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Madjid Sali
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Madjid SALI
INTRODUCTION
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freudien. Par ailleurs cette forme est conservée pour introduire in vivo, dans le
vif du texte en quelque sorte, une des questions visées par le propos, celle des
modalités de traitement de l’excitation. La réification tente, pour se défendre de
ses effets, de la fixer.
Afin de remédier à cette tentation toute naturelle, nous envisagerons, les
uns après les autres, les points qui nous semblent les plus engagés dans cette
question. Parmi eux le problème de la représentation apparaît d’emblée central.
C’est donc munis de ces incertitudes que nous arrimerons le fil quelque peu
inconstant de l’excitation à celui moins improbable de la pulsion.
LE MONTAGE PULSIONNEL
Le mot « montage » est, bien que présent chez Freud, assez discutable. Il
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d’une première signification aussi élémentaire soit-elle. Les deux versants sont
de ce fait très immédiatement présents. L’étayage de la pulsion, sa sexuation, se
fait concomitamment sur l’autoconservation attenante au versant somato-
psychique, ses zones érogènes en leur exercice, et sur l’objet représenté au pôle
culturel-relationnel. Les zones érogènes servant de tout premiers lieux de ren-
contre avec l’objet. Aux classiques zones décrites, cutanéo-muqueuses situées
sur le corps propre, s’ajoutent notamment l’ouïe et le regard, lieux de plaisir
intense (on pense là à l’émotion esthétique visuelle et auditive pour exemple)
situés plus sur le versant relationnel de la découverte de l’objet. L’objet ne se
limite pas en effet à la seule fonction d’assurer l’autoconservation même si
celle-ci garde toute son importance. Il tient de là sa place essentielle dans les
deux versants constituants de la pulsion.
Plusieurs remarques sont à faire. En allant de la source au but et à l’objet,
nous nous apercevons que la cohérence est frappante.
Le pôle somatique est ici dédoublé par son pendant le « ça » qui y plonge
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« Nous obtenons ainsi une courte mais intéressante série de rapports : le prin-
cipe du nirvana exprime la tendance de la pulsion de mort, le principe de plaisir
représente la revendication de la libido, et la modification de celui-ci, le prin-
cipe de réalité, représente l’influence du monde extérieur. »
Le principe du plaisir apparaît alors être une forme, majeure certes mais
une forme quand même, d’organisation et de présentation de la pulsion. Il peut
de ce fait, dans des circonstances défavorables notamment en cas de réponse
durablement et sévèrement inadaptée de l’objet, soit rater son organisation,
soit subir une forme de désorganisation rétrograde et se constituer selon des
modalités de liaisons fautives ou subversives. Le but apparaît cliniquement
contraire à la réalisation attendue, voire aux prévisions de la logique de l’auto-
conservation. Celle-ci n’est plus toute-puissante et l’étayage du sexuel sur les
besoins n’est plus tout à fait exclusif. Ainsi Freud est amené à constater, lors de
sa réflexion tout à fait inaugurale à son travail sur « Le problème économique
du masochisme » que « si la douleur et le déplaisir peuvent être en eux-mêmes
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en droit d’exiger d’un tel dispositif qu’il se montre utilisable et expédient pour
d’autres sujets, ne serait-ce que pour voir sous un autre jour ce que nous
connaissons déjà » (p. 283) ; et de nouveau : « C’est seulement par suite du
renouvellement du système qu’il était nécessaire de le répéter » (p. 300). Nous
apprenons alors les effets de l’usage du nouveau système. Il nous montre que la
conflictualité psychique doit s’envisager en tenant compte des deux voies. La
voie régrédiente déjà largement utilisée depuis le modèle du rêve est aussi appli-
cable pour la psychose : « Le moi se crée autocratiquement un nouveau monde,
extérieur et intérieur à la fois » ce dernier étant constitué « par le capital mné-
sique des perceptions antérieures qui comme “monde intérieur” forment une
possession et une partie composante du moi » (p. 284). La voie progrédiente est
mue par la répétition qui ramène à l’actuel du sujet des inscriptions d’expé-
riences : « Dans la psychose le fragment de réalité repoussé revient sans cesse
forcer l’ouverture vers la vie psychique », celles-ci sont autant actuelles, issues
d’une réalité perceptible intolérable, qu’anciennes : « La refonte de la réalité
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Dans l’Égypte ancienne, afin que l’âme du défunt rejoigne son but spiri-
tuel, il était nécessaire de lui indiquer par divers signes à la fois apaisants et
directifs les voies qui y mènent. L’effet traumatique de la mort a désorienté
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n’en est pas moins sûr. L’associativité féconde et son interprétation sont à ce
prix ; celui du présupposé d’un train déjà et durablement sur ses rails.
Mais voilà que la clinique nous montre que, parfois, le discours bégaye,
que le paysage repasse interminablement. L’itération prend la place de la liai-
son associative attendue. Le trajet n’est plus aussi sûr, la pulsion peut dérailler.
Devant ces incertitudes, les liaisons fautives, déviantes se présentent comme
autant de voies de salut pour l’excitation. La liaison perverse, le détournement
de but permettent d’échapper à la déliaison. La peur subvertit les chemins du
désir, la menace du vide dévoie les investissements. La pulsion perd son âme, en
quelque sorte.
C’est dans ces circonstances que la proposition de Freud de « Construction
dans l’analyse » prend toute sa valeur. Il ne peut s’agir dans ces cas difficiles,
mais aussi dans d’autres circonstances moins extrêmes, d’attendre que les asso-
ciations révèlent les liaisons pulsionnelles et permettent l’interprétation. Il
devient nécessaire d’offrir un cadre d’accompagnement qui permette à l’exci-
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