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Une apparition
Celle-ci était la première. Mais, depuis longtemps, malgré mon mauvais genou, en
cachette, Jasmin m’avait appris à monter. Si déjà pour un jeune homme ordinaire la bicyclette
est un instrument bien amusant, que ne devait-elle pas sembler à un pauvre garçon comme
moi, qui naguère encore traînais misérablement la jambe, trempé de sueur, dès le quatrième
kilomètre !… Du haut des côtes descendre et s’enfoncer dans le creux des paysages ;
découvrir comme à coups d’ailes les lointains de la route qui s’écartent et fleurissent à votre
approche, traverser un village dans l’espace d’un instant et l’emporter tout entier d’un coup
d’œil… En rêve seulement j’avais connu jusque-là course aussi charmante, aussi légère. Les
côtes mêmes me trouvaient plein d’entrain. Car c’était, il faut le dire, le chemin du pays de
Meaulnes que je buvais ainsi…
« Un peu avant l’entrée du bourg, me disait Meaulnes, lorsque jadis il décrivait son
village, on voit une grande roue à palettes que le vent fait tourner… »
Il ne savait pas à quoi elle servait, ou peut-être feignait-il de n’en rien savoir pour
piquer ma curiosité davantage.
C’est seulement au déclin de cette journée de fin d’août que j’aperçus, tournant au vent
dans une immense prairie, la grande roue qui devait monter l’eau pour une métairie voisine.
Derrière les peupliers du pré se découvraient déjà les premiers faubourgs. À mesure que je
suivais le grand détour que faisait la route pour contourner le ruisseau, le paysage
s’épanouissait et s’ouvrait… Arrivé sur le pont, je découvris enfin la grand rue du village.
Des vaches paissaient, cachées dans les roseaux de la prairie et j’entendais leurs
cloches, tandis que, descendu de bicyclette, les deux mains sur mon guidon, je regardais le
pays où j’allais porter une si grave nouvelle. Les maisons, où l’on entrait en passant sur un
petit pont de bois, étaient toutes alignées au bord d’un fossé qui descendait la rue, comme
autant de barques, voiles carguées, amarrées dans le calme du soir. C’était l’heure où dans
chaque cuisine on allume un feu.
Alors la crainte et je ne sais quel obscur regret de venir troubler tant de paix
commencèrent à m’enlever tout courage. À point pour aggraver ma soudaine faiblesse, je me
rappelai que la tante Moinel habitait là, sur une petite place de La Ferté-d’Angillon.
I. Le paysage : 5,5
1) Quels sont les principaux éléments qui constituent le paysage ? (0,5 pt)
2) Quel est le temps employé pour la description ? (0,5 pt)
3) Dans les lignes 16 à 26, quels sont les deux sens auxquels cette description fait
appel ? Relevez les termes justifiant votre réponse. (1 pt)
4) Relevez une expression permettant de caractériser l’atmosphère de ce paysage.
(0,5 pt)
5) Quel est le point de vue adopté dans cette description ? Justifiez votre réponse.
(1,5 pt)
6) Montrez comment le paysage est découvert progressivement par François.
Justifiez en vous appuyant sur des expressions du texte. (1,5 pt)
I. L’émotion : 5
1) Que suggèrent les points de suspension à la ligne 11 ? (0,5 pt)
2) a. A quoi le narrateur compare-t-il le paysage dans les verbes « s’épanouir » et
« s’ouvrir » (l. 19-20) ? (0, 5 pt)
b. Identifiez la figure de style contenue dans l’expression « Les maisons
[...]comme autant de barques ». (0,5 pt)
3) Analyser (nature et fonctions) les deux expansions du nom « pont » dans « petit
pont de bois » (l.24) ? Que suggère l’adjectif ? (1,5 pt)
4) Quels sont les sentiments (au moins trois) éprouvés par François à la découverte
de ces lieux ? Justifiez votre réponse par des citations précises. (1,5 pt)
REECRITURE (4 points)
Réécrivez ce passage en remplaçant « je » par « elle ». Procédez à toutes les modifications
nécessaires.
Celle-ci était la première. Mais, depuis longtemps, malgré mon mauvais genou, en
cachette, Jasmin m’avait appris à monter. Si déjà pour un jeune homme ordinaire la
bicyclette est un instrument bien amusant, que ne devait-elle pas sembler à un pauvre garçon
comme moi, qui naguère encore traînais misérablement la jambe, trempé de sueur, dès le
quatrième kilomètre !…
DICTEE (6 points)
Nous habitions les bâtiments du Cours Supérieur de Sainte-Agathe. Mon père, que
j’appelais M. Seurel, comme les autres élèves, y dirigeait à la fois le Cours Supérieur, où l’on
préparait le brevet d’instituteur, et le Cours Moyen. Ma mère faisait la petite classe.
Une longue maison rouge, avec cinq portes vitrées, sous des vignes vierges, à
l’extrémité du bourg ; une cour immense avec préaux et buanderie, qui ouvrait en avant sur le
village par un grand portail ; sur le côté nord, la route où donnait une petite grille et qui
menait vers La Gare, à trois kilomètres ; au sud et par derrière, des champs, des jardins et des
près qui rejoignaient les faubourgs… tel est le plan sommaire de cette demeure où
s’écoulèrent les jours les plus tourmentés et les plus chers de ma vie – demeure d’où partirent
et où revinrent se briser, comme des vagues sur un rocher désert, nos aventures.
REDACTION
Comme François, vous découvrez un lieu dont un ami vous a longuement parlé. Vous
évoquez cette découverte en cherchant à faire partager vos émotions.
1. Le paysage n’est pas décrit directement : suspens, attente, désir de la découverte (0.5)
2. a. Les paroles de Meaulnes sont « Un peu avant l’entrée du bourg, on voit une grande
roue à palettes que le vent fait tourner… ». Il s’approche du but et attend ce point de repère
qu’il se remémore. (0.25 + 0.25)
b. Meaulnes me disait qu’ (0.5) un peu avant le bourg on voyait (0.25) une grande roue
à palette que le vent faisait (0.25) tourner ».
3. Le détachement (0.25) du COD « la grand’roue » (0.25) évoque l'attente de la
découverte (0.5).
4. Le GN souligné a pour fonction sujet (0.25) inversé (0.25) ; la position du GN évoque
une découverte progressive, le mystère (0.5).
5. Les adverbes (0.5) « seulement, déjà, enfin » insiste sur l’impatience, le désir (0.5).
III.
Barème :
Dictée