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Université d’Orléans, CoST

Algèbre – Licence 1, Semestre 2


Chapitre 2 : Algèbre linéaire dans Rn et Cn

J.-Ph. Anker & Ph. Grillot

Année académique 2022–2023

2022–2023 Algèbre S2 Université d’Orléans


Algèbre linéaire dans Rn et Cn
Contenu
1. Espaces vectoriels
2. Résolution de systèmes linéaires (rappels)
3. Sous-espace vectoriels
4. Bases
5. Applications linéaires et matrices
6. Déterminants, produit scalaire, produit vectoriel

Application
L’algèbre linéaire est un domaine fondamental des mathématiques. Elle
permet de classifier les solutions des systèmes linéaires, mais aussi
d’équations différentielles. Elle a également de nombreux liens avec la
géométrie (droites, plans, transformations linéaires), la physique,
l’infographie, le calcul scientifique . . .

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1. Espaces vectoriels
1. L’ensemble R des nombres réels peut être représenté par une droite.
C’est un espace de dimension 1.
2. Le plan R2 de dimension 2 est l’ensemble des couples xx12 de


nombres réels.
x1
 
3. L’espace R3 de dimension 3 est l’ensemble des triplets x2
x3
de
nombres réels.

x3 x3
 x1   x1 
x2 x2
x3 x3
x2 x2

x1 x1

Un élément de R3 peut être représenté par un point ou par un vecteur.


!
x1
4. L’espace Rn
de dimension n ∈ N∗ est l’ensemble des n -uplets ..
.
xn
de nombres réels.
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Définition. Somme de vecteurs et multiplication par un scalaire
! !
u1 v1
Soient u = ..
. et v = ..
. deux vecteurs dans Rn .
un vn
!
u1 +v1
. La somme de u et v est le vecteur u + v = ..
.
un +vn
!
λu1
. Soit λ ∈ R, appelé scalaire. Alors λ · u = ..
.
λun
!
0
. Le vecteur nul de Rn est le vecteur 0 = ..
.
0
!
−u1
. L’opposé de u est le vecteur −u = (−1) · u = ..
.
−un

Autres notations : u~, ~0, u, 0, u, 0

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Exemple dans R2 :

u
1
v
1

!
      3  
1 3 4 2 −1
u= ,v = ,u+v = , λ = 23 , λ · u = , −u =
2 1 3 3 −2
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Théorème.
! ! !
u1 v1 w1
Soient u = ..
. ,v= ..
. et w = ..
. des vecteurs dans Rn
un vn wn

et λ, µ ∈ R. Alors
1.
2.
3.
4. u
5.
v
6.
7.
8.

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Définition. Espace vectoriel
Soit K = R ou C. Un K-espace vectoriel est un ensemble non vide E , muni
. d’une loi de composition interne
. d’une loi de composition externe
vérifiant les propriétés suivantes :
1.
2.
3.
4. Pour tout u ∈ E , il existe u 0 ∈ E tel que u + u 0 = 0E .
Cet élément u 0 est noté −u.
5.
6.
7.
8.

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Terminologie :
. Les éléments de E sont appelés vecteurs, ceux de K scalaires.
. 0E est appelé élément neutre ou vecteur nul.
Lorsque le contexte est clair, on le note plus simplement 0.
. u 0 = −u est appelé symétrique ou opposé de u.
. λ · u est aussi noté λu. On parle de multiplication par un scalaire.
Remarque. On montre en TD que 0 · u = 0E et que λ · 0E = 0E .
k
X
. L’associativité permet d’écrire v1 + v2 + · · · + vk = vj .
j=1
Exemples d’espaces vectoriels :
.

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2. Résolution de systèmes linéaires (rappels)
Un système linéaire de n équations à p inconnues s’écrit

 a11 x1 + a12 x2 + · · · + a1p xp = b1

...

an1 x1 + an2 x2 + · · · + anp xp = bn

Le système homogène associé est



 a11 x1 + a12 x2 + · · · + a1p xp = 0

...

an1 x1 + an2 x2 + · · · + anp xp = 0

Théorème.
Un système linéaire a soit aucune solution,
soit une unique solution, soit une infinité de solutions

L’algèbre linéaire fournit des méthodes efficaces pour connaître le nombre


de solutions d’un système linéaire.
Elle permet aussi de décrire toutes les solutions s’il y en a une infinité.
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Définition. Un système linéaire est
. échelonné si le nombre de coefficients nuls commençant une ligne croît
strictement ligne après ligne,
. échelonné réduit si de plus le premier coefficient non nul de chaque
ligne vaut 1, et c’est le seul élément non nul de sa colonne.

Exemple :

 x1 − 2 x2 + 3 x3 + 17 x4 = 4

− x2 + 2 x3 + 13 x4 = 5 système échelonné
 1 5
2 x3 + 2 x4 = 2


 x1
 − 4 x4 = −2
x2 − 3 x4 = 3 système échelonné réduit

x3 + 5 x4 = 4

   −2 + 4 x 
x1 −2 4
4
   
3 + 3 x   3 
 + x4  3 
 x2   4  
Solution : 
 x3  = 
  =
 
 4 − 5 x4  4   −5 
x4 x4 0 1
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Méthode du pivot de Gauss (Gauß)
On introduit 3 opérations sur les lignes :
1. Li λLi : multiplication de la ligne i par λ 6= 0
2. Li Li + λLj : ajout à la ligne i d’un multiple de la ligne j
3. Li ! Lj : permutation (échange) des lignes i et j
Ces opérations ne changent pas les solutions du système
Méthode du pivot de Gauss :
. Obtenir un 1er coefficient de la 1ère ligne non nul (par permutation)
. Diviser la 1ère ligne par le 1er coefficient (premier pivot)
. Annuler les 1ers coefficients nuls sur les lignes suivantes en leur
ajoutant des multiples de la 1ère ligne
. Recommencer avec les lignes suivantes, pour obtenir une forme
échelonnée
. Obtenir une forme échelonnée réduite, en ajoutant des multiples des
lignes pivot aux lignes précédentes
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Méthode du pivot de Gauss (Gauß)


 − x2 + 2x3 + 13x4 = 5
x1 − 2x2 + 3x3 + 17x4 = 4

−x1 + 3x2 − 3x3 − 20x4 = −1

..
.

  −2 + 4 x4 
x1 −2 4
    
3 + 3 x4   3 
 + x4  3 
 x2    
Solution : 
 x3  = 
  =
 
 4 − 5 x4  4   −5 
x4 x4 0 1
´¹¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹¸ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¶ ´¹¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹¸ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹¶
avec x4 ∈ K arbitraire sol. part. sol. gén.
inhomogène homogène

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Systèmes homogènes et inhomogènes
Un système linéaire est homogène si b1 = · · · = bn = 0.
Un tel système admet toujours la solution nulle x1 = · · · = xp = 0.
Théorème.
Tout système homogène avec p > n admet une infinité de solutions.

Théorème.
La solution générale d’un système inhomogène est
la somme d’une solution particulière de ce système
et de la solution générale du système homogène associé.

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3. Sous-espaces vectoriels
Définition. Sous-espace vectoriel
Soit E un K-espace vectoriel. Alors F ⊂ E est un sous-espace vectoriel si
. 0E ∈ F
. Pour tous u, v ∈ F , on a u + v ∈ F
. Pour tout λ ∈ K et tout u ∈ F , on a λ · u ∈ F

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Théorème.
Soient E un K-espace vectoriel et F un sous-espace vectoriel de E . Alors F
est lui-même un espace vectoriel (pour les lois induites par celles de E )

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Théorème.
L’ensemble des solutions d’un système linéaire homogène à n équations et
p inconnues est un sous-espace vectoriel de Rp .

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Définition. Combinaisons linéaires
Soient v1 , . . . , vn des vecteurs d’un espace vectoriel E . Alors tout vecteur
u = λ1 v1 + · · · + λn vn ,
avec λ1 , . . . , λn ∈ K, est appelé combinaison linéaire de v1 , . . . , vn .
Les scalaires λ1 , . . . , λn sont les coefficients de cette combinaison linéaire.

Si n = 1, on se réduit à la notion de colinéarité : u = λ1 v1

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Théorème. Caractérisation d’un sous-espace par combin. linéaires
Soient E un K-espace vectoriel et F une partie non vide de E .
Alors F est un sous-espace vectoriel de E ssi (si et seulement si)
λu + µv ∈ F ∀ u, v ∈ F et ∀ λ, µ ∈ K.

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Proposition. Intersection de deux sous-espaces
Soient F et G deux sous-espaces vectoriels d’un K-espace vectoriel E .
Alors leur intersection F ∩ G est encore un sous-espace vectoriel de E .

Faux pour la réunion

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Définition. Somme de deux sous-espaces
Soient F et G deux sous-espaces vectoriels d’un K-espace vectoriel E .
La somme de F et G est l’ensemble

F + G = u + v u ∈F, v ∈G

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Proposition.
F + G est un sous-espace vectoriel de E .
C’est le plus petit sous-espace vectoriel de E contenant à la fois F et G .

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Définition. Somme directe de deux sous-espaces
Soient F et G deux sous-espaces vectoriels d’un K-espace vectoriel E .
F et G sont supplémentaires dans E si F ∩ G = {0E } et F + G = E .
On note alors E = F ⊕ G et on dit que E est la somme directe de F et G .

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Proposition.
F et G sont supplémentaires dans E ssi tout élément de E s’écrit de
manière unique comme somme d’un élément de F et d’un élément de G .

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Sous-espace engendré Vect(v1 , . . . , vn )
Théorème. Structure de l’ensemble des combinaisons linéaires
Soient v1 , . . . , vn des vecteurs dans un K-espace vectoriel E .
. L’ensemble des combinaisons linéaires de v1 , . . . , vn est un sous-espace
vectoriel de E .
. C’est le plus petit sous-espace vectoriel de E contenant v1 , . . . , vn .

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Sous-espace engendré Vect(v1 , . . . , vn )
Théorème. Structure de l’ensemble des combinaisons linéaires
Soient v1 , . . . , vn des vecteurs dans un K-espace vectoriel E .
. L’ensemble des combinaisons linéaires de v1 , . . . , vn est un sous-espace
vectoriel de E .
. C’est le plus petit sous-espace vectoriel de E contenant v1 , . . . , vn .

Cet ensemble est appelé sous-espace engendré par v1 , . . . , vn .


Il est noté Vect(v1 , . . . , vn ).

u ∈ Vect(v1 , . . . , vn ) ⇐⇒ ∃ λ1 , . . . , λn ∈ K, u = λ1 v1 + · · · + λn vn

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4. Bases et dimension
Soit E un K-espace vectoriel.
Définition. Famille libre
F = {v1 , v2 , . . . , vp } est une famille libre ou linéairement indépendante si
λ1 v1 + λ2 v2 + · · · + λp vp = 0 =⇒ λ1 = 0, λ2 = 0, . . . , λp = 0
Une famille qui n’est pas libre est dite liée ou linéairement dépendante.

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Proposition.
Une famille {v1 , v2 } est liée ⇐⇒ ∃λ ∈ K, v1 = λv2 ou v2 = λv1 .

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Théorème.
Une famille F = {v1 , . . . vp } de p ≥ 2 vecteurs est liée si et seulement si
au moins un des vecteurs de F est combinaison linéaire des autres.

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Proposition.
Soit F = {v1 , . . . vp } une famille de vecteurs de Rn .
Si p > n, alors F est liée.

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Soit E un K-espace vectoriel.
Définition. Famille génératrice
F = {v1 , v2 , . . . , vp } est une famille génératrice de E si
∀v ∈ E , ∃ λ1 , . . . , λ p ∈ K , v = λ1 v1 + λ2 v2 + · · · + λp vp
c-à-d si E = Vect(v1 , v2 , . . . , vp ). On dit alors que F engendre E .

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Proposition.
Soit F = {v1 , v2 , . . . , vp } une famille génératrice de E .
Alors F 0 = {v10 , v20 , . . . , vq0 } est aussi une famille génératrice de E
ssi tout vecteur de F est une combinaison linéaire de vecteurs de F 0 .

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Proposition.
Si la famille F = {v1 , v2 , . . . , vp−1 , vp } engendre E
et l’un des vecteurs, disons vp , est combinaison linéaire des autres,
alors la famille F \ {vp } = {v1 , v2 , . . . , vp−1 } engendre également E .

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Définition. Base
Une famille B = {v1 , v2 , . . . , vn } de vecteurs de E est une base de E
si B est une famille libre et génératrice.

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Théorème.
Une famille B = {v1 , v2 , . . . , vn } de vecteurs de E est une base de E
si et seulement si tout vecteur v ∈ E s’exprime de manière unique
comme combinaison linéaire de v1 , . . . , vn :
∀ v ∈ E , ∃ ! λ1 , . . . , λn ∈ K , v = λ1 v1 + · · · + λn vn

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Théorème A. Théorème d’existence d’une base
Tout espace vect. admettant une famille génératrice finie possède une base.

Théorème B. Théorème de la base incomplète


Supposons que E admette une famille génératrice finie. Alors
(i) toute famille libre peut être complétée en une base,
(ii) de toute famille génératrice, on peut extraire une base.

Théorème C.
Soient G une famille génératrice finie de E et L une famille libre de E .
Alors il existe une famille F ⊂ G telle que L ∪ F soit une base de E .

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Dimension d’un espace vectoriel
Définition. Espace de dimension finie
Un K-espace vectoriel E est dit de dimension finie s’il possède une base
ayant un nombre fini d’éléments.

Théorème. Théorème de la dimension


Toutes les bases d’un espace vectoriel E de dimension finie ont le même
nombre d’éléments.
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Définition. Dimension d’un espace vectoriel
Soit E un espace vectoriel de dimension finie. Le nombre d’éléments de
toute base de E s’appelle la dimension de E , et est notée dim E .

Remarques :
. {0} est un espace vectoriel. Par convention, sa dimension est 0.

. Un espace vectoriel qui n’est pas de dimension finie est dit de


dimension infinie. Exemple : E = {f : R → R}.

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Lemme.
Soit E un espace vectoriel de dimension finie, L une famille libre de E , et
G une famille génératrice de E . Alors Card L ≤ Card G .

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Corollaire.
Soit E un espace vectoriel admettant une base avec n éléments. Alors
1. Toute famille libre de E a au plus n éléments.
2. Toute famille génératrice de E a au moins n éléments.

Le théorème de la dimension suit directement de ce résultat.

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Théorème.
Soient E un K-espace vectoriel de dimension n et F = {v1 , . . . , vn } une
famille de n vecteurs de E . Les assertions suivantes sont équivalentes :
1. F est une base de E ,
2. F est une famille libre de E ,
3. F est une famille génératrice de E .

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Théorème.
Soient E un espace vectoriel de dim. finie et F un sous-espace de E . Alors
1. F est de dimension finie.
2. dim F ≤ dim E .
3. F = E ⇐⇒ dim F = dim E .

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Corollaire.
Soient E un espace vectoriel et F ⊃ G deux sous-espaces de E de
dimensions finies. Alors F = G ⇐⇒ dim F = dim G .

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Théorème. Théorème des quatre dimensions.
Soient E un espace vectoriel de dimension finie et F , G deux sous-espaces
de E . Alors dim(F + G ) = dim F + dim G − dim(F ∩ G ).

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Corollaire.
1. Si E = F ⊕ G , alors dim E = dim F + dim G .
2. Tout sous-espace d’un espace de dim. finie admet un supplémentaire.

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5. Applications linéaires et matrices
Définition. Application linéaire
Soient E et F deux K-espaces vectoriels. Une application f : E → F est
linéaire si
1. f (u + v ) = f (u) + f (v ) pour tous u, v ∈ E ,
2. f (λ · u) = λ · f (u) pour tout u ∈ E et tout λ ∈ K.

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L’ensemble des applications linéaires de E dans F est noté L (E , F ).
Ces applications sont aussi appelées morphismes ou homomorphismes.
. L’application nulle, notée 0L (E ,F ) , est l’application f définie par
f :E →F, f (u) = 0F ∀u ∈ E .
. L’application identité, notée idE , est l’application f définie par
f :E →E, f (u) = u ∀u ∈ E .

Proposition.
L (E , F ) est un sous-espace vectoriel de l’espace vectoriel {f : E → F }.

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Proposition.
Soient E et F deux K-espaces vectoriels. Si f : E → F est une application
linéaire, alors
1. f (0E ) = 0F ,
2. f (−u) = −f (u) pour tout u ∈ E .

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Proposition. Caractérisation d’une application linéaire
Soient E et F deux K-espaces vectoriels et f : E → F . Alors f est linéaire
si et seulement si
f (λu + µv ) = λf (u) + µf (v ) ∀ u, v ∈ E , ∀ λ, µ ∈ K

Plus généralement, si f : E → F est une application linéaire, alors


f (λ1 v1 + · · · + λn vn ) = λ1 f (v1 ) + · · · + λn f (vn )
pour tous v1 , . . . vn ∈ E et tous λ1 , . . . , λn ∈ K.

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Exemple 1: Symétrie centrale
C : E → E , u 7→ −u.

C (u)

La symétrie centrale dans R2 est aussi une rotation de 180◦ , ou demi-tour.

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Exemple 2: Homothétie
Hλ : E → E , u 7→ λu.

Hλ (u)

Cas particuliers : H1 = idE , H0 = 0L (E ,E ) , H−1 = C

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Exemple 3: Réflexion d’axe Oy
   
x −x
Sy : R2 → R2 , 7→ .
y y

Sy (u) u

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Exemple 4: Réflexion d’axe Ox
   
x x
Sx : R2 → R2 , 7→ .
y −y

Sx (u)

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Exemple 5: Réflexion p.r. à la droite y = x
   
x y
Sπ/4 : R2 → R2 , 7→ .
y x

Sπ/4 (u)

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Exemple 6: Rotation d’angle θ
   
x (cos θ)x − (sin θ)y
Rθ : R2 → R2 , 7→ .
y (sin θ)x + (cos θ)y

Rθ (u)

θ u

Cas particuliers : R0 = idR2 , Rπ = C

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Exemple 7: Changement d’échelle verticale
   
x x
Sx,λ : R2 → R2 , 7→ .
y λy

Sx,λ (u)

Cas particuliers : Sx,1 = idR2 , Sx,−1 = Sx

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Exemple 8: Changement d’échelle horizontale
   
x λx
Sy ,λ : R2 → R2 , 7→ .
y y

Sy ,λ (u)
u

Cas particuliers : Sy ,1 = idR2 , Sy ,−1 = Sy

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Exemple 9: Projection sur l’axe Ox
   
x x
Px : R2 → R2 , 7→ .
y 0

Px (u)

Px = Sx,0
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Image, noyau et rang d’une application linéaire
Soient E et F deux K-espaces vectoriels et f : E → F une application
linéaire.
Définition. Image
L’image de f est l’ensemble Im f = f (E ) = {y ∈ F | ∃ x ∈ E , f (x) = y }.

Proposition. Image d’un sous-espace vectoriel


Si E 0 est un sous-espace vectoriel de E , alors
f (E 0 ) = {y ∈ F | ∃ x ∈ E 0 , f (x) = y } est un sous-espace vectoriel de F .
En particulier, Im f = f (E ) est un sous-espace vectoriel de F .

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Définition. Noyau
Le noyau de f est l’ensemble Ker f = f −1 ({0F }) = {x ∈ E | f (x) = 0F }.

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Proposition.
Ker f est un sous-espace vectoriel de E .

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Remarque : f : E → F est surjective si et seulement si Im f = F .
Théorème. Caractérisation de l’injectivité
f : E → F est injective si et seulement si Ker f = {0E }.

Une application linéaire bijective est aussi appelée un isomorphisme.

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Proposition.
Si E est de dimension finie, alors Im f est de dimension finie.

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Définition. Rang d’une application linéaire
Le rang de f est la dimension de Im f . On note rg(f ) = dim Im f .

Proposition.
Si E et F sont de dimension finie, alors rg(f ) ≤ min(dim E , dim F ).

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Théorème. Théorème du rang
Si dim E < ∞, alors dim E = dim Ker f + rg(f ) = dim Ker f + dim Im f .

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Proposition.
Soient E , F , G trois espaces vectoriels, et f : E → F et g : F → G des
appli. linéaires. Alors la composée g ◦ f : E → G est une appli. linéaire.

Proposition.
Soit f : E → F un isomorphisme. Alors f −1 : F → E est un isomorphisme.

Proposition.
Soit f : E → F un isomorphisme d’espaces vectoriels. Si E (resp. F ) est de
dimension finie, alors F (resp. E ) l’est aussi, et dim E = dim F .

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Théorème.
Soit f : E → F une appli. linéaire, avec E et F de dim. finie. Supposons
dim E = dim F . Alors les assertions suivantes sont équivalentes :
1. f est bijective;
2. f est injective;
3. f est surjective.

Algèbre L1S2 2022–2023 66/88


Exemple 1

Sy , 12 ◦ Sy , 12 = Sy2, 1 = Sy , 14
2

Sy−1
,1
= Sy ,2
2
Sy , 12 S y , 12

Sy , 12
Sx, 12 Sx, 12

Sx, 12

Algèbre L1S2 2022–2023 67/88


Exemple 2

Rπ/4

Rπ/4
Sx Sx

Sx ◦ Rπ/4 6= Rπ/4 ◦ Sx

Algèbre L1S2 2022–2023 68/88


Applications linéaires et matrices
Théorème.
Soient E et F deux esp. vect., avec E de dim. finie n, et soit (e1 , . . . , en )
une base de E . Alors pour tout choix (v1 , . . . , vn ) de n vecteurs de F , il
existe une unique appli. linéaire f : E → F t.q. f (ei ) = vi ∀i ∈ {1, . . . , n}.

Algèbre L1S2 2022–2023 69/88


Dans la suite, on supposera que E est un espace de dim. finie p muni d’une
base B = (e1 , . . . , ep ), F est un espace de dim. finie n muni d’une base
B 0 = (f1 , . . . , fn ) et f : E → F est une application linéaire.
Comme B 0 est une base, il existe des scalaires uniques aij tels que
f (ej ) = a1j f1 + · · · + anj fn , j = 1, . . . , p

Définition. Matrice d’une application linéaire


 B et B est 
La matrice de f par rapport aux bases 0
a11 . . . a1p
MatB,B0 (f ) =  ... .. 

. 
an1 . . . anp

Algèbre L1S2 2022–2023 70/88


Soit Mn,p (K) l’ensemble des matrices à n lignes, p colonnes à coefficients
dans K. Mn,p (K) forme un espace vectoriel pour les lois de composition

a11 . . . a1p b11 . . . b1p a11 + b11 . . . a1p + b1p


     
 . ..  +  .. ..  =  .. ..
 ..

.   . .   . . 
an1 . . . anp bn1 . . . bnp an1 + bn1 . . . anp + bnp
a11 . . . a1p λa11 . . . λa1p
   

λ ... ..  =  .. .. 

.   . . 
an1 . . . anp λan1 . . . λanp
La dimension de cet espace vectoriel est np
=⇒ Si E et F sont de dimension finie, dim L (E , F ) = dim E dim F

Algèbre L1S2 2022–2023 71/88


Proposition.
Soient f , g : E → F des appli. linéaires, B base de E , B 0 base de F . Alors
. MatB,B0 (f + g ) = MatB,B0 (f ) + MatB,B0 (g )
. MatB,B0 (λf ) = λ MatB,B0 (f )

Algèbre L1S2 2022–2023 72/88


Soit A ∈ Mn,p (K) d’éléments aij , B ∈ Mp,q (K) d’éléments bjk . Alors on
définit AB ∈ Mn,q (K) comme la matrice C d’éléments
Xp
cik = aij bjk i = 1, . . . , n k = 1, . . . , q
j=1

En général, AB 6= BA : le produit matriciel n’est pas commutatif

Algèbre L1S2 2022–2023 73/88


Proposition.
Soient f : E → F et g : F → G des appli. linéaires, B, B 0 , B 00 des bases
resp. de E , F et G . Alors MatB,B00 (g ◦ f ) = MatB0 ,B00 (g ) MatB,B0 (f ).

Algèbre L1S2 2022–2023 74/88


1 0 ... ... 0

0 1 ... 0
Si dim E = n, MatB,B (idE ) = In =  .. . . . ..  est la matrice identité
. .
0 ... 1 0
0 ... ... 0 1
Si A ∈ Mn,n (K), on définit Ap pour p ∈ N par A0 = In et Ap+1 = Ap A.
Corollaire.
Soient f : E → E une appli. linéaire et B une base de E . Pour tout p ∈ N,
si f p = f ◦ f ◦ · · · ◦ f , on a MatB,B (f p ) = MatB,B (f )p .
´¹¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¸ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹¶
p facteurs

Algèbre L1S2 2022–2023 75/88


Définition. Matrice inverse
Soit A ∈ Mn,n (K), aussi noté Mn (K). On dit que A est inversible s’il existe
une matrice A−1 ∈ Mn (K) telle que AA−1 = A−1 A = In .
Alors A−1 est appelée matrice inverse de A.

Théorème.
Soient E , F des espaces vect. de même dimension finie, f : E → F une
appli. linéaire, B base de E , B 0 base de F , et A = MatB,B0 (f ).
. f est bijective si et seulement si A est inversible.
. Dans ce cas, MatB0 ,B (f −1 ) = A−1 .

Algèbre L1S2 2022–2023 76/88


La matrice inverse peut être calculée par la méthode du pivot de Gauss :
In | A−1
 
A | In −→ . . . −→
où les −→ désignent des opérations élémentaires sur les lignes.

Algèbre L1S2 2022–2023 77/88


6. Déterminants, produits scalaire et vectoriel
Notons A(u, v ) l’aire signée du parallélogramme défini par u, v ∈ R2

v A(u, v ) > 0 A(u, v ) < 0


v
u
u

Propriétés.
v 2u
. A(v , u) = −A(u, v )
u
. A(u, λu) = 0
. A(λu, v ) = λA(u, v )
. A(u1 + u2 , v ) = A(u1 , v ) + A(u2 , v ) v
  v
. e1 = 10 , e2 = 01 ⇒ A(e1 , e2 ) = 1
u1 u2
u1 + u2
Algèbre L1S2 2022–2023 78/88
Bilinéarité : A(λu1 + µu2 , v ) = λA(u1 , v ) + µA(u2 , v )
A(u, λv1 + µv2 ) = λA(u, v1 ) + µA(u, v2 )
Définition. Déterminant d’une matrice 2 × 2
   
u1 v1
Soient u = ,v = ∈ R2 . Alors
u2 v2
 
u1 v1 u1 v 1
= A(u, v )
det =
u2 v2 u2 v 2

A(u, v ) =
=
=
= u1 v1 A(e1 , e1 ) + u1 v2 A(e1 , e2 ) + u2 v1 A(e2 , e1 ) + u2 v2 A(e2 , e2 )
´¹¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¸ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹¶ ´¹¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¸ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹¶ ´¹¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¸ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹¶ ´¹¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¸ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹ ¹¶
=0 =1 =−1 =0
 
u1 v1
Conséquence : det = u1 v2 − u2 v1
u2 v2

Algèbre L1S2 2022–2023 79/88


Théorème 1. Existence et unicité du déterminant
Il existe une unique application det : Mn (K) → K, appelée déterminant, tq
. det est linéaire p.r. à chaque colonne (les autres colonnes étant fixées)
. si A a deux colonnes identiques, alors det A = 0
. det In = 1

Algèbre L1S2 2022–2023 80/88


Proposition.
Notons C1 , . . . , Cn les colonnes de A ∈ Mn (K). Alors si A0 est obtenue par
. Ci ← λCi , λ 6= 0, alors det A0 = λ det A
. Ci ← Ci + λCj , i 6= j, alors det A0 = det A
. Ci ↔ Cj , i 6= j, alors det A0 = − det A

Corollaire.
Si une colonne Ci de A est combinaison linéaire des autres (c-à-d si les
colonnes forment une famille liée), alors det A = 0.

Algèbre L1S2 2022–2023 81/88


Théorème 2. Calcul par récurrence du déterminant
. Si A = (a) ∈ M1 (K), alors det A = a
. Si n ≥ 2 et A ∈ Mn (K) a les coefficients aij , alors pour tout i
det A = (−1)i+1 ai1 det Ai1 + · · · + (−1)i+n ain det Ain
où Aij est obtenue en supprimant la ligne i et la colonne j de A

Algèbre L1S2 2022–2023 82/88


Algèbre L1S2 2022–2023 83/88
Théorème 3.
Pour toutes matrices A, B ∈ Mn (K), on a det(AB) = (det A)(det B)

Corollaire.
Une matrice A ∈ Mn (K) est inversible si et seulement si det A 6= 0.
1
Dans ce cas, on a det(A−1 ) =
det A

Algèbre L1S2 2022–2023 84/88


Théorème 4.
Une matrice carrée A = (aij ) et sa transposée A> = (aji ) ont le même
déterminant.

Algèbre L1S2 2022–2023 85/88


Définition. Produit scalaire
 u1   v1 
Soient u = .. , v = ... ∈ Kn . Leur produit scalaire est défini par
.
un vn
(
u1 v1 + u2 v2 + · · · + un vn si K = R
u·v =
ū1 v1 + ū2 v2 + · · · + ūn vn si K = C (z̄: conjugué complexe de z)

Autres notations : (u, v ), (u|v ), hu, v i, hu|v i

Proposition. Pour tous u, v , w ∈ Kn et λ, µ ∈ K,


. v ·u =u·v (= u · v si K = R)
. u · (λv + µw ) = λ(u · v ) + µ(u · w )
. (λu) · (µv ) = λ̄µ (u · v ) (= λµ (u · v ) si K = R)

Définition. Norme n
√ X
La norme de u ∈ Kn est kuk = u·u où u · u = |ui |2
i=1
Si K = R, par le théorème de Pythagore, kuk est la longueur de u.
Algèbre L1S2 2022–2023 86/88
Proposition. Soient u, v ∈ Kn .
. Inégalité de Cauchy–Schwarz : |u · v | ≤ kukkv k
. Inégalité triangulaire : ku + v k ≤ kuk + kv k

Interprétation géométrique : Théorème du cosinus


e1 = ( 10 ) ⇒ u · e1 = u1 = kuk cos θ1
v
e2 = ( 01 ) ⇒ u · e2 = u2 = kuk sin θ1 θ2 − θ1
u2
u · v = u1 v1 + u2 v2
u
ku k
= kukkv k(cos θ1 cos θ2 + sin θ1 sin θ2 )
e2 θ1
u · v = kukkv k cos(θ2 − θ1 ) θ2
e1 u1

Définition. Base orthonormée (


1 si i = j
Une base B = (e1 , . . . , en ) de Kn est orthonormée si ei · ej =
0 sinon
Dans ce cas, la décomposition de u ∈ Kn
dans la base s’écrit
u = u1 e1 + · · · + un en avec ui = ei · u
Algèbre L1S2 2022–2023 87/88
Définition. Produit vectoriel
 u1   v1 
Soient u = u2
u3
,v = ∈ R3 . Leur produit vectoriel est défini par
v2
v3
u2 v3 − u3 v2

e1 e2 e3
 

u ∧ v =  u3 v1 − u1 v3  “ = ” u1 u2 u3
u1 v2 − u2 v1 v v v
1 2 3

Proposition. Pour tous u, v , w ∈ R3 et λ ∈ R,


. v ∧ u = −u ∧ v
. u ∧ (v + w ) = u ∧ v + u ∧ w u∧v
. λ(u ∧ v ) = (λu) ∧ v = u ∧ (λv )
v
. (u ∧ v ) · u = 0 et (u ∧ v ) · v = 0 θ A
donc u ∧ v est orthogonal à u et v u
. ku ∧ v k = kukkv k sin θ = A

Algèbre L1S2 2022–2023 88/88

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