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Avant-propos
A
ABSOLUTISME
ABSTENTIONNISME
ACCOUNTABILITY
ACTION COLLECTIVE
ACTION PUBLIQUE
ADMINISTRATION PUBLIQUE
AFFIRMATIVE ACTION
AFRIQUE
AGENDA POLITIQUE
AGRARIEN
ALIÉNATION POLITIQUE
ALTERMONDIALISME
ALTERNANCE POLITIQUE
AMÉRIQUE LATINE
ANARCHISME
ANARCHO-SYNDICALISME
ANTHROPOLOGIE POLITIQUE
ANTICLÉRICALISME
ANTISÉMITISME
APOLITISME
APPARENTEMENTS
ARISTOCRATIE
ASIE ORIENTALE
ASIE DU SUD-EST
ASSEMBLÉE NATIONALE
ASSIMILATION
ATTITUDES POLITIQUES
AUSTROMARXISME
AUTOCONTRAINTE
AUTOGESTION
AUTONOMIE
AUTORITAIRE
AUTORITARISME
AUTORITÉ
B
BALLOTTAGE
Bicamérisme
BIENS COMMUNS
BIENS PRIMAIRES
BONAPARTISME
BOSSISM
BOURGEOISIE
BUDGET DE L’ÉTAT
BUREAUCRATIE
C
CABINET
CACIQUISME
CAMÉRALISME
CAPITAL SOCIAL
CAPITALISME
CASTES ET POLITIQUE
CATHOLICISME ET POLITIQUE
CAUDILLISME
CENTRALISATION/DÉCENTRALISATION
CENTRE
CENTRE-PÉRIPHÉRIE
CÉSARISME
CHARISME
CHEF DE L’ÉTAT
CITÉ ANTIQUE
CIVIL RIGHTS
CLAN
CLASSE SOCIALE
CLIENTÉLISME
COERCITION
COLLECTIVITÉS LOCALES
COLONIALISME
COMMUNAUTARISATION
COMMUNAUTÉ
COMMUNAUTÉ DE SÉCURITÉ
COMMUNAUTÉ IMAGINÉE
COMMUNICATION POLITIQUE
COMMUNISME
COMMUNITARIENS
COMPARAISON POLITIQUE
COMPORTEMENT ÉLECTORAL
COMPORTEMENT POLITIQUE
CONCENTRATIONNAIRE (SYSTÈME)
CONFIANCE (QUESTION DE)
CONFLIT INTERNATIONAL
CONSENSUS
CONSENSUS DE WASHINGTON
CONSERVATISME
CONSOCIATIF (SYSTÈME)
CONSTITUTION
CONSTRUCTIVISME
CONTRACTUELLE (POLITIQUE)
CONTRAT SOCIAL
CONTRE-RÉVOLUTION
CORPORATISME
COUP D’ÉTAT
CRISE
CULTE DE LA PERSONNALITÉ
CULTURE
CULTURE POLITIQUE
CYBERNÉTIQUE
D
DÉBAT
DÉCENTRALISATION/DÉCONCENTRATION
DÉCONCENTRATION
DÉMOCRATIE
DÉMOCRATISATION
DÉSENCHANTEMENT DU MONDE
DÉVELOPPEMENT DURABLE
DÉVELOPPEMENT POLITIQUE
DÉVOLUTION
DHIMMIS
DICTATURE
DIPLOMATIE
DISCOURS PERFORMATIF
DISCRIMINATION POSITIVE
DISASSIMILATION
DISSOLUTION
DISSONANCE COGNITIVE
DISSUASION
DROIT DE VOTE
DROIT NATUREL
DROITE
DROITS CIVIQUES
DROITS DE L’HOMME
E
ÉCOLE DE FRANCFORT
ÉCOLOGIQUE (ANALYSE)
ÉCOLOGISTES (MOUVEMENTS)
ÉCONOMIE POLITIQUE
ÉCONOMIQUE (ANALYSE)
ÉDUCATION POLITIQUE
ÉGALITÉ
ÉLECTION
ÉLITISTES (THÉORIES)
ÉMOTIONS POLITIQUES
EMPIRE
EMPIRISME
ENDOGÈNE/EXOGÈNE
ESPACE PUBLIC
ÉTAT
ÉTAT-PROVIDENCE
ÉTAT RÉGULATEUR
ÉTAT VIRTUEL
ÉTAT VOYOU
ETHNICITÉ
ETHNO-NATIONALISME
ÉTUDES EUROPÉENNES
EXÉCUTIF/LÉGISLATIF (POUVOIRS)
EXPERT ET POLITIQUE
EXPLOITATION
EXTRÊME-ORIENT
F
FALSIFIABILITÉ
FASCISME
FÉDÉRALISME
FEDERALIST PAPERS
FEMMES
FÉODALITÉ
FINANCES PUBLIQUES
FONCTIONNAIRES
FONCTIONNAIRES INTERNATIONAUX
FONDAMENTALISME PROTESTANT
FORMULE MAGIQUE
FRANCHISE ÉLECTORALE
G
GAUCHE/DROITE
GENDER STUDIES
GÉNOCIDE
GENRE
GÉOPOLITIQUE
GERRYMANDERING
GLOBALISATION
GOUVERNABILITÉ
GOUVERNANCE
GOUVERNEMENT
GOUVERNEMENT LOCAL
GOUVERNEMENTALITÉ
GROUPE DE RÉFÉRENCE/D’APPARTENANCE
GROUPES DE PRESSION
GUERRE
GUERRE PRÉVENTIVE
H
HABITUS
HIÉRARCHIE SOCIALE
HISTORICISME
HOLISME
I
IDEALTYP
IDENTITÉ POLITIQUE
IDÉOLOGIE
IMPÉRIALISME
INCRÉMENTALISME
INDIGÉNISME
INDIVIDUALISME
INDIVIDUALISME MÉTHODOLOGIQUE
INDUSTRIALISATION
INDUSTRIELLE (SOCIÉTÉ)
INFLUENCE
INFORMATION
INGÉRENCE
INSTITUTION/INSTITUTIONNALISATION
INSTITUTIONNALISME HISTORIQUE
INSTITUTIONNALISME LIBÉRAL
INSTITUTIONS POLITIQUES
INSTRUMENTALISME
INTÉGRATION
INTÉGRATION RÉGIONALE
INTERACTIONNISME
INTERCOMMUNALITÉ
INTÉRÊTS
INTERNET
INTERVENTIONNISME DE L’ÉTAT
ISLAM ET POLITIQUE
ISLAMISME
J
JACOBINISME
JUDAÏSME ET POLITIQUE
JUSTICE
L
LAÏCITÉ
LANGAGE POLITIQUE
LEADERS D’OPINION
LEADERSHIP
LÉGALITÉ
LÉGISLATIF (POUVOIR)
LÉGITIMITÉ
LÉNINISME
LIBÉRALISATION
LIBERTARIENS
LIBERTÉ/ÉGALITÉ
LINKAGE
LITURGIE POLITIQUE
LOBBY
LOI
LOYALTY
LUSTRATION
M
MAGNA CARTA
MAJORITAIRE (PRINCIPE)
MANAGEMENT PUBLIC
MARCHÉ POLITIQUE
MARGINALITÉ POLITIQUE
MARXISME
MÉDIAS
MÉDIATION
MÉRITOCRATIE
MESSIANISME
MÉTHODOLOGIE
MIGRATION
MILITAIRES ET POLITIQUE
MILITANTISME
MILLÉNARISME
MINISTRES
MINORITÉ
MOBILISATION POLITIQUE
MOBILISATION SOCIALE
MODÈLES
MODÈLES SPATIAUX
MODERNISATION
MODERNITÉ
MONARCHIE
MONDIALISATION
MULTICULTURALISME
MULTILATÉRALISME
MYTHE POLITIQUE
N
NATION
NATIONALITAIRES (MOUVEMENTS)
NATIONALITÉ
NAZISME
NÉO-CORPORATISME
NÉO-INSTITUTIONNALISME
NÉO-PATRIMONIALISME
NOMENKLATOURA
NOTABLES
O
OBLIGATION POLITIQUE
OPINION PUBLIQUE
OPPOSITION
ORDRE POLITIQUE
ORGANICISME
P
PACIFISME
PAIX
PARADIGME SCIENTIFIQUE
PARADOXE DE CONDORCET
PARLEMENT
PARTICIPATION POLITIQUE
PARTICULARISME/PRIMORDIALISME/UNIVERSALISME
PARTIS POLITIQUES
PASSIONS POLITIQUES
PATRIMONIALISME/NÉO-PATRIMONIALISME
PATRIOTISME
PERESTROÏKA
PERSUASION POLITIQUE
PERTINENCE
PEUPLE
PILARISATION
PLÉBISCITE
PLURALISME
POLICY COMMUNITIES
POLICY NETWORKS
POLITEIA
POLITIQUES PUBLIQUES
POLITISATION
POLYARCHIE
POPULARITÉ
POPULISME
POSITIVISME
POSSIBILISME
POST-COLONIAL STUDIES
POSTNATIONALISME
POUBELLE
POUVOIR
PREMIER MINISTRE
PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
PRÉSIDENTIALISME
PRIMAIRES (ÉLECTIONS)
PRIMORDIALISME
PRINCIPE DE PRÉCAUTION
PRONUNCIAMIENTO
PROTECTORAT
PROTESTANTISME ET POLITIQUE
PSYCHOLOGIE POLITIQUE
PUBLIC CHOICE
PUBLIC/PRIVÉ (DISTINCTION)
PUISSANCE
PUTSCH
Q
QUESTIONS PARLEMENTAIRES
R
RACE/RACISME
RÉACTION
REALPOLITIK
RÉALISTE (THÉORIE)
RÉFÉRENDUM
RÉFÉRENTIEL
RÉGIMES INTERNATIONAUX
RÉGIMES POLITIQUES
RÉGULATION
RELATIVISME CULTUREL
RELIGION CIVILE
RELIGION ET POLITIQUE
REPRÉSENTATIONS
RÉPUBLIQUE
RÉSEAU
RESPONSABILITÉ POLITIQUE
RESSOURCES POLITIQUES
RÉTRODICTION
RITES POLITIQUES
S
SACRALISATION
SECTE
SÉCULARISATION
SÉCURITÉ
SEGMENTAIRES (SOCIÉTÉS)
SENS COMMUN
SEXE
SHADOW CABINET
SIONISME
SOCIALISATION POLITIQUE
SOCIALISME
SOCIÉTÉ CIVILE
SOCIÉTÉ DE RISQUE
SOCIO-HISTOIRE
SOCIOLOGIE ÉLECTORALE
SOCIOLOGIE HISTORIQUE
SOFT POWER
SONDAGES D’OPINION
SOUVERAINETÉ
SPIN DOCTOR
STALINISME
STORYTELLING
SUBSIDIARITÉ
SYMBOLIQUE POLITIQUE
SYNDICATS
SYSTÈME
SYSTÈME POLITIQUE
SYSTÉMIQUE (ANALYSE)
T
TABLES RONDES
TECHNOSTRUCTURE
TÉLÉVISION ET POLITIQUE
TERREUR POLITIQUE
TERRITOIRE
THÉOCRATIE
THINK-TANK
TICKET GRATUIT
TINGSTEN (EFFET)
TOTALITARISME
TRADITION
TRADITIONALISME
TRANSITIONS DÉMOCRATIQUES
TRANSNATIONALES (RELATIONS)
TRIBALISME
TYPE-IDÉAL
TYRANNIE
U-V-W
UNIVERSALISME
URBANISATION
UTOPIE
VALEUR
VERTS
VIOLENCE SYMBOLIQUE
VIRTÙ
VOILE D’IGNORANCE
VOLATILITÉ ÉLECTORALE
VOTE BLOQUÉ
VOTE PRÉFÉRENTIEL
WHIG/TORY
Liste de entrées
© EPA/Corbis
© Armand Colin, 2010
978-2-200-25624-1
7 édition revue et augmentée
e
www.armand-colin.com
COLLECTION DICTIONNAIRE
1 Makita Kasongo-Ngoy, Antoine Kernen et Anne Marynczak ont contribué à ce travail à ses débuts.
Qu’ils en soient ici remerciés.
A
ABSOLUTISME
Terme désignant dans son acception la plus large des pouvoirs politiques
dont l’autorité ne se trouve limitée ni par des institutions représentatives ni par
des règles constitutionnelles. À ce niveau de généralité, il devient quasiment
synonyme de despotisme.
En français, le mot acquiert toutefois le statut de concept classificatoire à
partir de 1796 (dans les années 1830 en anglais et en allemand). Il qualifie dès
lors tant les doctrines de légitimation que le mode de gouvernement des États
monarchiques modernes qui s’esquissent dans l’Europe du XVI siècle, qui se
e
ABSTENTIONNISME
ACCOUNTABILITY
ACTION COLLECTIVE
Tarde ou encore G. Le Bon qui, sous l’influence des écrits de Taine, ont
présenté une conception purement psychologique de l’action des foules, la
mobilisation résultant de l’irrationnel, de l’imitation, de la contagion mentale,
de l’émotion. Dans ce sens, l’action collective relève de la pathologie sociale
et se trouve produite par l’atomisation suscitée par l’industrialisation ou
encore l’urbanisation destructrices des groupes primaires. Cette perspective
très réductrice de l’action collective se trouve prolongée dans deux directions :
pour certains, tels James Davies ou, encore, Ted Gurr, la mobilisation est le
produit de la frustration et résulte d’attentes déçues productrices de violence ;
pour d’autres, comme W. Kornhauser, ce sont les sociétés de masse qui
mènent à ces mobilisations irrationnelles, l’isolement social et la dislocation
des structures collectives produisant une « population aliénée », prête à se
mobiliser. À partir de cette dernière conception, on a ainsi voulu voir, à tort,
dans le nazisme le résultat d’une société de masse atomisée : en réalité, la
mobilisation hitlérienne passe davantage par l’intermédiaire de groupes
cohérents d’action collective ; de manière plus générale, elle présuppose le
maintien, et non la disparition, des groupes primaires et secondaires,
structures essentielles à travers lesquelles elle se construit.
Tournant le dos aux théories atomistiques et irrationnelles de l’action
collective, on s’intéresse désormais au contraire à leur dimension rationnelle,
résultant de l’engagement intentionnel des acteurs ; dans ce sens, l’action
collective ne repose plus sur l’irrationnel mais bien sûr le choix rationnel.
C’est Mancur Olson qui a contribué à cette remise en question à travers le
paradigme du billet gratuit. À ses yeux, dans les groupes larges, un individu
rationnel se garde de participer à une action collective car le coût personnel
(en temps, argent, risques divers, etc…) sera toujours trop élevé d’autant plus
qu’il bénéficiera en toute hypothèse des bénéfices collectifs produits par la
mobilisation des autres. Si chacun se tient ce raisonnement logique, il n’y aura
pas de mobilisation. Olson souligne pourtant qu’un certain nombre d’acteurs
pouvant espérer une redistribution de biens personnels (nominations à des
emplois dans les partis ou les syndicats, etc.) ont intérêt à pousser à la mise en
œuvre de la mobilisation, l’exemple du closed shop imposé par les syndicats
illustrant cette participation obligatoire à l’action favorable au renforcement
du pouvoir d’une élite interne au syndicat ou au parti. L’école de la
mobilisation des ressources nous permet donc de nous éloigner de la
psychologie sociale au profit d’un regard économique ou sociologique sur
l’action collective.
Si nombre des critiques d’Olson, tel A. Pizzorno, ont rejeté ce modèle en
soulignant le caractère essentiel de la dimension proprement éthique menant à
l’engagement, en estimant dès lors que c’est dans le cadre d’une relation
sociale que l’on entend maintenir car elle fonde la cohérence de la
personnalité que l’on s’engage dans l’action, en terme de morale, avec les
autres, on s’est surtout livré, de nos jours, à un approfondissement des thèses
d’Olson en s’efforçant de les contourner tout en suivant une logique très
proche. McCarthy et Zald ont dans ce sens structuré cette interprétation en
terme de mobilisation des ressources, en se penchant sur l’organisation des
mouvements sociaux facilitant une diminution du coût de l’action, l’industrie
du mouvement social (SMI) regroupant toutes les organisations de
mouvement social attachées à la satisfaction d’un même ensemble global de
préférences, caractéristiques d’un mouvement social déterminé, tandis que le
secteur des mouvements sociaux (SMS) comporte toutes les industries de ce
type dans une même société. Comme le souligne François Chazel en reprenant
leur propre expression, Zald et McCarthy « remettent ainsi Olson sur ses
pieds », en démontrant que le mouvement social suit lui aussi une stratégie de
groupe d’intérêt, parvenant ainsi à dépasser le paradoxe d’Oslon. Dans le
même sens, A. Obershall met l’accent sur l’organisation de type
communautaire ou associatif du groupe qui se mobilise, celui-ci y parvenant
lorsqu’il se trouve en situation de segmentation, d’éloignement, vis-à-vis du
centre, du pouvoir, de l’État. Charles Tilly a contribué pour sa part à insérer le
rôle du politique et de l’État dans cette discussion en soulignant que les
mouvements en lutte font face à des gouvernements auxquels ils ont ou non
accès. Dès lors, le processus politique dépend, comme l’avancent aussi bien
D. McAdam qu’Herbert Kitschelt, de « la structure des chances politiques »
dans le cadre duquel il se déroule. Cette redécouverte du politique est
fondamentale puisqu’elle permet d’assurer une liaison entre la sociologie de
l’action collective et la sociologie comparée de l’État.
→ apolitisme, conflits (Théorie des), individualisme méthodologique,
mobilisation politique, Olson (paradigme d’)
BIRNBAUM P. et LECA J. (dir.), Sur l’individualisme, Paris, Presses de la
FNSP, 1986 ; CAFAÏ D., Pourquoi se mobilise-t-on ? Les théories de l’action
collective, Paris, La Découverte, 2007 ; CHAZEL F., Action collective et
mouvements sociaux, Paris, PUF, 1993 ; CHAZEL F., « Mouvements sociaux »,
in BOUDON R. (dir.), Traité de sociologie, Paris, PUF, 1992 ; TARROW S.,
Power in Movements : Social Movements, collective Action and Mass politics
in the Modern state, Cambridge University Press, 1994 ; MANN P., L’Action
collective, Paris, A. Colin, 1991 ; NEVEU E., Sociologie des mouvements
sociaux, Paris, La Découverte, 1996 ; OLSON M., La Logique de l’action
collective, Paris, PUF, 1978 ; MC ADAM D. et al., Comparative perspectives on
social movements, Cambridge University Press, 1996 ; TRAUGOTT M. (ed.),
Repertoires and cycles of collective action, Durham, Duke University Press,
1995.
ACTION PUBLIQUE
ADMINISTRATION PUBLIQUE
Le développement, inégal mais universel, du fait administratif est une
caractéristique spectaculaire des deux derniers siècles écoulés. Entamée en
France dès la fin de l’Ancien Régime, la croissance des effectifs des agents
publics s’est poursuivie tout au long du XIX siècle pour s’amplifier aux
e
pratique politique suivie, mais aussi des arrêts de principe du Conseil d’État
(19 oct. 1962, Brocas) qui l’ont contrôlée. Ce peuvent être des affaires en
cours, de faible signification politique, qui concernent le fonctionnement
quotidien des services administratifs (engagements de crédits, tableaux
d’avancements…). Ce peuvent être aussi des décisions dictées par l’urgence,
parfois alors fort importantes, notamment dans les domaines monétaire et
diplomatique.
La notion d’affaires courantes ne revêt pas la même signification selon la
nature du régime politique ou les circonstances de la chute du gouvernement.
Sous la IV République les crises étaient fréquentes et pouvaient durer près
e
d’un mois voire davantage ; en revanche l’exécutif était faible par rapport au
Parlement. Il fallait donc bien que les gouvernements agissent mais en évitant
prudemment, autant que faire se pouvait, toute décision politique majeure.
Sous la V République au contraire, lorsque Georges Pompidou fut censuré par
e
AFFIRMATIVE ACTION
→ discrimination positive
AFRIQUE
« L’africanisme politique » ne couvre pas l’ensemble du continent africain
qui est une entité purement géographique, mais la seule Afrique subsaharienne
dont l’homogénéité et l’exceptionalité peuvent déjà poser problème. Au-delà
de la diversité des peuplements, du type de colonisation, des économies et des
religions, des similitudes peuvent pourtant être postulées dans les modes
d’énonciation, de construction et de pratique du politique, reposant sur des
structures sociales comparables, une temporalité assez communément
partagée, un rapport à l’histoire et aux modèles occidentaux assez largement
assimilés.
Plutôt que d’un paradigme unique et commun, on peut faire état de construc
tions scientifiques successives, à la faveur desquelles l’Afrique a été présentée
comme l’objet privilégié du développementalisme (cf. les travaux d’Almond
et Coleman ou d’Apter), puis du postdéveloppementalisme (cf. l’analyse des
systèmes politiques africains à travers le prisme du néo-patrimonialisme)
avant de susciter, en France, une école assez fortement homogène, privilégiant
l’étude de la « politique par le bas », celle des « modes populaires d’action
politique » et, au-delà des structures institutionnelles formelles, la prise en
compte des réseaux multiples structurant les espaces sociaux et des
trajectoires politiques inscrites dans la longue durée.
L’apport conjugué de l’anthropologie politique (cf. Balandier, Evans-
Pritchard), de la politique comparée et de la sociologie politique a mis en
évidence l’irréductibilité de l’État importé aux histoires et aux pratiques
sociales africaines. Cette tension contribue à expliquer autant la faible
légitimité du système politique officiel que le déficit d’allégeance citoyenne
dont celui-ci tend à souffrir. Elle rend compte, par là même, de la
reconstruction d’autres formes de solidarité dont la réinvention du tribalisme,
le réinvestissement du sacré ou l’essor des réseaux sociaux informels sont les
expressions les plus courantes. C’est aussi dans cette perspective que doivent
être dépassées les visions trop simples d’un « autoritarisme de sous-
développement » ou des transitions démocratiques à ménager.
→ anthropologie politique, développement politique,
patrimonialisme/néo-patrimonialisme
BAYART J.-F., L’État en Afrique. La politique du ventre, Paris, Fayard,
1989 ; COLLIER P., The Bottom Billion. Why the poorest countries are failing
and what can be done about it, Oxford, Oxford University Press, 2007 ;
COULON C., MARTIN D. (éd.), Les Afriques politiques, Paris, La Découverte,
1990 ; MÉDARD J.-F. (éd.), Les États d’Afrique noire, Paris, Karthala, 1992 ;
NUGENT P., Africa since Independence. A Comparative History, Basingstoke,
Palgrave Macmillan, 2004 ; YOUNG C., The African Colonial State in
Comparative Perspective, New Haven, Yale University Press, 1994 ; ainsi
que, de façon générale, la Revue politique africaine.
AGENDA POLITIQUE
AGRARIEN
ALIÉNATION POLITIQUE
ALTERMONDIALISME
Une alternance peut avoir une signification restreinte s’il n’existe pas
d’alternative, c’est-à-dire de réelles différences entre les programmes de la
majorité et de l’opposition. Elle se réduit alors à un changement des équipes,
lequel se prolonge parfois dans la fonction publique par des mouvements de
grande échelle (spoil system américain). Au contraire si s’affrontent des
projets de société radicalement antagonistes, la perspective de l’alternance est
de nature à faire monter la tension et, à la limite, capable de déstabiliser la
démocratie. Ainsi le gouvernement Algérien qui avait préféré annuler les
élections de 1991 plutôt que de reconnaître la victoire du Front islamique du
Salut s’est-il trouvé confronté ensuite à de graves difficultés.
→ démocratie, régimes politiques
QUERMONNE J.-L., L’Alternance au pouvoir, Paris, PUF, 1996.
AMÉRIQUE LATINE
ANARCHISME
L’anarchisme est une doctrine qui postule que les gouvernements aussi bien
que toutes les formes d’autorité sont imposés artificiellement et sans nécessité
véritable aux sociétés humaines qui pourraient et devraient s’organiser sans
recours à quelque appareil coercitif que ce soit. C’est, également, un
mouvement qui a rassemblé les adeptes de cette doctrine à partir des
années 1860 et jusqu’à nos jours. En raison même de son idéologie
antiautoritaire, le mouvement anarchiste s’est refusé à toute organisation
centralisée ou simplement efficace, en prenant le contre-pied « libertaire » des
tendances « autoritaires » de Marx, plus encore du modèle léniniste
d’organisation du prolétariat hérité en fait de la tradition bureaucratique de la
social-démocratie allemande. De façon parallèle, le courant anarchiste s’est
voulu apolitique, en tout cas étranger aux partis même ouvriers, en raison
également de son rejet de tout objectif de conquête d’un État dont il ne visait
que la destruction (les anarchistes préconisent l’abstention électorale, dans la
mesure où ils n’attachent pas de valeur particulière à l’État démocratique).
L’anglais Godwin (1793) apparaît comme l’un des précurseurs de
l’anarchisme, bien que Proudhon ait été le premier théoricien social à s’en
réclamer explicitement. Par la suite, il devient l’un des deux grands courants
de la pensée révolutionnaire du dernier tiers du XIX et du début du XX siècle,
e e
ANARCHO-SYNDICALISME
ANTHROPOLOGIE POLITIQUE
ANTICLÉRICALISME
ANTISÉMITISME
APOLITISME
APPARENTEMENTS
ARISTOCRATIE
ASIE ORIENTALE
ASIE DU SUD-EST
→ Asie orientale
ASSEMBLÉE NATIONALE
→ parlement
ASSIMILATION
ATTITUDES POLITIQUES
→ comportement politique
AUSTROMARXISME
AUTOCONTRAINTE
AUTOGESTION
AUTONOMIE
L’adjectif pris isolément ne peut que désigner dans les termes les plus
vagues un style de conduite ou un tempérament politique. Il ne revêt le statut
de concept taxonomique qu’associé au terme de régime (régime autoritaire),
ou encore au regard de l’échelle d’attitudes de la « personnalité autoritaire ».
→ dictatures, régimes politiques : régimes autoritaires
AUTORITAIRE (PERSONNALITÉ). Notion issue des travaux d’un disciple de
Freud du nom de Paul Federn (1871-1950). Le psychologue social Theodor
Adorno, de l’École de Francfort, réfugié aux États-Unis, s’en est inspiré pour
créer à la fin de la Seconde Guerre mondiale une échelle d’attitudes de la
personnalité autoritaire (Authoritarian personality) testée dans les camps de
prisonniers allemands à la demande de l’armée américaine. Cet ensemble de
quatre échelles référées au conservatisme, à l’antisémitisme, à
l’ethnocentrisme et à l’adhésion au régime nazi visait à l’origine à détecter le
« potentiel fasciste » chez les soldats captifs. L’ensemble des observations
s’inscrivait sur une échelle finale (Échelle F) qui exprimait leurs « tendances
antidémocratiques implicites ». En 1953, Hannah Arendt redressera en
quelque sorte la barre en élargissant le dispositif à l’analyse des tendances
communistes et en transformant ainsi l’échelle F en une théorie générale du
totalitarisme.
→ behaviourisme, École de Francfort, fascisme, nazisme, totalitarisme
ADORNO T. W., FRENKEL-BRUNSWICK E., LEVINSON D. J., The Authoritarian
Personality, New York, Harper and Row, 1950 ; ADORNO T. W., Études sur la
personnalité autoritaire, Paris, Allia, 2006 [1951] ; DICK A., INTROVIGNE M.,
Le Lavage de cerveau : mythe ou réalité ?, Paris, L’Harmattan, 2006.
AUTORITARISME
AUTORITÉ
BALLOTTAGE
Dans un scrutin à deux tours où nul ne peut être élu s’il n’a obtenu la
majorité absolue au premier, on dira qu’il y a ballottage quand aucun candidat
ne remplit cette condition nécessaire. L’expression s’emploie plus
particulièrement à propos du sortant qui ne retrouve pas son siège le soir du
premier tour. Le ballottage pose le problème des reports de voix, surtout
lorsque des candidats se retirent ou sont éliminés. Il donne lieu ; le cas
échéant, à des tractations entre les candidats qui se maintiennent et ceux qui se
retirent volontairement ou sont éliminés. Mais, dans ce dernier cas, leur
capacité de négociation se trouve affaiblie.
→ élection
Bicamérisme
BIENS COMMUNS
BIENS PRIMAIRES
BONAPARTISME
Concept appliqué par Karl Marx au Second Empire français, puis étendu
par l’analyse marxiste aux semi-dictatures libérales sur le plan économique
bien que répressives dans le domaine politique et social. Pour Marx, le
bonapartisme « seconde manière » – distinct de celui du Premier Empire –
caractérise un régime « militaire despotique », dirigé toutefois par un dictateur
civil (Napoléon III). Surtout, il s’inscrit à un stade de l’industrialisation
capitaliste marqué par une situation d’équilibre entre la nouvelle bourgeoisie
entrepreneuriale et la classe ouvrière en expansion. De la sorte, la guerre civile
menaçante ou déjà en cours ne peut que se révéler sans issue victorieuse pour
l’un et l’autre camp, en raison précisément de cette équivalence des forces en
présence. D’où la tentation pour la bourgeoisie de renoncer à l’exercice direct
du pouvoir parlementaire pour remettre son sort à un « arbitre providentiel » à
qui elle « offre son sceptre » afin de mieux préserver son hégémonie
économique et sociale. Car, en réalité, le dictateur arbitre est partial. Sous
couvert de rassemblement national et Malgré son discours populiste référé
pour partie à la tradition révolutionnaire de 1789, il n’est que le chef d’un
« État d’exception de la bourgeoisie », dont le rôle consiste à défendre le
capital contre le travail grâce à la suspension des libertés publiques.
Le régime bonapartiste repose pourtant sur une base populaire, paysanne et
même ouvrière. En ce sens, il revêt une dimension plébiscitaire qui
s’accompagne d’une dénonciation des divisions suscitées par les partis.
Rassembleur, il préfigure sur certains points le boulangisme,
l’antiparlementarisme du début du XX siècle et même le mouvement gaulliste
e
BOSSISM
BOURGEOISIE
BUDGET DE L’ÉTAT
BUREAUCRATIE
CABINET
CACIQUISME
CAMÉRALISME
Référé aux sciences dites camérales, expression usitée à partir du
XVIII siècle en Allemagne surtout (Kameralwissenschaft). Sciences du bon
e
CAPITAL SOCIAL
CAPITALISME
CATHOLICISME ET POLITIQUE
Ce thème doit s’appréhender sous des angles multiples. Celui qui s’impose
en général d’abord à l’esprit des analystes de la politique concerne les
comportements électoraux ou les choix partisans des catholiques déclarés ou
pratiquants, qui sont certes des électeurs plus assidus que la moyenne mais
dont on sait qu’ils ont longtemps privilégié la droite même s’ils s’en éloignent
progressivement depuis une vingtaine d’années. Malgré cela, la « variable
catholique » reste la plus opérante pour les études de psycho-sociologie ou de
géographie électorales, comme aussi pour celles qui touchent à la socialisation
politique des Français notamment, chez qui les catholiques révèlent une
propension particulière aux activités militantes ou associatives.
Dans une perspective historique à moyen terme, l’influence politique du
catholicisme s’est manifestée différemment au niveau de la formation des
systèmes de partis ou encore dans le syndicalisme, par l’intermédiaire tant des
formations qui ont débouché sur les partis démocrates-chrétiens ou chrétiens-
sociaux que des centrales syndicales d’origine chrétienne. Ce phénomène a été
et demeure particulièrement important pour la détermination des clivages
politiques qui affectent l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, l’Italie ainsi que
les Pays-Bas et certains pays de l’Amérique latine. En remontant plus avant
encore dans le passé, sur le long terme historique, il apparaît enfin que
l’Église catholique comme institution souveraine a joué un rôle décisif dans
l’émergence de la modernité politique occidentale, de l’époque du
césaropapisme à celle de son opposition initiale puis de son ralliement au
libéralisme et à la démocratie, et ce en passant par les épisodes de sa lutte
contre le Saint-Empire romain germanique ou de son soutien à la formation de
l’État monarchique en France et en Angleterre.
Ces quelques repères montrent que l’impact politique du catholicisme s’est
exercé à plusieurs niveaux : celui de l’Église comme organisation
transnationale longtemps plus puissante que n’importe lequel des États alors
en gestation ; celui de la doctrine religieuse ; également ceux des
organisations séculières d’orientation confessionnelle ou du comportement
des catholiques en tant que milieu socio-culturel. Tous ces niveaux se sont
toutefois recoupés pour déterminer les grands clivages politiques de l’Europe
tels que Stein Rokkan en particulier les a analysés, au regard spécialement des
différences qui séparent sa partie septentrionale à dominante protestante, tôt
pourvue d’identités nationales fortes et consensuelles, de sa partie méridionale
catholique très marquée par une conflictivité droite/gauche qui n’est que
l’avatar de l’affrontement du cléricalisme et de l’anticléricalisme.
→ clivages politiques, partis politiques : Partis démocrates-chrétiens,
religion et politique
HERMET G., Sociologie de la construction démocratique, Paris, Economica,
1986 ; MICHELAT G., SIMON M., Classe, religion et comportement politique,
Paris, Presses de la FNSP/Éd. sociales, 1977 ; ROKKAN S., « Dimensions of
State-Formation and Nation-Building », pp. 562-600 in TILLY C. (ed.), The
Formation of National States in Europe, Princeton, Princeton University
Press, 1975.
Caucus
Terme d’origine britannique désignant au départ toute réunion interne d’un
parti ou d’une faction politiques, puis référé spécifiquement, à partir de 1868,
au caucus ou comité de Birmingham du parti libéral. Dès lors et de façon
générale, les caucuses deviennent les comités électoraux des libéraux dans
chaque circonscription à la veille d’une consultation électorale.
Le mot n’est plus guère utilisé en Grande-Bretagne. En revanche, il
continue de l’être aux États-Unis où il apparaît pour la première fois en 1763
pour désigner les instances chargées de sélectionner les candidats de chaque
parti, en particulier au niveau des États fédérés ou du comté (sous la forme du
precinct caucus ou de la county convention). De nos jours, cette procédure se
trouve remplacée par celle des élections primaires pour les scrutins législatifs,
ou par celle des conventions nationales pour les élections présidentielles.
Toujours aux États-Unis, le terme s’applique également aux groupes
parlementaires de chaque parti (Démocrates et Républicains à la Chambre des
représentants ou au Sénat) ou à des regroupements spécialisés (par ex.
concernant la réforme de l’armée) ; 32 groupes de cette sorte existaient à la
Chambre des représentants en 1986.
→ élection, parlement, partis politiques, primaires
JONES C. O., The United States Congress, Homewood, Dorsey, 1982, chap.
9 ; VALLET E., GRONDIN D. (dir.), Les Élections présidentielles américaines.
Sainte Foy, Presses de l’Université du Québec, 2004.
CAUDILLISME
CENTRALISATION/DÉCENTRALISATION
CENTRE
CÉSARISME
→ régimes autoritaires
CHARISME
CHEF DE L’ÉTAT
CITÉ ANTIQUE
Au-delà de la logique des empires, la cité antique représente la première
forme d’État organisé, avec son assise territoriale, l’expression d’une identité
et d’une volonté collectives de la part de ses citoyens, et bien entendu des
organes de gouvernement clairement définis et spécialisés. Son modèle
classique apparaît en Grèce vers le milieu du VIII siècle avant notre ère, sous la
e
une lente agonie, celui de la cité-État le relaie au Moyen Âge après une longue
interruption de la tradition des Républiques urbaines. La Cité-État apparaît en
Italie au XII siècle avant de se diffuser plus au nord, en particulier dans ce qui
e
CIVIL RIGHTS
CLAN
→ segmentaires (sociétés)
CLASSE SOCIALE
Centrale dans l’analyse de Marx, la notion de classe sociale a également été
utilisée par des auteurs totalement étrangers à cette tradition intellectuelle et
politique, notamment avant lui par Ricardo ou Tocqueville et, ultérieurement,
par Max Weber. Elle soulève de nombreux problèmes de définition en raison
des enjeux qui lui ont été associés par le mouvement communiste
international, lequel faisait de la lutte de classes le moteur de l’Histoire, et de
la classe ouvrière le sujet historique de la Révolution.
Dans Le Dix-Huit Brumaire de Louis-Napoléon Bonaparte (1852) puis dans
le Livre II du Capital, Marx s’était efforcé d’en définir les critères. Après
avoir écarté celui de la nature des revenus (profit, salaire ou rente foncière), il
insistait sur la place occupée dans le processus de production économique
parce qu’elle engendre des conditions d’existence spécifiques. Le principal
problème affronté par la théorie marxiste aura été de savoir jusqu’à quel point
il faut adjoindre à ces critères économiques (détention ou non d’un capital,
nature et niveau des rémunérations, intérêts matériels) des critères d’ordre
culturel ou idéologique tels que la conscience de classe, la capacité à élaborer
ses propres aspirations politiques. Gramsci, dans les années de l’entre-deux-
guerres, avait souligné le rôle des « appareils idéologiques », comme l’Église
catholique ou l’école, dans la formation des mentalités de classe. C’est en
partie dans cette filiation que se situe Pierre Bourdieu lorsque, par analogie
avec le capital économique, il met en avant l’importance du capital culturel
(niveau de diplômes, réseau de relations sociales, aisance dans la maîtrise des
codes sociaux, etc.) pour repérer les frontières de classes.
Chez Max Weber la notion de classe est rapportée au phénomène plus large
de la stratification. Des catégories de population (strates) apparaissent
hiérarchisées du point de vue de l’inégale disposition d’un bien considéré
comme désirable : l’argent (classes de revenus), le prestige social (classes de
statuts), le pouvoir (classes dirigeantes). L’auteur d’Économie et Société
privilégie donc une approche plus large mobilisant des critères pluriels.
Dans les sciences sociales la notion de classe soulève trois types de
difficultés. Les premières sont liées à ses usages politiques dans le mouvement
ouvrier. Identifier les classes potentiellement alliées du prolétariat dans la
conquête du pouvoir, s’interroger sur les nouvelles frontières de la classe
ouvrière (dans les années 1960) voire sur son avenir révolutionnaire, a
beaucoup contribué à biaiser l’analyse savante. Mais aujourd’hui
l’effondrement du mouvement communiste rend cet aspect secondaire.
Un second ordre de difficultés concerne les frontières des classes. Il n’est
pas aisé d’appliquer les critères marxiens à des groupements sociaux comme
l’administration publique ou les intellectuels. Le problème est d’autant plus
gênant que l’influence croissante de la technobureaucratie n’a cessé d’être
reconnue et dénoncée par la théorie marxiste au XX siècle. En outre, au sein
e
CLIENTÉLISME
COERCITION
→ violence politique
COLLECTIVITÉS LOCALES
→ décentralisation, intercommunalité
COLONIALISME
La colonie désigne tout territoire conquis et contrôlé par des hommes venus
d’une métropole : ainsi définie, elle s’impose comme institution
transculturelle et transhistorique, s’appliquant autant à la Grèce antique qu’au
monde contemporain. Dans son sens moderne et le plus courant, elle désigne
les implantations territoriales des puissances européennes au-delà de l’espace
territorial qu’elles revendiquent pour leur communauté nationale. Elle suppose
généralement la domination effective d’une minorité étrangère sur une
population autochtone culturellement différente. On distingue cependant entre
la colonie de peuplement, destinée à accueillir de façon massive la population
métropolitaine pour qu’elle s’y installe durablement au prix d’une
marginalisation, voire d’une destruction de la population autochtone, et la
colonie d’exploitation où la population métropolitaine, moins nombreuse,
encadre simplement la population autochtone.
Le colonialisme se définit alors soit comme une idéologie justifiant
l’entreprise coloniale, soit comme l’ensemble des pratiques sociales et
politiques permettant la réalisation de celle-ci. Ces pratiques peuvent faire
appel à des modèles d’administration directe (généralement caractéristiques de
la colonisation française) ou indirecte (indirect rule), conservant les formes
d’autorité traditionnelle alors mises en tutelle (propre à la colonisation
britannique).
Le néo-colonialisme désigne l’ensemble des pratiques renouvelées de la
dépendance, cherchant à mettre en œuvre d’autres moyens que la conquête
territoriale, jugée coûteuse et de pérennisation de plus en plus incertaine.
→ Coloniale (Situation), dépendance (théorie de la), développement
politique, impérialisme, post-colonial studies
BALANDIER G., « La situation coloniale : approche théorique », Cahiers
internationaux de sociologie (11), 1951, pp. 44-79 ; YOUNG C., The African
Colonial State in Comparative Perspective, New Haven, Yale University
Press, 1994.
COLONIALE (SITUATION). Concept introduit par Georges Balandier en 1951,
avec un double objectif : 1) Offrir une alternative méthodologique au
fonctionnaliste dominant en anthropologie politique ; 2) Créer un nouveau
cadre d’analyse des espaces coloniaux dans leur crise terminale. Le concept se
fondait sur l’idée centrale d’une « totalité » complexe, englobant l’ensemble
formé par les sociétés colonisatrices et les sociétés colonisées, ainsi que sur
l’attention portée à tous les déterminants de cette situation, économiques,
politiques, administratifs, idéologiques, religieux ou culturels.
→ colonialisme, dépendance (théorie de la), impérialisme, postcolonial
studies
BALANDIER G., « La situation coloniale : approche théorique », Cahiers
internationaux de sociologie (11), 1952, pp. 44-79.
Commissions parlementaires
Pour préparer la discussion et le débat des assemblées, il est toujours apparu
nécessaire d’étudier les textes en comité plus restreint réunissant notamment
ceux des parlementaires qui avaient acquis une compétence spécialisée.
Dans les démocraties parlementaires modernes, aucun projet ou proposition
de loi ne peut être discuté en séance plénière s’il n’a d’abord été examiné en
commission, et ce dans les deux chambres en cas de bicamérisme. C’est
pourquoi il existe des commissions permanentes spécialisées dans les grands
domaines de l’activité gouvernementale. En France depuis la réforme
constitutionnelle de 2008, leur nombre est plafonné à huit mais, actuellement
il n’en existe que sept : Affaires étrangères, Finances, Défense, Lois
constitutionnelles et législation, Affaires culturelles, familiales et sociales,
Affaires économiques, environnement et territoire (ex-Production et
échanges), Affaires européennes. Il existe aussi des commissions ad hoc,
c’est-à-dire créées spécialement pour l’étude d’un texte ou la mise en œuvre
d’une enquête. Elles débattent à huis clos et désignent un rapporteur dont la
personnalité et le degré de maîtrise du dossier jouent un grand rôle lors du
débat en séance plénière. L’éventuelle publication des rapports d’enquête ou
de contrôle contribue puissamment à nourrir le débat politique dans les médias
et l’opinion publique.
L’efficacité et la qualité du travail effectué en commission dépendent de
plusieurs facteurs. D’abord le nombre des commissaires qui ne doit pas être
trop élevé (il atteint 145 dans la commission des Affaires culturelles,
familiales et sociales) ; ensuite la qualité de l’assistance technique dont ils
peuvent bénéficier pour seconder leur propre compétence personnelle ; enfin
les moyens d’investigation juridiques et matériels dont ils disposent (droit de
se faire communiquer les documents nécessaires, de convoquer pour audition
toute personne utile, etc.). À cet égard les commissions sénatoriales
américaines ont réussi à se doter de redoutables pouvoirs d’examen et
d’enquête.
En vue de rationaliser l’exercice de la compétence législative des
Parlements modernes, trop souvent débordés par le nombre de textes ou
d’affaires à étudier, il a parfois été suggéré, comme en Italie, de doter les
commissions d’un pouvoir de décision, sous certaines conditions et dans
certaines matières. Composées généralement à la proportionnelle des groupes,
elles constituent dès lors des parlements en miniature. Cependant, elles-
mêmes sont souvent surchargées, de sorte que se constituent en leur sein des
groupes de travail informels où tend à se dissoudre la véritable confrontation
politique.
→ parlement, exécutif/législatif (pouvoirs)
CAMBY J.-P., Le Travail parlementaire sous la V République, Paris,
e
Montchrestien, 2004.
COMMUNAUTARISATION
COMMUNAUTÉ
COMMUNAUTÉ DE SÉCURITÉ
Concept créé par Karl Deutsch pour désigner des ensembles géo-politiques
plus ou moins intégrés, pluralistes ou pas, qui, par la proximité des valeurs qui
y dominent, par l’empathie des populations qui les composent et la
prévisibilité des comportements qui s’y forgent, éliminent entre eux les
risques de guerre. Le concept a ainsi été forgé pour rendre compte de la
communauté atlantique après la Seconde Guerre Mondiale.
DEUTSCH K., et al, Political Community and the Atlantic Area, Princeton,
Princeton University Press, 1957.
COMMUNAUTÉ IMAGINÉE
COMMUNICATION POLITIQUE
COMMUNISME
COMPARAISON POLITIQUE
COMPORTEMENT ÉLECTORAL
Les citoyens qui se rendent aux urnes se déterminent selon deux modèles
principaux. Leur choix peut s’inscrire dans la logique d’un vote de transaction
(Max Weber). On entend par là le fait que l’électeur calcule les profits qu’il
attend ou croit pouvoir attendre du soutien accordé à tel candidat, de
préférence à tel autre. Il est courant aujourd’hui de parler alors d’électeur
stratège, se comportant à la manière d’un consommateur qui évalue les
avantages respectifs des différentes offres disponibles sur le marché électoral,
c’est-à-dire les programmes des candidats dont il jauge la crédibilité
respective. Le choix des citoyens peut aussi s’inscrire dans une logique, toute
différente, celle d’un vote identitaire. En plaçant son bulletin dans l’urne,
l’électeur cherche avant tout à réaffirmer son appartenance à un groupe (le
vote communautaire au sens de Max Weber), à un parti ou à une famille
politique (vote de gauche, vote de droite…). Vote identitaire encore, mais en
un sens différent, lorsque l’électeur entend surtout décliner en votant son
attachement à des valeurs constitutives de son image de soi (vote de
conviction). Cela peut conduire à préférer un parti ou un candidat dont les
chances de gagner paraissent faibles ou nulles, voire une personnalité jugée
inférieure en crédibilité à celle de ses concurrents.
→ comportement politique, élections, sociologie électorale, vote
(fonctions du)
BAUMGARTNER J., FRANCIA P., Conventional Wisdom and American
Elections. Exploding Myths, Exploring Misconceptions, Lanham, Rowman,
Littlefield, 2008 ; BOY D., MAYER N. (dir.), L’Électeur a ses raisons, Paris,
Presses de Sciences-Po, 1996 ; EVANS J., Voters and Voting. An Introduction,
Londres, Sage, 2000 ; LEHINGUE P., L’analyse des transactions électorales.
Problèmes de méthode, Amiens, Thèse université de Picardie, 1996 ;
MAYER N. (dir.), Les Modèles explicatifs du vote, Paris, L’Harmattan, 1997.
COMPORTEMENT POLITIQUE
Ce sont les activités pratiques des agents sociaux qui relèvent de la notion
de participation politique, c’est-à-dire qui exercent une influence sur le mode
de gouvernement collectif. Le comportement se distingue d’une part de
l’attitude qui est plutôt une matrice de comportements virtuels structurée par
des normes sociales intériorisées et d’autre part, plus nettement encore, de
l’opinion que l’on peut définir comme un jugement rationalisé sur le réel,
fondé sur des croyances.
On peut distinguer trois grandes catégories. Tout d’abord les
comportements électoraux. De nos jours le droit de vote est presque
universellement reconnu même si les conditions dans lesquelles il s’exerce
varient considérablement. Candidats et électeurs vont accomplir des actes qui
ne sont intelligibles que par rapport à une situation créée par des règles du
jeu : lois électorales, système d’enjeux politiques, structure de la compétition,
ouverte ou verrouillée.
Il existe également des pratiques de participation dites conventionnelles.
Certaines sont simplement l’expression d’un intérêt pour la chose publique :
recherche d’informations dans la presse écrite ou parlée, discussions avec
l’entourage, assistance à des réunions politiques ou à des meetings ; d’autres
relèvent d’une implication politique plus active : participation ponctuelle à des
rassemblements de protestation (manifestations, sit-in, occupations de lieux
publics), adhésion à une association, un syndicat, un parti, qui peuvent
signifier un militantisme plus ou moins accentué.
Enfin le recours à la violence, pour tenter d’imposer la prise en
considération d’attentes ou d’exigences, est une forme de participation d’un
type bien particulier, ne serait-ce qu’en raison de son habituelle illégalité face
à un État qui revendique le monopole de la violence légitime. Revendication
de reconnaissance, elle va souvent de pair avec l’emploi de stratégies
classiques de négociation et de marchandage, mais dans certains cas elle est,
bien davantage, l’expression d’une volonté de changer les règles du système
politique (par ex. lorsqu’elle est associée à l’idée de révolution).
Pour expliquer ou comprendre un comportement politique, il est nécessaire
de se situer dans un cadre théorique qui fasse place à trois catégories
d’éléments. Tout d’abord, le comportement s’inscrit dans une situation
socialement structurée à la fois par des enjeux, des règles et des ressources
inégalement mobilisables. Enjeux en ce sens qu’il existe des buts ou des
objectifs que s’assignent les acteurs et qui orientent la manière dont ils vont
agir ou s’abstenir. Règles au sens juridique du terme (ce qui est légal et ce qui
ne l’est pas), mais aussi au sens culturel (ce qui est légitime et ce qui ne l’est
pas) ou stratégique (ce qui est efficace et ce qui ne l’est pas). Ressources
enfin, c’est-à-dire moyens d’action permettant d’imposer ou d’influencer : ce
sera par exemple l’argent, la notoriété, la compétence, la disposition de
moyens coercitifs, etc.
Le comportement s’inscrit par ailleurs dans une relation d’interaction entre
des individus. Il est une réponse à des messages et comportements antérieurs
en même temps qu’il suscite à son tour d’autres messages et d’autres
comportements ultérieurs. En d’autres termes il y a toujours séquence et effets
en chaîne, logique de processus, actions et réactions. Schématiquement
l’individu peut être mû par deux démarches : soit opérer un calcul
coûts/avantages qui mobilise ses capacités d’analyse rationnelle et suppose
qu’il accède au maximum d’informations pertinentes ; soit se contenter de
jouer son rôle dans la partie qui se déroule, rôle défini préalablement, de
manière plus ou moins précise, par les schèmes culturels et politiques qu’il a
intériorisés. L’impossibilité pratique de maîtriser toutes les données de toutes
les situations que l’individu doit affronter, jointe, le cas échéant, au sentiment
aigu de sa propre incompétence, fera que dans beaucoup de cas le second
scénario s’imposera de facto. Mais dans le « choix » entre l’initiative
calculatrice et la simple acceptation du rôle, l’individu sera influencé par les
satisfactions qu’il en attend ou les difficultés qu’il espère éluder. Le
conformisme peut être rassurant tandis que le sentiment d’affirmer un
comportement « personnel et conscient » est valorisant. Les données de la
situation et les facteurs de personnalité sont donc des éléments qui contribuent
à la réponse effectivement apportée.
Le comportement d’un individu, enfin, s’agrège à d’autres comportements,
phénomènes d’où résultent des « effets collectifs émergents ». L’action
collective n’existe pas en dehors d’actions individuelles agrégées ; mais elle
n’est pas pour autant la simple addition de celles-ci. Différentes situations
mériteraient d’être distinguées. Dans l’hypothèse par exemple où
interviennent de très nombreux individus posant le même acte se manifeste un
effet d’échelle qui transforme la dynamique du mouvement. Que cinq cents ou
cent mille personnes adhèrent à un nouveau parti, fait évidemment émerger
une organisation de nature différente, pesant d’un poids sans commune
mesure sur le sys tème politique. Par ailleurs, les comportements des individus
provoquent des chaînes de réactions, les unes sur le mode mimétique, les
autres sur le mode antagoniste, qui débouchent sur des phénomènes collectifs
qui n’ont pas été véritablement anticipés. Il peut même en résulter des effets
pervers, c’est-à-dire non souhaités par aucun des agents sociaux. Ajoutons
enfin que les comportements sont perçus et analysés, aussi bien par leurs
auteurs que par les tiers, à travers des représentations culturellement codées.
La réalité active socialement n’est pas le fait brut mais sa réinterprétation par
les agents concernés, qui s’effectue à la lumière de jugements de valeurs, de
normes d’appréciation disponibles, d’informations imparfaites sur les
anticipations escomptables.
→ action collective, behaviourisme, comportement électoral, passions
politiques, sociologie électorale, violence politique
BOUDON R., La Logique du social, Paris, Hachette, 1979 ; BRAUD PH.,
Sociologie politique, Paris, LGDJ, 2008 ; BRÉCHON P., Comportements et
attitudes politiques, Grenoble, PUG, 2006 ; FILLIEULE O. (dir.), Le
Désengagement militant, Paris, Belin, 2005 ; HIRSCHMAN A., Défection, prise
de parole et loyauté, Paris, Fayard, 1983 ; ION J. (dir.), L’Engagement au
pluriel, Saint-Étienne, Publications de l’université, 1999 ; MAYER N.,
PERRINEAU P., Comportements politiques, Paris, A. Colin, 1992 ; NEVEU E.,
Sociologie des mouvements sociaux, Paris, la Découverte, 2005.
CONCENTRATIONNAIRE (SYSTÈME)
CONFLIT INTERNATIONAL
CONSENSUS
CONSENSUS DE WASHINGTON
CONSERVATISME
jacobin, « coupé des réalités », mais celle des hommes de terrain au robuste
bon sens pragmatique. Le second thème majeur est un appel aux disciplines de
l’effort et de la responsabilité personnelle ; il comporte une explicite
connotation morale surtout avant la Seconde Guerre mondiale. Ceci explique
la rencontre qui s’opère très tôt, et demeurera durable, entre une large fraction
de la sensibilité conservatrice et le catholicisme sous la bannière du
cléricalisme. Mais les radicaux, qui appartiennent largement à la mouvance
conservatrice à partir des années 1920, font de l’idéal républicain une sorte de
morale laïque, à bien des égards proche, sur le plan civique, de celle de leurs
adversaires cléricaux en dépit de prémisses différentes.
→ libéralisme, traditionalisme
ALEXANDRE-COLLIER A., JARDIN X., Anatomie des droites européennes,
Paris, A. Colin, 2004 ; COMPAGNON A., Les Antimodernes de Joseph de
Maistre à Roland Barthes, Paris, Gallimard, 2005 ; HUGUENIN F., Le
Conservatisme impossible. Libéralisme et réaction en France depuis 1789,
Paris, La Table ronde, 2006 ; NISBET R., La Tradition sociologique, Paris,
PUF, 1984 ; RÉMOND R., Les Droites en France, Paris, Aubier, 1982 ; Les
Droites aujourd’hui, Paris, Audibert, 2005 ; VAÏSSE J., Histoire du néo-
conservatisme aux États-Unis. Le triomphe de l’idéologie, Paris, O. Jacob,
2008.
CONSOCIATIF (SYSTÈME)
→ démocratie consociative
CONSTITUTION
CONSTRUCTIVISME
CONTRACTUELLE (POLITIQUE)
CONTRAT SOCIAL
CONTRE-RÉVOLUTION
Éthique fondée sur une croyance de nature religieuse ou séculière, que Max
Weber distingue de l’éthique de la responsabilité.
CORPORATISME
CRISE
CULTE DE LA PERSONNALITÉ
CULTURE
CULTURE POLITIQUE
CYBERNÉTIQUE
DÉBAT
Il tient une place de choix dans la culture démocratique en tant que pratique
politique légitimant le fonctionnement d’institutions pluralistes (le Parlement
par ex.) et mise en œuvre concrète des libertés d’expression des citoyens
(confrontations dans les médias).
Le débat tire tout d’abord son importance du fait qu’il exclut la violence
physique et se substitue à elle comme mode d’affrontement entre forces
antagonistes. Discuter, voire polémiquer, plutôt que recourir à la force. Le
débat tire également son importance du fait qu’il contribue à la construction
de représentations du réel. Le problème dont on discute accède à l’existence,
ce dont on ne débat jamais est relégué dans le non-être, politiquement parlant.
On conçoit qu’il est donc très important, pour les acteurs politiques, de réussir
à imposer (ou à exclure) tel sujet de discussion selon qu’ils en maîtrisent ou
non les tenants et aboutissants et peuvent y occuper une position plus ou
moins favorable.
Le débat enfin joue un rôle dans la mobilisation politique. Favorisant la
cristallisation des opinions et leurs classements dans des camps
(amis/adversaires), il est nécessaire à la construction des majorités politiques.
Sans doute sa fonction apparente d’éclairer la solution souhaitable par
l’échange d’arguments strictement rationnels ne saurait-elle être surestimée.
Une thèse n’est jamais détruite par les objections qui lui sont opposées : à la
fois parce qu’il existe des rationalités et des logiques irréductibles les unes aux
autres, et parce que fonctionnent des mécanismes psychologiques de défense
des croyances auxquelles les individus sont émotionnellement attachés. Le
principal effet politique du débat, dans la culture démocratique, est peut-être
qu’il permet aux minoritaires de s’incliner sans déchoir, donc de mieux
accepter la loi de la majorité.
→ langage politique, symbolique politique
BRAUD PH., Le Jardin des délices démocratiques, Paris, Presses de la
FNSP, 1991 ; EDELMAN M., Political Language. Words that Succeed and
Politics that Fail, New York, Academic Press, 1971 ; RENAUT A., Qu’est-ce
qu’une politique juste ?, Paris, Grasset, 2004 ; REVEL M. (dir.), Le Débat
public. Une expérience française de démocratie participative, Paris, La
Découverte, 2007 ; ROUSSELIER N., Le Parlement de l’éloquence, Paris,
Presses de Sciences-Po, 1997.
DÉCENTRALISATION/DÉCONCENTRATION
DÉCONCENTRATION
→ Décentralisation/déconcentration
DÉMOCRATIE
cette vertu n’était pas accessible à tous, notamment aux pauvres tenaillés par
les impératifs immédiats de leur survie. (« La vertu est rare en ce monde »,
disait Saint-Just.)
De nos jours, et compte tenu du déphasage entre les deux acceptions
empirique et idéale de la démocratie, ses définitions globales sont si peu
satisfaisantes que Giovanni Sartori la caractérise « comme le nom pompeux
de quelque chose qui n’existe pas ». Si, pourtant, il fallait en retenir une qui
soit suffisamment acceptable au plan tant intellectuel que moral, celle que
Marx avait livrée dans Le Manifeste communiste paraîtrait recevable eu égard
à ses bonnes intentions. Pour Marx, à ce moment, la démocratie devait
consister en « une association où le libre développement de chacun est la
condition du libre développement de tous ».
Reste que cette définition se révèle des plus contestables dans la mesure où
elle présuppose que trois des grands enjeux du débat sur la démocratie se
trouvent réglés alors qu’ils ne le sont pas. Le premier porte sur la tension
majeure du principe démocratique, voire sur l’aporie qui procède de la
nécessité dans laquelle il se trouve de devoir concilier les notions
inconciliables de liberté et d’égalité. Rien n’assure, en effet, que la condition
du libre développement de tous n’entrave pas celle du libre développement de
chacun. L’exercice sans entrave de la liberté accroît l’inégalité cependant que
la poursuite de l’égalité risque d’entraver l’expression de la liberté pour une
raison symétrique.
Le deuxième enjeu du débat dérive du précédent, mais concerne de manière
plus spécifique la distinction des deux versants de la démocratie comme
régime politique réel et comme utopie mobilisatrice ou finalité ultime de
l’histoire. Marx, mais également Rousseau dans le Contrat social, voire
Platon pour qui l’État doit chercher « à réaliser le bonheur dans la cité tout
entière en unissant les citoyens », illustrent la seconde conception en vertu de
laquelle la démocratie ne peut avoir pour objectif – selon les termes de
Rousseau – que « d’instituer un peuple », « de changer pour ainsi dire la
nature humaine », « de transformer chaque individu […] en partie d’un grand
tout dont cet individu reçoive en quelque sorte sa vie et son être ». Telle est
toujours la position de John Rawls par exemple, qui, en dépit de son
orientation libérale plutôt utilitariste, privilégie finalement comme Platon ce
qu’il appelle la justice par rapport à la démocratie et qui l’envisage comme
une procédure d’éducation. À l’évidence, si cette vision obéit à des motifs
louables quant à l’avenir des hommes, elle ignore largement les aspects
immédiats de leur gouvernement. Au-delà, elle tend à justifier l’utilisation des
moyens politiques propres à diverses sortes de despotisme éclairé au nom de
l’excellence des fins poursuivies. C’est contre cette prétention dangereuse que
s’élèvent ceux qui se limitent à la définition minimale de la démocratie
comme régime représentatif, pluraliste et compétitif, d’abord centré sur la
protection de la liberté individuelle, puis devenu arbitral – tentant de concilier
la liberté et l’égalité – avec le développement de l’État-Providence tel que
l’analyse notamment Karl Polanyi. Mais à ce point surgit un troisième enjeu
du débat, qui divise aussi bien les utopistes que les institutionnalistes et qui
concerne la relation entre l’État et la société. Le concept démocratique tend
vers le monisme en ce sens qu’il postule la fusion idéale de ces deux entités –
tout au moins la nette prééminence de l’une sur l’autre. Tant pour les libéraux
que pour les communistes libertaires, la société doit absorber l’État ou le
réduire au rôle minimal d’une agence de service. À l’inverse, les jacobins
aussi bien que les bolcheviks, notamment, estiment que l’État doit accoucher
de la société démocratique nouvelle dont il ne se distingue guère. Le choix est,
en somme, entre le dépérissement de l’État ou celui de la société.
Les définitions qui s’imposent par leur fréquence et leur portée empirique
s’appliquent il est vrai pour l’essentiel à la démocratie comme régime.
Sérieusement cette fois, Sartori la définit au regard des théories élitistes
comme « le pouvoir des minorités démocratiques actives, le mot démocratique
signifiant que le recrutement de ces minorités doit être ouvert, et qu’elles
doivent entrer en concurrence en respectant les règles des systèmes
multipartistes ». Plus élitiste encore, Bottomore la perçoit « comme une forme
de gouvernement [qui] permet aux élites de se constituer librement, et
d’établir entre elles une compétition réglée pour les positions de pouvoir ».
Bien que toujours dans la même perspective, Joseph Schumpeter privilégie
davantage la dimension électorale d’une démocratie assimilée à une sorte de
marché politique. Pour lui, « la méthode démocratique est le système
institutionnel aboutissant à des décisions politiques dans lequel des individus
acquièrent le pouvoir de statuer sur ces décisions à l’issue d’une lutte
concurrentielle portant sur les votes du peuple ». Qui ne se satisferait de ces
caractérisations sceptiques peut se reporter alors aux multiples définitions plus
classiques de la démocratie instituée ; ainsi celle de Samuel P. Huntington,
aux yeux de qui « la démocratie existe là où les principaux leaders d’un
système politique sont désignés par des élections concurrentielles auxquelles
la masse de la population est admise à participer ». Plus novateur cependant
est le modèle « polyarchique » de Robert Dahl, pour qui le pouvoir
démocratique ne se trouve plus concentré dans une majorité ou des instances
spécialisées, mais se diffuse et se compense en une série continue
d’ajustements croisés des conflits qui surgissent entre des groupes multiples.
Le seul défaut de ce raisonnement est qu’il pourrait décrire aussi le
mécanisme du pouvoir dans nombre de régimes autoritaires.
Aucune de ces définitions ne convenant pleinement, on dira ici que la
démocratie désigne un mode d’organisation du pouvoir politique dont la
légitimité requiert qu’il reconnaisse pleinement le primat de la souveraineté
populaire et qu’il s’assigne pour objectif son renforcement effectif, mais dont
l’agencement réel se fonde toujours pour l’essentiel sur une délégation de
pouvoir à un personnel spécialisé par le biais d’élections régulières,
concurrentielles et sans exclusives trop marquées vis-à-vis de certains
secteurs, dans lequel aussi la volonté majoritaire ne s’exerce pas au point
d’écraser les minorités ou les groupes d’intérêts de toutes espèces. En
revanche, il n’y a pas de démocratie là où les électeurs sont privés de la
faculté de choisir et de renvoyer pacifiquement leurs gouvernants, étant
entendu que les situations où cette faculté s’exerce sans que d’autres critères
de la démocratie se vérifient, s’agissant notamment du sort des minorités,
revendiquent souvent l’épithète démocratique au regard d’autres valeurs que
celles de la tradition fondamentalement libérale, occidentale et individualiste
de la démocratie pluraliste.
Cette définition transactionnelle, privilégiant au fond la réalité de
l’intention démocratique des dirigeants, demeure il est vrai elle-même
contestable. La conception antique de la démocratie comme droit d’un peuple
à disposer d’un gouvernement indépendant sous la houlette de ceux qui le
persuadent de l’excellence de ce droit persiste dans nombre de pays du tiers-
monde comme chez tous les peuples mus par une ambition nationaliste (chez
les Palestiniens comme dans l’ex-Yougoslavie). Par ailleurs, grâce à Adam
Przeworski, le plus stimulant avec Bernard Manin et Danilo Zolo parmi les
théoriciens actuels de la démocratie, le débat vient à porter maintenant sur sa
dimension psycho-sociologique ou culturelle plutôt que procédurière. Il pose
que le sens démocratique implique l’acceptation de l’incertitude des résultats
de toute action politique tant par les gouvernés que par les gouvernants, à
l’encontre de l’autoritarisme fondé sur l’offre et la quête ancestrales de
certitudes sur l’avenir. Cette perception évacue toutefois la dimension de la
démocratie utopique, tout en présentant l’inconvénient d’ignorer que le jeu
même des politiciens démocratiques tend, comme Philippe Braud l’a souligné,
à entretenir la part du rêve chez les citoyens. De son côté, Bernard Manin a
souligné, récemment, que la démocratie représentative reste un régime
aristocratique simplement atténué par l’élection en dépit de son nom. Enfin,
Danilo Zolo a sans doute porté contre elle la critique la plus inquiétante. Pour
lui, la démocratie instituée se nourrit des attentes qu’elle s’emploie
constamment à faire naître, alors qu’elle peut de moins en moins les satisfaire
dans un monde chaque jour plus complexe et qu’elle court ainsi à
l’épuisement proche de ses ressources de légitimation. En outre, les débats les
plus récents portent en particulier sur des évolutions liées au succès du
concept de gouvernance, ou de « gouvernance démocratique » mal nommée,
évolutions qui tendent à récuser sans l’avouer la notion de décision majoritaire
ainsi que la suprématie de l’ordre public sur l’ordre privé, en mettant par là en
cause le principe même de souveraineté populaire qui fonde l’État
démocratique.
→ citoyenneté, démocratisation, gouvernance, marché (démocratie et),
régimes politiques
BRAUD P., Le Jardin des délices démocratiques, Paris, Presses de la FNSP,
1992 ; DAHL R. A., Polyarchy, New Haven, Yale University Press, 1971 ;
GAUCHET M., MANENT P., ROSANVALLON P. (dir.), Situations de la démocratie,
Paris, Gallimard/Le Seuil, 1993 ; HERMET G., La Démocratie, Paris,
Flammarion, coll. « Dominos », 1997 ; L’Hiver de la démocratie ou le
nouveau régime, Paris, A. Colin, 2008 ; LAVAU G., « La démocratie », pp. 29-
113 in GRAWITZ M., LECA J. (dir.), Traité de science politique, Paris, PUF,
1985, vol. 2 ; LAUVAUX PH., Les Grandes Démocraties contemporaines, Paris,
PUF, 2004 ; MANIN B., Principes du gouvernement représentatif, Paris,
Gallimard, 1995 ; SARTORI G., Théorie de la démocratie, Paris, A. Colin, 1973
[1962] ; SCHUMPETER J. A., Capitalisme, socialisme et démocratie, Paris,
Payot, 1965 [1942] ; ZOLO D., Democracy and complexity, Cambridge, Polity
Press, 1992.
DÉMOCRATIE ANTIQUE
→ cité antique
DÉMOCRATIE CONSOCIATIVE. Ce concept traduit de l’expression anglaise
consociational democracy a été appliqué par Arend Lijphart à des pays
singularisés par la superposition de multiples clivages non seulement
partisans, idéologiques ou sociaux au sens courant, mais aussi linguistiques,
religieux, historiques ou autres (clivage urbain/rural très marqué, par
exemple). Dans leur cas, le compromis démocratique ne pouvant s’établir
uniquement au niveau des coalitions de gouvernement et du mécanisme
multipartiste en général, l’équilibre politique se fonde également sur un jeu
complexe de relations entre des institutions ou forces qui représentent toutes
les facettes de la réalité nationale (les partis, mais aussi les syndicats, les
Églises, les groupements patronaux, les communautés linguistiques, le monde
paysan, parfois l’institution monarchique). L’exemple des Pays-Bas a inspiré
spécialement Lijphart, où la vie politique se fonde sur des « piliers » de cette
sorte (donnant naissance à la notion subsidiaire de « pilarisation » de la
politique). Mais le modèle consociatif peut s’étendre également à la Suisse, la
Belgique, la Finlande, le Liban d’avant 1980, dans une moindre mesure aux
pays scandinaves ou à l’Italie. Il convient d’ajouter que l’origine du terme de
consociation est très ancienne. Elle semble remonter au rhénan Johannes
Althussius, qui a utilisé au XVII siècle l’expression de consociatio symbiotica.
e
Cette expression a été reprise vers la même époque aux Pays-Bas. Il faut
noter, également, que David Apter a appliqué le concept au royaume
d’Ouganda, puis au Nigeria, avant que Lijphart ne le popularise.
→ néo-corporatisme, régimes politiques
DAALDER H., « The consociational democracy theme », World Politics 26
(4), juil. 1974 ; LIJPHART A., Democracy in Plural Societies, New Haven, Yale
University Press, 1977 ; « Consociational democracy », World Politics (21),
1969 ; The Politics of Accomodation : Pluralism and Democracy in the
Netherlands, Berkeley-Los Angeles, University of California Press, 1975.
DÉMOCRATIE DÉLIBÉRATIVE. Pour Jürgen Habermas comme pour Norberto
Bobbio, l’authenticité de la démocratie se mesure moins à la nature formelle
de ses institutions ou à l’extension du droit de vote qu’à la qualité du débat
public ouvert aux non-spécialistes qui se développe en son sein. La
démocratie délibérative se définit, selon ce point de vue, comme un espace de
débat précédant les décisions, impliquant l’ensemble de la société civile et non
restreint par conséquent aux seuls professionnels de l’élection ou aux leaders
d’opinion. Cet espace aurait vocation à se transformer en site primordial de la
souveraineté démocratique en lieu et place de l’espace institutionnel.
→ démocratie, espace public
BOHMAN J., REHG W. (dir.), Deliberative Democracy. Essays on Reason
and Politics, Cambridge (Mass.)/London, The MIT Press, 1997 ; COHEN J.,
« Deliberative and democratic legitimacy » in HAMLIN A. et al. (eds), The
Good Polity, Oxford, B. Blackwell, 1989 ; ELSTER J. (ed.), Deliberative
Democracy, Cambridge, Cambridge University Press, 1998 ; FISHKIN J.,
Democracy and Deliberation, New Haven, Yale University Press, 1992 ;
HABERMAS J., L’Intégration républicaine. Essais de théorie politique, Paris,
Fayard, 1998 [1996] ; MANIN B., « Volonté générale ou délibération ?
Esquisse d’une théorie de la délibération », Le Débat (33), janv. 1985 ;
MILLER D., « Deliberative democracy and social choice », Political Studies
(40), 1992.
DÉMOCRATIE DIRECTE. Exercice direct du gouvernement d’un État, d’une
région, d’une ville ou de toute autre collectivité par l’ensemble des membres
actifs de son corps politique (y compris quand ce corps politique se trouve
légalement restreint par des conditions de cens ou de lieu de naissance). Le
principe de la démocratie directe s’oppose de la sorte à celui, dominant dans la
pratique, de la démocratie représentative où les élus s’expriment au nom du
peuple qui n’a pour faculté que de les désigner et de les révoquer
périodiquement, depuis que les parlementaires britanniques et les délégués
français aux États généraux ont repoussé au XVIII siècle toute idée de mandat
e
impératif.
En fait, la démocratie directe n’a jamais existé au sens strict dans les
systèmes politiques différenciés, y compris dans les cités grecques où
l’assemblée des citoyens désignait par élection ou par tirage au sort un conseil
et des archontes en charge du pouvoir exécutif et de la préparation des lois.
Des dispositifs du même ordre se sont retrouvés plus tard dans d’autres
communautés de petite dimension où le peuple entier pouvait se rassembler en
un même lieu. Ainsi dans les assemblées de paroisse de la France de l’Ancien
Régime, de l’Angleterre ou de la Nouvelle-Angleterre, aujourd’hui encore
dans les petits cantons montagnards de la Suisse centrale où se tiennent
toujours les Landsgemeinde annuelles des « bourgeois » venus approuver les
lois et désigner les fonctionnaires. La procédure du référendum constitue de
son côté une expression de la démocratie directe applicable aux collectivités
politiques de dimension importante.
→ autogestion, démocratie : démocratie industrielle, référendum
HASKELL J., Direct Democracy or Representative Government ? Dispelling
the Populist Myth, Boulder, Westview Press, 2000 ; KRIESI H. (dir.),
Citoyenneté et démocratie directe, Zurich, Seismo, 1993 ; PAPADOPOULOS Y.,
Démocratie directe, Paris, Economica, 1998.
DÉMOCRATIE ÉLECTRONIQUE. Formule plutôt que concept, la démocratie
électronique se définit comme l’ensemble des technologies d’information et
de communication qui affectent à présent les pratiques politiques dans les
démocraties. Elle annoncerait l’émergence d’un nouveau type de délibération.
→ internet
SERFATY J. (dir.), L’Internet en politique des États-Unis à l’Europe,
Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2002.
DÉMOCRATIE ILLIBÉRALE. Expression calquée de l’américain, introduite par
Fareed Zakaria en 1997, désignant de jeunes démocraties qui, à l’inverse des
démocraties établies d’Europe de l’Ouest et d’Amérique du Nord qui ont
amorti le poids de la règle majoritaire par une protection des minorités,
appliquent cette règle sans restriction aucune et sans nulle garantie de
protection de ces minorités. L’exemple le plus extrême d’une telle démocratie
fut celui du Rwanda, où le règne très majoritaire de l’ethnie Hutu aboutit en
1994 au massacre de la minorité Tutsi sous l’égide pourtant d’un
gouvernement pourtant assez régulièrement élu. Avec ou sans massacres, des
situations analogues se sont observées au Liban, à Chypre et dans l’ex-
Yougoslavie notamment…
→ démocratisation, majoritaire (principe), minorité
ZAKARIA F., L’Avenir de la liberté. La démocratie illibérale aux États-Unis
et dans le monde, Paris, Odile Jacob, 2003.
DÉMOCRATIE INDUSTRIELLE. Expression relevant à l’origine du langage
syndical anglo-saxon et spécialement nord-américain, qui désignait après
1945 aussi bien la nature démocratique – douteuse – des organisations
ouvrières que les tentatives d’associer les salariés à la marche des entreprises.
Avec Dahl et Blumberg, elle est devenue ensuite, au cours des années 1970,
une doctrine prônant une démocratisation plus réelle de la prise de décision
sur les lieux de travail tant privés que publics, à l’exemple notamment de
l’expérience yougoslave alors en cours. Fondamentalement, cette conception
reposait sur l’idée que la nature de la propriété des moyens de production ne
modifiait pas sensiblement l’aliénation des travailleurs, et que l’essentiel se
jouait à cet égard au niveau de leur gestion. La vogue de la démocratie
industrielle a constitué le pendant de celle de l’autogestion pour la gauche
radicale des États-Unis et du Canada.
→ autogestion, syndicats
BLUMBERG P., The Sociology of Participation, London, Constable, 1971 ;
DAHL R. A., A Preface to Economic Democracy, Berkeley, University of
California Press, 1985 ; GODBOUT J. T., La Démocratie des usagers, Montréal,
Boréal, 1987.
DÉMOCRATIE ORGANIQUE. Concept apparu dans la droite autoritaire allemande
et repris notamment pas Carl Schmitt, puis encore par Francisco Javier Conde
et les théoriciens du régime franquiste en Espagne. La démocratie organique
s’oppose à la démocratie représentative d’inspiration libérale en ce qu’elle
répudie la médiation des partis politiques réputés diviseurs ainsi que le conflit
des intérêts, pour leur préférer un mode de représentation dit « naturel » de
type corporatiste, reposant sur les associations professionnelles, les familles,
les institutions religieuses ou culturelles ou encore l’armée. L’expression de
démocratie organique a été innocemment mais malencontreusement reprise en
2000 dans un document de la Commission européenne, pour désigner sa
propre pratique de « gouvernance »…
→ corporatisme, régimes politiques : régimes autoritaires,
traditionalisme
DÍAZ E., Pensamiento español en la era de Franco, Madrid, Tecnos, 1983.
DÉMOCRATIE PARTICIPATIVE. Proposition empruntée notamment à la pensée du
philosophe allemand Jürgen Habermas dans sa référence à l’espace public (ou
sphère publique), envisageant une alternative ou un renfort à la démocratie
représentative apportés par des modes de participation directe et volontaire
des citoyens à certains processus d’élaboration des politiques publiques, au
niveau local et sectoriel principalement (mais pas exclusivement dans le
principe). Dans ses applications, cette notion s’inscrit sur une échelle qui va
des certaines utopies révolutionnaires « altermondialistes » à des pratiques très
institutionnalisées observées spécialement au Brésil depuis les années 1970, et
surtout depuis la promulgation de la constitution de 1988 (celle-ci contient un
article faisant obligation aux municipalités de disposer de conseils
participatifs sectoriels pour obtenir des crédits fédéraux). Elle va également,
selon les circonstances, de la simple consultation d’un public plus ou moins
militant à la délibération « décisionnelle ». L’exemple du « budget
participatif » de la ville de Porto Alegre, du reste abandonné depuis la défaite
électorale du Parti des Travailleurs, est le plus connu dans cette perspective
(où 25.000 personnes environ, sur une population d’un million et demi
d’habitants, participaient au processus d’ordonnancement de 20 à 25 % de la
dépense municipale). Mais il est loin d’être le seul, puisque plus de 100
communes possédaient des conseils participatifs dans les années 1990, dont
un certain nombre de communes de droite. En France, le débat sur la
démocratie participative a fortement rebondi lors de la campagne
présidentielle de 2007, sous l’égide de Ségolène Royal en particulier. Par
ailleurs, la loi du 2 février 1995 (dite Loi Barnier) y a créé un dispositif
instaurant de nouveaux rapports entre les citoyens et les pouvoirs publics en
matière notamment d’installation de grandes infrastructures (à l’origine de la
procédure DUCSAI).
→ altermondialisme, Amérique latine, Démocratie délibérative, Régime
représentatif, espace public
BLONDIAUX L., SINTOMER Y., « Démocratie et délibération », Politix 15 (57),
2002 (Numéro spécial) ; HERVÉ M., D’IRIBARNE A., BOURGUINAT E., De la
Pyramide aux réseaux. Récits d’une expérience de démocratie participative.
Préface de Ségolène Royal, Paris, Autrement, 2007 ; GAUDIN J.-P., La
Démocratie participative, Paris, A. Colin, 2007 ; HABERMAS J., L’Intégration
républicaine. Essais de théorie politique, Paris, Fayard, 1998 [1996] ;
PATEMAN C., Participation and Democratic Theory, Cambridge, Cambridge
University Press, 1984 [1970] ; SINTOMER Y., Le Pouvoir au peuple. Jurys
citoyens, tirage au sort et démocratie participative, Paris, La Découverte,
2007.
DÉMOCRATIE PROCÉDURALE. Concept semble-t-il lancé en 1984 par Michael J.
Sandel, dans une perspective critique suggérant que les régimes
démocratiques existants ne s’inscrivaient que dans un ensemble de procédures
instrumentales qui dévalorisaient la démocratie en tant que valeur ou que
projet. En revanche, il a été repris dans une acception positive ou résignée par
certains spécialistes des transitions démocratiques revenus des utopies
révolutionnaires.
→ démocratisation, institution, régimes politiques
PRZEWORSKI A. Democracy and the Market, Cambridge, Cambridge
University Press, 1992 ; SANDEL M. J., « The procedural democracy and the
unencumbered self », Political Theory 12 (1), 1984.
DÉMOCRATIE REPRÉSENTATIVE
→ régimes politiques : régime représentatif
DÉMOCRATISATION
Conçue dans les années 1950, pour analyser notamment la situation propre
au subcontinent latino-américain, la théorie de la dépendance se propose
d’étudier le développement dans le contexte de la mondialisation du
capitalisme. La plupart des travaux qui en dérivent partent de trois postulats :
le système capitaliste international rejette dans sa périphérie les économies en
développement ; celles-ci ne cessent de se détériorer ; l’ordre socio-politique
dans le monde en développement est directement conditionné par les données
de l’économie dépendante. L’unité des sciences sociales et la primauté ainsi
proclamée de la science économique enlèvent toute autonomie au politique et
conduisent la théo rie de la dépendance à récuser le concept de développement
politique et les paradigmes qui lui sont associés.
Ces constructions ont connu des fortunes diverses : popularisées dans le
contexte du « tiers-mondisme » qui faisait école dans les années 1960, elles
ont essuyé par la suite la critique des tenants de l’analyse culturelle qui leur
reprochaient leur vision trop infrastructurelle et uniforme des sociétés en
développement, comme celle du post-développementalisme qui appelle à une
revalorisation du facteur politique. L’essor des NPI, l’insertion d’économies
rentières, les progrès fulgurants des PNB de certains États pétroliers, la
complexité de la crise de l’État dans les sociétés en développement, ont rendu
de plus en plus contestables les postulats de la théorie de la dépendance. Aussi
certains auteurs, comme le norvégien Galtung, se sont-ils efforcés de
conceptualiser, avec davantage de succès, les conditions d’une dépendance
plus politique, reposant notamment sur une clientélisation active des
gouvernants des États périphériques par ceux des États du centre.
→ centre-périphérie, développement politique, impérialisme,
international (scène internationale)
CARDOSO F. H., Politique et développement des sociétés dépendantes, Paris,
Anthropos, 1971 ; Développement et dépendance en Amérique latine, Paris,
PUF, 1978 ; EVANS P., Dependant Development : the Alliance of Multinational
State and Local Capitalism in Brazil, Princeton, Princeton University Press,
1979 ; GALTUNG J., « A structural theory of imperialism », Journal of Peace
Research, vol. 8, 2, 1971, pp. 81-117.
DÉSENCHANTEMENT DU MONDE
DÉVELOPPEMENT DURABLE
DÉVELOPPEMENT POLITIQUE
DÉVOLUTION
DHIMMIS
DICTATURE
DIPLOMATIE
DISCOURS PERFORMATIF
DISCRIMINATION POSITIVE
DISASSIMILATION
DISSOLUTION
DISSONANCE COGNITIVE
DISSUASION
DROIT DE VOTE
DROIT NATUREL
droit naturel est conçu comme un ensemble de droits fondamentaux fondés sur
des normes éthiques universelles. Si le droit naturel autorise le souverain à
édicter des lois (le droit positif), ce ne peut être qu’à condition qu’il s’agisse
de lois justes. Les lois humaines contraires au droit naturel légitiment la
désobéissance ; d’aucuns affirmeront même qu’elles perdent leur qualité de
règles juridiques.
Le droit naturel est en réalité un ordre moral idéal. Il relève non pas du
« Sein » (ce qui est) mais du « Sollen » (ce qui doit être) pour reprendre le
lexique de Kant. Cependant la présence du mot droit signifie bien la volonté
de l’opposer, terme à terme, au droit positif dans un rapport hiérarchique de
supériorité. Cependant, il s’agit d’une catégorie idéologique, au sens non
péjoratif du terme, c’est-à-dire fondée sur des « représentations » morales et
politiques de ce que doivent être les limitations au pouvoir de l’État, donc sur
des croyances et non pas une réalité objective. À l’époque moderne, le jus-
naturalisme a inspiré la notion de droits de l’Homme, conçus comme
universels, et favorisé la réception du contrôle de constitutionnalité des lois.
→ justice, liberté/égalité
GOYARD-FABRE S., Les Embarras philosophiques du droit naturel, Paris,
Vrin, 2002 ; STRAUSS L., Droit naturel et histoire, Paris, Flammarion, 2008 ;
SIMON P., Le Droit naturel. Ses amis et ses ennemis, Paris, Guibert, 2005.
DROITE
→ gauche/droite
DROITS CIVIQUES
DROITS DE L’HOMME
ÉCOLE DE FRANCFORT
ÉCOLOGIQUE (ANALYSE)
→ sociologie électorale
ÉCOLOGISTES (MOUVEMENTS)
ÉCONOMIE POLITIQUE
ÉCONOMIQUE (ANALYSE)
ÉDUCATION POLITIQUE
→ socialisation politique
ÉGALITÉ
→ liberté/égalité
ÉLECTION
New York, Columbia University Press, 1984 ; BRÉCHON P., La France aux
urnes. Cinquante ans d’histoire électorale, Paris, La Documentation française,
2004 ; CAMPBELL A., CONVERSE PH., MILLER W., STOKES D., The American
Voter, New York, Wiley, 1960 ; MARTIN P., Comprendre les évolutions
électorales. La théorie des réalignements revisitée, Paris, Presses de Sciences
Po, 2000 ; NORRIS P., Elections and Voting Behavior. New Challenges, New
Perspectives, Aldershot, Ashgate, 1998 ; NORRIS P., Electoral Engineering.
Voting Rules and Political Behavior, Cambridge, Cambridge University Press,
2004 ; PERRINEAU P., REYNIÉ D. (dir.), Dictionnaire du vote, Paris, PUF, 2001.
ÉLECTORAUX (SYSTÈMES). Les modes de scrutin se répartissent en deux
grandes familles : les systèmes majoritaires et les systèmes proportionnels.
Les premiers fonctionnent de façon très différente selon qu’ils sont
uninominaux ou plurinominaux, et comportent un seul tour ou deux tours.
Dans le scrutin uninominal majoritaire à tour unique (Royaume-Uni), est élu
le candidat qui obtient le plus de voix. C’est l’exigence d’une majorité
simplement relative. Dans le scrutin uninominal à deux tours (France), on ne
peut être élu dès le premier tour que si l’on obtient la majorité abso lue des
suffrages exprimés, c’est-à-dire la moitié des voix plus une. Dans le cas
contraire, un deuxième tour est organisé et la majorité relative suffit à
départager les candidats. Le scrutin majoritaire de liste (plurinominal) est
rarement mis en œuvre pour des élections législatives. Il sert alors à assurer au
parti dominant une écrasante prépondérance, surtout, comme cela s’est
pratiqué dans certains pays africains nouvellement indépendants, si les listes
sont nationales. En revanche, on le rencontre aux élections locales mais, dans
les pays démocratiques, il est alors associé à une dose de proportionnelle de
façon à assurer un minimum de représentation de l’opposition.
ÉLITISTES (THÉORIES)
ÉMOTIONS POLITIQUES
→ psychologie politique
EMPIRE
ENDOGÈNE/EXOGÈNE
Les sciences sociales ont très longtemps privilégié les processus endogènes
de changement par rapport aux processus exogènes, postulant, dans une
perspective Évolutionniste, que les sociétés obéissaient à une logique de
maturation et d’accomplissement, dont les marques principales étaient leur
différenciation et leur rationalisation croissantes. Les processus endogènes de
changement désignent ainsi tous les changements sociaux répondant à des
dynamiques internes aux sociétés, quels que soient les facteurs qui les ont
sollicitées ; les processus exogènes recouvrent, pour leur part, tous les
changements sociaux imposés de l’extérieur, par la contrainte ou par
l’adhésion plus ou moins libres des acteurs de la société considérée.
Les processus endogènes peuvent relever de la culture propre à la société
qui, dans une perspective « revivaliste », est censée contrôler le changement
social ; ils peuvent dériver aussi de la structure sociale, et notamment de
l’effet des conflits sociaux ; ils peuvent enfin correspondre à des déterminants
politiques (par ex. à la nature du pouvoir politique ou au type d’État). Les
processus exogènes peuvent d’abord correspondre à une perspective de type
diffusionniste, postulant notam ment que les sociétés changent par interactions
avec d’autres sociétés, soit sous forme d’échange, soit sous forme de
domination. Les flux transnationaux, et en particulier les flux de modèles
politiques peuvent, par exemple, tenir un rôle au moins aussi important que les
paramètres internes dans la réalisation des processus de démocratisation. Les
processus exogènes recouvrent aussi tous les effets de contrainte exercés par
l’environnement international sur les États-nations (guerres, flux migratoires,
structure de l’économie internationale, transformations écologiques, etc.).
En réalité, facteurs endogènes et facteurs exogènes se combinent, dans la
plupart des cas, pour contrôler le changement social, de plus en plus analysé
comme l’effet d’un processus interactif entre l’interne et l’externe.
→ international (scène internationale), transnationales (relations)
ESPACE PUBLIC
L’espace public se distingue de l’espace privé, qui est pour sa part le lieu de
la mise en valeur des rôles familiaux ou personnels ainsi que des formes les
plus individuelles du bonheur de l’acteur lui-même dans ses relations avec les
autres. Dans la période moderne, on considère que l’espace public se construit
à peu près à la même époque, au XVII , en Angleterre et en France. Phénomène
e
proprement urbain, il prend forme avec la naissance d’un public qui fréquente
les cafés, les théâtres, les concerts, avec aussi l’apparition essentielle des
salons où se réunissent noblesse et grande bourgeoisie intégrées socialement
l’une et l’autre dans ce cadre. L’époque des Lumières se concrétise dans la
généralisation de la conversation par laquelle se crée une sociabilité
généralisée, un public où circule idées et opinions, d’autant plus que la presse
connaît elle aussi un épanouissement rapide renforçant encore la cohérence du
public. Comme le montre Jürgen Habermas, l’espace public se différencie de
l’espace privé jusque dans la vie intime : dans les appartements bourgeois, la
salle commune devient pièce de réception où les personnes privées forment un
public. Les individus quittent ainsi la sphère privée de leur chambre pour le
salon dévolu à l’espace public. Apparu de manière progressive en Angleterre
où le principe représentatif facilite son apparition, l’espace public est renforcé
plus brutalement par la Révolution française, les clubs rendant possible les
réunions publiques où se discutent les nouvelles diffusées par une presse en
expansion rendant compte des débats eux-mêmes publics des diverses
assemblées. Pour Habermas, avec le triomphe du marché, l’espace public
régresse inévitablement, d’autant qu’au sein de la société les sphères
publiques et privées se distinguent de moins en moins. L’interpénétration
Économique entre ces deux sphères accentue le déclin de l’espace privé, le
droit public voyant sa spécificité contestée et le bourgeois se substituant de
plus en plus également au citoyen. La domination capitaliste abolirait donc
l’espace public et mènerait même jusqu’à « la colonisation du monde vécu »,
agissant ainsi au-dedans des consciences des acteurs par des publicités
négatrice des valeurs propres à l’espace public. Si Habermas reconnaît que des
nouveaux mouvements sociaux parviennent à réagir, s’il envisage que les
nouveaux médias, par leur caractère décentralisé, peuvent servir de moyen
favorisant le renouveau de l’espace public, sa vision demeure marquée par un
profond évolutionnisme. On peut, au contraire, d’une part considérer qu’elle
ignore les spécificités historiques propres à chaque nation dont l’influence se
révèle pourtant décisive sur les rapports entre ces deux espaces et estimer,
d’autre part, avec Albert Hirschman, que dans ces contextes contraignants, il
revient aussi à l’acteur de choisir de s’engager dans l’espace public ou de
s’attarder à cultiver son bonheur privé. On réintroduit alors l’intentionnalité de
l’acteur dans l’opposition entre ces deux sphères considérées autrement
comme simplement pro duites par des évolutions structurelles échappant aux
acteurs.
→ Démocratie Participative
CALHOUN G. (ed.), Habermas and the Public Sphere, The MIT Press,
Cambridge, 1992 ; DACHAUX E., L’Espace public, Paris, Presses du CNRS,
2008 ; HABERMAS J., L’Espace public. Archéologie de la publicité comme
dimension constitutive de la société bourgeoise, Paris, Payot, 1978 ; Théorie
de l’agir communicationnel, Paris, Fayard, 1987 ; HIRSCHMAN A., Bonheur
privé, action publique, Paris, Fayard, 1983.
ÉTAT
ÉTAT-PROVIDENCE
ÉTAT RÉGULATEUR
ÉTAT VIRTUEL
ÉTAT VOYOU
ETHNICITÉ
Notion peu précise et très polysémique introduite dans sa forme actuelle par
David Riesman en 1953, marquant une rupture par rapport à la connotation
antérieure péjorative ou résiduelle du terme ethnique (désignant des groupes
en voie de disparition). Elle prétend conférer à une collectivité sociale donnée
une réalité naturelle transcendant toute construction politique. Cette réalité est
conçue en fonction du repérage de traits tenus pour innés et communs à
l’ensemble des membres de la collectivité qui est alors désignée par un nom
(ethnonyme). Contrairement à la race, l’ethnie ne se caractérise pas par
référence à des critères biologiques, auxquels sont généralement préférés des
critères de type culturel (langue, histoire, croyances, habitudes de vie et
surtout sentiment de commune appartenance). Postulée naturelle, l’ethnie ne
saurait pourtant échapper à une part de construit (qui lui est intérieur et
extérieur) et donc à une dimension en même temps fragile, arbitraire et
mythique.
Forgée par l’anthropologie pour analyser les sociétés primitives, cette
notion s’est étendue, de façon mal maîtrisée, à la science politique. Elle est
utilisée soit dans une perspective développementaliste ou post-
développementaliste, afin de décrire les processus de construction étatique et
nationale ainsi que les résistances qui les accompagnent, soit en politique
comparée afin d’appréhender les modes d’intégration des minorités dans les
systèmes politiques. Dans ce dernier usage – le plus fréquent – la notion
d’ethnie rejoint celle de minorité culturelle. Dans l’un et l’autre cas, elle peut
présupposer que les communautés politiques doivent avoir un fondement
ethnique, ce qui tend à faire de l’ethnicité une des composantes tant de la
mobilisation politique que de la construction des systèmes politiques, et à
conduire ainsi jusqu’à l’extrême que constitue l’Épuration ou la purification
ethnique (c’est-à-dire la modification par la contrainte de la composition des
communautés politiques afin de leur conférer une « identité ethnique »
homogène et unique). Dans une perspective moins radicale, elle vise à
restaurer le sentiment de fierté de groupes qui se sentaient humiliés et à
donner une légitimité à leurs revendications. Son usage se retrouve de plus en
plus aujourd’hui en relations internationales, correspondant à la nature des
nouveaux conflits internationaux. Comme tel, il se trouve partagé entre une
interprétation « ethno-réaliste », qui en fait un paramètre nouveau de la
géopolitique et une interprétation constructiviste qui souligne son rôle comme
instrument de mobilisation politique.
→ anthropologie politique, identité politique, nation, partis politiques :
Partis ethniques, peuple, segmentaires (sociétés)
AMSELLE J.-L., MBOKOLO E. (dirs.), Au Cœur de l’ethnie, Paris, La
Découverte, 1985 ; AMSELLE J.-L., Logiques métisses, Paris, Payot, 1990 ;
BARTH F., Ethnic Groups and Boundaries, London, G. Allen and Unwin,
1969 ; DARVICHE M.-S., « L’horizon ethnique de la modernité. La sociologie
d’Anthony D. Smith », Revue Internationale de Politique Comparée (7) 1,
2000, pp. 203-234 ; GLAZER N., MOYNIHAN P., Ethnicity : Theory and
Experience, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 1975. Pour une
interprétation « ethno-réaliste », cf. BROWN M. (ed.), Ethnic Conflict and
International Security, Princeton University Press, 1993 ; pour une
interprétation constructiviste, cf. GANGULY R., TARAS R., Understanding
Ethnic Conflict, New York, Longman, 1998.
ETHNO-NATIONALISME
ÉTUDES EUROPÉENNES
D’usage récent dans cette signification, cette expression désigne non pas les
études de nature comparative portant sur les systèmes politiques des pays
européens, mais celles qui sont essentiellement orientées vers l’analyse de la
nature et du fonctionnement des institutions formelles ou de fait de l’Union
européenne. S’y ajoute également l’étude des nouvelles formes de vie
politique européenne, au niveau par exemple des fédérations de partis.
→ intégration régionale
DEHOUSSE R. (dir.), L’Europe sans Bruxelles ? Une analyse de la méthode
ouverte de coordination, Paris, L’Harmattan, 2004 ; MAGNETTE P., Le Régime
politique de l’Union européenne, Paris, Presses de Sciences Po, coll.
« Références », 2007 ; JACQUOT S., WOLL C. (dir.), Les Usages de l’Europe :
acteurs et transformations européennes, Paris, L’Harmattan, coll. « Logiques
politiques », 2004 ; MAGNETTE P. (dir.), Contrôler l’Europe. Pouvoir et
responsabilité dans l’Union européenne, Bruxelles, Presses de l’ULB, 2003 ;
REYNIÉ D., La Fracture occidentale. Naissance d’une opinion européenne,
Paris, La Table Ronde, 2004 ; ROUSSELIER N., L’Europe des traités, de
Schuman à Delors, Paris, CNRS Éditions, 2007.
→ administration publique
EXÉCUTIF/LÉGISLATIF (POUVOIRS)
EXPERT ET POLITIQUE
EXPLOITATION
→ aliénation, marxisme
LABICA G., Dictionnaire critique du marxisme, Paris, PUF, 1982.
EXTRÊME-ORIENT
→ Asie orientale
F
FALSIFIABILITÉ
Au sens de Popper, une théorie qui se vérifierait quels que soient les
résultats de l’observation n’aurait aucune validité scientifique. Au contraire,
une hypothèse savante remplit cette condition lorsqu’elle permet de diviser en
deux groupes l’ensemble de tous les énoncés concevables : ceux avec lesquels
elle est contradictoire et ceux avec lesquels elle est compatible.
→ méthodologie
FASCISME
FÉDÉRALISME
FEDERALIST PAPERS
FEMMES
aux femmes des droits politiques qui n’ont été consacrés qu’en avril 1944 (par
le gouvernement d’Alger). Paradoxalement les monarchies d’Ancien Régime
leur avaient laissé une place plus importante puisque des femmes ont pu
apparaître au tout premier plan comme reines, comme régentes ou même
comme conseillers très écoutés du Prince.
Aujourd’hui, la place des femmes dans la vie politique soulève deux ordres
de questions. Tout d’abord existe-t-il encore des spécificités de leur
comportement électoral ? On observe en général une tendance à la
convergence des attitudes entre hommes et femmes, tant en ce qui concerne
l’abstentionnisme que la répartition des suffrages entre les familles politiques.
Deuxième question : comment expliquer la persistance d’une forte sous-
représentation des femmes dans les postes de responsabilité politique, et leur
confinement fréquent dans certains domaines précis : affaires sociales par
exemple ? À ce problème il est des réponses classiques. Soit les handicaps
qu’elles subissent dans la vie sociale (moindre qualification professionnelle,
revenus inférieurs) mais on devrait alors constater, avec le progrès vers plus
d’égalité socio-économique depuis trente ans, une meilleure représentation
des femmes dans la vie politique ; ce qui n’est pas le cas. Soit les obstacles
que dresse devant elles la misogynie des hommes, explication certainement à
considérer mais dont on peut douter qu’elle soit suffisante car les hommes
sont également en intense rivalité entre eux.
Pour s’imposer en politique, il faut goûter les gratifications offertes par
cette activité spécialisée, dominée par la compétition la plus acharnée et par la
« surcharge de rôle ». C’est de ce point de vue que la sous-représentation des
femmes dans la vie politique peut constituer un indicateur précieux de ses
modes de fonctionnement cachés. Si la place des femmes dans des pays
comme la Norvège est si différente de ce qu’elle est en France ou en Italie,
c’est sans doute parce que la politique y est de nature différente, donc que les
coûts psycho-sociaux de l’engagement se révèlent moins dissuasifs pour
davantage de femmes et ses gratifications plus attractives.
→ genre
ACHIN C., LÉVÊQUE S., Femmes en politique, Paris, La Découverte, 2006 ;
MARQUÈS-PEREIRA B., La Citoyenneté politique des femmes, Paris, A. Colin,
2003 ; MOSSUZ-LAVAU J., Femmes-Hommes. Pour la parité, Paris, Presses de
Sciences-Po, 1998 ; PIONCHON S., DERVILLE G., Les Femmes et la politique,
Grenoble, PUG, 2004 ; SINEAU M., Parité. Le Conseil de l’Europe et la
participation des femmes à la vie politique, Strasbourg, Éd.du Conseil de
l’Europe, 2004 ; TREMBLAY M. (dir.), Genre, citoyenneté et représentation,
Sainte-Foy, Presses de l’Université Laval, 2007.
FÉODALITÉ
XIV . Son mécanisme est économique, mais il traduit aussi la diffusion dans
e
FINANCES PUBLIQUES
FONCTIONNAIRES
→ bureaucratie
FONCTIONNAIRES INTERNATIONAUX
FONDAMENTALISME PROTESTANT
d’alcool. Un reflux s’est observé ensuite jusque vers 1970, suivi d’une reprise
sous les présidences de Nixon et Johnson (sous l’égide notamment du pasteur
Billy Graham).
→ protestantisme et politique
FATH S., Militants de la Bible aux États-Unis. Évangéliques et
fondamentalistes du Sud, Paris, Autrement, coll. « Frontières », 2004 ;
LACORNE D., De la religion en Amérique. Essai d’histoire politique, Paris,
Gallimard, coll. « L’esprit de la cité », 2007 ; NOLL M., America’s God. From
Jonathan Edwards to Abraham Lincoln, Oxford, Oxford University Press,
2002.
FORMULE MAGIQUE
Expression en usage en Suisse romande, désignant le dispositif tacite en
vertu duquel les quatre grands partis helvétiques – radicaux, démocrates-
chrétiens, socialistes et ex-agrariens de l’UDC – se répartissent quel que soit
le résultat des élections un nombre fixe de postes ministériels au sein du
Conseil fédéral (le gouvernement, composé de 7 membres en permanence, en
2007 2 radicaux, 2 UDC, 2 socialistes et 1 chrétien-démocrate). Ce dispositif
s’esquissa déjà à partir de décembre 1943, dans un contexte d’union nationale
déterminé par la guerre mondiale, mais aussi suite au raz-de-marée socialiste
aux élections législatives du même mois (les socialistes jusqu’alors exclus du
Conseil fédéral obtenant 56 sièges sur 194 au Conseil national, soit 11 de plus
que dans la législature antérieure). Le gouvernement compta ainsi un
socialiste face à six radicaux, agrariens et chrétiens sociaux jusqu’à ce que le
Parti socialiste retourne dans l’opposition de 1953 à 1959. Ce n’est qu’après
cette date que la « formule magique » proprement dite est devenue
véritablement de règle et quasiment para-constitutionnelle en Suisse.
→ cabinet, élection, gouvernement, partis politiques, Systèmes de Partis
Foules (Théorie des)
Dans la seconde moitié du XIX siècle, en réaction contre les conséquences
e
FRANCHISE ÉLECTORALE
→ citoyenneté, suffrage
GAUCHE/DROITE
GENDER STUDIES
→ femmes, genre
GÉNOCIDE
Massacre en masse d’une population, ayant au sens exact pour objectif son
élimination totale pour des motifs ethniques, culturels ou religieux en
particulier. Le terme a été créé en 1944 par Raphael Lemkin par référence au
génocide commis par les nazis contre les juifs, et il se trouve défini comme
notion juridique dans la Convention sur le crime de génocide adoptée par
l’Assemblée générale des Nations Unies en 1948. La Convention pour la
prévention et la répression du crime de génocide, adoptée par l’assemblée
générale des Nations unies le 9 décembre 1948, considère que le génocide
constitue un ensemble d’actes « commis dans l’intention de détruire, tout ou
en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux comme tel ». De
même, l’article 6 du statut de la Cour pénale internationale considère le crime
de génocide comme un crime commis avec l’intention d’extermination totale
d’une population par la mise en œuvre systématique (donc planifiée) de cette
volonté. Un massacre de grande échelle ne constitue donc pas nécessairement
un génocide. Outre la Shoah, l’ONU et de nombreux pays considèrent le
massacre des Arméniens par l’Empire ottoman en 1915-1916 comme un
génocide. De même, le massacre des Tutsis au Rwanda ainsi que celui de
Srebrenica réalisé par les Serbes en juillet 1995 sont qualifiés par l’ONU de
génocide. Différents tribunaux ont jugé ces génocides, le Tribunal de
Nuremberg (massacres réalisés par les nazis), le Tribunal pénal international
(massacre en ex-Yougoslavie) ou encore le Tribunal pénal international pour
le Rwanda. De nos jours, certains tentent d’utiliser le terme de génocide pour
l’appliquer au mouvement vendéen durant la Révolution française, à la
destruction d’une culture, à la colonisation en s’éloignant de son sens originel.
Bien que le mot s’emploie également souvent à leur sujet, et quelle que soit
leur ampleur, les tueries à grande échelle perpétrées par les Khmers rouges au
Cambodge ne relèvent en réalité pas proprement de ce phénomène,
puisqu’une élimination absolue de l’ethnie cambodgienne aurait impliqué que
les dirigeants Khmers rouges envisagent eux-mêmes de se supprimer au bout
du compte, ce qui n’était sûrement pas le cas. Reste que ce mot est utilisé très
fréquemment abusivement, pour désigner toutes exécutions massives (ainsi, à
l’initiative de la justice espagnole, pour désigner les crimes commis contre des
milliers de cadres de la gauche chilienne par le régime du Général Pinochet).
→ nazisme, purification ethnique, Régimes (systèmes) totalitaires
L’Allemagne nazie et le génocide juif, Paris, Gallimard/Le Seuil, 1985 ;
ARENDT H., Le Système totalitaire, Paris, Seuil, 1972 ; BOUCHET-SAULNIER F.,
Dictionnaire pratique du droit humanitaire, Paris, La découverte & Syros,
1998, pp. 212-213 ; Aly GÖTZ A., HELM S., Les Architectes de
l’extermination : Auschwitz et la logique de l’anéantissement, Paris, Calmann-
Lévy, 2006 ; SÉMELIN J., « Du massacre au processus génocidaire », Revue
internationale des sciences sociales (174), déc. 2002, pp. 483-492 ;
SHELTON D., Encyclopedia of genocide and crimes against humanity, New
York, Macmillan, 2005 ; TANER A., Un acte honteux : le génocide arménien et
la question de la responsabilité turque, Paris, Denoel, 2008 ; Brickyards to
graveyards : from production to genocide in Rwanda. Albany, State
University of New York, 2002 ; TERNON Y., L’État criminel. Les génocides au
XX siècle, Paris, Seuil, 1995.
e
GENRE
GÉOPOLITIQUE
GERRYMANDERING
GLOBALISATION
GOUVERNABILITÉ
Une seconde dimension de ce concept prend en compte le fait que, dans les
sociétés développées, l’exercice du pouvoir politique suppose des
concertations et des négociations à différents niveaux, impliquant des acteurs
de statut inégal soit subordonnés hiérarchiquement soit, au contraire, plus ou
moins indépendants les uns des autres. Ainsi, le financement d’un équipement
lourd comme l’extension d’un aéroport transfrontalier ou la mise en œuvre de
la directive européenne Natura 2000, exigent-ils la mise en place d’une
articulation décisionnelle complexe. Interviendront, selon des modalités
juridiques particulières, avec des ressources politiques de nature différente, les
instances de l’Union européenne, les autorités de différents États et
collectivités locales (notamment les régions), des dirigeants d’établissements
publics et de firmes privées. Avec la gouvernance multi-niveaux, on cherche
ainsi à mieux rendre compte des processus effectifs d’exercice du pouvoir en
se donnant une vision plus globale de l’ensemble des parties prenantes et une
meilleure chance d’observer les multiples rationalités d’acteurs impliquées.
→ gouvernance, management public, politiques publiques
BACHE I., FLINDERS M. (ed.), Multi-level Governance, Oxford, Oxford
University Press, 2004 ; BENZ A., « Compound Representation in EU Multi-
level Governance », in KOLHER-KOCH B. (ed.), Linking EU and National
Governance, Oxford, Oxford University Press, 2003 ; GAUDIN J.-P., Pourquoi
la gouvernance ? Paris, Presses de Sciences-Po, 1999 ; HOOGHE L., MARKS G.,
Multi-level Governance and European Integration, Lanham, Rowman and
Littlefield, 2001 ; KOOIMAN J., Governing as Governance, London, Sage,
2003 ; LE GALÈS P., Le Retour des villes européennes. Sociétés urbaines,
mondialisation, gouvernement et gouvernance, Paris, Presses de Sciences-Po,
2003 ; WILKINSON R., Global Governance, Londres, Routledge, 2002.
GOUVERNEMENT
GOUVERNEMENT LOCAL
GOUVERNEMENTALITÉ
GROUPE DE RÉFÉRENCE/D’APPARTENANCE
GROUPES DE PRESSION
GUERRE
Les conflits entre États sont constitutifs de guerres dès lors qu’ils donnent
lieu à l’usage de la force. La guerre définit donc un État conflictuel dans
lequel les partenaires « vident leurs différends par la force » (Grotius).
Considérée comme l’aboutissement paroxystique de la rivalité chronique qui
oppose les États entre eux, la guerre est étroitement associée à une
compétition de puissances, à un « duel amplifié », comme l’établissait
Clausewitz, dans lequel « chacun cherche, en employant sa force physique, à
ce que l’autre exécute sa volonté ». À ce titre, elle vise à « terrasser »
l’adversaire et « ne connaît pas de limites » ; stratégique et finalisée, elle
repose sur une intention hostile plus qu’un sentiment hostile et sur une fin
politique précise. Autant de caractéristiques qu’on ne retrouve pas dans les
nouveaux conflits internationaux (voir ce mot), du moins de façon aussi
claire : toutes ces caractéristiques se prêtent assez mal en effet à l’évolution
récente de la conflictualité internationale qui se développe davantage au sein
des États qu’entre eux, abandonnant d’autant cette logique de duel.
Les évolutions théoriques récentes soulignent ainsi la prolifération des
formes non interétatiques de guerre (guerre civile) ou, métaphoriquement, les
formes non militaires (guerre économique, guerre commerciale…).
L’expression « conflits armés » est souvent préférée de nos jours au terme de
guerre.
→ conflit international, conflit international, démocratisation
ARON R., Paix et guerre entre les nations, Paris, Calmann-Lévy, 1962 ;
ARON R., Penser la guerre, Paris, Gallimard, 1976 ; BATTISTELLA D., Retour de
l’état de guerre, Paris, A. Colin, 2006 ; CLAUSEWITZ C. von, De La Guerre,
Paris, Payot, 2006 [1818] ; DAVID C. P., La Guerre et la paix, Paris, Presses de
Sciences Po, 2000 ; DÉRIENNIC J.-P., Les Guerres civiles, Paris, Presses de
Sciences Po, 2001 ; DOYLE M., Ways of War and Peace, New York, Norton,
1997 ; GROTIUS H., Le Droit de la guerre et de la paix, Paris, PUF, 1999
[1625] ; HOLSTI K., The State, War and the State of War, Cambridge,
Cambridge University Press, 1996 ; LEVY J., War in the Modern Great Power
System, 1495-1975, Lexington, University Press of Kentucky, 1983 ;
VASQUEZ J. (ed.), What do we Know About War ?, Lanham, Rowman and
Littlefield, 2000.
GUERRE PRÉVENTIVE
Guerre entreprise en vue de réduire une menace potentielle qui pèse sur un
État et qui est en fait définie par la subjectivité de celui qui y recourt. La
guerre préemptive suppose l’imminence et la matérialité de cette menace.
Elles ne sont admises ni l’une ni l’autre par le droit international.
COLONOMOS A., Le pari de la guerre : guerre préventive, guerre juste ?
Paris, Denoel, 2009.
H
HABITUS
HISTORICISME
Cette expression, popularisée par Popper dans une série d’articles parus en
1944, vise à identifier une tendance intellectuelle qui parcourt la pensée
occidentale depuis Platon à Marx en passant par Hegel. À proprement parler,
l’historicisme désigne cette démarche qui voit la clé d’interprétation des
institutions politiques ou des œuvres philosophiques dans leur généalogie.
C’est le contexte historique, donc la présence du passé dans le présent, qui
seul permet de comprendre ce qui fait sens dans toutes les manifestations de la
vie sociale. Ainsi conçu, l’historicisme inclut des auteurs aussi différents que
Hans-Georg Gadamer pour qui c’est un préjugé de croire que l’on puisse
penser sans préjugés, ou Foucault, attaché lui aussi à comprendre la
généalogie de toute forme de savoir. Cependant, Popper a fait de
l’historicisme une hydre qu’il s’acharne à dénoncer, rejoignant un combat
parallèle mené par Léo Strauss. Selon Popper, l’historicisme ne se contente
pas de nier l’existence de vérités universelles et intemporelles, Il porterait en
lui une vision qui conduit au totalitarisme. De Platon à Marx, l’auteur de La
Société ouverte et ses ennemis décrypte une lecture de l’histoire qui se
caractérise par un triple stigmate : le relativisme, le holisme et l’activisme. S’il
n’y a plus de vérité absolue ou invariante, il n’y a plus d’objectivité
scientifique ni non plus de normes universellement opposables à la tyrannie.
Si les individus sont déterminés par les structures sociales et soumis à des lois
historiques, alors il est possible de décrypter celles-ci et, à partir de cette
connaissance « scientifique », de soumettre les êtres humains à un type de
régime politique qui les manipule impunément. Ainsi conçu, l’historicisme
apparaît essentiellement comme une idéologie alors qu’à strictement parler, il
est avant tout un mode de connaissance.
FURET F., L’Atelier de l’histoire, Paris, Flammarion, 1982 ;
GADAMER H. G., Vérité et méthode. Les grandes lignes d’une herméneutique
philosophique, Paris, Seuil, 1996 [1960] ; POPPER K., Misère de l’historicisme,
Paris, Presses Pocket, 1998 [1944] ; POPPER K., La Société ouverte et ses
ennemis, vol. 2, Paris, Seuil, 1978 ; VEYNE P., Comment on écrit l’histoire,
Paris, Seuil, 1971.
HOLISME
IDEALTYP
→ type-idéal
IDENTITÉ POLITIQUE
IDÉOLOGIE
IMPÉRIALISME
INCRÉMENTALISME
INDIGÉNISME
INDIVIDUALISME MÉTHODOLOGIQUE
INDUSTRIALISATION
→ modernisation
INDUSTRIELLE (SOCIÉTÉ)
On entend par société industrielle un type de société dominé par une forte
division du travail menant à un rapide développement économique suscitant
une élévation de la consommation ; elle implique la formation de grandes
concentrations industrielles rendues possible par l’accumulation du capital,
l’usage sans limite des technologies les plus novatrices tournées vers la
croissance sans fin accentuant sans cesse la division des tâches, la naissance,
dans ce cadre, d’une grande concentration de la population ouvrière
impliquant presque toujours une séparation entre le lieu de travail et le lieu de
résidence et de loisir, menant du même coup, presque toujours, à une
destruction des formes communautaires d’appartenance sociale ainsi qu’à une
remise en question des représentations collectives traditionnelles. La
domination du marché et le règne de la concurrence entraînent aussi
l’apparition de forces syndicales organisées dans le cadre de l’entreprise. Par
beaucoup d’aspects, la société industrielle s’identifie, par conséquent, au
devenir de la société capitaliste ; reste alors à voir dans quelle mesure
l’histoire Économique du monde occidental serait le résultat d’un mode
unique de développement exportable partout, y compris dans les pays en voie
de développement qui devraient entrer à leur tour dans le même mode de
gestion sociale ; un certain nombre de politologues, comme David Apter ou
d’autres, ont en effet estimé que la modernisation de ces sociétés passe par
l’introduction des rôles issus de la société industrielle, perspective qui occulte
la dimension proprement politique du développement. Au nom du respect des
cultures et des histoires spécifiques, cette interprétation se trouve souvent
rejetée, même si une autre voie vers la modernisation socio-économique n’a
pas encore réellement vu le jour.
APTER D., The Politics of Modernization, Chicago, Chicago University
Press, 1965 ; ARON R., Dix-huit leçons sur la société industrielle, Paris,
Gallimard, 1962 ; BADIE B., Le Développement politique, Paris, Economica,
1994 ; BELL D., Vers la société postindustrielle, Paris, R. Laffont, 1975.
INFLUENCE
→ pouvoir
INFORMATION
→ communication politique
INGÉRENCE
INSTITUTION/INSTITUTIONNALISATION
INSTITUTIONNALISME HISTORIQUE
INSTITUTIONNALISME LIBÉRAL
→ multilatéralisme
INSTITUTIONS POLITIQUES
INSTRUMENTALISME
INTÉGRATION RÉGIONALE
INTERACTIONNISME
INTERCOMMUNALITÉ
INTÉRÊTS
XIX siècle, en font même le principe explicatif unique des mobiles individuels
e
de l’action. Pour ces auteurs, qui exercent aujourd’hui encore une grande influ
ence sur les théories de l’acteur rationnel, chacun est guidé dans ses
comportements par la recherche de son utilité, c’est-à-dire satisfaire ses
intérêts au meilleur coût escomptable (Expected Utility Maximization). Les
individus poursuivent des objectifs (postulat 1) ; ces objectifs sont
conditionnés par leurs intérêts personnels, tels qu’ils se les représentent
(postulat 2) ; leur comportement se dégage des préférences établies entre ces
divers intérêts (postulat 3). Quant aux phénomènes collectifs, ils résultent
d’une agrégation des stratégies individuelles fondées sur un calcul conscient.
Le courant contemporain, dit de l’individualisme méthodologique (Olson,
Boudon, Bourricaud), tend à donner de ces intérêts une vision en termes
essentiellement économiques. Soit par présupposé psychologique sommaire,
soit par conviction méthodologique (car les intérêts matériels ou
matérialisables se prêtent mieux à l’analyse quantitative). C’est ainsi le choix
opéré par Olson, dans son livre classique La Logique de l’action collective, de
même en France chez Raymond Boudon. Ces postulats inspirent aussi très
largement les théories des jeux ; mais les modèles les plus sophistiqués en
science politique (P. Ordeshook, Game Theory and Political Theory,
Cambridge, 1988) ont précisément mis en évidence la difficulté à décrire et
prévoir de cette manière la complexité des comportements humains.
En effet, comme l’a montré Hirschman, le rationalisme occidental, issu du
XVIII siècle, tend à établir une opposition radicale, en même temps qu’une
e
hiérarchie, entre les intérêts d’une part et une seconde catégorie de mobiles
d’autre part : les passions. Les premiers seuls induiraient des comportements
rationnels, impliquant un calcul fondé sur la recherche d’informations
pertinentes en situation d’incertitude ; les secondes échapperaient à toute
prévisibilité et pourraient déboucher sur des actes contraires aux intérêts du
sujet. En d’autres termes la maîtrise des passions serait une condition
nécessaire à la poursuite des intérêts.
Deux grandes problématiques ont modifié, au XX siècle, la manière de
e
INTERNET
INTERVENTIONNISME DE L’ÉTAT
Doctrine mais aussi pratique politique qui consiste à conférer à l’État (ou au
secteur public qu’il contrôle) un rôle actif de régulation. En matière
économique, financière et monétaire, il s’agira de corriger des déséquilibres
produits par le jeu spontané des lois du marché, soit par la dépense publique,
soit par la pression fiscale, soit par la réglementation. En matière sociale, cela
signifie assurer un rôle de protection des catégories défavorisées ou en
situation de vulnérabilité.
L’intervention peut être directe (dépenses budgétaires de santé, d’éducation,
de logement, lutte contre le chômage, etc.) ou indirecte (subventions à des
associations, prise en charge des déficits d’organismes de protection sociale,
etc.). Cette politique s’inscrit directement en opposition avec les conceptions
libérales héritées du XIX siècle selon lesquelles l’État doit se contenter, en
e
ISLAM ET POLITIQUE
L’islam est plural, dans l’espace comme dans le temps ; aussi est-il
simpliste d’énoncer une construction du politique homogène et propre à cette
religion multiséculaire, adoptée par un milliard d’individus environ. D’autant
que les acteurs sociaux gardent l’initiative d’agir sur toute religion, comme sur
tout système, tant pour les façonner et les transformer que pour en faire les
instruments symboliques de leur propre projet. Dans une perspective macro-
comparative, on peut cependant retrouver des caractéristiques qui distinguent
les sociétés du monde musulman de celles dominées par d’autres cultures, et
qui freinent ou entravent les processus de mondialisation des valeurs ou des
imaginaires. Ainsi en est-il d’abord du caractère moniste de la légitimité
islamique : celle-ci réside en un Dieu unique qui n’a pas délégué aux hommes
(ni donc aux princes ou au juriste) la compétence d’élaborer le juste.
Uniquement révélé, celui-ci ne saurait se retrouver dans l’œuvre législative
humaine : pour se légitimer le prince doit donc faire l’effort de se conformer à
la sharia (Loi Divine) qu’il retrouve dans le Coran, dans la Sunna du prophète
(ensemble des paroles et des actes qu’on lui prête), voire dans l’ijtihad (effort
d’interprétation conforme à la Loi Divine), ou l’ijma (consensus de la
communauté des croyants, ou, du moins, des Ulama, docteurs de la Loi). Dans
la même orientation, le prince doit protéger la communauté des croyants
(Umma) et défendre la foi. À cette conception de la légitimité s’ajoute un
autre fondement qui garantit le pouvoir du prince : la cité, avant d’être juste,
est nécessaire pour protéger du chaos et de la sédition (fitna). Cet aspect du
discours politique de l’islam peut apparaître comme source d’autoritarisme ou
d’arbitraire ; mais il se trouve aussi inversé dans le répertoire contestataire qui
considère que le prince impie peut être cause de fitna (de sédition) et, qu’à ce
titre, il doit être également combattu y compris par le jihad (effort religieux
pour combattre le mal, communément traduit par « guerre sainte »). La
contestation de nature religieuse se trouve ainsi valorisée et tend à activer
l’effort du prince pour se ressourcer à la Loi de Dieu. Cette vision est
cependant à mettre en perspective avec d’autres constructions qui ont marqué
– ou marquent encore – le devenir de nombreux systèmes politiques du monde
musulman, soit sous l’effet de facteurs exogènes et notamment de
l’importation moderne des modèles politiques occidentaux, soit sous l’effet de
traditions quiétistes, voire laïcisantes (cf. les travaux d’Olivier Carré)
élaborées dans différents contextes intellectuels et politiques. On a tendance à
distinguer, pour ces raisons, entre l’islam comme production théologique,
l’islam comme paramètre culturel structurant les comportements sociaux et la
construction institutionnelle, et l’islamisme comme forme d’action politique,
de gouvernement (Iran, Arabie Saoudite) et de contestation (salafisme,
djihadisme…), faisant de la fusion entre islam et politique un principe de
mobilisation politique.
→ légitimité, religion et politique
BADIE B., Les Deux États, Paris, Fayard, 1987 ; BEHRMAN L. G., Muslim
Brotherhoods and Politics in Senegal, Cambridge (Mass.), Harvard University
Press, 1970 ; BURGAT F., L’Islamisme en face, Paris, La Découverte, 2007 ;
CARRÉ O., L’Islam laïque, Paris, A. Colin, 1993 ; Mystique et politique. Le
Coran des islamistes, Paris, Cerf, 2004 ; DROZ-VINCENT P., « Quelles
nouvelles perspectives d’analyse des régimes politiques dans le monde
arabe ? », Revue française de science politique 55 (3), juin 2005 : 528-533 ;
GARDET L., L’Islam, religion et communauté, Paris, Desclée de Brouwer,
1968 ; GELLNER E., Muslim Society, Cambridge, Cambridge University Press,
1981 ; KEPEL G., Fitna, Paris, Gallimard, 2004 ; LEWIS B., Le Retour de
l’Islam, Paris, Gallimard, 1985 ; ROY O., L’Échec de l’islam politique, Paris,
Seuil, 1992 ; ROUGIER B., Qu’est-ce que le salafisme ?, Paris, PUF, 2009 ;
VANER S., HERADSTVEIT D., KAZANCIGIL A. (dirs.), Sécularisation det
democratization dans les societies musulmanes, Bruxelles, Bern, Peter Lang,
2008 ; VON GRUNEBAUM G., L’Identité culturelle de l’Islam, Paris, Gallimard,
1973.
ISLAMISME
→ Islam et politique
J
JACOBINISME
JUDAÏSME ET POLITIQUE
Ce thème immense se trouve abordé ici d’un point de vue très restrictif, en
mettant l’accent seulement sur la manière dont il se pose dans le contexte de la
France moderne. Aux lendemains de la Révolution, lorsque Napoléon
convoque un Sanhédrin de rabbins afin qu’ils cautionnent les nouveaux
rapports entre le judaïsme et l’État, ceux-ci interprètent de manière
particulièrement large la tradition talmudique, Dina de Malkhouta dina (« la
loi du royaume est la loi »), sanctionnant, ainsi, dans l’exil, la suprématie de la
loi du Royaume et, dorénavant, celle de l’État centralisateur à la française
particulièrement hostile à toute autonomie juridique civile, juive ou autre.
Nombre de rabbins, du XIX siècle à nos jours, vont chanter les louanges de la
e
JUSTICE
l’idée que les processus sociaux se trouvent commandés par des lois qu’il est
possible de discerner et que, par conséquent, les gouvernants avertis de celles-
ci se trouvent en mesure de remodeler la société qu’ils dirigent. Deux
principes alternatifs ou complémentaires vont dès lors conduire les théoriciens
et les artisans de la justice sociale : d’une part celui du mérite ou de la juste
rétribution, d’autre part celui de l’égalité dans la satisfaction des besoins.
Cette seconde conception a débouché dans sa version radicale sur les
doctrines communistes et, dans son interprétation modérée, sur le concept et
sur la pratique de la social-démocratie (qui représentent un compromis entre le
critère du mérite et celui des besoins ou de l’égalité).
LAÏCITÉ
Fayard, 2004.
LANGAGE POLITIQUE
→ communication politique
LEADERS D’OPINION
LEADERSHIP
→ charisme, personnalisation
LÉGALITÉ
LÉGISLATIF (POUVOIR)
→ exécutif/législatif (pouvoirs)
LÉGITIMITÉ
Juan Linz définit la légitimité comme une croyance faisant qu’en dépit de
leurs insuffisances et de leurs défauts, les institutions politiques d’un peuple
lui apparaissent supérieures à toutes les autres formes de gouvernement. Il
s’agit en outre d’une qualité du pouvoir dont l’acceptation se fonde non sur la
coercition comme ressource première, mais sur le consentement réputé libre
de la population qui s’y trouve soumise (consentement opposé à la sujétion).
Ce critère de liberté dans la soumission peut évidemment poser problème dans
certains cas. Toutefois, l’obligation morale d’obéissance repose sur cette
conception de la légitimité du pouvoir politique qui la requiert.
La légitimité découle à la fois de principes de nature symbolique et de
pratiques dont la transgression rompt le consensus. Ces principes et ces
pratiques ont nécessairement varié dans l’espace et dans le temps : autorité
divine ou magique, coutumes ancestrales, hiérarchies lignagères ou
générationnelles, loi dite naturelle, hérédité dynastique, constitutionnalité,
régularité juridique, légitimité démocratique dérivée de l’élection ou d’une
dynamique populiste. Cependant, la légitimité constitue bien, dans toutes les
circonstances, l’élément de portée sociale et intime à la fois qui fait accepter
volontairement par les gouvernés l’autorité des gouvernants. Elle dérive moins
de la conformité d’un ensemble de règles formelles que de la symbolique d’un
imaginaire politique en général sans alternative dans une société et à un
moment donnés, ou encore d’un système de valeurs. Il faut ajouter que cette
dimension normative et éthique n’épuise pas la notion de légitimité. Celle-ci
doit s’appréhender également au niveau descriptif, dans sa prégnance
effective, en ce sens qu’elle est toujours à consolider et que le simple
acquiescement passif fonde l’obligation d’obéissance de la plupart des
gouvernés y compris dans les démocraties.
→ autorité, obligation politique, valeur
WEBER M., Œuvres politiques (1895-1919), Paris, Albin-Michel, 2004.
LÉGITIMITÉ (TYPES DE). Max Weber distingue trois grands types de
domination légitime. Lorsque la domination est rationnelle et légale,
l’obéissance se trouve régie par des règles abstraites, le détenteur du pouvoir
légal est lié par cette dimension impersonnelle tout comme celui qui subit ce
pouvoir ; c’est comme citoyen qu’il accepte la légitimité d’un pouvoir légal
justifié par la compétence de celui qui l’exerce ainsi que par une totale
absence de dimension personnelle ; le type le plus pur de ce mode de
domination se fait jour dans le cadre de la direction administrative
bureaucratique. Weber oppose cette domination légitime à la domination
traditionnelle ; la légitimité de cette dernière repose cette fois sur le sacré :
« Le détenteur du pouvoir est déterminé en vertu d’une règle transmise. On lui
obéit en vertu de la dignité personnelle qui lui est conférée par la tradition. »
Le caractère interpersonnel de ce type de domination est donc nettement plus
marqué ; du coup, ceux qui obéissent entrent souvent dans des rapports de
dépendance de type patrimonial. Weber décrit enfin la domination
charismatique dont la légitimité repose sur les qualités extraordinaires de celui
qui la détient et à travers laquelle se constitue une « communauté
émotionnelle » rassemblant les disciples, les fidèles ou encore, les hommes de
confiance. Ces types purs ne se produisent que très rarement et l’on assiste
fréquemment à leur combinaison ; ils peuvent aussi se succéder les uns les
autres, Weber n’entrant toutefois pas dans une conception évolutionniste de la
légitimité où un grand type succéderait, au cours de l’évolution de l’histoire, à
un autre. À ses yeux, il arrive donc que l’on puisse passer de la légitimité
rationnelle à la légitimité charismatique et, inversement, le détenteur d’un
pouvoir plébiscitaire peut tenter de s’appuyer sur une direction administrative
légale.
→ charisme, domination (types de), tradition
WEBER M., Œuvres politiques (1895-1919), Paris, Albin-Michel, 2004.
LÉNINISME
→ démocratisation
Libéralisme
À l’encontre d’une vision moniste et homogène de la société qui se fait jour
aussi bien chez Hobbes que chez Rousseau, les théoriciens de libéralisme
entendent favoriser la représentation politique des multiples intérêts. Cette
tradition libérale, demeurée relativement secondaire dans l’histoire française,
est illustrée, par exemple, par Tocqueville mais aussi, et bien davantage
encore, par Benjamin Constant ou encore Prévost-Paradol. Rejetant la
dimension purement abstraite et uniforme de la volonté générale issue du
courant révolutionnaire de 1789 sans pour autant adhérer à la pensée
réactionnaire, ces auteurs trouvent dans le monde anglo-saxon la source de
leur inspiration. Benjamin Constant donne au libéralisme français ses lettres
de noblesse : dans De l’esprit de conquête et de l’usurpation (1814), il
souligne d’emblée que « l’opinion générale ne se compose que des opinions
particulières » ; et, contre la conception que les anciens se faisaient de la
liberté en participant au pouvoir politique tout en renonçant à défendre une
« indépendance privée », contre tous les révolutionnaires s’inspirant de ces
seuls modèles antiques, contre l’abbé Sièyes qui « détestait la liberté
individuelle en ennemi personnel », il écrit : « c’est au nom de la liberté qu’on
nous a donné des prisons. » Selon lui, comme il l’affirme dans son discours
De la liberté des anciens comparée à celle des modernes, « notre liberté à
nous doit se composer de la jouissance paisible de l’indépendance privée […]
L’indépendance individuelle est le premier besoin des modernes ; en
conséquence, il ne faut jamais leur en demander le sacrifice pour établir la
liberté ». Face aux courants du catholicisme intransigeant, de la réaction
organiciste ou encore, du socialisme, ce libéralisme est demeuré assez faible.
Beaucoup de courants de pensée souhaitaient faire jouer un rôle majeur à un
État interventionniste : les uns sur le plan scolaire avec une conception
offensive de la laïcité, les autres sur le plan économique (protectionnisme
agricole et industriel), d’autres encore acquis à une vision réformiste ou
révolutionnaire de la société. Dans un sens plus courant et actuel, le terme de
libéralisme désigne une orientation centrée sur l’économie de marché, les
privatisations, la libre circulation des marchandises, des services et des
moyens financiers, réduisant l’intervention économique de l’État à la portion
congrue et accordant même la suprématie à l’ajustement par le marché plutôt
qu’à la régulation politique. L’expression néo-libéralisme a pratiquement
acquis la même signification.
→ démocratie, individualisme, libertariens, pluralisme
ARMSTRONG KELLY G., The Humane Comedy. Constant, Tocqueville and
French Liberalism, Cambridge, Cambridge University Press, 1992 ; BERLIN I.,
Éloge de la liberté, Paris, Presses Pocket, 1990 ; CONSTANT B., « De la liberté
des anciens comparée à celle des modernes », in De l’esprit de conquête et de
l’usurpation, Paris, Flammarion, 1986 ; HOLMES S., Benjamin Constant et la
genèse du libéralisme politique, PUF, 1994 ; MACPHERSON C. B., La Théorie
politique de l’individualisme possessif. De Hobbes à Locke, Paris, Gallimard
(Folio), 2004 [1971] ; MANENT P., Les Libéraux, 2 vol., Paris, Pluriel, 1986 ;
RAWLS J., Libéralisme politique, PUF, 1995.
LIBERTARIENS
LIBERTÉ/ÉGALITÉ
Du point de vue de la science politique, ce qui importe est de cerner non pas
les contenus philosophiques de ces concepts majeurs de l’histoire de la
pensée, mais les représentations que peuvent s’en construire les différents
agents sociaux et, surtout, les usages qu’ils en font pour mieux légitimer leurs
attentes ou leurs exigences. À cet égard les deux termes gagnent à être mis en
relation étroite car, dans les règles du jeu démocratique, ils se « répondent ».
Ces deux valeurs de référence ont d’abord ceci en commun qu’elles ne
correspondent nulle part à une complète concrétisation sociale. L’égalité
s’entend non pas comme égalité réelle des conditions, ce qu’aucune société
contemporaine développée n’approche, même de très loin ; elle signifie
égalité des droits, donc l’acceptation en pratique d’innombrables inégalités
effectives. La liberté est un concept philosophique au contenu fluide (que
représente exactement le libre-arbitre au regard des innombrables modalités
du contrôle social ?). De toute évidence on ne peut entendre au pied de la
lettre la définition donnée par l’article 4 de la Déclaration de 1789 : « La
Liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui » ;
d’innombrables activités professionnelles (et politiques) par exemple
deviendraient impossibles à exercer. Dans une démocratie, elle recouvre
essentiellement l’exercice des libertés publiques constitutionnellement
consacrées : ce qui n’est pas rien, mais n’épuise évidemment pas la richesse
des significations virtuelles du terme.
Politiquement parlant, l’importance de ces concepts majeurs réside dans
leur efficacité symbolique. Grâce à leurs connotations émotionnelles positives
elles recèlent une grande capacité mobilisatrice pour l’action collective et cela,
d’autant plus que les significations susceptibles de leur être attachées sont
presque illimitées. En effet l’attachement à la liberté ne légitime pas les
mêmes aspirations ni les mêmes intérêts chez le petit commerçant ou chez le
journaliste, chez le médecin libéral ou dans les professions d’éducateur. Et
comme entre les faibles et les forts (pour parler comme Lacordaire) la liberté
confère manifestement un avantage aux dominants, la revendiquer constitue
un moyen de dire socialement quelque chose qui ne serait pas recevable sans
risque politique : à savoir la justification de l’agressivité. La liberté est en effet
invoquée comme excuse, et légitimation, de la compétition la plus âpre,
parfois la plus cruelle dans ses conséquences, aussi bien sur le terrain
économique de la concurrence entre firmes que sur celui des pratiques
médiatiques en matière d’information. Mais, précisément, la revendication
également légitime de l’égalité introduit un rééquilibrage symbolique au profit
des dominés. Justifiant l’expression des mécontentements, des insatisfactions
ou des revendications, elle habille d’un voile de respectabilité politique ce qui
n’est parfois que revendication de privilèges ; plus largement elle contribue à
la recevabilité dans le débat démocratique de contestations multiples qui, bien
loin d’ébranler les assises du régime politique, permettent au contraire d’en
démontrer l’ouverture et la capacité de les prendre en charge sans drame
institutionnel majeur. Ainsi ces deux mots clés du vocabulaire démocratique
sont-ils constamment sollicités dans le débat politique à la fois parce qu’ils
portent en eux un exceptionnel pouvoir de légitimation et de mobilisation,
mais aussi parce qu’ils créent dans la société l’illusion d’un partage de valeurs
communes, en raison de la diversité des projections qu’ils peuvent accueillir.
→ démocratie, symbolique politique
LIBERTÉ DES ANCIENS/LIBERTÉ DES MODERNES
→ libéralisme
Libertés publiques
Dans un État de Droit, ce sont des prérogatives reconnues aux citoyens, et
plus largement à tout individu (étranger, enfant mineur) qui permettent de
concrétiser face à la Puissance publique un espace d’initiative individuelle ou
collective. Elles sont généralement proclamées par une norme juridique de
nature constitutionnelle de telle sorte qu’elles s’imposent à tous les organes de
l’État y compris au Parlement dont les lois peuvent alors faire l’objet d’un
contrôle de constitutionnalité (aux États-Unis par la Cour suprême, en
Allemagne par la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, en France par le
Conseil constitutionnel).
Du point de vue du politiste, les libertés publiques sont à la fois des enjeux
du débat politique et des moyens d’action (ressources politiques). Dans le
premier cas, elles sont fréquemment mises en balance, explicitement ou non,
avec des considérations de sécurité, de « raison d’État » ; dans le second, elles
apparaissent indissociablement liées à la participation de type démocratique
(suffrage universel, discussion publique des options politiques, droits de
l’opposition).
Les libertés publiques peuvent être regroupées autour de quatre pôles :
– les libertés de la personne (liberté individuelle, liberté de conscience et
liberté religieuse, liberté d’opinion) ;
– les libertés de communication (liberté de réunion, liberté de presse,
d’information, de communication audiovisuelle, liberté d’enseignement) ;
– les libertés à caractère économique (propriété, liberté d’entreprise, liberté
du travail) ;
– les libertés-modes collectifs d’action (liberté d’association, liberté
syndicale, droit de grève).
→ démocratie, Droits de l’Homme, État : État de droit, libertariens
CHEVALLIER J., L’État de droit, Paris, Montchrestien, 1999 ; LEBRETON G.,
Libertés publiques et droits de l’Homme, Paris, Sirey, 2009 ; OBERDORFF H.,
Droits de l’Homme et libertés fondamentales, Paris, LGDJ, 2008 ; SUDRE F.,
Droit européen et international des droits de l’Homme, Paris, PUF, 2008.
LINKAGE
LITURGIE POLITIQUE
LOBBY
→ groupes de pression
LOI
LOYALTY
LUSTRATION
MAGNA CARTA
Charte écrite imposée par les barons anglais au roi Jean sans Terre
(juin 1215), pour le contraindre à reconnaître et protéger les libertés et les
privilèges de la noblesse anglaise. Cassée par le Pape Innocent III qui releva
Jean sans Terre de ses serments, elle n’en constitue pas moins un document
décisif, tant du point de vue des libertés publiques que du droit
constitutionnel.
Sur le plan des libertés, elle consacre le premier Habeas Corpus en
interdisant toute détention, mise hors la loi ou exil qui n’aient été décidés par
un jugement légal. Sur le plan constitutionnel, elle scelle la première
expression écrite d’une limitation légale de l’arbitraire monarchique, en
instituant un Conseil de surveillance dont la fonction est de veiller à
l’application réelle de la Charte. En cela, elle annonce, avec le complément
des Provisions d’Oxford (mai-juin 1258), la création d’institutions
parlementaires.
À usage exclusif de la noblesse (étendu à la bourgeoisie londonienne), ce
document n’avait pas, dans le contexte de l’époque, cette valeur et cette
orientation universalistes (encore moins démocratiques) que lui a prêtées, plus
tard, l’historiographie anglaise de la période victorienne.
→ libertés publiques, parlement
Types d’interventions prévus par la Charte des Nations Unies, dans le cadre
de son chapitre VI consacré au « règlement pacifique des conflits » (maintien
de la paix) ou de son chapitre VII prévoyant des actions destinées à imposer la
paix au cas où celle-ci serait menacée ou rompue (imposition de la paix). Dans
les deux cas, les opérations sont décidées par la Conseil de sécurité et
supposent la mobilisation de contingents militaires volontairement fournis par
des États-membres qui assurent leur équipement et leur entretien.
La distinction entre ces deux types d’opérations n’a jamais été très claire
dans la réalité, comme le suggèrent en particulier celles menées au Congo ex-
belge (ONUC, 1960) ou dans l’ex-Yougoslavie dans les années 1990. Pour
cette raison, on a pu parler d’opérations conduites selon les modalités du
« chapitre VI et demi » de la Charte. Les opérations de maintien de la paix
relevant à la lettre du chapitre VI (peace-keeping) ont en outre évolué au sortir
de la Guerre froide, en se dégageant de la seule logique d’interposition pour
contribuer à créer les conditions d’une paix civile et politique effective
(peace-making), ainsi que le montrent les exemples de la Namibie (GANUPT,
1989-1990), où il s’agissait de garantir l’accès à l’indépendance, ou du
Cambodge (APRONUC, 1993), où l’objectif était la tenue d’élections libres.
On parle volontiers alors « d’opérations de deuxième génération ».
De même, la fin de la bipolarité a revitalisé les opérations du chapitre VII
(peace enforcement), avec des succès d’ailleurs inégaux (Guerre du Golfe en
1991, ou opération ONUSOM en Somalie en 1992). Même si ces opérations
s’inscrivent dans le projet global de sécurité collective, auparavant gelé au-
delà de l’action menée par l’ONU en Corée (1950), elles restent encore peu
probantes, tant dans leur efficacité que dans leur nature (opérations de guerre
ou opérations humanitaires ? opérations onusiennes ou opérations de super-
puissance ?).
→ ingérence, international, sécurité
BERTRAND M., L’ONU, Paris, La Découverte, 2000 ; COULON J. (dir.),
Guide du maintien de la paix, Montréal, Athéna/CEPES, 2004 ; TAYLOR P.,
GROOM A. J. R. (eds.), International Institutions, Londres, Pinter, 1990 ;
HILL S. M., MALIK S. P., Peacekeeping and the United Nations, Aldershot,
Asggate, 1996.
MAJORITAIRE (PRINCIPE)
MANAGEMENT PUBLIC
MARCHÉ POLITIQUE
MARGINALITÉ POLITIQUE
MARXISME
MÉDIAS
MÉDIATION
MÉRITOCRATIE
idéal dont la finalité limite l’emprise d’un parti ou d’un groupe social
spécifique. La méritocratie sert aussi à justifier les régimes de type
technocratique.
→ démocratie, élitistes (théories), hiérarchie sociale
IHL O., Le Mérite et la République. Essai sur la société des émules, Paris,
Gallimard, 2007.
MESSIANISME
MÉTHODOLOGIE
Ce qui caractérise le discours scientifique ce n’est pas qu’il atteigne au
« vrai », mais qu’il accède à une meilleure capacité d’élucidation grâce à des
méthodes susceptibles à la fois d’affiner le regard et d’identifier les conditions
de validité des résultats de la recherche. Le savoir savant en effet n’est jamais
une « photographie du réel » mais une interprétation conditionnée par
l’emploi des paradigmes retenus, des concepts mis en œuvre, des techniques
d’investigation utilisées. Ainsi, pour prendre un exemple simple comme
l’analyse de l’état de l’opinion publique sur un problème politique, la
définition du concept d’opinion, construite ou empruntée par le chercheur,
commande l’orientation de l’enquête ; surtout les données exploitables ne
seront pas de même nature selon qu’elles auront été recueillies par
questionnaire standardisé administré, à l’occasion d’un sondage, à un
échantillon représentatif, ou par une observation approfondie sur le terrain, de
type ethnographique ; enfin elles ne permettront pas de dégager les mêmes
conclusions puisque, dans le premier cas, elles seront plus frustes mais
extrapolables à l’ensemble de la population, et, dans le second, beaucoup plus
riches mais non susceptibles d’extension automatique au-delà du groupe
étudié.
Les problèmes méthodologiques naissent aux différentes étapes de la
démarche scientifique. On peut tout d’abord se poser la question du choix des
paradigmes. On entend par là un système de propositions fondamentales, de
pratiques scientifiques et de méthodes d’investigation dont l’acceptation
conventionnelle, dans tout ou partie de la communauté savante, constitue une
tradition de recherche (cf. Kuhn). Le paradigme est donc le cadre intellectuel
dans lequel fonctionne un auteur et à l’intérieur duquel ses œuvres sont
intelligibles. Ainsi le paradigme mertonien (néo-fonctionnaliste) met-il en
avant une explication sociologique fondée sur l’étude des besoins et des
demandes auxquels les institutions fournissent des réponses plus ou moins
appropriées. Le paradigme de l’acteur rationnel valorise un point de départ :
les comportements individuels fondés sur le calcul coûts/avantages en
situation socialement construite. De même peut-on parler du paradigme
wébérien de la domination, des paradigmes behavioralistes, constructivistes
(cf. Berger et Luckmann) ou ethnométhodologiques (cf. Garfinkel), des
paradigmes de la modernisation et du développement, des paradigmes
identitaires, etc.
Comme l’a longuement montré Thomas Kuhn, un paradigme mobilise non
seulement des propositions démontrables mais bien plus encore des croyances
tenues pour acquises par des autorités scientifiques légitimes. En d’autres
termes il constitue toujours un « pari » dont la validité s’apprécie
essentiellement à partir de sa fécondité heuristique, c’est-à-dire sa capacité
d’orienter vers des recherches fécondes et d’engendrer des études et
conclusions prédictives de phénomènes. Il serait donc illusoire, et scientiste,
d’accorder à tout paradigme le caractère objectif du « vrai », opposable à
l’« erreur » (c’est-à-dire à tout ce qui lui serait extérieur).
Les problèmes méthodologiques apparaissent ensuite au niveau des
hypothèses de recherche et des concepts retenus. Toute entreprise savante est
une entreprise de classement ou encore, selon l’expression des
constructivistes, de typification ; il faut élaborer des catégories d’analyse pour
pouvoir penser le monde observable. La recherche suppose d’abord
l’identification d’un problème, c’est-à-dire la mise en place d’un système de
questionnements autour d’une « énigme » à déchiffrer. C’est ce que, dans le
langage contemporain, on appelle « construire l’objet ». Ainsi, au début de ce
siècle, des sociologues et des historiens comme Max Weber, Otto Hintze,
Marc Bloch… se sont-ils posé la question de savoir si la féodalité était une
étape historique traversée par toutes les grandes civilisations d’Europe et
d’Asie. Il fallait donc définir la catégorie « féodalité ». Face à ce type de
problème, deux manières de procéder sont envisageables. Soit le chercheur
observera empiriquement l’ensemble des traits, caractéristiques à ses yeux, du
phénomène (historique) considéré au sein de chacune des civilisations
retenues, et il s’efforcera d’en présenter une synthèse. Il dégagera alors ce que
l’on appelle un « type réel » (par opposition à un « idéal-type »). La réponse
au problème initialement posé résidera alors dans une comparaison terme à
terme des types réels, qui dégage ou non des similitudes fondamentales entre
les diverses situations historiques étudiées.
Au contraire la construction d’un idéal-type, au sens où l’a conçu Max
Weber, implique une activité intellectuelle plus autonome. Il ne s’agit plus de
conceptualiser le matériau (historique) tel qu’il est, dans toute sa singularité,
mais d’énoncer un système de propriétés jugées essentielles auxquelles seront
confrontés les matériaux historiques disponibles. En d’autres termes, l’idéal-
type est un concept nominaliste : il indique avec quel outillage analytique le
chercheur va interroger les réalités observables. Ainsi Hintze a-t-il construit
l’idéal-type « féodalité » autour de trois facteurs qui se conditionnent
mutuellement : le facteur militaire (apparition d’un ordre privilégié de
guerriers), le facteur socio-économique (ces guerriers tirent leurs revenus de la
propriété foncière qui leur assure une rente fondée sur le travail de leurs
paysans), le facteur politique (la noblesse guerrière s’autonomise localement
grâce à la prédominance de liens personnels sur les liens institutionnels qui
demeurent très lâches). Et c’est ce concept qui va lui permettre de discerner
des formations historiques pleinement féodales (Allemagne, France, Japon,
pays arabo-musulmans) et d’autres qui n’en manifestent que des éléments
partiels (Inde, Chine, Pologne, etc.).
La méthode des types-idéaux doit être correctement comprise.
Généralement ceux-ci ne se retrouvent pas de façon pure dans la réalité
observable. Lorsque Max Weber distinguait la domination légale/rationnelle
(caractéristique de l’État moderne), la domination traditionnelle et la
domination charismatique, il n’ignorait pas que des éléments de domination
traditionnelle ou charismatique pouvaient perdurer ou réapparaître dans l’État
moderne ; mais l’important pour lui était précisément de pouvoir évaluer
l’importance respective de ces traits caractéristiques au sein d’une même
formation historique ; c’est-à-dire confronter les réalités à l’outil d’analyse.
Les problèmes méthodologiques apparaissent enfin au niveau du choix des
techniques d’investigation. Celles-ci sont de nature variée, présentant chacune
leurs avantages et leurs limites. Les unes privilégient le travail sur documents
existants : archives de toute nature, textes juridiques, presse écrite ou
audiovisuelle, mémoires et autobiographies d’acteurs, mais aussi analyses et
commentaires voire ouvrages littéraires ou « grand public » qui contribuent
activement à la construction des représentations du politique. D’autres
relèvent d’un travail direct de terrain : enquêtes ethnologiques,
observation/participation, sondages d’opinion, expérimentation en situation
réelle. D’autres enfin font place au travail sur des situations artificiellement
créées : expérimentation en laboratoire, simulations mathématiques, jeux et
modèles formels. Dans la première catégorie de techniques d’investigation,
l’analyse de discours joue un rôle essentiel, empruntant aux disciplines de la
linguistique, de la sémiologie, de l’histoire (critique de textes) et s’ouvrant
parfois à l’outil mathématique (sémantique quantitative par ex.). La seconde
catégorie de méthodes est dominée par le recours à la technique de l’entretien
qui peut être directif (administration d’un questionnaire), semi-directif
(recours à un guide d’entretien) ou non-directif (principe de libre association).
La troisième suppose une réflexion logique très rigoureuse concernant la
détermination et le contrôle des variables retenues en vue de mesurer,
mathématiquement ou non, l’influence d’une manipulation de certaines
d’entre elles sur la situation globale et sa dynamique.
Le choix des paradigmes (est-il toujours totalement conscient ?), celui des
méthodes et des techniques d’investigation modifient considérablement
l’éclairage donné sur l’objet. Le paradigme de l’acteur rationnel permet plus
difficilement de prendre en considération l’importance des contraintes sociales
intériorisées par le sujet dès la première socialisation. Le recours aux
méthodes quantitatives présente l’immense avantage d’introduire rigueur et
précision ; mais l’absence de données fiables en certains domaines conduit
souvent à exclure de l’analyse des facteurs explicatifs d’importance majeure,
par exemple les phénomènes d’ordre symbolique. Et toute « typologisation »
fait surgir un instrument de lecture du réel qui cristallise la visibilité de
certains phénomènes en même temps qu’il en occulte d’autres. Ainsi, prendre
comme critère de structuration des familles politiques l’échelle droite-gauche
tend à favoriser d’une part une surestimation de ce qui sépare visiblement ces
deux pôles au détriment de ce qui les rapproche sur d’autres terrains ; cela
provoque également une sous-estimation des divergences internes au sein de
chaque famille, et tend à rendre plus malaisée la correcte appréhension de la
fluidité historique de ce que représentent la droite et la gauche pour les
générations successives.
Toute réflexion méthodologique doit affronter le problème de ce que
signifie « comprendre ». Avec Durkheim était privilé giée la recherche des
causes. On entend par là la mise en évidence de rapports de nécessité entre
deux phénomènes (ou catégories de phénomènes) de telle sorte que « si A…,
alors B… ». Cependant la notion de causalité pose parfois problème. D’abord
parce qu’elle peut être difficile à dégager de l’observation : une corrélation
statistique entre deux phénomènes A et B peut signifier que A cause B, ou que
B cause A, ou encore que A et B sont produits parallèlement par un facteur C
non identifié ; de même l’observation en histoire d’une séquence
d’événements ne signifie-t-elle pas nécessairement que l’événement en amont
« explique » l’événement en aval. Surtout peut-être, l’existence de rapports de
corrélation complexes entre des configurations de facteurs explicatifs, les
effets de rétroaction des uns sur les autres (que l’analyse systémique excelle à
mettre en évidence) font apparaître le caractère étriqué parfois de la notion
même de causalité qui tend alors à s’effacer derrière la réalité
d’« agencements d’interactions ».
Les sciences sociales sont confrontées à une autre modalité de l’explication
qui consiste à dégager des lois, impliquant une certaine prédictivité des
phénomènes. Lois très générales de l’Histoire comme déjà Tocqueville ou
Marx en ont formulé au XIX siècle ou, plus modestement aujourd’hui, lois
e
MIGRATION
en mouvement, Paris, SEDES, 1986 ; BADIE B., BRAUMAN R., DECAUX E.,
DEVIN G., WITHOL DE WENDEN C., Un autre regard sur les migrations, Paris,
La Découverte, 2008 ; WITHOL DE WENDEN C., Atlas mondial des migrations,
Paris, Autrement, 2009.
MILITAIRES ET POLITIQUE
MILITANTISME
MILLÉNARISME
→ messianisme
MINISTRES
MINORITÉ
Se dit de tout groupe social, quel qu’il soit, qui dans une société donnée, se
trouve en situation d’infériorité par rapport à un groupe dominant. Cette
infériorité s’exprime de façon quantitative, mais se définit aussi par référence
à des données qualitatives de nature culturelle : on parlera ainsi de « minorités
linguistiques », de « minorités religieuses » ou de « minorités ethniques »
voire de « minorités sociales », recouvrant tout un ensemble de
caractéristiques liées à des pratiques sociales considérées comme déviantes au
sein de la société concernée. En fait, la minorité n’existe que par rapport au
modèle de domination qui fonde la société, qui distingue entre la norme et la
déviance, entre le légitime et l’illégitime et qui définit les conditions de plein
exercice de la participation politique. L’existence de minorités soulève ainsi le
problème de leur protection, de la garantie de leurs droits et des modes
d’exercice de leur autonomie. Au niveau de la société tout entière, se pose la
question de leur compatibilité avec le principe de l’unité de l’État, de
l’indivisibilité de la souveraineté et du respect éventuel du principe
majoritaire. La société plurale, en organisant la coexistence de minorités, ou la
société consociative, en définissant les conditions du partage des
responsabilités politiques entre elles, apparaissent comme des formes
d’accommodement d’un ordre social composé de minorités structurées et
organisées. En langage institutionnel, on parlera de « minorité électorale » ou
de « minorité parlementaire » pour désigner des ensembles électoraux ou
partisans ayant rassemblé une minorité de suffrages, et exclus, à ce titre, de
l’exercice du pouvoir.
→ culture, ethnicité, majoritaire (principe), opposition, parlement
MINORITÉ (Gouvernement de). Dans un régime démocratique représentatif,
le gouvernement de minorité désigne une formation gouvernementale qui
résulte d’une coalition parlementaire arithmétiquement minoritaire. La
situation se présente lorsque la configuration des clivages partisans rend
impossible la formation d’une coalition majoritaire et donne donc naissance à
une pluralité de coalitions minoritaires possibles. Elle peut aussi dériver, dans
un modèle de bipolarisation, d’une victoire très courte d’une des deux
coalitions qui doit alors bénéficier de la neutralité bienveillante des quelques
Élus inclassables ou appartenant à de petits partis qui ne relèvent d’aucune des
deux coalitions possibles. Enfin, le gouvernement de minorité peut aussi
résulter du retrait de la coalition gouvernementale de certaines des formations
qui le composaient et qui choisissent soit le « soutien (parlementaire) sans
participation (gouvernementale) » soit le soutien sélectif.
MOBILISATION POLITIQUE
Concept très utilisé en science politique, mais dans des sens variés et
parfois de façon galvaudée. On peut retenir, avec François Chazel, que la
mobilisation politique désigne « la création de nouveaux engagements et de
nouvelles identifications – ou quelquefois la réactivation de loyautés et
d’identifications oubliées – ainsi que le rassemblement, sur cette base,
d’acteurs ou de groupes d’acteurs dans le cadre d’un mouvement social
chargé, au besoin par la confrontation directe et éventuellement violente avec
les autorités en place, de promouvoir et parfois de restaurer des fins
collectives ». La mobilisation politique suppose ainsi la réunion de trois
éléments constitutifs : l’activation des engagements et des identifications, la
formation d’un mouvement social, la définition de fins collectives. Autant
d’éléments qui peuvent recouvrir les domaines les plus divers de l’action
politique : aussi pourra-t-on faire État de « mobilisation citoyenne », de
« mobilisation révolutionnaire », de « mobilisation électorale », de
« mobilisation partisane » ou de « mobilisation syndicale »…
La mobilisation politique se distingue de la mobilisation sociale qui se
rapporte, quant à elle, au changement social. Elle désigne le processus de
déliquescence des allégeances traditionnelles et les transformations qui en
dérivent : Karl Deutsch, notamment, suggère qu’en s’émancipant de son
groupe communautaire d’appartenance, l’individu tend à s’intégrer à un public
mobilisé dont la constitution renouvelle profondément la configuration des
sociétés et des systèmes politiques qui en sont affectés. En ce sens, la
mobilisation est autant un processus de changement qu’un État qui se mesure
à l’aide d’indicateurs (urbanisation, alphabétisation, essor des mass medias,
développement d’un marché, essor des communications, etc.).
→ action collective, altermondialisme, citoyenneté, identité politique,
loyalty, nation : nationalisme, participation politique
CHAZEL F., « La mobilisation politique », Revue française de science
politique, juin 1975 ; CHAZEL F. (dir.), Action collective et mouvements
sociaux, Paris, PUF, 1993 ; CRÉTTIEZ X., SOMMIER I. (dir.), La France rebelle.
Tous les mouvements et acteurs de la contestation, Paris, Michalon, 2006 ;
ION J., FRANGULADAKIS S., VIOT P., Militer aujourd’hui, Paris, Éd. Autrement
(CEVIPOF), 2005 ; ION J., La Fin des militants ? Paris, Éd. de l’Atelier/Éd.
ouvrières, 1997 ; LAGRANGE H., OBERTI M. (dirs.), Émeutes urbaines et
protestations. Une singularité française, Paris, Presses de Sciences Po, 2006.
MOBILISATION SOCIALE
→ mobilisation politique
MODÈLES
MODÈLES SPATIAUX
MODERNISATION
MODERNITÉ
MONARCHIE
MONDIALISATION
Concept de relations internationales décrivant l’état du monde
contemporain marqué en même temps par un renforcement de la
communication, des interdépendances et des solidarités, par le
désenclavement des États et des espaces régionaux et par une uniformisation
des pratiques et des modèles sociaux à l’échelle de la planète tout entière.
Ce processus ne fait sens qu’à un niveau macro-sociologique et ne renvoie
pas à des indicateurs empiriques très précis ni très rigoureux. Son intérêt est
davantage théorique : il suggère, en effet, que les phénomènes politiques,
économiques et sociaux ne peuvent pas être étudiés en vase clos,
indépendamment de leur insertion dans un système-monde qui, contrairement
à autrefois, s’étend à l’ensemble du globe. Il suggère aussi que les catégories
classiques de l’analyse internationale s’en trouvent ébranlées : distinction
entre l’interne et l’externe, territoire, souveraineté, sécurité (« globale » et non
plus seulement « nationale »)… Son analyse est souvent associée à celle de
l’essor du particularisme, de plus en plus conçu comme une réaction de
protection face aux effets de la mondialisation.
→international
BECK U., What is Globalization ? Cambridge, Polity Press, 2000 ;
BERGER S., Notre première mondialisation, Paris, Seuil, 2003 ; MAC GREW A.,
Global Transformations, Londres, Polity Press, 1999 ; SÉNARCLENS P. DE, La
Mondialisation : théories, enjeux et débats, Paris, A. Colin (U), 2005 ;
SCHOLTE J. A., Globalization. A Critical Introduction, Palgrave, 2005.
MULTICULTURALISME
MULTILATÉRALISME
MYTHE POLITIQUE
→ symbolique politique
N
NATION
NATIONALITAIRES (MOUVEMENTS)
NATIONALITÉ
(Filmer), dans l’état de nature les hommes n’étaient pas libres ; ils vivaient
dans des familles patriarcales soumises à un pouvoir rigoureux. On en déduira
donc la justification de la monarchie absolue comme mode naturel
d’organisation sociale. Chez Hobbes au XVII siècle, c’est au contraire l’égalité
e
radicale entre les hommes, et l’insécurité totale qui en résulte, qui fondent la
nécessité d’un pouvoir rigoureusement omnipotent pour contenir l’agressivité
de l’homme pour l’homme. Quant à Locke, il illustre un autre courant pour
qui l’état de nature faisait bénéficier les hommes d’un certain nombre de
droits et d’avantages auxquels ils n’ont pu vouloir raisonnablement renoncer
en convenant du pactum societatis. Il fonde sur ce calcul le thème des droits
naturels, inaliénables et sacrés, opposables à tout pouvoir politique
oppresseur. Enfin Rousseau a développé la thèse de la totale souveraineté de
l’Homme à l’état de nature d’où il déduit celle du Peuple dans tout État de
société, quel qu’il soit. C’est la Volonté générale, souveraine, une et
inaliénable.
La sortie de cet état de nature postule l’existence d’un « contrat social ».
Certains auteurs se le représentent comme un événement historique et d’autres
comme une simple construction logique évoquant l’accord de volontés qui
aurait présidé d’une part à la fondation d’une vie en commun (pactum
societatis) d’autre part à l’acceptation de l’obéissance à une loi commune
(pactum subjectionis). Contribuant à forger les représentations du pouvoir
légitime, ces notions interdépendantes fonctionnent comme de véritables
mythes, c’est-à-dire des idées forces mobilisatrices de raisonnements et
d’affects. Il en subsiste aujourd’hui une trace importante dans la notion de
souveraineté populaire sur laquelle reposent beaucoup d’édifices
constitutionnels démocratiques.
→ État, souveraineté
GOYARD-FABRE S., Les Embarras philosophiques du droit naturel, Paris,
Vrin, 2002 ; MOREAU P.-F., Le Récit utopique. Droit naturel et roman de
l’État, Paris, PUF, 1982 ; SIMON P., Le Droit naturel. Ses amis et ses ennemis,
Paris, Guibert, 2005 ; STRAUSS L., Droit naturel et histoire Paris, Flammarion,
2008 [1952] ; VILLEY M., Philosophie du droit, Paris, Dalloz, 1979.
NAZISME
1996 [1966].
NÉO-CORPORATISME
NÉO-INSTITUTIONNALISME
NÉO-PATRIMONIALISME
→ patrimonialisme
NOMENKLATOURA
NOTABLES
Max Weber définit les notables comme des personnes 1) dont l’aisance
matérielle leur permet de remplir des fonctions politiques, administratives ou
associatives non rémunérées, 2) et qui jouissent d’un prestige social leur
permettant de conserver ces fonctions pendant de longues périodes. Au
XIX siècle, on désigne plus précisément comme notables les détenteurs de
e
pouvoirs locaux qui sont parvenus à imposer leur présence aux sommets du
pouvoir à partir de la monarchie de Juillet, en limitant ainsi la puissance de
l’État centralisé monarchique, révolutionnaire ou napoléonien.
L’administration étatique n’a eu de cesse, néanmoins, de poursuivre sa
centralisation afin d’étendre l’emprise de la puissance publique au détriment
des détenteurs de pouvoirs locaux. Dans ce sens, la logique de l’État fort s’est
exercée, en France, à l’encontre de l’autonomie d’un gouvernement local à
l’américaine, comme lieu périphérique de pouvoir autonome. Pourtant, dès les
années 1970, Pierre Grémion a dénoncé cette lecture trop simpliste des
rapports centre-périphérie dans la France contemporaine. Dans son ouvrage Le
Pouvoir périphérique, il a montré comment « à la périphérie, l’État tombe en
miettes » : les notables locaux savent en effet contrôler l’administration locale
et imposent leurs propres demandes auprès des fonctionnaires d’autorité en
poste dans le département. Dans le même sens, les rapports entre le préfet et
ses notables ont été appréhendés autrement : au lieu de l’image du préfet tout-
puissant, héritier des intendants d’autrefois, imposant la volonté de Paris aux
provinces soumises, on souligne maintenant la permanence des rapports
d’interdépendance qui se sont créés entre ces hauts fonctionnaires d’autorité et
leurs notables. De véritables échanges de services non prévus par les textes et
à la marge de la loi se sont tissés entre eux afin d’assurer les intérêts des uns et
des autres : le préfet a besoin des notables pour maintenir son autorité locale et
démontrer l’étendue de son pouvoir. Cela renforce le prestige
des notables auprès des électeurs locaux en parvenant à faire passer des
messages destinés à faire avancer rapidement des questions personnelles, à
résoudre des problèmes sociaux, à débloquer des dossiers industriels, etc. Pour
imposer leurs vues auprès de leur préfet, en passant en dehors des voies
normales, les grands notables, ceux, par exemple, qui sont maires de grandes
villes, le menacent parfois d’intervenir directement dans le cadre des
administrations centrales. Se tissent ainsi tout un ensemble de relations
complexes, de « réseaux croisés » d’influence qui rendent solidaires les
notables et les préfets. Du coup, la théorie du clientélisme sert, même en
France, à décrire de tels liens interpersonnels.
Cet équilibre paraît pourtant remis en question par les grandes lois de
décentralisation de 1982 : désormais, on assiste au « sacre des notables » dont
le pouvoir s’exerce d’autant plus facilement que de nombreux pouvoirs leur
ont Été confiés sous le contrôle simplement a posteriori des préfets.
Responsables de véritables structures administratives institutionnalisées
recrutant des fonctionnaires destinés à mener leur carrière à la périphérie, les
présidents de conseil régional, par exemple, apparaissent comme de nouveaux
féodaux, maîtres de leur place, à tel point que dorénavant nombre d’anciens
préfets préfèrent quitter l’État afin de poursuivre leur carrière dans les cabinets
de ces notables triomphants. Les rapports entre les notables et les
représentants de l’État se trouvent ainsi redessinés au profit de la périphérie,
dans le cadre de la mise en application d’un projet « girondin » de contrôle de
l’État fort. Ils risquent néanmoins de se stabiliser à l’avenir, ne serait-ce parce
que l’État conserve bien des ressources financières et juridiques pour faire
entendre sa voix.
→ clientélisme, conservatisme, élitistes (théories), gouvernement local
DUPUY F., THOENIG J.-C., L’Administration en miettes, Paris, Fayard, 1985 ;
GRÉMION P., Le Pouvoir périphérique, Paris, Seuil, 1976 ; RONDIN J., Le Sacre
des notables. La France en décentralisation, Paris, Fayard, 1984 ; SCHMIDT V.,
Democratizing France, Cambridge, Cambridge University Press, 1990.
O
OBLIGATION POLITIQUE
OPINION PUBLIQUE
les rumeurs que relaient les salons en vue. Au XVIII siècle, le milieu
e
intellectuel introduit une composante supplémentaire ; c’est une époque où les
succès d’édition de certains philosophes assoient l’autorité de quelques-uns
dans la formulation et la diffusion des manières de penser. Plus tard, avec
l’avènement de la démocratie représentative, la mesure de l’opinion publique
devient un enjeu directement électoral. Les élus locaux jouent alors un rôle
décisif non seulement comme relais d’opinion auprès des dirigeants nationaux
mais aussi comme producteurs actifs de cette opinion publique. Ce rôle
exclusif leur est disputé avec un succès croissant par la presse écrite dès
l’apparition de « la presse à deux sous », sous le second Empire, laquelle peut
exciper de son audience de masse. Enfin de nos jours, le développement des
sondages a beaucoup contribué à dévaloriser cette fonction traditionnelle des
relais d’opinion en organisant en permanence la mesure des perceptions et
jugements des citoyens. La multiplicité de ces enquêtes, leur aura de
scientificité, leur capacité à anticiper correctement les mouvements électoraux
ont introduit une dimension entièrement nouvelle dans les processus de
construction/production de l’opinion publique.
→ médias, sondages d’opinion, storytelling
BOURDIEU P., « L’opinion publique n’existe pas », pp. 222-235 in :
Questions de sociologie, Paris, Éd. de Minuit, 1980 ; BLONDIAUX L., La
Fabrique de l’opinion. Une histoire sociale des sondages, Paris, Seuil, 1998 ;
BRÉCHON P. (dir.), La gouvernance de l’opinion publique, Paris, L’Harmattan,
2003 ; CHAMPAGNE P., Faire l’opinion. Le nouveau jeu politique, Paris, Éd. de
Minuit, 1990 ; LEHINGUE P., Subunda : Coup de sonde dans l’océan des
sondages, Bellecombe, Éd.du Croquant, 2007 ; REYNIÉ D., Le Triomphe de
l’opinion publique, Paris, Odile Jacob, 1998.
OPPOSITION
ORDRE POLITIQUE
Les ONG ont pris une importance considérable depuis la Seconde Guerre
mondiale. S’opposant aux OIG (organisations intergouvernementales), elles se
définissent comme des associations constituées de façon durable par des
particuliers dans le but d’atteindre des objectifs non lucratifs. À ce titre, elles
peuvent être internationales ou nationales et, dans ce dernier cas, s’insérer
dans des réseaux transnationaux confédérant diverses organisations
nationales.Une dizaine d’entre elles jouissaient d’un statut consultatif auprès
du Conseil Économique et social des Nations Unies en 1945 : elles sont
aujourd’hui trois mille dans ce cas. C’est dire leur expansion et le
renforcement de leurs fonctions (information, investigation, pression,
expertise, prestation de services matériels, voire écriture du droit…). De ce
fait, certaines d’entre elles (dans les domaines du développement, des droits
de l’homme, de l’environnement) accomplissent une véritable diplomatie
privée.
DOUCIN M., Les ONG. Le contre-pouvoir, Paris, Toogezer, 2007 ; ROUILLE
D’ORFEUIL H., La Diplomatie non gouvernementale, Paris, Le livre équitable,
2006.
PACIFISME
PAIX
PARADIGME SCIENTIFIQUE
PARADOXE DE CONDORCET
PARTICIPATION POLITIQUE
PARTICULARISME/PRIMORDIALISME/UNIVERSALISME
PARTIS POLITIQUES
and Power, Cambridge, Cambridge University Press, 1988 ; SEILER D.-L., Les
Partis politiques, Paris, A. Colin, coll. « Compact », 2000 ; ainsi que la revue
Party Politics.
ORGANISATION INTERNE. En dépit des changements issus notamment de
l’effondrement des formations d’orientation communiste et de l’érosion de
l’assise sociale des partis ouvriers dans les sociétés occidentales, les travaux
de Maurice Duverger (1951) peuvent toujours servir de point de départ pour la
classification des structures organisationnelles des partis politiques. La base
de cette classification fait d’abord référence à leur origine historique, à savoir
à la dichotomie que Duverger établit entre les partis de cadres, considérés
comme archaïques, et les partis de masse modernes. Cette distinction primaire
mobilise un certain nombre de variables d’organisation : 1) la nature des
structures formelles (comités des partis de cadres, sections socialistes, cellules
communistes, éventuellement milices de style fasciste) ; 2) les modalités des
liaisons verticales et horizontales à l’intérieur du parti ; 3) la centralisation ou
la diffusion du pouvoir en son sein ; 4) en dernier lieu, tous les aspects dérivés
de la notion d’adhérent qui définissent l’articulation des cercles concentriques
allant des dirigeants puis des militants jusqu’au simple électeur. C’est dans
cette perspective que se dégage une typologie finale à quatre termes : partis de
cadres, partis indirects, partis de masse et partis totalitaires.
Au sein des systèmes politiques, les partis communistes ont occupé une
place inégale : autrefois puissants dans l’Allemagne de Weimar, dans la
France et l’Italie d’après-guerre, jouant un rôle important dans la résistance
clandestine aux régimes autoritaires installés au Portugal, en Espagne ou en
Grèce, ils ont toujours été faibles, voire très faibles, en Europe du Nord (sauf
en Finlande et à un court moment au Danemark, en 1944-1945), et dans la
quasi-totalité des sociétés extra-européennes. Leur venue au pouvoir en
Europe de l’Est, en Chine ou au Viêt-nam en a fait des partis uniques, gonflant
très largement la réalité de leur assise sociale. La désagrégation du système
soviétique a précisément contribué à leur démantèlement (voire leur
interdiction) à l’Est et à leur quasi-disparition dans le monde occidental où ils
ne conservent que quelques bastions locaux. Au-delà de ce contexte
international, la puissance des partis communistes fut aussi liée à un moment
des systèmes politiques occidentaux, lorsqu’ils offraient à la classe ouvrière
un instrument en même temps d’expression revendicative et d’intégration au
sein d’un ordre politique qui la marginalisait dans un comportement
d’aliénation. Cette hypothèse, développée par Georges Lavau, reconnaissait
ainsi aux partis communistes l’accomplissement d’une fonction tribunitienne
qui correspond, semble-t-il, moins étroitement aux données immédiatement
contemporaines.
→ communisme, marxisme, oligarchie (loi d’airain d’)
BACKES U., MOREAU P., (eds.), Communist and Post-communist Parties in
Europe, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2008 ; COURTOIS S. (dir.),
Histoire et mémoire du communisme en Europe, Paris, R. Laffont, 2002 ;
LAVAU G., À quoi sert le PCF ?, Paris, Fayard, 1981 ; HERMET G., Les
Communistes en Espagne, Paris, Presses de la FNSP, 1971.
PARTIS SUCCESSEURS. Expression désormais consacrée en français et en
anglais, pour désigner les formations politiques issues des anciens partis
communistes des démocraties populaires de l’Europe centrale et orientale.
Seul le PC tchèque a conservé son ancienne appellation, tandis que les autres
ont généralement choisi de se dénommer « Parti socialiste » ; ainsi le Parti
ouvrier unifié polonais, ou son homologue hongrois, ou encore le Parti
communiste bulgare, rebaptisé Parti socialiste bulgare. En dehors du PC
tchèque, les autres partis communistes existant à présent dans l’Est de
l’Europe ne sont en réalité que de très petites formations dissidentes,
nostalgiques du passé ou extrémistes, en général incapables de franchir les
seuils électoraux qui leur permettraient d’être représentés dans les parlements.
→ communisme, démocratisation, Partis communistes
GRZYMALA-BUSSE A. M., Redeeming the Communist Past : The
Regeneration of Communist Parties in East Central Europe, Cambridge,
Cambridge University Press, 2002 ; HERMET G., MARCOU L. (dirs.), Des partis
comme les autres ? Les anciens communistes en Europe de l’Est, Bruxelles,
Éd. Complexe, 1998 ; MINK G., SZUREK J.-C., La Grande conversion. Le
destin des communistes en Europe de l’Est, Paris, Seuil, 1999.
PARTIS CONFESSIONNELS. Expression partisane des identifications religieuses,
les partis confessionnels se retrouvent, inégalement développés, dans les
systèmes politiques les plus variés. Dans les systèmes autoritaires, ils
s’imposent comme instances de mobilisation contestataire, obtenant plus ou
moins facilement le statut de parti politique : tel est notamment le cas des
mouvements islamistes (notamment des Frères musulmans) dans un grand
nombre de pays musulmans ; de la même manière, certains régimes
autoritaires de l’Europe de l’Est et du Sud, ainsi que d’Amérique latine, durent
plus ou moins composer avec des partis d’inspiration démocrate-chrétienne
qui purent servir d’expression contestataire.
Ce sont à leur naissance et pour des périodes de durée variables selon les
pays des partis cléricaux dans leur inspiration (liés aux évêques et au Vatican)
et confessionnels dans leur référence religieuse explicite, y compris lorsque
celle-ci n’est pas mentionnée dans leur intitulé. Leur prototype est le Zentrum
de l’empire allemand, apparu par réaction contre le Kulturkampf d’orientation
luthérienne du chancelier Bismarck. Vont se développer parallèlement les
partis homologues d’Autriche, de Belgique, des Pays-Bas et de Suisse, puis,
en 1919, le Parti populaire italien de l’abbé Sturzo, enfin, le beaucoup plus
modeste Parti démocrate populaire qui s’organise en France pendant les
années 1930. Toutefois, la période de grande expansion de la démocratie-
chrétienne ne survient qu’après la Seconde Guerre mondiale, lorsque la
Democrazia cristiana devient le pivot de la vie politique italienne, que la
CDU/CSU allemande fait balance égale avec la social-démocratie, que le
Mouvement républicain populaire (MRP) se hausse pendant quelques années
parmi les trois grands partis français et que les autres formations de cette
obédience maintiennent leurs positions en Autriche (face à la social-
démocratie), en Belgique flamande (parti dominant), au Luxembourg, aux
Pays-Bas et en Suisse.
La gamme des dénominations de ces partis recouvre alors divers termes
selon les pays : démocratie-chrétienne, bien entendu, mais alternativement,
chrétien-social, social-chrétien ou encore populaire. Dans tous les cas,
cependant, leur matrice idéologique reste la doctrine sociale de l’Église
marquée par le refus des conflits de classes, tandis que leur base sociale
s’appuie sur les syndicats d’origine confessionnelle vis-à-vis des ouvriers
croyants ou modérés, ainsi que sur le réseau des organisations d’Action
catholique s’agissant des classes moyennes ou des jeunes. Toutefois, dès avant
le concile Vatican II, les partis démocrates-chrétiens se dégagent de plus en
plus de la tutelle des évêques et se « déconfessionalisent », pour des raisons
qui tiennent autant à l’évolution d’une partie de leurs dirigeants, membres ou
électeurs qu’à celle d’une fraction croissante du clergé, qui les juge trop
conservateurs et compromettants sur le plan aussi bien politique que religieux.
C’est, également, que les formations démocrates-chrétiennes constituent
comme les partis communistes ou socialistes des partis de masses dont
l’électorat ne correspond pas nécessairement au « peuple pratiquant » et
englobe nombre d’indifférents en matière de foi. Dès lors, une assez grande
variété de courants répartis de la gauche à la droite va s’y consolider, tandis
que, en ce qui la concerne, la démocratie-chrétienne française va voir la plus
grande partie de sa clientèle politique captée par le courant gaulliste sous la
V République (ses héritiers, rassemblés dans le Centre des démocrates
e
En France, les écologistes des années 1970 n’ont pas accepté sans fortes
réticences initiales l’idée de créer un parti politique. Lancé par les
candidatures successives, à l’élection présidentielle, de René Dumont en 1974
et Brice Lalonde en 1981, le processus n’aboutit qu’en 1984 avec la fusion de
diverses petites formations qui créent « Les Verts, Confédération écologiste-
Parti écologiste ». Partisan d’une affirmation autonome de l’identité
écologiste, qui s’exprime dans le slogan : « Ni droite, ni gauche », Antoine
Waechter n’obtient que 3,8 % des suffrages à l’élection présidentielle de
1988. Cependant un décollage incontestable s’est produit à partir des élections
européennes de 1989 (10,6 %), et régionales de 1992 (14,7 %), terni toutefois
de nombreuses contre-performances ultérieures.
Les partis écologistes ne sont pas de purs et simples défenseurs de
l’environnement. Sans doute cette préoccupation est-elle constitutive d’une
part essentielle de leur démarche, expliquant les mobilisations contre le
nucléaire, les équipements lourds (en matière autoroutière par exemple), les
industries polluantes, la destruction d’écosystèmes, etc. Mais ce sont plus
fondamentalement des partis hostiles au productivisme industrialiste et à la
compétition économique, dont ils font le procès au nom d’une autre
conception de la qualité de la vie. En ce sens, pour reprendre les analyses de
Ronald Inglehart, ils incarnent des valeurs postmatérialistes qui les mettent à
large distance idéologique des partis classiques de la scène politique. Cette
caractéristique s’observe dans les éléments de leur programme concernant les
droits des femmes et des minorités culturelles, le tiers-mondisme, le refus de
la vision « économiste » des problèmes de société. Ils attachent une grande
importance à des thèmes comme la réduction et le partage du travail, qui
doivent, selon eux, permettre de vivre différemment une vie plus autonome et
plus créative. De même les Verts ont-ils l’ambition de constituer une nouvelle
génération de partis politiques par un style d’action à la fois plus
démocratique et moins conventionnel qui rompe avec les logiques de la
politique professionnelle (d’où un mode de fonctionnement interne souvent
mal compris ou observé avec condescendance). On ne s’étonnera pas dès lors
que, sociologiquement, bien loin de représenter les couches les plus
traditionnelles d’une société rurale sur la défensive, ils trouvent leurs
meilleurs appuis dans le pôle intellectuel des classes moyennes et chez les
détenteurs d’un niveau d’études supérieures.
→ écologiques (Mouvements)
BOY D. (dir.), L’écologie au pouvoir, Paris, Presses de Sciences Po, 1995 ;
SAINTENY G., L’Introuvable écologisme ?, Paris, PUF, 2000 ; SERNE P., Les
Verts ont vingt ans, Paris, Cédis, 2004 ; VIALATTE J., Les Partis verts en
Europe occidentale, Paris, Economica, 1996.
PARTIS ETHNIQUES. Cette famille de partis prétend représenter un groupe
ethnique en s’opposant en général à ce qu’il soit gouverné ou dominé par
d’autres groupes. Ces partis sont souvent confondus avec les organisations
autonomistes ou indépendantistes (Parti nationaliste basque, Convergence et
Union en Catalogne…). Toutefois, pour que leur titre soit exact, ils doivent
revendiquer expressément un particularisme ethnique, linguistique, voire
religieux, excluant en fait ou en principe d’autres populations. Tel est, sans
excès, le cas du Scottish National Party, plus vigoureusement ceux du parti
québécois, du Sinn Féin irlandais ou de Herri Batasuna au Pays Basque. Les
partis de ce type deviennent par ailleurs assez nombreux en Afrique, même si
leur dénomination ne l’indique pas en général ; ainsi, le Front pour la
démocratie au Burundi (FRODEBU), qui représente pour l’essentiel l’ethnie
Hutu. Ils commencent également à s’esquisser dans les zones indiennes de
l’Amérique latine, avec l’ASI colombienne par exemple. Le même
phénomène peut se retrouver, en outre, dans certains pays de l’Est européen
comme l’ex-Yougoslavie, ou encore en Bulgarie, s’agissant de la minorité
turco-musulmane. Par ailleurs, un parti quelconque peut exercer un attrait
particulier sur des minorités de couleur ou autres, comme le parti démocrate
aux États-Unis. Il lui arrive, alors, de se voir caractériser comme « ethnique »
dans une acception assez différente.
→ ethnicité, minorité, nation : Nationalitaires (Mouvements), partis
politiques : Partis autonomistes
HROCH M., « Nationalism and national movements : comparing the past
and present of Central and Eastern Europe », Nations and Nationalism 2 (1),
1996 ; Social Preconditions of National Revival in Europe, Cambridge,
Cambridge University Press, 1985 [1968].
PARTIS LIBÉRAUX. Les partis libéraux représentent habituellement une
fraction des milieux sociaux les plus favorisés, des divers secteurs de la
bourgeoisie aux classes moyennes. Ils trouvent souvent un appui direct du
côté du patronat ; la Fédération des entreprises belges n’hésite pas à appuyer
le parti libéral tout comme les partis sociaux chrétiens et, dans le même sens,
en Grande- Bretagne ou en Allemagne, on constate de telles pratiques. En cas
d’échec, cet appui peut disparaître comme dans la situation italienne où la
Confindustia soutint le parti libéral avant de s’en détourner. Ces partis sont
attachés à la libre entreprise, à l’économie de marché et entendent limiter
l’intervention de l’État. Face aux anciens partis conservateurs qui étaient leurs
adversaires traditionnels, certains partis libéraux ont le plus souvent recherché
les conditions d’une alliance avec ces concurrents conservateurs quitte à tenter
de s’en détacher pour conquérir leur clientèle autonome ; ainsi, en Grande-
Bretagne, le parti libéral s’est lancé depuis fort longtemps dans une telle
stratégie mais n’a jamais pu s’imposer face à ses deux grands rivaux, d’autant
que le système électoral en vigueur ne lui est guère favorable et, en dépit de
belles poussées électorales récentes, l’échec a été constant ; dans d’autres cas
de figure, plus rares il est vrai, certains partis libéraux ont passé des accords
provisoires avec les partis ouvriers. En France, récemment, le parti libéral fut
incarné par le Parti républicain, les giscardiens étant parvenus à constituer un
pôle politique considérable de droite face à leur allié-rival qu’était le RPR
gaulliste, davantage populiste et interventionniste.
→ libéralisme, Whig/Tory
BOBBIO N., Libéralisme et démocratie, Paris, Cerf, 1996 ; DELWIT P. (dir.),
Libéralismes et partis libéraux en Europe, Bruxelles, Éd. de l’Université de
Bruxelles, 2002 ; ROUSSELIER N., L’Europe des libéraux, Bruxelles, Complexe,
2001 ; SEILER D.-L., Partis et famille politiques, Paris, PUF, 1980 ; Les partis
politiques, Paris, A. Colin, 2000.
PARTIS PROTESTANTS. Cette famille partisane, à ne pas confondre avec celle
de la démocratie-chrétienne, ne s’est développée qu’en Suisse, aux Pays-Bas
et dans les pays scandinaves. Dans les sociétés pluriconfessionnelles de Suisse
et de Hollande, les partis protestants ont exprimé une réaction orientée à la
fois contre le poids politique des catholiques et contre la mentalité laïque des
libéraux appartenant pourtant eux aussi en majorité à la religion réformée.
Dans les pays scandinaves presque totalement dominés par les Églises établies
luthériennes, ils ont tendu seulement à préserver le lien privilégié de ces
Églises avec l’État et avec l’identité nationale. Ces partis n’ont guère recueilli
plus de 5 % des suffrages exprimés dans les meilleures circonstances. Les
partis chrétiens populaires danois et norvégiens subsistent toujours, de même
que le Parti chrétien-démocrate suédois et le Parti évangélique populaire
suisse. En revanche, le Parti antirévolutionnaire et l’Union chrétienne
historique des Pays-Bas se sont joints en 1977 au Parti catholique hollandais
pour fonder l’Appel chrétien-démocrate (CDA). Bien qu’il apparaisse
largement comme le parti des protestants de l’Irlande du Nord, le Parti
unioniste n’entre pas véritablement dans cette catégorie.
→ protestantisme et politique, fondamentalisme protestant,
sécularisation
MADELEY J. T.S., « Scandinavian Christian Democracy : throwback or
portent ? », European Journal of Political Research, 1977, pp. 267-286 ;
VIGNAUX E., Luthéranisme et politique en Norvège : le Parti chrétien du
peuple, Paris, L’Harmattan, coll. « Logiques politiques », 2003.
PARTIS RADICAUX. Dans son sens français (ou suisse), le parti radical se
présente comme un parti « radicalement républicain », cherchant à exprimer
les aspirations et les attentes des nouvelles classes moyennes liées à
l’avènement de la République. Attaché, à ce titre, à la laïcité et aux institutions
républicaines, marqué par son passé de parti de gouvernement, il exprime une
idéologie évoluant assez vite vers la promotion du pluralisme, de la tolérance
et du compromis. Lié à des catégories sociales rapidement débordées par la
révolu tion industrielle, il professe généralement une vision économique plutôt
traditionnelle. L’appellation existe également en Suisse, où elle a désigné une
orientation politique voisine mais s’applique maintenant au parti de
gouvernement par excellence.
longtemps des formations ouvrières pour l’essentiel, ils ont acquis à présent
une assise sociale beaucoup plus large dans les classes moyennes et les
professions non manuelles. Tous restent marqués cependant par leur origine
syndicale bien qu’à des degrés divers. En France, la captation de la CGT par
le parti communiste a fait que la SFIO puis le parti socialiste recréé au congrès
d’Épinay se sont éloignés par force de cette origine. En revanche, les partis
allemand, autrichien, belge, hollandais et scandinaves sont toujours en
symbiose avec les syndicats (ce fut, longtemps, le cas aussi pour le PSOE
espagnol).
Party Decline in America : Policy, Politics, and the Fiscal State, Princeton,
Princeton University Press, 1996.
PARTIS DANS LES SOCIÉTÉS EN DÉVELOPPEMENT. Les partis politiques dans les
pays en développement s’écartent substantiellement des partis politiques
occidentaux tels que la science politique les a saisis et analysés. Certes, ils
dérivent presque tous d’une importation, voire, au départ, d’un simple
prolongement du modèle partisan européen. La colonisation, notamment, a
favorisé la diffusion d’idéologies politiques d’origine occidentale au sein de
sociétés d’Afrique et d’Asie ; à mesure que s’effectuait l’émancipation de
celles-ci, l’élite politique qui se formait en son sein a également fait école
dans les partis d’inspiration socialiste ou chrétienne, jusque sur les bancs des
parlements métropolitains. C’est dire que les structures, mais surtout la
symbolique, voire l’habillage idéologique de ces partis rappellent nettement
les constructions occidentales les plus familières.
PASSIONS POLITIQUES
Comme l’a montré Pierre Ansart, l’étude des passions politiques a une
longue tradition d’analyse qui remonte à Platon et Aristote. Ces auteurs étaient
frappés, en effet, par l’influence des sentiments et des insatisfactions dans le
déroulement de la vie politique de la Cité. On observe, à travers l’histoire, une
certaine permanence de passions fondamentales mettant en œuvre l’agressivité
ou la solidarité, la convoitise du pouvoir ou l’enthousiasme désintéressé, la
fascination de la violence et les mille visages de la séduction. Néanmoins, le
plus important est la mise en évidence des dispositifs sociaux, culturels et
symboliques mis en place pour les mobiliser, les canaliser, les exploiter ou les
dériver sur d’autres objets (par ex., les logiques du bouc émissaire).
Montesquieu cherchera même à caractériser le « principe » des régimes
politiques à partir d’une passion fondamentale dont ils tirent plus
systématiquement parti pour se pérenniser : l’honneur dans le monarchique, la
crainte dans le despotique, l’amour de la vertu dans le républicain. De son
côté, la magistrale étude par Tocqueville du système politique américain, est
centrée également sur l’analyse des passions démocratiques.
→ émotions politiques
ANSART P., Les Cliniciens des passions politiques, Paris, Seuil, 1997 ;
BRAUD PH., L’émotion en politique, Paris, Presses de Sciences Po, 1996 ;
ELSTER J., Psychologie politique, Paris, Éd. de Minuit, 1990 ; HIRSCHMAN A.,
Les Passions et les intérêts, Paris, PUF, 1980 ; TRAÏNI C. (dir.), Émotions…
Mobilisations, Paris, Presses de Sciences-Po, 2009.
PATRIMONIALISME/NÉO-PATRIMONIALISME
PATRIOTISME
PERESTROÏKA
PERSUASION POLITIQUE
→ communication politique
PERTINENCE
PEUPLE
PILARISATION
PLÉBISCITE
PLURALISME
POLICY COMMUNITIES
POLICY NETWORKS
→ policy communities
POLITEIA
POLITIQUES PUBLIQUES
POLITISATION
POLYARCHIE
POPULARITÉ
POPULISME
POSITIVISME
POSSIBILISME
Notion utilisée par Albert Hirschman, pour désigner des pratiques
politiques et économiques rebelles aux propositions radicales et à la prise de
risque, privilégiant ce qu’il est possible de réaliser dans la perspective d’une
éthique de responsabilité. Le paradigme des transitions démocratiques s’est
inspiré de cette attitude de 1975 à 1990. Il convient de rappeler par ailleurs le
« possibilisme » du théoricien socialiste Paul Brousse (1844-1912), qui
préconisait une voie indolore vers le socialisme par l’action municipale
systématique et le développement des services communaux.
SANTISO J., « Théorie des choix rationnels et rationalités des transitions
démocratiques », L’Année sociologique 47 (2), 1997
POST-COLONIAL STUDIES
POSTNATIONALISME
POUBELLE
POUVOIR
Concept fondamental en sciences sociales, et plus particulièrement en
sociologie politique, le mot pouvoir souffre d’une extraordinaire polysémie
due à son emploi courant dans les contextes les plus variés. Pour en préciser
les significations, inégalement pertinentes en science politique, il est classique
de distinguer trois grandes catégories d’approches :
– Dans une perspective substantialiste (« avoir du pouvoir »), le pouvoir est
assimilé à une sorte de capital (au sens monétaire du terme) que l’on acquiert,
accumule, dilapidé, qui produit des bénéfices ou procure des avantages… Il ne
s’agit là en réalité que d’une métaphore qui ne permet pas de pousser plus loin
l’analyse.
– Dans une perspective institutionnaliste, le pouvoir est une expression qui
sert à désigner soit l’État par opposition aux citoyens ou à la société civile,
soit les gouvernants dans le couple pouvoir/opposition, soit l’ensemble des
institutions constitutionnelles dans l’expression : les pouvoirs publics.
– Dans une perspective interactionniste enfin, particulièrement féconde en
sociologie politique, le pouvoir est une relation qui se caractérise par la
mobilisation de ressources pour obtenir d’un tiers qu’il adopte un
comportement auquel il ne se serait pas résolu en dehors de cette relation.
C’est ce qu’exprime Max Weber lorsqu’il en propose la définition suivante :
« Toute chance de faire triompher, au sein d’une relation sociale, sa propre
volonté, même contre des résistances. »
Le pouvoir, au sens interactionniste, a fait l’objet de nombreuses analyses
mettant en évidence ses différentes facettes, qu’il apparaisse comme la cause
d’un comportement (d’action ou d’abstention), comme une restriction à la
liberté d’autrui, ou comme un échange inégal.
Selon la nature des ressources mobilisées pour l’obtention d’un tel résultat,
on pourra distinguer d’une part le pouvoir d’injonction et d’autre part le
pouvoir d’influence. Le premier suppose la possible intervention de la force
en cas de non respect de la norme édictée. Telle est la caractéristique normale
des normes juridiques ; mais à côté d’elles il existe aussi des injonctions de
fait, en marge ou en violation de la légalité.
Le pouvoir d’influence au contraire, parce qu’il exclut la contrainte
matérielle comme garantie ultime de son effectivité, suppose la mobilisation
de ressources d’une autre nature : c’est la capacité d’offrir des gratifications
en contrepartie de l’acceptation du comportement suggéré. Ce peuvent être
des rémunérations matérielles ou encore des informations perçues comme
utiles (dans le travail de persuasion), ou des gratifications symboliques au
niveau de l’estime de soi.
Cette relation de pouvoir entre deux ou n personnes ne serait pas réellement
intelligible s’il était fait abstraction des conditionnements de la situation au
sein de laquelle cette relation se noue. C’est le problème des rapports entre la
structure globale et l’interaction ponctuelle. Si l’officier de police peut
enjoindre à des manifestants de se disperser, c’est parce qu’il est investi d’une
compétence légale, revêtu d’une présomption de légitimité et qu’il dispose
Éventuellement des moyens matériels de faire respecter l’injonction. Cela
renvoie donc en amont à l’existence d’une organisation hiérarchique de la
police, elle-même placée sous l’autorité d’un ministre responsable.
Toute relation de pouvoir peut être analysée comme doublement
conditionnée. À un niveau fondamental tout d’abord. C’est dans la structure
sociale elle-même. La détention d’un capital économique, culturel ou social
plus important permet, en effet l’accès plus aisé à des moyens d’influence plus
efficaces et plus diversifiés. Le conditionnement de la relation de pouvoir
s’exprime également dans la mise en place de modes de rationalités. Ce sont
d’une part les règles externes, et perçues comme telles, d’ordre juridique,
culturel ou tout simplement stratégique (logiques de situations) qui s’imposent
aux acteurs dans leurs relations particulières. Ce sont d’autre part des règles
ou des normes qu’ils ont intériorisées par socialisation, et qu’ils ont faites leur,
au point d’avoir le sentiment subjectif qu’en s’y conformant, ils ne font
qu’obéir à eux-mêmes (dispositions psychologiques des agents culturellement
conditionnés, codes de comportements acquis, rôles assumés). Ainsi, de même
qu’aux échecs l’emprise d’une pièce sur une autre, à un moment déterminé de
la partie, n’est pas compréhensible si l’on ignore les règles du jeu, de même la
relation de pouvoir ne prend-elle sa signification véritable que par référence
au mode de fonctionnement du système social tout entier.
→ bureaucratie, décision (processus de), domination (types de),
ressources politiques
BARNETT M., DUVALL R., (eds.), Power in Global Governance, Cambridge,
Cambridge University Press, 2005 ; BRAUD PH., « Du pouvoir en général au
pouvoir politique », in GRAWITZ M., LECA J. (dir.), Traité de science politique,
Paris, PUF, 1985, vol. I, p. 335 sq. ; BRAUD PH., Sociologie politique, Paris,
LGDJ, 2008 ; CHAZEL F., « Pouvoir », in BOUDON R. (dir.), Sociologie, Paris,
PUF, 1992 ; CLEGG S., Frameworks of Power, Londres, Sage, 1993 ;
FRIEDBERG E., Le Pouvoir et la règle, Seuil, 1993 ; FOUCAULT M., Surveiller et
punir, Paris, Gallimard, 1975 ; GIBSON M., Culture and Power, New York,
Berg, 2007 ; LUKES S., Power. A Radical View, Londres, MacMillan Press,
1986 ; WEBER M., Économie et société, Paris, Plon, 1971 [1922].
→ exécutif/législatif (pouvoirs)
PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
PRÉSIDENTIALISME
→ Régimes Présidentiels
PRIMAIRES (ÉLECTIONS)
Procédé par lequel les électeurs sont appelés à choisir eux-mêmes les
candidats présentés par les partis lors des élections générales. Destinée, en
principe, à démocratiser le choix des candidats et donc le fonctionnement du
gouvernement représentatif, cette institution fut intro duite aux États-Unis en
1904 par le gouverneur du Wisconsin, Robert LaFollette, pour choisir les
candidats à un scrutin local (auparavant, les dirigeants des partis choisissaient
les candidats à leur guise). Cette pratique est devenue la plus courante aux
États-Unis où elle est utilisée dans de nombreuses élections, mais elle est
surtout connue pour le rôle qu’elle tient dans le processus de désignation du
Président. Encore convient-il de noter qu’elle fonctionne au seul niveau des
États, qu’elle ne concerne que 35 d’entre eux et qu’elle consiste en réalité à
désigner les délégués à la Convention nationale du parti, destinée à investir le
candidat officiel. Ces primaires fonctionnent différemment d’un état à l’autre :
elles peuvent être, notamment, fermées (réservées aux seuls électeurs
déclarant leur affiliation au parti considéré) ou ouvertes (accessibles, à des
degrés divers, à tous les électeurs). Essentiellement américain, ce procédé
semble s’attirer les faveurs de plusieurs praticiens de la vie politique en
Europe, qui y voient un moyen efficace d’arbitrer entre les courants divergents
au sein d’un parti ou d’une coalition de partis.
→ caucus, élection
PRIMORDIALISME
→ particularisme
PRINCIPE DE PRÉCAUTION
L’idée de progrès est partagée par l’ensemble des penseurs du XVIII siècle :
e
le Siècle des lumières est celui de la croyance dans un progrès infini basé sur
la Raison universaliste, seule capable d’apporter le bonheur au genre humain.
Si nombre de penseurs de l’époque adhèrent à une telle vision que partagent
tous les Encyclopédistes, Condorcet en a donné la présentation la plus célèbre
dans son Esquisse d’un tableau historique des progrès de l’esprit humain
(1793) : « Ce tableau, écrit-il, doit présenter l’ordre des changements […] et
montrer ainsi […] la marche que l’espèce humaine a suivie, les pas qu’elle a
faits vers la vérité ou le bonheur. Ces observations sur ce que l’homme a été,
sur ce qu’il est aujourd’hui, conduiront ensuite aux moyens d’assurer les
nouveaux progrès que sa nature lui permet d’espérer encore. » Fortement
critiquée par la pensée réactionnaire, cette vision optimiste exerce au contraire
une forte influence sur Auguste Comte qui présente sa théorie des trois étapes
menant finalement, par-delà la métaphysique et la théologie, à l’ère
positiviste, à la science, au positivisme triomphant et donc, au progrès. Dans
ce sens, une relation indirecte s’instaure entre le projet de Condorcet et celui
d’une partie de la sociologie contemporaine trouvant sa source dans les
travaux d’Auguste Comte et conservant à l’époque contemporaine la
perspective positiviste comme mode de gestion des conflits sociaux ;
perspective seule capable, aux yeux de certains, de mener à davantage de
progrès collectif à travers, par exemple, la mise en place d’un Welfare State.
→ positivisme, tradition
BAKER K., Condorcet. Raison et politique, Paris, Hermann, 1988 ;
LASCH CH., Le seul et vrai paradis. Une histoire de l’idéologie de progrès et
de ses critiques, (S.l.), Climats, coll. « Sisyphe », 2002 [1991] ; NISBET R.,
History of the Idea of Progress, New York, Basic Books, 1980 ; TAGUIEFF P.-
A., Le sens du progrès, Paris, Flammarion, 2004.
PRONUNCIAMIENTO
→ coup d’État
PROTECTORAT
PROTESTANTISME ET POLITIQUE
fidèles des Églises indépendantes qui se sont rassemblés dans les sociétés de
tempérance (prônant la prohibition des boissons alcooliques) animées
principalement par des femmes, puis dans le mouvement féministe lui-même
en même temps que dans les ligues anti-esclavagistes (paradoxalement, ces
protestants furent aussi à l’origine des doctrines de promotion de la
colonisation érigeant celle-ci en devoir moral et religieux pour les peuples
« civilisés »). Et ce sont ensuite les syndicats et partis ouvriers qui furent
souvent la création des protestants dissidents (la même remarque pouvant
s’appliquer à la gauche populiste américaine – au People’s Party – des
années 1890). En France, les hauts fonctionnaires et universitaires protestants
tels que Ferdinand Buisson et Félix Pécaut ont joué au cours des années 1880
un rôle très important dans le développement initial de l’éducation laïque
(comme plus tard Gustave Monod ou Louis Méjean). Il en alla de même pour
le personnel politique au tout début de la III République. Ainsi, ce qui ne se
e
PSYCHOLOGIE POLITIQUE
PUBLIC CHOICE
→ choix rationnel
PUBLIC/PRIVÉ (DISTINCTION)
PUISSANCE
PUTSCH
→ coup d’État
Q
QUESTIONS PARLEMENTAIRES
Pour assurer le contrôle de l’exécutif ou, simplement, lui faire connaître les
préoccupations de leurs mandants, les députés et sénateurs ont la possibilité,
en France comme dans la plupart des régimes représentatifs, de poser des
questions écrites ou des questions orales. Les premières sont publiées au
Journal officiel ainsi que la réponse du ministre compétent qui doit être
donnée dans un délai limité. Les secondes, posées lors d’une séance spéciale
chaque semaine, peuvent être suivies ou non d’un débat. Le temps imparti
pour poser la question puis répliquer à la réponse du ministre est
rigoureusement réglementé, afin d’éviter l’obstruction et de faciliter le
maximum d’interventions parlementaires. Il en est également donné un
compte rendu au Journal officiel-Débats.
→ confiance (question de), parlement
CAMBY J.-P., SERVENT P., Le Travail parlementaire sous la V République,
e
RACE/RACISME
dans les ouvrages de Gobineau qui soutient « l’éternelle séparation des races »
et l’« immense supériorité des blancs », dans certains écrits de Renan qui
affirme la suprématie des aryens sur les races sémitiques, les noirs formant
eux aussi à ses yeux, une race dite inférieure ; on retrouvera de manière
encore plus accentuée une telle hiérarchie raciale chez G. Vacher de Lapouge,
pour qui « la notion de race est d’ordre zoologique » : elle lui permet de
prôner une politique eugénique qui sera systématiquement mise en œuvre plus
tard par Hitler. Même si Renan refuse pour sa part de s’engager dans une telle
biologisation raciale du politique, il a néanmoins renforcé les théories des
races dans leur variante linguistique et culturelle en rejoignant, de ce point de
vue, la perspective relativiste plus ancienne d’un Herder si favorable au
maintien des différences culturelles. C’est dire que le racisme instaure aussi
un lien étroit entre race biologique et culture particulière ; soit il affirme l’idée
de hiérarchie entre ces races porteuses de culture, soit encore, il estime que
chacune d’entre elles reste légitime en demeurant enfermée dans sa propre
logique ; contre les métissages, chaque race-culture se construit presque en
une nation fermée aux autres ; tous les individus doivent alors demeurer au
sein de l’une de ces entités closes, aux cultures si dissemblables, la
légitimation des différences entraînant un racisme fondé cette fois sur le
relativisme, davantage que sur une hiérarchie scientiste. Chez Le Bon comme
chez Barrès, on se trouve ainsi en présence d’un racisme tout à la fois
biologique et culturel de type relativiste ; tous deux étaient, très logiquement,
violemment anti-dreyfusard, précisément parce que, pour eux, un juif ne peut
que trahir la race française puisqu’il n’est pas, à leurs yeux, pénétré de sa
culture ; il est « le représentant d’une espèce différente » ; le métissage mène à
la dégénérescence et donc, à la trahison. Dans le même sens, Le Bon, tout
comme une large partie des penseurs réactionnaires français, se montre hostile
à la colonisation dans la mesure où elle entraîne elle aussi une forme de
métissage en prétendant imposer la culture française à d’autres races-cultures
qui doivent plutôt demeurer fidèles à leurs propres valeurs. Cette logique
mène droit à la volonté de reconduire dans leurs pays d’origine les immigrés,
en particulier ceux issus d’Afrique du Nord, et au chacun chez soi. Contre
ceux qui restent confiants dans le rationalisme universaliste des Lumières, les
mouvements racistes contemporains, en France comme dans le reste de
l’Europe, n’hésitent pas à s’engager dans des comportements d’une grande
violence physique.
→ antisémitisme
BIRNBAUM P., « La France aux Français », Histoire des haines nationalistes,
Paris, Seuil, 1993 ; BOUCHER M. (dir.), Discriminations et ethnicisation :
combattre le racisme en Europe, La Tour d’Algues, Éd. de l’Aube, 2005 ;
BUTLER J., Le Pouvoir des mots : discours de haine et politique du performatif,
Paris/Amsterdam, 2008 ; COLAS D., Races et racismes. De Platon à Derrida,
Paris, Plon, 2004 ; LIAUZU C., Race et civilisation, Paris, Syros, 1992 ;
OLENDER M. (éd.), Le Racisme, Gembloux, Complexe, 1981 ; PERRY R., Race
and racism : the development of modern racism in America, New York,
Macmillan, 2007 ; STEPAN N., The Idea of Race in Science : Great Britain
1800-1960, London, Macmillan/St Antony’s College, 1982 ; TAGUIEFF PH., La
Force du préjugé, Paris, La Découverte, 1988 ; TODOROV T., Nous et les
autres, Paris, Seuil, 1989 ; WIEVIORKA M., L’Espace du racisme, Paris, Le
Seuil, 1991.
RÉACTION
REALPOLITIK
RÉALISTE (THÉORIE)
RÉFÉRENDUM
RÉFÉRENTIEL
→ politiques publiques
RÉGIMES INTERNATIONAUX
RÉGIMES POLITIQUES
Ce qui vient d’être développé illustre que la présence d’un chef d’État, d’un
président du gouvernement ou de ministres nombreux issus de l’armée ne
signifie pas forcément qu’un régime soit militaire. Les dictatures du général
Franco en Espagne, ou du général Tchang-Kaï-Tchek à Taiwan
n’appartenaient pas à cette catégorie mais à celle de l’autoritarisme civil, de la
même façon que l’accession du général de Gaulle à la magistrature suprême
n’a évidemment pas signifié que la France s’était transformée en République
militaire (l’État français du Maréchal Pétain étant également un régime
autoritaire civil, y compris lorsque l’amiral Darlan présidait son
gouvernement).
Par ailleurs, et s’agissant bien cette fois des régimes militaires, diverses
distinctions doivent spécifier leurs traits multiples. Une évolution importante
s’est d’abord produite en ce qui concerne leur origine et leur conception de
l’exercice du pouvoir. Longtemps, les dictatures militaires ont constitué en
règle générale le produit de l’ambition efficace d’un officier bénéficiant certes
de soutiens dans l’armée, mais agissant à titre personnel avec l’appui de
quelques collègues et de quelques régiments, au besoin contre le gré du haut-
commandement (cas paradigmatique des vieilles républiques « bananières »
de l’Amérique centrale). Mais cette ancienne règle générale tombe de plus en
plus en désuétude, si ce n’est dans certains pays africains ou, à l’état de
velléité infructueuse, en Argentine ou au Vénézuéla notamment. Ce qui la
remplace est la prise et l’exercice du pouvoir par l’armée en tant que corps
constitué, sous l’autorité hiérarchique de ses chefs réguliers et en vertu de
décisions prises collégialement par ceux-ci après consultation des
responsables des différentes armes et régions militaires. Tel est du moins
l’esprit du dispositif qui préside à la mise en œuvre du putsch, à la désignation
des présidents galonnés successifs par ordre d’ancienneté, aux choix des
politiques, étant entendu que certaines disputes peuvent se faire jour entre les
diverses branches des forces armées ; ainsi entre l’aviation généralement plus
démocratique et la marine plus réactionnaire. Le régime militaire brésilien des
années 1964-1984 a offert l’exemple par excellence de ces mécanismes,
comme aussi la dictature du général Pinochet au Chili (1973-1991).
La structure interne des régimes militaires s’est trouvée coiffée de la façon
la plus classique par une junte – la junta – collégiale de gouvernement formée
d’une dizaine de membres au maximum et réunissant des représentants des
diverses armes. Les membres de celle-ci sont dans le cas ordinaire ceux du
haut-commandement (Chili, Thaïlande), dans d’autres cas de plus ou moins
jeunes officiers révolutionnaires ou en révolte contre leurs supérieurs (cas un
temps fréquent au Proche-Orient) qui s’autodésignent. Toutefois, les régimes
militaires tendent toujours à s’institutionnaliser et les juntes originelles de
toutes espèces prennent alors d’autres appellations (SLORC en Birmanie,
DERG éthiopien sous Mengistu). La plupart le font même dès leur début ou
très rapidement, en prenant le plus souvent le visage formel de régimes
présidentiels dont le personnage central est coopté par ses pairs avant d’être
proposé ou non à l’acclamation du peuple (le Brésil et l’Indonésie en ont
fourni un temps des exemples).
Plus bas dans l’appareil de l’État, les régimes militaires se sont
accommodés de formules d’organisation tellement diverses qu’on a pu douter
quelquefois de leur nature martiale. Ainsi en Égypte, où il est devenu d’usage
que les ministres soient des civils. Par ailleurs, les militaires ont dans certains
pays colonisé presque intégralement les rouages de l’administration et même
des entreprises, comme en Birmanie, en Indonésie ou au Chili un moment,
tandis qu’ils se sont appuyés au contraire sur une bureaucratie civile
pratiquement intacte au Ghana ou au Nigéria, notamment. Restent alors les
situations véritablement intermédiaires où l’armée se présente comme le
soutien d’un chef d’État civil ou militaire désigné de manière discutable, sans
que les rouages de l’État se trouvent confisqués pour autant par ses membres
et sans qu’on puisse parler proprement en ce qui les concerne de régime
militaire. Le Zaïre du maréchal Mobutu se range dans cette catégorie,
l’Algérie dans une moindre mesure et dans un genre différent, ou encore le
Pakistan en dépit de ses élections très disputées et de son pluralisme partisan.
Ceci sans oublier les cas particulièrement inclassables de l’Irak de Saddam
Hussein et de la Syrie, où le pouvoir repose sur une sorte de symbiose du
corps des officiers et des partis Baas.
→ coup d’État, militaires et politique, régimes politiques : Régimes
autoritaires
FINER S. E., The Man on Horseback, Harmondsworth, Penguin, 1976 ;
ROUQUIÉ A. (dir.), La Politique de Mars, Paris, Le Sycomore, 1981 ;
HUNTINGTON S., The Soldier and the State, New York, Random House, 1964.
RÉGIME MIXTE. La théorie du régime mixte a eu notamment pour ambition de
stopper la succession historique des régimes en rompant le cycle de la
dégradation du politique. Polybe est généralement reconnu comme son
premier théoricien explicite. Attentif aux institutions romaines, il estime que
la qualité d’un régime tient à sa capacité d’équilibrer les trois formes de
pouvoir archétypiques : monarchie, aristocratie et démocratie (à Rome : la
monarchie représentée par les consuls, l’aristocratie par le Sénat, la
démocratie par les pouvoirs du peuple). Aristote avait toutefois préparé l’idée
de régime mixte, dans la perspective d’un régime d’équilibre servant de
remède à la corruption de la politique par le temps (la monarchie devient
tyrannie, l’aristocratie oligarchie, la démocratie démagogie). Ce remède
retient ce que chaque régime a de bon et se fonde sur la combinaison de ces
bons éléments. Avec Montesquieu, lecteur de Polybe, cette conception va
déboucher beaucoup plus tard sur la théorie de la séparation des pouvoirs puis
sur l’idée des poids et contrepoids.
BLANQUER J.-M., « L’ordre constitutionnel d’un régime mixte », Revue de
droit public (5/6), 1998 : 1526-1540 ; PETOT J., « La notion de régime mixte »,
Recueil d’études en hommage à Charles Eisenmann, Paris, Éd. Cujas, 1977.
RÉGIMES PARLEMENTAIRES. Ils constituent une catégorie particulière des
régimes représentatifs dans les démocraties pluralistes. Par opposition aux
régimes présidentiels d’une part, aux régimes d’assemblée d’autre part, ils se
définissent comme le gouvernement des affaires par un cabinet responsable
devant un Parlement lui-même susceptible d’être dissous. Avec ce système
minimum de dépendance réciproque entre l’exécutif et le législatif, se
trouvent en effet mises en place les bases d’une nécessaire collaboration entre
les pouvoirs publics.
Les systèmes totalitaires ont obéi avec une intensité variable au primat
apparent de l’idéologie : raciste et élémentaire dans le cas allemand, marxiste
et référé à l’extinction des distinctions de classe par la collectivisation des
moyens de production dans le cas communiste. Mais ils ont présenté dans la
pratique d’autres caractéristiques : 1) L’existence d’un parti unique doublant
l’appareil de l’État et se substituant à lui en réalité ; 2) L’omniprésence d’une
police politique destinée autant à diffuser une terreur généralisée et garante de
la soumission de la population qu’à assurer véritablement la sécurité du
système ; 3) Le mépris de l’ordre juridique, adapté constamment à des
circonstances changeantes et d’ailleurs bafoué jusque dans ces circonstances ;
4) L’endoctrinement permanent de la population et particulièrement des
jeunes, par le biais d’une information unilatérale ainsi que dans le cadre
d’organisations multiples, croisées et pratiquement inesquivables sous peine
de mort physique ou sociale ; 5) La transformation des systèmes de valeurs
conçue à la lettre comme une préparation de la société future, mais
débouchant finalement sur une inversion perverse traduite par le double
langage et la duplicité. À tout cela s’est ajouté le fait que ce qui n’était pas
interdit n’était pas forcément permis, que moins une institution était visible,
plus elle était puissante, et que l’appropriation des moyens de production par
les pouvoirs communistes y a écrasé tout spécialement l’autonomie des
individus comme des structures propres de la société.
Il faut noter, cependant, que les systèmes communistes sur leur déclin ont
quitté la catégorie du totalitarisme pour se rapprocher de celle des régimes
autoritaires. Il convient d’observer, également, que l’Italie fasciste ou
l’Espagne de Franco sont toujours demeurées en deçà du paroxysme
totalitaire, tandis que l’adjectif totalitaire se trouve toujours utilisé sans cesse
hors de propos comme pour attester la confusion des idées de celui qui
l’emploie.
ARENDT H., Le Système totalitaire, Paris, Seuil, 1972 ; Les Origines du
totalitarisme, Paris, Seuil, 1995 ; ARON R., Démocratie et Totalitarisme, Paris,
Gallimard, 1965 ; FAYE J.-P., Langages totalitaires, Paris, Hermann, 1972 ;
FRIEDRICH C., BRZEZINSKI Z., Totalitarian Dictatorship and Autocracy, New
York, Harper, 1956 ; HERMET G. (dir.), Totalitarismes, Paris, Economica,
1984 ; KLEMPERER V., LTI. La langue du III Reich. Carnets d’un philologue,
ème
RÉGULATION
RELATIVISME CULTUREL
RELIGION CIVILE
RELIGION ET POLITIQUE
REPRÉSENTATION POLITIQUE
REPRÉSENTATIONS
RÉPUBLIQUE
RESPONSABILITÉ POLITIQUE
RESSOURCES POLITIQUES
sq.
RÉTRODICTION
RITES POLITIQUES
→ liturgie politique
Rôle (notion de)
Dans toutes les collectivités, on constate une différenciation des fonctions
entre les acteurs liées à la division du travail social. À chaque fonction se
trouvent liés des rôles spécifiques qui permettent leur mise en œuvre et
correspondent à des attentes de la part des autres acteurs. On distingue de
manière classique les rôles innés des rôles acquis, les premiers étant naturels,
liés au sexe, à la famille, etc., les seconds étant au contraire acquis par les
acteurs au cours de leur propre vie sociale, professionnelle, politique, etc.
Considérés comme la dimension dynamique du statut d’un acteur spécifique,
les rôles sont tous soigneusement contrôlés et les individus qui les exercent se
trouvent dans l’obligation de s’effacer quelque peu, de limiter autant qu’ils le
peuvent l’expression de leurs propres valeurs ou intérêts, ceux-ci devant
inférer le moins possible avec le déroulement de rôles considérés comme
simplement fonctionnels, revêtant dès lors une dimension quelque peu
impersonnelle. Les normes sociales régissent l’exercice des rôles et leur
distribution. Dans le groupe social tout entier ou dans le cadre de la famille,
du groupe de jeu, d’une organisation partisane ou syndicale, les rôles de
chaque acteur se trouvent donc distribués, le père tout comme le chef d’un
groupe politique étant supposé occuper une fonction dirigeante vis-à-vis des
autres membres de sa famille ou de son organisation politique. La division des
rôles conduit ainsi, par exemple, à l’acceptation de la différence entre
dirigeants et dirigés.
Satisfaire à un rôle revient souvent à accepter une dimension théâtrale dans
la mesure où chaque acteur joue son ou ses rôles. Talcott Parsons ou Erving
Goffman ont l’un et l’autre souligné cette dimension théâtrale des rôles
sociaux par laquelle un acteur en vient à incarner un personnage ; Goffman
surtout, l’auteur de La Mise en scène de la vie quotidienne, s’est longuement
penché sur les multiples manières dont un acteur s’efforce de prendre une
distance à l’égard de son propre rôle, de se moquer presque de ce
comportement par trop organisé afin de légitimer davantage sa propre
personnalité, l’acteur ne voulant pas la ramener simplement à un ensemble de
rôles préalablement définis. De plus, chaque acteur exerce presque toujours,
dans des sociétés complexes, un nombre important de rôles distincts qui
doivent, dans la mesure du possible, être congruents entre eux, permettant
ainsi la préservation de la cohérence de la personnalité.
→ comportement politique
MERTON R. K., Éléments de théorie et de méthode sociologiques, Paris,
Plon, 1965 [1957] ; PARSONS T., BALES R. et al., Family, Socialization and
Interaction Process, Glencoe, The Free Press, 1954.
S
SACRALISATION
→ Électoraux (Systèmes)
SECTE
Notion assez imprécise, employée dans des sens différents et qui reçoit,
dans le langage courant, une connotation péjorative, mettant l’accent sur son
caractère fermé, élitiste et intolérant (d’où sectaire et sectarisme). En
sociologie religieuse, le concept de secte a cependant une signification
beaucoup plus neutre. Max Weber l’oppose à celui d’Église, pour insister sur
son caractère contractuel, volontaire et décentralisé, tandis que E. Troeltsch
distingue Église, réseau mystique et secte : le second est précaire et assez
informel, tandis que la secte est structurée sur le plan local et se caractérise,
contrairement à l’Église, par un fort engagement de ses membres, ainsi que
par sa capacité de produire une contre-culture. L’essor contemporain de
« nouveaux mouvements religieux », notamment, mais pas uniquement, dans
les sociétés en développement, a conduit à un élargissement assez peu
rigoureux du concept de secte qui semble désormais désigner toute
construction religieuse déviante par rapport aux institutions religieuses
traditionnelles. De la même manière, et de façon métaphorique, la secte
désigne volontiers, au sein de la cité, tout groupement d’individus réunis
autour de convictions profondément intériorisées et refusant toute forme de
compromis et toute pratique tolérante à l’égard de l’autre.
→ messianisme, religion et politique
SÉGUY J., Christianisme et société, Paris, Le Cerf, 1980 ; WEBER M.,
L’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme, Paris, Plon, 1964.
SÉCULARISATION
SÉCURITÉ
SEGMENTAIRES (SOCIÉTÉS)
SENS COMMUN
Généralement opposé au savoir méthodiquement acquis, il est devenu, dans
les sciences sociales et plus particulièrement en sociologie et en
anthropologie, une importante catégorie d’analyse. Plus souvent évoqué que
réellement étudié, il se révèle d’un fonctionnement complexe si on l’envisage
dans une perspective anthropologique.
Clifford Geertz observe qu’il ne peut être défini par son contenu, trop
variable selon les cultures, mais comme un « cadre à penser » présentant le
savoir pertinent à travers les propriétés suivantes : naturel, pratique, littéral
(c’est-à-dire simple), sans complication méthodologique et accessible à tout
individu normalement raisonnable. Mais la comparaison anthropologique
permet d’observer que « le sens commun n’est pas ce que l’esprit débarrassé
des conventions perçoit spontanément ; il est ce que l’esprit plein de
présupposés conclut ».
→ culture
CRAPEZ M., Défense du bon sens ou la controverse du sens commun, Paris,
Éd. du Rocher, 2003 ; GEERTZ C., « Le sens commun en tant que système
culturel », pp. 105-107 in Savoir local, savoir global, Paris, PUF, 1986.
Séparation des pouvoirs (Doctrine de la)
La séparation des pouvoirs est une technique d’organisation
constitutionnelle liée au libéralisme. On en trouve plusieurs interprétations.
Selon une première interprétation, le principe de séparation des pouvoirs
qu’on impute à tort à Montesquieu comporte deux règles : celle de la
spécialisation et celle de l’indépendance. La spécialisation signifie que les
trois fonctions juridiques de l’État, législative, exécutive et juridictionnelle,
sont attribuées à trois organes distincts, chacun devant exercer une seule
fonction et ne devant participer en rien à l’exercice des deux autres ; d’après la
règle de l’indépendance, les organes doivent être dépourvus de tout moyen
d’action réciproque (absence de dissolution, de responsabilité, etc.). La
combinaison de ces deux règles est censée produire un équilibre entre les
organes respectifs des trois fonctions.
Cette théorie a été critiquée par Carré de Malberg qui a montré que la
spécialisation ne produirait pas un équilibre entre les organes mais une
hiérarchisation, car les fonctions ne sont pas égales mais sont bien
hiérarchisées. Selon une deuxième interprétation, pour Montesquieu comme
pour tous les auteurs du XVIII siècle, y compris J.-J. Rousseau, le principe de
e
SEXE
→ genre
SHADOW CABINET
SIONISME
issue des Lumières, qui a rendu possible leur assimilation aussi bien en
Grande-Bretagne qu’en France finirait par s’imposer aussi dans l’est de
l’Europe. D’autres plaçaient, au contraire, leurs espoirs dans le mouvement
ouvrier internationaliste comme libérateur de l’humanité tout entière, incluant
définitivement les juifs dans le monde moderne ; d’autres tentaient de
construire un mouvement ouvrier spécifiquement juif dans la diaspora ;
d’autres enfin souhaitaient, au contraire, le retour à des structures proches du
ghetto d’antan qui seraient seules capables de faire revivre la solide tradition
orthodoxe religieuse menacée par les diverses émancipations.
Au sein du mouvement sioniste lui-même se sont longtemps affrontées
deux tendances principales. La première, animée par Ahad ha-Am, a
privilégié surtout la renaissance culturelle comme condition de la construction
d’une nouvelle communauté politique tandis que la seconde, incarnée par
Théodore Herzl, s’est montrée résolue à construire d’emblée, dans l’urgence
et par tous les moyens, un État juif souverain. Le sionisme politique devait
l’emporter en s’imposant finalement, en 1948, par la création de l’État
d’Israël. Sa légitimité s’est d’ailleurs renforcée dès avant ce moment aussi
bien par l’affaire Dreyfus, marquant les limites de l’émancipation des
Lumières, que par les terribles pogromes de l’Est de la fin du siècle dernier
ou, encore et surtout, à l’époque contemporaine, par le génocide nazi.
→ antisémitisme, nation : Nationalisme
DIECKOFF A., L’Invention d’une nation, Paris, Gallimard, 1993 ;
DIECKOFF A. (dir.), L’État d’Israël, Paris. Fayard, 2008 ; HAZONY Y., L’État
juif : sionisme, postsionisme et destins d’Israël, Paris. Éd. de l’Éclat, 2007 ;
HERZL TH., L’État des Juifs, Paris, La Découverte, 1989 ; PENSLAR D., Israel in
History : the Jewish state in comparative perspective, London, Routledge,
2007 ; VITAL D., The Origins of Zionism (1975) ; Zionism : the Formative
Years (1982) ; Zionism : the Crucial Phase (1987), trois livres parus chez
Clarendon, Oxford ; STERNHELL Z., Aux origines d’Israël, Paris, Fayard, 1995.
SOCIALISATION POLITIQUE
La socialisation désigne le processus d’insertion des individus au sein d’une
société donnée, et donc l’intériorisation des normes et des valeurs propres à
cette société. La socialisation politique distingue la dimension politique de
cette intégration et décrit ainsi l’apprentissage, par l’individu, de son rôle
politique. Dans une perspective systémique, longtemps dominante dans ce
secteur d’étude, notamment aux États-Unis, la socialisation se rapportait
essentiellement au processus d’intégration de l’individu au sein d’un système
social global correspondant, le plus souvent, au système politique national (cf.
en particulier, D. Easton). Des travaux plus récents mettent, en revanche,
l’accent sur le rôle actif de l’individu dans l’accomplissement de ce processus
de socialisation. Annick Percheron relève, en particulier, l’appartenance,
simultanée ou successive, de l’individu à plusieurs collectivités –
subnationales ou transnationales – qui sont porteuses, chacune, d’une
socialisation qui leur est propre et qui est concurrentielle des autres. Loin de
présider à une socialisation uniforme, les sociétés nationales sont en réalité un
lieu où entrent en compétition – voire en conflit – plusieurs systèmes de
normes et de valeurs entre lesquels l’individu tranche et opère ses choix. En
outre, l’individu ne peut pas être tenu pour un sujet exposé à un apprentissage
passif, mais en réalité porteur d’une personnalité et d’une série d’expériences
qui le conduisent à procéder de manière interactive avec les agents porteurs de
socialisation (famille, école, lieu de travail, réseaux associatifs…). C’est
l’étude de cette interaction qui devient, de plus en plus, l’objet des analyses de
socialisation politique. La socialisation anticipatrice décrit les processus par
lesquels un individu adopte par avance les normes et les valeurs d’une
collectivité à laquelle il cherche à appartenir.
→ comportement politique, valeur
EASTON D., DENNIS J., Children in the Political System, New York,
McGraw Hill, 1969 ; PERCHERON A., L’Univers politique des enfants, Paris,
Presses de la FNSP, 1974 ; La Socialisation politique, Paris, A. Colin, 1993.
SOCIALISME
générale du socialisme, Paris, PUF, 4 vol., 1972-1978 ; ELSTER J., Karl Marx,
Paris, Fayard, 1983 ; KITSCHELT H., The Transformation of European Social
Democracy, New York, Cambridge University Press, 1994 ; LAZAR M., La
Gauche en Europe depuis 1945. Invariants et mutations du socialisme
européen, Paris, PUF, 1996 ; LIPSET S. M., MARKS G., It Didn’t Happen Here :
Why Socialism Failed in the United States, New York, Norton, 2000.
Société
Influencées par la tradition philosophique occidentale, les sciences sociales
ont souvent repris à leur compte la coupure, voire l’opposition :
individu/société. Il en résulte des questionnements à la fois banals et
essentiels. La société est-elle simple agrégation de comportements individuels
ou constitue-t-elle une entité distincte soumise à des lois spécifiques ? La
société est-elle le produit des individus qui la composent ou, au contraire, est-
elle le système de déterminismes et de contraintes qui les façonnent ? Les
réponses contrastées données à ces questions dessinent les frontières de
problématiques scientifiques différentes. Ainsi l’individualisme
méthodologique (cf. Olson, Boudon) ou l’interactionnisme stratégique (cf.
Crozier) privilégient-ils l’étude des relations micro-sociologiques pour en
inférer les phénomènes macro-sociaux ; de même accordent-ils une place
importante au choix des acteurs. Au contraire, les approches dites holistes (en
France, Bourdieu mais aussi Touraine ou Balandier) insistent davantage sur
les déterminismes sociaux qui gouvernent les agents (un terme
significativement préféré à celui d’acteur).
Dans ses travaux, Norbert Elias récuse cette dichotomie individu/société. Il
insiste au contraire sur l’interpénétration constante des comportements
individuels et des phénomènes collectifs, sur les « configurations complexes »
d’interactions en situation socialement organisée. « La société n’est pas
simplement un objet face aux individus isolés ; elle est ce que chaque individu
désigne lorsqu’il dit nous. »
→ centre-périphérie, culture politique, organicisme, segmentaires
(sociétés)
BOUDON R., La Logique du social, Paris, Hachette, 1983 ; DURKHEIM É., Les
Règles de la méthode sociologique (1895), Paris, PUF, 1987 ; ELIAS N., La
Société des individus, Paris, Fayard, 1991 ; Qu’est-ce que la sociologie ?,
Paris, Éd. de l’Aube, 1991 ; GIDDENS A., La Constitution de la société, Paris,
PUF, 1987.
SOCIÉTÉ CIVILE
SOCIÉTÉ DE RISQUE
SOCIO-HISTOIRE
→ méthodologie
NOIRIEL G., Introduction à la socio-histoire, Paris, La Découverte, 2006
(Repères).
SOCIOLOGIE ÉLECTORALE
→ électorale (sociologie)
SOCIOLOGIE HISTORIQUE
SOFT POWER
Concept forgé par Joseph Nye en 1990 et passé comme tel dans la langue
française. Il était destiné d’abord à répondre aux thèses sur le déclin
américain, en affirmant que la puissance des États-Unis reposait non
seulement sur des ressources militaires et économiques, mais aussi sur un
ensemble d’instruments matériels et symboliques qui permettent d’obtenir
spontanément et sans contrainte l’adhésion des autres, en façonnant leurs
préférences et leurs attentes. On distingue alors le rôle de la culture, des
valeurs, de la communication, de l’image qu’on donne de soi, mais aussi de
toute forme de médiation permettant de peser sur le processus de mise sur
agenda international. On tiendra alors le soft power pour une capacité
attractive, sans que Joseph Nye ne soit parvenu à définir ni mesurer ce que
cette attraction implique quant au mode de structuration du système
international.
NYE J., Bound to lead, New York, Basic Books, 1990 ; Soft Power, New
York, 1999.
SONDAGES D’OPINION
SOUVERAINETÉ
SPIN DOCTOR
STALINISME
STORYTELLING
SUBSIDIARITÉ
SYMBOLIQUE POLITIQUE
SYNDICATS
Les syndicats se constituent peu à peu dans les pays d’Europe occidentale,
au cours de la seconde moitié du XIX siècle, à des rythmes qui varient
e
Presses de Sciences Po, 2008 ; JULLIARD J., Autonomie ouvrière : Étude sur le
syndicalisme d’action directe, Paris, Seuil, 1988 ; LAZAR M. (dir.), La Gauche
en Europe depuis 1945, Paris, PUF, 1995 ; MOURIAUX R., Le Syndicalisme en
France depuis 1945, Paris, La Découverte, 2004.
SYSTÈME
Dans le système politique américain, la victoire aux élections d’un des deux
grands partis entraîne traditionnellement un vaste mouvement du personnel,
qualifié de système de dépouilles. Système fortement décentralisé dans lequel
la bureaucratie étatique reste faiblement structurée et institutionnalisée, les
États-Unis attribuent une importance décisive à la victoire électorale d’un
parti car elle témoigne de la force de la démocratie elle-même : du coup, le
vainqueur s’attribue un certain nombre de fonctions publiques qui, dans
d’autres sociétés comme la France, demeurent protégées par la permanence de
la bureaucratie publique. Le spoil system mène ainsi à une circulation
constante des élites politiques qui concerne aussi les fonctions considérées
ailleurs comme purement administratives. Les difficultés posées par une telle
alternance constante ont mené à l’époque contemporaine à la mise en place
d’un système au mérite, forme embryonnaire d’une méritocratie
bureaucratique qui restreint la portée du système des dépouilles. Au contraire,
dans des pays à État fortement bureaucratisé comme la France, on a vu se
développer à l’époque contemporaine une rotation des élites analogue par
beaucoup d’aspects au vieux spoil system, limitant ainsi quelque peu la
continuité du service public.
→ administration publique, bureaucratie, élection, méritocratie
SYSTÈME POLITIQUE
SYSTÉMIQUE (ANALYSE)
TABLES RONDES
TECHNOSTRUCTURE
Cette notion a été proposée par James Burnham en 1941, dans son ouvrage
L’ère des organisateurs. À ses yeux, les dirigeants des grandes entreprises
sont amenés à contrôler peu à peu l’ensemble de la société à partir de leurs
compétences techniques. Prolongeant une vision positiviste propre au
XIX siècle et dans la perspective d’un Saint-Simon, Burnham considère donc
e
TÉLÉVISION ET POLITIQUE
TERREUR POLITIQUE
TERRITOIRE
THÉORIE CRITIQUE
→ École de Francfort
THINK-TANK
Cette notion issue du monde anglo-saxon désigne des structures
indépendantes de l’État ou des partis capables, en fonction de leur entière
indépendance intellectuelle, de leur expertise, de leurs connaissances,
d’élaborer des propositions dont peuvent s’inspirer les autorités politiques.
Les politiques publiques sont ainsi largement influencées par ces groupes qui
servent de réservoir d’idées d’autant plus que leurs propositions sont diffusées
par la presse et les médias et suscitent des discussions publiques. Les plus
célèbres, aux États-Unis, sont la Brookings Institution ou encore la Rand
Corporation. Ces groupes se répandent un peu partout ; on en trouve
désormais en France, comme la Fondation Saint Simon.
TICKET GRATUIT
TINGSTEN (EFFET)
TRADITION
TRADITIONALISME
TRANSITIONS DÉMOCRATIQUES
→ démocratisation
TRANSNATIONALES (RELATIONS)
Les relations transnationales désignent toutes les relations sociales qui, par
volonté délibérée ou par destination, se déploient sur la scène mondiale au-
delà du cadre étatique national et qui se réalisent en échappant au moins
partiellement au contrôle ou à l’action médiatrice des États. Elles contribuent
ainsi à recomposer l’ordre mondial en doublant le monde des États-nations
d’un monde « multicentré », dont les acteurs sont constitués d’individus, de
réseaux associatifs ou informels ainsi que d’organisations non
gouvernementales. Ces relations concernent les secteurs les plus divers de
l’action sociale : économique, culturel, démographique ou politique ; elles se
structurent soit à l’initiative d’entreprises (firmes multinationales,
organisations religieuses, organisations humanitaires, entreprises de
communication…), soit par agrégation de décisions ou de choix individuels
(mouvements migratoires par ex.). Elles sont amenées à se définir par rapport
aux États qui, au gré des situations, résistent à leur essor, cherchent à capter
ou à utiliser à leur profit certaines de leurs ressources ou, encore, établissent
avec elles un nouveau type de division du travail.
→ international (scène internationale), linkage, réseau (concept de)
BADIE B., SMOUTS M.-C., Le Retournement du monde. Sociologie de la
scène internationale, Paris, Presses de la FNSP, 1992 ; ROSENAU J.,
Turbulence in World Politics, Princeton, Princeton University Press, 1990.
TRIBALISME
TYPE-IDÉAL
La notion de type-idéal a été élaborée par Max Weber dans ses Essais sur la
science. Pour lui, le type-idéal représente la seule méthode compatible avec la
pluralité infinie des valeurs qui orientent les recherches menées par les
sociologues ; rompant avec un strict positi visme, Weber propose de
considérer celui-ci comme « un concept limite purement idéal, duquel on
mesure la réalité pour clarifier le contenu empirique de certains de ses
éléments importants et avec lesquels on la compare ». Le type-idéal est une
représentation de la réalité, partielle et partiale, construite à partir de valeurs
spécifiques conduisant à choisir certaines variables au détriment d’autres qui
n’entrent pas dans le cercle d’intérêt du chercheur (il s’agit selon les termes
mêmes de Weber d’un « concept limite purement idéal, duquel on mesure la
réalité pour clarifier le contenu empirique de certains de ses éléments
importants et avec lesquels on la compare »). Ainsi la dimension économique
privilégiée, par exemple, par le marxisme, représente un point de vue sur la
réalité qu’il convient de prendre en considération mais rien de plus. Dans ce
sens, « il n’est pas un exposé du réel […] on obtient un idéal-type en
accentuant unilatéralement un ou plusieurs points et en enchaînant une
multitude de phénomènes donnés isolément, diffus et discrets, que l’on trouve
tantôt en grand nombre et tantôt pas du tout, qu’on ordonne selon les
précédents points de vue choisis unilatéralement, pour former un tableau de
pensée homogène. On ne trouvera nulle part empiriquement un pareil tableau
dans sa pureté conceptuelle : il est une utopie ». Weber donne par conséquent
une importance considérable à l’imagination du sociologue et construit un
instrument de recherche compatible avec sa sociologie de la culture et des
valeurs. Contre tous les positivismes, Weber propose une sociologie
interprétative qui n’est guère compatible avec l’emploi des méthodes
quantitatives et statistiques d’autant plus qu’elle ne croit pas en la possibilité
de parvenir, dans les sciences sociales, à de véritables démonstrations de
l’ordre de la causalité, tant les valeurs unilatérales, celles des chercheurs mais
aussi et surtout celles des acteurs, sont multiples. D’une richesse
incontestable, ces tableaux de pensée présentent pourtant l’inconvénient
inverse des méthodes de type quantitatif : par définition, ils ne peuvent être
infirmés.
→ méthodologie : méthodes qualitatives, paradigme scientifique
WEBER M., Essais sur la théorie de la science, Paris, Plon, 1965 [1918],
pp. 179-181.
TYRANNIE
Règne d’un tyran, modalités d’exercice de son pouvoir sans frein, ou espace
politique qui lui est soumis. Dans la Grèce antique, le tyran s’emparait du
pouvoir et s’y maintenait par la force, au mépris de toute règle déjà établie ou
simplement prévisible. Il pouvait toutefois bénéficier de l’assentiment
populaire, et ce n’est qu’avec Platon et Aristote que la tyrannie s’est
transformée en catégorie typologique connotée de manière totalement
péjorative. Platon, en particulier, l’interprétait soit comme une corruption de
la monarchie, soit comme un risque tendanciel inhérent à la démocratie. C’est
Leo Strauss qui a renoué en 1946 avec l’usage du mot, devenu cher plus tard
aux néo-conservateurs américains dans leur croisade pour la démocratie en
tous terrains.
→ cité antique, totalitarisme, violence politique
U-V-W
UNIVERSALISME
→ particularisme
URBANISATION
UTOPIE
VERTS
→ partis écologistes
Violence politique
En un sens large, toute forme de contrôle social (processus d’acculturation
ou de socialisation) est une violence faite à des individus contraints de
renoncer à la satisfaction de certaines attentes. Il s’agit là d’une « violence
structurelle » qui produit, selon les termes de Johan Galtung, « une différence
négative entre les possibilités d’accomplissement des individus et leurs
réalisations effectives ». Cette conception très (trop ?) large de la violence est
loin d’être unanimement partagée. Un critère matériel (destructions de biens,
blessures létales ou non infligées aux personnes) est considéré comme un
élément indispensable de la définition. Mais ce qui qualifie de politique la
violence ainsi comprise, c’est la présence d’indicateurs supplémentaires :
généralement le choix de la cible, les motivations de l’acteur, le modus
operandi ou les circonstances du passage à l’acte. Dans les systèmes politiques
contemporains, qui cherchent tous à faire prévaloir la monopolisation au profit
de l’État du recours légitime à la force, le critère matériel, en revanche, il
convient de retenir sous la même définition les manifestations de la violence
d’État, souvent euphémisée sous le terme de coercition, et les violences
contestataires : à la fois parce qu’elles sont fréquemment en étroite interaction,
mais aussi par souci de neutralité scientifique à l’égard des jugements de
valeurs, très contrastés, que portent sur elles les acteurs sociaux. Ainsi conçue,
la violence, envisagée comme menace ou comme recours, constitue une
« ressource » qui s’intègre, à côté d’autres moyens d’action concomitants,
dans les logiques de négociation et de marchandage qui gouvernent la vie
politique. Elle est inégalement performante selon qu’elle éveille seulement
l’éphémère attention des médias ou qu’elle inspire soit la peur qui paralyse
soit l’indignation qui mobilise. Elle est aussi inégalement distribuée. L’État
moderne dispose généralement d’une supériorité écrasante tant du point de
vue technique que symbolique, puisque sa violence est censée utilisée
seulement pour faire respecter le droit. Cependant, une violence à niveau
modéré (occupations de lieux publics, déprédations matérielles circonscrites)
constitue dans les démocraties un moyen d’expression courant et banalisé.
Enfin, de très petits groupes – terroristes – peuvent acquérir une capacité de
nuisance élevée et, de ce fait, peser lourdement sur les calculs politiques des
gouvernants.
→ ressources politiques, terreur politique, terrorisme
BRAUD PH., Violences politiques, Paris, Seuil (Points), 2004 ; CRETTIEZ X.,
Violence et nationalisme, Paris, O. Jacob, 2006 ; GIRARD R., La Violence et le
sacré, Paris, Grasset, 1972 ; LAGRANGE H., OBERTI M. (dirs.), Émeutes
urbaines et protestation. Une singularité française, Paris, Presses de Sciences-
Po, 2008 ; MICHAUD Y., Changements dans la violence, Paris, O. Jacob, 2002 ;
SÉMELIN J., Purifier et détruire. Usages politiques des massacres et génocides,
Paris, Seuil, 2005 ; SOMMIER I., La Violence révolutionnaire, Paris, Presses de
Sciences-Po, 2008 ; TILLY CH., TARROW S., Politiques du conflit. De la grève à
la révolution, Paris, Presses de sciences-Po, 2008 ; WIEVIORKA M., La
Violence, Paris, Balland, 2004 ; ZIMMERMANN E., Political Violence, Crises
and Revolutions, Cambridge, Shenkman, 1983.
VIOLENCE SYMBOLIQUE
VIRTÙ
VOILE D’IGNORANCE
Cette notion a été proposée par John Rawls dans son livre fondamental,
Théorie de la justice. À ses yeux, des individus à la recherche d’un fondement
rationnel à leur association et à leur reconnaissance réciproque doivent
s’inspirer d’une véritable équité (fairness), c’est-à-dire que chacun doit
respecter des règles en sachant que les autres les appliquent également, et que
chacun sait aussi restreindre sa propre recherche du bonheur pour la rendre
compatible avec celle des autres. Afin de mettre en place cette justice
acceptable par tous, Rawls propose sa notion de voile d’ignorance impliquant
que les acteurs sociaux parviennent à se détacher de leurs convictions et de
leurs intérêts. Dans ce contexte, pour Rawls, « personne ne connaît sa place
dans la société, sa position de classe ou son statut social ; personne ne connaît
ses propres atouts naturels […] sa propre conception du bien […] le contexte
particulier de sa propre société ». Les hommes n’étant plus séparés par la
conscience de leurs intérêts contradictoires, de leurs valeurs antagonistes qui
les détournent d’un accord sur une vérité transcendantale commune à tous, ils
parviennent à atteindre, grâce à ce voile d’ignorance, un minimum d’accord
commun. La recherche de la justice supposerait donc la mise en place de ce
voile d’ignorance volontairement respecté par les citoyens soucieux du
renforcement de l’espace public partagé. Seuls ces contractants « imaginaires
et artificiels » (Catherine Audard) instaureraient une justice acceptable pour
tous, fondée ni sur un rapport social contraignant ni sur le partage d’une
culture commune.
→ justice
AUDARD C. et al., Individu et justice sociale, Paris, Seuil (Points), 1988 ;
RAWLS J., Théorie de la justice, Paris, Seuil, 1987 ; Justice et démocratie,
Paris, Seuil, 1993 ; ROSANVALLON P., La Nouvelle Question sociale, Paris,
Seuil, 1995.
VOLATILITÉ ÉLECTORALE
VOTE BLOQUÉ
VOTE PRÉFÉRENTIEL
→ Electoraux (Systèmes)
WHIG/TORY
acquiert son sens classique. Il le fait par référence aux deux amorces du
bipartisme anglais en voie de formation : d’abord le nouveau parti Tory créé
par William Pitt, représentant à la fois l’Église anglicane, la gentry rurale et
certaines classes commerçantes, ensuite le nouveau parti Whig, conduit par
James Fox, qui, après avoir auparavant déjà représenté l’aristocratie et les
couches bourgeoises libérales, se fera notamment le défenseur des protestants
dissidents. De nos jours, après l’effondrement du bipartisme
libéraux/conservateurs dû à l’irruption des travaillistes, les deux termes
désignent encore parfois deux lignées ou deux tempéraments politiques
britanniques, l’un ouvert aux idées avancées et réformatrices (Tony Blair
serait à ce titre un Whig), l’autre distinguant une classe dirigeante attachée aux
traditions mais aussi protectrice des faibles.
→ Partis libéraux, Systèmes de partis
Liste de entrées
Absolutisme [G.H.]
Abstentionnisme [G.H.]
Abstentionnisme différentiel [G.H.]
Accountability [G.H.]
Action collective [P.B.]
Action publique [P.B.]
Administration publique [Ph.B.]
Affaires courantes (Gouvernement d’) [Ph.B.]
Affirmative action [GH]
Afrique [B.B.]
Agenda politique [G.H.]
Agrarien [G.H.]
Aliénation politique [Ph.B.]
Altermondialisme [G.H.]
Alternance politique [Ph.B.]
Amendement (Droit d’) [Ph.B.]
Amérique latine [G.H.]
Anarchisme [G.H.]
Anarcho-syndicalisme [G.H.]
Anthropologie politique [G.H.]
Anticléricalisme [GH]
Antisémitisme [P.B.]
Apolitisme [Ph.B.]
Apparentements [Ph.B.]
Aristocratie [B.B.]
Asie orientale [B.B.]
Asie du Sud-Est [B.B.]
Assemblée nationale [Ph.B.]
Assimilation [P.B.]
Attitudes politiques [Ph.B.]
Autromarxisme [G.H.]
Autocontrainte [Ph.B.]
Autogestion [G.H.]
Autonomie [G.H.]
Autoritaire [G.H.]
Autoritaire (Personnalité) [G.H.]
Autoritarisme [G.H.]
Autorité [G.H.]
Ballottage [Ph.B.]
Behaviourisme (ou behaviorisme) [B.B.]
Bicamérisme [Ph.B.]
Biens communs [B.B.]
Biens primaires [G.H.]
Bonapartisme [G.H.]
Bossism [G.H.]
Bourgeoisie [G.H.]
Budget de l’État [Ph.B.]
Bureaucratie [P.B.]
C
Cabinet [G.H.]
Cabinet (Gouvernement de) [G.H.]
Cabinets ministériels [G.H.]
Caciquisme [G.H.]
Caméralisme [G.H.]
Capital social [G.H.]
Capitalisme [Ph.B.]
Castes et politique [P.B.]
Catholicisme et politique [G.H.]
Caucus [G.H.]
Caudillisme [G.H.]
Censure (Motion de) [Ph.B.]
Centralisation/Décentralisation [P.B.]
Centre [G.H.]
Centre-périphérie [B.B.]
Charisme [P.B.]
Checks and balances [G.H.]
Chef de l’État [Ph.B.]
Chef du gouvernement [Ph.B.]
Choix rationnel (Théorie du) [G.H.]
Cité antique [G.H.]
Cité-État [G.H.]
Citoyenneté [Ph.B.]
Civil Rights [G.H.]
Civilisation [B.B.]
Clan [B.B.]
Classe sociale [Ph.B.]
Clientélisme [G.H.]
Clivages politiques [G.H.]
Coalition (gouvernement de) [Ph.B.]
Coercition [Ph.B.]
Collectivités locales [Ph.B.]
Colonialisme [B.B.]
Coloniale (Situation) [G.H.]
Commissions parlementaires [Ph.B.]
Communautarisation [P.B.]
Communauté [B.B.]
Communalisation-sociation [B.B.]
Communauté de sécurité [B.B.]
Communauté imaginée [P.B.]
Communication politique [Ph.B.]
Communisme [Ph.B.]
Communitariens [G.H.]
Comparaison politique [B.B.]
Comportement électoral [Ph.B.]
Comportement politique [Ph.B.]
Concentrationnaire (Système) [B.B.]
Confiance (Question de) [Ph.B.]
Conflits (Théorie des) [P.B.]
Conflit international [B.B.]
Conflit international (lnouveau) [B.B.]
Consensus [Ph.B.]
Consensus de Washington [G.H.]
Conservatisme [Ph.B.]
Consociatif (Système) [G.H.]
Constitution [Ph.B.]
Constructivisme [Ph.B.]
Contractuelles (Politiques) [Ph.B.]
Contrat social [B.B.]
Contre-révolution [P.B.]
Conviction (éthique de la) [G.H.]
Corporatisme [G.H.]
Coup d’État [G.H.]
Crise [Ph.B.]
Culte de la personnalité [G.H.]
Culture [B.B.]
Culture politique [B.B.]
Cybernétique [G.H.]
Débat [Ph.B.]
Décentralisation/Déconcentration [Ph.B.]
Décision (processus de) [P.B.]
Déconcentration [Ph.B.]
Démocratie [G.H.]
Démocratie antique [G.H.]
Démocratie consociative [G.H.]
Démocratie délibérative [G.H.]
Démocratie directe [G.H.]
Démocratie électronique [G.H.]
Démocratie illibérale [G.H.]
Démocratie industrielle [G.H.]
Démocratie organique [G.H.]
Démocratie participative [G.H.]
Démocratie procédurale [G.H.]
Démocratie représentative [Ph.B.]
Démocratisation [G.H.]
Dépendance (Théorie de la) [B.B.]
Désenchantement du monde [G.H.]
Développement durable [G.H.]
Développement politique [B.B.]
Dévolution [G.H.]
Dhimmis [G.H.]
Dictature [G.H.]
Dictature du prolétariat [Ph.B.]
Diplomatie [B.B.]
Discours performatif [G.H.]
Discrimination positive [G.H.]
Disassimilation [P.B.]
Dissolution [Ph.B.]
Dissonance cognitive [Ph.B.]
Dissuasion [B.B.]
Division du travail social [P.B.]
Domination (types de) [Ph.B.]
Droit de vote [Ph.B.]
Droit naturel [Ph.B.]
Droite [G.H.]
Droits civiques [Ph.B.]
Droits de l’homme [G.H.]
Falsifiabilité [Ph.B.]
Fascisme [P.B.]
Fédéralisme [P.B.]
Federalist Papers [G.H.]
Femmes [Ph.B.]
Féodalité [G.H.]
Finances publiques [Ph.B.]
Fonction tribunitienne [G.H.]
Fonctionnaires [P.B.]
Fonctionnaires internationaux [G.H.]
Fonctionnalisme (théorie du) [P.B.]
Fondamentalisme protestant [G.H.]
Formule magique [G.H.]
Foules (théorie des) [P.B.]
Franchise électorale [G.H.]
Frustration relative (Théorie de la) [G.H.]
Gauche/Droite [G.H.]
Génocide [P.B. + G.H.]
Gender studies [G.H.]
Genre [G.H.]
Géopolitique [B.B.]
Gerrymandering [B.B.]
Globalisation [B.B.]
Gouvernabilité [P.B.]
Gouvernance [G.H.]
Gouvernance multi-niveaux [Ph.B.]
Gouvernement [Ph.B.]
Gouvernement local [P.B.]
Gouvernementalité [G.H.]
Groupe de référence/d’appartenance [P.B.]
Groupes de pression [P.B.]
Guerre [B.B.]
Guerre préventive [B.B.]
Habitus [Ph.B.]
Hiérarchie sociale [P.B.]
Historicisme [Ph.B.+ G.H.]
Holisme [G.H.]
Idealtyp [G.H.]
Identité politique [Ph.B.]
Idéologie [P.B.]
Immigration (Politiques de l’) [Ph.B.]
Impeachment [G.H.]
Impérialisme [B.B.]
Imputabilité [G.H.]
Incrémentalisme [P.B.]
Indigénisme [G.H.]
Individualisme [P.B.]
Individualisme méthodologique [P.B.]
Industrialisation [B.B.]
Industrielle (société) [P.B.]
Influence [Ph.B.]
Information [Ph.B.]
Ingérence [B.B.]
Institution/Institutionnalisation [B.B.]
Institutionnalisme historique [G.H.]
Institutionnalisme libéral [B.B.]
Institutions politiques [Ph.B.]
Instrumentalisme [G.H.]
Intégration [B.B.]
Intégration régionale [B.B.]
Interactionnisme [Ph.B.]
Intercommunalité [Ph.B.]
Intérêts [Ph.B.]
International (Scène internationale) [B.B.]
Internet [Ph.B.]
Interventionnisme de l’État [Ph.B.]
Islam et politique [B.B.]
Islamisme [B.B.]
Jacobinisme [P.B.]
Jeux (théorie des) [G.H.]
Judaïsme et politique [P.B.]
Justice [G.H.]
Justice sociale [G.H.]
Laïcité [G.H.]
Langage politique [Ph.B.]
Leaders d’opinion [P.B.]
Leadership [G.H.]
Légalité [Ph.B.]
Législatif (Pouvoir) [Ph.B.]
Légitimité [G.H.]
Légitimité (types de) [P.B.]
Léninisme [P.B.]
Libéralisation [G.H.]
Libéralisme [P.B.]
Libertariens [G.H.]
Liberté/Égalité [Ph.B.]
Liberté des anciens/Liberté des modernes [Ph.B.]
Libertés publiques [Ph.B.]
Linkage [B.B.]
Liturgie politique [Ph.B.]
Lobby [P.B.]
Loi [G.H.]
Loyalty [P.B.]
Lustration [G.H.]
Nation [P.B.]
Nationalisme [P.B.]
Nationalisme libéral [P.B.]
Nationalitaires (Mouvements) [P.B.]
Nationalité [G.H.]
Nature État de) [Ph.B.]
Nazisme [P.B.]
Néo-corporatisme [P.B.]
Néo-institutionnalisme [G.H.]
Néo-patrimonialisme [B.B.]
Notables [P.B.]
Nouveaux mouvements sociaux [G.H.]
Pacifisme [B.B.]
Paix [B.B.]
Panel (Technique du) [G.H.]
Paradigme scientifique [G.H.]
Paradoxe de Condorcet [Ph.B.]
Parlement [Ph.B.]
Participation politique [P.B.]
Particularisme-Primordialisme-Univer-salisme [B.B.]
Partis politiques [G.H.]
Organisation interne [G.H.]
Systèmes de partis [B.B.] + [G.H.]
Typologie des clivages partisans [G.H.]
Partis cartel [G.H.]
Partis agrariens [G.H.]
Partis antifiscaux [G.H.]
Partis autonomistes [G.H.]
Partis communistes [B.B.]
Partis successeurs [G.H.]
Partis confessionnels [B.B.]
Partis démocrates-chrétiens [G.H.]
Partis écologistes [Ph.B.]
Partis ethniques [G.H.]
Partis libéraux [P.B.]
Partis protestants [G.H.]
Partis radicaux [B.B.]
Partis socialistes et sociaux-démocrates [G.H.]
Partis travaillistes [P.B.]
Partis américains [G.H.]
Partis dans les sociétés en développement [B.B.]
Parti unique [B.B.]
Passions politiques [Ph.B.]
Patrimonialisme/Néo-patrimonialisme [B.B.]
Patriotisme [G.H.]
Patriotisme constitutionnel [P.B.]
Personnalisation [P.B.]
Personnel politique (sélection du) [P.B.]
Persuasion politique [Ph.B.]
Pertinence [Ph.B.]
Peuple [B.B.]
Pilarisation [G.H.]
Plébiscite [G.H.]
Pluralisme [P.B.]
Policy communities [Ph.B.]
Policy networks [Ph.B.]
Politeia [Ph.B.]
Politiques publiques [P.B.]
Politisation [Ph.B.]
Polyarchie [P.B.]
Popularité [Ph.B.]
Populisme [B.B.]
Positivisme [P.B.]
Possibilisme [G.H.]
Postcolonial Studies [G.H.]
Postnationalisme [P.B.]
Poubelle [P.B.]
Pouvoir [Ph.B.]
Pouvoir exécutif/Pouvoir législatif [Ph.B.]
Pragmatisme (Sociologie pragmatique) [G.H.]
Premier ministre [Ph.B.]
Président de la République [Ph.B.]
Présidentialisme [G.H.]
Primaires (Élections) [B.B.]
Primordialisme [B.B.]
Principe de précaution [G.H.]
Progrès (Idée de) [P.B.]
Pronunciamiento [G.H.]
Protectorat [Ph.B.]
Protestataires (Mobilisations) [Ph.B.]
Protestantisme et politique [G.H.]
Psychologie politique [Ph.B.]
Public Choice [G.H.]
Public/Privé (Distinction) [P.B.]
Puissance [B.B.]
Purification ethnique [G.H.]
Putsch [G.H.]
Race/Racisme [P.B.]
Réaction [P.B.]
Realpolitik [G.H.]
Réaliste (Théorie) [B.B.]
Référendum [G.H.]
Référentiel [G.H.]
Régimes internationaux [G.H.]
Régimes politiques [Ph.B.]
Régimes autoritaires [G.H.]
Régimes militaires [G.H.]
Régime mixte [G.H.]
Régimes parlementaires [Ph.B.]
Régimes présidentiels et semi-présidentiels [G.H.]
Régime représentatif [Ph.B.]
Régimes sultaniques [G.H.]
Régimes (systèmes) totalitaires [G.H.]
Régulation [B.B.]
Relations internationales [B.B.]
Relativisme culturel [B.B.]
Religion civile [G.H.]
Religion et politique [B.B.]
Répertoire d’action [Ph.B.]
Représentation (Théorie de la) [B.B.]
Représentation politique [Ph.B.]
Représentation fonctionnelle [G.H.]
Représentations [Ph.B.]
République [P.B.]
Réseau (concept de) [B.B.]
Résolution des conflits [B.B.]
Responsabilité (Éthique de la) [G.H.]
Responsabilité politique [Ph.B.]
Ressources politiques [Ph.B.]
Rétrodiction [G.H.]
Révolution [B.B.]
Rites politiques [Ph.B.]
Rôle (notion de) [P.B.]
Sacralisation [G.H.]
Scrutin (Modes de) [Ph.B.]
Secte [B.B.]
Sécularisation [G.H.]
Sécurité [B.B.]
Sécurité humaine [GH]
Segmentaires (sociétés) [B.B.]
Sens commun [Ph.B.]
Séparation des pouvoirs (doctrine de la) [P.B.]
Sexe [GH]
Shadow cabinet [B.B.]
Sionisme [P.B.]
Socialisation politique [B.B.]
Socialisme [G.H.]
Société [Ph.B.]
Société civile [Ph.B.]
Société de risque [G.H.]
Sociologie électorale [Ph.B.]
Sociologie historique [Ph.B.]
Soft Power [B.B.]
Sondages d’opinion [Ph.B.]
Souveraineté [Ph.B.]
Spin doctor [G.H.]
Stalinisme [G.H.]
Storytelling [G.H.]
Subsidiarité [B.B.]
Suffrage [G.H.]
Symbolique politique [Ph.B.]
Syndicats [P.B.]
Système [G.H.]
Système des dépouilles [P.B.]
Système politique [G.H.]
Systémique (analyse) [P.B.]
T
Universalisme [B.B.]
Urbanisation [B.B.]
Utopie [P.B.]
V
Valeur [B.B.]
Verts [Ph.B.]
Violence politique [Ph.B.]
Violence symbolique [Ph.B.]
Virtù [GH]
Voile d’ignorance [P.B.]
Volatilité électorale [GH]
Vote (fonctions du) [Ph.B]
Vote bloqué [GH]
Vote préférentiel [Ph.B]
Whig/Tory [G.H.]