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Convention collective (Etude générale)

Chapitre 1. Généralités

Section 1. Nature et objet des conventions collectives

Section 2. Types de conventions collectives

Section 3. Sources des conventions collectives

Section 4. Commission nationale du dialogue social

Chapitre 2. Règles communes à toutes les conventions collectives

Section 1. Conclusion des conventions collectives en général

Section 2. Durée

Section 3. Effets de la convention collective de travail

Section 4. Contentieux des conventions collectives de travail

Sous-section 1. Actions en justice


Sous-section 2. Tribunaux compétents

Section 5. Contrôle et sanctions

Section 6. Interprétation des conventions collectives

Chapitre 3. Règles particulières aux conventions collectives agréées

Section 1. Elaboration

Section 2. Champ d’application

Section 3. Agrément des conventions collectives

Sous-section 1. Conventions collectives répondant aux


conditions légales
Sous-section 2. Fin de l’agrément

Chapitre 4. Règles particulières aux conventions collectives d’établissements

Chapitre 1. Généralités

1. Législation - Les conventions collectives de travail ne faisaient l’objet d’aucune réglementation


avant le décret du 4 août 1936, abrogé et remplacé par le décret du 5 novembre 1949. Ce décret a
été inséré au code du travail où il forme le titre III du livre premier (art. 31 et s.).

Section 1. Nature et objet des conventions collectives


2. Définition - La convention collective est un accord relatif aux conditions de travail (art. 31, al. 1er,
C.T.). Elle ne constitue donc pas, à proprement parler, un contrat de travail, celui-ci étant le contrat
par lequel une personne s’engage à travailler pour une autre personne.

3. Objet - La convention collective se borne, en général, à déterminer les engagements pris par
chacune des parties envers l’autre partie et, notamment, certaines conditions auxquelles devront
satisfaire les contrats de travail individuels ou d’équipes que les personnes liées par la convention
passeront soit entre elles, soit avec des tiers, pour le genre de travail qui fait l’objet de la convention
(art. 31, al. 2, C. T.). C’est une réglementation préalable des conditions de travail. Cependant rien ne
s’oppose à ce qu’elle renferme les éléments d’un véritable contrat de travail.

4. Convention collective et contrat de travail - Les rapports entre la convention collective et le


contrat individuel sont-ils semblables à ceux unissant la convention à la loi ? Oui dans un sens, car
dans les deux cas il s’agit de faire respecter la hiérarchie des règles juridiques en assurant la
soumission de la règle inférieure à la règle supérieure, à moins que la première ne soit plus favorable
au travailleur que la seconde : les clauses contraires de l’accord individuel sont automatiquement
supprimées pour être remplacées par celles de la convention collective. Non, car si la convention
collective peut suppléer la loi, il est exclu que sa conclusion puisse remplacer la signature d’un contrat
individuel qui, seul, peut créer entre un travailleur et un employeur un lien juridique de subordination.

Section 2. Types de conventions collectives

5. Critère - On distingue deux types de conventions collectives de travail :

- les conventions collectives agréées;

- les conventions collectives d’établissements.

Selon qu’une convention collective appartiendra à l’un ou l’autre type, son caractère obligatoire
s’imposera soit seulement à ceux qui l’ont directement ou indirectement signée, soit à tous ceux qui se
rattachent à une activité professionnelle déterminée, qu’ils soient ou non signataires.

6. Convention collective agréée - La procédure de l’agrément impose, par voie réglementaire, une
convention collective à toute une branche d’activité professionnelle. Cette convention devient alors
véritablement la “loi de la profession” par arrêté du ministre des affaires sociales. Ses dispositions
sont obligatoires pour tous les établissements et tous les travailleurs qui relèvent de cette activité
professionnelle.

Pour pouvoir être agréée, une convention collective doit répondre à certaines conditions spéciales de
forme et de fond.

Le texte complet de toute convention collective agréée est publié par le Journal Officiel de la
République Tunisienne.

7. Convention collective d’établissement - La convention collective d'établissement s'applique aux


personnes qui l'ont signée personnellement ainsi que ceux qui sont, ou deviennent, membres des
organisations signataires. Elle lie également les organisations qui lui donnent leur adhésion, ainsi que
tous ceux qui, à un moment quelconque. deviennent membres de ces organisations.

Section 3. Sources des conventions collectives

8. Textes - Il convient de rappeler que l'introduction des conventions collectives en Tunisie avait eu
lieu en 1936 par le décret de 4 Août 1936 selon lequel des conventions collectives de travail pouvaient
être conclus dans les branches d'activité de l'industrie et du commerce.
Ce décret a été abrogé par le décret de 5 Novembre 1949 qui a introduit une nouveauté qui consiste
en la soumission des conventions collectives à l’agrément du ministre chargé du travail, d’une part et
l’interdiction d’insérer des dispositions relatives aux salaires, indemnités et à la classification
professionnelles dans les conventions collectives, d’autre part. Ce qui a entraîné la conclusion d’un
nombre réduit de conventions.

En abrogeant le décret du 5 Novembre 1949, le code de travail a maintenu l’interdiction sus-


mentionnée dans ses articles 51 et 52. Cette interdiction a été levée, par les dispositions du décret n°
73-247 du 25 Mai 1973 qui autorise les conventions collectives du travail à contenir des dispositions
relatives aux salaires, aux indemnités accessoires de salaires et à la classification individuelle des
travailleurs dans chaque catégorie professionnelle, rendant ainsi caducs les articles 51 et 52 du code
de travail. Il y a lieu de souligner que ce changement est intervenu à la suite de la décision, prise en
1971, d’abandonner l’expérience socialisante des années 60 au profit d’une politique libérale et
essentiellement contractuelle.

Ainsi, la première convention qui a vu le jour est la convention collective cadre, conclue le 20 Mars,
1973, entre l’Union Générale Tunisienne du Travail (U.G.T.T) et l’Union Tunisienne de l’Industrie, du
Commerce et de l’Artisanat (U.T.I.C.A), uniques organisations syndicales, représentant
respectivement les travailleurs et les employeurs. Cette convention est applicable sur l’ensemble du
territoire de la République Tunisienne entre les employeurs et les travailleurs occupés d’une façon
permanente dans les activités non agricoles assujetties aux dispositions du Code de Travail. De
même, elle constitue pour chaque branche d’activité, la base pour l’établissement des conventions
collectives sectorielles.

Et partant, le nombre de conventions collectives sectorielles conclus entre les partenaires sociaux n’a
cessé de s’accroître : 33 conventions en 1976, 39 en 1981 et 46 en 1993. D’autres, sont en cours
d’élaboration.

A l’instar de celles de la convention collective cadre, les dispositions des conventions collectives
sectorielles sont rendues obligatoires sur l’ensemble du territoire tunisien et pour les employeurs et
pour les travailleurs, lesquelles dispositions, ont été modifiées lors des négociations collectives de
1983, 1990 et 1993 (volets réglementaire et financier) et 1989 (volet financier).

Pour ce qui est de la convention collective cadre, la première révision de ses dispositions avait eu lieu
en 1984 et le premier avenant avait été signé le 17 Novembre 1984. Quant au second, il a été conclu
le 15 Octobre 1992 entre le président de l’UTICA et le secrétaire général de l’UGTT. Cet avenant a
porté sur les points suivants :

- Le droit syndical, en introduisant d’une part le principe de crédit d’heure afin de permettre au délégué
syndical de participer à des séminaires de formation et d’autre part, l’octroi des facilités
supplémentaires pour l’action syndicale.

- La discipline, en accordant plus de garanties au droit de défense aux travailleurs comparus devant le
conseil de discipline.

- La période d’essai, qui était limitée dans le secteur privé à trois mois renouvelables une seule fois
pour toutes les catégories professionnelles, a été fixée comme suit :

* six mois renouvelables une seule fois pour les agents d’exécution;
* neuf mois, renouvelables une seule fois, pour les agents de maîtrise;
* une année, renouvelables une seule fois, pour les cadres.

- Enfin, l’actualisation de la liste des jours fériés chômés et payés dans le secteur privé.

Cet accord, qui a parachevé l’accord du 17 Avril 1990 relatif à l’ouverture des négociations collectives
entre les partenaires sociaux, a constitué le point de départ de la signature d’un accord-cadre entre
les organisations syndicales, le 23 Février 1993, portant ouverture des négociations pour la révision
des conventions collectives.
En vertu de cet accord, les négociations sociales sectorielles entre les partenaires sociaux ont été
axées notamment sur les points suivants :

- la santé et la sécurité au travail;

- le rendement;

- l’avancement et la promotion des travailleurs;

- et la révision des grilles des salaires des différents secteurs d’activité régis par les conventions
collectives sectorielles et ce, en simplifiant le régime des salaires par le regroupement des primes
dans la mesure du possible et l’intégration des indemnités complémentaires et provisoires (ICP) dans
le salaire de base.

9. Professions soumises aux conventions collectives - Les conventions touchent actuellement les
secteurs non agricoles suivants :

- Cafés bars et restaurants, savonneries, bonneterie et confections, constructions métalliques,


bâtiment et travaux publics, assurances, industrie laitière, mécanique générale et électricité, pâtes
alimentaires et couscous, salines, commerce des matériaux de construction du bois et de produits
sidérurgiques, pharmacies, répartiteurs de médicaments, fabrication de peinture, textile, constructeurs
et concessionnaires de véhicules automobiles, transformation de plastique, commerce de gros, demi-
gros et détail, projection cinématographique, conserves et semi, liège, hôtellerie, fabricant de produits
d’entretien et d’insecticides, chaussures, banques et établissements financiers; explosifs, fabricants
de produits de toilette et de parfumerie, confiserie et biscuiterie et chocolaterie, industrie des
matériaux ce construction, industrie du cuir et des peaux, boissons non alcoolisées, boissons
alcoolisées, torréfaction des cafés, ports et docks, minoteries, boulangerie, presse, fonderie,
métallurgie et construction mécanique, teintureries et blanchisserie, loueurs de véhicules,
transformation du verre et de la miroiterie, gardiennage et transport de fonds, concessionnaires du
matériel agricole, génie civil et enseignement privé.

On remarque que le nombre de convention collectives de travail a atteint 46 conventions intéressant la


quasi-totalité des secteurs d’activité.

Enfin, une troisième révision de la convention collective cadre a eu lieu en 2004 et le troisième
avenant a été signé le 20 avril 2004.

10. Exclusions - Ne sont pas, en revanche, concernées par les conventions collectives : les
entreprises publiques ou assimilées ayant un statut législatif ou réglementaire particulier ainsi que les
entreprises privées dont le personnel est soumis aux mêmes statuts particuliers que les entreprises
publiques.

Section 4. Commission nationale du dialogue social

11. Rôle de la commission - La commission nationale du dialogue social a été créée par l’article 2 de
la loi n° 96-62 DU 15 juillet 1996, portant modific ation de certaines dispositions du code du travail et
inséré sous l’article 335 du code du travail, en vue démettre son avis sur les négociations collectives.

12. Composition et fonctionnement - La composition et le fonctionnement de cette commission sont


fixés par décret (art. 335, al. 2, C.T.).

13. Attributions de la commission nationale du dialogue social - Elle est chargée :

- au stade de la négociation de donner, à la demande du Ministre des Affaires Sociales, un avis sur
toute difficulté née à l’occasion de la négociation d’une convention collective.

De même, elle peut être également consultée sur toute question relative à la conclusion et à
l’application des conventions collectives ;
- au stade de l’agrément ou du retrait d’agrément de donner un avis au ministre des affaires sociales
sur :

* l’agrément ou le retrait d’agrément des conventions collectives en général; .

* l’agrément des conventions collectives relevant des pouvoirs spéciaux conférés en ce domaine au
ministre des affaires sociales, lequel ne peut intervenir que si l’avis motivé préalable de la commission
nationale du dialogue social est favorable et émis sans opposition.

A noter que la commission nationale du dialogue social joue également un rôle important en matière
de législation du travail, de normes internationales du travail, de salaires, de classification
professionnelle, de négociations collectives et de climat social (art. 335, C. T.).

Chapitre 2. Règles communes à toutes les conventions


collectives

Section 1. Conclusion des conventions collectives en général

14. Parties contractantes - La convention collective de travail peut être conclue soit par deux
collectivités, l’une de travailleurs, l’autre d’employeurs, soit par une collectivité de travailleurs avec un
ou plusieurs employeurs agissant individuellement (art. 31, al. 1er, C.T.).

Ainsi un employeur isolé peut, aussi bien qu’un groupement d’employeurs, signer une convention
collective, mais du côté des travailleurs, la participation au contrat ne peut être que collective.

Du côté des travailleurs, la convention collective de travail peut être signée par une ou plusieurs
organisations syndicales (art. 31, al. 1er, C.T.).

15. Nécessité d’un écrit - Par une dérogation aux règles générales des contrats consensuels, la
convention collective de travail doit être écrite, à peine de nullité (art. 31, al. 1er, C.T.). Etant destinée
à s’appliquer à de nombreuses personnes, la preuve testimoniale en serait très difficile. Il n’est
d’ailleurs exigé pour cet écrit aucune forme solennelle.

16. Affichage - Dans les établissements soumis à l’application d’une convention collective, un avis
doit être affiché par les soins du chef d’entreprise dans les lieux où le travail est effectué ainsi que
dans les locaux où se fait l’embauchage et sur la porte de ces derniers.

Cet avis doit indiquer l’existence de la convention collective, les parties signataires, la date et le lieu
de dépôt (voir Sanctions pour défaut d’affichage). Un exemplaire de la convention sera tenu à la
disposition du personnel. En ce qui concerne les travailleurs agricoles, ceux des professions libérales,
les travailleurs isolés ou à domicile, seul est exigé l’affichage à la municipalité du lieu de leur
résidence ou à défaut au siège de la délégation par les soins de la partie employeur à la convention
(art. 31, al. 3, C.T.)

Section 2. Durée

17. Durée - La convention collective de travail peut être conclue au gré des partis : soit pour une
durée indéterminée, soit pour une durée déterminée (art. 32, al. 1er, C.T.).

18. Convention à durée indéterminée - La convention collective de travail peut toujours cesser au
gré de l’une des parties, et à son égard seulement, à charge pour elle de notifier, au moins un mois à
l’avance, sa volonté à toutes les autres parties du contrat (art. 33, C.T.).
Si l’une des parties comprend plusieurs groupements de travailleurs ou plusieurs employeurs ou
groupements d’employeurs, la convention à durée indéterminée dénoncée par un de ces
groupements ou de ces employeurs continue à lier les autres. Elle subsiste donc et n’est résolue que
par la renonciation, dans les formes prévues à l’article 33 du code de travail, du dernier de ces
groupements de travailleurs ou du dernier de ces employeurs ou groupements d’employeurs.

Dans la pensée du législateur, c’est la convention à durée indéterminée qui doit constituer la règle.
Toutes les fois que les parties désirent limiter strictement les effets de la convention dans le temps,
elles doivent exprimer formellement leur volonté.

19. Convention à durée déterminée - Lorsque la convention collective de travail est conclue pour
une durée déterminée, cette durée ne peut être supérieure à cinq années (art. 32, al. 1er, C.T.).

A défaut de stipulation contraire, la convention collective de travail à durée déterminée, qui arrive à
expiration continue à produire ses effets par tacite reconduction comme une convention à durée
indéterminée (art. 32, al. 2, C.T.).

20. Renonciation à la convention collective de travail - Aux termes de l’article 33 du code de


travail, tout groupement de travailleurs ou d’employeurs ou tout employeur non groupé, partie à une
convention collective de travail conclue ou prorogée par tacite reconduction pour une durée
indéterminée, peut, à toute époque, se dégager en notifiant sa renonciation à toutes les autres parties,
groupements de travailleurs ou d’employés ou employeurs non groupés, avec lesquelles il a conclu.
Cette notification doit être faite un mois à l’avance.

Section 3. Effets de la convention collective de travail

21. Effets entre les parties à la convention - Dans tout établissement compris dans le champ
d’application d’une convention, les dispositions de cette convention s’imposent aux rapports nés des
contrats individuels ou d’équipe (art. 31, al. 2, C.T.).

22. Effets à l’égard des tiers - Lorsqu’une seule des parties au contrat de travail est liée par les
clauses d’une convention collective de travail, ces clauses sont présumées s’appliquer aux rapports
nés du contrat de travail, à défaut de stipulation contraire.

L’insertion dans le contrat individuel de conditions contraires à celles de la convention collective


suffirait d’ailleurs à prouver que les parties n’ont pas voulu appliquer celle-ci dans leurs relations
respectives.

Mais si la convention collective ne peut être imposée aux tiers, la partie liée par la convention, qui
l’oblige même à l’égard des tiers, et qui aurait accepté, à l’égard de ceux-ci, des conditions contraires
aux règles déterminées par cette convention, peut être civilement actionnée, par les autres personnes
engagées dans la convention, en dommages-intérêts à raison de l’inexécution des obligations par
elles assumées.

23. Exécution loyale - Les groupements de travailleurs et d’employeurs liés par une convention
collective de travail sont tenus de rien faire qui soit de nature à en compromettre l’exécution loyale
(art. 34, C.T.).

24. Garantie d’exécution - Bien qu’en principe le groupement ne soit tenu à cet égard que de ses
faits personnels et non de ses membres, l’article 34 du code du travail dispose que les groupements
sont garants de l’exécution de la convention par leurs membres. Toutefois, le groupement n’est garant
que dans la mesure déterminée par la convention.

Section 4. Contentieux des conventions collectives de travail

Sous-section 1. Actions en justice


25. Actions individuelles - Les personnes liées par une convention collective de travail peuvent
intenter une action en dommages-intérêts aux autres personnes ou groupements liés par la
convention qui violeraient à leur égard les engagements contractés (art. 36, C.T.).

Cette action peut être introduite par les travailleurs ou par les employeurs à titre individuel,
indépendamment de l’action qui a pu être exercée par l’un des groupes signataires.

Il résulte donc de tout ceci que, si les travailleurs ne peuvent, à titre individuel, participer à
l’élaboration d’une convention collective, ils sont au contraire capables d’agir en justice pour se voir
appliquer les dispositions de cette convention collective.

26. Action des groupements - Les groupements régulièrement constitués, liés par une convention
collective de travail, peuvent, en leur nom propre, intenter une action en dommages-intérêts aux
autres personnes ou aux groupements liés par la convention, qui violeraient les engagements
contractés (art. 35, C.T.).

Pour agir il est nécessaire que le groupement ait été lésé. Lorsqu’un ou plusieurs membres du
groupement sont atteints dans leurs intérêts professionnels, le groupement est généralement atteint
lui-même, et l’action du syndicat est recevable relativement aux faits portant un préjudice direct ou
indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’il représente (Voir “Syndicat professionnel”).

A l’égard de ses propres membres, un syndicat peut être amené à intenter une action en vertu du
préjudice qu’il subit : 1° en tant que syndicat par l’atteinte portée à son autorité; 2° Dans les inté rêts
collectifs de la profession qu’il représente par le risque de dénonciation auquel l’exposent les
violations dont ces membres se sont rendues coupables et la difficulté qui en résulte à faire respecter
la convention par les autres parties.

Sous-section 2. Tribunaux compétents

27. Litiges d’ordre individuel - Lorsque le litige porte sur l’application d’une convention collective à
un ou plusieurs contrats de travail individuels le tribunal compétent sera le conseil des prud’hommes,
normalement habilité à trancher les litiges individuels en matière de contrat de travail.

Il en est ainsi même lorsque l’action en contestation a été soulevée par l’un des syndicats signataires
de la convention collective. Le conseil des prud’hommes doit alors statuer même si la disposition de la
convention qu’il s’agit de faire respecter donne lieu à interprétation.

Lorsque le litige porte sur l’interprétation ou l’application de la convention collective elle-même, le


différend doit au contraire, être porté devant les tribunaux civils de droit commun ; ils ont en effet à
connaître de tous les litiges portant sur l’exécution de la convention collective, et qui ne sont pas
élevés à l’occasion d’un contrat de louage de services.

De même, les tribunaux de droit commun sont compétents pour l’application d’une convention
collective à un contrat individuel de travail, lorsque l’action en justice n’est pas exercée par le titulaire
lui-même du contrat mais par un tiers (la veuve du salarié par exemple).

Notons enfin que ce sont les tribunaux judiciaires qui restent compétents pour apprécier les clauses
d’une convention collective agréée. En effet, l’arrêté d’agrément ne modifie en rien le caractère
contractuel de la convention : il a seulement pour effet d’étendre son champ d’application. La
compétence administrative ne peut donc être retenue.

28. Litiges d’ordre collectif - Lorsqu'il s’agit non plus de conflits individuels de travail, mais de litiges
collectifs d’ordre économique, le règlement de ces conflits se fait obligatoirement par la voie des
procédures particulières de l’arbitrage, de la conciliation (voir les études "Arbitrage", “Conciliation
obligatoire”)

Section 5. Contrôle et sanctions


29. Contrôle de l’application et de l’exécution des conventions collectives - Ce sont les
inspecteurs du travail qui ont qualité pour contrôler l’application des dispositions des conventions
collectives agréées. Ils sont également chargés, concurremment avec les officiers de police judiciaire,
d’assurer l’exécution :

1° des dispositions relatives à l’affichage de tout e convention collective et des arrêtés d’agrément (voir
n° 30) ;

2° de l’ensemble des clauses des conventions collec tives agréées;


#30. Sanctions pour défaut d'affichage - Toute infraction concernant l’affichage de la convention
collective ou de l’arrêté d’agrément est punie d’une amende de 24 à 60 dinars. Dans le cas de
récidive, la peine prévue est portée au double.

b - Sanctions pour paiement de salaires inférieurs à ceux prévus par la convention collective
agréée - Les employeurs des professions et régions comprises dans le champ d’application d’une
convention collective agréée de travail, qui ont payé des salaires inférieurs à ceux fixés par cette
convention, ou qui ont contrevenu aux dispositions concernant les accessoires du salaire prévues par
la convention ou par la loi, sont punis d’une amende de 24 à 60 dinars. L’amende est appliquée autant
de fois qu’il y a de travailleurs rémunérés dans des conditions illégales. En cas de récidive, la peine
prévue est portée au double.

Section 6. Interprétation des conventions collectives

30-1. Etendue du contrôle de la cour de cassation sur l'interprétation des conventions


collectives - Il convient de rappeler que la convention collective de travail a une nature duale. Contrat
quant à sa formation, règlement quant à ses effets. Cette dualité se retrouve dans l'étendue du
contrôle que la cour de cassation exerce sur les décisions des juges du fond, concernant
l'interprétation que ces derniers font d'une clause d'une convention collective.

La cour de cassation a choisi d'assimiler l'accord à une loi au sens matériel.

30-2. Assimilation de la convention collective à la loi - La cour de cassation n'a pas opté pour le
simple contrôle de la dénaturation des clauses claires et précises de la convention collective au profit
d'un contrôle élargi, consacrant ainsi un nouveau cas d'ouverture à cassation : la violation de la
convention collective. Ceci n'est pas sans rappeler la violation de la loi. Par cette assimilation de la
convention collective à la loi, la cour de cassation fait prévaloir l'aspect normatif de la convention
collective au détriment de son aspect contractuel.

La cassation des décisions des juges du fond se fait généralement au visa de l'article 31 du code du
travail ce qui consacre l'assimilation de la convention collective à la loi (Cass. Civ., arrêt n° 1191 7, 11
octobre 1984, Bulletin de la cour de cassation. II, P. 31 ; arrêt n° 10733, 17 décembre 1984, Bulletin
de la cour de cassation. II. P. 41 ; arrêt n° 13508 , 20 octobre 1986, Bulletin de la cour de cassation. II.
P. 42 ; arrêt n° 22720, 20 février 1989, Bulletin d e la cour de cassation. P. 60 ; arrêt n° 23501, 29 mai
1989, Bulletin de la cour de cassation. P. 202).

La cour de cassation a même admis son contrôle sur la violation d'une convention collective en
dehors de toute référence à l'article 31 du code du travail. Cette solution s'explique par la présence
dans la convention collective d'un élément normatif qui tend à prédominer sur l'élément contractuel
(Cass. civ., arrêt n° 19866, 2 mars 1988, Bulletin de la cour de cassation. P. 151 ; arrêt n° 34544, 2 7
août 1992Bullerin de la cour de cassation. P. 135).

Chapitre 3. Règles particulières aux conventions


collectives agréées
Section 1. Elaboration

31. Parties contractantes - La convention collective agréée doit être conclue entre les organisations
syndicales, patronales et ouvrières, les plus représentatives de la branche d’activité intéressée, dans
le territoire où elle doit s’appliquer (art. 38, al. 1er, C.T.).

32. Critère de la représentativité - Au cas où un différend s’élèverait au sujet du caractère de la plus


grande représentativité d’une ou plusieurs organisations syndicales, un arrêté du ministre des affaires
sociales, pris après avis de la commission nationale du dialogue social, déterminera, celles de ces
organisations qui, dans le cadre de la branche d’activité et dans le territoire considéré, seront
appelées à conclure la convention (art. 39, C.T.).

33. Clauses obligatoires - Les conventions collectives agréées doivent, au moins, contenir des
dispositions concernant :

- la liberté syndicale et la liberté d’opinion;

- les salaires applicables par catégories professionnelles et la procédure de classement des


travailleurs entre les dites catégories;

- les conditions d’embauchage et de licenciement des travailleurs, sans que les dispositions prévues
puissent porter atteinte à la liberté syndicale ou à la liberté d’opinion;

- le délai-congé;

- les modalités de fonctionnement d’une commission paritaire de régler les difficultés nées de
l’application de la convention (art. 42, C.T.).

Section 2. Champ d’application

34. Champ d’application territorial - Lorsqu’une convention collective a pour objet de régler les
rapports entre employeurs et travailleurs de l’ensemble d’une branche d’activité, sa conclusion est
subordonnée à la détermination de son champ d’application territorial par un arrêté du ministre des
affaires sociales, pris après avis de la commission nationale du dialogue social (art. 37, C.T.) : le
champ d’application territorial peut être national, régional ou local.

35. Champ d’application professionnel - Pour ce qui est du champ d’application professionnel, les
conventions collectives agréées doivent obligatoirement limiter leur champ d’application à une
branche d’activité déterminée.

En revanche, elles doivent concerner toutes les catégories professionnelles des salariés de cette
branche d’activité.

Section 3. Agrément des conventions collectives

Sous-section 1. Conventions collectives répondant aux conditions légales

36. Demande d’agrément par un syndicat ou à l’initiative du ministre des affaires sociales - Les
conventions collectives remplissant les conditions requises, peuvent être agréées. La procédure de
l’agrément a pour effet de les rendre obligatoires pour tous les employeurs ou travailleurs relevant de
la branche d’activité professionnelle visée dans leur champ d’application et ce, qu’ils soient ou non
adhérents à une des organisations signataires.

Leur agrément peut être demandée :

- soit par l’une des organisations syndicales des travailleurs ou d’employeurs;

- soit par le ministre des affaires sociales.

37. Formalités préalables à l’agrément - L’agrément est prononcé par arrêté du ministre des affaires
sociales après avis de la commission nationale du dialogue social (art. 37, C.T.).

38. Arrêté d’agrément : publicité - La décision d’agrément est rendue publique par l’insertion au
“Journal Officiel de la République Tunisienne” de l’arrêté d’agrément, portant en annexe le texte de la
convention collective agréée (art. 40, al. 1er, C.T.).

De même la décision de refus d’agrément est notifié par le ministre des affaires sociales aux parties
contractantes (art. 40, al. 2, C.T.).

Par ailleurs, les établissements soumis à l’application d’une convention collective agréée doivent, en
principe, afficher l’arrêté d’agrément dans les lieux où le travail est effectué, ainsi que dans les locaux
et à la porte des locaux où se fait l’embauchage (voir n° 30).

Cependant l’obligation d’affichage ne porte que sur l’arrêté d’agrément proprement dit et non sur
l’intégralité de la convention et de ses avenants éventuels.

39. Portée et effets de l’agrément - L’agrément a pour effet de rendre obligatoire les dispositions de
la convention collective pour tous les employeurs et les travailleurs des professions comprises dans
son champ d’application (art. 38, al. 1er, C.T.).

Les dispositions de la convention collective deviennent obligatoires du seul fait de leur parution au
Journal Officiel.

Sous-section 2. Fin de l’agrément

40. Cessation de la convention collective elle-même - L’arrêté d’agrément perd tout effet lorsque
la convention collective cesse d’être en vigueur par suite de sa dénonciation ou de son non-
renouvellement.

41. Retrait d’agrément - Par ailleurs le ministre des affaires sociales peut, soit de sa propre initiative,
soit à la demande d’une organisation syndicale de travailleurs ou d’employeurs intéressée, retirer
l’agrément donné à une convention collective par arrêté pris après avis motivé de la commission
nationale du dialogue social (art. 41, C.T.).

Chapitre 4. Règles particulières aux conventions


collectives d’établissements

42. Elaboration - L’article 44 du code du travail ne permet la conclusion de convention collective


concernant un établissement ou un groupe d’établissements que lorsqu’une convention collective
agréée est déjà applicable à l’établissement ou au groupe d’établissements considérés.

Le domaine de la convention collective d’établissement se limite à adapter les dispositions de la


convention collective agréée aux conditions particulières de l’établissement considéré.
Cependant, les conventions collectives d’établissements ne peuvent contenir des dispositions moins
favorables pour les travailleurs que celles des conventions collectives agréées qui sont applicables
aux établissements (art. 44, al. 2, C.T.)

43. Applicabilité - Les conventions collectives d’établissements ne sont applicables qu’à partir du jour
qui suit celui de leur dépôt qui doit être fait au greffe de la juridiction compétente en matière
prud’homale du lieu où elles ont été conclues (art. 45, al. 1er, C.T.).

Ce dépôt est effectué par la partie la plus diligente (art. 45, al. 2, C.T.).

44. Transmission - Deux exemplaires du texte de la convention collective, signés par les parties, sont
adressés dans les deux jours suivant son dépôt, par le secrétaire ou le greffier de la juridiction en
question, l’un au ministre des affaires sociales, l’autre à l’inspection du travail territorialement
compétente (art. 45, al. 3, C.T.).

45. Communication - Toute personne intéressé peut gratuitement avoir communication des
conventions collectives de travail au secrétariat ou greffe de la juridiction où a lieu le dépôt,
communication à des conventions collectives de travail. Des copies certifiées conformes peuvent être
délivrées au frais du demandeur par le conseil de prud’hommes (art. 45, al. 4, C.T.)

46. Date d’application - Les conventions collectives d’établissements ne sont applicables qu’à partir
du jour qui suit celui de leur dépôt (V. infra, n° 40).

47. Adhésion ultérieure - Toute organisation syndicale de travailleurs ou d’employeurs ou tout autre
groupement d’employeurs, ou tout employeur qui n’est pas partie à la convention collective
d’établissement, peut y adhérer ultérieurement avec le consentement des parties contractantes (art.
46, al. 1er, C.T.).

Cette adhésion n’est valable qu’à partir du jour qui suit celui de notification, ainsi que la notification du
consentement des parties, au greffe où le dépôt de la convention a été effectué (art. 46, al. 2, C.T.).

48. Personnes et groupements liés par la convention collective d’établissement - Sont


considérés comme liés par la convention collective d’établissement :

- les travailleurs et les employeurs qui sont engagés directement;

- les employeurs et les travailleurs membres d’un groupement partie si dans un délai de huit jours à
partir de la convention ou de la notification de l’adhésion, ils n’ont pas donné leur démission de ce
groupement et n’ont pas signifié celle-ci au greffe où le dépôt a été effectué (art. 47, C.T.).

49. Renonciation à la convention collective d’établissement - Toute partie à une convention


collective d’établissement conclue pour une durée indéterminée, qui désire user du droit de
dénonciation, doit notifier sa décision au greffe où la convention est déposée, en même temps qu’elle
la notifie aux autres parties (art. 48, C.T.).

Rappelons que selon les règles habituelles de tout contrat de droit commun la dénonciation peut être
totale ou partielle, c’est-à-dire porter sur l’ensemble des clauses de la convention ou seulement sur
certaines de ces clauses. Une telle dénonciation partielle est valable si elle ne modifie pas trop
profondément l’équilibre de la convention.

La dénonciation peut également être le fait de plusieurs ou de l’une des parties à la convention. Dans
ce dernier cas, la dénonciation ne joue qu’à l’égard de son auteur ; la convention reste valable pour
les autres signataires ou adhérents.

50. Fusion, cession, scission ou changement d’activité - En principe, lorsque, à la suite de


modifications apportées à l’entreprise, notamment par fusion cession, scission ou changement
d’activité, les accords ou conventions collectives applicables sont mis en cause, ces accords ou
conventions sont maintenus en vigueur, à l’égard des travailleurs antérieurement bénéficiaires et
directement affectés par ces mesures :
- jusqu’à leur remplacement par de nouvelles conventions;

- jusqu’à la date d’effet des modifications apportées à l’entreprise, à défaut de nouvelles conventions.

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