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Lio
Lio
Tao-tö king
Gallimard
Ce texte a paru dans la collection
Connaissance de l’Orient, série chinoise (no 42)
Lao-tseu
Selon la tradition chinoise, Li Eul ou Lao Tan, plus connu sous le nom
de Lao-tseu ou Laozi (Vieux Maître) aurait vécu au VIe siècle avant J.-C.
Originaire du pays de Chu en Chine centrale, sa vie recluse a donné lieu à
de nombreuses légendes : après une naissance miraculeuse, il aurait vécu
deux cents ans et aurait dispensé quelques enseignements au jeune
Confucius. Il aurait été archiviste et astrologue des empereurs Zhou, mais
écœuré par la décadence de cette dynastie, il s’enfuit vers l’ouest, assis sur
un bœuf, épisode repris par une importante iconographie. La légende
rapporte qu’avant de franchir la frontière indienne, il a confié au garde son
testament philosophique, le Tao-tö king. Il semble cependant que ce texte
date de l’époque Han (206 à 220 après J.-C.). On ignore où et comment est
mort Lao-tseu.
La traduction proposée dans cette édition repose essentiellement sur le texte chinois
établi par Tchou K’ien-tche, Lao-tseu kiao-che.
Tao-tö king
I
Le gouvernement du saint
consiste à vider l’esprit du peuple,
à remplir son ventre,
à affaiblir son ambition,
à fortifier ses os.
L’abandon du Tao
fait naître la bonté et la justice.
L’intelligence et le savoir
entraînent le grand artifice.
La discorde des six parents{18}
fait surgir la piété filiale et l’amour paternel.
La nuit et le désordre du royaume
provoquent la loyauté et la bonne foi.
XIX
Depuis l’antiquité
son essence n’a pas varié.
Pour le comprendre
il suffit d’observer le germe de tout être.
Comment puis-je connaître le germe de tout être ?
Par tout ce que je viens de dire.
XXII
L’ancien dicton : « Qui se plie restera entier » est-ce donc une parole
vaine ?
C’est par là qu’on garde son intégrité.
XXIII
Connais le masculin,
Adhère au féminin.
Sois le Ravin du monde.
Quiconque est le Ravin du monde,
la vertu constante ne le quitte pas.
Il retrouve l’enfance.
Connais le blanc.
Adhère au noir.
Sois la norme du monde.
Quiconque est la norme du monde,
la vertu constante ne s’altère pas en lui.
Il retrouve l’illimité{20}.
Connais la gloire.
Adhère à la disgrâce.
Sois la Vallée du monde.
Quiconque est la Vallée du monde,
la vertu constante est surabondante en lui.
Il retrouve le bloc de bois brut.
Le bloc de bois, débité selon son fil, forme des ustensiles.
Le saint en suivant la nature des hommes devient le chef des ministres.
C’est pourquoi le grand maître ne blesse rien.
XXIX
On regarde le Tao,
cela ne suffit pas pour le voir.
On l’écoute,
cela ne suffit pas pour l’entendre.
On le goûte,
cela ne suffit pas pour en trouver la saveur.
XXXVI
Plus on va loin,
moins on connaît.
Le Tao produit.
La vertu conserve.
La matière fournit un corps.
Le milieu parachève.
Ainsi tous les êtres du monde
révèrent le Tao et honorent la vertu.
Cette vénération pour le Tao et ce respect de la vertu
ne sont pas ordonnés, mais toujours spontanés.
Cultivée en soi-même
sa vertu sera authentique ;
cultivée dans sa famille,
elle s’enrichira ;
cultivée dans son village,
elle grandira ;
cultivée dans l’État,
elle sera florissante ;
cultivée dans le monde,
elle deviendra universelle.
Pratique le non-agir,
exécute le non-faire,
goûte le sans-saveur,
considère le petit comme le grand
et le peu comme beaucoup.
Attaque une difficulté dans ses éléments faciles ;
Accomplis une grande œuvre par de menus actes.
La chose la plus difficile au monde
se réduit finalement à des éléments faciles.
L’œuvre la plus grandiose s’accomplit
nécessairement par de menus actes.
Cet arbre qui remplit tes bras est né d’un germe infime.
Cette tour avec ses neuf étages vient de l’entassement de mottes de terre.
Le voyage de mille lieues commence par un pas.
On retrouve là
la vertu de non-rivalité
et la capacité de conduire les hommes.
Tout cela est en parfaite harmonie avec la loi du Ciel.
LXIX
La voie du ciel
sait vaincre sans batailler,
répondre sans parler,
venir sans qu’on l’appelle
et former ses projets avec sérénité.