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N° d’ordre 2009-ISAL-0090

Année 2009

Thèse

Compréhension des mécanismes physiques


de fatigue dans le polyamide vierge et
renforcé de fibres de verre

Présentée devant
L’institut national des sciences appliquées de Lyon

Pour obtenir
Le grade de docteur

École doctorale : École doctorale materiaux de Lyon

Par
Elodie Mourglia Seignobos
(Ingénieur)

Thèse effectuée au laboratoire:


Laboratoire Polymères et Matériaux Avancés (UMR CNRS/RHODIA)

Soutenance le 27 Novembre 2009 devant la Commission d’examen

Jury MM. L. Laiarinandrasana (rapporteur)


D. Long (directeur de thèse)
H. Meijer
J. Oberdisse
L. Odoni (correspondant industriel)
H. Sautereau (président du jury)
R. Séguéla (rapporteur)

E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA


E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Remerciements
Ce travail a été effectué au sein du Laboratoire des Polymères et Matériaux Avancés, Unité
Mixte de Recherche CNRS/RHODIA, et dirigé par M. Didier Long, Directeur de Recherches
CNRS, et M. Ludovic Odoni, Ingénieur de recherches RHODIA.

Tout d’abord, je tiens à exprimer ma profonde reconnaissance envers mes directeurs de thèse
M. Didier Long et M. Ludovic Odoni pour leur confiance, leur exigence et leur soutien tout au
long de ces trois années. Leur encadrement fut très complémentaire, et a permis que cette
thèse soit une expérience très épanouissante scientifiquement, professionnellement et
personnellement.

D’autres membres du laboratoire ont largement contribué à cette thèse, et je souhaite les
remercier ici, en particulier M. Paul Sotta, car les analyses par diffusion des rayons X de cette
thèse lui doivent beaucoup, tant en heures de discussion qu’en heures de sommeil manquées à
l’ESRF. De même, je remercie M. Loïc Vanel pour sa contribution au modèle physique proposé
dans cette thèse, et Mme Louise-Anne Fillot pour nos discussions de mécanique des polymères
qui ont toujours été très enrichissantes.

Je tiens à exprimer ma gratitude envers M. Lucien Laiarinandrasana, M. Roland Séguéla et M.


Henry Sautereau pour les discussions fructueuses qui ont ponctué cette étude, et je les
remercie ainsi que les autres membres du jury M. Han Meijer et M. Julian Oberdisse pour avoir
accepté d’examiner cette thèse.

Je remercie la société RHODIA pour le financement de cette thèse CIFRE. Une grande partie
des expérimentations de ce travail a été réalisée dans les laboratoires de Mécanique et de
Microscopie du Centre de Recherches et de Technologies de Lyon de Rhodia. Je souhaite
remercier ici vivement mes collègues du CRTL M. Frédéric Brun, Mlle Hélène Ghis, M. Gilles
Robert, M. Gilles Orange, M. Olivier Gilbain, Mme Magali Davezac, M. Olivier Sanséau, Mlle
Magalie Fontana, M. Rémi Sellier et Mme Joëlle Guillaud-Saumur pour leur accueil, leur
implication dans ce travail et leur grande sympathie durant ces trois années.

Ce travail n’aurait pu être réalisé sans la collaboration de M. Cyrille Rochas pour les
caractérisations par diffusion des rayons X aux petits angles à l’ESRF de Grenoble (CRG
D2AM), de M. Marc de Boissieu du laboratoire SIMAP de Grenoble pour les caractérisations par
diffusion des rayons X aux grand angles, et de Mme Annie Brûlet et M. François Boué du LLB
(CEA-CNRS) pour les caractérisations par diffusion des neutrons. Qu’ils trouvent ici l’expression
de ma gratitude pour leur aide et leur contribution.

Je remercie sincèrement M. Stéphane Loustau et M. Dominique Millon, correspondants


conception mécanique et maintenance du CRTL, dont les compétences et la disponibilité ont
permis de mettre au point les outils nécessaires à l’obtention des résultats de cette thèse.

Parmi les membres du LPMA, je remercie tout d’abord mes acolytes de la première promotion
de thésards, M. Brice Gabrielle -et son éternelle bonne humeur- et M. Elian Masnada. Je
souhaite remercier aussi M. Arnaud Vieyres pour sa participation efficace à ce travail de
doctorat en tant que stagiaire ingénieur. Je remercie également l’indispensable Mme Sandrine
Rossi, technicienne au LPMA, pour ses nombreux coups de pouce, et Mlle Marie-Laure Milan
pour sa sympathie et son aide dans le tortueux « Parcours du Doctorant » lors de la rédaction.

Plus généralement, je remercie du fond du cœur tous les membres du LPMA et du CRTL qui
ont fait que je garde un excellent souvenir de ces trois ans.

Enfin, je remercie tout particulièrement Fabien pour ses nombreuses qualités, notamment sa
curiosité, son écoute et sa patience qui ont été précieuses pendant cette thèse, et je remercie
chaleureusement mes parents, mes amis et toute ma famille pour leurs encouragements et
leurs témoignages d’affection lors de la soutenance de thèse.

E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA


E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Résumé

Compréhension des mécanismes physiques de fatigue dans le polyamide


vierge et renforcé de fibres de verre

Les polyamides renforcés de fibres de verre sont utilisés dans l’automobile pour leur
légèreté vis-à-vis du métal à rigidités équivalentes. Pour évaluer leur durabilité à différentes
températures nous avons construit des courbes de Wöhler. Nous proposons un critère
d’endommagement basé sur la déformation élastique et proposons ainsi de normaliser les
courbes de Wöhler par le module initial du matériau à sa température de fonctionnement. La
courbe maîtresse obtenue permet de prédire la durabilité en fatigue du matériau pour une large
gamme de contraintes et températures.
Nous proposons un scénario d’endommagement en fatigue en trois étapes. Pendant
une brève étape le matériau s’échauffe et l’endommagement est négligeable. La seconde étape
est caractérisée par une température du matériau constante et une évolution linéaire de la
raideur apparente (appelée module dynamique en fatigue) et de la déformation en fonction du
logarithme du nombre de cycles. Au cours de la troisième étape la rigidité chute brutalement
jusqu’à rupture. Nous montrons que la durée de vie est contrôlée par la durée de la seconde
étape au cours de laquelle le module du matériau décroît linéairement avec le logarithme du
temps.
Nous avons réalisé des caractérisations par microscopie électronique et par diffusion
des rayons X et diffusion de neutrons pour étudier l’endommagement depuis l’échelle
nanométrique jusqu’à l’échelle micronique de la microstructure semi-cristalline du polyamide
renforcé de fibres de verre et de la matrice polyamide en tant que référence. Ces
caractérisations nous permettent d’expliciter les mécanismes liés à la seconde étape
d’endommagement. Nous mettons en évidence la nucléation de domaines de faible densité
dans la matrice polyamide à une échelle nanométrique, et l’augmentation du nombre et de la
taille de ces domaines jusqu’à une échelle micronique. La distribution de taille, la densité et le
facteur de forme de ces domaines ont été quantifiés.
Nous proposons enfin un modèle physique de nucléation des domaines basé sur
l’existence d’une distribution d’intensités des déformations locales. L’énergie d’activation du
processus de nucléation des cavités a été déterminé. Ce modèle permet d’expliquer l’évolution
logarithmique des propriétés macroscopiques du polyamide vierge et renforcé au cours de la
fatigue.
Les résultats de cette thèse ouvrent la voie vers une meilleure prédiction de la durée
de vie en fatigue d’une part, et vers une augmentation de la durée de vie du matériau grâce à
des formulations innovantes de la matrice d’autre part.

Mots-clés : Polyamide, Fatigue, Physique des polymères, Polymères semi-cristallins,


Polymères renforcés fibres de verre, Cavitation, Craquelures, Rupture.

E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA


Abstract

Physical mecanisms during fatigue in neat and glassfiber reinforced


polyamide

Glass fiber reinforced polyamides are used in the automotive field thanks to their ligth
weight in comparison to metals for the same rigidity. In order to study its durability, this
material was tested in fatigue at different temperatures and stress vs fatigue lifetime curves
(also called Wöhler curves) were drawn. We proposed a damage criterion based on the strain
and therefore we normalized the Wöhler curves by the initial elastic modulus at the
functionning temperature of the material. The master curve obtained enabled to predict the
fatigue lifetime for a wide range of stresses and temperatures.
Our study show that fatigue damage evolves in 3 phases. During the first step the
material’s temperature increases and the damage is negligible. The second step is characterized
by a stable temperature and a linear evolution of the apparent stiffness (called dynamic
modulus in fatigue) and of the strain with the logarithm of the number of cycles. The sharp
drop of stiffness during the third step is followed by the breaking of the composite. We show
that lifetime is controlled by the duration of the second phase where t the material’s modulus
decreases linearly with the logarithm of the time.
Characterizations by X ray scattering, neutron scattering and electronic microscopy
enabled us to study the fatigue damage from the nanometric scale to the micronic scale of the
semi-crystalline structure of the reinforced polyamide and of the neat polyamide as a reference.
The damage during the second step can be explained. We show that the drop of properties is
due to low density domains nucleation in polymeric matrix at the nanometric scale, and to the
increase of the number and of the size of these domains until the micronic scale. The size
distribution, density and form factor of the domains have been quantified.
We proposed a physical model for the nucleation of the domains based on the concept
of heterogeneities of local strains. The activation energy has been estimated. This model is
able to account for the logarithmic evolution of the macroscopic properties of reinforced and
neat polyamide in fatigue.
The results of this thesis opens the way to a better lifetime prediction in fatigue in one
hand, and to an increase of the lifetime thanks to innovative formulations of polymer matrix in
another hand.

Key words : Polyamide, Fatigue, Polymer physics, Semi-crystalline polymers, Glass fiber-
reinforced polymers, Cavitation, Crazes, Breaking.

E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA


Problématique de la thèse

Contexte industriel

Les polyamides renforcés de fibres de verre sont actuellement utilisés dans le domaine
automobile en raison de leurs bonnes propriétés de rigidité et de résistance aux chocs. La
gamme d’applications est large (système d’admission d’air, structure du tableau de bord…) et
les polyamides renforcés sont étudiés dans le but de remplacer le métal pour de nouvelles
applications.
En effet, les constructeurs cherchent à remplacer le métal par des matériaux plus légers –
comme l’aluminium, le titane ou les polymères – car les directives de l’Union Européenne sur
la réduction des gaz à effet de serre sont de plus en plus exigeantes [1]. En 2000, l’émission de
CO2 moyenne pour les véhicules particuliers était estimée à environ 186g de CO2/km, et
l’objectif de réduction de cette émission fixée par le Parlement Européen set le 17 décembre
2008 est de 120g de CO2/km pour les nouveaux véhicules. L’objectif pour 2020 est de 95g de
CO2/km. Or il est considéré que 75% de la consommation en carburant d’un véhicule est due à
son poids.
Dans les véhicules de nombreuses pièces sont soumises à des chargements répétés, à savoir les
pièces proches du moteur qui subissent les vibrations du moteur et les pièces de structure qui
supportent les vibrations du châssis. En ce qui concerne le polyamide renforcé de fibres de
verre, les applications se trouvent principalement sous le capot. L’amplitude des vibrations est
faible mais la pièce doit être capable de supporter ces vibrations pendant toute la vie du
véhicule. La température au voisinage du moteur est de plus en plus élevée, et les températures
maximales en pointe atteignent aujourd’hui 170°C. Les polymères sont des matériaux dont le
comportement est très dépendant de la température de l’environnement. Pour concurrencer les
métaux, les fournisseurs de polymères doivent donc être capables d’estimer précisément la
durée de vie des pièces en fatigue à différentes températures, et de proposer des matériaux
polymères innovants à longue durabilité.

Contexte scientifique

La fatigue est une détérioration des matériaux par effet de sollicitations répétées. L’étude de ce
phénomène est d’une grande importance car la contrainte de rupture en fatigue est très
inférieure à la contrainte à rupture en traction, et pour certains matériaux cette contrainte peut
même être inférieure à leur limite élastique. Les études concernant la durée de vie des métaux
en fatigue à grand nombre de cycles sont actuellement très abouties et permettent une bonne
compréhension des mécanismes de fatigue et un dimensionnement des pièces métalliques
fiable. Cependant ces conclusions ne peuvent pas être transposées aux matériaux polymères
car ils sont sollicités dans le domaine viscoélastique même pour les essais d’endurance, alors
que les métaux sont généralement sollicités dans leur domaine élastique. En fatigue, les
frottements moléculaires internes et leur propriété d’isolant thermique impliquent une forte
variation de la température dans le matériau. Or les propriétés physiques des polymères sont
très dépendantes de la température, notamment en raison de la transition vitreuse proche de la
température ambiante. Le comportement en fatigue des polymères est donc très influencé par
la température. Depuis les années 1980 la résistance des polymères a été largement étudiée

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
[39; 53; 110; 112; 114], mais peu d’études ont porté sur la compréhension et la prédiction de
la durée de vie à différentes températures dans les polymères [5; 23; 26; 48; 53; 79]. Un des
objectif de cette thèse est donc de faire varier largement la température du polymère afin
d’étudier son comportement en fatigue dans les domaines vitreux et caoutchoutiques ainsi
qu’autour de sa transition vitreuse.

Dans le polyamide renforcé de fibres de verre, il a été montré que l’endommagement en


fatigue est abondant, localisé et distribué de manière homogène [25]. Cet endommagement
cause une baisse de la rigidité du matériau dès les premiers cycles de fatigue. Les mécanismes
de rupture finaux en fatigue sont bien décrits dans la littérature. Ils mettent en jeu la formation
de fissures en têtes de fibres et en général la propagation de ces fissures à l’interface fibres-
matrice [45; 79]. Cependant ce mécanisme d’endommagement n’est observé que lors des
derniers cycles avant la rupture. Il permet de décrire les stades ultimes de la rupture en fatigue,
mais n’explique pas dégradation progressive du matériau. Ce travail visera donc à
caractériser l’endommagement qui apparaît dans les premiers stades de la fatigue.

La structure des polymères semi-cristallins est organisée depuis l’échelle nanométrique jusqu’à
l’échelle micronique. La compréhension des mécanismes physiques associés à
l’endommagement en fatigue doit donc passer par l’étude de l’évolution des propriétés du
matériau à ces différentes échelles. Or les travaux antérieurs concernant la fatigue ont consisté
à étudier l’évolution des propriétés mécaniques au cours de la fatigue à l’échelle
macroscopique [72], à observer les échantillons fatigués par microscopie [44; 115], ou les
deux [6; 7; 10; 25]. La caractérisation de l’endommagement dans les polymères semi-
cristallins à l’échelle submicronique et son influence sur les propriétés macroscopiques a fait
l’objet d’un faible nombre de travaux dans le cas de la traction [19; 29; 35; 64]. Ces études ont
montré que la formation de cavités submicroniques peut être à l’origine de mécanismes
d’endommagement à plus grande échelle. Cependant cette étude n’a pas été réalisée dans le
cas de la fatigue. Il reste nécessaire d’étudier l’évolution de la structure du matériau soumis à
une contrainte cyclique à l’échelle sub-micronique pour expliquer les premiers stades de
l’endommagement en fatigue.

La compréhension de l’évolution de la structure multi-échelles du matériau devrait nous


permettre de proposer une interprétation physique des mécanismes spécifiques de la fatigue.
Nous présenterons à la fin de cette étude un modèle physique sera basé sur les
caractérisations expérimentales des défauts en fatigue, pour expliquer l’évolution des
propriétés mécaniques macroscopiques.

Après une introduction de cette étude au chapitre 1, et une présentation des matériaux et des
méthodes utilisées au chapitre 2, l’étude de la durée de vie en température du polyamide vierge
et renforcé de fibres sera présentée dans le troisième chapitre. Nous présenterons dans le
chapitre 4 l’évolution des propriétés à l’échelle macroscopique du polyamide en fatigue, puis
nous changerons d’échelle au chapitre 5 pour présenter les caractérisations de
l’endommagement à l’échelle microscopique par microscopie électronique et diffusion des
rayons X, et enfin nous montrerons au chapitre 6 les changements structuraux causés par la
fatigue à l’échelle nanoscopique par diffraction des rayons X. Une fois les mécanismes
d’endommagement mis en évidence, nous proposerons un modèle pour expliquer les
mécanismes physiques associés. Ce modèle permettra d’expliquer l’évolution des propriétés
mécaniques et sera présenté au chapitre 7.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Sommaire

Problématique de la thèse 1

Chapitre 1 : Introduction 11

1 Le polyamide, sa structure et ses mécanismes de rupture ........... 11

1.1 Le polyamide, un polymère à structure multi-échelles 12


1.1.1 La maille cristalline ........................................................................ 12
1.1.2 Les lamelles cristallines .................................................................. 13
1.1.3 Les sphérolites .............................................................................. 14
1.2 Mécanismes de déformation des polymères semi-cristallins 15
1.2.1 Courbe contrainte – déformation dans les polymères semi-cristallins
homogènes ................................................................................................ 15
1.2.2 Le comportement élastique et viscoélastique met en jeu la déformation
de la phase amorphe interlamellaire ............................................................. 17
1.2.3 Le comportement plastique implique la déformation de la phase
cristalline .................................................................................................. 18
1.2.3.1 Glissements cristallins ................................................................ 18
1.2.3.2 Cavitation ................................................................................. 19
1.2.3.3 Critère de plasticité .................................................................... 19
1.2.3.4 L’écoulement plastique, un phénomène thermiquement activé ......... 20
1.2.4 Mécanismes de plasticité localisée ................................................... 21
1.2.4.1 Bandes de cisaillement ............................................................... 21
1.2.4.2 Craquelures............................................................................... 22
1.2.5 Rupture de la structure sphérolitique : influence des différentes échelles
de l’organisation cristalline .......................................................................... 25
1.2.6 Comportement aux grandes déformations : Fibrillation ...................... 25
1.2.6.1 Orientation de la structure cristalline ............................................ 25
1.2.6.2 Transitions de phase cristalline .................................................... 26
1.2.6.3 Rupture des thermoplastiques semi-cristallins fibrillaires ................. 27
2 Les fibres de verre, un renfort pour la performance ..................... 28

2.1 Transfert de contraintes à l’interface fibre-matrice 28


2.2 Rigidité 29
2.2.1 Influence de l’orientation des fibres ................................................. 29
2.2.2 Influence de la longueur des fibres .................................................. 30
2.3 Résistance à l’impact 31
2.4 Champs de contraintes autour des fibres 31
3 La fatigue dans les matériaux et le cas particulier des polymères 33

3.1 Fatigue dans les matériaux 33


3.1.1 Etude de la durée de vie : Courbes contrainte – nombre de cycles à
rupture ................................................................................................... 33
3.1.1.1 Définition des paramètres de chargement pour les sollicitations
périodiques............................................................................................. 34
3.1.1.2 Critère de fin de vie en fatigue ..................................................... 35

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
3.1.2 Essais de propagation de fissures en fatigue ..................................... 35
3.1.3 Lois de durée de vie dans les matériaux ........................................... 36
3.1.3.1 Fatigue plastique oligocyclique ..................................................... 36
3.1.3.2 Domaine d’endurance limitée....................................................... 36
3.1.3.3 Influence du rapport de contraintes .............................................. 36
3.1.3.4 Endommagement cumulatif en fatigue .......................................... 37
3.2 Fatigue dans les polymères 38
3.2.1 Spécificités des matériaux polymères en fatigue ................................ 38
3.2.1.1 Transition vitreuse et dépendance en temps/température ............... 38
3.2.1.1 Comportement thermomécanique des polymères ........................... 39
3.2.2 Etude de la durée de vie en fatigue des polymères ............................ 41
3.2.2.1 Fatigue à déformation imposée .................................................... 41
3.2.2.2 Essais à contrainte imposée : influence de l’orientation et de la taille
des fibres ............................................................................................... 42
3.2.2.3 Propagation des fissures en fatigue .............................................. 44
3.2.2.4 Approche de la mécanique de la rupture pour l’étude de la durée de vie
d’éprouvettes non entaillées ..................................................................... 44
3.2.3 Scénario d’endommagement des polymères semi-cristallins renforcés de
fibres courtes en fatigue : endommagement spécifique de la fatigue ................. 46
3.2.3.1 Dégradation généralisée du matériau en fatigue dès les premiers cycles
............................................................................................... 46
3.2.3.2 Rôle de l’interface ...................................................................... 46
3.2.3.3 Influence de l’orientation des fibres .............................................. 48
3.2.3.4 Influence de la teneur en eau du composite................................... 49
3.2.3.5 Influence de la température ........................................................ 50

Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation 55


1 Systèmes étudiés : polyamides vierges et renforcés de fibres de
verre ................................................................................................... 55

1.1 Caractéristiques de la matrice polyamide 55


1.2 Caractéristiques de fibres de verre courtes 55
1.3 Mise en œuvre du composite par injection 56
1.4 Microstructure multicouches du polyamide 57
1.4.1 Structure cœur-peau du polyamide .................................................. 57
1.4.2 Structure cœur-peau liée à l’orientation des fibres de verre ................ 58
1.4.3 Structure multicouches du polyamide renforcé de fibres de verre ........ 60
2 Tests mécaniques et caractérisations structurales ....................... 61

2.1 Tests mécaniques 61


2.1.1 Essais de fatigue en température .................................................... 61
2.1.2 Contrainte ultime en traction dynamique (UTS) ................................. 61
2.2 Caractérisations macroscopiques 62
2.2.1 Analyse des cycles de fatigue .......................................................... 62
2.3 Caractérisations microscopiques et nanoscopiques 63
2.3.1 Microscopie électronique à balayage (MEB) ....................................... 63
2.3.2 Diffraction des rayons X ................................................................. 65
2.3.3 Diffusion des rayons X aux petits angles in situ ................................. 66
2.3.4 Diffusion des neutrons aux petits angles .......................................... 70

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue 75

1 Représentation de la durée de vie en fatigue : courbes de Wöhler 75

1.1 Echauffement du matériau sollicité en fatigue 77


1.1.1 Résultats expérimentaux ................................................................ 77
1.1.2 Etude de l’échauffement ................................................................. 80
1.2 Effet de la fréquence 82
2 Prise en compte de la température dans l’étude de la durée de vie
en fatigue ........................................................................................... 85

2.1 Proposition d’une loi de prédiction pour tenir compte des effets de la
température 85
2.1.1 Polyamide renforcé de fibres de verre .............................................. 85
2.1.2 Influence de la vitesse de déformation ............................................. 88
2.1.3 Influence des fibres de verre ........................................................... 89
2.2 Vers une compréhension de la loi de prédiction de la durée en fatigue 90
2.2.1 Interprétation de la constante  ...................................................... 91
2.2.2 Interprétation de la constante  ...................................................... 92

Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en


fatigue 99

1 Résultats de l’analyse des cycles .................................................. 99

1.1 Une déformation progressive 102


1.1.1 Polyamide renforcé de fibres de verre ............................................ 102
1.1.1.1 Evolution de la déformation plastique ......................................... 102
1.1.1.2 Evolution de la déformation élastique ......................................... 104
1.1.1.3 Critère de rupture .................................................................... 106
1.1.1.4 Influence de la fréquence .......................................................... 107
1.1.2 Polyamide vierge ......................................................................... 108
1.2 Evolution du module dynamique 109
1.2.1 Polyamide renforcé de fibres de verre ............................................ 109
1.2.1.1 Evolution du module dynamique en 3 étapes ............................... 109
1.2.1.1 Influence de la fréquence .......................................................... 113
1.2.2 Polyamide vierge ......................................................................... 113
1.3 Evolution de l’énergie dissipée par cycle 114
1.3.1 Polyamide renforcé de fibres de verre ............................................ 114
1.3.2 Polyamide vierge ......................................................................... 116
1.4 Evolution du déphasage contrainte - déformation 116
1.4.1 Polyamide renforcé de fibres de verre ............................................ 116
1.4.2 Polyamide vierge ......................................................................... 119
2 Mesures macroscopiques de l’endommagement ......................... 120

2.1 Densité 120


2.1.1 Polyamide renforcé de fibres de verre ............................................ 120
2.1.2 Polyamide vierge ......................................................................... 121
2.2 Le Module d’Young comme traceur d’endommagement 122

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
2.3 Le module dynamique comme traceur d’endommagement en fatigue 123
2.4 Mesures de déformation volumique 125

Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique 133

1 Polyamide non renforcé .............................................................. 133

1.1 Localisation de l’endommagement 133


1.2 Observations microscopiques de l’endommagement 134
1.2.1 Faciès de rupture en fatigue ......................................................... 134
1.2.2 Rôle des cavités dans l’endommagement en fatigue ......................... 135
1.3 Quantification de l’endommagement 138
1.3.1 Etude des cavités sphériques par analyse d’images .......................... 138
1.3.1.1 Distribution de taille des cavités ................................................. 138
1.3.1.1 Fraction volumique des cavités .................................................. 139
1.3.2 Diffusion des rayons X ................................................................. 140
1.3.2.1 Caractérisations in situ par SAXS ............................................... 140
1.3.2.2 Caractérisation de la taille des cavités par USAXS ........................ 141
1.3.2.3 Calcul de la fraction volumique .................................................. 148
1.4 Proposition d’un mécanisme d’endommagement 150
2 Polyamide renforcé de fibres de verre ........................................ 153

2.1 Analyse des champs de déformation 153


2.2 Microtomographie 153
2.3 Microscopie 154
2.3.1 Faciès de rupture ........................................................................ 154
2.3.2 Rôle du déchaussement des fibres dans la rupture en fatigue ............ 156
2.3.3 Endommagement matriciel ........................................................... 157
2.4 Diffusion des rayons X 158
2.4.1 Estimation de la diffusion des cavités ............................................. 158
2.4.2 Estimation de la diffusion des fibres de verre .................................. 158
2.4.3 Résultats expérimentaux .............................................................. 159
2.5 Diffusion des neutrons 161
2.5.1 Estimation des contrastes de densité de longueur de diffusion .......... 161
2.5.2 Estimation du signal des fibres de verre ......................................... 162
2.5.3 Etude du signal des cavités........................................................... 163
2.5.3.1 Caractérisations dans la direction perpendiculaire aux fibres de verre ...
............................................................................................. 164
2.5.3.2 Caractérisations dans la direction parallèle aux fibres de verre ....... 165

Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique 171

1 Etude de la maille cristalline par WAXS dans le PA renforcé de


fibres de verre .................................................................................. 171

1.1 Influence de la fatigue sur l’isotropie de la phase cristalline à l’échelle de la


maille 171
1.2 Influence de la fatigue sur la perfection de la maille cristalline 173

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2 Etude de la structure cristalline à l’échelle des lamelles par SAXS
2D ................................................................................................... 174

2.1 PA non renforcé 175


2.1.1 Soustraction du signal des cavités ................................................. 175
2.1.2 Etude du signal des lamelles cristallines ......................................... 177
2.1.3 Quantification du volume soumis à la séparation des lamelles ........... 179
2.1.4 Prise en compte de la corrélation spatiale des domaines
d’endommagement ................................................................................... 181
2.2 PA renforcé de fibres de verre 182

Chapitre 7 : Interprétation physique 189

1 Endommagement en fatigue : un phénomène thermiquement activé


................................................................................................... 189

1.1 Notion d’hétérogénéités de déformations locales 190


1.2 Evolution logarithmique du module dynamique en régime de fatigue stable190
1.3 Evolution catastrophique des propriétés macroscopiques avant rupture 192
1.4 Influence de la fréquence 193
2 Rupture en fatigue...................................................................... 194

2.1 Notion de fraction de sites de rupture critique 194


2.2 Linéarité des courbes de Wöhler 194
2.3 Normalisation en température par un critère de déformation 195
2.3.1 Identification des constantes  et  ................................................ 195
2.3.2 Energie d’activation de la rupture .................................................. 195
2.3.3 Volume d’activation ..................................................................... 196
3 Nucléation de domaines de faible densité ................................... 197

3.1 Energie de nucléation des cavités 197


3.2 Contrainte macroscopique de nucléation 198
3.3 Volume d’activation 199

Conclusions et perspectives 201

Annexes 205

Liste de références 211

-7-
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

-8-
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

1
Introduction

1 Le polyamide, sa structure et ses mécanismes de rupture


1.1 Le polyamide, un polymère à structure multi-échelles
1.1.1 La maille cristalline
1.1.2 Les lamelles cristallines
1.1.3 Les sphérolites
1.2 Mécanismes de déformation des polymères semi-cristallins
1.2.1 Courbe contrainte – déformation dans les polymères semi-cristallins
homogènes
1.2.2 Le comportement élastique et viscoélastique met en jeu la déformation de
la phase amorphe interlamellaire
1.2.3 Le comportement plastique implique la déformation de la phase cristalline
1.2.4 Mécanismes de plasticité localisée
1.2.5 Rupture de la structure sphérolitique : influence des différentes échelles
de l’organisation cristalline
1.2.6 Comportement aux grandes déformations : Fibrillation

2 Les fibres de verre, un renfort pour la performance


2.1 Transfert de contraintes à l’interface fibre-matrice
2.2 Rigidité
2.2.1 Influence de l’orientation des fibres
2.2.2 Influence de la longueur des fibres
2.3 Résistance à l’impact
2.4 Champs de contraintes autour des fibres

3 La fatigue dans les matériaux et le cas particulier des polymères


3.1 Fatigue dans les matériaux
3.1.1 Etude de la durée de vie : Courbes contrainte – nombre de cycles
à rupture
3.1.2 Essais de propagation de fissures en fatigue
3.1.3 Lois de durée de vie dans les matériaux
3.2 Fatigue dans les polymères
3.2.1 Spécificités des matériaux polymères en fatigue
3.2.2 Etude de la durée de vie en fatigue des polymères
3.2.3 Scénario d’endommagement des polymères semi-cristallins renforcés de
fibres courtes en fatigue : endommagement spécifique de la fatigue

-9-
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

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Chapitre 1 : Introduction

Chapitre 1 : Introduction

Ce premier chapitre vise à donner au lecteur les éléments nécessaires à la compréhension du


sujet et à son positionnement par rapport aux travaux antérieurs. Nous présenterons dans une
première partie les principales caractéristiques de la structure des polymères thermoplastiques
semi-cristallins tels que le polyamide, et nous expliquerons comment cette structure est
affectée lors des déformations mécaniques. Cette première partie ne donnera pas d’éléments
concernant la fatigue en particulier, mais permettra de montrer la diversité des mécanismes de
déformation dans les polymères. Ces éléments pourront être comparés avec les mécanismes
typiques de la fatigue dans la partie expérimentale. Dans une seconde partie, nous
expliquerons le renforcement particulier que permet l’ajout de fibres de verre dans une matrice
thermoplastique. Enfin, dans une troisième partie, nous rappellerons les conclusions des études
de la fatigue dans les matériaux en général, et dans les polymères en particulier. Nous
montrerons ainsi pourquoi les polymères ne peuvent pas directement bénéficier des longues
années d’étude de la fatigue des métaux. Nous présenterons les mécanismes
d’endommagement en fatigue proposés pour les polymères renforcés de fibres de verre. Nous
montrerons ainsi que ces études ne permettent d’expliquer que les stades ultimes de la rupture
en fatigue, et que l’endommagement progressif qui apparaît dès les premiers cycles de fatigue
reste à comprendre.

1 Le polyamide, sa structure et ses mécanismes de


rupture

Le polyamide a été synthétisé pour la première fois par W. H. Carothers en 1935 à partir
d’acide adipique et d’hexaméthylène diamine. Sa première application industrielle a été lancée
par Du Pont de Nemours en 1938 dans le domaine textile. Ces premières fibres entièrement
synthétiques ont été commercialisées sous l’appellation Nylon. Dans le début des années 1940,
le nylon commença à être produit pour des applications de plastiques techniques en raison des
propriétés mécaniques élevées, une bonne tenue à haute température et une solidification très
rapide lors de la mise en œuvre. Actuellement, les applications du polyamide en tant que
plastique technique sont nombreuses et diverses. On peut par exemple citer l’automobile
(pièces sous capots comme les collecteurs d’admission d’air, pompes à eau, boîtes à eau de
radiateur, et les pièces extérieures telles que les enjoliveurs de roues), l’électroménager
(éléments de programmateurs, barrettes de connecteurs), l’électrotechnique (boîtiers de
contacteurs, sectionneurs, carcasses de bobines, interrupteurs, connecteurs, serre-câbles,
colliers), la mécanique (cages de roulements à billes, bagues), et les sports et loisirs (berceaux
de selles de vélos, composants de skis).
Les bonnes propriétés mécaniques du polyamide - sa résistance aux températures élevées, sa
résistance aux attaques chimiques et sa facilité de mise en œuvre - lui sont apportées par sa

- 11 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

capacité à cristalliser. Nous allons décrire dans le paragraphe suivant sa structure semi-
cristalline.

1.1 Le polyamide, un polymère à structure multi-échelles

Le polyamide est un polymère semi-cristallin. A l’échelle nanométrique la phase cristalline est


caractérisée par les paramètres de sa maille cristalline. La phase cristalline croît sous formes de
lamelles d’une taille de l’ordre de la centaine de nanomètres. Ces lamelles organisées en objets
sphériques appelés sphérolites qui ont une taille micronique. Le polyamide a donc une
structure multi-échelles. Dans ce paragraphe, nous allons décrire cette structure depuis
l’échelle nanométrique jusqu’à l’échelle micronique.

1.1.1 La maille cristalline

Les polymères sont formés d’unités de répétition nommées monomères. Lorsque ces
monomères peuvent adopter une conformation spatiale régulière et que les macromolécules
peuvent former des liaisons inter chaînes, alors la cristallisation au sein du polymère peut
devenir thermodynamiquement favorable. Le polyamide 6,6 est obtenu par polycondensation
de l’acide adipique et de l’hexaméthylène diamine, et sa formule est la suivante (Figure 1) :

Figure 1 : Unité de répétition du polyamide 6,6.


L’unité de répétition du polyamide 6,6 présente des groupements –CH2- flexibles et des
groupements polaires capables de former des liaisons hydrogènes, de plus l’arrangement
spatial des monomères est régulier. Le PA 6,6 est donc un excellent candidat pour la
cristallisation. A température ambiante, le polyamide 6,6 se trouve sous sa forme cristalline α
triclinique [59] (Figure 2). Les lamelles sont repliées dans le plan a-c et la cohésion dans la
direction b est assurée par des liaisons hydrogènes.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

Figure 2: Maille cristalline du polyamide 6,6 (a=049nm, b=0.54nm, c=1.72nm, α=48.5), β=77°, γ=63.5°) (a)
projection dans la direction b montrant la face a-c, les liaisons hydrogènes sont marquées en pointillés. (b)
projection dans la direction c montrant les faces a-b [59].

La structure de la phase α varie entre une phase αI thermodynamique (obtenue par


cristallisation en solution, densité 1.21 g/cm3) et αII cinétique (obtenue lors d’un
refroidissement rapide, densité 1.16 g/cm3).
En général, la cinétique de cristallisation très rapide du polyamide 6,6 ne permet pas une
cristallisation très ordonnée, donc le taux de cristallinité reste modéré (35% environ).

1.1.2 Les lamelles cristallines

Les chaînes se replient pour former des lamelles cristallines. Entre ces lamelles on trouve des
chaînes de polymère qui n’ont pas trouvé leur place dans l’organisation cristalline : il en
résulte une alternance entre phase amorphe et phase cristalline. Un polymère n’est donc jamais
100% cristallin. Cette organisation cristalline est caractérisée par une longue période nommée
L sur la Figure 3. Flory a étudié la microstructure des semi-cristallins et a montré que la longue
période des lamelles est d’environ 10nm dans les polymères [30].

Figure 3 : Représentation schématique d’une lamelle cristalline dans un polymère semi-cristallin d’après
Flory [30].

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

La longueur des chaînes de polymères est très grande devant l’épaisseur des lamelles. Une
même macromolécule peut appartenir à la phase amorphe et à des lamelles cristallines
différentes. En outre, les chaînes qui constituent la phase amorphe sont enchevêtrées. La phase
amorphe forme donc des ponts covalents et physiques entre les lamelles cristallines et assure
ainsi la cohésion du système. La formation de ces liaisons intercristallines a été étudiée par
Séguéla [102].

1.1.3 Les sphérolites

La matière fondue contient des germes qui sont des sites de nucléation des lamelles. Les
lamelles croissent depuis ces germes dans toutes les directions, et on obtient des structures
isotropes appelées sphérolites (Figure 4).

Figure 4 : Organisation des lamelles en sphérolites.

Les sphérolites sont observables par microscopie optique en lumière polarisée [59] du fait de
la biréfringence de la phase cristalline (Figure 5). En effet l’indice de réfraction varie selon
l’orientation du plan de polarisation par rapport aux axes cristallographique. Ainsi dans le
polyamide 6,6 l’indice de réfraction est relativement important perpendiculairement aux axes
des chaînes en raison de la présence des ponts hydrogènes.
a b c

Growth Growth
direction direction

Figure 5 : (a) Observation d’un sphérolite par microscopie optique à polarisation croisée [59]; (b) et (c)
phénomène de biréfringence.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

La taille des sphérolites est variable selon la nature chimique du polymère, la concentration en
sites de nucléation et les paramètres de mise en œuvre. Le diamètre des sphérolites est
généralement de plusieurs microns.

1.2 Mécanismes de déformation des polymères semi-cristallins

Nous avons montré que la structure des polymères semi-cristallins est organisée depuis
l’échelle nanométrique jusqu’à l’échelle micronique. Nous allons maintenant présenter
l’évolution de cette organisation sous contrainte. Ce paragraphe permettra de décrire les
modifications structurales à ces différentes échelles dans le cadre général de sollicitations de
traction, et non pas dans le cas particulier de la fatigue.
Nous allons présenter les modifications structurales dans les polymères semi-cristallins par
ordre croissant des déformations. Lorsque ces polymères sont soumis à une contrainte faible,
leur comportement est élastique ou viscoélastique et leur déformation est réversible. Au-delà,
ils suivent un comportement plastique et les déformations irréversibles causent des
modifications structurales. Nous verrons que lorsque les polymères sont sollicités en dessous
de leur transition vitreuse, les phénomènes de plasticité sont souvent localisés, et le reste de
l’échantillon est déformé élastiquement. Nous présenterons les deux grands types de
mécanismes de plasticité localisée : les bandes de cisaillement et les craquelures. Aux grandes
déformations, la structure sphérolitique est altérée et on obtient une structure fibrillaire
ordonnée dans la direction du chargement.

1.2.1 Courbe contrainte – déformation dans les polymères semi-cristallins


homogènes

Le comportement des matériaux est communément apprécié grâce aux courbes contrainte
nominale () versus déformation nominale (ε) comme le présentent les Figure 6et Figure 7
pour le cas des polymères semi-cristallins homogènes.
σ

l0

Figure 6 : Traction d’un échantillon de longueur initiale l0 et de longueur sous chargement l.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

σR
σY

I II III
ε
Figure 7 : Courbe contrainte nominale – déformation nominale dans les polymères semi-cristallins : stade
(I) élasticité – viscoélasticité ; stade (II) plasticité ; stade (III) orientation des macromolécules dans la
direction de chargement.

(l  l 0 )
La déformation est ε définie telle que   . Le comportement en traction des polymères
l0
est très dépendant de la température et de la vitesse de déformation  , qui est définie telle que
d (l  l 0 )
   . Trois comportements sont généralement définis :
dt l 0 dt

(I) Aux faibles contraintes, la déformation est proportionnelle à la contrainte et la déformation


est réversible. On a   E   et la pente E est appelée module d’Young ou module
d’élasticité. On parle de viscoélasticité lorsque la déformation est réversible et que le retour à
une déformation nulle dépend du temps. Ce comportement fera l’objet d’une description dans
la partie 1.2.2.

(II) La fin de la relation linéaire entre la contrainte et la déformation marque le début de la


plasticité. Le maximum de la contrainte nominale après apparition de la plasticité est
généralement appelé seuil de plasticité et est noté σY. Les mécanismes associés au
comportement plastique seront présentés au paragraphe 1.2.3. Lorsque le polymère est vitreux,
les mécanismes de plasticité sont souvent localisés. Ces mécanismes particuliers seront
présentés au paragraphe 1.2.4. A ce stade la structure sphérolitique est globalement conservée.
Nous nous interrogerons sur l’influence des différentes échelles de l’organisation cristalline
sur la rupture de la structure sphérolitique au paragraphe 1.2.5.

(III) La déformation est toujours plastique et les macromolécules s’orientent dans la direction
de chargement. Cette orientation de la structure provoque un durcissement du matériau avant
rupture. Si le polymère localise la déformation, on peut observer une zone de rétrécissement de
la section : ce phénomène est nommé striction. La déformation dans cette zone est alors très
importante à contrainte constante. Dans ce cas la structure sphérolitique est complètement

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Chapitre 1 : Introduction

altérée et une microstructure orientée dans la direction de la contrainte est formée. Ce


mécanisme de fibrillation sera présenté au paragraphe 1.2.6.

Selon les conditions de température et de vitesse de déformation la rupture peut apparaître


dans chacun des domaines élastique (la rupture est alors fragile), ou plastique (la rupture est
ductile), avec ou sans striction. La contrainte à rupture est notée σR.

Lorsque le polyamide 6,6 est sec, les valeurs caractéristiques de sa courbe de traction à 23°C et
  10 3 s 1 sont E=3GPa, σY=80MPa et σR=120MPa.

1.2.2 Le comportement élastique et viscoélastique met en jeu la


déformation de la phase amorphe interlamellaire

Le comportement élastique et viscoélastique sont associés à la déformation de la phase


amorphe interlamellaire depuis les travaux de Bowden et Young [13]. Leur étude basée sur des
caractérisations de la structure cristalline par diffusion des rayons X aux grands et petits angles
a montré différents mécanismes de déformation de la phase amorphe (Figure 8).

Figure 8 : Déformation de la phase amorphe selon Bowden et Young [13] : (a) cisaillement interlamellaire ;
(b) séparation interlamellaire ; (c) rotation d’un bloc de lamelles.

La déformation de la phase amorphe implique trois types de déformations : le cisaillement


interlamellaire, la séparation interlamellaire, et la rotation de blocs de lamelles.
Le cisaillement interlamellaire est caractérisé par un mouvement des lamelles cristallines
causant le cisaillement simple de la phase amorphe. Ce mécanisme est facilité lorsque la
température est supérieure à la transition vitreuse car la phase amorphe a un comportement
caoutchoutique. La réversibilité de ce cisaillement est liée à la présence de macromolécules
pontant les phases cristallines qui sont mises sous tension lors du cisaillement et qui vont
relaxer lors du déchargement du matériau.
La séparation interlamellaire est due à une composante de tension ou compression entre les
lamelles cristallines. La phase cristalline constituant un réseau, la phase amorphe sous tension
ne peut se contracter dans le sens perpendiculaire à la contrainte. La séparation des lamelles

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

implique donc une variation de volume locale qui peut éventuellement conduire à la cavitation
du matériau.
La rotation de blocs de lamelles implique la présence de blocs de lamelles cristallines libres de
tourner sous l’action de la contrainte. Ce phénomène est caractérisé par un changement de la
période caractéristique des blocs de lamelles.

1.2.3 Le comportement plastique implique la déformation de la phase


cristalline

Le comportement plastique implique la déformation de la phase cristalline. Ces déformations


de la phase cristallines sont causées par des glissements cristallins, associés à la formation de
microcavités.

1.2.3.1 Glissements cristallins


Les déformations irréversibles ont lieu lorsque les contraintes deviennent suffisamment
grandes pour dépasser la contrainte seuil d’écoulement plastique. Pour les polymères, ce seuil
est faible en comparaison avec les métaux ou céramiques.
Plusieurs études ont permis d’attribuer l’écoulement plastique à la phase cristalline, les
premiers travaux sur ce phénomène ont été réalisés par Bowden et Young [13]. Leurs travaux
ont permis d’expliquer la plasticité par des mécanismes de cisaillement et de fragmentation
des lamelles (Figure 9).

Figure 9: Cisaillement et dislocations de la phase cristalline selon Bowden et Young [13] : (a) glissement
fin, le déplacement d’un élément du réseau a provoqué le glissement de chacun des autres éléments du
réseau ; (b) glissement plus grossier ou glissement d’ensembles d’éléments du réseaux ; (c) représentation
des dislocations lors du cisaillement des lamelles cristallines.

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Chapitre 1 : Introduction

Les glissements cristallins peuvent être considérés fins ou grossiers selon la densité de plans
de glissement dans la lamelle. Cette densité de plans cristallins dépend de la taille de la maille
cristalline et de la mobilité de la phase amorphe.
Des études expérimentales ont montré que la contrainte seuil de déformation plastique est
proportionnelle à l’épaisseur des lamelles et de l’état de contraintes sur la structure cristalline
[16; 17; 80].

1.2.3.2 Cavitation
La caractérisation de l’endommagement dans les polymères semi-cristallins à l’échelle
submicronique et son influence sur les propriétés macroscopiques a fait l’objet d’un faible
nombre de travaux. Kuksenko et Tamusz ont réalisé des caractérisations par diffusion des
rayons X aux petits angles. Ils ont montré que lorsque le polymère est déformé des microvides
sont formés. Leur taille est constante et leur nombre augmente avec la déformation, et la
rupture est provoquée par une densité critique de microvides [65]. La taille de ces cavités est
très variable selon la morphologie cristalline : les cavités ont un diamètre de plusieurs
centaines de nanomètres dans les polymères non orientés, et un diamètre de quelques dizaines
de nanomètres pour les polymères de structures orientées par étirage. Lorsque le polymère est
déchargé, ces microvides se referment. Les travaux de Kuksenko et Tamusz ont été récemment
utilisés par Corté et Leibler pour étudier les propriétés mécaniques des polymères-semi-
cristallins renforcés choc [21].

Les travaux de Castagnet ont porté sur la caractérisation d’un polymère semi-cristallin à
l’échelle submicronique, le PolyFluorure de Vinylidène (PVDF) [19]. Des tests mécaniques
couplés à des mesures volumétriques et à des analyses par diffraction et diffusion des rayons X
ont révélé la formation de cavités entre les lamelles cristallines sous déformation,
préférentiellement à l’équateur des sphérolites, qui apparaissent juste avant l’écoulement et qui
sont à l’origine de l’endommagement et de la rupture du polymère.

Pawlak et Galeski ont comparé l’influence du cisaillement cristallin et de la cavitation dans la


phase amorphe sur la rupture des polymères semi-cristallins. Ils indiquent que la cavitation
apparaît dans les polymères dont les cristaux ont une résistance plastique élevée, alors que les
polymères dont les cristaux ont une faible résistance plastique se déforment par cisaillements
cristallins. Les chercheurs ajoutent que pour le cas particulier des polyamides dont la tension
de surface est élevée, les cavités sont instables et referment rapidement, mais laissent des
traces d’endommagement. La pression négative p qui tend à refermer une cavité de rayon r est
2
en effet proportionnelle à la tension de surface S : p   S . Le diamètre des cavités mesuré
r
par diffusion des rayons X est de 4 à 5nm, de l’ordre de la distance interlamellaire [81]. Des
observations par microscopie électronique ont permis à Galeski de localiser ces cavités dans la
phase amorphe interlamellaire et intersphérolitique [35].

1.2.3.3 Critère de plasticité


Il existe plusieurs critères pour estimer la contrainte nécessaire à l’apparition de l’écoulement
plastique. Le critère le plus usité dans le domaine des polymères est basé sur le travail de Von
Mises en 1913. On peut écrire la contrainte dans un solide sous forme tensorielle à partir des
contraintes principales :

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Chapitre 1 : Introduction

 1 0 0
 
 0  2 0  avec σ1 la contrainte principale la plus élevée.
0 0  
 3

Le critère de Von Mises est un critère basé sur la contrainte tangentielle octaédrique, définie
comme la contrainte qui s’exerce sur les plans (1,1,1).
1/ 2
 (   2 ) 2  ( 2   3 ) 2  ( 3   1 ) 2 
 VM   1 
 2
(1) 
Pour les métaux l’écoulement a lieu lorsque la contrainte de Von Mises est
atteinte :  Y   VM . Mais pour les polymères l’écoulement dépend de la composante
  2  3 
hydrostatique de la contrainte P telle que : P   1 
 3 
Le seuil de plasticité varie en effet fortement avec la pression hydrostatique du fait de
l’existence de volume libre entre les macromolécules. On utilise donc un critère de Von Mises
modifié :
 VM   Y 0  P (2)
où Y0 est la contrainte d’écoulement lorsque la pression est nulle (cisaillement pur), µ un
coefficient de friction interne qui dépend du matériau, et P la pression hydrostatique (ou
contrainte moyenne).

1.2.3.4 L’écoulement plastique, un phénomène thermiquement activé


L’écoulement plastique est un phénomène thermiquement activé. La théorie d’Eyring définit la
dépendance en température de l’écoulement plastique [27; 28; 108]. La mobilité d’un segment
de polymère est associée à une barrière d’énergie E0 à franchir, et la difficulté à franchir cette
barrière correspond à une probabilité de saut de cette barrière d’énergie. En l’absence de
contrainte ce saut est très peu probable et la probabilité de ce passage augmente avec la
contrainte (l’application d’une contrainte modifie la hauteur de la barrière d’énergie à
franchir). Ce passage a pour effet d’orienter le segment de polymère dans la direction de la
contrainte.
Le segment de polymère a une surface effective A et subit une contrainte de traction σ. La
force appliquée est donc σA. Le travail absorbé par le segment mobile pour franchir la barrière
à distance x est σAx. On définit un volume d’activation v égal à Ax.
La théorie d’Eyring définit le temps de mobilité  d’un segment :
 E  v 
   0 exp 0 
 k B T  (3)
où 0 est une constante caractéristique du matériau, E0 est l’énergie d’activation, v le volume
d’activation du matériau, σ la contrainte, kB la constante de Boltzmann, et T la température.
La mobilité de segments de polymère est donc d’autant plus probable que la contrainte et la
température sont élevées.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

1.2.4 Mécanismes de plasticité localisée

Lorsque les polymères sont sollicités en dessous de leur transition vitreuse, la plasticité est
souvent localisée, le reste du matériau ayant un comportement élastique ou viscoélastique. Les
deux grands mécanismes de plasticité localisée sont les bandes de cisaillement et les
craquelures, et ces mécanismes peuvent cohabiter. Friedrich a notamment traité la compétition
entre bandes de cisaillement et craquelage dans les polymères semi-cristallins [33].

1.2.4.1 Bandes de cisaillement


Les bandes de cisaillement sont un mécanisme de plasticité localisée typique des polymères
semi-cristallins, même si elles peuvent aussi être observées dans certains polymères amorphes
tels que le polycarbonate (PC). On observe ces bandes de cisaillement dans la direction de
cisaillement maximale, c’est-à-dire pour un angle de 45° par rapport à l’axe de traction dans
une éprouvette homogène sollicitée en traction uniaxiale. En général, la direction des bandes
de cisaillement observée dans les polymères semi-cristallins est comprise entre 35° et 42° [33].
Pour les polymères semi-cristallins, Bowden et Young ont montré que les bandes de
cisaillement sont principalement localisées dans les sphérolites à environ 45° de la direction de
chargement [13] (Figure 10).

Figure 10 : Déformation plane dans un sphérolite en 2 dimensions par Bowden et Young [13] : cisaillement
des lamelles à 45° de la direction de la contrainte.
Les glissements moléculaires dans cette direction de cisaillement provoquent une orientation
des macromolécules et donc un phénomène de biréfringence. Pour les polymères transparents
on peut donc mettre en évidence les bandes de cisaillement par microscopie optique en lumière
polarisée. Il existe deux types de bandes de cisaillement : des bandes fines et des bandes
grossières (Figure 11).

- 21 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

(a) (b)
Figure 11 : (a) Bandes de cisaillement grossières observées par Kramer dans le polystyrène en compression
cyclique à température ambiante [60]; (b) Bandes de cisaillement fines observées par Friedrich dans le
polypropylène à une température de -196°C [33].

Plus récemment, les observations de Ferreiro par microscopie à force atomique ont montré que
la déformation des sphérolites dans des films de PA 6 met en jeu des bandes de cisaillement
[29].

Figure 12 : Bandes de cisaillement fines dans un sphérolite avec un angle par rapport à l’axe de traction de
52° : (a) image AFM en amplitude (2.5x2.5µm) ; (b) image AFM en amplitude (700x700nm) [29]. L’axe de
traction est vertical.

Sous contrainte les sphérolites déformés prennent une forme ellipsoïdale. Ces images montrent
clairement la présence de bandes de cisaillement fines qui traversent la structure sphérolitique.
Ces bandes de cisaillement ont été observées par Ferreiro à 52° de la direction de traction
quelle que soit la température, pour des températures inférieures à 160°C et pour des
déformations supérieures à 10%.

1.2.4.2 Craquelures
Les craquelures sont des fissures pontées par des fibrilles de matière. Le diamètre des
craquelures est de l’ordre du micron, et les craquelures sont donc visibles au microscope
optique. Les fibrilles ont un diamètre de l’ordre de 10 nm et remplissent 50% du volume de la

- 22 -
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Chapitre 1 : Introduction

craquelure. Elles peuvent aussi être mises en évidence par microscopie électronique (Figure
13). La grande différence de densité entre la craquelure et la partie intacte de l’échantillon
cause une diffusion de la lumière et donc un blanchiment apparent de l’échantillon.

(b)

Figure 13 : (a) craquelures dans le polystyrène en traction d’après Strobl [104];


(b) Craquelure dans le polystyrène observée par Kambour en microscopie
électronique [51].
(a)

Les craquelures sont souvent causées par les tractions uniaxiales ou biaxiales, et on ne les
observe pas pour des chargements en compression ou en cisaillement pur. Elles se forment
statistiquement dans le matériau, et préférentiellement à la surface de l’éprouvette. Les
craquelures sont observées principalement dans les matériaux amorphes, pour des masses
moléculaires supérieures à la limite d’enchevêtrement des macromolécules. La longueur des
macromolécules est un paramètre important puisque les chaînes doivent être assez courtes
pour se désenchevêtrer et assez longues pour stabiliser les fibrilles. Plummer et Kramer [88],
et plus récemment Kausch et al. [55] ont étudié l’influence des enchevêtrements sur les
mécanismes de déformation dans plusieurs polymères.

La formation des craquelures dans les polymères en général a fait l’objet d’études
approfondies par Argon [4], Kramer [61; 62], et le craquelage dans les semi-cristallins a été
étudié par Narisawa [78], Kausch et al. [56] et Friedrich [33]. La formation des craquelures est
un mécanisme en trois étapes.
La création de vides dans un matériau homogène étant excessivement difficile, il est clair que
les craquelures se forment sur des hétérogénéités qui concentrent les contraintes. La nature
statistique de l’apparition des craquelures est liée à un processus thermiquement activé. Les
cavités sont nucléées entre les macromolécules sans rupture de chaînes. La cinétique
d’initiation des craquelures dépend de la contrainte appliquée : plus la contrainte est élevée et
plus les craquelures se forment rapidement. Après la phase d’initiation, la densité des
craquelures sature.
Les fibrilles croissent par fluage et par approvisionnement de matière dans la masse du
polymère à l’extrémité de la fibrille. La craquelure se propage perpendiculairement à la
contrainte par un mécanisme d’instabilité de ménisque qui explique la rupture répétée de
l’interface en front de craquelure. Ce mécanisme a été proposé par Argon et est illustré en
Figure 14.

- 23 -
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Chapitre 1 : Introduction

Figure 14 : Modèle de croissance latérale des craquelures par instabilité de ménisque proposé par Argon
[4].

Un matériau contenant des craquelures n’est pas forcément ruiné. Lorsqu’on décharge le
matériau, les craquelures se referment mais sont toujours présentes. Elles peuvent disparaître si
le matériau est recuit au-delà de sa transition vitreuse car les molécules peuvent se re-
enchevêtrer. La rupture du matériau est causée par la rupture des fibrilles. Ces dernières
rompent par coupures de chaînes ou par désenchevêtrement selon la nature du polymère et la
température.

Des observations récentes par Thomas en microscopie à force atomique ont montré
l’apparition de craquelures dans un sphérolite de polybutylène [107] (Figure 15).

Figure 15 : Craquelure dans un sphérolite de polybutylène [107] observé pour une déformation
macroscopique de 6%.

Ces observations ont montré que la déformation locale dans la zone centrale du sphérolite est
près de deux fois supérieure à la déformation macroscopique, et des mesures de déformation
volumiques ont permis de conclure que la déformation transverse dans les films est quasi
nulle. Ces résultats sont expliqués par l’apparition de craquelures dans la zone équatoriale des
sphérolites. En effet, les lamelles cristallines situées à l’équateur du sphérolite sont orientées
dans une direction perpendiculaire à la contrainte. Elles subissent donc la contrainte normale la
plus importante, et la séparation des lamelles favorise la cavitation à l’origine des craquelures.

- 24 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

1.2.5 Rupture de la structure sphérolitique : influence des différentes


échelles de l’organisation cristalline

Schultz a étudié les relations entre la microstructure des semi-cristallins non orientés (structure
sphérolitique) et leurs mécanismes de déformation [100]. Son étude discute de l’influence des
caractéristiques des sphérolites, des lamelles cristallines et des chaînes amorphes
interlamellaires. Il est difficile de dissocier les influences de chacune des échelles de la
structure cristalline car elles sont interdépendantes, mais l’étude de Schultz a tout de même
permis de dresser une cartographie des modes de rupture en fonction de différents paramètres
structuraux (Figure 16).

Figure 16 : Modes de rupture des polymères semi-cristallins en fonction de la température, de la vitesse et


des paramètres structuraux [100].

La taille des sphérolites et les liaisons intersphérolitiques ont une grande influence sur la
plasticité et la rupture des polymères semi-cristallins. Ainsi l’ajout d’agents nucléants pour
obtenir des sphérolites de plus petits diamètres permet d’augmenter la ductilité, la contrainte
d’écoulement et la contrainte à rupture. La densité de défauts dans la macromolécule influence
la dureté et le module élastique de la structure cristalline. Plus la densité de défauts est
importante, plus le cisaillement de la structure est facilité, et plus la contrainte seuil
d’écoulement est faible. La masse moléculaire influence également les propriétés mécaniques
car la densité de molécules pontant les lamelles cristallines augmente avec la longueur des
chaînes. La contrainte à rupture augmente avec la densité de ces molécules liens.

1.2.6 Comportement aux grandes déformations : Fibrillation

1.2.6.1 Orientation de la structure cristalline


Aux grandes déformations les cristaux se fragmentent, s’orientent parallèlement à la contrainte
et reforment de nouveaux blocs cristallins. Cette réorganisation est permise par le cisaillement
cristallin et la rotation des cristaux dans la direction du chargement. La structure sphérolitique
initialement isotrope disparaît au profit d’une nouvelle structure cristalline orientée en

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Chapitre 1 : Introduction

microfibrilles. Pour un ordre de grandeur de la déformation nécessaire pour causer ce


phénomène, on peut par exemple citer Castagnet qui a observé la microfibrillation du PVDF
pour des déformations supérieures à 40% [19].
Cette réorganisation est généralement accompagnée par une forte localisation de la
déformation plastique appelée striction qui est caractérisée par un rétrécissement local de la
section de l’éprouvette.
Le modèle de Peterlin rend compte de l’évolution de la structure cristalline aux grandes
déformations, lorsque la déformation est localisée et que l’étirement est important avant
rupture [83] (Figure 17).

Microfibrille
Figure 17 : Représentation de l’amorphe inter et intralamellaire selon Peterlin [83] : (A) molécule lien
interfibrillaire, (B) molécule lien intrafibrillaire.

La structure fibrillaire est caractérisée par une orientation presque parfaite des chaînes dans la
direction de traction, les lamelles cristallines étant orientées perpendiculairement à la
contrainte. Les microfibrilles ont des dimensions latérales de quelques angströms et une
longueur de l’ordre de la dizaine de microns. Le module élastique dans la direction des chaînes
est très élevé. On distingue une phase amorphe localisée entre les blocs cristallins (la cohésion
est assurée par des liaisons covalentes et des liaisons faibles) et une phase amorphe localisée
entre les microfibrilles (la cohésion est assurée par des liaisons faibles uniquement).
Le module élastique et la contrainte à rupture dans la direction parallèle aux microfibrilles sont
très élevés.

1.2.6.2 Transitions de phase cristalline


La plasticité dans les polymères semi-cristallins peut être accompagnée de réorganisations
désordre – ordre de la phase cristalline. Le travail de Murthy concernant les PA aliphatiques
donne des exemples de ce phénomène [77]. Miri a observé un changement de phase cristalline
dans le PA6 aux grandes déformations [75]. Le PA 6 peut se trouver sous une forme α
ordonnée (phase thermodynamiquement favorable dans laquelle les chaînes sont parfaitement
alignées) et sous une forme  moins ordonnée (phase cinétiquement favorable dans laquelle la
rotation des chaînes implique une densité plus faible). Ces phases sont aisément différentiées
par diffusion des rayons X aux petits angles et par spectroscopie infrarouge. Pour des
déformations jusqu’à 220% et une température de 100°C, Miri a montré que l’orientation des

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Chapitre 1 : Introduction

chaînes dans la direction de traction est combinée à une transformation de phase -α
progressive, signe d’une réorganisation désordre - ordre.

1.2.6.3 Rupture des thermoplastiques semi-cristallins fibrillaires


L’écartement entre les lamelles cristallines est limité par la présence de macromolécules qui
pontent les lamelles. Lustiger a montré que l’écartement des lamelles aux grandes
déformations est permise par la rupture de liaisons interchaînes voire par la rupture des chaînes
liens [71] (Figure 18).

Figure 18 : Rupture de molécules liens lors de la déformation du polyéthylène selon Lustiger [71] : (a)
structure cristalline avant déformation ; (b) et (c) séparation interlamellaire ; (d) rupture de molécules
liens dans la phase amorphe. La direction de traction est verticale.

Andrews a rédigé un chapitre exhaustif sur la rupture de molécules lors de la déformation dans
les polymères [3]. Plus particulièrement, Kausch a étudié la rupture de fibres de PA6,6 [54].
Les fibres sont très étirées lors de la mise en œuvre et leur structure cristalline est très orientée,
comme le présente la Figure 17. Kausch a estimé le nombre de ruptures de chaînes par la
mesure de la densité de radicaux libres formés lors de la rupture des chaînes par la technique
de résonance paramagnétique électronique. Pour les fibres de nylon 6,6 lorsque la déformation
est inférieure à 8% on n’observe pas de rupture de liaisons : la plasticité est due à des
réarrangements de chaînes dans la phase amorphe. Lorsque la déformation est supérieure à 8%
on mesure un nombre de radicaux libres dans la phase amorphe qui croit avec la déformation
[54].

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Chapitre 1 : Introduction

2 Les fibres de verre, un renfort pour la performance


L’ajout d’objets rigides dans la matrice thermoplastique a pour effet d’augmenter le module
élastique de l’ensemble du système. Le renforcement par les fibres de verre permet aussi
d’améliorer la résistance aux chocs. Nous verrons dans la partie suivante les caractéristiques
principales du renfort par les fibres de verre qui permettent d’améliorer à la fois la rigidité et la
résistance à l’impact des thermoplastiques.

2.1 Transfert de contraintes à l’interface fibre-matrice

Lorsqu’une contrainte est appliquée dans la direction des fibres dans un composite à fibres
courtes parfaitement alignées, la contrainte est transférée de la matrice aux fibres par une
contrainte de cisaillement à l’interface. Le calcul des contraintes à l’interface a été proposé par
Cox dans le cas d’une matrice élastique renforcée de fibres élastiques [24], et les calculs ont
été repris par Folkes [31]. La figure ci-après présente les profils de contrainte de cisaillement à
l’interface et de traction dans la fibre issus de ces calculs.

Contrainte de traction Contrainte de cisaillement


dans la fibre F à l’interface 

X=0 X=l
lc/2 lc/2

R direction
r
de traction

Figure 19 : Profils de contraintes de cisaillement à l’interface et de traction dans la fibre dans le cas d’une
matrice soumise à une déformation homogène dans la direction de la longueur des fibres.

Pour une fibre de rayon r, de longueur l, de résistance à rupture σR, incorporée dans une
matrice solide, si la matrice est soumise à une déformation  homogène dans la direction de la
fibre, le transfert de contraintes de la matrice vers la fibre et vice versa dépend de la relation
entre le déplacement u dans la direction de la longueur de la fibre à une distance x d’une
extrémité, et du déplacement v de la matrice au même point. Si on considère un élément de
dF
fibre dx soumis à une force de traction F, on a :  H (u  v) , avec H une constante
dx
dépendant du composite.
Autrement dit la force de traction dépend de la contrainte de cisaillement  à
dF
l’interface :  2  r   .
dx

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Chapitre 1 : Introduction

La force nécessaire pour rompre la fibre en traction vaut   r   R , et la force nécessaire au


2

déchaussement des fibres vaut   r  l   . Kelly a défini une longueur critique de fibres en
dessous de laquelle la fibre va être extraite de la matrice sans rompre [57]:
r R
lc 
 (4)
Selon Folkes la valeur de la longueur critique des fibres de verre courtes dans une matrice
polyamide est de 230µm environ [31].

2.2 Rigidité

2.2.1 Influence de l’orientation des fibres

Les fibres courtes sont anisotropes et sont orientées lors de la mise en œuvre par injection. La
rigidité du composite dépend directement de l’orientation des fibres, qui est représentée dans
l’espace par un tenseur d’orientation. Par exemple, un thermoplastique dont les fibres sont
toutes orientées dans la même direction présentera un module d’Young bien plus important
parallèlement à la direction des fibres que perpendiculairement à celle-ci, et les propriétés sont
isotropes dans le plan perpendiculaire à la direction des fibres.
La rigidité des matériaux fibreux en fonction de l’orientation des fibres a été en premier lieu
étudiée par Cox en 1952 [24], puis le comportement mécanique des polymères renforcés de
fibres courtes a été précisé par Piggott dans les années 1970 [84; 85]. Piggott a notamment
discuté de l’influence de l’orientation des fibres sur la ténacité des composites [84] et de l’effet
du rapport de forme des fibres, de l’adhésion fibre-matrice, du coefficient de friction et des
contraintes résiduelles autour des fibres sur la rigidité et la résistance à la rupture [85]. Il
conclut que pour la traction l’orientation des fibres est un paramètre d’ordre 1, la rigidité
décroissant fortement lorsque l’angle entre la direction principale des fibres et la direction du
chargement augmente. Pour les propriétés statiques, l’adhésion entre les fibres et la matrice
semble avoir un rôle limité.

Le module d’élasticité du composite Ec s’écrit généralement en fonction des modules


élastiques de la matrice Em et des fibres Ef, de la fraction volumique de fibres f et du facteur
d’orientation des fibres  :
E c  E f  f  E m (1   f )
(5)
Par ailleurs, l’injection rapide des composites à fibres courtes provoque une structure 3
couches caractérisée par différentes orientations des fibres (Figure 20). Cette structure
multicouches est expliquée par différents profils de vitesse de remplissage, et donc différents
flux élongationnels et de cisaillement. Les propriétés du cœur et de la peau des échantillons
sont donc souvent très différentes.

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Chapitre 1 : Introduction

(a) (b)

Figure 20 : Structure d’un composite thermoplastique à fibres courtes mis en œuvre par injection [9] : (a)
schéma de la structure 3 couches dans une plaque, la flèche montre le sens d’injection ; (b) observation
microscopique de la zone de cœur.

Karger-Kocsis a décrit cette structure multicouches en fonction des paramètres d’injection.


L’épaisseur du cœur décroît avec l’augmentation de la température du moule et avec
l’augmentation de la vitesse d’injection. Cet auteur a montré que les propriétés de résistance à
la propagation de fissures en fatigue des zones de cœur et peau sont différentes [52].

2.2.2 Influence de la longueur des fibres

Folkes s’est basé sur les calculs de Cox pour déterminer l’influence de la longueur des fibres
sur la rigidité du composite. La rigidité augmente avec la longueur des fibres jusqu’à atteindre
une valeur plateau (Figure 21).
Module élastique en traction (GPa)

70

60

50

40

30

20

10

0
0 0.4 0.8 1.2 1.6 2.0
Longueur des fibres (mm)

Figure 21 : Modélisation de l’influence de la longueur des fibres sur le module élastique dans la direction
de la longueur des fibres [24; 31].

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Chapitre 1 : Introduction

2.3 Résistance à l’impact

Pour qu’un matériau soit résistant aux chocs, il faut que l’énergie nécessaire à la propagation
des fissures soit élevée. Une méthode pour y parvenir sans baisser la rigidité du composite est
d’augmenter l’énergie nécessaire au déchaussement des fibres.
Selon Cottrell [22] l’énergie nécessaire pour déchausser une fibre de longueur inférieure à lc
 f   l 2
est U l lc  , et l’énergie pour déchausser une fibre de longueur supérieure à lc est
12 d
 f   lc 3
U l lc  . Ainsi l’énergie nécessaire au déchaussement est maximale à la longueur
12 d  l
critique des fibres de verre, comme l’illustre le graphique proposé par Folkes (Figure 22).
Énergie de rupture U

U2~l2 U2~1/l

lc Longueur des fibres l


Figure 22 : Modélisation de l’influence de la longueur des fibres sur la résistance à la rupture [31].
La longueur de fibres optimale pour la résistance aux chocs est donc lc.

2.4 Champs de contraintes autour des fibres

La présence de particules rigides dans la matrice provoque une concentration des contraintes
autour de la particule. En effet lorsque les particules sont bien liées à la matrice, leur rigidité
empêche localement la déformation de la matrice. Goodier a étudié les champs de contrainte
autour d’inclusions sphériques dans le domaine élastique, et a montré que la contrainte au
voisinage de la particule est près de deux fois supérieure à la contrainte macroscopique [37].
Pour obtenir un ordre de grandeur des champs de contrainte en tête de fibres lors d’un essai de
traction, on peut dans un premier temps considérer un thermoplastique renforcé de particules
sphériques d’un diamètre égal au diamètre des fibres. Un article de Matonis nous a permis de
préciser le profil de contrainte autour d’une particule sphérique [74], avec R le diamètre de la
sphère, x la distance au centre de la sphère, σ la contrainte macroscopique, et σ(x) la
contrainte locale (Figure 23).

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Chapitre 1 : Introduction

2.0

1.6

σ(x) /σ
1.2
σ
0.8

0.4

0
1 2 3 4
x/R
Figure 23 : Profil de contrainte de traction dans la matrice au voisinage d’une sphère de rayon R.

Les champs de contrainte dans la matrice au voisinage de deux particules se somment. La


contrainte dans la matrice est donc plus ou moins homogène et selon la distance entre les
particules. Nous avons calculé des champs de contrainte autour des particules sphériques en
fonction de la distance qui les sépare. Dans le cas d’un composite thermoplastique renforcé de
20% en masse de fibres de verre de longeur L=200µm et de diamètre R=10µm, la fraction
volumique de fibres est de 10.5%, et si les fibres sont bien dispersées et orientées dans la
direction de traction la distance entre les fibres est de 20µm. La Figure 24 donne un exemple
pour un matériau renforcé de particules sphériques avec une distance interparticulaire de
20µm. On montre que la contrainte de traction dans la matrice est alors plus de trois fois
supérieure à la contrainte macroscopique.

3.6

3.2
σ(x) /σ

2.8

2.4

2.0

1.6

1.2
σ
0.8
1 2
x/R
Figure 24 : Profil de contrainte dans la matrice entre deux sphères de diamètre 10µm et distantes de 20µm.

La densité de sites de concentrations de contraintes est importante dans les thermoplastiques


renforcés. Ainsi, contrairement aux polymères non renforcés, la présence d’un défaut dans la
matrice aura généralement un effet de localisation des contraintes négligeable.

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Chapitre 1 : Introduction

3 La fatigue dans les matériaux et le cas particulier des


polymères

La fatigue est une détérioration des matériaux par effet de sollicitations répétées. L’étude de ce
phénomène est d’une grande importance car la contrainte de rupture en fatigue est très
inférieure à la contrainte à rupture en traction, et pour certains matériaux cette contrainte peut
même être inférieure à leur limite élastique. Pour étudier la durée de vie des matériaux on
distingue les essais de fatigue sur matériaux non entaillés et les essais de propagation de
fissures de fatigue sur matériaux entaillés. Nous allons expliquer ces deux méthodes puis
présenter le comportement en fatigue des polymères en comparaison avec les autres matériaux.
Nous montrerons que le caractère viscoélastique des polymères cause un échauffement
important en fatigue, et nous expliquerons également pourquoi les polymères ont un
comportement mécanique qui dépend fortement de la température. Ce paragraphe nous
amènera à conclure que les conclusions en fatigue dans les matériaux autres que polymères,
notamment les métaux qui ont fait l’objet d’études très approfondies, ne peuvent pas être
directement appliquées aux polymères. Nous présenterons enfin l’évolution des propriétés
mécaniques qui apparaît très tôt en fatigue dans les polymères renforcés de fibres en fatigue.
Nous montrerons que les caractérisations microscopiques dans ces matériaux ne permettent
d’expliquer que la rupture en fatigue, et que des caractérisations supplémentaires, notamment à
l’échelle submicronique, semblent nécessaires pour comprendre l’évolution de ses propriétés
macroscopiques.

3.1 Fatigue dans les matériaux

3.1.1 Etude de la durée de vie : Courbes contrainte – nombre de cycles à


rupture

Ces courbes contrainte () – nombre de cycles à rupture (NR) sont appelées courbes de Wöhler
(Figure 25). Pour des contraintes les plus élevées le matériau casse après un nombre de cycles
faibles et on parle de fatigue oligocyclique. Ces tests sont spécifiques des structures sous
chargement important. Lorsque la contrainte est faible le matériau casse après un grand
nombre de cycles de fatigue (NR>105 cycles). Pour chaque niveau de contrainte, il est
nécessaire d’étudier la statistique du nombre de cycles à rupture d’un nombre d’éprouvettes
significatif [68; 70]. Certains matériaux présentent une limite de contrainte en dessous de
laquelle le nombre de cycles à rupture peut être considéré comme infini et cette asymptote est
nommée limite d’endurance.

- 33 -
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Chapitre 1 : Introduction

Contrainte σ
300

200

σendurance
100
105 106 107
Nombre de cycles à rupture N
Figure 25 : Représentation des courbes de Wöhler, notions de statistique de durée de vie et de limite
d’endurance.

Plusieurs facteurs influencent la durée de vie en fatigue : la forme des cycles, les niveaux de
contrainte, la fréquence des sollicitations, l’environnement, la géométrie des échantillons…
Ces paramètres sont choisis selon le matériau et son application. Dans la littérature, on trouve
donc des données matériaux qui sont souvent difficiles à comparer en raison de la grande
variabilité de ces paramètres.

3.1.1.1 Définition des paramètres de chargement pour les sollicitations périodiques


Il existe différents paramètres de sollicitations périodiques. Le plus souvent la contrainte (ou
plutôt la force) est contrôlée au cours de l’essai. La forme des cycles peut être périodique
sinusoïdale, triangulaire, carrée, ou aléatoire.
Pour le cas des sollicitations périodiques la Figure 26 représente les paramètres du chargement
qui suivent :
(   min )
- la contrainte moyenne  moy  max ;
2
(   min )
- l’amplitude  A  max ;
2

- le rapport de contraintes R  m in
 m ax
σ

σmax
A
σmin
temps

Figure 26 : Paramètres de chargement en fatigue pour une sollicitation périodique.

- 34 -
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Chapitre 1 : Introduction

Lorsque R  1 on parle de fatigue alternée (le chargement alterne traction et compression),


lorsque 0  R  1 on parle de fatigue alternée dissymétrique, lorsque R  0 on parle de
fatigue répétée (la sollicitation consiste en des chargements de traction répétés, avec
déchargement total à chaque cycle), et lorsque 0  R  1 on parle de fatigue ondulée (le
chargement est en traction avec une contrainte toujours positive).
La contrainte maximale de fatigue pour provoquer la rupture du matériau en 1 cycle est
nommée σUTS (cf. chapitre 2).

3.1.1.2 Critère de fin de vie en fatigue


Le matériau testé est parfois considéré comme ruiné avant sa rupture. On définit alors un
critère de fin de vie qui correspond au nombre de cycles nécessaire pour atteindre un
endommagement fixé. Cet endommagement est couramment exprimé en pourcentage de chute
d’augmentation de la déformation pour les essais à contrainte imposée (ou en pourcentage de
chute de la contrainte pour les essais à déformation imposée).

3.1.2 Essais de propagation de fissures en fatigue

Les essais de propagation des fissures consistent à étudier le régime de propagation stable de la
fissure d’une éprouvette pré-entaillée. La mécanique linéaire élastique de la rupture définit le
facteur d’intensité des contraintes K tel que K    Y  a avec Y un facteur de forme lié à la
géométrie de l’éprouvette et a la longueur de la fissure. Les essais de propagation de fissure en
fatigue permettent d’étudier la vitesse de propagation d’une fissure en fonction de l’intensité
de contraintes en pointe de fissure (Figure 27).
da/dN (mm/cycle)

10-1

10-2

10-3

10-4

10-5

0.1 1 10
ΔK (MPa.m1/2)

Figure 27 : Représentation des essais de propagation de fissures en fatigue : droite de Paris.

La loi de Paris est une loi empirique qui permet de décrire la résistance du matériau à la
propagation de fissure :
 AK 
da m

dN (6)

- 35 -
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Chapitre 1 : Introduction

avec N le nombre de cycles, da/dN la vitesse d’avancement de la fissure, ∆K la variation du


facteur d’intensité des contraintes au cours d’un cycle de fatigue, et A et m des constantes
dépendantes du matériau.
La valeur de ∆K évolue au cours de l’essai car la fissure de fatigue avance. Lorsque ∆K est
assez grand, on peut passer périodiquement au-dessus et en dessous de la valeur critique pour
la propagation. On observe alors des stries de fatigue, et ce phénomène est appelé stick-slip.

3.1.3 Lois de durée de vie dans les matériaux

Plusieurs lois de dimensionnement ont été proposées pour prédire la durée de vie des pièces
métalliques sous sollicitations uniaxiales périodiques.

3.1.3.1 Fatigue plastique oligocyclique


Manson a montré que le nombre de cycles à rupture NR est relié à la déformation élastique
élémentaire dans un cycle ∆εe par la relation :

N R   e  C (7)
avec α une constante proche de 0.5 dans le cas des métaux classiques, et C une constante
déterminée à partir de la mesure de la déformation plastique accompagnant la rupture
statistique dans les mêmes conditions et correspondant à NR=0.25 en sollicitations alternées et
NR=0.5 en sollicitations répétées.
Pour les fortes contraintes (fatigue oligocyclique), les matériaux sont fatigués dans le domaine
plastique et Coffin a montré une relation similaire entre la déformation plastique ∆εp et le
nombre de cycles à rupture :

N R   p  C
(8)
L’équation de Manson-Coffin est issue de ces deux résultats :

N R  ( e   p )  C
(9)

Takahara a appliqué la relation de Manson-Coffin dans le cas de la fatigue à déformation


imposée du Poly(chlorure de vinyle) (PVC) plastifié sous convection naturelle [106]. Son
étude a confirmé que cette l’équation est valable pour le polymère étudié, et la valeur de α
obtenues est de 0.14.

3.1.3.2 Domaine d’endurance limitée


Pour les faibles contraintes (grandes durées de vie), la déformation totale des métaux est
quasiment élastique. Il existe plusieurs expressions pour relier NR à σ (loi de Basquin, loi de
Weibull, loi de Bastenaire…), nous citerons ici celle de Weibull :
N R (   D ) n  A (10)
avec σD la limite d’endurance qui borne inférieurement ce domaine, et A et n des constantes
dépendant du matériau (n=1 ou 2 selon les métaux).

3.1.3.3 Influence du rapport de contraintes


En 1899 Goodman proposa une représentation de la durée de vie en fonction du rapport de
contraintes R et des contraintes maximale et minimale. Cette équation nécessite de connaître la

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courbe de Wöhler du matériau pour la fatigue alternée symétrique. On note σ-1 la contrainte
maximale appliquée dans ce cas. Le tracé de la droite de Goodman permet de connaître la
durée de vie du matériau pour d’autres types de sollicitations.
  moy 
 A   1 1  
  UTS  (11)
avec σA l’amplitude de la contrainte, σmoy la contrainte moyenne et σUTS la contrainte pour une
rupture en 1 cycle.
La droite de Goodman permet de définir une contrainte de fatigue alternée symétrique
équivalente qui correspond à une durée de vie connue :
A
 1 
 moy
1
 UTS (12)

Gerber modifia ensuite l’équation de Goodman pour l’adapter aux matériaux ductiles.
  moy 
2

 A   1 1  
  UTS  (13)

Enfin en 1930 Soderberg modifia l’équation de Goodman en remplaçant la contrainte à rupture


en statique par la limite élastique du matériau, qui est une grandeur plus conservative.
  moy 
 A   1 1  
  E 
(14)

Mallick a adapté l’équation de Gerber pour l’étude du polyamide 6,6 renforcé de 30% de fibres
de verre. Il a montré que cette équation permet de tenir compte de l’influence de la valeur de la
contrainte moyenne sur la durée de vie en fatigue de ce matériau [72].

3.1.3.4 Endommagement cumulatif en fatigue


La loi de Miner est une loi empirique qui date de 1945 et qui considère le cumul linéaire de
l’endommagement en fatigue. Le principe est simple : si N cycles sont nécessaires pour causer
la rupture de la pièce, alors chaque cycle consomme 1/Nième de la durée de vie de la pièce. La
contribution de chaque cycle est alors considérée équivalente et le phénomène de fatigue est
considéré comme linéaire. Pour des sollicitations d’amplitude variable, si on connaît le
nombre de cycles effectué pour chaque niveau d’amplitude, on peut obtenir la part de
dommages causée par chaque niveau d’amplitude. Cette loi est simple d’utilisation, et ne
nécessite que la connaissance de la courbe de Wöhler du matériau, mais ne tient pas compte de
l’histoire du chargement en fatigue.

D’autres lois d’endommagement existent, parmi celle-ci nous citerons la loi de Lemaître et
Chaboche. Celle-ci est basée sur les théories de l’endommagement continu en fluage élaborées
par Rabotnov et Kachanov. Pour une sollicitation périodique de forme constante avec σmax la
contrainte maximale et σmoy la contrainte moyenne, on a :

1   max   moy 
NR 
1    M ( moy ) 
(15)

- 37 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

où α,  sont des constantes dépendant du matériau et M(σmoy) est un coefficient dépendant de


la contrainte moyenne. Cette loi peut être étendue aux essais à différents niveaux de
contraintes et aux essais de sollicitations multiaxiales. Elle permet de prendre en compte
l’histoire du chargement, la non linéarité du cumul des dommages et le rapport des contraintes.

3.2 Fatigue dans les polymères

3.2.1 Spécificités des matériaux polymères en fatigue

3.2.1.1 Transition vitreuse et dépendance en temps/température


Dans les polymères la température influence la mobilité des chaînes. Aux faibles températures,
la mobilité est restreinte à des courts segments de macromolécules, et le matériau est rigide :
c’est l’état vitreux. Aux températures élevées, les chaînes ont des mouvements coordonnés sur
des longs segments et le matériau est moins rigide : c’est l’état caoutchoutique. La température
qui sépare ces deux états est appelée température de transition vitreuse (notée Tg). La
transition vitreuse marque une brusque variation des propriétés mécaniques du matériau. Le
comportement mécanique des polymères présente alors des dépendances en température et en
temps très importantes, comme l’illustre la Figure 28. La température de transition vitreuse des
polymères est souvent très proche de la température de leur application : elle est généralement
comprise entre -100°C et 200°C selon les polymères. Cela signifie que leur comportement en
application peut varier considérablement avec les variations de température et de vitesse de
sollicitation, contrairement aux métaux dont le comportement est constant dans l’intervalle de
température cité.

120
40°C
(MPa)
Contrainte vraie (MPa)

vraie(MPa)

25°C
100

80
80°C
Contraintevraie

60 10-2s-1
120°C 10-3s-1
Contrainte

40 135°C 10-4s-1

20
150°C
0
0 0.4 0.8 1.2 1.6 2.0
(a) Déformation vraie (-) (b) Déformation vraie (-)
Figure 28 : (a) courbe de traction à différentes températures dans le polycarbonate d’après G’Sell [34] (b)
courbe de traction à différentes vitesses dans le Polycarbonate d’après Klompen [58].

En outre, le polyamide a une grande affinité avec les solvants polaires. Sa reprise en eau après
mise en œuvre influence sa température de transition vitreuse. Selon son hygrométrie, il peut
être à température ambiante dans son état vitreux, caoutchoutique ou dans sa transition
vitreuse.

- 38 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

3.2.1.1 Comportement thermomécanique des polymères


La cohésion des polymères thermoplastiques est assurée par des liaisons secondaires
interchaînes. Leur rigidité et leur limite élastique sont donc relativement faibles. La fatigue a
alors lieu dans le domaine de la viscoélasticité, ou de la viscoplasticité, même dans le cas des
essais d’endurance sous contraintes et déformations faibles. Au contraire, pour ces essais à
grand nombre de cycles les métaux sont généralement sollicités dans le domaine élastique.
Dans ces domaines les polymères présentent des dissipations d’énergie par frottements
internes qui causent l’échauffement du matériau. De plus les polymères sont des isolants
thermiques, donc les échanges de chaleur avec l’environnement sont faibles. L’échauffement
est très lié à la température extérieure car la partie viscoélastique varie avec la température et
change beaucoup autour de la Tg. Un bilan thermique dans le domaine de la viscoélasticité
linéaire permet de comprendre ces effets thermomécaniques.

Pour une contrainte périodique sinusoïdale en fatigue répétée σ telle que    moy (1  cos wt ) ,
la réponse en déformation  est de la forme    moy (1  cos(wt   )) avec  le déphasage entre
la contrainte et la déformation et w la pulsation de la sollicitation.
 moy  moy
On a  moy  avec E le module d’Young du matériau, d’où   cos(wt   ) .
E E
2
La densité d’énergie mécanique stockée au cours d’une période T  dans le volume de
w
l’échantillon soumis à la fatigue vaut :
2 / w
W    d
0 (16)
 moy
avec d   w sin(wt   )dt
E
On obtient :
2 / w
 moy 2
W  
0
E
(1  cos wt )  w sin(wt   )  dt

2 / w
 moy 2 2 / w
 moy 2
équivalent à W    E
w cos  sin wt cos wt  dt   E
w sin   cos2 wt  dt
0 (17)0

La première intégrale est nulle et est issue de l’énergie élastique restituée sur une période
(notée W’) alors que la seconde intégrale correspond à l’énergie dissipée en partie sous forme
de chaleur (notée W’’).
En première approximation, on peut considérer pour les polymères que l’énergie non restituée
est dissipée dans le matériau sous forme de chaleur [38; 41; 90].
Ainsi pour un cycle la densité d’énergie vaut :
2 / w
 moy 2
W ''  E
w sin   cos2 wt  dt
0 (18)
 moy 2

W ''  sin 
E
(19)

- 39 -
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Chapitre 1 : Introduction

soit pour une période T, on obtient la densité de puissance dissipée P’’ :

W ' '  moy


2

P' '   w sin 


T 2E
(20)
avec W’’ la densité d’énergie par unité de volume (en J/m3) et P’’ la densité de puissance
moyennée sur une période (en W/m3 ou en MPa/s).
La conduction thermique des polymères étant faible, on peut négliger la quantité de chaleur
dissipée par conduction vers les mors de la machine mécanique. Le volume qui dissipe de
l’énergie vers le milieu extérieur est égal au volume soumis à la fatigue mécanique. De plus, la
dissipation thermique par rayonnement est négligeable pour les températures atteintes. On
estime donc que la chaleur à dissiper est échangée avec le milieu extérieur uniquement par
convection. On note Q- la quantité de chaleur évacuée par l’échantillon vers l’extérieur par
unité de volume et de temps, ou densité de puissance par unité de volume évacuée vers
l’extérieur (en W/m3 ou en MPa/s) :
S
Q   h (T  Ta )
V (21)
2
avec h le coefficient d’échange thermique (W/m /K), S la surface d’échange, V le volume de
l’échantillon, T la température de l’éprouvette (K), Ta la température ambiante (K).

Takahara a utilisé ce bilan thermique pour définir le comportement thermomécanique du


polymère en fatigue [106]. Si la chaleur échangée avec le milieu extérieur est supérieure à la
chaleur dissipée dans le matériau, alors le matériau atteint un équilibre thermique. Si par
contre l’énergie dissipée sous forme de chaleur dans le matériau ne peut être évacuée vers
l’extérieur, alors le matériau s’échauffe continûment (Figure 29).

Figure 29 : Courbe de Wöhler pour le Polytétrafluoroéthylène et échauffement en fatigue pour une


fréquence de 30Hz. La marque x indique la rupture du matériau [39; 92].

On distingue généralement deux types de comportement en se basant sur ces mesures de


température [7]. Si la contrainte de fatigue est élevée, la température du matériau polymère
augmente continûment au cours des essais. Ces essais sont appelés essais de fatigue thermique
car la rupture du matériau est causée par l’élévation de la température. Lesser et al. ont montré

- 40 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

que l’échauffement du matériau peut augmenter jusqu’à atteindre la température de fusion du


polymère et leurs mesures DSC de la cristallinité d’échantillons fatigués thermiquement ont
indiqué une baisse du taux de cristallinité [69]. Si au contraire la contrainte est suffisamment
faible, la rupture du matériau est causée par l’endommagement mécanique et on parle de
fatigue mécanique.

3.2.2 Etude de la durée de vie en fatigue des polymères

Les essais de Wöhler portent sur éprouvettes non entaillées, alors que les essais de propagation
de fissure caractérisent la vitesse de propagation stable d’une fissure préexistante. Comme la
période d’initiation de l’endommagement influence considérablement la durée de vie, il n’est
pas rare qu’un matériau de résistance à la propagation de fissure en fatigue élevée présente une
courte durée de vie dans les essais de Wöhler. Hertzberg et Manson proposent une illustration
exhaustive de cette conclusion pour différents polymères. [39].

3.2.2.1 Fatigue à déformation imposée


Dally a étudié le comportement en fatigue de thermoplastiques renforcés de fibres de verre
dans les années 1960. Les matrices sont du polyamide, du polystyrène ou du polyéthylène
renforcées de fibres de verre courtes ou longues. Dally travaille à une fréquence de 10Hz, à
R=0.05, et le niveau de contrainte est adapté pendant l’essai pour éviter le flambement de
l’éprouvette lié au fluage. C’est donc un essai similaire à la fatigue à déformation imposée
[25]. Dans ce cas la courbe de Wöhler du polyamide présente une limite d’endurance pour un
nombre de cycles de 103 (Figure 30).
Contrainte σmax (MPa)

200

Nylon Nylon
fibres longues fibres courtes
100

Polystyrène

Polyéthylène

Nombre de cycles à rupture N


Figure 30 : Courbes de Wöhler pour différents thermoplastiques renforcés selon Dally [25].

Dally normalise les courbes de Wöhler par la contrainte à rupture σR des polymères pour
comparer des matériaux de contrainte à rupture très différentes. Il montre que les matériaux
qui ont les plus grandes résistance à la rupture sont les plus résistants en fatigue, mais la
normalisation précise que le ratio contrainte max / σR décroît plus rapidement pour certains
matériaux de contrainte à rupture élevée (Figure 31).

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Chapitre 1 : Introduction

Contrainte σmax / σR
Nylon
Fibres Polystyrène
longues
Nylon fibres courtes
Polyéthylène

Nombre de cycles à rupture N


Figure 31 : Comparaison des courbes de Wöhler normalisées par la contrainte à rupture pour différents
thermoplastiques renforcés [25].
Pour les essais de fatigue à déformation imposée, la durée de vie augmente avec la ductilité du
matériau. Ainsi la durée de vie du polyamide conditionné est supérieure à celle du polyamide
sec [6].

3.2.2.2 Essais à contrainte imposée : influence de l’orientation et de la taille des


fibres
L’influence de l’orientation et de la taille des fibres de verre sur la durée de vie des
thermoplastiques renforcés en fatigue à contrainte imposée a été traitée par plusieurs auteurs
[9; 44; 45; 115]. Horst a comparé les courbes de Wöhler pour le polyamide vierge et renforcé
de fibres de verre avec des orientations de fibres variables (Figure 32). Les courbes de Wöhler
sont des droites : la relation entre la contrainte imposée et le logarithme du nombre de cycles à
rupture est linéaire.

PA+FV (1)

1 2 3

PA+FV (2)
PA+FV (3)

PA

Figure 32 : Courbes de Wöhler pour des polyamides renforcés de fibres de verre (PA+FV) d’orientations
variables et pour le polyamide non renforcé (PA) [45].

- 42 -
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Chapitre 1 : Introduction

La relation linéaire entre la contrainte et le logarithme du nombre de cycles à rupture a été


confirmée par Noda [79]. On a  m ax   A log N  B , avec σmax la contrainte maximale, N le
nombre de cycles à rupture, et A et B deux constantes dépendant du matériau.

Une corrélation entre la résistance en traction et la résistance en fatigue est trouvée dans ces
différents travaux [9; 44; 45]. La résistance à la rupture en fatigue est en effet directement
proportionnelle à la contrainte à rupture pour une casse après 1 cycle de fatigue (σUTS).
Lorsqu’on normalise la courbe de Wöhler par la contrainte à rupture de matériaux
d’orientations de fibres différents, on obtient une courbe maîtresse.

1 2 3

PA

PA+FV (1)(2)(3)

Figure 33 : Courbes de Wöhler normalisées par la contrainte à rupture σUTS pour des polyamides renforcés
de fibres de verre (PA+FV) d’orientations variables et pour le polyamide non renforcé (PA) [45].

Les auteurs concluent que l’orientation des fibres a la même influence sur les propriétés de
traction et de fatigue, même si les mécanismes mis en jeu peuvent être différents. Pour un
rapport contrainte maximale en fatigue sur contrainte à rupture égal, on remarque que le
polyamide non renforcé présente un nombre de cycles à rupture plus grand que le polyamide
renforcé de fibres de verre.
Bernasconi a étudié l’influence du recyclage sur les propriétés de résistance à la fatigue du
polyamide 6 chargé 30% de fibres de verre. Il a montré qu’un second moulage par injection
influence la longueur moyenne des fibres de verre, qui diminue. Les propriétés mécaniques du
composite sont alors également diminuées. Bernasconi obtient aussi une courbe maîtresse
après avoir normalisé les courbes de Wöhler des matériaux injectés une et deux fois par leur
UTSF, ce qui montre que cette méthode fonctionne aussi pour tenir compte de l’influence de la
longueur des fibres [9].
Il est important de souligner que cette normalisation n’est valable que dans le cas d’essais de
fatigue non influencés par la température. Lorsque l’échauffement du composite est non
négligeable (cas d’essais à une température proche de la Tg ou cas d’éprouvettes plus épaisses
par exemple), des déviations à cette courbe maîtresse sont observées [44].

- 43 -
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Chapitre 1 : Introduction

3.2.2.3 Propagation des fissures en fatigue


La propagation de fissures en fatigue a été étudiée par Lang pour différents polyamides
renforcés de fibres de verre courtes [66]. La fréquence de travail est de 10Hz. Une
amélioration significative de la résistance à la propagation des fissures en fatigue est montrée
pour les PA renforcés de fibres en comparaison avec le PA pur.

PA+33%FV

da/dN (mm/cycle)
PA

ΔK (MPa.m1/2)
Figure 34 : Propagation de fissure en fatigue à 10Hz dans le polyamide 6,6 non renforcé (PA) et dans le
polyamide renforcé de 33% de fibres de verre (PA+33%FV) [66].

Lang montre que la résistance à la propagation des fissures en fatigue (PFF) augmente avec le
taux de fibres pour des taux supérieurs à 30%. La résistance à la PFF augmente avec
l’adhésion fibres-matrice et est peu influencée par l’orientation des fibres. Lang a également
étudié l’influence de l’épaisseur de l’échantillon : plus l’échantillon est fin, plus on se
rapproche des conditions de contraintes planes et non plus des déformations planes, et donc
plus l’énergie nécessaire à la propagation des fissures est importante.

Bretz a étudié l’influence de la teneur en eau sur la vitesse de propagation de fissure dans
différents polyamides dont le PA6,6 [15]. Il a montré que la vitesse de PFF diminue avec la
teneur en eau jusqu’à une composition de 2.5% en masse, puis la vitesse de PFF augmente
avec la teneur en eau. A saturation en eau (8.5% en masse), la vitesse de PFF est même
inférieure à celle du polymère sec. Ces résultats sont interprétés par la compétition entre
l’émoussement de la fissure lorsque la ductilité augmente et la baisse de la rigidité.

3.2.2.4 Approche de la mécanique de la rupture pour l’étude de la durée de vie


d’éprouvettes non entaillées
Wyzgoski a appliqué les lois de la mécanique de la rupture pour proposer un modèle de
prédiction de la durée de vie en fatigue en flexion de thermoplastiques renforcés de fibres de
verre non entaillés [112]. Le modèle suppose la présence d’un défaut unique préexistant
critique et ignore la contribution de l’initiation de la fissure.

- 44 -
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Chapitre 1 : Introduction

La méthode consiste à réaliser des essais de Paris pour déterminer les paramètres A et m. La
mécanique de la rupture définit le facteur d’intensité de contraintes en pointe de fissures
permet de remplacer la valeur de ∆K dans la loi de Paris :
K  Y a (22)
avec K le facteur d’intensité des contraintes, Y un facteur sans dimension lié à la géométrie de
l’éprouvette (que l’on peut obtenir dans la littérature [103]) et a la longueur de fissure.
Il est nécessaire de déterminer la taille des fissures dans les éprouvettes non entaillées et leur
évolution au cours de la fatigue. En général la taille du défaut initial est inconnue et on peut
estimer que la taille du défaut final est égale à l’épaisseur de l’échantillon ou la mesurer à
l’aide de tests de résistance à la rupture.
Lorsqu’on connaît les valeurs des tailles initiale et finale de la fissure en fatigue, et le
comportement en propagation de fissure du matériau, Wyzgoski propose de remplacer
l’expression de K dans la loi de Paris pour obtenir le nombre de cycles à rupture des essais de
Wöhler. On obtient :
 
2  1 1 
Nf  
(m  2) AY m ( ) m  a ( m22) a ( m22 ) 
 0 f  (23)
On peut aussi exprimer la taille du défaut initial en fonction des autres grandeurs, notamment
du nombre de cycles à rupture :
2 /( m2 )
 
 
 1 
a0   
 N f (m  2) AY  
m
1 
 2 a
( m2 ) / 2 
 f  (24)
D’après Wyzgoski ce modèle donne de bons résultats pour le polyamide (PA) et le
polycarbonate (PC), mais pas pour le poly(butylène téréphtalate) (PBT). La taille du défaut
initial dépend de l’orientation des fibres. Le défaut initial du PA est estimé à 188µm pour la
fatigue parallèle à la direction du flux d’injection et 386µm dans la direction perpendiculaire
au flux.
Dans une étude plus récente Wyzgoski réexamine l’intérêt de la mécanique de la rupture pour
prédire les courbes de Wöhler en supposant l’existence de multiples défauts qui croissent
simultanément au sein de l’éprouvette [114]. La taille de la fissure à rupture af est supposée
dépendante de la contrainte imposée selon l’expression :
a f  C1 exp( C2 ) , avec C1  t et C2 
ln(t )  ln( a0 ) où a est la taille du défait initial, a la
 B  0 f

taille du défaut finale, t l’épaisseur de l’éprouvette, et σB la contrainte à rupture. Ce nouveau


modèle a été appliqué à la fatigue en flexion et en traction. Les prédictions de durées de vie
obtenues sont fiables, même pour le PBT.

- 45 -
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Chapitre 1 : Introduction

3.2.3 Scénario d’endommagement des polymères semi-cristallins renforcés


de fibres courtes en fatigue : endommagement spécifique de la
fatigue

3.2.3.1 Dégradation généralisée du matériau en fatigue dès les premiers cycles


En fatigue, Dally a indiqué que dans les PA6 secs renforcés de fibres de verre courtes les
défauts sont très localisés, abondants, et uniformément distribués [25]. Il observe des fissures
dans la matrice en tête de fibres qui se propagent par déchaussement à l’interface, et la
propagation dans la matrice est limitée. Plusieurs régions de fissures s’étendent et coalescent,
et forment une grande zone fissurée. Il mesure la résistance à la rupture en traction statique
pour des essais de fatigue interrompus à différents nombres de cycles. La chute de la contrainte
à rupture est de l’ordre de 10 à 15% pour le PA renforcé de fibres de verre. Cette chute est le
signe d’une dégradation généralisée dans le matériau.
Des études récentes ont confirmé une baisse de la rigidité au cours des essais de fatigue, liée à
l’échauffement du matériau et à l’endommagement généralisé [6; 7; 72; 86]. Dans le cas des
essais de fatigue à déformation imposée, la baisse de la rigidité est caractérisée par une baisse
de la contrainte maximale. La contrainte en fin d’essai est généralement deux fois inférieure à
la contrainte initiale dans le polyamide renforcé de fibres de verre [6; 7]. Lorsque la contrainte
est imposée, la baisse de la rigidité est accompagnée d’une augmentation de la déformation
significative [72]. Pour les polyamides renforcés de fibres de verre, la rigidité est constante
pendant un nombre de cycles négligeable, puis diminue [86]. La dégradation généralisée du
matériau apparaît donc dès les premiers stades de la fatigue.
Le comportement viscoélastique des composites en fonction du nombre de cycle en fatigue a
été étudié, et les auteurs s’accordent à montrer que les propriétés viscoélastiques des
composites polyamide renforcés de fibres sont par contre constantes jusqu’aux derniers stades
de la fatigue [38; 79].

3.2.3.2 Rôle de l’interface


Lorsque le composite thermoplastique renforcé de fibres de verre courtes est sollicité en
traction, le rôle de l’interface semble être limité [85]. Au contraire, comme les chargements
sont répétés en fatigue, l’interface est sollicitée en cisaillement et on observe généralement le
déchaussement des fibres à la rupture. Ainsi la qualité de l’interface influence
considérablement la durée de vie en fatigue [20; 86; 87].

Les mécanismes de rupture dans le polyamide renforcé de fibres courtes en traction ont été
étudiés par Sato sur la base d’observations microscopiques et de mesures d’émissions
acoustiques [96-98]. Le scénario de rupture qu’il propose est le suivant (Figure 35).

- 46 -
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Chapitre 1 : Introduction

Figure 35 : Mécanismes de rupture en traction proposé par Sato [96]

- 1. Les fissures sont initiées à l’interface fibres-matrice en tête de fibres.


- 2. Les fissures se propagent dans la matrice le long de l’interface, laissant une fine
couche de matrice adhérer à la fibre. Seuls les systèmes présentant un faible
interface fibre - matrice se rompent alors.
- 3. Les fissures croissent dans la matrice, initiées par les craquelures interfaciales,
accompagnées d’une déformation plastique de la matrice.
- 4. Les zones de matrice microfissurées et déformées plastiquement coalescent, la
propagation est alors stable et la rupture ductile.
- 5. Une fois la taille de la zone ductile devenue critique, la propagation devient
instable et le reste du matériau casse de manière fragile.
Les observations microscopiques montrent que les fibres ne sont pas cassées, même au stade
final de la rupture.

Horst et Spoormaker ont étudié la fatigue du polyamide renforcé de fibres de verre courtes sur
éprouvettes non entaillées [44; 45]. Le composite étudié est du PA 6 contenant 30% de fibres
de verre. Les éprouvettes sont découpées dans des plaques injectées puis conditionnées jusqu’à
équilibre de la reprise en eau. Ces derniers proposent un scénario de rupture en quatre étapes
(Figure 36).

- 47 -
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Chapitre 1 : Introduction

Figure 36 : Mécanismes de rupture en fatigue proposé par Horst [44; 45].

- 1. L’endommagement est localisé aux concentrations des contraintes, c’est-à-dire


en têtes de fibres. En tête de fibres la matrice est faiblement liée au renfort car les
fibres ne sont pas recouvertes d’agent de couplage (cf. chapitre 2).
- 2. Les cavités croissent le long des fibres et les fibres se déchaussent.
- 3. Le déchaussement des fibres relâche la contrainte dans la matrice et facilite sa
déformation plastique. Les cavités deviennent des microfissures qui croissent dans
la matrice.
- 4. Les vides coalescent dans la matrice mais ces fissures restent pontées (par la
matrice étirée plastiquement et/ou par les fibres) jusqu’à juste avant la rupture
finale.
Ce mécanisme de rupture en fatigue a été confirmé par plusieurs auteurs [6; 7; 79]. Un travail
complémentaire a permis à Horst d’analyser les contraintes de cisaillement à l’interface pour
expliquer la décohésion en fatigue [43].

Il est important de noter que les premières fissures n’apparaissent que tardivement, lors des
derniers cycles avant la rupture. Ce mécanisme de rupture en fatigue ne permet donc pas
d’expliquer l’endommagement généralisé observé dès les premiers cycles en fatigue. De plus,
l’initiation des fissures dans la matrice en tête de fibres reste à expliquer.

3.2.3.3 Influence de l’orientation des fibres


Lang et al. ont étudié les mécanismes associés à la propagation d’une fissure en fatigue dans
les années 1980. Leurs observations par microscopie électronique montrent que le faciès de
rupture diffère selon l’orientation des fibres dans l’épaisseur d’une même éprouvette [66; 67].
La matrice casse de manière ductile dans la zone où les fibres sont perpendiculaires à la
contrainte, et de manière fragile aux bords orientés parallèlement à la contrainte. Le
déchaussement des fibres est très variable d’un matériau à l’autre, et ces différences semblent
être dues à une différence de traitement chimique de surface des fibres et à une différence
d’hygrométrie du PA. Lorsque les fibres ont orientées perpendiculairement au plan de la

- 48 -
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Chapitre 1 : Introduction

fissure, ils ont montré que propagation d’une fissure en fatigue est générée par la formation et
la coalescence de microvides et de microfissures dans les zones de concentration des
contraintes, c'est-à-dire en tête de fibres ou le long de fibres proches de têtes de fibres voisines.
Même dans le cas d’une interface fibre/matrice forte, la propagation des microfissures est
localisée à l’interface et les fibres ne présentent plus de trace de polymère à leur surface.
Lorsque la fissure atteint une taille critique, le reste du matériau casse de manière fragile dans
la matrice et l’interface semble alors être intact. Cette observation est confirmée par Zhou et
Mallick qui ont observé une fine couche de polymère à la surface des fibres lorsque celles-ci
sont orientées dans la direction de la contrainte [115].

3.2.3.4 Influence de la teneur en eau du composite


L’influence de la présence d’eau dans les composites à matrice polyamide est double : le
composite plastifie la matrice – la rendant ainsi plus ductile – et fragilise l’interface
fibre/matrice. Bergeret a étudié l’influence du vieillissement hygrothermique sur les propriétés
mécaniques statiques de différents thermoplastiques renforcés de fibres [8]. Il montre que la
reprise en eau affecte les propriétés mécaniques du polyamide renforcé de fibres de verre. La
conception d’un agent de couplage résistant aux agressions hygrothermiques permet de réduire
significativement la baisse des propriétés mécaniques.

Horst souligne que le conditionnement des échantillons est très important dans les mécanismes
de rupture en fatigue [45]. Lorsque la teneur en eau est à l’équilibre dans le polymère, le
mécanisme précédemment cité intervient, mais pas lorsque le polymère est sec (Figure 37).

(a) (b)
Figure 37 : Mécanismes d’endommagement en fatigue dans le polyamide renforcé de fibres de verre (a)
faible hygrométrie du composite, la matrice est peu ductile et le déchaussement très limité ; (b) forte
hygrométrie du composite, la matrice est très ductile et les mécanismes impliquent le déchaussement des
fibres [45].
Ces résultats sont confirmés par les observations de Barbouchi et al. qui ont étudié les
mécanismes de rupture en fatigue du polyamide 6,6 renforcé de fibres de verre en fonction de
la teneur en eau. Les images par microscopie électronique à balayage montrent que le
déchaussement des fibres et la ductilité de la matrice sont plus limités dans le cas d’une
matrice sèche [6].

- 49 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

3.2.3.5 Influence de la température


L’influence de la température de l’environnement sur les mécanismes de rupture du polyamide
6,6 renforcé de fibres de verre a été étudiée par Noda [79]. La température varie de 0°C à
140°C et la matrice contient moins de 0.2% en masse d’eau, donc les essais de fatigue ont été
réalisés sur le polymère vitreux, caoutchoutique et dans la transition vitreuse. Noda montre
deux mécanismes de rupture selon que le polymère est au-dessus ou en dessous de sa Tg. Dans
les deux cas le premier stade de l’endommagement est caractérisé par la formation de
microvides en tête de fibres. Pour T<Tg les microvides se propagent aux extrémités des fibres
et la rupture de la matrice est fragile. Les longueurs de déchaussement des fibres sont faibles.
Pour T>Tg les microvides se propagent par déchaussement le long des fibres et la rupture de la
matrice est ductile. L’étirement de la matrice est important et les longueurs d’extraction des
fibres sont grandes.

- 50 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

Conclusion
En fatigue, les mécanismes d’endommagement du polyamide renforcé de fibres de verre ont
été décrits par l’évolution des propriétés mécaniques macroscopiques et par des observations
de l’endommagement microscopique. L’endommagement dans le polyamide renforcé de fibres
de verre est abondant, localisé et distribué de manière homogène. Les mécanismes de rupture
finaux sont bien décrits. Pour les polyamides conditionnés dans un environnement à 50%
d’humidité, les fissures apparaissent en tête de fibres qui sont des sites de localisation des
contraintes. Elles se propagent à l’interface fibre/matrice, et la matrice qui n’est plus liée aux
fibres peut se déformer plastiquement. Les faciès de rupture caractéristiques de la fatigue
montrent le déchaussement des fibres et une grande ductilité de la matrice polymère. Pour les
polyamides secs, le déchaussement des fibres est limité. Cependant la phase d’initiation des
fissures reste mal comprise. En outre, la fatigue cause une évolution des propriétés
mécaniques macroscopiques dès les premiers cycles, et les fissures ne sont observées que peu
de cycles avant la rupture. L’endommagement généralisé qui apparaît dans les premiers stades
de la fatigue n’est ainsi pas expliqué dans la littérature.

La fatigue provoque l’endommagement du matériau par effet de sollicitations répétées. Nous


avons rappelé dans ce premier chapitre les types de tests permettant d’évaluer la résistance à la
fatigue des matériaux. D’une part, les essais de propagation de fissure en fatigue consistent à
mesurer la vitesse de propagation d’une fissure en fonction de l’intensité des contraintes en
pointe de fissure. D’autre part, les courbes contrainte – nombre de cycles à rupture ou courbes
de Wöhler sont une représentation statistique de la durée de vie des matériaux non entaillés.
Comme la période d’initiation de l’endommagement influence considérablement la durée de
vie, il n’est pas rare qu’un matériau de résistance à la propagation de fissure en fatigue faible
présente une longue durée de vie dans les essais de Wöhler. Dans cette étude nous cherchons à
caractériser les premiers stades de l’endommagement. Cet objectif nous a conduits à préférer
les essais de Wöhler qui sont plus adaptés à l’étude de l’initiation des défauts.

Il existe des tests de fatigue oligocyclique pour lesquels la rupture a lieu après un faible
nombre de cycles aux grandes déformations, et des essais d’endurance pour lesquels le
matériau casse après un grand nombre de cycles et pour des petites déformations. Les
polymères sont des matériaux qui ont un comportement particulier en fatigue car ils sont
sollicités dans le domaine viscoélastique même pour les essais d’endurance. En fatigue, les
frottements moléculaires internes et leur propriété d’isolant thermique impliquent une forte
variation de la température dans le matériau. Or les propriétés physiques des polymères sont
très dépendantes de la température, notamment en raison de la transition vitreuse proche de la
température d’application. Le comportement en fatigue des polymères est donc très influencé
par la température, cependant peu d’études ont porté sur l’étude de la fatigue des polyamides
renforcés de fibres de verre en température. Ce travail de thèse a pour but d’étudier l’influence
de la température sur la durée de vie en fatigue et sur les mécanismes d’endommagement mis
en jeu.

Les polyamides sont des polymères thermoplastiques semi-cristallins, et leur structure est
multi-échelles. Nous venons de montrer dans ce premier chapitre que les mécanismes de
déformation plastique peuvent affecter chacune de ces échelles. On peut classer les
mécanismes en deux familles : aux faibles déformations les mécanismes de déformation
plastique conservent l’organisation sphérolitique, et aux grandes déformations les mécanismes
bouleversent cette structure isotrope au profit d’une nouvelle structure orientée en

- 51 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 1 : Introduction

microfibrilles. Dans cette étude nous nous intéresserons aux essais d’endurance pour lesquels
les niveaux de déformation sont faibles. Dans le cas général de la déformation des polymères
semi-cristallins soumis à une contrainte de traction, nous avons rappelé les mécanismes
typiques des faibles déformations. D’une part, il existe des mécanismes de déformation
plastique qui induisent un changement de volume. Ces mécanismes sont observés
généralement à l’équateur des sphérolites, car les lamelles cristallines subissent une contrainte
normale qui favorise la déformation volumique. Les travaux parus dans la littérature ont
permis de montrer que le polyamide peut être sujet à la cavitation nanométrique entre les
lamelles cristallines, à la cavitation à plus grande échelle (centaines de nanomètres), et au
craquelage sur plusieurs dizaines de microns. D’autre part, certains mécanismes impliquent le
cisaillement de la structure cristalline et ne modifient pas le volume. Ces mécanismes sont
observés dans le plan de cisaillement maximal, à environ 45° de la direction de la contrainte.
A l’échelle nanométrique, on observe des glissements dans les lamelles cristallines, et à
l’échelle macroscopique le polyamide peut localiser la plasticité dans des bandes de
cisaillement. Notre étude a pour objectif de comparer ces mécanismes généraux des polymères
semi-cristallins en traction avec les mécanismes particuliers de la fatigue dans le cas du
polyamide. Les mécanismes d’endommagement en fatigue dans le polyamide n’ont été étudiés
qu’à l’échelle micronique de l’apparition des fissures. Il semble indispensable d’investiguer
l’évolution de la structure semi-cristalline à l’échelle submicronique en fatigue afin
d’expliciter l’endommagement généralisé qui apparaît dès les premiers stades de la fatigue.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

2
Matériaux et méthodes de caractérisation

1 Systèmes étudiés : polyamides vierges et renforcés de fibres de


verre
1.1 Caractéristiques de la matrice polyamide
1.2 Caractéristiques de fibres de verre courtes
1.3 Mise en oeuvre du composite par injection
1.4 Microstructure multicouches du polyamide
1.4.1 Structure coeur-peau du polyamide
1.4.2 Structure coeur-peau liée à l’orientation des fibres de verre
1.4.3 Structure multicouches du polyamide renforcé de fibres de verre

2 Tests mécaniques et caractérisations structurales


2.1 Tests mécaniques
2.1.1 Essais de fatigue en température
2.1.2 Contrainte ultime en traction dynamique (UTSF)
2.2 Caractérisations macroscopiques
2.2.1 Analyse des cycles de fatigue
2.3 Caractérisations microscopiques et nanoscopiques
2.3.1 Microscopie électronique à balayage (MEB)
2.3.2 Diffraction des rayons X
2.3.3 Diffusion des rayons X aux petits angles in situ
2.3.4 Diffusion des neutrons aux petits angles

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de


caractérisation

Dans ce deuxième chapitre, nous présenterons les méthodes de fabrication des matériaux
étudiés, et nous détaillerons leurs caractéristiques structurales. Les méthodes de caractérisation
les plus importantes pour ce travail de thèse seront ensuite expliquées. Les méthodes d’analyse
complémentaires sont présentées en annexe A3.

1 Systèmes étudiés : polyamides vierges et renforcés


de fibres de verre

1.1 Caractéristiques de la matrice polyamide

Le polyamide 6,6 renforcé de 30% de fibres courtes est commercialisé par Rhodia sous le nom
A218V30noir34NG. Pour optimiser la transformation et les propriétés des polyamides
techniques, des additifs sont ajoutés à la formulation :
- des agents de nucléation qui garantissent une cristallisation fine et homogène ;
- des lubrifiants qui aident le démoulage de la pièce ;
- des stabilisants chaleur, anti-oxydants, anti-UV qui évitent la dégradation du PA dans
la presse à injecter et qui permettent de conserver les propriétés du polymère en
utilisation.
Le grade étudié dans cette étude contient également des pigments noirs en quantité très faibles
(moins de 1%). Les principales propriétés physiques et mécaniques du polyamide 6,6 renforcé
de 30% de fibres de verre sont rassemblées en annexe A1.

Le polyamide non renforcé utilisé pour cette étude est un polyamide 6,6 modèle. Le seul
additif est une cire de démoulage pour garantir la qualité de la mise en oeuvre.

1.2 Caractéristiques de fibres de verre courtes

Les fibres de verre sont fabriquées par fusion de silice et de différents additifs : des fondants
pour baisser la température de fusion du verre (oxydes de sodium, potassium et bore) et des
stabilisants qui apportent les propriétés spécifiques (alumine pour les propriétés mécaniques
par exemple). Le verre le plus utilisé pour des applications de renforcement des polymères est
le verre E (sa composition chimique est donnée en annexe A1). Le verre en fusion est coulé

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

dans un creuset à orifices de petite taille, et est immédiatement trempé et étiré en sortie de
four. Les filaments ont une taille typique de 10µm après étirage pour notre application.
Ces monofilaments sont ensuite regroupés en fagots pour leur appliquer un traitement de
surface appelé ensimage. Le traitement de surface est un agent de couplage qui a pour but de
créer des liaisons covalentes avec la matrice polymère. Les fibres sont ensuite coupées avant
d’être commercialisées, et leur longueur est typiquement de 3mm.

Les granulés de polymère et ces fibres de verre sont enfin moulés par injection. Les fibres sont
dispersées et cassées à cause du cisaillement lors de la mise en oeuvre. La taille finale des
fibres de verre est de 200 à 250µm de long.

Les fibres sont ensimées avant d’être coupées lors de la mise en œuvre du composite, donc les
têtes de fibres sont caractérisées par l’absence d’agent de couplage. De même, comme les
fibres sont ensimées par fagots, la couche d’ensimage à la surface n’est pas homogène, comme
le montre la Figure 38.

20µm 1µm
(a) (b)
Figure 38 : Ensimage des fibres de verre observé par microscopie électronique (a) fagots de fibres avant
mise en oeuvre du composite ; (b) zoom sur une fibre, la fibre voisine a laissé une bande non ensimée.

1.3 Mise en œuvre du composite par injection

Les polyamides vierges et renforcés ont été injectés sur presse industrielle dans des conditions
standards afin d’obtenir des éprouvettes de fatigue plates (Figure 39). Les paramètres
d’injection sont présentés en annexe A2.

Figure 39 : Géométrie d’éprouvette utilisée pour les essais de fatigue.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

Cette géométrie est utilisée par les métallurgistes pour étudier les tôles minces, et les
dimensions des éprouvettes sont conformes à la norme concernant les essais de fatigue sur
produits sidérurgiques NF A03-401. L’intérêt de cette géométrie est de localiser
l’endommagement tout en minimisant la concentration des contraintes. Le rayon de courbure
de l’éprouvette permet d’obtenir une concentration des contraintes inférieure à 3% (Figure 40).
En pratique, cela nous permet de prévoir approximativement l’endroit de la rupture, et donc de
réaliser une mesure locale de la déformation jusqu’aux derniers cycles. De même, cette
localisation permet de connaître la zone d’intérêt pour les caractérisations de
l’endommagement des essais de fatigue stoppés avant rupture.

140
120
contrainte (MPa)

100
80
60
40
20
0
-40 -20 0 20 40
distance au plan de plus faible section (mm)

Figure 40 : Profil de contrainte dans l’éprouvette dans le plan perpendiculaire à la direction de


chargement. La double flèche représente la position et la longueur de jauge de l’extensomètre.

Après mise en oeuvre, les éprouvettes ont été stockées dans des sacs étanches afin de les
maintenir leur faible taux d’humidité. Des mesures de la teneur en eau par la technique de
Karl-Fisher ont montré que les éprouvettes testées contiennent environ 0.15% en masse d’eau.

1.4 Microstructure multicouches du polyamide

1.4.1 Structure cœur-peau du polyamide

Le procédé de mise en œuvre de moulage par injection cause une structure cristalline coeur-
peau. La matière fondue à une température de 290°C est trempée lorsqu’elle est en contact
avec le moule à une température de 70°C. On obtient une structure sphérolitique à partir de
20µm du bord (Figure 41). La taille des sphérolites augmente avec la distance au bord jusqu’à
atteindre une taille de 20µm. la présence des fibres de verre ne modifie pas cette structure
cœur-peau du polymère.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

20µm

(1) (2)

Figure 41 : Observation d’une coupe de polyamide prélevée au bord de l’éprouvette en microscopie


optique à polarisation croisée, la flèche pointe la surface de l’éprouvette en contact avec le moule : (1) zone
d’organisation non sphérolitique ; (2) sphérolites dont la taille augmente avec la distante au bord. Les
objets noirs sont des fibres de verre orientées dans la direction parallèle à la direction d’observation.

Dans certains cas, la cristallisation du polymère peut être initiée à la surface de la fibre de
renfort, et les cristaux croissent alors dans la direction normale à la surface des fibres [31]. Ce
phénomène s’appelle la transcristallisation. Il est important de noter que dans le cas du
polyamide renforcé de fibres de verre la transcristallisation causée par les fibres est très
limitée. Très localement, des zones de cristallisation nucléée sur les fibres ont été observées
dans les zones de cisaillement important près des bords de l’échantillon, mais leur présence est
négligeable. Les sphérolites sont très majoritairement nucléés dans la matrice et leur
croissance est stoppée par une fibre ou un sphérolite voisin. La structure cristalline est donc
isotrope (Figure 42).

50 µm

Figure 42 : Observation de la structure cristalline dans le polyamide renforcé de fibres de verre par
microscopie optique à polarisation croisée.

1.4.2 Structure cœur-peau liée à l’orientation des fibres de verre

Les fibres de verre qui sont en contact direct avec le moule lors de l’injection n’ont pas
d’orientation préférentielle. Puis dans tout l’échantillon les fibres sont globalement orientées

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

dans la direction d’injection, sauf dans une zone de coeur d’épaisseur 500µm environ, où les
fibres adoptent une orientation oblique (Figure 43).

coeur

200µm

Figure 43 : Observation microscopique de l’orientation des fibres dans le polyamide renforcé de 30% de
fibres de verre.

Une étude de Rhodia a permis de déterminer l’orientation des fibres dans une plaque de
polyamide 6,6 renforcé par 30% de fibres de verre de dimensions x=100mm par y=300mm et
de d’épaisseur z=2mm. Les caractérisations de l’orientation ont été réalisées par analyses
d’images de microtomographie X. L’orientation des fibres est caractérisée par un tenseur
d’orientation d’ordre 3. La Figure 44 permet de montrer l’évolution de la première composante
du tenseur d’orientation des fibres en fonction de la profondeur dans la plaque pour différents
points par rapport au seuil d’injection.

0.9
Première composante du tenseur

0.8
z=2
0.7
40 1 3
0.6 5
x=100
50 2 50
0.5
A218V30_1 y=300
0.4
A218V30_2 150
A218V30_3
0.3
A218V30_5
0.2
0 500 1000 1500 2000
Profondeur en Z (µm)

Figure 44 : Première composante du tenseur d’orientation des fibres de verre en fonction de la profondeur
dans l’épaisseur de la plaque pour différents points par rapport au seuil d’injection. La flèche grise
présente la direction d’injection.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

1.4.3 Structure multicouches du polyamide renforcé de fibres de verre

En résumé, le composite PA renforcé de fibres courtes peut être considéré comme un système
multicouches. Le schéma suivant représente les caractéristiques des différentes couches du
polyamide renforcé de fibre courtes (Figure 45).

1 2 3 4 2 1

Figure 45 : Schéma de la structure multicouches du composite (1: épaisseur 10µm, FV non orientées,
structure cristalline non sphérolitique – 2: épaisseur 10µm, FV orientées, structure cristalline non
sphérolitique, 3: FV orientées, structure cristalline sphérolitique, 4: 500µm, FV moins orientées, structure
cristalline sphérolitique). Le trait noir épais représente le moule.

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Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

2 Tests mécaniques et caractérisations structurales

2.1 Tests mécaniques

2.1.1 Essais de fatigue en température

La machine utilisée pour les essais mécaniques est une machine servohydraulique INSTRON
8872, capable de réaliser des essais pour polyamides chargés fibres de verre jusqu’à 10 Hz
environ. La fréquence de sollicitation influence considérablement l’échauffement du matériau
lors des essais de fatigue. Il est important de limiter cet échauffement afin d’étudier les
véritables caractéristiques mécaniques du polymère. Pour des éprouvettes plates de 2 à 6mm
d’épaisseur, les fréquences de sollicitation choisies sont généralement de 1 à 10Hz. L’étude de
Hertzberg et Manson sur un grand nombre de polymères a montré qu’une fréquence de 1 à
10Hz est généralement conseillée dans les polymères pour un bon compromis entre
échauffement limité et durée d’essai limitée [39]. Pour nos essais nous avons choisi une
fréquence de 5Hz. La sollicitation en traction-traction est sinusoïdale, et le rapport contrainte
min sur contrainte max vaut R=0.1. Les essais sont pilotés en contrainte pour éviter le
flambage de la pièce, et parce que les applications sous capot moteur semblent plus liées à une
contrainte répétée qu’à une déformation répétée. L’électronique INSTRON nous assure une
régulation capable d’atteindre de manière précise les valeurs crêtes de contrainte même si les
propriétés mécaniques de l’éprouvette varient au cours des essais. Tous les essais ont été
réalisés dans une enceinte thermique sous atmosphère d’air.

La déformation est mesurée à l’aide d’un extensomètre de contact de longueur utile 12.5mm.
Pour les calculs des caractéristiques macroscopiques de l’éprouvette, nous considérerons que
les bords de l’éprouvette sont parallèles dans cette zone de mesure. La faible localisation des
contraintes de cette géométrie permet de considérer la contrainte constante dans le volume
étudiée. L’erreur réalisée alors inférieure à 2%. La température de surface de l’échantillon a été
mesurée à l’aide d’un thermocouple dans la zone de plus faible section, c’est-à-dire à l’endroit
où l’autoéchauffement est vraisemblablement le plus fort. Ce thermocouple a une précision de
1°C.

Les essais ont été répétés 5 fois pour chaque niveau de contrainte afin d’obtenir une statistique
des durées de vie (moyenne et écart-type).

2.1.2 Contrainte ultime en traction dynamique (UTS)

Pour une fréquence donnée, la résistance en traction ultime dans les conditions de chargement
de fatigue (UTS pour Ultimate Tensile Strength) est la valeur de la contrainte à rupture pour
un essai de casse en fatigue en 0.5 cycle (essai décrit dans la norme ISO 13003:2003). A 5 Hz,
la valeur de la contrainte maximale en fatigue doit être adaptée pour que la casse apparaisse
après 0.1s, au maximum de la première montée en charge. Pour déterminer cette contrainte à
rupture notée σUTS, on réalise trois essais pour chaque température. La Figure 46 présente la
forme du signal de charge imposé à l’éprouvette pour les tests d’UTS.

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Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

250
σUTS
200

contrainte (MPa)
150

100

50
0.5 cycle
0
2 2.05 2.1 2.15 2.2
temps (s)

Figure 46 : Essai d’UTS à 65°C à 5Hz pour le polyamide 6,6 chargé 30% de fibres de verre.

2.2 Caractérisations macroscopiques

2.2.1 Analyse des cycles de fatigue

Afin de suivre l’évolution des propriétés macroscopiques des éprouvettes au cours de la


fatigue, nous avons analysé les cycles contrainte - déformation subis par le matériau. Ces
cycles caractéristiques en fatigue sont tracés en portant en abscisse la déformation (ε) et en
ordonnée la contrainte (ζ), comme montré en Figure 47.
σ

(σmax ,εmax )

(σmin ,εmin ) ε

Figure 47 : Représentation graphique des cycles de fatigue.

Nous avons choisi une fréquence d’acquisition de 1kHz pour nos tests de fatigue à 5Hz, afin
d’obtenir 200 points par cycle. Les cycles de fatigue sont été modélisés par une ellipse au
moyen d’un algorithme développée sous MS Excel. La modélisation consiste à minimiser
l’erreur entre les données expérimentales et le modèle elliptique. Selon les conditions d’essai,
la forme des cycles de fatigue peut dériver de la forme elliptique. Pour évaluer l’erreur
commise par cette approximation, nous pouvons suivre l’erreur minimale obtenue par
l’analyse.
Nous avons étudié les propriétés macroscopiques suivantes :
-contraintes minimum et maximum (ζmin, ζmax);

- 62 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

-déformations minimum et maximum (εmin, εmax);


-déphasage entre la contrainte et la déformation (δ);
-énergie développée par cycle (W);
( m ax   m in )
-module dynamique Ed, calculé selon l’équation E d  .
( m ax   m in )
L’accumulation de l’endommagement au sein du matériau peut être appréciée grâce à
l’évolution du module élastique E, définit dans la partie linéaire de la courbe de traction (soit

aux faibles déformations) par E  avec ζ la contrainte et ε la déformation. Cependant, la

mesure du module d’Young nécessite de décharger régulièrement l’éprouvette au cours de
l’essai de fatigue. En fatigue, on préfère donc étudier l’évolution du module dynamique Ed.
Notons que ce module est différent des modules d’Young obtenus selon la norme ISO 527 car
la sollicitation est sinusoïdale, la vitesse de déformation bien plus importante et le calcul du
module n’est pas effectué sur la partie élastique seule du signal.

2.3 Caractérisations microscopiques et nanoscopiques

2.3.1 Microscopie électronique à balayage (MEB)

La microscopie électronique à balayage (MEB) met en évidence les reliefs d’une surface.
L’image est formée en balayant un faisceau d’électrons accéléré par une tension relativement
faible (1 à 5kV pour le polyamide) et focalisé sur la surface de l’échantillon. Cette technologie
présente une large gamme de grandissements et une grande profondeur de champ avec une
résolution pouvant aller jusqu’à 10 nm environ (Figure 48).

- 63 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

Production du Canon à électrons


faisceau
d’électrons

Lentilles /condenseur

Générateur
de balayage

Balayage Contrôle du
grandissement

Image
observée
Focalisation
Lentille / objectif Signal
électrique

Collecteur et
photomultiplicateur

Figure 48 : Schéma de fonctionnement du microscope électronique à balayage.

La source du faisceau d’électrons est située au sommet de la colonne dans ce qu’on appelle le
canon. Le canon est constitué d’une cathode (le filament), d’une électrode polarisée
négativement (le wehnelt) et d’une anode qui va permettre d’accélérer les électrons. Le
filament de tungstène a un diamètre de 1/10e de mm est courbé en V pour concentrer
l’émission d’électrons à sa pointe. L’anode est une plaque de métal mise à la masse et percée
d’un trou pour le passage des électrons. Plus un faisceau d’électrons est accéléré, plus son
énergie est grande et plus il est ponctuel. Mais aussi, plus il est destructeur pour l’échantillon.
La colonne électrique est composée généralement de lentilles électroniques et a pour fonction
de condenser le faisceau d’électrons en un spot. Ce spot sera balayé par l’intermédiaire du
déflecteur de balayage sur l’échantillon.

Différents types d’électrons entrent en jeu dans la microscopie électronique à balayage (Figure
49).

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Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

(a) (b)
Figure 49 : Interactions électrons – matière en microscopie électronique à balayage (a) électrons
secondaires ; (b) électrons rétrodiffusés.

Lorsqu’on envoie des électrons sur les atomes de l’échantillon, certains d’entre eux sont
réfléchis, ce sont les électrons primaires. D’autres sont absorbés par les atomes de
l’échantillon, ce qui provoque leur ionisation. Les atomes éjectent alors des électrons
secondaires et le retour à l’état fondamental de l’atome se fait par émission de rayons X. Les
électrons qui permettent l’observation de la topographie des surfaces sont les électrons
secondaires. Le signal est proportionnel au nombre d’électrons secondaires émis par la surface
de l’échantillon et recueillis par le détecteur. Ce nombre d’électrons dépend également de
l’angle d’incidence du faisceau d’électrons par rapport à la surface de l’échantillon. Les
électrons rétrodiffusés provoquent un contraste topographique et/ou chimique car le taux
d’électrons rétrodiffusés est une fonction croissante du numéro atomique Z de l’échantillon.
L’interaction électron – matière conduit à des accumulations de charges en surface de
l’échantillon. Si l’échantillon est conducteur, ces charges sont évacuées vers la masse. Par
contre, le polyamide étant isolant, l’accumulation de ces charges déformerait le faisceau
d’électrons et modifierait son énergie. Il est donc nécessaire de déposer une couche
conductrice à la surface des polymères.

Nous avons observé par MEB les surfaces de rupture des éprouvettes de polyamide. Pour
observer l’endommagement dans les échantillons non rompus suite aux essais mécaniques
(éprouvettes témoin non fatiguées ou éprouvettes en cours d’essai de fatigue), nous avons
cryofracturé les échantillons après une trempe d’une durée de 1 heure dans de l’azote liquide.
La géométrie de nos éprouvettes permet de localiser l’endommagement, nous avons donc
observé les caractéristiques de la zone de plus faible section. Les échantillons sont enfin
métallisés par une couche de 2nm de Platine.

2.3.2 Diffraction des rayons X

La technique de diffraction des rayons X (appelée WAXS pour Wide Angle X-ray Scattering)
permet d’étudier la structure des cristaux. Ces rayons sont générés usuellement par impact
d’un faisceau d’électrons de haute énergie sur une cible métallique. Les électrons incidents
arrachent les électrons de cœur des atomes et la relaxation des électrons des couches externes
vers les niveaux vacants est à l’origine de l’émission d’un rayonnement X de fluorescence
caractéristique de la transition entre ces deux niveaux. Généralement on travaille avec les raies
les plus intenses de la série Kα.
L’absorption des rayons X résulte principalement de l’effet photoélectrique. Le photon W est
absorbé par un atome et l’excès d’énergie est transféré à un électron qui est éjecté de l’atome.
Il s’ensuit une émission de fluorescence X ou l’émission d’un électron Auger. L’intensité I(h)
d’un rayon monochromatique après avoir traversé une épaisseur z est :

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Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

I ( h)
 exp(    h)
I0 (25)
-1
où µ est le coefficient d’absorption linéaire (en cm ) et h l’épaisseur (en cm).
Le spectre diffracté par le cristal est analysé selon la loi de Bragg qui permet d’obtenir les
paramètres de la maille cristalline :
n  2d sin  (26)
avec n un entier positif, λ la longueur d’onde du rayonnement, d la distance entre les plans
cristallins, Θ l’angle entre les rayons incidents et les rayons diffractés.
Cette loi est interprétée conventionnellement en considérant les plans (hkl) comme des miroirs
semi-transparents. Il y a accord de phase uniquement lorsque la différence de marche entre
deux plans successifs est un multiple n de  où n représente l’ordre de la réflexion sur les
plans (hkl).
2
On définit ensuite vecteur de diffusion q tel que d  , avec d la distance entre les plans
q
cristallins au sein du matériau. Les intensités des spectres de diffraction sont présentées en
fonction de ce vecteur de diffusion.
Dans les polymères, cette technique permet également de différencier la phase cristalline (qui
forme des pics de diffraction) et la phase amorphe (qui forme un anneau diffus) de manière à
calculer un taux de cristallinité.

Les analyses WAXS ont été réalisées au laboratoire des Sciences de l’Ingénierie, des
matériaux et des Procédés (SIMaP) à l’Institut Polytechnique de Grenoble. La source de rayons
X se compose d’un générateur de rayons X suivi d’un filtre 100µm de cuivre qui laisse passer
la longueur d’onde correspondant à la raie Kα du Cu. Sur le chemin optique, on place un objet
cylindrique de petite taille appelé « beam stop » qui a pour rôle d’arrêter le faisceau direct. Les
rayons traversant le matériau sont en partie absorbés. Notre calcul du coefficient d’atténuation
d’intensité linéique µ du polyamide 6,6 non chargé est µ=5.96 cm-1, ce qui correspond à une
épaisseur optimale de 2mm de polyamide pour une transmission de 30% (calcul basé sur une
valeur d’énergie de faisceau correspondant à la longueur de la raie Kα du cuivre). Pour le
polyamide 6,6 chargé de 30% de fibres de verre E, nous obtenons µ=56cm-1, ce qui correspond
à des échantillons d’épaisseur 300µm à 400µm. Les découpes dans les éprouvettes sont
effectuées à la scie diamantée. Nos expériences ont confirmé que la transmission obtenue est
proche de la transmission théorique de 30%. Pour les éprouvettes non fatiguées ou fatiguées
mais non rompues, on réalise les caractérisations dans la zone de plus faible section de
l’éprouvette. Pour les éprouvettes rompues en fatigue, on étudie la zone située juste sous la
rupture (environ 0.5mm sous la rupture).

2.3.3 Diffusion des rayons X aux petits angles in situ

Le phénomène de diffusion des rayons X est dû à la présence d’hétérogénéités de densité


électroniques au sein du matériau. L’intensité diffusée est fonction des hétérogénéités et
l’angle de diffusion renseigne sur la taille des objets (Figure 50). Les expériences de diffusion
des rayons X (ou SAXS pour Small Angle X-ray Scattering) sont conçues pour mesurer cette
intensité à de très petits angles, afin d’étudier des hétérogénéités d’une taille de quelques
Ångströms à quelques microns. Depuis les années 1980 on utilise des sources de très haute

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

brillance grâce au rayonnement synchrotron émis par des particules chargées circulant à très
haute vitesse dans des anneaux de stockage.

Figure 50 : Schéma de diffusion des rayons X

Dans les expériences de diffusion des rayons X aux petits angles, le vecteur de diffusion est
4 
calculé tel que q  sin où λ est la longueur d’onde du rayonnement X et  l’angle entre
 2
le rayon incident et le rayon diffusé. Comme en WAXS ; l’organisation qui est à l’origine du
2
phénomène de diffusion a pour dimension caractéristique d telle que d  .
q

L’intensité diffusée par des cavités sphériques de rayon R et de volume V dans un matériau
homogène est donnée par l’expression de la section efficace différentielle par unité de volume
suivante [36] (Figure 51):
2
 (sin qR  qR cosqR) 
I (q)  n( R) I 0Tr  (   0 ) V h 3
2 2 2

 (qR)3 

Log I(q)
Guinier

Porod

Log q
R-1
Figure 51 : Représentation de l’intensité diffuse par des objets sphériques en fonction du vecteur de
diffusion.

Le régime de Guinier correspond aux valeurs de q du même ordre de grandeur que R-1. Dans
ce régime il est possible de déterminer la taille des objets à l’origine de la diffusion. Le régime

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

de Porod correspond aux valeurs de q telles que q<<R-1. Ce régime est caractéristique de la
quantité et des caractéristiques topologiques des interfaces entre zones de densités
électroniques différentes.

Les expériences de diffusion des rayons X aux petits angles ont été réalisées sur la ligne BM2
(CRG D2AM) de l’ESRF (European Synchrotron Radiation Facility) de Grenoble. La
longueur d’onde du rayonnement était de 0.1110nm. La distance entre l’échantillon et le
détecteur était de 1.70m, et la gamme de vecteur d’onde accessible était de qmax=1.1nm-1 à
qmin=5.10-2nm-1. Ces conditions de mesure nous ont permis de caractériser les hétérogénéités
du matériau dans une gamme de taille caractéristique de 5nm à 150 nm environ, et d’obtenir
des spectres en 2 dimensions. Le béhénate d’argent est un matériau qui a un pic de diffraction
caractéristique à q=1.076nm-1 [11]. L’utilisation de ce standard permet d’obtenir une bonne
précision sur la mesure de q. Le détecteur est une caméra CCD et la taille d’un pixel était de
50µm. Le temps d’exposition nécessaire était de 1 à 2s pour le polyamide renforcé de fibres de
verre et de 2s à 10s pour le polyamide non renforcé. La technique de diffusion des rayons X
aux petits angles de la ligne BM2 est donc suffisamment rapide pour pouvoir réaliser des
caractérisations du matériau sous contrainte en évitant les problèmes liés à la relaxation du
polymère. Nous avons caractérisé la diffusion du composite dans son état initial (sortie
d’injection) et après fatigue dans différentes conditions de température, et la diffusion du
polyamide non renforcé avant et après fatigue sous sa Tg en tant que référence.

Les images sont divisées en 36 secteurs angulaires de 10°, ce qui permet d’étudier
l’anisotropie des objets diffusants avec précision.

Les éprouvettes de fatigue dont la géométrie a été présentée en Figure 39 (partie 1.3 de ce
chapitre) ont été pré-fatiguées dans notre laboratoire sur la machine INSTRON 8872, à trois
températures d’environnement (à 25°C le polymère est sous la Tg ; à 65°C autour de la Tg ; à
140°C au-delà de la Tg) et avec une fréquence de 5Hz. Pour ces caractérisations nous avons
étudié l’endommagement dans le cas de la fatigue mécanique (cf. chapitre 3). Nous avons
interrompu les essais de fatigue après différents nombres de cycles pour caractériser
l’évolution structurale du matériau au cours de la fatigue. Nous avons ensuite coupé des
échantillons de ces éprouvettes pour les tractionner sous le faisceau. Tout comme pour les
caractérisations par diffraction des rayons X, les épaisseurs des matériaux pour obtenir une
transmission optimale sont de 300µm à 400µm pour le polyamide 6,6 renforcé de 30% de
fibres de verre, et de 2mm pour le polyamide non renforcé. Les échantillons sont prélevés au
moyen d’une scie diamantée. Les dimensions typiques des échantillons étaient de 25mm de
long par 4mm de large. Comme pour les caractérisations par diffraction, nous avons
caractérisé la zone de plus faible section de l’éprouvette où est localisé l’endommagement, et
caractérisé la zone sous la rupture pour les échantillons rompus en fatigue.

Il est reporté dans la littérature que des petites cavités causées lors du chargement d’une
éprouvette se referment lors du déchargement [65; 81]. Afin de caractériser l’endommagement
sous contrainte dans les mêmes conditions qu’à la fin des essais de fatigue, nous avons
appliqué in situ les mêmes conditions de contrainte et de température que lors des essais de
fatigue qui ont précédé. Pour cela, nous avons mis au point une machine de traction
« miniature » capable de tractionner des échantillons d’une épaisseur de 300µm à 2mm et dont
les dimensions sont adaptées à la ligne BM2 (Figure 52 et Figure 53). Cette machine est
équipée d’un capteur de force de capacité +/-500N et nous avons fabriqué une enceinte
thermique pour pouvoir appliquer la contrainte de traction dans les mêmes conditions de

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Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

température qu’en fatigue. L’enceinte thermique est chauffée à l’aide de 4 cartouches


chauffantes. La température dans l’enceinte est mesurée par un thermocouple et le
fonctionnement des cartouches est régulé à l’aide d’un coupe-circuit. La régulation PID est
optimisée pour atteindre une stabilisation à 65°C et à 140°C le plus rapidement possible. Afin
d’éviter que le capteur de force ne chauffe par conduction, nous avons ajouté une circulation
d’air comprimé dans la barre allonge. La conduction thermique vers le socle de la machine est
limitée par l’ajout d’une pièce en poly(étheréthercétone) (PEEK) isolant thermique. Les
fenêtres de l’enceinte thermique sont en kapton (polyimide transparent aux UV et stable pour
des températures élevées jusqu’à 400°C) pour limiter les pertes thermiques par convection. La
valeur de force mesurée est visualisable sur un afficheur près de la machine, et enregistrée par
l’ordinateur de la ligne BM2 à l’aide d’une sortie auxiliaire.

Cadre (inox)

Traverse équipée de
roulements à billes
Capteur de force

Barre allonge

Perçage pour circulation


d’air comprimé
Colonnes (inox)

Cartouches chauffantes
intégrées

Thermocouple

Enceinte thermique (cuivre)

Socle (PEEK)

Figure 52 : Plans de la machine de traction miniature équipée de l’enceinte thermique.

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Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

(a) (b)
Figure 53 : Machine de traction miniature en place sur la ligne BM2 de l’ESRF (a) mise en place des
échantillons ; (b) mise en place de l’enceinte thermique.

Le matériau peut avoir différents comportements entre le coeur et le bord de l’éprouvette en


contact avec le moule lors de l’injection (“effet coeur-peau” décrit au paragraphe 1.4 de ce
chapitre), à cause des différentes morphologies du polymère et/ou de l’orientation des fibres.
Nous avons donc coupé les éprouvettes dans leur épaisseur afin de caractériser des zones de
structures différentes.

Pour caractériser des objets d’une taille supérieure à 150nm, des caractérisations par diffusion
des rayons aux très petits angles (USAXS pour Ultra Small Angle X-ray Scattering) se sont
révélées nécessaires. Ces caractérisations ont été réalisées sur la ligne ID2 de l’ESRF de
Grenoble. La longueur d'onde du rayonnement X était de 0.1nm. Le montage est une caméra
Bonse-Hardt. Cette caméra permet d’obtenir une grande résolution aux très petits angles mais
n’est capable de fournir que des spectres 1D et nécessite un temps d’acquisition long. Pour le
polyamide non renforcé le temps d’acquisition est de 5 minutes environ Des caractérisations in
situ ne sont donc pas pertinentes à cause de la relaxation du polymère. La gamme de q
accessible en USAXS nous a permis de compléter les caractérisations SAXS avec un intervalle
de qmax=5.10-2nm-1 à qmin=10-3nm-1. La préparation des échantillons est identique à celle des
caractérisations par diffusion aux petits angles.

Pour les polyamides renforcés de fibres de verre, la présence des fibres gêne beaucoup
l’interprétation. Nous verrons au chapitre 5 qu’il est difficile de soustraire le signal des fibres
de verre pour étudier le signal de l’endommagement. Les mesures par SAXS posent de plus un
certain nombre de problème quand on atteint le régime des USAXS (réfraction, diffusion par
les surfaces des échantillons, autres sources d’inhomogénéités à grande échelle…).

2.3.4 Diffusion des neutrons aux petits angles

La diffusion de neutrons est causée par des hétérogénéités de densité de longueur de diffusion
des neutrons, suivant les différents atomes présents dans le matériau.

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Chapitre 2 : Matériaux et méthodes de caractérisation

Tout comme pour les caractérisations par diffusion des rayons X, les expériences sont faites
sur des matériaux fatigués préalablement dans notre laboratoire.

Nous avons travaillé sur un prototype Très Petits Angles (TPA) au Laboratoire Léon Brillouin
au CEA se Saclay [18]. Cette ligne nous a permis de travailler dans une gamme de très petits q
avec un détecteur 2D. Les principales caractéristiques du spectromètre TPA qui permettent
d’atteindre les très petits angles sont un collimateur constitué de trous de très petit diamètre (1
ou 2mm) et un détecteur présentant taille de pixel très petite (0.15x0.15mm). Pour nos
expériences la longueur d’onde utilisée est de 0.9nm et la distance échantillon – détecteur est
de 6.422m. La gamme de q accessible est de qmax=10-2nm-1 à qmin=4.10-3nm-1. Le temps
d’exposition nécessaire à la caractérisation d’un échantillon est de l’ordre de 10 heures.

Pour mettre en évidence les cavités en amplifiant sélectivement leur contraste, les échantillons
ont été gonflés jusqu’à l’équilibre de sorption par un solvant deutérié du polyamide, le D2O
(eau lourde). Ainsi la matrice contient environ 8% de solvant et les cavités contiennent environ
100% de solvant.

Les échantillons pré-fatigués et gonflés de D2O sont ensuite coupés dans l’épaisseur pour
obtenir une épaisseur de 1mm environ. La zone étudiée est la zone de plus faible section qui
localise l’endommagement comme nous l’avons montré au paragraphe 1.3. Nous coupons
donc l’éprouvette pour conserver la partie centrale sur 10mm de long environ (Figure 54).

10mm

Figure 54 : Zone de l’éprouvette étudiée par diffusion de neutrons.

La dimension du faisceau lorsqu’il traverse l’échantillon est typiquement de 25mm de


diamètre. Nous avons donc fatigué 4 éprouvettes pour placer 4 échantillons juxtaposés sous le
faisceau, comme le montre la Figure 55. Les échantillons sont serrés entre 2 lames de quartz,
et la cellule est remplie de D2O afin que les échantillons restent gonflés pendant la
caractérisation.

Cellule inox

Échantillon PA +D2O

Lame quartz

Joint téflon

(a) (b)
Figure 55 : Disposition des échantillons de polyamide gonflés de D2O dans la cellule pour la caractérisation
USANS (a) vue de face ; (b) vue de profil.

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

3
Etude de la durée de vie en fatigue

1 Représentation de la durée de vie en fatigue : courbes de


Wöhler
1.1 Echauffement du matériau sollicité en fatigue
1.1.1 Résultats expérimentaux
1.1.2 Etude de l’échauffement
1.2 Effet de la fréquence

2 Prise en compte de la température dans l’étude de la durée de vie


en fatigue
2.1 Proposition d’une loi de prédiction pour tenir compte des effets de la température
2.1.1 Polyamide renforcé de fibres de verre
2.1.2 Influence de la fréquence
2.1.3 Influence des fibres de verre
2.2 Vers une compréhension de la loi de prédiction de la durée en fatigue
2.2.1 Interprétation de la constante 
2.2.2 Interprétation de la constante 

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en


fatigue

Nous avons rappelé au chapitre 1 les types de tests permettant d’évaluer la résistance à la
fatigue des matériaux. D’une part, les essais de propagation de fissure en fatigue consistent à
mesurer la vitesse de propagation d’une fissure en fonction de l’intensité des contraintes en
pointe de cette fissure. D’autre part, les courbes contrainte maximale – nombre de cycles à
rupture ou courbes de Wöhler sont une représentation statistique de la durée de vie des
matériaux non entaillés. Comme la période d’initiation de l’endommagement influence
considérablement la durée de vie, il est fréquent qu’un matériau de résistance à la propagation
de fissure en fatigue faible présente une longue durée de vie dans les essais de Wöhler.
Hertzberg et Manson proposent une illustration exhaustive de cette conclusion pour différents
polymères [39]. Dans cette étude nous cherchons à caractériser les premiers stades de
l’endommagement. Nous avons donc réalisé des essais de Wöhler qui sont plus adaptés à
l’étude de l’initiation des défauts.
Le premier chapitre a montré que le comportement mécanique des polymères est très
dépendant de la température et de la vitesse de déformation. L’objectif de cette partie est
d’étudier la durée de vie du polyamide renforcé de fibres de verre en fatigue à différentes
températures et fréquences, et de la comparer à la durabilité du polyamide non renforcé.

1 Représentation de la durée de vie en fatigue :


courbes de Wöhler
La représentation des courbes de Wöhler consiste à tracer la contrainte maximale de fatigue en
fonction du nombre de cycles à rupture. Il est nécessaire d’étudier des séries d’éprouvettes
pour obtenir des données statistiques sur la durée de vie. Nous présenterons ici le nombre de
cycles à rupture moyen et son écart-type. Dans notre étude les courbes de Wöhler ont été
construites pour le polyamide vierge (PA) et renforcé de 30% de fibres de verre (PAFV) pour
des durées de vie comprises entre 100 et 106.5 cycles. Nous avons travaillé à trois températures
d’environnement différentes : 25°C (sous la Tg du polymère), 65°C (autour de la Tg) et 140°C
(au-dessus de la Tg). Les courbes de Wöhler pour le polyamide vierge (PA) et renforcé de
fibres de verre (PAFV) sont présentées en Figure 56. Les valeurs de durées de vie pour des
casses en 1 cycle ont été obtenues par la méthode d’UTS (cf. chapitre 2).

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

250
PAFV-25°C
PAFV-65°C

Contrainte maximale (MPa)


200
PAFV-140°C

150

100
NR NR

50

0
0 2 4 6 8
(a) PAFV log nombre de cycles à rupture

120
Contrainte maximale (MPa)

100

80

60

40

20

0
0 2 4 6 8
log nombre de cycles à rupture
(b) PA

Figure 56 : Courbes de Wöhler pour différentes températures : (a) pour le polyamide renforcé de fibres de
verre (NR signifie Non Rompu) ; (b) pour le polyamide non renforcé. La fréquence est de 5Hz, R=0.1.

Loin de la transition vitreuse, les courbes de Wöhler du polyamide vierge et renforcé de fibres
de verre représentées en échelle semi-logarithmique sont des droites, comme indiqué dans la
littérature [10; 72; 73; 79]. On obtient une relation linéaire entre la contrainte maximale σmax et
le logarithme du nombre de cycles à rupture log N :
 m ax   A(T ) log N  B(T ) (28)

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

avec A(T) et B(T) des constantes dépendant du matériau et de la température. Autour de la


transition vitreuse la relation entre la contrainte maximale de fatigue et le logarithme du
nombre de cycles à rupture n’est pas linéaire. Les phénomènes à l’origine de cette non linéarité
sont liés à l’échauffement du matériau et seront expliqués dans le paragraphe suivant (1.1.).

La courbe de Wöhler ne présente pas de contrainte à partir de laquelle la durée de vie semble
infinie. Cela signifie que les polyamides 6,6 vierge et renforcé de fibres de verre ne présentent
pas de limite d’endurance dans la gamme de contraintes étudiée, comme reporté dans des
articles antérieurs pour le même polymère [91]. Seule la courbe de Wöhler pour des
températures proches de la transition vitreuse n’est pas une droite : autour de la Tg le
comportement viscoélastique du matériau change brutalement, ce qui affecte la dépendance en
contrainte du nombre de cycles à rupture.

Les valeurs de durées de vie pour le PA non renforcé sont très dispersées. Au contraire, nous
avons constaté que les écart-types pour les durées de vie du PA renforcé de fibres sont très
faibles en comparaison avec la littérature sur les thermoplastiques non renforcés [70]. Le
renforcement du polyamide a pour effet de multiplier le nombre de sites de concentrations de
contraintes et permet donc d’éviter qu’un petit nombre d’événements entraîne la rupture.

Nous avons étudié la durée de vie en fatigue et les mécanismes de rupture du polyamide non
renforcé uniquement à 25°C et dans les cas de fatigue mécanique. Pour les températures et
contraintes plus élevées, le matériau casse après striction. Ce mécanisme est très différent et
nous avons choisi de focaliser cette étude sur la rupture du PA sous déformation faible, comme
c’est le cas dans le polyamide 6,6 renforcé.

1.1 Echauffement du matériau sollicité en fatigue

1.1.1 Résultats expérimentaux

Nous avons montré dans le chapitre introductif que les polymères ont la particularité de
s’échauffer lorsqu’ils sont soumis à une sollicitation cyclique. Nous avons mesuré la
température en surface des éprouvettes au cours des essais de fatigue (Figure 57).

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

16
154.8 MPa

augmentation de température (°C)


14 133.4 MPa
12 114.3 MPa
110.8 MPa
10

0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

(a) T<Tg nombre de cycles


25
103.2 MPa
89.3 MPa
augmentation de température (°C)

85 MPa
20 82 MPa
75 MPa
68.8 MPa
15

10

NR
5
NR

0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

(b) T~Tg nombre de cycles


16
76.8 MPa
augmentation de température (°C)

14 66.1 MPa
57.8 MPa
12 54.5 MPa
10

0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

(c)T>Tg nombre de cycles

Figure 57 : Augmentation de la température en surface de l’éprouvette au cours d’essais de fatigue à


différentes contraintes pour le polyamide renforcé de fibres de verre dans un environnement de (a) 25°C ;
(b) 65°C (NR signifie non rompu) ; (c) 140°C.

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

Pour les essais de fatigue mécanique, nous observons que la température de surface augmente
pendant une période d’environ 1000 cycles et reste ensuite stable jusqu’à la fin de l’essai.
Cette rapide stabilisation de la température est permise par la convection forcée dans l’enceinte
thermique. Les essais de Handa sur le polyamide renforcé de fibres de verre sous convection
naturelle ont en effet montré que la température est faiblement croissante pendant tout l’essai
et ne se stabilise que pour la dernière décade 106 [38]. Dans certains cas nous avons observé
une augmentation faible de la température de surface en fin d’essai, signe que de nouveaux
mécanismes de dissipation interviennent.

Pour les essais de fatigue mécanique réalisés dans un environnement à 25°C et 140°C, c’est-à-
dire loin de la Tg, l’auto-échauffement mesuré en surface au cours du régime stationnaire est
faible, et compris entre 2°C et 5°C selon la contrainte. Pour les essais réalisés dans l’étuve à
65°C, c’est-à-dire autour de la Tg, l’auto-échauffement est plus important et est compris entre
4°C et 13°C selon la contrainte. L’échauffement plus important autour de la transition vitreuse
peut être expliqué par la plus importante dissipation d’énergie autour de la Tg. Nous avons vu
au chapitre 1 que la densité de puissance dissipée au cours d’un cycle P’’ dans le polymère
responsable de l’échauffement peut être approximée par :
 moy 2
P' '  w sin  (20)
2E
où σ est la contrainte sinusoïdale telle que    moy cos wt , w la pulsation de la sollicitation (en
s-1),  le déphasage entre la contrainte et la déformation (en rad), E le module élastique du
matériau (en MPa), et P’’ en W/m3 ou en MPa/s. Ainsi plus le déphasage est grand, plus
l’échauffement dans le matériau est important. Les valeurs de  pour 3 tests de mêmes durées
de vie en fatigue à 3 températures différentes illustrent ce résultat (Figure 58).

10
déphasage contrainte-déformation (°)

1
1.E+00 1.E+01 1.E+02 1.E+03 1.E+04 1.E+05

140°C - 66.1 MPa


25°C - 133.4 MPa
65°C - 85.0 MPa
0.1
nombre de cycles

Figure 58 : Déphasage entre la contrainte et la déformation en fonction du nombre de cycles en fatigue -


influence de la température pour 3 essais de même durée de vie.

La Figure 59 représente l’évolution de la température de surface pour un polyamide non


renforcé sollicité en fatigue.

- 79 -
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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

16
69MPa

augmentation de température (°C)


14 67.3MPa
61.9MPa
12

10

0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06
nombre de cycles
Figure 59 : Augmentation de la température de surface au cours d’essais de fatigue pour le polyamide 6,6.

Pour une même contrainte entre 65MPa et 70MPa, certaines éprouvettes présentent des casses
thermiques - leur rupture a lieu après 1000 cycles environ et la température augmente
fortement, et d’autres présentent des casses mécaniques – leur rupture a lieu après 100 000
cycles environ et la température se stabilise rapidement. Cela explique la grande dispersion de
durée de vie du polyamide non renforcé.

Notre étude vise à comprendre la fatigue mécanique, c’est pourquoi dans la suite de ce
document nous nous focaliserons sur les cas de fatigue pour lesquels la température du
matériau se stabilise.

1.1.2 Etude de l’échauffement

Le bilan thermique effectué au premier chapitre nous a permis d’estimer la densité de


puissance dissipée dans le matériau (équation 1) la densité de puissance évacuée vers le milieu
extérieur (équation 2).
 moy 2
P' '  w sin 
2E
(20)

S
(T  Ta ) Q  h
V (21)
avec P’’ et Q- des quantités d’énergies par unité de volume et par unité de temps (exprimées en
W/m3 ou en MPa/s), σ la contrainte sinusoïdale telle que    moy cos wt , w la pulsation de la
sollicitation (en s-1),  le déphasage entre la contrainte et la déformation (en rad), E le module
élastique du matériau (en MPa), h le coefficient d’échange thermique (W/m2/K), S la surface
d’échange, V le volume de l’échantillon, T la température de l’éprouvette (K), Ta la
température ambiante (K).

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

L’élévation de température par unité de temps est :


dT W ' 'Q  

dt C p
(29)
avec  la densité (en kg/m ) et Cp la capacité thermique massique du matériau (en J/kg/K).
3

dT
Lorsqu’on atteint l’équilibre thermique on a  0 , soit P’’=Q- .
dt
On obtient donc :
hS
P"  (T  Ta )
V
(30)
 moy 2
hS
soit w sin   (T  Ta )
2E V
(31)
Dans notre cas la seule inconnue est h, le coefficient de transfert thermique. Ce coefficient
dépend de l’enceinte thermique utilisée et de la température de régulation. On peut le
déterminer expérimentalement pour chacune des températures d’environnement, à partir de la
pente de la relation entre l’échauffement et l’énergie non restituée P’’ :
V
(T  Ta )  P' '
hS (32)
V  moy
2

soit (T  Ta )  w sin  (33)


hS 2 E
Nos expériences ont permis de déterminer les valeurs nécessaires à l’estimation du coefficient
de transfert thermique. Nous utilisons les valeurs expérimentales de l’échauffement (après
stabilisation de la température), du déphasage (valeur moyenne du régime stationnaire) et du
module élastique initial pour toutes les conditions de contrainte et de température dans
l’enceinte thermique dans le cas de la fatigue mécanique du polyamide renforcé de fibres de
verre. Il est alors possible de calculer les valeurs de coefficients de transfert thermique dans
nos conditions d’essai (Figure 60).

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

16
V/hS =26.8
14
V/hS =18.2
12
V/hS =14.7
10

(T-Ta) (K)
8

6
25°C
4 65°C
140°C
2

0
0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
P'' (MPa/s)
Figure 60 : Relations entre l’échauffement et l’énergie non restituée pour différentes températures dans
l’enceinte thermique. Les pentes des droites correspondent aux valeurs de coefficient de transfert
thermique V/hS en Ks/MPa.

Nous avons ainsi défini expérimentalement les valeurs de coefficient de transfert thermique :
V/hS=18.2 Ks/MPa à 25°C, V/hS =14.7Ks/MPa à 65°C et V/hS =26.8Ks/MPa à 140°C. Ces
données permettent de définir la température d’échauffement en surface de l’échantillon pour
toute autre contrainte.

Handa et Katoh ont utilisé ce bilan thermique pour proposer une méthode de prédiction de
l’échauffement dans le polyamide 6,6 renforcé de fibres de verre [38]. Ils ont calculé les
valeurs de coefficient de transfert thermique pour de larges gammes de températures et
fréquences. Les valeurs que nous obtenons à 5Hz sont du même ordre de grandeur. Handa a
montré que les valeurs du coefficient de transfert thermique tendent à augmenter avec la
température, sauf lorsque la température d’environnement est proche de la transition vitreuse
du polyamide 6,6. La valeur de V/hS autour de la Tg est très faible.

1.2 Effet de la fréquence

Le chapitre 1 a montré que le comportement mécanique des polymères est très dépendant de la
température et de la vitesse de déformation. Nous avons donc étudié l’influence de la
fréquence sur la durée de vie du polyamide renforcé de fibres de verre.

Les conclusions sur les effets de la fréquence reportés dans la littérature sont divergentes, car
les effets de la fréquence impliquent souvent les effets de l’échauffement. Dans le cas des
essais de propagation des fissures de fatigue (PFF), la vitesse de propagation de fissures est
définie par l’avancée de la fissure en fonction du logarithme du nombre de cycles (les essais de
PFF ont été définis au chapitre 1). Wyzgoski a étudié l’effet de la fréquence sur la vitesse de
propagation de fissures en fatigue dans les polyamides non renforcés [113]. Cet auteur a étudié
le polyamide 6 et le polyamide 6,6 secs. Les fréquences sont comprises entre 0.1Hz et 5Hz et

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

les essais sont réalisés à température ambiante. La température en pointe de fissure a été
mesurée par thermographie infrarouge. A 5Hz, l’échauffement est non négligeable et la
température augmente au-delà de la Tg pour le PA6 et le PA6,6. Par contre à 0.5Hz et 0.1Hz
l’échauffement est considéré négligeable. La conclusion de cet article est que plus la fréquence
est faible, plus la vitesse de propagation des fissures en fatigue est importante. Ce résultat est
en contradiction avec les résultats de Hertzberg [40] qui indiquent que la fréquence n’a pas
d’influence sur la vitesse de propagation d’une fissure en fatigue dans le PA sec. Cette
divergence peut être expliquée par une gamme de fréquence différente ou une épaisseur de
plaque différente. Lang et al ont en effet discuté de l’effet de l’épaisseur des plaques et ont
montré que les plaques minces en contraintes planes ont un comportement différent des
plaques épaisses en déformations planes [66].
Wyzgoski et al. ont également étudié l’influence de la fréquence sur la vitesse de propagation
en fatigue des polyamides renforcés de fibres de verre [111]. Le matériau étudié est du
polyamide 6,6 chargé 33% de fibres de verre. Les chercheurs ont réalisé des essais de fatigue à
0.1, 0.2, 0.5, 1.0 et 5.0 Hz. Ces fréquences sont faibles, donc le matériau présente un
échauffement hystérétique faible. Au contraire de ce qui a été montré par Wyzgoski pour les
polyamides vierges, la vitesse de propagation des fissures des PA renforcés de fibres est
indépendante de la fréquence du chargement.
Pour le PA renforcé conditionné à 50% d’humidité, Wyzgoski observe une dépendance en
fréquence similaire à celle du PA non renforcé [113]. Ce résultat est confirmé par Bernasconi
qui a étudié le PA6 renforcé 30% de fibres de verre conditionné à 50% d’humidité pour des
fréquences comprises entre 1 et 4Hz [10].

En conclusion, la fréquence semble influencer le nombre de cycles à rupture du polyamide


renforcé de fibres de verre uniquement lorsque le matériau est sollicité autour de sa Tg. La
variation de fréquence cause des variations de température faibles, mais les conséquences de
cet échauffement sur les propriétés mécaniques du composite ne sont pas négligeables autour
de la transition vitreuse. Nous avons donc fait varier la fréquence de fatigue loin de la Tg et
pour des fréquences faibles, afin de s’affranchir des effets de l’élévation de température. Pour
ces deux fréquences l’échauffement du matériau mesuré en surface est de moins de 2°C, et
loin de la Tg cet échauffement a des conséquences négligeables sur les propriétés mécaniques.
La Figure 61 permet de comparer les courbes de Wöhler d’un polyamide renforcé de fibres de
verre sec à 5Hz et 0.5Hz.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

250
GFPA 25°C 5Hz
GFPA 25°C 0.5Hz
200
GFPA 140°C 5Hz
GFPA 140°C 0.5Hz

 max (MPa)
150

100

50

0
0 2 4 6 8
log nombre de cycles à rupture
(a)
250
GFPA 25°C 5Hz
GFPA 25°C 0.5Hz
200
GFPA 140°C 5Hz
GFPA 140°C 0.5Hz
max (MPa)

150

100

50

0
1.E-01 1.E+01 1.E+03 1.E+05 1.E+07

(b) temps à rupture (s)

Figure 61 : Influence de la fréquence dans le polyamide renforcé de fibres de verre (PAFV) à 25°C et
140°C : (a) représentation en fonction du nombre de cycles ; (b) représentation en fonction du temps.

Lorsque l’influence de la température est négligeable, c’est-à-dire pour une température


d’environnement choisie loin de la Tg du polymère, nous confirmons que le polyamide
renforcé de fibres de verre casse après avoir subi un nombre critique de cycles qui est
indépendant de la fréquence de fatigue appliquée.

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

2 Prise en compte de la température dans l’étude de la


durée de vie en fatigue

2.1 Proposition d’une loi de prédiction pour tenir compte des


effets de la température

2.1.1 Polyamide renforcé de fibres de verre

Il existe dans la littérature une normalisation des courbes de Wöhler qui permet de prédire la
durée de vie en fatigue pour des polymères renforcée de fibres avec des orientations de fibres
différentes. Cette normalisation consiste à rapporter la contrainte maximale de fatigue à la
contrainte de rupture en 1 cycle, c’est-à-dire à la contrainte d’UTS [9; 44; 45; 115]. Jia a
montré que la normalisation des courbes de Wöhler par la contrainte d’UTS est valable pour
différentes températures loin de la Tg, c’est-à-dire dès lors que l’échauffement et ses
conséquences sur les propriétés viscoélastiques du matériau sont négligeables [48]. Tous les
auteurs confirment que cette normalisation par l’UTS ne permet pas de tenir compte des effets
de la température. A notre connaissance, il n’existe pas d’autre proposition de normalisation
des courbes de Wöhler pour prédire la durée de vie des polymères à différentes températures.

Nous proposons un critère de rupture basé sur la déformation, et proposons donc une
normalisation des courbes de Wöhler par le module d’Young à la température d’auto-
échauffement du matériau. Ainsi, l’ordonnée à l’origine est la contrainte maximale en fatigue
rapportée au module élastique du matériau, et cette grandeur est analogue à une déformation.

Nous avons mesuré le module d’Young pour les différentes températures de plateau de
stabilisations en fatigue. La méthode d’essai est présentée en annexe A3 et les résultats en
Figure 62. Les courbes de Wöhler normalisées par le module sont présentées en Figure 63.

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

10000
Plateau vitreux
9000

module d'Young (MPa)


8000

7000

6000
Plateau
5000 caoutchoutique

4000

3000
0 50 100 150 200
Température (°C)

Figure 62 : Evolution du module d’Young en fonction de la température pour le PA 6,6 renforcé de 30%
de fibres de verre (mesures réalisées avec une vitesse de déformation  =10-3s-1 sur éprouvettes de fatigue).

0.03
PAFV 25°C 5Hz
0.025 PAFV 65°C 5Hz
Contrainte maximale / E(T)

PAFV 140°C 5Hz


0.02

0.015

0.01
σ/E = -2.09 10-3logN + 2.35 10-2

0.005

0
0 2 4 6 8
log nombre de cycles à rupture

Figure 63 : Courbes de Wöhler du polyamide renforcé de fibres de verre normalisées par le module
d’Young à la température de stabilisation en fatigue.

Notre normalisation conduit à une droite maîtresse qui permet de prédire la durée de vie en
fatigue pour une large gamme de températures et de fréquences selon l’équation suivante :
 m ax
  log N   (34)
E (T )
avec σmax la contrainte maximale du test de fatigue, E le module d’Young du matériau à la
température d’auto-échauffement, et A et B deux paramètres qui dépendent du matériau. Pour
le polyamide 6,6 renforcé de 30% de fibres de verre, on obtient =2.09 10-3 et =2.35 10-2.

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

Loin de la Tg, la faible élévation de température n’a pas d’influence sur les propriétés
mécaniques et notamment sur le module élastique. Les courbes de Wöhler peuvent être
considérées isothermes et elles sont linéaires (Figure 56). Au contraire autour de la Tg chaque
point de la courbe de Wöhler correspond à une température différente et donc à un module
élastique différent dans le saut de propriétés mécaniques de la transition vitreuse. La courbe de
Wöhler n’est pas isotherme et sa forme est asymptotique. La normalisation par le module
élastique permet de tenir compte du changement brutal de propriétés viscoélastiques qui est lié
à la Tg, et pour toutes les températures d’environnement, on montre une relation linéaire entre
la contrainte normalisée par le module élastique et le logarithme du nombre de cycles à
rupture.

Ce résultat semble à première vue en contradiction avec les résultats de Handa [38] et de Noda
[79]. Tous deux ont travaillé sur le polyamide 6,6 chargé 33% de fibres de verre à une
fréquence de 20Hz et à des contraintes comprises entre 45 et 140MPa. Les courbes de Wöhler
en température sont de la forme :  m ax   A(T ) log N  B(T ) avec A(T) la pente qui représente
la sensibilité à la résistance à la fatigue et B(T) la contrainte à rupture en traction. Lorsque les
valeurs de la pente et de l’ordonnée à l’origine sont représentées en fonction de la température
de l’environnement, les auteurs obtiennent que ces deux valeurs décroissent lorsque T<Tg et
sont constantes lorsque T>Tg. Ils en déduisent que la fatigue est liée à des mécanismes
différents selon que le polymère est fatigué au-dessus ou en dessous de sa Tg. Or la validité de
notre normalisation implique que la pente A(T) et l’ordonnée à l’origine B(T) des courbes de
Wöhler ait la même dépendance en température que le module :
A(T )
 (35)
E (T )
B (T )
et  (36)
E (T )
Dans les publications de Handa et Noda, les valeurs de A(T) et B(T) sont représentées en
fonction de la température de l’environnement du matériau. Nous proposons de reprendre leurs
valeurs de ces publications et de les représenter en fonction de la température de l’échantillon.
Cependant, les mesures de température de l’échantillon en fonction de la température de
l’environnement ne sont pas mentionnées pour les températures supérieures à l’ambiante dans
ces articles. Les mesures de température d’échantillon pour une température extérieure de
23°C réalisées par Handa indiquent que l’échantillon s’échauffe de 10°C environ à 20Hz.
Nous avons montré que pour un environnement proche de la transition vitreuse l’échauffement
est plus de deux fois plus important (Figure 57). Si on estime que la température de
l’échantillon est supérieure d’environ 20°C à la température d’environnement pour une
fréquence de 20Hz, alors on peut tracer les valeurs de A(T) et B(T) en fonction de la
température de l’échantillon. On obtient alors que la pente A(T) et l’ordonnée B(T) sont
décroissantes autour de Tg (saut de module élastique dans la transition vitreuse), et constantes
pour T>Tg (plateau vitreux). Notre normalisation par le module devient donc compatible avec
leurs données (Figure 64).

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

Tg PA6,6 Tg PA6,6

température de l’environnement (K) température de l’échantillon (K)


(a) (b)
Figure 64 : (a) Représentation des valeurs de la pente et de l’ordonnée à l’origine des courbes de Wöhler
du polyamide 6,6 en fonction de la température de l’environnement selon Noda ; (b) Représentation des
données de Noda en fonction de la température de l’échantillon en estimant une échauffement de 20°C de
l’éprouvette à 20Hz.

2.1.2 Influence de la vitesse de déformation

La vitesse de déformation en fatigue est de l’ordre de  =10-1s-1, et la vitesse de déformation


pour nos mesures du module d’Young est de  =10-3s-1. Les effets de la vitesse de la
déformation sur le module élastique de la matrice polyamide sont négligeables loin de la Tg,
mais sont conséquents autour de la transition vitreuse, comme le montrent nos mesures par
analyse mécanique dynamique en Figure 65 (la méthode de mesure est présentée en annexe
A3).

3500

3000
Module élastique (MPa)

2500

2000

1500 25°C
65°C
1000
140°C
500

0
0.1 1 10
Fréquence (Hz)

Figure 65 : Module élastique en fonction de la fréquence pour les différentes températures


d’environnement en fatigue.

Loin de la Tg, le fait que le module élastique soit quasi indépendant de la vitesse de
déformation explique que la normalisation par E(T) soit valide avec des valeurs de modules

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

élastiques mesurés à des vitesses de déformation différentes des vitesses de déformation des
tests de fatigue (Figure 66).

0.03
PAFV 25°C 5Hz
0.025 PAFV 65°C 5Hz

Contrainte maximale / E(T)


PAFV 140°C 5Hz
0.02
PAFV 25°C 0.5Hz
PAFV 140°C 0.5Hz
0.015

0.01

0.005

0
0 2 4 6 8
log nombre de cycles à rupture

Figure 66 : Courbes de Wöhler du polyamide renforcé de fibres de verre normalisées par le module
d’Young à la température de stabilisation en fatigue : influence de la fréquence.

Par contre, la validité de la normalisation autour de la Tg par un module élastique mesuré à


une vitesse de déformation différente de la vitesse de déformation en fatigue pourrait être
expliquée par une équivalence temps – température. Un balayage en fréquence par DMA à
différentes températures autour de la Tg a montré qu’une variation de deux décades en vitesse
de déformation est équivalente à une variation d’environ 10°C dans une gamme de +/- 10°C de
la transition vitreuse. Il est donc possible que la température au cœur de l’échantillon soit
supérieure de près de 10°C de la température de surface dans cette gamme de température.

2.1.3 Influence des fibres de verre

Nous avons normalisé les courbes de Wöhler du polyamide vierge et renforcé de fibres de
verre, et nous avons fait varier l’orientation des fibres de verre en modifiant la géométrie
utilisée (Figure 67). Les éprouvettes nommées « orientation 2 » ont été découpées au centre de
plaques injectées de dimensions 100mm x 300mm x 4mm, dans la direction de l’écoulement.
L’injection dans des plaques de cette largeur conduit à une orientation des fibres plus oblique
en comparaison avec l’injection d’éprouvettes de géométrie fatigue (Figure 39). Nous avons
également comparé les normalisations du polyamide vierge et du polyamide renforcé de fibres
de verre (Figure 67).

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

0.03
PAFV 25°C 5Hz
0.025 PAFV 65°C 5Hz

Contrainte maximale / E(T)


PAFV 140°C 5Hz
0.02 PAFV 25°C 5Hz orientation2
PAFV 140°C 5Hz orientation2
0.015 PA 25°C 5Hz

0.01

0.005

0
0 2 4 6 8
log nombre de cycles à rupture

Figure 67 : Courbes de Wöhler du polyamide renforcé de fibres de verre normalisées par le module
d’Young à la température de stabilisation en fatigue : influence de la présence des fibres de verre et de
l’orientation des fibres.

Nous montrons que la normalisation par le module d’Young à la température d’échauffement


est valide pour des orientations de fibres différentes. Cette normalisation par le module
d’Young permet donc de représenter l’influence de l’orientation des fibres de verre, comme la
normalisation par l’UTS (cf. chapitre 1), et permet de plus de tenir compte des effets de la
température.

De plus, il est important de souligner que les courbes de Wöhler normalisées du matériau
vierge et du matériau renforcé de fibres correspondent. Ce résultat semble signifier que les
mécanismes d’endommagement dans le polyamide renforcé de fibres sont matriciels et sont les
mêmes que dans le polyamide non renforcé fatigué sous sa Tg.

2.2 Vers une compréhension de la loi de prédiction de la durée en


fatigue

A ce stade, il est important de comprendre les paramètres qui influencent les constantes λ et 
de l’équation (34) pour comprendre les mécanismes impliqués dans la rupture en fatigue. Dans
cette partie, nous proposons des interprétations physiques des constantes  et  qui devront
être validées par l’étude de matériaux polymères différents du polyamide.

- 90 -
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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

2.2.1 Interprétation de la constante 

Pour toute contrainte et toute température, on a montré que :

 m ax   A(T ) log N  B(T ) (28)


avec B(T) la valeur de la contrainte à rupture en 1 cycle nommée σUTS(T). On obtient :
 m ax   A(T ) log N   UTS (T ) (37)
Et nous avons démontré la validité de la normalisation par le module d’Young à la température
d’échauffement du composite :
 m ax
  log N   (34)
E (T )
Cela qui signifie que la constante  est une indépendante de la température :
 (T )
  UTS
E (T ) (38)
Si on trace les courbes de UTS(T) pour les différentes températures étudiées, on montre par
construction que  est en effet une valeur d’allongement qui est indépendante de la
température (Figure 68).

250

UTS(T=25°C) 25°C

200
65°C
contrainte (MPa)

150
140°C

100

50
E(T=25°C)

0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
= UTS(T)/E(T) allongement (%)

Figure 68 : Courbes d’UTS pour différentes températures et représentation de la constante  .

La valeur de la constante  peut donc être estimée à partir du tracé des courbes d’UTS à
différentes températures. Pour le polyamide 6,6 renforcé de 30% de fibres de verre cette
constante caractéristique vaut environ =2.35%. Nous interprétons cette constante comme une
valeur d’allongement critique pour l’endommagement.

Ces résultats laissent penser qu’un moyen d’augmenter la durée de vie des polymères en
fatigue à contrainte imposée est d’augmenter la valeur de cette constante , par des
modifications de la structure semi-cristallines de la matrice par exemple.

- 91 -
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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

Les chapitres suivants permettront d’étudier l’évolution des propriétés macroscopiques


(chapitre 4), microscopiques (chapitre 5) et nanoscopiques (chapitre 6) du matériau,
notamment son allongement. Nous chercherons alors à comprendre la signification de la valeur
d’allongement critique .

2.2.2 Interprétation de la constante 

Les travaux de Klompen et al. et de Janssen et al. montrent que la rupture ductile en fluage est
gouvernée par le même phénomène que la rupture ductile en traction [46; 58]. Dans les deux
cas, la rupture a pour origine le comportement de déformation intrinsèque du polymère, plus
particulièrement la déformation vraie d’adoucissement après écoulement, qui conduit à
l’initiation de zones de déformations localisées. Klompen a développé et validé un modèle
constitutif 3D pour prédire l’apparition de ces instabilités plastiques, qui permet de prédire
précisément la durée de vie en fluage du polycarbonate [58].
Janssen montre que la même approche est applicable pour prédire la durée de vie du
polycarbonate sous chargement cyclique, pour différentes masses moléculaires et différents
traitements thermiques [46; 47]. Pour ces cas de fatigue mécanique Janssen travaille sur des
échantillons de faible épaisseur et dans un bain d’eau thermostaté pour éviter toute
accumulation de chaleur au sein de l’échantillon. Les essais de fatigue sont réalisés à une
fréquence de 2Hz. Le modèle tient compte du vieillissement physique, accéléré par la
contrainte cyclique. Pour la fatigue oligocyclique, c’est-à-dire pour la fatigue thermique
puisque la rupture est dominée par les effets thermiques, le modèle constitutif est adapté,
Janssen ajoute une expression de temps de relaxation pour décrire la dissipation d’énergie.

Nous avons cherché à savoir si le modèle proposé par Janssen est adaptable à notre étude.
Klompen et Janssen montrent d’une part :

 Y   0 log   c (39)
d’autre part dans le cas du fluage [58]:
 creep   0 log t failure  c
(40)
et dans le cas de la fatigue répétée avec pour contrainte moyenne σmean [46; 47]:
 mean   0 log t failure  c
(41)
Ainsi à partir de tests statiques on peut connaître la sensibilité à la vitesse de déformation de la
contrainte seuil du polycarbonate qui permet d’obtenir la pente σ0. Cette même pente σ0 permet
de prédire la durée de vie en fatigue du polycarbonate en remplaçant la contrainte de fluage par
la contrainte moyenne de fatigue.

Les tests de fluage que nous avons réalisés dans le polyamide vierge à 25°C ont montré que la
relation entre la contrainte seuil d’écoulement et la vitesse de déformation est linéaire :
 Y (T )  A' (T ) log   B' (T ) (42)
Dans notre étude de la fatigue du polyamide vierge, nous avons montré que la rupture est
causée par un nombre critique de cycles de fatigue tel que :
 m ax   A(T ) log N  B(T ) (28)
En remplaçant le nombre de cycles par le temps à rupture   N  f , f étant la fréquence de la
sollicitation, on obtient :

- 92 -
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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

 m ax   A(T ) log( )  B(T ) (43)

Les équations (41) et (42) sont illustrées par la Figure 69.

120 70

100 60
y = 8.7x + 109.3
50 y = -3.6x + 56
 y (MPa)

80

 moy (MPa)
40
60
30
40
20
20 10

0 0
-8 -6 -4 -2 0 0 2 4 6 8
log vitesse de déformation
log vitesse en(sfluage
de déformation
-1
) (s-1) temps
log temps à rupture
à rupture en(s)fatigue (s)

Figure 69 : (a) Relation linéaire entre le logarithme de la vitesse de déformation et la contrainte seuil
d’écoulement du polyamide vierge en fluage ; (b) Relation linéaire entre la contrainte moyenne et le
logarithme du temps à rupture dans le polyamide en fatigue.

Le modèle de Janssen n’est pas directement applicable au polyamide vierge. La relation entre
le logarithme de la vitesse de déformation et la contrainte seuil d’écoulement plastique n’est
pas similaire à la relation entre contrainte moyenne de fatigue et le logarithme de la durée de
vie en fatigue. Les mécanismes de fatigue ne sont donc pas directement liés à la localisation de
déformation plastique, contrairement au cas du polycarbonate.

De même, ce modèle n’est pas valide pour le polyamide renforcé de fibres de verre. En effet,
le modèle de Janssen signifie que le temps à rupture en fatigue est indépendant de la fréquence
pour le polycarbonate. Au contraire, nous avons montré aux paragraphes 1.2. et 2.2. que la
rupture du polyamide en fatigue a lieu pour des durées de fatigue dépendant de la fréquence, et
que le nombre de cycles à rupture est indépendant de la fréquence. En conséquence, les
mécanismes de rupture du polyamide en fatigue sembleraient avoir pour origine une
déformation cumulée à chaque cycle.

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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

Conclusion
Dans ce chapitre nous avons étudié le comportement en fatigue du polyamide 6,6 sec non
renforcé et renforcé de 30% de fibres de verre par la méthode de Wöhler. Nous avons comparé
le comportement du polyamide renforcé à trois températures d’environnement différentes :
25°C (sous la Tg du polymère), 65°C (autour de la Tg) et 140°C (au-dessus de la Tg). Nous
avons montré le logarithme du nombre de cycles à rupture est une fonction linéaire de la
contrainte maximale de fatigue, ce qui signifie que les polyamides 6,6 vierge et renforcé de
fibres de verre ne présentent pas de limite d’endurance dans la gamme de contraintes
appliquées.

Le comportement viscoélastique du polymère induit une dissipation d’énergie sous chargement


cyclique qui est majoritairement transformée en chaleur. Si la quantité de chaleur dissipée par
l’échantillon est proche de la quantité de chaleur évacuée vers le milieu extérieur, la
température du matériau se stabilise. C’est le cas des essais de fatigue mécanique sous
contrainte faible. Un bilan thermique nous a permis de calculer les transferts de chaleur par
convection forcée dans notre enceinte thermique. L’échauffement dans le matériau peut donc
être estimé théoriquement pour toute sollicitation périodique sinusoïdale à partir du
comportement viscoélastique du matériau (que l’on peut déterminer par un essai d’Analyse
Mécanique Dynamique).

Nous avons montré que la température influence la durée de vie en fatigue et la forme des
courbes de Wöhler, et nous proposons un critère de normalisation basé sur la déformation pour
tenir compte de l’influence de la température. Nous montrons ainsi que les courbes de Wöhler
normalisées par le module d’Young à la température d’auto-échauffement du matériau se
confondent en une droite maîtresse. La connaissance de cette droite maîtresse nous permet de
prédire la durée de vie en fatigue pour une large gamme de températures et de contraintes, dès
lors que la température d’échauffement du matériau est connue.

Nous montrons ainsi que le logarithme du nombre de cycles à rupture en fatigue est une
simple fonction de la contrainte de fatigue rapportée au module élastique et de deux
constantes indépendantes de la température  et .
La constante  influence l’ordonnée à l’origine de la droite maîtresse et peut être explicitée
par le comportement statique du matériau. C’est la contrainte à rupture en traction rapportée
au module élastique, qui est une grandeur analogue à une déformation qui est indépendante de
la température.
La valeur de la constante  détermine la pente de la droite maîtresse. Lorsque l’influence de la
température est négligeable, c’est-à-dire pour une température d’environnement choisie loin de
la Tg du polymère, nous avons montré que le polyamide renforcé de fibres de verre casse
après avoir subi un nombre critique de cycles qui est indépendant de la fréquence de fatigue
appliquée. La valeur de la constante  est indépendante de la durée de test de fatigue et ne
dépend du nombre de cycles. Les mécanismes de rupture du polyamide en fatigue semblent
donc avoir pour origine une déformation critique cumulée lors du cyclage.
Un moyen d’augmenter la durée de vie des polymères en fatigue à contrainte imposée est
d’augmenter la valeur de  et de diminuer la valeur de .

Nous allons chercher à interpréter physiquement ces constantes  et  dans la suite de ce


document. L’évolution des propriétés macroscopiques, microscopiques et nanoscopiques du

- 94 -
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Chapitre 3 : Etude de la durée de vie en fatigue

polyamide en fatigue seront présentées respectivement aux chapitres 4, 5 et 6 et auront pour


objectif de mieux comprendre les mécanismes d’endommagement en fatigue qui influencent
directement la durée de vie.

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Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

- 96 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

4
Evolution des propriétés macroscopiques en
fatigue

1 Résultats de l’analyse des cycles


1.1 Evolution du module dynamique
1.1.1 Polyamide renforcé de fibres de verre
1.1.2 Polyamide vierge
1.2 Une déformation progressive
1.2.1 Polyamide renforcé de fibres de verre
1.2.2 Polyamide vierge
1.3 Evolution de l’énergie dissipée par cycle
1.3.1 Polyamide renforcé de fibres de verre
1.3.2 Polyamide vierge
1.4 Evolution du déphasage contrainte - déformation
1.4.1 Polyamide renforcé de fibres de verre
1.4.2 Polyamide vierge

2 Mesures macroscopiques de l’endommagement


2.1 Densité
2.1.1 Polyamide renforcé de fibres de verre
2.1.2 Polyamide vierge
2.2 Le Module d’Young comme traceur d’endommagement
2.3 Le module dynamique comme traceur d’endommagement en fatigue
2.4 Mesures de déformation volumique

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Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

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Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

Chapitre 4: Evolution des propriétés


macroscopiques en fatigue

L’étude de la durée de vie des matériaux en fatigue au chapitre 3 a montré que la rupture
semble liée à une déformation critique cumulée par le cyclage. Nous avons proposé un critère
de rupture homogène à une déformation et indépendant de la température. De plus, nous avons
montré que les mécanismes d’endommagement en fatigue semblent similaires dans le
polyamide vierge et dans le polyamide renforcé de fibres de verre. Dans ce chapitre, nous
présentons l’évolution des propriétés mécaniques du composite au cours de la fatigue. Dans
une première partie, l’analyse des cycles de fatigue nous permettra d’estimer la baisse de la
rigidité du matériau, le fluage en fatigue, l’énergie dissipée par cycle et le déphasage entre la
contrainte et la déformation. L’objectif est d’expliciter notre critère de rupture basé sur la
déformation et de comparer le comportement du polyamide vierge et renforcé de fibres en
fatigue. Dans une seconde partie, des mesures de densité et de déformation sous contrainte
complèteront cette étude macroscopique et permettront d’estimer la quantité
d’endommagement dans les deux matériaux.

1 Résultats de l’analyse des cycles


La représentation des cycles contrainte – déformation en fatigue permet d’étudier l’évolution
des propriétés mécaniques au cours d’un essai de fatigue. Notre méthode d’analyse des cycles
a été présentée au chapitre 2. Nous avons montré au chapitre précédent que les mécanismes de
fatigue semblent similaires quelle que soit la température du matériau, indépendantes de la
fréquence et similaires pour le polyamide vierge et renforcé de fibres de verre. L’objectif de
cette partie est de comparer la forme des cycles de fatigue pour différentes contraintes,
températures et fréquences afin de comprendre les mécanismes impliqués dans la fatigue par
l’étude de l’évolution des propriétés macroscopiques du matériau en fatigue en fonction de la
température.

Les figures suivantes permettent de montrer l’évolution de la forme des cycles au cours de la
fatigue dans le polyamide renforcé de fibres de verre (Figure 70) et dans le polyamide vierge
(Figure 71). Ces cycles seront étudiés en détails dans les paragraphes suivants.

- 99 -
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Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

140

120

100

contrainte (MPa)
80

60

40
cycle 1
cycle 1 000
20 cycle 10 000
cycle 100 000
cycle 200 000
0
0 0.5 1 1.5 2 2.5
(a)T<Tg déformation (%)
90

80

70
contrainte (MPa)

60

50

40

30
cycle 1
20 cycle 10
cycle 100
10 cycle 1 000
cycle 10 000
0
0 1 2 3

(b)T~Tg déformation (%)


70

60

50
contrainte (MPa)

40

30

20 cycle 1
cycle 10
cycle 1 000
10
cycle 10 000
cycle 100 000
0
0 2 4 6

(c)T>Tg déformation (%)

Figure 70 : Evolution des cycles de fatigue pour des essais de fatigue mécanique dans le polyamide renforcé
de fibres de verre (a) environnement à 25°C et max=114.3MPa ; (b) environnement à 65°C et
max=82.0MPa ; (c) environnement à 140°C et max=57.8MPa.

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Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

80

70

60

contrainte (MPa)
50

40

30
cycle 1
20 cycle 10
cycle 100
cycle 1 000
10 cycle 10 000
cycle 100 000
0
0 2 4 6 8
déformation (%)

Figure 71 : Evolution des cycles de fatigue pour des essais de fatigue mécanique dans le polyamide dans un
environnement à 25°C et max=69.0MPa.

La forme des cycles peut être modélisée par une ellipse afin de déterminer les valeurs de
module dynamique Ed, des déformations minimales et maximales dans le cycle (εmin et εmax),
de la dissipation d’énergie par cycle (W) et du déphasage entre la contrainte et la déformation
(). Nous présenterons dans cette partie l’évolution du module dynamique Ed, de la
déformation ε, de l’énergie dissipée par cycle W et du déphasage entre la contrainte et la
déformation  définis en Figure 72. L’évolution de la déformation ε est la somme des
contributions des déformations élastiques, viscoélastiques, plastiques et causées par
l’endommagement. Nous considérons ici que la partie réversible de la déformation εe
correspond à la déformation élastique et viscoélastique, et que la somme des déformations
irréversibles dans le cycle εp correspond à la déformation plastique.
σ
σmax

σmin

min(N) max(N) ε

εp εe
Figure 72 : Paramètres des cycles de fatigue.

La déformation maximale εmax est la somme de la déformation élastique et viscoélastique εe, et


de la déformation plastique εp, définies telles que :

 m ax   e   p (44)

- 101 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

avec
 m ax( N )
 p ( N )   m ax( N )  (45)
Ed ( N )
 e ( N )   m ax( N )   p ( N ) (46)

1.1 Une déformation progressive

Lorsque les polymères sont soumis à une contrainte cyclique, ils présentent une déformation
progressive [73]. Dans la littérature, cette déformation est interprété comme la signature du
fluage en fatigue [72]. Dans la partie suivante nous allons étudier cette déformation
progressive en fatigue en comparaison avec les caractéristiques du fluage statique. En fatigue,
la vitesse de fluage est généralement définie comme la pente de la courbe de déformation
maximale en fonction du nombre de cycles soit dεmax/dN [10; 44; 45]. Néanmoins, comme
expliqué en Figure 72, l’évolution de εmax est la somme des contributions des déformations
élastiques, viscoélastiques, plastiques et causées par l’endommagement. Afin de différentier
ces contributions, nous allons présenter dans cette partie l’évolution de la déformation
plastique εp d’une part, et la déformation élastique et viscoélastique εe d’autre part.

1.1.1 Polyamide renforcé de fibres de verre

1.1.1.1 Evolution de la déformation plastique


La Figure 73 représente l’évolution de la déformation plastique en fatigue pour des tests à
différentes températures.

2
154.8 MPa
1.8
133.4 MPa
1.6 114.3 MPa
1.4 110.8 MPa
100 MPa
1.2
p (%)

1
0.8
0.6
0.4
0.2
0
1.E+00 1.E+01 1.E+02 1.E+03 1.E+04 1.E+05 1.E+06
nombre de cycles
(a)T<Tg

- 102 -
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Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

4
103.2 MPa
3.5 89.3 MPa
3 85.0 MPa
82 MPa
2.5
75 MPa
2 68.8 MPa

p (%)
1.5 NR

1 NR

0.5
0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

(b)T~Tg nombre de cycles

7
76.8 MPa
6 66.1 MPa
57.8 MPa
5
54.5 MPa
p (%)

0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

nombre de cycles
(c)T>Tg
Figure 73 : Evolution de la déformation plastique (εp) pour le PA renforcé de fibres de verre à (a) T<Tg,
(b) T~Tg, (c) T<Tg; le symbole ( ) correspond à la fin du régime d’évolution linéaire en fonction du
nombre de cycles.

Pour les essais de fatigue mécanique, lorsque la température est stabilisée, le minimum de la
déformation des cycles de fatigue augmente linéairement avec le logarithme du nombre de
cycles. On observe une augmentation plus rapide et non linéaire avant la rupture finale.

Dans la partie linéaire de la déformation, la vitesse de fluage en fatigue diminue avec la


contrainte et le nombre de cycles à rupture. La Figure 74 présente la vitesse de fluage en
fatigue en fonction du nombre de cycles à rupture.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

0
-1 25°C
-2 65°C
140°C
-3
-4

Log dεp/dN
log d
-5
-6
-7
-8
-9
-10
0 2 4 6 8
log N
Log nombre de cycles à rupture

Figure 74 : Vitesse de fluage en fatigue en fonction du nombre de cycles à rupture pour différentes
températures.

La vitesse de fluage en fatigue est une fonction linéaire du nombre de cycles à rupture. Ce
résultat est en accord avec la littérature [44]. Les caractéristiques de εp en fatigue sont alors
identiques aux caractéristiques de la déformation en fluage statique secondaire. François,
Pineau et Zaoui décrivent le fluage en quatre étapes [32]. Après une déformation instantanée,
le matériau est soumis à un fluage primaire lié à la mise sous tension de chaînes de polymère
initialement relaxées, qui gouvernent la résistance au fluage du polymère. Ensuite le fluage
secondaire est cause par une déformation homogène du matériau qui implique les mouvements
d’un grand nombre de chaînes et qui est caractérisé par une vitesse de déformation constante
(dε/dt=constante). Et enfin le fluage tertiaire est expliqué par l’endommagement et est
caractérisé par une augmentation de la vitesse de fluage jusqu’à la rupture. Cependant, il n’est
pas rare que des défauts apparaissent lors du fluage secondaire, conduisant à une instabilité qui
cause la rupture avant le fluage tertiaire. Jinen a de même montré la relation linéaire entre la
déformation en fluage du polyamide 6 renforcé de 15% de fibres de verre et le logarithme du
temps, et la décroissance linéaire de la vitesse de fluage en fonction du temps à rupture [49].

1.1.1.2 Evolution de la déformation élastique


La déformation élastique est ici influencée par les propriétés élastiques et viscoélastiques du
matériau, et par l’endommagement qui provoque une chute du module dynamique Ed. La
Figure 75 présente l’évolution de la déformation élastique en fonction du nombre de cycles de
fatigue pour différentes températures et différentes contraintes.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

4
154.8 MPa
3.5 133.4 MPa
3 114.3 MPa
110.8 MPa
2.5 100 MPa

e (%)
2

1.5

0.5

0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06
nombre de cycles
(a)T<Tg
4
103.2 MPa
3.5 89.3 MPa
85.0 MPa
3
82 MPa
2.5

2
e (%)

1.5

0.5

0
1.E+00 1.E+01 1.E+02 1.E+03 1.E+04 1.E+05 1.E+06

(b)T~Tg nombre de cycles

3.5

2.5
e (%)

1.5
76.8 MPa
1 66.1 MPa
57.8 MPa
0.5
54.5 MPa
0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06
nombre de cycles
(c)T>Tg
Figure 75 : Evolution de la déformation élastique (εe) pour le PA renforcé de fibres de verre à (a) T<Tg, (b)
T~Tg, (c) T<Tg.

Comme la déformation plastique, la déformation élastique est une fonction linéaire croissante
du nombre de cycles de fatigue pour un régime qui débute après la stabilisation de la

- 105 -
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Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

température (cycle 1000) et jusqu’à l’apparition de l’endommagement catastrophique du


matériau (une demi décade avant la rupture).

1.1.1.3 Critère de rupture


Les résultats du chapitre 3 nous ont conduits à proposer un critère de rupture basé sur une
déformation cumulée par le cyclage et indépendante de la température. Afin de comparer les
valeurs des déformations plastiques et élastiques à rupture, nous avons tracé εp et εe à rupture
en fonction du nombre de cycles à rupture pour différentes contraintes et températures (Figure
76).

5
e à rupture (%)

2 25°C
65°C
1
140°C
0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

nombre de cycles à rupture

6
p à rupture (%)

2 25°C
65°C
1
140°C
0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

nombre de cycles à rupture

Figure 76 : Déformations élastiques εe et plastiques εp à rupture en fonction du nombre de cycles à rupture


pour différentes contraintes et différentes températures.

- 106 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

En conclusion, la rupture ne semble pas liée à une valeur de déformation plastique critique. En
effet, la déformation plastique à rupture augmente avec la température en raison du phénomène
de fluage thermiquement activé qui est associé à la fatigue.

Par contre, la déformation élastique varie peu avec la température. Une durée de vie
particulière peut donc être associée à une valeur critique de déformation élastique peu
dépendante de la température. La relation linéaire et indépendante de la température entre la
contrainte maximale de fatigue rapportée au module élastique à la température d’échauffement
du matériau et le nombre de cycles à rupture semble être associée à une déformation élastique
critique cumulée par le cyclage. La valeur de la déformation élastique critique à rupture
diminue avec la contrainte maximale de fatigue.

1.1.1.4 Influence de la fréquence

L’étude de l’évolution de εp pour deux tests effectués à des fréquences différentes montre que
la déformation en fatigue est insensible à la fréquence (Figure 77).
3
140°C - 54.5 MPa - 5Hz
2.5
déformation plastique (%)

140°C - 54.5 MPa - 0.5 Hz

1.5

0.5

0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

nombre de cycles
Figure 77 : Evolution de la déformation plastique (εp) dans le PA renforcé de fibres de verre pour 2
fréquences différentes à T>Tg.

La vitesse de fluage en fatigue est indépendante de la fréquence pour le polyamide sec renforcé
de fibres de verre. Le matériau casse pour une déformation critique qui dépend de la
température et de la contrainte appliquée (Figure 73) et qui n’est pas fonction de la durée du
test de fatigue. Ces deux résultats expliquent que la fréquence n’a pas d’influence sur le
nombre de cycles à rupture.
A l’inverse, Bernasconi a montré que la fréquence a une influence sur la vitesse de fluage en
fatigue et sur la durée de vie du polyamide 6 renforcé de fibres de verre courtes conditionné à
RH50. Bernasconi a obtenu une relation linéaire entre le logarithme de la vitesse de fluage en
fatigue et le logarithme du nombre de cycles à rupture [10]. Ce résultat est en accord avec les
conclusions de Horst et Spoormaker [44]. Dans le cas du polyamide conditionné la variation
de fréquence cause une variation de température dans le matériau. A la température ambiante

- 107 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

le polyamide renforcé conditionné est fatigué autour de sa Tg, donc ce changement de


température implique un changement des propriétés viscoélastiques du matériau et modifie la
vitesse de fluage en fatigue. Le nombre de cycles à rupture est alors dépendant de la vitesse de
fluage en fatigue et une diminution importante de la résistance à la fatigue a été observée
lorsque la fréquence augmente.

Si on considère un critère de rupture basé sur la déformation élastique εe, on peut définir le
temps de rupture  en fonction de εe et de la vitesse de déformation  :
e
 (47)

où    0  w (48)
avec ε0 la déformation dans le cycle et w la pulsation de la sollicitation cyclique.
Dans ce cas le nombre de cycles à rupture N est dépendant du temps de rupture  et de la
période de la sollicitation T :

N (49)
T
et en utilisant l’équation (47) on obtient :
  
N e  e  e (50)
T  0 wT  0 2
Pour les polymères sont la rupture est liée à un critère de déformation plastique, le nombre de
cycles à rupture semble indépendant de la fréquence de la sollicitation cyclique.

1.1.2 Polyamide vierge

Les figures suivantes présentent l’évolution des déformations plastiques et élastiques dans le
polyamide non renforcé.

5
4.5
4
3.5
3
p (%)

2.5
2
1.5
1
0.5
0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

nombre de cycles

Figure 78 : Evolution de la déformation plastique p pour T<Tg pour le PA vierge dans un environnement
à 25°C et pour une contrainte maximale de 69MPa.

- 108 -
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Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

2.65

2.6

2.55

2.5

e (%)
2.45

2.4

2.35

2.3

2.25
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

nombre de cycles

Figure 79 : Evolution de la déformation élastique e pour T<Tg pour le PA vierge dans un environnement à
25°C et pour une contrainte maximale de 69MPa.

Après les 1000 premiers cycles qui correspondent à l’échauffement du matériau, les évolutions
de εp et εe sont linéaires en fonction du logarithme du nombre de cycles, comme dans le
polyamide renforcé de fibres. Pour cette température (T<Tg) la déformation du polyamide
semble être homogène et la rupture a lieu sans striction.

1.2 Evolution du module dynamique

L’évolution du module dynamique Ed au cours de la fatigue est liée à une évolution de la


rigidité apparente du matériau. Cette chute du module dynamique est à l’origine de la
déformation εe. Dans cette partie nous allons étudier l’influence de la température et de
l’endommagement sur la chute de Ed.

1.2.1 Polyamide renforcé de fibres de verre

1.2.1.1 Evolution du module dynamique en 3 étapes


La chute du module dynamique Ed en fonction du nombre de cycles permet d’étudier
l’influence de la contrainte et de la température (Figure 81). Dans le chapitre précédent nous
avons montré que pour les cas de fatigue mécanique l’élévation de la température dure 1000
cycles environ quelle que soit la température ambiante. Nous montrons ici que lorsque la
température est stabilisée, Ed décroît linéairement avec le logarithme du nombre de cycles
quelle que soit la température de l’environnement (25°C – 65°C – 140°C). La rupture finale
est précédée d’une chute significative de Ed. La fin du régime d’évolution logarithmique du
dEd
module dynamique est définie à la rupture de pente de (Figure 80).
dN

- 109 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

-500

-1000

dEd/dN
-1500

-2000 Fin du régime


logarithmique
-2500
0 2 4 6
log N
Figure 80 : Définition de la fin du régime d’évolution logarithmique du module dynamique.

10000
9000
8000
7000
6000
Ed (MPa)

5000
4000 100.0 MPa
3000 110.8 MPa
2000 114.3 MPa
Élévation de 133.4 MPa
1000 température 154.8 MPa
0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

(a)T<Tg nombre de cycles

Élévation de
température

(b)T~Tg

- 110 -
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Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

4000

3500

3000

2500

Ed (MPa)
2000

1500
54.5 MPa
1000 57.8 MPa
Élévation de 66.1 MPa
500
température 76.8 MPa
0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

nombre de cycles
(c)T>Tg
Figure 81 : Evolution du module dynamique (Ed) pour le polyamide renforcé de fibres de verre (a) T<Tg,
(b) T~Tg, (c) T>Tg; le symbole ( ) représente la fin du régime d’évolution logarithmique avec le nombre
de cycles de Ed ; NR signifie Non Rompu, le test de fatigue étant stoppé avant la rupture.

Pour T<Tg et T>Tg et dans les cas de fatigue mécanique (cf. chapitre 3), la faible élévation de
température durant les 1000 premiers cycles a des conséquences négligeables sur la valeur de
Ed. En effet, nos mesures du module d’Young (annexe A3) montrent que le matériau reste
respectivement sur le plateau vitreux et sur le plateau caoutchoutique (Figure 82). La valeur du
module dynamique est constante pendant un faible nombre de cycles (de l’ordre de la dizaine
de cycles), et ensuite la chute du module dynamique est linéaire avec le logarithme du nombre
de cycles. Au contraire, pour T~Tg, l’élévation de la température pendant les 1000 premiers
cycles a une influence considérable sur le module dynamique du composite car la transition
vitreuse est caractérisée par une brutale modification des propriétés mécaniques avec la
température. Une fois la température stabilisée, comme pour les essais loin de la Tg, la chute
de Ed est linéaire en fonction du logarithme du nombre de cycles.

10000
Plateau vitreux
9000
module d'Young (MPa)

8000

7000

6000
Plateau
5000 caoutchoutique

4000

3000
0 50 100 150 200
Température (°C)

- 111 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

Figure 82 : Evolution du module d’Young en fonction de la température pour le PA 6,6 renforcé de 30%
de fibres de verre (mesures réalisées avec une vitesse de déformation  =10-3s-1 sur géométrie fatigue).

La Figure 81 montre que la chute du module dynamique diminue avec la contrainte maximale
de fatigue. Quel que soit le niveau de contrainte, la chute de module est importante avant la
rupture finale du matériau, signe que l’endommagement du matériau est généralisé avant la
rupture. Les résultats correspondent aux conclusions d’un travail de thèse sur le polyamide 6
chargé de différents taux de fibres de verre [87]. Cette étude a montré que la chute du module
dynamique est très limitée pour des taux de fibres de verre de 10% et 20%, ce qui signifie que
la rupture a lieu à cause de la localisation de l’endommagement sur une hétérogénéité dans le
matériau, alors que la chute de Ed est importante pour un taux de fibres de 30%, caractéristique
d’une dégradation généralisée du composite dans la zone utile de l’éprouvette. Cette différence
de comportement en fonction du taux de fibres peut être expliquée par une distance critique
entre les fibres de verre. Pour un polymère renforcé de 30% en masse de fibres courtes, les
fibres représentent 15.7% du volume du composite, et la distance moyenne entre les fibres est
d’environ 15µm. Pour un polymère chargé de 20% en masse de fibres, le renfort correspond à
10.5% du volume, et la distance moyenne entre les fibres est de 20µm environ. La distance
critique entre les fibres pour obtenir un endommagement généralisé du matériau est de 15µm.
Cette distance critique pourrait être expliquée par une homogénéisation des champs de
contrainte autour des fibres. L’étude sur le renfort par les fibres que nous avons réalisée dans
le chapitre 1 nous a permis de définir le profil de contrainte dans le plan perpendiculaire à la
contrainte, entre deux sphères en fonction de leur diamètre R et de la distance x qui les sépare.
On peut ainsi comparer la concentration des contraintes σ(x)/σ avec la contrainte
macroscopique et σ(x) la contrainte locale pour une distance entre sphères de 20µm et de
15µm (Figure 84). La contrainte dans la matrice entre deux fibres est plus importante et plus
homogène dans le cas d’une distance entre fibres de 15µm, ce qui peut expliquer un
endommagement plus homogène dans le polyamide renforcé de 30% de fibres.

3.6 3.6

3.2 3.2
σ(x) /σ
σ(x) /σ

2.8 2.8

2.4 2.4

2.0 2.0

1.6 1.6

1.2 1.2
σ σ
0.8 0.8
1 2 1 1.5

(a) x/R (b) x/R


Figure 83 : Profil de contrainte dans la matrice entre deux sphères de diamètre 10µm (a) distantes de 20µm
et (b) distantes de 15µm.

- 112 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

Cette distance critique pourrait aussi être expliquée par les paramètres structuraux de la
matrice. La taille des sphérolites étant de 20µm, il est possible qu’une distance critique de
15µm soit nécessaire pour que les fibres pontent la structure cristalline et modifient les
mécanismes de rupture.

Après la fin du régime d’évolution logarithmique du module dynamique, la chute finale des
propriétés dure environ une demi décade, quel que soit le niveau de contrainte et pour toutes
les températures. La première étape d’échauffement du matériau dure également toujours 1000
cycles. Il est donc important de signaler que la seconde étape d’évolution logarithmique des
propriétés est la seule étape qui a une influence directe sur la durée de vie.

1.2.1.1 Influence de la fréquence


Nous avons montré dans le chapitre 3 que lorsque la fréquence correspond à une élévation de
la température qui n’influence pas le module (lorsque le matériau est loin de sa Tg), la
fréquence n’a pas d’influence sur le nombre de cycles à rupture. Voyons maintenant quelle est
l’évolution des propriétés macroscopiques pour différentes fréquences. Nous donnons un
exemple en Figure 84 de l’évolution du module dynamique pour 2 essais de fatigue à 140°C à
des fréquences différentes.
4000

3500

3000

2500
Ed (MPa)

2000

1500

1000
140°C - 54.5 MPa - 5Hz
500
140°C - 54.5 MPa - 0.5Hz
0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

nombre de cycles

Figure 84 : Evolution du module dynamique dans le PA renforcé de fibres à deux fréquences différentes à
T>Tg.

L’évolution de Ed est très similaire pour des deux essais à 5Hz et 0.5Hz malgré un facteur 10
sur le temps d’essai. Le temps sous charge a une influence négligeable sur comportement du
matériau, et au contraire le nombre de cycles de chargement conditionne l’évolution de Ed.

1.2.2 Polyamide vierge

La Figure 85 présente l’évolution de Ed pour le PA non renforcé.

- 113 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

3500

3000

2500

Ed (MPa)
2000

1500

1000

500

0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06
nombre de cycles

Figure 85 : Evolution du module dynamique Ed pour T<Tg pour le PA vierge dans un environnement à
25°C et pour une contrainte maximale de 69MPa.

L’évolution de Ed est linéaire en fonction du logarithme du nombre de cycles pour le PA non


renforcé sollicité à T<Tg. On met en évidence une chute de Ed d’environ 8%, ce qui signifie
que dans la matrice non renforcée l’endommagement est généralisé, tout comme dans le
matériau renforcé. Cependant, la rupture a lieu brutalement, dans le domaine d’évolution
linéaire de Ed, à cause d’une instabilité. La rupture survient sans chute dramatique du module
contrairement au composite. Cette rupture causée par un petit nombre d’événements explique
les écarts-types importants sur la durée de vie dans le polymère non renforcé.

1.3 Evolution de l’énergie dissipée par cycle

1.3.1 Polyamide renforcé de fibres de verre

Nous avons étudié l’évolution de l’énergie dissipée W par cycle dans le polyamide renforcé de
fibres de verre (Figure 86).

- 114 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

1
154.8 MPa
133.4 MPa
114.3 MPa
110.8 MPa

énergie par cycle (J)


0.1 100 MPa

0.01

0.001
1.E+00 1.E+01 1.E+02 1.E+03 1.E+04 1.E+05 1.E+06

(a)T<Tg nombre de cycles


1
énergie par cycle (J)

0.1

103.2 MPa
89.3 MPa
0.01
85 MPa
82 MPa
75 MPa
68.8 MPa
0.001
1.E+00 1.E+01 1.E+02 1.E+03 1.E+04 1.E+05 1.E+06
(b)T~Tg nombre de cycles
1
énergie par cycle (J)

0.1

76.8 MPa
0.01
66.1 MPa
57.8 MPa
54.5 MPa
0.001
1.E+00 1.E+01 1.E+02 1.E+03 1.E+04 1.E+05 1.E+06

(c)T>Tg nombre de cycles

Figure 86 : Evolution de l’énergie dissipée par cycle dans le polyamide renforcé de fibres pour (a) T<Tg,
(b) T~Tg, (c) T<Tg; le symbole ( ) marque la fin du régime d’évolution linéaire en fonction du logarithme
du nombre de cycles.

- 115 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

Pour les essais de fatigue mécanique, l’énergie dissipée par cycle est quasi constante et
augmente légèrement avant la rupture. L’augmentation de W correspond à un nombre de cycles
similaire à celui de l’apparition de la non linéarité de la déformation plastique et du module
dynamique.

1.3.2 Polyamide vierge

La Figure 87 présente l’évolution de l’énergie dissipée par cycle dans le PA non renforcé.
nombre de cycles
1
énergie par cycle (J) 1.E+00 1.E+01 1.E+02 1.E+03 1.E+04 1.E+05 1.E+06

0.1

0.01

0.001

Figure 87 : Evolution de l’énergie dissipée par cycle pour le PA vierge dans un environnement à 25°C et
pour une contrainte maximale de 69MPa.

L’énergie dissipée par cycle est bruitée, et en moyenne quasi constante. Cette énergie par cycle
est proche de celle du PA renforcé de fibres pour un essai de même durée de vie à T>Tg.

1.4 Evolution du déphasage contrainte - déformation

1.4.1 Polyamide renforcé de fibres de verre

L’étude du déphasage entre la contrainte et la déformation permet d’analyser l’évolution des


propriétés viscoélastiques du composite au cours de la fatigue (Figure 88).

- 116 -
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Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

10

déphasage contrainte-déformation (°)


1

154.8MPa
133.4MPa
114.3MPa
110.8MPa
0.1
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

(a)T<Tg nombre de cycles


10
déphasage contrainte - déformation (°)

NR

NR

103.2MPa
89.3 MPa
85.0 MPa
82.0MPa
75 MPa
68.8MPa
1
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

(b)T~Tg nombre de cycles

- 117 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

10

déphasage contrainte - déformation (°)


76.8MPa
66.1MPa
57.8 MPa
54.5MPa

1
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06

(c)T>Tg nombre de cycles

Figure 88 : Evolution du déphasage contrainte – déformation au cours d’essais de fatigue dans le


polyamide renforcé de fibres de verre pour (a) T<Tg ; (b) T~Tg, NR signifie Non Rupture ; (c) T<Tg.

Pour les essais de fatigue mécanique autour de la transition vitreuse, les valeurs des
déphasages contrainte - déformation  sont comprises entre 4° pour les contraintes faibles et 6°
pour les contraintes les plus élevées. Loin de la transition vitreuse les valeurs de  sont
comprises entre 0.4° et 1.5°. Ces valeurs confirment que pour les essais dans un
environnement à 65°C (valeur de la Tg mesurée en DMA), même si le matériau s’échauffe de
quelques degrés Celsius, le polymère est toujours dans sa transition vitreuse.
Le déphasage  est presque indépendant du niveau de contrainte appliqué. Pour T<Tg, les
valeurs de  sont très faiblement croissantes pendant l’essai de fatigue. Lorsque le composite
est fatigué à une température proche de la transition vitreuse du polymère ou à T>Tg, pour les
contraintes faibles le déphasage est faiblement décroissant. Ce phénomène a été observé par
ailleurs par Lesser dans le polyamide vierge et par Noda dans le polyamide renforcé [69; 79],
et est interprété par une augmentation de la composante élastique du comportement du
matériau. Le déphasage augmente avant la rupture.
Le nombre de cycles correspondant à l’augmentation de  est similaire au nombre de cycles de
l’augmentation de l’énergie dissipée par cycle et de la non linéarité de la déformation et du
module dynamique. Noda a étudié plus précisément l’évolution de la linéarité de la
déformation du polyamide 6,6 renforcé de fibres de verre en fatigue et a montré que la
déformation devient non linéaire avant l’augmentation du déphasage avant rupture [79]. Les
modifications structurales irréversibles à l’origine de la non linéarité de la déformation
pourraient expliquer l’apparition de la rupture finale du matériau.
Pour toutes les températures, le déphasage augmente avant la rupture. Takahara a étudié
l’évolution des propriétés viscoélastiques de plusieurs polymères vierges et renforcés de fibres
de verre. Pour les contraintes faibles, les valeurs de tan de ces matériaux décroissent avec le
nombre de cycles de fatigue. Selon Takahara cette décroissance est le signe d’une rupture
fragile [105]. La rupture dans le polyamide renforcé n’est donc pas fragile.

- 118 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

1.4.2 Polyamide vierge

Nous avons étudié le déphasage entre la contrainte et la déformation dans le polyamide (Figure
89).
10

déphasage contrainte - déformation (°)


1

0.1

0.01

0.001
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06
nombre de cycles (N)

Figure 89 : Evolution du déphasage contrainte – déformation dans le PA fatigué dans un environnement à


25°C et pour une contrainte maximale de 69MPa.

Pour le polyamide vierge le déphasage est de 0.5° environ. Cette valeur est proche de celle
obtenue pour le polyamide renforcé de fibres de verre à T<Tg. Le déphasage du polyamide non
renforcé augmente avec le nombre de cycles de fatigue, comme c’est le cas dans le polyamide
renforcé de fibres à T<Tg.

- 119 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

2 Mesures macroscopiques de l’endommagement

2.1 Densité

2.1.1 Polyamide renforcé de fibres de verre

Nous avons montré au chapitre 1 que les mécanismes de déformation des polymères semi-
cristallins peuvent impliquer ou non une variation de volume. Les mesures de densité
permettent généralement de mettre en évidence des endommagements causant une variation de
volume tels que la cavitation de la matrice, les décohésions fibres/matrice, ou les
réarrangements cristallins. Le technique de mesure par colonne à gradient de densité permet de
fournir des valeurs à 0.0002 près (cette technique est présentée en annexe A3). Cependant
nous avons observé une porosité à cœur dans les éprouvettes injectées, causée par le retrait de
la matière lors du refroidissement du polymère. Cette porosité cause un écart-type important
des mesures de densité (±0.001) et ne nous permet pas de connaître avec précision l’évolution
de l’endommagement du matériau.

Nous avons mesuré la densité des éprouvettes dans la zone de rupture (Figure 91). Des cubes
de 2mm d’arête sont coupés sous la rupture comme montrés en Figure 90.

Zone étudiée

Figure 90 : Zone étudiée sous la rupture pour les mesures de densité.

- 120 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

1.371
1.37
1.369
1.368

densité
fatigue à 25°C
1.367
fatigue à 65°C
1.366 fatigue à 140°C
1.365
1.364
1.363
référence non rupture
fatiguée

Figure 91 : Evolution de la densité du polyamide renforcé de fibres de verre en fatigue à différentes


températures (températures de consigne pour l’enceinte thermique).

Pour le matériau fatigué à T<Tg la densité ne chute pas de manière significative. Des mesures
par Calorimétrie Différentielle à Balayage ont montré que le taux de cristallinité de varie pas
au cours des casses de fatigue mécanique. On peut en déduire que le changement de volume lié
à l’endommagement après déchargement de l’éprouvette est inférieur à 0.1% pour les essais à
T<Tg. Dans le cas des matériaux fatigués à T~Tg et T>Tg, la Figure 91 montre que la baisse
de densité est de l’ordre de 0.15%.

2.1.2 Polyamide vierge

Nous avons mesuré l’évolution de la densité en fatigue dans le PA non renforcé dans la zone
de rupture (Figure 92).
1.163
1.162
1.161
1.16
densité

1.159
1.158
1.157
1.156
1.155
référence rupture

Figure 92 : Evolution de la densité du polyamide fatigué à 69.0MPa dans un environnement à 25°C


(rupture après 560 000 cycles).

L’évolution de la densité est de moins de 0.1%. Cependant, il est possible que des modes
d’endommagement par création de vides ne soient pas révélés car le déchargement de
l’éprouvette peut impliquer que des cavités se referment. Des mesures de déformation
volumiques sous chargement permettront de mettre en évidence ce phénomène. De même, la

- 121 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

densité ne permet pas de mettre en évidence des cavités anisotropes développant peu de
volume. Des mesures de module d’Young permettront d’étudier cette hypothèse.

2.2 Le Module d’Young comme traceur d’endommagement

La création de vides anisotropes pourrait expliquer une chute de densité faible et une chute de
module élastique importante. En effet, dans ce cas la section efficace S est différente de la
section initiale S0 car elle est diminuée de la section des porosités S*. On a S  S 0  S *
(Figure 93).

S*

(a) S0 (b) S=S0-S*


Figure 93 : Evolution de la section efficace S (a) section initiale S0 dans un matériau ; (b) section efficace en
présence de cavités de section S*.

On définit donc une variable d’endommagement basé sur l’évolution de la section


S* S
efficace D   1 . Si on néglige les concentrations de contrainte en fond de fissure et
S0 S0
E
on obtient : D  1  . La mesure de la chute du module d’Young permet ainsi d’estimer la
E0
variable d’endommagement D. Dans le cas d’un endommagement par création de vides de
forme anisotrope, D permet d’estimer la section de l’endommagement perpendiculaire à la
contrainte. Un article de Kachanov a défini les propriétés élastiques effectives de matériaux
poreux selon la forme et l’orientation des cavités [50].

Nous avons fatigué des éprouvettes et stoppé les essais de fatigue après différents nombres de
cycles pour mesurer le module d’Young E du matériau. Les mesures de module dynamique
présentées dans la partie précédente (Figure 81) ont montré une chute de Ed pendant les 1000
premiers cycles de fatigue. Cette première étape correspond à la stabilisation de la température
du matériau. Nous avons montré dans la partie précédente que chute de Ed était presque
négligeable loin de la Tg, mais significative autour de la transition vitreuse en raison de
l’évolution du module d’Young autour de la transition vitreuse du polymère. Afin de nous
affranchir des effets de la température, les mesures de module d’Young que nous présentons
ici sont réalisées à la température d’autoéchauffement du composite, même pour le matériau
non fatigué. La Figure 94 présente les résultats sous la forme de l’évolution de la variable
d’endommagement D.

- 122 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

20
27°C

paramètre d'endommagement D (%)


15
73°C

10 144°C

0
1.E+00 1.E+01 1.E+02 1.E+03 1.E+04 1.E+05 1.E+06
-5

-10
nombre de cycles de fatigue

Figure 94 : Evolution de la variable d’endommagement pour le PA renforcé de fibres de verre à (a) T<Tg,
environnement à 25°C et σmax=114.3MPa (b) T~Tg, environnement à 65°C et σmax=82MPa (c) T>Tg,
environnement à 140°C et σmax=54.5MPa.

Nous montrons que la première étape de 1000 cycles pendant laquelle le matériau s’échauffe
n’est pas liée à une chute du module d’Young, ce qui signifie que le matériau ne s’endommage
pas par cavitation pendant cette période. Nous pouvons donc affirmer que la chute du module
dynamique Ed pendant les 1000 premiers cycles est due aux effets seuls de la température.
En outre, la variable D diminue faiblement pour les températures égales ou supérieures à la Tg
pendant l’échauffement du matériau. Cette augmentation est faible et semble être d’autant plus
importante que la température est élevée. Ce phénomène pourrait être expliqué par un
écrouissage très local de la matrice dans les zones de concentrations des contraintes, c’est-à-
dire en têtes de fibres de verre, causé par une orientation de la structure cristalline, une
perfection cristalline ou une augmentation du taux de cristallinité. Cette augmentation de
l’élasticité permet d’expliquer la diminution du déphasage entre la contrainte et la déformation
montrée précédemment. Cette hypothèse sera étudiée au chapitre 6.
Ensuite la chute du module d’Young entre le cycle 1000 et la rupture est de 5% pour T<Tg, et
de 20% pour T~Tg et T>Tg. La chute du module élastique est donc considérable.

2.3 Le module dynamique comme traceur d’endommagement en


fatigue

La mesure du module d’Young nécessite de décharger régulièrement l’éprouvette au cours de


l’essai de fatigue. En fatigue, on préfère donc étudier un traceur d’endommagement basé sur
l’évolution du module dynamique réduit Ed/Ed0 avec Ed le module dynamique au cours de la
fatigue et Ed0 le module dynamique pour le premier cycle.

La Figure 95 présente l’évolution du traceur de l’endommagement pour les essais réalisés à


des températures et contraintes variables dans les cas de fatigue mécanique. Pour les essais
loin de la Tg, l’élévation de température est faible, et le module du matériau est constant sur le

- 123 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

plateau vitreux, donc l’évolution du module dynamique ne peut pas être causée par la
thermique et la référence Ed0 peut être choisie au cycle 1. Pour les essais autour de la Tg, nous
avons vu précédemment que lors des premiers cycles en fatigue, la dissipation au sein du
polymère à sa transition vitreuse cause une chute importante du module dynamique lors de la
première étape en fatigue. Il faut donc attendre la stabilisation de la température de
l’éprouvette pour pourvoir considérer que l’évolution du module dynamique est due à de
l’endommagement au sein du matériau. On étudie donc Ed/Ed0 pour une température constante
dans le composite, en prenant la valeur du module dynamique à 2000 cycles comme valeur de
référence Ed0.

1.2

1
-12%

0.8
Ed/Ed0

0.6

0.4 100.0 MPa


110.8 MPa
0.2 114.3 MPa
133.4 MPa

0
1.E+00 1.E+02 1.E+04 1.E+06
nombre de cycles
(a)T<Tg
1.2
NR
1
-27% NR
0.8
Ed/Ed0

0.6

68.8 MPa
0.4 75 MPa
82 MPa
0.2 85.0 MPa
89.3 MPa
0
1.E+00 1.E+01 1.E+02 1.E+03 1.E+04 1.E+05 1.E+06

(b)T~Tg nombre de cycles

- 124 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

1.2

1
-27%
0.8

Ed/Ed0
0.6

0.4
54.5 MPa
0.2 57.8 MPa
66.1 MPa
0
1.E+00 1.E+01 1.E+02 1.E+03 1.E+04 1.E+05 1.E+06
nombre de cycles
(c)T>Tg
Figure 95 : Traceur d’endommagement Ed/Ed0 au cours des essais de fatigue pour différents niveaux de
contrainte (a) à T<Tg ; (b) à T~Tg ; (c) à T>Tg.

Lorsque la température de consigne d’essai est de 25°C, le module dynamique chute de 12%
environ. La chute du module est de 27% environ pour les essais autour de la Tg et au-delà de
la Tg. Il semble que pour une même température, la chute du module dynamique diminue
légèrement avec la contrainte. Cependant cette influence de la contrainte et très faible et on
gardera à l’esprit que le cumul de dommages est très peu influencé par le niveau de contrainte.

Les valeurs de module dynamique sont plus importantes que celles du module d’Young car les
premières sont liées à la partie élastique et viscoélastique, alors que les dernières sont liées à la
partie élastique seule.

2.4 Mesures de déformation volumique

L’étude de la dilatation sous contrainte en traction permet d’estimer l’évolution de volume V


dans la zone d’intérêt de l’éprouvette en fonction de la déformation axiale ε. Les déformations
sont mesurées dans la zone de plus faible section de l’éprouvette. Cette technique est présentée
en annexe A3. La déformation volumique est notée εv.
V
  v  f ( )
V (51)
Les mesures de déformation volumiques sont réalisées sur des éprouvettes préalablement
fatiguées une même contrainte, et les essais de fatigue sont stoppés après différents nombres
de cycles. Les essais de traction réalisés dans un deuxième temps pour les mesures de
déformations volumiques sont effectués dans le domaine élastique des matériaux
endommagés. Par définition dans le régime élastique du matériau la déformation volumique
est proportionnelle à la déformation axiale ε :

 v  (1  2 )
(52)

- 125 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

avec  une constante dépendante du matériau appelée coefficient de Poisson. Si le coefficient


de Poisson vaut 0.5 le matériau est indilatable et la déformation plastique est causée par du
cisaillement uniquement, et si le coefficient de Poisson vaut 0 le matériau se déforme par
création de volume uniquement.

Les polyamide 6,6 a un coefficient de Poisson typiquement environ égal à 0.4, comme le
montre la Figure 97. Si des cavités sont nucléées en fatigue et s’ouvrent sous l’effet de la
traction, la création de volume cause une augmentation de la déformation axiale et donc une
diminution du coefficient de Poisson (Figure 96).

l’
l

L L’

L0 L0

l0 l0
(a) (b)
Figure 96 : Variation des dimensions d’un échantillon sous traction (a) sans présence de cavités ; (b) en
présence de cavités qui s’ouvrent sous la traction.

La mesure de la déformation volumique consiste à mesurer la déformation axiale et les


déformations transverses dans l’éprouvette par mesure optique (cf. annexe A3). Nous avons
fatigué des éprouvettes et interrompu les essais de fatigue après différents nombres de cycles
pour étudier l’évolution du coefficient de Poisson en fatigue à différentes températures (Figure
97). Ces essais de traction ont été réalisés dans une enceinte thermique à la température
d’autoéchauffement du composite, même pour le matériau non fatigué.

0.0045
0.004
déformation volumique

0.0035
0.003
0.0025
0.002
0.0015 cycle 0
cycle 1500
0.001
cycle 77000
0.0005 cycle 160000
0
0 0.005 0.01 0.015 0.02

déformation axiale
(a)T<Tg

- 126 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

0.007
cycle 0
0.006
cycle 1000

déformation volumique
cycle 20000
0.005
cycle 100000
0.004

0.003

0.002

0.001

0
0 0.005 0.01 0.015 0.02 0.025

(b)T~Tg déformation axiale

0.01
0.009 cycle 0
cycle 28500
0.008
déformation volumique

cycle 100000
0.007
0.006
0.005
0.004
0.003
0.002
0.001
0
0 0.005 0.01 0.015 0.02 0.025 0.03

(c)T>Tg déformation axiale

Figure 97 : Evolution de la déformation volumique au cours d’essais de fatigue (a) à 25°C ; (b) à 65°C ; (c)
à 140°C.

Le bruit sur les mesures de déformation augmente avec la température car les flux d’air chaud
dans l’enceinte thermique perturbent l’acquisition optique. Compte tenu de ce bruit, la
déformation volumique n’évolue pas au cours de la fatigue, quelle que soit la température. Les
valeurs des coefficients de Poisson sont =0.364+/-0.001 à 25°C, =0.398+/-0.013, et
=0.38+/-0.03 à 140°C. Ces mesures de déformation volumique ne montrent pas d’ouverture
de cavités nucléées en fatigue. La variation de volume sous traction liée à un endommagement
par variation de volume est donc inférieure au bruit de mesure, soit inférieure à 0.3% à T<Tg,
inférieure à 3% à T~Tg et inférieure à 8% à T>Tg.

- 127 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

Conclusion
Cette étude macroscopique nous a permis de définir trois étapes dans l’évolution des
propriétés en fatigue. La première étape est caractérisée par l’échauffement du matériau. Pour
les essais de fatigue mécanique, la température augmente pendant un faible nombre de cycles
indépendamment de la température d’environnement et de la contrainte appliquée. Pour les
matériaux sollicités loin de la Tg du polymère, cet échauffement est sans conséquences sur les
propriétés mécaniques macroscopiques. Par contre pour le matériau fatigué autour de la Tg,
l’échauffement provoque une brusque évolution de ses propriétés viscoélastiques, et donc une
chute du module dynamique. Cette première étape d’échauffement n’est pas associée à des
mécanismes d’endommagement qui affectent le module élastique. Au contraire, la composante
élastique du matériau augmente, et cette augmentation est d’autant plus importante que la
température est élevée.

La seconde étape marque le début de l’endommagement mécanique du matériau et influence


directement la durée de vie. Le module dynamique et la déformation sont des fonctions
linéaires du logarithme du nombre de cycles. Dans cette étape la déformation est progressive
et la vitesse de fluage en fatigue est inversement proportionnelle à la durée de vie, comme
c’est le cas en fluage statique. Cette vitesse de fluage dépend du nombre de cycles et la durée
de vie est indépendante de la fréquence dès lors que la fréquence est suffisamment faible pour
que l’échauffement du matériau reste négligeable. L’endommagement est ainsi cumulé à
chaque cycle et ne dépend pas du temps sous chargement. L’énergie dissipée par cycle est
constante et le comportement viscoélastique du composite est stable. Les caractéristiques de
cette seconde étape sont identiques pour le polyamide vierge et pour le polyamide renforcé de
fibres. Ces résultats semblent confirmer que les mécanismes qui gouvernent la durée de vie en
fatigue sont similaires dans ces deux matériaux.

Dans les polyamides renforcés de 30% de fibres, la fin de cette seconde étape est caractérisée
par l’augmentation de la composante dissipative du matériau. Le module dynamique chute
brutalement et l’évolution de la déformation n’est plus linéaire avec le logarithme du nombre
de cycles. Des études précédentes ont montré que l’apparition de cette troisième étape est
causée par le début du comportement viscoélastique non linéaire du matériau. Pour une même
durée de vie, la rupture a lieu pour une déformation élastique critique qui est quasi
indépendante de la température. Mais pour une même température la déformation plastique
critique est d’autant plus grande que la température est élevée. Le critère de rupture
indépendant de la température proposé au chapitre 3 semble donc correspondre à une valeur de
déformation élastique macroscopique critique. En outre, le taux d’endommagement à rupture
dans le matériau est significativement plus important dans le matériau à l’état caoutchoutique
que dans le matériau à l’état vitreux.

Dans le polyamide renforcé de fibres de verre, le module élastique chute de 5% environ


lorsque T<Tg et de 20% environ pour T~Tg et T>Tg. Dans le polyamide non renforcé le
module dynamique chute de 10% environ. Cet endommagement n’est pas relié à une baisse
significative de la densité des matériaux. La densité ne diminue que de 0.1% pour T>Tg et
d’environ 0.15% pour T~Tg et T>Tg. Ces résultats pourraient être expliqués par un
mécanismes de cavitation, seulement si les vides présentent un facteur de forme de 100 une
fois l’éprouvette déchargée. C’est le cas de cavités plates perpendiculaires à la traction qui
peuvent causer une diminution de surface portante importante et une élévation de volume
relativement faible.

- 128 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 4 : Evolution des propriétés macroscopiques en fatigue

Les résultats des caractérisations macroscopiques de l’endommagement à rupture pour le


polyamide vierge (PA) et pour le polyamide renforcé de fibres de verre (PAFV) sont
rassemblés dans le tableau suivant (Figure 98).

PAFV T<Tg PAFV T~Tg PAFV T>Tg PA T<Tg


Diminution de
<0.1% 0.15% 0.15% <0.1%
densité
Diminution de
12% 27% 27% 8%
Ed
Diminution de
5% 20% 20% NC
E
Variation de
volume sous <0.3% <3% <8 % NC
contrainte
Figure 98 : Résultats des caractérisations macroscopiques de l’endommagement dans le polyamide (PA) et
le polyamide renforcé de fibres de verre (PAFV) : densité, module dynamique Ed, module élastique E,
variation de volume sous contrainte. NC signifie Non Connu.

- 129 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

- 130 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

5
Caractérisations à l’échelle microscopique

1 Polyamide non renforcé


1.1 Localisation de l’endommagement
1.2 Observations microscopiques de l’endommagement
1.2.1 Faciès de rupture en fatigue
1.2.2 Rôle des cavités dans la rupture en fatigue
1.3 Quantification de l’endommagement
1.3.1 Etude des cavités sphériques par analyse d’images
1.3.2 Diffusion des rayons X
1.4 Proposition d’un mécanisme d’endommagement

2 Polyamide renforcé de fibres de verre


2.1 Analyse des champs de déformation
2.2 Microtomographie
2.3 Microscopie
2.3.1 Faciès de rupture
2.3.2 Rôle du déchaussement des fibres dans la rupture en fatigue
2.3.3 Endommagement matriciel
2.4 Diffusion des rayons X
2.4.1 Estimation de la diffusion des cavités
2.4.2 Estimation de la diffusion des fibres de verre
2.4.3 Résultats expérimentaux
2.5 Diffusion des neutrons
2.5.1 Estimation des contrastes de densité de longueur de diffusion
2.5.2 Estimation du signal des fibres de verre
2.5.3 Etude du signal des cavités

- 131 -
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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle


microscopique

Le chapitre précédent a montré que les polyamides renforcés de fibres de verre


s’endommagent en trois étapes. Durant la première étape le matériau s’échauffe et
l’endommagement est négligeable. La seconde étape est caractérisée par une évolution linéaire
des propriétés mécaniques macroscopiques en fonction du logarithme du temps. Cette étape
influence directement le nombre de cycles à rupture. L’endommagement cause une chute du
module élastique considérable, et pourtant la densité du matériau est presque inchangée. Cette
seconde étape nécessite une étude approfondie car elle n’a pas fait l’objet de caractérisations
microscopiques à notre connaissance. Ce chapitre 5 a donc pour objectif d’étudier les
modifications structurales qui ont lieu à l’échelle microscopique et qui peuvent expliquer les
propriétés macroscopiques en fatigue dans la seconde étape d’endommagement en fatigue qui
ont été présentées au chapitre 4. La troisième étape est marquée par une chute brutale des
propriétés macroscopiques du matériau avant rupture. Les mécanismes d’endommagement qui
ont lieu juste avant la rupture ont été décrits dans la littérature [6; 7; 44; 45; 79; 85] et ont été
rappelés au chapitre 1. Les caractérisations microscopiques présentées ici permettront de
comparer rapidement les modes de rupture finaux du polyamide dans le cadre de notre étude
avec les résultats des travaux antérieurs. Les résultats des chapitres 3 et 4 laissent penser que
les mécanismes d’endommagement dans le polyamide renforcé de fibres de verre sont
matriciels et sont identiques aux mécanismes d’endommagement dans le polyamide vierge.
Après avoir présenté les caractérisations microscopiques de l’endommagement dans le
polyamide non renforcé comme référence, nous présenterons les caractérisations dans le
polyamide renforcé de fibres de verre et comparerons les résultats de ces deux matériaux en
conclusion.

1 Polyamide non renforcé

1.1 Localisation de l’endommagement

Les caractérisations macroscopiques présentées au chapitre précédent sont issues de mesures


de déformations moyennes obtenues avec un extensomètre de longueur utile de 12.5mm. Pour
rendre compte des éventuelles localisations de l’endommagement, nous avons réalisé certains
essais de fatigue mécanique avec un système de mesure de champs de déformation.
L’éprouvette est recouverte d’un mouchetis de peinture pour obtenir des points nombreux,
aléatoirement dispersés et de petite taille. La position de ces points est enregistrée par une
caméra vidéo et traitée ensuite par le logiciel Aramis. La caméra et la machine de fatigue sont
synchronisées pour que les images soient acquises au maximum de la contrainte cyclique.
Nous présentons dans ce paragraphe un essai représentatif du comportement en fatigue

- 133 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

mécanique à température ambiante du polyamide non renforcé (Figure 99). Pour l’essai
présenté la déformation moyenne mesurée par extensométrie est de 2% environ pour le cycle
10 000 et de 5% pour le cycle 100 000. L’évolution de la déformation est linéaire en fonction
du logarithme du nombre de cycles entre le cycle 1 000 et le cycle 100 000 (résultats présentés
au chapitre 4).

(a) (b) (c) (d)


Figure 99 : Champs de déformation dans le polyamide au maximum de la contrainte cyclique (a) cycle 10 ;
(b) cycle 1 000 ; (c) cycle 10 000 ; (d) cycle 100 000 (σmax=61.9MPa – environnement à 25°C).

Certaines zones ne sont pas analysables en raison de la qualité locale des points de peinture.
On peut tout de même conclure que la déformation est homogène pendant les 1000 premiers
cycles. Ensuite des hétérogénéités de déformations locales apparaissent. A partir du cycle
10 000 on observe des sites de localisation de la déformation présentant un niveau de
déformation bien plus important que la déformation moyenne, soit 8% minimum. Ensuite le
nombre de sites de localisation de la déformation augmente avec le nombre de cycle en
fatigue. Peu de cycles avant rupture (cycle 100 000) le nombre de sites de localisation de
l’endommagement est considérable. L’endommagement est donc local et abondant, ce qui
explique la diminution importante du module dynamique présentée au chapitre 4.

1.2 Observations microscopiques de l’endommagement

1.2.1 Faciès de rupture en fatigue

La Figure 100 présente la surface de rupture du polyamide 6,6 non renforcé fatigué avec une
contrainte maximale de 69MPa dans un environnement de 25°C.

- 134 -
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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

2µm

Figure 100 : Fractographie d’une éprouvette de PA non renforcé rompu en fatigue après 411 643 cycles
(σmax=69Mpa – environnement à 25°C).

La rupture du matériau est ductile. L’étirement du polymère lors de la rupture est important et
cette déformation plastique est accompagnée de cavitation. Le matériau semble casser par
coalescence de cavités. Nous pouvons alors nous demander si l’endommagement en fatigue
d’ordre 1 est la cavitation, et quelle est la dimension caractéristique de cette éventuelle
cavitation. Pour comprendre le rôle de la cavitation dans l’endommagement en fatigue, nous
avons réalisé des observations microscopiques (paragraphe suivant 1.2.2), et des
caractérisations quantitatives par analyse d’images et diffusion des rayons X (paragraphe
suivant 1.3).

1.2.2 Rôle des cavités dans l’endommagement en fatigue

Pour mieux comprendre le rôle de la cavitation dans la rupture en fatigue du polyamide, nous
avons caractérisé l’évolution de la microstructure du polymère au cours de la fatigue en
observant des échantillons fatigués cryofracturés (Figure 102) et d’échantillons coupés au
microtome (Figure 103). Les plans d’observations sont présentés en Figure 101.

Direction
de la
contrainte

(a) Plan d’observation

Direction
de la
contrainte

(b) Plan d’observation

Figure 101 : (a) Plan d’observation perpendiculaire à la contrainte ; (b) plan d’observation parallèle à la
contrainte.

- 135 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

2µm 2µm
(a) (b)
Figure 102 : Cryofracture dans le PA dans le plan perpendiculaire à la contrainte (a) en sortie de mise en
oeuvre par injection (référence) ; (b) après 300 000 cycles de fatigue (σmax=69MPa – environnement à
25°C).

10µm 10µm

(a) (b)
Figure 103 : Observation de coupes de polyamide dans le plan parallèle à la contrainte par microscopie
électronique à balayage en mode transmission (a) échantillon non fatigué ; (b) après 300 000 cycles de
fatigue (σmax=61.9MPa – environnement à 25°C).

Le polyamide référence non fatigué présente des cavités sphériques en faible nombre. Leur
diamètre moyen est de 500nm. Ces cavités sont très probablement formées pendant la phase
d’injection, à cause du retrait de la matière lors du refroidissement rapide du polymère fondu
dans le moule. Ces cavités sont localisées de manière aléatoire dans la structure sphérolitique.
L’éprouvette fatiguée présente un plus grand nombre de cavités. La distribution de taille des
cavités est large (de 20nm à plusieurs microns de diamètre) et globalement la taille des cavités
semble plus importante que dans l’éprouvette non fatiguée.

Les éprouvettes de fatigue que nous étudions localisent l’endommagement. La forme de la


géométrie engendre un gradient de contrainte lors des essais de fatigue, ce qui nous permet
d’étudier l’évolution de l’endommagement lors des derniers cycles de fatigue en observant
l’évolution de la microstructure du matériau en fonction de la profondeur sous la rupture
(Figure 104).

- 136 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

Plan de rupture

-40µm sous la rupture

Fissures

-50µm sous la rupture

Craquelures

-60µm sous la rupture

Cavités
2µm

Figure 104 : Cryofracture dans la direction parallèle à la contrainte dans le PA non renforcé rompu en
fatigue (σmax=69MPa – environnement à 25°C) après 412 000 cycles. Le plan de rupture est localisé à 50µm
plus haut que les fissures visibles sur cette image. La direction de la contrainte est verticale et le plan de
rupture est en haut de l’image.

On observe des fissures jusqu’à 50µm sous la rupture. Pour une distance plus grande à la
surface de rupture, la contrainte est plus faible et les fissures sont pontées par des fibrilles de
polymère : ce sont des craquelures (cf. chapitre 1). Pour des distances à la rupture supérieure à
60µm, nous n’observons plus de craquelures et nous confirmons la présence de cavités.
Nous avons observé des coupes fines de polyamide (100nm environ) par microscopie
électronique à transmission pour mieux étudier ces craquelures (Figure 105).

(a) (b)
Figure 105 : Observation de coupes fines de polyamide fatigué sous la rupture dans le plan perpendiculaire
à la contrainte (a) croissance de la craquelure dans la direction perpendiculaire à la contrainte et à

- 137 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

l’équateur d’un sphérolite ; (b) mise en évidence des fibrilles. Les flèches indiquent la direction de la
contrainte.

Avec cette technique de préparation nous avons observé des craquelures en nombre important
jusqu’à 150µm sous la rupture. Les craquelures sont souvent centrées sur une cavité de
diamètre supérieur à 500nm et se propagent perpendiculairement à la contrainte, et à l’équateur
des sphérolites c’est-à-dire parallèlement aux lamelles cristallines.

Ainsi les cavités évoluent certainement en craquelures, et lorsque les fibrilles cassent ces
craquelures forment des fissures ouvertes. La rupture a lieu lorsqu’une fissure (ou plusieurs
fissures qui ont coalescé) atteignent une taille critique. Ces observations correspondent tout à
fait à la littérature décrite au chapitre 1 [4; 33; 56; 61; 62; 78].

1.3 Quantification de l’endommagement

Les observations microscopiques ont montré des cavités, des craquelures et des fissures. Les
analyses de champs de déformation ont montré que l’endommagement est localisé et que les
sites d’endommagements sont abondants. Il est donc important d’obtenir des données
quantitatives dans un volume représentatif du matériau pour étudier les mécanismes mis en jeu
dans la fatigue. L’objectif du paragraphe suivant est d’étudier les différents mécanismes mis en
évidence par microscopie par des techniques statistiques telles que l’analyse d’images et la
diffusion des rayons X et des neutrons.

1.3.1 Etude des cavités sphériques par analyse d’images

1.3.1.1 Distribution de taille des cavités


Les cavités sphériques observées en microscopie électronique à balayage en mode
transmission (STEM) présentent un bon contraste avec le polyamide. Nous avons donc pu
développer une méthode d’analyse d’images pour déterminer la distribution de taille, le
nombre de cavités et leur évolution au cours de la fatigue. Les échantillons sont coupés au
microtome dans le plan parallèle à la contrainte dans la zone de plus faible section de
l’éprouvette. Pour chaque type d’échantillon (non fatigué – fatigué – rompu en fatigue), 3 à 4
éprouvettes ont été étudiées. Les coupes observées ont une épaisseur de 1µm, ce qui offre un
bon compromis entre la résolution obtenue et le nombre de cavités analysées. Avec cette
épaisseur les craquelures ne sont pas analysées car le contraste entre la craquelure et le
polyamide est très faible. Cette étude focalise donc sur l’étude des cavités sphériques. Les
coupes sont observées à deux grandissements (x1300 et x5000) pour étudier une gamme large
de taille de cavités. Les images sont prises de manière aléatoire dans la coupe et environ 50
images sont acquises par type d’échantillon. Les images sont analysées à l’aide du logiciel
ImageJ, mis à disposition par le National Center for Biotechnology Information. A cause de la
résolution des images et du seuillage, le diamètre des cavités est connu avec une incertitude
d’environ +70nm/-30nm pour le grandissement x5000 et +300nm/-100nm pour le
grandissement x1300. Les cavités de diamètre inférieur à 100nm ne peuvent pas être étudiées
de manière quantitative. Les distributions de taille des cavités sont présentées en Figure 106.

- 138 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

100000

nombre par unité de volume (mm-3)


10000

1000

100

Non fatigué
10
cycle 300 000
Rupture
1
100 1000 10000
diamètre (nm)
Figure 106 : Evolution de la distribution de taille des cavités sphériques au cours de la fatigue obtenue par
analyse d’images sur coupes épaisses de polyamide.

Pour tous les échantillons, plus les cavités sont grosses et plus leur nombre est faible. Cette
distribution de taille semble donc suivre une loi de puissance de type :
N R 
n p ( R)  p (53)
R
avec R le rayon des cavités (en mm), n(R) le nombre de cavités de rayon R (sans unités), ∆R la
largeur d’un intervalle de taille (en mm), NP une constante permettant de modéliser l’ordonnée
à l’origine de la droite en échelle logarithmique (en mm-2+α) et α une constante permettant de
modéliser la pente de cette droite (sans unités). La constante α obtenue pour le polyamide
fatigué vaut environ 3.3. Le diamètre des cavités les plus grosses est d’environ 3µm. Le
nombre des cavités de diamètre supérieur à 500nm est un peu plus important pour l’échantillon
fatigué. On peut donc supposer que les grosses cavités grossissent au cours de la fatigue.

1.3.1.1 Fraction volumique des cavités


Par intégration de la distribution expérimentale de taille de cavités, on peut calculer la fraction
volumique des cavités dans les échantillons et calculer une densité moyenne pour chaque type
d’éprouvette (Figure 107).

- 139 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Fv cavités de 100 à 500nm au grandissement
Chapitre x5000 + cavités
5 : Caractérisations de
à l’échelle microscopique
500nm à 2µm au grandissement x1310 + Fit de 2µm à Dmax

fraction volumique des cavités (%)


0.18
0.16
0.14
0.12
0.1
0.08
0.06
0.04
0.02
0
non fatigué cycle 300 000 rupture

Figure 107 : Evolution de la fraction volumique des cavités au cours de la fatigue.

La fraction volumique de vide dans le polyamide non fatigué est inférieure à 0.1%, ce qui
explique que les propriétés mécaniques et la densité du matériau soient standard. Cette fraction
volumique augmente au cours de la fatigue mais reste très faible (0.15%). Ces valeurs de
fraction volumiques correspondent bien aux mesures de densité présentées au chapitre 4. Mais
ces cavités étant sphériques, leur présence ne peut pas expliquer l’importante chute du module
dynamique de 8% présentée également au chapitre 4.

1.3.2 Diffusion des rayons X

La technique de diffusion des rayons X est une technique quantitative qui permet d’étudier
l’évolution de l’endommagement au cours de la fatigue. La diffusion des rayons X aux petits et
très petits angles nous a permis de caractériser la taille des cavités, la densité volumique de
vide et la distribution de taille des cavités en analysant les régimes de Guinier et de Porod
(régimes décrits au chapitre 2).

1.3.2.1 Caractérisations in situ par SAXS


Nous avons caractérisé par SAXS 2D sous contrainte et température des éprouvettes de
polyamide pré-fatiguées à différents nombres de cycles en comparaison avec un matériau
référence non fatigué. Nous avons appliqué une contrainte croissante sur le matériau in situ
dans le but d’ouvrir des cavités éventuellement refermées. La Figure 108 présente les images
de diffusion de cette expérience. Nous avons remarqué que l’échantillon cassait dans les mors
de la machine de traction sous une contrainte plus faible que la contrainte maximale de fatigue.
Nous présentons donc ici les figures de diffusion du matériau sous contrainte maximale
atteinte avant la rupture.

- 140 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

(a) (b) (c) (d)

(e) (f) (g)

Figure 108 : images de diffusion en SAXS 2D pour le polyamide à différents nombres de cycles en fatigue à
69MPa dans un environnement à 25°C (a) avant fatigue (référence) ; (b) après 2 000 cycles; (c) après
300 000 cycles; (d) à la rupture ; et les mêmes échantillons sous tension (e) référence sous une contrainte à
50MPa; (f) échantillon fatigué 2 000 cycles sous une contrainte de 51MPa; (g) échantillon fatigué 300 000
cycles sous une contrainte de 42MPa. Le sens de traction est vertical.

L’anneau de diffusion correspond aux lamelles cristallines du polyamide, dont la distance de


répétition typique est de 10nm. Ce signal est isotrope car l’organisation cristalline est
sphérolitique. Les lamelles s’orientent perpendiculairement à la contrainte sous chargement et
ce phénomène est réversible. L’influence de la fatigue sur la structure cristalline à l’échelle des
lamelles sera étudiée plus précisément au chapitre 6.

Au centre de l’image, c’est-à-dire pour les plus petits angles, l’intensité du signal diffusé
augmente avec le nombre de cycles en fatigue. C’est le signe d’un endommagement qui
provoque une forte hétérogénéité de densité électronique, comme la création de vides. Ce
signal correspond à des objets d’une taille de 20nm ou plus. Ce signal n’est pas plus intense
sous tension : la traction ne crée pas d’hétérogénéités de densité électroniques
supplémentaires, autrement dit les cavités ne s’ouvrent pas sous contrainte, contrairement aux
observations dans le polyamide semi-cristallin étiré dont la structure cristalline est orientée
[65].
Les objets que nous mettons en évidence sont trop gros pour que leur taille soit estimée : nous
sommes dans le régime de Porod qui correspond à l’étude de l’interface des objets. Une étude
par diffusion des rayons X aux plus petits angles dans le régime de Guinier est nécessaire.

1.3.2.2 Caractérisation de la taille des cavités par USAXS


Afin de quantifier la taille et la distribution de taille des plus gros objets, nous avons complété
les caractérisations SAXS par des caractérisations USAXS réalisées avec un montage de
Bonse-Hardt. Cette technique permet de réaliser des caractérisations d’objets jusqu’à une taille
micronique dans une direction choisie, mais nécessite un temps d’acquisition trop long pour
des caractérisations in situ. Nous avons montré précédemment que l’endommagement
n’évolue pas sous traction, donc les cavités peuvent être étudiées une fois la contrainte
relâchée. L’intensité diffusée par des cavités sphériques de rayon R et de volume V dans un
matériau homogène est donnée par l’expression suivante [36] :
2
 (sin qR  qR cosqR) 
I (q)  n( R) I 0Tr  (   0 ) V h 3
2 2 2

 (qR)3  (27)
où I(q) est en Wcm2, n(R) est le nombre de cavités de rayon R par unité de volume (en cm-3), I0
est l’intensité du rayonnement incident (en W), Tr est la transmission de l’échantillon (sans

- 141 -
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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

unités), 2 est la section efficace d’un électron (  2  7.8  10 26 cm2 ),  est la section éclairée
par le faisceau (en cm2), h est l’épaisseur de l’échantillon (en cm),  est la densité électronique
du polyamide (cm-3), et 0 est la densité électronique de la cavité (en cm-3).

La Figure 110 présente les intensités normalisées pour les échantillons de polyamide référence
et fatigués à différents nombres de cycles dans un environnement à 25°C. Avec la technique
USAXS les spectres mesurés sont directement normalisés par I 0 , , Tr qui sont des grandeurs
dépendantes de l’appareillage et du matériau, et nous normalisons ces spectres par l’épaisseur
de l’échantillon pour obtenir une grandeur intrinsèque du matériau :
2
I (q)  (sin qR  qR cosqR) 
 n( R)  2 (   0 ) 2V 2  3 
I 0Tr h  (qR)3  (54)
où h est l’épaisseur de l’échantillon en mm. L’intensité normalisée est donc donnée en mm-1.
Les caractérisations sont présentées dans les directions parallèles et perpendiculaires à la
contrainte comme représentées en Figure 109.

σ
y

y x

x détecteur

RX

échantillon

Figure 109 : Représentation des directions d’analyse des spectres diffusés avec un angle  par rapport à la
direction du faisceau incident : (x) direction perpendiculaire à la contrainte caractérisant la dimension des
objets suivant l’axe x ; (y) direction parallèle à la contrainte caractérisant la dimension des objets suivant
l’axe y.

- 142 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

1.E+07

1.E+06

1.E+05

intensité (mm-1)
1.E+04

1.E+03

référence 1.E+02
cycle 2 000
cycle 10 000 1.E+01

cycle 300 000 1.E+00


rupture
1.E-01
1.E-04 1.E-03 1.E-02 1.E-01 1.E+00
-1
(a) vecteur d'onde (nm )

1.E+07

1.E+06

1.E+05
intensité (mm )
-1

1.E+04

1.E+03

référence 1.E+02
cycle 2000
cycle 10 000 1.E+01

cycle 300 000 1.E+00


rupture
1.E-01
1.E-04 1.E-03 1.E-02 1.E-01 1.E+00
-1
(b) vecteur d'onde (nm )

Figure 110 : Caractérisations USAXS dans le polyamide fatigué à 69MPa dans un environnement à 25°C
(a) direction y ; (b) direction x.

Il est clair d’après la Figure 110 (a) que l’intensité diffusée augmente avec le nombre de cycles
en fatigue. La comparaison avec la Figure 110 (b) indique que la quantité d’endommagement
qui apparaît au cours des 10 000 premiers cycles est faible et isotrope, et que pour les nombres
de cycles de fatigue plus élevés endommagement anisotrope et intense est créé.

Le polymère étudié pour ces caractérisations USAXS est un polyamide formulé avec
uniquement un minimum de cire de démoulage (cf. chapitre 2). Le matériau ne contient donc
pas d’additifs susceptibles de créer de la diffusion. De plus, des mesures de taux de cristallinité
par calorimétrie différentielle à balayage (cf. annexe A3.) ont montré que la fatigue ne modifie
pas le taux de cristallinité. L’intensité plus importante des échantillons fatigués ne peut donc
être expliquée que par une répartition non homogène des densités.

- 143 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

A l’échelle étudiée, le polyamide est considéré comme homogène dans nos calculs. La densité
électronique  moyenne dans le polyamide est donc estimée telle que :
n   d  NA
 e
M (55)
-
avec ne- le nombre l’électrons par unité de répétition de la macromolécule (soit 113e pour le
PA6,6), d la densité du polymère (soit 1.14x103 kg/m3 pour le PA6,6), NA le nombre
d’Avogadro, et M la masse moléculaire de l’unité de répétition de la macromolécule (soit 226
g/mol pour le PA6,6). Nous obtenons PA = 3.4325x1029m-3 pour le PA6,6.

Pour les échantillons fatigués 10 000 cycles ou moins, le signal diffusé est isotrope et on
utilise le facteur de forme de cavités sphériques pour interpréter le signal diffusé dans les
directions parallèles et perpendiculaires à la contrainte. Le spectre diffusé a une pente de -3.
Cette pente peut être causée par une large distribution de taille des cavités. Pour cette
population de cavités nous prenons la densité électronique du vide 0 = 0 m-3.
Nous avons modélisé les spectres avec différentes lois de distribution de taille des cavités, et la
loi de puissance s’est révélé être la plus représentative de la pente -3. La loi de puissance est
définie comme suit :
N R 
n p ( R)  p (53)
R
où np(R) est le nombre de cavités de rayon R par unité de volume (en cm-3), ∆R est l’intervalle
entre deux rayons considérés (en cm), Np est un paramètre décrivant l’intensité diffusée (en
cm-2+α), et α une constante décrivant la pente (sans unités) L’influence des paramètres
ajustables de la modélisation Np et α sont présentés en Figure 111 et Figure 112.

1.0E+08 1.0E+08
expérience expérience
1.0E+07 1.0E+07
modèle modèle
1.0E+06 1.0E+06
1.0E+05 1.0E+05
Intensité (cm )

Intensité (cm )
-1

-1

1.0E+04 1.0E+04
1.0E+03 1.0E+03
1.0E+02 1.0E+02
1.0E+01 1.0E+01
1.0E+00 1.0E+00
1.0E-01 1.0E-01
1.0E-02 1.0E-02
0.0001 0.001 0.01 0.1 1 0.0001 0.001 0.01 0.1 1
-1
(a) (b)
-1
Vecteur d'onde q (nm ) Vecteur d'onde q (nm )

- 144 -
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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

1.0E+08
expérience
1.0E+07
modèle
1.0E+06
1.0E+05

Intensité (cm )
-1
1.0E+04
1.0E+03
1.0E+02
1.0E+01
1.0E+00
1.0E-01
1.0E-02
0.0001 0.001 0.01 0.1 1

(c)
-1
Vecteur d'onde q (nm )

Figure 111 : Influence de la constante NP sur la modélisation de l’intensité du spectre de diffusion du


polyamide non fatigué (a) NP=10-8 cm-2+α; (b) NP=10-10 cm-2+α; (c) NP=4 10-9 cm-2+α ; avec α=3.6 et
Rmax=1.4µm.

1.0E+08 1.0E+08
expérience expérience
1.0E+07 1.0E+07
modèle modèle
1.0E+06 1.0E+06
1.0E+05 Intensité (cm ) 1.0E+05
Intensité (cm )

-1
-1

1.0E+04 1.0E+04
1.0E+03 1.0E+03
1.0E+02 1.0E+02
1.0E+01 1.0E+01
1.0E+00 1.0E+00
1.0E-01 1.0E-01
1.0E-02 1.0E-02
0.0001 0.001 0.01 0.1 1 0.0001 0.001 0.01 0.1 1
-1
(a) (b)
-1 Vecteur d'onde q (nm )
Vecteur d'onde q (nm )
1.0E+08
expérience
1.0E+07
modèle
1.0E+06
1.0E+05
Intensité (cm )
-1

1.0E+04
1.0E+03
1.0E+02
1.0E+01
1.0E+00
1.0E-01
1.0E-02
0.0001 0.001 0.01 0.1 1

(c)
-1
Vecteur d'onde q (nm )

Figure 112 : Influence de la constante α sur la modélisation de l’intensité du spectre de diffusion du


polyamide non fatigué (a) α=3 et NP=10-6 cm-2+α ; (b) α=4 et NP=7.10-11 cm-2+α ; (c) α=3.6 et NP=4 10-9 cm-2+α ;
avec Rmax=1.4µm.

Pour les échantillons fatigués plus de 10 000 cycles, les spectres ont une pente de -3 et un
changement de régime à environ q=0.03nm-1 pour le matériau fatigué 10 000 cycles, à environ
q=0.01nm-1 pour le matériau fatigué 300 000 cycles et à environ q=0.1 nm-1 pour le matériau

- 145 -
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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

fatigué jusqu’à la rupture. Ce changement de régime est créé par de nouveaux domaines de
densité électronique plus faible que le polyamide, qui ont une large distribution de taille. Leur
signal est anisotrope. Pour tenir compte de ces domaines nous avons ajouté une autre
population de taille suivant une loi de puissance, avec un facteur de forme des cavités  :
R
 x (56)
Ry
avec Rx et Ry les dimensions de la cavité elliptique respectivement dans la direction
perpendiculaire et parallèle à la contrainte.

On considère que cette population anisotrope est très probablement à l’origine des craquelures.
Les craquelures sont des fissures pontées par de la matière (c.f. chapitre 1). On choisit donc
pour cette population une densité électronique ajustable et comprise celle du vide et celle du
polyamide. Ainsi, la densité électronique des domaines anisotropes nucléés en fatigue est
définie par    PA   avec  la fraction volumique de matière au sein du domaine.

Le nombre de domaines modélisé est dépendant du volume de la cavité. Lorsque le signal est
isotrope, on choisit le volume d’une sphère de rayon R. Pour les échantillons anisotropes, on
utilise le volume d’une ellipse de facteur de forme  et de dimensions Rx dans la direction x et
Ry dans la direction y :
4
V  R y   2
3
(57)
3
4
V  Rx / 
3
ou encore (58)
3
Nous avons modélisé nos courbes avec un intervalle de taille ∆R=20nm. Pour les populations
anisotropes les spectres sont modélisés avec un nombre de cavités nP(R) identique dans les
directions parallèle et perpendiculaire à la contrainte. Les paramètres variables sont la
dimension des objets dans la direction parallèle à la contrainte, le facteur de forme des objets,
leur nombre par unité de volume et la fraction volumique de polyamide au sein des domaines
d’endommagement . Ces valeurs sont ajustées pour obtenir des valeurs de densité et de chute
du module compatibles avec les valeurs obtenues au chapitre 4, soit une chute de densité
inférieure à 0.1% et une chute du module dynamique d’environ 8%. Le volume des cavités et
la dimension dans la direction perpendiculaire sont des paramètres déduits. Un exemple de
signal modélisé est donné en Figure 113 et les résultats des modélisations sont regroupés en
Figure 114.

- 146 -
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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

1.0E+08
expérience
1.0E+07
modèle
1.0E+06

Intensité (cm-1)
1.0E+05
1.0E+04 direction y

1.0E+03
Direction x
1.0E+02
1.0E+01
1.0E+00
0.0001 0.001 0.01 0.1 1

Vecteur d'onde q (nm-1)

Figure 113 : Modélisation des intensités diffusées par l’échantillon fatigué 300 000 cycles dans les
directions x et y au moyen de deux lois de puissance.

Cavités sphériques formées lors de Domaines d’endommagement


l’injection formés en fatigue
=0 =0.9
Nombre ∆R Rmin Rmax NP α  Rmin Rmax NP’ α 
-2+α -2+α
de (nm) (nm) (nm) (cm ) (nm) (nm) (cm )
cycles
0 20 10 1350 4 10-9 3.6 1 - - - - -
2.103 20 10 1230 3.5 10-9 3.6 1 10 110 1.0 10-1 2.5 1
1.104 20 10 1290 3.5 10-9 3.6 1 10 110 1.5 10-1 2.5 1
3.105 20 10 1190 6 10-9 3.6 1 10 190 1.5 10-3 2.5 5
10 190 2.5 10-3 2.5 5
rupture 20 10 1300 16 10-9 3.6 1
10 1310 1.3 10-4 2.5 5
Figure 114 : Paramètres de modélisation des spectres de diffusion dans le PA.

Pour le matériau non fatigué, les signaux linéaires en échelle logarithmique de pente -3 des
spectres diffusés dans les directions perpendiculaire et parallèle à la contrainte peuvent être
modélisés par une distribution de taille de cavités de type loi de puissance avec un coefficient
α=3.6. Les paramètres de modélisation sont quasi identiques dans les deux directions pour les
essais fatigués non rompus. Ce signal est donc isotrope. La distribution de taille des objets est
très large, de 20nm à 2.6µm environ de diamètre. Cette population est aussi observée pour tous
les échantillons avec une intensité qui augmente faiblement avec le nombre de cycles de
fatigue. Ce signal correspond aux cavités sphériques initialement présentes dans le matériau
suite à la mise en œuvre par injection. Ces cavités ont été étudiées par analyses d’images en
microscopie électronique à transmission au paragraphe 1.3.1. Les valeurs de taille des cavités
correspondent bien aux valeurs obtenues par ces observations microscopiques, et les valeurs
de coefficient α obtenues sont proches (α=3.3 en analyse d’images et α=3.6 en USAXS). Les
échantillons fatigués présentent les mêmes caractéristiques de taille et de distribution de taille
de ces cavités sphériques. Le nombre de ces cavités augmente pour l’échantillon fatigué à
rupture.

- 147 -
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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

Les échantillons fatigués 2000 et 10 000 cycles présentent une population de domaines
sphériques nucléés en fatigue, d’un rayon compris entre 10nm et 110nm.
Pour l’échantillon fatigué 300 000 cycles, on observe que certains de ces domaines évoluent
vers une population de cavités asymétriques d’une dimension Ry comprise entre 10nm et
190nm dans la direction parallèle à la contrainte et d’une dimension Rx comprise entre 50nm et
950nm dans la dimension perpendiculaire à la contrainte. Le facteur de forme est de 5.

A rupture, l’échantillon présente une population de cavités d’une dimension Ry comprise entre
10nm et 1.31µm dans la direction parallèle à la contrainte et d’une dimension Rx comprise
entre 50nm et 6.55µm dans la dimension perpendiculaire à la contrainte. Le nombre de
domaines dominant le signal diminue avec le nombre de cycles. On peut supposer que des
domaines nanométriques sphériques sont nucléés en grand nombre dans le polyamide dès les
1000 premiers cycles, et qu’une partie de ces cavités croît dans la direction perpendiculaire à la
contrainte au cours de la fatigue.

1.3.2.3 Calcul de la fraction volumique


Nous avons sommé les contributions de chaque population de cavités de la distribution en loi
de puissance et nous avons calculé le volume de vide total selon l’expression suivante :
R max

VP  n
R min
P ( R)V ( R )dR

(59)
Rmax 
N pR 4
VP  
Rmin
R
 R3dR
3
soit (60)
Pour tout α<4 il vient :
Np 4  1 4  
VP   Rmax 
R 3  4   
(61)
Cette fraction volumique est moyennée sur le volume analysé et ne permet pas de tenir compte
des variations locales de densité à faible échelle. La fraction volumique calculée est très
dépendante de l’ajustement de la valeur du rayon maximal des cavités (Figure 115).

1.0E+08 1.0E+08
expérience expérience
1.0E+07 1.0E+07
modèle modèle
1.0E+06 1.0E+06
1.0E+05 1.0E+05
Intensité (cm )
Intensité (cm )

-1
-1

1.0E+04 1.0E+04
1.0E+03 1.0E+03
1.0E+02 1.0E+02
1.0E+01 1.0E+01
1.0E+00 1.0E+00
1.0E-01 1.0E-01
1.0E-02 1.0E-02
0.0001 0.001 0.01 0.1 1 0.0001 0.001 0.01 0.1 1
-1 -1
(a) Vecteur d'onde q (nm ) (b) Vecteur d'onde q (nm )

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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

1.0E+08
expérience
1.0E+07
modèle
1.0E+06
1.0E+05

Intensité (cm )
-1
1.0E+04
1.0E+03
1.0E+02
1.0E+01
1.0E+00
1.0E-01
1.0E-02
0.0001 0.001 0.01 0.1 1

(c)
-1
Vecteur d'onde q (nm )

Figure 115 : Influence de la constante α sur la modélisation de l’intensité du spectre de diffusion du


polyamide non fatigué (a) Rmax=1.2µm ; (b) Rmax=1.9µm ; (c); Rmax=1.4µm ; avec α=3.6 et NP=4 10-9.

Les résultats des calculs de fractions volumiques moyennes sont donnés en Figure 116.

Nombre de VP (cavités sphériques formées lors VP (domaines d’endommagement en


cycles de l’injection) fatigue)
(%) (%)
0 0.06 -
2.103 0.05 0.51
1.104 0.05 0.76
3.105 0.08 0.43
rupture 0.15 1.4
Figure 116 : Fractions volumiques de la population de cavités sphériques liées au moulage par injection et
de la population des domaines d’endommagement en fatigue.

On observe une faible augmentation de la fraction volumique des cavités sphériques formées
lors de l’injection pour le matériau rompu en fatigue. La fraction volumique initiale comprise
entre 0.05% et 0.1%, et à rupture on obtient une fraction volumique de 0.15%. Ces
caractéristiques correspondent tout à fait aux tailles et fractions volumiques des cavités
sphériques mises en évidence par nos observations microscopiques quantitatives (paragraphe
1.3.1) et aux mesures de densité (chapitre 4). Cette population, de part la forme sphériques des
cavités et la faible fraction volumique, ne permet pas d’expliquer l’évolution des propriétés
mécaniques en fatigue présentées au chapitre 4, notamment la chute du module dynamique.

La fraction volumique des domaines anisotropes n’augmente pas de manière linéaire avec la
fatigue car notre calcul est basé sur le signal des domaines les plus gros. Les domaines qui se
sont propagés dans la direction perpendiculaire à la contrainte masquent le signal des petits
domaines isotropes. Ainsi, les petites cavités ne sont pas prises en compte dans le calcul. Avec
les paramètres de modélisation choisis, la fraction volumique des cavités anisotropes est de
1.4% environ à rupture. Ces cavités anisotropes présentent un facteur de forme de 5, ce qui
permet d’expliquer une chute de module dynamique de 7% environ, ce qui est compatible avec
l’évolution du module en fatigue présentée au chapitre 4. Nous avons obtenu une fraction
volumique de polyamide au sein des domaines d’endommagement de =90%. Ce résultat est
compatible avec l’hypothèse que ces cavités sont à l’origine des craquelures. Cette valeur de 

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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

permet d’expliquer une chute de densité de 0.14%, ce qui est proche de la baisse de densité
inférieure à 0.1% présentée au chapitre 4 également.

1.4 Proposition d’un mécanisme d’endommagement

Le craquelage dans les semi-cristallins a été étudié par Narisawa [78], Kausch et al. [56] et
Friedrich [33]. La phase d’initiation des craquelures dans le cas des semi-cristallins a été
précisée par les travaux de Friedrich. Cette première étape met en jeu le cisaillement de la
phase cristalline et la formation de vides d’une taille submicronique. Lorsque les
concentrations de contraintes locales dépassent la contrainte seuil d’écoulement plastique, les
lamelles cristallines sont fragmentées en blocs cristallins individuels qui s’orientent dans la
direction de la contrainte macroscopique. Ces blocs cristallins ont une taille typique de 10 à
30nm. Parallèlement des vides submicroniques sont formés, d’une taille de 10 à 50nm
perpendiculairement à la contrainte pour 2 à 6nm parallèlement à la contrainte (Figure 117). Ils
sont très probablement nucléés dans les zones de concentrations de contraintes locales. Ces
zones de nucléation sont localisées dans la phase amorphe, entre les lamelles cristallines
orientées avec un angle de 45° par rapport à la contrainte macroscopique [33] car ces zones
soumises à un cisaillement important entre lamelles, ou entre les lamelles orientées
perpendiculairement à la contrainte macroscopique car la séparation des lamelles cause une
variation de volume locale propice à la formation de microvides [13; 33]. La nucléation de ces
microvides provoque une concentration des contraintes locales latérale, qui favorise la
nucléation d’autres cavités voisines. Il en résulte une organisation des microvides dans un plan
perpendiculaire à la contrainte macroscopique.

Figure 117 : Initiation des craquelures dans les polymères semi-cristallins selon Friedrich [33].

Nous proposons un mécanisme d’endommagement basé sur les caractérisations


microscopiques quantitatives et sur les données bibliographiques concernant les craquelures
[33] pour expliquer les résultats mécaniques macroscopiques (Figure 118). Nos observations
par microscopie électronique à transmission ont montré que les craquelures croissent

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préférentiellement dans la direction parallèle aux lamelles cristallines, perpendiculairement à


la contrainte, c’est-à-dire à dans le plan équatorial des sphérolites. Des caractérisations par
diffusion des rayons X aux très petits angles nous ont permis de montrer la nucléation de
domaines d’endommagement nanométriques sphériques dans le polyamide, d’un diamètre
caractéristique de 20 à 220nm. Durant les premiers stades de la fatigue, nous avons montré que
le nombre de ces nanodomaines augmente avec le nombre de cycles de fatigue, mais que leur
taille reste constante. La nucléation de ces nanodomaines met en jeu plusieurs empilements de
lamelles cristallines (dont la distance de répétition caractéristique est d’environ 10nm) et est
compatible avec le modèle proposé par Friedrich. Ensuite certains de ces domaines croissent
perpendiculairement à la contrainte. Dans le polyamide nous supposons donc que les
craquelures soient initiées préférentiellement par la nucléation de nanodomaines dans la phase
amorphe entre lamelles cristallines orientées perpendiculairement à la contrainte, comme
présenté dans la partie bibliographique dans le poly(fluorure de vinylidène) [19]. A la rupture
les domaines elliptiques ont une taille comprise entre 20nm et 2.6µm parallèlement à la
contrainte, et comprise entre 20nm et 13.1µm perpendiculairement à la contrainte. Pour
comparer avec la littérature des polymères semi-cristallins non orientés, on peut rappeler que
Kuksenko et Tamusz ont observé des cavités d’un diamètre de plusieurs centaines de
nanomètres sous déformation [65].

(a) (b) (c)

(d) (e)
Figure 118 : Croissance des cavités submicroniques dans la phase amorphe entre les lamelles orientées
perpendiculairement à la contrainte (a) cavités microniques de large distribution de taille dans
l’échantillon non fatigué; (b) nucléation de cavités nanométriques dans la phase amorphe entre lamelles
perpendiculaires à la contrainte (diamètre entre 20 et 180nm environ) ; (c) augmentation du nombre de ces
cavités sphériques nanométriques ; (d) et (e) croissance des cavités nanométriques dans la direction
perpendiculaire à la contrainte.

- 151 -
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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

Les cavités sphériques liées à la mise en œuvre n’explique pas l’évolution des propriétés
mécaniques mais contribue certainement à l’endommagement. En effet, comme détaillé dans
la littérature [33; 104]. La présence des cavités sphériques microniques suite à la mise en
œuvre par injection cause une forte concentration locale de la contrainte macroscopique et
favorise sans doute la nucléation des cavités submicroniques.

Le craquelage dans les polymères en fatigue a été étudié par Sauer et al. [99]. Son étude a
porté sur plusieurs polymères (polystyrène, copolymère de styrène et d’acrylonitrile, différents
poly(méthylméthacrylates), et polystyrènes renforcés d’élastomères). Le mode
d’endommagement observé en fatigue pour ces matériaux est le craquelage. La durée de vie en
fatigue est augmentée pour les matériaux de masse moléculaire et de densité
d’enchevêtrements physiques importantes, car ces paramètres stabilisent les craquelures et
retardent la rupture. Ce résultat serait probablement vérifié aussi pour le polyamide.

Les domaines d’endommagement sont orientés perpendiculairement à la contrainte et sont très


probablement localisés à l’équateur des sphérolites. Ces domaines seraient donc spatialement
corrélés, ce qui impliquerait que la diminution du module dynamique pourrait être expliquée
par une fraction volumique des domaines plus faible. A ce stade, il est nécessaire d’étudier
l’évolution des caractéristiques des lamelles cristallines en fonction de leur orientation par
rapport à la contrainte pour définir la zone endommagée du sphérolite. Nous considérons que
les cavités sont nucléées dans les zones du sphérolites soumis à une séparation importante des
lamelles. Des analyses par SAXS 2D permettraient de définir l’angle solide 2 dans lequel la
séparation des lamelles est importante (Figure 119). Cette étude sera réalisée au chapitre 6.

2

Figure 119 : Endommagement dans le plan équatorial des sphérolites : notion d’endommagement selon un
angle solide 2.

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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

2 Polyamide renforcé de fibres de verre

2.1 Analyse des champs de déformation

Nous avons montré dans la partie précédente que le polyamide non renforcé localise la
déformation et que le nombre de sites de localisation augmente avec le nombre de cycles de
fatigue. En comparaison, les champs de déformation dans l’éprouvette de polyamide renforcé
de fibres de verre sont présentés en Figure 120.

(a) (b) (c) (d)

Figure 120 : mesures des champs de déformation dans le polyamide renforcé de fibres de verre.

La contrainte est uniforme au cycle 1, et un site de localisation de la déformation apparaît dès


le cycle 1000. L’intensité de la déformation ne semble pas augmenter avec la fatigue, mais le
nombre de sites de localisation de l’endommagement augmente avec le nombre de cycles de
fatigue. L’endommagement en fatigue dans le polyamide renforcé de 30% de fibres de verre
est local et abondant, comme dans le polyamide non renforcé et comme décrit dans la
littérature [6; 7; 25; 72; 86]. Cet endommagement abondant explique les chutes importantes du
module dynamique et du module élastique présentées au chapitre 4.

2.2 Microtomographie

La technique de microtomographie synchrotron permet de mettre en évidence les


hétérogénéités de coefficient d’absorption linéiques des rayons X noté µ. C’est une technique
d’analyse 3D non destructive, il est donc possible d’extraire une image 2D à une profondeur
donnée dans l’échantillon. Nous avons observé le polyamide renforcé de fibres de verre par
cette technique. Les fibres de verre apparaissent en blanc car leur coefficient d’atténuation
linéique est élevé (µFV=89cm-1), le polyamide en gris foncé car sont coefficient d’atténuation
linéique est faible (µPA=6.0cm-1) et le vide en noir (µvide=0cm-1) (Figure 121). La résolution de
la microtomographie est de l’ordre du micron, il est donc difficile de mettre en évidence
l’endommagement matriciel.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

Figure 121 : Microtomographie synchrotron dans le polyamide renforcé de fibres de verre fatigué dans un
environnement à 140°C pendant 34000 cycles avec σmax=57.8MPa. Les flèches représentent la direction de
la contrainte.

Certaines fibres sont cassées sous la contrainte cyclique et l’interface fibre/matrice a


localement cédé en tête de fibre. La taille approximative des vides créés est de 10µm dans la
direction perpendiculaire aux fibres (égal au diamètre des fibres) et 3µm dans la direction
parallèle aux fibres. La création de vide causée par ces phénomènes doit être suffisamment
faible pour expliquer que la chute de densité présentée au chapitre 4 soit inférieure à 0.1%.

2.3 Microscopie

2.3.1 Faciès de rupture

Nos observations des faciès de rupture en fatigue dans le polyamide renforcé de fibres de verre
par microscopie électronique à balayage correspondent aux caractéristiques reportées dans la
littérature [44; 45]. Les fractographies ont les mêmes caractéristiques pour les fatigues
mécaniques, quelles que soient la température et la contrainte. On observe une zone de rupture
ductile dans laquelle le polymère est très étiré, une zone de rupture intermédiaire et une zone
de rupture fragile (Figure 122).

(a) : 25°C zone fragile (b) : Fatigue à 80°C zone (c) : Fatigue140°C zone
fragile fragile

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

(d) : Fatigue à 25°C zone (e) : Fatigue à 80°C zone (f) : Fatigue140°C zone
transition fragile-ductile transition fragile-ductile transition fragile-ductile

(g) : Fatigué à 25°C zone (h) : Fatigué à 80°C zone (i) : Fatigue à 140°C zone
ductile ductile ductile

Figure 122 : Caractéristiques des zones de rupture ductile, intermédiaire et fragile pour des ruptures à
différentes températures.

La zone ductile est observée près des bords de l’éprouvette. C’est une zone de rupture lente et
très énergétique et est caractérisée par une déformation plastique importante de la matrice
polymère. L’étirement de la matrice augmente avec la température. Pour les essais de même
durée de vie en fatigue, on observe que la taille de la zone ductile augmente avec la
température. Si on considère la zone ductile comme une fissure, la mécanique de la rupture
explique ce résultat par la formation d’une zone de concentration des contraintes et donc de
localisation de l’endommagement en pointe de fissure dont la taille augmente lorsque la
contrainte seuil d’écoulement du matériau diminue avec la température.
La zone intermédiaire montre des zones de plasticité localisée. Les fibres sont entourées de
couronnes de polymère. Les faciès de rupture en traction présentent également cette
morphologie entre les zones ductiles et fragiles [86]. Ces couronnes ne peuvent pas être
expliquée par la transcristallisation du polyamide depuis la surface des fibres, car nous avons
montré au chapitre 2 par microscopie optique à polarisation croisée que la transcristallisation
est négligeable dans notre matériau. La littérature confirme cette observation dans le PA6
renforcé par des charges rigides, où la transcristallinité est de 70nm depuis l’interface, ce qui
semble bien trop faible pour expliquer les couronnes [76]. L’interprétation la plus probable de
ces couronnes est qu’en pointe de fissure la rupture des fibres entraîne une rupture de la
matrice circulairement depuis l’interface fibre/matrice, cette interprétation est confirmée par
Horst [44]. Lorsque l’interface est cohésive, la matrice subit une contrainte d’autant plus forte
qu’elle est proche de la fibre. Ainsi, jusqu’à une distance critique depuis l’interface de 10 à 15
microns environ, la contrainte dans la matrice est supérieure à la capacité du matériau et la
rupture est fragile depuis l’interface, provoquant les couronnes de matrice. Au-delà de cette
distance critique, la rupture est ductile.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

La zone de rupture fragile présente des fibres dont les longueurs d’extraction sont très
variables (0 à 100µm environ). L’ouvrage de Folkes qui concerne les thermoplastiques
renforcés de fibres de verre indique que la longueur critique des fibres de verre bien liées au
polyamide 6,6 est de 230µm environ [31]. Les fibres plus longues que cette longueur critique
cassent lors de la rupture. Les fibres de notre composite ont une longueur moyenne de 250µm.
Certaines fibres sont cassées et d’autres sont déchaussées, ce qui explique la distribution de
taille des fibres déchaussées observée dans la zone fragile. Dans la zone ductile, l’étirement de
la matrice autour des fibres conduit à des longueurs d’extraction plus faibles.

2.3.2 Rôle du déchaussement des fibres dans la rupture en fatigue

Nous avons indiqué dans le premier chapitre introductif que pour les polyamides renforcés de
fibres de verre, avec une matrice à l’équilibre de reprise en eau à hygrométrie ambiante, le
déchaussement est important [6; 7; 44; 45; 79]. Lorsque la matrice polyamide est sèche, le
déchaussement des fibres est moins important [45]. Dans le cas du polyamide de cette étude, la
zone de rupture ductile présente des traces de déchaussement très limitées, conformément à la
littérature (Figure 123).

20µm

Figure 123: Fractographie du PA renforcé de fibres de verre, zone ductile.

L’interface fibre/matrice reste donc majoritairement cohésive dans le cas de notre matériau. Ce
résultat peut être expliqué par le fait que la matrice contient très peu d’eau. La présence d’eau
a une influence sur la ductilité de la matrice et sur la qualité de l’interface (cf. chapitre 1).
Dans cette étude nous avons fait varier la ductilité de l’interface en réalisant des tests de
fatigue à des températures supérieures et inférieures à la Tg, et nous n’avons pas observé de
déchaussement plus important pour les températures élevées. On peut conclure que ce n’est
pas la ductilité de la matrice liée à la Tg qui est responsable du déchaussement. Lorsque nous
avons conditionné des éprouvettes à RH50, nos avons observé un déchaussement également
limité.

Nous avons observé l’interface fibre/matrice dans un essai de fatigue interrompu avant rupture.
L’éprouvette est cryofracturée dans une direction parallèle à la contrainte (les plans
d’observation ont été présentés en Figure 101). La Figure 124 permet de comparer l’interface
fibre/matrice pour une éprouvette référence et pour une éprouvette fatiguée. Pour l’éprouvette
de référence non fatiguée, la surface des fibres est recouverte de polymère. Concernant le

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

matériau fatigué, la cryofracture révèle des bandes de décohésion fines, mais la quasi-totalité
de la surface de la fibre est enduite de polymère comme pour le matériau témoin. Le
déchaussement limité des fibres permet à celles-ci de renforcer la matrice jusqu’à la rupture.

2µm 2µm
(a) (b)
Figure 124 : Cryofracture dans le sens parallèle à la contrainte dans le polyamide renforcé de fibres (a)
référence, montrant le polymère à la surface des fibres ; (b) après 100 000 cycles à 75MPa dans un
environnement à 65°C, montrant le déchaussement partiel des fibres.

Le déchaussement en bandes fines peut être dû aux hétérogénéités d’épaisseur d’ensimage


montrées au chapitre 2.

2.3.3 Endommagement matriciel

Nous avons compété ces observations par des cryofractures dans le plan perpendiculaire à a
contrainte dans la zone de plus faible section de l’éprouvette (Figure 101), afin d’observer les
défauts de la matrice. La Figure 125 présente les observations de l’éprouvette fatiguée et de
l’éprouvette de référence non fatiguée. Comme pour le polyamide non renforcé, nous
observons des cavités dans la matrice polymère.

2µm 2µm
(a) (b)
Figure 125 : Cryofracture du polyamide renforcé de fibres dans le sens perpendiculaire à la contrainte (a)
référence montrant des cavités dans la matrice (diamètre jusqu’à environ 500nm) ; (b) après 100 000 cycles
à 75MPa dans un environnement à 65°C montrant des cavités dans la matrice (diamètre jusqu’à environ
1µm).

Les cavités dans le matériau référence semblent être d’une taille moyenne de 500nm, et d’une
distribution de taille large. Ces cavités ont été formées lors de l’injection, comme pour le

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

polyamide non renforcé. Il est difficile d’estimer l’influence de la fatigue sur la quantité de
vides, la distribution de taille et la localisation des cavités.

2.4 Diffusion des rayons X

Nous avons montré pour le polyamide non renforcé que la diffusion des rayons X est une
technique qui permet de mettre en évidence des hétérogénéités de densité électronique dans le
cas d’un matériau homogène comportant des cavités. Lorsque le matériau est hétérogène,
comme c’est le cas du polyamide renforcé de fibres, plusieurs espèces diffusent. Il est donc
nécessaire d’estimer la diffusion des cavités dans la matrice polyamide d’une part et la
diffusion des fibres de verre dans le polyamide d’autre part. Nous avons montré au chapitre 2
que l’orientation des fibres de verre dépend de la profondeur dans l’épaisseur de l’éprouvette
(structure cœur-peau). Les caractérisations sont ici réalisées dans la zone de peau où les fibres
sont bien orientées dans la direction de la contrainte macroscopique. Le signal des fibres de
verre analysé dans la direction parallèle à la contrainte et aux fibres est ainsi minimisé.
Le polyamide renforcé de fibres de verre étudié par ici par diffusion de neutrons a été pré-
fatigué dans notre laboratoire à 140°C et σmax=54.5MPa. La préparation des échantillons a été
détaillée au chapitre 2.

2.4.1 Estimation de la diffusion des cavités

Rappelons que l’intensité diffusée par des cavités sphériques de rayon R et de volume V est
donnée par l’expression suivante [36]:
2
I (q)  (sin qR  qR cosqR) 
 n( R)  2 (   0 ) 2V 2  3 
I 0Tr h  ( qR ) 3
 (54)
-3
où n(R) est le nombre de cavités de rayon R par unité de volume (en cm ), I0 est l’intensité du
rayonnement incident (en W), Tr est la transmission de l’échantillon (sans unités), 2 est la
section efficace d’un électron (en cm2),  est la section éclairée par le faisceau (en cm2), h est
l’épaisseur de l’échantillon (en cm),  est la densité électronique du matériau (cm-3), et 0 est
la densité électronique de l’objet diffusant (en cm-3).

En première approximation les cavités observées par microscopie peuvent être considérées
comme des particules sphériques de densité électronique 0=0cm-3, de taille moyenne 500nm
et de densité volumique n( R)  V =0.1% pour correspondre aux mesures de densité présentées
au chapitre 4.

2.4.2 Estimation de la diffusion des fibres de verre

Le calcul de la densité électronique des fibres de verre est basé sur la composition volumique
du verre E :
  i  di  N A
 FV   i (62)
Mi
avec i la fraction volumique de chacune de l’espèce considérée, i la densité électronique de
cette espèce, NA le nombre d’Avogadro, di la densité de l’espèce, et Mi sa masse moléculaire.

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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

Ce calcul conduit à FV=8.07 1029m-3 pour les fibres de verre et nous avons déjà montré que
PA = 3.4325x1029m-3 pour le PA6,6.

Les fibres de verre sont considérées comme des ellipses de dimensions Rx=10µm par
Ry=250µm parfaitement dispersées et orientées, et de fraction volumique n( R)  V =15.7%. La
diffusion des fibres de verre dans la matrice polyamide dans la direction parallèle aux fibres et
à la contrainte est calculée comme suit :
2
I ( q)  (sin qRy  qRy cosqRy ) 
 n( R)   2  (   0 )2  V 2   3  (63)
I 0Tr h  ( qR ) 3 
 y 
La diffusion des cavités dans la direction perpendiculaire à la contrainte et aux fibres est
calculée comme suit :
2
I (q)  (sin qRx  qRx cos qRx ) 
 n( R)   2  (   0 ) 2  V 2   3  (64)
I 0Tr h  (qRx )3 

2.4.3 Résultats expérimentaux

Les caractérisations SAXS donnent des intensités relatives et il faut utiliser un standard
secondaire pour obtenir l’intensité absolue. On utilise le Lupolen (polyéthylène standard)
d’intensité absolue 6cm-1 et d’épaisseur contrôlée (2.94mm) [36].

Nos estimations nous permettent de comparer les diffusions liées aux fibres et aux cavités dans
les directions parallèles et perpendiculaires aux fibres de verre (Figure 126).

1.E+11
Fibres de verre
1.E+09

1.E+07
intensité (cm-1)

1.E+05 Cavités

1.E+03

1.E+01

1.E-01

1.E-03
0.001 0.01 0.1 1
-1
(a) vecteur d'onde q (nm )

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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

1.E+07
1.E+06
1.E+05

intensité (cm-1)
1.E+04 Cavités
1.E+03
1.E+02
1.E+01
1.E+00
1.E-01 Fibres de verre
1.E-02
1.E-03
0.001 0.01 0.1 1
-1
vecteur d'onde q (nm )
(b)
Figure 126 : Estimation des intensités diffusées par les fibres de verre et les cavités dans le polyamide (a)
dans la direction perpendiculaire aux fibres (direction x) ; (b) dans la direction parallèle aux fibres
(direction y).

Le signal causé par les fibres de verre dans la direction perpendiculaire aux fibres est beaucoup
plus intense que le signal des cavités. Le signal des cavités ne peut donc pas être étudié dans
cette direction. Dans la direction parallèle aux fibres, l’intensité théorique des cavités est 1000
fois supérieure à l’intensité diffusée par les fibres. Les spectres sont donc analysables dans la
direction parallèle aux fibres.

Cependant nos caractérisations expérimentales du polyamide renforcé de fibres non fatigué


dans la direction parallèle aux fibres montrent que la diffusion des fibres est plus importante
que la théorie et cette intensité est du même ordre de grandeur que le signal théorique des
cavités (Figure 127).

1.E+09
1.E+08 Fibres de verre
1.E+07
1.E+06
intensité (cm-1)

1.E+05
1.E+04
Cavités
1.E+03
1.E+02
1.E+01 Mesure
1.E+00 expérimentale
1.E-01
1.E-02
1.E-03
0.001 0.01 0.1 1 10
vecteur d'onde q (nm-1)

Figure 127 : Intensité théorique dans la direction parallèle à la majorité des fibres (direction y) avec 1% de
fibres orientées perpendiculairement.

On peut modéliser le signal des fibres de verre avec seulement 1% de fibres orientées
perpendiculairement l’intensité diffusée par les fibres dans la direction parallèle à la majorité,
et alors l’intensité des fibres est du même ordre de grandeur que la diffusion des cavités. En se
basant sur les résultats de diffusion des rayons X on considère que 99% des fibres sont
orientées parallèlement à la contrainte et que 1% des fibres sont orientées perpendiculairement.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

La diffusion des fibres de verre dans la matrice polyamide dans la direction perpendiculaire à
la contrainte est calculée telle que :
2
I (q)  (sin qRx  qRx cos qRx ) 
 0.99   2  h  n( R)  V 2   3 3

I0  ( qRx ) 
2
(65)
 (sin qRy  qRy cos qR y ) 
 0.01  2  h  n( R)  V 2   3 
 ( qR ) 3 
 y 

On montre ainsi que la diffusion liée aux fibres dans le cas de composites polymères est très
influencée par les fibres qui ne sont pas orientées. Cette technique ne permet donc pas de
donner des résultats quantitatifs sur la présence de cavités.

2.5 Diffusion des neutrons

Les caractérisations par diffusion des rayons X ont été réalisées sur des éprouvettes de
polyamide renforcé de fibres de verre fatiguées à 140°C. Les échantillons sont pré-fatigués
dans notre laboratoire. Ils sont ensuite coupés pour obtenir une épaisseur optimale, et gonflés
dans l’eau lourde selon la méthode présentée au chapitre 2. Comme pour les caractérisations
par SAXS, les mesures sont réalisées en USANS dans la zone de peau où les fibres sont bien
orientées dans la direction de la contrainte macroscopique, afin de minimiser le signal des
fibres de verre dans la direction parallèle à la contrainte et aux fibres.

2.5.1 Estimation des contrastes de densité de longueur de diffusion

La technique de diffusion des neutrons permet de mettre en évidence les hétérogénéités de


densité de longueur de diffusion des neutrons  (m-2):
b  NA  d
 (66)
M
avec b la longueur de diffusion de l’espèce (noyau atomique) considérée (m), NA le nombre
d’Avogadro, d la densité du matériau (kg/m-3), et M la masse moléculaire de l’espèce (kg/mol).
Lorsque plusieurs espèces sont en présence la densité de diffusion du matériau dépend des
fractions volumiques des différentes espèces :
  b  d  NA
 ( FV )   i i i (67)
Mi
avec i la fraction volumique du constituant i, bi sa longueur de diffusion, di sa densité et Mi
sa masse molaire.

Pour le polyamide 6,6 de formule brute C12H22O2N2, on connaît sa masse molaire


M(PA6,6)=0.226 kg/mol, sa densité d(PA6,6)=1140 kg/m3, sa longueur de diffusion
b(PA6,6)  2.7856  10 12 cm . On obtient une densité de longueur de diffusion de
 (PA6,6)  0.8462  1010 cm 2 .

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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

Pour l’eau lourde D2O, on a b( D2O)  1.9245  10 12 cm , d(D2O)=1105.6 kg/m3, et


M(D2O)=0.02 kg/mol, d’où  ( D2O)  6.3732  1010 cm 2 .
Les protons portés par les liaisons amides sont échangeables. Le polyamide 6,6 a deux protons
échangeables par monomère. Nous postulons qu’à l’équilibre tous les protons échangeables du
polyamide ont été remplacés par un atome de deutérium. Pour le polyamide 6,6 gonflé de 10%
de D2O à l’équilibre, on obtient b( PA6,6 H  2 D2 )  4.868  10 12 cm et
 ( PA6,6 H  2 D2 )  1.4658  10 cm , d’où  ( PA6,6 gonfléD2O)  1.3630  10 cm .
10 2 10 2

La composition volumique des fibres de verre E et les caractéristiques des différents


constituants sont données dans le tableau suivant (Figure 128).

Fraction Masse Longueur


Densité di
constituant volumique molaire Mi de diffusion
(kg/m3)
i (kg/mol) bi (10-12cm)
SiO2 0.652 0.060 2200 1.57713
Al2O3 0.104 0.102 3970 2.4307
CaO 0.135 0.056 3350 1.0603
MgO 0.037 0.040 3600 1.1463
B 2 O3 0.072 0.070 3130 3.0709
Figure 128 : Caractéristiques des fibres de verre E.

On obtient  ( FV )  4.1955  1010 cm2 .

Afin d’augmenter le contraste de densité de longueur de diffusion entre les cavités et la


matrice polyamide, nous avons gonflé les échantillons d’eau lourde D2O. Nous pouvons ainsi
comparer les contrastes de longueur de diffusion causés par les fibres et les cavités dans le cas
du matériau sec et du matériau gonflé, pour des cavités vides et pour des cavités peines de
50% de polymère.
Pour des cavités vides dans une matrice polyamide sèche, on
obtient :   0.7160  10 cm .
2 20 4

Pour des fibres de verre dans la matrice polyamide sèche, on obtient :  2  17 .602  10 20 cm4 .
Pour des cavités pleines de D2O dans une matrice polyamide gonflée de D2O, on
obtient :  2  25 .102  10 20 cm4 .
Pour des fibres de verre dans la matrice polyamide gonflée de D2O, on
obtient :  2  8.023  10 20 cm 4 .
Pour des cavités contenant 50% de polyamide et 50% de vide dans la matrice polyamide, on
obtient :  2  0.1790  10 20 cm 4
Pour des domaines d’endommagement contenant 50% de D2O et 50% de polyamide gonflé de
D2O dans la matrice polyamide gonflée de D2O, on obtient :  2  6.275 10 20 cm 4 .

2.5.2 Estimation du signal des fibres de verre

Les fibres de verre sont considérées comme des ellipses de dimensions Rx=10µm par
Ry=250µm. En se basant sur les résultats de diffusion des rayons X on considère que 99% des
fibres sont orientées parallèlement à la contrainte et que 1% des fibres sont orientées

- 162 -
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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

perpendiculairement. La diffusion des fibres de verre dans la matrice polyamide dans la


direction perpendiculaire à la contrainte est calculée telle que :
2
I (q)  (sin qRx  qRx cos qRx ) 
 0.99   2  h  n( R)  V 2   3 3

I0  ( qRx ) 
2
(65)
 (sin qRy  qRy cos qR y ) 
 0.01  2  h  n( R)  V 2   3 
 ( qR ) 3 
 y 
Cette expression est équivalente à :
2
I (q)  (sin qRx  qRx cos qRx ) 
 0.99   2  h    V   3 
I0  (qRx ) 3 
2
(68)
 (sin qR y  qR y cos qR y ) 
 0.01  2  h    V   3 
 ( qR ) 3 
 y 
Avec  la fraction volumique de fibres de verre soit 15.7%.

De même, dans la direction parallèle aux fibres la diffusion vaut :


2
I (q)  (sin qRy  qRy cosqR y ) 
 0.99   2  h    V   3 
I0  ( qR ) 3 
 y  (69)
2
 (sin qRx  qRx cosqRx ) 
 0.01  2  h    V   3 
 (qRx ) 3 

2.5.3 Etude du signal des cavités

Nous avons mis en évidence deux populations de cavités sphériques dans le polyamide
renforcé de fibres de verre : une population de taille moyenne 500nm dans la matrice (cf.
paragraphe 2.3.3. de ce chapitre), et une population de taille 3µm par 10µm environ liée à la
casse et à la décohésion des fibres (cf. paragraphe 2.2.). Une troisième population a été mise en
évidence par diffusion des rayons X dans la matrice polyamide (cf. paragraphe 1.3.2.). Nous
allons modéliser le signal de chacune de ces populations pour la comparer aux résultats
expérimentaux.

Pour la population (A) de cavités de 500nm, on considère qu’elle sont remplies de D2O après
gonflement, et on considère que leur fraction volumique maximale est de 0.1% pour
correspondre aux résultats de mesure de densité présentées au 4ème chapitre.
Pour la population (B) de cavités microniques, on considère de même qu’elles sont remplies
de D2O à équilibre de sorption et on utilise la même fraction volumique.
Pour la population (C) de cavités anisotropes, on se base sur nos mesures USAXS de
distributions de taille des cavités dans la matrice non renforcée de fibres et on considère que
dans le matériau renforcé les tailles des domaines d’endommagement sont similaires. On
considère ainsi qu’à rupture l’intensité diffusée est causée par une population de domaines
d’endommagement de facteur de forme égale à 5, d’une dimension Ry comprise entre 10nm et
1.31µm dans la direction parallèle à la contrainte et d’une dimension Rx comprise entre 50nm
et 6.55µm dans la dimension perpendiculaire à la contrainte. La fraction volumique de

- 163 -
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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

polyamide  au sein des domaines d’endommagement est un paramètre ajustable de la


modélisation. La fraction volumique des domaines d’endommagement est choisie pour
expliquer la chute du module d’Young de 20% pour ce matériau fatigué à σmax=54.5MPa dans
un environnement à 140°C (cf. chapitre 4), soit une fraction volumique de 4% pour des objets
de facteur de forme égal à 5.

La diffusion des cavités anisotropes de dimensions Rx et Ry dans la matrice polyamide dans la


direction parallèle aux fibres et à la contrainte notée IUSANS(q,Ry) est estimée à partir des
intensités expérimentales des caractérisations USAXS notée ici IexpUSAXS(q,Ry) :

 2 h 
IUSANS (q, Ry )  I expUSAXS (q, Ry )  2  USAXS  USANS (70)
 (    0) hUSANS USAXS
2

où 2 est la section efficace d’un électron (  2  7.8  10 26 cm2 ),  est la densité électronique
du polyamide (cm-3), 0 est la densité électronique de la cavité (en cm-3), ∆2 est le contraste
de densité de longueur de diffusion des neutrons (en cm-4), hUSAXS est l’épaisseur de
l’échantillon de polyamide pour les caractérisations USAXS (soit environ 0.2cm), hUSANS est
l’épaisseur de l’échantillon de polyamide pour les caractérisations USANS (soit environ
0.1cm), USAXS est la fraction volumique des domaines d’endommagement de la matrice
polyamide rompue en à 25°C et 69MPa (soit environ 1.4%), et USANS est la fraction volumique
des domaines d’endommagement du polyamide renforcé rompue en fatigue à 140°C et
54.5MPa (soit environ 4%).

De même, la diffusion de ces cavités dans la direction parallèle aux fibres et à la contrainte
notée IUSANS(q,Rx) est estimée à partir des intensités expérimentales des caractérisations
USAXS notée ici IexpUSAXS(q,Rx) :
 2 h 
IUSANS (q, Rx )  I expUSAXS (q, Rx )  2  USAXS  USANS (71)
 (    0) hUSANS USAXS
2

2.5.3.1 Caractérisations dans la direction perpendiculaire aux fibres de verre


On montre les intensités théoriques de la diffusion des fibres et des cavités en Figure 129.
1.E+06
Fibres de verre
intensité (cm-1)

1.E+05

A
1.E+04

B
C
1.E+03
0.001 0.01 0.1
-1
vecteur d'onde q (nm )
(a)

- 164 -
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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

1.E+06
A
Fibres de verre

intensité (cm-1)
1.E+05 C

1.E+04 B

1.E+03
0.001 0.01 0.1
-1
vecteur d'onde q (nm )
(b)
Figure 129 : Intensités théoriques diffusées par les cavités et les fibres dans la direction perpendiculaire
aux fibres pour le polyamide renforcé de fibres de verre fatigué à rupture (a) sec ; (b) matériau gonflé de
D2O. (A) cavités d’une taille de 500nm et d’une fraction volumique de 0.1%, (B) cavités d’une taille de 3µm
parallèlement aux fibres et 10µm perpendiculairement et d’une fraction volumique de 0.1% et (C) cavités
d’une taille de 250nm parallèlement aux fibres et 2.5µm perpendiculairement, et de fraction volumique
4%.

Le signal des cavités est très inférieur au signal des fibres de verre, ce qui rend impossible
l’étude des cavités dans la direction perpendiculaire aux fibres.

2.5.3.2 Caractérisations dans la direction parallèle aux fibres de verre


On étudie les signaux de diffusion dans la direction parallèle aux fibres et on compare les
résultats expérimentaux aux estimations de diffusion des fibres de verre et des 3 classes de
cavités (Figure 130).

1.E+06
témoin sec
B
fatigué sec
intensité (cm-1)

1.E+05
A

1.E+04

C
Fibres de verre
1.E+03
0.001 0.01 0.1
vecteur d'onde q (nm-1)
(a)

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Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

1.E+06
A témoin D2O
B fatigué D2O

intensité (cm-1)
1.E+05
C

1.E+04

Fibres de verre
1.E+03
0.001 0.01 0.1
-1
vecteur d'onde q (nm )
(b)
Figure 130 : Intensités théoriques (courbes continues) et expérimentales (marques triangulaires) diffusées
par les cavités et les fibres dans la direction parallèle aux fibres pour le polyamide renforcé de fibres de
verre fatigué à rupture (a) sec ; (b) matériau gonflé de D2O. (A) cavités d’une taille de 500nm et d’une
fraction volumique de 0.1%, (B) cavités d’une taille de 3µm parallèlement aux fibres et 10µm
perpendiculairement et d’une fraction volumique de 0.1% et (C) domaines d’endommagements anisotropes
issus des caractérisations USAXS dans la matrice PA.

La diffusion des échantillons secs est expliquée par la présence des fibres uniquement. La
différence de densité de longueur de diffusion entre la matrice polyamide et les cavités est trop
faible pour que les cavités puissent être mises en évidence.
Lorsque les échantillons sont gonflés de D2O, le signal des cavités devient supérieur au signal
de diffusion des fibres de verre. Dans ce cas le signal de diffusion théorique des cavités
anisotropes identiques à celles du polyamide non renforcé est le signal qui permet d’expliquer
au mieux le signal diffusé. La fraction volumique de polyamide au sein des domaines
d’endommagement estimée est (PAFV)=0.8. Cette valeur est très proche de la fraction
volumique de matière estimée pour l’endommagement en fatigue dans la matrice polyamide
(PA)=0.9 (cf. 1.3.2.2.).

- 166 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

Conclusion

Dans les polyamides vierges et renforcés, les mesures de champs de déformations ont montré
que l’endommagement est localisé dès les premiers stades de la fatigue. Le nombre de sites de
localisation de l’endommagement augmente avec le nombre de cycles de fatigue, et les sites
sont nombreux avant rupture. Il est donc nécessaire d’étudier l’endommagement par des
techniques statistiques comme la diffusion des rayons X.

Des observations par microscopie électronique ont mis en évidence des cavités dans le
polyamide vierge et dans le polyamide renforcé. Ces cavités semblent créées lors du
refroidissement rapide de la matière fondue dans la phase de mise en œuvre du matériau. Ces
cavités sont sphériques, de distribution de taille large allant de 20nm à environ 3µm. Des
observations microscopiques quantitatives par analyse d’images et des caractérisations par
diffusion des rayons X dans le polyamide non renforcé ont montré que ces cavités représentent
une fraction volumique initiale de 0.1% et que la distribution de taille des cavités suit une loi
de puissance. Le nombre de cavités de taille micronique augmente faiblement en fatigue, et la
fraction volumique à rupture mesurée est d’environ 0.2%. En conséquence, ces cavités ne
peuvent pas expliquer l’évolution des propriétés macroscopiques montrées au chapitre 4, et en
particulier la chute du module dynamique d’environ 10% dans le polyamide non renforcé.

Nous avons mis en évidence par diffusion des rayons X dans le polyamide non renforcé la
nucléation et la croissance d’une population de domaines d’endommagement anisotropes
permettant d’expliquer l’évolution des propriétés du polyamide en fatigue. Nous proposons un
mécanisme en trois étapes qui correspond à la bibliographie sur les craquelures.
Dans une première étape, des cavités nanométriques sphériques d’un diamètre de 20 à 220nm
sont formées sous la contrainte cyclique. Ces dernières sont très probablement nucléés dans la
phase amorphe entre les lamelles cristallines orientées perpendiculairement à la contrainte. En
effet dans cette direction la contrainte de traction dans la phase amorphe est maximale, et la
séparation des lamelles implique une variation de volume locale. Cela signifie que ces cavités
sont certainement localisées à l’équateur des sphérolites. La distance typique entre les
lamelles cristallines dans les directions parallèles et perpendiculaires à la contrainte sera
précisée dans le chapitre suivant. La présence des cavités sphériques microniques suite à la
mise en œuvre par injection cause une forte concentration locale de la contrainte
macroscopique et favorise sans doute la nucléation des cavités submicroniques.
Ensuite, certaines de ces cavités croissent dans la direction perpendiculaire à la contrainte et
cette dimension perpendiculaire augmente avec le nombre de cycles de fatigue. Ces cavités
sont anisotropes et orientées perpendiculairement à la rupture. Nous avons montré qu’un
facteur de forme de 5 permet d’expliquer les courbes de diffusion, et nous avons postulé que
les cavités sont pontées par des fibrilles représentant 90% du volume des cavités. A la rupture
ces domaines d’endommagement ont une dimension Ry comprise entre 10nm et 1.31µm dans
la direction parallèle à la contrainte et une dimension Rx comprise entre 50nm et 6.55µm dans
la dimension perpendiculaire à la contrainte.
Des caractérisations par microscopie électronique à transmission laissent penser que ces
domaines d’endommagement anisotropes évoluent pour former les craquelures observées sous
la rupture. Nous avons montré par microscopie que les fibrilles des craquelures cèdent pour
former des fissures ouvertes qui conduisent à la rupture.

- 167 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 5 : Caractérisations à l’échelle microscopique

Pour les polyamides renforcés de fibres de verre, nous avons montré dans le chapitre précédent
que les mécanismes d’endommagement sont certainement matriciels et similaires à ceux du
polyamide non renforcé. Dans ce chapitre nous avons observé que le déchaussement des fibres
est très limité, ce qui correspond à la littérature sur les polyamides sec renforcés de fibres.
Nous observons également une fraction de fibres cassées sous la contrainte cyclique. Nous
avons montré par des caractérisations par diffusion des neutrons que l’endommagement
observé dans le polyamide vierge permet d’expliquer les courbes de diffusion dans le
polyamide renforcé de fibres, avec une fraction volumique de polyamide dans les domaines
d’endommagement de 80%. Il semble donc probable que l’endommagement dans le PA
renforcé soit le même endommagement que dans le PA non renforcé. Néanmoins, pour
affirmer que les propriétés macroscopiques dépendent uniquement de cet endommagement
matriciel et non pas de la casse des fibres, il faudrait quantifier le nombre de fibres cassées et
calculer leur influence sur les propriétés macroscopiques.

- 168 -
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Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

6
Caractérisations à l’échelle nanométrique

1 Etude de la maille cristalline par WAXS dans le PA renforcé de fibres


de verre
1.1 Influence de la fatigue sur l’isotropie de la phase cristalline à l’échelle de la maille
1.2 Influence de la fatigue sur la perfection de la maille cristalline

2 Etude de la structure cristalline par SAXS 2D


2.1 PA non renforcé
2.1.1 Soustraction du signal des cavités
2.1.2 Etude du signal des lamelles cristallines
2.1.3 Quantification du volume soumis à la séparation des lamelles
2.1.4 Prise en compte d la corrélation spatiale des domaines
d’endommagement
2.2 PA renforcé de fibres de verre

- 169 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

- 170 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle


nanométrique

Nous avons observé un durcissement du matériau en fatigue pour les températures voisines ou
supérieures à la transition vitreuse. Ce durcissement a été mis en évidence par une
augmentation du module d’Young lors des mesures macroscopiques du chapitre 4. A l’échelle
microscopique au chapitre 5, nous avons mis en évidence la nucléation de cavités et leur
propagation en craquelures, et ces phénomènes ne peuvent que cause une chute de la valeur
mesurée du module élastique. Nous allons donc dans ce chapitre 6 étudier l’évolution de la
microstructure du polyamide à l’échelle nanométrique, c’est-à-dire à l’échelle de la perfection
de la maille cristalline et à l’échelle des lamelles cristallines.
Nous avons montré que la chute du module dynamique peut être expliqué par la croissance de
domaines d’endommagement anisotropes localisés à l’équateur des sphérolites. Cet
endommagement semble avoir pour origine la nucléation de cavités nanométriques dans la
phase amorphe localisée entre les lamelles cristallines orientées perpendiculairement à la
contrainte. Nous chercherons dans ce chapitre à quantifier la séparation lamellaire, et à savoir
si la nucléation de cavités nanométriques a une influence irréversible sur la distance typique de
répétition entre la phase amorphe et la phase cristalline. La quantification de la séparation
lamellaire permettra de définir un volume de localisation de l’endommagement et de tenir
compte de la corrélation spatiale des objets. Nous préciserons alors les caractéristiques des
domaines d’endommagement proposées au chapitre 5.

1 Etude de la maille cristalline par WAXS dans le PA


renforcé de fibres de verre

1.1 Influence de la fatigue sur l’isotropie de la phase cristalline à


l’échelle de la maille

Nous avons montré au chapitre 2 que l’orientation des fibres de verre est dépendante de la
profondeur dans l’épaisseur de l’éprouvette (structure cœur-peau). L’orientation des fibres de
verre influence directement la rigidité du composite, et donc potentiellement la localisation de
l’endommagement. C’est pourquoi nous avons caractérisé la phase cristalline et son évolution
en fatigue pour les zones d’orientation des fibres différentes. La Figure 131 présente la figure
de diffraction pour le polyamide 6,6 chargé fibres de verre non fatigué et fatigué jusqu’à
rupture pour des zones de l’éprouvette différentes. Les conditions de fatigue pour l’échantillon
présenté ici étaient 82MPa et un environnement de 65°C.

- 171 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

(a) (b)
Figure 131 : image WAXS pour le composite PA 6,6 – 30% fibres de verre (a) non fatigué ; (b) fatigué
jusqu’à rupture, observation au bord de l’éprouvette.

Les images obtenues montrent les pics de diffraction de la phase α du polyamide 6,6. Les deux
anneaux de diffraction que l’on observe correspondent aux plans (100) et au doublet (110),
(010) de la maille triclinique du PA 6,6. L’image 2D montre que l’organisation est isotrope.

Afin d’étudier avec précision l’isotropie de l’organisation cristalline des échantillons, on peut
découper l’image en secteurs et calculer la moyenne de l’intensité en fonction de la distance au
centre pour chacun des secteurs (Figure 132). Les figures obtenues ont été découpées en 36
secteurs de 10°. Pour des raisons de clarté dans la présentation des résultats nous ne montrons
dans la figure suivante que les secteurs équatoriaux et azimutaux.

250

90°
200
intensité (unités arbitraires)

180°
270°
150

100

50

0
20 25 30 35 40 45 50
vecteur d'onde q (nm-1)
(a)

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

250

90°
200

intensité (unités arbitraires)


180°
270°
150

100

50

0
20 25 30 35 40 45 50
vecteur d'onde q (nm-1)
(b)
250

90°
200
intensité (unités arbitraires)

180°
270°
150

100

50

0
20 25 30 35 40 45 50
vecteur d'onde q (nm-1)
(c)
Figure 132 : Analyse WAXS par secteurs pour le composite PA 6,6 – 30% (a) non fatigué ; (b) fatigué
jusqu’à rupture observation près du bord ; (c) fatigué jusqu’à rupture observation au cœur. Conditions de
fatigue : σmax=82MPa - environnement de 65°C.

Pour le polyamide non fatigué les positions, largeurs à mi-hauteur et intensités des maxima des
pics sont similaires pour tous les secteurs, c’est-à-dire dans toutes les directions.
L’organisation cristalline à l’échelle de la maille cristalline est donc isotrope et la fatigue
n’influence pas cette isotropie à T~Tg quelle que soit la zone de l’éprouvette.

1.2 Influence de la fatigue sur la perfection de la maille cristalline

La phase α du polyamide 6,6 est plus ou moins bien organisée. On définit une phase αI plus
ordonnée (plus dense) et une phase αII contenant plus de défauts (moins dense). Les paramètres
de maille de ces deux phases sont précisées dans la littérature et l’écartement entre le pic (100)
et le doublet (010), (110) est plus important dans le cas de la phase αI. On peut alors
caractériser le degré de perfection cristalline du polyamide 6,6 à partir de la différence entre les
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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

positions des deux pics. Afin d’évaluer l’influence de la fatigue sur la perfection du cristal
nous avons caractérisé l’évolution des paramètres de la maille cristalline.
La structure cristalline étant isotrope, il est possible de conclure depuis l’étude d’une seule
direction ou de la moyenne des secteurs angulaires. La position des pics est plus précise en 1D
qu’en 2D. Dans le but de comparer les pics (positions, largeurs à mi-hauteur, maxima), nous
avons donc utilisé un autre diffractomètre RX 1D en transmission. Les résultats sont présentés
en Figure 133.

2500
non fatigué
2000 fatigué
intensité (unités arbitraires)

1500

1000

500

0
20 30 40 50
vecteur d'onde q (nm-1)

Figure 133 : moyenne du spectre WAXS pour le composite PA 6,6 – 30% fibres de verre. Conditions de
fatigue : σmax=82MPa - environnement de 65°C.

Avec l’appareil 1D les positions des pics pour le matériau fatigué sont identiques à celles du
matériau non fatigué. On peut en déduire que les analyses des spectres conduisent à des
graphiques quasi identiques pour les matériaux fatigués et non fatigués.
La fatigue n’influence donc pas la perfection cristalline des cristallites du polyamide 6,6
chargé 30% fibres de verre à T~Tg.

2 Etude de la structure cristalline à l’échelle des


lamelles par SAXS 2D
Pour cette étude, nous avons pré-fatigué des échantillons dans notre laboratoire pendant
différents nombres de cycles pour caractériser l’évolution de la structure cristalline en fatigue.
Les échantillons sont ensuite caractérisés par diffusion des rayons X aux petits angles sur la
ligne BM2 de l’ESRF. Nous avons conçu une machine de traction in situ équipée d’un capteur
de force et d’une enceinte thermique pour étudier les échantillons sous contrainte et en
température. La méthode est expliquée en détails dans le chapitre 2. Les résultats des
caractérisations par diffusion des rayons X aux petits angles ont déjà été présentés au chapitre
5 dans le polyamide vierge afin de montrer que les cavités ne s’ouvrent pas sous la contrainte.
Nous allons reprendre les spectres de diffusion pour nous intéresser maintenant au signal des
lamelles cristallines. L’étude du signal 2D des lamelles cristallines va nous permettre de
quantifier la séparation lamellaire en fonction de l’orientation des lamelles par rapport à la

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

contrainte macroscopique. Pour le polyamide vierge et renforcé de fibres de verre, les signaux
seront dans un premier temps analysés dans la direction parallèle et dans la direction
perpendiculaire à la contrainte afin de mettre en évidence le phénomène de séparation
lamellaire. Le signal des cavités aux petits angles a une pente d’environ -3, nous allons le
soustraire aux spectres avant de comparer les anneaux de diffusion des lamelles cristallines.
Dans le polyamide renforcé de fibres de verre, le signal des fibres a une pente d’environ -4, il
sera de même soustrait afin de mieux comparer les signaux des lamelles. Dans un deuxième
temps, les spectres 2D seront dissociés en 36 secteurs de 10°, ce qui nous permettra de définir
le volume du sphérolite dans lequel le phénomène de séparation lamellaire a lieu.

2.1 PA non renforcé

L’objectif de cette partie est de quantifier l’influence de la fatigue et de la traction in situ sur la
distance de répétition entre lamelles cristallines dans le polyamide non renforcé. Le matériau
de cette étude est un polyamide vierge fatigué pendant 300 00 cycles dans un environnement à
25°C sous une contrainte σmax=69MPa. Les images SAXS 2D sont analysées selon 36 secteurs
de 10° (Figure 134). Les spectres de diffusion dans la direction parallèle à la contrainte
correspondent à la moyenne des intensités des 6 secteurs 255° à 285° et 75° à 105° et
permettent d’étudier les caractéristiques des lamelles orientées perpendiculairement à la
contrainte. Les spectres de diffusion dans la direction perpendiculaire à la contrainte
correspondent à la moyenne des intensités des 6 secteurs -15° à 15° et 165° à 195° et
permettent d’étudier les caractéristiques des lamelles orientées parallèlement à la contrainte.

σ
270°

180° 30° 0°

90°
Figure 134 : Analyse des images de diffusion selon 36 secteurs de 10°. La flèche représente la direction de
la contrainte macroscopique.

2.1.1 Soustraction du signal des cavités

Pour obtenir plus de précision sur le signal des lamelles, nous allons soustraire le signal des
cavités des spectres de diffusion. Ce signal est linéaire en échelle logarithmique dans chacune
des directions parallèle et perpendiculaire à la contrainte (Figure 135).

- 175 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

2
1. non fatigué
1.5 4. 2. non fatigué sous contrainte
3. 3. fatigué
2.
1 1. 4. fatigué sous contrainte

log intensité (U.A.)


0.5 1. y = -3.526x - 3.4401
2. y = -3.5145x - 3.3231
0 3. y = -3.7412x - 3.2321
-0.5 4. y = -3.7675x - 3.1519

-1

-1.5

-2
-1.5 -1.3 -1.1 -0.9 -0.7 -0.5 -0.3 -0.1 0.1

(a) log vecteur d'onde (nm-1)

1.5
4. 1. non fatigué
1 3. 2. non fatigué sous contrainte
2. 3. fatigué
1.
4. fatigué sous contrainte
log intensité (U.A.)

0.5
1. y = -3.471x - 3.3806
0 2. y = -3.5522x - 3.3821
3. y = -3.6371x - 3.4042
-0.5 4. y = -3.6211x - 3.3387

-1

-1.5

-2
-1.5 -1.3 -1.1 -0.9 -0.7 -0.5 -0.3 -0.1 0.1
-1
(b) log vecteur d'onde (nm )

Figure 135 : Courbes de diffusion du polyamide avant et après 300 000 cycles de fatigue à σmax=69MPa
dans un environnement à 25°C (a) direction 90° ; (b) direction 0°. Les valeurs de contrainte sont
σmax=50MPa pour le polyamide non fatigué et σmax=42MPa pour le polyamide fatigué.

Les intensités des signaux des cavités mesurés sont donc de la forme :
log( I cavités )  a log q  b (72)

On normalise les spectres par le signal des cavités linéaires en échelle logarithmique de la
façon suivante :

I normalisé  I mesuré  I cavités (73)

- 176 -
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Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

2.1.2 Etude du signal des lamelles cristallines

La soustraction du signal des cavités permet de comparer la position des pics des lamelles
cristallines, leur largeur à mi-hauteur et leur intensité (Figure 136).

0.24
non fatigué
0.22
non fatigué sous contrainte
0.2 fatigué

log intensité (mm-1)


0.18 fatigué sous contrainte

0.16
0.14
0.12
0.1
0.08
0.06
0.04
0.4 0.6 0.8 1 1.2
-1
log vecteur d'onde q (nm )
(a)
0.24
non fatigué
0.22 non fatigué sous contrainte
0.2 fatigué
fatigué sous contrainte
0.18
intensité (mm-1)

0.16
0.14
0.12
0.1
0.08
0.06
0.04
0.4 0.6 0.8 1 1.2
-1
vecteur d'onde q (nm )
(b)
Figure 136 : Intensité diffusée par les lamelles cristallines dans le polyamide avant et après 300 000 cycles
de fatigue à σmax=69MPa dans un environnement à 25°C, avec soustraction du signal des cavités (a)
direction 90°; (b) direction 0°. Les valeurs de contrainte sont σmax=50MPa pour le polyamide non fatigué et
σmax=42MPa pour le polyamide fatigué.

La position des pics des lamelles cristalline n’est pas modifiée par la fatigue, quelle que soit la
direction d’analyse.

La traction in situ est sans effet sur les lamelles orientées parallèlement à la contrainte. Au
contraire, l’intensité diffusée par les lamelles orientées perpendiculairement à la contrainte est
plus intense sous chargement, ce qui signifie que le nombre de lamelles orientées
perpendiculairement a augmenté. Les lamelles dans le plan équatorial des sphérolites
s’orientent perpendiculairement à la contrainte. De plus, le déplacement du pic des lamelles

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Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

perpendiculaires à la contrainte vers des plus petites valeurs de q indique que les lamelles
s’écartent.

Pour cette étude nous avons modélisé le signal des lamelles par une fonction lorentzienne à
l’aide du logiciel Fit2D développé par l’ESRF. Un exemple de modélisation est donné en
Figure 137 et les résultats sont regroupés en Figure 138.

Figure 137 : Exemple de modélisation du pic des lamelles cristallines par une fonction de Lorentz à l’aide
du logiciel Fit2D.

non fatigué / fatigué /


non fatigué σ=50MPa fatigué σ=42MPa
position (nm-1) 0.701 0.680 0.705 0.677
distance de répétition
8.96 9.24 8.91 9.28
moyenne (nm)
maximum (mm-1) 0.167 0.203 0.153 0.197
largeur à mi-hauteur (nm-1) 0.236 0.234 0.233 0.228
Figure 138 : Résultats des modélisations des pics des lamelles cristallines orientées dans la direction
perpendiculaire à la contrainte avec le logiciel Fit2D.

Le maximum du pic des lamelles cristallines pour le polyamide fatigué 300 000 cycles est
obtenu pour un vecteur de diffusion (q=8.91nm-1) très proche de celui concernant le polyamide
non fatigué (q=8.96nm-1). Sous contrainte, le maximum est obtenu respectivement à q=9.28nm
pour le polyamide fatigué et à q=9.24nm pour le polyamide non fatigué. Il en résulte une
déformation locale de 3% environ. En considérant que la contraction dans la direction
perpendiculaire est empêchée par le réseau cristallin [13], on en déduit une variation de
volume locale de 3% également. Ce phénomène est globalement réversible, car même après un
grand nombre de cycles de fatigue les lamelles cristallines retrouvent leur distance de

- 178 -
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Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

répétition initiale. La nucléation de cavités nanométriques résulte certainement de la séparation


des lamelles cristallines, mais ce phénomène n’est irréversible que localement et la distance
caractéristique de répétition entre la phase amorphe et la phase cristalline est en moyenne
inchangée lorsque la contrainte est relâchée. Les largeurs à mi-hauteur des pics sont plus
faibles pour le matériau fatigué. On peut en déduire que la distribution des distances de
répétition des lamelles cristallines est un peu plus faible, autrement dit que la structure
cristalline à l’échelle des lamelles s’est un peu homogénéisée.

2.1.3 Quantification du volume soumis à la séparation des lamelles

Nous avons montré dans le paragraphe précédent que les lamelles cristallines orientées
perpendiculairement à la contrainte se séparent sous traction. Dans cette partie, nous allons
étudier plus précisément ce phénomène de séparation lamellaire sous contrainte en fonction de
l’orientation des lamelles afin de définir le volume dans lequel ce phénomène est significatif.
On définit un angle  entre la direction des lamelles et la direction de référence (Figure 139).
Les résultats sont présentés en Figure 140.

-90°

σ σ

y 0°

x détecteur

RX

échantillon

Figure 139 : Définition de l’angle  entre la direction des lamelles cristallines et la direction de référence.

L’écartement des lamelles est une fonction croissante de la direction des lamelles dans le
repère présenté en Figure 139 (Figure 140).

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Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

1.E+07
-90°
-80°
-70°
-60°

intensité (U.A.)
-50°
-40°
1.E+06 -30°
-20°
-10°

1.E+05
0.1 1
-1
vecteur d'onde q (nm )

Figure 140 : Spectres de diffusion des lamelles cristallines en fonction de leur orientation (en unités
arbitraires). Pour une direction de -90° les lamelles sont orientées perpendiculairement à la contrainte et
pour une direction de 0° les lamelles sont orientées parallèlement à la contrainte.

La distance de répétition de référence pour les lamelles cristallines est mesurée pour le
matériau non fatigué à contrainte nulle. On modélise la distance de répétition des lamelles
cristallines en fonction de leur orientation à l’aide du logiciel Fit2D pour le polyamide fatigué
puis soumis à une contrainte de 40MPa in situ. Le module élastique dynamique de ce matériau
fatigué est de 2700MPa (cf. chapitre 4). La déformation macroscopique est donc de 1.5%
environ. La Figure 141 présente la variation locale de volume dans la phase amorphe
interlamellaire en fonction de pour l’angle  compris entre 0° et 90°. Par symétrie on construit
la figure Figure 141 (b) pour des angles  compris entre -90° et 90°.

angle  Position distance de variation locale


(nm-1) (nm-1) répétition (nm) de volume (%)
référence 0.695 9.04 0
0 0.666 9.43 4.31
10 0.664 9.46 4.65
20 0.666 9.43 4.31
30 0.668 9.40 3.98
40 0.674 9.32 3.10
50 0.680 9.24 2.21
60 0.858 9.16 1.33
70 0.6915 9.09 0.55
80 0.693 9.07 0.33
90 0.692 9.08 0.44
(a)

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Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

variation locale de volume (%)


4.5
4
3.5
3
2.5
2
1.5
1
0.5
0
-100 -50 0 50 100
angle Y (°)
(b)
Figure 141 : Etude de la séparation lamellaire en fonction de l’angle  entre la direction des lamelles et la
direction de référence (a) résultats des modélisations avec le logiciel Fit2D ; (b) représentation de la
variation de volume locale en fonction de l’angle .

La déformation moyenne est de 2.3%. La variation de volume locale est maximale pour un
angle  inférieur à 30°. L’endommagement décrit au chapitre 5 est probablement localisé dans
cette zone de séparation des lamelles maximale. On considère donc que les domaines de faible
densité que nous avons proposés sont spatialement corrélés dans un angle solide de 60° autour
du plan équatorial des sphérolites (Figure 142).

2 =60°

Figure 142 : Localisation de l’endommagement dans la zone équatoriale du sphérolite telle que 2=60°.

L’endommagement est ainsi localisé dans un volume d’environ 33% du sphérolite.

2.1.4 Prise en compte de la corrélation spatiale des domaines


d’endommagement

Les domaines d’endommagement étant spatialement corrélés dans le matériau dans un volume
de 33% du sphérolite, il en résulte que la fraction volumique moyenne nécessaire pour
expliquer la chute du module dynamique du matériau est 66% inférieure à nos estimations
proposées au chapitre 5. Nous avons repris notre modélisation des spectres USAXS (Figure
114 et Figure 116) en divisant par 3 la fraction volumique estimée précédemment. Nous avons
- 181 -
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Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

adapté les valeurs de densité de matière  dans les domaines d’endommagement afin d’obtenir
les valeurs des intensités expérimentales. Les résultats obtenus sont présentés en Figure 143 et
Figure 144.

Domaines d’endommagement formés en


fatigue
=0.83
Nombre ∆R 2 Rmin Rmax NP’ α 
-2+α
de (nm) (°) (nm) (nm) (cm )
cycles
0 20 - - - - - -
2.103 20 60 10 110 1.0 10-1 2.5 1
1.104 20 60 10 110 1.5 10-1 2.5 1
3.105 20 60 10 190 1.5 10-3 2.5 5
60 10 190 2.5 10-3 2.5 5
rupture 20
60 10 1310 1.3 10-4 2.5 5
Figure 143 : Paramètres de modélisation des spectres de diffusion dans le PA.

Nombre de VP (domaines d’endommagement en


cycles fatigue)
(%)
0 -
2.103 0.17
1.104 0.25
3.105 0.14
rupture 0.47
Figure 144 : Evolution des fractions volumiques des domaines d’endommagement en fonction du nombre
de cycles de fatigue.

En tenant compte de la corrélation spatiale des domaines d’endommagement, on explique la


chute du module à rupture présentée au chapitre 4 par la présence de domaines anisotropes
orientés perpendiculairement à la contrainte et contenant 83% de matière.

2.2 PA renforcé de fibres de verre

Le signal des fibres de verre est linéaire en échelle logarithmique et on normalise les courbes
en soustrayant ce signal de la même façon que celui des cavités dans le polyamide non
renforcé (Figure 145).

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Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

0.25
non fatigué
non fatigué sous contrainte
0.2
fatigué

intensité normalisée
fatigué sous contrainte

(unités arbitraires)
0.15

0.1

0.05

-0.05
0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2
-1
vecteur d'onde q (nm )
(a) T<Tg
0.25
non fatigué
non fatigué sous contrainte
0.2
fatigué
intensité normalisée

fatigué sous contrainte


(unités arbitraires)

0.15

0.1

0.05

-0.05
0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2
-1
vecteur d'onde q (nm )
(b) T~Tg
0.25
non fatigué
non fatigué sous contrainte
0.2
fatigué
intensité normalisée

fatigué sous contrainte


(unités arbitraires)

0.15

0.1

0.05

-0.05
0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2
-1
(c) T>Tg vecteur d'onde q (nm )
Figure 145 : Intensité diffusée par les lamelles cristallines orientées perpendiculairement à la contrainte
dans le polyamide renforcé de fibres de verre avant et après fatigue, avec soustraction du signal des cavités
(a) T<Tg ; (b) T~Tg ; (c) T>Tg.

Ces spectres ont été modélisés à l’aide du logiciel Fit2D (Figure 146).

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Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

non fatigué / fatigué /


(a) T<Tg non fatigué sous fatigué sous
contrainte contrainte
position (nm-1) 0.681 0.653 0.691 0.653
distance de répétition
9.23 9.63 9.10 9.62
moyenne (nm)
maximum (mm-1) 0.105 0.178 0.168 0.244
largeur à mi-hauteur 0.171 0.178 0.168 0.190
(nm-1)

non fatigué / fatigué /


(b) T~Tg non fatigué sous fatigué sous
contrainte contrainte
position (nm-1) 0.673 0.632 0.696 0.623
distance de répétition
9.33 9.94 9.03 10.09
moyenne (nm)
maximum (mm-1) 0.160 0.180 0.193 0.185
largeur à mi-hauteur
0.219 0.230 0.146 0.251
(nm-1)

non fatigué
fatigué sous
(c) T>Tg non fatigué sous fatigué
contrainte
contrainte
position (nm-1) 0.678 0.654 0.688 0.623
distance de répétition
9.27 9.61 9.14 10.08
moyenne (nm)
maximum (mm-1) 0.173 0.185 0.180 0.177
largeur à mi-hauteur
0.221 0.230 0.220 0.263
(nm-1)
Figure 146 : Résultats de la modélisation des pics des lamelles cristallines à l’aide du logiciel Fit2D (a)
influence de la fatigue à T<Tg ; (b) T~Tg ; (c) T>Tg.

Sous contrainte, les lamelles cristallines s’écartent. La séparation lamellaire est plus
importante pour les matériaux fatigués. Cependant, la distance de répétition entre les lamelles
pour les matériaux déchargés est plus faible pour les matériaux fatigués, qui ont subi un grand
nombre de tractions répétées.

La Figure 147 présente la variation de volume locale calculée d’après la distance de répétition
entre les lamelles cristallines.

non fatigué fatigué


Contrainte in Déformation Contrainte in Déformation
situ (MPa) volumique (%) situ (MPa) volumique (%)
T<Tg 83 4.33 70 5.71
T~Tg 69 6.54 68 11.8
T>Tg 70 3.67 66 10.3
Figure 147 : Influence de la fatigue sur la variations de volume locale pour les lamelles orientées
perpendiculairement à la contrainte lors de la traction du le polyamide renforcé de fibres de verre.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

La séparation des lamelles en traction est ici clairement montrée. La distance de répétition
entre lamelles cristallines sous contrainte est plus importante pour les matériaux fatigués, et la
variation de volume locale augmente également avec la fatigue de manière significative.

Les variations de volume locales causées par la traction in situ jusqu’à la contrainte maximale
de fatigue sont très similaires pour toutes les températures. Compte tenu des dispersions sur la
valeur de contrainte appliquée in situ et des incertitudes des modélisations des pics des
lamelles, on peut conclure que la variation de volume locale dans le polyamide renforcé de
fibres de verre non fatigué est indépendante de la température et quasi identique à la variation
de volume locale dans le polyamide vierge, soit environ 4% à l’équateur des sphérolites. Une
même durée de vie en fatigue correspond alors à un couple (σmax ; T) causant une même
déformation à l’échelle des lamelles cristallines.

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Chapitre 6 : Caractérisations à l’échelle nanométrique

Conclusion

Les caractéristiques de la maille cristalline ne sont pas modifiées par la sollicitation de fatigue,
et nous avons mentionné précédemment que le taux de cristallinité des matériaux est
globalement constant au cours de la fatigue. L’augmentation du module élastique lors des
premiers cycles de fatigue aux températures égales et supérieures à la transition vitreuse ne
peut pas être expliquée ni par une perfection de la phase cristalline, ni par une augmentation du
taux de cristallinité. Cependant, la calorimétrie différentielle à balayage et la diffraction des
rayons X sont des techniques qui moyennent sur un grand volume qui ne permettent peut-être
pas de montrer des variations locales de la structure du matériau.

Les lamelles cristallines orientées perpendiculairement à la contrainte macroscopique


s’écartent à chaque cycle et retrouvent en moyenne leur position initiale à chaque
déchargement. La nucléation des cavités nanométriques mise en évidence au chapitre 5 est très
certainement favorisée par cette séparation des lamelles. La séparation lamellaire est plus
importante pour les matériaux fatigués, ce qui signifie que l’endommagement en fatigue
localisé dans l’amorphe interlamellaire cause une déformation locale plus importante.
Cependant l’apparition de ces cavités n’est pas corrélée à une augmentation irréversible de la
distance interlamellaire. Au contraire, nous avons montré que la distance entre lamelles
diminue avec la fatigue dans le polyamide renforcé de fibres de verre.

Nous avons montré que la séparation lamellaire est une fonction croissante de l’angle entre la
direction des lamelles cristallines et la direction de la contrainte macroscopique. A partir des
caractérisations SAXS 2D dans le polyamide vierge, nous avons mesuré la déformation locale
de volume en fonction de l’orientation des lamelles. En considérant que l’endommagement est
localisé dans les zones de séparation des lamelles importantes, nous montrons que
l’endommagement décrit au chapitre 5 est certainement localisé dans un volume de +/- 30° par
rapport au plan équatorial des sphérolites. L’endommagement est ainsi localisé dans un
volume d’environ 33% du sphérolite. En tenant compte de la corrélation spatiale des domaines
d’endommagement, on explique la chute du module à rupture présentée au chapitre 4 par la
présence de domaines anisotropes orientés perpendiculairement à la contrainte et contenant
83% de matière. La fraction volumique des domaines d’endommagement est de 0.47% et la
chute de densité correspondante est inférieure à 0.1%. Ces résultats permettent d’expliquer la
chute du module dynamique de 8%. Ce mécanisme permet donc d’expliquer l’ensemble des
caractérisations macroscopiques de l’endommagement présentées au chapitre 4.

Enfin, la déformation à l’échelle des lamelles cristalline orientées perpendiculairement à la


contrainte est similaire pour des essais de mêmes durées de vie réalisés à des températures
différentes. De plus, cette valeur de déformation locale est identique pour le polyamide vierge
et renforcé de fibres de verre et vaut environ 4%.

- 186 -
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Chapitre 7 : Interprétation physique

7
Interprétation physique

1 Endommagement en fatigue
1.1 Notion d’hétérogénéités de contraintes locales
1.2 Evolution logarithmique du module dynamique en régime de fatigue stable
1.3 Evolution catastrophique des propriétés macroscopiques avant rupture
1.4 Influence de la fréquence

2 Critère de rupture en fatigue


2.1 Notion de fraction de sites de rupture critique
2.2 Linéarité des courbes de Wöhler
2.3 Normalisation en température par un critère de déformation
2.3.1 Identification des constantes  et 
2.3.2 Energie d’activation de la rupture
2.3.3 Volume d’activation

3 Nucléation et croissance de domaines de faible densité


2.1 Energie de nucléation des cavités
2.2 Contrainte macroscopique critique de nucléation
2.3 Volume d’activation

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Chapitre 7 : Interprétation physique

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 7 : Interprétation physique

Chapitre 7 : Interprétation physique

La chapitre 3 a permis de montrer que le nombre de cycles de fatigue à rupture dans le


polyamide vierge et renforcé de fibres de verre est une simple fonction de la contrainte de
fatigue rapportée au module élastique et de deux constantes indépendantes de la température 
et . La constante  influence l’ordonnée à l’origine de la droite maîtresse et peut être
explicitée par le comportement statique du matériau. C’est la contrainte à rupture en traction
rapportée au module élastique, qui est une grandeur analogue à une déformation indépendante
de la température. La valeur de la constante  détermine la pente de la droite maîtresse.
Lorsque l’influence de la température est négligeable, c’est-à-dire pour une température
d’environnement choisie loin de la Tg du polymère, nous avons montré que le polyamide
renforcé de fibres de verre casse après avoir subi un nombre critique de cycles qui est
indépendant de la fréquence de fatigue appliquée. La valeur de la constante  est ainsi
indépendante de la vitesse de déformation. Nous avons montré au chapitre 4 que la rupture a
lieu pour une déformation élastique qui est peu dépendante de la température. Cette
déformation élastique qui contrôle la rupture pourrait être à l’origine du critère de rupture que
nous proposons. Au contraire, nous avons montré que la valeur de la déformation plastique à
rupture est très dépendante de la température et ne peut pas être un critère de rupture. Les
mécanismes de rupture du polyamide en fatigue semblent donc avoir pour origine une
déformation élastique critique cumulée lors du cyclage. Les caractérisations présentées dans le
chapitre 5 nous ont permis de mettre en évidence la nucléation de cavités nanométriques et
leur croissance dans la direction perpendiculaire à la contrainte. Nous avons montré au
chapitre 6 que la déformation élastique de la phase amorphe entre les lamelles cristallines
orientées perpendiculairement à la direction de la contrainte est considérable. Cette
déformation locale se traduit par une grande variation de densité et permet d’expliquer la
nucléation des cavités nanométriques. Dans ce chapitre nous allons approfondir
l’interprétation physique de ce critère de rupture basé sur la déformation élastique pour
expliquer l’évolution logarithmique du module dynamique, sur la base d’un modèle
d’activation thermique. Nous verrons ensuite comment cette évolution logarithmique des
propriétés macroscopiques du matériau est reliée à la linéarité des courbes de Wöhler. Enfin,
nous proposerons un modèle de nucléation des cavités dans la phase amorphe interlamellaire
qui permet d’expliquer les ordres de grandeur des énergies d’activation, volumes d’activation
et temps de rupture de notre système.

1 Endommagement en fatigue : un phénomène


thermiquement activé
Le polyamide 6,6 est un matériau peu résistant à la propagation des fissures. Lorsqu’il n’est
pas renforcé, nous avons montré que la rupture en fatigue est causée par un petit nombre
d’événements. Lorsqu’un défaut atteint une taille critique, la rupture a lieu très brutalement.
On observe donc la rupture dans le régime d’évolution logarithmique du module, avant
l’apparition du régime catastrophique. Lorsque le polyamide est renforcé de fibres de verre, le

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Chapitre 7 : Interprétation physique

nombre de sites d’endommagement est plus important. On observe une dégradation


généralisée du matériau avant la rupture qui caractérise le régime d’endommagement
catastrophique qui apparaît après le régime logarithmique (cf. chapitre 4). Dans cette partie
nous allons interpréter physiquement le régime d’évolution logarithmique des propriétés
macroscopiques et expliquer le régime final d’évolution catastrophique des propriétés
macroscopiques.

1.1 Notion d’hétérogénéités de déformations locales

Le polyamide est un matériau semi-cristallin et donc hétérogène par nature. La déformation est
donc localement hétérogène. Le polyamide renforcé de fibres de verre présente des
hétérogénéités de déformations locales supplémentaires considérables en raison du
renforcement par les fibres de verre. Ainsi la déformation macroscopique est amplifiée
localement et l’amplification locale de la déformation présente un intervalle très large. On
considère que toute l’hétérogénéité du système est exprimée par l’hétérogénéité de
déformations locales. On note cet intervalle d’amplifications locales [µ- ; µ+] et dans cet
intervalle on définit une probabilité d’amplification p(µ). Cette notion d’hétérogénéités de
déformations locales est équivalente à la notion d’hétérogénéités de barrières d’énergie dans
un modèle thermiquement activé.
Les hétérogénéités de barrière d’énergie ont été interprétées par Perez par un modèle de
fluctuations de densité [82]. Ce dernier propose la notion d’hétérogénéités de volume libre
associées à un excès local d’enthalpie et d’entropie qui permet la mobilité des polymères
amorphes. Ces hétérogénéités de volume libre sont nommées « défauts quasi-ponctuels ». Ces
défauts quasi-ponctuels sont soumis à une déformation locale en cisaillement et peuvent
former des micro-domaines cisaillés qui se propagent sous la contrainte par réarrangements
successifs au bord du micro-domaine.

1.2 Evolution logarithmique du module dynamique en régime de


fatigue stable

On considère que les mécanismes d’endommagement liés à l’initiation des craquelures sont
thermiquement activés (cf. chapitre 1) [27; 28; 108]. Nous avons montré au chapitre 6 que les
craquelures sont initiées par nucléation de domaines de faible densité dans la phase amorphe
du polyamide. Un site a pour temps caractéristique de rupture  qui dépend de la déformation
locale locale à laquelle il est soumis. On postule que les énergies d’activations U0 sont
identiques pour tous les sites. On a alors :
µ

E (t )  E (0)  exp(t /  ) p( µ)dµ


µ
(74)
 U 0   locale Kv 
avec    0 exp 
 k BT  (75)
où p(µ) est la distribution de probabilité du facteur d’amplification, E(0) la valeur initiale du
module du matériau, E(t) la valeur de ce module au temps t, 0 une constante caractéristique du

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Chapitre 7 : Interprétation physique

matériau, K le module élastique de la phase amorphe du polyamide, v le volume d’activation


du matériau, kB la constante de Boltzmann (kB=1.38 10-23 m2 kg s-2 K-1), et T la température.


La déformation locale est la déformation macroscopique amplifiée soit  locale  µ  .
E (t )
Dans un premier temps on considère que la rupture d’une fraction de sites n’influence pas les
temps de rupture des sites non rompus. On fait ainsi l’hypothèse que la chute du module est
négligeable. Nous allons montrer que cette hypothèse permet d’expliquer l’évolution
logarithmique du module dynamique en fatigue.
Si la déformation locale n’est alors pas influencée par la chute du module, on a

 locale  µ  . On obtient :
E (0)
  
 U0  µ Kv 
   0 exp  
E ( 0)
 k BT 
  (76)
 
Les sites soumis aux déformations les plus amplifiées cassent, et il faut attendre leur rupture
pour solliciter des sites sous déformation moins amplifiée. On note µp(t) un facteur
d’amplification particulier qui dépend du temps. Quand les sites d’amplification µp cassent,
cela signifie que tous les sites d’amplification plus grande comprise entre µ+ et µp sont
rompus, et tous les sites d’amplification comprise entre µp et µ- sont intacts. Les sites
d’amplification supérieure à µp ne contribuent plus au module élastique. Le module élastique a
alors pour valeur :
µp

E (t )  E (0)  exp( t /  ) p ( µ)dµ


µ
(77)
 µ 
E (t )  E (0)1   exp(t /  ) p( µ)dµ 
 µ 
 p  (78)
Or exp(-t/)0 pour t> et exp(-t/)1 lorsque t<.On obtient :
 µ 
E (t )  E (0)1   p( µ)dµ 
 µ 
 p  (79)
µ
µ  µ p
avec  p( µ)dµ  µ   µ
µp
(80)
Pour t=(µp) on obtient le temps caractéristique de rupture d’un site d’amplification de
déformation µp :
  
 U 0  µp Kv 
   0 exp  
E (0)
 k BT 
  (81)
 
On en déduit le temps nécessaire pour rompre les sites d’amplification de déformation µp :

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Chapitre 7 : Interprétation physique


U 0  µp   K v
E ( 0)
ln(t /  0 )  (82)
k BT

L’amplification de déformations µp vaut alors :


µp 
E (0)
U  k T ln(t /  0 ) (83)
  K v 0 B

L’expression du module en fonction du temps devient :


 µ  µp 
E (t )  E (0)1   
 µ  µ  (84)

 µ 
E (0)
U 0  k BT ln(t /  0 ) 
E (t )  E (0)1  Kv 
 µ  µ 
  (85)
 
 E (0)
 U 0  k BT ln(t /  0 )   µ 
E (t )  E (0) Kv 
 µ  µ 
  (86)
 
La chute logarithmique du module est ainsi expliquée par la présence d’un large intervalle
d’amplification des déformations. Pour les matériaux très homogènes dont la distribution
d’amplifications locales est étroite, le matériau ne peut s’endommager. La rupture a lieu après
une chute négligeable du module de Young (E). Pour les matériaux hétérogènes la largeur de
la distribution des amplifications locales cause la rupture des sites dont les temps de rupture
sont les plus courts car ils sont soumis aux déformations locales les plus fortes, et ce avant que
les sites de temps de rupture longs ne soient soumis à une déformation suffisante pour casser.
On a donc un endommagement avant rupture. Nous estimons que la contrainte locale autour
des têtes de fibres de verre est supérieure à la contrainte macroscopique d’un facteur L/d, avec
L la longueur des fibres et d la distance entre fibres. Nous avons montré au chapitre 2 que la
distance entre fibres vaut environ d=15µm dans le cas du polyamide renforcé de 30% de fibres
de verre. L’intervalle d’amplification de contraintes est donc compris entre -=1 et +15.

Des études antérieures sur des systèmes désordonnés modèles ont montré que
l’endommagement est une fonction linéaire du logarithme du temps. Ainsi Politi et Ciliberto
ont montré par simulations numériques que le taux d’événements de rupture décroît au cours
du temps en 1/t [89]. Ce modèle a été repris par Saichev et Sornette qui ont obtenu le même
résultat par résolution analytique [94].

1.3 Evolution catastrophique des propriétés macroscopiques avant


rupture

Nous avons montré au chapitre 4 que la chute du module dynamique dans le polyamide
renforcé de fibres de verre est très importante avant rupture, et n’est plus une fonction linéaire
du logarithme du temps. La rupture d’un certain nombre de sites influence l’amplification de la

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 7 : Interprétation physique

contrainte macroscopique sur les autres sites, c’est-à-dire que la chute du module élastique
n’est plus négligeable et influence la valeur des contraintes locales. La rupture des sites est
favorisée par la rupture des sites voisins et l’endommagement est « auto-accéléré ». Scorretti a
calculé l’endommagement à l’approche de la rupture, et a montré que le taux
d’endommagement varie en 1/(-t) [101]. De même, Santucci et al. ont obtenu une vitesse
d’avancée de fissure qui varie en 1/(-t) [95]. Dans notre système polyamide renforcé de fibres
de verre, il est donc possible que le module dynamique varie également en –log(-t). Une étude
plus approfondie permettrait d’étudier cette hypothèse.

1.4 Influence de la fréquence

Nous avons montré au chapitre 4 que l’endommagement est une fonction linéaire du
logarithme du nombre de cycles et ne dépend pas de la durée du test de fatigue. Ce résultat est
difficile à expliquer par notre modèle. Il est possible que les événements de rupture se
produisent très majoritairement au maximum de la contrainte dans notre système.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 7 : Interprétation physique

2 Rupture en fatigue

2.1 Notion de fraction de sites de rupture critique

Nous avons montré au chapitre 4 que la chute du module dépend de la contrainte appliquée et
de la température du matériau. Les valeurs de chute du module élastique à rupture sont
comprises entre 8% et 20%. Dans cette partie, nous allons chercher à interpréter les valeurs des
paramètres du modèle. La précision du modèle proposé permet à ce stade d’étudier les ordres
de grandeur des paramètres. Pour cette raison, nous considérons que la chute du module
élastique est de l’ordre de 10%.
Cette diminution de module peut être associée à une fraction sites rompus égale à 10%. On
note la fraction de sites non rompus c (environ égale à 90%), définie telle que :
  
c  p (87)
µ  µ

2.2 Linéarité des courbes de Wöhler

On peut remplacer l’expression de µp, équation (83), dans l’équation (87) précédente. On
exprime ainsi la fraction de sites non rompus à rupture en fatigue en fonction de la durée de
vie en fatigue.
E (0)
 Kv
 
U 0  k B T ln(t lifetime /  0 )  µ
c  (88)
µ  µ

On en déduit l’expression de la durée de vie en fatigue :


Kv
U
ln(t lifetime /  0 )  0  ( µ  µ ) c  µ 
k B T E ( 0) k B T
(89)

Et l’expression de la contrainte macroscopique en fonction du logarithme du temps à rupture


en fatigue, comme sont représentées les courbes de Wöhler :
U 0  E ( 0) k B T  E ( 0)
  ln(t lifetime /  0 )
v  K  ( µ  µ ) c  µ  v  K  ( µ  µ ) c  µ 
(90)

On montre ainsi la relation linéaire entre la contrainte maximale en fatigue répétée et le


logarithme du temps à rupture.

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Chapitre 7 : Interprétation physique

2.3 Normalisation en température par un critère de déformation

2.3.1 Identification des constantes  et 

Nous avons montré au chapitre 3 que les courbes de Wöhler sont normalisées par le module
élastique mesuré à la température d’échauffement en fatigue. Le nombre de cycles de fatigue à
rupture dans le polyamide vierge et renforcé de fibres de verre est ainsi une simple fonction de
la contrainte maximale de fatigue rapportée au module élastique et de deux constantes
indépendantes de la température  et  :
 m ax
  log N   (34)
E (T )
Les valeurs expérimentales pour le polyamide vierge et renforcé de fibres de verre sont =2.35
10-2 et =2.09 10-3.

En divisant l’expression de la durée de vie en fonction de la contrainte, équation (90) par le


module élastique, on obtient :
 U0 k BT
  ln(t lifetime /  0 ) (91)
E v  K  ( µ  µ ) c  µ  v  K  ( µ  µ ) c  µ 

A l’aide des équations (34) et (91) on identifie ainsi l’expression de l’ordonnée à l’origine de
la courbe maîtresse  :
U0
 (92)
K  v  ( µ  µ ) c  µ 
On vérifie que  est une grandeur homogène à une déformation.
De même, on obtient l’expression de  :
k BT
 (93)
K  v  ( µ  µ ) c  µ 
On peut en déduire que la durée de vie en fatigue sera d’autant plus longue que la phase
amorphe du polymère sera rigide, que la distribution des amplifications de déformations
locales sera large et que la fraction de sites rompus critique c sera élevée.

2.3.2 Energie d’activation de la rupture

Nous allons calculer les valeurs de l’énergie d’activation pour chaque température.

Pour une contrainte nulle, l’équation (34) montre que le logarithme du nombre de cycles à
rupture tend vers log(N)=12. Pour une fréquence de 5Hz, ce nombre de cycles correspond à un
temps de rupture t (en s) de :
N 1012
t   1011 (94)
f 5
Or le temps de choc caractéristique dans les polymères est de 010-11s [63]. On obtient le
temps de rupture équivalent :
ln t /  0  50 (95)

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Chapitre 7 : Interprétation physique

En remplaçant dans l’équation (91), on obtient :

U0 k BT
  50 (96)
K  v  (      ) c    K  v  (      ) c   
soit
U 0  50 k BT (97)

Pour les températures de nos essais de fatigue de 298K (25°C), 338K (65°C) et 413K (140°C),
on obtient les énergies d’activation suivantes :
U0(25°C)=2.0 10-19J
U0(65°C)=2.3 10-19J
U0(140°C)=2.8 10-19J
Soit pour une mole de polyamide les énergies d’activation sont égales à :
U0(25°C)=120kJ/mol
U0(65°C)=140kJ/mol
U0(140°C)=170kJ/mol
Ces valeurs d’énergie de liaison sont comprises entre l’énergie de rupture d’une liaison
hydrogène (environ 10 kJ/mol) et l’énergie de rupture d’une liaison covalente (environ 400
kJ/mol).

2.3.3 Volume d’activation

L’équation (92) permet de définir l’expression du volume d’activation v :


U0
v (98)
  K  (      ) c    
Nos estimations des champs de déformation autour des fibres ont montré que µ+ vaut environ
15. Comme nous l’avons mentionné précédemment, la fraction de sites non rompus peut être
approximée à c=90%. On peut alors estimer que les valeurs de (      ) c     sont
environ égales à (      ) c     =13.6. Les mesures expérimentales du module élastique de
la matrice polyamide en fonction de la température ont été présentées au chapitre 3 (Figure
65). On estime que le module élastique de la phase amorphe est environ 3 fois plus faible que
le module du semi-cristallin. Il est donc possible d’estimer les valeurs du volume d’activation
pour les différentes températures d’essai :
v(25 C )  0.6nm 3
v(65 C )  1nm 3
v(140 C )  5nm 3

Le volume d’activation augmente avec la température du matériau, ce résultat a été observé par
Holt dans le poly(méthyl méthacrylate) [42]. Les valeurs des volumes d’activation
correspondent aux volumes d’activation typiques des mécanismes de plasticité dans les
polymères amorphes et semi-cristallins, qui sont compris dans la littérature entre 1nm3 et
10nm3 [12; 14; 42; 93; 109].

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Chapitre 7 : Interprétation physique

3 Nucléation de domaines de faible densité

3.1 Energie de nucléation des cavités

L’augmentation du volume d’activation avec la température explique que les constantes  et 


soient indépendante de la température. En effet, cette évolution a pour conséquence que le
facteur E  v soit constant. Nous avons montré au chapitre 5 que l’endommagement en fatigue
est initié par la nucléation de cavités dans la phase amorphe du polymère. Dans cette partie,
nous proposons un modèle de nucléation de cavités dans la phase amorphe pour expliquer
l’évolution du volume d’activation en fonction du module élastique.

Nous avons montré que l’endommagement en fatigue est thermiquement activé :


 E  µ   v 
   0 exp 0 
 k BT  (76)
L’énergie de nucléation des cavités est notée  . La relation entre cette énergie et le temps
caractéristique de nucléation est définie par l’expression suivante :
  
   0 exp  (99)
 k BT 

La nucléation des cavités a lieu dans la phase amorphe interlamellaire, entre les lamelles
cristallines orientées perpendiculairement à la contrainte (cf. chapitre 6). Le module élastique
de la phase amorphe est noté K. Le bilan énergétique de la nucléation d’une cavité de rayon a
conduit à :
1   µ  3
2

  K  a   a
2
(100)
26  E 
avec  la tension de surface de la phase amorphe du polyamide (en J/m2). Le premier terme de
l’équation correspond à l’énergie élastique récupérée par la formation d’une cavité et le second
terme correspond à l’énergie nécessaire pour créer une nouvelle surface.

L’évolution de l’énergie de nucléation d’une cavité de diamètre a sous contrainte en fonction


passe par un maximum (Figure 148).

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Chapitre 7 : Interprétation physique

c
a
ac

Figure 148 : Evolution de l’énergie de nucléation  en fonction du diamètre a de la cavité.

Ainsi pour des cavités de diamètre inférieur à ac, les cavités sont instables car la tension de
surface du milieu tend à refermer les cavités. Les cavités de diamètre supérieur à ac se
d
propagent sous la contrainte. Pour ac, on a  0 . Ainsi le diamètre critique de nucléation et
da
l’énergie nécessaire à la propagation des cavités nucléées sous contrainte valent :
1
ac  2 (101)
  µ c 
2

K 
4  E 
64 3 3
 ( )   60 (102)
2  µ  2  µ 
4 4
3
K   K  
 E   E 
Pour que cette énergie soit compatible avec le temps de rupture observé expérimentalement
 ( ac )
(100s), on a  40 d’où (σc)1.6 10-19J et pour 1 mole (ac)=100kJ/mol.
k BT

3.2 Contrainte macroscopique de nucléation

A partir de l’équation (102), on peut calculer la contrainte macroscopique critique pour nucléer
et propager une cavité :
1/ 4
E  60 3 
 c   2  (103)
µ  K c 
Nous avons réalisé des mesures de tension de surface de la matrice polyamide par la technique
de l’angle de goutte. Nous avons obtenu =4.10-2 J/m2. L’application numérique suivante pour
estimer la contrainte de nucléation est effectuée avec une valeur de module élastique de la
phase amorphe du polyamide à 25°C K1GPa, et µ=15. La contrainte critique de nucléation
vaut alors σc=250MPa.

Cette valeur de contrainte est du même ordre de grandeur que la contrainte macroscopique
maximale appliquée en fatigue pour les polyamides renforcés de fibres, comprise entre 100 et

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Chapitre 7 : Interprétation physique

150MPa, et est compatible avec des valeurs de contraintes locales plus grandes que la
contrainte macroscopique dans le polyamide renforcé de fibres de verre.

Le diamètre critique ac obtenu pour la contrainte σc est : ac  23 nm .

3.3 Volume d’activation

Pour obtenir une expression simplifiée de l’énergie de nucléation en fonction de la contrainte,


on peut linéariser l’évolution de  dans la gamme de contraintes expérimentales :
d 
 ( )   ( c )  (   c )  (104)
d  c
On obtient
300 3 240 3 
 ( )   (105)
 µ  
4
 µ  
4
 c
K 2 c  K 2 c 
 E   E 
On remplace l’expression de σc de l’équation (103) dans l’équation (105) précédente et on
obtient :
1/ 4
300 3 240 3 µ  K 2 c 
 ( )     
3 
(106)
 µ  
4
 µ  
4
E  60 
K 2 c
 K 2 c

 E   E 
Soit avec les valeurs numériques citées précédemment, on obtient :
µ
 ( )  8 1019  2.3 1018  (107)
E
Et en remplaçant l’énergie d’activation explicitée par l’équation (107) dans l’équation (76) :
 19 18 µ 
 8  10  2.3  10  
t   0 exp  E  (108)
 k BT 
 
 
Par identification entre les équations (786) et (108), on obtient :
2.3  10 18
v (109)
K
On montre que dans ce modèle de nucléation thermiquement activé, le volume d’activation est
inversement proportionnel au module élastique. Ce résultat explique que le volume
d’activation augmente avec la température pour nos températures expérimentales. On déduit
de l’équation (106) que le produit K  v est indépendant de la température, ce qui explique
que la constante  soit indépendante de la température. La constante  est proportionnelle à T,
ce qui représente une dépendance en température faible qui est un peu différente des résultats
expérimentaux.

Une application numérique avec la valeur du module du composite à 25°C conduit à la valeur
de volume d’activation suivante :
v(25 C )  2nm3
Cette valeur de volume d’activation est très proche de celle estimée dans le paragraphe 2.3.3.

- 199 -
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Chapitre 7 : Interprétation physique

Conclusion

L’étude de la durée de vie en fatigue répétée du polyamide vierge et renforcé de fibres de verre
réalisée au chapitre 3 nous a permis de montrer que le nombre de cycles à rupture est une
simple fonction de la contrainte maximale de fatigue rapportée au module élastique et de deux
constantes indépendantes de la température  et . Ce dernier chapitre nous a permis
d’expliciter ces constantes sur la base d’un mécanisme macroscopique d’endommagement
thermiquement activé. Ainsi,  et  sont des constantes qui dépendent de deux paramètres
variables, le module élastique E et le volume d’activation v. Les ordres de grandeur des
volumes d’activation obtenus sont un peu plus faibles que les volumes d’activation typiques de
la plasticité des polymères. Le volume d’activation obtenu est compris entre environ 0.6nm3 et
5nm3 pour les températures étudiées (25°C – 65°C – 140°C), et les énergies d’activation sont
comprises entre 120kJ/mol et 170kJ/mol dans cet intervalle de température.

Nous proposons un modèle de nucléation des domaines d’endommagement sur la base des
observations par microscopie électronique et par diffusion des rayons X et des neutrons
présentées au chapitre 5. Ce modèle de nucléation montre que le volume d’activation de la
nucléation des domaines d’endommagement varie en 1/E. Le produit E  v est donc constant,
ce qui permet d’expliquer que les constantes  et  soient indépendantes de la température. Le
volume d’activation obtenu sur la base de ce modèle microscopique sont proches des valeurs
obtenues pour le modèle macroscopique cité précédemment (v=2nm3 à 25°C).

L’étude de l’évolution des propriétés macroscopiques en fatigue présentée au chapitre 4 a


montré que le module dynamique est une fonction linéaire du logarithme du nombre de cycles.
Nous expliquons ce résultat par la présence d’hétérogénéités de déformations locales au sein
des polymères semi-cristallins. Ces hétérogénéités de déformations locales sont dues à la
structure semi-cristalline dans le polyamide vierge, et également au renforcement par les fibres
de verre dans le composite. Le temps de rupture caractéristique d’un site est d’autant plus
court que la déformation locale est élevée. Les sites dont la déformation locale est grande
cassent en premier, et le temps nécessaire pour casser les sites d’amplification de déformation
décroissante est donc croissant avec le nombre de cycles. Cette évolution logarithmique
domine jusqu’à ce que la chute du module ne soit plus négligeable. Les temps de rupture des
sites non rompus sont alors influencés par la chute du module et l’endommagement est
catastrophique avant rupture.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Conclusions et perspectives

Le critère de rupture en fatigue est lié à la déformation élastique


Nous avons montré que la température influence la durée de vie en fatigue et la forme des
courbes de Wöhler, car la température influence directement la rigidité du matériau. Nous
montrons alors que les courbes de Wöhler normalisées par le module d’Young à la
température d’auto-échauffement du matériau se confondent en une courbe maîtresse. La
normalisation des courbes de Wöhler par le module élastique mesuré à la température
d’échauffement du matériau conduit à un critère de rupture homogène à une déformation
élastique.
Notre analyse des caractéristiques des cycles de fatigue a montré que pour une même durée de
vie, la rupture a lieu pour une déformation élastique qui est quasi indépendante de la
température. Au contraire, pour une même température, la déformation plastique à rupture est
d’autant plus grande que la température est élevée. Le critère de rupture semble donc
correspondre à une valeur de déformation élastique. L’influence de la plasticité sur la durée de
vie semble négligeable, mais l’influence de la plasticité sur les mécanismes
d’endommagement en fatigue reste tout de même à comprendre.

La normalisation des courbes de Wöhler par le module élastique


permet de prédire la durée de vie sur une large gamme de
température et de contraintes
La connaissance de la courbe maîtresse des courbes de Wöhler normalisées par le module
élastique à la température d’échauffement nous permet de prédire la durée de vie en fatigue
pour une large gamme de températures et de contraintes, dès lors que la température
d’échauffement du matériau est connue.
Un bilan thermique nous a permis de calculer les transferts de chaleur par convection forcée
dans notre enceinte thermique. L’échauffement dans le matériau peut donc être estimé
théoriquement pour toute sollicitation périodique sinusoïdale à partir du comportement
viscoélastique du matériau (que l’on peut déterminer par un essai d’Analyse Mécanique
Dynamique). A partir de la connaissance d’une courbe de Wöhler à une température choisie, il
est donc possible d’extrapoler les valeurs de durées de vie en fatigue pour toute autre
contrainte et température données. Pour une prédiction encore améliorée, il serait nécessaire
d’estimer le terme source de chaleur au sein du matériau et le flux de chaleur dissipé par
convection forcée.
Cette courbe maîtresse permet une meilleure prédiction de la durée de vie, et pourrait être
extrapolable à d’autres polymères dont les mécanismes d’endommagement en fatigue seraient
similaires à ceux du polyamide. Cette hypothèse reste à vérifier par des essais d’endurance de
différents thermoplastiques semi-cristallins renforcés.

L’endommagement en fatigue est initié par la nucléation de cavités


nanométriques dans la phase amorphe entre les lamelles orientées
perpendiculairement à la contrainte
Des caractérisations par diffusion des rayons X aux très petits angles nous ont permis de
montrer la nucléation de domaines d’endommagement nanométriques sphériques dans le

- 201 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
polyamide non renforcé, d’un diamètre caractéristique de 20 à 220nm. Durant les premiers
stades de la fatigue, le nombre de ces nanodomaines augmente avec le nombre de cycles de
fatigue, mais leur taille reste constante. Ensuite ces domaines croissent perpendiculairement à
la contrainte. A la rupture les domaines elliptiques ont une taille comprise entre 20nm et
2.6µm parallèlement à la contrainte, et comprise entre 20nm et 13.1µm perpendiculairement à
la contrainte. La nucléation et la croissance de ces domaines de faible densité permettent
d’expliquer la chute du module dynamique en fatigue, et la baisse de densité du matériau
négligeable.
Nous avons caractérisé la structure cristalline du polyamide sous traction par diffusion des
rayons X aux petits angles. Nous avons montré que la séparation des lamelles cristallines
orientées perpendiculairement à la contrainte cause une déformation locale supérieure à la
déformation macroscopique. La variation locale de volume qui en résulte permet d’expliquer
la nucléation des nanodomaines d’endommagement dans la phase amorphe interlamellaire et
suppose que l’endommagement soit localisé à l’équateur des sphérolites. Les lamelles
cristallines s’orientent perpendiculairement à la contrainte sous chargement, augmentant ainsi
le nombre de sites de nucléation des domaines d’endommagement. Nos observations par
microscopie électronique à transmission ont montré que ces domaines d’endommagement
anisotropes croissent dans la direction perpendiculaire à la contrainte et confirment leur
localisation à l’équateur des sphérolites. Des observations microscopiques sous la rupture ont
montré que la rupture du matériau a lieu lorsque les fibrilles des craquelures cèdent pour
former des fissures ouvertes. Les travaux de Sauer ont montré que la durée de vie en fatigue
des matériaux dont les modes d’endommagement impliquent le craquelage est augmentée pour
les matériaux de masse moléculaire et de densité d’enchevêtrements physiques importantes,
car ces paramètres stabilisent les craquelures et retardent la rupture.
Ces résultats ouvrent la voie vers la conception de polyamides à durabilité en fatigue
améliorée. Ainsi, des modifications du taux de cristallinité et de la masse moléculaire du
polyamide permettraient de mieux comprendre et de mieux maîtriser l’initiation des
nanodomaines de faible densité dans la phase amorphe et leur propagation en craquelures, et
permettraient certainement de conduire à une durée de vie en fatigue plus longue.

L’endommagement dans le polyamide renforcé de fibres de verre


est matriciel, et les mécanismes d’endommagement semblent
identiques dans le polyamide non renforcé
La normalisation des courbes de Wöhler conduit à la même courbe maîtresse pour le
polyamide vierge et pour le polyamide renforcé de fibres de verre. Ce résultat semble signifier
que les mécanismes d’endommagement dans le polyamide renforcé de fibres sont matriciels et
sont les mêmes que dans le polyamide non renforcé fatigué sous sa Tg.
De plus, une étude macroscopique nous a permis de montrer que l’évolution des propriétés
macroscopiques présente les mêmes caractéristiques dans le polyamide vierge et renforcé de
fibres de verre. Cette étude macroscopique nous a permis de définir trois étapes dans
l’évolution des propriétés en fatigue.
La première étape est caractérisée par l’échauffement du matériau. Pour les essais de fatigue
mécanique, la température augmente pendant un faible nombre de cycles indépendamment de
la température d’environnement et de la contrainte appliquée. Pour les matériaux sollicités loin
de la Tg du polymère, cet échauffement est sans conséquences sur les propriétés mécaniques
macroscopiques. Par contre pour le matériau fatigué autour de la Tg, l’échauffement provoque
une brusque évolution de ses propriétés viscoélastiques, et donc une chute du module

- 202 -
E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
dynamique. Cette première étape d’échauffement n’est pas associée à des mécanismes
d’endommagement qui affectent la durée de vie en fatigue.
La seconde étape marque le début de l’endommagement mécanique du matériau et influence
directement la durée de vie. Le module dynamique, la déformation plastique et la déformation
élastique sont des fonctions linéaires du logarithme du nombre de cycles. Les caractéristiques
de cette seconde étape sont identiques pour le polyamide vierge et pour le polyamide renforcé
de fibres. Ces résultats semblent confirmer que les mécanismes qui gouvernent la durée de vie
en fatigue sont similaires dans ces deux matériaux.
Dans les polyamides renforcés de 30% de fibres, la fin de cette seconde étape est caractérisée
par l’augmentation de la composante dissipative du matériau. Le module dynamique chute
brutalement et l’évolution de la déformation n’est plus linéaire avec le logarithme du nombre
de cycles.
Nous avons montré par diffusion des rayons X que l’endommagement en fatigue dans le
polyamide vierge est initié par la nucléation de nanodomaines de faible densité, qui se
propagent perpendiculairement à la contrainte et qui sont localisés à l’équateur de sphérolites.
Nous avons montré par des caractérisations par diffusion des neutrons que l’endommagement
observé dans le polyamide vierge permet d’expliquer les courbes de diffusion dans le
polyamide renforcé de fibres, avec une fraction volumique de polyamide dans les domaines
d’endommagement voisine de celle du polyamide vierge. Il semble donc probable que
l’endommagement dans le PA renforcé soit le même endommagement que dans le PA non
renforcé.

La forme des courbes de Wöhler et l’évolution des propriétés


macroscopiques en fatigue sont causées par des hétérogénéités de
déformation locales
Le nombre de cycles à rupture est une simple fonction de la contrainte maximale de fatigue
rapportée au module élastique et de deux constantes indépendantes de la température  et .
Nous avons explicité ces constantes sur la base d’un mécanisme macroscopique
d’endommagement thermiquement activé. Ainsi,  et  sont des constantes qui dépendent de
deux paramètres variables, le module élastique E et le volume d’activation v. Le volume
d’activation obtenu est un peu plus faible que le volume d’activation typique de la plasticité
des polymères amorphes et semi-cristallins, et compris entre 0.6nm3 et 5nm3 pour les
températures étudiées, et les énergies d’activation sont comprises entre 120kJ/mol et
170kJ/mol. Ce modèle permet d’expliquer l’évolution linéaire du module dynamique en
fonction du logarithme du nombre de cycles. Nous expliquons ce résultat par la présence
d’hétérogénéités de déformations locales au sein des polymères semi-cristallins vierges et
renforcés de fibres. Le temps de rupture caractéristique d’un site est d’autant plus court que la
déformation locale est grande. Les sites dont la déformation locale est grande cassent en
premier, et le temps nécessaire pour casser les sites d’amplification de déformation
décroissante est donc croissant avec le nombre de cycles. Cette évolution logarithmique
domine jusqu’à ce que la chute du module ne soit plus négligeable. Les temps de rupture des
sites non rompus sont alors influencés par la chute du module et l’endommagement est
catastrophique avant rupture.

La nucléation de domaines de faible densité est un processus


thermiquement activé
Nous proposons un modèle de nucléation dans la phase amorphe des domaines de faible
densité caractérisés par diffusion des rayons X. Ce modèle de nucléation montre que le volume

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
d’activation de la nucléation des domaines d’endommagement varie comme l’inverse du
module élastique de la phase amorphe K. Le produit K  v est donc constant, ce qui permet
d’expliquer que les constantes  et  soient indépendantes de la température. Le volume
d’activation obtenu sur la base de ce modèle microscopique sont proches des valeurs obtenues
pour le modèle macroscopique cité précédemment (v=2nm3 à 25°C).
Il serait intéressant d’étudier la validité de ce modèle pour d’autres polymères semi-cristallins
en fatigue, afin de comprendre si ce modèle est générique des semi-cristallins ou spécifique
des polyamides.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Annexes

A1. Principales caractéristiques du polyamide vierge et


renforcé de fibres de verre
Le tableau suivant présente les principales propriétés du polyamide renforcé de 33% de fibres
de verre selon Kohan [59].

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Le tableau suivant rassemble nos mesures effectuées sur le polyamide 6,6 renforcé de 30% de
fibres de verre.
Module élastique en traction ISO527 (MPa) 10 300
Transition vitreuse Tg DMA (°C) 65
Masse moléculaire moyenne en nombre Mn GPC 18 000
Taux de cristallinité DSC (%) 35
Taux d'humidité Karl-Fisher (ppm) 1500

Le tableau ci-après présente les différents constituants des fibres de verre E.


composition massique compo volumique compo molaire
(%) (%) (%)
SiO2 54 54 56
Al2O3 15.5 16 9
Ca0 17 17 19
MgO 5 5 8
B2O3 8.5 9 8

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
A2. Paramètres d’injection du polyamide vierge et
renforcé de fibres de verre
PARAMETRES DE MOULAGE
Presse Demag H 200-80/ Moule plaque fatigue

PARAMETRES TEMPS
Temps de solidification (s) 10

Temps de maintien (s) 8

 Temps d'injection (s) 0.36

 Temps de dosage (s) 5.15

 Temps de cycle (s) 22


PARAMETRES VITESSE
Vitesse d'injection (mm/s) 170

Vitesse de  vis (tr/min) 200


PARAMETRES PRESSION
Pression de maintien (bar) 500

 Pression d'injection (bar) 1875

Contre pression (bar) 50


COMMUTATION
En course (cm3) 10.5

 Matelas (cm3) 6.9

Course dosage (cm3) 28 + 1


TEMPERATURES
Température moule (°C) 80

Température fourreau (°C) 280-280-285-290 buse

TH matière avant moulage 0,09%

Poids pièces 17,2 g

NB : les variables de moulage sont désignées par le signe 

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A3. Méthodes de caractérisation

Microscopie optique à polarisation croisée


La microscopie optique en polarisation croisée permet de différencier les zones organisées des
zones désorganisées du matériau.
Le principe de cette observation est de placer l’échantillon sous le microscope entre un
polariseur et un analyseur. Le polariseur a pour effet de ne laisser passer qu’une seule
composante de vibration de la lumière, et l’analyseur est orienté perpendiculairement au
polariseur pour ne recevoir que les ondes qui se trouvent dans un plan perpendiculaire aux
ondes transmises par le polariseur. Le système a ainsi pour effet d’arrêter la lumière.
Si on place une matière non organisée (optiquement inactive) sous le microscope, comme un
polymère amorphe relaxé, elle apparaît alors noire en transmission. Si par contre on place une
matière organisée ou orientée (optiquement active) après l’analyseur, comme un polymère
cristallin, lorsque le faisceau traverse l’échantillon le plan de la lumière polarisée tourne.
L’analyseur reçoit donc une partie de la lumière et ces zones optiquement actives apparaissent
lumineuses.
Comme les échantillons sont observés en mode transmission, le matériau doit être d’épaisseur
fine. Les échantillons ont donc été coupés au microtome pour obtenir des épaisseurs de 2µm.
Les coupes sont ensuite placées sur une goutte de paraffine entre deux lames de verre.

Mesures de densité par colonnes à gradient


Les mesures de densité ont été réalisées dans des colonnes à gradient de densité, préparée à
partir de deux solvants partiellement miscibles (CCl4 et toluène).
Les échantillons testés ont été découpés dans les éprouvettes à l’aide d’une scie diamantée. On
coupe des cubes de 2mm de côté environ.
Après deux heures exactement de stabilisation dans la colonne, on relève la position des cubes
qui nous indique leur densité correspondante. La lecture de position des échantillons dans la
colonne graduée conduit à une incertitude de mesure qui permet de donner la densité à 0.0002
près.

Calorimétrie différentielle à balayage


La calorimétrie différentielle à balayage (ou Differential Scanning Calorimetry, DSC), mesure
les différences de flux de chaleur entre l’échantillon et une référence, en fonction de la
température. L’échantillon est placé dans une capsule et la référence est une capsule vide. On
mesure la différence de flux de chaleur nécessaire à la variation de la température pour ces
deux creusets. La dérivée de cette énergie par rapport à la température permet de calculer la
capacité calorifique de l’échantillon.
Les transitions thermiques dans le matériau qui sont accompagnées d’une variation de capacité
calorifique sont donc ainsi mises en évidence.
Nous avons analysé par cette technique les zones de rupture des échantillons. Ces zones sont
coupées en lamelles d’une épaisseur de 25µm environ à l’aide d’un microtome à température
ambiante. Les copeaux sont ensuite placés dans une capsule en aluminium percée, la prise
d’essai est de 4 à 4.5 mg. Les essais sont réalisés sur un appareil Mettler DSC822e. La vitesse

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
de montée en température est de 2°C/min et la vitesse de refroidissement est de 10°C/min. La
plage d’étude débute à 25°C, puis la température monte à 300°C, baisse jusqu’à 25°C et
remonte à 300°C.
L’aire du pic de fusion donne l’enthalpie (ΔHf) de la transformation. On obtient le taux de
cristallinité χc en divisant ΔHf par l’enthalpie d’un cristal parfait de PA6,6 notée ΔHf0.
 f
c 
 f
0

Pour les polyamides chargés 30% de fibres de verre, on mesure l’énergie liée à la
transformation pour une masse de composite donnée, on rapporte donc l’enthalpie à la
composition massique en polyamide.
Les données du Polymer Handbook [BRA99] estiment ΔHf0 à 196J/g.

Chromatographie d’exclusion stérique


Pour les séparations par chromatographie d’exclusion stérique (Steric Exclusion
Chromatography, SEC), le composite est tout d’abord dissout dans un solvant, puis la solution
est filtrée afin de séparer les macromolécules des fibres de verre. Les différentes
macromolécules sont ensuite séparées selon leurs masses à l’aide d’une colonne poreuse. Les
molécules de plus faibles masses ont un volume plus petit, et peuvent donc effectuer un plus
long chemin dans la colonne. Au contraire, les plus grosses molécules prennent une trajectoire
plus directe. Il en résulte qu’en SEC les grosses masses sortent de la colonne en premier.
En sortie de colonne les masses des macromolécules sont mesurées à l’aide d’un détecteur
UV1 (270 nm). Ce détecteur indique les masses des molécules (Mn, Mw, Mz) en équivalent de
molécules de polystyrène.
Pour calculer la présence éventuelle de branchement, on utilise une référence de polyamide
linéaire appelée PMZ421.
Nous avons analysé les masses du composite dans la zone d’endommagement, c’est-à-dire
dans la zone de section minimale à l’aide d’une pince coupante. Quelques centaines de mg
sont analysés, et deux solutions de polymères sont réalisées pour connaître la reproductibilité
de l’analyse.

Analyse Mécanique Dynamique


Pour mesurer la température de transition vitreuse (Tg), nous avons effectué une analyse
mécanique dynamique, ou DMA (Dynamic Mechanical Analysis) sur l’appareil Rheometrics
ARES. Cet outil de mesure permet de réaliser un essai en torsion rectangulaire sur le barreau.
La déformation sinusoïdale appliquée à l’échantillon permet d’accéder aux valeurs des
modules élastiques G’, module visqueux G’’, et au rapport G’’/G’ appelé tan δ. Au maximum
du pic de tan δ, on définit la transition α. La Tg est définie par la valeur de la transition α à
1Hz.
Les conditions d’essai sont une fréquence de 1Hz, une déformation de 0.015% et une rampe de
température de -50°C à 200°C avec une vitesse de 2°C/min. La valeur de Tg est choisie au
maximum de tan δ. Pour certains essais nous avons fait varier la fréquence à température
constante.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
Module d’Young
Les mesures de module élastique sont réalisées sur des éprouvettes de géométrie fatigue
présentées au chapitre 2 (Figure 39). Les essais sont pilotés en déplacement jusqu’à atteindre
la contrainte minimale de l’essai de fatigue, et cette rampe est réalisée en 2s. La vitesse de
déformation moyenne correspondante est d’environ 10-3s-1.

Videotraction

Le système VidéoTraction a été inventé par G’Sell et Hiver [2; 34], puis développé par la
société Apollor. Cette technologie permet de piloter des essais de tractions uniaxiales en
déformation vraie. Ce système permet notamment d’étudier le comportement plastique des
polymères par des mesures de déformations volumiques dans la zone de striction.
La préparation des éprouvettes consiste à appliquer des marqueurs dans la zone d’intérêt, sur a
face et sur la tranche. Le barycentre des marqueurs est suivi en temps réel par 2 caméras CCD.
Ces caméras CCD sont interfacées avec la console de pilotage de la machine de traction,
comme le capteur de force et le capteur de position de la traverse (Figure 149). L’essai
mécanique est piloté en déformation axiale vraie. L’acquisition des déformations transverses
vraies permet de calculer la déformation volumique.

Figure 149 : Schéma de fonctionnement général du système Vidéotraction.

Pour notre étude nous avons appliqué 4 marqueurs sur la face de l’éprouvette de fatigue et 4
marqueurs sur la tranche. La machine de traction est une machine électromécanique Zwick
Z050 (Figure 150).

Figure 150 : Position des marqueurs pour les mesures de déformation volumique sous contraintes avec le
système VidéoTraction.

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E. Mourglia Seignobos – UMR 5268 CNRS/ RHODIA
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