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Liste des textes présentés à l’oral des EAF

1er objet d’étude : La littérature d’idées du XVIème au XVIIIème siècle


Œuvre intégrale : Les Caractères de La Bruyère
Parcours associé : La comédie sociale

François de LA ROCHEFOUCAULD, « Du rapport des hommes avec les animaux », Maximes,


Réflexions Diverses, XI,16 
Extrait des « Obsèques de la lionne », Jean de La Fontaine, Fables, livre VIII, fable 14
« Acis », La Bruyère, Les Caractères, « De la société et de la conversation », 7, 1688
« Pamphile », Les Caractères, La Bruyère, Chapitre IX, « Des Grands »
« Le roi berger », Les Caractères,  La Bruyère , livre X fragment 29

2ème objet d’étude : La poésie du XIXème au XXIème siècle


Œuvre intégrale : Les Fleurs du Mal de Baudelaire
Parcours associé : La boue et l’or

Extrait de « Une Charogne », Les Fleurs du Mal, section « Spleen et idéal », 1861
« A une passante », Les Fleurs du Mal, section « Tableaux parisiens », 1861
« L’Albatros », Les Fleurs du Mal, section « Spleen et idéal », 1861
« J’aime l’araignée et j’aime l’ortie », Victor Hugo, Les Contemplations, 1856
« Le Crapaud », Tristan Corbière, Les Amours jaunes, 1873

Points de grammaire : interrogation, négation, propositions subordonnées circonstancielles


et phrase complexe.
Du rapport des hommes avec les animaux 
 
Il y a autant de diverses espèces d'hommes qu'il y a de diverses espèces d'animaux, et les hommes
sont, à l'égard des autres hommes, ce que les différentes espèces d'animaux sont entre elles et à
l'égard les unes des autres. Combien y a-t-il d'hommes qui vivent du sang et de la vie des
innocents :  les uns comme des tigres, toujours farouches et  toujours cruels ; d'autres comme des
lions, en gardant quelque apparence de générosité ; d'autres comme des ours, grossiers et avides ;
d'autres comme des loups ravissants et impitoyables ; d'autres comme des renards, qui vivent
d'industrie, et dont le métier est de tromper ! 
 Combien y a-t-il d'hommes qui ont du rapport aux chiens ! Ils détruisent leur espèce ; ils chassent
pour le plaisir de celui qui les nourrit ; les uns suivent toujours leur maître, les autres gardent sa 
maison. Il y a des lévriers d'attache, qui vivent de leur valeur qui se destinent à la guerre, et qui ont
de la noblesse dans leur courage ; il y a des dogues acharnés, qui n'ont de qualité que la fureur ; il y a
des chiens, plus ou moins inutiles, qui aboient souvent, et qui mordent quelquefois ; il y a même des
chiens de jardinier. Il y a des singes et des guenons qui plaisent par leurs manières, qui ont de l'esprit,
et qui font toujours du mal :  il y a des paons qui n'ont que de la beauté, qui déplaisent par leur chant,
et qui détruisent les lieux qu'ils habitent. 
Il y a des oiseaux qui ne sont recommandables que par leur ramage et par leurs couleurs. Combien de
perroquets qui parlent sans cesse, et qui n'entendent jamais ce qu'ils disent ; combien de pies et
de corneilles, qui ne s'apprivoisent que pour dérober ; combien d'oiseaux de proie, qui ne vivent que
de rapines ; combien d'espèces d'animaux paisibles et tranquilles, qui ne servent qu'à nourrir d'autres
animaux ! 

François de LA ROCHEFOUCAULD, « Du rapport des hommes avec les animaux », Maximes, Réflexions


Diverses, XI,16 

Analysez cette phrase complexe.


Les obsèques de la Lionne

(…)
Pour revenir à notre affaire
Le Cerf ne pleura point, comment eût-il pu faire ?
Cette mort le vengeait ; la Reine avait jadis
Etranglé sa femme et son fils.
Bref il ne pleura point. Un flatteur l'alla dire,
Et soutint qu'il l'avait vu rire.
La colère du Roi, comme dit Salomon,
Est terrible, et surtout celle du roi Lion :
Mais ce Cerf n'avait pas accoutumé de lire.
Le Monarque lui dit : Chétif hôte des bois
Tu ris, tu ne suis pas ces gémissantes voix.
Nous n'appliquerons point sur tes membres profanes
Nos sacrés ongles ; venez Loups,
Vengez la Reine, immolez tous
Ce traître à ses augustes mânes.
Le Cerf reprit alors : Sire, le temps de pleurs
Est passé ; la douleur est ici superflue.
Votre digne moitié couchée entre des fleurs,
Tout près d'ici m'est apparue ;
Et je l'ai d'abord reconnue.
Ami, m'a-t-elle dit, garde que ce convoi,
Quand je vais chez les Dieux, ne t'oblige à des larmes.
Aux Champs Elysiens j'ai goûté mille charmes,
Conversant avec ceux qui sont saints comme moi.
Laisse agir quelque temps le désespoir du Roi.
J'y prends plaisir. A peine on eut ouï la chose,
Qu'on se mit à crier : Miracle, apothéose !
Le Cerf eut un présent, bien loin d'être puni.
Amusez les Rois par des songes,
Flattez-les, payez-les d'agréables mensonges,
Quelque indignation dont leur coeur soit rempli,
Ils goberont l'appât, vous serez leur ami.

Jean de La Fontaine, Fables, livre VIII, fable 14

Analysez la phrase interrogative en rouge.


Extrait de Les Caractères, « De la société et de la conversation » La Bruyère
 
Que dites-vous ? Comment ? Je n’y suis pas ; vous plairait-il de
recommencer ? J’y suis encore moins. Je devine enfin : vous voulez, Acis, me
dire qu’il fait froid ; que ne disiez-vous : « Il fait froid » ? Vous voulez
m’apprendre qu’il pleut ou qu’il neige ; dites : « Il pleut, il neige. » Vous me
trouvez bon visage, et vous désirez de m’en féliciter ; dites : « Je vous trouve
bon visage. » — Mais, répondez-vous, cela est bien uni et bien clair ; et
d’ailleurs qui ne pourrait pas en dire autant ? Qu’importe, Acis ? Est-ce un si
grand mal d’être entendu quand on parle, et de parler comme tout le monde ?
Une chose vous manque, Acis, à vous et à vos semblables les diseurs de
Phoebus ; vous ne vous en défiez point, et je vais vous jeter dans l’étonnement :
une chose vous manque, c’est l’esprit. Ce n’est pas tout : il y a en vous une
chose de trop, qui est l’opinion d’en avoir plus que les autres ; voilà la source de
votre pompeux galimatias, de vos phrases embrouillées, et de vos grands mots
qui ne signifient rien. Vous abordez cet homme, où vous entrez dans cette
chambre ; je vous tire par votre habit, et vous dis à l’oreille : « Ne songez point à
avoir de l’esprit, n’en ayez point, c’est votre rôle ; ayez, si vous pouvez, un
langage simple, et tel que l’ont ceux en qui vous ne trouvez aucun esprit
peut-être alors croira-t-on que vous en avez. »

La Bruyère, Les Caractères, « De la société et de la conversation », 7, 1688.

Analysez la négation dans ce passage.


Les Caractères, La Bruyère (1688-1696)
Chapitre IX, « Des Grands », extrait de
« Pamphile »

    Pamphile ne s'entretient pas avec les gens qu'il rencontre dans les salles ou dans les cours :
si l'on en croit sa gravité et l'élévation de sa voix, il les reçoit, leur donne audience, les
congédie ; il a des termes tout à la fois civils et hautains, une honnêteté impérieuse et qu'il
emploie sans discernement ; il a une fausse grandeur qui l'abaisse, et qui embarrasse fort
ceux qui sont ses amis, et qui ne veulent pas le mépriser.

    Un Pamphile est plein de lui-même, ne se perd pas de vue, ne sort point de l'idée de sa
grandeur, de ses alliances, de sa charge, de sa dignité ; il ramasse, pour ainsi dire, toutes ses
pièces, s'en enveloppe pour se faire valoir ; il dit : Mon ordre, mon cordon bleu ; il l'étale ou il
le cache par ostentation. Un Pamphile en un mot veut être grand, il croit l'être ; il ne l'est
pas, il est d'après un grand. Si quelquefois il sourit à un homme du dernier ordre, à un
homme d'esprit, il choisit son temps si juste, qu'il n'est jamais pris sur le fait : aussi la
rougeur lui monterait-elle au visage s'il était malheureusement surpris dans la moindre
familiarité avec quelqu'un qui n'est ni opulent, ni puissant, ni ami d'un ministre, ni son allié,
ni son domestique. Il est sévère et inexorable à qui n'a point encore fait sa fortune. Il vous
aperçoit un jour dans une galerie, et il vous fuit ; et le lendemain, s'il vous trouve en un
endroit moins public, ou s'il est public, en la compagnie d'un grand, il prend courage, il vient
à vous, et il vous dit : Vous ne faisiez pas hier semblant de nous voir. Tantôt il vous quitte
brusquement pour joindre un seigneur ou un premier commis ; et tantôt s'il les trouve avec
vous en conversation, il vous coupe et vous les enlève. Vous l'abordez une autre fois, et il ne
s'arrête pas ; il se fait suivre, vous parle si haut que c'est une scène pour ceux qui passent.
Aussi les Pamphiles sont-ils toujours comme sur un théâtre : gens nourris dans le faux, et qui
ne haïssent rien tant que d'être naturels ; vrais personnages de comédie, des Floridors, des
Mondoris.

Analysez cette proposition subordonnée circonstancielle.


Quand vous voyez quelquefois un nombreux troupeau, qui répandu sur une colline
vers le déclin d'un beau jour, paît tranquillement le thym et le serpolet, ou qui broute dans
une prairie une herbe menue et tendre qui a échappé à la faux du moissonneur, le berger,
soigneux et attentif, est debout auprès de ses brebis; il ne les perd pas de vue, il les suit, il les
conduit, il les change de pâturage; si elles se dispersent, il les rassemble; si un loup avide
paraît, il lâche son chien, qui le met en fuite; il les nourrit, il les défend; l'aurore le trouve
déjà en pleine campagne, d'où il ne se retire qu'avec le soleil: quels soins! quelle vigilance!
quelle servitude! Quelle condition vous paraît la plus délicieuse et la plus libre, ou du berger
ou des brebis ? le troupeau est-il fait pour le berger, ou le berger pour le troupeau ? Image
naïve des peuples et du prince qui les gouverne, s'il est bon prince.
Le faste et le luxe dans un souverain, c'est le berger habillé d'or et de pierreries, la houlette
d'or en ses mains; son chien a un collier d'or, il est attaché avec une laisse d'or et de soie.
Que sert tant d'or à son troupeau ou contre les loups ?

Les Caractères, La Bruyère , livre X fragment 29


Une Charogne

Le soleil rayonnait sur cette pourriture,


Comme afin de la cuire à point,
Et de rendre au centuple à la grande Nature
Tout ce qu'ensemble elle avait joint ;

Et le ciel regardait la carcasse superbe


Comme une fleur s'épanouir.
La puanteur était si forte, que sur l'herbe
Vous crûtes vous évanouir.

Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride,


D'où sortaient de noirs bataillons
De larves, qui coulaient comme un épais liquide
Le long de ces vivants haillons.

Tout cela descendait, montait comme une vague,


Ou s'élançait en pétillant ;
On eût dit que le corps, enflé d'un souffle vague,
Vivait en se multipliant.

Et ce monde rendait une étrange musique,


Comme l'eau courante et le vent,
Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique
Agite et tourne dans son van.

Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve,


Une ébauche lente à venir,
Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève
Seulement par le souvenir.

Extrait de « Une Charogne », section « Spleen et Idéal », Les Fleurs du Mal, Charles Baudelaire, 1861
A une passante

La rue assourdissante autour de moi hurlait.


Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d’une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l’ourlet;

Agile et noble, avec sa jambe de statue.


Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son oeil, ciel livide où germe l’ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.

Un éclair… puis la nuit! – Fugitive beauté


Dont le regard m’a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l’éternité?

Ailleurs, bien loin d’ici! trop tard! jamais peut-être!


Car j’ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
O toi que j’eusse aimée, ô toi qui le savais!

Aune passante, extrait de Les fleurs du Mal, section « Tableaux parisiens », Charles Baudelaire, 1861
L’albatros

Souvent, pour s’amuser, les hommes d’équipage


Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
Qui suivent, indolents compagnons de voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.

A peine les ont-ils déposés sur les planches,


Que ces rois de l’azur, maladroits et honteux,
Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
Comme des avirons traîner à côté d’eux.

Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !


Lui, naguère si beau, qu’il est comique et laid !
L’un agace son bec avec un brûle-gueule,
L’autre mime, en boitant, l’infirme qui volait !

Le Poète est semblable au prince des nuées


Qui hante la tempête et se rit de l’archer ;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.

« L’Albatros », Extrait des Fleurs du Mal, section « Spleen et Idéal » Charles Baudelaire, 1861
Le Crapaud

Un chant dans une nuit sans air…


– La lune plaque en métal clair
Les découpures du vert sombre.

… Un chant ; comme un écho, tout vif


Enterré, là, sous le massif…
– Ça se tait : Viens, c’est là, dans l’ombre…

– Un crapaud ! – Pourquoi cette peur,


Près de moi, ton soldat fidèle !
Vois-le, poète tondu, sans aile,
Rossignol de la boue… – Horreur ! –

… Il chante. – Horreur !! – Horreur pourquoi ?


Vois-tu pas son œil de lumière…
Non : il s’en va, froid, sous sa pierre.
.....................
Bonsoir – ce crapaud-là c’est moi.

              Ce soir, 20 Juillet.

Tristan Corbière - Les Amours jaunes, 1873


J'aime l'araignée et j’aime l’ortie

J'aime l'araignée et j'aime l'ortie,


Parce qu'on les hait ;
Et que rien n'exauce et que tout châtie
Leur morne souhait ;

Parce qu'elles sont maudites, chétives,


Noirs êtres rampants ;
Parce qu'elles sont les tristes captives
De leur guet-apens ;

Parce qu'elles sont prises dans leur oeuvre ;


Ô sort ! fatals noeuds !
Parce que l'ortie est une couleuvre,
L'araignée un gueux;

Parce qu'elles ont l'ombre des abîmes,.


Parce qu'on les fuit,
Parce qu'elles sont toutes deux victimes
De la sombre nuit...

Passants, faites grâce à la plante obscure,


Au pauvre animal.
Plaignez la laideur, plaignez la piqûre,
Oh ! plaignez le mal !

Il n'est rien qui n'ait sa mélancolie ;


Tout veut un baiser.
Dans leur fauve horreur, pour peu qu'on oublie
De les écraser,

Pour peu qu'on leur jette un oeil moins superbe,


Tout bas, loin du jour,
La vilaine bête et la mauvaise herbe
Murmurent : Amour !

« J’aime l’araignée et j’aime l’ortie », Victor Hugo, Les Contemplations, 1856

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