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PHOTOCOPILLAGE
© Gualino éditeur, Lextenso éditions 2 013
33 rue du Mail 75081 Paris cedex 02
ISBN 978-2 - 297 -03 165-3
TUELEUVRE ISSN 1 288-8206
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Si dans certaines disciplines, comme le droit constitutionnel ou le droit international public,
les ouvrages universitaires sont assez semblables, cette remarque ne s'appl ique qu'imparfaite
ment aux relations internationales. C haque auteur développe une conception personnelle
et souvent subjective en fonction de sa formation et de ses centres d'intérêt.
Tel ouvrage s'appesantit sur l'histoire des relations internationales depuis 1 94 5 , tels autres sur
les théories et aspects doctrinaux. Certains adoptent une approche exclusivement juridique,
privilégiant les acteurs étatiques et les organisations internationales et mini misent ainsi l'émer
gence de nouveaux acteurs sur la scène internationale. D'autres mettent principalement
l'accent sur les relations économiques, commerciales et financières.
La difficulté est de trouver un juste équilibre entre le théorique et l 'événementiel. L'ambition
modeste de cet « Essentiel » est de concilier, dans un cadre l i mité, ces différentes facettes des
relations internationales, de manière plus ou moins détaillée, et d'offrir au lecteur, qu'il soit
étudiant ou qu'il soit intéressé par la vie internationale, une présentation claire, vivante et
actuelle de la société i nternationale.
Cet ouvrage traite en 1 1 chapitres des rapports et flux transfrontaliers, matériels ou immaté
riels, qui peuvent s'établir entre deux ou pl usieurs individus, groupes ou collectivités. Il se
compose de trois parties :
•
les données de la scène internationale (chapitres 1 à 4): les approches doctrinales ; un
bref historique des relations internationales depuis 1 945; les caractères de la société i nter
nationale ainsi que les facteurs constitutifs des relations i nternationales ;
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4 l'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
•
les acteurs et les règles des relations internationales (chapitres 5 à 8): I 'Ëtat, protago
niste principal des relations internationales ; les acteurs récents, les Organisations intergou
vernementales (OIG) ; les nouveaux acteurs, O rganisations non gouvernementales (ONG),
Sociétés transnationales (STN), individus et peuples ainsi que la régulation normative des
relations internationales ;
•
les enjeux et les défis des relations internationales (chapitres 9 à 1 1 ) étudiés sous
forme de questionnement : guerre ou paix? richesse ou pauvreté? et I'Ëtat est-i l margina
lisé au sein du système i nternational?
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Présentation 3
1
Les données de la scène internationale
Chapitre 1 - Les relations internationales: une réalité
complexe 15
1 - La relativité d'une définition 15
2 - Les approches doctrinales 16
• Les approches réalistes (ou conflictuelles) 16
a) L'étude des conflits 17
b) Les relations de puissance 18
• Les approches transnationales (ou solidaristes) 20
a) L'interdépendance de la vie internationale 21
b) L'institutionnalisation de la vie internationale 23
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6 l'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
• La fragmentation 36
a) La montée des nationalismes et des intégrismes 36
b) Les maux du «sous-développement» 37
• La contestation 40
a) La contestation interne 40
b) Au niveau externe 41
• Le facteur démographique 46
• Les facteurs économique, financier et monétaire 48
• Le facteur militaire 52
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SoMMAIRE 7
• Le facteur médiatique 53
• Le facteur juridique 54
2
Les acteurs et les règles des relations
internationales
• La population 59
3 - Les individus 82
4 - Les peuples 83
Chapitre 8- La régulation normative des relations
internationales 85
1 - Les sources du droit des relations internationales 85
• Les traités 86
• La coutume 86
• Les principes généraux de droit 86
• L'équité 87
• La jurisprudence 87
• La doctrine 87
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SoMMAIRE 9
3
Les enjeux et les défis des relations
internationales
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Liste des abréviations
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Les données de la scène
interna tiana le
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Les rela tions
in terna tionales :
une réalité complexe
L a définition des relations internationales est relative e t contingente; elle varie
selon les approches doctrinales développées, qu'elles soient conflictuelles ou soli
daristes. Si, par une commodité de langage, l'expression communauté internatio
nale est souvent employée, elle ne postule ni qu'il y ait une solidarité étroite
entre ses entités constitutives, ni qu'il existe un gouvernement mondial.
Les relations internationales sont « d'une telle complexité qu'on peut les appréhender de multiples
manières et que les diverses tentatives effectuées pour réduire cette complexité à des termes
simples et univoques débouchent sur autant de définitions controversées » . Ces propos de Marcel
Merle en 1 988 restent toujours d'actualité.
technologie militaire, le territoire n'est plus obligatoirement une garantie certaine quant à la
puissance d'un Ëtat ;
- les approches géo-économiques qui affirment que la politique étrangère n'est plus unique
ment la défense d'intérêts politiques mais aussi d'intérêts économiques qui sous-tendent les
nouvelles logiques d'affrontement.
Cette thèse, défendue au début des années 1 990 par Edward Luttwak, privilégie l'arme écono
mique comme instrument de puissance et d'affirmation sur la scène internationale. À la géopoli
tique traditionnelle pour laquelle les rivalités sont essentiellement territoriales, se substituerait une
géo-économie qui aurait pour but de conquérir ou de préserver une position enviée au sein
de l'économie mondiale. L'intervention directe ou indirecte de I 'Ëtat dans les diverses activités
d'investissement, de recherche et de développement à la différence des motivations commerciales
des entreprises privées, relève de la géo-économie. Le concept défini par E. Luttwak est intéressant
car il intègre une dimension économique longtemps sous-estimée par les théoriciens des relations
internationales. Toutefois il n'est pas exempt d'imprécisions, voire de critiques car son concepteur
en limite le champ aux seules nations industrialisées occidentales alors qu'il apparaît aujourd'hui
posséder une dimension plus globale.
À la différence de la géopolitique œuvrant dans un cadre territorial fixe et délimité, la
géo-économie se meut dans un espace en perpétuel mouvement s'affranchissant des frontières
territoriales. Cependant les deux concepts ne sont pas antinomiques mais complémentaires. En
aucun cas, la géo-économie ne signifie la fin des conflits et des revendications territoriales. Si elle
permet d'avoir, au sein des pays industrialisés, une grille d'analyse plus fine des relations entre
I'Ëtat et ses partenaires industriels nationaux, elle est utilement complétée par une approche
géopolitique dans la compréhension des conflits et rivalités de pouvoirs en Asie, en Afrique
centrale ou au Proche-Orient.
Plusieurs auteurs, de Hobbes à Machiavel, de Morgenthau à Aron, ont défendu cette approche
réaliste des relations internationales fondée sur trois éléments principaux :
- les relations internationales sont régies par les rapports interétatiques, limités à un nombre faible
d'acteurs. La théorie réaliste ne nie pas l'existence de relations transnationales mais elle les juge
secondaires dans la compréhension de l'ordre international. Elle prône la dissociation absolue
entre l'externe et l'interne ;
- les rapports entre Ëtats sont conditionnés par la recherche de l'intérêt national (d'où le qualifi
catif réaliste). Il faut assurer la puissance de I'Ëtat ;
- les relations internationales sont essentiellement conflictuelles, l'instrument principal étant le
recours à la force. La hiérarchie entre Ëtats se fonde principalement sur le facteur militaire,
même si d'autres facteurs économiques ou culturels peuvent exister.
Cette théorie postule donc que les Ëtats-nations sont les acteurs presque exclusifs du système
international et qu'ils ne sont motivés que par leur intérêt propre. Il en résulte des relations inte
rétatiques conflictuelles par nature qui donnent la priorité à la force sur l'économie.
Sous l'influence de divers facteurs, l'école réaliste va se transformer en néoréalisme. Si les interdé
pendances économiques et technologiques sont davantage prises en compte, les Ëtats conservent
le pouvoir effectif de détermination rationnelle de la politique internationale, au nom d'une légiti
mité issue de la volonté de leurs concitoyens. Autrement dit pour les néoréalistes (Robert Gilpin,
Stephen Krasner), la gouvernance mondiale ne peut être que le fait des Ëtats, que le politique
dominant l'économique.
Les courants néoréalistes considèrent que la fin de la guerre froide signifie le retour aux affronte
ments de puissance mais cette fois à l'échelle planétaire. Le clivage Est/Ouest fortement battu en
brèche, laisserait la place aux seuls intérêts nationaux. Ces courants, à la différence de l 'analyse
réaliste classique, mettent aussi l'accent sur la composante économique (guerre économique) ou
culturelle (choc des civilisations) des intérêts de puissance et leur possible mutation en conflit
militaire.
En 1993, un professeur américain, Samuel Huntington, renouvela le genre en estimant que les
conflits à venir seraient caractérisés par des affrontements culturels qui opposeraient non les
Ëtats-nations, mais les principales civilisations mondiales. « Le choc des civilisations dominera la
politique mondiale. Les lignes de fracture entre civilisations seront les lignes de fron t » .
Il distingue huit civilisations: occidentale, slave-orthodoxe, islamique, hindoue, confucéenne,
japonaise, latina-américaine et africaine.
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20 l'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
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C HAPITRE 1 - Les relations i nternationales: une réalité complexe 21
archétype et partagent la même conception des relations internationales) ou hétérogène (les États
se réclament de valeurs contradictoires).
Le système se réfère à divers modèles unipolaire, bipolaire ou multipolaire, rigide ou souple, repré
sentatifs des rapports de force. Un système unipolaire (homogène) ne connaît qu'un seul pôle
de décision, à une époque récente pour certains auteurs et gouvernants, l'hyperpuissance
américaine. Un système bipolaire peut être homogène quand deux pôles de puissance, de
force identique et partageant les mêmes valeurs, dominent les relations internationales. Il est hété
rogène lorsque les deux pôles défendent des conceptions opposées de la société. Ce système
bipolaire est dit rigide (conflit Est-Ouest de 1 947 à 1 962) ou souple (naissance du mouvement
des non-alignés). Dans le cadre d'un système multipolaire, plusieurs entités politiques, de taille
comparable et de force militaire équivalente, coexistent et se concurrencent mutuellement. Il
s'agit d'un système d'équilibre, censé éviter la domination d'une entité sur les autres.
En France, Marcel Merle s'est attaché à présenter une explication globale des relations internatio
nales à partir d'une analyse systémique plus élaborée. Il relève que la formation d'un système
global, soumis à des influences continues de la part de son environnement, engendre deux effets
contradictoires : une interdépendance accrue et une accumulation de contradictions au sein du
système.
Une autre théorie, la gouvernance globale, a été développée, durant les années 1 990, par James
Rosenau et met l'accent sur la notion d'autorité, mais définie de manière spécifique au marché ou
au secteur concerné.
Elle n'est pas prédéfinie et ne présuppose pas une hiérarchie spécifique du pouvoir ; elle s'exprime
dans la relation entre les divers acteurs concernés.
La combinaison de la mondialisation et du niveau local favorise l'émergence de nouvelles forces au
sein des sociétés, qui provoquent un double processus d'intégration et de fragmentation et contri
buent à la dilution de l'autorité entre les niveaux mondial, national et infranational .
L'approche d e Rosenau met e n lumière une gouvernance globale particulièrement complexe où
interagissent une multiplicité d'acteurs dans un espace en perpétuelle évolution . Les acteurs de
base de la gouvernance sont les sphères d'autorité plutôt que les États, les structures historiques
ou les compromis politiques qui caractérisent les précédentes théories. Chaque sphère exerce son
autorité selon des modalités qui lui sont propres et les relations intersphériques ne sont pas néces
sairement hiérarchiques. Au sein de chaque sphère, les acteurs les plus puissants font respecter
leur autorité. Ainsi, selon Rosenau, c'est « une convergence entre les besoins des différents
acteurs qui permet à l'un d'entre eux d'obtenir l'approbation des autres et non une contrainte de
type constitutionnel qui attribuerait la plus haute autorité exclusivement aux États et
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C HAPITRE 1 - Les relations i nternationales: une réalité complexe 23
Ce système des Nations unies est régi selon des principes tels que ceux de hiérarchie, de coordina
tion et de complémentarité.
L'essor continu de l'institutionnalisation aboutit à une extrême diversité d'organisations internatio
nales en dehors même du système onusien. On en dénombre près de 400 dans tous les conti
nents, à titre d'exemples l 'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN), le Conseil de
l'Europe, l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), l'Union afri
caine, l'Organisation des Ëtats américains (OEA), l'Association des Nations de l'Asie du Sud-Est
(ASEAN) et la Ligue des Ëtats arabes. Toutes ces organisations interétatiques ont, par la volonté
des Ëtats, développé un droit des relations internationales.
L'apparition de plusieurs facteurs tels que l'internationalisation des activités criminelles atténue la
distinction interne/externe, précédemment évoquée. Elle rend compatible les deux approches
traditionnelles des relations internationales.
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Les cara ctères
de la société
in terna tionale
La société internationale se caractérise par son ambivalence entre régulation et
anarchie, ordre et désordre. Elle conserve encore un caractère interétatique mais
possède déjà un caractère transnational. Cette société est parcourue par deux
courants apparemment contradictoires, la mondialisation et la fragmentation.
Elle connaît une mutation accélérée qui met à mal les vérités de la veille et rend aléatoire les prévi
sions du lendemain. Un aspect significatif de cette transformation réside dans la formation d'une
société civile mondiale transcendant les frontières, composée d'Organisations non gouvernemen
tales intervenant dans les champs religieux, human itaire, écologique et culturel. Ce phénomène
est facilité et amplifié par l'essor rapide des techniques de l'information et de la communication,
qui soit dit en passant, accentue les inégalités entre pays développés et pays en développement
(PED).
lASCF
Fondation
SAC IFRIC
Comité consultatif Comité d'interprétaion
45 membres
L'élaboration d ' une norme est soumise à une procédure stricte appelée « due process ».
Cel le-ci est basée sur une concertation avec toutes les parties intéressées à travers notamment
les organismes nationaux en liaison avec I 'IASB.
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LA NORMALISATION COMPTABLE INTERNATIONALE 27
Les p rincipales étapes de l 'élaboration ou de la modification d'une norme IAS/IFRS sont les
suivantes:
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28 L'ESSENTIEL DES NORMES COMPTABLES INTERNATIONALES IAS/I FRS
• Règlements européens
La réglementation européenne relative à l'adoption des normes IAS/IFRS est contenue dans les
trois règlements no 1 606/2002, 1 725/2003 et 707/2004.
• Calendrier d'application
Néanmoi ns, le règlement offre des options aux Ëtats membres de l'Union européenne.
Option 1 : Liberté d'adoption pour les sociétés non cotées et les comptes sociaux (les Ëtats
membres peuvent autoriser ou obliger ces cas d 'appl ication).
Option 2 : Les Ëtats membres peuvent autoriser certai nes sociétés à reculer l 'échéance au
ter janvier 2007.
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30 L'ESSENTIEL DES NORMES COMPTABLES INTERNATIONALES IAS/I FRS
b ) E n Fra n ce
Le CNC a retenu le calendrier suivant :
Comptes consolidés Comptes individuels
Sociétés APE Application obligatoire
Néanmoi ns, i l sera difficile de maintenir à terme un double système comptable (IFRS et normes
nationales) pour des raisons :
- de compréhension des utilisateurs des états financiers ;
- de coût et de complexité pour les entreprises.
Les i nstances nationales et internationales travail lent à un horizon court/moyen terme à la
convergence des normes nationales avec les normes de I'IASB. En France, les règlements
actuels du CRC transposent déjà par étape dans la réglementation comptable française le
contenu des normes IAS/IFRS.
• Mécanisme d'adoption des normes : AROEFRA G
notamment sur les problèmes concrets de leur application . Tout comme l 'ARC, le Comité est
composé de représentants des États membres et de la Commission.
2) L'European Financial Reporting Advisory Group (EFRAG)
C réé en 200 1 , l'European Financial Reporting Advisory Group (ou Comité Technique
comptable) est une institution privée qui a un objet technique. L' EFRAG a pour vocation de
donner aux parties prenantes à l'i nformation financière (professions comptables, auditeurs,
banquiers, bourses de valeur, . . . ) de l'Union européenne la possibilité d'agir vis-à-vis de I'IASB :
- en amont des normes, afin que les travaux de I'IASB prennent en compte les points de vue
et les besoins exprimés par les instances des États membres ;
- en aval des normes, par l'analyse rapide des projets de nouvelles normes, et l 'explication de
l 'application des normes et interprétations dans le cadre règlementaire européen.
L' EFRAG est composé :
- d'un Conseil de Surveillance (Supervisory Committee) de 23 membres représentants les
différentes parties prenantes à l ' i nformation financière. Son rôle est de définir le programme
de travail du Comité Technique et de s'assurer que ses trava ux sont conformes à l'intérêt
européen ;
- d 'un Comité Technique (Tech nical Experts Group : TEG) de 1 1 membres nommés par le
Conseil de Survei llance et qui est chargé de préparer les positions tech niques de l ' U n ion
européenne sur les normes.
Placé auprès de la Commission européenne, I' EFRAG agit au niveau européen, et constitue
donc l'appui technique de l'ARC.
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Les principales
caractéristiques C HAPITRE 3
- les principes comptables fondamentaux qui sont inclus dans le cadre concep
tuel de I'IASB, composé de définitions, de critères de comptabilisation et d'éva
luation, et qui doit être utilisé pour appliquer le référentiel IFRS de façon appro
priée.
• Normes applicables
a) Term i n o logie
Le terme de « référentiei /FRS » représente donc les normes et interprétations adoptées par
I'IASB, c'est-à-dire :
- les normes comptables internationales (dites lAS) existant actuel lement ;
- les (nouvelles) normes internationales d'i nformation financière (IFRS) ;
- et les i nterprétations s'y rapportant : interprétations d u SIC et interprétations de I 'IFRIC ;
- les modifications ultérieures de ces normes et les i nterprétations s'y rapportant ;
- les normes et interprétations s'y rapportant qui seront publiées ou adoptées à l'avenir par
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I 'IASB.
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ro Référentiel IFRS = /AS + IFRS + SIC + /FRIC
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36 L'ESSENTIEL DES NORMES COMPTABLES INTERNATIONALES IAS/I FRS
L' IASB a publié en décembre 2003 le texte définitif relatif à un projet dit « Amélioration des
normes » contenant une version révisée de 1 4 normes (lAS 1 , 2, 8, 1 0, 1 5, 1 6, 1 7, 2 1 , 24,
27, 28, 3 1 , 33 et 40).
L'objectif de ce texte était double :
- réduire ou élimi ner les options afi n d'augmenter la comparabilité,
- incorporer les interprétations SIC (ou les supprimer lorsqu 'elles ne sont plus compatibles
avec les nouvelles normes) dans les textes des normes afi n d'en augmenter la lisibil ité.
L'adoption par le mécanisme européen de ces révisions est en cours de réalisation (à la date
de publication de l'ouvrage). Ces normes révisées entrent en vigueur pour les exercices
ouverts à compter du 1 er janvier 2005.
c) Stable platform
L' IASB a publié en février et mars 2004 :
- quatre nouvelles normes IFRS (IFRS 2 , 3 , 4 et 5) ;
- ainsi que trois normes lAS révisées (lAS 36, 38 et 39 révisée).
Avec la publication de ces textes, la quasi-tota lité des normes qui devront être appl iquées pour
effectuer la transition aux IFRS en 2005 (dite « stable platform ») est désormais connue.
Les premiers adoptants des IAS/IFRS en 2005 connaissent désormais les dispositions qu'ils
devront appliquer pour l 'établissement de leurs premiers états financiers (bilan d'ouverture au
1 er janvier 2004, comparatif 2004 et comptes 2005).
L'ARC doit statuer sur toutes les dernières normes et révisions récentes publiées par I'IASB,
avant le 1 er janvier 2005, afin que l'Europe adopte le référentiel complet, conformément aux
exigences des IAS/IFRS.
Les développements ci-après tiennent compte de l'ensemble de ces modifications.
• Approche de 1'/ASB et des IAS/IFRS : l'essentiel
Les poi nts à retenir pour une approche synthétique du référentiel de I'IASB et des normes
IAS/IFRS sont les suivants (les notions indiquées sont développées dans la suite de l'ouvrage).
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LES PRINCIPALES CARACTËRISTIQUES DES NORMES IAS/IFRS 37
RÉFÉRENTIEL de I'IASB
- Référentiel d ' inspiration anglo-saxonne établi à l 'attention des investisseurs.
- Élaboration du référentiel à partir d'une approche reflétant la réalité de l'activité économique
de l'entreprise par rapport a u marché.
- Traitement des opérations comptables à partir de principes comptables identiques (cadre
conceptuel) et non de règles.
- Déconnexion de tout environnement juridique et fisca l .
- Normalisation globale à l a fois des règles comptables et des éléments d e l ' information
financière (annexe, rapport de gestion, élément d'information, . . . ) .
- Appl ication obligatoire de toutes les normes et de toutes les interprétations.
NORMES IAS/IFRS
- Primauté du bilan sur le compte de résultat.
- Introduction du concept de « juste valeur ».
- Mesure de la perte de valeur et de la dépréciation des actifs.
- Prééminence du fond sur la forme.
- Appl ication rétrospective.
- Importance des notes annexes.
• Présentation
Afin de faire p rogresser l'harmonisation des pratiq ues comptables, I'IASB a préconisé de se
g concentrer sur les états financiers préparés afin de donner une information utile aux prises
ro de décisions économiques.
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38 L'ESSENTIEL DES NORMES COMPTABLES INTERNATIONALES IAS/I FRS
À cet effet, un cadre de préparation et de présentation des états financiers dit « cadre
conceptuel » a été approuvé et publié initialement par I'IASC en 1 989 puis adopté en 2001
par I'IASB. Il regroupe les principes comptables fondamentaux en abordant les points
suivants :
Le cadre conceptuel représente ainsi le cadre général qui s'applique à l'ensemble des
entreprises, sans exception, produisant des comptes selon le référentiel IFRS et leur
permet de se référer (tout en étudiant les dispositions d'évaluation et de comptabili
sation spécifiques à une norme) aux concepts de base des éléments traités dans les
états financiers.
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- un bilan ;
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ro - un compte de résultat ;
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LES PRINCIPALES CARACTËRISTIQUES DES NORMES IAS/IFRS 39
- un tableau des variations de la situation financière (qui peut être présenté de diverses
façons, par exemple comme un tableau de flux de trésorerie ou un tableau d'emplois
ressources) ;
- des notes annexes et d'autres états et textes explicatifs qui font partie intégrante des états
financiers.
b) Objectifs des états financiers
L'objectif des états financiers est de fournir une information sur la situation financière, la
performance et les variations de la situation financière d' une entreprise, qui soit utile à un
large éventail d'util isateurs pour prendre des décisions économiques.
Comme les investisseurs sont les apporteurs de capitaux à risque de l'entreprise, la fourni
ture d'états financiers qui répondent à leurs besoins répondra également à la plupart des
besoins des autres utilisateurs susceptibles d'être satisfaits par des états financiers.
Les états financiers préparés dans cet objectif satisferont donc aux besoins communs
d'information de la plupart des uti lisateurs.
L' IASB classe les utilisateurs des états financiers en sept catégories principales : les investis
seurs actuels et potentiels, les membres du personnel, les prêteurs, les fournisseurs et autres
créanciers, les clients, les États et leurs organismes publics, et le public.
3) La fiabilité
L' i nformation possède la qualité de fiabilité quand elle est exempte d'erreur et de biais
significatifs et que les utilisateurs peuvent lui faire confiance pour présenter une i mage fidèle
de ce qu'elle est censée présenter ou ce qu'on pourrait s'attendre raisonnablement à la voir
présenter.
4) La comparabilité
Les utilisateurs doivent être en mesure de comparer les états financiers d'une entreprise dans
le temps et les états financiers d 'entreprises différentes afin d 'évaluer et d'identifier les
tendances de leurs situations financières et de leurs performances.
c) Les critères de la fiabi l ité
Pour fournir aux utilisateurs des états financiers fiables, I'IASB précise cinq critères selon leur
ordre d'i mportance :
1) L'image fidèle
Pour être fiable, l'i nformation doit avant tout présenter une i mage fidèle des transactions et
autres événements qu'elle vise à présenter ou dont on s'attend raisonnablement à ce qu'elle
les présente.
2) La prééminence de la substance sur la forme
Pour donner une image fidèle des transactions et autres événements, i l est nécessaire qu'ils
soient comptabilisés et présentés conformément à leur substance et à leur réal ité économique
et non pas seulement selon leur forme j u ridique.
3) La neutralité
Pour être fiable, l'i nformation contenue dans les états financiers doit être neutre, c'est-à-dire
sans parti pris. Les états financiers ne sont pas neutres si, par la sélection ou la présentation
de l'information, ils influencent les prises de décisions ou le j ugement afin d'obtenir un
résultat ou une issue prédéterminé.
4) La prudence
La prudence est la prise en compte d'un certain degré de précaution dans l'exercice des j uge
ments nécessaires pour préparer les estimations dans des conditions d'incertitude, pour faire
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42 L'ESSENTIEL DES NORMES COMPTABLES INTERNATIONALES IAS/I FRS
en sorte que les actifs ou les produits ne soient pas surévalués et que les passifs ou les charges
ne soient pas sous-éva lués.
5) L'exhaustivité
Pour être fiable, l'information contenue dans les états financiers doit être exhaustive, autant
que le permettent le souci de l'importance relative et celui du coût. Une omission peut rendre
l'information fausse ou trompeuse et, en conséquence, non fiable et insuffisamment
pertinente.
d) Les contra i ntes à respecter pour que l ' i nformation soit pertinente et fiable
Au regard des ca ractéristiques qualitatives et des critères de fiabilité, I'IASB énonce les quatre
contraintes suivantes à prendre en compte lors de la publ ication de l'information financière
selon le référentiel IAS/IFRS :
1) La célérité
L' i nformation peut perdre sa pertinence si elle est fournie avec un retard indu. Pour atteindre
l 'équilibre entre pertinence et fiabilité, la considération dominante doit être de satisfa ire au
mieux les besoins des utilisateurs en matière de prise de décisions économiques.
2) Le rapport coût 1 avantage
Le rapport coût 1 avantage est une contrai nte générale pl utôt qu'une caractéristique qualita
tive qui stipule que les avantages obtenus de l'information doivent être supérieurs au coût
qu'il a fallu consentir pour la prod uire.
3) L'équilibre entre les caractéristiques qualitatives
Le but poursuivi est d 'atteindre un équilibre approprié entre les ca ractéristiques afin de satis
faire aux objectifs des états financiers, sachant que l'importance relative de chacune d 'elles
est une affai re de j ugement professionnel.
4) La présentation fidèle
Les états financiers sont fréquemment décrits comme donnant une image fidèle ou une
présentation fidèle de la situation financière, de la performance et des variations de la situa
tion financière d'une entreprise. Bien que le cad re conceptuel ne traite pas directement de ces
concepts, l 'application des principales caractéristiq ues qualitatives et des dispositions norma-
g tives comptables appropriées a normalement pour effet que les états financiers donnent ce
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qui généralement s'entend par image fidèle ou présentation fidèle de cette information .
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LES PRINCIPALES CARACTËRISTIQUES DES NORMES IAS/IFRS 43
• Concepts de base
Actif � ressource contrôlée par l'entreprise du fait d'événements passés et dont des avantages
économiques futurs sont attendus par l'entreprise.
Passif � obligation actuelle de l'entreprise résultant d'événements passés et dont l'extinction
devrait se traduire pour l'entreprise par une sortie de ressources représentatives d'avantages
économiques.
Capitaux propres � intérêt résiduel dans les actifs de l'entreprise après déduction de tous ses
passifs.
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44 L'ESSENTIEL DES NORMES COMPTABLES INTERNATIONALES IAS/IFRS
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L es n o rm es
d 'in fo rm a tio n fin a n cière
Chapitre 1 Les normes de présentation d e l ' i nformation financière 49
Chapitre 2 Le péri mètre de reporting 71
Chapitre 3 Les normes sectorielles 89
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Les normes
de présenta tion de C HAPITRE 1
l'information financière
La présentation de l'information financière (appelée en anglais « Financial
Reporting ») a pris une place prépondérante dans le référentiei /FRS par rapport
aux sujets purement comptables.
L'information financière concerne l'ensemble des états financiers (appelés en
anglais « Financial Statements ») et des opérations qui y sont retracées, que ce
soit dans les comptes individuels ou consolidés.
L'information financière est plus spécifiquement traitée à travers les normes suivantes :
- les normes relatives aux états financiers et regroupant les états financiers proprement dits,
les tableaux de flux de trésorerie, les changements de méthodes comptables et les évène
ments postérieurs à la date de clôture influençant les états financiers (lAS 1 , 7, 8 et 1 0) ;
- les normes relatives aux informations supplémentaires fourn ies aux util isateurs des états
financiers, à savoir l'i nformation sectorielle, les parties l iées, le résultat par action et l'i nfor
mation sur les comptes intermédiaires (lAS 1 4, 24, 33 et 34).
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50 L'ESSENTIEL DES NORMES COMPTABLES INTERNATIONALES IAS/I FRS
!OBJECTI F
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L'objectif de la norme lAS 1 est de prescrire une base de présentation générale à tous des
états financiers, afin qu'ils soient comparables ta nt aux états fina nciers de l'entreprise pour
les exercices antérieurs q u 'aux états financiers d'autres entreprises.
CHAMP D'APPLICATION
La norme lAS 1 doit s'appliquer à la présentation de tous les états financiers à usage géné
ral établis et présentés conformément aux normes comptables i nternationales. Elle
s'applique à toutes les entreprises y compris les banques et les entreprises d 'assurances.
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C HAPITRE 4 - Les facteurs constitutifs des relations internationales 51
et ses conséquences sociales sont prévisibles avec une croissance globale à moins de 3 % en 2009
(négative de 0,3 % dans les pays développés, positive de plus 5 % pour les pays émergents). La
reprise de l 'économie internationale en 201 0 a été variable selon les continents et illustre une
grande d isparité de croissance : plus de 8 % en Asie orientale, 5,7 % en Amérique latine, 2,6 %
aux Ëtats-Unis et 1 ,7 % pour l'Union européenne. Les années 201 1 et 20 1 2 n'échappent pas au
même constat avec la plupart des pays en croissance en Asie, en Afrique et en Amérique latine,
en récession ou en très faible croissance en Europe.
De même l 'émergence sur la scène internationale des fonds souverains a modifié l'architecture
financière traditionnelle. Selon la définition du FMI, un fonds souverain répond à trois critères :
tout d'abord il est contrôlé par un gouvernement ; ensuite il gère des actifs financiers dans une
optique de long terme ; enfin sa stratégie d'investissement vise des objectifs macroéconomiques
précis (garantie des pensions de retraite, diversification de l'économie nationale ou soutien de
secteurs de l'économie fragilisés par des chocs extérieurs). Leurs ressources proviennent de l'accu
mulation d'excédents de la balance courante, résu ltant de l'exportation de matières premières
(pays du Golfe persique, Russie et Norvège), d'un excédent de l'épargne nationale (Singapour),
voire d'une part des réserves de change (Chine). Ces fonds d'Ëtat servent souvent davantage des
intérêts géopolitiques que financiers ce qui explique la multiplication des mesures de contrôle et
de transparence adoptées par les Ëtats visés et par le Groupe de travail international sur les fonds
souverains, constitué par le FMI, l'OCDE et les Ëtats concernés.
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52 l'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
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• Le facteur militaire
Toute société est travaillée par des tensions. La société internationale n'échappe pas à cet axiome
et les entités qui la composent n'ont pas hésité à recourir à la force armée pour régler leurs diffé
rends ou pour se protéger d'une menace réelle ou potentielle. La course aux armements est
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C HAPITRE 4 - Les facteurs constitutifs des relations internationales 53
intemporelle, générale et multiforme. Elle concerne toutes les régions du monde et tous les types
et systèmes d'armes nucléaires ou conventionnelles.
La militarisation implique la mise en œuvre de moyens humains, matériels, financiers, scientifiques
et commerciaux considérables. La présence, notamment dans les pays du Tiers-Monde, d'arsenaux
militaires disproportionnés aux réalités contemporaines représente un danger patent pour le main
tien de la paix et la stabilité mondiales.
L'augmentation sensible des dépenses militaires américaines depuis les attentats du 1 1 septembre
2001 (7 1 1 milliards de dollars en 201 1 ) résulte en partie du changement de doctrine stratégique
opéré en septembre 2002 et du coût de l'intervention en Irak. La suprématie militaire sans égale
dont bénéficient aujourd'hui les Ëtats-Unis vise à écarter préventivement toute menace en prove
nance d 'Ëtats voyous, voire à plus long terme l'émergence d'une puissance militaire qui pourrait
contester leur hégémonie.
En retour, on constate un fort accroissement des budgets militaires chinois ou russe. Selon l'Ins
titut international de recherche sur la paix de Stockholm, les dépenses militaires mondiales ont
avoisiné les 1 738 milliards de dollars en 201 1 , soit une augmentation réelle de 1 7 % par rapport
à 2009.
• Le facteur idéologique
Les détenteurs d'une parcelle d'autorité véhiculent un message à destination des nationaux et du
monde extérieur, parfois contrebalancé par des contre-idéologies. Qu'elles soient globales ou
confinées aux rapports interétatiques (Marcel Merle), fonctionnelles ou dysfonctionnelles
(P.-F. Gonidec), les idéologies sont à la fois source d 'affirmation et d'occultation.
Ainsi, les influences du nationalisme ou du fait religieux sur la scène internationale, depuis 1 990,
sont difficilement contestables.
• Le facteur médiatique
L'impact des grands médias (télévision et presse écrite) sur les relations internationales est indé
niable. L'instrument médiatique conditionne souvent les réactions des opinions publiques
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54 l'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
• Le facteur juridique
La production de normes juridiques internationales, écrites ou coutumières, représente un facteur
non négligeable, même si les règles de droit formulées ne reçoivent pas toujours d'application
effective de la part des Ëtats destinataires.
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Les acteurs et les règles
des relations internationales
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L 'Éta t, pro tagoniste
principal des rela tions
in terna tionales
L 'identification des facteurs explicatifs permet de confirmer l'évolution que
connaissent les acteurs des relations internationales.
Pendant des siècles, il n'y a eu qu'un acteur unique, l'État, qui présente encore
l'originalité d'être à la fois le protagoniste principal et l'architecte du système
international en tant que créateur de la règle de droit.
Selon la définition de l' État formulée par la Cour internationale de justice, « les États sont des
entités politiques égales en droit, de structure semblable et relevant toutes du droit international ».
Loin d'être la forme d'organisation politique par excellence qui caractériserait aussi bien les
sociétés tribales et l'Antiquité que les temps modernes, l'État est au contraire un phénomène
historique récent. Sa naissance remonte aux xve et XVIe siècles et correspond à une « réponse histo
rique à un problème intemporel » , celui du pouvoir. Il constitue une invention occidentale qui a
permis à une partie de l'Europe de quitter l'ère féodale pour entrer dans la modernité politique.
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58 L'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
• Le territoire
Portion d'espace sur laquelle I 'Ëtat va exercer sa souveraineté, le territoire, délimité par des fron
tières terrestres, maritimes et aériennes, constitue l'assise de la puissance étatique.
Les frontières sont les conséquences de l'Histoire, des guerres, de négociations et de traités.
Certaines peuvent prendre une base naturelle comme le relief montagneux, les fleuves ou les
côtes. P. Renouvin a noté l 'influence de cette géographie sur la politique elle-même en soulignant
qu'elle a souvent préservé l'indépendance d'une population.
Si l'ensemble des terres émergées de la planète est partagé entre les Ëtats, il n'en est pas ainsi de
tous les espaces maritimes. La Convention de Montego Bay sur le droit de la mer de 1 982, entrée
en vigueur en 1 994, autorise les Ëtats riverains à prolonger leur emprise territoriale sur la portion
de mer immédiatement voisine de leur frontière côtière. Cette extension s'effectue horizontale
ment (mer territoriale) et verticalement (droits exclusifs et souverains sur les ressources de la zone
économique exclusive et du plateau continental).
La maîtrise du territoire permet d'assurer la cohésion et la protection de la population qui y réside.
Ce dernier facteur est primordial car il concerne l'intégrité territoriale et l'attachement au sol qui
sont des ferments de l'identité nationale et très souvent des éléments de mobilisation patriotique.
Le droit international a défini les principes protecteurs d'inviolabilité et d'intangibilité des
frontières conventionnellement reconnues.
Si un Ëtat ne peut exister sans territoire, il peut survivre à une amputation (annexion) ou à une
division, du moment où ces bouleversements n'impliquent pas la domination d'une puissance
étrangère.
Le principe de territorialité s'applique sans aucune l i m ite inférieure ou supérieure de superficie (des
quelques hectares du Vatican aux millions de kilomètres carrés de la Russie). Dans le périmètre
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CHAPITRE 5 - L'État, protagoniste principal des relations internationales 59
défini par les frontières, existent des espaces où I'Ëtat n'exerce pas son pouvoir ; le droit interna
tional reconnaît par exemple l'extraterritorialité des ambassades des pays étrangers soumises à
leurs d roits nationaux respectifs.
• La population
L'Ëtat suppose une population définie comme l'ensemble des personnes (nationaux et étrangers)
qui vivent sur un territoire national et sont soumises à l'autorité de I 'Ëtat. Son autorité ne
s'applique pas de la même façon aux nationaux et aux étrangers auxquels le droit international
garantit un certain nombre de protections.
La nationalité est le lien j u ridique qui unit un individu, un groupement (sociétés) ou une chose
(navires ou aéronefs) à un Ëtat donné.
Ce lien personnel ne recouvre pas exactement le fait de vivre sur tel territoire. Ainsi un « national »
d'un Ëtat ne perd pas sa nationalité du seul fait qu'il réside à l'étranger ; à l'inverse le fait de
résider sur le territoire d'un État ne donne pas automatiquement la nationalité de cet État.
L'octroi de la nationalité relève de la compétence exclusive de l'État. Elle s'acquiert soit par la nais
sance (droit du sol) soit par la filiation (droit du sang). Pour qu'elle soit opposable aux autres Ëtats,
la nationalité doit être effective et réelle (affaire Nottebohm, CIJ 1 955).
L'octroi de la nationalité à des personnes physiques ou morales crée des droits et fait peser des
obligations.
Les nationaux bénéficient du droit d'entrer et de sortir du territoire national ; ils peuvent
demander à leur Ëtat d'exercer la protection diplomatique. De plus tout individu doit bénéficier
d'une nationalité (article 1 5 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1 948).
Toutefois la double nationalité est envisageable de même que l'apatridie (absence de nationalité).
Les étrangers sont titulaires de divers droits conformément à un principe général de droit interna
tional (libertés de la personne, impartialité du système judiciaire) et régis par des accords interéta
tiques bi ou multilatéraux instaurant une réciprocité.
Le lien juridique et personnalisé, précédemment évoqué, a souvent fait assimiler la population
d'un Ëtat à la nation. L'origine de cette affirmation se trouve dans le principe des nationalités,
consacré par la Révolution française.
Le droit qui en découle, celui de toute nation à devenir un Ëtat, a contribué à la formation d'Ëtats
européens accédant à l'indépendance au XIXe siècle et a été appliqué en 1 9 1 9 (Traité de Versailles).
Ce principe des nationalités a un prolongement dans le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.
Ce droit reconnu par la C harte des Nations unies est étroitement lié au mouvement de décoloni
sation. Réaffirmé en 1 960 par la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux pays et aux
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60 L'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
peuples coloniaux (Résolution 1 5 1 4), ce droit a permis de mener à bien le processus de décoloni
sation et de conduire à l'indépendance de nombreux Ëtats par la voie de l'autodétermination.
Pourtant son utilisation soulève des ambiguïtés et des difficultés.
Au moment de la décolonisation, les nouveaux Ëtats ont accédé à l'indépendance dans le cadre
de frontières établies par le colonisateur.
Or ces frontières étant souvent artificielles, les populations de ces Ëtats ne présentaient pas un
caractère homogène. En effet il arrive que plusieurs groupes à forte identité partagent un territoire
et soient placés sous l 'autorité d'un même Ëtat. Ils ont accepté, ou ont été contraints d'accepter,
une coexistence plus ou moins harmonieuse.
Cette situation favorise les risques de conflits infra ou interétatiques.
Les exemples de conflits entre communautés abondent en Inde, au Sri-Lanka, à C hypre, au
Rwanda et dans les anciens pays du bloc soviétique.
A la source, on retrouve toujours des causes identiques : volonté d'indépendance, antagonisme
ethnique eVou religieux, voire des luttes de pouvoir. Le conflit se ramène fréquemment à une
persécution ou à une répression de ces communautés, en général des minorités, par I ' Ëtat dirigé
par une ethnie ou une confession dominante.
En vue d'assurer leur protection, faute de pouvoir les doter de structures étatiques, le droit inter
national a développé un statut des minorités nationales (ethniques, religieuses, linguistiques).
La question de la protection des minorités retrouve une actualité avec l'accession à l'indépendance
des anciennes républiques soviétiques et la résurgence d'Ëtats plurinationaux. Elle apparaît de plus
difficilement conciliable avec le principe de souveraineté des Ëtats.
En second lieu, le développement récent du droit international vient interférer avec la volonté
propre des États. L'adhésion de l'État aux règles d u droit international et sa participation aux
multiples organisations internationales, lui imposent le respect d'un certain nombre de principes
qu'il n'a pas édicté lui-même, bien qu'il ait contribué à leur rédaction.
De plus la logique d'appartenance à une organisation supranationale aboutit inévitablement à une
érosion de la souveraineté des États membres par transfert (pour certains par abandon) de compé
tences à l'organisation.
Par ailleurs, si en théorie les États naissent souvera ins et égaux en droit et sont donc libres de
choisir leur régime politique, économique et social, la liberté de choix est limitée par l 'apparition
d'un modèle dominant constitué du couple démocratie libérale-économie de marché.
Il faut s'interroger sur l'effectivité de la souveraineté de nombreux États qui semblent être sous
tutelle politique ou économique d'autres États ou d'organisations internationales (plans d'ajuste
ment structurel du Fonds monétaire international dans certains pays du Tiers-Monde).
Force est de constater que la réalité de la souveraineté d'un État se mesure à l'aune de son
indépendance dans la conduite de sa politique intérieure et extérieure.
Ces relations diplomatiques sont l'œuvre des dirigeants politiques qui pratiquent une diplomatie
personnelle en raison de l'internationalisation de toutes les activités sociales. Il ne faut pas omettre
le personnel spécialisé, agents diplomatiques et consulaires, dont le statut et les fonctions ont été
codifiés respectivement en 1 96 1 et 1 963 par les Conventions de Vienne afin de concilier les impé
ratifs de souveraineté aux exigences des relations internationales. La mission diplomatique et les
agents qui y sont rattachés jouissent d'immunités fonctionnelles telles que l'inviolabilité des
locaux et du courrier (mission) ainsi que l 'inviola bilité physique, l'immunité de j u ridiction et
l'exemption fiscale (agents).
Les modalités des relations revêtent deux formes : le conflit ou la coopération. Dans le cadre
d'une action diplomatique, la seconde forme est privilégiée. Cette coopération traduit dans les
faits un accord de volonté entre Ëtats afin d'aboutir, dans une matière précise, à une réalisation
commune.
Elle est l'expression d'un mode de relations amicales et ne connaît pas de limitation dans son
objet. Le phénomène s'inscrit dans la durée et requiert des moyens administratifs et financiers
appropriés. Tributaire des variations de comportements de ses protagonistes, ce phénomène est
éminemment instable. Les tendances actuelles mettent en lumière l'importance des disparités de
développement, un relatif désengagement de I'Ëtat au profit d'opérateurs publics ou privés
et surtout une globalisation de la coopération et un développement des mécanismes
multilatéraux.
Ces relations de coopération sont souvent finalisées dans un document écrit, généralement un
traité, acte j u ridique par lequel deux ou plusieurs sujets de droit international s'accordent pour
produire des effets juridiques.
Instrument destiné à préserver la souveraineté des Ëtats, le traité souffre d'un formalisme et d'une
solennité parfois préjudiciable aux relations internationales. La pratique a donc développé les
accords en forme simplifiée et la technique des réserves qui permet à un Ëtat ayant ratifié un
traité de ne pas se considérer comme lié par une ou plusieurs de ses dispositions.
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Des acteurs récen ts :
les organisa tions
in tergouvernemen tales
Peu à peu, d'autres intervenants, les organisations internationales intergouverne
mentales, sont apparus sur la scène, écornant partiellement le monopole étatique,
sans parvenir pourtant à le remettre fondamentalement en cause.
L'octroi de la personnalité j u ridique inclut la capacité juridique dans les limites des attributions de
l'organisation. Cela signifie que « l'organisation est un sujet de droit international, qu'elle a la
capacité d'être titulaire de droits et de devoirs internationaux et qu'elle a capacité de se prévaloir
de ses droits par voie de réclamation internationale » (CU, avis consultatif du 1 1 avril 1 949 relatif
aux réparations des dommages subis au service des Nations unies).
Le traité constitutif confère à l'organisation des com pétences spécifiques, autrement dit elle obéit
au principe de spécialité.
Pourtant une théorie des « compétences implicites » a été invoquée par la Cour internationale de
justice (CU) en vertu d'une tendance générale à l'élargissement et à l'aménagement des compé
tences des organisations internationales.
L'OIG adopte des règles juridiques contraignantes (résolutions) ou non contraignantes (recom
mandations) selon son degré d'intégration et son champ d'intervention. Elle exerce un contrôle
plus ou moins effectif sur les activités des Ëtats membres.
Les dix États les plus contributeurs au budget général de l'ONU 201 0-20 1 2 (en %)
1 États-Unis 22 %
2 Japon 1 2,53 %
3 Allemagne 8,02 %
4 Royaume-Uni 6,60 %
5 France 6, 1 2 %
6 Italie 4,99 %
7 Canada 3,20 %
8 C h ine 3, 1 9 %
9 Espagne 3, 1 8 %
10 Mexique 2,36 %
Total : 72 , 1 9 % du budget
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68 l'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
2) Le Conseil de Sécurité
Organe restreint de quinze membres dont cinq membres permanents, le Conseil de Sécurité est
conçu comme l'organe exécutif des Nations unies. Il travaille sans discontinuer lorsque les circons
tances l'exigent.
Les décisions de procédure sont prises à la majorité des 9/1 se ; les décisions majeures sont adop
tées dans les mêmes conditions de majorité, encore faut-il que le vote des cinq membres perma
nents soit favorable. Le droit de veto, accordé en 1 945 aux vainqueurs de la Seconde Guerre
mondiale, a souvent paralysé l'action de l'ONU. L'imperfection fondamentale de toute construc
tion j u ridique est manifeste en droit international . Le système du Conseil de sécurité en est une
illustration parfaite puisque cinq membres permanents dotés d'un droit de veto, souvent juges et
parties, peuvent bloquer toute initiative collective (échec en 2003 d'une résolution
américano-britannique autorisant l'usage de la force en Irak ou menace russe d'user de ce droit
sur la question de l'indépendance du Kosovo).
Il est aujourd'hui contesté par de nouvelles puissances qui désirent modifier la composition du
Conseil et réclament une réforme leur accordant un siège permanent au sein du Conseil. Des
projets de réforme proposent son élargissement à 24 voire 25 Ëtats avec de nouveaux membres
permanents ou semi-permanents selon les projets. Le groupe des quatre (Allemagne, Brésil, Inde
et Japon) a pris une initiative en ce sens. Mais pour qu'ils aboutissent, une révision de la Charte
est nécessaire. Or s'agissant d'une décision majeure, elle requiert l'accord unanime des cinq
membres permanents qui ne sont pas pressés de partager leurs privilèges avec d'autres Ëtats.
Il est critiqué également pour des raisons d'équité, notamment pour des différences de traitement
face à des situations similaires mais son impuissance est souvent la conséquence d'un désintérêt
flagrant de la part de ses membres les plus éminents.
Saisi par l'Assemblée générale, le Secrétaire général, un Ëtat membre ou même par un Ëtat
non-membre, le Conseil de Sécurité est chargé du maintien de la paix, conformément aux chapi
tres VI et VIl de la Charte.
Son rôle est subordonné à l'état des relations entre les cinq Grands. Si le Conseil est confronté à
une situation de blocage, l'action diplomatique du Secrétaire général sera paradoxalement faci
litée. En revanche si le Conseil fonctionne normalement, il empiète sur les compétences du Secré
taire général qui encourt alors les éventuels reproches des États, des organisations et des individus.
Il ne faut pas non plus occulter la personnalité du détenteur de la fonction qui lui donne une
tonalité particulière.
2) La Cour internationale de justice
Organe judiciaire principal des Nations unies, la C U est composée de quinze juges élus conjointe
ment par l 'Assemblée générale et le Conseil de Sécurité selon des critères de compétence, de
représentation de tous les courants juridiques et des grandes formes de civilisation ainsi que de
répartition géographique équitable.
Un État dont le litige est examiné par la Cour peut demander la désignation d'un juge ad hoc de
son choix.
La CU remplit une double fonction : contentieuse et consultative.
La fonction contentieuse consiste à rendre des arrêts sur la base du droit international, autre
ment dit de sanctionner un comportement étatique condamnable.
La Cour ne peut juger les États que s'ils ont accepté sa j u ridiction (clause facultative de compé
tence obligatoire) ; dans cette éventualité ses décisions ont force obligatoire. En cas de refus d'exé
cution, elle ne dispose pas d'instruments de contrai nte. Le Conseil de Sécurité est seul habilité à
employer des mesures contraignantes.
La fonction consultative consiste à dire le droit dans une situation j u ridique incertaine sur saisine
des organes intergouvernementaux de l'ONU et des institutions spécialisées.
Elle est, depuis 1 988, le juge d'appel du Tribunal de première instance des Communautés euro
péennes, qui statue essentiellement sur les affaires de concurrence et les litiges concernant les
fonctionnaires européens.
L'Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l'Italie et l ' Espagne ont accepté de perdre leur second
comm1ssa1re.
Un système de repondération est à la base du fonctionnement du Conseil des ministres de
l'Union, organe décisionnel primordial, pour les votes à la majorité qualifiée. L'élargissement
supposait une repondération des voix qui tiennent mieux compte du poids démographique de
chaque pays (de trois à vingt-neuf voix). La parité des voix entre les quatre grands est maintenue
(vingt-neuf voix) mais l'Allemagne obtient un « filet démographique » , selon lequel les votes au
Conseil des ministres devraient, pour être validés, représenter 62 % de la population européenne
(1 7 % pour la seule Allemagne). Les petits pays ont obtenu qu'une décision ne puisse être prise
sans l'accord de quatorze États sur vingt-sept. Le système, adopté à Nice, est donc particulière
ment complexe puisque trois seuils sont désormais prévus lors de la prise de décision : majorité
des États, majorité qualifiée en voix et filet démographique de 62 % .
Pour éviter l a paralysie des institutions communautaires après l'élargissement, les votes à l'unani
mité devaient devenir l'exception. L'objectif initial était d'étendre à une cinquantaine de domaines
le vote à la majorité qualifiée. Le compromis final reste en deçà des espérances, la plupart des
pays ont réussi à préserver leur droit de veto sur les sujets les plus sensibles Uustice, fiscalité, immi
gration et défense).
Le Traité de Nice facilite le déclenchement d'une coopération renforcée, qui permet à un nombre
limité de pays (huit) d'avancer plus vite que d'autres dans certains domaines.
Une convention a élaboré en 2003 un nouveau traité instituant une constitution pour l'Europe.
Signé en juin 2004, ce traité, fruit d'un compromis, apportait des changements sur plusieurs
points : un président du Conseil élu pour deux ans et demi un ministre des Affaires étrangères et
un président de la Commission élu par le Parlement européen ; une délimitation plus précise des
compétences entre l'Union et les États membres, conforme au principe de subsidiarité ; l'incorpo
ration de la charte des droits fondamentaux adoptée en 2000 ; la simplification des traités ; un
accroissement du rôle des Parlements nationaux dans l 'architecture européenne et l 'amélioration
de la légitimité démocratique et de la transparence de l'Union et de ses institutions, afin de les
rapprocher des citoyens des États membres. Il facilitait la création d'un espace judiciaire européen,
l'approfondissement de la politique extérieure et de sécurité commune (PESC).
Comme tout traité international, il devait être ratifié par voies référendaire ou parlementaire par
les vingt-cinq États membres (la Bulgarie et la Roumanie n'ont rejoint l'Union qu'en 2007) et
entrerait en vigueur en novembre 2009.
La construction européenne serait rentrée alors dans une nouvelle phase.
Le double vote négatif des peuples français et néerlandais a conduit le Conseil européen réuni à
Luxembourg en juin 2005 à autoriser les États qui le désiraient à geler le processus de ratification.
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74 l'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
Il est presque certain que ce texte ne pourra être mis en œuvre en l'état.
Après deux ans de statu quo, le Conseil européen des 2 1 , 22 et 23 juin 2007 a débloqué, après
de longues tractations, la situation de paralysie dans laquelle l ' U n ion se trouvait. Le Traité modifi
catif, adopté par les 27 chefs d'État et de gouvernements (Traité sur le fonctionnement de
l'Union), amende les traités existants mais ne les remplace pas. On conserve donc la multiplicité
des traités alors que le défunt projet de constitution constituait un texte unique. Le Conseil euro
péen de juin 2007 avait fixé le calendrier : la présidence portugaise a convoqué en juillet 2007 la
Conférence intergouvernementale chargée de rédiger le nouveau traité au plus tard fin 2007. Il
devait ensuite être ratifié par les 27 États membres pour pouvoir entrer en vigueur comme prévu
à la mi-juin 2009.
Le non irlandais lors du référendum organisé au printemps 2008 a entraîné une entrée en vigueur
plus tardive que prévue. Il a fallu attendre que les électeurs irlandais aient à se prononcer une
seconde fois au dernier trimestre 2009. L'unanimité des 27 États membres constituant un impé
ratif j u ridique, un résultat négatif aurait définitivement compromis les chances d'application du
Traité de Lisbonne dans sa rédaction actuelle.
Le texte est finalement entré en vigueur le 1 er décembre 2009 et ne contient plus de dispositions
symboliques (références au drapeau, à l'hymne, à la devise et à la monnaie de l'Union). Le terme
de constitution disparaît, de même que la partie Ill d u traité constitutionnel fixant les politiques et
le fonctionnement de l'Union. La C harte des droits fondamentaux, qui formait la partie Il de la
Constitution, n'est plus reprise dans son intégralité et fait l'objet d'une référence qui lui donne
malgré tout une force j u ridique contraignante, à l'exception du Royaume-Uni, de la Pologne et
de la République tchèque exemptés de son application. La personnalité j u ridique de l'Union est
maintenue avec la fusion des trois piliers : politiques communautaires ( 1 er pilier), politique étran
gère et de sécurité commune (2e pilier) et la coopération judiciaire et policière (3e pilier).
La délimitation des compétences entre l'Union et les États membres est conservée : l'Union doua
nière, le commerce, la concurrence et la politique monétaire demeurent des compétences exclu
sives de l'Union. La politique sociale, le marché intérieur, l'énergie et la recherche restent des
compétences partagées avec les États.
Les principales innovations institutionnelles, introduites dans la partie 1 de la Constitution, sont
préservées : à partir de 2009, un président de l'Un ion pour une période stable de deux ans et
demi, élu par ses pairs, au lieu de l'actuelle rotation semestrielle (actuellement Herman Von
Rompuy) ; la composition réduite de la Commission européenne dès 2 0 1 4 (2/3 de sa composition
actuelle et rotation égalitaire) et la fonction de Haut représentant pour les affaires étrangères et la
politique de sécurité (terme qui remplace celui de ministre des Affaires étrangères) élu pour un
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C HAPITRE 6 - Des acteurs récents : les organisations intergouvernementales 75
mandat de cinq ans et doté des mêmes pouvoirs que dans le projet de Constitution (actuellement
Catherine Ashton).
Le champ des décisions à la majorité qualifiée est étendu à 40 nouveaux domaines, notamment
en matière de coopération judiciaire sur le plan pénal et de coopération policière. Cette réforme
se traduit par une augmentation des pouvoirs du Parlement européen, colégislateurs dans ces
domaines avec le Conseil des ministres. Le Royaume-Uni et l'Irlande ont obtenu de ne pouvoir
appliquer les décisions prises dans ces domaines que lorsqu'ils y sont intéressés. Elle s'accom
pagne, à la demande du Royaume-Uni, de la création d'un mécanisme destiné à faciliter les
coopérations renforcées entre les États désireux d'aller de l'avant. En ce qui concerne le calcul de
la majorité qualifiée, le traité reprend le système de votes de la Constitution qui prévoyait qu'une
décision serait adoptée si elle obtenait le soutien de 55 % des États membres représentant 65 %
de la population de l'Union.
Cependant pour obtenir le soutien de la Pologne, plusieurs concessions ont été consenties : son
entrée en vigueur est reportée en 201 4, et, jusqu'en 2 0 1 7 , un État membre pourra demander à
ce que s'applique le système de votes du Traité de Nice, précédemment évoqué. De plus un méca
nisme permettra à un groupe d'États qui approche la minorité de blocage d'obtenir une poursuite
de la négociation en vue d'une solution. L'unanimité demeure néanmoins la règle pour la poli
tique étrangère, la fiscalité, la politique sociale, les ressources de l'Union ou la révision des traités.
Le rôle des Parlements nationaux est renforcé : ils disposeront de huit semaines (au lieu de six)
pour examiner un texte communautaire et, à la demande des Pays-Bas, la Commission euro
péenne devra justifier une décision, la revoir ou la retirer, si elle est contestée à la majorité simple
des voix attribuées aux Parlements nationaux. Si la Commission ne les suit pas, ils pourront
demander aux États membres de bloquer le processus de décision.
Le droit d'initiative citoyenne, qui permettra à un m i l l ion de citoyens d'inviter la Commission à
soumettre une proposition figure dans le projet de traité modificatif. Quelques dispositions
inédites ont été introduites dans le texte : d'une part, un protocole sur les services publics souligne
l'importance des services d'intérêt général ainsi que la grande marge de manœuvre des autorités
nationales, régionales et locales ; d'autre part est insérée une référence à la solidarité énergétique
en cas de problème d'approvisionnement.
Suite à la crise de l'euro, des initiatives majeures ont été prises : un mécanisme de sauvetage a été
mis en place pour assister les pays de la zone euro (1 7 depuis l'entrée de l'Estonie au 1 er janvier
201 1 ) en difficulté financière. En premier lieu, un Fonds européen de stabilité financière (FESF),
doté de 440 milliards d'euros, peut aider un État en empruntant sur les marchés à un taux compé
titif grâce aux garanties apportées par les États de la zone euro. Il est activé à l'unanimité des États
participants. En second lieu, un mécanisme européen d'assistance financière, doté de 60 milliards
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76 l'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
d'euros, est financé par des emprunts réalisés par la Commission sur les marchés, garantis par le
budget communautaire. Il est activé à la majorité qualifiée des Vingt-Sept.
Réunis à Luxembourg le 8 octobre 201 2, les ministres des Finances des 1 7 États membres de la
zone euro ont signé l 'acte de naissance du Mécanisme européen de stabilité (MES), traité annexé
au traité sur l'Union européenne. Cet instrument financier est doté de 500 milliards d'euros de
capacité d'emprunt, dont une large part assumée par l'Allemagne en vertu de son statut de
première économie de la zone euro. Il constitue une étape historique dans la construction de
l'Union monétaire, la zone euro est désormais pourvue d'un pare-feu permanent et efficace.
Le mécanisme prendra à terme la relève du Fonds de secours actuel, le FESF. Les deux instruments
vont cohabiter jusqu'en juillet 201 3, ce qui permettra un temps de cumuler leur capacité de prêts
de 700 millions d'euros. Le MES peut apporter, pour les États qui ont ratifié le traité, son aide
financière de quatre façons différentes : renflouer un État qui ne peut pas se financer sur les
marchés ; racheter de la dette d'État sur le marché primaire et secondaire ; recapitaliser les
banques via un prêt au gouvernement ; accorder une ligne de crédit souple, qui garantisse tout
ou partie de ses émissions sur les marchés. La création d'un mécanisme commun de supervision
bancaire, première étape d'une future Union bancaire européenne, complète le dispositif et facili
tera dès mars 2 0 1 4 la résolution des crises bancaires sous le contrôle de la Banque centrale
européenne.
Le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), plus connu sous le nom de
pacte budgétaire européen, largement impulsé par l 'Allemagne et qui engage 25 des 27 pays de
l'Union européenne à plus de discipline budgétaire, avec des sanctions à la clé si les objectifs ne
sont pas atteints, est entré en vigueur le 1 er janvier 2 0 1 3 . La Cour de justice européenne pourra
infliger une amende allant jusqu'à 0 , 1 % du PIB en cas de non-transposition du texte dans le
droit national. En cas de déficit budgétaire trop important, le Conseil européen pourra infliger
une sanction financière allant de 0,2 à 0,5 % du PIB. Mais avant cette étape, la Commission
européenne adressera des avertissements aux pays en question . Ce traité remplace le pacte de
stabilité et de croissance, adopté en 1 997 et devenu obsolète.
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Les nouvea ux acteurs
des rela tions
in terna tionales
Si les organisations internationales gouvernementales restent assujetties à la
volonté des États, de nouveaux acteurs sont apparus et ont vocation à modifier
l'ordre interétatique en favorisant l'émergence de concurrents et en offrant un
complément ou une alternative au modèle interétatique existant.
l'ensemble des continents, même si la localisation européenne demeure dominante. Ces ONG
interviennent dans des domaines très variés (plus d'une centaine) que Josepha Laroche a judicieu
sement regroupés en quatre grandes catégories : les organisations corporatives, axées sur la
défense des intérêts de leurs membres au sein d'Institutions spécialisées comme la FAO, l'OMS
ou le Bureau international du travail (BIT), les organisations techniques telles que la Commission
Internationale de Protection radiologique, les organisations sociales et humanitaires comme
Amnesty International, le Comité international de la Croix Rouge (CIC R), Médecins sans frontières
(prix Nobel de la Paix 1 999), Médecins du Monde ou Greenpeace et enfin les organisations
savantes comme l'Institut de Droit International, la Fondation Carnegie ou le Mouvement
Pugwash.
• Statut et fonctions
Les ONG les plus représentatives bénéficient d'une certaine reconnaissance de la part des organi
sations intergouvernementales qui leur accordent, dans leurs domaines d'activités, un statut
consultatif (plus de 2 000 à l'ONU).
Elles sont toutes habilitées à recevoir des informations des organisations intergouvernementales et
même pour certaines d'entre elles à être automatiquement consultées, voire à proposer l'inscrip
tion à l 'ordre du jour des débats de leurs propositions. De plus, les ONG organisent, avec le
soutien des OIG, des réunions en marge des grandes conférences internationales des Nations
unies consacrées aux problèmes de société (environnement, démographie, développement social,
criminalité transnationale ou situation des femmes). La tenue, depuis 200 1 , d'un Forum social
mondial a permis à des groupes jusque-là exclus des affaires internationales de s'exprimer et de
défendre l'idée d'une autre mondialisation. Le mouvement altermondialiste, lui-même divisé, n'a
pu élaborer un projet alternatif global mais peut jouer un rôle précurseur dans des cadres plus
sectoriels.
Elles sont donc associées au processus normatif ; parfois elles participent de façon implicite ou
explicite à l'élaboration et à l'adoption de la règle de droit (exemple du CICR en matière de droit
humanitaire).
Le travail des ONG ne s'arrête pas au stade de l'adoption des règles ; elles surveillent l'application
effective par les États de leurs obligations conventionnelles.
Aiguillon ou promoteur de nouvelles normes de droit international, les ONG humanitaires, théori
quement indépendantes des États, deviennent de plus en plus dépendantes de financements
publics (en moyenne 60 %). Cette prolifération n'est pas toujours synonyme de transparence et
d'indépendance car il existe aussi des ONG créées par des gouvernements pour défendre leurs
intérêts et d'autres dont le sérieux, la compétence et le but non-lucratif laissent à désirer. Les
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CHAPITRE 7 - Les nouveaux acteurs des relations internationales 79
plus sérieuses jouent la complémentarité avec les États et les entreprises. Un examen attentif
montre que leurs actions ont renforcé l'interventionnisme étatique dans les relations
internationales.
L'influence des ONG est appréciée différemment par les auteurs, certains leur attribuent « un rôle
considérable dans la politique internationale » (J. Laroche), d'autres « un rôle diffus et modeste »
(D. Collard), confirmant, en réalité, la dialectique de l 'encore interétatique et du déjà transnational.
connu un franc succès. Pour d'autres experts, notamment ceux de l'ancien Commissariat général
au Plan français (Rapport d'octobre 1 999 sur La nouvelle nationalité de l'entreprise dans la
mondialisation), la nationalité d'une entreprise s'exprime de cinq manières : la finance, le territoire,
la matière grise, la culture et les relations avec les institutions de I'Ëtat. À chacun de ces niveaux,
une communauté nationale peut conserver une marge de manœuvre sur son destin économique.
La principale conclusion du rapport conduit à dénoncer le mythe de l'entreprise globalisée sans
référence à un territoire.
STN. Soixante et onze pays ont ainsi assoupli leurs législations pour séduire les firmes
multinationales.
Depuis la crise de 2008, ce double objectif est concomitant : libéraliser et promouvoir l'investisse
ment étranger tout en le réglementant davantage. Le rapport 201 2, précité, de la Conférence des
Nations unies pour le commerce et le développement (C NUCED) sur les investissements internatio
naux affirme que durant la période 2000-20 1 1 , 78 % des modifications des textes régissant les
investissements étrangers introduisent un environnement plus favorable et 22 % un environne
ment plus strict. Ces changements ont entraîné un afflux d'investissements dans certains PED,
passés d'une moyenne de 20 milliards de dollars par an entre 1 983 et 1 988 à 684 milliards de
dollars en 201 1 , soit près de la moitié des flux mondiaux des I D E .
Cette libéralisation s'est également accompagnée de la signature d e multiples accords internatio
naux d'investissements (3 1 64 au 1 er janvier 20 1 2 dont 2 833 accords bilatéraux). Ils ne régissent
plus uniquement les relations des pays développés avec les PED mais celles entre les PED
eux-mêmes ainsi qu'entre ces derniers et les pays en transition. Ces accords sont de plus en plus
détaillés, complexes et illustrent une interaction croissante entre les investissements et d'autres
préoccupations financières et environnementales. En 200 1 , cinq sociétés issues de pays émergents
asiatiques ont fait leur apparition dans le classement des cent plus grosses firmes transnationales
et ce chiffre est en régulière augmentation (en 2008, 77 des 1 00 premières STN des PED avaient
leur siège en Asie).
Amplifiés par le phénomène de déterritorialisation de l'activité économique et de la dérégulation
des marchés boursiers, les échanges des STN représentent, en 2008, plus d'un tiers des échanges
mondiaux. Il est vrai que les dix premiers pays en développement bénéficiaires d'investissements
directs étrangers accueillent 65 % du total des flux. En 201 0, 33 % des fusions-acquisitions ont
été réalisés par des entreprises de pays émergents ( 1 4 % en 2005).
Dans un intérêt mutuel bien compris, les États-Unis, la Grande-Bretagne et plusieurs sociétés trans
nationales pétrolières et minières anglo-saxonnes ont signé en décembre 2000 avec des ONG un
code de bonne conduite en matière de droits de l'homme par lequel ils s'engagent à ne pas
encourager ou soutenir des violences contre les populations locales afin de protéger leurs investis
sements. En 1 997, le Programme des Nations unies pour l'environnement a mis en place avec des
STN et des ONG américaines la Global Reporting Initiative (GRI) identifiant des critères de compor
tement socialement responsables, de plus en plus exigeants et détaillés. La moitié des entreprises
cotées au Dow Jones et au CAC 40 suivent ces recommandations. Le rapport 20 1 0 affirme que
« les STN, avec leurs compétences, leurs technologies de pointe et leur champ d'application plané
taire, sont nécessairement des acteurs de premier plan dans les efforts mondiaux pour réduire les
émissions de gaz à effet de serre et passer à une économie à faible intensité de carbone » .
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82 L'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
De même plus de 1 0 000 entreprises et organismes adhèrent en janvier 201 3 au Global Compact
(Pacte Mondial) initié en 1 999 par Kofi Annan (respect de dix principes environnementaux, civi
ques, sociaux et de lutte contre la corruption). Toutefois le caractère général des « normes »
proposées et l 'absence de mécanisme de contrôle et de sanction éventuelle ne permettent pas
un réel suivi de leur application. Une nouvelle initiative pourrait aboutir à la promulgation d'un
ensemble de « normes ONU » plus universelles et plus contraignantes que celles du Global
Compact. Elle ne pourra aboutir qu'avec le concours actif des entreprises et des ONG.
En réalité les deux acteurs, Ëtats et STN sont, dans le contexte actuel, liés par une solidarité et une
complémentarité évidentes. La réussite des uns conditionne celle des autres. Cette interdépen
dance, lorsqu'elle joue, est manifeste : si I'Ëtat a besoin de l 'entreprise transnationale pour affermir
son développement, préserver l'emploi et assurer le bien-être de sa population, la firme est tribu
taire de I'Ëtat pour assurer la sécurité et le maintien de l'ordre, indispensables au succès de
l'entreprise.
Cependant la compétition internationale que l'Amérique du Nord, l'Europe et le Japon se livrent,
s'effectue en partie par l'entremise des STN, « véritables moteurs du système de production
mondiale intégré » .
Cette concentration et cette course à l a « taille critique » sont l a conséquence d u phénomène de
mondialisation et suscite toujours interrogations et inquiétudes. La mondialisation induit, nous
l'avons vu, une logique d'affrontement mais aussi une logique de coopération.
(notamment l'appel à des dizaines de milliardaires de léguer la moitié de leur fortune à des
œuvres caritatives ou pour la Fondation Gates qui consacre 3 milliards de dollars par an à des
causes humanitaires) en passant par l'usage de l'aura décernée aux prix Nobel de la Paix
(Desmond Tutu, Rigoberta Menchu, Monseigneur Belo et Jose Maria Horta, Aung San Suu Kyi,
Kofi An nan, Al Gare, Ba rack Obama ou plus récemment en 20 1 0 au dissident chinois Liu
Xiaobo). Cette distinction a permis soit de sensibiliser les opinions publiques à des situations ou
conflits inacceptables, soit à prendre acte des efforts prodigués en faveur des populations civiles
ou à la recherche de la paix.
rn Les peuples
En tant qu'acteurs des relations internationales, les peuples ont eu une destinée surprenante dans
la mesure où tout le monde s'accordait à dire que leur rôle s'était achevé à la décolonisation. La
fin de la bipolarisation a engendré un renouveau du droit des peuples dans des domaines tradi
tionnels et aussi dans des domaines nouveaux. Le principe du droit des peuples à disposer
d'eux-mêmes, consacré par l'ONU en faveur des peuples coloniaux, avait une finalité unique, leur
accession à l'indépendance et au statut étatique. En revanche, une fois le peuple devenu État, la
question n'était plus d'actualité au sein des frontières de l 'État décolonisé. Depuis, ce principe, aux
effets j u ridiques limités mais aux implications politiques évidentes, n'est plus cantonné aux seuls
peuples coloniaux. Il est fréquemment invoqué comme un droit identitaire qui se matérialise par
une revendication d'autodétermination ou de reconnaissance de droits ancestraux (cas des
peuples autochtones).
S'intéresser aux peuples sans terre ou aux minorités opprimées remet en cause les équilibres
géopolitiques actuels et risque de mettre à bas une société internationale très fragilisée.
Cette prise en compte des peuples par le droit international est donc partielle et se heurte encore
au principe de souveraineté des États, soucieux d'éviter sécessions et démembrements.
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La régula tion norma tive
des rela tions
in terna tionales
Les relations internationales sont régies par un corpus de règles spécifiques qui en
couvre tous les aspects traditionnels ou nouveaux.
Le fondement du droit international, relationnel ou institutionnel, repose sur la
reconnaissance par les différents protagonistes, présents sur la scène mondiale,
d'un certain nombre d'intérêts. Il permet de définir et d'organiser des règles
collectives visant à prévenir l'insécurité et limiter le recours à la force.
Le droit est un instrument de la politique, il expnme l'état des rapports sociaux, y compris les
rapports de force, à un moment donné.
Malgré ses imperfections et ses incertitudes, le droit international ne cesse de s'étendre. Il couvre
la quasi-totalité des activités humaines s'exerçant à travers des frontières et permet un minimum
de régulation de l'interdépendance. Le phénomène juridique, parfois nié par les tenants dépités
d'un droit naturel et universel dont l'ONU serait garante, est perçu différemment selon les
cultures. Il n'en demeure pas moins que ces sociétés se reconnaissent liées réciproquement par
des obligations j u ridiques contenues dans des traités ou des contrats.
Ce constat nous conduit à aborder la question des sources du droit international .
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86 L'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
• Les traités
Le traité, procédé de formation le plus ancien, prend la forme d'un accord conclu entre deux ou
plusieurs sujets de droit international en vue de produire des effets j u ridiques. Cet acte conven
tionnel écrit, et conclu entre Ëtats ou entre Organisations, manifeste leur volontarisme.
La matière a été codifiée en 1 969 par la Convention de Vienne.
Trois phases jalonnent la procédure : la négociation, la signature et la ratification. La négociation
est menée par des plénipotentiaires spécialement mandatés par l'autorité nationale compétente.
Elle s'effectue dans un cadre bilatéral ou multilatéral. La signature authentifie le texte sans
engager l'État. Cet engagement d'application du traité résulte de la ratification, acte par lequel
l'organe supérieur de l'État confirme la signature du plénipotentiaire.
La ratification est laissée à l 'appréciation discrétionnaire de I'Ëtat signataire. La date d'entrée en
vigueur d'un traité bilatéral est fonction des ratifications par les deux parties. Pour les traités multi
latéraux, deux procédés sont utilisés séparément ou conjointement, soit la date est précisée par le
traité lui-même, soit le texte prévoit le nombre de ratifications nécessaire.
Un traité ratifié doit être appliqué, sous réserve de réciprocité, tant qu'il n 'a pas été dénoncé par
l'une des parties. Encore faut-il que la dénonciation soit possible (exemple des traités européens
qui ne la prévoient pas).
• La coutume
« Pratique juridique générale, acceptée comme étant le droit », la coutume internationale est la
manifestation d'un comportement répété, constant, durable et clair. Ces caractères impliquent
une adhésion volontaire et consciente de nombreux Ëtats à se conformer à une règle obligatoire
en gestation. Les actes susceptibles de créer des précédents sont issus d'une pratique organique
émanant des Ëtats ou des Organisations internationales.
La coutume possède une valeur identique à celle des traités, en d'autres termes leur force juri
dique est égale. Si une disposition conventionnelle ultérieure peut modifier ou abroger une règle
coutumière, la réciproque est vraie. L'attrait de la norme écrite conduit fréquemment la société
internationale à un travail de codification de la coutume (droit de la guerre, droit des traités,
droit de la mer).
(égalité entre les parties, réparation intégrale des dommages causés, autorité de la chose jugée).
Toutefois, ils ne représentent qu'une source supplétive de droit international, utilisée uniquement
en l'absence de règles conventionnelles ou coutumières.
• L'équité
Le Statut de la CIJ autorise cette j u ridiction, avec l'accord des parties au litige, à statuer ex 02quo
et bono, c'est-à-dire en équité.
Le recours à un jugement en équité permet de réduire les effets pénalisants d'une application
stricte du droit international (par exemple en matière de délimitation des frontières maritimes).
S'il comble parfois les lacunes du droit, il est généralement admis qu'il ne puisse pas le contredire
(pas d'équité contra !egem).
• La jurisprudence
Moyen « auxiliaire » de détermination de la règle de droit, la j u risprudence est l'ensemble des
décisions j u ridictionnelles et arbitrales à portée universelle ou régionale. Le droit international
établit le principe de l'autorité relative de la chose jugée ; néanmoins la force interprétative, tirée
des jugements ou sentences, crée des précédents j u ridiques. Certes il dit le droit mais il favorise
aussi l'émergence de normes j u ridiques coutumières ou écrites.
• La doctrine
Autre moyen « auxiliaire » , la doctrine se situe au bas de la « hiérarchie des normes de droit inter
national » . La CIJ ne s'y réfère jamais explicitement ce qui n'empêche pas les spécialistes éminents
de la discipline de réfléchir et de proposer la création de nouvelles règles ou la modification de
règles existantes inadaptées aux réalités des relations internationales. Ces points de vue doctrinaux
peuvent être défendus par les Ëtats devant des instances internationales qui ont la faculté de les
prendre en compte dans le prononcé de leurs décisions.
• Le jus cogens
Cette notion a été introduite par l'article 53 de la Convention de Vienne sur les traités sous la
pression des États en développement.
Une norme de jus cogens est « une norme impérative du droit international acceptée et reconnue
par la communauté internationale dans son ensemble en tant que norme à laquelle aucune déro
gation n 'est permise et qui ne peut être modifiée que par une nouvelle norme du droit interna
tional général ayant le même caractère » . Cette norme est placée au sommet de la hiérarchie,
autrement dit toutes les autres règles de droit lui sont assujetties et elle s'impose à tous les États,
faisant fi de la théorie volontariste. La violation d' une norme de jus cogens est une cause de
nullité absolue d'un engagement international. L'article 53 ne donne aucune définition concrète
de la notion, cependant la C IJ a précisé son contenu en se référant à l'interdiction du recours à
la force, du génocide, de la torture ainsi q u 'à la prohibition de l'esclavage.
Des principes fondamentaux des relations internationales ont ainsi été introduits par le traité, la
coutume et les principes généraux de droit et souvent consacrés par la Charte de l'ONU.
Il est nécessaire de les mentionner et d'en préciser les éléments essentiels.
Le système mis en place par les Traités de Westphalie inaugurait un ordre dans lequel les relations
internationales étaient exclusivement interétatiques. Les principes, établis en 1 648, régissent
encore la vie internationale. Ils ont été, pour la majorité d'entre eux, inscrits dans la C harte de
1 945. D'autres principes sont en gestation.
Doctrine officielle de la société internationale, l'universalisme des droits de l'homme doit passer
« de la sphère de l'idéal à celle de la réalité ».
déclarées patrimoine de l'humanité. Perçue par les PED, non parfois sans fondement, comme un
dessein néocolonialiste et mercantile des Ëtats développés, l'ingérence progresse dans les esprits
et irrigue lentement la société internationale, en dépit des obstacles dressés par les
« souverainistes » .
massifs commis dans huit États africains, la dernière enquête ayant été ouverte en janvier 20 1 3 sur
la situation au Mali.
En dépit de progrès certains (création de tribunaux spéciaux pour juger de crimes commis par des
gouvernants en Sierra Leone et au Cambodge, création d'un tribunal spécial pour juger les assas
sins de l'ancien Premier ministre libanais, Rafic Hariri), la justice internationale reste une justice à
double standard tiraillée par des considérations politiques qui freinent, voire bloquent ses initia
tives et démontre la difficulté pour la société internationale de construire une véritable justice
pénale à l'échelle planétaire.
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Les enjeux et les défis
des relations internationales
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Guerre ou paix ?
L 'établissement d'un ordre pacifique est l'enjeu premier des relations internatio
nales contemporaines. La nature des conflits a évolué. Cette ambition justifie la
mise en œuvre de mesures préventives et éventuellement l'emploi de mesures
répressives coercitives ou non coercitives.
Comme le souligne avec justesse Thierry de Montbrial, « la plupart des conflits sont plus souvent
provisoirement interrompus que définitivement maÎtrisés » . Le nombre des victimes civiles est en
constante augmentation (5 % en 1 9 1 4- 1 9 1 8, 75 % en 1 939-1 945 et 95 % dans l'ancienne
Yougoslavie).
Cette évolution des conflits rend la recherche de la paix aléatoire car il est plus aisé de négocier
sur la base de critères substantiels (territoire) que sur le fondement de critères immatériels (idéo
logie). La paix n'est pas un concept figé se définissant a contrario comme un état de non-guerre,
elle est « l'expression d'un équilibre temporaire de puissance » . L'absence de guerre ne peut être
considérée ni comme un signe de paix, ni comme une preuve de stabilité. La condamnation de la
guerre ne suffit pas à établir la paix.
La définition classique de la guerre, à savoir la violence mise en œuvre par une entité politique, est
devenue insuffisante.
Une privatisation de la violence publique se développe en dehors des Ëtats et parfois même délé
guée à des bandes armées. La guerre se fait davantage au sein des Ëtats ou d'Ëtat à non-Ëtat ou
quasi-Ëtat. La distinction traditionnelle entre état de paix et état de guerre a perdu de son
évidence (Irak, Afghanistan et Côte d'Ivoire). La violence terroriste accentue cette indécision
et selon le Département d'Ëtat américain, les actes de terrorisme ont triplé en 2004. La tendance
ne s'est pas inversée.
La sécurité internationale est sans cesse menacée par des facteurs de tension et des sources de
déséquilibre qui sont exploités par différents Ëtats ou mouvements œuvrant à une subversion
généralisée de la société internationale. La mise en place de moyens matériels et juridiques,
même imparfaits, est seule capable d'établir et de garantir un ordre supérieur à toutes les parties
en cause.
Cette quête de sécurité collective passe par l 'emploi de mesures préventives et éventuellement
de mesures répressives.
serait assuré par une autorité universelle supranationale. Sans faire preuve d'un pess1m1sme
déplacé, ce bouleversement n'est pas proche. Les grandes puissances, généralement exportatrices
d'armements, ne désirent pas transférer leurs compétences et préfèrent gérer le problème en
termes de maîtrise. Quant aux PED, ils sont les premiers à acquérir des armes et à obérer ainsi,
pour certains d'entre eux, les chances d'un développement économique. Même les effets négatifs
de la crise financière et économique mondiale semblent avoir eu peu d'impact sur les dépenses
militaires mondiales. Les 2/3 des pays pour lesquels des données étaient disponibles en 201 1 ont
augmenté leurs budgets militaires.
Les dix États ayant les dépenses militaires les plus importantes en 201 1
{en m illiards de dollars US)
2 Chine 1 43 *
3 Russie 72 *
4 Royaume-Uni 62,7
5 France 62 , 5
6 Japon 59,3
7 Inde 48,9
8 Arabie Saoudite 48,5
9 Allemagne 46,7*
10 Brésil 3 5 ,4
La multiplication de conflits sur la planète n'instaure pas un climat de confiance suffisant pour
favoriser la conclusion d'accords généraux de désarmement. Toutefois des accords limités, régio
naux ou bilatéraux, peuvent être conclus par certains Ëtats selon des méthodes de négociation
précises.
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98 L'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
ratification et, d'autre part, un système de dix-huit inspections réciproques annuelles. Cet instru
ment international a été ratifié par le Sénat américain et la Douma russe en décembre 201 O .
Les initiatives engagées par les membres de la société internationale ont parfois abouti à des résul
tats concrets en fonction des types d'armes.
En ce qui concerne les armes chimiques et bactériologiques, qualifiées d'armes des pauvres, le
traité sur l'interdiction totale et la destruction des a rmes chimiques du 1 5 janvier 1 993 (entré en
vigueur en 1 997 et fixant la date butoir au 29 avril 2 0 1 2) comprend un dispositif strict de contrôle
confié à une organisation spécifique, dotée d'un corps d'inspecteurs. Il vérifie que les Ëtats signa
taires respectent l'interdiction de fabrication, de stockage et d'utilisation. À la fin de l'année 201 1 ,
plus de 50 000 tonnes d'agent des armes chimiques déclarées avaient été détruites de manière
véritable, soit 7 1 % du total . Près de 4 millions d 'articles et de conteneurs d'armes chimiques
déclarés avaient été détruits, soit 46 % du total .
De même, u n traité sur l'interdiction totale des armes bactériologiques et à toxines d u 1 0 avril
1 972 (entré en vigueur en 1 975) prévoit des mesures de destruction de ce type d'armes.
En ce qui concerne les armes conventionnelles, un traité du 1 0 avril 1 98 1 , sur l'interdiction ou la
limitation de certaines armes classiques susceptibles de provoquer des traumatismes excessifs ou
des souffrances inutiles, a été conclu . Il vise à prohiber l'emploi de certains projectiles, d'armes
incendiaires et d'armes-pièges. Cette convention a été complétée sur ce point par le Traité sur
l'interdiction totale des mines antipersonnelles du 3 décembre 1 997. Il impose la destruction des
stocks existants, obligation à laquelle la France s'est conformée au 3 1 décembre 1 999. On ne
peut que regretter que les principaux Ëtats exportateurs (Ëtats-Unis, C hine et Russie) aient refusé
de le signer et par conséquent de le ratifier.
Toutefois l'adoption en mars 20 1 3 par l'Assemblée générale de l'ONU d'un projet de traité de
commerce des armes dites classiques (du pistolet aux missiles, des chars aux avions et navires de
guerre) constitue une première étape vers une mora lisation et une régulation de la vente d'armes
dont le montant s'élève à 700 milliards de dollars par an. L'objectif tient à l'obligation pour
chaque Ëtat d'évaluer, avant toute vente, si les armes qui font l'objet de la transaction risquent
d'être utilisées pour contourner un embargo international, pour commettre un génocide ou
d'autres exactions contre les populations civiles, ou être détournées au profit de terroristes ou
des criminels. Il doit être ratifié par 50 Ëtats pour entrer en vigueur, processus qui devrait être
achevé sans doute en 20 1 5 . Sa portée apparaît réduite en raison de l'opposition de trois Ëtats
(Corée du Nord, Iran et Syrie) et de l'abstention de 23 autres parmi lesquels figurent certains des
principaux pays exportateurs (Chine et Russie) ou acheteurs (Inde, Indonésie ou Ëgypte) d'armes.
En dépit de ses défauts, ce traité a le mérite d'exister tout comme la réglementation relative aux
armes de destruction massive.
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1 00 l'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
dispositif de surveillance internationale particulier, destiné à faire respecter leurs engagements aux
États parties, est institué. Toutefois, l'article 1 4 prévoit l'entrée en vigueur lorsque les 44 États
désignés dans une liste annexe auront tous ratifié le traité dans un délai de trois ans.
2) Un avenir incertain
L'avenir de ces deux conventions universelles est devenu incertain après les campagnes d'essais
indienne et pakistanaise en mai 1 998. Le CTBT n'a pas encore été ratifié par les États-Unis, la
Russie et la Chine. La défection de trois puissances nucléaires majeures enlèverait au traité toute
signification. Seuls 3 5 des 44 États nommément désignés l'ont ratifié ce qui risque d'encourager
les « États parias ou voyous » (Rogue States) à ne pas respecter la non-prolifération. Les
États-Unis ont, par ailleurs, dénoncé en 2002 le traité ABM de 1 972, conclu avec l'URSS, afin de
pouvoir déployer un système antimissile qui les protégerait des velléités guerrières ou terroristes de
ces États. L'équilibre de la terreur, malgré tout préservé depuis les années 1 950, apparaît dès lors
compromis.
Le TNP, suite aux essais inde-pakistanais, est confronté à des États échappant désormais à toute
classification juridique. L'Inde et le Pakistan sont devenus des puissances nucléaires de fait ; ils ne
sont plus des ENDAN au sens du TNP mais ils ne sont pas des EDAN ! Le traité n'a pas empêché
l'émergence de nouveaux États nucléaires (Israël et Corée du Nord) ce qui pourrait amener
certains pays à ne pas reconduire leur adhésion au TNP suivant en cela l'exemple de la Corée du
Nord en janvier 2003 . Au-delà de l'avenir du TNP, se pose la question de la non-prolifération.
En procédant à leurs expérimentations au nom de la sécurité nationale, l'Inde et le Pakistan ont
souligné les limites de l 'ordre mondial nucléaire. Ils ont voulu dénoncer l'impérialisme nucléaire
des cinq Grands en affirmant leur droit souverain de développer une capacité nucléaire. Les deux
États n'ont pas violé le droit international puisqu'ils n'étaient pas liés conventionnellement et ont
pu trouver une base légale dans l'avis consultatif de la CU du 8 juillet 1 996 sur la licéité de la
menace ou de l'emploi d'armes nucléaires. Si la Cour, dans son raisonnement, condamne l'utilisa
tion de l'arme nucléaire comme contraire aux principes intransgressibles du droit humanitaire
international, « elle ne saurait perdre de vue le droit fondamental qu'a tout État à la survie, et
donc le droit qu'il a de recourir à la légitime défense, conformément à l'article 51 de la Charte,
lorsque cette survie est en cause » (§ 96 de l 'avis).
Faut-il craindre, au cours des prochaines années, un renouveau de la prolifération nucléaire dans
des PED désireux de sanctuariser leur territoire et d 'accéder ainsi à un degré de puissance et de
prestige sur la scène internationale ? La réponse dépendra en partie de l'attitude des grandes puis
sances nucléaires à l 'égard de l'obligation de résultat insérée dans l'article VI du TNP et réaffirmée
en 2000 en vue de conclure un traité de désarmement général et complet. L'échec de la Confé
rence de révision du TNP en mai 2005 dû en partie au refus américain de démanteler leur
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1 02 L'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
internationale sur le terrorisme nucléaire, adoptée en 2005, complète le dispositif existant mais
n'est pas entrée en vigueur, faute des ratifications suffisantes.
Un sommet sur la sécurité nucléaire, réunissant 47 pays dont huit des neuf Ëtats détenteurs de
l'arme atomique, s'est tenu à Washington en avril 20 1 0 sur un ordre du jour consensuel : la sécu
risation des matériaux nucléaires tels que le plutonium et l'uranium hautement enrichis. Si la
déclaration finale rappelle l'objectif de mettre en sû reté toutes les matières en quatre ans (1 587
tonnes sont entreposées dans quarante pays), elle réaffirme que la sécurisation relève toujours de
mesures nationales.
Un autre instrument de non-prolifération consiste dans la création de zones dénucléarisées au sein
desquelles les armes nucléaires sont bannies. L'instauration d'une telle zone représente un gage
de paix et de sécurité et actuellement cinq régions sont dénucléarisées : l'Antarctique (1 959),
l'Amérique latine et les Caraïbes (1 967), le Pacifique sud ( 1 985), l'Asie du Sud-Est (1 995) et
l'Afrique (1 996). Deux autres « zones » sont exemptes d'armes nucléaires, le fond des mers et
l'espace extra-atmosphérique.
Cependant, faute de pouvoir désarmer les Ëtats, il faut s'efforcer d'éviter le recours à la force en
réglant pacifiquement les différends.
a) Le règlement judiciaire
Cette forme de règlement de litiges entre Ëtats concerne un règlement par des juridictions perma
nentes, régies par des textes qui sont de portée générale et sont établis à l'avance. Les Ëtats
peuvent recourir à une juridiction (CU) ou à l'arbitrage.
1) La Cour internationale de justice
Organe j u ridictionnel des Nations unies siégeant à La Haye, la CU est compétente pour résoudre
des litiges d'ordre juridique. Néanmoins, les Ëtats ne sont pas obligés de lui soumettre leurs diffé
rends sauf s'ils ont ratifié la clause facultative de juridiction obligatoire les contraignant à accepter
la compétence de la Cour. Les Ëtats utilisaient peu cette voie judiciaire jusqu'aux années 1 980 ;
grâce à l'impartialité de ses décisions, elle est saisie depuis de nombreuses affaires.
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1 04 l'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
2) L'arbitrage
Selon la définition donnée par la Convention de La Haye de 1 907, « l'arbitrage international a
pour objet le règlement des litiges entre États par des juges de leur choix sur la base du droit
international » .
Procédure contractuelle, i l suppose u n accord préalable entre États sous forme d'un compromis
d'arbitrage, occasionnel ou permanent. Celui-ci détermine le rôle et la compétence des arbitres
(personnalité unique ou commission mixte). Le recours à l'arbitrage présente des avantages liés à
la souplesse d'utilisation car ce sont les États intéressés qui choisissent la composition du tribunal
arbitral. De même, si le litige porte sur une règle de droit international, les parties sont libres de
préciser dans le compromis les règles applicables en l'espèce. Les juges se prononcent en droit et
en équité et leur décision est définitive et obligatoire. Les parties peuvent décider la confidentialité
de la sentence. Cette technique de règlement judiciaire est assez souvent utilisée dans des
problèmes de délimitation des espaces maritimes (Ca nal de Beagle, plateau continental de la mer
d'Iroise et récemment îles de la Mer rouge).
b) Le règlement politique
Cette méthode de règlement, prévue par le chapitre VI de la Charte, fait appel à des procédés
traditionnels et institutionnels.
1) Les procédés traditionnels
Depuis le Moyen Âge, la pratique internationale a engendré plusieurs moyens d'ordre diploma
tique pour empêcher un litige de dégénérer en conflit ouvert. L'article 33 de la Charte en dresse
une énumération non exhaustive : la négociation, la médiation, les bons offices, l'enquête et la
conciliation.
La négociation est la procédure la plus simple, elle implique un contact direct ou indirect entre
les parties, soumises au respect des principes de bonne foi et de parole donnée.
La médiation fait intervenir un tiers qui suggère aux parties une solution précise à leur différend.
La mission de bons offices n'est pas fondamentalement différente de la précédente puisqu'un
tiers propose son intervention en vue de favoriser la discussion entre les protagonistes mais sans
suggérer de solution.
Créée par la Convention de La Haye de 1 899, l'enquête internationale permet d'établir la maté
rialité et la véracité des faits à l'origine d'un litige. La Commission d'enquête doit comprendre,
sous la présidence d'un tiers, des représentants des parties. Elle rédige un rapport établissant les
faits sans se prononcer sur les responsabilités encourues.
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C HAPITRE 9 - Guerre ou paix ? 1 05
La conciliation est le procédé le plus réglementé en droit international. Les éléments d'un litige
sont transmis à une commission mixte de trois ou cinq membres, présidée par un tiers. Elle a
pour but de rapprocher les points de vue et de proposer un règlement acceptable par les parties.
Certains traités internationaux prévoient à l 'avance l'existence d'une commission de conciliation,
gage d'une plus grande efficacité.
Ces méthodes classiques de règlement présentent la particularité d'être facultatives et de ne pas
lier les Ëtats, autrement dit elles n'ont pas de caractère contraignant, à la différence des
procédés de règlement judiciaire.
2) Les procédés institutionnels
Dans ce cadre, le règlement ne repose plus sur un accord bilatéral mais sur une décision unilaté
rale de l'Organisation internationale. La Charte de l'ONU a prévu un mécanisme souple ;
conformément au chapitre VI, les parties à un différend doivent d'abord recourir à l'un des
procédés traditionnels de règlement des conflits ou, s'il y a lieu, aux mécanismes institués à cet
effet dans les textes constitutifs d'organisations régionales (OTAN, Union Africaine, Ligue
arabe . . . ), habilitées à régler les différends mettant en cause la stabilité régionale. En cas d'échec
de cette première tentative, les Ëtats en litige doivent saisir le Conseil de sécurité qui peut recom
mander le procédé le plus approprié. Il peut se proposer en tant que médiateur ou organiser
lui-même une commission d'enquête. L'avènement des organisations internationales a ainsi
permis d'institutionnaliser les procédures classiques de règlement.
Ces instances collectives offrent des instruments de dialogue aux parties et dans l'hypothèse où le
différend est porté devant une organisation internationale, la pression des Ëtats membres s'exerce
et contraint souvent les antagonistes à justifier leur position et à accepter la discussion, surtout si
les grandes puissances se trouvent directement intéressées à la résolution de ce conflit. Les résul
tats sont plus aléatoires si une grande puissance est impliquée directement dans un conflit.
Si le recours à la force ne peut être évité, les Nations unies ont le pouvoir de rétablir l'ordre
troublé. L'ONU demeure théoriquement l'unique cadre de référence légal et légitime des interven
tions internationales les plus importantes. Hormis l'hypothèse de la légitime défense, elle apparaît
seule compétente pour décréter des actions (sanctions ou interventions) au nom de la justice
internationale.
Le chapitre VIl est en théorie mis en œuvre contre les Ëtats qui ont violé l'article 2 § 4 de la
Charte, transgressant ainsi le principe de l'interdiction de la menace et de l'emploi de la force
armée dans les relations internationales.
Le Conseil de sécurité est seul qualifié pour apprécier la gravité de la situation et déterminer les
mesures adaptées pour y faire face.
Un des problèmes essentiels réside dans la constatation de l'agression, notion non définie par la
Charte. Son contenu a été précisé dans la Résolution 3 3 1 4 du 1 4 décembre 1 974 dont les dispo
sitions laissent, en fin de compte, au Conseil une liberté d'appréciation. L'article 39 de la Charte
l'habilite à décider des moyens de répression, militaires ou non, aptes à empêcher ou à faire
cesser l'agression.
Toutefois la pratique onusienne a dégagé des mesures de police internationale, dans des condi
tions autres que celles prévues par la Charte, pour pallier à la carence du Conseil.
1 États-Unis 27, 1 7 %
2 Japon 1 2 ,53 %
3 Royaume-Uni 8, 1 6 %
4 Allemagne 8,02 %
5 France 7,56 %
6 Italie 5 %
7 Chine 3,94 %
8 Canada 3,21 %
9 Espagne 3,18 %
10 Corée du Sud 2,26 %
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C HAPITRE 9 - Guerre ou paix ? 1 09
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Rich esse ou pa u vreté ?
La richesse mondiale s'accroÎt, la pauvreté aussi. Cette opposition paradoxale
représente non seulement une ligne de fracture essentielle entre le Nord et le
Sud mais aussi un redoutable clivage au sein des sociétés des pays développés.
De la résolution de questions alimentaires, démographiques, économiques et envi
ronnementales dépend le devenir des relations internationales du xxr siècle.
Les inégalités de développement sont incontestablement l'un des plus sérieux facteurs de tension
à l'intérieur de la société internationale. On constate en effet une inégalité croissante de la répar
tition des richesses, l'écart de revenu par habitant entre pays industrialisés et pays en développe
ment a triplé entre 1 960 et 2000. L'écart de revenus entre les 20 % les plus riches et les 20 %
les plus pauvres de la population mondiale s'est fortement accru en 50 ans (1 960 : de 1 à 30 ;
1 999 : de 1 à 74 ; 201 0 : de 1 à 84). Les 20 % les plus riches se partagent plus de 85 % du PIB
mondial et près de 1 ,3 milliard de personnes (un quart de la population des PED) vit en deçà du
seuil de pauvreté absolue. La pauvreté exprime une situation, celle où un Ëtat est dans l'incapacité
d'assurer le bien-être de ses ressortissants et d 'exercer ses fonctions régaliennes. La définition de la
pauvreté est différente selon les hémisphères. Dans les pays du Sud, les organisations financières
internationales, notamment la Banque Mondiale, considèrent comme pauvres les populations
dont les ressources n'atteignent pas 1 ,2 5 dollar par jour quoique depuis peu cette institution
inclue dans ses statistiques le chiffre de deux dollars (soit 2,6 milliards d'êtres humains).
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112 L'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
Dans les pays du Nord, la pauvreté ne se définit pas de manière absolue mais relative, elle touche
toute personne dont les ressources sont inférieures de 60 % au revenu médian (en France,
964 euros par mois en 201 1 ) .
Les classements nationaux des PED sont souvent moins rigoureux que celui basé sur le standard
international d'un de 1 ,2 5 dollar. La Chine, par exemple, reconnaît deux fois et demi moins de
pauvres et l'Inde deux fois moins que les statistiques internationales. Si la pauvreté reste très majo
ritairement celle du Sud, ce dernier n'en a plus le monopole (nouvelle pauvreté dans les pays
industrialisés, en Russie, dans certaines anciennes républiques soviétiques, en Europe orientale et
au Moyen-Orient). Il faut noter que ces inégalités évoluent de façon contradictoire. D'un côté, les
pays émergents rattrapent les pays riches (convergence) mais de l'autre, certaines régions du
monde, l'Afrique ou l'Amérique latine, restent en retrait (divergence).
Un autre phénomène est constatable : les inégalités croissent fortement au sein même des pays
émergents. Si les plus pauvres profitent de cette nouvelle croissance, le bénéfice est moindre que
dans les années 1 980 (Rapport Banque mondiale 2 0 1 0). Treize ans après l'adoption en 2000 des
Objectifs pour le développement du millénaire (ODM), dont l'un vise à diviser par deux la pauvreté
mondiale soit 920 millions de pauvres, d'ici à 201 5, le pari semble gagné en 201 2 sauf dans
certains pays africains, certaines régions de l'Europe orientale et d'Asie orientale, à condition que
les taux de croissance constatés depuis 2004 perdurent et que l'aide au développement atteigne
les 1 00 milliards de dollars par an.
Les facteurs démographique et économique expliquent, en partie, le phénomène.
de 40 % du prix des céréales due à la faiblesse des stocks mondiaux. Malgré une récolte
2008-2009 abondante et une baisse temporaire des prix, le véritable problème est celui des
revenus et de l'accès des plus pauvres à la production.
La crise financière de 2008 a amplifié ce problème car pour assurer la sécurité alimentaire
mondiale d'une population qui croît, il faut investir. Or les fonds publics risquent de faire défaut
pour financer l'aide alimentaire. Selon le Programme alimentaire mondial (PAM), l'aide internatio
nale a atteint en 2008 son plus bas niveau depuis quarante ans. Si cette situation perdurait, les
conséquences seraient alors dramatiques dans les PED où la réduction du revenu des populations
les plus pauvres pourrait s'élever en moyenne à plus de 6 % . Selon la FAO, 22 pays sont particu
lièrement vulnérables à la flambée des prix en raison de sous-alimentation chronique et d'une
forte dépendance vis-à-vis des importations de céréales et de produits pétroliers. Dans des pays
comme le Nicaragua, « une augmentation de 40 % du prix des céréales pourrait suffire à faire
tomber 2 % supplémentaires de la population dans une situation d'extrême pauvreté » . La crise
actuelle pourrait conduire plus de 1 00 millions de personnes nouvelles dans l'extrême pauvreté.
De nombreux pays pauvres sont frappés de plein fouet par l'augmentation des prix sur des
produits agricoles sur les marchés internationaux, souvent génératrice d'émeutes de la faim et la
facture des importations alimentaires mondiales avoisinait les 1 000 milliards de dollars en 201 O.
En effet, les ménages les plus pauvres dans les pays en développement dépensent 60 à 80 % de
leur revenu en nourriture. Lorsque les prix s'envolent, ils doivent dépenser encore plus de leur
revenu, déjà faible pour se nourrir. Ainsi, il leur reste très peu pour acheter d'autres biens néces
saires comme les vêtements, le loyer, les médicaments, les fournitures scolaires et au fur et à
mesure, ils commencent à limiter ces dépenses.
Les experts de l'ONU renouvellent leur appel contre une croissance démographique anarchique
qui entraverait le développement économique et déséquilibrerait davantage les conditions climati
ques et l'écosystème. Les conditions de vie et de travail s'en trouveraient dégradées. 700 millions
d'adolescents sont arrivés sur le marché du travail en 201 0 ; cette arrivée massive impliquera des
efforts considérables dans les domaines des infrastructures, de l 'emploi, de l 'éducation et de la
santé. Or le choix de stratégies économiques orientées vers le marché, le libre-échange et le
désengagement de I'Ëtat aboutit à une réduction d rastique des dépenses publiques peu propice
au développement humain.
(1 1 9,7 pour la seule C hine). La CNUCED établit le volume 201 2 à 1 3 1 0 milliards de dollars, les
flux devant avoisiner les 1 400 milliards en 201 3 et 1 600 milliards en 2 0 1 4 .
En raison des difficultés rencontrées par les PED, le poids d e la dette publique extérieure a
quadruplé depuis 1 980 ; il atteint près de 1 650 mill iards de dollars en 20 1 0 et obère les chances
d'un décollage économique. Les politiques de rééchelonnement de la dette sont généralement
inutiles et les pays créanciers privilégient, pour les 41 Ëtats les plus pauvres de la planète, une
annulation de leur dette. Celle-ci représente 250 milliards de dollars, soit à peine 0,6 % du PIB
mondial (plus de 60 000 milliards de dollars).
Le G 7 a décidé, lors du sommet de Cologne en juin 1 999, d'annuler une partie de la dette à
hauteur de 70 milliards dans le cadre de l'initiative Pays pauvres très endettés (PTIE) dont les
critères d'application ont été assouplis. Cette initiative, étalée sur dix ans, est insuffisante (2,8 %
de la dette totale des PED) mais néanmoins nécessaire pour éviter que les 36 pays éligibles ne
deviennent des « entités chaotiques ingouvernables », rongées par la violence. 30 Ëtats dont 23
en Afrique ont bénéficié de 58 milliards de dollars d'allégement au titre de l'initiative PTIE et de
l'Initiative de l'allégement de la dette multilatérale (IADM). Ces initiatives se poursuivent toujours
mais l 'évaluation faite par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU est très critique : peu de
progrès accomplis et plusieurs pays qui en ont bénéficié sont proches de la cessation de paiement
(Résolutions des 5 et 1 8 juillet 201 2). Au-delà des chiffres, le FMI et la Banque mondiale se sont
engagés en septembre 1 999, lors de leurs assemblées annuelles, à faire de la lutte contre la
pauvreté une priorité, réaffirmée lors des Sommets du G 8 depuis celui d'Ëvian (2003). Encore
faut-il que l'allégement de la dette ne se fasse pas aux dépens de l'aide nouvelle. En effet
plusieurs économies industrielles sont dans un processus de consolidation budgétaire et de réduc
tion des dépenses publiques, notamment des crédits affectés à l'aide au développement. Les pays
occidentaux rencontrent des difficultés croissantes pour tenir leurs promesses d'aide. Par un effet
de résorption, la part des effacements de dettes accordées aux pays africains est désormais réduite
au sein du montant global de l'aide et nécessite de trouver de nouvelles liquidités. Selon une
étude de la Banque mondiale de juin 2007, « les chiffres disponibles jusqu'à maintenant montrent
que, à part la réduction de la dette, les pays africains n 'ont pas engrangé les résultats des
promesses faites lors des sommets des G 8. . . » .
Le G 8
Le Groupe des Huit (G 8) est un forum de discussion, qui vise à permettre aux dirigeants des
huit nations les plus industrialisées du monde de trouver un terrain d'entente sur des ques
tions essentielles ainsi que des solutions à des enjeux mondiaux. Au fil des ans, le sommet a
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1 16 L'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
évolué pour prendre la forme d'une réunion annuelle, au cours de laquelle les dirigeants se
penchent sur des thématiques reliées au développement international, à la santé, à la paix et
à la sécurité.
Le G 8 est composé de l'Allemagne, du Canada, des Ëtats-Unis, de la France, de l'Italie, du
Japon, du Royaume-Uni et de la Russie. Même si les dirigeants de ces pays entretiennent des
rapports réguliers, ils se réunissent officiellement une fois par an dans le cadre du G 8.
Le G 8 était à l'origine un instrument ancré dans la politique économique, dont la création
découle de réunions régulières entre Valéry Giscard D'Estaing et Helmut Schmidt, alors respec
tivement ministres des Finances de la France et de l'Allemagne. Ils ont par la suite accédé au
pouvoir dans leur pays respectif et, au moment où la crise pétrolière du milieu des années
1 970 affaiblissait les grandes économies mondiales, le président français Giscard D'Estaing a
invité les dirigeants de l 'Allemagne, des Ëtats-Unis, de l'Italie, du Japon et du Royaume-Uni
de se réunir en 1 975 pour trouver une solution à cette crise.
Le Canada s'est joint au groupe lors du Sommet de 1 976, que les Ëtats-Unis ont tenu à Porto
Rico. La Communauté européenne, maintenant appelée Union européenne, a reçu le statut
d'observateur l'année suivante, au Sommet de Londres. La Russie est devenue membre à
part entière du G 8 en 1 998.
Les dix derniers sommets ont eu lieu à Évian (2003), Sea Island (2004), Gleneagles
(2005), Saint Petersbourg (2006), Heiligendamm (2007), Hokkaido (2008), L 'Aquila
(2009), Muskoka (2010), Deauville (201 1) et Camp David (États-Unis, 2012).
Les Ëtats membres assument à tour de rôle la présidence annuelle du G 8, dans l 'ordre
suivant : France, Ëtats-Unis, Royaume-Uni, Russie, Allemagne, Japon, Italie et Canada. Bien
que ne faisant pas partie de ce roulement, l'Union européenne participe également au G 8,
où elle est représentée par le Président du Conseil européen et le Président de la Commission
européenne.
Le pays qui exerce la présidence du G 8 (le Royaume-Uni en 201 3) accueille et organise
le sommet et un certain nombre de réunions ministérielles préparatoires. Il doit également
s'exprimer au nom du G 8 et engager le dialogue avec les pays qui ne sont pas membres du
G 8, les organisations non gouvernementales et les organisations internationales.
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C HAPITRE 1 0 - Richesse ou pauvreté ? 117
Créé en 1 999 à l'issue de la crise financière asiatique, le G 20 avait comme objectif de réunir les
ministres des Finances et les gouverneurs des banques centrales une fois par année, habituelle
ment à la fin de l'automne, afin de discuter de questions économiques internationales.
Depuis le début de la crise économique mondiale en 2008, le G 20 est devenu le principal forum
de dirigeants en matière de coopération économique internationale. Les réunions annuelles des
ministres des Finances et des gouverneurs de banques centrales se poursuivent toujours, permet
tant l'avancement des initiatives du G 20 et contribuant aux discussions lors des Sommets des diri
geants. Les objectifs du Groupe étaient d'apporter de la stabilité aux marchés financiers et de
promouvoir la coopération économique.
Le G 20 regroupe des économies développées et émergentes de tous les continents représentant
90 % de la croissance mondiale : 1 9 États dont les huit États du G 8, l'Afrique du Sud, l'Australie,
l'Arabie saoudite, la Turquie, la C h i ne, l'Inde, l'Indonésie, la Corée du Sud, le Brésil, l'Argentine et
le Mexique auxquels s'ajoute l'Union européenne.
Le G 20 est désormais perçu comme l'enceinte la plus efficace pour diriger les efforts mondiaux
visant à contenir la crise et à atténuer ses répercussions. Les dirigeants du G 20 se sont réunis
dans le cadre de cinq sommets distincts tenus à Washington, Londres, Pittsburgh, Toronto et
Séoul pour stabiliser le système financier, pour coordonner les programmes économiques natio
naux afin de guider l'économie mondiale vers la reprise, et pour assurer que les institutions finan
cières internationales reposent sur des bases solides et qu'elles possèdent les ressources néces
saires. A partir de 201 1 (Sommet de Cannes), les Sommets des dirigeants du G 20 se tiennent
une fois l'an (le prochain en Russie puisqu'elle en assure la présidence, à Saint-Pétersbourg en
septembre 201 3).
Le premier Sommet des dirigeants du G 20 s'est tenu à Washington, les 1 4 et 1 5 novembre 2008,
lors duquel les dirigeants ont convenu d'un Plan d'action visant à stabiliser l'économie mondiale et
à prévenir d'autres crises éventuelles. Il a pointé les déficiences des régulateurs nationaux, le
manque de coordination internationale, la mauvaise évaluation des risques ; l'opacité des bilans,
la disparité des normes comptables et l'absence de surveillance sur certains marchés.
Ils ont souligné l'importance cruciale de rejeter le protectionnisme et ont présenté des plans de
relance coordonnés. Dans leur ensemble, ces mesures ont constitué la plus importante initiative
de stimulation budgétaire et monétaire et le plus vaste programme de soutien du secteur financier
des temps modernes.
Les dirigeants se sont réunis une seconde fois à Londres, les 1 er et 2 avril 2009, où ils ont poursuivi
le travail qu'ils avaient commencé à Washington et ont annoncé une contribution sans précédent
de 1 , 1 milliard de $US afin de rétablir le crédit, la croissance et les emplois dans l'économie
mondiale. Cet engagement comprenait un apport de 750 milliards de $ pour le Fonds monétaire
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118 L'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
coopérer. Ifs sont d'abord préoccupés par la politique dans leur pays ». L'impression d'impuissance
vient de l'écart entre les décisions du G . 20 et leur impact concret sur l'économie mondiale.
Parallèlement à cet effort en faveur des pays les plus déshérités, les pays industrialisés soutiennent
des Ëtats pivots, essentiels au maintien d'un équilibre géopolitique régional. Le Brésil et le
Mexique, l'Algérie, I'Ëgypte et le Nigeria ou l 'Indonésie ont bénéficié ainsi d'aides bilatérales ou
multilatérales. Les pays créanciers ou donateurs de même que les organisations internationales
financières (selon les circonstances) se montrent plus attentifs à l'utilisation faite par les pays réci
piendaires de l'aide octroyée. On ne peut occulter ici un facteur réel de pauvreté, la « mauvaise
gouvernance » . Cette expression désigne des principes et des méthodes de gestion et d'adminis
tration décriés, suivis par les gouvernants des PED. L'adoption d'un modèle de développement
inadapté, le niveau élevé des budgets militaires et la corruption endémique de dirigeants politi
ques et économiques (conception patrimoniale du pouvoir) ont souvent empêché le décollage
attendu. Ce n'est pas un hasard si, comme le montre le tableau suivant, les pays perçus comme
les plus corrompus sont souvent les plus pauvres.
1 65 Haïti 19
1 65 Tchad 19
1 65 Burundi 19
1 69 Irak 18
1 70 Turkmenistan 17
1 70 Ouzbekistan 17
1 72 Myanmar (Birmanie) 15
1 73 Soudan 13
1 74 Afghanistan 8
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1 20 L'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
Trois interrogations subsistent et sont lourdes d e conséquences pour l'avenir : quelle est l'effica
cité des aides ? Des échanges internationaux ouverts sont-ils Je meilleur gage de dévelop
pement ? Comment faire pour que la croissance globale n'approfondisse pas les
inégalités ?
Il est vraisemblable que deux forces contraires joueront un rôle déterminant, d'une part les inté
rêts des firmes mondialisées, d'autre part les exigences d'un développement équitable. Leur
conciliation conditionne l 'atténuation des inégalités de richesses préjudiciables à une cohabitation
harmonieuse au sein de la société internationale.
Comme le soulignait déjà, en 1 999, le secrétaire général de la CNUCED, « si les sociétés transna
tionales s'attaquent à ce défi, elles contribueront à un processus de mondialisation moins généra
teur de crise. Sinon le danger existe, non négligeable, que la relation qui s'est établie entre les
grands groupes et les pays d'accueil ne soit soumise à de fortes tensions et ne conduise à une
remise en cause de la libéralisation, facteur essentiel de leur expansion ces dernières décennies ».
Il est urgent de prendre des mesures pour comprendre et protéger l'équilibre écologique. . . afin de
préserver nos objectifs économiques et sociaux et de remplir nos obligations envers les générations
futures » .
La notion de patrimoine commun de l'humanité prend ici tout son sens.
Sa protection nécessite une coopération de l'ensemble des acteurs des relations internationales
(États, OIG, ONG, entreprises et individus).
Le problème de l'environnement excède celui de la pauvreté puisque l 'espèce humaine est
concernée. Les membres du Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat
(GIEC) estiment que le réchauffement climatique rendra plus difficile à atteindre les Objectifs du
Millénaire dans le domaine du développement durable, comme la réduction de la pauvreté. Néan
moins le « défi écologique » fait resurgir l'antagonisme Nord-Sud dans un champ nouveau. Le
clivage pays riches/pays pauvres domine les débats environnementaux. Énoncé et théorisé au
Sommet de Rio en 1 992, le développement durable est « un modèle de développement qui
permet de satisfaire les besoins d'une génération, en commençant par ceux des plus démunis,
sans compromettre la possibilité pour les générations suivantes, de satisfaire les leurs » .
En dépit d e nombreuses acceptions sémantiques, il ne l'est donc réellement que si les générations
futures héritent d'un environnement de qualité au moins égal à celui qu'ont reçu les générations
précédentes. En fait les notions de durabilité et d'équité intergénérationnelle impliquent
d'accorder la même importance à un présent concret et à un avenir abstrait. Or comment concilier
les intérêts de pays aux niveaux de développement très différents ?
Lors des grandes conférences internationales tenues en 2002 (Monterrey et Johannesburg), les
PED ont dénié aux pays développés, grands pollueurs de l'écosystème, le droit de leur imposer
des règles contraignantes qui risqueraient de peser fortement sur une croissance déjà faible ou
inexistante.
Cette « globalisation écologique » , par ailleurs inévitable, est assimilée à une ingérence inaccep
table dans leurs affaires intérieures. Les risques majeurs encourus par l 'environnement passent au
second rang des préoccupations des gouvernants du Sud et même de l'Est ; ils privilégient le déve
loppement économique, seul capable de réduire le phénomène de pauvreté.
Confrontés au remboursement de la dette, certains PED dilapident leur patrimoine forestier et
favorisent ainsi l'érosion des sols et la désertification.
Une très grande partie des pauvres est des ruraux et leur survie dépend de la productivité de sols
qui se dégradent rapidement.
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1 22 L'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
instauration d'une taxe sur le carbone, d'une taxe sur les émissions de gaz du transport interna
tional aérien et maritime ou bien d'une taxe sur les transactions financières).
De même, il ignore l'insuffisance des objectifs de réduction des gaz à effet de serre à l'horizon
2020 pour ne pas dépasser les 2°C et contourne l'épineux sujet du protocole de Kyoto qui
s'achève fin 20 1 2 (la Russie et le Japon ont annoncé leur intention de ne pas le prolonger
au-delà de 201 2). Sans une nouvelle période d'appli cation, le principal instrument de coopération
Nord-Sud, à savoir le mécanisme de développement propre (MDP), serait menacé. Il permet à des
industriels qui investissent dans des technologies réduisant les émissions de gaz à effet de serre
des pays du Sud de recevoir en contrepartie autant de crédits carbone que de tonnes de C02
économisées. 70 % des projets approuvés par les Nations unies concernent la Chine, l'Inde ou le
Brésil et seulement 2 % l'Afrique.
La 1 8e Conférence sur le climat, qui s'est tenue à Doha en décembre 201 2, a hélas abouti à un
accord a minima, en deçà des enjeux et des attentes.
Si le protocole de Kyoto a été prolongé jusqu'en 2020, sa portée est plus limitée puisque le
Canada, le Japon et la Russie ont décidé de se retirer du processus. L'Union européenne, l'Aus
tralie et la dizaine d' États qui ont renouvelé leur engagement ne représentent que 1 5 % des émis
sions de gaz à effet de serre au niveau mondial. C es dernières sont d'environ 50 milliards de
tonnes par an alors que l'objectif adéquat serait de se trouver à 44 milliards de tonnes en 2020.
Cet accord confirme le manque de volonté politique d'agir contre le réchauffement climatique et
laisse dubitatif sur les chances d'aboutir à un accord global en 201 5.
L'économiste britannique Nicolas Stern, dans un rapport publié en novembre 2006, a évalué le
coût économique à 5 500 milliards d'euros si rien n 'est fait pour enrayer l'augmentation des gaz
à effet de serre dans l'atmosphère.
De plus, lors du sommet de la Terre à Johannesburg, les chefs d'État avaient pris l'engagement de
ralentir de manière significative d'ici à 20 1 0 la perte de biodiversité. Le taux actuel d'extinction,
selon les espèces, est 1 00 à 1 000 fois supérieur au taux d'extinction naturel : un mammifère sur
quatre, une espèce d'oiseaux sur huit, un tiers des amphibiens et 70 % des plantes sont
menacés. Une étude publiée en juin 2008 montre que la disparition d'espèces animales et végé
tales coûte chaque année 6 % du produit national brut mondial soit 2 000 milliards d'euros.
Ainsi la situation s'est fortement détériorée depuis 1 960 ; l'activité humaine dégrade les écosys
tèmes, plus vite qu'ils ne peuvent se reconstituer, d'environ 30 % .
La dixième conférence sur l a diversité biologique, qui s'est tenue à Nagoya e n octobre 20 1 0, a
adopté un accord certes limité mais significatif. Il repose sur trois volets :
- l'adoption d'un plan stratégique de vingt objectifs, décliné en plans nationaux, visant à freiner le
rythme de disparition des espèces à l'horizon 2020 ;
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1 24 l'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
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L 'Eta t, acteur
marginalisé ?
L'opposition de la souveraineté étatique et du droit d'ingérence constitue l'un des
enjeux principaux des relations internationales du prochain siècle.
La société internationale devra tenter de concilier le maintien d'un cadre étatique
réaménagé et le respect des droits de l'homme. Si des tentatives de théorisation
sont déjà formulées, les prémices pratiques au Kosovo, au Timor oriental et en
Irak sont peu convaincantes. De plus, de nombreux États, fragilisés par des
menaces multiples, relèvent leur impuissance devant le développement de flux
mafieux. Toutefos i le « dépérissement » de l'État dans la sphère internationale
n 'est pas imminent.
« interventionnistes » seraient renforcés dans leur démarche si l'impératif moral invoqué n'était
pas à géométrie variable, autrement dit si le droit d'ingérence s'appliquait également au Tibet, en
Afrique ou au Caucase. Les « souverainistes » ne pourront pas indéfiniment occulter l'exigence
pressante de protection de populations civiles menacées de massacres, étape obligée vers un
règlement pacifique des différends.
Comme le souligne Mario Bettati, « il est acquis. . . que le droit d'ingérence est aujourd'hui un droit
dont jouissent les Nations unies et qu'elles peuvent déclencher des opérations. Il se trouve qu'elles
ne l'exercent pas toujours » .
Cette sélectivité répond à une stratégie concertée des grandes puissances et principalement des
Ëtats-Unis. Dans son discours d'investiture, prononcé le 20 janvier 1 993, le président Clinton affir
mait que « si nos intérêts vitaux sont menacés ou si la volonté et la conscience de la communauté
internationale sont mises au défi, nous agirons, par des moyens pacifiques si c'est possible, par la
force si c'est nécessaire » . Or la tentation est parfois grande pour les Ëtats-Unis de pratiquer l 'uni
latéralisme et la confusion de leurs intérêts propres avec ceux de la société internationale. Il est
tout autant vrai que, sans la puissance militaire américaine, l 'application des résolutions de l'ONU
serait sans doute plus incertaine qu'elle ne l'est. Comme le souligne Jacques Lévy, « il y a dans les
propos de Bill Clinton une double dimension, celle de la nature du mobile (intérêts ou éthique) et
celle de l'échelle de la réponse (nationale ou mondiale). La conciliation dans les démocraties est
difficile d'autant plus qu'il appartient à des responsables politiques étatiques ou interétatiques,
comme le secrétaire général des Nations unies, de mettre en œuvre des actions et des institutions,
à terme, déstabilisatrices des pouvoirs nationaux » .
débat sur l'universalité des droits de l 'homme a opposé, lors de la seconde conférence mondiale
en 1 993 à Vienne, les pays occidentaux à certains pays, principalement asiatiques. Pour l'Occident,
les droits de l'homme sont indissociables et universels. Inhérents à la personne humaine, leur viola
tion par un Ëtat concerne tous les membres de la société internationale, nonobstant les environne
ments historiques, culturels, ethniques ou religieux.
Pour la plupart des pays asiatiques, bien que le relativisme culturel ne puisse justifier la dilution des
normes et obligations universelles, l'universalisme des droits de l'homme doit être fondé sur une
approche plurielle des modes d'interprétation qui reconnaisse les vertus du pluralisme et de l'alté
rité dans le domaine j u ridique et politique.
La réalisation des principes fixés par la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1 948 et
par les Pactes de 1 966, adoptés sous l'égide des Nations unies, ne peut se faire, à terme, que
par le développement économique générateur de justice sociale et de démocratisation. En effet sa
promotion peut aider dans le temps au respect graduel des droits de l'homme. Les exemples
de Taiwan et de la Corée du Sud sont significatifs car la réussite de l 'économie de marché, dans
ces Ëtats nouvellement industrialisés, a engendré une prise de conscience des gouvernants qui
ont compris que le maintien d'un régime politique autoritaire ne serait plus systématiquement
compatible avec la poursuite de leur développement économique. La proclamation internationale
de droits universels est nécessaire, elle n'est pas suffisante. Il faut prévoir un système effectif de
sanction des atteintes à ces droits reconnus.
d'un contrôle j u ridictionnel des actes étatiques, qui plus est éventuellement sur l'initiative des indi
vidus (Cour européenne des droits de l'homme).
Comme nous l'avons précédemment évoqué, le droit international, pour les crimes les plus graves,
a évolué dans une double direction : d'une part, la définition des infractions internationales,
d'autre part l'établissement d'une justice pénale internationale. Des travaux de codification ont
été entrepris et ont partiellement abouti. Les trois j u ridictions internationales (les deux tribunaux
ad hoc pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda et la Cour pénale internationale) sont habilitées à
juger les quatre mêmes catégories de crimes (paix, guerre, humanité et génocide). Ces crimes
sont spécifiques puisque au-delà de l'atteinte à des individus, ils portent atteinte au concept
même d'humanité. Le génocide se différencie des autres crimes par l'élément intentionnel qui le
caractérise, du point de vue j u ridique, sa spécificité réside bien dans l'intention de détruire un
groupe en tant que tel. Le premier jugement, rendu le 2 septembre 1 998 par le tribunal interna
tional pour le Rwanda dans l 'affaire Akayesu, a confirmé bon nombre d'opinions doctrinales sur la
définition du génocide. Il peut y avoir génocide même si la totalité du groupe visé n'est pas exter
minée ; un accusé peut être condamné pour génocide même s'il n'a pas personnellement tué des
membres du groupe. De plus, les viols et violences sexuelles, particulièrement nombreux au
Rwanda et en Bosnie-Herzégovine, ont été inclus dans la définition alors qu'ils ne figurent pas
dans l'article 2 de la Convention sur le génocide de 1 948.
La responsabilité des gouvernants n'est pas occultée, elle est prévue à l'article 4 de la Convention
et à l'article 24 du statut de la Cour pénale internationale. Le procureur du tribunal pour
l'ex-Yougoslavie, en pleine guerre du Kosovo, n'a pas hésité à inculper, le 22 mai 1 999, le prési
dent yougoslave Milosevic et quatre hauts dirigeants de la Fédération de crimes contre l'humanité.
De même l'arrestation et le transfert à La Haye en 2008 et en 201 1 des anciens responsables
suprêmes des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic et Ratko Mladic, démontrent que l'impunité
totale n'est plus assurée. Plusieurs anciens dirigeants ont été jugés ou sont sur le point de l'être
(le Libérien Charles Taylor, le Tchadien Hissene Habré, certains dirigeants Khmers rouges . . . ). La
mondialisation juridique de la répression des violations les plus graves des droits de l'homme
est-elle enfin traduite dans les faits ?
Il faut être prudent. Si l'évolution actuelle représente un progrès certain (se référer à la Résolution
1 757 du Conseil de Sécurité créant un tribunal international chargé de juger les responsables de
l'assassinat de l'ancien Premier ministre libanais Hariri), il ne faut pas s'attendre à une judiciarisa
tion rapide de la vie internationale. Le combat mené par les États-Unis contre la Cour pénale inter
nationale (signature d'accords bilatéraux excluant toute extradition de citoyens américains) l'abro
gation partielle de la loi belge de compétence universelle ou l'impunité dont bénéficient encore
certains anciens chefs d'État tortionnaires (l'éthiopien Mengistu) illustrent parfaitement cette
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C HAPITRE 1 1 - L' État, acteur marginalisé ? 129
méfiance à l'égard d'une telle justice. L'arrêt de la Cour internationale de justice du 26 février
2007 dans l'affaire Bosnie/Serbie Montenegro ne lève pas réellement cette ambiguïté.
Deux documents informels, les Rapports Axworthy (du nom du ministre canadien des Affaires
étrangères) sur La sécurité humaine : la sécurité des individus dans un monde en mutation, et
Evans/Sahnoun (respectivement australien et algérien) sur Une responsabilité de protéger se
proposent de définir dans les faits (Axworthy) ou dans le droit (Evans/Sahnoun) de nouvelles
normes des relations internationales établissant les droits et les obligations dans le cadre des
actions humanitaires. « La nature changeante des conflits violents et l'intensification de la mondia
lisation, placent de plus en plus l'individu au cœur des affaires mondiales. . . La sécurité de l'individu
devient un nouvel étalon de mesure de la sécurité mondiale et imprime une nouvelle impulsion à
l'action internationale (Axworthy) » .
Ce rapport part de deux constatations paradoxales :
- la mondialisation, si elle procure de nombreux avantages, s'accompagne d'une recrudescence
de crimes avec violence, trafic de stupéfiants, terrorisme, propagation des maladies et dégrada
tion de l'environnement. Ce constat dément le postulat selon lequel la sécurité des individus
découle de la sécurité des États ;
- plus les instruments de guerre tendent à se sophistiquer, plus les principales victimes des conflits
armés sont les populations civiles comme l'a démontré le récent conflit du Kosovo. Ainsi, selon
M . Axworthy, la sécurité nationale ne suffit pas à assurer la sécurité de la population. Une
nouvelle approche s'avère indispensable. Les Traités, interdisant l'emploi des mines antiperson
nelles et créant une Cour pénale internationale, procèdent de cette approche de la sécurité
axée sur les individus qui transcende les frontières des États et ne fait plus de la souveraineté
nationale le pilier des relations internationales. Pour promouvoir la sécurité humaine, il faut
accepter le principe du recours à des mesures coercitives, y compris des interventions militaires
ou l'imposition de sanctions économiques globales à des régimes non démocratiques. Aux
États d'initier le mouvement par l'élaboration de politiques étrangères axées sur les individus et
non plus seulement sur les intérêts nationaux en y associant les organisations multilatérales, les
groupes de la société civile, les ONG et le milieu des affaires.
Le rapporteur préconise même un régime international de sanctions contre les multinationales qui
financent ou tirent profit des conflits. Il reconnaît que la raison d'État et le devoir d'ingérence
humanitaire coexistent difficilement. De plus, les États-Unis, notamment, conservent des
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habitudes de grande puissance, comme le prouve son refus de signer le traité instituant la CPI
ou celui prohibant les essais nucléaires.
Il est également plus facile de proposer une ingérence internationale pour protéger les populations
civiles en Angola, au Kosovo ou en Sierra Leone qu'en Tchétchénie ou au Tibet.
Cependant, plus s'affirme l'urgence de la protection des individus dans les conflits modernes, plus
les notions de souveraineté nationale et d'ingérence humanitaire entrent dans un processus de
tension dynamique. Selon M. Axworthy, pour que la sécurité humaine prime progressivement
sur le droit des Ëtats, il faut réformer étape par étape les institutions internationales, principale
ment le Conseil de sécurité afin qu'il établisse les normes définissant l'espace et les limites du
droit à l'ingérence, autrement dit les hypothèses où la souveraineté perd sa légitimité .
Le Rapport Evans/Sahnoun prône également une forme de droit d'ingérence et propose un droit
d'intervention des Nations unies dans tout Ëtat coupable de crimes graves et répétés contre ses
propres citoyens, dénommé responsabilité de protéger.
Ces documents constituent l'une des premières tentatives pour théoriser la limitation de la souve
raineté nationale au profit du droit d'ingérence h u manitaire. Il faut toutefois faire preuve de vigi
lance lorsque le droit d'ingérence est évoqué pou r justifier une guerre préventive car le droit
humanitaire fournit alors un alibi ambigu à l 'exercice d'une politique de puissance (Irak en 2003
ou Géorgie en 2008).
L'intervention de l'OTAN au Kosovo (mars-juin 1 999), décidée au nom du respect des droits de
l'homme, marque le passage de la théorie à la pratique. Cette organisation de défense collective
est intervenue alors qu'aucun de ses Ëtats membres n'était menacé par la République fédérale
de Yougoslavie. La politique d'épuration ethnique et de transferts forcés de populations a justifié
le bombardement de sites militaires ou d'infrastructures civiles. Le conflit du Kosovo, que certains
commentateurs ont érigé en précédent, suscite quelques interrogations et réflexions. L'inter
vention est-elle désormais la règle ou l'exception ? Il semble que le Kosovo constitue un cas
atypique. L'ingérence, selon Zbigniew Brzezinski, n'est envisageable que dans les régions du
monde où les voisins se sentent concernés. Voulue par les Européens, essentiellement la France,
l'Allemagne et la Grande-Bretagne et exécutée principalement par les Ëtats-Unis, cette guerre
non déclarée visait avant tout à libérer une province à fort particularisme local d'un régime
central oppressif, sans interférences économique ou stratégique. Ce consensus « atlantique » n'a
pas été partagé par tous les Ëtats dans le monde. Aux laudateurs des progrès du droit
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C HAPITRE 1 1 - L' État, acteur marginalisé ? 131
international, côté occidental, correspondent, côté PED, les critiques à l'égard d'une régression
néo-coloniale. Le fait que l'OTAN se soit substituée à l'ONU a été mal perçu par des pays soucieux
de leur souveraineté et peu disposés à abandonner le dogme de la non-intervention dans les
affaires intérieures d'un État. Plusieurs pays d'Asie, multinationaux ou pluriethniques, privilégient
l'unité nationale et s'inquiètent de l'indépendance unilatérale de Kosovo. Le sort réservé aux
minorités ethniques, dans bon nombre de ces États, leur fait craindre la force d'un précédent,
applicable sur le continent asiatique. Cela explique aussi pourquoi la Chine et les ex-républiques
soviétiques d'Asie centrale, réunies au sein du Groupe de Shanghai, ont refusé de soutenir l'inter
vention russe en Géorgie en août 2008.
Les propos du président Clinton pouvaient leur faire redouter le pire : « Que vous viviez en
Afrique, en Europe centrale où n 'importe où ailleurs dans le monde, si quelqu'un veut commettre
des crimes de masse contre une population civile innocente, il doit savoir, que dans la mesure de
nos possibilités, nous l'en empêcherons » .
Le parallèle avec le Timor oriental est édifiant. En septembre 1 999, l e porte-parole d u Départe
ment d'État américain, James Rubin, déclarait que le Timor n'était pas le Kosovo. L'appréciation
des situations est différente alors que, sur le fond, les exactions contre des populations minori
taires sont identiques. Comment expliquer ces différences de perception ? Au Kosovo, l'inter
vention visait, entre autres objectifs, à donner à l'OTAN une légitimité nouvelle « hors zone » (en
dehors de la zone géographique des Alliés) et à la doter d'un nouveau concept stratégique. Consi
dérée déjà comme responsable du conflit bosniaque, la Serbie de M. Milosevic représentait un
facteur de déstabilisation régionale qu'Américains et Européens ne pouvaient plus tolérer. Au
Timor, ces considérations étaient inopérantes puisque la plupart des pays asiatiques étaient réti
cents à l'envoi d'une force multinationale sous commandement australien, l'Asie ne disposant
pas d'une organisation de sécurité collective comparable à l'OTAN. Quel paradoxe ! Au Kosovo,
une organisation régionale intervient sur le territoire d'un État souverain et reconnu comme tel
par la société internationale, sans son autorisation. L'ONU est marginalisée et n'intervient qu'à la
fin du processus par le vote de la Résolution du Conseil de Sécurité 1 244 du 1 0 juin 1 999, fixant
les détails du plan de paix qui maintient la fiction juridique de l'intégrité territoriale serbe.
Au Timor oriental, l'ONU retrouve le rôle principal et conditionne son intervention, par le biais
d'une force multinationale dirigée par l 'Australie, pays ayant reconnu l'annexion de ce territoire
dès 1 978, à l'accord de l'Indonésie alors que cette même organisation mondiale n'a jamais
reconnu l'annexion du Timor-Est. Le paradoxe n'est qu'apparent. Malgré une suspension provi
soire de l 'aide internationale, les considérations géopolitiques et géostratégiques l'ont emporté
au Timor oriental. L'Indonésie est un pays indispensable à la stabilité de la zone sur les plans
démographique, militaire et stratégique (il ne faut pas oublier qu'elle contrôle plusieurs détroits
par lesquels transite une part importante du commerce mondial).
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Cet Ëtat, depuis la guerre froide, est un allié fidèle des Ëtats-Unis qui ne sont pas insensibles aux
risques de désagrégation d'un archipel de 245 millions d'habitants.
En 2003, l'ONU ne donne pas son aval à l 'entrée en guerre contre l'Irak et le précédent moral
invoqué en fin de processus par les Ëtats-Unis, qui se référaient au devoir d'ingérence pour
renverser le régime irakien, peut paraître spécieux. Au-delà de l'aspect j u ridique, à la différence
des exemples kosovar et timorais, l'intervention en I rak comportait des risques réels de déstabilisa
tion aggravés par l'absence d'un projet consensuel de sortie de crise élaboré par la société interna
tionale. Malgré la mise en place d'un gouvernement intérimaire reconnu par l'ONU dans la Réso
lution 1 546 du 8 juin 2004 du Conseil de Sécurité puis la tenue d'élections démocratiques,
l'établissement d'un gouvernement d'unité nationale ainsi que l'exécution de Saddam Hussein et
des principaux dirigeants baasistes de l'ancien régime, les actes de violence n'ont pas cessé
depuis 2005. Un accord a été signé par les Ëtats-Unis et l'Irak en novembre 2008. Il prévoit un
calendrier de retrait des troupes américaines des centres urbains au 30 juin 2009, leur regroupe
ment dans une soixantaine de bases avant un retrait définitif du pays au 3 1 décembre 201 1 .
Sans faire preuve d'un pessimisme déplacé, on ne peut que souscrire au constat établi par Thierry
de Montbrial lorsqu'il affirme que « la conduite de la politique internationale reste dominée par
des calculs d'intérêt où la justice et la morale n 'occupent au mieux qu 'une place restreinte ».
La crise géorgienne de l'été 2008 confirme ce constat. Prenant prétexte d'une opération armée
géorgienne en vue de reconquérir une souveraineté effective sur l'Abkhazie et I'Ossétie du Sud,
maintenues lors de l'indépendance au sein du nouvel État géorgien en 1 99 1 , conformément à la
volonté de Boris Eltsine de le faire dans le cadre des frontières de l'ex-Union soviétique, la Russie a
procédé à une intervention militaire en août 2008. Elle a rejeté toute intervention des Nations
unies et sous couvert de reconnaissance de l'indépendance de ces deux entités territoriales, elle
procède de fait à une annexion de facto de ces régions séparatistes. Cette intervention russe
répond à un double objectif : d'une part conserver le leadership dans le Caucase et ainsi envoyer
un message de fermeté aux anciennes républiques de l'URSS, parfois moins coopératives que par
le passé ; d'autre part, faire payer aux Occidentaux leur soutien à l'indépendance unilatérale du
Kosovo au prix de contorsions j u ridiques quant à la conformité de leur décision avec la résolution
1 244 précitée. Vladimir Poutine l'avait dénoncée non comme un cas sui generis mais comme un
précédent fâcheux pouvant faire j u risprudence. Pour des raisons politiques, l'indépendance du
Kosovo est apparue comme la moins mauvaise des solutions. En réalité le parallèle entre le
Kosovo et la Géorgie met en lumière deux conceptions antagonistes des relations internationales.
D'un côté, la volonté occidentale, parfois hypocrite, de surpasser la contradiction entre le principe
d'intégrité territoriale et le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ; d'un autre côté la volonté
russe de dépasser les antagonismes ethniques par le retour à la politique de puissance basée sur
le fait accompli par l'usage de la force.
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C HAPITRE 1 1 - L' État, acteur marginalisé ? 1 33
Ces limitations se sont multipliées. Les États-nations sont, pour reprendre l'expression de Bùi Xuân
Quang, des États inconfortables, fragilisés par un double phénomène. Par le haut, les échanges de
marchandises, de capitaux et d'informations font fi de la géographie, les unions régionales se
voient reconnaître des compétences exclusives et le droit international commence prudemment à
reconsidérer le dogme de la souveraineté étatique (phénomène d'intégration transnationale). Par
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1 34 l'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
le bas, les revendications de populations se font jour soit pour une plus grande autonomie dans le
cadre d'une large décentralisation, soit pour défendre leur droit à l'autodétermination. De
nombreuses collectivités locales disposent désormais des mêmes instruments que les Ëtats pour
s'informer et emprunter sur les marchés financiers. A l'inverse les recettes fiscales étatiques ont
diminué dans de nombreux pays en raison de la possibilité reconnue aux entreprises de déloca
liser, totalement ou partiellement leurs activités dans des zones à faible imposition (phénomène
de fragmentation subnationale).
De plus, la lutte contre les dérives mafieuses s'annonce délicate. La volonté de captation des
richesses naturelles au profit d'affidés et l'essor de groupes mafieux contrôlant divers trafics confir
ment plus qu'ils ne révèlent la dégradation du système politique successeur d'un Ëtat soviétique. A
un Ëtat tyrannique, podagre et tout-puissant non exempt lui-même, d'impéritie, d'improductivité
et de concussion, s'est substitué un Ëtat apparemment dominateur. Si les événements de Beslan
en septembre 2004 ont favorisé une dérive autocratique (nomination des gouverneurs régionaux,
Parlement et justice aux ordres, opposition muselée), I'Ëtat se montre souvent inefficace et miné
par la corruption.
L'Ëtat dans le monde traverse une crise. La Colombie fournit un autre exemple de société
gangrenée par des groupes criminels. L'Ëtat colombien est confronté à deux phénomènes qui se
renforcent mutuellement, la guérilla communiste et les trafiquants de drogue. En Albanie, le
marxisme-léninisme à peine abandonné, la société a retrouvé sa segmentarisation multiséculaire
en clans nordistes et sudistes.
Dans une vision plus large, il semble que le xxe siècle aura été, à la fois, celui de l'hypertrophie de
I'Ëtat et celui de son « déclin » . Certes il n'y a pas de commune mesure entre les théories de I'Ëtat
modeste et la réalité des Ëtats fantoches que submergent les mafias. De plus, il ne faut pas mettre
sur le même plan la globalisation économique qui transcende les frontières nationales et les souve
rainetés étatiques et la tendance à l 'internationalisation des réseaux criminels et terroristes. Depuis
le Sommet de l'Arche, à Paris, en juillet 1 989, où les chefs d'Ëtat et de gouvernement s'enga
geaient à renforcer la coopération pour lutter contre « l'argent sale » , les mafias du crime n'ont
cessé de prospérer.
Le Crime organisé transnational (COT) représentait en 201 1 , 7 1 3 milliards d'euros issus des trafics
sur les êtres humains, de stupéfiants et d'armes légères et constitue, selon l'ONU, une menace
globale pour la stabilité internationale. Ce chiffre d 'affaires annuel se surajoute à une masse
considérable de capitaux dont l'ampleur semble de nature à déstabiliser le système financier
mondial. Ce phénomène du blanchiment est devenu un enjeu économique qu'il faut maîtriser.
Ces opérations bénéficient des nouvelles technologies (portefeuille et courrier électroniques) qui
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facilitent les transferts anonymes. Chaque marché constitue un instrument potentiel de recyclage,
y compris les acquisitions d'entreprises.
Le FMI constate que le blanchiment de l'argent sale répartit ses capitaux autour du monde, non
pas en fonction d'un taux de rentabilité mais selon la facilité à éviter les contrôles nationaux. Ces
flux financiers, qui entrent et sortent en dehors de toute rationalité économique, déstabilisent de
nombreux États, que ce soient les paradis fiscaux répertoriés ou à l'inverse la Russie ou la
Colombie. Selon l'OCDE, les fonds placés par les entreprises des pays du G 7 dans ces paradis
avoisinent les 370 milliards de dollars (le total des dépôts est, selon des estimations fiables,
d'environ 1 2 000 milliards de dollars). Ces paradis ont en commun une taxation faible ou nulle
pour les non-résidents, un fort secret bancaire et des procédures d'enregistrement souples pour
les sociétés (plus de 400 banques et deux millions de sociétés-écrans). Ils font courir un risque
systémique mondial .
Créé e n 1 989, à l'initiative d u G 7 , le Groupe d'action financière sur l e blanchiment des capitaux
(GAFI) qui réunit les pays de l'OCDE ainsi que la Commission européenne et le Conseil de coopé
ration du Golfe, désire lutter contre « le côté obscur de la mondialisation » . Il a adopté en
juin 2003 une série de quarante mesures permettant d'améliorer son dispositif de surveillance
des circuits d'argent sale et de financement du terrorisme. Les résultats obtenus ne sont pas
toujours probants et en 2 0 1 4, les experts estiment que l'argent sale dépassera en volume ce
qu'était le PNB américain en 1 997 !
Toutefois, la crise de 2008, sans doute une opportunité historique, rend nécessaire une régulation
du système financier international et un accroissement de la transparence. En effet, on doit se
rendre compte que la législation de certains États permet l'inexistence de publication des
comptes, d'obligation de tenir un registre des actionnaires, d'avoir un minimum de capital social,
voire d'en avoir un tout court, d'aviser le registre du commerce sur les modifications des statuts,
etc. La plupart de ces sociétés n'existent pas, sont fictives et servent à contourner une obligation,
voire à commettre une infraction.
Le blanchiment progresse en dépit d'une vigilance internationale accrue. L'OCDE distingue en
effet au sein de sa liste les pays coopératifs parmi lesquels figurent les paradis bancaires euro
péens à fort secret bancaire (Suisse, Luxembourg, Belgique et Autriche) des pays non coopératifs
qui n'étaient plus que deux en 201 0 (Costa Rica et Labuan en Malaisie). Quant aux rares territoires
figurant sur la liste grise, ils ne pèsent que 0,25 % d u marché mondial de la finance off shore. Or,
empêcher les j u ridictions non coopératives de menacer le système financier mondial, tel que prévu
dans les déclarations d'intention adoptées lors des sommets du G 20, reste un objectif difficile à
atteindre en raison du traitement inégalitaire entre États. En dépit de plus de 700 accords bilaté
raux d'échanges d'informations fiscales conclus depuis 2008, des paradis fiscaux perdurent,
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1 36 l'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
parfois au sein même du territoire d'Ëtats membres du G 20 ! L'action conjuguée des différents
acteurs nationaux et internationaux, permettra-t-elle de mettre en place un système d'évaluation
coercitive permanente ? Le doute est permis.
Cependant, la globalisation et l'internationalisation des activités mafieuses forment, l'une et
l'autre, les deux faces d'un monde où les Ëtats peinent à rester les acteurs principaux, sinon exclu
sifs, des relations internationales.
Ainsi à l 'extérieur, le concert des nations est devenu discordant et à l'intérieur des Ëtats, les déci
deurs cherchent le point d'équilibre que Paul Valéry voyait toujours s'échapper en remarquant que
« l'État, trop fort, nous écrase, mais que, trop faible, il nous manque » .
Comme l e fait remarquer justement Joseph S . Nye, l a tendance a u désengagement étatique,
cause et conséquence de la mondialisation, n'est pas, dans l'absolu, irréversible. Comme je l'indi
quais dans la première édition de cet Essentiel en janvier 2000, nul ne pouvait exclure un retour
en grâce de I'Ëtat si la situation mondiale évoluait vers le désordre sous l 'effet de récessions
économiques, d 'actes terroristes, de dégradation accélérée de l'environnement ou de tout autre
événement imprévu. Les attentats du 1 1 septembre 2001 et les crises financières systémiques ont
prouvé que les véritables acteurs publics restent les pouvoirs étatiques nationaux dotés de vraies
monnaies convertibles et d'institutions j u ridiques solides. La gestion de la crise financière et écono
mique actuelle en est l'illustration la plus éclatante. La globalisation n'implique pas le retrait de
I'Ëtat mais réclame son renforcement, voire sa construction. Le Rapport 2005 sur la gouvernance
mondiale de la Banque mondiale apporte un éclairage intéressant. La bonne gouvernance
débouche sur des conditions de vie meilleures et sur une réduction renforcée de la pauvreté.
L'amélioration des droits, l'efficacité de l'Administration, la lutte contre la corruption ou le respect
des contrats donnent des résultats encourageants en six ou huit ans.
La Banque mondiale qui, il y a quinze ans, prônait la libéralisation et les privatisations chères à
Milton Friedman, privilégie la bonne gouvernance. Elle comprend qu'un Ëtat efficace doté d'insti
tutions pérennes et respectées permet à terme de multiplier par deux ou trois le PIB par habitant
d'un PED.
Toutefois si certains pays ont progressé, d'autres stagnent.
La société internationale se caractérisera donc toujours par son extrême complexité et sa fragilité.
Elle conservera, à terme, un caractère hétérogène en raison de la diversité géographique, cultu
relle, religieuse, politique et économique de ses composantes. Comme le souligne l'économiste
Nicolas Baverez, le monde multipolaire en gestation « ne deviendra pas spontanément stable et
pacifique » . A l'aube du troisième millénaire, nous vivons une période intermédiaire où le temps
de l'hégémonie occidentale, et plus particulièrement américaine, s'estompe alors que celui des
pays émergents se profile (52 % de la production industrielle, 80 % des réserves de change et
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mondiales, les conflits armés, la technologie et, de façon décisive - point de vue américain
oblige -, le rôle des États-Unis.
Ces quatre évolutions sont la libération de l'individu (individual empowerment), la démographie, la
dispersion de la puissance (diffusion of power) et les problématiques d'énergie, d'eau et d'alimen
tation. Ces facteurs permettent de dégager trois scénarios pour 2030 : « coopération » (fusion),
« retour en arrière » (reverse engines) et « désintégration » (fragmentation) :
- ce premier scénario se caractérise par un angélisme irréaliste. La coopération verrait l'émer
gence d'un monde fraternel, guidé par la Chine et les États-Unis, dont la collaboration sur le
plan technologique déclencherait un nouvel âge d'or pour les relations internationales. Peu
d'éléments concrets ne semblent actuellement en mesure d'accréditer une telle évolution ;
- le deuxième scénario « retour en arrière » prévoit le retour à un monde « pré-américain » ,
c'est-à-dire à l'instabilité de la première moitié du xxe siècle, et il n'est pas le plus optimiste.
Confrontés à des difficultés budgétaires, les États-Unis n'ont plus la capacité de se projeter sur
la scène internationale. D'abord bien accueilli par les pays émergents, ce retrait est vite source
de déséquilibre. Les tensions ethniques et géopolitiques en Asie et au Moyen-Orient se transfor
ment rapidement en conflits ouverts, dans un contexte de stagnation économique mondiale ;
- le dernier scénario est, de l 'aveu même des auteurs du rapport, le plus probable. Les cartes de la
puissance sont redistribuées par une croissance économique inégalitaire. L'Occident s'affaiblit au
profit de l'Asie, alors que la volatilité des marchés et le changement climatique menacent la
stabilité mondiale. Dans ce monde « désintégré », l'absence généralisée de volonté politique
pour résoudre les problèmes mondiaux marginalise les organisations multilatérales et accentue
le risque de conflits interétatiques. Des confrontations militaires majeures - entre la Chine et
les États-Unis, notamment - demeurent évitables, mais le monde est constamment au bord du
gouffre La conjoncture mondiale des années 201 0 sera tendue et bienheureux les prophètes et
les professionnels de la prévision qui décèlent, de manière péremptoire, les évolutions futures de
la société internationale. S'il est envisageable de subodorer des tendances possibles, il est péril
leux de les croire certaines.
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Atlas
- L 'Atlas des migrations, Hors-série Le Monde-La Vie, 2008.
- L 'Atlas des mondialisations, Hors-série Le Monde-La Vie, 201 O .
- L 'Atlas des religions, Hors-série Le Monde-La Vie, 2 0 1 1 .
- L 'Atlas des civilisations, Hors-série Le Monde-La Vie, 20 1 2 .
- L 'Atlas des utopies, Hors-série Le Monde-La Vie, 2 0 1 2 .
Ouvrages
- ARNAUD (A. J .), Dictionnaire de la globalisation, col l . Droit et société, LGDJ, 201 O .
- DEVIN (G.), Sociologie des relations internationales, coll. Repères, La Découverte, n° 335,
2007 .
- G RAZ (J.-C . ), La gouvernance de la mondialisation, coll. Repères, La Découverte, no 403,
3e édition, 201 O .
- LEFEBVRE (M .), L e jeu du droit et de la puissance, Précis de relations i nternationales, PUF,
3e édition, 2007.
- LE HARDY D E BEAULIEU (L.) (sous la dir.), Relations internationales : grands textes politiques et
juridiques, Anthemis, 201 O .
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1 40 L'ESSENTIEL DES RELATIONS INTERNATIONALES
- ROCHE (J.-J.), Les relations internationales, LGDJ, 6e édition, 20 1 2 ; Théorie des relations
internationales, coll. Clefs, Montchrestien, ge édition, 2 0 1 0 ; Chronologies thématiques des
relations internationales de 1 945 à fin 2006, coll. Carrés rouge, Gualino éditeur, 2007.
- SMOUTS (M.-C l .) (sous la dir.), Les nouvelles relations internationales, pratiques et théories,
Presses de Sciences Po, 1 998.
- SUR (S.), Les relations internationales, Montchrestien, 6e édition, 2 0 1 1 .
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