Vous êtes sur la page 1sur 12

Unité 4.

LITTÉRATURE FRANÇAISE DU CLASSICISME


PLAN

1. Le terme classicisme: apparition, étymologie et signification.


2. Le contexte histirique et culturel.
3. L’esthétique du classicisme (Art poétique de Nicolas Boileau):
 L’immitation et la normativité.
 La perfection et l’ordre.
 La clarté et la simplicité.
4. L'honnête homme (Les Caractères de Jean de La Bruyère, Les fables de Jean de La Fontaine).
5. Le conflit tragique (Phèdre de Jean Racine).

TEXTES

NICOLAS BOILEAU (1636–1711), Art poétique, I (1674)

Enfin Malherbe vint, et, le premier en France,


Fit sentir dans les vers une juste cadence,
D'un mot mis en sa place enseigna le pouvoir,
Et réduisit la muse aux règles du devoir.
Par ce sage écrivain la langue réparée
N'offrit plus rien de rude à l'oreille épurée.
Les stances avec grâce apprirent à tomber,
Et le vers sur le vers n'osa plus enjamber.
Tout reconnut ses lois; et ce guide fidèle
Aux auteurs de ce temps sert encor de modèle.
Marchez donc sur ses pas; aimez sa pureté,
Et de son tour heureux imitez la clarté.
Si le sens de vos vers tarde à se faire entendre,
Mon esprit aussitôt commence à se détendre,
Et, de vos vains discours prompt à se détacher,
Ne suit point un auteur qu'il faut toujours chercher.
Il est certains esprits dont les sombres pensées
Sont d'un nuage épais toujours embarrassées;
Le jour de la raison ne le saurait percer.
Avant donc que d'écrire apprenez à penser.
Selon que notre idée est plus ou moins obscure,
L'expression la suit, ou moins nette, ou plus pure.
Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement,
Et les mots pour le dire arrivent aisément.
Surtout qu'en vos écrits la langue révérée
Dans vos plus grands excès vous soit toujours sacrée.
En vain vous me frappez d'un son mélodieux,
Si le terme est impropre, ou le tour vicieux;
Mon esprit n'admet point un pompeux barbarisme,
Ni d'un vers ampoulé l'orgueilleux solécisme.
Sans la langue, en un mot, l'auteur le plus divin
Est toujours, quoi qu'il fasse, un méchantécrivain.
Travaillez à loisir, quelque ordre qui vous presse,
Et ne vous piquez point d'une folle vitesse;
Un style si rapide, et qui court en rimant,
Marque moins trop d'esprit, que peu de jugement.
J'aime mieux un ruisseau qui sur la molle arène
Dans un pré plein de fleurs lentement se promène,
Qu'un torrent débordé qui, d'un cours orageux,
Roule, plein de gravier, sur un terrain fangeux.
Hâtez-vous lentement; et, sans perdre courage,
Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage :
Polissez-le sans cesse et le repolissez;
Ajoutez quelquefois, et souvent effacez.
C'est peu qu'en un ouvrage où les fautes fourmillent,
Des traits d'esprit semés de temps en temps pétillent.
Il faut que chaque chose y soit mise en son lieu;
Que le début, la fin répondent au milieu;
Que d'un art délicat les pièces assorties
N'y forment qu'un seul tout de diverses parties :
Que jamais du sujet le discours s'écartant
N'aille chercher trop loin quelque mot éclatant.
Craignez-vous pour vos vers la censure publique ?
Soyez-vous à vous-même un sévère critique.

JEAN DE LA BRUYÈRE (1645–1696), Les Caractères (1688)

Gnathon ne vit que pour soi, et tous les hommes ensemble sont à son égard comme s'ils n'étaient point. Non content de
remplir à une table la première place, il occupe lui seul celle de deux autres; il oublie que le repas est pour lui et pour toute la
compagnie; il se rend maître du plat, et fait son propre de chaque service : il ne s'attache à aucun des mets, qu'il n'ait achevé
d'essayer de tous; il voudrait pouvoir les savourer tous tout à la fois. Il ne se sert à table que de ses mains; il manie les
viandes, les remanie, démembre, déchire, et en use de manière qu'il faut que les conviés, s'ils veulent manger, mangent ses
restes. Il ne leur épargne aucune de ces malpropretés dégoûtantes, capables d'ôter l'appétit aux plus affamés; le jus et les
sauces lui dégouttent du menton et de la barbe; s'il enlève un ragoût de dessus un plat, il le répand en chemin dans un autre
plat et sur la nappe; on le suit à la trace. [...] Il embarrasse tout le monde, ne se contraint pour personne, ne plaint personne, ne
connaît de maux que les siens, que sa réplétion et sa bile, ne pleure point la mort des autres, n'appréhende que la sienne, qu'il
rachèterait volontiers de l'extinction du genre humain.

*******

Que dites-vous ? Comment ? Je n'y suis pas; vous plairait-il de recommencer? J'y suis encore moins. Je devine enfin :
vous voulez, Acis, me dire qu'il fait froid : que ne disiez-vous : " Il fait froid" ? Vous voulez m'apprendre qu'il pleut ou qu'il
neige; dites : "Il pleut, il neige". Vous me trouvez bon visage, et vous désirez de m'en féliciter; dites : "Je vous trouve bon
visage." - Mais répondez-vous cela est bien uni et bien clair; et d'ailleurs, qui ne pourrait pas en dire autant ?" Qu'importe,
Acis ? Est-ce un si grand mal d'être entendu quand on parle, et de parler comme tout le monde ? Une chose vous manque,
Acis, à vous et à vos semblables, les diseurs de phébus ; vous ne vous en défiez point, et je vais vous jeter dans l'étonnement
: une chose vous manque, c'est l'esprit. Ce n'est pas tout : il y a en vous une chose de trop, qui est l'opinion d'en avoir plus que
les autres; voilà la source de votre pompeux galimatias, de vos phrases embrouillées, et de vos grands mots qui ne signifient
rien. Vous abordez cet homme, ou vous entrez dans cette chambre; je vous tire par votre habit et vous dis à l'oreille : "Ne
songez point à avoir de l'esprit, n'en ayez point, c'est votre rôle; ayez, si vous pouvez, un langage simple, et tel que l'ont ceux
en qui vous ne trouvez aucun esprit : peut-être alors croira-t-on que vous en avez."

*******

Ménalque descend son escalier, ouvre sa porte pour sortir, il la referme: il s'aperçoit qu'il est en bonnet de nuit; et
venant à mieux s'examiner, il se trouve rasé à moitié, il voit que son épée est mise du côté droit, que ses bas sont rabattus sur
ses talons, et que sa chemise est par-dessus ses chausses. [...] On l'a vu une fois heurter du front contre celui d'un aveugle,
s'embarrasser dans ses jambes, et tomber avec lui chacun de son côté à la renverse. Il lui est arrivé plusieurs fois de se trouver
tête pour tête à la rencontre d'un prince et sur son passage, se reconnaître à peine, et n'avoir que le loisir de se coller à un mur
pour lui faire place. Il cherche, il brouille, il crie, il s'échauffe, il appelle ses valets l'un après l'autre: on lui perd tout, on lui
égare tout; il demande ses gants, qu'il a dans ses mains, semblable à cette femme qui prenait le temps de demander son
masque lorsqu'elle l'avait sur son visage. Il entre à l'appartement, et passe sous un lustre où sa perruque s'accroche et demeure
suspendue: tous les courtisans regardent et rient; Ménalque regarde aussi et rit plus haut que les autres, il cherche des yeux
dans toute l'assemblée où est celui qui montre ses oreilles, et à qui il manque une perruque.

JEAN DE LA FONTAINE (1621–1695), Les fables

Le Cerf et la Vigne

Un Cerf, à la faveur d’une vigne fort haute,


Et telle qu’on en voit en de certains climats,
S’étant mis à couvert et sauvé du trépas,
Les veneurs, pour ce coup, croyaient leurs chiens en faute ;
Ils les rappellent donc. Le Cerf, hors de danger,
Broute sa bienfaitrice : ingratitude extrême !
On l’entend, on retourne, on le fait déloger :
Il vient mourir en ce lieu même.
« J’ai mérité, dit-il, ce juste châtiment :
Profitez-en, ingrats. » Il tombe en ce moment.
La meute en fait curée : il lui fut inutile
De pleurer aux veneurs à sa mort arrivés.
Vraie image de ceux qui profanent l’asile
Qui les a conservés.

La Tortue et deux Canards

Une Tortue était, à la tête légère,


Qui, lasse de son trou, voulut voir le pays,
Volontiers on fait cas d'une terre étrangère :
Volontiers gens boiteux haïssent le logis.
Deux Canards à qui la commère
Communiqua ce beau dessein,
Lui dirent qu'ils avaient de quoi la satisfaire :
Voyez-vous ce large chemin ?
Nous vous voiturerons par l'air en Amérique .
Vous verrez mainte république,
Maint royaume, maint peuple ; et vous profiterez
Des différentes mœurs que vous remarquerez.
Ulysse en fit autant. On ne s'attendait guère
De voir Ulysse en cette affaire.
La Tortue écouta la proposition.
Marché fait, les Oiseaux forgent une machine
Pour transporter la pèlerine.
Dans la gueule en travers on lui passe un bâton.
Serrez bien, dirent-ils ; gardez de lâcher prise.
Puis chaque Canard prend ce bâton par un bout.
La Tortue enlevée on s'étonne partout
De voir aller en cette guise
L'animal lent et sa maison,
Justement au milieu de l'un et l'autre Oison.
Miracle, criait-on. Venez voir dans les nues
Passer la Reine des Tortues.
La Reine : vraiment oui ; Je la suis en effet ;
Ne vous en moquez point. Elle eût beaucoup mieux fait
De passer son chemin sans dire aucune chose ;
Car lâchant le bâton en desserrant les dents,
Elle tombe, elle crève aux pieds des regardants.
Son indiscrétion de sa perte fut cause.
Imprudence, babil, et sotte vanité,
Et vaine curiosité,
Ont ensemble étroit parentage.
Ce sont enfants tous d'un lignage.

Le Lièvre et la Tortue

Rien ne sert de courir ; il faut partir à point.


Le Lièvre et la Tortue en sont un témoignage.
Gageons, dit celle-ci, que vous n’atteindrez point
Si tôt que moi ce but. Si tôt ? Êtes-vous sage ?
Repartit l’animal léger.
Ma commère il vous faut purger
Avec quatre grains d’ellébore.
Sage ou non, je parie encore.
Ainsi fut fait : et de tous deux
On mit près du but les enjeux :
Savoir quoi, ce n’est pas l’affaire,
Ni de quel juge l’on convint.
Notre Lièvre n’avait que quatre pas à faire ;
J’entends de ceux qu’il fait lorsque prêt d’être atteint,
Il s’éloigne des chiens, les renvoie aux Calendes,
Et leur fait arpenter les Landes.
Ayant, dis-je, du temps de reste pour brouter,
Pour dormir, et pour écouter
D’où vient le vent ; il laisse la Tortue
Aller son train de Sénateur.
Elle part, elle s’évertue ;
Elle se hâte avec lenteur.
Lui cependant méprise une telle victoire,
Tient la gageure à peu de gloire ;
Croit qu’il y va de son honneur
De partir tard. Il broute, il se repose,
Il s’amuse à toute autre chose
Qu’à la gageure. A la fin quand il vit
Que l’autre touchait presque au bout de la carrière ;
Il partit comme un trait ; mais les élans qu’il fit
Furent vains : la Tortue arriva la première.
Hé bien, lui cria-t-elle, avais-je pas raison ?
De quoi vous sert votre vitesse ?
Moi, l’emporter ! et que serait-ce
Si vous portiez une maison ?

JEAN RACINE (1639–1699), Phèdre


Acte I, scène 3
ŒNONE
Madame, au nom des pleurs que pour vous j’ai versés,
Par vos faibles genoux que je tiens embrassés,
Délivrez mon esprit de ce funeste doute.

PHÈDRE
Tu le veux ? lève-toi.

ŒNONE
Parlez : je vous écoute.

PHÈDRE
Ciel ! que lui vais-je dire ? et par où commencer ?
ŒNONE
Par de vaines frayeurs cessez de m’offenser.

PHÈDRE
Ô haine de Vénus ! Ô fatale colère !
Dans quels égarements l’amour jeta ma mère !

ŒNONE
Oublions-les, madame ; et qu’à tout l’avenir
Un silence éternel cache ce souvenir.

PHÈDRE
Ariane, ma sœur ! de quel amour blessée
Vous mourûtes aux bords où vous fûtes laissée !

ŒNONE
Que faites-vous, madame ? et quel mortel ennui
Contre tout votre sang vous anime aujourd’hui ?

PHÈDRE
Puisque Vénus le veut, de ce sang déplorable
Je péris la dernière et la plus misérable.

ŒNONE
Aimez-vous ?

PHÈDRE
De l’amour j’ai toutes les fureurs.

ŒNONE
Pour qui ?
PHÈDRE
Tu vas ouïr le comble des horreurs…
J’aime… À ce nom fatal, je tremble, je frissonne.
J’aime…

ŒNONE
Qui ?

PHÈDRE
Tu connais ce fils de l’Amazone,
Ce prince si longtemps par moi-même opprimé…

ŒNONE
Hippolyte ? Grands dieux !

PHÈDRE
C’est toi qui l’as nommé !

ŒNONE
Juste ciel ! tout mon sang dans mes veines se glace !
Ô désespoir ! ô crime ! ô déplorable race !
Voyage infortuné ! Rivage malheureux,
Fallait-il approcher de tes bords dangereux !

PHÈDRE
Mon mal vient de plus loin. À peine au fils d’Égée
Sous les lois de l’hymen je m’étais engagée,
Mon repos, mon bonheur semblait être affermi ;
Athènes me montra mon superbe ennemi :
Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ;
Un trouble s’éleva dans mon âme éperdue ;
Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ;
Je sentis tout mon corps et transir et brûler :
Je reconnus Vénus et ses feux redoutables,
D’un sang qu’elle poursuit tourments inévitables !
Par des vœux assidus je crus les détourner :
Je lui bâtis un temple, et pris soin de l’orner ;
De victimes moi-même à toute heure entourée,
Je cherchais dans leurs flancs ma raison égarée :
D’un incurable amour remèdes impuissants !
En vain sur les autels ma main brûlait l’encens !
Quand ma bouche implorait le nom de la déesse,
J’adorais Hippolyte ; et, le voyant sans cesse,
Même au pied des autels que je faisais fumer,
J’offrais tout à ce dieu que je n’osais nommer.
Je l’évitais partout. Ô comble de misère !
Mes yeux le retrouvaient dans les traits de son père.
Contre moi-même enfin j’osai me révolter :
J’excitai mon courage à le persécuter.
Pour bannir l’ennemi dont j’étais idolâtre,
J’affectai les chagrins d’une injuste marâtre ;
Je pressai son exil ; et mes cris éternels
L’arrachèrent du sein et des bras paternels.
Je respirais, ŒNONE ; et, depuis son absence,
Mes jours moins agités coulaient dans l’innocence :
Soumise à mon époux, et cachant mes ennuis,
De son fatal hymen je cultivais les fruits.
Vaines précautions ! Cruelle destinée !
Par mon époux lui-même à Trézène amenée,
J’ai revu l’ennemi que j’avais éloigné :
Ma blessure trop vive aussitôt a saigné.
Ce n’est plus une ardeur dans mes veines cachée :
C’est Vénus tout entière à sa proie attachée.
J’ai conçu pour mon crime une juste terreur ;
J’ai pris la vie en haine, et ma flamme en horreur ;
Je voulais en mourant prendre soin de ma gloire,
Et dérober au jour une flamme si noire :
Je n’ai pu soutenir tes larmes, tes combats :
Je t’ai tout avoué ; je ne m’en repens pas.
Pourvu que, de ma mort respectant les approches,
Tu ne m’affliges plus par d’injustes reproches,
Et que tes vains secours cessent de rappeler
Un reste de chaleur tout prêt à s’exhaler.

 Écrivez et apprenez le sens de ces notions et concepts:

Classicisme___________________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
Rationalisme__________________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
Honnête homme_______________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
Portrait littéraire_______________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
___________________________________________________________________________________________________
Caricature____________________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
Satire________________________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
Fable________________________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
Texte didactique_______________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________________________

Vous aimerez peut-être aussi