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Université Lumière Lyon 2

Master 1 Anthropologie

Les musées en mouvement :


Médiation dansée au sein de musée
d’anthropologie en France

Raíssa Batista Fonseca


Sous la direction du Professeur Denis Cerclet

Lyon, 2019
2
REMERCIEMENTS

Le travail de réflexion et d’écriture ne se fait jamais seul. Je remercie tout


d’abord mon directeur de recherche Denis Cerclet pour la confiance qu’il m’a accordée
cette année. Je remercie également Manon Julian et Diogo Tavares pour les discussions,
le temps partagé ensemble, les lectures et révisions de mes textes. Merci également à
Emmanuel Prost pour l’amour (la musique et la danse du quotidien) qui me donne de la
force pour continuer le chemin ici (merci à toute sa famille pour son accueil).

À ma famille qui me manque énormément mais qui est toujours présente : mon
(incroyable) mère Analuza Batista, ma sœur LuanaVaz et meu pequeno-grande neveu
João Lucas Vaz.

Être loin de chez soi n’est pas facile (surtout en ce moment politique tellement
difficile chez moi), mais être loin c’est aussi se lancer vers la rencontre des autres. Je
remercie énormément mon réseau affectif et de soutien que j’ai en France : Ju Bezerra
et Bastien Mocacera?, Gabrielle Aurand, Sabrina Caldiès à Lyon. Le stage à Marseille
était possible grâce à Andréia Astier, Joran Tabeaud (Jojo), Sergio Bacalhau, Perlla
Rannielly. Je remercie également Benjamin Ruschi (et la petit Nora), Renata Pires et Lis
Stegmann. Aux amis du Mucem : Emmanuelle Dorbaire, Nicolas Doduik et Meriem
Griss.

Je remercie mes amies toujours présentes dans ma vie, même avec la distance et
la saudade : Camila Góes, Luisa Victor, Lorena Cronemberg, Vi Laraia, Maria Acselrad
et à tous les membre du Coletivo Lugar Comum.

À tous ceux que j’ai pu rencontrer cette année autour de l’anthropologie dans la
promo du master, et autour de la musique grâce au Maracatu Casa Amarela.

Á Jurema Sagrada qui me donne la force et aux Orixás qui me donnent l’amour.

3
Sommaire
INTRODUCTION 6

CHAPITRE 1 –DANSE, MUSÉE ET ANTHROPOLOGIE : L’EXPÉRIENCE À


TRAVERS LE MOUVEMENT 15

La danse entre au musée 15


Enjeux 15
Historique 17
État de l’art 20

Musée et anthropologie 22
Enjeux 22
Historique 25
Du musée du Trocadéro au Musée de L’Homme 25
Le musée de l’Homme et le musée du Quai Branly 27
Le Musée des Civilisations de l’Europe et de la méditerrané (Mucem) 28

Danse et musée d’anthropologie en France 29


Enjeux 29
Quelques exemples français 30

CHAPITRE 2 – MÉDIATION CULTURELLE, ANTHROPOLOGIE ET DANSE


33

Médiation culturelle et musée 33

Médiation culturelle et anthropologie 36

Médiation dansée : trois expériences à Lyon 38


Les rituels dansés à partir d’œuvre d’art, par la Compagnie Propos au Musée des Beaux-Arts
de Lyon 38
« Visite expérience : posture(s) à l’œuvre » dans l’exposition Radio/ Tomorrow’s Sculture de
Katinga Bock à l’Institut d’Art Contemporain de Villeurbanne (IAC) 40
Bal chorégraphié en écho à l’exposition Claude, un empereur au destin singulier  au Musée
des Beaux-arts de Lyon 41

4
CHAPITRE 3 – ON DANSE ? MÉDIATIONS ET DANSE AU MUCEM,
MARSEILLE. 43

L’exposition On danse ? 43

Les médiations autour de l’exposition 46


Salle principale 48
Observations générales 48
Concernant le personnel en salle 49
Anecdote : Qui se permet de danser au musée ? 50
Salle de chauffe 51
Observations générales 52
Anecdote : Comment danse-t-on avec la différence ? 53
Visite-atelier « On danse ? » 53
Visite-atelier : « La danse, très peu pour moi » 55
Observations générales 56
Anecdote : On danse ? 57

Quelle danse pour quel public ? 57


Quelle danse ? 57
Danse exposée, danse médiatisée 58
Danse médiatisée, médiation dansée 59
Pour quel public ? 60
Public présent et public absent 60
Public récepteur et public acteur 61

CONCLUSION 63

BIBLIOGRAPHIE 66

ANNEXES 71

5
INTRODUCTION

Mon intérêt pour la thématique de ce mémoire résulte de mes expériences de


médiatrice culturelle. Au cours de mon parcours en licence de Sciences sociales à
l’Université Fédérale de Pernambuco, j’ai en effet eu l’opportunité de développer
diverses formes de médiation au sein de deux musées de la ville de Recife : le Musée
d’art moderne Aloísio Magalhães (stage à mi-temps de deux ans, entre 2011 et 2013) et
le Musée du l’Homme du Nordeste (stage à mi-temps d’un an en 2017). Associée à la
constante pratique artistique (danse, théâtre et cirque) à laquelle j’ai toujours accordé
une grande place dans mon apprentissage ainsi qu’aux études de spécialisation en Danse
et Éducation1 (2017-2018), ce travail mené dans les musées a stimulé ma réflexion sur
la possibilité de concevoir les pratiques pédagogiques de médiation à partir de
l’expérience sensible et corporelle, donc par la danse.

Dans le cadre du mon premier stage au Musée d’art moderne Aloísio Magalhães,
la formation avec la commissaire Suely Rolnik2 en vue de la conception de l’exposition
de l’artiste brésilienne Lygia Clark a aiguisé mon intérêt sur la puissance de la
médiation dans le musée. Artiste moderniste, Lygia Clark a lancé à son époque une
nouvelle manière d’aborder l’œuvre artistique : elle a apporté au musée la nécessité
d’un engagement du corps du visiteur à travers la sensation et la perception 3. Une autre
question abordée dans cette formation était celle de l’importante de la médiation dans
l’élaboration même d’une exposition, surtout pour une artiste dont les œuvres trouvent
sens à travers l’expérience.

Quelques années plus tard, en tant que stagiaire au Musée du l’Homme du


Nordeste, les approches sensibles et expérimentales dans la médiation m’ont
m’interrogée à nouveau. Cette fois le défi était de construire une médiation orientée à
partir du corps en mouvement – l’expérience kinesthésique et sensitive en général –

1
. Mon travail final s’intitule : Museu em movimento : dança, mediação e antropologia.
2
.Suely Rolnik est psychanalyste, critique d'art et de culture et professeur titulaire à l'Université
Catholique de São Paulo où elle coordonne un programme de doctorat d'études transdisciplinaires
sur la subjectivité contemporaine. Elle a été professeur invitée dans le cadre du programme d’études
indépendantes (PEI) du Musée d'Art Contemporain de Barcelone (MacBa).
3
.Pour approfondir sur l’importance de Lygia Clark dans la relation entre art et le musée au Brésil
voir : Suely Rolnik (2007/1) « La mémoire du corps contamine le musée ». Multitudes nº 28, p. 71 à
81.

6
dans un musée d’anthropologie. Intitulé « Médi(action) : déplacer le musée au travers
du sensible », ce projet, destiné à un public adolescent, proposait d’aborder les questions
historiques et anthropologiques présentées par l’exposition permanente du musée
« Nordeste : territoires pluriels, culturels et droits collectifs ». Le développement d’un
éventail d’activités proposées aux jeunes visiteurs (jeux corporels, mises en récit,
travaux de description, etc.) m’a conduit à formuler une série d’interrogations.
Comment intégrer à l’expérience sensible du visiteur une dimension anthropologique ?
Comment la danse en particulier peut permettre la transmission d’une culture matérielle
et immatérielle évoquée par une exposition ethnographique ?

J’ai initié une première réflexion au sein du cours de spécialisation en « Danse et


Éducation : pratiques et pensée du corps », ayant abouti à l’écriture (sous la direction de
Giorrdani Gorki) d’un article intitulé « Museus em movimento : dança, médiação e
antropologia ». J’y présentais l’expérience de la médiation que j’avais développée avec
la danseuse Rebeca Godin. Le master d’anthropologie de l’Université Lumière Lyon II
est pour moi l’occasion de développer ces questions dans le contexte muséal en France.

Quelles sont les relations possibles entre la danse et le musée ? Quelle est
l’intérêt du musée – espace constitué à partir de la notion archive, gardien de la
mémoire – pour la danse, art éphémère ? Ce mémoire envisage d’étudier la relation
entre la danse et le musée et plus spécifiquement la danse dans la médiation culturelle.
La danse peut-elle constituer une pratique expérimentale de médiation au sein du musée
et du musée d’anthropologie en particulier ? Quelles sont les expériences possibles
apportées par la danse dans une médiation ?

Mes pratiques artistiques développées parallèlement à mon parcours scientifique


ont toujours contribué à ma manière de penser et pratiquer l’anthropologie. Ce travail
est donc situé dans une approche anthropologique et ethnographique qui « se distingue
généralement par la méthode d’observation participante et le mode qualitatif de
recherche4 ». Ce travail se fonde également sur la notion de « corps-témoin ».

4
.Theresa Jill Buckland (2013). « Mudança de perspectiva na etnografia da dança ». In CAMARGO,
Giselle Guilhon Antunes (org) Antropologia da dança I/. Florianopolis: Insular .Traduction libre du
portugais.

7
Développée par Theresa Jill Buckland dans son essai d’introduction à l’ethnologie de la
danse intitulé « Mudanças de perspectiva na Ethnografia da Dança5 » (2010), cette
notion invite à inclure dans les observations du chercheur sur le terrain la représentation
de ses sensations corporelles, puisque « la force de l’ethnographie est, avec toutes ses
imperfections, d’éclairer les expériences et d’obtenir une compréhension des pratiques
partagées qui sont en même temps rarement consensuelles mais plutôt conflictuelles,
négociées et émergentes6 ».

L’intérêt de proposer une recherche sur la médiation dansée dans le musée


d’anthropologie en France émerge par conséquent de questionnements sur la production
même de connaissances en anthropologie. Premièrement, l’espace du musée
d’anthropologie se trouve questionné : en résistance à l’héritage colonial qui le
détermine, quelles sont les pratiques qui visent la production et le partage d’une
connaissance qui s’éloignent du colonialisme et de la notion de « culturel exotique » ?
La deuxième question émerge, celle de l’importance du corps et de la dimension de
l’expérience corporelle pour réfléchir sur l’altérité : comment le corps en mouvement
peut aider à élaborer une connaissance anthropologique – féministe et décoloniale ?
Enfin, on peut questionner le rôle de la propre médiation dans l’anthropologie : quels
sont les contributions de la médiation – et donc du médiateur culturel – pour les
anthropologues et pour la recherche en anthropologie ?

À travers de tels questionnements, mon intérêt, influencé par mes lectures


féministes7 et décoloniales8, est donc mettre en pratique une médiation culturelle dans le
musée qui pourrait contribuer à une réflexion sur les musées d’anthropologie – et la
production anthropologique en général – basée sur l’expérience via le mouvement
corporel et par conséquent, sur un « savoir » kinesthésique9. Les études de
l’anthropologie de la danse et du corps, influencées par la phénoménologie de Merleau-
Ponty, ont contribué à considérer le caractère incarné (embodiment) de la connaissance
5
.Theresa Jill Buckland (2013). Op. cit.
6
.Ibidem, p.150.
7
.Sandra Harding (1986). The Science Question in Feminism. Ithaca & London, Cornell University
Press; CURIEL, Ochy. (2007). Critique postcoloniale et pratiques politiques du féminisme
antiraciste. Mouvements, 51(3), 119-129. doi:10.3917/mouv.051.0119
8
., Boaventura de Souza Santos (2002) Para uma sociologia das ausências e uma sociologia das
emergências. Revista Crítica de Ciências Sociais, 63, Outubro. p. 237-280.; SANTOS, Boaventura.
(2007) Para Além do Pensamento Abissal: Das linhas globais a uma ecologia de saberes. Revista
Crítica de Ciências Sociais, 78, Outubro. P.3-46.
9
.Kinesthésique : Relatif à la kinesthésie ; qui concerne la sensation de mouvement des parties du
corps. [sources : Trésor de la Langue Française].

8
ethnographique10. Le paradigme « d’embodiment » présenté pour Thomas J. Csordas11,
nous montre que le corps doit être compris non comme un objet « bien pour penser »
mais comme un sujet nécessaire pour être12. La notion d’embodiment est donc « un
champ méthodologique indéterminé défini par des expériences perceptuelles et par la
présence et l’engagement au monde. [...] l’expérience incarnée est le point de départ
pour analyser la participation humaine au monde culturel13 ». C’est à travers cette
approche que souligner l’importance de l’engagement du corps de la chercheuse-
danseuse dans une recherche anthropologique en danse14 devient, pour moi, nécessaire.

Ainsi, si nous considérons l’expérience des musées ethnographiques comme une


manière d’aborder l’anthropologie elle-même, il serait nécessaire de « remplace[r]
l’objectivation de la danse en tant que structure par les sensations de la danse en tant
que processus. [...] En faveur des récits de première main qui utilisent leur propre corps
comme outil pour documenter et étudier la danse 15 ». Dans le même sens, le corps
servirait dans la médiation sensorielle à documenter et à explorer le musée : en partant
du corps en mouvement et de ses sensations, il s’agit de produire une réflexion
autonome et donc transformante en tant que pratique pédagogique. À travers ce type de
médiation, la hiérarchie entre le médiateur/ethnologue et les sujets du terrain est
également mis en question : si l’objectif est de proposer des voies et des moyens au
visiteur pour participer au processus lui-même, les relations de pouvoir entre ces sujets
changent.

Autrement dit, en considérant l’expérience corporelle comme une dimension


importante de la production de connaissance, le musée d’anthropologie comme un
espace de questionnement de l’anthropologie elle-même, et la médiation comme une
façon de repenser le positionnement de l’anthropologue et les questions de pouvoir entre
10
.Patricia Aschieri et Rodolf Puglisi, (2010) Cuerpo y producción de conocimiento en el trabajo de
campo. Una aproximación desde la fenomenologia, las ciências cognitivas y las práticas corporales
orientais. In Cuerpos plurales. Antropología de y desde los cuerpos. Coord. Silvia Citro. Biblios,
1ed, Buenos Aires.
11
.Thomas Csordas. (1994). Embodiment and experience. The existential ground of culture and self.
Cambridge University Press e CSORDAS, Thomas. (2010). “Modos somáticos de atention” in
CITRO, Silvia (org) Cuerpos plurales. Antropología de y desde los cuerpos. Biblios, 1ed, Buenos
Aires.
12
.Ibidem, p.83
13
.Idem.
14
.Maria Acselrad (2018) « Em busca do corpo perdido: o movimento como ponto de partida para a
pesquisa antropológica em dança ». In CAMARGO, Giselle Guilhon Antunes (org). Antropologia da
dança IV/ Florianópolis: Insular.
15
.Ibidem, p. 61.

9
le chercheur et les sujets du terrain, deux principales réflexions épistémologiques me
semblent se distinguer : l’anthropologie réflexive des années 1960, et particulièrement
les contributions de l’épistémologie féministe16, ainsi que l’anthropologie de la danse et
du corps.

Si les prémices de la science traditionnelle sont basées sur l’idée de neutralité


scientifique, d’objectivité, d’universalité, désincarnées17 et donc, sur une connaissance
non située18, mon intérêt est, au contraire, de penser et produire une étude
anthropologique située, incarnée qui considère les subjectivités dans la production des
sciences. Cette réflexion, initiée par les théories post-modernes et développées par les
ethnologues féministes, nous montre l’importance de l’expérience de l’ethnologue dans
la production de connaissances. Cecilia Sandenberg19 propose l’image du kaléidoscope
pour penser les possibilités de variations ouvertes par les rencontres ethnographiques :

En regardant dans le viseur du kaléidoscope, la lumière des miroirs


est reflétée dans les prismes au moyen de cellules contenant des
morceaux de verre, des coquillages et autres, qui créent différentes
« mosaïques », ou motifs de dessin et de couleur, à chaque
mouvement du tube [ ...] Si nous prenons les catégories de genre,
race, classe sociale, ethnie, génération, sexualité, etc. comme des
« prismes sociaux » et des miroirs comme un contexte dans lequel
elles se reflètent dans le temps et l’espace sociaux, la métaphore du
kaléidoscope permet de saisir la dynamique de les relations
sociales dans la mesure où le « prisme de genre » interagit avec
d'autres « prismes sociaux » (de race, d'origine ethnique, d'âge, de
sexualité, de classe sociale, etc.), produisant des « mosaïques »
distinctes ou des schémas complexes d'identités et de relations [...],
toujours historiquement spécifiques20.
16
.Plus spécifiquement l’ouvrage Feminismo, ciência e tecnologia (2002) organize par Ana Alice
Alcântara Costa et Cecilia Maria Bacellar Sandrenberg.
17
.Traduction du portugais : Descoporificado, autrement dit sans considérer le « corps ».
18
.Cecília Sardenberg. (2014). « Revisitando o campo: Autocrítica de uma antropóloga feminista » In
Dossier: passado y presente de la antropologia feminista. Mora (B. Aires) vol.20 no.1 Ciudad
Autónoma de Buenos Aires ago; HARDING, Sandra (1996). « Rethinking Standpoint Epistemology:
What is Strong Objectivity? », en Keller, Evelyn Fox y Longino, Helen E (Eds.), Feminism &
Science, Oxford, Oxford University Press, pp. 235248.
19
.Cecilia M. B Sardenberg (2002). « Da Crítica Feminista à Ciência a uma Ciência Feminista? », en
COSTA, Ana Alice y SARDENBERG, Cecília M. B., Feminismo, Ciência e Tecnologia, Salvador,
NEIM/UFBA,REDOR. Disponible sur: http://vsites.unb.br/ih/his/gefem/labrys11/libre/cecilia.htm.
20
.Traduction du portugais: “Quando olhamos pelo visor do caleidoscópio, a luz dos espelhos se reflete
nos prismas por meio de células contendo pedaços de vidro, conchas e elementos semelhantes, o que
cria diferentes 'mosaicos', ou padrões de desenho e cores, a cada movimento do tubo [...]. Se
tomarmos as categorias gênero, raça, classe, etnia, geração, sexualidade, etc., como "prismas sociais"
e os espelhos como o contexto em que se refletem no tempo e espaço sociais, a metáfora do
caleidoscópio nos permite apreender o a dinâmica das relações sociais na medida em que o "prisma
de gênero" interage com os demais "prismas sociais" (de raça, etnia, idade, sexualidade, classe
social, etc.), produzindo "mosaicos" distintos, ou complexos padrões de identidades e relações [...],
que são sempre historicamente específicos (Sardenberg, 2011: 0203)”/ SANDENBERG, Cecilia.

10
À travers cette réflexion, il me semble important de considérer mes propres
prismes sociaux dans les relations qui se jouent sur le terrain : jeune femme, brésilienne,
donc étrangère en France. Considérer toutes les possibilités de ces « mosaïques » qui
impliquent d’« affecter et être affectée21 » devient incontournable dans la recherche et
est, sans doute, enrichissant pour l’anthropologie.

Pour conclure, le désir de mettre en place une médiation dansée – c’est-à-dire


provoquer le corps en mouvement, en explorant la perception et les émotions comme
support pour une visite à une exposition – est lié à la volonté d’investigation sur le rôle
du corps et de la corporéité dans les études ethnographiques. L’entrelacement des
mouvements et des théories produit en effet des discours et de nouvelles connaissances
où il est possible de déplacer des pensées en pensant à partir du mouvement22.

« […] Les façons de bouger sont des façons de penser23 »

Évoquer la danse comme un chemin pour la recherche revient à mobiliser


l’expérience de la danse. Hugo Leornardo da Silva, dans la préface de son ouvrage
Desabituação compartilhada : Contato improvisação, jogo de dança e vertigem (2014)
nous rappelle que « l’explication sur l’expérience n’est pas l’expérience, c’est quelque
chose d’autre qui utilise des éléments d’expérience et y fait référence24 ».

Selon un regard anthropologique, il est important de mettre en évidence que


« certaines langues n’ont pas de terme générique pour ces activités que nous appelons
danse et musique25 ». La notion de « danse » peut par conséquent être conçue comme
une notion fondée par la propre pensée occidentale. Ce n’est pas pour autant que les

(2002). Op. cit.


21
.Jeanne Favret-Saada. (2009). Désorceler. Paris, Éditions de l’Olivier.
22
.Silvia Citro. (2012). « Cuando escribimos y bailamos. Genealogías y propuestas téorico-
metodológicas para una antropologia de y desde las danzas » In CITRO, Silvia y ASCHIERI, Patricia
(org), Op. cit.
23
.Theresa Jill Buckland, 2013, Op. cit. p.149.
24
.Hugo Leonardo da Silva. (2014) Desabituação compartilhada: contato improvisação, jogo de
dança e vertigem. Valença: Selo A Editora.
25
.Hugo Zemp (2010), « Pour entrer dans la danse ». In Les Danses du Monde, (livre-disque), Paris :
collection CNRS, Musée de l’Homme, p. 3-25. p.3 .

11
questions développées jusqu’aujourd’hui autour de « la danse » ne peuvent pas nous
aider à penser ce que nous appelons « danse ». L’ethnomusicologue Hugo Zemp cite la
définition interculturelle de la danse proposée par l’anthropologue Judith Hanna dans
son ouvrage To dance is human (1979) :

La danse peut être plus correctement définie comme un


comportement humain composé du point de vue du danseur, de
séquences volontaires intentionnellement rythmées et structurées
culturellement. Ces séquences sont formées de mouvements
corporels non verbaux, différents des activités motrices
quotidiennes et ils ont des valeurs esthétiques inhérentes 26.

Avec le développement des nouvelles techniques et styles de danse (contact


improvisation27, mouvement authentique28 etc.) nous pouvons par ailleurs ajouter que la
danse est aussi

[…] un exercice constant sur la perturbation des sens […] faisant


référence aussi bien aux interfaces du corps humain qu’à son
environnement et à sa dimension sémantique. Autrement dit, les
sens que « nous apportent » les choses du monde et le sens que
nous nous faisons de ces choses (à partir des choses et à leur
sujet29…)

La danse est considérée comme l’expérience de la relation du corps qui danse. À


travers l’action de « faire », elle devient ainsi également l’action de « dire ». En
considérant l’implication et le compromis des corps dans les relations qu’ils établissent
avec l’environnement « la danse et la politique partagent le même processus de
constitution de propositions et d’idées artistiques et collectives30. »

En évoquant la relation entre la danse et le musée d’anthropologie, on pourrait


rapidement associer celle-ci aux seules représentations des danses appelées
26
.Ibidem, p.4
27
.La naissance du Contact Improvisation est datée de 1972. Cette technique est née aux Etats-Unis à
partir du travail danseurs de traditions de danse moderne avec des propositions d’avant-garde.
(SILVA, Hugo, 2014, p.16).
28
.Mise en place à la fin des années cinquante aux États-Unis par la danseuse, Mary Stark Whitehouse,
qui est devenue psychanalyste. Formée en analyse jungienne et inspirée de la théorie de
l’imagination active développée par Jung, la danseuse a glissé d’un intérêt tourné vers le danseur et
la transmission du mouvement à une attention dirigée vers la personne qui danse. (KUYPERS,
Patricia. (2016). « Être vu les yeux fermés. La discipline du mouvement authentique » In Psarolis,
Alexia (coord) Nouvelles de danse. NDD- HIVER 16, Nº65. p.16.
29
.Hugo Leonardo da Silva. (2014), Op. cit. Traduction du portugais: “[...] um exercício constante
sobre a perturbação dos sentidos [...] refereindo-se tanto às interfaces do corpo humano com seu
ambiente como a dimensões semânticas. Ou seja, os sentidos que “trazem” as coisas do mundo até
nós e os sentidos que fazemos dessas coisas (e a partir delas e a despeito delas...)” .p.15
30
.Jussara Sobreira Setenta. (2008) O fazer-dizer do corpo : dança e performatividades. Salvador:
EDUFBA. p.11.

12
« folkloriques ». Au contraire, ma pensée sur la médiation dansée se tourne vers une
recherche de mouvements du corps établis à travers la relation avec les œuvres, l’espace
du musée et les contextes des œuvres exposées. Il s’agirait plutôt d’explorer la capacité
de la danse de mettre en relation les autres et soi-même dans l’espace du musée, et ce à
partir des œuvres exposées. Il me semble nécessaire pour cela de convoquer des
questions sociales et humaines – normalement abordées dans le musée
d’anthropologie – à partir de la danse et du corps.

L’intérêt n’est donc pas de parler d’un style particulier de danse, mais de
comprendre la danse comme la mise en relation avec l’autre et avec soi-même par le
corps en mouvement dans l’espace (espace, temps et corps, éléments indispensables
pour penser et pratiquer la danse), capable de faire sentir et penser.

Pour l’élaboration de cette réflexion, nous allons initier une discussion sur
l’entrée de la danse au musée à travers un bref historique ouvrant sur une présentation
de quelques enjeux de la notion (notamment à partir de l’esthétique et des travaux
développés autour de la médiation dansée dans le musée). Cette première approche
permettra ensuite de réfléchir sur les enjeux de la relation entre l’institution muséale et
l’anthropologie, puis sur la manière dont la danse devient un élément de recherche pour
l’anthropologie et par conséquent pour le musée d’anthropologie.

Afin d’entrer plus avant dans les questionnements que je me propose de traiter
dans ce mémoire, il était également nécessaire de faire une cartographie des médiations
dansées dans les musées à Lyon. J’ai ainsi participé à des médiations dansées dans
divers musées, afin d’observer et décrire les activités développées, et de vivre moi-
même l’expérience de la médiation dansée. J’ai pu identifier trois médiations basées sur
la danse à Lyon durant cette année universitaire : des rituels dansés à partir d’œuvres
d’art de la collection permanente, par la Compagnie Propos au Musée des Beaux-Arts
de Lyon, une « visite expérience » intitulée « Posture(s) à l’œuvre dans l’exposition
Radio/ Tomorrow’s Sculture de Katinga Bock » à l’Institut d’Art Contemporain de
Villeurbanne (IAC), et un bal chorégraphié en écho à l’exposition Claude, un empereur
au destin singulier au Musée des Beaux-arts de Lyon. Ces trois expériences dans

13
différents types de musées suivant différents modes d’élaboration de médiation ont
nourri mes questionnements sur les relations entre danse, musée et anthropologie.
J’aborderai cet apport dans le deuxième chapitre de ce mémoire.

Enfin, un cas spécifique du musée d’anthropologie sera traité dans le troisième


chapitre. J’y présenterai les expériences de médiation que j’ai observé dans le cadre de
mon stage réalisé au Mucem à Marseille autour de l’exposition On danse ?. L’objectif
était de réaliser une évaluation des activités de médiation autour de l’exposition On
danse ?. Le stage m’a ainsi permis d’observer les diverses dimensions de la
médiation au MuCem. Pour cette analyse, j’ai également été conduite à une réflexion
sur l’exposition elle-même, d’autant plus qu’elle abordait la propre thématique de la
danse et de l’expérience que constitue l’acte de danser.

Effectué durant une période d’environ un mois, entre le 29 mars et le 18 mai


2019 (annexe 3), le stage se composait de trois moments d’observations : du 29 mars au
13 avril, du 19 avril au 21 avril et du 11 mai au 18 mai. J’ai ensuite suivi onze visites
guidées de différents types et observé plusieurs activités (évènements et projets) autour
de l’exposition. Enfin, les rencontres et les entretiens (semi-structurés) aussi bien avec
les médiateurs, les guides, les agents de sécurité que les responsables des actions
développées tout au long de l’exposition, constituaient une partie importante du travail.
Afin de réaliser mon évaluation des médiations autour de cette exposition, j’ai ainsi pu
observer, participer et dialoguer avec plusieurs acteurs impliqués, ceci de l’élaboration
de la médiation à sa réception, en passant par sa réalisation.

14
CHAPITRE 1 –DANSE, MUSÉE ET
ANTHROPOLOGIE : L’EXPÉRIENCE À TRAVERS LE
MOUVEMENT

Dans le premier chapitre, nous réfléchirons à partir du fait que la notion


d’esthétique réunit en soi celle d’expérience. Nous aborderons ensuite l’entrée de la
danse dans le musée d’un point de vue historique et exposerons les travaux académiques
qui nourrissent la discussion sur la médiation dansée dans le musée. Pour approfondir
notre réflexion et nous attacher au cas du musée d’anthropologie, nous retracerons
brièvement le développement des musées d’anthropologie en France pour évoquer les
enjeux politiques et réflexifs des mutations de ces institutions pour la propre
anthropologie. Finalement, nous réfléchirons sur la relation entre danse et anthropologie
à travers quelques exemples de la manière dont la danse se présente dans le musée
d’anthropologie en France.

La danse entre au musée


Enjeux

Aborder les questions du musée et de la danse revient à évoquer l’enjeu de


l’esthétique qui prend une place importante dans la pensée philosophique et dans les
études sur l’art. Cette discipline est toutefois fortement critiquée pour être considérée
comme une « science du Beau », comme l’a fait Paul Valéry dans son Discours sur
l’Esthétique (1937), ou comme un « régime de perception et de pensée » ou
d’« identification de l’art » qui permet de dire « ceci est de l'art » ou « ceci appartient à
tel ou tel art », comme l’a fait Jacques Rancière31.

John Dewey dans son ouvrage L’art comme expérience (1934) convoque
plusieurs idées sur la relation entre œuvre d’art et expérience. Selon lui « l’œuvre d’art
se compose en fait des actions et des effets de ce produit sur l’expérience 32 ». En

31
.Jacques Ranciere. (2011) Aisthesis. Eric Loret, « Libération » 17 novembre.
32
.John dewey. (2005). L’art comme expérience. Editions: Folioessais. p.30

15
critiquant le musée comme un espace rappelant la montée du nationalisme et du
l’impérialisme, il affirme :

La montée du capitalisme a exercé une influence puissante sur le


développement des musées en tant que lieux propres à accueillir les
œuvres d’art et a contribué à répandre l’idée que les œuvres d’art
ne font pas partie de la vie quotidienne33 .

Le musée est en cela conçu comme un espace isolé de la vie quotidienne par un
régime de classification du « beau ». Par conséquent, l’esthétique éloignerait l’art des
gens, du quotidien et donc, de l’expérience. Il s’oppose également à la tradition
kantienne, c’est-à-dire à la prévalence de la notion de beauté ; John Dewey34 défend que

L’art est non pas l’émanation spirituelle éthérée d’une muse céleste
lointaine, mais une excrétion incarnée, expressivement épurée, des
énergies naturelles présentes dans nos transactions vivantes avec
notre environnement naturel et culturel, orientée vers un
accomplissement supérieur de la vie35.

Est-il possible, alors, de sensibiliser le public à travers une expérience incarnée


– par exemple la danse, le chant, le jeu ?

Le mot aisthesis, d’origine grecque, évoque la sensation, le processus de


perception ; la sensation visuelle, gustative et auditive est ainsi proposée pour penser la
« sensation du beau36 » au détriment de l’esthétique, en tant que théorie de classification
du beau. Il nous est permis de déduire que la danse dans la médiation au musée
s’approche d’une recherche orientée par l’aisthesis, autrement dit par l’expérience
incarnée, corporelle et créatrice de sensations et de perceptions :

Lorsque nous nous déplaçons, nous avons « une circularité entre


les événements de l’environnement et ceux du corps même, qui
s’établit avec un certain apprentissage, c'est-à-dire une nouvelle
interprétation de ces événements » (NOBREGA, 2008, p.146). La
perception serait donc indissociablement psychique, sensorielle et
motrice37.

C’est donc à travers une conception de l’esthétique incarnée que la danse peut
être utile dans la médiation muséale.

33
.Ibidem, p.37.
34
.Idem
35
.Richard shusterman. (2005). Présentation de l’édition française de L’art comme expérience.
Traduction coordonnés par Jean-Pierre Cometti. Collection : Folio Essais. Ed : Tractatus & Co.
36
.Walter D. Mignolo (2010) Aiesthesis decolonial. Calle14, v.14, n.4, Enero-juin.
37
.Maria Acselrad. Op. cit. p.57

16
Historique

La liaison entre la danse et le musée apparaît de manière évidente en 1841 avec


l’introduction des attractions vivantes au sein des collections du Phineas Taylor Barnum
à New York38. Elle est ensuite explorée par des danseurs qui réalisent leurs recherches à
partir des objets du musée. C’est le cas d’Isadoran Ducan, pionnière de la danse
moderne, qui conçoit des chorégraphies à partir de son regard sur les vases grecs du
Musée du Louvre et du British Museum. En 1933, Rolf de Maré fonde à Paris une
association qui devient le premier musée de la danse : les Archives internationales de la
danse, en activité jusqu’en 195239.

C’est cependant dans les années 1960 que la relation entre danse et musée
s’intensifie. En 1964 Merce Cunningham crée l’évènement Museum Event No1 :

Présenté sans entracte, Event consiste en des danses complètes ou


des extraits de danses du répertoire avec souvent de nouvelles
séquences arrangées pour une performance et un lieu particulier,
avec plusieurs activités séparées qui se déroulent en même temps
pour permettre moins une soirée de danse que l'expérience de la
danse40.

La même année, il se présente à Vienne dans le Museum des 20 Jahrhunderts (le


musée du XXª siècle)41 pour un happening42.

En cherchant de nouveaux espaces où se présenter, la danse moderne et la


performance interrogent les codes préexistants et envisagent dans le même temps le
travail avec des disciplines artistiques différentes. Le changement dans le monde des
arts visuels comme au sein de la propre danse produit des échanges importants pour les

38
.Marisa Hayes. (2017/1). Dates Clefs. Repères, cahier de danse 2017/1 (n° 38-39), p. 4-6.
DOI 10.3917/reper.038.0004
39
.Idem
40
.Musée d’art Moderne de Paris, Event Merce Cunningham. Disponible sur:
http://www.mam.paris.fr/fr/activite/event-merce-cunningham. [Consulté le 12 août 2019].
41
.Fabienne Boursiquot (2014) « Musée et anthropologie ». Essai bibliographique sur les ouvrages DE
L’ESTOILE B (2007) Le goût des autres. De l’exposition coloniale aux arts premiers. Paris, Édiations
Flammarion et MAZÉ, C., F. POULARD ET C. VENTURA (dir.) (2013) Les musées d’ethnologie. Culture,
politique et changement institutionnel. Paris, Éditions du CTHS In Anthropologie et Sociétés, vol.
38, nº 309-323.p.8
42
.« Le terme « happening » fut choisi en avril 1957 par Allan Kaprow pour désigner un événement en
général et prit la forme de collages de différents éléments artistiques s’organisant en
« environnement » ou assemblages dans lesquels le public intervenait » (ROQUES, Sylvie et
VIGARELLI, Georges (2008/2) « Enjeux et limites de la performance ». Communications, nº83,
p.169-179. P.173).

17
représentations de la danse professionnelle en dehors de l’espace conventionnel, à
savoir celui du théâtre.

Avec le développement de la danse post-moderne – elle-même constituante de la


composition de la danse contemporaine aujourd’hui – le lien entre danse et musée
devient plus évident. La recherche caractéristique de ces styles de danse est essentielle
pour la création des spectacles ; le musée devient par conséquent un espace de dialogue
avec d’autres expressions artistiques mais aussi avec d’autres espaces possibles, ceci
pour montrer une danse qui diffère du Ballet, forme prédominante dans les théâtres à
l’époque. En 1966, des danseurs et chorégraphes – parmi eux Steve Paxton, Trisha
Brown, Simone Forti et Yvonne Rainer – ont ainsi performé dans des musées et des
galeries d’art grâce à la création du Judson Danse Theatrer. Il est intéressant de noter
que ces artistes étaient les premiers à introduire l’improvisation de façon systématique
dans la danse43. En France cette relation se consolide avec la création d’un secteur de
danse au Musée national d’Art moderne de la Ville de Paris, l’ARC (animation,
recherche et confrontation). Crée en 1966 par Lise Brunel 44, il permet à de jeunes
compagnies d’organiser des actions dans le musée45.

La danse a cependant été souvent pratiquée dans sa dimension spectaculaire sous


la forme de spectacles et non dans sa simple relation avec les œuvres. C’est seulement
dans les années 1990 que la danse entame un réel dialogue avec les œuvres visuelles
exposées au musée et commence ainsi à être considérée comme une pratique apportant
des outils importants pour révéler les dimensions socio-politiques de l’esthétisme46.

Dans son mémoire de master, Charline Bidault propose une liste non-exhaustive
des présentations de danse au sein de musées ayant eu lieu ces dernières années en
France :

Avec Aatt enen tionon en 1996, Boris Charmatz investit l'espace


d'accueil du Centre Pompidou et déplace la chorégraphie sur une
structure d'échafaudage ; The Show Must Go On de Jérôme Bel
présenté en 2002 au Centre Pompidou, déconstruit la notion de
danse perçue par le public, et « épure le plateau au maximum pour
mettre en scène et désosser les éléments constitutifs de la société
43
.Charline t. (2016). L’intervention de la danse dans les musées et les monuments historiques comme
outil de médiation. Master 1 « Médiation Culturelle, patrimoine et numérique ». L’université Paris
X.
44
.Lise Brunel (1922-2011) était une journaliste qui a beaucoup écrit sur la danse.
45
.Charline Bidaul (2016). Op. cit.
46
.Idem.

18
de consommation ». […] En 2012, la Tate Modern a créé les
Tanks, « des espaces bruts, industriels, souterrains [...] qui seront le
point d'ancrage pour la présentation d'art vivant et de films au sein
de la Tate Modern » ; le Museum of Modern Art (MoMA) accueille
de manière régulière des artistes comme Boris Charmatz, par
exemple avec Three Collective Gestures en 2013 ; les galeries d’art
font de même avec par exemple l’exposition Move.
Choreographing You : Art and Dance Since the 1960s à la
Hayward Gallery à Londres en 2012, qui intégrait « des
installations reconstituées et commandées (quelques
participatives), des œuvres d’art, et des performances (qui étaient
pour la plupart des reconstitutions) ». Plus récemment, le Centre
Pompidou accueillait Anne Teresa De Keersmaeker en mars
dernier pour sa création-exposition de neuf jours
Work/Travail/Arbeid, qui « re-imagin[ait] sa chorégraphie Vortex
Temporum [...] dans un environnement muséal » et permettait au
public de se promener, « occup[er] l’espace, s’imbriqu[er] même
dans l’œuvre et la danse47 ».

Toutes ces interventions ont influencé l’intégration de la danse dans le musée.


En ce qui concerne la danse dans la médiation culturelle, c’est seulement en 2007 que la
chorégraphie Aurélie Gandit élabore sa première « visite dansée » au Musée des Beaux-
Arts de Nancy48.

En 2019, le danseur Boris Charmatz assume la direction du Centre


chorégraphique National de Rennes et le renomme le Musée de la Danse. Celui-ci
devient alors à la fois un lieu de croisement, un espace de conservation et un espace
pour penser, pratiquer et élargir les frontières de la danse49. Le projet du Musée de la
Danse a duré dix ans (entre 2009 et 2018) et a proposé plusieurs projets mêlant
pratiques et théorie de la danse. Dans un entretien pour France Culture, Boris Charmatz
évoque cette institution :

On s'est dit [que] un Musée de la danse serait une sorte de tiers


espace dans lequel des artistes visuels, des danseurs, des
chorégraphes, et bien sûr, des visiteurs, du public, pourraient
s'emparer de cette idée-là et pratiquer, expérimenter, découvrir,
s'enrichir, et enrichir l'idée qu'ils se font de cet art. On s'est dit
qu'on inventerait un musée à partir de zéro, parce que quand on a
commencé à Rennes il n'y avait rien. (...) C'est un jeu de bascule où
les postures ne sont pas fixes, il n'y pas le danseur sur scène et le
spectateur dans la salle et le technicien à la lumière... Il y a

47
.Charline Bidault. (2016). Op. cit. p.11.
48
.Marisa Hayes. Op. cit., p. 4-6. Visite dansée au musée des beaux-arts de Nancy, Cie La Brèche
Aurélie Gandit. Video Visite danse disponible sur: https://vimeo.com/19248064. [Consulté le 10
août 2019]
49
.Musée de la danse. Disponible sur: http://www.museedeladanse.org/fr/articles/musee-de-la-
danse.html . [Consulté le 10 août 2019]

19
vraiment une œuvre commune où on peut passer du visiteur au
spectateur, au participant, à l'artiste, à l'œuvre d'art 50...

La danse devient donc de plus en plus une possibilité d’exploration esthétique


des œuvres d’art présentes au musée, trouvant alors une place dans la majorité des
musées en France. Plusieurs musées contiennent actuellement des secteurs d’arts du
spectacle et proposent une programmation de spectacles tout au long de l’année. La
danse contribue ainsi à une dimension évènementielle dans laquelle les musées sont de
plus en plus engagés. En effet, les spectacles de danse, théâtre et conférences répondent
à la nécessité de diversification du public tout en conservant et augmentant les
propositions pour les publics habituels. Elle ne semble cependant pas encore assez
explorée en tant qu’outil de relation entre la perception du public et les œuvres
artistiques dans la médiation au musée, et plus spécifiquement dans le musée
d’anthropologie.

État de l’art

La relation entre danse et musée est encore très peu traitée dans l’univers
académique et universitaire au Brésil comme en France. Il me semble donc important de
mener une réflexion et un dialogue avec les travaux initiés auparavant. Commençons
par en résumer les principaux.

Au Brésil, Ail Regina da Silva écrit dans son mémoire Interdit de toucher,
autorisé de danser : danse et médiation dans le Musée d’art contemporaine 51 (2017) sur
l’expérience de six médiations réalisées dans l’exposition au MAC/USP à São Paulo. La
danse était choisie comme outil de médiation pour être une activité artistique possible à
réaliser pour tout le monde, pour tous corps. Ail da Silva évoque les théories de
Merleau-Ponty pour aborder la question d’expérience et de la perception de l’art, en
considérant qu’occuper le musée par la danse peut transformer la manière de se déplacer
dans l’espace et de transformer la relation avec l’art à travers le corps. Elle est

50
.Entretien avec Boris Charmatz sur France Culture « Le Musée de la Danse est une œuvre commune
où on peut passer du rôle de visiteur à celui de danseur », le 15/10/2017. Disponible sur :
https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/la-nuit-revee-de-boris-charmatz-
entretien-23. [Consulté le 11 août 2019]
51
.Traduction libre du portugais. Original: Proibido tocar, permitido dançar: dança e mediação no
museu de arte contemporanêa. SILVA, Aila Regina da. (2017). “Proibido tocar, permitido dançar”:
dança e mediação no museu de arte contemporânea. Dissertação Mestrado programa de pós-
graduação Interinidades em Estéticas e História da arte. São Paulo- SP

20
également l’auteur de l’article intitulé « Le corps médiateur : danse et médiation dans le
musée52 » construit à partir de ses recherches précédentes.

En France, dans son mémoire de master intitulé L’intervention de la danse dans


les musées et les monuments historiques comme outil de médiation (2016), Charline
Bidault aborde la question de la danse comme un outil pour la médiation dans le musée
et dans les monuments historiques à partir de deux projets : le Dancing Museums et le
Monuments en mouvement, développé entre 2015 et 2017 et proposé par L’Union
Européenne. Plusieurs exemples de dialogues de la danse avec des œuvres d’arts, des
objets ethnographique et monuments historiques sont présentés par Charline Bidault.
Elle évoque également des exemples de visites guidées « non par la voix, mais par la
danse53 ». À travers des exemples comme celle de la Maison des arts de Laval avec le
spectacle 360 degrés du danseurs et chorégraphe George Stamos qui élabore une
expérience chorégraphe sur l’exposition Et si les robots mangeaient des pommes,
l’auteur défend l’idée que des créations comme celle-ci pourront changer la perception
du visiteur sur l’exposition « en apportant une vision humaine et en suscitant de
l’empathie pour les machines54. »

En ce qui concerne les deux projets moteurs de son analyse, le projet Dancing
Museums, organisé par un centre de développement chorégraphique français, était
destiné à intégrer la danse dans le musée. Dans le cadre du programme « Europe
Créative », ce projet avait cinq structures de danse associées et huit musées européens.
La Briqueterie, centre de développement chorégraphique, portait le projet avec la
chorégraphe Tatiana Julien dans le Musée du Louvre et au MAC VAL. L’idée du projet
était « d’explorer, à travers la danse, de nouveaux liens plus vivants entre le public et les
œuvres pour que les musées puissent devenir des espaces de partage55 » L’auteur montre
que les projets comme celui-ci permet de faire du spectateur, un « acteur dans la
réception autant que dans la création 56 ». La médiation dansée devient ainsi intéressante
à la fois pour les danseurs – qui mènent leurs recherches et créations –, pour le musée
– qui développe de nouveaux projets – mais aussi pour les publics – qui peuvent

52
.Traduction libre du portuguais : O corpo mediador: dança e mediação no museu (2017/1).
53
.Laurent Pichaud. (2006) « Faire « voir du lieu » avec la danse. », in: Repères, cahier de danse, n° 18
("Espaces de danse"), février, p. 19-21 , p.20.
54
.Charline Bidault. (2016). Op. cit.
55
.Ibidem, p.53.
56
.Ibidem, p.54.

21
participer de manière plus vivante et personnelle à une médiation culturelle. La
restitution du projet en France était finalisée par la déambulation chorégraphique
intitulée Prière de ne pas détruire dans plusieurs salles du Louvre le 18 mars de 2015.
Le projet était réalisé avec la participation de danseurs professionnels et amateurs – qui
s’étaient précédemment rencontrés – mais aussi du public le jour de la présentation.
C’est important de considérer que la danse n’était alors pas convoquée pour le
divertissement du public mais pour restituer et montrer les réflexions permises par le
projet et pour instaurer également un dialogue avec le public, donc en tant que médium
d’approche entre visiteurs, œuvres et musée.

Concernant le projet Monuments en mouvements, l’objectif était de « proposer


des œuvres dansées in situ dans les monuments historiques57 ». Mené par le Centre des
Monuments Nationaux et lancé par Simon Pons-Rotbard, le projet envisageait
« d’interroger les stéréotypes figés du patrimoine en soulignant les rapports entre le
mouvement et l’architecture58 ». Le Monuments en mouvements était réalisé par la
présentation de neuf spectacles dans plusieurs monuments de Paris sous la forme de
spectacles et déambulations.

En résumé, Charline Bidault montre les enjeux de la présence de la danse dans le


musée, d’abord comme performance puis comme outil de médiation. Au travers de ces
deux projets, elle questionne le type de public visé par ces types de projets et les intérêts
des institutions comme ceux des danseurs. Son texte est donc important pour le
développement d’une réflexion sur la danse comme un outil de médiation dans les
musées, autrement dit comme médium pour la participation à la médiation au travers de
la perception corporelle des visiteurs.

Musée et anthropologie 
Enjeux

Le musée, dans le sens commun, peut être compris comme un lieu de mémoire,
un lieu où le temps s’arrête. Dans la modernité, la conception du musée a
considérablement changé, ainsi que l’idée même de ce qui peut habiter un musée.

57
.Ibidem, p.75.
58
.Ibidem, p.76.

22
Aujourd’hui, il est possible de concevoir et faire l’expérience du musée comme un
espace de réflexion et d’expérimentation. En pensant le musée d’anthropologie dans ce
contexte, il est possible de percevoir les différents modèles et structures de ce type de
musée et ses transformations au long terme selon les enjeux politiques, scientifiques et
économiques.

A l’instar de l’ethnographie, l’anthropologie a hérité du modèle des sciences


naturelles. Pour cette raison, on pourrait définir les premiers musées d’anthropologie
comme des « inventaire[s] encyclopédique[s] du monde réalisé[s] au moyen d’une
collection systématique59 », c’est-à-dire comme un dispositif de classification et
catégorisation des choses. Toujours est-il que le développement des musées
d’ethnographie a été rendu possible par la démarche de la propre discipline
anthropologique : c’est à partir de la pratique des collectes anthropologiques
(constituées à la fois par des achats et par des pillages) initiée durant la période
coloniale que les musées d’anthropologie s’établissent et conquièrent leur espace. Les
missions scientifiques de l’époque envisagent d’écrire « l’histoire de la civilisation » et
le principe de base du musée d’ethnographie consiste à « présenter la diversité des races
et des cultures humaines, conçue sur le modèle de la diversité des espèces naturelles,
mais également hiérarchisée60 ».

Au long des années, le musée, tout comme l’anthropologie, vit cependant de


profonds changements dans ses pratiques et ses épistémologies. À cause de la
transformation de la discipline anthropologique (que l’on ne peut distinguer de la
transformation du monde lui-même qu’elle est censée représenter), le musée
d’ethnographie vit une crise dans les années 1980 et entre dans un processus de
redéfinition. Les musées d’anthropologie sont mis en question par divers chercheurs. De
manière provocatrice, l’anthropologue Jean Jamin soulève par exemple la question :
« Faut-il brûler les musées d’ethnographie ?61 ». Bien évidemment, les musées n’ont pas
disparu pour autant, mais, dans le changement, « certains optent pour une conversion à

59
.Fabienne Boursiquot (2014) « Musée et anthropologie ». Essai bibliographique sur les ouvrages DE
L’ESTOILE B (2007) Le goût des autres. De l’exposition coloniale aux arts premiers. Paris, Édiations
Flammarion et MAZÉ, C., F. POULARD ET C. VENTURA (dir.) (2013) Les musées d’ethnologie. Culture,
politique et changement institutionnel. Paris, Éditions du CTHS In Anthropologie et Sociétés, vol.
38, nº 309-323. p.310
60
.Benoît De L’Estoile. (2010) Le goût des autres. De l’exposition coloniale aux arts premiers.
Flammarion, Paris. p.301.
61
.Jean Jamin. Faut-il brûler les musées d’ethnographie ?.(1998) Gradhiva n° 24, p. 65-69.

23
l’esthétisme, les objets ethnographiques devenant des objets d’art. D’autres s’engagent
dans la voie d’une collaboration avec les communautés dont les objets sont exposés62».

Benoît De L’Estoile classifie les musées d’anthropologie en deux types : le


musée de Soi et le musée des Autres. Le premier « expose les trésors d’un groupe local,
d’une communauté », et répond donc à la question « Qui sommes-nous ?  ». Ce type de
modèle, plus actuel, correspond aux musées communautaires mis en place à travers
l’articulation entre ceux que nous appelons les indigènes et les anthropologues 63. La
notion de « Musée des Autres » apparaît beaucoup plus compliquée. Selon Benoît De
L’Estoile:

Un tel musée ne renvoie pas d’abord à un Nous, mais précisément


à ceux qui sont définis comme différents. La délimitation du
domaine du musée est alors négative : les Autres sont tels par
contraste avec Nous. Le « musée des autres » expose les choses des
Autres ; des objets qui ont pour caractéristique principale d’être
exotique au sens propre, c’est-à-dire originaires d’un lieu lointain,
étranger, et d’avoir été rapportés « chez Nous64 » [...].

Les « musées des Autres », très présents encore dans la muséographie française,
posent aujourd’hui encore des problèmes épistémologiques à l’anthropologie. Selon
l’angle de l’altérité – Nous/Autres –, ils relèvent souvent d’un héritage de projet
d’affirmation d’une identité collective : cette identité se constitue sur les Autres, mais
par le Nous. C’est à travers cette articulation que l’on perçoit la présence d’une pensée
coloniale. A l’instar de Nélia Dias, on peut s’interroger : « pourquoi, alors que le
colonialisme a disparu, les « catégories du colonialisme » continuent-elles encore à
façonner les modes d’analyses des objets65? ». Finalement, qui est concerné par le
musée d’anthropologie ?

Les musées d’anthropologie sont importants pour la consolidation des identités


nationales. Le désir de représenter l’Autre (caractéristique aussi bien des musées de
sociétés et civilisations que des musées nationaux) comporte des enjeux politiques,
scientifiques et économiques propres à chaque nation. Dans l’ouvrage Les musées
d’ethnologie. Culture, politique et changement institutionnel (2013), les auteurs
62
.Fabienne Boursiquot (2014). Op. cit. p.310
63
.Regina Abreu. (2008). « Tal antropologia, qual museu? Museu, identidades e patrimônio cultural ».
Revista do Museu de arqueologia e Etnologia, São Paulo, Suplemento 7.
64
.Benoît de L’Estoile. (2010) Op. cit. p.15
65
.Nélia Dias. (2000). « Musée et colonialisme : entre passé et présent » in Au musée des cultures du
monde/ Actes du colloque organisé par le musée national des Arts d’Afrique et d’Océanie et le
Centre Georges-Pompidou. Dir : Dominiques Taffin, Pari : Maissonneuve et Larosse. p.20.

24
affirment par exemple que ces « institutions culturelles et scientifiques [sont]
éminemment liées au politique66 ». La constitution d’un musée d'ethnographie nous
amène par conséquent à penser l’anthropologie et le musée comme des outils politiques
d’État, participant à la consolidation de l’idée de nation et au désir de patrimoine.

Historique

Du musée du Trocadéro au Musée de L’Homme


Crée en 1866 à Havard, le Peabody Museum of Archaelogy and Ethnologie est le
premier musée d’anthropologie. La relation entre l’anthropologie et le musée ne devient
cependant plus intense qu’à partir de 1890 avec la grande période de l’anthropologie de
musée marquée par l’ouverture de plusieurs musées en Amérique du nord et en Europe,
notamment le Musée d’ethnographie du Trocadéro à Paris 67. Le projet de ce type de
musée dans sa vision scientifique et pédagogique est alors de « conserver, classer et
étudier les produits de l’humain et de la nature68 ».

Cette institution est la première en France à regrouper en un lieu unique les


productions matérielles des peuples des différents continents, se nourrissant « tant de la
“mission civilisatrice” et de l’État colonial, que de l’unification de l’État-nation en
métropole69 ». Suivant un désir de renouvellement de ce musée, son directeur, Paul
Rivet, invite en 1928 George-Henri Rivière pour s’occuper de la muséographie et de la
relation public de cette institution70. La préoccupation est de réaliser un « musée
vivant » et une grande attention à la mise en forme de l’exposition se trouve ainsi
instituée.

Rivière se réclame d’un anti-esthétisme selon « l’idée que l’appréciation


esthétique est produite non par la pure contemplation d’une forme, mais par la
compréhension, c’est-à-dire par la mise en œuvre d’une contextualisation de type
ethnographique71 ». Il propose alors de nouveaux principes muséographiques en
66
.Camille Mazè. ;, Fréderic Poulard. ;, Chritelle Ventura. (dir.). (2013). Op. cit. p.9.
67
.Fabienne Boursiquo (2014). Op. cit.
68
.Ibidem, p.311.
69
.Fabrice Grognet. (2013). La réinvention du musée de l’Homme au regard des métamorphoses
passées du Trocadéro In Les musées d’ethnologie. Culture, politique et changement institutionnel,
VENTURA, C (dir.) Op. cit. p. 42
70
.Benoît de L’Estoile. (2010). Op. cit. p.243.
71
.Ibidem, p.248. Cependant, cet anti-esthétisme dans l’exposition du Trocadéro est vue de manière
relative par divers auteurs. Selon De L’Estoile (2010), par exemple : « […] il faut relativiser

25
exposant les objets tour à tour selon un esprit pédagogique et une tournure exotique,
récurrente dans les expositions coloniales72.

En 1935, le Musée d’ethnographie du Trocadéro [MET] interrompt ses


expositions en vue de la démolition du bâtiment et la reconstruction d’un nouveau : le
Palais de Chaillot, destiné à accueillir l’Exposition universelle de 1937. La fin du MET
établit une rupture qui conduit à l’ouverture de deux musées distincts : le Musée de
l’Homme (inauguré en 1938 et dirigé par Paul Rivet) et le Musée National des Arts et
Traditions populaires (inauguré en 1937 et dirigé par Georges Rivière). Fabrice Grognet
distingue les projets de ces deux institutions selon ces termes :

L’ethnographie entendue dans l’aile Passy du palais de Chaillot


[Musée de l’Homme] a donc pour objet l’étude universelle de « la
civilisation des peuples de type archaïque », alors que l’aile Paris
[Musée National des Arts Traditions populaires] se destine à la
sociologie des traditions régionales de la France pouvant être
amenées à perdurer dans des pratiques populaires renouvelées 73.

Alors que, liant anthropologie et sciences naturelles, le musée de l’Homme


manifeste une orientation naturaliste (notamment par des expositions conçues comme
une sorte de « monde des origines reconstitué » et par la diversité physique et culturelle
des objets exposés, deux faits assimilables à la muséographie du Muséum National 74), le
MNATP « se destine à la sociologie des traditions régionales de la France 75 » et vise « à
incarne[r] l’identité française à travers un musée scientifique relatif aux cultures
populaires76 ».

Le musée de l’Homme se fonde ainsi à la fois sur la question de l’homme en


société et sur la diversité des races : il devient un « monument à la différence77 » (De
L’Estoile, 2007). Dans le même temps, il présente une « esthétique fonctionnaliste, anti-
décorative dont les principes sont ceux des architectes du Mouvement moderne […] la
sobriété de la présentation et la rigueur des textes au ton très scientifique, refuse
ostensiblement le romantisme78 ».
l’ « anti-esthétisme » du musée du Trocadéro, qui fut certainement beaucoup plus marqué par les
préoccupations artistique que les musée d’ethnographie du reste du monde ». (p. 252).
72
.Benoît de l’Estoile. (2010) Op. cit. p. 253.
73
.Fabrice Grognet. (2013). Op. cit. p.48.
74
.Idem
75
.Ibidem, p.48.
76
.Ibidem. p.319.
77
.Benoît de l’Estoile. (2010) Op. cit.
78
.Ibidem. p.257

26
Le musée de l’Homme et le musée du Quai Branly
Le projet « Arts premiers », mis en place en 1996, annonce la crise de
l’ethnographie au sein du musée. Celui-ci envisage de redéfinir la relation entre
l’ethnologie et le musée, indépendamment du Muséum National. La création du musée
du Quai Branly évince cependant ces projets et le musée de l’Homme – fermé en 2003 –
devient quelques années plus tard une galerie d’exposition et de diffusion culturelle, en
conséquence d’une réforme du Muséum National. En 2005 le Musée du l’Homme est
inauguré par la deuxième fois et vise à présenter le rapport entre l’Homme et la nature
au travers d’un message politique et citoyen où « la connaissance et la prose de
conscience de la fragilité de l’humanité79 » est mise en avant.

Conçu par le président Jacques Chirac80 le Musée du Quai Branly ouvre ses
portes en 2006. Ce musée représente un certain désir de changement du statut des objets
ethnographiques qui tendent à devenir des objets d’art ; la construction du sens du
musée tient du fait que la « découverte de l’Autre à travers ses arts […] constitue sa
mission81 ». La reconnaissance d’une esthétique universelle, défendue par le Musée du
Quai Branly, apporte également d’autres questionnements importants concernant la
question de l’ethnographie et de l’art : « ne serait-ce pas une sorte d’interprétation
ethnocentrique que d’exposer des objets en tant qu’objets d’art alors que leur sens
d’origine n’était pas artistique et que la catégorie d’art reflète un point de vue
occidental82 ?». Sur « le mythe des arts premiers » le Musée du Quai Branly – qui porte
son adresse dans son nom plutôt que son statut (musée d’art ou un musée
d’ethnographie) – emploie son « instrument de légitimation du projet du musée […] tout
en évitant d’affronter le poids de l’héritage colonial ou l’histoire des collections 83 ».
Actuellement, le Musée du Quai Branly continue d’être un important musée qui abrite
en France des objets ethnographiques extra-Européen. À travers son centre de recherche
et les multiples activités développées au sein du musée, il suscite des réflexions autour
de l’anthropologie, de l’art et du musée.
79
.Fabrice Grognet. (2013). Op. cit. p.59
80
.C’est important de souligner qu’ « en effet le musée du quai Branly est avant tout, comme l’affirme
le président Stéphane Martin, “un vrai projet présidentiel et un vrai projet politique”  ». (PAGANI,
Camille, Op. cit, p.270).
81
.Benoît De L’Estoile. (2010) Op. cit. p.345
82
.Camilla Pagani. Politiques de reconnaissance dans les musées d’ethnographie et des cultures au
XXIª siècle. (2014).Doctorat de Philosophie. Université Paris-Est-Créteil- Università degli studi di
Milano. (p.270).
83
.Ibidem, p.271.

27
Le Musée des Civilisations de l’Europe et de la méditerrané (Mucem)
Héritage du MNATP le Musée de Civilisations d’Europe et Méditerrané
(Mucem) a été inauguré en 2013 à Marseille. Le mot « civilisation » inclus dans le nom
du musée consiste en une « appellation révélatrice d’une certaine approche muséale, qui
vise à mettre en valeur la diversité de discours, de points de vue et d’identités
historiques qui compose une société à un moment donné 84 ». Orienté vers une
anthropologie symbolique (qui cherche à rompre dans la foulée avec la pensée
folkloriste85), le Mucem révèle le processus d’européanisation et la division entre les
Autres (Musée du Quai Branly) et le Nous (le Mucem) en vogue actuellement dans le
monde86.

Le Mucem se présente comme un important musée national français qui s’ajoute


à l’importance culturelle et économique à la ville de Marseille. Élaboré pour être un
musée de société il traite « de sujets bien délimités concernant un groupe humain, un
moment de l’histoire, une ville ou un territoire87 ». À travers ses expositions et sa
programmation culturelle, il se propose d’évoquer des sujets qui abordent la diversité
culturelle et d’identités, des modes de vie anciens et actuels et leurs transformations. Le
Mucem a ainsi pour ambition d’aider le visiteur à mieux comprendre le monde où il vit
et ses « changements dans toutes leurs dimensions et leur implications 88 ». Il affiche
pour cela trois objectifs principaux : réaliser des synthèses sur certains grands sujets de
société, valoriser les collections, et consacrer le Mucem comme musée de la
méditerranée89. Ce désir et ces objectifs affichés par le musée constituent un défi délicat,
particulièrement si l’on considère l’histoire de la diversité sociale et culturelle de
Marseille, ville qui accueille le musée.

Les changements autour du musée d’anthropologie en France nous conduisent à


nous interroger, comme le souligne Benoît De L’Estoile :

Que veut dire un musée consacré aux sociétés « autres », qu’il soit
d’art ou d’anthropologie, dans un monde postcolonial ? À quels
84
.Fabienne Boursiquot (2014) Op. cit. (P.322).
85
.Camille Mazé.; POULARD, Fréderic; VENTURA, Chistelle. ( dir. ). 2013 Op. cit.
86
.Camilla Pagani. Op. cit.
87
.Voir le « Projet scientifique et culturel » du Mucem édité en 2017, p. 15.
88
.Bruno Suzzarelli. (2013). « Préface : Quels musées de civilisation(s) pour l’avenir ? ». In
CHEVALIER, Denis (dir.). Métamorphoses des muées de société. Paris (ouvrage issu des premières
rencontres scientifiques internationales organisées par le Mucem), (p.9).
89
.Voir le « Projet scientifique et culturel » du Mucem édité en 2017, p. 46.

28
défis sont confrontés les réalisateurs d’expositions s’ils veulent
donner aux visiteurs la compréhension d’un monde contemporaine
complexe90 ? »

Actuellement, il y a en France une diversité de musée d’anthropologie : le


Musée de l’Homme et le Musée de Quai Branly à Paris, le Musée de Confluences à
Lyon et le MuCem à Marseille. Cette diversité de musées révèle ainsi les enjeux
politiques et les différentes manières de penser la relation entre le musée,
l’anthropologie et l’expérience artistique.

Danse et musée d’anthropologie en France


Enjeux

Une des premières études sur la danse en anthropologie a été réalisé par le
britannique Edward Evan Evans-Pritchard (1902-1973). Intitulé « The Dance », elle est
publiée en 1928 dans la revue Africa91. D’autres anthropologues britanniques ont
également traitéde la danse dans leurs travaux : Radchiffe-Brow (1881-1955),
Malinowski (1884-1942 et encore Raymond Firth (1901-2002). En Amérique du Nord,
le culturaliste Franz Boas (1858-1942) traite de la danse dans son Primitive Art. Sa fille,
Franziska Boas (1902-1980), organise quant à elle le premier symposium sur la danse
en 1942 dans une perspective anthropologique92. En France, Émile Durkheim (1857-
1917) et son neveu Marcel Mauss (1872-1950) participent à la fondation de l’Institut
d’ethnologie et influencent les travaux des africanistes de l’époque qui abordent la
danse dans leurs travaux. Marcel Mauss publie en 1936 l’article « Les techniques du
corps93 », encore aujourd’hui utilisé comme référence pour la recherche concernant les
pratiques corporelles. Les archives internationales de la danse fondées par Rolf de Maré
– évoquées plus haut – réunissent par ailleurs plusieurs chercheurs qui travaillent sur les
études folkloriques et intéressés par la danse.

90
.Benoît De L’Estoile. (2010) Op. cit. (P.286)
91
.Edward Evans-Pritchard. « The Dance », Africa, vol . 1, 1928, p.446-462
92
.d’Andrée Grau et Georgiana Wierre-Gore. (2005) Anthropologie de la danse. Genèse et
constructions d’une discipline. Centre National de la Danse, Paris. p.12.
93
.Marcel Maus (1936) « Les techniques du corps », Journal de psychologie normal et pathologique,
vol.32, nº 3-4, p.271-293.

29
Mais c’est seulement à partir des années soixante avec la publication par
Getrude Kurath de son article « Panorama of danse ethnology94 » que la danse est
admise officiellement comme objet de recherche en anthropologie. Cette relation va se
développer au fur et à mesure de l’avancement de la recherche en anthropologie. La
danse est dès lors considérée comme un « fait social total95 » – qualité attribuée aux
phénomènes qui sont à la fois expression et synthèse de l’ensemble de la vie sociale
d’une société donnée – et mérite donc d’être étudiée au même titre que la religion ou la
politique96.

Le musée d’anthropologie a une place importante dans le développement de la


recherche en danse puisqu’il encourage le chercheur a étudier les musiques et les danses
en voie de « disparition », expression reflétant la conception anthropologique des
manifestations populaires (chants, musiques, danse, costumes, etc.) courante dans les
années soixante. Le musée était donc conçu comme un espace d’abri pour conserver les
culturelles immatérielle en voie de « disparition ». En France, la relation entre musée
d’anthropologie et danse, peut aussi être perçue par la création d’un département de
recherche sur la danse au Musée des Arts et Tradition Populaire (MATP) dirigé par
George Rivière.

Quelques exemples français

Après une brève recherche97, j’ai pu identifier qu’une seule expérience au sein de
musées ethnographiques français a réellement exploré la danse comme un outil de
médiation. Pour les vacances de la Toussaint de 2015, le Musée du Quai Branly, en
partenariat avec le Collectif 3 à l’œuvre, a gratuitement proposé au visiteur, la « Visite
en mouvement : Une histoire dans l’histoire »,

La question de la dimension sensorielle et interactive par l’acte de danse dans le


musée d’anthropologie est exemplifiée par la proposition de la visite corporelle intitulée
« Visite en mouvements : Une histoire dans l’histoire » proposée en 2015 par le Musée
94
.Gertrude Prokosch Kurat (1960) « Panorama of danse etnology », Current Anthropology, vol.1, nº3.
Traduction du texte pour le français In GRAU, d’Andrée et WIERRE-GORE, Georgiana. (2005)
Anthropologie de la danse. Genèse et constructions d’une discipline. Centre National de la Danse,
Paris.
95
.Concept développé par Marcel Mauss dans son « Essai sur le don, Forme et raison de l’échange
dans les sociétés archaïques », Années sociologique, Paris : PUF, [1923-1924], 1993.
96
.D’Andrée Grau et Georgiana Wierre-Gore. (2005) Op. cit. p.25.
97
.Portant sur les principaux musées d’anthropologie en France (Musée de l’Homme, Musée du Quai
Branly, Mucem et Musée de Confluences).

30
du Quai Branly et mise en place par le Collectif 3 à l’œuvre. La description sur le site du
Musée présente l’activité : le musée se parcourt à plusieurs, en suivant ses sensations et
en se laissant porter par son imagination 98. Dans son mémoire, Charline Bidault expose
cette expérience de visite :

Guidés par des danseurs, les visiteurs étaient invités à incarner eux-
mêmes un objet par le mouvement : par exemple, placée devant un
tambour africain, une des danseuses proposait à un petit groupe de
visiteurs d’interpréter le tambour, en donnant des petits coups de
poing sur les bras et le dos de ses voisins, selon un rythme musical.
Par cette activité simple, ludique et accessible à tous, la danse offre
une manière d’être soi-même investi par les œuvres 99.

La question de la participation du public porte autrement dit sur la possibilité


pour la danse de matérialiser une médiation partagée : « la danse pourrait être ainsi
interprétée comme cette forme artistique qui faciliterait la compréhension en faisant
appel au corps et à une certaine mobilité sensorielle 100 ». Quand la visite des collections
devient une expérience corporelle !

Si les analyses mises en place sur les musées en France autour de la performance
montrent que l’espace pour la danse est plutôt celle des spectacles, il me semble
important de s’intéresser au cas particulier d’utilisation de la danse comme support pour
la médiation dans les musées d’anthropologie français. Quelle est la place de
l’expérience dans la médiation pratiquée au sein des musées d’anthropologie ?
Comment la danse peut-elle être un outil de médiation culturelle au sein de telles
institutions ?

Récemment, divers musées en France ont accueilli des expositions sur la danse
et notamment des musées d’anthropologie. En 2017, le Musée des Confluences à Lyon
a présenté Corps rebelles101 tandis que le MuCem exposait On danse ? un an plus tard.
Orienté vers la compréhension de la danse contemporaine, Corps rebelles développait
six grands thèmes – danse virtuose ; danse vulnérable ; danse savante, danse populaire ;
danse politique ; danses d’ailleurs ; Lyon, une terre de danses ; le Sacre du printemps –
et proposait le studio danser Joe, atelier immersif et résidences d’artistes. Le public était
98
.Musée du Quai Branly, Détails de l’évènement –visite corporelle des collections, 2015. Disponible
sur : http://quaibranly.fr/fr/informations-pratiques/aller-plus-loin/visites-et-ateliers/visites-guidees/
details-de-levenement/e/visites-corporelles-des-collections-36129/ [Consulte le 12 août 2019].
99
.Charline Bidault. (2016) Op. cit.
100
.Ibidem, p.34.
101
.France Culture, Danse au musée, « Danse au musée ». Disponible sur :
https://www.franceculture.fr/emissions/le-petit-salon/danse-au-musee. [Consulté le 3 juillet 2019].

31
également invité à une expérience participative réalisé par Moment Factory d’après
l’œuvre Joe de Jean-Pierre Perrault102.L’exposition On danse ? du MuCem visait quant
à elle à exposer l’acte de partage de la danse. L’expérience de cette exposition, ainsi que
les médiations mises en place à son occasion, seront abordées dans le troisième chapitre.

La thématique de la danse a également été explorée par d’autres musées, tels le


Centre Pompidou à Paris avec l’exposition Danser sa vie en 2012, le Musée du Louvre
à Paris avec l’exposition Corps en mouvement, la danse au musée en 2017, le musée de
Rodin avec Mouvements de danse en 2018, et le LaM, Musée d’Art Moderne,
Contemporaine et l’Art Brut situé à Lille avec l’exposition Danser brut en 2019.

Étudier les manières d’approche du public par les musées d’anthropologie me


semble actuellement nécessaire pour une pensée sur la propre anthropologie. Si
l’anthropologie est née de rencontre de différentes cultures et de l’expérience de
l’anthropologue, comment aborder cette dimension dans un musée ? Quelle est ainsi la
place de l’expérience dans un musée d’anthropologie ? Le corps en mouvement – à
travers la danse – peut-il potentialiser la réflexion dans le musée ? Provoquer des
changements de perception des questions exposées ? La médiation culturelle offre ainsi
une diversité d’approche de telles questions selon les divers publics concernés.

Se proposer d’étudier d’un point de vue anthropologique la place de la danse


(prise à la fois comme objet et méthode de recherche) au sein du musée ethnographique
c’est donc se disposer à contribuer à l’élaboration de formes de connaissances trop peu
explorées encore.

102
.Avec la collaboration de la Fondation Jean-Pierre Perreault et le Musée de civilisation.

32
CHAPITRE 2 – MÉDIATION CULTURELLE,
ANTHROPOLOGIE ET DANSE

Pour le deuxième chapitre, il me semble important de développer les enjeux


théoriques et pratiques concernant la médiation culturelle dans l’institution muséale.
Comment concilier les institutions (c’est-à-dire leurs discours, le quantitatif plutôt que
le qualitatif, etc.) et l’activité du médiateur (les propositions de pratiques pédagogiques
de débats, d’échanges, de prises de parole, etc.) ? Pour poursuivre, nous nous proposons
d’étudier les possibles questions que l’anthropologie peut produire pour la médiation
culturelle et plus spécifiquement pour la médiation en musée d’anthropologie. Pour
finir, nous allons montrer trois expériences de médiation dansée proposées par le Musée
de Beaux-arts de Lyon et l’Institut d’Art Contemporain de Villeurbanne.

Médiation culturelle et musée


En France, l’arrivée de la notion de médiation culturelle et des services éducatifs
dans les musées se produit conjointement à la politique d’accessibilité pour tous aux
œuvres de qualité. Le désir de médiation montre qu’elle « est une manière de nommer à
la fois cet objectif non satisfait de justice sociale dans la répartition des biens culturels,
et le besoin de refonder sur d’autres bases le paradigme général de démocratisation
culturelle103 ».

C’est à partir des années soixante qu’émergent les politiques culturelles pour la
médiation visant, encore aujourd’hui, « la participation possible de chacun à la vie
culturelle par les pratiques d’expression, d’éducation non formelle, d’engagement, par
le lien tissé entre des pratiques sociales aujourd'hui éclatées (travail, engagement
politique, activité artistique104) ». Bien que la pratique professionnelle de la médiation
ait cours dans les musées français depuis longtemps déjà, ce n’est qu’à partir de 2004
que la loi relative aux musées mentionne les attributions du médiateur : « chaque musée
de France dispose d’un service ayant en charge les actions d’accueil des publics, de
103
Marie-Christine Bordeaux. (2008) La médiation culturelle en France, conditions d’émergence,
enjeux politiques et théoriques. Actes du Colloque international sur la médiation culturelle,
Montréal, p.1.
104
.Ibidem, p.8.

33
diffusion, d’animation et de médiation culturelles. Ces actions sont assurées par des
personnels qualifiés105 ».

Nombreux sont les enjeux relatifs à la notion de médiation culturelle, du


médiateur et de la communication. Marie-Christine Bordeaux, dans la partie
« Historique de l’apparition de la notion de médiation » des actes du Colloque
international sur la médiation culturelle, élucide ce qu’est la médiation culturelle : loin
de revenir à l’information et à la communication commerciale, la médiation peut être
définie comme « le projet de mise à disposition de ressource, d’instauration d’un espace
critique d’échanges […] un processus d’engagement et de distanciation des individus
dans les relations aux œuvres, aux dispositifs et aux lieux 106 ». La pratique et les
compétences de la médiation culturelle au musée peuvent être classées selon trois axes :

les médiations directes, de face-à-face, interactionnelles, entre


professionnels de la culture et publics ; les médiations indirectes,
différées qui sont portées par des textes, des outils, des répertoires
de démarches ; les différentes techniques de gestion et
d’administration de projet qui concourent à l’organisation de la
rencontre107.

Ainsi, et bien entendu, la médiation ne consiste pas seulement en la pratique des


médiateurs. Toutefois, ceux-ci occupent un rôle fondamental dans la médiation puisque
ce sont eux qui établissent le contact direct avec le public ; on peut ainsi considérer que
leur pratique apparaît au centre de la démarche de la médiation.

Il est aujourd’hui évident que la médiation culturelle combine en permanence


deux dimensions contradictoires : un axe vertical, lié à l’institution et élaboré dans la
sphère de légalité – répondant donc à un désir de transmission d’un contenu
préexistant ; et un axe horizontal, lié aux techniques d’intervention des acteurs de la
médiation – techniques « fondées sur le partenariat avec des acteurs d’autres champs
professionnels, l’écoute des besoins, l’accueil de pratiques culturelles et artistiques non
légitimes au sein de l’institution, la prise en compte des représentations et de la parole
de chaque individu108 ». Les réflexions sur la médiation culturelle et ses possibles
pratiques devient par conséquent nécessaire pour problématiser la pratique actuelle et
éclaircir les futures pratiques.

105
.Ibidem, p.4.
106
.Ibidem, p.7
107
.Ibidem, p.8.
108
.Marie-Christine Bordeaux. 2008 Op. cit p.10.

34
Dans l’introduction de son article « La médiation culturelle : une construction du
lien social » (2000), Jean Caune lance diverses questions à propos du secteur culturel :

Peut-il se limiter à être celui de la diffusion et de la réception des


donnes artistiques légitimées par le « monde de l’art » ? Ne doit-on
pas inclure dans ce domaine les pratiques sensibles ou intelligibles
qui permettent à la personne de se construire dans son rapport à
l’autre109 ?

Bien évidemment, ces questions ne sont pas simples à résoudre. Pour cela, il me
semble en tous les cas qu’il faut toujours mettre en évidence les médiations culturelles
« qui met[tent] en œuvre une intention et une attention sensible 110 », ce que Jean Caune
qualifie de médiation esthétique.

Il s’agit de construire dans une production discursive, c’est-à-dire dans la


production de débats, d’échanges. Marie-Christine Bordeaux évoque les compétences
au travail dans la pratique du médiateur :

La médiation se caractérise par une production discursive


spécifique et par l’invention de formes particulières de
communication culturelle : conférences dansées, « leçons » de
théâtre, ressources culturelles pour audioguides, DVD à vocation
pédagogique composés de fragments d’œuvres cinématographiques
agencés en un certain ordre ou bien dans le plus grand désordre,
outils d’aide à l’interprétation, spectacles mêlant amateurs et
professionnels, œuvres composites issues d’ateliers, livres écrits à
plusieurs mains, marathons d’écriture, appels à projets auprès de la
population, auprès de groupes d’amateurs, etc111.

Pour résumer, il apparaît inutile d’établir une manière unique de pratiquer la


médiation culturelle : c’est dans la possibilité de mélanger des pratiques artistiques et
pédagogiques diverses, dans l’écoute du visiteur que l’on pourrait mettre en jeu
l’imaginaire, mobiliser les affects et les émotions et influencer nos perceptions.

Médiation culturelle et anthropologie


La médiation peut aussi être pensée à partir de la notion d’expérience : dans la
mesure où celle-ci « implique à la fois une attitude réceptive et une action
productive112 », l’expérience permet la construction collective de significations, enjeu
principal de la médiation. Le lien entre les notions convoquées par l’anthropologie, la
109
.Jean. Caune (2000) Op. cit, p.2
110
.Ibidem, p.6
111
.Marie-Christine Bordeaux. 2008 Op. cit, p.10.

35
danse, et la performance permettent de penser la puissance d’une médiation basée sur
une expérience du sens et de la perception, capable de formuler des questions à partir du
corps en mouvement113 : c’est l’idée que celui-ci peut être un outil de documentation et
d’investigation des éléments artistiques et politiques exposés par le musée114.

Tout comme pour l’anthropologue, c’est l’écoute et l’observation qui fondent le


travail du médiateur. Et si l’anthropologue cherche à comprendre l’altérité, on pourrait
dire que le médiateur s’attache, lui, à créer des formes d’expériences d’altérité au sein
du musée. C’est particulièrement le cas de la médiation destinée à des musées
ethnographiques pour laquelle il s’agit de relier publics, artistes et contextes culturels en
fonction des activités de recherche. Le principe de la recherche en anthropologie
(observation, participations, réflexion, dialogue, contact avec l’altérité) peut-il être
utilisé dans la conception d’une médiation ? Quelles sont les convergences entre la
pratique de la médiation et celle de l’anthropologie ? De quelles manières le médiateur
participe-t-il à la compréhension de la diversité humaine, un des objectifs des musées
d’anthropologie ?

Il est d’ailleurs intéressant de noter que la danse, pratique d’altérité par


excellence, constitue une matière particulièrement prisée autant par l’anthropologie que
par la muséologie. Pour certains anthropologues contemporains 115, il s’agit en effet de
proposer une réflexion basée sur la perception et la possibilité de créer de nouvelles
formes de connaissance à partir de la danse. En même temps, nous le signalions
précédemment, le musée est de plus en plus investi par la danse116, depuis l’exploration
de l’espace muséologique en lui-même au développement de nouveaux outils de
médiation.

Considérant que le musée d’anthropologie devrait être un espace d’apprentissage


et d’expérience des cultures autres et de l’altérité, il me semble important de réfléchir
sur ce type de pratiques dans la médiation culturelle. En tant qu’espace à la fois
112
. Richard Shusterman. (1991). Op. cit. p.88. L’auteur reprend ici un argument présenté par John
Dewey.
113
. Maria Acselrad. (2018). Op. cit.
114
. Theresa Jill. Buckland (2013). Op. cit
115
.Jean-Michel Beaudet. (2018). « Escrever-dançar: definir a antropologia da dança? » In CAMARGO,
Giselle Guilhon Antunes (org). Antropologia da dança IV ; CITRO, Silvia. (2012). Op. cit.;
MARULANDA, Daniela Botero. (2018). « Como se estuda uma dança? Desenvolvimento e
perspectivas da antropologia da dança » In Camargo, Giselle Guilhon Antunes (org). Antropologia
da dança IV.
116
. Aila Regina da Silva. (2017). Op. cit. ; BIDAULT, Charline. (2016 Op. cit.

36
d’actions et de réflexions, celle-ci devrait en effet trouver un support important dans les
jeux, les danses et les chants – autrement dit dans le mouvement du corps – pour
« médiatiser » les expositions ethnographiques ; ceci estimant la médiation culturelle
comme une partie notable d’une exposition, particulièrement indispensable dans la
présentation des cultures immatérielles.

Autrement dit, la puissance d’une médiation basée sur le corps en mouvement


permet de (re)penser le lien entre certaines notions fondamentales convoquées par
l’anthropologie et par les musées, notamment à travers l’expérience corporelle,
l’exploration des sens et de la perception, points nécessaires pour la pratique de
l’altérité. Les stratégies de médiation basées sur l'expérience kinesthésique permettent
en effet la présence active du sujet, de l’imagination et des émotions au musée « dans la
construction de moments qui, de manière subtile et ludique, tracent un lien entre l'œuvre
d’art et l’espace physique117 », et élargissent ainsi le rôle des médiateurs et de leurs
pédagogies en repensant les méthodes et les questions de l’anthropologie. La danse
servirait ainsi une expérience perceptive et émotionnelle de l’approche anthropologique
aussi bien au sein de musées que dans la propre recherche scientifique.

L’expérience corporelle, créatrice de sens et d’interprétation 118, permet non


seulement l’apprentissage des codes culturels mais aussi celui des perceptions du/dans
le monde. Le corps « est le lieur de l’homme à toutes les énergies visibles et invisibles
qui parcourent le monde119 », c’est à travers lui que nous percevons et interagissons avec
et dans le monde. Lorsque l’on parle de « corps », ce n’est donc pas selon l’idée dualiste
cartésienne qui sépare corps et esprit, mais bien selon celle d’un corps « en tant
qu’organisme qui produit dynamiquement des significations pour des actions et des
pensées – par la cognition – et [qui] est également modifié par des actions et des
pensées120 ». La perception, les sensations, les émotions et les sentiments – dimensions
des accès possibles à l’expérience corporelle – sont alors compris comme des moyens
d’apprentissage et de production de connaissance.

117
. Aila Regina da silva. (2017.1) O corpo mediador: dança e mediação no museu. Repertório,
Salvador, ano 20, n.28, p.390-402.
118
. Maria Acselrad (2018). Op. cit
119
. David. Le Breton Antropologia do corpo e modernidade (2011) Tradução de Fábio dos Santos-
Petrópolis, RJ: Vozes, p.50 (traduction du portugais).
120
. Thompson Lemos Silva-Neto (2015). A cognição corpórea como continuidade crítica das
ciências cognitivas. Tese (doutorado) - Universidade do Estado do Rio de Janeiro. Instituto de
Filosofia e Ciências Humanas, p.215 (traduction du portugais).

37
Médiation dansée : trois expériences à Lyon 
Pour élucider les différentes possibilités d’utilisation de la danse dans la
médiation culturelle, nous présentons trois expériences vécues dans deux musées à
Lyon : au musée des Beaux-Arts de Lyon, avec deux propositions du danseur Denis
Plasard et sa compagnie (Compagnie Propos) dans deux expositions distinctes ; et à
l’Institut d’Art Contemporain de Villeurbanne, proposition de la danseuse Marie-
Zénoibe. Ces expériences ont non seulement rendu possible le contact avec des danseurs
qui proposent de telles médiations, mais aussi une première réflexion sur la médiation
dansée en France.

Les rituels dansés à partir d’œuvre d’art, par la Compagnie Propos


au Musée des Beaux-Arts de Lyon

Dans le cadre du « week-end festif au musée », le Musée des Beaux-arts de


Lyon a proposé le dimanche 4 novembre 2018 une découverte des salles à partir des
interprétations chorégraphiques de Denis Plassard et sa compagne Lyonnaise Propos.
Notons que le musée a organisé trois séances, j’ai pour ma part participé à la seconde.

La médiation a commencé avec l’explication de la proposition par Denis


Plassard. Il s’agissait de partager avec le public des interprétations chorégraphiques de
certains tableaux. Accompagné d’un danseur de sa compagnie, Plassard présentait
d’abord le tableau (auteur, époque, date, style, etc.). Il présentait ensuite son regard sur
l’œuvre : quelle action a-t-il imaginé à partir de l’observation du tableau ? Comment a-
t-il pensé la chorégraphie – qu’il a appelé « rituel dansé » du tableau ? Venait ensuite,
par étape, la chorégraphie. Le public, qui se tenait autour des deux danseurs, était
également invité à participer aux différents rituels dansés pour chaque tableau. Ce
passage de l’observation du tableau à un mouvement du corps m’a permis de mobiliser
quelques questions sur l’œuvre d’art, le musée et la médiation : quelle est la relation
entre l’art matériel – l’objet en soi – et l’art immatériel – l’art éphémère de la danse,
performance et théâtre – qui n’existe que par la présence ? La danse peut-elle être un
outil pour exprimer les émotions, les perceptions sur une œuvre d’art ?

La médiation était mise en place dans trois salles du musée, le public, dont je
faisais partie, riait, discutait et applaudissait, positionné autour des deux danseurs qui
changeait de lieu dans la salle à chaque changement de tableau. Six œuvres ont été

38
présentées de manière dansée : (annexe 1 ; image 1) Portrait d’une officier de marine
(vers 1845), de Jean- François Millet ; (annexe 1 ; image 2) Les deux avocats (1862), de
Honoré Daumier ; (annexe 1 ; image 3) L’Automne (1864), de Puvis de Chavannes ;
(annexe 1 ; image 4) Champs de blé dans le Morvan (1842), de Jean-Baptiste Camille
Corot ; (annexe 1 ; image 5) La noce chez le photographe (1879), de Dagnam-
Bouveret et (annexe 1 ; image 6) La fanfare de bois-le-rois (XIX siècle) 121, de Antoine-
Jean Bail.

Pour le premier tableau, les danseurs ont présenté une « danse d’arme » ; pour le
deuxième, inspirés de l’ancienne pratique des avocats d’échauffement vocal avant les
audiences, ils ont présenté une chorégraphies basée entre la voix et le geste ; ensuite, ils
ont montré une danse de cours ; pour la quatrième œuvre, ils ont été inspirés par le geste
de la récolte de blé ; pour la cinquième, ils ont proposé un jeu de photo-mariage, c’est-à-
dire une danse de couple au son de la musique (l’idée était de répéter le même rituel
avec les yeux fermés) ; pour le dernier tableau, ils ont créé une chorégraphie à la vitesse
progressive au fur et à mesure qu’une cellule de danse est ajoutée. Les six chorégraphies
ont été présentées en une médiation qui a duré environ une heure trente, avec des
moments accompagnés de musiques et d’autres sans.

Cette première expérience de médiation dansée se situe en fait entre une


médiation et un spectacle, surtout si l’on considère la faible participation du public.
L’objectif ici était de montrer des interprétations chorégraphiques possibles face aux
œuvres et non de pousser le public à élaborer sa propre danse. Des médiations de ce
type me semblent toutefois nécessaires pour deux raisons : elles permettent de faire
sentir au visiteur qui a pleinement participé, non habitué qu’il soit, les enjeux et la
puissance d’une telle expérience ; mais elles permettent également de faire percevoir à
ceux qui sont restés en retrait que la danse peut être un outil intéressant de médiation.

Cette médiation m’a incitée à regarder les œuvres présentées par la danse avec
plus d’intérêt. Chaque geste, position des personnages, couleur, etc. me conduisaient à
différentes perceptions sur l’œuvre et à des voies d’imagination multiples, comme par
exemple pour le tableau Les deux avocats (illustration 2) : quels seraient les types de
discussions entre eux ? Après la fin de la médiation, je suis retournée dans la salle
d’exposition pour regarder tous les tableaux présentés et je me suis permise de

121
. Annexes 1

39
construire des histoires sur l’image devant moi et sur l’élaboration des tableaux
(époque, technique, etc.).

« Visite expérience : posture(s) à l’œuvre » dans l’exposition


Radio/ Tomorrow’s Sculture de Katinga Bock à l’Institut d’Art
Contemporain de Villeurbanne (IAC)

La deuxième médiation à laquelle j’ai participé a été organisée par l’Institut


d’Art Contemporain de Villeurbanne sous la conduite de Marie- Zénoibe Harlay.
Réalisée le samedi 17 novembre 2018, la médiation était composée d’un groupe de cinq
personnes. Au contraire de ma première expérience décrite précédemment, la médiation
proposée au IAC était de mettre en mouvement le public.

Marie-Zénoibe, danseuse et chorégraphe, a commencé la médiation en


présentant sa proposition. En une unique séance, il s’agissait de commencer la visite
hors de la salle d’exposition, en faisant des échauffements et un travail de sensibilisation
pour se préparer à danser/regarder les œuvres.

Dans la salle réservée, le public s’est disposé en cercle et, conduit par Marie-
Zénoibe, a initié une sensibilisation des paumes et de la tête par des petits massages et
perceptions tactiles de différentes parties du corps. La danseuse a ensuite proposé une
investigation corporelle avec un tissu (annexe 2, image 7). Tour à tour, chacun entrait
dans le cercle et expérimentait la construction de postures avec le tissu. Les autres
essayaient d’élaborer des postures à partir du mouvement de la personne : placer le
poids, les formes, répondre à la relation du tissu avec le corps – observer et sentir,
autrement dit, à partir du mouvement de l’autre. Nous avons également exploré le tissu
par deux (annexe 2, image 8) : la première personne posait le tissu sur l’autre qui devait
réagir avec le corps. Ce n’est qu’ensuite que nous sommes entrés dans l’exposition : le
but était alors de jouer le rôle de visiteur et d’élaborer des postures devant les œuvres
(annexe 2, images 9 et 10). Dans la salle d’exposition, l’indication de la danseuse était
de prendre deux minutes pour regarder les salles et créer des postures pour l’œuvre de
notre choix.

Initialement, le groupe était composé de cinq personnes. Au long de la


médiation, il s’est réduit à trois. L’interaction entre nous était subtile : des petits regards
entre nous et des compositions de mouvement à partir du mouvement de l’autre. À la

40
fin, nous avons discuté de la difficulté de construire une unique posture devant une
œuvre et de celle d’agir sous le regard de visiteurs qui ne participaient pas à la
médiation. Le manque d’habitude de ce type de médiation et des expérimentations
artistiques face à l’œuvre dans le musée révèle qu’il y a des postures attendues face à
l’œuvre et que le regard des autres porté sur nous exerce un type de contrôle sur nos
corps vers un comportement qui est admis ou pas.

Malgré la pertinence de la proposition, qui visait à mettre le corps du visiteur en


mouvement, il me semble qu’il manquait des indications de la danseuse pendant
l’activité qu’elle proposait aux participants pour explorer l’imaginaire et les possibilités
de travail de la posture face à l’œuvre. Celles-ci auraient d’ailleurs pu être
communiquées par l’engagement du propre corps de la danseuse/médiatrice.
L’invitation à construire une posture face à l’œuvre, m’a conduit à conclure que le
régime esthétique ne considère généralement pas le visiteur comme partie constitutive
de la réflexion sur l’œuvre. La manière dont je pose, le corps, la tête, les membres
peuvent interférer sur ma façon de sentir et percevoir l’œuvre. L’acte de médiation
permet, par la danse de questionner la place et le rôle du visiteur au musée, face à une
œuvre artistique.

Bal chorégraphié en écho à l’exposition Claude, un empereur au


destin singulier  au Musée des Beaux-arts de Lyon

Le Musée des Beaux-arts, en partenariat avec Denis Passard et sa compagnie, a


proposé un bal chorégraphié en écho à l’exposition Claude, un empereur au destin
singulier. Réalisé le vendredi 4 janvier de 2019 en trois séances consécutives (j’ai pour
ma part participé de la deuxième), le bal durait 45 minutes, dirigé par Denis Passard et
deux musiciens sur scène. Au contraire des autres médiations dansées présentées dans
ce dossier, le bal n’a pas eu lieu en salle d’exposition, mais dans une grande salle
séparée. Il a réuni environ quarante personnes lors de cette deuxième séance, la majorité
composée de personnes âgées, mais aussi de couples avec des enfants.

Denis Passard a commencé par montrer des séries de petites chorégraphies : la


première, par exemple, se constituait d’un déplacement en avant, suivi de l’allongement
des bras devant et derrière, dessinant ainsi aqueduc, en référence à l’exposition Claude,
un empereur au destin singulier. Il a ensuite ajouté des mouvements accompagnés de

41
musique pour donner le temps de chaque pas. Après la première chorégraphie, le
danseur a proposé de se mettre par deux, le bal commençait ainsi avec les rencontres
générées par la danse.

Chaque fois que le chorégraphe ajoutait des pas, il faisait référence à des
éléments de l’exposition, par exemple à la texture des tables Claudiennes, discours de
Claude gravé dans le bronze. Dans le bal, Denis Passard a proposé quatre types de
marche qui variaient selon la musique, rendant possible un mélange entre les
participants. Finalement, le public était invité à danser par deux les yeux fermés,
proposition qui n’a pas vraiment fonctionné à cause du manque d’intimité et de
confiance entre les participants. Avec un air léger et détendu, la grande majorité des
participants au bal est allée visiter l’exposition, où, par hasard, on pouvait y retrouver un
partenaire de danse.

Le petit nombre de ces expériences et leur caractère inédit conduit à revendiquer


pour les musées actuels de réels espaces de productions esthétiques e/ou Aisthetique
destinés au public. La fonction du visiteur dans le musée doit aussi être celle
d’élaboration d’actions et de productions de réflexions. Aucune de ces médiations ne
s’est déroulée dans un musée d’anthropologie, c’est donc avec l’expérience au Mucem
que j’ai pu approfondir la question de la relation entre médiation dansée et musée
d’anthropologie.

42
CHAPITRE 3 – ON DANSE ? MÉDIATIONS ET
DANSE AU MUCEM, MARSEILLE.

Le musée d’anthropologie est une institution qui comporte des enjeux


particuliers, notamment dans la relation entre les œuvres exposées et les attentes du
public. Les expériences que j’ai vécues au Mucem sont ainsi importantes pour mieux
comprendre le cas de la médiation dans le musée d’anthropologie.

Pour ce chapitre, nous commencerons par décrire l’exposition On danse ?, puis


nous évoquerons la politique des publics du Mucem. Nous présenterons ensuite trois
exemples de médiations mises en place au Mucem pour l’exposition On danse ? (la
présence du personnel en salle d’exposition, les usages de la salle de chauffe et les deux
visites-ateliers : « On danse ? » et « La danse, très peu pour moi »). Pour faciliter la
compréhension des activités et des espaces utilisés par les médiations présentées, je
mettrai à disposition des photos et des vidéos que j’ai prises pendant les observations (le
musée et les participants m’y ayant autorisée).

L’exposition On danse ?
Mise en place au MuCem entre le 20 janvier et 20 mai 2019, l’exposition On
danse ? a été élaborée par la commissaire générale Émilie Girard (conservatrice en chef
du patrimoine, responsable du département des collections et des ressources
documentaires au MuCEM), la commissaire associée Amélie Couillaud (commissaire
d’exposition indépendante, programmatrice de spectacles) et Cécile Degos, responsable
de la scénographie. Pour élargir le point de vue sur les questions sur la danse, Boris
Charmatz122 (danseur, chorégraphe et fondateur du Musée de la danse à Renne) était
l’artiste invité pour cette session au MuCEM.

L’élaboration d’une exposition constitue une opportunité pour le développement


d’une réflexion sur un sujet ou une thématique, aussi bien que pour la conception de
diverses activités destinées à graviter autour. Après plusieurs expositions autour de la
122
.Artiste invité du Mucem pour la saison 2018-2019, le danseur a une large expérience de la relation
entre danse et musée. Créateur du Musée de la danse à Rennes, dont les dix années d’existence ont
beaucoup contribué au travail sur la relation entre danse et musée en France.

43
danse dans divers musées en France 123, les commissaires de l’exposition On danse ? ont
envisagé « moins une exposition sur la danse ou sur le danseur que sur l’acte de
danser ; c’est-à-dire non pas sur la danse comme phénomène réservé à une élite de
professionnels surentrainés mais sur la danse comme fait partagé, partageable par le
plus grande nombre124 ». La scénographie est conçue notamment à partir de trois
dimensions fondamentales de la danse125 – le corps, l’espace et le temps – et à partir de
deux questions : « Où commence la danse ? » et « Vers qui danse-t-on ? ».

Dans une salle située au deuxième étage du bâtiment J4, l’exposition était
composée d’une boucle de six heures de soixante extraits vidéo exposée sur douze
écrans de différentes tailles, matériaux et formes disposés autour d’un ensemble de
structures inspirées du mobilier urbain (balançoire, rampe de skate, bancs, etc.). On
pourrait ainsi considérer que l’exposition On danse ? correspond à une exposition
d’immersion. Même s’il est possible de la considérer ambitieuse et floue, l’idée d’une
exposition immersive est de transmettre de manière sensible et sensorielle les sujets
abordés qui y sont abordés126.

L’exposition se divisait en trois espaces principaux : un premier avec un podium


de danse et des balançoires, un deuxième avec des chaises longues et une rampe, le
dernier constitué d’espaces divers pour s’asseoir ou s’allonger, deux rampes pour glisser
et, juste avant la sortie de l’exposition, un rideau de fils servant d’écran. Elle disposait
également de quatre objets : une sculpture ultra réaliste intitulée Hikage à l’entrée, un
tambour de chaman et un ghetto blaster dans le deuxième espace, et un éventail de
Mistinguett dans le troisième espace (voir Annexe 5). L’exposition comportait de plus
deux objets chorégraphiques du danseur William Forsythe 127 qui avaient pour objectif
l’engagement du corps du visiteur à travers des objets touchables ou le mouvement du
corps. Le premier, intitulé Towards the Diagnostic Gaze (2019), constituait en un
plumeau posé sur une table où il y avait inscrit « Hold the object abosolutely still –
123
.Par exemple, Danser sa vie, au Centre Pompidou à Paris en 2012, Corps rebelles au Musée des
Confluences à Lyon en 2017 et Corps en mouvement, la danse au musée au Musée du Louvre à Paris
en 2017.
124
.Entretien avec Émilie Girard au CCR le 15 mai 2019.
125
.Hugo Zemp, montre pour sa part que la danse peut être comprise selon de multiples abordages :
physique, culturel, social, physiologique, économique, politique et de la communication. ZEMP,
Hugo (2010), « Pour entrer dans la danse ». In ZEMP, Hugo (2010). Op. cit., p. 3-25.
126
.Florence Belaen. (2004) « L’immersion comme nouveau mode de médiation au musée des sciences.
Étude de cas : la présentation du changement climatique », Colloque Sciences, médias et sociétés.
Lyon, ENS-LSH. Disponible sur http://sciences-medias.ens-lsh.fr/article.php3 ?id_article=70.
127
.Artiste et chorégraphe allemand (1949, New York, Etats-Unis)

44
Tenez l’objet absolument immobile ». Le second, Instructions (2018), correspondait à
un texte gravé sur un mur noir où étaient donné des indications simples de mouvements
du corps pouvant constituer une danse128)S’ajoutait à ces espaces la salle de chauffe sur
laquelle nous reviendrons plus loin.

Notons d’emblée que le désir d’innovation peut être perçu dans l’imbrication de
la proposition des objets et vidéos exposés (voir Annexe 5). Les commissaires sont
parties du corps du visiteur pour, d’après Émilie Girard lors de notre entretien,
construire une scénographie « dynamique où le mouvement soit complètement
prenant129 » pour « inviter [les visiteurs] à découvrir la danse là où on n’a pas l’habitude
de la voir et à réaliser à quel point elle modifie le rapport avec soi et avec les autres 130 ».
Pour l’élaboration de cette scénographie, elles ont ainsi choisi l’utilisation d’une
moquette pour que le visiteur puisse explorer les différentes possibilités d’expérimenter
une exposition.

Lors de notre entretien, Émilie Girard précise à propos de l’importance accordée


à la scénographie de l’exposition :

Il y a une forme indissociable du fond. On a avancé de concert sur


la conception du flux et sur la scénographie. On avait, avec
Amélie, une idée assez précise de ce que l’on voulait c’est-à-dire
un espace décloisonné le plus possible, avec des écrans vraiment
différents, de manière à pouvoir expérimenter différents modes de
regarder : du très grand, du très petit, du caché, des choses qui se
diffusent plus largement. Ce qui était important pour nous aussi,
c’était le confort. L’enjeu de la scénographie était de retenir un peu
les gens, qu’ils ne fassent pas juste traverser et sortir. Donc on a
envisagé un sol qui soit très confortable, qui donne envie de
s’asseoir, voire de se coucher, de dormir si on a envie […] 131.

On danse ? était ainsi une exposition particulièrement singulière et innovatrice


au Mucem. Pour aider à établir le lien entre la proposition du musée et les divers publics
touchés effectivement par l’exposition – et dans l’idée d’inviter le public généralement

128
.Informations disponibles sur la fiche « Peut-on danser dans un musée ? » du projet « Le Mucem
c’est quoi ? », organisée par les responsables du champ social et handicap et destinée aux
animateurs, aux éducateurs, aux enseignants, aux accompagnateurs qui souhaitaient visiter le Mucem
en autonomie avec un groupe de jeunes, c’est-à-dire sans payer la visite guidée. Video : objet
chorégraphique Instructions, William Forsyte, 19 avril 2019. Disponible sur :
https://youtu.be/qcQQlDJzj_E
129
.Entretien avec Émilie Girard au CCR le 15 mai 2019.
130
.Voir le site du Mucem sur l’exposition On danse ?
131
.Entretien avec Émilie Girard au CCR le 15 mai 2019.

45
absent –, de multiples projets de médiations ont été mis en place. Je présente ici les
observations collectées dans ce sens pendant mes séjours au Mucem.

Les médiations autour de l’exposition


Le département du développement culturel et des publics est divisé en trois
pôles : le pôle développement culturel, le pôle de diversification des publics, et le pôle
de gestion des publics. Avec cette structure diversifiée, le musée consolide des activités
et diverses médiations pour chaque exposition.

Les outils de médiations dans un musée sont variés : il est possible d’employer à
la fois le texte, différents types de visites, des projets, des évènements, etc. Pour ce qui
concerne les médiations directes avec le public par des médiateurs ou des guides, le
Mucem utilise deux méthodes : les médiations postées, assurées par les médiateurs (ou
« compagnons de voyage132», employés par MUSÉA – Accueil de publics133) présents
dans la salle d’exposition et disponibles pour tous les visiteurs ; et les visites guidées et
les ateliers, prestations payantes assurées par des guides (employés par Pont-des-Arts :
l’invitation à l’art134).

J’ai initié les activités d’observation avec la participation au week-end


évènement « Danse de Mars » réalisé du 29 au 31 mars 2019. Le projet consistait en la
réalisation d’un week-end de programmation (avec des performances, des projections,
des vernissages festifs, etc.) en écho à l’exposition On danse ?. Le projet était mené par
les responsables du champ de médiation événementielle du pôle développement culturel
et du champ des familles et des jeunes du pôle de diversification des publics, ce en
partenariat avec la promotion du Master 1 « Politiques culturelles et mécénat » de
Sciences Po Aix.

J’ai pu, ensuite, faire des observations dans la salle de la médinathèque. Cet
espace, situé au premier étage du Mucem, est destiné à diffuser des archives vidéo de
l’INA en dialogue avec les expositions temporaires. Pour l’exposition On danse ?,
étaient par exemple montrés des extraits d’entretiens et de chorégraphies de danseurs
célèbres comme Pina Bausch ou Boris Charmatz. Dans ce même espace, était mis à
132
.Voir le « Projet scientifique et culturel » du Mucem édité en 2017, p. 124.
133
.Site MUSEA : https://www.musea-accueil.com/fr/home/.
134
.Site Pont-des-arts : http://www.pont-des-arts.com/.

46
disposition du public un dispositif spécifique, le photomaton, qui prenait des séquences
de photos des usagers pour en faire une courte vidéo. Celle-ci pouvait être partagée sur
les réseaux sociaux, ce dispositif constituait ainsi à la fois une médiation et une stratégie
de publicité pour l’exposition.

Concernant les outils pédagogiques, le musée a produit deux dispositifs. Le


premier, nommé « Dossier pédagogique » et distribué auprès des éducateurs, contenait
des réflexions autour de l’exposition et des exemples d’analyses des vidéos exposées.
Ce dossier a été construit par le champ scolaire en partenariat avec un professeur invité
du Lycée Saint Charles à Marseille. Le deuxième outil pédagogique était intitulé « Le
Mucem c’est quoi ? ». Conçu par le champ social et du handicap, il était distribué aux
groupes des centres de loisir et aux groupes qui n’avaient pas le moins de payer les
visites-ateliers. Parmi plusieurs fiches pour chaque exposition du musée, le dispositif
comptait une fiche sur l’exposition On danse ? comportant des indications et des
questions sur la thématique de l’exposition.

Dans le cadre des projets de médiations j’ai également pu connaitre le projet


Mixdanse (mené par le chargé des publics du champ social et du handicap). L’idée de ce
projet était de réaliser des ateliers de danse, exécutés entre novembre 2018 et janvier de
2019 et dirigés par le chorégraphe Christophe Hales et les danseurs de sa compagnie La
Zouze. Les participants ont été variés : le Centre Social Saint-Gabriel, la Maison Pour
Tous - Centre social Saint-Mauront National, le l’IRSAM / Arc-en-Ciel / les Nénuphars,
l’Université d’Aix-Marseille, le lycée Saint-Charles et le Club senior du CCAS Saint-
Victor. La conclusion du projet a consisté en trois présentations chorégraphiques et
deux vidéos sur le processus, mises à disposition des visiteurs dans la salle de
medinathéque.

Par ailleurs, j’ai suivi la restitution du projet « Bar masqué – Nuit Vernie » mené
par la responsable du champ du public scolaire en partenariat avec le Ballet National de
Marseille, les élèves du Lycée Saint-Louis et Emmaus. La présentation dans le théâtre et
dans le hall du musée a marqué pour moi la fin de mes observations au Mucem.

Afin de mieux comprendre les enjeux autour des médiations mises en place pour une
telle exposition, nous avons choisi de présenter les usages de la salle d’exposition
– notamment déterminés par la présence des médiateurs MUSEA et des agents de
sécurité –, de la salle de chauffe et des deux visites-ateliers : « On danse ? » et « La

47
danse, très peu pour moi ». Pour cela, nous commencerons par décrire l’activité pour
ensuite rendre compte d’observations d’ordre général puis anecdotique qui nourriront
notre réflexion.

Il nous semble toutefois important de commencer par la présentation des


conditions tarifaires. Pour la politique des publics l’accessibilité par le prix des visites et
des activités est en effet une question majeure. Les tarifs variaient selon le mode de
visite : individuelle ou en groupe, autonome ou guidée :

Visite exposition   Tarif de groupe (8   Visite guidée  


a 25 personnes)
Plein tarif 9,50 Visite guidée 1h 260 € Plein tarif + visite 14 €

Étudiant 5 € Visite guidée 1h30 290 € Tarif réduit + visite 9,50 €
Famille (2 adultes + 5 14 € Visite autonome 35 € 18A +visite 4,50 €
enfants)

Ajoutons que le premier dimanche de chaque mois, l’entrée du Mucem, comme


la majorité des musées en France, est gratuite pour tous. Cette action permet la présence
d’un public non-habituel au musée. La gratuité pour des groupes de milieux sociaux
précaires peut par ailleurs être assurée grâce à une politique spécifiques d’accès aux
visites guidées, c’est le cas de celle mise en place pour l’exposition Jean Dubuffet, un
barbare en Europe. L’exposition On danse ? n’a cependant pas bénéficié de ce
dispositif : toutes les visites guidées étaient par conséquent payantes.

Salle principale

Observations générales
Globalement, les usages possibles de la salle étaient beaucoup plus explorés par
les enfants (j’ai pu entendre d’un enfant occupé à jouer : « Ici, c’est ma salle
préférée ! »). Après quelques instants d’observations dans la salle, les adultes présents
avaient en effet tendance à limiter leur usage de la scénographie. La balançoire et les
rampes étaient ainsi l’espace des enfants et des jeunes tandis que les espaces pour
s’assoir confortablement étaient utilisés par les adultes. Parfois, les parents
expérimentaient la balançoire et les rampes en compagnie de leurs enfants.

48
En fait, le musée n’est pas considéré comme un espace pour danser mais plutôt
comme un espace pour regarder, lire, écouter. Les codes traditionnels du mode de visite
d’une exposition (en particulier les rituels « ne pas toucher les objets » et « faire
silence » ou « ne pas faire de bruit ») constituaient ainsi une barrière difficilement
surmontable pour les usages proposés par cette exposition : courir, danser, sauter et
expérimenter des objets participatifs (œuvre de Forsythe). Selon la description d’un
agent de sécurité, les seuls publics qui se permettaient de danser étaient les enfants (j’en
ai pu voir moi-même imiter les danses présentées par les vidéos, danser en groupe, etc.)
et les « baba cool135 ». Finalement, la salle d’exposition était utilisée d’avantage comme
un cinéma qu’une salle de danse. Une partie du public et des agents de sécurité ayant
exprimé leur incompréhension de la relation de certaines vidéos avec la thématique de
l’exposition, il est possible d’y voir là un frein à l’appropriation et l’expérimentation de
l’espace par les visiteurs, pour qui le regard traditionnel de spectateur prévaut sur le rôle
possible d’acteur.

Une seconde contradiction que supportait l’exposition semble fondamentale :


alors que On danse ? se proposait d’évoquer la danse de tous, pour tous, alors que la
scénographie visait tous les corps, l’accessibilité n’était pas toujours effective. Tous les
espaces n’étaient ainsi pas adaptés aux personnes âgées, à celle en surpoids et à mobilité
réduite en général.

Concernant le personnel en salle


Les médiateurs MUSEA, présents dans la salle d’exposition le mercredi et le
week-end, ont joué un rôle important pour l’exposition et pour la médiation.
Disponibles pour le visiteur, les médiateurs MUSEA restaient ouverts au dialogue sur
les œuvres interactives – notamment celles qui n’étaient pas « claires » pour le visiteur –
et sur les questions clés de l’exposition.

Ils ont en revanche rencontré des difficultés pour trouver leur placement dans la
salle (les médiateurs se tiennent soit à l’entrée de l’exposition, soit circulant dans la
salle, soit avant la sortie de l’exposition) et pour mettre en place différentes approches
afin d’accéder aux publics et d’établir des dialogues.

135
.Je trouve cette remarque particulièrement riche d’interprétations possibles. Elle mériterait une
analyse que nous n’avons pas la possibilité de développer ici.

49
Une autre question abordée par les médiateurs lors de mes entretiens concerne le
manque d’espace pour les propositions de médiations qui auraient pu être effectuées
dans les expositions. Jeunes (entre 20 et 30 ans) dont les études sont liées à l’art, au
musée et/ou à la médiation, les médiateurs MUSEA auraient pu apporter des
suggestions à partir de leurs champs d’études et de leurs expériences au contact direct
avec les publics.

Par ailleurs, les agents de sécurité ont eu un rôle ambigu dans l’exposition On
danse ?. D’une part, leur seule présence indiquait un système de règles à suivre (ne pas
toucher à la sculpture à l’entrée, ne pas maltraiter les appareils, l’espace, etc…), de
l’autre ils avaient la fonction de médiateurs (surtout les jours d’absence de médiateurs
MUSEA) lorsqu’il s’agissait au contraire de toucher et manipuler les œuvres.

Les deux métiers – médiateur et agent de sécurité – aux fonctions différentes


voire contradictoires au sein de la structure du musée, jouent un rôle extrêmement
important puisque c’est eux qui assurent la liaison directe avec le public au musée.
Voilà pourquoi l’engagement de ces deux métiers, à la fois dans l’explication de
l’exposition mais aussi dans la conception même des visites guidées proposées pour
chaque exposition, me semble important.

Anecdote : Qui se permet de danser au musée ?


« Le 11 avril 2019, pendant mon déjeuner, j’ai observé par la grande fenêtre du
4ème étage un groupe de jeunes – entre 6 et 12 ans – accompagnés par quatre adultes qui
dansaient devant le bâtiment à côté du Mucem. J’ai vite imaginé qu’ils allaient au
Mucem pour voir l’exposition On danse ?. À 13h20, j’étais dans la salle de l’exposition
et le groupe – formé essentiellement de non-blancs, public peu présent d’après mes
observations – est entré. Le groupe a regardé les vidéos, les adultes accompagnateurs
demandaient sans cesse le silence, certainement par crainte de se faire reprendre par un
agent de sécurité ou un employé du musée. Contrairement à dehors, personne du groupe
n’a dansé. »

Salle de chauffe 

Élaborée par le danseur Boris Charmatz et le département de production du


spectacle du Mucem, la salle de chauffe, localisée au Forum du musée, abordait toutes

50
les questions évoquées par l’exposition à travers l’expérience en elle-même, et par l’acte
de danser.

La salle était délimitée par un tapis de danse au milieu de la salle et des canapés
disposés autour. L’espace est une dimension importante de la danse. Le tapis, par
exemple, est devenu, du moins au sein de l’« espace occidental », le lieu par excellence
pour les cours de danse136. Lors de notre entretien, une des danseuses médiatrices de cet
espace témoigne :

Le tapis propose un espace autre. On se met pied nu, c’est une


bascule avec le quotidien qui fait que l’on entre dans un espace
autre, un relatif confort […]. Ça permet aussi de passer de
spectateur à danseur. Je le trouve quand même assez important
[…].

La danseuse conclut pour sa part :

On [ne] sait pas ce qu’est la danse, on [ne] sait pas comment


l’attraper… Mais d’en faire une expérience, je pense que ça
modifie vraiment le regard que l’on peut avoir là-dessus. C’est un
excellent apport, pour moi c’est le moment fort de l’exposition.

L’objectif initial était d’« échauffer » le public avant de visiter l’exposition.


Chaque week-end un duo de danseurs137 invité par Charmatz se relayait pour proposer
des séances de danse (de 30 min à 1 heure, selon le duo). Chaque danseur apportait des
pratiques et expériences de danse, ce qui a rendu possible l’exploration des multiples
formes de la danse contemporaine, comme le contact improvisation. Cependant, malgré
cette diversité proposée par les danseurs, le dialogue avec l’univers de la Méditerranée,
avec les danses européennes traditionnelles ou celle du milieu urbain actuel (objets
d’études au fondement du Mucem) étaient peu présents.

Observations générales
Avec une extraordinaire diversité des publics, la salle de chauffe était un outil de
médiation non seulement pour l’exposition mais également pour le musée. Les visiteurs

136
.Nous en profitons cependant pour affirmer que d’autres espaces de danse sont aujourd’hui
envisagés. À l’École des sables, par exemple, tous les cours sont dispensés sur le sable.
137
.Danseurs participants de la salle de chauffe : Djino Alolo Sabin, Regis Badel, Eric Minh Cuong
Castaing, Boris Charmatz, Montaine Chevalier, Sonia Darbois, Raphaëlle Delaunay, Sandra
Français, Gaspard Guilbert, Christophe Haleb, Christophe Ives, I-Fang Lin, Filipe Lourenço,
Dorothée Munyaneza , Julien Monty, Balkis Moutashar, Fabrice Ramalingom, Asha Thomas.

51
devenaient ici acteurs/danseurs dans le musée et plusieurs personnes venaient tous les
week-ends pour participer à cette activité138.

L’espace a cependant été jugé inapproprié par une partie du public interrogé car,
espace de passage, les visiteurs se sentaient trop exposés. Les usages multiples de cet
espaces (évènements, expositions, passage d’entrée pour le cinéma, etc.) provoquait un
conflit entre ceux-ci. Une des danseuses participant aux activités en salle de chauffe a
quant à elle exprimé le regret de ne pas avoir pu profiter d’une salle de ce type au cœur
même de l’exposition. Notons cependant que les visiteurs – parmi eux plusieurs
venaient par choix, d’autres parce qu’ils avaient découvert l’activité pendant la visite au
musée – étaient satisfaits de la proposition et plusieurs restaient tout l’après-midi dans la
salle de chauffe.

Finalement, on peut dire que la salle de chauffe consistait en un espace ouvert,


favorable aux rencontres et aux dialogues. La danse, dans la plupart des cas, permettait
la rencontre avec soi-même et avec l’autre. Dans cet espace, le visiteur s’envisageait de
façon perceptible comme acteur et pas seulement comme « spectateur ». Autrement dit,
cet espace – beaucoup plus fréquenté par les femmes que par les hommes – a rendu
possible un contact spontané avec les visiteurs-acteurs. À travers la danse j’ai pu établir
une « participation observante, qui questionne la formule classique observation
(distante/réflexion) + participation, pour intégrer le caractère expérimentalo-corporel de
la production de connaissance ethnographique, en soulignant la proximité avec les
interlocuteurs139. » Un tel travail sensible – où le contact avec les autres se fait de
manière spontanée et à travers un vrai échange (normalement rendu possible par la
pratique de la danse) – me semble actuellement essentiel pour une recherche
anthropologique de qualité.

Anecdote : Comment danse-t-on avec la différence ?


« Lors d’un week-end d’observations dans la salle de chauffe, le tapis de danse –
qui jusque-là n’avait jamais été une barrière pour moi, au contraire – a montré qu’il
pouvait aussi avoir ces limites. L’arrivée d’un groupe avec une personne en fauteuil
138
.Vidéo  : Salle de Chauffe, exposition On danse ?, Mucem, 17 mai 2019. Disponible sur :
https://youtu.be/7S9jGLIS4aQ
139
.Traduction de l’espagnol : « ‘particioatión observante’, que cuestiona la fórmula clássica
‘observación (distancia/reflexión) + participación’, para integrar el carácter experiencial-corporal de
la productión de conocimiento etnográfica, destacando la cercania com nuestros interlocutores”.
ASCHIERI, Patricia. « Hacia une etnografia encarnada: la corporalidad del etnógrafo/a como dato em
la investigación » In CAMARGO, Giselle Guilhon Antunes (org) Antropologia da dança IV. (p.75)

52
roulant a attiré mon attention car c’était la première fois que j’observais une personne
dans une telle situation participer à la salle de chauffe. Je participais alors à l’activité
proposée par le danseur avec le reste du groupe. La personne en fauteuil, venue pour
cette activité, est restée tout le long de l’animation séparée du groupe, qui réalisait une
activité collective sur le tapis.

Le tapis s’est ainsi présenté comme une barrière à l’inclusion de la personne en


fauteuil roulant qui ne pouvait dépasser la limite claire que constituait le tapis. En tant
que participante du groupe, j’ai essayé plusieurs fois de déplacer le groupe en dehors du
tapis pour créer ensemble un autre espace de danse. Sans succès, j’ai quitté l’activité
pour observer la situation. Pourrait-on penser d’autres type de tapis de danse auquel le
fauteuil roulant puisse accéder ? Comment penser des espaces de danse autres,
inclusifs ? ».

Visite-atelier « On danse ? »

Initialement les commissaires ne désiraient pas réaliser des médiations dans la


salle d’exposition, fait révélateur d’une envie d’une exposition qui puisse « parler pour
elle-même » [ref ?] au travers de la scénographie et des objets. Lors des visites-ateliers
le groupe commençait par conséquent par visiter l’exposition avant de passer à la
réalisation d’atelier ailleurs. Un bref dialogue sur les objets et sur l’idée globale de
l’exposition étaient d’abord présenté pendant la visite.

Le scénario de la visite-atelier « On danse ? » était élaboré par la danseuse


invitée Marina Costa et visait les groupes scolaires et les familles. Les guides
responsables de la visite-atelier ont participé à une visite-test menée par Marina Costa
avec la participation de toute l’équipe responsable pour les médiations au musée et les
responsables pour la communication. Un document « Scénario de la visite-atelier »
contenant la présentation des étapes à suivre a également été produit et distribué aux
guides. Chaque guide faisait bien évidement les adaptations nécessaires selon la réalité
de chaque groupe et ses propres habiletés pour développer la thématique.

Deux modèles de visite était pensés : une destinée aux enfants de moins de 8 ans
et une pour les enfants à partir de 8 ans. La visite était constituée de trois parties :
l’accueil du groupe dans le hall du musée, une brève visite dans la salle d’exposition
– avec une discussion sur les vidéos et les objets exposés et un temps d’exploration des

53
espaces immersifs de la salle – et, finalement, le développement de l’activité dans une
salle située au premier étage inférieur du musée.

Dans le scénario distribué aux guides responsables de mettre en œuvre l’activité,


Marina Costa exprime l’objectif de la visite-atelier « On danse ? » en ces termes :

Entrer, en douceur, dans une mise en mouvement du corps ;


développer l’écoute de l’autre et du groupe ; s’initier à l’expérience
d’écoute de soi, de son corps, de son imaginaire et s’exprimer de
façon libre sur différents types de rythmes et d’images 140.

L’atelier en lui-même était constitué en trois étapes. Il commençait par un temps


d’échange d’environ 10 min. Les guides posaient pour cela des questions sur
l’expérience de l’exposition : qu’est-ce qui vous a plu/interpellé ? qu’avez-vous
apprécié/compris ? Celles-ci conduisaient à des interrogations évoquées par
l’exposition : pensez-vous que ça c’est de la danse ? De quoi a-t-on besoin pour parler
de danse ? Après cette première approche, les guides proposaient un échauffement, puis
un jeu avant la clôture de l’activité.

Le jeu destiné aux enfants de moins de 8 ans s’appelait « On danse les
couleurs141 ». Il visait à faire entrer les enfants dans la danse à travers le développement
d’une relation avec un objet (un foulard coloré). Rassemblés ensuite selon la couleur de
leur foulard, les enfants étaient ensuite invités à élaborer une chorégraphie à partir des
mouvements expérimentés plus tôt.

Le deuxième jeu, destiné aux enfants de plus de 8 ans, s’intitulait « On


danse142 ? ». Plus complexe, il conduisait à une première expérience de création
chorégraphique. Chaque groupe d’enfants ou de familles recevait une tablette avec
treize extraits vidéo présentés dans l’exposition. Après le choix d’une vidéo à travailler,
chaque personne du groupe devait choisir trois adjectifs d’une liste proposée par le
guide et créer un mouvement. La liste d’adjectifs était basée sur trois notions (inspirées
de l’étude du mouvement dansé de Rudolf Laban) : le corps (souple, fort, mou, agile,
etc.) ; le mouvement dans l’espace (petit, circulaire, fluide, etc.) et l’utilisation de
l’espace (expansif, concentré, etc.).

140
.Scénario de la visite-atelier « On danse? », conception de Marina Costa, 21 décembre 2018.
141
.Vidéo : On danse en famille ?, « On danse les couleurs », Mucem, 19 avril 2019. Disponible sur :
https://youtu.be/8_hWZ3o1dT4
142
.Vidéo : visite-atelier « On danse ? », Mucem, 04 avril 2019. Disponible sur:
https://youtu.be/ag4mKr8HD4Y

54
Si on considère la relation entre les œuvres et le public, ces deux activités
montrent la possibilité de médiation à partir de la thématique globale puisqu’elles
conduisaient à mettre le corps en mouvement à travers un objet relationnel et médiatiser
les œuvres à travers des vidéos en travaillant sur ce que l’on voit et imagine à partir de
celles-ci.

De manière globale, on peut dire que la visite-atelier « On danse ? » a atteint ses
objectifs : la participation des élèves à l’atelier par une expérience de danse et
l’instauration d’un dialogue entre l’exposition, l’atelier et l’enseignement dispensé à
l’école. Quant aux familles, l’atelier a indubitablement favorisé l’interaction pratique
entre les parents et les enfants. Notons que l’utilisation de la tablette a encouragé les
plus jeunes à participer à l’activité, participation parfois difficile à cause de la nécessité
d’un engagement certain du corps. Un approfondissement pratique sur la danse me
semble en revanche important pour les guides responsables d’ateliers de ce type.

Une incohérence avec la thématique de l’exposition peut par ailleurs être repérée
car, tandis que l’exposition aborde l’acte de danser – ce que tout le monde fait –,
l’atelier se propose d’inventer une chorégraphie – travail caractéristique de la danse
professionnalisée. Certains accompagnateurs de groupe ont de plus remarqué la taille
réduite de la salle pour l’élaboration de l’atelier, ils étaient cependant satisfaits en raison
de la réussite de l’activité.

Visite-atelier : « La danse, très peu pour moi » 

Élaborée par les guides conférenciers du Point-des-arts143, cette visite-atelier était


divisée en trois parties successives : l’accueil, avec quelques questions sur la danse, la
visite de l’exposition, et enfin une discussion dans la salle atelier. L’idée était de
d’aborder les thématiques de l’exposition par la parole plutôt que par le corps.

Pendant l’accueil, chaque participant recevait un casque pour écouter les


indications et explications données par la guide. Après la visite de l’exposition, tout le
groupe passait à la salle d’atelier et s’asseyait assis en cercle. La guide commençait par
interroger le public (pourquoi ont-ils choisi cette visite-atelier ?) puis les participants
recevaient des phrases à compléter : je danse à la … (folie) ; je danse plutôt du… (rock,

143
.Agence de guides conférenciers qui propose des visites guidées pour les institutions des secteurs
culturels et des rallyes culturels pour le public.

55
classique, etc.) ; je préfère danse avec… (les amies, seules, etc.) ; je danse quand ?
(depuis toujours, depuis le ventre de ma mère) ; pour moi la danse c’est ? (participation,
partage, mode d’expression144). Ses questions aidaient à introduire la thématique par les
expériences passées du visiteur et permettaient le tissage de liens entre les membres du
groupe.

L’atelier se poursuivait par la présentation des enjeux d’une exposition sur la


danse au Mucem, notamment à partir des questionnements que peuvent soulever les
relations entre danse, anthropologie et musée (une référence était par exemple faite au
département de la danse crée par George Rivière au MATP, voir chap 1). Ensuite, la
guide distribuait à chaque participant une tablette avec des extraits vidéos projetés dans
la salle d’exposition. L’idée était de discuter des questions précédemment évoquées à
partir des vidéos exposées (discussion guidée par le dossier pédagogique).

Observations générales
La visite « La danse très peu pour moi » a eu beaucoup moins d’impact que
l’atelier « On danse ? ». Adressée à un autre public (non pas à des visites scolaires mais
à des visites spontanées), cet atelier a été suivi par un public habitué à la danse
(danseurs amateurs, amateurs de spectacles de danse, etc..).

Le peu de temps passé dans l’exposition été remarqué par plusieurs groupes qui
auraient aimé que l’atelier puisse se dérouler au sein de la salle d’exposition.
L’utilisation de la tablette diminuait de plus l’importance de la présence du corps
comme instrument pour l’expérience en danse et provoquait la dispersion du groupe :
chacun regardait les vidéos sur une tablette et presque personne ne participait à la
discussion menée par la guide. Des questions importantes étaient pourtant soulevées par
les guides mais l’expérience par le corps en mouvement n’était pas du tout permise par
cet atelier.

Par ailleurs, les lacunes de spécialisation technique autour la danse de la part des
guides de musée a provoqué des difficultés d’adaptation de la visite interactive pour un
groupe de gens âgés. Si la danse est pour tout le monde – jargon bien exploité dans

144
.Exemples de réponses données par les participants de la visite-atelier du 6 avril 2019, 14h30.

56
l’exposition et sa médiation – pourquoi ne pas donner la possibilité d’expérimenter la
danse aux plus âgés145 ?

Anecdote : On danse ?
« Lors de la visite-atelier du 12 mai, une famille (dont cinq jeunes) a trouvé trop
court le moment passé dans la salle d’exposition (remarque récurrente du public) alors
qu’ils ont passé beaucoup de temps dans la salle d’atelier où ils ont simplement regardé
les vidéos sur les tablettes – qu’ils n’ont pas eu le temps de regarder dans la salle
d’exposition. À côté, dans la salle de chauffe, se déroulait avec enthousiasme un atelier ;
les regards de toute la famille se tournaient vers cette expérience. La discussion
organisée dans le cadre de leur visite-atelier n’a pas « pris » et l’atelier s’est terminé. La
famille a alors tout de suite « plongé » dans la salle de chauffe (où ils sont restés toute
l’après-midi) à la recherche de l’expérience évoquée par l’expression phare de
l’exposition, l’acte de danser, qu’ils n’avaient pas trouvé dans l’atelier « La danse très
peu pour moi ».

Quelle danse pour quel public ?


Quelle danse ?

L’acte de danser est toujours lié à son contexte social et culturel. A priori tout le
monde peut danser, mais ce n’est en revanche pas tout le monde qui danse
effectivement. L’exposition On danse ?, qui n’aborde pas la danse en soi mais plutôt
l’acte de danser, relève le défi d’élaborer une exposition sur cette thématique et les
enjeux qui l’entourent. On retrouve ainsi dans les textes de son catalogue certains
enjeux définitionnels évoqués dans notre introduction : « une marche n’est pas une
danse, mais on peut la voir comme une danse146 ». Si tout geste ou mouvement du corps
constitue de la danse, on ne peut pour autant pas dire que tout est danse. Que reste-t-il
pour la danse ? Notons que dans l’exposition On danse ? ainsi que dans ses médiations,

145
.Je fais ici référence à la visite-atelier « La danse, très peu pour moi » réalisée le 11 avril 2019
spécialement adaptée pour un groupe des seniors de la Maison du Bel âge. Cette forme d’adaptation
n’a cependant pas permis d’aborder les enjeux théoriques ni pratiques de l’exposition.
146
.Romain Bigé. (2018). « Oú commence la danse ? ». In GIRARD, Émilie, et COUILLAUD, Amélie
(dir.). On danse ? (Catalogue de l’exposition). Marseille : Musée des civilisations de l’Europe et
Méditerranée.

57
le Mucem a choisi d’aborder l’acte de danser à partir du regard spécifique de la danse
contemporaine et de ses pratiques.

Par ailleurs, le regard sur les danses d’une société peut éclairer des questions
touchant aux genres, aux races, aux classes sociales, mais aussi à l’acceptation sociale
du corps. Dans un musée d’anthropologie ou de société, poser la question de la
représentation est indispensable. Après une analyse rapide, on perçoit que, malgré la
grande diversité de thématiques couvertes par l’exposition On danse ?, la majorité des
vidéos projetées dans la salle d’exposition étaient issues de productions européennes et
nord-américaines. Cela montre que la diversité des représentations envisagées par le
musée de civilisations n’était pas la priorité.

Danse exposée, danse médiatisée


Représenter le mouvement par la vidéo permet le regard sur l’acte de danse des
autres. Mais ce choix impose également au visiteur de l’exposition On danse ? la place
du spectateur de cinéma, spectateur qui regarde, immobile et passif. Or, aborder l’acte
de danse me semble impliquer la présence physique, donc le corps – mais pas
seulement. L’utilisation des outils technologiques pour exposer et médiatiser la danse et
le corps en mouvement me semble ainsi aboutir à une certaine contradiction, en
particulier lorsque l’on considère l’usage actuellement abusif des écrans dans notre
société. La vidéo est certes un mode important d’archivage de la trace de la danse ; mais
quels autres supports pourrions-nous utiliser pour évoquer, présenter, réfléchir sur la
danse ?

À propos de la danse et de ses possibles supports d’exposition, une danseuse


participant aux activités en salle de chauffe s’est exprimée en ces termes lors de notre
entretien :

« Je n’aime pas trop la vidéo comme support de la danse. Parce que
je suis quelqu’un du spectacle vivant et je sais trop ce qu’est le
vivant et l’instant présent – qui est absolument gommé et réduit
avec la vidéo. Maintenant la vidéo c’est une trace indéniable et
c’est une trace moderne. Après j’avais envie d’autres… comme je
ne suis pas quelqu’un de la vidéo et qui n’est pas envie de me
retrouver devant un écran, j’étais un peu en manque d’autres
ressources visuelles : des partitions, des objets, des costumes, des
choses qui nourrissent plus mon imaginaire […]. Notre pratique est
bien éphémère mais comment faire autrement ? »

58
En ce qui concerne les expériences de médiations à partir du corps en
mouvement, nous pourrions remarquer que la relation entre les œuvres exposées et les
médiations aurait pu être plus solidement établie. La salle de chauffe, qui avait pour but
de montrer et partager la pratique du danseur, a présenté en cela quelques lacunes. Très
peu de références aux œuvres exposées étaient en effet utilisées dans les activités
proposées et une partie des danseurs n’ont pas même visité l’exposition.

La danse peut être un outil très puissant de médiation dans le musée


d’anthropologie. L’élaboration d’une médiation dansée consistante implique cependant
un engagement et une collaboration entre plusieurs acteurs du musée : le médiateurs, les
guides, les danseurs et les anthropologues.

Danse médiatisée, médiation dansée


On peut dire qu’une médiation dansée vise à « aiguiser les sens et la perception
du visiteur et donner la possibilité de considérer des questionnements à partir du corps
en mouvement147 » alors qu’une danse médiatisée cherche à « expliquer » la danse en
tant que sujet ou thématique. Cette différence permet de penser la danse dans la
médiation non pas seulement lorsque la danse est exposée ; il s’agit ainsi de considérer
la danse comme une possibilité de nouvelles expériences dans le musée en général.

La visite-atelier « On danse ? » a réussi – dans la plupart des cas observés – à


offrir une expérience à travers la danse introduite au musée. Elle peut ainsi être
considérée comme une médiation dansée. Certains moments de cette visite-atelier
consistaient toutefois en une simple explication du processus de création d’une
chorégraphie dans le cadre spécifique de la danse contemporaine – ce qui correspond
davantage à une danse médiatisée.

Il me semble donc important de penser l’espace de la médiation comme


microlaboratoire politique148 – pour reprendre le terme utilisé par Romain Bigé dans
son texte pour le catalogue de l’exposition. Ceci revient à considérer la médiation
comme un espace d’élaboration active (par la pensée et le corps) de nouvelles manières
d’appréhender le musée aujourd’hui. L’engagement du corps du visiteur est par

147
.Raíssa Fonseca (2017). Musées en mouvement : danse, anthropologie et médiation culturelle.
Dossier final pour la spécialisation en Danse et éducation. Recife : CENSUPEG, p. 2. (Traduction
libre.)
148
.Romain Bigé. (2018). Op. cit.

59
conséquent une revendication politique de diversité des formes possibles de concevoir
la médiation, l’art et le musée.

La réflexion sur la médiation dansée révèle donc la nécessite de changement


dans les médiations culturelles actuelles. Nous considérons en effet les médiations de ce
type capables de provoquer des changements dans l’action et la réflexion sur la propre
médiation, elles devraient par conséquent permettre de construire un espace critique
d’échanges. Si le musée d’anthropologie est encore lié à la discipline anthropologique, il
me semble important de mettre en pratique les instruments actuels de la recherche en
anthropologie dans le musée d’anthropologie, notamment à travers les médiations.

Pour quel public ?

Public présent et public absent


Le projet scientifique et culturel du MuCEM exprime l’importance de penser
non pas seulement aux publics habituels du musée mais également aux publics absents,
c’est-à-dire aux publics qui n’ont pas l’habitude de fréquenter le musée :

Le musée dispose d’atouts pour attirer des publics variés, mais il


paraît nécessaire de les mobiliser davantage pour attirer les publics
néophytes (qui ne se représentent pas comme des publics de
musée, et donc n’y viennent pas) et a fortiori, bien sûr, les publics
du champ social (qui cumulent les difficultés de mobilité, les
problématiques financières et symboliques149).

Un musée qui se propose de faire comprendre « le monde où l’on vit » (avec un
regard particulièrement tourné vers l’Europe et la Méditerranée) assume la
responsabilité de montrer la diversité culturelle existante et de fournir l’accès aux
différents publics concernés. Pour cela, il me semble donc important de ménager des
espaces de dialogues et d’expériences qui fournissent un regard sur les différences et
l’altérité.

Une autre question considérable est celle de créer la possibilité d’accès à des
personnes, groupes et familles qui désirent mais ne peuvent accéder au musée pour des
raisons économiques. Dans le cadre de l’exposition On danse ? les visites guidées se
sont adressées dans leur majorité à des groupes scolaires (et très peu à des associations
ou centres de loisir – c’est-à-dire aux publics généralement issus de milieux sociaux

149
.« Projet scientifique et culturel » du Mucem édité en 2017, p. 120.

60
défavorisés). L’entrée gratuite des visites-ateliers pour les associations au faibles
moyens mise en place pour l’exposition de Jean Dubuffet, un barbare en Europe,
représente en ce sens un progrès dans la politique de diversification et d’inclusion de
publics.

Avec les rencontres permises par la salle de chauffe (activité gratuite pour tout le
public), il me semble évident que la proposition par le musée d’expériences par le corps
en mouvement peut être un dispositif à la fois pour attirer le public qui n’a pas
l’habitude de fréquenter un musée d’anthropologie, mais aussi pour montrer au public
présent que ce type de pratique – auquel il n’est pas habitué – permet d’expérimenter le
musée d’une autre façon.

Public récepteur et public acteur


Après ces trois exemples des médiations au Mucem (en salle d’exposition, les
visites-guidées et en salle de chauffe), nous percevons que le désir d’une participation à
travers l’expérience du corps en mouvement vient autant du musée que du visiteur.

Bien évidemment, la majorité du public est habitué à des modèles de visites


purement explicatives, où il y a une « transmission » du savoir, de la vérité du musée.
Dans une visite « classique » d’un musée d’anthropologie le médiateur a en effet
tendance à convoquer une certaine vérité des œuvres des collections pour développer
ses stratégies de communication, diffusion et transmission. C’est d’ailleurs parfois ce
qui est attendu d’une visite muséale. Selon moi, il devient néanmoins urgent de discuter
ces stratégies aussi bien pour réfléchir à la place et à la fonction actuelles d’un musée
d’anthropologie que pour repenser la participation du visiteur dans l’élaboration d’un
musée d’anthropologie, qui touche, par définition, à des questions politiques qui nous
concerne tous.

Actuellement, le musée – et particulièrement celui de société – est un espace


important pour la mise en œuvre de questionnements politiques et pédagogiques,
d’autant plus lorsqu’il s’agit de visites scolaires. Le « Projet scientifique et culturel » du
Mucem édité en 2017 stipule ainsi :

[…] la visite dans le cadre scolaire reste perçue comme un


prolongement de l’école, fondée sur un discours magistral et
l’apprentissage de savoirs. C’est là que devra donc résider la
recherche de nouvelles formes de médiation, susceptibles de créer

61
chez l’élève une sorte de révélation, ou à tout le moins d’éveiller sa
curiosité150.

C’est sur cette envie d’éveiller la curiosité que la médiation doit se baser pour
inviter la participation du visiteur en créant un espace pour être actif dans la pensée et
dans le corps, pour découvrir ensemble d’autres manières de penser l’espace du musée
aujourd’hui.

150
.Ibidem, p. 119.

62
CONCLUSION

Ce mémoire nous a permis d’analyser les diverses relations possibles entre la


danse, l’anthropologie, le musée et la médiation culturelle. Nous avons observé l’espace
donné à la danse dans les musées en général, d’abord comme inspiration pour les
créations en danse puis comme médiation. Concernant les musées d’anthropologie en
France, la danse a d’abord trouvé un espace dans la recherche des études folkloristes.
Elle est de plus en plus fréquemment thème d’exposition, et se retrouve, par conséquent
dans la médiation. On a cependant pu notamment constater que la danse est encore peu
pratiquée dans les médiations au sein de musée d’anthropologie en France.

Nous avons vu qu’une médiation dansée peut assumer diverses formes. Une
médiation dansée doit être avant tout une expérience artistique (et politique) en
établissant des possibilités de relations entre l’art et les questions sociales abordées dans
le musée. Si on considére que la médiation dans le musée est un laboratoire d’art, c’est-
à-dire un espace dédié à des expérimentations – pratiques et réflexives –, la médiation
au musée d’anthropologie doit aussi être pensée comme un espace pour élaborer des
questions sur la propre anthropologie, notamment quant à son héritage colonial et ses
enjeux sociaux actuels. La relation entre la notion d’esthétique et d’expérience, conçue
comme aisthesis, nous invite à considérer que la danse, à partir des sensations et
perceptions, peut être une pratique expérimentale dans la médiation entre le public et les
œuvres exposées. Une médiation dansée proportionne donc une autre manière
d’expérimenter les œuvres et le musée.

Les trois expériences de médiation au sein de musées lyonnais – pendant


lesquelles j’ai d’abord participé à la médiation dansée avant de visiter l’exposition de
manière individuelle – ont contribué pour moi à l’ouverture d’un autre regard, et d’une
autre relation avec les œuvres, ceci à partir de l’expérience corporelle, affective et
créative provoquée par le corps en mouvement. C’est important de souligner, que ce
type de proposition est parfois proposé par le musée comme un évènement pour attirer
une grande quantité des visiteurs. Dans le cas du musée des Beaux-arts à Lyon, le projet
« Bal chorégraphique » a reçu une adhésion du public qui révèle son intérêt pour des

63
propositions innovatrices et participatives. Cette participation du public montre qu’un
autre musée et une autre médiation sont envisagées par les visiteurs.

En ce qui concerne les médiations réalisées autour de l’exposition On danse ? au


Mucem, nous pouvons constater que l’acte de danser a été approché selon deux chemins
distincts : d’abord comme un instrument pour l’explication de l’exposition (comme lors
des visites-ateliers « La danse, très peu pour moi ») mais également comme un
instrument pour établir d’autres possibilités de perception sur l’exposition elle-même,
approche plus participative (nous l’avons observé dans la salle de chauffe et la visite-
atelier « On danse ? »). Une expérience dansée dans la médiation introduit les enjeux de
la perception et de l’émotion dans l’expérience du musée. La salle de chauffe a montré
par sa gratuité que le public revient au musée pour participer aux propositions de ce
type et finit par établir une autre relation – plus proche – avec l’espace du Mucem.

À travers cette réflexion, nous pouvons constater que le croisement des pensées
et des pratiques de la danse, du travail des médiateurs et des méthodes de recherche en
anthropologie peut contribuer à l’expérience en tant que pratique pédagogique dans le
musée d’anthropologie. Précisons toutefois qu’un projet de médiation dansée doit être
élaborée de concert par les médiateurs, danseurs et anthropologues afin de rendre
possible une pratique et une réflexion consistante.

Décoloniser les musées me semble donc aussi urgent que faire de l’espace du
musée, à travers l’expérience esthétique qu’il propose, un espace de dialogue sur
l’altérité. Autrement dit, il s’agit de créer des espaces d’inclusion de publics
traditionnellement non « représentés », dépourvus de l’habitude ou de moyens
financiers nécessaires à l’accès au musée. Au moment où on lance le regard sur la
construction du musée d’anthropologie, et par conséquent sur l’anthropologie elle-
même, nous percevons ses changements dans la pratique et dans la pensée. La nécessité
d’aborder dans le musée d’anthropologie les questions actuelles de l’anthropologie
– une pensée décoloniale, féministe et anti-raciste – devient donc évidente. AUtrment
dit, de telles questions doivent être travaillée dans la médiation, espace capable de
« remuer » ces réflexions à travers de plusieurs stratégies pédagogiques et artistiques,
dont, bien sûr, la danse.

Bien évidemment, cette première réflexion sur la médiation dansée dans un


musée d’anthropologie reste lacunaire. Pour l’approfondissement de cette thématique en

64
Master 2, il sera nécessaire de mener des entretiens plus proches : du public pour
comprendre l’intérêt et l’expérience du visiteur (y a-t-il un changement de perception
sur l’exposition ?) ; des danseurs et chorégraphes (comment et pourquoi le danseur et/ou
le musée sont intéressés à la fois par l’art matériel et l’art du mouvement ?); et des
médiateurs et médiatrices du service de médiation du musée (quel est l’intérêt du musée
de proposer une médiation dansée?). Il me semble également nécessaire une réflexion
sur la différence entre le rôle du guide et celui du médiateur au sein des musées en
France.

La recherche de rapprochements entre la pratique et la pensée émane de la tentative


d’élaborer un savoir critique et sensible, basée autant sur l’anthropologie que sur la danse.
Suivant un désir d’élaborer une réflexion sur la pratique (et de donner à la pratique l’espace
de la réflexion), nous pouvons conclure que la friction entre l’anthropologie et la danse
me semble nécessaire et importante pour les deux champs de connaissance ainsi que pour la
médiation dans le musée d’anthropologie.

65
BIBLIOGRAPHIE

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Émission Danse au Musée :https://www.franceculture.fr/emissions/le-petit-salon/danse-


au-musee

France Culture, Danse au musée, Disponible sur :


https://www.franceculture.fr/emissions/le-petit-salon/danse-au-musee. [Consulté
le 3 j

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http://www.mam.paris.fr/fr/activite/event-merce-cunningham. [Consulté le 12
août 2019].

Musée du Quai Branly, Détails de l’évènement –visite corporelle des collections, 2015.
Disponible sur :
http://quaibranly.fr/fr/informations-pratiques/aller-plus-loin/visites-et-ateliers/
visites-guidees/details-de-levenement/e/visites-corporelles-des-collections-
36129/ [Consulte le 12 août 2019].

Visite chorégraphiée de musée/ Denis Plasard, Cie Propo. Disponible sur :


https://vimeo.com/160375654.

Visité dansée au musée des beaux-arts de Nancy, Cie La Brèche Aurélie Gandit.
Disponible sur: https://vimeo.com/19248064

Site MUSEA : https://www.musea-accueil.com/fr/home/.

Site Pont-des-arts : http://www.pont-des-arts.com/.

70
ANNEXES

Tables des annexes

Annexe 1 : Tableaux ayant fait l’objet de médiation au Musée des Beaux-arts 73

Annexe 2 : Photographies de la médiation à l’Institut d’Art Contemporain 75

Annexe 3 : Planning d’activités du Mucem lors du stage 76

Annexes 4 : Tableau récapitulatif des observations réalisées au Mucem 77

Annexes 5 : Dessins de l’exposition On danse ? par Emmanuel Prost 79

Annexe 6 : Liste de links d’accès aux vidéos 81

71
Annexe 1 : Tableaux ayant fait l’objet de la médiation « Rituels dansés »
réalisée au Musée des Beaux-arts de Lyon

Tableau 1 Portrait d’un officier de marine, (vers


1845), Jean- François Millet.
Source :http://mbarouen.fr/fr/oeuvres/portrait-d-
un-officier-de-marine

Tableau 1 : Les deux Avocats, (1862), de Honoré


Daumier
Source:http://www.art.com/products/
p30972236575/product.htm?RFID=990319

Tableau 3 : L’Autonne, (1864), de Puvis de


Chavannes 
Source :http://www.mba-lyon.fr/static/mba/
contenu/img/img-oeuvres/oe_majeures/Puvis-de-
Chavannes%20l-Automne-451.jpg

72
Tableau 4 : Champs de blé
dans le Morvan, (1842), de
Jean-Baptiste Camille
Corot.
Source :http://www.mba-
lyon.fr/static/mba/contenu/
img/Collections%20en
%20mvt/Champs-Morvan-
detail.jpg

Tableau 5 : La noce chez le


photographe, (1879), de
Dagnam- Bouveret.
Source :https://
alheuredelart.files.wordpres
s.com/2016/12/
dagnan_bouveret_une_noce
_chez_le_photographe.jpg?
w=723

Tableau 6 : La fanfare de


bois-le-rois, (XIX siècle), de
Antoine-Jean Bail.
Source :https://
www.google.com/url?
sa=i&source=images&cd=&v
ed=2ahUKEwirqNyY8Y_kA
hXPyYUKHT7XC7gQjRx6B
AgBEAQ&url=https%3A
%2F%2Ffr.wikipedia.org
%2Fwiki%2FFichier
%3ABail_Antoine-
Jean_La_Fanfare_de_Bois-
le-
Roi.jpg&psig=AOvVaw2yUJ
A7wcoA-
Zm823asB0Wr&ust=1566336
736329710

73
Annexe 2 : Photographies de la médiation à l’Institut d’Art Contemporain
de Villeurbanne

Figure 1 : Expérimentation seule avec le Figure 2 : Expérimentation avec l’autre,
tissu, « Visite expérience : posture(s) à « Visite expérience : posture(s) à
l’œuvre », Source : IAC l’œuvre » Source : IAC

Figure 3 : « Visite expérience : posture(s) à Figure 4 : « Visite expérience : posture(s) à
l’œuvre dans l’exposition Radio/ Tomorrow’s l’œuvre dans l’exposition Radio/ Tomorrow’s
Sculture de Katinga Bock». Source : IAC Sculture de Katinga Bock». Source : IAC

Figure 5 : « Visite expérience : posture(s) à Figure 6 : « Visite expérience : posture(s) à
l’œuvre dans l’exposition Radio/ Tomorrow’s l’œuvre dans l’exposition Radio/ Tomorrow’s
Sculture de Katinga Bock». Source : IAC Sculture de Katinga Bock». Source : IAC

74
Annexe 3 : Planning d’activités du Mucem lors du stage
DATE HORAIRE OBJETS D'OBSERVATION REMARQUES
S
PREMIERE CAMPAGNE D’OBSERVATION
Vendredi 29 14h - 23h Exposition – Forum
Mars
Samedi 30 15h - 23h Programmation des étudiants
Mars
Dimanche 31 12h - 20h Programmation des étudiants
Mars
Lundi 1er Avril 12h - 20h Visite scolaire – Exposition
Mardi 2 Avril PAUSE
Mercredi 3
PAUSE
Avril
Jeudi 4 Avril 9h - 18h Visite scolaire – Exposition
Vendredi 5 9h - 18h Visite scolaire – Exposition
Avril
Samedi 6 Avril 14h - 18h Salle de chauffe – Forum
Dimanche 7 12h - 18h Exposition – Forum Premier dimanche du mois : entrée
Avril du musée gratuite
Lundi 8 Avril Début des vacances scolaires pour
PAUSE la zone de Marseille
Mardi 9 Avril PAUSE
Mercredi 10 9h - 18h « On danse en famille » (de 15h à
Avril 16h30) – Exposition
Jeudi 11 Avril 9h - 18h Visite atelier « On danse en famille »
(de 15h à 16h30) – Exposition
Vendredi 12 9h - 18h Visite atelier « On danse en famille »
Avril (de 15h à 16h30) – Exposition
Samedi 13 14h - 18h Salle de chauffe – Exposition – Forum
Avril
DEUXIÈME CAMPAGNE D’OBSERVATION
Jeudi 18 Avril 9h - 18h Exposition
Vendredi 19 9h - 18h Visite atelier « On danse en famille » 
Avril 
Samedi 20 14h - 18h Salle de chauffe – Exposition
Avril
Dimanche 21 14h - 18h Salle de chauffe Week end de Pâques
Avril
TROISIEME CAMPAGNE D’OBSERVATION
Samedi 11 Mai Représentation Ballet National de
Marseille – Projet Emmaüs
Dimanche 12 12h - 18h Salle de chauffe – Exposition
Mai
Lundi 13 Mai PAUSE
Mardi 14 Mai PAUSE
Mercredi 15 Séance ajustement nuit des musées 
Mai 
Jeudi 16 Mai
Vendredi 17 Répétition Bar masqué au MuCEM
Mai
Samedi 18 Mai Nuit des musées et restitution de Bar

75
masqué – Exposition et forum

76
Annexes 4 : Tableau récapitulatif des observations réalisées au Mucem

Nb de
nb Type d'outils de Matériel Départements
visite Prix
d'obs médiation utilisé /institutions
urs

Publics

En visites autonomes

450
Expositi Moquette/écran/ Commissaire/ Prix du
6 Texte/espace par
on objets scénographe billet
jour
pas de
Médina Écran/ Département de
6 Vidéo/texte/internet donné Gratuit
-thèque canapé/Photomaton communication
es
Programmation 30-80
Salle de Tapis/lumière/
4 Danseur culturelle/commiss par Gratuit
chauffe musique
aire jour

En visites-atelier
9 dont 20/25 14€/
On 3 Foulard/
familial
Guide Ponts des arts par 9,5€
danse ? tablette/carte/geste
es visite /4,5€
La
danse Tablette/
12/20 14€/
très écouteurs/questions
3 Guide Ponts des arts par 9,5€
peu (pour interagir avec le
visite /4,5€
pour groupe)
moi 

Les projets

Département du
développement
culturel et des
publics (chargée de
Spectacles, boîte de
médiation
danse, concerts,
Danses 1 événementielle du
Spectacle/vidéo/ performances 2176 /
de (30 pôle Gratuit
expérience (partenariat ScPo- 839
mars mars) développement
master 1 projet
culturel et chargée
culturel)
des familles et des
jeunes du pôle de
diversification des
publics)
Mix- 2 Spectacle/vidéo Danse et vidéo (en Département du Non Gratuit
rens-
danse (9 et partenariat avec la développement
eigné
26 compagnie de danse culturel et des
mai) Zouze (Chritophe publics (chargée
Haleb). Participations des publics du
du Centre Social Saint- champs social et du
Gabriel, l'IRSAM Arc- handicap du pôle
en-ciel, Aix-Marseille de diversification
Université, Le club des publics)

77
senior et le CCAS St
Victor; la Maison pour
Tous Centre Social
Saint-Mauront
National et le lycée
Saint- Charles
Salle de spectacle
Nuit 1 (participations du Non
Chargée du publics
des (18 Spectacle Ballet Nacional, rens- Gratuit
scolaire eigné
musée mai) étudiants lycée Thiers
et Emaüs)

Personnels en salle d´exposition

Les
agents
de 3 Regard/parole Onet sécurité / /
sécurit
é
Les Objet
média- 6 Mediateur.trice chorégraphique/parole MUSEA / /
teurs /papier

Outils pédagogiques

Dossier par Non


Scolaire +
pédago expositi Texte/image/parole rens- /
on professeur invité eigné
-gique
Département du
Le Mu-
développement Non
CEM
Papier/texte/image culturel et des rens- /
c'est eigné
publics (champs
quoi ?
Social et handicap)

78
Annexes 5 : Dessins de l’exposition On danse ? par Emmanuel Prost

Figure 7 : Dessin de l’entrée de l’exposition On danse ? au Mucem, par Emmanuel Prost, le 16 Mai
2019. Source : archive personnelle.

Figure 8 : Dessin de l’exposition On danse ? au Mucem, par Emmanuel Prost, le 16 Mai 2019.
Source : archive personnelle.

79
Figure 9 : Dessin d’exposition On danse ? au Mucem, Balançoire, fait par Emmanuelle Prost le 16
Mai 2019. Source : archive personnelle.

80
Annexe 6 : Liste de links d’accès aux vidéos
« Salle de chauffe, Exposition On danse ?, Mucem, 18 mai 2019 »:
https://youtu.be/7S9jGLIS4aQ

« Objets chorégraphique Instructions, William Forsyte, 19 avril 2019 »:


https://youtu.be/qcQQlDJzj_E

« On danse en famille?, On danse les couleurs, Mucem, 19 avril 2019 »:


https://youtu.be/8_hWZ3o1dT4

« visite-atelier "On danse?", Mucem, 04 avril 2019 »:


https://youtu.be/ag4mKr8HD4Y

81

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