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Juste Valeur Des Immobilisations Corporelles Dune Entite - 30028
Juste Valeur Des Immobilisations Corporelles Dune Entite - 30028
Introduction
Les Normes comptables pour les entreprises à capital fermé (NCECF) offrent
aux préparateurs d’états financiers un choix non récurrent, selon lequel une
entité peut décider d’évaluer une immobilisation corporelle à sa juste valeur à
la date de transition des PCGR canadiens aux NCECF1. Ce choix peut s’appliquer
à n’importe quelle immobilisation corporelle à la date de transition aux NCECF.
1
Définition de la « juste valeur »
L’annexe du chapitre 3063 des NCECF fournit des indications sur l’évaluation à la
juste valeur. La juste valeur est définie comme étant le « montant de la contrepar-
tie dont conviendraient des parties compétentes agissant en toute liberté dans
des conditions de pleine concurrence2 ». Cela signifie que la transaction n’est pas
une vente forcée ou une liquidation.
A2 « Les prix cotés des marchés actifs constituent les éléments probants
les plus fiables pour établir la juste valeur et servent de fondement à
l’évaluation, lorsqu’ils existent. »
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Les autres techniques d’évaluation sont celles utilisées dans le cadre des approches
par les coûts et par les résultats. L’annexe du chapitre 3063 des NCECF traite de
l’application de techniques d’évaluation de la valeur actualisée pour estimer la
juste valeur d’un actif à long terme, ce qui suppose une estimation des flux de
trésorerie futurs qui découleraient de l’utilisation de l’ actif. Cette estimation est
généralement fondée sur des hypothèses quant au montant et au calendrier des flux
de trésorerie futurs, et comporte un certain degré de subjectivité dans l’établissement
des prévisions de trésorerie et des taux d’actualisation correspondants. L’incertitude
qui en découle entraîne une préférence pour les données de marché observables,
comme réitéré à l’annexe du chapitre 3063 des NCECF :
A25 « Lorsque les prix d’un actif ou d’un passif ou d’un actif ou d’un passif
essentiellement similaire peuvent être observés sur le marché, il n’est pas
nécessaire d’avoir recours à des évaluations de la valeur actualisée parce
que l’évaluation que le marché fait de la valeur actualisée est déjà reflétée
dans le prix. Toutefois, en l’absence de prix observables, les évaluations de
la valeur actualisée constituent souvent la meilleure technique pour estimer
un prix. Une entreprise sera ordinairement en mesure d’estimer les flux de
trésorerie prévus d’un actif ou d’un passif, mais il pourra s’avérer difficile de
déterminer la prime de risque appropriée compatible avec la juste valeur. »
Exigences de l’auditeur
Lorsqu’elle prépare les estimations de la juste valeur, la direction doit tenir compte
des exigences de l’auditeur afin de s’assurer que le résultat net satisfasse aux
critères d’audit. La Norme canadienne d’audit (NCA) 5403 traite des responsabi-
lités qui incombent à l’auditeur en ce qui concerne les estimations comptables,
y compris les estimations comptables en juste valeur, et les informations y affé-
rentes à fournir dans les états financiers. La variation de la nature et de la fiabilité
des informations sur lesquelles la direction peut s’appuyer influe sur le degré
d’incertitude de mesure inhérent à l’évaluation de la juste valeur. L’auditeur doit
tenir compte du caractère subjectif des hypothèses utilisées par la direction et de
l’éventualité d’un parti pris (volontaire ou involontaire) de la part de la direction
dans la préparation des estimations comptables en juste valeur. L’auditeur doit
ensuite évaluer si les hypothèses importantes retenues par la direction sont rai-
sonnables et déterminer l’incidence de tout risque d’anomalie significative sur
son évaluation.
3 « Audit des estimations comptables, y compris les estimations comptables en juste valeur,
et des informations y afférentes à fournir ».
A7 « Les estimations des flux de trésorerie intègrent les hypothèses que les
intervenants du marché utilisent dans leurs estimations de la juste valeur,
lorsque ces informations peuvent être obtenues moyennant un coût et
un effort raisonnables. Autrement, l’entreprise peut utiliser ses propres
hypothèses. L’utilisation, par une entreprise, de ses propres hypothèses
sur les flux de trésorerie futurs est compatible avec une estimation de la
juste valeur, à la condition qu’aucune donnée contraire n’indique que les
intervenants du marché utiliseraient des hypothèses différentes. Lorsqu’ il
existe de telles données, l’entreprise doit modifier ses hypothèses afin
d’ y intégrer ces informations relatives au marché. »
Cela signifie que les estimations de la juste valeur devraient être fondées sur
l’utilisation optimale de l’actif, sans égard à la manière dont la direction compte
réellement l’utiliser. Par exemple, si une entité exploite un bien immobilier au
centre-ville de Montréal, comme un parc de stationnement, mais que les interve-
nants du marché pourraient vraisemblablement déterminer que l’utilisation opti-
male de ce bien serait d’y ériger une tour de bureaux, cette dernière hypothèse
devrait être utilisée pour en déterminer la juste valeur. Le concept de l’ « utilisation
optimale » d’une propriété immobilière requiert généralement que l’utilisation soit
raisonnablement probable, physiquement réalisable, conforme aux règlements de
zonage et de construction, et financièrement possible, en plus de maximiser la
rentabilité de la propriété en question.
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Pour déterminer la juste valeur d’actifs qui ne sont pas utilisés de façon opti-
male in situ (« valeur d’utilité » à l’emplacement de l’actif), l’évaluateur doit
déterminer si ces actifs auraient une plus grande valeur s’ils étaient vendus
en pièces détachées (« valeur d’échange »), dans l’éventualité où ils peuvent
être déplacés. Par exemple, la machinerie et l’outillage d’une usine de textile
au Canada pourraient avoir une plus grande valeur en Asie, même en tenant
compte des coûts de la transaction, du transport et autres coûts liés à leur
déplacement vers leur lieu d’utilisation.
Techniques d’actualisation
Deux techniques sont décrites à l’annexe du chapitre 3063 des NCECF :
la technique d’actualisation traditionnelle et la technique de la valeur
actualisée prévue.
Constat de la valeur
Lorsqu’il fait le constat de la valeur, l’évaluateur se penche sur les forces et
les faiblesses des chiffres obtenus au moyen de l’application des différentes
approches. Tout en exerçant son jugement professionnel, l’évaluateur doit
se fier davantage aux méthodes qui offrent le plus d’informations fiables
(par exemple, des données observables), en tenant compte de la hiérarchie
établie dans les normes comptables.
Les évaluateurs de biens immobiliers appliquent eux aussi les trois approches
générales d’évaluation précédemment décrites, soit par le marché (« comparaison
directe »), par les résultats et par les coûts.
4 La définition à utiliser pour une mission donnée peut varier selon le ressort territorial, par exemple lorsqu’une
évaluation est fournie dans le contexte d’un procès.
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L’approche par comparaison directe repose sur le principe qu’un acquéreur éclairé
ne paierait pas plus pour un bien immobilier que ce que lui coûterait un autre
bien immobilier équivalent. L’estimation de la valeur repose sur des ventes ou des
inscriptions de biens immobiliers comparables dotés de caractéristiques semblables
dans une zone géographique pertinente. L’ évaluateur peut hausser ou réduire
la valeur d’un bien immobilier pour combler les écarts de taille, d’emplacement,
de taux d’intérêt et autres entre le bien visé et des biens comparables.
L’approche par les résultats repose sur le principe que la valeur correspond à
la valeur actualisée des flux de trésorerie futurs que le bien immobilier est en
mesure de produire s’il atteint son utilisation optimale. Selon cette approche,
deux méthodes peuvent s’appliquer : celle de la capitalisation directe ou celle
de l’actualisation des flux de trésorerie. Selon la méthode de la capitalisation
directe, il s’agit de calculer la valeur de location (souvent exprimée en dollars
par pied carré) qui correspond au marché pour le bien immobilier en se fondant
sur les modalités des contrats de location de biens immobiliers similaires, le taux
d’inoccupation prévu, les créances irrécouvrables et les frais d’exploitation.
Le montant théorique du bénéfice d’exploitation net annuel qui en découle est
capitalisé à un taux de rendement approprié, qui tient compte des conditions
probables du financement hypothécaire, pour déterminer la valeur du bien
immobilier. La méthode de l’actualisation des flux de trésorerie consiste à faire
une projection du résultat net le plus probable sur une certaine période et à
présupposer que le bien immobilier sera revendu la dernière année de la
projection, puis à actualiser les flux de trésorerie connexes selon un taux
d’actualisation tenant compte du risque.
L’approche par les coûts consiste à estimer les coûts, aux prix actuels, pour la
construction d’un nouveau bien immobilier d’une utilité équivalente à celle du
bien évalué, en en soustrayant une provision pour dépréciation (physique, fonction-
nelle et économique) et en y additionnant la valeur estimative du terrain.
Exemple — immobilisations de production
Nous avons participé à la détermination de la juste valeur d’une usine en exploi-
tation dans le contexte de l’évaluation d’une perte de valeur d’actifs à long terme
(après avoir établi que l’usine avait échoué au test de recouvrabilité selon l’an-
cien chapitre 3063 du Manuel de CPA Canada – Comptabilité). Toutes les immo-
bilisations corporelles de l’usine ont été considérées comme un groupe d’actifs,
au plus bas niveau de regroupement d’actifs et de passifs pour lequel les flux
de trésorerie identifiables étaient dans une large mesure indépendants de ceux
d’autres actifs et passifs5.
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Pour déterminer le CMPC6 , nous avons calculé le taux de rendement qu’un
intervenant du marché exigerait des immobilisations de production, en tenant
compte du fait que l’incertitude liée à la volatilité du prix des matières premières
avait été prise en considération dans les trois scénarios élaborés par la direction,
mais aussi que cette incertitude entraînait des coûts qui ont été pris en compte
au moyen d’un facteur de risque.
6 La formule qui sert à déterminer le CMPC est bien établie dans la théorie financière, et se traduit par
l’équation suivante (pour une entreprise ayant une structure financière simple composée d’éléments
de capitaux propres et de capitaux empruntés) :
CMPC = (KB × WB ) + (KB × WB )
eB eB dB dB
Où :
WB = Capitaux propres pondérés (valeur des capitaux propres divisée par le capital investi)
eB
W = Dette pondérée (valeur de la dette portant intérêt divisée par le capital investi)
dB
7 Il s’agit d’un modèle selon lequel le coût du capital pour toute action ou tout portefeuille d’actions correspond
à un taux sans risque plus une prime de risque proportionnelle au risque systématique lié à l’action ou au
portefeuille. Le MEDAF est un élément fondamental de la théorie des marchés financiers, qui partage le
risque en deux composantes : le risque systématique et le risque spécifique. Le risque systématique est
inhérent à tous les titres qui comportent un risque et ne peut être éliminé par la diversification. Le coefficient
de mesure du risque systématique lié aux actions est le coefficient bêta. Le risque spécifique est propre
à un titre donné (selon les caractéristiques du secteur d’activité ou de l’entreprise émettrice), et peut être
écarté par la diversification. L’hypothèse fondamentale du MEDAF est que le rendement prévu d’un titre
est fonction du risque systématique lié à ce titre et que le risque spécifique est considéré comme éliminé
puisque les investisseurs ont la possibilité de détenir des portefeuilles importants et très diversifiés.
8 Le coefficient bêta est le coefficient de mesure du risque systématique d’une action donnée, soit la tendance
du cours d’une action à fluctuer en fonction des variations d’un indice donné. Le coefficient bêta dépend de
la relation entre le rendement du titre et celui du marché, évalué selon un indice boursier général comme le
S&P/TSX.
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Facteurs internes
Ces facteurs sont liés aux différents actifs évalués et peuvent, par exemple,
comprendre les éléments suivants :
• la stabilité, l’expérience et les réalisations de l’équipe de direction;
• la dépendance à l’égard du personnel clé;
• la dépendance à l’égard de gros clients;
• la concurrence, la part de marché et l’étendue des services;
• la diversité de la clientèle;
• la situation financière, la liquidité et le niveau d’endettement;
• le risque de projection lié au caractère audacieux des prévisions en matière
de flux de trésorerie;
• l’état matériel des actifs;
• la rentabilité ou les déficits historiques.
Facteurs externes
Ces facteurs sont liés aux forces externes (incontrôlables) qui ont une incidence
sur l’usine, par exemple :
• la conjoncture économique générale prévue pour la période de projection;
• les conditions générales du marché et l’activité en matière
de regroupements d’entreprises;
• les taux d’intérêt;
• les conditions du secteur d’activité;
• la demande du marché;
• le caractère cyclique du secteur d’activité;
• l’incidence des fluctuations des cours du change;
• l’incidence de la réglementation gouvernementale.
Nous n’avons pas tenu compte de la variabilité des coûts des matières premières
pour l’établissement du taux d’actualisation applicable, puisque la direction
l’avait déjà fait lors de l’élaboration des trois scénarios possibles en matière de
flux de trésorerie. Nous avons appliqué le CMPC, résultant de l’examen de tous
les facteurs susmentionnés, aux flux de trésorerie prévus pour estimer la juste
valeur combinée des immobilisations de production (dans leur ensemble) à la
date d’évaluation.
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Les conclusions dégagées au terme des deux approches présentaient des diffé-
rences significatives. La valeur obtenue au moyen de l’approche par les résultats
correspondait à environ la moitié de celle obtenue au moyen de l’approche par les
coûts. Nous en avons conclu que l’approche par les résultats permettait d’obtenir
une valeur plus représentative de celle qu’un intervenant du marché assignerait
aux immobilisations de production, compte tenu des réalités désavantageuses du
marché et de l’improbabilité que l’intervenant construise une nouvelle usine. (Dans
le cas inverse, plus d’importance aurait pu être accordée à l’approche par le coût
de remplacement après amortissement.)
Conclusion
Faire le choix non récurrent d’évaluer des immobilisations corporelles à leur juste
valeur, aux fins du passage aux NCECF, peut vraisemblablement entraîner l’appli-
cation de techniques d’évaluation spécialisées. La direction pourrait envisager de
retenir les services d’un expert en évaluation pour déterminer la juste valeur de ces
immobilisations, afin de s’assurer que les montants présentés au bilan de l’entité
reflètent les valeurs appropriées et satisfont aux exigences de l’auditeur.
Richard M. Wise
est associé au sein des Services de consultation du bureau de Montréal de MNP
s.e.n.c.r.l. Il occupait le poste de directeur principal chez Wise, Blackman s.e.n.c.r.l.
avant la fusion de ce cabinet avec MNP. Il est membre du Business Valuation
Standards Committee de l’ASA depuis plus de 20 ans et détient le titre de Master
Certified Business Appraiser aux États-Unis. M. Wise est l’un des premiers réci-
piendaires du titre de CA•EJC. M. Wise est le principal coauteur du Guide to
Canadian Business Valuations (Thomson Carswell) et de l’outil d’aide à la pratique
de l’ICCA intitulé Introduction to Investigative and Forensic Practice Issues.
CPA Canada entreprend des initiatives visant à aider les professionnels en exercice et les entreprises. Le présent bulletin s’appuie sur les NCECF
en vigueur en mai 2014. Il contient des indications de mise en œuvre ne faisant pas autorité et n’a pas été adopté, sanctionné, approuvé ou
influencé de quelque autre façon que ce soit par le Conseil des normes comptables, ou par tout autre conseil ou comité de CPA Canada, ou par
les instances dirigeantes ou les membres de CPA Canada ou d’un ordre provincial. Le professionnel en exercice doit exercer son jugement
professionnel pour déterminer si les indications contenues dans le présent bulletin sont appropriées et pertinentes compte tenu des circonstances
propres à la mission d’audit qu’il réalise.
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