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M1 Master Juriste d’affaires - FSJES SOUISSI

Droit des sociétés:

La faute de gestion
Réalisé par: Sous l’appréciation de :
Nada OUMAALLI Pr. Saida GUENBOUR
INTRODUCTION

"Gérer, c'est prévoir, anticiper... et assumer les conséquences de ses


choix." Henri Fayol
 La gestion des risques constitue un aspect incontournable de la fonction du chef d'entreprise,
positionné en tant qu'acteur clé de la vie économique et sociale. Dans cette optique, il est essentiel pour
le dirigeant de prendre conscience des obligations qui lui incombent en tant que leader.
 En effet, la fonction de dirigeant n'est pas exempte de risques, notamment en raison de la responsabilité
personnelle du dirigeant engagée par des négligences ou des manœuvres frauduleuses.
 Il est important de souligner que les erreurs ne proviennent pas des sociétés elles-mêmes, mais bien
de leurs dirigeants. Les fautes qui leur sont reprochées dans la gestion d'une société sont diverses, leur
champ d'application est étendu, allant de la simple négligence ou imprudence aux manœuvres
frauduleuses caractérisées. Cette notion se révèle complexe pour les juristes, du fait que son périmètre
n'est pas formellement encadré par la loi
FONDEMENT JURIDIQUE
 l'article 67 de la loi 5-96  L'article 352 de la loi 17-95
 Les gérants sont responsables, individuellement ou  Les administrateurs, le directeur général et, le cas
solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les échéant, le directeur général délégué ou les
tiers, soit des infractions aux dispositions légales membres du directoire sont responsables,
applicables aux sociétés àresponsabilité limitée, soit des individuellement ou solidairement, selon le cas,
violations des statuts, soit des fautes commises dans leur
envers la société ou envers les tiers, soit des
gestion.
infractions aux dispositions législatives ou
 Si plusieurs gérants ont coopéré aux mêmes faits, le réglementaires applicables aux sociétés anonymes,
tribunal détermine la part contributive de chacun dans la soit des violations des statuts, soit des fautes dans
réparation du dommage. leur gestion.
 Outre l'action en réparation du préjudice subi  Si plusieurs administrateurs, ou plusieurs
personnellement, les associés peuvent, soit
administrateurs et le directeur général ou, le cas
individuellement, soit en se groupant intenter l'action
échéant, le directeur général délégué ou les
sociale en responsabilité contre les gérants. Les
demandeurs sont habilités àpoursuivre la réparation de
membres du directoire ont coopéré aux mêmes
l'entier préjudice subi par la société àlaquelle, le cas faits, le tribunal détermine la part contributive de
échéant, les dommages- intérêts sont alloués. chacun dans la réparation du dommage.
Intérêt du sujet

 L’intérêt de traiter ce sujet est doublement justifié, l’environnement juridique des entreprises et les rapports
entre les différents acteurs se complexifient et multiplient les occasions de litige et de mise en cause des
dirigeants d’entreprise. Ce litige pourra compromettre l’avenir de la société, aussi l’avenir personnel du
dirigeant.

Problématique :

Comment délimiter juridiquement les contours de la faute de gestion ?


SOMMAIRE

 INTRODUCTION
Partie 2 : "La Faute de Gestion : Entre Pouvoir Discrétionnaire
Partie 1 : Analyse conceptuelle de la faute de gestion : du Juge et Critère de l'Intérêt Social" :
Chapitre 1:La faute de la gestion à la lumière de la jurisprudence
Chapitre I : Les aspects Inhérents à la Faute de Gestion :
Section 1 : Le Juge et la Faute de Gestion : Gardien de
Section 1 : Le concept de la faute de gestion : l'Équilibre Entre Liberté et Responsabilité
Section 2 : Responsabilité des Dirigeants : Établissement et
Section 2 : Comblement du vide juridique par la doctrine Moyens d'Exonération

: Chapitre II : la faute de gestion et l’intérêt social

Section 1 : L'Intérêt Social comme Critère de Jugement des


Chapitre II : Les manifestations dualistes de la faute de Comportements des Dirigeants
gestion : Section 2 : Unification de la Faute de Gestion : Le Critère de
l'Intérêt Social comme Fondement Fédérateur
Section 1. Manifestations actives : BIBLIOGRAPHIE
Partie 1 : Analyse conceptuelle de la faute de gestion

La faute de gestion, par sa nature complexe, nécessite une exploration approfondie. Cette première partie

se consacre à une analyse détaillée de cette notion, débutant par les aspects Inhérents à la Faute de Gestion

(Chapitre 1). Ce dernier prépare le terrain pour l'examen des effets de cette dernière (Chapitre 2).
Chapitre I : Les aspects Inhérents à la Faute de Gestion

Section 1 : Le concept de la faute de gestion

La faute de gestion se compose de deux termes : Faute et Gestion


Ces termes appartiennent à deux sphères distinctes, à savoir le langage comptable et le langage juridique.
Le jargon juridique considère la faute comme étant un acte illicite supposant la violation d’un devoir, la
transgression du Droit .
Il convient de signaler qu’il n’existe aucune définition légale précise de la gestion. La conception de la
gestion se définie comme étant une science d’administration et de direction d’une organisation et de ses
différentes fonctions .
Les opérations de gestion englobent la gestion des biens mobiliers, des immeubles et tous le patrimoine de
l’entreprise.
Autrement formulé, la gestion se présente comme une activité juridique dont le dirigeant assume la
responsabilité pendant une durée limitée dans le but de réaliser l'intérêt suprême de la société .
Les organes de gestion susceptibles de commettre une
faute de gestion

 Société Anonyme  Sarl , SNC, SCS


 Les administrateurs, le directeur  Les gérants
général et, le cas échéant, le directeur
général délégué ou les membres du
directoire
 la gestion relève des organes de direction, impliquant toutes les personnes physiques ou
morales qui assurent la direction et participent activement à cette fonction, qu'elles
soient rémunérées ou non, et qu'elles aient un contrat de travail ou non.

 Le dirigeant de fait se caractérise par son immixtion dans des fonctions cruciales
pour la direction générale de l'entreprise, impliquant une participation continue et un
contrôle effectif et constant de la marche de la société. Un exemple concret est celui
d'un associé majoritaire prenant des décisions normalement attribuées au dirigeant.
Cour de cassation Française, Chambre commerciale, 9 juin 2022, 19-
24.026

 La Cour de cassation considère qu’est dirigeant de fait « celui qui, accomplit en toute
indépendance une activité positive de gestion et direction de la société débitrice ». Il
peut donc voir sa responsabilité engagée.
 La réforme de la loi 20-19 sur la société anonyme a introduit une présomption de solidarité en
matière de faute de gestion à l'encontre des administrateurs ou membres du Directoire. Même s'ils
n'ont pas participé aux actes répréhensibles des dirigeants, ces administrateurs ou membres du
Directoire peuvent être mis en cause s'ils avaient simplement connaissance de ces fautes sans les
révéler à la prochaine assemblée générale.

 l'administrateur provisoire en cas de commission de fautes. En tant que mandataire de justice


intervenant dans des situations où la gestion de l'entreprise est compromise, l'administrateur
provisoire est désigné par le juge pour assurer temporairement la gestion de l'entreprise à la place
des dirigeants. Bien que sa mission soit limitée dans le temps, cela n'exclut pas la possibilité
pour lui de commettre des fautes pendant la gestion de l'entreprise.
Section 2 : Attitude de la doctrine face à ce vide
juridique

 La faute de gestion représente le type de faute le plus délicat à établir, son évaluation se base sur le
comportement d'un administrateur diligent, actif et prudent, tenant compte du contexte temporel et des
circonstances spécifiques de l'affaire.
 la faute de gestion peut être identifiée selon deux critères : le critère économique et le critère juridique. Sur le
plan juridique, la faute de gestion se manifeste lorsque le dirigeant ne gère pas la société dans l'intérêt
social, mais dans son intérêt personnel. En revanche, sur le plan économique, elle se traduit par une
mauvaise gestion financière ou matérielle de la part du dirigeant. Par conséquent, la détection de la faute de
gestion peut résulter de l'évaluation de l'expertise de gestion, telle que prévue par l'article 157 de la loi nº17-95
relative à la société anonyme. Cette mesure s'ajoute à l'expertise in futurum, telle que prévue par l'article 55 du
code de procédure civile.
 Limiter la définition de la faute de gestion pourrait conduire à des abus, car les dirigeants sociaux
pourraient être tentés d'exploiter les failles découlant de cette limitation
 Selon la doctrine majoritaire,la diversité des comportements fautifs associés à la

faute de gestion rend difficile l'élaboration d'une définition homogène. Ces

comportements présentent un éventail de degrés de gravité sans lien véritable. En

revanche, la doctrine minoritaire propose une approche unifiée de la faute de

gestion, basée soit sur le critère d'un comportement prudent et avisé, soit sur la

validité des actes de gestion conformément au pouvoir légal accordé aux dirigeants

sociaux.
Chapitre II : Les manifestations dualistes de la faute de gestion :

 La panoplie des fautes de gestion est étendue, rassemblant ainsi des actes positifs que

négatifs, pouvant relever un caractère de volonté, comme elle peut constituer le résultat

d’une simple imprudence ou négligence. La faute de gestion est caractérisée par des

actions (section.1) ou au contraire des abstentions des dirigeants au regard du

comportement d’un dirigeant normalement diligent(section.2).


Section 1. Manifestations actives

 Audace excessive ou imprudence du dirigeant.


 Lors de la création de la société
 - Insuffisance du capital social : la responsabilité civile des organes de direction était
engagée pour faute de gestion en cas d'insuffisance du capital social, considéré comme un
instrument essentiel du fonctionnement de l’.entreprise.
-Choix d'un investissement hasardeux : Le choix d'investissements peut constituer une
faute de gestion si le dirigeant ne rassemble pas suffisamment d'informations pour évaluer la
conformité du projet à ses fonds propres. Il s'agit d'une imprudence fautive en raison de
l'insuffisance de capitaux. D’après un arrêt de la Cour de cassation datant du 19 mars 1996,
lors de la création de l'entreprise, le choix d'investissements inadaptés ou excessifs, compte
tenu de leurs conditions prévisibles de financement, peut constituer une faute de gestion .
2/ Au cours du fonctionnement de la société :

 - Engagement de la société au-delà de ses capacités financières : Dans une quête de


profit, le dirigeant peut être tenté par des choix non réfléchis présentant un risque élevé.
Cela peut se traduire par l'engagement de la société dans de nouveaux projets et
engagements sans évaluer ses capacités financières, créant ainsi de nouvelles charges que
l'entreprise ne peut pas supporter.
 - Engagement financier disproportionné : De manière similaire à un dirigeant qui
engage la société dans des dépenses disproportionnées par rapport à ses ressources, il est
recommandé de prévoir les dépenses en fonction des ressources disponibles, de les ajuster
et d'exercer un contrôle afin de maintenir l'équilibre financier de l'activité.
Une décision judiciaire Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 31 mai
2016, 14-24.779, Inédit disponible sur Légifrance a confirmé que maintenir une
rémunération à un niveau très élevé peut constituer une faute de gestion. Par
exemple, dans le cas d'un dirigeant d'une société en liquidation judiciaire, les juges
ont considéré qu'il avait commis une faute de gestion en maintenant sa
rémunération à un niveau excessif. La Cour de cassation a souligné qu'il est
nécessaire d'apprécier le montant de la rémunération d'un dirigeant par rapport à la
situation financière de la société pour déterminer si elle est excessive.
Incompétence du dirigeant .

 L'incompétence, elle, se manifeste chez un dirigeant qui ne maîtrise pas la capacité de


gérer l'entreprise, démontrant ainsi une absence des compétences nécessaires. La
jurisprudence reconnaît comme une faute de gestion par incompétence le fait pour un
dirigeant d'accepter des contrats désavantageux pour la société. Un exemple de cette
incompétence se retrouve également chez celui qui applique des tarifs excessivement
bas, entraînant des pertes pour l'entreprise.
 Un arrêt de la Cour de cassation française datant du 13 avril 2022 remet en question
la qualification de faute de gestion attribuée à un dirigeant ayant engagé l'entreprise
dans une activité dépendante d'un seul client. La Cour de cassation estime que le
motif retenu n'est pas adéquat pour établir une faute de gestion non réductible à de la
simple négligence.
Section 2. Manifestations passives.

 La négligence se caractérise par l'omission d'une action qui aurait dû être accomplie.
Un dirigeant négligent adopte une attitude totalement passive, ne réagissant pas face
à une situation donnée. Cette passivité constitue un élément majeur engagent la
responsabilité du dirigeant social. Les tribunaux ont reconnu comme faute de gestion
les cas où les dirigeants adoptent cette attitude passive face aux difficultés financières
des sociétés. Un exemple concret est celui d'un dirigeant qui, par son attentisme,
permet à la dette sociale de s'accumuler, ne cherchant pas activement les fonds
nécessaires pour rétablir une trésorerie normale.
 Le défaut de déclaration de cessation de paiement dans une société commerciale en
difficulté financière constitue également une faute .
 un dirigeant qui persiste dans l'exploitation déficitaire de la société sans prendre de
mesures pour permettre un redressement commet également une faute de gestion
 le manque de surveillance par le dirigeant social est une autre forme de négligence, se
traduisant par une carence dans l'exercice de ses fonctions. Cela s'applique
notamment aux administrateurs qui ne remplissent pas leurs obligations de
surveillance liées à leurs fonctions.
 L'absence physique au sein de la société peut être considérée comme une faute de
gestion
Obligations dont le manquement constitue
une faute de gestion

 Obligation de tenir une comptabilité : article 18 du code de commerce


 Comptabilité fictive : La tenue d'une comptabilité fictive, donnant une image fausse
du patrimoine de la société
 Transgression des principes de la loi sur les sociétés commerciales
 Obstacles à l'exercice des prérogatives des associés : Les organes de direction qui
entravent l'exercice des droits politiques, financiers et patrimoniaux des associés
violent les dispositions légales
Deuxième partie : La Faute de Gestion : Entre Pouvoir
Discrétionnaire du Juge et Critère de l'Intérêt Social

 Chapitre I : La faute de la gestion à la lumière de la jurisprudence


 Section 1 : Le Juge et la Faute de Gestion : Gardien de l'Équilibre Entre Liberté et
Responsabilité
 La faute de gestion n'est pas explicitement définie par la loi, laissant ainsi la
qualification du comportement fautif à la discrétion du juge. Ce pouvoir
d'appréciation prend généralement deux formes distinctes.
 Lorsque la législation ou la doctrine ne fournissent pas une définition précise d'une
notion, créant ainsi une zone grise, le juge se voit contraint d'utiliser son pouvoir
discrétionnaire pour élargir le champ de la faute de gestion. Deux méthodes distinctes
émergent dans cette démarche : l'appréciation spécifique et l'appréciation a priori.
 L'appréciation marginale consiste à évaluer le comportement du dirigeant en fonction
des circonstances spécifiques de l'acte. Le dirigeant doit faire face à des choix
complexes, chacun présentant des avantages et des inconvénients. Le juge, dans son
analyse, prend en considération les circonstances temporelles, géographiques et les
usages professionnels.

 En respectant le principe de non-immixtion dans la gestion sociale, le juge doit


reconnaître la marge de liberté accordée au dirigeant pour entreprendre ses décisions.
 La justification de la non-ingérence dans les décisions de gestion s'appuie sur deux points
essentiels. Tout d'abord, le caractère intrinsèque du risque et de l'aléa dans chaque
décision de gestion accorde aux dirigeants une marge d'erreur d'appréciation qui ne
constitue pas nécessairement une faute. Deuxièmement, les juges ne sont autorisés à
évaluer que la légalité de la décision par rapport à la bonne foi ou à l'intérêt social, sans
pouvoir juger de l'opportunité même de la décision.
 En ce qui concerne l'appréciation a priori, le juge doit se positionner au moment où les
faits ont eu lieu, même s'il rend sa décision plusieurs années plus tard. Il doit faire
abstraction des conséquences malheureuses qui ont pu découler de la décision, mais qui
n'étaient pas raisonnablement prévisibles au moment de sa prise. Ce principe est
particulièrement pertinent lorsqu'on reproche aux administrateurs d'avoir poursuivi une
activité déficitaire au lieu de décider de mettre fin à cette activité dans le but de redresser
la société. L'appréciation a priori est nécessaire pour évaluer le caractère fautif du
comportement du dirigeant au moment où il a pris la décision.
 1ere approche : les juges évaluent la faute de gestion en comparant le
comportement de l'auteur de la faute à celui d'un tiers agissant avec la
prudence et la diligence d'un bon père de famille, selon les normes du
droit français. Ce principe impose au dirigeant une obligation de moyens,
où il doit agir avec prudence et mettre en œuvre tous les moyens à sa
disposition pour servir l'intérêt de la société. Un simple état défavorable
des affaires sociales ne présume pas de la faute de gestion du dirigeant,
car il est jugé sur ses efforts plutôt que sur les résultats.
 2eme approche : le comportement du dirigeant est évalué en fonction de
ses propres actions, de la prudence et de la diligence qu'il manifeste dans
sa vie quotidienne. Cette méthode prend en compte les circonstances
spécifiques entourant le dirigeant et peut offrir une perspective plus
contextualisée sur la question de la faute de gestion.
Section 2 : Responsabilité des Dirigeants : Établissement et Moyens
d'Exonération

 La preuve d'une faute est nécessaire pour engager la responsabilité


des dirigeants. La charge de la preuve repose sur les demandeurs,
qui doivent démontrer l'existence d'une faute de comportement
constitutive de la faute de gestion. Les conclusions d'une expertise de
gestion, réalisée à la demande des actionnaires minoritaires, ainsi
que le rapport du syndic détaillant le bilan financier, économique et
social de l'entreprise en difficulté, peuvent faciliter l'établissement de
la preuve. La faute de gestion étant un fait juridique, sa preuve peut
être réalisée par divers moyens, notamment l'expertise de gestion.
Les moyens d'exonération

 Tous les comportements des dirigeants ne constituent pas nécessairement une faute de
gestion. Ces derniers bénéficient d'une marge d'erreur et de risque inhérente au
rythme imposé par la vie des affaires.
 Le droit à l'erreur est reconnu aux dirigeants, et de mauvais résultats issus d'une
décision ne sont pas, en soi, suffisants pour caractériser une faute. De même, les
dirigeants peuvent être exonérés s'ils versent des sommes d'argent élevées en raison
de nécessités imposées par les opérations. La possibilité de ne pas être tenu
responsable en cas d'erreur de gestion a été reconnue aux dirigeants, définissant ainsi
l'erreur de gestion comme le résultat d'un comportement décisionnel non aventureux.
En contraste avec la faute de gestion, l'erreur de gestion souligne la volonté des
dirigeants de ne pas nuire à l'intérêt de la personne morale qu'ils représentent. Dans
de telles situations, les dirigeants se sont engagés pleinement, même si leurs décisions
n'ont pas produit les résultats escomptés.
Chapitre II : la faute de gestion et l’intérêt social

 Section 1 : L'Intérêt Social comme Critère de Jugement des Comportements des


Dirigeants

 L'intérêt social d'une entreprise représente l'objectif premier de son existence,


dépassant la simple recherche de profit. Il incarne la contribution de l'entreprise
au bien-être collectif en favorisant la prospérité économique, le respect des normes
éthiques, et la satisfaction des parties prenantes. L'intérêt social transcende les
seuls intérêts des actionnaires pour englober les employés, les clients, les
fournisseurs, la communauté locale et l'environnement. Il guide les décisions
stratégiques en équilibrant les impératifs économiques avec des considérations
sociales et environnementales
Exemples

 L'intérêt de la personne morale se manifeste par l'établissement d'un équilibre


commercial pour réaliser un profit. La vente à perte va à l'encontre de cet intérêt.
 le cas du dirigeant qui s'accorde des rémunérations disproportionnées par rapport à
la trésorerie de la société privilégie son intérêt personnel au détriment de celui de la
société .
 L'intérêt social exige des dirigeants compétents et prévoyants pour assurer la
continuité de la personne morale. Les décisions prises avec prudence et dans une
perspective de continuité sont conformes à cet intérêt.
 Ainsi, l'intérêt social sert de critère pour identifier les comportements des dirigeants
qui sont contraires à la continuité de la personne morale pendant l'exercice de la
gestion. Cela souligne l'importance d'une gestion proactive et d'une surveillance
attentive pour garantir la pérennité de la société.
Section 2 : Unification de la Faute de Gestion : Le Critère de
l'Intérêt Social comme Fondement Fédérateur

 La diversité des actes des organes de l'administration, incarnant la faute de


gestion, ouvre la voie à une conception unifiée de cette notion particulière. Un
principe de mise en balance des intérêts des parties est appliqué pour déterminer
l'existence ou non d'un abus de majorité ou de minorité, en se référant au critère
de l'intérêt social. Par analogie, le critère de l'intérêt social contribue à mettre un
terme à la définition souvent variée de la faute de gestion des dirigeants sociaux.
Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 7 octobre
1997, 94-18.553

 la jurisprudence donne une définition unanime à la faute de gestion en se


basant sur le critère d’intérêt social, dans le cas d’espèce, la cour de
cassation a rendu un arrêt qui a considéré que la décision de gestion d’un
gérant d’une SARL ayant refusé la facturation du produit du transfert
d’un fonds de commerce cédé à une autre société qu’il a créé contraire à
l’intérêt social de la première société et constitue une faute de gestion.
Cour de Cassation ,Rabat , Nr de décision 1646
24/12/2008
 La procédure de liquidation judiciaire ne peut avoir effet uniquement sur la société en
question mais elle peut être étendue à son dirigeant par la prise de sanctions à son
encontre, qu’il soit un dirigeant de droit ou de fait.
 Le dirigeant, lors du jugement de liquidation, est responsable s’il apparait qu’il a
commis une faute de gestion en cette qualité.
 Le tribunal qui a estimé que le dirigeant a commis des faits relevant de ce que la loi a
prévu exclusivement dans l’art 706 du Code de commerce tel que la disposition des
biens de la société par la cession de créance n’as pas violé la loi lorsqu’il a étendu la
procédure de liquidation judiciaire au dirigeant fautif.
 Revenons à la notion des actes de gestion. Les dirigeants agissent en vertu de
pouvoirs légaux dans le but de satisfaire certains intérêts, en premier lieu celui de
la personne morale. Le dirigeant doit prendre des décisions de gestion sans
privilégier son intérêt personnel .
 Ainsi, le comportement décisionnel du dirigeant ne doit pas outrepasser les
contours définis par l'intérêt de la personne morale , em préservant sa continuité
économique, financière et son fonctionnement harmonieux.
 Selon une auteur : « Libres propos sur la responsabilité civile dans la gestion
d’une entreprise , la faute de gestion est unifiée, car il s'agit d'un acte de gestion
critiquable qui consiste invariablement en "un écart de conduite des affaires de
l'entreprise que n'aurait pas commis un gestionnaire prudent et avisé". Cet écart
se mesure notamment par rapport à un critère, une conduite de référence fondée
sur l'intérêt social. Une décision de gestion qui s'écarte de la conduite fixée par
l'intérêt social risque de constituer une faute de gestion en cas de préjudice.
Conclusion

 L'intérêt social d'une entreprise va au-delà de la simple quête de profits,


représentant plutôt son engagement envers le bien-être collectif. Cela se manifeste
par la contribution de l'entreprise à la prospérité économique, au respect des
normes éthiques, et à la satisfaction des diverses parties prenantes, telles que les
employés, les clients, les fournisseurs, la communauté locale, et l'environnement.
L'intérêt social guide les décisions stratégiques en équilibrant les exigences
économiques avec des considérations sociales et environnementales, contribuant
ainsi à forger une entreprise durable, socialement responsable et bénéfique pour la
collectivité.
Bibliographie :
 Articles :
 Ouvrages:  BEL HAJ HAMOUDA AJMI, « La faute de gestion est-elle impossible à
 DEEN GIBRILA « Droit des sociétés », 6eme édition, Editions éviter ?». 03 Mars 2009 By Audinet
Elipses, 1 juillet 2020. Tunisie Juridique - Droits des
affaires.
 -, DELMAS , Dirigeant de société , statut juridique , social et fiscal http://www.investirentunisie.net/index.php?id=262:tunisiedossierslaf
 -JEAN CELESTE « Le statut du dirigeant de société au Maroc (SA autedegestionendroit
desaffaires&option=com_content
et la SARL) , Dépôt légal : 2004/0062
 -MOHAMED El Mernissi « Traité marocain de droit des sociétés »,  P. Bézard, « La compétence et le devoir des dirigeants sociaux en
Ed, Lexis Nexis,2019. droit français », 1987, Vol. 10, 3ème journée franco-US, Journal Soc.
Législation comparée
 M. Cozian, A. Viandier, F. Deboissy, Droit des sociétés, 33e éd,
2020, Lexis Nexis  Jurisprudence :
 Mémento pratique Francis Lefebvre - droit des sociétés.  -Cass., Com., 10 octobre 1995, n° 93-15.553
 VINEYG et P. JOURDAN « Traité de droit civil ; les obligations ; la  -Cass., Crim, 23 novembre 2004, n° 04-80.830
responsabilité civile ; conditions ». LGDJ. 2éme édition ; 1998
 -Cass.com.10 décembre 1995
 Thèses :
  -Cass.com.19 mars 1996
- Gérard Hervé VILON GUEZO « Responsabilité pénale du
dirigeant : regard critique » soutenue le : 14 décembre 2016  -Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 28 juin 2017, 14-
 SERGE Hadgi- Artinian « La faute de gestion en droit des 29.936, Inédit disponible sur Légifrance
sociétés » Litec 2001.  Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 31 mai 2016, 14-
 Lois : 24.779, Inédit disponible sur Légifrance
 La loi 20-19 modifiant la loi sur la SA.  Webographie
 Dahir nª 1-96-124 du 14 rabii II 1417 (30 aout 1996) portant  :https://
promulgation de la loi nª 17-95 relative à la société anonyme. www.avocats-picovschi.com/dirigeant-de-fait-une-situation-haut-
 La loi nº 15-95 formant code de commerce promulguée par le risque_article_256.html
dahir nª 1-96-83 du 15 Rabii I) 1417 1er aout 1996
 La loi nª5-96 sur les autres formes de société

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