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Ecoulements d'affaissement et d'étalement

Article  in  European Journal of Environmental and Civil Engineering · January 2006


DOI: 10.1080/17747120.2006.9692814

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2 authors:

N. Roussel Philippe Coussot


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Ecoulements d’affaissement et d’étalement :
modélisation, analyse et limites pratiques

N. Roussel*, P. Coussot **

* Laboratoire Central des Ponts et Chaussées


58, Bd Lefebvre
75732 PARIS CEDEX 15
Nicolas.roussel@lcpc.fr

** Laboratoire des Matériaux et Structures du Génie Civil


Cité Descartes
77420 CHAMPS SUR MARNES

RÉSUMÉ. L’objectif de cet article est de faire le point sur l’ensemble des questions pratiques
qui se posent vis à vis de la caractérisation des bétons frais à l’aide d’essais empiriques du
type affaissement au cône d’Abrams, étalement... . Les différents phénomènes physiques mis
en jeu sont successivement analysés et deux solutions analytiques de l’écoulement sont
proposées dans deux cas asymptotiques (faible affaissement et fort étalement). Ces solutions
sont comparées à des résultats expérimentaux et à des simulations numériques dans le cas de
pâtes de ciment et de bétons. Pour terminer, les limites de l’essai d’étalement de Bétons Auto-
Plaçants sont mises en évidence et une alternative est envisagée.
ABSTRACT. This paper gathers results from several numerical, analytical and experimental
studies in an attempt to answer most of the practical questions that rise when trying to
quantify the workability of a given fresh concrete with empirical tests such as the Abrams
cone test or the slump flow… Several physical phenomena are successively analyzed and
asymptotical solutions of the flow are obtained in two extreme case (high and low slumps)
and compared to experimental results in the case of concretes and cement pastes. Finally, the
limits of the slump flow test used as a SCC reception test are demonstrated and an alternative
test is presented.
MOTS-CLÉS : Béton, étalement, affaissement, cônes, seuil d’écoulement, boite LCPC.
KEYWORDS: Concrete, spread, slump, cone, yield stress, LCPC Box.

Revue. Volume X – n° x/année, pages 1 à X


2 Revue Européenne de Génie Civil. Volume X – n° x/année

1. Introduction

La maniabilité ou l’ouvrabilité d’un béton frais représente sa capacité à se mettre


en œuvre sous son propre poids avec ou sans l’aide d’une vibration. En France,
l’essai le plus répandu pour la quantifier est l’essai d’affaissement au cône
d’Abrams (norme NF P 18-451) encore appelé slump-test (norme ISO 4109). La
méthode d’essai est définie par la norme NF P 18-451. Les classes de consistance
sont définies en fonction des variations de l’affaissement (tableau 1).

Classe de consistance Affaissement au cône (cm)


ferme de 0 à 4
plastique de 5 à 9
très plastique de 10 à 14
fluide plus de 15

Tableau 1 : les classes de consistance

Il existe dans le monde plus de 120 essais (Bartos, 2001) pour quantifier ou au
moins qualifier la maniabilité d’un béton à l’état frais. Ces essais peuvent être de
façon générale séparés en trois catégories :
- les essais empiriques dont le résultat est une quantité géométrique reliée à la
forme de l’échantillon à l’arrêt de l’écoulement (affaissement, étalement, L-Box,
table à choc)
- les essais empiriques dont le résultat est un temps nécessaire à l’écoulement
d’une certaine quantité de matériau dans une géométrie donnée (Cône de Marsh
((Roussel, 2005), V-Funnel (Bartos, 2001), maniabilimètre (Bartos, 2001), cône
modifié (De Larrard et al., 1998), etc)
- les essais utilisant des « rhéomètres à bétons » qui permettent, pour certains
d’entre eux, la mesure de grandeurs physiques intrinsèques représentatives du
comportement rhéologique du matériau. Ces rhéomètres à bétons ont fait l’objet de
nombreux développements ces vingt dernières années. En pratique cependant,
même s’ils fournissent la même classification des bétons testés en terme de fluidité,
ils ne donnent pas la même valeur absolue des paramètres physiques mesurés
(Ferraris et al., 2001), (Ferraris et al., 2004). Ces rhéomètres ont néanmoins permis
de montrer que, du point de vue de la loi de comportement, les bétons modernes à
l’état frais peuvent être décrits par des modèles de type « fluides à seuil ». Ces
modèles prennent en compte l’existence d’un seuil de contrainte en dessous duquel
le matériau ne s’écoule pas ou plus mais négligent son éventuel comportement
Ecoulements d’affaissement et d’étalement 3

thixotrope. La mesure du seuil reste pourtant un sujet particulièrement délicat qui a


fait l’objet de nombreuses publications. Dans le cas des bétons qui contiennent des
particules centimétriques il est nécessaire d’utiliser des géométries d’écoulement
spécifiques et des appareils sophistiqués (rhéomètre Cemagref (Coussot et al.,
1995); rhéomètre BML (Con Tec, 2000), rhéomètre BTRhéom (De Larrard et al.,
1996) mais les mesures restent délicates, le coût prohibitif pour une majorité
d’applications, et ces appareils ne sont pas tous adaptés à une utilisation sur
chantier.
L’objectif que nous nous sommes fixés est de répondre, par une approche
scientifique, à l’ensemble des questions pratiques qui se posent vis à vis de la
caractérisation des bétons frais à l’aide d’essais empiriques du type affaissement au
cône d’Abrams, étalement...
Une première remarque fondamentale s’impose : pour passer de l’essai à la mise
en œuvre ou d’un essai à un autre, la seule façon d’établir un lien entre une
topologie d’écoulement et une autre est de s’appuyer sur un paramètre physique,
une grandeur intrinsèque caractéristique du matériau. Prenons comme exemple le
remplissage d’un coffrage cylindrique. Négligeons dans un premier temps la
présence des armatures et considérons que le diamètre du cylindre est grand devant
la taille des plus grosses particules du béton, le béton peut alors être considéré
comme un fluide homogène. Un bilan des forces dans le cas d’un fluide à seuil
adhérent aux parois nous fournit directement un critère d’écoulement simple,
impliquant le seuil de contrainte du matériau tc, le diamètre du cylindre D et le
gradient de pression A généré par la gravité (donc imposé) et permettant, via
éventuellement l’introduction d’un coefficient de sécurité, de garantir le remplissage
intégral du coffrage. La vibration qui suivra n’aura donc qu’à remplir son rôle
traditionnel, à savoir expulser l’air du béton et non pas achever la mise en place. Ce
critère, qui s’exprime ainsi :
AD
τc ≤ [1]
4
permet d’estimer le seuil de contrainte maximum en dessous duquel le béton est
adapté au coulage de cet élément. Mais comment corréler cette valeur de seuil avec
les méthodes utilisées pour caractériser la maniabilité d’un béton sur chantier ? Quel
est l’affaissement minimum au cône d’Abrams permettant de garantir cette mise en
œuvre ?
Les travaux présentés et synthétisés ici ont pour la plupart fait l’objet de
publications dans des revues internationales et nous nous y réfèrerons lorsque
nécessaire.
4 Revue Européenne de Génie Civil. Volume X – n° x/année

2. Mesure du seuil de contrainte d’un matériau à base cimentaire

2.1. Les 3 essais utilisés : protocole et domaine d’utilisation

Dans cette étude, nous nous focalisons sur trois essais empiriques existants,
mais les notions présentées sont applicables à n’importe quelle géométrie conique
voire, pour certaines, à un volume quelconque d’échantillon. Les dimensions des
cônes étudiés ici sont rappelées dans le Tableau 2 et la figure 1. Nous traiterons bien
sûr du cône d’Abrams et de l’essai d’affaissement, de l’essai d’étalement qui en est
dérivé et qui est utilisé pour tester les Bétons AutoPlaçant (BAP) et enfin de l’essai
d’étalement au mini-cône développé pour caractériser la fluidité des pâtes de
ciment.

Cône Essai d’affaissement ou Essai d’étalement au mini-


d’étalement au Cône d’Abrams cône
H 0 (mm) 300 50
Rmin (mm) 50 35
Rmax (mm) 100 50

Tableau 2 : géométries des cônes étudiés

z
Rmin

r H0

O θ

Rmax

Figure 1 : Géométrie initiale du cône


Ecoulements d’affaissement et d’étalement 5

2.2. Arrêt de l’écoulement d’un fluide à seuil : essais aux cônes et régimes
d’écoulement

Lorsque l’opérateur soulève le moule conique, le matériau est soumis à son


propre poids et peut s’écouler sous l’effet des contraintes résultantes. Deux cas se
présentent alors : la contrainte générée par la gravité n’est pas suffisante pour
dépasser le seuil de contrainte et aucun affaissement n’est mesuré ou bien la
contrainte générée est supérieure au seuil et l’écoulement peut démarrer. Ensuite,
pendant l’affaissement du béton, si nous supposons que l’inertie de l’écoulement est
négligeable (nous reviendrons sur ce point plus loin), l’épaisseur de matériau et
donc la contrainte générée par la gravité diminuent. Les deux cas précédents
réapparaissent formulés cette fois sous la forme suivante : la contrainte générée par
la gravité n’est plus suffisante pour dépasser le seuil de contrainte et l’écoulement
s’arrête ou bien la contrainte générée reste supérieure au seuil et l’écoulement se
poursuit.
Il est nécessaire ici de rentrer plus en détail dans cette notion de contrainte
générée par la gravité. Celle-ci est liée à la hauteur de la colonne de matériau au
dessus du point considéré. La contrainte utilisée dans le paragraphe précédent pour
décrire le démarrage ou l’arrêt de l’écoulement est la contrainte la plus élevée au
sein de l’échantillon déformé et est donc située au pied du cône. Elle décroît avec
l’altitude du point considéré pour atteindre une valeur nulle à la surface supérieure
du cône. Ainsi, au pied du cône, l’écoulement peut avoir lieu car la contrainte y est
supérieure au seuil de contrainte mais il peut exister toute une zone dans la partie
supérieure du cône dans laquelle la contrainte générée, plus faible, reste inférieure
au seuil du matériau et n’est donc pas déformée. C’est sur cette décomposition que
s’est basé (Murata, 1984) pour relier l’affaissement S au seuil du matériau τc. Dans
la partie cisaillée, l’écoulement se poursuit jusqu’à ce que la contrainte de
cisaillement y soit égale au seuil alors que la partie supérieure reste non déformée.
Cette théorie a ensuite été corrigée par (Schowalter et al., 1998) et adaptée à une
géométrie cylindrique par (Pashias et al., 1996). Cependant, même si un accord
expérimental assez grossier avait été obtenu par (Schowalter et al., 1998), les
analyses plus fines et plus récentes de (Clayton et al., 2003) et (Saak et al., 2004)
ont montré un fort désaccord entre la théorie et les résultats expérimentaux pour les
géométries coniques testées. De plus, dans le cas d’affaissements particulièrement
élevés, la zone non cisaillée est négligeable et quasiment tout le matériau est en
mesure de s’écouler. Les théories précédentes ne sont pas adaptées à ce type
d’écoulement où le diamètre de la « galette » formée par le matériau semble être
plus représentatif du comportement que l’affaissement.
Les solutions existantes souffrent donc de la comparaison avec les résultats
expérimentaux. De plus, elles ne sont pas adaptées à la description et à l’analyse des
« nouveaux » essais sur matériaux fluides lors desquelles l’affaissement est si élevé
(et du coup systématiquement proche de la hauteur initiale du cône) que l’on préfère
mesurer l’étalement. Nous présentons ici une approche générale permettant
6 Revue Européenne de Génie Civil. Volume X – n° x/année

d’interpréter les résultats de l’intégralité de cette famille d’essais empiriques et de


leur éventuelle descendance adaptée aux matériaux nouveaux et encore à venir.
Le fait que, dans la pratique, suivant les matériaux testés ou le cône utilisé, deux
quantités géométriques soient mesurées (affaissement ou étalement) montre
l’influence de la forme finale sur l’interprétation de l’essai. Deux régimes peuvent
donc être dissociés lors de l’étude de la forme après l’arrêt de l’écoulement. Le
premier régime correspond à celui où la hauteur de l’échantillon est grande devant
son rayon. C’est typiquement le cas de l’essai d’affaissement au cône d’Abrams et
nous l’appellerons le régime d’affaissement. Le deuxième régime correspond au
cas où le rayon de la galette obtenue est grand devant l’épaisseur finale de
l’échantillon. Nous l’appellerons le régime d’étalement. Ces deux régimes se
distinguent, comme nous allons le voir, par des formes du tenseur des contraintes et
du tenseur des taux de déformation totalement différentes et donc des traitements
analytiques adaptés eux aussi différents.
Nous allons par la suite utiliser l’affaissement adimensionnel S ' et le seuil
adimensionnel τ c ' :

S τc
S' = ; τ c '= [2]
H0 ρgH 0
où ρ est la masse volumique du matériau testé et H 0 la hauteur initiale du
cône. Ces grandeurs nous permettront de rassembler les résultas obtenus pour
différents cônes sur un même graphique.
Nous allons décrire l’écoulement dans le repère cylindrique (O, r ,θ , z )
représenté Figure 1. Les composantes du vecteur vitesse d’écoulement sont
( vr , vθ , vz ). La symétrie du problème impose que vθ = 0 et que l’ensemble des
variables ne dépendent pas de θ. Le tenseur des taux de déformations a donc la
forme suivante :

∂vr v ∂v 1  ∂v ∂v 
D= e rr + r eθθ + z e zz +  r + z (e rz + e zr ) [3]
∂r r ∂z 2  ∂z ∂r 
Dans le cas du régime d’affaissement, considérons le cas extrême d’un cylindre
dont le rayon R est faible devant sa hauteur H . Dans ce cas, les variations
radiales de la contrainte sont négligeables devant les variations verticales. A une
altitude z dans l’échantillon, la contrainte résultante du poids du matériau au
dessus du point considéré s’écrit − ρg ( H − z )e z . Les autres contraintes sont
nulles et l’expression du tenseur des contraintes peut être mise sous la forme
suivante :
Ecoulements d’affaissement et d’étalement 7

ρg ( H − z ) ρg ( H − z )
Σ = − ρg ( H − z )e zz = − I+ (err + eθθ − 2e zz ) [4]
3 3
Le deuxième terme à droite de l’égalité est l’expression du tenseur des
contraintes déviatoriques. Si la déformation reste faible, l’hypothèse H >> R reste
vraie, le champ de contrainte conserve cette forme et l’écoulement s’arrête lorsque
la hauteur du cône H = H 0 − S est égale à une hauteur critique pour laquelle le
critère de plasticité de Von Mises est rempli en z = 0 .

ρg ( H 0 − S )
= τc [5]
3
soit sous forme adimensionnelle :

τc'=
(1 − S ') [6]
3
Cette relation n’est valide que si l’affaissement est faible et que la forme initiale
du cône remplit la condition H >> R . Il est à noter qu’un résultat analytique
similaire aurait été obtenu en faisant l’hypothèse que l’écoulement est de type
élongationnel. Cette solution a été publiée dans (Roussel et al., 2005).
Dans le cas du régime d’étalement, l’épaisseur de l’écoulement est en général
faible devant le rayon de la « galette » formée par le matériau. La vitesse
d’écoulement radiale est très supérieure à la vitesse d’écoulement verticale
( vz << vr ) et les variations des caractéristiques de l’écoulement par rapport à z
peuvent être négligées devant les variations par rapport à r ( ∂ ∂r << ∂ ∂z ).
Dans ce cas, le tenseur des taux de déformations se simplifie et peut se mettre sous
la forme suivante :
1 ∂vr
D= (e rz + e zr ) [7]
2 ∂z
L’écoulement à priori tridimensionnel tend vers un écoulement
monodimensionnel. Dans ces conditions, une première analyse de l’écoulement a
été réalisée par (Liu et al., 1989) puis généralisée par (Coussot et al., 1996). Les
résultats obtenus ont été confirmés par (Balmforth et al., 2002) puis comparés à des
étalements de pâtes de ciment par (Roussel et al., 2005).
On cherche ici à obtenir le profil du matériau à l’arrêt de l’écoulement, c’est à
dire l’épaisseur du dépôt en fonction du rayon h( r ) . Suite aux observations du
paragraphe précédent, seul le taux de déformation e rz est non négligeable ainsi que
la contrainte de cisaillement associée τ rz et les équations de conservation de la
quantité de mouvement se simplifient :
8 Revue Européenne de Génie Civil. Volume X – n° x/année

∂p ∂τ rz ∂p
0=− + ; 0 = − ρg − [8]
∂r ∂z ∂z
En intégrant la deuxième équation entre 0 et z et en prenant pour référence la
pression atmosphérique p ( h) = 0 , on obtient

p = ρg (h(r ) − z ) [9]

La première équation peut alors être intégrée entre 0 et h pour donner:


dh
ρgh = −τ rz (0) [10]
dr
A l’arrêt, τ rz (0) → τ c et l’équation (10) peut être intégrée avec la condition à
la limite h( R ) = 0 . La forme du matériau lorsqu’il arrête de s’écouler peut donc
être décrite par:

 2τ (R − r ) 
1/ 2

h(r ) =  c  [11]
 ρg 
La hauteur au centre est H = h(0) = (2τ c R ρg )1 / 2 . En intégrant l’expression
2π R
du profil pour retrouver le volume testé Ω = ∫ ∫ h(r )rdrdθ , nous obtenons :
0 0


τ c '= H 0 (1 − S ')
3/ 2 5/ 2
[12]
15Ω
L’expression du seuil en fonction de l’étalement mesuré, la plus intéressante
d’un point de vue pratique, est alors:

225ρgΩ 2
τc = [13]
128π 2 R 5
Il est important de noter que, même si cette relation dépend du volume testé, elle
ne dépend pas de la forme initiale du cône ( H 0 par exemple). L’écoulement, dans
le régime d’étalement, est tel que le matériau « oublie » sa forme initiale.

2.3. Influence de l’inertie

La description de l’écoulement d’affaissement ou d’étalement du paragraphe


précédent est basée sur l’hypothèse que l’écoulement a lieu suffisamment lentement
pour que les effets d’inertie soient négligeables et que la forme finale ne dépende
Ecoulements d’affaissement et d’étalement 9

que du seuil. (Tatersall et al., 1983) ainsi que (Murata, 1984) avaient constaté que la
viscosité plastique du matériau n’avait pas d’influence sur l’affaissement.
Cependant, il est possible d’imaginer que, si l’opérateur soulève le cône très
rapidement et que la viscosité plastique du béton est faible, la forme finale du béton
après arrêt de l’écoulement pourrait ne pas dépendre uniquement du seuil. En effet
l’énergie cinétique de l’écoulement, si elle n’est pas atténuée par une vitesse de
soulèvement relativement lente du moule ou absorbée par la dissipation visqueuse
lors de l’écoulement, pourrait permettre au matériau de dépasser sa position
théorique d’arrêt décrite au paragraphe précédent. Pour quantifier cet effet,
considérons la contrainte due à l’inertie I = ρV . Dans le cas d’un affaissement
2

faible de l’ordre de 10 cm, la durée d’écoulement est de l’ordre de 1 à 2 secondes


selon la viscosité plastique du matériau. I est alors de l’ordre de 30 Pa, valeur
largement inférieure aux seuils des bétons donnant lieu à des affaissements de 10
cm. Dans le cas d’un affaissement plus fort voire d’un étalement, la distance
parcourue par le matériau est de l’ordre de 30 cm mais le temps avant l’arrêt de
l’écoulement est cette fois de l’ordre de 5 secondes pour des viscosités plastiques
standards. I est alors de l’ordre de 5 Pa, valeur également très inférieure aux seuils
des bétons les plus fluides. Le fait que l’écoulement ne dépende pas de la vitesse de
levée du cône, de la viscosité plastique et de manière plus générale de l’inertie de
l’écoulement est donc confirmé.

2.4. Adhérence ou glissement - Influence de la tension superficielle ou du


mouillage

Dans la pratique, une grande attention est apportée à la préparation de la surface


sur laquelle l’essai a lieu. La plaque doit être préalablement mouillée mais sans
excès d’eau. La question de la condition aux limites de l’écoulement au niveau de la
plaque se pose alors : adhérence ou glissement ? (Pashias et al., 1996) a mesuré
l’affaissement d’une suspension de particules sur des plaques de rugosité
différentes. Des valeurs d’affaissement indépendantes de la rugosité ont été
obtenues amenant à la conclusion que l’écoulement était adhérent. Les particules
étudiées étaient cependant de tailles très réduites par rapport aux inclusions
granulaires présentes dans un béton. Plus récemment (Chamberlain et al., 2003) a
étudié de manière théorique l’influence de cette condition aux limites sur la hauteur
critique à laquelle un cylindre arrête de s’affaisser. On peut tirer de ces résultats
l’information suivante : dans le cas du cône d’Abrams, la différence maximale de
hauteur d’affaissement entre une condition d’adhérence totale et une condition de
glissement total ne dépasse pas 18%.
Par ailleurs si la forme à l’arrêt de l’écoulement d’un dépôt de matériau dépend
du seuil, alors l’eau, fluide visqueux Newtonien par excellence, devrait s’étaler
indéfiniment. Ce n’est bien sûr pas le cas. En fait, la tension superficielle
conditionne l’arrêt de l’écoulement des matériaux à seuil nul ou faible. Celle ci
dépend du fluide testé et de la surface sur laquelle il s’écoule. Ce phénomène
10 Revue Européenne de Génie Civil. Volume X – n° x/année

physique ne peut bien sûr jouer un rôle significatif que pour des matériaux très
fluides et nous allons donc traiter ce problème uniquement vis à vis de l’étalement.
Pour quantifier cet effet, comparons la perte d’énergie par dissipation visqueuse
( dWv ) avec la perte d’énergie de surface ( dWs ) lors d’un incrément de rayon
d’étalement dR . La variation de l’énergie de surface est la somme des variations
des énergies interfaciales aux frontières entre la plaque (solide) et l’air ambiant
(gaz) ( dWSG ), entre le matériau testé (liquide) et l’air ambiant ( dWLG ) et entre le
matériau et la plaque ( dWSL ). Ces variations d’énergie sont respectivement
proportionnelles aux variations des surfaces de contact entre les différents milieux
( dS SG ), ( dS LG ) et ( dS SL ) via des coefficients de tension interfaciale γ SG , γ LG ,
γ SL . Ces coefficients sont reliés entre eux par l’équation de Young
γ SG = γ LG cosθ + γ SL où θ est l’angle de mouillage au point de contact des trois
milieux.
Si nous faisons l’hypothèse que l’épaisseur du matériau est faible (seul cas dans
la pratique où les effets de tension superficielle pourrait jouer un rôle), alors nous
pouvons écrire que
dS SG ≈ − dS LG ≈ − dS SL ≈ −2πRdR
et
dWs ≈ 2πRγ LG (1 − cosθ )dR
La valeur de γ LG n’est pas connue pour les matériaux cimentaires, surtout
lorsqu’ils sont adjuvantés à l’aide de produits tensioactifs. En première
approximation il est cependant tout à fait raisonnable de prendre la même valeur que
l’eau pure γ LG = 0.07 Pa.m, puisque c’est le fluide interstitiel de ces matériaux, qui
enrobe les particules et assure l’interface avec l’air ambiant.
Si nous faisons maintenant l’hypothèse que l’écoulement est principalement
cisaillant (ce qui est une conséquence de l’hypothèse précédente d’épaisseur mince),
alors nous pouvons écrire que le taux de cisaillement est proportionnel au taux de
cisaillement à la périphérie rdR/RH. La dissipation visqueuse est alors :

τ (rdR RH )(2πHrdr )
R
∫Ω
τ γdω = ∫
0
[14]

Dans le cas d’un écoulement lent (inertie négligeable et matériau sur le point de
s’arrêter) τ ≈ τ c , nous obtenons:

dWv ≈ 2πR 2τ c dR 3 [15]


Ecoulements d’affaissement et d’étalement 11

L’influence de la tension de surface sur la forme finale du dépôt est négligeable


si dWv >> dWs . En termes de seuil de contrainte, ceci correspond au critère
suivant :

3(1 − cosθ )γ LG
τ c >> [16]
R

Application :
En appliquant la relation précédente au cas d’un BAP présentant un étalement de
900 mm (limite supérieure de l’essai), nous obtenons que le béton doit présenter un
seuil supérieur à 0,6 Pa pour que l’essai ne soit pas affecté par les effets de tension
superficielle. Nous pouvons donc conclure que, malgré l’attention portée sur ce
point dans la pratique, la tension superficielle ne joue pas de rôle d’un point de vue
théorique sur le résultat de l’essai (à la condition que le matériau puisse être
considéré comme un matériau homogène mais nous y reviendrons plus loin).
Cependant, en appliquant la relation au cas d’une pâte de ciment d’étalement
30 cm au mini Cône, nous obtenons que, cette fois, la pâte doit avoir un seuil
supérieur à 2 Pa pour que l’essai ne soit pas affecté par les effets de tension
superficielle. Or cette valeur est du même ordre que le seuil d’une pâte de ciment
ayant un étalement de 30 cm. Il est donc important de garder à l’esprit que, dans ce
cas, les effets de tension superficielle limite le domaine de validité de l’essai : le
résultat de l’essai n’est plus représentatif du comportement rhéologique du matériau
mais d’un phénomène physique parasite.

2.5. Influence de la taille des particules

Le résultat d’un essai d’affaissement ou d’étalement n’est représentatif du


comportement rhéologique d’un béton que si l’échantillon est représentatif du
matériau. Ceci impose d’une part que le volume de l’échantillon soit grand devant le
volume élémentaire des plus grosses particules et d’autre part que les dimensions
caractéristiques de l’écoulement (l’épaisseur de matériau dans le cas d’un
écoulement de type axisymétrique comme celui généré par l’affaissement ou
l’étalement d’une quantité donnée de matériau) soient grandes devant la taille des
plus grosses particules composant le béton. La première condition est remplie : le
volume du cône d’Abrams est d’approximativement 6 litres soit 5000 fois la taille
des plus grosses particules (taille de l’ordre centimétrique). La deuxième condition,
comme nous allons le voir, n’est pas toujours remplie dans les tests d’étalement.
Elle impose que l’épaisseur au centre (épaisseur maximale) soit au moins 5 fois
supérieure au diamètre du plus gros grain (la valeur de 5 est couramment retenue
(Coussot et al., 1999) mais il est possible d’être plus exigeant vis à vis de ce critère).
Si cette condition n’est pas remplie, l’écoulement peut difficilement être considéré
12 Revue Européenne de Génie Civil. Volume X – n° x/année

comme l’écoulement homogène d’un milieu continu. Dans la pratique, ceci


correspond à un écoulement dont les caractéristiques résultent des évolutions des
différents composants du matériau en fonction des conditions aux limites
particulières, et non du comportement intrinsèque d’un seul matériau. Il est alors
impossible d’interpréter le test en termes de comportement intrinsèque du matériau.
C’est malheureusement le cas de l’essai d’étalement pratiqué lors de la
caractérisation des BAP. Nous traitons ici le cas d’un BAP dont l’étalement est de
750 mm. Si nous considérons dans un premier temps le matériau comme homogène,
la relation [13] nous indique que son seuil est approximativement de 20 Pa pour une
densité de 2,5. L’épaisseur de la galette obtenue est, en son centre, de 2,5 cm
(relation [11]). Pour que le matériau puisse être effectivement considérée comme
homogène, il faudrait que le diamètre du plus gros granulat soit inférieur à 2,5/5 =
0,5 cm. Or, le diamètre des plus gros grains dans ce type de béton est au mieux de
l’ordre de 1 cm. Nous concluons que le résultat de l’essai d’étalement dans le cas
des BAP n’est pas représentatif du comportement rhéologique du béton en tant que
mélange mais qu’il est régi par une combinaison des propriétés de ses différents
composants, combinaison qui peut varier d’un béton à l’autre. Par conséquent, le
résultat de l’essai d’étalement sur BAP est à considérer avec précaution.

2.6. Comparaison des solutions analytiques, des simulations numériques et des


résultats expérimentaux

2.6 .1. Cas du mini cône et des pâtes de ciment


La Figure 2 rassemble les résultats des solutions analytiques présentées ici, de
simulations numériques et de mesures expérimentales dans le cas du mini cône et de
pâtes de ciment publiées dans (Roussel et al., 2005).
Résultats expérimentaux
Le seuil de contrainte des pâtes de ciment est mesuré expérimentalement à l’aide
d’un viscosimètre équipé d’une géométrie Vane (voir (Roussel et al., 2005) pour
plus de détails). Pour chaque essai, l’affaissement et l’étalement sont mesurés.
Simulations numériques
Les simulations numériques présentées ici ont été conduites en supposant que le
comportement rhéologique du béton était de type élasto-visco-plastique (module
élastique, viscosité plastique et seuil de contrainte). Une étude systématique (voir
(Roussel, 2004) a montré que le module d’Young du matériau n’a pas d’influence
sur le résultat du calcul aussi longtemps que les déformations élastiques sont
négligeables devant les déformations dues à l’écoulement une fois le seuil de
contrainte atteint. Nous avons donc utilisé la valeur minimale de module permettant
d’atteindre cette situation, toute valeur supérieure du module augmentant la durée
des calculs. Dans les simulations, la vitesse de levée du cône est infinie : le cône
disparaît à un instant initial. Pour éviter une éventuelle influence des effets d’inertie
Ecoulements d’affaissement et d’étalement 13

de l’écoulement et en gardant en tête que la forme finale du matériau ne dépend pas


de la viscosité plastique, nous avons utilisé dans les simulations des valeurs
relativement élevées de viscosité plastique (50 Pa.s pour les bétons et 1 Pa.s pour les
pâtes de ciment). Une étude ultérieure a montré la faible influence de ce paramètre
sur le résultat des simulations. L’écoulement a été considéré comme adhérent le
long de la surface solide.
Analyse
Le régime d’affaissement valide en théorie uniquement lorsque l’affaissement
est quasiment nul et le rapport H R est grand ne décrit qu’approximativement la
plage d’affaissement très faible. On peut cependant noter que, même dans la
configuration initiale de l’échantillon (voir Tableau 2), l’hypothèse H >> R n’est
pas vérifiée : H R ≈ 1 . En revanche la solution analytique obtenue dans le cas du
régime d’étalement décrit de façon tout à fait satisfaisante les résultats
expérimentaux obtenus pour un seuil adimensionnel inférieur à 0,05. Ceci
correspond à un rapport H R expérimental de 0,1. Nous sommes bien ici dans le
domaine de validité de l’hypothèse définissant le régime d’étalement. Les
simulations numériques sont en accord avec les résultats expérimentaux sur toute la
plage de seuil testé et confirment les hypothèses utilisées pour modéliser le
problème (inertie négligeable, tension superficielle négligeable si l’étalement est
inférieur à 30 cm, adhérence à la paroi, forme finale uniquement dépendante du
seuil).
14 Revue Européenne de Génie Civil. Volume X – n° x/année

0.9

0.8

0.7
affaissement adimensionnel

0.6

0.5

0.4

0.3

solution analytique : régime d'étalement


0.2
solution analytique : régime d'affaissement
simulations numériques
0.1
résultats expérimentaux

0
0.0001 0.001 0.01 0.1 1
seuil adimensionnel

Figure 2. Affaissement adimensionnel en fonction du seuil adimensionnel du


matériau lors d’un essai au mini cône sur des pâtes de ciment. Les résultats des
solutions analytiques, de simulations numériques et de mesures expérimentales
sont reportés sur la figure.

2.6.2. Cas du cône d’Abrams et des bétons


Les résultats des mêmes modèles sont représentés Figure 3 dans le cas du cône
d’Abrams. La solution en régime d’affaissement s’avère plus adaptée à la prédiction
des affaissements quasiment nuls car la géométrie initiale du cône impose
H R = 3.
Il est malheureusement impossible de valider expérimentalement les résultats
obtenus dans cette géométrie puisque les rhéomètres à bétons ne sont pas encore en
accord entre eux au niveau de la mesure des valeurs absolues des paramètres du
comportement (Ferraris et al., 2001), (Ferraris et al., 2004). La Figure 3 rassemble
cependant les mesures réalisées au LCPC ces dernières années et les comparent aux
prédictions théoriques. La forte dispersion des mesures est à noter.
Ecoulements d’affaissement et d’étalement 15

Les solutions proposées sont en accord quantitatif approximatif avec les mesures
au moins dans la plage d’utilisation du rhéomètre (affaissement adimensionnel
compris entre 0,33 et 0,66 ; affaissement compris entre 10 et 20 cm). Pour des
affaissements inférieurs à 10 cm, la plupart des bétons présentant des tailles de
particule maximales de l’ordre de 20 mm, l’hypothèse d’homogénéité nécessaire à
une corrélation entre forme du matériau à l’arrêt de l’écoulement et seuil du
matériau homogène est fortement compromise. Comme nous pouvions nous y
attendre, une dispersion encore plus marquée apparaît dans ce domaine.

1 affaissement
adimensionnel
0.9

0.8

0.7

0.6

0.5

0.4

0.3

0.2 solution analytique : régime d'affaissement


solution analytique : régime d'étalement
0.1 simulations numériques
résultats expérimentaux BTRHEOM
0
0.01 0.1 seuil adimensionnel 1

Figure 3. Affaissement adimensionnel en fonction du seuil adimensionnel du


matériau lors d’un essai au cône d’Abrams sur des bétons. Les résultats des
solutions analytiques et de simulations numériques sont reportés sur la figure.
Des mesures expérimentales obtenues à l’aide d’un rhéomètre à béton
BTRheom sont également reportées mais uniquement à titre indicatif.

2.7. Utilisation du régime d’étalement pour quantifier le seuil des matériaux


cimentaires

Nous avons pu montrer dans les sections précédentes que nous disposions d’une
corrélation quantitative très correcte entre forme finale du matériau et seuil de
16 Revue Européenne de Génie Civil. Volume X – n° x/année

contrainte. Cependant, la corrélation en régime d’étalement que nous proposons


n’existe que si :
- le rapport H R est faible.
- les effets de tension superficielle sont négligeables
- l’épaisseur de la galette formée est au moins égale à 5 fois la taille du plus gros
grain.
En outre, dans ce régime d’écoulement, la forme finale ne dépend pas de la
forme initiale de l’échantillon, car l’ensemble du matériau a subi un écoulement au
moins pendant un instant.

60 étalement
(cm)
50

40

30
valeurs expérimentales
20 solution théorique

10
volume testé (l)
0
0 1 2 3 4 5 6

Figure 4 : Etalement en fonction du volume de matériau testé pour une pâte de


ciment dont le seuil mesuré au viscosimètre est de 60 Pa. La solution théorique
et les résultas expérimentaux sont reportés.

Ceci nous permet de proposer le principe général d’essai suivant :


Si un volume Ω de pâte de ciment, mortier ou béton est versé lentement sur une
surface lisse horizontale, alors la mesure du diamètre de la galette ( D = 2 R )
obtenue après arrêt de l’écoulement est corrélé au seuil du matériau par la relation
[13]:
Ecoulements d’affaissement et d’étalement 17

225ρgΩ 2
τc =
128π 2 R 5
Des valeurs d’étalement obtenues pour une pâte de ciment de seuil 60 ± 3 Pa
(mesuré au viscosimètre) et pour différents volumes versés à l’aide d’un seau sur
une plaque métallique horizontale sont reportés sur la Figure 4. La corrélation est
excellente et confirme l’efficacité de ce protocole en tant que technique de mesure
du seuil d’un matériau cimentaire. Cependant, pour que la relation entre seuil et
étalement soit valide, la validité des hypothèses nécessaires à son établissement
doivent être vérifiées. Pour cela, le volume de matériau testé doit être choisi à partir
de l’abaque proposé en Figure 5 en fonction du seuil attendu du matériau et de la
taille de la plus grosse particule du mélange. Pour des raisons pratiques évidentes, le
volume est limité de façon à ne pas engendrer un étalement supérieur à 1,00 m.
Nous retrouvons sur cette figure les résultats établis précédemment, à savoir que
l’essai d’étalement des BAP ne peut pas être représentatif du comportement
homogène d’un béton contenant des particules centimétriques et que l’essai au mini-
cône pour pâtes de ciment est limité pour les faibles seuils par les effets de tension
superficielle et pour les seuils les plus élevés par la limite de validité de l’hypothèse
H << R . Si cet essai est pratiqué sur des mortiers contenant des particules
millimétriques, la limite basse d’utilisation de l’essai devient la condition
d’homogénéité du matériau.
18 Revue Européenne de Génie Civil. Volume X – n° x/année

1000 volume de
matériau (L)

100

Essai d'étalement sur BAP


10

0.1 Mini cône

seuil/densité (Pa)
0.01
1 10 100 1000
volume minimum de matériau pour se situer en régime d'étalement

volume minimum de matériau permettant de négliger les effets de tension


superficielle
volume minimum de matériau permettant de considérer le matériau comme
homogène (particules de 1 mm)
volume minimum de matériau permettant de considérer le matériau comme
homogène (particules de 10 mm)
limite pratique : volume maximum de matériau pour que l'étalement ne dépasse
pas 1 m

Figure 5 : Abaque de choix du volume minimum à tester pour garantir une


corrélation entre le seuil du matériau et l’étalement mesuré.

Il apparaît que, dans ces conditions, le volume de béton (particules


centimétriques) à tester devrait être de l’ordre du mètre cube avec des étalements de
l’ordre de plusieurs mètres... Ceci est problématique d’un point de vue pratique.
Cependant, il est nécessaire de noter que, de par la symétrie axiale des essais aux
cônes ou, de manière générale, des écoulements de type « fontaine », l’information
fournie sur l’épaisseur du matériau à l’arrêt est redondante. Elle est en effet répétée
sur chacun des diamètres offerts à une mesure expérimentale. Nous proposons donc
dans le cas des bétons de substituer à un essai sur plaque un essai dans un canal (cf.
Figure 6). Cet écoulement purement bidimensionnel fournit la même information
sur l’étalement que celle apparaissant sur un demi diamètre de la galette formée par
le matériau. Il permet cependant pour un volume testé de 6 litres (équivalent au cône
d’Abrams) de considérer, dans le cas des BAP, des épaisseurs de matériaux à l’arrêt
Ecoulements d’affaissement et d’étalement 19

de l’ordre de 6 cm. Cet essai que nous appelons « essai à la boite » est actuellement
en cours de validation au LCPC sur des matériaux modèles (cf. Figure 7) et devrait
faire l’objet d’un protocole d’essai sous peu. Son dépouillement est basé sur les
travaux présentés ici en y ajoutant l’influence des parois latérales (Roussel, 2005).
C’est un essai rapide, simple, économique et fiable pour mesurer le seuil des bétons
fluides à auto-plaçants et ainsi répondre à notre objectif initial : être capable de
mesurer sur chantier le seuil de contrainte du matériau garantissant sa bonne mise en
oeuvre.

Figure 6. Essai à la boite sur un BAP


20 Revue Européenne de Génie Civil. Volume X – n° x/année

solution théorique pour un seuil de 50 Pa


7
solution théorique pour un seuil de 30 Pa
6 solution théorique pour un seuil de 60 Pa
Epaisseur de l'écoulement h (cm)

0
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120
x (cm)

Figure 7. Profil du matériau à l’arrêt de l’écoulement. Comparaison entre


solution théorique et mesures expérimentales.

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