat d’un métabolisme qui le
dégrade en hème et en globine (partie protéique), comme déjà cité, l’hème contient le Fer
et un noyaux porphyrique, ce dernier, subit des réactions qui le transforme en biliverdine,
et puis en bilirubine libre, un pigment relativement stable et liposoluble, pour subir un
métabolisme de solubilisation hépatique (conjugaison), une élimination biliaire, un cycle
entéro-hépatique et une élimination urinaire sous forme d’Urobiline ou fécal sous forme de
stercobiline, la deuxième forme de la bilirubine appelée « conjuguée » est hydrophile et
peut être aussi éliminée par filtration glomérulaire. Là encore, le taux de bilirubine
circulante est fonction d’un équilibre entre la production, la conjugaison et l’élimination,
lors les déficits en G6PD, la libération accrue de l’hémoglobine et de ses métabolites
marque un débordement des mécanismes de conjugaison et d’élimination, d’où
l’hyperbilirubinèmie qui caractérise certaines formes clinique des crises hémolytiques, à
noter qu’il s’agit principalement d’une hyperbilirubinémie à prédominance libre avec un
ictère cliniquement, cela est importante dans deux sens : le premier est que les mécanismes
hépatiques de conjugaison sont intactes mais non complètement acquis (nouveau-né ou
prématuré), et le deuxième est dans le faite de la liposolubilité de ces composés, avec
l’aptitude à franchir la barrière hémato-encéphalique, avec précipitation de ces pigments
dans les noyaux chromophores du système nerveux central (surtout les noyau gris de la
base) réalisant le tableau d’un ictère néonatal nucléaire dans l’extrême).

D’une autre part, l’hyperactivité accrue du système réticulo-endothélial se manifeste par


une hypertrophie d’adaptation de ses organes (dont la rate principalement) avec une
splénomégalie cliniquement, complétant la triade classique des maladies hémolytiques
chroniques

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Figure-9- : répartition des variantes en rapport avec les zones d’endémie paludéenne.

Revenant au stress oxydant, la manifestion du déficit en G6PD nécessite des conditions de


stress oxydatif qui ne sont pas nécessairement toujours présentes, d’où l’évolution en crises
de la maladie. Plusieurs facteurs peuvent entrainer un état « d’hostilité » oxydative,
d’abord, les infections, par les dérèglements immunologiques et le microenvironnement
riche en radicaux libres et cytokines libérés soit par le pathogène soit par les cellules de la
réponse inflammatoire (surtout les granulocytes neutrophiles). Certains médicaments,
peuvent aussi provoquer le débordement des mécanismes antioxydant, soit par leur pouvoir
oxydatif direct soit par un mécanisme indirect (inhibition enzymatique, blocage d’un
récepteur, induction métabolique……).
Enfin, certains aliments riches en activité oxydative peuvent induire une crise
hémolytique, il s’agit en fait de la cause la plus fréquente et la circonstance révélatrice la
plus classique du déficit en G6PD illustré par le nomination « Favisme » de ce déficit
anciennement vue sa manifestion surtout après ingestion des fèves.

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Figure -10- : Diagramme récapitulatif des mécanismes physiopathologiques dans le déficit en G6PD

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