Vous êtes sur la page 1sur 112

Rodolphe Guilland

Les Logothètes : Etudes sur l'histoire administrative de l'Empire


byzantin
In: Revue des études byzantines, tome 29, 1971. pp. 5-115.

Résumé
REB 29 (1971)Francep. 5-115.
R. Guilland, Les Logothètes. — Etude de la charge représentée par les titres suivants : logothète du Trésor public, logothète de
l'armée, logothète du drome, logothète des troupeaux, logothète des sékréta, logothète du Trésor privé, grand logothète. Après
une partie historique décrivant l'évolution des termes depuis le début de l'empire byzantin jusqu'à la fin du XIVe siècle, vient une
liste des titulaires de ces charges avec une notice plus ou moins développée suivant l'importance des personnages et le nombre
des mentions.

Citer ce document / Cite this document :

Guilland Rodolphe. Les Logothètes : Etudes sur l'histoire administrative de l'Empire byzantin . In: Revue des études byzantines,
tome 29, 1971. pp. 5-115.

doi : 10.3406/rebyz.1971.1441

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rebyz_0766-5598_1971_num_29_1_1441
LES LOGOTHÈTES
Etudes sur l'histoire administrative de l'Empire byzantin

Rodolphe GUILLAND*

D'une façon générale, les logothètes (ot λογο&έται) sont des agents
du fisc, chargés plus spécialement de la rentrée des impôts et de la vérif
ication des comptes des diverses administrations ; ils semblent aussi avoir
été chargés de contrôler les paiements faits par l'Etat pour les soldes et les
traitements divers. Les numerarii, d'après Ensslin1, seraient les précurseurs
des logothètes, car, depuis Constantin Ier le Grand (306-337), c'étaient des
fonctionnaires des Finances, intervenant dans divers services militaires et
civils. Pour Stein2, les logothètes sont les successeurs des anciens scrinarii
qui étaient attachés à la préfecture du prétoire et surveillaient les Admin
istrations au point de vue financier. Ils assuraient ce service dans le
στρατιωτικόν3, dans la γενική τράπεζα et dans 1'ίδική τράπεζα ainsi que
dans la préfecture du prétoire, du IVe au Ve siècle. Il est incontestable que
la fonction de logothète existait déjà dans l'ancienne Rome, sous un autre
nom qui est très certainement le mot rationalis, tiré lui-même du mot ratio
(calcul, compte). Depuis Dioclétien (284-305) et Constantin Ier le Grand,
le mot rationalis désigne et distingue les nombreux procuratores de l'admi
nistration des Finances. A l'époque de Septime-Sévère (193-211), on trouve
le procurator a rationibus (ό επί των καθ-όλου λόγων )4.

* Ces articles sur les logothètes étaient accompagnés d'index particuliers. La rédaction
de la revue, que je tiens à remercier de sa collaboration pour une dernière mise au point,
fera publier cette étude en brochure séparée avec un index général des titres et des noms.
1. W. Ensslin, Numerarius, RE 17, 1937, col. 1317.
2. E. Stein, Studien zur Geschichte des byzantinischen Reiches, vornehmlich unter den
Kaisern Justinus II. und Tiberius Constantinus, Stuttgart 1919.
3. J. Lydus, De magistratibus, III, 38 : Bonn, p. 23020~21.
4. Voir le compte rendu de l'ouvrage de Stein cité à la note 2 par A. Müller, BZ 25,
1925, p. 167.
6 R. GUILLAND

Les procurator es se confondaient pratiquement avec les rationales5. Ils


ne s'occupèrent, d'abord, que de la fortune de l'empereur et étaient appelés,
en Orient, comités et, en Occident, rationales aerarii ; en Egypte, les deux
dénominations étaient réunies, cornes et rationalis summarum Aegypti6. Les
procuratores devinrent des fonctionnaires de l'Etat et eurent la surveillance,
les uns, du Trésor de l'Etat, les autres, de la Caisse de l'empereur, ratio
nales rei privatae7. La mission des rationales était la surveillance des pro
priétés et biens de l'empereur8, la confiscation de la fortune des criminels9,
l'administration de tous les biens dépendant des rationales10, la juridiction
des procès intéressant lefiscus11. Les points communs entre, d'une part,
les rationales ou procuratores et, d'autre part, les logothètes sont des fonc
tions très spécialisées et, certainement, le contrôle général des impôts
et des crédits, d'abord des biens privés de l'empereur, puis de ceux de l'Etat.
A la haute époque, en effet, les logothètes étaient de simples agents
exécutifs du fisc, rattachés à la préfecture du prétoire et ne semblent pas
avoir été encore spécialisés dans des départements nettement limités.
Cette spécialisation se fit à différentes époques ; elle était vraisemblable
ment accomplie bien avant le IXe siècle.
Les logothètes ne sont pas mentionnés dans la Notifia Dignitatum, qui
date de la fin du IVe siècle, parmi l'officium des hauts fonctionnaires d'ordre
financier. Mais ils existaient, à la fin du Ve siècle, sous Anastase Ier (491-
518). Jean de Paphlagonie, préposé à la direction des impôts à la préfecture
du prétoire, fut titré consulaire en quittant ses fonctions et devint ensuite
κόμης λαργιτιώνων12. U fut remplacé à la préfecture du prétoire par Marinos
le Syrien, nommé τρακτευτής και λογοθέτης13. Jean de Paphlagonie n'était
pas préfet du prétoire, mais attaché à la préfecture du prétoire, au service
des impôts. C'est à l'instigation de Marinos que furent créés les βίνδικαι,
vindices, chargés du recouvrement des impôts dans toutes les villes de l'Em-

5. A. Semenov, Über Ursprung und Bedeutung des Amtes der Logotheten in Byzanz,
BZ 19, 1910, p. 445.
6. Notitia Dignitatum Orientalium, XII. Cf. A. Semenov, art. cit.
7. Notitia..., ΧΙΠ.
8. Cod. Theod., X, 18, 1.
9. Ibid., IX, 42, 7 et X, 9,1.
10. Ibid., X, 2, 1 et II, 25, 1.
11. Ibid., XI, 30, 41 ; II, 1, 5 ; III, 26, 5. Symmaque, Epist., X, 62. Cf. A. Semenov,
art. cit., p. 446.
12. Malalas, XVI (Bonn, p. 40011"13) : έκ τοϋ τρακτεύειν τα δημόσια χαρτία του
πραιτωρίου των έπαρχων έποίησεν αύτδν άπδ υπάτων. Id. : Bonn, p. 40017.
13. Malalas, XVI : Bonn, p. 40013~14. Sur les τρακτευταί, fonctionnaires fiscaux,
voir Du Cange, Glossarium, s.v.
LES LOGOTHÈTES 7

pire14. Marinos fut le véritable premier ministre d'Anastase Ier 15. Il parvint,
d'ailleurs, à devenir préfet du prétoire (ΰπαρχος της αυλής)16. Il est possible
qu'il ait été nommé logothète du prétoire auparavant. Marinos fut chargé
de réprimer la révolte de Vitalien ; à ce moment-là, il avait quitté la pré
fecture du prétoire, car il est qualifié d'aîcà έπαρχων17. Il y a lieu de noter
que, lors de l'émeute de 512, provoquée par une addition monophysite au
texte canonique du Trisagion, Péparque et le logothète donnent lecture à
Sainte-Sophie de l'édit consacrant cette addition18.
Au VIe siècle, à l'époque de Justinien Ier (527-565), les logothètes, chargés
alors de la perception des impôts, ne semblent pas avoir été encore des
fonctionnaires indépendants. Ils n'ont pas rang de ministres et sont envoyés
en mission dans les provinces. En effet, Justinien Ier charge les agents du
fisc, «auxquels on a donné le nom de logothètes»19, de percevoir les
impôts dans les provinces20. Des logothètes21 étaient accrédités également
dans les armées, en qualité d'agents comptables, pour vérifier les dépenses
et l'état des soldes22. Ces logothètes se rendirent vite odieux par leurs
agissements. Procope fait plus d'une fois allusion au rôle joué par le logothèt
e Alexandre. Contrôleur des impôts, c'est-à-dire logothète à Byzance,
il fut envoyé en Italie, qu'il pressura sans pitié ; il reçut le surnom de « petits
ciseaux » (ψαλίδιον) pour son habileté à rogner les pièces d'or. A force
de fournir à l'empereur de grosses sommes d'argent, il parvint lui-même aux
honneurs et à l'opulence23. Il est probable que, sous Justinien Ier, les logo
thètes étaient assez nombreux24.

14. Malalas, XVI : Bonn, p. 4001β. Evagre, III, 42 : Bidez et Parmentier, p. 14425.
15. J. Lydus, De magistratibus, III, 36 (Bonn, p. 22912~13) : Μαρίνου τήν δλην άνα-
ζωσαμένου των πραγμάτων διοίκησιν.
16. Evagre, III, 42 : Bidez et Parmentier, p. 14427-28. léon Grammaticus : Bonn,
p. 118. Zonaras : Bonn III, p. 137.
17. Malalas, XVI : Bonn, p. 40312.
18. Id. : Bonn, p. 407. Léon Grammattcus : Bonn, p. 119. Cedrenus : Bonn I, p.
631. Zonaras : Bonn III, p. 138.
19. Procope, Anecdota, 24 (Bonn III, p. 1331) : βνομα δέ λογοθέτας αύτοΐς £&ετο.
20. Ibid.
21. Ibid. (Bonn III, p. 13313) : ot καλούμενοι λογο&έται. Cf. id., De hello gotthico,
ΠΙ, 1 (Bonn II, p. 284) et ΠΙ, 21 (Bonn II, p. 368).
22. Procope, Anecdota, 26 (Bonn III, p. 145), parlant des méfaits de Justinien Ier contre
les soldats, écrit que les logothètes étaient récompensés par l'attribution d'une part de
l'impôt du douzième, part proportionnée aux sommes qu'ils pouvaient tirer des soldats.
23. Id., De bello gotthico, ΠΙ, 1 (Bonn II, p. 2844"6. 8"9) : ήν δέ 'Αλέξανδρος τις
έν Βυζαντίω τοις δημοσίοις έφεστώς λογισμοΐς * λογοθέτην έλληνίζοντες τήν τιμήν
ταύτην καλουσι 'Ρωμαίοι. "Ενδοξος έξ άδοξων ταχύ γέγονεν, έκ πενήτων άτεχνώς
πλούσιος. Cf. id., Anecdota, 24 : Bonn ΙΠ, p. 134.
24. J. Lydus, De magistratibus, III, 36 (Bonn, p. 2291β~18) : καγκελλάριοι γαρ
αυτοί και λογοθέται καΐ της θείας και γενικής τραπέζης διοικηταί.
8 R. GUILLAND

Etant donné l'énorme importance qu'avaient pour les empereurs la


perception et la centralisation des impôts dans les caisses publiques, les
fonctionnaires, chargés de ce soin, prirent naturellement une influence qui
devint très grande. Au VIe siècle, les logothètes étaient déjà des fonction
naires importants, pouvant parvenir aux plus hautes charges, et des per
sonnages en vue. Lors de la conjuration de 563 contre Justinien Ier, le
logothète Jean est mentionné à côté du consulaire Eusèbe, comte des fé
dérés25. Cette même année 563, l'éparque de Constantinople Procope,
ayant été destitué, fut remplacé par Andréas, ex-logothète, qui faillit d'ail
leurs être massacré par les factions26.
Au début du VIIe siècle, sous l'empereur Maurice (582-603), la percep
tion des impôts ressortissait encore au préfet du prétoire, comme le montre
le cas de Georges directeur des impôts des villes d'Orient, « que les Romains
appellent éparque du prétoire »27. Au début du VIIe siècle, les logothètes
sont déjà des personnages importants. Parmi les victimes de Phokas (602-
610) figure l'ex-préfet du prétoire, logothète et curateur d'Hormisdas28,
Constantin Lardys. Sous Héraclius (610-^641), les logothètes continuent à
s'élever dans la hiérarchie, car l'on voit l'un d'eux titré patrice, Théodose29,
qui, lors du siège de Byzance par les Avars en 626, est parmi les ambassa
deurs accompagnant le patrice Athanase, chargé de faire des propositions
de paix au chagan. Or, au VIIe siècle, le patriciat n'était guère conféré
qu'à des magistrats éminents. Les sources ne précisent pas de quels logo
thètes il s'agit, mais il est probable qu'il est question des logothètes du
prétoire, qui tendent à devenir de hauts fonctionnaires indépendants. La
préfecture du prétoire disparue, le logothète du prétoire fut rattaché à la
préfecture de la Ville30. Au VIIe siècle, le logothète devient le premier des
contrôleurs des dépenses publiques. L'importance des logothètes grandit
rapidement et ils deviennent de véritables ministres, affectés aux divers
services financiers de l'Etat. Vers la fin du VIIe siècle apparaît chez les
historiens le terme de λογοθ-έτης του γενικού.
Au Xe siècle, Philothée mentionne l'existence de quatre logothètes : le

25. Théophane : Bonn, p. 368 = de Boor, p. 237-238.


26. Id. : Bonn, p. 370 = de Boor, p. 239. Il est qualifié de ό άπα λογοθετών (de
Boor, p. 2398).
27. Simocatta, VIII, 1 (Bonn, p. 31310-12) : Γεώργιον, δς της των έφων
πόλεων φορολογίας τήν έπιστασίαν έκέκτητο · τοϋτον πραιτορίου Ιπαρχον άποκαλοϋσι
'Ρωμαίοι.
28. Chronicon Paschale (Bonn, p. 6948~9) : άπό έπαρχων γενόμενος πραιτωρίων
και λογοθέτης και κουράτωρ των Όρμίσδου.
29. Ibid. (Bonn, p. 721 8) : Θεοδόσιος ό ενδοξότατος πατρίκιος και λογοθέτης.
30. Constantin Porphyrogénète, De cerimoniis, II, 52 : Bonn I, p. 717.
LES LOGOTHÈTES 9

logothète du Trésor public, occupant le 33 e rang dans la hiérarchie des


offices, le logothète de l'armée, occupant le 35e rang, le logothète du drome
(Postes et Communications), occupant le 37e rang, et le logothète des
troupeaux, occupant le 40e rang31. Au XIVe siècle, le Pseudo-Codinus
mentionne encore ces quatre logothètes32, mais il ajoute à la liste le grand
logothète33 et le logothète du Trésor privé (de l'empereur)34. Les textes
mentionnent, à différentes époques, d'autres logothètes, dont le plus im
portant est le logothète des sékréta35.
Après la IVe Croisade, le logothète fut assimilé, au début du XIIIe siècle,
au chancelier des Latins36.
Un ancien logothète était appelé άπό (των) λογοθετών37.
Les bureaux du logothète s'appelaient λογο&έσιον. Le mot se trouve
déjà dans l'édit XII de Justinien Ier38. L'expression οί του λογο&εσίου
désigne les fonctionnaires attachés aux bureaux d'un logothète et, au Xe
siècle, plus particulièrement, les fonctionnaires dépendant du logothète
du Trésor public39.
La femme d'un logothète était appelée λογοΟέτισσα40.
L'Eglise avait, elle aussi, ses logothètes, ou, du moins dans la période où
des notices définissent sa fonction, un logothète : officier assez élevé dans
la hiérarchie des archontes, il s'apparenta quelque peu au logothète du
drome, sans jamais exercer des pouvoirs très étendus et bien définis41.

31. Ibid. (Bonn I, p. 71321· 22> 23· as-2e) : του γενικού, του στρατιωτικού, τοΰ δρόμου,
των αγελών. Dans rénumération de Reiske (ibid. II, p. 802), il y a lieu de remplacer
le grand logothète et le logothète είδικοΰ par le logothète de l'armée et le logothète des
troupeaux.
32. Pseudo-Codinus : Bonn, p. 915"19 = Verpeaux, p. 13714~16 (γενικού) ; p. 11e =
p. 13828 (στρατιωτικού) ; p. 107 = p. 1388 (δρόμου) ; p. Il8 = p. 13830 (αγελών).
33. Id.: p. 99=p. 1378 (μέγας λογοθέτης).
34. Id. : p. 101β = p. 13820 (λογοθέτης των οίκειακών).
35. Λογοθέτης των σεκρέτων.
36. Nicétas Chômâtes (Bonn, p. 2621-2) : ώς ή Λατίνων βούλεται φωνή, καγκελάριον,
ώς δ"Έλληνες εϊποιεν, λογοθέτην. Cf. Cinnamus (Bonn, p. 14112~13) : καντζιλερίω
(...) Ôv λογοθέτην εϊποι Αν τις έλληνίζων άνήρ. Dans les notes à Cinnamus (ibid.,
p. 358), Radevicus (De gest. Frid., III, 47), rappelant le supplice de Théodore Styppeiôtès,
préfet du caniclée sous Manuel Ier Comnène, écrit : Canictinus videlicet, quern nos cancel-
larium dicere possumus, allant ainsi à rencontre des témoignages des historiens, qui sem
blent être cependant formels. Le logothète, assimilé au chancelier, paraît être soit le logo
thète των σεκρέτων, soit le logothète du drome.
37. Attaliate : Bonn, p. 203, 246, 271.
38. Du Cange, Glossarium, s.v.
39. Cf. Reiske (De cer. : Bonn II, p. 223).
40. Lettre de Théodore de Stoudios à la femme de N., logothète (II, 340 : PG 99, 1673).
41. J. Darrouzès, Recherches sur les Offikia de l'Eglise byzantine, Paris 1970, p.
359-362.
10 R. GUILLAND

Laissant ici de côté certains logothètes, soit archaïques, soit moins


fréquemment mentionnés, qui ne semblent pas avoir joué un grand rôle
dans l'Etat42, nous étudierons les principaux logothètes dans l'ordre
suivant :
I. Le logothète du Trésor public
II. Le logothète de l'armée
III. Le logothète du drome
IV. Le logothète des troupeaux
V. Le logothète des sékréta
VI. Le logothète du Trésor privé
VII. Le grand logothète.
Chaque article comprendra d'après un même plan une partie historique
décrivant l'évolution des termes et de l'office et une partie prosopogra-
phique avec une notice des titulaires, plus ou moins développée selon
l'importance des personnages et des mentions43.

42. C'est ainsi que l'on trouve aussi, principalement dans les sceaux, les titres suivants :
λογοθέτης των βασιλικών αρχαρίων, ou plutôt άρκλών, λογοθέτης τοϋ βεστιαρίου, λογο
θέτης του πραιτωρίου (le plus fréquent), λογοθέτης της μεγάλης εταιρείας, λογοθέτης
των υδάτων, βασιλικός λογοθέτης. Certains de ces titres peuvent correspondre à l'un
des titres plus courants que nous allons étudier ou à des fonctions secondaires comme
celles des comités.
43. Nous donnons ici la liste des ouvrages qui dans la suite de l'article seront cités
en abrégé.
Antoniadis-Bibicou, Recherches = Hélène Antoniadis-Bibicou, Recherches sur les
douanes à Byzance, Paris 1963.
Bréhier, Institutions = L. Bréhier, Le monde byzantin IL Les Institutions de l'empire
byzantin, Paris 1949.
Bury, Adm. System = J. B. Bury, The Imperial Administrative System in the Ninth
Century, with a Revised Text of the Kletorologion ofPhilotheos, Londres 1911.
Dölger, Beiträge = F. Dölger, Beiträge zur Geschichte der byzantinischen Finanzver
waltungbesonders des 10. und 11. Jahrhunderts, Leipzig-Berlin 1927.
Dölger, Regesten = F. Dölger, Regesten der Kaiserurkunden des oströmischen Reiches,
I-V, Munich 1924-1965.
Grumel, Regestes = V. Grumel, Les Regestes du Patriarcat de Constantinople, I-III,
1932-1947.
Konstantopoulos, Molybdoboulla = K. M. Konstantopoulos, Βυζαντιακα Μολυβδό-
βουλλα, Athènes 1930.
Laurent, Bulles = V. Laurent, Les bulles métriques dans la sigillographie byzantine,
Athènes 1932.
Schlumberger, Sigillographie = G. Schlumberger, Sigillographie de V empire byzantin,
Paris 1884.
Pour plus de clarté nous mentionnerons chaque fois pour les chroniqueurs et histo
riens byzantins l'édition utilisée et nous n'omettrons le nom de l'auteur que pour les deux
ouvrages de Constantin Porphyrogénète : De cerimoniis (cité De cer.) et De adminis-
trando imperio.
LES LOGOTHÈTES 11

I. — Le logothète du trésor public

Ό λογοθέτης του γενικού

Le logothète du Trésor public (ό λογοθέτης του γενικού λογιστηρίου)1


ou logothète du génikon (γενικός λογοθέτης ou λογοθέτης του γενικού,
comme on l'appelle d'ordinaire, ou, mais moins fréquemment, λογοθέτης
των γενικών et souvent simplement ό γενικός)2 a hérité les fonctions les
plus importantes du cornes sacrarum largitionum : il répartit les impôts de
toute nature, il en surveille la rentrée, il tient à jour les contrôles, renouvelle
et complète la liste des impôts. Il est un véritable ministre des Finances.
Le λογοθέσιον του γενικού a succédé à la γενική τράπεζα, rattachée autre
foisau praefectus praetorio praesentalis3 .
Un sceau de Stéphane, « très glorieux άπό μαγίστρων et logothète du
génikon, commerciaire de Tyr », daté de 5774, inciterait à penser que la
création du titre de logothète du génikon pourrait dater de la seconde moit
iédu VIe siècle. C'est, en effet, l'époque où les commerciaires pouvaient
cumuler d'autres fonctions plus ou moins importantes5 et où, comme le
note très justement le R.P. V. Laurent6, le même fonctionnaire pouvait
être chargé à la fois de « l'inspection générale et de la direction des opéra
tionscommerciales ». Les fonctionnaires, chargés de la perception des impôts
et appelés logothètes ou non, existaient déjà certainement sous Justinien
Ier (527-565)7. En effet, au moment d'entreprendre la guerre des Vandales,
vers 532-533, le préfet du prétoire, Jean de Cappadoce, et le trésorier, ainsi
que les divers fonctionnaires chargés de percevoir les impôts pour le compte
du Trésor public et du Trésor impérial s'inquiétèrent des énormes dépenses
qu'allait nécessiter cette guerre8. Ces derniers fonctionnaires appartenaient
certainement à la classe des logothètes, mais ils n'avaient pas encore un

1. Bréhier, Institutions, p. 257.


2. De cer., I, 68 : Bonn I, p. 246 ; Appendix : I, p. 460 ; II, 53 : 1, p. 784. On disait
jadis καθολικός, καθολικός της 'Αφρικής, rationalis Africae (Reiske : Bonn II, p. 276).
Nous exclurons dans cette étude l'appellation de logothète général qui bien que pouvant
prêter à confusion est souvent donnée en français au logothète du génikon.
3. E. Stein, Studien zur Geschichte des byzantinischen Reiches, vornehmlich unter den
Kaisern Justinus II. und Constantinus, p. 148.
4. Antoniadis-Bibicou, Recherches, p. 174 et 225 (sceau n° 3).
5. Ibid., p. 174.
6. V. Laurent, Bulletin de sigillographie byzantine, Byζ. 5, 1930, p. 606, n° 1.
7. Cf. G. Millet, L'origine du logothète général, Mélanges F. Lot, Paris 1925, p.
563-573.
8. Procope, De bello vandalico, I, 10 : Bonn I, p. 353.
12 R. GUILLAND

rang individuel dans la hiérarchie des offices et figuraient en sous-ordre.


Ceux qui étaient chargés de faire rentrer les impôts publics (φόρος δημόσιος)
relevaient vraisemblablement du préfet du prétoire et ceux qui étaient
chargés de faire rentrer les revenus du Trésor impérial (φόρος βασιλικός )
dépendaient d'une autre administration.
Le logothète du génikon apparaît certainement au VIIe siècle, lorsque
disparaît le cornes sacrarum largitionum. Les derniers titulaires connus sont,
en effet, Théodore sous Tibère II (578-582), Athanase et Anastase sous
Phokas (602-6 10)9. Deux sceaux permettent d'affirmer l'existence du
logothète du génikon dès le début du VIIe siècle. Le premier est le sceau
de Dosithée, patrice, protospathaire impérial, logothète du génikon et
commerciaire de l'apothèque de Bithynie, Saloutaria et Pakatiani, qui est
daté de 62310 ; le second est celui de Théodose (6 ενδοξότατος πατρίκιος
και λογοθ-έτης) qui, lors de l'attaque de Constantinople par les Avars en
626, faisait partie de l'ambassade envoyée au chagan pour lui soumettre
des propositions de paix11. Quant aux sources écrites, elles ne font mention
du logothète du génikon qu'après, semble-t-il, la disparition de la préfec
ture d'Orient, vers 680. Théophane rapporte que, sous le premier règne de
Justinien II, vers 690, le sultan Abimélech, voulant réparer le temple de la
Mecque, songeait à utiliser les colonnes de l'église de Gethsémani. Il fut
détourné de ce projet par deux chrétiens de Palestine, Serge, fils de Mansour,
γενικός λογοθ-έτης, et le patrice Claesos12. Ce Mansour était peut-être le père
de Jean Mansour, surnommé Chrysorrhoos ou Jean Damascene, célèbre
pour sa défense du culte des images sous Constantin V (740-775). Il s'agit
vraisemblablement d'un fonctionnaire du sultan Abimélech, car la présence
alors d'un logothète du génikon s'explique difficilement.
Les premières mentions d'un logothète du génikon dans les textes datent
de l'époque de Justinien II (685-695 et 705-711). L'ex-moine Théodote,
directeur des services du Trésor public13, montra dans l'exercice de ses
fonctions une si cruelle férocité qu'après la déchéance de Justinien II en
695, il fut brûlé vif par le peuple14. Restauré en 705, Justinien II, voulant se

9. Bury, Adm. System, p. 86.


10. Antoniadis-Bibicou, Recherches, p. 226.
11. Chronicon Paschale : Bonn, p. 721. Il est très vraisemblable, pour ne pas dire
certain, que Théodose était un logothète du génikon. C'était en tout cas un haut fonc
tionnaire.
12. Théophane : Bonn, p. 559 = de Boor, p. 36523~2e.
13. Id. : Bonn, p. 562 = de Boor, p. 36722~23. Léon Grammaticus : Bonn, p. 165.
Cedrenus : Bonn I, p. 773. Zonaras : Bonn III, p. 232-233. Nicéphore, Breviarium :
Bonn, p. 42ie-1?.
14. Théophane : Bonn, p. 566 = de Boor, p. 369.
LES LOGOTHÈTES 13

faire livrer Philippicus-Bardanès qui l'avait détrôné, envoya au chagan de


Chazarie une ambassade, à la tête de laquelle il mit le patrice Georges
Syros, logothète du génikon, accompagné de l'éparque Jean, qui tous deux
furent massacrés15. Ainsi, l'office spécial de logothète du génikon paraît
avoir été établi au cours du VIIe siècle, sans qu'on puisse cependant préciser
la date exacte.
Le cornes sacrarum largitionum fut alors remplacé par le sacellaire, dont
la Caisse était devenue la Caisse centrale de l'Empire et qui était le contrô
leur général de tous les ministres. Etant donné ses attributions financières,
le logothète du génikon dépendait du sacellaire. Par contre, le logothète
du génikon a la direction des services financiers du logothète de l'armée
et du logothète du Trésor privé rattachés jusque-là à la préfecture du pré
toire et qui, avec la disparition de celle-ci, apparaissent à cette époque.
Devenu un personnage important, le logothète du génikon se voit confier
des missions souvent délicates.
Au VIIIe siècle, la charge de logothète du génikon était devenue l'une
des plus hautes charges civiles de l'Empire. Son titulaire était presque
toujours paré du titre, alors considérable, de patrice, sauf s'il était clerc
ou moine. Au début du VIIIe siècle, Anastase II (713-716) confie le com
mandement de sa flotte au diacre de la Grande Eglise, Jean, alors logothète
du génikon16.
Au IXe siècle, le logothète du génikon gagne encore en importance.
Les commerciaires qui relevaient jadis, comme le logothète, du préfet du
prétoire et étaient chargés de la perception des douanes, sont rattachés, à
partir du IXe siècle, au logothète du génikon17.
Au Xe siècle, l'activité du logothète du génikon nous est assez bien
connue avec le Klètorologe de Philothée, qui date de 899. Le logothète
du génikon est le premier des quatre grands logothètes18. Il occupe le
33e rang dans la hiérarchie des offices, alors que les trois autres logothètes
occupent respectivement, le logothète de l'armée, le 35e, le logothète du
drome, le 37e, et le logothète des troupeaux, le 40e. Le logothète du génikon
figure dans la classe des secrétaires, où il occupe le 13e rang19. Il pouvait

15. Id. : Bonn, p. 580 = de Boor, p. 37828.


16. Id. : Bonn, p. 590 = de Boor, p. 38511 (λογοθέτης γενικός). Zonaras : Bonn
ΙΠ, p. 245. Nicéphore, Breviarium : Bonn, p. 5620~22 (των δημοσίων φόρων λογιστήν,
δν λογοθέτην γενικόν οΐδε καλεϊν ή συνήθεια). On trouve aussi pour désigner le
logothète du génikon l'expression ό την τοϋ γενικού διέπων αρχήν (Théophane Cont. :
Bonn, p. 34610-11).
17. Antoniadis-Bibicou, Recherches, p. 171, 176, 219.
18. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 713.
19. Ibid. : p. 715.
14 R. GUILLAND

prétendre aux plus hauts titres nobiliaires, anthypatos-patrice, patrice,


protospathaire, entre autres20. Le logothète du génikon n'est primé que
par l'éparque et le sacellaire21. Il reçoitsapart dans les largesses impériales22.
Il est nommé par simple édit verbal δια λόγου et il est révocable23. Son mi
nistère s'appelle τό σέκρετον του γενικού24.
L'officium du logothète du génikon comprenait un nombre élevé de
fonctionnaires répartis dans de nombreux bureaux, preuve de l'importance
du logothète du génikon dans l'administration des Finances de l'Empire.
Ces bureaux étaient au nombre de douze.
1. Le {grand) chartulaire du sékréton [χαρτουλάριος (μέγας) του σεκρέτου].
Il est le premier fonctionnaire dans la hiérarchie du logothésion. Il dirige
le sékréton ou bureau des archives, où sont enregistrés les titres de pro
priété soumis à l'impôt, cet enregistrement constituant un titre de pro
priété25. Le chartulaire du sékréton était vraisemblablement le directeur
d'autres bureaux, dont certains existaient déjà dans l'officium du cornes
sacrarum largitionum, qui avaient été maintenus après la disparition de
celui-ci26. Le grand chartulaire pouvait cumuler les fonctions de commerciai-
re27. Dans la hiérarchie aulique, il est rangé dans la classe des spathaires28.
2. Le chartulaire des caisses (χαρτουλάριος των άρκλών). Il était chargé
du contrôle des caisses des divers ministères et également de celui des caisses
des thèmes29. Les χαρτιά des villes les plus importantes des thèmes étaient,
en effet, déposés chez le chartulaire des caisses. Ce cadastre général était
du reste sommaire, étant donné l'impossibilité de prendre copie des très
nombreux documents déposés dans les caisses diverses, comme les actes
de vente, les donations, les partages de propriétés, entre autres30. Il se
pourrait que les chartulaires des caisses soient les successeurs des praepositi
thesaurorum de la Notitia Dignitatum, mais on ne saurait les assimiler aux
chartularii de cohortalibus officiis uniusque provinciae mentionnés en 468,
qui semblent être des ecclésiastiques31.

20. De cer., H, 52 : Bonn I, p. 728, 731.


21. Ibid. : p. 713.
22. Ibid., II, 53 : p. 784.
23. Ibid., II, 52 : p. 707. Cf. II, 3 : p. 525-526.
24. Ibid., Appendix : p. 461.
25. Bréhier, Institutions, p. 257.
26. Bury, Adm. System, p. 87.
27. Antoniadis-Bibicou, Recherches, p. 175, n° 2.
28. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 735.
29. Ibid., II, 49 : Bonn I, p. 69418 (οι ϊξω χαρτουλάριοι τοϋ γενικού).
30. Dölger, Beiträge, p. 103.
31. Bury, Adm. System, p. 87.
LES LOGOTHÈTES 15

3. Les inspecteurs des thèmes (οι έπόπται των θεμάτων). Ils étaient chargés
d'établir le chiffre des impôts dus par les thèmes et d'en surveiller la levée32.
4. Le comte des eaux (ό κόμης των υδάτων), chargé de l'entretien des
canalisations assurant le ravitaillement en eau. Il est très probable que
les grandes villes de l'Empire avaient un comte des eaux33.
5. L'oikistikos (ό οικιστικός). Le sens de ce mot n'est pas clair. Pour
Vogt34, c'est un « chef de travaux publics ». Pour Panöenko35, οικιστικός
est une faute pour πιστικός. Le βασιλικός πιστικός était un fonctionnaire
du commerce maritime, comme les trois sceaux publiés par lui le montrent
d'une façon très précise36. Il est impossible d'admettre cette explication.
Οικιστικός est bien le titre officiel de ce fonctionnaire37. Müller veut voir
en lui un «fonctionnaire de la construction»38. Bury n'exprime aucun
avis39. Tout en déclarant que l'hypothèse de Müller est la plus vraisemb
lable,Dölger est étonné de voir l'oikistikos faire partie de l'officium du
logothète du génikon40. Un traité anonyme, datant du XIIe siècle, semble-
t-il, apporte, d'après Dölger, quelques renseignements intéressants. L'oikisti
kos garde dans ses archives les προκατεσπασμένα λογίσιμα ou listes d'exempt
ions d'impôts accordées aux domaines de l'Etat, aux monastères et autres
personnes ; Dölger ne prend pas position41. Il a raison de dire que ce mot
vient certainement du verbe οίκίζειν, formé lui-même sur οϊκος. Il pourrait
s'agir d'un fonctionnaire des Finances, chargé peut-être de surveiller au
point de vue financier certaines catégories α'οϊκοι. On ne rencontre plus
l'oikistikos après le XIe siècle42. Il avait rang de spathaire43.

32. Ibid. Bréhier, Institutions, p. 257. Dölger, Beiträge, p. 79. Les έξισωταί sem
blent être différents des έπόπται. Cf. Bury, Adm. System, p. 87.
33. Bury, Adm. System, p. 87. Cf. F. Dirimtekin, Adduction de l'eau à Byzance,
dans la région dite « Bulgarie », CA 10, 1959, p. 217-243. On se contentera de signaler
ici la mention exceptionnelle d'un logothète des eaux dans Michel Attaliate (Bonn, p.
16714~16) : έάλω δέ καΐ δ πρωτοσβέστης Βασίλειος ό Μαλέσης, τα πρώτα φέρων τω
βασιλεΐ, το του λογοθέτου τών υδάτων όφφίκιον περιεζωσμένος.
34. Α. Vogt, Basile Ier empereur de Byzance (867-886) et la civilisation byzantine
à la fin du IXe siècle, Paris 1908, p. 98.
35. Β. Α. Ραν&νκο, Katalog molivdovulov, IRAIK 13, 1908, p. 116.
36. Ibid. 7, 1902, p. 40 sq.
37. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 717 ; II, 53 : 1, p. 789. Cf. Bury, Adm. System, p. 88.
38. A. Müller, Das Amt der Logotheten in spätrömischer und byzantinischer Zeit,
1914, p. 26 (cité par Dölger, Beiträge, p. 91).
39. Bury, Adm. System, p. 38.
40. Dölger, Beiträge, p. 91.
41. Ibid., p. 91.
42. Ibid., p. 91.
43. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 736.
16 R. GUILLAND

6. Les koumerkiarioi ou kommerkiarioi (κουμερκιάριοι/κομμερκιάριοι)


étaient des percepteurs levant les impôts et les douanes de l'Empire. Ils
sont les successeurs des comités commerciorum de la Notifia Dignitatum.
Les commerciaires, dont nous possédons de nombreux sceaux44, étaient
décorés des titres de hypatos, spathaire, spatharocandidat ou protospathaire.
7. Le directeur du service des revenus fiscaux des propriétés impériales
[6 της κουρατορίας ou, plus exactement, δ (σπαθάριος και) έπί της
κουρατορίας των βασιλικών οίκων]45 est vraisemblablement le successeur du
magister privatae de la Notitia Dignitatum46, qui dépendait du cornes
sacrarum largitionum. Il y a lieu de noter que depuis le VIe siècle κουρατορία
est employé fréquemment comme synonyme de res privata41 .
8. Le κόμης της λαμίας. Il avait la surveillance des mines et des métaux
précieux. Il est probablement le successeur du comes metallorum per Illyri-
cum de la Notitia Dignitatum49.
9. Le dioecète (διοικητής). Il était chargé de lever les impôts directs dans
sa circonscription (διοίκησις). Il est vraisemblablement le successeur du
cornes largitionum per diocesim Asianam de la Notitia Dignitatum49. Il
était responsable devant le logothète du génikon des impôts de son district.
Les dioecètes existaient à Constantinople et dans les provinces50.
10. Le κομεντιανός ou κοβεντιανός, dont on ignore la fonction. Il est peut-
être l'équivalent de κομβεντιανός, tiré du mot κομβέντος, représentant le
latin conventus51.
11-12. Le πρωτοκαγκελλάριος et le καγκελλάριος qui en dépendait52. Un
chrysobulle de Basile II, daté de mars 99253, réglant les droits de douane à
acquitter par les bateaux vénitiens se rendant à Constantinople, mentionne,
parmi les fonctionnaires dépendant du logothète du génikon, auxquels le
chrysobulle doit être notifié, les υπόλογοι του γενικού dont on ignore la
fonction.
Au Xe siècle, les historiens font rarement mention des logothètes du
génikon. Cantonnés dans leurs lourdes attributions financières, ils font peu

44. Antoniadis-Bibicou, Recherches, p. 225-238.


45. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 736.
46. Bury, Adm. System, p. 88.
47. Cf. Théophane (Bonn, p. 756 = de Boor, p. 4872) : τήν βασιλικήν κουρατορίαν.
48. Bury, Adm. System, p. 89.
49. Ibid., p. 89.
50. Ibid., p. 89.
51. Ibid., p. 89-90.
52. Ibid., p. 90.
53. Dölger, Regesten, n° 781.
LES LOGOTHÈTES 17

parler d'eux. Il est cependant certain que la charge de logothète du génikon


ne tomba pas en désuétude et il y eut toujours des titulaires jusqu'en
1204.
Au XIe siècle, le logothète du génikon occupe toujours un rang élevé
dans la hiérarchie ; dans les chrysobulles, sa signature suit immédiatement
celle du sacellaire54. Cependant, à la fin du XIe siècle et vraisemblablement
avec l'arrivée au pouvoir d'Alexis Ier Comnène (1081-1118) et par suite de
l'importante réforme administrative dont il est l'auteur, le logothète du géni
kon perd, pendant une certaine période qui semble correspondre à celle des
Comnènes (1081-1185), de son importance. Son sékréton est supervisé
par le grand logariaste, poste créé par Alexis Ier Comnène55. Un texte56,
datant du règne de cet empereur, permet de connaître la composition du
logothétat du génikon et de mesurer combien il avait perdu de son import
ance. Le logothète du génikon Michel Kourtikios est assisté du logariaste
Basile Tzirithôn, de quatre notaires impériaux, ainsi désignés : le notaire
impérial du même sékréton Apimpithioum, le notaire impérial du même
sékréton du génikon, Constantin Rhôthônas, le notaire impérial du sékréton
du génikon, Jean Serblias, et le notaire impérial du sékréton du génikon,
Nicolas Triphyllos, ainsi que du juge du Velum et directeur de l'Hippo
drome (ό κριτής του βήλου και επί του Ιπποδρόμου), Jean Manouèlitès.
Il se pourrait que le logothète du génikon ait abandonné, au moins en
partie, ses fonctions à 1'έπί των οίκειακών57. En tout cas, la création du logo
thétat des sékréta, à l'époque d'Alexis Ier Comnène, n'implique pas la
suppression du logothétat du génikon. Il s'agit simplement d'un rouage
administratif nouveau. Le logothète des sékréta n'est pas, sous un nom
nouveau, le même fonctionnaire que le logothète du génikon.
Avec Isaac II Ange (1185-1195), dont la politique est en réaction contre
celle des Comnènes, le logothète du génikon reparaît avec ses fonctions
antérieures et son personnel58. Il a retrouvé son indépendance et son im
portance, comme le prouvent les titres auliques joints à son office : nobé-

54. MM 6, p. 488.
55. Mentionné pour la première fois en 1090. Cf. Hélène Ahrweiler, Byzance et la
mer, Paris 1966, p. 203.
56. Cité par Du Cange, Constantinopolis Christiana, II : Paris, p. 154 = Venise, p. 121.
Cf. Zachariae, JGR 3, p. 398, qui écrit Κουτρίκος, Άπιμπιθιούμ, tandis que Du Cange
porte Κουτρίκιος, Άπφεπιθίων.
57. Dölger, Beiträge, p. 20.
58. Ibid., p. 15-20.
18 R. GUILLAND

lissime, protonobélissime, sébaste59, alors qu'au VIe siècle il n'est qu'èvSo-


ξότατος60.
Au XIIIe siècle, la prise de Constantinople en 1204 par les Croisés de la
IVe Croisade amena des modifications profondes dans l'administration
byzantine. La charge de logothète du génikon existe toujours sous l'empire
de Nicée et sous les Paléologues. Si elle avait disparu au XIIe siècle, les
empereurs de Nicée et les Paléologues n'auraient eu aucune raison pour la
rétablir. De même, si l'appellation de logothète du génikon avait été remplacée
par celle de logothète des sékréta, les empereurs de Nicée et les Paléologues
n'auraient eu aucune raison de la remettre en usage. Sous les Paléologues
(1261-1453), les textes attestent que le logothète du génikon est toujours
en fonction et n'est pas un simple titre honorifique. A la fin du XIIIe siècle
et au début du XIVe, Georges Acropolite, Théodore Mouzalon et Théodore
Métochite sont connus comme logothètes du génikon, avant d'être devenus
grands logothètes. L'activité et l'importance du logothète du génikon sont
assez grandes pour qu'Andronic II Paléologue (1282-1328) laisse, en fait,
le logothète du génikon Théodore Métochite diriger seul les affaires de
l'Etat61. Dès la fin du XIIIe siècle, semble-t-il, la charge de logothète du
génikon est devenue un échelon vers la charge supérieure de grand logothète.
En tout cas, la dernière mention du logothète du génikon, qui nous est
parvenue, est un acte de Kutlumus d'octobre 1375, mentionnant une déci
sion du juge général Matarangos, de février 1341, confirmant certaines déci
sions, « le logothète du génikon n'ayant pris aucun arrêt contraire »62.
Le logothète du génikon est certainement toujours un fonctionnaire des
Finances. Cependant, vers 1350, le Pseudo-Codinus le cite bien dans la
hiérarchie des offices où il occupe le 18e rang63, mais il déclare ignorer ses
fonctions64 ; il ne connaît que son uniforme, qui porte brodé le portrait

59. Laurent, Bulles, n° 260.


60. Chronicon Paschale (Bonn, p. 721 8) : δ ενδοξότατος πατρίκιος και λογοθέτης
Θεοδόσιος. Il y a lieu de noter que les titres auliques accordés au logothète du génikon
sont, dans sa longue histoire, assez nombreux et parmi les titres les plus élevés on rencontre
les suivants : consul (Cyriaque), proconsul (Nicolas), endoxotatos, magistros (Aktoua-
rios, Cérulaire, Constantin, Stéphane, Serge, Xèros), nobélissime, protonobélissime,
ostiaire impérial (Constantin), patrice (Nicéphore Ier, Sisinios, Dosithée, Georges, Nicétas,
Nicolas, Serge, Théophane), proèdre (Cérulaire), protoproèdre (Cérulaire), protospa-
thaire impérial (Philothée, Dosithée, Serge, Sisinios, Théophane), recteur (Basile), sébaste
(Cérulaire), spathaire, vestarque (Xèros).
61. V. Laurent, Notes de titulature byzantine. 4. Le logothète du Trésor sous les
premiers Paléologues, EO 38, 1939, p. 369-370.
62. P. Lemerle, Actes de Kutlumus, Paris 1945, p. 131, acte 34.
63. Pseudo-Codinus : Bonn, p. 915 = Verpeaux, p. 13714.
64. Id. : p. 3416 = p. 17615"16.
LES LOGOTHÈTES 19

de l'empereur65. Rien ne permet cependant de supposer que la charge de


logothète du génikon soit tombée en désuétude dans le courant du XIVe
siècle et au XVe. Les diverses listes des offices publiées au XIVe siècle
mentionnent toutes le logothète du génikon66. Les historiens de la fin
du XIVe et du XVe siècle ne font pas allusion aux logothètes du génikon,
mais ce silence des sources n'implique nullement la disparition de l'office.
Il exista certainement jusqu'à la fin de l'Empire un logothète du génikon,
portant ce nom ou un autre, chargé d'établir les impôts et de les faire rentrer.
Les services du logothétat du génikon étaient installés dans un vaste
édifice qui portait le nom de Tè Γενικόν (λογιστήριον). La tradition en
attribuait la construction à Constantin le Grand67. Ce magnifique palais
construit en briques fut démoli par Isaac II Ange, preuve non pas de la
disparition du logothétat du génikon, mais de son transfert dans un autre
endroit68. Cet édifice, qui abritait le ministère des Finances depuis des
siècles, avait dû subir bien des transformations. Comme le logothète du
génikon n'était pas seulement ministre des Finances, mais exerçait aussi une
juridiction contentieuse en matière d'impôts, le Génikon était également
un tribunal devant lequel étaient portées toutes les réclamations et plaintes
contre le fisc et contre ses agents. Les empereurs, soucieux d'équité, tenaient
parfois à venir vérifier eux-mêmes la manière dont on rendait la justice
aux contribuables. Basile Ier descendait souvent du Grand Palais au Géni
konet siégeait en personne pour écouter les doléances des victimes du fisc
et leur faire rendre justice69.
Comme l'Idikon, le Génikon se trouvait dans l'enceinte même du Grand
Palais, mais sa situation exacte est difficile à préciser. Il faisait partie d'un
groupe de bâtiments édifiés entre l'église du Seigneur, l'Idikon et le Sigma70.
Constantin Doukas qui, pendant la minorité de Constantin VII Porphyro-
génète, tenta de s'emparer du Grand Palais, fut arrêté, après avoir forcé
la porte de la Chalkè, devant la porte des Excubiteurs et massacré71.

65. Id. : p. 2015 = p. 1572.


66. Cf. J. Verpeaux, Pseudo-Kodinos. Traité des offices, Paris 1966, p. 30017, 30513
30716, 32142-43, 33553~54, 34425, 34721-22.
67. Patria CP : Preger II, p. 1451.
68. Nicétas Chômâtes : Bonn, p. 581.
69. Théophane Cont. (Bonn, p. 26013"15) : αυτός των βασιλείων ύποκατιών εις τό
λεγόμενον Γενικόν.
70. Patria CP : Preger II, p. 145. Sur l'église du Seigneur, cf. R. Guilland, Etudes
de topographie de Constantinople byzantine, I, Berlin-Amsterdam 1969, p. 64-65. Sur
l'Idikon, ibid., p. 94-119.
71. Théophane Cont. : Bonn, p. 383, 719-720, 876. Cedrenus : Bonn II, p. 280.
20 R. GUILLAND

D'après Cedrenus72, Constantin Doukas aurait été tué ou achevé εν τω


του γενικού σεκρέτφ et sa tête aurait été portée au Chrysotriklinos par la
porte de cette salle, porte au-dessus de laquelle se trouvaient les icônes du
Christ et de la Vierge. La porte en question n'est certainement pas la porte
orientale du Salon d'Or, donnant accès à la terrasse du Phare, mais la
porte occidentale, donnant accès au Lausiakos. Zonaras dit clairement
qu'il s'agit de la porte occidentale73. Les dignitaires, reçus en audience
par l'empereur, pénétraient au Salon d'Or par la porte occidentale et
sortaient par cette même porte. Constantin Doukas, après son audience,
fut reconduit par l'empereur jusqu'à la porte de sortie, au-dessus de la
quelle se trouvaient les deux icônes74. D'après le Continuateur de Théo-
phane75, l'empereur, lorsqu'il adressa à Constantin Doukas sa menace,
se trouvait εν τη προς ανατολάς του Κυρίου είκόνι, c'est-à-dire dans l'ab
side orientale du Salon d'Or décorée de l'icône du Christ. La porte ainsi
désignée devait être placée en face de lui, par conséquent à l'occident76.
De ce qui précède il résulte que le Génikon doit être cherché à l'ouest du
Salon d'Or, soit dans les parages de l'Idikon, soit dans le voisinage de
l'église du Seigneur, ce qui est probable77.

Il nous est parvenu le nom d'un certain nombre de logothètes du géni


kon1.
1. ACROPOLITE, Constantin, qui devint grand logothète.
2. ACROPOLITE, Georges, qui devint également grand logothète.
3. AKTOUARios, Théodore, contresigne en avril 1088, comme magistros
et logothète du génikon, le chrysobulle d'Alexis Ier Comnène exemptant
de tout impôt le monastère de Saint- Jean-Prodrome de Patmos2.

72. Cedrenus : Bonn II, p. 26915~16.


73. Zonaras, XVI, 14 (Bonn III, p. 452 = Dindorf IV, p. 4619-20) : τήν προς δύσιν
οδσαν τοϋ χρυσοτρικλίνου ; XVI, 16 (Bonn III, p. 460 = Dindorf IV, p. 5123) : δια
της δυτικής του χρυσοτρικλίνου πύλης.
74. Glycas : Bonn, p. 556.
75. Théophane Cont. : Bonn, p. 37315~16.
76. Cf. cependant J. Ebersolt, Le Grand Palais et le Livre des Cérémonies, Paris
1910, p. 81, n. 1.
77. Un lemma de la correspondance de Spanopoulos indique que la παλαιά σε-
κρετική θέσις (du logothésion du génikon) se trouvait à l'Oatos (Dölger, Beiträge, p. 1 1 1).
Sur l'Oatos, cf. R. Guilland, op. cit., I, passim (voir Index).
1. Les logothètes du génikon devenus grands logothètes seront étudiés comme tels.
2. Dölger, Regesten, n° 1147.
LES LOGOTHÈTES 21

4. antonin, γενικός, mentionné comme tel dans les synaxaires au 23


septembre3.
5. Basile, recteur et logothète du génikon, est mentionné dans un acte
de Lavra de 973, sanctionnant l'acquisition par le moine Serge de l'île
του Γυμνοπελαγησίου4, et dans un second acte du même monastère, de
988, confirmant l'acquisition de la même île par le moine Sabbas5.
6. cérulaire, Constantin, était le neveu du patriarche Michel Ier Céru-
laire (1043-1058). Les lettres que lui adressa Psellos permettent de connaître
un peu sa vie* II fut très vraisemblablement logothète du génikon, puis
magistros et sacellaire. Il reçut ensuite la dignité honorifique de proèdre
et fut promu en 1071 protoproèdre. Il occupa la charge de grand dron-
gaire de la Veille. Michel VII Doukas le consultait souvent sur l'adminis
tration de l'Etat. Promu sébaste et επί των κρίσεων, il mourut sous le règne
de Nicéphore III Botaniate6.
7. Constantin. En montant sur le trône, Basile Ier voulut témoigner sa
reconnaissance à l'higoumène de Saint-Diomède qui l'avait accueilli, à son
entrée à Byzance. L'higoumène fut nommé économe et syncelle, son frère
Jean drongaire de la Veille, son frère Paul trésorier ou chartulaire du Trésor,
son frère Constantin logothète du génikon7.
8. dèmocharês. Théodore Stoudite adresse une lettre au logothète du
génikon Dèmocharês pour l'engager à continuer d'intervenir auprès de
l'empereur, en faveur de l'orthodoxie8.
9. jean. En 715, Anastase II, ayant appris qu'une flotte arabe venant
d'Alexandrie était arrivée à Phoenix pour y charger des bois de cyprès,
envoya ses bateaux les plus rapides vers Rhodes, sous le commandement
du diacre de Sainte-Sophie et logothète du génikon Jean. Mais les soldats
de l'Opsikion se révoltèrent contre Jean et le tuèrent ; les bateaux rega
gnèrent leur base9.
10. kastamonitès, Théodore. Oncle maternel d'Isaac II Ange, ce dernier
le créa à son avènement logothète du génikon et lui confia la direction du
gouvernement1 °.

3. Du Cange, Glossarium, s.v. γενικόν ; H. Delehaye, Syn. CP, p. 7214.


4. Rouillard-Collomp, Actes de Lavra, I, Paris 1937, p. 31e et 32ao.
5. Ibid., p. 3446 et note à la ligne 40. Les deux actes sont détruits.
6. N. Oikonomidès, Le serment de l'impératrice Eudocie (1067). Un épisode de
l'histoire dynastique de Byzance, REB 21, 1963, p. 119-120.
7. Théophane Cont. : Bonn, p. 69114, 84222. Léon Grammaticus : Bonn, p. 256.
8. II, 82: PG 99, 1323-1325.
9. Théophane : Bonn, p. 590 = de Boor, p. 38510-11. Nicéphore, Breviarium : Bonn,
p. 51. Zonaras : Bonn III, p. 245.
10. Bréhier, Institutions, p. 41.
22 R. GUILLAND

11. kourtikios, Michel. Il était logothète du génikon sous Alexis Ier


Comnène11.
12. léon, patrice et logothète du génikon, est mentionné dans deux actes
de Lavra, de 993, d'ailleurs détruits, confirmant les titres de propriété de
l'île του Γυμ,νοπελαγησίου acquise successivement par le moine Serge en
973 et par le moine Sabbas en 98912.
13. mansour, Serge13.
14. métochite, Théodore. Il fut grand logothète.
15. monastèriotès, Léon, κριτής του βήλου και γενικός, confirme un
acte datant des environs de 118014.
16. mouzalon, Théodore. Il fut grand logothète.
17. nicéphore Ier. Lorsqu'en 802, Nicéphore Ier s'empara du trône contre
Irène, il était patrice et exerçait les hautes fonctions de γενικός λογοθ-έτης15.
Les historiens qualifient souvent Nicéphore Ier d'a7ro λογοθετών, pour
rappeler ses anciennes fonctions16. Appartenant à l'aristocratie byzantine
en sa qualité de sénateur17, Nicéphore Ier, homme de finances, aimait
par-dessus tout l'argent et usait de tous les moyens pour s'en procurer18.
18. nicétas, patrice et logothète du génikon, reçoit en 810 une κέλευσις
de Nicéphore Ier lui enjoignant de majorer les impôts des églises et des cou
vents ainsi que ceux des « hôtels » particuliers, avec un rappel de huit
ans19.
19. philothée, protospathaire et γενικός sous Michel III (842-867),
était partisan du césar Bardas contre Basile20.
20. sisiNios. Sous Romain II (959-963), le protospathaire Sisinios,
άπό σακελλίου, fut nommé éparque ; peu après, remplacé à la préfecture

11. Cf. note 56, p. 17. La famille des Kourtikios appartenait à l'aristocratie by
zantine. Un Basile Kourtikios se distingue comme général sous Alexis Ier Comnène
[Anne Comnène, Alexiade : Bonn I, p. 246 (?), 248, 316, 332, 344, 383 ; II, p. 154].
12. Cf. note 5, p. 21.
13. Cf. note 12, p. 12.
14. F. Dölger, Die Kaiserurkunden des Johannes-Theologos-Klosters auf Patmos,
BZ 28, 1928, p. 339.
15. Théophane : Bonn, p. 738 = de Boor, p. 4764~5. Cedrenus : Bonn II, p. 306.
Léon Grammaticus : Bonn, p. 200-201. Zonaras : Bonn III, p. 301. Ephrem, v. 1978 :
PG 143, 85.
16. Glycas : Bonn, p. 5305.
17. Id. : p. 5304.
18. Théophane : Bonn, p. 741 = de Boor, p. 47731 ; p. 743 = p. 47831. Cedrenus :
Bonn II, p. 40.
19. Dölger, Regesten, n° 370.
20. Théophane Cont. : Bonn, p. 67818. Léon Grammaticus : Bonn, p. 244.
LES LOGOTHÈTES 23

de la Ville par le patrice Théodore Daphnopatès, άπ6 στρατιωτικών, il


fut alors titré patrice et nommé γενικός λογοθέτης21 .
21. SPANOPOULOS, Georges, logothète du génikon, reçoit d'Alexis Ier
Comnène en 1 109 une λύσις à une question posée par lui sur le montant
des impôts accessoires22.
22. syros, Georges. Envoyé par Justinien II, après sa restauration sur le
trône (705), pour détruire la ville de Cherson, il fut fait prisonnier par les
habitants et mis à mort23.
23. théodote. Ancien moine, logothète du génikon sous Justinien II,
il se montra si tyrannique dans l'exercice de ses fonctions qu'après la chute
de Justinien II il fut brûlé24.
24. TziRiTHON, Jean, logothète du génikon. Dans un rapport adressé
antérieurement à 1109 à Alexis Ier Comnène, il fait savoir, entre autres,
que la maison de Dèmètrios Kamatèros a été saisie par le fisc, car il n'avait
pas tenu l'engagement qu'il avait pris de verser le double des impôts des
« cantons » de Thrace et de Macédoine25.
25. N. Le métropolite de Synade et syncelle Léon adresse deux lettres à
N., logothète du génikon26.
26. N. Un chrysobulle d'Andronic II Paléologue, de 1302, adressé au
logothète du génikon n., confirme des propriétés au monastère de Xéropo-
tamou de PAthos27.
Il nous est parvenu un certain nombre de sceaux, qui nous font connaître
des logothètes du génikon, non mentionnés, semble-t-il, dans les textes.
27. Constantin, primicier, ostiaire impérial, λογοθέτης του γενικού28.
28. CYRIAQUE, ex-consul, logothète du génikon de l'entrepôt de Cilicie29.
29. dosithée, patrice, protospathaire impérial, logothète du génikon,
commerciaire de l'apothèque de Bithynie, Saloutaria et Pakatiani (623)30.

21. Id. : p. 4706, 75714~15.


22. Zachariae, JGR 3, p. 393 et 396. Mention des impôts p. 3943"4 : δικερατοεξα-
φόλλου, συνήθειας, έλατικοΰ. Cf. Dölger, Regesten, nos 1246 et 1247.
23. Cf. note 15, p. 13. Théophane : Bonn, p. 579-580 = de Boor, p. 37828, 3797.
24. Cf. note 14, p. 12.
25. Dölger, Beiträge, p. 75 ; Zachariae, JGR 3, p. 393.
26. J. Darrouzès, Epistoliers byzantins du Xe siècle, Paris 1960, p. 169, lettre 7
(Τψ γενικφ) et p. 199, lettre 44 (Εις τον γενικόν).
27. Dölger, Regesten, n° 2245. Ce chrysobulle est d'ailleurs faux.
28. Konstantopoulos, Molybdoboulla, sceau n° 408a.
29. V. Laurent, Bulletin de sigillographie byzantine, Byz. 5, 1930, p. 607.
30. Antoniadis-Bibicou, Recherches, p. 226. Cf. V. Laurent, Byz. 5, 1930, p. 587,
593, 607, 623.
24 R. GUILLAND

30. Etienne, από μαγίστρων et logothète du génikon, commerciaire


de Tyr (VIe s.)31.
31. GEORGES, patrice et γενικός λογοθέτης (VIIIe-IXe s.)32.
32. NICÉTAS, patrice, γενικός λογοθέτης (IXe-Xc s.)33.
33. Nicolas, patrice, proconsul, logothète du génikon (IXe-Xe s.)34.
Inconnu par ailleurs, il est peut-être différent du suivant.
34. Nicolas, patrice et logothète du génikon, dont le sceau est un peu
antérieur35.
35. serge, patrice, magistros, protospathaire, logothète du génikon
(IXe s.)36.
36. théophane, patrice, protospathaire impérial, logothète du génikon,
commerciaire de l'apothèque de Bithynie, Saloutaria et Pakatiani (624)37.
37. xèros, Basile, juge du thème des Cibyrrhéotes, magistros ; juge du
thème de l'Hellade et du Péloponnèse, vestarque, grand chartulaire du
Trésor public, logothète du génikon38.
38. N., patrice, logothète du génikon (VIIIe-IXe s.)39.
39. n., patrice, logothète du génikon (?)40.
40. n., spathaire, logothète du génikon (?)41.
41. N., protospathaire impérial, logothète du génikon (VIIIe-IXe s.)42.
42. n., patrice, logothète du génikon (?)43.
43. n., patrice, logothète du génikon (?)44.

31. Antoniadis-Bibicou, Recherches, p. 225.


32. Schlumberger, Sigillographie, p. 530.
33. V. Laurent, EO 31, 1932, p. 431-432. Cf. note 19, p. 22 : il s'agit peut-être du
même personnage.
34. V. Laurent, Les sceaux byzantins du médaillier Vatican, Cité du Vatican 1962,
p. 70.
35. Ibid., p. 70.
36. Konstantopoulos, Molybdoboulla, sceau n° 405.
37. Antoniadis-Bibicou, Recherches, p. 226. Cf. V. Laurent, Byz. 5, 1930, p. 588 et
594.
38. Laurent, Bulles, n° 260.
39. J. Ebersolt, Sceaux byzantins du musée de Constantinople, RN 14, 1914, p. 380.
40. Ibid., p. 380.
41. Ibid., p. 380.
42. Ibid., p. 381.
43. Konstantopoulos, Molybdoboulla, sceau n° 403.
44. Ibid., sceau n° 404.
LES LOGOTHÈTES 25

II. — Le logothète de l'armée


Ό λογοθέτης του στρατιωτικού

Le logothète de l'armée (λογοθέτης του στρατιωτικού, sous-entendu


λόγου, λογείου, πρυτανείου, ταμιείου ou θησαυρού) est l'ancien rationalis
aerarii militaris ou rationalis fisci militarise appelé encore rationalis mili-
taris ou logotheta castrensis1. Une inscription le qualifie praepositus tabu-
larum rationalis castrensis2. Dans l'Egypte byzantine, il était appelé, très
vraisemblablement, στρατιωτικός3. Le logothète de l'armée semble avoir
correspondu au procurator castrensis romain, chargé, semble-t-il, de l'ad
ministration du palais impérial, appelé castra, et, en particulier, du paie
ment de la solde de la garde impériale4. Le logothète de l'armée avait
essentiellement la lourde charge de tenir la comptabilité de l'armée, de
subvenir à ses dépenses et de payer la solde des officiers et des hommes
de troupe.
Au VIe siècle, à l'époque de Justinien Ier, des agents comptables ou offi
ciers payeurs étaient déjà attachés aux armées, sous l'appellation de logo-
thètes. Ces logothètes, d'après les registres (κατάλογος) où étaient inscrits
les noms des soldats ainsi que leur situation, payaient à chacun ce qui lui
était dû ; les fonds étaient fournis par le Trésor public5. A cette époque,
les logothètes, simples agents comptables délégués pour des missions
spéciales, dépendaient du préfet du prétoire. Au VIe siècle, le trésorier-
payeur aux armées était appelé ό του στρατοπέδου ύπαρχος6. Archelaos,
patrice, ancien της αυλής ύπαρχος, fut, lors de la guerre des Vandales,
ύπαρχος του στρατοπέδου7, de même que le sénateur Symmaque8.
Il est très probable que le logothétat de l'armée fut organisé au cours du
VIIe siècle, en même temps que les autres logothétats. On note un logothète

1. De cer. : Bonn II, p. 154 (notes de Reiske).


2. Ibid.
3. Du Cange, Glossarium, s.v. Cf. Bury, Adm. System, p. 90-91.
4. A. Semenov, Über Ursprung und Bedeutung des Amtes der Logotheten in Byzanz,
BZ 10, 1910, p. 447, n. 2.
5. Procope, Anecdota, 24 (Bonn III, p. 13312"13) : πρυτανεύει κατά πρεσβεία τας
έκ του δημοσίου συντάξεις έκάστφ. L'historien montre {ibid., p. 133-134) comment les
logothètes procédaient pour payer le moins possible et cite l'exemple du logothète
Alexandre, dont les agissements entraînaient pour l'armée la misère.
6. Procope, De bello vandalico, I, 1 1 (Bonn I, p. 36019) : οΰτω γαρ δ της δαπάνης
χορηγός ονομάζεται.
7. Ibid. : p. 36016.
8. Id., De bello vandalico, II, 1 6 (Bonn I, p. 48222) : ΰπαρχός τε και χορηγός της δαπάνης.
26 R. GUILLAND

de l'armée en 6269. Mais le logothétat de l'armée est vraiment organisé


en 680 lorsque disparaît la préfecture du prétoire dont l'administration
militaire passe au logothète de l'armée. Une caisse militaire indépendante
apparaît, en effet, à cette époque : το στρατιωτικόν. Il se pourrait que cette
caisse n'ait été instituée que pour la partie orientale de l'Empire10.
Au Xe siècle, le logothète de l'armée connaît sa plus grande importance.
En plus de l'entretien, du logement et de la solde de l'armée, il contrôle,
avant tout, les στρατιωτικοί κατάλογοι ou κώδικες, qui indiquent, entre
autres, les servitudes grevant les biens militaires en temps de paix. Il semble
aussi avoir tenu à jour la liste des prestations dues par la population à
l'armée et, en particulier, le rôle de cette dernière pour la création de troupes
armées à la légère, en temps de guerre11. Les στρατευταί, que ne mentionne
pas Philothée dans son Klètorologe, étaient chargés du recrutement de ces
troupes12 et de leur licenciement13. Ce contrôle fut maintenu, semble-t-il,
jusqu'à la fin de l'Empire. Le logothète de l'armée s'occupait aussi de la
construction des forteresses et des ponts14.
L'oflicium du logothète de l'armée comptait sept principaux fonction
naires15.
1. Les χαρτουλάριοι του σεκρέτου ou του στρατιωτικού ou encore του
στρατιωτικού λογο&έτου16, que les sceaux révèlent avoir été titrés
spatharocandidat (Constantin) et hypatos, comme μέγας χαρτουλάριος
του στρατιωτικού λογο&εσίου (Jean)17.
2. Les χαρτουλάριοι των Φεμάτων.
3. Les χαρτουλάριοι τών ταγμάτων, subordonnés les uns et les autres
au logothète de l'armée comme au stratège. Ils avaient les mêmes fonctions
que les scrinarii du préfet du prétoire18.
4. Les λεγατάριοι19.

9. Chronicon Paschale : Bonn, p. 721.


10. Bury, Adm. System, p. 90.
11. Dölger, Beiträge, p. 21.
12. MM 6, p. 481.
13. MM 6, p. 583 (άποστρατεύειν). Cf. Dölger, Beiträge, p. 21, η. 7.
14. Ε. Stein, Introduction à l'histoire et aux institutions byzantines, Traditio 7,
1949-1951, p. 149.
15. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 718. Cf. Bury, Adm. System, p. 90-91 et 140-141.
16. Ibid., II, 3 : p. 52414~18 ; II, 49 : p. 69419 ; II, 52 : p. 7523.
17. Schlumberger, Sigillographie, p. 353.
18. Bury, Adm. System, p. 90.
19. Ibid., p. 91.
LES LOGOTHÈTES 27

5. Les οπτίονες, officiers payeurs de la troupe20, qui existaient déjà au VIe


siècle sous Justinien Ier 21.
6. Le πρωτοκαγκελλάριος, qui suppose l'existence de καγκελλάριοι.
7. Les μανδάτορες.
L'officium du logothète de l'armée comportait des notaires, qui ne sont
pas mentionnés, mais que connaît le Livre des Cérémonies22, et qui tou
chaient la moitié des honoraires des chartulaires23.
Le personnel de l'Hippodrome était placé sous la haute direction des
préposites, qui choisissaient les employés dont les soldes étaient payées
par leurs soins sur le Trésor public. Toutefois, il semble qu'à une certaine
époque du Xe siècle, les logothètes de l'armée usurpèrent les attributions
des préposites en cette matière, ce qui provoqua des protestations24.
Les fonctions du logothète de l'armée lui assuraient dans la hiérarchie
aulique un rang assez élevé, le 35e 25, et il était rangé dans la classe des secré
taires26. Il pouvait prétendre aux plus hauts titres nobiliaires : anthypatos-
patrice, patrice, protospathaire, entre autres27. Comme tous les dignitaires
et fonctionnaires, il était invité aux banquets impériaux28.
La situation du logothète de l'armée se modifia au cours du XIe siècle.
Alexis Ier Comnène, en effet, désireux de contrôler plus sévèrement la
gestion des finances de l'Empire et, plus particulièrement, les dépenses
militaires qui absorbaient une grande partie du revenu national, créa le
grand logariaste, qui supervisa le sékréton du logothète de l'armée, dont
il assuma du reste souvent la fonction29. Le logothétat de l'armée cessa
d'être un ministère indépendant. Son importance fut encore diminuée avec
la création par Alexis Ier Comnène d'un Grand Etat-Major de l'armée de
terre, qui unifia cette dernière formée des tagmes ou armée impériale et des
thèmes ou armée provinciale30. Cependant, le logothète de l'armée existe
toujours à la fin du XIe siècle, ainsi que le prouvent un chrysobulle de Michel
VII Doukas, d'octobre 107431, un chrysobulle de Nicéphore III Botaniate,

20. De cer., H, 52 : Bonn I, p. 738«.


21. Bury, Adm. System, p. 91.
22. De cer., II, 49 : Bonn I, p. 69420.
23. Ibid. Cf. Bury, Adm. System, p. 91.
24. De cer., II, 56 : Bonn I, p. 807.
25. De cer., Π, 52 : Bonn I, p. 713 = Bury, Adm. System, p. 136.
26. De cer., II, 52 : p. 715 = p. 138.
27. De cer., II, 52 : p. 728, 731 = p. 146, 148.
28. De cer., II, 52 : p. 742, 767 = p. 157, 168.
29. Hélène Ahrweiler, Byxance et la mer, p. 203.
30. Ibid., p. 203.
31. Sathas, MB 1, p. 53e : είς το σέκρετον του στρατιωτικού λογοθέτου. Cf. Dölger,
Regesten, n° 1005.
28 R. GUILLAND

de 107932, et un chrysobulle d'Alexis Ier Comnène, d'avril 108833. Il y a


lieu de noter que dans les chrysobulles le logothète de l'armée signe immé
diatement après le logothète du génikon comme au Xe siècle. Il peut encore
accéder à de hauts titres nobiliaires, comme celui de magistros, en 108834.
Au XIIe siècle, le silence des textes est complet sur le logothète de l'armée
et peut permettre de conclure que sa fonction a disparu. La suppression
du titre de logothète de l'armée provient-elle de la centralisation réalisée au
XIIe siècle ou aussi de la disparition des biens militaires absorbés pratique
ment par les grands propriétaires fonciers35 ? Il est difficile de l'affirmer,
mais le fait est possible. On sait, en effet, que les soldats, une fois inscrits
sur les rôles, devaient déclarer la terre dont les revenus devaient couvrir
leurs dépenses en tant que soldats ; cette terre était inscrite dans des cadast
resspéciaux, déposés vraisemblablement chez les autorités du thème et
au logothésion de l'armée à Constantinople36. L'office de logothète de
l'armée fut cependant maintenu par les empereurs de Nicée et il en est de
même aux XIIIe-XVe siècles par les empereurs Paléologues. Mais il est
certain que l'office de logothète de l'armée cessa à peu près d'être réel pour
devenir simplement honorifique. Au XIVe siècle, le Pseudo-Codinus le
mentionne dans sa liste hiérarchique, où il lui attribue le 47e rang37 ; il
décrit son uniforme, un turban et un épilourikon sans skaranikon38, mais,
en ce qui concerne ses fonctions, il écrit : « Le logothète de l'armée n'a
aucun service »39. Le logothète de l'armée n'a plus qu'un titre et n'a plus
rien à voir avec l'administration des finances. En 1327, Cantacuzène men
tionne un logothète de l'armée qui remplit les fonctions de juge40.
Bien que l'office de logothète de l'armée fût devenu purement nominal,
il est toutefois probable que l'administration de l'ancien logothétat de
l'armée continua à fonctionner sous la direction de fonctionnaires spéciaux.
L'officier payeur de l'armée semble avoir été, au début du XIVe siècle, le
ύπαρχος του στρατιωτικού41. La distinction entre les divers Trésors

32. Sathas, MB 1, p. 583 (même formule). Cf. Dölger, Regesten, n° 1042.


33. Zachariae, JGR 3, p. 3756"7 : άπό τε των κατά καιρούς σεκρεταρίων γενικών
καΐ στρατιωτικών λογοθετών. Cf. Dölger, Regesten, η° 1147.
34. V. Laurent, Les sceaux byzantins du médaillier Vatican, p. 38, n. 5.
35. Dölger, Beiträge, p. 21.
36. Hélène Glykatzi-Ahrweiler, Recherches sur l'administration de l'Empire
byzantin aux IXe-XIe siècles, BCH 84, 1960, p. 10.
37. Pseudo-Codinus : Bonn, p. 11 = Verpeaux, p. 13828.
38. Id. : p. 24 = p. 16221-24.
39. Id. : p. 40 = p. 1848~9.
40. Cantacuzène : Bonn I, p. 24010.
41. Pachymère : Bonn II, p. 556.
LES LOGOTHÈTES 29

avait-elle été maintenue aux XIIIe-XIVe siècles ? Il est difficile de le dire.


Depuis des siècles, les empereurs s'étaient habitués à puiser indifféremment
dans toutes les Caisses pour les besoins de l'Etat et pour leurs dépenses
personnelles. L'existence d'un Trésor militaire spécial, dans cette période,
est douteuse et le texte invoqué pour l'établir est loin d'être probant. En
effet, pour armer et équiper une armée d'auxiliaires, Andronic II Paléologue
s'efforça de se créer des ressources. Les sommes nécessaires furent prises,
τα μέν έκ του βασιλικού πρυτανείου, τα δ' εκ των στρατιωτικών, τα δ'έκ των
κοινών και ιδιωτικών42. On a voulu voir là la preuve de l'existence de
quatre Trésors distincts, dont celui de l'armée43. Du Cange y voit également
la preuve de l'existence d'un Trésor militaire44. Mais le texte de Grégoras
est précisé par la suite. Si le Trésor impérial fournit une partie des sommes,
l'autre partie fut fournie par des contributions prélevées bon gré mal gré
par les agents du fisc (φορολόγοι) sur les districts, les villes, les monastères,
les corporations, entre autres, et sur les biens des soldats et des particuliers.
Dans les circonstances difficiles, les empereurs faisaient souvent appel au
concours volontaire ou forcé des citoyens. Il n'est nullement question dans
ce texte de Grégoras du Trésor militaire et du Trésor privé.
Bien que le titre de logothète de l'armée fût devenu honorifique, il gardait
cependant un certain éclat, comme en témoigne l'épithète πανευσεβέστατος
attribuée en 1333 au logothète de l'armée Alexis Hyaléas, vraisemblable
ment à propos de la reconstruction de la muraille maritime de Thessaloni-
que, due à l'intervention du logothète45, preuve d'une certaine activité
conservée encore par ce dernier.

Les textes nous ont conservé les noms de quelques logothètes de l'armée.
1. Alexandre. Directeur des impôts publics (τοις δημοσίοις έφεστώς
λογισμοΐς) sous Justinien Ier, il mit l'armée dans la misère par l'arbi
traire qu'il montra dans le recouvrement des impôts1.
2. archélaos, sous Justinien Ier, ύπαρχος της αυλής à Byzance et en
Illyrie et patrice, nommé οπαρχος του στρατοπέδου2.
3. daphnopatès, Théodore. Romain II (959-963) le nomma éparque,
en remplacement de l 'éparque Sisinios, titré patrice et nommé logothète

42. Grégoras : Bonn I, p. 2051214.


43. Pseudo-Codinus : Bonn, p. 198 (commentaire de Goar).
44. Du Cange, Glossarium, s.v.
45. P. Lemerle, Philippes et la Macédoine orientale, Paris 1954, p. 224, n. 7.
1. Procope, Anecdota, II, 24 : Bonn III, p. 134-135. Id., De belle gotthico, III, 1 : Bonn
II, p. 284-285.
2. Id., De bello vandalico, I, 11 : Bonn I, p. 360.
30 R. GUILLAND

du génikon. Théodore Daphnopatès était patrice et ancien logothète de


l'armée, άπο στρατιωτικών3.
4. Georges. Sous Théophile (829-842), il était logothète de l'armée,
στρατιωτικός4, ou, comme l'appelle Génésios, δ τας στρατιωτικας δέλ-
τους πεπιστευμένος5.
5. hyaléas, Alexis (?). Une inscription de 1316 mentionne un logothète
de l'armée, hualsou, vraisemblablement hualéou, képhalè de Thessalo-
nique et qui est peut-être le grand adnoumiaste Alexis Hyaléas6.
6. jean, eunuque et oikeiakos d'Irène (797-802), est mentionné comme
ostiaire impérial et λογοθ-έτης του στρατιωτικού λογοθ-εσίου parmi les
fonctionnaires assistant au IIe concile de Nicée en 7877. Vers 790, Irène
envoie en Italie Jean, σακελλάριος και λογοθ-έτης του στρατιωτικού pour
participer à l'expédition de Théodote et de Théodore, patrice et stratège
de Sicile. Jean fut fait prisonnier et tué8.
7. JULIANOS, δ ενδοξότατος άπο υπάτων πατρίκιος καΐ στρατιωτικού λο
γοθέτης, assiste au VIe concile œcuménique de 6809.
8. KABASiLAS, Théodore. Cantacuzène fait l'éloge de ce personnage
qu'Andronic II tenait en grande estime et qui avait su également se concil
ierl'amitié du jeune empereur Andronic III Paléologue. Théodore Kaba-
silas était même l'ami du grand logariaste Kokalas dont il n'ignorait pas
d'ailleurs la fourberie10.
9. MARiNOS, patrice et synklètikos, assiste au concile de 86911. Il ne faut
pas confondre Marinos patrice avec Marinos, anthypatos-patrice et
prôtasèkrètis, qui assiste au même concile12.
10. Michel vi Stratiôtikos (1056-1057). A la mort de Theodora, les eunu
ques élevèrent au trône le patrice Michel, στρατιωτικός, c'est-à-dire logo
thète de l'armée. C'était déjà un vieillard qui ne connaissait rien en dehors
de l'administration militaire, dans laquelle il avait fait toute sa carrière13.
11. nicétas, μαγίστρος και στρατιωτικός λογο&έτης, contresigne un pit-

3. Théophane Cont. : Bonn, p. 470.


4. Cedrenus : Bonn II, p. 129.
5. Genesius : Bonn, p. 71.
6. Cf. note 45, p. 29.
7. Mansi 12, 999 et 1051.
8. Théophane : Bonn, p. 704, 708. Cf. Cedrenus : Bonn Π, p. 916 (notes).
9. Mansi 11, 209, 218, 222.
10. Cantacuzene : Bonn I, p. 340.
11. Mansi 16, 158.
12. A. Christophilopoulos, Ή Σύγκλητος είς το βυζαντινών κράτος, Athènes 1949,
ρ. 49. Voir Mansi 16, 81-96, 134. Cf. Α. Vogt, Basile /"..., p. 357.
13. Cedrenus : Bonn II, p. 612. Joel : Bonn, p. 63.
LES LOGOTHÈTES 31

takion d'Alexis Ier Comnène, d'avril 108814, ainsi qu'une prostaxis, émise
à la même date et prescrivant de remettre au monastère de Saint- Jean-
Prodrome de Patmos une copie du chrysobulle émis à la même date et
accordant certains privilèges au couvent15.
12. NICOLAS, λογοθέτης των στρατιωτικών, étant décédé, Michel Psel-
los prononça son oraison funèbre16.
13. symmaque, sénateur, fut sous Justinien Ier Οπαρχος καΐ χορηγός
της δαπάνης17.
Nous possédons quelques sceaux de logothètes de l'armée qui ne semblent
pas connus par ailleurs.
14. EUSTATHios (VIIe s. probablement)18.
15. jean, hypatos (VIIIe-IXe s.)19.
16. Michel, patrice, proconsul, vestis, vestarque, στρατιωτικές λογοθέτης.
On possède de lui deux sceaux qu'il est difficile de dater20.
17. PAUL, protospathaire, έπί του χρυσοτρικλίνου, juge de l'Hippodrome,
στρατιωτικός λογοθέτης (Date ?)21.
18. théodose, consul, protospathaire et logothète de l'armée (XIIe
s.)22.

III. — Le logothète du drome


Ό λογοθέτης του δρόμου

A la haute époque byzantine, l'administration générale des Postes publi


ques (ό δημόσιος δρόμος)1 était rattachée à la préfecture du prétoire. De

14. MM 6, p. 5033. cf. dölger, Regesten, n° 1148.


15. Dölger, Regesten, n° 1149.
16. Kurtz-Drexl, Michaelis Pselli scripta minora, I, Milan 1936, p. 216-219.
17. Procchpe, De bello vandalico, II, 16 : Bonn I, p. 482.
18. G. Schlumberger, Sceaux byzantins inédits, REG 4, 1891, p. 134. Cf. id., Mélan
ges d'archéologie byzantine, Paris 1895, p. 242.
19. B. A. Panöenko, Katalog molivdovulov, IRAIK 9, 1904, p. 372-373, sceau n" 231.
20. Konstantopoulos, Mofybdoboulla, sceau n° 220a. Cf. Hanton, Lexique expli
catif du Recueil des inscriptions grecques et chrétiennes d'Asie Mineure, Byz. 4, 1927/28,
p. 69, n. 1.
21. Konstantopoulos, Mofybdoboulla, sceau n° 208. Schlumberger, Sigillographie,
p. 352-353.
22. Schlumberger, Sigillographie, p. 352.
1. Procope, Anecdota, 30 : Bonn III, p. 161. J. Lydus, De magistratibus, II, 10 :
Bonn, p. 176.
32 R. GUILLAND

très nombreuses constitutions impériales sont en effet adressées au préfet


du prétoire et concernent le service des Postes. Les préfets du prétoire et
leurs agents abusèrent de leurs pouvoirs, pratiquement sans contrôle. Une
réforme s'imposait ; dès la fin du IVe siècle, la direction générale des Postes
passa au magister officiorum. Cette mesure paraît remonter à la chute du
préfet du prétoire Rufin en 395. Dès lors les diplômes ou permis de poste
délivrés par le préfet du prétoire furent consignés par le maître des offices2.
Dans l'oificium de ce dernier figurent en effet divers fonctionnaires se
rattachant au service public des Postes : le curiosus cursus publia praesen-
talis unus ou inspecteur des Postes, l'un des principaux collaborateurs du
maître des offices3, qui avait la haute surveillance du service des Postes et
sous sa direction des curiosi per omnes provincias ainsi que des interprètes
diversarum gentium*. Au Ve siècle, le curiosus cursus publici, qui relevait
du maître des offices, avait la haute surveillance des Postes, mais l'adminis
tration générale des Postes restait entre les mains du préfet du prétoire.
Au VIe siècle, l'administration des Postes publiques semble être restée
sous la direction du préfet du prétoire, du maître des offices et des agents
de ce dernier. Il n'est pas encore question du logothète du drome. Les
fonctionnaires chargés du service des Postes sont désignés sous des appella
tionsvagues comme ό του δημοσίου φόρου έπιμελούμενος5. Le courrier
impérial est dit ο τας βασιλικας αποκρίσεις ποιών βεριδάριος6. Sous Jus
tin II (565-578), c'était le préfet du prétoire qui était tenu de fournir les
moyens de transport aux ambassadeurs à travers le territoire de l'Empire.
Le préfet du prétoire Constantin avait réglé la question et fixé le nombre
de chevaux et de voitures à mettre à la disposition des ambassadeurs7. Le
préfet du prétoire avait donc encore la haute main sur la Poste publique.
Le maître des offices, chargé cependant des relations extérieures et de la
réception des ambassadeurs, ne semble pas avoir eu à s'occuper de leur
voyage8.
L'organisation des divers logothétats semble remonter au cours du
VIIe siècle. Vers 680, l'administration des Postes est définitivement enlevée

2. J. Lydus, ibid., II, 10 : Bonn, p. 176 ; III, 22 : p. 216 ; III, 61 : p. 254-255.


3. Ibid., Ill, 22 (Bonn, p. 21620~21) : τόν πρίγκιπα της τάξεως τοϋ μαγίστρου ; cf. II,
10 (Bonn, p. 17610"11) : τόν πρώτον μέντοι των φρουμενταρίων (πρίγκιπα αυτόν σήμερον
συμβαίνει καλεϊσθαι).
4. Notifia Dignitatum Or., XI, 50. Cf. Daremberg et Saolio, DAGR, s.v. cursus.
5. Théophane : Bonn, p. 295 = de Boor, p. 191 7~8.
6. Id. : Bonn, p. 295 = de Boor, p. 191».
7. De cer., I, 89 : Bonn I, p. 400.
8. Ibid. : p. 398-408, passim.
LES LOGOTHÊTES 33

au préfet du prétoire et passe sous la direction du maître des offices. Mais


le logothète du drome n'apparaît vraiment qu'au VIIIe siècle, tout au
moins dans les documents qui nous sont parvenus. Avec la disparition du
maître des offices vers le milieu du VIIIe siècle et peut-être même avant la
fin du règne de Léon III (717-740), le chef des services dirigés par le maître
des offices, c'est-à-dire les Postes, la police politique, la réception des amb
assadeurs, la correspondance diplomatique, devint indépendant. Il est
fort probable que cette indépendance fut progressive. Le service des Postes
fut d'abord confié à un fonctionnaire unique et indépendant, qui prit le
nom de logothète du drome (λογοθέτης του δρόμου) et auquel on adjoignit
divers auxiliaires formant son officium. D'autre part le logothète du drome,
par la nature même de ses services, se trouvait en relations constantes avec
l'étranger et était au courant des événements extérieurs ; il devait nécessa
irementêtre amené à s'occuper des Affaires Etrangères et à en assumer la
direction. Le premier logothète du drome qui apparaît avec son titre est
Léon qui dans la guerre des Bulgares fut fait prisonnier en 7629. Le logo-
thétat du drome fut définitivement organisé pendant le IXe siècle. Le logo
thète du drome était devenu un personnage considérable, dont les historiens
font souvent mention.
Le logothétat du drome au Xe siècle est assez bien connu grâce aux
documents qui nous sont parvenus et qui, contrairement à ce qui a lieu pour
les autres siècles, sont particulièrement nombreux et importants10. Au
cours du Xe siècle, le logothète du drome s'écarte de sa vocation première
pour devenir le conseiller de l'empereur en matière de politique étrangère
et un véritable ministre des Affaires Etrangères. A l'origine, comme son
titre l'indique, le logothète du drome, alors logothète des Postes, était un
fonctionnaire des Finances, car, à Byzance, qui dit logothète dit haut
fonctionnaire des Finances11. Le logothète du drome contrôlait très vra
isemblablement son personnel et le budget de son ministère. Il en était ainsi
du logothète du génikon, du logothète de l'armée et du logothète des trou
peaux. Ce n'est pas que le logothète du drome n'ait plus eu d'attributions
financières, ce qui était du reste impossible étant donné ses fonctions de
directeur des Postes et de la police d'Etat, qui faisaient de lui un véritable
ministre de l'Intérieur, d'une part, et son rôle de ministre des Affaires
Etrangères, d'autre part. Mais il est certain que cette dernière fonction de-

9. Théophane : Bonn, p. 665 = de Boor, p. 43110.


10. Voir les pertinentes remarques de D. A. Miller (The Logothète of the Drome in the
Middle Byzantine Period, Byζ. 36, 1966, p. 440-442) sur les difficultés que présentent
l'interprétation des sources et leur utilisation.
11. Ibid., p. 438-439.
34 R. GUILLAND

vient de plus en plus importante. L'aspect financier de la fonction du logo


thète du drome apparaît en effet dans le contrôle du budget des Postes,
dans le contrôle des δωρεαί, ou cadeaux de l'empereur, remises aux ambass
adesenvoyées auprès de princes étrangers12, des dépenses causées par les
réceptions d'ambassadeurs étrangers au Grand Palais13 et des nombreuses
impositions de toute nature (άγγαρείαι) relatives au service de la Poste14.
Le Klètorologe de Patricline Philothée, rédigé vers 899, divers Taktika ou
listes hiérarchiques des dignitaires et des fonctionnaires, ainsi que l'ouvrage
connu sous le titre De Cerimoniis, du Xe siècle, permettent de reconstituer
dans une large mesure les fonctions du logothète du drome à cette époque.
Celui-ci a hérité du magister officiorum la direction des Postes et Communi
cations, les rapports avec les diplomates étrangers en séjour dans l'Empire,
en particulier la réception des ambassadeurs à la Cour, toutes fonctions
qui en font un directeur de la Sûreté à l'intérieur de l'Empire. Cependant,
si l'avis du logothète du drome était très vraisemblablement sollicité sur
les décisions relatives à la politique étrangère et en particulier sur le choix
des ambassadeurs et les instructions à leur donner, il ne fut jamais ambass
adeur, comme le fut parfois le magister officiorum15 . Le cas de Staurakios,
envoyé en ambassade auprès du calife Haroun ar-Rashid en 781, est une
exception16 qui ne se reproduisit qu'à la fin du XIIe siècle.
Grâce aux informations que lui fournissaient ses agents, le logothète
du drome était au courant de tout ce qui se passait sur le territoire de l'Emp
ireet il pouvait renseigner l'empereur sur les événements et sur l'état des
esprits. On conçoit l'importance de pareils renseignements et l'influence
que dut prendre sur les empereurs le personnage qui les apportait. Mieux
que tout autre, le logothète du drome était averti des menées séditieuses
et des complots contre la sûreté de l'Etat et il était amené par la force des
choses à prendre certaines mesures de police générale. Chargé de transmettre
dans les provinces les ordres impériaux et de veiller à leur exécution, le
logothète du drome avait par là certaines attributions qui faisaient de lui
un ministre de l'Intérieur, doublé d'un chef de la Sûreté.
Le logothétat du drome tendait ainsi de plus en plus à devenir un ministère
aux attributions multiples : surintendance des Postes, Affaires Etrangères,
police d'Etat, affaires intérieures, etc. Placé à la tête de tant d'importants
services, le logothète du drome, s'il était un homme expérimenté et énergique,

12. De cer., II, 44 : Bonn I, p. 6617.


13. Ibid., II, 15 : Bonn I, p. 570-571.
14. Dölger, Beiträge, p. 22.
15. D. A. Miller, art. cit., p. 439.
16. Théophane : Bonn, p. 706 = de Boor, p. 45616.
LES LOGOTHÈTES 35

devait nécessairement prendre rang de premier ministre. En fait, divers


logothètes du drome exercèrent les pouvoirs de premier ministre et dir
igèrent souverainement les affaires de l'Etat. Mais il y a lieu de noter qu'à
Byzance le poste de premier ministre n'était nullement attaché à tel ou
tel office ; l'empereur le choisissait et le prenait où bon lui semblait, soit
dans la hiérarchie des fonctionnaires, soit en dehors. L'homme que l'empe
reur avait désigné pour diriger les affaires publiques recevait alors un titre
nobiliaire élevé et était promu à un office, souvent même à plusieurs offices
à la fois, assez disparates.
Parmi les logothètes du drome qui furent en outre premiers ministres,
on peut citer : le patrice eunuque Staurakios sous Irène (797-802), le patrice
Théoctiste sous Theodora régente (842-856), Stylien Zaoutzès magistros
sous Léon VI (886-912), Léon Phokas patrice sous Nicéphore II Phokas
(963-969), Jean eunuque sous Constantin IX Monomaque (1042-1054),
Nicéphoritzès sous Michel VII Doukas (1071-1078)17. Si plusieurs logo
thètes du drome devinrent premiers ministres, c'est à la faveur des empereurs
plus qu'à la nature de leurs fonctions qu'ils le durent. Beaucoup d'entre
eux restèrent confinés dans leurs attributions spéciales sans s'élever au
faîte du pouvoir. Si un logothète du drome premier ministre avait les pouv
oirs les plus étendus, un simple logothète du drome n'avait que les pouvoirs
afférents à son office : service des Postes, Affaires Etrangères, police d'Etat.
Nombreux furent les hommes d'Etat qui dirigèrent en maîtres presque ab
solus les affaires publiques, sans solliciter l'office de logothète du drome,
car les empereurs se contentaient de placer à ce poste important un person
nageà leur dévotion. Ni Joseph Bringas, ni Romain Lécapène, ces deux
puissants ministres du Xe siècle, ne furent logothètes du drome. Les pré-
posites, les parakimomènes et les protovestiaires, hommes de confiance des
empereurs, avaient plus de chance d'obtenir le poste de premier ministre
que les logothètes du drome.
Le premier ministre avait le soin de diriger de haut la politique extérieure
de l'Empire ; son principal collaborateur pour les Affaires Etrangères était
le logothète du drome. Ce dernier n'avait pas pour mission de conclure
des traités ou de sceller des alliances, mais il était chargé de recevoir les
ambassadeurs, ce qui lui permettait d'exercer une action diplomatique et
d'indiquer au premier ministre la ligne de conduite à suivre. D'autre part,
le premier ministre avait le soin de veiller à la sûreté du souverain et de
l'Etat. Sans doute avait-il à son service un grand nombre d'informateurs
et d'agents, chargés des missions de haute police, mais le meilleur de ces

17. Voir plus loin les notices consacrées à ces logothètes du drome.
36 R. GUILLAND

agents était certainement le logothète du drome, que son nombreux per


sonnel tenait au courant des moindres rumeurs et des plus récentes nouv
elles.
Comme directeur des Postes, le logothète du drome avait une grande
importance, car la Poste était l'auxiliaire indispensable de la diplomatie.
Le service des Postes comportait deux régimes : un transport lent (πλατύς )
et un transport rapide (οξύς) de la correspondance. L'utilisation de ce
dernier était contrôlé strictement par un système d'autorisations (σύνθημα),
délivrées théoriquement par l'empereur, en fait par les hauts fonctionnaires
des Postes et dans certains cas par le logothète du drome lui-même18. Le
courrier rapide était en général réservé à la transmission des ordres impé
riaux et des documents financiers. Pour assurer ce service, le logothète
du drome avait dans ses bureaux des courriers (διατρέχοντες, cursores) et
des μανδάτορες19, dont la fonction n'est pas très bien connue et qui étaient,
semble-t-il, ou des courriers chargés de transmettre les ordres de l'empereur
ou de ses représentants, ou des inspecteurs (έπισκεπτηται ) chargés de
surveiller l'état et l'organisation des routes, ainsi que le parc des animaux
et le parc des voitures, affectés au service de la Poste20. En tout cas, διατρέ
χοντες et μανδάτορες ne désignent pas des fonctionnaires identiques et chargés
des mêmes fonctions.
Chargé de la direction des Affaires Etrangères, le logothète du drome
était tenu, par la force des choses, d'assurer la sécurité intérieure, en sur
veillant non seulement les indigènes mais aussi les étrangers, quels qu'ils
fussent. Ainsi s'explique la présence dans sa τάξις ou officium d'inspecteurs
(έπισκεπτηται) chargés de surveiller la circulation dans l'Empire et succes
seurspeut-être des agentes in rebus. Chargé de plus de recevoir les princes
et ambassadeurs étrangers, il était tenu de les protéger et de les surveiller.
A la haute époque, le maître des offices était chargé de la même mission21.
Il existait à Byzance, sous l'autorité du maître des offices, un bureau spé
cial, chargé de tout ce qui avait trait aux relations de Byzance avec les peu
ples barbares. Ce bureau était appelé le Bureau des Barbares (το σκρίνιον
των βαρβάρων)22, mentionné en 441 dans une constitution de Théodose II,
adressée au magister officiorum23. Son chef portait le nom de ό βάρβα-

18. D. A. Miller, art. cit., p. 443.


19. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 718.
20. D. A. Miller, art. cit., p. 443-444.
21. De cer., I, 89-90 : Bonn I, p. 398-410.
22. Ibid., I, 89 (Bonn I, p. 4008) : εν τφ σκρινίω των βαρβάρων.
23. Bury, Adm. System, p. 93.
LES LOGOTHÈTES 37

ρος24. A ce bureau étaient attachés divers fonctionnaires : des chartulaires


ou archivistes (du Bureau) des Barbares (ol χαρτουλάριοι των βαρβάρων)25,
un όπτίων των βαρβάρων26, chargé de fournir aux ambassadeurs les objets
nécessaires et de régler leurs dépenses, et des interprètes (έρμ,ηνευταί)27.
Les notes concernant les frais relatifs aux ambassades étaient conservées
au Bureau des Barbares28. A une époque qu'il est difficile de préciser, le
Bureau des Barbares passa sous la direction du logothète du drome.
Le Bureau des Barbares n'est pas mentionné par Philothée dans son
Klètorologe. Il existe encore très certainement. Philothée mentionne par
contre ό βάρβαρος29 ; Γέπί των βαρβάρων est très vraisemblablement iden
tique à lui30. Le Bureau des Barbares surveillait les étrangers et, en parti
culier, le corps diplomatique résidant à Constantinople, mais aussi les
étrangers se trouvant dans le territoire de l'Empire. Le contrôle de l'activité
des étrangers explique le contrôle exercé par le logothète du drome sur tout
bateau qui quittait Constantinople. Depuis le VIe siècle, ce contrôle était
fait par l'éparque, qui dépendait du magister officiorum31 . Mais, à la fin
du Xe siècle, le chrysobulle de mars 99232, en faveur des Vénitiens, les
mettait sous la juridiction du logothète du drome en ce qui concernait la
visite des bateaux et de leur cargaison, la perception des taxes et les procès
relatifs aux achats de marchandises byzantines.
Les relations avec l'étranger, extérieures et 'intérieures^ exigeaient la
collaboration d'interprètes. Et, de fait, le logothète du drome comptait
dans son officium un corps d'interprètes (έρμηνευταί, interprètes diver sarum
gentium) qui existait depuis longtemps33 et qui dépendait du magister
officiorum. Le corps des interprètes était rattaché au Bureau des Barbares.
Mais à côté de ces interprètes fonctionnaires, le logothète du drome avait
recours à des interprètes auxiliaires : citoyens bilingues comme les Armén
iens ou les Arabo-Ethiopiens, marchands et frontaliers, immigrants et

24. De cer., Appendix : Bonn I, p. 461 4 ; II, 52 : p. 7255. Il existait à Byzance une
maison dite οίκος του βαρβάρου {De administrando imperio, 43 : Bonn, p. 185 = Moravc-
sik-Jenkins, p. 19067), qui avait été peut-être occupée jadis par le βάρβαρος.
25. De cer., I, 89 : Bonn I, p. 40415-16.
26. Ibid. : p. 401 6.
27. Ibid. : p. 40416 et passim.
28. Ibid. : p. 400.
29. Ibid., Π, 52 : p. 725*.
30. Plusieurs sceaux des επί των βαρβάρων nous sont parvenus dont 6 de Stau-
rakios, protospathaire, et un de Pierre, protospathaire et επί των βαρβάρων (Schlum-
berger, Sigillographie, p. 448-449).
31. Procope, Anecdota, 25 : Bonn III, p. 138-142.
32. Dölger, Regesten, n° 781.
33. Notitia Dignitatum Or., XI, 52.
38 R. GUILLAND

alliés, prisonniers de guerre même34. Au Xe siècle, les interprètes étaient


nombreux, étant donné le nombre de pays en rapports avec l'Empire
byzantin. Au reste, il faut noter que la connaissance des langues étrangères
était très développée aussi bien dans la capitale que dans tout l'Empire35.
L'importance numérique des interprètes varia avec les époques, suivant les
nations avec lesquelles l'Empire était en relations. Au VIe siècle, on avait
surtout besoin d'interprètes de persan, de hunnique ou turc, de dialectes ge
rmaniques ; au VIIe siècle, d'arabe ; à partir des VIIIe-IXe siècles, de langues
slaves. Quant au latin, sa connaissance était allée se perdant dès le IXe
siècle ; Photius lui-même l'ignorait36. L'importance du corps des inter
prètes pour l'Empire byzantin est évidente. Les interprètes ne se contentaient
pas de traduire les lettres reçues de l'étranger ou celles qui y étaient adres
sées,ils accompagnaient les envoyés officiels au delà des frontières et jouaient
surtout un rôle important lors de la réception des ambassadeurs. Les his
toriens mentionnent rarement des interprètes. On peut citer cependant,
au Xe siècle, l'interprète d'arabe Thomas en 913, les interprètes d'arménien
Krinitès et Théodore à la même époque37. Le titre porté par Krinitès,
protospathaire, indique la considération attachée à leur fonction38.
L'officium du logothète du drome révèle la complexité des tâches qu'il
devait mener à bien. Il était composé comme suit.
1. Le protonotaire du droilte (ό πρωτονοτάριος του δρόμου) était le principal
collaborateur du logothète du drome. A la haute époque, le protonotaire,
primicerius notariorum, était le chef des notaires ou secrétaires chargés de
prendre note des actes et délibérations du Conseil impérial ; ils jouaient
le rôle de Secrétaires d'Etat. Il tenait le registre des fonctionnaires publics
inscrits au service de l'Etat ; il était même chargé parfois de lire les messages
de l'empereur39. Au Xe siècle, les grandes administrations civiles avaient
leurs notaires et certaines d'entre elles leur protonotaire. C'était le cas du
logothète du drome40, comme du logothète des troupeaux41. Le protonot
aire du drome, contrairement à ce qu'indique son titre, n'a pas de notai-

34. D. A. Miller, art. cit., p. 450, 452.


35. Bréhier, Institutions, p. 302.
36. Ibid., p. 302. D. A. Miller, art. cit., p. 449-450.
37. Ibid., p. 454.
38. R. Guilland, Etudes sur l'histoire administrative de l'Empire byzantin. Titres
et offices du Bas-Empire. Le grand interprète, EEBS 36, 1968, p. 17-26.
39. D. Serrigny, Droit public et administratif romain du IVe au VIe siècle, I, Paris
1872, p. 111.
40. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 71 813.
41. Ibid. : p. 71 819. C'était également le cas du chartulaire du sakelliou (ibid., p.
71910), du grand curateur (ibid., p. 7204) et du curateur des Manganes (ibid., p. 7209).
LES LOGOTHÈTES 39

res42 : il en était de même du logothète des troupeaux43. Le rôle du protonot


aire du drome au Xe siècle est assez mal connu. Il n'apparaît que deux fois
dans le Livre des Cérémonies, où il a un rôle cérémonial relatif aux étran
gers. Il présente les prisonniers de guerre lors de la cérémonie du triomphe44
et il remet à Ράρχων de Taron les présents de l'empereur45 : le kaniskion
qui les contient. Cependant, la présence d'un protonotaire dans l'officium
du logothète du drome s'explique par la mission de surveillance de ce der
nier sur les étrangers se trouvant dans l'Empire. Les protonotaires, en effet,
semblent avoir été plus spécialement affectés au service des provinces.
Les protonotaires d'Asie et de Phrygie, affectés à l'officium du logothète
des troupeaux46, et les protonotaires de thèmes de l'officium du chartu-
laire du sakelliou47 étaient certainement des fonctionnaires provinciaux,
les protonotaires de thèmes étant les chefs de l'administration civile du
thème48. Les protonotaires du grand curateur et du curateur des Manganes49
dirigeaient vraisemblablement les établissements qui se trouvaient dans
les provinces. Le service du logothète du drome le mettait nécessairement en
rapport avec les provinces. Il y a lieu de noter que le chartulaire du sakel
liouet les deux curateurs avaient à la fois des protonotaires et des notaires
impériaux50, mais que le chartulaire du vestiaire, l'eidikos et le prôtasè-
krètis n'avaient que des notaires impériaux51. La raison de ces distinctions
n'apparaît pas clairement ; il semble cependant que seules les administrat
ions qui avaient des ramifications dans les provinces avaient des proto
notaires. Certaines grandes administrations civiles, comme celles de l'épar-
que, du questeur et du logothète du génikon n'avaient ni protonotaire ni
notaires52.
Fonctionnaires importants, les protonotaires sont souvent mentionnés
par les historiens. Sous Michel III (842-867), pendant une course dans laquell
e l'empereur luttait avec le logothète du drome, Constantin, le protonot
aire du drome, tenait l'office de combinographe ; averti par un messager
d'une incursion arabe, il présenta, tout bouleversé, à l'empereur la lettre

42. Ibid. : p. 71 812-15.


43. Ibid. : p. 71818-21.
44. Ibid., II, 19 : p. 60921, 61 33.
45. Ibid., I, 25 : p. 13822 ; II, 15 : p. 5695.
46. Ibid., II, 52 : p. 71 830.
47. Ibid. : p. 71912.
48. Léon le Philosophe, Tactica, const. IV, 31.
49. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 720.
50. Ibid. : p. 71 911, 7205"6.
51. Ibid. : p. 7191β< 24, 7202-3.
52. Ibid. : p. 717-718.
40 R. GUILLAND

annonçant la fâcheuse nouvelle53. Au XIe siècle, on peut citer le protonot


aire du drome Constantin. Après la mort de Constantin IX Monomaque
(1054), son premier ministre Jean, logothète du drome, aidé du protonotaire
du drome Constantin et du chartulaire du caniclée Basile, essaya de faire
proclamer empereur Nicéphore Proteuôn54. A la même époque, diverses
lettres de Michel Psellos sont adressées à des protonotaires du drome :
au juge des Cibyrrhéotes, ancien protonotaire du drome55, à Eustrate
Choirosphaktès, magistros et protonotaire du drome56, à Jean, ostiaire et
protonotaire du drome57. On notera l'importance qu'avait alors le proto
notaire du drome en constatant qu'Eustrate Choirosphaktès portait le
titre élevé de magistros. Au XIIe siècle, sous Manuel Ier Comnène (1143-
1180), Jean Poutzès, protonotaire du drome avant d'être promu grand
logariaste58, est présent au synode de 1157 avec le titre de sébaste59. Vers
1180, Basile Kamatèros, logothète du drome, semble avoir été le même
personnage que Basile Kamatèros qui assiste au synode de 1166 en qualité
de protonotaire du drome60. Sous Andronic Ier Comnène (1183-1185),
le protonotaire du drome, sans doute sur l'ordre de son chef hiérarchi
que, le logothète (du drome) Stéphane Hagiochristophoritès, intervient dans
les jugements de condamnation des adversaires d'Andronic Ier Comnène61.
Le protonotaire par excellence était le protonotaire du drome et pour cette
raison il était le plus souvent désigné simplement sous le nom de proto
notaire, sans autre indication. Au Xe siècle, il figure dans l'ordre des spa-
thaires et il a la préséance sur les protonotaires et sur les notaires impériaux
qui ont, d'ailleurs, la préséance sur les protonotaires des curateurs et des
thèmes62.
2. Les chartulaires du drome {61 χαρτουλάριοι του δρόμου ou, plus exacte
ment, χαρτουλάριοι του οξέου δρόμου)63. Ils semblent être d'une part les
successeurs des curiosi per omnes provincias et peuvent être d'autre part

53. Théophane Cont. : Bonn, p. 198. Cedrenus : Bonn II, p. 175. Glycas : Bonn,
p. 542.
54. Cedrenus : Bonn II, p. 610.
55. Psellos, Epîst. 107 : Sathas, MB 5, p. 351.
56. Id., Epist. 124 : ibid., p. 372.
57. Id., Epist. 125 : ibid., p. 373.
58. Nicétas Chômâtes : Bonn, p. 73-74.
59. F. Chalandon, Les Comnènes, II, p. 642.
60. Ibid., p. 649.
61. Nicétas Chômâtes : Bonn, p. 437.
62. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 735-736.
63. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 78822 (τοϋ όξέου). Cf. De administrando imperio, 43 :
Bonn, p. 184 = Moravcsik-Jenkins, p. 19037 (του οξέως).
LES LOGOTHÈTES 41

identifiés avec les χαρτουλάριοι των βαρβάρων64. Ils s'occupaient, au


point de vue administratif, de toute affaire concernant les étrangers. Ils
pouvaient aussi être chargés de missions diplomatiques auprès de princes
étrangers65. Ils étaient secondés dans leur fonction par des notaires, bien
que ceux-ci ne soient pas mentionnés par Philothée, mais leur existence est
prouvée par des sceaux, comme celui de Léon66. Bien qu'étant des fonc
tionnaires de second plan, les chartulaires du drome sont parfois cités.
Ainsi Léon VI (886-912) envoie en mission à l'archonte de Taron l'eunuque
Sinutès, alors χαρτουλάριος του οξέως δρόμου, qui, devenu suspect, fut
remplacé par le protospathaire Constantin, domestique της τραπέζης67. Un
chrysobulle de Michel VII Doukas, d'octobre 1074, mentionne des chartul
airesdu drome68.
3. Les inspecteurs (έπισκεπτηται). Us étaient vraisemblablement chargés
de la police de la route et des frontières ainsi que de la surveillance des
étrangers. L'éparque, le grand curateur et le logothète des troupeaux avaient
eux aussi leurs inspecteurs. Il nous est parvenu quelques sceaux d'inspect
eurs, mais leurs titres ne sont pas assez précis ; ainsi le sceau d'Epiphane,
βασιλικοί) έπισκηπτίτου Ποδαντοΰ69. Les έπισκεπτηται sont peut-être
les successeurs des curiosi, mais on ne saurait l'affirmer70.
4. Les interprètes (έρμηνευταί)71.
5. Le curateur de V Apokrisiareion (6 κουράτωρ του Άποκρισιαρείου)72. Il
administrait probablement le palais où étaient reçus les ambassadeurs
(άποκρισιάριοι) ; ainsi au VIe siècle, le palais de Placidia recevait les apo-
crisiaires du pape73. Il est vraisemblable que le curateur de l 'Apokrisia
reion contribuait aussi à la surveillance des ambassadeurs, comme portent
à le croire les doléances de l'ambassadeur Amalarius de Metz au IXe siècle
et au Xe siècle celles de Liutprand de Crémone74, se plaignant du zèle trop
inquisiteur de ses subordonnés. On ignore l'endroit exact où se trouvait
l'Apokrisiareion. Liutprand déclare qu'il se trouvait éloigné du Grand

64. Bury, Adm. System, p. 92.


65. Bréhier, Institutions, p. 302.
66. Bury, Adm. System, p. 93.
67. De administrando imperio, 43 : Bonn, p. 183-185 = Moravcsik- Jenkins, p. 19036"40.
68. MM 5, p. 13812.
69. Schlumberger, Sigillographie, p. 315 (Epiphane), p. 511-512 (Les épiskeptites).
70. Bréhier, Institutions, p. 302.
71. Voir notes 33-34, p. 37-38.
72. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 71 814.
73. Fliche-Martin, Histoire de l'Eglise, IV, p. 537. Sur le palais de Placidia, cf.
R. Janin, Constantinople byzantine3, p. 135.
74. D. A. Miller, art. cit., p. 447.
42 R. GUILLAND

Palais et qu'on apercevait de là la flotte dans son bassin. Il se pourrait dans


ces conditions que le palais se soit trouvé dans le quartier des colonies
italiennes, sur la Corne d'Or75. La présence d'interprètes dans l'oificium
du logothète du drome suggère à Dölger l'hypothèse que la κουρατωρεία
de l'Apokrisiareion n'est autre que le σκρίνιον των βαρβάρων sous un
autre nom76. C'est possible, mais pas certain. Philothée n'indique pas le
rang du curateur de l'Apokrisiareion dans la hiérarchie aulique, mais,
étant donné sa fonction, il est vraisemblable qu'il était spathaire.
6. Des courriers (διατρέχοντες)77.
7. Des appariteurs (?) (μανδάτορες)78, dont on ne connaît pas la fonction
exacte, mais qui, très certainement, avaient une fonction différente de celle
des courriers.
Conseiller intime de l'empereur et ministre des Affaires Etrangères, il
est naturel que le logothète du drome ait pris une part importante dans les
cérémonies du Grand Palais. Le logothète était le premier fonctionnaire
introduit auprès de l'empereur à son lever79. On va le chercher dans les
asèkrèteia pour le mener au Chrysotriklinos. Lorsque l'empereur doit
prononcer un discours à la Magnaure, il est entouré du logothète du drome,
du prôtoasèkrètis et du protonotaire80. Il attend l'empereur à son passage
soit au Grand Palais, soit aux Blachernes81. Le logothète du drome a le
privilège de monter dans le vaisseau impérial, privilège qu'il partage avec
le prôtoasèkrètis, le maître des requêtes et le drongaire de la Veille82, ainsi
qu'avec le mystique, le drongaire de la flotte, le domestique des scholes, le
parakimomène et le protovestiaire83.
Lorsque l'empereur sort à cheval du Grand Palais, le logothète du drome
figure dans l'escorte ; il porte le sagion de pourpre et il est à cheval84. Il
préside à la promotion des hauts fonctionnaires d'ordre civil ou militaire85.
Π prend part aux cérémonies du triomphe, où il joue un rôle important (il
présente les prisonniers) et où il est assisté du protonotaire du drome86.

75. D. A. Miller, art. cit., p. 447.


76. Dölger, Beiträge, p. 22, n. 3.
77. De cer., II, 52 : Bonn Ι, ρ. 78618~19.
78. Ibid. : p. 78619.
79. De cer., II, 1 : Bonn I, p. 520-521.
80. Ibid., II, 10 : p. 546.
81. Ibid.,1, 1 : p. 914 ; II, 9 : p. 54418.
82. Ibid., II, 13 : p. 560.
83. De administrando imperio, 51 : Bonn, p. 234 = Moravcsik-Jenkins, p. 24629"31.
84. De cer., I, 10 : Bonn I, p. 82?-8.
85. Ibid., II, 3 : p. 525-526.
86. Ibid., II, 19 : p. 60921 ; II, 20 : p. 61 33.
LES LOGOTHÈTES 43

Mais son rôle le plus important au Grand Palais est la réception des
ambassadeurs. Il a hérité ce rôle du maître des cérémonies (επί της κα
ταστάσεως)87. Assisté de divers officiers, il introduit les ambassadeurs
étrangers88. Sous Michel III déjà, au IXe siècle, le logothète (du drome)
accompagne une délégation de Slaves venant faire leur soumission à l'em
pereur89. Assisté du maître des cérémonies, dont le rôle s'efface devant celui
du logothète du drome lors de la réception des ambassadeurs étrangers,
et des préposites, le logothète du drome dirige les préparatifs de la réception
solennelle des ambassadeurs90. C'est lui qui pose aux ambassadeurs les
questions d'usage et qui fait présenter par le protonotaire du drome à
l'empereur les présents apportés par les ambassadeurs91. Lors de la récep
tiondes ambassadeurs, le logothète du drome portait le lôros92 ; il assis
tait aux dîners donnés en leur honneur et revêtait à cette occasion le cos
tume à médaillon du souverain, le spékion93.
L'importance des fonctions du logothète du drome fait qu'il est souvent
désigné sans son appellation de logothète94, ce qui prouve combien la
fonction financière avait perdu d'importance au profit des fonctions de
ministre des Affaires Etrangères. Il est l'un des trois hauts fonctionnaires
qui forment un groupe souvent mentionné dans le Livre des Cérémonies :
logothète du drome, prôtoasèkrètis, protonotaire95. Dans le Klètorologe
de Philothée, le logothète du drome occupe le 37e rang dans la hiérarchie96
et rentre dans la classe des secrétaires97. Il peut aspirer aux plus hauts
titres nobiliaires : anthypatos-patrice, patrice, protospathaire, magistros,
prôtomagistros98. Deux historiens arabes du Xe siècle, Ibn Hauqal et
Biruni, confirment le haut rang du logothète du drome en écrivant qu'il est

87. D. A. Miller, art. cit., p. 459.


88. De cer., I, 24 : Bonn I, p. 138 ; II, 15 : p. 56823, 5883.
89. Ibid., II, 37 : p. 6351.
90. Ibid., II, 15 : p. 56716.
91. Ibid., I, 24 : p. 138 ; Π, 15 : p. 568-569, 595 ; II, 47 : p. 680-681.
92. Ibid., II, 15 : p. 57716.
93. Ibid. : p. 5858. Cf. D. A. Miller, art. cit., p. 459-460 : description détaillée d'une
ambassade d'après le Livre des Cérémonies.
94. De cer., l, 7 : Bonn I, p. 246a ; II, 1 : p. 5206~7. Théophane Cont. : Bonn, p.
1223. Cf. A. Vogt, Basile /"..., p. 164.
95. De cer., I, 1 : Bonn I, p. 719~20 (où figure en outre le chartulaire du caniclée) ;
I, 21 : p. 1232-3.
96. Ibid., II, 52 : p. 71 323.
97. Ibid. : p. 71 517.
98. Ibid., I, 47 : p. 2403 ; II, 52 : p. 72819, 73116. Cf. D. A. Miller, art. cit., p. 462-463.
44 R. GUILLAND

le second après l'empereur". Ses subordonnés obtenaient en général des


titres nobiliaires assez élevés, comme celui de spathaire100.
On peut dire que c'est au Xe siècle que la puissance et l'importance du
logothète du drome sont les plus grandes101. En effet, aux XIe et XIIe
siècles, l'importance du logothète du drome diminue. Sans doute avec
l'établissement des colonies italiennes dans l'Empire, il continue à rester
compétent pour juger les procès entre les sujets de l'Empire et les étrangers,
s'il y a eu mort d'homme102. Mais ses services sont réduits. Il ne figure
plus parmi les fonctionnaires des Finances et ses chartulaires sont classés
parmi les fonctionnaires inférieurs103. Il n'a plus de rapports, d'autre part,
avec le scrinium Barbarorum, comme le prouve l'existence, au XIIe siècle,
d'un grand interprète (μέγας διερμηνευτής), directeur du service de l'inter
prétariat, devenu indépendant104.
Le logothétat du drome fut-il exercé au XIIe siècle en collégialité ? Cette
hypothèse fut avancée par E. Stein pour expliquer la mention à la même
date de deux logothètes : Jean Doukas et Dèmètrios Tornikès105. F.
Dölger estime que la collégialité de la charge ne s'impose pas106 et il s'ap
puie sur le chrysobulle d'Isaac II pour Venise, en date de juin 1189, qui est
connu seulement dans sa rédaction latine107 ; dans ce texte, archicanceî-
larius équivaut selon Dölger à grand logothète et désigne Jean Doukas
comme le plus ancien en titre ; ce qui laisse supposer que cancellarius est
l'équivalent de logothète du drome108. En fait, l'hypothèse et l'essai
d'explication par le titre de grand logothète deviennent inutiles, car ils
reposent sur une double confusion. Il est étonnant qu'on cite toujours
comme concurrent de Jean Doukas Dèmètrios Tornikès, d'après l'acte
de 1188, alors que le texte porte Constantin Tornikès109 ; mais une fois
connue la parenté entre Dèmètrios et Constantin, celui-ci étant le fils qui
succède à son père dans la charge, il appert aussi que l'acte de décembre,

99. D. A. Miller, art. cit., p. 467.


100. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 7355-6.
101. D. A. Miller, art. cit., p. 463-464, où l'on trouvera l'avis, entre autres, de Beck,
Boak, Bréhier, Dölger et Ostrogorsky sur l'importance du logothète du drome.
102. Dölger, Regesten, n° 1647.
103. MM 6, p. 48.
104. D. A. Miller, art. cit., p. 452.
105. E. Stein, Untersuchungen zur spätbyzantinischen Verfassungs- und Wirt
schaftsgeschichte, Mitteilungen zur osmanischen Geschichte 2, 1923/25, p. 34-35.
106. Dölger, Beiträge, p. 23, n. 1.
107. Id., Regesten, n° 1590.
108. F. Dölger et J. Karayannopulos, Byzantinische Urkundenlehre, Munich 1968,
p. 63, n. 10.
109. MM 6, ρ. 12316-17.
LES LOGOTHÈTES 45

indiction 7, n'est pas de 1188, mais de 1203 : Constantin succéda en effet à


Dèmètrios en 1201 110. D'autres confusions secondaires entre les divers
Jean qui accédèrent à la charge dans la seconde moitié du XIIe siècle ont
pu accréditer l'hypothèse de la collégialité, mais celle-ci n'a aucun appui
lorsqu'on a rétabli la distinction des personnes et la valeur des dates.
L'office de logothète du drome fut maintenu par les empereurs de Nicée
(1204-1261). Mais l'importance du logothète du drome a encore diminué ;
il a abandonné ses fonctions diplomatiques au grand logothète qui est
devenu le conseiller intime de l'empereur pour la politique extérieure et
intérieure. L'office de logothète du drome tend alors, comme la plupart
des offices, à devenir plus honorifique que réel. Ainsi s'explique le peu de
mentions que font les historiens de cet office pendant cette période.
Les Paléologues de retour à Constantinople ne modifièrent pas dans ses
grandes lignes la hiérarchie des offices. Le logothète garde son rang, d'ail
leurs modeste. Jadis, le logothète par excellence était le logothète du drome ;
aux XIIIe-XVe siècles, c'est le grand logothète, les autres n'étant plus guère
que des dignitaires de second ou de troisième plan. A la fin du XIIP siècle,
en 1299, le logothète du drome Métrètopoulos confirme au monastère athonite
de Chilandar la possession de certaines terres et certains privilèges111 et
le futur patriarche Jean Glykys (1315-1319)112 est encore cité avec le titre
de logothète du drome ; mais il semble qu'il soit le dernier personnage
mentionné avec ce titre. Le Ps.-Codinus, en effet, connaît son rang hiérar
chique, le 27e 113 ; il décrit son uniforme (skiadion, turban, épilourikon,
mais sans skaranikon)114, mais il déclare que le logothète « avait jadis un
service qui nous est inconnu ; maintenant il n'en a aucun »115. Le titre
est devenu purement honorifique.

Les historiens et les chroniqueurs nous ont conservé un assez grand


nombre de noms de logothètes du drome1.

110. J. Darrouzès, Georges et Dèmètrios Tornikès. Lettres et discours, Paris 1970,


p. 34. Voir ci-dessous les notices de Dèmètrios et Constantin Tornikès.
111. Dölger, Regesten, n° 2210.
112. Grégoras, VI, 7 : Bonn I, p. 1933. Sphrantzès, 31 : Bonn, p. 20.
113. Pseudo-Codinus : Bonn, p. 107 = Verpea.ux, p. 1388.
114. Id. : p. 2213"15 = p. 15912^16.
115. Id. : p. 368-9 = p. 17824-27.
1. Il n'est pas question de donner ici une liste exhaustive des logothètes du drome.
On trouvera une liste des logothètes du drome dans A. Müller, Das Amt des Logotheten
in spätrömischer und byzantinischer Zeit, Munich 1914, et dans D. A Miller, The Logot
hète of the Drome in the Middle Byzantine Period, Byz. 36, 1966, p. 463-469, pour la
période étudiée par lui (VIIIe-Xe s.). Les notices suivantes sont classées par ordre chro
nologique à l'intérieur de chaque siècle.
46 R. GUILLAND

Vnie siècle

1. léon. Le logothète du drome Léon, fait prisonnier au cours d'une


bataille contre les Bulgares en 762, fut tué en même temps qu'un autre
Léon, patrice et stratège des Thracésiens2.
2. ANTIOCHOS. Parmi les victimes de la persécution iconoclaste,
Théophane mentionne Antiochos, ex-logothète du drome et stratège de
Sicile3. Nicéphore de Constantinople fait également mention d'Antiochos4".
L'explication qu'il donne montre que déjà au VIIIe siècle le directeur des
Postes était chargé d'avertir l'empereur des événements intéressant l'Etat.
3. Grégoire. Le logothète Grégoire prit parti pour Artabasde contre
Constantin V et fut envoyé en 742 solliciter l'appui du calife arabe Yazid5.
Il est vraisemblable que Grégoire était logothète du drome.
4. podopagouros, Constantin. Patrice et ex-logothète du drome, Const
antin Podopagouros fut promené ignominieusement dans l'Hippodrome
et décapité pour crime d'iconolâtrie ou peut-être pour conspiration. Sa
mort émut le peuple qui manifesta ses sentiments de réprobation. Constant
in V destitua l'éparque Procope, qui n'avait pas sévi contre les manifest
ants.Constantin Podopagouros était le frère du patrice Stratègios, domest
iquedes Excubiteurs6. Nicéphore de Constantinople relate le supplice de
Constantin Podopagouros, mais il ne mentionne pas sa qualité de logothète
du drome7.
5. Grégoire. Peu de temps après la mort de Léon IV le Chazare (780),
l'impératrice régente Irène eut à réprimer un complot qui avait pour but
de porter au trône l 'ex-césar Nicéphore. A la tête du complot se trouvait
le logothète du drome, Grégoire. Tous les conjurés furent châtiés et exilés8.
Il est peu probable qu'il s'agisse du logothète Grégoire, qui prit parti pour
Artabasde contre Constantin V9. Il nous est parvenu un sceau de « Gré
goire asèkrètis impérial et logothète du drome », que Schlumberger ident
ifie avec Grégoire10.

2. Théophane : Bonn, p. 664 = de Boor, p. 43 19"10.


3. Id. : p. 676 = p. 43811-!2.
4. Nicéphore, Breviarium (Bonn, p. 83 = de Boor, p. 74U~13) : ό των δημοσίων
πραγμάτων τάς υπομνήσεις διακομίζων (λογο-9-έτην δέ τοΰ δρόμου τήν άξίαν οι περί τα
βασίλεια καλοϋσι).
5. Théophane : Bonn, p. 641 = de Boor, p. 41 610. Cf. Dölger, Regesten, n° 309.
6. Id. : p. 676 = p. 4388-".
7. Nicéphore, Breviarium : Bonn, p. 83 = de Boor, p. 7418~20.
8. Théophane : Bonn, p. 703 = de Boor, p. 454ie.
9. Cf. note 5.
10. Schlumberger, Sigillographie, p. 528.
LES LOGOTHÈTES 47

6. STAURAKios. L'eunuque Staurakios, patrice et logothète του οξέως


δρόμου, fut longtemps le premier et tout-puissant ministre d'Irène11.
Celle-ci lui confia diverses missions délicates. En 781, elle envoya le logo
thète du drome Staurakios, accompagné du magistros Pierre et du domest
iqueAntoine, à Harun ar-Raschid, qui était parvenu jusqu'à Chrysopolis,
pour signer la paix12. Staurakios commanda même des armées. Près d'un
siècle après la création du thème des Helladiques, la Grèce n'était pas
complètement soumise. En 783, Irène, qui était d'origine athénienne,
envoya Staurakios avec une armée qui soumit la Grèce centrale et l'Attique
et parvint jusque dans le Péloponnèse. Il revint à Constantinople avec de
nombreux prisonniers et un énorme butin, ce qui lui valut le triomphe13.
Comme premier ministre d'Irène, Staurakios eut à sévir contre les par
tisans du jeune empereur Constantin VI14. Ce dernier s'étant emparé du
pouvoir, Staurakios fut disgracié, battu de verges et exilé15. Il rentra d'ail
leurs en grâce plus tard et accompagna l'empereur en expédition16. Lors-
qu'Irène reprit le pouvoir, Staurakios eut à lutter contre un rival également
puissant, l'eunuque Aétios, patrice et favori de l'impératrice Irène. Les
deux eunuques s'efforçaient de choisir un candidat au trône dans leur
famille respective17. En 800, Staurakios tenta un coup d'Etat, mais il
échoua à cause des mesures prises par Aétios. Il ne survécut pas à son
échec18. Il est évident que ce n'est pas en sa qualité de logothète du drome
que Staurakios commandait les armées. Mais les empereurs pouvaient
désigner tel personnage de leur choix pour diriger une expédition, sans tenir
compte de la fonction exercée par lui.

IXe siècle

7. HEXABOULios, Jean. Après l'assassinat de Léon V l'Arménien (820),


Jean Hexaboulios, logothète du drome (του δρόμου τους λόγους τηνικαυτα
τι&είς), révéla aux partisans de Michel II, alors enchaîné, que la clé qui

11. Théophane (Bonn, p. 706 = de Boor, p. 45613~14) : πρωτεύοντα πάντων των


τηνικαυτα όντων και τα πάντα διοικούντα.
12. Dölger, Regesten, n° 340.
13. Théophane : Bonn, p. 707 = de Boor, p. 45625~29. Cedrenus : Bonn II, p. 21.
Léon Grammaticus : Bonn, p. 194.
14. Théophane : Bonn, p. 719-720 = de Boor, p. 464-465.
15. Id. : p. 723 = p. 46627-28.
16. Id. : p. 730 = p. 47121.
17. Id. : p. 733-734 = p. 473-474.
18. Id. : p. 735-736 = p. 474-475.
48 R. GUILLAND

fermait les chaînes se trouvait dans la poche de l'empereur assassiné1. Il


était patrice et conserva peut-être ses hautes fonctions sous le règne de
Michel II (820-829), car on le voit conseiller l'empereur dans une affaire
d'Etat2. Il avait été jadis l'un des familiers de Michel Ier Rhangabé (811-
813)3 et Léon V l'Arménien le tenait en estime, comme un serviteur loyal
et expérimenté. C'est à lui qu'il avait confié la mission de veiller sur les
agissements de Michel le Bègue4. Il était chargé sous Michel Ier Rhangabé
de la surveillance des Murs, autrement dit il était comte des Murs5.
8. myron. Le logothète du drome Myron était le beau-père de Pétronas,
frère de l'impératrice Theodora. Il dénonça à l'empereur Théophile (829-
842) l'illustre stratège Manuel comme suspect d'aspirer au trône. Bien que
défendu par le protovestiaire Léon, Manuel dut fuir en Syrie. Peu après,
Théophile le rappelait, le titrait magistros et le nommait domestique des
scholes6. Il semble bien que ce fut ce même Myron, logothète, qui fut chargé
avec Pétronas de faire procéder à l'exécution de Théophile7.
9. théoctiste était un fidèle serviteur de la dynastie amoréenne. C'est lui
qui s'entremit pour sauver Michel le Bègue condamné à mort. Sous prétexte,
en effet, de chercher un prêtre pour Michel accusé de haute trahison et
devant être exécuté le lendemain, il sortit du Grand Palais pour convoquer
les conjurés sur les instructions de Michel. Ce dernier était alors domestique
des Excubiteurs8. Il est possible que Théoctiste appartînt au corps de la
Garde. Devenu empereur, Michel II récompensa Théoctiste en le titrant
patrice et en le nommant chartulaire du kanikleion9. Théoctiste resta en
faveur sous Théophile (829-842) qui le nomma logothète du drome, tout en
le laissant à la tête de la chancellerie10. Théophile le désigna même comme
tuteur du jeune empereur Michel III11. De même qu'il avait été fidèle à
Théophile, de même le fut-il à sa veuve, l'impératrice Theodora, sur laquelle
il exerça une grande influence. Théoctiste gouverna en réalité l'Etat comme

1. Genesius : Bonn, p. 30.


2. Id. : p. 44. Cedrenus : Bonn II, p. 89. Zonaras : Bonn III, p. 346.
3. Genesius : Bonn, p. 5.
4. Id. : p. 20.
5. Id. : p. 5.
6. Théophane Cont. : Bonn, p. 632, 796, 798. Léon Grammaticus : Bonn, p. 218.
7. Théophane Cont. : Bonn, p. 810.
8. Genesius : Bonn, p. 23.
9. Théophane Cont. : Bonn, p. 38. Genesius : Bonn, p. 38. Zonaras : Bonn III,
p. 390.
10. Genesius : Bonn, p. 83. Cedrenus : Bonn II, p. 129.
11. Théophane Cont. : Bonn, p. 148. Genesius : Bonn, p. 77.
LES LOGOTHÈTES 49

premier ministre12. Zonaras qualifie en effet Théoctiste de παραδυναστεύων13.


Le 20 novembre 855, une révolution de palais termina la carrière de
Théoctiste qui fut assassiné à l'instigation du césar Bardas, oncle de Michel
III14.
D'après le Continuateur de Théophane, Théoctiste aurait été eunuque15.
Ce renseignement est confirmé par l'écrivain arabe Tabari16, qui parle d'un
kanikleios eunuque. Comme il s'agit des événements de 855-856, on peut
affirmer que le fonctionnaire en question était Théoctiste. Toutefois Géné-
sios17 donne un renseignement un peu différent. Le césar Bardas, d'après
lui, voulant convaincre le jeune empereur Michel III que Théoctiste était
dangereux pour lui, prétendit que Theodora avait l'intention de l'épouser ou,
tout au moins, de lui donner l'une de ses filles pour femme ; il lui serait
ainsi facile de s'emparer du trône. Le désespoir de Theodora, en apprenant
la nouvelle de la mort de son favori, donne quelque créance à cette alléga
tion18.
Théoctiste commanda deux expéditions contre la Crète, sans succès19. Il
s'était fait construire une maison avec bains et jardin dans l'Abside, à
l'intérieur du Grand Palais, de manière à être à proximité des bureaux
impériaux20. Il avait, dans la ville, un palais qui fut transformé en couvent,
sous le nom de τα Κανικλείου21. C'est dans ce couvent que furent enfermées
l'impératrice Sophie, femme de l'empereur Christophore Lécapène, et les
cinq sœurs de Romain II22. C'est également là que furent gardées, sur l'ordre
de Nicéphore III Botaniate, les parentes des Comnènes en 108 123.
Après la mort de Théoctiste, la fonction de logothète du drome semble
avoir perdu de son importance24. Théoctiste était logothète du drome et
préposé à la chancellerie. Or, à sa mort, les deux fonctions étant devenues

12. Genesius : Bonn, p. 83. Cedrenus : Bonn Π, p. 139.


13. Zonaras : Bonn III, p. 381 = Dindorf III, p. 41817"18.
14. Théophane Cont. : Bonn, p. 657. Genesius : Bonn, p. 86-90. Cedrenus : Bonn
II, p. 157-158; cf. BZ 24, 1954, p. 13.
15. Théophane Cont. : Bonn, p. 148.
16. F. Dvornik, Les légendes de Constantin et de Méthode vues de Byzance, Prague
1933, p. 36-37.
17. Genesius : Bonn, p. 87.
18. Théophane Cont. : Bonn, p. 169, 657. Cedrenus : Bonn Π, p. 157-158.
19. Théophane Cont. : Bonn, p. 654, 814-815.
20. Id. : p. 815-816. L'Abside faisait communiquer le palais de Daphnè au Grand
Palais sacré. Cf. R. Guilland, Etudes de topographie de Constantinople byzantine,
Berlin- Amsterdam 1969, I, p. 96 et passim (voir Index topographique).
21. Patria CP : Preger II, p. 248. Cf. R. Janin, Constantinople byzantine2, p. 365-366.
22. Théophane Cont. : Bonn, p. 471.
23. Zonaras : Bonn III, p. 730.
24. D. A. Miller, art. cit., p. 465.
50 R. GUILLAND

vacantes, le césar Bardas se réserva pour lui-même celle de préfet du cani


clée25, ce qui semble indiquer que le préfet du caniclée est regardé comme
supérieur au logothète du drome à ce moment-là.
10. Constantin (maniakès). Officier des Excubiteurs, drongaire de la
Veille, patrice et logothète du drome, Constantin, originaire d'Arménie,
avait été envoyé à Byzance sous le règne de Théophile (829-842), qui l'avait
fait entrer dans le corps des Excubiteurs. Pendant la régence de Theodora
(842-856), il était drongaire de la Veille et avait été chargé de chasser le
patriarche Jean le Grammairien de son siège ; il fut nommé plus tard
logothète du drome et titré patrice26. Constantin l'Arménien tenta de
sauver Théoctiste, ministre de Theodora27 ; il s'opposa à l'élection du
patriarche Photius28 et il secourut le patriarche déchu, Ignace29. Il devait
être un personnage important pour être admis aux banquets auxquels
assistaient le césar Bardas et l'élite de la noblesse byzantine30. Il était
alors titré patrice et était le père du patrice Thomas, qui fut plus tard logo
thète du drome31, et de l'historien Génésios32.
Michel III ne dédaignait pas de courir en char avec Constantin dans
l'hippodrome de Saint-Mamas33. C'est pendant l'une de ces courses que
l'on vint annoncer à Michel III une brusque attaque arabe du côté de
Malagina. Michel III écouta cette nouvelle avec indifférence et n'inte
rrompit pas les divertissements. Pour courir, il avait revêtu la casaque du
Bleu ; son adversaire était Constantin, qui représentait le Vert, tandis que
Cheilas représentait le Blanc et Craesos le Rouge. Le prôtoasekretis et le
protonotaire du drome remplissaient l'office de combinographes34. Dans
une autre course, Constantin l'Arménien représentait le Blanc, alors que
Michel III représentait le Bleu, Agalianos le Vert et Craesos le Rouge.
Constantin n'était alors que drongaire de la Veille35. Après l'assassinat du
césar Bardas en avril 866, Constantin, alors drongaire de la Veille, protégea
Michel III contre la fureur des partisans du césar36. A ce moment, c'était

25. Théophane Cont. : Bonn, p. 171.


26. Genesius : Bonn, p. 8112~21.
27. Id. : p. 88-89.
28. Id. : p. 100.
29. Id. : p. 101-102.
30. Théophane Cont. : Bonn, p. 229. Genesius : Bonn, p. 110.
31. Théophane Cont. : Bonn, p. 22910-12.
32. Id. : p. 68116~17. Léon Grammaticus : Bonn, p. 249.
33. Genesius : Bonn, p. 102.
34. Théophane Cont. : Bonn, p. 198. Cedrenus : Bonn II, p. 175. Glycas : Bonn,
p. 542.
35. Théophane Cont. : Bonn, p. 681, 835. Léon Grammaticus : Bonn, p. 249.
36. Théophane Cont. : Bonn, p. 206. Genesius : Bonn, p. 106-107.
LES LOGOTHÈTES 51

Symbatios qui était logothète du drome. Il eut pour successeur Goumer, à


qui succéda vraisemblablement Constantin l'Arménien comme logothète
du drome, en 866 ou 86737. D'après Léon Grammaticus, Constantin
l'Arménien s'appelait Maniakès38. Il s'était lié d'amitié avec Basile, tous
deux étant originaires d'Arménie39.
11. serge. Le logothète du drome Serge ne nous est connu que par deux
lettres du patriarche Photius. Il fut donc logothète pendant le premier
patriarcat de Photius, entre novembre 858 et avant 866, date à laquelle
Symbatios détient ce poste40.
12. symbatios, ou SABBATios. Symbatios, titré patrice et logothète du
drome, était le gendre du césar Bardas41, oncle de Michel III et son premier
ministre. Séduit par les promesses de Basile, le futur empereur, il participa
à l'assassinat du césar Bardas42. Basile lui avait promis de le faire titrer
césar43. Frustré dans ses espérances et voyant grandir la fortune de Basile,
Symbatios jugea sa situation difficile à la Cour ; il se démit de ses fonctions
de logothète du drome et se fit nommer stratège des Thracésiens44. Il fut
remplacé comme logothète du drome par Goumer, le comte de l'Opsi-
kion45. En apprenant le couronnement de Basile, il se souleva, mais la
sédition fut vite réprimée, et il subit le châtiment de sa rébellion. Plus
tard, Basile Ier se montra clément envers lui et ses complices46.
13. goumer. Comte de l'Opsikion, Goumer succéda à Symbatios
comme logothète du drome47. Il n'est pas impossible que Goumer soit le
même que le patrice Goumer (ou Gouber) qui fut chargé, avec divers hauts
personnages, d'instruire le procès du patriarche Photius au début du règne
de Léon VI48.
14. jean. Lors du concile œcuménique ouvert solennellement à Constan-

37. Cedrenus (Bonn II, p. 175) qualifie Constantin de logothète du drome.


38. Léon Grammaticus : Bonn, p. 236.
39. Théophane Cont. : Bonn, p. 229-230.
40. Photius, Epist., III, 2 et 4 : PG 102, 928-929.
41. Cedrenus : Bonn II, p. 180. Les Continuateurs de Théophane l'appellent
δ τοϋ δρόμου τους λόγους διδούς (Bonn, p. 20512~13) ou λογοθέτης τοϋ δρόμου (ρ.
2374~5, 676a).
42. Théophane Cont. : Bonn, p. 205-206, 237-238, 676-679, 828-831. Genesius :
Bonn, p. 106.
43. Théophane Cont. : Bonn, p. 676, 828, 833. Léon Grammaticus : Bonn, p. 247.
44. Théophane Cont. : Bonn, p. 238. Cedrenus : Bonn Π, p. 199.
45. Théophane Cont. : Bonn, p. 833. Léon Grammaticus : Bonn, p. 247.
46. Théophane Cont. : Bonn, p. 240-241, 680-681. Cedrenus : Bonn II, p. 200.
47. Théophane Cont. : Bonn, p. 680, 833. Léon Grammaticus : Bonn, p. 247.
48. Théophane Cont. : Bonn, p. 354-355. Cedrenus : Bonn II, p. 251. Léon Gramm
aticus : Bonn, p. 264.
52 R. GUILLAND

tinople le 5 octobre 869, on note parmi les dignitaires et officiers assistant


aux séances le logothète du drome Jean, patrice, qui ne semble pas connu
par ailleurs49.
15. hagiopolitès, Jean. En montant sur le trône, Léon VI avait à se
venger de Santabarènos et de son protecteur, le patriarche Photius. L'em
pereur se hâta de déposer Photius et il envoya à la Grande Eglise le magis-
tros Andréas, stratèlate, et le magistros Jean Hagiopolitès, ex-logothète du
drome, pour expulser Photius du patriarcat et le conduire dans un monast
ère50. Le procès contre Photius et Santabarènos fut dirigé par de hauts
personnages parmi lesquels figure le magistros Hagiopolitès51. Jean Hagiop
olitès était un homme fort instruit52. Il avait sans doute été logothète du
drome sous Basile Ier.
16. stylianos zaoutzès. Titré magistros et nommé logothète du drome
au début du règne de Léon VI (886-912), Stylianos était le père de Zoè,
maîtresse de l'empereur, ce qui explique sa rapide fortune53. Sous le règne
de Basile Ier (877-886), il était le commandant de la Petite Hétairie et il
devait déjà avoir quelque crédit, puisque c'est sur son intervention que le
jeune empereur Léon VI fut remis en liberté54. Stylianos s'efforça d'amener
le jeune empereur à épouser Zoè et il usa de tous les moyens pour arriver à
son but55. Enfin Léon VI épousa Zoè et la fit couronner impératrice56. Peu
après, Stylianos était créé basiléopator, dignité nouvelle57. Bien que parfois
suspect à l'empereur, il dirigea les affaires de l'Etat jusqu'à sa mort58 ;
il était un véritable vice-empereur. Il mourut au Grand Palais et on lui fit
de splendides funérailles59. Quelques mois plus tard, Zoè suivait son père

49. Mansi 16, 37, 44, 75, 309. Cf. A. Christophilopoulos, Ή Σύγκλητος εις το
βυζαντινον κράτος, Athènes 1949, ρ. 49.
50. Théophane Cont. : Bonn, p. 353-354. Léon Grammaticus : Bonn, p. 263.
Cedrenus : Bonn II, p. 249.
51. Théophane Cont. : Bonn, p. 355. Léon Grammaticus : Bonn, p. 264. Cedre
nus : Bonn II, p. 251.
52. Théophane Cont. : Bonn, p. 353. Léon Grammaticus : Bonn, p. 263.
53. Théophane Cont. : Bonn, p. 354. Léon Grammaticus : Bonn, p. 263. Cedre
nus : Bonn II, p. 250.
54. Léon Grammaticus : Bonn, p. 260.
55. Théophane Cont. : Bonn, p. 359. Léon Grammaticus : Bonn, p. 269-270.
Cedrenus : Bonn II, p. 253, 256, 257, 258.
56. Léon Grammaticus : Bonn, p. 270. Cedrenus : Bonn II, p. 258.
57. Théophane Cont. : Bonn, p. 357, 701, 852. Léon Grammaticus : Bonn, p. 266.
Cedrenus : Bonn II, p. 253, Zonaras : Bonn III, p. 441. D'après Syméon Magister
(Théophane Cont. : Bonn, p. 701), Stylianos aurait été basiléopator vers 888, la troisième
année du règne de Léon VI, avant le mariage du souverain.
58. Léon Grammaticus : Bonn, p. 269.
59. Id. : p. 271.
LES LOGOTHÈTES 53

dans la tombe60, à la fin de 896. De nombreuses novelles sont adressées à


Stylianos, qualifié de très excellent maître des offices sacrés61. Il fut étroit
ementlié à une affaire mal connue, mais qui fut l'une des causes de la guerre
bulgaro-byzantine de 894, le transfert en 893 du commerce avec la Bulgarie
à Thessalonique, alors qu'il se faisait jusque-là à Constantinople. Les
cargaisons bulgares, partant de Varna, de Sozopolis et de Mésembrie,
durent traverser le Bosphore, les détroits, doubler la presqu'île de Chalci-
dique pour aborder à Thessalonique. L'instigateur de cette mesure fut
Stylianos qui voulait procurer à deux de ses amis, marchands de l'Hellade,
Staurakios et Kosmas, des bénéfices substantiels62. Pendant près de dix ans,
il se maintint au pouvoir grâce à sa fille, maîtresse, puis épouse de Léon VI.
Après sa mort, tous les membres de sa famille, compromis dans un complot,
furent exilés ou mis au couvent et leurs biens furent confisqués63.
Il semble qu'avec Stylianos la fonction de logothète du drome eût retrouvé
un certain éclat, dû, semble-t-il, moins aux titres qu'il avait reçus (magistros
et basiléopator) qu'aux relations familiales qu'il avait avec l'empereur.

Xe siècle

17. Thomas. Les chroniqueurs prennent soin de rappeler que Constantin


l'Arménien, drongaire de la Veille, puis patrice et logothète du drome,
était le père « du patrice Thomas, qui fut plus tard logothète du drome1 ».
Cette insistance semble prouver que Thomas était un homme de haute
valeur. Constantin VII Porphyrogénète qui l'a connu vante en effet ses
capacités et sa science2. Thomas était logothète du drome vers 907, car il
semble bien que le logothète Thomas, cité dans la Vie d'Euthyme, était
logothète du drome3. On le retrouve logothète du drome après 913, pendant
la minorité de Constantin VII Porphyrogénète, lors du coup d'Etat de
Constantin Doukas ; il aurait été prévenu, paraît-il, de la tentative de ce

60. Id. : p. 271.


61. Par exemple Novelle 18: Τφ ύπερφυεστάτω μαγίστρω των θείων όφφικίων
(PG 107, 400 = Noailles-Dain, p. 69).
62. Antoniadis-Bibicou, Recherches, p. 140.
63. Théophane Cont. : Bonn, p. 857-859. Léon Grammaticus : Bonn, p. 271-273.
Cedrenus : Bonn II, p. 258-259.
1. Théophane Cont. : Bonn, p. 150, 198, 229, 681, 835. Léon Grammaticus : Bonn,
p. 249.
2. Théophane Cont. (Bonn, p. 22910~12) : Κωνσταντίνος ό πατρίκιος, ό τοϋ κα&'ήμας
λογο-9-έτου τοΰ δρόμου καΐ έν φιλοσοφία όόκρου καΐ άδωροτατου περιφανώς πατρικίου
Θωμά πατήρ.
3. Bury, Adm. System, p. 92, n. 1.
54 R. GU1LLAND

dernier et de son échec par un billet mystérieux4. Comme logothète du


drome, il fut chargé vers 907 de juger le moine Nicétas, accusé d'avoir
déserté chez les Bulgares et d'être l'auteur de pamphlets séditieux5.
18. himérios. Le patrice Himérios, avant d'être logothète du drome,
avait été prôtoasèkrètis6. En 904, Léon de Tripoli, Grec renégat passé à
l'Islam, s'emparait de Thessalonique, la plus grande ville de l'Empire après
Constantinople7. Himérios venait d'être nommé drongaire de la flotte
impériale ; il n'osa pas poursuivre la flotte arabe. Il s'y décida finalement et
remporta sur les Arabes plusieurs victoires navales8. En 910, une importante
expédition contre la Crète, repaire des pirates arabes, fut décidée. Le patrice
et logothète du drome Himérios commanda l'expédition qui fut couronnée
de succès9. Mais en octobre 911 Léon de Tripoli battait la flotte impériale
dans les parages de Samos et faisait prisonnier Himérios10. Lorsque libéré
Himérios revint à Byzance, l'empereur Alexandre (912-913) était sur le trône.
Il détestait Himérios qu'il relégua dans un couvent où il mourut de chagrin
peu après11. Comme logothète du drome, il eut à trancher un grave différend
survenu pendant la campagne de Crète entre le capitaine des Mardaïtes
d'Attalia et le protospathaire Eustathe, asèkrètis, faisant fonction de
stratège des Cibyrrhéotes12.
19. RHABDOUCHOS, Léon. Titré protospathaire, Léon Rhabdouchos était
stratège de Dyrrachium (Durazzo). Après la mort de Léon VI (912), il
négocia avec le prince de Serbie Pierre Gojnikovic ; ces négociations irr
itèrent Syméon le Grand, tsar de Bulgarie, et tendirent les relations entre ce
dernier et l'Empire byzantin13. Plus tard, sous Romain Ier Lécapène, Léon
Rhabdouchos, alors titré magistros, devint logothète du drome14.
20. kosmas. Beau-père de Jean, mystique et paradynaste, Kosmas poussa

4. Théophane Cont. : Bonn, p. 383. Sur Constantin Doukas voir D. I. Polemis,


The Doukai. A Contribution to Byzantine Prosopography, Londres 1968, p. 21-25.
5. Vita Euthymii, 16 : Karlin-Hayter, p. 10724 et note p. 220.
6. Théophane Cont. : Bonn, p. 863. Cedrenus : Bonn II, p. 262.
7. Théophane Cont. : Bonn, p. 366-367, 564-567.
8. Id. : p. 371-372, 710. Cedrenus : Bonn II, p. 266.
9. De cer., II, 44 : Bonn I, p. 651.
10. Théophane Cont. : Bonn, p. 376-377, 715. Zonaras : Bonn III, p. 449-450.
11. Théophane Cont. : Bonn, p. 379-380, 717. Cedrenus : Bonn II, p. 277.
12. De administrando imperio, 50 : Bonn, p. 229-230 = Moravcsik- Jenkins, p. 240-
242.
13. M. Lascaris, La rivalité bulgaro-byzantine en Serbie et la mission de Léon
Rhabdouchos, RHSEE 20, 1943, p. 202-207.
14. De administrando imperio, 32 : Bonn, p. 156 = Moravcsik- Jenkins, p. 15682~83.
G. Kolias, Léon Choirosphactès, magistre, proconsul et patrice, Athènes 1939, p. 129 :
lettre 27 au fils du patrice Monomaque. Cf. D. A. Miller, art. cit., p. 470.
LES LOGOTHÈTES 55

son gendre à conspirer contre Romain Ier Lécapène en 925. Dénoncé, il


fut frappé de verges et destitué. Quant à son gendre, il fut chassé du Grand
Palais et forcé de se faire moine15. On ignore quel fut le successeur de Kosmas
au logothétat du drome.
21. jean. Le logothète du drome Jean est le destinataire d'une lettre de
Théodore de Nicée : à Jean, fils (?) et logothète du drome. Comme le
remarque très justement le P. J. Darrouzès, « fils et logothète est peu
probable, même en comprenant « fils spirituel » ; le plus simple est de sup
poser une abréviation mal transcrite »16.
22. romain. Patrice et logothète du drome, Romain est un correspon
dant de Théodore Daphnopatès17.
23. rector, Michel. Après la mort de Romain II (963), le parakimomène
Joseph Bringas dirigea les affaires publiques pendant la régence de Théo-
phano. Il était assisté de Michel Rector, titré magistros et logothète du
drome, et du patrice Syméon, prôtoasèkrètis18.
24. tzimiskès, Jean. Il était déjà patrice et stratège des Anatoliques
avant l'avènement de Nicéphore II Phokas (963)19. Il contribua à faire
proclamer empereur ce dernier20. Il semble qu'il n'ait été titré magistros
et nommé domestique des scholes d'Orient qu'au début du règne de Nicé
phore II Phokas21. Devenu suspect à l'empereur, il fut relevé de son com
mandement militaire de domestique des scholes22. Zonaras23 est le seul
à mentionner la nomination de Tzimiskès comme logothète du drome. Il
prétend que Jean Tzimiskès fut nommé logothète du drome en compens
ation,ce qu'il considéra comme une injure. Peu après, Jean Tzimiskès
assassinait Nicéphore II Phokas et montait sur le trône24.
25. syméon le Métaphraste. Le personnage a posé de nombreux problè-

15. Théophane Cont. : Bonn, p. 410-411, 903. Cedrenus : Bonn Π, p. 306-307.


Léon Grammaticus : Bonn, p. 314-315.
16. J. Darrouzès, Epistoliers byzantins du Xe siècle, p. 291 et 410 (index).
17. Lettre inédite signalée par J. Darrouzès, Un recueil épistolaire byzantin, le
manuscrit Patmos 706, REB 14, 1956, p. 160.
18. Léon Diacre : Bonn, p. 427 (notes de Hase). Une famille byzantine portait le
nom de Rhaiktôr, qu'il faut distinguer du nom commun, la dignité de recteur. Sous Nicé
phore Botaniate, un moine nommé Rhaiktôr se fit passer pour l'empereur Michel VII
Doukas, détrôné en 1078 (Anne Comnène, Alexiade : Bonn I, p. 58-59).
19. Léon Diacre : Bonn, p. 37. Cf. G. Schlumberger, Nicéphore Phokas, Paris 1890,
p. 278.
20. Cedrenus : Bonn II, p. 347. Léon Diacre : Bonn, p. 37-38 (et notes p. 431).
21. Cedrenus : Bonn II, p. 360. Léon Diacre : Bonn, p. 44, 49.
22. Glycas : Bonn, p. 572.
23. Zonaras : Bonn III, p. 516.
24. Cf. D. A. Miller, art. cit., p. 463, 469 (liste chronologique des logothètes du
drome de 762 à 979).
56 R. GUILLAND

mes d'identification et de datation ; mais on ne doute plus de l'identité


du magistros et logothète qui se consacra aussi à une compilation de Vies
de saints25. Les éloges par Psellos et Marc Eugénikos attestent cette double
activité et l'époque où il exerçait sa fonction, du règne de Nicéphore Phokas
à celui de Basile IL II est probable que Syméon est le prôtoasèkrètis et
patrice qui inspira deux novelles de Nicéphore Phokas26. En 975, Syméon
magistros et logothète est conseiller de Jean Tzimiskès27. Sa collection
épistolaire qui est composite reflète les deux aspects de son activité28 :
celle de l'homme de lettres et du collectionneur de textes, celle de l'homme
d'Etat.

XIe siècle

26. eustathe. En 1030, sous le patriarche Alexis III Stoudite, les héré
tiques jacobites furent déférés au tribunal synodal par l'empereur ; deux
métropolites, l'anthypatos-patrice, vestis et logothète du drome Eustathe
et presque tout le sénat sont désignés comme juges associés par ordre
exprès de l'empereur1.
27. jean. Après la disgrâce de Constantin Lichoudès, Constantin IX
Monomaque (1042-1055) choisit pour le remplacer l'eunuque Jean. De
basse naissance, celui-ci était d'une incapacité notoire et savait à peine
écrire, ce qui n'empêcha pas l'empereur de lui confier la direction des
affaires publiques et d'en faire le premier parmi les sénateurs2. Le préposite
Jean avait été επί του κοιτώνος ; en 1050, il était préfet du caniclée et il
fut ensuite, semble-t-il, logothète (du drome)3. Cedrenus qualifie Jean de
paradynaste de l'empereur4. Psellos nous a laissé un portrait peu flatteur
de Jean5. Jean, logothète (du drome), était encore au pouvoir en 1055 lors

25. Voir les articles de J. Gouillard (DTC 14, 2959-2971) et N. Tomadakès (EEBS
23, 1953, p. 113-149).
26. Zachariae, JGR 3, p. 292 et 296 (titres). Cf. N. Tomadakès, art. cit., p. 130.
27. Léon Diacre : Bonn, p. 168-169.
28. J. Darrouzês, Epistoliers byzantins du Xe siècle, p. 33-38 (notice) et 99-163
(lettres).
1. Grumel, Regestes, n° 830. Voir l'édition Ficker, Erlasse des Patriarchen von
Konstantinopel Alexios Studites, Kiel 1911, p. 1131-33 ; je qualificatif du logothète péri-
bleptos équivaut à spectabïlis.
2. Zonaras : Bonn III, p. 649-650 = Dindorf IV, p. 180.
3. Zonaras : Bonn III, p. 649. Cf. Germaine Rouillard, Note prosopographique :
le préposite Jean επί τοϋ κοιτώνος et έπί του κανικλείου, ΕΟ 32, 1933, ρ. 444-446,
qui hésite à identifier Γέπί του κανικλείου et le logothète homonyme.
4. Cedrenus : Bonn II, p. 610. Zonaras : Bonn III, p. 649.
5. Psellos : Renault II, p. 58. Cf. G. Schlumberger, L'épopée byzantine à la fin
du Xe siècle {969-1057), III, Paris 1905, p. 677 et 742.
LES LOGOTHÈTES 57

de la mort de Constantin IX Monomaque. Hostile à l'impératrice Theo


dora, il s'efforça avec divers autres hauts dignitaires, parmi lesquels le
protonotaire du drome Constantin et le préposé au caniclée Basile6, de
faire proclamer empereur Nicéphore Proteuôn, mais il échoua et fut dis
gracié7.
28. xylinitès, Nicétas. Après la mort de Constantin IX Monomaque
(1055), les partisans de la porphyrogénète Theodora, parmi lesquels Xyli
nitès, déjouant les intrigues des eunuques, amenèrent Theodora au Grand
Palais et la firent proclamer impératrice8. En récompense, Xylinitès fut
nommé logothète du drome. Il l'était encore pendant le règne de Michel VI
Stratiôtikos (1056/57)9.
29. alôpos. Au logothète du drome Alôpos, qui lui avait demandé si
les deux Basile ou les deux Grégoire étaient homonymes ou synonymes,
Michel Psellos envoie sa réponse10. Il s'agit vraisemblablement d'Alôpos
qui fut envoyé comme ambassadeur par Michel VI Stratiôtikos en 1057
auprès d'Isaac Comnène révolté11.
30. anonyme. Michel Psellos adresse une lettre à un logothète du drome
anonyme12. Dans une autre de ses lettres, il est question d'un logothète
(du drome), qualifié hypersébaste13. Enfin le même auteur mentionne encore
un logothète (du drome)14. Ces correspondants de Psellos peuvent s'ident
ifieravec l'un des trois précédents (Jean, Xylinitès ou Alôpos) selon la
date des lettres qui reste à déterminer.
31. nicéphore dit nicéphoritzès à cause de sa petite taille. L'eunuque
Nicéphoritzès était originaire du thème des Bucellaires. Rusé, intrigant et
brouillon, Nicéphoritzès excellait à répandre des bruits calomnieux sur les
plus hauts personnages. Secrétaire de Constantin X Doukas (1059-1067),
il osa accuser l'impératrice d'adultère15. Nommé duc d'Antioche à deux
reprises, il gouverna de telle façon que les troubles et les séditions se mult
iplièrent en Syrie. Rappelé, il fut jeté en prison. A l'avènement de Romain

6. Cedrenus : Bonn II, p. 610.


7. Ibid. Zonaras : Bonn III, p. 649-650.
8. Cedrenus : Bonn II, p. 610.
9. Id. : p. 623.
10. Sathas, MB 5, préface p. (66) : cette adresse ne figure pas dans l'opuscule édité
par Kurtz-Drexl.
11. Dölger, Regesten, n° 935.
12. Sathas, MB 5, p. 330.
13. Ibid., p. 378.
14. Ibid., p. 483 = Kurtz-Drexl II, p. 1847.
15. Cedrenus : Bonn II, p. 706. Attaliate : Bonn, p. 181. Mathieu d'Edesse, 106
(Dulaurier, p. 178), prétend que l'impératrice avait des relations intimes avec Nicéphore
Botaniate, qu'elle poussa à la révolte.
58 R. GUILLAND

IV Diogène en 1068, Nicéphoritzès parvint à prix d'argent à se faire mettre


en liberté et à se faire nommer juge de l'Hellade et du Péloponnèse. C'est
ce personnage louche que Michel VII Doukas (1071-1078) prit pour premier
ministre et il le nomma logothète (du drome)16. Comme premier ministre,
Nicéphoritzès succédait à Jean, métropolite de Sidè, protoproèdre des
protosyncelles, eunuque lui aussi, mais énergique et expérimenté17. D'après
Bryennios, c'est sur la recommandation du césar Jean Doukas que Michel
VII Doukas prit pour ministre Nicéphoritzès, qu'il nomma logothète du
drome18.
Nicéphoritzès gouverna despotiquement l'Etat, car l'empereur lui lais
sait tout faire, approuvait tout19. Par ses injustices et ses rapines, il s'attira
bientôt la haine de tous. On réclamait impérieusement la déchéance de ce
néfaste ministre, mais l'empereur refusa de se séparer de son favori20. La
double révolte de Bryennios en Occident21 et de Nicéphore Botaniate en
Orient22 força Michel VII à abdiquer. Nicéphoritzès s'empressa de fuir
et se réfugia auprès de Roussel de Bailleul à Héraclée23, mais celui-ci le
fit jeter en prison. Pour se venger Nicéphoritzès l'empoisonna. Livré à
Nicéphore Botaniate, il fut relégué dans l'île de Proti, mais l'entourage de
Nicéphore Botaniate se défiait trop de l'ancien ministre pour le laisser en
vie. Sommé de livrer ses trésors, il fut torturé par le grand hétériarque (Ro
main) Straboromanos et succomba sous les sévices24.
D'après Bryennios, c'est sur l'initiative de Nicéphoritzès que fut créé
le corps militaire des Immortels25. Une autre initiative de Nicéphoritzès, qui
ne connut pas de succès, fut sa tentative, sous Michel VII Doukas, d'insti
tuer le monopole du blé à Rhaidestos pour le compte de l'Etat26.
32. jean. En mai 1086, Alexis Ier Comnène confirme sur la demande
de Léon Képhalas, proèdre et katépanô d'Abydos, la donation qu'il lui a
faite en récompense de sa défense de Larissa contre Bohémond et il prescrit

16. Attaliate : Bonn, p. 182. Cedrenus : Bonn II, p. 706.


17. Attaliate : Bonn, p. 180-181. Cedrenus : Bonn II, p. 705-706. Zonaras :
Bonn III, p. 707-708.
18. Bryennios : Bonn, p. 56.
19. Zonaras : Bonn III, p. 708.
20. Id. : p. 773. Cedrenus : Bonn II, p. 719. Attaliate (Bonn, p. 208) qualifie bien
Nicéphoritzès d 'ex-logo thète, mais plus loin il le qualifie de logothète (p. 246, 257).
21. Zonaras : Bonn III, p. 716.
22. Id. : p. 720.
23. Attaliate : Bonn, p. 271-272. Cedrenus : Bonn II, p. 734. Zonaras : Bonn III,
p. 720.
24. Cedrenus : Bonn II, p. 743-744. Zonaras : Bonn III, p. 725-726.
25. Bryennios : Bonn, p. 133-134.
26. Attaliate : Bonn, p. 202-204.
LES LOGOTHÈTES 59

au proèdre et logothète du drome Jean d'inscrire au rôle du thème de Moglé-


na ce chôrion qui sera exempt totalement et perpétuellement de toutes les
charges, prestations et corvées27.
33. sklèros, Andronic. Le protonobélissime et logothète du drome
Andronic Sklèros assistait au synode des Blachernes de la fin de 1094 qui
mit fin à la querelle des images suscitée par le rigorisme de Léon de Chal-
cédoine28.

ΧΙΓ siècle

34. mélès, Stephanos. Cet officier d'origine arménienne fut logothète


du drome sous Jean Comnène. Personnage cultivé et passionné de litt
érature, il fut l'ami de Théodore Prodrome et de Michel Italikos. Du pre
mier il reçut deux billets — sa charge de logothète est rappelée dans les
lemmes1 — , du second trois lettres de pure rhétorique, où sont exaltés le
charme de son éloquence et la grâce de son style2. On lui a attribué une
Vie en vers de s. Théodore Stoudite3.
35. kamatèros, Jean. Il était le fils de Grégoire Kamatèros, de qui lui
vient par hérédité le titre nobiliaire de sébaste ; cette filiation est indiquée
dans une lettre de Georges Tornikès4. Une autre lettre du même, datable
de 1155, porte l'adresse suivante : au sébaste et logothète du drome Jean
Kamatèros5. Contrairement à son frère Andronic, Jean Kamatèros n'affi
che jamais sa parenté avec les Doukas ; il faut donc le distinguer de Jean
Doukas, mieux que ne l'a fait Polemis, dont la notice reflète les erreurs
antérieures6. Vers 1159, Manuel Comnène, avisé en Arménie de l'évasion
d'Andronic Comnène, envoya à Antioche Jean Kamatèros pour prévenir
les intrigues et annoncer sa propre arrivée7. Vers 1164, le logothète du
drome Jean dénonça Styppeiôtès, préfet du caniclée, et, sur une fausse

27. Rouillard-Collomp, Actes de Lavra, I, p. Ill et 114.


28. Cf. P. Gautier, REB 29, 1971, p. 243.
1 . Cf. PG 1 33, 1023-1024 et 1067.
2. Cf. J. Cramer, Anecdota graeca, III, Oxford 1836, p. 171-172, 173-174, 201-203.
3. Cf. S. Mercati, BZ 25, 1925, p. 43-46.
4. J. Darrouzès, Georges et Dèmètrios Tornikès. Lettres et discours, p. 25, 44, 129
(n. 5) ; voir l'arbre généalogique des Kamatèros du XIIe siècle à la page 49.
5. Lettre 15 (ibid., p. 137). Bien interprétée, l'adresse de cette lettre permet d'éliminer
toute mention d'un Kamatèros comme évêque élu d'Ephèse : celui-ci est en réalité l'auteur
de la lettre, Georges Tornikès.
6. D. I. Polemis, The Doukai. A Contribution to Byzantine Prosopography, p. 125-
133 (notice sur les Kamatèros) et p. 127-130 (Jean Doukas).
7. Nicétas Chômâtes : Bonn, p. 140-141. Cf. F. Chalandon, Les Comnènes, II,
p. 450-451.
60 R. GUILLAND

accusation, le fit condamner à être aveuglé8. Les motifs de la haine du logo


thète du drome contre le préfet du caniclée étaient futiles en apparence.
Jean était jaloux parce que l'empereur avait fait don à Théodore Styppeiô-
tès d'un encrier en or, enrichi de pierres précieuses, destiné à contenir
l'encre rouge avec laquelle les empereurs signaient leurs actes, et parce
que l'empereur avait désigné Théodore pour présider aux Blachernes la
cérémonie de prestation de serment du prince de Hongrie Bêla comme hé
ritier du trône, alors que cette présidence revenait selon l'usage au logo
thète du drome9. En réalité, il y avait entre les deux hommes une lutte
d'influence. Théodore, préfet du caniclée, était alors hiérarchiquement infé
rieur à Jean, logothète du drome. Il avait supplanté Jean Hagiothéodôritès
dans la faveur impériale et, investi de la pleine confiance du souverain,
il dirigeait l'Etat10. Jean Kamatèros, intrigant et ambitieux, aspirait à
supplanter Théodore et à devenir à son tour premier ministre. Au Xe
siècle, le logothète du drome occupait le 37e rang de la hiérarchie, alors que
le chartulaire du caniclée n'occupait que le 47e rang11. Au XIIe siècle, le
logothète du drome était déjà bien déchu de son rang ; toutefois il était
encore supérieur au préfet du caniclée, bien que de peu. En effet, lors de la
troisième séance du concile de 1166, l'ordre dans lequel sont mentionnés
les dignitaires et fonctionnaires présents met le logothète du drome imméd
iatement avant le préfet du caniclée12. Les deux fonctions étaient certa
inement très voisines l'une de l'autre, mais la préséance restait encore,
semble-t-il, au logothète du drome. On comprend alors les protestations
de Jean Kamatèros.
Celui-ci possédait de nombreux talents de société et était en particulier
grand buveur. Nicétas rapporte qu'il avait parié avec Manuel Ier Comnène
de boire toute l'eau du bassin qui se trouvait jadis à l'entrée du triklinos
de Nicéphore II Phokas, situé au-dessus du Boukoléon et placé depuis
par Manuel Ier Comnène dans le Chrysotriklinos13. Le portrait que fait
de lui Nicétas est peu flatteur, mais il s'achève par la mention du dernier
acte de la vie du logothète : avant de mourir, Jean Kamatèros demanda

8. Nicétas Chômâtes : Bonn, p. 145-147. Cinnamus : Bonn, p. 184. Cf. F. Chalan-


don, op. cit., p. 223.
9. Nicétas Choniatès (Bonn, p. 14712) : α τφ λογοθετικω δήπουθεν όφφικίω ήσαν
αρμόδια.
10. Id. : ρ. 77-78, 145-146.
11. De cer., Π, 52 : Bonn I, p. 713-714.
12. PG 140, 253e. Ce procès-verbal impérial et patriarcal n'est enregistré dans les
Regestes ni par Dölger, ni par Grumel.
13. Nicétas Choniatès (Bonn, p. 14919-20) : £ (...) χρυσόσπαστος μέγιστος ανδρών.
LES LOGOTHÈTES 61

pardon à Styppeiôtès14. Ce trait, à la fin d'une longue digression, signifie


que le logothète, qui ne sera plus mentionné par la suite, est décédé vers
116515.
36. hagiothéodôritès, Michel. Il était probablement le fils de Jean
Hagiothéodôritès, protonotaire du drome, que Manuel Ier avait choisi
au début de son règne comme mésazôn16. La famille est connue pour s'être
consacrée au droit17, et le frère de Michel, Nicolas Hagiothéodôritès, le
métropolite d'Athènes, était versé dans la même discipline18. Michel
succéda vraisemblablement sans intermédiaires à Jean Kamatèros comme
logothète du drome : il contresigne les actes officiels dès le mois de mars
116619. Il est présent au synode à la même date, le 6 mars20, avec un quali
ficatif inusité21. Au synode du 18 février 1170, il porte la même titulature22.
Grégoire Antiochos lui adresse un discours de consolation pour la mort
de sa sœur Anne23 ; à la mort de son frère Nicolas, Michel avait encore
deux sœurs qui vivaient en moniales24. Le logothète Michel jouissait d'une
certaine réputation dans les milieux littéraires en raison de sa propre cul
ture et de sa fonction. Outre les allusions contenues dans les monodies pour
son frère Nicolas, il reste un discours inédit d'Eustathe de Thessalonique
et un autre de Constantin Psaltopoulos qui lui sont adressés25. Constantin

14. Id. : p. 1502°-aa.


1 5. La digression sur Jean Kamatèros occupe les pages 145-1 50 ; il est clair que Nicétas
a placé tout ce qui concernait le logothète à cette place à cause de la date de sa mort.
16. Nicétas Chômâtes (Bonn, p. 741"3) : πρότερον βντα καΐ τοϋ δρόμου πρωτονοτά-
ριον, μελεδωνόν δε μεσεύοντα και των οικείων ύποδρηστηρα διαταγμάτων τόν* Αγιοθεο-
δωρίτην τίθησιν Ίωάννην. Sous cette description littéraire pourrait se cacher une fonc
tion de logothète, mais la suite montre que Théodore Styppeiôtès, supplantant Jean
Hagiothéodôritès, reçoit la charge de préposé au caniclée {id. : p. 78).
17. J. A. B. Mortreuil, Histoire du droit byzantin, III, Paris 1846, p. 486-488.
18. Monodies d'Eustathe de Thessalonique et d'Euthyme de Néai Patrai citées dans
REB 20, 1962, p. 79 ; 23, 1965, p. 152.
19. Actes de mars et avril 1166 : Dölger, Regesten, nös 1465, 1467, 1468.
20. PG 140, 253e : του πρωτονωβελισσιμοϋπερτάτου λογο&έτου τοΰ δρόμου και
ορφανοτρόφου κυρου Μιχαήλ τοΰ Άγιοθεοδωρίτου.
21. C'est la première mention dans un procès-verbal du titre prôtonôbélissimohy-
pertatos ; voir REB 23, 1965, p. 225, n. 20.
22. Grumel, Regestes, n° 1110. La première édition porte πρωτονοτάριου υπέρτατου
{VV 11, 1904, p. 47918), qui est corrigé par S. N. Sakkos, cO πατήρ μου μείζων μού έστιν,
Π, Thessalonique 1968, p. 18621 ; cette dernière édition atteste que l'éparque Basile
Kamatèros et le dikaiôdotès Théodore Pantechnès partagent le même qualificatif à cette
date.
23. REB 20, 1962, p. 64-65.
24. Ibid., p. 65 et 80.
25. Scorialensis Y II 10, f. 128 et 357.
62 R. GUILLAND

Manassès célébra également le logothète Michel26. Le patriarche Luc,


dans une période où des emplois séculiers étaient contestés aux clercs,
concéda au même logothète du drome le droit de se faire accompagner
dans ses voyages par le hiéromoine Macaire le Hiérosolymitain qui lui
servait de secrétaire27.
37. kamatèros doukas, Basile. Appelé sur son sceau Kamatèros et
Doukas, Basile était le frère d'Euphrosyne Doukas, mariée à Alexis III
Ange, et le fils d'Andronic Doukas. Il devint par alliance l'oncle de Théo
dore Ier Lascaris, qui avait épousé Anne, fille d'Alexis III Ange28. Il fut
titré sébaste, comme l'indique son sceau, et, au moins depuis 1166, proto
notaire29. En 1182, il était logothète du drome. Après la chute du proto-
sébaste Alexis, ministre de l'impératrice régente Marie d'Antioche, veuve
de Manuel Ier Comnène, Andronic Ier Comnène s'était emparé du pouvoir
et gouvernait l'Empire au nom du jeune empereur, Alexis II Comnène.
Andronic Ier Comnène préparait son élévation au trône en cherchant à se
débarrasser de l'impératrice et en faisant planer la terreur sur les défenseurs
de la légitimité. Divers représentants de la haute noblesse conspiraient
contre Andronic Ier Comnène, dont ils redoutaient l'ambition ; parmi eux
se trouvaient Andronic, fils de Constantin Ange, le mégaduc Andronic
Kontostéphanos et ses nombreux fils, et le logothète du drome Basile
Kamatèros. Le complot fut découvert ; quelques-uns des conspirateurs
réussirent à s'enfuir, mais Kontostéphanos et ses quatre fils furent arrêtés,
ainsi que Basile Kamatèros, et condamnés à être aveuglés. Basile Kamatèros
fut exilé en Russie30. Rappelé d'exil par Isaac II Ange et aveuglé d'un œil
seulement, il conserva une grande activité sous Alexis III Ange et même
après 1204, car il est envoyé en ambassade en 1209/1210 par Théodore
Ier Lascaris à Léon, roi d'Arménie31.
Il ne faut pas confondre Basile Kamatèros, logothète du drome, avec ses

26. K. Horna, Eine unedierte Rede des Konstantin Manasses, Wiener Studien 28,
1906, p. 173-184 ; ce discours est suivi d'une lettre d'envoi (p. 185) ; les titres sont suppléés
par l'éditeur.
27. PG 137, 1024 s = Rhalli-Potli, II, p. 662 (commentaire de Balsamon). Grumel,
Regestes, n° 1101.
28. V. Laurent, Un sceau inédit du protonotaire Basile Camatéros, Byz. 6, 1931,
p. 261-271. Era L. Branousès, Πατμιακά. β'. Πρόσταξις Μανουήλ Α' Κομνηνού, dans
Χαριστήριον εις Ά. Κ. Όρλάνδον, II, Athènes 1966, ρ. 78-97.
29. D. I. PoLEMis, The Doukai. A Contribution to Byzantine Prosopography, p. 130.
30. NicÉTAS Chômâtes : Bonn, p. 345-346. Michel Chômâtes : Lampros I, p. 312,
et II, p. 62, 522, 528.
31. Dölger, Regesten, n° 1680 ; dans ce dernier acte, Basile est appelé simplement
oncle de l'empereur (Théodore Ier Lascaris).
LES LOGOTHÈTES 63

homonymes contemporains : Basile Kamatèros, acolythe32, Basile Kama-


tèros éparque, qui assista au synode de 1166 en même temps que Basile
Kamatèros, protonotaire (du drome)33. Le logothète de 1180-1182 ne
peut être l'éparque de 1166, car Basile aurait ainsi rétrogradé dans un office
inférieur ; c'est le protonotaire de 1166 qui est devenu très probablement
logothète du drome, comme le suggère dans la mention de 1166 le titre
de sébaste propre à la lignée de Grégoire Kamatèros, à travers Andronic34.
38. hagiochristophoritès, Stéphane, dit antichristophoritès. Ce
personnage louche qui, à la suite de quelque méfait, avait subi une muti
lation infamante, celle du nez, parvint à s'immiscer dans les bonnes
grâces d'Andronic Ier Comnène qui le nomma logothète (du drome) et le
titra sébaste35. Il fut le ministre d'Andronic Ier Comnène et son âme damn
ée. Nicétas fait plus d'une fois allusion à ce personnage, sans indiquer
ses fonctions36. Hagiochristophoritès ne prenait même pas la peine de con
sulter l'empereur pour les condamnations qu'il prononçait avec la complic
ité de magistrats qui lui étaient dévoués37. Il finit par être tué par Isaac
Ange qu'il allait arrêter38. Il est probable que ce logothète du drome succé
da à Basile Kamatèros aveuglé par Andronic II, et non à Michel Hagiothéo-
dôritès.
39. doukas, Jean. Les mentions du logothète du drome Jean Doukas
dans les années 1188-1189 ne doivent pas favoriser l'hypothèse de la collé
gialité de l'office, car il est le seul attesté à cette date39. En septembre-
octobre 1188, Jean Doukas, alors logothète du drome, était envoyé en
ambassade auprès de Frédéric Ier Barberousse à Nuremberg, pour régler
le passage des Croisés à travers le territoire de l'Empire byzantin40. En
décembre de la même année, Isaac II Ange l'envoie en ambassade à Gênes
auprès de Balduino Guercio, pour régler certaines questions relatives à la
future croisade41. Enfin, au début de 1189, Isaac II Ange envoie de nouveau

32. Cinnamus : Bonn, p. 210. Cf. F. Chalandon, Les Comnènes, II, p. 225, 522.
33. PG 140, 253e"0.
34. J. Darrouzès, Georges et Dèmètrios Tornikès. Lettres et discours, p. 48-49.
35. Eustathe de Thessalonique, De Thessalonica : Bonn, p. 405-408 = Kyriakidès-
Rotolo, p. 44-48. La remarque d'Eustathe (p. 4812~13 : ... ό λογοθέτης, τοϋτό τε γαρ
έτιμήθη και τδ σεβαστός κλη&ηναι) indique que la dignité de sébastos fut conférée avec
la charge et par dérogation à quelque usage.
36. Nicétas Choniatès : Bonn, p. 354, 381, 442.
37. Id. : p. 437.
38. Id. : p. 444-447.
39. Voir ci-dessus note 110, p. 45.
40. Dolger, Regesten, n° 1581. Nicétas Choniatès : Bonn, p. 5259"10.
41. Dölger, Regesten, n° 1583 ; MM 3, p. 211"12, mention qu'il convient de relever :
τον πανσέβαστον σεβαστόν οίκεϊον αύτη λογοθέτην τοΰ δρόμου κυρ Ίωάννην τον Δούκαν
64 R. GUILLAND

Jean Doukas, accompagné d'Andronic Cantacuzène, en ambassade auprès


de Frédéric Ier Barberousse, pour régler encore certaines questions relatives
à la croisade42. En juin de la même année, un chrysobulle d'Isaac II Ange
faisait savoir aux Vénitiens que le décret leur accordant des compensations
pour certains dommages subis par eux devrait être contresigné par le logo-
thète du drome Jean Doukas43. Le mémoire, adressé en 1198 à Alexis III
Ange par le métropolite d'Athènes Michel Chômâtes, conserve une preuve
de l'activité de Jean Doukas comme logothète du drome. Il s'agit des contri
butions et du nombre de marins qu'en vertu d'une décision (απογραφή ) de
ce dernier les Athéniens devaient fournir à la marine impériale44. A cette
date, Jean Doukas est décédé ou bien il a accédé à une autre charge.
L'identification de ce personnage ne repose que sur ces données. Les
titres de pansébaste et de familier sont trop généraux pour fournir une solu
tion. Du moins faut-il exclure l'identité avec le logothète Jean Kamatèros
qui décéda vers 1 165 (voir sa notice) et qui de toute façon n'aurait pas occupé
le même poste sous Manuel Ier et sous Isaac II. L'identité avec le sébas-
tocrator Jean Doukas, oncle d'Isaac II, est également exclue45 à cause de
l'omission de cette haute dignité dans les mentions du logothète. On l'a
identifié avec l'un des fils d'Andronic Kamatèros46. Mais aucun des memb
res de cette famille prolifique ne semble avoir abandonné totalement le
patronyme Kamatèros depuis Grégoire, le logothète du début du XIIe
siècle. Il est impossible d'admettre en tout cas qu'un fils d'Andronic Kamat
èros, qui serait parfois désigné comme cousin de Manuel Ier, participa dès
1150 à la campagne de Serbie47. De plus rien ne prouve que la succession
des titres hétériarque, éparque et logothète du drome de 1170 à 1188 con
vienne au même personnage48, car le grade de hétériarque est supérieur à

42. Dölger, Regesten, n° 1587. Nicétas Chômâtes : Bonn, p. 5261.


43. Dölger, Regesten, n° 1590. Zépos, JGR 1, p. 4558-10 : pansevasti et nostrae
sublimitati familiaris archicancellarii domini Johannis Duce.
44. Texte de Michel Choniatès cité par Hélène Antoniadis-Bibicou, Etudes d'his
toire maritime à Byzance. A propos du thème des Caravisiens, Paris 1966, p. 43, n. 2.
45. Voir le relevé des mentions du sébastocrator par L. Stiernon, Les origines du
despotat d'Epire, REB 17, 1959, p. 102-116, et, en particulier, à la page 113, le stemma
généalogique établissant la parenté avec Manuel Ier et Isaac II. Jean Doukas était sébasto
crator dès 1186 (Nicétas Choniatès : Bonn, p. 489).
46. D. I. Polemis, The Doukai. A Contribution to Byzantine Prosopography, p. 127,
n. 16. L'auteur admet comme évidente une interprétation donnée déjà par Regel de
l'adresse d'Eustathe de Thessalonique à Jean Doukas (Ch. Müller, Geographi graeci
minores, II, Paris 1882, p. 201), interprétation qui paraît contestable à J. Darrouzès
(op. cit., p. 46).
47. D. I. Polemis, op. cit., p. 128, n. 2 (citant Cinnamus : Bonn, p. 125).
48. Ibid., p. 128.
LES LOGOTHÈTES 65

celui de logothète et celui d'éparque inférieur49. De plus, l'éparque de


1181-1182 est dit nommément Kamatèros50, tandis que le logothète de
1188 n'est jamais cité avec ce nom. D'autre part, les mentions littéraires
de Jean Doukas, en particulier dans la harangue d'Eustathe de Thessalo-
nique, lui donnent le titre de grand hétériarque. Ce Doukas, identique à
celui qui fit ériger une stèle en Hongrie ou Transylvanie, n'est pas le futur
logothète du drome51. En ce qui concerne les logothètes du drome, l'essent
iel sera de distinguer Jean Doukas de Jean Kamatèros.
40. tornikès, Dèmètrios. D'après l'édition récente de ses discours52,
Dèmètrios Tornikès est mieux connu et daté. La première mention du
logothète du drome en fonction se trouve dans le sèmeiôma impérial de
1191 concernant la déposition de Dosithée53. Auparavant Dèmètrios
avait occupé les charges de juge du Velum54 et de préfet du caniclée55,
mais il ne peut avoir été le concurrent ou le collègue de Jean Doukas en
118856. Le chrysobulle d'Isaac II en avril 1192 déclare sa signature néces
saire pour la validation des clauses57. En novembre 1198, le chrysobulle
d'Alexis III relatif aux questions pendantes entre l'Empire et Venise et
conservé seulement dans sa rédaction latine porte : Trinkio cancellario58. Il
contresigne encore un acte de Chilandar en juin 119959. Avec le décès de
Dèmètrios, Michel Choniatès apprit la nouvelle que son fils Constantin
lui succédait dans la charge60. Entre autres renseignements que fournit

49. Voir la succession hiérarchique au synode de 1166 : PG 140, 253 e-0.


50. Nicétas Chômâtes : Bonn, p. 301 12. Le même historien cite habituellement le
même personnage sous le même nom, ou bien il distingue par quelque détail de titu-
lature ou de parenté les personnages qui pourraient être confondus. Ainsi Jean Doukas,
sébastocrator et oncle d'Isaac II, qui pourrait être confondu avec le logothète Jean Doukas,
est toujours signalé avec son titre et sa parenté (ainsi p. 4473, 502x~2).
51. D. I. Polemis, op. cit., p. 129, n. 2 et 10.
52. J. Darrouzes, Georges et Dèmètrios Tornikès. Lettres et discours, p. 32-42 (notice),
43 (généalogie), 189-201 (lettre à Tévêque d'Esztergom), 326-353 (lettres au pape). Le
logothète écrit au nom de l'empereur et du patriarche.
53. A. Papadopoulos-Kérameus, AIS H, p. 362. Cf. REB 22, 1964, p. 195-196.
54. Nicétas Chômâtes : Bonn, p. 344.
55. J. Darrouzes, op. cit., p. 33.
56. Voir ci-dessus note 110, p. 45. Stein et Dölger confondent Dèmètrios et Constant
in Tornikès et les dates du dernier sont bien établies.
57. MM 3, p. 3223~25 : πιστωθηναι όφείλοντος καΐ δι'ύπογραφης του πανσεβάστου
σεβαστού οικείου της βασιλείας μου καΐ λογοθέτου του δρόμου κυρ Δημητρίου του
Τορνίκη. Cf. Dölger, Regesten, n° 1610. Sur l'emploi d'oikeios, on consultera l'article de
J. Verpeaux, Les oikeioi. Notes d'histoire institutionnelle et sociale, REB 23, 1965, p. 89-99.
58. Zachariae, JGR 3, p. 55431~82 : cum pansevasto sevasto et Imperio meo familiari
cancellario vicedomino Dimitrio Trinkio. Cf. Dölger, Regesten, n° 1647.
59. L. Petit, Actes de Chilandar, p. 14, n° 5.
60. Lettre 17, datée par G. Stadtmüller, Michael Choniatès, p. 251-252.
66 R. GUILLAND

la monodie de Dèmètrios par son fils Euthyme, on trouve celui-ci : le logo


thète du drome s'occupait principalement des relations avec l'étranger61.
Un discours curieux de Nicétas Chômâtes atteste que le logothète du drome
Dèmètrios organisait des concours d'éloquence, auxquels participa l'hi
storien62. On ne doit pas confondre le logothète du drome Dèmètrios avec
son petit-fils, le mésazôn du XIIIe siècle, avec lequel Michel Choniatès fut
en relations épistolaires63.

XIIIe siècle

41. tornikès, Constantin. L'accession de Constantin Tornikès, fils de


Dèmètrios, à la charge de son père dès la mort de celui-ci est attestée à la
fois par la monodie d' Euthyme Tornikès1 et par une lettre de Michel Chon
iatès2. Ces documents indiquent la date de février 1201 (ou février 1202),
et toute autre mention antérieure de Constantin comme logothète du drome
est à rejeter3. Auparavant le fils de Dèmètrios avait tenu les charges de
maître des requêtes et d'éparque4. Sébaste comme son père5, il avait un
droit personnel à ce titre en raison de son mariage avec une Comnène de
haute lignée6, d'où les descendants de Constantin tireront leur appellation
de Tornikès-Comnène7. Cette alliance justifie également la titulature du
logothète du drome Constantin dans le seul acte qui le cite et où il est
qualifié d'oncle de l'empereur8, titre qui ne peut valoir que par rapport à

61. J. Darrouzès, Les discours d'Euthyme Tornikès, REB 26, 1968, p. 94-107 ;
voir surtout les paragraphes 13, 25 et 28.
62. Inédit du Marcianus XI 22, f. 107. Cf. J. Darrouzès, op. cit., p. 34, n. 11.
63. Lettre 180 (Lampros II, p. 356-357), dernière de la collection, datable de 1218.
Michel, très âgé, cite les membres de la famille Tornikès qu'il a connus : le grand logo
thète divin Tornikès (Dèmètrios), l'éparque Constantin, victime des Scythes, et un
métropolite de Palaiai Patrai. Le métropolite avait donc oublié, en écrivant au petit-
fils, mésazôn de Théodore Lascaris, sa propre lettre au logothète Constantin (lettre 77 :
ibid., p. 124). L'épithète mégas qu'il emploie à propos de Dèmètrios est ici purement
littéraire.
1. J. Darrouzès, Les discours d'Euthyme Tornikès, REB 26, 1968, p. 1086~7 :
λογοθέτα (Dèmètrios), ό σός παις (Constantin), ό καλός μετά σέ λογοθέτης.
2. Lettre 77 : Lampros, p. 124.
3. Voir note 110, p. 45.
4. MM 6, p. 1299 : πανσεβάστου σεβαστού... επί των δεήσεων ; p. 14215 : και έπαρχου.
5. Laurent, Bulles, n° 440 (sceau du sébastos Constantin Tornikès).
6. J. Darrouzès, art. cit., p. 1088~10.
7. Le plus connu est le mésazôn Dèmètrios Tornikès, fils de Constantin (voir note
63, p. 66). Sur la descendance de Constantin, voir G. Schmalzbauer, Die Tornikioi
in der Palaiologenzeit, JÖBG 18, 1969, p. 117-135.
8. MM 4, p. 12315~17. Les éditeurs, interprétant l'indiction 7 comme équivalant à
1188, ont provoqué ainsi nombre de confusions (voir note 110, p. 45).
LES LOGOTHÈTES 67

Alexis IV9. Après la prise de Constantinople par les Croisés en 1204, Const
antin Tornikès avait accepté à contrecœur de servir l'empereur latin Bau
douin Ier (1204-1205). Après la défaite de ce dernier, Constantin se rendit
auprès du vainqueur, le tsar des Bulgares Joannice, pour traiter, mais celui-ci fit
exécuter son prisonnier Baudouin Ier et le logothète du drome Constantin1 °.
42. métrètopoulos, Basile. Un acte de Patmos, daté de juin 1265,
porte le contreseing du logothète du drome Basile Métrètopoulos11. Le
même logothète du drome, mentionné comme décédé dans l'acte 13 de
Chilandar de janvier 1299, avait concédé au monastère athonite une pro
priété de sept cents modioi12.
43. glykys, Jean. Vers 1292, Jean Glykys, alors maître des requêtes,
fut adjoint à Nicéphore Choumnos, alors mystique, pour diriger les affaires
publiques pendant la maladie de Théodore Mouzalon, grand logothète et
proto vestiaire13. Au début de 1294, Jean Glykys, toujours maître des re
quêtes, accompagné de Théodore Métochite alors logothète des troupeaux,
fut envoyé en ambassade auprès du roi Henri II de Chypre et du roi Héthum
II d'Arménie pour négocier le mariage de Michel IX Paléologue, fils d'An-
dronic II Paléologue. Les ambassadeurs revinrent avec deux sœurs d'Héthum
II, parmi lesquelles se trouvait Rita, la future impératrice Marie14. Grégoras,
ami de Jean Glykys, qui rappelle cette mission, lui attribue la dignité de
logothète du drome et à Théodore Métochite celle de logothète du Trésor
privé15. Il est très probable que Grégoras attribue aux deux ambassadeurs
des dignités qu'ils n'obtinrent que par la suite16. Quoi qu'il en soit, le 12
mai 1315 Jean Glykys, bien que laïc et marié, devenait patriarche de Const
antinople17 et le restait jusqu'au 11 mai 1319, date à laquelle la maladie

9. J. Darrouzès, Georges et Dèmètrios Tornikès. Lettres et discours, p. 34.


10. Nicétas Choniatès : Bonn, p. 848.
11. MM 6, p. 238, n° 110. Cf. Dölger, Regesten, n° 1935. Mais contrairement à
l'affirmation de Dölger que le nom doit être lu Μετρητός, le fac-similé montre clairement
l'abréviation Μετρητοπούλ (ου ) (F. Dölger, Facsimiles byzantinischen Urkunden, Munich
1931, n° 46, où la transcription sera donc corrigée d'après la reproduction).
12. L. Petit, Actes de Chilandar, p. 3476. Cf. Dölger, Regesten, n° 2215.
13. Pachymère : Bonn Π, p. 164.
14. Grégoras : Bonn I, p. 193-194 (les titres p. 1941). Cf. Dölger, Regesten, n° 2156b.
15. Grégoras : Bonn I, p. 193-194.
16. Dölger, Beiträge, p. 45, n. 3, parle par erreur de deux ambassades de Jean Glykys
et de Théodore Métochite, la première vers 1293 au moment où Jean Glykys était maître
des requêtes et Théodore Métochite logothète des troupeaux ; la seconde en 1294 alors
que Jean Glykys était logothète du drome et Théodore Métochite logothète du Trésor
privé. Les Regesten ne mentionnent pas cette hypothétique première ambassade de 1293.
17. Grégoras : Bonn I, p. 2706~7. Ephrem, v. 10379 : PG 143, 380. Sphrantzès :
Bonn, p. 31.
68 R. GUILLAND

l'obligea à se retirer dans le monastère de Kryotissa où il mourut peu


après.
Jean Glykys était fort instruit18. Il nous est parvenu sous son nom un
important traité de Syntaxe ; le reste de son œuvre, des discours et des
sermons, est encore inédit19. Jean Glykys est parmi les correspondants de
Maxime Planude20 et de Michel Gabras21, qui lui adressent plusieurs
lettres, surtout ce dernier.

Un certain nombre de logothètes du drome nous sont connus uniquement


par des sceaux.
VIIIe siècle
44. léon, protospathaire impérial1.
VIHe-IXe siècles
45. EUTYCHios, logothète του οξέως δρόμου2.
46. léon, logothète du drome3.
47. martin, spatharocandidat impérial et logothète του οξέως δρόμου4.
Xe-XF siècles
48. jean, magistros, anthypatos-patrice, protospathaire, logothète du
drome5.
49. jean, proèdre, logothète du drome, stratège ton...6.
XF-XIF siècles
50. Michel, logothète du drome7.
51. Théodore, proèdre, logothète du drome8.

18. Grégoras : Bonn I, p. 2708"11.


19. K. Krumbacher, Geschichte der byzantinischen Litteratur von Justinian bis zum
Ende des oströmischen Reiches (527-1453 f, Munich 1897, p. 589-590.
20. Maxime Planude, Epist. : Treu, p. 40 (n° 23).
21. Α. Μ. Ζανετπ, Graeca D. Marci bibliotheca codicum manu scriptorum per titulos
digesta, Venise 1740, p. 232-242. lettres n°s 4, 10, 35, 85.
1. H. Hunger, Zehn unedierte byzantinische Beamtensiegel, JÖBG 17, 1968, p. 180,
n°2.
2. J. Ebersolt, Sceaux byzantins du musée de Constantinople, RN 14, 1914, p. 247.
3. V. Laurent, Une source peu étudiée de la Sicile au haut moyen âge : la sigill
ographie byzantine, Byzantino-sicula 2, Palerme 1966, p. 29.
4. Schlumberger, Sigillographie, p. 529.
5. Ibid., p. 529.
6. Konstantopoulos, Molybdoboulla, p. 324, n° 407a.
7. Schlumberger, Sigillographie, p. 529.
8. Konstantopoulos, Molybdoboulla, p. 19-20. Cf. V. Laurent, Byz. 6, 1931, p. 782
et 795.
LES LOGOTHÈTES 69

Xffle siècle
52. léon, anthypatos-patrice, protospathaire impérial, logothète du
drome9.

Les sceaux suivants ne peuvent être datés de façon certaine :


53. Constantin, logothète du drome, protospathaire impérial, επί του
χρυσοτρικλίνου1 °.
54. serge, logothète du drome, magistros, anthypatos-patrice, proto
spathaire11.

Le doute persiste au sujet de quelques personnages titrés logothètes et


que l'on ne saurait qualifier de logothètes du drome avec certitude.
55. aétios. Il succéda à Staurakios au début du IXe siècle et semble,
d'après Théophane, avoir été logothète du drome12, mais on ne saurait
l'affirmer absolument.
56. Grégoire. On a signalé avec réserve le logothète Grégoire, dont on
ne sait pas exactement s'il était affecté au drome (voir p. 46, n° 3).
57. phokas, Léon. Frère de l'empereur Nicéphore II Phokas (963-
969), Léon Phokas fut titré patrice13, puis magistros14 et enfin curopalate15.
Il exerça de nombreux commandements militaires : stratège de Cappa-
doce16, domestique des Anatoliques1 7, stratège d'Occident18, domestique
d'Occident19, faisant fonction de domestique d'Orient20. Il reçut les hon
neurs du triomphe21. Pendant le règne de Nicéphore II Phokas, il exerça,
d'après Liutprand, les fonctions de logothète du drome22. Exilé par Jean
Ier Tzimiskès23, Léon Phokas fut arrêté et aveuglé à la suite de rébellions

9. Schlumberger, Sigillographie, p. 530 ; mais il faut remarquer que la titulature


n'est pas celle du XIIIe siècle, date proposée par l'éditeur.
10. Konstantopoulos, Molybdoboulla, p. 349, n° 592a.
11. Ibid., p. 112, n° 407.
12. Théophane : Bonn, p. 737 = de Boor, p. 47520~31.
13. Théophane Cont. : Bonn, p. 462.
14. Théophane Cont. : Bonn, p. 758. Cedrenus : Bonn II, p. 341. De cer., I, 96 :
Bonn I, p. 435.
15. Léon Diacre : Bonn, p. 49. Cedrenus : Bonn II, p. 379, 402. Liutprand, Legatio :
Bonn (volume de Léon Diacre), p. 349.
16. Cedrenus : Bonn II, p. 327. Zonaras : Bonn III, p. 482.
17. Théophane Cont. : Bonn, p. 462.
18. Id. : p. 755.
19. Id. : p. 758.
20. Id. : p. 479.
21. Id. : p. 480. Cedrenus : Bonn II, p. 341.
22. Liutprand, Legatio : Bonn (volume de Léon Diacre), p. 349B.
23. Cedrenus : Bonn II, p. 379.
70 R. GUILLAND

et de complots24. Les historiens ne mentionnent pas Léon Phokas comme


logothète du drome ; le témoignage de Liutprand déclarant qu'il occupait
cette charge ne saurait prévaloir contre le silence des sources byzantines.

Humble fonctionnaire des Finances au VIIIe siècle, le logothète du


drome grandit en importance au IXe siècle, connut sa plus grande influence
au Xe siècle, mais vit son rôle diminuer à partir du XIe siècle, jusqu'à dis
paraître pratiquement au XIVe siècle et n'avoir plus qu'un titre honorifique.
Les divers titres qui accompagnent son nom reflètent l'importance de la
fonction, variable selon les époques. Ils vont des plus élevés (basiléopator,
patrice, magistros, proèdre, protospathaire impérial, spatharocandidat)
aux plus modestes, en passant par les degrés intermédiaires : anthypatos-
patrice, prôtomagistros, vestis, pansébaste-sébaste, hypersébaste, protono-
bélissime, prôtonôbélissimohypertatos.
On n'a pas étudié ni déterminé dans quelle mesure ces titres conviennent
au logothète du drome en vertu de sa fonction ou bien lui sont attribués
par suite d'un cumul ou par concession expresse25. Dans la mesure où le
permettent les documents existants, on peut répartir dans un ordre chrono
logique les titres attribués au logothète du drome :
patrice du VIIIe au XIe siècle : Kosmas, Goumer, Hexaboulios, Jean,
Podopagouros, Staurakios, Symbatios, Théoctiste ;
magistros du IXe au XIe siècle : Jean Hagiopolitès, Serge, Stylianos,
Zaoutzès, Syméon, Thomas ;
protospathaire impérial au Xe au XIIIe (?) siècle : Jean, Léon (?), Stylianos ;
anthypatos-patrice du Xe au XIIIe (?) siècle : Léon (?), Stylianos ;
sébastos {et dérivés) du XIe au XIIe siècle : Jean Kamatèros, Jean Doukas,
Basile Kamatèros, Hagiochristophoritès, Constantin Tornikès.
Quelques titres apparaissent plus rarement :
spatharocandidat : Martin (VIIIe s.) ;
prôtomagistros : Stylianos (IXe s.) ;
proèdre : Théodore (XP-XIP s.) ;
vestis : Eustathe (XIe s.) ;
protonobélissime : Michel Hagiothéodôritès (XIIe s.) ;
prôtonôbélissimohypertatos : le même ;
exceptionnellement basiléopator : Stylianos (IXe s.).

24. Cedrenus : Bonn II, p. 389, 403-404. Sur Léon Phokas voir Du Cange, Familiae
byzantinae, p. 150.
25. Voir par exemple la formule citée à propos de Hagiochristophoritès à la note 35
de la page 63. On sait en effet que d'autres logothètes (Jean Kamatèros par exemple)
jouissent du titre de sébastos en vertu d'une parenté avec l'empereur.
LES LOGOTHÈTES 71

IV. — Le logothète des troupeaux


*O λογοθέτης των αγελών

Le logothète des troupeaux (ό λογοθέτης των αγελών, logotheta gregum)


est vraisemblablement le successeur du praepositus gregum et stabulorum de
la Notifia Dignitatum1 , plutôt que le successeur du rationalis gregum
Caesaris procurator et saltuum2 ou magister pecoris et saltuum*. Le praepos
itus gregum dépendait du cornes reiprivatae (κόμης πριβάτων)4, tandis que
le logothète des troupeaux devint très rapidement un fonctionnaire indé
pendant, ayant lui-même un oificium. Toutefois, vers 850, le logothétat des
troupeaux, qui administre les biens de la Couronne, dépend du sacellaire
qui supervise tous les Bureaux de caractère financier5.
L'officium du logothète des troupeaux comprenait un petit nombre de
fonctionnaires :
1. Le protonotaire d'Asie (6 πρωτονοτάριος Ασίας).
2. Le protonotaire de Phrygie (ο πρωτονοτάριος Φρυγίας).
3. Les administrateurs (διοικηταί τών μητάτων), que l'on peut identifier
avec les procuratores saltuum de la Notifia Dignitatum.
4. Les inspecteurs (έπισκεπτηται), chargés vraisemblablement de surveiller
les διοικηταί.
5. Les comtes (κομήτες), sur lesquels nous n'avons aucun renseignement6.
Cet oificium n'avait pas, très vraisemblablement, de sékréton, étant donné
le petit nombre de ses fonctionnaires.
Le logothète des troupeaux administrait les grands pâturages d'Asie
Mineure, où étaient élevés d'énormes troupeaux de chevaux, de mulets et
d'ânes pour la remonte de la cavalerie et pour le transport des bagages. Les
pascua et les saltus de la resprivata ou domaines de l'empereur, que le logo
thète des troupeaux administrait aussi7, étaient largement mis à contri
bution. Lors des hostilités, le logothète des troupeaux devait fournir à
l'armée les chevaux et mulets nécessaires et s'entendre à ce sujet avec le

1. Notifia Dignitatum Or., XIV, 8.


2. De cer. : Bonn II, p. 494 (notes de Reiske).
3. Ibid.
4. Notifia Dignitatum Or., XIV, 6.
5. Dölger, Beiträge, p. 14.
6. De cer., Π, 52 : Bonn I, p. 718. Cf. Bury, Adm. System, p. 111 et 140.
7. Théodoret, Histoire ecclésiastique, III, 12 (Parmentier, p. 1892~3) : τόν τών
ιδίων του βασιλέως κτημάτων καΐ χρημάτων ήγεμονίαν πεπιστευμένον. Reiske {De cer. :
Bonn II, p. 494) fait cependant des réserves concernant l'allégation de Goar à partir de
ce texte.
72 R. GUILLAND

comte de l'Etable8, intendant en chef des grandes écuries de Malagina.


Sur l'ordre de l'empereur, le logothète des troupeaux devait établir un état
équitable des prestations à fournir par les μητάτα ou établissements mili
taires9, au prorata des ressources et des moyens de chaque μητάτον d'Asie
et de Phrygie. Ces régions devaient fournir 200 mulets, estimés à 15 nomis-
mata chacun, et 200 chevaux, estimés à 12 nomismata l'un. Soit au total
5.400 nomismata, ou 75 livres d'or10. Les mulets et chevaux étaient conduits
par les soins du logothète des troupeaux à Malagina, où le comte de l'Etable
en prenait livraison. Le Livre des Cérémonies décrit minutieusement l'état
dans lequel les mulets et chevaux devaient être livrés11.
De ces faits il ressort deux constatations : les mulets et les chevaux
étaient réquisitionnés à un prix officiel, dont le contrôle justifie l'existence
du logothète des troupeaux. D'autre part, l'importance prise par le logothète
des troupeaux aux IXe et Xe siècles provient du rôle de premier plan que
jouait alors la cavalerie dans les guerres. Le logothète des troupeaux est
devenu supérieur à son ancien chef, Γέπί του σακελλίου ou Γίδικός12. Cepend
ant, bien que la réquisition de chevaux et de mulets ait certainement
toujours existé pour l'armée, l'importance du logothète des troupeaux va
diminuant avec le XIe siècle. Sa signature ne figure plus dans les chrysobulles.
La réforme administrative d'Alexis Ier Comnène à la fin du XIe siècle
modifie profondément, très vraisemblablement, les fonctions du logothète
des troupeaux. Il n'a certainement plus de rapport avec l'armée comme au
Xe siècle, ce qui faisait de lui un fonctionnaire mi-civil mi-militaire, comme
l'indique sa place dans la hiérarchie13. Il existe toujours sous l'empire de
Nicée, comme le prouve le sceau d'un chartulaire des troupeaux impériaux
(χαρτουλάριος των βασιλικών αγελών ) qui date des XIIe-XIIIe siècles14.
Ce fonctionnaire n'est pas mentionné par Philothée au Xe siècle, ce qui
prouve les modifications apportées à Fofficium du logothète des troupeaux
après le Xe siècle. A l'époque du Pseudo-Codinus, le logothète des troupeaux
n'avait plus de fonction15. Les grands domaines impériaux de l'Asie
Mineure existaient toujours dans une certaine mesure sous l'empire de

8. De cer., Appendix : Bonn I, p. 448.


9. G. Kolias, Περί μητάτου, Άθηνα 51, 1941/46, p. 129-142. Le mot μητάτον a
désigné tout d'abord un logis, un logement, puis, dans un sens plus précis, un campement
pour troupes en mouvement.
10. De cer., Appendix : Bonn I, p. 458.
11. Ibid. : p. 459-460.
12. Dolger, Beiträge, p. 24.
13. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 715.
14. Schlumberger, Sigillographie, p. 325.
15. Pseudo-Codinus : Bonn, p. 40 = Verpeaux, p. 18414~16.
LES LOGOTHÈTES 73

Nicée, ce qui explique la relative importance qu'avait alors le logothète


des troupeaux, en particulier sous le règne de Jean III Vatatzès (1222-1254),
qui s'occupa beaucoup de l'armée dont la richesse en chevaux étonnait
chacun16. Le logothète des troupeaux semble avoir eu alors la garde du
Trésor impérial, avec, sous ses ordres, un corps de troupe spécial17. Il est
vraisemblable que la garde du Trésor impérial n'ait été qu'une charge
exceptionnelle et n'ait pas fait partie normalement du service du logothète
des troupeaux. Mais au XIVe siècle, ces grands domaines d'Asie Mineure
avaient disparu, ce qui entraîna la suppression de la plupart des services du
logothète des troupeaux. Le Pseudo-Codinus ignore même les fonctions de
jadis du logothète des troupeaux18. C'est que son office était plus honor
ifique que réel. Il participe aux cérémonies auliques ; aussi le Pseudo-
Codinus décrit-il son uniforme qui, comme celui du logothète de l'armée,
comportait un turban et un épilourikon sans skaranikon19. Bien que devenu
un titre honorifique, le logothétat des troupeaux subsistera jusqu'à la fin de
l'Empire.
Au Xe siècle, le logothète des troupeaux occupait dans la hiérarchie le
40e rang20 et rentrait dans la classe des stratarques21, alors qu'il aurait dû
être rangé dans la classe des sékrétikoi. Les stratarques en effet étaient des
chefs d'ordre militaire. Mais le fait semble pouvoir s'expliquer de la manière
suivante. Le logothète des troupeaux pouvait être appelé à défendre contre
les incursions des ennemis ou contre les pillards les domaines dont il avait
la haute surveillance. Au XIVe siècle, le logothète des troupeaux occupe le
49e rang dans la hiérarchie22. Il est toujours compté parmi les hauts digni
taires, mais il semble être le dernier d'une classe spéciale de dignitaires23,
classe distinguée par certaines particularités de costume24.
Les logothètes des troupeaux sont rarement cités par les chroniqueurs.
C'étaient cependant de hauts personnages, mais ils n'avaient guère l'occa
sionde jouer un rôle politique.

16. Théodore Skoutariôtes : Sathas, MB 7, p. 287.


17. Pachymère : Bonn II, p. 53.
18. Voir note 15.
19. Pseudo-Codinus : Bonn, p. 25 = Verpeaux, p. 1631"4.
20. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 713. Le logothète des troupeaux occupe dans la liste
d'Uspenskij le n° 105. Benesevic estime qu'il faut lire <άπο>λογο-9·έτης των αγελών
[V. BeneSevic, Die byzantinischen Ranglisten nach dem Kletorologion Philothei (De
Cer. 1. II c. 52) und nach den Jerusalemer Handschriften zusammengestellt und revidiert,
BNJ5, 1927, p. 156].
21. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 715. Cf. Bury, Adm. System, p. Ill et 140.
22. Pseudo-Codinus : Bonn, p. 11 = Verpeaux, p. 13830.
23. Id. : p. 58 = p. 21 18-15.
24. J. Verpeaux, Hiérarchie et préséances sous les Paléologues, TM 1, 1965, p. 429.
74 R. GUILLAND

Les historiens nous ont transmis les noms des logothètes des troupeaux
suivants.
1. hagiothéodôritès. Après la mort de Théodore II Lascaris (1258), le
protovestiaire Georges Mouzalon, tuteur du jeune empereur Jean IV
Lascaris, fut régent de l'Empire. Il confia la garde du Trésor impérial à des
hommes sûrs et capables, sous la direction de Hagiothéodôritès, alors
logothète des troupeaux1. Après son couronnement, Michel VIII Paléologue
promut logothète των οίκειακών Hagiothéodôritès, alors logothète des
troupeaux2. Il contresigne le prostagma annonçant aux villes de l'Empire la
mort de Théodore II Lascaris3.
2. métochite, Théodore. Lors de son ambassade, en 1294, avec le futur
patriarche Jean Glykys, alors επί τών δεήσεων d'après Pachymère4, logo
thète du drome d'après Grégoras5, Théodore Métochite, qui fut plus tard
grand logothète et premier ministre d'Andronic II Paléologue, n'était
encore que logothète des troupeaux6, logothète των οίκειακών d'après
Grégoras7. On doit retenir le témoignage de Pachymère, contemporain des
faits, car en 1294 Grégoras venait seulement de naître.
3. pépagomène. Le patriarche de Constantinople Grégoire III de Chypre
(1283-1289) adresse l'une de ses lettres à Pépagomène, logothète des trou
peaux8. Il est peu probable qu'il s'agisse de Nicolas Pépagomène, corre
spondant de Grégoras9.
4. phakrasès, Jean. Logothète des troupeaux sous le règne d'Andronic II
Paléologue (1282-1328), il était lié d'amitié avec Maxime Planude qui lui
écrit onze lettres après 1299, avec Grégoire III de Chypre qui lui écrit avant
1291 et avec Nicéphore Choumnos qui lui écrit après 1299. Il est peut-être
identique à Jean Phakrasès, auteur d'une Liste des Offices impériaux10, à qui
un manuscrit attribue le titre de parakimomène11.

1. Pachymère : Bonn I, p. 53.


2. Id. : Bonn I, p. 109.
3. Id. : Bonn I, p. 53. Cf. Dölger, Regesten, n° 1852.
4. Pachymère : Bonn II, p. 2056.
5. Grégoras : Bonn I, p. 1941.
6. Pachymère : Bonn II, p. 2056.
7. Grégoras : Bonn I, p. 1941. La notice relative à Théodore Métochite est plus
complète dans l'étude consacrée au grand logothète.
8. Grégoire de Chypre, lettre 52 : Eustratiadès, EPh 2, 1909, p. 36-37. La lettre est
antérieure au patriarcat de Grégoire de Chypre.
9. R. Guilland, Nicéphore Grégoras. Correspondance, Paris 1927, p. 370.
10. D. M. Nicol, The Byzantine Family of Kantakouzenos (Cantacuzenus) ca. 1100-
1460, Dumbarton Oaks 1968, p. 234.
11. Ibid., p. 234.
LES LOGOTHÈTES 75

5. Ν. Une lettre de Nicolas Ier le Mystique (901-907 et 912-925) est


adressée au logothete des troupeaux, mais on en ignore le contenu12.
6. N. Une poésie de Manuel Philès est adressée : Au logothete des
troupeaux13. Il semble, d'après cette lettre, que le logothete des troupeaux
aurait été chargé de fournir des vivres et de payer la solde des mercenaires
étrangers. Il aurait eu alors le rôle d'un intendant militaire.
7-8. Il nous est parvenu deux sceaux, l'un de basile, logothete des
troupeaux et spathaire, qui semble dater des VIIP-IXe siècles14, l'autre de
basile, έκ προσώπου du logothete des troupeaux, asèkrètis et protospathaire
impérial, daté du XIe siècle15.

V. — Le logothete des sékréta

Ό λογοθ-έτης των σεκρέτων

Le logothete des sékréta (= des bureaux, des ministères) est mentionné


pour la première fois dans le chrysobulle d'Alexis Ier Comnène de 1081,
organisant la régence de sa mère Anne Dalassène1. Le logothete des sékréta y
apparaît comme un contrôleur général, qui exerçait son autorité non seul
ement sur les finances, mais encore sur toute l'administration civile2. E.
Stein3 a cru pouvoir affirmer que le logothete des sékréta était une création
d'Alexis Ier Comnène, opinion admise par A. Semenov4, par Ch. Diehl

12. Lettre citée dans celle que Nicolas Ier écrivit en même temps à l'économe de la
Grande Eglise qui faisait la visite des domaines de province (PG 111, 260e). Cf. Grumel,
Regestes, n° 757.
13. E. Miller, Manuelis Philae carmina, II, Paris 1857, p. 238.
14. G. Schlumberger, Mélanges d'archéologie byzantine, p. 264. Cf. id., Sceaux
byzantins inédits. 3e série, REG 7, 1894, p. 328-329.
15. C. Maslev, Vizantijski olovni pecati ot Pliska i Preslav, Bulletin de VInstitut
archéologique (Académie bulgare des sciences) 20, 1955, p. 445-462. Mais la lecture du
sceau n° 10 de cette collection est corrigée par V. Laurent {BZ 49, 1956, p. 541) : βασιλικω
όστιαρίω, κριτή καΐ έκ προσώπου του λογο-9-εσίου των αγελών.
1. Texte conservé par Anne Comnène {Alexiade : BonnI, p. 157M603). Cf. Dölger,
Regesten, n° 1073.
2. Ch. Diehl, Un haut fonctionnaire byzantin : le logothete (των σεκρέτων), Mél
anges Ν. Iorga, Paris 1933, p. 217-229. Voir le compte rendu de l'article par G. Stadt
müller dans BZ 34, 1934, p. 373-379.
3. E. Stein, Untersuchungen zur spätbyzantinischen Verfassungs- und Wirtschafts
geschichte, Mitteilungen zur osmanischen Geschichte 1, 1921/22, p. 34.
4. A. Semenov, Über Ursprung und Bedeutung des Amtes der Logotheten in Byzanz,
BZ 19, 1910, p. 440-449.
76 R. GUILLAND

et L. Bréhier5. Hélène Ahrweiler6 a raison de faire remarquer d'abord que


le chrysobulle a été promulgué tout au début du règne, au moment où
l'empereur allait quitter Constantinople pour combattre les Normands, et
qu'il n'avait pas les loisirs nécessaires pour changer quoi que ce fût dans
l'organisation administrative de l'Empire. Ensuite, le logothète des sékréta
semble avoir les mêmes fonctions que Constantin Lichoudès qui, sous
Constantin IX Monomaque (1042-1054), était, d'après son ami Psellos, le
« nœud liant les responsables des autres sékréta désignés également comme
logothètes, mais de tel et tel bureau »7. Constantin Lichoudès aurait été
ainsi mésasmos ou, comme on l'appela plus tard, mésazôn. Sans conclure,
comme Hélène Ahrweiler, que « le logothète des sékréta n'est que le nom
technique du fonctionnaire appelé à cette époque mésazôn ou μεσίτης
των κοινών »8, on doit penser que l'auteur a raison de dire qu'Alexis Ier
Comnène adapta « une ancienne fonction aux besoins du moment »9
plutôt qu'il créa une nouvelle fonction de grande importance du gouver
nement central.
En prenant possession du Grand Palais, Alexis Ier Comnène chargea son
neveu par alliance Michel et l'éparque de la Ville Rhadènos de conduire
l'empereur déchu, Nicéphore III Botaniate, au couvent de la Péribleptos10.
Dans le chrysobulle précité, l'empereur déclare approuver d'avance tous
les actes de sa mère et couvrir toutes les mesures prises par ses ministres
et spécialement par le logothète des sékréta alors en exercice11. Ce logo
thète des sékréta n'est vraisemblablement pas identique au προεστώς των
σεκρέτων cité un peu avant12 et un peu plus loin ό διοικών τα σέκρετα13.
Ce dernier fonctionnaire paraît pouvoir être identifié plutôt avec le prôtoa-
sèkrètis.
Le sékréton, mot venu du latin secretum, a d'abord signifié assemblée et
désigné le consistoire (κονσιστώριον ) ou Conseil de l'empereur. C'est ainsi
qu'Hèsychios explique le mot sékréton, qui est employé dans ce sens dans le

5. Bréhier, Institutions, p. 270.


6. Hélène Ahrweiler, Byzance et la mer, p. 201.
7. Ibid., p. 201.
8. Ibid., p. 201.
9. Ibid., p. 202.
10. Anne Comnène, Alexiade : Bonn I, p. 133-134.
11. Ibid. : Bonn I, p. 157-160 = Zépos, JGR 1, p. xxxin-xxxiv.
12. Ibid. : Bonn I, p. 158 = Zépos, JGR 1, p. xxxrv13 (του προεστώτος των σεκρέτων) .
13. Ibid. : Bonn I, p. 159 = Zépos, JGR 1, p. xxxiv22 (τοϋ κατά τήν ήμέραν διοικούν
τοςτα σέκρετα).
LES LOGOTHÈTES 77

Code de Théodose14. Le mot conserve encore ce sens dans le Livre des


Cérémonies15. Mais il finit par être employé pour désigner les bureaux
administratifs autonomes, chargés du contrôle économique, financier,
judiciaire et fiscal dans tout l'Empire. C'est avec ce sens que l'utilise déjà
le Livre des Cérémonies : τό σέκρετον του γενικού16, το σέκρετον του
ειδικού17.
D'après Müller18, le logothète des sékréta aurait assuré le même service
que jadis le sacellaire, opinion que semble approuver Stein19. Mais Dölger
fait remarquer très justement que cette hypothèse ne saurait être retenue20.
En effet, dans le chrysobulle d'Alexis Ier Comnène de 1081, organisant la
régence d'Anne Dalassène, le logothète des sékréta semble être, malgré les
très grands pouvoirs qui lui sont donnés, « plutôt un chef de Cabinet qu'un
tout-puissant fonctionnaire des Finances ». Si l'hypothèse de Müller corres
pondait à la réalité, on s'expliquerait mal que jusqu'en 1088 le sacellaire
reste à la tête des services financiers et qu'il ne soit pas question du logo
thète des sékréta. En erfet, un document officiel de 1088 porte la signature
du νοτάριος του σακελλαρίου et le contreseing du λογοθέτης των σεκρέτων
qui ne peut être donné que par les fonctionnaires de la chancellerie.
Le texte du chrysobulle de 1081 ne permet pas de préciser d'une façon
très nette le rôle du logothète des sékréta dans la gestion des affaires pu
bliques, car il lui confère des attributions autres que des attributions finan
cières. D'après ce texte, le logothète des sékréta présentera à Anne Dalas
sèneles rapports (άναφοραί) sur les affaires dont il aura à discuter avec elle.
Il contresignera tous les actes d'Anne Dalassène, dont le privilège impérial
est ainsi affirmé ; il interviendra dans la nomination des fonctionnaires, à
propos des αξιώματα, des traitements, des donations de terres, des requêtes
des sujets ; il donnera des ordres au logothète du génikon, avec lequel il

14. Cod. Theod., VI, 35, 7. Cité par Bury, Adm. System, p. 38. Cf. Hesychius, s.v.
σέκρετον, συνέδρων, et Du Cange, Glossarium, s.v.
15. Bury, Adm. System, p. 83-84.
16. De cer., Appendix : Bonn I, p. 4615. Sous Alexis Comnène, voir Zachariae,
JGR 3, p. 398.
17. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 6716. D'après Hélène Ahrweiler (Fonctionnaires et
bureaux maritimes à Byzance, REB 19, 1961, p. 251), la plupart des logothésia ou minis
tères auraient été transformés au XIIe siècle en sékréta ou bureaux administratifs sous
l'autorité du logothète des sékréta.
18. A. Müller, Das Amt der Logotheten in spätromischer und byzantinischer Zeit,
p. 48. Cité par Dölger, Beiträge, p. 18, n. 1.
19. E. Stein, Untersuchungen zur spätbyzantinischen Verfassungs- und Wirtschafts
geschichte, Mitteilungen zur osmanischen Geschichte 2, 1923/25, p. 34.
20. Dölger, Beiträge, p. 18.
78 R. GUILLAND

ne saurait donc être identifié21. Le logothète des sékréta a la direction du


service de la correspondance impériale22 ; de plus, il est chargé de régler les
conflits entre les bureaux de l'administration et les particuliers. Ainsi, le
logothète des sékréta Jean Bélissariôtès en 1196 préside un tribunal réuni
pour régler un conflit entre l'administration et le couvent athonite de Lavra23.
Le logothète des sékréta supervisant tous les bureaux, sa création provoqua
celle d'un nouveau bureau d'enregistrement des actes relatifs au domaine
privé et qui furent enregistrés à la fois dans le logothésion des sékréta et
dans celui du Trésor privé24.
Ces faits et surtout le chrysobulle de 1081 montrent combien le logothète
des sékréta, centralisant et coordonnant les services publics, était alors l'un
des plus hauts personnages de l'Empire. Il était parfois même apparenté à
la famille impériale, comme le montre le cas de Théodore Kastamonitès,
oncle d'Isaac II Ange. Mais il importe de ne pas oublier que les logothètes
des sékréta cités étaient presque tous des hommes de finances, rompus aux
questions fiscales par leur carrière.
On conçoit que le logothète des sékréta, placé au-dessus de tous les
autres logothètes par ses fonctions, ait été désigné par abréviation sous le
nom de grand logothète, appellation qui devait être plus tard officielle sous
les empereurs de Nicée. En effet, Théodore Kastamonitès, oncle maternel
d'Isaac II Ange qui le nomma logothète des sékréta, reçoit pour la première
fois dans un acte officiel l'appellation de grand logothète25. C'est à partir
de 1192 et à propos des successeurs de Kastamonitès qu'il faut examiner de
près les particularités de titulature qui indiquent un changement au moins
dans le vocabulaire26.
Le titre de logothète des sékréta disparaît après 1204, si l'on considère
que Nicétas Choniatès appartient à la période antérieure. Comme on le
verra, il ne figure pas dans la liste du Pseudo-Codinus, pas plus qu'il n'avait

21. Du Cange, Glossarium, s.v.


22. A. Semenov, art. cit., p. 448.
23. P. Lemerle, Notes sur l'administration byzantine à la veille de la IVe croisade
d'après deux documents inédits des archives de Lavra, REB 19, 1961, p. 263, n. 4. Sur
le contrôle judiciaire du logothète des sékréta, voir K. M. Konstantopoulos, Ή δίκη
τοϋ Σεκρέτου, EEBS 10, 1933, p. 295. C'est la raison pour laquelle Reiske {De cer. :
Bonn II, p. 802) appelle le logothète des sékréta rationalis tribunalium variorum.
24. L'enregistrement dans plusieurs sékréta était chose courante. Citons pour exemple
le chrysobulle émis par Michel VII Doukas en 1074 et soumis à cinq bureaux différents en
1075. Cf. Sathas, MB 1, p. 53 ; Dölger, Regesten, n° 1005.
25. Nicétas Chômâtes : Bonn, p. 5743-7.
26. Pour le détail, se reporter aux notices qui suivent concernant Kastamonitès
Bélissariôtès et Choniatès.
LES LOGOTHÈTES 79

figuré dans le Klétorologe de Philothée. L'empire de Nicée et les Paléologues


adoptèrent la dénomination de grand logothète, mais les attributions ne sont
plus celles du logothète des sékréta sous les Comnènes.
Parmi les épithètes et les titres auliques qui accompagnent le nom de
logothète des sékréta, celui de σεβαστός devient négligeable à la fin du
XIIe siècle en raison de sa vulgarisation ; on citera surtout les titres de
μεγαλεπιφανέστατος, πρωτοπανεντιμ,οϋπέρτατος et πρωτονοβελίσσιμος27.

Durant un peu plus d'un siècle, on relève quelques noms de logothètes des
sékréta, dont les mieux connus sont ceux de la fin du XIIe siècle.
1. bélissariôtès, Jean. Sa titulature officielle figure dans un acte de
Lavra daté de 1196. D'après la description de cet acte1 dont nous n'avons
pas encore le texte sous les yeux, Jean Bélissariôtès, logothète des sékréta et
grand logariaste, reçoit mandat de faire respecter les privilèges du monastère
de Lavra par les fonctionnaires de la Mer. La même titulature apparaît
parmi les autres fonctions notables du même personnage énumérées dans le
titre de sa monodie, dont Nicétas Choniatès est l'auteur2. Tandis que le
titre de la monodie pourrait indiquer deux fonctions successives, l'acte
de Lavra atteste le cumul des deux charges à la date de l'acte, en 1196.
Or un acte de même date mentionne le grand tribunal du logothète, ce qui
revient à dire du grand logothète3. L'identité des deux titres attestée déjà
pour Jean Kastamonitès avant 1192 doit être confirmée par les adresses des
lettres de Michel Choniatès à son beau-frère qui ne portent que le titre
de grand logothète4. En raison de la distance qui les sépare, il ne faut pas

27. MM 6, p. 5334 (acte de 1088).


1. P. Lemerle, art. cit., p. 259.
2. Nanianus 281 (= Marcianus XI 22) décrit par A. Mingarelli, Graeci codices
manu scripti apud Nanios patricios venetos asservait, Bologne 1784, p. 474 : μονωδία έπΐ
τφ θανάτω τοΰ γυναικάδελφου αύτοΰ 'Ιωάννου του Βελισσαριώτου θ-ανόντος έν τη πόλει
τη Νικαία · έγεγόνει δέ οδτος έπί των οΐκειακών, λογο&έτης των σεκρέτων, μέγας λογα-
ριαστής και έσύστερον πρωτασηκρήτις και ορφανοτρόφος. En attendant l'édition du
texte, on sait du moins que Bélissariôtès était le beau-frère des Choniatès.
3. MM 4, p. 30514 : παρά τφ μεγάλω λογο&ετικφ δικαστηρίω. Cf. P. Lemerle, art.
cit., p. 264 ; l'auteur fait remarquer que ce tribunal ne peut être que celui de Jean Bélissa
riôtès.
4. Lettres 15 et 53 : Lampros, p. 21 et 88. La seconde date de 1194-1195, mais la
première semble dater des débuts du séjour de Michel à Athènes. Il est peu probable
que Bélissariôtès fût déjà grand logothète à cette date : ou bien la lettre n'est pas classée
exactement dans l'ordre chronologique, ou bien l'adresse est ajoutée au moment de la
formation de la collection. On a fait la même remarque pour les adresses des lettres à
Dèmètrios Tornikès. Cf. J. Darrouzès, Georges et Dèmètrios Tornikès. Lettres et dis
cours, p. 33.
80 R. GUILLAND

confondre Jean Bélissariôtès avec un autre Jean dont le nom de famille


n'est pas connu et qui est mentionné dans les procès-verbaux synodaux
relatifs à Sotèrichos Panteugénos5. L'édition de ces actes suggère cependant
une confusion possible entre deux titres très proches, celui de grand logo-
thète et celui de grand logariaste. En 1156-1157, Jean était certainement
grand logariaste des sékréta6. P. Lemerle a fait remarquer que le grand
tribunal logothétique présidé en 1196 par Jean Bélissariôtès ne figure pas
parmi les quatre tribunaux énumérés dans le prostagma de Manuel Ier
Comnène de mars 11667. Le cumul des deux titres par Bélissariôtès peut
signifier une fusion latente de deux offices très proches par le nom et les
attributions, à travers une évolution indiscernable des titres eux-mêmes.
En tout cas, la faute de copie du Parisinus 1234 suggère que le titre de mégas
du logariaste se communique au logothète des sékréta.
2. chômâtes, Nicétas. Né de famille aisée à Chônes en Phrygie vers le
milieu du XIIe siècle, Nicétas avait été envoyé à Constantinople à l'âge de
neuf ans, pour faire ses études sous la direction de son frère aîné Michel.
Entré de bonne heure au service de l'Etat, il occupa sous les Anges les plus
hautes situations et, entre autres, le poste de logothète des sékréta. Stratège
du thème de Philippopoli lors de la 3 e croisade (1 189), il assista à la prise de
Constantinople par les Croisés en 1204. Grâce à l'amitié d'un Vénitien,
il put se réfugier à Nicée, où il joua un rôle important à la cour de Théo
dore Ier Lascaris. Il vivait encore en 1210. Les fonctions de Nicétas Chômât
es apparaissent principalement dans les titres de ses œuvres : Histoire,
Trésor de l'orthodoxie, Opuscules (discours et lettres). L'auteur a pris soin
d'indiquer sa fonction au moment de la composition de plusieurs discours,
qui ne sont pas classés dans leur ordre chronologique exact dans la col
lection8. Ces renseignements permettent d'esquisser les étapes de sa carrière
consacrée à l'administration des Finances et à son contentieux.

5. Grumel, Regestes, nos 1038, 1041, 1043.


6. Le texte édité par Mai d'après le Vaticanus 680 donne les titres μεγάλου λογαριαστου
(PG 140, 148Ö), μεγάλου λογαριαστου του σεβαστού (PG 140, Π7°). Après vérification
faite par V. Laurent et J. Darrouzès, la lecture τοϋ σεβαστού est une erreur d'édition pour
των σεκρέτων. Mais le nom de la fonction est bien λογαριαστου dans le Vaticanus 680
et le Sinaiticus 1117, f. 348V, λογοθέτου (très abrégé) dans le Parisinus 1234, f. 377. On
lira donc avec certitude λογαριαστου, surtout à cause du témoignage du Sinaiticus, indé
pendant du Trésor de Vorthodoxie de Choniatès.
7. Zachariae, JGR 3, p. 460 s. et 469 s. (Dölger, Regesten, nos 1465-1466). Cf.
P. Lemerle, art. cit., p. 262-264.
8. La collection est contenue dans le Nanianus 281 (actuel Marcianus XI 22). Il n'est
pas utile de citer ici les pièces extraites de ce manuscrit par Sathas (MB) et par Miller
(Historiens des croisades), puisque l'édition critique en est annoncée ; on renverra à la
description de Mingarelli, op. cit., p. 472-474, n°" 91-107.
LES LOGOTHÈTES 81

Comme grammatikos impérial, il compose une adresse au synode pen


dant une campagne en Bulgarie9, l'épitaphios de son collègue Théodore
Trochos10 et un exercice de rhétorique proposé par le logothète du drome
Dèmètrios Tornikès11. Mais le terme grammatikos est très vague et re
couvre certainement d'autres fonctions, puisque Nicétas déclare qu'il était
le collègue de Trochos comme préposé au koitôn12. Dans V Histoire, Nicétas
dit aussi qu'il servait de secrétaire à l'empereur13. Le titre de grammatikos
du logothète14, que Nicétas se donne à l'occasion du discours de l'Epi
phanie en 1190, se rattache peut-être à la mission qu'il remplit peu aupa
ravant à Philippopoli15 et au cours de laquelle il assista à l'arrivée de Frédér
ic Barberousse. Peu après, Nicétas accède à la charge de juge du Velum1 6.
A côté de ces titres qui sont proches de la composition d'une œuvre occa
sionnelle, il faut mettre ceux des grandes œuvres et de la collection des
Opuscules17 . Ces derniers ajoutent trois charges : celle d'éphoros, d'èm
των κρίσεων et de logothète des sékréta18. Ce fut la dernière charge que
Nicétas remplit avant la prise de Constantinople en 1204, puisqu'il en fut
destitué par Alexis V au profit de Philokalios1 9. Mais on remarque enfin dans
certaines recensions de Γ Histoire et du Trésor l'emploi du terme grand logo
thète qui se substitue à celui de logothète des sékréta ou se combine avec lui20.

9. Ibid., p. 472, n° 92.


10. Ibid., p. 472, n° 93.
11. Ibid., p. 473, n° 101. Le titre de logothète donné à Dèmètrios Tornikès doit corre
spondre à la fonction réelle de Dèmètrios au moment du discours.
12. Ibid., p. 472 : προεστώτα του επί των κοινών χρημάτων κοιτώνος. Cette fonc
tion est exprimée en termes différents dans le titre de l'Histoire (προκαθημένου του
κοιτώνος) et dans celui du Trésor (έπ! τοϋ βασιλικού κοιτώνος).
13. Nicétas Choniatès : Bonn, p. 51819 (ύπογραμματεύων).
14. A. MiNGARELLi, op. cit., p. 473, n° 98 : λογοθετικοΰ βντος γραμματικού.
15. Nicétas Choniatès (Bonn, p. 52610"11) : τήν του θέματος Φιλιππουπόλεως ύπε-
ζωσμένοι τηνικαυτα καΐ αρχήν καΐ άπογραφήν.
16. Α. MiNGARELLi, op. cit., n°s 91 et 94 : deux discours à Isaac II prononcés à peu
de distance de la nomination comme juge, probablement en 1191.
17. Pour VHistoire, voir l'édition de Bonn, p. 3 : titre en deux recensions. Pour le
Trésor, il faut citer les catalogues de manuscrits : A. M. Bandini, Catalogus codicum
ntanuscriptorum bibliothecae Mediceae Laurentianae, I, Florence 1764, p. 431 ; R. Devreesse,
Codices vaticani graeci, III, Vatican 1950, p. 130.
18. Dans un titre littéraire d'édition, on met en tête la dernière fonction en date ou
la plus noble ; les autres sont rangées tantôt en ordre décroissant, tantôt en série dont il
reste à déterminer l'ordre chronologique. Dans les titres de Nicétas, un flottement se
fait jour autour du titre de génikos, associé ou non à éphoros : les deux appartiennent à
un service financier, mais la connaissance du titre exact dépend de l'édition critique.
19. Nicétas Choniatès (Bonn, p. 749e"7) : τοϋ τοις σεκρέτοις λογοθετεΐν παραλέλυκεν.
20. On trouve en effet trois rédactions : μεγάλου λογοθέτου (Bonn, p. 3), λογοθέτου
των σεκρέτων (Bonn, p. 3 ; R. Devreesse, op. cit., p. 130), μεγάλου λογοθέτου των
σεκρέτων (Α. M. Bandini, op. cit., p. 431).
82 R. GUILLAND

Peut-être ces variantes veulent-elles dire que Nicétas obtint un nouveau


titre à Nicée, mais selon toute vraisemblance elles gardent le même sens
que les formules antérieures appliquées à Kastamonitès et à Bélissa-
riôtès21.
3. choumnos. On a admis l'existence d'un grand logothète Choumnos,
dont le prénom serait Nicéphore et qui entre en concurrence avec le grand
logothète, en fait logothète des sékréta, Kastamonitès22. En lisant attent
ivement les deux sources citées, on s'aperçoit que Choumnos est simple
mentsébastos et que les actes de 1192 le citent comme décédé23. Choumnos
se distingue parfaitement du grand logothète, décédé lui aussi, comme nous
le disons dans la notice de Kastamonitès. Les éléments de datation restent
un peu vagues, car le chrysobulle de février 1192 récapitule les dettes con
tractées à l'égard des Pisans par Andronic Ier lorsqu'il était en Palestine,
par Alexis Ange (frère d'Isaac), futur empereur, lorsqu'il était détenu par
le comte de Tripoli et enfin par le défunt grand logothète et par le défunt
sébastos Choumnos et par d'autres, défunts ou survivants. Les titres donnés
aux deux derniers, le logothète et Choumnos, sont ceux qu'ils avaient à
leur décès, non pas nécessairement ceux qu'ils avaient en 1183-1185, date
probable de leur emprunt aux Pisans24.
4. doukas, Andronic. Un chrysobulle d'Alexis Ier Comnène, vraisem
blablement relatif à des propriétés du monastère athonite de Xénophon
dans le katépanikion de Kalamaria et de la région de Stomion, mentionne
le logothète des sékréta Andronic Doukas25.
5. hexamilitès, Serge. Une novelle d'Alexis Ier Comnène de 1082 est
contresignée par le protoproèdre Serge Hexamilitès, logothète des sékréta26.
6. kamatèros, Grégoire. D'origine très simple, Grégoire Kamatèros

21. Cf. le compte rendu de G. Stadtmüller, déjà cité, dans BZ 34, 1934, p. 373-379.
22. Dölger, Regesten, n°s 1607, 1610. J. Verpeaux, Nicéphore Choumnos, homme
d'Etat et humaniste byzantin, Paris 1959, p. 28. Le prénom Nicéphore est cité par Dölger,
Beiträge, p. 23, η. 1.
23. MM 3, p. 534~35 et 2717~18 : του πρωτοπανεντιμοϋπερτάτου μεγάλου λογοθέ-
του εκείνου και τοϋ σεβαστού εκείνου τοΰ Χούμνου. Telle est l'expression des deux
chrysobulles alléguée par Dölger, mais la conjonction et l'article obligent à distinguer
deux personnes.
24. MM 3, p. 5-6.
25. Dölger, Regesten, nos 1294 et 2226. Cf. D. I. Polemis, The Doukai. A Contribut
ion to Byzantine Prosopography, p. 193, n° 233, qui estime qu 'Andronic Doukas vécut
plutôt sous Alexis II Comnène ou, plus vraisemblablement, sous Alexis III Ange.
26. Cf. Zachariae, JGR 3, p. 349 ; Dölger, Regesten, n° 1083. Il est certain que
Serge, logothète des sékréta, mentionné lors du procès d 'Italos, est Serge Hexamilitès ;
cf. IRAIK2, 1897, p. 425. On ignore s'il est encore ce protonobélissime et logothète des
sékréta anonyme attesté en mai 1088 et mars 1089. Cf. P. Gautier, REB 29, 1971, p. 238.
LES LOGOTHÈTES 83

était logariaste du sékréton du génikon en 108827. Une lettre de Théophy-


lacte de Bulgarie, vers 1094, le qualifie de ύπογραμματεύων de l'empereur
(Alexis Ier Comnène), le félicite pour sa nomination comme prôtoasè-
krètis et nobélissime28, et le qualifie de l'épithète modeste de λαμπρός,
qui ne saurait d'ailleurs qualifier le titre de nobélissime. Comme secrétaire
d'Alexis Ier Comnène, il avait été chargé de recueillir les aveux de Nicéphore
Diogène29. Devenu agent du fisc, il avait acquis une énorme fortune en
parcourant le territoire de l'Empire pour percevoir les impôts. Il finit par
épouser une princesse de la famille impériale nommée Irène Doukaina30 et
fut alors nommé logothète des sékréta31. Il fut promu sébaste. Il mourut
en 1126 ou 113232. Jean II Comnène l'avait adjoint au protovestiaire Gré
goire Taronite pour diriger l'Etat33. Théodore Prodrome écrivit une mono-
die sur lui lors de sa mort et Nicolas Kalliklès une épigramme pour la même
occasion34.
7. kastamonitès, Théodore. Il est le premier à porter le titre de grand
logothète dans un document officiel, le chrysobulle d'Isaac II pour Gênes
en date d'avril 1192, où il est désigné comme oncle de l'empereur et comme
défunt sans que soit précisé son nom35. C'est Nicétas Choniatès qui nous
apprend que Kastamonitès était l'oncle maternel de l'empereur Isaac
II36 ; vantant son expérience des affaires et son habileté à faire rentrer les
contributions publiques, l'historien ajoute que l'empereur l'avait promu
logothète des sékréta37. A cette occasion, Nicétas Choniatès ne manque
pas d'épancher sa bile contre l'un de ses anciens supérieurs en le repré-

27. P. Gautier, Monodie inédite de Michel Psellos sur le basileus Andronic Doukas,
REB 24, 1966, p. 163. Cf. MM 6, p. 50.
28. P. Gautier, art. cit., p. 163, n. 31.
29. Anne Comnène : Bonn I, p. 452. Cf. F. Chalandon, Les Comnènes, II, p. 20,
qui traduit d'une façon peu heureuse logothète des sékréta par logothète du Secret.
30. D. I. Polemis, op. cit., p. 78-79.
31. Nicétas Choniatès : Bonn, p. 13. Voir aussi J. Darrouzès, Georges et Dèmè-
trios Tornikès. Lettres et discours, p. 43-46 et p. 129, n. 5.
32. V. Laurent, Un sceau inédit du protonotaire Basile Camatéros. Contribution
à la prosopographie byzantine, Byz. 5, 1931, p. 265-266.
33. Nicétas Choniatès : Bonn, p. 14.
34. V. Laurent, art. cit., p. 266.
35. MM 3, p. 2716-17. Le texte distingue bien ce grand logothète et le sébaste Choum-
nos ; cf. Dölger, Regesten, n° 1610.
36. Nicétas Choniatès (Bonn, p. 5745~6) : τφ προς μητρός θείφ.
37. Id. (p. 5748"10) : μάλιστα περί τας δημοσίας συνεισφοράς δεξιώτατος (...), δνκαΐ
λογοθέτην των σεκρέτων προβαλόμενος.
84 R. GUILLAND

sentant soutenu sur sa litière par deux porteurs comme une amphore de
vin ; ce logothète reçut les privilèges d'une coiffure et d'une couverture de
selle de pourpre, et sa signature de même couleur équivalait pratiquement
à celle de l'empereur38. Tout autre est le ton des lettres de Michel d'Athènes,
le frère de Nicétas, lorsqu'il s'adresse au même personnage ; il ressort des
superlatifs adressés au logothète que celui-ci avait le titre de mégas et qu'il
dirigeait tout39. De la comparaison de ces témoignages on peut conclure
que Kastamonitès cumulait le titre de mégas avec la charge de logothète
des sékréta.
8. Michel. En prenant possession du Grand Palais, Alexis Ier Comnène
avait chargé son neveu par alliance Michel d'une mission de confiance40.
Par un chrysobulle de 1 109, Alexis Ier Comnène chargea Michel de procéder
à un arpentage de toutes les propriétés de Lavra de la région de Thessa-
lonique. Michel est mentionné dans le chrysobulle comme pansébaste sébaste
et logothète des sékréta41.
9. PHiLOKALios ou philokalès, Eumathios. Un sceau le qualifie de panséb
aste, acolouthos et éparque42. En 1 189 et 1 190, il était envoyé en ambassade
auprès de Frédéric Ier Barberousse43. A la fin de 1196 ou au début de 1197,
il était de nouveau envoyé en ambassade auprès d'Henri IV d'Allemagne,
au sujet d'un tribut que devait payer Byzance44. Il fut probablement nommé
logothète des sékréta par Alexis V Mourtzouphlos en 1204, en remplace
ment de Nicétas Chômâtes45, qu'il supplante aussi dans sa position sénat
oriale.

38. Nicétas Chômâtes (Bonn, p. 5758~9) : καΐ δια βαφής όμοιας (7 : όξυβαφή)
ύποσημαίνεσθαι τους τόμους των δημοσίων λόγων καΐ τα γραμμάτια. Tout le passage
de Nicétas (p. 574-576) précède la mention du décès et constitue la monodie très
peu élogieuse du défunt.
39. Lettre 44 (Lampros II, p. 7024~25) : ό τα πάντα διοικών παμμέγιστος λογοθέτης.
De plus on remarque que l'adresse contient la même désignation (πανυπερεντιμοϋπέρ-
τατος θείος) que le chrysobulle de 1192 (note 35). Le couple παμμέγας-μέγας est natu
rellement parallèle à πανσέβαστος-σεβαστός.
40. Cf. Anne Comnène : Bonn I, p. 133-134.
41. Rouillard-Collomp, Actes de Lavra, I, p. 14724. Notice sur le personnage par
P. Gautier, REB 28, 1970, p. 216-217, et REB 29, 1971, p. 237.
42. V. Laurent, Les sceaux byzantins du médaillier Vatican, p. 55-56.
43. Ansbertus, Historia de expeditione Friderici imperatoris {MGH Scriptores 5,
Berlin 1928, p. 6024~25) : pansevasto acholitho domno Eumathio Philocali. Cf. Dölger,
Regesten, n° 1602.
44. V. Laurent, op. cit., p. 55-56.
45. Nicétas Choniatès : Bonn, p. 749. Théodore Skoutariôtès : Sathas, MB 7,
p. 445. Cf. V. Laurent, op. cit., p. 55-56.
LES LOGOTHÈTES 85

VI. — Le logothète du trésor privé

Le logothète du Trésor privé est le successeur du κόμης των πριβάτων


(cornes rerum privatarum), qui fut appelé ensuite ό ειδικός, ou bien ο
έπί του ειδικού" (ιδικού), puis ό επί των οικειακών, et enfin λογοθέτης
των οικειακών. La charge a évolué sous ces appellations distinctes qui
visent toutes le bien privé.
A la haute époque (IVe-Ve siècles), le κόμης των πριβάτων administrait
les biens de la Couronne ainsi que les biens patrimoniaux de l'empereur.
Au VIe siècle, ces derniers furent administrés, semble-t-il, par un fonction
naire spécial, le κόμης του πατριμωνίου (comes sacri patrimoniï)1 . Jadis le
Trésor public (aerarium) était distinct du Trésor impérial (fiscus), mais à la
haute époque byzantine ils tendirent à se confondre, l'empereur ayant le
droit de puiser indifféremment dans les deux, bien qu'ils restassent distincts
pour l'administration et la comptabilité2. L'ancien aerarium était placé
sous la direction du cornes sacrarum largitionum (κόμης λαργιτιώνων)3 et
l'ancien/iscMi sous celle du cornes rerum privatarum (κόμης των πριβάτων)4.
Quant aux biens patrimoniaux des empereurs, ils étaient administrés d'abord
par des curateurs, sous la haute surveillance du cornes rerum privatarum,
puis par un fonctionnaire vraisemblablement indépendant, le cornes sacri
patrimonii (κόμης του πατριμωνίου), comme il vient d'être dit. D'après un
scoliaste des Basiliques, les ressources de l'empereur provenaient jadis de
trois sources : Y aerarium, le fiscus et le patrimonium5 .
L'ofScium du cornes rerum privatarum se composait d'un personnel
nombreux6, mais la création du cornes patrimonii restreignit nécessairement
ses compétences et il n'eut plus que la direction du Trésor privé.
Les textes des Ve et VIe siècles mentionnent à diverses reprises les comités
rerum privatarum. Dans les Actes du concile de Chalcédoine (451), le

1. Notifia Dignitatum Ocddentalium : Böcking, p. 54 et 374-379. Cf. D. Serrigny,


Droit public et administratif romain du IVe au VIe siècle, I, p. 105 ; Daremberg et Saglio,
DAGR, s.v. illustris, n. 5.
2. Des fonctionnaires palatins gérant des caisses publiques et des biens patrimoniaux
sont mentionnés par Procope, Anecdota, 22 (Bonn III, p. 12424-1251) : τοις παλατίνοις,
οι δή άμφί τε τους θησαυρούς καΐ τα πριβάτα καλούμενα τότε πατριμόνιον.
3. De cer., I, 87 : Bonn I, p. 394s.
4. Ibid., I, 89 : p. 40117 ; I, 91 : p. 41319.
5. Basiliques, VII, 1, 3 (Scheltema, Scholia I, p. 37, n° 5) : τρεϊς ήσαν το παλαών
«Ε τοϋ βασιλέως περιουσίαι · λαργιστζίονες, πριβάτα και πατριμονάλιαι.
6. Notitia Dignitatum Ocddentalium, XI : Backing, p. 54.
86 R. GUILLAND

κόμης των θείων πριβάτων est qualifié de μεγαλοπρεπέστατος7. Sous


Julien l'Apostat, les historiens citent Félix, gardien du Trésor, et Elpidios,
responsable des biens privés de l'empereur. Théodoret8 répète les termes de
Philostorge. Jean d'Antioche décrit l'ascension sous Zenon (474-491)
d'un Epinikos qui parvint à la charge des biens privés, puis à celle du Tré
sor impérial, et enfin au siège de préfet de la Ville9. Le même empereur créa
comte des biens privés Alexandre, l'ambassadeur du roi Honoric10. Le
Code de Justinien mentionne les comités rerum privatarum suivants : Pelage
sous Arcadius en 38511, Aeneas sous Zenon12, Floros sous Justinien Ier,
qui lui adresse la novelle 12 où il l'appelle κόμης των απανταχού θείων
πριβάτων et qui était aussi curator dominicae domus, Pierre, vir illustris,
qui était également curator divinae domus Augustae et partageait cette
dernière fonction avec Macedonius vir illustris1*. Les Novelles de Justinien
Ier font également allusion au cornes rerum privatarum14. Cassiodore nous a
laissé la formule d'investiture de ce dernier, dite Formula comitivae pri
vatarum et une Formula comitivae patrimonii15.
Au VIe siècle, Jean Lydus mentionne le cornes chargé de l'administration
du Trésor de l'Empire et le cornes qui administrait les biens du domaine de
la Couronne, c'est-à-dire les biens dont l'empereur avait la disposition en
tant qu'empereur16. La gestion des biens patrimoniaux des empereurs,
c'est-à-dire ceux qu'ils possédaient en propre comme particuliers, relevait
également, comme on l'a vu, du cornes rerum privatarum. Par prudence ou

7. Mansi 6, 564 = Schwartz III, I, 1, p. 5516.


8. Théodoret, Histoire ecclésiastique, III, 11 (Parmentier, p. 1892~5) : Φίλιξ μέν,
ταμίας ών των βασιλικών θησαυρών, Έλπίδιος δέ, τών ιδίων τοϋ βασιλέως χρημάτων
τε και κτημάτων την ήγεμονίαν πεπιστευμένος * κόμητα δέ πριβάτων τόν τοιούτον
'Ρωμαίοι προσαγορεύειν είώθασιν. Cf. Philostorge, Histoire ecclésiastique, VII, 10 :
Bidez, p. 189. Reiske avait donc raison de douter de la valeur de la citation de ce texte
à propos du logothète des troupeaux (ci-dessus, note 7, p. 71).
9. C. Müller, Fragmenta Historicorum Graecorum, IV, p. 618 (211) : έπί την τών
πριβάτων άνέδραμεν αρχήν, εκείθεν τε και τών βασιλικών θησαυρών, και προς τόν
υπάρχον άνέβη θρόνον.
10. Malchus, Excerpta : Bonn, p. 24067.
11. Cod. Just., VII, 65, 7.
12. Ibid., VII, 37, 2.
13. Ibid., VII, 37, 3.
14. Novelle 123, 43 ; Novelle 124, 2.
15. PL 69, 688 et 691.
16. J. Lydus, De magistratibus, II, 27 (Bonn, p. 19113~15) : κόμητα γάρ λαργιτιώ-
νων Ιταλοί λέγουσιν αντί τοΰ προεστώτα τών της βασιλείας θησαυρών, καΐ κόμητα
πριβάτων αντί τοϋ τών ιδία πώς τοις βασιλεΰσι προσηκόντων. ZosiME {Histoire, V,
52 : Bonn, p. 2939~u) connaît la même distinction : Πατρώνιος ό τών θησαυρών
προεστώς και ό τών ανηκόντων ίδία τφ βασιλεϊ ταμιείων προβεβλημένος.
LES LOGOTHÈTES 87

par esprit de méthode, Anastase Ier (491-518) enleva la gestion des biens
patrimoniaux au κόμης πριβάτων et la confia à un fonctionnaire spécial,
dit πατριμώνιος. Ce fonctionnaire nouveau était l'intendant de la fortune
personnelle de l'empereur, fortune qui lui venait de ses ancêtres17. La
séparation des biens patrimoniaux d'avec les biens de la Couronne18 était
prudente, étant donné l'instabilité du pouvoir dans une même famille.
Procope parle d'un certain Eudaemôn, homme fort riche et titré consulaire,
qui était intendant de la fortune privée de l'empereur19. Ce personnage
était probablement κόμης πατριμωνίου.
La distinction entre le Trésor public et le Trésor privé s'affaiblit de plus
en plus et les deux Trésors tendirent à se confondre. Aussi est-il difficile de
préciser les attributions respectives du cornes largitionum et du cornes rerum
privatarum à la fin du VIe siècle.
Au début du VIIe siècle, sous Phokas (602-610), il est encore question d'un
κόμης των λαργιτιώνων20 ; mais au cours du VIIe siècle se fit la substitution
des logothètes aux comtes dans la direction des administrations financières.
A la fin du siècle, les divers logothétats sont organisés. Le κόμης των
λαργιτιώνων est devenu le λογοθέτης του γενικού. Il est probable que le
changement de nom fut accompagné d'une modification dans les attribu
tions.Vraisemblablement vers la même époque, l'expression κόμης πριβάτων
tombe en désuétude. Le mot πριβάτα fut remplacé par le mot grec ειδικά, et
plus tard ιδικά, qui lui est synonyme21.
Au VIIIe siècle, semble-t-il, 1 'ειδικός λόγος, qui avait recueilli au début
du siècle précédent une partie des agents administratifs de la préfecture du

17. J. Lydus, De magistratibus, II, 27 (Bonn, p. 19119~21) : δ λεγόμενος πατριμώνιος


αντί του φύλαξ της Ιδία πώς ανηκούσης τω βασιλεΐ καΐ τυχόν έκ προγόνων περιουσίας,
δν (...) 'Αναστάσιος (...) άνεστήσατο.
18. Justinien Ier {Novelle 69, 4, 2) cite : καΐ τα θεια πριβάτα καΐ τό θείον πατριμώνιον.
Lécrivain (Darembero et Saglio, DAGR, art. latifundia) distingue la domus divina du
sacrum patrimonium. Cependant Procope semble les considérer comme identiques :
την βασίλειον οίκίαν αυτήν ήν δή πατριμώνιον καλεϊν νενομίκασι {De hello gotthico,
I, 4 : Bonn II, p. 2114~15) ; τα χωρία της βασιλέως οικίας, ήν δή πατριμώνιον καλοΰσι
{ibid., Ι, 6 : Bonn II, ρ. 3221~22).
19. Procope, Anecdota, 29 (Bonn III, p. 15624~25) : επίτροπος τέως της βασιλέως
ουσίας Ιδίας.
20. Théophane : Bonn, p. 459 = de Boor, p. 29720.
21. Evagre (III, 39 : Bidez-Parmentier, p. 13719) connaît déjà l'expression : των
καλουμένων ειδικών σκρινίων. Les Basiliques (VI, 1, 109 : Heimbach I, p. 149 = Schel-
tema I, p. 16327) citent le κόμης της Ίδικης περιουσίας. Dans le De cer. (I, 89 : Bonn I,
p. 40117), l'expression κόμης τών πριβάτων reçoit le scholion των ιδικών. Balsamon enfin
{Nomocanon, I, 5 : PG 104, 989B) écrit : πριβάτον γαρ λέγεται κατά Λατίνους τό ίδικόν.
Cf. Du Cange, Glossarium, s.v. Ίδικόν.
88 R. GUILLAND

prétoire, était devenu un service complètement indépendant du sacellaire,


qui avait réuni sous son autorité les agentes des largitiones et de Yarca22.
Au IXe siècle, sous Théophile, il est question de Nicétas Triphyllios,
chef du sékréton de Feidikon23. Avant de quitter la régence, l'impératrice
Theodora, mère de Michel III, fit connaître aux sénateurs le montant des
sommes contenues dans le Trésor impérial24. Michel eut vite fait de dila
pider ces richesses considérables et, à court d'argent, il réunit les objets
d'art en or qui ornaient le Grand Palais et les fit porter au Trésor impérial
pour être fondus. Quant aux vêtements impériaux tissés d'or, il les envoya à
l'Eidikon, pour être fondus également25 ; la mort seule empêcha Michel III
de profiter de son acte de vandalisme26. Montant sur le trône en 867,
Basile Ier fit ouvrir le Trésor27 ; il le trouva presque vide, mais un vieil
eunuque, le protospathaire Basile, lui fournit l'état des sommes dépensées et
la liste des personnages qui avaient reçu illicitement de grosses sommes
d'argent prélevées sur le Trésor ; l'empereur exigea des bénéficiaires qu'ils
rapportent la moitié des sommes touchées par eux sur le Trésor2 8. Les libé
ralités que Basile Ier fit au peuple lors de son avènement furent prises non
point sur les fonds publics, mais sur ses propres biens29, c'est-à-dire non
sur le Trésor public, mais sur sa fortune personnelle. Basile Ier trouva
d'ailleurs à l'Idikon une certaine quantité d'or, reliquat de la fonte des
objets d'art et des vêtements impériaux, que Michel III n'avait pas eu le
temps de dilapider. Constantin VII Porphyrogénète mentionne que Basile
Ier trouva cet or dans l'Idikon et qu'il le fit frapper à son effigie30. La dis
tinction entre le Trésor impérial ou public et le Trésor privé apparaît assez
nettement ; les biens personnels de l'empereur ne rentraient pas dans ces
deux Trésors.
D'après ce qui précède, il semble que l'eidikos exerçait son autorité
sur le Phylax. C'était un bâtiment dans lequel étaient déposés certains
objets précieux et qui était situé non loin de l'abside nord-est du Salon d'Or

22. Dölger, Beiträge, p. 36. Bury, Adm. System, p. 85.


23. Genesius, III (Bonn, p. 71 6~7) : Νικήτα, ζπί τοϋ ειδικού σεκρέτου καθηγουμένω.
24. Cedrenus (Bonn II, p. 15822) : τφ βασιλικφ ταμιείω.
25. Id. (ρ. 1609"11) : τφ βασιλικφ ταμιείω (...) τφ είδικφ.
26. Id. : ρ. 160, 203.
27. Théophane Cont. (Bonn, p. 25516) : τον των βασιλείων θησαυρών άνέωξε φύλακα.
Cf. Cedrenus : Bonn II, p. 20217.
28. Théophane Cont. (Bonn, p. 2565) : τφ βασιλικφ θησαυροφυλακείω. Cf. Cedre
nus (Bonn II, p. 20224"25) : το δημόσιον, το βασιλικόν ταμιεϊον.
29. Théophane Cont. (Bonn, p. 25616~17) : ούκ εκ των δημοσίων (ουδέ γαρ
ήν), άλλ'έκ τών οικείων, ά έκέκτητο πρότερον. Cf. Cedrenus (Bonn II, p. 2034~δ) :
ούκ έκ τών δημοσίων, άλλ'έκ τών ιδία διαφερόντων αύτφ.
30. Théophane Cont. (Bonn, p. 2572· n) : τοϋ έν τφ είδικφ (...) χαραχθείς.
LES LOGOTHÈTES 89

ou abside de Saint-Théodore31. Le Phylax semble avoir été séparé de la


Sakellè qui était construite dans un autre endroit et faisait probablement
partie des dépendances du patriarcat32. La Sakellè avait en dépôt un Trésor
particulier. Lorsque le Phylax fut enlevé à l'administration de Γε'ιδικος λόγος,
il y aurait eu, selon Dölger33, une modification orthographique. Avant le
Xe siècle, on ne disait pas ειδικός, mais ιδικός, comme le prouvent le Takti-
kon d'Uspenskij et une lettre de Photius adressée à Nicétas, protospathaire
et préfet de l'Idikon34. Le sens donné au mot ιδικός semble une réminis
cencede Γίδική τράπεζα du VIe siècle à l'époque de Justinien Ier et de
Πδική περιουσία (res privata) ou de Γίδική κτησις (sacrum patrimonium),
comme le remarque avec raison Bury35, pour qui semblable rapprochement
avec ces institutions n'existe ni pour les noms ni pour les fonctions. Quant
à Stein36, il voudrait voir dans Γίδική τράπεζα un office réunissant le
produit des impôts en nature, le mot ιδικός dérivant du substantif είδος au
sens de marchandise ; bien qu'ingénieuse, l'hypothèse ne saurait être
retenue. 'Ιδικός a son sens traditionnel, qu'il a du reste conservé pendant tout
le moyen âge, et veut dire : particulier, personnel, spécial, comme dans l'e
xpression ιδικός νόμος (loi spéciale), fréquente dans les Novelles de Justinien
jer 37 j^ ε^ικ6ν> c'est un Trésor spécial, par opposition à το γενικόν, Trésor
général ou public. Au Xe siècle, le mot ίδικόν semble avoir disparu ou, tout
au moins, est l'équivalent du mot είδικόν38. Philothée et les témoignages
écrits contemporains ne connaissent que ce dernier mot, mais la rareté
des documents ne permet pas de trancher la question ίδικός-ειδικός dans
l'état actuel de nos connaissances.
Au Xe siècle, le Klètorologe de Philothée mentionne 6 του ειδικού ou
ό επί του ειδικού39. Il est souvent aussi appelé ό επί του ειδικού λόγου40
ou encore simplement ο ειδικός41. Le préfet de l'Eidikon avait-il conservé

31. R. Guilland, Etudes de topographie de Constantinople byzantine, I, p. 112.


32. Ibid., II, p. 18.
33. Dölger, Beiträge, p. 36, n. 4 (p. 37).
34. Cités par Dölger (ibid.).
35. Bury, Adm. System, p. 98.
36. E. Stein, Studien zur Geschichte des byzantinischen Reiches, vornehmlich unter
den Kaisern Justinus II. und Tiberius Constantinus, p. 149. Bury (Adm. System, p. 99,
n. 1) fait remarquer que dans les papyrus égyptiens είδος, dont Stein voudrait faire
dériver είδικόν, signifie impôt.
37. Dölger, Beiträge, p. 36, n. 1 et 2.
38. Cf. Reiske (De cer. : Bonn II, p. 156) ; notes à Cedrenus (Bonn II, p. 846).
39. De cer., II, 52 (Bonn I, p. 7146 = Bury, p. 13728) : ή τοΰ ειδικού (αξία).
40. Ibid. (p. 7201"2 = p. 1428) : τφ επί τοΰ είδικοϋ λόγου.
41. Ibid., Π, 15 (Bonn, p. 5947) : ό ειδικός μετά των ιδίων νοταρίων. Le local est
appelé une fois Ίδικόν (Ι, 30 : Bonn I, p. 1699).
90 R. GUILLAND

l'appellation de κόμης ? C'est possible, mais non certain, bien que les
Basiliques lui donnent cette qualification42. En tout cas, le ministère de
l'eidikos paraît singulièrement diminué, si on le compare au ministère de
l'ancien cornes rerum privatarum. Le logothète des troupeaux dirige une
importante administration qui appartenait jadis à ce dernier. Le grand
curateur et le curateur des Manganes ont également dans leur département
divers services qui jadis étaient de son ressort. L'eidikos n'est pas non plus,
comme l'était le cornes rerum privatarum, l'intendant des biens patrimoniaux,
car cette charge semble avoir été confiée à un fonctionnaire eunuque, le
protovestiaire.
L'eidikos avait à sa disposition des fonds provenant de sources spéciales
et affectés aux diverses dépenses de l'empereur, aux largesses et aux aumônes
que faisait l'empereur, en certaines circonstances, par exemple à l'occasion
des dîners officiels43. Les sommes nécessaires au paiement des traitements
du personnel de l'Hippodrome étaient prélevées par les préposites sur cette
même caisse44. Il semble que les diverses administrations financières, après
avoir perçu les sommes qui leur étaient dues, devaient ensuite les verser au
koitôn ou Trésor, qui était le lieu où l'on enfermait l'or et l'argent, en lingot
ou monnayé, ainsi que divers objets précieux45. C'est ce que permet d'in
duire une note de la Logarikè d'Alexis Ier Comnène46. Les diverses admin
istrations financières centralisaient probablement dans leurs bureaux
les revenus de leur département respectif et les versaient au Trésor à leur
compte après certaines formalités. Ainsi le protospathaire Krinitès Arotras,
stratège du Péloponnèse, verse au koitôn le tribut dont il avait frappé des
habitants révoltés du Péloponnèse47.
L'empereur prélevait dans le Trésor les sommes dont il avait besoin,
sur tel ou tel compte selon les cas. Il est au surplus probable que chaque
administration gardait dans ses caisses des sommes plus ou moins import
antes. Basile Ier, on l'a vu, ayant trouvé vide le Trésor impérial, découvrit
à l'Eidikon une certaine quantité d'or et divers objets d'art en or que son

42. Cf. note 21 (p. 87).


43. De cer., II, 52 (Bonn I, p. 74818 = Bury, p. 16014~15) : παρά τοΰ ειδικού λόγου.
44. Ibid., II, 56 (Bonn I, p. 80716) : έκ τοΰ είδικοΰ λόγου.
45. Du Cange, Glossarium, s.v. κοιτών. Anne Comnène rapporte la mésaventure
d'un percepteur d'impôts qui apportait au koitôn le produit de ses levées (Alexiade, II,
vi, 4 : Bonn I, p. 108-109).
46. Zachariae, JGR 3, p. 388 (note au tableau) : και ταΰτα μέν είσί τα λογισ&έντα
και εγνωσμένα τφ δημοσίω και είσκομιζόμενα έν τφ βασιλικφ κοιτώνι. On distingue
clairement les rôles du fisc et les apports à la caisse impériale.
47. De administrando imperio, 50 (Bonn, p. 223 = Moravcsik- Jenkins, p. 23452~53) :
είσεκόμισεν (...) έν τφ Φεοφυλάκτφ κοιτώνι.
LES LOGOTHÈTES 91

prédécesseur voulait envoyer à la fonte48. L'eidikos avait donc des fonds


pour les besoins courants, mais, pour les besoins extraordinaires, il devait
s'adresser au koitôn. En cas d'expédition, le koitôn confiait les objets
précieux qu'il renfermait soit à l'administration du vestiaire impérial, soit
à une autre administration pour qu'il soit mis à la disposition de l'empe-
reur 49 .
En campagne, l'eidikos devait tenir une comptabilité compliquée. Les
frais causés par les achats de vivres, les distributions et largesses faites par
l'empereur à l'armée étaient couverts en principe par les revenus des thèmes ;
à défaut, c'était la caisse de l'eidikos qui payait50. Le fourrage nécessaire
pour le convoi impérial était en principe fourni par les protonotaires des
thèmes, mais, si l'empereur recevait des prestations bénévoles, l'eidikos
devait en faire état, afin qu'au retour de l'expédition on puisse opérer une
réduction sur le total des fournitures faites par les protonotaires. Le calcul
des sommes à déduire était effectué au bureau de l'eidikos51.
Lors des expéditions militaires, le rôle de l'eidikos était important, car
il devait emporter dans ses bagages une multitude d'objets pour le service
de l'empereur ainsi que de grosses sommes d'argent. Pour le transport de
tout ce matériel, 46 bêtes de somme étaient mises à sa disposition. Les objets
emportés consistaient principalement en étoffes et en vêtements divers,
achetés sur le forum et destinés sans doute à être offerts en présents à
l'occasion. Il est d'ailleurs probable que certaines fournitures étaient faites
directement par les ateliers impériaux. L'eidikos emportait également une
foule d'ustensiles, tels que lanternes, chandeliers, briquets, etc., ainsi
qu'une provision de chandelles, des feuilles de parchemin52.
L'eidikos emportait également de grosses sommes soit en monnaies
d'or (χάραγμα), soit en monnaies d'argent (μιλιαρήσια). Ces dernières
servaient pour les distributions faites à l'hétairie impériale, aux pages impér
iaux, aux scholaires et autres soldats qui montaient la garde autour de
l'empereur. Ces sommes étaient prises sur le koitôn53. Le sacellaire était
chargé en même temps que l'eidikos de transporter du numéraire, destiné
aux innombrables dépenses de l'expédition. Il est probable que le sacellaire
transportait les fonds destinés aux dépenses générales et que l'eidikos
n'avait à sa disposition que les fonds destinés aux dépenses personnelles de

48. Voir ci-dessus note 25.


49. De cer., Appendix : Bonn I, p. 46610-12.
50. Ibid. : p. 45113~20.
51. Ibid. (p. 4778) : εις το σέκρετον του είδικοϋ.
52. Ibid. : p. 473-474.
53. Ibid. (p. 4731) : λαμβάνει 6 ειδικός άπό του κοιτώνος.
92 R. GUILLAND

l'empereur et aux diverses gratifications et largesses. C'est ce qui semble


ressortir de la comparaison des textes54.
Parmi les dépenses incombant à l'eidikos, en temps de guerre à l'exté
rieur, il faut encore mentionner les sommes destinées à l'équipement des
bêtes de somme du convoi impérial ; il versait trois livres au comte de
l'Etable55, ainsi qu'une certaine somme à Γέπί της τραπέζης et au δομέστικος
της υπουργίας pour l'achat des denrées nécessaires pour la table impérial
e56.
Lors de l'expédition de Crète en 949, l'administration de l'eidikos eut
à faire face à de fortes dépenses pour l'équipement de la flotte. Le Livre
des Cérémonies indique scrupuleusement les dépenses et énumère en détail
les objets les plus divers achetés en vue de l'expédition57. Le sékréton de
l'eidikos ne fournit pas sur ses stocks les objets énumérés ; il les achète ou
verse à des fonctionnaires qualifiés les sommes nécessaires pour les achats.
L'administration du vestiaire impérial (το σέκρετον του βασιλικού βε
στιαρίου) participa aussi dans une large mesure aux dépenses de l'expédition
de Crète et dut procurer diverses fournitures58.
Ces relations, au plan financier, entre l'eidikon et le vestiaire impérial
ont amené Dölger à penser que le second devait être subordonné au pre
mier59 ; il estime aussi qu'une partie des objets précieux appartenant au
vestiaire impérial était déposée à l'Eidikon ou, tout au moins, dans un bât
iment voisin, le βεστιάριον του Καριανοΰ, sous la direction de l'eidikos. Les
textes ne permettent pas de confirmer cette hypothèse intéressante. Les
directions de l'eidikon et du vestiaire impérial étaient indépendantes, tout
en collaborant dans certaines conditions.
L'eidikos avait un Trésor particulier, alimenté par les revenus tirés de
l'exploitation des ateliers impériaux (εργοδοσία). Au Ve siècle, les fabriques
d'armes (fabricae) étaient sous le contrôle du magister officiorum60 ; les
autres manufactures dépendaient du cornes sacrarum largitionum, mais nous
ignorons à quelle époque les fabriques impériales passèrent sous le contrôle
de l'eidikos. On ne saurait conclure toutefois avec Bury61 qu'une fois les
services du cornes sacrarum largitionum passés sous la direction du génikos,

54. De cer., Appendix : Bonn I, p. 471 16 et 473.


55. Ibid. : p. 462.
56. Ibid. : p. 463.
57. Ibid., II, 45 : p. 671, 673-674, 677-678.
58. Ibid. : p. 672, 676.
59. Dölger, Beiträge, p. 38.
60. Bury, Adm. System, p. 99.
61. Ibid, p. 99.
LES LOGOTHÈTES 93

l'administration des ateliers impériaux serait devenue indépendante et que


son directeur aurait été appelé eidikos par opposition au génikos.
Les fabriques et les ateliers impériaux rapportaient des revenus import
ants; c'est la raison pour laquelle l'eidikos est un fonctionnaire d'ordre
financier ; il occupait le 52e rang dans la hiérarchie62 et appartenait à la
classe des secrétaires63. Comme les grands officiers de la Couronne, l'e
idikos pouvait aspirer aux plus hauts titres nobiliaires : anthypatos-patrice,
patrice, protospathaire, etc.64 Ni le Livre des Cérémonies, ni les chroni
queurs ne mentionnent l'appellation exacte de ce fonctionnaire ; il n'est
pas qualifié de logothète, car il n'existait encore au Xe siècle que quatre
logothètes (du génikon, de l'armée, du drome et des troupeaux), cités
parmi les 60 grands officiers de la Couronne ; les ambassadeurs étrangers
demandaient seulement des nouvelles des quatre logothètes65.
L'eidikos faisait en tout cas partie des hauts fonctionnaires, car il assiste
aux grands dîners officiels66 et il est bien un fonctionnaire des Finances,
comme l'indique la désignation officielle de son service (ειδικός λόγος)67.
L'officium de l'eidikos, tel que Philothée l'établit pour la fin du IXe
siècle et le début du Xe, était bien moins important que celui du κόμης των
πριβάτων tel qu'il est donné dans la Notitia Dignitatum du Ve siècle.
Il comprenait les fonctionnaires suivants68.
1. Οι βασιλικοί νοτάριοι του σεκρέτου, les notaires impériaux chargés
des services du bureau. Ils étaient en général titrés spathaires69 ; ils tou
chaient une part assez importante des honoraires que versaient les nou
veaux fonctionnaires lors de leur nomination70. Dèmètrios, notaire impér
ialde l'eidikon, prit part à une conspiration contre Romain Ier Lécapène
(919-944)71. En 1045, un acte officiel mentionne Jean Kamatèros, proto
spathaire, juge de l'Hippodrome et notaire impérial de l'eidikos72.

62. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 7146 = Bury, p. 13728.


63. Ibid. : p. 71518 = p. 13824.
64. Ibid. : p. 7297, 7323 = p. 14728, 14927.
65. Ibid., II, 47 (Bonn I, p. 68110) : πώς εχουσιν οι δ' λογοθέται.
66. Ibid., II, 15 : p. 5947 ; II, 52 : p. 75019.
67. Ibid., II, 52 : Bonn, p. 720*-2 = Bury, p. 1428.
68. Bury, Adm. System, p. 100.
69. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 73523 = Bury, p. 152s3.
70. Ibid., II, 49 : Bonn I, p. 694.
71. Théophane Cont. : Bonn, p. 400, 732, 892. Leon Grammattcus : Bonn, p. 305.
72. MM 5, p. 214~15 : βασιλικός νοτάριος τοϋ ειδικού λογοθέτου. Son chef Eusta-
thios s'intitule έπΐ τοϋ κοιτώνος και ειδικός.
94 R. GUILLAND

2. Οί άρχοντες, les directeurs, successeurs des έργαστηριαρχαί και


άρχοντες73.
3. Οι έβδομάριοι του ειδικού, mentionnés dans le Livre des Cérémonies1*.
4. Οι μειζότεροι των εργοδοσιών75, les surveillants des manufactures.
Celles-ci, on l'a dit, étaient une source importante de revenus pour l'emper
eur. Théophane signale en 792 l'incendie de l'atelier des tréfileurs d'or76.
D'après les Patria, Constantin Ier le Grand aurait construit les Manganes
pour en faire un atelier impérial d'armes77. Irène (797-802) établit des
ateliers dans le quartier d'Eleuthère78. Constantin V transforma la chapelle
de Saint- Jean-Prodrome en un atelier79. V Όξεοβαφεΐον, signalé par les
Patria80 dans le quartier de Narsès, était vraisemblablement un atelier
impérial de teinture de pourpre.
L'administration de l'eidikos était établie au Grand Palais dans un bât
iment dont la tradition attribuait la construction à Constantin Ier le Grand81.
Il est d'ailleurs peu probable que ΡΕίδικόν ou Ίδικόν, souvent mentionné
dans le Livre des Cérémonies62, soit l'édifice bâti par Constantin Ier le
Grand. Il se trouvait entre le Triconque et la grande salle du Lausiakos,
précédant le Chrysotriklinos83. Du Cange suppose que les biens patrimo
niaux des empereurs y étaient conservés84, ce qui est possible. A l'Eidikon
se trouvait aussi un bureau spécial85, chargé de recueillir le produit de
l'impôt du chrysargyre, sorte d'impôts des patentes, aboli par Anastase
Ier (491-518), mais ce bureau n'avait rien de commun avec l'Eidikon du

73. Les deux sceaux qui nous sont parvenus de ces fonctionnaires datent du VIIe
siècle. Cf. G. Schlumberger, Mélanges d 'archéologie byzantine, p. 240-241 ; B. A.
Pan&nko, Katalog molivdovulov, IRAIK 13, 1908, p. 114, n° 402.
74. De cer., Appendix : Bonn I, p. 478, 587.
75. Sur ce terme, voir N. Svoronos, Recherches sur le cadastre byzantin et la fiscalité
aux XIe et XIIe siècles : le cadastre de Thèbes, BCH 83, 1959, p. 68, n. 3.
76. Théophane (Bonn, p. 726 = de Boor, p. 4693~4) : μέρος τοϋ βασιλικού έργοδοσίου
των χρυσοκλαβαρίων.
77. Patria CP (Preger II, ρ. 21615"16) : τά μάγγανα εις βασιλικόν έργοδόσιον.
78. Ibid. : ρ. 269, η° 173.
79. Ibid. (ρ. 1483) : έργοστάσιον.
80. Ibid. : ρ. 249, η° 94.
81. Ibid. : ρ. 145*.
82. De cer., I, 14 : Bonn I, p. 91 ; I, 30 : p. 169 ; I, 32 : p. 174-175 ; I, 52 : p. 263 ;
I, 66 : p. 297 ; II, 1 : p. 519.
83. J. Ebersolt, Le Grand Palais de Constantinople et le Livre des Cérémonies, p.
124-126.
84. Du Cange, Constantinopolis Christiana, II : Paris, p. 154 = Venise, p. 121 ;
Id., Glossarium, s.v. ίδικόν.
85. Evagre, III, 39 (Bidez-Parmentier, p. 13720) : σκρινίων ειδικών.
LES LOGOTHÈTES 95

Livre des Cérémonies ; il dépendait du cornes sacrarum largitionum, le


chrysargyre étant effectivement un impôt annuel versé au Trésor public86.
L'administration de l'eidikos continua à fonctionner pendant un certain
temps au XIe siècle. En 1045, en effet, un pittakion de Constantin IX
Monomaque, daté de février, est adressé au vestarque, préfet du koitôn
et eidikos Eustathe, au sujet d'une rente de 72 nomismata pour le couvent
de la Néa Monè ; cette rente devra être inscrite par l'eidikos sur la liste des
protospathaires87. En 1052, le même empereur prescrit au sékréton de
l'eidikon d'inscrire un pittakion en faveur du même monastère à Chios88 ;
en mai 1058, Isaac Ier Comnène adresse un pittakion au sékréton de l'e
idikos en faveur du monastère de la Théotokos Dékapolitissa89. Psellos,
de son côté, fait allusion au sékréton de l'eidikos à propos d'un procès
jugé en 1056, d'où il ressort que sous le règne de Constantin IX Monomaq
ue la liste des personnages pourvus de titres nobiliaires était conservée à
ce bureau90. Or les titres nobiliaires étaient souvent vendus par l'empereur ;
il est probable que le prix en était versé dans les bureaux de l'eidikos, où
ils étaient enregistrés. Dans ces conditions il est possible que les dotations
afférentes aux titres nobiliaires étaient payées par l'administration de l'e
idikos. Il est bien certain que le ressort des administrations ne restait pas
immuable, mais variait selon les époques. Au XIe siècle, la compétence de
l'eidikos peut avoir été étendue dans certains domaines.
Toutefois, certains faits montrent la perte progressive d'importance de
l'eidikos. Déjà après la mort de Constantin IX Monomaque (1054),
Psellos adresse une lettre à Γέπί των οίκειακών qui va remplacer l'eidikos91.
Le chrysobulle de Michel VII Doukas, daté d'octobre 1074, est enregistré
dans divers logothétats, dont le sékréton des οίκειακά92. Un chrysobulle
de Nicéphore III Botaniate, daté de 1079, est adressé aux mêmes logothét
ats93.D'autre part, de nombreux actes officiels de la seconde moitié du
XIe siècle montrent l'existence de 1'έπΙ τών οίκειακών et de 1'είδι.κός, mais

86. Zonaras, XIV, 3 (Bonn III, p. 13 = Dindorf III, p. 25918~22) : χρυσαργύρου


δασμός (...) είσφέρειν τω δημοσίφ τέλος έτήσιον. Cf. Du Cange, Glossarium, s.v.
χρυσάργυρον.
87. MM 5, p. 1. Cf. Dölger, Regesten, n° 865.
88. Citation dans BZ 14, 1905, p. 593. Cf. Dölger, Regesten, n° 906.
89. Edition dans ΕΑ 4, 1883/84, p. 431. Cf. Dölger, Regesten, n° 940.
90. Sathas, MB 5, p. 211e, 2121. Sur ce procès de Psellos, voir P. Lemerle, « Roga »
et rente d'Etat aux Xe-XIe siècles, REB 25, 1967, p. 85 s.
91. Lettre 23 : Sathas, MB 5, p. 250 ; lettre 163 : ibid., p. 421.
n° 92.
1005.Sathas, MB 1, p. 535 : εις τδ σέκρετον τών οίκειακών. Cf. Dölger, Regesten,
93. Ibid., p. 157. Cf. Dölger, Regesten, n° 1042.
96 R. GUILLAND

ce dernier est toujours mentionné après le premier. Il en est ainsi, par exemp
le,dans les actes de Lavra94, entre 1057 et 1086. Toutefois, un chryso
bulled'Alexis Ier Comnène, vraisemblablement de 1081, est encore enre
gistré au sékréton de l'eidikos95.
Au XIIIe siècle, l'eidikos n'est plus mentionné ; l'appellation semble
être tombée en désuétude et avoir été remplacée par celle d'iTtl των οίκεια-
κών. Ce titre se trouve bien avant le XIIe siècle ; pratiquement inexis
tantdans les sources écrites, il se rencontre sur les sceaux des VIIIe-IXe,
Xe et Xe-XIe siècles96. Sa fréquence permet de dire avec Dölger97 qu'il
ne peut s'agir alors que d'un fonctionnaire du Grand Palais, et non d'un
haut fonctionnaire comme au XIIe siècle. Ainsi un επί των οίκειακών
παρασκευής désignerait le maître des cérémonies dans sa fonction de
directeur de la domesticité du Grand Palais, dont il surveillait l'activité
lors de la préparation de la réception de chaque dimanche98 ; il en est de
même du directeur ou surveillant de la domesticité attachée au service des
différentes salles du Grand Palais99 et de Γέπί των οίκειακών τραπέζης100,
chef des services de la table impériale, qui, selon Dölger, pourrait être
assimilé à Γέπί της τραπέζης του δεσπότου101. Parmi les sources écrites
antérieures au XIIe siècle, on peut citer un acte de bornage des terres de
l'Athos et de celles des habitants de Hiérissos, daté de 943 et mentionnant
Parilos, protospathaire impérial et επί των οίκειακών102.
Le premier document officiel où figure Γέπί των οίκειακών est un chryso
bullede Constantin IX Monomaque, de 1044, en faveur du monastère
de la Néa Monè de Chios103. Comme le mot l'indique, Γέπί τών οίκειακών
avait l'administration des biens privés de l'empereur. En 1085, en effet, le
sékréton de Γέπί τών οίκειακών enregistre une donation par chrysobulle

94. Rouillard-Collomp, Actes de Lavra, I, nOs 27, 28, 30, 31, 36, 37, 38, 41.
95. Ibid., p. 97, n° 56.
96. Schlumberger, Sigillographie, p. 555-556.
97. Dölger, Beiträge, ρ, 44, n. 3.
98. Dölger (ibid.) conteste l'interprétation d'un sceau par Schlumberger (Sigillo
graphie, p. 138) en citant De cer., II, 2 (Bonn I, p. 5237) : ό κατά τήν ήμέραν κλητο-
ρεύων άρτοκλίνης ; le fonctionnaire serait celui qui est de service le vendredi.
99. Schlumberger, Sigillographie, p. 557-558 : κουβικουλάριος καΐ έπί τών οίκεια
κώντοΰ εσωτερικού. Cf. Dölger, ibid.
100. Schlumberger, Sigillographie, p. 600.
101. De cer., II, 52 : Bonn I, p. 72515 = Bury, p. 14515.
102. Rouillard-Collomp, Actes de Lavra, I, p. 1111. Mais cet acte est un faux.
103. EA 4, 1883/84, p. 40616. Cf. Dölger, Regesten, n° 862. Un document latin
mentionne en 1032 l'envoi comme ambassadeur en Italie méridionale d'Anatolikos,
epi tu ykiaku, accompagné du protospathaire, juge du Velum et de l'Hippodrome (Lupus
Protospatharius, cité par Dölger, Beiträge, p. 44, n. 4).
LES LOGOTHÈTES 97

au monastère de l'Eléousa d'une propriété de 500 modioi, provenant du


domaine privé de l'empereur104. Le même bureau enregistre en 1087 la
donation de Leipsô à Christodoulos de Patmos105. Le typikon du monast
ère du Pantokrator à Constantinople, rédigé en 1136, signale l'intervention
du même sékréton dans le rachat par le fisc aux héritiers de la propriété
Néoboliadès, dont l'empereur Jean II Comnène fait don au monastère106.
La disparition du logothétat de l'eidikon a amené la fin de la distinction
entre les biens de la Couronne et les biens de l'Etat. En fait, les empereurs
n'étaient pas tenus de respecter cette distinction et ils pouvaient rattacher
tel ou tel bien à l'une ou l'autre des catégories de dépôt. Ainsi Basile Ier
avait rattaché la κουρατωρία des Manganes aux biens de la Couronne et
l'avait détachée des biens de l'Etat107.
Nous avons quelques renseignements sur l'activité financière de Γέπί των
οίκειακών. En 1079, un chrysobulle de Nicéphore III Botaniate frappait
d'une amende de 5 livres d'or au profit de l'oikeiakon quiconque transgress
erait les décisions impériales en faveur d'un monastère élevé en l'honneur
de saint Jean Prodrome dans l'île de Strobèlos108. En 1082, Alexis Ier
Comnène inflige dans un chrysobulle en faveur de Venise une amende de
10 livres d'or aux contrevenants qui devront les verser à ce même sékré
ton109. En 1145, ce sékréton enregistre un prostagma de Manuel Ier Comnèn
e exemptant d'impôts certains paysans du monastère de Saint- Jean-
Prodrome de Patmos110. Un chrysobulle de Manuel Ier Comnène en faveur
de Venise, daté de 1148, inflige aux contrevenants une amende de 10 livres
d'or à verser à ce sékréton111. En 1 160, un acte du même empereur exempte
d'impôts le monastère de l'Eléousa et il est enregistré à ce bureau112.
D'autre part, une prostaxis de Manuel Ier Comnène de 1151 ou 1166,
interdisant aux clercs de s'occuper de banque, est enregistré aussi à ce

104. L. Petit, Le monastère de Notre-Dame de Pitié, IRAIK 6, 1900, p. 2730 :


του σεκρέτου των οίκειακών. Cf. Dölger, Regesten, n° 1124.
105. MM 6, p. 29.
106. A. Dmitrievskij, Opisanie Hturgiceskich rukopisej, Ι, ρ. 69822~23 : το έξωνη&έν
παρά τοϋ δημοσίου δια του σεκρέτου του έπΐ των οίκειακων.
107. Théophane Cont. (Constantin, Vita Basilii) : Bonn, p. 337. Cf. Bury, Adm.
System, p. 101.
108. MM 6, p. 2023. Cf. Dölger, Regesten, n° 1045.
109. Zachariae, JGR 3, p. 4384"5 : exigetur a secreto ton oichiacon. Cf. Dölger,
Regesten, n° 1081.
110. MM 6, p. 105 : lysis du mois de mars enregistrée en avril dans cinq bureaux
dont celui de Γέπί των οίκειακών. Cf. Dölger, Regesten, n° 1340.
111. Zachariae, JGR 3, p. 52829 : multabitur a secreto epi ton ykiacon. Cf. Dölger,
Regesten, n° 1373.
112. L. Petit, art. cit., p. 32.
98 R. GUILLAND

sékréton113. Mais pendant presque tout le règne de Manuel Ier, c'est le


même personnage qui garde la charge des biens privés de l'empereur.
En effet, dès sa première citation dans les actes officiels, Théodore Pantech-
nès s'intitule nomophylax et επί των οίκειακών114. Les autres fonctions
de Pantechnès évoluèrent, mais lorsqu'il est cité pour la dernière fois en
1181/1182 comme éparque et premier dikaiôdotès, il est encore directeur
du même bureau des biens privés qu'en 1148115. La carrière de Pantech
nès témoigne de la stabilité des fonctionnaires dévoués aux Comnènes,
car en même temps son frère poursuivait une carrière parallèle dans l'Egli
se116.
De ce qui précède il ressort que Γεπί των οίκειακών eut des attributions
très diverses, surtout sous le règne de Manuel Ier Comnène ; il remplaça
le logothète du génikon, dont il n'est plus fait mention sous les Comnènes,
et garda des attributions analogues à celles de l'ancien eidikos. Mais,
avec l'avènement d'Isaac II Ange (1185-1195 et 1203-1204), le logothète
du génikon retrouva ses fonctions et il semble que l'importance de Γέπί
τών οικειακων diminua.
La charge de Γέπί τών οίκειακών fut maintenue par les empereurs de
Nïcée et par les Paléologues. Il est alors appelé λογο&έτης τών οίκειακών.
Lors du synode réuni pour juger des accusations portées contre le
patriarche Bekkos en 1273 par Jean Choumnos, parmi les assistants figurent
le grand logothète Acropolite et Dèmètrios Iatropoulos, λογο&έτης τών
οίκειακών117. Vers 1282, ce dernier fonctionnaire est envoyé en ambas
sadepar Michel VIII Paléologue pour négocier le mariage d'Eudocie,
troisième fille de l'empereur, avec Jean II, empereur de Trébizonde118. En
1294, Théodore Métochite, alors λογο&έτης τών οίκειακών, est envoyé
en Arménie pour négocier le mariage de l'empereur Michel IX Paléologue
avec Marie (Rita, Xénè), fille du roi Léon II d'Arménie119.
Au XIVe siècle, le titre de λογοθέτης τών οίκειακών est devenu un titre

113. Zachariae, JGR 3, p. 492. Cf. Dölger, Regesten, n° 1384.


114. Le chrysobulle de février 1148 (Dölger, Regesten, n° 1372) était déposé en ori
ginal au bureau de Γέπί τών οίκειακών, et celui-ci, Théodore Pantechnès, signa le docu
ment au verso après le grand logariaste. Voir l'édition de S. Pétrddès, ROC 14, 1909,
p. 204 et 208.
115. Nicétas Chômâtes : Bonn, p. 306.
116. Brève notice sur ces deux correspondants de Georges Tornikès dans J. Darrou-
zès, Georges et Dèmètrios Tornikès. Lettres et discours, p. 49-52 (p. 50 : le cursus de
Théodore).
117. Pachymère : Bonn I, p. 377.
118. Id. : p. 522.
1 19. Id. : Bonn Π, p. 205. Grégoras : Bonn I, p. 193. Cf. Dölger, Regesten, n° 2156b.
LES LOGOTHÈTES 99

nobiliaire, dont le détenteur n'est astreint à aucun service. Le Pseudo-


Codinus connaît le λογοθέτης των οίκειακών. Il occupe le 39e rang de la
hiérarchie120 ; son costume est décrit : un turban, un épilourikon sans
skaranikon121. Il n'a plus de fonction, comme le préteur du peuple et
le grand logariaste. Il est cependant vraisemblable que cette charge honor
ifique continua à être conférée à divers titulaires aux XIVe et XVe siècles.
Ainsi les termes πριβάτα, ειδικά ou Ιδικά et οίκειακά sont synonymes.
L'ensemble des biens compris sous cette rubrique fut administré par un
fonctionnaire spécial qui porta selon les époques le titre de comte ou de
directeur ou enfin de logothète. Aux XIIIe, XIVe et XVe siècles, la fonction
a disparu, mais le titre est resté comme purement honorifique ou nobil
iaire.

Les sources écrites et la sigillographie nous ont conservé seulement quel


ques noms dont nous relevons l'exacte titulature.

ειδικός :
1. eustathe, sous Constantin IX Monomaque1.
2. Grégoire, primicier, koitonite, eidikos, connu seulement par un
sceau, datant de l'époque des Comnènes2.
3. léon, vestis et eidikos, de l'époque des Comnènes, connu seulement
par ce sceau3.

επί του ειδικού :


4. Nicétas triphyllios, sous l'empereur Théophile4, correspondant de
Photius5.

επί των οίκειακών :


5. Théodore pantechnès, sous Manuel Ier Comnène, de 1148 à 1181/82,
en cumul avec d'autres fonctions6.
6. parilos, sous le règne de Romain Ier Lécapène7.

120. Pseudo-Codinus : Bonn, p. 10 = Verpeaux, p. 13920.


121. Id. : p. 24 = p. 161a5"27.
1. MM 5, p. 1. Cf. Dölger, Regesten, n° 865.
2. Schlumberger, Sigillographie, p. 518.
3. Ibid,, p. 518.
4. Genesius : Bonn, p. 71.
5. Photius, Epist., II, 65 (Valettas, n° 130) : PG 102, 981.
6. Cursus résumé dans J. Darrouzès, op. cit., p. 50-51.
7. Cf. n. 102, p. 96.
100 R. GUILLAND

λογοθέτης των οίκειακών :

7. angélos. La missive qu'adressa Michel VIII Paléologue au pape


Jean XXI en 1277 et dans laquelle il mettait le pape au courant de ses
efforts pour réaliser l'union des Eglises, fut remise à ce dernier par une
ambassade qui comprenait Angélos, que le texte de la missive, parvenue
seulement dans sa rédaction latine, qualifie de secretis camerae, équivalent
peut-être de λογοθέτης των οίκειακών8.
8. hagiothéodôritès. Logothète des troupeaux sous le règne de Michel
VIII Paléologue, il fut promu λογοθέτης τών οίκειακών9, preuve que cette
charge était supérieure à la première.
9. Dèmètrios iatropoulos. Un chrysobulle de Michel VIII Paléologue,
daté de 1275 et confirmant au couvent de Xeropotamou la propriété de
toutes ses possessions anciennes et récentes10, mentionne le λογοθέτης
τών οίκειακών pansébaste sébaste et oikeios de l'empereur11. Par un prak-
tikon, celui-ci accorde au monastère athonite de Xeropotamou une import
anteoikonomia pour un revenu de 300 hyperpères environ dans la région
de Hiérissos12. Dèmètrios Iatropoulos est mentionné comme λογοθέτης
τών οίκειακών en 1273 et 128213. Il est vraisemblable que le Dèmètrios
Iatropoulos qui signe une décision judiciaire en 129514 ne soit pas ce
λογοθέτης τών οίκει,ακών15.
10. Théodore métochite1 6.

VIL — Le grand logothète

Ό μέγας λογοθέτης

Du Cange attribue à Andronic II Paléologue (1282-1328) la création de


la dignité de grand logothète en faveur de Théodore Métochite, en s'appuy-

8. Dölger, Regesten, n° 2029.


9. Pachymère : Bonn I, p. 109.
10. J. Bompaire, Actes de Xeropotamou, Paris 1964, p. 91, acte 10.
11. Ibid., p. 9359.
12. Ibid., p. 9 et 90.
13. Pachymère : Bonn I, p. 125, 377, 522.
14. F. Dölger, Aus den Schatzkammern des heiligen Berges, Munich 1948, p. 167 :
6 πρωτασηκρήτης επί τών οίκειακών... (titulature surprenante pour l'époque).
15. Contrairement à ce qu'accepte J. Bompaire {op. cit., p. 91), malgré déjà les réserves
faites par Dölger.
16. Voir la notice sur Théodore Métochite dans l'étude sur le grand logothète.
LES LOGOTHÈTES 101

ant sur le texte du Pseudo-Codinus1. Mais ce dernier dit simplement que


« l'empereur Andronic II Paléologue, pour honorer Théodore Métochite
qui était logothète du génikon, le fit grand logothète ». Andronic II modifia
de plus l'ordre hiérarchique des offices et éleva le grand logothète du 12e
au 9 e rang : « Celui-ci était au-dessus du stratopédarque, mais au-dessous
du prôtostratôr »2.
Le grand logothète est incontestablement le successeur du logothète
des sékréta. Dans la liste du Pseudo-Codinus, comme dans les listes simi
laires, tous les logothètes (du génikon, du drome, des troupeaux, des oikeia-
ka, de l'armée) sont mentionnés3 ; seul le logothète des sékréta a disparu ;
par contre apparaît la dénomination de grand logothète qui ne peut être
que l'ancien logothète des sékréta4. Au XIVe siècle, le grand logothète
était spécialement chargé de la correspondance impériale avec les souve
rains étrangers5 ; cette mission avait été jadis celle du logothète du drome
qui paraît la remplir encore à la fin du XIIe siècle6. Selon Dölger, c'est un
grand logothète qui aurait transmis à Frédéric Ier Barberousse une lettre
d'Isaac II, en octobre 1 1897. Mais la titulature des logothètes sous les Anges,
voilée par des formes littéraires, des traductions et des interprétations,
n'est pas toujours facile à saisir. La notice précédente, par l'examen de la
titulature des logothètes des sékréta Kastamonitès et Bélissariôtès, nous a
fait admettre que le titre de grand logothète s'introduit vers la fin du siècle,
comme associé à logothète des sékréta.
Au XIIIe siècle, Georges Acropolite, grand logothète, apparaît comme
un véritable ministre des Affaires Etrangères. C'est lui sans doute qui
avait conclu le traité avec le prince russe Ouroch, car Théodore II Lascaris
le rendit responsable de l'inexécution dudit traité, en affirmant que cette
affaire le regardait. La scène entre l'empereur et son ministre fut très vive ;
disgracié quelques jours, Georges Acropolite reprit son rang et ses fonctions,

1. Du Cange, Glossarium, s.v.


2. Pseudo-Codinus : Bonn, p. 9 = Verpeaux, p. 13714~21.
3. Id. : p. 9-11 = p. 13714, 1388· a°· 28· 30.
4. Id. : p. 9 = p. 1378.
5. Id. : p. 32 = p. 1741"9.
6. Voir la notice de Dèmètrios Tornikès, p. 65-66.
7. Dölger, Regesten, n° 1598. En cet endroit Dölger donne grosslogothetes pour
l'équivalent de cancellarius (texte d'Ansbertus), alors qu'il s'agit de Jean Doukas logo
thète du drome ; cf. Nicétas Chômâtes : Bonn, p. 52010. Mais au n° 1590, Dölger avait
admis une autre équivalence (archicancellarius = λογοθέτης τοΰ δρόμου ) d'après le
chrysobulle de juin 1189 (Zachariae, JGR 3, p. 53715). Il est évident que la forme latine
ne peut faire foi contre les témoignages grecs contemporains. Cette terminologie de la
fin du XIIe siècle a joué un rôle pour la formation d'une hypothèse sur la collégialité de
l'office (voir ci-dessus, p. 44, n. 105).
102 R. GUILLAND

et Théodore II Lascaris s'empressa de lui communiquer les affaires qu'il


avait avec le despote d'Epire8.
Sous les Paléologues, le grand logothète est le chef de la diplomatie et
véritablement un premier ministre, fonction qui existait déjà avant et qui
était liée à des activités précises9. Conseiller de l'empereur pour la politique
intérieure et extérieure, directeur général des Finances, le grand logothète
aurait eu comme fonction adjointe à sa fonction propre le μεσαστίκιον10.
On ne saurait cependant l'affirmer, faute de textes précis et indiscutables.
Ce que l'on peut dire, c'est que le mésazôn était certainement le conseiller
très écouté de l'empereur, mais que le personnage choisi pour cette fonc
tion n'était pas nécessairement le grand logothète11.
Le grand logothète, semble-t-il, était chargé de la surveillance des bu
reaux de l'ancienne préfecture de la Ville et de ses faubourgs, mais Andronic
III Paléologue transféra ce service au prôtostratôr, moins par suite d'une
réforme administrative que pour une raison politique et militaire. Le jeune
empereur Andronic III Paléologue avait triomphé définitivement de son
aïeul, Andronic II Paléologue, mais sa vie et son trône restaient encore
menacés12.
Seul le grand logothète a conservé au XIVe siècle certaines attributions,
car les autres logothètes ont cessé d'être des fonctionnaires pour être de
simples dignitaires sans fonctions. Quatre anciens logothètes n'exercent
plus de charge et on ne sait même plus quel service ils rendaient aupara
vant13. D'autre part, le grand logothétat n'a pas connu le système de la
collégialité. Le grand logothète est seul de son rang, comme le grand do
mestique, le préfet du caniclée, le mégaduc, le grand connétable, le grand
baioulos, entre autres.

8. Acropolite : Bonn, p. 134-142 = Heisenberg I, p. 126-133. Cf. J. B. Papado-


poulos, Théodore II Lascaris empereur de Nicée, Paris 1908, p. 91-92.
9. La fonction de premier ministre est étudiée en dernier lieu par R.-J. Loenertz, Le
chancelier impérial à Byzance au XIVe et au XIIIe siècle, OCP 26, I960, p. 275-300. Il
reprend les données réunies par H.-G. Beck {BZ 48, 1955, p. 309-338) et J. Verpeaux
(Byzantinoslavica 16, 1955, p. 270-296). Le P. Loenertz estime que le terme est technique
et désigne strictement un chancelier.
10. Du Cange, Glossarium, s.v. : Nam logothetae adjuncta erat μεσάζοντος functio,
ut qui continuo régi adesset ejusque mandata exciperet et dictaret.
11. C'est ce que dit expressément le Pseudo-Codinus (Bonn, p. 33 = Verpeaux, p.
1747-9) u s'ensuit que mésazôn n'est pas à proprement parler un titre officiel spécifique.
12. Grégoras : Bonn I, p. 4322~3. Cf. L.-P. Raybaud, Le gouvernement et V administ
rationcentrale de V empire byzantin sous les premiers Paléologues, Paris 1968, p. 211.
13. Pseudo-Codinus : Bonn, p. 34 = Verpeaux, p. 17615~16 (logothète du génikon) ;
p. 36 = p. 17824-27 (logothète du drome) ; p. 40 = p. 1848~9 (logothète de l'armée) ;
p. 40 = p. 18414"16 (logothète des troupeaux).
LES LOGOTHÈTES 103

Sans doute Andronic II Paléologue nomma-t-il grand logothète Const


antin Acropolite vers 1292, mais il ne lui confia pas la direction des affaires
publiques, qu'il donna à Nicéphore Choumnos, préfet du caniclée14. Const
antin Acropolite se trouva être grand logothète en même temps que Théo
dore Métochite, mais il était en quelque sorte un grand logothète fictif, honoré
d'un titre, mais sans fonctions réelles15. Bien que les hautes charges n'eus
sentqu'un seul titulaire, l'empereur pouvait néanmoins confier la même char
ge à deux ou plusieurs personnages, sans leur donner les mêmes obligations.
Dans la hiérarchie, le grand logothète du XIVe siècle occupait le 12e
rang entre le grand connétable et le protosébaste1 6. Mais Andronic II
Paléologue, voulant honorer Théodore Métochite, alors logothète du
génikon, le nomma grand logothète et le plaça au 9e rang, entre le grand
stratopédarque et le prôtostratôr. L'ordre hiérarchique ainsi modifié par
Andronic II fut maintenu et la charge de grand logothète resta très élevée
au XVe siècle17. Avec Théodore Métochite, l'office de grand logothète
était devenu l'un des plus importants et il allait garder le 9e rang dans la
hiérarchie jusqu'à la fin de l'Empire, comme en témoigne le cas de Georges
Sphrantzès, nommé vers 1451-1452 grand logothète par Constantin XII
Dragasès1 8.
Le Pseudo-Codinus nous a conservé la description du costume du grand
logothète : skiadion, kabbadion et skaranikon, comme celui du prôtostrat
ôr, mais sans bâton19.
L'épithète μέγας du grand logothète est parfois remplacée par d'autres
qui ne semblent pas très officielles. Ainsi la liste anépigraphe en vers,
composée vers 1328 et attribuée par certains manuscrits à Manuel Philès,
au parakimomène Jean Phakrasès ou à l'un des frères Xanthopoulos20,
qualifie Théodore Métochite λογοθετών μέγιστος21. Le superlatif, intro
duitici pour la commodité du vers, se rencontre d'ailleurs sous d'autres
formes dès les premières mentions d'un grand logothète22.

14. Pachymère : Bonn Π, p. 193.


15. Cantacuzène : Bonn I, p. 6714, 681.
16. Pseudo-Codinus : Bonn, p. 9 = Verpeaux, p. 1378.
17. Sphrantzès : Grecu, p. 90. Pseudo-Phrantzès : Bonn, p. 228 = Grecu, p. 372.
18. Sphrantzès : Grecu, p. 90-94. Pseudo-Phrantzès : Bonn, p. 228-232 = Grecu,
p. 372-376.
19. Pseudo-Codinus : Bonn, p. 19 = Verpeaux, p. 15416"19.
20. J. Verpeaux, Pseudo-Kodinos. Traité des offices, p. 327.
21. Ibid., p. 33432-83, 33818°-181.
22. Ces mentions et les qualificatifs παμμέγας, παμμέγιστος n'ont qu'une valeur
littéraire à l'égard de Kastamonitès cité comme logothète des sékréta ; cf. Michel Cho-
niatès, lettre 44 : Lampros II, p. 7016·25.
104 R. OUILLAND

Les grands logothètes dont le nom nous est parvenu et que nous allons
suivre dans leur ordre chronologique furent en général des personnalités
eminentes de leur siècle.
1. stratègopoulos. Dans un procès qui oppose les gens de Sampson
aux habitants d'Amazonokorakia (région de Milet) en 1217, le sébaste et
grand logothète Stratègopoulos signe la sentence d'arbitrage1. La compos
itiondu tribunal et la forme de la signature indiquent une forte évolution
par rapport aux actes antérieurs à 1204 analysés par P. Lemerle2. Ce logo
thète de l'empire de Nicée, le premier dont nous avons aussi une signature
sur pièce judiciaire, semble présider ce tribunal du grand logothète cité en
1196 dans un acte de Latros3 et que présidait effectivement Bélissariôtès,
le logothète des sékréta (et grand logariaste) de l'époque. Stratègopoulos
fait donc le lien entre une fonction ancienne et une fonction nouvelle. La
différence d'avec Bélissariôtès est que ce dernier n'est pas désigné comme
grand logothète dans la teneur de l'acte, ni par une signature.
2. ACROPOLiTE, Georges. Georges Acropolite naquit vers 1217 à Const
antinople. Vers 1233, il se rendit à la cour de Nicée et fut l'élève de Théo
dore Hexaptérygos et du célèbre Nicéphore Blemmyde, dont il suivit les
cours en compagnie du futur Théodore II Lascaris. Celui-ci devait devenir
vers 1246 son élève et lui garder son amitié et sa confiance. La carrière de
Georges Acropolite fut rapide et brillante. Vers 1239, il fut probablement
titré grand logariaste4 et vers 1246 il était logothète du génikon5. Quel
ques années plus tard, il fut nommé grand logothète. Il est en effet incon
testable qu'il le fut, mais il est difficile de préciser l'année de sa nomination.
Il est peu probable qu'il s'agisse de 1244, comme on l'a écrit6. Il était alors
bien jeune pour pouvoir porter un pareil titre. Il est plus probable qu'il
fut promu seulement en 1255 sous le règne de Théodore II Lascaris (1254-
1258), pendant lequel il joua un rôle diplomatique et militaire important7.

1. MM 4, p. 295. L'un des juges au moins reçut un mandat impérial pour instruire
la cause. Sur cet acte voir aussi Dölger, Regesten, n° 1693.
2. Cf. REB 19, 1961, p. 258-272.
3. Ibid., p. 264, où est cité l'acte du Latros (MM 4, p. 30514).
4. A. Heisenberg, Georgii Acropolitae opera, II, Leipzig 1903, p. xv et 3 (vers d'un
grand logariaste anonyme). Sur l'office de grand logariaste, voir l'étude de R. Guilland,
JÖBG 18, 1969, p. 101-113.
5. A. Heisenberg, op. cit., II, p. 6 : Στίχοι του λογοθέτου των γενικών κυρου Γεωργίου
τοϋ Άκροπολίτου.
6. Κ. Krumbacher, Geschichte der byzantinischen Litteratur2, Munich 1897, p. 286.
7. Α. Heisenberg, op. cit., I, p. 124 ; II, p. ix et note 1 ; J. B. Papadopoulos, Théodore
H Lascaris empereur de Nicée, p. 14-15. Un acte de Jean III Vatatzès daté de 1235 ment
ionne1747.le grand logothète Georges Acropolite, mais c'est un faux ; cf. Dölger, Regesten,

LES LOGOTHÈTES 105

C'est vers cette époque qu'il rédigea, en tant que grand logothète, le traité
avec Stefan Ouroch I (1243-1276), qui ne l'observa d'ailleurs pas. Théo
dore II Lascaris en rendit responsable Georges Acropolite et eut avec lui
une discussion très vive, à la suite de laquelle il lui fit administrer publique
ment la bastonnade8. Réconcilié avec lui, Théodore II Lascaris le mit à la
tête des troupes byzantines envoyées en 1257 contre le despote d'Epire
Michel II ; par la même occasion, il lui conféra le titre de préteur qui lui
donnait en cette circonstance le commandement suprême9. Mais, manquant
d'expérience militaire, Georges Acropolite se faisait battre et était fait
prisonnier. Il fut libéré en 1260 par Michel VIII Paléologue qui, se rendant
mieux compte que Théodore II Lascaris des qualités de Georges Acropoli
te, en fit un diplomate.
Fort instruit, Georges Acropolite professa longtemps à Byzance. Après
la reconquête de la Ville en 1261, l'enseignement supérieur y était dans un
triste état. D'après son élève Georges de Chypre (le futur patriarche Gré
goire II), Georges Acropolite obtint d'être déchargé de toute charge publi
quepar Michel VIII Paléologue, afin de se consacrer à la restauration de
l'enseignement10. Durant son bref patriarcat (1265-1266), Germain III
demanda que Georges Acropolite fût remplacé dans son enseignement par
Manuel Holobôlos. Le patriarche alléguait l'âge et la fatigue du grand
logothète pour obtenir sa retraite11.
Cependant dès la libération de Georges Acropolite en 1260, Michel VIII
avait mis à l'épreuve les qualités du diplomate qu'il avait reconnues. Au
début de l'hiver, il l'envoyait en ambassade auprès du roi de Bulgarie,
Constantin Tich Asen12. En 1269, Georges Acropolite reçut l'ordre de sévir
contre les adversaires du patriarche Joseph Ier et s'acquitta fort durement
de sa mission. Pachymère l'accuse d'avoir une conscience élastique et de ne
pas peser ses responsabilités13. Vers 1273, le grand logothète, assisté du
logothète du Trésor privé Iatropoulos, représenta l'empereur au synode
réuni contre Bekkos, accusé par Jean Choumnos14. En mars 1274, il fai-

8. Acropolite : Bonn, p. 139 = Heisenberg, p. 130-131.


9. Id. (p. 148 = p. 13913) : πραίτορα χειροτονήσας. Ce titre de circonstance n'a pro
bablement rien à voir avec le titre inférieur de πραίτωρ τοϋ δήμου enregistré par le Pseudo-
Codinus (Bonn, p. 10 = Verpeaux, p. 13819).
10. Georges de Chypre, Autobiographie : W. Lameere, La tradition manuscrite de la
correspondance de Grégoire de Chypre patriarche de Constantinople (1283-1289), Bruxelles-
Rome 1937, p. 1857"ia.
11. Pachymère : Bonn I, p. 283.
1 2. Acropolite : Bonn, p. 1 87 = Heisenberg, p. 1 75-1 76. Cf. Dölger, Regesten, n° 1 888 .
13. Pachymère : Bonn I, p. 316.
14. Id. : p. 377.
106 R. GUILLAND

sait partie de l'ambassade envoyée au pape Grégoire X au sujet du concile


de Lyon et comprenant l'ancien patriarche Germain III, le métropolite
de Nicée Théophane, le προκαθήμενος του βεστιαρίου Nicolas Panarétos
et le grand interprète Georges Tzimiskès15. Une lettre de Michel VIII
Paléologue à Grégoire X le priait d'accueillir favorablement ses représent
ants, l'ancien patriarche Germain III et le grand logothète Georges Acro-
polite, de regarder leurs déclarations au sujet de l'union des Eglises comme
étant ses propres déclarations16.
En 1277, le grand logothète Georges Acropolite assiste comme témoin
à la signature du chrysobulle de Michel VIII Paléologue, renouvelant le
traité avec Venise17. Enfin en 1281-1282, il était envoyé en ambassade, en
compagnie de Xiphilin, grand économe de Sainte-Sophie, à l'empereur Jean
II Comnène de Trébizonde, pour négocier le mariage de ce dernier avec
Eudocie, troisième fille de Michel VIII Paléologue18. Peu de temps après
son retour d'ambassade, Georges Acropolite mourait, en 1282, quelques
mois avant Michel VIII Paléologue.
Savant autant que diplomate, Georges Acropolite a laissé une Histoire
(Χρονική Συγγραφή), exposant les événements de la prise de Constanti
nople en 1203 jusqu'à la reconquête de la ville par Michel VIII Paléologue
en 1261. Contemporain de la plus grande partie des événements rapportés
par lui, bien placé pour les connaître, l'historien laisse une œuvre import
antepour la connaissance de son époque. Il a laissé également quelques
ouvrages oratoires et théologiques et il a publié la correspondance de son
élève, Théodore II Lascaris, qui lui adressa 41 lettres19.
3. mouzalon, Théodore. Théodore Mouzalon avait reçu une forte
instruction. Il avait été l'élève de Grégoire de Chypre20, ainsi que Nicéphore
Choumnos, Manuel de Néocésarée et Théodore Xanthopoulos21. Michel
VIII Paléologue s 'étant particulièrement intéressé à ces jeunes gens avait
nommé Mouzalon logothète du génikon et l'avait titré sébaste22. Il lui

15. Pachymère : Bonn I, p. 384 ; Mansi 24, Ί4°-Ε. Cf. Dölger, Regesten, n° 2006.
16. Dölger, Regesten, n° 2009.
17. MM 3, p. 96. Cf. Dölger, Regesten, n° 2026.
18. Pachymère : Bonn I, p. 521. Cf. Dölger, Regesten, n. 2050.
19. Κ. Krumbacher, op. cit., p. 286-288.
20. Grégoire de Chypre, lettre 91 : Eustratiadès, p. 71. Une notice sur Théodore
Mouzalon est écrite par V. Laurent dans DTC 10, 1930, 2581-2584.
21. J. Verpeaux, Nicéphore Choumnos homme d'Etat et humaniste byzantin, p. 30.
22. Signature au verso du chrysobulle de 1277 pour Venise : δια του σεβαστού καΐ
λογοθέτου τοϋ γενικού Θεοδώρου του Μουζάλωνος. La formule des éditeurs (MM 3,
p. 96) est révisée par Dölger, Regesten, n° 2026. Dans la lettre de Grégoire de Chypre
(citée à la note 20), une variante donne à Mouzalon le titre de λογοθέτη των γενικών.
LES LOGOTHÈTES 107

avait fait épouser « la fille de Cantacuzène », que Pachymère ne désigne pas


autrement23 et qui était probablement une cinquième fille, non connue par
ailleurs, de Jean Comnène Cantacuzène Ange et d'Irène Paléologine24.
Michel VIII avait confié à Mouzalon la direction des affaires publiques25.
Théodore Mouzalon était opposé à l'union des Eglises. Exaspéré par son
attitude antiunioniste, Michel VIII alla jusqu'à le faire frapper à coups de
bâton par son propre frère Léon Mouzalon et à lui retirer la direction des
affaires publiques. Ne pouvant supporter sa disgrâce, il fit amende honor
able et, après s'être soumis humblement, il fut rétabli dans ses dignités
et reprit le pouvoir26. Il est probable qu'en récompense de sa soumission
il ait été nommé grand logothète lorsque la mort de Georges Acropolite
laissa cette charge vacante, c'est-à-dire peu avant la mort de Michel VIII
Paléologue, car lorsqu'Andronic II Paléologue monta sur le trône en
1282, le nouvel empereur recourait aux conseils de Mouzalon27 et celui-ci
peu après condamnait au feu un écrit composé sous le règne précédent28. Le
ministre prit rapidement un grand ascendant sur le souverain qu'il assis
taitdans toutes les affaires publiques29. Il obtint même d'Andronic II le
privilège de porter un couvre-chef écarlate et tissé d'or en haut, insigne
alors supérieur à celui de son office ; Nicéphore Grégoras le décrit longue
mentet déclare qu'il est semblable à celui des princes de la famille impér
iale30.
Très versé dans la connaissance des dogmes, Mouzalon prit part à toutes
les controverses religieuses de son temps. Autant par conviction que par
devoir de sa charge il participa à la condamnation de Jean Bekkos et de ses
partisans par le synode de 1285 au palais des Blachernes31. A l'élection
du patriarche Athanase (octobre 1289), il fut mêlé à l'enquête sur le candidat
et se laissa convaincre de publier un écrit élogieux. Mais lorsque, quatre

23. Pachymère : Bonn I, p. 495-496.


24. D. M. Nicol, The Byzantine Family ofKantakouzenos (Cantacuzenus) ca. 1100-1460,
p. 25-26, n. 18.
25. Pachymère (Bonn I, p. 4962~3) : λογοθέτην τών γενικών έτίμα (...) καΐ μεσίτη
των κοινών έχρατο.
26. Id. : Bonn I, p. 496-497.
27. Id. : Bonn Π, ρ. 12. De 1277 à 1293, Mouzalon intervient dans plusieurs actes
officiels ; cf. Dölger, Regesten, nos 2026, 2104, 2121, 2131, 2144, 2154.
28. Id. : Bonn II, p. 25-26. Ce fait date de mars 1283, avant l'élection de Grégoire de
Chypre comme patriarche.
29. Id. (Bonn II, p. 5910) : τα πολλά παρά βασιλεΐ δυνάμενος. Cf. Grégoras (Bonn I,
p. 17010"12) : ό Μουζάλων οΰτος τω βασιλεΐ παραδυναστεύων τότε καΐ τοις βασιλικοΐς
καΐ δημοσίοις μεσιτεύων πράγμασι.
30. Pachymère : Bonn II, p. 5911"12. Grégoras : Bonn I, p. 17014"21.
31. Pachymère : Bonn Π, p. 90-91. Grégoras : Bonn I, p. 169-170.
108 R. GUILLAND

ans plus tard, mois pour mois (octobre 1294), Athanase fut démis, le logo-
thète jeta encore son écrit au feu32. Vers 1290, se repentant de sa sévérité
envers l'ex-patriarche Bekkos, Andronic II lui fit parvenir des secours par
l'intermédiaire du grand logothète Mouzalon. Vers 1291, celui-ci fut élevé
à la dignité de protovestiaire et cumula ces deux titres33.
Depuis le début du règne d 'Andronic II, Mouzalon avait assumé la
lourde charge de premier ministre. Las et malade, il demanda à l'empereur
de le décharger du souci des affaires publiques et désigna lui-même pour
son successeur le questeur Nicéphore Choumnos, que l'empereur éleva alors
à la dignité de mystikos. Nicéphore Choumnos eut pour adjoint Jean Glykys,
maître des requêtes34. Désireux de donner un éclatant témoignage de sa
faveur à son fidèle ministre, le protovestiaire et grand logothète Mouzalon,
Andronic II fiança son propre frère Théodore Paléologue à la fille de Mouz
alon. Malheureusement on s'aperçut que la jeune fille était enceinte. Le
frère de l'empereur trouva un autre parti, mais après force discussions
canoniques sans issue, Andronic II décida de marier son propre fils Const
antin avec la fille de Mouzalon35, mais celui-ci mourut avant que le mariage
ait pu être célébré, vers 1294-1295. Avant de mourir, le proto vestiaire
Théodore Mouzalon revêtit, selon l'usage, la robe de moine ; il demanda
pardon aux malheureux clercs qu'il avait persécutés pendant sa vie pour
leurs opinions religieuses. Il fut enseveli dans le monastère de Tornikios
à Nicée36. On ignore qui succéda à Théodore Mouzalon comme grand
logothète.
4. ACROPOLiTE, Constantin. Fils du grand logothète Georges Acropolite,
il avait épousé une fille de prénom inconnu, épouse elle-même d'un Canta-
cuzène37. Constantin ne succéda pas immédiatement à son père38, puisque
Pachymère déclare nettement que le successeur fut Théodore Mouzalon39.
Avant 1283, Constantin était déjà logothète du génikon : le titre figure dans
des adresses de lettres que lui envoie Grégoire de Chypre avant son patriar-

32. Pachymère : Bonn II, p. 145 et 177.


33. Id. : p. 10312-13, 1536"7.
34. Id. : p. 16414-19.
35. Id. : p. 181-182. Cf. A. Th. Papadopoulos, Versuch einer Genealogie der Palaio-
logen (1259-1453), Munich 1938, p. 27 (n° 43) et 37-38 (n° 60).
36. Pachymère : Bonn II, p. 192-193. Le défunt avait du côté de son épouse un droit
de patronage sur le monastère.
37. A. Th. Papadopoulos, op. cit., p. 16-17 (n° 26).
38. Contrairement à ce que dit Sathas (MB 1, préface p. 23, n. 2). Cet auteur semble
dire d'ailleurs que Constantin Acropolite mourut vers la fin de 1282.
39. Pachymère : Bonn II, p. 12.
LES LOGOTHÈTES 109

cat40. Il a cette même fonction en 1285, à l'occasion de la trêve signée par


Andronic II avec Venise41. En 1295, Maxime Planude lui décerne encore le
même titre dans une lettre à Philanthropène42 . Il est difficile de dire à quelle
date Constantin reçut le titre de grand logothète. Mis en semi-disgrâce
par Michel VIII Paléologue en même temps que Théodore Mouzalon, il
ne connut pas exactement la même récompense sous Andronic II pour
son attitude antiunioniste et fut tenu, semble-t-il, à l'écart des hautes charges
du gouvernement. Il se peut que le soulèvement de son gendre Philanthro
pène en Asie Mineure en 1296, auquel participa aussi le moine Melchisé-
dech, fils de Constantin Acropolite43, ait aliéné à ce dernier les faveurs
d'Andronic IL Toujours est-il que Constantin Acropolite n'est pas cité
comme grand logothète avant 1321. Dans le conseil tenu en effet à cette
date pour juger le jeune empereur Andronic III Paléologue, Andronic II
présidait, assisté du patriarche Gérasimos et de Théolepte de Philadelphie.
Parmi les hauts dignitaires présents se trouvaient Cantacuzène, le grand
logothète Théodore Métochite, le préfet du caniclée Nicéphore Choumnos,
Constantin Acropolite également grand logothète44. Il se pourrait que la
nomination de Constantin Acropolite comme grand logothète, faite à une
date que nous ignorons, l'ait été en compensation de la nomination de
Nicéphore Choumnos à la direction effective des affaires de l'Etat avec le
titre de préfet du caniclée. Ainsi s'expliquerait que Nicéphore Choumnos,
bien que premier ministre et ayant la faveur impériale, ne fut pas nommé
grand logothète, mais simplement préfet du caniclée ; ainsi s'expliquerait
aussi que Théodore Métochite, tout en étant premier ministre et très influent
auprès d'Andronic II, ait attendu longtemps sa nomination comme grand
logothète, qu'il ne semble avoir obtenue que vers 1321.
Comme son père, Constantin Acropolite était un homme fort instruit.
Il a laissé une Brève Histoire des Romains, qui va d'Enée aux environs de
1323, mais dont l'exposé des faits s'arrête en 1118, la fin de l'ouvrage ne

40. Il s'agit des lettres 2, 38 et 39 qui portent le même numéro dans l'édition d'Eus-
tratiadès et le relevé de W. Lameere, La tradition manuscrite de la correspondance de
Grégoire de Chypre patriarche de Constantinople (1283-1289), p. 197-203. Une lettre
(Eustratiadès 169 = Lameere 183) date du patriarcat de Grégoire II.
41. D'après la description de Dölger (Regesten, n° 2104), Constantin s'intitule οικείος,
λογοθέτης τοϋ γενικού.
42. Μ. Treu, Maximi monachi Planudis Epistulae, Vratislava 1890, lettre 94 et p. 248.
43. Long récit de Pachymère : Bonn Π, p. 210-231. Cf. J. Verpeaux, op. cit., p.
40-41.
44. Cantacuzène : Bonn I, p. 67-68. L'historien, bien renseigné sur ce point, insiste
sur le fait que Constantin, cité après Théodore Métochite, est lui aussi grand logothète
(p. 681 : μέγας λογοθέτης ών καΐ αυτός).
110 R. GUILLAND

comprenant qu'une liste des souverains et quelques remarques historiques


qui ne sont peut-être pas de Constantin Acropolite45. Il est du reste surtout
connu par son importante œuvre hagiographique qui lui a valu d'être
appelé le Nouveau Métaphraste46.
5. métochite, Théodore. Théodore Métochite47 naquit vers 1269-1270,
non pas à Nicée, comme on l'a toujours écrit sur une fausse interprétation
du mot πατρίς dans son Eloge de Nicée, bien qu'il ait lui-même précisé
la portée de ce terme en lui adjoignant l'incise « dans un certain sens »48,
mais à Constantinople, comme il le dit lui-même au début de l'Eloge de
Constantinople quand il donne les raisons qui l'ont amené à le composer :
d'une part la Ville est sa patrie, d'autre part elle l'a nourri dans les Lettres49.
Son père Georges Métochite, archidiacre impérial, participe de 1274 à 1277
aux tractations de Michel VIII avec Rome, ce qui lui valut d'être condamné
avec son collègue Théodore Mélitèniôtès au début du règne d'Andronic50.
Ce dernier fit emprisonner les partisans de l'union avec Rome au début de
1283, pour les reléguer en 1284 au fort Saint-Grégoire dans une île de la baie
d'Astakè51. Georges Métochite fut exilé ensuite en Asie Mineure où sa fa
mil e, y compris Théodore, le suivit. Durant les sept années qu'il passa près
de son père, Théodore poursuivit ses études en fréquentant les milieux
monastiques52. En 1290, il revenait à Constantinople, ainsi que sa famille.
Théodore Métochite avait alors un peu plus de vingt ans, comme il le
dit lui-même dans son Poème autobiographique53. Il sut, on ne sait com
ment, se concilier la faveur d'Andronic II Paléologue ; son père était en
effet en prison, ou plus exactement interné au Grand Palais, où il pouvait
du reste recevoir des visites et même lire les écrits unionistes qu'on lui

45. K. Krumbacher, op. cit., p. 388.


46. H.-G. Beck, Kirche und theologische Literatur im byzantinischen Reich, Munich
1959, p. 698-699.
47. La mise au point la plus récente et la plus autorisée des divers problèmes de chro
nologie concernant Théodore Métochite se trouve dans l'ouvrage de I. Sevcenko, Etudes
sur la polémique entre Théodore Métochite et Nicéphore Choumnos, Bruxelles 1962.
48. Sathas, MB 1, p. 14014. Cf. I. Sevcenko, op. cit., p. 269.
49. Inédit cité par I. Sevcenko, op. cit., p. 269.
50. Pachymère : Bonn Π, p. 21-22. Sur la date, voir I. Sevcenko, op. cit., p. 134.
51. Pachymère : Bonn II, p. 102-103.
52. Chr. G. Müller et Th. Kiessling, Theodori Metochitae Miscellanea philosophica
et historica, Leipzig 1821, p. 238-257 (chapitres 38-40, passim). Cf. I. Sevcenko, op. cit.,
p. 27.
53. Sur les relations entre Théodore Métochite et son père, voir R.-J. Loenertz,
Théodore Métochite et son père, dans Archivum Fratrum Praedicatorum 23, 1953, p.
184-194. Les renseignements principaux sont tirés du poème autobiographique de Théo
dore édité par M. Treu, Dichtungen des Grosslogotheten Theodoros Metochites, Postdam
1895, p. 12, vers 421-436.
LES LOGOTHÈTES 111

faisait parvenir clandestinement54. Peu après 1290, Théodore Métochite


était logothète des troupeaux55. En 1294 ou 1295, Andronic II Paléologue
l'envoya en ambassade en Arménie pour négocier le mariage de l'empereur
Michel IX Paléologue, fils d 'Andronic II, avec Marie (Rita, Xénè), fille
aînée du roi d'Arménie Léon IL L'ambassade, qui semble avoir duré plu
sieurs mois, fut couronnée de succès et Michel IX épousait Rita-Marie le
16 janvier 1295 ou 1296. Théodore Métochite avait alors 25 ou 26 ans et il
était logothète des troupeaux d'après Pachymère, tandis que Jean Glykys
qui l'accompagnait est dit επί των δεήσεων56. Parlant de la même mission,
Grégoras le qualifie de λογοθέτης τών οίκειακών et Jean Glykys de logothète
du drome57. Dans les deux hypothèses, Théodore Métochite restait infé
rieur à Jean Glykys, le futur patriarche, qui rédigea un compte rendu
détaillé des faits dans un style qui enchantait Grégoras58.
En 1298, Théodore Métochite était chargé par Andronic II Paléologue
d'une mission auprès du roi de Serbie, Stefan Ouroch II Miloutine, pour
négocier le mariage de ce prince avec sa fille Simone, âgée seulement de
5 ans. Malgré l'opposition canonique du patriarche, le mariage fut célébré
au printemps 1299. Théodore Métochite a laissé une relation de cette
ambassade59. Il devait être alors logothète du Trésor privé60. Ensuite
pendant deux ans, entre 1303-1305, il fut envoyé à Thessalonique par
Andronic II auprès de l'épouse impériale Irène de Montferrat comme
ministre et en même temps espion du souverain61. A son retour, il reçoit
une marque d'honneur insigne : sa fille Irène épousait Jean, fils du porphy-
rogénète Constantin, propre neveu d'Andronic II62, vers l'année 1305,
au plus tard avant 1311-131263. Le titre de logothète du génikon dut être

54. Pachymère : Bonn II, p. 271.


55. M. Treu, op. cit., p. 12-13, vers 451-454. Les dates du cursus sont examinées en
détail par J. Verpeaux, Le cursus honorum de Théodore Métochite, REB 18, 1960,
p. 195-198 ; on ne citera cet article que dans la mesure où les renseignements ne sont pas
repris par I. Sevcenko.
56. Pachymère : Bonn II, p. 205 ; cf. I. Sevcenko, op. cit., p. 272-273.
57. Grégoras : Bonn I, p. 193-194. Le témoignage de Pachymère, selon l'avis de
J. Verpeaux et de I. Sevèenko, sera préféré à celui de Grégoras plus éloigné de l'événe
ment.Sur Jean Glykys, voir la notice ci-dessus p. 67-68.
58. Grégoras : Bonn I, p. 19319~22.
59. Sathas, MB 1, p. 154-193. Cf. l'étude de M. Laskark, Vizantiske princeze y
srednevekovnoj SrbiJU Belgrade 1926, p. 53-56 et 68, n. 1.
60. I. Sevôenko, op. cit., p. 273-274, montre comment Théodore Métochite peut succé
derà Dèmètrios Iatropoulos, le prôtoasèkrètis cité en 1295 avec la même charge.
61. M. Treu, op. cit., p. 21, vers 743 et 757-758. Cf. J. Verpeaux, art. cit., p. 196-197.
62. A. Th. Papadopoulos, op. cit., p. 23 (n° 38).
63. I. Sevcenko, op. cit., p. 7 (n. 1) et 149-150.
112 R. GUILLAND

octroyé à Théodore Métochite pour cette circonstance64. Il occupait encore


la même charge vers la fin de 1320, quand il s'opposa à des mesures de
coercition contre Andronic III en rébellion contre son grand-père65.
La stagnation de Théodore Métochite au rang de logothète du génikon
s'explique en grande partie par la présence de Nicéphore Choumnos à la
tête des affaires publiques ou comme premier conseiller de l'empereur.
La rivalité entre les deux personnages qui allait tourner plus tard à la
polémique66 joua en faveur de Théodore Métochite qui obtint progress
ivementauprès de l'empereur la place prépondérante occupée auparavant
par Choumnos préfet du caniclée (ou de l'écritoire). Le pouvoir de Métoc
hite67 s'affirme à partir de 1316 pour atteindre son apogée en 1321. Le
14 mars de cette année, Grégoras le cite encore comme logothète du gé
nikon68. Pour le jugement du co-empereur Andronic III au mois d'avril de la
même année, il arbore enfin le titre de grand logothète6 9. Des sources occident
ales bien informées témoignent précisément de la haute position de Théodore
Métochite à partir de cette date. D'une part, le dominicain Philippe Incontri,
qui vivait à Péra depuis 1312, déclare qu'il gouvernait tout l'empire70. D'aut
re part, Théodore Paléologue, marquis de Montferrat, dans ses Enseigne
ments composés en 1326, exprime la haine suscitée parmi les partisans de
Choumnos par l'élévation de Théodore Métochite71. De même que son rival
avait obtenu un rang particulier dans la hiérarchie aulique, de même le grand
logothète qui siégeait auparavant après le prôtostratôr et avant le stratopé-
darque72 passa à un rang supérieur par une faveur spéciale d 'Andronic IL

64. M. Treu, op. cit., p. 21, vers 764-765. Cf. J. Verpeaux, art. cit., p. 197. La plus
ancienne mention doit être celle d'une adresse de la lettre envoyée par Manuel Moscho-
poulos à Métochite et éditée par I. Sevcenko {Speculum 27, 1952, p. 140).
65. Grégoras : Bonn I, p. 193.
66. J. Verpeaux, Nicéphore Choumnos homme d'Etat et humaniste byzantin, p. 48-62.
A cet exposé, I. Sevcenko (op. cit.) a ajouté de nombreuses précisions.
67. Grégoras (Bonn I, p. 271 2~5) : τφ βασιλεΐ παραδυναστεύων καΐ πασαν
κατάστασιν δλοις μεσιτεύων τοις πράγμασιν ό Μετοχίτης, λογο-9-έτης &ν τηνικαϋτα τοΰ
γενικού. Le terme μεσάζων impliqué dans la citation n'a pas probablement un sens aussi
technique que le veut R.-J. Loenertz (art. cit., p. 287). Voir en dernier lieu l'exposé de
L.-P. Raybaud, Le gouvernement et l'administration centrale de V empire byzantin sous les
premiers Paléologues (1258-1354), p. 202-206.
68. Grégoras : Bonn I, p. 3033~6.
69. Cantacuzène : Bonn I, p. 5422 ; on retrouve dans ce passage le terme μεσιτεύων
qui exprime le pouvoir effectif du ministre associé cette fois au titre de grand logothète.
Cf. Grégoras : Bonn I, p. 3142~3.
70. Th. Kaeppeli, Deux nouveaux ouvrages de f. Philippe Incontri de Péra O.P.,
Archivum Fratrum Praedicatorum 23, 1953, p. 175.
71. Voir les remarques de I. Sevcenko, op. cit., p. 163-166.
72. Pseudo-Codinus : Bonn, p. 9 et 12 = Verpeaux, p. 13714~21 et 1401"7. Voir aussi
la préface de J. Verpeaux, p. 28-29.
LES LOGOTHÈTES 113

Pendant la dernière phase de la guerre entre Andronic II et Andronic III


(1326-1328), Théodore Métochite, inquiet de la tournure que prenaient
les événements et sentant sur lui l'hostilité du peuple, avait quitté son propre
palais pour aller habiter le Grand Palais impérial et il n'osait plus sortir
en public. Tourmenté par un songe, il avait déposé chez des amis sûrs sa
fortune. Lorsque la rumeur de la prise de la ville par Andronic III parvint
au Grand Palais, Théodore Métochite refusa d'y croire et de prendre les
mesures nécessaires73. La victoire d'Andronic III fut suivie de scènes de
désordre. Le peuple pilla le palais de Théodore Métochite74, dont les biens
furent confisqués par le Trésor public. De ses immenses richesses il ne lui
resta rien ; sa haute fortune politique sombrait sans retour. Beaucoup
saluèrent avec joie sa chute, criant bien haut que ses richesses étaient le
produit de ses concussions, ce que Nicéphore Grégoras n'ose pas démentir
clairement, bien qu'il fût son ami fidèle75. Quant au logothète déposé, il
fut exilé à Didymotique en mai 1328 ; rappelé d'exil en 1330, il mourait
au monastère de Chora le 13 février 1332, un mois après le décès d'Andronic
II Paléologue.
Ses œuvres littéraires variées sont maintenant mieux connues grâce aux
études de Beck, Verpeaux et Sevcenko ; il reste d'importantes parties
inédites dont la connaissance importerait à l'histoire du temps et des idées
aussi bien religieuses que scientifiques et philosophiques.
6. gabalas raoul, Jean. Après la rupture entre Anne Paléologine et
Cantacuzène, Jean Gabalas, qui joignait aussi à ce nom celui de la famille
Raoul, fut envoyé en mission dans la capitale, mais il se laissa convaincre
de quitter le parti de Cantacuzène76. De grand drongaire qu'il était, il
reçut le titre de protosébaste en 134277 et fut associé dès lors au grand duc
Alexis Apokaukos pour la direction des affaires78. A titre de protosébaste,
il contresigne de novembre 1342 à mai 1343 trois actes pour des monastères
de l'Athos79. Deux autres actes d'octobre et novembre 1344 portent le
contreseing du grand logothète Jean Raoul (Zographou) et du protosébaste

73. Grégoras : Bonn I, p. 411-421.


74. Cantacuzène : Bonn I, p. 305.
75. Grégoras : Bonn I, p. 425-426.
76. Cantacuzène : Bonn II, p. 118-119.
77. Id. : p. 218.
78. Id. (p. 22320"21) : συνάρχων τφ μεγάλω δουκί τα κοινά δΐ,φκει καΐ μεσάζων τη
βασιλίδι ήν. Dans son article sur le mésazôn (OCP 26, 1960, p. 284-285), le P. Loenertz
Commente ce passage dans un paragraphe très précis sur la carrière de Gabalas.
79. Acte 20 de Kutlumus de novembre 1342 (Lemerle, p. 91), acte 2 de Dochiariou de
mai 1343 (EEBS 4, 1927, p. 287), acte 132 de Chilandar de mars 1343 (Petit, p. 276).
Cf. Dölger, Regesten, nos 2883, 2887, 2889.
114 R. GUILLAND

et grand logothète Jean Raoul (Philothéou)80. Mais Gabalas Raoul se


maintint peu de temps au pouvoir. Apokaukos le bernait en lui promettant
sa fille en mariage81 et Gabalas essayait de perdre Apokaukos dans l'esprit
de l'impératrice82. Apokaukos l'emporta et fit interner Gabalas au couvent
de la Pammakaristos83, après qu'il se fut réfugié à Sainte-Sophie où il
avait revêtu l'habit monastique ; il s'évada, fut repris et jeté en prison.
Ces faits sont antérieurs au meurtre d'Apokaukos (14 juin 1345).
7. métochite, Nicéphore. Fils du grand logothète Théodore Métochite,
Nicéphore fut un bon élève de Nicéphore Grégoras qui fait allusion à lui
dans sa correspondance84. Il semble avoir été l'ami d'Andronic III Paléolo-
gue, à qui il révélait en 1321 les mesures qu'on allait prendre contre lui85. En
1325, durant une expédition aux confins de la Serbie et de la Macédoine,
il conspire contre Andronic II avec son frère Dèmètrios86. Longtemps après,
Nicéphore Métochite prit nettement le parti de Cantacuzène contre l'impé
ratrice Anne. Il semble avoir été créé grand logothète sous le règne de
Jean VI Cantacuzène (1347-1 354) 87. En 1355, le pape Innocent VI expé
diait des lettres aux divers personnages favorables à l'union des Eglises.
L'une de ces lettres est adressée au « Nobili viro Nichifor Metochitis mega-
logothetis >>88. Le 8 octobre 1357, Nicéphore Métochite, dit grand logothète
et oncle de l'empereur Jean V Paléologue, assiste à la signature de l'acte
reconduisant pour 5 ans les conventions entre Venise et Byzance89.
8. sphrantzès, Georges. Né à Constantinople en 1401, il mourut en
1477 ; il laissa un livre de Mémoires90, dont la forme authentique est

80. Acte 36 de Zographou d'octobre 1344 (Regel, p. 89), acte 8 de Philothéou de no


vembre 1344 (Regel, p. 23). Cf. Dölger, Regesten, nos 2899, 2900.
81. Cantacuzène : Bonn II, p. 437, 441-442. Grégoras : Bonn II, p. 701-702.
82. Grégoras : Bonn H, p. 710.
83. Cantacuzène : Bonn II, p. 497-498. Grégoras : Bonn II, p. 726.
84. R. Guilland, Correspondance de Nicéphore Grégoras, p. 357-358.
85. Cantacuzène : Bonn I, p. 63.
86. Id. : p. 209.
87. Id. : Bonn II, p. 554. L'historien, rapportant la mission de Métochite auprès de
Vatatzès en 1345, signale la nomination de grand logothète comme postérieure.
88. A. TÄUTU, Acta Innocenta PP. VI, Rome 1961, n° 92a, p. 175. Il ne reste dans le
registre que l'adresse de la lettre dont la formule est la même pour plusieurs destinataires.
Cf. O. Halecki, Un empereur de Byzance à Rome, Varsovie 1930, p. 45 et 48.
89. MM 3, p. 1 26 ; Dölger, Regesten, n° 3070. A cette occasion le grand logothète ajoute
à son nom celui de Laskaris, comme son frère Michel cité par Cantacuzène (Bonn I, p. 2101).
90. V. Grecu, Georgios Sphrantzès. Ta καθ' εαυτόν (1401-1477), cum Pseudo-Phrant-
zes in appendice sive Macarii Melisseni Chronicon (1258-1481), Bucarest 1966. Selon la
pratique de cet éditeur, dont la préface donne une bonne notice sur Sphrantzès, il
serait bon d'observer la distinction entre les deux œuvres en citant la chronique non au
thentique sous le titre Pseudo-Phrantzès.
LES LOGOTHÈTES 115

maintenant bien reconnue et qui rapporte la vie mouvementée de ce bon


serviteur des Paléologues depuis Manuel II jusqu'au despote du Pélo
ponnèse Thomas. Il acquiert son premier titre important au service de
Jean VIII Paléologue en 1432 lorsqu'il est nommé protovestiarite91. Quand
Constantin XII Paléologue monta sur le trône, il continua à recourir aux
services de Sphrantzès, qui l'avait servi au Péloponnèse, en prenant en
particulier le gouvernement de Mistra92. La promotion de Sphrantzès
au poste de grand logothète en 1451, au retour d'une mission de deux ans
en Ibérie, souleva une querelle de protocole93. Il est probable que les
mentions d'un titre de proto vestiaire, qui serait supérieur à celui de protov
estiarite selon le protocole, proviennent simplement d'une déformation
de copie, car Sphrantzès ne mentionne pas cette promotion dans ses Mém
oires. Après la prise de Constantinople en 1453, il fut fait prisonnier.
Libéré, il se réfugia près du despote de Morée Thomas Paléologue, puis en
Italie, enfin dans l'île Sainte-Maure (= Leucade, Corfou) où il prit l'habit
monastique et termina ses jours sous le nom de Grégoire.

91. Sphrantzès : Grecu, p. 5021~23. Pseudo-Phrantzès : Bonn, p. 158 = Grecu,


p. 300. Cf. R. Guilland, Le protovestiarite Georges Sphrantzès, REB 6, 1948, p. 48-57 =
Recherches sur les institutions byzantines, II, p. 203-211.
92. Sphrantzès : Grecu, p. 6825. Pseudo-Phrantzès : Bonn, p. 200 = Grecu, p. 342.
93. Sphrantzès : Grecu, p. 90-94. Pseudo-Phrantzès : Bonn, p. 224-229 = Grecu,
p. 368-372. Cf. R. Guilland, art. cit., p. 50-53 = p. 204-205.

Vous aimerez peut-être aussi