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Université Mohammed 5 Rabat

Faculté des sciences juridiques économiques et sociales Souissi

Master Juriste d’Affaires


Module : droit social de l’entreprise

La durée du travail
à la lumière de la jurisprudence

Réalisé par : Fatima-Azzahra KASSOU-OUALI


Encadré par Professeur : Ahmed HAJJAMI

Année universitaire : 2023-2024


Sommaire
Introduction

1ère Partie : Cadre Légal du Temps de Travail


Chapitre 1 : Régime Juridique
Section 1 : Durée Normale du Travail
Section 2 : la notion de travail Effectif

Chapitre 2 : l’organisation de la durée du travail


Section 1 : Des horaires collectives
Section 2 : Du travail de la nuit

2ème Partie : l’aménagement de la durée de travail et


sa suspension
Chapitre 1 : Flexibilité du Temps de Travail
Section 1 : Réduction des Heures
Section 2 : Heures Supplémentaires

Chapitre 2 : Suspension de la durée du travail


Section 1 : Organisation des Repos et congés
Section 2 : Le statut de femme salariée

Conclusion
Introduction

« Avec l’usine moderne, émerge non seulement un espace d’un type nouveau mais plus
fondamentalement encore un temps nouveau, une nouvelle temporalité, un nouveau temps
social. Temps plein, temps homogène, temps rigoureux, temps collectif imposé par la méga-
machine de production » 1

Le travail, considéré auparavant comme une occupation journalière à laquelle l’homme est
condamné par son besoin et à laquelle il doit en même temps sa santé, sa subsistance, sa
sérénité, son bon sens et sa vertu peut-être. Au milieu du XVIIIe siècle Diderot et D’Alembert
définissaient le travail dans l’Encyclopédie comme étant ainsi. Le mot travail prit ensuite, au
XIXe siècle, une acception positive. Il fut perçu comme un acte de création et d’expression de
l’intelligence humaine, source d’épanouissement individuel et outil majeur de civilisation.2

Il a été toujours avancé que le droit du travail est appelé à faire sortir les prolétaires de la
misère. Souvent on le qualifie de « progressiste ». En fait tous les textes législatifs et
réglementaires font de lui un droit élaboré au profit des travailleurs. Il en est ainsi dès lors
qu’il s’efforce de leur octroyer au moins deux garanties fondamentales à savoir l’emploi et
les ressources. Plusieurs moyens sont conçus dans ce sens : priorité d’embauchage, absence
de discrimination sexiste, réglementation du licenciement, la formation, la promotion,
suspension du contrat etc…
La garantie des ressources se fait sentir chaque fois que le salarié ne peut fournir son travail :
maladie ou accident, congé, force majeure, autres risques sociaux définis par la sécurité
sociale... L’amélioration de la condition sociale du travailleur prend obligatoirement en
considération la situation du travail lui-même : mesure d’hygiène et de sécurité, taux des
salaires élevé afin de maintenir le pouvoir d’achat, L’épanouissement du travailleur dans
l’entreprise. Toutes ces conditions favorisent bien entendu le progrès social de celui-ci.3

1
IRES/DARES, Les comités d’entreprise, enquête sur les élus, les activités et les moyens, Paris, Ministère de
l’Emploi et de la Solidarité, L’Atelier, 1998 ; A. Hege, « Le comité et son environnement représentatif » in
IRES/DARES, 1998,
2
Etiennot, Agnès Etiennot, Pascale « Droit du travail » Ed. 2, Ellipses, 2022
3
La durée du travail peut être définie comme étant la période pendant laquelle un salarié est à
la disposition de son employeur et exerce ses fonctions conformément aux directives de ce
dernier, sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles.1

Au Maroc jusqu’en 1926 il n’existait aucune disposition légale en la matière. Le dahir du 13


juillet 1926 limita la durée du travail à 10 heures par jour coupée d’un repos obligatoire
minimum d’une heure. Plus tard, un autre dahir du 18 juin 1936 institua la semaine de 48
heures. Ce dahir est toujours en vigueur. Il s’applique notamment aux établissements
industriels et commerciaux. Aujourd’hui la durée normale de travail est désignée comme 44
heures par semaine

La durée du travail connaît 3 caractéristiques à savoir : la réduction du temps de travail, alors


que le temps consacré au travail fut longtemps sans limite légale, les premières lois sociales
ont visé à limiter le temps de travail pour les plus jeunes, puis pour tous les salariés. Ensuite
la caractéristique de flexibilité (donnée aux employeurs et demandée aux salariés), afin que le
rythme de travail puisse être calqué sur celui de l’entreprise. Et finalement la négociation
collective2 qui laisse primer la démocratie sur l’autorité et la prise individuelle des
employeurs.

Le sujet de la durée du travail dans le code du travail nous pose devant la problématique
suivante :

"Est-ce que le code du travail équilibrer entre les exigences de productivité


des entreprises et le respect des droits des salariés en matière de durée du
travail ?"

1
https://formation.lefebvre-dalloz.fr/dossier/droit-social/temps-de-travail
2
Maillard-Pinon, Sandrine, “droit du travail », Ed 26 Dalloz, 2021
1ère Partie : Cadre Légal du Temps de Travail
La durée légale du travail, définie par la loi, constitue le cadre général régissant les heures de
travail acceptables pour les travailleurs. Cette durée normale, souvent établie à une limite
hebdomadaire, vise à garantir un équilibre entre la productivité économique et le bien-être
des employés. Les horaires collectifs, établis au sein des entreprises, définissent les périodes
pendant lesquelles les employés sont tenus d'être présents sur leur lieu de travail. Enfin, le
travail de nuit, souvent pratiqué dans des secteurs nécessitant une continuité d'activité, est
soumis à des règles spécifiques pour protéger la santé et la sécurité des travailleurs.

Chapitre 1 : Régime juridique


La durée légale du travail définit le nombre d'heures que les employeurs peuvent légalement
exiger de leurs employés sur une base légale. Cette durée, établie par la loi, vise à garantir le
respect des droits des travailleurs tout en répondant aux besoins opérationnels des entreprises.
Parallèlement, ce chapitre abordera la notion de travail effectif qui englobe les heures
réellement travaillées, excluant souvent les périodes de pause ou d'attente non productives.
Ainsi, la réglementation de la durée légale du travail et la reconnaissance du travail effectif
sont essentielles pour assurer une juste rémunération et protéger les droits des travailleurs.

Section 1 : la durée normale du travail :


La durée légale du travail diffère selon la nature du travail, depuis le 8 juin 2004, la durée
légale du travail effectif est fixée à 44 heures par semaine civile ou 2 288 heures par an pour
toutes les entreprises non agricoles quelle que soit leur taille 1.

Elle est de 2496 heures par an pour les entreprises agricoles2. Elle est en outre de 48 heures
hebdomadaires pour les travailleurs et travailleuses domestiques, ou de 40 heures pour les
travailleurs et travailleuses entre 16 et 18 ans (Loi n°19-12 du 6 kaada 1437, 10 août 2016).

Selon le décret n° 2-04-569 fixant les modalités d'application de l'article 184 de la loi n° 65-
99 relative au Code du travail, l'employeur peut, lorsqu'il adopte le régime de 44 heures du
travail dans les activités non agricoles, répartir cette durée de manière égale ou non égale sur

1
C. trav., art. 184, al. 1er
2
C. trav., art. 184, al. 3
les jours de la semaine, sous réserve du repos hebdomadaire. Néanmoins, si les besoins de
l'établissement, la nature de son activité, ses conditions techniques et ses ressources humaines
l’exigent il pourra opter pour le régime de répartition annuelle selon 3 conditions à savoir :

1. Demander l'avis des représentants des salariés ou du comité de l'entreprise, s'il y a lieu
;
2. Mettre en place un programme prévisionnel du changement de la durée de travail, au
cours de l'année ou pendant une période déterminée de l'année ;
3. Respecter un délai d'information sur tout changement programme de répartition de la
durée de travail qui ne peut être inférieur à 8 jours.

Les dispositions relatives à la durée du travail s'appliquent aux personnes liées par contrat de
travail quels que soient ses modalités d'exécution, la nature de la rémunération et le mode de
son paiement, et la nature de l'entreprise dans laquelle il s'exécute, notamment les entreprises
industrielles, commerciales, artisanales, les exploitations agricoles et forestières et leurs
dépendances. Elles s'appliquent également aux entreprises et établissements à caractère
industriel, commercial ou agricole relevant de l'État et des collectivités locales, aux
coopératives, sociétés civiles, syndicats, associations et groupements de toute nature ( Code
de trav., art. 1er, al. 1er ).

Les dispositions de la loi s'appliquent également aux employeurs exerçant une profession
libérale, au secteur des services et, de manière générale, aux personnes liées par un contrat de
travail dont l'activité ne relève d'aucune de celles précitées ( C. trav., art. 1er , in fine). Au
sein des établissements et entreprises visées, les dispositions relatives à la durée du travail
s'appliquent aux :

- apprentis ;

- salariés sous Contrat à durée indéterminée (CDI) ;

- salariés sous Contrat à durée déterminée (CDD) ;

-travailleurs temporaires ;

- salariés à temps partiel ;

- travailleurs à domicile.
Pour les personnes exclues, il s'agit principalement des dirigeants et gérants de société non
liés à l'entreprise par un contrat de travail. Il en va de même pour les représentants de
commerce (appelés couramment « VRP ») non soumis à un horaire contrôlable1 ;

La réduction de la durée de travail dans les activités non agricoles de 2496 à 2288 heures
dans l'année et dans les activités agricoles de 2700 à 2496 heures dans l'année n'entraîne
aucune diminution du salaire.

Il faut également souligner que lorsque la nature de l’activité de l’entreprise nécessite une
organisation du travail sous forme d’équipes successives, la durée de travail de chaque équipe
doit être continue et ne doit pas dépasser huit heures par jour avec une pause possible pour le
repos ne dépassant pas une heure.2

Le dépassement de la durée de huit heures par jour de travail de chaque équipe en cas
d’organisation du travail par équipes successives est puni d’une amende de 300 à 500
dirhams 3

Le législateur a limité la durée du travail effectif mais dans certains établissements ayant le
service en rapport avec le public, le travail n’est pas toujours intégralement effectif, la
clientèle manquant à certaines heures de la journée ; on a estimé dans ce cas, que l’on peut
retenir plus de 8 heures par jour, donc plus de 48 heures par semaine le personnel. C’est ainsi
que dans la coiffure, l’employeur exige 50 heures de présence par semaine ; dans les cafés,
hôtels et restaurants, il peut être demandé 57 heures de présence par semaine au personnel, à
l’exception de celui de la cuisine duquel il ne peut être exigé plus de 54 heures, tous ceci dans
la limite journalière maximum de 12 heures de présence.

Les règles qui précèdent ne peuvent toujours être appliquées de manière stricte, en raison des
nécessités de la vie économique et de la nature de certaines professions, de certains travaux.4

1
Mohamed OULKHOUIR : « Exécution du contrat de travail : durée du travail », 1 décembre 2021, LexisNexis
2
Jalak Rbii, Meriam Mounjid, « Code du travail annoté et commenté »,
3
Code de travail, Article 203
4
A.DHIMENE « droit du travail marocain », 2004
Section 2 : la notion de travail effectif

En droit français, la définition du temps de travail effectif est défini par l’article L.3121-1 du
Code du travail comme le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur
et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.
Si les conditions posées par ce texte sont réunies, sont alors assimilés au temps de travail
effectif le temps nécessaire à la restauration ainsi que le temps consacré aux pauses ( C.trav.,
art. L. 3121-2)

Le temps de travail effectif est comptabilisé au moment où l’employé prend ses fonctions
sous la supervision de son supérieur. Cependant, il peut être amené à réaliser des tâches qui
sortent du cadre habituel de ses fonctions, et qui sont aussi comptabilisées en tant que temps
de travail effectif. C’est notamment le cas :

 des heures de délégation des représentants du personnel ;


 de la visite médicale obligatoire et de la visite d’information et de prévention;
 des formations réalisées sur le temps de travail, afin d’améliorer les compétences du
travailleur ou ses capacités à conserver un emploi dans son entreprise ou dans une
autre.

Certaines absences, comme le congé de maternité, sont également assimilées par la loi
comme du temps de travail effectif. Elles permettent de calculer ses congés payés et son
ancienneté.1

En ce qui concerne les temps de pause et les temps dédiés aux repas, ils ne sont généralement
pas inclus dans le calcul du temps de travail effectif. Pendant ces périodes, le salarié cesse ses
activités professionnelles et n'est plus sous la direction de l'employeur.

Ainsi, toute pause que le salarié peut prendre à sa discrétion en fonction de son travail,
pendant laquelle il n'est pas soumis aux directives de l'employeur et peut vaquer à ses
occupations personnelles, peut être considérée comme une pause et ne doit pas être
comptabilisée comme du temps de travail effectif. Cependant, les périodes de pause et les
temps consacrés aux repas doivent être considérés comme du temps de travail effectif lorsque
le salarié reste à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives.

1
Léna Cazenave : « Temps de travail effectif : comment le comptabiliser ? », 22 novembre 2023
En revanche, le déjeuner qui s’intercale entre deux périodes de travail effectif est un temps de
pause, mais rien n’interdit aux partenaires sociaux de considérer, par un accord d’entreprise
ou de branche, que ce temps de restauration et de pause doit être reconnu comme du temps de
travail effectif. Dès lors qu'elle leur est plus favorable que la norme légale, la norme
conventionnelle est applicable aux employés.1

Il est donc envisageable de considérer comme temps de travail effectif un temps de repas
lorsqu'un salarié, en fonction de ses responsabilités, tel qu'un cuisinier par exemple, n'a
aucune liberté pendant cette période.

Le temps nécessaire à l'habillage et au déshabillage dans l'enceinte de l'entreprise ou sur le


lieu de travail n'est en principe pas considéré comme du temps de travail effectif, sans
préjudice des clauses conventionnelles, des usages ou des stipulations du contrat de travail
assimilant ces temps d'habillage et de déshabillage à du temps de travail effectif. En pratique,
lorsque le port d'une tenue de travail est obligatoire et que l'habillage et le déshabillage
doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail, le temps nécessaire à l'habillage
et au déshabillage donne parfois lieu à contreparties financières ou en temps de repos.2

En ce qui concerne le temps du trajet, une distinction doit être établie en la matière :

 Temps de trajet habituel entre le domicile et le lieu de travail : le temps habituel de


trajet entre le domicile et le lieu de travail ne constitue pas du temps de travail effectif
et n'a pas à être rémunéré ;
 Temps de trajet entre deux lieux de travail : le temps de trajet entre deux lieux de
travail (par exemple, entre le siège de l'entreprise ou le chantier, ou entre deux
chantiers ou deux lieux de mission) constitue du temps de travail effectif. De même,
lorsque le salarié est tenu de se rendre au siège à la demande de l'employeur pour
charger du matériel avant d'être transporté sur le chantier ou pour assurer la conduite
du véhicule utilisé pour le transport du matériel ou du personnel, ce temps doit être
rémunéré comme du travail effectif.

1
Lahalle, Thibault, « Droit du travail », ed Ellipses, 2022
2
Mohamed OULKHOUIR : « Exécution du contrat de travail : durée du travail », 1 décembre 2021, LexisNexis
Chapitre 2 : l’organisation des durées du travail
L'organisation des durées du travail, à travers les horaires collectifs et le travail de nuit,
constitue un aspect essentiel de la gestion de l’entreprise. Les horaires collectifs définissent les
périodes pendant lesquelles les employés sont tenus d'être présents sur leur lieu de travail, en
prenant en compte les besoins opérationnels de l'entreprise ainsi que les contraintes
individuelles des travailleurs. Parallèlement, le travail de nuit, pratiqué dans certains secteurs
nécessitant une continuité d'activité, est soumis à des règles spécifiques visant à protéger la
santé et la sécurité des travailleurs. En assurant une planification efficace et équilibrée des
horaires collectifs et du travail de nuit, les entreprises peuvent garantir une gestion optimale du
temps de travail tout en préservant le bien-être de leurs employés.

Section 1 : Les horaires collectives


Le travail s'effectue dans le cadre d'un horaire uniforme fixé par l'employeur pour l'ensemble
des salariés de l'établissement ou pour une partie seulement de ceux-ci.
La fixation de l'horaire collectif constitue, en principe, une prérogative de l'employeur
correspondant à son pouvoir de direction. L'employeur doit toutefois informer par écrit les
salariés, lors de leur embauche, des horaires pratiqués au sein de l'entreprise ( C. trav., art. 24 ,
in fine).
La question de la prière constitue un problème puisque la Cour de Cassation a considéré comme
une faute passible d’une sanction le fait pour le salarié de quitter son poste pour accomplir la
prière en dehors des horaires prévus à cet effet.
La cour d’Appel avait motivé cette décision pour Manque de base légale la décision qui, en
vue d’accorder au salarié les indemnités pour licenciement abusif, a jugé que la rupture était
aux torts de l’employeur dès lors que ledit salarié a quitté son poste suite à une sanction
irrégulière qui lui a été administrée pour avoir quitté son poste pour accomplir la prière, qui est
un devoir religieux, ceci alors que , selon la cour de cassation : si la prière est un droit pour les
salariés, ladite prière est fixée à des heures précises pendant lesquelles les concernés peuvent
se libérer, l’employeur , responsable de l’organisation de la durée de travail, ayant la latitude
de les sanctionner lorsqu’ils ne respectent pas lesdits horaires , ceci en application des articles
20 et 21 du code du travail qui imposent aux salariés de respecter les horaires de travail1

1
Cour de cassation, 16 avril 2019 - N°2169/5/1/2017; 552/1
Les horaires de travail réduits pendant le mois du Ramadan sont une pratique assez courante
au Maroc. Il n'y a selon nous aucune disposition légale contraignant les entreprises privées à
réduire les horaires de travail pendant le ramadan et un employeur est donc valablement en
droit de refuser une telle demande ou de l'accepter en réduisant les salaires à proportion
de la réduction des horaires. Cependant il peut résulter du jeune une résistance physique
fortement amoindrie avec pour corollaire une baisse de la vigilance. Par conséquent, il est
légitime de penser que dans certains cas, le jeune peut conduire à un risque de blessures ou de
malaise surtout dans les chantiers agricoles ou de mines et, mettre en danger par voie de
conséquence, à la fois la sécurité de l’ouvrier, mais également celle de ses collègues. Bien que
le Code du travail n’impose aucune obligation aux employeurs pendant ce mois sacré, ces
derniers restent néanmoins responsables de la santé et de la sécurité de leurs salariés1.
Néanmoins, l’employeur n’a pas le droit d’imposer des heures supplémentaires aux employés
notamment au mois de Ramadan pendant la nuit, le refus de l’employé n’est pas un motif de
licenciement et ne constitue pas un abandon de poste.2
Le travail par roulement ou par relais est interdit sauf dans les entreprises où cette organisation
du travail est justifiée par des raisons techniques ( C. trav., art. 187, al. 1er ).
Le « travail par roulement » est défini comme « l'organisation du travail qui permet à un
établissement de rester ouvert tous les jours de la semaine, sans que chaque salarié qui s'y
trouve occupé ne dépasse la limite maximum légale de la durée du travail »
Selon l’article 184 Le « travail par relais » est défini comme « l'organisation du travail avec
des équipes tournantes sur la base de la non- simultanéité des repos des salariés dans le cadre
de la même journée »
Le recours à ces organisations de travail doit être justifié par des raisons techniques. Il s'agit
principalement de la nécessité de maintenir les outils de production (machines) en situation
permanente de fonctionnement.

1
Le Matin Emploi, ‘entretien avec Mohamed Oulkhouir’,
chrome extension://efaidnbmnnnibpcajpcglclefindmkaj/https://www.cwa-maghreb.com/wp-
content/uploads/2018/10/Ramadanetentreprises.pdf
2
Cour de cassation, 11 septembre 2013 - N°1254/5/2/2012; 1197
Section 2 : travail de nuit
Dans le secteur non agricole, le travail de nuit se réfère à toute activité exercée entre 21
heures et 6 heures du matin, tel que stipulé dans l'article 172, alinéa 4, du Code du travail.
Pour le secteur agricole, cette période est définie comme s'étendant de 20 heures à 5 heures
du matin, conformément à l'article 172 du même code.

L'aspect impératif de la définition du travail de nuit ne fait aucun doute, étant donné son
objectif fondamental de protection de la santé des travailleurs, en particulier des femmes et
des mineurs. Par conséquent, il est expressément interdit aux parties contractantes ou aux
représentants sociaux de fixer une plage horaire différente de celle établie par le Code du
travail.
Contrairement aux dispositions régissant les heures supplémentaires, aucune restriction
formelle n'est imposée par le Code du travail en ce qui concerne le recours au travail de nuit.
Toutefois, si ces heures de travail nocturne sont considérées comme des heures
supplémentaires, les règles applicables aux heures supplémentaires doivent être respectées,
notamment en ce qui concerne les conditions de recours (Code du travail, article 196).

Le Code du travail ne prévoit pas non plus de compensations spécifiques en numéraire ou en


repos pour le travail de nuit sauf dans les cas suivants :
- application de la réglementation relative aux heures supplémentaires ;
- situation des salariés de sexe féminin pour lesquels il y a lieu de prévoir un certain
nombre de mesures et notamment mettre à leur disposition, en cas d'absence de moyens
de transport publics, des moyens de transport de leurs lieux de résidence vers le lieu de
travail et vice-versa ; leur accorder un repos d'au moins une demi-heure après chaque
durée de travail continu de 4 heures. La durée de ce repos est comptabilisée dans la
durée du travail effectif ; enfin, mettre à leur disposition des moyens de repos1
Il doit également être accordé aux femmes et aux mineurs, entre deux journées de travail de
nuit, un repos dont la durée ne peut être inférieure à 11 heures consécutives2

1
D. n° 2-04-568 , 16 kaa. 1425 [29 déc. 2004], fixant les conditions devant être mises en place pour faciliter le
travail de nuit des femmes : BORM nº 5280, 6 janv. 2005, p. 26, version française
2
FRANCK DAUTRIA : « Statut de la femme salariée », 9 avril 2021, LexisMaroc
En principe, le travail de nuit est interdit pour les mineurs de moins de 16 ans (Code du
travail, article 172, alinéa 3). Toutefois, des dérogations sont envisageables dans des
circonstances urgentes telles que la prévention d'accidents imminents. L'employeur est alors
tenu d'informer immédiatement l'inspecteur du travail.
Concernant le travail de nuit des femmes, il est généralement autorisé, sous réserve de
certaines conditions et de consultations des organisations professionnelles et syndicales
représentatives (Code du travail, articles 172, alinéa 1er, et 173, alinéa 1er). En effet, sauf
dans les établissements auxquels la nécessité impose une activité continue ou saisonnière ou
dont le travail s'applique soit à des matières premières, soit à des matières en élaboration, soit
à des produits agricoles susceptibles d'altération rapide, les femmes peuvent être employées à
tout travail de nuit ( C. trav., art. 173, al. 1er ), en considération de leur état de santé et de leur
situation sociale, après consultation des organisations professionnelles d'employeurs et des
organisations syndicales de salariés les plus représentatives. Il conviendra alors de respecter
les dispositions du décret n° 2-04-568 du 29 décembre 2004 fixant les conditions devant être
mises en place pour faciliter le travail de nuit des femmes ( C. trav., art. 172, al. 1er ).1

1
Mohamed OULKHOUIR : « Exécution du contrat de travail : durée du travail », 1 décembre 2021, LexisNexis
2ème Partie : l’aménagement de la durée de travail et
sa suspension

Chapitre 1 : Flexibilité du Temps de Travail


Dans un environnement professionnel où la gestion efficace du temps est cruciale, la
réglementation des heures supplémentaires de travail et leur réduction revêtent une
importance considérable. Les heures supplémentaires, définies comme les heures de travail
effectuées au-delà de la durée légale, sont souvent nécessaires pour répondre aux exigences
opérationnelles ou aux pics de charge de travail. Cependant, leur utilisation excessive peut
entraîner une fatigue accrue, une diminution de la productivité et des risques pour la santé des
travailleurs. Dans ce contexte, la mise en place de réglementations visant à encadrer les
heures supplémentaires et à promouvoir une réduction du temps de travail peut jouer un rôle
crucial dans la protection des droits des travailleurs, la préservation de leur santé et de leur
bien-être, ainsi que dans l'amélioration de l'efficacité organisationnelle.

Section 1 : Réduction des Heures de travail


L’article 185 dispose qu’afin de faire face à des crises passagères périodiques, l'employeur
peut, après consultation des représentants des salariés et éventuellement des représentants
syndicaux au sein de l'entreprise, répartir la durée annuelle de travail sur l'année selon les
nécessités de l'entreprise, à condition que la durée normale de travail quotidienne ne dépasse
pas dix heures.

Cette mesure n'entraîne aucune baisse de salaire mensuel. L'employeur peut également
réduire la durée normale de travail pour une période ne dépassant pas soixante jours par an,
de manière continue ou discontinue, après consultation des délégués des salariés et, le cas
échéant, des représentants syndicaux de l'entreprise en cas de crise économique temporaire ou
de circonstances exceptionnelles involontaires, et ce, lorsque la réduction de la durée normale
de travail est envisagée dans une entreprise qui occupe au moins dix salariés,

Le salaire est versé pour le temps de travail effectif et ne peut en aucun cas être inférieur à 50
% du salaire normal, sauf dispositions plus avantageuses pour les salariés.
La réduction des horaires du travail peut parfois être la source d’un litige entre l’employeur et
le salarié comme c’est le cas de l’Arrêt rendu par la Cour de Cassation qui comporte qu’il
n’est pas considéré comme ayant abandonné son poste le salarié qui refuse de travailler suite
à la réduction par l’employeur de la durée de travail de plus de 60 jours par an sans avoir
l’accord préalable des salariés. La rupture du contrat de travail est à l’initiative de
l’employeur qui est auteur d’un licenciement déguisé 1

Si la réduction de la durée normale de travail dépasse celle prévue initialement, la période de


cette réduction doit être déterminée par accord entre l'employeur, les délégués des salariés et,
le cas échéant, les représentants syndicaux de l'entreprise.

En l'absence d'accord, la réduction de la durée normale de travail ne peut être mise en œuvre
qu'avec l'autorisation du gouverneur de la préfecture ou de la province, conformément à la
procédure établie à l'article 67 du code de travail.

Le non-respect de ces dispositions peut mener à verser une amende de 10.000 à 20.000
dirhams2

La chambre sociale a décidé que l’employeur ne peut pas réduire de manière unilatérale les
heures de travail précisées dans le contrat. Dans le cas contraire, le salarié aura le droit de
demander des dommages et intérêts pour le préjudice subi à cause de cette réduction 3

À défaut d'accord, la réduction de la durée normale de travail ne peut être opérée que sur
autorisation du gouverneur de la préfecture ou de la province en respectant la procédure
prévue par l’article 67 du Code du travail.

En outre, s’il n’a pas obtenu l’autorisation du gouverneur bien que la durée de réduction de la
durée légale ait dépassé soixante jours (d’avril à fin août). Le comportement de l’employeur
est tout à fait contraire aux dispositions des articles 185 et 186 du Code du travail. Par
conséquent, le salarié a le droit de refuser de travailler alors que l’employeur a fixé
unilatéralement les heures de travail et son recours à l’inspecteur du travail ne constitue pas
un abandon de poste mais un licenciement abusif 4

L’employeur doit préciser la durée de la réduction dans la lettre envoyée au délégué


provincial chargé du travail. La Cour de cassation a décidé que lorsque la lettre envoyée au

1
C. Cass., 25 avr. 2013, arrêt n° 652, doss. n° 309/5/2/2012.
2
Code de travail art. 204
3
C. Supr., 21 avr. 2011, arrêt n° 452, doss. n° 919/5/1/2010 .
4
C. Cass., 30 avr. 2015, arrêt n° 1066, doss. n° 258/5/1/2015
délégué provincial chargé du travail ne contient pas la durée de la réduction, il faut
obligatoirement un accord avec les délégués ou les représentants syndicaux ou l’autorisation
du gouverneur selon la procédure fixée par l’article 67 du Code du travail car la réduction
peut dépasser 60 jours (C. Cass., Soc., 25 avr. 2013, n° 652).

Section 2 : Les heures supplémentaires

Le recours par les entreprises aux heures supplémentaires est limité aux situations suivantes :

 Les travaux d'intérêt national : lorsqu'une entreprise est tenue de faire face à des travaux
d'intérêt national (C. trav., art. 196), les salariés peuvent être amenés à effectuer des
heures supplémentaires pendant la durée de réalisation de ces travaux à condition que :
1- La durée journalière de travail n'excède pas les 10 heures,
2- Le repos hebdomadaire des salariés concernés ne soit pas suspendu,
3- Le motif justifiant l'application des heures supplémentaires soit notifié, par écrit, à
l'agent chargé de l'inspection du travail, selon chaque cas 1
 Le surcroît exceptionnel de travail : en cas de surcroît exceptionnel de travail,
l'employeur peut recourir aux heures supplémentaires, sous réserve que le total de ces
heures ne dépasse pas un contingent annuel de 80 heures de travail par an pour chaque
salarié (D. n° 2-04-570, 29 déc. 2004, art. 2, al. 1er). Si la nature de l'activité de
l'entreprise l'exige, l'employeur peut augmenter ce contingent annuel de 20 heures
supplémentaires sous réserve que le total des heures supplémentaires ne dépasse pas les
100 heures par an pour chaque salarié et que les délégués des salariés, les représentants
syndicaux ou, le cas échéant, le comité d’entreprise soient consultés à ce sujet (D. n° 2-
04-570, 29 déc. 2004, art. 2, in fine)

Dans le souci de la protection de la santé des salariés mineurs âgés entre quinze et dix-huit
ans, la prolongation de la durée normale de travail ne concerne que les salariés majeurs ayant
atteint l’âge de la majorité légale de dix-huit ans.

Ce principe connaît néanmoins une exception qui concerne les salariés âgés de seize ans qui
exercent les activités précisées à titre limitatif à l’article 191 (les préposés au service médical,
salles d’allaitement et autres services crées en faveur des salariés de l’établissement et de

1
Décret n° 2-04-570, 29 déc. 2004, art. 1er
leurs familles, aux magasiniers, pointeurs, garçons de bureau, agents préposés au nettoyage
des locaux et aux agents similaires).

L’urgence des travaux à effectuer au sein de l’entreprise peut justifier le dépassement de la


durée normale du travail. L’article 193 cite les situations qui correspondent à ces cas
d’urgence. Il s’agit par exemple de travaux indispensables pour prévenir des dangers
imminents, organiser des mesures de sauvetage, réparer des accidents survenus soit au
matériel, soit aux installations, soit aux bâtiments de l'entreprise ou pour éviter le
dépérissement de certaines matières.

Ainsi il a été jugé qu’il constitue un abandon de poste, le fait pour le salarié de quitter son
poste après que l’employeur lui ait demandé d’effectuer des heures supplémentaires qui
étaient nécessaires vu les circonstances qui étaient nécessaires pour éviter la perte du produit
(Lait) s’il n’était pas traité pendant la nuit Le respect de la procédure de licenciement n’est
pas obligatoire lorsque le salarié quitte son poste après refus des heures supplémentaires. 1

La prolongation dans ces hypothèses est possible à condition qu’elle soit faite pendant un jour
ensuite à raison de deux heures durant les trois jours suivants.

Le non-respect de la durée de travail n’excédant pas deux heures pendant le délai de trois
jours tel que fixé par l’article 192 ou la prolongation de la durée normale de travail après
l’expiration dudit délai est puni d’une amende de 300 à 500 dirhams selon l’article 203 du
code du travail

La non-rémunération, en sus du salaire afférent à la durée normale de travail, des heures de


travail effectuées en vertu de la dérogation au titre de l’article 192 est punie d’une amende de
300 à 500 dirhams (V. art. 203).

L’amende est appliquée autant de fois qu’il y a de salariés à l’égard desquels la disposition de
l’article 192 n’a pas été observée, sans toutefois que le total des amendes dépasse le montant
de 20.000 dirhams (V. art. 203).2

En réalité une étude en 2011 a été menée par le Haut-Commissariat du Plan et montre que
selon les secteurs d’activité, la durée passée au bureau peut carrément s’envoler. Dans les
services par exemple, les Marocains travaillent en moyenne 49,6 heures par semaine. Dans

1
Cour de cassation, 31 mai 2016 - N° 1050/5/1/2015; 1093
2
Jalak Rbii, Mariam Mounjid, « Code du travail annoté et commenté »,
l’industrie, la durée moyenne est de 49,3 heures et dans le BTP, 48,2 heures. Dans la
catégorie fourre-tout, les « Activités mal désignées », ou informelles, les salariés travaillent
48,1 heures. En revanche, dans la fonction publique, la durée de travail hebdomadaire est de
seulement 37,5 heures. Côté employeurs, les semaines de travail sont chargées : ils passent en
moyenne 53 heures à gérer leur entreprise.1

Chapitre 2 : Suspension de la durée du travail

La suspension de la durée du travail, notamment à travers l'organisation des repos et des


congés, joue un rôle crucial dans la préservation du bien-être des travailleurs et dans la
promotion d'un équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. Cette organisation
permet aux employés de se reposer, de se ressourcer et de passer du temps avec leur famille,
contribuant ainsi à leur santé physique et mentale. De plus, la durée du travail des femmes
salariées nécessite une attention particulière pour garantir l'égalité des chances et la
conciliation entre les responsabilités professionnelles et familiales. En prenant en compte les
besoins spécifiques des femmes sur le marché du travail, notamment en matière de congés
maternité et de flexibilité des horaires, il est possible de favoriser leur participation pleine et
entière au monde du travail.

Section 1 : Organisation des Repos et congés


Le repos hebdomadaire profite à :

- Tous les salariés occupés dans un établissement industriel ou commercial ou dans ses
dépendances, de quelque nature qu'ils soient, publics ou privés ;
- tous les salariés des offices publics et ministériels, des professions libérales, des
sociétés civiles, des syndicats professionnels et associations de quelque nature que ce
soit ;
- tous les autres salariés : apprentis, VRP, travailleurs à domicile, travailleurs
temporaires ainsi que les salariés détachés temporairement au Maroc par une
entreprise étrangère.

1
https://www.lavieeco.com/affaires/combien-dheures-travaillent-reellement-les-marocains-20786/
Il est interdit d'occuper plus de 6 jours par semaine un même salarié. Le repos hebdomadaire
doit avoir une durée minimale de 24 heures consécutives, auxquelles s'ajoute le repos
quotidien de 12 heures, soit un repos hebdomadaire d'une durée minimale de 35 heures
consécutives ( C. trav., art. 205 ).

Le repos hebdomadaire doit être accordé soit le vendredi, soit le samedi, soit le dimanche,
soit le jour du marché hebdomadaire ( C. trav., art. 206, al. 1er ).

Rappelons que l'employeur doit obligatoirement, et en principe, donner congé à l'ensemble du


personnel sans distinction, le jour du repos hebdomadaire.

Les salariés dont le repos hebdomadaire a été suspendu ou réduit doivent bénéficier d'un
repos compensateur dans un délai maximum d'un mois.1

En ce qui concerne les jours de fête, il est interdit aux employeurs d'occuper les salariés
pendant les jours de fête payés dont la liste est déterminée par voie réglementaire et pendant
les jours fériés.

Les modalités de rémunération des jours de fête varient en fonction des modalités de
paiement du salaire :

- le salarié payé à l'heure ou à la journée reçoit une indemnité pour le jour de fête payé
égale à la rémunération qu'il aurait perçue s'il était resté à son poste de travail, à
l'exception des indemnités de risque ou de remboursement des frais et dépenses
engagés par lui à l'occasion de son travail ( C. trav., art. 219 ) ;
- l'indemnité pour le jour de fête payé due au salarié dont le salaire est fixé à la tâche,
au rendement ou à la pièce, est égale au vingt-sixième de la rémunération perçue pour
les vingt-six jours de travail effectif ayant précédé immédiatement le jour de fête payé
( C. trav., art. 220 ) ;
- lorsque le salaire est fixé forfaitairement à la semaine, à la quinzaine ou au mois, les
rémunérations correspondantes ne peuvent faire l'objet d'aucune réduction du fait du
chômage d'un jour de fête payé ou d'un jour férié, même lorsque ce jour n'est pas
déclaré rémunéré ( C. trav., art. 221 ).

1
l'arrêté du ministre de l'emploi et de la formation professionnelle n° 342-05 du 9 février 2005 (BORM nº 5540,
5 juill. 2007, p. 896, version française. - C. trav., art. 215 ).
Le défaut de paiement des jours fériés déclarés rémunérés comme temps de travail effectif est
puni d’une amende de 300 à 500 dirhams.

Il est permis à certaines entreprises de ne pas interrompre le travail pendant le jour de fête
payé ou le jour férié. Il s’agit d’une disposition dérogatoire qui ne concerne que les
établissements dont le fonctionnement est nécessairement continu. C’est le cas pour quelques
entreprises dont la nature de l’activité nécessite que le travail ne soit pas interrompu
notamment pendant les jours de fêtes ou fériés. C’est également le cas pour les entreprises qui
ont adopté le repos hebdomadaire par roulement. Cette possibilité s’étend aussi à d’autres
établissements tels ceux de la vente au détail des produits alimentaires ou dans les cafés,
restaurants, hôtels, établissements de spectacles ou ceux dans lesquels sont mises en œuvre
des matières pouvant être altérées rapidement.1

Lorsque le jour de fête ou le jour férié payé tombe le jour où un salarié a son repos
hebdomadaire par roulement, l’employeur doit lui verser une indemnité pour cette journée
égale à la rémunération qu’il aurait perçue s’il était resté à son poste de travail.

Par application des dispositions du premier alinéa de l'article 224 du Code du travail ,
l'employeur doit verser à ses salariés qui travaillent un jour de fête payé ou un jour férié : le
salaire correspondant au travail effectué ; une indemnité supplémentaire égale au montant de
ce salaire. Cette indemnité supplémentaire peut être remplacée, dans le cadre d'un accord
individuel entre le salarié et l'employeur, par un repos compensateur payé.

Les salariés, rémunérés en totalité ou en partie au pourboire, bénéficient d'un repos


compensateur payé d'une journée, même si un salaire minimum leur est garanti par
l'employeur (C. trav., art. 224 )

Finalement, malgré le fait que les jours fériés sont légaux et indiqués dans le décret précité,
l’employeur a le droit de récupérer dans les trente jours les heures de travail perdues en raison
du jour férié. Il convient pour cela de consulter les délégués des salariés et, le cas échéant, les
représentants des syndicats dans l'entreprise, et de s'assurer que la récupération n’est pas
effectuée le jour où le salarié doit bénéficier de son repos hebdomadaire et qu'elle n'ait pas pour
effet de porter la durée du travail au-delà de 10 heures par jour.

En ce qui est du congé annuel payé, aux termes de l' article 231 du Code du travail , le salarié
a droit à un congé dont la durée est calculée à raison de 1,5 jours ouvrables par mois de travail

1
Jamal Rbii, Mariam Mounjid, « code du travail annoté », 2021
effectif, soit au maximum 18 jours de congés payés légaux. Lorsque le nombre de jours
ouvrables n'est pas un nombre entier, la durée du congé est portée au nombre entier
immédiatement supérieur.

Des dispositions plus favorables que celles mentionnées dans le Code du travail, peuvent être
prévues par conventions collectives, accords d'entreprise, contrats de travail ou usages.

Il faut un accord entre le salarié et son employeur sur le cumul ou le fractionnement et une
mention doit en être portée sur le registre des congés annuels payés. Ensuite, le cumul ou le
fractionnement du congé annuel payé n’est possible que dans la limite de deux années
consécutives. Enfin, en cas de fractionnement du congé annuel payé, la fraction ne peut être
inférieure à douze jours ouvrables continus incluant deux jours de repos hebdomadaire.
Autrement dit, le fractionnement ne doit pas conduire à priver le salarié du droit de se reposer
pendant une durée assez longue et ainsi éviter que le congé annuel soit détourné de sa finalité.

Pour le congé maladie, la maladie et l’accident de droit commun constituent des causes de
suspension du contrat de travail au sens de l’article 32. Lorsque le salarié ne peut pas exécuter
son travail pour cause de maladie ou d’accident, il doit en informer son employeur et le justifier
dans un délai de quarante-huit heures sauf cas de force majeure.

Le salarié doit reprendre son travail à la fin de son congé de maladie peu importe s’il avait
respecté ou non son obligation légale d’informer son employeur dans un délai de 48 heures. La
lettre envoyée par l’employeur pendant l’arrêt maladie selon laquelle il invite le salarié à
reprendre son travail ne constitue pas une lettre de licenciement. En revanche, le fait pour le
salarié de ne pas reprendre son travail à la fin de l’arrêt maladie ou de ne pas prouver qu’il a
été interdit de le reprendre constitue un abandon de poste 1

Section 2 : la femme salariée

La femme salariée dispose d'un certain nombre de prérogatives qui lui sont accordées par la
Constitution, le Code du travail, ainsi que certaines conventions internationales auxquelles le
Maroc a adhéré.

1
C. Cass., 20 sept. 2012, arrêt n° 1829, doss. n° 151/5/1/2012 .
D'une part, elle bénéficie des mêmes droits et avantages que l'homme en matière d'accès au
travail. Mais d'autre part, des dispositions spécifiques ont été élaborées en matière de non-
discrimination, d'égalité des droits, de traitement, d'accès au travail et de rémunération.

L'organisation spécifique du travail de la femme porte sur le travail de nuit ainsi que sur certains
travaux interdits en raison de leur dangerosité, ou sur les travaux de manutention d'objets ou
marchandise.

Aux termes des dispositions de l' article 172 du Code du travail , les femmes peuvent être
employées à tout travail de nuit, sous réserve d'exceptions prévues par voie réglementaire. Cette
autorisation de principe est toutefois donnée « en considération de leur état de santé et de leur
situation sociale, après consultation des organisations professionnelles d'employeurs et des
organisations syndicales de salariés les plus représentatives »1

Le premier article du décret n° 2-04-568, en date du 29 décembre 2004 (BORM nº 5280, 6


janv. 2005, p. 26, version française), fixe les conditions devant être mises en place pour faciliter
le travail de nuit des femmes :

- il convient tout d'abord de mettre à leur disposition des moyens de transport de leurs
lieux de résidence vers le lieu de travail et vice-versa, et ce, en cas d'absence de moyens
de transport publics ;
- de leur accorder un repos minimal d'une demi-heure après chaque durée de travail de 4
heures continues, cette durée de repos étant comptabilisée dans la durée de travail
effectif ;
- et enfin, de mettre à leur disposition des moyens de repos, c'est-à-dire des lieux où elles
sont en mesure de prendre ce repos minimal de trente minutes par période de quatre
heures continues.

Aux termes des dispositions de l' article 174 du Code du travail , un repos doit être accordé aux
femmes entre deux journées de travail de nuit ( C. trav., art. 174, al. 1er ).

La durée de ce repos ne peut être inférieure à 11 heures consécutives

Le préambule du Code du travail, ainsi que plusieurs articles du code, interdisent toute mesure
visant à porter atteinte à la stabilité des salariés dans le travail pour des raisons liées à la
grossesse ou la maternité.

1
C. trav., art. 172, al. 1er
En ce qui concerne la grossesse, et aux termes des dispositions du premier alinéa de l'article
154 du Code du travail , toute salariée enceinte a le droit de suspendre son contrat de travail
pendant une période qui commence 7 semaines avant la date de l'accouchement et se termine
7 semaines après la date de celui-ci.

L'alinéa second du même article 154 dispose que cette suspension peut être prolongée lorsque
la salariée produit un certificat médical attestant que son état pathologique l'exige. Cette
prolongation ne peut toutefois excéder 8 semaines avant la date présumée de l'accouchement
et 14 semaines après celui-ci .

On a coutume d'écrire que la salariée est donc protégée durant les périodes d'absence dues à sa
grossesse, ou consécutives à celle-ci. Cette assertion n'est pas totalement exacte, puisqu'à la
lecture des termes du premier alinéa de l'article 159, la salariée est protégée dès lors qu'elle se
trouve en situation de produire un certificat médical attestant de son état de grossesse. Ainsi,
un employeur qui la convoquerait à l'entretien préalable pour sanctionner un acte susceptible
d'emporter son licenciement pour faute, se verrait contraint d'abandonner la procédure s'il lui
était produit un certificat médical en ce sens.1

En ce qui concerne l’accouchement, la femme salariée est susceptible de prolonger la


suspension de son contrat de travail, ou de ne pas reprendre immédiatement son activité
professionnelle. 2Mais dès lors qu'elle reprend son activité professionnelle, ses conditions de
travail se verront aménagées.

Le premier alinéa de l'article 156 du Code du travail dispose qu'à l'issue du délai de 7 semaines
ou, éventuellement de 14 semaines, qui suivent l'accouchement, la mère salariée peut s'abstenir
de reprendre son travail, et ce, pour élever son enfant. La suspension du contrat ne peut dans
ce cas excéder 90 jours.

Pendant une période de douze mois courants à compter de la date de la reprise du travail après
l’accouchement, la mère salariée a droit quotidiennement, pour allaiter son enfant, durant les
heures de travail, à un repos spécial d’une heure, rémunéré comme temps de travail, il peut être
fractionné en une demi-heure le matin et une demi-heure l’après-midi. Cette heure est
indépendante des périodes de repos appliquées à l’entreprise. La mère salariée peut, en accord

1
Franck DAUTRIA, « Statut de la femme salariée », LexisMaroc, 2021
2
idem
avec son employeur, bénéficier de l’heure réservée à l’allaitement à tout moment pendant les
jours de travail.1

Il est important d’aborder une disposition légale non courante qui pourra faciliter la vie à de
nombreuses mères allaitantes, il s’agit de l’aménagement d’une chambre spéciale d'allaitement
dans toute entreprise ou à proximité immédiate lorsque cette entreprise occupe au moins
cinquante salariées âgées de plus de seize ans. Ces chambrés d'allaitement peuvent servir de
garderies pour les enfants des salariées travaillant dans l'entreprise.

Conclusion
En conclusion, au Maroc, le Code du travail représente un cadre réglementaire
visant à concilier les impératifs de productivité des entreprises avec le respect
des droits des salariés en matière de durée du travail. En définissant la durée
légale du travail, les règles sur les heures supplémentaires, les congés et les

1
https://social.gov.ma/questions-frequemment-posees/les-droits-des-femmes-dans-la-legislation-relative-au-
travail/
repos hebdomadaires, ainsi que les dispositions spécifiques pour le travail de
nuit et l'aménagement du travail des femmes, le Code du travail cherche à
instaurer un équilibre entre les intérêts économiques des employeurs et la
protection sociale des travailleurs. Cependant, malgré ces avancées
réglementaires, des défis persistent en termes d'application effective des
dispositions légales et de garantie des droits des salariés. Des lacunes subsistent
notamment en ce qui concerne le contrôle et la mise en œuvre des heures
supplémentaires, ainsi que dans la protection des travailleurs vulnérables, tels
que les femmes et les employés travaillant de nuit. Ainsi, pour assurer un réel
équilibre entre productivité et protection sociale, il est nécessaire de renforcer
les mécanismes de contrôle, de sensibilisation et de dialogue social, tout en
veillant à l'adaptation continue du cadre juridique aux évolutions du monde du
travail. En définitive, le Code du travail constitue une base solide, mais son
efficacité dépendra largement de sa mise en œuvre effective et de son adaptation
aux besoins et aux réalités du marché du travail marocain.

Bibliographie
Ouvrages :

 A.DHIMENE « droit du travail marocain », 2004


 Etiennot, Agnès Etiennot, Pascale « Droit du travail » Ed. 2, Ellipses, 2022
 Jalal Rbii, Mariam Mounjid, « Code du travail annoté et commenté », LexiNexis,
2021
 Lahalle, Thibault, « Droit du travail », ed Ellipses, 2022
 Maillard-Pinon, Sandrine, “droit du travail », Ed 26 Dalloz, 2021

Revues et articles scientifiques :

 Mohamed OULKHOUIR : « Exécution du contrat de travail : durée du travail », 1


décembre 2021, LexisNexis
 Léna Cazenave : « Temps de travail effectif : comment le comptabiliser ? », 22
novembre 2023
 Franck DAUTRIA, « Statut de la femme salariée », LexisMaroc, 2021

Enquêtes :
 IRES/DARES, Les comités d’entreprise, enquête sur les élus, les activités et les
moyens, Paris, Ministère de l’Emploi et de la Solidarité, L’Atelier, 1998 ; A. Hege, «
Le comité et son environnement représentatif » in IRES/DARES, 1998
 Enquête du Haut commissariat au plan (HCP) sur l’emploi et ses
caractéristiques

Textes de Lois :
 Constitution
 Code du Travail
 Décret n° 2-04-570, 29 déc. 2004, art. 1er
 Aarrêté du ministre de l'emploi et de la formation professionnelle n° 342-
05 du 9 février 2005 (BORM nº 5540, 5 juill. 2007, p. 896, version
française. - C. trav., art. 215 ).
Jurisprudence
 Cour de cassation, 16 avril 2019 - N°2169/5/1/2017; 552/1
 Cour de cassation, 11 septembre 2013 - N°1254/5/2/2012; 1197
 C. Cass., 25 avr. 2013, arrêt n° 652, doss. n° 309/5/2/2012.
 C. Supr., 21 avr. 2011, arrêt n° 452, doss. n° 919/5/1/2010 .
 C. Cass., 30 avr. 2015, arrêt n° 1066, doss. n° 258/5/1/2015
 C. Cass., 20 sept. 2012, arrêt n° 1829, doss. n° 151/5/1/2012 .
 Cour de cassation, 31 mai 2016 - N° 1050/5/1/2015; 1093

Webographie :

 https://formation.lefebvre-dalloz.fr/dossier/droit-social/temps-de-travail
 https://social.gov.ma/questions-frequemment-posees/les-droits-des-
femmes-dans-la-legislation-relative-au-travail/
 https://www.lavieeco.com/affaires/combien-dheures-travaillent-
reellement-les-marocains-20786/

 chrome extension://efaidnbmnnnibpcajpcglclefindmkaj/https://www.cwa-
maghreb.com/wp-content/uploads/2018/10/Ramadanetentreprises.pdf

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