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Influence de la microstructure sur le transport diffusif

des pâtes, mortiers et bétons à base de CEM I avec


ajout de fumée de silice
Zineb Bajja

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Zineb Bajja. Influence de la microstructure sur le transport diffusif des pâtes, mortiers et bétons à
base de CEM I avec ajout de fumée de silice. Génie civil. Université Paris Saclay (COmUE), 2016.
Français. �NNT : 2016SACLN054�. �tel-01485320�

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THESE DE DOCTORAT DE
L’UNIVERSITE PARIS-SACLAY
PREPAREE A
L’ECOLE NORMALE SUPERIEURE DE CACHAN
(ECOLE NORMALE SUPERIEURE PARIS-SACLAY)

ECOLE DOCTORALE N° (579)


Sciences Mécaniques et Energétiques, Matériaux et Géosciences
Spécialité de doctorat : Génie Civil

Par

Madame Zineb BAJJA

Influence de la microstructure sur le transport diffusif des pâtes, mortiers et bétons


à base de CEM I avec ajout de fumée de silice

Thèse présentée et soutenue à « Cachan », le « 02 Décembre 2016 »

Composition du Jury :

Mme, LORENTE Sylvie (INSA de Toulouse) Présidente


Présidente
M, AÏT-MOKHTAR Karim (Université de la Rochelle) Rapporteur
Rapporteur
M, AMIRI Ouali (Université de Nantes) Rapporteur
Rapporteur
Mme, BAROGHEL-BOUNY Véronique (IFSTTAR Champs-sur-Marne) Examinatrice
Examinatrice
M. KHELIDJ Abdelhafid (Université de Nantes) Examinateur
Examinateur
M. BENNACER Rachid, (ENS de Cachan) Directeurdedethèse
Directeur thèse
Mme, DARQUENNES Aveline (ENS de Cachan) de thèse Encadrante
Encadrante ENS ENS
M. DRIDI, Wissem (CEA Saclay) EncadrantCEA
Encadrant CEA
M. PETIT, Laurent (EDF –R&D) Invité
Invité
A mes parents,
A mes deux frères,
A Allae-Eddine, pour son soutien et sa patience pendant ces trois années de thèse
A Adam et à mes futurs enfants

2
Remerciements

Je souhaite remercier ici tous ceux qui, par leur aide, leurs encouragements et leurs conseils, m’ont
permis de réaliser cette thèse. Grâce à eux, ces trois années resteront une passionnante aventure
scientifique et humaine.

Ce travail a été mené au sein du Laboratoire du Comportement des Bétons et des Argiles (LECBA)
au sein du CEA de Saclay ainsi qu’au LMT de Cachan, le laboratoire de Mécanique et Technologie
de l’ENS Cachan. Je voudrais donc exprimer toute ma gratitude à toutes les personnes appartenant à
ces deux structures.

Je tiens à remercier, en premier lieu, les personnes qui m’ont suivi de près durant ces trois années. Je
remercie profondément Professeur Rachid BENNACER (ENS Cachan) qui a dirigé cette thèse avec
énormément de patience, beaucoup d’enthousiasme et une dose d’exigence. Son expérience
scientifique, ses conseils, ses encouragements et sa disponibilité ont été un soutien indispensable à la
réalisation de cette thèse.

Un grand merci aussi à mes deux encadrants de thèse, M. Wissem DRIDI, ingénieur chercheur
(LECBA), et Aveline DARQUENNES, Maître de conférences habilitée à diriger des recherches
(ENS de Cachan), qui ont su toujours se rendre disponibles et ont tout mis en œuvre pour que ce
travail puisse se réaliser dans les meilleures conditions. Leur soutien assidu et permanent m’a permis
de donner le meilleur de moi-même au cours de ces années de thèse.

Ce travail de thèse n’aurait pas pu être mené à bien sans l’aide d’innombrables personnes à qui je
souhaite exprimer ma reconnaissance.

Je souhaite remercier Mme Valérie L’HOSTIS, chef du LECBA (CEA Saclay) qui m’a accueilli dans
son installation pour trois ans. Je la remercie très chaleureusement pour l’intérêt qu’elle a porté pour
ce travail, pour son soutien constant, ses encouragements et sa participation à la réussite de ces
travaux. Je la remercie infiniment pour son engagement à offrir un cadre de travail agréable et pour
son exigence de qualité.

Je voudrais également exprimer ma profonde reconnaissance à M. Patrick LE BESCOP, ingénieur


chercheur (LECBA) pour son immense implication dans ma thèse, Je voudrais lui dire combien
m’ont été profitables et instructives nos discussions scientifiques au cours de ma thèse.

Mes remerciements vont également à tous mes collègues du LECBA, qui ont participé de près ou de
loin au bon déroulement de ce travail. Ils ont, tous, contribué, directement ou indirectement, à mon
travail, en apportant aides, conseils et bonne humeur. Je pense à Etienne et Corinne toujours
présents pour me former aux appareils expérimentaux ou pour remédier à des difficultés techniques.
Merci également à Stéphane, Pascal, Laure, Benoit et Benoist pour nos discussions enrichissantes et
à toute l’équipe du 133N : William, Gaëtan, Christophe et Claude pour leur soutien et leur
gentillesse.
Merci à tous mes amis du deuxième étage (Farah, Rita, Tulio, Sylvain, Blanca, Tran, Maud, Suzy,
Mejdi, Martin, Julia et Anoushka) pour la très bonne ambiance qui a régné tout au long de ces trois
années, pour leurs sourires et leur soutien au quotidien.

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Ces trois années passées ont également été sources d’enrichissantes collaborations. Mon travail de
thèse financé par EDF m’a offert l’opportunité d’échanger scientifiquement avec Laurent PETIT,
ingénieur chercheur (EDF). Je tiens à le remercier pour m’avoir fait part de son intérêt pour mon
travail tout au long de la thèse, lors de nos régulières réunions d’avancement, ainsi que de son
soutien et sa grande compréhension.
Je remercie Virginie BLIN, chef du laboratoire L3MR de m’avoir accueilli pour réaliser les essais de
diffusion à l’eau tritiée. Un grand merci à Nathalie MACE, ingénieur chercheuse au L3MR, qui m’a
transféré ses connaissances et son savoir-faire expérimental en matière de transport des
radionucléides. Je la remercie pour sa présence et son aide.

Il m’est impossible de tourner cette page sans adresser mes remerciements à tous les membres qui
ont accepté d’assister à ma soutenance de thèse. Je remercie Mme Sylvie LORENTE (INSA de
Toulouse), pour m’avoir fait l’honneur de présider ce jury de thèse. J’adresse aussi mes plus vifs
remerciements à M. Karim AIT-MOKHTAR (Université de La Rochelle) et M. Ouali AMIRI
(Université de Nantes) pour leurs remarques constructives émises en qualité de rapporteurs de ce
travail. Merci aussi à Mme Véronique BAROGHEL-BOUNY (IFSTTAR) et M. Abdelhafid
KHELIDJ (Université de Nantes) pour avoir accepté de prendre part à ce jury d’exception. Leurs
nombreux conseils seront, j’en suis persuadé, d’une grande utilité pour moi dans le futur.

Je terminerai en remerciant mes proches et en leur dédiant ce travail : à mes parents qui m’ont
toujours encouragée et qui ont toujours été de mes côtés malgré la distance qui nous sépare. Merci
pour votre soutien, votre confiance et votre amour illimité. Merci à mon mari qui m’a toujours
soutenu dès le début de cette aventure, et qui été toujours présent pour s’occuper de notre fils,
quand je l’étais pas. Merci à mes deux frères, toujours soucieux des nouvelles de leur sœur. Je ne
vous remercierai jamais assez pour tout ce que vous m’avez donné. Que ce travail soit pour vous
l’expression de ma profonde reconnaissance.

4
Notations & Abréviations
FS Fumée de Silice
FSS Fumée de Silice Slurry (en suspension liquide)
FSD Fumée de Silice Densifiée (poudre)
pdc Pâte de ciment
CEM I Ciment Portland
E/C Rapport eau sur ciment initiale
Eeff/C Rapport eau sur ciment effectif
Liant Ciment composé utilisé ; ici CEM I avec FS
E/L Rapport eau sur liant
%FS Pourcentage massique de FS par rapport à la masse du ciment
θH2O Porosité totale à l’eau
ρH2O Masse volumique apparente à l’eau
θHg Porosité totale au mercure
rc Rayon critique des pores capillaires
αhyd Degré d’hydratation
αm Porosité modifiée par les interactions de l’espèce diffusante
αc Connectivité
F Facteur de Forme
El Eau liée
CH Portlandite
C-S-H Silicates de Calcium Hydatés
C-S-H (P) Silicates de Calcium Hydatés produits par la réaction pouzzolanique
C-S-H- (C) Silicates de Calcium Hydatés produits de l’hydratation du ciment Portland
C-S-H (LD) Silicates de Calcium Hydatés (Low Density)
C-S-H (HD) Silicates de Calcium Hydatés (High Density)
ITZ Interface granulat/pate
Vagg Teneur volumique en granulats
Dei Coefficient de diffusion effectif de l’espèce i
DeHTO Coefficient de diffusion effectif de l’eau tritiée HTO
De(O2) Coefficient de diffusion effectif de l’oxygène
D0 Coefficient de diffusion d’une espèce donnée dans une solution infinie
Kd Capacité de fixation de l’espèce diffusante dans le milieu poreux
C0 Concentration du traceur en amont
C1 Concentration du traceurà l’aval
MEB Microscope Electronique à Balayage
BSE Détection en mode électrons rétrodiffusés
PIM Porosimétrie par Intrusion Mercure
ATG Analyse Thermogravimétrique
EDM Transformée de la distance euclidienne

C CaO
S SiO2
A Al2O3
H H2O
M MgO
𝑆̅ SO3
F Fe2O3

5
Table de matières

TABLE DE MATIERES
INTRODUCTION GENERALE .................................................................................................................... 10

CHAPITRE I : ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE .......................................................................................... 16


Partie A : Microstructure des matériaux sans et avec ajout de FS ......................................... 18
1. Ciment Portland ................................................................................................... 18
1.1. Fabrication et composition ........................................................................................................................... 18
1.2. Hydratation du ciment Portland ......................................................................................................... 19
1.2.1. Mécanisme d’hydratation ................................................................................................................... 19
1.2.1.1. Hydratation des silicates C3S et C2S..................................................................................................... 19
1.2.1.2. Hydratation des aluminates C3A et C4AF ............................................................................................ 19
1.2.2. Caractéristiques des principales phases hydratées ............................................................................ 21
1.2.2.1. Les silicates de calcium hydratés C-S-H ............................................................................................... 21
1.2.2.2. La portlandite...................................................................................................................................... 23
1.3. Microstructure d’un matériau cimentaire durci ........................................................................................... 24
1.3.1. Réseau poreux d’une pâte de ciment ................................................................................................. 24
1.3.1.1. Les pores capillaires ............................................................................................................................ 24
1.3.1.2. Les pores des hydrates ........................................................................................................................ 26
1.3.1.3. Porosité totale et distribution de taille des pores ............................................................................... 26
1.3.2. Porosité de l’ITZ dans le cas des mortiers et bétons .......................................................................... 27
1.4. Résumé ......................................................................................................................................................... 30
2. Ciment avec ajout de fumée de silice .................................................................... 30
2.1. Fumée de silice ................................................................................................................................................... 31
2.1.1. Production et historique ..................................................................................................................... 31
2.1.2. Caractéristiques de la fumée de silice non-densifiée ......................................................................... 31
2.1.3. Mécanisme et mode d’action de la FS ................................................................................................ 32
2.1.3.1. Effet granulaire ................................................................................................................................... 32
2.1.3.2. Effet pouzzolanique ............................................................................................................................ 33
2.2. L’influence de l’ajout de fumée de silice sur la microstructure ........................................................................... 35
2.2.1. Effet sur la porosité de la pâte ............................................................................................................... 35
2.2.2. Effet sur la porosité de l’ITZ .................................................................................................................... 37
2.2. Résumé ......................................................................................................................................................... 38
Partie B : Propriétés de transport dans les matériaux poreux ............................................... 39
1. Diffusion liquide dans un milieu poreux - Généralités............................................ 39
1.1. Diffusion sans interaction dans le matériau cimentaire ............................................................................... 40
1.2. Diffusion avec interaction dans le matériau cimentaire............................................................................... 41
1.2.1. Cas des ions chlorures ........................................................................................................................ 42
1.2.2. Cas des radionucléides et choix du HTO ............................................................................................. 43
1.2.3. Prise de compte de la décroissance radioactive ................................................................................. 45
1.3. Coefficient d’autodiffusion D0 et Facteur de forme F ................................................................................... 46
1.4. Influence des conditions de service sur la diffusion ..................................................................................... 47
1.4.1. Température ....................................................................................................................................... 47
1.4.2. Etat de saturation ............................................................................................................................... 47
2. Diffusion dans les matériaux cimentaires avec FS .................................................. 48
2.1. Etat de l’art des données de diffusion ................................................................................................................. 48
2.2. Manques identifiés et problématique relevée .................................................................................................... 52
2.3. Prédiction du coefficient de diffusion HTO .......................................................................................................... 52
2.3.1. Modèles numériques............................................................................................................................. 52
2.3.2. Lien entre paramètres intrinsèques au matériau et D e ......................................................................... 53
2.4. Conclusion : sélection des formulations et de l’élément diffusif HTO pour la suite de l’étude .......................... 55

CHAPITRE II : CAMPAGNE EXPERIMENTALE SUR PATES ET MORTIERS ................................ 58


1. Matériaux d’étude ................................................................................................ 60
1.1. Choix des matières premières ...................................................................................................................... 60
1.1.1. La fumée de silice ............................................................................................................................... 60
1.1.2. Le ciment Portland .............................................................................................................................. 63
1.1.3. Le superplastifiant .............................................................................................................................. 63
1.1.4. Les granulats ....................................................................................................................................... 64
1.2. Formulations et nominations ....................................................................................................................... 66
1.3. Confection et conservation des échantillons ............................................................................................... 67
2. Mesure du coefficient de diffusion HTO ................................................................ 68
2.1. Principe de l’essai through-out diffusion ...................................................................................................... 68
2.1.1. Montage de la cellule ......................................................................................................................... 68
2.1.2. Vérification de l’étanchéité................................................................................................................. 69
2.1.3. Lancement de l’essai ........................................................................................................................... 69
2.2. Dimensionnement des échantillons ............................................................................................................. 70
2.3. Traitement et analyse des résultats ............................................................................................................. 71
3. Caractérisation de la microstructure poreuse ........................................................ 73
3.1. Porosité accessible à l’eau ............................................................................................................................ 73
3.2. Distribution de la taille des pores ................................................................................................................. 75
3.2.1. Préparation et prétraitement des échantillons .................................................................................. 75
3.2.2. Porosimétrie par intrusion mercure (PIM) ......................................................................................... 76
3.2.3. Sorption d’azote.................................................................................................................................. 79
3.3. Profil de porosité à l’interface granulat/pâte ............................................................................................... 80
3.3.1. Polissage et Préparation des surfaces à observer .............................................................................. 80
3.3.2. Acquisition d’images ........................................................................................................................... 81
3.3.3. Traitement et analyse d’images.......................................................................................................... 81
4. Réactivité et dispersion de la FS au sein de la matrice cimentaire .......................... 86
4.1. Degré d’hydratation ..................................................................................................................................... 86
4.2. Réactivité de la FS : Analyse Thermogravimétrique ..................................................................................... 88
4.3. Cartographie élémentaire (MEB associé à l’EDS) ......................................................................................... 90
5. Conclusion : .......................................................................................................... 90

CHAPITRE III : PATES : MICROSTRUCTURE EN LIEN AVEC LA DIFFUSION ............................. 94


1. Influence de la forme de fumée de silice ............................................................... 96
1.1. Caractérisation de la fumée de silice slurry (FSS) et densifiée (FSD) ............................................................ 96
1.2. Perte de performances liée à l’agglomération de la FSD ............................................................................. 97
1.3. Discussion sur la dispersion de la FS densifiée ........................................................................................... 101
1.3.1. Traitement aux ultrasons de la poudre ............................................................................................ 101
1.3.2. Efforts de cisaillement en présence de granulats ............................................................................. 102
2. Influence de la teneur en FSS .............................................................................. 104
2.1. Structure poreuse des pâtes avec FSS ........................................................................................................ 104
2.1.1. Porosité totale et degré d’hydratation ............................................................................................. 104

7
2.1.2. Distribution de la taille des pores et réactivité de la FS .................................................................... 106
2.2. Coefficients de diffusion HTO ..................................................................................................................... 107
2.2.1. Résultats ........................................................................................................................................... 107
2.2.2. Lien entre coefficient de diffusion et rayon critique ........................................................................ 109
3. Influence du rapport E/L ..................................................................................... 111
3.1. Microstructure poreuse .............................................................................................................................. 111
3.2. Mesures des coefficients de diffusion HTO ................................................................................................ 114
3.2.1. Résultats ........................................................................................................................................... 114
3.2.2. Lien entre coefficient de diffusion et rayon critique ........................................................................ 115
3.2.3. Comparaison avec les pâtes sans ajout de FS ................................................................................... 116
4. Conclusion .......................................................................................................... 118

CHAPITRE IV : DE LA PATE AUX MORTIERS : IMPACT DE L’AJOUT DES GRANULATS ...... 120
1. Diffusion HTO ..................................................................................................... 122
2. Interprétation par la caractérisation microstructurale ......................................... 124
2.1. Analyse de la microporosité de l’ITZ ........................................................................................................... 124
2.2. Homogénéité de la matrice cimentaire ...................................................................................................... 126
2.2.1. Dispersion de la FSS .......................................................................................................................... 126
2.2.2. Réactivité de la FS ............................................................................................................................. 129
2.3 Distribution poreuse ................................................................................................................................... 131
2.3.1. Porosimétrie à l’eau et au mercure .................................................................................................. 131
2.3.2. Sorption d’azote................................................................................................................................ 136
2.3.2.1. Caractérisation de la porosité des C-S-H .......................................................................................... 136
2.3.2.2 Limites de la technique ..................................................................................................................... 139
2.4. Perte de performances de confinement liée à l’agglomération de la FSS .................................................. 140
3. Discussion sur la dispersion de la FSS .................................................................. 143
3.1. L’effort de cisaillement induit par l’ajout des granulats ............................................................................. 144
3.2. L’influence de l’ajout du superplastifiant ................................................................................................... 146
3.3. L’importance de la séquence du mélange .................................................................................................. 147
4. Impact de la teneur en sable sur les coefficients de diffusion .............................. 148
4.1. Part de la dilution ....................................................................................................................................... 148
4.2. Part de la percolation d’ITZ et de la tortuosité : approche analytique....................................................... 150
4.3. Simulation 3D de l’effet de l’ITZ et de la tortuosité sur les coefficients de diffusion des mortiers............ 151
4.3.1. Présentation du modèle et de la chaîne de calcul ............................................................................ 152
4.3.1.1. Calcul du nombre d’inclusions ....................................................................................................... 152
4.3.1.2. Construction de la géométrie 3D ................................................................................................... 153
4.3.1.3. Maillage de la géométrie 3D......................................................................................................... 155
4.3.1.4. Calcul de la diffusivité équivalente .................................................................................................. 155
4.3.2. Application numérique: Part de la percolation d’ITZ et de la tortuosité sur les coefficients de
diffusion 156
4.3.3. Contribution de la tortuosité dans les coefficients de diffusion des pâtes contenues dans les
mortiers 158
5. Impact de la granulométrie du sable ................................................................... 159
5.1. Propriétés de diffusion ............................................................................................................................... 160
5.2. Analyse de la structure poreuse ................................................................................................................. 161
6. Conclusion .......................................................................................................... 165

8
CHAPITRE V : BETONS : ESTIMATION DU COEFFICIENT DE DIFFUSION HTO ..................... 168
1. A partir de paramètres microstructuraux ............................................................ 170
1.1. Fabrication et caractérisation des bétons étudiés ..................................................................................... 170
HTO
1.2. Relations entre De et paramètres microstructuraux .............................................................................. 173
HTO
1.2.1. Relation entre De et Vagg ............................................................................................................... 173
HTO
1.2.2. Relation entre De et rc .................................................................................................................. 175
HTO
1.2.3. Relation entre De et θHg ................................................................................................................ 175
2. A partir de la diffusion d’une autre espèce .......................................................... 180
2.1. Diffusion du Lithium/chlorure .................................................................................................................... 181
2.1.1. Protocole des essais de diffusion LiCl ............................................................................................... 181
2.1.1.1. Les solutions de remplissage des compartiments amont et aval ..................................................... 181
2.1.1.2. Suivi de concentration ionique: ........................................................................................................ 181
HTO
2.1.2. Estimation du De des mortiers CEM I ........................................................................................... 182
2.2. Diffusion gaz Oxygène /azote ..................................................................................................................... 184
2.2.1. Préparation et pré-conditionnement des échantillons .................................................................... 184
2.2.2. Protocole expérimental des essais de diffusion au gaz .................................................................... 185
2.2.3. Protocole expérimental des essais de perméabilité au gaz .............................................................. 187
2.2.4. Essais de diffusion et de perméabilité .............................................................................................. 188
3. A partir d’une succession de modèles numériques .............................................. 195
3.1. L’approche modélisation ............................................................................................................................ 195
3.1.1. Le modèle d’hydratation................................................................................................................... 196
3.1.2. Modèle multicouche de transport .................................................................................................... 197
3.1.3. Modèle 3D pour les mortiers et bétons ............................................................................................ 198
HTO
3.2. Résultats de la modélisation numérique : Estimation des De des pâtes, mortiers et béton.................. 199
4. Conclusion .......................................................................................................... 202

CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES ................................................................................... 204

REFERENCES .............................................................................................................................................. 208


Annexe A : Fiches produits des matériaux utilisés : ............................................................ 228
Annexe B : Des méthodes analytiques de détermination du degré d’hydratation dans les
matériaux en présence de FS ............................................................................................. 236
Annexe C : Méthode d’interprétation des essais de perméabilité – Modèle numérique ...... 240

9
INTRODUCTION GENERALE

Introduction Générale
De par son faible coût, sa facilité de mise en œuvre et sa disponibilité pratiquement universelle, le
béton est le matériau de construction le plus utilisé au monde dès lors qu’il entre dans la réalisation
de diverses structures. En particulier, les matériaux cimentaires sont largement utilisés dans
l’industrie nucléaire que ce soit pour la construction des centrales nucléaires ou pour les
infrastructures dédiées au stockage et au confinement des déchets radioactifs de différentes
catégories. Cependant, bien que près de deux milliards de tonnes de béton soient produites chaque
année par le simple mélange de ciment, d’eau, de sable et de graviers, tous les processus physico-
chimiques à la base de cette transformation ne sont pas complétement bien compris et font toujours
l’objet de plusieurs recherches.

Dans les concepts de stockage de déchets actuellement existant en France (déchets de très faible
activité et déchets de faible à moyenne activité à vie courte) (Tableau 1), les matériaux cimentaires
sont couramment utilisés comme barrière de confinement.

------------------------------Période -------------------------
Vie Très Courte Vie Courte Vie Longue
(période < 100 jours) (période ≤ 31 ans) (période > 31 ans)

Très Faible Gestion par Stockage de surface (Centre des déchets de très
----------------Activité--------------

activité (TFA) décroissance faible activité de l’Aube


radioactive sur le site
de production Stockage à faible
Faible Activité Stockage de surface profondeur (à l’étude
(FA) dans le cadre de la loi
(Centre des déchets de du 28 juin 2006)

Puis élimination dans faible et moyenne


Moyenne Activité les filières activité de l’Aube)
(MA) conventionnelles

Haute Activité Stockage profond (à l’étude dans le cadre de la loi


(HA) du 28 juin 2006)

Tableau 1 : Classifications des déchets radioactifs en fonction de leur niveau d’activité et période
d’après le Plan National de Gestion des Matières et Déchets Radioactifs [RIC 92]

En effet, selon la nature et l’activité du déchet, après traitement (solidification, incinération,


compactage), le déchet est soit enrobé dans un colis à base de ciment, soit bloqué par différentes
matrices (résine, bitume, liants hydrauliques c.à.d. mortiers et bétons). Ensuite, l’enveloppe qui
emballe le déchet conditionné est soit un conteneur béton considéré comme durable et étanche, soit
un conteneur métallique considéré comme périssable au-delà de la période d’exploitation du site de
stockage.

Le conditionnement permet de « fixer » les radioéléments de par les propriétés physico-chimiques du


matériau d’enrobage : structure chimique (pH basique favorisant la précipitation des radionucléides),
texture (porosité, tortuosité, compacité..). Les propriétés physiques du colis (résistance mécanique,
résistance au feu, au gel et au dégel) sont aussi des facteurs importants à prendre en compte. En
outre, la facture du colis facilite la manutention, le transport et le stockage de ces déchets (Figure 1).

10
INTRODUCTION GENERALE

Figure 1 : Transport de colis pour des déchets de faible et moyenne activité

On distingue alors deux catégories de colis de déchets de faible et moyenne activité, susceptibles
d’être stockés en surface [ATA 89] [RFS n°3-2e]:

-Les colis de déchets homogènes, où les déchets contenant les radionucléides sont enrobés dans des
matrices et répartis de façon homogène dans celle-ci (Figure 2 à gauche). Pour ce type de
conditionnement, le confinement peut être assuré par la matrice de conditionnement et / ou le
conteneur en béton durable quand il y’en a un. Les propriétés de confinement de la matrice sont
qualifiées par des tests de lixiviation menés selon des spécifications techniques définies par
l’ANDRA (l’Agence Nationale de la gestion des Déchets Radioactifs). Celles du conteneur en béton
durable sont garanties par des valeurs maximales de coefficients de diffusion effectifs de l’eau tritiée
[ANDRA 99].

-Les colis de déchets hétérogènes -et ce sont les colis qui nous intéressent dans cette étude -, où les
déchets solides radioactifs sont bloqués dans un conteneur par un liant hydraulique, afin de former
un solide non dispersable comportant le moins de vide possible. La répartition des radionucléides
dans le colis est aléatoire et localisée. Dans ce cas, le liant peut participer à la résistance mécanique
et au pouvoir de confinement du colis, mais ces propriétés sont essentiellement assurées par le
conteneur et le sur-enrobage (Figure 2 à droite). Leur efficacité est déterminée par des mesures de
diffusivité des radioéléments à travers des lames minces de matériau de même formulation que celle
du sur-enrobage concerné et du conteneur s’il s’agit d’un béton.

11
INTRODUCTION GENERALE

Figure 2 : Exemples des différents types de colis de déchets nucléaires

L’analyse de sureté de ce mode de stockage, repose entre autres, sur la connaissance des matériaux
cimentaires: leur comportement, leur microstructure et leur pouvoir de rétention vis-à-vis des
radioéléments. La connaissance des processus diffusionnels au sein de leur phase liquide et des
interactions qui peuvent exister entre l’élément diffusant et la matrice cimentaire sont des éléments
indispensables à l’étude de leur durabilité et leur confinement à long terme.

Dans le cadre de cette thèse, on s’est intéressé à l’étude des propriétés diffusives et microstructurales
des pâtes, mortiers et bétons à base de CEM I avec ajout de Fumée de Silice (FS), formulations de
base pour certains conteneurs de déchets radioactifs de faible à moyenne activité (Figure 3).

Figure 3 : Conteneur en béton F44 (CEM I + FS) utilisé par EDF pour le stockage en surface de déchets
de faible et de moyenne activité

Ce présent travail conduit au CEA (au laboratoire des études du comportement des bétons et des
argiles) et au LMT (Laboratoire de Mécanique et Technologies) s’inscrit dans un programme de

12
INTRODUCTION GENERALE

recherche piloté en partenariat avec EDF R&D. L’étude présentée se focalise sur l’investigation de la
microstructure des matériaux cimentaires avec Fumée de Silice et sur les liens avec leurs propriétés
de diffusion, en particulier, le coefficient de diffusion effectif De. Ce paramètre est un est un
indicateur essentiel de la durabilité et de la capacité de confinement des radionucléides.

Dans la littérature, plusieurs études se sont intéressées à l’identification des propriétés de diffusion
de chlorure (Cl-) dans les matériaux avec FS [JEN 99] [MIND 91] [KON 12] [BYF 87], en lien avec
la corrosion des armatures dans les bétons armés. Les techniques expérimentales utilisées pour
évaluer la résistance de ces matériaux à la pénétration des chlorures sont très nombreuses :
conductivité électriques, essais d’immersion, essais de migration accélérée sous champ
électrique [ASTM 96] [NTB 99]. Cependant, ces essais donnent des coefficients de diffusion très
différents et difficilement comparables. En plus, le retard dû aux interactions de cet élément avec la
matrice cimentaire ne permet pas de déterminer les propriétés effectives des matériaux.
Dans le cadre des études de sûreté du stockage radioactif, les mécanismes d’interactions des
éléments diffusants avec le matériau tendent alors à surestimer le pouvoir de confinement des colis
cimentaires pouvant contenir des radionucléides plus mobiles et qui interagissent moins que les ions
chlorures. C’est le cas de l’eau tritiée (HTO) qui est considérée comme le radionucléide le plus
rapide à diffuser au sein des matrices cimentaires, et qui est présentée comme traceur « témoin »,
grâce à sa faible interaction avec la matrice cimentaire [RIC, 92].

Les travaux publiés sur la diffusion HTO dans les matériaux cimentaires sont rares. En particulier,
pour les matériaux avec ajout de FS, on dispose à peine de quelques valeurs expérimentales de
coefficients de diffusion HTO (DeHTO) provenant des études de Delagrave [DEL 98], de Matte [MAT
99] ou de Lovera publiées dans [BAR 07]. Ces valeurs concernent dans la majorité des cas des pâtes
de ciment, et rarement des mortiers ou bétons. En effet, les bétons en présence de FS atteignent des
coefficients de diffusion très faibles, ce qui rend leurs détermination expérimentale par les essais de
diffusion naturelle « en cellule » [RIC 92] extrêmement longue (plusieurs années) et très coûteuse.
En contrepartie, les coefficients de diffusion des pâtes de ciment sont plus accessibles par l’essai « en
cellule », pour des raisons de représentativité (épaisseur d’échantillon très faible jusqu’à 3 mm), et de
diffusivité plus élevée. Cependant, les pâtes de ciment sont très peu utilisées en pratique, et donc une
étude d’extrapolation vers les propriétés du mortier et du béton s’avère nécessaire [DRI 13] [LARB
13].

Au vue de la problématique énoncée, le présent travail a pour objectif majeur de proposer des
méthodes permettant de prédire les propriétés diffusives de bétons avec FS, difficiles à
déterminer expérimentalement par l’essai des cellules de diffusion.

Pour mener à bien ce projet, il est d’abord nécessaire de bien comprendre l’influence de la
composition initiale des matériaux et en particulier de l’ajout de fumée de silice sur les propriétés
microstructurales et de diffusives des matériaux cimentaires. Un état de l’art est alors dressé,
exposant plus particulièrement une synthèse des données de diffusion disponibles pour les matériaux
avec FS. L’essentiel de cette revue bibliographique est présentée au Chapitre I de ce manuscrit.

Sur la base des manques identifiés dans la littérature, les formulations de pâtes et de mortiers avec
FS étudiées dans ce travail ont été sélectionnées. Leurs compositions initiales (teneur et type de FS,
E/Liant, teneur et granulométrie des granulats…) ont été variées afin de parcourir des

13
INTRODUCTION GENERALE

microstructures et des propriétés diffusives différentes. Les matériaux et les méthodes


expérimentales utilisées pour investiguer leurs réseaux poreux et déterminer leurs coefficients de
diffusion HTO sont présentés au chapitre II.

Dans tout ce qui suit, le travail s’est focalisé sur l’interprétation des résultats des D eHTO à partir des
propriétés microstructurales des matériaux, dans le but d’établir des relations diffusion/porosité -au
sens large- et diffusion/composition initiale. Le chapitre III présente les résultats obtenus pour les
pâtes de ciment avec FS qui ont permis d’élaborer une relation analytique entre les coefficients de
diffusion HTO et le rayon critique des pores capillaires.

Le chapitre IV s’intéresse au passage pâte – mortier en identifiant l’impact du volume de granulats


introduits (Vagg) sur le coefficient de diffusion HTO des mortiers et en exprimant ce lien (D eHTO/Vagg)
par une relation dite de dilution. Le pouvoir de dilution induit par l’ajout de sable a été dissocié de
l’effet de l’interconnexion de l’ITZ (interface granulat/pâte) et de la tortuosité, afin de déterminer la
part de participation de chacun d’eux sur les DeHTO des mortiers.

Enfin, les relations trouvées entre DeHTO et les paramètres microstructuraux ont permis d’approcher
plus ou moins les coefficients de diffusion de deux bétons avec et sans FS (Chapitre V). Dans le
même objectif, deux autres méthodes d’estimation du coefficient de diffusion de béton ont également
été proposées. Il s’agit d’un côté, de tester en diffusion un autre élément que l’eau tritiée permettant
de remontant aux DeHTO, et de l’autre de proposer une chaine de calcul adaptée au cas des mortiers et
bétons afin d’estimer numériquement leur coefficients de diffusion.

14
15
Chapitre I : Etude bibliographique

Chapitre I : Etude bibliographique

Les matériaux cimentaires avec Fumée de Silice (FS) sont largement utilisés pour le
conditionnement de déchets radioactifs en raison de leurs bonnes propriétés de confinement et de
leur durabilité. Ces propriétés caractéristiques des matériaux cimentaires dépendent d’un certain
nombre de paramètres (formulation, mise en œuvre) qui conditionnent la microstructure du matériau
final. Ainsi, la viabilité de ce mode de conditionnement repose, entre autre, sur la connaissance de
ces matériaux; leur microstructure et leur pouvoir de rétention vis-à-vis des radioéléments.

Avant de lancer toute étude, il convient d’examiner ce qui a été fait précédemment dans la littérature
afin de mener un travail de recherche novateur permettant d’alimenter la base de données
bibliographique.

Cette étude bibliographique rappelle dans une première partie (Partie A) quelques notions de base
sur les matériaux cimentaires auxquelles le manuscrit fera fréquemment référence, puis précise les
principaux acquis concernant l’influence de l’ajout de fumée de silice (FS) sur l’hydratation et la
microstructure de ces matériaux.
La deuxième partie de ce chapitre (Partie B) expose un état de l’art sur la diffusion au sein des
matériaux cimentaires en rappelant la théorie de la diffusion liquide en milieu poreux et les
paramètres influençant le phénomène de transport, et en justifiant le choix de l’élément diffusif
(radionucléide HTO) choisi dans le cadre de cette étude.
Une synthèse des données existantes sur la diffusion au sein des matériaux à base de CEM I avec
ajout de FS, a permis de relever certaines problématiques et d’identifier les manques existants qui
ont orienté par la suite notre choix de formulations et de caractérisations.

16
Chapitre I : Etude bibliographique

CHAPITRE I : ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE .......................................................................................... 16


Partie A : Microstructure des matériaux sans et avec ajout de FS ......................................... 18
1. Ciment Portland ................................................................................................... 18
1.1. Fabrication et composition ........................................................................................................................... 18
1.2. Hydratation du ciment Portland ................................................................................................................... 19
1.2.1. Mécanisme d’hydratation ................................................................................................................... 19
1.2.1.1. Hydratation des silicates C3S et C2S..................................................................................................... 19
1.2.1.2. Hydratation des aluminates C3A et C4AF ............................................................................................ 19
1.2.2. Caractéristiques des principales phases hydratées ............................................................................ 21
1.2.2.1. Les silicates de calcium hydratés C-S-H ............................................................................................... 21
1.2.2.2. La portlandite...................................................................................................................................... 23
1.3. Microstructure d’un matériau cimentaire durci ........................................................................................... 24
1.3.1. Réseau poreux d’une pâte de ciment ................................................................................................. 24
1.3.1.1. Les pores capillaires ............................................................................................................................ 24
1.3.1.2. Les pores des hydrates ........................................................................................................................ 26
1.3.1.3. Porosité totale et distribution de taille des pores ............................................................................... 26
1.3.2. Porosité de l’ITZ dans le cas des mortiers et bétons .......................................................................... 27
1.4. Résumé ......................................................................................................................................................... 30
2. Ciment avec ajout de fumée de silice .................................................................... 30
2.1. Fumée de silice ................................................................................................................................................... 31
2.1.1. Production et historique ..................................................................................................................... 31
2.1.2. Caractéristiques de la fumée de silice non-densifiée ......................................................................... 31
2.1.3. Mécanisme et mode d’action de la FS ................................................................................................ 32
2.1.3.1. Effet granulaire ................................................................................................................................... 32
2.1.3.2. Effet pouzzolanique ............................................................................................................................ 33
2.2. L’influence de l’ajout de fumée de silice sur la microstructure ........................................................................... 35
2.2.1. Effet sur la porosité de la pâte ............................................................................................................... 35
2.2.2. Effet sur la porosité de l’ITZ .................................................................................................................... 37
2.2. Résumé ......................................................................................................................................................... 38

Partie B : Propriétés de transport dans les matériaux poreux ............................................... 39


1. Diffusion liquide dans un milieu poreux - Généralités............................................ 39
1.1. Diffusion sans interaction dans le matériau cimentaire ............................................................................... 40
1.2. Diffusion avec interaction dans le matériau cimentaire............................................................................... 41
1.2.1. Cas des ions chlorures ........................................................................................................................ 42
1.2.2. Cas des radionucléides et choix du HTO ............................................................................................. 43
1.2.3. Prise de compte de la décroissance radioactive ................................................................................. 45
1.3. Coefficient d’autodiffusion D0 et Facteur de forme F ................................................................................... 46
1.4. Influence des conditions de service sur la diffusion ..................................................................................... 47
1.4.1. Température ....................................................................................................................................... 47
1.4.2. Etat de saturation ............................................................................................................................... 47
2. Diffusion dans les matériaux cimentaires avec FS .................................................. 48
2.1. Etat de l’art des données de diffusion ................................................................................................................. 48
2.2. Manques identifiés et problématique relevée .................................................................................................... 52
2.3. Prédiction du coefficient de diffusion HTO .......................................................................................................... 52
2.3.1. Modèles numériques............................................................................................................................. 52
2.3.2. Lien entre paramètres intrinsèques au matériau et De ......................................................................... 53
2.4. Conclusion : sélection des formulations et de l’élément diffusif HTO pour la suite de l’étude .......................... 55

17
Chapitre I : Etude bibliographique

Partie A : Microstructure des matériaux sans et avec ajout


de FS
Après un court rappel sur la chimie du ciment Portland, son hydratation, et la description des phases
créées, les propriétés porales de chaque phase et leurs rôles sur le phénomène de transport ont ensuite
été détaillés (section 1). Les additions minérales comme la fumée de silice dans une pâte de ciment
ou un mortier développent une microstructure différente de celle des matériaux cimentaires
ordinaires et modifient leurs propriétés physico-chimiques. Une synthèse de ces effets semble
nécessaire avant d’aborder les propriétés de confinement de ces matériaux (section 2).

1. Ciment Portland
1.1. Fabrication et composition
Le ciment Portland communément appelé CEM I est un mélange de clinker et de gypse (ou/et
anhydrite) dans une proportion d’environ 95-5 %. Ce matériau a été découvert par Louis Vicat en
1818 sur la base de ses travaux sur les chaux hydrauliques et a été breveté par Joseph Aspdin en
1824. Le nom « Portland » a été choisi pour bénéficier de la réputation qu’avait la pierre extraite des
carrières de l’ile Portland, située au sud-ouest de l’Angleterre.

Le clinker, le principal composant du ciment Portland, est fabriqué par cuisson dans un four rotatif à
1450 °C d’un mélange finement broyé et homogénéisé de calcaire et d’argile dans un rapport
d’environ 80-20 %. A la sortie du four, et après refroidissement par une trempe à l’air, le mélange
présente les compositions et proportions massiques résumées dans le tableau I-1 :

Tableau I-1 : Teneurs massiques des composants du clinker [TAY 90]

Eléments SiO2 Al2O2 CaO Fe2O3 MgO SO3 K2O Na2O


% massiques 19-25 2-9 62-67 1-5 0-3 1-3 0,6 0,3

Ces éléments sont combinés pour former les quatre principales phases composant le clinker
regroupés dans le tableau I-2. La détermination des proportions massiques en composants du clinker
est le résultat d’un calcul se basant sur les teneurs en oxydes [BOG 55].

Tableau I-2 : Les principaux constituants du clinker

Nom du composant Formule chimique Notation cimentière* Proportions


(%)
Silicate Tricalcique (alite) 3CaO, SiO2 C3S 50 à 70
Silicate bicalcique (bélite) 2CaO, SiO2 C2S 15 à 30
Aluminate tricalcique (célite) 3CaO, Al2O3 C3A 5 à 10
Aluminoferrite tétracalcique 4CaO,Al2O3, Fe2O3): C4AF 5 à 15

*La notation cimentière qui code les composants du ciment et les différentes espèces élémentaires de la pâte hydratée par des
lettres est utilisée pour simplifier l’écriture des phases. Dorénavant toutes les phases seront exprimées en utilisant cette notation
rappelée au début du manuscrit

Le caractère hydraulique du ciment est apporté par le clinker. Le gypse et/ou anhydrite (CaSO4.2H2O
ou C𝑆̅H2 en notation cimentière) ajouté régule la prise du ciment notamment par une action sur
l’hydratation des phases aluminates étant donné qu’elles sont beaucoup plus réactives à l’eau que les

18
Chapitre I : Etude bibliographique

phases silicates. Le paragraphe suivant détaille les réactions d’hydratation qui interviennent pour
chacune de ces phases au contact de l’eau.

1.2. Hydratation du ciment Portland


L’ « Hydratation » est un mot utilisé pour décrire de la manière la plus générale, l’ensemble des
réactions chimiques qui interviennent dès que le ciment est mis en contact avec l’eau. Comme toutes
les réactions chimiques, celles-ci obéissent à des lois thermodynamiques et cinétiques [NON 08].
Lorsque le ciment est placé au contact de l’eau, le mécanisme d’hydratation s’opère par une
succession d’étapes décrites pour la première fois par Le Chatelier en 1904 [CHA 04]. En effet, les
phases anhydres constituant le ciment (C3S, C3S, C3A, C4AF et le régulateur de prise) conduisent en
se dissolvant à sursaturer la solution de gâchage en calcium, silicium, aluminium, alcalins, sulfates…
En présence de cette solution sursaturée, les phases hydratées très peu solubles vont se précipiter
conférant ainsi au matériau sa résistance mécanique. La précipitation des hydrates va diminuer la
concentration des ions en solution permettant ainsi à nouveau la dissolution des phases anhydres. Et
ainsi de suite, ce processus de dissolution/précipitation se poursuit jusqu’à hydratation totale et
épuisement de l’eau nécessaire à ce processus. L’avancement de l’hydratation d’une pâte de ciment
(pdc) est caractérisé par le degré d’hydratation (αhyd) défini comme étant le rapport entre la masse
d’anhydres ayant réagis et la masse initiale d’anhydre.

1.2.1. Mécanisme d’hydratation


On se propose désormais de présenter les principales réactions d’hydratation de chacun des
composants anhydres du ciment.

1.2.1.1. Hydratation des silicates C 3 S et C 2 S


Le C3S se dissout rapidement lors du mélange du ciment Portland avec l’eau de gâchage. Sa
dissolution aboutit à la précipitation de portlandite Ca(OH)2 (CH selon la notation cimentière) et de
silicates de calcium hydratés (C-S-H). Les C-S-H formés présentent un rapport CaO/SiO2 (C/S)
variant entre 1,5 et 1,7 (voir section §I-A-1.2.2.). L’équation- bilan s’écrit:

C3S + (y+3-x) H → CxSHy + (3-x) CH (Eq. I-1)


L’hydratation du C3S a une importance particulière parce qu’il est le composant majoritaire des
ciments Portland (tableau I-2) ; de plus, son produit d’hydratation (C-S-H) influence la plus grande
partie des propriétés mécaniques de la pâte durcie.
Le C3S confère rapidement au ciment une résistance élevée, son hydratation n’évolue pratiquement
plus après 28 jours.
Contrairement au C3S, le C2S possède une cinétique plus lente [EUR 01], et permet donc d’atteindre
des résistances élevées à moyen et long terme. Les produits de son hydratation sont pourtant
identiques :
C2S + (y’+2-x’) H → Cx’SHy’ + (2-x’) CH (Eq. I-2)

1.2.1.2. Hydratation des aluminates C 3 A et C 4 AF


Le C3A est le constituant le plus réactif du clinker. En absence de régulateur de prise, le C3A réagit
très rapidement avec l’eau pour donner des hydrates métastables (C4AH13, C2AH8) qui se

19
Chapitre I : Etude bibliographique

transforment en aluminate de calcium hydraté C3AH6. La précipitation rapide de ces


hydroaluminates de calcium conduit à une rigidification précoce du matériau qui nuit à son
ouvrabilité.

L’addition de gypse permet justement d’éviter ce phénomène de fausse prise due à la cristallisation
quasi immédiate des aluminates hydratés. Cet ajout de gypse provoque en effet la formation autour
des grains de C3A de l’ettringite (trisulfo-aluminate de calcium hydraté - C6A𝑆̅3H32) relevant ainsi
d’une réactivité plus lente qu’en absence de gypse. Une mole de C3A et 3 moles de gypse dissoutes
aboutissent à la précipitation d’1 mole d’ettringite :

C3A + 3C𝑆̅H2 + 26H  C6A𝑆̅3H32 (Eq. I-3)

La teneur en gypse des ciments étant limitée, il y a donc en général excès de C 3A par rapport au
gypse. Lorsque le gypse est totalement consommé, la solution devient sous-saturée par rapport à
l’ettringite. Celle-ci se dissout et devient la nouvelle source de sulfate pour former avec le C3A
excédentaire un nouveau composé : le monosulfoaluminate de calcium hydraté (C4A𝑆̅H12). Le
processus peut être exprimé par l’équation bilan suivante :

2C3A + C6𝑆̅3H32 + 4H 3C4A𝑆̅H12 (Eq. I-4)

L’hydratation du C4AF en présence de gypse, génère la précipitation d’hydrates semblables à ceux


produits par le C3A. Le fer remplace l’aluminium dans l’ettringite pour former l’ettringite ferrière.
La vitesse de réaction est cependant beaucoup plus lente ; des cristaux de C4AF subsistent dans une
pâte de ciment CEM I même après 5 ans d’hydratation.

Les produits d’hydratation des différentes phases du ciment Portland sont résumés dans le Tableau I-
3.

Au total, une pâte de ciment Portland hydratée contient, en termes de proportions massiques,
approximativement 15 à 25 % de portlandite, 60 à 70 % de C-S-H et 5 à 15 % de phases aluminates.
Ces hydrates sont décrits séparément dans la section suivante.

20
Chapitre I : Etude bibliographique

Tableau I-3 : Produits d’hydratation des composés anhydres du CEM I

Anhydres Hydrates
C2S C-S-H ; CH
C3S
C3A C3AH6
C4AH13
En présence de gypse (CEM I) :
C6A𝑆̅3H32 ou AFt
C4A𝑆̅H12 ou AFm
C4AF C3(A,F)H6
C4(A, F)H13
En présence de gypse (CEM I) :
C6(A,F)𝑆̅3H32
C4(A,F)𝑆̅H12

1.2.2. Caractéristiques des principales phases hydratées

1.2.2.1. Les silicates de calcium hydratés C-S-H


Les silicates de calcium hydratés (C-S-H) sont les principaux constituants de la pâte de ciment
hydratée et proviennent de l’hydratation du C3S et de C2S (Tableau I-3). Ces éléments du système
ternaire CaO-SiO2-H2O, sont à l’origine des principales propriétés de la pâte de ciment durcie,
notamment de sa résistance mécanique.
Les C-S-H sont des composés principalement amorphes du fait de leur germination rapide. Ils sont
souvent appelés « gel de C-S-H » en raison de leur forte teneur en eau et de leur faible degré de
cristallinité. Cette dernière propriété rend la détermination de la morphologie des C-S-H plus
difficile avec les méthodes usuelles d’analyses. Dès lors, plusieurs modèles dans la littérature ont été
proposés afin de décrire leur nanostructure. Les modèles les plus connus sont résumés dans le
tableau suivant (Tableau I-4):

21
Chapitre I : Etude bibliographique

Tableau I-4 : Nanostructure des C-S-H décrite par plusieurs modèles

Modèle Description de la morphologie Schéma des C-S-H


Les particules colloïdales de CSH
Brownyard (1948)

sont modélisées sous forme de 2 à


3 feuillets élémentaires roulés sur
[POW 47]
Powers &

eux-mêmes, de haute surface


spécifique.

Les C-S-H sont modélisés en


couches avec un arrangement
Feldman & Sereda
(1970) [FEL 70]

irrégulier des feuilles ce qui crée Figure I-1 :


des espaces interfeuillets lors de Représentation
leur rapprochement. La pénétration schématique de
ou le départ d’eau de ces espaces trois modèles de
interfeuillets est possible, d’après C-S-H [OBE 86]
des résultats de sorption gaz.

Les C-S-H sont considérés comme


Wittmann (1976)

un réseau tridimensionnel de
[WIT 76]

particules colloïdales. Les


particules sont séparées par de
minces films d’eau fortement
adsorbée.

Deux types de C-S-H :


 C-S-H(LD) de faible densité
Tennis & Jennings (2000) [TEN 00]

(porosité de 31%)
 C-S-H(HD) pour haute densité
(porosité de 20%)
Ce modèle est en accord avec de
nombreuses études, notamment C-S-H (LD) C-S-H (HD)
[SCR 04] et [BEJ 06] qui ont Figure I-2 : Images MET des C-S-H(LD) et
montré à partir d’observations C-S-H(HD) [BEJ 06]
MEB et MET que les phases
anhydres sont entourés par une Figure I-3 : pâte de
première couche de « C-S-H CEM I vue au
internes » dense et ayant une 1 MEB avec :
texture homogène qui plonge dans 3 1= grain anhydre,
une matrice à texture hétérogène 2 2= C-S-H ‘internes’
contenant des C-S-H « externes » 3= C-S-H ‘externes’
et d’autres hydrates. et d’autres hydrates.

De façon macroscopique, les C-S-H sont caractérisés par le rapport molaire C/S. Nonat [NON 08]
décrit trois phases distinctes de C-S-H : les C-S-H-α correspondant à 0,66 < C/S < 1, C-S-H-β
correspondant à 1 < C/S < 1,5 et C-S-H-γ correspondant à 1,5 < C/S < 2. Damidot [DAM 95] quant à
lui décrit le système sous la forme de deux types de C-S-H : C-S-H SII avec un C/S> 1.5, et C-S-H

22
Chapitre I : Etude bibliographique

SI avec un C/S < 1,5. Dans un ciment CEM I, les C-S-H sont essentiellement de type γ ou SII avec
un plus haut rapport C/S ; en revanche, avec l’ajout de fumée de silice (réf. §I-A-2.2.1.), les C-S-H
produits de la réaction pouzzolanique (réf. §I-A-2.1.3.2) sont plutôt de type α (comme à l’interface
avec les grains de fumée de silice [NON 08]) ou β.

1.2.2.2. La portlandite
La portlandite ou l’hydroxyde de calcium est un composé cristallin de forme hexagonale (Figure I-4
(a)) et de formule chimique C-H =Ca(OH)2. Cet hydrate n’a que peu d’importance du point de vue
de la résistance mécanique, mais par contre, il joue un rôle très important du point de vue de la
durabilité.

La portlandite se forme par précipitation, en solution, dans l’espace poreux de la pâte de ciment. Au
cours de l’hydratation, les cristaux de portlandite croissent, rejoignent les grains de ciment recouverts
de gel de C-S-H, et forment ainsi des ponts d’hydrates, facilitant la percolation des phases solides à
court terme (Figure I-4 (b)). Cette phase se trouve préférentiellement dans les zones poreuses où elle
peut disposer de suffisamment d’espace pour cristalliser. Baroghel-Bouny dans [BAR 94] met en
évidence l’existence de CH dans les bulles d’air et les pores de la pâte de ciment, mais également à
l’interface granulat/pâte appelée ITZ (réf. §I-A-1.3.2.) pour les mortiers et bétons. La portlandite
contribue ainsi à réduire le volume total des pores en transformant une partie de l’eau liquide sous
forme de cristaux solides très peu poreux [TAY 90] [HEW 98].

(a) (b)

Figure I-4 : Cristaux de portlandite (a) vus au microscope électronique à balayage [DAM 95] et
(b) dans la matrice cimentaire réalisant un pont d’hydrates [REG 75]
En plus de sa propriété de précipitation dans la porosité de la pâte, la CH est la phase la plus soluble
parmi tous les hydrates (solubilité de l’ordre de 2,16 mol/L à 25°C). Elle se dissout et contribue avec
les alcalins (Na2O et K2O), à la basicité de la solution interstitielle, indispensable pour la passivation
des armatures métalliques du béton armé. L’équilibre chimique de la portlandite dans un milieu
cimentaire sans présence d’alcalins s’établit à un pH très basique, de l’ordre de 12,4. Ainsi, en cas
d’exposition de la pâte à de l’eau pure par exemple, et de par sa grande solubilité, la portlandite se
dissout pour compenser le départ des ions calcium par lixiviation. Cette décomposition augmente la
porosité du matériau et par conséquent sa vulnérabilité vis-à-vis des agressions extérieurs [ADE 92].
Elle est donc considérée comme le maillon faible de la durabilité du matériau cimentaire.

23
Chapitre I : Etude bibliographique

1.2.2.3. Les aluminates de calcium hydratés


Le premier type de phases aluminates produit par l’hydratation du C3A représente les phases AFt
appelées aussi Ettringite ou trisulfoaluminate de calcium hydraté (C6A𝑆̅3H32). A l’épuisement du
gypse et donc en absence d’ions sulfates, l’ettringite se décompose en monosulfoaluminate de
calcium hydraté. Ce deuxième type de phases aluminates, également appelé phase AFm, est de
formule C4A𝑆̅H12.

Ces phases stables sont minoritaires dans la pdc. Elles cristallisent sous forme d’aiguilles à base
hexagonale et plaquettes hexagonales et se retrouvent parsemées dans les C-S-H externes et la
portlandite.

Les produits d’hydratation décrits précédemment, les résidus anhydres et la solution interstitielle font
la microstructure du matériau cimentaire durci.

1.3. Microstructure d’un matériau cimentaire durci


Un matériau cimentaire est un milieu poreux qui peut être décrit par la superposition d’un corps
solide et d’espaces vides, les pores, dispersés de manière plus ou moins homogène au sein de la
matrice. Ces pores sont de dimensions très variables couvrant une gamme très large depuis des
nanopores aux macropores [BAR 89].

1.3.1. Réseau poreux d’une pâte de ciment


Lors de l’hydratation, une couche d’hydrates se forme à la surface des grains anhydres, comblant
ainsi une partie des espaces inter-granulaires initialement occupés par l’eau du gâchage. Les vides
initiaux se remplissent ainsi, au fur et à mesure que l’hydratation avance, par une structure poreuse
plus fine, celle du gel de C-S-H, entrainant ainsi une baisse de la porosité totale [JIA 89] [RIC 92].
Ce mode de remplissage engendre donc un réseau poreux très complexe et tortueux, qui va présenter
d’une part, des pores inter-grains résiduels que l’on a coutume d’appeler « capillaires » et d’autre
part, une porosité relative aux hydrates (en particulier du gel C-S-H).

1.3.1.1. Les pores capillaires


Ce sont des pores de grand diamètre (supérieur à 10-30 nm) [POW 58], définis comme l’espace non
comblé entre les grains de ciment par les hydrates. La porosité capillaire forme un réseau continu de
pores interconnectés dans la pâte fraiche, qui devient discontinu au fur et à mesure de l’hydratation.
La taille et le volume de ces pores décroit donc avec l’avancement de la réaction d’hydratation
comme le montre la figure I-5 obtenue par la technique de porosimétrie au mercure (M.I.P).
A un âge donné, la taille et le volume des pores capillaires diminue également avec le rapport E/C
(eau/ ciment massique) (Figure I-6), et le pic correspondant, va jusqu’à disparaitre pour des valeurs
suffisamment faibles de ce rapport [BAR 94]. Le rayon critique (localisé au niveau du pic des pores
capillaires et défini comme étant le rayon à partir duquel il se forme un chemin continu
d'écoulement à travers toutes les régions de l'échantillon) diminue également montrant un affinement
des pores capillaires.

24
Chapitre I : Etude bibliographique

E/C

Figure I-5 : Volumes cumulées de taille des pores Figure I-6 : Evolution du pic de la porosité
d’une pâte de ciment CEM I CPA (E/C=0.6) à capillaire en fonction du rapport E/C des
différents âges d’hydratation [WIN 70] pâtes de ciment Portland [SCH 70]

Dans l’étude des transferts des matériaux cimentaires, l’interconnexion des pores capillaires est une
caractéristique importante car elle modifie fortement la dimension des chemins de pénétration des
agents agressifs. Cette percolation de pores capillaires dans les pâtes de ciment a été étudiée par
Bentz et Garboczi [BEN 91] avec le modèle d’hydratation CEMHYD3D. La figure I-7(a) montre la
variation de la fraction des capillaires interconnectés avec le degré d’hydratation pour différents
rapports E/C. Plus le rapport E/C augmente, plus le degré d’hydratation conduisant à la discontinuité
du réseau poreux est élevé. Cette discontinuité se réalise par segmentation par des micropores plus
fins : porosité du gel. Les données de la Figure I-7(a) ont été transformées en traçant la fraction des
pores capillaires connectée en fonction de la porosité capillaire (figure I-7(b)).

(a) (b)
Figure I-7 : Interconnexion des pores capillaires [BEN 91]
L’interconnexion des pores capillaires ne dépend alors que de la porosité capillaire et le seuil de
percolation se situe aux alentours de 18%, valeur en dessous de laquelle les pores ne sont plus
connectés. Cette valeur limite est voisine de la densité critique de 15% qui assure la percolation du
matériau [SCH 70].

25
Chapitre I : Etude bibliographique

1.3.1.2. Les pores des hydrates


La porosité des hydrates correspond à la porosité induite par la structure en « hérisson » des C-S-H.
Elle est en proportion plus faible par rapport à la porosité capillaire et est très fine (diamètre < 10-20
nm). La porosité des hydrates est une caractéristique intrinsèque aux C-S-H formés par l’hydratation
du ciment Portland et ne dépend pratiquement pas du rapport E/C, ni de l’état d’avancement de
l’hydratation [POW 47] [BARO 81]. Elle est constante et égale à 28% du volume des C-S-H [POW
47], valeur vérifiée expérimentalement par Baroghel-Bouny [BAR 94] par l’exploitation des
isothermes de sorption d’eau d’une pâte de ciment Portland.

Certains modèles tels que [FEL 70] et [DAI 77] distinguent deux types de pores dans la porosité des
C-S-H : des larges pores inter-cristallites situés entre les particules de gel, et des petits pores intra-
cristallites situés à l’intérieur même des particules de C-S-H. Cette distinction est également
proposée dans le modèle de [TEN 00] qui considèrent une porosité inter-cristallite de 31% et 20%
respectivement pour les C-S-H LD et HD et une porosité intra-cristallite égale à 18% pour ces deux
C-S-H.

1.3.1.3. Porosité totale et distribution de taille des pores

La porosité θ (fraction de volume, %) est le volume des pores (Vp, m3) ramené au volume total ou
volume apparent (V, m3) du matériau :
Vp
  100
V
Le volume des pores contenus dans la matrice cimentaire est la somme du volume des pores de C-S-
H, du volume des pores capillaires, mais également celui des pores isolés ou des bulles d’air (rayon
allant de 50 µm à 1 mm) incorporées pendant le malaxage. Ces classes de pores ont été définies
différemment selon les auteurs (Figure I-8).

Figure I-8 : Définition des différentes classes de pores [RIC 04]


L’influence du rapport E/C et du degré d’hydratation sur le développement de la structure poreuse a
été largement étudiée pour les pâtes de ciment Portland. La figure I-9 montre l’augmentation de la
porosité totale à l’eau et au mercure avec le rapport E/C. Le volume poreux diminue et s’affine au
cours de l’hydratation comme montré précédemment sur la figure I-5.

26
Chapitre I : Etude bibliographique

Figure I-9 Evolution de la porosité à l’eau et la distribution de la taille des pores en fonction du
rapport E/C [LOV 01]

Plusieurs modèles dans la littérature sont proposés pour déterminer le volume d’eau libre dans la
porosité capillaire, le volume d’eau liée aux hydrates et la porosité totale d’une pâte de ciment
Portland à partir du rapport E/C et du degré d’hydratation. Les plus connus sont : le modèle de
Powers [POW 47], le modèle d’hydratation de Bentz et Garboczy CEMHYD3D [BEN 91], et le
modèle de Tennis et Jennings [TEN 00] qui sera modifié, dans notre cas d’étude, pour intégrer
l’ajout de la fumée de silice.

1.3.2. Porosité de l’ITZ dans le cas des mortiers et bétons


En plus de la porosité de la matrice cimentaire, un autre type de porosité apparaît lors de l’ajout de
granulats à une pâte de ciment : l’auréole de transition. Cette zone de transition formée à l’interface
granulat / pâte (Figure I-10(a)), appelée aussi ITZ « Interface Transition Zone », est souvent attribuée
à l’effet de paroi exercé localement par les surfaces des granulats sur les grains de ciment [MON 85]
[SCR 96]. En effet, lors du gâchage, les espaces entre les grains de ciment anhydre, à proximité de la
surface du granulat, deviennent plus grands, ce qui engendre une accumulation d’eau qui vient
combler ce vide et donc créer un gradient du rapport E/C local. Lors des réactions d’hydratation et
du durcissement de la pâte, l’eau disparaît et laisse une porosité plus élevée autour des granulats,
favorisant la nucléation et germination perpendiculairement à la paroi des plus gros hydrates comme
la portlandite et l’ettringite qui s’orientent de façon préférentielle [MON 85]. Par ailleurs, l’ITZ reste
pauvre en ions silicates et ferriques ce qui explique un rapport C/S élevé de 3 à 5,5 et un faible
pourcentage de C-S-H dans cette zone [BEN 92] [BEN 99].

L’ITZ est décrite comme une zone fragile au sein des mortiers et des bétons. Sur le plan mécanique,
cette couche est caractérisée par un film de faible cohésion et de moindre résistance mécanique que
la matrice, une zone de faiblesse qui va initier et favoriser la rupture du matériau face à toute action
mécanique [FARR 96] [MIN 95]. Sur le plan microstructural, l’auréole de transition est une zone
poreuse de quelques dizaines de micromètres d’épaisseur [OLL 95] [SCRI 04]. Depuis les travaux de
Scrivener en 1988 [SCR 88], la méthode d’analyse d’images est plus particulièrement utilisée pour
déterminer le profil de porosité au voisinage des granulats. De nombreuses études mettent en
évidence une porosité élevée à la surface du granulat qui décroit rapidement vers la matrice [DIA 01]
[ELS 05] [HEA 06] [WON 06] (Figure I-10(b)). Cependant, la porosité et l’épaisseur de l’ITZ
différent selon la nature des granulats (siliceux, calcaire, dolomite…) [DIA 01], la rugosité des
granulats (roulé, concassé) [WIN 94] et du rapport E/C utilisés. Une meilleure liaison pâte/granulat a

27
Chapitre I : Etude bibliographique

été constatée avec des granulats concassés en comparaison avec des granulats roulés [WIN 94]
[MOR 92]. Avec les granulats poreux (type calcaire), la formation d’hydrates de monocarbo-
aluminates de calcium, à l’interface pate/granulat, engendre une résistance élevée et une perméabilité
faible, malgré la porosité des granulats [DIA 01] [BAR 94]. Les granulats de type siliceux sont eux
plus couramment utilisés car très peu poreux et essentiellement inertes, cependant la couche d’ITZ
au voisinage de ces granulats y est plus visible.

(a) (b)
Figure I-10 : Mise en évidence de la porosité de l’ITZ dans un béton (E/C=0,4) [BEN 91] (a)
par imprégnation du béton par le métal de Wood ; (b) à partir du profil de porosité au
voisinage du granulat.
Au-delà d’un certain seuil de fraction volumique des granulats (et selon l’épaisseur de la couche
d’ITZ), ces zones de transition peuvent être interconnectées et modifier significativement les
propriétés de transfert des matériaux. C’est ce qui a été illustré par Winslow et al. dans [WIN 94] qui
mettent en évidence une discontinuité dans l’évolution des courbes de volume cumulés de mercure
entre 44,8 et 48,6% de fraction volumique de sable siliceux (figure I-11). Cet écart est expliqué par
l’apparition d’une nouvelle famille de grands pores attribuée à l’ITZ, qui percolent et deviennent
connectées à partir d’un certain seuil de fraction de sable. En dessous de cette fraction seuil, les
couches d’ITZ restent isolées et ne permettent donc pas de créer un chemin percolant.

Figure I-11 : Distribution de la taille des pores pour des mortiers CEM I à différentes teneurs
en sable siliceux (E/C = 0,4) : mise en évidence de la percolation d’ITZ [WIN 94]
Sur la base de ce résultat expérimental, les auteurs [WIN 94] ont réalisé des simulations afin de
déterminer l’épaisseur de l’ITZ ayant permis une percolation entre 44,8 et 48,6% de sable. Pour cela,

28
Chapitre I : Etude bibliographique

les grains de sable sont représentés par des sphères non diffusives, entourées par une couche
désignant l’ITZ, puis distribuées aléatoirement dans une pâte de ciment. La taille et la distribution
des grains de sable sont représentatives de celles utilisées expérimentalement. Pour chaque fraction
volumique de sable et chaque épaisseur d’ITZ (de 10 à 40 µm), la simulation permet de calculer la
fraction volumique des auréoles connectées (voir Figure I-12). En comparant les deux figures (I-11
et I-12) et en considérant une percolation complète de l’ITZ (proche de 100%) pour les mortiers à
48,6 et 55,4% de sable, et une connectivité partielle et plus faible pour les mortiers avec moins de
sable, l’épaisseur de l’ITZ peut être déterminée, et se situe entre 15 et 20 µm, dans ce cas d’étude
[WIN 94].

Figure I-12 : Fraction connectée de l’ITZ en fonction de l’épaisseur de l’auréole et du taux de


remplissage en granulat [WIN 94]

Cependant malgré la connectivité de l’ITZ, plusieurs études montrent que son effet reste limité
comparé à l’effet de la dilution et de la tortuosité générés par l’ajout des granulats qui restent
prédominants sur les propriétés de transport [DEL 97] [LOB 03] [HOR 95].
L’effet de l’ITZ est d’avantage réduit avec l’utilisation d’additions minérales : C’est ce qu’on va
décrire dans la section suivante.

29
Chapitre I : Etude bibliographique

1.4. Résumé
La structure poreuse de la pâte de ciment est essentiellement constituée de pores capillaires et de
pores d’hydrates.

La porosité capillaire (diamètre supérieur à 10-30 nm) est définie comme l’espace non comblé entre
les grains de ciment par les hydrates. Elle diminue avec l’avancement des réactions d’hydratation et
avec le rapport E/C (Figure I-5 et I-6). Dans l’étude des transferts des matériaux cimentaires,
l’interconnexion des pores capillaires est une caractéristique importante car elle modifie fortement la
dimension des chemins de pénétration des agents extérieurs. Pour une porosité capillaire inférieure à
18 % (Figure I-7), les pores capillaires ne communiquent plus entre eux et sont segmentés par une
porosité plus fine, celles des hydrates

La porosité des hydrates correspond à la porosité induite par la structure en « hérisson » des C-S-H.
Elle est en proportion plus faible par rapport à la porosité capillaire et est très fine (diamètre < 10-20
nm). La porosité des hydrates est une caractéristique intrinsèque aux C-S-H formés par l’hydratation
du ciment Portland (appelés C-S-H conventionnels) et ne dépend pratiquement pas du rapport E/C, ni
de l’état d’avancement de l’hydratation [POW 47] [BARO 81]. Elle est constante et égale à 28% du
volume des C-S-H [POW 47].

Avec l’ajout des granulats à une pâte de ciment, un autre type de porosité apparait à l’interface
granulat/pate (Figure I-10). Cette zone de transition (ITZ), expliquée souvent par l’effet de paroi
exercé par le granulat sur les grains de ciment, est caractérisée par une épaisseur de quelques
dizaines de micromètres (20 µm en moyenne) et par une porosité plus élevée (gradient E/C local),
favorisant la nucléation et la germination de plus gros hydrates comme la portlandite et l’ettringite
[31]. Au-delà d’un certain seuil de fraction volumique des granulats et selon l’épaisseur de la couche
d’ITZ, ces zones de transition peuvent être interconnectées et modifier significativement les
propriétés de transfert des matériaux (Figure I-11 et I-12). Cependant, pour plusieurs auteurs [DEL
97] [LOB 03] [HOR 95], l’effet de l’ITZ reste malgré tout limité sur les propriétés de transport
devant l’effet de la dilution et de la tortuosité induit par l’ajout de granulats.

2. Ciment avec ajout de fumée de silice


L’usage des additions minérales dans les matériaux cimentaires s’est beaucoup développé et leur
utilisation est aujourd’hui devenue courante. Cette pratique est encadrée par la norme béton NF EN
206-1 [EUR 04] et par les normes sur les différentes additions. Le rôle de ces constituants est de
substituer une partie du clinker/ciment, et ce pour trois raisons principales :

1. Réduction des coûts de production : les éléments d’additions sont généralement moins
couteux que le clinker ;
2. Amélioration performantielle : divers travaux montrent que ces éléments peuvent améliorer
les caractéristiques des matériaux cimentaires (porosité, durabilité, etc.);

30
Chapitre I : Etude bibliographique

3. Enjeu écologique : L’utilisation d’additions permet d’un côté de réduire l’émission de CO2
lors du processus de fabrication du clinker, et de l’autre de « recycler » des sous-produits
souvent dérivés de l’industrie.

Les additifs peuvent être choisis pour leurs propriétés hydrauliques ou pouzzolaniques qu’ils
développeront lors du processus d’hydratation. Parmi les additifs aux propriétés hydrauliques, on
trouve principalement les laitiers de hauts fourneaux. La catégorie des composés pouzzolaniques (qui
réagissent avec la portlandite pour former des C-S-H) regroupe essentiellement les pouzzolanes
naturelles, les Cendres Volantes (CV) et la Fumée de Silice (FS).

L’ajout de fumée de silice développe une microstructure différente de celle des pâtes, mortiers et
bétons fabriqués avec uniquement du ciment Portland. Une synthèse de ces effets est nécessaire
avant d’aborder les propriétés de confinement de ces matériaux.

2.1. Fumée de silice


2.1.1. Production et historique
La fumée de silice est un sous-produit de l’industrie du silicium et des alliages de ferrosilicium. Ces
produits sont fabriqués dans un four à arc, en réduisant le quartz par un apport approprié de carbone,
à une température d’environ 2 000 °C [TAY 97]. La fumée de silice est extraite en surface du four de
réduction par des ventilateurs principaux et résulte de la condensation du gaz SiO, intermédiaire
réactionnel du procédé de carboréduction. Elle est ensuite récupérée et filtrée dans un filtre à
manches, avant d’être densifiée pour en faciliter la manipulation.

La fumée de silice a été testée pour la première fois dans du béton en Norvège au début des années
1950. De bons résultats de résistance mécanique ont été obtenus dans le béton [BER 51] [BER 52] et
plus tard, il a été établi que ces bétons résistent mieux aux attaques sulfatiques externes [FIS 71].
Toutefois, à l’époque, la production industrielle était impossible car à ce moment aucune méthode
pour retenir de grandes quantités de particules ultrafines n’était disponible. Ainsi, ces résultats
satisfaisants ont vite été oubliés.

Et puis, dans le début des années 1970, le gouvernement norvégien a annoncé des exigences
environnementales strictes vis-à-vis de l’industrie de la fonte. Et c’est grâce à cet événement que de
grands progrès ont été réalisés dans la technologie de filtrage et en quelques années seulement, des
quantités importantes de fumée de silice ont été disponibles. Afin d’utiliser une aussi grande quantité
de fumée de silice, des efforts considérables de recherche ont été déployés par les principales
entreprises de fonderie norvégiennes. Ces gros travaux, réalisés à l’époque à Trondheim (3ème
grande ville du Norvège), ont formé la base de la technologie de la fumée de silice et sont à l’origine
de l’utilisation importante et croissante de la fumée de silice dans le monde entier.

2.1.2. Caractéristiques de la fumée de silice non-densifiée


La fumée de silice est initialement produite sous forme de poudre grise, non-densifiée et
principalement composée de particules ultrafines. Ces particules contiennent au moins 85 à 98% de
silice SiO2 amorphe et se présentent sous la forme de microsphères vitreuses dont le diamètre moyen
se situe entre 0,1 et 0,2 µm (figure I-13). Leur surface spécifique, mesurée par la technique B.E.T

31
Chapitre I : Etude bibliographique

[BRU 38] varie entre 13 000 et 30 000 m2/kg [MAL 87], et leur densité se situe entre 2,00 et 2,25
[REG 83].

Figure I-13: Particules individuelles de FS vues au Microscope Electronique à Transmission


[HEW 98]
Grâce à sa très grande finesse, sa forte teneur en silice et sa structure essentiellement vitreuse, la
fumée de silice constitue un produit hautement pouzzolanique [AIN 84], fréquemment utilisé pour la
fabrication des bétons à ultra hautes performances.

2.1.3. Mécanisme et mode d’action de la FS


La FS dans un matériau cimentaire agit selon un mode d’action double : physique (effet filler ou
granulaire) et chimique (effet pouzzolanique).

2.1.3.1. Effet granulaire


La relation entre la granularité et la porosité d’un mélange de grains est une question assez ancienne.
Caquot en 1937 [CAQ 37] a établi de façon empirique une loi exprimant la porosité minimale pmin
d’un assemblage de grains, comme une fonction de la dimension minimale, d, et maximale, D, des
grains qui le constituent :

𝑝𝑚𝑖𝑛 = 𝑝0 √𝑑⁄𝐷
5
(Eq. I-5)
Avec p0 un coefficient de proportionnalité qui dépend de la maniabilité du béton.
Cette approche montre que pour diminuer la porosité minimale, il faut augmenter l’étendue
granulaire [d-D]. En ajoutant de la FS dans un matériau cimentaire, ses particules fines (d très faible
donc pmin faible), lisses et sphériques pénètrent et s’empilent dans les espaces interstitiels restés vides
entre les grains de ciment de diamètre 100 fois plus grand (30 à 100 µm). En effet, pour un dosage de
10% de fumée de silice par masse de ciment, environ 50 000 à 100 000 microsphères sont ajoutés
pour chaque grain de ciment (Figure I-14). Dans ce cas, le mélange sera suffisamment « imprégné »
de fines particules et cette addition entrainera une augmentation de la surface spécifique interne d’à
peu près un ordre de grandeur.

32
Chapitre I : Etude bibliographique

Figure I-14 : Image d’un béton frais en présence de FS [HEW 98]


Cet ajout permet aussi d’améliorer les propriétés rhéologiques du mélange frais (matériau plus
fluide, pratiquement pas de ségrégation, ni de ressuage) et permet ensuite l’obtention d’une pâte plus
dense et de très forte compacité.

2.1.3.2. Effet pouzzolanique


Au premier jour de la prise, la fumée de silice est considérée comme inerte et joue plutôt un rôle
physique [DET 89]. Mais au fur et à mesure de l’avancement d’hydratation, après 1 à 2 jours du
commencement des réactions d’hydratation du ciment [LUP 93] [ZHA 91] [VER 92] [TOR 92], la
fumée de silice réagit avec l’hydroxyde de calcium pour produire des C-S-H selon la réaction
pouzzolanique suivante :

n’ CH + SiO2 + (3,9 – n’) H Cn’SH3,9 (Eq. I-6)

Parmi tous les produits d'hydratation, la CH est considérée comme étant le seul composé qui peut
être déterminé avec précision et par conséquent, sa détermination représente l'un des moyens pour
suivre le développement du processus d'hydratation du ciment Portland et de l’avancement de la
réactivité pouzzolanique. La figure I-15 [YOG 91] montre la teneur en portlandite en fonction du
pourcentage de FS ajouté au fur et à mesure de l’avancement de l’hydratation. La quantité de
Ca(OH)2 mesurée est le résultat de l’hydratation du ciment Portland qui génère de la portlandite et de
la réaction pouzzolanique qui en consomme.

33
Chapitre I : Etude bibliographique

Figure I-15 : Quantité de Ca(OH)2 Figure I-16 : Influence de la FS


dans les pâtes à différentes teneurs en sur la vitesse d’hydratation des
FS (E/Liant = 0.28) [YOG 91] mortiers (E/L= 0,32 - 4% SP)
[OLL 88]
On remarque que la quantité de portlandite diminue avec l’ajout de FS dès les premiers jours de
l’hydratation. Cette diminution, liée à la consommation de la portlandite par la silice, est plus
importante pour des dosages à 5 voire à 10% de FS, tandis que cette consommation « freine » et
devient plus faible pour des dosages supérieurs à 10% de FS.

Une légère différence de la teneur de portlandite observée entre 3 et 180 jours d’hydratation (entre
28 et 180 jours pour des teneurs en FS > 10%) signifie que toute la portlandite produite par
l’hydratation du ciment pendant ce temps a été consommée par la FS. Cependant la plus grande
quantité de CH se consomme dès les premiers jours ce qui prouve la grande réactivité de la FS au
jeune âge. La fumée de silice est parmi tous les ajouts (laitiers de hauts fourneau, cendres volantes),
le matériau le plus réactif grâce à sa surface spécifique très élevée et sa teneur importante en silice
réactive [REG 83] [GLA 84]. Grâce à cette réaction pouzzolanique, la quantité de C-S-H augmente
dans le matériau, ce qui permet à la fois d’augmenter la résistance et de réduire la perméabilité en
densifiant la matrice cimentaire.

En plus des rôles physique et chimique, l’ajout de FS semble stimuler et accélérer l'hydratation
initiale des silicates de calcium [AND 86] [SEL 82] pendant les premières heures qui suivent le
gâchage (Figure I-16) et, par voie de conséquence, accroit la quantité de portlandite formée. Mais en
même temps, par réaction pouzzolanique, la fumée de silice la consomme. Ceci est sans doute dû à
une précipitation favorisée de produits d’hydratation du ciment sur les particules fines de FS qui
constitueraient des sites de nucléation pour la cristallisation [MEH 81] [MOR 92] [LAR 90], en
particulier pour les cristaux de Ca(OH)2, ce qui réduit la taille moyenne de ces cristaux et les rend
plus finement distribués dans la microstructure [DET 89].

Aux stades ultérieurs, il semble que l’hydratation soit plutôt retardée en présence de FS, dans des
conditions normales d’alcalinité.

34
Chapitre I : Etude bibliographique

2.2. L’influence de l’ajout de fumée de silice sur la microstructure


La combinaison entre les effets physiques et chimiques fait que la microstructure d’un béton avec
fumée de silice sera plus homogène et plus dense.

2.2.1. Effet sur la porosité de la pâte


L’ajout de FS dans une pâte de ciment développe une structure poreuse plus fine que celle des pâtes
de ciment ordinaires [DUR 95] [HOO 92]. La porosité volumique totale, n’a pas nécessairement
diminué, mais les grands pores semblent subdivisés en de plus petits pores [YOG 87]. La figure I-17
[FEL 85] juxtapose les distributions porosimétriques au cours de l’hydratation de trois pâtes de
même rapport E/Liant de 0,25 (liant = ciment + FS) avec 0, 10 et 30% de FS. Au cours du temps, la
porosité diminue pour les trois pâtes traduisant le développement des hydrates. La porosité ne varie
pas beaucoup pour la pâte avec 10% de FS entre 28 et 180 jours suggérant que la réactivité de la FS
au-delà de 28 jours est plus faible, et ce qui rejoint ce qui a été dit précédemment dans la section (§I-
A-2.1.3.) sur la haute réactivité de la FS. Le diamètre seuil ou le rayon critique des pores capillaires
(défini précédemment dans§I-A-1.3.1.-pores capillaires et correspondant au point à partir duquel le
volume cumulé de mercure intrus augmente brusquement), quant à lui, diminue avec l'ajout de la
fumée de silice et dès les premiers jours d’hydratation. Ce diamètre seuil plus faible est dû aux
particules de FS présentes dans la porosité qui, réagissent, subdivisent les pores et comblent ainsi une
partie de la porosité par des produits de réaction plus dense [IGA 05]. Khan [KHA 03] montre aussi
que la porosité est réduite avec l’ajout de FS, mais il considère que cette réduction devient marginale
et moins importante à partir de 10% de substitution du ciment par de la FS. Il suggère par la suite que
l’optimum de performances (faible porosité et perméabilité) est atteint avec un pourcentage de
substitution du ciment entre 8 et 12% de FS.

35
Chapitre I : Etude bibliographique

Figure I-17 : Distribution


de la taille des pores de
pâtes (E/Liant = 0.25) avec
3 teneurs en FS [FEL 85]
(a) 0% de FS
(b) 10% de FS
(c) 30% de FS.

En présence de FS, la porosité des hydrates est également plus densifiée. Les C-S-H pouzzolaniques
formés à partir de la réaction de la fumée de silice (qu’on appellera par la suite C-S-H (P)) possèdent
un rapport molaire C/S et une quantité d’eau liée plus faibles [TAY 97] [LUP 93] [SEL 82] et une
structure plus dense [MOR 92] que les C-S-H conventionnels produits de l’hydratation du ciment
Portland. Basé sur une série de mesures d’adsorption/désorption sur des pâtes de ciment sans et avec
10% de FS, Baroghel-Bouny [BAR 98] a montré que la porosité des C-S-H pouzzolaniques est plus
faible (de 19%) comparé à la porosité des C-S-H conventionnels (de 28%) estimé par [8]. D’autres
études [LUP 93] [MUL 15] [ROSS 15] montrent que le rapport C/S dans les matériaux avec ajout de
FS, varie de 0,9 à 1,3, selon le degré d’hydratation et la teneur en FS, tandis qu’en absence de FS, ce
rapport est autour de 1,6-1,7.

Le seuil de percolation de ces deux phases (pores capillaires et C-S-H) reste lui inchangé et ne varie
pas beaucoup avec l’ajout de FS comme le montre les résultats de simulation numériques de Bentz
(Figure I-18) [BEN 00].

36
Chapitre I : Etude bibliographique

Figure I-18 : Percolation de la phase capillaire (à gauche) et des C-S-H (à droite) en présence
de FS

2.2.2. Effet sur la porosité de l’ITZ


La fumée de silice est un adjuvant très efficace pour l’amélioration des propriétés du béton et en
particulier l’amélioration de la qualité de l’auréole de transition, connue comme étant une zone de
faiblesse dans la matrice du béton [RIC 92] [ODL 86] [NEU 63]. La FS augmente la force de liaison
et l’énergie de rupture entre le granulat et la pâte [MIT 94] [SID 11] en rendant cette zone plus dense
[AIT 98], et en améliorant significativement sa structure et sa composition comme le montrent les
études de [GOL 89] [MON 86]. L’évolution de la structure au niveau de l’ITZ est schématisée dans
la figure I-19. Il est intéressant de noter la diminution de la quantité de Ca(OH) 2 et l’amélioration
générale entre le liant et les agrégats.

En effet, comme on l’a vu dans le paragraphe précèdent (§I-A-1.3.2.), la portlandite (amorphe ou


cristallisée) se trouve en forte concentration sous forme de couches dans l’auréole de transition, ou
en bordure des bulles d’air [BAR 94]. La FS va donc réagir autour des granulats pour former des C-
S-H et combler ainsi la porosité de l’ITZ [XUA 09] [XIE 92]. Rossignolo dans [ROS 09] a montré
que l'utilisation de 10% de fumée de silice a provoqué une réduction de 36% de l'épaisseur ITZ, par
rapport au béton de référence. Les travaux de Monteiro et Mehta [MONT 86] [MON 88] décrivent
une réduction de l'épaisseur d’ITZ de 50 µm, dans les bétons ordinaires, à des valeurs inférieures à
10 µm, dans les bétons avec FS.
D’autres études comme [SCR 88] (Figure I-20) montrent qu’avec l’ajout de FS, la porosité de l’ITZ
diminue fortement : on n’observe presque plus d’auréole de transition (ou son épaisseur est inférieur
à 5μm), alors que dans un béton CEM I, cette auréole de transition a une épaisseur de 25μm. Avec
une aussi faible épaisseur d’ITZ, les auréoles de transition resteront isolées et ne commenceront à
être connectés que dans des mortiers avec des teneurs volumiques en sable très importantes (> 50%)
[OLL 95] (Voir la Figure I-12).

La densification de la structure porale au niveau de la pâte et de l’interface granulat/pâte en


présence de FS se traduit par une amélioration de la résistance mécanique [BENTU 87] [MAZ 04]
[WIL 95] [WON 05] [LOL 81] et une diminution des propriétés de transports (§I-B-2.1.).

37
Chapitre I : Etude bibliographique

Figure I-19 : Effet de la FS sur la structure de Figure I-20 : Evolution de la


l’interface ITZ [BENT 87] : (a) et (b) étant porosité au voisinage des granulats
respectivement le béton frais et durci sans FS mise en évidence de l’effet de la FS
et (c) et (d) respectivement le béton frais et sur l’ITZ [SCR 88]
durci en présence de FS.

2.2. Résumé
Grâce à sa grande finesse, sa forte teneur en silice et sa structure essentiellement vitreuse, la fumée
de silice non-densifiée constitue un produit hautement pouzzolanique. Elle réagit avec la portlandite
pour produire des C-S-H appelés pouzzolaniques (C-S-H(P)), moins poreux [BAR 98], plus denses
[MOR 92] et plus riche en silice (rapport C/S plus faible) [TAY 97] [LUP 93] [SEL 82] que les C-S-
H conventionnels formés à partir de l'hydratation du ciment Portland (réf. §I-A-1.2.2.). Par
conséquent, la quantité d'hydrates augmente, ce qui augmente à la fois la résistance et réduit la
perméabilité en densifiant la matrice cimentaire. Outre cet effet pouzzolanique, la fumée de silice
peut également jouer le rôle de filler grâce à la finesse de ses particules lisses qui glissent et
pénètrent dans la porosité du matériau.

L’ajout de FS dans une pâte de ciment engendre une structure poreuse plus fine que celle des pâtes
avec ciment Portland. La porosité volumique totale, elle, n’a pas nécessairement diminué, mais les
grands pores semblent subdivisés en de plus petits pores [YOG 87]. Le diamètre seuil des pores
capillaires (correspondant au point à partir duquel le volume cumulé de mercure augmente
brusquement), diminue du fait du tapissage des parois capillaires par les particules de FS, et de la
subdivision de la porosité par des produits d’hydratation plus denses (§I-A-2.2.1).

Au niveau de l’ITZ, la FS augmente la force de liaison et l’énergie de rupture entre le granulat et la


pâte [MIT 94] [SID 11] en rendant cette zone plus dense [AIT 98], et en améliorant significativement
sa structure et sa composition [GOL 89] [MON 86]. Cet ajout est considéré comme très efficace pour
la réduction de l’épaisseur de l’ITZ de plusieurs dizaines de µm dans un béton ordinaire à quelques
µm dans un béton avec FS (§I-A-2.2.2). Avec une aussi faible épaisseur d’ITZ, les auréoles de
transition resteront isolées et ne peuvent percoler que pour des mortiers à fortes teneurs en sable (>
50%).

Nous verrons dans le Chapitre II que la fumée de silice est très rarement utilisée sous sa forme non-
densifiée à cause de sa manutention difficile, et qu’elle est plutôt conditionnée sous forme densifiée
dans la plupart du temps ou sous forme de suspension. Ces conditionnements engendrent souvent la
formation d’agglomérats, réduisant ainsi l’efficacité de la FS mal dispersée dans le matériau
cimentaire.

38
Chapitre I : Etude bibliographique

Partie B : Propriétés de transport dans les matériaux


poreux
Les transferts de matière dans des milieux poreux tels que les matériaux cimentaires peuvent
s’effectuer selon deux processus généraux, différenciés par la nature de leur moteur :

 Le transfert d’un fluide sous l’effet d’un gradient de pression appelé convection (ou
perméation) et mis en équation par la loi de Darcy. Deux principales grandeurs sont
associées à ce mode de transfert: la perméabilité au gaz et la perméabilité à l’eau.
 Le transport d’éléments sous l’effet d’un gradient de concentration appelé diffusion et mis en
équations par les lois de Fick. Des espèces telles des ions (Cl-) ou des molécules (eau tritiée
HTO, O2, CO2) vont se déplacer en raison de mouvements aléatoire de la zone la plus
concentrée vers la moins concentrée. Le paramètre associé à la diffusion est le coefficient de
diffusion de l’espèce diffusante.
La perméabilité et le coefficient de diffusion sont utilisés en génie civil comme indicateurs de
durabilité des matériaux cimentaires [ASS 04]. La pénétration des gaz agressifs comme le CO2 ou
l’oxygène O2 ou des ions comme le chlorure Cl-, en milieu saturé ou partiellement saturé, sont
responsables de la corrosion des armatures dans les bétons armés.

Les transferts de matière au sein des matériaux cimentaires résultent essentiellement de la diffusion
de radionucléides en phase liquide [RIC 92]. La diffusion intervient dans tous les cas : de manière
générale, c’est le phénomène prépondérant dans la dégradation des matériaux à base de liants
hydrauliques. Selon l’état des connaissances actuelles, il apparaît que la diffusion est largement
prépondérante devant la convection, au moins en milieu saturé, ce qui est le cas dans l’étude du
comportement à long terme de ces matériaux dédiés au stockage.
La diffusion au sein des matériaux complétement saturés correspond également au cas le plus
défavorable au sens de la rétention des radionucléides. La mesure du coefficient de diffusion en
conditions saturées permet d’accéder à une valeur enveloppe du coefficient de diffusion qui permet
de réaliser des études de sûreté robuste sur le stockage des déchets radioactifs.

1. Diffusion liquide dans un milieu poreux - Généralités

Sous l’effet de leur agitation aléatoire, les ions et les molécules d’un fluide sont animés d’un
mouvement Brownien (marche au hasard). Ce phénomène fut observé la première fois par R. Brown
en 1827 -qui remarqua le mouvement désordonné d’un grain de pollen dans l’eau- et fut finalement
expliqué par A. Einstein en 1905.

Dans le cas où un gradient de concentration d’espèces (ions ou molécules) existe entre deux zones, le
mouvement Brownien des espèces va générer un effet macroscopique, la diffusion, qui consiste en
leur déplacement moyen vers la zone de concentration basse. La diffusivité d’un matériau définie
quant à elle, l’aptitude de ce dernier à résister à la traversée des espèces sous gradient de
concentration.

39
Chapitre I : Etude bibliographique

Le phénomène de diffusion a été mis en équation par les lois de Fick établies empiriquement en 1855
et confirmées en 1905 par A. Einstein. Ces lois se basent sur l’hypothèse que le flux J de matière
diffusante à travers une surface, est proportionnel au gradient de concentration selon un axe normal à
cette surface : c’est la première loi de Fick. Cette loi est valable dans le cas d’une diffusion pure,
c’est-à-dire dans une solution suffisamment diluée et sans aucun phénomène d’électrodiffusion. Le
phénomène d’électrodiffusion est dû aux interactions ions-ions et ions-solvant qui peuvent intervenir
si la diffusion se produit dans une solution concentrée, et est pris en compte dans les équations de
Nernst-Planck [TRU 00] [SNY 01] [OLL 01].

Dans le cas de diffusion pure des espèces en solution suffisamment diluée (diffusion des
radionucléides dans le cadre de notre étude ou diffusion des ions en milieu peu concentré), la
première équation de Fick s’exprime dans le cas du transport unidirectionnel par :
C i
J i  D i (Eq. I-7)
x
Avec :
Ji : Le flux de diffusion de l’espèce i dans la direction x.
Di : Le coefficient de diffusion de l’espèce i dans la direction x. Le coefficient de diffusion est
caractéristique d’espèce i, du milieu et de la température dans lesquelles elle diffuse [m 2/s].
Ci : la concentration de l’espèce diffusante i [mol /m3 de solution].

Dans un milieu homogène poreux et saturé, la deuxième loi de Fick donne l’équation de
conservation dont la résolution permet de calculer la concentration de l’espèce i, en tout point x et à
chaque instant t : Ci (x, t).
C m   C i
  ( J i )  ( Dei ) (Eq. I-8)
t x x x
Avec Cm : la concentration de l’espèce diffusante par unité de volume de matériau [mol /m3 de
matériau] et Dei : le coefficient de diffusion effectif de l’espèce i dans le matériau poreux.

La résolution de l’équation de conservation, dépend du milieu (éventuellement de sa porosité, de son


degré de saturation-ici égal à 1) et de la nature de l’espèce diffusante et en particulier de son
interaction ou pas avec le milieu poreux.

1.1. Diffusion sans interaction dans le matériau cimentaire

La diffusion d’espèces agressives au sein des matériaux cimentaires dépend de la porosité, en


particulier de la porosité ouverte interconnectée qui sert de chemin pour la pénétration d’agents
extérieurs.
Dans le cas où l’espèce n’interagit pas avec la phase solide du matériau, c’est à dire qu’elle est inerte
vis-à-vis de la matrice cimentaire, les éléments diffusants seront tous contenus dans la phase poreuse
(solution interstitielle) du matériau. La concentration Cm en espèce i dans le matériau peut s’exprimer
en fonction de la concentration totale Ci en espèce i dans la solution et la porosité ouverte θ du
matériau ayant servi au transport de l’espèce :
Cm    Ci (Eq. I-9)
La deuxième loi de Fick appliquée au matériau poreux non réactif devient [SNY 01] :

40
Chapitre I : Etude bibliographique

C i Dei  2 C i i  Ci
2
  D (Eq. I-10)
t  2x 2x
a

Où Dai est le coefficient de diffusion apparent de l’espèce i dans le matériau [m2/s].


L’intégration de l’équation précédente permet de déterminer le profil de pénétration C i (x, t) de
l’espèce considérée dans le matériau. Dans le cas d’un milieu semi-infini, la concentration Ci(x,t)
s’exprime en fonction de la variable unique 𝑥⁄ . La progression de la pénétration d’une espèce par
√𝑡
diffusion se distingue par une cinétique parabolique (une loi caractéristique en √𝑡).

1.2. Diffusion avec interaction dans le matériau cimentaire


Les espèces considérées dans le domaine de la durabilité des bétons, interagissent souvent avec le
matériau solide. De telles interactions avec la matrice cimentaire, retardent la pénétration des espèces
dans le béton et peuvent être dues à plusieurs processus, plus ou moins réversibles, qui sont de
natures différentes et indépendantes les unes des autres :
- l'adsorption physique, qui met en jeu les forces de Van der Waals,
- l'interaction électrostatique, qui met en jeu des interactions entre les espèces solutées chargées et un
sorbant portant une charge nette à sa surface,
- la chimisorption, qui peut être considérée comme une interaction entre le soluté et les sites de
complexation à la surface du solide,
- la substitution, échange d'espèces identiques ou similaires en phase liquide (par exemple échange
isotopique - c'est le cas de l'eau tritiée, qui peut s'échanger avec l'eau piégée en phase solide),
- la précipitation ou la co-précipitation des produits peu solubles, qui peuvent diminuer la quantité de
matière présente dans la phase liquide.

En conséquence, les lois précédentes doivent être modifiées [SNY 01] [OLL 01]. L’équation (I-8)
peut être réécrite en considérant que la concentration totale en espèce diffusante Cm est la somme de
deux termes Cml et Cmf, respectivement les concentrations de l’espèce diffusante à l’état « libre »
dans la phase liquide [mol/ m3 de solution] et à l’état « fixé » par le solide [mol/m3 de matériau]:
Cm= Cml + Cmf
Cmf peut être exprimée en fonction de Cf qui est la concentration en espèces fixés rapportée à la
masse de solide [mol/ Kg de solide], de la porosité θ et de la masse volumique sèche du solide ρs (Eq.
I-11)
Cmf  (1   ).s .C f (Eq. I-11)
En considérant Cml la concentration de l’espèce libre comme dans le cas sans interaction
Cml = θ.Ci ; l’équation de Fick (I-8) s’écrit alors :
C i Dei  2 Ci Dei  2 C i  2 Ci
  D i
(Eq. I-12)
t C f  2 x m 2x
a
2x
  (1   )  s
C i
Avec :
C f
Kd  désigne la capacité de fixation de l’espèce diffusante dans la phase solide du matériau
Ci
[m3/Kg]. Si on suppose que l’échange instantané est entraîné par une isotherme d’interaction linéaire
(Cf varie linéairement avec Ci), Kd est alors une constante nommée la constante d’interaction. Les

41
Chapitre I : Etude bibliographique

isothermes non-linéaires peuvent être de type Freundlich [TAN 96], Langmuir ou Dubinin. D'autres
formes plus complexes peuvent prendre en compte des sorptions non réversibles et même des
phénomènes d'hystérésis.

Dai : le coefficient de diffusion apparent de l’espèce considérée i [m2/s]. Ce coefficient dépend du


coefficient de diffusion effectif, de la porosité ouverte θ mais aussi des interactions de l’élément i.

Dei : le coefficient de diffusion effectif, dépend uniquement de l’espèce diffusante i et de la structure


poreuse du matériau [m2/s].

αm : la porosité modifiée par les interactions de l’espèce diffusante avec le milieu solide [sans unité] :
αm = θ+ (1-θ).ρs.Kd (Eq. I-13)

Plus la capacité de fixation Kd est grande (αm grand par conséquent) et plus la diffusion devient
« freinée » et retardée par les interactions de l’élément diffusant dans le milieu poreux. Le Kd
dépend donc fortement de la nature de l’élément diffusant : ion ou molécule. Dans le domaine du
génie civil, la diffusion des ions chlorures est d’un grand intérêt pour la durabilité des matériaux
cimentaires surtout que cette diffusion est l’une des causes principales de la dégradation par la
corrosion des armatures dans le béton armé. Dans le domaine de la gestion des déchets radioactifs,
l’étude de la diffusivité des radionucléides au sein des matériaux cimentaires est un enjeu primordial
pour assurer la sureté de ce mode de stockage. Par la suite nous nous intéresserons aux interactions
de ces deux éléments diffusants à savoir les ions chlorures et les radionucléides.

On tient à rappeler que les constantes d’interactions Kd d’un élément (en l’occurrence ici des ions
chlorures ou des radionucléides) sont soit mesurées indirectement à partir des essais de diffusion
(mesure de la porosité modifiée αm), soit directement à partir des essais statiques « en batch » réalisés
sur les pâtes de ciment. Cet essai consiste d’abord à broyer une masse m de pâte de ciment et de la
disperser dans un volume V de solution dopée de l’élément i à une concentration initiale C0. Après
agitation, la concentration à l’équilibre Céq de l’élément i présent dans la solution est mesurée par
chromatographie ionique (cas des chlorures) et par scintillation liquide (cas des radionucléides) [RIC
04]. Le coefficient de distribution Kd, qui représente le rapport entre la concentration de l’élément
dans la phase solide (rapporté à la masse de solide) et sa concentration en solution, est calculé à
partir de l’équation suivante (I-14):

C 0  C éq V
Kd  . (Eq. I-14)
C éq m

1.2.1. Cas des ions chlorures


L’isotherme d’interactions de l’élément chlorure avec la matrice cimentaire représente la courbe
Cf = f(Ci). Cette isotherme est déterminée en mesurant les quantités de chlorures consommées par le
béton dans des solutions à différentes concentrations [AFGC 07]. La figure I-21 montre que cette
isotherme n’est pas linéaire et, par conséquent, le coefficient de diffusion apparent Da dépend de la
concentration.

42
Chapitre I : Etude bibliographique

Figure I-21 : isotherme d’interactions des chlorures [TAN 93]


Plus les concentrations en chlorure sont faibles, plus la rétention de ces ions par la matrice cimentaire
est élevée (Kd étant la pente de la courbe à faible concentrations). Dans ce cas, les coefficients de
diffusion (apparents) mesurés seront plus faibles à cause du retard induit par les importantes
interactions [LUPI 93] [COL 72].

L’interaction des ions chlorures avec le matériau solide peut prendre plusieurs formes (§I-B-1.2).
Cependant, pour plusieurs auteurs, la quantité de chlorures fixés par la matrice cimentaire réagit avec
le tricalcium aluminate C3A non hydraté pour produire des chloroaluminate de calcium (pic en ATG
à 350°C) [HOR 95] [PAG 81]. D’autres considèrent que la présence des ions chlorures entraine des
modifications au niveau de la microstructure et affine légèrement la taille des pores (par formation de
nouveaux hydrates) ce qui permet d’expliquer une probable diminution du coefficient de diffusion
[SAN 08].

En résumé, le coefficient de diffusion Da mesuré pour les ions chlorures dépend de la fixation de ces
ions et de leur interaction qui varie avec la concentration. Nous verrons dans le paragraphe suivant
l’avantage de la diffusion de certains radionucléides (en particulier celui de l’eau tritiée) qui permet
de mesurer un coefficient de diffusion effectif intrinsèque au matériau et indépendant de la
concentration appliquée.

1.2.2. Cas des radionucléides et choix du HTO


Les différents phénomènes de rétention des radionucléides dans les matrices cimentaires (échange
isotopique, complexation de surface, précipitation /co-précipitation – cf. § I-B-1.2) engendrent un
retard à la diffusion d’autant plus important que le « K d » est fort. Les coefficients de diffusion
mesurés sont alors d‘autant plus faibles (tableau I-5).

43
Chapitre I : Etude bibliographique

Tableau I-5 : Synthèse des ordres de grandeurs des coefficients de diffusion et des K d dans une
pâte CEM I (E/C= 0,4) pour divers radionucléides [RIC 04]

Radionucléide Coefficient de diffusion Kd (cm3/g)


apparent (m2/s)
Eau tritiée HTO 10-13 - 10-12 0,22±0,06
Césium Cs 10-13 0,18±0,07
Anions Technicium (Tc) 10-14-10-13 1,0 ± 0,13
Chlorure (Cl-) 10-15 0,9 ± 0,1
Iode (I-) 10-15 0,79 ± 0,12
Produits de fission Co 10-17 1à5
cationiques Ni 10-19 50 à 250
Mo, Pd < 10-19 – 10-18 Mo 1 à 2 ; Pd 150 à 200
Zr, Nb 10-22 - 10-21 Zr 2 à 5.104
Actinides Pu 10-21- 10-22 6 à 9.103
Am, Np, U < 10-19-10-18 ---

Mis à part pour le tritium et le césium, ces valeurs de coefficient de diffusion résultent d’essais de
lixiviation. En effet, compte tenu des durées des essais, seuls les radionucléides qui traversent
rapidement les matériaux, à savoir principalement l'eau tritiée (pour tous types de ciments avec
ajouts) et le césium (pour le CEM I seulement), sont testés au moyen des cellules de diffusion (§II-
2.1.).

Le césium et l’eau tritiée interagissent faiblement avec la matrice cimentaire. Leurs capacités de
rétentions sont respectivement assimilables à un échange isotopique avec l’hydrogène, pour le
tritium, et à une complexation de surface, pour le césium, et peuvent être décrites par une sorption
linéaire résumé par une constante d’interaction Kd. Cependant, le coefficient de diffusion de l’eau
tritiée (HTO) est plus élevé que celui du césium (Cs) (jusqu’à deux fois plus grand aux forts E/C et
nettement plus important à faibles E/C) (Figure I-22).

Nous avons pu constater que la majorité des données de diffusion portent sur les ions chlorures, vu
leur grande importance dans le domaine de durabilité des bétons armés. Cependant les techniques de
mesure utilisées pour évaluer la résistance des matériaux à la pénétration de ces ions agressifs sont
très nombreuses : conductivité électriques, essais d’immersion, essais de migration accélérée sous
champ électrique… et donnent des coefficients de diffusion très différents et difficilement
comparables. Ajoutant à cela le fait que les ions chlorures interagissent avec la matrice cimentaire
(§I-B-1.2.1.), il en résulte une hypothèse supplémentaire sur la capacité de fixation des Cl- (isotherme
non-linéaire d’interaction de type Freundlich [TAN 96], Langmuir, Dubinin ou autre). En
contrepartie, l’eau tritiée présente l’avantage d’être un traceur « témoin », qui interagit faiblement
avec la matrice cimentaire et dont la capacité d’interaction est décrite par un terme constant Kd

44
Chapitre I : Etude bibliographique

Figure I-22 : Comparaison des coefficients de diffusion effectifs relatifs au césium et à l’eau
tritiée obtenus pour des pâtes pures à base de CEM I à différents rapports E/C [RIC 04].
L’eau tritiée (HTO) est donc considérée comme le radionucléide le plus rapide à diffuser au sein
des matrices cimentaires, ce qui signifie que c’est celui qui pénètre et « sort en premier » à travers le
matériau cimentaire. Il est également considéré comme un traceur « témoin » grâce à sa faible
interaction avec la phase solide du matériau [RIC 92]. L’étude du comportement diffusif de ce
radionucléide peut servir comme référence pour identifier l’influence de différents paramètres
intrinsèques (rapport E/C, l’ajout de sable ou d’additifs…) sur le transport diffusif au sein des
matériaux cimentaires.

C’est pour toutes ces raisons que l’ANDRA (l’Agence Nationale pour la gestion des Déchets
Radioactives) exige la connaissance du coefficient de diffusion effectif HTO DeHTO de tout colis de
déchets nucléaires avant son acceptation.

1.2.3. Prise de compte de la décroissance radioactive


L’activité A d’un radionucléide désigne le nombre de désintégrations qui se produisent par unité de
temps dans une quantité donnée de ce radionucléide. Elle représente en d’autres termes la vitesse de
désintégration d’un radionucléide, et s’exprime en Becquerel (Bq) avec (1Bq = 1 désintégration par
seconde).

L’activité d’un élément radioactif diminue avec le temps du fait de la décroissance radioactive. Cette
 t
activité décroit de façon exponentielle selon la loi : A(t )  A0 e (Eq. I-15)

Avec :

A(t) : l’activité du radionucléide à l’instant t

A0 : l’activité du radionucléide à l’instant initial.

ln( 2)
 : T étant la période (en s) du radionucléide, et le temps nécessaire pour que la moitié des
T
atomes radioactifs présents initialement se soient désintégrés (et pour que l’activité soit divisée par
2).

45
Chapitre I : Etude bibliographique

Le tritium est un émetteur β ayant une énergie moyenne de 5,68 ± 0,01 keV, une activité spécifique
de 3,58 × 1014 Bq/g, et une période de 12,312 ± 0,025 ans. L’eau tritiée (HTO) étant une des formes
physiques du tritium.

La prise en compte de la décroissance radioactive dans les équations de diffusion s'effectue en


C i C i
remplaçant le terme dans l’équation (I-12) par le terme  C i . L’équation (I-12) devient
t t
alors :

C i Dei  2 C i
  C i (Eq. I-16)
t  2x

1.3. Coefficient d’autodiffusion D0 et Facteur de forme F


Lorsqu’il n’existe aucune contrainte dans le déplacement de l’élément diffusant, on définit son
coefficient de diffusion dans un milieu infini de solution porale Dsol. . C’est ce qu’on appelle aussi le
coefficient d’autodiffusion de l’élément dans la solution porale. Dans le cas d’une diffusion pure
(domaine de validité des lois de Fick), c.à.d. dans une solution suffisamment diluée, le coefficient
d’autodiffusion dans la solution interstitielle a souvent été remplacé par le coefficient de diffusion
moléculaire dans de l’eau pure D0 [ATK 84] [KYI 94] [TAF 93]. La valeur de ce dernier peut être
calculée à partir de la loi Stockes-Einstein donnée par certains auteurs [HORV 85] [TYR 84]:
RT
D0i  (Eq. I-17)
6. ..a i .N

Avec : R : constante des gaz parfaits (8,314 J⋅mol-1⋅K-1)


T : température absolue (K)
η : viscosité de l’eau (m)
N : nombre d’Avogadro (6,02.1023 mol−1)
ai : rayon des particules de l’élément diffusant i (m)

On notera que pour des éléments de taille voisine, les valeurs du coefficient d’autodiffusion, D 0
seront assez proches. Ce coefficient varie très peu avec la nature de l’espèce et est compris
généralement entre 0,5e-9 et 2e-9 m2/s.
-
A titre d’exemple à 25°C dans l’eau le D0HTO= 2,24e-9 m2/s [MIL 89]; et le D0Cl = 2,03e-9 m2/s [JEN
99].

Une fois le D0 défini, le facteur de forme [DUL 79] [TUM 96] est décrit comme étant le rapport
entre le coefficient de diffusion (ou la conductivité σ 0) de la solution interstitielle contenue dans le
milieu poreux D0, et le coefficient de diffusion effectif (ou la conductivité effective σ e) du milieu
D0  0
poreux saturé par cette solution De : F   (Eq. I-18)
De  e

Le facteur de formation est relié à la porosité ouverte θ et à la tortuosité T du réseau poreux par la
relation : F  T
 (Eq. I-19)

46
Chapitre I : Etude bibliographique

δ étant la constrictivité qui est définie comme le rapport entre la plus grande et la plus petite section
efficace des pores [BRA 74]. L’inverse du facteur de forme est appelé diffusivité relative.

1.4. Influence des conditions de service sur la diffusion


Les coefficients de diffusion effectifs sont habituellement mesurés au laboratoire à 20 °C et à l’état
saturé. Ces valeurs sont ensuite utilisées dans des modèles afin de prévoir la pénétration et l’intrusion
de l’espèce considérée. Cependant, en conditions de service, les matériaux cimentaires sont parfois
exposés à des conditions climatiques très différentes de celles du laboratoire, et nous nous proposons
d’apporter dans ce qui suit des données expérimentales permettant de prendre en compte ces
paramètres externes liés à l’environnement dans lequel le transport va s’effectuer.

1.4.1. Température
La diffusion est le résultat de l’agitation moléculaire, qui dépend de la température. La diffusion est
thermoactivée et la variation du coefficient de diffusion avec la température est donnée par la loi
d’Arrhénius :
Ea 1 1
.(  )
DT  DT0 .e R T0 T
(Eq. I-20)

Avec, DT le coefficient de diffusion à la température T [K], D0 le coefficient de diffusion à la


température T0 de référence, R la constante des gaz parfaits [8,314 J/mol K], et Ea, l’énergie
apparente d’activation [J/mol].
Pour la diffusivité des ions chlorures, les valeurs de l’énergie d’activation proposées dans la
littérature [PAG 81] [WIR 02] [KAD 00] [DAL 02] sont comprises entre 25 et 45 kJ/mol, selon la
nature du ciment et le rapport E/L utilisés pour les pâtes, mortiers et bétons.
Concernant la diffusivité de l’eau tritiée (HTO), Lamotte et Béjaoui dans [LAM 04] ont proposé une
interpolation selon une loi d’Arrhénius à partir des données existantes :
E0

D  DT0 .e RT
Avec DT0: le coefficient de diffusion à 20° et E0 = 4,4 104 J/mol

Une augmentation de la température lors du processus de diffusion modifie également la


microstructure des matériaux cimentaires (des phases comme l’ettringite ou la portlandite), et la
solubilité de certaines espèces diffusantes (des radionucléides tels le cobalt ou le plutonium..).

1.4.2. Etat de saturation


La diffusion des ions comme le chlorure ou des radionucléides comme le HTO a lieu en phase
liquide. L’état de saturation des matériaux cimentaires a donc une grande influence sur le coefficient
de diffusion dans la mesure où, à un degré de saturation faible, la phase liquide contenue dans le
matériau sera discontinue (on parle alors d’absence de percolation), et le chemin de diffusion plus
segmenté au point de s’arrêter pour des matériaux secs.
La Figure I-23 récapitule la variation du coefficient de diffusion effectif en fonction du degré de
saturation décrite par différentes lois.

47
Chapitre I : Etude bibliographique

Figure I-23 : Influence de l’état de saturation sur le coefficient de diffusion effectif [DRI 11]

Les données expérimentales obtenues par Francy et François [FRA 01] ou par Climent et al. [CLI
02] montrent l’existence d’un seuil de percolation (60% de saturation) en dessous duquel, la phase
liquide n’est plus continue et la diffusion est interrompu. Les modèles numériques développés par
[MAR 01] [BARY 04] [MEI 04] considèrent qu’il n’existe pas de seuil critique où la diffusion
disparaisse, car quand la phase liquide devient discontinue, le transfert de l’eau peut se produire par
absorption capillaire.

Comme nous l’avions précisé dans l’introduction de cette Partie B, on s’intéressera dans le cadre de
notre étude uniquement à l’étude de la diffusivité à l’état saturé, conditions correspondant au cas le
plus défavorable, puisqu’il permet d’obtenir le coefficient de diffusion le plus élevé.

2. Diffusion dans les matériaux cimentaires avec FS


2.1. Etat de l’art des données de diffusion
Plusieurs données de la littérature s’accordent à affirmer que la diffusivité d’un matériau cimentaire
est diminuée avec l’ajout de FS, grâce au raffinement de la structure porale au niveau de la pâte et à
l’interface granulat/pâte en présence de FS.

Les essais visant à déterminer le coefficient de diffusion au travers d’un milieu poreux sont assez
répandus et diversifiés : les tests peuvent être basés sur des phénomènes de diffusion naturelle
(cellules de diffusion), de migration (transfert accéléré par application d’un champ électrique) ou de
conductivité électrique et permettent de suivre des espèces ioniques (chlorures) ou moléculaires
(oxygène, eau tritiée). Ces essais étant tous différents, les grandeurs mesurées peuvent varier
(coefficient de diffusion effectif, coefficient de diffusion apparent, facteur de forme, etc..) et ce
manque de valeur intrinsèque rend difficile la comparaison des matériaux de natures différentes.
Cette diversité méthodologique implique un large panel de résultats qui ne permettent que de
dégager des tendances et des comparaisons entre matériaux. Le tableau I-6 résume les principales
études expérimentales traitant la diffusion au sein des pâtes, mortiers et bétons contenant de la FS.

48
Chapitre I : Etude bibliographique

Tableau I-6 : Synthèse des principales études expérimentales sur la diffusion au sein des matériaux avec ajout de FS
Les matériaux testés Technique utilisée Résultats Réf.
Pâtes de ciment (E/Liant = Exposition des échantillons à une solution à 3% L’ajout de FS réduit de manière significative la pénétration des ions Jensen et
0,5) avec des ajouts en FS de de NaCl (eau de mer synthétique) pendant 1 à 180 chlorures. L'addition de 20% de FS réduit la constante de diffusion d'un al. 1999
0, 3, 6, 10 et 20% en masse jours, puis détermination des profils de facteur d'environ 75. [JEN 99]
de ciment pénétration des ions chlorures par la technique % SF 0 3 6 10 20
EPMA (Electron Probe MicroAnalysis) [MEJ 96]. D (10-12 m2/s) 22 13 1,2 1,6 0,3
Le coefficient de diffusion effectif est déterminé
en supposant que l’isotherme d’interaction des
chlorures est de type Freundlich
Six pâtes de ciment avec des Des disques circulaires (3 mm d’épaisseur) placés La diffusivité est réduite par l’ajout de 10% de FS. Cette diminution est plus Zhang et
rapports E/Liant de 0,2 ; 0,25 dans les cellules de diffusion [PAG 81] entre un significative pour les pâtes à fort rapport E/L d’autant plus que le Gjørv
et 0,3 avec des ajouts de 0% compartiment amont (eau de chaux avec 0,5 M de coefficient de diffusion augmente exponentiellement (pour les pâtes avec et 1991
et 10% de FS en masse de NaCl) et un compartiment aval (eau de chaux). La sans FS) avec le rapport E/L. [MIND
ciment. concentration à l’aval a été suivie par 91]
spectrophotométrie [VOG 78].
Pâtes

Figure I-24 : Relation entre coefficient de diffusion Cl- et le rapport E/L

4 pâtes de ciment avec un Un coefficient DeHTO 2 à 4 plus faible avec l’ajout de 6% de FS dû à Delagrave
E/L=0,25 et 0,45 et avec 0 et Diffusion HTO en cellule sur des disques saturés l’affinement de la porosité et à la diminution du rayon critique (ou du et al.
6% de FS. de 5 mm d’épaisseur, et détermination du DeHTO diamètre seuil défini dans la section §I-A-1.3.1.1) de 20 à 15 nm par 1998
en régime permanent. exemple pour les pâtes E/L=0,45 grâce à l’ajout de FS. [DEL 98]
Pâtes (E/L ; %FS) (0,25 ; 0) (0,25 ; 6) (0,45 ; 0) (0,45 ; 6)
De (10-12 m2/s) 0,63 0,16 9,83 3,79

49
Chapitre I : Etude bibliographique

Pâtes (E/C = 0,3 et FS Immersion des échantillons dans 6 M de La résistance à la pénétration des ions chlorures est meilleure avec la Kong et
variant de 0 à 1%) sont NH4Cl et détermination de l’épaisseur de nanosilica car elle est mieux dispersé au sein de la matrice cimentaire, au al. [KON
fabriquées avec 2 types de pénétration des ions chlorure. contraire l’ajout de PS présente l’existence d’agglomérats au sein de la 12]
FS : nanosilica (poudre pâte de ciment et donc une perte de performances microstructurales et
ultrafine de FS) et PS diffusionnels.
(precipitated silica)
présentant des agglomérats
de silice.
Pâtes avec 0; 10 ; 20 et 30% Des disques avec 3 mm d’épaisseur ont été La FS doit être ajoutée par faible quantité, car à défaut, l’addition de FS Byfors
de FS et des rapports E/L de testés en cellules de diffusion sous un gradient en grande quantité -supérieure à environ 20%- pourrait réduire le pH à 1987
0,4 ; 0,5 et 0,6. de concentration de 1M de NaCl. des niveaux où l’environnement de l'acier ne soit plus passif. [BYF 87]
La diminution du pH de la solution interstitielle, liée à l’ajout de FS est
plutôt un avantage pour d’autres utilisations (stockage en profondeur des
déchets, interactions bétons/ argile). Le lecteur est d’ailleurs invité à
consulter la thèse de Codina [COD 07] sur les bétons bas-pH, pour plus
d’informations sur ce sujet.
Pâtes avec 0 ; 5 ; 10 et 15% Rapid chlorid permeability test [ASTM 96] des L’ajout de FS cause une légère diminution du pH entrainant une Gautefall,
de FS et un E/L de 0,5 et 0,7 ions chlorures et mesure du coefficient de diminution du seuil de concentration des chlorures [MONT 85] (seuil 1986
diffusion apparent Da. nécessaire pour les ions chlorures pour détruire la couche passive autour [GAU
des armatures et initier la corrosion). Cet effet est contre balancé par la 96]
diminution de la diffusion des ions chlorures grâce à l’ajout de FS.
2 pâtes de ciment (E/L=0,2) La présence de fumée de silice conduit à un coefficient 200 fois inférieur Matte et
sans et avec 32,5% de FS, Cellules de diffusion HTO sur des disques de 4 à celui de la pâte de ciment Portland. Une aussi grande diminution est al. [MAT
traitées thermiquement dans mm d’épaisseur, et détermination du DeHTO en due au traitement thermique qui a permis d’améliorer l’action 99]
de l’air humide à 90°C régime permanent. pouzzolanique de la FS (32,5% en masse du ciment).
pendant 2j après démoulage.
Bétons (E/L =0,37), 10% de La conductivité électrique a été mesurée et la La conductivité électrique diminue avec le volume d’agrégats : la Princigial
FS et une teneur en granulats conductivité normalisée (σ/σ0) tracée en dilution domine le transport plus que l’interconnexion des ITZ. La lo et al.
variant de 0-75%. fonction du volume d’agrégats. Le coefficient contribution de l’ITZ est visible qu’à partir de remplissage en Vagg > 2003
de diffusion effectif peut être déduit à partir de 60%. L’ITZ suggéré par le modèle est d’une épaisseur de 9µm et 2,5 [PRI 03]
l’équation (I-18). fois plus diffusive que la pâte.

50
Chapitre I : Etude bibliographique

Mortiers (Vagg =50%) sans Les DeHTO des mortiers (avec ou sans FS) sont plus influencés par la Delagrave
et avec 6% de FS ; (E/Liant Cellules de diffusion HTO sur des disques de 5 tortuosité associée à la présence des granulats que par la connectivité de et al.
de 0,25 et 0,45) mm d’épaisseur, et détermination du DeHTO en l’ITZ. 1998
régime permanent. Pour les mélanges ne contenant pas la fumée de silice, quel que soit le [DEL 98]
rapport E/L, l’ajout de 50% en volume d’agrégats réduit le coefficient de
diffusion d'environ 50%. Pour les mélanges contenant de la fumée de silice,
toutefois, il y a une diminution importante de 80% du De pour le mélange
E/L de 0,45, contre une diminution uniquement de 30% pour le mélange à
plus faible E/L de 0,25. L'addition de la FS contribue beaucoup à
l'affinement de la structure de pores dans les mélanges à forts rapports E/L.
Bétons (E/L = 0,35) avec 8% Le test de migration des Cl- en régime L’ajout de 8% de FS dans le béton contenant des agrégats poreux permet de Bogas et
de FS et 2 types de granulats transitoire (Rapid Chlorid Migration test) diminuer le Da uniquement de 6% tandis que cette réduction est d’environ al. 2015
LWA (lightweight spécifiée par NT build492 [NTB 99] a été utilisé 40% pour le béton avec des agrégats non-poreux. Un tel résultat est [BOGA
aggregates). avec une différence de potentiel de 10 à 60 V pour probablement dû à la densification de l’ITZ plus visible pour les granulats 15]
Les bétons avec CV ont forcer les ions à pénétrer rapidement dans les non-poreux (§I-A-1.3.2)
également été étudiés. échantillons. Le coefficient Da est mesuré.
Mortiers (Vagg de 0-65%), et Diffusion et perméabilité à l’oxygène après un Les diffusivités diminuent avec l'augmentation de la teneur en sable Wong et
Mortiers et Bétons

bétons (70% d’agrégats) avec séchage « doux » et stabilisation de la masse des suggérant un pouvoir de dilution et de tortuosité prépondérant vis-à-vis al .
0 et 10% de FS et à différents échantillons dans des conditions de température et l’interconnexion des ITZs. La même conclusion est également partagée par [WON
E/L de 0,3 à 0,5. de d’humidité relative (HR) respectives de 20°c et les auteurs de [CAR 98] [SHA 00]. 09]
50%.
Bétons avec la même teneur La durabilité (pénétration des chlorures, perméabilité à l’oxygène) des
Des mesures de conductivités électriques ont été Alexander
en agrégats Vagg=65%), des matériaux est nettement améliorée en présence de FS. L’ajout de 10% de FS
réalisés sur des échantillons (ϕ=68 mm et E= 25 et al.
rapports E/L variant de 0,4 à permet d’atteindre l’optimum des performances. Pour d’autres études
mm) saturés avec 5M de NaCl. Une différence de 1999
0,6 et des teneurs en FS et en potentiel (ddp) de 10V a été appliquée et le
comme [AYE 94] [VAL 13] [MAH 15], la FS est considérée parmi tous les [ALE 99]
de 0, 5 et 10%. ajouts (cendres volantes, métakaolin, zeolite..), l’additif le plus efficace
courant électrique traversant chaque échantillon a
été mesuré. Le De est déduit par (Eq. I-18)
pour diminuer le coefficient de diffusion pour un niveau de remplacement
optimal entre 7,5 et 10% [VAL 13], de 7% pour [HOO 97].
Bétons avec des agrégats Rapid chlorid penetration [ASTM 96] des ions L’utilisation de 3% de FS dans un béton avec granulats recyclés permet Mukharji
recyclés (E/L=0,4 et des chlorures et mesure du coefficient de diffusion d’obtenir une résistance à la pénétration des ions chlorures similaire à celle et al.
teneurs en nanosilica de 0 ; apparent Da. du béton avec des granulats naturels. [MUK
0,75 ; 1,5 et 3% en masse de 14] et
ciment. Ann et al.
[ANN 08]

51
Chapitre I : Etude bibliographique

2.2. Manques identifiés et problématique relevée


Au cours de cette revue bibliographique (tableau I-3), nous avons pu constater que la majorité des
données de diffusion portent sur les ions chlorures, vu leur grande importance dans le domaine de
durabilité des bétons armés. Cependant les techniques de mesure utilisées pour évaluer la résistance
des matériaux à la pénétration de ces ions agressifs sont très nombreuses : conductivité électriques,
essais d’immersion, essais de migration accéléré sous champ électrique … et donnent des
coefficients de diffusion très différents et difficilement comparables. Ajoutant à cela le fait que les
ions chlorures interagissent avec la matrice cimentaire (§I-B-1.2.1) ce qui conduit à faire en plus une
hypothèse sur la capacité de fixation des Cl- (isotherme non-linéaire d’interaction de type Freundlich
[TAN 96], Langmuir, Dubinin ou autre). En contrepartie, l’eau tritiée présente l’avantage d’être un
traceur « témoin », qui interagit faiblement avec la matrice cimentaire et dont la capacité
d’interaction est décrite par un terme constant Kd (§I-B-1.2.2). Ce traceur est idéal pour mesurer le
coefficient de diffusion effectif intrinsèque au matériau contrairement aux chlorures par exemple où
la diffusion dépend fortement de la concentration initiale de l’essai. Dans la littérature néanmoins,
très peu de données sur les coefficients de diffusion effectifs HTO sont disponibles. Pour les
matériaux avec ajout de FS, destinés au stockage des déchets radioactifs- notre cas d’étude-, on
dispose à peine de quelques valeurs expérimentales DeHTO provenant des études de Delagrave [DEL
98], de Matte [MAT 99] ou de Lovera publié dans [BAR 07]. Ces valeurs concernent
principalement des pâtes et rarement des mortiers ou des bétons, vu la lourdeur des essais de
diffusion HTO surtout pour les bétons. Les bétons en présence de FS atteignent des coefficients de
diffusion assez faibles, ce qui rend la détermination expérimentale de ces coefficients avec des essais
de diffusion naturelle « en cellule » extrêmement longue (plusieurs années).

Pour remédier à ce problème, plusieurs études se sont intéressées à développer des outils pour
essayer de prédire et estimer le DeHTO des mortiers et bétons. Certaines ont proposé des modèles
numériques tandis que d’autres ont essayé de trouver un lien entre les paramètres intrinsèques au
matériau et le coefficient de diffusion HTO permettant d’estimer simplement les propriétés de
transfert des matériaux. Une synthèse sur ces recherches est donnée ci-après.

2.3. Prédiction du coefficient de diffusion HTO


2.3.1. Modèles numériques
Plusieurs approches de modélisation ont été présentées dans la littérature, pour essayer d’estimer le
coefficient de diffusion HTO.

Bentz, par exemple, propose une succession de modèles numériques simulant l’hydratation, la
microstructure et la diffusion au sein des pâtes [BEN 00] et des bétons [BENTZ 00] avec ajout de
FS. Le modèle NIST 3D [BEN 97] a été utilisé pour décrire la microstructure des matériaux avec FS,
et la simulation par analogie électrique [GAR 92] [GAR 98] pour calculer les diffusivités relatives
(§I-B-1.3). Les coefficients de diffusion des pâtes obtenues numériquement ont ensuite été comparés
aux valeurs expérimentales de diffusion HTO de Delagrave et al. [DEL 98] et de diffusion des
chlorures de Jensen et al. [JEN 99]. Pour les systèmes avec 6% de fumée de silice [DEL 98], un

52
Chapitre I : Etude bibliographique

facteur deux est trouvé entre les valeurs simulées et expérimentales, une valeur qui -d’après Bentz –
reste raisonnable. Avec la diffusion des chlorures, l’analogie était meilleure (20% d’écart).
Pour les bétons contenant la FS, une équation a été développée pour la prédiction du coefficient de
diffusion des ions de chlorure en fonction des proportions du mélange (E/C, % de FS, Vagg) et du
degré d'hydratation attendu. La Figure I-25 représente un cas particulier de cette équation et montre
l'amélioration relative en coefficient de diffusion avec l’ajout de différentes teneurs en FS pour un
degré d’hydratation fixe αhyd de 0,6. Des études comme [FAR 15] ou [SHE 09], proposent d’autres
équations pour prédire le coefficient de diffusion des bétons exposés aux ions de chlorure.

Figure I-25 : Amélioration relative du coefficient de diffusion des bétons avec différentes
teneurs en FS (αhyd =0,6). Les 2 points expérimentaux proviennent du travail d’Alexander et al.
[ALE 99]
Song et al. [SON 07] ont proposé une approche de modélisation multi échelle qui permet de suivre
l’hydratation du liant, le développement de la microstructure, et l’évolution des coefficients de
diffusion des bétons en présence de FS. Leur approche est similaire à celle de Bentz et aide à estimer
le De des bétons à partir de paramètres matériaux connus (E/L ; %FS ; αhyd), et d’autres moins
évidents comme l’épaisseur et la diffusivité de la couche d’ITZ. Ces modèles restent cependant très
théoriques et la comparaison aux valeurs expérimentales reste très pauvre vu l’insuffisance des
données expérimentales.

Dans le paragraphe suivant, nous proposons de voir d’autres propositions pour estimer le DeHTO -
sur des fondements expérimentaux- à partir de paramètres intrinsèques au matériau (porosité,
rapport E/C, rayon critique des pores…).

2.3.2. Lien entre paramètres intrinsèques au matériau et D e


Les propriétés de transfert étant souvent conditionnées par le réseau poreux, certains auteurs ont
cherché à relier les variations de diffusivité aux paramètres microstructuraux. Tognazzi [TOG 98]
[MAI 00] trace l’évolution du DeHTO de pâtes CEM I (différents rapports E/C), en fonction de la
porosité totale au mercure et propose une relation exponentielle entre ces deux paramètres (Figure I-
23). L'extrapolation de cette formule à des porosités élevées repose sur le fait que le coefficient de
diffusion d'un matériau poreux ne peut pas excéder celui de l'eau pure fixé à 2.24e-9 m2/s pour 92%
de porosité [TOG 98]. Cette formule donne une estimation du coefficient de diffusion des pâtes
CEM I à partir de la connaissance de leur porosité totale. D’autres auteurs comme Jensen et al. [JEN
99] ou Poon et al. [POO 06] ont également considéré la porosité comme un paramètre essentiel qui a

53
Chapitre I : Etude bibliographique

une influence directe sur la diffusion. Poon et al. trouvent une relation exponentielle entre la charge
totale des ions de chlorure traversant les pâtes et leur porosité [POO 06], tandis que Jensen et al.
proposent d’estimer le coefficient de diffusion de chlorure à partir de la porosité capillaire du
matériau à différentes teneurs en FS [JEN 99].

Figure I-26 : Relation entre DeHTO des pâtes CEM I et leur porosité totale au mercure [TOG
98]

De l’autre côté, plusieurs chercheurs se sont contentés de lier les coefficients de diffusion aux
paramètres du mélange initial (E/C, %FS ; le Vagg…). Zhang et al. (Figure I-24) [MIND 91], Azari et
al. [AZA 93] ou encore Bogas et al. [BOGA 15] offrent des relations entre coefficient de diffusion
effectif des ions de chlorure et le rapport E/C de pâtes contenant de la FS. Une telle relation en
diffusion HTO n’existe pas encore pour les matériaux avec FS. Pour les pâtes CEM I (CPA 52,5R) et
CEMV/A (contenant des cendres volantes et des laitiers de hauts fourneaux), l’étude expérimentale
réalisée par Richet [RIC 92] constitue une étude complète sur la diffusion de l’eau tritiée (Figure I-
27). Cependant, l’extrapolation de ces données acquises sur les pâtes vers les mortiers et les bétons,
s’avère plus compliqué qu’une simple proportionnalité à la teneur de la pâte dans le béton, à cause
des effets induits par les granulats (dilution, tortuosité et l’ITZ).

Figure I-27 : Variation du coefficient de diffusion (à gauche) en fonction du rapport E/C des
pâtes de ciments à base de CEM I et CEMV/A d’après [ANDRA 05] ; (à droite) en fonction du
Vagg [LARB 13].

54
Chapitre I : Etude bibliographique

Larbi a étudié en 2013 [LARB 13] le passage entre pâtes et mortiers CEM I en s’intéressant à
l’influence de la présence des granulats dans les mortiers. Elle trouve que le coefficient de diffusion
des mortiers diminue linéairement avec le volume d’agrégats en suivant une loi de type (1-Vagg) 0,865
pour des 0≤Vagg≤ 50%.

Dans le cadre de notre travail, nous aborderons cette transition pâtes-mortiers-bétons en présence
d’ajouts comme la FS. Mais avant cela, nous essayerons d’abord d’alimenter la pauvre base de
données (manques précédemment relevés dans §I-B-2.2) en testant en diffusion HTO des pâtes (à
différents rapports E/L et teneurs en FS) et des mortiers (à différentes teneurs en agrégats V agg : 0-
65% et différentes granulométries). Ces matériaux subiront également une caractérisation
microstructurale complète en utilisant différentes techniques d’investigation de la porosité
(porosimétrie à l’eau, au mercure, l’adsorption d’azote, MEB associé à l’analyse d’images), et de la
réactivité de la FS (ATG, MEB associé à l’EDS). L’objectif ultime étant de relier les paramètres
microstructuraux des pâtes et des mortiers à leurs coefficients de diffusion HTO et pouvoir estimer,
in fine, le DeHTO du béton, très difficile à tester en cellule de diffusion.

2.4. Conclusion : sélection des formulations et de l’élément diffusif


HTO pour la suite de l’étude
Les transferts de matière dans les matériaux cimentaires peuvent s’effectuer selon deux processus
généraux: la diffusion (Le transport d’éléments sous l’effet d’un gradient de concentration) et la
perméabilité ou l'advection (Le transfert d’un fluide sous l’effet d’un gradient de pression).

Dans le contexte du stockage des déchets radioactifs, les transferts de matière en sein des matériaux
cimentaires peu perméables, résultent essentiellement de la diffusion de radionucléides dans leur
phase liquide [RIC 92]; la diffusion qui est largement prépondérante devant la perméabilité, au
moins en milieu saturé, ce qui est le cas dans l’étude du comportement à long terme de ces
matériaux dédiés au stockage. La diffusion au sein des matériaux complétement saturés correspond
également au cas le plus défavorable au sens de la rétention des radionucléides. La mesure du
coefficient de diffusion en conditions saturées permet d’accéder à une valeur enveloppe du
coefficient de diffusion qui permet de réaliser des études de sûreté robuste sur le stockage des
déchets radioactifs.

Parmi tous les radionucléides, l’eau tritiée (HTO) est le radionucléide le plus rapide à traverser les
matériaux cimentaires. Il est également considéré comme un traceur « témoin » grâce à sa faible
interaction avec la phase solide du matériau [RIC 92]. L’étude du comportement diffusif de ce
radionucléide peut servir comme référence pour voir l’influence de différents paramètres
intrinsèques (rapport E/C, l’ajout de sable ou d’additifs…) sur le transport diffusif au sein des
matériaux cimentaires. Pour l’ANDRA, le DeHTO est un paramètre indispensable pour l’acceptation
des colis de déchets nucléaires.

Dans le cadre de cette thèse, on s’est intéressé à l’étude de la diffusivité au sein des pâtes, mortiers
et bétons à base de CEM I + FS, formulation de base pour une catégorie de conteneurs de déchets
radioactifs de faible à moyenne activité. La diffusion HTO de ces matériaux a été très peu étudiée
dans la littérature puisqu’on ne dispose que de quelques valeurs D eHTO provenant des études de
Delagrave [DEL 98], de Matte [MAT 99] ou encore de Lovera publiées dans [BAR 07], et qui

55
Chapitre I : Etude bibliographique

concernent principalement des pâtes et rarement des mortiers ou des bétons, très longs à tester en
cellules de diffusion, à cause de leur faibles coefficients de diffusion.

En revanche, la diffusion des ions chlorures a largement été étudiée vu son importance pour la
durabilité des bétons armés. Les coefficients de diffusion Cl- diminuent avec l’ajout de FS, grâce au
raffinement et à la densification de la structure porale au niveau de la pâte et à l’interface
granulat/pâte dans ces matériaux. Cette diminution est plus significative pour les pâtes à fort rapport
E/C [MIND 91], et meilleure quand la FS est correctement dispersée dans la matrice cimentaire
[KON 12]. Or, les coefficients de diffusion de cet élément ont été mesurés par plusieurs techniques
(conductivité électrique, diffusion accélérée sous champ électrique, immersion, cellule de
diffusion...) ce qui fournit des valeurs différentes et difficilement comparables. En plus, le retard dû
aux interactions de cet élément avec la matrice cimentaire ne permet pas de déterminer les propriétés
effectives des matériaux contrairement à l’eau tritiée considérée comme le traceur « idéal » pour
mesurer le coefficient de diffusion effectif et intrinsèque au matériau.

Dans notre travail, nous essayerons tout d’abord d’alimenter la base de données (manques
précédemment relevés §I-B-2.2.) en testant en diffusion HTO des pâtes (à différents rapports
E/Liant et teneurs en FS) et des mortiers (à différentes teneurs en agrégats Vagg : 0-65% et
différentes granulométries). Ces matériaux subiront également une caractérisation microstructurale
complète en utilisant différentes techniques d’investigation de la porosité (porosimétrie à l’eau, au
mercure, l’adsorption d’azote, MEB associé à l’analyse d’images), et de la réactivité de la FS (ATG,
MEB associé à l’EDS). L’objectif ultime étant de relier les paramètres microstructuraux des
pâtes et des mortiers à leurs coefficients de diffusion HTO et pouvoir estimer, in fine, le DeHTO
du béton. En effet, ce coefficient de diffusion est très difficile à obtenir par l’essai des cellules de
diffusion, pour des raisons de représentativité (épaisseur doit être au moins égale à trois fois le plus
gros grain utilisé dans le béton, généralement > 3 cm), et de lenteur d’essai (le régime permanent n’a
pas été obtenu même après des années d’essai pour certains bétons composés.

Dans la littérature, plusieurs études ont essayé de relier le coefficient de diffusion aux paramètres
intrinsèques aux matériaux (porosité, rapport E/C, Vagg …). Ce travail n’a pas encore été réalisé pour
la diffusion HTO au sein des matériaux avec ajout de FS vu la rareté des données. Les modèles
numériques proposés pour estimer les DeHTO des bétons avec FS se basent également sur le très peu
de données disponibles en coefficients de diffusion HTO dans les matériaux avec FS, ce qui rend la
présentation et la discussion de ses résultats insuffisantes.

56
57
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et


mortiers

Ce chapitre présente la démarche entreprise dans le choix des matériaux d’études et des méthodes
expérimentales utilisées pour étudier les propriétés de diffusion et investiguer la microstructure des
pâtes et mortiers à base de CEM I + FS. L’objectif étant de pouvoir relier les paramètres
microstructuraux et le coefficient de diffusion effectif (De), permettant d’estimer le De du béton à
partir de ses caractéristiques microstructurales.

La première partie décrit les matériaux qui font l’objet de cette étude ainsi que les critères de
sélection de leurs constituants et l’élaboration de leur formulation. L’essai de diffusion de l’eau
tritiée (HTO), ainsi que les techniques expérimentales adoptées pour investiguer la structure poreuse
(porosité totale, distribution de la taille des pores et profil de l’ITZ) de ces matériaux sont ensuite
détaillés respectivement dans la deuxième et troisième partie de ce chapitre. Pour finir, une dernière
attention est portée à la réactivité et à la dispersion de la FS au sein des matrices cimentaires.

58
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

CHAPITRE II : CAMPAGNE EXPERIMENTALE SUR PATES ET MORTIERS .......................................... 58


1. Matériaux d’étude ................................................................................................ 60
1.1. Choix des matières premières ...................................................................................................................... 60
1.1.1. La fumée de silice ............................................................................................................................... 60
1.1.2. Le ciment Portland .............................................................................................................................. 63
1.1.3. Le superplastifiant .............................................................................................................................. 63
1.1.4. Les granulats ....................................................................................................................................... 64
1.2. Formulations et nominations ....................................................................................................................... 66
1.3. Confection et conservation des échantillons ............................................................................................... 67

2. Mesure du coefficient de diffusion HTO ................................................................ 68


2.1. Principe de l’essai through-out diffusion ...................................................................................................... 68
2.1.1. Montage de la cellule ......................................................................................................................... 68
2.1.2. Vérification de l’étanchéité................................................................................................................. 69
2.1.3. Lancement de l’essai ........................................................................................................................... 69
2.2. Dimensionnement des échantillons ............................................................................................................. 70
2.3. Traitement et analyse des résultats ............................................................................................................. 71

3. Caractérisation de la microstructure poreuse ........................................................ 73


3.1. Porosité accessible à l’eau ............................................................................................................................ 73
3.2. Distribution de la taille des pores ................................................................................................................. 75
3.2.1. Préparation et prétraitement des échantillons .................................................................................. 75
3.2.2. Porosimétrie par intrusion mercure (PIM) ......................................................................................... 76
3.2.3. Sorption d’azote.................................................................................................................................. 79
3.3. Profil de porosité à l’interface granulat/pâte ............................................................................................... 80
3.3.1. Polissage et Préparation des surfaces à observer .............................................................................. 80
3.3.2. Acquisition d’images ........................................................................................................................... 81
3.3.3. Traitement et analyse d’images .......................................................................................................... 81

4. Réactivité et dispersion de la FS au sein de la matrice cimentaire .......................... 86


4.1. Degré d’hydratation ..................................................................................................................................... 86
4.2. Réactivité de la FS : Analyse Thermogravimétrique ..................................................................................... 88
4.3. Cartographie élémentaire (MEB associé à l’EDS) ......................................................................................... 90

5. Conclusion : .......................................................................................................... 90

59
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

1. Matériaux d’étude
La revue bibliographique a permis d’identifier un grand manque sur les données de diffusion HTO
pour les matériaux avec ajout de FS. Les formulations étudiées dans le cadre de ce travail ont été
sélectionnées en priorité pour alimenter cette base de données. Leurs compositions initiales (rapport
E/L, teneur en FS, teneur en sable et granulométrie du sable) ont été variées afin de balayer des
microstructures et des propriétés diffusives différentes, et d’identifier l’influence de chaque
paramètre (eau, FS, granulométrie et teneur en agrégats) sur l’évolution de la diffusivité au sein de
ces matériaux. Au total 5 pâtes et 11 mortiers ont été formulés, testés en diffusion HTO et leurs
microstructures investiguées afin d’essayer d’interpréter et d’expliquer les valeurs mesurées des
coefficients de diffusion HTO (DeHTO). L’objectif étant, dans un premier lieu, d’enrichir la littérature
en données de diffusion HTO et de voir l’influence de chaque paramètre de composition (eau, FS,
granulats) sur l’évolution de la diffusivité au sein de ces matériaux avec ajout de FS. Le but ultime
est de rechercher un modèle permettant d’estimer avec confiance le coefficient de diffusion d’un
béton à partir de ses données microstructurales et des diffusivités mesurées sur les pâtes et sur les
mortiers de la même formulation (problème de la durée des essais sur les bétons).

Deux formulations de bétons ont également été fabriquées et leurs microstructures caractérisées dans
le cadre de ce travail. Cependant, ces échantillons n’ont pas été testés en diffusion HTO en cellule
car ces essais peuvent durer des années. Les informations relatives à la fabrication et à la
caractérisation de ces bétons sont détaillées ultérieurement au chapitre V.

1.1. Choix des matières premières


Les matières premières choisis pour la fabrication des pâtes et mortiers sont :

 Fumée de silice sous deux formes : densifiée (S95 DM) et SLURRY.


 Ciment Portland CEM I 52,5 PM ES CP2 de l’usine Lafarge du Teil.
 Sable siliceux naturel roulé, de trois différentes classes granulaires : fine, normalisée et
grossière.
 Superplastifiant Glenium ® 27, utilisé pour certaines formulations.

Les critères de sélection et la composition de chaque constituant sont détaillés ci-dessous. L’annexe
A présente les fiches produits du ciment, des FS, des sables et de l’adjuvant.

1.1.1. La fumée de silice

Dans le chapitre I, la fumée de silice (FS) a été présentée sous sa forme non-densifiée, généralement
connue en tant que poudre ultrafine composée de particules sphériques 100 fois plus fins que les
grains de ciment. Or, cette forme « idéale » de FS est très rarement utilisée comme ajout dans les
matériaux cimentaires à cause de sa grande volatilité, et de la difficulté à manipuler et à transporter
une poudre aussi fine. Pour s’adapter à ces difficultés techniques, les industriels ont proposé de
conditionner la FS sous d’autres formes : densifiées, en suspension (slurry), ou en pastilles pour
augmenter la densité et faciliter l’utilisation du matériau. La différence entre ces configurations
réside dans la taille des particules (surface spécifique d’action) et n’affecte pas la composition
chimique de la fumée de silice. Le tableau II-1 propose un descriptif des trois états de FS.

60
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

Tableau II-1 : Les formes commercialisées de fumée de silice

Forme de FS Descriptif

Fumée de silice La poudre densifiée (densité apparente élevée > 500kg/m 3) est certes plus facile
densifiée (FSD) à manipuler et moins chère à transporter que la poudre non densifiée, mais elle
est composée de particules ultrafines agglomérées avec des formes irrégulières
et des tailles entre 10 microns à quelques millimètres [DIA 06] (voir figure II-1
et II-2) créés lors du processus de densification.

Fumée de silice Ce matériau est obtenu en mixant la poudre non densifié avec de l’eau en égale
slurry (FSS) proportions de masse afin de produire un slurry stable. La production d’un slurry
stable est un processus complexe qui nécessite des mélangeurs de cisaillement
spécialement pour la fumée de silice. Sous cette forme, la FS est censé offrir
une meilleure dispersion dans le mélange cimentaire.

Fumée de silice La pelletisation est une forme de traitement généralement utilisé dans des
en pastilles ou en périodes d’excès de production. Elle permet de préparer le matériau pour
pellets faciliter sa mise en décharge. Cette méthode consiste à façonner la fumée de
silice sous forme de pastilles de 0,5 à 1mm de diamètre sur des tables de
pelletisation, en utilisant de l’eau et une faible quantité de fumée de silice pour
lier la pastille. Les matériaux de cette forme ne conviennent pas pour une
utilisation dans le béton car il est impossible de disperser proprement ces
pastilles dans un mélange de béton.

Dans la littérature, la forme densifiée (FSD) sèche semble être de loin la forme la plus couramment
utilisée; le slurry n’étant pas disponible dans certains pays. La FSD existe presque entièrement sous
forme d’agglomérats de sphères fines reliés entre eux, lors du processus de densification, par des
liaisons permanentes qui semblent très difficiles à briser [JOH 93] [JOH 94] [DIA 03]. La taille de
ces chaines de particules varie d’une dizaine à plusieurs milliers de micromètres. La figure II-1 (a) et
(b) [DIA 06] montrent les tailles et les formes des agglomérats de la FSD observées au MEB
respectivement en 3D en mode d’électrons secondaires (SE) et en section transversale en mode
d’électrons rétrodiffusés (BSE). Des images similaires ont également été publiées dans [LAG 93]
[RAN 97] [HOO 98].

61
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

(a) (b)

Figure II-1 : FSD commerciale observée au MEB (a) en 3D en mode SE (b) en section transversale
en mode BSE [DIA 04].

Dans la plupart des études réalisées, la fumée de silice a été introduite sous sa forme agglomérée et
densifiée. Parmi ces études, quelques-unes seulement se sont intéressées à vérifier la dispersion de la
FS au sein du matériau cimentaire. Ces quelques travaux ont signalé la présence d’agglomérats de
plusieurs µm de diamètre dans des pâtes, mortiers et bétons [DIAM 03] [NAG 94] [BON 92]. Ces
agglomérats peuvent facilement réduire l’efficacité de la FS sur les propriétés des matériaux
cimentaires [SAN 99] [YAJ 03], en raison de leur plus grand diamètre, leur surface spécifique plus
faible, et leur réactivité pouzzolanique inférieure à celle des grains unitaires. L’effet filler de la FS
est également affecté en présence de ces amas, qui peuvent agir dans certains cas, comme des
agrégats réactifs participant à la réaction alcali-silice (RAS) [DIAM 03] et créant des dommages au
sein des bétons.

Par ailleurs, la fumée de silice slurry (FSS) qui est un mélange liquide de poudre non densifiée avec
de l’eau à proportions égales, promet une meilleure dispersion au sein des mélanges de pâtes,
mortiers et bétons [HEW 98]. Cette forme de FS a pourtant été très rarement étudiée dans la
littérature, probablement en raison de l’indisponibilité de cette suspension dans plusieurs pays. Parmi
les quelques auteurs qui ont utilisé la FSS comme ajout, on peut citer par exemple, Rossen et al.
[ROSS 15] qui ont étudié la composition des C-S-H dans des pâtes de ciment avec FSS. Ils ont
constaté que le rapport C/S dans les C-S-H diminue avec la consommation de la portlandite CH, pour
se situer autour de 1,4 à 1,5 en présence de CH, puis chuter à 1,0 quand toute la CH est consommée
dans le matériau. Zhang et al [ZHA 16] se sont eux intéressés à comparer la résistance mécanique
des matériaux fabriqués avec la FSS et la FSD. Ils ont remarqué que la teneur en eau liée ainsi que la
résistance à la compression sont plus faibles dans la pâte contenant la FSD. Toutefois, l'impact de
l'utilisation de ces deux formes de FS sur les propriétés de transport et plus particulièrement sur la
diffusion de l'eau tritiée n'a jamais été discuté auparavant.

Dans le cadre de cette étude, nous avons décidé, en premier lieu, d’utiliser les deux formes de FS
afin d’évaluer la perte de performances -du coefficient de diffusion et des propriétés
microstructurales– en raison de la présence d’agglomérats de FS dans la pâte de ciment. Pour
cela, deux pâtes de ciment de même composition initiale ont été fabriquées avec de la FSD pour
l’une, de la FSS pour l’autre. Toutes les autres formulations ont été élaborées avec du slurry, censé

62
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

offrir une meilleure dispersion de la FS au sein des matériaux cimentaires [HEW 98]. Le tableau II-
3 regroupe les matériaux étudiés lors de ce travail.

La société CONDENSIL fournit une large gamme de fumées de silice densifiées et en suspension.
Notre choix s’est porté sur une fumée de silice sèche riche en silice (95% de SiO 2 amorphe), et qui
rentre dans la composition des deux formes slurry et densifiée. La FSD choisie est une poudre grise
(S95 DM) de densité 2,24 et le SLURRY, un mélange composé de 50,1% de FS sèche non-densifiée
diluée dans l’eau, d’une densité de 1,382. Les deux formes de FS ont été produites dans la même
usine de CONDENSIL à Anglefort. La composition chimique de ces deux formes est la même, seule
la distribution de la taille des particules est différente. Le tableau II-2 affiche la composition
chimique de la fumée de silice sèche utilisée dans la FSD et la FSS.

1.1.2. Le ciment Portland


Le ciment Portland utilisé est un CEM I 52,5 PM ES CP2 de l’usine Lafarge du Teil. Ce ciment est
choisi en référence au précédent travail de Larbi [LARB 13] qui a étudiée la diffusion HTO et la
microstructure d’une multitude de pâtes et mortiers fabriqués avec ce même ciment, et sans additions
minérales. L’objectif étant de pouvoir par la suite comparer nos formulations à ses matériaux de
référence et voir en particulier l’influence de l’ajout de FS pour les différents pâtes et mortiers.

Ce ciment a également été sélectionné à la base pour sa faible teneur en alcalins. Il est riche en C3S
(65,3%) et C2S (18,6%) et pauvre en aluminates (4,35% de C3A et 7,14% de C4AF). Le tableau II-2
regroupe la composition chimique du CEM I.

Tableau II-2 : Composition chimique du CEM I et de la FS sèche utilisée dans la FSD et FSS

Elément CEM I FS sèche utilisée


(% massique) dans la FSD et FSS
SiO2 22,40 95±2
CaO 66,60 0,50
Al2O3 2,96 0,20
Fe2O3 2,33 0,40
SO3 2,13 0,10
MgO 0,95 0,30
K2O 0,15 0,10
Na2O 0,10 0,60
Perte au feu (%) 1,00 2,50
Densité (kg/m3) 3,16 2,24

L’analyse granulométrique du ciment Portland et des deux types de FS utilisés dans ce travail, sera
présentée et commentée ultérieurement au début du chapitre III (Figure III-1).

1.1.3. Le superplastifiant
L’adjuvantation est apparue nécessaire pour améliorer l’ouvrabilité de certaines formulations. Le
superplastifiant utilisé est le Glenium ® 27. Il s’agit d’un adjuvant à base d’éther polycarboxylique
modifié. Son pH est de 7±1 et sa densité de 1,05±0,02 en solution (20% d’extrait sec). Il a été utilisé
dans sa plage normale de dosage c-à-d entre 0,1 à 3% de la masse du ciment et a été incorporé seul à
la fin du malaxage pour certaines pâtes et mortiers (Tableau II-3).

63
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

L’ouvrabilité ou le degré de fluidité des pâtes et mortiers a été mesurée après chaque préparation de
mélange par le test du mini-cône selon la norme UNE-EN 1015-3. Le superplastifiant a été rajouté
aux formulations dont les étalements et les affaissements ne correspondaient pas aux critères
d’ouvrabilité définies (entre 10 et 12,5 cm pour l’affaissement et entre 19 et 22,5 pour l’étalement).
L’objectif de cette mesure est d’avoir une maniabilité presque constante des formulations fabriquées
dans le cadre de cette étude, et celles précédemment testées dans [LARB 13] afin de permettre la
comparaison des échantillons entre eux, et éviter toute mauvaise compacité susceptible de fausser les
résultats.

En effet, les mortiers sont moins maniables avec l’ajout de sable, et par conséquent, les mélanges à
fortes teneurs en sable deviennent mal compactés. Cette mauvaise compacité peut induire la présence
de bulles d’air et de vides au sein des matériaux, ce qui peut fortement influencer les résultats,
notamment la masure du coefficient de diffusion qui sera plus élevée en présence de ces artefacts.
L’ajout du superplastifiant est donc indispensable pour garantir une ouvrabilité correcte des mortiers
riches en sable.

Pour les pâtes de ciment avec FS ayant un rapport E/L de 0,4 ou plus, nous avons constaté une bonne
fluidité et maniabilité du mélange, et nous n’avons donc pas eu à rajouter du superplastifiant.
D’ailleurs, plusieurs normes fixent la quantité d'eau qui fournit une consistance normale au mélange
cimentaire ; la norme (UNE EN 196-3) par exemple, considère un rapport E/L de 0,372 pour un
ciment pouzzolanique de référence. Pour les pâtes de ciment ayant un rapport E/L de 0,3, l’ajout du
superplastifiant était indispensable.

1.1.4. Les granulats


Le sable choisi pour la fabrication de tous les mortiers est un sable naturel roulé de type siliceux
(96,3% de silice) et de masse volumique totale de 2,62 t/m3. Il s’agit d’un sable inerte et très peu
poreux caractérisé par un faible taux d’absorption (0,4%). Ce sable a été utilisé en trois
granulométries différentes, afin d’étudier l’effet de la taille des grains et de la compacité du mélange
sur les propriétés diffusives des mortiers. Le sable normalisé (SN) CEN EN 196-1, possède la courbe
granulométrique la plus étalée avec une distribution de taille des grains allant de 0.08 à 2mm. Le
sable fin (SF) et le sable grossier (SG), ont des étendues granulaires plus faibles respectivement de
0,125 à 0,3 et de 0,63 à 2 mm (Voir Figure II-2 et II-3).

64
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

Figure II-2 : Courbes granulométriques du SN, SF et SG [LARB 13].

Sable normalisé (SN) Sable fin (SF) Sable grossier (SG)

Figure II-3 : Les sables utilisés vu au microscope optique [LARB 13]

L’ajout du sable et du superplastifiant modifie légèrement la quantité d’eau effective présente au


sein de la matrice cimentaire. La quantité d’eau, absorbée par les granulats et apportée par le
superplastifiant est prise en compte dans l’équation suivante :

eeff  einitiale  eabsorbée  eadjuvant


(Eq. II-1)
eeff  einitiale  S  (Ws  As )  eadjuvant

Avec eeff (kg /m3) la quantité d’eau effective, einitiale (kg/m3) la quantité d’eau ajoutée initialement au
mélange, eabsorbée (kg/m3) la quantité d’eau absorbée par les grains de sable, eadjuvant (kg /m3) la
quantité d’eau apportée par le superplastifiant, S (kg/m3) la quantité de sable, Ws la teneur en eau du
sable et As (kg /m3) la teneur en eau absorbée par le sable.

Pour le sable siliceux utilisé, le taux d’absorption est de 0,4% (As = 0,4%), et la teneur en eau la plus
faible (en saison sèche, cas le plus défavorable) est de l’ordre de Ws = 0,02%. La quantité d’eau
ramenée par le superplastifiant est également faible vu qu’il a été utilisé en petites quantités.

Les valeurs de eeff calculées pour chaque formulation sont affichées dans le tableau II-3. Les écarts
entre le rapport e/c initiale et eeff /c sont très faibles et ne dépassent pas les 1% : ils peuvent donc être
considérés comme négligeables.

65
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

1.2. Formulations et nominations


Pour les pâtes, le rapport E/L a été sélectionné entre 0,3 ; 0,41 et 0,5 et la teneur en FS varie entre 10
et 20%. Pour les mortiers, ces deux grandeurs ont été fixées respectivement à 0,41 et 10% (excepté
pour un mortier à 20% de FS), et la fraction volumique du sable variée de 0 à 65% pour les trois
granulométries de sable : SN, SF et SG.

Des formulations similaires de pâtes et de mortiers fabriqués uniquement avec du CEM I (sans ajout
de FS) ont déjà été testées et caractérisées dans le cadre du travail de Larbi [LARB 13]. Pour
permettre la comparaison entre les matériaux avec et sans fumée de silice, le choix du rapport E/L
pour la plupart des formulations permet d’obtenir une porosité initiale égale entre les formulations
sans et avec fumée de silice. Ainsi, le rapport E /L de 0,41 (pour les pâtes et les mortiers avec 10%
de FS) et le rapport E/L de 0,42 (pour les deux formulations avec 20% de FS) ont été obtenues en
considérant une porosité initiale (c.à.d. un rapport volume d’eau initial/ volume total) égale à celle
des formulations CEM I avec E/C de 0,4 et sans FS.

Le tableau II-3 résume les formulations de pâtes et de mortiers étudiées dans le cadre de ce travail.
Les formulations sont désignées à l’aide de la notation SX(Y)Z, où :

 SX désigne le type de sable, SN pour le sable normalisé, SF pour sable fin et SG pour sable
grossier. Pour les pâtes, X n’existes pas, et le S désignera Slurry pour la forme de la FS utilisé
 Y indique le pourcentage par rapport à la masse de ciment de fumée de silice (%FS)
 Z représente la fraction volumique de sable dans la formulation (Vagg) variant de 0 à 65%.
Par exemple la formulation SN(10)50 désigne le mortier de sable normalisé formulé avec 10% de FS
par masse de ciment, et 50% de teneur volumique de sable.

Ces compositions se caractérisent par une même porosité initiale. Deux autres pâtes de ciment ont
été réalisées : D-F44 et S-F44. Elles ont été fabriquées avec 10% en masse de ciment de FS, un
rapport E/L de 0,3 et respectivement avec de la FSD et la FSS. La pâte S(10)0-0,5 obtenue avec
10% de FSS, possède un rapport E/L de 0,5.

66
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

Tableau II-3 : Récapitulatif de formulations de pâtes et de mortiers avec FS

Notation E/L E/C eeff/c % FS Nature de FS Vagg (%) Sable Adjuvant

D-F44 0,3 0,334 0,335 10 FSD 0 --- 0,2%


S-F44 0,3 0,334 0 ,33 10 FSS 0 --- 0,2%
5
S(0)0 [LARB 13] 0,4 0,4 0,4 0 --- 0 --- ---
Pâtes

S(10)0 ou SN(10)0 0,41 0,456 0,456 10 FSS 0 --- ---

S(20)0 0,42 0,512 0,512 20 FSS 0 --- ---

S(10)0-0,5 0,5 0,550 0,550 10 FSS 0 --- ---

SN(0)50[LARB 13] 0,4 0,4 0,395 0 --- 50 SN ---


SN(10)10 0,41 0,456 0,455 10 FSS 10 SN ---

SN(10)30 0,41 0,456 0,453 10 FSS 30 SN ---

SN(10)50 0,41 0,456 0,454 10 FSS 50 SN 0,2%

SN(10)60 0,41 0,456 0,454 10 FSS 60 SN 1%


Mortiers

SN(10)65 0,41 0,456 0,454 10 FSS 65 SN 1%

SF(10)10 0,41 0,456 0,455 10 FSS 10 SF ---


SF(10)30 0,41 0,456 0,454 10 FSS 30 SF 0,2%

SF(10)40 0,41 0,456 0,454 10 FSS 40 SF 0,5%

SF(10)50 0,41 0,456 0,455 10 FSS 50 SF 1%

SG(10)50 0,41 0,456 0,454 10 FSS 50 SG 0,1%

SN(20)50 0,42 0,512 0,510 20 FSS 50 SN 0,5%

D’autres formulations de pâtes et de bétons ont également été confectionnées dans le cadre de ce
travail pour répondre à des besoins spécifiques et à des questions qui se sont posées au cours de cette
étude. Le détail de ces mélanges sera présenté au moment convenu, dans les prochains chapitres.

1.3. Confection et conservation des échantillons


Les formulations réalisées dans le cadre de cette étude ont toutes été élaborées avec la FSS excepté la
pâte D-F44. Avant utilisation, le slurry a été cisaillé avec un homogénéisateur Ultra-Turrax T65D
afin d’assurer l’uniformité du mélange et éviter la ségrégation des particules de FS dans la
suspension liquide. La fabrication des mortiers a été réalisée en suivant le même protocole de façon à
assurer une répétabilité dans les manipulations. Le gâchage est réalisé avec un malaxeur normalisé

67
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

de laboratoire (EN 196-1) d’une capacité de 3 litres selon le mode opératoire suivant (inspiré de la
norme NF EN 196-1):

 Introduction du sable et du ciment dans un bol humidifié.


 Mise en agitation à vitesse faible (vitesse de rotation =140± 5 tours/min) pendant 30s
 Introduction régulière du slurry puis de l’eau en continuant de malaxer
 Mise en agitation lente pendant 30 secondes
 Malaxage à vitesse rapide (vitesse de rotation= 285± 5 tours/min) pendant 60 secondes
 Arrêt du malaxeur pendant 1 minute, pendant laquelle on racle les bords et le fond du bol à
l’aide d’une spatule pour être sûr d’avoir un mélange homogène à la fin de la procédure.
 Reprise du malaxage à grande vitesse pendant 90s.
Les préparations ont ensuite été versées en deux couches dans des moules cylindriques (h=11cm et
Φ=7,2cm) et vibré à mi-hauteur et à remplissage complet afin d’évacuer les bulles d’air. La durée et
l’intensité de la vibration ont été ajustées selon la maniabilité du mélange afin d’éviter la
ségrégation. 24h après le moulage, les éprouvettes de mortiers sont démoulées et placées en cure
sous eau de chaux pendant 6 mois dans une chambre humide (HR=100% ± 5%, T=20± 1 °C) afin
d’éviter les phénomènes de lixiviation.

Après 6 mois d’hydratation, les éprouvettes ont été sectionnées au centre pour obtenir des disques
homogènes de 6 mm d’épaisseur (§II-2.2.). Un disque a été utilisé pour les tests de diffusion et les
autres pour la caractérisation de la microstructure poreuse et les investigations liées à la réactivité de
la FS. Le coefficient de diffusion effectif DeHTO a été mesuré par l’essai de type « through-out
diffusion », détaillé ci-dessous.

2. Mesure du coefficient de diffusion HTO


Le coefficient de diffusion d’un matériau cimentaire peut être mesuré selon plusieurs techniques. Les
plus connues sont les méthodes d’immersion, les essais de diffusion accélérés sous champ électrique
[NTB 99] ou les essais de diffusion naturelle en cellules. Pour l’eau tritiée (HTO), notre
radionucléide d’intérêt dans le cadre du stockage des déchets de faible à moyenne activité (chapitre
I), le coefficient de diffusion effectif peut être mesuré par l’essai de diffusion en cellule à partir du «
through-out diffusion test».

2.1. Principe de l’essai through-out diffusion


Le « through-out diffusion test» en cellule permet de mesurer le coefficient de diffusion effectif du
HTO, tout en respectant les conditions de sécurité liées à la manipulation des radioéléments.
Néanmoins, ces essais durent généralement plusieurs mois voire des années (pour les bétons) pour
atteindre le régime permanent.

2.1.1. Montage de la cellule


Le dispositif expérimental permettant de réaliser l’essai est une cellule de diffusion fabriquée en
PVC dont le schéma de principe est représenté ci-dessous (Figure II-4). Un disque du matériau à
étudier sépare les compartiments amont et aval de la cellule de diffusion. L’étanchéité est assurée
d’abord par la colle époxy Araldite® (colle composée d’une résine époxyde et d’un agent

68
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

polymérisant) permettant de coller l’échantillon aux deux flasques, puis par les joints toriques et les
vis qui servent à fixer l’échantillon entre les deux demi-cellules. La partie supérieure de chaque
compartiment est équipé d’un orifice permettant l’introduction des solutions et la réalisation des
prélèvements (Figure II-4).

Figure II-4 : Schéma de principe (à gauche) et photos (à droite) d’une cellule de diffusion.

2.1.2. Vérification de l’étanchéité


Après montage des cellules, les échantillons sont d’abord mis « en équilibre » en remplissant les
compartiments amont et aval (volume d’environ 110ml chacun) par une solution « interstitielle »
reconstituée. Cette opération permet d’un côté de stabiliser l’échantillon mais aussi de vérifier
l’étanchéité de la cellule en réalisant des pesées successives pendant deux semaines. En l’absence de
fuites au niveau de la cellule, l’essai de diffusion HTO peut ainsi démarrer.

La composition de la solution interstitielle reconstituée a été inspirée de la norme NF M60-326


(2006), et enrichie par les retours d’expériences issus des expérimentations conduites au Laboratoire
de Mesures et Modélisation de la Migration des Radionucléides (L3MR) du CEA de Saclay,
laboratoire dont lequel ont été réalisés nos essais. Elle est composée de [NaOH]=0,1mol/l ;
[KOH]=0 ,1mol/l ; [CaO]=2mmol/l avec un pH=13,1. Le calcium a été rajouté (par rapport à la NF
M60-32) pour éviter la lixiviation des échantillons au cours de l’essai.

2.1.3. Lancement de l’essai


Le compartiment amont est dopé par l’eau tritiée avec une concentration C0≈5x10-9 Bq/m3 tandis que
le compartiment aval est rempli par la solution interstitielle reconstituée (C 1=0). Sous l’effet du
gradient de concentration, l’espèce HTO migre vers les zones à concentration faible c.à.d vers le
compartiment aval en passant par l’échantillon. La température de réalisation des essais est fixée à
21 ± 1°C.

69
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

L’activité transférée du compartiment amont vers le compartiment aval est suivie dans le temps par
des prélèvements successifs, jusqu’à atteindre le régime permanente. L’appareil de comptage par
mesure de scintillation liquide (spectrométrie β) est utilisé pour détecter la quantité d’eau tritiée
relâchée à l’aval (Figure II-5). Le flux d’activité en régime permanent permet de déduire le
coefficient de diffusion effectif du matériau.

Figure II-5 : Appareil de scintillation liquide (L3MR)

Une seule cellule a été montée par formulation, soit 16 cellules au total. Les essais n’ont pas été
répétés pour des raisons de sécurité (limiter l’exposition radioactive), des raisons financières (essais
très cher) et des contraintes techniques (espace restreint en sorbonne). Cependant, la reproductibilité
de ces essais est généralement assez bonne d’après le travail de Larbi [LARB 13] qui avait obtenu un
écart-type maximal de 15% sur les coefficients de diffusion mesurés dans les matériaux les plus
diffusifs. Pour les échantillons très peu diffusifs (ce qui est notre cas), l’erreur était plus faible.

2.2. Dimensionnement des échantillons


Les échantillons de pâtes et de mortiers placés entre le compartiment amont et aval sont obtenus par
découpe sous eau de la partie centrale de chaque éprouvette, au moyen de la tronçonneuse Escil
(modèle Brillant 250) (Figure II-6). La vitesse d’avance du disque de découpe a été fixée à 10
mm/min (vitesse faible) afin d’offrir une surface d’échantillon lisse et peu striée.

Figure II-6 : Découpe des disques de 6 mm dans la partie centrale de l’éprouvette au moyen de la
tronçonneuse ESCIL

L’épaisseur choisie pour les échantillons est de 6mm±0,1mm. Ce choix représente un compromis
entre deux raisons. D’abord, une raison de représentativité, car pour avoir des résultats fiables,

70
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

l’échantillon doit avoir au minimum une épaisseur trois fois plus grande que le diamètre maximale
des grains (1,8mm pour le SN). Ensuite, pour une raison de rapidité, étant donné que le temps
d’obtention du régime permanent (t) est fonction du carré de l’épaisseur de l’échantillon (x avec x=k.
√t), et par conséquent plus la lame est épaisse plus la durée de l’essai risque d’être trop importante.

Après la découpe des échantillons, ces derniers ont été polis des deux faces afin de garantir une
épaisseur uniforme partout et d’assurer une fixation et un serrage parfaits au niveau des cellules de
diffusion. L’épaisseur moyenne de chaque échantillon a été calculée à partir de la moyenne
arithmétique des mesures effectuées à l’aide d’un comparateur en six points différents.

2.3. Traitement et analyse des résultats


La quantité de radioéléments transférés du compartiment amont vers le compartiment aval est suivie
dans le temps par des prélèvements successifs (de 0,1ml à l’amont et de 1ml à l’aval avec
compensation) une à deux fois par semaine, et analysés par scintillation liquide. Le compartiment
aval doit être vidangé dès que sa concentration en traceur dépasse 3% de la concentration initiale à
l’amont. Cela permet de maintenir une concentration en espèce diffusante presque nulle en aval. Ce
mode opératoire est conçu pour assurer des conditions aux limites constantes pendant l’essai. Une
concentration C0 fixe en amont et une concentration nulle en aval pendant toute la durée de l’essai
(C(x=0,t)=C0 ; C(x=L,t)=C1=0 ceci ∀t≥0).

D’un autre côté, la résolution analytique de la deuxième loi de Fick (Equation I-12 §I-B-1.2.) pour
une paroi d’épaisseur L (ici = 6 mm) soumise à un gradient de concentration tel que la concentration
soit égal à C0 sur une face et soit nulle sur l’autre face, est donnée par l’équation :

 x 2  1 nx n 2 2 t 
C ( x, t )  C 0 1    sin( ) exp(  De 2 
) (Eq. II-2)
 L  n 1 n L  m L 
Dans les mêmes conditions, le flux de diffusion relâché sur la face à concentration nulle de la paroi
(x=L), peut être déduit de cette équation et de la 1 ère loi de Fick et s’exprime par l’équation (Eq. II-
4):

DeC0 
n2 2t
J (t )  (1  2 cos(n ) exp(  De )) (Eq. II-4)
L n 1  m L2

La quantité cumulée d’espèces qui a diffusée dans le compartiment aval est obtenue en intégrant le
flux J(t) sur le temps et sur la section de la surface exposée de l’éprouvette S:

Q(t ) L L2 2L2 


cos(n ) n 2 2 t
SC 0
 De t 
6
 2


n 1 n 2
exp(  De
 L2
) (Eq. II-5)
m

Aux temps longs, la quantité cumulée d’espèces, au régime permanent, présente une asymptote
SC0 
linéaire donnée par : Q( régime _ permanent)  ( De t  m ) (Eq. II-6)
L 6

71
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

La figure II-7 montre l’allure générale de la quantité Q(t ) L représentant l’activité radioactive de
S .C0
HTO relâchée et cumulée dans le compartiment aval, et de la courbe du flux J (t ) L à travers la
C0
lame mince du mortier SN(10)60.

Figure II-7 : Le flux sortant (JL/C0) et l’activité radioactive cumulée (QL/SC0) de HTO dans le
compartiment aval d’une cellule de diffusion du mortier SN(10)60

L’ajustement de l’équation analytique (II-5) avec les points expérimentaux de la quantité Q(t ) L
S .C0
permet de déduire le coefficient de diffusion effectif De obtenu à partir de la pente au régime
permanent, mais également le coefficient αm retrouvé à partir de l’abscisse à l’origine Ti puisque
 .L2
Ti  (s) (Eq. II-7)
6.De

Ti : le temps de retard ou le « time-lag» est une notion mathématique qui n’est utilisée qu’en qualité
de repère temporel du transfert. Il permet de comparer les temps d’obtention des régimes
permanents, pour deux espèces différentes j et k, ou deux matériaux différents. Le « time-lag » ne
représente pas le temps que met une molécule d’eau tritiée pour franchir la lame mince ‘décrit par T t
sur la figure II-7). Un temps d’essai ≥ 4Ti est considéré nécessaire pour déterminer le coefficient de
diffusion de façon fiable [LAM 93].

La solution analytique donnée par l’équation (II-5) est introduite dans un outil qui s’appelle MIED
(Modèle d’Interprétation des Expériences de Diffusion). Cet outil présente l’avantage de prendre en
compte en plus l’appauvrissement de l’amont au cours du temps et la décroissance radioactive de
l’élément diffusif (§I-B-1.2.3.). MIED est un outil d’interprétation classiquement utilisé pour
interpréter les expériences de transport. Il s’agit d’une bibliothèque dynamique développée au
laboratoire L3MR et codée en Fortran90 et en Visual Basic pour Excel [RAD 06]. Cet outil permet
de calculer les concentrations (activités) instantanées amont et aval en fonction de la géométrie
expérimentale (épaisseur, surface diffusante), des paramètres du matériau (coefficient de diffusion,
porosité, masse volumique sèche), et des propriétés du traceur (période radioactive). Couplé au

72
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

solveur d’Excel, il permet d’obtenir par régression quadratique le jeu de paramètres d’entrées le plus
représentatif des valeurs expérimentales (seules les caractéristiques du milieu poreux sont en général
ajustées à savoir le De et le αm). Le coefficient de diffusion De obtenu par ajustement avec MIED est
le même obtenu à partir de la pente de la courbe expérimentale Q.L/S.C 0 au régime permanent
[LARB 13].

Les valeurs de coefficients de diffusion des matériaux testés seront affichées dans le tableau
récapitulatif II-5.

La pénétration des radionucléides comme le HTO dans les matériaux cimentaires se fait à travers le
réseau poreux. Il est donc indispensable de caractériser la structure poreuse des pâtes et des
mortiers afin de pouvoir expliquer et interpréter les coefficients de diffusion effectifs obtenus pour
chaque matériau.

3. Caractérisation de la microstructure poreuse


Les techniques d’investigation de la structure poreuse (texture) des matériaux cimentaires sont très
nombreuses et doivent être choisies selon la gamme de taille de pores à étudier. Il est nécessaire de
faire appel à différentes méthodes pour caractériser les différentes catégories de pores, car aucune
technique n’est capable à elle seule de couvrir une gamme de taille de pores aussi étendu que celui
du matériau cimentaire.

Dans le cadre de ce travail, les techniques choisies pour la caractérisation texturale des pâtes,
mortiers et bétons sont les plus couramment utilisées dans la littérature, à savoir la mesure de la
porosité à l’eau par pesée hydrostatique, les mesures par intrusion mercure et la sorption d’azote
pour certaines formulations. Ces outils sont tout à fait complémentaires.

Pour l’investigation de la porosité de l’ITZ à l’interface granulat/ pâte, on utilise plus


particulièrement une procédure d’acquisition (MEB) et d’analyse d’images qui permet de déterminer
le profil de porosité au voisinage du granulat.

3.1. Porosité accessible à l’eau


La porosité accessible à l’eau est un paramètre de premier ordre dans l’évaluation et la prévision de
la durabilité. C’est en effet, un indicateur de durabilité au sens du document publié par l’AFGC en
2004 [ARL 07]. Il existe plusieurs techniques pour mesurer la porosité à l’eau et parmi elles, la
détermination de la porosité accessible à l’eau par pesée hydrostatique selon le mode opératoire
AFPC-AFREM [AFREM 97]. Il s’agit d’une mesure simple et praticable sur une large variété de
matériaux qui permet de déterminer à la fois la porosité globale et la masse volumique apparente.
L’essai consiste à déterminer par pesée les trois grandeurs suivantes :
- La masse saturée en eau de l’échantillon dans l’air Mair
- La masse saturée de l’échantillon immergé dans l’eau : Meau
- La masse de l’échantillon dans l’air à l’état sec après séchage Msec. L’échantillon a été pesé jusqu’à
masse constante entre deux pesées successives d’une journée : ΔM/M < 0,5%.

A partir de ces données, il est alors possible d’accéder à la porosité accessible à l’eau (Eq. II-8) et à
la masse volumique apparente de l’échantillon (à l’état sec) (Eq. II-9) :

73
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

M air  M sec
Porosité accessible à l’eau :   (Eq. II-8)
M air  M eau
M sec
Masse volumique apparente :  app  (Eq. II-9)
M air  M eau
La température de séchage proposé par le groupe (AFREM, 1997) est de 105±5°C. Le séchage à
cette température est de plus en plus contesté. Des études comme celles de Gallé [GAL 01], de
Winslow [WIN 94] ou de Baroghel-Bouny [BAR 94] ont montré qu’à cette température, la structure
poreuse peut-être altérée et endommagée. Certains hydrates comme l’ettringite, le gypse et les C-S-H
commencent à se déshydrater plus tôt, respectivement vers 60°C, 80°C et au-delà de 100°C. La
porosité à l’eau représentant l’eau libre au sein du matériau correspond alors à celle estimée par
séchage à 60°C, la plus proche à celle obtenue après séchage sous vide ou par lyophilisation [GAL
01]. Ainsi dans cette étude, le séchage à 60°C sera privilégié pour la mesure de la porosité accessible
à l’eau. Les porosités à 80° et 105°C ont également été mesurées pour les utilisateurs qui adoptent
toujours ces températures, et qui souhaitent les utiliser pour comparer avec d’autres matériaux.

Les mesures de la porosité à l’eau ont été répétées deux fois pour chaque formulation et chaque
température de séchage, et la valeur moyenne reportée comme résultat. Les échantillons, découpés
au centre des éprouvettes, ont des dimensions (≈2 cm3) supérieures ou égales à 3 fois le plus gros
granulat, pour être les plus représentatifs possible. Le tableau II- 5 affiche les valeurs des porosités à
l’eau θH2O (et des masses volumiques apparentes ρH2Oapp) à 60, 80 et 105°C avec leurs écarts-types.

Pour une meilleure visibilité, les porosités à l’eau pour les trois températures de séchage ont été
tracées dans la figure II-8. Les erreurs relatives sont très faibles (ne dépassent pas les 4%) et donc
n’apparaissent pas sur le graphe.

Figure II-8 : Comparaison des valeurs moyennes de porosité à l’eau par séchage à trois
températures différentes : 60, 80 et 105°C.

74
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

La porosité à l’eau est surestimée avec l’application d’un séchage à forte température (80 et 105°)
car l’eau liée à certains hydrates est également mobilisée à ces températures et pas uniquement l’eau
libre. L’écart entre porosités à différentes températures a tendance à diminuer avec l’ajout d’agrégats
(volume de pâte plus faible), et à augmenter avec l’ajout de FS, formulations qui présentent
probablement une teneur en hydrates plus importante du fait de la réaction pouzzolanique de la FS
(réf. §I-A-2.1.3).

Dans les prochains chapitres, on utilisera uniquement les valeurs de porosité déterminées à partir
d’un séchage à 60°C.

3.2. Distribution de la taille des pores


Le réseau et la distribution poreuse d’un matériau cimentaire sont extrêmement complexes car les
pores obtenus après hydratation ont une géométrie complexe et des dimensions variables (§I-A-1.3.).
Il existe plusieurs méthodes de mesure de la taille des pores ; les plus couramment utilisées sont les
mesures de porosimétrie par intrusion mercure (PIM) et par sorption d’azote. Ces techniques sont
complémentaires et permettent la caractérisation de la structure des matériaux à l’échelle
microporeuse, mésoporeuse et macroporeuse (Figure I-8) (de 1 nm à plusieurs centaines de µm).
Cependant, préalablement à ces mesures, le prétraitement des échantillons est indispensable pour que
l’ensemble du réseau poreux soit accessible au fluide à injecter. L’eau libre, ainsi que les gaz et les
vapeurs contenus dans les pores de l’échantillon de matériau à analyser, doivent être évacués par une
technique de séchage et de dégazage de l’échantillon.

3.2.1. Préparation et prétraitement des échantillons


Le résultat de l’investigation de la structure poreuse dépend fortement du prétraitement appliqué. Par
exemple, la porosité et la surface spécifique d’un solide microporeux déterminées par sorption
d’azote peuvent facilement varier de ± 30%, selon la procédure de séchage adoptée [BAR 02].

En effet, lors du prétraitement, un séchage insuffisant réduira l’accès au réseau poreux et sous-
estimera les valeurs de porosité et de surface spécifique, tandis qu’un prétraitement trop violent peut
conduire à des altérations de la microstructure de l’échantillon de matériau. La technique de séchage
idéale, qui préserve la microstructure et qui peut retirer uniquement l’eau libre du matériau, n’existe
malheureusement pas. Les différentes méthodes de séchage utilisées affectent la microstructure de
différentes façons : soit en induisant des microfissures, ou en altérant les hydrates en faisant perdre
une partie d’eau chimiquement liée. Aussi, dans la littérature, un consensus sur la meilleure
technique de séchage à utiliser n’existe pas.

Dans notre cas, le prétraitement appliqué consiste en une « cryosublimation » ou à une


« lyophilisation » des échantillons sous vide (6. 10-4 mbar), durant 7 jours, après immersion dans de
l’azote liquide (-77K). Cette technique de Freeze-drying (ou F-drying) est critiquée par plusieurs
auteurs mais reste tout de même défendue par beaucoup d’autres.

Gallé [GAL 01], par exemple montre que la technique de lyophilisation est un procédé de séchage
approprié pour l’investigation de la structure porale des matériaux cimentaires par (PIM). Moukwa
[MOU 88] considère que le prétraitement par lyophilisation est le moins néfaste vis-à-vis de la
microstructure, grâce à la sublimation de la glace qui provoque des contraintes capillaires plus
faibles que celles générées aux limites solide – liquide - vapeur lors d’un séchage normal. Korpa

75
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

[KOR 06] confirme également cette atténuation des effets des pressions capillaires dues à la
sublimation-évacuation (F-drying). Il affirme que l’utilisation de la F-drying donne une « image plus
réelle » de la microstructure, tandis que la méthode D-drying (séchage sous vide à -79°C et ~ 6,7e-2
Pa) [KOR 06], considérée par plusieurs laboratoires comme l’une des meilleures techniques de
séchage, donne des résultats légèrement moins bons. D'autres investigations [KOR 06] [KON 93]
ont aussi montré une préservation des pores fins (<5 nm) avec l’utilisation de la F-drying.

Pour l’analyse chimique par ATG (Analyse ThermoGravimétrique) et pour arrêter l’hydratation des
échantillons saturés, Collier et al. [COL 08] ont constaté que le F-drying et les échanges de solvants
avec de l’isopropanol sont les techniques les plus efficaces trouvés à ce jour.

Ainsi et pour toutes ces raisons préalablement citées, la technique de lyophilisation reste la technique
la plus couramment utilisée par les laboratoires.

Maintenant, il est vrai que d’autres travaux de recherche ont prouvé le contraire, à savoir que le
prétraitement par lyophilisation affecte aussi bien les pores du gel que les pores capillaires et
endommage la microstructure à cause de l’effort thermomécanique induit [POW 47] [FEL 64].
Cependant, toutes les autres techniques de séchage affectent plus ou moins la structure physique ou
chimique des matériaux cimentaires, et les avis restent partagés sur les effets de la lyophilisation.

Pour finir, il est à rappeler que l’un des objectifs principaux de ces caractérisations microstructurales
est de pouvoir comparer des échantillons de pâtes et de mortiers entre eux. Il est donc plus important
d’utiliser la même technique de séchage pour tous les échantillons, c’est le cas dans cette étude avec
la F-drying. Des échantillons représentatifs des matériaux (2 à 3 cm 3) ont été prélevés sur les disques
découpés. Trois échantillons de chaque formulation ont été testés en PIM et en adsorption azote, et
la moyenne est donnée comme résultat. En général, ces essais montrent une bonne reproductibilité
(écart type moyen n’excédant pas les 10%).

3.2.2. Porosimétrie par intrusion mercure (PIM)


La porosimétrie par intrusion (ou injection) de mercure est un outil d’investigation de la structure
méso et macroporeuse des matériaux, qui repose sur le caractère non mouillant du mercure. Pour
faire pénétrer ce dernier dans un milieu poreux vide d’air, il faut lui appliquer une pression d’autant
plus forte que les dimensions des pores sont faibles. Les essais ont été réalisés à l’aide d’un
porosimètre de la marque Micrometrics (modèle Autopore IV 9500).

Le principe consiste d’abord à immerger sous vide dans un bain de mercure un échantillon sec déjà
lyophilisé (Figure II-9 (a)) et de lui appliquer ensuite une pression de mercure PHg qui augmente de
façon incrémentale et principalement sur deux phases. La première phase est une intrusion en basses
pressions jusqu’à 0,66 MPa et la deuxième, une pénétration à haute pression jusqu’à 413,4 MPa. Le
volume cumulé de mercure Vp entrant dans les pores est mesuré à chaque incrément V=V(P Hg), et le
diamètre équivalent d’accès des pores (Dp) (supposés cylindriques) déterminé en fonction de la
pression d’intrusion PHg à partir de l’équation de Washburn [WAS 21] :

4 Hg cos( Hg )
Dp   (Eq.II-10)
PHg

76
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

Où σHg est la tension superficielle de mercure (σ Hg=0,480 N/m et σHg=0,485 N/m sont les valeurs les
plus couramment utilisées [ARL 07]) et θHg l’angle de mouillage du mercure dans le matériau
variant de 130° à 145° [GOO 81] selon la nature du solide (avec une valeur moyenne résultant d’un
grand nombre d’expériences et retenue par plusieurs laboratoires de 141°C [ARL 07]).

A l’issu de cet essai, le résultat brut décrit le volume cumulé de mercure V introduit (et évacué) en
fonction du diamètre des pores accessibles (Figure II-9(b)). Cette courbe d’intrusion, ou sa dérivée,
permet de déterminer les principales familles des pores, ainsi que le diamètre seuil des pores
capillaires (ou le rayon critique défini dans §I-A-1.3.1. ou §I-A-2.2.1.), un diamètre d’une grande
importance sur les propriétés de diffusion au sein de la matrice cimentaire, comme le montre le
chapitre suivant.

(a) (b)
Figure II-9 : (a) têtes de pénétromètres après injection de mercure en basse pression -3
échantillons par formulation- (b) Cycle d’intrusion-extrusion de mercure sur un échantillon de
pâte SN(10)0

On peut également définir, à partir de cette courbe, deux paramètres essentiels : la connectivité αc, et
la porosité totale au mercure: θHg.

La connectivité est une notion théorique qui décrit le nombre de connexions qu’offre un pore avec
ses voisins, et qui permet d’évaluer qualitativement le pourcentage de mercure piégé. Il est en effet,
important de noter qu’à l’intrusion, le mercure inséré révèle la connectivité et la percolation du
réseau poreux, tandis qu’à l’extrusion, le volume de mercure, non restitué en totalité, met en
évidence les formes et les tailles irrégulières de la structure poreuse du matériau [MAT 01] [MATA
01]. La connectivité αc est donnée par l’expression :
e
Vmin V i
c  (Eq. II-11)
i
Vmax V i

Où Vi est le volume de mercure introduit pour une pression de 0,1 MPa (pression atmosphérique, et
valeur finale à laquelle le mercure est évacué), Vimin et Vimax correspondent respectivement aux
volumes minimal extrudée et maximal introduit comme on peut le voir sur la Figure (II-9(b)). Le
pourcentage de mercure piégé (αc) permet l’évaluation qualitative de la connectivité des pores : plus
αc est élevé et moins le milieu est connecté.

77
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

La porosité totale au mercure θHg décrit le volume de pores connectés envahis par le mercure à la fin
de la phase d’intrusion. Elle est obtenue en multipliant le volume cumulé maximal introduit V imax de
pâtes, mortiers ou bétons par leurs masses volumiques respectives (au mercure) :

 Hg  Vmax
i
ml / g    Hg g / ml (Eq. II-12)

Les valeurs de porosité totale θHg au mercure pour chaque formulation sont regroupées dans le
tableau récapitulatif II-5. La porosité au mercure, comparé à celle de l’eau (60°C), est nettement plus
faible pour toutes les formulations testées (Figure II-10).

Figure II-10 : Valeurs moyennes de porosités mesurées par porosimétrie à l’eau et par intrusion
mercure

Cette différence entre θHg et θH O est liée à l’inaccessibilité du mercure aux porosités très fines. En
2

effet, les C-S-H ne sont que très partiellement accessibles par intrusion de mercure puisque, compte
tenu des pressions maximales disponibles, le diamètre minimal accessible au mercure est de 3 nm.
Cette contrainte d’accessibilité explique également les faibles valeurs de surface spécifique mesurées
par la PIM (au moins 80% de la surface spécifique provient des C-S-H [BAR 94]).

Pour compléter la description de la structure poreuse dans les domaines microporeux (ouvertures de
pores inférieurs à 3 nm), non accessibles au mercure, il est souvent fait appel aux mesures par
adsorption-désorption de gaz (azote dans notre cas d’étude).

La porosimétrie par intrusion de mercure est une technique qui possède d’autres inconvénients et qui
a souvent été critiquée. L’application des très hautes pressions d’injection est susceptible
d’endommager le réseau poreux très fin. Par ailleurs, le modèle de pores cylindriques -accessibles au
mercure depuis la périphérie du matériau- peut entrainer une mauvaise attribution du volume injecté
dans le cas où des pores de plus grandes dimensions sont connectés via des pores de faibles
diamètres [DIA 00] [ABE 99].

Cependant, cette technique reste particulièrement utile et performante pour permettre une étude
comparative de la percolation et de la distribution de la taille des pores dans des systèmes où seul un
paramètre de composition varie (soit E/L, Vagg, %FS, granulométrie…). Elle demeure l’une des

78
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

rares méthodes capable d’explorer une gamme de pores aussi large (360 µm à 3 nm) et de fournir des
indicateurs pour l’interprétation ou la prédiction des propriétés de transfert des matériaux (rayon
critique, θHg).

3.2.3. Sorption d’azote


Les isothermes d’adsorption-désorption d’azote ont été obtenues dans le domaine de pressions
relatives (0,01≤ P/P0 ≤ 1) en utilisant un dispositif expérimental automatisé communément appelé
l’appareil BET (de la marque Micrometrics). Cet appareil comprend un poste d’analyse et deux
postes de dégazage utilisés pour essayer d’éliminer l’eau résiduelle adsorbée dans les pores du
matériau lyophilisé et avoir une surface « propre » avant toute mesure d’adsorption. Tous les
échantillons ont été fragmentés en petits morceaux de quelques millimètres puis dégazés pendant 24h
à 60°C et 6x10-4 mbar, avant le lancement de l’essai.

Les mesures d’adsorption d’un gaz chimiquement inerte tel que l’azote permettent la détermination
de la surface spécifique (indicateur de la finesse de division d’un milieu poreux) par la méthode BET
[BRU 38]. Cette méthode consiste à relier le volume des molécules adsorbées (adsorbat) à la surface
du solide (adsorbant), dans le domaine des faibles pressions relatives (0,05≤P/P 0≤0,40). A partir du
tracé de l’isotherme d’adsorption, on détermine le volume de gaz adsorbé sous forme d’une
monocouche de molécules (V0). Connaissant l’aire d’encombrement d’une molécule d’adsorbat
(AN2=0,162 nm2), on détermine la surface spécifique (SN2) du matériau exprimée en m2/g par la
formule suivante :

N A .V0 . AN 2
S N2  (Eq. II-13)
VM

Avec NA : le nombre d’Avogadro = 6,023. 1023 et VM, le volume molaire de l’adsorbat = 22 410 cm3
aux conditions normales de température et de pression (273,15 K, 1 bar).

A partir des isothermes de désorption, la distribution de la taille d’ouverture des micro- et mésopores
peut être estimée [GRE 82] [CON 06]. L’intérêt de cette méthode est qu’elle permet de compléter les
spectres poreux obtenus par PIM en investiguant des pores de diamètre inférieure à 3 nm, et sans
aucun risque d’endommager le matériau (méthode non-destructive). La distribution de la taille des
pores est calculée en appliquant la théorie BJH (Barrett, Joyner and Halend) [BARR 51] sur la
branche de désorption, en supposant que celle-ci représente l’équilibre de condensation capillaire, et
que le rayon du ménisque est donné par l’équation de Kelvin-Laplace. Les pores sont supposés
cylindriques, et leurs parois tapissées d’une couche multimoléculaire d’azote dont l’épaisseur dépend
de la pression relative d’équilibre.

Les auréoles microporeuses présentes à l’interface granulat/pâte ne peuvent pas être précisément
quantifiées par porosimétrie au mercure ou par adsorption d’azote. Pour l’analyse de ces zones, il
faudrait plutôt faire appel à la microscopie électronique à balayage couplée à l’analyse d’images.

79
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

3.3. Profil de porosité à l’interface granulat/pâte


L’information sur la porosité et l’épaisseur de l’ITZ est indispensable pour améliorer la
compréhension et aider à l’interprétation des résultats de diffusion HTO, surtout dans le cas où ces
zones percolent et peuvent participer fortement à l’augmentation du coefficient de diffusion (§I-A-
1.3.2).

Le protocole établi pour l’analyse de l’ITZ a été inspiré des travaux de Wong & Buenfeld [WON 06]
et de Scrivener [SCR 04] et a déjà été appliquée par Larbi [LARB 13] sur les mortiers CEM I sans
ajouts. Ce protocole consiste en une succession d’étapes (détaillées ci-dessous) allant de la
préparation des surfaces à l’analyse des images acquises par le MEB.

3.3.1. Polissage et Préparation des surfaces à observer


Quand la surface de l’échantillon n’est pas plane, le contraste topographique devient prépondérant
[PAQ 06] ce qui rend la distinction des phases (anhydres, pores, C-S-H...), à partir des images MEB,
très difficile. La section à observer au MEB pour l’analyse de la porosité doit donc être plane et
polie.

La préparation des échantillons consiste d’abord à sécher le matériau afin de retirer l’eau résiduelle
des pores. L’objectif étant par la suite de pouvoir saturer les pores sous vide d’une résine époxy qui
va contribuer à conserver la morphologie du réseau poreux en la consolidant et en lui permettant de
résister aux efforts mécaniques induits par le polissage.

Pour le séchage des échantillons, on a aussi opté pour la lyophilisation, pour les mêmes raisons que
celles précisées dans la section §II-3.2.1. Ce mode de conditionnement a été utilisé par de nombreux
auteurs qui ont fait appel à l’imagerie MEB pour la caractérisation des matériaux cimentaires [KJE
03] [WON 06] [WONG 06] [DIA 08]. Les échantillons ont été découpés au centre des disques de 6
mm, trempés dans de l’azote liquide et introduits dans un lyophilisateur de type LYOVAC GT2
pendant 7 jours.

Une fois les échantillons séchés, ils sont placés dans un moule d’enrobage de 30 mm de diamètre et
imprégnés sous vide par une résine Epoxy. Cette saturation sous vide des pores permet de consolider
le matériau et éviter qu’il se désagrège au cours du polissage. La résine est ensuite mise à sécher (à
durcir) pendant 24h avant de procéder au démoulage et d’entamer l’étape de polissage.

L’état de surface plan recherché est atteint en réalisant des polissages successifs au moyen d’une
polisseuse de type Tegramin (Struers). Des disques abrasifs de carbure de silicium de granulométrie
de plus en plus fine (220, 600, 1200) ont été utilisés avec comme lubrifiant, l’éthanol. Des disques
diamantés de taille de grains de 9 µm; 3 µm; 0,3 µm et jusqu’à 0,04 µm lubrifiés avec une pâte
diamanté et d’autres lubrifiants non aqueux ont également été employé pour affiner le lissage de la
surface. La vitesse de rotation des disques, la force d’abrasion et le temps de polissage ont
respectivement été fixés à 70 tours/minute, 90N et 5 min.

Pour être observable facilement au microscope, la surface de l’échantillon est ensuite rendue
conductrice par une « métallisation » au carbone. L’échantillon final ressemble à ceux de la figure II-
11.

80
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

Figure II-11 : Echantillons de mortiers: lyophilisés, enrobés à la résine, polis et métallisés

3.3.2. Acquisition d’images


Les échantillons préparés ont été observés au MEB JEOL® 5410LV sous un vide poussé (3,68 10-4
Pa), à une distance focale de 10 mm et sous une tension d’accélération des électrons de 15 keV.
L’acquisition des images a été effectuée en mode d’électrons rétrodiffusées BSE (Back-Scattered
Electrons mode), une émission très sensible à la composition chimique et idéale pour pouvoir
identifier les différentes phases des matériaux cimentaires [SCR 04].

En effet, chaque phase de la microstructure (pores, résidus anhydres, C-S-H ou ettringite, etc)
possède un niveau de gris (allant de 0 pour le noir à 255 pour le blanc-Figure II-12), qui permet de le
distinguer des autres. Plus l’élément chimique est de numéro atomique élevé, plus il est contrasté.
Pour les pores par exemple, imprégnés de résine de numéro atomique faible, le niveau de gris est
proche de 0 (couleur noire) sous émission BSE.

Figure II-12 : Echelle des niveaux de gris : 0 correspond au noir et 255 au blanc

Le contraste et la taille sont fixes pour toutes les images dédiées à l’analyse d’images. 20
acquisitions ont été réalisées pour chaque formulation afin d’avoir une bonne estimation du profil de
porosité au voisinage du granulat [WON 06]. Le niveau de contraste est reproductible entre plusieurs
images d’un même échantillon ce qui permet par analyse d’images, la quantification des différentes
phases de la microstructure- surtout les pores au voisinage du granulat qui nous intéressent ici.
Toutes les images prises contiennent un seul granulat localisé sur le côté, pour faciliter le traitement.

3.3.3. Traitement et analyse d’images


Une étude bibliographique s’est imposée afin de déterminer les différentes méthodes de traitement
d’images existantes appliquées au cas des matériaux cimentaires. Les principales méthodes sont
issues des travaux du groupe du laboratoire des matériaux de construction à l’EPFL, du Laboratoire
de Matériaux et Durabilité des Constructions (LMDC) à Toulouse et du groupe de Durabilité des
bétons à l’Imperial Collège à Londres. Ces approches présentent certes quelques différences, mais le

81
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

concept général pour les mortiers et bétons reste le même, et consiste en trois étapes essentielles : la
segmentation de la phase d’intérêt, la segmentation du granulat, et la quantification de la phase
d’intérêt.

Pour le calcul du degré d’hydratation par exemple, la phase d’intérêt qui sera segmenté et dont la
surface sera quantifiée, est représentée par les grains anhydres. Dans notre cas d’étude, on s’intéresse
à déterminer le profil de porosité au voisinage du granulat et donc la phase concernée ici correspond
aux pores du matériau.

Ce travail de segmentation et d’évaluation a été réalisés par un l’outil d’analyse d’image MEB,
« Image J ». Il s’agit d’un logiciel du domaine public (téléchargeable gratuitement [IMAGE J]), écrit
en Java par le NIH (National Institute of Health), et adaptable à toutes les plateformes (Windows,
Mac ou Linux). Son utilisation est simple et pertinente pour la caractérisation du profil de porosité de
l’ITZ.

3.3.3.1. Segmentation des pores


La segmentation des pores à partir d’une image avec niveaux de gris (0-255), nécessite d’abord la
fixation d’une valeur seuil qui servira à classer chaque pixel selon son intensité dans une image
binaire comportant uniquement deux valeurs, noir (0) et blanc (255). Autrement dit, si le pixel a un
niveau de gris inférieur à celui de la valeur seuil, il prendra la valeur 0 (couleur noir), sinon (si son
niveau de gris est au contraire supérieur à la valeur seuil) il prendra la valeur 255 (blanc).

Dans la littérature, de nombreuses méthodes existent pour la détermination de cette valeur seuil, très
importante pour la quantification de la porosité avec une meilleure précision. Scrivener par exemple
[SCR 04] montre qu’elle correspond au point d’intersection des tangentes aux courbes pics des pores
et des C-S-H dans l’histogramme des niveaux de gris (Figure II-13(a)). Ce niveau seuil de
segmentation des pores se situe aux alentours de 50 pour une pâte de ciment Portland. Sa technique a
été adoptée pour la détermination du niveau de gris seuil à partir de l’histogramme de mortier
(Figure II-13(b)). Elle permet de donner une segmentation très proche de la morphologie des pores
telle présentée sur l’image MEB (Figure II-14).

82
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

(a) (b)

Figure II-13 : Détermination du niveau seuil des pores à partir de l’histogramme des niveaux de
gris (a) d’une pâte de ciment observée par Scrivener [SCR 04], (b) du mortier SN(10)60

La particularité de l’histogramme de mortier par rapport à celui de la pâte, c’est qu’il contient un pic
en plus, celui des granulats (le 1er pic sur la Figure II-13(b)). Pour le pic de portlandite CH, on
n’arrive pas bien à le détecter dans nos images, soit parce qu’il est confondu et masqué par celui des
C-S-H à cause d’une moins bonne résolution, soit parce que la portlandite est consommé par la
réaction pouzzolanique ce qui peut expliquer sa faible quantité au sein de la matrice cimentaire. La
teneur en CH sera déterminée plus précisément au moyen de l’ATG (§II-4.2.).

Dès lors que le niveau de gris seuil est déterminé pour chaque photo de mortier (ici aux alentours de
55), la segmentation des pores peut être automatisée. La figure II-14, présente une image MEB du
mortier SN(10)60 (avec un granulat sur le côté droit), et à droite la segmentation des pores par la
méthode d’intersection des tangentes [SCR 04].

Figure II-14 : Image BSE du mortier SN(10)60 (à droite), segmentation des pores par la méthode
de l’intersection des tangentes [SCR 04] (à gauche)

83
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

3.3.3.2. Segmentation des granulats


Après la segmentation des pores, la deuxième étape dans le traitement d’images est la segmentation
des granulats. Cette étape consiste, comme pour les pores, à encadrer le niveau de gris du granulat
pour pouvoir l’isoler sur une image binaire (noir et blanc). Cette opération s’annonce
particulièrement difficile pour les granulats car leur pic de gris est très proche de celui des hydrates.

Pour les granulats, on a donc utilisé la segmentation manuelle en essayant de délimiter au mieux le
contour des granulats. Ce travail était très laborieux compte tenu du nombre d’images à traiter (20
images pour chaque formulation de mortier). La figure II-15, représente l’image binaire avec le
granulat segmenté.

Figure II-15 : Image BSE du mortier SN(10)60 (à droite), segmentation manuelle du granulat à
partir de l’image BSE (à gauche)

Sur l’image MEB du mortier (ici le SN(10)60), il est important de noter l’existence d’un petit fossé
d’environ 1 à 2 µm entre le granulat et la matrice cimentaire. Cet écart peut être dû au retrait de la
pâte lors du prétraitement de l’échantillon, ou au léger « décollement » du grain de sable lors de
l’étape du polissage. En tout cas, l’ITZ représente la distribution des pores situé au voisinage de cet
écart. Il s’agit d’une zone de changement graduelle de la microstructure, comme l’avait décrite
Scrivener [SCR 04] [SCR 96].

3.3.3.3. La carte de distance euclidienne


La carte de distance euclidienne a été appliquée au cas des matériaux cimentaires par Wong &
Buenfield [WON 06]. La carte de distance euclidienne est obtenue en appliquant la transformée de
distance euclidienne (EDM) à l’image binaire représentant le masque du granulat (Figure II-16).
Cette transformation consiste à associer à chaque pixel de l’image MEB, la distance par rapport aux
points de contour du granulat. Ceci va générer des bandes d’épaisseur égales de 3 pixels (soit 0,39
µm) ; ayant chacune un niveau de gris allant de 1 à 255 (Figure II-16).

84
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

Figure II-16 : Le masque du granulat (à droite), Transformée de distance euclidienne du masque


du granulat (à gauche)

L’EDM du masque de granulat est la dernière étape intermédiaire avant la détermination du profil de
porosité au voisinage du granulat.

3.3.3.4. Profil de porosité de l’ITZ


La quantification des pores s’effectue sur l’image résultante de la multiplication de la carte de
distance (Figure II-16 à droite) (EDM du masque d’agrégat) avec le masque de pores correspondant
(Figure II-14 à droite). Il s’agit ensuite pour chaque bande de quantifier les pixels représentant les
pores afin de pouvoir par la suite tracer le profil de porosité de l’ITZ en fonction de la distance du
granulat. La figure suivante résume les différentes étapes du protocole d’analyse d’image adopté.

Figure II-17 : Le protocole établi pour la détermination du profil de porosité à l’interface granulat/
pâte.

85
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

4. Réactivité et dispersion de la FS au sein de la matrice


cimentaire
L’objectif de cette section est de vérifier la réactivité et la bonne dispersion de la FS au sein des
matrices cimentaires de toutes les formulations étudiées après 6 mois d’hydratation.

Pour cela on commence d’abord par mesurer le degré d’hydratation des pâtes et des mortiers par la
technique la plus couramment utilisée : la perte au feu. Ce paramètre représente un degré
d’hydratation globale du liant (ciment + FS) et ne permet pas de distinguer la part liée à l’hydratation
du ciment de celle liée à la réactivité de la FS. Pour pouvoir caractériser la réactivité pouzzolanique
de la FS, on fera appel à d’autres techniques de mesure comme l’ATG (Analyse
ThermoGravimétrique) qui permet de déterminer deux paramètres importants : la teneur en
portlandite et la quantité d’eau chimiquement liée aux hydrates.

L’homogénéité de la matrice cimentaire ou la bonne dispersion de la FS, a été vérifiée en utilisant le


MEB associé au mode EDS (Energy Dispersive Spectrometry) et en réalisant des cartographies
élémentaires silicium/calcium sur les échantillons de chaque formulation.

4.1. Degré d’hydratation


Les hydrates formés lors des réactions d’hydratation élémentaires ou pouzzolanique se décomposent
sous l’effet de hautes températures, en libérant de l’eau et du dioxyde carbonique. Les mesures par
perte au feu et par thermogravimétrie sont fondées sur ce principe, et constituent des méthodes
indirectes de mesure du degré d’hydratation avec l’hypothèse d’une relation linéaire entre la quantité
d’eau liée non évaporable et le degré d’hydratation.

L’essai de perte au feu consiste à sécher un échantillon directement à une température initiale T 0
jusqu’à atteindre une masse constante mT0 (variation de masse < 0,5% dans un intervalle de 24h).
L’échantillon est ensuite chauffé à une température Tf, également jusqu’à masse constante mTf.
La température finale Tf est souvent fixée à 550°C pour les échantillons non-carbonatés. C’est la
température à laquelle tous les hydrates (C-S-H, CH, AFm, AFt....) sont altérés et libèrent l’eau liée
non évaporable. Pour les échantillons carbonatés, la température T f doit être fixée à 1000°C car les
carbonates de calcium libèrent du CO2 à des températures plus élevées entre 600 et 800°C.
Dans notre cas, les échantillons ne sont pas carbonatés car ils ont été conservés pendant 6 mois en
cure sous eau de chaux préservés de tout échange avec l’extérieur et ont ensuite été directement
testés par perte au feu et ATG. Ceci a été confirmé en vérifiant par ATG l’absence de perte de masse
après 550°C (ni de pic de carbonates, voir section suivante et la courbe DTG de la figure II-18 (b)).

La température T0 a été fixée à 80°C (Grandubé [ARL 07] et AFREM 1997). D’après les travaux de
[GAL 01] [KLE 98] [ZHO 01] [RAM 02] qui montrent la déstabilisation de l’ettringite et de
certaines phases aluminates AFm en dessous de ces températures, il serait plus judicieux de faire une
perte au feu des échantillons entre T0=60°C et Tf= 550°C.

La perte de masse entre 60 et 550 °C est attribuée à l’évaporation de l’eau liée aux hydrates. Pour
obtenir une teneur en eau liée, cette perte de masse est ramenée à la masse de liant anhydre (la masse
de CEM I+FS anhydre étant considérée égale à celle mesurée à 550 °C). La teneur massique en eau
liée (% massique), notée El, est calculée par la relation suivante :

86
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

m60C  m550C
El  (Eq. II-14)
m550C

Pour les mortiers, l’essai par perte au feu et ATG (section suivante) a été au début réalisé sur un
broyat de matrice cimentaire en écartant les granulats. Cette poudre a été obtenue après concassage,
broyage puis tamisage sur tamis de 80 µm afin d’essayer d’éliminer les grains de sable même les
plus fins de 0,08 mm de diamètre. Néanmoins, après vérification par DRX et par microscope
optique, il s’avère que malgré cette opération, de petits grains de sable (quartz) existent toujours dans
ce broyat, chose qui va fausser les valeurs de pesées. Par conséquent, nous avons décidé par la suite
de tester des échantillons représentatifs entiers car avec cette méthode au moins, on est sûr de
connaitre la vraie teneur en pâte au sein de chaque mortier. La teneur en eau liée a donc été rapportée
à la masse de pâte contenue dans le mortier, elle s’exprime en g d’eau liée /g de liant (CEM I + FS)
anhydre. Il est à noter que le sable siliceux peut supporter des températures très élevées (température
de fusion de 1650°C).

La précision de la balance utilisée est de 0,1 mg, ce qui représente 0,005 % de la masse moyenne des
échantillons analysés (3 g environ). En ce qui concerne la répétabilité des essais, la teneur en eau liée
varie de 3 %.

L’eau liée mesurée par perte au feu a été comparée à celle retrouvée par ATG dans le tableau II-4.
Les valeurs d’eau liée mesurées à l’aide des deux techniques sont très proches puisque l’erreur
maximale ne dépasse pas 6%. Par la suite, les valeurs d’eau liée mesurées par ATG pour calculer le
degré d’hydratation αhyd à l’échéance de 6 mois :
El
 hyd  (%) Avec El∞ désignant la quantité d’eau liée totale à hydratation complète (t=∞).
El
Cette quantité peut être calculée en utilisant un modèle d’hydratation ou via une expérience
d’hydratation accélérée. Sa valeur est généralement située entre 0,228 [BAR 94] et 0,235 [ARL 07]
pour les pâtes CEM I et CEM II (en particulier ici CEM I + 10% FS). Cette dernière valeur a été
considérée pour calculer les degrés d’hydratation des matrices cimentaires contenues dans chaque
mortier.

87
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

Tableau II-4 : Eau liée aux hydrates et degré d’hydratation retrouvée par perte au feu et par ATG

Formulation El (g /g liant) El (g/g liant) par ATG Degré


par perte au feu (Equ.) d’hydratation
S-F44 0,173 0,168 71,7%
S(0)0 --- 0,218 93,1%
S(10)0 0,204 0,201 85,5%
S(20)0 0,192 0,181 77,1%
S(10)0-0,5 0,209 0,206 87,6%
SN(0)50 -- --- ---
SN(10)10 0,205 0,203 86,3%
SN(10)30 0,197 0,193 82,2%
SN(10)50 0,193 0,194 82,7%
SN(10)60 0,198 0,195 83,0%
SN(10)65 0,201 0,195 82,8%
SF(10)10 0,202 0,200 85,8%
SF(10)30 0,196 0,194 82,8%
SF(10)40 0,199 0,192 81,7%
SF(10)50 0,200 0,192 81,9%
SG(10)50 0,193 0,195 83,0%
SN(20)50 0,178 0,181 76,9%

Les formulations à fortes teneurs en sable (>30% en volume de granulats) ont des degrés
d’hydratation un peu plus faibles que celui de la pâte ou du mortier avec uniquement 10% de sable.
Dans un premier temps, on peut attribuer cette différence à l’effet d’absorption de l’eau par les
granulats siliceux qui augmente avec la teneur en sable. Or, les résultats du calcul des Eeff/C effectifs
a montré que l’écart avec Einit/C (tableau II-3) ne dépasse pas 0,003 ; ce qui écarte complétement
cette hypothèse. Cette différence, ainsi que tous les autres degrés d’hydratation seront commentés
dans les prochains chapitres (III et IV).

La mesure du degré d’hydratation permet afin de vérifier la maturité des échantillons pour garantir
une stabilité de la microstructure au cours de l’essai de diffusion. Cette mesure permettra également
de vérifier s’il y’a une corrélation entre les valeurs de porosité et le taux d’hydratation. Cependant, le
degré d’hydratation reste une mesure globale ne permettant pas de dissocier la part de l’hydratation
du ciment portland de celle de la FS.

La mesure de la teneur en portlandite (par ATG) est une des pistes qui peut donner une indication sur
la réactivité pouzzolanique de la FS.

Dans la littérature, il existe quelques modèles analytiques essayant d’estimer le degré d’hydratation
des matériaux avec ajout de FS, sauf que les formules proposées ne tiennent pas compte de plusieurs
paramètres (la nature du ciment ou de la FS utilisée, sa dispersion au sein de la matrice cimentaire).
Ces modèles sont souvent basés sur des hypothèses difficiles à vérifier. Certains de ces modèles ont
été décrits dans l’annexe B.

4.2. Réactivité de la FS : Analyse Thermogravimétrique


L’essai de l’ATG ou l’Analyse thermogravimétrique repose sur le même principe que celui de la
perte au feu et consiste à soumettre l’échantillon à une augmentation de température de 30 à 1050°C,

88
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

et à enregistrer en continu la perte de masse. Sous certaines hypothèses, les mesures de pertes de
masses permettent de quantifier l’eau chimiquement liée à chaque hydrate et la teneur en portlandite
dans les matériaux cimentaires au cours de l’hydratation.

L’ATG a été réalisée sur environ 350 mg ± 0,1mg de poudre de pâtes et de mortiers sous atmosphère
d’azote (N2 à 1bar), et en utilisant une vitesse de montée en température égale à 10°C/min [LOU 96]
[PES 04]. La poudre des échantillons a été obtenue en broyant des morceaux représentatifs de
chaque formulation, directement sortis de la solution de cure, sous sorbonne d’azote (gaz inerte)
puis en les préservant sous vide jusqu’au jour de l’essai. Ces deux opérations ont pour objectif
d’éviter la carbonatation des échantillons.

Le traitement des résultats pour le calcul des pertes de masses et la courbe de dérivée (DTG) sont
élaborés par un logiciel fourni avec l’appareil utilisé (NETZSCH STA 409 PC LUXX), voir Figure
II-18 (a).

(a) (b)

Figure II-18 : a) Appareil de mesure ATG utilisé et b) exemple de résultats D’ATG réalisé sur un
échantillon de mortier SN(10)30

Chaque phase se décompose dans une plage de température qui lui est propre. Selon El-Jazairi et
Illston [ELJ 77], la déshydroxylation de portlandite a lieu entre 400 et 550°C. L’équation (Eq. II-15)
est utilisée pour déterminer la teneur en portlandite en g/g de liant anhydre.

400C
M CH M  M 550C
CH  (Eq. II-15)
M H 2O Ml

Avec M 400C et M 550C sont respectivement les masses de l’échantillon à 400 et 550°C, et Ml la masse
initiale du liant anhydre (CEM I + FS) contenue dans l’échantillon de pâte ou de mortier. Le ratio
M CH M H 2O correspond au rapport des masses molaires de portlandite et de l’eau égales
respectivement à 74,09 et 18,01 g/mol. Les teneurs en portlandite (CH(%)) déterminées pour chaque
formulation ont été placées dans le tableau récapitulatif II-5.

89
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

La deuxième quantité qu’on cherche également à déterminer par l’ATG est l’eau chimiquement liée
aux C-S-H. Pour cela, on commence d’abord par exprimer la quantité chimiquement liée à tous les
hydrates (C-S-H, CH, AFm, AFt..) –l’eau non-évaporable, définie par l’équation donnée dans
[MOUN 03] :

mb  mT0 1050  m600800 (Eq. II-16)

Avec mT0 1050 la perte de masse entre la température T0 = 60°C (d’après les sections
précédentes) et 1050°C et m600800 la perte de masse entre 600 et 800°C due à la
décarbonatation de la calcite [PAN 05]. Dans notre cas, on rappelle que cette quantité est nulle
(calcite inexistante) car les échantillons ont été préparés de telle façon à éviter la carbonatation
(absence de pic de carbonates dans la courbe DTG).

Par conséquent, l’eau non évaporable comprend l’eau chimiquement liée à la portlandite (perte de
masse entre 400 et 550°C –Eq. II-15.) et l’eau chimiquement liée des autres phases (C-S-H, AFm,
AFt) obtenue par perte de masse entre 60° et 400°C. Les silicates de calcium hydratés commencent à
se décomposer à partir de 105°C [BAR 94], l’ettringite dès 60°C [GAL 01]. En négligeant l’eau non-
évaporable des phases AFm et AFt [JENN 94], l’eau liée perdue entre 105 et 400°C peut
principalement correspondre à la déshydroxylation des C-S-H. Ainsi l’eau liée aux C-S-H (g/g de
liant) peut être déduite en divisant la masse d’eau perdue entre 105 et 400°C par la masse de liant
anhydre de l’échantillon testé.

En plus de l’utilisation de l’ATG, la bonne réactivité et dispersion de la FS au sein de la matrice


cimentaire a été vérifiée par imagerie MEB associée au mode EDS (Energy Dispersive
Spectrometry).

4.3. Cartographie élémentaire (MEB associé à l’EDS)


Les échantillons préalablement préparés pour l’investigation de l’interface ITZ (section 3.3.1.) ont
été utilisés pour vérifier l’homogénéité de la pâte et la bonne ou la mauvaise dispersion de la FS. Le
même microscope JEOL® 5410LV a été utilisé avec des techniques de réglage semblables (section
3.3.2), combiné à l’EDS [POS 80]. Par enregistrement des photons X individuels émis par
l’échantillon, ce détecteur constitue un moyen d’analyse de la composition chimique du matériau.

Dans cette étude, l’EDS a été utilisé pour visualiser la présence ou pas d’agglomérats de FS. Cette
technique fournit une cartographie de la distribution et des proportions relatives (intensité) des
éléments définis (Ca, Si, O, Al ...) de la zone balayée.

5. Conclusion :
Ce chapitre décrit la démarche expérimentale utilisée pour répondre aux objectifs de la thèse (Figure
II-19). Ils sont récapitulés de la façon suivante :

Objectifs :

 Etudier les propriétés diffusives des matériaux cimentaires à base de (CEM I +FS) dédiés au
stockage des déchets radioactifs de faible et moyenne activité.

90
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

 Essayer de trouver un lien entre paramètres microstructuraux et le coefficient de diffusion


effectif des pâtes et mortiers, nous permettant par la suite d’estimer le DeHTO du béton (très
difficile à tester en cellules de diffusion) à partir d’une simple caractérisation.
Démarche expérimentale

 Varier les compositions initiales de pâtes (rapport E/L, teneur en FS) et de mortiers (la teneur
en sable, la granulométrie du sable) afin de balayer des microstructures et des propriétés
diffusives différentes, et à pour étudier l’influence de chaque paramètre (eau, FS, granulats)
sur l’évolution de la diffusivité au sein de ces matériaux
 Alimenter la base de données en coefficients de diffusion HTO des matériaux avec ajout de
FS.
 Caractérisation de la microstructure de ces matériaux et essayer d’interpréter les résultats
obtenus à partir des essais de diffusion.
 S’assurer de la bonne réactivité et de la bonne dispersion de la FS au sein du matériau
cimentaire.

Figure II-19 : Schéma synoptique de la démarche expérimentale

91
Chapitre II : Campagne expérimentale sur pâtes et mortiers

Tableau II-5 : Tableau récapitulatif de propriétés microstructurales et coefficients de diffusion


mesurées

Formulation DeHTO ρH2Oapp à θH2O (%) θH2O θH2O (%) θHg El (g/g Degré CH (g/g
(m2/s) 60°C 60°C (%) 105°C (%) liant) par d’hydratation liant
80°C ATG anhydre)
(Equ.) (%)

D-F44 6,40e-13 24,1 ± 0,06 --- --- 17,88 --- --- 17,2%
S-F44 2,97e-13 1,867 24,1 ± 0,07 29,3 32,6 12,54 0,168 71,7 14,6%

S(0)0 2,56e-12 1,710 30,4 ± 0,7 31,5 33,5 13,9 0,218 93,1 29,0%
[LARB 13]
S(10)0 1,05e-12 1,643 32,3 ± 0,3 36,8 39,2 18,8 0,201 85,5 19,6%

S(20)0 4,87e-13 1,585 34,6 ±0,5 40,1 43,1 20,9 0,181 77,1 18,6%

S(10)0-0,5 1,79e-12 1,479 39,6 ± 0,3 43,5 46,5 27,0 0,206 87,6 23,4%

SN(0)50 1,45e-12 2,110 14,7 ± 0,5 17,0 19,2 10,6 --- --- ---
[LARB 13]

SN(10)10 1,07e-12 1,747 29,4 ± 0,4 33,1 36,1 17,7 0,203 86,3 20,5%

SN(10)30 3,75e-12 1,946 22,9 ± 0,2 26,5 28,7 13,3 0,193 82,2 18,2%

SN(10)50 2,67e-13 2,109 16,0 ± 0,1 18,7 20,1 9,5 0,194 82,7 17,2%

SN(10)60 2,18e-13 2,226 12,1 ± 0,3 14,5 15,8 7,8 0,195 83,0 17,3%

SN(10)65 2,20e-13 2,230 12,1 ± 0,1 13,4 14,2 7,7 0,195 82,8 17,6%

SF(10)10 8,39e-13 1,745 29,3 ± 0,4 33,9 36,6 16,2 0,200 85,8 22,1%
SF(10)30 3,83e-13 1,932 23,7 ± 0,1 27,0 29,2 14,5 0,194 82,8 19,5%

SF(10)40 2,66e-13 2,002 20,3 ± 0,2 23,6 25,2 14,2 0,192 81,7 18,9%

SF(10)50 3,04e-13 1,986 17,3 ± 0,3 19,4 21,4 14,6 0,192 81,9 17,6%

SG(10)50 2,64e-13 2,109 17,2 ±0,6 20,6 21,3 10,6 0,195 83,0% 18,2%

SN(20)50 1,95e-13 2,087 16,9 ±0,2 20,2 21,3 12,5 0,181 76,9% 15,9%

92
93
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la


diffusion
La caractérisation de la microstructure et des propriétés de diffusion à l’échelle de la pâte est une
étape intermédiaire, mais essentielle avant d’aborder le cas des mortiers et des bétons.

L’objectif de ce chapitre est de déterminer l’influence de chaque paramètre de la composition initiale


sur la structure poreuse et les coefficients de diffusion de l’eau tritiée dans les pâtes CEM I + FS.

Il s’agit, dans un premier temps, d’utiliser la Fumée de Silice (FS) sous ses deux formes les plus
connues : la forme en suspension liquide appelée Slurry (FSS) et la forme Densifiée (FSD). Cette
dernière pouvant générer la formation de plusieurs agglomérats de FS, l’enjeu était de pouvoir
quantifier la perte de performances, tant sur le plan microstructural que sur la capacité de rétention
du HTO des pâtes de ciment, liée à l’utilisation de la FSD.

Le choix du slurry ayant été adopté pour le reste des formulations de pâtes, mortiers et bétons, on
s’est ensuite focalisé sur l’effet de la teneur en FS et la quantité d’eau de gâchage sur la porosité et la
diffusion. Les pâtes de ciment ont été donc préparées en variant la quantité de FS entre 0 et 20% par
masse de ciment et le rapport E/L de 0,3 à 0,5. Les résultats des essais de diffusion ont été interprétés
à partir des caractérisations du réseau poreux. En particulier, un lien entre le coefficient de diffusion
et le rayon critique des pores capillaires a été établi.

94
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

CHAPITRE III : PATES : MICROSTRUCTURE EN LIEN AVEC LA DIFFUSION ............................. 94


1. Influence de la forme de fumée de silice ............................................................... 96
1.1. Caractérisation de la fumée de silice slurry (FSS) et densifiée (FSD) ............................................................ 96
1.2. Perte de performances liée à l’agglomération de la FSD ............................................................................. 97
1.3. Discussion sur la dispersion de la FS densifiée ........................................................................................... 101
1.3.1. Traitement aux ultrasons de la poudre ............................................................................................ 101
1.3.2. Efforts de cisaillement en présence de granulats ............................................................................. 102

2. Influence de la teneur en FSS .............................................................................. 104


2.1. Structure poreuse des pâtes avec FSS ........................................................................................................ 104
2.1.1. Porosité totale et degré d’hydratation ............................................................................................. 104
2.1.2. Distribution de la taille des pores et réactivité de la FS .................................................................... 106

2.2. Coefficients de diffusion HTO .............................................................................. 107


2.2.1. Résultats ........................................................................................................................................... 107
2.2.2. Lien entre coefficient de diffusion et rayon critique ........................................................................ 109

3. Influence du rapport E/L ..................................................................................... 111


3.1. Microstructure poreuse .............................................................................................................................. 111
3.2. Mesures des coefficients de diffusion HTO ................................................................................................ 114
3.2.1. Résultats ........................................................................................................................................... 114
3.2.2. Lien entre coefficient de diffusion et rayon critique ........................................................................ 115
3.2.3. Comparaison avec les pâtes sans ajout de FS ................................................................................... 116

4. Conclusion .......................................................................................................... 118

95
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

1. Influence de la forme de fumée de silice


Comme précédemment détaillé à la section §II-1.1.1, la fumée de silice (FS) « idéale » sous forme de
poudre non-densifiée est très compliquée à manipuler et à transporter à cause de sa grande volatilité.
Voilà pourquoi, elle n’est jamais commercialisée sous cet état, mais plutôt sous des formes faciles
d’utilisation comme la forme densifiée, en suspension (slurry) ou en pastilles (non adaptée à l’emploi
dans les matériaux cimentaires).

Dans la littérature, la forme densifiée (FSD) est de loin la forme la plus utilisée grâce à sa
disponibilité plusieurs pays. Malgré son utilisation fréquente sous cette forme, très peu d’études se
sont intéressées à vérifier sa dispersion au sein de la matrice cimentaire. Ces dernières mettent en
évidence la présence d’agglomérats de plusieurs µm de diamètre dans des pâtes, mortiers et bétons
[DIA 06] [BON 92].

De l’autre côté, la fumée de silice slurry (FSS), mélange liquide de poudre non densifiée et d’eau à
égales proportions, est censée offrir une meilleure dispersion de la FS au sein des mélanges
cimentaires [HEW 98]. Or, à cause de l’indisponibilité de ce produit, même parfois aux Etats-Unis
[DIA 06], peu d’études lui ont été consacrées.

La présence d’agglomérats de FS, lors de l’utilisation de la FSD, peut facilement réduire l’efficacité
de la FS sur les propriétés des matériaux cimentaires. Ces amas ont un diamètre plus grand, une
surface spécifique plus faible et une réactivité pouzzolanique inférieure à celle des grains unitaires
[SAN 99]. Yajun [YAJ 03] par exemple constate une diminution de la résistance mécanique et de la
teneur en eau liée dans la pâte contenant de la FSD. D’autres études comme [KON 12] [OER 13]
[ZHA 16] montrent une décroissance de la résistance à la lixiviation et à la pénétration des ions de
chlorure en présence d’agglomérats, pouvant également jouer le rôle d’agrégats réactifs participant à
la Réaction Alcali-Silice (RAS) [DIA 06] [AND 07]. Cependant, la baisse des performances au
niveau des propriétés de transport en lien avec les paramètres microstructuraux à cause de la
présence des agglomérats de FS n’a pas été explorée auparavant.

L’objectif de cette section est de quantifier et d’évaluer les pertes de performances microstructurales
et diffusionnels liées à l’utilisation d’une forme aggloméré (la Fumée de Silice Densifiée FSD), par
rapport à la FSS, forme censée être mieux dispersée. Les résultats présentés ci-dessous permettront
par la suite de justifier l’utilisation de la FSS pour la fabrication des autres formulations de pâtes et
de mortiers.

Deux types de pâtes sont caractérisés: D-F44 (FSD) et S-F44 (FSS) fabriqués avec le même rapport
E/L de 0,3 et la même teneur en FS sèche par masse de ciment de 10%.

1.1. Caractérisation de la fumée de silice slurry (FSS) et densifiée


(FSD)
Les fumées de silice densifiée (S95 DM) et en suspension (SLURRY) sélectionnées dans le cadre de
cette étude ont été produites dans la même usine CONDENSIL à Anglefort. Elles ont donc la même
composition chimique puisque la FS sèche utilisée dans leurs fabrications est semblable (tableau II-
2). La différence entre ces deux formes réside dans la distribution de la taille des particules.

96
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

La figure III-1 montre la distribution granulométrique du ciment Portland CEM I (d 50 = 15 µm), de la


FSS (d50 = 5 µm) et de la FSD (d50 = 95 µm), mesurée par granulométrie laser. Le traitement aux
ultrasons n’a pas été employé pour la FSD afin de s’approcher des conditions d’utilisation de ce
matériau lors de la préparation des matériaux cimentaires, matériau pouvant présenter d’éventuels
agglomérats de FS. Le slurry (FSS) lui, a été cisaillé, avant la mesure, avec un homogénéisateur
Ultra-Turrax T65D pour assurer l’uniformité du mélange et éviter la ségrégation des particules de FS
dans la suspension liquide.

Figure III-1 : La distribution de taille des particules de la FSS, CEM I et la FSD mesurée par diffraction
laser et sans application d’aucune énergie de dispersion

Bien que la fumée de silice slurry (FSS) soit présentée par les industriels comme étant un mélange
liquide de FS non-densifiée et d’eau, très peu de particules sub-micrométriques sont observées,
probablement à cause du grand degré d’agglomération généré pendant le processus de production.
Les particules contenues dans le slurry ont néanmoins, un diamètre moyen de 5 µm et la majorité
d’entre elles (> 80%), un diamètre inférieur à 10 µm, ce qui rend la FSS nettement meilleure avec
des particules beaucoup plus « fines » que celles contenues dans la fumée de silice densifiée (FSD)
avec un diamètre moyen des grains de plusieurs dizaine de micromètres (≈ 95 µm).

La finesse des particules de FS est une caractéristique très importante qui doit être prise en compte
lors du choix du type de fumée de silice. La section suivante illustre l’effet d’une bonne dispersion
de FS (et en contrepartie de la présence d’agglomérats) sur la microstructure et le coefficient de
diffusion.

1.2. Perte de performances liée à l’agglomération de la FSD


La FSS et FSD ont respectivement été incorporées dans les pâtes S-F44 et D-F44 à même teneur de
10% par masse de ciment et avec un rapport E/L identique de 0,3. Afin d’obtenir une idée sur la
dispersion de la fumée de silice au sein de la matrice cimentaire, l’imagerie MEB associée au mode
EDS a été réalisée sur chacune de ces deux pâtes.

97
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

La figure III-2 représente les cartographies élémentaires de silicium (Si) et de calcium (Ca) des
échantillons S-F44 et D-F44. Le silicium et calcium sont respectivement représentés en blanc et noir.

Figure III-2 : Cartographies de silicium (Si) et de calcium (Ca) sur les pâtes D-F44 (à gauche) et S-F44 (à
droite)

Comme prévu, la pâte de ciment fabriquée avec la FSD (D-F44), se distingue par la présence de
plusieurs agglomérats de silice avec des formes irrégulières et des tailles comprises entre 10 µm et
plusieurs centaines de micromètres. La présence de silice (SiO2) est vérifiée par l’existence de
silicium (Si) et d’oxygène (O2) et par l’absence de calcium. De l’autre côté, la matrice cimentaire de
la pâte S-F44 semble plus homogène grâce à une meilleure dispersion de la FS.

L’effet de la dispersion de la FS sur la microstructure est analysé dans ce paragraphe. Concernant la


porosimétrie à l’eau, une même valeur de porosité totale à l’eau de l’ordre de 24% (Tableau II-5) est
obtenue pour les deux pâtes. La porosité à l’eau est donc un paramètre global qui sert à estimer le
volume total des pores, mais qui est très peu sensible aux variations de la taille des pores, et qui ne
permet pas de donner plus de détails sur la structure poreuse du matériau. Heureusement, d’autres
techniques existent et permettent de fournir des paramètres capables de détecter cette hétérogénéité
de dispersion de FS, comme la distribution de la taille des pores déterminée par porosimétrie au
mercure, les produits d’hydratation quantifiés par ATG, ou encore le coefficient de diffusion liquide
mesuré par l’essai de diffusion à l’eau tritiée.

La figure III-3 (a) montre la distribution des volumes poreux (dV/dlog(d p)) en fonction des diamètres
de pores pour les deux pâtes D-F44 et S-F44. Ces courbes ont été obtenues par différentiation
logarithmique des courbes de volumes cumulés (Figure III-3(b)), et représentent la moyenne de trois
mesures réalisées sur trois échantillons de chaque formulation. On considère ici que les pores de
moins de 6 nm de diamètre correspondent aux pores du gel de C-S-H et que les pores ayant des
diamètres entre 6 et 50 nm rassemblent les pores capillaires créés dans les hydrates. Les pores de
plus de 50 nm correspondent aux pores capillaires de grandes dimensions et aux macrospores (bulles
d’air occlus, par exemple) [UCH 96]. Cette même classification est adoptée par la suite pour toutes
les courbes obtenues par porosimétrie au mercure.

Le rayon critique (rc) -ou le diamètre seuil (ds=2rc)- précédemment défini dans le chapitre I dans les
sections §I-A-1.3.1 et §I-A-2.2.1 comme étant le rayon correspondant au maximum du pic des pores
capillaires, est représenté sur la Figure III-3. D’après Halamickova at al. [HAL 95], il s’agit du rayon
à partir duquel se crée un chemin continu d’écoulement à travers de l’échantillon.

98
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

0,14

dV/dlog(dp) (ml/nm. g de pâte)


Macro- porosité Porosité Porosité du 0,12
S-F44 D-F44 Capillaire gel de C-S-H
0,1
0,08
0,06
0,04
0,02
0
10000 1000 100 ds = 2rc 10 1
Diamètre d'accès des pores dp (nm)

(a)

Volume cumulé de mercure


0,08

intrus (ml/g de pâte)


S-F44 D-F44
0,06

0,04

0,02

0
10000 1000 100 10 1
Diamètre d'accès des pores dp (nm)

(b)

Figure III-3 : Distributions poreuses obtenus par intrusion de mercure pour les deux pâtes S-F44 et D-
F44 (a) distribution des volumes poreux (dV/dlog(dp)) en fonction des diamètres de pores;
(b) Courbe du volume cumulé de mercure intrus en fonction des diamètres d’accès des pores

On remarque, à partir de la Figure III-3(a), que la porosité capillaire est plus fine et qu’elle est en
quantité plus faible dans la pâte de ciment fabriquée avec de la FSS. On parle alors d’un rayon
critique de l’ordre de 9,5 nm pour la pâte D-F44 et de 6,1 nm pour la pâte S-F44. Cet affinement de
la porosité capillaire dans la pâte S-F44 est lié à la meilleure efficacité d’une FS bien dispersée et
particulièrement à un effet « filler » plus efficace avec les grains unitaires de FS. La porosité de la
pâte S-F44 est par conséquent mieux comblée et plus fine par rapport à la pâte D-F44. Par ailleurs, la
mesure de la teneur en portlandite déterminée par l’analyse thermogravimétrique peut nous
renseigner sur la réactivité pouzzolanique de chaque forme de FS.

La Figure III-4 montre les courbes DTG (DTG étant la première dérivée de la courbe de perte de
masse) obtenues pour les deux pâtes D-F44 et S-F44. Le premier pic localisé entre 40 et 400°C est
dû à l’eau libre et l’eau chimiquement liée aux hydrates (C-S-H, AFm et AFt), tandis que le
deuxième pic entre 400 et 550°C correspond à la déshydroxylation de la portlandite (CH). Dans

99
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

notre cas d’étude, et comme nous l’avions précédemment mentionné dans la section §II-4.2, le
troisième pic de calcite généralement détecté entre 600 et 800°C n’existe pas car tous les matériaux
testés ont été protégés de la carbonatation depuis leur fabrication jusqu’à l’étape de
l’échantillonnage.

0,0

-0,2

-0,4 D-F44
DTG (mg/min)

-0,6 S-F44

-0,8

-1,0

-1,2 CH
C-S-H
-1,4
0 200 400 600 800 1000
Température (°C)

Figure III-4 : Courbes DTG des pâtes S-F44 et D-F44

Il est important de noter que le pic de CH est moins marqué dans la pâte de ciment fabriquée avec du
slurry, ce qui signifie que la perte de masse liée à la déshydratation de la portlandite est plus faible
dans la S-F44. En contrepartie, la quantité d’eau liée aux hydrates est plus importante au sein de cette
pâte, révélant probablement l’existence de plus de C-S-H.

La teneur en portlandite calculée par l’équation (II-15) est aux alentours de 14,6% pour la pâte
fabriqué avec de la FSS, au lieu de 17,2% pour la pâte contenant de la FS densifiée (tableau II-5). La
réactivité pouzzolanique des particules unitaires de FS présentes dans la pâte homogène S-F44 est
donc plus élevée par rapport à celle des agglomérats présents dans la pâte D-F44 ayant une faible
surface effective de réaction.

Les amas de FS existants dans la pâte D-F44 sont incapables, à cause de leur grande taille, de
combler la porosité capillaire (rôle filler impacté) favorisant ainsi la présence de pores plus larges
(Figure III-3). Leur présence diminue la réactivité pouzzolanique, ce qui conduit à une faible
quantité de C-S-H (P) et par conséquent à un diamètre moyen de pore des C-S-H plus élevé que celui
obtenu dans la pâte avec une meilleure dispersion de FS. Et pour finir, la présence de ces
agglomérats dans la forme densifiée de FS est à l’origine de la diminution de l’efficacité de cet ajout
et d’une augmentation du coefficient de diffusion d’un facteur 2 de 2,97 e-13 à 6,4e-13 (Tableau II-5).
Une augmentation qui n’est pas négligeable dans le contexte du comportement à long terme d’un
stockage de déchets radioactifs.

La finesse des particules de la fumée de silice est donc un paramètre important à prendre en
considération lors du choix du type de FS. Il impacte directement la réactivité pouzzolanique de la
FS et sa capacité à réduire la teneur en eau [QUE 12]. En plus, les fines particules de FS ont la

100
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

particularité de pouvoir combler les vides entre les grains de ciment [PAN 01] et d’affiner la
microstructure en créant une structure poreuse plus dense [SID 11].

Malgré la perte de performances liée à la présence des agglomérats dans la FSD, la forme densifiée
demeure la forme la plus commercialisé et la plus utilisée dans l’industrie et dans la recherche grâce
à la grande disponibilité de ce produit. Par conséquent, la question qui se pose maintenant c’est
comment peut-on améliorer la dispersion de cette FSD, afin de pouvoir gagner en performances et en
efficacité de la FS ?

1.3. Discussion sur la dispersion de la FS densifiée


Dans la littérature, plusieurs techniques ont été suggérées pour améliorer la dispersion des particules
de FS, les plus répandues sont le traitement aux ultrasons de la poudre [ROD 12], ou l’introduction
d’efforts de cisaillement durant le malaxage du mélange cimentaire [BOH 96].

1.3.1. Traitement aux ultrasons de la poudre


Quelques études précédentes montrent que le Traitement par Ultrasons (T.U.S) de la poudre
densifiée améliore la dispersion des particules de FS en réduisant la distribution de tailles de ces
grains. Rodriguez et al. [ROD 12] observent une augmentation de la réactivité de la FS après
traitement de la poudre. D’autres auteurs comme Martinez et al. [MAR 11] mesurent des résistances
mécaniques plus élevées pour les mortiers fabriqués avec de la fumée de silice traitée par ultrasons.
Ces derniers [MAR 11] constatent aussi que la résistance mécanique maximale est obtenue en
appliquant la durée la plus longue (25 min) et la puissance de traitement la plus élevée (600 W).

Dans notre cas d’étude, et afin de s’assurer d’une meilleure dispersion de la FSD, nous avons opté
pour une puissance de sonification de 600 W et pour une durée de traitement de 25 min, soit les
mêmes valeurs que celles adoptées par Martinez et al. [MAR 11]. Le traitement aux ultrasons a été
réalisé au CEA Marcoule à l’aide d’un sonicateur S-3000 de Misonix avec une puissance maximale
appliquée à l’oscillateur transducteur de 600W et une fréquence de sortie de 20 kHz.

La figure III-5 montre la distribution de la taille des particules des deux formes de fumée de silice
(FSS et FSD-S95DM) avant et après T.U.S.

101
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

8
FSD sans T.U.S
7 FSD avec T.U.S
6 FSS sans T.U.S
Volume (%) 5 FSS avec T.U.S

4
3
2
1
0
0,1 1 10 100 1000
Diamètre de particules (µm)

Figure III-5 : Distribution de taille des particules de la FSD et FSS avant et après traitement aux
ultrasons

Le traitement aux ultrasons améliore significativement la dispersion de la fumée de silice densifiée


(FSD) et permet de briser les agglomérats de FS en diminuant le diamètre moyen des particules (d 50)
de 95 à 20 µm. Cependant, malgré l’application de ce processus de sonification, la dispersion de la
fumée de silice slurry demeure meilleure car elle contient des particules plus fines (d 50 =10 µm) que
celles de la FSD après traitement aux ultrasons.

Le traitement aux ultrasons permet donc de casser quelques agglomérats (principalement les plus
grands) mais pas la totalité, parce que la séparation des liens dans les plus petits amas de FS
nécessite l’application de forces plus élevées. Pour la FSS, la distribution de la taille des particules
est la même avec ou sans sonification.

L’utilisation de telles techniques « dispersives » améliore la dispersion de la FS mais reste assez


laborieuse et difficile à appliquer avant chaque fabrication de matériau cimentaire. Le slurry, produit
industriel prêt à l’emploi, doit être privilégié pour une dispersion optimale de FS et pour un gain
maximal en performances, en particulier vis-à-vis du coefficient de diffusion. Ainsi, toutes les
formulations citées dans la suite de ce manuscrit ont été fabriquées avec du slurry pour obtenir de
meilleures propriétés de durabilité.

1.3.2. Efforts de cisaillement en présence de granulats


La perte de performances constatée suite à l’utilisation de la forme densifiée de fumée de silice, est
maximale dans le cas des pâtes de ciment. Pour les mortiers et les bétons, il est parfois annoncé que
l’effet de cisaillement généré pendant le malaxage avec l’ajout de granulats, améliore plus ou moins
la dispersion de la fumée de silice densifiée au sein de la matrice cimentaire, réduisant ainsi cet écart
de performances (sur le coefficient de diffusion et la structure porale) entre des bétons fabriqués avec
de la FSD ou de la FSS.

En effet, la dispersion de la FSD peut être totalement ou partiellement améliorée avec l’ajout de
granulats. Pour certains auteurs comme Zhang et al. [ZHA 16], la présence de granulats dans le béton
permet de briser tous les agglomérats de la FSD, tandis que pour d’autres [OER 13] [AND 07] [ROD
12] [DIA 04] [YAJ 03], beaucoup d’amas de FS demeurent non-dispersés et même parfois

102
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

entièrement intactes. La figure III-6 [DIA 04] montre un exemple de la persistance de ces
agglomérats dans la matrice cimentaire d’un béton. Cette différence de comportement peut être due à
plusieurs facteurs : (1) la procédure de malaxage utilisée, (2) la granulométrie des agrégats, (3) la
nature de la fumée de silice densifiée et éventuellement (4) le prétraitement préalable ou pas de la
poudre de FS.

Figure III-6 : Mise en évidence de l’existence d’agglomérats de FSD dans la matrice cimentaire du
béton

Pour des auteurs tels que [HOO 98] [MAR 00] [SHA 93], les agglomérats de fumée de silice
densifiée ne peuvent pas être totalement brisés en adoptant la procédure classique de fabrication, à
savoir l’utilisation de la séquence de mélange normalisée ( EN 196-1) et du malaxeur commercial
ordinaire du béton. Lagerblad et Utkin [LAG 93] montrent que le changement de la séquence du
mélange (c-à-d l’ordre d’introduction des constituants) améliore légèrement la dispersion de la FSD,
mais ne permet pas d’éliminer tous les agglomérats dans le béton. Pour ce qui est de la durée du
malaxage, ces mêmes auteurs [LAG 93] comparent deux bétons préparés avec des temps de
malaxage différents et constatent une légère amélioration de la dispersion de FSD avec
l’augmentation de la durée de malaxage. Cependant, des gros agglomérats existent toujours dans les
deux mélanges. Baweja et al. [BAW 03] partagent cette même conclusion dans le cas des pâtes de
ciment et considèrent que l’accroissement du temps de malaxage et l’ajout de superplastifiant n’ont
qu’une influence mineure sur la décomposition d’agglomérats. Dans le cas des mortiers et des bétons
durcis, ces auteurs [BAW 03] observent par contre que le temps de malaxage et le dosage en
superplastifiant réduisent l’occurrence des agglomérats de FSD.

La granulométrie des agrégats utilisée dans le matériau cimentaire peut aussi affecter la dispersion de
la FSD. Pour certains [LAG 93], les grains de sable fins entourent les agglomérats de FSD et les
protègent de l’ « écrasement » pendant le malaxage. Ils considèrent en effet, que la présence
d’agrégats de taille similaire ou inférieure à celle des amas de FS empêche leur dispersion. Ces
mêmes remarques ont également été partagées par Baweja et al. [BAW 03], qui observent que les
aggloméras de FSD se brisent moins pendant un malaxage de mortier que durant un malaxage de
béton, contenant de plus gros granulats.

Un autre facteur important pouvant expliquer la bonne ou la mauvaise dispersion de la FSD dans les
bétons, est la nature de la fumée de silice utilisée et en particulier la densité ou la force de liaison
entre les particules de FS induite pendant le processus de densification, en plus de la distribution de
la taille des agglomérats. Andrew et al. [AND 07] comparent trois FSD ayant la même composition

103
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

chimique mais des densités et des distributions de tailles de particules différentes, et remarquent que
chaque type de FSD agit différemment en participant ou pas aux réactions alkali-silice dans les
mortiers.

Et pour finir, et comme on l’a précédemment vu dans la section précédente §III-1.3.1., un traitement
préalable de la poudre avant utilisation (en l’occurrence par ultrasons) améliore la dispersion et
permet de briser au moins une partie des agglomérats existants dans la FSD.

Tout cela pour dire que même dans les mortiers et bétons, la dispersion de la FSD n’est pas si simple,
puisqu’elle dépend de plusieurs paramètres. Voilà pourquoi, la majorité des auteurs s’accordent sur
le fait que l’ajout d’agrégats tous seuls n’est pas suffisant pour disperser la totalité des agglomérats
de la FSD. Il serait plutôt préférable de regrouper plusieurs techniques « dispersantes » (ajout
d’agrégats, de superplastifiant, traitement de la poudre avant utilisation, malaxage spécial…) pour
espérer atteindre une dispersion idéale et ne plus avoir d’amas de FSD dans le matériau cimentaire.

En tout cas, l’utilisation du slurry que ce soit dans les pâtes, mortiers ou bétons demeure préférable
car il permet une meilleure densification de la microstructure au niveau de la matrice cimentaire,
mais aussi au niveau de l’ITZ comme le montrent certaines études [SEN 10] [KON 12].

2. Influence de la teneur en FSS


Les pâtes de ciment S(0)0, S(10)0 et S(20)0 ont une porosité initiale égale et des teneurs en fumée de
silice slurry variant respectivement de 0, 10 et 20% par masse de ciment. Nous regardons dans cette
partie l’influence de la teneur en fumée de silice sur les propriétés microstructurales et
diffusionnelles de ces pâtes.

2.1. Structure poreuse des pâtes avec FSS


2.1.1. Porosité totale et degré d’hydratation
La figure III-7 montre les valeurs de porosité totale et de masse volumique apparente, obtenues par
porosimétrie à l’eau (§II-3.1.), en fonction de la teneur en FS de chaque pâte de ciment hydratée de 6
mois.

104
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

36 1,725

Masse volumique apparente (g/cm3)


35 1,700

34 1,675
Porosité θH2O (%)
33 1,650

32 1,625

31 1,600

30 1,575

29 1,550
0% 5% 10% 15% 20% 25%
Pourcentage de FS présent dans la pâte

Figure III-7 : Porosités à l’eau et masses volumiques apparentes des pâtes de ciment à différentes
teneurs en FSS

On remarque que les masses volumiques apparentes diminuent avec l’ajout de FS, une diminution
prévisible puisqu’on substitue une partie du ciment Portland (ρCEM I ≈3,61) par de la FS plus légère et
moins dense (ρ de la poudre séché de FS étant de 2,24).

D’un autre côté, la porosité totale augmente linéairement avec l’ajout de FS. Cette augmentation est
probablement due à la FS qui consomme la portlandite (CH), non poreuse, pour produire des
hydrates poreux; les C-S-H. Cette augmentation de la porosité totale est aussi observée dans les
ciments aux laitiers ou les ciments composés CEMV (laitiers + cendres) [STE 15] [COD 07]. Pour
d’autres auteurs comme [KJE 99], cet accroissement de la porosité peut être expliqué par l’existence
de macroporosités « hollow-shell » dans des mélanges matures de ciment avec FS. Ces pores ont été
directement observés au MEB puis détectés avec les isothermes de désorption.

Il est important de noter que pour des matériaux ayant la même porosité initiale (presque le même
E/Liant), une augmentation de la porosité totale induit naturellement une diminution du degré
d’hydratation. Ce constat a été confirmé avec la mesure des degrés d’hydratation qui diminuent de
93,1% à 85,5% puis à 77,1% respectivement pour les pâtes de ciment fabriquées avec 0, 10 et 20%
de FSS. Cette diminution est probablement due à la faible teneur en eau liée associée aux C-S-H(P)
créés avec la réaction pouzzolanique, comparée à celle contenue dans la portlandite (CH) ou les C-S-
H(C) conventionnels, produits de l’hydratation du ciment Portland [HUA 85]. Ainsi, les pâtes avec
plus de FS sont celles avec le plus de C-S-H(P) (moins de portlandite et de C-S-H(C)) et avec le
degré d’hydratation le plus faible.

Maintenant, si on revient à l’évolution de la porosité avec la teneur en FS, le résultat de la Figure III-
7 peut nous sembler à première vue inquiétant, car cela peut vouloir indiquer que l’ajout de FS a un
effet négatif sur la microstructure poreuse puisqu’il augmente le volume total des pores au sein du
matériau. Cependant, la porosité totale à l’eau reste un paramètre global, qui ne permet pas de donner
plus d’informations ou de détails sur la structure poreuse du matériau comme le font d’autres
techniques, en l’occurrence la porosimétrie au mercure.

105
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

2.1.2. Distribution de la taille des pores et réactivité de la FS


La Figure III-8 montre la distribution de la taille des pores en fonction de l’ajout de la FSS.

0,3
S(0)0 S(10)0 S(20)0

dV/dlog(dp) (ml/nm. g de pâte)


0,25

0,2

0,15

0,1

0,05

0
10000 1000 100 10 1
Diamètre d'accès des pores dp(nm)

(a)

0,14
S(0)0 S(10)0 S(20)0

Volume cumulé de mercure intrus


0,12

0,1

0,08

(ml/g)
0,06

0,04

0,02

0
10000 1000 100 10 1
Diamètre d'accès des pores dp(nm)

(b)

Figure III-8 : Distributions poreuses obtenues par intrusion de mercure pour les trois pâtes S(0)0,
S(10)0 et S(20)0 (a) distribution des volumes poreux (dV/dlog(dp)) en fonction des diamètres de
pores;(b) Courbe du volume cumulé de mercure intrus en fonction des diamètres d’accès des pores

L’ajout de la fumée de silice (slurry) dans la pâte de ciment augmente la teneur en gel de C-S-H
(zone avec les diamètres d’accès ≤6 nm) comme le montre la figure III-8(a).Cette augmentation
trouve son origine dans la réaction pouzzolanique, qui produit plus de C-S-H(P) pouzzolaniques,
lorsque plus de silice est disponible dans le matériau. Ce résultat est en accord avec les quantités de

106
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

portlandite obtenues par ATG (tableau II-5) qui diminuent respectivement de 29,0 ; 19,6 et 18,6%
avec l’ajout de 0, 10 et 20% de FS.

Cependant, on remarque que la consommation en portlandite est plus importante (autour de 0,1 g/ g
de liant anhydre) avec l’ajout de 10% de FSS, et ne change pas beaucoup avec l’ajout de 20% de
fumée de silice (0,11g/ g liant anhydre). Cela signifie que l’efficacité de la réactivité pouzzolanique
de la FS ralentit au-delà d’un certain pourcentage de FS, dans le cas de cette étude après 10%. Une
tendance similaire est observée à la Figure III-8(a) sur les courbes de dérivées logarithmiques du
volume cumulée (le dV/dlog(dp)) où le pic correspondant aux C-S-H augmente de 0,1 à 0,23
ml/(nm.g) avec l’ajout de 10% de FS, et jusqu’à 0,28 ml/(nm.g) avec l’ajout de 20% de FS.

Dans la littérature, plusieurs études mettent en évidence l’existence d’un optimum d’utilisation de FS
généralement situé entre 8 et 12% d’ajout de FS [KHA 03] [ALE 99]. En dessus de ce seuil
d’efficacité, les particules de fumée de silice ne participent pas toutes à la réactivité pouzzolanique
(voir Fig. I-15) mais une grande partie d’entre elles vont se contenter de jouer un rôle de filler inerte,
ce qui permet tout de même d’affiner la porosité du matériau.

C’est d’ailleurs ce qui a été constaté pour la porosité capillaire. En effet, un affinement des pores est
observé avec l’ajout de FS. Cet affinement se traduit par une diminution du rayon critique capillaire.
Il est probablement dû à l’effet « filler » des particules de FS qui ont la possibilité de pénétrer au sein
de l’espace poreux et par conséquent justifier l’existence de pores plus étroits dans ces matériaux en
présence de FS. Dans les pâtes étudiées, le rayon critique des pores capillaires est évalué à 18 ; 13 et
8,5 nm (soit un diamètre critique de 36 ; 26,3 et 17,1) respectivement pour les pâtes de ciment avec
0; 10 et 20% d’ajout de FSS.

Par ailleurs, il est vrai que le volume total de mercure intrus est plus important pour la pâte S(20)0
(c’est le cas de la porosité à l’eau aussi). Néanmoins, ce volume est connecté via des pores fins, plus
étroits que dans le S(10)0 puis le S(0)0. Dans ce contexte, le paramètre de connectivité (αc défini par
l’équation II-11 dans la section §II-3.2.2) peut renseigner sur le degré de connexion (ou de
percolation) du réseau poreux. Le tableau III-1 donne les valeurs moyennes (à partir de 3 mesures)
des données nécessaires (Vi, Vemin et Vimax) pour calculer le pourcentage de mercure piégé αc. Pour
rappel, un réseau poreux est mieux connecté quand αc diminue.

Tableau III-1 : Connectivité du réseau poreux dans les pâtes S(0)0 ; S(10)0 et S(20)0, évaluée par
porosimétrie au mercure

Pâtes Vemin Vi à 0,1 MPa Vimax Connectivité αc


(ml/g) (ml/g) (ml/g) (%)
S(0)0 0,0438 0,0017 0,0781 55,10 ± 3,15
S(10)0 0,0733 0,0040 0,1137 63,17 ± 1,83
S(20)0 0,0886 0,0029 0,1325 66,12 ± 1,27

La connectivité augmente avec l’ajout de FS révélant ainsi un réseau poreux bien moins accessible au
mercure. La présence de fumée de silice permet donc de segmenter la porosité par des pores plus fins ce
qui influe directement sur les possibilités de transfert à travers le réseau poreux.

2.2. Coefficients de diffusion HTO


2.2.1. Résultats

107
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

Le principe de la mesure, les conditions d’essai, les dimensions des échantillons ainsi que la méthode
d’analyse des résultats ont été présentés au chapitre II section §II-2.

La figure III-9 présente l’évolution du flux sortant (JL/SC0) et de l’activité relâchée cumulée
(QL/SC0) suivis dans le temps à l’aval de la cellule S(10)0. Tous les essais ont été poursuivis jusqu’à
atteindre le régime permanent (flux constant).

1,4E-05 1,4E-12

1,2E-05 1,2E-12

1,0E-05 1E-12
Q (t)L/SC0 (m2)

8,0E-06 8E-13

JL/C0 (m2/s)
6,0E-06 6E-13

4,0E-06 QL/SC0
4E-13

2,0E-06 JL/C0 2E-13


fit MIED
0,0E+00 0
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180
Temps (jours)

Figure III-9: Evolution du flux sortant (JL/SC0) et de l’activité relâchée cumulée (QL/SC0) à l’aval en
fonction du temps pour la pâte S(10)0

La figure III-10 affiche la comparaison entre les activités relâchées à l’aval pour les trois pâtes de
ciment avec 0, 10 et 20% de FSS.

3,0E-05
S(0)0
2,5E-05 S(10)0
S(20)0
Q (t)L/SC0 (m2)

2,0E-05
fit MIED
1,5E-05

1,0E-05

5,0E-06

0,0E+00
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180
Temps (j)

Figure III-10: Evolution de l’activité relâchée à l’aval pour les trois pâtes de ciment S(0)0 ; S(10)0 et
S(20)0

108
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

L’observation des courbes de la Figure III-10 met en évidence une diminution du relâchement d’eau
tritiée avec l’ajout de FS. Les coefficients de diffusion HTO, les temps de retard T i et les porosités
modifiées αm ont été déterminés par ajustement avec le modèle MIED comme précédemment détaillé
à la section §II-2.3. Leurs valeurs sont affichées dans le tableau III-2.

Tableau III-2: Valeurs des paramètres de diffusion : De, αm et Ti obtenues par l’exploitation des
courbes de diffusion à l’eau tritiée pour les trois pâtes avec 0, 10 et 20% de FS

Pâtes Temps Ti (j) αm (%) DeHTO (m2/s)


S(0)0 13 46,5% 2,56e-12
S(10)0 33 48,9% 1,05e-12
S(20)0 70 62,9% 0,48e-12

On peut remarquer que le classement des valeurs de la porosité à l’eau tritiée αm par rapport à la
teneur en FS dans les pâtes est similaire à celui obtenu par la porosité à l’eau θH2O (§III-2.1.1.).
Néanmoins, la comparaison entre αm et θH2O montrent que les porosités accessibles à l’eau tritiée sont
systématiquement plus importantes que celles accessibles à l’eau, par la définition même de ce
paramètre considéré dans la résolution de la deuxième équation de Fick.

Pour une même épaisseur d’échantillon pour toutes les pâtes (≈ 6 mm), le temps de relâchement des
molécules HTO augmente également avec l’ajout de FS. Ce temps est respectivement deux et cinq
fois plus important avec l’ajout de 10 et de 20% de FS, ce qui rend la durée de l’essai et l’obtention
du régime permanent beaucoup plus long dans les pâtes en présence de fumée de silice. Ceci
confirme la capacité de ces matériaux à retarder le relâchement des radionucléides

Malgré l’augmentation de la porosité totale avec l’ajout de FS, l’affinement de la taille des pores
observé par porosimétrie au mercure a engendré la baisse du coefficient de diffusion HTO. Ce
dernier chute respectivement d’un facteur ≈ 2,5 et 5,2 avec l’ajout de 10 et 20% de FS. Le même
facteur de 2,5 en coefficients de diffusion a été obtenu par Delagrave [DEL 98] pour les pâtes de
ciment (E/L =0,45) après l’ajout d’uniquement 6% de FS. Toutefois, vu la rareté des données
disponibles sur les coefficients de diffusion HTO en présence de FS, les valeurs obtenues dans le
cadre de cette étude sont difficilement comparables à d’autres données.

Afin de pouvoir expliquer cette baisse du coefficient de diffusion HTO à partir des propriétés
microstructurales, l’étude d’un possible lien entre différents paramètres et le coefficient de diffusion
de l’eau tritiée, en particulier entre le rayon critique des pores capillaires rc et le DeHTO est présentée
au point suivant.

2.2.2. Lien entre coefficient de diffusion et rayon critique


Les essais de porosimétrie eu mercure présentent l’avantage de fournir des données sur la percolation
du réseau poreux et sur la taille des rayons d’accès de chaque type de porosité. En particulier dans
l’étude du transport dans les matériaux cimentaires, le rayon critique (ou le diamètre seuil) des pores
capillaires est une caractéristique importante qui définit le rayon d’accès à partir duquel un chemin
continu d’écoulement se forme à travers le matériau.

En effet, la finesse des pores capillaires a un impact direct sur le coefficient de diffusion liquide (ici
de l’eau tritiée). La figure III-11(a) montre la décroissance du coefficient de diffusion effective

109
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

DeHTO (m2/s) en fonction du rayon critique (rc) de pores capillaires pour les trois pâtes de ciment
S(0)0; S(10)0 et S(20)0. Les deux valeurs de DeHTO et rc des pâtes S-F44 et D-F44 ont été ajoutées
dans la figure III-11(b). Ils suivent la même tendance : une décroissance exponentielle du coefficient
de diffusion avec le rayon critique des pores capillaires.

3E-12 3E-12

2,5E-12 S(0)0 2,5E-12 S(0)0

2E-12 2E-12
DeHTO (m2/s)

DeHTO (m2/s)
1,5E-12 1,5E-12

1E-12 S(10)0 1E-12 S(10)0


DeHTO = 1E-13e0,1745 rc D-F44 DeHTO = 1E-13e0,1768 rc
5E-13 S(20)0 5E-13 S(20)0
R² = 0,9999 R² = 0,9945
S-F44
0 0
0 5 10 15 20 25 0 5 10 15 20 25
Rayon critique rc (nm) Rayon critique rc (nm)

(a) (b)
Figure III-11 : Variation du coefficient de diffusion HTO en fonction du rayon critique pour
(a) les pâtes S(0)0; S(10)0 et S(20)0 ;(b) les trois précédentes pâtes et les deux pâtes S-F44 et D-
F44

Un résultat proche a été obtenu par Halamickova [HAL 95] qui a testé différentes formulations de
pâtes, mortiers et bétons avec des rapports E/C de 0,4 et 0,5 en diffusion chlorures. Dans ses
résultats, le coefficient de diffusion des ions chlorures varie linéairement avec le rayon critique
(Figure III-12).

Figure III-12 : Coefficients de diffusion chlorures en fonction du rayon critique des pores (ici appelé Cr)
pour les pâtes de ciment et les mortiers CEM I [HAL 95]

Cependant, les matériaux testés dans son travail [HAL 95], étaient à base de ciment Portland et ont
été formulés avec des rapports E/C importants de 0,4 et 0,5, ce qui a permis l’obtention de valeurs de

110
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

rayons critiques assez élevées (20 nm ≤ rc ≤ 120 nm). Dans le cadre de notre étude, les matériaux
testés étant presque tous formulés avec de la FS (excepté le S(0)0), les rayons critiques des pores
capillaires obtenus ont des tailles inférieurs à 20 nm.

La relation exponentielle représentée dans la Figure III-11(b) sera alimentée tout au long de ce
manuscrit par les autres valeurs de coefficients de diffusion et de rayons critiques des différentes
formulations de pâtes et mortiers.

Dans la partie suivante, nous étudions l’influence du rapport E/L en présence de FS dans les pâtes de
ciment.

3. Influence du rapport E/L


Le rapport E/L vaut 0,3; 0,41 et 0,5 pour les pâtes de ciment avec 10% de FSS en masse de ciment.
Ces pâtes sont alors respectivement nommées S-F44, S(10)0 et la S(10)0-0,5.

3.1. Microstructure poreuse


Le tableau II-5 présente les valeurs de porosité à l’eau pour les trois pâtes S-F44, S(10)0 et S(10)0-
0,5. Comme prévu, la porosité à l’eau (à 60°C) augmente avec le rapport E/L, puisque la porosité
initiale suivait elle-même cet ordre d’accroissement. Après 6 mois d’hydratation, θH2O augmente
linéairement et respectivement de 24,1 ; 32,3 et 39,5% avec le rapport E/L de 0,3 ; 0,41 et 0,5 des
pâtes de ciment.

Les degrés d’hydratation augmentent également avec le rapport E/L, pour les pâtes de ciment ayant
le même âge (6 mois), car l’état d’hydratation d’un matériau à très faible teneur en eau initiale est
peu évolutif au cours du temps. On mesure alors des valeurs de αhyd aux alentours de 71,7 ; 85 ,5 et
87,6% pour les pâtes avec 10% de FS et des rapports E/L respectifs de 0,3 ; 0,41 et 0,5. Ces résultats
ont également pu être vérifiés en visualisant de façon comparative l’état d’hydratation des matériaux
par imagerie MEB. Des images en mode électrons rétrodiffusés (BSE) ont été alors réalisés sur des
échantillons préparés selon la procédure détaillée en §II-3.3.1., avec un grossissement x 151. Sur ces
images (Figure III-13), les tâches très claires (presque blanches) dans la matrice cimentaire,
représentent les grains de ciment anhydre et les zones plus foncées (grises), les hydrates.

111
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

S-F44 (x151) S(10)0 (x151)

S(10)0-0,5 (x151) S(10)0-0,5 (x505)

Figure III-13 : Images obtenues au MEB sur les surfaces polies des trois échantillons S-F44 (E/L=0,3) ;
S(10)0 (E/L=0,41) et S(10)0-0,5 (E/L=0,5) âgés de 6 mois au grossissement (x151) et un zoom au
grossissement (x505) pour la pâte S(10)0-0,5.

Avec le même âge pour tous ces matériaux, la pâte S-F44 montre la subsistance de plusieurs grains
blanchâtres de ciment non hydraté révélant un taux d’hydratation plus faible dans cette pâte par
rapport à celui de la pâte S(10)0 et la pâte S(10)0-0,5. Cependant, un taux d’hydratation plus faible
(comme celui de la pâte avec E/L de 0,3) ne nuit en rien aux propriétés mécaniques et
microstructurales, mais peut au contraire se révéler positif [BAR 94].

D’ailleurs, par rapport aux deux formulations S(10)0 et S(10)0-0,5 (où la matrice est plus poreuse -
voir le grossissement plus élevé x505), la matrice cimentaire de la pâte S-F44 semble plus
homogène, plus dense et la porosité (en noir) plus particulièrement fine. Ces observations ont été
confirmées par les distributions de la taille des pores caractérisées par porosimétrie au mercure.

En effet, l’augmentation de la porosité totale avec le rapport E/L se traduit par une augmentation de
la fraction et de la taille de la porosité capillaire ainsi que les pores des hydrates (Figure III-14).

112
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

0,3
S-F44 S(10)0 S(10)0-0,5

dV/dlog(D) (ml/nm. g de pâte)


0,25

0,2

0,15

0,1

0,05

0
10000 1000 100 10 1
Diamètre d'accès des pores dp (nm)

(a)

0,2
S-F44 S(10)0 S(10)0-0,5 0,18

Volume cumulé de mercure


0,16
0,14

intrus (ml/g)
0,12
0,1
0,08
0,06
0,04
0,02
0
10000 1000 100 10 1
Diamètre d'accès des pores dp (nm)

(b)

Figure III-14 : Distributions poreuses obtenues par intrusion de mercure pour les trois pâtes S-F44 ;
S(10)0 et S(10)0-0,5 ;(a) distribution des volumes poreux (dV/dlog(dp)) en fonction des diamètres
d’accès de pores;(b) Courbe du volume cumulé de mercure intrus en fonction des diamètres d’accès
des pores

Avec l’augmentation du rapport E/L, le matériau est mieux hydraté favorisant ainsi la formation de
plus d’hydrates. Ce résultat a été confirmé par les teneurs en eau liée au sein des C-S-H déterminées
à partir de l’analyse thermogravimétrique, par perte de masse entre 105 et 400°C en g/g de liant
anhydre (§II-4.2). La teneur d’eau liée aux C-S-H augmente avec la quantité d’eau de gâchage
introduite dans le matériau, comme le montre le tableau III-3. En particulier, cette augmentation est
plus marquée quand on passe d’un E/L de 0,3 à 0,41 (↗1,55%) que de 0,41 à 0,5 (↗0,9%). Elle est
en accord avec les valeurs données par le pic correspondant aux C-S-H de la figure III-14(a) qui est
amplifié de 0,13 ml.nm-1g-1 entre 0,3 et 0,41 en masse d’eau par liant, et seulement de 0,05 ml.nm -1g-
1
quand on passe d’un E/L de 0,41 à 0,5. Ce changement de « cadence » peut suggérer l’existence
d’un rapport E/L intermédiaire entre 0,3 et 0,41, en dessous duquel il n’y’a pas assez d’eau pour

113
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

hydrater totalement le ciment. Il nous rappelle en quelque sorte le rapport E/L d’environ 0,38,
rapport critique suggéré par le modèle de Powers pour les pâtes CEM I.

Par ailleurs la teneur en portlandite augmente aussi avec le rapport E/L en raison des taux
d’hydratation élevés.

Tableau III-3 : Eau liée aux C-S-H et la teneur en portlandite retrouvées par ATG pour les trois pâtes S-
F44 ; S(10)0 et S(10)0-0,5 ; et exprimées en g/g de liant anhydre.

Pâtes Eau liée aux C-S-H Teneur en CH


(g/g de liant anhydre) (g/g de liant anhydre)
S-F44 11,35% 14,6%
S(10)0 12,9% 19,6%
S(10)0-0,5 13,8% 23,4%

En plus de la porosité des hydrates, l’ajout d’eau dans les pâtes de ciment en présence de fumée de
silice, décale les pics correspondant aux pores capillaires vers les rayons les plus larges et augmente
leur amplitude. Ainsi, on obtient des rayons critiques qui augmentent de 6,1 ; 13 et 16 nm (soit égale
à 12,2 ; 26,3 et 32 nm de diamètre seuil) respectivement pour les pâtes de ciment slurry avec des
rapports E/L de 0,3 ; 0,41 et 0,5.

3.2. Mesures des coefficients de diffusion HTO


3.2.1. Résultats
L’activité relâchée cumulée en fonction du temps pour les formulations S-F44 ; S(10)0 et S(10)0-0,5
est représentée dans la figure III-15.
2,0E-05
1,8E-05
1,6E-05 S-F44
S(10)0
Q (t)L /S.C0 (m2)

1,4E-05
1,2E-05 S(10)0-0,5

1,0E-05 fit MIED

8,0E-06
6,0E-06
4,0E-06
2,0E-06
0,0E+00
0 50 100 150 200 250
Temps (j)

Figure III-15: Evolution de l’activité relâchée à l’aval pour les trois pâtes de ciment S-F44 ; S(10)0 et
S(10)0-0,5

On peut remarquer que le coefficient de diffusion (la pente de la droite au régime permanent) et
l’activité cumulée en un temps donné augmentent avec le rapport E/L. Le relâchement des molécules

114
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

HTO est également accéléré pour les pâtes à forts rapports E/L, avec des temps Ti autour de 130, 33
et 19 jours respectivement pour les pâtes de ciment avec un E/L de 0,3 ; 0,41 et 0,5. L’écart là aussi,
tant sur le time-lag Ti que sur le coefficient de diffusion DeHTO, est plus important quand on passe
d’un rapport E/L de 0,3 à 0,41; que de 0,41 à 0,5.

Concernant les coefficients de diffusion, ils augmentent respectivement de 2,97 e-13 à 1,05e-12 puis
1,79e-12 m2/s avec le rapport E/L de 0,3; 0,41 et 0,5, soit d’un facteur 6 lorsque E/L croit de 0,3 à
0,5. Ceci montre l’importance de ce paramètre dans le mécanisme de diffusion. En effet, l’étude de
la variation de la diffusivité avec le rapport E/L revient à étudier l’impact de la quantité de pores
formés sur les propriétés diffusives des matériaux cimentaires. Plus la quantité de pores est
importante, plus le pouvoir diffusif est important. L’augmentation de la quantité d’eau de gâchage se
traduit par la formation d’un réseau poreux plus percolant, comme le montre les volumes cumulés de
mercure intrus dans la Figure III-14(b). Le paramètre de connectivité αc, calculé à partir des données
de porosimétrie au mercure, confirme que l’ajout d’eau génère un réseau poreux plus connecté et
moins segmenté. Il diminue alors respectivement de 76,5 ; à 63,1 puis 57,0% avec le rapport E/L de
0,3 ; 0,41 et 0,5, sachant qu’un αc plus élevé caractérise un réseau poreux moins connecté. Ainsi, la
pâte S-F44 réussit le mieux à piéger le mercure, mais également les molécules d’eau tritiée qu’elle
parvient à retenir le plus longtemps possible (Figure III-15).

3.2.2. Lien entre coefficient de diffusion et rayon critique


Dans l’objectif de relier les coefficients de diffusion HTO à des paramètres microstructuraux, et
comme précédemment montré dans la section §III-2.2.2., les DeHTO obtenus pour les pâtes à
différents rapports E/L sont représentés en fonction des rayons critiques des pores capillaires. La
figure III-11(b) présente donc trois points supplémentaires (III-16) correspondants aux pâtes S-F44 ;
S(10)0 et S(10)0-0,5.

3E-12

2,5E-12 S(0)0

2E-12
DeHTO (m2/s)

S(10)0-0,5
1,5E-12

1E-12 S(10)0
DeHTO = 1E-13e0,1759rc
D-F44 R² = 0,9954
5E-13 S(20)0
S-F44
0
0 5 10 15 20 25
Rayon critique rc (nm)

Figure III-16 : Variation du coefficient de diffusion HTO en fonction du rayon critique pour toutes les
pâtes de ciment étudiées dans ce chapitre

Le tableau III-4 récapitule les valeurs de DeHTO et de rayons critiques rc (ou diamètres seuil ds)
obtenus à partir des courbes de porosimétrie au mercure pour toutes les pâtes étudiées dans ce
chapitre III.

115
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

Tableau III-4 : Récapitulatif des valeurs de DeHTO et de rayons critiques pour les six pâtes étudiées

Pâte DeHTO (m2/s) Rayon critique rc Diamètre seuil ds (nm)


(nm)
S-F44 2,97e-13 6,1 12,2
S(10)0 1,05e-12 13,1 26,3
S(10)0-0,5 1,79e-12 16 32
S(0)0 2,56e-12 18 36
S(20)0 4,87e-13 8,5 17,1
D-F44 6,40e-13 9,5 19

En conséquence de l’élargissement du rayon critique et de la diminution de la connectivité, le


coefficient de diffusion effectif des pâtes augmente. En plus, le DeHTO des trois pâtes à différents
rapports E/L rejoint la même courbe exponentielle déjà tracée dans la Figure III-11. Le rayon
critique est donc un paramètre important puisqu’il permet d’interpréter plus moins l’évolution du
coefficient de diffusion. La relation exponentielle établie est applicable uniquement dans son
domaine de validité (5 nm≤ rc ≤20 nm).

3.2.3. Comparaison avec les pâtes sans ajout de FS


Les valeurs de coefficients de diffusion DeHTO ont été représentées en fonction du rapport E/L pour
les pâtes de ciments S-F44 ; S(10)0 et S(10)0-0,5 avec 10% de FSS, et pour les pâtes de même
porosité initiale sans ajout de FS testées précédemment dans l’étude de Larbi [LARB 13] (Figure III-
17).

5,E-12
10% FSS
4,E-12
0% FSS
DeHTO (m2/s)

3,E-12

2,E-12

1,E-12

1,E-13
0,2 0,3 0,4 0,5 0,6
Rapport E/L

Figure III-17 : Evolution du coefficient de diffusion HTO avec le rapport E/L en présence et en absence
de FSS.

L’augmentation du rayon critique observée pour les pâtes de ciment avec et sans ajout de FS peut
expliquer l’accroissement des coefficients de diffusion avec le rapport E/L. Cependant, les
coefficients de diffusion n’évoluent pas de la même manière c.à.d. que pour les pâtes fabriquées
uniquement avec du ciment Portland, la pente de la courbe DeHTO=f (E/L) est en effet plus raide, ce
qui signifie en d’autres termes que la diffusion croit plus fortement avec le rapport E/L, en absence
de FS. En contrepartie, pour les pâtes avec FS, l’ajout d’eau impacte moins les paramètres de

116
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

diffusion puisqu’on retrouve un coefficient directeur de la pente D eHTO=f (E/L) plus faible. Ce
dernier résultat est probablement dû aux particules de FS « gourmandes» en eau qui vont donc
réduire la teneur en eau dans le matériau avec l’augmentation de la teneur en FS [QUE 12] [FEL 85]
(de l’eau nécessaire dans la réaction pouzzolanique de la FS (Eq. I-6) en plus de l’eau adsorbée en
surface des particules). Une telle consommation d’eau résulte de la grande surface spécifique des
particules ultrafines de FS [MAL 08].

Dans la Figure III-17, on peut remarquer que la valeur du coefficient de diffusion (ainsi que celle du
rayon critique rc) de la pâte de ciment avec (0% de FS ; E/L=0,3) est presque égale -voir légèrement
supérieure- à celle de la pâte (10% de FS ; E/L=0,41). L’avantage de cette dernière pâte c’est qu’elle
est plus facile à manipuler et à mettre en œuvre.

Ainsi, la présence de FS dans les mélanges cimentaires permet de réduire l’impact de l’ajout d’eau,
tout en rendant ces matériaux plus résistant à l’intrusion d’agents agressifs (ions comme le chlorure)
et en améliorant leur capacités de confinement vis-à-vis des radionucléides.

117
Chapitre III : Pâtes : Microstructure en lien avec la diffusion

4. Conclusion
La microstructure poreuse et les propriétés de transport des pâtes de ciment avec FS ont été
investiguées dans ce chapitre. Les éléments récoltés nous permettent d’alimenter la base de données
des coefficients de diffusion HTO, et de comprendre l’influence de chaque paramètre de la
composition initiale sur l’évolution de la structure poreuse au sein de la matrice cimentaire.

L’étude à l’échelle de la pâte est une étape intermédiaire, mais nécessaire avant d’aborder le cas des
mortiers et des bétons présentant l’ajout d’un nouveau élément perturbateur: les granulats.

Dans ce chapitre, la perte de performances liée à l’utilisation d’une forme densifiée de FS (FSD) par
rapport à une forme de fumée de silice en suspension liquide (FSS slurry), a été en premier lieu
illustrée. Le choix du slurry ayant été adopté par la suite pour toutes les formulations, on s’est ensuite
intéressé à l’effet de la teneur en FS et de la quantité d’eau du gâchage sur les propriétés poreuses et
de diffusion. La teneur en FS a donc été variée de 0 à 20% par masse de ciment pour préparer des
pâtes de ciment avec des rapports E/L allant de 0,3 à 0,5. Les principaux résultats peuvent être
résumés de la façon suivante :

 Grâce à sa meilleure dispersion au sein de la matrice cimentaire, l’utilisation de la fumée de


silice slurry améliore la structure des pores et réduit de moitié le coefficient de diffusion
HTO par rapport à une pâte de ciment similaire fabriquée avec la forme densifiée de FS. En
effet, l’utilisation de la FSD montre l’existence de plusieurs agglomérats de FS avec des
formes et des tailles irrégulières au sein de la matrice cimentaire.
 L’ajout de FSS augmente la porosité totale, mais réduit la taille des pores. En particulier, le
rayon critique des pores capillaires se rétrécit et par conséquent, fait diminuer
significativement le coefficient de diffusion. L’utilisation de la fumée de silice dans la
fabrication des colis de déchets nucléaires améliore donc leurs capacités de rétention des
radionucléides et assure de meilleures conditions de sécurité dans de telles installations.
 Les coefficients de diffusion HTO augmentent linéairement avec le rapport E/L. Cependant,
cette augmentation reste plus importante dans le cas des pâtes de ciment sans ajout de FS. La
présence de FS dans les mélanges cimentaires réduit donc l’impact de l’ajout d’eau et freine
la pénétration des molécules HTO, qui devient manifestement plus lente que dans des pâtes
de ciment comparables fabriquées avec uniquement du ciment Portland.
 Une relation de type exponentiel lie le coefficient de diffusion effectif D eHTO et le rayon
critique rc déterminé par porosimétrie au mercure. La courbe tracée DeHTO en fonction de rc
est alimentée par des nouvelles mesures présentées dans le chapitre IV.

118
119
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout


des granulats
Après la caractérisation des propriétés des pâtes de ciment et de l’influence de chaque élément de la
composition initiale (rapport E/C, %FS) sur les propriétés microstructurales et de diffusion, l’objectif
de ce chapitre est d’identifier le passage pâte-mortier en étudiant l’impact de l’ajout des granulats.
Les granulats utilisés sont de type siliceux et sont donc considérés comme non-poreux (§II-1.1.4.).

Il s’agit dans les deux premières sections, de présenter les résultats des coefficients de diffusion
obtenus pour les mortiers à base de sable normalisé (SN), et de les interpréter à partir de la
caractérisation microstructurale. Cette dernière comprend l’investigation de la porosité au niveau de
la matrice cimentaire et à l’interface granulat/pâte (ITZ). L’homogénéité des pâtes de ciment
contenues dans les mortiers et la réactivité de la FSS sont également abordées dans ces deux
premières parties avant de leur consacrer une section toute entière. La troisième partie propose donc
une discussion sur la dispersion de la fumée de silice slurry dans les mortiers.

Les effets induits par l’ajout de sable normalisé sur les coefficients de diffusion sont examinés en
quatrième partie. L’objectif consiste à dissocier l’effet de la dilution de celui de la percolation de
l’ITZ et de la tortuosité, et voir la part de participation de chacun de ces phénomènes sur la variation
des DeHTO de mortiers. En particulier, pour essayer de comprendre l’impact de la percolation des
couches d’ITZ, un modèle 3D permettant de simuler un VER de mortier a été développé et adapté
aux cas des mortiers de cette étude.

Les sections 1 à 4 traitent uniquement le cas des mortiers fabriqués avec du sable normalisé. La
dernière partie (§IV-5) expose et discute les résultats de mortiers de sable fin et sable grossier afin de
voir l’effet de la granulométrie du sable sur la microstructure et les propriétés de diffusion.

120
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

CHAPITRE IV : DE LA PATE AUX MORTIERS : IMPACT DE L’AJOUT DES GRANULATS ...... 120
1. Diffusion HTO ..................................................................................................... 122
2. Interprétation par la caractérisation microstructurale ......................................... 124
2.1. Analyse de la microporosité de l’ITZ ........................................................................................................... 124
2.2. Homogénéité de la matrice cimentaire ...................................................................................................... 126
2.2.1. Dispersion de la FSS .......................................................................................................................... 126
2.2.2. Réactivité de la FS ............................................................................................................................. 129
2.3 Distribution poreuse ................................................................................................................................... 131
2.3.1. Porosimétrie à l’eau et au mercure .................................................................................................. 131
2.3.2. Sorption d’azote................................................................................................................................ 136
2.3.2.1.Caractérisation de la porosité des C-S-H ........................................................................................... 136
2.3.2.2 Limites de la technique ..................................................................................................................... 139
2.4. Perte de performances de confinement liée à l’agglomération de la FSS .................................................. 140

3. Discussion sur la dispersion de la FSS .................................................................. 143


3.1. L’effort de cisaillement induit par l’ajout des granulats ............................................................................. 144
3.2. L’influence de l’ajout du superplastifiant ................................................................................................... 146
3.3. L’importance de la séquence du mélange .................................................................................................. 147

4. Impact de la teneur en sable sur les coefficients de diffusion .............................. 148


4.1. Part de la dilution ....................................................................................................................................... 148
4.2. Part de la percolation d’ITZ et de la tortuosité : approche analytique....................................................... 150
4.3. Simulation 3D de l’effet de l’ITZ et de la tortuosité sur les coefficients de diffusion des mortiers............ 151
4.3.1. Présentation du modèle et de la chaîne de calcul ............................................................................ 152
4.3.1.1. Calcul du nombre d’inclusions ....................................................................................................... 152
4.3.1.2. Construction de la géométrie 3D ................................................................................................... 153
4.3.1.3. Maillage de la géométrie 3D......................................................................................................... 155
4.3.1.4. Calcul de la diffusivité équivalente .................................................................................................. 155
4.3.2. Application numérique: Part de la percolation d’ITZ et de la tortuosité sur les coefficients de
diffusion 156
4.3.3. Contribution de la tortuosité dans les coefficients de diffusion des pâtes contenues dans les
mortiers 158

5. Impact de la granulométrie du sable ................................................................... 159


5.1. Propriétés de diffusion ............................................................................................................................... 160
5.2. Analyse de la structure poreuse ................................................................................................................. 161

6. Conclusion .......................................................................................................... 165

121
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

1. Diffusion HTO
Les essais de diffusion HTO ont été conduits sur les cinq mortiers fabriqués avec des teneurs
volumiques de sable normalisé variant de 10 à 65%. La pâte de ciment S(10)0 décrite dans le
chapitre III, s’appellera ici SN(10)0 tel un mortier préparé avec 10% de FS en masse et 0% de
volume de sable. Le rapport E/Liant effectif, la teneur en FS ainsi que la granulométrie du sable sont
les mêmes pour tous les mortiers, ce qui nous permet de se focaliser sur l’effet de l’ajout des
granulats.

L’évolution de l’activité relâchée cumulée en fonction du temps pour ces formulations sont présentés
à la Figure IV-1.

1,6E-05

1,4E-05 SN(10)0
Sn(10)10
1,2E-05 SN(10)30
Q (t)L/SC0 (m2)

1,0E-05 SN(10)50
SN(10)60
8,0E-06 SN(10)65

6,0E-06

4,0E-06

2,0E-06

0,0E+00
0 50 100 150 200
Time (days)
Figure IV-1 : Evolution de l’activité cumulée relâchée en aval pour les mortiers à différentes teneurs
volumiques en sable

Une observation de ces courbes met en évidence une diminution du relâchement de l’eau tritiée avec
la teneur en sable. En particulier, pour les mortiers contenant des fractions volumiques de sable
supérieures à 30%, la capacité de rétention ainsi que le temps de relâchement des molécules HTO
sont beaucoup plus élevés. Cette amélioration significative des capacités de confinement au sein des
mortiers avec un Vagg ≥ 30% est confirmée par les valeurs de coefficients de diffusion effectifs.

La Figure IV-2 corrèle les valeurs de coefficients de diffusion HTO (D eHTO) des mortiers avec leur
teneur volumique en sable Vagg.

122
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

1,2E-12

DeHTO des mortiers (m2/s)


1,0E-12

8,0E-13

6,0E-13

4,0E-13

2,0E-13

0,0E+00
0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur en sable Vagg (%)

Figure IV-2 : Corrélation entre la teneur volumique de sable normalisé et le coefficient de diffusion
des mortiers avec 10% de FS

Deux comportements différents peuvent en effet être distingués. D’un côté, la pâte de ciment et le
mortier avec 10% en volume de sable avec des coefficients de diffusion plus élevés. De l’autre, les
mortiers formulés avec plus de 30% de volume d’agrégats avec des coefficients de diffusion plus
faibles qui décroissent linéairement avec la teneur volumique de sable. Pour les mortiers formulés
uniquement avec du CEM I et sans ajout de FS [LARB 12], cette différence de comportement n’a
pas été constatée puisque les DeHTO diminuaient linéairement avec la teneur en sable sur tout le
domaine 0%≤Vagg≤ 50% [LARB 13].

Afin d’essayer de comprendre ce qui se passe au niveau des mortiers avec ajout de FS, et pour
permettre la comparaison entre les différents coefficients de diffusion, il serait plus judicieux
d’estimer le DeHTO de la matrice cimentaire contenue dans chaque mortier (Figure IV-3). Dans la
littérature, de nombreux modèles empiriques proposent de prédire le coefficient de diffusion d’un
mortier à partir de celui de la pâte qui le constituent et de sa teneur en sable. Dans notre cas, nous
utiliserons le calcul inverse, c.à.d. estimer le De de la pâte à partir du De du mortier.

Basé sur une approche parallèle, le modèle de dilution parfaite à deux phases (matrice cimentaire et
granulats non-poreux) peut être adopté. Ce modèle est considéré comme le plus adéquat pour
reproduire le comportement des mortiers sans FS [LARB 12] [BAJ 15]. Il permet de prédire le
mortier pâte
coefficient de diffusion du mortier De à partir de celui de la pâte qui le constitue De selon la
relation suivante :

Demortier  Depâte (1  Vagg ) (Eq. IV-1)

La couche d’ITZ, si elle existe, est supposée être incluse dans la phase : pâte.

123
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

1,4E-12

DeHTO dans la fraction de pâte (m2/s)


1,2E-12

1,0E-12

8,0E-13

6,0E-13

4,0E-13

2,0E-13

0,0E+00
0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur en sable Vagg(%)

Figure IV-3 : Coefficients de diffusion HTO dans la fraction de pâte contenue dans chaque mortier de
sable normalisé en fonction de sa teneur en granulats

Si toutes les formulations de mortiers contenaient la « même pâte », les coefficients de diffusion des
fractions de pâte seraient tous situés autour de la même valeur. Or ce n’est pas le cas, puisque la
figure IV-3 montre l’existence de deux types de pâtes : (1) une pâte contenue dans les mortiers avec
une teneur volumique de sable inférieure ou égale à 10%, et possédant un coefficient de diffusion
plus élevé (≈1,1x10-12 m2/s), (2) une pâte contenue dans les mortiers avec une fraction volumique de
sable supérieure ou égale à 30%, disposant d’un coefficient de diffusion presque deux fois plus
faible (0,55x10-12 m2/s).

Pour comprendre l’origine de cette différence entre la pâte contenue dans les mortiers à faibles et à
fortes teneurs en sable, la microstructure de ces matériaux a été investiguée à l’aide de différentes
techniques expérimentales.

2. Interprétation par la caractérisation microstructurale


La caractérisation de la microstructure des mortiers comprend l’investigation de la porosité
détectable au niveau de l’ITZ (interface granulat/pâte), ainsi que l’étude de l’homogénéité et de la
structure poreuse de la matrice cimentaire.

2.1. Analyse de la microporosité de l’ITZ


Des observations au microscope électronique à balayage associées au traitement d’images ont été
effectuées sur tous les mortiers SN au niveau de l’interface granulat/pâte. L’objectif principal étant
de déterminer le profil de la porosité détectable au voisinage du granulat, et l’épaisseur de la couche
d’ITZ. Le protocole expérimental adopté a été précédemment détaillé au chapitre II (§II-3.3.)

La figure IV-4 présente la variation de la porosité en fonction de la distance à partir de la surface des
grains pour tous les mortiers étudiés. Chaque profil de porosité est la moyenne de 20 images MEB
acquises au voisinage des granulats de sable siliceux.

124
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

La porosité de l’ordre de 70% à la surface du grain est sûrement due à un petit décollement du grain
de sable lors de l’étape de polissage. En effet, un léger arrachement du grain de sable se traduit en
analyse d’images par l’existence d’un contour noir (zone poreuse-voir image de la Figure II-15) à
proximité du granulat.

80
SN(10)10 SN(10)30 SN(10)50 SN(10)60 SN(10)65
70
Porosité détectable (%)

60
50
40
30
20
10
0
0 5 10 15 20 25
Distance de la surface du granulat (µm)

Figure IV-4 : Profils de porosité détectable mesurée à l’interface granulat/pâte par traitement
d’images MEB des mortiers de sable normalisé.

Les profils montrent une décroissance rapide de la porosité au voisinage du granulat, puis une
stabilisation autour d’une valeur constante à partir de 2 à 3 µm de la surface du grain de sable. En
particulier pour le mortier à faible teneur en sable (SN(10)10), la valeur de porosité au sein de la
matrice cimentaire est légèrement plus élevée que celles des matrices cimentaires contenues dans les
autres mortiers. Cependant, l’épaisseur moyenne de la couche d’ITZ est plus ou moins la même pour
tous les mortiers étudiés et demeure très faible (< 5 µm).

Comparés aux mortiers à base de ciment Portland dont l’épaisseur moyenne de l’ITZ est de l’ordre
de 20 µm [LARB 13] [SCRI 04], l’ajout de FS permet donc de réduire l’épaisseur de l’ITZ, et
d’améliorer la qualité de l’auréole de transition [GOL 89] [MON 86] [BENT 87]. En effet, en
réagissant avec la portlandite qui se trouve en forte concentration à proximité des granulats (§I-A-
2.2.2), la fumée de silice participe à la densification de la porosité au niveau de l’auréole de
transition. En plus, et grâce à la finesse de ses particules, la FS pénètre au sein de la porosité de l’ITZ
et permet d’en combler une grande partie.

Dans la littérature, plusieurs études montrent l’effet bénéfique de l’utilisation de la FS sur l’auréole
de transition. Pour Scrivener et al. [SCR 88], l’ajout de FS diminue fortement la porosité au niveau
de l’ITZ, et réduit l’épaisseur à moins de 5 µm. Les travaux de Monteiro et Mehta [MON 88]
décrivent une réduction de l'épaisseur de l’ITZ pour les bétons avec FS (10 µm) par rapport aux
bétons ordinaires (50 µm).

Vue sa faible épaisseur observée dans les mortiers à 10% de FSS, l’auréole de transition ne peut pas
être à l’origine de la différence observée au niveau des coefficients de diffusion (Figure IV-2 et IV-
3). Pour essayer d’interpréter et expliquer ce saut en DeHTO entre les mortiers à faible et à fortes
teneurs en sable, une investigation à l’échelle de la matrice cimentaire s’impose.

125
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

2.2. Homogénéité de la matrice cimentaire


L’objectif de cette section est de vérifier la dispersion ainsi que la réactivité de la FS slurry au sein
des matrices cimentaires contenues dans les mortiers.

Comme précédemment constaté dans la partie §III-1.2, la dispersion de la fumée de silice au sein de
la pâte de ciment est un facteur clé pour assurer un gain de performances optimal. Dans ce même
chapitre, il a été conclu que l’usage du slurry s’avérait meilleur par rapport à l’utilisation de la
poudre densifiée, puisqu’il offre une meilleur distribution des particules de FS au sein de la matrice
cimentaire. Cependant, le cas présenté auparavant concernait des pâtes de ciment à faible rapports
E/L de 0,3. Dans le cas actuel, le slurry est utilisé dans des mortiers ayant un rapport E/L plus
important de 0,41.

2.2.1. Dispersion de la FSS


A l’échelle de la pâte, les observations MEB associées à l’analyse chimique par EDS ont mis en
évidence l’existence de plusieurs agglomérats de FS de grands diamètres (ϕ > 100 µm) au sein de la
matrice cimentaire de la pâte SN(10)0 et du mortier SN(10)10. En revanche, pour les mortiers avec
plus de 30% en fraction volumique de sable, ces agglomérats étaient de petites tailles et très peu
nombreux.

La figure IV-5 montre les agglomérats de FS observés dans la pâte SN(10)0 (Figure IV-5(a)), dans le
mortier SN(10)10 (Figure IV-5(b)) et dans le mortier SN(10)30 (Figure IV-5(c)) à deux
grossissement différents. Dans les mortiers, les agglomérats de FS peuvent être différenciés des
grains de sable siliceux par la présence de petites quantités de calcium au sein des agglomérats
(début d’hydratation de FS) et son absence dans le sable non-poreux, composé uniquement de silice
SiO2.

126
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

(a)

(b)

127
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

(c)
Figure IV-5: les agglomérats de FSS entourés de cercles blancs dans la matrice du SN(10)0 (a),
SN(10)10 (b) et du SN(10)30 à deux grossissement (x34) et (x220) (c)

D’une part, la fumée de silice slurry a tendance à former des agglomérats, de diamètre allant jusqu’à
plusieurs centaines de micromètres, qui ne sont pas bien dispersés dans les mortiers à faible teneur en
sable tels que SN(10)0 et SN(10)10. Et pourtant, en revenant à la distribution granulométrique
initiale du slurry - avant utilisation (Figure III-1), les particules de FSS sont bien dispersées et la
majorité d’entre elles ont un diamètre ne dépassant pas 20 µm.

Dans l’objectif de comprendre l’origine des agglomérats de FS observés dans les mortiers à moins de
10% de sable, des observations au microscope optiques ont été réalisés sur deux mélanges. Le
premier est un mélange de FSS avec l’eau interstitielle reconstituée d’un matériau cimentaire (pH=
13) et le deuxième, un mélange de FSS diluée dans de l’eau pure (pH=7) (Figure IV-6).

Figure IV-6: Observations au microscope optique du mélange de FSS avec une solution interstitielle
reconstituée (pH=13) [à gauche] et du mélange de FSS diluée dans l’eau pure [à droite]

Dés que le mélange avec la solution basique contenant la chaux a lieu, la FS flocule très rapidement
et certains agglomérats peuvent même se voir à l’oeil nu. En contrepartie, la FSS mélangé avec de

128
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

l’eau pure présente une bonne dispersion de la FS, en accord avec la distribution initiale des
particules de diamètre maximal autour de 10 à 20 µm (Figure III-1).

Les amas de FS présents dans les formulations SN(10)0 et SN(10)10 sont donc principalement
formés en raison de l’interaction de la FS avec l’hydroxyde de calcium contenu dans l’eau du
gâchage, et non pas dus à l’état initial du slurry, qui a été bien cisaillé et dont la taille de particules a
été vérifiée avant usage. Ce phénomène a également été observé dans la littérature par Mitchell et al.
[MIT 98] qui ont étudié l’interaction de la FS densifiée avec l’hydroxyde de calcium et le ciment
Portland. Ces auteurs mettent en évidence la formation de plusieurs agglomérats -entourés par des
silicates de calcium hydratés- qui persistent dans le matériau même après 120 jours d’hydratation.

D’autre part, et en revenant à la Figure IV-5, les observations faites sur les mortiers avec des teneurs
volumiques de sable supérieures ou égales à 30% montrent « une disparition » des agglomérats de
FS où du moins, la présence de quelques amas de très petites tailles (Figure IV-5(c)). La présence
d’une quantité significative de sable ( ≥ 30% en fraction volumique) pendant le malaxage du mortier
permet donc d’améliorer la dispersion de la FSS et contribue à briser les agglomérats de FS en
induisant des efforts de cisaillement au sein de la matrice cimentaire. L’utilisation du superplastifiant
dans les mortiers avec plus de 50% de teneur en sable, peut également particper à l’amélioration de
la dispersion de la FS.

Nous reviendrons plus en détails dans la section (§IV-3), sur le rôle du sable et du superlastifiant
dans la dispersion de la FSS. L’usage du slurry étant censé offrir une bonne dispersion de la FS au
sein de la matrice cimentaire (comme précédemment vu au chapitre III), nous essayerons également
dans cette même partie (§IV-3) d’expliquer la bonne et la mauvaise dispersion de FS observées
respectivement dans la pâte S-F44 et SN(10)0.

Pour l’instant, on s’intéresse à l’influence de la présence des gros agglomérats de FS - dans les
formulations SN(10)0 et SN(10)10- sur la réactivité de la FS et sur la microstructure des matériaux.
Une caractérisation complète de ces matériaux va permettre d’interpréter les résultats de diffusion,
en particulier l’écart des coefficients de diffusion observé entre les mortiers à faibles (≤ 10%) et à
fortes teneurs en sable (≥ 30%).

2.2.2. Réactivité de la FS
Pour avoir une idée plus claire sur la réactivité de la FS (réaction pouzzolanique), toutes les
formulations de mortiers ont été soumises à l’analyse thermogravimétrique. L’objectif étant de
déterminer la teneur en portlandite CH et l’eau chimiquement liée aux C-S-H dans la fraction de la
pâte de ciment contenue dans chaque mortier (Figure IV-7(a)). Le rapport des pertes de masse liées
aux deux phases CSH et CH (r = CSH/CH) - pour chaque fraction de pâte contenue dans les
mortiers- est représenté dans la Figure IV-7(b) comme indicateur de la réactivité pouzzolanique de la
FS.

129
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

0,21 Eau liée aux C-S-H 3,4


0,2 Teneur en CH 3,3
0,19
g/g de liant anhydre

Rapport C-S-H/CH
3,2
0,18 3,1
0,17
3
0,16
2,9
0,15
0,14
2,8
0,13 2,7
0,12 2,6
0 10 20 30 40 50 60 70 0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur volumique de sable Vagg (%) Teneur volumique de sable Vagg (%)

(a) (b)

Figure IV-7 : Dans chaque fraction de pâte contenue dans les mortiers : (a) Teneur en portlandite et
eau liée chimiquement aux C-S-H ; (b) ratio des pertes de masse liées aux deux phases C-S-H et CH
(rapport C-S-H/CH)

Il est important de noter que ces quantités ont été reportées par masse de liant anhydre (ou masse de
pâte sèche) afin de déterminer les comportements différents entre les matrices cimentaires contenues
dans chaque mortier. Les teneurs en CH et d’eau liée chimiquement aux C-S-H obtenues initialement
par gramme de mortier sec (= msable + mliant) sont données au tableau IV-1.

Tableau IV-1 : Teneur en portlandite et eau liée aux C-S-H représentées en g/ g de mortier sec

Formulation Teneur en CH Eau liée aux C-S-H


(g/gmortier sec) (g/gmortier sec)
SN(10)0 19,6% 12,9%
SN(10)10 16,9% 10,4%
SN(10)30 9,9% 7,1%
SN(10)50 5,8% 4,5%
SN(10)60 4,4% 3,5%
SN(10)65 3,8% 2,9%

En revenant à la Figure IV-7, on remarque que les matrices cimentaires contenues dans les mortiers à
plus de 30% de teneur en sable, contiennent moins de portlandite et plus de C-S-H. Ce résultat peut
être expliqué par une meilleure dispersion et donc une meilleure réactivité des « grains unitaires » de
FS présents dans les mortiers à plus de 30% de sable. Ces fines particules consomment plus de
portlandite pour produire d’avantage de C-S-H de type C-S-H(P) pouzzolaniques. En revanche, les
grains densifiés de FS présents dans les mortiers avec 10% ou moins de teneur en sable, possèdent
une faible réactivité pouzzolanique (Figure IV-7) en raison de leurs grandes dimensions et leur faible
surface spécifique [DIAM 03].
La teneur en portlandite est en moyenne autour de 20,0% et 17,5% (Figure IV-7(a)) respectivement
dans la matrice cimentaire contenue dans les mortiers avec une teneur en sable égale/inférieure à
10% et dans les mortiers à plus de 30% de teneur volumique en sable. En considérant la teneur en
portlandite de 29,0% mesurée sur la pâte de ciment CEM I hydratée à 6 mois (Tableau II-5), et en
faisant l’hypothèse que toute la FS introduite dans les mortiers à plus de 30% de sable a participé à la

130
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

réaction pouzzolanique, on peut estimer par une simple règle de trois, la quantité de FS qui a réagi
dans les mortiers à moins de 10% de teneur en sable. Ce calcul montre que 7% de FSS (par masse de
ciment) a réagi dans les formulations SN(10)0 et SN(10)10, et que les 3% restants n’ont pas participé
à la réaction pouzzolanique probablement à cause de leur forme agglomérée (10% de FSS ajouté
initialement au mélange). Un résultat proche a été retrouvé par l’analyse d’images obtenues par
microtomographie aux rayons X, qui estime la quantité de FSS agglomérée à 3,8% au lieu de 3%
calculée dans le cas précédent. Cette mesure consistait d’abord à balayer un volume carré de pâte
SN(10)0 de 1 cm3 (8,7 µm en taille de voxel) avant de faire de l’analyse d’image sur la géométrie 3D
récupérée (Figure IV-8). Le logiciel utilisé Avizo 3D, a permis ensuite en filtrant le niveau de gris
correspondant aux amas de FS (de diamètre ≥ 100 µm), de déterminer le volume puis la masse de la
FS agglomérée dans le matériau.

Figure IV-8 : (A gauche) Image obtenue par tomographie aux rayons X de la pâte de ciment SN(10)0 :
Mise en évidence des tâches grises correspondantes aux agglomérats de FSS, (à droite) Exemple de
segmentation du niveau de gris des amas de FSS réalisé par Avizo 3D (1 cm2 d’échelle).

A la Figure IV-7, tous les mortiers contiennent la même formulation initiale de pâte (%FS= 10% ;
E/L =0,41). Cependant, une augmentation de la teneur en C-S-H (poreux), et une consommation de
CH (non-poreux) dans les mortiers à plus de 30% de sable (Figure IV-7(b)), peut induire une légère
augmentation de la porosité au sein de ces matériaux (§III-2.1.1.). Une augmentation de la porosité
justifie la diminution du degré d’hydratation (Tableau II-5) en moyenne de 85,7 à 82,5%
respectivement dans les mortiers à faibles (≤10%) et à fortes teneurs en sable (≥30%).

D’autre part et outre cet effet pouzzolanique, les agglomérats de FS (dans le SN(10)0 et SN(10)10)
impactent également le rôle de filler que la FS est censée jouer. Contrairement aux grains unitaires,
ces amas sont incapables de remplir et de pénétrer au sein de la porosité. C’est ce qu’on va essayer
de confirmer dans la section suivante, qui propose une investigation complète de la porosité de
chaque mortier par différentes techniques (porosimétrie à l’eau, au mercure et sorption azote).

2.3 Distribution poreuse


2.3.1. Porosimétrie à l’eau et au mercure
La figure IV-9 montre les valeurs de porosité à l’eau obtenues pour chaque formulation de mortier.
La porosité à l’eau décroit avec l’accroissement de la teneur d’agrégats, puisque la fraction de pâte –
la partie poreuse dans le mortier- diminue avec l’ajout de sable.

131
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

Les valeurs de porosité à l’eau sont comparées à la loi de dilution parfaite mentionnée précédemment
(équation IV-1) pour les coefficients de diffusion. Pour les porosités, cette loi s’exprime de la façon
suivante :

 Hmortier
2 O   Hpâte
2 O (1  Vagg ) (Eq. IV-2)

Avec  H 2O et  H 2O correspondent respectivement à la porosité de la pâte de ciment (ici SN(10)0)


pâte mortier

et du mortier et Vagg à la teneur volumique en sable.

Cette loi de dilution parfaite représente le cas théorique d’un milieu poreux dilué par des agrégats
non-poreux.

35

30 (1-Vagg)
Porosité à l'eau θH2O (%)

25

20

15

10

5
0 10 20 30 40 50 60 70 80
Fraction volumique de sable Vagg (%)

Figure IV-9 : Valeurs de porosités à l’eau pour les mortiers à différentes teneurs en sable normalisé.

Les valeurs expérimentales sont très proches de la droite de pente (1-Vagg), ce qui signifie que toutes
les matrices cimentaires contenues dans les mortiers ont la même valeur de porosité totale à l’eau. A
première vue, ce résultat implique que la présence d’agrégats ne perturbe pas la matrice cimentaire,
qui demeure la même dans les différents mortiers. Toutefois, les observations MEB montrent que ce
n’est pas le cas, et que la présence d’une quantité importante de sable (ici plus de 30% de sable)
assure une amélioration de la dispersion de la FS et probablement une modification de la
microstructure poreuse de la matrice cimentaire contenue dans les mortiers.

En effet, malgré une valeur de porosité égale dans toutes les pâtes, la distribution des tailles de pores
peut être tout à fait différente. La porosité à l’eau est donc un paramètre macroscopique qui donne
une quantification globale de la porosité existante dans le matériau, mais qui ne permet pas de
renseigner sur la répartition de la taille des pores.

Malgré ses limites en terme de diamètre d’accès aux pores (≥ 3 nm) et les nombreuses critiques
accordées à cette technique (§II-3.2.2.), la porosimétrie au mercure reste une technique efficace pour
obtenir des informations sur la distribution de la taille des pores. Les agrégats de sable siliceux
utilisés dans la préparation des mortiers sont considérés comme non-poreux, de sorte que le volume

132
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

de pores mesuré concerne uniquement la porosité dans la matrice cimentaire. Afin de permettre la
comparaison entre les matrices cimentaires contenues dans les différents mortiers, les résultats de
porosimétrie au mercure ont été rapportés à la fraction de la pâte de ciment plutôt qu’à la fraction de
mortier. Le volume cumulé de mercure intrus et la distribution des volumes poreux de la pâte
contenue dans le mortier sont ainsi obtenus en multipliant les valeurs brutes par le terme :

1
(Eq. IV-3)
 sable
1  V agg

Avec ρsable la masse volumique du sable (=2,62g/cm3) et ρ la masse volumique apparente du mortier
obtenue par porosimétrie à l’eau.

La figure IV-10(a) et IV-10(b) montrent respectivement la distribution de la taille des pores et les
volumes de mercure cumulés en fonction du diamètre des pores accessibles dans chaque pâte de
mortier.

133
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

0,25

dV/dlog(D) (ml nm-1 par g de pâte)


SN(10)0
0,2
SN(10)10

SN(10)30 0,15
SN(10)50
0,1
SN(10)60

SN(10)65
0,05

0
1000 100 10 1
Diamètre d'accès des pores dp (nm)

(a)

0,12

Volume cumulé de mercure intrus


SN(10)0
0,1
SN(10)10
SN(10)30 0,08

(mL/g de pâte)
SN(10)50
0,06
SN(10)60
SN(10)65 0,04

0,02

0
1000 100 10 1
Diamètre d'accès des pores dp (nm)

(b)

Figure IV-10 : Distributions poreuses obtenues par intrusion de mercure dans les fractions de pâte
contenues dans les mortiers de sable normalisé : (a) : Distributions des volumes poreux en fonction
des diamètres de pores ; (b) Courbe du volume cumulé de mercure intrus en fonction de diamètre
d’accès de pores

Etant donné que tous les graphes sont réduits à la fraction de pâte, et sachant que le rapport E/L et la
nature du ciment introduits initialement sont les mêmes dans toutes les formulations, les courbes de
la Figure IV-10 devraient idéalement être superposées. D’autant plus que l’ITZ dans les mortiers est,
rappelons-le, presque négligeable (épaisseur < 5µm).

Cependant les courbes obtenues montrent plusieurs différences. L’ajout d’agrégats perturbe le
squelette microstructural et justifie les dissemblances de distributions poreuses entre les mortiers

134
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

avec 0 ou 10% de teneur en sable d’un côté, et les mortiers avec plus de 30% de fraction volumique
de sable (30%, 50%, 60% ou 65%), de l’autre côté.

Dans la Figure IV-10(b), les tracés correspondants à la pâte de ciment SN(10)0 et au mortier
SN(10)10 montrent une percolation plus importante du réseau des pores capillaires, qui a lieu avec
des pores de diamètres seuils plus grands débutant vers 40 nm. Cependant, l’ajout d’agrégats à plus
de 30% de volume de sable, réduit ces diamètres d’accès et permet une interconnexion de pores avec
des diamètres d’entrée de pores aux alentours de 30 nm. Le volume total cumulé introduit par le
mercure est par conséquent également plus élevé dans les mortiers à faible teneur en sable. On parle
alors d’un volume de 0,114 ml/g dans les matrices cimentaires contenues dans les formulations
SN(10)0 et SN(10)10, contre un volume autour de 0,08 ml par g de fraction de pâte contenue dans
les mortiers à plus de 30% de sable.

Ces résultats reflètent l’existence d’une porosité capillaire plus faible et plus fine dans les matrices
cimentaires contenues dans les mortiers à plus de 30% de sable, comme le montre également la
Figure IV-10(a). Un affinement de la porosité capillaire au sein de ces mortiers est probablement dû
à un effet filler plus efficace de la FS bien dispersée (principalement composée de grains unitaires) et
à la formation d’une quantité supplémentaire de C-S-H (Figure IV-7), capable de combler des
espaces poreux et par conséquent justifier l’existence d’une porosité « plus étroite » observée dans
ces matériaux.

La finesse des pores capillaires joue un rôle très important dans la diffusion liquide comme
mentionné précédemment au chapitre III (§III-2.2.2.) et comme confirmé par le travail de
Halamickova [HAL 95] sur la diffusion des chlorures. Il a été prouvé que les coefficients de
diffusion diminuent avec le rayon critique des pores capillaires directement déterminé à partir des
courbes d’intrusion mercure (Figure III-3(a)). Dans notre cas (Figure IV-10(a)), le rayon critique des
pores capillaires est d’environ 10,5 nm (diamètre autour de 21 nm) pour les pâtes de ciment
contenues dans les mortiers avec plus de 30% de sable, comparé à un rayon critique plus grand de 13
nm (soit un diamètre de 26 nm) pour les pâtes contenues dans les formulations SN(10)0 et SN(10)10.
Une telle augmentation du rayon critique peut donc expliquer l’augmentation du coefficient de
diffusion de la matrice cimentaire, respectivement de 0,55x10 -12 m2/s à 1,1x10-12 m2/s (valeurs
moyenne calculées de la Figure IV-3). Un nouveau point vient s’ajouter à la courbe reliant le D eHTO
au rayon critique rc, le couple (10,5 nm ; 0,55x10-12 m2/s). La Figure IV-11 est une mise à jour de la
Figure III-16 avec en plus, le point (en rouge) représentant la matrice cimentaire -homogène-
contenue dans les mortiers à plus de 30% de sable. On remarque que ce point rejoint lui aussi la
courbe exponentielle préalablement tracée au chapitre III, ce qui confirme jusqu’ici la validité de
cette relation entre DeHTO et rc.

135
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

3,00E-12

2,50E-12 S(0)0

2,00E-12

DeHTO (m2/s)
S(10)0-0,5
1,50E-12

1,00E-12 S(10)0
DeHTO = 1E-13e0,1759rc
D-F44 R² = 0,9954
5,00E-13 S(20)0
S-F44
0,00E+00
0 5 10 15 20 25
Rayon critique rc (nm)

Figure IV-11 : Variation du DeHTO avec le rayon critique rc pour toutes les pâtes de ciment et pour la
matrice cimentaire contenue dans les mortiers à plus de 30% de sable (en rouge).

En revenant à la Figure IV- 10(a) et en se focalisant sur la porosité du gel (diamètre d’accès ≤6 nm),
un quasi-même pic de C-S-H est observé pour toutes les formulations de mortiers. Toutefois, ce
résultat ne signifie pas que la même teneur ou que le même type de C-S-H sont contenus dans les
mortiers pour deux raisons principales :

(1) la technique de porosimétrie au mercure est incapable de fournir des informations en dessous de
3 nm de diamètre d’accès, ce qui limite son utilité pour l’investigation de la porosité fine des
hydrates.
(2) l’application de pressions très élevés (413 MPa pour atteindre des diamètres de pores de 3 nm)
risque éventuellement d’endommager ou de détruire un réseau de pores très fins tel que celui des C-
S-H. Néanmoins, au-delà de la technique de PIM, d’autres techniques peuvent être proposées pour
explorer la porosité des C-S-H et par conséquent compléter la distribution de la taille des pores.

2.3.2. Sorption d’azote

2.3.2.1. Caractérisation de la porosité des C-S-H


Afin de caractériser les pores de gel, la technique de sorption d’azote avec l’appareil BET (§II-3.2.3.)
a été utilisée, et les isothermes d’adsorption et de désorption ont été déterminées (Figure IV-12(a)).
Les volumes de pores de tous les échantillons sont ramenés à la fraction de la pâte et exprimés par
masse de pâte plutôt que par masse de mortier, afin de permettre la comparaison entre les différents
matériaux. L’application de la méthode B.J.H. [BARR 51] aux isothermes de désorption à T= 77 K
donne la distribution des pores de C-S-H (Figure IV-12(b)).

136
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

50

45
Volume aadsorbé (cm3/g de pâte)

SN(10)0
40
SN(10)10
35 SN(10)30
30 SN(10)50
SN(10)60
25
SN(10)65
20

15

10

5
0
0,1 1
Pression relative (P/P0)

(a)

0,35

dV/dlog(D) (cm3 . nm-1 par g de pâte


0,3
SN(10)0
SN(10)10 0,25
SN(10)30
SN(10)50 0,2
SN(10)60
SN(10)65 0,15

0,1

0,05

0
20 10 8 6 4 2
Diamètre de pores D (nm)

(b)

Figure IV-12 : (a) Isothermes d’adsorption et de désorption d’azote et (b) distributions poreuses
obtenues par application de la méthode B.J.H à l’isotherme de désorption, dans les mortiers à base de
sable normalisé.

En ce qui concerne les isothermes d’adsorption et de désorption d’azote, les courbes de la pâte
SN(10)0 et du mortier SN(10)10 se distinguent à nouveau du reste des isothermes. Dans la Figure
IV-12(a), malgré un volume total adsorbé identique dans toutes les matrices cimentaires (d’environ
45 cm3/g), l’adsorption de l’azote s’opère différemment. Par exemple, pour une valeur de pression
relative égale à 0,8, le volume adsorbé dans les pâtes contenues dans le SN(10)0 et le SN(10)10

137
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

(d’environ 18,5 cm3/g) est plus important que celui adsorbé dans les pâtes contenues dans les
mortiers à plus de 30% de sable (autour de 13 cm 3/g). La même comparaison peut également se faire
sur les isothermes de désorption (Figure IV-12(a)). La différence observée au niveau de cette figure,
affecte tout particulièrement la distribution de la taille des pores.

Les graphes de la figure IV-11(b) révèlent le diamètre moyen des pores de C-S-H, localisé au niveau
du pic, pour chaque matrice cimentaire contenue dans les mortiers (voir le tableau IV-2).

Tableau IV-2 : Rayon et diamètre moyen des C-S-H correspondant au maximum du pic de la
distribution poreuse donnée à la Figure IV-12(a) dans les fractions de pâte contenues dans les
mortiers de sable normalisé

Diamètre moyen de Rayon moyen de


Formulations
pores Dp (Å) pores rp(Å)

SN(10)0 35,5 ± 0,4 17,8 ± 0,2


SN(10)10 36,4 ± 0,8 18,2 ± 0,4
SN(10)30 33,8 ± 0,3 16,9 ± 0,1
SN(10)50 33,7 ± 0,4 16,8 ± 0,2
SN(10)60 33,5 ± 0,6 16,7 ± 0,3
SN(10)65 33,6 ± 0,5 16,8 ± 0,2

A partir du tableau IV-2, on constate que les matrices cimentaires contenues dans les formulations
SN(10)0 et SN(10)10 ont un rayon moyen de pores de C-S-H autour de 18 Å, contre un rayon plus
faible (rp ≈ 16,8 Å) dans les mélanges de mortiers à plus de 30% de teneur en sable.

Le mode poreux situé à rp ≈ 17 à 18 Å est généralement décrit dans la littérature comme étant une
caractéristique intrinsèque des C-S-H conventionnels produits de l’hydratation du ciment Portland
[BAR 94]. Les C-S-H présents dans les formulations SN(10)0 et SN(10)10 sont donc de nature très
proche de celle des hydrates conventionnels. En revanche, les C-S-H contenus dans les formulations
à plus de 30% de teneur en sable semblent avoir un réseau poreux plus fin signalant l’existence
d’hydrates plus denses- la même observation a également été faite pour les pores capillaires. Une
telle finesse de C-S-H est probablement due à la meilleure dispersion et réactivité de la FS favorisant
la production de plus de C-S-H pouzzolaniques au sein de ces matériaux. Dans l’autre cas, les
agglomérats de FS retrouvés dans le SN(10)0 et SN(10)10 justifient la faible réactivité
pouzzolanique et par conséquent une majorité de C-S-H conventionnels. Ces explications sont
entièrement conformes aux résultats d’ATG (Figure IV-7).

A la fin de cette section, il est important de noter que la technique de sorption d’azote présente
visiblement l’avantage de pouvoir explorer les pores fins et ainsi compléter la distribution poreuse
donnée par porosimétrie au mercure. En particulier, elle permet de fournir l’information sur le rayon
moyen des pores de C-S-H, identique à celui identifié par la sorption de vapeur d’eau [BAR 94].
Cependant, la technique de sorption d’azote n’est pas adaptée pour quantifier le volume réel des
pores. C’est d’ailleurs ce qui a été constaté de la figure IV-12(b), où les amplitudes de pics obtenus
semblent mal refléter la réalité. Les limites de cette technique sont discutées dans le paragraphe
suivant.

138
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

2.3.2.2 Limites de la technique


Dans la littérature, plusieurs études [BARO 07] [JUE 01] [THO 99] [ODL 03] ont souligné le fait
que les volumes de pores mesurés avec l’azote sont sous-estimés, en particulier dans les pâtes
denses, en raison de la difficulté d’accessibilité de la molécule d’azote dans le réseau poreux fin.

Parmi ces auteurs, Baroghel-Bouny dans [BARO 07] considère que l’adsorption de gaz comme
l’azote, l’oxygène ou l’argon est certes plus simple à réaliser et fournit des données utiles (comme le
diamètre moyen des pores de C-S-H), mais elle demeure néanmoins inappropriée pour caractériser la
structure complète du réseau poreux. Dans ce travail, l’amplitude de pics diminue considérablement
avec le rapport E/C dans une gamme de rayon de pores (1 nm ≤ r p ≤ 2 nm) (Figure IV-13 de [BARO
07]). En particulier, le volume de C-S-H et la surface spécifique mesurés dans la pâte de ciment
nommée CH (E/C = 0,2 et 10% de FS) par adsorption azote s’avèrent extrêmement faibles. Et
pourtant, de par la réaction pouzzolanique, les C-S-H existent tout de même en quantité importante
au sein de cette pâte de ciment CH.

Figure IV-13 : Distributions poreuses obtenues par application de la méthode B.J.H. à l’isotherme de
désorption d’azote, pour trois pâtes de ciment âgées d’un an et demi. [BARO 07]

La difficulté d’accès des molécules de gaz, au sein de la porosité des hydrates tel que le gel C-S-H
est la principale cause responsable de l’insuffisance de cette méthode. Un séchage et un dégazage
inappropriés peuvent participer fortement à réduire l’accessibilité du gaz aux pores fins, en
particulier dans le cas des pâtes de ciment denses [JUE 01] [THO 99] [ODL 03].

Tennis et Jennings dans [TEN 00] considèrent de leur côté que, le C-S-H de type LD (Low Density)
est le seul composant de la microstructure qui contribue sensiblement à la surface spécifique mesurée
par l’azote. Ils affirment qu’aucun des pores des C-S-H HD (High Density) n’est accessible à l’azote,
tandis que les C-S-H LD sont totalement ou partiellement accessibles au N2.

Maintenant, en revenant aux résultats de la Figure IV-12(b), on remarque que le volume (l’amplitude
du pic) est faible et sous-estimé en particulier dans les fractions de pâte contenues dans les mortiers à

139
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

fortes teneurs en sable. Selon Tennis et Jennings, et à cause du problème d’accessibilité de l’azote, ce
volume ne représente qu’une partie des C-S-H LD et pas de C-S-H HD ou de C-S-H pouzzolaniques
(ayant une structure et une densité similaire à celle des HD). C’est également pour cette raison que la
capacité d’adsorption en monocouche est plus élevée dans le SN(10)0 et SN(10)10 et plus faible
dans les mortiers à plus de 30% de sable. Ce résultat affecte directement la surface spécifique BET
obtenue à l’azote (SN2- voir Tableau IV-3) et la sous-estime, parce que la valeur SN2 ne représente
pas tous les pores de C-S-H présents dans le matériau, mais uniquement une petite partie de ces
hydrates. Nous ne pouvons donc pas comparer ces faibles valeurs de surfaces spécifiques obtenues à
l’azote, avec les résultats de l’ATG (Figure IV-7(a)) qui donnent la quantité d’eau liée dans tous les
types de C-S-H.

Tableau IV-3: Comparaison de la surface spécifique BET obtenue à partir des isothermes d’adsorption
d’azote (SN2) avec la surface spécifique cumulée au mercure (SHg)

Formulation SN2 (m2/g de pâte) SHg (m2/g de pâte)


SN(10)0 60,89 30,08
SN(10)10 58,85 28,50
SN(10)30 45,41 21,13
SN(10)50 44,84 20,87
SN(10)60 43,74 20,37
SN(10)65 41,17 19,71

Le tableau IV-3 affiche également les valeurs de surfaces spécifiques obtenues par porosimétrie par
intrusion mercure SHg [BAR 94], calculées à partir de la Figure IV-10(b). Les faibles valeurs de SHg
sont également dues à la difficulté d’accès du mercure à des pores de diamètre < 3 nm. Les surfaces
spécifiques au mercure sont plus faibles que celles obtenues à l’azote, car le N2 arrive à atteindre
plus de pores que le Hg. En effet SHg < SN2 < SH2O [BARO 07], avec SH2Ö la surface spécifique
mesurée par sorption de vapeur d’eau.

Pour finir, que ce soit avec la sorption d’azote ou avec la PIM, la surface spécifique obtenue dans la
pâte contenue dans les mortiers à plus de 30% de sable est plus faible, car cette pâte est plus dense ce
qui rend ses pores moins accessibles au mercure et à l’azote.

Les techniques de sorption d’azote et de porosimétrie au mercure sont des techniques simples, faciles
à utiliser et qui fournissent des informations sur la distribution de la taille des pores et sur le rayon
moyen des C-S-H par exemple. Cependant, ces méthodes d’investigation présentent des limites et ne
permettent pas une caractérisation complète de la microstructure poreuse en particulier celle des
hydrates. Face à ces lacunes, la sorption de vapeur d’eau est considérée comme pertinente pour
investiguer de façon fiable la structure fine du gel de C-S-H [BAR 94], inaccessible par les autres
fluides. Malheureusement, cette technique n’a pas été employée dans le cadre de ce travail.

2.4. Perte de performances de confinement liée à l’agglomération


de la FSS
Les agglomérats de FS mis en évidence dans les mortiers à faible teneur en sable (≤ 10%) (§IV-
2.2.1), impactent à la fois la réactivité de la FS (§IV-2.2.2.) et la distribution poreuse (§IV-2.3) de

140
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

ces matériaux, et sont responsables de la perte de performances constatée par les coefficients de
diffusion (Figure IV-2).

Afin de mieux visualiser l’effet de cette présence d’agglomérats de FS sur la diffusion, les
coefficients de diffusion HTO des mortiers contenant 10% de FSS - testés dans le cadre de cette
étude - ont été comparés aux DeHTO des mortiers sans ajout de FS (même porosité initiale ; E/C =0,4)
étudiés dans la thèse de Larbi [LARB 13]. La figure IV-14 illustre cette comparaison.

2,6E-12
10% FS
DeHTO dans les mortiers (m2/s)

2,1E-12
0% FS
≈2
1,6E-12

≈5
1,1E-12

6,0E-13

1,0E-13
0 10 20 30 40 50 60 70
Fraction volumique de sable (%)

Figure IV-14 : Coefficients de diffusion effectifs des mortiers sans et avec 10% de FSS

Malgré l’existence d’amas de FSS dans les mortiers à 0 et 10% de teneur en sable, l’ajout de FS dans
ces matériaux a un effet bénéfique sur la diffusion. En effet, le coefficient de diffusion de la pâte
contenant 10% de FSS est deux fois plus faible que celui de la pâte de ciment sans ajout de FS (une
diminution de 2,56 10-12 m2/s à 1,05 10-12 m2/s). Cependant, cet écart aurait pu être plus important si
la FSS était bien dispersée. C’est d’ailleurs ce qui a été constaté pour les mortiers à plus de 30% de
sable, où les coefficients de diffusion sont 5 fois moins élevés avec l’ajout de 10% de FSS. Par
exemple, pour le mortier avec 50% de sable, le coefficient de diffusion décroit de 1,45 10 -12 m2/s à
0,26 10-12 m2/s avec l’addition de 10% de FS.

La pâte S(20)0 vue au MEB, présentait également l’existence de plusieurs amas de FS, tandis que la
pâte du mortier SN(20)50 contenant 50% de teneur en sable, semblait plutôt homogène et montrait
une meilleure dispersion de silice au sein de la matrice cimentaire. La courbe de distribution poreuse
donnée par porosimétrie au mercure affiche un affinement de la taille des pores capillaires et une
diminution du rayon critique de 8,5 à 7 nm respectivement pour la matrice cimentaire S(20)0 et celle
contenue dans le mortier SN(20)50 (Figure IV-15).

141
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

0,3
S(20)0

dV/dlog(dp) (ml/nm. g de pâte)


0,25
SN(20)50
0,2

0,15

0,1

0,05

0
10000 1000 100 10 1
Diamètre d'accès des pores dp(nm)

(a)

0,14

Volume cumulé de mercure intrus


S(20)0 0,12
SN(20)50
0,1

0,08

(ml/g)
0,06

0,04

0,02

0
10000 1000 100 10 1
Diamètre d'accès des pores dp(nm)

(b)

Figure IV-15 : Distributions poreuses obtenues par intrusion de mercure dans la pâte S(20)0, et dans la
fraction de pâte contenue dans le mortier SN(20)50 ; (a) : Distributions des volumes poreux en
fonction des diamètres de pores ; (b) Courbe du volume cumulé de mercure intrus en fonction de
diamètre d’accès de pores

Le coefficient de diffusion de la pâte de ciment contenue dans le mortier SN(20)50, et estimée à


partir du modèle bi-phasique de dilution parfaite (Eq. IV-1) donne une valeur de 3,91.10-13 m2/s; soit
une valeur inférieur à celle du coefficient de diffusion de la pâte SN(20)0 (de 4,87.10 -13m2/s). Il est à
noter que le nouveau couple (x=7 nm ; y=3,91.10-13 m2/s) rejoint également la courbe exponentielle
de la Figure IV-11.
Grâce à la meilleure dispersion de la FS dans le SN(20)50, le coefficient de diffusion de la matrice
cimentaire est plus faible que celui de la pâte SN(20)0 qui présente des zones inhomogènes.

142
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

La bonne dispersion de la fumée de silice slurry s’avère donc une condition nécessaire pour assurer
un gain maximal an coefficient de diffusion et garantir une meilleure durabilité de ces matériaux.
Voilà pourquoi, à ce stade de l’étude, une mise au point sur la dispersion de la FSS s’impose.

La section suivante tente d’élucider le rôle de chaque constituant (sable et superplastifiant) dans la
dispersion de la FSS. Elle revient plus en détail sur l’usage du slurry (introduit au chapitre III) censé
offrir une meilleur dispersion afin d’expliquer les différences de comportement observées pour les
pâtes S-F44 et SN(10)0.

3. Discussion sur la dispersion de la FSS


Ce chapitre a pour objectif de comparer le comportement d’une pâte à ceux de mortiers ayant le
même rapport E/L et la même teneur en FS, afin d’identifier l’influence de l’ajout d’agrégats sur la
microstructure et les propriétés de transport. Pour permettre cette comparaison, la pâte et les
mortiers doivent avoir la même ouvrabilité. L’ouvrabilité ou le degré de fluidité des pâtes et des
mortiers a été mesurée après chaque préparation du mélange par le test du mini-cône selon la norme
UNE-EN 1015-3.

Avec l’ajout de sable, la maniabilité des mortiers décroît, et leur mise en œuvre devient de plus en
plus difficile à cause de problèmes de compactage. Cette texture mal compactée peut induire la
présence de plusieurs variables (bulles d’air, vides) susceptibles de fausser et d’impacter
négativement les résultats de diffusion et de l’homogénéité de la microstructure. Pour limiter ces
différents problèmes, un superplastifiant a été ajouté dans les formulations à fortes teneurs en sable
(≥ 50%) afin d’améliorer leur ouvrabilité/maniabilité.

Dans ce travail, la valeur d’affaissement a été fixée entre 10 et 12,5 cm pour tous les mélanges. Pour
la pâte de ciment avec 10% de FS et un rapport E/L de 0,41, l’ouvrabilité du mélange a été jugée
bonne et ne nécessitant pas d’ajout de superplastifiant. D’ailleurs, plusieurs normes fixent la teneur
en eau nécessaire pour obtenir une consistance normale (par exemple la norme UNE EN 196-3
préconise le rapport E/C de 0,372 comme référence de ciment pouzzolanique).

Dans la littérature, plusieurs chercheurs ont adopté l’ajout du superplastifiant dans les mortiers à
fortes teneurs en sable. Parmi eux, Wong et al. [WON 09] ont étudié l’impact de l’ajout d’agrégats
sur la diffusion et la perméabilité au gaz au sein des mortiers avec FS (8% de FS) et (E/C de 0,3).
Dans leur travail, le superplastifiant est ajouté uniquement dans les mortiers à plus de 30% de sable,
et non dans la pâte ou le mortier avec 10% de teneur en sable. Yanjun et Cahyadi [YAJ 03] ont
également étudié la microstructure et la résistance à la compression de plusieurs pâtes de ciment (E/L
=0,4) avec 0, 5, 10 et 20% d’ajout de FS sans ajouter de superplastifiant dans leurs formulations.

Dans cette partie, on verra que l’ajout de granulats joue un rôle significatif dans la dispersion des
agglomérats de FSS grâce aux efforts de cisaillement induits pendant le malaxage, et que leur effet
est beaucoup plus important que celui de l’ajout du superplastifiant. Bien évidemment, les matériaux
concernés ici sont ceux formulés avec de la fumée de silice de type slurry. Cette affirmation n’est pas
valide dans le cas des matériaux fabriqués avec la poudre densifiée de fumée de silice (FSD). Dans
ce dernier cas, où la FSD est employée, plusieurs auteurs s’accordent à combiner l’utilisation de
plusieurs techniques de dispersion (cisaillement du mélange, l’ajout de superplastifiant, traitement
préalable de la poudre…) afin d’espérer l’obtention d’une bonne dispersion et de limiter la présence
d’agglomérats au sein du matériau cimentaire (§III-1.3.).

143
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

3.1. L’effort de cisaillement induit par l’ajout des granulats :


Comme précédemment vu dans les deux premières sections de ce chapitre, les mortiers à plus de
30% de teneur en sable, montrent une meilleure homogénéité de la pâte et une bonne dispersion de la
FSS que les mortiers à moins de 10% de teneur en sable, révélant l’existence d’agglomérats. Le
superplastifiant n’a été ajouté que dans les formulations à plus de 50 % de sable, ce qui signifie que
le mortier SN(10)30, fabriqué avec 30% de volume de sable et 10% de FS, ne contient pas de
superplastifiant.

Cependant, malgré l’absence d’adjuvant dans la formulation SN(10)30, la FSS est bien dispersée et
les agglomérats de FS presque inexistants, contrairement aux formulations SN(10)0 et SN(10)10.
L’ajout de sable à hauteur de 30% en volume, est alors suffisant pour générer un effort de
cisaillement capable de briser les amas de FSS et fournir une meilleure dispersion de la FS et une
meilleure homogénéité de la matrice cimentaire.

Le coefficient de diffusion HTO obtenu pour le mortier SN(10)30 est faible et rejoint les D eHTO des
autres mortiers à plus de 50% de sable (Figure IV-2 et IV-3). Aussi et comme le montrent les
résultats de caractérisation microstructurale, la matrice cimentaire contenue dans le SN(10)30 est
assez proche, voir presque similaire à celle contenue dans les mortiers à plus de 50% de sable. Cela
signifie en d’autres termes, que la même « efficacité » de FS est obtenue dans un mortier avec 30%
de sable sans ajout de superplastifiant, que dans un mortier avec plus que 50% de teneur en sable
mais contenant du superplastifiant. Ce résultat implique que l’effet de l’ajout de granulats sur la
dispersion de la FSS est plus important que l’usage du superplastifiant.

Dans l’objectif de confirmer le rôle du cisaillement généré par les granulats pendant le malaxage,
une nouvelle formulation a été proposée à ce stade de l’étude : un mortier avec 10% de FS, E/L=
0,41, 50% de teneur volumique en sable grossier (de granulométrie entre 0,63 à 2 mm) et sans
superplastifiant. Après malaxage du mortier, le mélange est tamisé afin d’éliminer tous les grains de
sable et de récupérer uniquement le coulis ou la pâte de ciment. Cette pâte est ensuite vibrée puis
démoulée après 24h. Elle est conservée pendant 6 mois en eau de chaux dans les mêmes conditions
détaillées précédemment dans (§II-1.3.).

Le sable grossier a été choisi afin de faciliter l’opération du tamisage (le plus petit grain ayant une
taille de 0,6 mm). La pâte résultant de cette opération est appelée SG(10)50-tamisée.

Après 6 mois d’hydratation, la pâte de ciment tamisée est observée au MEB associé à l’analyse
chimique par EDS. Les observations présentées à la Figure IV-16, montrent une bonne dispersion de
la FS et l’absence de gros agglomérats comme ceux perçus dans les SN(10)0 et SN(10)10.

144
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

SG(10)50-tamisée

Figure IV-16: Image MEB capturé au grossissement (x36) et cartographie élémentaire de silicium
(bleu) et calcium (rouge) de la pâte de ciment SG(10)50-tamisée.

La mesure de la porosité totale à l’eau de la pâte SG(10)50-tamisée donne une valeur de 32,5±0,4%,
similaire à celle de la pâte de ciment SN(10)0 ayant la même composition initiale (32,3 ± 0,3).
Cependant grâce à la meilleure dispersion de la FS dans cette nouvelle pâte, la taille des pores est
plus petite que celle de la pâte initiale SN(10)0, et sa distribution rejoint parfaitement celle des pâtes
contenues dans les mortiers à plus de 30% de sable (Figure IV-17).

0,25
SN(10)0

dV/dlog(D) (ml nm-1 par g de pâte)


SN(10)10 0,2
SN(10)30
SN(10)50
SN(10)60 0,15
SN(10)65
SG(10)50-tamisée 0,1

0,05

0
1000 100 10 1
Diamètre d'accès des pores dp (nm)

Figure IV-17 : Illustration de la distribution poreuse de la pâte SG(10)50-tamisée obtenue par


porosimétrie au mercure

Une pâte similaire à SG(10)50-tamisée a également été fabriquée mais avec du sable monodispersé
(de granulométrie 2,5/3 mm) à la place du sable grossier (0,63/2 mm). Les cartographies en calcium
et cilicium montrent des résultats analogues à ceux de la Figure IV-16, à savoir une bonne dispersion
de la FSS et une parfaite homogénéité de la pâte.

En résumé, ces résultats montrent que l’ajout d’une quantité significative de sable est suffisent pour
briser les agglomérats de fumée de silice de type slurry grâce à l’effort de cisaillement induit par les
granulats pendant le malaxage. L’effet de l’ajout du superplastifiant est illustré séparément ci-après.

145
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

3.2. L’influence de l’ajout du superplastifiant


Une nouvelle pâte de ciment a été fabriquée afin de découpler les effets du superplastifiant et des
granulats sur la dispersion de la FSS. Il s’agit de la pâte SN(10)0 à laquelle 0,2% de superplastifiant
a été ajouté pendant l’étape de malaxage. Ce choix de dosage en adjuvant est adopté car un dosage
plus élevé à 0,3% montre un phénomène de ressuage et de ségrégation des grains de ciment. La pâte
qu’on appelle SN(10)0-SP est fabriquée, démoulée et conservée comme toutes les pâtes précédentes
suivant le protocole détaillé en (§II-1.3.).

La Figure IV-18 montre une cartographie élémentaire du silicium (Si) et du calcium (Ca) réalisée sur
la pâte SN(10)0-SP, avec le même grossissement que les images précédentes (x36).

Figure IV-18 : Image MEB capturée au grossissement (x36) et cartographie élémentaire de silicium
(bleu) et calcium (rouge) de la pâte de ciment SN(10)0-SP.

En comparant cette Figure IV-18 à la Figure IV-5(a), on note une certaine amélioration de la
dispersion de FS traduite par la détérioration des plus gros agglomérats de plusieurs centaines de
micromètres de diamètre. Cependant les amas de quelques centaines de µm (≈ 100 à 200 µm, ou un
peu moins) persistent toujours au sein de la matrice cimentaire du SN(10)0-SP.

L’ajout de superplastifiant ne peut donc qu’améliorer la dispersion de la FSS. Néanmoins son usage
à lui seul, n’est pas suffisant pour briser tous les agglomérats de FS et assurer une parfaite
homogénéité de la pâte de ciment.

Partant de ce constat et en revenant à la formulation de pâte S-F44 caractérisée auparavant à la


section §III-1, la bonne dispersion de la FSS observée au niveau de cette matrice cimentaire ne peut
donc être justifiée uniquement par l’ajout de superplastifiant. En effet, la teneur en eau étant faible
dans ce matériau (E/C = 0,3), les grains de ciment (de taille de particules plus élevée que celles de la
FSS à l’état initial) vont probablement participer pendant le malaxage à induire plus d’efforts de
cisaillement au sein de la matrice cimentaire. Ces efforts de frottements internes sont atténués et
affaiblies en présence d’une quantité d’eau plus élevée, c’est le cas de la pâte SN(10)0 avec un
rapport E/C de 0,4 qui montre la persistance de plusieurs amas de FSS malgré l’ajout d’adjuvant
(Figure IV-18).

La bonne dispersion de la fumée de silice slurry dans les pâtes de ciment peut également dépendre
d’autres paramètres. Pour certains auteurs comme [DUS 13], la séquence de mélange ou l’ordre

146
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

d’introduction des constituants (eau, ciment et slurry), se révèle d’une grande importance pour
l’homogénéité de la pâte.

3.3. L’importance de la séquence du mélange


Düsseldorf dans [DUS 13] a étudié la dispersion de la fumée de silice en suspension (slurry) dans des
pâtes de ciment fabriquées avec quatre séquences différentes d’introduction de constituants. La
teneur en FS (10%), le rapport E/L (0,4) ainsi que les conditions de malaxage (vitesse et durée ≈ 4
min) étaient invariables dans ces formulations.

Le résultat d’observation au microscope optique des sections polies de pâtes élaborées à différentes
séquences est illustré à la Figure IV-19.

Figure IV-19 : Observations au microscope optique de sections polies des pâtes de ciment fabriquées
avec quatre différentes séquences de mélange (a, b, c, d) : Vérification de l’homogénéité de la pâte
[DUS 13]

Plusieurs agglomérats de silice (SiO2) de taille allant jusqu’à 2 mm de diamètre se sont formés
lorsque le ciment est ajouté en premier à la suspension de la fumée de silice avant d’introduire par la
suite l’eau dans le malaxeur (Sample 1-1, Figure IV-19(a)). De l’autre côté, une distribution
uniforme des particules de FS au sein de la pâte est constatée quand le ciment est d’abord mélangé
avec l’eau pour former une pâte de ciment, qui est ensuite mélangée avec le slurry (Sample 1-2,
Figure IV-19(b)). Les deux autres séquences (Figure IV-19 (c) et (d)), montrent également
l’existence de plusieurs amas qui correspondent respectivement à des hydrates de ciment Portland

147
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

formés localement dans la pâte et à des agglomérats plus denses et plus riches en silice que la
matrice qui les entoure.

Seul l’échantillon 1-2 (Figure IV-19(b)) produit par la séquence ciment + eau + slurry a montré une
structure relativement homogène de la pâte de ciment. La séquence ou l’ordre d’introduction des
composants initiaux s’avère donc d’une grande importance quand la fumée de silice est utilisée sous
forme de slurry. Elle a un impact considérable sur le degré de dispersion et sur l’homogénéité de la
distribution de la fumée de silice dans la pâte de ciment.

Dans notre cas d’étude, et pour la fabrication des pâtes et des mortiers, les constituants ont été
introduits dans l’ordre ciment + slurry + eau (§II-1.3.) correspondant au cas le plus défavorable, celui
de la Figure IV-19(a). Cette séquence peut donc expliquer l’existence de plusieurs agglomérats de
FSS en l’occurrence dans les pâtes de ciment comme la SN(10)0 ; SN(10)0-0,5; SN(20)0 ou dans le
cas du mortier à faible teneur en sable SN(10)10.

A la fin de cette partie (§IV-3), plusieurs paramètres semblent influencer la dispersion de la FSS.
L’effet de la teneur en granulats a été en particulier, illustré dans (§IV-3.1). A présent, l’objectif de la
section suivante est d’étudier l’effet des granulats sur le processus de diffusion (dilution, tortuosité,
effet de l’ITZ). Pour cela, on s’intéresse principalement aux mortiers ayant une matrice cimentaire
homogène, à savoir les mortiers à plus de 30% de sable normalisé.

4. Impact de la teneur en sable sur les coefficients de


diffusion
4.1. Part de la dilution
De retour à la Figure IV-2 et en reprenant les résultats de la section (§IV-2.2.2.), on estime que la
quantité de FSS ayant réagi dans la pâte de ciment SN(10)0 et le mortier SN(10)10 se situe autour de
6 à 7% en masse de ciment, et autour de 10% dans les mortiers à plus de 30% de sable, soit la
quantité totale initialement ajoutée dans les mélanges. Le coefficient de diffusion de la pâte SN(10)0
est donc surestimé par rapport à celui de la vraie pâte contenue dans les mortiers à plus de 30% de
sable. Le DeHTO de cette dernière peut être déterminé comme l’intersection de la prolongation de la
droite passant par les valeurs de mortiers (≥30% de sable) avec l’axe Y à l’abscisse V agg = 0 (Figure
IV-20).

148
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

1,2E-12
Avec 10% FS
1,0E-12

DeHTO des mortiers (m2/s)


(1-Vagg)^0,865
8,0E-13

6,0E-13 -13
5,12 10
4,0E-13

2,0E-13

0,0E+00
0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur en sable Vagg (%)

Figure IV-20 : Estimation du coefficient de diffusion de la matrice cimentaire contenue dans les
mortiers à plus de 30% de teneur en sable.

Les valeurs des coefficients de diffusion effectifs dans mortiers à plus de 30% de sable sont corrélées
avec la teneur en sable contenue dans les matériaux. La régression linéaire des coefficients de
diffusion expérimentaux donne lieu à une équation proche de la loi de dilution parfaite:

Demortier  Depâte (1  Vagg ) 0,865 (Eq. IV-4)

Avec De,pâte, désigne le coefficient de diffusion effectif du mortier avec 0% de granulat.


Cette même loi de dilution a été proposée par Larbi dans [LARB 13] pour les mortiers CEM I sans
ajout de FS (Figure IV-21). Les valeurs de coefficients de diffusion HTO des mortiers CEM I avec
0, 10, 30 et 50% de teneur volumique en sable ont été mesurées expérimentalement [LARB 13].
Cette courbe a été complétée par la valeur expérimentale du coefficient de diffusion d’un béton
(même E/C=0,4) fabriqué avec 66% de granulats (en volume) [LAM 04], un D eHTO du béton qui
rejoint parfaitement la loi de dilution établie initialement pour les mortiers (Eq. IV-4).

3,01E-12 Sans FS
Avec 10% FS
2,51E-12 (1-Vagg)^0,865
(1-Vagg)^0,865
2,01E-12 (1-Vagg)
De HTO (m2/s)

1,51E-12

1,01E-12

5,1E-13

1E-14
0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur en sable Vagg (%)

Figure IV-21 : Lois de dilution pour les coefficients de diffusion obtenus pour les mortiers avec et sans
FS : Mise en évidence de la dominance de la dilution

149
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

Globalement, la loi en (1-Vagg)0,865 est très proche de la loi de dilution parfaite en (1-Vagg). Le léger
dépassement de la loi expérimentale est probablement dû à l’effet de l’ITZ et de la tortuosité induits
par l’ajout de granulats. Néanmoins, leurs effets restent négligeables devant l’effet de la dilution qui
est largement prédominante.

La part de la tortuosité et de la percolation d’ITZ sont illustrés ci-dessous.

4.2. Part de la percolation d’ITZ et de la tortuosité : approche


analytique
L’ajout de granulats non-diffusifs au sein d’une matrice cimentaire, augmente la tortuosité du réseau
poreux et rallonge notablement le parcours moyen de la diffusion. L’effet de la tortuosité vient alors
s’ajouter à l’effet de la dilution pour diminuer d’avantage les coefficients de diffusion des mortiers
avec l’ajout de sable. Des lois comme celle de Bruggeman-Hanai (Loi B-H) [SHA 00] exprime la
diffusivité effective du mortier en combinant l’effet de la tortuosité à celui de la dilution par:

3
Demortier  Depâte (1  Vagg ) 2
(Eq. IV-5)

Cette loi a été développée pour le cas de particules sphériques placées dans une matrice conductrice.
Le modèle suppose que la conductivité de la matrice ne varie pas avec l’ajout de particules isolantes
qui diluent la matrice et réoriente la conduction autour d’elles de façon à rendre le parcours de
conduction plus tortueux.

En tenant compte uniquement de l’effet de la tortuosité, les valeurs de coefficients de diffusion


seront inférieures à celles obtenues par la loi de dilution parfaite (Figure IV-20) ce qui n’arrange pas
un rapprochement avec les résultats expérimentaux obtenus. L’interconnexion de l’ITZ a donc un
rôle compétitif avec la dilution et la tortuosité puisqu’elle participe plutôt à augmenter les
coefficients de diffusion des mortiers avec l’ajout de granulats.

Afin de voir la part d’influence de l’ITZ et de la tortuosité, l’effet de la dilution -induit par l’ajout de
granulat- a été retranché des valeurs de coefficients de diffusion. Cela signifie en d’autres termes que
l’effet de la percolation d’ITZ + tortuosité est obtenu en divisant le D eHTO des mortiers par la loi de
dilution parfaite en (1-Vagg) :

Demortier ( Eq . IV  3)
Depâte(1  Vagg )0,865 Depâte
Part d ' ITZ  Tortuosité     (Eq. IV-6)
(1  Vagg ) (1  Vagg ) (1  Vagg )0,135

La Figure IV-22 illustre les résultats de ce rapport pour les mortiers avec et sans ajout de FS.

150
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

4,0E-12
Sans FS
3,5E-12
Avec 10% de FS

De HTO /(1-Vagg) (m2/s)


3,0E-12
2,5E-12
2,0E-12
1,5E-12
1,0E-12
5,0E-13
0,0E+00
0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur en sable Vagg (%)

Figure IV-22 : Part de la percolation d’ITZ et de la tortuosité sur les coefficients de diffusion des
mortiers à différents ajouts de teneur en sable normalisé (avec et sans FS).

Avec l’augmentation de la teneur en granulats, la tortuosité est supposée diminuer les coefficients de
diffusion des mortiers (rallongement du chemin de diffusion) tandis que l’interconnexion des
couches d’ITZ est censée les augmenter (couche d’ITZ plus poreuse que la matrice cimentaire). Or à
partir de la Figure IV-22, on remarque que le rapport DeHTO(mortier) / (1-Vagg) (Eq. IV-6) augmente
légèrement avec le volume de granulats ce qui signifie que l’effet de l’interconnexion des couches
d’ITZ l’emporte sur l’effet de la tortuosité.

On note également que l’impact de ces deux phénomènes combinés (tortuosité et interconnexion
d’ITZ) reste faible sur les coefficients de diffusion comparé à l’effet induit par la dilution. On parle,
en effet, d’une augmentation maximale de 0,5 10-12 m2/s dans la matrice cimentaire contenu dans le
béton CEM I (Vagg = 66%), à cause de l’ITZ et la tortuosité du réseau poreux. Dans les mortiers avec
FS, l’effet de l’ITZ est encore plus atténué car l’épaisseur de la couche d’ITZ est très faible (≤ 5µm)
et la probabilité de son interconnexion pour pouvoir créer un chemin percolant est minime. Les
mortiers avec ajout de FS possèdent l’avantage d’avoir quasi la même matrice cimentaire dans tous
les mortiers, grâce à leur faible épaisseur d’ITZ.

Dans l’objectif de comprendre l’allure des courbes représentés dans la Figure IV-22, et d’expliquer
l’origine du terme (1-Vagg)0,135 provenant de l’effet de la percolation d’ITZ associé à celui de la
tortuosité, un modèle 3D tri-phasique a été développé et adapté au cas des mortiers. La notion de
tortuosité étant très complexe, et souvent couplée dans la littérature, à un autre effet comme la
dilution (Loi B-H), l’effet de l’ITZ ou la constrictivité (relation de facteur de forme Eq. I-19), nous
essayerons avec le modèle 3D de proposer une formule correspondante à la part de la tortuosité.

4.3. Simulation 3D de l’effet de l’ITZ et de la tortuosité sur les


coefficients de diffusion des mortiers
La chaine de calcul 3D sera utilisée dans cette partie pour étudier l’impact de la percolation d’ITZ
associée à la part de la tortuosité sur les propriétés de transport.

151
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

4.3.1. Présentation du modèle et de la chaîne de calcul


Le matériau cimentaire est supposé tri-phasique comprenant la phase «matrice», la phase «granulats»
et la phase « ITZ » modélisée selon le concept classique : couche d’épaisseur constante entourant
chaque granulat (Figure IV-23).

Figure IV-23 : Modèle triphasique d’un mortier

Les matériaux cimentaires sont alors modélisés par un ensemble d’inclusions bicouche de formes
sphériques enchâssées dans un milieu homogène. Cela représente en réalité des grains de sable
entourés chacun par la couche d’ITZ et distribués d’une manière aléatoire dans la matrice cimentaire
hors ITZ. Cette approche a été discutée à cause de son aspect idéal dans la représentation des
couches d’ITZ d’épaisseur constante indépendamment de la taille des grains, leur gravité...
Cependant cette illustration reste tout de même simple et possède l’avantage d’autoriser les
chevauchements des couches de cette phase, permettant ainsi d’étudier l’impact de la percolation
d’ITZ sur les propriétés de transport.

La chaine de calcul développée pour calculer la diffusion équivalente des mortiers à partir des
diffusivités intrinsèques de chaque phase [LARB 13], comporte quatre étapes principales :

- Calcul du nombre d’inclusions selon le volume et la granulométrie du sable utilisé.


- La génération des inclusions et construction de la géométrie 3D du VER.
- Maillage de la géométrie
- Détermination de la diffusivité équivalente du mortier en définissant d’abord les conditions
aux limites et les données matériau, puis en résolvant le problème par éléments finis.

4.3.1.1. Calcul du nombre d’inclusions


A partir de la granulométrie et du volume de sable utilisé, le nombre et la taille des granulats peuvent
être déterminés. Le tableau IV-4 affiche la teneur volumique du sable normalisé correspondant à
chaque intervalle de diamètre d’ouverture de tamis (Fiche produit du sable normalisé en Annexe A).

152
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

Tableau IV-4 : Teneur volumique de sable correspondant à chaque rayon de sphères utilisé pour
modéliser les grains de sable normalisé.

Diamètre d’ouverture Rayon moyen des Teneur volumique du


du tamis sphères* sable
Entre 1,6 et 2 mm 900 µm 7%
Entre 1 et 1,6 mm 650 µm 26%
Entre 0,5 et 1 mm 375 µm 35%
Entre 0,16 et 0,5 mm 165 µm 20%
Entre 0,08 et 0,16 mm 60 µm 12%

Le rayon moyen de sphères pour modéliser les grains de sable est calculé à partir de la moyenne des
diamètres d’ouverture du tamis. Le nombre de sphères est déterminé en fonction de la teneur
volumique de sable pour chaque intervalle de diamètre, et du volume de granulats total V agg ajouté
dans le matériau.

4.3.1.2. Construction de la géométrie 3D

Une fois les dimensions du VER (3 fois la taille du plus grand grain de sable), le nombre et les
rayons des sphères sont calculés, on passe à l’étape de la construction. Cette étape consiste à placer
aléatoirement les inclusions (entourées par l’ITZ) dans le VER de matrice cimentaire. Un algorithme
spécifique, le module COMBS a été développé en Python par Erwan Adam (CEA) et Christophe
Bourcier (CEA) afin de s’acquitter de cette tâche [BOU 13]. Le modèle fait appel aux fonctionnalités
du module GEOM de la plateforme SALOME. A la sortie du module, on obtient un fichier
d’extension « .pos » contenant la géométrie du modèle, et décrivant chaque inclusion et sa position.

L’emplacement aléatoire des inclusions dans le VER se fait en milieu périodique, c.à.d. qu’on
autorise aux inclusions de déborder d’un côté du domaine pour réapparaitre de l’autre (Figure IV-
24). Ce cas de figure permet de représenter au mieux le matériau cimentaire, et permet de gagner en
taux de remplissage des inclusions granulaires. Le milieu non périodique interdit aux inclusions
d’approcher les frontières du VER et ne correspond pas à la réalité du matériau cimentaire.

La distance minimale séparant les deux inclusions est également paramétrée dans le module Combs.
Elle est choisie égale à l’épaisseur de l’ITZ (≈ 5 µm et 20 µm [LARB 13] respectivement pour les
mortiers avec et sans FS) afin de permettre aux auréoles de transition de se chevaucher.

153
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

Figure IV-24 : Emplacement aléatoire d’inclusions granulaires entourées par la couche d’ITZ en milieu
périodique (remplissage Vagg=9,95%, Epaisseur d’ITZ= 5 µm) : VER visualisé par le logiciel SALOME

Le tableau IV-5 détaille les quantités de chaque phase dans l’ensemble des géométries de mortiers de
sable normalisé créées. L’épaisseur de la couche d’ITZ dans les mortiers sans FS est fixée à 20 µm
(§ I-1.3.2.) [LARB 13], tandis que celle contenue dans les mortiers avec ajout de FS a été majorée à
5 µm (§ I-2.2.2. et Figure IV-4). Les limites du module Combs résident dans l’incapacité de placer
toutes les inclusions voulues en particulier dans le cas des forts taux de remplissage (>80% en
volume).

Tableau IV-5 : Modèle géométrique réalisé pour les mortiers de sable normalisé avec et sans FS

Modèles SN. 1 SN. 2 SN. 3 SN. 4 SN. 5 SN. 6


de mortiers
Ave San Ave Sans Ave Sans Ave Sans Ave Sans Ave San
avec sable
c FS s FS c FS FS c FS FS c FS FS c FS FS c FS s FS
normalisé
Dimension
1500 x 1500 x 1500 µm3
s du VER
Quantité
de sable 9,98 28,80 50,02 55,02 58,92 64,20
Vagg(%)
Volume de 10,5 19,0 19,8 20,6
0,80 3,67 2,29 4,14 4,41 4,64 4,96 ---
l’ITZ (%) 1 4 8 5
Taux de
remplissag
10,7 13,6 31,1 39,3 54,1 69,1 59,4 74,9 63,5 79,5 69,2 ---
e du cube
(%)

Le choix du VER à 1500x1500x1500 µm3, a été établi suite à la comparaison des diffusivités
équivalentes sur des cubes de dimensions différentes variant de (1000 3 µm3) à (30003 µm3) –voir la
thèse de Larbi [LARB 13]-. Il a été montré qu’à des dimensions de VER inférieures à 1000, il
devient difficile de respecter la granulométrie du sable. De l’autre côté, c.à.d. à des dimensions
supérieures à 3000, le maillage devient difficile à générer et le temps de calcul trop important.
Le choix d’une côte de VER égale à 1500 µm s’avère être, en effet, un bon compromis entre la
représentativité du VER et le temps de calcul.

154
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

Une fois les géométries construites, l’étape suivante consiste à transformer cette description de la
géométrie dans un format utilisable par la plateforme SALOME.

4.3.1.3. Maillage de la géométrie 3D


Le nombre de volumes tétraédriques obtenus pour les mortiers étudiés se situe entre 2. 105 et 20. 105.
La quantité de mailles augmente avec le taux de remplissage, en particulier en cas d’interconnexion
des couches d’ITZ. La figure IV-25 propose un récapitulatif des étapes de construction de la
géométrie et maillage 3D du mortier.

Python et MODULE COMBS

Inclusions granulaires ITZ pâte VER mortier

SALOME : visualisation de
la géométrie et maillage

Figure IV-25 : Etapes de construction de la géométrie et du maillage 3D du VER de mortier

Le volume de mortier maillé, est exporté en format «.med» compatible avec les codes de calcul. Ce
fichier d’export contient toutes les informations sur les maillages et les champs discrétisés
nécessaires avant de lancer le calcul de la diffusivité équivalente en utilisant le logiciel CAST3M.

4.3.1.4. Calcul de la diffusivité équivalente


Le problème simulé a pour objectif de reproduire les mesures expérimentales de diffusivité
équivalente. Il consiste à appliquer un gradient de température (ΔT) entre deux faces du VER,
résoudre le problème thermique par éléments finis et mesurer le coefficient de diffusion
homogénéisé du VER sur une direction x, à partir des flux entrant et sortant.

La diffusion thermique imposant un gradient de température (Figure IV-26), a été choisie par
analogie à la diffusion en gradient de concentration. Elle est en plus parfaitement adaptée pour
simuler la diffusion d’une espèce neutre qui réagit faiblement avec la matrice cimentaire, ce qui est
le cas de l’eau tritiée.

155
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

Figure IV-26: Gradient thermique appliqué entre deux faces du VER d’un mortier, le flux est considéré
nul sur les autres faces.

La résolution du problème thermique se fait en régime isotrope (VER symétrique) et stationnaire


traduit par l’équation ΔT =0. Les granulats sont considérés comme non-diffusifs, ce qui explique la
suppression du groupe de maillage granulats sur la Figure IV-26. En contrepartie, la matrice
cimentaire et l’ITZ sont les phases diffusives des matériaux cimentaires et se verront donc attribuer
des coefficients de diffusion non nuls.

Afin de calculer la diffusivité homogénéisée du volume de mortier De, équivalent, le logiciel Cast3M a
besoin comme données d’entrée des coefficients de diffusion intrinsèques de chaque phase et du
fichier « .med » contenant toutes les informations sur le maillage du VER. Le coefficient de
diffusion équivalent donne le même résultat en supprimant le groupe de maillage granulats ou en leur
attribuant un coefficient de diffusion presque nul: De, (granulats) = 1. 10-23 m2/s [LARB 13].

Par la suite et pour toutes les géométries générées, le groupe maillage des granulats sera déduit sous
CAST3M afin de minimiser les temps de calculs.

4.3.2. Application numérique: Part de la percolation d’ITZ et de la


tortuosité sur les coefficients de diffusion
Dans cette partie, le modèle 3D est utilisé pour déterminer la fraction connectée d’ITZ dans chaque
mortier. Le calcul consiste donc à attribuer à la matrice et aux granulats des coefficients de diffusion
presque nuls de (10-23 m2/s), et d’accorder à l’ITZ une valeur de coefficient de diffusion constante
De, ITZ non nulle. Le coefficient de diffusion De, équivalent obtenu à la sortie de ce modèle représente
dans ce cas, la diffusion due à la percolation d’ITZ. Cette interconnexion au sein de l’ITZ est
affectée par la tortuosité -de la matrice cimentaire et de l’ITZ- attribuée à l’emplacement des
granulats.

La fraction connectée de l’ITZ – freinée par la tortuosité- est calculée par le rapport De,equivalent/ De,ITZ
La Figure IV-27 présente les valeurs de la fraction connectée en fonction de la teneur volumique en
sable normalisé pour les deux épaisseurs d’ITZ: 5 µm et 20 µm respectivement pour les mortiers
avec et sans FS.

156
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

10
9 Epaisseur d'ITZ = 20 µm
8 Epaisseur d'ITZ = 5 µm

De,equivalent/De,ITZ (%)
7
6
5
4
3
2
1
0
0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur en inclusions granulaires Vagg (%)

Figure IV-27 : Fraction connectée d’ITZ – freinée par la tortuosité- déterminée numériquement en
fonction de la teneur en inclusions granulaires (Vagg) pour deux épaisseurs d’ITZ

Pour les mortiers CEM I sans ajout de FS (Epaisseur d’ITZ = 20 µm), les couches d’ITZ
commencent légèrement à percoler entre 10 et 30% de teneur en sable normalisé. En particulier, la
fraction connectée d’ITZ devient de plus en plus importante à partir de 30% en volume d’inclusions
granulaires.

De l’autre côté, les couches d’ITZ de 5 µm (ou moins) d’épaisseur contenues dans les mortiers avec
ajout de FS, percolent beaucoup « plus tard », et qu’à partir de 60% d’inclusions granulaires.

Les résultats de la Figure IV-27 sont en adéquation avec ceux de la Figure IV-22 qui montrent une
augmentation du coefficient de diffusion de la matrice contenue dans les mortiers respectivement à
partir de 10 et 60% de teneur en sable dans les mortiers sans et avec ajout de FS. Cette augmentation
est expliquée par la percolation des couches d’ITZ –freinée par la tortuosité- qui participent au
transport des radionucléides. L’interconnexion des ITZs reste néanmoins dans notre cas, limitée et
maîtrisée (fraction connectée < 100%), puisqu’on n’observe pas une augmentation brutale du
coefficient de diffusion dans les mortiers à fort Vagg, comme déjà rapporté dans la littérature [HOU
92][PRI 03][ASB 01].

Le rapport De, équivalent /De,ITZ représenté dans la Figure IV-27 décrit la contribution (en %) de l’ITZ à
la diffusion de la pâte (matrice + ITZ) contenue dans chaque mortier, minorée par la tortuosité. Si on
ajoute à ce rapport la contribution de la matrice cimentaire à la diffusion de la pâte contenue dans
chaque mortier (qui est de 100%=1 car la matrice est toujours connectée dans un mortier à moins de
De, équivalent
70% de granulats), on retrouve la grandeur A  (  1) .
De, ITZ

La variation du De de la pâte contenue dans chaque mortier due à la contribution de l’ITZ +


tortuosité + matrice - obtenue numériquement- peut être représentée en multipliant le terme « A » par
le coefficient de diffusion de la pâte de ciment (Vagg=0) de chaque série de mortiers avec ou sans FS.
Cela revient à multiplier le terme « A(20 µm) » adapté aux mortiers sans ajout de FS (Epaisseur
d’ITZ = 20µm), par 2,56.10-12 m2/s, et de multiplier la grandeur « A(5 µm) » relative aux mortiers
avec FS (Epaisseur d’ITZ = 5µm), par 5,12.10-13 m2/s. La Figure IV-28 représente ce résultat obtenu

157
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

numériquement par le modèle 3D. Ces graphes se superposent avec ceux retrouvés analytiquement
dans la Figure IV-22, et suivent la même loi en (1-Vagg)-0.135 comme trouvée précédemment dans (Eq.
IV-6).

4E-12 Sans FS
3,6E-12
DeHTO de la pâte contenue dans

De_pâte(2,56e-12) * A(20 µm)_num


3,2E-12
chaque mortier (m2/s)

De_HTO_mortier/(1-Vagg)_exp
2,8E-12
2,4E-12 De_pâte(2,56e-12)/(1-Vagg)^0,135_ana

2E-12 hfgh Avec FS


1,6E-12
De_pâte (5,12e-13)*A(5 µm)-num
1,2E-12
De_HTO_mortier/(1-Vagg)_exp
8E-13
4E-13 De_pâte(5,12e-13)/(1-Vagg)^0,135_ana
0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur en sable (%)

Figure IV-28 : Contribution de l’ITZ + tortuosité + matrice dans le DeHTO de la pâte contenue dans
chaque mortier : comparaison du résultat numérique, analytique et expérimental

A partir de ces résultats de modélisation et des résultats de la Figure IV-22, on peut confirmer que
l’effet de l’ITZ combiné à celui de la tortuosité contribuent à augmenter le coefficient de diffusion de
la pâte contenue dans chaque mortier selon une loi en (1-Vagg)(-0,135). Afin de dissocier la part de la
percolation d’ITZ de l’effet de la tortuosité dans les coefficients de diffusion des matrices
cimentaires contenues dans les mortiers (Figure IV-28), le modèle 3D sera à nouveau exploité mais
avec de nouveaux paramètres d’entrée.

4.3.3. Contribution de la tortuosité dans les coefficients de


diffusion des pâtes contenues dans les mortiers
L’objectif ici est de dissocier entre l’effet de la tortuosité et celui de la percolation de l’ITZ et de
déterminer la contribution de la tortuosité - seule - sur les coefficients de diffusion des pâtes de
ciment contenues dans les mortiers. Les paramètres d’entrée du modèle numérique seront donc
différents de ceux de la section (§IV-4.3.2.). On attribuera à l’ITZ, un coefficient de diffusion
intrinsèque (De,ITZ) égal à celui de la matrice cimentaire (De,matrice) - et aux granulats un De presque
nulle - ce qui revient à modéliser le mortier par un matériau bi-phasique (granulats et matrice). Le
coefficient de diffusion homogénéisé calculé à la sortie de ce modèle représente dans ce cas, la
contribution de la dilution et de la tortuosité de la matrice induites par la présence des granulats.
Sachant que la dilution pure participe à diminuer les coefficients de diffusion des mortiers suivant
une loi en (1-Vagg), la part de la tortuosité seule peut être déterminée.

La Figure IV-29 compare les coefficients de diffusion des mortiers obtenus en considérant un De,ITZ =
De,matrice (= 1.10-12 m2/s par exemple), avec les DeHTO des mortiers qui suivent une loi de dilution
parfaite en (1-Vagg). Il est important de noter que la courbe De,ITZ = De,matrice dans la figure IV-29 est
valable quel que soit l’épaisseur de l’ITZ puisqu’on considère le mortier ici comme matériau bi-

158
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

phasique (matrice, granulats). Cette courbe a été approchée par une loi de type (1-Vagg)n avec n
estimé à 1,307. Pour la loi B-H [SHA 00] donnée à l’équation (Eq.IV-4), le facteur n est égal à 1,5 =
3/2.

1,E-12
De,ITZ=De,matrice
1,E-12
(1-Vagg)^1,307
DeHTO des mortiers (m2/s)

9,E-13 (1-Vagg)

8,E-13

7,E-13

6,E-13

5,E-13

4,E-13
0 10 20 30 40 50
Teneur volumique en inclusions granulaires Vagg (%)

Figure IV-29: Comparaison des coefficients de diffusion des mortiers obtenus en considérant un De,ITZ =
De,matrice = 1.10-12 m2/s, avec les DeHTO des mortiers qui suivent une loi de dilution parfaite en (1-Vagg)

La part de la tortuosité seule est alors obtenue en déduisant la contribution de la dilution pure (1-
Vagg) de la courbe (De,ITZ = De,matrice) qui évolue en (1-Vagg)1,307. Cela revient à diviser le rapport : (1-
Vagg) 1,307 par (1-Vagg).

La tortuosité et la dilution parfaite participent alors respectivement à diminuer les coefficients de


diffusion des mortiers suivant une loi en (1-Vagg)0,307 et en (1-Vagg). La percolation d’ITZ + tortuosité
contribuent à augmenter ces coefficients de diffusion de mortiers suivant une loi en (1-Vagg)0.135
(§IV-4.3.2.). Par conséquent, l’interconnexion des couches d’ITZ représente à elle seule une
augmentation des coefficients de diffusion de mortiers en (1-Vagg)-0,135-0 ,307 soit en (1-Vagg)-0,442.

En résumé de cette section 4, il est important de noter que l’effet de la dilution (1-Vagg) reste
dominant comparé à l’interconnexion des ITZs (1-Vagg) -0,442, qui l’emporte à son tour sur la
tortuosité du réseau poreux induite par l’ajout des agrégats de sable (1-Vagg) 0,307:
Dilution >> Interconnexion d’ITZ’s > Tortuosité.
La multiplication des trois effets combinés (dilution parfaite, tortuosité et percolation d’ITZ) permet
de retrouver la loi (qu’on appelle de dilution car c’est elle qui prédomine) en (1-Vagg)0,865 (Eq. IV-4)
valable pour les mortiers avec et sans FS (Figure IV-21).

5. Impact de la granulométrie du sable


L’impact de la granulométrie du sable est discuté dans cette partie. Trois types de sable sont utilisés:
un sable fin (nommé SF : 0,125/0,3), un sable grossier (nommé SG: 0,63/2 mm) et un sable
normalisé (nommé SN : 0,08/2 mm) étudié précédemment dans les 4 premières sections de ce
chapitre.

159
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

5.1. Propriétés de diffusion


Les résultats obtenus des essais de diffusion sur les formulations de mortiers avec sable fin (SF),
sable grossier (SG) et sable normalisé (SN) sont présentés dans la Figure IV-30. On rappelle que les
deux formulations SN(10)0 et SN(10)10 fabriquées respectivement avec 0 et 10% de sable normalisé
montraient l’existence de plusieurs agglomérats de FS mal dispersés.

1,2E-12
Sable Normalisé (SN)
DeHTO des mortiers (m2/s)

1,0E-12
Sable Fin (SF)
8,0E-13
Sable Grossier (SG)
6,0E-13

4,0E-13

2,0E-13

0,0E+00
0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur en sable Vagg (%)

Figure IV-30 : Comparaison entre les coefficients de diffusion effectifs obtenus dans les mortiers à
différentes granulométries

En comparant les deux mortiers SN(10)10 et SF(10)10, on remarque que le coefficient de diffusion
du mortier fabriqué avec 10% de sable fin est plus faible que celui du mortier élaboré avec la même
teneur en sable normalisé. Cette diminution du DeHTO est probablement due à une légère amélioration
de la dispersion de la FSS dans la matrice cimentaire contenue dans le SF(10)10.

En effet, pour un même volume de sable introduit (ici 10%), la quantité de grains dans un sable fin
est beaucoup plus importante que dans un sable normalisé, au vue de leur granulométrie. Une
augmentation du nombre de granulats induit donc plus d’efforts de cisaillement pendant le malaxage
du mortier SF(10)10, ce qui peut expliquer la légère amélioration de la dispersion de FS observée et
par conséquent cette légère diminution du coefficient de diffusion. La technique d’imagerie MEB
associée à l’EDS confirme cette hypothèse et montre l’existence de moins d’amas de FSS dans le
mortier avec 10% de sable fin comparé au même mortier avec sable normalisé. Cependant, la
dispersion de la FSS dans le mortier SF(10)10 n’est que partielle, puisque la matrice cimentaire
demeure malgré tout inhomogène.

Pour les mortiers avec et plus de 30% de teneur en sable, les coefficients de diffusion semblent assez
similaires quel que soit la granulométrie utilisée. Ceci est probablement dû à l’existence de la quasi-
même pâte de ciment dans chaque mortier. En effet, l’homogénéité des matrices cimentaires
contenus dans ces mortiers a été vérifiée au MEB, qui montre une bonne dispersion de la FSS, et
l’absence d’agglomérats.

160
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

Une légère augmentation du coefficient de diffusion dans la formulation SF(10)50 fabriquée avec
50% en volume de sable fin peut tout de même être notée dans la Figure IV-30. Pour essayer de
comprendre l’origine de cet accroissement, la microstructure des mortiers avec sable fin et grossier a
été caractérisée.

5.2. Analyse de la structure poreuse


Avec l’accroissement de la teneur en sable, et quel que soit sa granulométrie, la porosité à l’eau
diminue en suivant une loi de dilution parfaite (Figure IV-31(a)). Les formulations à fortes teneurs
en sable fin montrent en particulier, un léger dépassement de porosité par rapport à la droite de
dilution. Les mesures de masse volumique apparente (Figure IV-31(b)) rejoignent cette idée, et
montrent une augmentation linéaire de la densité avec la teneur en granulats, sauf pour le mortier
SF(10)50 qui s’écarte fortement de la droite.
35
Sable Normalisé (SN)
30 Sable Fin (SF)
Porosité à l'eau θH2O (%)

Sable Grossier (SG)


25
--- (1-Vagg)
20

15

10

5
0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur en sable Vagg (%)

(a)
2,3
Masse volumiique apparente

2,2 Sable Normalisé (SN)


Sable Fin (SF)
2,1
ρH2O (g/cm3)

Sable Grossier
2
1,9
1,8
1,7
1,6
0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur en sable Vagg (%)

(b)
Figure IV-31: Valeurs moyennes de porosité à l’eau et de masse volumique apparente en fonction de
la teneur en sable fin, normalisé et grossier.

161
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

Un léger dépassement de la porosité du mortier SF(10)50 et la diminution de sa masse volumique


apparente est synonyme d’une augmentation de la teneur en vides à l’intérieur du matériau, des vides
liées à la porosité ou à de l’air occlus.

La porosité totale au mercure ramenée à la masse de pâte contenue dans chaque mortier est affichée
dans la Figure IV-32.

26
θHg ramenée à la fraction de pâte (%)

24
22
20
18
16
14
12

Formulations de mortiers

Figure IV-32 : Evolution de la porosité totale au mercure pondérée par la fraction de pâte pour les
mortiers de sable SN, SF et SG.

Etant donné le même rapport E/L et la même teneur en FS dans toutes les formulations, la quantité
globale de pores pondérée à la fraction de pâte devrait être la même. C’est plus au moins le cas pour
toutes les fractions de pâtes dont les porosités oscillent autour d’une même valeur de porosité au
mercure comprise entre 16 et 20%, excepté pour les matrices cimentaires contenues dans les mortiers
à fortes teneurs en sable fin. En l’occurrence, la formulation SF(10)50 sort de ce domaine et affiche
une porosité de 23,6%, révélant la présence d’une pâte plus poreuse au sein de ce mortier.
L’augmentation de la porosité totale au mercure est expliquée par la distribution de la taille de pores
donnée par PIM. La Figure IV-33 compare les trois profils de porosité des matrices cimentaires
contenues dans les mortiers avec 50% en volume de sable fin, normalisé et grossier.

162
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

3,0E-01

dV/dlog(D) (ml nm-1 par g de pâte)


2,5E-01
SF(10%)50%
SN(10%)50% 2,0E-01
SG(10%)50%
1,5E-01

1,0E-01

5,0E-02

0,0E+00
10000 1000 100 10 1
Diamètre d'accés des pores dp (nm)

(a)

0,14

Volume cumulé de mercure intrus


0,12
SF(10%)50%
SN(10%)50% 0,1
SG(10%)50%
0,08

(ml/g)
0,06

0,04

0,02

0
10000 1000 100 10 1
Diamètre d'accés des pores dp (nm)

(b)

Figure IV-33 : Distributions poreuses obtenues par intrusion de mercure dans les fractions de pâte
contenues dans les mortiers SF(10)50, SN(10)50 et SG(10)50 : Distributions des volumes poreux en
fonction des diamètres de pores ; (b) Courbe du volume cumulé de mercure intrus en fonction de
diamètre d’accès de pores

A partir de la Figure IV-33(b), on remarque que la porosité contenue dans le mortier SF(10)50 crée
un chemin percolant au sein de la matrice cimentaire justifiant l’augmentation du volume de mercure
cumulé de 0,085 (cas des mortiers avec SN et SG) à 0,12 ml/g.

L’interconnexion des pores est due à une augmentation de la quantité de pores capillaires et des
macropores (Figure IV-33(a)). En effet, malgré un léger affinement de la porosité capillaire au sein
du mortier SF(10)50, la quantité de pores capillaires de diamètre (6 nm <d p< 50 nm) double de

163
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

volume. En plus, dans ce même mortier apparait une nouvelle classe de macrospores de diamètres
compris entre 50 nm et 1000 nm. L’existence de cette zone peut être interprétée par l’existence de
bulles d’air ou/et par l’interconnexion des couches d’ITZ.

Le premier cas a été vérifié à l’aide de l’imagerie MEB. La Figure IV-34 met en évidence l’existence
de bulles d’air au sein du mortier SF(10)50.

200 µm

Figure IV-34 : Image MEB en mode BSE montrant l’existence de bulles d’air dans le mortier SF(10)50

La formation de ces zones poreuses est probablement liée, d’un point de vue rhéologique, à la
difficulté de mettre en œuvre ce matériau à cause de la grande quantité de grains de sable qu’il
contient. La forte teneur en granulats fins augmente alors la quantité d’air occlus au sein du matériau.
Ce phénomène a précédemment été rapporté par plusieurs études dont celle de [DEL 99] qui affirme
que la quantité d’air occlus augmente avec la présence des fines dans les mortiers. Par ailleurs
plusieurs tentatives de fabrication du mortier avec 60% de sable fin ont été effectuées sans succès.

Afin d’estimer la quantité de bulles d’air contenues dans le mortier SF(10)50, les valeurs de
porosités à l’eau mesurées de deux façons différentes sont comparées. Il s’agit d’un côté de mesurer
la porosité à l’eau sur des échantillons sortis de leur solution de cure après 6 mois, et sur des
échantillons saturés à l’eau sous vide (pendant 24h) après la même période de cure. La température
de séchage est la même et fixée à 60°C.

La valeur de porosité à l’eau obtenue par saturation sous vide (=18,8±0,5%) des échantillons
SF(10)50 est supérieure à celle obtenue par saturation sous eau de chaux uniquement (=17,3±0,3%).
La différence montre que les bulles d’air sont soit partiellement saturées ou non saturées après 6
mois de période de cure. En effet, dans ces conditions normales de saturation, les bulles d’air se
remplissent d’eau très lentement comparés aux pores capillaires.

Une aussi faible différence obtenue par porosimétrie à l’eau (1,5%) dû à la présence de bulles d’air
peut être responsable de l’augmentation brutale du volume de mercure intrus dans l’échantillon
SF(10)50. Rappelons que dans les conditions de porosimétrie au mercure, les échantillons sont
saturés sous vide de mercure avant d’appliquer des pressions d’intrusion de plus en plus élevées
permettant d’atteindre les nanopores.

En présence de FS, la percolation du réseau poreux mesuré par porosimétrie au mercure dans le
mortier SF(10)50, reste malgré tout limitée, ce qui justifie la légère augmentation du coefficient de

164
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

diffusion avec l’ajout de sable fin, par rapport aux mortiers fabriqués avec des granulométries moins
fines. Dans le cas des mortiers CEM I sans ajout de FS [LARB 13], l’interconnexion du réseau
poreux largement plus importante en présence de sable fin, explique l’accroissement du coefficient
de diffusion de 1,45.10-12 à 3,70.10-12 m2/s, respectivement pour les mortiers formulés à 50% de
sable normalisé et fin. L’ajout de FS dans le mortier SF(10)50 permet donc d’atténuer cet écart en
coefficient de diffusion, en comblant une partie de la porosité, et en limitant la connectivité des pores
capillaires.

De retour à la Figure IV-33(a), la zone de macropores (50 nm ≤ dp ≤1000 nm) observée au sein de la
formulation SF(10)50, peut également être affectée par la percolation des couches d’ITZ. En effet,
les zones d’interface dans les mortiers à sable fin commencent à percoler à partir d’une teneur en
sable d’environ 40% contre une teneur en sable de 60% pour les mortiers à sable normalisé (Figure
IV-35). Cette figure est obtenue à partir du calcul 3D détaillé (§IV-4.3.).

4,0
Sable normalisé Epaisseur d'ITZ = 5 µm
3,5
Sable fin Epaisseur d'ITZ = 5 µm
3,0
De,equivalent/De,ITZ (%)

2,5
2,0
1,5
1,0
0,5
0,0
0 10 20 30 40 50 60 70
Taux d'inclusions granulaires (%)

Figure IV-35 : Mise en évidence de l’effet de la granulométrie sur les propriétés de diffusion et
l’interconnexion des couches dans les mortiers avec FS (Epaisseur d’ITZ autour de 5 µm)

Cependant, grâce à la faible épaisseur d’ITZ, l’interconnexion de cette zone dans un mortier avec
50% en volume de sable fin semble très faible. La percolation de l’ITZ dans le mortier SF(10)50 ne
peut donc participer que très légèrement à l’augmentation du DeHTO de ce mortier.

6. Conclusion
Le présent chapitre tente d’examiner l’influence de l’ajout de granulats sur les propriétés de diffusion
et de microstructure. Les formulations concernées sont essentiellement les mortiers avec sable
normalisé fabriqués à différentes teneurs en granulats (de 0 à 65%). D’autres types de sable (sable fin
et sable grossier) ont également été étudiés pour la compréhension de l’effet de la granulométrie.

Les résultats les plus importants sont résumés, ci-dessous :

165
Chapitre IV : De la pâte aux mortiers : impact de l’ajout des granulats

 Deux comportements ont été distingués pour le coefficient de diffusion HTO. La pâte
contenue dans les mortiers avec et moins de 10% de teneur en sable affiche un coefficient de
diffusion deux fois plus élevé que celui déterminé dans la matrice cimentaire contenue dans
les mortiers avec et plus de 30% de teneur en sable. L’impact de l’ITZ est négligeable pour
les mortiers avec FS et ne peut donc pas expliquer cette différence.

 Des agglomérats de FSS ont été retrouvés dans la pâte de ciment et le mortier à faible teneur
en sable (10%). Ces amas sont principalement formés en raison de l’interaction de la FS avec
l’hydroxyde de calcium contenu dans l’eau du gâchage, et ils ne sont donc pas dus à l’état
initial du slurry, qui est bien cisaillé et dont la taille des particules est bien vérifiée avant
utilisation.

 La présence d’une quantité significative de sable ( ≥ 30% en fraction volumique) pendant le


malaxage du mortier offre une meilleure dispertion de la FSS et permet de briser les
agglomérats de FS en induisant des efforts de cisaillement au sein de la matrice cimentaire.
L’utilisation du superplastifiant dans les mortiers avec plus de 50% de teneur en sable, peut
également aider à améliorer la dispersion de la FSS.

 L’agglomération de la FSS peut facilement réduire son efficacité sur les propriétés de pâtes
et de mortiers. Elle affecte les deux rôles que la FS est censée jouer. D’abord, l’effet
« filler », car contrairement aux particules unitaires, les amas de FS sont incapables de
remplir la porosité capillaire favorisant ainsi la présence de plus grands pores. La réactivité
pouzzolanique est également affaiblie ce qui conduit à une faible quantité de C-S-H (P)
pouzzolaniques et donc à un diamètre moyen de pores de C-S-H un peu plus élevé comparé à
celui d’une pâte affichant une meilleure dispersion. L’impact négatif sur les propriétés de
transport se traduit par une augmentation du coefficient de diffusion de 0,51 e-12 à 1,1e-12
m2/s.
Une attention particulière doit donc être accordée à la disperison de la FS afin d’obtenir des
performances maximales pour les propriétés de transport du matétriau.

 L’effet de la dilution induit par l’ajout de granulats non poreux est dominant devant
l’interconnexion des couches d’ITZ, qui l’emporte à son tour sur la tortuosité de la pâte due à
la présence du sable. La même loi de dilution a été retrouvée pour les mortiers avec et sans
FS. Elle s’exprime en (1-Vagg)0,865.

 L’utilisation d’une granulométrie fine augmente le nombre de granulats introduits dans le


mélange de mortier et permet d’améliorer la dispersion de la FS. Cependant à fortes teneurs
en granulats, l’ajout de sable fin provoque l’apparition d’air occlus (bulles d’air de grand
diamètre) dans le matériau et une interconnexion « précoce» des couches d’ITZ

166
167
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de


diffusion HTO

Au regard de son importante résistance mécanique mais surtout de ses potentielles capacités de
confinement conférées par une microstructure compacte, le béton s’avère le matériau le plus adapté
pour composer la coque du conteneur de certains colis de déchets radioactifs. Les études sur les
propriétés de confinement et de microstructures de pâtes (Chapitre III) et de mortiers (Chapitre IV)
sont des étapes intermédiaires mais essentielles pour pouvoir extrapoler et évaluer les propriétés de
diffusion du béton.

En effet, les coefficients de diffusion des bétons atteignent des valeurs très faibles (cf. chapitre I), ce
qui rend leur évaluation expérimentale via des essais de diffusion naturelle « en cellule »
extrêmement longue (plusieurs années). L’objectif de ce chapitre est donc d’essayer d’estimer le
coefficient de diffusion des bétons à partir de trois méthodes.

La première méthode propose d’estimer le coefficient de diffusion HTO de deux bétons à partir de la
caractérisation de leurs réseaux poreux. Ainsi, trois relations entre DeHTO et des paramètres
microstructuraux permettent d’approcher les coefficients de diffusion de deux bétons sans et avec
10% de FS.

Dans le même cadre, la deuxième méthode vise à déterminer le coefficient de diffusion effectif des
matériaux cimentaires par la diffusion d’un autre élément que l’eau tritiée, et d’essayer par la suite de
trouver un lien permettant de remonter aux DeHTO.

Enfin, la troisième méthode consiste à estimer le DeHTO numériquement. Pour cela une chaine de
calcul composée de trois modèles, a été développée et adaptées au cas des mortiers et des bétons
testés expérimentalement.

168
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

CHAPITRE V : BETONS : ESTIMATION DU COEFFICIENT DE DIFFUSION HTO ..................... 168


1. A partir de paramètres microstructuraux ............................................................ 170
1.1. Fabrication et caractérisation des bétons étudiés ..................................................................................... 170
HTO
1.2. Relations entre De et paramètres microstructuraux .............................................................................. 173
HTO
1.2.1. Relation entre De et Vagg ............................................................................................................... 173
HTO
1.2.2. Relation entre De et rc .................................................................................................................. 175
HTO
1.2.3. Relation entre De et θHg ................................................................................................................ 175
2. A partir de la diffusion d’une autre espèce .......................................................... 180
2.1. Diffusion du Lithium/chlorure .................................................................................................................... 181
2.1.1. Protocole des essais de diffusion LiCl ............................................................................................... 181
2.1.1.1. Les solutions de remplissage des compartiments amont et aval ..................................................... 181
2.1.1.2. Suivi de concentration ionique: ........................................................................................................ 181
HTO
2.1.2. Estimation du De des mortiers CEM I ........................................................................................... 182
2.2. Diffusion gaz Oxygène /azote ..................................................................................................................... 184
2.2.1. Préparation et pré-conditionnement des échantillons .................................................................... 184
2.2.2. Protocole expérimental des essais de diffusion au gaz .................................................................... 185
2.2.3. Protocole expérimental des essais de perméabilité au gaz .............................................................. 187
2.2.4. Essais de diffusion et de perméabilité .............................................................................................. 188
3. A partir d’une succession de modèles numériques .............................................. 195
3.1. L’approche modélisation ............................................................................................................................ 195
3.1.1. Le modèle d’hydratation................................................................................................................... 196
3.1.2. Modèle multicouche de transport .................................................................................................... 197
3.1.3. Modèle 3D pour les mortiers et bétons ............................................................................................ 198
HTO
3.2. Résultats de la modélisation numérique : Estimation des De des pâtes, mortiers et béton.................. 199
4. Conclusion .......................................................................................................... 202

169
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

1. A partir de paramètres microstructuraux


Cette partie propose d’estimer les coefficients de diffusion HTO de deux bétons (avec et sans FS) à
partir de la caractérisation de leur microstructure.

1.1. Fabrication et caractérisation des bétons étudiés


Deux bétons ont été fabriqués avec 70% de teneur volumique en granulats. Ce volume d’inclusions
granulaires a été choisi afin de compléter les résultats de mortiers ayant pu atteindre un taux de
remplissage en grains de sable normalisé de 65%. En effet, plus on augmente la taille de granulats
utilisés et plus on arrive à atteindre des taux de remplissage importants. C’est d’ailleurs ce qui a été
remarqué pour les mortiers avec sable fin, où le remplissage volumique en grains de sable ne pouvait
pas dépasser les 50% (le mortier à 50% présentant plusieurs bulles d’air, et un mortier à 60% se
révélant impossible à mettre en œuvre). Or, avec le sable normalisé, on arrive à atteindre des
remplissages de l’ordre de 65%, et avec des granulats plus grands (le cas du béton), un volume
granulaire encore plus élevé (≥70%).

Les formulations B(0)70 et B(10)70 désignent les deux bétons fabriqués avec 70% de volume
granulaire (Vagg) respectivement sans et avec 10% de FS de type slurry. Le CEM I, la fumée de silice
slurry et le superplastifiant sélectionnés pour l’élaboration des bétons sont similaires à ceux utilisés
dans les pâtes de ciment et les mortiers (§II-1.1.). Pour les agrégats, deux types de granulats
concassés de nature calcaire ont été employés : du sable de classe granulaire 0/4 mm, et des
gravillons de granulométrie 5/14 mm. Les fiches produits de ces matériaux ont été ajoutées en en
annexe A.

Avant utilisation, la teneur en eau de ces granulats a été mesurée en calculant la perte de masse après
séchage à 105°C. Elle est respectivement égale à 0,08% et 0,09% pour le sable 0/4 et les gravillons
5/12, soit légèrement au-dessus de la teneur en eau de 0,05% obtenue pour le sable siliceux. Cette
faible augmentation est probablement due à la nature calcaire des granulats, légèrement plus poreux
et qui vont par conséquent absorber un peu plus d’eau que les granulats siliceux. La teneur en eau
des agrégats en plus de l’eau ramenée par le slurry et le superplastifiant ont été pris en compte dans
le calcul de la masse d’eau à introduire. L’objectif étant d’assurer des rapports E/L égaux à ceux des
mortiers avec et sans FS. Le tableau V-1 affiche la composition initiale de chaque béton. Les teneurs
en FS et en adjuvant sont exprimés par rapport à la masse de ciment.

Tableau V-1 : Formulations de bétons avec et sans FS

Vagg du sable Vagg de gravillons Teneur en E/L


Bétons : Vagg total Adjuvant
0/4 mm 5/12 mm FS effectif
B(0)70 70% 0% 0,398 0,5%
23,9% 46,1%
B(10)70 70% 10% 0,409 0,6%

Les bétons ont été mis en œuvre en deux couches dans des moules cylindriques (h=11 cm ;
Φ=7,2cm) et vibrés à mi-hauteur et à remplissage complet afin d’évacuer les bulles d’air. Après 24h,
les éprouvettes de béton sont démoulées puis placées en cure sous eau de chaux pendant 6 mois, soit

170
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

dans les mêmes conditions de conservation des mortiers. Après cette cure, des échantillons sont
prélevés au centre et utilisés pour investiguer le réseau poreux des deux bétons par porosimétrie à
l’eau et au mercure.

Les valeurs de porosité à l’eau à 60°C obtenues pour les bétons B(0)70 et B(10)70 sont
respectivement égales à 9,09% ± 0,2% et 10,5% ± 0,7%. La porosité totale dans le béton avec FS est
plus élevée que dans le béton sans FS pour les mêmes raisons notées et expliquées précédemment
(§III-2.1.1.) dans le cas des pâtes de ciment. La Figure V-1 affiche les porosités à l’eau des mortiers
avec et sans FS complétées par les valeurs correspondant aux bétons (Vagg =70%).

35

Avec 10% FS
30
Sans FS
Porosité à l'eau θH2O (%)

25 (1-Vagg)

20

15

10

5
0 10 20 30 40 50 60 70
Fraction volumique de sable Vagg (%)
Figure V-1 : Porosités à l’eau des mortiers avec et sans FS complétées par les valeurs correspondant
aux bétons (Vagg =70%)

Les valeurs de porosité à l’eau des bétons rejoignent les courbes de dilution parfaite. Les granulats
calcaires introduits dans les bétons ont joué le même rôle de dilution que les granulats siliceux non-
poreux. Avec cette hypothèse, le volume cumulé de mercure intrus ainsi que la distribution des
volumes poreux de la pâte contenue dans le béton sont obtenus en multipliant les résultats bruts du
béton par le terme donné en (Eq. IV-3). Cette supposition sera utilisée dans ce qui suit.

La Figure V-2 compare les spectres poreux bruts moyens des deux bétons B(0)70 et B(10)70.
L’ajout de FSS dans le béton augmente la teneur en gel de C-S-H comme le montre la figure V-2(a).
Cette augmentation est due à la réaction pouzzolanique de la FSS produisant plus de C-S-H(P). Un
affinement des pores capillaires est également observé avec l’ajout de FSS, ce qui signifie une
diminution du rayon critique capillaire de 16,5 à 10,5 nm (de 33,0 à 21,1 nm en diamètre)
respectivement dans les matrices cimentaires contenues dans les bétons B(0)70 et B(10)70. Ces
résultats sont similaires à ceux observés dans le cas des pâtes de ciment (Figure III-8).

La matrice cimentaire contenue dans le B(10)70 possède un rayon critique des pores capillaires de
10,5 nm, soit le même rayon critique des pâtes de ciment contenues dans les mortiers à plus de 30%
de teneur en sable normalisé. Pour le béton B(0)70, le rayon critique s’avère légèrement plus faible
que celui de la pâte de ciment (à même composition) S(0)0 dont la distribution poreuse a été illustrée

171
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

Figure III-8. Il est respectivement de 16,5 et 18 pour la pâte contenue dans le béton B(0)70 et la pâte
de ciment S(0)0.

6,E-02

dV/dlog(dp) (ml nm-1 par g de béton)


B(0)70 5,E-02

B(10)70 4,E-02

3,E-02

2,E-02

1,E-02

0,E+00
10000 1000 100 10 1
Diamètre d'accès des pores dp (nm)

(a)
3,0E-02

Volume cumulé de mercure intrus


2,5E-02
B(0)70

(mL/g de béton)
B(10)70 2,0E-02

1,5E-02

1,0E-02

5,0E-03

0,0E+00
10000 1000 100 10 1
Diamètre d'accès des pores dp (nm)
(b)
Figure V-2 : Distributions poreuses obtenues par intrusion de mercure pour les deux bétons B(0)70 et
B(10)70 (a) distribution des volumes poreux (dV/dlog(dp)) en fonction des diamètres de pores;(b)
Courbe du volume cumulé de mercure intrus en fonction des diamètres d’accès des pores

La Figure V-3, compare la distribution de la taille des pores du béton B(10)70 ramenée à sa fraction
de pâte, avec celles des pâtes de ciment contenues dans les mortiers de sable normalisé.

172
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

0,25
SN(10)0

dV/dlog(D) (ml nm-1 par g de pâte)


SN(10)10
SN(10)30 0,2
SN(10)50
SN(10)60 0,15
SN(10)65
B(10)70
0,1

0,05

0
1000 100 10 1
Diamètre d'accès des pores dp (nm)
Figure V-3 : Comparaison de la distribution poreuse du béton avec celles des mortiers à différentes
teneurs volumiques de sable normalisé

Le spectre poreux du béton se confond avec celui des mortiers SN(10)30; SN(10)50; SN(10)60 et
SN(10)65, ce qui signifie que la pâte de ciment contenue dans ces mortiers est la même que celle
contenue dans le béton.

La microstructure des deux bétons B(0)70 et B(10)70 étant caractérisée, nous essayerons dans ce qui
suit d’estimer leurs coefficients de diffusion à partir de relations corrélant le D eHTO à plusieurs
paramètres microstructuraux.

1.2. Relations entre DeHTO et paramètres microstructuraux


Trois tentatives d’estimation du coefficient de diffusion des bétons B(0)70 et B(10)70 seront
présentées ci-dessous.

1.2.1. Relation entre D e HTO et V agg

Comme précédemment vu au chapitre IV (Figure IV-21), les coefficients de diffusion des mortiers
diminuent avec le volume des granulats Vagg suivant une loi en (1-Vagg)0,865 (Eq. IV-4). Cette loi a été
vérifiée pour tous les mortiers CEM I et pour les mortiers avec FS à partir de 30% de teneur en sable.
La Figure V-4 présente l’évolution du rapport De mortier / De pâte pour tous les mortiers de sable
normalisé en fonction du pourcentage d’agrégats. On rappelle que le D epâte, qui est le coefficient de
diffusion du mortier à Vagg = 0, a été obtenu pour les mortiers avec FS (5,12e-13) sur base de la
procédure décrite précédemment (section §IV-4.1). La formulation sans FS correspondant au Vagg de
66% désigne un béton (E/C =0,4) à base de granulats calcaires qui a été testé dans [LAM 04].

Le rapport Demortier/De pâte prédit par la loi en (1-Vagg)0,865 est validé pour les mortiers avec ou sans FS,
mais pour un béton CEM I (figure V-4).

173
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

1,1
Sans FS
1,0
Avec 10% FS
0,9
De mortier/Depâte 0,8
(1-Vagg)^0,865

0,7
0,6
0,5
0,4
0,3
0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur en sable (%)
Figure V-4 : Rapport Demortier/De pâte pour les mortiers avec et sans FS, Mise en évidence de la loi de
dilution en (1-Vagg)0,865

Il est intéressant de souligner qu’à la Figure V-3, la distribution poreuse de la matrice cimentaire
contenue dans le béton B(10)70 est similaire à celle de la pâte contenue dans les mortiers avec FS à
plus de 30% de sable. Le coefficient de diffusion de la pâte de ciment contenue dans le béton
B(10)70 se retrouve par conséquent autour de 5,12e-13 m2/s.

D’un autre côté, les granulats calcaires utilisés dans la fabrication du B(10)70, ont une faible porosité
(4,1% pour les gravillons, 3,8% pour le sable - annexe A) comparée à celle de la matrice cimentaire.
Ceci se traduit également par une quasi-absence de pic de macropores au niveau des courbes de
porosimétrie au mercure (Figure IV-2(a)). L’ajout de ce type de granulats calcaires peut donc jouer
un rôle de dilution au sein du béton, comme c’est le cas pour le sable siliceux dans les mortiers. Cette
hypothèse sera utilisée dans d’autres méthodes d’estimation du coefficient de diffusion du béton.

Il est aussi important de noter qu’avec des granulats calcaires concassés (cas des bétons), la liaison
pâte/granulat (ITZ) a été trouvée meilleure qu’avec des granulats roulés (cas des mortiers) [MOR 92]
[DIA 01]. La porosité et l’épaisseur de l’ITZ devraient alors être légèrement inférieures dans les
bétons que dans les mortiers fabriqués au sable siliceux roulé.

Sur la base de ces différentes observations, il semble donc que la loi de dilution (Eq. IV-4), peut
donc être applicable dans le cas du béton B(10)70 (Vagg=70%). Le Depâte est le même que pour les
mortiers à plus de 30% de sable (5,12e-13). L’estimation du coefficient de diffusion du béton
B(10)70 avec cette méthode, donne une valeur de 1,81e-13 m2/s.

Pour le béton sans ajout de FS, la distribution poreuse de la matrice cimentaire contenue dans le
B(0)70 était (plus fine) que celle de la pâte de ciment S(0)0 de même composition. Ajoutant à cela
que l’effet de l’ITZ dans le béton (granulats calcaires concassés) doit être plus faible de meilleure
qualité que celle dans les mortiers (sable siliceux roulé et épaisseur d’ITZ de 20 µm). Le coefficient
de diffusion de la matrice contenue dans le B(0)70 doit alors être inférieur à celui de la pâte de
ciment S(0)0 (2,56e-12). L’estimation du DeHTO du béton B(0)70 s’avère dans ce cas plus difficile.
Néanmoins, on peut déduire que ce coefficient de diffusion est forcément plus faible que le DeHTO du
béton contenant la pâte S(0)0 (9,03e-13 m2/s),.

174
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

1.2.2. Relation entre D e HTO et r c

Une relation exponentielle entre le coefficient de diffusion à l’eau tritiée (D eHTO) et le rayon critique
des pores capillaires (rc) des pâtes de ciment a été précédemment établie au chapitre III et IV (Figure
IV-11). Elle s’exprime par l’équation :

DeHTO (matrice)  1.10 13 e (0,1759rc ) (Eq. V-1)

Cette relation permet d’estimer le coefficient de diffusion de la matrice contenue dans un mortier ou
béton à partir de la connaissance du rayon critique de ses pores capillaires déterminé par
porosimétrie au mercure. Elle a néanmoins été vérifiée uniquement dans le domaine de validité
(5 nm ≤rc≤ 20 nm).

En considérant les granulats utilisés dans la fabrication des mortiers et bétons comme très peu
poreux, les coefficients de diffusion de ces matériaux peuvent être estimés en combinant la loi de
dilution (Eq. IV-4) et l’équation V-1.

DeHTO (mortier ou béton )  1.10 13 e (0,1759rc ) (1  Vagg ) 0,865 (Eq. V-2)

Le rayon critique de la pâte contenue dans le béton B(0)70 et B(10)70 est respectivement égal à 16,5
et 10,5 nm (Figure V-2). En appliquant l’équation (Eq. V-2), le coefficient de diffusion du béton sans
FS est estimé autour de 6,43e-13, et celui du béton avec FS aux alentours de 2,23e-13.

Le béton F44 d’EDF dont le coefficient de diffusion HTO est de l’ordre de 1,1 e-13 (déterminé après
quelques années d’essais en cellule), a également été caractérisé par porosimétrie au mercure. Le
rayon critique de sa matrice cimentaire est évalué à 6,6 nm. En utilisant cette valeur de r c dans
l’équation V-2 (avec Vagg ≈ 70%), on obtient un coefficient de diffusion de l’ordre de 1,03e-13, très
proche de la valeur mesurée expérimentalement.

Ayant déjà caractérisé la pâte S-F44 dans le chapitre III, une estimation du coefficient de diffusion
du béton F44 peut également etre proposée à partir de la méthode précédente (§V-1.2.1.). et ayant
déjà caractérisé la pâte S-F44 dans le chapitre III, une estimation du coefficient de diffusion du béton
F44 aurait pu également être proposée. Le Depâte égal à 2,97e-13 (tableau II-5) est introduit dans la loi
de dilution (Eq. IV-4), pour donner un coefficient de diffusion de béton F44 autour de 1,05 e-13, à
nouveau très proche de la valeur réelle expérimentale.

1.2.3. Relation entre D e HTO et θ Hg

Les résultats de porosimétrie au mercure ont montré une différence entre les formulations SN(10)0 et
SN(10)10 et les autres formulations de mortiers à plus de 30% de sable normalisé (Figure IV-10).
Cette différence est aussi visible sur les résultats de diffusion (Figure IV-3). Les résultats de
porosimétrie au mercure ont également été en accord avec les résultats de diffusion dans les pâtes de
ciment à différentes teneurs en FS ou à différents rapports E/L.

Les essais de porosimétrie au mercure présentent donc l’avantage de fournir des données sur la
percolation du réseau poreux à travers l’interprétation des courbes de volumes cumulés de mercure
intrus. En particulier, le paramètre de porosité total au mercure θHg, décrit indirectement la

175
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

connectivité du réseau poreux et peut être calculé pour une pâte, mortier ou béton comme étant le
produit du volume cumulé maximal introduit Vimax de pâtes, mortiers ou bétons par leurs masses
volumiques respectives au mercure ρHg (Eq. II-12).

Cette grandeur peut être fournit directement, pour chaque analyse, par l’appareil de porosimétrie au
mercure.

La Figure V-5 affiche un récapitulatif des courbes de volumes cumulés de mercure intrus, obtenus
pour les pâtes, mortiers et bétons avec 10% de FS étudiés dans ce travail. Les deux bétons
caractérisés ici sont le béton B(10)70 et le béton F44. Le volume cumulé total V cumulé maximal de
chaque formulation correspond au volume cumulé mesuré jusqu’au plus petit diamètre d’accès (3
nm).

0,2 0,12

Volume cumulé de mercure intrus

Volume cumulé de mercure intrus


S-F44 0,18 SF(10)10
0,16 SF(10)30 0,1
S(10)0
0,14 SF(10)40
(ml/g de pâte)

(ml/g de mortier)
S(10)0-0,5 0,08
0,12 SF(10)50
0,1 SG(10)50 0,06
0,08
0,06 0,04
0,04
0,02 0,02
0
0
10000 1000 100 10 1
10000 1000 100 10 1
Diamètre d'accès des pores dp (nm) Diamètre d'accés des pores dp (nm)

0,12 Volume cumulé de mercure intrus


SN(10)0
SN(10)10 0,1
SN(10)30
(mL/g de mortier)

0,08
SN(10)50
SN(10)60 0,06
SN(10)65
0,04
B(10)70
Béton F44 0,02

0
10000 1000 100 10 1
Diamètre d'accés des pores dp (nm)

Figure V-5 : Récapitulatif des courbes de volume cumulé de mercure intrus, obtenus pour les pâtes,
mortiers et bétons avec 10% de FS

Les coefficients de diffusion DeHTO des pâtes, mortiers et bétons avec 10% de FS (affichés dans la
Figure V-5) ont été corrélés aux valeurs de porosité totale au mercure θ Hg (voir tableau II-5). Le
béton F44 testé en cellule de diffusion a un coefficient de diffusion HTO de 1,1 e-13 m2/s et une
porosité totale au mercure de de 2,8% ± 0,3%. Pour le béton B(10)70, la porosité totale au mercure
est de 6,5% ± 0,5%, mais la valeur expérimentale du coefficient de diffusion est inconnue.

La Figure V-6 représente l’évolution des coefficients de diffusion des pâtes, mortiers et béton (F44)
avec 10% de FS, en fonction de leur porosité au mercure. Les mortiers représentés ici sont

176
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

uniquement ceux fabriqués avec du sable normalisé et grossier. Les mortiers à base de sable fin n’ont
pas été considérés dans la Figure V-6. Ces matériaux présentaient des bulles d’air et des tâches
poreuses (§IV-5.2.) susceptibles de surestimer la porosité totale au mercure.

Pour une porosité totale de 92%, le coefficient de diffusion est égal au coefficient de diffusion de
l’eau tritiée dans l’eau pure D0HTO = 2,24e-9 m2/s (défini §I-1.3) [TOG 98].

2,5E-12
CEM I+10% FS y = 1,0E-13e0,11x
2,0E-12 R² = 0,9939
DeHTO en (m2/s)

1,5E-12

1,0E-12

5,0E-13

0,0E+00
0 10 20 30 40
Porosité au mercure θHg (%)
Figure V-6 : Evolution des coefficients de diffusion en fonction de la porosité au mercure pour les
pâtes, mortiers et béton (F44) avec ajout de 10% de FS.

Une loi d’évolution exponentielle du coefficient de diffusion effectif en fonction de la porosité au


mercure a été établie à partir des résultats expérimentaux. Le coefficient de diffusion le plus faible
correspond à celui du béton F44 (θHg = 2,8% ; DeHTO =1,1e-13m2/s), et le plus élevé à la pâte de
ciment S(10)0-0,5 (θHg = 27,0%; DeHTO = 1,79e-12 m2/s). Les deux points situés en dehors de la
courbe exponentielle correspondent aux deux formulations de pâte de ciment SN(10)0 et de mortier à
10% de teneur en sable SN(10)10, présentant l’existence de plusieurs agglomérats de FS. En effet,
comme précédemment vu dans la section (§IV-2.2.2.), la FS n’a pu réagir qu’à hauteur de 6 à 7%
dans ces mélanges au lieu de 10% ajouté initialement dans les matériaux.

Ainsi pour les pâtes, mortiers et bétons à base de CEM I + 10% de FS : la relation exponentielle
s’exprime par :

(11 Hg )
DeHTO (CEM I  10% FS )  1.0 13 e (Eq. V-4)

Pour le béton B(10)70 avec une porosité au mercure de 6,5%, le coefficient de diffusion HTO estimé
par l’équation V-4, est de 2,04e-13 m2/s.

Pour les formulations constituées de ciment portland CEM I sans ajouts, une loi exponentielle a été
proposée par Tognazzi dans [TOG 98] sur la base des résultats expérimentaux obtenus sur des pâtes
de CEM I CPA de différents E/C (résultats issus de [ADE 92] [RIC 97]). Ces résultats ont été
complétés par les données de pâtes et de mortiers à base de CEM I Le Teil testés par Larbi [LARB
13], et de pâtes et mortiers fabriqués avec du CEM I ASTM III utilisé par Delagrave [DEL 98]. Le
tableau V-2 regroupe toutes les données de pâtes et mortiers CEM I issues de la littérature.

177
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

Tableau V-2 : Coefficients de diffusion HTO et porosités au mercure de pâtes et mortiers CEM I issues
de la littérature

Références Formulations DeHTO (m2/s) θHg (%)

(E/C = 0,25) 5,67e-13 10,5


e
(E/C = 0,30) 1,18 -12 13
e
(E/C = 0,35) 2,78 -12 17,7
e
(E/C = 0,38) 3,47 -12 17,4
Pâtes de ciment à base de CEM e
(E/C = 0,40) 3,70 -12 22,1
I CPA testés par [RIC 97] e
[LARB 13] et corrigés par [BEJ (E/C = 0,42) 4,05 -12 22,3
e
06] (E/C = 0,45) 5,21 -12 22,8
e
(E/C = 0,50) 8,91 -12 28,4
e
(E/C = 0,60) 1,50 -11 36,0
e
(E/C = 0,65) 2,00 -11 38,7
e
(E/C = 0,4 ; Vagg=0) 2,56 -12 13,9
e
(E/C = 0,4 ; Vagg=10% de SN) 2,40 -12 13 ,8
e
(E/C = 0,4 ; Vagg=30% de SN) 1,96 -12 11,2
e
Pâtes de ciment et mortiers à (E/C = 0,4 ; Vagg=50% de SN) 1,45 -12 10,6
base de CEM I Le Teil testés (E/C = 0,4 ; Vagg=50% de SG) 9,90e-13 7,1
par [LARB 13] e
(E/C = 0,3 ; Vagg=50% de SN) 7,21 -13 8,7
e
(E/C = 0,35; Vagg=50% de SN) 1,5 -12 9,7
(E/C = 0,5 ; Vagg=50% de SN) 2,68-12 13,7
e
Pâte et mortier à base de CEM I (E/C = 0,25 ; Vagg=0) 6,3 -13 8,7
ASTM III testés par [DEL 98] (E/C = 0,25 ; Vagg=50% de e
3,8 -13 7,5
SN)
La Figure V-7 représente l’évolution exponentielle du coefficient de diffusion en fonction de la
porosité au mercure pour les pâtes et mortiers CEM I (tous ciments confondus). On considère là
aussi que pour une porosité de 92%, le coefficient de diffusion est égal à la diffusion du HTO dans
l’eau pure D0HTO.

178
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

3,0E-11
y = 4,6E-13e0,095x
CEM I
2,5E-11 R² = 0,954

2,0E-11
DeHTO(m2/s)
1,5E-11

1,0E-11

5,0E-12

0,0E+00
0 10 20 30 40
Porosité au mercure θHg (%)
Figure V-7 : Evolution des coefficients de diffusion en fonction de la porosité au mercure pour les
pâtes et mortiers à base de ciment Portland CEM I

Les coefficients de diffusion HTO des matériaux (pâtes, mortiers ou bétons) fabriqués avec du CEM
I uniquement, sont distribués sur une échelle plus importantes. La loi exponentielle s’exprime par
l’équation :

( 9,5 Hg )
DeHTO (CEM I )  4,6.10 13 e (Eq. V-5)

Avec une porosité totale au mercure de 5,8% ± 0,5%, le coefficient de diffusion HTO du béton
B(0)70 estimé par l’équation V-5, est proche de 8,03e-13 m2/s.

Pour chaque liant ou mélange donné (CEM I ou CEM I +10% de FS), le coefficient de diffusion
HTO augmente différemment avec la porosité accessible au mercure. D’ailleurs, une troisième loi
exponentielle peut également être établie à partir des données sur le coefficient de diffusion des pâtes
CEM V exposé dans [BEJ 06] (Figure V-8).

y = 9E-14e0,0482x
CEM V
9,E-13 R² = 0,9315
DeHTO en (m2/s)

7,E-13

5,E-13

3,E-13

1,E-13
0 10 20 30 40 50
Porosité au mercure θHg(%)
Figure V-8 : Evolution des coefficients de diffusion en fonction de la porosité au mercure pour les
pâtes CEM V

179
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

En conclusion de cette première partie, il est possible d’estimer le coefficient de diffusion d’un béton
à partir de la connaissance de certains de ses paramètres microstructuraux. La loi de dilution
proposée dans la section (§V-1.2.1.) permet d’évaluer le DeHTO du béton à partir du volume de
granulats et du coefficient de diffusion de la pâte qui le constitue. Dans les sections (§V-1.2.2.) et
(§V-1.2.3.), nous avons proposé des relations De(rc) et De(θHg) permettant une estimation du
coefficient de diffusion de béton, difficile à obtenir expérimentalement.

Le tableau V-3 regroupe les valeurs de coefficients de diffusion des bétons B(0)70 et B(10)70
calculées à l’aide des trois méthodes proposées.

Tableau V-3 : Récapitulatif des coefficients de diffusion HTO des bétons B(0)70 et B(10)70 estimés par
trois méthodes.

Méthode 1: Loi de Méthode 2: DeHTO et rc Méthode 3: De HTO et θHg


dilution

Bétons Vagg DeHTO rc (nm) DeHTO θHg DeHTO


(m2/s) (m2/s) (m2/s)

B(0)70 70% < 9,04e-13 16,5 6,43e-13 5,8% 8,03e-13

B(10)70 70% 1,81e-13 10 ,5 2,23e-13 6,5% 2,04e-13

On estime que les coefficients de diffusion des bétons B(0)70 et B(10)70 se situent en moyenne
autour de 7,23e-13 ± 0,8e-13 et 2,03e-13 ± 0,14e-13 m2/s. L’erreur relative entre les trois méthodes ne
dépasse pas les 11%.

La section suivante propose d’estimer le coefficient de diffusion HTO des mortiers et des bétons à
partir de la diffusion d’autres éléments que l’eau tritiée.

2. A partir de la diffusion d’une autre espèce


L’équation de facteur de forme [DUL 79] [TUM 96] devrait permettre de déduire le coefficient de
diffusion de toute espèce i qui réagit faiblement avec la matrice cimentaire, à partir de la
connaissance du facteur de forme géométrique du matériau testé.

D0i D0HTO
F  (Eq. V-6)
Dei DeHTO

Avec F le facteur de forme du matériau cimentaire testé, (Dei ; DeHTO) sont respectivement les
coefficients de diffusion effectifs de l’élément i et de l’eau tritiée HTO du matériau, et (D0i ;D0HTO),
les coefficients de diffusion respectivement de l’élément i et HTO dans une solution infinie d’eau à
25°C.

180
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

2.1. Diffusion du Lithium/chlorure


Les mortiers CEM I âgés de 6 mois testés préalablement en diffusion HTO dans le cadre de la thèse
de Larbi [LARB 13], ont été caractérisés en cellules de diffusion lithium/chlorures. Les résultats de
ces essais, publiés dans [BAJ 15], sont détaillés ci-dessous. Rappelons qu’il s’agit de quatre mortiers
à base de ciment Portland (CEM I Le Teil), à différentes teneurs volumiques de sable normalisé (Vagg
variant de 0 à 50%), et avec un rapport E/C de 0,4. Les essais de diffusion LiCl n’ont pas été répétés
deux fois comme les essais HTO.

2.1.1. Protocole des essais de diffusion LiCl


Les cellules de through-out diffusion pour la diffusion HTO (§I-2.1.1) sont également utilisées pour
les essais de diffusion LiCl. La différence entre les deux protocoles réside au niveau des solutions de
remplissage utilisées dans les compartiments amont et aval et de la technique de suivi de
concentration du lithium pendant le processus de diffusion des ions.
La diffusion du lithium/chlorure a été réalisée à faible concentration (C 0 = 41 mmol/L), afin de
négliger l’effet des interactions électriques entre les espèces diffusantes et la solution porale ionique
(phénomène d’éléctro-diffusion) et de pouvoir supposer une interaction réversible linéaire entre le
soluté et la matrice cimentaire (Kd constant). Seule la diffusion dans les matériaux saturés a été
examinée. Le phénomène d’électro-diffusion et les conditions insaturées ne font pas l’objet de cette
étude.

2.1.1.1. Les solutions de remplissage des compartiments amont et aval

La solution utilisée dans le compartiment aval est une eau de chaux saturée qui est préparée en
mélangeant 2g de Ca(OH)2 dans un litre d’eau ultra-pure. Après 24 h d’agitation, la solution a été
filtrée (filtres de 0,45 µm) puis utilisée pour remplir les compartiments aval des cellules de diffusion.
Le choix de l’utilisation de l’eau de chaux a été préféré à l’utilisation d’une solution interstitielle du
béton, car cette dernière contient une quantité d’ions sodium (Na+). EN effet, les ions sodium
possèdent un temps de rétention de 3,52 minutes contre 2,93 minutes pour le lithium (dans l’appareil
de chromatographie ionique). Il est donc clair que le présence de sodium dans la solution aval va
empêcher une résolution suffisante pour la détection du lithium puisque les temps de rétention du
(Li+ ;Na+) sont assez proches ce qui peut induire un chevauchement des deux pics.

Dans le compartiment amont, le traceur utilisé est le LiCl. Les deux ions ont été suivis. Le lithium et
le chlorure sont deux ions aux propriétés de transport très différentes : d’un côté, le lithium est un
traceur souvent utilisé pour les mesures des coefficients de diffusion effectifs car c’est un élément
neutre vis-à-vis de la matrice cimentaire, qui permet donc de s’affranchir des éventuelles interactions
avec les minéraux constitutifs de la pâte de ciment. Au contraire, les ions chlorures ne sont pas
neutres chimiquement (§I-1.2.1.), qu’ils soient libres dans la solution interstitielle ou qu’ils soient
liés et donc susceptibles de réagir avec les constituants de la pâte de ciment pour entrainer des
modifications physiques au sein du matériau.
La solution du compartiment amont est une solution d’eau de chaux saturée et contenant C 0 = 41
mmol/l du traceur LiCl. La solution a été filtrée avant d’être utilisée dans les compartiments amont.

2.1.1.2. Suivi de concentration ionique:

181
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

La quantité d’ions (Li+ ; Cl-) transférés du compartiment amont vers le compartiment aval est suivie
dans le temps par des prélèvements successifs (volume de 2 ml) pendant environ 4 mois jusqu’à
atteindre le régime permanent. Ces prélèvements sont analysés au moyen de l’appareil de
chromatographie ionique (DIONEX DX-120). La limite de détection de cet appareil se situe autour
de 0,18 µmol/L. Les étapes de résolution de l’équation analytique de Fick et d’ajustement avec les
points expérimentaux -permettant la détermination du coefficient de diffusion effectif des mortiers-,
sont similaires à celle des essais de diffusion HTO, section (§II-2.3.).

2.1.2. Estimation du D e HTO des mortiers CEM I


Les coefficients de diffusion des ions lithium et chlorure sont obtenus expérimentalement au bout de
4 mois d’essais (régime permanent atteint) pour les quatre mortiers à base de CEM I. Les D eHTO de
ces matériaux étant déjà connus [LARB 13], le calcul du facteur de forme peut s’effectuer en
calculant le rapport D0 /De pour chaque élément diffusif (Li+, Cl-, HTO) (Eq. V-6). On note que
D0HTO= 2,24. 10-9 m2/s, D0Li+ = 1,03. 10-9 m2/s et D0Cl- =2,03.10-9 m2/s [MIL 89].

La Figure V-7 compare les facteurs de forme du lithium, chlorure et eau tritiée calculés à partir des
coefficients de diffusion expérimentaux de chaque élément. Les facteurs de forme obtenus pour les
différentes espèces se superposent assez bien, et les différences mesurées entre ces valeurs ne
dépassent pas les 15%. Ces résultats confirment le caractère géométrique du facteur de forme, qui
reflète la morphologie, la connectivité et la tortuosité du réseau poreux d’un matériau.

1900
F du Lithium
1700
F du chlorure
1500
F du HTO
1300
Facteur de forme

1100

900

700

500
0 10 20 30 40 50 60
Fraction volumique de sable (%)
Figure V-7 : Comparaison entre les facteurs de forme du lithium, chlorure et eau tritiée calculés à
partir des coefficients de diffusion expérimentaux de chaque élément

Le concept du facteur de forme géométrique décrit par l’équation V-6 peut donc être considéré
comme valide pour les mortiers CEM I. Ce résultat est extrêmement important puisqu’il permet
d’estimer le DeHTO d’un mortier ou d’un béton, à partir de la diffusion d’un autre élément (le lithium
en l’occurrence). La Figure V-8 montre comment on arrive à estimer correctement le DeHTO des

182
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

mortiers CEM I (E/C=0,4) à partir de la diffusion lithium. Le De_HTO _théorique de la Figure V-8
désigne le coefficient de diffusion obtenu pour chaque mortier par la relation :

D0HTO 
De _ HTO _ théorique  Li 
DeLi (Eq. V-7)
D 0

3,0E-12
De_HTO_expérimental
2,5E-12 De_HTO_théorique
DeHTO (m2/s)

2,0E-12

1,5E-12

1,0E-12

5,0E-13
0 10 20 30 40 50 60
Fraction volumique de sable (%)
Figure V-8 : Comparaison entre le coefficient de diffusion obtenu expérimentalement et le coefficient
de diffusion calculé à partir de l’équation V-7

Le choix de tester en diffusion une espèce ionique à la place du HTO, présente l’avantage de réaliser
des essais dans des conditions de sécurité moins contraignantes. En effet, l’exigence technique et les
mesures de sécurité prises lors de la réalisation des essais de diffusion d’eau tritiée limitent la
pratique de ces tests. La diffusion d’ions tels que le lithium peut par contre être applicable dans la
plupart des laboratoires, et est plus abordable et beaucoup moins coûteuse que la diffusion d’eau
tritiée.

En contrepartie, ces essais de diffusion ionique possèdent certains inconvénients. D’abord, ils sont
aussi laborieux que les essais HTO puisque les deux nécessitent la réalisation de prélèvements
successifs et le suivi de concentration. En plus, la durée requise pour atteindre le régime permanent
(flux constant) s’avère en effet, plus longue avec les ions qu’avec l’eau tritiée (pour la pâte S(0)0, T i
≈ 10 jours avec le HTO contre 30 jours avec le Li+). L’obtention des DeHTO des bétons à partir de la
diffusion d’ions s’annonce par conséquent plus difficile qu’avec la diffusion HTO à cause de la
contrainte du temps et de représentativité des échantillons (épaisseur ≥ 3 cm).

Il est important de noter à la fin de cette section, que la substitution d’eau tritiée par les ions dans les
essais de diffusion peut se révéler parfois utile dans le cas des pâtes et des mortiers. Cependant, le
principe de facteur de forme décrit par l’équation V-6 n’a été vérifié que dans le cas des matériaux à
base de CEM I. Pour les matériaux composites avec ajouts (de type FS, CEM V…), certains auteurs
comme [MER 12] [MOH 02] ont montré (par des mesures d’impédance) que la valeur du facteur de
forme varie en présence d’ions chlorures. En effet, la porosité de ces matériaux étant plus fine, les
essais de diffusion se réaliseront sur des durées plus longues pendant lesquels les échantillons seront
exposés aux ions chlorures, capables de modifier leurs microstructures. Ces conditions peuvent
expliquer par conséquent, l’augmentation de la valeur du facteur de forme géométrique.

183
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

La diffusion naturelle des espèces en phase liquide est une technique très consommatrice de temps
qui est donc inadaptée pour estimer de façon rapide et fiable le coefficient de diffusion HTO du
béton. La section suivante propose de tester les matériaux avec et sans FS en diffusion gaz, une
technique plus rapide qui offre la possibilité de tester les bétons en diffusion.

2.2. Diffusion gaz Oxygène /azote


Les essais de diffusion au gaz dans des matériaux cimentaires séchés sont des essais rapides,
accessibles et faciles à utiliser puisqu’ils assurent un suivi automatisé de l’évolution de la
concentration à l’amont et à l’aval. Ces essais possèdent l’avantage de pouvoir déterminer un
coefficient de diffusion au gaz pour le béton en un temps raisonnable, qui n’est pas possible avec la
diffusion en phase liquide.

Les deux gaz sélectionnés sont l’oxygène (O2) et l’azote (N2). L’oxygène a été choisi parce qu’il joue
un rôle majeur dans la corrosion des armatures. Ainsi, la détermination de ses propriétés de diffusion
dans les matériaux cimentaires se révèle d’un grand intérêt pour la durabilité du béton armé. L’azote
a été sélectionné pour simuler l’air ambiant (constitué par près de 79% de N2).

Treize formulations au total ont été testées en diffusion gaz. Il s’agit d’un côté, de la série de
mortiers CEM I de sable normalisé (Vagg de 0 à 60% ; E/C =0,4), et du béton B(0)70, et de l’autre, de
la série de sable normalisé avec ajout de FS (CEM I + 10% de FS ; Vagg =0 à 65% ; E/L=0,415) avec
le béton B(10)70.

Avant le lancement des essais, les échantillons de pâtes, mortiers et bétons ont subi une phase de
conditionnement hydrique. Les échantillons testés en diffusion ont également subi des tests de
perméabilité au gaz (Kg).

2.2.1. Préparation et pré-conditionnement des échantillons


La préparation des échantillons pour les essais de diffusion au gaz, nécessite une attention
particulière. En effet, le séchage doit être suffisamment adapté pour pouvoir vider tous les pores
participants au transport, mais ne doit pas non-plus être agressif pour ne pas générer de microfissures
au sein du matériau, ou altérer certaines phases sensibles à la température dans les matériaux
cimentaires.

Des études antérieurs [WON 07] [WON 09] ont démontré que le séchage de pâtes de ciment matures
à 50% d’humidité relative (HR) et 20°C, jusqu’à l’équilibre, est un séchage suffisant et optimal au-
dessous duquel la variation des paramètres de transport (De) est négligeable. Dans une autre étude
[PAR 94], Parrott observe que les valeurs de perméabilité à l’air et d’absorption d’eau sont très
sensibles à l’humidité dès qu’elle dépasse les 60%. Pour ces raisons, les conditions d’équilibre final
sélectionnées pour les échantillons testés étaient donc de 50% d’humidité relative à 20°C.
Le problème qui se pose à ce niveau-là concerne la durée de séchage. En effet, un séchage en
solution saline à 50% HR et 20°C nécessite une durée d’au moins 6 mois avant d’atteindre
l’équilibre pour un disque d’échantillon de 2 cm d’épaisseur. Voilà pourquoi, des températures plus
élevées devraient être utilisées pour réduire le temps de conditionnement. Dans cette étude, la
température a été progressivement augmentée tout en diminuant l’humidité relative, pour éviter tout
gradient de température important susceptible d’endommager les matériaux.

184
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

Après 6 mois de cure, des échantillons de pâtes, mortiers et bétons avec et sans FS (h= 22 cm ; ϕ=7,5
cm), ont été sectionnés au centre des éprouvettes pour produire deux disques de 2 cm d’épaisseur
pour chaque pâte, deux disques de 3 cm d’épaisseur pour chaque mortier et deux disques de 5 cm
d’épaisseur pour chacun des deux bétons B(0)70 et B(10)70. Le protocole de conditionnement utilisé
par Wong dans [WON 09] a été adopté pour tous les échantillons. Il s’agit d’abord de sécher les
échantillons dans une enceinte climatique à 20°C et 50% d’HR pendant les sept premiers jours, avant
de les transférer dans un four à 35°C contenant du gel de silice pendant 7 jours supplémentaires.
L’étape suivante consiste à élever la température progressivement jusqu’à 50°C et de placer dans le
four un dessiccateur contenant une solution saturée de chlorure de zinc (ZnCl2) afin de maintenir
l’humidité relative à 10% à 50°C. Il est important de noter ici que la densité de vapeur d’eau à (10%
d’HR ; 50°C) est la même qu’à 50% de HR à 20°C [WON 09], ce qui signifie que le même état
hydrique d’équilibre est atteint dans les deux cas.
Les échantillons ont été séchés jusqu’à l’équilibre considéré atteint lorsque la perte de masse ne
dépasse pas 0,01% par jour. Avec ce protocole, l’équilibre est obtenu en moins de 100 jours pour les
échantillons de 5 cm d’épaisseur.

Un jour avant de lancer les essais de diffusion et de perméabilité au gaz, les disques ont été transférés
dans un dessiccateur contenant du gel de silice pour garantir un refroidissement des échantillons à
température ambiante (20°C) sans reprendre de l’humidité. Les pesées effectuées avant et après
refroidissement dans le dessiccateur ont montré que la variation de la masse est très négligeable.

Deux échantillons ont été testés pour chaque formulation et la valeur moyenne, a été reportée comme
résultat.

2.2.2. Protocole expérimental des essais de diffusion au gaz


La méthode utilisée pour mesurer les coefficients de diffusion consiste à placer un échantillon entre
deux compartiments (aval et amont) remplis avec deux gaz différents : l’azote pur (N2) à l’aval, et
l’air (mélange de 79% de N2 et 21% d’O2) à l’amont. Pour assurer une étanchéité parfaite de la
cellule de diffusion, les échantillons ont été fixés entre les deux demi-flasques en PVC par une colle
époxy puis serrés par des vis. Cet ensemble a ensuite été fixé entre les deux compartiments de la
cellule en utilisant 12 vis métalliques et 6 joints toriques. La surface exposée à la diffusion est de 5
cm de diamètre. La Figure V-9 montre le schéma d’une cellule de diffusion au gaz et le dispositif
expérimental utilisé dans cette étude.

185
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

Amont
21% O2 ; 79%N2

O2
Echantillon
N2
Aval
100% N2

Figure V-9 : Schéma d’une cellule de diffusion gaz (à gauche) et dispositif expérimental utilisé (à
droite)

Le dispositif expérimental est constitué d’une cellule de diffusion en acier inoxydable qui contient au
milieu dans chaque compartiment une sonde de mesure d’oxygène par fibre optique. Ces sondes sont
connectées à un logiciel qui permet de contrôler l’enregistrement des teneurs d’oxygène, de choisir la
périodicité des mesures et d’assurer l’étalonnage au début de chaque essai. La sonde O2 mesure la
teneur en oxygène (et en azote par soustraction) avec une bonne précision (< 0,05 %).

Les essais sont réalisés dans une pièce où la température est régulée à 20 °C. Le vide est d’abord
réalisé à l’aide d’une pompe dans les compartiments amont et aval. Ces compartiments sont
respectivement remplis par de l’air synthétique (21% O2, 79% N2) et de l’azote (100% N2). Le
remplissage s’effectue jusqu’à pression atmosphérique, mesurée à l’aide des capteurs de pression
placés dans les deux compartiments. Les deux capteurs affichent la même pression (à ± 1 mbar), ce
qui signifie que le gradient de pression (et par conséquent le transport du gaz par convection) est
négligeable. La diffusion en phase liquide est également ignorée parce que la durée d’essai ne
dépasse pas 10 h pour les échantillons les moins diffusifs. L’évolution des concentrations du gaz
dans les compartiments amont et aval est essentiellement gouvernée par le coefficient de diffusion
effectif du gaz.

Dans ce cas, l’équation de conservation de masse décrivant une diffusion unidirectionnelle au sein
des matériaux cimentaires est exprimée de manière similaire que l’équation (I-12) pour la diffusion
liquide. Dans cette relation, « C » représente la concentration du gaz (N2 ou O2) dans le mélange
gazeux, De le coefficient de diffusion effectif du N2 ou O2 et αm la porosité modifiée égale à θ (1-Sl),
avec θ et Sl désignent respectivement la porosité et de le degré de saturation en eau du matériau. Pour
chaque gaz (O2, N2) considéré séparément, la solution analytique de l’équation I-12 est calculée avec
l’outil MIED comme pour la diffusion liquide. Cet outil couplé au solveur Excel, fournit les valeurs
de coefficient de diffusion à partir de l’ajustement des courbes expérimentales et analytiques. La
Figure V-10 fournit un exemple d’ajustement entre les mesures expérimentales et le modèle
numérique.

186
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

1,8 81
O2-exp N2_exp
Concentration d'oxygène (%)

1,6

Concentration d'azote (%)


80,5
1,4 O2_num N2_num
1,2 80
1
79,5
0,8
0,6 79
Compartiment aval Compartiment amont
0,4
θ = 16,0% ; Sl = 0,52 78,5 θ = 16,0%; Sl=0,52
0,2 De(O2) = 4,02e-8 De(N2) = 4,09e-9 m2/s
0 78
0 50 100 150 200 250 100 150 2000 50
250
Temps (min) Temps (min)
Figure V-10 : Exemple d’ajustement entre les mesures expérimentales et le modèle numérique pour
un échantillon de mortier SN(10)50

En plus des essais de diffusion au gaz réalisés à pressions atmosphérique (1 bar à l’amont et à l’aval),
des essais de diffusion sous pressions sont également accomplis [YOS 16]. Deux pressions d’essais
ont été choisies; 4 bars et 8 bars. Il s’agissait alors de remplir les deux compartiments amont et aval à
la même pression (4 ou 8 bars en l’occurrence) respectivement par l’air et l’azote. Là aussi, une
attention particulière a été accordée à la vérification des valeurs de pressions mesurées par les
capteurs, afin d’éviter un gradient de pressions entre les deux compartiments.

L’objectif de ces essais est d’essayer d’approcher le comportement du gaz (en le comprimant) de
celui du liquide, pour espérer trouver un lien entre les coefficients de diffusion gaz et les coefficients
de diffusion en phase liquide.

2.2.3. Protocole expérimental des essais de perméabilité au gaz


L’essai de perméabilité au gaz utilise la même cellule que pour la diffusion au gaz, mais au lieu
d’appliquer un gradient de concentration entre les deux compartiments amont et aval, un gradient de
pression avec le même gaz (azote) est exercé. Chaque compartiment est relié à un manomètre
numérique qui enregistre l’évolution de la pression et de la température du volume de gaz. La Figure
V-11 représente le dispositif expérimental dédié aux mesures de perméabilité, inspirés des essais
« pulse-test » [SKO 03].
Amont
N2 ; P > Patm

Echantillon

Aval
N2 ; P = Patm

187
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

Figure V-11 : Photo du dispositif expérimental utilisé pour mesurer la perméabilité en phase gazeuse.

Dans les essais de perméabilité au gaz, il est important d’utiliser le même gaz dans les deux
compartiments pour éviter tout phénomène de diffusion et n’avoir que des mouvements de gaz par
convection. L’équation du flux massique est introduite après simplification dans un modèle
numérique. Pour plus de détails sur le modèle et les équations utilisées, se référer à l’annexe C et
[DRI 14]. L’ajustement des résultats expérimentaux avec le modèle numérique permet d’identifier la
perméabilité au gaz pour chaque échantillon testé.

Trois pressions de perméabilité de 2, 4 et 6 bars ont été testées sur un échantillon de chaque
formulation (pressions appliquées en amont). L’objectif est de pouvoir déterminer la perméabilité
intrinsèque (à P ∞) de chaque matériau.

2.2.4. Essais de diffusion et de perméabilité


Les échantillons de pâtes, de mortiers et de bétons avec et sans FS ont été équilibrés dans les mêmes
conditions hydriques équivalentes à (50%HR ; 20°C), cependant leurs degrés de saturation sont
différents, puisqu’ils ne contiennent pas le même liant (isothermes de désorption distinctes entre une
pâte CEM I et CEM I + 10% de FS). En revanche, pour une série d’échantillons contenant le même
liant (pâte, mortiers et bétons confondus), les degrés de saturation S l sont presque égaux puisque les
isothermes de désorption sont confondues. A titre d’exemple, le degré de saturation de tous les
matériaux CEM I se situe autour de 57% ± 2%.

Cette différence de degré de saturation Sl ne nous permet donc pas de comparer entre les matériaux
avec et sans FS, puisque les coefficients de diffusion et de perméabilité au gaz dépendent du S l.
D’ailleurs notre objectif n’est pas de comparer les formulations avec et sans FS (déjà fait dans les
chapitres précédents), mais plutôt de confronter le comportement des mortiers à celui des bétons de
même formulation.

2.2.4.1. Résultats des essais de diffusion gaz à pression atmosphérique

Les résultats des essais de diffusion gaz (diffusion d’O2 et N2) dans les pâtes de ciment, mortiers et
bétons avec et sans fumée de silice testés sous pression atmosphérique sont présentés dans la Figure
V-12. Les coefficients de diffusion d’oxygène et d’azote sont presque identiques pour toutes les
formulations de matériaux testés. Ce résultat est expliqué par une similitude des propriétés atomiques
et physiques entre O2 et N2 (taille de molécule, rayon atomique, masse, structure…). A cet effet, seul
le coefficient de diffusion d’oxygène sera commenté dans la suite de l’étude.

188
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

1,8E-07 1,8E-07
Sans FS Avec 10% FS
Coefficient de diffusion gaz De (m2/s)

Coefficient de diffusion gaz De (m2/s)


1,6E-07 1,6E-07
O2 O2
1,4E-07 N2 1,4E-07
N2
1,2E-07 1,2E-07
1,0E-07 1,0E-07
8,0E-08 8,0E-08
6,0E-08 6,0E-08
4,0E-08 4,0E-08
2,0E-08 2,0E-08
0,0E+00 0,0E+00
0 20 40 60 80 0 20 40 60 80
Teneur en granulats (%) Teneur en granulats (%)

Figure V-12 : Variation des coefficients de diffusion d’oxygène et d’azote dans les pâtes, mortiers et
bétons (Vagg=70%) avec et sans FS

Même s’il n’y’a pas lieu de comparer entre les matériaux avec et sans FS, on peut juste remarquer
que les mortiers et béton avec FS à plus de 30% de teneur sable ont des coefficients de diffusion
deux fois plus faibles que les matériaux comparables sans FS (Vagg>30%). En revanche, les
coefficients de diffusion de la pâte et du mortier à 10% de teneur en sable sont presque égaux en
présence ou en absence de FS, probablement à cause des agglomérats de FS présents dans les
formulations de pâte et du mortier (Vagg =10%) à 10% de FS. D’ailleurs la figure V-12 (à droite)
présente une différence significative entre le coefficient de diffusion du mortier avec 10% de sable
(De(O2=1,37e-7 m2/s) et le mortier à 30% de sable (De(O2)=5,92e-8 m2/s).

Par ailleurs, les résultats de diffusion à pression atmosphérique montrent l’existence d’une croissance
inattendue du coefficient de diffusion entre la pâte et le mortier à 10% d’agrégats, suivie d’une
diminution continue des De(O2) allant du mortier à 10% de sable au béton avec 70% d’agrégats.

Si la droite passant par les De(O2) des mortiers et béton a été extrapolée, les pâtes auraient eu des
propriétés de transport (De) plus élevés que les mortiers dilués avec des granulats. Or à notre
surprise, ce n’est pas du tout le cas puisqu’un comportement anormal est noté au niveau de la pâte.
Un comportement similaire de la pâte a également été observé par Wong [WON 09], ou encore par
Tumidajski [TUMI 96] qui observe une augmentation de la conductivité des mortiers en passant
d’une fraction de sable de 0 à 5%. L’origine de cette augmentation reste néanmoins inexpliquée par
ces auteurs, et qui peut être dû dans notre cas soit au changement de l’épaisseur (discs de 2 cm
d’épaisseur pour les pâtes et de 3 cm pour les mortiers), soit à la présence de microfissures dans les
mortiers et les bétons, induites par le retrait de dessiccation et/ou de séchage de la matrice en
présence des granulats. Ces derniers peuvent restreindre les déformations de la pâte induites par le
retrait de dessiccation et le retrait thermique ce qui peut générer une fissuration dans la zone
d’interface.

D’un autre côté, les bétons B(0)70 et B(10)70 présentent un comportement plutôt satisfaisant. Leurs
coefficients de diffusion à l’oxygène suivent, la ligne de dilution générée par l’ajout de sable dans les

189
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

mortiers, et reproduisent fidèlement le comportement d’un mortier à 70% de volume d’agrégats. Ce


résultat est rassurant dans la mesure où il rejoint ce qui a été précédemment avancé sur la dilution
induite par les granulats calcaires. Plus encore, les coefficients de diffusion D e(O2) diminuent avec
l’ajout de granulats en suivant la même loi de dilution en (1-Vagg)0,865 identifiée précédemment dans
le cas de la diffusion à l’eau tritiée (§IV-4.1 ; Eq. IV-4), comme le montre la Figure V-13.

1,8E-07 Sans FS
1,6E-07
1,4E-07 Avec 10% de FS
De (O2) en m2/s

1,2E-07 (1-Vagg)^0,865
1,0E-07
8,0E-08
6,0E-08
4,0E-08
2,0E-08
0,0E+00
0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur volumique en granulats (%)

Figure V-13 : Evolution des coefficients de diffusion oxygène des matériaux avec et sans FS suivant la
loi de dilution

En diffusion O2, la loi de dilution est parfaitement vérifiée pour les mortiers et le béton sans FS alors
qu’elle l’est un peu moins dans le cas des matériaux avec FS. Ce résultat est également observé dans
la Figure V-14 qui présente le rapport Demortier/Depâte (Debéton/Depâte dans le cas des bétons) pour toutes
les formulations, et pour les deux espèces diffusantes (HTO et O2), en fonction du pourcentage
d’agrégats. Tous les Depâte ont été obtenus par extrapolation de la droite passant par les mortiers, et
coïncident dans certains cas avec les valeurs expérimentales de la vraie pâte.

190
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

O2_sans FS
1,0 HTO_ sans FS
O2_avec 10% FS
0,8
HTO_avec 10% FS
De mortier/Depâte

(1-Vag)^0.865
0,6

0,4

0,2

0,0
0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur volumique en granulats Vagg (%)

Figure V-14: Comparaison des rapports Demortier/Depâte pour toutes les formulations de pâtes, mortiers
et bétons avec et sans FS, pour les deux espèces diffusantes O2 et HTO

Ainsi, on peut conclure que les résultats obtenus à partir de la diffusion d’oxygène ne permettent pas
de prédire (avec confiance) la valeur du coefficient de diffusion HTO du béton. Néanmoins, ces
résultats peuvent donner une idée sur le comportement diffusif du béton à l’eau tritiée. Les
coefficients de diffusion HTO des bétons sans et avec FS seront donc plus faibles que les D eHTO
respectifs des mortiers avec 60% et 65% de teneur volumique en sable.

2.2.4.2. Résultats des essais de diffusion gaz sous pression

Toujours dans l’objectif de trouver un lien entre le DeHTO et le De(O2), des essais de diffusion sous
pressions à 4 et 8 bars ont été réalisés sur les matériaux avec et sans FS afin d’essayer d’approcher le
comportement du gaz (en le comprimant) du comportement du liquide. Les essais sous pressions
n’ont pas été répétés.

La Figure V-15 regroupe les résultats des essais de diffusion de l’oxygène dans les pâtes, mortiers et
bétons avec et sans fumée de silice testés sous différentes pressions (1, 4 et 8 bars).

191
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

1,6E-07 1,6E-07
Sans FS P = Patm 1,4E-07
Avec FS P =Patm
1,4E-07
1,2E-07 P = 4 bars 1,2E-07 P = 4bars

De (O2) en m2/s
De(O2) en m2/s

1,0E-07 P = 8 bars 1,0E-07 P = 8 bars


8,0E-08 8,0E-08
6,0E-08 6,0E-08
4,0E-08 4,0E-08
2,0E-08 2,0E-08
0,0E+00 0,0E+00
0 10 20 30 40 50 60 70 0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur en granulats Vagg (%) Teneur en granulats Vagg (%)

Figure V-15 : Coefficients de diffusion d’oxygène sous différentes pressions d’essai

Les coefficients de diffusion de tous les matériaux diminuent avec l’application de la pression durant
l’essai de diffusion. Cette diminution n’est pas la même en fonction du type de matériaux puisqu’elle
est plus importante dans le cas des mortiers à faible teneur en sable et est de moins en moins
marquée pour les mortiers à forts Vagg. Seulement, la diffusion ayant lieu dans la matrice cimentaire,
la fraction de pâte contenue dans les mortiers diminue avec l’ajout de granulats, ce qui explique la
faible variabilité des De(O2) avec la pression pour les mortiers à fortes teneurs en granulats.

D’un autre côté, les observations faites dans la Figure V-15 peuvent nous renseigner sur le chemin
parcouru par l’oxygène dans ces matériaux poreux à différentes pressions appliquées. A pression
atmosphérique, le gaz diffuse à travers les plus gros pores (éventuellement les pores capillaires
interconnectés) et privilégie par conséquent le chemin le plus rapide. Toutefois, au fur et à mesure
que le gaz est comprimé (P↗), le libre parcours moyen du gaz diminue λ= f(1/P), poussant ainsi les
molécules d’oxygène à pénétrer dans des pores plus fins et donc de diffuser plus lentement (vitesse
de diffusion du gaz ralentie). Ce résultat peut être mieux élucidé avec le calcul des facteurs de forme.

La figure V-16 compare les facteurs de forme calculés à partir des coefficients de diffusion HTO
(Eq. V-6) avec les facteurs de formes obtenus par diffusion d’oxygène à différentes pressions. Le
D0HTOvaut = 2,24e-9 m2/s, tandis que le D0O2 a été calculé en prenant en compte la conjonction des
deux modes de diffusion : la diffusion Knudsen (DK) et la diffusion moléculaire (DMO2). Le D0O2
s’exprime alors par l’équation V-8 :

DK DOM 2
D O2
 (Eq. V-8)
DK  DMO2
0

Les formules et le calcul de ces deux grandeurs DK et DM sont détaillés dans la thèse de Cédric Boher
[BOH 12].

On rappelle que le facteur de forme est, proportionnel à la tortuosité du réseau poreux et inversement
proportionnel à la constrictivité (Eq. I-19).

192
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

1,E+05
1,E+04
Sans FS Avec FS
1,E+04

Facteur de forme
1,E+03
Facteur de forme

1,E+03
1,E+02
1,E+02
1,E+01
HTO O2_Patm 1,E+01 HTO O2_Patm
O2_4bars O2_8bars O2_4 bars O2_8 bars
1,E+00 1,E+00
0 20 40 60 0 20 40 60
Teneur en granulats Vagg (%) Teneur en granulats Vagg(%)

Figure V-16 : Comparaison des facteurs de forme calculés à partir des coefficients de diffusion HTO
avec les facteurs de formes obtenus par diffusion oxygène à différentes pressions pour chaque
formulation testée

D’après la Figure V-16, on remarque tout d’abord que les facteurs de forme augmentent avec le
volume d’agrégats. Ce résultat est probablement dû à l’ajout de granulats, qui rend le chemin de
diffusion plus tortueux (T plus élevé) pour les deux espèces diffusantes (O2 et HTO).

D’autre part, les facteurs de forme obtenus à partir de la diffusion d’eau tritiée (HTO) sont au moins
10 fois plus importants que les facteurs de forme d’oxygène. Les molécules d’HTO traversent par
conséquent des pores plus fins (constrictivité δ faible) ou/ et des chemins plus tortueux (T plus
grand), par rapport au gaz. En observant les ordres de grandeurs des coefficients de diffusion de
chaque élément, on retrouve des valeurs de l’ordre de 10-12 - 10-13 pour le HTO, contre des
coefficients de l’ordre du 10-7 - 10-8 traduisant une diffusion très rapide du O2. Pour les mêmes
matériaux parcourus, la diffusion en milieu liquide est très lente car très sensible à la microstructure
et permet d’explorer toute la gamme de pores du plus fin au plus grossier. En revanche, le gaz lui
privilégie le chemin le plus rapide, celui des macrospores interconnectées. Le principe de facteur de
forme entre la diffusion gaz et liquide (Eq. V-6 avec l’élément i=O2) ne peut donc pas être respecté
car il s’agit ici de deux mécanismes de diffusion complétement différents.

Avec l’augmentation de la pression durant l’essai de diffusion, on oblige le gaz à pénétrer au sein de
pores plus fins, δ diminue et le facteur de forme augmente en conséquence. Cependant, pour
atteindre un comportement de diffusion liquide (facteur de forme du O 2 égal à celui du HTO), la
pression doit être extrêmement élevée, voire infinie. A pression ∞, De(O2) sera proche du DeHTO.

2.2.4.3. Résultats des essais de perméabilité au gaz

Les essais de perméabilité au gaz ont été réalisés pour chaque formulation à trois pressions
différentes de 2, 4 et 6 bars dans le but de déduire par la suite le coefficient de perméabilité
intrinsèque. Dans la Figure V-17, on choisit de représenter la variation de la perméabilité mesurée en
fonction de la pression appliqué (plutôt en 1/P- approche de Klinkenberg) pour les mortiers et béton
sans FS. La même opération est réalisée pour les mortiers avec FS.

193
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

La perméabilité intrinsèque (Kv) est obtenue en extrapolant la courbe expérimentale : l’intersection


avec l’axe vertical correspond à une pression d’essai infinie pour laquelle il n’existe plus
d’écoulement moléculaire. Les valeurs de perméabilité intrinsèque sont affichées directement sur le
graphe pour les matériaux sans FS. La formulation SN(0)10 n’a pas été représentée car les valeurs de
perméabilité mesurées sont très importantes (Kv = 4,02e-16m2). Les droites deviennent de plus en
plus horizontales avec l’ajout de granulats, car la fraction de pâte, la phase perméable du matériau,
diminue.

1,5E-16
SN(0)0
Coeficient de perméabilité Kg (m2)

1,3E-16
SN(0)30
1,1E-16 9,23E-17 SN(0)50
SN(0)60
8,6E-17 SN(0)70

6,6E-17

4,6E-17 3,54E-17

2,6E-17 1,96E-17
1,18E-17
6,0E-18
0,E+00 1,E-06 2,E-06 3,E-06 4,E-06 5,E-06 6,E-06
9,26E-18 1/P (Pa-1)
Figure V-17 : Variation de la perméabilité mesurée Kg en fonction de la pression appliquée pour les
mortiers sans FS : détermination de la perméabilité intrinsèque Kv

La Figure V-18 montre une corrélation entre les coefficients de diffusion effectives De(O2) obtenus à
pression atmosphérique, et les valeurs de perméabilité intrinsèque pour tous les matériaux avec et
sans FS. L’existence d’une relation entre la perméabilité et la diffusion signifie que le chemin
parcouru par le gaz que ce soit par diffusion ou par perméation est pratiquement le même.

194
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

1,E-14
Sans FS

Perméabilité intrinséque Kv (m2)


Avec 10% de FS
1,E-15
y = 3E-18e4E+07x
R² = 0,9286

1,E-16
y = 1E-18e4E+07x
R² = 0,9249
1,E-17

1,E-18
0,E+00 5,E-08 1,E-07 2,E-07
Diffusion De(O2) (m2/s)
Figure V-18 : Corrélation des perméabilités intrinsèques Kv avec les coefficients de diffusion gaz pour
les formulations de pâte, mortiers et béton avec et sans FS

3. A partir d’une succession de modèles numériques


Cette partie propose d’estimer les coefficients de diffusion effective HTO des mortiers et bétons avec
FS à partir d’une succession de modèles numériques.

3.1. L’approche modélisation


Dans l’objectif d’estimer le DeHTO des mortiers et bétons, plusieurs étapes doivent être suivies. En
effet, l’approche modélisation utilisée est une combinaison de trois différents modèles résumées par
la Figure V-18. Chaque modèle possède des paramètres d’entrée et de sortie.

195
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

Figure V-18 : Etapes de calcul pour l’estimation des coefficients de diffusion des mortiers et bétons.

3.1.1. Le modèle d’hydratation


Le modèle d’hydratation utilisé pour les pâtes de ciment avec FS est le modèle de Tennis et Jennings
[TEN 00], dans lequel l’addition de fumée de silice a été considérée. Ce modèle basique qui suppose
des réactions stœchiométriques simples pour l’hydratation des quatre composants dominants du
ciment Portland (C3S, C2S, C3A, C4AF), a été modifié pour tenir compte de la réaction
pouzzolanique de la FS donnée par l’équation V-9 :

S + 1.1CH + 2.8H  C-S-H (P) (Eq. V-9)

Avec S, CH, H et C-S-H(P) désignent respectivement la silice (SiO2), la portlandite (Ca(OH)2), l’eau
(H2O) et les C-S-H pouzzolaniques. Ce dernier type de C-S-H s’ajoute aux deux autres types de C-S-
H existants dans une matrice de ciment Portland: les C-S-H (HD) et C-S-H (LD) décrits
précédemment dans le tableau I-4. Les C-S-H (LD) ont une faible densité sèche de 1440 Kg/m3,
tandis que les C-S-H (HD) et les C-S-H (P) ont des densités sèches assez proches respectivement de
1750 et 1805 Kg/m3 [TEN 00], et donc probablement des nanostructures semblables. Dans ce qui
suit, nous avons choisi de ne pas faire de distinction entre les C-S-H (HD) et les C-S-H (P), et de
supposer que ces deux hydrates ont des nanostructures comparables, des porosités internes et des
coefficients de diffusion intrinsèques identiques. L’union de ces deux types de C-S-H s’appellera
désormais C-S-H (HD&P).

Concernant les degrés d’hydratation des différentes phases, les vitesses de réactions des composants
du ciment Portland ont été décrites par les équations d’Avrami [TEN 00], tandis que le degré
d’hydratation de la réaction pouzzolanique a été calculé sur la base de l’équation de Jander [BARN
83].

Pour estimer la composition minérale d’une pâte de ciment avec FS, ce modèle nécessite comme
données d’entrée : la composition massique du ciment Portland utilisé, le rapport E/L, la teneur en
FS, et pour finir le paramètre Mr qui représente le rapport de la masse des C-S-H (LD) sur la masse
total de C-S-H, utilisé pour calibrer le modèle. Ce ratio est déterminé en supposant que le C-S-H
(LD) est le seul composant de la microstructure qui contribue à la mesure de la surface spécifique à
l’azote. Mr est défini par l’équation suivante V-10 :

196
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

SN2 M D
Mr  (Eq. V-10)
S LD M t

Avec SN2, la surface spécifique à l’azote de la pâte de ciment sèche (tableau IV-3), MD la masse de la
pâte de ciment sèche, SLD la surface spécifique par gramme de C-S-H (LD) sec et Mt la masse total
des C-S-H.

Le modèle délivre en sortie, une estimation des fractions volumiques des différentes phases à savoir,
le C-S-H(LD) ; C-S-H (HD), la porosité capillaire, les produits anhydres, et d’autres hydrates (AFm,
AFt et CH).

3.1.2. Modèle multicouche de transport

Ce modèle est inspiré de ceux proposés par Dridi [DRI 13] et Bary & Béjaoui [BARY 06]. Il est basé
sur le concept que les phases qui contribuent au transport diffusif des espèces dans la solution
interstitielle de la pâte de ciment sont la porosité capillaire et les C-S-H [BARY 06] (à cause de leurs
porosités intrinsèques).

Il est proposé ici de distinguer les C-S-H (LD) des C-S-H (HD & P). Trois phases diffusives doivent
donc être prises en considération pour pouvoir appliquer le modèle multicouche aux pâtes de ciment
avec FS : la porosité capillaire, les C-S-H (LD) et les C-S-H (HD & P). Pour une espèce diffusive
donnée (ici HTO), le coefficient de diffusion intrinsèque de la porosité capillaire est supérieur à celui
des phases C-S-H, et du fait de leur porosité plus élevée, le coefficient de diffusion intrinsèque des
C-S-H (LD) est supposé supérieur à celui des C-S-H (HD & P).

La pâte de ciment est représentée par un assemblage de sphères multicouches et son coefficient de
diffusion est calculé par homogénéisation [DRI 13] [BARY 06]. Trois configurations peuvent être
représentées en fonction de la phase qui percole dans le système [BARY 06]. Le seuil de percolation
de toutes les phases est fixé à 15%. A partir de ce seuil, la percolation est supposée complète (Figure
V-19). De nombreuses études s’intéressant aux propriétés de percolation fixent ces seuils autour de
15 à 18% [BEN 91] [GAR 01] [HU 05] [YE 03]. La fonction de percolation adoptée (Figure V-19)
est basée sur la modélisation de la microstructure par le code d’hydratation CEMHYD3D [GAR 01].

197
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

Figure V-19 : Fonction de percolation des phases diffusives [DRI 13]

En résumé, en fournissant en données d’entrée, les fractions volumiques des différentes phases, ainsi
que les valeurs des coefficients de diffusion intrinsèques de chaque espèce (D pc pour la porosité
capillaire, DLD et D HD&P respectivement pour les CSH (LD) et (HD&P)), le modèle permet
l’estimation de la diffusivité équivalente du système entier (pâte de ciment avec FS).

3.1.3. Modèle 3D pour les mortiers et bétons


La chaine de calcul 3D permettant de modéliser un VER de mortier a été précédemment détaillée
dans la section (§IV- 4.3.1). Elle sera utilisée dans ce chapitre pour calculer numériquement la
diffusivité équivalente des mortiers de sable normalisé avec 10% de FS, soit les mêmes formulations
de mortiers testés expérimentalement en diffusion HTO. En présence de FS, l’effet de l’ITZ sera
considéré dans le calcul numérique comme négligeable, au vu de la faible épaisseur de cette couche
(< 5 µm, §IV-2.1.), et de sa percolation minime (Figure IV-27). On introduira alors comme donnée
d’entrée du modèle 3D, un coefficient de diffusion effectif de l’ITZ égal à celui de la pâte de ciment
contenue dans le mortier DeITZ=Depâte. Le coefficient de diffusion Depâte étant une donnée de sortie du
modèle multicouche de transport.

Pour le béton, l’objectif était de construire la géométrie et de réaliser le maillage pour un VER de la
formulation B(10)70. L’effet de l’ITZ a été là aussi considéré comme négligeable d’autant plus que
les granulats utilisés dans la fabrication du béton sont des granulats calcaires concassés [MOR 92]
[DIA 01]. La diffusivité au sein des granulats calcaires a aussi été négligée devant la diffusivité de la
matrice.

Le volume modélisé du béton doit être représentatif de la granulométrie et du volume d’agrégats.


Dans le béton B(10)70, le sable (0/ 4 mm) occupe un volume de 23,9% et les gravillons (5/14 mm)
un volume de 46,1%. La taille du cube représentatif du béton doit donc être au moins 10 fois plus
grande que celle d’un mortier avec sable normalisé (150003 µm3 ou trois fois la taille du plus gros
grain). Or, avec une aussi grande taille de VER et un nombre important d’inclusions, le modèle 3D
atteint ses limites et n’arrive pas à créer de géométrie, ni de maillage.

198
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

L’idée est alors de « décomposer » un VER de béton en deux parties. D’abord, un volume
caractéristique du mortier contenu dans le béton (un mortier de 23,9% de sable (0/4 mm)) puis un
VER contenant 46,1% de gravillons (5/14 mm). Le calcul du coefficient de diffusion équivalent du
VER de béton, revient alors à calculer le coefficient de diffusion à travers le mortier à 23,9% D emortier
, et de reporter ce coefficient comme donnée d’entrée (ou coefficient de diffusion de matrice) pour le
VER à 46,1% de volume de gravillons. La figure V-20 illustre ces étapes de calcul de la diffusivité
équivalente du béton. On notre que le VER à 46,1% en volume de grains a été représenté à l’échelle
1/10éme, à cause des limites du modèle à réaliser des remplissages dans des cubes de grande taille. Le
résultat de diffusion est le même puisque le calcul de la diffusivité est un calcul de flux surfacique.

Figure V-20 : Etapes de calcul du coefficient de diffusion équivalent du béton B(10)70

3.2. Résultats de la modélisation numérique : Estimation des DeHTO


des pâtes, mortiers et béton
Les pâtes et mortiers contenant 10% de FS ont déjà été caractérisés par sorption d’azote (§IV-2.3.2.).
Le ratio Mr est calculé pour la pâte de ciment SN(10)0 et pour la matrice cimentaire contenue dans
les mortiers à plus de 30% de sable. Il est respectivement égal à 0,30 et 0,24±0,03. Dans le modèle
d’hydratation, on suppose que les 10% de FS introduits initialement ont réagi dans la matrice
cimentaire des mortiers à plus de 30% de sable. En revanche, et d’après les résultats de tomographie
et d’ATG, on considère que seulement 6% de FS a réagi au sein de la SN(10)0 (pour cette pâte on la
teneur en FS sera donc prise égale à 6%).

En plus de la valeur du paramètre Mr, et de la teneur en FS, ont été introduites dans le modèle
d’hydratation, la composition chimique du ciment (Le Teil) et le rapport E/Liant de 0,415. Le
modèle estime la composition minéralogique des deux pâtes SN(10)0 et la matrice cimentaire
contenue dans les mortiers à plus de 30% de granulats, après 6 mois d’hydratation (Tableau V-4). La
pâte de ciment contenue dans les mortiers à plus de 30% de sable contient comme prévu plus de C-S-
H denses (pouzzolaniques et HD) et moins de portlandite que la pâte S N(10)0 à 6% de FS.

199
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

Table V-4: Estimation des fractions volumiques des phases continues dans la pâte SN(10)0 et la pâte
des mortiers à plus de 30% de sable normalisé

Pâte Porosité C-S-H Autres hydrates


C-S-H (LD) Anhydres
capillaire (HD&P) (CH, Aft, Afm..)

SN(10)0 11,12% 18,09% 38,40% 26,28% 6,11%


Pâte des mortiers
11,03% 14,73% 42,43% 24,34% 7,46%
(Vagg≥ 30%)

Connaissant la composition minérale et la diffusivité intrinsèque de chaque phase, le modèle


d’homogénéisation multicouche calcule le coefficient de diffusion de la pâte. Pour la porosité
capillaire, le coefficient de diffusion intrinsèque est décrit – en première approximation- par celui du
HTO dans une solution aqueuse à 25°C (2,24e-9 m2/s). Les hydrates CH, AFm et Aft, étant
considérés comme non-poreux, leurs diffusivités intrinsèques sont jugés négligeables. Cependant, à
ce stade, la diffusivité des C-S-H (LD) et C-S-H (HD & P) reste inconnue.

Ces deux paramètres inconnus peuvent être déterminés par analyse inverse en utilisant les valeurs
expérimentales de coefficients de diffusion HTO et les compositions minérales de certaines pâtes de
ciment. Larbi [LARB 13] mesure des valeurs de coefficients de diffusion HTO de 1,44 e-12 ; 2,56e-12
et 5,36e-12 m2/s, respectivement pour les pâtes de ciment portland (sans FS) de rapports E/C 0,3 ; 0,4
et 0,5. Là aussi, l’estimation de la composition minérale de ces pâtes a été donnée en utilisant le
même modèle d’hydratation, en faisant varier le rapport E/C entre 0,3 et 0,5, et en renseignant la
composition chimique du ciment Portland (le même que dans les matériaux avec FS) [YOS 16]. Pour
les pâtes de ciment sans FS, le rapport Mr s’exprime selon l’équation V-11 [TEN 00], avec αhyd le
degré d’hydratation:

M r  3,017(e / c) hyd  1,347 hyd  0,538 (Eq V-11)

Les diffusivités intrinsèques des C-S-H (LD) et (HD) sont ajustées sur les coefficients de diffusion
HTO expérimentaux et les fractions volumiques de phases des pâtes de ciment portland déterminées
dans [LARB 13]. Celle du C-S-H (LD) est fixée donc à 3,6e-12 m2/s, tandis que la diffusivité
intrinsèque du C-S-H (HD) est retrouvé autour de 5,8e-13. Le tableau V-5 compare les coefficients
de diffusion expérimentaux au DeHTO estimés numériquement par le modèle d’homogénéisation
multicouche en attribuant aux C-S-H (LD) et (HD) leurs diffusivités intrinsèques respectives.

Tableau V-5 : Comparaison entre les coefficients de diffusion HTO expérimentaux et numériques des
pâtes de ciment Portland

E/C DeHTO x10-12expérimental (m2/s) DeHTO x 10-12numérique (m2/s)

0.3 1.44 1.23


0.4 2.56 2.30
0.5 5.36 5.12

200
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

Un bon accord est observé entre les valeurs expérimentales et numériques des coefficients de
diffusion des pâtes de ciment Portland - l’erreur n’excède pas les 15% -.

De retour aux deux pâtes de ciment avec FS, et connaissant les diffusivités intrinsèques de toutes les
phases, il est possible d’estimer par le modèle d’homogénéisation des coefficients de diffusion
numériques de l’ordre de 1,65e-12 et 6,2e-13 m2/s respectivement pour la pâte SN(10)0 et la pâte de
ciment contenue dans les mortiers à plus de 30% de teneur en sable. Ce saut entre les deux
coefficients de diffusion rejoint les résultats des observations expérimentales justifiées par la
présence d’agglomérats de FS dans la formulation de pâte SN(10)0 (§IV-1 & 2). Numériquement, ce
saut est dû à la percolation des C-S-H (LD) dans la pâte de ciment SN(10)0 (Tableau V-4), alors
qu’elle reste segmentée (teneur des C-S-H (LD) < 15%) dans la pâte de ciment contenue dans les
mortiers à plus de 30% de sable. Le calcul des DeHTO numériques se fait alors avec deux
configurations ce qui explique la différence remarquée.

Au vu des valeurs expérimentales de 1,05e-12 et ≈5,12e-13 m2/s respectivement pour la pâte SN(10)0
et celle contenue dans les mortiers (Vagg >30%), l’erreur d’estimation obtenue avec le modèle
d’homogénéisation reste acceptable. Des modèles comme celui de Bentz et al. [BEN 00] estimant les
coefficients de diffusion de pâtes de ciment avec FS, trouve des erreurs avoisinant parfois les 60%.

La dernière étape de la chaine de calcul consiste à utiliser le modèle 3D (§V-3.1.3.) pour évaluer les
coefficients de diffusion des mortiers et du béton B(10)70. Pour cela, on considère ici uniquement la
valeur du DeHTO de la pâte contenue dans les mortiers à plus de 30% de sable (6,2 e-13 m2/s), et on
estime que c’est la même dans le béton B(10)70 d’après (§V-1.1.). Les coefficients de diffusion
numériques ont été comparés aux coefficients de diffusion des mortiers obtenus expérimentalement.
La Figure V-21 illustre cette comparaison.

7E-13 Expérimental
Numérique
6E-13

5E-13
DeHTO (m2/s)

4E-13

3E-13

2E-13

1E-13

0
0 10 20 30 40 50 60 70
Teneur en granulats Vagg (%)

Figure V-21 : Comparaison des valeurs de coefficients de diffusion HTO numériques et expérimentales

Pour les mortiers, un bon accord est observé entre les valeurs expérimentales et numériques des
coefficients de diffusion, sauf un peu pour le mortier à 65% de sable où le coefficient s’éloigne
légèrement de la droite probablement à cause de la petite participation de l’ITZ (Figure IV-27), qui
n’a pas été prise en compte dans le modèle numérique. Pour le béton B(10)70, l’estimation donnée

201
Chapitre V : Bétons : Estimation du coefficient de diffusion HTO

par le modèle pour le coefficient de diffusion HTO est de 1,64 e-13 m2/s, une valeur légèrement
inférieure à l’estimation expérimentale de 2,03e-13 ± 0,14e-13 m2/s (§V-1.2.3.). Cet écart est
probablement dû de la non-prise en compte de l’ITZ.

L’approche modélisation proposée dans cette étude peut s’avérer donc efficace pour estimer les
coefficients de diffusion des pâtes, mortiers et bétons avec FS à partir d’une succession d’étapes
numériques, et d’une simple caractérisation de la matrice cimentaire à l’adsorption azote.

4. Conclusion
Ce chapitre propose d’estimer à partir de trois méthodes différentes, les coefficients de diffusion
HTO de deux bétons B(0)70 et B(10)70 fabriqués avec 70% de teneur volumique en granulats et
respectivement sans et avec ajout de 10% de FS. Les principales conclusions de chaque partie sont
les suivantes :

 La détermination de certains paramètres microstructuraux permet d’approcher plus ou


moins le DeHTO des bétons. La loi de dilution proposée dans la section (§V-1.2.1.) suggère
d’évaluer le DeHTO du béton connaissant son volume de granulats et le coefficient de
diffusion de la pâte qui le constitue. Les deux sections (§V-1.2.2.) et (§V-1.2.3.) mettent à
disposition des relations respectives De(rc) et De (θHg) et permettent au moyen des différentes
équations d’approcher le coefficient de diffusion de béton, difficile à obtenir
expérimentalement.

 La diffusion liquide d’un autre élément comme le lithium s’avère très efficace pour
reproduire les DeHTO des pâtes et mortiers CEM I, en faisant appel au concept de facteur de
forme. Cependant, la durée de ces essais est généralement supérieure à celle des tests de
diffusion HTO en cellule. Cette technique reste donc inadaptée pour estimer de façon rapide
et fiable le coefficient de diffusion HTO du béton. La diffusion au gaz a été proposée
comme solution alternative offrant la possibilité de tester en diffusion, des bétons. Elle
permet de dégager des tendances, de donner une idée sur les comportements diffusionnels
des bétons mais pas d’estimer, avec confiance, leurs coefficients de diffusion HTO.

 Enfin, une chaine de calcul numérique validée par les résultats expérimentaux des mortiers
contenant de la FS, donne une estimation du DeHTO du béton B(10)70. Elle consiste d’abord
à évaluer les fractions volumiques des phases contenues dans les pâtes de ciment avec FS à
partir de la composition initiale et d’une simple caractérisation en sorption d’azote. Ensuite,
le modèle représente la pâte de ciment par un assemblage de sphères multicouches et calcule
son coefficient de diffusion par homogénéisation. Et pour finir, un modèle 3D assure le
passage de la pâte aux mortiers et aux bétons.

202
203
CONCLUSION GENERALE & PERSPECTIVES

Conclusion générale et perspectives


Ce travail concerne l’étude de propriétés de diffusion et de microstructure des matériaux cimentaires
à base de CEM I avec ajout de Fumée de Silice (FS), formulations de base pour les conteneurs de
déchets de faible à moyenne activité destinés à un stockage en surface. La détermination
expérimentale des propriétés diffusifs d’un béton s’annonçant difficile (peut durer parfois plusieurs
années), l’objectif principal de cette étude était de proposer des outils permettant d’estimer le
coefficient de diffusion du béton (DeHTO) à partir de la connaissance de ses propriétés
microstructurales, de sa composition initiale ou encore des propriétés de la pâte qu’il contient. Suite
aux manques identifiés dans la littérature, la démarche entreprise était d’abord de constituer une
solide base de données pouvant alimenter ces outils prédictifs.

Les matériaux sélectionnés sont des formulations de pâtes et mortiers à différentes compositions
initiales (teneur et type de FS, rapport E/L, volume et granulométrie de sables…). Diverses
techniques expérimentales ont été utilisées pour caractériser leur structure poreuse globale
(porosimétrie à l’eau, au mercure, l’adsorption d’azote, l'ATG, MEB associé à l’EDS) et locale
(MEB associé à l’analyse d’images utilisé pour la quantification de la porosité à l'interface
granulat/pâte). La capacité de rétention de ces matériaux vis-à-vis du HTO a été déterminée par les
essais de diffusion en cellule.

L’étude à l’échelle de la pâte a permis de comprendre l’influence de chaque paramètre de la


composition initiale sur l’évolution de la structure poreuse, et donc des propriétés diffusives au sein
de la matrice cimentaire ; les propriétés de diffusion étant conditionnées par la microstructure.
D’abord, la finesse des particules de FS s’est révélée comme caractéristique très importante à
prendre en compte lors du choix du type de fumée de silice. En effet, les propriétés de durabilité de
la pâte fabriquée avec la Fumée de Silice Slurry (FSS), une forme de fumée de silice non-densifiée
en suspension liquide, se sont avérées meilleures que celles de la pâte avec la forme densifiée de FS
(FSD). Cette dernière présente l’existence de plusieurs agglomérats de FS, et affiche un réseau
poreux plus large ainsi qu’un coefficient de diffusion deux fois plus important comparé à la pâte
FSS. Afin d’obtenir un gain maximal de performances, le choix du slurry a été par la suite adopté
pour la fabrication de toutes les formulations.
D’un autre côté, l’augmentation de la teneur en FSS ou/et la diminution du rapport E/L favorisent
comme prévu le développement d’un réseau poreux plus fin et la diminution du rayon critique des
pores capillaires (rc). Ce dernier, défini comme étant le rayon à partir duquel se crée un chemin
continu d’écoulement à travers l’échantillon, influe fortement les résultats de diffusion. D’ailleurs,
une loi exponentielle reliant le DeHTO et rc a été établie à ce niveau de l’étude.

Le passage de la pâte aux mortiers est identifié en étudiant l’impact de l’ajout des granulats à
différentes teneurs. Deux comportements de pâtes de ciment contenues dans les mortiers se sont
distingués selon que la teneur en sable soit faible (≤ 10%) ou élevée (≥ 30%). La première montre
l’existence de plusieurs agglomérats de FS et affiche un coefficient de diffusion deux fois plus
important que dans la deuxième pâte plutôt homogène -l’ITZ observée pour tous les mortiers était
cependant similaire et considéré comme négligeable (Epaisseur < 5µm)-. La présence d’une quantité
significative de sable a permis d’offrir une meilleure dispersion de la FSS et de briser les
agglomérats de FS, grâce aux efforts de cisaillement induits pendant le malaxage et la préparation du

204
CONCLUSION GENERALE & PERSPECTIVES

mortier. L’usage unique du superplastifiant s’est avéré utile mais pas suffisant pour disperser tous les
agglomérats de FSS observés dans le matériau.

Par ailleurs, l’ajout de granulats siliceux non-poreux induit trois effets influents qui conditionnent les
résultats de coefficients de diffusion des mortiers : la dilution, l’impact de l’ITZ et la tortuosité.
L’effet de la dilution est dominant devant l’interconnexion des couches d’ITZ, qui l’emporte à son
tour sur la tortuosité de la pâte due à la présence des grains de sable. La part de participation de
chacun de ces effets sur les DeHTO des mortiers est déterminée et une relation analytique reliant D eHTO
et Vagg est proposée dans ce cadre. Elle permet d’estimer le coefficient de diffusion des mortiers avec
et sans FS à partir de celui de la pâte qu’ils contiennent.

Les résultats obtenus sur les pâtes et les mortiers ont permis d’alimenter la base de données
nécessaire pour extrapoler les propriétés de diffusion du béton.
Les relations DeHTO(rc) et DeHTO(Vagg) offrent une estimation du coefficient de diffusion du béton
respectivement à partir de la connaissance de son rayon critique déterminé par porosimétrie au
mercure et de son volume d’agrégats. D’autres équations reliant DeHTO et θHg, la porosité totale au
mercure, présentées pour les matériaux à base de CEM I et CEM I + 10% de FS, accordent une
estimation supplémentaire de la capacité de rétention des bétons.

D’autre part, la piste de la diffusion d’un autre élément que le HTO est explorée. Le concept de
facteur de forme a permis de déduire de façon fiable les coefficients de diffusion HTO des pâtes et
des mortiers CEM I à partir de leurs coefficients de diffusion au lithium. Cependant, il n’a pas été
vérifié pour les CEM I avec FS, ni pour les bétons d’ailleurs très lents à tester en diffusion liquide.
La diffusion de gaz, technique très rapide, a permis de donner une idée sur le comportement diffusif
du béton mais pas de prédire la valeur de son coefficient de diffusion. Les mécanismes de diffusion
gaz et liquide sont très différents. D’un côté, la diffusion en milieu liquide est très lente et très
sensible à la microstructure car permet d’explorer toute la gamme de pores du plus fin au plus
grossier. En revanche, le gaz diffuse rapidement en privilégiant le chemin le plus rapide, celui des
macrospores interconnectées.

L’approche de modélisation proposée dans ce travail s’est avérée efficace pour estimer les
coefficients de diffusion des pâtes, mortiers et bétons avec FS à partir d’une succession d’étapes
numériques, et d’une simple caractérisation de la matrice cimentaire à l’adsorption azote.

Ce travail apporte des éléments de réponses quant à la compréhension du lien qui existe entre les
paramètres microstructuraux et les propriétés de diffusion. Il permet de proposer quelques pistes
d’estimation du coefficient de diffusion de bétons en réponse à la problématique industrielle.
Cependant, la question reste ouverte et plusieurs autres études supplémentaires ou améliorations
peuvent être proposé pour compléter ce travail. Il peut être envisagé entre autres:

- De voir l’impact de la technique du séchage sur la distribution de leur taille de pores et


l’évolution de tous les paramètres matériaux déterminés dans cette étude (θHg, rc…)
- D’automatiser le protocole d’analyse d’images dédié à l’investigation de l’ITZ afin de
raccourcir le temps et l’effort dédiée à cette tâche.
- De prendre en compte la finesse et la distribution granulométrique de la FS dans les modèles
d’hydratation afin de représenter de façon fiable la réactivité de la FS dans le matériau.
- De vérifier la porosité et l’épaisseur de l’ITZ dans le cas d’utilisation des granulats calcaires
(supposée dans le cadre de cette étude comme négligeable).

205
CONCLUSION GENERALE & PERSPECTIVES

- De caractériser la diffusivité des granulats calcaires et de les introduire dans le modèle 3D.
- De pousser les limites du modèle 3D pour atteindre des taux de remplissage plus élevés dans
des VER de grande taille. Ce travail permettra de représenter la géométrie d’un béton par un
seul volume représentatif, permettant d’estimer la tortuosité réelle induite par les granulats
- D’apporter des améliorations au modèle numérique en créant des formes plus réalistes de
granulats (considérés ici comme sphériques), ou en générant des formes multicouches pour
représenter l’ITZ avec un gradient de porosité.
- De caractériser la porosité des granulats calcaires et l’introduire dans le modèle 3D.
- De regrouper les trois modèles de la chaine de calcul proposée (modèle d’hydratation,
d’homogénéisation et la simulation 3D) en un seul modèle ayant comme paramètre d’entrée
la composition massique du ciment utilisé (CEM I ou ciment composé) et les paramètres
initiaux du matériau (rapport E/L, Vagg, granulométrie…) et comme donnée de sortie le
coefficient de diffusion du mortier ou béton.

206
207
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226
ANNEXES

ANNEXES

227
ANNEXES

Annexe A : Fiches produits des matériaux utilisés :

228
ANNEXES

229
ANNEXES

230
ANNEXES

231
ANNEXES

232
ANNEXES

233
ANNEXES

234
ANNEXES

235
ANNEXES

Annexe B : Des méthodes analytiques de détermination du


degré d’hydratation dans les matériaux en présence de FS

1. Méthode de LUND University-2009


La méthode proposée par LUND Institute sur le calcul des degrés d’hydratation fait l’objet d’un
rapport [FAG 09].

Cette méthode considère, que toute l’eau chimiquement liée est supposé être perdu en chauffant
l’échantillon à 1000°C mais qu’il n’y’a pas d’eau chimiquement liée perdu avant la température de
105°C. Le degré d'hydratation est donc déterminé par la pesée de l'échantillon après séchage à 105 °
et à 1000°C. La différence de poids correspond à la teneur en eau liée chimiquement. La particularité
de cette méthode c’est qu’elle prend en compte la présence de fumée de silice et des agrégats dans le
calcul du degré d’hydratation.

1)Effet de la présence de fumée de silice dans une pâte : Dans le cas d’ajout de la fumée de silice
dans le mélange cimentaire, l’idée de base qui repose sur l’existence d’une proportionnalité directe
entre la quantité d’eau chimiquement liée déterminée par perte au feu entre 105° et 1000° et la
quantité de ciment qui a réagi n’est plus valide. Un exemple de pates de ciment contenant 0 ; 8 et
16% de fumée de silice est montré dans la figure suivante. Après 90 jours d’hydratation, la quantité
d’eau chimiquement liée diminue avec le temps d’hydratation. Le mécanisme derrière ce phénomène
n’est pas totalement clarifié. L’hypothèse avancé prévoit la production d’une certaine
polycondensation des chaines de silicates ce qui fait que l’eau liée se libère.

Figure B-I : Mesures de la quantité d’eau chimiquement liée dans les pâtes de ciments avec 0 ; 8 et
16% de fumée de silice [ZHA 91] (Alder signifie l’âge du béton en jours).

Dans [ATL 93], la relation suivante permet de calculer la quantité d’eau chimiquement liée dans une
pâte contenant de la fumée de silice :

236
ANNEXES

wn0 wn0
wn , pâte ( ). cem .c  ( ). FS .FS  0,25. cem .c  0,34. FS .FS (I)
c FS
Avec αcem est le degré d’hydratation du ciment portland, αFS le degré de réaction de la fumée de
silice, c et FS sont respectivement la masse du ciment et de fumée de silice dans l’échantillon. Les
coefficients 0,25 et 0,34 représentent la quantité d’eau chimiquement liée à hydratation complète du
ciment et de la fumée de silice par rapport aux teneurs totales en ciment et en fumée de silice.

Il est supposé donc que le ciment réagit comme s’il n’y’avait pas de fumée de silice, mais que la
réaction de la fumée de silice libère de l'eau qui a été initialement lié aux produits d’hydratation du
ciment.

Selon l’équation précédente (I), le degré d’hydratation du ciment est :

wn FS
 cem  4.(  0,34. FS . ) (II)
c c
avec wn la perte en masse de l’échantillon entre 105°C et 1000°C. Il est ainsi facile de calculer le
degré d’hydratation du ciment connaissant la perte en masse de l’échantillon et la masse de fumée de
silice et de ciment. Par contre, la seule difficulté qui se pose est au niveau de la détermination de la
quantité de fumée de silice qui a réagi. Probablement, elle peut être estimée à partir de la quantité de
Ca(OH)2 dans l’échantillon dès lors que la fumée de silice consomme la portlandite.

2) La présence des agrégats dans les mortiers : Cette méthode considère que les granulats présent
dans les mortiers ou les bétons contiennent une certaine quantité d’eau cristallisé qui est perdu quand
on atteint les 1000°C. Cette perte de masse Δwn,a va être soustraite à l’eau à l’eau liée du mortier afin
d’avoir la vraie valeur d’eau liée perdu dans la matrice cimentaire.

La quantité d’eau chimiquement liée dans la matrice cimentaire présente dans le mortier s’exprime
alors par l’expression :

wn,a
wn,mortier  W105  W1000  amortier .( ) (III)
a
Avec : W105° et W1000° la masse de l’échantillon respectivement après séchage à 105° et 1000°C ; a
la masse de granulats présents dans l’échantillon du mortier utilisé, amortier la teneur volumique des
agrégats dans le mortier et Δwn,a la perte de masse des agrégats entre 105 et 1000°.

A part les techniques préalablement cités et qui permettent de déterminer expérimentalement le degré
d’hydratation par perte de masse, il existe des méthodes théoriques qui permettent d’estimer
théoriquement le degré d’hydratation.

2. Méthode de Waller [WAL 00]

237
ANNEXES

Le degré d’hydratation dans le modèle de Waller tient en compte la contribution de la fumée de silice
et permet de déterminer séparément les degrés d’hydratation du ciment et du filler réactif utilisé. Le
modèle développé par Waller pour les matériaux cimentaires exprime la réaction de la fumée de
silice et du ciment avec les équations suivantes :

 E 
 3, 3.( C  ) 
 c ( )  1  e   (IV)

 
 x. c ()   FS x  1, 6 
 E
 FS ()  min 1;  avec :   0,6 min  ;  c ().e  C  (V)
 1,3.( FS )   C 1,3 
 C 
La quantité de portlandite est obtenue par : x=0,13φC2S+0,42 φC3S

E, C, et FS désignent la masse de l’eau, du ciment et de la fumée de silice en [kg/m3] ;

φC2S et φC3S : représentent la quantité de C2S et C3S dans le ciment.

3. Modèle de Powers adapté par Jensen et al. [LUR 03, JEN 01]
Le Modèle de Powers adapté par [JEN 01] suppose que la réaction de la fumée de silice est
proportionnelle à la réaction du ciment. Ce modèle permet d’estimer le degré d’hydratation en
fonction de la porosité interne de la matrice qui est évaluée à partir de la densité de chaque
composant de la matrice, des rapports E/C et FS/C. Les équations utilisées sont données ci-dessous :

p
 hyd  min(1; ) (VI)
 FS 
k 1,4  1,6( ) .1  p 
 C 

Avec :

E
p C (VII)
(E )  ( E )  ( E FS
C c  FS )( C )

1
k  (VIII)
1  1,4.( FS )
C

� Retrait chimique : Vrc=k(0.2+0.7(FS/C))(1-p) αhyd

� Eau capillaire : Vec=p-k(1.4+1.6(FS/C))(1-p) αhyd

� Eau de gel : Veg=k(0.6+1.6(FS/C))(1-p) αhyd

� Gel solide : Vgs=k(1.6+0.7(FS/C))(1-p) αhyd

238
ANNEXES

� Ciment : VC=k(1-p)(1-αhyd)

� Fumée de silice : VFS=k(1.4(FS/C))(1-p)(1-αhyd)

� ΣVi =1

239
ANNEXES

Annexe C : Méthode d’interprétation des essais de


perméabilité – Modèle numérique

Dans le modèle numérique, c’est toute l’équation du flux massique qui a été prise en compte :

𝑗 𝑘 𝑀𝑔𝑗 𝑃𝑔𝑗 𝑘𝑔 𝑀𝑔𝑗 𝑃𝑔 𝑗 𝑃𝑔𝑗 (16)


𝑤𝑔𝑗 = − 𝑀𝑔𝑗 𝑃𝑔𝑗 𝑘𝐻 𝜇𝑙 ∇𝑃𝑔𝑙 − 𝑀𝑔𝑗 𝑃𝑔𝑗 𝐷𝑙 ∇𝑃𝑔𝑗 − 𝑅𝑇 𝜇𝑔
∇𝑃𝑔 − 𝑅𝑇
𝐷𝑒 ∇ 𝑃𝑔
𝑙
convection diffusion convection diffusion
Transport en phase liquide Transport en phase gazeuse

Mgj et Dej sont respectivement la masse molaire et le coefficient de diffusion effectif dans le mélange
gazeux. Pg est la pression totale du mélange gazeux et Pgj est la pression partielle du gaz j.
KHj est la constante de Henry et Dlj est le coefficient de diffusion dans la phase liquide.
μi sont les viscosités dynamiques (Pa.s) et kl et kg (m2) sont les perméabilités à l'eau et au gaz.
Les équations implémentées dans le code open source BIL ainsi que les paramètres de transport ont
été détaillés dans un précédent rapport [DRI 14].

Etant donné l’axisymétrie du problème, seule la moitié d’une coupe longitudinale de la cellule de
diffusion est modélisée. Le maillage est réalisé en utilisant des éléments triangulaires (3 nœuds et 3
points d’intégration par élément) à partir du mailleur GMSH®. Le maillage obtenu est décrit en
figure C-1.

Aval Amont

Figure C-1: Maillage EF 2D des compartiments amont et aval et de l'échantillon

L’échantillon est délimité par les compartiments amont et aval, respectivement remplis par
l’azote à pression (P > Patm) et (P = Patm). Ces compartiments sont décrits par un milieu poreux
avec une porosité de 1, saturé en gaz et dont les paramètres de diffusion sont ceux qui
caractérisent l’air libre.

A l’issue d’une simulation numérique de l’essai de perméabilité, le suivi des pressions du gaz
dans les compartiments amont et aval est confronté aux résultats expérimentaux. Un exemple est
donné en figure C-2. Cet ajustement permet d’identifier les coefficients de perméabilité dans le
matériau.

En conclusion, ce modèle numérique peut être utilisé pour ajuster les résultats expérimentaux d’un
essai de perméabilité gaz. Les données d’entrée à fournir sont essentiellement, la porosité,
l’épaisseur de l’échantillon et le coefficient de diffusion en phase liquide et gazeuse de l’azote et de
l’oxygène.

240
ANNEXES

Figure C-21: Exemple d’ajustement du modèle numérique 2D avec les résultats expérimentaux d'un
essai de perméabilité gazeuse dans un mortier S(0)30 sans FS et avec 30% de sable normalisé

241
Titre : Influence de la microstructure sur le transport diffusif des pâtes,
mortiers et bétons à base de CEM I avec ajout de fumée de silice
Mots clés : Diffusion; porosité; fumée de silice; pâtes; mortiers; bétons

Résumé: Au regard de son importante ensuite été discuté. L’objectif ultime étant
résistance mécanique mais surtout de ses de trouver un lien entre les propriétés de la
capacités de confinement potentielles microstructure et les paramètres de
conférées par une microstructure compacte, transport nous permettant, in fine, à partir
le béton s’avère le matériau le plus adapté d’une simple caractérisation, d’estimer le
pour composer la coque du conteneur de DeHTO du béton, très difficile à obtenir par
certains colis de déchets radioactifs. La l’essai en cellules de diffusion HTO.
connaissance des propriétés de diffusion et D’autres tentatives ont également été faites
de microstructure de ces matériaux pour essayer d’évaluer ce coefficient de
cimentaires sont donc des éléments béton, comme la démarche de modélisation
indispensables à l’étude de leurs durabilités. multi-échelle (de l’échelle des hydrates au
Dans un contexte plus particulier de modèle 3D), ou la diffusion d’autres
confinement des déchets de faible à éléments (en l’occurrence ici de gaz O2 et
moyenne activité, l'utilisation des N2).
formulations avec ajout de fumée de silice La présente étude montre que des
(FS) s'avère d'une grande importance agglomérats de fumée de silice (slurry)
observés dans la pâte de ciment et dans le
La démarche expérimentale consiste d’abord mortier à faible teneur volumique en sable
à sélectionner des formulations de pâtes et normalisé (ici 10%), impactent les rôles filler
de mortiers à tester en diffusion HTO. Leurs et pouzzolanique de la FS et par conséquent
compositions initiales (rapport e/liant, les paramètres de durabilité de ces
teneur en FS, teneur en sable et matériaux. Cependant, la présence d’une
granulométrie du sable) ont été variées de forte teneur en granulats (>30%) pendant le
telle façon à balayer des microstructures et malaxage du mortier améliore
des propriétés diffusives différentes, et à considérablement la dispersion des
voir l’influence de chaque paramètre (eau, particules de FS et aide à cisailler et à briser
FS, teneur et granulométrie du sable) sur ces agglomérats en fournissant une
l’évolution de la diffusivité au sein de ces meilleure homogénéité du mélange et en
matériaux. La microstructure a été améliorant les propriétés microstructuraux
investiguée afin d’interpréter les valeurs des et diffusionnels.
coefficients de diffusion obtenus. Différentes Il a également été montré que l’utilisation
techniques complémentaires ont été de la FS sous forme slurry dans un mélange
utilisées pour caractériser cette structure cimentaire est malgré tout nettement
poreuse (porosimétrie à l’eau, au mercure, meilleure que la FS densifiée,
l’adsorption d’azote,), pour vérifier la communément utilisée dans la littérature.
réactivité de la FS (ATG, MEB associé à Des relations DeHTO et rayon critique, ou
l’EDS), et pour déterminer le profil de DeHTO et porosité accessible au mercure ont
porosité au niveau de l’ITZ (MEB associé à était établies et ont permis d’approcher plus
l’analyse d’images). ou moins des coefficients de diffusion HTO
Le lien entre les propriétés de la de bétons avec et sans ajout de FS.
microstructure et le coefficient de diffusion a
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Route de l’Orme aux Merisiers RD 128 / 91190 Saint-Aubin, France
Title : Influence of microstructure on diffusive transport within pastes,
mortars and concretes made of Portland cement and silica fume
Keywords : Diffusivity; microstructure; porosity; Silica fume; mortars

Abstract: Thanks to its high mechanical cells test. Other attempts have also been
strength and its potential containment made to try to assess the concrete diffusion
capacity conferred by a compact coefficient, such as the multi-scale modeling
microstructure, concrete is considered as approach (the scale of hydrates 3D model),
the most suitable material to compose the or the diffusion of other elements ( like
engineered barrier of some radioactive oxygen or nitrogen).
waste storage structure. Knowledge of The ultimate goal was to find a link between
diffusion properties and microstructure of microstructure properties and transport
these cementitious materials is then parameters to estimate from a simple
essential to study their long-term durability. characterization, the DeHTO of concrete,
In a more specific context of low and difficult to get from HTO diffusion cells test.
intermediate waste management, the use of Other attempts have also been made to try
formulations containing silica fume (SF) to assess the concrete diffusion coefficient,
appears of great importance. such as the multi-scale modeling approach
The experimental approach consists in (the scale of hydrates 3D model), or the
selecting many formulations of pastes and diffusion of other elements (like oxygen or
mortars to test by the HTO through-out nitrogen).
diffusion test. Their initial compositions
(water to binder ratio, SF content, sand This study shows that silica fume
content and particle size) were varied in agglomerates (slurry) observed in cement
order to browse different microstructures paste and mortar with low standardized
and diffusion properties, and to see the sand content (10%), impact the filler and
influence of each parameter (water, SF, pozzolanic roles of the SF and therefore
content and grain size of sand) on the sustainability parameters of these materials.
evolution of diffusivity within these On the other side, the presence of high
materials. The microstructure was aggregates content (> 30%) during mortar’s
investigated to interpret the obtained values mixing greatly improves the dispersion of SF
of diffusion coefficients. Different particles and helps shearing these
complementary techniques have been used agglomerates by providing better
to characterize the porous structure (water homogeneity of the mixture and enhancing
and mercury intrusion porosimetry, nitrogen microstructural and diffusional properties.
adsorption), to verify SF reactivity (TGA, SEM It was also shown that the use of the SF as a
associated to EDS) or to determine the slurry form in a cementitious mixture is still
profile porosity at ITZ (SEM combined with significantly better than the use of the
image analysis). densified FS, commonly used in the
The relationship between microstructure literature.
and diffusion coefficients (DeHTO) was then Relations between the DeHTO and the critical
discussed. The ultimate goal was to find a pore radius, or the DeHTO and mercury
link between microstructure properties and porosity have been established and helped
transport parameters to estimate from a to estimate more or less the HTO diffusion
simple characterization, the DeHTO of coefficients of two concretes with or without
concrete, difficult to get from HTO diffusion SF.
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