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Monsieur Éric Dupond-Moretti

Garde des Sceaux


Ministère de la Justice
13 Place Vendôme,
75001 Paris

Paris, le 14 septembre 2022

Monsieur le Ministre,

Les récentes manifestations et marches contre l'insécurité établissent un constat sans appel : la
propagation des actes de délinquance en Guyane est toujours bien réelle. Les Guyanais la vivent et en
sont témoins.

Délinquance organisée, orpaillage illégal, trafic de stupéfiants, et la liste est loin d'être exhaustive,
gangrènent la vie en société guyanaise. C'est donc d'une même voix interloquée que nous,
parlementaires de la Guyane, vous interpellons face à la politique pénale expérimentée depuis peu par le
Parquet de Cayenne, qui implique (entre autres allègements) le classement sans suite des saisies
inférieures à 1,5 kg de cocaïne.

À un modèle économique extrêmement rentable pour les trafiquants viendrait donc se superposer une
quasi impunité pénale ? Face à un faible niveau de vie et à des perspectives d’insertion professionnelle
léthargiques, ce double bénéfice ne manquera pas de déclencher le passage à l’acte d’une proportion
croissante de notre jeune population.

Ces mesures de non-sens, d'une part, ne pourront qu’encourager la banalisation du phénomène de trafic
de stupéfiants sur notre territoire, et ont été prises, d'autre part, sans aucune consultation des élus
locaux. Qu’est-il advenu de la philosophie de la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la
délinquance « qui fait du maire le pivot de la politique de prévention de la délinquance » ? Il est pourtant
question ici de la sécurité du quotidien des Guyanaises et Guyanais. Qui de mieux placé que les maires du
territoire, qui ont la connaissance du terrain, pour lutter efficacement contre ce tsunami de délinquance
qui empoisonne la vie quotidienne de la population ?

Ce n'est pas illustrer le concept de la "République qui protège" que de répondre à une pénurie (dénoncée
de longue date) de moyens humains, matériels et financiers par une politique de désengagement et de
bras ballants.

Contact
06 29 64 30 92 - 01 40 63 48 42
L'impératif de tarissement des trafics de stupéfiants ne peut se faire au détriment d’une politique pénale
de fermeté.

Une lutte efficace ne pourra se mener dans un tel contexte de capacités restreintes de jugement des
juridictions. La palette des réponses à apporter, systémiques car visant aussi bien les effectifs des forces
de l'ordre, la prévention et l'information de la population, l'attractivité des postes de magistrats et la mise
en place de liaisons opérationnelles efficaces, doit faire l'objet d'une réflexion collective et inclusive.

Dans l'attente de la mise en oeuvre d'un tel processus, nous demandons qu'il soit mis un terme à
l'expérimentation menée par le Parquet de Cayenne, et ce, dans les plus brefs délais.

Certains de l'intérêt que vous porterez à cette situation ubuesque, nous vous prions d'agréer, Monsieur le
Ministre, l'expression de notre respectueuse considération.

Copie à :

- Mme Élisabeth BORNE, Première ministre


- M. Gérald DARMANIN, ministre de l'Intérieur
- M. Jean-François CARENCO, ministre délégué chargé des Outre-mer

Contact
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