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Le coronavirus est une famille de virus qui causent des maux comme la maladie
actuelle appelée COVID-19
Avec 1% de taux de décès, le COVID-19 est bien moins mortel que la maladie à virus
Ebola qui est à 60%
Pour prévenir la maladie, il faut suivre de simples règles d’hygiène et éviter les lieux
de rassemblements
Plus de deux mois après son apparition en Chine en décembre 2019, la COVID-19[1],
couramment appelé coronavirus, touche les pays africains les uns après les autres depuis deux
semaines avec désormais quatre pays en Afrique subsaharienne : Nigeria, Sénégal, Cameroun
et Togo.
Cette situation donne l’occasion d’aller un peu plus en profondeur dans la compréhension et
la présentation de cette maladie qui suscite beaucoup de peur un peu partout sur le continent.
Pour cela, SciDev.Net est allé à la rencontre d’Alice Desclaux, médecin-anthropologue et
chercheur à l’unité de recherches translationnelles sur le VIH et les maladies infectieuses
(TransVIHMI) de l’Institut de recherche pour le Développement (IRD).
Elle est connue, entre autres, pour ses travaux dans la riposte à l’épidémie de la maladie à
virus Ebola qui a endeuillé trois pays d’Afrique de l’Ouest (Guinée, Liberia et Sierra Léone)
entre 2014 et 2016.
Dans cet entretien où elle décrit avec précision le coronavirus et ses caractéristiques, Alice
Desclaux démontre que la dangerosité de la COVID-19 n’est pas considérée comme
« majeure », et rappelle les règles simples que chacun devrait observer pour se protéger et
éviter la propagation de la maladie.
C’est quoi le coronavirus ?
L’utilisation actuelle de ce terme n’est pas tout à fait exacte et peut prêter à confusion. Le
coronavirus désigne une famille de virus qui comprend des virus assez dangereux pour la
santé humaine comme le MERS (syndrome respiratoire du moyen orient) et le SRAS
(syndrome respiratoire aigu sévère) qui a provoqué une épidémie au début des années 2000.
Ensuite, il y a d’autres coronavirus qui provoquent des affections moins graves, par exemple
de simples rhumes.
“On sait que la maladie n’est pas grave dans 85% des cas, et qu’elle peut être
plus grave dans 15% des cas, dont 5% peuvent nécessiter des interventions
relevant d’un service de réanimation.”
Alice Desclaux
L’élément commun aux deux pathologies est qu’elles suscitent la peur. La COVID-19
inquiète parce que c’est un mal invisible dans la mesure où il peut être transmis dans une
foule lorsque les personnes sont proches.
La science a très vite répondu à un certain nombre de questions. En moins d’un mois, le virus
a été identifié, on a défini à quelle famille de virus il appartient, son génome a été séquencé,
c’est-à-dire qu’on connaît très précisément le virus et on peut repérer son évolution, on a pu
comprendre les conditions de la transmission…
En revanche, on n’a toujours pas compris les raisons de l’émergence de la maladie. C’est-à-
dire la manière dont il est passé du réservoir, qui est vraisemblablement la chauve-souris, à
l’homme. Il devrait y avoir une espèce animale intermédiaire qui pourrait être le pangolin,
mais, ça reste à prouver.
On a déjà décrit les symptômes de la maladie : il y a le plus souvent de la fièvre, de la toux et
des signes respiratoires. On sait que la maladie n’est pas grave dans 85% des cas, et qu’elle
peut être plus grave dans 15% des cas, dont 5% peuvent nécessiter des interventions relevant
d’un service de réanimation.
Les chercheurs ont aussi commencé à tester des traitements. Mais il reste beaucoup à faire
pour comprendre si les mesures de santé publique sont adaptées, savoir quels sont les
équipements (comme les masques) les plus efficaces, savoir quels sont les tests de diagnostic
de l’infection les plus accessibles, c’est-à-dire peu chers et pouvant être pratiqués à large
échelle. Et puis, il faudra attendre plus de dix-huit mois pour avoir un vaccin puisque son
développement prend beaucoup de temps.
Quel peut être l’apport des sciences sociales dans cette mouvance ?
Alice Desclaux
On doit aussi mettre en place des mesures durables. Ce qu’on met en place dans un pays
quand il y a 10 cas ne peut pas être multiplié par 1000 s’il y a 10 000 cas. Plus le nombre de
patients est élevé, plus le système de santé doit mettre en place des mesures qui conviennent à
des populations de large échelle. On doit mobiliser des services différents et plus nombreux
tout en ayant des techniques qui favorisent le traitement en ambulatoire, c’est-à-dire en dehors
de l’hôpital, pour éviter que les gens se pressent à l’hôpital et se contaminent. Tous ces
aspects sont examinés par des enquêtes en santé publique et en sciences sociales. Les
représentations de la maladie par les populations font partie des questions traitées par les
sciences sociales.
L’épidémie d’Ebola avait pris les systèmes de santé et les services sanitaires par surprise.
Depuis, il y a tout un dispositif qui s’est mis en place pour anticiper les épidémies. D’abord
pour les détecter plus tôt dans le cadre de la surveillance sanitaire, et ensuite pour y répondre
plus tôt et de manière plus coordonnée. Dans les pays, des coordinations nationales, des
instituts nationaux de santé publique collectent des informations sur la circulation des agents
pathogènes que sont les virus et les bactéries, et traitent ces informations pour limiter leur
diffusion avant d’arriver au stade épidémique.
“Dans les sociétés où les personnes doivent payer elles-mêmes leurs tests pour
savoir si elles sont atteintes et où les patients doivent payer pour tous leurs
soins, l’épidémie avance de manière souterraine, personne ne voulant se ruiner
pour apprendre que son test est négatif”
Alice Desclaux
Il existe dans les pays des centres d’opération d’urgence sanitaire qui, lorsque l’épidémie est
déclarée, envoient des équipes de première urgence et peuvent mettre en place des mesures
immédiates sur le terrain. Du côté du système de soins, ces dispositifs sont en place dans la
plupart des pays africains. Au niveau de l’Afrique, il y a maintenant un CDC[2] africain basé à
Addis-Abeba avec des bureaux régionaux comme celui d’Abuja pour l’Afrique de l’ouest. Les
pays envoient leurs informations au niveau du bureau régional, qui transmet au niveau de
l’Africa CDC, qui peut venir en renfort pour les interventions et peut envoyer des experts qui
peuvent apporter des réponses très spécialisées adaptées à l’épidémie.
Si on regarde la dangerosité du virus lui-même, elle n’est pas majeure. Puisqu’un taux de
mortalité de 1% n’est pas très élevé. Mais, ce qui crée des différences, c’est la manière dont
les sociétés répondent et traitent la question en fonction des systèmes politiques, des aspects
économiques et culturels. Dans les pays qui considèrent que la santé publique est un bien
commun, la réponse à l’épidémie est en place et les acteurs et soignants de première ligne sont
reconnus. A Singapour par exemple, les soignants en première ligne ont reçu des primes pour
travailler dans un contexte de risque. Ce n’est malheureusement pas le cas dans la plupart des
pays.
Dans les sociétés inégalitaires par contre, où les personnes doivent payer elles-mêmes leurs
tests pour savoir si elles sont atteintes et où les patients doivent payer pour tous leurs soins,
l’épidémie avance de manière souterraine, personne ne voulant se ruiner pour apprendre que
son test est négatif. Là où les personnes qui décident au plus haut niveau politique n’ont pas
les bases scientifiques et ne comprennent pas qu’elles ont besoin d’experts, l’épidémie peut
continuer à s’étendre.
Au niveau de l’Afrique, il apparaît que d’énormes progrès ont été faits depuis l’épidémie
d’Ebola. Le dispositif international est aussi plus réactif. Mais les systèmes de soins devront
faire face à de nouveaux défis. Parce que pour traiter des personnes qui ont des complications
respiratoires, il faut des spécialistes en pneumologie et il faut des gériatres pour traiter les
personnes âgées. Ça veut dire qu’il faut renforcer ces spécialités, mettre en place d’autres
coordinations, mobiliser davantage les acteurs dans les services de santé périphériques et
travailler énormément avec les communautés.
Il existe des ressources dans les communautés, par exemple des associations en matière de
santé ou des associations de personnes atteintes de diverses pathologies, ou des médiateurs
formés par exemple au counselling… Tous ces acteurs de santé communautaire sont présents
et ça demande beaucoup de travail pour les activer. Pour qu’ils puissent travailler, il faut une
reconnaissance de leur travail, et leur donner des moyens… Ces défis doivent être relevés
dans tous les pays africains.
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Références