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Distributions

Convolution et transformée de Fourier


par Michel DOISY
Maître de conférences en mathématiques
École nationale supérieure d’électrotechnique, d’électronique, d’informatique, d’hydrau-
lique et des télécommunications (ENSEEIHT)
Institut national polytechnique de Toulouse

1. Support d’une distribution.................................................................... AF 145 — 2


2. Produit de convolution des distributions.......................................... — 3
2.1 Produit tensoriel des distributions ............................................................. — 3
2.2 Propriétés du produit tensoriel................................................................... — 4
2.3 Produit de convolution de distributions .................................................... — 4
2.4 Propriétés du produit de convolution ........................................................ — 6
2.5 Algèbre de convolution ............................................................................... — 7
3. Transformée de Fourier des distributions ......................................... — 9
3.1 Espace .......................................................................................................... — 9
3.2 Distributions tempérées.............................................................................. — 9
3.3 Exemples de distributions tempérées ....................................................... — 10
3.4 Transformée de Fourier des distributions tempérées .............................. — 10
3.5 Exemples de transformées de Fourier....................................................... — 11
3.6 Transformée de Fourier dans ′ (  ) .......................................................... — 12
3.7 Convolution et transformée de Fourier...................................................... — 13
Références bibliographiques ......................................................................... — 13

ans un premier article [AF 144], nous avons présenté les principales opéra-
D tions sur les distributions et abordé la notion fondamentale de dérivée
d’une distribution.
Ce deuxième article traite plus particulièrement du produit de convolution des
distributions et de leur transformée de Fourier.
Utilisés conjointement, le produit de convolution et la transformée de Fourier
sont deux outils très efficaces pour résoudre certaines équations différentielles.
Soit par exemple à résoudre :
1 g″ + g = f
– ------
2
ω
Formellement, et en utilisant les propriétés du produit de convolution et de la
transformée de Fourier [1], on peut écrire :
1 ( 2iπt ) 2ĝ ( t ) + ĝ ( t ) = fˆ ( t )
– ------
2
ω
soit encore :
2 2
4π t
- = fˆ ( t )
ĝ ( t ) 1 + --------------
2
ω
2 2
4π t
Comme la fonction 1 + --------------
2
- n’a pas de zéro réel :
ω
1
ĝ ( t ) = ------------------------fˆ ( t )
2 2
4π t
1 + --------------2
-
ω

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En utilisant les tables de transformées de Fourier, on a :


1 ˆ 1 –ω x
------------------------
2 2 = h ( t ) avec h ( x ) = --- ω e
4π t 2
1 + --------------2
-
ω
Finalement :
ĝ ( t ) = hˆ ( t )fˆ ( t ) = h ∗ f ( t )
et grâce à l’injectivité de la transformée de Fourier :
g = h∗ f
ou encore :

1
g ( x ) = --- ω e
2  ∫–ω x – t
f ( t ) dt

Bien entendu, dans ce calcul, plusieurs points restent à justifier ! Mais l’idée
fondamentale est qu’en utilisant presque uniquement un calcul formel, on
obtient la forme générale de la solution. On cherche à accroître l’efficacité de ce
calcul symbolique en utilisant ces opérations au sens des distributions.
En s’appuyant sur le fait que l’opérateur de dérivation des distributions est un
produit de convolution T ( n ) = δ ( n ) ∗ T , on montrera l’importance de la recherche
de solutions des équations différentielles, avec second membre la distribution δ
(solution de Green).
Dans la définition du produit de convolution de deux distributions, la notion de
support d’une distribution joue un rôle fondamental. Nous étudions en détail
cette notion délicate dans le premier paragraphe. Nous montrons ensuite com-
ment le produit de convolution permet la recherche de solutions des équations
différentielles en utilisant — en grande partie — un calcul algébrique dans une
algèbre de convolution convenable. Nous définissons enfin la notion de transfor-
mée de Fourier des distributions tempérées et nous étudions les propriétés
conjointes du produit de convolution et transformée de Fourier des distributions,
propriétés très voisines de celles qui existent pour les fonctions.

1. Support d’une distribution Soit alors la famille {Ωi}i de tous les ouverts sur lesquels T
s’annule et Ω = ∪i Ωi. C’est un ouvert et l’on peut montrer (ce n’est
pas évident !) que T s’annule sur Ω. C’est le plus grand ouvert sur
lequel T s’annule.
Il s’agit là d’une notion importante, notamment pour la définition
du produit de convolution des distributions.
Définition
Rappelons que si f est une fonction de  dans  , son support est Le complémentaire du plus grand ouvert sur lequel T s’annule
le complémentaire du plus grand ouvert sur lequel elle s’annule. Ou est le support de la distribution T noté Supp(T).
encore :
Exemple : Supp(δa) = {a}.
Supp ( f ) = { x ∈  / f ( x ) ≠ 0 }
Si T est une distribution régulière associée à une fonction f locale-
où la barre désigne la fermeture de l’ensemble. ment intégrable, soit T = [f], on montre que :
Le support d’une fonction est toujours un fermé.
Supp([f]) = Supp(f)
On utilise la même idée pour définir le support d’une distribution.
et les deux notions coïncident. On a aussi :
Définition
1 1
Soit T dans ′ (  ) et Ω un ouvert non vide de  , on dit que T Supp ⎛ vp ⎛ ---⎞ ⎞ = Supp ⎛ ---⎞ = 
⎝ ⎝ x⎠ ⎠ ⎝ x⎠
est nulle sur Ω si et seulement si, pour toute fonction ϕ de  ( Ω ) ,
on a 〈T, ϕ〉 = 0. Il est équivalent de dire que la restriction de T à
 ( Ω ) est nulle. Comment reconnaît-on si un point x appartient ou non au support
d’une distribution ?

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On a les caractérisations suivantes. Cette famille de distributions est particulièrement importante


pour plusieurs raisons, dont voici la première. Pour une distribution
à support compact, on peut étendre sa définition à un ensemble de
Proposition fonctions tests plus gros !
i) Un point x appartient au support de T si et seulement si,
pour tout voisinage ouvert V de ce point, il existe ϕ dans  ( V ) Soit en effet T à support compact. Nous noterons, comme il est
telle que 〈T, ϕ〉 ≠ 0. d’usage en théorie des distributions,  (  ) l’ensemble des fonctions
indéfiniment dérivables sur  .
ii) Inversement, on dira que T est nulle au voisinage de x – et
non nulle en x – si et seulement si x n’appartient pas au support On peut construire une fonction θ indéfiniment dérivable à sup-
de T, c’est-à-dire s’il existe un voisinage U de x tel que, quel que port compact et qui vaut 1 dans un voisinage de Supp(T). Soit alors
soit ϕ dans  ( U ) , on ait 〈T, ϕ〉 = 0. u une fonction dans  (  ) . On pose :
iii) Soit une fonction ϕ dans  (  ) vérifiant :
〈T, u〉 = 〈T, θu〉 pour u ∈  (  )
Supp(ϕ) ∩ Supp(T) = ∅
alors 〈T, ϕ〉 = 0. En effet, θu est une fonction de  (  ) et cette définition ne dépend
pas du choix de θ. Si l’on considère une autre fonction η de  (  )
iv) Si deux fonctions ϕ et ψ de  (  ) coïncident sur un voisi- qui vaut 1 dans un voisinage de Supp(T), alors (θ − η)u est dans
nage du support de T, alors 〈T, ϕ〉 = 〈T, ψ〉.
 (  ) et s’annule sur un voisinage de Supp(T) donc 〈T, θu〉 = 〈T, ηu〉.
v) Si T et W sont deux distributions, on a : Ainsi, pour une distribution à support compact, on peut étendre sa
Supp(T + W) ⊂ Supp(T) + Supp(W) définition à  (  ) .

vi) Pour toute distribution T, on a : On munit  (  ) de la notion de convergence suivante.

Supp ( T′ ) ⊂ Supp ( T )
Définition
Une suite {un}n de fonctions de  (  ) converge vers une fonc-
Ces caractérisations découlent de la définition du support. tion u ∈  (  ) si et seulement si la suite {un}n ainsi que toutes les
Revenons brièvement sur la propriété iv). La démonstration en est dérivées successives { u n( k ) } n convergent uniformément vers u
simple : soit V un voisinage ouvert de Supp(T) sur lequel ϕ et ψ coïn- (resp. u(k)).
cident. On peut toujours inclure entre Supp(T) et V un voisinage
fermé F, donc :
Il est alors facile de voir que si {un}n converge vers 0 dans  (  ) ,
Supp(T) ⊂ F ⊂ V alors {θun}n converge vers 0 dans  (  ) et donc le prolongement de
T vérifie :
Alors, par hypothèse, Supp(ϕ − ψ) est contenue dans Fc et donc, à
fortiori, contenu dans (Supp(T))c. Par définition du support, on a 〈 T, u n〉 0
〈T, ϕ − ψ〉 = 0. n→+∞

Par contre, il ne suffit pas que deux fonctions ϕ et ψ de  (  ) coïn- Cela montre que T est un opérateur continu de  (  ) dans  ou
cident sur le support de T pour que 〈T, ϕ〉 = 〈T, ψ〉. encore que, pour toute distribution à support compact, on a :

Exemple : prenons ϕ et ψ de  (  ) valant 1 en 0 et ayant une déri- T ∈ ′ (  )


vée distincte en 0, soit ϕ ′ ( 0 ) ≠ ψ ′ ( 0 ) . Alors 〈 δ ′, ϕ〉 ≠ 〈 δ ′, ψ〉 , alors
En fait, on montre que la réciproque est vraie à savoir que ′ (  )
que ϕ et ψ coïncident sur le support de δ ′ qui est {0}. est exactement l’ensemble des distributions à support compact.

L’inclusion Supp ( T′ ) ⊂ Supp ( T ) est en général stricte ! Pensez à


′ (  ) est l′ensemble des distributions à support compact
la distribution d’Heaviside H de support  + et dont la dérivée est la
distribution de Dirac δ de support {0}.
Certaines formes de support auront une grande importance pour
la suite.
2. Produit de convolution
Définition des distributions
On notera  +′ (  ) l’espace des distributions à support limité à
gauche, c’est-à-dire

T ∈  + (′ ) ⇔ ∃t 0 ∈  tel que Supp ( T ) ⊂ [ t 0 , + ∞ [ 2.1 Produit tensoriel des distributions

En théorie du signal, ces distributions seront associées aux Si f et g sont deux fonctions de  dans  , on définit leur produit
signaux causaux. tensoriel comme la fonction de deux variables :

Symétriquement, on définit  –′ (  ) : f ⊗ g(x, y) = f (x)g(y)


Grâce au théorème de Fubini, on vérifie que si f et g sont locale-
T ∈  – (′ ) ⇔ ∃t 0 ∈  tel que Supp ( T ) ⊂ ] – ∞ , t 0 ] ment intégrables sur  , alors f ⊗ g l’est aussi sur  2 . On peut alors
construire une distribution sur  2 en posant :

Définition
⎧[f ⊗ g] :  ( 2 ) →
On dira que T dans ′ (  ) est une distribution à support ⎪
compact si et seulement si Supp(T) est un ensemble compact de
.



ξ → 〈 [ f ⊗ g ] , ξ〉 = ∫∫ 2
ξ ( x, y ) f ( x ) g ( y ) d x d y

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Toujours grâce au théorème de Fubini, on peut écrire :


iv) Pseudo-produit
Si f et g sont des fonctions quelconques de  ∞ (  ) , on a :
∫∫ 2
ξ ( x, y )f ( x )g ( y ) dxdy = ∫ 
g(y) ∫ 
ξ ( x, y )f ( x ) dx dy (f ⊗ g ) . ( S ⊗ T ) = f . S ⊗ g . T
v) Symétrie

= ∫ 
f(x) ∫

ξ ( x, y )g ( y ) dy dx Sσ ⊗ Tσ = (S ⊗ T)σ
vi) Translation

En termes de distribution – et en gardant les variables pour plus τ a . S ⊗ τb . T = τ(a , b ) . S ⊗ T


de lisibilité – on a :
Par contre, en général :
〈 [f] ⊗ [g], ξ 〉 = 〈 g(y), 〈 f (x), ξ(x, y) 〉〉
= 〈 f(x), 〈 g(y), ξ(x, y)〉〉 S x ⊗ Ty ≠ T x ⊗ S y
C’est cette dernière formule qui va nous permettre d’étendre cette
définition de produit tensoriel au cas de deux distributions quelcon- alors que, par construction :
ques. On admet le résultat suivant.
S x ⊗ Ty = Ty ⊗ S x

Théorème 1 (  ) et T = δ. On a :
En effet, prenons S = [f] avec f ∈  loc
Si S et T sont deux distributions sur  , les expressions :
〈Sx, 〈Ty, ξ(x, y)〉〉 〈Ty, 〈Sx, ξ(x, y)〉〉

et
〈 S x ⊗ Ty , ξ ( x, y )〉 = f ( x ) ξ ( x, 0 ) dx
(où, comme précédemment, l’indice est conservé pour indiquer 
sur quelle variable on fait porter la distribution) ont un sens et
ont la même valeur, quel que soit ξ dans  (  2 ) .
et
La forme linéaire ainsi définie sur  (  2 ) est une distribution
sur  2 , notée S ⊗ T ou Sx ⊗ Ty. Si ξ(x, y) = ϕ(x)ψ(y) avec ϕ et ψ


dans  (  ) , alors :
〈 T x ⊗ Sy , ξ ( x, y )〉 = f ( y ) ξ ( 0, y ) dy
〈S ⊗ T, ξ〉 = 〈S, ϕ〉〈T, ψ〉 

Exemple :
1 (  ) , on a :
1. Pour f et g dans  loc
2.3 Produit de convolution
[f ⊗ g] = [f] ⊗ [g] de distributions
2. δx ⊗ δy = δ distribution de Dirac à l’origine de  2 .
3. δx ⊗ ∆y représente un peigne de Dirac selon l’axe Oy.
4. ∆x ⊗ 1 représente une somme de distributions linéaires de Dirac On sait [1] que si f et g sont deux fonctions intégrables sur  , la
sur les axes d’abscisse entière parallèles à l’axe Oy. fonction
5. ∆x ⊗ ∆y que l’on notera ∆x, y représente le peigne de Dirac à deux
y → f(x − y)g(y)
dimensions formé de distributions ponctuelles de Dirac en tout point
de coordonnées entières.
est intégrable en y pour presque tout x de  . On définit alors le pro-
duit de convolution de f et g noté f ∗ g comme la fonction (définie
presque partout) :
2.2 Propriétés du produit tensoriel

Voici les principales propriétés du produit tensoriel.


f ∗ g(x) = ∫ 
f ( x – y )g ( y ) dy = ∫ 
f ( y )g ( x – y ) dy

(la deuxième formule se déduisant de la première par le théorème


Proposition de changement de variables dans les intégrales). On sait de plus que
i) Continuité f ∗ g est une fonction intégrable sur  . Soit alors la distribution
Si la suite {Sn}n converge vers S dans ′ (  ) et la suite {Tn}n régulière associée :
converge vers T dans ′ (  ) , alors {Sn ⊗ Tn}n converge vers
S ⊗ T dans ′ (  ) .
ii) Support
〈 f ∗ g ( x ) , ϕ〉 = ∫ 
f ∗ g ( x ) ϕ ( x ) dx

On a :
Supp(S ⊗ T) = Supp(S) × Supp(T) qui s’écrit, grâce au théorème de Fubini :

iii) Dérivation

( D xα . D yβ ) ( S ⊗ T ) = D xα ( S ) ⊗ D yβ ( T ) ∀ ( α, β ) ∈  ×  〈 f ∗ g ( x ) , ϕ〉 = ∫∫ 2
f ( x – y )g ( y ) ϕ ( x ) dxdy

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et, par le changement de variables :

⎧u = x – y
⎨v = y

〈 f ∗ g ( x ) , ϕ〉 = ∫∫
2
f ( u )g ( v ) ϕ ( u + v ) dudv ∀ϕ ∈  (  ) (1)
α β x
Sous cette forme, on voit opérer la distribution produit tensoriel
f ⊗ g, ou plutôt son prolongement, car la fonction : (u, v) → ϕ(u + v)

x
sur laquelle elle opère n’appartient pas à  (  2 ) mais est seulement

+
y
indéfiniment dérivable ! En effet, si la fonction ϕ n’est pas identique-

=
b
ment nulle, il existe c dans  tel que ϕ(c) ≠ 0 et alors le support de

x
(u, v) → ϕ(u + v) contient au moins toute la droite du plan d’équation

+
y
x + y = c et n’est pas borné. C’est la difficulté pour étendre la

=
a
définition du produit de convolution à partir de la formule qui pré-
cède. La formule (1) ne pourra s’étendre à deux distributions S et T
que si leur produit tensoriel se prolonge à un espace de fonctions Figure 1 – Supp(S) = [α, β], Supp(T) quelconque et Supp(ϕ) = [a, b]
plus vaste que  (  2 ) et contenant au moins les fonctions
(u, v) → ϕ(u + v) pour toute fonction ϕ dans  (  ) .
S’inspirant de ce que nous avons fait pour étendre la définition
des distributions à support compact aux fonctions de  (  ) , nous
allons chercher une extension de S ⊗ T de la forme suivante :

〈S ⊗ T, Θξ〉

avec Θ ∈ ∞ ( 2 )
valant 1 sur un voisinage du support de S ⊗ T et
telle que l’application (x, y) → Θ(x, y)ϕ(x + y) appartienne à  (  2 ) y=β
pour toute fonction ϕ dans  (  ) .
Pour mettre en évidence une telle fonction Θ, on raisonne sur les
supports. x
y=α
Posons A = Supp(S), B = Supp(T), K = Supp(ϕ) pour ϕ ∈  (  ) et
enfin :

x+
y=
K ∆ = { ( x, y ) ∈  2 x + y ∈ K}

x+
t.q.

b
y=
Intuitivement, si A × B ∩ K∆ est compact dans  2 , « tout se
a
passe » dans un compact et l’extension est valide. On montre effec-
tivement [2] que si : Figure 2 – (symétrique de la précédente) Supp(S) quelconque,
Supp(T) = [α, β] et Supp(ϕ) = [a, b]
A×B∩ K∆ est compact dans  2

la construction de Θ s’obtient facilement.

Définition
Deux sous-ensembles fermés A et B de  sont dits convolu-
tifs, si et seulement si, pour tout compact K de  l’ensemble :

A × B ∩ K∆ est compact dans  2

Voici les principaux cas d’ensembles convolutifs qui vont nous y=β
intéresser pour la définition du produit de convolution de distribu-
x=α
tions. Nous illustrons ces cas de trois figures 1, 2 et 3 qui font com-
prendre le rôle joué par les différents supports. Nous réduisons
volontairement dans ces dessins les compacts à des intervalles fer- x
més bornés.
x+

Proposition
y=
x+

Dans chacun de ces cas, la formule :


b
y=

〈S ∗ T, ϕ〉 = 〈S ⊗ T, Θ(x, y)ϕ(x + y)〉


a

a un sens quelle que soit la fonction ϕ dans  (  ) et définit une


distribution sur  indépendante du choix de Θ. ′ (  ) (resp.  –′ (  ) )
Figure 3 – S et T appartiennent à  +

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Notons que ce ne sont pas les seuls cas où l’on peut définir le pro- 2.4 Propriétés du produit de convolution
duit de convolution S ∗ T. On a vu déjà que, pour les distributions
régulières associées à des fonctions intégrables, il n’y a pas de res-
triction de support. Dans la suite, on suppose que le produit de convolution des distri-
1. On a vu que H est dans  +′ (  ) et donc H ∗ H est bien défini. butions est défini.

Dans les calculs portant sur H ∗ H, il sera inutile – et cela sera vrai
aussi dans la suite – de faire intervenir la fonction Θ. Proposition
i) Le produit de convolution est commutatif :
L’important est qu’elle existe et qu’elle vaut 1 le support d’intégra-
tion. On a : S∗T=T∗S
ii) On a la propriété de dérivation suivante, quel que soit k
〈 H ∗ H , ϕ〉 = ∫∫ + × +
ϕ ( x + y ) dxdy
dans * :

( S ∗ T ) ( k ) = ( S ( k ) ∗ T ) = ( S ( k – 1 ) ∗ T′ ) = ... = ( S ∗ T ( k ) )
Par le changement de variables : iii) Sous réserve que tous les produits de convolution deux à
deux soient définis, on a :
⎧u = x ⎧x = u R ∗ (S ∗ T ) = ( R ∗ S ) ∗ T = R ∗ S ∗ T
⎨v = x + y ⇔ ⎨y = v – u
⎩ ⎩ iv) Si Supp (S) et Supp (T) sont convolutifs, on a :

et en posant E = { ( u, v ) ∈  2 t.q. 0  u  v} Supp (S ∗ T) ⊂ Supp (S) + Supp (T)


Si, de plus, Supp (S) et Supp (T) sont compacts alors
Supp (S ∗ T) est compact.
〈 H ∗ H , ϕ〉 = ∫∫ E
ϕ ( v ) dudv
1. La propriété ii) est particulièrement importante car, utilisée avec
Par le théorème de Fubini, on peut intégrer tout d’abord en u puis l’élément neutre δ, on en déduit que, pour toute distribution
en v : T ∈ ′ (  ) :

T(n) = T ∗ δ(n) = δ(n) ∗ T


+∞ +∞

∫ ∫ ∫
v

〈 H ∗ H , ϕ〉 = ϕ(v) du dv = v ϕ ( v ) dv La dérivation d’une distribution coïncide avec la convoluée de la


0 0 0 dérivée de même ordre de la distribution de Dirac. Plus générale-
ment, soit P(X) un polynôme :
On en déduit :
P(X) = a0 + a1X + ... + anXn
H ∗ H = xH = [x+] si x+ = sup(0, x)
et P(D) le polynôme de dérivation associé :
2. Pour S = δa et T quelconque dans ′ (  ) , δa ∗ T est bien définie
et l’on a : d dn
P ( D ) = a 0 + a 1 ------- + ... + a n ----------
〈δa ∗ T, ϕ〉 = 〈δa ⊗ T, ϕ(x + y)〉 = 〈T, ϕ(a + y)〉 = 〈T, τ−a . ϕ(y)〉 = 〈τa . T, ϕ〉 dx dx n

et donc : on a pour toute distribution T ∈ ′ (  ) :


P(D)(T) = P(D)(δ ∗ T) = [P(D)(δ)] ∗ T
δa ∗ T = τa . T ∀T ∈  ′ (  )
La définition suivante nous sera utile dans la suite.
En particulier :
Définition
δ ∗ T=T ∀T ∈ ′ (  )
Soit P(D) un polynôme de dérivation sur  , on appelle solu-
tion élémentaire de l’opérateur de dérivation ou encore solution
et : de Green, toute distribution E vérifiant
P(D)(E) = δ
δ est élément neutre pour le produit de convolution

3. La distribution T ∗ ∆ n’a de sens que si T est à support compact Voici très brièvement l’intérêt de cette notion.
et alors : Lorsque l’on cherche à résoudre une équation différentielle dans
′ (  ) , c’est-à-dire que l’on cherche à identifier les distributions tel-
〈 T ∗ ∆ , ϕ〉 = 〈 T ⊗ ∆ , ϕ ( x + y ) 〉 = 〈 T , ∑ ϕ ( x + n ) 〉 = 〈 T, ∑ τ – n . ϕ〉 les que :
n∈ n∈
P(D)(X) = T
Comme T est supposé à support compact, pour n assez grand : avec T connue, si l’on connaît une solution élémentaire E de l’opéra-
teur P(D), et sous réserve que les supports de E et de T soient con-
Supp(T) ∩ Supp(τ−n . ϕ) = ∅ volutifs, on a :
et la somme précédente est une somme finie. P(D)(E ∗ T) = [P(D)(E)] ∗ T = δ ∗ T = T

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Ainsi : ■ On notera l’analogie de cette formule avec celle qui définit le pro-
duit de convolution des fonctions.
E ∗ T est solution de l′équation différentielle La continuité de l’opération de convolution est une propriété déli-
cate. Mentionnons simplement un résultat, souvent suffisant dans la
Cela ramène la recherche d’une solution de l’équation différen- pratique [2].
tielle à la recherche d’une solution élémentaire. Notons enfin que,
en écrivant :
Proposition
P(D)(E) = P(D)(δ ∗ E) = [P(D)(δ)] ∗ E = δ La distribution T étant fixée, l’application :
la recherche de E revient à inverser dans ′ (  ) l’opérateur de S→S∗T
dérivation.
est continue dans ′ (  ) si :
Une autre conséquence intéressante de cette propriété de i) S varie en restant portée par un compact fixe ;
dérivation est la suivante. Si T ∈  +′ (  ) ou si T ∈ ′ (  ) , on obtient ii) S varie de façon quelconque mais T est à support compact ;
une primitive de T en considérant T ∗ H. En effet, on a : iii) S varie en restant portée par un intervalle [ a ; + ∞ [ , T étant
aussi causale.
( T ∗ H )′ = T ∗ H′ = T ∗ δ = T

2. En ce qui concerne la propriété iii), il se peut que R ∗ (S ∗ T) et Ces deux dernières propriétés permettent d’obtenir un important
(R ∗ S) ∗ T soient définis, sans qu’il y ait égalité, comme le montre théorème de densité qui montre que toute distribution T ∈ ′ (  )
l’exemple classique suivant. est limite dans ′ (  ) d’une suite de (distributions associées à des)
fonctions de  (  ) . Ce que l’on peut résumer par la formule :
Exemple : soit R = 1, S = δ ′ et T = H. On a :

R ∗ S = 1 ∗ δ ′ = ( 1 ∗ δ )′ = 1′ = 0 Théorème

donc :  (  ) est dense dans ′ (  )


(R ∗ S) ∗ T = 0
D’autre part : Preuve.♦ L’idée générale de la démonstration est la suivante.
S ∗ T = δ ′ ∗ H = ( δ ∗ H )′ = H′ = δ Soit {ρn}n une suite régularisante qui converge vers δ dans  (  ) .
En écrivant  comme une réunion croissante de compacts soit
donc :  = ∪ n K n , on montre que toute distribution T dans ′ (  ) est
limite d’une suite de distributions à support compact. On peut donc
R ∗ (S ∗ T) = R = 1
se limiter à faire la démonstration pour T à support compact. On a
3. Enfin iv) montre que le produit de convolution est une opéra- (continuité) :
tion interne, à la fois dans  +′ (  ) et dans ′ (  ) :
[ρn] ∗ T → δ ∗ T dans ′ (  )

⎧  +′ (  ) ×  +′ (  ) →  +′ (  ) Mais [ρn] ∗ T est une fonction  ∞ à support compact puisque


⎨ ( S, T ) → S ∗ T Supp([ρn]) et Supp(T) sont compacts. Donc [ρn] ∗ T appartient à
⎩ () . ♦
et

⎧ ′ (  ) × ′ (  ) → ′ (  ) 2.5 Algèbre de convolution


⎨ ( S, T ) → S ∗ T

Nous étudions le cas particulier d’un produit de convolution avec Définition
une distribution régulière. On appelle algèbre de convolution de distributions, tout
espace vectoriel de distributions contenant δ et dans lequel on
Proposition peut définir le produit de convolution.
Pour toute distribution S appartenant à  (  ) et toute
fonction f appartenant à  (  ) , le produit de convolution S ∗ [f]
est bien défini et c’est la distribution régulière associée à la On en a vu deux exemples :
fonction  ∞ : — l’ensemble ′ (  ) des distributions à support compact ;
— les ensembles  +′ (  ) et  –′ (  ) .
h ( z ) = 〈 S x, f ( z – x )〉 ∀z ∈ 
Dans ces algèbres de convolution, on peut faire du calcul algébri-
et donc, on peut écrire : que et donc résoudre des équations. On sait que, sous des hypothè-
ses très générales de linéarité, continuité et invariance dans le
S ∗ [f] = [h] temps, de très nombreux systèmes physiques peuvent être décrits
Pour toute distribution S à support compact c’est-à-dire en termes de produit de convolution. Supposons par exemple que le
S ∈ ′ (  ) et toute fonction f appartenant à  ∞ (  ) , le produit de système physique que l’on étudie s’écrive :
convolution S ∗ [f] est bien défini et c’est la distribution régulière
A∗X=B
associée à la fonction  ∞ :
avec A et B distributions connues,
h ( z ) = 〈 Sx , f ( z – x )〉 ∀z ∈ 
X inconnue.

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Si A admet un inverse de convolution noté A∗−1, vérifiant donc : Voici une méthode très générale pour la recherche d’une solution
élémentaire de l’opérateur de dérivation. On sait que l’équation dif-
A∗−1 ∗ A = A ∗ A∗−1 = δ férentielle homogène associée à (2), soit

et appartenant à la même algèbre de convolution que B, on a : dX ( t ) dn X ( t )


P ( D )X ( t ) = a 0 + a 1 --------------- + ... + a n ------------------ = 0 (5)
dt dt n
X= A∗−1 ∗B
a une solution unique pour laquelle X(0), X′ ( 0 ) , ..., X(n − 1)(0) pren-
et cela quel que soit B dans l’algèbre. De plus cette solution est uni- nent des valeurs données (conditions initiales). En particulier (5) a
que dans cette algèbre de convolution. une solution unique X0(t) pour laquelle :

En Physique, on est souvent amené à résoudre des équations dif- 1


férentielles linéaires à coefficients constants : X ( 0 ) = X′ ( 0 ) = ... = X ( n – 2 ) = 0 et X ( n – 1 ) = ------
an

dX ( t ) dn X ( t ) Considérons alors la distribution de  +′ (  ) :


P ( D )X ( t ) = a 0 + a 1 --------------- + ... + a n ------------------ = B ( t ) an ≠ 0 (2)
dt dt n E = H . X0(t)

Grâce au formalisme de la théorie de distributions, on a vu que On a dans ′ (  ) :


cette équation pouvait s’écrire :
E′ = H′ . X 0 ( t ) + H . X 0′( t ) = δ . X 0 ( t ) + H . X 0′ ( t )
P(D)(δ) ∗ X = B
Comme par hypothèse X0(0) = 0 :
et qu’alors le problème se ramenait à chercher une solution élémen-
taire de l’opérateur de dérivation : E′ = H . X 0′ ( t )

P(D)(E) = δ Par le même argument :

donc à inverser l’opérateur P(D)(δ). E ( k ) = H . X 0( k ) ( t ) pour k = 1, ..., n − 1


Exemple : Considérons l’équation différentielle :
et
X″ ( t ) + ω 2 X ( t ) = B ( t ) (3)
1
On lui associe l’équation dans ′ (  ) : E ( n ) = δ . X 0( n – 1 ) ( t ) + H . X 0( n ) ( t ) = ------ δ + H . X 0( n ) ( t )
an
( δ ″ + ω2 δ ) ∗ X = B
En sommant ces n dérivées, on a :
et la recherche d’une solution élémentaire de l’opérateur de dérivation
conduit à résoudre : P(D)(H . X0) = H . P(D)(X0) + δ
δ ″ + ω2 δ ∗ E = δ (4) et, comme X0 est solution de (5), on a P(D)(X0) = 0 et donc :
On vérifie facilement que : P(D)(H . X0) = δ
1 et E = H . X0 est une solution de Green pour l’opérateur de dérivation
ω H ( t ) sin ( ω t )
----
dans l’algèbre de convolution  +′ (  ) . Alors :

1 X = (H . X0) ∗ B
ω H ( t ) sin ( ω t ) appartient à
est solution de cette équation. Comme ----
est l’unique solution causale de (5) pour B causale.
 +′ (  ) alors, quel que soit B appartenant aussi à  +′ (  ) ,
Exemple : si l’on étudie l’oscillateur harmonique avec amortisse-
l’équation (3) a une solution unique donnée par :
ment, pour t  0 :
1 X″ ( t ) + 2 α X′ ( t ) + ω 2 = g ( t ) ω2 > α2
ω H ( t ) sin ( ω t )
X = B ∗ ----
on vérifie que la solution de l’équation homogène avec conditions initia-
Mais on vérifie aussi que : les y(0) = 0 et y′ ( 0 ) = 1 s’écrit :

1 1
– ---- H ( – t ) sin ( ω t ) X 0 ( t ) = -------- e – α t sin ( ω 1 t )
ω ω1

1 avec ω 1 = ω 2 – α 2 .
est une solution de (4). Comme ici – ---- H ( – t ) sin ( ω t ) appartient à D’après ce qui précède, la solution causale de l’équation s’écrit sous
ω
la forme de l’intégrale de Duhamel [3] :
 –′ (  ) , on obtient une solution unique dans  –′ (  ) donnée par :
+∞
1
X = B ∗ – ---- H ( – t ) sin ( ω t )
ω ω1
1
X ( t ) = ( H . X 0 ) ∗ g ( t ) = -------- ∫ 0
e – α t sin ( ω 1 t ) g ( t – τ ) d t

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3. Transformée de Fourier Proposition


des distributions i)  (  ) ⊂  2 (  ) et  (  ) ⊂  1 (  ) .
ii)  (  ) est dense dans  2 (  ) .
iii)  (  ) est stable par transformée de Fourier, c’est-à-dire
L’idée la plus naturelle, pour définir la transformée de Fourier f ∈  (  ) entraîne fˆ ∈  (  ) .
d’une distribution est de poser : iv) On a, dans  (  ) , l’égalité de Parseval-Plancherel :

〈Tˆ , ϕ〉 = 〈 T, ϕ̂〉
∀ f, g ∈  (  ) ∫ 
f ( x )g ( x ) dx = ∫ 
fˆ ( λ )ĝ ( λ ) d λ
La difficulté provient du fait que pour ϕ dans  (  ) , on a bien ϕ̂
indéfiniment dérivable mais jamais à support compact. Ainsi ϕ̂ et, en particulier, on a conservation de l’énergie :
n’appartient pas  (  ) et la formule précédente n’a pas de sens,
sauf à pouvoir prolonger T à un espace plus gros que  (  ) . L’idée
est alors de travailler dans un espace de fonctions tests qui soit
invariant par la transformation de Fourier. Le bon espace est
∀f ∈  (  ) ∫ 
f ( x ) 2 dx = ∫ 
fˆ( λ ) 2 d λ

l’espace  (  ) des fonctions  ∞ à décroissance rapide ainsi que


leurs dérivées, dit espace des fonctions de Schwartz. C’est On a évidemment  (  ) ⊂  (  ) . Pour définir des distributions
d’ailleurs cet espace qui permet la construction la plus simple de la opérant sur l’espace de fonctions tests  (  ) , il nous faut préciser la
transformée de Fourier dans  2 (  ) . Nous rappellerons tout topologie sur cet espace. Comme pour  (  ) , on peut se limiter à la
d’abord les principales propriétés de cet espace de fonctions. Une notion de convergence des suites.
fois construite la transformée de Fourier des distributions, nous
utiliserons abondamment les propriétés de la transformée de Fou-
Définition
rier des fonctions – dans  1 (  ) ou dans  2 (  ) – pour en déduire
Une suite de fonctions {ψn}n dans  (  ) converge vers 0
les propriétés analogues pour les distributions. Le lecteur souhai-
quand n tend vers l’infini, si et seulement si, quels que soient p
tant revoir ces propriétés peut consulter l’ouvrage de Gasquet et
et q dans  , les suites de fonctions { x p ψ n( q ) } n convergent uni-
Witomski [1]. formément vers 0 quand n tend vers l’infini. Cela se traduit de la
façon suivante :

∀ ( p, q ) ∈  2 lim sup x p ψ n( q ) ( x ) = 0
n→∞ x∈
3.1 Espace  (  )
Si une suite {ρn}n de  (  ) converge vers 0 dans  (  ) , alors elle
converge vers 0 dans  (  ) . Voici quelques propriétés utiles de la
Définition convergence dans  (  ) .
Une fonction f de  dans  est à décroissance rapide si et
seulement si : Proposition
Si la suite {ψn}n dans  (  ) converge vers 0 quand n tend vers
∀p ∈  lim xp f ( x ) = 0
x →∞ l’infini alors on a :
i) ψ n′ → 0 dans  (  ) (continuité de la dérivation).
Une fonction continue f de  dans  est à décroissance ii) Pour tout polynôme P, on a P ψ n → 0 dans  (  ) .
rapide si et seulement si :
iii) ψn → 0 dans  1 (  ) .
∀p ∈  sup x p f ( x ) < ∞ iv) ψˆn → 0 dans  (  ) (continuité de la transformée de Fou-
x∈ rier).
L’espace  (  ) , dit espace des fonctions de Schwarz, est
l’espace des fonctions f de  dans  vérifiant :
i) f ∈  ∞ (  ) ; 3.2 Distributions tempérées
ii) f est à décroissance rapide ainsi que toutes ses dérivées, ce
qui peut se traduire par :
Définition
∀ ( p, q ) ∈  2 sup x p f ( q ) ( x ) < ∞ On appelle distribution tempérée toute forme linéaire conti-
x∈
nue sur  (  ) , c’est-à-dire tout opérateur linéaire :

⎧ T : () → 
⎨ ψ → 〈 T, ψ 〉
Rappelons les principales propriétés de cet espace de fonctions ⎩
en liaison avec la transformée de Fourier des fonctions intégrables
tel que si {ψn}n converge vers 0 dans  (  ) quand n tend vers
définie par la formule : l’infini alors {〈T, ψn 〉}n tend vers 0. On notera ′ (  ) l’espace des
distributions tempérées.

fˆ ( λ ) = ∫ 
f ( x )e – 2iπx λ dx ∀λ ∈  On a remarqué précédemment que, pour une suite de  (  ) , la
convergence dans  (  ) implique la convergence dans  (  ) . Alors

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si T appartient à ′ (  ) on a, à plus forte raison, T ∈ ′ (  ) . On a on a :


donc :

′ (  ) ⊂ ′ (  ) 〈 [ f ], ϕ n〉  cM n ∫ 
dx
-------------------- = Cte M n
( 1 + x2 )
Inversement, on peut se demander à quelle condition une distri-
bution de ′ (  ) peut se prolonger en une distribution tempérée. Comme, par hypothèse, Mn tend vers 0 quand n tend vers l’infini,
le résultat s’en déduit.♦
On peut également montrer le résultat suivant.
Proposition
Pour qu’une distribution définie sur  (  ) puisse se prolonger
en une distribution sur  (  ) il faut et il suffit que T soit une Proposition
forme linéaire continue sur  (  ) pour la convergence de  (  ) . Les fonctions de  p (  ) pour p  1 définissent des distribu-
tions tempérées.

Ce qui signifie que, pour que T ∈ ′ (  ) se prolonge en une distri-


bution tempérée, il faut et il suffit que, pour toute suite {ϕn}n dans Un autre cas intéressant est le suivant, la démonstration étant
() qui converge vers 0 dans () , soit tout à fait identique à la démonstration précédente.
∀( p, q ) ∈  2 lim sup x p ϕ n( q ) = 0 , on doit avoir 〈 T, ϕn 〉 → 0 quand
n→∞x∈
n → + ∞. Proposition
Cette condition est nécessaire. Pour démontrer qu’elle suffit, on Si la suite { y n } n ∈  de nombres complexes est à croissance
s’appuie sur la densité de  (  ) dans  (  ) , car alors T se prolonge lente, soit
de façon unique en une forme linéaire continue sur  (  ) .
∃c > 0 ∃N ∈  t.q. ∀n ∈  yn  c ( 1 + n 2 ) N

alors la distribution :
3.3 Exemples de distributions tempérées
T = ∑ y n δ na (a > 0 donné)
n∈

On s’intéresse tout d’abord aux distributions tempérées réguliè- est une distribution tempérée.
res. Par un phénomène de dualité, on introduit la notion de fonc-
tions à croissance lente qui viennent tempérer la décroissance En particulier le peigne de Dirac est une distribution tempérée.
rapide des fonctions tests.

Définition 3.4 Transformée de Fourier


Une fonction f de  dans  est dite à croissance lente si et des distributions tempérées
seulement si :

∃c > 0 ∃N ∈  t.q. ∀x ∈  f ( x )  c ( 1 + x2 )N
Définition
Soit T une distribution tempérée c’est-à-dire T ∈ ′ (  ) , on
Une telle fonction est clairement localement intégrable – puisque appelle transformée de Fourier de T la distribution tempérée
(1 + x2)N l’est – donc définit une distribution régulière. notée Tˆ ou f ( T ) et définie par :

〈T̂ , ψ〉 = 〈 T, ψ̂〉 ∀ψ ∈  (  )
Proposition
Toute fonction à croissance lente définie une distribution
régulière tempérée.
Il est facile de vérifier que l’opérateur ainsi défini est bien une dis-
tribution tempérée en s’appuyant sur le fait que la transformée de
Preuve. ♦On a [ f ] ∈ ′ (  ) et on utilise la caractérisation précé- Fourier est une opération interne et continue dans  (  ) . Cette
dente pour montrer que [ f ] ∈ ′ (  ) . Soit alors {ϕn}n dans  (  ) qui définition est compatible avec la notion de transformée de Fourier
converge vers 0 dans  (  ) . On a : des fonctions de  1 (  ) et de  2 (  ) au sens suivant.


Proposition
〈 [ f ], ϕ n〉  f ( x ) ϕ n ( x ) dx Pour f fonction de  1 (  ) ou de  2 (  ) , on a :

[ f ] = [fˆ ]
〈 [ f ], ϕ n〉  ∫ 
f(x)
-------------------------------- ( 1 + x 2 ) N + 1 ϕ n ( x ) dx
( 1 + x2 )N + 1 Il est utile pour les formules d’inversion de définir la transformée
de Fourier inverse d’une distribution tempérée. Rappelons que,
pour une fonction intégrable ψ, celle-ci est définie par :
Posons M n = sup ( 1 + x 2 ) N + 1 ϕ n ( x ) qui est fini. En utilisant la
x∈
majoration :

f ( x )  c ( 1 + x2 )N
f(ψ)(λ) = ∫ 
ψ ( x )e +2iπx λ dx ∀λ ∈ 

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Grâce aux formules d’inversion de la transformée de Fourier dans


Définition ′ (  ) , on a :
Si T est une distribution tempérée, on appelle transformée de
Fourier inverse de T la distribution tempérée notée f ( T ) et [ e 2iπax ] = δ a
définie par :

〈 f ( T ) , ψ 〉 = 〈 T, f ( ψ )〉 ∀ψ ∈  (  ) résultat que l’on obtient, par exemple, en écrivant :

f ( [ e – 2iπa λ ] ) = δ a avec f ( [ e – 2iπa λ ] ) = f ( [ e – 2iπa λ ] σ )


On résume, dans la proposition suivante, les principales proprié-
tés de la transformée de Fourier des distributions tempérées. Elles = f ( [ e 2iπa λ ] )
se déduisent des propriétés analogues de la transformée de Fourier
vérifiées sur l’argument ψ [1]. Ainsi :

1̂ = δ
Proposition
Soit T une distribution tempérée. On a les propriétés ■ Voici une application importante en théorie du signal qui porte
suivantes : sur la transformée de Fourier du peigne de Dirac. La transformée de
— pour tout entier k de  : Fourier des distributions étant un opérateur continu :

+∞ +∞
Tˆ ( k ) = [ ( – 2iπx ) k T ]
∆a = ∑ δ na = ∑ [ e – 2iπtna ]
— pour tout entier k de  : n = –∞ n = –∞

T ( k ) = ( 2iπ λ ) kTˆ En comparant cette formule avec la décomposition du peigne de


Dirac en séries de Fourier (cf. article [AF 144, § 2.4]), on peut écrire :
— pour tout a réel fixé :
1
τ a T = e – 2iπ λ aTˆ ∆ a = --- ∆ 1
a ---
a
— pour tout a réel fixé :
1
ou en échangeant a  --- :
τ aTˆ = [ e 2iπxa T ] a
1
Si Tσ désigne la symétrisée de T : ∆ a = --- ∆ 1
a ---
a
f ( Tσ ) = [ f ( T ) ]σ = f ( T )
et, en particulier :
La transformation de Fourier f est application linéaire bijec-
tive et bicontinue de ′ (  ) dans ′ (  ) . L’application inverse ∆1 = ∆1
est f de sorte que l’on a les égalités :
Le peigne de Dirac est invariant par la transformée de Fourier.
f(f)(T) = f(f)(T) = T ∀T ∈ ′ (  )
1
La formule ∆ a = --- ∆ 1 appliquée à une fonction φ ∈  (  ) donne :
a ---
a

3.5 Exemples de transformées de Fourier


∑ 1
φ̂ ( na ) = --- ∑ n
φ ⎛⎝ ---⎞⎠
a
∀φ ∈  (  )
n∈ a n∈

C’est la formule sommatoire de Poisson.


δ̂ = 1
■ Afin d’illustrer le maniement de toutes ces propriétés, montrons
On voit souvent cette formule écrite de la façon suivante : comment elles permettent de déterminer la transformée de Fourier
1
de la distribution vp ⎛ ---⎞ .
⎝ x⎠
∫ 
e – 2iπtx δ ( x ) dx = 1 Il faut tout d’abord vérifier que cette distribution est bien une dis-
tribution tempérée.
ce qui est incorrect mais permet de mémoriser ce résultat important. Soit {ϕn}n une suite de  (  ) qui converge vers 0 dans  (  ) . On
Sa vraie signification, en termes de distribution tempérée est : écrit :

+∞

∫ ∫
1
1 ϕn ( x ) – ϕn ( – x ) ϕn ( x ) – ϕn ( – x )
〈 δ̂, ψ〉 = 〈 δ, ψ̂〉 = ψ̂ ( 0 ) = ∫ 
ψ ( x ) dx = 〈 1, ψ〉 ∀ψ ∈  (  )
〈 vp ⎛ ---⎞ , ϕ n〉 =
⎝ x⎠ 0
---------------------------------------- dx +
x 1
---------------------------------------- dx
x

On a par le théorème des accroissements finis :


Plus généralement, pour a quelconque dans  :
ϕn ( x ) – ϕn ( – x )
δˆa = [ e – 2iπa λ ] ---------------------------------------- = 2 ϕ n′( θ x ) avec θ x ∈ [ – x, x ]
x

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Comme { ϕ n′ } n converge uniformément vers 0 sur  , on a : De l’égalité :

1 1

1
ϕn ( x ) – ϕn ( – x ) 〈 f vp ⎛ ---⎞ , ψ ( – x )〉 = – 〈 f vp ⎛ ---⎞ , ψ ( x )〉
lim ---------------------------------------- dx = 0 ⎝ x⎠ ⎝ x⎠
n→+∞ 0 x
on déduit :
Pour la deuxième partie de l’intégrale, on écrit :
∞ ∞
ϕn ( x ) – ϕn ( – x ) x ϕn ( x ) – ϕn ( – x )
---------------------------------------- = -------------------------------------------------
x x2
- ( – 2iπ ) ∫ –∞
ψ ( x ) dx = 2K ∫ –∞
ψ ( x ) dx

On pose ensuite : et K = iπ. Donc :

M n = sup z ϕ n ( z ) < + ∞ 1
f vp ⎛ ---⎞ = ( – 2iπ )H + iπ
z∈ ⎝ x⎠
On a alors :
En remarquant que :
+∞ +∞

∫ ∫
ϕn ( x ) – ϕn ( – x ) 1 1 − 2H(x) = Sign(x)
---------------------------------------- dx  2M n1 ,1 ------ dx = Cte M n1 ,1
1 x 1 x2 on a finalement :

1
f vp ⎛ ---⎞
Par hypothèse, M n tend vers 0 quand n tend vers l’infini, donc :
= – iπ Sign ( x )
⎝ x⎠
+∞


ϕn ( x ) – ϕn ( – x )
lim ---------------------------------------- dx = 0 Par transformée de Fourier inverse et en utilisant l’imparité de
n→+∞ 1 x 1
vp ⎛ ---⎞ , on obtient :
1 ⎝ x⎠
Pour calculer la transformation de Fourier de vp ⎛ ---⎞ , on part de la
⎝ x⎠
formule :
1 1
f [ Sign ( x ) ] = ----- vp ⎛ ---⎞
1 iπ ⎝ x⎠
x . vp ⎛ ---⎞ = 1
⎝ x⎠

En utilisant la formule de dérivation :


3.6 Transformée de Fourier dans ′ (  )
(Tˆ )′ = [ ( – 2iπx )T ]

sous la forme :
Proposition
1 Le prolongement d’une distribution à support compact est
x . T = ⎛ -------------⎞ (Tˆ ) ′ une distribution tempérée, ce que l’on peut traduire par :
⎝ – 2i π⎠
′ (  ) ⊂ ′ (  )
on en déduit :

1 1 1
f x . vp ⎛ ---⎞ = ⎛ -------------⎞ ⎛ f vp ⎛ ---⎞ ⎞ ′ = 1ˆ = δ En effet, si K = Supp(T) pour T dans ′ (  ) et si θ est une fonction de
⎝ x⎠ ⎝ – 2i π⎠ ⎝ ⎝ x⎠ ⎠
 (  ) qui vaut 1 sur K, le prolongement de T à  (  ) était défini par :
et donc :
〈 T, ψ〉 = 〈 T, θψ〉 ∀ψ ∈  (  )
⎛ f vp ⎛ 1
---⎞ ⎞ ′ = ( – 2iπ ) δ
⎝ ⎝ x⎠ ⎠ Si {ϕn}n est une suite de  (  ) qui converge vers 0 dans  (  ) , la
suite {θϕn}n converge vers 0 dans  (  ) et donc 〈T, ϕn 〉 converge
Comme, d’autre part, l’on sait que H′ = δ , on en déduit (cf. article vers 0 quand n tend vers l’infini.
[AF 144, § 5.3]) que :
Si T est une distribution à support compact, sa transformée de
1 Fourier est bien définie. Elle possède la propriété particulière
f vp ⎛ ---⎞ = ( – 2iπ )H + Cte suivante.
⎝ x⎠

1
Pour déterminer la constante, on remarque que vp ⎛ ---⎞ est une Théorème
⎝ x⎠
Le prolongement d’une distribution T à support compact a
distribution impaire, donc sa transformée de Fourier aussi. En une transformée de Fourier qui est une distribution régulière
notant K la constante cherchée : associée à la fonction à croissance lente :
∞ ∞ s ( λ ) = 〈 Tx , e – 2iπ λ x〉 ∀λ ∈ 
1
〈 f vp ⎛ ---⎞ , ψ ( – x )〉 = ( – 2iπ )
⎝ x⎠ ∫ 0
ψ ( – x ) dx + K ∫ –∞
ψ ( – x ) dx
Pour tout entier k dans  , on a la formule de dérivation
∞ suivante :
∫ ∫
0

= ( – 2iπ ) ψ ( x ) dx + K ψ ( x ) dx par le changement x  – x s ( k ) ( λ ) = 〈 Tx , ( – 2iπx )e – 2iπ λ x〉 ∀λ ∈ 


–∞ –∞

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3.7 Convolution et transformée Proposition


de Fourier i) Si ψ ∈  (  ) et T ∈ ′ (  ) , on a :

ˆ
Comme pour les fonctions, la transformée de Fourier échange ⎧ ψ ∗ T = ψ̂ . T
convolution et multiplication, soit : ⎪ et

⎪ψ . T = ψˆ ∗ Tˆ
ˆ ˆ ⎩
⎧T ∗ U = T . U
⎨ ˆ ˆ
⎩T . U = T ∗ U ii) Pour  ∈ ′ (  ) et T ∈ ′ (  ) , on a :
Mais, comme pour les fonctions, il faut prendre garde aux condi-
tions de validité de ces formules ! On sait notamment que le produit S ∗ T = Sˆ . Tˆ
des distributions n’est défini que dans certains cas, notamment si
l’une des distributions est régulière. Voici quelques cas importants
de validité des ces formules. Les ouvrages généraux [4] [5] sont des références anciennes
mais particulièrement utiles pour des ingénieurs.

Références bibliographiques

[1] GASQUET (C.) et WITOMSKI (P.). – Analyse [3] SAICHEV (A.I.) et WOYCZYNSKI (W.A.). – [4] SCHWARTZ (L.). – Méthodes mathématiques
de Fourier et applications. Filtrage – Calcul Distributions in the physical and enginee- pour les sciences physiques. 390 p. Herman-
Numérique – Ondelettes. 354 p. – Masson – ring sciences. Volume 1. Distributional and Paris (1965).
Paris (1990). fractal calculus, integral transforms and [5] RODDIER (F.). – Distributions et transforma-
[2] HERVÉ (M.). – Transformation de Fourier et wavelets. 336 p. – Birkhäuser – Boston tion de Fourier. 323 p. – Ediscience Interna-
distributions. 182 p. – PUF – Paris (1986). (1997). tional – Paris (1978).

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