Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
av. de l'Opéra).
figurant
Rue Jean-Mermoz (Rond-Point-
sur le plan des-Champs-Elysées-rue du
Fg-Saint-Honoré).
Rive droite :
Rue du Colisée (Champs-
Palais Royal, Théâtre-Français, Élysées-rue du Fg-Saint-
Magasins du Louvre, Honoré).
rue Saint-Honoré, rue de Rue de Ponthieu (av. Matignon-
Richelieu, rue de Rivoli, place rue de Berry).
Vendôme, rue de la Paix, avenue Rue Vivienne (bd Montmartre-
de l'Opéra, boulevard des rue des Petits-Champs).
Italiens, boulevard Haussmann, Rue de Grammont (bd des
rue Lafayette, rue Lafitte, Plan de P a r i s
Italiens-rue du 4 Septembre).
place de la Madeleine, rue Royale, Rue Louis-le-Grand (av. de
rue des Capucines, rue Tronchet, Les pages degarde de cet ouvrage vous proposent l'Opéra-bd des Italiens).
rue des Petits-Champs, avenue un plan de Paris très particulier où Rue Taibout (bd Haussmann-
des Champs-Élysées, rue de Chateaudun).
rue du Faubourg-Saint-Honoré,
les points verts et les points bleus marquent
Rue de la Grange-Batelière
avenue Matignon, l'emplacement des rues mentionnées dans le texte,
(rue du Fg-Montmartre-rue
rue Saint-Denis, rue respectivement pour les boutiques de modistes Drouot qui prolonge la rue
Montmartre, rue du Temple, et pour lesfournisseurs. de Richelieu).
rue Rambuteau,
avenue Daumesnil. Rue de la Michodière (bd des
D'après le Plan monumental de Paris, Italiens-rue du 4 Septembre).
éd. Garnier, début du XX' siècle
Rive gauche : Rue d'Antin (rue des Petits-
Rue du Bac, rue de Sèvres, Champs-rue du 4 Septembre).
rue de Rennes, rue de l'Odéon. Rue Favart (Opéra-Comique-
bd des Italiens).
Rue de Cléry (rue Montmartre-
bd Bonne-Nouvelle).
Rue d'Aboukir (rue Montmartre-
Rues ne f i g u r a n t bd Bonne-Nouvelle).
pas sur le plan, Rue du Caire (rue Saint-Denis-
leurs t e n a n t s rue d'Aboukir).
et a b o u t i s s a n t s Rue de la Ferronnerie
(bd Sébastopol-rue des Halles).
Rive droite : Rue Mesley (bd Sébastopol-
rue du Temple).
Rue de l'Echelle
Rue de la Tour-d'Auvergne
(av. de l'Opéra-rue de Rivoli).
(rue des Martyrs-rue
Rue Saint-Nicaise
de Rochechouart).
(rue de Rivoli-rue Saint-Honoré,
Rue des Rosiers (prolongement
niveau Tuileries, n'existe plus). de la rue Sainte-Croix-de-la-
Rue Cambon (rue de Rivoli-
Bretonnerie).
boulevard de la Madeleine).
Rue Neuve-des-Mathurins L'avenue Victor-Emmanuel III,
(actuelle rue Auber, bd des est devenue avenue
@ 2000 Éditions Charles Massin,
Capucines, bd Haussmann). Franklin-Roosevelt vers 1945.
Rue du Marché-Saint-Honoré 16-18 rue de l'Amiral-Mouchez,
Rive gauche :
(perpendiculaire à la rue Saint- 75686 Paris Cedex 14. Tél. : 0 1 4 5 65 48 48.
Honoré, entre place Vendôme Rue Saint-Sulpice
Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction
et Saint-Roch). (rue Bonaparte-rue de l'Odéon).
réservés pour tous pays. Rue du Vieux-Colombier
Rue du Cirque (Champs-Élysées-
rue du Faubourg-Saint-Honoré). ISBN : 2-7072-0410-2 (rue Bonaparte-rue de Sèvres).
M O D E S D E P A R I S
Histoire
du
C h a p e a u
f é m t ..n t n
Nicole LE MAUX
massrn
Avant-propos
Première partie
•* ■ ,, s . t
t...-' /' ^ i
Les temps héroïques 1780-1790 : Rose Bertin
et la «révolution des marchandes de modes» 12
Le Directoire et l'Empire 1790-1815 :
le chapeau à brides ou capote 15
La Restauration et le début du règne
de Louis-Philippe 1815-1840 18
Le style second Empire 1840-1870.
Le chapeau de visites : la capote ou petit chapeau
fermé à brides 20
1870-1889 : période transitoire où règne
le petit chapeau 28
1890-1899 : fin de siècle 33
1900- 1 913 3 : La Belle Époque,
les beaux jours du grand chapeau 35
Le chapeau «de toujours aller» de 1890 à 191 3 41
1913-1939 : la modernité 42
Les années de guerre 1939-1945 48
Laprès-guerre, jusqu'en 1958 50
Déclin et renaissance : 1958-1999 52
D e u x i c in e p a r t i e
T r o i s i è èi-n e p a r t i e
( / t, ( , ^,
La confection amateur 140
Les chapeaux d'enfants 149
Lexique 151
Dans les romans de Colette, qui se situent
au début du XXe siècle, nombre de chapeaux
sont évoqués avec une précision qui fait
de ces lignes un document au même titre
qu'un dessin de mode ♦♦
< 2 é &
c  a ^ i e a M O }
de y p o l e ^ f e
P r e m i è r e p a r t i e
odchénuviN
apotelasnutcaei
Les t e m p s h é r o ï q u e s
Rose B e r t i n et la « r é v o l u t i o n
des marchandes de modes »
Un précieux témoignage
U n p e u p l u s tard, en 1 7 8 4 , R o s e p r o p o s a i t « u n p e t i t
chapeau de bohémien, troussé dans une perfection rare, sur
u n m o d è l e d o n n é par une jeune dame de ce pays, d o n t t o u t
Paris raffolait. Le chapeau avait une aigrette et de la passe-
m e n t e r i e c o m m e le S t e i n k e r q u e de nos pères ; il avait une
t o u r n u r e t o u t à fait particulière et originale. » Le Steinkerque
e s t v r a i s e m b l a b l e m e n t le t r i c o r n e , a p p a r u à la f i n d u
XVIIe siècle, et qui d o i t ici son n o m à la bataille de 1692.
Le D i r e c t o i r e
et l ' E m p i r e
Chapeau de paille d'Italie,
Le chapeau à brides ou capote ruban en coques et brides
Au lendemain de la Révolution française, la mode s'ins- de soie rayée mauve et jaune,
pire de l'Antiquité et les cheveux se portent très courts. Cela vers 1785 - iy88.
favorise dès le Directoire la vogue de petites formes très
emboîtantes et à brides : le «chapeau-casque» à visière, orné
de plumes, auquel on donne les noms les plus fantaisistes,
«à la Vénus», «à l'esclavage», «à la créole», ou encore «au
zéphir », peut-être à cause de sa plume blanche en saule
pleureur; le «chapeau au ballon », en paille jaune et étoffe
rose, qui se distingue par sa calotte sphérique, la « cornette »
bonnet rond à brides en forme de jugulaire, la toque, sans
bord, la capote qui avance légèrement au-dessus du front, le
turban drapé de forme ronde.
De toutes ces coiffures, la gamme est finalement
très variée : en 1799, une nouvelle forme, «le chapeau-
courrier », à visière agrandie, annonce le «chapeau-
jockey» immortalisé sur la tête de la Merveilleuse de
Carle Vernet.
La c a p o t e ou p e t i t c h a p e a u
fermé à brides
GaZ!, taffetas, velours sont des textiles aujourd'hui connus de tous sans pour
autant être couramment utilisés. Pendant le second Empire, ces tissus étaient
BARÈGE
les matières privilégiées dans les modes, mais souvent avec quelques variantes,
notamment dans la structure du tissage, ce qu'on appelle l'armure; ainsi la
gaze devenait barège, le taffetas, gros de Naples, reps, et le velours, velours
GAZE DROITE
épinglé, peluche (ou pluche). Voici quelques éclaircissements d'après le Traité
de la fabrication des étoffes de soie : des armuresfondamentales, de A. Dufour,
Profil Lyon, 1855,
La gaze et la barège
La gaze droite a pour caractéristique d'être transparente, effet qui s'obtient par
l'emploi d'une soie appropriée —soie grège ressortant de vers à soie de première
Face comparative race et defilature de premier ordre —qui donne un tissu extrêmement fin. GROS DE NAPLES
La barège est transparente comme la gaze mais le croisement desfils s'opère de
façon différente et donne lieu à des sinuosités égales defils de chaîne et de trame;
TAFFETAS
ainsi le long de l'étoffe se produit un effet de fils tressés. La barège est aussi Profil
transparente que la gaze mais plus solide.
Le taffetas est une étoffe de soie dont la chaîne est à fil simple et la trame à un
Chaîne
ou deux bouts; la surface du tissu est plane. On dit, pour exprimer la bonne Face comparative
qualité d'un taffetas qu'«ilfait bien la peau».
Le gros de Naples diffère du taffetas en ce que lesfils de chaîne sont doubles ou
triples, et lesfils de trame à trois ou quatre brins, donc les points de liages sont Schémas représentant,
face et profil, les étoffes citées.
plus saillants et des lignes transversales en relief apparaissent dans l'étoffe. Ce Traité de la fabrication
tissu est plus épais que le taffetas et son maniement est doux; il a un brillant des étoffes de soie.
que l'on nomme «brillant grené» et un éclat mat. A. Dufour, Lyon, 1855.
Proche du gros de Naples, le poult-de-soie présente une côteformée par la trame
de cinq à douze brins, appelée «gros-grain », et un éclat scintillant, Le poult-
de-soie estfréquemment utilisé à la même époque.
Le reps est une sorte de taffetas présentant defines côtes, à éclat miroitant ou
scintillant.
Chapeau de paille cousue orné 1865 est un tournant dans l'évolution de la capote : elle Chapeau de paille blanche,
de dentelle « Chantilly » noire, et dit «Lamhalle », orné tout
se réduit considérablement et perd progressivement son bavo-
defleurs. Le bavolet est remplacé autour de myosotis et degrelots
par une dentelle. Brides let, ce qui choque plus d'une journaliste de mode : «Le
de cristal; larges brides
de taffetas, vers 1865, chapeau, gémissent-elles, n'existe plus qu'à l'état de fanchon ; de taffetas, vers 1867-
sa forme est celle d'un triangle dont la pointe repose sur le
chignon attaché sur la nuque ; les dentelles, les fleurs, les
plumes même, tout se donne rendez-vous à cette place déser-
tée par le bavolet. »
1867 : le chapeau se réduit encore, et ne coiffe que le
sommet de la tête, même s'il conserve parfois un simulacre
de bavolet.
Le velours est une étoffe dont la surface est recouverte d'un poil court et serré
qui cache plus ou moins complètement un tissu continu qui lui sert defond.
Lesfils de poil sont levés à l'aide d'une petite tringle defer ou de laiton, lesfils
defond restent baissés. Unefois la tringle retirée, les petites boucles restent : si
on coupe ces boucles, au sommet dufer, on obtient le velours ordinaire ou velours
coupé. Si on garde ces boucles, on obtient le velours frisé ou velours épinglé,
dont l'éclat est mi-scintillant.
La peluche ou pluche est une sorte de velours qui comporte sur le tissu un poil
relevé par unfer, coupé ou non coupé, mais cepoil, au lieu de se tenir dans une
position perpendiculaire à l'étoffe se couche sur la surface et lui donne un aspect
tout àfait distinct et très brillant, imitant la fourrure.
VELOURS COUPÉ
Profil
Le c h a p e a u rond
1870-1889 :
période transitoire
où règne le petit chapeau
La crinoline a vécu : elle est remplacée par u n e
tournure qui cantonne le volume à l'arrière, et la
jupe est devenue si étroite, le corsage si étriqué,
que la femme élégante, nous dit une chroni-
queuse, «doit mettre sa très petite capote et
sa voilette avant d'avoir mis son corsage ».
Le chapeau est maintenant ramassé, compact,
adapté aux coiffures à chignon haut ou au
contraire très bas sur la nuque. Lexiguïté est
de mise même dans les formes habituellement
grandes, le chapeau amazone, le chapeau de
promenade à la campagne. La calotte retrouve un
peu de hauteur et l'ensemble de la coiffure dispa-
raît souvent sous les fleurs, les fruits, les feuillages,
les plumes et les dentelles : « Les chapeaux ronds se divi-
sent en deux catégories : ceux qui se placent sur le front et
vont surtout bien aux figures étroites, et ceux qui se mettent
Niniche orné defleurs et de ruban
un peu en arrière. Ces derniers ont d'assez larges bords, sont de teinte claire. La forme de
souvent retroussés d'un côté et s'ornent de longues plumes. » panier renversé est évidente.
Journal des Demoiselles, 1877. Photographie ancienne, vers 1875.
La « Revue du grand monde », le Moniteur de la mode, résume
la situation avec humour :
U n e silhouette fin de siècle
« Ce qu'il y a de mieux porté, c'est un chignon d'un demi-
mètre de haut et un chapeau de 25 centimètres. Ce chapeau déjà démodée, celle de Mille Lenoir,
est une espèce de petite galette de dentelle, couronnée d'un dans Les Pincengrain
petit macaron en satin. C'est très joli et ça ne coûte pas plus de Marcel Jouhandeau... qui a
cher qu'un quartier de terre dans les Basses-Alpes. »
observé le chapeau d'un œil précis.
Les brides se font en faille, tulle, mais beaucoup de «Madame Lenoir apparaît sous
chapeaux sont sans brides ou munis de barbes de dentelle sa petite capote la plus touchante
flottantes.
de discrétion et de sottise aimable,
Parmi ces formes, la plus séduisante est sans doute le à brides de ruban de soie,
«nmiche», illustré par les peintres James Tissot et surtout une aigrette de jais piquée et
Édouard Manet qui en a laissé une inoubliable silhouette dans
breloquante dans un chou de gaze,
le tableau «Sur la plage», 1873, (musée d'Orsay) : en paille
Chapeau de paille anglaise bordée là-haut, pour auréole, avec trois
de dentelle noire. Nœud et pans
naturelle, le niniche prend la forme d'un panier ovoïde renversé
fraises bourgeoises, comme
de velours noir. Roses et myosotis. et se noue sur la nuque par un ruban de velours noir qui traverse
le dessus de la calotte : il est entouré d'un voile blanc. On retrouve en goguette près de l'oreille. »
Mode illustrée, 1874,
le même chapeau dans « En bateau», 1874, (MET - New York)
et, une interprétation plus sévère, en paille noire et ruban noir,
dans «Le Chemin de fer», 1873, (coll. part. New York).
1900-1913 :
La Belle Époque,
les beaux jours du grand chapeau
Ajoutons à
cela des toques
dites « boléro » si
elles sont rondes,
et « Santos D u m o n t » si elles Charlotte de broderie anglaise
s'allongent en pointe devant ; des bordée de valenciennes, ceinturée
d'une draperie de soie vert vif,
« torpilleurs » —étroites coiffures très
vers 1907,
relevées sur le côté —; des « charlottes » de
broderie anglaise sur armature de métal ; enfin, les
«picture hats» à calotte haute dits Gainsborough,
Winterhalter, Vigée-Lebrun, Nattier. En 1904-
1905, les formes plates à calotte très basse,
véritables galettes, prévalent. Cécrivain P-J. Toulet
Plateau en dentelle } en donne une vivante image : « Chapeautez-vous,
de paille, à calotte basse madame. Mon Dieu, qu'il est plat, votre galurin.
rentrée dans la passe
On dirait une assiette à dessert... tout autour, il y
soulevée, sur la gauche,
sur une garniture en a un rang de pensées... D'ailleurs, j'aimais mieux ce
cache-peigne dejleurs mauve. lampion (tricorne) vert et or qui couronnait l'an
Dessus, nœud de ruban dernier les ondes de votre chevelure. » Mon amie
de soie écrue; 1902-1905. , Nane, 1905.
19 0 7 - 19 13
légères m o d i f i c a t i o n s en
fonction des tendances de
la m o d e en v i g u e u r , et
a u s s i de l ' é v o l u t i o n d u
m o d e de vie, l'expansion
des activités sportives, en
particulier.
Pour l'automobile,
l'indispensable voile
p r o t è g e le v i s a g e . Le
chapeau amazone, haut de
forme, voit sa h a u t e u r se
réduire, vers 1910. Il est
concurrencé par la « cape »
ou chapeau melon.
19 1 3 - 1 9 2 0
Les c h a p e a u x de t h é â t r e , n a g u è r e
o b j e t s de q u e r e l l e , s o n t de p e t i t s
béguins de gaze lamée, des bandeaux de
t u l l e p i q u é s d ' a i g r e t t e s o u de pierre-
r i e s . . . p l u t ô t des c o i f f u r e s q u e d e s
chapeaux ! (Voir Deuxième partie).
Forme inspirée de
l'époque 1900 : plateau
defeutre bleu marine,
garni d'un bouquet de
fleurs de couleurs vives,
et basculé en avant sur
un cache peigne de
Toque defeutre marine, ruban bleu marine.
vers 1937-;1938. l93&~1939-
Les feutres et les pailles se modèlent, se drapent, se sculp-
tent, se nervurent. Lornementation est sobre : boutons, rubans
de gros-grain, ruban ciré, glands de passementerie, motifs de
galalithe et plumes glacées.
Pour tenues habillées, on
recourt à la capeline qui
conserve un classi-
cisme remanié :
c a l o t t e basse,
arrondie ou en
léger tronc de
^ cône, passe plate.
Mais fleurs, tulles et
dentelles participent à l'orne-
mentation, à la manière des modes
de la Belle Époque
Les a n n é e s de g u e r r e
Feutre garni de deux plumes
couteaux, 1939-1940.
Rigueur, austérité, le chapeau s'accommode magnifique-
ment de toutes les restrictions et reste le support de la fantai-
sie et de l'imagination... voire de la provocation.
Jusqu'en 1941, le chapeau miniature se perche encore sur
le front, se fait «boîte à pilule» ou «chapeau de singe ». Il
est bientôt abandonné au profit de formes plus volumineuses
tantôt verticales, tantôt horizontales : le chapeau à passe en
auréole est basculé vers l'arrière ; les plateaux sur cache-peigne
évoquent 1900, les capelines et canotiers se caractérisent par
leur volume et l'épaisseur des bords, souvent doubles, retour-
nés, arrondis en bourrelet. D'immenses bérets dont le coif-
fant est tout en profil découvrent tout un côté de la cheve-
lure. Quelques capotes-cabriolets rappellent la Restauration.
Enfin, le turban, plat sur la nuque, élégamment torsadé,
Béret defeutre garni d'une drapé, se fait de plus en plus haut sur le front, et s'adjoint Chapeau à passe defeutre
draperie de mousseline vermillon, en auréole et calotte de taffetas
parfois une passe en auréole; confectionné dans du jersey, écossais. Haute Mode Sandrine,
,loi-iffe : Lola Mangin, 61 rue
de Sèvres, Paris, 1942-1944.
du taffetas, du velours, il connaît un large succès : il fait 55 rue Lamarck, Paris,
partie, avec le sac à bandoulière, de l'équipement de la cycliste. 1942-1945.
Hardiesse des formes, hardiesse des coloris qui s'animent :
peu de noir, sinon égayé par un ornement de couleur vive, des
gris, des roses, des mordorés, des bleus marine, dans des
féutres souvent grossiers ! Les pailles fines en laize se travaillent
comme du tissu, le fin picot et le large paillasson se
tressent.
Cloche de paille
tressée, drapée d'un
large ruban de satin
bicolore, vers 1943.
j u s q u ' e n 1 9 5 8
D é c l i n e t r e n a i s s a n c e :
1 9 5 8 - 1 9 9 9
Capeline : aquarelle
de Philippe Model, 1999.
Des formes sobres ou audacieuses, selon leur
destination et le goût de la cliente, toujours jeunes
et d'un coiffant irréprochable, s'élaborent dans
l'atelier de Jacques Pinturier; formé chez Gilbert
Orcel, son oncle, le modiste perpétue la tradition
de la haute mode parisienne, et la hisse au niveau
d'un art dont l'objet est éphémère, certes, mais qui
évolue sans cesse au gré des influences culturelles
fécondées par la rencontre, à Paris, d'une
femme venue d'ailleurs et qui deviendra une
«parisienne». Pour le modiste, ceci explique
le mystère et la pérennité des « modes »
parisiennes.
Depuis 1983, le chapeau a «son» Chapeau de canevas peint
musée, celui de Chazelles sur Lyon, qui assure avec et recouvert d'un tulle doré.
Le nœud marine est également
beaucoup de dynamisme une triple mission :
en canevas. Griffe :Jacques
sauvegarder le patrimoine des « modes », promouvoir Pinturier, 1997,
la création contemporaine et assurer une pédagogie,
sous forme de stages de formation professionnelle
et d'animations avec les scolaires ( voir page 155,
pour plus de renseignements).
Casquette defil de métal gainé
de velours noir. Fleurs de paille.
Jacques Pinturier,
10 rue Cambon, 1986.
Le r ô l e s o c i a l du c h a p e a u
U n e « r é c l a m e » de p r o d u i t de beauté, en 1 9 0 4 , m o n t r e
c o m b i e n le p e r s o n n a g e de la m o d i s t e est à la fois u n type
social bien circonscrit et une silhouette familière et caracté-
Un personnagefamilier
dans les rues de Paris à la Belle
Époque : la modiste. Petit Écho
de la Mode, 1904.
Le c h a p e a u et les c o n v e n a n c e s
L E S GRANDS É V É N E M E N T S
HEURES DU SOIR
C o n c e r t s . — Chapeaux, coiffures, peu volumineux ou coiffure Première communion. — Élégant chapeau de note
en cheveux avec peignes riches, nœuds de sobre.
velours.
T h é â t r e - F r a n ç a i s . — Mème note.
O d é o n . — Petit chapeau.
Le c h a p e a u en v o y a g e
Le deuil
Le g r a n d d e u i l s ' a c c o m p a g n e
t o u j o u r s d ' u n long voile de crêpe qui
couvre le visage, p e n d a n t les premières
semaines, et f l o t t e derrière, ensuite.
Chapeau de veuve, bordure
Le voile est u n é l é m e n t essentiel
de crêpe blanc tout autour
d u c h a p e a u de g r a n d d e u i l : p o u r de la passe. Long voile de crêpe
l ' é l é g a n c e et, s u r t o u t , pour les anglais, vers 1900.
convenances.
Pendant la Grande
Guerre, les revues
de m o d e s ' é t e n -
dent l o n g u e m e n t
Le Petit Journal, sur l'art d'agencer le voile : «Un voile
9 novembre 1902 : la Toussaint chic n'est ni froncé, ni plissé, ni drapé
dans les cimetières parisiens.
par des points. C'est une écharpe souple
dont toute la grâce vient : 1° de ses pro-
portions, 2° de la forme du chapeau et
du point précis où le voile est placé et
retenu sur cette forme, 3° de la tombée
du tissu... Un voile n'est joli que sur un
chapeau de forme symétrique, à bords
petits ou moyens s'il s'agit d'un chapeau
rond ; pour les grands deuils, on met
généralement un petit chapeau sans bord :
les trois formes qui ont remplacé la
capote, le chapeau fermé à brides d'an-
tan, sont la toque droite, le "pot de fleurs
renversé" (forme emboîtante tronconique
sans bord) et le "calot". Ces chapeaux
sont d'ailleurs à peu près importables
sans voile. » La Mode pratique, 1916.
La m i n u t i e dans la pose du voile perdure : « O n pose très
simplement les voiles en ce m o m e n t sur la calotte du chapeau
d ' o ù ils r e t o m b e n t très naturellement par derrière. Les voiles
s o n t cousus nets ou en dedans p o u r être retournés suivant la
façon d o n t on m e t t r a le voile, baissé sur le visage ou en arrière
c o m m e on le fait le plus souvent p u i s q u ' o n le pose ainsi au
b o u t de quelques j o u r s . . . Les p o i n t e s doivent être absolu-
m e n t égales en bas d u voile. C ' e s t pourquoi, il est nécessaire
de l'épingler sur le chapeau et de l'essayer avant de le coudre. »
Manuel de la Mode, 1 9 2 6 .
«La province surveille ses veuves. Elle mesure le temps durant lequel
les veuves portent le «voile devant ». Elle juge le chagrin éprouvé à la
longueur du crêpe.
Malheur à celle qui, par un jour torride, souleva son voile pour respirer!
Elle a été vue, on va dire :
- En voilà une qui a été vite consolée...
- A-t-elle beaucoup souffert de la mort de son mari ?
Deuil et séduction
- J'en doute : ses robes ne seraient pas si bien coupées. Ses larmes n'enlèvent
Elle avait d'ailleurs religieusement pas son rouge. Vous n'avez pas vu son voile ? C'est une voilette; et pas même
porté le deuil rigoureux des veuves de crêpe : du tulle.
de millionnaires. Reconnaissons qu'il y avait de la beauté dans cet ensevelissement des veuves
Chapeau et é d u c a t i o n
Dans la formation d'une femme d'intérieur, d'une maîtresse
de maison, les travaux d'aiguille ont une place importante :
au début du XXe siècle, savoir confectionner soi-même un
chapeau est un devoir.
Sous le titre «À quoi s'occupent nos jeunes filles?» le
mensuel Lecture pour tous, en 1906, évoque la formation de la
« modiste mondaine » :
«Mesdemoiselles, pour faire un joli chapeau, il faut être
de bonne humeur... C'est Mlle About qui donne ce conseil
aux jeunes filles venues pour apprendre chez elle les mystères
du métier de modiste... imaginez un salon inondé de lumière,
élégamment meublé : sur la longue table, rubans déroulés,
fleurs, plumes, pailles légères mettent la gaîté de leurs notes
claires et la variété de leurs nuances. Assises autour de la table,
les jeunes élèves s'appliquent à modeler, garnir, orner la forme
de feutre ou de paille. Mlle About va de l'une à l'autre, donne
une indication, remet en bonne voie un travail mal commencé.
En quelques heures, ce grand plateau blanc va devenir une
capeline Louis XVI ; ce feutre rouge, une toque croquée avec
un tapet de velours. On apprend vite ce que l'on apprend avec
plaisir : deux saisons, un hiver et un été, suffisent à former
la parfaite modiste mondaine. »
Chapeau et loisirs
Les loisirs, citadins ou campagnards, sont l'occasion de
porter un chapeau approprié.
Les concours d'élégance ont été pendant des décennies la
manifestation mondaine par excellence, dans laquelle le
chapeau jouait un rôle éminent.
Les journaux se faisaient l'écho de ces événements souvent
très parisiens : « Un loisir mondain se pratiquant en plein air
et consistant en jeux très variés aussi bien qu'inoffensifs est
le «gymkhana», nom exotique d'une chose bien parisienne et
moderne.
Les journaux se faisaient l'écho de ces événements souvent
très parisiens : «Un loisir mondain se pratiquant en plein
air et consistant en jeux très variés aussi bien qu'inoffen-
sifs est le «gymkhana», nom exotique d'une chose
bien parisienne et moderne.
Parmi les diverses courses auxquelles les
participantes doivent se soumettre, entre la
course aux grenouilles et la course
à la c u i l l è r e à œ u f s o u aux
animaux, voici la " c o u r s e
aux chapeaux" : les voitures
s o n t rangées à l'endroit du
départ. Chaque dame reçoit un
chapeau et un voile qu'elle doit
mettre ; cette opération effectuée, elle
donne elle-même le signal du départ au chauffeur. C'est
Canotier semblable à ceux naturellement la dame qui aura mis le moins de temps à poser
despromeneuses en montagne : son chapeau selon les règles de l'art qui arrivera la première au
forme ronde, haute calotte,
nœud de ruban, vers 1895-1998. poteau.» Je sais tout, août 1905.
Vers 1900, également, avait lieu une rencontre originale et
plus modeste : «Le grand concours annuel d'ombrelles et de
chapeaux garnis de fleurs naturelles, sur la plage de Pontaillac. »
La promenade dominicale, les activités sportives, et même
les «bains de mer» étaient, souvent, l'occasion d'exhiber le
nouveau chapeau, que ce soit en famille, entre amies. L'heure du bain au bord
Pour les citadines, c'était plutôt le restaurant, l'hippodrome, de la mer, E. Due^ 1892,
le théâtre. musée des Beaux-Arts, Rouen.
— C h u t ! . . . P a s d e b r u i t . . . je v o u s e x p l i q u e r a i ç a . . . j ' a r r i v e
Le théâtre représente un salon de modiste. À gauche, un comptoir parallèle à la cloi-
de Saumur.
son latérale. Au-dessus, sur une étagère, une de ces têtes en carton dont se servent
les modistes. Une capote defemme est placée sur cette tête. On ne voit pas un seul CLARA
article de modes dans cette pièce, excepté la tête en carton. C'est un salon de modiste, — D e p u i s six m o i s ?
les magasins sont censés être à côté. FADINARD
— O u i , j'ai m a n q u é la d i l i g e n c e . . .
CLARA, la modiste, parlant à la cantonade
CLARA
— Dépêchez-vous, M e s d e m o i s e l l e s ! . . . cette c o m m a n d e est
très p r e s s é e . . . M . Tardiveau n'est pas encore a r r i v é ! . . . Je n'ai — Q u a n d je p e n s e q u e c e t ê t r e - l à a v a i t p r o m i s d e m ' é p o u -
ser !...
jamais vu de t e n e u r de livres aussi l a m b i n . . .
M o n s i e u r Tardiveau, j'ai une course à vous donner, vous allez FADINARD, à p a r t
c o u r i r . . . rue R a m b u t e a u chez le p a s s e m e n t i e r . . . — C o m m e ça se t r o u v e ! ( H a u t ) M a i s je t e le p r o m e t s
TARDIVEAU toujours...
CLARA
—C ' e s t q u e . . .
CLARA — O h ! d ' a b o r d , si v o u s e n é p o u s i e z u n e a u t r e . . . je f e r a i s u n
éclat.
— Vous rapporterez des écharpes t r i c o l o r e s . . .
TARDIVEAU FADINARD
CLARA f e m m e ! . . . m a i s la p r e u v e , c ' e s t q u e je t e d o n n e m a p r a t i q u e . . .
(changeant de ton) A h ! j'ai b e s o i n d ' u n c h a p e a u d e p a i l l e d ' I t a l i e . . .
— C ' e s t p o u r ce maire de province, vous savez...
t o u t d e s u i t e . . . avec d e s c o q u e l i c o t s .
CLARA, seule
CLARA
—M e s ouvrières s o n t à l ' o u v r a g e . . . t o u t va b i e n . . . C ' e s t une
— O u i , c ' e s t ça, p o u r u n e a u t r e f e m m e !
b o n n e idée que j'ai eue de m ' é t a b l i r . . . Il n'y a que quatre mois
FADINARD
et déjà les pratiques arrivent... Ah! c'est que je ne suis pas une
modiste comme les autres, moi !... Je suis sage, je n 'ai pas d 'amou- — O h ! O h ! qu'elle est b ê t e !... u n c h a p e a u de paille p o u r . . .
FADINARD FADINARD, à p a r t
—Ah ! c'est une bonne idée !... voilà une bonne idée !... J'ai — Sapristi ! m e voilà bien !
justement ma soirée libre... Je me disais comme ça : «Mon Dieu !
CLARA
qu'est-ce que je vais donc faire de ma soirée ? » Voyons les
chapeaux ! - S i v o u s v o u l e z a t t e n d r e q u i n z e j o u r s , je v o u s e n f e r a i v e n i r
un de Florence.
CLARA
FADINARD
—C'est ici mon salon... venez dans mon magasin et ne faites
pas l'œil à mes ouvrières... — Q u i n z e jours !... petite bûche !
CLARA
Voici votre échantillon... je n'ai rien de pareil à ça.
FADINARD —Je n ' e n c o n n a i s q u ' u n s e m b l a b l e à Paris.
CLARA
—C est une paille très fine qui n'est pas dans le commerce...
Oh ! vous n'en trouverez nulle part, allez ! (Elle lui rend lefragment — O u i , m a i s il n ' e s t p a s à v e n d r e . . . J e l'ai m o n t é , il y a h u i t
de chapeau.) j o u r s , p o u r M a d a m e la b a r o n n e d e C h a m p i g n y . . .
La s o l u t i o n est t o u j o u r s entre les m a i n s des m o d i s t e s .
Soupçonnées d'abord de favoriser les grandes formes par souci
de lucre, elles s o n t consultées et se déclarent prêtes à orner
les têtes de petits choux de tulle où se b l o t t i t un oiselet, ou
de petits chapeaux t o u t en fleurs : le luxe des matériaux et la
délicatesse de l'exécution garantiront le prix élevé de l'article !
T o u c h a n t e anecdote
que celle racontée par
Marcel Jouhandeau,
et si p e u m o n d a i n e !
La rivalité e n t r e c o i f f e u r s et m o d i s t e s e s t u n e
l o n g u e h i s t o i r e , q u i a c o m m e n c é avec la v o g u e d e s
cheveux frisés en c o q u e s s u r m o n t é s d ' é l é g a n t s b o n n e t s
v e r s 1 7 8 0 . C e s m é t i e r s n e se s p é c i a l i s e n t v r a i m e n t
q u ' a u d é b u t d u XIXe s i è c l e . J u s q u e - l à , c o i f f e u r s ,
m a r c h a n d e s de m o d e s , m o d i s t e s et m ê m e lingères
p a r t i c i p e n t à la p a r u r e d e t ê t e : le c o i f f e u r n e laisse
p a s d e v o i r d a n s la m a r c h a n d e d e m o d e s u n e c o n c u r -
r e n t e e t i n v e r s e m e n t ; d ' a i l l e u r s , les d é f i n i t i o n s d u
D i c t i o n n a i r e de l ' I n d u s t r i e et des arts industriels,
1 8 8 3 , n e l a i s s e n t p a s d ' ê t r e é q u i v o q u e s ; le c o i f f e u r
e s t « celui q u i f a i t m é t i e r d e c o i f f e r e t d ' a c c o m m o d e r
les c h e v e u x » et la m o d i s t e celle « q u i c o n f e c t i o n n e
d e s o b j e t s d e s t i n é s à la c o i f f u r e d e s f e m m e s » .
L é o n a r d , M a r t i n e t , D u p a i n r i v a l i s a i e n t avec R o s e
B e r t i n , a u p r è s d e M a r i e - A n t o i n e t t e p o u r la c r é a t i o n
des poufs.
«Qui connaît le sieur Dupain, qui vient d'afficher partout, l'art varié des
coiffures ? Qui l'a lu ? Moi seul, peut-être. Il célèbre avec enthousiasme cet
Trois coiffures de M. Lassalette, ornement léger qui garnit la tête et accompagne lefront de l'homme, et comme
surmontées d'une plume. ilfaut idolâtrer son talent pour le pousser loin, il s'extasie devant l'art qui a
La coiffure de Paris, 1913. coupé, papilloté, tordu, crêpé, façonné, arrangé, pommadé, frisé et poudré de
deux ou trois centsfaçons différentes les cheveux soumis ou rebelles d'un galant
homme ou d'une joliefemme... Les coiffeurs avaient mis à leur porte engros
caractère, "Académie de coiffure", M. d'Angiviller a trouvé que c'était profaner
le mot "académie", et l'on a défendu à tous les coiffeurs de se servir de ce mot
respectable et sacré; car il faut dire qu'à Paris les prohibitions bigarres sont
éternelles. Il s'agit toujours d'une défense et jamais d'une permission.»
Op. cit. Coiffeurs.
perruque de fleurs —de Lucienne, chez Reboux —qui fait Ci-dessus:
merveille avec la coiffure d'Antoine » : coiffure ? chapeau ? il le chapeau en bourreletformant
diadème s'adapte à la perfection
s'agit d'une coiffure à cheveux courts parsemée de fleurs et à la coiffure, la voilette parachève
il est difficile de démêler la part de l'intervention respective l'harmonie de la ligne. Un grand
des deux créateurs. coiffeur a d'ailleurs réalisé, à la
même époque, de telles coiffures
Cette collaboration s'est estompée, au profit des modistes,
en remplaçant le chapeau
avec la guerre et la vogue des turbans à la fois pratiques et par une tresse de raphia...
économiques. Ce n'est qu'en 1946 que sera célébrée une et en ajoutant une voilette !
« entente cordiale » : coiffeurs et modistes rivalisent de savoir- Dessin de Jeanne Lanvin,
Plaire, 1946, DR.
faire, dans la paix, et les créations sont, des deux côtés, extra-
ordinairement belles.
Cheveux courts et petits chapeaux aboutirent à une produc-
tion brillante dans les années 1950. La vogue des coiffures
gonflantes, dès 1960, donne l'avantage aux coiffeurs, mais
d'autres facteurs interviennent pour mettre en péril la tran-
quille prospérité des modistes et des «modes».
Troisième partie
L e métier
Le m é t i e r de m o d i s t e ,
un art éclos à Paris
Les p r e m i è r e s m o d i s t e s
Rose Bertin et ses semblables étaient des marchandes de
mode, rattachées depuis 1776 aux plumassiers et fleuristes,
ce qui leur donnait le droit de fabriquer, garnir et vendre tout
ce qui concernait ces métiers, tout en continuant d'exercer
leur précédente activité : confectionner et vendre garnitures
de robes, bonnets et toute parure de tête.
Le terme de modiste, attesté au XVIIe siècle au sens de
«qui affecte de suivre la mode », s'appliquait dès la fin du
XVIIIe siècle —en 1798 dans le Journal des Dames et des modes —
à tous ceux qui s'occupaient de la parure féminine, et aux
coiffeurs ; il n'est porté dans le Dictionnaire de l'Académie
qu'en 183 5, au sens précis de «faiseuse de chapeaux de
femmes ».
Les témoignages écrits et picturaux ne laissent aucun doute
sur le prestige lié au travail des modes, « art chéri, art triom-
phant qui dans ce siècle a reçu des honneurs, des distinc-
tions... » selon Sébastien Mercier, Tableaux de Paris —Marchandes
de modes, VI, 86.
Léon Gozlan, au XIXe siècle, cité dans Les Magasins de
nouveautés, de Paul Jarry, élève la création d'un chapeau au
niveau d'un art : «Une modiste véritable, ce n'est pas une
ouvrière qui fabrique des broderies à la journée; c'est une
artiste qui ne travaille qu'à son temps. Une modiste c'est un
poète. Il y a le chapeau de commande, celui qui se fait pour
les pratiques. Ce chapeau-là, pour le bien exécuter, il ne s'agit
que de l'assortir convenablement au caractère et aux habi-
tudes physionomiques de la femme qui doit le porter... Mais
il y a le chapeau improvisé, celui que dicte la fantaisie, celui
qui ne doit et ne peut coiffer qu'une tête ; que l'artiste n'a vu
jamais mais qu'il a rêvé. Ah ! ce chapeau-là, c'est bien le chapeau
d'inspiration, le chapeau lyrique. »
Un très petit ouvrage de 1 8 3 0, fort édifiant, intitulé : Les
Institutrices réunies ou Dialogue sur les arts et les métiers, par
Mlle Elisa***, éclairait là-dessus les jeunes filles : «Où brille
principalement l'art de la marchande de modes, c'est dans la
manière d'arranger avec grâce et élégance, sur un bonnet ou
un chapeau, ces gazes, ces rubans ou ces fleurs artificielles qui
Les I n s t i t u t r i c e s réunies —
Illustration pour le chapitre :
Les Marchandes de modes,
Locard et Davi, Libraires,
Paris, 1825.
La h a u t e m o d e
Comme toute apprentie de l'époque, ellefut d'abord, pendant deux ans, ce qu'on
appelait alors un «lapin de couloir», c'est-à-dire qu'elle restait debout tout le
jour à la disposition des ouvrières pour des besognes subalternes. La seconde
étape de ce parcours constitue un pas significatif vers le métier de modiste :
l'apprentie s'assoit et aide la modiste dans son travail enfonction de son talent.
Les étapes àfranchir ensuite pour arriver au sommet sont alors rigoureusement
observées : petite apprêteuse, moyenne apprêteuse, première apprêteuse et première
apprêteuse qualifiée, c'est-à-dire «première».
La p e r s o n n a l i t é m ê m e de la g r a n d e m o d i s t e p a r i s i e n n e
était l ' o b j e t d'articles élogieux, p e n d a n t la seconde guerre
mondiale, n o t a m m e n t . Marie-Claire du 13 octobre 1939, dans
un long article i n t i t u l é : « E t malgré t o u t , la m o d e c o n t i n u e
et les g r a n d e s m o d i s t e s p o u r s u i v e n t c o u r a g e u s e m e n t leur
t â c h e . . . », rendait un hommage appuyé aux modistes, modèles
à l'appui : chapeau-résille de Mme Suzy, t u r b a n de jersey de
Rose Valois, p e t i t e t o q u e recouverte de fin jersey de laine
d'Agnès, t o q u e de feutre bordée d ' u n e b a n d e de jersey, de
Legroux Sœurs. Les nouvelles tendances de cette période de
pénurie s o n t là !
Les créateurs de ces nouvelles f o r m e s s o n t également :
G a b r i e l l e , J a n e t t e C o l o m b i e r , G i l b e r t O r c e l , S y g u r . . . et
A l b o u y . . . vedettes a u j o u r d ' h u i oubliées!
S a u f l'une d'elles : « U n e nouvelle modiste, qui a une belle
et longue barbe blanche, Van D o n g e n , le peintre célèbre, joue
m a i n t e n a n t avec les couleurs des rubans et des plumes. Il s'est
installé rue D a u n o u , au coin de la rue de la Paix. Ses clientes
seront b r u n e s avec des yeux sertis de noir et seront coiffées
de laque. » Marie-Claire Ier juin 1 9 4 2 .
U n des rôles de la grande modiste est de lancer, avec succès,
des m o d e s : p e n d a n t l ' O c c u p a t i o n , Paulette lance le t u r b a n
qui se révèle vite indispensable p o u r aller à bicyclette !
Les o u t i l s
Le point de mode,
le crochet modiste.
Pour faire
soi-même
ses chapeaux.
Comtesse de Gencé.
Bibliothèque des
ouvrages pratiques,
vers tçoo.
En plus de ces instruments spécifiques, la modiste utilise
l'attirail de la couturière : épingles, toutes petites épingles
pour les tissus fragiles —velours, soie —dites « camions »,
aiguilles, fil à coudre, ciseaux... Outre le point de bouton-
nière ou point de mode, elle utilise un point très rapproché,
presque invisible appelé « bagage » pour achever un tendu qui
ne tombe pas bien, dans les creux par exemple, et le point
arrière pour les coutures. Les chapeaux terminés sont expo-
sés sur des pieds de bois tourné de différentes hauteurs.
Les m a t é r i a u x
Le l a i t o n
Capeline de mousselinefleurie
Le fil de laiton, gainé de fil de coton, existe en 13 gros- entièrement drapée sur une cage
seurs, qui assurent une rigidité plus ou m o i n s grande. Les de laiton, vers 1948-1950.
formes de laiton p e r m e t t e n t de tendre, draper, froncer, chif-
f o n n e r t o u t e s sortes de tissu, d u tulle au velours,
a i n s i q u e de la p a i l l e o u d u f e u t r e . La
modiste prépare une « cage » de laiton, sorte
de carcasse destinée à fixer la forme. Cette cage
comprend les deux parties du chapeau : la calotte, fond
et flancs, et la passe; éventuellement, vers 1 9 0 0 , la barrette.
La m ê m e f o r m e p e r m e t t a i t , en variant l ' a g e n c e m e n t d u
tissu et des garnitures, de créer des chapeaux fort différents :
c'était le cas des capotes du XIXe siècle, des grands plateaux
et des toques de la Belle Époque, t o u t particulièrement. Lart
Chapeau dont la calotte estfaite de la grande m o d i s t e se manifestait dans cet agencement.
de mousseline tendue sur laiton
À p a r t i r de 1 9 2 0 , les calottes t e n d u e s sur une structure
et la passe de paille picot.
de laiton se raréfient ; le laiton reste utilisé p o u r tendre de la
Griffe : Apolline, rue de Rennes,
Paris, en lettres d'or sur coiffe sparterie afin d ' e n faire des moules, et aussi p o u r renforcer la
de soie, vers 190g. base de la calotte et le bord extérieur de la passe ; il est toujours
indispensable p o u r tendre ou draper des tissus légers c o m m e
le tulle o u la mousseline, dans des chapeaux très habillés.
La coiffure à la Belle Poule, Le chapeau s'est bel et bien imposé, il a déjà une histoire
vers ljj8. et sa première publicité, parue dans Le Journal des Dames et des
Modes de 1799, et célébrant la nouvelle parure désormais instal-
lée dans toute garde-robe respectable :
« Femmes qui savez vous parer
Des dons que vous fit la nature,
Vous ne devez pas négliger
Ceux que l'art vous procure ;
Si vous trouvez dans un chapeau
Le goût, l'agréable et l'utile,
Laissez le bonnet du hameau,
Pour le joli chapeau Deville. »
La Vie parisienne sous la Révolution et le Directoire,
Henri d'Alméras, 1909.
Le chapeau Deville, du nom de la modiste qui le créa en
1799, était le chapeau turc, sorte de turban orange (Costume
parisien).
Les modistes du monde élégant étaient l'objet d'éloges
sans mélange : Mlle Despeaux, ce « Michel-Ange des
marchandes de modes », Mlle Cafaxe, qui succéda à Rose
Bertin, rue Saint-Honoré, Mlle Gaussec dont les chapeaux
étaient qualifiés de «célestes», Mlle Bertrand et le modiste
Saulgeot, le célèbre Leroy, ancien coiffeur devenu modiste
de la cour impériale «inimitable, disait-on, en 181 I, pour les
chapeaux alors que la Despeaux l'était pour l'invention des
bonnets » (op. cit.).
La rue Saint-Honoré et les rues voisines deviennent les
hauts-lieux des «Modes », en particulier la rue de la Paix où
les numéros 2, 12, 15, 21, 26 correspondent à des boutiques
de modistes, auxquelles s'adjoint, le n° 20, Les Magasins de la
Belle Anglaise (voir ill. Première partie).
D a n s la r u b r i q u e « l e s C a r n e t s d e la P a r i s i e n n e » ,
—«Jeannette Colombier. Modiste. Ex-directrice de Marie-Alphonsine. Travaille —Gilbert Orcel, modiste. Très habile de ses doigts. D'abord pianiste, a d'abord
dans un magasin décoré par Bérard. 4 av. Matignon. coiffé des amies pour s'amuser. Continue sans rire, 5) rue du Cirque.
—Gabrielle, modiste. Autre élève de Lewis. Coiffe toutes celles qui voudraient être
—Paulette, modiste. 1er accessit à l'école Lewis. Collectionne les oiseaux deporcelaine,
vedettes... 5 bis, rue du Cirque.
n'en met pas sur ses chapeaux. 62 avenue Victor-Emmanuel (devenue avenue Franklin-
—Van Dongen, modiste. A d'abord peint lesfemmes, maintenant il les coiffe. Angle
Roosevelt).
rue Daunou, rue de la Paix. »
Les enseignes
La recherche des boutiques de modistes a conduit clientes
et promeneuses le long des rues prestigieuses du centre de
Paris, dans un itinéraire ponctué sans doute de nombreux
arrêts devant des vitrines si poétiques !
Mais le rêve est suscité par le produit fini : le chapeau.
Que se passe-t-il avant sa création ?
C'est un autre itinéraire, différent mais tout proche, qu'em-
prunte cette fois la modiste elle-même, en quête de fourni-
tures. Dans un périmètre restreint du 2e arrondissement, se
sont longtemps concentrés des fournisseurs dont le nombre
et la variété suggèrent de multiples savoir-faire autour du
chapeau : les rues d'Aboukir, du Caire, Rambuteau, Louis-le-
Grand, Saint-Denis, plus loin, vers le Marais, la rue Mesley...
Là s est épanouie, jusqu'en 1960, une incroyable activité
commerciale ne vivant que par les « modes » ; les rues four-
millaient d'ateliers et de manufactures, de boutiques de four-
nitures de matières premières ou accessoires pour modes...
sans compter les boutiques de modistes. Un regard jeté sur
un almanach montre l'extrême diversité des métiers, des
enseignes méconnues ou oubliées parfois en l'an 2000, mais
très explicites. Carte professionnelle de modiste.
1 8 4 4 *Almanach
L'almanach de Paris de 1844 note les Marchandes de modes, au nombre approximatif Plumassier fleuriste
de 4 0 0 — dont 60 dans le 1er arrondissement et i j o dans le 21 — dans l'ensemble Fleurs en papyrus et autres étoffes
des arrondissements, apportant éventuellement quelques précisions : Fleurs en tout genre, fait la coiffure et la garniture de robe et de bonnet
Plumes de parure
M o d e s et nouveautés
Spécialité pour la violette
Grand choix de modes à très bas prix, expédition pour la France et l'étranger
Fleurs et fruits
Modes et chapeaux de paille
Lingerie, nouveautés et chapeaux de paille Chenille et nouveautés
Assortiment de chapeaux et capotes de toutes nuances Applications de Bruxelles) tulle, blondes et dentelles
Dépôts de modes de plusieurs grandes maisons de Paris
Étoffes et apprêts pour fleurs (23) :
et, sous la r u b r i q u e F o u r n i t u r e s d e m o d e s : Étoffes, boutons, feuillages et apprêts
Têtes Fabrique de boutons de pâte pour fleurs
Fabrique de calottes Mousseline, chiffons, jaconas, percales, velours
Fabrique de calottes de linon pour modes Feuillages pour fleurs et rouge végétal
Ressorts de bonnets et chapeaux de dames
Paille affilée, sparterie, calottes en linon et tulle, cartons et laiton et toute la fourniture Apprêteurs d'étoffes
de modes
Blanchisseuse et apprêteuse de blondes et dentelles
Assortiment de chapeaux de toutes nuances, de5 à 10 francs, comm. et export. Gauffreuse à la mécanique pour nouveautés
S ' a j o u t e n t à cela, m a j o r i t a i r e m e n t d a n s le 2e a r r o n d i s s e m e n t ( r u e
Apprêteurs en chapellerie
d u Caire, rue S a i n t - D e n i s . . . ) u n e foule de commerces liés aux m o d e s :
Pour homme et pourfemmes, soit cousus soit d'Italie et ramaille (sic) les chapeaux
Fleuristes et plumassiers (environ 2 0 0 ) : Chapeaux de paille, remmaillage de chapeaux d'Italie
Dépôt général de plumes brutes d'autruches et autres Apprête, blanchit et teint en noir les chapeaux de paille et les remet à la mode
fleurs fines Fabrique de chapeaux de paille, de teinture fait tout ce qui concerne son état
1908 : Almanach
La paille
Ce n'est qu'à la fin du XVIIIe siècle que le chapeau de paille
a trouvé sa place dans le costume de ville. Sa carrière a ensuite
été constamment brillante et on a appelé chapeau de paille
toutes sortes de chapeaux dont le type le plus anciennement
connu était confectionné avec des tiges de graminées, mais
qui pouvaient aussi bien être tissés dans les matières les plus
diverses : plantes exotiques, bambou, joncs, roseau, pelures
de plumes, éclisses de baleine, etc., jusqu'au papier.
La fabrication des chapeaux de paille, quelle
Tresses de paille picot que soit la localisation de la matière première,
en écheveaux. comprend :
1. la préparation de la matière première;
2. la fabrication c'est-à-dire la confection du
tissu ;
3. le finissage : blanchiment (lavage), teinture,
apprêt, mise en forme, repassage ;
4. garniture: : fleurs, rubans...
La paille se vend couramment sous trois
formes : tresses en écheveaux, cônes tressés d'une seule pièce, Grosses tresses de paille
et tissu. et paillasson.
Les tresses
La m o d i s t e a c h è t e les t r e s s e s de p a i l l e n a t u r e l l e o u
synthétique, en écheveaux de différentes couleurs et grosseurs.
Elle coud ces tresses entièrement elle-même p o u r leur d o n n e r
la f o r m e choisie ; elle p e u t aussi acquérir, chez le fabricant,
des c ô n e s déjà f o r m é s d o n t les tresses s o n t c o u s u e s à la
m a c h i n e à p o i n t s q u a s i m e n t invisibles ; les e n s e i g n e s des
b o u t i q u e s r e n s e i g n e n t c l a i r e m e n t s u r ces f o u r n i s s e u r s :
« Chapeaux de tresses de paille » par exemple.
La variété des pailles tressées est grande, mais la majorité
des tresses servant à la confection des chapeaux est consti-
tuée de paille de graminées. Le tressage est fait manuelle-
ment, en utilisant un nombre variable de brins : on dit que
la tresse est à 4 bouts, 7 bouts, I I b o u t s . . .
Les cônes
La m o d i s t e p e u t s ' a p p r o v i s i o n n e r c h e z le f a b r i c a n t
chapelier, en cônes tressés, o n p o u r r a i t dire nattés, d ' u n e
seule pièce avec des pailles aux brins
suffisamment longs ; le travail de tressage se
fait manuellement, toujours à partir du
sommet. La beauté du travail dépend de la
régularité des croisements ou tours, de leur
tissu serré et aussi du choix minutieux de la
matière première. Chapeaux mi-confectionnés
en diverses pailles.
Il s'agit de pailles exotiques, telles que le Les deux chapeaux du milieu
panama, venant d'Equateur, d'un tissu ferme sont en «bordures» de paille,
et régulier, à la souplesse légendaire ; le c'est-à-dire en galon fantaisie.
Mode illustrée, 1888.
latanier, feuille de latanier ou palmier de
Cuba ; le bambou de Manille, le rotin de
Java, le yoko de Chine issu d'un jonc... Le
cône de paille est utilisé surtout pour des
chapeaux sport, les chapeaux «chapelier»
jusque dans les années 1920; ensuite, il
acquiert ses lettres de noblesse auprès des
modistes et des élégantes : le goût de la
Chapeau de paille noire à passe
bordée d'un galon de dentelle
sobriété, du naturel, de la souplesse dans les formes prévaut
de paille, petit bouquet violet. et les modistes modèlent le cône de paille comme elles le
Le chapeau a été l'objet font pour le cône de feutre.
d'un début de garniture;
il doit encore recevoir
une draperie ou un ruban
autour de la calotte, et,
à l'intérieur, la coiffe, vers 1888.
Intérieur du canotier
Canotier de paille nouée,
de paille nouée. vers 1900.
Cônes defeutre. Artnuptia.
Le feutre
[hiver, le chapeau de feutre règne en maître. Et la modiste
retourne chez le chapelier fabricant. A l'enseigne de « feutre
mérinos », il lui vendra des cônes ou des capelines (si la passe
est déjà ébauchée) de feutre de laine, de qualité médiocre; à
l'enseigne «cloches de feutre », il s'agira, vraisemblablement
de feutre de poil, de lièvre ou de lapin, de plus ou moins belle
qualité : parmi les plus belles, citons le « taupé » à l'aspect du
velours, le «flamand» à long poil imitant la fourrure, la «mélu-
sine » à longs poils soyeux.
Les teintes du feutre sont variées, en général unies, mais
parfois à motifs, par exemple de cachemire.
La modiste travaille le cône de feutre au moule en bois
fabriqué par le « formier » ; ce moule peut être dessiné, voire
sculpté, par la modiste elle-même, en particulier dans la haute
mode.
Tambourin defeutre à motif Le cône doit être préparé la veille c'est-à-dire mis dans un
de cachemire, vers igjo. torchon mouillé. Puis, il est « tiré » sur le moule, modelé au
gré de l'inspiration : le feutre apparaît là comme un matériau
susceptible d'une malléabilité étonnante. La calotte, une fois
taillée, est serrée avec un fil tout autour du moule ; la passe
est ensuite préparée sur le plot ou à main levée et cousue à la
calotte.
Tout ce travail se fait avec l'aide de la vapeur, obtenue avec
un fer à repasser, une patte mouille... [apprêt nécessaire, Calotte defeutre qui a été tirée
léger, se passe à la fin, sur l'envers, au pinceau. sur le moule de bois acheté
chez le «formier».
Jusque vers 1920, les chapeaux de feutre étaient souvent
fixés sur du laiton : ce procédé a été abandonné, les chapeaux
y ont gagné en souplesse, en légèreté.
Le feutre est modelé, sculpté, travaillé en drapés, en lanières.
Un motif de gros-grain, une nervure peut aboutir au chapeau
le plus élégant. C'est une question de mode, mais aussi de
savoir-faire, de goût, de talent de la part de la modiste.
Chapeau de lanières defeutre Comme pour la paille, la modiste peut acheter des chapeaux Chapeau de lanières defeutre
en croisillons. Jeanne Lanvin, de feutre formés ou mi-confectionnés. tressé mêlées à du cordonnet,
vers 1930. vers 1890-1893.
Le chapelier peut aboutir au produit fini. C'est le «chapeau-
chapelier» (fabriqué en série, moulé en atelier de transfor-
mation par un ouvrier alors que la garniture, très simple, est
posée par une ouvrière) que les femmes n'ont trouvé, pendant
longtemps, que dans des magasins pour hommes : chapeau
mou pour la chasse ou la promenade à la campagne, haut-de-
forme, cape ou melon. Lintervention de la modiste a permis
de personnaliser ce « feutre sport » qui a triom-
phé dans les années trente.
Chapeaux defeutre
Le t r a v a i l d e c r é a t i o n r e l e v a n t d u mi-confectionnés. Le chapeau
d o m a i n e artistique est le propre du ou n° 8 estfait de lanières defeutre
de la modiste. tressé. Mode illustrée, 1895.
Fleurs et plumes
Fleurs et plumes ont été, jusqu'en 1920, les ornements
privilégiés du chapeau, augmentant considérablement le prix
de celui-ci. Les besoins en fleurs et en plumes étaient saison-
niers : les fleurs ornant les chapeaux d'été se fabriquaient en
hiver et au printemps ; les plumes, parure d'hiver par excel-
lence, se fabriquaient en été. Ce phénomène explique en partie
que de nombreuses boutiques arborent l'enseigne « Fleurs et
Plumes ».
Lesfleurs
Les fleurs, accompagnées ou non de feuilles, constituent
la plus fraîche des garnitures, mais aussi la plus susceptible
de susciter des excès de mauvais goût. Colette nous en donne
un témoignage, évoquant «la grande Anaïs qui n'était jamais
contente quand sa tête ne chavirait pas sous trois kilogrammes
de roses... » alors que Marcel Proust admire la sobre élégance
. de Mme Swann «coiffée... d'un petit chapeau que dépassait
une seule fleur d'iris toute droite... ».
« Les fleurs artificielles, les plumes et les fantaisies diverses tionnée au talent de l'ouvrière. Le salaire ordinaire à Paris est de
pour la décoration des chapeaux de femme, sont une des branches 4 F par jour ; mais il est des ouvrières qui n'arrivent pas à dépas-
les plus i m p o r t a n t e s de l'industrie française et particulièrement ser 3 F. Tandis que d'autres gagnent jusqu'à 8 F pendant la saison.
de l'industrie parisienne. Agilité, adresse, goût, sentiment artistique, sont des qualités
O n ne trouve pas moins de soixante-cinq mille fleuristes en indispensables à la fleuriste et peuvent lui obtenir de très beaux
France d o n t vingt mille en province et q u a r a n t e - c i n q mille à salaires pour un travail qui, tout en étant assujettissant et parfois
Paris, sans tenir compte de toutes malsain à cause de la mauvaise instal-
les jeunes filles des ateliers des lation des ateliers, n'a rien de pénible
maisons religieuses qui ne tombent par lui-même.
pas sous le coup de la statistique. M a l h e u r e u s e m e n t , il ne faudrait
[apprentissage de la fleuriste se pas en conclure qu'il y a une mine
fait à l'atelier ou dans les écoles d ' o r dans le m é t i e r de fleuriste. Il
professionnelles. Pour réussir dans f a u t c o m p t e r avec les f l u c t u a t i o n s
ce métier, il faut l'adresse et le goût de la m o d e et avec le chômage forcé.
naturels à la Française ainsi que l'in- La saison o ù se fabrique la fleur
tense amour de la parisienne pour à Paris c o m m e n c e en n o v e m b r e et
la fleur naturelle. La «midinette»
finit en mai. Le reste du temps, un
qui, achetant deux sous de frites très petit nombre d'ouvrières
pour son déjeuner, dépense en même employées toute l'année suffit à
temps deux sous pour quelques assurer une fabrication très
roses, un brin de m u g u e t , une réduite...
branche de lilas ou la botte odorante
La plupart des sérieuses ouvrières
de giroflées ou d'œillets est une fleu-
fleuristes, p o u r parer à ce chômage
riste toute désignée. Capote garnie defleurs, vers 1880.
r é g u l i e r , se p r é c a u t i o n n e n t d ' u n
Les ouvrières en fleurs se divi-
a u t r e m é t i e r et s o n t é g a l e m e n t
sent en général en «rosières», en ouvrières de la « p e t i t e fleur» expertes au façonnage de la plume et de la fantaisie pour modes,
et d u « naturel ». Très souvent, du reste, elles exécutent tous les
dont le travail, à l'inverse de celui des fleurs, s'accomplit pendant
genres, ainsi que d u feuillage, d u montage, de la d i s p o s i t i o n en les mois d'été, afin d'assurer la vente de l'hiver.
piquets, touffes, guirlandes selon la mode. Ce n'est guère que
Suivant que les élégantes chargent leurs coiffures de luxu-
dans l'article c o m m u n et très bon marché que l'ouvrière se spécia-
riants bouquets, ou les proscrivent pour les remplacer par du
lise et ne p r o d u i t éternellement q u ' u n e m ê m e sorte de fleur.
tulle et des rubans, l'industrie des fleurs est prospère ou misé-
Avec un peu de mousseline, de colle, de peinture, des brins rable, enrichit ou ruine des milliers de jeunes filles et de femmes. »
de fil de fer et de caoutchouc, ces artisanes, v r a i m e n t artistes
nées, font des merveilles de grâce, de beauté et de vérité.
Le travail se fait à domicile, ou plus souvent à l'atelier, toujours La Femme dans la nature, dans les mœurs, dans la légende, dans la société.
aux pièces, sauf pour les apprenties, et la rémunération est propor- TomeIV,maison d'édition Bong &Cie, 1900.
Il y avait à Paris, vers 1840, 143 fabricants de fleurs et 16
marchands d'apprêts : ceux-ci faisaient les calices, les pistils,
les bourgeons, les étamines qu'ils vendaient aux fleuristes qui
les assemblaient et qui soudaient les divers feuillages et herbes
que leur vendaient les « verduriers ». Les ouvrières fleuristes
exécutaient le travail à l'aide d'outils spéciaux : pinces ou
brucelles pour saisir les parties de la fleur, boules de bois ou
fer pour « bouler » c'est-à-dire rendre concaves ou convexes
les pétales, découpoir ou emporte-pièce, gaufroir ou
fer à frapper les feuilles pour leur donner une appa-
rence naturelle. La fabrication comprenait quatre
opérations principales : découpage, gaufrage, colo-
riage et montage.
La division du travail accélère la produc-
tion par la fabrication séparée des diverses
parties de la fleur, pistil, étamine, boutons,
asse mblage, montage, teinture ; par les
matières utilisées : nansouk, jaconas, mousse-
line, crêpe, satin, chenille, velours, peluche, mais
aussi grâce aux matières récemment découvertes : les
matières plastiques, gutta-percha, Celluloïd ainsi que
t o i l e cirée, m i c a , p e a u ; la n o u v e l l e t e c h n o l o g i e , les p r o c é d é s
Chapeau à calotte couverte m é c a n i q u e s p o u r le d é c o u p a g e e t le m o n t a g e , p e r m e t t e n t u n e
defruits de verre etfleurs de soie.
p l u s g r a n d e p r o d u c t i v i t é d a n s la f a b r i c a t i o n d e s f l e u r s e t d e s
Passe de paille. Griffe :
Christian Dior, vers 1958. fruits. Les cerises, p a r exemple, s o n t i n t é r i e u r e m e n t f o r m é e s
d ' u n m o u l e de c o t o n recouvert d ' u n e légère c o u c h e gélatinée.
D a n s le p a s s é , le c o t o n é t a i t m o u l é à la b o u c h e , ce q u i p r é s e n -
tait de graves i n c o n v é n i e n t s p o u r l'ouvrière mais aussi p o u r
Les fruits sont une garniture plus rare mais cerises, fraises,
baies diverses, raisins, en noir, rouge vif, doré... ont été utili-
sés à toutes les époques, mêlés ou non à des fleurs... Ces
fruits peuvent être en soie, en velours, en matière synthétique,
et également en verre, mais la fragilité en raréfie l'emploi.
Les plumes
Si les fleurs constituent la garniture la plus fraîche, les
plumes constituent la plus riche et la plus onéreuse.
C'est au XVIIIe siècle, époque de splendeur de la plumas-
serie, que les «plumassiers —panachiers —boutiquiers et enjo-
liveurs » furent réunis aux « faiseurs de mode » qui avaient le
privilège de fabriquer les fleurs artificielles, et prirent la quali-
fication de «plumassiers-fleuristes ». Les plumassiers pari-
siens excellaient à teindre les plumes et à leur donner des
nuances en rapport avec la couleur des rubans et des étoffes.
Ils savaient aussi leur donner une tournure élégante.
Lautruche est la plume véritablement royale, longue,
brillante, vaporeuse, et c'est Marie-Antoinette qui la mit à la
mode sous deux formes principales : la plume unique
« amazone », longue, et le panache formé de trois plumes
Chapeau-perruque de plumes montées sur fil de fer. Sa vogue s'effaça provisoirement à la
montées sur un tullefort Restauration au profit de l'oiseau de paradis.
mais souple.
Au gré des modes, ailes, plumes «couteaux», fantaisies de
plumes, cocardes en plumes collées, aplaties et brillantes,
bandeaux, motifs divers de toutes couleurs, oiseaux entiers,
plumes «saules» et «pleureuses», tombantes, ornèrent toques
et chapeaux. Les plumassiers montaient eux-mêmes les « tours
de crosses », les piquets, les poufs vaporeux, les
aigrettes...
La plume devenue alors l'indispensable
ornement du chapeau féminin, la chasse
aux aigrettes se développa impitoyable-
ment : palmipèdes du Nord : mouettes,
pingouins, canards, oies, cygnes ;
oiseaux d'autres latitudes : lopho-
phores, perruches de l'Inde, paon de
Chine, paradis de Nouvelle-Guinée,
Cloche constituée de tiges
de plumes, vers 1925. hérons-crosses, hérons-aigrettes, mara-
bouts, lophorines au plumage velouté
dits « oiseaux de velours » et, plus
communs, faisans, geais, pintades, coqs.
Lautruche d'Afrique et d'Asie occi-
dentale conserva toujours sa faveur : elle
permettait beaucoup de fantaisie, se travaillait afin de présen-
ter divers aspects : frisée ou défrisée, glycérinée, rasée. Oiseau de paradis dans son étui.
Époque Louis-Philippe
«Je vous ai bien reconnue quand vous passiez l'autre soir dans la rue, pied
rapide etfinement chaussé, aidant d'une main gantée le vent à soulever les
volants de votre robe nouvelle, un peu pour ne point la salir beaucoup pour
laisser voir vosjupons brodés et vos bas transparents. Vous avie^un chapeau
d'un style merveilleux, et vous paraissiez même plongée dans une profonde
perplexité à propos du voile en riche dentelle quiflottait sur ce riche chapeau.
Casque de fine voilette de Lyon Embarras bien grave, en effet ! car il s'agissait de savoir lequel valait le mieux
noire, garnie de biais d'organdi et était le plus profitable à votre coquetterie, de porter ce voile baissé ou relevé.
blanc créé par Gilbert Orcel
en 1963, paru dans Vogue. En le portant baissé, vous risquiez de n'être pas reconnue par ceux de vos amis
Croquis deJacques Pinturier. que vous auriezjpu rencontrer, et qui, certes, auraient passé dixfois près de vous
sans se douter que cette opulente enveloppe cachait mademoiselle Mimi. D'un
a u t r e côté, en p o r t a n t ce voile relevé, c'était lui q u i r i s q u a i t de ne p a s être vu,
S e c o n d Empire
« Toutes les têtes defemmes sont à demi masquées par un petit voile de dentelle Voiletteformant écharpe, carnets
noire, étroit comme un loup, etfinissant au sourire qu'il semble chatouiller, en
de croquis, éd. Bell, été 1948, DR.
«Mme Bourjot avait relevé et rejeté sur son chapeau son double voile de dentelle. »
Renée Mauperin
1900
Lotte «venait parfois chez nous, très dame, en veste d'astrakan, un gros bouquet
de parme à la ceinture, et la voilette chenillée tendue sur son nez de pékinois. »
Colette, Mes Apprentissages.
Conclusion
Lâge d'or du chapeau féminin, couvrant plus d'un siècle Plus distanciée, la publicité d'après la Seconde Guerre
et demi, montre la place privilégiée de cet élément de la accentue la sobriété dans l'esthétique et le langage. Aux n o m
toilette féminine. et p r é n o m de la faiseuse, accompagnés de l'indispensable
Si cette histoire est attachante c'est qu'elle est aussi celle adresse, s'ajoute simplement : «Modes». U n m o t qui demeure
d'une connivence, d'une complicité entre un artisan de l'élé- encore magique, p o u r quelque t e m p s . . .
gance et la femme... Complicité qui s'est assez brutalement Plus rarement, la « réclame » t r a d u i t une insistance parti-
abolie dans les années soixante, avec l'évolution des modes culière, qui semble vouloir instaurer de nouveaux liens entre
et des mœurs dans leur ensemble. clientes et m o d i s t e , c o m m e dans celle-ci, p o u r la m o d i s t e
Un regard comparatif sur la publicité relative aux «modes » C l a u d e S a i n t - C y r : « S e s chapeaux p r ê t s à p o r t e r i r o n t à
est à cet égard édifiant : on peut y lire toutes car leur tour de tête est élastique.
l'évolution du statut de la modiste et de Ils vont du béret de toile au béret de
ses rapports avec le public. On a vu que tulle en passant par les canotiers pareille-
les joutes publicitaires entre modistes, au ment calculés. » Le message est illustré
XVIIIe siècle, pouvaient être redoutables, de trois bérets et d'un canotier, Jardin
et Beaulard, évoqué par S. Mercier dans des Modes, juin 1950.
son « scoop » sur Rose Bertin (voir plus Poussée à l'extrême, la sobriété
haut) ne se privait pas de dénigrer sa rivale. conduit la publicité à un message froid,
Les « réclames » du XIXe siècle, plus objectif, qui s'impose à une clientèle
amènes, évoquaient la compétence et le anonyme, à tout public ; c'est celui du
goût de Mme X avec un certain lyrisme : chapeau de feutre, fait en série, du
« Pour les chapeaux, on peut s'adresser en «chapeau chapelier », rival maintenant
toute confiance à l'aimable directrice de heureux, auprès des femmes, du chapeau
la maison de modes X... », Revue Mame, de modiste : « Feutrix —Ses formes
1897; elles suscitaient une sorte d'inti- modes —Ses feutres —Roger frères —
mité : « Mme Séguin, l'inventeur du 149, rue Montmartre, Paris (2e) »
chapeau à ressort, est amie du progrès, on Tenez-vous le pour dit ! La part du rêve
le voit, et nous lui devons vraiment de la est singulièrement réduite ! La modiste
reconnaissance », Journal des Femmes, 1847. Bague de tête géante en grillage cuivré n'est plus un personnage familier et
serti de velours turquoise. complice.
Ce sont des images publicitaires sobres et
j . Pinturier, janvier 2 0 0 0
résolument modernistes, bientôt «Art Mais son art ne m e u r t pas, même s'il
déco », qui leur succèdent, après la Première Guerre mondiale. subit les aléas que l'histoire inflige à toute création humaine.
La grande modiste des années 1920 associe son n o m et la pres- Les modes, la haute mode et les modistes continuent d'exis-
tigieuse adresse de sa maison à une photographie ou un dessin ter avec un talent et une créativité dont la vigueur ne demande
soulignant l'élégance pure de ses créations, et la situant au qu à s épanouir.
sommet. À cette époque, le chapeau stylisé ou même le carton Et c'est un bonheur pour les inconditionnels d'une
à chapeau seul sont fréquemment associés à une publicité p o u r élégance et d'une netteté parfaites, ou pour ceux qui veulent
p r o d u i t s de luxe, accessibles à une m i n o r i t é de privilégiées, introduire une fantaisie de bon aloi dans leur apparence, ou
tels que parfums, voitures, voyages : autant de signes d'élé- encore pour les amateurs des arts de la mode et du costume,
gance, de raffinement et d'art de vivre, qui suscitent le rêve. d'assister à un renouveau dans la création modiste.
Annexes
La confection amateur
Les c h a p e a u x d ' e n f a n t s
Lexique
L a confection amateur
c e q u ' o n a i t o b t e n u l a g r a n d e u r d u p l a t e a u . » M o d e illustrée, 1 9 0 2 .
U n a u t r e m o d è l e p r o c h e d e celui-ci, e n 1 9 0 5 , m o n t r e la b a r r e t t e
d e s t i n é e à s o u t e n i r la g a r n i t u r e e n c a c h e - p e i g n e , p o s é e à l'arrière
(voirPremièrepartie).
Les grands magasins, comme le Bon Marché, proposent des
formes à garnir entièrement ou des formes «mi-confectionnées »
dont il suffira de parachever l'ornement à l'aide de plumes et
de fleurs prêtes à agrafer. Piquets de fleurs ou de plumes, poufs
de plumes vaporeuses, brins de paradis, aigrettes, motifs divers,
oiseaux de fantaisie sont proposés à des prix abordables.
Après 1914, le chapeau, moins structuré, volontiers souple,
souvent sans garniture, est plus difficile à confectionner par
des mains inexpertes, ou du moins plus difficile à réussir.
Aussi, les revues de mode insistent-elles sur le fait que le
plus difficile est, pour une modiste amateur, de réaliser le
chapeau, non pas de l'imaginer. «Contrairement à la robe, le
chapeau ne peut se faire par tâtonnements et essayages
successifs : il nécessite de la spontanéité, du brio, une heureuse
improvisation donc un goût sûr. Le conseil de base est de
fabriquer le chapeau dans un premier temps, entièrement dans
de vieilles étoffes et de vieilles garnitures, une sorte de répétition,
après quoi il sera possible de se lancer dans la confection du
vrai chapeau. La forme peut s'acheter chez un formier : elle
sera assez ordinaire et passe-partout, en sparterie ; ou bien elle
peut s'acquérir chez une modiste : elle sera faite à la main, par
conséquent plus enlevée et plus à la mode du jour; elle sera
alors en paille ou en tissu. Cette forme doit être choisie en
harmonie avec la silhouette, la forme du visage, le genre de vie.
Une fois la forme choisie, le délicat problème de la garniture
se pose : il sera bon d'observer d'élégants chapeaux dans les
vitrines de la rue Royale ou de la rue de la Paix avant d'acheter
chez un spécialiste de fleurs ou de plumes, ou dans un magasin
de nouveautés, la garniture adéquate qu'il conviendra de disposer,
elle aussi, en fonction des critères vus plus haut. N'importe
quel nœud, n'importe quelle plume ne convient pas à n'importe
quel visage ni à n'importe quelle circonstance.Les grands
magasins vendent au rayon nouveautés quantité de formes de
paille et de divers tissus, à garnir soi-même, ainsi que fleurs et
plumes prêtes à agrafer.» La Mode pratique, 1915. Les grands
magasins vendent au rayon nouveautés quantité de forme de
paille et divers tissus, à garnir soi-même, ainsi que fleurs et
plumes prêtes à agrafer. » La Modepratique, 1915.
À partir des années 1920, la conception nouvelle du
chapeau est celle d'une femme moderne : peu de garnitures,
importance primordiale du « coiffant » naturel (si opposé au
cache-peigne de 1900) : cela justifie des rubriques telles que
«une idée par quinzaine» de La Modefrançaise, où l'accent est
mis sur l ' é c o n o m i e d o m e s t i q u e : « Les chapeaux de
paille a t t e i g n e n t , cette année, des prix inabordables
q u a n d on recherche u n e paille de belle qualité. Or,
mieux vaut u n chapeau t e n d u que l'on p e u t faire soi-
même à p e u de frais q u ' u n chapeau de paille de qualité
médiocre. Celui d o n t nous vous offrons a u j o u r d ' h u i le
modèle sera délicieux en organdi, en crêpe de Chine,
en crêpe Georgette. Grâce à votre patron, vous p o u r -
rez l ' e x é c u t e r v o u s - m ê m e sans p e i n e . . . C e chapeau
c o m p r e n d trois parties : la passe, le t o u r de tête, le
fond. Couper un ovale en sparterie p o u r la passe ; border
d ' u n laiton ; tailler dans le milieu de la passe u n ovale
qui f o r m e r a l'entrée de la tête ; tailler des crans desti-
nés à fixer le t o u r de la tête. Celui-ci est formé d ' u n e
b a n d e d r o i t e b o r d é e en h a u t et en bas d ' u n l a i t o n .
Le f o n d reste s o u p l e ; tailler le t i s s u l é g è r e m e n t
ovale, froncer à la base. Il se fixera a u t o u r de la tête par
des p o i n t s mode. N o u s d o n n o n s le p a t r o n de la spar-
terie, on devra couper le tissu en t e n a n t c o m p t e des
rentrés.
Bourrelet d'enfant
en paille nouée, nœud
plat de velours, fin XIXe-début
JeXe siècle.
«Breton» en paille
vernie bordeaux.
vers 1930-1940.
Aigrette : ornement de plumes fines et m e n t c o m m e c o i f f u r e d u soir, sans lorsque celle-ci se réduit à un toquet, 1900, le canotier est considéré comme
rigides se dressant le plus souvent en b r i d e s , vers 1 9 5 0 . pour, finalement, être supplantée par le une coiffure « de négligé » pour le sport,
hauteur sur le chapeau. Durant le chapeau rond ou ouvert. Cependant, les le voyage, la promenade. Les modistes
B é r e t : c o i f f u r e de f e u t r e , p l a t e , s a n s
Directoire on les appelait aussi brides resurgissent çà et là, selon le en ont peu à peu donné d'infinies inter-
c a l o t t e m a r q u é e , r o n d e et souple, q u e
« esprits ». Au début du xxe siècle, les caprice d'une mode, le temps d'une sai- prétations, jouant sur les dimensions,
les m o d e s f é m i n i n e s o n t e m p r u n t é e aux la forme ovale ou ronde, les matériaux :
aigrettes «colonel» étaient en grande son, accompagnant le chapeau de paille ;
Basques et aux Béarnais ; le béret a été elles sont alors en velours noir. le canotier tendu de dentelle de 1900,
faveur, leur hauteur pouvait égaler
interprété, selon les tendances en vogue, le canotier tendu de soie de 1950 en
30 cm; leur prix, plus élevé souvent que dans divers matériaux et diverses d i m e n -
celui du chapeau proprement dit, était sont des versions habillées. Une curieuse
s i o n s . Le p l u s r e m a r q u a b l e est, s a n s Cache-peigne : garniture de fleurs,
fonction du nombre de brins qui pou- interprétation de 1950 est le canotier
d o u t e , le g r a n d b é r e t des a n n é e s 1 9 4 0 - plumes ou ruban, posée sous la passe du «à bord cassé ».
vait aller jusqu'à 50 ou 60.
1 9 4 5 , p o r t é v e r t i c a l e m e n t et de c ô t é , chapeau, soit derrière, soit de côté, et
Amazone : longue plume frisée d'au- t o u t en profil. Le béret, f o r m e i n t e m - fixée sur la barrette. Cette garniture Cape : terme utilisé pour désigner le
truche, garnissant souvent le chapeau p o r e l l e et à c o n n o t a t i o n p a y s a n n e , caractéristique du chapeau de la Belle chapeau melon masculin, emprunté par
d'amazone. Voir : « chapeau amazone ». échappe aux caprices de la m o d e et est Époque cachait les épingles et le peigne les femmes, vers 1910, comme chapeau
encore a c t u e l l e m e n t largement apprécié.
d'amazone.
qui soutenaient le chignon. Vers 1938-
1939, les formes inclinées imitant ces
Bergère : voir « c h a p e a u - b e r g è r e ». Capeline : au XIXe siècle et au début du
Barbes : brides de dentelle remplaçant «plateaux», quoique moins grandes, ont xxe, capuchon en tissu de soie, mous-
les brides de rubans dans les capotes Bibi : n o m d o n n é aux p e t i t s chapeaux. ressuscité la garniture en cache-peigne seline, batiste, percale, coulissé généra-
habillées, les coiffures du soir. * pour un bref laps de temps.
Le t e r m e apparaît vers 18 3 1, l o r s q u e les lement sur armature de métal, utilisé
Barrette : bande de tulle raide fixée sur grandes f o r m e s R e s t a u r a t i o n voient leur comme sortie de bal ou coiffure de jar-
Calèche : au XVIIIe siècle, coiffure
une armature de fil de laiton, incurvée, volume diminuer. Il resurgit c h a q u e fois din. Le second Empire donnait parfois
d'étoffe en forme de large capuchon,
q u e les p e t i t s c h a p e a u x s o n t à la m o d e : fixée sur armature de baleine, d'osier, à cette forme l'ancien nom de « calèche ».
qui s'adaptait à la base de la calotte du
grand plateau, entre 1895 et 1905, 1 9 3 9 - 1 9 4 1 , 1 9 5 0 . . . p a r exemple. En 1900, cette forme est destinée aux
pouvant s abaisser ou se lever. Limmense
approximativement. La barrette per- calèche abritant les «poufs » de l'époque fillettes pour la ville.
B i c o r n e : c h a p e a u p r é s e n t a n t u n e passe
mettait de surélever le chapeau, derrière pliée de façon à p r é s e n t e r u n e p o i n t e de
de Marie-Antoinette est devenue, sous Par la suite, ce mot désigne un grand
ou de côté, tout en le stabilisant : il le second Empire, plus modeste de pro- chapeau à larges bords, en vogue dès le
c h a q u e côté de la calotte. Il s'agit d ' u n
emboîtait ainsi quelque peu le crâne ; la portions, et constitue une coiffure de début du xxe siècle, avec une connota-
e m p r u n t à certains uniformes, interprété
barrette pouvait recevoir la garniture en p a r les m o d i s t e s q u i le f é m i n i s e n t avec jardin confectionnée en batiste, en toile, tion particulière d'élégance. La capeline
cache-peigne, fleurs, plumes, coques de t o u s les m o y e n s de leur art : matières, ou bien une coiffure pour le soir, en satin se fait en toutes matières : paille, feutre,
ruban. C'est sur la barrette que se d i m e n s i o n s , o r n e m e n t , n o t a m m e n t vers souvent noir, ouatée, et doublée souvent tissu tendu, et se garnit de fleurs, den-
fixaient les épingles destinées à mainte- 1920. de couleur claire. Dès cette époque, le telle, plumes, voilette, ruban... Une
nir le chapeau sur la tête. terme, considéré comme vieilli, est rem- forme particulière est celle des années
Le nom de barrette est parfois donné à B r e t o n : chapeau à calotte demi-sphé- placé par celui de « capeline ». 1920 : la passe est alors ovale et se pré-
r i q u e et b o r d s r o n d s relevés t o u t a u t o u r sente en largeur, ou bien elle est dissy-
des petites toques des années 1930, pré-
Calotte : partie du chapeau emboîtant
sentant une ou deux arêtes vives. de la calotte. Ce c h a p e a u a d ' a b o r d été métrique. En 1947, le new-look donne
réservé aux e n f a n t s , vers 1 9 0 0 . Les le crâne composée du fond et des flancs ;
à la capeline une ligne oblique à partir
Bavolet : morceau d'étoffe froncée ou elle peut être constituée d'un seul mor- du sommet de la calotte.
« m o d e s » l ' o n t p a r la s u i t e a d a p t é à la
plissée, couvrant la nuque que l'on fixait, coiffure féminine, en a p p o r t a n t quelques
ceau. Certains chapeaux, notamment
La capeline demeure aujourd'hui le cha-
vers 1840 et jusqu'à 1865, à l'arrière de fantaisies : calotte r o n d e ou plate, b o r d s
vers 1950, réduits à cette seule partie,
peau de cérémonie par excellence.
la capote. Le bavolet est une caractéris- p l u s o u m o i n s larges ; les d i m e n s i o n s
étaient appelés tout simplement calotte.
tique de la capote, par opposition au C a p o t e : chapeau dit « fermé » qui
o n t é g a l e m e n t varié, de m ê m e q u e la Cannetille : galon de passementerie emboîte la tête et est muni de brides se
chapeau qui n'en comporte pas. p o s i t i o n plus ou m o i n s inclinée sur la métallique, or ou argent, utilisé pour
Labandon du bavolet, dès 1865, révo- nouant sous le menton. La capote a vu
tête. P l u t ô t p e t i t et e m b o î t a n t le crâne broder les chapeaux habillés, notamment
à la fin du XIXe siècle. le jour pendant le Directoire et a été le
lutionna l'allure de la capote et annonça h o r i z o n t a l e m e n t , vers 1 9 3 0 , le b r e t o n
son déclin. chapeau privilégié, le chapeau conve-
se présente, en 1 9 6 0 , c o m m e u n e vaste
Canotier : chapeau emprunté aux cano- na ble, « de vis i te», d u r a n t t o u t le
auréole a u t o u r d u visage.
Béguin : petit chapeau d'enfant com- tiers, à la fin du XIXe siècle, vers 1874. XIXe siècle. Sa forme a évolué présen-
posé essentiellement d'une calotte Brides : r u b a n s d e s t i n é s à se n o u e r sous À l'origine, le canotier, en paille, pré- tant une passe tantôt évasée, tantôt hori-
emboîtant le crâne et muni de fines le m e n t o n ; les brides s o n t u n e des carac- sente une calotte plate ovale et un bord zontale, plus ou moins grande ; la pré-
brides. Le béguin se trouve dans les téristiques d u chapeau fermé o u capote ; plat. Sa calotte est ceinturée d'un gros- sence du bavolet est une caractéristique
modes féminines vers 1880 et notam- elles d i s p a r a i s s e n t p r e s q u e t o t a l e m e n t grain noir. Très apprécié des cyclistes en de la capote de 1827 à 1865. À la fin
du siècle la capote est réduite à un petit ou moins large. Pendant la Restauration, capote à la fin du XIXe siècle ; il est graveur pour modes inscrit le nom et
plateau très orné et bientôt, vers 1895, la calotte assez haute et la passe plutôt d'abord considéré comme une forme l'adresse de la ou du modiste, générale-
elle est supplantée, chez les élégantes, large et retournée évoquent le bolivar ; hardie, peu « convenable » pour les ment en lettres d'or. C'est la griffe,
par le «chapeau rond». En 1900, seules le second Empire adopte des dimensions dames, mais il s'impose bientôt, sauf laquelle à partir de 1930 devient un petit
les « dames d'un certain âge » portent la harmonieuses, plutôt réduites ; dans les pour les dames âgées qui portent encore rectangle de soie, cousu sur le gros-grain
capote, plate, un peu lourde et le plus années 1880-1890, le chapeau-amazone le chapeau fermé pendant la première qui borde l'entrée de tête. Les modistes
souvent en noir, en violet. voit sa calotte s'élever modérément et décennie du xxe siècle. actuels en ont varié la présentation, sim-
son bord étroit se retourner : le chapeau- plifiant parfois à l'extrême, en apposant
Capote-cabriolet : au XVIIIe siècle, coif- Charlotte : chapeau inspiré des coiffures
amazone est au total petit. La calotte leur signature, au stylo, à l'intérieur de
fure d'étoffe coulissée sur fil de métal, portées par Charlotte Corday, à l'époque
s'élève assez spectaculairement au début la calotte. La coiffe est complétée par
s'élevant au-dessus du front à la manière de la Révolution française, caractérisé
du XXe siècle tandis que la passe reste une bande de même étoffe qui double
de la capote d'une voiture, et munie de par une calotte large et souple resserrée
étroite. Le chapeau-amazone se fait les flancs de la calotte : cette bande, cou-
brides. Pendant la première moitié du par un lien d'où s'échappe un volant
généralement en feutre, mais il peut sue d'un côté à l'entrée de tête, se fronce
XIXe siècle, les revues de mode donnent double ou triple, froncé ou plissé, tout sur l'autre côté à l'aide d'une coulisse
aussi être en paille, toujours dans des autour de la tête. Les charlottes connais-
le nom de capotes-cabriolets ou de cha- teintes sombres, noir, bleu marine. Le dans laquelle passe un petit ruban de
peaux-cabriolets à des capotes à passe sent une grande faveur dans les années
chapeau-amazone peut aussi être un cha- soie. Cette façon de doubler l'intérieur
évasée au-dessus du front, en étoffe ou 1900, pour les jeunes filles ou les jeunes
peau melon appelé cape. femmes, l'été. Ces formes sont confec- du chapeau est caractéristique du
en paille. Au début du XXe siècle,
XIXe siècle, lequel, en matière de mode,
quelques capotes-cabriolets apparais- tionnées dans des étoffes légères —tulle,
Chapeau-bergère (ou bergère) : chapeau se prolonge jusqu'en 1914. Mais dans
sent très ponctuellement dans les modes. dentelle, broderie anglaise —fixées, tout
les années 1920, de nombreuses calottes
à large bord, en paille, d'origine rurale, en restant souples, sur une armature de
Dans les années 1942-1946, quelques sont encore doublées ainsi.
seul chapeau véritablement féminin métal ; le lien ceinturant la calotte peut
grandes modistes ont ressuscité cette
avant 1780. Les modistes l'ont, au cours
forme avec brio dans des modèles assez être un ruban, une draperie, formant un Couteau (ou plume-couteau) : par
volumineux. des temps, rendu plus coquet par l'ad- chou de chaque côté. opposition aux petites minoches et aux
jonction d'ornements, tels que fleurs des plumes frisées vaporeuses comme l'ama-
Chenille : article de mercerie très uti-
Capote-fanchon : voir « Fanchon ». champs, rubans. zone, la plume-couteau est une longue
lisé dans les modes : il s'agit d'un fil
Casquette : coiffure à l'origine mascu- Chapeau mou : chapeau masculin en plume rigide provenant de la queue ou
duveteux, évoquant le velours, plus ou
feutre adopté par les femmes pour la des ailes de certains grands oiseaux
line, composée d'une calotte et d une moins gros. Les modistes réalisent, en
visière. La première apparition de la cas- chasse, l'excursion : sa petite calotte chenille, des broderies, des ornements comme le faisan. Cette plume, d'aspect
quette dans les modes se situe vers «fendue» (c'est-à-dire creusée) et son austère, convient aux chapeaux tout-
de chapeaux, et même des capotes tout
1864 : c'est la casquette Windsor lourde bord légèrement retourné sur les côtés, entières au crochet. Très utilisée à la fin aller, aux chapeaux de voyage, comme
ornement.
et peu appréciée. À la fin du XIXe et au en font un chapeau facile à porter avec du XIXe siècle, la chenille réapparaît pen-
début du XXe siècle, la casquette est une tenue sport, vers 1900. dant la guerre de 1939-1945, pour cro-
réservée au sport : cyclistes et automo- cheter les résilles alors à la mode.
Chapeau à la Paméla : chapeau en vogue Diadème : chapeau en forme de demi-
bilistes apprécient la visière qui protège
pendant le premier Empire, à haute Cloche : ce terme désigne les chapeaux cercle, souvent tout en plumes ou tout
le teint. C'est surtout à partir de 1930
calotte cylindrique et large bord rabattu à bords tombant tout autour de la tête. en fleurs, très en faveur vers 1950, alors
que les modistes ont donné à la cas-
sur les joues par un ruban partant de la En 1907, ce sont de volumineux cha- qu'on aime les formes évidées...
quette une allure féminine suivant les
calotte. Vers 1845, on appelle chapeau peaux que l'on baptise parfois ironi-
tendances en vogue : les calottes pren-
à la Paméla ou simplement Paméla, une quement «cloches-éteignoirs ». Mais ce
nent des formes variées, rondes, tron-
capote dont la passe horizontale s'ar- sont les années folles qui donnent à la Fanchon : fichu triangulaire que les
coniques et s'adjoignent des visières éga-
rondit au bas des joues en s évasant pour cloche son allure moderne, grâce aux femmes posaient sur la tête, pointe der-
lement variées quant à leur forme et leur
laisser la place à des boucles de cheveux, cheveux courts : calotte très emboîtante rière. Une petite fanchon de tulle ou de
dimension : rondes, carrées, oblongues.
Vers 1938-1939 les formes sont très à des fleurs, et continue derrière, plus enfoncée jusqu'aux sourcils, et bord dentelle remplace le bavolet lorsque
étroite et retournée sur la calotte, rem- étroit, retourné ou non; de 1920 à celui-ci est délaissé, vers 1865. À par-
enlevées, très féminines. La garniture de
plaçant le bavolet. 1930, la cloche devient de plus en plus tir de cette date, les capotes se rédui-
la casquette est toujours très sobre : ner-
Sous le second Empire, le demi-Paméla étroite et, en 1928, elle n'est autre qu'un sent et adoptent une forme triangulaire
vure dans le feutre, plume-couteau. Dans
est un grand chapeau rond dont la passe casque dépourvu de tout bord. À partir qui leur fait attribuer le nom de capote-
les années 1950-1960 la casquette fanchon.
baissée devant et derrière présente un de 1932, la cloche, moins sévère, assou-
reprend son allure tout-aller, s'assortit
mouvement arrondi de chaque côté, per- plit ses bords. Après une longue éclipse,
aux vêtements : elle se fait en jean, par Feutre : matériau privilégié pour la
mettant de disposer des fleurs dessous, la cloche fait un retour remarqué dans
exemple. confection des chapeaux d'hiver, fabri-
au niveau de l'oreille. les années soixante, sa calotte est moins
Chapeau-amazone (ou amazone) : cha- qué à partir de laine, pour les qualités
étroite, à fond rond ou plat, ses bords,
peau destiné à la promenade à cheval. La Chapeau rond : chapeau posé sur la tête, médiocres, et surtout de poil pour les
assez larges, parfois bombés.
forme classique est le haut-de-forme dit aussi chapeau ouvert, par opposition bonnes qualités : poil de lapin, de lièvre,
masculin. Sa calotte est plus ou moins au chapeau fermé ou capote, très emboî- Coiffe : carré de soie placé sur le fond, de castor, de taupe. On distingue le
haute selon les époques, sa passe plus tant. Le chapeau rond triomphe de la à l'intérieur du chapeau, et sur lequel le feutre ras, le feutre taupé à l'aspect
velouté, l'ourson ou flamand à poils dès le XVIIe siècle, le mousquetaire est Relevé : chapeau à passe se relevant ver- pour ses dimensions notamment.
soyeux, et le feutre mélusine à longs adopté par les dames pour la chasse, et, ticalement sur un côté ou devant, en Réduite au XIXe siècle, elle s'agrandit
poils soyeux. au XIXe siècle, peut constituer un cha- faveur vers 1940. ensuite, vers 1900. Un modèle typique
peau de ville. de 1902 est la toque de forme aérody-
Fond : partie de la calotte qui constitue Résille : filet à mailles assez larges, en
namique, dite «Santos Dumont », ainsi
le sommet du chapeau. Il peut être rigide, cordonnet, chenille, paille, rassemblant
mou, évidé. Le « fond béret » est un fond que la toque «boléro» plate et ronde.
Paméla : voir « chapeau à la Paméla ». les cheveux longs. La résille peut s'adap-
en étoffe souple drapée ou froncée. ter à l'arrière d'une toque. Elle est en Tricorne : chapeau porté par les hommes
Paillasson : grosse paille légère, brillante faveur dans les années 1940. aux XVIIe et XVIIIe siècles, et par les
d'un côté, mate de l'autre, que l'on tresse
femmes, au XVIIIe, pour la chasse. Le tri-
Haut-de-forme : chapeau à l'origine pour confectionner les chapeaux.
corne présente un bord retroussé formant
masculin, à calotte cylindrique plus ou Shako : chapeau emprunté au costume
Passe : bord du chapeau entourant la trois cornes le plus souvent équidistantes ;
moins haute et bord étroit retourné sur militaire, à calotte tronconique et petit
calotte ; selon les modes, la passe est sous Louis XV, le tricorne est devenu tout
les côtés ; il est utilisé, comme coiffure bord en visière, en vogue pendant le pre-
plus ou moins large et de forme ronde, petit et porte le nom de «lampion». Dès
féminine, pour les tenues d'amazone. mier Empire. Il est généralement orné
ovale, dissymétrique, évasée, horizon- le second Empire, le tricorne «garde fran-
tale ou verticale ; elle est absente dans d'une plume. çaise» est adopté par certaines femmes,
Jugulaire : se dit d'une bride fixe d'un la toque. On dit aussi les « ailes » du cha- Sparterie : tissage de fibre végétale, jugées alors hardies, pour la promenade à
côté et s'attachant de l'autre par un bou- peau. lamelles de bois, dont un côté est encollé cheval : les chroniques lui préfèrent le
ton, par opposition aux brides se nouant Petit-bord : chapeau rond à passe se rele- de mousseline de coton, ou de singalette, haut-de-forme plus « distingué ».
sous le menton et dont les pans retom- vant d 'un côté, en vogue vers 1840, pour qui est une étamine de coton apprêtée; Néanmoins, la vogue du tricorne s'accroît,
bent devant. le soir; le petit-bord se fait en velours, la sparterie, vendue en lés de 90 sur parallèlement à celle du «marquis », et les
dentelle, et se garnit de belles plumes, 100 cm, est utilisée comme base pour les modistes en font un chapeau de ville ou
de perles, de passementerie d'or. chapeaux tendus d'étoffe ; la sparterie du soir, selon qu'il est confectionné en
Marquis : chapeau proche du tricorne, humidifiée côté paille se moule aisément. feutre, en paille, ou en soie, tulle, dentelle
Picot : fin galon de paille fine, dite aussi
mais d'une géométrie moins rigoureuse, La sparterie de bonne qualité était utili- d'or... et garni de cocardes, de ruban, de
dont les bords se retroussent et se cas- « paille anglaise », qui sert à faire des
sée pour la confection de chapeaux cou- cabochon de perles, d'aigrettes...
chapeaux de paille cousue à la machine
sent en une corne plus ou moins mar- rants, mais elle présente l'inconvénient
dans des couleurs variées. Turban : chapeau constitué d'une dra-
quée, qui suffit à donner à l'ensemble d'être cassante. Cette sparterie naturelle
perie plus ou moins savante, exécutée
de la passe une forme triangulaire. À la Piquet : touffe de plumes verticales est, de plus en plus, remplacée par une dans une étoffe souple, d'inspiration
fin du XIXe siècle le marquis connaît une ornant les chapeaux, les coiffures du soir. sparterie synthétique faite de lamelles de
orientale. Il est particulièrement en
grande vogue pour le voyage, les tenues papier, et doublée de singalette.
P l a t e a u : chapeau de f o r m e plate faveur à l'époque de la campagne
de ville simples ; il se fait en feutre,
accueillant diverses garnitures. Dès Suivez-moi jeune-homme : longs rubans d'Égypte, pendant le premier Empire,
paille, tissu tendu et se garnit sobrement
1870, la capote emboîtante se trans- de velours noir tombant dans le dos ; le puis sous la Restauration, par suite du
de plumes, ruban, cocardes. Peu à peu
sa faveur s'accroît et les modistes l'in- forme en un petit plateau ; celui-ci res- terme est emprunté aux couturières par goût romantique pour l'exotisme, et
tera exigu jusqu'à la fin du siècle. En comme coiffure du soir au début du
terprètent dans des versions habillées les modistes à la fin du second Empire
1900, le plateau s'agrandit pour deve- pour désigner les rubans ornant les XXe siècle. Pendant la Deuxième Guerre
qui en font un chapeau de visite conve-
nir un grand chapeau habillé, s'inclinant petites formes ovales alors en vogue. mondiale, le turban est adopté pour des
nable, orné de draperies, «d'aigrettes
de côté ou vers le front, en prenant appui raisons pratiques : il protège parfaite-
majestueuses» ; pour le théâtre, le petit
sur la barrette ornée d'un cache-peigne. ment la chevelure pour aller à bicyclette ;
marquis est confectionné dans de la den-
Tambourin : toque basse, ronde ou ovale, il se fait de préférence en jersey.
telle, du tulle pailleté. À partir de 1908, Postillon : chapeau à calotte cylindrique à la mode vers 1950.
son volume s'accroît, comme celui de ou tronconique, assez haute, et bords
tous les chapeaux à la mode, pour rede- étroits retroussés sur les côtés ; il est Tiare : bonnet ou serre-tête présentant
ceinturé d 'un ruban de velours ou de Watteau : chapeau à large calotte plate
venir de dimensions raisonnables pen- un mouvement en pointe au-dessus du
dant la Première Guerre et les années et passe très relevée à l'arrière, sur une
gros-grain noir, orné d'une boucle au front, inspiré par les riches coiffures des
folles. Dans les années trente, le mar- souverains orientaux. La tiare est inter- garniture en cache-peigne. C'est un cha-
milieu du devant ; cet ornement est par-
peau habillé qui s'orne de draperies,
quis se fait tout petit, rappelant l'époque fois remplacé par un motif de plume, de prétée dans des matières riches, velours,
fleurs, plumes, perles de jais, rubans...
Louis Xy puis, à la fin de la décennie, fleurs, ou un nœud. satin, parfois ornée de pierreries, de bro-
deries, entre 1920 et 1950. Le Watteau se pose, à la fin du XIXe et
il se perche sur le haut du front. Après
Pouf : volumineux bonnet posé sur une au début du xxe siècle, sur les coiffures
une éclipse pendant la Seconde Guerre
coiffure non moins volumineuse, au Toque : chapeau sans bord, posé au som- vaporeuses, dans une position inclinée.
qui privilégie les vastes bérets, le mar-
temps de Marie-Antoinette. met de la tête. La toque existait pour les Il ne résiste pas à la vogue des chapeaux
quis réapparaît dans des modèles sobres hommes dès la Renaissance et les dames
Le pouf de plumes est une garniture en plus emboîtants et plus faciles à porter,
et «trotteurs » dans les années cinquante.
forme de touffe vaporeuse. l'empruntaient. Mais les modes fémi- à partir de 1914, même si quelques
Mousquetaire : grand chapeau de feutre nines ne l'ont adoptée qu'à la fin du réminiscences du Watteau apparaissent,
relevé d'un côté et orné de grandes XIXe siècle, lors du déclin de la capote. en 1938-1941, dans de petits plateaux
plumes amazones ; porté par les hommes La toque suit les tendances de la mode, en équilibre sur le front.
B i b l i o g r a p h i e
Ouvrages généraux
O u v r a g e s s u r la m o d e
et le c o s t u m e
Dictionnaire de la Mode, é d . d u R e g a r d .
J. R U P P E R T , Le Costume, l i b r a i r i e d ' a r t , 1 9 3 0 .
M a n u e l de la mode, é d . B a i l l è r e e t fils, B i b l i o t h è q u e p r o f e s -
sionnelle, 1926.
éd. S o m o g y , 1 9 8 6 .
M . D E L P I E R R E , Le C o s t u m e — G r a m m a i r e des styles, é d .
Flammarion, 1990.
J. LAVER, Histoire de la mode et du costume, éd. T h a m e s & H u d s o n ,
1990.
Catalogues d'exposition
Catalogue du musée du C h a p e a u :
La chapellerie à Chamelles-sur-Lyon
Renseignements pratiques
sur l e m u s é e du C h a p e a u
PHOTOGRAVURE
R.VB. Éditions
Cette édition numérique a été réalisée à partir d’un support physique parfois ancien conservé au
sein des collections de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal.
Elle peut donc reproduire, au-delà du texte lui-même, des éléments propres à l’exemplaire
qui a servi à la numérisation.
Cette édition numérique a été fabriquée par la société FeniXX au format PDF.
*
La société FeniXX diffuse cette édition numérique en vertu d’une licence confiée par la Sofia
‒ Société Française des Intérêts des Auteurs de l’Écrit ‒
dans le cadre de la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012.