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« Confiance et prudence » : la diplomatie chinoise au début

du XXIe siècle
Yang Baoyun
Dans Revue internationale et stratégique 2001/4 (n° 44), pages 99 à 110
Éditions IRIS éditions
ISSN 1287-1672
ISBN 2130518338
DOI 10.3917/ris.044.0099
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La revue internationale et stratégique, n° 44, hiver 2001-2002

« Confiance et prudence » :
la diplomatie chinoise
au début du XXI siècle e

Yang Baoyun*

■ LA REVUE INTERNATIONALE ET STRATÉGIQUE


YANG BAOYUN ■
Alors que nous venons d’entrer dans le XXIe siècle, la Chine tend à occuper une
position de plus en plus remarquable dans les affaires internationales.
Depuis la fin du siècle dernier, la Chine a obtenu d’excellents résultats dans divers
domaines. Elle a tout d’abord su résister avec succès aux effets de la crise financière
asiatique, qui a causé tant de difficultés aux pays de la région, en gardant un taux de
croissance économique relativement élevé. Elle est ensuite sur le point d’entrer dans
l’Organisation mondiale du commerce (OMC)1, et fut retenue par le Comité interna-
tional olympique pour accueillir les Jeux olympiques en 2008. Toutes ces avancées
ont redonné confiance au peuple et au gouvernement chinois dans leurs capacités au
niveau international. Nous avons donc de bonnes raisons de penser que dans les
années à venir la Chine prendra de plus en plus d’initiatives et adoptera une attitude
plus active dans les affaires mondiales et dans ses relations extérieures.
Mais le peuple et le gouvernement chinois ont, dans le même temps, pris clairement
conscience que la Chine reste un pays en voie de développement et une puissance
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régionale qui doit faire face à de nombreux défis et saisir la moindre opportunité. Bei-
jing préfère donc persister dans sa politique, qui consiste à « cacher ses talents et
attendre son heure » ; autrement dit, rester prudent dans les affaires diplomatiques.
Nous pensons également que, dans la situation mondiale actuelle, des facteurs
aussi essentiels que l’établissement d’un nouvel ordre international, la mondialisation
et ses effets sans précédent sur les relations internationales, la stabilité et la sécurité
de la Chine elle-même, constituent le noyau de la stratégie diplomatique du gouver-
nement chinois. Or, chacune de ces difficultés se reflète dans la présence de la Chine
sur la scène internationale.

LES RELATIONS ENTRE LA CHINE ET LES GRANDES PUISSANCES DU MONDE :


UNE IMPORTANCE PRIMORDIALE

Les relations entre la Chine et les grandes puissances telles que les États-Unis, la
Russie, le Japon et les pays européens, jouent un rôle primordial dans la diplomatie
chinoise. Or ces relations évoluent en fonction de la conjoncture internationale et
produisent de surcroît des effets qui s’influencent mutuellement.

* Faculté des relations internationales, Université de Beijing.


1. Le 17 septembre 2001, les négociateurs de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ont officiel-
lement donné leur feu vert à l’adhésion de la Chine à leur organisation, au terme de quinze années d’âpres
discussions.
100 ■ LA REVUE INTERNATIONALE ET STRATÉGIQUE

Relations sino-américaines

Depuis l’établissement de relations diplomatiques, en 1978, entre la Chine et les


États-Unis, les relations entre les deux pays ont connu, en particulier depuis la fin de
la guerre froide, de nombreuses vicissitudes, qui témoignent de leur extrême
complexité.
Pour le gouvernement chinois, les relations avec les États-Unis ont toujours été
considérées comme les plus importantes. On peut ainsi mesurer leur impact, direct ou
indirect, dans les relations extérieures de la Chine. Depuis des décennies, les diri-
geants chinois se sont efforcés de maintenir des relations normales entre les deux
pays. Cependant, la politique américaine à l’égard de la Chine a toujours été très ins-
table, voire changeante, au fur et à mesure de l’évolution de la situation internatio-
nale et de la situation intérieure dans chacun des deux pays. Il est certain que
l’approfondissement de la réforme et de l’ouverture signifie que la montée en puis-
sance de la Chine va se poursuivre. Cette dernière sera donc amenée à jouer un rôle
normal en Asie de l’Est et dans le reste du monde. Mais les États-Unis ne savent pas
comment faire face à cette montée en puissance de la Chine, et cherchent à empêcher
une extension de l’influence chinoise dans des sphères tant mondiale que régionale.
En particulier avec l’arrivée au pouvoir de l’administration Bush, au début de
l’année 2001, les relations entre la Chine et les États-Unis ont connu une série de dif-
ficultés et même des crises dangereuses.
Depuis longtemps, plusieurs problèmes ont empêché une amélioration des relations
bilatérales entre la Chine et les États-Unis. À présent, les questions des ventes
d’armes à Taiwan, des droits de l’homme, de la prolifération de missiles et du désé-
quilibre des échanges commerciaux continuent de causer du tort à la relation sino-
américaine. De plus, le 1er avril 2001, la collision entre un avion de combat de l’armée
chinoise et un avion espion américain a encore affecté cette relation, illustrant par là
même la défiance entre ces deux pays.
Mais, malgré ces difficultés, les relations sino-américaines sont trop imbriquées
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pour en revenir à une situation du type de la guerre froide.
Pour la partie chinoise, les États-Unis demeurent la seule superpuissance dans le
monde de l’après-guerre froide. Leur rôle dans les domaines économique, commercial
et international n’est absolument pas négligeable. Or le marché, la technologie et
l’investissement sont autant d’éléments indispensables au développement de
l’économie chinoise. Garder des relations normales – si elles ne sont pas excellentes –
avec les États-Unis correspond donc aux intérêts nationaux chinois. De leur côté, les
États-Unis ne peuvent pas non plus nier la réalité ni la rapidité du développement de
la Chine. D’une part, les relations avec la Chine ont une grande portée, non seule-
ment sur la sécurité de la région de l’Asie de l’Est, mais aussi sur la stabilité du
monde dans son entier. D’autre part, la potentialité du grand marché chinois attire
l’attention du milieu d’affaires américain. Ainsi, au cours des cinq premiers mois de
l’année 2001, le volume d’échange commercial sino-américain a atteint 30,4 milliards
de dollars, les exportations américaines vers la Chine ont augmenté de 20,9 %, et
l’investissement direct américain s’est élevé à 30 milliards de dollars1. L’adhésion de
la Chine à l’OMC révélera des perspectives encore plus attrayantes aux entrepreneurs
et aux hommes d’affaires américains, qui sont relativement influents au sein de la
nouvelle administration républicaine. Actuellement, l’économie américaine est entrée
dans une phase de récession assez importante ; le marché chinois est donc devenu

1. Beijing Information, no 34, 2001.


YANG BAOYUN ■ 101

encore plus indispensable pour les États-Unis. Tout cela prouve qu’un règlement
convenable des différends et un développement significatif des relations bilatérales
bénéficieront aux deux parties.
C’est justement pour toutes ces raisons que les deux pays espèrent tourner au
plus vite la page de l’« accident de l’avion espion » et cherchent à stabiliser leurs
relations.
Après avoir traversé une période difficile, l’administration Bush est devenue plus
raisonnable et pragmatique. Elle a ainsi choisi Clark Randt, ancien camarade de
classe du président et avocat d’affaires sinisant très impliqué dans des contrats sino-
américains, comme nouvel ambassadeur des États-Unis à Pékin, afin de mieux
représenter les intérêts des nombreuses grandes entreprises américaines implantées
sur le territoire chinois. Par ailleurs, pendant sa visite en Chine, les 28 et
29 juillet 2001, Colin Powell, secrétaire d’État de l’administration Bush, a répété à
plusieurs reprises que les États-Unis ne cherchaient pas l’affrontement avec la
Chine, et qu’ils espéraient établir des relations positives et constructives avec ce
pays « important et fort ». Il a également reconnu que la Chine, qui bénéficie d’une
politique de réforme et d’ouverture, se trouvait actuellement dans une période de
transition.
La visite du secrétaire d’État Colin Powell marque la reprise d’un dialogue et de
contacts de haut niveau entre les deux pays. Une négociation sino-américaine sur la
non-prolifération des techniques de missile et une rencontre pour éviter des incidents
maritimes et aériens ont eu lieu durant l’été 2001. Sur l’invitation du secrétaire d’État
américain, Tang Jiaxuan, le ministre chinois des Affaires étrangères devait effectuer,
du 20 au 21 septembre 2001, une visite officielle aux États-Unis pour discuter des
relations entre les deux pays et, surtout, pour mieux préparer la visite du président
Bush dans la capitale chinoise après sa participation au sommet informel de l’APEC
(Coopération économique en Asie-Pacifique) qui devait se tenir à Shanghai au mois
d’octobre 2001.
Le 11 septembre 2001, New York et Washington ont été victimes d’attentats terro-
ristes qui ont causé des pertes humaines et matérielles très importantes. La Chine fait
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partie des pays qui ont exprimé, les premiers, aux dirigeants américains leur condam-
nation des attaques terroristes, leur sympathie au peuple américain et leurs condo-
léances aux familles des victimes. Les échanges téléphoniques entre les présidents chi-
nois et américain ont montré l’importance de la coopération internationale entre les
deux pays. Ces faits témoignent aussi que les relations sino-américaines sont graduel-
lement en train de se normaliser.
Force est de constater, cependant, que des divergences profondes continuent
d’exister entre les deux pays et que les relations sino-américaines connaîtront sans
doute de nouvelles vicissitudes. Mais les intérêts communs aideront les dirigeants des
deux pays à surmonter ces difficultés.

Relations sino-russes

Les relations entre la Chine et la Russie sont devenues de plus en plus importantes
pour la diplomatie chinoise. Sous la présidence de Boris Eltsine, les dirigeants des
deux pays ont établi des relations de partenariat et de coordination stratégique. Ces
relations stratégiques ont été confirmées et légitimées par un traité sino-russe, et le
16 juillet 2001, en visite officielle à Moscou, le président chinois Jiang Zemin signait
avec son homologue russe, le président Vladimir Poutine, le « Traité sino-russe
d’amitié, de coopération et de bon voisinage ». Il s’agit là d’un jalon important dans
l’histoire des relations sino-russes. Ce traité résume à lui seul les directives et les prin-
102 ■ LA REVUE INTERNATIONALE ET STRATÉGIQUE

cipes fondamentaux de ces relations, en vue d’un développement à long terme de


relations de bon voisinage et d’une coopération à avantages réciproques entre la
Chine et la Russie, sur la base du non-alignement, de la non-agression et dans le res-
pect du principe de ne pas menacer un pays tiers. Ce traité a arrêté, dans un cadre
légal, le principe de coexistence pacifique entre les deux peuples, de génération en
génération, et celui de ne jamais prendre l’autre pour ennemi, ainsi que la ferme
volonté des deux parties de se comporter à jamais en bons voisins, en bons amis et en
bons partenaires.
Guidées par ces principes, les relations sino-russes ont accompli de grands progrès.
Les deux pays ont renforcé leur coopération à avantages réciproques dans divers
domaines, politique, économique et commercial ; et même la coopération militaire a
connu des développements très rapides. Dans cette nouvelle perspective, la Chine et
la Russie cherchent à renforcer leur confiance mutuelle sur le plan politique, à conso-
lider la base d’une amitié et d’un bon voisinage, à élargir une coopération mutuelle-
ment bénéfique, à accroître la force motrice du développement commun des deux
pays, à renforcer les échanges culturels pour resserrer les liens d’amitié entre leurs
deux peuples, à intensifier leur collaboration stratégique et à œuvrer ensemble pour la
paix et le développement international. En tant que grands pays dotés d’une
influence majeure dans le monde et membres permanents du Conseil de sécurité de
l’ONU (Organisation des Nations unies), la Chine et la Russie assument aussi la mis-
sion de maintenir la paix et la stabilité mondiales.
Pour promouvoir les relations entre les deux pays, un mécanisme de rencontres
régulières entre chefs d’État et de gouvernement a été établi. Les échanges et les
visites à tous les échelons se sont aussi multipliés, et les deux parties n’ont pas non
plus hésité à se soutenir mutuellement dans le but de sauvegarder leur souveraineté
nationale, leur indépendance et leur intégrité territoriale. Elles ont aussi réussi, pour
l’essentiel, à résoudre leurs différends frontaliers légués par l’histoire, et les échanges
et la coopération se sont étendus aux domaines économique et commercial. Enfin,
la Chine et la Russie ont recouru à une coordination stratégique efficace dans la
promotion de la multipolarisation mondiale, le maintien de la paix et de la stabilité
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globale.
Pour concrétiser ce traité, le Premier ministre chinois, Zhu Rongji, a effectué au
cours de l’année 2001 une visite officielle à Moscou. Sur le plan international, il a pu
discuter avec le président Poutine du traité antimissile ABM (Anti-Ballistic Missile)
de 1972, que les États-Unis souhaitent abandonner afin de mener à bien leur propre
projet de déploiement d’un bouclier antimissile (NMD). Les deux dirigeants sont
opposés à l’abandon du traité ABM, qu’ils considèrent comme la « pierre angulaire »
du système de stabilité stratégique.
Sur le plan économique, les deux pays ont décidé d’accroître les échanges entre
eux. En 2000, le volume commercial entre les deux pays a dépassé 8 milliards de dol-
lars, alors que ce chiffre était de 4,6 milliards de dollars au premier semestre de
l’année 2001. Au cours de la 4e rencontre des chefs de gouvernement chinois et russe,
les deux dirigeants devraient explorer les moyens susceptibles de renforcer la coopé-
ration économique bilatérale et d’accroître leurs échanges dans les secteurs, entre
autres, de l’éducation, de la culture, du sport, de la santé, de la science et de la tech-
nologie, et de la protection de l’environnement.
Pendant cette visite, les représentants des deux gouvernements ont signé une série
d’accords commerciaux. La partie chinoise devrait acheter cinq avions civils russes
Tu-204, tandis que la compagnie pétrolière russe et un groupe énergétique chinois
ont signé un accord sur la construction d’un oléoduc reliant la région sibérienne
d’Irkoutsk à la région du nord-est chinois de Dalian. Dans le même temps, les deux
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pays ont aussi décidé d’élargir leurs échanges commerciaux au domaine du transit
ferroviaire1.
Mais depuis la normalisation des rapports entre la Chine et la Russie, il semble
que leurs relations aient connu un développement plus évident dans les domaines
politique et stratégique que dans les domaines économique et commercial. Sur le plan
géopolitique, ces liens ont aussi permis de contrebalancer les échanges Chine/États-
Unis. Cependant, certains problèmes tels que l’immigration chinoise dans les régions
d’Extrême-Orient de la Russie et la définition d’une partie de la frontière entre les
deux pays risquent de contrarier le développement normal de ces relations. Les deux
pays doivent donc continuer de faire des efforts pour éliminer ces obstacles poten-
tiels, afin que les relations sino-russes soient encore plus étroites.

Relations sino-japonaises

Le gouvernement chinois porte depuis longtemps une attention particulière à ses


relations avec le Japon. Il espère ainsi, d’une part, établir et conserver, de génération
en génération, des relations de bon voisinage avec ce pays qui a causé tant de dou-
leurs au peuple chinois entre la fin du XIXe siècle et la fin de la Seconde Guerre mon-
diale ; et, d’autre part, accélérer le développement économique du pays grâce à des
aides techniques et financières en provenance du Japon.
Depuis l’établissement de relations diplomatiques entre les deux pays, force est de
constater que la coopération sino-japonaise a connu un essor sans précédent. À présent,
le Japon est devenu le plus grand partenaire de la Chine en termes d’échanges commer-
ciaux. Il fait également partie des plus importants investisseurs étrangers en Chine.
Selon les statistiques de la douane chinoise, le montant des échanges sino-japonais attei-
gnait, en 2000, 83,1 milliards de dollars. Sur les quatre premiers mois de l’année 2001, ce
chiffre s’élevait à 28,6 milliards de dollars, tandis que les investissements japonais en
Chine connaissaient une croissance extraordinaire. En 1972, le gouvernement japonais
avait fourni à la Chine quatre crédits, d’un montant total de 2 660 milliards de yens. Et,
en 1981, la partie chinoise recevait 120 milliards de yens comme aides gratuites de la
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part du Japon. Les crédits et les aides japonais ont ainsi beaucoup contribué au déve-
loppement de l’énergie, de la protection de l’environnement, de la communication, de
l’éducation, de la médecine, de l’agriculture, etc.2
Mais les relations sino-japonaises se sont détériorées ces derniers temps, en partie à
cause de l’apparition d’une tendance conservatrice dans la vie politique japonaise.
Tout d’abord, les conservateurs japonais ne reconnaissent pas les crimes de guerre
que les militaires japonais ont commis pendant la Seconde Guerre mondiale. Ils ont
également cherché, à plusieurs reprises, à modifier le contenu des manuels d’histoire
japonais pour en effacer les faits réels. Cette année, le gouvernement japonais a
donné le feu vert à l’apparition et à l’usage, dans les écoles, de manuels de ce type, et
ce, en dépit des protestations des gouvernements et des peuples de pays victimes de
l’invasion et de l’occupation japonaises pendant la guerre. Or, si la dernière guerre
d’agression menée par les militaires japonais est déniée, et que l’histoire est déna-
turée, les sentiments du peuple chinois, ainsi que ceux des peuples d’autres pays asia-
tiques, seront inévitablement blessés.
Or le gouvernement et les hommes politiques japonais ont, eux aussi, participé à
cette tendance de droite. Le 13 août 2001, soit deux jours avant la date historique du

1. Le Monde, le 7 septembre 2001.


2. « L’analyse de la situation actuelle des relations économiques et commerciales sino-japonaises »,
Agence de la Nouvelle de Chine, 5 juillet 2001.
104 ■ LA REVUE INTERNATIONALE ET STRATÉGIQUE

15 août, qui marque la défaite du Japon et sa reddition inconditionnelle lors de la


Seconde Guerre mondiale, Junichiro Koizumi, en sa qualité de chef du gouvernement
japonais, s’est rendu au temple de Yasukuni où sont gardées les tablettes commémo-
ratives de grands criminels de guerre. L’attitude adoptée à l’égard du temple Yasu-
kuni a toujours été un test, pour voir si le gouvernement japonais pouvait ou non
traiter correctement son histoire militaire contemporaine. Or le comportement du
Japon face à ses guerres d’agression influence de manière considérable le fondement
politique de ses relations avec la Chine.
Les conservateurs japonais cherchent aussi à réviser la Constitution pacifiste du
Japon, pour qu’il se dote d’une véritable armée au lieu de ses forces actuelles
d’autodéfense, et qu’il puisse prendre davantage d’initiatives en Asie-Pacifique. Sa
coopération en matière de sécurité maritime avec la Corée du Sud, les pays de
l’ANSEA (Association des nations du Sud-Est asiatique) et l’Inde révèle les efforts du
Japon en vue de jouer un rôle accru dans la région Asie-Pacifique.
Il faut encore indiquer que les relations entre la Chine et le Japon sont liées à
celles de la Chine et des États-Unis. À titre d’exemple, le traité nippo-américain de
coopération en matière de défense a été renforcé en 1996, après un accroissement des
tensions entre les deux rives du détroit de Taiwan et face à la montée en puissance de
la Chine. Les États-Unis ont par ailleurs confirmé que le Japon verrait son rôle et ses
responsabilités renforcés dans la région Pacifique, sans pour autant qu’il puisse
s’émanciper de son allié nord-américain en ce qui concerne sa sécurité. Nous avons
donc de bonnes raisons de penser que, avec le développement de l’économie chinoise,
l’importance des aides financières et des techniques en provenance du Japon devrait
diminuer. La Chine pourrait alors être plus libre dans sa politique japonaise, poli-
tique qui serait mise plus étroitement en liaison avec les relations sino-américaines.

Relations sino-européennes

Les relations entre la Chine et l’Europe occupent une place importante dans la
balance diplomatique chinoise. Actuellement, sous le double effet de la mondialisa-
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tion et de la régionalisation, le gouvernement chinois s’attache non seulement à ren-
forcer ses relations avec tous les pays européens, mais il veille aussi à entretenir des
liens plus étroits avec l’Union européenne (UE).
Cette politique chinoise s’appuie avant tout sur la position et le rôle croissants de
l’UE sur la scène internationale. Depuis longtemps, la Chine encourage le processus
d’unification de l’Europe ; elle a su, en outre, garder des liens étroits avec la Commu-
nauté européenne. La Chine estime toujours que la multipolarisation et la globalisa-
tion économique se développent rapidement, et que l’établissement et le développe-
ment d’un partenariat constructif entre la Chine et l’UE, sur la base du respect
mutuel, de l’égalité, des avantages réciproques et de la recherche de points communs
par-delà les divergences, répondent à long terme aux intérêts communs des deux par-
ties, et contribueront à promouvoir la paix et la stabilité dans le monde.
Récemment, la Commission européenne a publié un rapport évaluant, depuis 1998,
l’état des relations de l’UE avec la Chine et leur coopération dans différents domaines.
Le rapport formulait également une série de propositions. La Chine l’a favorablement
accueilli ; depuis quelques années, grâce aux efforts déployés de part et d’autre, les
relations entre la Chine et l’UE tendent à se développer. Les dirigeants des deux parties
ont eu des contacts réguliers, et le dialogue politique et les consultations ont été fruc-
tueux. La coopération bilatérale dans les domaines économique, commercial,
scientifique et technologique, comme dans d’autres domaines, s’est, elle aussi, encore
développée.
YANG BAOYUN ■ 105

Au début du mois de septembre 2001, le Premier ministre chinois Zhu Rongji s’est
déplacé à Bruxelles pour participer au quatrième sommet Union européenne - Chine.
À cette occasion, le gouvernement chinois a fait valoir son intention de renforcer la
coopération, aussi bien dans le domaine commercial que dans celui de
l’environnement. Il se satisfait, en outre, du fait que l’Union européenne souhaite, au
plus vite, voir la Chine entrer dans l’OMC.
Sur le plan politique, bien que l’Europe insiste aussi sur l’importance des droits de
l’homme, il semble qu’elle cherche plutôt la négociation que l’hostilité. La Chine
apprécie cette attitude ; c’est pourquoi les deux parties s’accordent à « continuer leur
dialogue » en la matière, sur la « base d’un respect et d’une égalité mutuels ». Dans le
même temps, l’Union européenne a réitéré son soutien à la politique chinoise de lutte
contre la criminalité et la corruption, félicitant Beijing des résultats obtenus dans la
lutte contre l’immigration illégale. Les deux parties ont également décidé
d’institutionnaliser la pratique d’un sommet annuel, et de renforcer les contacts entre
leurs administrations en charge des Affaires étrangères1.
En tant que membre de l’ASEM (Rencontre Europe-Asie), née en 1996, la Chine
cherche aussi à renforcer la coopération entre l’Europe et l’Asie. Elle espère ainsi
profiter de ce nouveau système de coopération internationale pour échanger davan-
tage de points de vue avec les membres de cette organisation, sur la coopération
régionale, les problèmes régionaux et les questions internationales importantes.
Si l’on regarde de plus près la nature des relations sino-européennes, force est de
constater que celles-ci connaissent un plus grand succès dans le domaine économique
que dans le domaine politique. Certains experts estiment enfin que la Chine continue
actuellement de renforcer ses liens avec les pays européens pour mieux résister à
l’attitude de confrontation adoptée par les États-Unis à son égard. Ils ont aussi leurs
raisons. La Chine cherche notamment, avec les pays européens, à renforcer
l’opposition au projet américain de bouclier de défense antimissile, dans le but de
préserver la stabilité internationale.

LES RELATIONS ENTRE LA CHINE ET LES PAYS EN VOIE DE DÉVELOPPEMENT :


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UNE BASE FONDAMENTALE

Pour avoir partagé le même sort dans le passé et poursuivre actuellement des
objectifs communs, la Chine accorde une très grande importance à l’établissement et
au renforcement de relations avec les autres pays en voie de développement. Mais
d’autres considérations plus géopolitiques l’obligent également à privilégier ses rela-
tions avec les pays voisins.

Les relations avec les pays voisins

« Stabiliser ses relations avec les pays voisins » a toujours été, continue d’être et
restera l’un des principes fondamentaux de la diplomatie chinoise. La Chine partage
des frontières avec de nombreux pays. Or certains « points chauds » du monde se
situent actuellement dans des pays ou régions proches de la Chine, tels que la pénin-
sule Coréenne, le sous-continent indien, l’Afghanistan ou les républiques d’Asie cen-
trale. Dans le même temps, les zones alentour sont touchées par certains phénomènes
néfastes, qui menacent la stabilité de ces régions, tels que les activités de piraterie, le
trafic de drogue, le sabotage des séparatistes et des extrémistes religieux, etc. Tous ces
éléments constituent autant de défis à la stabilité, à la sécurité et au développement

1. Le Monde, le 5 septembre 2001.


106 ■ LA REVUE INTERNATIONALE ET STRATÉGIQUE

de la Chine. C’est pourquoi le gouvernement de Beijing a pris des mesures importan-


tes pour établir et conserver de bonnes et stables relations avec tous ses voisins.
Le gouvernement chinois estime que la question coréenne a été un « point chaud »
en Asie du Nord-Est, qui a aussi touché à la sécurité internationale. Il souhaite que
les États-Unis et la République populaire démocratique de Corée (RPDC) puissent
normaliser leurs relations diplomatiques aussitôt que possible, que les relations entre
le Nord et le Sud de la péninsule Coréenne puissent se maintenir dans cet état de
détente, et que les relations entre le Japon et la RPDC se normaliseront également.
L’apaisement des tensions entre ces différents pays représente aussi un élément favo-
rable pour la Chine elle-même.
Ce sont les raisons pour lesquelles la Chine continue de chercher à jouer un rôle
actif dans les affaires de la péninsule Coréenne. Beijing est content de voir que les
deux Corées réussissent à négocier de façon pacifique leur réunification autonome.
Au début du mois de septembre 2000, le président chinois, Jiang Zemin, a effectué
une visite officielle de trois jours en RPDC. Il s’agissait de la première visite d’un chef
d’État chinois en Corée du Nord depuis l’établissement de relations diplomatiques
entre Pékin et Séoul en 1992. Le président chinois a apporté son soutien à son homo-
logue nord-coréen, notamment sur les questions liées au dialogue entre le Nord et le
Sud et sur la réunification autonome des deux parties de la Péninsule.
Dans la période qui a précédé cette visite, une série de gestes significatifs ont parti-
culièrement retenu notre attention. À la veille de l’arrivée du président chinois, le
gouvernement nord-coréen a tout d’abord proposé aux autorités sud-coréennes de
relancer les négociations entre les deux Corées, interrompues il y a quelques mois.
Par ailleurs, selon les médias internationaux, le dirigeant nord-coréen Kim Jong-il a
de nouveau confirmé, au cours de sa rencontre avec le président chinois, sa promesse
de geler tout tir d’engins de longue portée jusqu’en 20031. Nous savons que les essais
balistiques constituent un épouvantail brandi par Washington pour justifier son pro-
jet de bouclier antimissile (NMD) auquel s’oppose la Chine. Il est donc permis de pen-
ser que la visite du président Jiang en Corée du Nord a non seulement permis de
développer les relations entre les deux pays, mais a également montré la contribution
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que la Chine pourrait apporter à la normalisation de la situation dans la Péninsule,
tout en renforçant la position chinoise dans son bras de fer avec Washington sur la
question du système antimissile, dans la perspective d’un sommet Jiang-Bush au mois
d’octobre 2001 à Shanghai.
Avec ses voisins d’Asie du Sud-Est, la Chine poursuivra sa politique diplomatique,
fondée sur le principe d’un développement de relations stables, caractérisées par le
bon voisinage et la coopération extensive et orientée vers l’avenir. Avec certains pays
de la région, la Chine cherche à résoudre des problèmes légués par l’histoire.
En 1999-2000, par exemple, le gouvernement chinois a signé avec le Viêtnam des trai-
tés et accords intergouvernementaux relatifs à sa frontière terrestre, à la démarcation
du golfe de Beibu2 et à la coopération dans l’industrie de la pêche entre ces deux
pays. La Chine est aussi toujours prête à discuter avec les pays concernés du pro-
blème des îles de la mer de Chine méridionale.
La Chine renforce également sans relâche ses liens avec l’ANSEA, organisation
régionale qui englobe tous les pays de la région de l’Asie du Sud-Est. Des systèmes
de communication et de coopération entre la Chine et l’ANSEA ont été établis et ont
déjà montré leur efficacité. Les sommets 10 + 1 (10 pays de l’ANSEA plus la Chine) et
10 + 3 (10 pays de l’ANSEA plus la Chine, le Japon et la Corée du Sud) ont fourni au

1. AFP, Séoul, le 5 septembre 2001.


2. Appellation ancienne : golfe du Tonkin.
YANG BAOYUN ■ 107

gouvernement chinois l’occasion de renforcer sa présence en Asie du Sud-Est. Beijing


commence aussi à prendre de plus en plus d’initiatives dans le Forum de l’ANSEA, qui
a été créé dans le but de sauvegarder la sécurité de cette région, très perturbée pen-
dant la longue période de la guerre froide.
Cependant, bien que les relations entre la Chine et les pays d’Asie du Sud-Est se
soient beaucoup améliorées, certains problèmes restent toujours difficiles à résoudre.
Actuellement, la méfiance à l’égard d’une « menace chinoise », dont le contenu n’est
plus seulement limité, par ses inventeurs, au domaine politique ou militaire, mais
touche également au domaine économique en raison de la croissance rapide de
l’économie chinoise, risque d’empoisonner ses relations.
La Chine a aussi réajusté ses relations avec ses voisins de l’Asie du Sud, en parti-
culier avec les deux grandes puissances de la région que sont l’Inde et le Pakistan.
Pékin cherche à garder et à renforcer, d’une part, ses amitiés traditionnelles avec le
Pakistan et porte la plus grande attention à améliorer, d’autre part, ses relations avec
l’Inde.
L’Asie centrale, de son côté, constitue une autre région limitrophe très perturbée.
Ainsi le Nord-Ouest chinois est-il menacé par les séparatistes nationalistes et les
extrémistes religieux. Au mois d’avril 1996, à l’occasion d’une rencontre entre les
chefs d’États de cinq pays de la région (Chine, Russie, Kazakhstan, Tadjikistan,
Kirghizstan), un système de sécurité et de coopération a été mis en place. Ce système,
qui a beaucoup contribué à la stabilité de la région, a ainsi connu un développement
important. Le 15 juin 2001, les dirigeants des cinq pays se sont réunis à nouveau à
Shanghai ; ils ont alors décidé de créer l’Organisation de coopération de Shanghai, en
y admettant un autre pays d’Asie centrale, l’Ouzbékistan. Le 14 septembre 2001, à
Almaty, au cours de la première rencontre des Premiers ministres des pays membres
de cette organisation, les six Premiers ministres ont publié une déclaration commune
pour montrer leur volonté de mener à bien la lutte contre le terrorisme, le sépara-
tisme et l’extrémisme. Ils ont exprimé leur détermination à coopérer avec tous les
pays et les organismes du monde et à prendre des mesures efficaces dans cette lutte.
L’existence même de l’Organisation de coopération de Shanghai fournit un bon
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exemple des moyens susceptibles d’assurer le maintien de la paix et de la sécurité
dans la région et semble créer un nouveau type de relations entre États et un nou-
veau modèle de coopération régionale.

Les relations entre la Chine et les autres pays en voie de développement

Depuis la fondation de la République populaire de Chine (RPC), les pays en voie


de développement, de manière générale, ont toujours été considérés par le gouverne-
ment chinois comme des amis traditionnels. Or, depuis la fin de la guerre froide, la
Chine a pris encore plus conscience du rôle de ces pays, et cherche, de ce fait, à nouer
des relations encore plus étroites avec eux.
Dans le processus actuel de mondialisation, le gouvernement chinois estime qu’un
grand nombre de pays en développement sont confrontés au défi de la souveraineté.
La mondialisation a, d’une part, creusé l’inégalité entre pays forts et pays faibles, et
d’autre part, en requérant un nombre croissant d’organisations et de règles de
conduite internationales, elle a permis aux pays développés, avec leur puissance
nationale polyvalente, d’acquérir dans presque tous les régimes internationaux qui
produisent ces règles de conduite, plus de droits de parole en faveur de leurs intérêts.
Dans le même temps, et sous couvert de formules et de concepts tels que « les droits
de l’homme avant la souveraineté » ou la « souveraineté limitée », les pays dévelop-
pés exigent des pays en développement qu’ils cèdent une partie de leur souveraineté,
108 ■ LA REVUE INTERNATIONALE ET STRATÉGIQUE

et ils se permettent d’intervenir dans les affaires intérieures de ces derniers. Dans ces
circonstances, la sauvegarde efficace de leur sécurité économique et de leur souverai-
neté nationale est devenue une nouvelle tâche pour ces pays.
Pour atteindre cet objectif, la Chine insiste sur la nécessité d’établir un nouvel
ordre mondial. Elle estime, en effet, qu’un nouvel ordre politique et économique
international doit assurer aux différents pays, et surtout aux nombreux pays en voie
de développement, le droit à un développement égal. Aider ces derniers à développer
leur économie revêt une importance cruciale pour la préservation d’une paix durable
et la réalisation d’un progrès partagé dans le monde. Les pays développés se doivent
d’alléger, voire d’annuler effectivement, les dettes des pays en développement, de les
aider à se doter d’une capacité d’autodéveloppement, d’intensifier la mise en valeur
de leurs ressources humaines, de travailler à une réduction progressive de l’écart entre
le Nord et le Sud sur les plans économique, scientifique et technique, notamment,
tout en se gardant de ne pas chercher uniquement à obtenir, de la part des pays en
développement, ressources, marchés et profits. La communauté internationale doit
prendre des mesures plus actives et plus efficaces pour réformer le système écono-
mique, commercial et financier international et protéger véritablement les droits et les
intérêts légitimes des pays en développement.
Par ailleurs, dans ses relations avec les pays en voie de développement, la Chine
donne une impulsion particulière à la coopération Sud-Sud. Elle considère, en effet,
que la coopération Sud-Sud devrait permettre aux pays en développement
d’affronter les changements de la situation internationale et les défis de la
mondialisation, en les aidant à valoriser pleinement leurs atouts en matière de res-
sources naturelles et humaines. Maintenant, la Chine est en train de chercher à
mener une coopération avec les pays en voie de développement dans les affaires
internationales1.
Pour renforcer leurs relations avec ces différents pays, les dirigeants chinois au
plus haut niveau, y compris le président, le Premier ministre et le président de
l’Assemblée, y ont effectué, ces dernières années, une série de visites officielles – en
Asie, en Afrique et en Amérique latine particulièrement. Des conférences internatio-
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nales spécialisées ont aussi été solennellement organisées par le gouvernement chinois
et ses partenaires du développement. Par exemple, le « Forum sur la coopération
sino-africaine - conférence interministérielle 2000 » a été inauguré le 10 octobre 2000
à Beijing. À cette occasion, le gouvernement chinois a annoncé une réduction impor-
tante, voire une annulation complète, des dettes contractées par les pays africains
surendettés ou les plus sous-développés envers la Chine.
Les initiatives dans lesquelles la Chine s’est engagée à l’égard des pays en voie de
développement ont été chaleureusement accueillies par ces derniers ; elles ont, en
outre, déjà produit certains résultats remarquables : la Chine a ainsi rétabli ses rela-
tions diplomatiques avec certains pays pauvres qui avaient noué des relations officiel-
les avec les autorités de Taiwan ; la plupart des pays en voie de développement ont
apporté leur soutien au gouvernement chinois à l’occasion de conférences internatio-
nales abordant des sujets aussi sensibles que les droits de l’homme, le statut de Tai-
wan dans les organisations internationales, etc. Dès lors, nous restons persuadés que
les relations entre la Chine et les pays en voie de développement connaîtront, dans le
siècle en cours, un profond renforcement.

1. On peut trouver ces idées dans l’« Allocution du président chinois Jiang Zemin au Forum sur la coo-
pération sino-africaine - conférence ministérielle 2000 », Agence Xinhua, le 11 octobre 2000.
YANG BAOYUN ■ 109

UNE DIPLOMATIE PLUS ACTIVE ET DURABLE

Un demi-siècle s’est écoulé depuis la fondation de la République populaire de


Chine. Pendant cette période, la diplomatie chinoise a traversé de nombreuses épreu-
ves, se révélant à chaque fois plus mûre et d’une stabilité accrue. Même lorsque des
événements graves surviennent à l’improviste, les diplomates chinois réussissent à les
traiter d’une façon raisonnable, intelligente et imperturbable. Ainsi, de nombreux
succès diplomatiques ont été remportés par le gouvernement chinois.
Au début du XXIe siècle, nous pouvons essayer d’envisager les perspectives des
relations extérieures de la Chine autour des points suivants.
— La Chine va continuer à appliquer sa politique diplomatique indépendante et
non alliée. La paix et le développement seront toujours considérés par la Chine
comme un objectif primordial dans l’évolution de la situation internationale au XXIe.
La tâche principale du gouvernement chinois restera le développement de l’économie
nationale et l’amélioration du niveau de vie du peuple. Pour atteindre cet objectif, la
diplomatie chinoise devra aussi s’employer à créer un environnement international de
paix. D’ailleurs, l’adhésion de la Chine à l’OMC lui permettra, nous pensons, de déve-
lopper davantage ses relations extérieures dans le domaine économique.
— La Chine continuera de développer ses relations avec tous les pays du monde,
en poursuivant une coopération tous azimuts. Les relations sino-américaines occupe-
ront toujours une place importante, mais les obstacles existants entre les deux pays
condamnent le développement de ces relations à une série de difficultés. Les relations
avec la Russie revêtiront une importance stratégique particulière, tandis qu’avec
l’Europe elles s’orienteront de manière plus significative vers le domaine économique.
Les relations avec les pays en voie de développement, en particulier avec les pays voi-
sins, aideront la Chine à garder son indépendance diplomatique et à accélérer son
développement économique dans la paix.
— En raison de la mondialisation économique et de la multipolarisation interna-
tionale, la Chine cherchera, tout en renforçant ses relations avec les pays du monde
entier, à mener une coopération plus étroite avec les organisations internationales et
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régionales, telles que l’ONU, l’OMC, l’UE, l’ANSEA. Elle jouera aussi un rôle plus actif
dans les systèmes internationaux ou régionaux destinés à sauvegarder la paix et la
stabilité du monde et à lutter contre les activités criminelles transnationales telles le
terrorisme, les séparatismes, les extrémismes, le trafic de drogue, la contrebande, la
piraterie, l’immigration clandestine, etc. À travers cette participation, la Chine sera
plus ouverte au monde extérieur dans différents domaines. Sans aucun doute, toutes
ses contributions aux organismes internationaux favoriseront aussi le renforcement et
l’amélioration de ses relations avec divers pays du monde.
— La question de Taiwan, enfin, sera mise en relief dans les relations extérieures
de la Chine. Le gouvernement chinois déclare depuis toujours que Taiwan constitue
une partie inséparable du territoire chinois, et que le gouvernement de la République
populaire de Chine est l’unique gouvernement légal de l’ensemble de la Chine. La
question de Taiwan est purement et simplement une affaire interne à la Chine et une
question qu’il revient à la Chine de résoudre. Mais la situation a beaucoup évolué
depuis une dizaine d’années. Ainsi, au mois de mai 2000, le représentant du parti
indépendantiste a été élu président des autorités taiwanaises, et les activités des indé-
pendantistes se sont de plus en plus développées. Face à cette situation, une partie
des hommes politiques de certains pays ont apporté leur soutien à cette tendance
indépendantiste. Ces actions sont considérées par le gouvernement chinois comme
des interventions grossières dans les affaires internes de la Chine, qui causent des
dommages graves aux relations que la Chine entretient avec ces pays.
110 ■ LA REVUE INTERNATIONALE ET STRATÉGIQUE

À présent, la Chine négocie un tournant majeur de son histoire : le XVIe Congrès


national du Parti communiste chinois aura lieu en 2002. Le pouvoir passera alors des
mains des dirigeants de la troisième génération à celles de la quatrième génération.
Une question se pose ainsi autour de cet événement : y aura-t-il de grands change-
ments dans la politique extérieure de la Chine ?
Nous pensons que ces changements – on ne parle pas des réajustements nécessaires
selon l’évolution de la situation concrète – seront peu probables.
Tout d’abord, la situation politique en Chine est toujours relativement stable, et la
transition du pouvoir en cours s’opère d’une façon normale. On ne voit pas non plus
de signes avant-coureurs de graves troubles politiques et sociaux. Dans ces condi-
tions, les politiques chinoises se caractérisent davantage par leur continuité. Par ail-
leurs, la diplomatie chinoise actuelle a déjà fait ses preuves ; une modification ne sera
donc pas nécessaire. Ainsi, nous avons la conviction que la politique extérieure chi-
noise gardera sa continuité avec l’arrivée au pouvoir des dirigeants de la quatrième
génération. Avec cette politique, la Chine va évoluer vers une ouverture plus large et
une réforme plus profonde. Ce sera une contribution au développement de la Chine
elle-même, mais aussi à la stabilité du monde.
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