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Contrôle ultrasonore au moyen de traducteurs

multi-éléments : design et applications


J. Poguet, L. Chupin, Ph. Gendreu : IMASONIC
S. Mahaut, O. Roy : Commissariat à l’Energie Atomique

Résumé
Dans le cadre d’inspection de pièces à géométrie complexe à l’aide de traducteurs multi-éléments, l’interaction entre
le champ ultrasonore émis et les pièces à contrôler peut générer des signaux demandant une analyse avancée pour
détecter, voire dimensionner les défauts recherchés.
Il est dans ce cadre déterminant de disposer de moyens de simulation permettant de prédire le fonctionnement de la
chaîne d’acquisition en intégrant notamment les performances des traducteurs et l’interaction du faisceau émis avec la
pièce à contrôler.
Il est par ailleurs nécessaire d’utiliser des capteurs générant le moins possible de signaux parasites, dus à des modes
de vibration non souhaités, pouvant interférer avec les signaux utiles.
Cette présentation met en évidence dans un tel contexte les apports de la plate-forme logicielle CIVA, développée par
le CEA, et des traducteurs piezocomposites conçus et fabriqués par Imasonic.
Introduction
Les performances croissantes des systèmes de contrôle par ultrasons, incluant notamment des capteurs multi éléments,
des électroniques de pilotage asservies à des mécaniques de déplacement, et des unités de traitement de l’information
acquise, permettent d’accéder à l’inspection de nouvelles pièces, à la diminution des zones non contrôlées ou à une
réduction du temps de contrôle nécessaire. On peut citer à titre d’exemple le contrôle de rotor et de pieds d’ailettes
(1), le contrôle de piquage ou encore le contrôle d’arbres.
Pour la mise au point de tels systèmes de contrôle, et pour l’exploitation des résultats, il est essentiel de maîtriser le
faisceau ultrasonore émis et les effets de son interaction avec la pièce à contrôler.
Cette maîtrise s’acquiert en partie avec l’aide de logiciels de simulation de faisceau capables de modéliser
l’interaction des capteurs, de l’électronique de pilotage (lois de retard) et de la pièce à contrôler (géométrie, matériau,
type et position des défauts).
Elle nécessite également l’utilisation de traducteurs réduisant le plus possible les modes de vibrations parasites.
Apport de la simulation ultrasonore (CEA)
Le CEA a développé des outils de simulation ultrasonore, au sein de la plate-forme logicielle Civa (2), prenant en
compte des configurations de contrôle non destructif réalistes, représentatifs des besoins industriels. Ces outils sont
utilisés dans une démarche de définition et/ou d’optimisation d’une méthode de contrôle : une configuration
d’inspection appropriée (type de capteur, technique d’inspection, influence des paramètres), en fonction des
performances requises, peut ainsi être entièrement simulée et donner des résultats quantitatifs sur sa capacité à
détecter et caractériser les défauts recherchés. Ces outils peuvent aussi être mis à profit pour l’interprétation de
résultats de contrôle existants, ou encore pour la formation d’opérateurs. Enfin, les performances numériques de ces
modèles en termes de précision et de temps d’exécution autorisent un usage intensif de la modélisation pour étudier
l’influence de la variation des différents paramètres du contrôle.
Les deux modèles développés et implantés dans Civa sont Champ-Sons (3) – calcul du champ impulsionnel rayonné
dans une pièce par un traducteur - , et Méphisto (4) – simulation d’une inspection c avec interaction faisceau/défaut -.
Le logiciel Champ-Sons permet d’optimiser et démontrer les performances d’un traducteur, de type immersion ou
contact, plan ou focalisé, monolithique ou multi-éléments, à travers une pièce de géométrie et de structure complexes
-pièce homogène ou hétérogène, isotrope ou anisotrope - . Le champ calculé par ce logiciel peut ainsi servir de
donnée d’entrée au code Méphisto. Ce logiciel prend en compte le déplacement du traducteur, et calcule, pour chaque
position, le signal ultrasonore reçu par le traducteur, résultant de l’interaction entre le faisceau incident et un défaut
(plan, volumique, ou multi-facettes) ou les limites de la pièce. Méphisto prend également en compte les conversions
de mode d’ondes produites par réflexion sur les bords de la pièce ou sur un défaut. Les images ultrasonores simulées,
de type Ascan, Bscan, Cscan, sont directement comparables aux images issues des données d’acquisition.
Dans le cadre de la simulation de techniques multi-éléments, le logiciel Champ-Sons permet d’optimiser le traducteur
(découpe des éléments, fréquence) afin de minimiser le nombre d’éléments du traducteur sans génération de lobes de
réseau, selon la gamme d’angles de réfraction et de taux de focalisation souhaités. La géométrie du traducteur étudiée
peut être une découpe circulaire, linéaire (traducteurs de type « barrette ») ou matricielle (réseau 2D). Le code
Champ-Sons calcule le champ résultant de l’ensemble des éléments, avec application de lois de retards et
d’amplitude. Le stockage des réponses impulsionnelles de chaque élément en tout point de la zone de calcul permet
de calculer le champ pour différentes lois de retards ou d’amplitude, de modifier le signal du traducteur, sans
nécessité de relancer un nouveau calcul (3).
Les bénéfices apportés par les capteurs piezocomposites
Au delà des caractéristiques dimensionnelles (taille, nombre et géométrie des éléments), et des performances
électroacoustiques (fréquence, bande passante) des traducteur , il est parfois nécessaire pour l’interprétation des
résultats de prendre en compte le comportement vibratoire de leur partie active piezoélectrique.
Mode de vibration d’épaisseur et mode de vibration radial
Les capteurs piezoélectriques ultrasonores utilisent généralement une pastille de matériau piezoélectrique
monolithique dont l’épaisseur varie en fonction de la fréquence.
Des électrodes sont déposées de part et d’autres de cette pastille pour la faire vibrer et ainsi émettre des ultrasons. Le
mode de vibration utilisé dans la plupart des cas est le mode d’épaisseur, pour émettre des ondes longitudinales, ou
ondes de compression. Au-delà de ce mode de vibration recherché et piloté, le comportement mécanique des éléments
piezoélectriques monolithiques génère des modes de vibrations radiaux, ou transversaux qui ont pour effet de générer
des signaux ultrasonores parasites qui s’ajoutent au signal recherché.
Les cas les plus défavorables sont les traducteurs dont les dimensions de la partie active sont proches de l’épaisseur
de la pastille. Les fréquences des modes de vibration utiles et parasites ne peuvent alors pas être séparées par filtrage.
C’est par exemple le cas pour des traducteurs mono éléments basse fréquence (inférieure à 500 KHz) ou pour des
éléments de capteurs multi éléments (capteurs phased array).
Réduction des modes de vibration parasites
Ces modes de vibrations parasites perturbent le signal ultrasonore ainsi que le profil du faisceau.
Au-delà de cette perturbation, ils présentent également l’inconvénient majeur de ne pas être pris en compte par la
plupart des logiciels de calcul de champs ultrasonores rayonnés et sont à l’origine d’écarts non prévisibles entre les
résultats de simulation et les résultats expérimentaux.
Imasonic conçoit et fabrique depuis 10 ans des capteurs basés sur la technologie piezocomposite 1-3 (5), schématisée
sur figure 1. De par leur structure composite orientée selon l’axe d’émission des ultrasons, schématisée sur la figure 2,
ces matériaux présentent l’avantage de réduire à un niveau très faible les vibrations parasites :
• La hauteur des bâtonnets de céramique, grande devant leurs dimensions latérales, favorise la vibration selon le
mode d’épaisseur au détriment du mode radial.
• L’isolement des bâtonnets dans un matériau polymère permet de couper la propagation transversale des
vibrations
Réduction du couplage inter éléments
La propagation de vibrations transversales a une autre conséquence dans le cadre de capteurs phased array : lorsqu’un
élément est activé, ces vibrations transmettent à ces voisins une vibration non souhaitée, avec un déphasage non
maîtrisé.
Les concepts de balayage, focalisation et déflexion électroniques (6) sont basés sur l’utilisation de retards
électroniques appliqués à chaque élément du traducteur dans le but de former un faisceau ayant des caractéristiques
souhaitées (distance focale, angle d’inspection, résolution latérale, profondeur de champ…). Il est donc essentiel de
pouvoir piloter individuellement chacun des éléments.
Grâce à la limitation des modes de vibration parasites expliquée précédemment, la structure piezocomposite 1-3 des
capteurs Imasonic (5) permet de réduire le couplage entre les éléments à une valeur généralement inférieure à –40 dB
(voir figure 3), ce qui permet une exploitation optimale de la technologie phased array avec des résultats
expérimentaux proches des simulations.
Exemples d’application

Démonstration des performances d’un traducteur


La figure 4 présente un exemple de visualisation d’une configuration de contrôle, avec un traducteur multi-éléments
contact sur une pièce complexe (raccordement plan / cylindre). Le traducteur, fonctionnant à 3MHz, est un réseau
linéaire de 16 éléments, de distance centre à centre de 1 mm, avec un sabot en plexiglas incliné à 15°. La figure 4.b)
montre les champs rayonnés par le traducteur sur la partie plane pour différentes lois de retards (calculées en ondes
L), à 30, 45 et 60 degrés de réfraction dans l’acier, focalisant à 20 mm de profondeur. Les amplitudes des champs
(normalisés) sont reportées en dB par rapport à l’amplitude obtenue sans loi de retards. Le rapport d’amplitude entre
les fronts L et T diminue lorsque l’angle de réfraction augmente, et l’on observe une perte de sensibilité globale.
Aucun lobe de réseau n’est présent quelle que soit la loi de retards appliquée, ce qui valide la découpe choisie. La
figure 4.c) présente les champs ultrasonores rayonnés sur la partie courbe de la pièce. Les champs sont calculés, d’une
part en prenant en compte la désadaptation du traducteur (présence d’une lame d’eau sous le sabot), d’autre part en
considérant un sabot courbe adapté à la pièce. Dans les deux cas les lois de retards appliquées correspondent à une
focalisation en ondes L45°. On voit que l’on peut compenser les effets de la lame d’eau par retards, même s’il
subsiste une perte de sensibilité.
Vérification des performances d’un traducteur
La figure 5 présente la comparaison des champs ultrasonores simulés et mesurés pour un traducteur multi-éléments
annulaire fonctionnant en immersion (formé de 11 anneaux circulaires, d’ouverture globale 93 mm, fonctionnant à
1MHz). Les relevés de champs et les simulations sont effectués à 20 et 50 mm de profondeur, sur une ligne
perpendiculaire à l’axe du traducteur, qui rayonne un champ focalisé à 50 mm de profondeur dans une pièce d’acier
plane. Les mesures de champ sont réalisées à l’aide d’un capteur électromagnétique (sonde EMAT). Les simulations
sont effectuées en utilisant, pour le signal du traducteur, la forme d’onde mesurée à la focale. L’utilisation d’un signal
expérimental comme forme d’onde de référence permet en effet de prendre en compte les caractéristiques de la chaîne
d’acquisition et la bande passante du récepteur. Les vues expérimentales et simulées montrent un très bon accord, ce
qui permet de valider la découpe du traducteur réalisé et son bon fonctionnement global (absence de diaphonie
acoustique et électrique notamment, qui aurait induit des contributions supplémentaires).
Conclusion
La combinaison des performances de la plate-forme CIVA en ce qui concerne la simulation du faisceau ultrasonore,
et des capteurs Imasonic en ce qui concerne la réduction des modes de vibration parasites, permet la mise au point et
l’exploitation des résultats de nouvelles applications complexes telles que par exemple le contrôle de piquages, le
contrôle de pieds d’ailettes (1), le contrôle de rotors ou le contrôle d’arbres.
CIVA offre déjà en outre la possibilité de comparer les résultats expérimentaux avec les résultats des simulations.
Des voies d’améliorations restent encore possibles pour améliorer la maîtrise d’inspections complexes, en intégrant
par exemple sur les machines électroniques de contrôle les logiciels de simulation et d’exploitation pour un recalage
en temps réel des résultats.
Références
(1) P.Ciorau, J.Poguet, G.Fleury, « Special linear phased array probes used for ultrasonic examination of
complex turbine components », Proc. Of 15th WCNDT (2000)
(2) F. Cartier, R. Raillon, L . Le Ber, A. Lhémery et P. Calmon, « Outils CAO d’imagerie et de simulation pour
l’expertise en contrôle par ultrasons », dans ce volume.
(3) O. Roy, S. Mahaut, M. Serre and A. Lhémery, « Application of ultrasonic beam-forming techniques using a
phased array system to defect characterization », Proc. Of the First Int. Conf. on NDE in relation to
Structural Integrity for Nuclear and Pressurised Components (1998)
(4) L.Le Ber, P. Calmon, E. Abittan, « Contribution de la modélisation ultrasonore au processus de qualification
des méthodes de contrôle », dans ce volume.
(5) J.Poguet, G.Fleury, J.L.Guey, P.Conche, « La technologie piezocomposite : Une approche innovante pour
développer les performances du C.N.D. par ultrasons », dans ce volume
(6) J.Poguet, J.Marguet, F;Pichonnat, L.Chupin, “La technologie Phased array : concepts, capteurs et
applications”, dans ce volume
Figure 1. Représentation schématique de la Figure 2. Limitation des modes de vibration transversaux
structure piezocomposite 1-3 dans la structure piezocomposite 1-3
Vibration pilotée Vibration pilotée

Vibrations parasites importantes Vibrations parasites réduites

Figure 3. Représentation schématique de la réduction du couplage inter éléments dans les matériaux
piezocomposite 1-3 par rapport aux céramiques monolithiques

10 mm Lame d’eau sous le sabot


16 mm
L30°
16 mm

15°
+3 dB L43°
24 mm - 6 dB
T

Rayon 100 mm L45°


Partie plane +1 dB Sabot adapté à la géométrie

L60° L45°
-3 dB T 0 dB

a) b) c)
Figure 4. Modélisation du champ d’un traducteur sur pièce complexe. a) configuration et géométrie du traducteur.
b) Champs rayonnés sur la partie plane. c) Champs rayonnés sur la partie courbe, avec /sans manque de couplage

Champs à 20 mm (champ proche) Champs à 50 mm (profondeur focale)


Mesuré Simulé Mesuré Simulé

11 anneaux
L L
Φ 93 mm
L
6.35 µs

L
5 µs

T T T T
30 mm
60 mm
Figure 5. Champs mesurés et simulés pour un traducteur multi-éléments annulaire focalisant à 50 mm de profondeur

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