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Section 3. Le règlement des problèmes de compétence à l'intérieur de l'ordre juridictionnel administratif ....p. 21
§1. Le règlement par le Conseil d'Etat des difficultés de compétence s'élevant en cours de traitement d'un litige........................... p. 21
A. Le règlement de juges............................................................................................................................................................................................... p. 21
B. La connexité............................................................................................................................................................................................................... p. 22
§2. Le règlement préventif des questions de compétence................................................................................................................p. 23
A. Les trois hypothèses de renvoi.................................................................................................................................................................................. p. 23
B. Éléments de procédure.............................................................................................................................................................................................. p. 24
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Nous l'avons vu précédemment, la solution française au problème du contrôle de l'action administrative, sous
son double aspect de contrôle de la légalité et de mise en jeu de la responsabilité, consiste à remettre à un
juge spécialisé, le juge administratif, la connaissance des litiges soulevés par cette action.
Il existe donc un ordre juridictionnel administratif, à côté de l'ordre juridictionnel judiciaire, et en laissant de
côté, au plan interne, le cas du Conseil constitutionnel qui constitue un ordre à lui seul. Cet ordre juridictionnel
administratif est constitué d'un certain nombre de juridictions, les unes à compétence générale, les autres
à compétence spécialisée. Les juridictions administratives spécialisées sont nombreuses, elles répondent à
une double série de préoccupations, soit de nature technique, soit de nature « politique » (la volonté de faire
participer les justiciables à la justice, compte tenu de la nature particulière des fonctions exercées, c'est le cas,
par exemple, des juridictions ordinales, c'est-à-dire des ordres professionnels).
Parmi ces juridictions administratives spécialisées, on peut citer, à titre d'exemples, d'abord la Cour des
comptes, dont tout le monde a peu ou prou entendu parler, qui a été créée en 1807 et est chargée de juger les
comptes (mais non les comptables, il existe une autre juridiction pour juger ces derniers, il s'agit de la Cour de
discipline budgétaire et financière. V. sur ce point les manuels de finances publiques). La Cour des comptes est
juge, en appel, des jugements rendus par les chambres régionales des comptes, et elle relève elle-même du
contrôle de cassation du Conseil d'Etat (dans sa décision du 8 juillet 1904, Botta, Rec. p. 557, concl. Romieu,
le Conseil d'Etat a rappelé à la Cour des comptes le caractère d'autorité de la chose jugée de ses décisions qui
s'imposait à elle). On trouve également les juridictions disciplinaires, nombreuses et variées, notamment les
juridictions ordinales précitées (les conseils nationaux des ordres professionnels en formation disciplinaire),
ou encore dans l'éducation nationale (conseil supérieur de l'éducation nationale se réunissant en formation
disciplinaire). On pense moins à d'autres juridictions administratives spécialisées, qui traitent cependant un
grand nombre d'affaires, telles la Commission centrale d'aide sociale, les juridictions des pensions ou encore
la Commission des recours des réfugiés, qui est saisie chaque année de plusieurs milliers d'affaires.
Et, par voie de conséquence, de même qu'il existe des difficultés de compétences qui peuvent surgir entre
les ordres juridictionnels, de même, de similaires difficultés peuvent se présenter à l'intérieur d'un ordre
juridictionnel (ce qui montre, d'ailleurs, que l'unité d'ordre juridictionnel ne constitue pas une solution définitive
à ces difficultés de répartition des compétences entre les juridictions d'un ordre juridictionnel).
On examinera donc successivement, d'abord la notion de juridiction administrative, ensuite les différentes
juridictions administratives, enfin le partage des compétences à l'intérieur de l'ordre juridictionnel administratif.
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La distinction de l'activité juridictionnelle de celle des autres activités publiques paraît simple, or il n'en est pas
ainsi. Comme pour d'autres distinctions, s'il existe une qualification législative, il n'y a pas - sauf cas particulier
- à se poser beaucoup de questions : c'est ce que l'on peut vérifier pour les juridictions de droit commun. En
revanche, en l'absence de qualification de cette nature, il faut bien s'interroger, et le juge s'interroge, sur les
critères à retenir pour la qualification de juridiction.
On considère habituellement qu'est juridictionnel l'organe qui est habilité à trancher des litiges avec force de
vérité légale. Cela implique ou suppose que plusieurs conditions soient réunies.
Il faut d'abord que les actes pris par l'organisme en question soient revêtus d'une certaine autorité, c'est-à-dire
s'imposent aux personnes en cause avec une force objective et incontestée.
Il faut, ensuite, que cet organisme soit habilité à trancher des litiges, à arbitrer entre des prétentions
contradictoires.
Ces différentes conditions doivent être satisfaites simultanément pour que l'on puisse parler de juridiction. En
l'absence de l'une d'entre elles on ne saurait parler de juridiction. Ainsi, la loi possède bien une force initiale et
objective, et n'est cependant pas un acte juridictionnel. De même, un expert peut bien indiquer, par exemple,
laquelle des thèses en présence présente le plus de probabilités d'exactitude, voire celle qui, selon lui, est la
seule qui devrait être retenue, cela ne fait pas pour autant de l'expertise un acte juridictionnel.
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d'un point de vue historique, l'exemple, que cite R. Odent dans son Contentieux administratif, du Tribunal
administratif mixte de Dalat, prévu par une convention franco-vietnamienne, et qui ne fut pas considéré par
le Conseil d'Etat comme une juridiction française (CE 16 novembre 1956, Ministre chargé des relations avec
les Etats associés, Rec. p. 439).
La question de la distinction, sur le plan interne, avec l'ordre juridictionnel judiciaire, risque beaucoup plus de
se présenter que la précédente, étant précisé qu'elle se pose pour des juridictions particulières et non pour les
juridictions à compétence générale que l'on connaît bien. Lorsque un texte qui institue une juridiction déclare
que celle-ci relève, en appel ou en cassation, du contrôle du Conseil d'Etat ou de celui de la Cour de cassation,
la question est résolue d'office, et l'on applique la solution donnée par le législateur.
Mais il arrive beaucoup plus fréquemment que le législateur ne précise pas la nature de la juridiction qu'il
crée, ne serait-ce, d'ailleurs, que parce que il ne précise pas (parce qu'il ne s'interroge pas sur ce point) si
l'organisme créé est une juridiction.
C'est aux juridictions suprêmes saisies - en ce qui nous concerne, le Conseil d'Etat - de se prononcer, alors,
sur la nature de l'organisme et, s'il s'agit d'une juridiction (étape que nous avons vue plus haut), de dire s'il
s'agit d'une juridiction administrative ou d'une juridiction judiciaire.
Pour se prononcer, le juge prend en compte la nature des litiges que la juridiction est amenée à trancher. On
se souvient, par exemple (Voir cours précédent, leçon introductive et leçon sur les sources) que le Conseil
d'Etat a considéré le jury d'honneur institué par une ordonnance de 1945 pour se prononcer sur les recours
faits par les parlementaires déclarés inéligibles pour avoir voté les pleins pouvoirs au maréchal Pétain comme
une juridiction administrative. L'un des considérants de cette décision résume bien la démarche du Conseil
d'Etat : « il résulte de l'ensemble des prescriptions législatives relatives au jury d'honneur et notamment de
celles qui concernent tant sa composition et ses pouvoirs que les recours en révision dont il peut être saisi, que
cet organisme a le caractère d'une juridiction qui, par la nature des affaires sur lesquelles elle se prononce,
appartient à l'ordre administratif et relève à ce titre du contrôle du Conseil d'Eta statuant au contentieux » (CE
7 février 1947, D'Aillières, Rec. p. 50, RDP 1947, p. 68, concl. Odent).
De même, la Commission nationale des accidents du travail (CE 11 février 1953, Société industrielle de
produits chimiques Bozel Malétra, Rec. p. 62), la Commission nationale d'appel des conflits d'affiliation aux
caisses d'allocation vieillesse des non salariés (CE 1er juillet 1955, Caisse de compensation de l'organisation
autonome nationale de l'industrie et du commerce, Rec. p. 381 ; cet exemple illustre l'application des critères
jurisprudentiels et de la qualification légale ou réglementaire car, postérieurement à cette décision, un décret
transféra à la Cour de cassation la compétence en la matière), l'instance arbitrale instituée par une loi de 1978
et relative à l'indemnisation des rapatriés (CE 6 février 1981, Mlle Balzano, Rec. p. 68), ont été considérées
comme des juridictions administratives.
De même, le Conseil d'Etat a jugé que les juridictions des pensions étaient des juridictions administratives (CE
19 octobre 2012, M. Kessabi, req. n° 342763).
L'une des applications les plus connues, et aussi sans doute la plus controversée, a été la
reconnaissance de la nature de juridiction administrative, par le Conseil d'Etat, au Conseil supérieur de
la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège, l'argument retenu par le Conseil
d'Etat ayant été que les litiges soumis à ce Conseil supérieur de la magistrature « intéressent l'organisation
du service public de la justice » (CE 12 juillet 1969, Sieur L'Etang, Rec. p. 388). Relevons à cet égard que
lorsqu’il est saisi d’un recours contre une décision du CSM statuant en matière disciplinaire, le Conseil d’Etat
peut contrôler l’appréciation que porte cette instance sur la nécessité d’examiner l’affaire hors la présence du
public (CE 21 octobre 2009, M. C, req. n° 312928).
En ce qui concerne la création des juridictions administratives, depuis 1958 le législateur n'est plus
compétent que pour créer de nouveaux ordres de juridictions (selon l'article 34 de la Constitution la loi fixe les
règles concernant « la création de nouveaux ordres de juridictions et le statut des magistrats »). Prise au pied
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de la lettre, cette disposition aurait anéanti la compétence du législateur puisque, on le rappelle, un ordre de
juridictions est composé de l'ensemble des juridictions soumises à une même cour suprême et que, de ce fait,
il n'y a (Conseil constitutionnel mis à part) que deux ordres de juridictions, l'administratif et le judiciaire. Toute
nouvelle juridiction créée relève donc nécessairement de l'un ou de l'autre de ces ordres juridictionnels, et la
compétence pour créer cette juridiction serait uniquement celle du pouvoir réglementaire.
Pour éviter cette conséquence, le Conseil constitutionnel, comme du reste le Conseil d'Etat, ont adopté
une interprétation très souple (et, au sens strict, inexacte) de la notion d'ordre de juridictions. Ont été ainsi
considérés comme des ordres de juridiction, impliquant donc la compétence du législateur, les tribunaux pour
enfants (CC 21 décembre 1964), la section des assurances sociales du Conseil régional de discipline de
l'ordre des médecins (CE 13 juillet 1962, Conseil national de l'ordre des médecins, Rec. p. 479), les juridictions
d'expropriation (CC 9 février 1965), les conseils de prud'hommes (CC 13 juin 1991).
Mais les temps ont changé, une référence constitutionnelle apparaissait utile, si ce n'est indispensable. Le
Conseil constitutionnel a pallié l'absence de dispositions expresses en ce sens. Il a commencé par mettre des
bornes au législateur en lui interdisant de porter atteinte à l'indépendance des juridictions. Dans une décision
80-119 DC du 22 juillet 1980 portant validation d'actes administratifs, il déclare : « il résulte des dispositions de
l'article 64 de la Constitution en ce qui concerne l'autorité judiciaire et des principes fondamentaux reconnus
par les lois de la République en ce qui concerne, depuis la loi du 24 mai 1872, la juridiction administrative,
que l'indépendance des juridictions est garantie ainsi que le caractère spécifique de leurs fonctions sur
lesquelles ne peuvent empiéter ni le législateur ni le gouvernement ; qu'ainsi il n'appartient ni au législateur
ni au Gouvernement de censurer les décisions des juridictions, d'adresser à celles-ci des injonctions et de se
substituer à elles dans le jugement des litiges relevant de leur compétence ».
En ce qui concerne plus précisément les juridictions administratives, le Conseil constitutionnel va rendre en
1987 une décision très importante à propos de la loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des
décisions du Conseil de la concurrence (Décision 86-224 DC du 23 janvier 1987). Dans cette décision, le
Conseil constitutionnel commence par déclarer que les dispositions des articles 10 et 13 de la loi des 16 et
24 août 1790 et du décret du 16 fructidor de l'an III (on renvoie pour l'analyse de ces dispositions à la leçon
introductive du premier cours), « qui ont posé dans sa généralité le principe de la séparation des autorités
administratives et judiciaires n'ont pas en elles-mêmes une valeur constitutionnelle ».
Cette affirmation est importante car on aurait pu penser précisément à cette loi de 1790 comme fondement
de la juridiction administrative. Encore aurait-il fallu pour cela que le Conseil constitutionnel leur reconnût une
valeur constitutionnelle, et c'est le contraire qui s'est produit, le Conseil ayant dénié une telle valeur à cette
loi et au décret de l'an III qui en reprenait l'affirmation. Peut-être le Conseil constitutionnel a-t-il voulu, par
prudence, ne pas lier le législateur.
Néanmoins (c'est le terme utilisé par le Conseil), ajoute le Conseil constitutionnel, « conformément à la
conception française de la séparation des pouvoirs, figure au nombre des "principes fondamentaux reconnus
par les lois de la République" celui selon lequel, à l'exception des matières réservées par nature à l'autorité
judiciaire, relève en dernier ressort de la compétence de la juridiction administrative l'annulation ou la
réformation des décisions prises, dans l'exercice des prérogatives de puissance publique, par les autorités
exerçant le pouvoir exécutif, leurs agents, les collectivités territoriales de la République ou les organismes
publics placés sous leur autorité ou leur contrôle ».
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Cette réserve de compétence ne vaut, constitutionnellement, que pour le contentieux de l'annulation, c'est dire
que certains contentieux de pleine juridiction, et l'on pense en particulier au contentieux de la responsabilité,
pourraient être transférés par le législateur d'un ordre de juridiction à un autre.
Il faut ainsi distinguer l'existence même de la juridiction administrative des compétences que celle-ci peut avoir.
La première est constitutionnellement protégée, ce n'est pas le cas de la seconde, sauf pour le contentieux de
l'annulation des actes administratifs : pour le reste, les attributions de compétences entre l'ordre juridictionnel
administratif et l'ordre juridictionnel judiciaire peuvent varier en fonction de facteurs qui peuvent être très
variables et ne pas être rationnels du tout, le législateur pouvant même (inspiré par le gouvernement) avoir
des « mouvements d'humeur » conduisant à un transfert de compétences d'un ordre à un autre.
Le Conseil d'Etat a rendu le 12 janvier 2012 une charte de déontologie de la juridiction administrative applicable
à l'ensemble des membres des juridictions administratives, charte qui est organisée autour autour de six
chapitres :
1. principes généraux ;
2. indépendance et impartialité ;
3. prévention des conflits d'intérêt dans l'exercice des fonctions ;
4. devoir de réserve ;
5. secret et discrétion professionnelle ;
6. obligation d'exclusivité et activités accessoires.
Chacun des chapitres rappelle d'abord les principes législatifs et réglementaires applicables, puis développe
ce que le texte appelle "les bonnes pratiques".
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Section 2. Les juridictions
administratives
Les juridictions administratives sont représentées par les juridictions administratives de droit commun - les
plus importantes, et de loin - et les juridictions administratives spécialisées, qui n'appellent pas de longs
développements.
Les juridictions de droit commun sont constituées par le Conseil d'Etat, les tribunaux administratifs et les cours
administratives d'appel.
Le Conseil d'Etat se trouve au sommet de l'ordre juridictionnel administratif il est la « juridiction administrative
suprême », selon la formule de l'article L. 111-1 du code de justice administrative. Mais il est également un
organe consultatif, un conseil du gouvernement, cette dualité de fonctions faisant l'originalité du Conseil d'Etat
français par rapport aux juridictions administratives suprêmes qui existent dans d'autres pays.
Le Conseil d'Etat est l'héritier du Conseil du Roi de l'Ancien Régime. Il est créé ou recréé, sous sa forme
moderne, par l'article 52 de la constitution du 22 frimaire de l'an VIII (soit le 13 décembre 1799), selon lequel
il est « chargé de rédiger les projets de loi et les règlements d'administration publique et de résoudre les
difficultés qui s'élèvent en matière administrative ». Son sort est d'abord lié à celui du pouvoir politique qui l'a
institué, qui l'a vu naître. Création de l'empereur, allié objectif (comme l'on dirait dans certains discours) de ce
dernier, il est ensuite en butte à l'hostilité (compréhensible) des Bourbons et des Orléans. En 1848 il bascule
du côté du pouvoir législatif, sous le Second Empire il se retrouve, comme durant le premier, au service de
l'empereur. La loi du 24 mai 1872, en attribuant - définitivement cette fois - au Conseil d'Etat la justice déléguée
(sur cette notion,V. leçon introductive au premier cours), lui donne une nature de véritable juridiction et lui
assure sa pleine indépendance par rapport au pouvoir politique.
Le Conseil d'Etat siège au Palais-Royal, il est composé d'environ 300 membres, répartis en conseillers, maîtres
des requêtes et auditeurs, ce qui représente un nombre restreint et limite, par voie de conséquence, les
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évolutions qui auraient pu ou pourraient tendre à accroître ses attributions (sauf, bien entendu, à accroître
considérablement le nombre de conseillers d'Etat, cette réforme n'étant pas à l'ordre du jour).
Les formations administratives sont au nombre de cinq : la section Sociale, la section des Finances, la section
de l'Intérieur, la section des Travaux publics, la section du Rapport et des études. Le Premier ministre fixe la
répartition des matières entre les sections, tout département ministériel étant rattaché à l'une de ces sections
et avec, évidemment, une actualisation à chaque changement de gouvernement.
L'avis demandé au Conseil peut requérir la participation de plus d'une section, auquel cas l'avis est rendu par
les sections concernées réunies. Dans les cas les plus importants l'avis est rendu par l'Assemblée générale
ordinaire, qui compte 35 membres (le vice-président, les présidents de section et 28 conseillers), l'Assemblée
générale plénière réunissant tous les conseillers d'Etat. En cas d'urgence, une Commission permanente est
chargée de rendre les avis.
La section du rapport et des études effectue, ainsi que sa dénomination l'indique, des études pour le compte
du gouvernement, en vue de réformes dans un domaine déterminé, elle intervient pour surmonter les difficultés
qui peuvent résulter de l'exécution de la chose jugée, elle établit le Rapport annuel du Conseil d'Etat qui, après
adoption par l'Assemblée générale, est remis au président de la République.
Les formations contentieuses sont représentées par la Section du contentieux qui, selon l'article R. 122-1
du code de justice administrative, « juge de toutes les affaires qui relèvent de la juridiction contentieuse du
Conseil d'Etat ». La Section du contentieux est présidée par un président assisté de trois présidents adjoints,
elle comporte dix sous-sections ayant chacune son président et deux assesseurs ayant rang de conseillers,
plus dix à douze autres membres, maîtres des requêtes parmi lesquels sont choisis les commissaires du
gouvernement et auditeurs qui sont rapporteurs.
Depuis 1963, et afin d'éviter les éventuelles contradictions qui pourraient résulter de la dualité de formations
administratives et de formations contentieuses (un avis favorable rendu par une section administrative donnant
lieu à un décret ultérieurement annulé par une formation contentieuse, par exemple), les maîtres des requêtes
et auditeurs ont la « double appartenance », et des procédures d'information et de participations réciproques
ont été instituées.
Les affaires sont réparties entre les sous-sections en vue de leur instruction contradictoire. Lorsque l'instruction
est achevée, et que le rapporteur public (ex-commissaire du gouvernement) a rédigé ses conclusions, l'affaire
est soumise à une formation de jugement. La formation classique de jugement est constituée par deux sous-
sections réunies, la présidence étant assurée par l'un des présidents adjoints, voire par le président de la
section du contentieux, avec participation d'un conseiller appartenant à une section administrative.
Cependant, depuis 1980, les décisions peuvent être rendues par une seule sous-section, ce qui permet
d'accélérer la procédure, et ne soulève guère d'objections, certaines affaires présentant un caractère répétitif.
En cas de difficulté, l'affaire peut être renvoyée à la section du contentieux. Cette dernière expression
ne désigne pas l'ensemble des formations contentieuses mais l'une des formations, la formule « section
du contentieux » pouvant donc désigner le tout ou la partie, c'est-à-dire soit l'ensemble des formations
contentieuses par opposition aux formations administratives, soit l'une des formations de cet ensemble
contentieux. La section du contentieux en tant que formation contentieuse au-dessus des sous-sections (mais
ne devant pas être considérées comme une instance d'appel des sous-sections) est composée du président
de la section du contentieux (entendue comme l'ensemble), des trois présidents adjoints, des dix présidents
de sous-sections, de deux conseillers venant des sections administratives et du rapporteur.
Enfin, au sommet, si l'on peut dire, de ces formations contentieuses on trouve l'Assemblée du contentieux
qui, malgré sa dénomination, comporte un nombre de membres moins élevé que la section, avec, sous la
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présidence du vice-président du Conseil, les six présidents de section, les trois présidents adjoints de la section
du contentieux, le président de la sous-section d'instruction et le rapporteur. Ainsi que l'on peut s'en douter,
seules les affaires les plus importantes « remontent » ainsi à l'assemblée du contentieux et la plupart des
décisions dites « de principe » ont été rendues par l'assemblée. C'est dire, également, que sur les 5000 à
6000 décisions qui sont rendues chaque année par le Conseil d'Etat, entre une quinzaine et une trentaine,
seulement, sont rendues en assemblée.
La présentation faite ci-dessus du Conseil d'Etat montre que celui-ci dispose de deux sortes d'attributions, des
attributions administratives d'une part, des attributions contentieuses d'autre part.
Les attributions administratives du Conseil d'Etat sont de deux sortes, des attributions consultatives et des
attributions de nature hiérarchique.
La fonction consultative du Conseil d'Etat est la plus ancienne, il suffit de relire l'article 52 de la Constitution du
22 frimaire de l'an VIII que l'on a cité plus haut, mais c'était déjà celle qu'exerçait le conseil du Roi. Le Conseil
d'Etat est donc le conseil du pouvoir exécutif. Cette fonction consultative se traduit par l'émission d'avis, de
portée différente selon la nature des textes soumis.
En vertu des articles 38 (ordonnances) et 39 (projets de lois) de la Constitution, d'abord, le Conseil d'Etat
est obligatoirement consulté sur les projets de lois et d'ordonnances avant d'être soumis au Conseil des
ministres. L'avis est donné, normalement, par l'assemblée générale ordinaire, par la commission permanente
si le gouvernement déclare le projet urgent (un gouvernement a tendance à estimer que beaucoup de ses
projets présentent un caractère d'urgence ...). Il convient d'ajouter que le Conseil d'Etat n'est plus consulté sur
les amendements apportés tant par le gouvernement que par le Parlement, ce qui pourrait être un moyen de
contourner la consultation obligatoire. Cependant, pour éviter des abus en ce sens, le Conseil constitutionnel
a déclaré que « les adjonctions et modifications ne sauraient (...) dépasser par leur objet ou leur portée les
limites inhérentes au droit d'amendement » (CC, Décision n° 86-225 DC du 23 janvier 1987).
En ce qui concerne les projets de décrets, la consultation du Conseil d'Etat est obligatoire dans les cas suivants.
En premier lieu, tel est le cas lorsque des dispositions législatives ou réglementaires ont prévu que des décrets
seraient pris après avis du Conseil d'Etat. Cette hypothèse est très fréquente, la plupart des lois comportant
cette formule, presque rituelle, selon laquelle les mesures d'application seront prises par décret en Conseil
d'Etat. Certaines lois impliquent ainsi un grand nombre de décrets pris après avis du Conseil d'Etat (la loi du
13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales renvoyait ainsi à plus de cinquante décrets
d'application, dont certains ont été très longs à prendre).
En second lieu, en vertu du second alinéa de l'article 37, les « textes de forme législative » intervenus dans
le domaine réglementaire peuvent être modifiés par décrets pris après avis du Conseil d'Etat, à condition
cependant, pour les textes intervenus après l'entrée en vigueur de la Constitution de 1958, que si le Conseil
constitutionnel ait déclaré qu'ils ont un caractère réglementaire. Une telle hypothèse est loin d'être théorique, le
gouvernement laissant le Parlement intervenir dans une matière qui, selon la Constitution, est réglementaire,
soit pour aller plus vite, soit par tactique politique.
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En dehors des cas qui viennent d'être cités, le gouvernement peut toujours soumettre au Conseil d'Etat des
projets de textes à l'avis du Conseil d'Etat, la formation du Conseil d'Etat qui intervient étant variable selon
l'importance du texte. Certains avis ont contribué à atténuer les tensions qui se manifestaient dans certains
domaines. On peut citer, à cet égard, l'avis, tout à fait remarquable, rendu par le Conseil d'Etat le 27 novembre
1989 à propos du port par certains élèves de signes par lesquels ils entendaient manifester leur appartenance
à une religion (V. leçon sur la notion d'acte administratif unilatéral).
Les attributions administratives du Conseil d'Etat sont encore des attributions que l'on peut qualifier de
nature « hiérarchique ». En effet, en vertu de l'ordonnance du 31 juillet 1945 « le Conseil d'Etat est chargé
d'une mission permanente d'inspection à l'égard des juridictions administratives tant en France que dans les
territoires d'outre-mer ». La mission est composée d'un conseiller d'Etat, président, assisté de deux autres
membres du Conseil. Cette mission peut inspecter toutes les juridictions administratives, mais, en fait, exerce
essentiellement son contrôle sur les juridictions ordinaires de l'ordre administratif, tribunaux administratifs
et cours administratives d'appel. La mission vérifie les modalités d'organisation et de fonctionnement des
juridictions, elle apprécie l'activité de la juridiction. Elle peut élaborer des rapports à destination des ministères
concernés et peut préconiser des réformes relativement à l'organisation et au fonctionnement des juridictions
administratives.
Un siècle et demi plus tard, environ, la situation était devenue intenable, en raison de l'accroissement du
contentieux qui avait conduit à l'engorgement du Conseil : chaque année, a-t-on dit, le Conseil d'Etat prenait
un an de retard. Pour régler ces difficultés un décret du 30 septembre 1953 a inversé le principe consacré
jusque-là, faisant des tribunaux administratifs, successeurs des conseils de préfecture, les juridictions de droit
commun du contentieux administratif, tout en laissant en compétence de premier ressort au Conseil d'Etat les
affaires les plus importantes.
L'amélioration a été réelle mais - est-ce l'effet de ce que l'on appelle, de manière très discutable au
demeurant, l'accélération de l'histoire - elle n'a duré qu'une trentaine d'années, de nouveau un engorgement
s'est manifesté. Une nouvelle réforme, très importante, est intervenue en 1987, avec la création des cours
administratives d'appel, le Conseil d'Etat devenant, principalement (et avec les nuances que l'on va apporter),
une juridiction de cassation. Cette réforme, mûrement réfléchie, a été une réussite, ce qui n'empêche d'ailleurs
pas le contentieux de continuer à augmenter (mais les causes sont évidemment externes à la juridiction
administrative).
Le Conseil d'Etat est aujourd'hui, pour partie un juge de premier et dernier ressort, pour les affaires qui vont
être indiquées, pour partie un juge de cassation. Les affaires qui demeurent de la compétence du Conseil
d'Etat par voie d'appel sont aujourd'hui très réduites.
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Le Conseil d'Etat demeure donc, comme il vient d'être indiqué, un juge de premier et, donc, de dernier, ressort,
pour certaines affaires. La liste de ces affaires figure aux articles L. 311-1 et R. 311-1 du code de justice
administrative. On peut, à l'instar de B. Pacteau, distinguer, parmi ces affaires réservées à la compétence
directe du Conseil d'Etat celles qui le sont à raison de leur objet et celles qui le sont à raison de leur localisation.
S'agissant de l'objet, est d'abord réservée directement au Conseil d'Etat la connaissance des décrets et des
ordonnances. On voit bien que, ici, c'est l'importance de la mesure en cause qui a motivé et justifié le maintien
d'une compétence en premier ressort du Conseil d'Etat..
En deuxième lieu, le Conseil d'Etat est compétent pour connaître directement de certains actes des ministres.
Cela vaut pour les « actes réglementaires », avec toutes les questions que cela soulève (V. les leçons sur les
actes administratifs unilatéraux) et le refus de prendre de tels actes, ainsi que pour les autres actes « qui ne
peuvent être pris qu'après avis du Conseil d'Etat ».
En troisième lieu, le décret du 30 juillet 1963 modifié a également attribué compétence en premier ressort au
Conseil d'Etat pour connaître des recours contres les décisions des « organismes collégiaux à compétence
nationale ». Cela concerne les décisions des ordres professionnels (seuls envisagés en 1963), ainsi que tous
les organismes qui présentent ce caractère (par exemple des autorités administratives indépendantes telles
que la CNIL, ou encore, dans un tout autre domaine, des jurys nationaux), la compétence du Conseil d'Etat
s'appliquant aussi bien aux actes individuels qu'aux actes réglementaires.
Il en est ainsi, encore, en quatrième lieu, du contentieux relatif à la situation individuelle des fonctionnaires
nommés par décret du président de la République, en cinquième lieu d'un contentieux un peu particulier, celui
des oppositions aux décrets autorisant des changements de nom.
La première catégorie de contentieux concerne les litiges nés hors du ressort des juridictions administratives
territoriales. Bien que cette situation puisse paraître curieuse, les applications ne manquent pas. Il peut arriver,
en effet, que l'application des critères de compétence des juridictions administratives, que l'on va examiner
plus loin, ne permette pas de déterminer une juridiction compétente.
Pour éviter un déni de justice, la solution a consisté à donner compétence en premier ressort au Conseil d'Etat.
L'hypothèse la plus banale - bien que fort heureusement peu courante - est celle de litiges nés hors des eaux
territoriales françaises : tel est le cas de l'accident provoqué par une ancre qui avait été déposée par le génie
militaire français en territoire allemand (CE 17 novembre 1965, Société Neptun Transport Und Schiffahrt, Rec.
p. 614) ou, plus curieux encore (mais parfaitement explicable : les mers et les océans sont de plus en plus
fréquentés, les « routes maritimes » peuvent donner lieu à des accidents), l'accident causé à un navire en
haute mer par une cible flottante, qui avait dérivé, de l'armée de l'air française (CE 4 décembre 1970, Ministre
d'Etat chargé de la Défense nationale et ministre de l'Equipement et du Logement c/ Sieur Starr et British
Commonwealth Insurance Company, que l'on peut retenir plus simplement sous le nom de Sieur Starr).
On peut encore citer comme autres hypothèses, qui relèvent de l'histoire (mais pas seulement, les accords
liant la France à un certain nombre de pays pouvant encore donner lieu à de tels litiges), les litiges résultant,
à l'époque, d'actes pris par des autorités françaises siégeant dans des territoires soustraits, depuis, à la
souveraineté de la France : litiges nés d'un contrat conclu à Saïgon (CE 21 février 1964, Compagnie de
navigation Denis Frères, Rec. p. 126), ou entre une autorité militaire ayant son siège à Douala et un fournisseur
dont le siège social est à Fort Lamy (CE 5 janvier 1972, Société Unitchadienne, Rec. p. 4).
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Une seconde catégorie de litiges donnant lieu à attribution de compétence directe au Conseil d'Etat est un peu
l'inverse de la précédente : ce n'est pas par absence de juridiction compétente que la compétence est attribuée
au Conseil d'Etat, mais parce qu'il y a plusieurs juridictions susceptibles d'être compétentes simultanément.
L'hypothèse la plus banale est celle d'un acte réglementaire (mais autre que les actes réglementaires énumérés
précédemment) qui est susceptible de recevoir application dans le ressort de plusieurs tribunaux administratifs.
Il s'agit, plus généralement, de déterminer le champ d'application d'un acte, la chose étant loin d'être toujours
simple. D'une part, en effet, il n'est pas toujours aisé de savoir si l'on a affaire à un acte réglementaire ou non
réglementaire (V. leçon sur la notion d'acte administratif unilatéral). D'autre part, si l'acte n'est pas un acte
réglementaire, la question n'est pas pour autant résolue. Le juge s'interroge donc sur les effets directs de l'acte,
se demandant si ce dernier a des effets directs « sur un ensemble de personnes ou d'institutions situés dans les
ressorts de plusieurs tribunaux administratifs », pour reprendre la formule du commissaire du gouvernement
Braibant dans ses conclusions sur une affaire importante (et délicate juridiquement), CE 8 novembre 1961,
Société Olympia Press (Rec. p. 624).
Le Conseil d'Etat est également juge de cassation. Le recours en cassation sera présenté de manière plus
complète dans une leçon ultérieure. Il convient ici de se borner à trois remarques.
En premier lieu, le recours en cassation devant le Conseil d'Etat n'est pas une nouveauté car, avant que
ne soient instituées les cours administratives d'appel, le Conseil d'Etat était juge de cassation des décisions
juridictionnelles rendues en dernier ressort par les juridictions administratives spécialisées (par exemple, pour
ceux qui en disposent, la juridiction nationale d'un ordre professionnel, ou encore la Cour des comptes). Il l'est
évidemment demeuré.
En deuxième lieu, le recours en cassation devant le Conseil d'Etat présente des particularités par rapport au
recours en cassation que l'on connaît en droit privé. En droit administratif, et dans un premier temps, le recours
en cassation a été inspiré du recours pour excès de pouvoir et, avant 1987 déjà, les auteurs comparaient
le recours en cassation au recours en annulation, tout au moins dans l'utilisation de certaines techniques de
contrôle juridictionnel. Dans un second temps, avec l'application régulière du contrôle de cassation, le juge
administratif a été amené à adopter certaines méthodes du juge judiciaire, ou à s'en inspirer. Le contrôle de
cassation en droit administratif emprunte donc pour partie au contrôle de cassation du droit privé, sans lui
être assimilable.
En troisième lieu, et pour éviter que le Conseil d'Etat ne soit submergé par les recours en cassation de la part
de requérants (ou de leurs avocats) qui auraient continué à réagir comme si le Conseil d'Etat était toujours le
juge d'appel de droit commun, un mécanisme de filtrage a été institué. La loi du 31 décembre 1987 comporte
une disposition, qui est aujourd'hui l'article L. 822-1 du code de justice administrative, selon laquelle le rejet
peut être immédiat « si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ». Dans un premier
temps, une « commission d'admission des pourvois en cassation » a été instituée pour procéder à ce filtrage.
Après un temps d'adaptation, cette commission a été supprimée en 1997, le filtrage étant effectué par les
formations de jugement habituelles.
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par les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, sont soumises à un certain nombre de
dispositions communes que l'on présentera avant d'analyser ces deux types de juridictions.
Les jugements des tribunaux administratifs et les arrêts des cours administratives d'appel sont rendus par des
formations collégiales, sous réserves des exceptions tenant à l'objet du litige ou à la nature des questions à
juger.
Les magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel forment un même corps, à
l'exception des présidents de cour administrative d'appel, qui sont conseillers d'Etat. Lorsque la participation
d'un magistrat de tribunal administratif à une commission est prévue, la désignation peut porter sur un magistrat
de cour administrative d'appel.
Les membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont nommés et
promus par décret du Président de la République. Ils sont recrutés parmi les anciens élèves de l'Ecole nationale
d'administration, sous réserve des autres formes de recrutement.
En effet, d'autres recrutements complètent le recrutement effectué selon les modalités citées ci-
dessus, les besoins en personnels de ces juridictions ont conduit à développer ces procédés de
recrutement.
• En premier lieu, et de manière classique, des recrutements peuvent se faire à ce que l'on appelle le
tour extérieur. Celui-ci signifie que l'on peut recruter des personnes d'un corps par d'autres procédés
que le procédé de principe (qui, en France, est, ainsi qu'on le sait, le procédé du concours). Pour deux
membres du corps recrutés parmi les anciens élèves de l'ENA au grade de conseiller, une nomination
est prononcée au bénéfice, de fonctionnaires civils ou militaires de l'Etat ou de fonctionnaires de la
fonction publique territoriale ou de la fonction publique hospitalière qui justifient, au 31 décembre de
l'année considérée, d'au moins dix ans de services publics effectifs dans un corps ou cadre d'emplois de
catégorie A ou sur un emploi de catégorie A ou assimilé, ainsi que des magistrats de l'ordre judiciaire.
Pour sept conseillers promus au grade de premier conseiller, une nomination est prononcée, à condition
qu'ils justifient d'au moins huit ans de services effectifs dans un ou plusieurs des corps ou cadres
d'emplois cités, au bénéfice : de fonctionnaires de l'un des corps recrutés par la voie de l'ENA ; de
fonctionnaires appartenant à un autre corps de catégorie A ou cadre d'emplois de même niveau, titulaires
de l'un des diplômes exigés pour se présenter au concours externe d'entrée à l'ENA ainsi que d'un
grade et d'un échelon déterminés par décret en Conseil d'Etat ; de magistrats de l'ordre judiciaire ;
de professeurs et maîtres de conférences titulaires des universités ; d'administrateurs territoriaux ; de
personnels de direction des établissements de santé.
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la catégorie A ; aux magistrats de l'ordre judiciaire ; aux titulaires de l'un des diplômes exigés pour se
présenter au premier concours d'entrée à l'ENA. C'est là un débouché intéressant pour de bons étudiants
en droit.
L'avancement des membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel a lieu
de grade à grade après inscription au tableau d'avancement. Ce tableau est établi sur proposition du Conseil
supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, présenté ci-après.
Les présidents sont nommés au choix sur proposition du Conseil supérieur des tribunaux administratifs
et cours administratives d'appel après inscription au tableau d'avancement parmi les membres du corps des
tribunaux administratifs et cours administratives d'appel comptant huit ans de services effectifs et ayant, soit
satisfait à l'obligation de mobilité, soit exercé leurs fonctions juridictionnelles pendant trois ans dans une
cour administrative d'appel. Les présidents occupent les fonctions, dans une cour administrative d'appel, de
président de chambre ou d'assesseur, dans un tribunal administratif, de président ou de vice-président du
tribunal, au tribunal administratif de Paris, ils occupent, en outre, les fonctions de président ou de vice-président
de section.
Le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel (CSTACAA) exerce seul,
à l'égard des membres des TA et des CAA, les attributions conférées par la loi du 11 janvier 1984 portant
dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat. Il connaît de toute question relative au
statut particulier du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel. En outre, il émet des
propositions sur un certain nombre de nominations, détachements et intégrations (ceux prévus aux art. L.
233-3, L. 233-4 et L. 233-5 du code de justice administrative).
Une innovation - intéressante pour les étudiants - est également à signaler, c'est la création, depuis 2002,
des « assistants de justice ». Selon l'article L. 227-1 du code de justice administrative, peuvent être nommés,
en qualité d'assistants de justice, auprès des membres du corps des tribunaux administratifs et des cours
administratives d'appel, les personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation juridique d'une
durée au moins égale à quatre années d'études supérieures après le baccalauréat et que leur compétence
qualifie particulièrement pour exercer ces fonctions. Ces assistants sont nommés pour une durée de deux ans
renouvelable deux fois, ils sont tenus au secret professionnel.
Un contrôle de l'activité des membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel
est exercé par la mission permanente d'inspection des juridictions administratives.
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juridictions d'attribution dont l'essentiel des attributions était constitué de compétences de consultations. Cela
explique peut-être que le recrutement de ces conseils de préfecture n'ait pas toujours obéi à des critères qui
sont aujourd'hui de rigueur lorsqu'il s'agit de juges. Quoi qu'il en soit, une réforme importante a eu lieu en 1953,
un décret du 30 septembre 1953, complété par un règlement d'administration publique (catégorie de normes qui
n'existe plus aujourd'hui) du 28 novembre 1953 ayant créé des tribunaux administratifs interdépartementaux.
On peut éprouver quelque inquiétude, au vu de l'augmentation actuelle, sur ce que cela pourrait être avec une
meilleure connaissance ...) et une moindre réticence, venant d'une moins grande déférence, à le faire.
Les tribunaux administratifs sont actuellement au nombre de 37 (en comptant le tribunal de Nîmes, et le tribunal
de Toulon récemment créé), dont 29. Les tribunaux administratifs outre-mer sont ceux de : Basse-Terre, pour
la Guadeloupe ; Cayenne, pour la Guyane ; Fort-de-France, pour la Martinique ; Mamoudzou, pour Mayotte ;
Mata-Utu, pour Wallis-et-Futuna (ce tribunal étant lié à celui de Nouvelle-Calédonie et présidé par le président
de ce dernier) ; Saint-Denis, pour la Réunion ; Saint-Pierre, pour Saint-Pierre-et-Miquelon ; Papeete, pour la
Polynésie française ; Nouméa, pour la Nouvelle-Calédonie.
Il est à noter que les tribunaux administratifs de Paris et de Strasbourg connaissent des règles particulières
d'organisation, le premier en raison de l'importance quantitative des affaires qu'il est appelé à traiter, le second
en raison de survivances historiques héritées de la période prussienne.
A la tête de chaque tribunal on trouve un président assisté, dans certains tribunaux, d'un vice-président. Chaque
tribunal est divisé en chambres, chacune composée de trois juges, avec possibilité de formations élargies et
de formations plénières. Si le principe demeure celui de la collégialité, l'augmentation du nombre d'affaires à
traiter, la nécessité de réduire les délais de jugement, la nature des questions posées, a conduit à développer
les cas de juge « statuant seul », ainsi qu'on le verra plus en détail dans une leçon ultérieure.
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Les tribunaux administratifs ont trois sortes d'attributions, de très inégale importance, les fonctions
juridictionnelles étant, évidemment, les plus importantes
En premier lieu, les tribunaux administratifs ont des fonctions administratives, dont on peut penser qu'elles sont
utiles à la fois aux administrations et au juge, ce dernier pouvant, de ce fait, mieux connaître l'administration,
donc ses difficultés comme ses dérobades. Tout d'abord, selon l'article R. 242-1 du code de justice
administrative, les tribunaux administratifs peuvent donner des avis aux préfets. Il peut paraître curieux que ces
fonctions n'aient pas été étendues aux collectivités territoriales, le principe de libre administration ne pouvant
être considéré comme un obstacle juridique déterminant (mais peut-être les pouvoirs publics ont-ils craint que
les conseillers de TA ne soient trop sollicités).
Ensuite, les membres des TA sont amenés à participer à de nombreuses commissions administratives, dont
les plus connues sont les commissions départementales des impôts directs et les commissions d'expulsion
des étrangers.
Enfin, selon l'article L. 2132-5 du code général des collectivités territoriales (CGCT) : « Tout contribuable
inscrit au rôle de la commune a le droit d'exercer, tant en demande qu'en défense, à ses frais et risques,
avec l'autorisation du tribunal administratif, les actions qu'il croit appartenir à la commune, et que celle-ci,
préalablement appelée à en délibérer, a refusé ou négligé d'exercer ». Cette disposition a donné lieu à une
jurisprudence relativement abondante, et à des commentaires qui le sont encore plus. Le Conseil d'Etat a
été amené à préciser que la nature de la compétence d'un TA, lorsque ce dernier est appelé à donner son
autorisation, est bien de nature administrative (CE 26 juin 1992, Pezet et San Marco, Rec. p. 248, concl. Le
Chatelier), sa décision étant alors qualifiée d' « arrêté », et le tribunal n'étant pas tenu de respecter les règles
de la procédure juridictionnelle.
Les tribunaux administratifs ont aussi, et avant tout, des attributions contentieuses. Ils sont, « en premier
ressort et sous la réserve des compétences attribuées au Conseil d'Etat, juges de droit commun du contentieux
administratif » (art. L. 211-1 du code de justice administrative). En d'autres termes, lorsqu'un litige s'élève en
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matière administrative, la compétence pour en connaître appartient normalement à un tribunal administratif,
sauf si un texte particulier déroge à ce principe.
Les règles de compétence sont d'une grande importance pratique, puisqu'elles permettent de dire quelle
est la juridiction administrative compétente. Ces règles sont d'ordre public, c'est-à-dire qu'elles peuvent être
soulevées d'office par le juge même si les parties, elles, ne les ont pas soulevées.
Rappelons également que la répartition des compétences entre juridictions administratives et juridictions
judiciaires est du domaine de la loi, tandis que la modification de la répartition des compétences au sein des
juridictions administratives est du domaine du règlement, en application de l'article 34 de la Constitution.
En effet, il ne suffit pas de savoir que, pour résoudre un litige déterminé, le juge compétent est le juge
administratif, il ne suffit même pas de savoir que, au sein de la juridiction administrative, le juge compétent
est le tribunal administratif, encore faut-il savoir quel est le tribunal territorialement compétent, puisque, par
définition, il existe une pluralité de tribunaux administratifs : chaque juridiction voit sa compétence déterminée,
non pas seulement matériellement - définition donnée par l'article L. 211-1 du CJA qui a été rappelé - mais
également territorialement, et ces compétences ne sont pas interchangeables, un tribunal ne peut se prononcer
si c'est un autre tribunal qui est compétent.
Le principe est que la compétence du tribunal administratif est déterminée par le siège de l'autorité
administrative qui a pris l'acte ou passé le contrat litigieux. Cependant, ce principe est assorti de toute une
série d'exceptions, destinées avant tout à éviter l'encombrement du tribunal administratif de Paris.
En premier lieu, il s'agit de la résidence du requérant. Ce critère détermine le tribunal territorialement compétent
s'agissant des litiges relatifs à la reconnaissance d'une qualité (par ex. déporté, interné, résistant, combattant
volontaire, évadé, etc.) et aux effets attachés à cette qualité. Il en va de même pour les litiges relatifs aux
diverses décorations (la France est un pays où beaucoup attachent une grande importance aux décorations),
aux emplois réservés, aux pouvoirs de police utilisés sous forme de décisions individuelles par les autorités
administratives.
Le deuxième critère est celui du lieu de situation des biens. Ce lieu détermine le tribunal territorialement
compétent en matière de déclaration d'utilité publique (expropriation), de domaine public, de remembrement,
d'opération d'urbanisme, de permis de construire, de classement des monuments et des sites, de réquisition
(mobilière ou immobilière).
Le troisième critère utilisé est celui du lieu d'affectation des agents publics (fort nombreux, ainsi que l'on
sait, donc à l'origine d'un contentieux quantitativement important). Ce lieu d'affectation détermine le tribunal
territorialement compétent dans le cas de litiges d'ordre individuel concernant des fonctionnaires et agents de
l'Etat ou de toute autre personne publique. Si la décision attaquée est relative à une nouvelle affectation (en
cas de mutation, par ex.), c'est le lieu de cette nouvelle affectation qui est pris en considération. Si la mesure
attaquée est relative à une cessation de fonctions (l'hypothèse inévitable, pour ceux qui ne décèdent pas avant,
est la mise à la retraite ; d'autres hypothèses, rares, peuvent se présenter comme, par ex., une révocation).
C'est le lieu de la dernière affectation qui est pris en considération. En revanche si la décision est à la fois
collective (cas d'un tableau d'avancement) et susceptible de recevoir application dans le ressort de plusieurs
tribunaux administratifs, c'est celui dans lequel siège l'auteur de la mesure attaquée qui est compétent pour
recevoir l'action.
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Un quatrième critère est le siège des assemblées, corps ou organismes : les litiges relatifs à la désignation
des membres de tels organismes (qu'il s'agisse d'une nomination ou d'une élection), sont de la compétence
du tribunal dans le ressort duquel cet organisme a son siège.
Un cinquième critère est le lieu d'exercice de la profession : ce dernier détermine le tribunal administratif
compétent dans le cas de litiges relatifs à l'application des législations et réglementations de certaines
activités professionnelles telles que les professions libérales, agricoles, commerciales, ainsi que pour les litiges
soulevées par les sanctions édictées en application desdites législations et réglementations.
En sixième lieu, on tient compte du lieu d'exécution du contrat. Le principe est que les litiges relatifs à la
passation et à l'exécution des contrats sont de la compétence du tribunal dans le ressort duquel le contrat est
exécuté. Si le contrat est exécuté dans le ressort de plusieurs tribunaux - ce qui est parfaitement envisageable,
par exemple dans le cas de construction d'une autoroute - le tribunal compétent est celui dans le ressort duquel
l'autorité publique (ou la première des autorités publiques, s'il y en a plusieurs) contractante a signé le contrat.
Un septième critère est celui des pensions : les litiges relatifs aux pensions - très nombreuses par définition -
sauf ceux des agents des collectivités territoriales, sont de la compétence du tribunal dans le ressort duquel se
trouve le lieu d'assignation du paiement de la pension ou, à défaut, le lieu de résidence du demandeur lors de
l'instruction du pourvoi. Pour les agents des collectivités territoriales, le tribunal compétent est, logiquement,
celui dans le ressort duquel se trouve le siège de la personne publique de laquelle dépendait l'agent au moment
de sa mise à la retraite.
On rencontrera ces règles dans les leçons suivantes consacrées à la responsabilité. Précisons d'ores et déjà
que dans ce domaine de la responsabilité extracontractuelle, si le dommage résulte d'une décision qui aurait
pu faire l'objet d'un recours en annulation devant un tribunal administratif, c'est ce dernier qui est compétent
pour connaître des conséquences dommageables. Si le dommage résulte d'un agissement administratif, le
tribunal compétent est celui dans le ressort duquel s'est produit le fait générateur du dommage.
Un dernier critère à prendre en considération est celui des personnes soumises à l'exercice d'un pouvoir
de tutelle. On pourrait certes penser que ce critère est devenu accessoire, voire sans intérêt, du fait de la
suppression de la tutelle. Il n'en est rien, et il faut se méfier des idées toutes faites qui traînent.
• D'une part, en effet, les personnes publiques ne sont pas seulement constituées par les collectivités
territoriales, et la tutelle subsiste sur un certain nombre de ces personnes même si, et c'est une difficulté,
il n'est pas toujours aisé de savoir si une personne publique - par exemple un établissement public - est
soumise ou non à une tutelle.
• D'autre part, même en ce qui concerne les collectivités territoriales, le législateur a supprimé la tutelle
administrative et la tutelle financière, mais non la tutelle technique - qui peut ne pas être négligeable -
qu'il n'a fait, selon ses propres termes, qu' « alléger ». Quoi qu'il en soit, dans cette hypothèse de tutelle,
les litiges y afférents sont de la compétence du tribunal dans le ressort duquel la personne sous tutelle
a son siège, pour autant qu'aucune des règles précédemment exposées ne puisse s'appliquer.
Lorsque aucun des critères qui viennent d'être présentés ne trouve à s'appliquer, on en revient au critère
résiduel précédemment énoncé, le critère du siège de l'auteur de la mesure contestée.
Ainsi, par exemple, l’action en responsabilité pour abandon d’un projet à l’étranger relève du tribunal
administratif du siège de la personne publique (en l’espèce, préjudice résultant de l’abandon fautif par une
personne publique, l’Agence pour l’enseignement du français à l’étranger, de la procédure dite de dialogue
compétitif pour la passation d’un contrat de partenariat sur le financement, la conception, la réalisation et la
maintenance d’un nouveau lycée français au Caire : CE 3 septembre 2009, Société Solefim, req. n° 313657).
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Il faut signaler, enfin, que pour tout litige se greffant à titre incident, accessoire ou additionnel sur le litige
principal, c'est le tribunal compétent au principal qui demeure compétent pour connaître de l'accessoire, en
vertu du principe accessorium sequitur principale.
L'augmentation du nombre de conseillers d'Etat aurait été, peut-être, une solution envisageable mais, d'une
part, au vu de l'augmentation du contentieux que nous avons pu observer depuis une trentaine d'années,
l'amélioration aurait été de courte durée, d'autre part cela aurait sans doute modifié profondément la nature
du Conseil d'Etat. La solution choisie, qui s'est révélée au fil du temps être la meilleure, a été celle de la
création de cours administratives d'appel, ce qui entraînait un changement important du Conseil d'Etat qui
se transformait, et pour la première fois de son histoire, en un juge dont la compétence principale est une
compétence de cassation.
Ces huit cours administrative d'appel (CAA) sont celles de Bordeaux, Douai (la plus petite par le nombre
d'affaires, créée pour décharger la cour de Paris), Lyon, Marseille (devenue la cour traitant le plus grand
nombre d'affaires, d'où, peut-être, un jour, la création d'une nouvelle cour pour la décharger), Nancy, Nantes,
Paris, Versailles. Chacune de ces cours comporte un certain nombre de chambres, huit pour Paris, sept pour
Marseille, six pour Bordeaux et Lyon, cinq pour Versailles, quatre pour Nancy et Nantes, trois pour Douai.
Chaque Cour est présidée par un président qui est un membre du Conseil d'Etat. C'est là une différence
importante avec les tribunaux administratifs : les membres des tribunaux administratifs (président compris),
ainsi que les membres des cours administratives d'appel (hors président) font partie d'un même corps, qui
est celui des conseillers de tribunaux administratifs et de conseillers des cours administratives d'appel ; le
président d'une CAA est, lui, conseiller d'Etat.
Les affaires sont jugées, soit par une chambre, soit par la cour en formation plénière, qui délibère en nombre
impair. Une chambre siège en formation de jugement sous la présidence du président de chambre ou, en cas
d'absence ou d'empêchement, d'un magistrat désigné à cet effet par le président de la cour et ayant au moins
le grade de président. Une chambre comprend, outre le président, un magistrat affecté à la chambre, désigné
en suivant l'ordre du tableau parmi les magistrats présents, le magistrat rapporteur.
Lorsque la nature ou la difficulté de l'affaire le justifie, et sans préjudice des dispositions de l'article R. 222-29
du code de justice administrative (qui permet de décider d'inscrire une affaire au rôle de la cour statuant en
formation plénière), le président de la chambre peut proposer au président de la cour que la chambre siégeant
en formation de jugement comprenne, outre les magistrats qui viennent d'être mentionnés, un autre magistrat
affecté à la chambre et un magistrat affecté à une autre chambre.
Le président de la cour peut présider une chambre siégeant en formation de jugement, le président de la
chambre siégeant alors au titre de magistrat affecté à la chambre. Par ailleurs, et ainsi qu'on l'a signalé plus
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haut, la formation de jugement ou le président de la cour peuvent, à tout moment de la procédure, décider
d'inscrire une affaire au rôle de la cour statuant en formation plénière.
La cour statuant en formation plénière est présidée par le président de la cour ou, à défaut, par le président
de chambre le plus ancien dans ses fonctions. Elle comprend, en outre, les présidents de chambre de la cour,
remplacés en cas d'absence ou d'empêchement par un magistrat de la même chambre ayant au moins le grade
de président, désigné en suivant l'ordre du tableau, le magistrat rapporteur, s'il y lieu, un magistrat départageur,
ayant le grade de président, désigné suivant l'ordre du tableau. En cas d'absence ou d'empêchement, les
président des CAA sont remplacés par le président de chambre le plus ancien dans l'ordre du tableau.
Le vice-président du Conseil d'Etat peut, à la demande d'un ministre et avec l'accord du chef de juridiction
et de l'intéressé, désigner un magistrat d'une CAA (comme d'un TA) pour qu'il apporte son concours à une
administration de l'Etat. Le président de la CAA peut, de son côté (et comme le président d'un TA), à la demande
d'un préfet du ressort, et avec l'accord de l'intéressé, désigner un membre de la juridiction pour qu'il apporte
son concours à une administration de l'Etat.
En second lieu, et c'est le plus important, et de loin, les CAA ont des attributions contentieuses. Les cours
administratives d'appel rendent des arrêts, et non des jugements. Selon l'article L. 211-2 du code de justice
administrative, les cours connaissent des jugements rendus en premier ressort par les tribunaux administratifs,
sous réserve des compétences attribuées au Conseil d'Etat en qualité de juge d'appel et de celles définies aux
articles L. 552-1 et L. 552-2 du code de justice administrative. Elles sont, en d'autres termes, les juridictions
d'appel de droit commun en matière de contentieux administratif.
Les cours administratives d'appel connaissent également des appels formés contre les jugements rendus par
les commissions du contentieux de l'indemnisation des Français dépossédés de biens situés dans un territoire
antérieurement placé sous la souveraineté, le protectorat ou la tutelle de la France.
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Section 3. Le règlement des problèmes
de compétence à l'intérieur de l'ordre
juridictionnel administratif
De même qu'il peut se présenter des difficultés de détermination de la compétence d'un ordre juridictionnel par
rapport à un autre, de même, à l'intérieur d'un ordre juridictionnel - et cela vaut autant pour les juridictions de
l'ordre judiciaire que pour celles de l'ordre administratif - des difficultés peuvent apparaître pour savoir quelle
est la juridiction compétente. Ces difficultés sont inévitables et s'expliquent (en partie) très simplement parce
que la pluralité de juridictions sur le territoire entraîne la définition d'un ressort territorial pour chaque juridiction,
ressort qui limite nécessairement, du point de vue territorial, la compétence de chaque juridiction (compétence
ratione loci).
C'est à la juridiction suprême de l'ordre juridictionnel, pour l'ordre administratif, le Conseil d'Etat par
conséquent, qu'il appartient de déterminer la juridiction compétente. Tout cela fait néanmoins perdre du
temps aux plaideurs, qui ne comprennent pas ces questions, sans compter le coût que cela représente pour
eux. C'est pourquoi des procédés préventifs ont été adoptés par le pouvoir réglementaire (mais sur inspiration
du juge) pour éviter, autant que possible, de telles difficultés.
A. Le règlement de juges
Le règlement de juge est le procédé par lequel le Conseil d'Etat règle les différends de jurisprudence à l'intérieur
de la l'ordre juridictionnel administratif, ceci afin d'éviter des complications inutiles, voire des dénis de justice.
Ce procédé se rencontre également en procédure civile, mais il y connaît un moindre développement qu'en
droit administratif. Le principe du règlement de juge est de permettre la remise en cause de l'autorité de chose
jugée qui s'attache normalement aux décisions de justice. Le règlement de juge intervient dans trois cas.
Le premier cas est le conflit de compétences qui peut apparaître entre deux juridictions inférieures.
Dans cette hypothèse, deux juridictions administratives de même niveau rendent chacune une décision
d'incompétence qui empêche le requérant d'obtenir justice. Cette hypothèse ne peut se présenter qu'en raison
du comportement du requérant (c'est-à-dire son avocat) qui, au lieu de faire appel du jugement d'incompétence,
est allé devant une autre juridiction.
Si le premier tribunal a déclaré à tort son incompétence, c'est à bon droit que le second tribunal saisi va, lui,
affirmer son incompétence. Mais, compte tenu du temps écoulé, le jugement du premier juge a acquis l'autorité
de chose jugée. On arrive ainsi à une situation absurde où le requérant ne peut plus obtenir qu'un juge se
prononce sur sa cause, ce qui est inacceptable (même s'il y a faute de sa part), d'où le règlement de juge. Le
Conseil d'Etat, saisi d'un recours contre le premier ou le second jugement, confirme celle des deux décisions
qui lui paraît fondée et annule, subséquemment, celle qui est erronée en la déclarant nulle et non avenue.
Le tribunal dont la sentence est ainsi anéantie est alors saisi de la requête par le seul effet de la décision du
Conseil d'Etat.
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Un deuxième cas est le conflit de compétence qui peut apparaître entre une décision du Conseil d'Etat
et celle d'une juridiction territoriale. L'affaire Hounicheren, de 1950, illustre ce cas de figure : la victime d'un
accident automobile (hypothèse qui ne pourrait plus se produire aujourd'hui en raison de la loi de 1957) s'était
vue déboutée de son action devant le conseil de préfecture au motif que, selon ledit conseil, la responsabilité
incombait à l'Etat, la compétence ne relevant plus, alors, des conseils de préfecture. Mais le Conseil d'Etat,
compétent pour condamner l'Etat, saisi par le requérant, estima que la ville était seule responsable, ce qui
aurait dû conduire à une décision d'incompétence et, donc, à un déni de justice pour le requérant. Le Conseil
d'Etat déclara donc nul et non avenu le jugement du conseil de préfecture et régla l'affaire par règlement de
juge (CE 21 avril 1950, Hounicheren, S 1951, 3, 36, concl. Barbet).
Un troisième cas, encore plus curieux, mais parfaitement compréhensible, est celui du règlement de juges
par suite de contradiction entre deux décisions du Conseil d'Etat lui-même. Ceci peut se produire surtout
à la suite d'un changement de législation ou de réglementation applicable. Cette hypothèse est illustrée par
l'affaire Miret (CE 11 mai 1959, Rec. p. 295, S 1959, p. 146, concl. A. Bernard), où une contrariété inévitable
était apparue entre deux décisions successives du Conseil d'Etat.
B. La connexité
Il peut arriver que deux demandes, liées entre elles, relèvent de deux juridictions différentes. Il serait excessif
d'exiger du requérant qu'il forme deux requêtes distinctes afin de respecter les règles de compétence. C'est
pourquoi, en application de dispositions réglementaires de 1960 devenues les articles R. 342-1 et s. et R.
344-1 et s. du code de justice administrative, le Conseil d'Etat peut désigner le juge qui sera compétent pour
régler les deux affaires. C'est ce que l'on appelle la connexité.
Encore faut-il que les affaires soient véritablement connexes. Le Conseil d'Etat a interprété très restrictivement
cette condition de connexité, pour évier que les requérants ne cherchent à mettre un peu trop facilement en
échec les règles de compétence territoriale.
Pour qu'une question soit considérée comme connexe à une autre, il faut que le sort de l'une dépende de l'issue
de l'autre. Par connexité il faut donc entendre la liaison étroite des solutions, et non l'identité des questions
posées : deux demandes semblables formées pour des agents se trouvant dans des situations identiques ne
sont pas connexes (CE 22 octobre 1969, Consorts Tencéré).
Il peut y avoir tout d'abord connexité de demandes présentées devant deux juridictions territoriales. Ainsi, par
exemple, deux tribunaux administratifs sont saisis simultanément de demandes présentant entre elles un lien
étroit de connexité. Il importe d'éviter que les décisions rendues soient en contradiction.
Le Conseil d'Etat est saisi, soit par l'un des deux présidents de TA saisissant le président de la section du
contentieux par voie d'ordonnance, soit par l'une des parties en appel du refus opposé par le président du
tribunal à leur demande de saisir le président de la section du contentieux. La saisine de ce dernier a pour effet
l'envoi du dossier au Conseil d'Etat et le sursis à statuer pour les deux tribunaux. Le président de la section du
contentieux se prononce sur la connexité par ordonnance non motivée insusceptible de recours juridictionnel.
Si l'absence de lien entre les deux affaires est constatée, la procédure reprend devant les tribunaux saisis,
si, en revanche, le lien est relevé, le président de la section du contentieux désigne le tribunal qui connaîtra
des deux demandes.
Il peut y avoir, ensuite, connexité, entre une demande présentée devant une juridiction territoriale et une
demande formée devant le Conseil d'Etat.
• En premier lieu, le Conseil d'Etat est compétent pour se prononcer sur toute affaire connexe d'une affaire
dont il est saisi et qui relève de sa compétence en premier et dernier ressort.
• En second lieu, lorsque la connexité est soulevée, et quelle que soit l'hypothèse, le Conseil d'Etat est saisi
par le tribunal concerné ou les parties, ce qui a pour effet d'entraîner le sursis à statuer et de suspendre,
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également, le délai d'appel. En ce cas, le pouvoir de prononcer sur la connexité n'appartient pas au
président de la section du contentieux mais aux formations ordinaires du Conseil.
• La première hypothèse est celle dans laquelle le Conseil d'Etat est incompétent. Lorsque ce dernier
est saisi de conclusions relevant de la compétence d'une autre juridiction administrative, et sous réserve
des dispositions de l'article R. 351-4 relatives aux conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste
(V. ci-après), le président de la section du contentieux, saisi par la sous-section chargée de l'instruction
du dossier, règle la question de compétence et attribue, le cas échéant, le jugement de tout ou partie de
l'affaire à la juridiction qu'il déclare compétente.
• La deuxième hypothèse, que l'on rencontre beaucoup plus fréquemment, est celle dans laquelle une
juridiction administrative territoriale est saisie alors que le Conseil d'Etat est compétent. Lorsque
une cour administrative d'appel ou un tribunal administratif est saisi de conclusions qu'il estime relever
de la compétence du Conseil d'Etat, son président transmet sans délai le dossier au Conseil d'Etat qui
poursuit l'instruction de l'affaire. Si l'instruction de l'affaire révèle que celle-ci relève en tout ou partie de
la compétence d'une autre juridiction, la sous-section d'instruction saisit le président de la section du
contentieux qui règle la question de compétence et attribue, le cas échéant, le jugement de tout ou partie
des conclusions à la juridiction qu'il déclare compétente et qui ne peut, alors, se récuser (article R. 351-2
du code de justice administrative).
Les cas dans lesquels cette hypothèse se rencontre sont représentés, notamment, par les mouvements
de fonctionnaires, nominations ou mutations. Ainsi, par exemple, un professeur des écoles est muté de
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Mayotte à La Réunion ; le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Mamoudzou
annule la décision du vice-recteur de l'académie de Mayotte accordant à l'intéressé une indemnité
forfaitaire ; le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux, saisie en appel, transmet au
Conseil d'Etat la requête présentée par le ministre de l'éducation nationale (CE 21 décembre 2007,
Ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, req. n° 282709). Ou
encore, une clinique saisit le tribunal des affaires sociales d'un litige l'opposant à l'agence régionale de
l'hospitalisation (ARH) à propos d'un avenant portant sur une question de tarification des prestations,
tribunal qui surseoit à statuer jusqu'à ce que le tribunal administratif se soit prononcé sur la légalité de
l'avenant ; le président de la cour administrative, saisie en appel du jugement du TA, saisit le Conseil
d'Etat sur le fondement de l'article R. 351-2 du code de justice administrative (CE 27 décembre 2007,
Clinique Saint-Roch, req. n° 299608). Citons un dernier exemple de renvoi, cette fois par le président
d'un TA, à propos de la requête demandant l'annulation d'un arrêté ministériel portant agrément d'une
machine à voter (CE 28 novembre 2007, MM. Pierre A, Fernand B, Jacques C, Jean D, Maurice E et
Nicolas F, req. n° 305655).
• La troisième hypothèse a été prévue par le décret n° 2002-547 du 19 avril 2002 pour remédier à un
inconvénient de la procédure qui existait jusque-là : le président d'une cour administrative d'appel ou
d'un tribunal administratif devait toujours renvoyer au Conseil d'Etat même lorsqu'il estimait que c'était
une autre juridiction administrative que le Conseil d'Etat qui était compétente. Désormais (décret de 2002
codifié à l'article R. 351-3 du code de justice administrative), lorsqu'une cour administrative d'appel ou
un tribunal administratif est saisi de conclusions qu'il estime relever de la compétence d'une juridiction
administrative autre que le Conseil d'Etat, son président, ou le magistrat qu'il délègue, transmet sans
délai le dossier à la juridiction qu'il estime compétente. Toutefois, en cas de difficultés particulières, il
peut transmettre sans délai le dossier au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat qui
règle la question de compétence et attribue le jugement de tout ou partie de l'affaire à la juridiction qu'il
estime compétente.
B. Éléments de procédure
Une première remarque concerne ce que l'on appelle les « irrecevabilités manifestes » qui, si elles n'étaient pas
soulevées, ralentiraient inutilement la procédure et pèseraient sur le bon fonctionnement de la justice. C'est
pourquoi des dispositions ont été prises pour éviter que les règles de répartition des compétences présentées
dans les développements qui précèdent ne fassent obstacle au constat par un juge de ces irrecevabilités.
Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi un tribunal administratif, une cour administrative d'appel
ou le Conseil d'Etat, relève de la compétence d'une juridiction administrative, le tribunal administratif, la cour
administrative d'appel ou le Conseil d'Etat, selon le cas, est compétent, nonobstant les règles de répartition
des compétences entre juridictions administratives, pour rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité
manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance ou pour constater qu'il n'y a pas lieu de statuer
sur tout ou partie des conclusions.
Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi le Conseil d'Etat relève de la compétence d'une
juridiction administrative autre qu'un tribunal administratif ou une cour administrative d'appel, le Conseil d'Etat
est compétent, nonobstant toutes dispositions relatives à la répartition des compétences entre juridictions
administratives, pour rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être
couverte en cours d'instance ou pour constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur tout ou partie des conclusions.
Enfin, « lorsque des considérations de bonne administration de la justice l'imposent », le président de la section
du contentieux du Conseil d'Etat, de sa propre initiative ou sur la demande d'un président de TA ou de CAA,
attribue, par une ordonnance motivée qui n'est pas susceptible de recours, le jugement d'une ou plusieurs
affaires à la juridiction qu'il désigne.
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