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du XXIe siècle
Yang Baoyun
Dans Revue internationale et stratégique 2001/4 (n° 44), pages 99 à 110
Éditions IRIS éditions
ISSN 1287-1672
ISBN 2130518338
DOI 10.3917/ris.044.0099
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« Confiance et prudence » :
la diplomatie chinoise
au début du XXI siècle e
Yang Baoyun*
Les relations entre la Chine et les grandes puissances telles que les États-Unis, la
Russie, le Japon et les pays européens, jouent un rôle primordial dans la diplomatie
chinoise. Or ces relations évoluent en fonction de la conjoncture internationale et
produisent de surcroît des effets qui s’influencent mutuellement.
Relations sino-américaines
encore plus indispensable pour les États-Unis. Tout cela prouve qu’un règlement
convenable des différends et un développement significatif des relations bilatérales
bénéficieront aux deux parties.
C’est justement pour toutes ces raisons que les deux pays espèrent tourner au
plus vite la page de l’« accident de l’avion espion » et cherchent à stabiliser leurs
relations.
Après avoir traversé une période difficile, l’administration Bush est devenue plus
raisonnable et pragmatique. Elle a ainsi choisi Clark Randt, ancien camarade de
classe du président et avocat d’affaires sinisant très impliqué dans des contrats sino-
américains, comme nouvel ambassadeur des États-Unis à Pékin, afin de mieux
représenter les intérêts des nombreuses grandes entreprises américaines implantées
sur le territoire chinois. Par ailleurs, pendant sa visite en Chine, les 28 et
29 juillet 2001, Colin Powell, secrétaire d’État de l’administration Bush, a répété à
plusieurs reprises que les États-Unis ne cherchaient pas l’affrontement avec la
Chine, et qu’ils espéraient établir des relations positives et constructives avec ce
pays « important et fort ». Il a également reconnu que la Chine, qui bénéficie d’une
politique de réforme et d’ouverture, se trouvait actuellement dans une période de
transition.
La visite du secrétaire d’État Colin Powell marque la reprise d’un dialogue et de
contacts de haut niveau entre les deux pays. Une négociation sino-américaine sur la
non-prolifération des techniques de missile et une rencontre pour éviter des incidents
maritimes et aériens ont eu lieu durant l’été 2001. Sur l’invitation du secrétaire d’État
américain, Tang Jiaxuan, le ministre chinois des Affaires étrangères devait effectuer,
du 20 au 21 septembre 2001, une visite officielle aux États-Unis pour discuter des
relations entre les deux pays et, surtout, pour mieux préparer la visite du président
Bush dans la capitale chinoise après sa participation au sommet informel de l’APEC
(Coopération économique en Asie-Pacifique) qui devait se tenir à Shanghai au mois
d’octobre 2001.
Le 11 septembre 2001, New York et Washington ont été victimes d’attentats terro-
ristes qui ont causé des pertes humaines et matérielles très importantes. La Chine fait
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Relations sino-russes
Les relations entre la Chine et la Russie sont devenues de plus en plus importantes
pour la diplomatie chinoise. Sous la présidence de Boris Eltsine, les dirigeants des
deux pays ont établi des relations de partenariat et de coordination stratégique. Ces
relations stratégiques ont été confirmées et légitimées par un traité sino-russe, et le
16 juillet 2001, en visite officielle à Moscou, le président chinois Jiang Zemin signait
avec son homologue russe, le président Vladimir Poutine, le « Traité sino-russe
d’amitié, de coopération et de bon voisinage ». Il s’agit là d’un jalon important dans
l’histoire des relations sino-russes. Ce traité résume à lui seul les directives et les prin-
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pays ont aussi décidé d’élargir leurs échanges commerciaux au domaine du transit
ferroviaire1.
Mais depuis la normalisation des rapports entre la Chine et la Russie, il semble
que leurs relations aient connu un développement plus évident dans les domaines
politique et stratégique que dans les domaines économique et commercial. Sur le plan
géopolitique, ces liens ont aussi permis de contrebalancer les échanges Chine/États-
Unis. Cependant, certains problèmes tels que l’immigration chinoise dans les régions
d’Extrême-Orient de la Russie et la définition d’une partie de la frontière entre les
deux pays risquent de contrarier le développement normal de ces relations. Les deux
pays doivent donc continuer de faire des efforts pour éliminer ces obstacles poten-
tiels, afin que les relations sino-russes soient encore plus étroites.
Relations sino-japonaises
Relations sino-européennes
Les relations entre la Chine et l’Europe occupent une place importante dans la
balance diplomatique chinoise. Actuellement, sous le double effet de la mondialisa-
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Au début du mois de septembre 2001, le Premier ministre chinois Zhu Rongji s’est
déplacé à Bruxelles pour participer au quatrième sommet Union européenne - Chine.
À cette occasion, le gouvernement chinois a fait valoir son intention de renforcer la
coopération, aussi bien dans le domaine commercial que dans celui de
l’environnement. Il se satisfait, en outre, du fait que l’Union européenne souhaite, au
plus vite, voir la Chine entrer dans l’OMC.
Sur le plan politique, bien que l’Europe insiste aussi sur l’importance des droits de
l’homme, il semble qu’elle cherche plutôt la négociation que l’hostilité. La Chine
apprécie cette attitude ; c’est pourquoi les deux parties s’accordent à « continuer leur
dialogue » en la matière, sur la « base d’un respect et d’une égalité mutuels ». Dans le
même temps, l’Union européenne a réitéré son soutien à la politique chinoise de lutte
contre la criminalité et la corruption, félicitant Beijing des résultats obtenus dans la
lutte contre l’immigration illégale. Les deux parties ont également décidé
d’institutionnaliser la pratique d’un sommet annuel, et de renforcer les contacts entre
leurs administrations en charge des Affaires étrangères1.
En tant que membre de l’ASEM (Rencontre Europe-Asie), née en 1996, la Chine
cherche aussi à renforcer la coopération entre l’Europe et l’Asie. Elle espère ainsi
profiter de ce nouveau système de coopération internationale pour échanger davan-
tage de points de vue avec les membres de cette organisation, sur la coopération
régionale, les problèmes régionaux et les questions internationales importantes.
Si l’on regarde de plus près la nature des relations sino-européennes, force est de
constater que celles-ci connaissent un plus grand succès dans le domaine économique
que dans le domaine politique. Certains experts estiment enfin que la Chine continue
actuellement de renforcer ses liens avec les pays européens pour mieux résister à
l’attitude de confrontation adoptée par les États-Unis à son égard. Ils ont aussi leurs
raisons. La Chine cherche notamment, avec les pays européens, à renforcer
l’opposition au projet américain de bouclier de défense antimissile, dans le but de
préserver la stabilité internationale.
Pour avoir partagé le même sort dans le passé et poursuivre actuellement des
objectifs communs, la Chine accorde une très grande importance à l’établissement et
au renforcement de relations avec les autres pays en voie de développement. Mais
d’autres considérations plus géopolitiques l’obligent également à privilégier ses rela-
tions avec les pays voisins.
« Stabiliser ses relations avec les pays voisins » a toujours été, continue d’être et
restera l’un des principes fondamentaux de la diplomatie chinoise. La Chine partage
des frontières avec de nombreux pays. Or certains « points chauds » du monde se
situent actuellement dans des pays ou régions proches de la Chine, tels que la pénin-
sule Coréenne, le sous-continent indien, l’Afghanistan ou les républiques d’Asie cen-
trale. Dans le même temps, les zones alentour sont touchées par certains phénomènes
néfastes, qui menacent la stabilité de ces régions, tels que les activités de piraterie, le
trafic de drogue, le sabotage des séparatistes et des extrémistes religieux, etc. Tous ces
éléments constituent autant de défis à la stabilité, à la sécurité et au développement
et ils se permettent d’intervenir dans les affaires intérieures de ces derniers. Dans ces
circonstances, la sauvegarde efficace de leur sécurité économique et de leur souverai-
neté nationale est devenue une nouvelle tâche pour ces pays.
Pour atteindre cet objectif, la Chine insiste sur la nécessité d’établir un nouvel
ordre mondial. Elle estime, en effet, qu’un nouvel ordre politique et économique
international doit assurer aux différents pays, et surtout aux nombreux pays en voie
de développement, le droit à un développement égal. Aider ces derniers à développer
leur économie revêt une importance cruciale pour la préservation d’une paix durable
et la réalisation d’un progrès partagé dans le monde. Les pays développés se doivent
d’alléger, voire d’annuler effectivement, les dettes des pays en développement, de les
aider à se doter d’une capacité d’autodéveloppement, d’intensifier la mise en valeur
de leurs ressources humaines, de travailler à une réduction progressive de l’écart entre
le Nord et le Sud sur les plans économique, scientifique et technique, notamment,
tout en se gardant de ne pas chercher uniquement à obtenir, de la part des pays en
développement, ressources, marchés et profits. La communauté internationale doit
prendre des mesures plus actives et plus efficaces pour réformer le système écono-
mique, commercial et financier international et protéger véritablement les droits et les
intérêts légitimes des pays en développement.
Par ailleurs, dans ses relations avec les pays en voie de développement, la Chine
donne une impulsion particulière à la coopération Sud-Sud. Elle considère, en effet,
que la coopération Sud-Sud devrait permettre aux pays en développement
d’affronter les changements de la situation internationale et les défis de la
mondialisation, en les aidant à valoriser pleinement leurs atouts en matière de res-
sources naturelles et humaines. Maintenant, la Chine est en train de chercher à
mener une coopération avec les pays en voie de développement dans les affaires
internationales1.
Pour renforcer leurs relations avec ces différents pays, les dirigeants chinois au
plus haut niveau, y compris le président, le Premier ministre et le président de
l’Assemblée, y ont effectué, ces dernières années, une série de visites officielles – en
Asie, en Afrique et en Amérique latine particulièrement. Des conférences internatio-
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1. On peut trouver ces idées dans l’« Allocution du président chinois Jiang Zemin au Forum sur la coo-
pération sino-africaine - conférence ministérielle 2000 », Agence Xinhua, le 11 octobre 2000.
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