Mais ce n'est pas d'un apostat même repentant que l'historien
des Francs a voulu parler, puisqu'il n'indique aucune tache, aucune ombre dans la vie d'une sainteté sublime qu'il résume, et puis- que, en présentant à notre admiration un Trophime mou- rant confesseur de la foi, il n'ajoute pas qu'il ait été pré- cédemment infidèle à sa croyance et pour cela déposé. Le Trophime de M. Amédée Thierry, résultat de l'a- malgame de textes sans autre rapport que la ressemblance de quelques points accessoires, est un personnage aussi peu réel que sont chimériques les raisons pour lesquelles Fabien l'aurait destiné à la Gaule. Texte de M. Amédée Thierry, — « On ne sait pas bien quel fut, sur le pape Etienne, l'effet de cette lettre si ferme et si éloquente (de Cyprien), mais où respirait un ton d'au- torité qui put déplaire à l'évêque de la ville éternelle. Home chrétienne ne voyait pas sans jalousie Carthage chrétienne prendre, comme elle l'avait fait depuis un demi-siècle, un ascendant incontestable , et laisser loin derrière elle, par la gloire desTertullien et des Cyprien, toutes les églises de l'Italie. Assez disposé , pour son compte, à secouer le patronage de l'évêque africain, et cherchant même déjà une occasion de rompre avec lui, Etienne n'obtempéra point aux avertissements de sa let- tre; du moins paraît-il certain qu'il n'excommunia pas Marcianus. De ce moment on ne parle plus du schisme d'Arles, qui peut-être tomba de lui-même , et peut-être fut étouffé par la seule intervention des évêques trans- alpins (1). » Orservations. —Quelle étonnante interprétation! Parce que Cyprien écrivit à Etienne contre Marcien une lettre dont on change le style noble en ton d'autorité, il aurai voir supérieur, le droit de faire exécuter les sentences de l'épiscopat ! Parce que l'Afrique avait produit deux grands hommes, Tertullien et Gyprien, la papauté en serait devenue ja- louse, comme si cette terre africaine n'eût pas été une portion de son empire et que la couronne de l'Eglise n'eût pas été formée de tous ces rayons épars ! Parce que le pontife Etienne condamna l'usage de re- baptiser tous les hérétiques, il faudra donc supposer qu'il saisit une occasion longtemps souhaitée de rompre avec Carthage, puisqu'il ne pouvait l'éclipser? Parce que la réponse d'Etienne ne nous est pas par- venue, sommes-nous donc forcés de dire que, par bou- derie contre Carthage , il abandonnait sans peine au schisme cette cité d'Arles que d'autres, au prix de leur vie, auraient délivrée ? Il paraît que, lorsqu'on parle de l'Eglise, il ne faut plus croire à la vertu, ni au dévouement, ni au bon sens, mais au vice seul. Explique alors qui pourra la conversion du monde ! Remarquons cependant que, selon M. Thierry, toutes ces accusations ne sortent pas de la région des soupçons et des doutes, et que, s'il fait envoyer en Gaule par Fabien le romanesque Trophime, pour se précautionner contre les succès des héritiers d'Irénée ; s'il fait artificieusement préparer en Afrique un schisme par Etienne, ce n'est que simple supposition. Il tâche toujours de demeurer respec- tueux, et souvent il y parvient. Voici des paroles qui ne sont pas d'un ennemi : « Saint Pierre s'établit à Rome, au milieu des Juifs, dans le quartier du Janicule; saint Paul, qui l'y rejoignit, s'adressa de préférence, comme il faisait toujours, aux Grecs, autre peuple errant dans ce rendez- vous de l'univers. C'était encore par l'élément oriental que la religion des nations s'introduisit dans la ville d