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Comportements sexuels à risque au temps du VIH/Sida :

le cas des jeunes en Côte d’Ivoire


Elise Amoin Kacou

To cite this version:


Elise Amoin Kacou. Comportements sexuels à risque au temps du VIH/Sida : le cas des jeunes en Côte
d’Ivoire. Sociologie. Université Panthéon-Sorbonne - Paris I, 2018. Français. �NNT : 2018PA01H086�.
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Thèse
Pour l’obtention du grade de Docteur
Discipline : Démographie

Comportements sexuels à risque au temps du VIH/Sida : le cas des


jeunes en Côte d’Ivoire

Présentée par Elise Amoin KACOU


Le 19 Novembre 2018

Sous la direction de
Alexandre Avdeev, professeur
Keho Yaya, professeur

Membres du jury :
Marc PILON, Directeur de Recherche (Université Paris Descartes-Ined-IRD), Président
Virginie DE LUCA BARRUSSE, Professeure des universités (Université Paris 1 Panthéon Sorbonne),
Membre
Parfait ELOUNDOU-ENYEGUE, Président du département de sociologie du dévéloppement (Université
Cornell, Ithaca, New York), Rapporteur
Irina TROITSKAIA, Directeur de Recherche (Université de Moscou), Rapporteur

Alexandre AVDEEV, Professeur des Universités (Université de Paris 1), Directeur

Yaya KEHO, Professeur des Universités (Université Félix Houphouet Boigny d’Abidjan), Directeur
L’université de Paris 1 Panthéon Sorbonne n’entend donner aucune approbation ou
improbation aux opinions émises dans cette thèse. Ces opinions doivent être considérées
comme propres à leur auteur.

i
Dédicaces

A Yves Saure, ton amour, ton soutien et les sacrifices consentis m’ont stimulé à achever
cette thèse.

A mes enfants Ariel Illan et Ethan Samuel, vous avez supporté mon absence et traversé
beaucoup d’épreuves.

A mes parents, votre aide a été très précieuse.

ii
Remerciements

Je veux exprimer ma profonde reconnaissance et ma gratitude envers tous ceux qui ont
contribué d’une façon ou d’une autre à la réalisation de ce travail. Mes remerciements les plus
sincères vont tout d’abord à Alexandre Avdeev et Yaya Keho, mes directeurs de thèse, pour
m’avoir encadré et inculqué leur rigueur scientifique. Leur grande disponibilité et leurs
observations critiques ont été pour moi une source de motivation constante tout au long de ce
travail. Le suivi permanent ainsi que votre soutien sur le plan social ont été d'un apport
inestimable pour la réussite de mes travaux. Merci également de m’avoir accordé votre
confiance et compréhension à la suite des difficultés familiales qui ont engendré une longue
période d’inactivité.

Je tiens aussi à adresser mes remerciements aux membres du jury, Irina Troitskaia, Parfait
Eloundou- Enyegue, Virginie Barrusse, Marc Pilon qui ont accepté d’évaluer mon travail.

Un merci tout particulier à l’école doctorale de géographie de Paris, à l’Université de Paris 1


Panthéon Sorbonne et à l’IDUP qui m’ont permis de mener cette thèse dans de bonnes
conditions. Que Virginie Barrusse, directrice de l’IDUP, l’ensemble des enseignants ainsi que
Ingrid Le Goslès et Mohamed Ouaraz trouvent ici l’expression de ma profonde gratitude. Je ne
remercierai jamais assez l’IDUP et le Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA)
d’avoir financièrement soutenu mes participations aux conférences.

Tous mes remerciements à la coopération française qui a contribué en partie au financement de


cette recherche. A cet effet, je remercie particulièrement Mme Juliette N’Takpé du Service de
Coopération et d’Action Culturelle de l’Ambassade de France en Côte d’Ivoire qui a organisé
mes séjours doctoraux à Paris.

Mes vifs remerciements à Nayo Ankouvi, coordonnateur du projet Waapp pour avoir accepté
gracieusement d’introduire mon questionnaire dans son enquête.

Mes remerciements vont également à l’endroit de Koffi N’Guessan et Kouadio Hugues,


directeurs de l’ENSEA qui ont tout mis en œuvre pour me permettre de faire cette thèse.

La phase de lecture et relecture d’une thèse est un travail long et fastidieux. Je remercie Richard
Moussa, Nathaniel Gbenro et Désiré Kanga pour les relectures avisées d’une partie ou de
l’ensemble de la thèse et leurs précieuses corrections. Mes pensées non des moindres vont aussi

iii
à Landry Niava et Fabrice Tanoh pour les échanges constructifs sur le guide d’entretien, le
recrutement et la formation des enquêteurs.

J’adresse toute ma reconnaissance à mes collègues du département « population et


développement » de l’ENSEA notamment à Lazare Sika, Rosine Mosso, Raïmi Fassassi pour
leurs précieux conseils sur mes choix méthodologiques et leur soutien tout au long de la thèse.
Merci à tout le personnel administratif et financier de l’ENSEA notamment Madame
Alphonsine Ali-Kouadio et Monsieur Florent Agnima.

A mes collègues de l’IDUP, Sonzia Teutsong et Ann Kiragu avec lesquelles j’ai eu des échanges
très fructueux sur les EDS au Cameroun et au Kenya. Le partage d’expérience et leurs
encouragements m’ont donné la force de venir à bout de cette thèse, que chacune trouve ici
l’expression de ma profonde reconnaissance.

Je ne saurais oublier les enquêteurs et les chefs d’équipe qui, des mois durant, ont parcouru
toute la Côte d’Ivoire et côtoyé les jeunes pour administrer les questionnaires. Je veux leur
témoigner ma reconnaissance pour leur courage et leur compétence. Merci également aux
jeunes qui ont accepté de participer à l’enquête quantitative et aux entretiens individuels.

J’ai une pensée pour tous les collègues démographes et statisticiens qui m’ont soutenu dans
cette aventure : Antoine Dedewanou, Monique Kossonou, Abdul Dosso, Serge Bessekon,
Salomon Assi et Brahima Touré. Merci pour vos diverses contributions.

Enfin qu’il me soit aussi permis de remercier chaleureusement ma belle famille et mes proches
qui m’ont soutenu et encouragé tout au long de mes études doctorales. Parmi eux, Véronique
Saure, Danielle Saure, Jean-Claude Saure, Louise Brazda, Nonh Anita, mamie Hélène.

iv
Précisions pour la lecture

Choix terminologiques

Avant d’entamer la lecture de cette thèse, il est judicieux de présenter un ensemble de


terminologies autour desquelles ce travail est construit et de préciser leur signification.
Les définitions d’adolescents, de jeunes et de jeunes adultes ne sont pas consensuelles et les
critères retenus pour leurs définitions sont tout aussi variables (biologique, sociale, juridique,
économique, etc.). Un grand nombre de ces définitions font référence à une classe d’âge,
variable clé en démographie. Ainsi, la terminologie « adolescents » renvoie à différents groupes
d’âge : 10-19 ans (Kaptue, 1998) ; 12-19 ans (Guiella, 2004 ; Miangator, 2010), 15-19 ans
(Djamba, 1997 ; Rwenge, 2012), 15-26 ans Calvès (1998), 15-28 ans (Kuate-Defo, 1998). Pour
les Nations Unies (ONU, 2010), les jeunes constituent la tranche d’âge comprise entre 15 et 24
ans. C’est également le choix fait par Kalambayi (2007) en se basant sur la précocité de
l’activité sexuelle d’une part et la forte prévalence des IST/VIH/Sida dans la population
célibataire en République Démocratique du Congo. Dans d’autres recherches, il y a même un
chevauchement entre les groupes d’âge 10-19 ans et 15-24 ans, considérés respectivement
comme ceux des adolescents et jeunes (Rwenge, 2012). En somme, il n’y a pas de limite d’âge
universellement reconnue pour désigner les adolescents et les jeunes.
Dans cette recherche, les termes « adolescents et jeunes », « jeunes » et « jeunes adultes » sont
utilisés pour désigner la population de 15-24 ans. La période d’adolescence est fixée à 15-19
ans et celle de la jeunesse à 20 à 24 ans.

En outre, j’emploierai les termes « typologie de ménage ou familiale » pour me référer à la


structure familiale des ménages. Cette composition des ménages à partir du lien de parenté avec
le chef de ménage a permis de distinguer une typologie familiale comme les « ménages/familles
monogames, polygames, monoparentales, etc. ».

v
Résumé
Comportements sexuels à risque au temps du VIH/Sida : le cas des jeunes en Côte
d’Ivoire
La prévalence du VIH/Sida en Côte d’Ivoire reste encore aujourd’hui très élevée au regard des
niveaux observés dans la sous-région ouest africaine. Un grand nombre des nouvelles infections
à VIH se produit chez les jeunes de 15 à 24 ans. C’est également dans cette tranche d’âge que
réside l’espoir d’inverser le cours de cette épidémie. Cette thèse se propose de questionner les
comportements sexuels à risque parmi les jeunes dans un contexte social et économique en
pleine mutation. L’objectif est d’appréhender les facteurs explicatifs de l’évolution des
comportements sexuels à risque. Les données utilisées proviennent de cinq sources
complémentaires : les enquêtes démographiques et de santé de 1998 et 2012, l’enquête sur les
indicateurs du Sida de 2005, l’enquête quantitative sur le contexte de la sexualité des jeunes
organisée dans le cadre du West Africa Agricultural Productivity Program (WAAPP) en 2015
et une enquête qualitative que nous avons menée en 2015 dans la ville d’Abidjan (Côte
d’Ivoire).
Les résultats mettent au jour une non observance des normes traditionnelles en matière de
sexualité en Afrique. Du fait de la modernisation, ces normes de comportements sexuels sont
incontestablement en évolution. Les rapports sexuels prônés, autrefois, exclusivement dans le
cadre du mariage, notamment chez les filles tendent à s’estomper avec une proportion croissante
de jeunes qui s’engage dans une sexualité prémaritale. L’affaiblissement des modes
traditionnels de contrôle social, l’émancipation hâtive des jeunes de leur famille ainsi que le
recul de l’implication des membres de la famille élargie dans la socialisation ont pour
conséquence une sexualité à haut risque d’IST, notamment le VIH/Sida. De plus, cette sexualité
des jeunes célibataires intervient souvent à un âge précoce où leur immaturité physique et leur
manque d’informations approfondies sur le Sida les exposent à plus de risques. Cette étude
montre que le calendrier de l’initiation sexuelle prémaritale conditionne le recours ou non au
préservatif. Ainsi, les jeunes qui commencent leur vie sexuelle de façon précoce sont plus
enclins à ne pas recourir au préservatif au moment de cette occurrence. En s’intéressant au
multipartenariat sexuel, les résultats montrent que l’adoption d’un tel comportement émane de
décisions individuelles influencées surtout par l’environnement familial et le contexte socio-
économique. L’analyse compréhensive du multipartenariat à travers le discours des participants
met en lumière des aspects insuffisamment pris en compte dans les enquêtes quantitatives
standardisées. Il ressort en autres que la désarticulation de la socialisation ou la rupture des liens
sociaux et affectifs sont influents sur le recours aux partenaires multiples. Enfin, on note que
les pratiques préventives chez les jeunes ont connu des progrès notables entre 1998 et 2012
mettant ainsi en évidence l’efficacité des stratégies de prévention en l’occurrence la
sensibilisation, l’accessibilité aux préservatifs. Du point de vue programmatique, ce résultat est
plutôt encourageant car il prouve que la lutte contre le Sida progresse légèrement dans le pays.
En revanche, entre 2005-2012, la proportion des jeunes n’ayant pas fait usage de préservatifs
est restée stable. Comme les jeunes résidant en ville et les plus instruits ont davantage contribué
au maintien des comportements à risque, il s’avère nécessaire de redéfinir les objectifs et
reformer les programmes des préventions des IST en Côte d’Ivoire.

Mots-clés : VIH/Sida, sexualité prémaritale, comportement sexuel à risque, calendrier


d’initiation sexuelle, multipartenariat, préservatif, jeunes, Côte d'Ivoire.

vi
Abstract

Sexual risk behaviour in the time of AIDS : the case of young people in
Ivory Coast
The prevalence of HIV/AIDS in Ivory Coast remains considerably high compared to the levels
observed in other West African countries. Most new HIV infections cases occur among young
people of age 15-24 years. The hopes of reversing the trend of this epidemic lie in this age
group. This dissertation aims at examining sexual risk behaviors among young people in a
changing social and economic context. The objective is to understand factors that could explain
the evolution of risky sexual behavior. The data used in this dissertation is from five
complementary sources: The Demographic and Health Surveys of 1998 and 2012, the AIDS
Indicator Survey of 2005, the context of youth sexuality survey as part of West Africa
Agricultural Productivity Program (WAAPP), 2015 and a qualitative survey we organized in
the city of Abidjan (Côte d'Ivoire), 2015.
Our findings reveal a lack of compliance with traditional norms of sexuality in Africa. Sexual
intercourse formerly exclusive in marriage, especially among girls, tends to fade while
premarital sex is on the rise. Traditional methods of social control are weakening, an early
emancipation of young people from their families is being observed and a decline in the
involvement of extended family members in socialization, resulting in high-risk sexuality for
sexually transmitted infections including HIV / AIDS. Moreover, this sexuality of young singles
often comes at an early age insofar as a lack of physical immaturity and a lack of information
on AIDS puts them at greater risk. This study shows that the timing of premarital sexual
initiation determines whether or not condoms are used. Thus, young people who start their
sexual life early are more likely not to use condoms at the time of this occurrence. By looking
at multiple sex partnerships, the results show that the adoption of such behavior emanates from
individual decisions influenced mainly by the family environment and the socio-economic
context. A comprehensive analysis of multi-partnership based on a qualitative survey highlights
aspects that are not sufficiently taken into account in standardized quantitative surveys. In
addition, it appears that the disarticulation of socialization or the breakdown of social and
emotional ties has an influence on the use of multiple partners. Finally, we note that preventive
practices among young people have made significant progress between 1998 and 2012. From a
programmatic point of view, this result is rather encouraging because it proves that the fight
against AIDS is progressing in the country. However, between 2005-2012, the proportion of
youth who didn’t use condoms remained stable. As young urban residents and the most
educated have contributed more to the maintenance of risky behavior, it is necessary to redefine
the objectives and reform the STI prevention programs in Côte d'Ivoire.

Key-words : HIV/AIDS, premarital sexuality, sexual risk behaviour, timing of first sexual
intercourse, multipartner, condom, young people, Ivory Coast.

vii
Sigles et abréviations

AGEPE : Agence d'études et de Promotion de l'Emploi


ANRS : Agence Nationale de Recherche sur le Sida et les hépatites virales
ARV : Antirétroviral / Antirétroviraux
CAP : Connaissances Attitudes Pratiques
CEPED : Centre Population et Développement
CERF : Fonds Central d’Intervention d’Urgence ou Central Emergency Response Fund
CHU : Centre Hospitalier Universitaire
CNLS : Conseil National de Lutte contre le Sida
CNO : Centre-Nord-Ouest
DSRP : Documents de Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté
EDS : Enquête Démographique et de Santé
EEMCI : Enquête nationale sur l’Emploi auprès des Ménages en Côte d’Ivoire
EIS : Enquête sur les Indicateurs du Sida
EI/ PSCAP : Entretien Individuel/Professionnel du Sexe Connaissance Attitude Pratique
EMF : Enquêtes Mondiales sur la Fécondité
ENSETE : Enquête Nationale sur la Situation de l’Emploi et du Travail des Enfants
ENSEA : Ecole Nationale Supérieure de Statistique et d’Economie Appliquée
FCFA : Franc de la Communauté Financière Africaine
INED : Institut National d'Etudes Démographiques
INS : Institut National de la Statistique
INSEE : Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques
INSERM : Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale
IST : Infections Sexuellement Transmissibles
IVG : Interruption Volontaire de Grossesse
MEMPD : Ministère d'État, Ministère du Plan et du Développement
MICS : Multiple Indicator Cluster Survey
MLS : Ministère de la Lutte contre le Sida
MSHP : Ministère de la Sante et de l'Hygiène Publique

viii
OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Economique
OMS : Organisation Mondiale de la Santé
ONG : Organisation Non Gouvernementale
ONU : Organisation des Nations Unies
ONUSIDA : Programme commun des Nations Unies sur le VIH /Sida
ORC : Opinion Research Corporation
PEPFAR : President's Emergency Plan for AIDS Relief
PIB : Produit Intérieur Brut
PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement
PRB : Population Reference Bureau
PVVIH : Personnes Vivant avec le VIH
RCI : République de Côte d’Ivoire
REPCI : Rapport national sur l'Etat et le devenir de la Population de la Côte d'Ivoire
RESEN : Rapport d'Etat du Système Educatif National
RGPH : Recensement Général de la Population et de l'Habitat
SIDA : Syndrome d'Immunodéficience Acquise
UNESCO : Organisation des Nations Unies pour l'Education, la Science et la Culture
UNFPA : Fonds des Nations Unies pour la Population
UNGASS : United Nations General Assembly Special Session
UNICEF : Fonds des Nations Unies pour l'Enfance
USAID : United States Agency for International Development
VIH : Virus de l'Immunodéficience Humaine
WAAPP : West Africa Agricultural Productivity Programme

ix
Sommaire
Dédicaces ................................................................................................................................................ ii

Remerciements ....................................................................................................................................... iii

Précisions pour la lecture ........................................................................................................................ v

Résumé ................................................................................................................................................... vi

Abstract ................................................................................................................................................. vii

Sigles et abréviations ............................................................................................................................ viii

Sommaire ................................................................................................................................................ x

Introduction générale............................................................................................................................... 1

CHAPITRE 1. Sexualité prénuptiale et comportements sexuels à risque chez les jeunes : état de la
question et approches théoriques ............................................................................................................ 8

CHAPITRE 2. Tendances générales des comportements sexuels et contexte de l’étude...................... 44

CHAPITRE 3. Données et approches méthodologiques ....................................................................... 73

CHAPITRE 4. Calendrier de l’initiation sexuelle des jeunes : quels effets sur l’utilisation de préservatif
............................................................................................................................................................. 108

CHAPITRE 5. Structure familiale et multipartenariat sexuel chez les jeunes : de l’approche quantitative
à l’approche bio-phénoménologique................................................................................................... 141

CHAPITRE 6. Tendances de la non utilisation du préservatif parmi les jeunes : une Analyse des sources
du changement et des déterminants ..................................................................................................... 180

Conclusion générale ............................................................................................................................ 215

Bibliographie ....................................................................................................................................... 224

Annexes ............................................................................................................................................... 253

Liste des tableaux ................................................................................................................................ 273

Liste des figures................................................................................................................................... 275

Table des matières ............................................................................................................................... 276

x
« Les jeunes sont la clé du combat contre le Sida. En leur offrant l’appui dont ils ont
besoin, nous pouvons leur donner les moyens de se protéger du virus. En leur
fournissant des informations honnêtes et directes, nous pouvons abattre le mur de
silence qui entoure toute la société. En créant des campagnes efficaces d’éducation et
de prévention, nous pouvons transformer l’enthousiasme, la force et les rêves d’avenir
des jeunes en outils efficaces pour combattre l’épidémie ».

ONUSIDA, 2003 (extrait du discours de Kofi Annan prononcé à l’Université


Zhejiang, Chine, en octobre 2002)

xi
Introduction générale

A l’échelle mondiale, l’épidémie du VIH s’est stabilisée grâce aux efforts de prévention, de
financements et un accès plus important aux soins ayant permis de contenir le virus (OMS,
2007). Toutefois, l’Afrique subsaharienne, avec les 25,6 millions de personnes vivant avec le
VIH en 2016, demeure la région la plus durement touchée. Elle concentre également près des
deux-tiers des nouvelles infections dans le monde (OMS, 2017). Cette épidémie constitue pour
de nombreux pays, la première cause de morbidité et de mortalité (Amat-Roze, 2003). Certes,
le nombre des nouvelles infections à VIH a baissé de 41% depuis 2000 et celui des décès liés
au Sida de 34%. En 2014, près de 90% des personnes qui connaissent leur séropositivité ont
accès aux traitements antirétroviraux (ONUSIDA, 2014). De même, entre 2000 et 2015,
l’espérance de vie a augmenté de 5 ans, inversant ainsi les tendances à la baisse observées dans
les années 1990 (OMS, 2016). Ces avancées prometteuses ne doivent pas occulter la persistance
de certains facteurs favorisant la propagation de l'épidémie. Il s'agit entre autres, des pratiques
sexuelles qui exposent les populations africaines à un risque élevé de contraction et de
transmission du VIH.

Les conséquences économiques, sociales, démographiques et sanitaires de cette pandémie sont


un véritable obstacle au développement du continent. En effet, le VIH/Sida accroît les dépenses
publiques dans le domaine de la santé et fragilise les services de santé déjà surchargés. Ainsi,
en Côte d’Ivoire, un allongement de la durée moyenne de séjour hospitalier et une élévation du
taux d’occupation des lits par les patients infectés par le VIH/Sida sont observés (RCI, 2009).
De même, il engendre une plus faible productivité des personnes malades, une baisse du revenu
des foyers ayant en leur sein des PVVIH, une chute de la consommation et de l’épargne, qui
sont autant de facteurs conduisant au ralentissement de la croissance économique. En Côte
d’Ivoire, la perte de la croissance du PIB attribuable au VIH/Sida est estimée à 0,8% (UNFPA,
2009).

En outre, le Sida touche davantage les pays les plus attractifs pour la main d’œuvre étrangère
notamment l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire et le Nigeria en occasionnant de nouveaux
départs de populations (Chabrol, 2002). Par exemple, la prévalence du VIH dans les complexes
agroindustriels, en Côte d’Ivoire, avoisine 17% (RCI, 2009). Par ailleurs, la cellule familiale,
premier maillon de la société, se trouve aussi affectée par cette épidémie à travers le
bouleversement de la distribution des rôles entre actifs et non actifs. Les réseaux familiaux qui

1
jouent un rôle crucial dans l’allègement des contraintes financières, en Afrique, commencent à
s'effondrer lorsqu'ils doivent prendre en charge trop d'orphelins et que le soutien de la famille
ne peut plus subvenir à ses besoins, et encore moins à ceux d'autrui (Beresford, 2001).

Si en Afrique de l’ouest, la majorité des pays ont un taux de prévalence inférieur à 2%, la Côte
d’Ivoire peut être considérée comme un pays de forte prévalence du Sida même si le taux est
nettement inférieur à ceux des pays de l’Afrique australe où la pandémie est la plus répandue
en Afrique. La prévalence du VIH/Sida chez les adultes âgés de 15 à 49 ans est estimée à 1%
au Burkina Faso, 1,1% au Mali, 2,1% au Libéria, 1,7% en Guinée et 2% au Ghana 1. Avec un
taux de prévalence de 3,7% en 20122, la Côte d’Ivoire se situe largement en tête dans cette sous-
région et figure même parmi les 15 pays du monde les plus affectés (ONU, 2001). Depuis près
de deux décennies, l'infection à VIH/Sida constitue un véritable défi pour le pays. Pour répondre
à la menace, les autorités ont mis en place un ministère en charge de la lutte ainsi qu’un Conseil
National dont le but était de mettre l’accent sur la multisectorialité, la décentralisation des
activités et le renforcement de la coordination nationale.

Malgré les efforts déployés par les différents acteurs de la lutte contre ce fléau pour limiter sa
propagation et réduire son impact, le niveau de la prévalence reste élevé. Les données
épidémiologiques disponibles montrent que les jeunes de 15 à 24 ans sont parmi les couches de
la population les plus touchées. Selon l’OMS, plus de la moitié des nouvelles infections
aujourd’hui se produisent dans cette tranche d’âge et plus de onze millions d’entre eux vivent
avec cette maladie. Plus grave encore, la majorité de ces jeunes ne savent même pas qu’ils sont
porteurs du virus. Des millions d’autres n’ont que peu ou pas de connaissances sur cette maladie
(UNICEF et al., 2002).

Devant l’impact dévastateur du Sida, des taux élevés de grossesses non désirées et des
avortements clandestins, les problèmes de santé des adolescents et des jeunes sont devenus une
priorité de santé publique, en Afrique subsaharienne (Biddlecom et al., 2008). L’intérêt accordé
à cette frange de la population vient d’abord de leur poids démographique dans cette partie du
monde : les moins de 25 ans représentent les deux-tiers de la population totale dans la plupart
de ces pays contre 25% à 30% dans les pays d’Europe (Guengant et May, 2011). En outre, les
programmes de lutte contre le Sida mis en place dans les pays d’Afrique subsaharienne se
focalisent davantage sur les jeunes car ils sont plus susceptibles que les adultes d’adopter des

1
La prévalence du VIH parmi la population générale (15-49 ans) est obtenue avec STATcompiler à partir des
données EDS 2010 du Burkina Faso, 2014 du Ghana, 2012 de la Guinée, 2013 du Libéria et 2012-2013 du Mali.
2
Les dernières estimations de l’ONUSIDA (2015) situent la prévalence en Côte d’Ivoire à 3,2%.

2
comportements sans risque et de s’y tenir. En les ciblant, les chances de succès semblent plus
probables puisqu’ils sont encore « malléables » et qu’il est possible de leur faire accepter plus
facilement des comportements protecteurs (Baya, 2006). Enfin, investir dans la santé sexuelle
et reproductive des adolescents et des jeunes est un élément important dans la perspective
d'exploiter le dividende démographique en Afrique (Bloom, 2016). En fait, la baisse de la
fécondité et la tenue de bonnes pratiques de gestion macroéconomique ne suffiront pas à faire
bénéficier aux pays africains des retombées du dividende démographique sans un accroissement
de la population en âge de travailler (les jeunes représentent donc cet espoir).

Depuis la Conférence Internationale sur la Population et le Développement (CIPD) tenue en


1994, au Caire, la santé sexuelle et reproductive des adolescents et des jeunes a connu un regain
d’attention comme en témoigne un extrait du programme d’action3 : « Essayer de résoudre les
problèmes de santé en matière de sexualité et de reproduction des adolescents, notamment les
grossesses non désirées, les avortements pratiques dans de mauvaises conditions de sécurité,
les maladies sexuellement transmissibles, dont la contamination par le VIH et le Sida, en
encourageant un comportement procréateur et sexuel responsable et sain, y compris
l'abstinence, et en fournissant des services et une orientation particulièrement adaptés à ce
groupe d’âge; réduire considérablement le nombre des grossesses d'adolescentes ». (Nations
Unies, 1997, p.57). Cette problématique se trouve désormais au centre des préoccupations
actuelles tant sur le plan scientifique que programmatique (Beninguisse, 2007).

Les problèmes de santé des jeunes proviennent en partie de leur comportement sexuel qui est à
relier aux transformations biologique et comportementale (Miangator, 2010). Les changements
biologiques entraînent des modifications physiques qui sont elles-mêmes associées à une série
de changements psychologiques et affectifs (Perrin-Escalon et Hassoun 2004). A cet âge, les
jeunes sont animés d’un sentiment d’autonomie, d’indépendance et d’invulnérabilité (Moloua
et al., 2004). Leur comportement sexuel est caractérisé par une sexualité précoce, un recours
aux partenaires multiples et/ou occasionnels et une faible utilisation du préservatif, tout ceci
dans un contexte prémarital. En effet, l’activité sexuelle prémaritale est considérée comme une
période où l’exposition au risque de contracter le VIH et les IST est la plus grande (Caraël,
1995). Dans la plupart des pays africains, de nombreuses études soulignent le recul de l’âge au
premier mariage et une augmentation de la sexualité prémaritale (Antoine, 2002 ; Delaunay et
al., 2001). En réalité, les comportements des jeunes relatifs à la sexualité sont en pleine

3
Il s’agit du point 7.44 du programme d’action de la CIPD.

3
évolution. Traditionnellement, la sexualité était régie par une entrée précoce en union surtout
chez les femmes, des rites d’initiation pour les garçons ou des normes strictes de chasteté aux
célibataires. La sexualité n’était alors légitime que dans le mariage : les fiançailles et la virginité
jusqu’au jour des noces. On observe de nos jours, une période plus ou moins longue selon les
sociétés, s’écoulant entre l’initiation sexuelle et le premier mariage traduisant ainsi d’une
dissociation entre mariage et sexualité. En d’autres mots, on assiste à un accroissement de
l’entrée en sexualité des jeunes célibataires. Cette dynamique est presqu’universelle en Afrique
subsaharienne et dans la majorité des pays d'autres régions (Blanc et Way, 1998). Selon
Kalambayi (2007), la sexualité préconjugale n’est pas un phénomène nouveau mais ce qui
change c’est son intensification et sa banalisation avec souvent une approbation tacite des aînés.
Ainsi, de phénomène tabou dans bon nombre de sociétés africaines, elle est devenue presque
généralisée voire ordinaire, dépassant les frontières d’âges et de statuts matrimoniaux.
Toutefois, cette activité sexuelle hors mariage intervient dans un contexte où le contrôle social
est délité surtout dans les villes. De plus, l’urbanisation, les crises économiques, le chômage et
la scolarisation des filles (leur entrée dans le monde du travail et le changement de statut qui
s’en suit) ont conduit à une diversification accrue des formes de familles en Afrique. Tout
comme dans le monde entier, on a pu constater une profonde évolution des structures familiales
avec le développement des unions libres, l’émergence des ménages monoparentaux et le
changement radical de fonctionnement des familles étendues (Barou, 2017). Ces diverses
mutations de la société ont un impact sur les attitudes sexuelles des jeunes en Afrique
subsaharienne notamment la sexualité et la fécondité préconjugales.

La fécondité est l’une des dimensions abordée dans les travaux sur la sexualité prémaritale, en
raison du fait qu’une grossesse hors union n’est usuellement pas le fruit d’un acte délibéré et
donc non désirée notamment chez les adolescentes scolarisées car elle peut entrainer l’arrêt des
études et conduire celles-ci à une situation de précarité financière. Certaines de ces grossesses
se soldent par des avortements clandestins mettant en danger la vie et la fertilité des jeunes
filles. En effet, les méthodes contraceptives sont très peu utilisées parmi les jeunes engagés
dans une sexualité prénuptiale. En Côte d’Ivoire, la fécondité des 15-24 ans contribue pour
près de 13% à la fécondité totale et à 19 ans, 42% des jeunes filles ont déjà eu au moins un
enfant. En revanche, la prévalence contraceptive moderne est respectivement de 29% et 32%
chez les 15-19 ans et 20-24 ans (EDS-MICS 2012).

Dans le contexte de la propagation de l’épidémie du VIH/Sida, le recul du mariage associé à la


sexualité précoce conduisant à une augmentation de la sexualité des jeunes célibataires met en

4
évidence une vulnérabilité particulière aux risques sexuels (Belec, 2007). De manière générale,
l’utilisation du préservatif a significativement augmenté en Afrique subsaharienne (Cleland et
Ali, 2006) mais les rapports sexuels des jeunes demeurent très peu protégés (Rossier et al.,
2013). Pourtant, en l’absence de vaccin, à l’heure actuelle, le préservatif est l’un des moyens
efficaces de protection contre les IST/VIH/Sida. En effet, aucun traitement n’a réussi à
permettre une guérison complète. Les traitements antirétroviraux sont les médicaments les plus
efficaces qui existent mais ils ne sont pas accessibles à l’immense majorité des groupes les plus
exposés à l’infection (Tsafack, 2009) même si le nombre de personnes recevant les ARV a
fortement augmenté dans les pays à revenus intermédiaires. Dans le même temps, la grande
majorité de ces jeunes ignorent leur statut sérologique constituant ainsi un facteur important de
propagation de la maladie. Par exemple, en Côte d’Ivoire, alors que seulement 68,1% des filles
de 15-24 ans ne connaissent pas leur statut sérologique récent, cette proportion atteint plus de
81% chez les garçons (EDS-MICS 2011). Or le niveau actuel du dépistage est considéré comme
trop faible pour que les stratégies de prévention et de traitement soient pleinement efficaces.

Même si les possibilités de réduire considérablement l’incidence du VIH sont extrêmement


encourageantes, selon l’ONUSIDA, certains signes indiquent une augmentation des
comportements sexuels à risque dans de nombreux pays dont la Côte d’Ivoire (ONUSIDA,
2013). Cela signifie que les efforts en matière de politiques de prévention ne semblent pas
suffisants pour inverser cette tendance. Bien que le niveau de connaissance sur le VIH/Sida soit
de plus en plus élevé, les changements de comportements apparaissent lents alors qu’ils ont
permis la diminution de l’incidence du VIH au Zimbabwe à travers la réduction du nombre de
partenaires sexuels, l'utilisation plus fréquente du préservatif et l'âge plus tardif du premier
rapport sexuel. Dans le contexte africain où la voie majeure de transmission est sexuelle et en
particulier hétérosexuelle, la lutte contre l’épidémie repose avant tout sur une action de
prévention visant à modifier les conduites sexuelles des individus (Tijou-Traoré, 2003).

Face à cette situation, les interactions entre les comportements sexuels des jeunes et les risques
face au Sida méritent d’être examinés, car comme le rappellent Desgrées du Loû et Ferry (2006,
p.4) « lorsque la transmission est principalement sexuelle, ce ne sont que lors d'échanges
sexuels que l’individu s'expose et que la transmission peut avoir lieu ». Le calendrier de
l’initiation sexuelle a-t-il une incidence sur la protection de ce rapport ? Quelle est la relation
entre un premier rapport sexuel de nature précoce et le non usage de préservatif ? En quoi la
structure familiale influence-t-elle le recours aux partenaires sexuels multiples ? Les tendances
du non recours au préservatif relèvent-elles d’un changement de comportement de la population

5
juvénile ou au contraire de l’effet de structure de la population ayant répondu aux différentes
enquêtes ? Il s’agit dans cette perspective d’isoler les parts respectives des effets de structure
ou de composition et de performance sur la non utilisation de préservatif. Les deux hypothèses
plausibles seraient que les variations des tendances de la non protection des rapports sexuels
soient liées, d’une part au réflet des comportements réels ou d’autre part au changement dans
la composition de la population jeune entre 1998 et 2012. Et enfin, quels sont les facteurs
explicatifs de la non utilisation du préservatif dans le temps ? Les comportements des individus
pouvant varier dans le temps et selon les contextes de la vie, la recherche des déterminants se
fera selon les périodes d’observation retenues. Pour répondre à l’ensemble de ces questions,
cette étude a mobilisé une démarche combinant approches quantitative et qualitative.

N'ayant pas connu les années noires de l’épidémie sans la trithérapie, les jeunes ne semblent
pas craindre le VIH au point de se détourner d’une activité sexuelle sans risque. Les travaux
antérieurs indiquent que les comportements sexuels sont susceptibles de varier selon les
caractéristiques socio-culturelles et économiques du cadre familial, individuelles et
extrafamiliales (Meekers et Calvès, 1997 ; Kaptue, 1998 ; Rwenge, 2000 ; 2010, 2013 ;
Kalambayi, 2007 ; Kobelembi, 2005 ; Guiella, 2012).

L’objectif principal de cette recherche est de contribuer à l’identification des facteurs aussi bien
individuels que familiaux associés au comportement sexuel à risque chez les jeunes en Côte
d’Ivoire.

Cette thèse s’articule autour de six chapitres. Le premier chapitre fait une synthèse critique de
la littérature sur les questions de sexualité prénuptiale chez les jeunes et de comportements
sexuels à risque en Afrique subsaharienne. Dans ce chapitre, nous présentons aussi les concepts
d’adolescent et de jeune ainsi que les approches théoriques permettant d’expliquer les
comportements sexuels. La description des tendances générales des comportements sexuels
menée dans le second chapitre permet d’explorer la situation dans quelques pays du monde. En
sus, une présentation sommaire du contexte socioéconomique, politique et épidémiologique
dans lequel s’inscrit la recherche s’est avérée comme préalable avant toute analyse. En effet,
les comportements sexuels des individus dépendent fortement des possibilités et des contraintes
qu’offre leur environnement. Ainsi, intégrer le contexte social et économique est indispensable,
dans la compréhension des attitudes des jeunes, pour mieux définir les stratégies de prévention.
Le troisième chapitre présente les données et l’approche méthodologique utilisées. Il a été

6
également l’occasion de restituer en profondeur les enquêtes quantitative et qualitative
complémentaires que nous avons réalisé.

Les trois derniers chapitres présentent les résultats des analyses réalisées. Ils s’attèlent à
identifier les facteurs familiaux, économiques et individuels pouvant expliquer la dynamique
des comportements sexuels à risque parmi les jeunes. En effet, ces analyses débutent avec le
quatrième chapitre qui traite l’articulation entre le calendrier de l’initiation sexuelle des jeunes
et l’utilisation du préservatif. Ainsi, les analyses mettent en évidence la manière dont l’entrée
précoce en sexualité peut déterminer ou non l’usage du préservatif. Le cinquième évalue la
relation entre la structure des ménages et le multipartenariat à partir d’une analyse quantitative
complétée par une approche qualitative. Le dernier chapitre s’intéresse aux tendances de la non
utilisation du préservatif à travers d’une part les sources de changement et d’autre part, les
déterminants.

7
CHAPITRE 1. Sexualité prénuptiale et comportements
sexuels à risque chez les jeunes : état de la question et
approches théoriques

En Afrique subsaharienne, les premières études sur la sexualité remontent à la période coloniale
et elles étaient centrées sur les causes d’infécondité et de stérilité surtout en Afrique centrale et
ce en l’absence de l’épidémie du VIH/Sida (Rwenge, 1999, 2000, Anoh et Talnan, 2005,
Kalambayi, 2007). Par la suite, l’activité sexuelle a été cernée au travers de la régulation des
naissances, objectif assigné aux programmes internationaux d’enquêtes (Jaspard, 2005). Mais
depuis l’avènement de cette épidémie, les recherches menées sur le comportement sexuel et
procréateur des jeunes se sont développées en s’inscrivant dans une perspective de santé
reproductive.

C’est à la Conférence Internationale sur la Population et le Développement (CIPD) de 1994 que


l’on va passer des concepts de Santé Maternelle et Infantile et Planification Familiale
(SMI/PF)4au concept de Santé de la Reproduction (SR) plus globalisant, prenant en compte
toutes les étapes de la vie (naissance, adolescence, procréation, ménopause) aussi bien chez
l’homme que chez la femme (MEMPD, 2006). En outre, le plan d’action de cette conférence a
élaboré la toute première définition de la santé de la reproduction comme étant « un état de
bien-être physique, mental et social total et non la simple absence de maladie ou d'infirmité,
pour tout ce qui touche au système reproducteur » (Ashford, 2004). C’est donc autour de ce
paradigme SR que va se développer la problématique de la sexualité et des comportements
sexuels à risque chez les jeunes (Guiella, 2012). Toutefois, Bozon (2009) reproche, aussi bien
à la CIPD qu’à la conférence mondiale sur les femmes de Beijing de 1995, la manière dont elles
ont envisagé la sexualité des jeunes, appelés généralement adolescents. A l’analyse des
documents relatifs aux programmes d’action de ces conférences, l’auteur souligne que le droit
reconnu aux femmes de décider librement de leur sexualité s’applique aux femmes en couple
mais ne s’applique pas aux jeunes femmes célibataires.

Parallèlement à la propagation du VIH/Sida, la littérature met en évidence une augmentation de


l’activité sexuelle prénuptiale des jeunes en Afrique subsaharienne (Feyisetan et Pebley, 1989 ;
Djamba, 1997, Thiriat, 1999 ; Bozon et Hertrich, 2004 ; Beninguisse, 2007 ; Rossier et Ortiz,

4
Le concept SMI/PF prenait uniquement en compte le couple mère-enfant

8
2011, 2013), une entrée en vie sexuelle précoce (Meekers et Calvès, 1997 ; Meekers et Ahmed,
1997) et des comportements à risque comme le multipartenariat et la non utilisation de
préservatifs lors des rapports sexuels exposant ainsi les adolescents et les jeunes aux IST/Sida,
aux grossesses précoces et souvent non désirées et aussi à des avortements clandestins réalisés
parfois dans de mauvaises conditions de sécurité (Akoto et al., 2005 ; Anoh et Talnan, 2005 ;
Rwenge, 2012 ; Guillaume, 2000).

La plupart des travaux antérieurs tentent d’expliquer les comportements sexuels des adolescents
et des jeunes à partir des approches socio-culturelles, économiques, institutionnelles et genre.
Toutefois, l’approche globale ou systémique d’explication des comportements sexuels mérite
d’être privilégiée dans toute recherche puisque ceux-ci ne peuvent être cernés qu’en intégrant
les effets des institutions politiques, des communautés locales, de la famille, de l’environnement
extrafamilial et des individus concernés (Rwenge, 2012).

Ce chapitre a pour objectif de dresser un état des lieux de la problématique de la sexualité


prémaritale et des comportements sexuels à risque en Afrique en mettant un accent particulier
sur la partie subsaharienne du continent. Partant de la définition des concepts d’adolescent et
de jeune, nous abordons aussi dans ce chapitre la sexualité prémaritale avec son corollaire de
conséquences et enfin, nous présentons les approches explicatives des comportements sexuels.

1.1. Définition des objets d’étude

1.1.1. Adolescent ou jeune : Quel concept retenir dans cette recherche ?


Dans la littérature, le groupe d’âge de 15 à 24 ans est aussi bien assimilé à l’adolescence qu’à
une partie de l’adolescence et de la jeunesse. Délimiter la période de l’adolescence de celle de
la jeunesse n’est pas chose aisée à cause de la multiplicité des définitions qui entourent ces
concepts. En effet, les périodes qui séparent le statut d’adolescent de celui de jeune peuvent
varier sensiblement d’une culture à une autre et même d’un chercheur à un autre dans la mesure
où les critères pour les définir peuvent changer en fonction des données disponibles et des
objectifs poursuivis par la recherche. C’est donc à juste titre que Evina (1998) a pu dire que le
concept d’adolescent recouvre plusieurs dimensions : biologique, démographique, sociale,
psychosociale, physiologique, juridique, économique.

C’est au XIXe siècle, avec le développement de la scolarisation, qu’émerge progressivement la


notion d’adolescence comme période de la vie et comme concept (De Linares et Metton-Gayon,
2008). C’est ce qui a amené certains auteurs à penser que l’adolescence et la jeunesse sont des

9
produits spécifiques de la modernité (Diop, 2010). Dans de nombreuses sociétés traditionnelles
la période d’adolescence était inexistante à cause du caractère précoce des mariages et des
procréations. Le passage de l’enfance à l’âge adulte, avec tous les droits et les devoirs des
adultes, se faisait directement ; on quittait alors l’enfance pour le statut d’adulte, épouse et mère
pour les filles (Diop, 1995 ; Yakam, 2007).

Alors que les démographes ont recours à l’âge pour délimiter l’adolescence de la jeunesse, les
sociologues utilisent d’autres critères (Tolno, 2009). En s’appuyant sur l’une des premières
analyses sociologiques réalisées par Parsons en 1942, Galland (2001) décrit l’adolescence
comme étant une période d’insouciance et d’irresponsabilité précédant l’âge adulte, où les
jeunes endossent enfin les rôles sociaux de leurs aînés. Selon Cuin (2011), les sociologues
préfèrent le concept de jeunesse à celui d’adolescence, souvent réduit au statut de variable
explicative de nature exogène : la fameuse crise d’adolescence. Cette crise statutaire serait due
au fait que l’adolescent n’est, à cette période de sa vie, ni enfant ni adulte. L’auteur poursuit
pour dire que « la notion de jeunesse fait référence à une catégorie socio-démographique
extrêmement hétérogène, celle d’adolescence à une expérience originale et universelle ».

Le nombre important de disciplines qui s’intéressent à l’adolescence traduit la difficulté d’une


définition claire et admise de tous et met davantage en évidence l’ambiguïté des connotations
données à ce concept tant dans les pays industrialisés que dans les pays en développement
(Akoto et al., 2005, Tolno, 2009). Selon Diop (2010), cette grande variation dans l’utilisation
de ce concept crée de multiples polémiques et controverses entre les intervenants et les
différents spécialistes en sciences sociales. Les travaux antérieurs (Akoto et al., 2005, Diop,
2010) indiquent que les adolescents sont généralement des individus appartenant notamment
aux groupes d’âge 10 à 19 ans, 15 à 19 ans ou 15 à 24 ans mais ces groupes d’âge peuvent
changer selon le contexte des études et les institutions internationales ayant en charge les
problèmes des adolescents et des jeunes, etc.

Pour l’OMS, l’adolescence est la période de croissance et de développement humain qui se


situe entre l’enfance et l’âge adulte, c'est-à-dire entre les âges 10 et 19 ans. Au cours de cette
période, les individus ne sont pas entièrement capables de comprendre des concepts complexes
ou les relations entre un comportement et ses conséquences, ou bien encore le degré de maîtrise
qu’ils ont ou peuvent avoir sur la prise de décisions en matière de santé, y compris s’agissant

10
du comportement sexuel. Ainsi, ils seraient plus vulnérables à l’adoption de comportements
sexuels à risque.5

Même si l’adolescence renvoie à la période de vie où l'individu fait la transition du stade de


l'enfance à celui d'adulte ou encore celle située entre la puberté et la maturité (Beninguisse,
2007), il est par contre difficile de situer où finit cette enfance et où commence l'âge adulte car
dans chaque société, un événement particulier marque et légitime la fin de l'adolescence (Diop,
1995). Ainsi, l’adolescence s’achève chez les occidentaux par avec « l’accès à un emploi
rémunéré, avec le départ de la maison familiale ou encore avec la maturité psychologique qui
sort la jeune fille ou le jeune garçon de sa crise d'adolescence » (Delaunay, 1994, p.27). Dans
les sociétés africaines traditionnelles, la fin de l’adolescence est caractérisée par des cérémonies
d’initiation qui marquent l’accès à des responsabilités ou à des rôles sociaux de la vie adulte.
Par exemple, dans les sociétés agraires, alors que la sortie de l’adolescence des jeunes garçons
est marquée par l’accès à la terre débouchant sur leur rôle économique, celle des jeunes filles
se fait par le mariage et l'initiation à leur rôle de mère et d'épouse (Delaunay, 1994). Par ailleurs,
Akoto et al. (2005) révèlent plutôt que la puberté indique le début biologique de l’adolescence,
mais les signes qui marquent son achèvement sont divers et mal définis. Le début de la puberté
comme ligne de démarcation claire entre l’enfance et l’adolescence ne simplifie pas les choses,
selon l’UNICEF (2011), qui indique qu’elle survient à des moments très différents chez les
filles et les garçons et pour chaque personne de même sexe. Tout cela témoigne de la variabilité
de ce concept et des différentes réalités qu’il recouvre.

Quant à la jeunesse, elle renvoie à une étape de vie entre l’adolescence et la vie adulte.
« Postérieure à l’adolescence et à ses difficultés psychosociales, mais différente de l’âge adulte
parce que non inscrite dans un rôle conjugal et a fortiori familial, la jeunesse deviendrait un
âge à part entière » (Galland, 1993, p.254). Avec l’effritement des systèmes de valeurs
traditionnelles sous l’effet de la modernisation, la jeunesse émerge comme une étape de vie
importante en Afrique. Cette émergence a été possible en raison de l’allongement de la période
de célibat, des nouvelles formes de socialisation donnant plus d’autonomie ou d’indépendance
aux individus puisque ceux-ci sont placés hors de la sphère des lignages (Calvès et al., 2006).
La distinction entre la jeunesse et l’adolescence est culturellement établie par Galland (2001).
Tandis qu’à l’adolescence, l’individu est sous la dépendance et la protection des parents ou des
éducateurs, à la jeunesse, il acquiert « une forme d'indépendance à l'égard de la génération

5
http://www.who.int/maternal_child_adolescent/topics/adolescence/dev/fr/

11
aînée, même si cette indépendance n'est le plus souvent que partielle ». Ainsi, elle serait une
phase préparant l’individu à un accès progressif aux rôles adultes. En somme, pour l’OMS, la
jeunesse « youth » correspond à la classe d’âges de 15-24 ans et se distingue de la population
jeune « young people » qui englobe l’ensemble des individus âgés de 10 à 24 ans6. Par ailleurs,
dans les EDS et les EIS, le terme adolescent fait référence aux enquêtés âgés de 15 à 19 ans.

Mais alors comment différencier l’adolescent du jeune, au regard de toutes ces définitions ?
Même si Beninguisse (2007) reconnaît que ces deux concepts sont difficiles à cerner, il conclut
néanmoins que l’adolescent est un jeune moins âgé qui n’est pas encore adulte et que les
adolescents sont donc une sous-catégorie des jeunes. En l’absence de définitions univoques de
l’adolescence et de la jeunesse et partant des données à analyser dans cette recherche, nous
privilégions le critère de classe d’âge. Ainsi, la tranche d’âge de 15-24 ans est retenue pour
désigner les « jeunes ». Elle sera dans certains cas, subdivisée en deux générations : adolescents
(15-19 ans) et jeunes (20-24 ans) pour mesurer les variations dans les comportements sexuels.
Si les adolescents ou les jeunes appartiennent aux mêmes tranches d’âge, ils ne forment pas un
groupe homogène, en ce sens qu’ils vivent dans des contextes culturels, familiaux, socio-
économiques et politiques différents où se forgent des expériences et des personnalités variées
(Yakam, 2007). Ainsi, leurs comportements en matière de sexualité seront empreints de
spécificités contextuelles.

1.1.2. Qu’entend-t-on par sexualité prénuptiale et comportements sexuels à risque ?


L’importance et la croissance de l’activité sexuelle des adolescents et des jeunes avant le
mariage, en Afrique, ne fait plus aucun doute (Delaunay, 1994 ; Wellings et al., 2006). Une
enquête réalisée en 1982 dans la ville d’Ibadan, au Nigéria confirmait le niveau élevé et
croissant de l’activité sexuelle des adolescents et jeunes célibataires (Nichols et al., 1986). Des
études récentes (Rossier et al., 2013) révèlent même que l’activité sexuelle prénuptiale est une
pratique généralisée en milieu urbain, parmi les jeunes instruits et aisés.

Si par le passé, les premiers rapports sexuels coïncidaient avec le mariage, aujourd’hui, il existe
un décalage entre les deux occurrences. En effet, du fait de plusieurs facteurs dont
l’urbanisation, la modernisation des modes de vie, la crise économique, la généralisation de la
scolarisation notamment celle de la jeune fille, les mariages des jeunes générations ne sont plus
aussi précoces qu’autrefois. On assiste donc à une longue période de célibat caractérisée par

6
http://apps.who.int/adolescent/second-decade/section2/page1/recognizing-adolescence.html , consulté le
12/08/2017

12
une sexualité prénuptiale due à la hausse de l’âge au mariage et à l’écart qui se creuse entre
l’âge au premier rapport sexuel et celui de la mise en union (Delaunay et Guillaume, 2007 ;
Beninguisse, 2007 ; Rossier et al., 2013 ; Bakass et Ferrand, 2013). Cette période de sexualité
préconjugale n’est pourtant pas sans risque pour les jeunes dans la mesure où leurs rapports
sexuels ne s’inscrivant pas dans un cadre « formel », ils échappent ainsi à tout contrôle, laissant
libre cours à des comportements peu responsables. Cette observation est corroborée par
Delaunay et Guillaume (2007), lorsqu’elles soulignent que cette période de sexualité juvénile
autonome, échappant au contrôle des aînés, aboutit à une plus grande individualisation des
comportements. Ainsi, les jeunes cumulent plusieurs comportements sexuels dits « à risque » :
précocité de l’entrée en vie sexuelle, développement du multipartenariat sexuel7, intensité de
l’activité sexuelle prénuptiale et non utilisation du préservatif car comme le soulignent Rossier
et al. (2013) les rapports sexuels des jeunes africains restent insuffisamment protégés.
Tous ces comportements sexuels sont qualifiés de « à risque » puisqu’il s’agit d’un ensemble
de pratiques et d’actes sexuels qui ont la particularité de soumettre l’individu à un risque, celui
de contracter les IST/Sida. Au-delà même du risque de transmission sexuelle de l’infection à
VIH et des autres IST, la sexualité prémaritale des adolescents et des jeunes a de lourdes
répercussions sur l'individu, sa famille et l'ensemble de la communauté. Ce sont notamment les
cas croissants de grossesses non désirées, d’avortements clandestins, de complications à
l'accouchement, de mortalité infantile et d’infection par des maladies sexuellement
transmissibles.

1.2. Conséquences négatives de la sexualité prémaritale des adolescents et jeunes

La généralisation des relations sexuelles préconjugales des adolescents et des jeunes provoque
un certain nombre de préoccupations liées aux risques sanitaires qui lui sont associées :
infection à VIH, IST, grossesses prénuptiales non désirées, avortements (Adjamagbo et al.,
2004). Effectivement, cette sexualité prémaritale est couramment le lieu de prises de risque, les
moyens de protection étant absents lors des rapports sexuels (Bajos, 2006).

7
N’est pas un facteur de risques en lui-même, mais bien un indicateur de risques. En effet, la prise de risques peut
être moins importante chez un « multipartenaire » qui protège chaque rapport sexuel que chez un « monopartenaire
» qui a des rapports non protégés (Moreau et al., 2005).

13
1.2.1. Les grossesses prénuptiales : le plus souvent précoces et/ou non désirées
Dans de nombreuses régions d’Afrique subsaharienne y compris en milieu rural, on assiste au
déclin de la nuptialité précoce (Kuate-Defo, 2000). Ce déclin va transposer l’initiation sexuelle
de la sphère conjugale à la sexualité prémaritale (Birungi et al., 2012). Au nombre des
conséquences de cette activité sexuelle préconjugale, notons les grossesses prénuptiales dont
certaines sont le plus souvent précoces et/ou non prévues.

Dans le monde, près de 16 millions de jeunes femmes âgées de 15 à 19 ans donnent naissance
à un enfant chaque année et 95% de ces naissances surviennent dans des pays en
développement. La grossesse précoce chez les adolescentes est plus fréquente dans les
populations pauvres, moins éduquées et vivant dans des zones rurales (OMS, 2012). Les
chercheurs suggèrent d’autres explications à cela : le besoin de prouver sa fertilité, l’ignorance,
l’acceptation réduite des méthodes contraceptives « modernes », la rareté des services de
planning familial, etc. (Yakam, 2007).

La maternité des adolescentes n’a pas toujours été un problème dans les sociétés d’Afrique
subsaharienne. Par le passé, les mariages étant précoces, les naissances des jeunes filles avaient
le plus souvent lieu dans le cadre d’une union formelle (Meekers, 1994). Mais avec le recul de
l’âge au mariage des jeunes allongeant ainsi leur période de célibat, on remarque de nos jours,
une augmentation de la sexualité prénuptiale dans des contextes où, comme le soulignent
Hertrich et Pilon (1997), l’utilisation de la contraception moderne reste très faible. On observe
donc, en Afrique subsaharienne, des taux élevés de grossesses non désirées chez les jeunes filles
avec le risque que ces grossesses conduisent à des avortements (Biddlecom et al., 2008). Selon
ces auteurs, alors que 35% des grossesses chez les 15-19 ans sont non désirées ou non
programmées, 22 % se terminent par un accouchement et 13% à un avortement.

Certaines grossesses prénuptiales s’inscrivent dans le cadre d’une stratégie féminine visant à
aider à sceller une éventuelle union. C’est ce que confirme Meekers (1994) lorsqu’il écrit ceci :
« Fromthis perspective, premarital pregnancies are a result of conscious, rational decision ».
En d’autres termes, les jeunes filles sont conscientes des risques qu’elles prennent sauf qu’en
cas de grossesses prénuptiales, la suite du scénario est presque entièrement dictée par la volonté
de l’homme (Rossier et al., 2013). Du coup, la suite des évènements devient complexe en cas
de refus de paternité (rejet de la famille, stigmatisation sociale, déscolarisation, avortement,
abandon du bébé en cas d’accouchement).

14
Traditionnellement le mariage est le seul espace socialement reconnu dans lequel doit s’exercer
la maternité. De ce fait, les grossesses hors mariage sont susceptibles d’occasionner le rejet de
la famille (Mondain et al. 2005). En effet, la grossesse avant le mariage est souvent très mal
perçue par certaines communautés en Afrique, pouvant même entraîner le risque pour la jeune
fille d’être expulsée du domicile paternel. La jeune fille peut alors se trouver livrée à elle-même
dans des conditions économiques précaires. Perçue comme une source de honte, la jeune mère
s’expose à l’opprobre, sa réputation est ternie, elle court le risque de rester célibataire, ou d’être
obligée d’épouser l’auteur de sa grossesse.

Par ailleurs, une grossesse non prévue et illégitime peut également présenter pour les jeunes
filles en scolarité un risque d’abandon scolaire, réduisant considérablement leurs perspectives
d’avenir, notamment celle de trouver un emploi stable. De ce fait, les grossesses d’adolescentes
sont considérées comme un problème social, à cause de leur association avec la pauvreté,
association attribuée à la déscolarisation qui accompagne potentiellement la grossesse et les
limitations d’opportunités de carrière qui en résultent (Yakam, 2007).
Dans les pays où les grossesses sont interdites en milieu scolaire8, les filles enceintes sont
obligées d’interrompre leurs études, comme le réaffirment Nichols et al. (1986, p.100) « Most
schools in Nigeria do not permit pregnant girls to remain enrolled, so pregnant adolescents is
likely to have postpone or abandon her education». Dans certains cas, les abandons scolaires
peuvent concerner les garçons. En effet, les adolescents/jeunes auteurs de grossesse peuvent
voir leur statut « d’enfants » passer à celui d’adultes avec des responsabilités parentales qui y
sont associées. Certains sont donc obligés de quitter prématurément l’école pour le monde du
travail. Ces abandons scolaires sont une perte énorme en terme de gaspillage de capital humain
autant pour les jeunes que pour la société dans la mesure où il n’y aura pas de retour sur les
investissements consentis aussi bien au niveau familial qu’au niveau gouvernemental pour la
formation de la jeunesse.

1.2.2. Avortements aux âges jeunes : risques sanitaires et conséquences sociales


L’avortement est un phénomène qui a pris de l'ampleur dans plusieurs pays africains au cours
des dernières décennies mais il n’existe pas de données officielles sur cette pratique. Les
restrictions légales à l'avortement en Afrique expliquent la rareté des données sur le sujet et leur
manque de représentativité. Les quelques études ponctuelles disponibles ne fournissent qu'une

8
Les législations se sont assouplies maintenant mais certaines filles préfèrent abandonner l’école à cause de la
honte

15
mesure partielle de l'ampleur du phénomène et il demeure toujours difficile de collecter des
informations sur cette pratique et d’en estimer les niveaux (Guillaume, 2000 ; 2005). Dans
maints pays africains, les Interruptions Volontaires de Grossesses (IVG) étant interdites par la
loi, des grossesses prénuptiales se soldent souvent par des avortements non sécurisés c’est-à-
dire pratiqués en dehors des structures sanitaires ou même dans un environnement sanitaire
inadéquat, dans des conditions d’hygiène souvent déplorables et par des personnes n’ayant pas
reçu la formation nécessaire ou n’ayant reçu aucune formation (copine, voisine, etc.). En
Afrique subsaharienne, plus d’une grossesse sur 10 chez les 15–19 ans se termine par un
avortement (Biddlecom et al., 2008). Les niveaux élevés d’avortement chez les adolescentes et
les jeunes filles célibataires notamment en milieu urbain sont souvent attribués à un accès
difficile aux centres de planification familiale à cause de la réprobation sociale de la sexualité
hors union (Mensch et al., 2006).

Selon les résultats d’une étude menée, à l’échelle nationale, en Côte d’Ivoire par Vroh et al.
(2012), le profil des femmes ayant avorté est dominé par les femmes âgées de moins de 25 ans
(65,3%), non scolarisées (36,8%), célibataires (58,9%). A l’exception du niveau d’instruction,
cette étude vient corroborer les résultats trouvés précédemment par Guillaume et Desgrèes du
Loû (2002). À Abidjan, des enquêtes auprès de femmes en consultation dans les centres de
santé montrent que l’avortement concerne surtout les femmes de moins de 25 ans célibataires
et d’un niveau d’instruction élevé. Une autre étude réalisée au Togo par Afiwa et al. (2012)
confirme un recours plus fréquent à l’avortement chez les jeunes comparativement à l’ensemble
de la population féminine en âge de procréer. Les auteurs révèlent également qu’à Lomé, 39%
des femmes de 15 à 24 ans, qui ont été enceintes au moins une fois, ont déclaré avoir déjà eu
recours à un avortement.

Les avortements aux âges jeunes se font généralement de façon clandestine. Effectués en
violation des législations en vigueur, ils ne sont pas sans risque pour les jeunes filles. Elles
peuvent être victimes de complications car elles avortent à des durées tardives et avec des
méthodes dangereuses surtout l’indigénat, les médicaments en surdosage et les produits
chimiques (Guillaume, 2005). Ces complications peuvent avoir des conséquences à long terme
sur la santé des femmes ou sur leur fertilité, mais aussi provoquer leur décès. Dans ce contexte,
un nombre important des décès maternels pourrait être attribuable aux avortements, comme le
souligne Guillaume (2000). En effet, 70% des décès maternels survenus dans les trois CHU en
Côte d’Ivoire entre 1989 et 1992 seraient consécutifs à des avortements provoqués. Pour Vroh
et ses collègues (2012), ce sont environ 47 000 femmes qui meurent par an suite à des

16
complications de cette pratique. A ces risques de morbidité et de décès maternels auxquels sont
exposés les jeunes femmes, s’ajoutent des conséquences psychologiques. Selon Guillaume et
Lerner (2007), les pratiques abortives sont plus traumatisantes pour les jeunes femmes que pour
les adultes. Ainsi, plus les femmes sont très jeunes (moins de 16 ans) plus elles souffrent
spécialement, et courent de plus grands risques physiques et psychologiques lorsqu’elles
avortent.

1.2.3 Comportements sexuels à risque des jeunes et facteurs associés


 Controverse et consensus autour des facteurs de la dynamique du VIH

Devant les variations dans la prévalence du VIH d’un pays à un autre du continent ou au sein
même d’un pays, des travaux précurseurs ont montré que cette hétérogénéité dans la dynamique
du VIH était liée aux comportements sexuels de la population (Desgrées du Loû et Ferry, 2006).
En d’autres mots, les différences de niveaux de prévalence étaient principalement dues à
l’activité sexuelle des individus. Le sujet de controverse se situe au niveau des facteurs à
l’origine de la dynamique du VIH. D’autres études plus récentes ont révélé que les facteurs
biologiques (les caractéristiques des couches virales, le niveau des IST) auraient un rôle plus
important dans les différences de prévalence (Ferry et al., 2001). Les flux migratoires, la qualité
et l'accessibilité des services de santé, le statut précaire de la femme, la réponse de la
communauté toute entière face à l'épidémie (Sanou, 1999) sont autant de facteurs mis en
évidence dans la littérature. Néanmoins, l’objectif de cette recherche n’est en aucun cas
d’élucider les facteurs déterminants de la diffusion du VIH mais d’appréhender les
comportements des individus qui impliquent ou non leur exposition au virus du Sida. C’est
exactement ce sur quoi les auteurs s’accordent c’est-à-dire les comportements qui accroissent
le risque d’infection à VIH. Ainsi, l’âge d’entrée dans la vie sexuelle et le multipartenariat
concomitant ou sériel sont des comportements sexuels qui exposent les individus au risque
d’infection en les mettant en contact avec le VIH. Alors que l’utilisation systématique du
préservatif influe sur la propagation de l’épidémie et empêchant la transmission du VIH (Ferry,
1999).

 De groupes à risque à comportements à risque

Avant la découverte des modes de transmission du virus, le point commun entre les premiers
malades du Sida dans des villes de la côte ouest des États-Unis était leur orientation sexuelle,
des rapports sexuels fréquents, des partenaires multiples et l’usage de drogues (Delaunay,
1999a). A cette période, pour orienter les politiques de prévention, les groupes dits à risque sont
17
constitués pour rendre compte de la fréquence statitique de la maladie. Selon l’ONUSIDA
(2011), cette expression implique que le risque n’existe que pour les membres de certains
groupes. Ce concept sensé être neutre aura un caractère stigmatisant comme l’atteste l’adage
« l’étrange maladie des gays » et même accroître la discrimination. Mais l’identification de tous
les différents modes de transmission voit émerger un groupe de population apparemment « non
à risque », la catégorie des hétérosexuels parmi les infectés. Dès lors, le risque ne peut pas être
assigné seulement à une catégorie de population. Le concept de « groupes à risque » va donc
laisser place à celui de « comportements à risque » (Delaunay, 1999a).

 Modèles théoriques sur la prise de risque dans le domaine de la sexualité

La connaissance des modes de transmission et des mesures préventives contre le VIH s’est
améliorée au fil des années. Mais, on observe toujours un hiatus entre les connaissances que les
individus ont de l’exposition au risque d’infection à VIH et leur véritable comportement sexuel
à savoir l’absence de pratiques de prévention. En santé publique, deux principales approches
du risque (constructiviste et objectiviste) sont proposées pour expliquer ce décalage (Bajos et
Lidwig, 1995 ; Bajos, 1999). Elles se distinguent par le statut qu’elles accordent au risque. Dans
l’approche objectiviste, le comportement à risque est comme un acte individuel, volontaire
soumis à l’influence du milieu socio-culturel d’appartenance (Bajos, 1999 ; Bajos, 2006 ; De
Biaso, 2006 ; Clavez, 2010). Autrement dit, la décision d’adopter ou non un comportement à
risque serait individuel et indépendant du contexte social et relationnel dans lequel se trouve
l’individu. On suppose donc que les individus n’agissent pas rationnellement et prennent des
risques. Ainsi, la conduite des personnes est liée au traitement de l’information. Cette approche
mobilise une définition du risque permettant d’identifier les caractéristiques des personnes,
voire des relations, concernées par les risques liés à l’activité sexuelle. Les recherches basées
sur cette approche font implicitement l’hypothèse que la protection de sa santé est la chose la
plus importante pour un individu, la plus déterminante pour expliquer ses pratiques.

Privilégiée en sciences sociales, les recherches constructivistes postulent que le risque n'est pas
une donnée préalable à l'expérience sociale des acteurs mais plutôt une construction sociale
produite par la confrontation des intérêts, savoirs et pratiques des différents acteurs sociaux
(Bajos, 2006). Ainsi, les individus construisent leur propre définition du risque en fonction d’un
ensemble de facteurs (le type de relation, leur expérience sociale, leur trajectoire de vie, etc.)
(Bajos, 1999). Le risque est donc réinterprété par l’individu à l’aune des éléments qui façonnent

18
sa sexualité (Hamel, 2008). En résumé, le comportement préventif des jeunes (notamment
l’usage de préservatif) peut différer selon la nature de la relation dans laquelle ils sont engagés.
Dans cette recherche, la définition du risque ou du comportement sexuel à risque retenue
articule ces deux approches.

 Comportements sexuels à risque

Dans le processus de diffusion du VIH/Sida, on retient certains comportements sexuels et on


en exclut d'autres du fait qu'ils n'interviennent pas dans la transmission du virus. Les actes et
les pratiques sexuelles (relations sexuelles pénétratives) qui exposent leurs auteurs à un plus
grand risque de contracter les IST ainsi que le virus du Sida sont considérées comme des
comportements sexuels à risque. Ceux-ci sont considérés comme les déterminants majeurs de
la propagation de l’infection par le VIH (BAD, 2001). A ce propos, il est à noter qu’en Afrique,
le VIH se transmet essentiellement par voie sexuelle, plus particulièrement par voie
hétérosexuelle (environ 80 à 90% des cas)9 et le risque de contamination est aggravé en cas de
maladie sexuellement transmissible préexistante (Desgrées du Loû, 1998).

Dans cette partie du monde, l’épidémie du VIH/Sida touche toutes les couches de la population
et tous les âges mais certains groupes comme les adolescents et les jeunes sont particulièrement
plus vulnérables. De nombreux facteurs expliqueraient cette vulnérabilité notamment
l’immaturité des organes génitaux féminins, le déficit d'informations sur les pratiques de
prévention, l’impuissance à négocier des pratiques sexuelles à faible risque, le déni d'un risque
personnel encouru, peu ou pas d'accès à l'information, aux conseils, aux préservatifs et aux
services de santé (Baya et Meda, 2001). Par ailleurs, l’adolescence est une période au cours de
laquelle les jeunes découvrent la sexualité et dans le même temps, ils sont avides de nouveautés
et d’expériences. Cela les amène à s’engager dans des comportements à risque dans la mesure
où à cet âge leurs rapports sexuels sont souvent spontanés et les relations instables, dans le
temps.

Le concept de comportements sexuels à risque recouvre plusieurs dimensions dans la littérature


mais généralement l’entrée précoce en vie sexuelle, le multipartenariat et la non utilisation du
condom pendant les rapports sexuels sont les trois aspects les plus cités. A cela, Rwenge (2000)

9 A la transmission hétérosexuelle majoritaire, s’ajoute celle de la mère à l’enfant, durant la grossesse, la naissance ou
l’allaitement. En outre, le VIH circule aussi parmi les populations clés à travers la transmission homosexuelle et
la transmission sanguine chez les usagers de drogues injectables.

19
ajoute les rapports avec plusieurs partenaires sexuels concurrents et ceux avec un(e) partenaire
de passage. Selon l’ONUSIDA (2010), la baisse sensible de l’incidence du VIH est associée à
trois éléments c'est-à-dire une augmentation de l’utilisation du préservatif, un recul de l’âge du
premier rapport sexuel et une baisse du nombre de personnes ayant plusieurs partenaires.
Toutefois, dans certains travaux antérieurs (Miangotar, 2010, Guiella, 2004 ; 2012), la précocité
des rapports sexuels n’est pas considérée comme un risque en soi mais plutôt comme un facteur
contribuant à une plus grande probabilité d’adoption de comportement sexuel à risque.
Autrement dit, la précocité préfigure des styles de vie sexuelle qui ont un impact sur les
comportements à risque liés à la sexualité (Bajos et Durand, 2001). Ainsi, une étude menée
dans la ville de Bamenda au Cameroun indique que l'occurrence précoce des rapports sexuels
favorise chez les jeunes aussi bien le multipartenariat que leur engagement dans une sexualité
occasionnelle (Rwenge, 1999).

Mais alors quels sont les facteurs qui accentuent la vulnérabilité des jeunes faces à une sexualité
risquée ?

1.2.3.1. Conditions de vie précaires comme facteur de risque

Des études empiriques ont montré que la relation entre la pauvreté et les comportements sexuels
à risque est souvent contradictoire. Alors que dans certaines études, il ressort que les
considérations économiques, par exemple la pauvreté ou les conditions de vie difficiles, avaient
tendance à pousser les jeunes à l’adoption de comportements sexuels à risque, dans d’autres,
c’est plutôt l’effet inverse.

Parmi les études qui confirment la thèse selon laquelle les conditions difficiles de vie sont liées
positivement à une sexualité à risque, on peut citer celles menées en Côte d’Ivoire par Anoh et
al. (2002) et Talnan et al. (2004). Ces auteurs révèlent que l’entrée en vie sexuelle se fait de
manière plus précoce dans les couches sociales défavorisées et la susceptibilité d’avoir des
rapports sexuels avec plusieurs partenaires est plus élevée pour ces jeunes que pour ceux vivant
dans des conditions socio-économiques meilleures.

L’examen des différences de comportement sexuel entre les habitants des bidonvilles et les non-
résidents des bidonvilles à Nairobi, montre que les premiers ont des relations sexuelles à un âge
précoce, ont plus de partenaires sexuels, et sont moins susceptibles que les seconds d'adopter
des mesures de prévention contre la transmission du VIH /Sida (Zulu et al., 2002).

20
En Afrique du Sud, plus précisément dans le KwaZulu-Natal, une enquête, menée en 2001
auprès des jeunes de 14 à 24 ans dont 29% étaient orphelins d’un ou des deux parents, a permis
de montrer que la pauvreté accroît considérablement la probabilité d’avoir des rapports sexuels
non protégés. Mieux, il ressort que les jeunes filles résidant dans les ménages à faible niveau
de vie, sont plus enclines à avoir des partenaires multiples, à subir des rapports sexuels forcés
et ou à échanger leurs relations sexuelles contre un cadeau ou de l’argent (Hallman, 2004). Dans
une analyse portant sur les pays francophones d’Afrique subsaharienne, Rwenge (2013) aboutit
à des résultats marqués par une très grande variabilité selon les pays. En effet, il rapporte que
la pauvreté des ménages est positivement associée au multipartenariat en Côte d’Ivoire alors
qu’au Sénégal, c’est l’aisance matérielle qui lui est associée. A Madagascar, l’effet positif de la
pauvreté est observé uniquement chez les garçons.

Dans d’autres études plus antérieures réalisées au Cameroun (Rwenge, 2000 ; 2012), les
variables considérées pour mesurer des conditions économiques de vie des adolescents et jeunes
sont l’occupation du père, l’activité économique de la mère, le niveau de vie du ménage et la
suffisance des moyens. En recourant à ces indicateurs plus élaborés, l’auteur arrive à montrer
que la pauvreté des familles conduit les jeunes au multipartenariat sexuel, à la sexualité
occasionnelle et à la non-utilisation des préservatifs.

En situation de pauvreté, les jeunes s’adonnent à la sexualité comme un moyen de survie au


détriment même des risques qu’elle comporte. A ce propos, Desgrées du Loû et Ferry (2006,
p.4) rapportent que « dans un environnement de sous-développement et de pauvreté, les risques
sont multiples, et que leur gestion compétitive ne place pas nécessairement le risque de Sida
comme une priorité car il n’est souvent pas ressenti comme le plus immédiat ou le plus vital ».
Lorsque la satisfaction des besoins élémentaires est difficilement assurée, il est clair que le souci
de l’utilisation systématique du préservatif lors des rapports sexuels devient secondaire pour
des jeunes vivant dans la précarité.

En s’appuyant sur les adolescentes vivant dans quatre contextes différents (Burkina-Faso,
Ghana, Malawi et Ouganda), Madise et al. (2007) soulignent que les filles les plus riches au
Burkina-Faso, au Ghana et au Malawi ont eu leur premier acte sexuel plus tard par rapport à
leurs homologues moins riches, mais ce constat n’était pas valable pour l’Ouganda.

Paradoxalement au Bénin, Sossa et Zounon, (2005) observent que le multipartenariat croit des
conditions de vie mauvaise aux conditions aisées. En d’autres mots, plus les conditions
socioéconomiques s’améliorent plus les jeunes sont susceptibles d’avoir plusieurs partenaires.

21
Contre toute attente, une autre étude auprès des étudiants nigérians a révélé que la pauvreté
n’était pas un facteur déterminant du comportement sexuel à risque (Odimegwu et Adedini,
2013). Compte tenu de la nature incertaine de ces résultats, les auteurs ont recommandé la
conduite d’autres opérations de collecte de données en vue d’une meilleure compréhension de
cette relation.

1.2.3.2. Déficit de connaissance sur les IST/VIH/Sida

En Afrique subsaharienne, le pourcentage de jeunes de 15 à 24 ans possédant des connaissances


complètes sur le VIH a certes augmenté dans le temps mais reste faible : 36% chez les garçons
et 28% chez les filles (ONUSIDA, 2013). Aujourd’hui, même si la quasi-totalité des jeunes
savent que le Sida existe, ils sont encore nombreux ceux qui ont des connaissances erronées sur
ses modes de transmission. Selon les données de l’EDS 2012, en Côte d’Ivoire, moins de la
moitié des jeunes de 15-24 ans interrogés (47,9%) savent que le virus ne peut pas être transmis
par les piqûres de moustiques et seulement 67,2% savent qu’on ne peut pas contracter le VIH
en partageant un repas avec une personne séropositive.

Le déficit de connaissances relatif aux modes de transmission et aux moyens de prévention du


VIH/Sida figure au nombre des facteurs qui accroissent les comportements sexuels à
risque chez les adolescents et les jeunes (Dimbuene, 2010). Ainsi, l’amélioration du niveau de
connaissance sur la prévention de la transmission du VIH chez les jeunes devrait entraîner
l’adoption des comportements plus sûrs.

C’est aussi l’observation faite par Rwenge (2010) à partir des données de l’EDS 2004 du
Cameroun et de l’enquête sur « Culture, Genre, Comportements Sexuels et
IST/VIH/Sida » menée en 2000 à Bafoussam et Mbalmayo. Il affirme que la faible
connaissance du Sida favorise le multipartenariat sexuel et la non-protection des rapports
sexuels chez les jeunes. En sus, notons que l’auteur parvient à la même conclusion dans une
étude antérieure réalisée dans la ville de Bamenda. Il avait indiqué que les comportements
sexuels des jeunes en milieu urbain seraient directement liés à leur connaissance du Sida et/ou
des méthodes de prévention des risques associés à l'activité sexuelle (Rwenge, 1999).
L’importance réelle de la connaissance des modes de transmission et des moyens de prévention
du VIH/Sida dans la promotion des comportements de prévention contre cette épidémie ne fait
plus aucun doute. Une étude portant sur 2 328 jeunes de 10 à 24 ans à Lusaka (Zambie) révèle
que la connaissance est un élément protecteur notamment chez les hommes où elle réduit la
probabilité d’avoir plus d’un partenaire au cours des trois derniers mois et accroit la probabilité

22
d’utiliser le préservatif (Magnani et al, 2002). Par ailleurs, Wagbatsoma et Okojie (2006) ont
observé une corrélation entre la connaissance du Sida et le comportement sexuel des
adolescents de Benin-City, Nigéria : plus le niveau de connaissance était bas plus ils adoptaient
des pratiques sexuelles insouciantes ou irresponsables.

En somme, l’amélioration des connaissances sur les IST/VIH/Sida peut avoir un impact sur le
long terme car comme le soulignent Eloundou-Enyegue et al. (2005), il est rare que des
individus ayant adopté l'utilisation du préservatif puissent revenir à un comportement sexuel
plus risqué.

1.2.3.3. Consommation des substances désinhibantes

Certaines conduites non sexuelles comme la consommation d’alcool et de drogues vont de pair
avec l’adoption de comportements sexuels à risque (ONUSIDA, 2001). Il s’agit sans aucun
doute d’une porte ouverte à la transmission des IST et du VIH dans la mesure où l’usage de ces
substances affaiblit la capacité de jugement des jeunes et peut les conduire à avoir des rapports
sexuels non protégés. Ce risque serait encore plus élevé si les deux partenaires sont sous
l’emprise de ces substances. Dans la littérature, on a constaté que les travaux mettant en exergue
le lien entre alcool, drogues et sexualité à risque ont davantage ciblé les professionnelles du
sexe et les homosexuels que les jeunes.

Parmi les études consacrées aux jeunes, on trouve celle de Guiella et Woog (2006) portant sur
6 268 adolescents de 12 à 19 ans ; il s’agit d’une enquête représentative du niveau national
réalisée au Burkina Faso en 2004. Les auteurs révèlent que chez les filles de 15 à 19 ans non en
union, la consommation d’alcool (par le partenaire ou elles-mêmes) lors du dernier rapport
sexuel semble réduire l’utilisation d’un condom. Par contre, cette tendance n’est pas vérifiée
chez les garçons.

Une enquête par sondage aléatoire sur 1 889 adolescents et jeunes de 10-24 ans, en 2009, dans
la localité de Mbalmayo au Cameroun, conduit aux mêmes conclusions : le préservatif est plus
souvent inutilisé parmi les individus ayant souvent consommé l’alcool à l’initiation sexuelle,
chez les garçons comme chez les filles, aux derniers rapports sexuels, seulement chez les
premiers (Rwenge, 2012). Aussi, il arrive souvent que ces substances sont consommées par des
mineurs. Du fait de leur jeune âge, les conséquences sont encore plus importantes. En effet, en
plus de réduire les inhibitions, la consommation d’alcool et de drogue peut inciter les mineurs
à être plus disposés à prendre des risques qu’ils ne l’auraient fait en d’autres circonstances

23
(Guiella, 2006). Ce constat est d’autant plus vrai qu’une étude comparative des comportements
sexuels des lycéens congolais et français, montre que le fait d’avoir des rapports sexuels après
avoir trop bu ou avec un partenaire dont on sait qu’il prenait des drogues injectables amène
l’ensemble des jeunes congolais à présenter un plus grand nombre de MST et de grossesses
chez les mineures (Courtois et al., 2001).

1.3. Quelques approches explicatives des comportements sexuels des jeunes

La littérature traitant de l’explication des comportements sexuels inclut un ensemble


d’approches dont les principales sont les suivantes : l’approche socioculturelle, l’approche
économique, l’approche du genre et l’approche institutionnelle. Mais ces approches seules ne
sauraient rendre compte de toute la réalité en raison de la complexité de la sexualité ? A cette
interrogation, Rwenge (2010, 2012) préconise plutôt une approche globale ou systémique. A la
différence des autres approches classiques, celle-ci a l’avantage de prendre en compte les
caractéristiques individuelles et le cadre extrafamilial, notamment le rôle de l’école, des pairs,
et des médias.

1.3.1. Approche socioculturelle

Partant du constat que la sexualité est une construction sociale « encadrée par un ensemble de
lois, de coutumes, de règles et de normes, variable dans le temps et dans l’espace » (Lhomond,
2009, p.161), l’approche socioculturelle postule que les comportements sexuels des individus
sont largement influencés par les mœurs et valeurs de la société dans laquelle ils vivent. En
d’autres mots, cette approche se présente comme un essai d’explication des comportements
sexuels à partir des normes et des exigences du fonctionnement de la société en matière de
sexualité. Ainsi, elle se base sur le fait que les perceptions et les pratiques sexuelles des
individus découlent du système socioculturel dans lequel ils sont moulés.

De cette approche, il se dégage deux modèles dont l’un est fondé sur l’héritage culturel
(tradition) (Emina, 2005) et l’autre sur la théorie de la désorganisation sociale ou social
disorganization (Calvès et Meekers, 1997).

1.3.1.1. L’héritage culturel

Le modèle de l’héritage culturel fait référence aux manières de penser et d’agir héritées des
traditions et des coutumes ; celles-ci étant très variables selon les ethnies et/ou les régions de
résidence et les religions (Emina, 2005). Ainsi, les valeurs traditionnelles auraient donc une

24
influence sur le comportement sexuel des individus. A titre d’illustrations, Rwenge (1999)
rapporte que la plupart des populations d’Afrique de l’Est se caractérisent par leur fort
attachement aux valeurs traditionnelles et qu’elles étaient le plus touchées par le VIH. Il
explique que leurs normes traditionnelles seraient très favorables à l’expansion du Sida. Ainsi,
en Ouganda, les us et coutumes de certaines sociétés sont favorables une intense activité
sexuelle avant ou dans le mariage. De même, d’autres études antérieures questionnant
l’influence des valeurs traditionnelles sur les comportements sexuels des individus suggèrent
une variation selon l’ethnie et la religion (Rwenge, 2004 ; Talnan et al., 2004).

1.3.1.2. L’appartenance ethnique ou groupe culturel

L’ethnie a une influence sur les variables de comportements telles que l’âge aux premiers
rapports sexuels, l’âge à la première union, la pratique contraceptive, l’âge à la première
grossesse, etc. (Kouton, 1992). En effet, l’ethnie, « en tant que lieu de production de modèles
socio-culturels auxquels s’identifient les individus, est un des éléments importants à prendre en
compte dans l’étude (…) de bien d’autres phénomènes démographiques » (Evina, 1990, p.66)
notamment l’étude des comportements sexuels des individus.

L’appartenance ethnique a été identifiée par plusieurs auteurs comme un facteur important de
différenciation des comportements sexuels des individus. C’est la conclusion à laquelle aboutit
une étude réalisée en Côte d’Ivoire par Talnan et al. (2004) qui indiquent que le fait d’appartenir
aux groupes ethniques Krou et Sénoufo ou Malinké multiplie respectivement par 2,13 et 1,66
les chances d’avoir des rapports sexuels avant l’âge de 16 ans par rapport aux filles du groupe
Akan.

Globalement la littérature sur le sujet met en relief deux typologies : d’une part, on retrouve les
ethnies où les mœurs sexuelles sont permissives et d’autre part, celles où les mœurs sexuelles
sont très rigides (Rwenge, 2004 ; 2012). Ainsi, certaines cultures tolèrent ou même encouragent
les relations sexuelles avant le mariage, voire extraconjugales, alors que d’autres les
proscrivent. Dans les sociétés où la liberté sexuelle prénuptiale et extra-conjugale est largement
tolérée, comme chez les Bëti de la province du centre Cameroun par exemple, les jeunes filles
procèdent à des tentatives visant à provoquer les premières règles dans le but de hâter le début
des relations sexuelles (Rwenge, 2002, 2004). Pour l’auteur, les relations sexuelles
occasionnelles et la multiplicité des partenaires sexuels sont plus importantes dans les
sociétés où les mœurs sexuelles sont « tolérantes » et les rapports de genre souples. Dans son
analyse, il a clairement mis en lumière la particularité des comportements sexuels chez les Bëti.

25
Dans cette ethnie, les parents n’exercent aucun contrôle sur la sexualité de leurs enfants. De
même, on n’accorde pas une grande importance à la virginité de la fille avant le mariage. La
fécondité préconjugale est un souhait pour les parents notamment le père qui espère ainsi que
sa fille lui laisse des petits enfants « naturels » avant de se marier. Ces enfants illégitimes
appartiennent donc à la famille de leur mère et ne prennent socialement rang qu’après les
enfants légitimes.

Dans d’autres groupes culturels, les jeunes filles sont encouragées à avoir des rapports sexuels
prénuptiaux pour prouver leur fertilité par une grossesse avant d’être données en mariage par
leur famille (Rossier et al., 2013). C’est ce que Thiriat (2000) confirme en écrivant que dans
ces sociétés : «la grossesse prénuptiale est valorisée comme gage de la fécondité de la jeune
femme. L’enfant appartiendra à l’époux, qu’il en soit ou non le géniteur ».

En outre, au nord Kenya, plus précisément chez les Massaï, comme le souligne Rwenge (2004),
au sein d’un même lignage, une femme mariée est autorisée à avoir des relations sexuelles
extraconjugales avec un autre homme, en cas d’absence prolongée de son conjoint. Dans ces
sociétés rurales où les activités pastorales nécessitent de longs mois de transhumance avec le
troupeau, la « continuité » de l’activité sexuelle de l’épouse avec les parents du mari permet de
maintenir les performances en matière de fécondité.

Par ailleurs, des études ont montré que des rites culturels au sein de certains groupes ethniques
peuvent influencer le multipartenariat sexuel des individus. C’est notamment le cas du rite de
« lavement » des filles baoulé, en Côte d’Ivoire (Guerry et Chauveau, 1970 ; Etienne et Etienne,
1971). Si on en croit ces derniers (p.174), « lorsqu’une fille est devenue pubère, on la "lave".
On lui dit, en lui donnant un cache-sexe neuf, que maintenant "elle a grandi", qu’elle
peut "chercher les garçons" et que si elle fait un enfant, on pourra le garder ».

Ce rite traditionnel permettait aux filles de jouir d’une liberté sexuelle considérable. Ainsi elles
étaient autorisées à avoir des relations sexuelles avec les jeunes gens en âge de se marier. Il
n’est pas rare qu’elle ait, non pas un copain officiel, mais plusieurs partenaires sexuels plus ou
moins occasionnels et officieux (tant qu’aucune compensation matrimoniale n’ait été versée à
sa famille). Toutefois, il est à noter que dans cette culture, la liberté sexuelle n’était pas
synonyme de libertinage mais elle avait pour visée de laisser toute la latitude à la jeune fille de
choisir elle-même son futur mari (le bon mari, le plus généreux et capable de procréer dans un
contexte où la grossesse prénuptiale était acceptée).

26
Dans de nombreuses autres cultures par contre, on préfère que les jeunes femmes non mariées
soient vierges, la virginité revêtant une importance sociale (Thiriat, 2000 ; Sa’ad, 2007). Ainsi
en Asie et dans les pays arabes, la sexualité préconjugale des femmes reste réprimée. Par
exemple, dans le monde arabe, pour punir les rapports sexuels préconjugaux d’une jeune fille
et préserver « l’honneur » des familles, des hommes ont recours au crime d’honneur. C’est le
crime par lequel un père ou un frère tue sa fille ou sa sœur, ayant perdue sa virginité ou
entretenant des relations sexuelles hors mariage et ce, avec l’absolution bienveillante de la loi
(Fargues, 1986).

En sus, Hertich et Locoh, (1999) indiquent qu’en Inde du Nord et au Bangladesh, lorsque des
filles sont suspectées d’avoir eu des rapports sexuels avec des hommes d’une autre caste ou
d’une autre religion, elles sont victimes de violences physiques de la part de leurs frères ou
même tuées. Dans les communautés, telle que chez les Fulbes du Sud Borno au Nigéria, ainsi
que chez les Bamiléké, la virginité est une valeur exigée. Les rapports sexuels des femmes avant
le mariage sont unanimement condamnés alors qu’ils sont tolérés chez les hommes (Sa’ad,
2007). Chez les Bamiléké, les femmes qui ont eu des enfants avant le mariage sont généralement
considérées comme ayant « été le jouet des hommes » pendant leur jeunesse et donc
susceptibles d’être malades (infections sexuellement transmissibles) (Rwenge, 2004).

1.3.1.3. La religion

Elle « véhicule un certain nombre de valeurs et normes qui régissent la vie des fidèles sur le
plan comportemental, physiologique et psychique (Akoto, 1985, p.185). De ce fait, elle joue un
rôle fondamental dans les perceptions, les comportements et les attitudes des fidèles à travers
leurs croyances.

Les religions bouleversent les normes préexistantes en matière de sexualité. C’est pourquoi, les
religions chrétiennes ont souvent été considérées comme déstabilisatrices des traditions
africaines (Rwenge, 1999). Dans la plupart des religions, la question de la sexualité est un sujet
tabou qui relève du domaine du privé voire du sacré. Cette situation est un obstacle à l’accès à
l’information et empêche la fréquentation des services de la santé de la reproduction.

En outre, certaines religions comme le christianisme et l’islam sont hostiles aux relations
sexuelles prémaritales et à l’adultère. Le Sida, y est alors perçu comme une « maladie de Satan »
à cause du lien qu’il entretient avec le sexe. C’est ce qu’indique Boumpoto, 1999, p365 :« le
Sida est considéré comme une punition ou une malédiction de Dieu à l’égard des personnes

27
n’obéissant pas ses ordonnances ou commettant des péchés (…) le Sida apparait toujours
comme une maladie-sanction d’une inconduite sexuelle, ce qui l’assimile à l’impudicité, à la
débauche, à l’adultère ». En somme, l’image qu’ont ces religions à l’égard des IST/VIH/Sida
pourrait amener certains de leurs fidèles à adopter des comportements sexuels à risque. Par
exemple, l’opposition des Eglises, en général, à l’utilisation du préservatif pourrait expliquer
les réticences qu’ont certains de leurs fidèles à s’acheter un préservatif. Dans un tel contexte,
des fidèles prennent le risque d’avoir des rapports sexuels non protégés que de se faire
surprendre, par un membre de leur communauté, en train de se procurer un préservatif.

Dans une étude portant sur la République du Congo, Enel et Querre (2006, p.64) écrivent
« toutes les églises interdisent les relations sexuelles prémaritales et extraconjugales, ainsi que
l’avortement provoqué ; toutes préconisent la fidélité et l’abstinence ; aucune n’est favorable
à l’utilisation du préservatif. Or ces préceptes ne sont pas scrupuleusement respectés par les
croyants ». L’utilisation des préservatifs étant assimilée à la dépravation des mœurs, on
comprend dès lors la résistance de ces religions aux messages de prévention (Zoungrana, 1999).
L’influence de la religion sur les comportements sexuels varie selon les pays. Par exemple, en
milieu urbain ivoirien, Talnan et al., (2004) ont observé que les jeunes musulmanes ont moins
de chance d’avoir recouru aux condoms dans leur vie que leurs homologues adeptes de religions
chrétiennes. D’autres auteurs en l’occurrence Baya et Meda (2001) sont parvenus aux mêmes
conclusions chez les jeunes de Bobo-Dioulasso.

L’appartenance religieuse est un déterminant de l’entrée précoce en vie sexuelle dans certains
pays. Au Cameroun, il ressort que les adolescentes musulmanes et les adeptes des religions
traditionnelles sont significativement moins susceptibles de retarder leurs premiers rapports
sexuels dans toutes les régions de résidence (Kuate Defo, 1998). Dembélé (2004) a
pratiquement observé la même tendance au Burkina-Faso. Il ressort de son étude que les
adolescentes animistes et musulmanes sont plus susceptibles de s’engager dans l’activité
sexuelle prémaritale que les catholiques.

En Amérique Latine, pour se distinguer par leurs mœurs, les évangélistes exercent un contrôle
communautaire sur la conduite des jeunes femmes, les contraignant ainsi à retarder leur entrée
dans l’activité sexuelle (Meslé et al., 2011). Par contre, ces auteurs soulignent qu’en France,
l’initiation sexuelle des femmes varie peu en fonction de l’appartenance sociale et du niveau
d’intégration religieuse sauf chez des musulmanes affirmées qui se distinguent par un âge au
premier rapport sexuel nettement supérieur à celui des autres femmes.

28
En analysant l’influence de la mobilité religieuse sur l’entrée en vie sexuelle chez les jeunes,
Bozon et al. (2006), sont parvenus aux résultats selon lesquels les initiations sexuelles sont plus
tardives chez les filles qui ont connu une socialisation religieuse « cohérente » : catholiques de
famille catholique, et surtout pentecôtistes de famille pentecôtiste (49% des femmes de ce
groupe sont sans expérience sexuelle à 20 ans).

Toutefois, au sein d’une même religion hostile aux relations sexuelles prémaritales, on observe
un comportement différentiel selon le sexe. Lhomond (2009), dans une étude réalisée auprès de
jeunes de 15-18 ans en France, souligne que les garçons élevés dans l’islam n’ont pas de
comportements différents des autres garçons quant à leur calendrier d’entrée dans la sexualité.
Par contre, les filles issues des familles musulmanes sont moins d’un tiers, à 18 ans, à avoir eu
des rapports sexuels, contre près de 75% des autres filles. On remarque que la forte pression de
la morale sociale et du contrôle familial ralentit l’entrée dans la sexualité des filles élevées dans
l’islam.

Ce résultat va dans le sens de l’observation faite par Bakass et Ferrand (2013). Au Maroc, pays
rigoriste, où l’ordre social et religieux repose sur des valeurs telles que l’honneur et le prestige
du groupe familial, on note un comportement différentiel selon le sexe. Alors que la religion
impose la chasteté aux célibataires et la virginité féminine, l’entrée en sexualité masculine se
caractérise par sa précocité, par le choix de partenaires sexuelles plus âgées ou professionnelles
(prostituées) et par une pression des pairs. Par contre au Brésil, Bozon et al. (2006) ont observé
qu’uniquement dans la religion pentecôtiste les jeunes hommes ont retardé leur entrée dans
l’activité sexuelle.

1.3.2. Théorie de la désorganisation sociale : urbanisation, scolarisation et mass médias


conduisant à la mutation des mœurs sexuelles

Développée par Cherlin et Riley (1986), la théorie de la désorganisation sociale stipule « that
premarital sexual activity is the result of the breakdown of social control that older persons
had over the younger ones » (Djamba, 1997, p.245). C’est exactement ce que réaffirment Gueye
et al. (2001, p.61) en d’autres termes « Increasing modernization and media exposure, along
with a decline in the authority of parents and elders, have undermined the societal and cultural
rules that formerly controlled and informed adolescent sexuality ». Ainsi, l’affaiblissement des
structures traditionnelles et le relâchement du contrôle des aînés sur les cadets vont faire naître
des comportements nouveaux orientés plus vers la satisfaction personnelle et la gratification

29
émotionnelle, que vers la responsabilité familiale. Dans ce cas, les relations sexuelles seraient
spontanées et ne répondraient à aucun but particulier (Diop, 1995 ; Rwenge, 1999 ; Anoh et al.,
2002). En Afrique subsaharienne, l’image de la famille étendue continue de prévaloir. Elle est
associée à la primauté de la parenté sur les individus, au pouvoir des aînés sur les cadets et à la
domination des hommes sur les femmes. Le contrôle social permament impliquait
traditionnellement un faible pouvoir de décicion des jeunes. Les conduites de ces derniers
étaient scrutées par les aînés et leurs unions étaient conclues entre les parents sans moindre
référence à leurs sentiments. La chasteté, les devoirs conjugaux en l’occurrence la soumission
au mari étaient les valeurs enseignées aux filles. Avec la modernisation, l’urbanisation
croissante et l’exposition de la population aux médias, on assiste à une mutation profonde des
normes qui se traduit par un affaiblissement des normes sociales et au déclin de l’éducation
traditionnelle en matière de sexualité prémaritale et au relâchement du contrôle de la famille
(Meekers, 1994 ; Djamba, 1997 ; Calvès, 1997 ; Antoine et Djiré, 1998 ; Talnan et al., 2004 ;
Delaunay et Guillaume, 2007).

Sous l’effet concomitant de tous ces facteurs, les individus s’affranchissent de plus en plus de
l’autorité des aînés. C’est ce que soulignent Antoine et Djiré (1998, p117) « l’urbanisation
permet un élargissement de l’espace social de l’individu, le contrôle familial peut s’affaiblir,
l’homme ou la femme peut s’affirmer davantage ». Alors qu’en milieu rural, les personnes
vivent confinées dans leur aire géographique et ethnique (village, tribu, clan), dans les zones
urbaines, l’accès à l’école permet une ouverture sur le monde extérieur.

La scolarisation généralisée et la crise économique, en Afrique, font apparaître de nouveaux


comportements sociaux principalement en milieu urbain. En effet, l’incertitude économique
pesant sur les jeunes les oblige à différer leurs projets matrimoniaux. De plus, la scolarisation
des filles entraîne un bouleversement des équilibres familiaux traditionnels existants. La
sexualité féminine, plus contrainte par les normes sociales et devant s’exercer dans le cadre
exclusif du mariage, se trouve ainsi modifiée. L’allongement de la scolarité permet un recul de
l’âge au premier mariage des femmes dans la plupart des pays, prolongeant ainsi la période de
célibat (Mondain et Delaunay, 2006), créant un écart entre l’âge d’entrée en vie sexuelle et l’âge
d’entrée en union chez les femmes. Selon Bozon (2004), cet allongement général de la scolarité
contribue au déclin de l’autorité adulte. Aussi, les filles scolarisées n’ont plus pour première
aspiration le mariage dans la mesure où l’école favorise leur émancipation individuelle et créé
de nouvelles aspirations professionnelles et conjugales (Djiré et al., 1997).

30
Pour Rwenge (1999)10 « l’école et les nouvelles valeurs récréatives éloignent souvent les jeunes
des adultes. En plus la séparation des sexes n’y est plus assurée. Toutes les nouvelles inventions
récréatives telles que le cinéma, les soirées dansantes, le football… raccourcissent le temps
que les jeunes passent sous le contrôle des parents ou dans ce cercle familial ». Les
conséquences de cette situation sont le développement d’une activité sexuelle précoce chez les
jeunes et la pratique du multipartenariat, faits observés dans plusieurs villes africaines. Bien
plus, le contenu des enseignements dispensés et les connaissances acquises à l’école donnent
aux jeunes la possibilité de remettre en cause certaines valeurs et normes traditionnelles voire
ancestrales comme l’atteste Meekers (1994, p.1) « this change can be attribuate, at least in
part, to the fact that educated young people now obtain knowledge from books which can be
used to challenge the wisdom of older génération ». Il en résulte une modification des rapports
entre les sexes et les générations, un déclin de l’autorité parentale et une plus grande autonomie
des individus vis-à-vis des aînés.

Toutefois, la revue de la littérature révèle que la théorie de la désorganisation sociale présente


quelques limites dans l’explication des comportements sexuels des jeunes. La résidence en
milieu urbain, l’instruction et l’exposition aux médias sont les principaux indicateurs utilisés
pour saisir la modernisation, or des études viennent modérer l’influence négative de la
scolarisation sur la sexualité des jeunes par le fait que l’instruction retarderait l’occurrence des
premiers rapports sexuels chez les filles (Rwenge, 1995 ; Kobelembi, 2005). En sus, même s’il
est vrai que les médias (internet y compris) ont favorisé la diffusion de films de nature
pornographiques, des études ont montré que les jeunes ougandais, par exemple, n’adoptaient
pas nécessairement toutes les nouvelles pratiques sexuelles. Ils continuaient à pratiquer la seule
posture communément appelée « missionnaire », lors de leurs relations sexuelles (Kalambayi,
2007). Par ailleurs, l’instruction et les médias seraient un facteur de prévention des grossesses
non désirées chez les filles à travers l’adoption de comportements nouveaux dont l’utilisation
de méthodes contraceptives modernes (Calvès, 1999, Emina, 2005).

1.3.3. Approche économique

L’approche économique se base sur la théorie développée par Cherlin et Riley (1986) qui
distinguaient deux catégories de jeunes en fonction des motivations justifiant les relations
sexuelles préconjugales. Ainsi, il ressort que les comportements sexuels des adolescents et des

10
http://www.bioline.org.br/request?uaps99040

31
jeunes sont déterminés par des motivations d’ordre économique et social (Meekers, 1994 ;
Rwenge, 1999 ; Moloua et al.,2004). Cette approche suggère l’idée selon laquelle la sexualité
devient d’une part une stratégie de survie, un moyen de se mettre à l’abri des besoins matériel
et financier et d’autre part une stratégie utilisée par les jeunes pour améliorer leur statut via le
mariage ou la fécondité. C’est aussi l’observation faite par Calvès (1997) en étudiant les
comportements sexuels des jeunes femmes camerounaises. Pour l’auteur, le comportement
sexuel de ces dernières s’inscrit souvent dans une stratégie rationnelle visant des objectifs précis
tels que des avantages financiers, la constitution de relations ou la recherche d’un mari.

1.3.3.1. Activités sexuelles des jeunes comme moyen d’amélioration des conditions
économiques

Selon la théorie de « l’adaptation rationnelle », les jeunes s’engageraient dans les relations
sexuelles dans le but d’obtenir de l’argent, des cadeaux ou diverses autres gratifications en vue
de subvenir à leurs besoins (Calvès, 1999 ; Diop, 1995 ; Rwenge, 1999 ; 2000 ; 2002). Ainsi,
les relations sexuelles prémaritales résulteraient d’une décision rationnelle visant à rechercher
un soutien d’ordre économique. Si on en croit Meekers (1994, p.48) «… unmarried teenagers
use sexual relations and pregnancy to achieve certain goals. For example, sexual relations may
produce economic benefits, or may be a step toward marriage. From this perspective,
premarital pregnancies are a result of conscious, rational decisions ». De même, pour Calvès
(1997, p.399) « The rational adaptation argument, on the sexual relationships or childbearing
as strategies to achieve specific goals. (…) some African adolescents exchange sexual favors
clothes, gifts, or for money to pay their school fees ». A partir d’une etude empirique menée au
Cameroun, elle écrit: « Focus group discussions confirm previous findings that the financial
aspect of sexual activity is becoming increasingly important in urban Cameroon (…)
participants stress that the money received by female adolescents in exchange for sexual favors
is often used to buy luxury items such as fancy clothing, perfume, jewels, rather to satisfy basic
needs » (p.405).
Toujours dans le contexte camerounais, Kaptue (1998), dans une analyse particulièrement
approfondie des données, est parvenu à des conclusions similaires. Les jeunes filles auraient
donc des relations avec un ou plusieurs sponsors (des travailleurs) pour financer à leurs
dépenses quotidiennes mais aussi avec des paretnaires réguliers notamment des élèves ou
étudiants.

32
Par ailleurs, les individus vivant dans la pauvreté ou menacés par la précarité sont vulnérables
à l’exploitation sexuelle et sont incités à échanger des faveurs sexuelles afin de survivre. Ainsi,
face aux difficultés économiques, certains jeunes s’engagent dans des rapports tarifés pour
satisfaire leurs besoins. Ainsi, le contexte de précarité socio-économique semble être l’un des
éléments qui contribue à l’émergence de la prostitution ou de la semi prostitution (Songué,
1986, Calvès 1997). Le témoignage de ces jeunes filles, issus d’entretiens individuels d’une
enquête qualitative auprès des professionnels du sexe, traduit bien cette réalité : « …c’est la
pauvreté qui fait. Souvent tu n’as rien, tu es obligée de te donner. Souvent même tu n’as pas
beaucoup d’argent, mais tu as faim-là, tu vas aller te donner pour avoir à manger. » ;« Souvent
y'a les filles qui n'ont pas des moyens, souvent elles n'ont pas des parents pour les aider donc
elles se disent que quoi, si aujourd'hui j'ai eu un mouvement qui veut partir avec moi, peut-être
il va me donne l'argent parce que elle regarde derrière elle, elle n'a personne… ». (Sika et al.,
2012, p.31).

Par exemple, en Côte d’Ivoire, les conditions de vie se sont fortement dégradées du fait de la
crise militaro-politique débutée le 19 septembre 2002 et qui a entraîné parfois la perte du
conjoint et/ou des parents et la baisse des activités lucratives. Des femmes en l’occurrence les
déplacées de guerre se sont adonnées à des rapports sexuels à but lucratif. Elles s’exposent ainsi
au risque de contamination par le VIH/Sida d’autant plus que le préservatif n’est pas utilisé de
façon systématique lors des rapports sexuels occasionnels alors que la transmission par voie
sexuelle constitue le véritable canal de propagation du VIH (Zanou, 2002).

La monétarisation des rapports sexuels se fait avec des partenaires plus âgés et généralement
nantis que les jeunes filles qualifient de « sugar dadies », de « sponsors » ou de « grotto »11.
Ces relations monnayées s’inscrivent dans un réseau de polyandrie que Thiriat (1999) illustre
par slogan « chic choc chèque » utilisé à Kinshasa. Ainsi, les femmes entretiennent des relations
avec des partenaires présentables pour sauver les apparences auprès des parents et de la famille
(chic), des relations plus sentimentales c'est-à-dire avec les partenaires pour qui le cœur bat
réellement (choc) et des relations plus matérielles (chèque). Dans ce dernier, le partenaire serait
le plus souvent un adulte, marié et stabilisé matériellement, pourvoyeur de biens et d’argent
pour l’habillement et le paiement des études (Jeurissen, 2003).

11
Terme le plus couramment utilisé à Abidjan surtout en milieu universitaire. Pour arrondir la fin du mois quand
l'aide familiale est inexistante ou tarde à venir, des étudiantes ont des relations avec des hommes socialement aisés,
âgés et mariés.

33
Selon Calvès (1998), le phénomène de « sugar dadies » fait aussi partie des stratégies mises en
place par les filles pour la recherche d’un emploi. Dans ce contexte de domination « d’âge »12
renforcée par la domination financière, ce sont les hommes qui le plus souvent initient et
contrôlent toutes les décisions sexuelles, ce qui a des implications sur la vulnérabilité des jeunes
filles face aux IST/VIH/Sida (Bopda, 2001). La négociation de relations sexuelles protégées,
par ces dernières, devient quasiment impossible.

Le recours aux relations sexuelles rétribuées dans le but de satisfaire les besoins financiers n’est
pas seulement l’apanage des filles. Certains jeunes hommes s’inscrivent dans cette logique de
relations sexuelles tarifées. Il peut donc s’agir de relations sexuelles avec des femmes plus âgées
ou des relations homosexuelles avec des hommes plus âgés. Dans le premier cas, des jeunes
hommes ont des rapports sexuels avec des femmes plus âgées « cougars » ou « suggar
mummies » qui, en contrepartie, se proposent de leur assurer un confort financier. Dans le
second cas, il s’agit de relation avec des hommes plus âgés contre une gratification financière
(Moloua et al., 2004). Dans le cas du Cameroun, Kaptue (1998) estime que de nombreux jeunes
garçons infectés par le VIH le sont devenus en ayant des relations homosexuelles avec des
riches étrangers dans le but de financer leurs études, se payer des vêtements, etc.

Des résultats d’études particulièrement ceux de Rwenge (1999) ont révélé une forte corrélation
entre les facteurs économiques et les comportements sexuels étudiés. Dans le cas du
multipartenariat, à l’exception de la suffisance des moyens, les autres variables considérées
avaient une influence positive sur ce comportement sexuel. Les jeunes issus de foyer dont le
niveau de vie était moyen et de parents sans emplois, étaient plus susceptibles que les autres à
avoir plusieurs partenaires sexuels. Il est aussi ressorti que les rapports sexuels occasionnels
étaient fortement et positivement corrélés à la suffisance des moyens dont disposent les jeunes
pour subvenir à leurs besoins qu’aux autres facteurs économiques considérés. En somme, la
dépendance économique et la précarité dans laquelle se trouvent certains jeunes les privent du
pouvoir d’exercer un contrôle sur les modalités du déroulement de l’acte sexuel.

Mais est ce que l’engagement en sexualité de tous les jeunes notamment des filles est une
décision rationnelle basée sur l’attente d’une gratification ? Cette théorie ne trouve-t-elle pas
ses limites dans un contexte africain où sans être des prostituées, les femmes ont des relations
sexuelles avec des hommes en échange d’un soutien financier ou matériel ? Nous disons comme
Yakam (2007), qu’en Afrique subsaharienne, recevoir de l’argent ou des cadeaux d’un homme

12
Expression utilisée par Bozon, population et sociétés, N°391, juin 2003

34
avec qui on a des rapports sexuels est tout à fait normal et une fille se sentirait humiliée si elle
avait des rapports sexuels sans rien recevoir en retour. Il faudrait donc relativiser lorsqu’on
aborde des objectifs poursuivis par les adolescents et les jeunes en devenant sexuellement actifs.

1.3.3.2. Activité sexuelle des jeunes comme stratégie d’ascension sociale

Les jeunes n’entrent pas uniquement dans la sexualité pour améliorer leur condition de vie mais
aussi pour une valorisation sociale. En Côte d’Ivoire, pour s’assurer le passage en classe
supérieure ou obtenir un diplôme, des filles n’hésitent pas à moyanner des faveurs sexuelles
accordées aux enseignants contre les notes ou moyennes sexuellement transmissibles (NTS ou
MTS). Ce comportement a été également mis en évidence par Rwenge (2004) à Bafoussam et
Mbalmayo (Cameroun). Pour augmenter leur chance de réussite scolaire, les filles recrutent
certains de leurs partenaires sexuels parmi les collègues intellectuellement habiles ou les
enseignants.

Aussi, certaines jeunes filles s’engagent dans des rapports sexuels préconjugaux afin d’aboutir
à la fécondité qui constitue pour elles une stratégie dont la finalité serait le mariage. Cette
stratégie mise en œuvre par les filles est justifiée par l’importance accordée à la nuptialité et à
la fécondité dans la détermination du prestige social de la femme en Afrique (Rwenge, 1999).
Les civilisations africaines réservent une grande place à la maternité, à telle enseigne que
l’image de la femme est parfois inséparable de celle de la maternité (Evina, 1990, p.43). La
maternité est socialement valorisée que dans le cadre strict d’une union stable. Compte tenu du
rétrécissement du marché matrimonial, la valorisation du statut social passe également par la
maternité. C’est le constat fait par Calvès (1997, p.1) « In many African societies, adolescents
become sexually active because they want to have children. In Cameroon, children are a source
of pride and social statuts, even if one is not married ». A partir d’une analyse basée sur sept
pays d’Afrique subsaharienne, Calvès et Meekers (1997, p.1) corroborent ce point de
vue « young women may enter sexual relationships to enhance their marriage prospects, to
prove their fertility to their future husband ». Au total, il s’agirait d’une stratégie utilisée le plus
souvent par les jeunes filles peu instruites pressées de se marier pour acquérir un statut social
(Rossier et al., 2013).

1.3.4. Approche institutionnelle


Moins représentée dans la littérature, cette approche est basée sur l’idée selon laquelle
l’adoption de comportement sans risque par les jeunes dépend à la fois du cadre politique et

35
légal et de la possibilité d’accès aux informations et aux moyens de prévention. C’est dire que
l’environnement institutionnel en matière d’activité sexuelle peut modifier les comportements
sexuels des jeunes (Rwenge, 1999, Moloua, 2004, Anoh et al.,2005, Kalambayi, 2007).
Concrètement, cette approche accorde une grande importance aux politiques, aux lois, aux
programmes et aux services de santé à l’attention des jeunes qui font partie des facteurs
institutionnels susceptibles d’influencer leur activité sexuelle (Mayack, 2014).

Convaincue que la mise en place de programmes et de service de santé de la reproduction peut


avoir un impact sur le comportement des jeunes, la Côte d’Ivoire a élaboré une politique de
Santé sexuelle et Reproductive qui inclut un volet santé procréatrice et compétences de la
planification de la vie dans l'enseignement et la formation pour les jeunes à travers le Projet
EVF/MP (Education à la Vie Familiale/ Education en Matière de Population) au Ministère de
l’Education Nationale. En outre, l’engagement des autorités dans la lutte contre le VIH/Sida et
les autres IST peut avoir une grande incidence sur la propagation de ces maladies parmi les
jeunes (Moloua, 2004). Ainsi, en Côte d’Ivoire, un Programme National de Santé Scolaire et
Universitaire (PNSSU), initié depuis 2001, a pour but la promotion de la santé des élèves et des
étudiants en leur fournissant un ensemble de prestations notamment préventives. Il s’agit, entre
autres, du dépistage volontaire des IST/VIH/Sida, de l’offre de services de Prévention de la
Transmission Mère-Enfant (PTME) liée à l’infection à VIH, la prise en charge psychosociale
des filles enceintes et leur référence dans les structures de Consultations Prénatales, etc.

Même s’ils sont encore en nombre insuffisant, des services de santé de la reproduction ciblant
spécifiquement les jeunes ont été créés afin de mieux les informer sur les questions relatives
aux risques liés à l’activité sexuelle. Certains programmes d’éducation en dehors de l’espace
scolaire, peuvent favoriser la réduction des comportements sexuels à risque. Par exemple, dans
le district de Rakai en Ouganda, où des taux élevés d’infection VIH, ont été signalés parmi les
jeunes, des chercheurs ont constaté que des jeunes sexuellement actifs participant à des
programmes d’éducation par pairs étaient cinq fois plus à même d’utiliser des préservatifs que
les autres, le chiffre pour ceux qui ont reçu une formation d’éducateurs pour les pairs était
encore plus élevé, six fois plus (Rivers et Aggleton, 1996).

L’absence des structures sanitaires spécialisées dans les réponses aux problèmes des jeunes,
dans les petites villes et en milieu rural, peut accroître leur ignorance des dangers qu’ils courent
dans leur activité sexuelle. Ainsi, des actions spécifiques doivent être menées auprès des

36
adolescents et des jeunes afin d’impacter leurs comportements sexuels présents mais
probablement futurs.

1.3.5. Approche genre


L’approche genre est celle utilisée par l’OMS à travers le projet de Santé Familiale et Protection
contre le Sida (SFPS). Dans le domaine de la sexualité, cette approche stipule que la femme ou
la jeune fille, du fait de son faible pouvoir de décision, n’a aucun contrôle ou du moins un
contrôle limité sur sa sexualité (Moloua et al., 2004). En plus, elle suppose que la réduction de
l’écart entre les pouvoirs dévolus à chaque sexe par la société permettra à la femme de participer
plus efficacement à la prise des décisions dans tous les domaines notamment la sexualité et la
santé (Kobelembi, 2005).

En résumé, cette approche vise à expliquer les comportements sexuels par les inégalités entres
sexes et les rapports de genre qui en découlent. Avant de poursuivre, il est primordial de
comprendre le concept de genre. Pour Labourie-Racapé et Locoh (1999, p.67) : « les inégalités,
les discriminations entre hommes et femmes ne sont pas le fruit de la nature mais celui de la
culture et des productions sociales qui, prenant pour base une différence biologique qu’il n’est
pas question de nier, ont construit des systèmes de genre justifiant des pratiques différenciées
et le plus souvent inégalitaires ». Ainsi, le genre fait référence aux rôles, activités et
responsabilités assignés à l'homme et à la femme par la société. Ce sont donc sur la dimension
biologique que ces différences de rôles ou cette division sexuelle des tâches va indubitablement
se construire. En clair, « … autour de ces caractéristiques biologiques se construit une
différenciation, une hiérarchisation dans la place occupée par les uns et par les autres, qui
révèle une inégalité des pouvoirs, variable d’une société à une autre, mais presque toujours au
détriment des femmes » (Labourie-Racapé et Locoh, p.68).

C’est également ce que souligne Gupta (2003, p.1), quand il écrit : « Nous avons affaire à une
construction sociale et culturelle qui différencie les femmes des hommes et définit les façons
dont ils interagissent ».Cette définition va dans le même sens que celle proposée par Locoh
(2007, p.25) « le concept de genre exprime le fait qu’au-delà des différences biologiques qui
caractérisent chaque sexe, les différences de statut entre hommes et femmes et les rapports qui
en découlent ont un caractère socialement construit ».

Ce statut des individus selon leur genre varie d’une culture à l’autre, d’un espace géographique
à l’autre. Par exemple, dans le contexte socio-culturel africain, le mariage confère au mari le
droit de disposer du corps de sa femme. Ainsi, l’acte sexuel est un devoir conjugal auuquel

37
aucune femme ne devrait se soustraire au moment où le mari le désire. Que la femme ait envie
ou pas, c’est l’homme qui décide des circonstances de l’acte sexuel du couple (Rwenge et
Kamden, 2001).

Les rôles stéréotypés font que les jeunes femmes et dans une moindre mesure les jeunes gens
ont des comportements sexuels différents face au risque d’infection aux IST/VIH/Sida. Dans
de nombreux pays en développement, les femmes ont peu de contrôle sur leur sexualité et leur
rôle est généralement confondu à celui de reproduction. C’est qu’écrit Evina (1990, p.43) : « la
procréation est le "but premier" ». Dans ces sociétés, la fécondité étant fortement valorisée, la
femme a un devoir de procréation qui est donc incompatible avec l’usage du préservatif
(Desgrèes du Loû et al., 2007).

1.3.5.1. Le faible pouvoir de décision des femmes en matière de sexualité

En Afrique subsaharienne, les rapports de genre étant fortement inégalitaires, les femmes
subissent la domination des hommes en matière de sexualité. Dans la plupart des sociétés
traditionnelles (sociétés patriarcales et patrilinéaires), la femme est considérée comme une «
cadette sociale » et est marginalisée dans plusieurs domaines de la vie sociale. Sur le plan
conjugal, familial et communautaire, le pouvoir de décision reste donc concentré chez les
hommes. Par exemple, dans l’activité sexuelle, la jeune femme mariée n’a pas le droit de refuser
les rapports sexuels à son conjoint quand il le désire (Rwenge, 2012). On aurait pu s’attendre à
ce que les rapports de genre soient plus égalitaires entre partenaires dans les jeunes générations
mais le problème demeure (Kobelembi, 2005). Cette attitude des femmes s’explique par une
culture du silence qui entoure le sexe dans de nombreuses sociétés et qui les poussent à rester
dans l'ignorance des questions sexuelles et passives dans leurs rapports leur laissant ainsi peu
de pouvoir sur la capacité de négocier leur protection sexuelle (Gupta, 2003).

En outre, dans certaines sociétés africaines, en cas de décès du conjoint, la femme ne pouvait
pas hériter des terres ni du patrimoine. Pour rester dans la famille de son défunt mari, elle
pouvait, si elle le désirait, épouser un frère ou un parent paternel de ce dernier (le lévirat). Ainsi,
les veuves, encore en âge de procréer, pouvaient donner des héritiers à la famille du défunt. De
ce fait, la famille rentabilise les compensations matrimoniales versées. Les causes du décès
n’étant pas toujours connues en Afrique subsaharienne, il est possible que l’ex conjoint soit
décédé des suites d’une infection à VIH/Sida. Cette situation pourrait entraîner une propagation
du VIH et même une transmission mère-enfant, en cas de procréation. Dans son analyse portant
sur les peuls Bandé, vivant à l’extrémité sud-est du Sénégal, Pison (1986) observe que le

38
remariage après une rupture d’union est systématique chez les femmes ; la situation de veuve
ou de divorcée non remariée, pendant une longue période n’étant pas admise, même quand elles
dépassent la cinquantaine d’âge. Dans un tel contexte, les risques d’infection aux IST/VIH/Sida
ne peuvent qu’être importants. Toutefois, il est à noter que dans plusieurs sociétés matrilinéaires
et même patrilinéaires ces pratiques traditionnelles tendent progressivement à disparaître même
en milieu rural (Lloyd et Gage-Brandon, 1993).

Ainsi, face à des partenaires sexuels à risques, les femmes ou les jeunes filles ont moins de
pouvoir que les hommes de s’abstenir des rapports sexuels ou d’exiger le port d’un préservatif.
Il est également ressorti de certaines études que le statut socio-économique de la femme
influence sa capacité à communiquer avec son partenaire, sa participation à la prise de décisions
ainsi que son utilisation du condom.

1.3.5.2. La forte dépendance économique

Les normes sociales de genre et la dépendance socio-économique des femmes peuvent limiter
leurs habiletés à négocier des pratiques sexuelles sécuritaires avec leurs partenaires et ainsi les
rendre vulnérables au VIH. Des études ont montré que la capacité des jeunes filles ou des
femmes à négocier l’usage du préservatif dépend de leur dépendance économique et de la
différence d’âge entre partenaires (Rwenge, 2000). La dépendance économique et un écart
d’âge important en défaveur de la jeune fille compromettent son aptitude à exiger des rapports
sexuels sans risque. Comme le soulignent Moloua et al., (2004), la négociation n’est pas
toujours de règle à cause du rapport de genre déséquilibré. Ces auteurs arguent que les rapports
inégalitaires et la mauvaise image de soi sont des facteurs psychosociaux qui déterminent
parfois les comportements sexuels à risque. Le faible niveau d’éducation des femmes et leur
faible taux d’activité professionnelle entraînent la domination masculine. Ainsi, « les femmes
restent dépendantes, objet de représentation et objet d’un désir masculin dominant » (Bozon et
Léridon, 1993, p.1183). Les contraintes économiques sont principalement à l’origine de la
vulnérabilité des femmes face au risque d’infection par le VIH et autres IST. Elles peuvent dans
ce cas avoir des relations sexuelles non protégées même quand elles sont conscientes des risques
encourus, car une rupture avec le partenaire/mari est synonyme de précarité et d’absence de
soutien financier et matériel.

39
1.3.5.3. Le multipartenariat sexuel et rapport de genre

A l’instar de plusieurs sociétés dans le monde, contrairement aux femmes, le multipartenariat


sexuel des hommes semble être toléré. Ainsi, il est légitimement pratiqué par les hommes et
illégitimement par les femmes (Mulot, 2009). Il fait partie des normes sexospécifiques qui
consacrent la domination du sexe masculin et accroissent le risque d’exposition au VIH pour
les femmes. Dans son étude sur les pays francophones d’Afrique subsaharienne, Rwenge (2013)
confirme que le phénomène de multipartenariat sexuel est quels que soient le pays et l’âge plus
intense parmi les jeunes garçons que les filles. Lawson (1999) fait remarquer qu’en Afrique, le
multipartenariat sexuel des hommes est fréquent, à tout âge, et généralement socialement
accepté, soit sous forme de polygamie, soit sous forme de relations extraconjugales. La société
attend des femmes un partenaire unique durant leur vie mais elle excuse tacitement les aventures
masculines. Ce constat est d’autant plus vrai qu’en Côte d’Ivoire, on parle de « deuxième
bureau » pour désigner les maîtresses des hommes mariés. C’est donc ce vagabonage sexuel
des hommes introduit de fait la maladie dans la famille. De par la nature de ces relations
impliquant différents acteurs (le mari, sa femme et ses partenaires occasionnelles et/ou
régulières), les hommes et les femmes se trouvent dans des situations différentes face au risque
de contracter les IST/VIH/Sida. Ainsi, le faible pouvoir de négociation dans les relations
sexuelles soumet les femmes ou les jeunes filles quelle que soit leur condition matrimoniale au
risque d’être infectées par le partenaire habituel : mari, copain. Elles sont donc plus souvent
victimes qu’actrices de la propagation (Lawson, 1999 ; Desgrèes du Loû et al., 2007).
Toutefois, il y a aussi des jeunes filles ou femmes qui s’engagent dans des relations sexuelles
de type transactionnel ou tarifé avec plusieurs partenaires mais comme le souligne Paicheler
(1995), les femmes multiplient moins les expériences sexuelles que les hommes.

1.3.6. Approche systémique

Dans l’explication des comportements sexuels des individus, les études antérieures ont
longtemps privilégié les approches culturelles, économiques, institutionnels ou les rapports de
genre en occultant les caractéristiques individuelles et le cadre extrafamilial notamment le rôle
de l’école, des pairs, et des médias. Ainsi, Rwenge suggère une approche plus globale ou
systémique qui intègre tous les facteurs afin d’évaluer le pouvoir explicatif de chacun (Rwenge,
2010 ; 2012).

40
Concernant les caractéristiques individuelles, l’auteur identifie d’une part la perception par les
adolescents ou les jeunes de leur capacité à s’abstenir des rapports sexuels en présence des
partenaires et de l’autre sur la manière de faire les rapports sexuels et la personne qui prend les
décisions dans ce domaine. Il est clair que les jeunes qui discutent de sexualité et de contraceptif
entre partenaires sont plus conscients des risques encourus donc auront plus tendance à utiliser
les préservatifs lors des rapports sexuels.

En parcourant la littérature, il ressort aussi que les facteurs extra familiaux sont à considérer
dans l’explication des comportements sexuels des adolescents et des jeunes. S’agissant des
médias, de nombreuses études mettent en exergue une influence ambivalente sur les jeunes. Si
dans leur éducation, les médias jouent un rôle très important, aux côtés de l’école et de la
famille, en accroissant leur connaissance et favorisant une sexualité saine, ils peuvent en même
temps être à l’origine de dérives comportementales sur le plan sexuel (Kobelembi, 2005). En
effet, au niveau de l’éducation sexuelle, les médias constituent un puissant moyen de diffusion
de messages à grande échelle et sont des canaux privilégiés lors des campagnes de
sensibilisation. Toutefois, l’exposition accrue aux contenus sexuels de certains médias (à
travers entre autres les films à caractère sexuel, les paroles sensuelles des chansons, l’accès aux
sites pornographiques sur internet) a un effet dévastateur sur les adolescents et les jeunes. De
plus en plus, on banalise la sexualité dans les médias et associe le sexe à tout en l’occurrence
aux spots publicitaires (voitures, produits cosmétiques, etc.).

En Afrique, les médias jouent un rôle prépondérant dans la lutte contre le VIH/Sida à travers la
promotion du préservatif. Ils ont donc un véritable impact sur la population. En Côte d’Ivoire,
l’étude menée par Talnan et al. (2004) montrent que l’exposition aux médias n’a aucun effet
significatif sur l’adoption de pratiques multipartenariales au cours des trois dernières années
avant l’enquête. Par contre, elle influence significativement le recours au préservatif lors des
rencontres sexuelles aussi bien chez les filles que chez les garçons (Talnan et al., 2004). Au
Cameroun, l’exposition à la télévision participe à l’amélioration des comportements préventifs
des adolescents et jeunes : quel que soit le sexe, on constate qu’à l’initiation sexuelle, les jeunes
qui n’en étaient pas exposés courent plus de risque de ne pas utiliser les préservatifs.
L’exposition à internet joue le même rôle que dans le premier cas mais l’exposition aux films
pornographiques détériore les comportements préventifs, à l’initiation sexuelle (Rwenge,
2012). De même, l’exposition au contenu sexuel des médias favorise l’entrée en activité
sexuelle ou l'intention de se livrer à des rapports sexuels. Quand bien même, l'influence de
l'exposition des adolescents au contenu sexuel des médias sur leur comportement en matière de

41
santé sexuelle au Nigéria n'est pas encore évidente, Wusu (2013) précise que les contenus
négatifs des médias peuvent mettre la santé sexuelle des adolescents en danger. Au total, nous
disons que certains médias audiovisuels occidentaux à travers les films et les images indécentes
font l’apologie de la sexualité prémaritale et semblent être à l’origine de la modification de la
signification de l’acte sexuel chez les jeunes africains (Kobelembi, 2005).

L’autre élément qui mérite un questionnement est la pression des pairs : pourquoi les
adolescents et les jeunes, en Afrique, se tournent vers leurs semblables pour avoir des
informations sur la sexualité ? En effet, ce sujet a toujours été un tabou et un mystère dans les
sociétés africaines. Les parents ne discutent pas de questions sexuelles avec leurs enfants. Face
à ce manque de communication, les jeunes s’informent dans les médias, les programmes
scolaires mais aussi auprès de leurs pairs qu’ils soient ou non du même sexe et appartenant
généralement au même groupe d’âge (Djiré et al., 1997 ; Kalunde. 1997).

Conclusion du chapitre 1
Dans bien de sociétés africaines de type préindustriel, les mariages étaient précoces ainsi que
la naissance du premier enfant. Le calendrier de la nuptialité et celui de l’initiation sexuelle se
superposaient permettant ainsi le confinement de la sexualité dans le mariage. Dans ce contexte,
les premiers rapports sexuels étaient certes précoces mais avaient lieu avec le conjoint dans le
cadre exclusif du mariage. Dans ces sociétés, les individus passaient directement du statut
d’enfant à celui d’adulte par le biais des rites initiatiques (circoncision, excision, lavement, etc.)
permettant l’accès à des rôles sociaux de la vie d’adulte. Autrement dit, la période transitoire
entre l’enfance et l’âge adulte, correspondant à l’adolescence, était brève voire inexistante
réduisant ainsi les risques d’une sexualité hors union.

Des changements sociodémographiques considérables sont intervenus en Afrique


subsaharienne au cours des dernières décennies du 20èmesiècle, tant en milieu urbain que rural.
Il s’agit de mutations culturelles, sociales et économiques qui ont bouleversé l’ordre traditionnel
en matière de sexualité dans les jeunes générations. Sous l’effet de l’urbanisation croissante,
l’élévation du niveau d’éducation surtout celle des filles et la crise économique qui retarde
l’accès des jeunes à un emploi, on assiste à un recul de l’âge au mariage dans la majorité des
pays, allongeant ainsi la durée d’adolescence sociale ou la période de célibat. Dès lors, on
observe dans ces pays, une augmentation de la sexualité prénuptiale des adolescents et des
jeunes en l’absence de mesure préventives. Les risques qui en découlent sont nombreux :

42
grossesses prénuptiales dont certaines sont précoces et non désirées, des avortements, des
IST/VIH/Sida.

Par ailleurs, cette sexualité prénuptiale est globalement caractérisée par sa précocité, la
multiplicité des partenaires en raison de la longueur du temps d’exposition et aussi par la non
utilisation de préservatif. Ces nouveaux comportements sexuels des adolescents et des jeunes
d’Afrique subsaharienne ont été largement documentés par les études antérieures qui se basent
principalement sur cinq hypothèses explicatives. La première est que l’influence de la
modernisation aurait induit l’affaiblissement des structures traditionnelles et le relâchement du
contrôle des aînés sur la sexualité des jeunes favorisant ainsi une certaine libéralisation sexuelle
contraire à la morale traditionnelle. On parle alors de la théorie de la désorganisation sociale.
La deuxième hypothèse est la théorie de l’adaptation rationnelle qui suppose que le
comportement sexuel des adolescents et des jeunes correspondrait à une décision rationnelle.
Ces derniers s’engageraient dans la sexualité pour atteindre des objectifs bien précis notamment
d’ordre économique ou social. Moins fréquente dans la littérature, la troisième hypothèse
qualifiée d’institutionnelle suggère que l'activité sexuelle des adolescents et des jeunes serait
fonction de l'importance que les décideurs accordent aux lois et programmes relatives à la
disponibilité, l’accessibilité et la qualité des services de santé de la reproduction.

En outre, la quatrième hypothèse stipule que les inégalités entre sexe influenceraient les
comportements sexuels. Compte tenu de leur faible pouvoir économique mais aussi de décision,
les jeunes filles n’auraient aucun contrôle ou alors n’a qu’un contrôle limité sur leur sexualité.
Elles seraient alors plus vulnérables que leurs homologues garçons. Enfin, la dernière
l’hypothèse s’inscrit dans une analyse systémique des comportements sexuels chez les jeunes.
Des auteurs préconisent donc une conjonction des déterminants familiaux, extra-familiaux et
individuels dans l’explication de ce phénomène.

En définitive, cette revue de la littérature a mis en évidence les approches explicatives des
comportements sexuels chez les jeunes. De toutes les hypothèses susmentionnées, l’approche
systémique guidera notre réflexion tout au long de cette recherche car nous pensons que le
comportement d’un individu peut varier sous la combinaison de plusieurs facteurs (culturels,
économiques et sociaux).

43
CHAPITRE 2. Tendances générales des comportements
sexuels et contexte de l’étude

La dynamique sociale de la seconde moitié du 20e siècle a provoqué des changements de


comportements « démographiques » et sexuels dans la plupart des pays européens : la baisse de
la fécondité, les mariages et la formation des familles sont reportés à plus tard, l’augmentation
des unions consensuelles, la déstabilisation de la famille, l’émancipation sexuelle des femmes
avec la disponibilité de la contraception, le rajeunissement de l’âge au premier rapport, le
développement de la protection sociale, etc. (Pinelli et al., 2001). Les risques d’IST prennent
ainsi une nouvelle dimension en dépassant le milieu marginal des professionnelles/ els de sexe
vers celui de l’ensemble de la population sexuellement active.

En effet, dans ces sociétés occidentales notamment en France, le cadre relativement strict qui
prévalait jusque dans les années 1960-70 a été remplacé progressivement par des modèles
éducatifs plus souples et parfois laxistes (Michaud et Akré, 2009). Par ailleurs, l’envolée des
divorces dès 1963 et la baisse de la fécondité correspondent à l’entrée en activité des femmes.
Tout cela s’inscrit dans une période d’évolution des mœurs et de lutte des femmes qui précède
la légalisation de la contraception médicale et le mouvement de mai 1968 (Bajos et Durand,
2001). A partir de 1973, l’âge au premier mariage recule considérablement et on voit apparaître
de nouvelles formes de conjugalité. Le déclin de l’institution matrimoniale favorise
l’augmentation des rapports sexuels préconjugaux et des conceptions prénuptiales (Jaspard,
2005). On assiste donc à une libéralisation des comportements sexuels tant chez les jeunes que
chez les adultes. Les relations sexuelles à l’adolescence sont donc devenues des réalités
normatives (Claes, 2003).

Même si elle donne une impression d’homogénéité culturelle, l’Amérique latine présente un
contexte en évolution avec de fortes différences selon les pays en matière de précocité des
unions, de taux de séparation des couples et de l’utilisation de contraception (Bozon, 2015).

De la même manière, en Afrique subsaharienne, le contexte dans lequel vivent les jeunes a
considérablement évolué. En effet, les mutations sociales et économiques se sont accompagnées
de changements significatifs dans les comportements. Ainsi, les normes sociales et culturelles
influençant la sexualité et la reproduction ont laissé place à une forme de liberté se traduisant
par l’émancipation des jeunes vis-à-vis des contraintes traditionnelles. Conséquence, on assiste

44
à l’abaissement de l’âge au premier rapport sexuel, au recul de l’âge au premier mariage
conduisant ainsi à une augmentation de la période de sexualité prénuptiale et à un recours plus
fréquent au multipartenariat. Ces « nouveaux » comportements sexuels ne sont pas sans risque
pour les jeunes dans un contexte de VIH/Sida (Delaunay et al., 2001). Toutefois, cette tendance
générale susmentionnée n’est pas observée de la même manière partout dans le monde.

Dans ce chapitre, l’objectif est de décrire l’évolution des comportements sexuels dans quelques
régions du monde avec un accent particulier sur l’Afrique subsaharienne. A la suite de cette
description, l’environnement contextuel est présenté en rapport avec le comportement sexuel
des jeunes.

2.1. Comportements sexuels des adolescents et des jeunes dans le monde : entre évolution,
baisse et contraste

L’amélioration de la santé sexuelle et reproductive des adolescents et des jeunes adultes passe
nécessairement par une meilleure connaissance de leurs comportements sexuels. Or, ceux-ci ne
sont pas statiques puisqu’ils connaissent des modifications des générations les plus anciennes
aux plus jeunes. Ainsi, selon le contexte culturel et la situation économique, les comportements
sexuels peuvent fortement varier.

2.1.1. Calendrier de l’initiation sexuelle : une tendance générale au recul

Dans de nombreux pays du monde, l’entrée en union devient de plus en plus tardive et prend
un caractère de plus en plus informel dans les pays développés, ouvrant ainsi la voie à une
dissociation entre le moment de l'initiation sexuelle et le début de la vie conjugale. En effet, les
changements intervenus dans le calendrier des débuts sexuels et leur déconnexion croissante
avec le mariage dans les générations récentes indiquent un relâchement du contrôle direct des
adultes sur les jeunes (Bozon, 2003). Dans ce contexte de libération des mœurs et du déclin de
l’influence des religions, on observe une baisse de l’âge au premier rapport sexuel dans
plusieurs régions du monde.

En Europe, c’est au cours de la seconde moitié du 20ème siècle que la baisse de l'âge à l'initiation
sexuelle s’est produite et elle a été globalement plus prononcée pour les femmes que pour les
hommes. Ainsi, la proportion de débutantes tardives (après 20 ans) a spectaculairement chuté
dans les douze pays européens étudiés par Bozon et Kontula (1997). Par ailleurs, pour tous les
45
pays de l’Europe occidentale où les données sont disponibles, l’âge au premier rapport sexuel
s’est abaissé d’au moins deux ans des générations féminines anciennes aux nouvelles (Bajos et
al., 2004). Ainsi, l’écart initial entre sexes s’est réduit et les âges au premier rapport ont
tendance à se rapprocher. Par exemple, en France, l’enquête de 1998 a révélé que les âges à
l’initiation sexuelle sont devenus identiques, 17,4 ans pour les garçons et 17,6 ans pour les
filles, dans les générations nées vers 1980 (Bozon, 2003) (Tableau 2.1).

Tableau 2.1 : Ages médians au premier rapport sexuel des hommes et des femmes, de quelques
pays, selon le groupe d'âges à l'enquête

Europe et Etats Unis Age médian au premier rapport sexuel


Génération (40-49 ans) Génération (20-24 ans)
H F H F
Belgique (1993) (j) 20,0 19,0 18,4 17,9
France (1992, 1998) (i) 18,9 17,9 17,6 17,4
Espagne (2001) (k) 20,1 18,5 19,1 18,2
Portugal (1997) (g) 21,5 17,5 19,8 17,4
Grèce (1999) (g) 19,8 17,4 19,0 17,4
Roumanie (1999) (h) 20,1 18,3 19,5 17,3
Etats Unis (1994) (m) 19,1 18,6 17,6 17,1
(j) 20-26 ans – (l) génération jeune née vers 1980. La médiane pour cette génération est calculée à partir de l’évolution
de la proportion d’individus initiés sexuellement à chaque âge entre 15 et 19 ans – (k) génération ancienne née entre
1956 et 1961, génération jeune née après 1975 –(g) 45-49 ans – (h) 40-44 ans pour les femmes, 45-49 ans pour les
hommes –(m) génération jeune : 18-24 ans
Source : Bozon, 2003

Plus récemment, l’enquête Contexte de la Sexualité en France (CSF) de 2006 couvrant une
cinquantaine de générations, en France, a confirmé la baisse de l’âge au premier rapport sexuel
mais celui-ci reste très différencié selon le sexe (Figure 2.1). En effet, il ressort qu’en un demi-
siècle, l’âge médian des hommes au premier rapport sexuel s’est abaissé d’un an et demi (de
18,8 ans pour les générations âgées aujourd’hui de 65 à 69 ans, à 17,2 ans pour les plus jeunes),
alors que celui des femmes, initialement beaucoup plus élevé a chuté de trois ans (17,6 ans pour
les femmes âgées de 18 ou 19 ans). En somme, de nos jours, les hommes et les femmes entament
quasiment leur première expérience sexuelle aux mêmes âges. Mais, au moment où le VIH/Sida
se propage, l’âge au premier rapport sexuel s’était stabilisé au cours des années 1980 et 1990
aussi bien pour les hommes que pour les femmes, avant de connaître une autre tendance à la
baisse à partir des années 2000 (ANRS, INSERM et INED, 2007).

46
Figure 2.1 : Age aux premiers rapports sexuels par sexe et par génération en France

Source : ANRS, INSERM et INED, 2007

En Amérique latine et dans les Caraïbes, lorsqu’on s’intéresse aux pays ayant des données EDS
disponibles pour les deux sexes, on note que le calendrier de l’initiation sexuelle n’a presque
pas changé en Bolivie, en Guyane et au Nicaragua. Seul le Brésil affiche la baisse la plus
importante quel que soit le sexe. Par exemple, chez les femmes, l’âge médian d’entrée dans la
vie sexuelle, qui était de 20,7 ans pour la génération la plus ancienne (45-49 ans au moment de
l’enquête), est tombé à 18,8 ans pour la génération 25-29 ans. Cependant, au Pérou, on observe
une tendance inverse : les générations féminines récentes entrent plus tardivement en sexualité
que leurs aînées.

Dans cette partie du monde, la littérature révèle que les garçons ont souvent des rapports sexuels
plus tôt que les filles (Bozon, 2003 ; Bozon et Hertrich, 2004 et Bozon, 2005). Contrairement
à l’Afrique où l’entrée en sexualité des filles précède celle des garçons, « le modèle latino-
américain traditionnel de contrôle de la sexualité juvénile crée un double standard selon le
sexe : les jeunes gens sont incités à une initiation plus précoce, alors que tout est fait au
contraire pour le retarder autant que possible l’accès des femmes à une vie sexuelle » (Bozon
et al., 2006, p.667). Les résultats des EDS viennent confirmer les propos de Bozon et ses
collègues. Lorsqu’on considère les personnes âgées de 25 à 29 ans au moment des différentes
enquêtes, il apparaît une plus grande précocité à l’initiation sexuelle chez les hommes. Ainsi,
en Bolivie, la différence entre les âges médians au premier rapport sexuel a été de 1,6 an (17,2
ans pour les hommes et 18,8 ans pour les femmes) en 2008 ; au Brésil de 2,3 ans (16,5 et 18,8)

47
en 1996 ; en Guyane de 0,3 an (18,0 et 18,3) en 2009 ; au Nicaragua de 2,6 ans (15,6 et 18,2)
en 1998 et au Pérou, elle a été de 2,7 ans (16,6 et 19,3) en 1996 (Tableau 2.2).

Tableau 2.2 : Age médian au premier rapport sexuel par sexe dans quelques pays d’Amérique
latine et Caraïbes

Pays Année Age médian au premier rapport sexuel des Age médian au premier rapport sexuel des
d’enquête hommes femmes
25-29 ans 45-49 ans 25-29 ans 45-49 ans
Bolivie 2008 17,2 17,7 18,8 18,7
Brésil 1996 16,5 17,3 18,8 20,7
Colombie 2015 15,8 16,5 17,1 18,7
Guyane 2009 18,0 18,5 18,3 18,8
Nicaragua 1998 15,6 15,5 18,2 18,2
Pérou 1996 16,6 16,9 19,3 18,8
Source: The DHS Program STATcompiler - http://www.statcompiler.com

Fortement associé au contexte social et culturel dans lequel il intervient, l’âge au premier
rapport sexuel varie d’un pays à un autre. En Afrique subsaharienne, l’initiation sexuelle des
femmes a toujours été plus précoce que celle des hommes. Au nombre des facteurs explicatifs
figurent la nuptialité précoce. Par exemple, en Afrique, 42% des femmes entre 15 et 24 ans sont
mariées avant d'avoir 18 ans, souvent à des hommes qui ont 15 ans de plus qu'elles (UNICEF,
2005). Toutefois, les données plus récentes indiquent, à l’exception de quelques pays (Mali,
Guinée…), une élévation de l’âge des femmes au premier rapport sexuel, alors que celui des
hommes diminue (sauf en Ethiopie, Rwanda et Ouganda) (Tableau 2.3). Bozon (2003) fait
l’hypothèse que, dans certains pays fortement touchés par le Sida, les campagnes de prévention
ont pu pousser les jeunes femmes à retarder leur premier rapport sexuel. En définitive, il ressort
que l’initiation sexuelle ouvrent la voie à l’exposition potentielle des jeunes au risque de
contraction des IST/VIH/Sida : plus il est précoce plus le risque est élevé. En fait, des études
ont montré qu’une entrée précoce en sexualité est associée à une plus grande probabilité
d’adoption de comportement sexuel à risque notamment le recours à la multiplicité des
partenaires (Miangator, 2010, Pettifor et al., 2010).

48
Tableau 2.3 : Age médian au premier rapport sexuel par sexe dans des pays d’Afrique
subsaharienne

Régions/Pays Année Age médian au premier Age médian au premier


d’enquête rapport sexuel des hommes rapport sexuel des femmes
25-29 ans 45-49 ans 25-29 ans 45-49 ans
Afrique de l’ouest
Burkina Faso 2010 20,4 20,8 17,6 17,9
Côte d'Ivoire 2011-12 18,1 19,1 16,9 17,0
Ghana 2008 19,9 20,2 18,6 17,9
Guinée 2012 18,9 20,8 16,3 17,0
Mali 2012-13 21,0 22,6 16,8 17,6
Niger 2012 22,6 24,4 16,0 15,6
Nigéria 2013 20,9 21,4 17,8 17,1
Sénégal 2010-11 22,0 22,7 19,4 17,9
Sierra Leone 2013 17,8 18,4 16,4 16,5
Togo 2013-14 19,0 19,7 18,1 18,3
Afrique centrale
Cameroun 2011 18,4 18,9 17,3 17,0
Tchad 2004 18,1 18,7 15,8 15,8
Congo Brazzaville 2011-12 16,7 17,6 16,4 16,1
Congo Démocratique 2013-14 17,5 18,0 16,8 16,7
Gabon 2012 16,6 17,8 17,1 16,3
Afrique australe
Lesotho 2009 17,9 20,5 18,5 18,3
Namibie 2013 17,7 18,6 18,8 20,0
Swaziland 2006-07 19,3 19,8 18,1 17,6
Afrique de l’est
Ethiopie 2011 21,8 20,9 17,4 15,6
Kenya 2008-09 17,8 17,8 18,3 17,7
Madagascar 2008-09 17,9 18,3 17,2 17,3
Malawi 2010 18,5 19,0 17,3 17,0
Mozambique 2011 16,9 17,5 16,0 16,3
Rwanda 2010 22,0 21,2 21,3 20,5
Ouganda 2011 18,8 18,5 17,0 16,8
Zimbabwe 2010-11 20,6 20,5 19,3 18,1

Source: The DHS Program STATcompiler - http://www.statcompiler.com

2.1.2. Entrée en union de plus en plus tardive


Dans la plupart des régions du monde, la tendance est presque partout au recul de l’âge au
mariage. Mais dans ce changement, l’élément qui subsiste est l’entrée plus tardive en union des
hommes par rapport aux femmes, à l’exception de l’Asie de l’ouest, de la Chine et du Sud qui
enregistrent les nuptialités masculines les plus précoces (Locoh, 2002).

En Europe, plus particulièrement en France, dans le haut moyen âge, les unions étaient précoces
et les écarts d’âge entre conjoints faibles. Les filles se mariaient avant 16 ans et les garçons
autour de 25 ans. La sexualité n’était alors tolérée qu’à l’intérieur du cadre matrimonial. A la

49
fin du XVIe et au milieu du XVIIe siècle, l’âge moyen au mariage ne va cesser de s’élever
notamment pour les filles, passant de 19,1 ans à 23,4 ans. Au cours du XIXe siècle, cet âge
atteint même 25,8 ans pour les femmes avant de commencer à s’abaisser (Jaspard, 2005).
Des chiffres récents montrent qu’une femme européenne s’est mariée pour la première fois à
l’âge de 26,5 ans en 2002 contre 24,2 ans en 1990. Cette propension des jeunes générations à
différer le premier mariage s’est étendue à l’ensemble des pays européens à l’exception de
l’Europe orientale (Conseil de l’Europe, 2005). En France, les hommes et les femmes nés au
milieu des années 1950 ont été plus précoces à former une première union. Très vite avec les
générations suivantes, l’âge médian au premier mariage se relève : 23,8 ans pour les générations
1951-1955 ; 26 ans dès la génération 1971 (Prioux, 2003). En 2013, l’âge moyen au premier
mariage se situe désormais à 32,3 ans pour les hommes et 30,5 ans pour les femmes, selon
l’INSEE13.

De façon générale, l’Afrique subsaharienne est la région où les femmes se marient le plus tôt.
Ainsi, dans les années 1960, l’âge médian au premier mariage était inférieur à 18 ans dans la
plupart des pays à l’exception de ceux d’Afrique australe (Pison, 2012 ; Locoh, 2002).

Même si traditionnellement l’Afrique se caractérisait par la précocité de la première union


surtout chez les femmes, ces dernières décennies, de nombreux travaux ont souligné la hausse
de l’âge au premier mariage pour les deux sexes surtout en milieu urbain (Antoine et al., 2001,
Antoine, 2002 ; Tabutin et Schoumaker, 2004). En Afrique du nord, le changement est
spectaculaire au Maroc et en Tunisie mais l’évolution de la nuptialité est plus modeste dans les
pays côtiers et encore très discrète dans le Sahel (Hertrich et pilon, 1997). Les données EDS
récentes en Afrique subsaharienne confirment cette évolution. Pour mieux rendre compte de
l’augmentation de l’âge médian d’entrée en première union, intéressons-nous particulièrement
à quelques pays de l’Afrique de l’ouest en observant deux générations (25-29 ans et 45-49 ans)
entre deux différentes enquêtes. On s’aperçoit effectivement que l’âge au mariage des femmes
recule de façon globale mais avec des variations modestes dans certains pays (Niger, Mali, etc.).
Toutefois, un rajeunissement de l’âge d’entrée en première union est constaté au Mali en 2012-
2013 (Figure 2.2).

13
http://www.insee.fr/fr/themes/detail.asp?ref_id=bilan-demo&page=donnees-detaillees/bilan-
demo/pop_age3b.htm

50
Figure 2.2 : Evolution de l’âge médian au premier mariage des femmes dans certains pays
d’Afrique de l’ouest.

25

20

15

10

G(25-29 ans)
5
G(45-49 ans)

0 Mali_2006
Liberia_2007

Liberia_2013

Sénégal_2005

Sénégal_2010-11
Mali_2012-13

Niger_2006

Niger_2012
Ghana_2003

Ghana_2008

Guinée_2005

Guinée_2012
Cote d'Ivoire_1998-99

Cote d'Ivoire_2011-12

Source: The DHS Program STATcompiler - http://www.statcompiler.com

Plusieurs facteurs sont attribuables à ce recul de la primo-nuptialité. Il s’agit de l’urbanisation,


la scolarisation notamment l’allongement de la durée des études, l’accès des femmes aux
activités en particulier dans le secteur moderne de l'économie, l’adoption de nouveaux
comportements chez les jeunes. La crise économique entraîne des difficultés d’insertion sur le
marché du travail poussant ainsi les hommes à reporter leur mise en union (Antoine et al., 2001).
En Afrique, les hommes étant les principaux pourvoyeurs de ressources dans les ménages,
l’absence d’un emploi rémunéré et l’accès difficile à un logement constitue un obstacle au
mariage car comme le souligne Delaunay (1998), le premier mariage nécessite une disponibilité
d’argent devant servir entre autre à la constitution de la compensation matrimoniale. Au total,
notons que ce report avéré de l’entrée en union a pour conséquence majeure d’allonger le temps
de vie en célibat avec un impact réel sur les comportements sexuels des générations récentes
(Adjamagbo et al., 2005).

2.1.3. Développement de la sexualité prémaritale


Dans de nombreux pays en développement, le début de la vie sexuelle ne coïncide plus avec le
calendrier de la primo-nuptialité, conduisant ainsi à une longue période de célibat et un
développement de la sexualité prémaritale (Adjamagbo et al., 2004 ; Bozon et Hertrich, 2001).

51
Chez les femmes, celle-ci serait plutôt dû au recul de l’âge au mariage qu’à la variation de l’âge
à l’initiation sexuelle (Guillaume, 2009).

Le développement de la sexualité prénuptiale en Afrique est confirmé par les travaux de Bozon
et Hertrich (2001) portant sur 15 pays. Il ressort que, dans la plupart de ces pays africains, un
tiers au moins des femmes des jeunes générations ont eu leurs premiers rapports au moins deux
ans avant leur premier mariage alors que cette situation était exceptionnelle vingt-cinq ans plus
tôt. En outre, en s’appuyant sur des données EDS récentes, on note également que la période
préconjugale s’est allongée dans certains pays africains et latino-américains. Par exemple, en
Côte d’Ivoire, alors que cette période n’atteignait même pas deux ans pour la génération
féminine de 45-49 ans, elle est passée à 3,6 ans pour les 25-29 ans, soit un écart de 1,8 an
(Tableau 2.4). En Amérique latine, l’augmentation est plus significative au Brésil que dans les
autres pays (un écart de 1,3 an au Brésil contre 0,8 an et 0,5 an respectivement en Colombie et
au Guatemala). Chez les hommes, en revanche, cette période de sexualité prémaritale est très
longue dans tous les pays (atteignant même la dizaine d’années au Gabon pour la génération
30-34 ans) mais les données disponibles n’indiquent pas une réelle augmentation d’une
génération à une autre (Annexe 1). Que ce soit chez le jeune homme ou la jeune fille, cette
période peut, selon Bozon et Hertrich (2001), correspondre vraisemblablement à des fiançailles
sexualisées et prolongées avec le ou la futur(e) conjoint(e) mais aussi à des relations sexuelles
ponctuelles avec un ou plusieurs partenaires ou même à une expérience se soldant par à une
grossesse non suivie de mise en union.

Tableau 2.4 : Age médian au premier mariage, âge médian au premier rapport sexuel et durée de
la sexualité prénuptiale chez les femmes

Pays Année Age médian au Age médian au premier Durée de la sexualité


d'enquête premier mariage rapport sexuel prénuptiale
25-29 ans 45-49 ans 25-29 ans 45-49 ans 25-29 ans 45-49 ans
A B C D A-C B-D
Afrique subsaharienne
Bénin 2011-12 19,3 20,8 18,2 18,9 1,1 1,9
Cameroun 2011 19,0 17,9 17,3 17,0 1,7 0,9
Cote d'Ivoire 2011-12 20,5 18,8 16,9 17,0 3,6 1,8
Gabon 2012 22,1 19,6 17,1 16,3 5,0 3,3
Kenya 2014 20,5 19,8 18,1 17,6 2,4 2,2
Madagascar 2008-09 18,4 18,9 17,2 17,3 1,2 1,6
Ouganda 2011 18,2 17,9 17,0 16,8 1,2 1,1
Amérique latine
Bolivie 2008 21,1 20,6 18,8 18,7 2,3 1,9
Brésil 1996 21,0 21,6 18,8 20,7 2,2 0,9
Colombie 2015 21,1 21,9 17,1 18,7 4 3,2
Guatemala 2014/15 20,3 19,1 19,0 18,3 1,3 0,8
Source: The DHS Program STATcompiler - http://www.statcompiler.com

52
2.1.4. Fécondité prémaritale renforcée par une fécondité précoce

La fécondité prémaritale est un phénomène existant en Afrique mais également dans certains
pays développés à des degrés divers (Garenne et Halifax, 2000). Si en Europe, le problème
semble moins aigu en raison d’une adoption plus rapide de la contraception, aux Etats Unis, par
contre, il est d’une grande ampleur. Un nombre élevé de naissances prémaritales et
d’avortements y a été constaté parmi les jeunes notamment dans la population afro-américaine.
Ainsi, dès les années 1960, les chercheurs vont accorder une attention particulière à la fécondité
précoce et/ou préconjugale en vue d’appréhender les conséquences sur la santé de la mère et de
l'enfant et sur le bien-être économique et social futur de la mère (Delaunay, 1994). En Europe,
les accouchements sont particulièrement fréquents chez les adolescentes au Royaume-Uni : le
taux de fécondité augmente très vite de 15-20 ans puis la hausse ralentie. Ce phénomène est
également observé en Irlande (Pison, 2010). Il est important de rappeler qu’en Europe, les
grossesses des adolescentes se soldent davantage par des IVG alors qu’aux Etats Unis, les filles
ont tendance à garder leurs enfants (Darroch et al., 2001).

Tableau 2.5: Taux de grossesse, de natalité et d’avortement chez les adolescentes dans cinq pays
développés (pour 1000 adolescentes entre 15 et 19 ans)

Pays Naissances Avortements Grossesses Ratio


d’avortements
Suède (1996) 7,8 17,2 25,0 68,8
France (1995) 10,0 10,2 20,2 50,5
Canada (1995) 24,5 21,2 45,7 46,4
Grande Bretagne (1995) 28,3 18,4 46,7 39,4
Etats Unis (1996) 54,4 29,2 83,6 34,9
Source : Darroch et al. 2001, p.246

Dans les années 1960, en Afrique subsaharienne, presque toutes les femmes se mariaient et
surtout en grande partie avant l’âge de 20 ans (Garenne et Halifax, 2000). A l’exception de
quelques groupes ethniques qui toléraient la sexualité et la procréation préconjugale, dans la
majorité des cas, le mariage précédait obligatoirement l’entrée en vie sexuelle et féconde. Mais
aujourd’hui, ce n’est plus pareil avec l’allongement de l’âge au mariage. Dans un contexte où
l’utilisation de la contraception est très limitée, il est évident d’être confronté aux grossesses
des jeunes filles. La fécondité avant le premier mariage n’est pas toujours désirée et pose un
véritable problème de santé lorsqu’elle est précoce. Toutefois, en Afrique, ce n’est pas tant
l’aspect relatif à la santé de la mère et de l’enfant qui prime lorsqu’on aborde la fécondité
préconjugale mais plutôt l’intégration et le statut social, dans les sociétés où la tolérance est
faible pour les enfants nés hors union et leurs mères (Pison, 2012).

53
L’augmentation de la fécondité prémaritale, dans certains pays africains, apparait dans les
travaux réalisés par Adjamagbo et al. (2004) à partir de données biographiques. Ainsi, à Dakar,
au Sénégal, la proportion de femmes ayant commencé leur vie familiale par une naissance est
passée de 8,3% à 23,3% respectivement pour les générations 1945-1954 et 1965-1974. Cette
évolution est également mise en évidence par Mondain et al. (2005). A partir des naissances de
rang 1 enregistrées au cours de la période d’observation 1984-2000 à Niakhar, au Sénégal, les
auteurs soulignent que le niveau de la fécondité prémaritale est relativement élevé : près d’un
quart des premières naissances ont été conçues avant le mariage et 16% sont intervenues dans
le célibat. En outre, Garenne et Halifax (2000) révèlent que le phénomène de fécondité avant le
mariage est particulièrement important à Madagascar, en Namibie, au Libéria, au Zimbabwe et
au Kenya mais faible au Nigeria, au Bénin, au Burkina Faso et au Mali (Figure 2.3).

Figure 2.3 : Pourcentage de naissances prémaritales chez les femmes de 15-49 ans

Nigeria
Benin
Burkina Faso
Mali
Burundi
Niger
Sénégal
Rwanda
Uganda
Centrafrique
Cameroun
Malawi
Togo
Tanzania
Ghana
Zambia
Cote d'Ivoire
Mozambique
Kenya
Zimbabwe
Liberia
Namibie
Madagascar
0 5 10 15 20
Source : Garenne et Halifax, 2000

A partir des données EDS récentes, on remarque que l’âge à la première naissance chez les
femmes connaît également un recul des générations les plus âgées aux plus jeunes dans certains
pays. Ce recul varie de moins d’un an (Rwanda, Tanzanie, Zambie, Kenya, Cameroun, Togo,

54
Sénégal, Nigeria, Libéria et Côte d’Ivoire) pour atteindre un an au Zimbabwe et presque deux
ans au Ghana. Pour mesurer l’importance de la fécondité prémaritale, nous utilisons les
tendances de l’âge médian à la première naissance et de son écart par rapport à l’âge au premier
mariage. Si la valeur obtenue est inférieure à 0 alors la première naissance précède le premier
mariage, traduisant de facto une fécondité prémaritale. En revanche, si la valeur est supérieure
ou égale à 0, alors le premier mariage précède la première union. On parle dans ce cas de
fécondité maritale (Beninguisse, 2007). En analysant ces écarts, on s’aperçoit que, dans tous
les pays considérés, les naissances arrivaient nettement après le mariage pour la génération 45-
49 ans. C’est seulement au Liberia que les deux phénomènes ont lieu aux mêmes âges médians
(18,4 ans).

Cependant, dans la jeune génération, on distingue d’abord les pays dans lesquels les naissances
interviennent peu avant le mariage c’est-à-dire moins d’une année (Togo, Cameroun,
Zimbabwe, Rwanda, Zambie, Ouganda, Tanzanie), puis ceux où les naissances surviennent
entre une et trois ans après le mariage (Burkina Faso, Niger, etc.) et enfin ceux dans lesquels
les naissances précèdent le mariage (Côte d’Ivoire, Liberia et Kenya) confirmant l’hypothèse
d’une tendance à l’augmentation des naissances hors mariage (Tableau 2.6).

Mais pourquoi la prééminence de la fécondité prémaritale n’est pas observée dans de nombreux
pays, comme on s’y attendait ? La réponse peut se trouver dans l’étude de Rossier (2006)
lorsqu’elle écrit : « il n’y a pas d’augmentation des naissances hors mariage au Burkina Faso ;
par contre, il semble que l’on assiste, à Ouagadougou comme dans d’autres capitales, à une
augmentation du recours à l’avortement provoqué ». A cela, il faut ajouter les problèmes de
mesure car il est difficile de déterminer l’intensité de la fécondité hors union en raison de la
variation des définitions du concept de mariage lors des opérations de collecte, des indicateurs
utilisés et de la population de référence dans chaque recherche. Par exemple, en utilisant la
proportion des mères célibataires pour évaluer les naissances prémaritales, Emina (2005)
formule deux critiques : premièrement, parmi les femmes qui ont eu des naissances hors union,
certaines ne sont plus célibataires au moment de l’enquête et ensuite, les femmes célibataires
dont les enfants sont décédés sont reprises au dénominateur et non au numérateur. Par ailleurs,
l’indicateur utilisé par Beninguisse (2007) ne prend en compte que la fécondité prémaritale et
maritale alors que certaines naissances de rang 1 peuvent avoir lieu chez les femmes en rupture
d’union.

55
Tableau 2.6 : Age médian à la première naissance, Age médian au premier mariage et écarts d’âge
entre ces deux occurrences

Ecarts entre les âges


à la première
Age médian à la Age médian au naissance et le
première naissance premier mariage premier mariage
Année
Pays d’enquête 25-29 45-49 25-29 45-49 25-29 45-49
ans ans ans ans ans ans
A B C D A-C B-D
Bénin 2011-12 20,3 21,7 19,3 20,8 1,0 0,9
Burkina Faso 2010 19,4 19,9 17,9 18,0 1,5 1,9
Cote d'Ivoire 2011-12 19,8 19,0 20,5 18,8 -0,7 0,2
Ghana 2008 21,8 20,0 21,0 19,1 0,8 0,9
Liberia 2013 19,2 18,4 19,3 18,4 -0,1 0
Mali 2012-13 18,8 20,9 17,4 19,2 1,4 1,7
Niger 2012 18,1 19,4 15,9 15,6 2,2 3,8
Nigeria 2013 20,3 19,5 18,6 17,3 1,7 2,2
Sénégal 2010-11 21,4 20,5 19,9 18,3 1,5 2,2
Togo 2013-14 21,0 20,5 20,2 19,5 0,8 1
Cameroun 2011 19,7 19,4 19 17,9 0,7 1,5
Centrafrique 1994-95 19,4 19,8 17,4 17,4 2 2,4
Kenya 2008-09 19,8 19,5 20,2 18,9 -0,4 0,6
Madagascar 2008-09 19,5 20,3 18,4 18,9 1,1 1,4
Malawi 2010 18,9 18,9 17,9 17,6 1 1,3
Rwanda 2010 22,9 22,2 22,3 20,6 0,6 1,6
Tanzanie 2010 19,6 19,4 18,9 18,5 0,7 0,9
Ouganda 2011 18,9 18,9 18,2 17,9 0,7 1
Zambie 2013-14 19,2 18,7 18,9 17,7 0,3 1
Zimbabwe 2010-11 20,5 19,5 19,9 18,7 0,6 0,8
Source: The DHS Program STATcompiler - http://www.statcompiler.com

2.1.5. Sexualité de plus en plus à risque : relations sexuelles instables et partenaires


multiples

La vie sexuelle des adolescents et des jeunes débute généralement par des relations amoureuses
marquées par leur caractère occasionnel, superficiel et éphémère. En effet, à l’adolescence, les
relations sexuelles sont surtout passagères, instables et le multipartenariat est fréquent
(Kalambayi, 2007). A cette période de la vie, les changements de partenaires sont récurrents et
les relations sont de courte durée. L’enquête française menée auprès des jeunes de 15-18 ans
vient renforcer l’hypothèse de la brièveté des premières relations sexuelles chez les jeunes.
Ainsi, cette enquête a révélé que la moitié des jeunes a eu une première relation dont la durée
varie d’un jour à un mois. S’agissant du délai entre le premier et le second partenaire, pour
environ la moitié des jeunes (49,6%) le délai est compris entre deux mois et un an ; et pour plus
d’un quart (28,3%), il est de moins de deux mois. Ces résultats font de la sexualité des jeunes

56
une série d'épisodes brefs et plus ou moins espacés. Au Burkina Faso, la durée de la première
relation sexuelle varie fortement selon le sexe des jeunes gens : en moyenne une année pour les
garçons et de huit mois à quatre ans pour les filles. Mais pour près de la moitié de ces jeunes,
cette première relation est déjà terminée (Ouédraogo et al., 2006). En outre, les adolescents ont
souvent des relations sexuelles non planifiées, accidentelles et sans lendemain. Des élèves du
lycée moderne II de Bouaké, en Côte d’Ivoire, ont affirmé que leurs rapports sexuels ont lieu
généralement après des « shows » (soirée dansante, un pot dans un bar, un bal de fin d’année,
une fête, etc.) et qu’ils étaient non programmés (Mazou, 2014). En somme, l’engagement des
jeunes dans les relations sexuelles éphémères est associées à l’usage de substances nocives
(drogues, alcool) et à une moindre préoccupation à la protection contre les IST/VIH/Sida
(Courtois, 2011).

Concernant le recours au multipartenariat sexuel, il est de plus en plus important chez les jeunes
bien qu’il figure parmi les facteurs qui contribuent à la propagation du VIH/Sida. Même s’il est
faible chez les filles, rien ne l’empêche « d’exister dans l’ombre et à l’abri des regards
accusateurs et des injonctions moralisatrices » (Mulot, 2009, p.68). Chez les jeunes garçons,
cette pratique semble être plus répandue (Bajos et Durand, 2001 ; Talnan et al., 2004). Dans
beaucoup de sociétés, pour prouver leur virilité notamment à leurs pairs, ces derniers n’hésitent
pas à multiplier les expériences sexuelles, considérées comme quelque chose de prestigieux.
Or, le multipartenariat est un comportement qui crée, majore et perpétue le risque d’infection à
VIH. Ainsi, dans les pays où la prévalence du VIH est déjà élevée, le risque d’accélération de
sa transmission liée aux partenariats sexuels multiples et simultanés est particulièrement
important (ONUSIDA, 2008). Un rapport régional de l’UNAIDS (2010) souligne que près d’un
tiers des nouvelles infections sont dues au multipartenariat dans l’ensemble des six pays
considérés (Benin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Ghana, Nigéria, Sénégal).

2.1.6. Utilisation du préservatif lors des rapports sexuels chez les jeunes : un faible recours
en Afrique

Les programmes de prévention du VIH chez les jeunes mettent en avant l’abstinence, le recul
de l’âge au premier rapport sexuel et la baisse du nombre de partenaires. Mais pour des jeunes
célibataires qui sont sexuellement actifs, le préservatif demeure la seule méthode de prévention
contre la transmission du Sida et des autres IST. Cependant, son utilisation systématique à
chaque rapport sexuel n’est pas encore effective chez les jeunes.

57
Dans les pays développés, l’utilisation du préservatif au cours du premier rapport sexuel
concerne la grande majorité des jeunes. En effet, la crainte du Sida a poussé la jeune génération
à faire du préservatif son premier moyen d’initiation à la vie sexuelle. Ainsi, en France, dès les
années 1990, le préservatif est devenu la méthode presque universelle de protection des
premiers rapports sexuels : de 1985 à 1996, on passe, en une dizaine d’années, de 10% à 85%
d’utilisation au premier rapport (Toulemon et Leridon, 1996 ; Rossier et Leridon, 2004).
Contrairement au premier rapport sexuel, l’utilisation du préservatif au cours du dernier rapport
sexuel est liée à la prise de la pilule par la partenaire. Ainsi, le préservatif est utilisé dans 83%
des cas quand la partenaire ne prend pas la pilule d’après les déclarations des garçons et ce
chiffre est de 79% d’après les déclarations des filles (Bajos et Durand, 2001). Ce résultat met
nettement en évidence la double fonction du préservatif : méthode contraceptive et moyen de
prévention des IST/VIH/Sida. En sus, Bozon et al., (2006) ont montré que le premier rapport
sexuel des jeunes au Brésil est globalement assez bien protégé mais le préservatif tend à être
abandonné lorsque la relation se stabilise.

En Afrique, l’utilisation du préservatif lors des rapports sexuels reste globalement faible et très
variable selon les pays. En Zambie, plus de 70% des jeunes célibataires affirment avoir utilisé
cette méthode lors de leur dernier rapport sexuel, contre plus de 50% au Gabon et au Zimbabwe.
Par contre, ils sont moins de 30% à dire la même chose au Sénégal et au Togo et encore moins
nombreux dans d’autres pays comme l’Egypte (Finger et Pribila, 2003). En se basant sur des
données relatives aux pays francophones d’Afrique subsaharienne, Rwenge (2013) confirme la
faiblesse de la fréquence d’utilisation des préservatifs aux premiers rapports sexuels par les
adolescents et les jeunes. Prata et al. (2005) abondent dans le même sens en soulignant que
moins de 15% des adolescentes célibataires de 15-19 ans ont utilisé un préservatif en Tanzanie,
au Malawi et en Ethiopie. L’usage du préservatif n’est pas systématique chez les jeunes quand
bien même les rapports sexuels sont à haut risque d’infection à VIH (partenaires multiples,
occasionnels, partenaires non marital et non cohabitant, etc.). Ainsi, en Afrique Subsaharienne,
le pourcentage des jeunes âgés de 15-24 ans ayant des partenaires multiples et qui déclarent
avoir utilisé un préservatif lors de leur dernier rapport sexuel est de 47% chez les garçons et de
32% chez les filles (UNICEF et al., 2011). Même dans un pays comme l’Afrique du sud, où la
prévalence du VIH dans la population adulte est estimée à 17,9% en 2012 (ONUSIDA, 2013),
l’usage constant du préservatif est encore moins fréquent : seuls 34% à 35% des 15 à 19 ans et
21% à 25% des 20 à 24 ans déclarent avoir toujours utilisé le préservatif avec leur premier ou
première partenaire (Pettifor et al., 2010). Au Burkina Faso, selon une enquête réalisée à Bobo-

58
Dioulasso, moins de la moitié des jeunes a utilisé un préservatif au moment de leur premier
rapport sexuel : environ deux jeunes hommes sur cinq (43,5%) contre environ une jeune femme
sur trois (29,5%) (Baya et Meda, 2001). En Côte d’Ivoire, la situation n’est pas plus reluisante
puisque seulement 48,7% des jeunes de 15-24 ans ont utilisé le préservatif lors des derniers
rapports sexuels à risques.

2.2. Côte d’Ivoire : un bref aperçu du contexte

Afin de bien situer le phénomène étudié dans son contexte socio-démographique, il est
judicieux de présenter les aspects économiques, sociaux et politiques ayant un lien avec les
comportements sexuels des jeunes.

2.2.1. Contexte économique et comportements sexuels : quand la pauvreté favorise la prise


de risque
Dès son indépendance, la Côte d’Ivoire engage une politique économique lui permettant
d’enregistrer, au cours des deux premières décennies de son développement (1960-1980),
d’excellentes performances économiques avec un PIB réel proche de 8% en moyenne, par an
(Cogneau et Mesplé-Somps, 1999). L’augmentation spectaculaire des prix internationaux du
café et du cacao, entre 1975 et 1977, avait induit un gain de recette d’exportation de plus de
50%. En effet, le prix du café a été multiplié par 3,6 et celui du cacao par 3 (Davis, 1993). Cette
période désignée par l’expression « miracle ivoirien » était aussi caractérisée par la disponibilité
financière et le faste des investissements (Fauré, 1982).

Mais après des années de croissance économique continue, les indicateurs macro-économiques
et sociaux se sont altérés à partir de la décennie 1980 et le pays a basculé de la catégorie des
pays à revenu intermédiaire vers celle des pays les moins avancés. Sous la pression des
institutions de Brettons Woods, une série de programmes d’ajustement structurel (PAS) est
adoptée en vue de restaurer les grands équilibres macro-économiques et créer les conditions
d’une relance économique. Puis, intervient en 1994, la dévaluation du FCFA ayant pour effet
un accroissement de la compétitivité externe du pays, favorisant ainsi une augmentation de
toutes les recettes jusqu’en 1998 (Akindès, 2001 ; Esso, 2009). Cependant, en 1999, le premier
coup d’état militaire survient et celui-ci a un effet déstabilisateur sur l’économie qui était
tournée vers une diversification de la production afin de réduire la vulnérabilité de l’économie
aux chocs exogènes tels ceux qu’elle a connus dans les années 1980.

59
La situation sécuritaire précaire finit par être transformée en une succession de crises politiques
dont les paroxysmes ont été atteints en 2002 et 2011. Ces crises vont globalement contrarier
l’économie ivoirienne et particulièrement affecter le système de santé, l'agriculture, le
commerce et l'éducation, provoquant ainsi une détérioration des conditions socio-économiques
et une aggravation généralisée de la pauvreté. Les résultats des Enquêtes sur le Niveau de Vie
des ménages (ENV) attestent que la pauvreté a connu une hausse tendancielle passant de 10%
en 1985 à 36,8% en 1995 et à 33,6% en 1998 avant de remonter à 38,4% en 2002 puis à 48,9%
en 2008, en raison des crises sociopolitiques et militaires successives. A cette date, une
personne sur deux est pauvre contre une personne sur dix en 1985. La pauvreté monétaire
touchait une population estimée à 10 174 000 personnes (MEMPD, 2008). La Côte d’Ivoire
n’avait encore jamais connu une telle dégradation du niveau de vie de sa population. Toutes
les régions sont touchées par la pauvreté mais celles ayant le plus souffert des conflits le sont
davantage : il s’agit des régions Centre, Nord et Ouest (CNO) (Annexe 33). En 2015, le taux de
pauvreté reste élevé même s’il a connu une légère baisse (46,3%) (Figure 2.4).

Figure 2.4 : Evolution du taux de pauvreté en Côte d’Ivoire entre 1985 et 2015

Source : INS, 2015. Enquêtes Niveau de Vie des ménages

Ces conditions de vie difficile constituent un facteur essentiel de vulnérabilité aux


IST/VIH/Sida. Par ailleurs, les conflits militaro-politiques ont aggravé la situation de précarité
économique et sociale avec son corollaire de pertes d’emplois liées à des délocalisations
d’entreprises voire leur fermeture, de cherté de la vie, de dysfonctionnements des services
sociaux de base, de consommation abusive d’alcool par les jeunes et les adultes, et surtout de
dégradation des mœurs. Cette dernière est matérialisée par des comportements sexuels à risque

60
tels que le sexe transactionnel, les relations sexuelles intergénérationnelles, l’infidélité et la non
utilisation de préservatifs (Kouadio et Ezouatchi, 2013). En effet, la longue période de ni paix
ni guerre a entraîné la dégradation des conditions de vie des familles. Ainsi, la paupérisation
grandissante et le manque d’activités génératrices de revenus a poussé de plus en plus de jeunes
filles vers la recherche de gains parfois « faciles » pour subvenir à leurs besoins élémentaires
ou à ceux de leur famille. Il s’agit d’une forme déguisée de prostitution car comme le souligne
le Rapport sur l’état de la population (2006, p.149) : « la prostitution de survie liée au faible
niveau socio-économique de la communauté aggrave le phénomène de prostitution ». En outre,
les propos d’un acteur travaillant dans une ONG de lutte contre le Sida attestent la
recrudescence du phénomène avec l'avènement de la crise. « Je peux dire, surtout dans la ville
d’Aboisso que nous connaissons, cette crise a amené beaucoup de filles à adhérer à ce métier-
là. Même parmi celles que nous connaissons derrière le commissariat il y a beaucoup de
déplacées. Maintenant dans la ville, là on en parle pas, il y a beaucoup également. » (EI,
PSCAP 2011). Ces femmes s’exposent ainsi au risque de contamination par le VIH/Sida
d’autant plus que le préservatif n’est pas utilisé de façon systématique lors des rapports sexuels
occasionnels alors que la transmission par voie sexuelle constitue le véritable canal de
propagation du virus en Côte d’Ivoire (Zanou et al., 2002).

2.2.2. Crises militaro-politiques, déplacement de populations et comportements sexuels à


risque
Contrairement à bon nombre de pays africains, la Côte d’Ivoire a connu plusieurs décennies de
stabilité politique avant de sombrer depuis 1999 dans une vague de turbulences : le coup d’Etat
de décembre 1999, les élections contestées d’octobre 2000, le coup d’Etat manqué de septembre
2002 et la crise post-électorale de 2011. En effet, le 19 septembre 2002, une crise politico-
militaire éclate, entraînant la division du pays en trois zones, dont l’une sous contrôle d’un
gouvernement de réconciliation nationale, la deuxième sous contrôle des Forces Nouvelles (ex-
rébellion) et la troisième étant une zone tampon séparant les deux premières (Figure 2.5). A la
suite de séries d’accords de paix, un processus de normalisation a permis la tenue des élections
présidentielles dont la contestation des résultats a conduit à la crise post-électorale de 2011.
Outre les nombreux dégâts matériels et les pertes en vies humaines, ces conflits ont occasionné
des déplacements massifs de populations fuyant les combats. Les mouvements de populations
étaient aussi bien dirigés vers les pays voisins que vers la zone gouvernementale : en 2002, on
estimait à 1 100 000 le nombre de Personnes Déplacées Internes (PDIs) et à 37 615 les réfugiés
ivoiriens dans les pays voisins (OMS et Ministère délégué chargé de la Santé, 2003). Ces

61
chiffres semblent être en deçà de la réalité car une enquête réalisée dans seulement cinq
départements14 a estimé à 709 37715 le nombre de PDIs. Aussi, les conditions de vie précaires
des PDIs ne favorisent-elles pas l’adoption de comportements sexuels à risque. Une étude
réalisée par l’ENSEA en 2004 a montré que le statut de déplacé est un facteur associé à la non
utilisation de préservatif (Soro, 2007).

Figure 2.5 : La Côte d’Ivoire après le 19 septembre 2002

Notons que les atmosphères de crise créent toujours des situations de non-droit particulièrement
favorables au développement de comportement de tous genres. En effet, en situation de conflits

14
Le pays comptait alors 58 départements
15
Enquête PDI-FAC 2005 “Conditions de vie des personnes déplacées et des familles d’accueil en zone
gouvernementale : résultats de l’enquête”. MSVG/ENSEA/UNFPA.

62
ou de catastrophes naturelles, l’accent est généralement mis sur la satisfaction des besoins
vitaux. L’attention est essentiellement focalisée sur la survie des populations et la prévention
du paludisme, des maladies diarrhéiques, etc. Dans un tel contexte, une maladie comme le Sida,
qui risque ou non de tuer dans les années à venir peut ne pas être une priorité dans l’immédiat.
Par ailleurs, les prises de risque semblent importantes autant pour les civils que pour les
combattants puisque la vigilance baisse pour tous et l’accès aux préservatifs est parfois difficile.
Sur les lignes de front, loin de leurs familles, les militaires passent de longs mois et ont souvent
des relations sexuelles non protégées qui les exposent au risque de contamination du VIH/Sida.

2.2.3. VIH/Sida : une analyse de la situation épidémiologique


Depuis la survenue de la crise militaro-politique de 2002, le système sanitaire connaît une
situation de plus en plus précaire. Cette crise a entraîné une désorganisation du dispositif
sanitaire marquée par la cessation d’activités dans sept directions régionales et dans vingt-
quatre directions départementales. Environ 85% du personnel de santé des zones CNO ont
quitté leur poste, réduisant considérablement la disponibilité et la qualité des prestations de
santé (MSHP, 2008). En outre, l’évaluation CERF a révélé qu’il y a eu destruction ou pillage
de 46% des structures sanitaires dans les zones ex-occupées (UNFPA, 2008). Cette situation a
exacerbé le contexte sanitaire du pays déjà marqué par une morbidité et une mortalité générale
élevées qui sont imputables à plusieurs facteurs dont le VIH/Sida ou la co-infection
VIH/Tuberculose.

2.2.3.1. Progression et stabilité de l’épidémie

La progression de l’épidémie a été particulièrement rapide dans le pays. Ainsi, de 2 cas


officiellement déclarés en 1985, le nombre de personnes vivant avec le VIH a très rapidement
évolué pour atteindre 6 779 en 1990, 510 000 en 2001 puis 570 000 en 2003 dont 530 000
adultes de 15- 49 ans et 40 000 enfants de 0 à 14 ans. En 201516, le nombre d’adultes vivant
avec le VIH était estimé à 440 000. Cette situation est certes très préoccupante mais ces derniers
chiffres publiés mettent en évidence une certaine tendance à la stabilisation de la séroprévalence
du VIH/Sida puisque, dans les années 2000, la maladie touchait près de 10% de la population
ivoirienne adulte (ONUSIDA, 2002).

En outre, en 2015, le nombre d’orphelins et d’enfants rendus vulnérables du fait du Sida dans
le pays était estimé à 230 000. Quant au nombre de nouvelles infections, tous âges confondus,

16
http://www.unaids.org/fr/regionscountries/countries/ctedivoire consulté le 29/07/2017

63
il est passé de 58 000 en 2001 à 30 000 en 2012 et ce, malgré l’objectif de réduire
significativement l’incidence des nouvelles infections (ONUSIDA, 2013). Par ailleurs, le
nombre de décès liés au VIH/Sida a évolué parallèlement à la progression de la maladie mais
de plus en plus l’augmentation du nombre de personnes sous traitement antirétroviral sauve
davantage de vies. En effet, des mesures ont été prises pour faciliter et améliorer l’accès au
traitement à travers la gratuité des médicaments. Grâce à ces efforts, le nombre de personnes
qui décèdent de causes liées au Sida chaque année, a diminué. Ainsi, le nombre de décès est
passé de 46 000 à 25 000 entre 2001 et 2015. Cette baisse de la mortalité aurait été certainement
plus importante n’eut été les ruptures de traitements par les PVVIH lors de la crise post-
électorale ou encore au phénomène des perdus de vue. Les données du Ministère de la Santé et
de la Lutte contre le Sida indiquent qu’en 2007, 2008 et 2009 le taux de perdus de vue était
respectivement de 35%, 40% et 38,8%, à 12 mois de traitement (Kouassi et al., 2014).
Selon l’ONUSIDA (2013), le nombre de personnes sous ARV était de 109 925 à la fin de
l’année 2012. Ce chiffre reste encore faible et ce, pour diverses raisons. S’il est vrai que le
nombre de centres de prise en charge des PVVIH a connu une augmentation considérable dans
le pays, passant de 8 en 2003 à 477 en 2011 avec 83 065 PVVIH sous traitement ARV,17 il se
pose un problème de concentration des lieux de traitement dans les zones urbaines. A cela, il
faut ajouter la stigmatisation des personnes vivant avec le VIH et l’insuffisance des efforts
déployés pour répondre aux besoins des populations vulnérables, dont les professionnel(le)s du
sexe, les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes, les consommateurs de drogues
injectables, les détenus et les réfugiés (Moh, 2012).

2.2.3.2. Populations les plus à risque

Avec un taux de prévalence du VIH de 3,2%18, en 2015, au sein de la population générale, la


Côte d’Ivoire se situe dans la phase généralisée de l’épidémie19 selon la classification de
l’ONUSIDA/OMS. Toutes les couches de la population sont menacées mais certaines le sont
davantage que d’autres. Toutefois, ce taux de prévalence pourrait masquer des différences
considérables entre les différentes catégories de populations. C’est pourquoi certaines sous-

17
http://www.afro.who.int/fr/cote-divoire
18
http://www.unaids.org/fr/regionscountries/countries/ctedivoire , consulté le 12/08/2017
19
Selon le guide de terminologie de l’ONUSIDA (2011), une épidémie généralisée de VIH est une épidémie qui
perdure par transmission hétérosexuelle. Dans ce cas, la prévalence du VIH est généralement supérieure à 1% chez
les femmes enceintes bénéficiant d’un suivi prénatal. Une définition plus récente désigne un contexte où la
prévalence dépasse 1% dans la population générale adulte (15-49 ans).

64
populations, dont les comportements sexuels sont les plus à risque sont jusqu’ici ciblées par les
enquêtes de surveillance comportementale. Il s’agit des jeunes âgés de 15 à 24 ans, des routiers,
des migrants ruraux et surtout des professionnelles du sexe. Conformément aux dénominations
internationales, on pourrait ajouter les jeunes ayant leur premier rapport sexuel entre 15 et 17
ans, les femmes adultes victimes d’abus et de violence sexuels (30-34 ans), les couples
sérodiscordants, les militaires, les enseignants, les porteurs d’une IST, et les tuberculeux
(CNLS, 2011). Du fait de leurs comportements sexuels à risque, ces groupes sont plus exposés
aux risques de transmission du VIH/Sida. Ainsi, leurs taux de prévalence pourraient être encore
plus élevés ce qui appelle une vigilance de tous les instants.

En Côte d’Ivoire une étude réalisée en 2006 indiquait une séroprévalence chez les PS, quatre
fois plus élevée que celle de la population générale, soit 18,5% (OMS, 2009). La lutte contre le
VIH/Sida s’intéresse à ces populations spécifiques car le risque de contracter le virus est plus
élevé dans cette frange de la population et cela peut contribuer à alimenter l’épidémie au sein
de la population générale. Plusieurs études (OMS, 2009) ont montré qu’une réduction de la
prévalence du VIH chez les populations hautement vulnérables pourrait contribuer
significativement à la baisse de la prévalence dans la population générale. Dès lors, la nécessité
de mettre en place des stratégies de lutte contre le Sida au sein de ces populations est apparue
d’une importance primordiale dans les politiques élaborées. Ainsi, plusieurs interventions au
sein de cette sous population se sont développées. Elles se traduisent par la multiplicité des
partenaires œuvrant pour les PS/MSM20 et par la réalisation de nombreuses études ayant pour
but de fournir des informations utiles en vue d’améliorer la compréhension de la cible.

2.2.3.3. Féminisation du VIH/Sida

Le contexte épidémiologique est aussi marqué par la féminisation du VIH/Sida. Alors qu’à ses
débuts, le Sida touchait davantage les hommes, aujourd’hui on assiste à une féminisation de la
maladie. A l’instar de plusieurs pays d’Afrique subsaharienne et même des Caraïbes, le nombre
de femmes infectées est en augmentation. Ainsi, elles sont plus exposées que les hommes à
l'infection pour des raisons sociales, culturelles et physiologiques (UNFPA, 2005). Au
Swaziland, le nombre de jeunes femmes séropositives est presque le quadruple de celui des
jeunes hommes. Les taux de séroprévalence sont trois fois plus élevés chez les jeunes femmes

20
A travers les fonds du PEPFAR et du fonds mondial, de nombreuses ONG internationales (Heartland Alliance,
Family Health International, etc.) œuvrent auprès de ladite cible

65
que chez les hommes en Afrique du Sud, en Côte d’Ivoire et au Malawi (ONUSIDA et OMS,
2008).

Des données plus récentes confirment la thèse de la féminisation de l’épidémie. En effet, l’EIS
2005 révèle un taux de prévalence de 6,4% chez les femmes contre 2,9% chez les hommes. Il
s’ensuit un ratio d’infection entre les femmes et les hommes égal à 2,2 ce qui signifie qu’il y a
220 femmes infectées pour 100 hommes infectés (INS et MLS et ORC Macro, 2006). Quel que
soit le groupe d’âge, les taux de séroprévalence chez les femmes sont nettement supérieurs à
ceux observés chez les hommes des mêmes groupes d’âges. En outre, l’EDS-MICS de 2012
réaffirme le fait que le VIH/Sida « ait pris un visage féminin » en Côte d’Ivoire. La prévalence
est de 4,6% chez les femmes et de 2,7% chez les hommes. En s’intéressant à l’âge, on note que
la prévalence est faible chez les 15-19 ans aussi bien en 2005 qu’en 2012 (moins de 1% aussi
bien chez les femmes que chez les hommes), elle augmente passant au-dessus de la barre de 2%
dans la tranche d’âge de 20-24 ans pour atteindre un peu moins de 8 % à 45-49 ans (Figure2.6).

Figure 2.6 : Taux de prévalence du VIH par sexe et âge en 2005 et en 2011/12

16 9
14 8
12 7
6
10
5
8
%
%

4
6 3
4 2
2 1
0 0
15-19 20-24 25-29 30-34 35-39 40-45 45-49 15-19 20-24 25-29 30-34 35-39 40-45 45-49
Groupe d'âges
Groupe d'âges

Femmes Hommes Femmes Hommes

Source : EIS 2005 et EDS 2011-2012

2.2.3.4. Infections Sexuellement Transmissibles (IST) chez les jeunes

Elles sont une source fréquente de problèmes de santé en Afrique dans la mesure où elles
augmentent le risque de transmission du VIH. Les données sur la prévalence des IST sont rares
d’une part, parce que la grande majorité des cas ne sont ni diagnostiqués ni traités (PRB, 2011),
d’autre part, les études réalisées sur le sujet ont ciblé essentiellement les sous populations
(professionnels du sexe, les consultantes des soins prénatals et obstétricaux, etc.), limitant ainsi

66
leur représentativité (Beninguisse, 2007). Généralement lors des opérations de collecte sur la
santé sexuelle, des questions sont posées sur les antécédents d’IST (au cours des douze derniers
mois). Il s’agit le plus souvent de symptômes ou signes d’IST décrits par les enquêtés. Les
informations recueillies peuvent seulement suggérer la présence d’une IST mais elles ne
constituent pas une preuve. Ainsi, alors que 8% des femmes ayant déjà eu des rapports sexuels
ont déclaré avoir eu une IST (des pertes vaginales anormales et malodorantes, plaies ou ulcère
génital) au cours des 12 derniers mois ; cette proportion est de 5% (écoulement urétral ou ulcère
génital) chez les hommes (INS et ICF International, 2012).

2.2.4. Profil socio-démographique des jeunes en Côte d’Ivoire


2.2.4.1. Les jeunes dans la population ivoirienne

La volonté nettement pro nataliste affichée par les pouvoirs publics a accentué le rythme de
croissance très rapide de la population en Côte d’Ivoire. Cet élan démographique est porté par
une immigration importante en provenance des pays limitrophes (Burkina Faso, Mali, Guinée).
Mais, cette croissance démographique connait une certaine décélération observée depuis 1988.
Selon les données du RGPH de 2014, la population totale du pays s'élève à 22 671 331
habitants. Elle est caractérisée par une extrême jeunesse : 41,5% des individus ont moins de 15
ans et les jeunes âgés de 15 à 24 ans représentent 19% de la population totale (INS, 2014). Selon
la Division Population des Nations Unies, le nombre de jeunes âgés de 15-24 ans a beaucoup
évolué passant de 1 095 000 en 1975 à 3 724 000 en 2010. Par ailleurs, les données du RGPH
indiquent que c’est dans la ville d’Abidjan, capitale économique, qu’on observe la proportion
la plus importante de jeunes (21,7%) ; puis vient le district de Yamoussoukro (21,2%) (Tableau
2.7). En outre, on note que cette population jeune est très urbanisée, plus de 43% vit en ville
(INS et ICF International, 2012), en partie à cause de la migration scolaire puisque la quasi-
totalité des infrastructures scolaires et universitaires sont localisées dans les grandes villes.

67
Tableau 2.7 : Population des 15-24 ans par région, en 2015

Régions Effectif Population Poids Régions Effectif des Population Poids


des 15-24 totale des 15-24 ans totale des
ans jeunes jeunes
Abidjan 1 020 051 4707401 21,7 Me 96 824 514454 18,8
District de 75 474 355406 21,2 Tonkpi 170 142 992389 17,1
Yamoussoukro
San Pedro 153 324 826618 18,5 Cavally 89 150 459898 19,4
Nawa 194 479 1053072 18,5 Guemon 157 833 919250 17,2
69 061 400718 17,2 Haut 264 635 1430300 18,5
Gboklè sassandra
Indenié-Djuablin 108 334 560408 19,3 Marahoué 153 216 861982 17,8
Sud Comoé 116 672 642581 18,2 Poro 134 130 763546 17,6
Kabadougou 29 521 193364 15,3 Tchologo 78 152 467903 16,7
Folon 14 602 96409 15,1 Bagoué 64 286 375547 17,1
Gôh 161 333 875999 18,4 Gbeké 184 832 1010845 18,3
Lôh-Djiboua 131 136 729163 18,0 Hambol 70 515 429977 16,4
Belier 56 497 346768 16,3 Worodougou 48 837 272275 17,9
Iffou 52 153 311606 16,7 Beré 66 141 388893 17,0
N'Zi 40 593 247578 16,4 Bafing 29 688 183014 16,2
Moronou 60 680 352611 17,2 Gontougo 114 203 666589 17,1
Grands ponts 64 592 356479 18,1 Boukani 43 749 267163 16,4
Agneby-Tiassa 105 340 606665 17,4 Ensemble 4 220 175 22 666 871 19,0
Source : INS. 2015. RGPH, 2014

2.2.4.2. Education et niveau d’instruction des jeunes

La scolarisation et l’instruction sont des éléments importants à prendre en compte car elles
peuvent influer sur les comportements sexuels des jeunes. De nombreuses recherches
confirment l’idée selon laquelle une scolarisation prolongée retarde la maturité sociale et par
ricochet l’initiation sexuelle ; et que l’instruction est positivement corrélée à l’utilisation des
préservatifs (Rwenge, 2000 ; Kobelembi, 2005). Par ailleurs, elles peuvent aussi être prises en
compte dans la formulation des campagnes de communication de masse.

En Côte d’Ivoire, le taux d’analphabétisme est de 36,8% chez les personnes de 15-35 ans soit
près de 2,2 millions de jeunes qui ne savaient ni lire ni écrire en 1998 (INS, 1998). Chez les 15-
24 ans, le taux d’alphabétisation se situe à 72,3% et 62,7%21 respectivement chez les hommes
et les femmes. Au fil des années, la proportion des jeunes de 15-24 ans n’ayant aucun niveau
d’instruction reste élevée : 41,5% en 2008 ; 35,9% en 2011-2012 et 31,7% en 2013 (Tableau
2.8). Alors que plus de 44% des garçons ont déclaré avoir le niveau secondaire, cette proportion

21
http://www.unicef.org/french/infobycountry/cotedivoire_statistics.html

68
est à peine 29% chez les filles, en 2013. La participation aux études supérieures a certes connu
une évolution au fil des générations mais elle reste encore faible dans le pays. La fréquentation
scolaire actuelle met en évidence un faible niveau de scolarisation des jeunes. Cette faiblesse
est liée aux difficultés d’encadrement qui résultent de l’insuffisance des capacités d’accueil et
au mauvais état des infrastructures éducatives inégalement réparties sur le territoire national. A
cela s’ajoutent les taux élevés de déperditions scolaires puisque le rendement du système
éducatif est encore faible. Pour preuve, le RESEN (2009) indique que sur une cohorte d’enfants
qui entrent en 6ème seulement 20% d’entre eux pourront franchir le cap de la 3ème et atteindre la
première classe du second cycle et la probabilité d’accès en terminale est estimée à 14%. En
2012, le taux brut de scolarisation au niveau secondaire (12 à 18 ans), était seulement de 47%
au niveau national. Ce taux cache des disparités selon le milieu de résidence : 76% en milieu
urbain alors qu’il n’est que de 14% en milieu rural (INS et ICF International, 2012). Cette
grande différence pourrait s’expliquer par le fait que l’offre scolaire est plus appréciable en
milieu urbain qu’en milieu rural.
En somme, tous ces indicateurs auraient pu être meilleurs si la crise de 2002 n’avait pas
accentué les entraves à la scolarisation des enfants à cause du déplacement massif des
populations en dehors de leurs zones de résidence et à l’insuffisance des structures dans les
zones d’accueil.

Tableau 2.8 : Niveau d’instruction de la population de 15-24 ans (%)

Niveau ENV EDS-MICS EEMCI ENSETE


d’instruction 2008 2011-12 2012 2013
H F E H F E H F E H F E
Aucun 32,9 49,4 41,5 27,0 44,3 35,9 26,6 42,0 34,6 22,6 41,2 31,7
Primaire 26,9 25,2 26,0 27,3 27,4 27,4 24,8 25,1 25,0 28,0 27,3 27,7
Secondaire 38,4 24,6 31,2 42,8 26,1 34,2 44,9 30,6 37,5 44,7 28,9 37,0
Supérieur 1,8 0,9 1,3 2,8 2,2 2,5 3,6 2,3 2,9 4,7 2,5 3,6
Source : ENV 2008, EDS-MICS2011-12, AGEPE, 2012, INS et AGEPE, 2014.

2.2.4.3. Les jeunes et le marché du travail

L’insertion des jeunes sur le marché du travail en Côte d’Ivoire se heurte à de nombreux
problèmes dont l’insuffisance d’emplois salariés, l’inadéquation de leur formation aux
exigences des offres d’emplois et leur inactivité en matière de recherche d’emploi.

Le secteur moderne est dans l’incapacité d’absorber le flux important de jeunes qui arrivent
chaque année sur le marché du travail. La principale cause est la faiblesse de l’investissement
privé. De ce fait, les emplois informels, qui sont le fait des initiatives privées souvent

69
individuelles, apportent un palliatif à l’absence d’emplois modernes (AGEPE, 2012). Ainsi, ce
secteur va accueillir de nombreux jeunes qui exerceront des activités n’ayant souvent aucun
lien avec leur formation.

L’inadéquation formation-emploi est l’un des problèmes cruciaux au cœur de la problématique


de la sous scolarisation des enfants même si les bénéfices de l’instruction ne se limitent pas
uniquement à l’emploi formel. L’école dans plusieurs pays africains ne séduit plus à cause du
chômage qu’elle génère. Les cours dispensés ne sont généralement pas en rapport avec les
besoins du monde du travail. Ainsi, de nombreux jeunes diplômés n’arrivent pas à s’insérer sur
le marché de l’emploi dans la mesure où les formations ne sont pas adaptées aux besoins des
entreprises. Les longues études semblent constituer un frein à l’obtention d’un emploi. En effet,
la durée moyenne d’études des chômeurs est de 9,9 ans contre 7,9 ans chez les actifs occupés,
soit un écart de deux ans (Tableau 2.9). Les jeunes sont aussi plus touchés par le chômage dans
la mesure où comparativement aux autres couches de la population, le taux de chômage est
passé de 16,4% en 1998 à 18,3% en 2002 et 24,2% en 2008 pour les tranches d’âge de 20 à 24
ans. En outre, des données plus récentes révèlent qu’en 2012, le taux de chômage des jeunes de
14-24 ans est de 13,8% contre 9,4% au niveau national. Par ailleurs, le taux de chômage des
personnes n’ayant aucun niveau d’instruction est de 6,4% contre 29% pour les titulaires de la
Maîtrise (AGEPE, 2012).

Tableau 2.9 : Positionnement des jeunes par rapport à la situation dans l’emploi

Situation dans Hommes Femmes Ensemble


l’emploi Age Durée Age Durée Age Durée
moyen moyenne moyen moyenne moyen moyenne
d’étude d’étude d’étude
Actifs occupés 26,6 8,2 25,4 7,5 26,1 7,9
Chômeurs 25,9 10,6 25,2 9,3 25,5 9,9
Inactifs 19,6 9,6 21,5 9,6 20,6 9,6
Ensemble 24,5 9,0 24,0 8,6 24,3 8,8
Source : AGEPE, 2012

2.2.4.4. La question de l’égalité des sexes

Depuis des décennies, la question de l’équité et de l’égalité entre les hommes et les femmes
demeure au centre des préoccupations internationales et nationales. Cependant, toutes les études
relatives à cette problématique ont révélé l’existence et la persistance des inégalités entre
hommes et femmes dans la quasi-totalité des domaines de la vie sociale.

70
Consciente du problème, la Côte d’Ivoire a ratifié en 1995 la Convention sur l’élimination de
toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF). En outre, elle a consacré
dans sa Constitution du 1er août 2000 le principe d’égalité entre homme et femme. En plus de
ces dispositions, le pays s’est engagé à travers le document de Politique Nationale sur l’Égalité
des Chances, l’Equité et le Genre à promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des
femmes.

En dépit de tous ces efforts consentis au niveau national, la femme, dans son triple rôle
d’épouse, de mère et d’agent économique, reste confrontée à de nombreuses difficultés en
l’occurrence la sous scolarisation, les violences sexuelles en l’occurrence les mutilations
génitales féminines, le faible accès aux emplois modernes, etc. D’une manière générale, la
persistance de tabous et autres interdits, notamment culturels, entretenus par la société ainsi que
l’ignorance de leurs droits civiques, les difficultés d’accès au crédit et à la propriété foncière
constituent des handicaps sérieux pour l’épanouissement de la grande majorité des femmes. En
effet, la possession de biens comme la terre ou la maison demeure presqu’inaccessible pour les
femmes alors que le fait pour elles, d’être propriétaire de biens peut renforcer leur pouvoir
d’action et les protéger en cas de séparation ou de rupture d’union. Par ailleurs, en termes de
revenu, une femme gagne en moyenne seulement 20% du salaire d’un homme (OCDE, 2013).
Chez les jeunes de 14-35 ans, le revenu moyen mensuel des jeunes garçons est deux fois plus
élevé que celui des jeunes filles (62 988 FCFA contre 30 393 FCFA) (AGEPE, 2012). En outre,
dans les prises de décision au sein du ménage, les hommes et les femmes n’ont pas le même
rôle et niveau d’implication. Par exemple, c’est dans la décision concernant ses propres soins
de santé que la participation de la femme est la moins importante. Ce type de décision est pris,
dans 64% des cas principalement par le conjoint et dans 24% des cas de manière conjointe.
Seulement 10% des femmes ont déclaré avoir pris seules ce type de décision (INS et ICF
International, 2012).

Aussi bien au niveau institutionnel que programmatique, la Côte d’Ivoire a accompli


d’importants progrès en matière d’égalité entre les sexes et d’autonomisation de la femme.
Ainsi, au niveau de l’éducation, une cellule de promotion de l’éducation des jeunes filles a été
créée au sein du Ministère de l’Education Nationale. Dans le même ordre d’idée, l’introduction
de l’éducation sexuelle à l’école, à travers le projet Education à la Vie Familiale et Education
en matière de population, en éliminant les stéréotypes dans les manuels scolaires, conduit au
respect de la jeune fille en tant qu’égale du jeune garçon de sa génération. Cependant, ces

71
acquis, aussi appréciables soient-ils, ne sauraient faire oublier les réalités qui entravent encore
l’épanouissement de la femme dans la société ivoirienne d’aujourd’hui.

Conclusion du chapitre 2

Ce chapitre vient confirmer l’idée selon laquelle les comportements sexuels des jeunes
connaissent des changements notables non seulement dans les pays occidentaux mais, en outre,
dans les pays d’Afrique subsaharienne. D’une manière plus générale, les résultats établis ici
suggèrent que les mutations dans le calendrier des débuts sexuels et leur déconnexion croissante
avec le mariage dans les générations récentes favorisent une période de sexualité prémaritale
plus ou moins longue selon les contextes. Cette rupture traduit une baisse du contrôle social,
associée à la baisse du pouvoir économique des parents et l’effondrement de l’autorité familiale.
Dans le cas particulier de la Côte d’Ivoire, où le taux de prévalence du VIH/Sida demeure élevé,
conjugué avec une faible utilisation du préservatif, étudier les attitudes sexuelles à risque des
jeunes nécessite une compréhension du contexte économique, les crises politiques successives
et la situation épidémiologique du VIH, etc.

L’hypothèse serait que l’environnement familial, économique et les caractéristiques


individuelles peuvent expliquer les tendances observées dans les comportements sexuels à
risque des adolescents et jeunes en Côte d’Ivoire. L’approche méthodologique utilisée à cet
effet est présentée dans le chapitre suivant.

72
CHAPITRE 3. Données et approches méthodologiques

La démographie a mis du temps à intégrer dans son objet d’étude la sexualité, les
comportements sexuels ou même les risques liés à la sexualité. C’est également le cas d’autres
disciplines comme la sociologie de la famille et l’anthropologie de la parenté (Bozon, 2002).
Ce retard est surtout dû au fait que « la sexualité était considérée comme un comportement
naturel et invariant, lié à la reproduction biologique et inscrit dans le cadre de la nuptialité »
(Bozon, 2009, p.15). De plus, la démographie moderne ayant évolué dans le sillage de la
statistique, elle ne pouvait pas intégrer l’analyse des comportements privés et sexuels.
Autrement dit, elle n’analysait les phénomènes que l’institution statistique enregistrait et
objectivait (Bozon et Leridon, 1993).

C’est seulement avec l’apparition de la contraception moderne et surtout l’émergence de


l’épidémie du VIH/Sida ainsi que de ses ravages, que la démographie va se préoccuper de
l’étude de la sexualité (Bozon, 2002). En effet, dès 1983, cette épidémie était déjà reconnue en
Afrique mais aucune action en matière de prévention et de recherche en sciences sociales n’a
été menée, entre 1984-1986, cause de la résistance des gouvernements et de l’opinion publique
(Caraël, 1995). Cette attitude est la conséquence des conclusions hâtives émanant des premiers
résultats des travaux mettant en évidence l’origine africaine du Sida. D’après Fassin (1999),
l’enquête de Douglas Feldman au Rwanda en 1986 est l’une des premières études en sciences
sociales sur la sexualité au temps du Sida. Il s’agissait d’une recherche anthropologique ayant
montré que la transmission était quasiment hétérosexuelle à travers les prostituées. En sus,
d’autres enquêtes anthropologiques ont été menées, aussi bien en milieu urbain qu’en milieu
rural, mais elles ont révélé que si l’existence de groupes à risque avait une signification au
niveau épidémiologique, elle était extrêmement problématique d’un point de vue sociologique
(Vidal et Bazin, 2000). Dans le même temps, l’OMS va initier des grandes enquêtes vers la fin
des années 1980. Dès lors, les enquêtes quantitatives sur la sexualité en Afrique sont
relativement récentes. Même si l’observation des comportements sexuels n’est pas devenue une
opération de routine comme c’est le cas des enquêtes sur la consommation ou l’emploi réalisées
par les institutions de statistique, leur prise en compte s’avère enrichissante dans l’analyse
sociologique de la famille, l’étude des rapports de genre, la définition de stratégie de prévention
du Sida, etc. (Bozon et Leridon, 1993).

73
Avec la propagation de cette pandémie, en Afrique subsaharienne, on note de plus en plus
l’existence de données permettant l’étude des comportements sexuels et reproductifs des jeunes.
En effet, pour planifier des interventions ciblées et fournir des informations basées sur
l’évidence afin d’aider à mobiliser et accroître la réponse au VIH/Sida, des données sont
collectées tant à l’échelle nationale qu’au niveau local (des régions ou villes, etc.).

Dans ce chapitre, il est question de présenter les sources des données, d’évaluer leur qualité
notamment pour quelques variables clés (âge au premier rapport sexuel, âge au moment de
l’enquête) et de décrire brièvement l’approche méthodologique utilisée.

3.1 Données disponibles sur la sexualité et les comportements sexuels en Côte d’Ivoire

Dans les pays d’Afrique subsaharienne, avant la mise en place du programme international des
EDS, les rares données représentatives au niveau national étaient, de qualité souvent trop
médiocre pour réaliser des analyses fines (Barbieri, 1993). La Côte d’Ivoire, à l’instar d’autres
pays africains, était cruellement confrontée à un manque de données socio-démographiques que
les vastes programmes mondiaux d’enquêtes vont combler notamment avec les premières
enquêtes mondiales sur la fécondité (EMF) exécutées de 1972 à 1984 (Ayad et Barrere, 1991).
Dans leur prolongement, le programme des enquêtes démographiques et de santé (EDS) a été
lancé en septembre 1984 et enfin les enquêtes par grappes à indicateurs multiples (MICS)
développées par l’UNICEF depuis les années 1990. Ces enquêtes ont pour but d’aider les pays
à recueillir des données comparables sur la situation des enfants, des femmes et des hommes en
vue de l’actualisation des indicateurs démographiques et de santé.

Si les EDS permettent, entre-autres, l’analyse des comportements sexuels et reproductifs des
adolescents et des jeunes, les MICS, quant à elles, collectent certes des informations sur le Sida
et le dépistage chez les femmes en vue d’étudier l’infection des enfants pendant les
accouchements. Ceci dans le but de renforcer les stratégies de prévention en faveur des femmes
en consultations prénatales.

S’agissant des données spécifiques sur la sexualité, c’est seulement au cours de la période 1988-
1990 que la Côte d’Ivoire a bénéficié de l’appui de la section de recherches en sciences sociales
de l’OMS pour la conduite des enquêtes « Connaissances, attitudes, croyances et pratiques »
(CACP)22 destinées à la population générale, et « relations entre partenaires » (RP) portant
davantage sur les comportements sexuels. Ces enquêtes utilisaient aussi bien les approches

22
En anglais ce sont les enquêtes: Knowledge, Attitudes, Beliefs, Practicies (KABP)

74
quantitatives que qualitatives. Elles ont été réalisées parmi la population générale et les groupes
à risque notamment les adolescents, les prostituées et leurs clients et les drogués par voie
intraveineuse (Caraël, 1995 ; Vangroenweghe, 2000). Ces enquêtes avaient pour but de fournir
un outil de travail permettant de mieux orienter les stratégies préventives. Entre 1988 et 1990,
21 pays africains dont la Côte d’Ivoire ont réalisé ce genre d’enquêtes (Annexe 2) mais celles-
ci n’ont pas pu être réitérées pour, entre autres raisons, un manque de moyens financiers. Malgré
les critiques faites sur les protocoles de ces enquêtes, il ressort qu’elles ont eu le mérite de
fournir, à la Côte d’Ivoire, de bons indicateurs à un moment donné sur le niveau de
connaissances du Sida en fonction du sexe, du groupe d’âges et du milieu de résidence,
permettant ainsi les interventions du programme national de lutte contre le Sida (Caraël, 1995).

A la suite des enquêtes « OMS », de nombreuses études sur les comportements sexuels ont été
réalisés en Côte d’Ivoire avec un accent particulier sur les groupes ayant des comportements à
risque. En effet, le niveau de prévalence et la progression de l’épidémie du VIH/Sida dans le
pays nécessitaient un suivi permanent des comportements de certains groupes de populations
parmi les plus vulnérables, de même qu’une surveillance épidémiologique de tous les instants.
Ainsi, pour que les actions planifiées touchent les cibles précises, des enquêtes de surveillance
comportementale23 répétées sur plusieurs années, ont été mises en œuvre. Les premières ont été
réalisées en 1998 puis en 2002 et s’intéressaient aux adolescents, aux filles libres, aux migrants
et aux routiers dans cinq villes de Côte d’Ivoire (Abidjan, Bouaké, Daloa, Korhogo et San-
Pedro). Basées sur une approche purement quantitative, ces études ont mis en exergue une
prévalence élevée au niveau des IST, une sexualité précoce chez les « filles libres » et une
connaissance limitée des modes de prévention des IST/VIH/Sida.

En outre, avec l’appui des partenaires au développement, de nombreuses autres enquêtes sur
les comportements sexuels de la population ont été menées dans certaines villes ou régions du
pays (Tableau 3.1)24. Généralement le choix des localités dépendait du niveau de prévalence du
VIH/Sida ou des zones bénéficiant au préalable des interventions des partenaires, ce qui
permettait l’évaluation de l’impact des projets/programmes.

23
Behavioral, Surveillance Survey (BSS),
24
Il s’agit d’études plus ou moins récentes sur les comportements sexuels en Côte d’Ivoire réalisées soit par l’INS
soit par l’ENSEA avec le financement de différents partenaires techniques et financiers.

75
Tableau 3.1 : Quelques études réalisées sur les comportements sexuels en Côte d’Ivoire

Intitulé de l’enquête Cible Localités Année Partenaires


Connaissances, attitudes et personnes âgées de Régions des 2011 Banque Mondiale à
pratiques (CAP) 10 49 ans Lagunes, des travers le Projet
Montagnes, des d'Urgence Multisectoriel
Savanes et du Sud de Lutte contre le Sida
Comoé (PUMLS).
Violences basées dur le genre Femmes de 10-49 Bouaké, Daloa, Décembre Fonds des Nations Unies
ans et hommes de Danané, Duékoué, 2007 à pour la Population
10-40 ans Guiglo, Korhogo, Avril 2008 (UNFPA)
Man et
Yamoussoukro

Comportements, attitudes et Professionnelles du Abidjan, Bouaké, Mars à Juin Fonds des Nations Unies
pratiques des Professionnelles Sexe Daloa, Danané, 2007 pour la Population
du sexe vis-à-vis du VIH/Sida Duékoué, Man, (UNFPA)
San Pédro,
Yamoussoukro

Santé sexuelle et de la des adolescents et Bouaflé, 2004 Fonds des Nations Unies
reproduction des jeunes de 12-24 Bondoukou et pour la Population
ans Toumodi (UNFPA)
Comportements en matière les jeunes 15-24 Abidjan, Bouaké et 2002 Santé familiale et
d’IST/VIH/Sida ans Korhogo prévention du Sida
(SFPS)
Projet de prévention du Sida Routiers et les Abidjan- Mai 2002 PSI, Côte d’Ivoire et
sur les axes migratoires de professionnelles du Yamoussoukro- Septembre Tulane University
l’Afrique de l’Ouest sexe Ouangolo-Pogo- 2002
(PSAMAO-Côte d’Ivoire) Aboisso-Noé
Enquête de base sur les Ex-combattants 12 zones de 2006 Fonds des Nations Unies
connaissances, attitudes et des Forces de regroupement dont pour la Population
pratiques des ex-combattants Défense et de 6 en zone (UNFPA)
vis-vis des IST/VIH/Sida Sécurité (FDS) et gouvernementale
ceux des et 6 en zone sous
Forces Armées des contrôle des forces
Forces Nouvelles nouvelles
(FAFN)

3.2 Source de données

L’analyse de la dynamique des comportements sexuels des individus sur différentes périodes
requiert des sources de données appropriées telles les enquêtes de panel ou de suivi et dans une
perspective à plus long terme, les observatoires de population (Schoumaker et Tabutin, 1999).
En effet, les données collectées, généralement sur plusieurs années, permettent de mieux
comprendre les interrelations entre la sexualité des jeunes avec l’environnement familial,
culturel, économique, etc. En l’absence de telles données, nous aurons recours à des enquêtes à
passage unique ou transversales. Selon Beninguisse (2007), l’étude de la sexualité des jeunes
se heurte à un manque de données adéquates. S’il admet que les EDS constituent la principale
source de données disponibles, il souligne toutefois qu’elles abordent ce sujet de manière très

76
imparfaite. Il préconise plutôt l’utilisation d’enquêtes de type biographique parce qu’elles
auraient l’avantage de lier l’évolution des comportements sexuels aux mutations sociales qui
les accompagnent. Aussi, dans cette recherche, nous mobilisons aussi bien les données
quantitatives que qualitatives.

3.2.1 Présentation des données quantitatives


Les analyses qui vont être faites reposent, en partie, sur les données des EDS et EIS. Les
données individuelles provenant de ces enquêtes réalisées respectivement en 1998/99, 2005 et
2011/12 sont utilisées. En outre, elles sont complétées par les données provenant de notre
enquête « contexte de la sexualité des jeunes » réalisée dans le cadre du projet « West Africa
Agricultural Productivity Program » portant sur les jeunes ruraux résidant dans des régions
agricoles.

3.2.1.1 Les enquêtes démographiques et de santé (EDS) et l’enquête sur les indicateurs du
Sida (EIS)

Les EDS ont été développées dans le cadre du projet Measure DHS financé par l’Agence des
États-Unis pour le Développement International (USAID). Ces enquêtes bénéficient également
de contributions d’autres bailleurs de fonds ainsi que du financement des pays participants. Le
projet Measure DHS est réalisé par ICF Macro, qui s’est associé depuis 2008 à cinq autres
organismes.25Depuis 1984, les EDS collectent des données représentatives au niveau national
sur la population, la santé et la nutrition. Au fil du temps, les questionnaires des EDS ont connu
une évolution prenant en compte les problèmes de santé émergeants ainsi que de nouvelles
thématiques telles que le VIH/Sida et les infections sexuellement transmissibles, le paludisme,
les jeunes, les mutilations génitales féminines, le pouvoir d’action des femmes, la violence
domestique, la consommation de tabac et d’alcool ainsi que l’hypertension.
La Côte d’Ivoire a réalisé trois EDS respectivement en 1994, 1998/1999 et 2011/12. Ces
enquêtes ont pour objectif d’estimer des indicateurs socio-économiques, démographiques et
sanitaires au niveau de l’ensemble de la population, des femmes et des hommes en âge de
procréer ainsi que des enfants.

25
Il s’agit de Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health/Center for Communication Programs, PATH,
Futures Institute, Camris International et Blue Raster.

77
Par ailleurs, les EIS sont un autre type d’enquêtes du projet Measure. Elles collectent des
données à partir d’un échantillon de femmes et d’hommes, représentatif sur le plan national,
sur pratiquement tous les aspects de la connaissance, des attitudes et du comportement vis-à-
vis du Sida, incluant parfois le test du VIH. En 2005, le pays a réalisé sa première EIS.
Toutefois, notons que la troisième EDS a été couplée avec la quatrième enquête par grappes à
indicateurs multiples (MICS)26 et la deuxième EIS.

3.2.1.2 Questionnaires

Trois questionnaires ont été utilisés au cours de ces enquêtes : ménage, femme et homme.

Le questionnaire ménage a permis de collecter les caractéristiques sociodémographiques


notamment l’âge, le sexe, le milieu de résidence, l’éducation, l’état matrimonial et les
caractéristiques socio-économiques dans lesquelles vivent les enquêtés. Il a également permis
d’établir l’éligibilité des personnes à interviewer individuellement et de déterminer les
populations de référence pour le calcul de certains indicateurs démographiques.

Le questionnaire individuel femme s’adresse exclusivement aux femmes en âge de procréer


(15-49 ans) éligibles dans les ménages enquêtés. Le seul critère de sélection retenu est l’âge de
la femme. Ce questionnaire est le plus dense et il aborde plusieurs thématiques notamment la
fécondité, la connaissance et l’utilisation de la contraception, la grossesse et l’allaitement, la
vaccination et la santé des enfants, la nuptialité, la préférence en matière de fécondité, etc.

Le questionnaire individuel homme est une forme simplifiée du questionnaire femme. Il


s’adresse à un sous échantillon d’hommes âgés de 15-59 ans. Il vise à collecter des informations
sur la connaissance et l’utilisation de la contraception et sur les opinions des hommes ou des
maris en matière de fécondité, de taille de la famille et planification familiale, etc. En somme,
l’étude des comportements sexuels s’appuie sur les données individuelles qui retracent les
activités sexuelles des enquêtés (au cours de la vie et des 12 derniers mois) (Tableau 3.2).

26
Les enquêtes MICS, organisées par l’UNICEF, sont spécifiquement orientées vers la recherche des problèmes
spécifiques à l’enfant (santé, nutrition, éducation, développement) et à la mère (protection de la mère et de
l’enfant).

78
Tableau 3.2 : questions relatives aux comportements sexuels à risque

Sections Libellé des questions Enquêtes


Mariage *Au cours des 12 derniers mois, avec combien de 1998
personnes différentes autres que (votre
mari/l’homme avec qui vivez/femme) avez-vous
eu des rapports sexuels ?

*Au cours des 12 derniers mois, avec combien de


Personnes différentes avez-vous eu des rapports
sexuels ?

* Lors de votre dernier rapport sexuel, un condom


a-t-il été utilisé ?

Mariage et activités sexuelles * Mise à part [cette/ces deux personnes], avez- 2005
vous eu des rapports sexuels avec quelqu'un
d'autre au cours des 12 derniers mois ?

*En tout, avec combien de personnes différentes


avez-vous eu des rapports sexuels au cours des 12
derniers mois ?

* La dernière fois que vous avez eu des rapports


sexuels (avec votre dernier partenaire), un
condom a-t-il été utilisé ?

Mariage et activités sexuelles 2011/12


*À part (cette personne/ces deux personnes),
avez-vous eu des rapports sexuels avec une autre
personne au cours des 12 derniers mois ?

*En tout, avec combien de personnes différentes


avez-vous eu des rapports sexuels au cours des 12
derniers mois

* La dernière fois que vous avez eu des rapports


sexuels (avec votre dernier partenaire), un
condom a-t-il été utilisé ?

Source : EDS/EIS 1998, 2005, 2012

3.2.1.3 Echantillons des EDS/EIS

L’échantillon des EDS tout comme de l’EIS est un échantillon stratifié à deux degrés. Au
premier degré, des grappes ou districts de recensement (DR) sont tirés sur l’ensemble du
territoire national à partir de la liste des DR du Recensement Général de la Population et de
l’Habitat (RGPH) de 1998. Compte tenu de l’ancienneté de cette base, une mise à jour complète
des grappes, a été effectuée avant la réalisation de ces enquêtes. Cette actualisation a permis
d'obtenir une liste complète de ménages résidant dans la grappe et cette liste a servi de base de
sondage pour tirer les ménages au deuxième degré.

79
Toutes les femmes âgées de 15-49 ans vivant habituellement dans les ménages sélectionnés, ou
présentes la nuit précédant l’enquête, étaient éligibles pour être enquêtées. De plus, dans un
sous-échantillon d’un ménage sur deux, tous les hommes de 15-59 ans ont également été
enquêtés (Tableau 3.3).

Tableau 3.3 27: Effectifs des ménages et individus enquêtés

Source de données Ménages Femmes Hommes Hommes de 15-24 Femmes de 15-24 ans
enquêtés enquêtées enquêtés ans enquêtés enquêtées
EDS, 1998-99 2 122 3 040 886 341 1429
EIS, 2005 4 368 5 183 4 503 1850 2286
EDS, 2011-12 9 686 10 060 5 135 1811 3984
Source : EDS 1998-99, EIS 2005, EDS 2011-12

3.2.1.4 Couverture de l’échantillon

De manière générale, les sources de données utilisées dans cette thèse ont une assez bonne
couverture. Toutefois, les taux de non réponse observés lors de l’EIS 2005 sont plus élevés que
ceux obtenus avec les EDS 1998-99 et 2011-12, et ce quel que soit le type d’enquêtes (Tableau
3.4). L’explication pourrait résider dans les conditions particulières de la réalisation de l’EIS
2005. Du fait de la crise politico- militaire, le pays était toujours divisé en trois zones (Figure
2.5), rendant laborieux les activités de terrain. Il était difficile pour les populations de circuler
d’une zone à l’autre à cause des contrôles intempestifs et des tracasseries de tout genre. Au
moment du démarrage de la collecte en août 2005, les combats avaient certes cessé, mais la
tension existait toujours et variait selon l’atmosphère politique du moment. Si dans la zone sous
contrôle gouvernemental, aucun obstacle ne s’opposait à la conduite de l’enquête, dans la zone
sous contrôle des Forces Nouvelles, par contre, aucune institution de la république n’était
fonctionnelle. Il a donc fallu des négociations préalables avant de commencer l’enquête dans
cette zone (INS, MLS et ORC Macro, 2006).

Tableau 3.4 : Couverture des échantillons

Source de Enquête ménage Enquête individuelle femme Enquête individuelle homme


données Urbain Rural Ensemble Urbain Rural Ensemble Urbain Rural Ensemble
EDS, 1998-99 97,5 98,7 97,9 96,2 96,6 96,4 85,0 95,6 88,3
EIS, 2005 94,2 96,6 95,5 88,1 91,3 89,8 81,9 91,7 87,5
EDS, 2011-12 97,2 98,7 98,1 90,6 94,6 92,7 86,2 94,1 90,5
Source : Rapports EDS 1998-99, EIS 2005, EDS 2011-12

27
Effectif non pondéré

80
3.2.2 Evaluation de la qualité des données EDS/EIS

Malgré les dispositions prises lors de la formation des enquêteurs et même pendant la saisie des
données recueillies, les données issues des opérations de collecte demeurent particulièrement,
dans les pays en développement, entachées de nombreuses erreurs provenant de diverses
sources. Ces erreurs peuvent être de nature à conduire les utilisateurs potentiels à des
conclusions invraisemblables. C’est pourquoi Gendreau (1993) préconise de procéder à une
analyse permettant d’évaluer la qualité des données de façon que les utilisateurs disposent
d’éléments leur permettant d’en apprécier les biais éventuels, la précision, et donc les limites
d’utilisation. Autrement dit, pour la fiabilité des résultats issus des analyses, les données
utilisées doivent être de bonne qualité, d’où l’importance de leur évaluation.

3.2.2.1 Examen des taux de non-réponse


Les variables retenues pour l’analyse doivent être effectivement renseignées dans la mesure où
un taux élevé de non-réponse peut avoir une grande influence sur la qualité des résultats. Les
données manquantes dues à la non-réponse peuvent biaiser les estimations réalisées. Ainsi,
lorsque dans un même échantillon, les individus ayant répondu aux questions et ceux n’ayant
pas répondu ont des caractéristiques différentes, il en résulte que les estimations basées sur les
seules réponses obtenues peuvent être biaisées (Giraldo et Zuanna, 2006 ; Bethlehem et al.,
2009).

Dans les enquêtes, on distingue la non-réponse partielle de la non-réponse totale. On parle de


non-réponse partielle quand seulement une partie de l’information est recueillie pour un enquêté
c’est-à-dire que certaines questions ne comportent pas de réponses. Les causes sont diverses :
refus de répondre à certaines questions (notamment dans le domaine de la santé),
incompréhension des questions ou des réponses proposées, abandon en cours de l’enquête,
invalidation d’une partie du questionnaire pour cause d’incohérence des données recueillies,
etc. En revanche, la non-réponse totale suppose que l’individu n’a pas du tout participé à
l’enquête. Elle peut être due à de nombreux facteurs notamment le refus de l’enquêté de prendre
part à l’opération de collecte, l’impossibilité de joindre l’individu sélectionné, l’incapacité de
la personne contactée à répondre au questionnaire, la perte ou destruction du questionnaire,
l’abandon dès le début de l’enquête, etc. (Pailhe et solaz, 2007).

81
Avant l’analyse des données, les non-réponses font généralement l’objet d’un traitement selon
leur ampleur. Alors que la correction de la non-réponse partielle se fait par des méthodes
d’imputation (Dussaix, 2009), la non-réponse totale se traite par la repondération.
Dans le cas des EDS/EIS, les corrections ont été déjà réalisées sur la non-réponse totale. Ainsi,
les poids de sondage ont été ajustés pour la correction de non-réponse au niveau « ménage » et
« individus » (INS et ICF international, 2012). Il ne nous reste donc qu’à évaluer les taux de
non-réponses des différentes variables retenues pour cette étude. A l’examen du tableau 3.5, il
ressort que l’ensemble des variables à l’exception de la non utilisation de préservatif ont un
taux de non-réponse inférieur à 5%.

Pour traiter les valeurs manquantes de la variable non utilisation de préservatif en 2005 et 2012,
nous utilisons la méthode d’imputation multiple au détriment de l’imputation unique. En effet,
la correction par une imputation unique a un inconvénient majeur en ce sens que pour chaque
valeur manquante, on impute une seule valeur. Selon Donzé (2001, p.3) « … du fait qu’une
unique valeur imputée ne peut pas représenter toute l’incertitude à propos de la valeur à
imputer, les analyses qui considèrent les valeurs imputées de manière équivalente aux valeurs
observées en général sous-estiment l’incertitude, même si la non-réponse est correctement
modélisée et des imputations aléatoires sont générées ».

Développée principalement par Rubin, la technique d’imputation multiple a l’avantage


d’imputer successivement plusieurs valeurs à chaque donnée manquante. Ainsi, plusieurs jeux
de données complètes sont générés, respectant les caractéristiques de la distribution des données
observées notamment la variabilité et les corrélations entre les variables (Donzé, 2001 ; Cotrell
et al., 2009). Dans cette recherche, pour obtenir des résultats plus fiables, la technique
d’imputation multiple via la méthode MICE (Multivariate Imputation by Chained Equations28)
est utilisée. Cette approche permet de disposer de plusieurs bases imputées tout en tenant
compte des éventuelles variabilités dans les variables. White et al. (2011) suggèrent de
considérer un nombre d’imputations égal à la part de valeurs manquantes. C’est sur les bases
générées que vont s’appliquer les méthodes d’analyse retenues.

28
En anglais « Imputation multiple par équations enchaînées »

82
Tableau 3.5 : Sous échantillon 15-24 ans

Variables 1998 2005 2012


Effectif % de non- Effectif % de non- Effectif % de
valide réponse valide réponse valide non-
réponse
Age 1691 0 4196 0 5716 0
Age au premier rapport sexuel 1689 0,1 4191 0,1 5704 0,2
Sexe 1691 0 4196 0 5716 0
Sexe du chef de ménage 1691 0 4196 0 5716
Etat matrimonial 1691 0 4196 0 5716 0
Niveau d’instruction 1691 0 4196 0 5716 0
Milieu de résidence 1691 0 4196 0 5716 0
Religion 1691 0 4191 0,1 5707 0,2
Ethnie 29 1353 0 4191 0,1 5697 0,3
Non utilisation de préservatif30 1296 0,2 2795 14,5 3773 12,6
Nombre de partenaires 1686 0,4 4185 0,3 5696 0,4
Niveau de vie 1691 0 4196 0 5716 0
Typologie des ménages 1691 0 4196 0 5716 0
Connaissance complète 1691 0 4196 0 5716 0
Exposition aux médias 1691 0 4196 0 5716 0

3.2.2.2 Evaluation de la qualité des données sur l’âge

En Afrique subsaharienne, lors des opérations de collecte des données, les âges sont souvent
recueillis avec difficulté et imprécision. La majorité des personnes interrogées au cours des
enquêtes ne connaissent ni le jour, ni le mois, ni même souvent l’année de leur naissance. Des
facteurs sociologiques, culturels et institutionnels (le mauvais fonctionnement de l’état civil)
sont souvent cités pour expliquer les difficultés liées à la déclaration de l’âge dans les pays en
développement. Dans ces pays, les faits d’état civil notamment les naissances ne sont pas tous
enregistrés. Par exemple, en Côte d’Ivoire, l’enquête MICS 2006 a révélé que près de la moitié
des enfants de moins de 5 ans (45%) n’était inscrit dans aucun registre d’état civil. Ce constat
est confirmé par l’EDS-MICS 2011/12 puisque pratiquement un enfant de moins de 18 ans sur
quatre n’est pas enregistré à l’état civil (24 %) et 13% des enfants ne possèdent pas d’acte de
naissance, bien qu’étant enregistrés. Dans ce contexte, il n’est donc pas rare de trouver des
adultes qui ignorent leur date de naissance.

Par ailleurs, les taux d’analphabétisme élevés expliqueraient également les mauvaises
déclarations des âges en Afrique subsaharienne. Le plus souvent la datation des évènements
dont la naissance se fait grâce aux faits marquants de la communauté (nombre de fêtes des

29
En 1998, l’ethnie a été saisie uniquement chez les femmes. Donc la variable est Non applicable dans le fichier
homme.
30
Respectivement 1388 jeunes en 2012 n’avaient pas encore de rapport sexuel

83
ignames, les saisons, les fêtes de générations, etc.). Un autre facteur mis en cause est la
déficience de la mémoire pour les évènements reculés dans le temps lors des enquêtes avec les
questions rétrospectives (Emina, 2005). Pour toutes ces raisons, l’utilisation des données sur
l’âge requiert avant tout l’évaluation de leur qualité car elle peut être entachée d’erreur. Le
rapport de masculinité ainsi que des méthodes graphiques (pyramide des âges et courbes de
distribution de fréquences) et statistiques (calcul des indices) permettent de déceler les erreurs
de déclaration de l’âge.

3.2.2.3 Analyse de la structure par âge

La distribution par âge de la population permet d'apprécier la qualité des données recueillies.
Pour Roger et al. (1981), cette structure par âge enregistrée au cours d'une enquête est la
résultante de l'histoire passée des générations concernées et des conditions de la collecte. La
première composante renvoie aux variations passées de la fécondité, de la mortalité et des
migrations tandis que la seconde dépend surtout de la nature de la question sur l'âge, le niveau
et la formation des enquêteurs, les coutumes, le niveau d'instruction des enquêtés, etc.

Les courbes de la figure 3.1 montrant la répartition de la population selon leur âge au moment
de l’enquête laisse apparaître de fortes irrégularités dans les déclarations. En effet, elles
évoluent en dents de scie avec des pics et des creux plus accentués à certains âges. Ces
irrégularités peuvent s’expliquer par des attractions ou des répulsions aux âges ronds (terminés
par 0 ou 5).
Même si la Côte d’Ivoire a connu un conflit armé et de nombreux déplacements de populations,
les effets de ces phénomènes n’ont pas fortement perturbé les distributions par âge. Par
conséquent, la deuxième composante évoquée par Roger et ses collègues pourrait expliquer les
irrégularités observées.

84
Figure 3.1 : Répartition des enquêtés par âge

700

600

500
Effectifs

400

300

200

100

0
15 17 19 21 23 25 27 29 31 33 35 37 39 41 43 45 47 49 51 53 55 57 59
Age

1998 2005 2012

Pour déceler l’ampleur des irrégularités constatées, il existe plusieurs méthodes statistiques
d’évaluation : les indices combiné des Nations Unies, de Whipple ( Iw), de Myers et de Bachi.
Ces indices donnent des informations sur le degré d’exactitude des âges déclarés et la qualité
des données recueillies. Ainsi, nous calculons l’indice de Whipple couramment utilisé dans les
travaux et celui de Myers qui a l’avantage d’être mieux élaboré.

Calculé pour les trois enquêtes, l’indice de Whipple31 compare les âges de la population qui ont
été déclarés se terminant par 0 et 5 dans la plage d’âge 23-59 ans. Les chiffres obtenus indiquent
des indices de Whipple de 1,14 ; 1,20 et 1,09 respectivement en 1998, 2005 et 2012. Ces valeurs
suggèrent que les données sont approximatives pour les périodes 1998 et 2005 et qu’elles
traduisent une légère attraction pour des âges terminés par 5 ou 0. En revanche, en 2012, on
note une amélioration de la qualité des déclarations d’âge.

Quant à l’indice de Myers, il mesure la répulsion ou l'attraction pour tous les âges se terminant
de zéro à neuf. Il indique pour un chiffre donné, une attraction ou une répulsion. Il permet aussi
de se prononcer de façon globale sur l'ensemble des chiffres. Cet indice présente aussi
l'avantage d'éliminer, au moins en partie, la diminution des effectifs entre deux âges séparés de

31
Pour les différentes valeurs de cet indice, l’annuaire démographique des Nations Unies ont proposé une
échelle d’appréciation de la fiabilité des données. Ainsi, si :
Iw < 1,05, les données sont très exactes ;
1,05≤ Iw ≤ 1,09, les données sont raisonnement exactes ;
1,10≤ Iw ≤ 1,24, les données sont approximatives ;
1,25 ≤ Iw ≤ 1,74, les données sont inexactes ;
Iw ≥ 1,75, les données sont très vagues

85
10 ans, en se servant des effectifs pondérés (Roger et al., 1981). La valeur de l'indice de Myers
varie entre 0 (aucune attraction ou répulsion) et 180 (tous les âges déclarés se terminent par un
seul chiffre (Gendreau et al., 1985). Autrement dit, les valeurs de cet indice sont d’autant plus
élevées que les distorsions dans les données sont importantes. Pour chaque chiffre, le signe
négatif du coefficient indique une répulsion, tandis que le signe positif traduit une attraction.
Les résultats obtenus pour le calcul de l’indice de Myers sont présentés dans l’annexe 6.

Figure 3.2 : Degré d’attraction ou répulsion des chiffres terminaux (Indice de Myers)

-1

-2

-3

-4
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9

EDS 1998 EIS 2005 EDS 2012

L’indice de Myers vaut 10 en 2012 contre 13,4 et 15,6 respectivement en 2005 et 1998. Ces
valeurs, plus proches de 0 que de 180, suggèrent qu’il y a eu une meilleure déclaration des âges
au fil des enquêtes. En effet, l’augmentation progressive du niveau d’instruction de la
population pourrait être à l’origine de l’amélioration des déclarations. De façon spécifique, les
données de l’EDS 1998 indiquent une préférence pour les chiffres terminés par 0, 5, 6, et 7 dans
une moindre mesure pour les chiffres 8 et 9. A contrario, on observe une répulsion pour les âges
se terminant par 1, 2, 3 et 4. Le constat est le même au niveau de l’EIS avec une attraction très
marquée par le chiffre 5 et une repulsion pour 1, 3 et 4. Au niveau de l’EDS-MICS 2012, on
note une préférence pour les chiffres 0, 5 et 8 et une répulsion pour le chiffre 1, 3, 4 (Figure
3.2). Globalement, en considérant les déclarations des âges lors des trois enquêtes, on constate
que les données recueillies sur l'âge sont entachées d'erreurs mais celles-ci ne sont pas très
importantes.

86
Toutefois, des techniques existent pour contourner ces problèmes de mauvaise déclaration de
l’âge : le regroupement en classes d’âges, la méthode graphique des distributions cumulées, la
technique des moyennes mobiles (Gendreau et al., 1985 ; Emina, 2005). Dans notre cas, le
regroupement en groupe d’âges quinquennaux a été retenu. Ainsi, l’allure des courbes en
annexe 36 montre une atténuation sensible du problème d'attraction ou de répulsion et conduit
quelque peu à des compensations au niveau des transferts d'effectifs d'un groupe d'âges à un
autre.

3.2.2.4 Evaluation de la qualité des déclarations sur l’âge aux premiers rapports sexuels

Le premier rapport sexuel est un évènement mémorable qui représente une étape hautement
symbolique dans la vie d’un individu. De ce fait, il peut être reconstitué rétrospectivement, de
nombreuses années plus tard (Bozon et Leridon, 1993). Sauf que lors des enquêtes, il peut
s’introduire des biais dans le recueil de ces données. En effet, les enquêtés peuvent donner des
réponses de façade afin de se retrouver dans ce qui pourrait être qualifié de comportement
normal, notamment quand ce premier rapport sexuel a lieu hors union alors que les normes
culturelles en vigueur ne tolèrent pas ce genre de comportements (Emina, 2005). Ce constat
amène Bozon (2003) à dire que la qualité de la déclaration sur l’âge au premier rapport n’est
pas garantie au cours des opérations de collecte. Trois difficultés majeures peuvent biaiser cette
déclaration : l’incapacité à déclarer un âge, les problèmes de mémoire pour les générations plus
anciennes et la tendance à répondre en fonction des attentes sociales.

Chez les enquêtés les plus âgés, compte tenu des défaillances de mémoire, la déclaration de
l’âge au premier rapport sexuel peut être sujette à des erreurs, dans la mesure où cette question
revêt un caractère rétrospectif. Par contre, chez les jeunes générations, la déclaration de l’âge à
la première expérience sexuelle peut varier suivant le sexe des enquêtés. Alors que les garçons
ont tendance à rajeunir l’âge à leurs premières initiations sexuelles pour mettre en exergue leur
virilité, les filles préfèrent le retarder pour rester dans le cadre normatif imposé par la société
traditionnelle. Par ce rallongement de l’âge aux premiers rapports sexuels, ces dernières veulent
se conformer aux normes de la société qui voudraient que cette initiation sexuelle féminine se
fasse dans le cadre exclusif du mariage. En d’autres termes, le mari devrait être le seul censé
initier la femme à la sexualité. Ainsi, il pourrait exister quelques erreurs essentiellement liées
au contexte socioculturel qui entoure l’activité sexuelle surtout en dehors du mariage. Ces
pesanteurs culturelles pourraient amener des filles à déclarer qu’elles n’ont pas encore eu des
rapports sexuels alors qu’elles sont sexuellement actives.
87
3.2.2.5 Erreurs de mesure : les données collectées sur la sexualité sont-elles fiables ?

Généralement les erreurs de mesure émanent des différentes étapes de la collecte et du


traitement des données. Ainsi, elles peuvent être dues, d’une part, aux interviewés qui, pour des
raisons diverses, fournissent des réponses qui ne correspondent pas à la réalité de leurs opinions
ou de leurs comportements. Et d’autre part, elles peuvent être dues aussi aux enquêteurs qui
peuvent donner aux enquêtés une mauvaise interprétation des questions qui leur sont posées ou
orienter les réponses (Guiella, 2012 ; Dussaix, 2009).

Dans l’analyse des questions sur la sexualité, les erreurs de mesure méritent d’être abordées car
lors des recueils des données, les pratiques sexuelles ne sont pas directement observables
(Bozon, 1999). On se fie uniquement aux déclarations individuelles. Aussi, est-il possible de
collecter des données fiables sur les comportements sexuels des individus, en Afrique, en raison
des tabous qui entourent l’univers de la sexualité ?

Globalement, les données collectées sur les comportements sexuels sont auto rapportées et elles
peuvent, de ce fait, être sujettes à des biais, dus à la désirabilité sociale. Celle-ci désigne la
tendance, pour un enquêté, à modifier ses réponses afin de faire bonne impression. C’est
également l’observation faite par Kelly et al. (2013) « Social desirability bias is problematic in
studies that rely on self-reported sexual behavior data». En effet, la désirabilité sociale peut
amener les individus à sous-estimer ou à surestimer tout comportement donné. Les personnes
auront tendance naturellement à répondre conformément à ce qui est valorisé par la société, à
ce qu’il considère être la norme sociale. Par exemple, pour une question sur le nombre de
partenaires sexuels au cours des douze derniers, certains enquêtés donneront des réponses
socialement acceptables tandis que d’autres pourront amplifier leurs antécédents sexuels
(Rotermann, 2008, Institut de la statistique du Québec, 2016). En analysant la fréquence des
rapports sexuels, Leridon (1993) a soupçonné chez certains individus une volonté de se
rapprocher d’une fréquence idéale. C’est ce qu’il a qualifié de biais de « normalisation vers le
haut ».

Par ailleurs, certains aspects du déroulement de l’interview peuvent avoir un effet sur la
déclaration des comportements sexuels : présence dans les environs des parents, du
partenaire/mari, des co-épouses, etc. En outre, le sexe de l’enquêteur pourrait aussi influer sur
les déclarations des enquêtés en matière de comportements sexuels. Par exemple, face à une
femme, certaines enquêtées auront tendance à ne pas déclarer leurs comportements réels mais

88
à ramener leurs réponses proches des comportements jugés souhaitables voire normaux.
Toutefois, « les comportements sexuels ne se livrant qu’à travers les déclarations des acteurs
(…) la véracité des déclarations est impossible à vérifier ou à rapprocher des sources
extérieures » (Bozon, 2002, p.307 et p.310).

En somme, toutes ces erreurs relevées ne sont pas de nature à mettre en doute les EDS/EIS qui
sont des enquêtes organisées au plan mondial et portées par Macro Inc. La méthodologie utilisée
dans ces enquêtes est également éprouvée, mise en œuvre dans de nombreux pays. Elles ont
aussi l’avantage de bénéficier de l’expertise des équipes pays notamment les Instituts Nationaux
de la Statistique. Les expériences acquises par ces institutions tant dans la formation des agents,
la collecte que dans l’exploitation des données permettent de minimiser lesdites erreurs.

3.3 Limites des données de l’étude

Comme toutes les enquêtes à caractère transversal, les données des EDS/EIS utilisées dans cette
thèse, peuvent présenter des biais dans la mesure où les caractéristiques socio-économiques et
démographiques enregistrées ne correspondent pas à celles qui prévalaient au moment où
l’évènement étudié s’est produit. Si ces données fournissent des informations détaillées sur les
jeunes au moment de l’enquête, elles ne permettent pas, en revanche, de connaître les
caractéristiques sociodémographiques et économiques des chefs de ménage ou des ménages
dans lesquels ils auraient vécu. Les comportements sexuels actuels de ces derniers sont les
résultats de facteurs antérieurs que les études transversales ne permettent pas de mesurer. A
titre d’exemple, un jeune peut vivre au moment de l’enquête dans un ménage pauvre alors qu’à
son initiation sexuelle, il résidait dans un ménage aisé. C’est également le constat fait par
Schoumaker et Tabutin (1999). Selon eux, les enquêtes démographiques sont généralement à
passage unique, donnant ainsi des informations sur le niveau de vie actuel, mais rarement sur
le passé. Miangotar (2010) abonde dans le même sens lorsqu’il souligne que certaines données
des EDS collectées au moment de l’enquête ne permettent pas d’apprécier l’antériorité d’une
variable par rapport à une autre pour déterminer une relation causale.

3.4 Concepts, indicateurs et variables d’analyse

3.4.1 Comportements sexuels à risque : terminologie et définitions


Quand on questionne la sexualité des adolescents et jeunes à l’ère du Sida, la littérature aborde
immanquablement des concepts comme les comportements à risque, les comportements sexuels
à risque, la sexualité à risque ou même les rapports sexuels à haut risque d’infection à VIH. Ces

89
concepts ont certes des similitudes mais présentent des réalités particulières et des définitions
plurivoques suivant les auteurs et les contextes. Ainsi, au Canada, dans une étude sur les
adolescents et les jeunes adultes, les comportements à risque renvoient à des comportements
ayant des conséquences négatives sur la santé, comme le tabagisme, l’abus d’alcool, les
relations sexuelles avec plusieurs partenaires et les relations sexuelles sans préservatif
(Galambos et Tilton-Weaver, 1998). Quant à la notion de rapport sexuel à haut risque, elle
apparaît dans les enquêtes EDS/EIS à travers le type de partenaire déclaré par les personnes
interrogées. Ainsi, sont considérés à hauts risques, les rapports sexuels avec un partenaire
extraconjugal et non cohabitant. Dans la présente thèse, le comportement sexuel à risque est le
concept qui sera étudié. Les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC)32,
aux Etats Unis, le définit comme un comportement qui augmente le risque de contracter des
infections sexuellement transmissibles et d’avoir des grossesses non désirées. Plus
concrètement, il s’agit du fait d’avoir des rapports sexuels à un âge précoce, de multiples
partenaires sexuels, des rapports sexuels sous l'influence de l'alcool ou des drogues et des
rapports sexuels non protégés. Selon Miangator (2010), le comportement sexuel devient à
risque dès lors qu’il est plus susceptible d’exposer, ou d’accroître les possibilités d’exposition,
à la contraction des infections sexuellement transmises, du VIH/Sida et de grossesses précoces
et/ou non désirées. Au total, les comportements sexuels à risque sont ceux qui exposent les
jeunes à un plus grand risque de contracter le VIH et les autres IST (Guiella, 2012). Par ailleurs,
ce concept recouvre plusieurs dimensions telles que l'initiation précoce à l'activité sexuelle, les
multiples partenaires sexuels, les relations sexuelles intergénérationnels, les relations avec les
partenaires occasionnels, etc. Dans le cadre de cette recherche, trois aspects des comportements
sexuels à risque ont été retenus à savoir : le calendrier précoce d’entrée en vie sexuelle, le
multipartenariat et la non utilisation du préservatif lors du dernier rapport sexuel. Ce sont donc
ces trois aspects qui constitueront nos variables dépendantes.

3.4.2 Variables dépendantes

Les trois variables susmentionnées pour mesurer les comportements sexuels à risque méritent
d’être explicitées. La première est l’initiation sexuelle précoce surtout dans un contexte
prémarital. Effectivement, la précocité des premiers rapports sexuels est associée à des facteurs
susceptibles d’accroître le risque pour une jeune personne de contracter le VIH notamment le
fait d’avoir des partenaires plus âgés (Pettifor et al., 2010). Dans les EDS, la question permettant

32
En anglais Centers for Disease Control and prevention

90
de saisir cette information est libellée ainsi : « Quel âge aviez-vous quand vous avez eu, pour
la première fois, des rapports sexuels ? »

La seconde variable d’intérêt est le multipartenariat sexuel qui est mesurée par le pourcentage
des jeunes de 15-24 ans ayant eu plus d’un partenaire au cours des douze derniers mois. Le
changement fréquent de partenaires sexuels au cours d’un laps de temps donné peut amplifier
les risques de transmission des IST/VIH/Sida. Dans les enquêtes EDS, cette variable est obtenue
à partir des questions suivantes :
- « En tout, durant votre vie, avec combien de personnes différentes avez-vous eu des
rapports sexuels ? »
- « À part (cette personne/ces deux personnes), avez-vous eu des rapports sexuels avec
une autre personne au cours des 12 derniers mois ? »
- « En tout, avec combien de personnes différentes avez-vous eu des rapports sexuels au
cours des 12 derniers mois ? »33.

Notre choix s’est porté sur la dernière question parce qu’elle couvre une période relativement
plus courte par rapport à la première c’est-à-dire qu’elle fait moins appel à la mémoire.

La troisième variable dépendante est la non utilisation du préservatif. Dans le contexte actuel
où il n’existe pas de remède pour guérir le Sida, la protection des rapports sexuels reste la
méthode la plus simple et la plus fiable de prévention. La question posée aux enquêtés est la
suivante : « la dernière fois que vous avez eu des rapports sexuels (avec le dernier partenaire),
un condom a-t-il été utilisé ? ».

3.4.3 Variables explicatives

La typologie des ménages et le niveau de vie de ceux-ci sont nos variables indépendantes
principales dans cette étude. Par ailleurs, les autres variables retenues sont relatives aux
caractéristiques des jeunes (le sexe, l’âge, l’état matrimonial, le niveau d’instruction,
l’exposition aux médias et la connaissance complète du VIH/Sida), du chef de ménage (le sexe
et le niveau d’instruction,) et du ménage (la taille du ménage, le milieu de résidence).

33
Cette question permet de vérifier la réponse donnée à la question précédente et donne le nombre total de
partenaires sexuels au cours des douze derniers mois précédent l’enquête.

91
3.4.4 Indicateurs et mesure

La structure ou typologie des ménages, le niveau de vie, l’exposition aux médias, la


connaissance complète du VIH constituent un ensemble d’indicateurs utilisés dans ce travail. Il
est donc important de préciser leur signification et leur mesure

Typologie des ménages

Contrairement aux sociétés occidentales où les liens avec les collatéraux peuvent se rompre
après deux ou trois générations, en Afrique noire, la famille se confond avec le lignage et tous
les descendants d’une souche restent liés (Binet, 1979). Du point de vue du statisticien ou du
démographe, un tel concept (famille) est donc difficile à opérationnaliser. Hérité de la tradition
statistique européenne, le ménage apparaît plutôt comme un concept plus opératoire (Locoh,
1997). Quoique pertinent, le ménage en Afrique recouvre des situations plus diverses en raison
des pratiques matrimoniales et résidentielles (Locoh, 1997). Il s’agit d’une unité de collecte
qui donne une réalité familiale africaine déformée, limitée au cercle des co-résidents et loin de
correspondre à l’entourage familial effectif (Tichit et Robette, 2008). Malgré les critiques
notamment des anthropologues, le ménage en tant qu’outil d’observation demeure une assise
statistique considérable (Locoh, 1997). Afin de permettre une comparabilité dans le temps et
dans l’espace, le principe de standardisation de la collecte et de l'analyse des EDS a permis
d’adopter une définition des ménages qui intègre à la fois des critères économiques, résidentiels
et des pratiques domestiques. Ainsi, un ménage correspond à une personne ou à un ensemble
de personnes apparentées ou non, qui vivent sous le même toit, mangent généralement ensemble
et qui reconnaissent l’autorité d’une personne appelée « chef de ménage ». En somme, les
données utilisées dans ce travail reposent sur cette définition.

En Afrique subsaharienne, les ménages présentent une grande diversité de formes (Vimard et
N’Cho, 1997). Il n’est pas rare de trouver des ménages imbriqués dans lesquels un noyau
familial réside dans un ménage plus grand. La diversité des situations est révélée par les données
collectées par les EDS dans lesquelles les détails du lien de parenté font ressortir de nombreuses
configurations (ménages avec ascendants, descendants, gendres, brus, beaux-parents, cousins,
personnes non apparentés, etc.). Par ailleurs, dans ces sociétés, la polygamie est une réalité bien
ancrée dans les pratiques matrimoniales, aussi bien en milieu urbain que rural. On peut y
observer des ménages polygames co-résidents ou non. Si dans les sociétés occidentales, le
ménage se circonscrit au cercle restreint des membres de la famille conjugale, dans les sociétés

92
africaines traditionnelles, le ménage peut renfermer, outre la famille conjugale, des membres
du lignage, le clan et la tribu (Lefranc, 1997 ; Koné et Kouamé, 2005). En effet, les membres
d’un ménage peuvent être unis par un groupe social ou par des liens de parenté agnatique ou
utérine. Autrement dit, à côté de la parenté biologique ou consanguine, il existe la parenté
sociale. Ainsi, de cousinage en cousinage, jusqu’à un ancêtre commun de plus en plus éloigné,
on se perd souvent dans la filiation des individus d’un ménage africain. Cette complexification
de la structure des ménages africains notamment exprime une forme de rapports de solidarité,
d’alliance dont le fondement est basé sur un système de parenté patrilinéaire ou matrilinéaire.
Il est donc difficile, dans ce cas, d’appréhender de façon quantitative la composition familiale
ou la typologie des ménages en Afrique en raison de cette complexité des liens qui unissent les
membres d’un ménage. Ce constat vient corroborer l’observation faite par Pilon et Vignikin
(2006) qui soulignent qu’il n’existe pas une typologie unique ou universelle des ménages mais
tout dépend des objectifs de la recherche. Ainsi, dans le cadre de cette recherche, pour cerner
la composition du ménage de résidence des jeunes, nous avons créé une typologie des ménages
en fonction de leur composition et du lien de parenté des membres avec le chef de ménage.
Dans les EDS, après avoir listé tous les membres du ménage, le chef devait indiquer le lien de
parenté qu’il entretenait avec chaque membre. A partir du modèle togolais (URD-DSG, 2000),
cinq catégories de ménages ont été définies et se présentent comme suit :

 Ménage isolé : Chef de ménage (CM) seul ;


 Ménage monoparental : CM+ enfant(s) + autre(s) personne(s) ;
 Ménage monogame : CM+ conjoint + (enfants) + autre(s) personne(s) ;
 Ménage polygame : CM+ conjoints + (enfants) + autre(s) personne(s) ;
 Ménage non familial : CM+ autre(s) personne(s).
Toutefois, pour les besoins de l’analyse, nous avons fait un recodage du ménage non familial
et isolé.

En définitive, avec le manque cruel de données démographiques dans les pays du sud, la
composition du ménage reste toujours le principal indicateur familial, faute de sources plus
appropriées. Généralement, les données recueillies par les recensements africains ou les EDS
ne fournissent qu’une information minimale sur la composition familiale des ménages à partir
du lien de parenté au chef de ménage. Par conséquent, ce type de données ne permettent pas
une observation plus fine et multilatérale des liens familiaux au sein du ménage (Tichit et
Robette, 2008).

93
Niveau de vie du ménage

La mesure du niveau de vie des ménages est uniquement disponible dans les bases de données
de 2005 et 2012. Pour une question d’harmonisation, un nouvel indicateur est construit avec la
même méthodologie pour les trois enquêtes.

Dans la littérature, l’analyse du niveau de vie est largement abordée sous l’angle monétaire
(Kourouma, 2011). Dans cette approche, le niveau de vie est appréhendé à travers le revenu ou
les dépenses de consommation du ménage (Ravallion, 1996). Soutenue par les Utilitaristes ou
Welfaristes, cette approche débouche sur la détermination d’un seuil de pauvreté, c’est-à-dire
une valeur limite qui sépare la population de pauvres des autres. L’évaluation du champ de la
pauvreté s’effectue sur une base relative et le niveau moyen de revenus du ménage est souvent
pris comme indicateur de la situation financière des ménages (Fall et Menéndez, 2007).
Toutefois, l’approche monétaire présente une limite en ce sens que le revenu et les dépenses ne
sont pas le seul moyen d’accès aux ressources essentielles. Elle omet d’autres composantes du
bien-être telles que la possession ou la disposition gratuite d’un logement, l'existence d'un
patrimoine permettant de compenser des difficultés, ou plus généralement le réseau relationnel
(Hourriez et Legris, 1998) ou même les conditions d’existence. En outre, l’indice de pauvreté
humaine (IPH) du PNUD confirme la prise en compte de la dimension non monétaire dans
l’analyse de la pauvreté en ce sens qu’elle intègre d’autres aspects comme l’accès à l’eau, le
taux d’analphabétisme et l’espérance de vie à la naissance. Tout ceci indique le caractère
complexe et multiforme du concept de niveau de vie. Il est très variable selon les objectifs
poursuivis par chaque étude et les données disponibles. C’est cette diversité de définitions ou
d’approches méthodologiques qui a fait dire à Kobiané (2004, p.266) « à chacun (chercheurs
ou même institutions) ses pauvres ».

Les travaux de Filmer et Pritchett (1998) à partir des données des EDS ont permis d'approcher
le niveau de vie à l’aide d’un indicateur composite communément appelé « wealth index ». En
fait, les EDS ne collectent pas des données sur le revenu ou les dépenses de consommation
pouvant permettre de construire un indicateur classique de pauvreté monétaire. Néanmoins,
elles s’intéressent aux informations sur les caractéristiques de l’habitat et les biens
d’équipement durables, permettant de construire un proxy de niveau de vie du ménage (Hewett
et Montgomery, 2001 ; Kobiané, 2009). Ce proxy a été adopté pour une utilisation générale
dans les EDS, les EIS et les MICS. La principale critique formulée est que cet indice présentait
un biais urbain dans la mesure où les services fournis au public comme l’électricité, l’eau

94
courante, les égouts ne sont pas disponibles dans de nombreuses zones rurales (Rutstein 2008).
Au nombre des approches proposées pour créer des indices de richesse qui tiennent compte du
milieu de résidence figure celle de Kobiané (2004).

En se basant donc sur cette approche, nous avons élaboré un indicateur de niveau de vie selon
un processus en trois étapes. La première consiste en une analyse descriptive des variables à
utiliser dans l’élaboration de l’indicateur. Toutefois, une distinction est faite selon son milieu
de résidence. Pour faciliter le choix de chacune des modalités de « milieu », on a créé une
variable dichotomique « filtre » pour sélectionner successivement les milieux de résidence. Elle
prend 1 si le milieu de résidence en question est sélectionné et 0 sinon. L’analyse descriptive
en elle-même consiste en l’examen des différentes variables en faisant un tri à plat dans chaque
milieu de résidence. Les modalités des variables faiblement représentées sont recodifiées dans
l’optique de faire l’analyse en composantes principales (ACP).

A la seconde étape, on fait l’ACP dans chaque milieu de résidence. L’idée est que le niveau de
vie diffère d’un milieu de résidence à un autre. Il ne faut donc pas assimiler le niveau de vie
d’un pauvre en ville à celui d’un pauvre en campagne.

Pour finir, on construit une variable « proxy », qui indique le niveau de vie de façon quantifiée,
en extrayant la première composante factorielle relative à chaque milieu de résidence. Dans
cette ACP, la première composante explique presque toujours une très grande part de la
variance et par conséquent peut être interprétée comme l’indicateur le plus synthétique des
variables retenues. Pour chaque milieu de résidence, on détermine les différentes valeurs des
premier, deuxième, troisième et quatrième quintiles de la variable proxy. A la suite, on crée les
cinq classes qui correspondent à :

- De la valeur minimale de proxy à la valeur du premier quintile, on a les « très pauvres »


- Du premier au deuxième quintile, on a les « Pauvres »
- Du deuxième au troisième quintile, on a la « classe intermédiaire »
- Du troisième au quatrième quintile, on a les « nantis »
- Du quatrième quintile à la valeur maximale de proxy, on a les « très nantis ».

Toutefois, pour les analyses, la variable avec cinq modalités (quintiles du niveau de vie) a été
recodée en trois modalités. Les deux premiers quintiles sont considérés comme « pauvres », le
troisième « moyen » et les deux derniers « riches ». Il est à préciser que l’indicateur a été
construit au niveau ménage (base ménage), mais il est utilisé comme proxy du niveau de vie de

95
l’individu (base individu), sous l’hypothèse que le niveau de richesse au niveau individuel
reflète celui du ménage.34

Exposition aux médias

Un indicateur mesurant l’exposition aux médias a été construit à partir de trois variables
(regarde la télévision, lecture des journaux/magazines et écoute la radio). La variable
« Exposition aux médias » prendra la valeur 0 si le jeune n’est exposé à aucun média, 1 s’il est
exposé à au moins un média. Cette variable s’avère importante, en ce sens que, dans le cadre
de la prévention du VIH/Sida, les médias constituent un puissant outil d’informations pouvant
toucher un grand public.

Connaissance complète du VIH/Sida

Pour une réponse plus efficace devant l’intensification du Sida, une Session extraordinaire de
l'Assemblée générale des Nations Unies (UNGASS) a été consacrée à cette épidémie en juin
2001. À la fin de cette session, les 189 États membres de l'ONU ont endossé une Déclaration
d'engagement sur le VIH/Sida dite parfois « Déclaration de l'UNGASS ». Cette déclaration
comprenait des cibles assorties de délais destinés à générer des progrès concrets (ONUSIDA,
2008). Ainsi, pour harmoniser les progrès réalisés à l’échelle des pays, des indicateurs ont été
définis. C’est le cas de l’indicateur « connaissance complète ».
Partant de l’idée que le comportement des jeunes vis-à-vis du VIH/Sida est largement tributaire
de leur niveau de connaissance de cette maladie, nous avons créé un indicateur de connaissance
complète en nous inspirant de celui de l’UNGASS.

Ainsi, est considérée comme connaissance complète du VIH/Sida, toute une connaissance
prenant en compte les réponses positives aux questions suivantes :
o Peut-on réduire le risque de contracter le virus du Sida en utilisant un condom au cours
de chaque rapport sexuel ?
o Peut-on réduire le risque de contracter le virus du Sida en ayant juste un seul partenaire
sexuel qui n'est pas infecté et qui n'a aucun autre partenaire sexuel ?
o Une personne paraissant en bonne santé peut-elle être porteuse du virus ?

o Le virus qui cause le Sida peut-il être transmis de la mère à son enfant pendant la
grossesse ?

Autrement dit, on suppose que la proportion d’individus dont le niveau de vie ne correspond à celui de leur
34

ménage de résidence est marginale.

96
o Le virus qui cause le Sida peut-il être transmis de la mère à son enfant pendant
l’accouchement ?
o Le virus qui cause le Sida peut-il être transmis de la mère à son enfant pendant
l’allaitement ?

Ces connaissances incluent aussi des réponses négatives aux questions qui suivent :

o Peut-on contracter le virus du Sida par les piqûres de moustiques ?

o Peut-on contracter le virus du Sida en partageant la nourriture avec une personne qui a
le Sida ?

La variable « connaissance complète » prendra la valeur 1 si le jeune a une connaissance


complète et 0 sinon.

3.5 Enquête sur le contexte de la sexualité dans le cadre du West Africa Agricultural
Productivity Program35 (WAAPP)

Notre objectif était de collecter des données complémentaires pour enrichir les EDS/EIS déjà
disponibles. Au départ, nous avons voulu réaliser une enquête portant sur les comportements
sexuels parmi les étudiants dans trois grandes villes de la Côte d’Ivoire. Le choix de cette
population cible est motivé par le paradoxe entre leur niveau d’instruction élevé, gage d’une
meilleure capacité à raisonner et à assimiler les modes de prévention du VIH/Sida et leur
adoption de comportements sexuels à risque.

N’ayant pas de financement, nous n’avons pas fait d’échantillonnage mais de façon raisonnée,
des étudiants de 3ème année de Licence en Sciences économiques, Sociologie et Géographie36
ont été respectivement choisis dans les universités d’Abidjan-Cocody, Daloa et Korhogo. Avec
l’appui de trois enseignants-chercheurs de notre réseau, les questionnaires37 ont été distribués
aux étudiants pendant les cours pour une auto-administration. Ensuite, lors des prochains cours,
ceux-ci étaient réceptionnés dans une boîte hermétiquement fermée. Compte tenu des
problèmes de complétudes et du grand nombre d’informations incohérentes ou aberrantes, nous
avons suspendu la collecte des données à Daloa et détruit les questionnaires d’Abidjan et
Korhogo, où la collecte était achevée.

35
En français « Programme de Productivité Agricole en Afrique de l’Ouest » (PPAAO)
36
Ces trois filières ont été choisies parce que nous avons réussi à entrer en contact avec les enseignants dispensant
ces cours.
37
500 questionnaires de deux pages ont été envoyés dans chacune des universités retenues. Pour les villes de
l’intérieur, les questionnaires ont été acheminés par le biais des services courriers des compagnies de transport.

97
A la suite de ce problème, nous avons contacté le coordonnateur de l’enquête WAAPP, qui a
accepté de joindre notre questionnaire à son projet. Toutefois, la principale contrainte est la
réduction de ce questionnaire à moins de 10 variables du fait de la quantité de travail que les
enquêteurs devaient accomplir38.

Le WAAPP est un programme initié par la Communauté Économique des États de l’Afrique de
l’Ouest (CEDEAO) avec l’appui financier de la Banque Mondiale. Deux principaux objectifs
ont été assignés à ce programme : d’une part améliorer la productivité des produits vivriers et
de l’autre soutenir la coopération régionale en matière agricole en Afrique.

En Côte d’Ivoire, le Fonds Interprofessionnel pour la Recherche et le Conseil Agricoles


(FIRCA) a été chargé d’assurer l’unité de coordination de ce programme. Par ailleurs, pour
disposer d’une bonne visibilité dans la mise en œuvre de certaines composantes du projet,
l’ENSEA a été identifiée pour apporter un appui aux activités de suivi-évaluation du
programme. Ainsi, entre 2013 et 2014, l’ENSEA a conduit des études de référence et d’impact
des actions menées dans les filières (banane plantain, maïs, igname, manioc, riz, volaille et
porc) dudit programme. En outre, en 2015, une autre étude d’évaluation de l’impact du projet
a été commanditée par le FIRCA. C’est donc dans le cadre de cette étude que nous avons intégré
notre questionnaire « contexte de la sexualité des jeunes ».

3.5.1 Déroulement de l’enquête

Les travaux préparatoires à l’évaluation de l’impact du projet ont débuté depuis le mois de
février 2015. Ces travaux ont porté essentiellement sur l’élaboration de la méthodologie, la
conception des outils de collecte, la conception des applications pour les Personal Digital
Assistant (PDA)39 et tablettes, le recrutement et la formation des agents enquêteurs ainsi que la
sensibilisation des populations cibles.

La collecte de données a été réalisée sur toute l’étendue du territoire national. Cette opération
s’est déroulée du 15 septembre au 24 novembre 2015, soit un peu plus de 2 mois. Cette période

38
L’enquête WAAPP était très lourde. Une fois dans un DR, il fallait procéder à la reconnaissance de ses limites
et de celles des îlots, au dénombrement des ménages et à l’interview auprès des ménages à partir des questionnaires
dénombrement, recensement parcelle, ménage, producteur et parcelle. En outre, des opérations de levée des
superficies et de pose de carrés de rendement sont initiées afin de recueillir des informations sur les parcelles
(superficie et rendement). Ces dernières activités devaient se faire dans les exploitations agricoles des enquêtés
qui sont souvent situées à plus de 20km du ménage. Ces distances étaient généralement parcourues par les
enquêteurs à pied ou en vélo.
39
Ce sont des appareils conçus pour répondre aux besoins de collecte de données dans une large variété
d'applications

98
était très variable selon les équipes. Compte tenu des élections présidentielles, certaines équipes
ont dû interrompre la collecte à cause des tensions entre les partisans des différentes formations
politiques. L’opération a mobilisé 111 agents enquêteurs, 4 enseignant-chercheurs et 7
assistants de recherche.

3.5.2 Zone d’enquête

La collecte de données s’est effectuée dans 33 régions et districts autonomes dont 22 au Sud et
11 au Nord.

Tableau 3.6 : Régions et Districts couverts par l'étude

ZONES SUD (22) ZONES NORD (11)


Agneby-tiassa Iffou Bafing
Belier Indenie-Djuablin Bagoue
Cavally Loh-Djiboua Bere
District Autonome d'Abidjan Marahoue Bounkani
District Autonome de Yamoussoukro Me Folon
Gbokle Nawa Gbeke
Goh Moronou Hambol
Gontougo N'zi Kabadougou
Grands Ponts San-pedro Poro
Guemon Sud-comoe Tchologo
Haut-Sassandra Tonkpi Worodougou
Enquête ENSEA/WAAPP, 2013/2014

3.5.3 Méthodologie de collecte

Du fait de la complexité et la diversité des informations à collecter auprès du ménage, quatre


enquêtes de nature différentes ont été nécessaires : ménage ; producteurs individuels ;
parcelle et rendement.

3.5.3.1 Plan de sondage : méthode de détermination de la taille de l’échantillon des


producteurs
Dans la pratique, trois critères sont pris en compte pour la détermination de la taille de
l’échantillon :
 La variabilité ou dispersion de la variable d’intérêt ;
 La contrainte budgétaire permettant de déterminer le nombre d’unités que l’on peut
observer avec le budget dont on dispose ;
 La contrainte de précision d’au moins un estimateur en termes d’intervalle de confiance.
Pour cette étude d’impact, c’est la troisième approche qui a été retenue compte tenu des
objectifs du projet.

99
La mise en œuvre de cette approche a permis de retenir 1 889 ménages agricoles sur toute
l’étendue du territoire. La précision des estimateurs étant de 95% avec une correction de la taille
de l’échantillon relativement au tirage aléatoire simple (design effect). Par ailleurs, en
considérant un taux de non réponse supposé arbitrairement à 20%, la taille de l’échantillon a
été réévaluée à 2 266 ménages.

3.5.3.2 Echantillonnage

Sélection des exploitations

Pour les producteurs individuels (ménages), la procédure de tirage est un échantillonnage


stratifié à deux degrés. La base de sondage utilisée, à cet effet, est la liste exhaustive des districts
agricoles par région (où l’on trouve ces exploitations et où il est plus probable de trouver les
ménages propriétaires ou ayant la gestion de ces exploitations).

Au premier degré, les Districts de Recensement agricole (Unités Primaires) sont tirés de façon
aléatoire dans chaque région. La liste des Districts de Recensement agricole (DR agricoles
provisoire) utilisée est celle du Recensement Général de la Population et de l’Habitat de 2014.
Dans les DR agricoles tirés, il a été procédé à un dénombrement qui a permis au second degré
de tirer les ménages agricoles pratiquant les spéculations du WAAPP. Tous les producteurs
individuels pratiquant les spéculations du WAAPP ont été donc interviewés dans les ménages
sélectionnés.

Conformément au protocole, les agents enquêteurs ont effectué le dénombrement des ménages
dans les DR avant de procéder à leur sélection aléatoire pour réaliser les interviews.

Tableau 3.7 : Répartition de l’échantillon par zone

Nombre de
Nombre de Taille attendue de Taille Taux de
Zone ménages
DR l’échantillon réalisée réalisation (%)
dénombrés
Sud 118 13 920 1416 1374 97
Nord 73 6 850 850 688 81
Ensemble 191 20 770 2266 2062 91
Source : ENQUETE-ENSEA/WAAPP, 2015/2016

Sélection des jeunes (Questionnaire santé sexuelle)

L’échantillonnage de jeunes a été réalisé dans l’ensemble de la population de 15 ans à 24 ans.


Il était initialement prévu de procéder à la sélection des jeunes à l’intérieur du ménage.

100
Toutefois, compte tenu de certaines contraintes, et surtout pour atteindre la taille souhaitée,
deux approches ont été combinées :

 Approche 1 : Sélection au sein des ménages


Après le listing des individus du ménage, un jeune respectant le critère de sélection est tiré au
hasard pour répondre au questionnaire contexte de la sexualité des jeunes.

 Approche 2 : Sélection au sein de la population


Pour compléter la taille souhaitée, en cas d’absence des personnes au sein de ménage (du fait
des activités champêtres), les jeunes sont sélectionnés dans l’ensemble de la population en
procédant par la méthode des itinéraires. Toutefois, cette méthode n’est pas sensée poser de
problème pour l’extrapolation dans la mesure où la procédure de dénombrement des ménages
permet de disposer d’une estimation de la population (nombre d’individus) appartenant à la
tranche d’âge cible.

La taille souhaitée était d’au moins 30 jeunes à interviewer par région, à répartir selon le nombre
de Zone de Dénombrement.

3.5.4 Apurement des données

L’apurement des données est une étape très importante au cours de laquelle le fichier de données
de l’enquête subit des contrôles de cohérence afin d’en améliorer la qualité. Une fois les
données collectées et saisies sur les tablettes et PDA fusionnées, des contrôles ont été opérés
sur les fichiers afin de détecter et traiter les éventuelles incohérences et réponses
invraisemblables.

3.5.5 Difficultés rencontrées

Des difficultés ont été rencontrées lors de la mise en œuvre de l’étude. Ainsi, l’enquête pilote,
initialement prévue pour durer 5 jours dans deux DR des localités de Lopou et de Yassap A de
la sous-préfecture de Dabou, a fait presque deux semaines. En cause, le déploiement des
différentes applications sur les tablettes et PDA. Certaines de ces applications n’étaient pas
compatibles avec les tablettes ou les PDA, il a donc fallu plusieurs jours à l’équipe technique
pour trouver des solutions. De ce fait, nous avons dû maintenir les équipes sur les sites de
l’enquête pilote durant plusieurs jours le temps d’affiner tous les outils, les applications ainsi
que les questionnaires papiers pour pallier aux éventuels dysfonctionnements (bugs) des
appareils.

101
3.6 Brève description des méthodes d’analyse

Des méthodes statistiques descriptives et explicatives sont utilisées pour comprendre les
facteurs associés aux comportements sexuels à risque des jeunes.

L’approche descriptive est basée sur l’analyse bivariée et la méthode de décomposition. En


effet, l’analyse bivariée permet de vérifier la liaison ou l’association entre les variables
dépendantes et chacune des variables indépendantes. Ainsi, le recours au tableau de contingence
suivi d’un test de khi2 permet d’évaluer l’association entre les variables.

Par ailleurs, dans la perspective de rechercher les sources des changements dans la dynamique
de la non utilisation de préservatif chez les jeunes, la méthode de décomposition a été mobilisée.
L’objectif étant de montrer si les évolutions observées au cours des trois périodes d’enquête
étaient dues à l’effet de performance ou de comportement reflétant le changement dans la
performance des groupes ou à l’effet de composition qui se rapporte aux changements dans la
taille relative des groupes.
Etant donné que les liaisons significatives obtenues au niveau bivarié peuvent être réelles ou
fallacieuses en présence d’autres variables, nous faisons appel dans un second temps à l’analyse
multivariée qui prend en compte plusieurs variables susceptibles d’influencer les variables
dépendantes.
Concernant l’analyse multivariée, elle repose sur les modèles de régression logistique, probit
bivarié et relogit. Ces modèles visent à appréhender les déterminants du multipartenariat sexuel
et de la non utilisation de préservatif chez les jeunes. Ces différentes méthodes d’analyse vont
être développées de manière explicite dans les chapitres qui s’y réfèrent.

3.7 Présentation des données qualitatives

La réalité sociale étant complexe, l’approche quantitative ne suffit pas à elle seule à appréhender
les comportements des individus d’où l’apport des méthodes qualitatives. Elles ont le mérite de
permettre une explication voire une compréhension plus approfondie des faits de population en
prenant en compte l’effet des contextes socio-culturels dans les comportements
démographiques. En outre, la recherche qualitative repose sur une méthode de représentativité
non statistique. La collecte des données s’arrête lorsqu’on atteint le point saturation de
l’information qui survient entre la 20ème et 30ème entrevues. Dans le cas d’une recherche
phénoménologique, certains auteurs pensent qu’on peut se limiter à un maximum d’entrevues

102
avec 10 personnes puisque les nouvelles informations n’ajoutent pas un sens nouveau à ce qui
a déjà été considéré (Savoie-Zajc, 2007).

3.7.1 Espace géographique et social de l’étude


Pour mieux cerner la réalité sociale étudiée, l’enquête s’est circonscrite à quatre communes de
la ville d’Abidjan (Abobo, Yopougon ; Port Bouët et Cocody). Ces communes regroupent une
configuration diversifiée de ménages et de familles dans lesquels on trouve des jeunes ayant
plusieurs partenaires sexuels. En sus, les enquêtés sont issus à la fois des quartiers précaires,
populaires ou même huppés. Toutefois, les interactions produites, les imaginaires populaires
développés et la pratique du multipartenariat sexuel constituent l’homogénéité sociale
structurant les différents espaces géographiques de la population cible.

3.7.2 Sélection des participants

La population cible à interroger est composée de jeunes âgés de 15 à 24 ans et ayant eu des
rapports sexuels avec au moins deux partenaires au cours des douze derniers mois. Pour une
diversification des profils de façon à tenir compte des situations sociales les plus différents
possibles, six variables socio-démographiques ont été retenues pour le recrutement des
enquêtés.

Tableau 3.8 : Caractéristiques socio-démographiques des enquêtés

Variables Indicateurs
Age [15 ; 19]
[20 ; 24]
Sexe Masculin
Féminin
Lieu de résidence Abobo
Yopougon
Port-Bouët
Cocody
Religion Musulmane
Chrétienne
Autres religions
Niveau de vie du ménage Pauvre
Moyen
Aisé
Aire culturelle Akan
Krou
Mandé

103
3.7.3 Déroulement de la collecte des données

La collecte des données a duré environ un mois (entre Août et septembre 2015). Nous avons
bénéficié de l’appui de deux enquêteurs. Ces derniers ont bénéficié au préalable d’une
formation que nous avons animée afin de leur permettre de s’approprier de l’outil de collecte
de données. Un accent particulier a été mis sur la nécessité d’obtenir le consentement des
participants et l’importance de les rassurer sur la confidentialité des données recueillies comme
le veut l’éthique de la recherche. Ainsi, les participants ont pu apporter librement leur
consentement après avoir été instruits sur l’étude et les conditions de l’entretien notamment sur
sa durée et son enregistrement au dictaphone.

3.7.4 Outil de collecte de données

L’analyse qualitative repose sur différentes méthodes : observation, entretien (individuel ou


collectif), récit de vie, focus groupe, etc. En fonction des objectifs poursuivis par notre
recherche, les entretiens individuels ont été privilégiés. Ils sont particulièrement adaptés quand
on souhaite analyser les trajectoires des individus, les moments et les raisons qui guident leur
parcours.

Ainsi, les données ont été recueillies au cours d’entretiens individuels semi directifs. A la
différence de l’entretien directif dans lequel les questions demandent des réponses très concises,
fermées et dont la forme se rapproche en pratique de l’administration d’un questionnaire, dans
l’entretien semi-directif, les questions font plutôt appel à des réponses plus ouvertes et moins
fermées. L’entretien semi directif se structure principalement autour d’un guide d’entretien
(Annexe 16) abordant l’environnement familial global dans lequel les jeunes ont évolué depuis
l’enfance, le statut relationnel dans cet environnement, le statut socio-économique de leur
ménage et la dimension idéologique des personnes ayant des partenaires sexuels multiples.

Par ailleurs, les entretiens ont tous été réalisés en français même si certains discours sont
ponctués de termes « nouchi40 ». Les jeunes utilisent très souvent ce langage pour désigner par
exemple leurs petites amies (la go). En accord avec les enquêtés, les interviews ont été réalisés
dans les ménages, espaces vert des quartiers, espaces de jeux et même dans un bistrot.

40
C’est l’argot utilisé en Côte d’Ivoire. Il s’agit d’un mélange de français et de plusieurs langues de Côte d'Ivoire,
il est apparu au début des années 1980. Il était à l'origine parlé par des jeunes citadins mal scolarisés ou délinquants,
ne maîtrisant pas bien la langue française.

104
3.7.5 Méthode d’échantillonnage

Pour la collecte des données, la méthode d’échantillonnage ciblé notamment « boule de neige »
a été utilisée. Cette méthode consiste à repérer un noyau d'individus (des personnes considérées
comme influentes et relationnelles par exemple) ; noyau auquel s'ajoute tous ceux qui sont en
relation (de travail, d'amitié, etc.) avec eux. Elle comprend deux phases. La première concerne
le repérage des différents réseaux de groupes de jeunes constituant potentiellement la
population cible. Ce repérage consiste à délimiter les espaces sociaux et géographiques de forte
production du multipartenariat sexuel. La seconde phase renvoie à l’identification des
personnes ayant un fort réseau social qui puissent favoriser l’immersion auprès de la cible
recherchée.

3.7.6 Traitement des données

 L’analyse rapide
Elle consiste à consigner les idées pertinentes des enquêtés sur chaque question posée. Elle
permet d’identifier les questions à ajuster ou approfondir pour les prochains entretiens et
d’explorer les premières tendances au niveau des résultats préliminaires qui seront soit
consolidés soit invalidés lors de l’analyse approfondie. Le cadre logique de l’analyse rapide
repose sur les propos de l’enquêté (communication gestuelle et verbale) associé au principe
analytique de la recherche des similitudes et des différences objectivées de chaque entretien
réalisé. Pour ce faire, seize codes structurels ont été élaborés selon les thématiques du guide
d’entretien (Annexe 34).

 La transcription des fichiers audio


Après la collecte des données, tous les enregistrements audio ont été intégralement transcrits.
Les discours et les styles voire les interjections des participants ont été, autant que faire se peut,
fidèlement conservés. De plus, les entretiens n’ont pas été transcrits dans l’ordre de leur
réalisation mais l’un à la suite de l’autre selon que des éléments semblent comparables afin de
faciliter l’analyse. Les données ont été saisies sur Word et analysées entretien par entretien. Il
s’est agi de rendre compte pour chaque entretien de la perception d’ensemble des enquêtés sur
le fait social étudié et de retenir la pertinence de leur analyse.

105
 L’analyse approfondie
Il s’agit de l’analyse textuelle systématique des données. De façon précise, l’analyse rapide
couplée avec l’analyse approfondie permettent de mettre en évidence les dimensions
structurelles et idéologiques des réalités évoquées par les participants.

3.7.7 Approche méthodologique utilisée : la bio-phénoménologie

Dans la tradition qualitative, la structuration méthodologique s’articule autour de cinq


principales approches (Paillé et Mucchielli, 2008). Il s’agit de la théorisation ancrée ou grounted
theory, les approches étude de cas, ethnographique, biographique et phénoménologique. C’est
précisément ces deux dernières approches sociologiques qui sont mobilisées dans le cadre de
l’analyse du multipartenariat sexuel. Pour Josselson (1998), l’approche biographique consiste
à faire le récit de vie, à reconstituer la trajectoire sociale des individus afin d’accéder à la
connaissance d’univers sociaux à partir d’expériences singulières. Quant à l’approche
phénoménologique (Giorgi, 1997), elle analyse l’expérience de la quotidienneté en mettant en
lumière les structures de la conscience c’est-à-dire sous leurs aspects concrets et matériels
(socialement, culturellement ancrés).

Le choix de combiner ces deux approches s’explique par le fait que le multipartenariat est à la
fois un phénomène diachronique c’est-à-dire un construit temporel (approche biographique) et
la résultante d’une expérience quotidienne de vie (approche phénoménologique). Pour mener à
bien ce procédé méthodologique, deux principes sont proposés. Le premier consiste à la
reconstitution du parcours de vie des personnes ayant des partenaires sexuels multiples afin de
saisir les configurations sociales de production du multipartenariat sexuel, les chocs sociaux
affectivement chargés, des faits marquants structurant la conscience constituante du
phénomène, etc.

Le second est relatif à la description des actes de conscience qui donnent sens aux actions
intentionnelles des sujets concernés. Cette posture méthodologique est mise en œuvre à travers
un questionnement du phénomène de multipartenariat sexuel dans ses dimensions idéologiques
(représentations, pensées, perceptions, affectivité…), relationnelle (systèmes de relations,
statuts, rôles et positions sociales), symbolique et comportementale (comportements, pratiques
sociales, signes et symboles..) tout en questionnant le contexte et les cadres sociaux (normes
sociales, institutions) d’émergence et de productions du multipartenariat sexuel.

106
Cette approche bio-phénoménologique répond à deux objectifs. Le premier objectif vise
d’abord, d’élaborer un profil multi dimensionnel des ménages où vivent ou ont vécu les
enquêtés. Cette monographie s’appuie sur trois axes majeurs, à savoir : (i) la description de
l’environnement global des ménages/familles des personnes ; (ii) le statut socio-économique
des ménages/familles et (iii) le statut relationnel de ces acteurs sociaux dans les
ménage/familles. Le second objectif ambitionne de saisir les productions idéologiques
légitimant le multipartenariat sexuel.

Conclusion du chapitre 3

Ce chapitre a permis de présenter les données utilisées pour analyser les comportements sexuels
des jeunes. Il ressort qu’aujourd’hui, la Côte d’Ivoire dispose d’une quantité appréciable de
données permettant d’étudier notre problématique. Outre les EDS/EIS, deux autres sources
complémentaires, tant quantitative et qualitative, ont été mobilisées dans une perspective
interdisciplinaire. Ce faisant, ce chapitre a mis en lumière les problèmes relatifs à la qualité des
données comme c’est souvent le cas dans les enquêtes rétrospectives. L’évaluation de la qualité
des informations collectées a révélé les erreurs classiques qui entachent les données notamment
en Afrique mais pas de quoi à les remettre en cause. Autrement dit, nous disposons de données
de qualité satisfaisante pour analyser les différentes dimensions des comportements sexuels à
risque dans les trois chapitres qui suivent.

107
CHAPITRE 4. Calendrier de l’initiation sexuelle des
jeunes : quels effets sur l’utilisation de préservatif

En Afrique subsaharienne, il a été constaté que le rapport sexuel est la principale voie de
transmission du VIH/Sida et que la population la plus infectée est jeune avec un âge compris
entre 15 et 29 ans (Abega et Magne, 2006). Pour inverser la tendance de cette épidémie, il est
donc impératif de limiter les nouvelles infections notamment dans la jeune génération. Ainsi,
les adolescents et les jeunes sont considérés par les programmes de prévention comme un
groupe ayant des comportements sexuels à risques. L’âge au premier rapport sexuel est un
indicateur qui rend compte de ce risque encouru.

L’initiation sexuelle des jeunes est l’une des dimensions de la sexualité ou des comportements
sexuels abordée dans de nombreux travaux (Bozon, 1993 ; Bajos et Bozon, 2008 ; Bozon,
2012). Ces recherches se sont considérablement développées depuis l’apparition du VIH/Sida.
En effet, les premières expériences sexuelles marquent la transition de l’enfance vers l’âge
adulte (Beninguisse, 2007) et aussi le début de l’exposition au risque d’infection par les
IST/VIH/Sida (Caraël, 1995). Cette primo-sexualité ne s’oublie pas et fait partie des
évènements qui s’impriment profondément dans la mémoire des individus puisqu’elle marque
un passage, celui des premiers pas dans la sexualité adulte et annonce tout un destin (Bozon,
1993).

L'âge aux premiers rapports sexuels des jeunes revêt donc une grande importance en matière
de prévention du VIH. Dans les EDS ou autres enquêtes sur la sexualité menées dans une
perspective de santé de la reproduction, cet âge est recueilli dans la mesure où c’est un
déterminant proche de la fécondité mais aussi il permet de cerner les comportements sexuels en
vue d’une meilleure définition des politiques et programmes de lutte contre le VIH/Sida. Par
ailleurs, il s’avère déterminant dans l’explication des comportements sexuels futurs. Selon
Bozon (1993), le caractère précoce ou tardif des débuts sexuels laisse présager une attitude à
l'égard de la sexualité, et plus largement à l'égard du couple, voire de la vie familiale. En
d’autres mots, le calendrier de la sexualité initiale préfigure la diversité ultérieure des
expériences sexuelles. C’est aussi ce qu’évoque Guiella (2012), pour qui, ce calendrier
conditionne la qualité de la transition vers l’entrée dans la vie adulte. Quant aux travaux de
Senn et Carey (2011), ils soulignent qu’un calendrier précoce était associé à un comportement

108
sexuel à l'âge adulte. Selon ces auteurs, les expériences sexuelles précoces peuvent être des
événements de vie importants qui influent sur le comportement sexuel subséquent.

De nos jours, l’initiation sexuelle s’expérimente de façon universelle dans un contexte marqué
par des transformations profondes notamment l’essor de la scolarisation secondaire favorisant
une plus grande autonomie de la jeunesse (Meslé et al., 2011). De plus, cette sexualité est
déconnectée de tout projet conjugal et met donc fin à l’interdit de la sexualité prénuptiale qui
prévalait par le passé (Maillochon et al, 2016). Par ailleurs, la littérature indique une précocité
de l’âge à la sexualité initiale en Afrique subsaharienne surtout pour les femmes (Singh et al.,
2000 ; Beninguisse, 2007 ; Pettifor et al., 2010 ; Kobelembi, 2005). Rappelons que dans cette
région du monde, la sexualité précoce dans le cadre du mariage était une forme de régulation
de l’activité sexuelle féminine. Même légitimée, elle a des conséquences néfastes sur la santé
de la reproduction (Djiré et al., 1997) mais ce qui nous intéresse ici c’est l’activité sexuelle
précoce hors mariage.

L'initiation sexuelle précoce des jeunes célibataires peut accroître les risques d’IST/VIH/Sida,
de grossesses non planifiées et même des conséquences psychiques liées au regret du passage
à l’acte (Godeau et al., 2008). Elle met en évidence le degré de vulnérabilité des adolescents,
en ce sens qu’un rapport sexuel précoce intervient quand les organes sont en croissance et que
l’individu manque d’expérience (Baya, 2006). En outre, des travaux antérieurs ont également
montré un lien entre la sexualité initiale précoce et les autres comportements sexuels à risque.
Ainsi, un calendrier précoce serait associé à un nombre élevé de partenaires sexuels et à une
période plus longue de sexualité prémaritale (Bélec, 2007 ; Adohinzin et al., 2016). A propos
des jeunes, Bajos et Durand (2001, p.6) écrivent que, « les plus précoces sexuellement mènent
par la suite une vie moins “rangée” et plus complexe. Ils ont plus de partenaires sexuels tout
au long de leur vie, dans leur adolescence d’abord, mais également pendant les périodes où ils
sont en couple ». D’autres auteurs ont plutôt montré l’influence du moment de la découverte de
la sexualité adulte sur l’utilisation du préservatif (Pettifor et al., 2010).

On peut alors s’interroger sur la relation entre la précocité du premier rapport et le non usage
de préservatif. L’autre question de recherche est de montrer si l’initiation sexuelle précoce non
protégée varie selon le sexe. Dans certaines cultures notamment en milieu rural africain, la
sexualité est structurée par des rapports de genre ou des inégalités de genre. Selon Bozon (2001,
p.170), il existe une relation dialectique entre le genre et la sexualité : d’une part « le genre
structure la sexualité humaine, en inscrivant les actes et les significations de la sexualité dans

109
une logique de rapports inégaux » et de l’autre « la sexualité représente, stabilise et légitime
les rapports de genre, en figeant les rapports entre hommes et femmes ». Tous les aspects de la
sexualité voire de la reproduction sont souvent dominés par les hommes. Par exemple, la
réponse non numérique « ça dépend de mon mari » (Diop,1985) donnée par certaines femmes
à la question relative au nombre d’enfants désirés lors des EMF traduit bien l’hégémonie
masculine. Dans ce rapport de domination, on imagine que les jeunes filles soient moins
susceptibles d’avoir leur première expérience sexuelle protégée.

A partir de données collectées auprès des jeunes résidant en milieu rural ivoirien, ce chapitre se
propose d’étudier la façon dont le calendrier de l’entrée en sexualité peut conditionner le recours
au préservatif au moment de cette occurrence. Ces deux évènements ne sont pas forcément
indépendants en ce sens que les individus qui sont très jeunes n’ont pas encore réellement
conscience du danger encouru lors de la phase d’expérimentation de la sexualité. Du coup, le
désir ou l’envie de vivre l’acte sexuel prend le pas sur toute possibilité de protection.

L’approche économétrique retenue est l’estimation par un probit bivarié. Il permet de modéliser
conjointement la probabilité d’avoir une première relation sexuelle précoce et la probabilité de
ne pas se protéger. Ce modèle apparait approprié du fait de l’interdépendance entre les deux
évènements étudiés.

4.1 Calendrier des débuts sexuels vu sous l’angle du genre

Dans certaines sociétés, les hommes et les femmes occupent des positions sociales différentes
au regard de la loi, la division sexuelle du travail, la religion, le système de parenté, le régime
matrimonial, etc. (Reysoo, 2002). La sexualité n’échappe pas à cette règle. Ainsi, les débuts de
vie sexuelle sont marqués par des stéréotypes de genre. Il s’agit, pour nous, de mettre en exergue
non pas les différences non intra-genre (par exemple : jeunes femme instruites et sans
instruction, résidantes en milieu urbain versus rural, etc.) mais les disparités inter-genre.

Les normes sociales qui entourent l’entrée en sexualité des femmes leur imposent davantage de
contraintes qu’aux hommes (Maillochon et al.,2016). Si un calendrier précoce des hommes est
socialement admis, celui des femmes n’est pas tolérée. Par exemple au Brésil, les filles sont
encouragées à contrôler leurs pulsions afin de retarder le plus longtemps possible leur initiation
sexuelle ; en revanche, les garçons sont incités à un début plus précoce (Castro, 2009). La même
observation a été faite dans les cultures méditerranéennes par Bozon (2013). Pour préserver la
virginité des filles jusqu’au mariage, le contrôle social vise à retarder leur entrée en activité
sexuelle alors que les garçons s’engagent très tôt avec des prostituées ou des femmes âgées. Par
110
contre, en Afrique subsaharienne, les jeunes filles sont le plus souvent envoyées très tôt en
mariage pour éviter qu’elle découvre la sexualité dans un cadre préconjugal. Le recul actuel de
l’âge au mariage traduit un assouplissement des procédures de contrôle de la sexualité féminine
et ouvre donc aussi la voie à une appropriation, par les femmes, du champ de la sexualité et de
la reproduction (Hertrich, 2007).

Même l’acquisition de connaissances sur les modes de transmission et de prévention, censé


permettre aux jeunes de prendre des précautions lors de leur initiation, des inégalités subsistent.
Selon Dimbuene (2010), les stéréotypes de genre qui prévalent dans la plupart des sociétés
veulent que les femmes soient moins informées et passives sur la sexualité. Celles qui auraient
de bonnes connaissances sur la sexualité sont soupçonnées d’être sexuellement hyperactives.

4.2 Relation entre la précocité de l’entrée en sexualité et les autres comportements sexuels
à risque : considérations empiriques
De nombreux travaux mettent en relation le lien entre l’initiation sexuelle précoce et les
comportements futurs à risque. En d’autres termes, la sexualité précoce serait un facteur
prédictif de la sexualité future. Pour Pettifor et al. (2010), les comportements sexuels au
moment de premiers rapports précoces, notamment en l’absence de préservatif, peuvent établir
un précédent pour les comportements futurs à risque VIH élevé.

On note également qu'un début précoce de la vie sexuelle augmente la probabilité d'avoir
plusieurs partenaires au cours des douze derniers mois, mais aussi d'avoir une fréquence de
rapports sexuels élevée (Chavaillaz, 2010). C’est dans le même sens qu’abondent Adohinzin et
al. (2016). A partir de données collectées auprès des jeunes de 15-24 ans à Bobo-Dioulasso
(Burkina Faso), ils montrent que les jeunes ayant commencé leur vie sexuelle de façon précoce,
étaient plus enclins au multipartenariat sexuel que ceux qui avaient une sexualité tardive. Une
analyse conduite par l’UNICEF a aussi révélé que les adolescents dont l'activité sexuelle est
précoce ont une probabilité plus élevée d'avoir des rapports sexuels avec des partenaires à haut
risque ou avec des partenaires multiples et sont moins susceptibles d'utiliser des préservatifs
(UNICEF, ONUSIDA et OMS, 2002). En sus, Akwara et ses collègues (2003) ont rapporté que
l'âge précoce au premier rapport sexuel est associé à une longue période d'exposition à l'activité
sexuelle, à une plus grande propension à accumuler des partenaires sexuels et à des chances
accrues de contracter des maladies sexuellement transmissibles. En s’appuyant sur les données
de l’EDS du Kenya de 1998, les auteurs rapportent que les individus ayant eu leur premier

111
rapport sexuel avant l'âge de 15 ans présentaient des probabilités d'environ 50% de déclarer des
comportements à risque comparativement à ceux ayant eu un premier rapport sexuel à l'âge de
15 ans ou plus. En Afrique du Sud, Zuma et al. (2010) révèlent que le multipartenariat est
considérablement plus répandu parmi les individus de 15-24 ans dont les rapports sexuels
initiaux sont précoces.
Toujours en Afrique du Sud, une étude réalisée auprès des jeunes hommes du milieu rural a
montré que les individus ayant des débuts sexuels avant 15 ans étaient plus susceptibles de ne
pas utiliser le préservatif et d’avoir des partenaires occasionnels (Harrison et al., 2005).

Ces mêmes constats sont observés aux Etats Unis où O'Donnell et al. (2001) ont trouvé que la
précocité de l’entrée en activité sexuelle était liée à plusieurs comportements à risque chez les
jeunes des minorités urbaines. Ainsi, ils ont rapporté que l’initiation sexuelle précoce
augmentait la probabilité d’avoir plusieurs partenaires sexuels, d’être impliqué dans des
rapports sexuels fréquents ou forcés ou encore en état d’ivresse. Une autre analyse portant sur
la Chine met en avant une probabilité plus accrue d’avoir des partenaires non réguliers
(partenaires occasionnels ou commerciaux) et de partenaires multiples chez les hommes ayant
eu une sexualité précoce (Ma et al., 2009).

4.3 Données

Les données utilisées proviennent de l’enquête « impact du projet WAAPP sur les produits
vivriers du WAAPP, de l’élevage de porc et de la volaille traditionnelle » au cours de laquelle
nous avons introduit un questionnaire dénommé « contexte de la sexualité des jeunes ». Cette
enquête a été réalisée en Côte d’Ivoire de septembre à novembre 2015 par l’ENSEA.
D’envergure nationale, notre « sous enquête » avait pour but de saisir les conditions dans
lesquelles interviennent les premières relations sexuelles des jeunes. Le questionnaire portait
sur les caractéristiques des enquêtés, le contexte de la rencontre avec le partenaire de l’initiation,
l’écart d’âge et les liens avec ce dernier, la durée de la relation, les motivations du premier
rapport, les échanges sur le préservatif et son utilisation, etc. Compte tenu des exigences du
commanditaire du projet WAAPP et des objectifs de cette enquête, notre questionnaire a été
considérablement réduit rendant impossible l’analyse de certains aspects de la primo-sexualité
des jeunes. Toutefois, cette limite n’est pas de nature à remettre en cause les résultats forts
intéressants issus de notre étude.

112
4.3.1 Définitions des concepts clés

Avant toute analyse, il convient de préciser la signification d’un ensemble de notions utilisées.

Le premier rapport sexuel : Ce terme désigne la première expérience sexuelle de pénétration


vaginale/coït vaginal ou annale/coït annal impliquant au moins deux personnes de même sexe
ou de sexe opposé. Considéré comme un événement qui fait symboliquement passer à la
sexualité adulte, l’initiation sexuelle avec partenaire est toujours un moment décisif de la
biographie individuelle et de la construction de soi (Bozon, 2003 ; Bozon et Kontula, 1997).
Même si la question n’a pas été explicitement posée, dans notre travail, on se limitera à la
première fois où les jeunes ont fait l’amour avec un partenaire de sexe opposé. Par ailleurs, la
première relation sexuelle n’intègrera donc pas les pratiques sexuelles comme les premiers flirts
(caresses, baisers, etc.).

La sexualité précoce : Dans la littérature, des seuils d’âge sont utilisés pour déterminer si l’âge
au premier rapport sexuel est précoce ou non. On observe une variation autour de ces seuils car
ils diffèrent selon les auteurs et souvent au sein d’un même pays. Ainsi, en France, alors que
Maillochon et al., (2016) ont qualifié de précoce, les expériences sexuelles qui ont lieu avant
15 ans, Bozon (1993) ainsi Godeau et al., (2008) les situent à 15 ans ou moins. Ces derniers
justifient cette limite d’âge au regard de la loi française qui considère que les individus ayant
moins de 15 ans ne sont pas en mesure de consentir librement à une relation sexuelle, ni
d’exercer un choix de façon libre et éclairée. Autrement dit, ils n’auraient pas pleine conscience
des risques et des modifications corporelles et psychiques qu’implique l’acte. Par ailleurs, le
choix de ce seuil serait également lié à une puberté de plus en plus précoce dans la plupart des
pays industrialisés relative à l’amélioration de la nutrition, plus équilibrée et plus diversifiée,
ainsi que les bonnes conditions de santé.

De même, en Afrique du Sud, Pettifor et al., (2010) fixent la précocité sexuelle avant 15 ans
contre 16 ans et moins pour Zuma et ses collègues (2010). Dans une étude portant sur le Burkina
Faso, le Cameroun, la Côte d’Ivoire et le Togo, Akoto et al. (2005) considèrent qu’une entrée
en activité sexuelle est précoce si elle a lieu avant 15 ans. Quant à Rwenge (1999), il définit la
sexualité précoce comme l'occurrence des premiers rapports sexuels pendant l'adolescence
physiologique, c'est-à-dire avant 16 ans. Si certains auteurs utilisent un seuil très bas (avant 14
ans) comme Miangotar (2010) pour le Burkina Faso, d’autres définissent comme précoces les
premiers rapports sexuels avant l’âge de 18 ans (Bignami-Van et Adjiwanou, 2009). Selon
Kalambayi (2007, p.116), « cette appréciation se fait le plus souvent de manière arbitraire sans

113
qu’il soit indiqué un critère de référence dans la mesure où aucune recherche ne précise l’âge
" acceptable " du premier rapport ».

Dans le cadre de cette recherche, nous considérons qu’une entrée en vie sexuelle est précoce,
lorsqu’un individu de la tranche 15-24 ans a eu son premier rapport avant l’âge de 16 ans. Ce
seuil est donc retenu d’une part parce que l’évolution de la distribution de l’âge au premier
rapport sexuel montre que la moitié des jeunes sont initiés à l’âge de 16 ans. D’autre part,
aucune étude menée en Côte d’Ivoire ne met en évidence une maturation sexuelle précoce dans
les zones rurales qui aurait permis d’abaisser cet âge à 15 ans.

Figure 4.1: Evolution de l’âge au premier rapport sexuel

25,00

20,00

15,00
%

10,00

5,00

0,00
8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
Age au premier rapport sexuel

Garçon Fille

4.3.2 Variables de l’analyse


Deux variables dépendantes sont considérées dans ce travail. Il s’agit d’abord du calendrier
d’entrée en sexualité qui découle de la question « quel âge aviez-vous quand vous avez eu pour
la première fois des rapports sexuels ? ». Cette information a été recueillie en année auprès des
jeunes ayant déjà vécu cette expérience. La variable s’étend de 8 à 24 ans et elle a été recodée
en deux modalités : 8-15 ans (sexualité précoce) et 16-24 ans (sexualité tardive).

Concernant la seconde variable dépendante, elle a été saisie à partir de la question « un


préservatif a-t-il été utilisé lors de ce premier rapport sexuel ». Cette variable est binaire :
« oui » pour dire l’individu a utilisé et « non », n’a pas utilisé.

114
Les variables indépendantes sont constituées des caractéristiques socio-démographiques
individuelles (sexe, âge au moment de l’enquête, niveau d’instruction), socio-culturelles
(ethnie), la durée dans la relation et l’écart d’âge avec le premier partenaire.

L’âge des individus au moment de l’enquête : il s’agit d’une variable continue que nous avons
recodé en trois modalités :15-17 ans ; 18-20 ans et 21-24 ans.
L’ethnie : au-delà des déterminants individuels, il existe des facteurs socioculturels, en
l’occurrence l’ethnie, qui influencent les comportements sexuels chez les jeunes. Les normes
culturelles, très variables selon les ethnies, peuvent favoriser ou prévenir les comportements
sexuels à risque (Odimegwu et Somefun, 2017). Compte tenu du taux élevé de non-réponse,
cette variable sera exclue des analyses.

La durée dans la relation : elle a permis d’appréhender la stabilité de la première relation


sexuelle. Elle a été précodée en quatre catégories : relation/aventure d’un jour, moins d’un mois,
de 1 à 6 mois et plus de 6 mois.

L’écart d’âge entre partenaires : il varie de 8 à 53 ans. Pour les besoins de l’analyse, cette
variable a été recodée en quatre modalités : partenaire ayant le même âge, partenaire plus jeune,
partenaire plus âgé de 1 à 4 ans et partenaire beaucoup plus âgé (5 ans et plus).

4.3.3 Hypothèses de travail


En Afrique subsaharienne, une hausse de l’activité sexuelle prénuptiale sans cohabitation est
observée chez les adolescents et les jeunes (Magnani et al., 1995). Cette activité sexuelle est de
plus en plus importante dans les générations jeunes et aussi plus précoce (Calvès, 1996 ;
Rwenge, 1995). Avec l’évolution de la société, entrer plus tôt dans la vie sexuelle avant le
mariage s’avère normale. Cette précocité sexuelle serait associée à d’autres comportements à
risque. Deux hypothèses sont alors formulées :

Hypothèse 1 : Le début sexuel précoce expliquerait la faible adoption de pratique de


prévention. En d’autres mots, la précocité de ce premier rapport favoriserait l’absence de
protection au moment de cette occurrence. Toutefois, à l’ère du VIH/Sida, l’usage du préservatif
est le principal moyen de prévention des risques liés à l'activité sexuelle prénuptiale.

Hypothèse 2 : Les jeunes filles entrées dans la sexualité avant 16 ans seraient moins
susceptibles d’utiliser le préservatif que les garçons.

115
4.3.4 Méthodes d’analyse

L’analyse descriptive et explicative sont les deux méthodes mobilisées dans ce chapitre.

Analyse descriptive

Nous procédons d’abord à une description des caractéristiques socio-démographiques des


enquêtés (analyse univariée) puis à une analyse bivariée pour déceler les corrélations entre les
variables indépendantes retenues et les deux variables à expliquer. A partir de tableaux de
contingence, des tests d’indépendance de khi-deux sont calculés en vue de déterminer
l’existence ou non de cette relation. Effectivement, ces tests d’indépendance sont utilisés pour
étudier sur un même échantillon la liaison entre deux variables qualitatives (Ancelle, 2002 ;
Genin, 2015). Nous retenons le seuil de signification statistique de 1% et 5%.
Par ailleurs, des tests de proportion basés sur la procédure de Marascuilo sont faits pour vérifier
si deux proportions sont statistiquement différentes ou pas (Anderson et al., 2015).

Analyse explicative

Enfin, pour tenir compte de l’effet conjoint de l’ensemble des variables, un modèle probit
bivarié est utilisé.

Présentation du modèle

Pour traiter simultanément les deux variables à expliquer que sont le calendrier de l’entrée en
sexualité et l’usage de préservatif, deux équations sont estimées. Ces variables étant de nature
qualitative dichotomique, nous utilisons un modèle statistique non linéaire notamment un probit
bivarié. Dans ce modèle, les termes d’erreurs des deux équations sont supposés suivre une loi
normale-bivariée (Joseph et Recotillet, 2010).

Soit la variable T représentant le calendrier de l’entrée en sexualité qui prend la valeur 1 si le


jeune a entamé précocement sa sexualité et 0 sinon. Soit également Y, la variable « usage de
préservatif au premier rapport sexuel » qui a la valeur 1 si le rapport sexuel n’a pas été protégé
et 0 sinon. Dans le modèle, le calendrier de l’initiation sexuelle dépend des caractéristiques des
individus X (l’âge, le sexe, le niveau d’instruction, etc.), l’usage de préservatif dépend des
caractéristiques Z (l’âge, le sexe, le niveau d’instruction, la durée de la relation, l’écart d’âge
entre partenaire).

116
Le modèle peut se spécifier ainsi :

𝑇 ∗ = 𝑋𝛽 + 𝑈
𝑌 ∗ = 𝑍𝛾 + 𝑉
Avec
𝑇 = 1 𝑠𝑖 𝑇 ∗ > 0
𝑇 = 0 𝑠𝑖𝑛𝑜𝑛
𝑌 = 1 𝑠𝑖 𝑌 ∗ > 0
𝑌 = 0 𝑠𝑖𝑛𝑜𝑛

1 𝜌
Avec (𝑈𝑉)~𝑁 (0; ( ))
𝜌 1

Les deux équations du modèle sont estimées simultanément par le maximum de vraisemblance.
Par ailleurs, dans ce modèle, les coefficients des variables explicatives ne sont pas directement
interprétables. Seuls les signes de ces paramètres indiquent si les variables associées influencent
à la hausse ou à la baisse la probabilité de l'événement considéré. Toutefois, les effets
marginaux sont calculés en vue de mesurer la sensibilité de la probabilité des événements T=1,
ou Y=1 ou {T=1, Y=1} ou {T=1, Y=0} ou {T=0, Y=1} ou {T=0, Y=0} (Hurlin, 2003).

Par ailleurs, dans un modèle probit bivarié, on estime un coefficient de corrélation (rho) entre
les termes d’erreur. Ainsi, un rho non significatif indique que l'on peut estimer séparément deux
probit.

4.4 Résultats

4.4.1 Caractéristiques socio-démographiques des enquêtés


Le tableau 4.1 présente la répartition des enquêtés selon certaines caractéristiques
sociodémographiques, à savoir l’âge, le niveau d’instruction, l’état matrimonial, la région de
résidence et le groupe ethnique.

L’enquête a été réalisée auprès d’un échantillon41 de 1821 adolescents et jeunes, vivant en
milieu rural ivoirien, dont 52,9% de garçons et 47,1% de filles. Cette prédominance masculine
pourrait s’expliquer par le caractère sensible du sujet. En outre, la majeure partie de ces jeunes
a un âge compris entre 15 et 19 ans. Avec une proportion de 58,4%, ceux-ci représentent plus

41
Le plan de sondage a été conçu de sorte à ce que l'échantillon pondéré soit représentatif des jeunes ivoiriens de
15 à 24 ans vivant en milieu rural.

117
de la moitié de la population enquêtée. L’âge médian des jeunes enquêtés est de 19 ans sans
distinction de sexe.

La population de l’étude apparaît fortement instruite avec 46,2% des jeunes ayant au moins le
niveau secondaire ou plus. Toutefois, un peu plus d’un quart des enquêtés a déclaré
respectivement n’avoir aucune instruction (27,8%) ou ayant le niveau primaire (26%). Les
comparaisons selon le sexe révèlent des inégalités importantes. On note que les filles sont moins
instruites que les garçons. En effet, les filles sans instruction et celles ayant atteint le niveau
secondaire ou plus représentent 31,9% et 39,7% contre respectivement 24,2% et 51,9% chez
les garçons.

Quant à la situation matrimoniale des enquêtés, elle se caractérise par une prédominance du
célibat (84,5%). Puis viennent les personnes mariées42 ou vivant en couple (15,1%) et enfin une
proportion marginale de personnes divorcées ou veuves (0,4%).

Pour ce qui est de la répartition des jeunes selon la région de résidence, les résultats montrent
qu’au moment de l’enquête environ 2 jeunes sur 10 (respectivement 18,8%, 17,6% et 15,7%)
résidaient dans les régions de l’ouest, du centre-ouest et du sud-ouest.

Concernant la nationalité, on remarque que les Ivoiriens sont largement majoritaires. Ainsi,
parmi les enquêtés, environ 9 sur 10 déclarent être de nationalité ivoirienne (88,5%). Cette
tendance est également constatée au niveau des deux sexes. Les étrangers, dominés par les
Burkinabés, ne représentent que 11,5%. En s’intéressant à l’ethnie des Ivoiriens, les grands
groupes les plus représentés sont les Akan (29,7%) et les Krou (13%), suivie dans une moindre
mesure des Voltaïques et des Mandé du sud. Toutefois, une importante proportion d’Ivoiriens
(20%) n’a pas souhaité préciser son ethnie pour des raisons probablement sécuritaires. La
collecte de cette information en période électorale ne fut pas aisée. Généralement, en cas de
conflit, un amalgame grossier est fait entre l’ethnie et le parti politique, du coup, certains
enquêtés n’ont pas voulu indiquer leur ethnie par crainte de représailles.

42
Ce sont toutes les personnes mariées officiellement, coutumièrement ou religieusement.

118
Tableau 4.1 : Répartition des jeunes selon des caractéristiques socio démographiques par sexe

Variables Garçons Filles Ensemble


Groupe d’âges N=971 N=850 N=1821
15-19 54,6 62,6 58,4
20-24 45,4 37,4 41,7
Age médian 19,0 19,0 19,0
Niveau d’instruction
Aucun 24,2 31,9 27,8
Primaire 23,9 28,4 26,0
Secondaire ou plus 51,9 39,7 46,2
Etat matrimonial
Célibataire 92,7 75,3 84,5
Marié/en couple/concubinage 7,3 23,9 15,1
Séparé/divorcé/veuf 0,0 0,8 0,4
Régions
Sud 10,9 10,4 10,7
Nord-Ouest 5,9 7,6 6,7
Nord 6,3 8,6 7,4
Centre 7,8 9,1 8,4
Nord Est 3,8 4,8 4,3
Ouest 21,5 15,8 18,8
District d'Abidjan 2,5 2,5 2,5
Centre Nord 6,1 4,0 5,1
Sud-Ouest 14,1 17,5 15,7
Centre Ouest 18,6 16,4 17,6
Centre Est 2,4 3,4 2,9
Groupes ethniques
Akan 29,5 30,1 29,7
Krou 13,7 12,2 13,0
Mandé du nord 5,4 5,4 5,4
Mandé du sud 10,5 6,7 8,7
Voltaïque 10,4 13,0 11,6
Autres Ivoiriens 19,5 20,6 20,0
Etrangers 11,0 12,1 11,5
Ensemble 52,9 47,1 100

4.4.2 Initiation sexuelle préconjugale des jeunes


Les valeurs et les normes profondément enracinées dans les pratiques coutumières sont certes
difficiles à éliminer mais elles connaissent des modifications avec l’accroissement de la
modernisation et de l’éducation. L’élévation du niveau d’instruction contribue à une plus
grande autonomie des jeunes et donc va faire baisser le contrôle parental et même social.
L’effritement des mœurs consécutif à ce modernisme modifie le comportement sexuel des
jeunes notamment en ville. En réalité, les villes africaines étaient le lieu privilégié
d’expérimentation des comportements nouveaux et où le processus d’individualisation était

119
plus accentué. En milieu rural, les modèles de références occidentaux sont encore lointains, le
poids des structures familiales et sociales sont encore persistantes (Thiriat, 1999).

En zone rurale africaine, la sexualité était précédée par des rites d’initiation et de puberté.
Autrement dit, ces sociétés traditionnelles étaient régies par un modèle de régulation de la
sexualité. Ainsi, le début du mariage apparaissait comme le point de départ de l’apprentissage
de la sexualité. De fait, l’entrée en sexualité et la maternité étaient fortement liées au mariage.
Dans ce contexte, l’encadrement de la sexualité est assuré par la culture et les institutions
sociales notamment la religion, la famille, les castes, etc. (Beninguisse, 2007). Le mariage avec
son caractère précoce servait à contrer les risques de sexualité prénuptiale. Cette situation est-
elle restée statique en milieu rural ?

Le contexte de la sexualité en milieu rural a également subi des mutations avec le modernisme
(les échanges villes-campagnes, la scolarisation, etc.). Même si trop d’enfants ne sont toujours
pas scolarisés en Afrique, on note, de façon générale, une progression de la scolarisation. Notre
enquête a d’ailleurs montré qu’une proportion relativement importante de jeunes résidant en
milieu rural est très instruite c’est-à-dire ayant le niveau secondaire ou supérieur. L’école,
empreinte de valeurs de modernité, va permettre aux jeunes générations d’acquérir une certaine
émancipation et une autonomie plus marquée vis-à-vis de la famille. On assiste donc à un déclin
de l’autorité parentale et de l’influence familiale. En effet, avec les mutations du contexte socio-
culturel, les attitudes des jeunes vont subir un changement sous l’effet de l’émergence de
nouveaux acteurs comme l’école, les pairs, les médias, etc. Ainsi, les jeunes ne respectent plus
les normes et valeurs rigoristes sur la sexualité en vigueur dans leur société, tout ceci dans un
environnement économique et épidémiologique différent.

Concernant le contexte économique, notons que les crises économiques apparues, en Côte
d’Ivoire, dans les années 1980 et au début des années 1990 ont conduit à une augmentation du
déficit budgétaire. Pour réduire de façon drastique les dépenses publiques et relever le niveau
économique du pays, les institutions de Bretton Woods vont lui imposer des mesures
d’ajustement structurel. Ces restrictions budgétaires vont toucher plusieurs secteurs dont celui
de l’agriculture. La suppression des subventions des intrants agricoles à l’issue du
désengagement de l’Etat a fortement affecté le monde agricole. De même, la baisse des cours
mondiaux va entraîner une réduction des revenus des paysans et donc une détérioration des

120
conditions de vie des populations rurales. Car, le taux de pauvreté43 en milieu rural s’est
énormément accru passant de 15,8% en 1985 à 46,1% en 1995, 49% en 2002 et à 62,5% en
2008 avant de légèrement redescendre à 56,8% en 2015 (INS, 2008 ; INS, 2015). Même les
producteurs de la filière café-cacao sont touchés par la pauvreté. Il est dit que près de 60%
d’entre-eux vivent en dessous du seuil de pauvreté (Banque Mondiale, 2014). Les travaux de
Fall et Cissé (2007) indiquent que d’autres facteurs peuvent expliquer la pauvreté extrême qui
sévit dans les ménages ruraux : l’accès difficile à la terre, au crédit, aux marchés, l’inadaptation
des politiques nationales ainsi que les règles inéquitables du commerce international. Cette
situation économique difficile compromet le mariage des jeunes qui est conditionné en amont
par la constitution d’une compensation matrimoniale (dont le montant varie selon les groupes
ethniques voire les clans) ou même par des gages de solvabilité (Leonard, 1997). Si dans
certaines communautés, cette pratique consistant au versement d’avantages matériels et
financiers par le futur époux aux parents de la future épouse, est symbolique, dans d’autres le
montant est beaucoup plus élevé. A cela s’ajoutent les autres charges liées au ménage dont
l’alimentation et la santé qui contraignent les jeunes à reporter leurs projets de formation
d’union. C’est donc cette dissociation entre mariage et sexualité qui explique la croissance de
la sexualité hors union.

Sur le plan épidémiologique, la prévalence du VIH/Sida reste élevée, dans la population


générale, avec un taux supérieur à 3% 2011 (INS et Macro, 2012). Du coup, la sexualité des
jeunes devient un enjeu de santé publique.

L’entrée en vie sexuelle est mesurée à travers la proportion des jeunes ayant déjà eu leur premier
rapport sexuel. A l’exception d’un seul individu, tous les enquêtés ont accepté de répondre à la
question qui s’y réfère. L’échantillon montre que l’initiation sexuelle a débuté pour la grande
majorité des jeunes interrogés. Ainsi, près de huit jeunes sur dix (78,2%) ont déjà eu leur
première relation sexuelle. Ceci révèle en même temps qu’une proportion non négligeable de
jeunes (environ 22%) n’a pas encore expérimenté la sexualité. Parmi ces derniers, on enregistre
une proportion relativement plus importante de garçons. L’analyse selon le sexe révèle que les
jeunes filles ont été plus nombreuses à avoir entamé une vie sexuelle. En fait, leur proportion
diffère statistiquement de celle des garçons (82,7% contre 74,3% ; p=0,000) (Figure 4.2).

43
Le seuil de pauvreté a été de 183 450 F CFA en 2002 et de 241 145 F CFA en 2008. Il est calculé par tête et par
an. Ce seuil, étant défini en fonction des prix de la ville d’Abidjan, le niveau des prix dans chaque strate a été pris
en compte, en référence à celui de la ville d’Abidjan, afin de déterminer le vrai niveau de dépense des ménages
concernés (INS, 2008).

121
Figure 4.2 : Répartition (en %) des jeunes selon qu’ils aient eu ou non leurs premiers rapports
sexuels

Ensemble des enquêtés Uniquement les célibataires

90,0 82,7 90,0


78,2 77,2 74,3
80,0 74,3 80,0 72,2
70,0 70,0
60,0 60,0
50,0 50,0
40,0 40,0
25,7 27,8 25,7
30,0 21,8 30,0 22,8
17,3
20,0 20,0
10,0 10,0
0,0 0,0
Garçons Filles Ensemble Garçons Filles Ensemble

N'a pas encore eu de rapport sexuel N'a pas encore eu de rapport sexuel
A déjà vécu une première expérience sexuelle A déjà vécu une première expérience sexuelle

Note : Les différences sont significatives entre filles et garçons au seuil de 1% aussi bien au niveau
de l’ensemble (N=1821) que des célibataires (1513).

Si l’on considère uniquement le sous échantillon des célibataires, les résultats varient très peu.
Sur l’ensemble des 1514 individus enquêtés, environ trois sur quatre (74,3%) ont déjà eu une
première expérience sexuelle. La répartition par sexe indique une proportion plus élevée de
filles ayant entamé leur vie sexuelle que les garçons (77,2% contre 72,2% ; p=0,000).

Par ailleurs, la proportion des jeunes garçons célibataires ayant déjà débuté leur vie sexuelle
varie peu par rapport à celle de l’ensemble des jeunes garçons (72,2% contre 74,3%) en raison
de leur faible proportion vivant en union (seulement 7,3%). Chez les filles, en revanche, la
variation est relativement plus importante (77,2% contre environ 83% soit près de 6 points
d’écart).

L’âge à l’initiation sexuelle varie de 8 à 24 ans (Figure 4.1). Ce graphique permet de remarquer
que de 9 à 12 ans ainsi qu’aux âges élevés, la proportion de garçons entrée en sexualité est plus
importante que celle des filles. En revanche, entre 13 et 14 ans avec un pic à l’âge 16 ans
(22,9%), les filles sont relativement plus nombreuses à vivre cette première expérience sexuelle.
Par ailleurs, l’âge médian aux premiers rapports sexuels des enquêtés, l’âge auquel la moitié
d’entre eux ont vécu cette expérience, est de 16 ans, sans distinction de sexe.

122
4.4.3 Entrée en vie sexuelle plus précoce chez les garçons
Dans cette section, l’analyse est basée sur le sous échantillon des célibataires ayant déjà eu leur
premier rapport sexuel.

Dans l’ensemble, le calendrier d’entrée dans la sexualité des jeunes est tardif. Plus de deux
jeunes sur quatre (60,8%) ont débuté leur sexualité à partir de 16 ans. Mais des différences de
calendrier entre filles et garçons sont observées. Les résultats indiquent que les garçons vivent
cette expérience de manière plus précoce (c’est-à-dire avant 16 ans) que les filles (41% contre
36,7% ; p=0,000) (Figure 4.3). C’est également le constat fait par Delaunay (2005) dans de
nombreux pays africains. Cet engagement précoce des jeunes garçons en sexualité
s’expliquerait par leur désir d'être socialement reconnu comme étant physiquement mûr ou
même des « hommes » à part entière (Tenkorang et Maticka-Tyndale, 2008). Par ailleurs,
Sauvain-Dugerdil et al. (2002) ont montré que les débuts sexuels des jeunes hommes se
produisent plus tôt en zone rurale alors que les femmes suivaient cette trajectoire en milieu
urbain. Cette précocité des rapports sexuels les expose à des risques divers étant donné que ces
rapports sont souvent non protégés ou relèvent du multipartenariat (Guiella, 2004). Ce résultat
peut sembler d’emblée surprenant puisque l’Afrique subsaharienne est désignée comme l’une
partie du monde où l’accès à la sexualité des jeunes femmes est beaucoup plus précoce que
celui des hommes (Biddlecom et al., 2008 ; Meslé et al., 2011). Mais cette tendance contraire
à nos attentes pourrait s’expliquer par deux principales raisons. Premièrement, ce résultat peut
traduire une véritable réalité notamment avec le bouleversement des équilibres familiaux
traditionnels, la scolarisation des filles, la crise économique, etc. Si les filles débutaient plus
précocement leur vie sexuelle, c’était surtout du fait des mariages précoces qui sont désormais
en net recul en Afrique de l’Ouest (Fenn et al., 2015). Deuxièmement, les filles peuvent déclarer
des âges plus tardifs pour se conformer à la norme sociale alors que les garçons pourront être
tentés de rajeunir cet âge pour valoriser leur virilité. Un autre argumentaire pouvant expliquer
les débuts sexuels plus tardifs chez les filles est la persistance des contrôles parentaux. Ainsi,
en France, Andro (2008) a plutôt fait remarquer que le cadre de référence familial peut conduire
les jeunes notamment les filles à différer leur entrée dans la sexualité. Même si le contrôle social
s’est affaibli, les parents ont toujours un regard sur les sorties des filles.

En comparaison avec nos résultats, dans l’enquête EDS 2011/12, les filles du milieu rural ont
été plus nombreuses que les garçons à avoir déclaré des premiers rapports sexuels avant
d’atteindre l’âge de 16 ans. Dans ce cas précis, les différences de méthodologie pourraient
expliquer les tendances contradictoires observées. En réalité, la base de sondage de l’EDS est

123
constituée de la liste des districts de recensements du RGPH 1998, alors que notre enquête
utilise la liste des DR agricoles.

Figure 4.3 : Répartition des célibataires ayant déjà eu leurs premiers rapports sexuels selon le
calendrier

70,0 63,2
59,0 60,8
60,0

50,0
41,0 39,2
40,0 36,8
%

30,0

20,0

10,0

0,0
Garçons Filles Ensemble

Précoce Tardif

Note : Les différences sont significatives entre filles et garçons


au seuil de 1%

Une sexualité plus précoce chez les plus jeunes

Le calendrier des débuts sexuels est aussi influencé par l’âge au moment de l’enquête. Ainsi,
on observe que l’occurrence précoce des premiers rapports sexuels est plus fréquente dans les
jeunes générations que dans les plus anciennes. En effet, lorsqu’on passe des plus jeunes (15-
17 ans) aux plus âgés (21-24 ans), ils sont respectivement 78,1% à 23% à s’être initiés de façon
précoce. Il est donc judicieux que les programmes d’éducation sexuelle cible les plus jeunes
afin de différer les premiers rapports sexuels et accroitre l’utilisation du préservatif dans la
mesure où ces programmes ont l’avantage d’améliorer les connaissances, l’estime de soi, le
changement des attitudes et donc induisent un comportement sexuel plus responsable
(UNESCO, 2015).

Cette tendance globale ne varie pas selon le sexe. Alors que 80,3% des adolescents de 15-17
ans entrent plus tôt en activité sexuelle, cette proportion est de 75,3% chez les adolescentes de
la même tranche d’âge. Ces résultats vont dans le sens de ceux trouvés par Delaunay et al.
(1999 ; 2001) en milieu rural sénégalais. Ces auteurs ont observé une entrée en vie sexuelle plus
précoce des hommes issus des jeunes générations. Selon eux, plusieurs facteurs seraient à

124
l’origine de ce constat notamment la précocité de la puberté des garçons, l’influence du milieu
urbain à travers la scolarisation, la migration de travail et les modifications des normes en
matière de sexualité.

Tableau 4.2 : Répartition en (%) des jeunes par sexe selon le calendrier, l’âge et le niveau
d’instruction
Garçons (G) Filles (F) Ensemble p-value
Variables N=664 N=491 N=1155 entre précoce
Précoce Tardif Précoce Tardif Précoce Tardif
(G) et (F)44
Age au moment de l'enquête (A)
15-17 80,3 19,7 75,3 24,7 78,1 21,9 ***
18-20 38,4 61,6 28,5 71,5 33,2 66,9 ***
21-24 24,2 75,9 20,4 79,6 23,0 77,0 ***
Prob.chi2 0,000
Niveau d’instruction
Aucun 37,8 62,2 38,0 62,0 37,9 62,1 ns
Primaire 40,9 59,1 39,4 60,6 40,2 59,8 ***
Secondaire ou plus 42,5 57,5 34,6 65,4 39,3 60,7 ***
Prob.chi2 0,000
Note : Le test de chi2 donne une association significative au seuil de 1% entre le calendrier de l’initiation
sexuelle et chacune des deux variables (l’âge au moment de l'enquête et le niveau d’instruction)

Une précocité moins importante chez les filles instruites

Les différences de calendrier de l’initiation sexuelle varient selon le niveau d’instruction


(Tableau 4.2). Bozon et Kontula (1997) ont montré que dans toute l’Europe, les individus
diplômés du supérieur connaissent une entrée en sexualité plus tardive que ceux qui quittent
plus tôt l’école. En étudiant les facteurs contextuels des comportements sexuels des jeunes de
la ville de Bamenda au Cameroun, Rwenge (1999) arrive à une conclusion similaire. En effet,
il rapporte que les premiers rapports sexuels sont plus précoces chez les jeunes bamiléké ou
tikari-nsoh de faible niveau d'instruction. Toutefois si cette relation est vérifiée chez les
femmes, il ressort du rapport de l’EDS 1998-1999 que plus le niveau d’instruction des hommes
est élevé plus l’entrée en vie sexuelle est précoce. Ainsi, alors que l’âge médian à l’initiation
sexuelle se situe à 17,5 ans pour ceux qui sont du niveau d’instruction secondaire et plus, il
atteint 18,5 ans pour le primaire et 20 ans pour les analphabètes (INS et ORC, 2001). Nos
résultats corroborent ce constat dans la mesure où la proportion de garçons qui entament
précocement sa sexualité augmente lorsque le niveau d’éducation s’améliore. En revanche, les

44
Les p-values calculées au niveau des modalités sont issues des tests de comparaison des proportions de
Marasculio. Si la p-value est significative au seuil de 5% il y a une différence de proportion entre les garçons et
les filles ayant eu une sexualité précoce.

125
filles les plus instruites sont moins nombreuses à débuter la sexualité avant 16 ans. C’est aussi
le constat fait par Guta et Mahy (2003) qui ont trouvé que le niveau d’éducation secondaire
était associé à une probabilité plus faible de rapports sexuels précoces chez les filles dans tous
les huit pays étudiés.

4.4.4 Durée de la relation sexuelle avec le premier partenaire


A travers la question « Combien de temps a duré la relation avec ce premier partenaire
sexuel ? », cette étude a évalué la durée de la première relation sexuelle afin de mettre en
exergue la diversité de situation que cela pourrait représenter.

Dans l’ensemble, près de la moitié de la population de célibataires (49,6%) a eu une relation


relativement longue (plus de six mois) avec le tout premier partenaire sexuel. Pour environ 30%
d’entre eux, la durée de cette relation se situe entre un et six mois. Enfin, elle a été courte,
respectivement un jour et moins d’un mois, pour 8,8% et 11,9% des jeunes (Figure 4.4).

Figure 4.4 : Répartition (en %) des jeunes selon la durée de leur première expérience sexuelle

8,8

11,9

49,6

29,6

Un jour Moins d’un mois 1 à 6 mois Plus de 6 mois

La tendance est la même quel que soit le sexe des enquêtés. Toutefois, on observe quelques
nuances. On observe une différence statistiquement significative entre la proportion de garçons
et de filles dont la relation avec le premier partenaire a été de courte durée c’est-à-dire à peine
un jour, moins d’un mois et d’un à six mois (Figure 4.5). Par ailleurs, chez les jeunes filles, la
relation avec le premier partenaire sexuel est plus durable. Ce sont près de 58% d’elles qui ont
eu une première relation longue (contre 43,2% des garçons ; p=0,000). Comme le soulignent
Bozon et al. (2006), les filles et les garçons ne donnent pas la même signification voire la même
valeur affective et symbolique à leur première expérience sexuelle. Si pour les garçons, cette

126
expérience n’implique aucun engagement pour l’avenir vis-à-vis de leur partenaire (d’où la
brièveté de la relation), chez les filles, en revanche, elle est synonyme d’un engagement
amoureux. Selon ces auteurs, nombreux sont les garçons qui ne s’estiment pas amoureux de
leur première partenaire alors que les filles s’inscrivent dans une décision plus réfléchie
impliquant le choix d’une relation vraie et durable. Elles voient en cet évènement une étape
pour atteindre une vie de couple future. En d’autres termes, les filles espèrent que le partenaire
à l’initiation sexuelle soit le futur conjoint même si cela est de plus en plus rare de nos jours
comme le font remarquer Bozon et ses collègues. (Bozon et Kontula, 1997 ; Bozon et al., 2006).

Figure 4.5 : Répartition (en %) des jeunes par la durée de leur première expérience sexuelle et le
sexe
70,0

57,9
60,0

50,0
43,2
40,0
32,1
%

30,0 26,5

20,0 15,8
8,9 8,7
10,0 6,9

0,0
Un jour Moins d’un mois 1 à 6 mois Plus de 6 mois

Garçons Filles

Note : Les différences sont significatives entre filles et garçons au seuil de 1%

La durée de la relation est associée à l’entrée en sexualité (Tableau 4.3). Globalement, lorsque
la période de la première relation est longue, les pourcentages des individus ayant des débuts
précoces sont minoritaires. Ainsi, alors que près de 42% de jeunes initiés précocement sont
passés à l’acte le jour même, leur proportion n’est que de 34% chez ceux dont la relation a été
de longue durée (plus de six mois). La prise en compte du sexe montre que les filles ont été
moins nombreuses (32%) à avoir des rapports initiaux précoces qui s’inscrivent dans une longue
durée comparativement aux garçons (36%). A l’inverse, l’activité sexuelle précoce de très
courte durée s’observe davantage parmi les garçons (65,1% contre 11% pour les filles ;
p=0,000).

127
Tableau 4.3 : Répartition en (%) des jeunes par sexe selon le calendrier et la durée de la relation

Garçons Filles Ensemble p-value


Durée dans la relation N=664 N=491 N=1155 entre précoce (G) et (F)
Précoce Tardif Précoce Tardif Précoce Tardif
Un jour 65,1 34,9 11,0 89,0 41,8 58,2 ***
Moins d’un mois 42,3 57,7 59,5 40,5 46,6 53,4 ***
1 à 6 mois 40,7 59,3 50,1 50,0 44,3 55,7 ***
Plus de 6 mois 35,9 64,2 32,0 68,1 33,9 66,1 ***
Prob.chi2 0,000

4.4.5 Ecart d’âge entre partenaires au premier rapport sexuel

Les relations sexuelles intergénérationnelles contribuent à favoriser la dynamique de la


transmission du VIH/Sida et des autres IST. Les jeunes notamment les filles débutent leur
sexualité le plus souvent avec des hommes beaucoup plus âgés. Ce phénomène très courant en
Afrique est un facteur important à l’origine des disparités de prévalence du VIH entre les
adolescents et les adolescentes (ONUSIDA, 2008). Autrement dit, à âges égaux, les filles sont
presque plus contaminées que les garçons. Ainsi, à Kisimu, au Kenya, à 15-19 ans 23% des
filles sont infectées par le VIH contre 3% chez les homologues de sexe masculin, soit huit fois
plus (Amat-Roze, 2003).

Dans le but de calculer les différences d’âge entre les partenaires, les enquêtés ont été invités à
indiquer l’âge de leur premier partenaire sexuel. Il ressort des analyses que l’entrée dans la
sexualité des filles se fait très peu avec les garçons de leur génération (seulement 1,9% contre
environ 18,7% chez les garçons). Elles s’initient généralement avec des hommes beaucoup plus
âgés donc plus expérimentés. Alors que la majorité des garçons ont leurs premiers rapports
sexuels avec des partenaires plus jeunes qu’eux (61,6%), les filles, quant à elles, vivent cette
expérience avec des hommes plus âgés qu’elles (Figure 4.6). On note que la quasi-totalité des
jeunes filles enquêtées (95,9%) a eu un premier partenaire plus âgé. Parmi les premiers
partenaires de celles-ci, une proportion non négligeable (8%) avait une différence d’âge de dix
ans ou plus contre 0,5% chez les garçons (Annexe 9). Ce résultat est largement corroboré par
les analyses de Zanou et Nyankawindemera (2002) menées auprès de 5075 jeunes de 15-19 ans
dans six45 villes de la Côte d’Ivoire.

45
Les villes d’Abidjan, Bondoukou, Bouaké, Daloa, Korhogo et San-Pédro appartenaient aux sites de surveillance
sentienelle du VIH dans le cadre du programme national de lutte contre le Sida.

128
Cette description des écarts d’âge entre partenaires est quelque peu différente du modèle
brésilien notamment chez les garçons qui ont tendance à avoir leurs premiers rapports avec des
femmes plus âgées. Ainsi, ils s’engagent avec des partenaires occasionnelles plus
expérimentées pour leur permettre de surmonter leur propre inexpérience (Bozon et al., 2006).

Figure 4.6 : Répartition des jeunes sexuellement actifs selon l’écart d’âge du partenaire

21,5
Partenaire beaucoup plus âgé (5 ans et plus) 44,7
3,5

31,5
Partenaire plus âgé (1 à 4 ans) 51,2
16,2

35,6
Partenaire plus jeune 2,2
61,6

11,3
Partenaire ayant le même âge 1,9
18,7

0,0 10,0 20,0 30,0 40,0 50,0 60,0 70,0

Ensemble Filles Garçons

Note : Les différences sont significatives entre filles et garçons au seuil de 1%

Par ailleurs, l’écart d’âge entre partenaires est significativement associé au calendrier du
premier rapport sexuel des jeunes. Dans l’ensemble, les jeunes qui déclarent des partenaires du
même âge sont plus nombreux à avoir des débuts sexuels avant 16 ans (53,4%). En prenant en
compte le sexe, on note qu’il n’existe pas de différence significative entre les filles et les garçons
ayant eu des rapports précoces avec des partenaires de la même génération, ce qui laisse
supposer que cet évènement est souvent vécu entre personne inexpérimentée. En revanche, on
constate que la proportion de filles qui vivent une initiation précoce est plus importante lorsque
le partenaire est beaucoup plus âgé (5 ans et plus) : près de deux filles sur quatre (40,9% contre
35,9%, p=0,000). Chez les garçons, ils ont été majoritaires à débuter leur sexualité avant 16 ans
avec des partenaires plus jeunes (31,2%) et aussi plus âgé (63,7%). Cette observation est en
conformité avec les travaux d’Adohinzin et al. (2016). Ils révèlent que le fait d'avoir un premier
partenaire plus âgé, était associé à des premiers rapports sexuels précoces chez les jeunes. Ce
déséquilibre d’expérience entre partenaire à l’initiation peut avoir des conséquences sur la santé
du partenaire le plus jeune. Les personnes plus âgées ayant des partenaires beaucoup plus
jeunes, ont déjà un passé sexuel qui peut les rendre plus susceptibles d’accroitre le risque de

129
transmission des IST/ VIH/Sida surtout en cas de non usage de préservatif. Ces écarts d’âge
entre les partenaires peuvent aussi affecter les négociations ultérieures sur les pratiques
sexuelles et l’utilisation de préservatif surtout pour les filles.

Tableau 4.4 : Répartition en (%) des jeunes par sexe selon l’écart d’âge entre partenaire

p-value
Garçons Filles Ensemble
entre précoce
Ecart d’âge entre partenaires N=643 N=474 N=1117
(G) et (F)
Précoce Tardif Précoce Tardif Précoce Tardif
Partenaire ayant le même âge 53,4 46,6 53,8 46,2 53,4 46,6 ns
Partenaire plus jeune 31,2 68,8 19,3 80,7 30,9 69,2 ***
Partenaire plus âgé (1 à 4 ans) 63,7 36,3 33,4 66,6 42,2 57,9 ***
Partenaire beaucoup plus âgé (5 ans et plus) 35,9 64,2 40,9 59,1 40,4 59,6 ***
Prob.chi2 0,000

4.4.6 Utilisation de préservatif au moment du premier rapport sexuel

L'utilisation du préservatif a augmenté presque partout dans le monde mais les taux restent
faibles dans de nombreux pays en développement (Wellings et al., 2006). En France, par
exemple, le préservatif s’est imposé progressivement comme une pratique préventive en début
de vie sexuelle. En effet, l’impact des campagnes et actions de prévention a permis une
augmentation régulière et forte, depuis 30 ans, du recours au préservatif lors du premier rapport
sexuel (Moreau et al., 2008). Par contre, dans les pays francophones d’Afrique subsaharienne,
la fréquence d’utilisation des préservatifs aux premiers rapports sexuels par les adolescents et
jeunes demeure faible même si les tendances actuelles mettent en exergue des niveaux
encourageants notamment dans les générations les plus récentes (Rwenge, 2013).

Dans notre échantillon, les jeunes célibataires ayant déjà eu leur premier rapport sexuel devaient
indiquer si un préservatif avait été utilisé à cette occasion. Globalement, les résultats montrent
que ces premiers rapports sexuels ont été protégés seulement dans 45% des cas. Cette
proportion, bien que faible au regard du niveau actuel de prévalence du VIH/Sida en Côte
d’Ivoire, se situe au-dessus de celles de plusieurs pays francophones d’Afrique. Pour Rwenge
(2013), l’engagement sérieux des autorités ivoiriennes et des organisations dans la lutte contre
le Sida a favorisé l’adoption de comportements plus préventifs. Ainsi, les adolescents et jeunes
prennent à leur initiation sexuelle plus de précaution que leurs homologues d’autres pays.

130
En considérant le sexe des enquêtés, il ressort qu’au moment de la première expérience sexuelle,
les garçons ont été plus nombreux à déclarer n’avoir pas utilisé de préservatif (environ 58%
contre 51% chez les filles, p=0,000). Selon les normes sociales en vigueur en Afrique,
l’initiative des rapports sexuels et de l’utilisation du préservatif revient le plus souvent aux
hommes. Du coup, quand ceux-ci sont réticents au port du préservatif, le rapport sexuel n’est
pas protégé. Il est difficile pour une jeune femme de proposer un préservatif à son partenaire
car ceci est synonyme de « mœurs légères » ; cette dernière s’expose à la violence et réduit ses
chances de construire une relation durable (Yakam, 2009). Ces résultats confirment le fait que
dans des sociétés africaines, ce sont les hommes qui décident en matière de sexualité. En effet,
le plus souvent, le choix du lieu, du moment et même de la forme des rapports sexuels leur
revient.

Les résultats issus de l’analyse bivariée révèlent également que la non utilisation du préservatif
au premier rapport sexuel baisse avec l’âge. Ainsi, les adolescents de 15-17 ans sont plus
nombreux (60,4%) à avoir une initiation sexuelle non protégée contre 56,1% et près de 50%
respectivement chez les 18-20 ans et 21-24 ans. Ces résultats descriptifs suggèrent que
l’acquisition des connaissances sur les modes de prévention se fait probablement au fil des
années. En fait, les plus jeunes ont moins conscience du danger réel encouru lors des rapports
sexuels non protégés ou encore une faible perception du risque encouru. Il est donc nécessaire
que les programmes de sensibilisation et de prévention ciblent ces derniers pour qu’ils adoptent
des comportements plus responsables au moment de leur entrée en vie sexuelle.

Figure 4.7 : Répartition en (%) des jeunes par sexe ou groupe d’âge selon l’utilisation ou non du
préservatif

131
Note : Les différences sont significatives statistiquement au seuil de 1% au niveau du sexe et du
groupe d’âge.

Par ailleurs, une forte association est observée entre l’utilisation du préservatif et le calendrier
de l’initiation sexuelle. On constate que l’usage du préservatif est moins important lorsque les
jeunes débutent précocement leur vie sexuelle et ce quel que soit le sexe. Alors que seulement
32,6% des personnes qui ont eu un premier rapport sexuel précoce c’est-à-dire avant 16 ans ont
affirmé s’être protégées, la proportion de celles qui ont eu un rapport tardif protégé atteint
53,5% (Tableau 4.5). Ces résultats montrent que les individus entrant tardivement en sexualité
prennent conscience des risques liés aux rapports sexuels non protégés. C’est la même tendance
que Pettifor et al. (2010) ont observé en Afrique du Sud à partir des données d’une enquête
représentative au niveau national auprès de 7 692 jeunes 15 à 24 ans sexuellement actifs. Il
ressort de leurs analyses que les jeunes dont les premiers rapports sexuels ont eu lieu à un âge
précoce sont plus susceptibles que les autres répondants de déclarer avoir omis le préservatif
lors de leur première expérience sexuelle. Le même constat peut être tiré des analyses de
Yotebieng et al. (2009) qui expliquent plutôt que le fait de retarder les débuts sexuels d’une
année supplémentaire augmente de 1,44 fois la probabilité d'utiliser un préservatif au moment
du premier rapport.

L’un des résultats les plus marquants de cette analyse est que la durée de la relation influence
la protection des premiers rapports sexuels. Dans l’ensemble, on remarque que plus la durée de
la relation s’allonge plus la sexualité initiale fait l’objet d’une protection. Ainsi, alors que près
de 86% des jeunes, dont la relation n’a duré qu’un jour, ont affirmé n’avoir pas utilisé un
préservatif au moment de leur initiation, cette proportion est 55,3% pour une relation d’au
moins un mois et atteint 46,7% pour une durée de 6 mois et plus.

La brièveté d’une relation peut compromettre l’usage du préservatif. En effet le contexte dans
lequel se déroulent les aventures d’un soir ou les histoires sans lendemain des jeunes met en
évidence le caractère brusque et circonstanciel de leurs rapports sexuels (Mazou, 2014). En
revanche, lorsque la relation s’installe dans la durée, les sentiments amoureux devancent
généralement les échanges physiques (Maillochon et al, 2016). Ces relations amoureuses ou
sentimentales peuvent être plus ou moins de longues durées avant de déboucher sur des rapports
sexuels pénétratifs. Une étude réalisée en France par Lagrange et Lhomond, (1995) auprès des
jeunes de 15-18 ans scolarisés ou en formation a montré une démarcation entre pratiques non
génitales et premiers rapports sexuels. Si à 14 ans la moitié des jeunes des deux sexes a échangé

132
le premier baiser, on note que près de trois ans et demi séparent l'âge médian à ce premier baiser
de l'âge médian au premier coït. Ce laps de temps peut favoriser les conversations préalables
sur la prise de précaution lors du premier rapport sexuel. Dans notre cas, même si ce résultat
est important, il aurait été plus intéressant de documenter le temps écoulé entre la rencontre et
l’acte sexuel lui-même.

Un autre résultat important de cette analyse bivariée est que le recours au préservatif lors de
l’initiation sexuelle dépend également de l’écart d’âge avec le partenaire. Les différences d’âge
entre partenaires peuvent constituer un obstacle important à la protection du premier rapport
sexuel et peuvent même affecter de manière négative la dynamique de pouvoir et des
négociations sur les pratiques sexuelles ultérieures surtout si ce sont les femmes qui sont les
plus jeunes (Amo-Adjei, 2012). Globalement, les partenaires ayant le même âge (64,6%) et
ceux dont la différence d’âge est importante (58,5%) ont été plus nombreux à déclarer n’avoir
pas utilisé de préservatif lors de premières expériences sexuelles. Aussi, on note que l’utilisation
du préservatif est meilleure chez les filles lorsque le partenaire est plus jeune (77,4%). Le
constat est le même chez les garçons mais dans des proportions moins importantes (environ
45,8%).

Tableau 4.5 : Répartition en (%) des jeunes par sexe et l’utilisation ou non du préservatif selon
quelques variables

Variables Garçons (G) Filles (F) Ensemble p-value entre


Pas utilisé
N=665Utilisé Pas utilisé
N=492Utilisé Pas utilisé
N=1157Utilisé pas utilisé
Calendrier de l’initiation sexuelle
(G) et (F)
Précoce 67,7 32,3 66,8 33,2 67,4 32,6 ***
Tardif 51,1 48,9 41,0 59,0 46,5 53,5 ***
Prob. chi2 ***
Durée de la relation
Un jour 82,5 17,5 90,4 9,6 85,9 14,1 ***
Moins d’un mois 67,0 33,0 51,5 48,5 63,1 36,9 ***
1- 6 mois 53,4 46,6 58,4 41,6 55,3 44,7 ***
Plus de 6 mois 52,9 47,1 40,7 59,3 46,7 53,3 ***
Prob. chi2 ***
Ecart d’âge entre partenaires
Partenaire ayant le même âge 66,5 33,5 41,5 58,5 64,6 35,4 ***
Partenaire plus jeune 54,2 45,8 22,6 77,4 53,3 46,7 ***
Partenaire plus âgé 58,3 41,7 46,9 53,1 50,2 49,8 ***
Partenaire beaucoup plus âgé 77,7 22,3 56,6 43,4 58,5 41,5 ***
Prob.
ans et chi2
plus) ***

133
Malgré les résultats intéressants que suggèrent l’analyse bivariée, elle n’est pas suffisante pour
comprendre la relation simultanée entre le calendrier de l'activité sexuelle initiale et l'utilisation
du préservatif. En réalité, ces variables peuvent être corrélées à d’autres caractéristiques des
jeunes qu’il faut considérer. C’est pourquoi nous recourons à des modèles multivariés pour
estimer la probabilité d’entrer précocement en sexualité et la probabilité de ne pas utiliser de
préservatif.

4.4.7 Résultats de la modélisation


 La précocité de la sexualité augmente les risques de ne pas utiliser le préservatif
Les résultats de l’estimation du modèle probit bivarié sont présentés dans le Tableau 4.6. La
colonne A explique la probabilité d’avoir des rapports sexuels initiaux précoces et la colonne
B, le non usage de préservatif lors du premier rapport sexuel.

La significativité statistique du coefficient de corrélation (rho) atteste de la pertinence d’utiliser


ce modèle d’estimation (Tableau 4.6). En effet, le modèle estimé révèle un rho positif ce qui
veut dire que le fait d’entrer précocement en sexualité influe positivement sur la probabilité de
ne pas faire usage de préservatif au cours du premier rapport sexuel. C’est dire que les facteurs
inobservables qui influencent à la fois le calendrier de l’initiation sexuelle et l’usage de
préservatif sont positivement corrélés. Ainsi, les jeunes qui font une entrée plus précoce en
sexualité sont plus susceptibles d’adopter des comportements sexuels à risque en l’occurrence
l’absence de précaution lors des rapports.

En analysant la première équation, on n’observe pas d’effets significatifs du niveau


d’instruction et de la durée de la relation sur l’initiation sexuelle précoce. En revanche, on
constate que le fait d’être une jeune fille contribue à baisser de 0,15 point la probabilité d’entrer
plus tôt en vie sexuelle. Ce résultat montre que le calendrier masculin de l’initiation sexuelle
s’avère plus précoce que celui des filles. Par le passé, en Afrique subsaharienne, les femmes
débutaient leur vie sexuelle plus tôt que les hommes notamment du fait du mariage précoce.
Cette situation connait un changement dans de nombreux pays (Kenya, Zambie) où on observe
un rajeunissement de l’âge au premier rapport sexuel des hommes (Bozon, 2003 ; Bozon et
Hertrich, 2004). Le même constat a été fait par Delaunay et al. (1999) dans une analyse portant
sur les hommes en milieu rural sénégalais.

En outre, l’âge est un élément déterminant de l’initiation sexuelle précoce. Ainsi, le fait d’être
un adolescent de 15-17 ans augmente fortement et significativement la propension de
commencer sa vie sexuelle avant 16 ans. Par contre, l’appartenance à la tranche d’âge 21-24

134
ans fait baisser cette probabilité de 0,10 point. Les résultats ont montré une corrélation
particulièrement plus forte avec la tranche d’âge des adolescents. Cela pourrait s’expliquer par
le fait que l’entrée en activité sexuelle est plus précoce dans les générations jeunes que chez les
plus anciennes (Kobelembi, 2005 ; Maillochon et al., 2016). L’hypothèse permettant
d’expliquer ce constat serait les transformations profondes survenues dans les comportements
sexuels dans les dernières décennies du 20ème siècle (Bozon, 2009). Il est probable que les
mutations dans la sexualité des individus au fil des générations aient favorisé plus d’autonomie
pour les jeunes et moins de contrôle social de la part des aînés. Pour Bozon (2009), ces
changements vont permettre le passage d'une sexualité construite par des contrôles externes aux
individus à une sexualité reposant sur des disciplines internes. Ainsi, dans ce nouveau système
normatif où il n’y a pas d’appareils de sanctions et de contrôle, les premières expériences
sexuelles des individus interviennent dans un contexte social distinct de celui des générations
précédentes. On a donc une génération jeune qui s’initie plus tôt et ce, en dehors de tout cadre
marital.

Assez logiquement, les résultats montrent que l’écart d’âge avec le premier partenaire est lié au
calendrier précoce de l’initiation sexuelle. La probabilité d'avoir un premier rapport sexuel
avant 16 ans augmente lorsque le premier partenaire sexuel est plus âgé. Cette probabilité est
respectivement de 0,16 et 0,19 point lorsqu’on passe d’une différence d’âge de 1- 4 ans
(partenaire plus âgé) à plus de 5 ans (partenaire beaucoup plus âgé). Pettifor et al (2010) ont
aussi trouvé un résultat identique auprès des jeunes femmes en Afrique du Sud en utilisant une
régression de poisson. Ainsi, chaque année d’âge supplémentaire du premier partenaire par
rapport à l’âge de la jeune femme, augmente significativement la probabilité qu’elle ait eu des
premiers rapports sexuels précoces.

Les résultats de la seconde équation du modèle estimé indiquent que le sexe est également un
facteur explicatif de la non utilisation de préservatif au premier rapport sexuel. Le fait d’être
une jeune fille plutôt qu’un garçon diminue la probabilité de ne pas se protéger lors de la
première expérience sexuelle de 0,16 point. C’est un résultat inattendu puisque d’après la
littérature, les jeunes filles, en Afrique, ont généralement des rapports sexuels avec des hommes
beaucoup plus âgés rendant ainsi difficile leur négociation de l’usage du préservatif (Talnan et
al., 2004 ; Abega et Magne, 2006). Ce contexte est renforcé par une domination masculine
marquée par des stéréotypes sociaux et une vulnérabilité économique des femmes qui
expliquent leur faible utilisation de préservatif. Nos résultats peuvent suggérer une autre lecture
de la situation. En effet, une recherche réalisée par Tumwesigye et al. (2013) sur les jeunes du

135
milieu rural et péri-urbain en Ouganda donne des résultats similaires. Les auteurs font
remarquer un niveau plus élevé d'utilisation du préservatif au premier rapport sexuel chez les
femmes que chez les hommes. L’explication se trouverait dans le fait que les femmes étaient
plus susceptibles d'avoir eu un premier rapport sexuel dans une relation stable et avec des
partenaires plus âgés, tous deux associés à l'utilisation du préservatif.

Par ailleurs, en analysant les raisons qui motivent les jeunes filles de Kinshasa à entamer une
vie sexuelle, Kalambayi (2007) met en avant la curiosité, la recherche du plaisir, le désir de
prouver son amour à l’être aimé et la pression des pairs. Les premiers rapports sexuels ont donc
un caractère sentimental ou psychologique et non lucratif. L’acte sexuel en lui-même peut avoir
lieu sur l’initiative des partenaires masculins mais aussi des filles ou même des deux (Abega et
Magne, 2006). Dans un tel contexte, on imagine bien les filles suggérer la protection de leur
initiation sexuelle. Comme le soulignent Pettifor et al. (2010) dans leurs travaux sur l’Afrique
du sud, les femmes des deux groupes d’âges (15-19 ans et 20-24 ans) sont plus susceptibles que
les hommes de déclarer avoir parlé du préservatif à leur premier partenaire sexuel. Selon
certains auteurs, la protection du premier rapport sexuel des jeunes filles peut s’inscrire
davantage dans l’optique d’une méthode contraceptive dans le but d’éviter une grossesse par
rapport à la prévention du VIH/Sida (Anoh et Talnan, 2005).

En ce qui concerne l’impact de l’âge sur le non recours au préservatif, les résultats ne révèlent
pas d’effet significatif.

Sans surprise, le niveau d’instruction a un impact significatif sur la probabilité de ne pas utiliser
de préservatif au moment de l’entrée en sexualité adulte. On remarque que cette probabilité
augmente lorsque le niveau d’éducation devient faible. Ainsi, le passage du niveau primaire à
sans instruction augmente le risque de ne pas se protéger de 0,24 point. Un parallèle peut être
établi avec les résultats de Baya et Meda (2001) qui soulignent que les jeunes sans instruction
ou avec un niveau d'instruction primaire ont une probabilité significativement plus faible
d’utiliser un préservatif lors du premier rapport comparativement aux jeunes de niveau
secondaire et plus. L’instruction facilite une meilleure acquisition des connaissances sur le rôle
préventif du préservatif dans la protection contre les IST/VIH/Sida. Ces connaissances vont
donc créer chez les individus les conditions requises pour percevoir la vulnérabilité, la gravité
et donc d’induire chez eux le désir de se protéger (UNESCO, 2002).

Comme on pouvait s’y attendre, la durée de la relation influence la probabilité de ne pas recourir
aux préservatifs lors de l’initiation sexuelle. En d’autres termes, lorsque la relation avec le

136
premier partenaire est brève, la probabilité que le préservatif ne soit pas utilisé pendant l’entrée
en sexualité augmente considérablement. Ainsi, par rapport aux individus dont la relation a duré
plus de six mois, la probabilité qu’un jeune n’utilise pas le préservatif au cours du premier
rapport sexuel accroît de 0,34 point, lorsque la durée de la relation est d’un jour. Le laps de
temps qui sépare la rencontre et le premier coït est révélateur de l’adoption des comportements
à risque ou pas. Les relations brèves ou de courte durée ont généralement une issue sexuelle
non programmée d’où le faible recours au préservatif.

Tableau 4.6 : Estimation des interactions entre le calendrier précoce et le non usage de préservatif

Variables Probabilité d’entrer Probabilité de ne pas utiliser


précocement en sexualité de préservatif
(A) (B)
Effet marginal Erreur type Effet marginal Erreur type
Sexe (masculin)
Féminin -0,1523*** 0,0555 -0,1635*** 0,0581
Age (18-20 ans)
15-17ans 0,4314*** 0,0488 0,0494 0,0491
21-24 ans -0,1049** 0,0438 -0,0230 0,0451
Instruction (secondaire ou plus)
Aucun 0,0107 0,0472 0,2355*** 0,0485
Primaire -0,0030 0,0428 0,1464*** 0,0461
Ecart d’âge (partenaire plus jeune)
Même âge 0,1632** 0,0670 0,1149 0,0703
Partenaire plus âgé (1-4 ans) 0,1578*** 0,0566 0,0427 0,0629
Partenaire beaucoup plus âgé (5 ans et 0,1883*** 0,0689 0,2009*** 0,0682
Durée
plus) dans la relation (plus de 6 mois)
Un jour 0,0446 0,0918 0,3369*** 0,0631
Moins d’un mois 0,0809 0,0556 0,1395** 0,0620
1-6 mois 0,0548 0,0455 0,0652 0,0476
Coefficient du rho 0,3159
Wald test of rho=0 Prob>chi2=0,0000
N 1117

 Effets de la sexualité précoce non protégée


En premier lieu, les résultats suggèrent que le sexe a un effet négatif très fort sur la sexualité
précoce non protégée. Ainsi, le fait d’être une jeune femme réduit de 0,15 point de probabilité
les risques d’avoir un rapport précoce sans préservatif.

De même, l’âge exerce une influence sur l’initiation sexuelle précoce non protégée. Etre un
adolescent de 15-17 ans accroît la probabilité d’avoir un premier rapport sexuel non protégé. A
l’opposé, le fait d’avoir 21-24 ans réduit cette probabilité. Cela pourrait confirmer la prise de
conscience plus grande des dangers d’une sexualité à risque lorsqu’on gagne en maturité.

137
De manière évidente, on s’attend à ce que le niveau d’instruction soit déterminant dans le
calendrier de la sexualité initiale sans préservatif. L’effet marginal des modalités « aucun
niveau et primaire » est assorti d’un signe positif, ce qui implique qu’il est plus probable pour
les individus ayant ces niveaux d’éducation d’entamer une vie sexuelle précoce non protégée
par rapport à ceux ayant le niveau secondaire ou plus (prise comme référence).

La différence d’âge avec le partenaire semble jouer un rôle sur la précocité des débuts sexuels
sans protection. Par exemple, le fait que le premier partenaire ait le même âge ou soit plus âgé
affecte positivement la probabilité de vivre une première expérience sexuelle sans protection.

Aussi, constate-t-on que la durée de la relation influence la probabilité d’avoir un premier


rapport sexuel non protégé avant 16 ans. Par rapport à des personnes dont la relation a été longue
(durée plus de 6 mois), celles ayant eu une relation éphémère ou courte ont une propension plus
grande à commencer leur sexualité sans faire usage de préservatif.

Tableau 4.7 : Estimation d’un calendrier sexuel précoce non protégé

Variables Probabilité d’avoir un premier rapport sexuel


précoce non protégé
Effet marginal Erreur type
Sexe (masculin)
Féminin -0,1490*** 0,0412
Age (18-20 ans)
15-17ans 0,2661*** 0,0433
21-24 ans -0,0720** 0,0318
Instruction (secondaire ou plus)
Aucun 0,0913** 0,0391
Primaire 0,0522 0,0330
Ecart d’âge (partenaire plus jeune)
Même âge 0,1357** 0,0541
Partenaire plus âgé (1-4 ans) 0,1019** 0,0415
Partenaire beaucoup plus âgé (5 ans et plus) 0,1875*** 0,0546
Durée dans la relation (plus de 6 mois)
Un jour 0,1405** 0,0708
Moins d’un mois 0,1003** 0,0439
1-6 mois 0,0550 0,0364

Conclusion du chapitre 4
A partir de données collectées en milieu rural ivoirien, ce chapitre a mis en lumière la relation
entre le calendrier d’entrée dans la sexualité et l’usage du préservatif lors de cette initiation.
Deux questions de recherche ont été examinées : les résultats de la première suggèrent que les
jeunes qui entament plus tôt leur vie sexuelle sont plus enclins à ne pas recourir au préservatif

138
au moment de cette occurrence. La conjonction entre le calendrier précoce et la non protection
du premier rapport est un indicateur de prise de risque. En effet, lorsque l’âge d’initiation est
précoce, les individus sont encore immatures et manquent d’informations nécessaires sur la
sexualité, les rendant ainsi vulnérables aux IST/VIH/Sida à travers leur exposition à un plus
grand nombre de partenaires sexuels et à une plus longue période d’activité sexuelle.

Comme le fait remarquer certains auteurs, l’immaturité physique des adolescents les expose à
des risques si la sexualité ou la reproduction commence trop tôt. Les individus initiés très tôt
sexuellement font à peine leur transition de l’enfance à l’adolescence. Cette période marquée
par le manque de connaissance ou d’informations précises sur le VIH/Sida, ses modes de
transmission et moyens de prévention constitue pourtant un facteur majeur de propagation de
cette maladie. Selon Kobelembi, en Centrafrique, les jeunes acquièrent postérieurement les
informations sur les conséquences de l’activité sexuelle précoce ou du moins qu’elles ne sont
pas suffisantes pour atténuer leur désir d’expérimenter le rapport sexuel. D’autres auteurs
soulignent plutôt l’ignorance des adolescents à l’égard de cette sexualité précoce. D’après
Sawadogo (2016, p.176), « cette ignorance empêche l’individu d’appréhender correctement le
risque encouru, et donc, de mettre en œuvre une stratégie quelconque de gestion du risque.
Ceci est d’autant plus vrai que ces rapports sont survenus pour la plupart sans préparation ».
C’est dire que cette sexualité initiale prémaritale intervient souvent de façon spontanée sans
aucune préparation préalable ; ce qui explique que les individus ne prévoient pas à l’avance de
se procurer un préservatif. Il est aussi probable que la compréhension du non recours au
préservatif des adolescents entrés précocement en sexualité vienne du capital confiance à
l’égard du partenaire. Selon d’autres auteurs, le premier rapport sexuel intervient avec un
partenaire bien connu, en qui ces adolescents ont confiance, du coup la question de la protection
pourrait être moins prioritaire.

Globalement, l’immaturité, l’ignorance, le désir pressant de découvrir l’acte sexuel, la grande


dépendance affective vis-à-vis de leur partenaire, absence totale de conscience des risques
encourus vont conduire à une entrée précoce en sexualité sans aucune protection. C’est
pourquoi, dans certains pays, les programmes de prévention préconisent le report de l’âge au
premier rapport sexuel car il a été démontré que le fait de s’initier plus tard, diminuerait le
risque d’infection lors de chaque rapport sexuel surtout chez les femmes.

139
En ce qui concerne la seconde question, les résultats indiquent que la probabilité de commencer
précocement la vie sexuelle sans faire usage du préservatif est plus grande chez les garçons que
chez les filles. Si par le passé, les débuts sexuels des filles, en Afrique subsaharienne, étaient
plus précoces à cause de leur mise en union dès la puberté ou peu de temps après, de nouveaux
modèles ont vu le jour dans le contexte prémarital. Parmi les célibataires résidant en milieu
rural, les garçons semblent s’initier plus tôt que les filles. Contrairement à ce qu’on s’attendait,
les garçons précoces ne sont pas plus susceptibles d’avoir des rapports protégés que les filles.
Ces résultats mettent en évidence les progrès réalisés dans la sensibilisation des filles en vue
d’une négociation du préservatif avec leur partenaire (dans le but de combattre la féminisation
du VIH/Sida).

140
CHAPITRE 5. Structure familiale et multipartenariat
sexuel chez les jeunes : de l’approche quantitative à
l’approche bio-phénoménologique46

Globalement, les jeunes constituent une population ayant des comportements sexuels à risque
dans la mesure où, à cette période de la vie, les relations sexuelles sont généralement instables
et le multipartenariat fréquent (INS et Macro, 2012). La multiplication du nombre de partenaires
augmente les risques d'exposition aux IST/VIH/Sida. Aussi, le multipartenariat hétérosexuel,
comme c’est le cas en Afrique, est propice à une dynamique soutenue de l’épidémie (Mulot,
2009). En effet, le risque d’infecter d’autres personnes est plus élevé chez les individus ayant
simultanément plusieurs partenaires. Le type de partenaires et de relations entre partenaires
influent considérablement sur le processus de diffusion du VIH. Incontestablement, « ces
relations peuvent être ponctuelles, occasionnelles ou régulières, sérielles ou concomitantes. Le
multipartenariat multiplie les situations à risque et donc accroît le risque d’exposition au
VIH/Sida » (Ferry, 1999, p.119).

Les facteurs explicatifs dans les études sur le recours aux partenaires multiples reposent en
grande partie sur les caractéristiques individuelles et extra-familiales des adolescents et des
jeunes. Ainsi, ces études ne prennent pas toujours en compte la dimension familiale. Et pourtant,
la famille en tant qu’agent de socialisation, transmet à l’individu le patrimoine culturel et les
liens affectifs qui, en retour, participent aussi de sa socialisation. Elle inculque aux individus
les valeurs et les normes qui l'aideront par la suite à développer des relations sociales
(Thollembeck, 2010). Les études qui intègrent la structure familiale dans la compréhension des
comportements sexuels se focalisent davantage sur l’entrée en vie sexuelle, l’activité sexuelle
ou la maternité (Wu et al., 1997 ; Kumi-Kyereme et al., 2007 ; Dimbuene et Defo,
2011 ; Magnani et al., 2002 ; Diop-Sidibe, 2005 et Tambashe et Shapiro, 1996). En plus, les
résultats issus des analyses ne sont pas toujours convergents voire très contrastés suivant le sexe
(Ngom et al. 2003 et Diop-Sidibe, 2005).

Dans ce chapitre, nous privilégions la théorie de la désorganisation sociale selon laquelle


l'urbanisation et la modernisation conduiraient à un effritement de l’autorité des aînés et du

46
Ce chapitre fera l’objet d’une communication intitulée « Structure familiale et multipartenariat sexuel chez les
jeunes : de l’approche quantitative à l’approche bio-comportementale » dans la séance poster : Sexualité et santé
de la reproduction lors du XXVIIIe Congrès international de la population qui se tiendra au Cap, en Afrique du
sud, du 29 octobre au 4 novembre 2017.

141
groupe familial sur les jeunes faisant ainsi place à une dégradation des mœurs. Avec la
modernisation, les ménages africains font face à de nombreux changements familiaux (la
montée des naissances hors mariage, du divorce, de nouvelles stratégies matrimoniales,
l’émergence de la monoparentalité, la montée de la décohabitation, etc.) pouvant influencer le
comportement sexuel des adolescents et des jeunes. Dans ces nouveaux modèles familiaux, les
individus acquièrent plus d’autonomie vis-à-vis de la structure sociale notamment les normes
qui en régissent leur fonctionnement. Cette autonomie engendre de nouvelles formes de
relations entre le mari, son épouse (ou ses épouses) et ses enfants (Vimard, 1993). Autrement
dit, les individus ont un plus grand pouvoir de décision et plus de liberté. Mais ces nouvelles
configurations de ménages/familles à l’ère de la modernité ne favorisent-elle pas l’adoption de
comportement sexuel à risque de la part des jeunes ?

Ainsi, ce chapitre examine les effets de la structure familiale sur le multipartenariat sexuel chez
les jeunes en s’appuyant sur deux démarches méthodologiques complémentaires : l’une
quantitative et l’autre qualitative. Dans un premier temps, il présente les variations du recours
aux partenaires multiples selon les diverses caractéristiques des jeunes et du ménage puis met
en exergue les déterminants. Dans un second temps, l’approche bio-phénoménologique est
utilisée pour cerner les dimensions idéologiques de cette pratique.

5.1 Analyse quantitative du multipartenariat chez les jeunes en Côte d’Ivoire

Dans cette section, nous examinons l’influence de la structure familiale des ménages sur le
multipartenariat sexuel des jeunes en recourant aux méthodes d’analyse quantitatives.

5.1.1 La structure familiale et son influence sur les comportements sexuels des jeunes en
Afrique : l’apport de quelques études empiriques

Les comportements sexuels des jeunes sont certes influencés par des facteurs individuels mais
aussi par des facteurs familiaux voire communautaires (Miangator, 2010 ; Dimbuene, 2010).
L’influence de la composition familiale sur le comportement sexuel est indéniable car,
l’environnement familial dans lequel un individu évolue à tendance à façonner sa conduite à
travers les normes sociales véhiculées.

En Afrique subsaharienne, de nombreux enfants ne résident pas avec leurs parents biologiques
parce qu’ils sont confiés à des familles d’accueil. En effet, le confiage est un fait social
important s’inscrivant de longue date dans les pratiques familiales africaines. Les raisons

142
traditionnelles du transfert d’enfants entre les unités familiales sont plus diversifiées : maladie
ou décès des parents biologiques, divorce ou répudiation, migration temporaire ou définitive,
socialisation/éducation des enfants, renforcement des liens familiaux, etc. (Pilon, 2003). Dans
les ménages ou familles africaines, on observe différentes formes de confiage. Par le fait, les
enfants appartenant à l’ensemble du lignage, il n’est donc pas rare de voir librement circuler les
enfants au sein du réseau familial dès le sevrage ou à partir de l’âge de six ans (correspondant
à l’âge d’entrée à l’école), et être socialisés sous la responsabilité d’un des membres de la
parenté (Sidze et Kuate-Defo, 2007). En d’autres termes, les enfants peuvent résider avec tous
les membres de la parenté : grands-parents, oncles, tantes, etc. Mais, il arrive qu’ils soient
confiés à des personnes non apparentées. Ce confiage d’enfants s’inscrit dans une forme de
solidarité familiale et parfois ethnique conduisant souvent au placement de ces derniers en
dehors de la ville ou du village de résidence des parents. Ils sont donc confiés à un tuteur qui a
la charge de jouer le rôle des parents et de garantir leur succès. Mais est-ce que ces arrangements
résidentiels ont-ils un impact sur le comportement sexuel des enfants devenus adolescents ou
jeunes ? En d’autres mots, le fait de vivre ou non avec leurs parents biologiques conduirait-il à
des comportements sexuels différenciés ?

Des études indiquent que le mode de résidence des jeunes avec les parents biologiques a un
impact sur leur comportement sexuel. La corésidence avec les deux parents biologiques est
davantage bénéfique en ce sens qu’elle favorise le contrôle parental qui est fortement associé à
une faible probabilité de comportement sexuel à risque (Dimbuene, 2010). C’est à cette même
conclusion que parvient Kouton (1992) dans le contexte béninois. Il indique que la cohabitation
des enfants avec leurs parents permet à ces derniers d’assurer une meilleure éducation,
d’exercer davantage leur autorité avec pour effet un relèvement de l’âge du début des relations
sexuelles. Autrement dit, les jeunes entraient plus tardivement dans la sexualité en vivant avec
leurs deux parents. Selon une autre étude basée sur des données collectées sur les structures
familiales à trois différents moments au cours de la vie des jeunes célibataires des deux sexes
âgés de 12 à 24 ans au Cameroun, il apparaît que le fait de vivre au sein d’une famille biparentale
étendue ou nucléaire est fortement associé à un faible taux de précocité du premier rapport
sexuel (Defo et Dimbuene, 2012). A partir d’une étude ethnographique réalisée auprès des
jeunes du milieu rural dans le nord-ouest de la Tanzanie, Wamoyi et al., (2011) font remarquer
que la présence d’un père semble plus important dans le contrôle des activités sexuelles des
jeunes. Un résultat identique a été trouvé par Ngom et al (2003) auprès des adolescents vivant
dans les bidonvilles de Nairobi. La littérature révèle aussi que dans certains cas la résidence

143
avec les parents favorise un meilleur contrôle des fréquentations et du coup l’adoption de
comportement sexuel plus responsable chez les jeunes. C’est le constat fait par Biddlecom et
al., (2009) dans les quatre pays étudiés. Ils remarquent que les adolescents ayant déclaré une
faible surveillance parentale couraient un risque plus élevé d'avoir des rapports sexuels au cours
de la dernière année.

Dans une étude menée par Rwenge dans la ville de Bamenda au Cameroun (2000), il ressort
que les jeunes vivant avec un seul parent étaient plus susceptibles d'être sexuellement actifs et
couraient plus de risque d'avoir plusieurs partenaires que ceux vivant avec leurs deux parents.
Selon l’auteur, la corésidence avec les grands-parents avait le plus souvent un effet protecteur,
tandis que le fait de vivre uniquement avec un frère ou une sœur ou avec d'autres personnes
accroissait généralement la probabilité d'adoption de comportements sexuels à risques. En
outre, en évaluant l’influence de la structure familiale sur le comportement sexuel des
adolescentes non mariées dans le district de Rakai en Ouganda, Pilgrim et al, (2015) sont
parvenus à des résultats qui diffèrent selon le statut de fréquentation des enquêtées. Le fait de
vivre dans le même ménage que le père biologique avait un effet protecteur contre le recours
aux partenaires multiples. Toutefois, ce résultat a été observé seulement chez les filles non
scolarisées mais il était non significatif chez les filles scolarisées. En sus, dans leur analyse
menée au Nigéria à partir d’un échantillon représentatif des étudiants de premier cycle des
différentes facultés de l’université de Obafemi Awolowo, Odimegwu et Adedini, (2013) ont
rapporté que les jeunes étudiants vivant dans une famille monoparentale (un seul parent) ont
une plus faible probabilité d'avoir de multiples partenaires sexuels.

En revanche, les travaux de Miangator (2010) montrent que l’absence des deux parents dans le
ménage n’est pas systématiquement associée au comportement sexuel à risque. Dans le même
ordre d’idée, une analyse, portant sur les adolescentes en République Démocratique du Congo,
faite par Kabali et al., (2009) a abouti un résultat similaire. En effet, ils soulignent que le
multipartenariat est plus fréquent parmi les jeunes vivant avec leurs deux parents. Toutefois,
les auteurs ont observé une prédominance de cette pratique chez les adolescentes des ménages
à niveau de vie faible et moyen. Cette situation pourrait suggérer des relations sexuelles
rétribuées, synonyme de stratégie de survie de la part de ces adolescentes.

La survie des parents est déterminante dans l’adoption de comportements sexuels à risques par
les jeunes (Tambashe et Shapiro, 1996 ; Slap et al., 2003). Effectivement, la perte des parents
accentue la vulnérabilité des orphelins surtout lorsque c’est le père qui décède. Les enfants sont

144
confiés à des proches ou aux mères dont la situation économique, en Afrique, est généralement
précaire. Ainsi, Mboussou et ses collègues (2006) ont observé une activité sexuelle précoce
chez les orphelins reçus en consultation psychologique et un nombre accru de partenaires chez
ceux ayant abandonné leur scolarité. Une autre étude, portant sur les adolescentes de 12-19 ans,
réalisée avec les données du Burkina Faso, Ghana, Malawi, et de l’Ouganda confirme que les
orphelines des deux parents courent plus de risque d’avoir des rapports sexuels précoces que
les autres non orphelines. En revanche, chez les orphelins, on n’observe pas de vulnérabilité
accrue à l'initiation sexuelle précoce (Chae, 2013). Dans le contexte camerounais, Rwenge
(2000) a montré que les orphelins et les enfants vivant avec un parent célibataire étaient
généralement plus susceptibles de s'engager dans des activités sexuelles.

La relation parent-enfant est également susceptible d’influencer le comportement sexuel des


jeunes. Pour Biddelcom et al., (2009), une augmentation d’un point des niveaux de la
communication parent-enfant sur la sexualité et la supervision parentale contribuent à faire
baisser les risques d’avoir le premier rapport sexuel de 8% et 6%, respectivement. Quant à
Dimbuene (2010), il met en exergue l’influence de la nature des relations entre parents et jeunes
sur les comportements sexuels des derniers. Ces travaux révèlent que la qualité des relations
entre les parents/tuteurs et le jeune est significativement associée à une faible probabilité de
recourir à plusieurs partenaires sexuels au cours des douze derniers mois et de non utilisation
du préservatif.

La situation matrimoniale voire le type d’union dans lequel les parents sont engagés a également
un impact sur le comportement sexuel de leurs enfants (Tambashe et Shapiro, 1996). Pour
déterminer si la structure familiale (polygame ou monogame) est associée à l'activité sexuelle
des jeunes, Slap et al., (2003) ont réalisé une enquête auprès des élèves du secondaire
fréquentant dans 39 établissements scolaires au Nigeria. Il ressort que l'activité sexuelle est plus
fréquente chez les élèves issus de familles polygames que chez leurs homologues des familles
monogames. De même, la mobilité matrimoniale et l’instabilité conjugale influencent aussi la
sexualité des jeunes à travers l’encadrement familial.

5.1.2 Données

Les données utilisées proviennent de trois sources : l’enquête démographique et de santé de


1998, l’enquête sur les indicateurs du Sida de 2005 et l’enquête démographique et de santé et à
indicateurs multiples de 2011-2012.

145
5.1.3 Variables d’analyse et hypothèses

La variable à expliquer est le multipartenariat sexuel au cours des douze derniers mois chez les
jeunes âgés de 15-24 ans. Ce groupe d’âge considéré intègre les adolescents et les jeunes. Au
départ, l’objectif était d’étudier ce phénomène dans un contexte prémarital c’est-à-dire
uniquement chez les célibataires. Mais pour des raisons d’effectifs, les autres situations
matrimoniales (notamment les unions libres et les mariés) sont prises en compte dans l’analyse.
La variable indépendante principale est la typologie des ménages qui permettra
d’opérationnaliser la structure familiale. L’effet de cette variable est contrôlé par une série
d’autres variables relevant des caractéristiques individuelles (le sexe, l’état matrimonial, l’âge,
le niveau d’instruction), celles du ménage (le niveau de vie, le milieu de résidence) et du chef
de ménage (sexe). L’ensemble de ces variables ont été présentées dans le chapitre 3.

Hypothèses de recherche

De façon générale, il s’agit de vérifier si l’adoption des comportements sexuels à risques


notamment le recours aux partenaires multiples varie selon le type de ménages et le cas échéant
de déterminer les facteurs à l’origine de cette variation. Cette hypothèse principale se
décompose en hypothèses spécifiques pouvant être testées.

Hypothèse 1 : La structure familiale des ménages influence la pratique du multipartenariat


sexuel chez les jeunes. Ainsi, les jeunes issus des ménages monoparentaux seraient plus enclins
à avoir plusieurs partenaires sexuels que leurs homologues des ménages monogames. La
monoparentalité s’inscrit dans les changements familiaux que connaissent de plus en plus les
ménages africains. Elle traduit une rupture ou un relâchement de la cohésion conjugale
traditionnelle (Vimard et N’Cho, 1997). L’hypothèse formulée est que les jeunes vivant dans
les familles monogames, supposées plus stables avec deux parents, jouissent d’un grand
contrôle social que ceux issus des ménages monoparentaux (majoritairement dirigés par des
femmes). L’affaiblissement du contrôle social sur la sexualité serait d’autant plus important que
le ménage monoparental connaitrait des conditions de vie difficiles (Dimbuene, 2010).

Hypothèse 2 : Toutefois l’impact de la structure des ménages sur le multipartenariat sexuel


dépend également d’autres caractéristiques du ménage, du chef de ménage et des jeunes. De
façon spécifique :

146
Hypothèse 2a : Le niveau de vie du ménage a un effet négatif sur la pratique au multipartenariat
sexuel. Ainsi, les jeunes des ménages pauvres ont une plus grande propension à avoir des
relations sexuelles avec plusieurs partenaires.

Hypothèse 2b : L’influence du multipartenariat sexuel diffère selon le milieu de résidence. En


effet, en Afrique subsaharienne, les modes de vie en matière de production, de consommation,
de revenus et les infrastructures ne sont pas les mêmes selon qu’on réside en ville ou à la
campagne. Avec l’urbanisation, les normes et les valeurs culturelles ont subi des changements
faisant émerger des attitudes libérales chez les jeunes. Ainsi, le milieu urbain accroîtrait le
risque de recourir aux partenaires multiples.

Hypothèse 2c : L’état matrimonial du jeune est discriminant dans la pratique du


multipartenariat sexuel. Ce phénomène touche davantage les jeunes célibataires que ceux en
union.

Hypothèse 2d : Il existe une relation positive entre le niveau d’instruction du jeune et le


multipartenariat sexuel. Plus le niveau d’instruction augmente plus les jeunes ont tendance à
avoir plusieurs partenaires sexuels.

5.1.4 Méthodes d’analyse statistique


Compte tenu des objectifs de cette section, nous utilisons les méthodes d’analyse descriptive
bivariée et multivariée explicative.

5.1.4.1 Analyse descriptive bivariée

Cette méthode permet de vérifier les liaisons ou associations entre le multipartenariat et les
caractéristiques du ménage, du chef et celles des jeunes. Ainsi, à l’aide de tableaux de
contingence ou de graphiques sur lesquels des tests de khi-deux sont calculés, nous évaluerons
l’association entre les variables. Lorsque la probabilité associée au khi-deux est inférieure au
seuil de 10%, on conclut que les deux variables sont associées, sinon on dit qu’elles sont
indépendantes.

Par ailleurs, pour comparer les proportions des jeunes multipartenaires suivant les autres
caractéristiques et selon les différentes années considérées, nous utilisons le z-test (distribution
asymptotiquement normale). Ce test permet de comparer les proportions de deux échantillons
indépendants. Si les p-values issues des tests de comparaison des proportions sont inférieures

147
au seuil de 5%, alors on rejette l’hypothèse nulle d’égalité des proportions (en d’autres termes,
il y a une différence significative de proportions).
Pour les analyses, nous ne prenons au dénominateur que les jeunes ayant entamé leur vie
sexuelle.47

5.1.4.2 Analyse multivariée explicative

Choix du modèle

Lorsque les individus ont le choix entre deux alternatives ou que la variable dépendante a deux
modalités, il est démontré que le modèle linéaire n’est pas approprié. Dans un tel contexte, les
modèles à variables dépendantes binaires sont les plus indiqués 48. Dans ce type de modèle
(variable dépendante binaire), la variable 𝑦𝑖 peut prendre deux valeurs que nous notons 0 et 1.
Dans notre cas, ces valeurs se traduisent par « au plus un partenaire » et « au moins deux
partenaires sexuels » au cours des douze derniers mois. La distribution (inconditionnelle) de la
variable dépendante est donnée par le tableau 5.1.

Tableau 5.1: Répartition des jeunes de 15-24 ans par sexe selon le nombre de partenaires sexuels
au cours des douze derniers mois dans les trois enquêtes

EDS 1998 EIS 2005 EDS-MICS 2011


Nombre de partenaires sexuels % N % N % N
Au plus un partenaire 84,6 1099 85,2 2730 86,3 3724
Au moins deux partenaires 15,1 196 14,5 465 13,4 578
Ne sait pas 0,3 4 0,3 11 0,3 14
Total 100 1299 100 3206 100 4302

Le tableau 5.1 montre que l’échantillon est déséquilibré. La proportion de jeunes ayant au plus
un partenaire sexuel est de 85% en 1998 et 2005 et de 86% en 2011 ; ce qui est très élevée en
comparaison à ceux qui ont au moins deux partenaires. Le fait que le nombre de jeunes
multipartenaires soit très faible permet de qualifier ce phénomène d’événement rare.

47
Nos résultats sont différents de ceux obtenus dans les rapports EDS parce que les dénominateurs ne sont pas les
mêmes. Par exemple, dans le rapport de l’EDS-MICS 2011-2012, le multipartenariat est calculé sur l’ensemble
des jeunes de 15-24 ans (y compris les jeunes qui n’ont jamais eu de rapport sexuel).
48
Il est également possible d’utiliser le modèle de probabilité linéaire. Dans ce cas, les coefficients s’interprètent
comme la variation de la probabilité de l’événement en présence suite à une variation unitaire des explicatives.
Toutefois, le modèle de probabilité linéaire présente des insuffisances parce qu’il repose sur une fonction de lien
linéaire. Il n’intègre aucune contrainte permettant à la probabilité de l’événement en présence d’être comprise entre
0 et 1.

148
Dans la littérature, il est connu qu’en présence d’événements rares, les modèles classiques ne
permettent pas d’expliquer et de prédire le phénomène analysé. Par exemple, le modèle logit
classique peut sous-évaluer la probabilité des événements rares alors que ces probabilités
présentent un intérêt particulier pour le chercheur. C’est la raison pour laquelle, nous
privilégions la correction49proposée par King et Zeng (2001) pour tenir compte du déséquilibre
dans l’échantillon analysé. C’est une procédure en deux étapes : à la première étape, les auteurs
calculent un estimateur du modèle logit classique et corrige ce dernier à partir d’informations
disponibles à priori sur l’échantillon et la population mère. Vu que les coefficients estimés
présentent très peu d’intérêt pour le chercheur, la seconde étape consiste à calculer les
probabilités prédites qui sont utilisées pour les interprétations.

Des simulations Monte Carlo ne permettent pas de réfuter la validité de cette approche lorsque
la taille de l’échantillon augmente ; le problème se posant sur des petits échantillons.50.
Toutefois, nous utilisons la méthode du maximum de vraisemblance pénalisé (Firth, 1993) à
des fins de robustesse en suivant la recommandation de Leitgöb (2013).

Techniquement, il est démontré par simulation, à partir de l’étude de Leitgöb intitulée « The
Problem of Modeling Rare Events in ML-based Logistic Regression : Assessing Potential
Remedies via MC Simulations », que les approches « relogit » de King et Zeng (2001) et
« firthlogit » de Firth (1993) convergent vers le même coefficient lorsque le nombre
d’observations devient assez élevé. Cependant, la littérature ne donne pas d’éléments de
comparaison quant aux variances estimées (donc par rapport aux significativités des
coefficients estimés) par ces deux méthodes. Les résultats de nos estimations (Annexe 13 à 15)
sont conformes à la littérature quant à la convergence des coefficients estimés.

Toutefois, nous choisissons d’analyser les résultats des modèles estimés par la méthode de King
et Zeng. Ce choix se justifie par le fait que les modèles estimés par la méthode de « firthlogit »
sur-ajuste les modèles estimés.

En effet, le sur-ajustement (overfitting en anglais) dans une régression survient soit (i) lorsque
le nombre de variables explicatives est beaucoup trop élevé par rapport au nombre
d’observations disponibles (selon la littérature, on devrait avoir entre 10 et 15 observations par
coefficient à estimer), soit (ii) lorsque l’échantillonnage effectué rend les coefficients des

49
Il existe d’autres corrections proposées dans la littérature notamment le modèle logit exact (Hirji et al., 1987),
la méthode du maximum de vraisemblance pénalisé (Firth, 1993) et la distribution des valeurs extrêmes
généralisées (Calabrese et Osmetti, 2015).
50
Voir Leitgöb (2013) pour une discussion sur cette question.

149
variables explicatives d’une régression parfaitement significatifs alors que sur d’autres données,
la réalité serait toute autre (Chang, 2012). C’est à ce dernier problème auquel nos données sont
confrontées (Annexe 13 à 15) d’où le choix du Relogit.

Formulation du modèle Relogit

Si l’on considère notre variable d’intérêt, la pratique du multipartenariat, notée Y pour un


individu i, Yi va prendre deux modalités (1 si l’individu a la caractéristique recherchée et 0
sinon). En outre, on a X1,….., Xp un ensemble de variables explicatives pour Yi.

prob(Yi  1/ X i ) p
Le modèle Logit peut alors s’écrire ln( ) = β0 +   j X ij
1  prob(Yi  1/ X i ) j 1

Où Xi est le vecteur de variables indépendantes pour l'individu i ; β0 est une constante ; βj est
le coefficient qui mesure l’effet de la variable j.

Une fois le modèle Logit estimé, les étapes suivantes sont nécessaires pour parvenir à
l’estimation du ReLogit :

1. récupérer les coefficients 𝛽̂ et la variance 𝑉(𝛽̂ ).


1
2. calculer les biais comme suit 𝛽̂𝑏𝑖𝑎𝑖𝑠 = (𝑋 ′ 𝑊𝑋)−1 𝑋 ′ 𝑊𝜉avec 𝜉𝑖 = 2 𝑄𝑖𝑖 (2𝜋̂𝑖 − 1), 𝑄𝑖𝑖

étant les éléments de la diagonale de 𝑄 = 𝑋(𝑋 ′ 𝑊𝑋)−1 𝑋 ′ , et 𝑊 = 𝑑𝑖𝑎𝑔[𝜋̂𝑖 (1 − 𝜋̂𝑖 )]

Au total, l’estimateur du Relogit est donné par 𝛽̂𝑟𝑒𝑙𝑜𝑔𝑖𝑡 = 𝛽̂ − 𝛽̂𝑏𝑖𝑎𝑖𝑠 et sa variance est donnée
𝑛 2
par 𝑉(𝛽̂𝑟𝑒𝑙𝑜𝑔𝑖𝑡 ) = (𝑛+𝑘) 𝑉(𝛽̂ ).

La commande relogit du logiciel Stata permet d’obtenir les résultats (Tomz et al., 1999)51.

Pour faciliter les interprétations, des rapports de côtes (odds ratio) sont calculés à partir des
coefficients obtenus avec le relogit. En fait, un rapport de côtes calculé est l’exponentielle du
coefficient estimé.

51
Tomz M., King G.et Zeng L. ont été les programmeurs de la Version 1.1.1 du Relogit en octobre 1999

150
5.1.5 Résultats
5.1.5.1 Les jeunes et leurs ménages de résidence : une prééminence de la monogamie et un
recul de la polygamie

La proportion de jeunes vivant seuls ou dans un ménage non familial reste faible au regard des
autres types de ménages (11,3%, 17,7% et 13,2% respectivement en 1998, 2005 et 2011). Dans
les ménages d’une seule personne, on y trouve généralement, en milieu urbain, des élèves ou
étudiants vivant seul loin de leur famille pour poursuivre leur scolarité et en milieu rural, des
jeunes adultes ayant pris leur autonomie vis-à-vis de leur famille. En revanche, les ménages
non familiaux, dans lesquels les chefs sont sans enfant ni conjoint, mais cohabitent
éventuellement avec d’autres personnes (apparentées ou non), sont surtout dirigés par les
femmes (Tableau 5.2). Pour les analyses, ces deux types de ménages ont été regroupés pour
éviter les faibles effectifs.

En outre, les résultats révèlent que les jeunes, dans leur grande majorité, résident dans des
ménages de type monogame quel que soit la période d’enquête. Ces ménages peuvent être
nucléaires ou élargis. A la cellule familiale nucléaire, viennent se greffer des personnes
apparentées ou non. L’accueil de personnes extérieures au ménage ou l’envoi de certains
membres du ménage vers d’autres unités résidentielles constitue une particularité des ménages
d’Afrique subsaharienne compte tenu de l’existence de réseaux de solidarités familiales. Ceci
aurait pour effet de réduire la pression du nombre d’enfants sur les ressources disponibles
(Kobiané, 2002 ; Eloundou-Enyegue et Shapiro, 2005).

Les ménages polygames sont un autre type de ménages mis en évidence par nos données. En
effet, la polygamie est l’un des traits majeurs du régime de nuptialité en Afrique subsaharienne
(Antoine et Nanitelamio, 1995). C’est en Afrique de l’Ouest que son ampleur est plus
remarquable (Antoine et Pilon, 1998). Cette pratique toucherait environ quatre femmes mariées
sur dix et un homme marié sur quatre (Hertrich, 2006). Du point de vue économique, le mode
de production agricole des sociétés traditionnelles, caractérisé par une absence de technologie
(c’est-à-dire que le travail se fait manuellement) est mis en avant pour expliquer la pratique
polygamique selon l’hypothèse de Boserup. En réalité, les femmes et les enfants constituaient
une force de travail donc le fait pour un homme d’en avoir un grand nombre lui garantissait une
main d’œuvre bon marché. Dans ce contexte, cette pratique est très avantageuse pour l’homme
puisqu’elle est peu coûteuse et rentable (Antoine, 2002). Mais cette approche économique est
remise en cause par d’autres travaux (Goody, 1973 cité par Antoine 2008, p.83) « les taux de

151
polygamie les plus élevés sont en Afrique de l'Ouest alors que c'est en Afrique de l'Est que les
femmes cultivent le plus… les causes de la polygamie sont avant tout d'ordre sexuel et
reproductif, plutôt qu'économique et productif ». Par ailleurs, l’obligation de l’abstinence post-
partum, dont la durée est très variable selon les sociétés, s’appliquait aux deux parents mais
avec l’érosion des traditions, seules les mères sont concernées. L’union polygamique permet au
père d’avoir toujours des rapports sexuels avec une autre épouse malgré le respect de cet interdit
post-partum (Locho, 1984). La polygamie a donc un caractère prestigieux pour l’homme
(Antoine et Pilon, 1998). En effet, sur le plan culturel et symbolique, avoir des épouses procure
un honneur et une descendance nombreuse tout en constituant une forme d’assurance vieillesse.
Avec la modernisation, on observe un recul récent de cette pratique dans plusieurs pays ouest-
africains notamment en milieu urbain (Hertrich, 2006).

En Côte d’Ivoire, une loi de 1964 a aboli la polygamie mais dans la réalité, même si cette loi
n’autorise pas la célébration de plus d’un mariage civil, elle n’empêche en rien les unions
polygamiques concrétisées généralement sur les plans traditionnel et religieux. Dans
l’ensemble, 18%, 11,4% et 9,3% des jeunes enquêtés respectivement en 1998, 2005 et 2011
vivaient dans un ménage polygamique. Ces résultats semblent mettre en évidence le recul de la
polygamie en Côte d’Ivoire, qui pourrait être lié à de nombreux facteurs dont la modernisation,
la crise économique et le christianisme.

Il ressort également que 15,7%, 18,9% et 17,5% des jeunes résident dans un ménage
monoparental, respectivement en 1998, 2005 et 2011. L’émergence du concept de
monoparentalité a fait son apparition à la suite des nombreuses mutations des structures
familiales (instabilité des unions, montée des naissances hors mariage, célibat des mères,
divorce, etc.). Un ménage monoparental est composé d’un parent seul vivant avec un ou
plusieurs enfants. En Afrique, lorsqu’on parle de ce type de ménage, on fait directement allusion
aux femmes chefs de ménage. Selon Tichit, (2005), il est très réducteur d’associer la
monoparentalité aux femmes chefs de ménage dans la mesure où elles ne sont pas toutes en
situation de monoparentalité. Toutefois, l’auteur reconnait qu’il existe (p.8) « des problèmes de
visibilité de la monoparentalité, qui obligent généralement à restreindre le cadre d'observation
aux chefs de ménage » lors de la collecte et l’analyse des données d’enquête. En Côte d’Ivoire,
ces ménages sont davantage dirigés par les femmes que par les hommes. Dès lors, on comprend
l’association faite entre la monoparentalité et la pauvreté (Tichit, 2005). En effet, les ménages
ayant à leur tête des femmes sont beaucoup plus susceptibles d’être pauvres du fait même des

152
circonstances particulières ayant contraint celles-ci à devenir chefs de ménages (décès du
conjoint, divorce, mères célibataires, émigration du conjoint, etc.).

Tableau 5.2 : Répartition des jeunes selon la typologie et le sexe de leur chef de ménage

Typologie 1998 2005 2011


des ménages

Sexe du chef de Ensemble Sexe du chef de Ensemble Sexe du chef de Ensemble


ménage ménage ménage
Masculin Femme Masculin Femme Masculin Femme
Isolé /non
9,2 23,7 11,3 15,9 25,2 17,7 9,9 26,3 13,2
familial
Monogame 64,5 0,2 55,0 63,4 5,1 52,0 73,9 2,8 60,0
Polygame 21,1 0 18,0 14,3 0 11,4 11,6 0 9,3
Monoparental 5,2 76,1 15,7 6,4 69,7 18,9 4,6 70,9 17,5

5.1.5.2 Nombre de partenaires sexuels parmi les jeunes

Le nombre de partenaires multiples, simultanés ou non, est un facteur accroissant le risque de


transmission du VIH/Sida notamment en présence d'autres facteurs tels que les rapports anaux
ou le non usage de préservatif (Tanser et al., 2011). En moyenne, une fille multipartenaire a eu
2,3 ; 2,4 et 2,1 partenaires sexuels respectivement en 1998, 2005 et 2012. Chez les garçons, le
nombre de partenaire est légèrement plus élevé quelle que soit la période atteignant même 3,6
en 1998. Pour la suite des analyses, on a considéré comme multipartenaire, tous les individus
ayant eu au moins deux partenaires sexuels au cours des douze derniers mois précédents les
enquêtes.

Figure 5.1 : Nombre moyen de partenaire selon le sexe

4,0
Nombre moyen de partenaires

3,5 3,6
2,9 3,3
3,0 3,0 2,9
2,5 2,8

2,0 2,4 2,1


2,3
1,5
1,0
0,5
0,0
1998 2005 2012
Année

Garçons Filles Ensemble

153
5.1.5.3 Association entre le multipartenariat sexuel et les variables indépendantes

Les résultats de l’analyse descriptive révèlent que la proportion de jeunes ayant eu plus d’un
partenaire sexuel au cours des douze derniers mois était de 15,1% en 1998, 14,5% en 2005 et
13,4% en 2011 (Figure 5.2). On observe donc une tendance à la baisse du phénomène de
multipartenariat sexuel entre 1998 et 2011. Toutefois, les tests réalisés indiquent que les baisses
enregistrées ne sont pas significatives (Tableau 5.3).

Tableau 5.3 : Test de proportion

Années Proportions p-value (comparaison par année)52


1998-2005 15,1 - 14,5 0,606
2005-2011 14,5 - 13,4 0,172
1998-2011 15,1 - 13,4 0,119

La pratique du multipartenariat chez les jeunes diffère significativement selon le sexe de


l’enquêté. En effet, il apparaît que le multipartenariat sexuel est plus élevé parmi les garçons et
ce, quelle que soit la période de l’enquête. Alors qu’en 1998, plus de deux garçons sur cinq
(44,9%) ont déclaré avoir eu au moins deux partenaires sexuels, en 2005 et 2011, cette
proportion est respectivement de 27,5% et 34,5%. Chez les filles, en revanche, les proportions
demeurent faibles avec 8,5%, 5,6% et 6% respectivement en 1998, 2005 et 2011.
L’importance du multipartenariat sexuel parmi les garçons voire les hommes, en général,
s’expliquerait par le fait que « les hommes comptabilisent toutes leurs relations sexuelles tandis
que les femmes, en accord avec les normes sociales en matière de sexualité féminine, ont
davantage tendance à ne tenir compte que des relations sexuelles qui ont vraiment compté pour
elles » (Bajos et Durand, 2001, p.7). Les écarts entre sexe peuvent-ils résulter de la formulation
des questions53 sur le nombre de partenaire sexuel au cours des douze derniers mois ? Jaspard
(2005) a montré qu’il n’y avait pas d’ambiguité dans l’énonciation de la question mais que les
hommes se reféraient aux « actes » et les femmes, aux « relations », mettant ainsi en exergue le
fossé qui sépare les sexes dans la représentation de leur altérité. Songué (1998), en revanche,
explique que le multipartenariat masculin n’est pas un besoin biologique insatiable mais plutôt
un moyen d’améliorer leur statut social auprès de leurs pairs (multiplier les rencontres sexuelles
permet de se faire respecter par les autres).

52
Les p-values sont issues des tests de comparaison des proportions prtesti. Si la p-value est inférieure au seuil
de 5% il ya une différence de proportion entre les deux années considérées.
53
En tout, avec combien de personnes différentes avez-vous eu des rapports sexuels au cours des 12 derniers mois

154
Figure 5.2 : Répartition en (%) des jeunes ayant eu au moins deux partenaires sexuels au cours
des douze derniers mois par sexe

50 44,9
45
40
34,5
35
30 27,5
(%)

25
20 15,1 14,5 13,4
15
8,5
10 5,6 6
5
0
Garçons Filles Ensemble
Sexe

EDS 1998 EIS 2005 EDS 2011

Note : le test chi2 indique une différence entre sexe significative au seuil de 1%

La pratique du multipartenariat sexuel varie significativement selon la typologie des ménages,


quelle que soit l’année de l’enquête. Toutefois, le V de Cramer54 indique que cette liaison est
faible par sa valeur qui est de 0,095 en 1998 ; 0,082 en 2005 ; 0,116 en 2011. De manière
générale, les jeunes issus des ménages isolés et non familiaux sont plus nombreux à s’être
engagés dans des relations sexuelles avec plusieurs partenaires. Mais, en 2005, ce
comportement est aussi très présent chez les jeunes vivant dans les ménages monoparentaux
(Tableau 5.4).

Contre toute attente, le multipartenariat sexuel s’avère moins répandu chez les jeunes résidant
dans les ménages polygames (10,2% et 10,6% respectivement en 1998 et 2005). Dans la
polygamie notamment sans corésidence, chaque épouse et ses enfants résident séparément, ce
qui s’apparente à un ménage dirigé par une femme. On avait donc pensé que les jeunes élevés
dans ce type de ménage seraient plus susceptibles de s’engager dans une activité sexuelle à
risque. Globalement, quel que soit le type de ménage, l’activité sexuelle multipartenariale
concerne davantage les garçons que les filles. En 1998, plus d’un jeune garçon sur deux (55,1%)
vivant dans un ménage monoparental a eu au moins deux partenaires sexuels au cours des douze
derniers mois. Cette proportion se situe respectivement à 47% et 44,1% pour ceux vivant dans

54
Il permet de comparer l’intensité du lien entre les deux variables qualitatives

155
des ménages monogames et non familial/isolé. Par contre, chez les filles, la proportion la plus
élevée n’atteint même pas 10% et elle est observée dans les ménages monogames.

S’agissant du niveau de vie, l’existence d’une relation positive avec le multipartenariat sexuel
est constatée en 1998 et 2011. Pour ces deux périodes, les résultats montrent que plus les
conditions de vie s’améliorent plus l’adoption de ce comportement sexuel devient importante.
Ainsi, en 1998, cette proportion était de 12,8% chez les pauvres, puis de 13,4% lorsqu’on passe
dans la classe intermédiaire et 21,1% dans le groupe des riches. C’est cette même tendance qui
s’observe en 2011. On passe donc de 10% à 12,7% et 17,8% respectivement des ménages
pauvres, intermédiaires et riches. Cette tendance est similaire à celle observée tant chez les
garçons que les filles. Ce résultat est contraire à nos attentes puisqu’on suppose que c’est plutôt
la pauvreté qui conduirait à des relations sexuelles avec plusieurs partenaires. Il ne s’agirait
donc pas de stratégie de survie ayant pour but de se mettre à l’abri du besoin financier.

Le milieu de résidence est associé au multipartenariat sexuel pour les trois années considérées.
En d’autres mots, habiter une zone urbaine agit sur l’engagement des jeunes dans ce type
d’activité sexuelle. Ainsi, entre 1998 et 2011, respectivement 17,8% ; 15,8% et 15,9% des
jeunes résidant en milieu urbain ont déclaré avoir eu au moins deux partenaires sexuels au cours
des douze derniers mois. En revanche, ce sont 12,8% ; 13,4% et 10,5% des jeunes vivant en
milieu rural qui ont déclaré avoir adopté ce comportement sexuel.

Concernant le sexe du chef de ménage, à l’exception de 2005, on constate qu’il n’influe pas sur
le multipartenariat sexuel des jeunes. En effet, en 2005, la proportion de jeunes ayant eu des
partenaires sexuels multiples est plus élevée dans les ménages dirigés par des femmes (17,4%)
contre 13,8% dans les ménages ayant à leur tête des hommes (p=0,000). Ce résultat nous semble
évident dans la mesure où les femmes chefs de ménage étant économiquement vulnérables,
elles s’investiraient davantage dans des activités lucratives pour subvenir au besoin de leurs
enfants. De ce fait, elles consacreraient moins de temps à l’encadrement ou à la surveillance de
leurs progénitures. Par ailleurs, l’absence d’une figure paternelle incarnant l’autorité dans un
ménage pourrait conduire les jeunes à plus de libertinage sexuel. Car comme le souligne
Rwenge (2013, P.58) « dans les ménages dirigés par les femmes, ces dernières doivent tout
assumer, leurs styles de contrôle et de supervision ne démontrent presque pas d’autorité… ».

En sus, on remarque aussi que le recours à plus d’un partenaire est positivement associé au
groupe d’âge en 2011. On note que le taux de multipartenariat sexuel augmente avec l’âge. Si

156
chez les filles, l’augmentation est très faible, chez les garçons, en revanche, ce taux devient très
important lorsqu’on passe des adolescents (15-19 ans) aux jeunes (20-24 ans).

L’instruction est également une variable discriminante du recours aux partenaires multiples.
Elle est positivement associée à cette pratique au seuil de 1%. En effet, la proportion des jeunes
qui ont déclaré avoir adopté ce comportement sexuel augmente avec le niveau d’instruction
atteint. Ainsi, lorsqu’on passe des jeunes n’ayant aucune instruction à ceux de niveau
secondaire ou plus, cette proportion varie de 8,4% à 23,5% en 1998, de 7,8% à 23,9% en 2005
et de 5,6% à 22,2% en 2011.

Enfin, les analyses révèlent que l’état matrimonial est un facteur de différenciation du
multipartenariat sexuel. Dans l’ensemble, comme on pouvait s’y attendre, ce comportement
s’observe davantage chez les jeunes célibataires que chez ceux qui sont en union. Toutefois,
l’analyse suivant le sexe met en évidence un comportement paradoxal : alors que chez les filles
le recours aux partenaires multiples est plus fréquent chez les célibataires, parmi les garçons,
c’est tout le contraire. La proportion des jeunes garçons en couple ayant eu d’autres partenaires
sexuels en dehors du partenaire régulier est plus importante que chez les célibataires et ce, en
2005 et 2011. Cette probabilité plus élevée de l’acquisition de partenaires multiples par les
garçons en union avait été mise en évidence par Talnan et al. (2004).

En somme, l’analyse bivariée a mis en évidence les relations entre le multipartenariat sexuel et
les différentes variables indépendantes. Ces associations permettent déjà de pressentir la
validité de certaines de nos hypothèses. Néanmoins, une analyse plus complète requiert un
contrôle par d’autres variables, dans un contexte multivarié.

157
Tableau 5.4 : Analyse différentielle du multipartenariat sexuel selon les caractéristiques socio-
démographiques

Variables EDS 1998 EIS 2005 EDS 2011/12

Garçons Filles Ensemble Garçons Filles Ensemble Garçons Filles Ensemble

Caractéristiques du ménage

Typologie *** *** ***


Monogame 47,0 9,5 15,4 26,8 4,7 12,9 35,5 5,7 12,5
Monoparental 55,1 6,3 14,5 32,6 8,1 17,5 33,8 4,2 10,4
Polygame 27,9 7,5 10,2 27,3 2,1 10,6 34,3 4,3 11,3
Isolé/non familial 44,1 8,8 23,1 25,2 9,6 19,0 32,8 13,8 23,4

Niveau de vie *** ns ***


Pauvre 42,4 6,8 12,8 28,4 3,2 13,0 27,7 4,4 10,0
Moyen 46,4 7,0 13,4 25,9 6,6 14,4 33,2 5,6 12,7
Riche 46,7 13,3 21,1 28,8 6,4 16,1 41,7 8,1 17,8
Milieu de résidence ** ** ***
Urbain 49,5 10,5 17,8 26,6 8,3 15,8 37,4 7,7 15,9
Rural 40,8 6,6 12,8 28,3 3,1 13,4 30,5 4,0 10,5
Caractéristique du CM
Sexe du CM ns ** ns
Masculin 44,0 8,7 15,4 26,4 4,4 13,8 34,2 5,6 13,5
Féminin 51,9 7,3 13,6 32,7 9,8 17,4 36,2 7,3 13,3
Caractéristiques individuelles
Groupe d’âges ns ns **
15-19 ans 42,9 9,9 15,3 25,9 6,2 13,4 30,4 6,7 11,9
20-24 ans 46,4 7,1 14,9 28,3 5,2 15,3 36,6 5,5 14,4
Niveau *** *** ***
d’instruction
Aucun 33,3 5,1 8,4 18,1 4,4 7,8 18,9 3,3 5,6
Primaire 56,3 11,5 19,1 26,0 5,1 13,2 36,2 6,7 13,9
Secondaire ou plus 44,8 12,4 23,5 32,6 9,2 23,9 40,5 9,9 22,2
Etat matrimonial *** *** ***
Célibataire 46,3 13,8 23,2 26,8 7,5 18,1 34,3 9,2 18,7
En couple/marié 37,5 3,0 5,0 27,3 2,3 6,1 39,1 1,7 4,8
Effectif de jeunes 237 1058 1295 1306 1889 3195 1124 3178 4302
Note : ns = non significatif ; * p ≤ 0,1 ; ** p≤ 0,05 ; *** p≤ 0,01

5.1.5.4 Facteurs explicatifs du multipartenariat sexuel chez les jeunes

Cette partie consacrée à la modélisation économétrique met en exergue les facteurs qui
déterminent la pratique du multipartenariat sexuel chez les jeunes en Côte d’Ivoire entre 1998
et 2011.

158
Significativité globale des modèles

Les P-value associées aux Likelihood Ratio (LR) des tests de khi-deux fournissent la
significativité globale des modèles. Elles permettent de dire si oui ou non les variables
explicatives prises ensemble ont un effet sur la variable dépendante.

Dans notre cas, les trois modèles finaux (Tableaux 5.6 à 5.8) indiquent une p-value du khi-deux
statistiquement inférieure à 1 % (Tableau 5.5) c’est-à-dire qu’ils sont globalement significatifs.
On peut donc conclure que, pour les trois années d’enquêtes, l’une des variables explicatives,
au moins, a un effet sur le multipartenariat sexuel.

Tableau 5.5 : Significativité globale de l’estimation des modèles Relogit

EDS1998 EIS2005 EDS2011

Prob>chi2 0.0000 0.0000 0.0000


Note : Estimations sous stata

Présentation des résultats multivariés

Les tableaux 5.6 à 5.8 présentent les résultats du modèle de régression pas à pas (introduction
progressive des variables). Ce modèle a été utilisé afin d’identifier les mécanismes par lesquels
chacune des variables indépendantes influence la variable étudiée. Le modèle M0 donne les
effets bruts de chaque variable55 et les autres modèles donnent les effets nets, obtenus en
contrôlant successivement par le niveau de vie du ménage (M1), le milieu de résidence (M2),
le sexe des enquêtés (M3), la tranche d’âge (M4), le niveau d’instruction (M5), la situation
matrimoniale (M6) et la religion (M7). En somme, le modèle final (M7) prend en compte toutes
les variables retenues pour l’explication du multipartenariat sexuel à l’exception du sexe du
chef de ménage qui a dû être retiré du modèle car fortement corrélé à la typologie des
ménages.56
De manière générale, les résultats des modèles saturés indiquent que, toute chose étant égale
par ailleurs, les déterminants du multipartenariat sont : la typologie des ménages (structure
familiale), le milieu de résidence, le niveau d’instruction, le sexe, le groupe d’âge, la situation

55
Typologie des ménages, le niveau de vie, le milieu de résidence, le sexe, l’âge, le niveau d’instruction, la
situation matrimoniale et la religion.
56
Le test de Khi2 a montré qu’il y a une liaison entre la typologie et le sexe du chef de ménage. Le V de cramer
est 0,744 ; 0,688 et 0,764 respectivement en 1998, 2005 et 2011/12 indique que cette liaison est très forte par sa
valeur élevée. En effet, alors que la majeure partie des ménages monogames sont dirigés par des hommes, les
ménages monoparentaux ont à leur tête des femmes.

159
matrimoniale et la religion des enquêtés mais il existe des variabilités selon la période
d’observation.

L’influence de la structure familiale sur le recours aux partenaires sexuels multiples n’est
significative qu’en 1998 et 2011. En effet, en 1998, dans le modèle brut, le risque de s’engager
dans une activité sexuelle multipartenaire est 1,7 fois plus élevé chez les jeunes vivant dans les
ménages non familiaux et isolés que chez ceux des ménages monogames. L’introduction du
niveau de vie du ménage (M1) et du milieu de résidence (M2) fait même augmenter les rapports
de côtes (odds radio=1,8). Mais après le contrôle par les caractéristiques individuelles (le sexe,
le groupe d’âge, le niveau d’instruction et l’état matrimonial), on n’observe plus de différence
significative entre les jeunes des ménages non familiaux et ceux issus des ménages monogames,
considérés comme groupe de référence (M6). Enfin, dans le modèle final (M7), en prenant en
compte la religion, on constate que seule la modalité « monoparental » est significative au seuil
de 10%. Ainsi, par rapport aux jeunes des ménages monoparentaux, ceux des ménages
monogames ont 1,5 fois plus de risque d’avoir eu au moins deux partenaires sexuels au cours
des douze derniers mois. En 2011, la relation entre la structure du ménage et le multipartenariat
s’est renforcée. Ainsi, au seuil de 5%, la probabilité d’avoir plusieurs partenaires est plus élevée
dans les ménages monogames que monoparentaux (M7).

Contre toute attente, les analyses montrent que les jeunes des ménages monoparentaux ne sont
pas plus enclins à s’engager dans des relations sexuelles avec plusieurs partenaires que leurs
homologues des familles monogames. On avait supposé qu’en raison de leur plus grande
exposition à la pauvreté et à la précarité, les jeunes issus des ménages monoparentaux
adopteraient plus des comportements sexuels à risque. En outre, dans ce type de ménages
dirigés majoritairement par les femmes, l’absence de figure paternelle favoriserait un
relâchement des mœurs dans le domaine de la sexualité. On s’aperçoit plutôt que le
multipartenariat sexuel est plus fréquent chez les jeunes des ménages monogames. On pourrait
alors penser que le niveau de vie peut expliquer le recours à cette pratique sexuelle à risque.
Mais là encore, on remarque que la pauvreté touche moins les jeunes des ménages monogames
que leurs pairs des familles polygames (Annexe 12). L’explication pourrait provenir d’autres
facteurs car comme le mentionne Rwenge (2012), l’engagement des jeunes dans l’activité
sexuelle multipartenariale peut être dû certes à l’environnement familial mais aussi
extrafamilial et aux motivations individuelles.

160
Sur les trois années d’enquête, le niveau de vie n’a pas d’influence significative sur les relations
sexuelles multiples. L’introduction du sexe de l’enquêté en 1998 (M3) et la prise en compte du
niveau d’instruction en 2011 (M5) ont fait perdre, à la variable niveau de vie, son effet
significatif. Par conséquent, ces deux variables apparaissent alors comme des variables
intermédiaires du niveau de vie du ménage.

Les résultats montrent une relation fragile entre la pratique du multipartenariat sexuel et le
milieu de résidence en 2011. En effet, si en 1998 et 2005, la relation est inexistante, au cours
de la dernière période, on peut observer que les jeunes résidant en ville courent 1,3 fois plus de
risque d’avoir au moins deux partenaires sexuels comparativement à ceux du milieu rural.

On note également que le sexe reste une variable très discriminante dans la pratique du
multipartenariat sexuel et ce, quelle que soit l’année de l’enquête. Son influence demeure
importante des modèles bruts aux modèles finaux. Ainsi, le risque d’avoir plusieurs partenaires
sexuels est au moins 5 fois plus élevé chez les jeunes garçons que chez les filles entre 1998 et
2011. Ces résultats sont concordants avec ceux de Beninguisse (2007) qui trouve des
différentiels de 4 à 10 fois plus selon les pays. Cette tendance cadre avec l’observation faite
dans de nombreuses sociétés dans lesquelles les garçons s’incitent entre eux à multiplier les
expériences sexuelles, considérées comme quelque chose de prestigieux. En conséquence, l’on
pense à tort que le fait de varier les conquêtes féminines fait naturellement partie du
tempérament masculin (ONUSIDA, 2001).

En outre, l’âge intervient faiblement dans l’explication de la pratique du multipartenariat sexuel


uniquement en 2011. Les résultats indiquent que l’occurrence des rapports sexuels avec des
partenaires multiples augmente avec le groupe d’âge. Ainsi, les jeunes (20-24 ans) ont une
probabilité de 1,3 fois plus importante de recourir à plusieurs partenaires sexuels par rapport
aux adolescents (15-19 ans).

Le niveau d’instruction exerce une influence sur le recours au multipartenariat sexuel. Si la


relation est faible en 1998, elle semble plus importante en 2005 et 2011. Concernant la période
1998, l’instruction est significativement associée au fait d’avoir eu plusieurs partenaires sexuels
dans le modèle brut. Ainsi, un jeune ayant le niveau primaire court 2,5 fois plus de risque de
s’engager dans une telle activité sexuelle que son homologue n’ayant aucune instruction. C’est
cette configuration qui est observée dans le modèle M5 mais elle se modifie avec l’introduction
de l’état matrimonial et de la religion. Du coup dans le modèle final (M7), les jeunes de niveau

161
primaire ont 1,6 fois plus de risque d’adopter ce comportement sexuel que ceux n’ayant aucun
niveau d’étude.

En 2005, on constate que l’instruction augmente très significativement la probabilité d’avoir


plusieurs partenaires sexuels. En effet, dans le modèle final, les jeunes ayant un niveau
secondaire ou plus ont 1,8 fois plus de risque d’avoir au moins deux partenaires sexuels que
leurs congénères sans instruction. Ces résultats viennent renforcer la thèse selon laquelle
l’instruction est positivement associée à ce comportement sexuel. C’est la même relation que
Rwenge (2013) a observé chez les garçons au Cameroun, à Madagascar, en Côte d’Ivoire et au
Burkina Faso.

En 2011, la relation observée est robuste dans la mesure où elle ne se modifie pas avec l’ajout
de l’état matrimonial et de la religion dans le modèle. On note, dans le modèle final, que le
risque de s’engager dans une activité sexuelle multipartenariale est encore plus important chez
les jeunes les plus instruits. En effet, ces derniers ainsi que ceux de niveau primaire ont 2 fois
plus de risque d’avoir ce comportement sexuel que ceux n’ayant aucune instruction.

La situation matrimoniale des jeunes est un élément essentiel qui favorise l’engagement dans
une activité sexuelle multipartenariale en 1998 et 2011. Dans les deux modèles bruts, les
célibataires ont au moins 4 fois plus de risque d’avoir des partenaires sexuels multiples que les
individus en union (odds ratio =0,179 et 0,216 respectivement en 1998 et 2011). En contrôlant
par la religion, les résultats confirment que le fait d’être en union réduit la propension d’avoir
au moins deux partenaires sexuels, avec des rapports de côte un peu en baisse.

Les résultats concernant la religion indiquent les musulmans sont moins susceptibles que les
chrétiens d’avoir eu plus d’un partenaire sexuel au cours des douze derniers mois précédents
les enquêtes (odds ratio=0,548 ; 0,673 et 0,599 en 1998, 2005 et 2011 respectivement).

Cette section a permis d’obtenir des résultats intéressants à partir d’une méthode d’analyse plus
appropriée. En effet, contrairement à de nombreux travaux sur le multipartenariat sexuel des
jeunes qui utilisent des modèles de régression logistique classique en dépit du déséquilibre des
échantillons (Anoh et al., 2002 ; Rwenge, 2013 ; Talnan et al., 2004 ; Adohinzin et al., 2016 ;),
nous avons fait le choix d’un modèle relogit pour corriger les éventuels biais. Mais pour une
compréhension plus approfondie du recours au relation sexuelle multiple, nous mobilisons une
autre approche de type socio-anthropologique.

162
Tableau 5.6 : Facteurs associés à la pratique de multipartenariat sexuel chez les jeunes (EDS 1998)

Variables Effet Effets nets


brut M1 M2 M3 M4 M5 M6 M7
M0
Typologie des (Ref. Monogame)
ménages
Monoparental 0,934 1,009 0,977 0,907 0,893 0,805 0,686 0,654*
Polygame 0,625 0,704 0,733 0,761 0,748 0,755 0,658 0,757
Familial/isolé 1,655** 1,833** 1,814** 0,969 0,974 0,977 0,822 0,828
Niveau de vie (Ref. Moyen)
Pauvre 0,951 0,948 1,045 1,082 1,078 1,201 1,223 1,106
Riche 1,728** 1,736** 1,686** 1,398 1,383 1,346 1,008 0,923
Milieu de (Ref. Rural)
résidence
Urbain 1,508** 1,241 1,424 1,445 1,398 1,436 1,489
Sexe (Ref. Féminin)
Masculin 8,755*** 8,637*** 8,758*** 8,513*** 6,928*** 7,450***
Groupe d’âge (Ref. 20-24 ans)
15-19 ans 1,047 1,225 1,220 1,013 1,015
Niveau (Ref. Aucun)
d’instruction
Primaire 2,520*** 2,278*** 1,813** 1,563*
Secondaire ou 3,238*** 1,585* 1,215* 0,968
plus
Etat matrimonial (Ref. Célibataire)
En couple/marié 0,179*** 0,318 0,338***
Religion (Ref. Chrétien)
Musulman 0,469*** 0,548**
Animiste/sans 0,613** 0,728
religion
Constante - 0,151*** 0,132*** 0,073*** 0,067*** 0,044*** 0,095*** 0,136***
Note : Ref. : Modalité de référence ; seuil de signification * p ≤ 0,1 ; ** p≤ 0,05 ; *** p≤ 0,01

163
Tableau 5.7 : Facteurs associés à la pratique de multipartenariat sexuel chez les jeunes (EIS 2005)

Effets nets
Effet brut
Variables
M0
M1 M2 M3 M4 M5 M6 M7
Typologie des ménages (Ref. Monogame)
Monoparental 1,436** 1,443** 1,441** 1,453* 1,453* 1,393* 1,326 1,313

Polygame 0,806 0,822 0,825 0,860 0,861 0,859 0,907 0,973

Familial/isolé 1,586** 1,600** 1,579** 1,071 1,070 1,112 1,084 1,106

Niveau de vie (Ref. Moyen)

Pauvre 0,894 0,914 0,945 0,988 0,987 1,100 1,134 1,076

Riche 1,141 1,163 1,140 1,053 1,053 0,921 0,921 0,859

Milieu de résidence (Ref. Rural)

Urbain 1,087 1,188 1,187 1,195 1,138 1,230


1,218
Sexe (Ref. Féminin)

Masculin 6,370*** 6,364*** 5,169*** 5,311*** 5,336***


6,370***
Groupe d’âge (Ref. 20-24 ans)

15-19 ans 0,986 0,922 0,881 0,913


0,853
Niveau d’instruction (Ref. Aucun)

Primaire 1,796** 1,394 1,339 1,164

Secondaire ou plus 3,722*** 2,146*** 2,022** 1,804**

Etat matrimonial (Ref. Célibataire)

En couple/marié 0,745 0,748


0,299***

Religion (Ref. Chrétien)


Musulman 0,513*** 0,673*

Animiste/sans religion 1,032 1,073

Constante - 0,143*** 0,138*** 0,050*** 0,050*** 0,039*** 0,042*** 0,049***

Ref. : Modalité de référence ; seuil de signification * p ≤ 0,1 ; ** p≤ 0,05 ; *** p≤ 0,01

164
Tableau 5.8 : Facteurs associés à la pratique de multipartenariat sexuel chez les jeunes (EDS 2011)

Effets nets
Effet brut
Variables
M0
M1 M2 M3 M4 M5 M6 M7
Typologie des ménages (Ref. Monogame)
Monoparental 0,810 0,811 0,799 0,832 0,834 0,777 0,670** 0,663**

Polygame 0,895 0,959 0,994 0,960 0,962 1,048 1,043 1,186

Familial/isolé 2,141*** 2,304*** 2,244*** 1,323 1,319 1,269 1,050 1,068

Niveau de vie (Ref. Moyen)

Pauvre 0,770* 0,790 0,855 0,877 0,880 0,978 1,007 0,945

Riche 1,482** 1,607*** 1,526** 1,408** 1,409** 1,245 1,118 1,100

Milieu de résidence (Ref. Rural)

Urbain 1,197 1,268 1,273 1,125 1,183 1,326*


1,603***
Sexe (Ref. Féminin)

Masculin 7,805*** 7,773*** 6,579*** 6,171*** 6,551***


8,289***
Groupe d’âge (Ref. 20-24 ans)

15-19 ans 0,937 0,876 0,779* 0,787*


0,806*
Niveau d’instruction (Ref. Aucun)

Primaire 2,778*** 2,309*** 2,227*** 1,950***

Secondaire ou plus 4,867*** 2,801*** 2,465*** 2,012***

Etat matrimonial (Ref. Célibataire)

En couple/marié 0,500*** 0,521***


0,216***

Religion (Ref. Chrétien)


Musulman 0,565*** 0,599***

Animiste/sans religion 1,106 0,996

Constante - 0,142*** 0,127*** 0,114*** 0,051*** 0,053*** 0,032*** 0,045***

Ref. : Modalité de référence ; seuil de signification * p ≤ 0,1 ; ** p≤ 0,05 ; *** p≤ 0,01

165
5.2 Approche sociologique des facteurs associés au multipartenariat sexuel des jeunes

L’approche quantitative a permis de mesurer les niveaux et d’identifier les facteurs qui
déterminent la pratique du multipartenariat chez les jeunes en Côte d’Ivoire. Toutefois, pour
une compréhension plus holistique de ce comportement, nous recourons à l’approche
qualitative qui permet aux acteurs sociaux de donner une signification subjective à leurs
pratiques. Le qualitatif renseigne mieux sur « le pourquoi » à partir des structures sociales de
l’imaginaire, de l’échelle de valeurs qui orientent les comportements socio-démographiques.

De plus en plus, la démographie utilise les approches qualitatives pour une analyse plus
approfondie des faits de population (Mimché, 2011). Mais cela n’a pas toujours été le cas. En
effet, la démographie classique était qualifiée d’analytique, statistique ou mathématique dans
la mesure où elle étudiait les populations humaines d’un point de vue purement quantitatif
(Tabutin, 2005 ; Henry, 1981). Il a fallu attendre le 20ème siècle pour que se développe une
« démographie sociale plus interdisciplinaire, davantage tournée vers les causes et
conséquences sociales, économiques, politiques et culturelles des changements, en d’autres
termes vers la compréhension et l’explication » (Tabutin, 2005, p3-4). C’est cette intégration
de méthodes voire de disciplines non quantitatives dans l’explication des phénomènes
démographiques que Bozon (2006) a appelé la « démographie compréhensive ».

Désormais les études en populations prennent des orientations phénoménologiques et


interprétatives en tentant d’intégrer le contexte social dans l’explication des comportements
démographiques (Mimché, 2011). C’est donc cette association des approches de nature socio-
anthropologique qui sera mobilisée pour une meilleure compréhension du multipartenariat.

Vers un intérêt grandissant autour de l’approche méthodologique mixte

De nombreuses recherches (notamment les recherches-actions) associent de plus en plus les


méthodes qualitatives et quantitatives dans l’étude des populations de façon soit simultanée soit
successive. Cette association permet de comprendre plus en profondeur des phénomènes dont
chaque méthode ne saisit que certains aspects. Si l’analyse statistique est limitée dans
l’explication des profils particuliers ou des trajectoires singulières, elle peut avoir un rôle positif
pour les approches plus qualitatives (Marpsat, 1999). Le recours à cette double méthode
s’observe dans des travaux réalisés dans les pays en développement, qui sont aussi des pays à
statistiques imparfaites. Les démographes s’inscrivent dans une logique d’interprétation et de
réflexivité qui nécessite une contextualisation des comportements, à laquelle des approches
qualitatives sont plus à mêmes d'apporter leur concours (Bozon, 2006). Dès lors, l’opposition
166
rituelle entre ces deux types d’approches laisse progressivement place à une complémentarité
en ce sens qu’elles fournissent des observations d’ordre totalement différentes.

5.2.1 Résultats et interprétation


5.2.2.1 Caractéristiques socio-démographiques des enquêtés

Pour rappel, l’enquête a porté sur vingt-deux personnes comprenant autant de filles que de
garçons. Neuf participants ont un âge compris entre 15-19 ans et treize entre 20-24 ans. Aussi,
notons que dix-sept d’entre eux sont d’obédience chrétienne, trois de religion musulmane et
deux se déclarant sans religion. Concernant le niveau d’instruction, on observe qu’un peu plus
de la moitié des enquêtés a un niveau secondaire et neuf ont un niveau supérieur. Quant au
niveau de vie, les jeunes affirmant vivre dans un ménage pauvre sont majoritaires (15 contre
respectivement 4 et 3 dans les ménages de la classe moyenne et aisée). Cette classification a été
faite à partir de certaines questions relatives à l’emploi des parents, au nombre de repas par
jour, au type de logement, au quartier de résidence, etc. Enfin, l’aire culturelle se caractérise
par la prédominance des Akan puis viennent les Mandé et les Krou.

Tableau 5.9 : répartition des enquêtés selon les caractéristiques socio-démographiques

Caractéristiques Abobo Yopougon Port Bouët Cocody TOTAL


Sexe
Masculin 2 3 4 2 11
Féminin 2 3 4 2 11
Age
15-19 ans 2 2 4 1 9
20-24 ans 2 4 4 3 13
Religion
Chrétienne 4 3 6 4 17
Musulman 0 1 2 0 3
Sans religion 0 2 0 0 2
Niveau d’instruction
Aucun 0 0 0 0 0
primaire 0 0 1 0 1
Secondaire 1 2 7 2 12
Supérieur 3 4 0 2 9
Niveau de vie
Pauvre 4 3 6 2 15
Moyen 0 1 2 1 4
Aisé 0 2 0 1 3
Aire culturelle
Akan 4 3 3 3 13
Krou 0 0 3 1 4
Mandé 0 3 2 0 5

167
5.2.2.2 Les facteurs sociologiques du multipartenariat sexuel des jeunes

Les phénomènes sociaux, en particulier le multipartenariat sexuel, touchent toutes les strates
sociales. Il s’agit dans cette partie du travail, d’appréhender et de décrire les principaux facteurs
sociologiques permettant d’expliquer le multipartenariat sexuel des jeunes. A cet effet, trois
principaux facteurs ressortent de l’analyse des données : la désarticulation des modes et
mécanismes de transmission des normes et règles au sein du ménage, le multipartenariat comme
facteur de résilience aux chocs émotionnels et sociaux et enfin la relation entre le contexte
socio-économique et cette pratique sexuelle.

A. La désarticulation de la socialisation au sein des ménages comme facteur latent


conduisant au multipartenariat sexuel des jeunes

La socialisation est un processus d'apprentissage, d'acquisition et d'intériorisation des modèles


culturels, des pratiques, des normes, des codes symboliques, des règles de conduite et des
valeurs de la société dans laquelle vit un individu. Induite par les contraintes imposées par la
société et les interactions avec l'environnement social, elle permet à l’individu de se construire
une identité sociale, en général, pendant l’enfance et l’adolescence, de s’adapter et de s’intégrer
dans la société. Pour ce faire, les cadres socialisateurs (la famille, l’école,) s’appuient sur des
référents idéologiques c’est-à-dire la religion, le savoir, la culture, les us et coutumes pour
faciliter l’intégration sociale des individus. Dans le cadre de cette étude, la socialisation
constitue un élément explicatif du multipartenariat sexuel. Ainsi, elle tourne autour de trois
dimensions clé que sont : la transmission des règles et valeurs religieuses, les modalités de
structuration de la communication concernant les questions sexuelles et enfin la présence des
membres de la famille élargie en occurrence les grands parents dans le ménage.

Sous l’angle religieux, elle est fondée sur un système d’interdits, de règles et de conduites qui
permettent de contrôler socialement les membres. De ce fait, l’un des interdits majeurs est
l’abstinence sexuelle avant le mariage. En cas d’infraction à ces règles, les parents infligent des
sanctions à leurs enfants allant des privations (de sortie, d’argent de poche, etc.) aux châtiments
corporels. Pour Durkheim (2013) l’exposition à la religion ou plutôt l’observance de ces normes
religieuses influence considérablement les décisions futures des enfants particulièrement au
niveau du choix de la forme de sexualité. Ainsi, les individus observant ces règles sont plus
enclins à développer plus tard un monopartenariat sexuel. Cependant, la plupart des enquêtés
n’ont pas été socialisés à des normes religieuses rigoristes notamment celles relatives à la
restriction des sorties, l’abstinence sexuelle quoique les parents soient des pratiquants d’une

168
religion. Ces jeunes ont plutôt intériorisé des valeurs modernes ou occidentales dans
l’environnement global précisément dans les groupes d’amis. Ces valeurs d’indépendance
s’acquièrent en dehors de la sphère familiale. Lesquelles valeurs finissent par créer des
situations favorables au multipartenariat sexuel. Comme l’expliquent ces jeunes :
« Moi, mes parents là sont des chrétiens très pratiquants. Quand, j’étais petite, on
partait à l’église ensemble les dimanches. Mais, ils ne m’ont jamais obligé à prier
ou même m’empêcher de sortir les soirs en boîte avec mes copines hein. Dès lors,
que je rentre à temps pour faire mes tâches ménagères le lendemain, pas de
problème » (20 ans, commune de Yopougon).

« A la maison les parents sont catholiques. Concernant les filles, ils se plaignent pas
trop quand on vient avec elles à la maison » (18 ans, commune de Cocody).

« Dans ma famille les filles ne doivent pas avoir de relations sexuelles avant le
mariage. En tous cas si la vieille t’attrape, tu vas regretter. Donc on se cache
pour gérer nos mouvements ». (17 ans, commune de Port Bouët).
L’éducation à la sexualité est aussi un facteur qui participe à l’adoption de comportements
sexuels plus responsables. En effet, la sexualité n’est pas donnée c’est-à-dire que les actes, les
relations et les significations sexuelles sont les résultats d’une construction et d’une
transformation sociale et culturelle. Les différentes aires culturelles ont une manière spécifique
d’inculquer les connaissances sexuelles aux individus (Séry et Gozé, 1995a). Dans la société
africaine et particulièrement dans les aires culturelles ivoiriennes, l’éducation sexuelle apparait
très différenciée selon le sexe. Elle reste très limitée chez les garçons (conseils pratiques,
circoncision, etc.) alors que les filles bénéficient d’une formation beaucoup plus approfondie
en la matière. Par exemple chez les Akan, la fille ne peut devenir mère qu’après des cérémonies
propitiatoires à caractère public et en rapport avec les premières menstrues. Ainsi, les rapports
sexuels sont formellement interdits avant ces rites initiatiques. Ces considérations à l’égard de
la sexualité sont rencontrées dans d’autres groupes (Krou, Mandé, Gür) où l’on punit
sévèrement le vagabondage sexuel sous toutes ces formes.

Ces groupes sociaux disposent de mécanismes (des cérémonies initiatiques) permettant


l’apprentissage des codes de la vie sexuelle dès l’entrée dans l’adolescence (période entre la
puberté jusqu’au mariage). Cette période charnière correspondant à la phase d’autonomisation
des jeunes se déroule pour certains sans référents initiatiques à la vie sexuelle. Ainsi, la plupart
des jeunes interviewés n’ont pas reçu ces codes de conduite sexuelle communément partagés
par la société : soit du fait que les parents eux-mêmes n’ont été socialisés à ces valeurs, soit par
l’effritement de l’autorité parentale qui pourrait être due aux multiples occupations des parents.
Pour combler cette lacune, les jeunes notamment en milieu urbain utilisent d’autres moyens
169
pour s’informer sur la sexualité. Ces canaux d’informations que sont les médias et l’entourage
deviennent les cadres sociaux alternatifs à la socialisation. Les attitudes et comportements
sexuels des jeunes sont dirigés non pas par la socialisation classique mais plutôt par ces cadres
palliatifs fortement marqués par la modernité. Les propos de ces jeunes en témoignent
clairement :

« Je vis avec ma mère actuellement. Le vieux lui il a été affecté à Gagnoa depuis un
moment. Elle n’a pas le temps de bien s’occuper de nous. Donc on se débrouille un
peu pour vivre » (22 ans, commune de Port Bouët).

« Non non non, on ne parle pas de ces choses-là à la maison dèh. Dans tous les cas,
il n’y a pas de discussion véritable avec les parents parce qu’ils sont tout le temps
pris par leurs activités. C’est avec mes potes que je parle de ça » (18 ans, commune
de Cocody)

En plus, la structure des ménages semble participer à l’explication du multipartenariat des


jeunes. Cela est observable dans trois types de ménages. Premièrement, on a le cas des ménages
dirigés uniquement par le père, ou la mère, ou l’oncle/ la tante ou un grand parent. Dans cette
configuration de ménage, la plupart du temps les jeunes disposent d’une plus grande liberté en
terme de sorties. Il n’existe pas de règles coercitives à la socialisation, les discussions entre le
parent et les enfants sont pratiquement inexistantes. Dans la majorité des cas, le chef de ménage
exerce une activité informelle, un seul repas est pris par jour et les jeunes sont obligés de trouver
des stratégies pour assurer leurs besoins immédiats. Dans un tel contexte, le problème se situe
au niveau de la perméabilité des mécanismes de contrôle parental. En effet, l’absence d’une
autre personne incarnant l’autorité parentale pose sociologiquement un déficit de mécanisme
de suivi des consignes éducatives données par le chef de ménage.

Deuxièmement, on a les ménages recomposés constitués d’un parent biologique (père ou mère)
et de son conjoint. La particularité de ces ménages repose sur la rigidité des normes en vigueur
en leur sein, entre autre, les sanctions punitives en cas d’infraction aux règles de la maison et
une ambiance conflictuelle permanente. Dans ce cas de figure, l’environnement familial tend à
produire une aliénation parentale c’est-à-dire un éloignement sentimental de l’un des parents
envers leurs enfants et vice versa. Cette situation est principalement causée par la distance
sociale c’est-à-dire le fait que les enfants n’ont soit pas vécu avec les parents ou ont vécu une
grande partie de leur enfance loin de la sphère parentale biologique (loin d’un parent). Un pan
des entretiens illustre bien cette réalité :

170
« C’est à l’âge de 13 ans que mon père et sa femme m’ont récupéré chez eux. Mais c’est
difficile parce que je ne m’entends pas avec mon père et ma marâtre. (…) Et comme je
n’ai pas grandi avec eux, c’est comme si mon propre père est un étranger pour moi.
C’est ma tante seule qui me comprend parce que j’ai grandi tout le temps avec ma tante.
Malgré le fait que je suis chez mon père c’est ma tante qui continue de payer mes
études » (20 ans, commune d’Abobo).

Troisièmement, les ménages dont les enquêtés sont sans lien de parenté avec le chef. Ces
ménages cumulent à la fois les caractéristiques des ménages monoparentaux et recomposés
Cette inexistence de liens de parenté met en perspective un faible niveau d’interaction entre le
jeune et son chef de ménage. Cela conduit à une absence de l’autorité parentale que ce dernier
aurait pu incarner en favorisant le contrôle social et la régulation comportementale.

En outre, deux autres facteurs, non moins importants, liés à la socialisation contribuent à
générer le multipartenariat sexuel. Ce sont le manque de communication sur les sujets dit
« tabou » entres les parents et leurs enfants et les types/lieux de fréquentation de ces derniers.
A ce niveau, dans la conscience collective, les parents sont considérés comme l’autorité morale
de la famille. Ils préfèrent aborder rarement, sinon jamais en public les questions sexuelles. Ces
sujets supposés indécents, gênants sont discutés loin des oreilles juvéniles. Dans ce contexte
d’inexistence de communication parentale sur la sexualité, les seuls recours sont les interfaces
d’information tels que la télévision, l’internet, les espaces de divertissement (bars, maquis,
plage) et les parentés sociales (amis, groupe de pair). Ainsi, ces types et lieux de fréquentation
constituent certes des espaces d’apprentissage mais aussi et surtout, des espaces de captation de
nouveaux partenaires sexuels. Dans cette perspective, ces cadres sociaux et spatio-temporels
deviennent par excellence des courroies de transmission d’une éducation sexuelle portée vers
le multipartenariat fondée sur des expériences collectivement développées par les jeunes,
partageant pour la plupart les mêmes conditions d’existence. Les propos de ce jeune le
confirment :

« Une fois, je suis allé chauffer au maquis avec mes gars. C’est eux qui m’ont branché
sur une go. Je voulais atteindre leur palmarès donc je n’ai pas hésité à me jeter à l’eau.
De toute façon, l’islam dit qu’un homme peut avoir quatre femmes. Donc je n’ai pas de
problème. Mon papa lui il a trois femmes. Donc c’est notre religion qui nous permet
d’avoir plusieurs partenaires sexuels » (19 ans, commune de Yopougon).

171
B. Le multipartenariat comme facteur de résilience aux chocs émotionnels

La résilience est un concept polysémique qui s’appuie sur des assises relevant de disciplines
variées (la psychologie, la sociologie, l’éthologie, la médecine, etc.). C’est dans les pays anglo-
saxons que ce concept s’est développé dans les années 1960 avec de nombreux travaux en
sciences humaines. Mais en France et dans les pays francophones, c’est seulement depuis les
années 1990 qu’il a véritablement commencé à susciter un vif intérêt (Anaut, 2005). D’après
Manciaux (2001), la résilience renvoie à la capacité d’un individu ou d’un groupe de personnes
à se développer bien, continuer à se projeter dans l’avenir en dépit d’événements déstabilisants,
de conditions de vie difficiles, de traumatismes parfois sévères. Elle fait également référence à
une adaptation exceptionnelle malgré l’exposition à des stresseurs significatifs (Cowen et al.,
1996). Notons aussi que la résilience fait appel à une reconstruction après avoir résisté à un
traumatisme sévère ou un accident de parcours. Il s’agit donc avant tout d’une réalité sociale
permettant de recréer un environnement relationnel encourageant et chaleureux (Dessez, 2003).
Ainsi, le multipartenariat constitue un comportement résilient face aux chocs émotionnels et à
l’instabilité sociale causée principalement par la distorsion des liens sociaux au sein des
ménages (Juby et al, 2005). En effet, le multipartenariat des jeunes s’inscrit dans un processus
temporel et dans un contexte relationnel et affectif.

L’analyse des discours montre que le premier facteur de choc émotionnel constituant un risque
d’exposition au multipartenariat sexuel des jeunes est d’ordre interne au ménage. Autrement
dit, les conflits parentaux (disputes incessantes, violences conjugales, divorces) constituent des
facteurs majeurs dans le recours aux partenaires sexuels multiples. Dans certains ménages, les
conflits au sein du couple parental tendent à structurer la vie familiale. La relation triangulaire
entre parents-enfants masque dans de nombreux cas ce conflit. Lorsque cette situation perdure
dans le temps, les enfants sont de plus en plus sollicités comme intermédiaires ou même
prennent le parti pour l’un des parents. Ce déséquilibre relationnel issu du conflit parental met
à l’épreuve la santé psycho-sociale des adolescents et des jeunes. L’engagement dans le
multipartenariat sexuel apparait pour ces jeunes comme un recours possible à situation vécue
comme désespérante. Ce qu’exprime ce jeune interviewé :

« Mon père passe son temps à se disputer avec sa femme. Souvent, même il me
dit à moi aussi qu’il ne m’aime pas. Tu ne peux pas comprendre comment c’est
écœurant d’entendre cela de la part de son propre papa. Moi, je ne veux pas vivre
la souffrance que ma maman a vécu… A cause de tout ça, quand je sors avec un
garçon, je ne dure pas dans mauvais rêve [pour dire qu’elle n’hésite pas à rompre
une relation si elle trouve une meilleure opportunité] » (20 ans, Port Bouët).
172
L’autre facteur de choc émotionnel mise en évidence par les données est l’instabilité sociale
du ménage relative à la rupture des liens sociaux et affectifs (décès du père, de la mère,
déception amoureuse). Il s’agit d’un mécanisme social de défense ou un dispositif de
neutralisation de la décharge émotionnelle générée par cette instabilité sociale du ménage. En
effet, lorsque les liens qui participent à la stabilité sociale d’un individu sont rompus, il s’en
suit un enchaînement de déséquilibres sociaux. Ainsi, les jeunes font face à des situations de
stress, d’anxiété, un repli sur soi, une attitude d’opposition, etc. Ces crises affectives
conduisent certains jeunes notamment les élèves et les étudiants à une déscolarisation précoce.
Dans cette configuration, ils essayent de se réadapter à la nouvelle donne en mobilisant le
soutien d’un réseau relationnel en l’occurrence les groupes de pairs. Cette mobilisation des
pairs s’opère selon deux modalités. La première concerne les groupes possédant des codes
d’intégration plus flexible. Ils sont basés sur des rapports d’amicalité en lien avec
l’appartenance au même lieu de résidence ou à la fréquentation de la même institution sociale
(école). Dans ces groupes, les jeunes partagent les mêmes empathies et sont confrontés
singulièrement à la même réalité sociale. Ces effets de rencontre transforment cette
résignation, induite par ces troubles affectifs en ressources internes et externes, en stratégies
de résilience pour faire face au traumatisme provoqué par la rupture du lien social. Parmi ces
stratégies, le multipartenariat sexuel apparait comme un mécanisme d’autorégulation affectif.
La seconde s’identifie à la mobilisation des réseaux relationnels plus hiérarchisés et plus
structurés. Aussi, la pratique du multipartenariat sexuel est perçu comme critère résiliant de
valorisation, d’appartenance sociale des membres au groupe. C’est donc une ressource sociale
admise comme propriété symbolique d’intégration au sein du groupe.

Enfin, la troisième catégorie de facteur lié aux chocs sociaux est d’ordre externe au ménage. En
premier lieu, nous avons la situation des personnes déplacées de guerre. Durant les crises
militaro-politiques que la Côte d’Ivoire a connues, il y a eu de nombreux mouvements de
populations qui ont reconfiguré la structure des familles d’accueil. Ainsi, au sein d’une même
concession, plusieurs ménages ont dû cohabiter créant ainsi un déséquilibre dans la
structuration des rôles et des charges familiales notamment pour le chef de ménage. En effet,
les ménages d’accueil devaient ajuster leur budget malgré des ressources limitées.
Concrètement, le nombre important de personnes à nourrir, la promiscuité, l’augmentation des
factures d’eau et d’électricité et les difficultés à scolariser les enfants ont engendré des situations
de conflit entre les ménages partageant le même espace. En d’autres mots, la situation de
cohabitation de plusieurs ménages a favorisé un dysfonctionnement dans l’organisation des

173
dépenses au point où, au niveau de l’alimentation, un seul repas est accordé dans la journée à
tous les membres. Toute chose contribuant à l’inconfort et au mal-être des jeunes. Dans cette
logique, ils tentent de fuir ces conjonctures sociales imposées par ce conglomérat familial. Le
mutlipartenariat sexuel apparait ainsi pour les jeunes comme une solution face aux
incommodités liées aux pressions sociales sur les ménages d’accueils engendrés par les
déplacements multiples lors des crises. Un pan d’un entretien illustre cette situation :

« Le changement d’habitat à la suite de la guerre en 2002 m’a marqué parce qu’on


vivait bien à Bouaké. La guerre a fait qu’on est devenu des déplacés. (…) étant avec
mes parents et mes petits frères à Korhogo, on a vraiment souffert quand on est
arrivé à Abidjan, chez le frère à mon père. On a trouvé là-bas les sœurs de la femme
de mon oncle avec leurs enfants. On était plus d’une vingtaine dans la maison. Toi-
même matin quand tu te réveilles tu sais que tu dois aller te débrouiller pour
manger parce que c’est le soir seulement qu’on prépare [pour dire faire la cuisine]
… » (21 ans, commune d’Abobo).
Puis, la mobilité scolaire apparait comme un choc social pouvant entraîner le multipartenariat.
La séparation temporaire d’avec les parents a des conséquences sur les jeunes. Ainsi, certains
jeunes orientés après la réussite à leur examen dans des collèges ou universités éloignés de leur
localité d’origine, en proie à une dépendance vis-à-vis des parents, se trouvent brusquement à
vivre une forme d’autonomie qu’ils appréhendent difficilement. Ils doivent apprendre à vivre
seul, loin des parents, être leur propre contrôle social dans un environnement marqué par des
influences négatives (sortie tardive, alcool, le vagabondage sexuel, etc.).
Pour ces jeunes partis étudier loin des parents, le recours aux partenaires multiples se fait pour
diverses raisons et ce en fonction du sexe. Le manque de revenu est une configuration qui
concerne particulièrement les jeunes filles. Lorsque les ressources envoyées par les parents ne
suffisent pas, elles se retrouvent dans une situation où elles se doivent de développer des
stratégies dont le multipartenariat sexuel afin d’avoir des sources de revenu additionnelles pour
assurer leur besoin quotidien. C’est cette réalité qu’exprime un jeune, interrogé dans la
commune de Cocody, à travers ces propos :
« La vie est devenue tellement chère ces temps-ci. On t’envoie Orange money pour
payer tes fournitures et manger mais ce ne suffit pas. Je ne peux pas aller voir mon
tuteur pour lui demander l’argent. Lui-même, il a ses enfants à s’en occuper. Donc
là si tu trouves un gars pour payer ton transport pour partir en vacances, tu ne vas
pas dire non » (20 ans).

Par ailleurs, l’effet d’imitation et d’affirmation sociale concerne davantage les garçons. En
effet, la volonté d’affirmer ses compétences masculines auprès des autres et de la gent féminine
conduit certains jeunes garçons à se livrer à des expériences sexuelles multiples sachant

174
évidemment la censure de l’autorité parentale loin de leur portée. Ainsi, le choc social subit par
ces jeunes liés à une indépendance précoce du fait de la mobilité scolaire et universitaire conduit
à des comportements sexuels à risque, comme l’explique ce jeune (18 ans, Port Bouët) :

« Moi c’est vrai que je suis un enfant de pauvre. Mais, les autres ‘’môgô’’ [membres]
du ‘’Gbonhi’’ [groupe de référence] même si leurs parents ont le ‘’blé’’ [l’argent], ils
savent que je suis un dur. (…) c’est pour faire malin mais c’est moi à chaque fois qu’on
sort, j’attrape une ‘’petite’’ [fille]. Eux tous, ils me respectent à cause de cela et ils
veulent faire comme moi ».

C. Contexte socio-économique et multipartenariat sexuel des jeunes

Le décryptage du discours des enquêtés a permis de mettre en évidence trois facteurs relevant
de l’environnement social et économique qui concourent au multipartenariat. Il s’agit du
chômage du chef de ménage ou l’absence de travail des jeunes, du faible niveau de vie du
ménage et de l’effritement des liens sociaux.

D’emblée, la perte de l’emploi du chef de ménage ou encore l’insertion difficile des jeunes sur
le marché du travail entraine progressivement un déclassement du statut social du ménage. Cette
situation confine socialement les jeunes dans une posture de fragilité pouvant conduire dans la
plupart du temps à une phase de dépendance parce que la précarité professionnelle entraîne une
absence de revenus et une dégradation des conditions de vie. Ainsi, l’individu vit un sentiment
d’échec, d’infériorité, d’impuissance, de déficience et totalement dépendant, par sa non-
participation aux activités économiques et par l’absence de ressources :

« Je ne suis pas considéré par mes autres camarades à cause de ma situation de


vie pauvre. A chaque fois, ils se moquent de moi parce que quand on sort je ne
peux pas faire comme eux » (17 ans, Commune d’Abobo).

Cette insécurité professionnelle est une source potentielle de désintégration sociale. Dans cette
perspective, l’engagement dans le multipartenariat apparait comme un recours, un filet de
sécurité sociale. Comme le traduit les propos de ces enquêtées :

« Quand notre père a perdu son travail, cela a bouleversé notre vie. Notre train de
vie à considérablement baissé et on était obligé de déménager dans le quartier que
nous sommes actuellement. C’est parce qu’on ne peut pas tout raconter. Mais c’est
à cause de cela que les parents se sont séparés. Sinon, si aujourd’hui tu vois que je
suis obligée d’avoir deux ou trois gars, c’est pour pourvoir aider mes parents
aussi » (20 ans, Commune de Yopougon).

175
« Il y a eu même des situations difficiles. Situation même je me considère comme
impuissant, faute de moyen parce que je ne pouvais pas agir. Han… souvent quand
tu vois ta maman ou ta sœur qui est malade là et que les parents même c’est bizarre
sur leur côté. Le financement n’était pas là quoi. Voilà, on est obligé de voir à côté
à côté pour renforcer les moyens » (22 ans, commune de Port Bouët).

Par la suite, les conditions de vie difficiles dans lesquelles vivent les jeunes contribuent à
accentuer le multipartenariat sexuel. Pour ces jeunes, le cadre de vie est avant tout dévalorisant
parce qu’il est l’apanage des discriminations sociales, des violences physiques et
psychologiques, de la faible sociabilité des parents /tuteurs et propice à une perte de confiance
en soi. Certains d’entre eux, en l’occurrence les jeunes filles sont réduites aux tâches
domestiques (dans les ménages de résidence) en dépit de leur statut d’élève ou d’étudiante.
Elles sont constamment sujettes dans la journée, au choix entre les activités ménagères et les
activités scolaires. Cette pression psychologique associée au sentiment d’exclusion des autres
membres du ménage conduit au complexe affectif. Autrement dit, le refoulement occasionné
par cette situation entraine dans la majorité des cas un transfert affectif vers des intermèdes
sociaux dont le multipartenariat sexuel en constitue une variante. Séry et Gozé (1995b) estiment
que les mauvaises conditions de vie qui touchent les ménages sont souvent à l’origine du
malaise familial qui frappe de plein fouet les jeunes « bourrés » de besoins et incapables de les
satisfaire autrement qu’en s’aliénant. Ce que révèle cet entretien :

« Moi j’ai toujours vécu ici (Abobo PK 18) dans des conditions très bizarres avec
mes tuteurs, c’est-à-dire dans des conditions précaires. Mon tuteur ne travaille pas.
C’est sa femme qui vend au marché d’Abobo. Quand tu te réveilles matin il n’y a
jamais la bouffe à la maison, à midi c’est pareil, c’est le soir que chacun se débrouille
pour pouvoir trouver à manger. On ne cause jamais entre nous et mes tuteurs ne
sont pas du genre à demander si tu vas bien ? Si tu as mangé ? Si tu es malade…
tout cela te rend triste à chaque fois. Donc, souvent tu es obligé de faire de vilaines
choses, c’est-à-dire boire l’alcool et sortie avec les filles pour pouvoir faire le vide
dans ta tête » (18 ans, Abobo).

Enfin, l’effritement des liens sociaux constitue un autre facteur identifié comme participant au
développement du multipartenariat sexuel. Des jeunes interrogés au cours de cette étude vivent
une situation à l’épreuve de la rupture des liens sociaux. En effet, ces épreuves tournent
principalement autour des stigmatisations par les parents causés par les échecs scolaires, de
dévalorisation du statut social (chômage) et de précarisation de la position sociale.

Les parents, ils attendent quoi ? un retour sur investissement. C’est normal, je les
comprends. Malgré la maîtrise en criminologie, je n’ai pas de boulot. Les gens
pensent que tu fais exprès pour ne pas trouver un travail. Je passe tous les concours

176
même ceux de niveau BAC mais j’échoue. Quand tu ne connais personne dans
l’administration, impossible de se faire une place au soleil (24 ans, Port Bouët).

Au total, toutes ces situations créent une sorte de la disqualification sociale (Paugam, 2009) qui
menace la cohésion interne du ménage et isole socialement les plus vulnérables en occurrence
les jeunes. Les conditions de vie précaire dans lesquelles ces derniers vivent s’accompagnent
souvent d’un déclassement progressif des statuts voire même d’une perte de l’identité sociale

Conclusion du chapitre 5

L’objectif de ce chapitre est d’apporter dans un premier temps un éclairage sur l’association
entre la structure familiale des ménages et la pratique du multipartenariat sexuel des jeunes.
Deux types d’analyse ont été effectués : l’analyse bivariée a permis d’établir des relations
d’association et l’analyse multivariée basée sur le modèle relogit a conduit à la recherche des
facteurs déterminants. En définitive, les modèles saturés permettent de retenir les principaux
résultats suivants :
 Compte tenu de leur configuration, on s’attendait à ce que les comportements
sexuels à risque soient plus prononcés dans les ménages monoparentaux. En effet, ce type de
ménages qui occupaient une place marginale dans le paysage familial sont en nette progression
avec la crise économique qu’ont connu de nombreux pays depuis la décennie 1980. Ayant à
leur tête généralement des femmes, ces ménages, avec un statut socioéconomique plus faible,
constituent des cadres problématiques de socialisation à la vie sexuelle (Sidze et Kuate-Defo,
2007). Notons que la figure masculine reste toujours un modèle auquel les jeunes peuvent
s’identifier donc en cas d’absence ou de désertion, ils sont privés de limites et de barrières
nécessaires à leur développement (Huon, 2004). De même, le niveau de contrôle parental sur la
sexualité des jeunes est variable selon le type de ménages. S’il est plus strict dans les ménages
biparentaux, il semble faible dans les ménages avec un seul parent. Ainsi, les enfants de familles
monoparentales ont déclaré avoir reçu moins de contrôle par rapport ceux vivant avec les deux
parents (Wamoyi et al., 2011).

D’après nos analyses, la structure des ménages est un déterminant de l’engagement dans les
relations sexuelles multiples. Toutefois, notre hypothèse H1 n’est pas confirmée dans la mesure
où le multipartenariat n’est pas plus prononcé parmi les jeunes vivant dans les ménages
monoparentaux que chez leurs homologues des ménages monogames. En effet, si les résultats
indiquent qu’en 2005, il n’y a pas de différence significative entre les jeunes de ces deux

177
groupes de ménages, en revanche, en 1998 et 2011, le phénomène de partenaires sexuels
multiples est plus répandu parmi les jeunes issus des ménages monogames que ceux des
ménages monoparentaux. Ces résultats rejoignent l’analyse faite par Odimegwu et Adedini
(2013) qui ont trouvé qu’au Nigéria les étudiants issus de familles monoparentales avaient
moins de risque d’être multipartenaires que les autres. Toutefois, d’autres études ont montré
l’influence positive des ménages monoparentaux sur les comportements sexuels à risque
(Godeau et al., 2008). Il est donc primordial de nuancer les résultats de nos travaux car comme
l’ont indiqué Miangator et LeGrand (2007) l’hypothèse selon laquelle les familles
monoparentales seraient plus à risque pour le comportement sexuel des adolescents et des
jeunes ne devrait pas être généralisable à tout ce groupe de population et même à tous les types
de famille monoparentale. Le fait de vivre dans un ménage avec un seul parent n’induit pas
nécessairement des risques comportementaux puisque la socialisation des adolescents et des
jeunes, en Afrique subsaharienne, n’est pas l’affaire exclusive des parents biologiques. Elle
implique d’autres agents de socialisation notamment la famille élargie voire toute la
communauté.

 Le niveau de vie des ménages ne discrimine pas les jeunes dans le recours aux
partenaires sexuels multiples. Ainsi, l’hypothèse selon laquelle les jeunes des ménages pauvres
sont plus enclins à avoir des relations sexuelles avec plusieurs partenaires n’est pas confirmée.
Il en va de même des travaux menés en Côte d’Ivoire dans le cadre des activités du projet «
Santé Familiale et prévention du Sida » par Anoh et al. (2002). Ces auteurs font remarquer que
les conditions de vie des jeunes n’auraient pas d’influence sur le fait d’entretenir des relations
sexuelles avec des partenaires multiples. Ce résultat inattendu suggère, selon Anoh et ses
collègues, que le multipartenariat ne repose pas principalement sur des facteurs d’ordre
économique mais plutôt sur la thèse de la désorganisation sociale.

 Le milieu de résidence est un déterminant du multipartenariat sexuel


uniquement en 2011. Ainsi, les jeunes du milieu urbain ont une plus forte propension à adopter
ce comportement sexuel que ceux des campagnes. Pour autant, cette variable reste fragile
c’est-à-dire significative au seuil de 10%. En Afrique, l’urbanisation a favorisé
l’occidentalisation des mœurs permettant aux jeunes générations de revendiquer plus de
liberté sexuelle et émotionnelle qui franchit les barrières ethniques et culturelles (Boileau,
2006). Les villes sont même présentées comme des centres de diffusion de la culture
occidentale qui promeuvent des valeurs de liberté et de démocratie. Elles donnent l’occasion

178
aux jeunes de se soustraire de l’autorité des parents et d’adopter des comportements à risque
(Kobelembi, 2005). En d’autres termes, la résidence en ville permet donc plus d’autonomie
se traduisant par des comportements sexuels moins responsable. Cette relation a été également
mise en évidence par Rwenge (2013).

 Le niveau d’instruction discrimine les jeunes en matière de multiplication de


partenaires sexuels. L’hypothèse testée ici est que le niveau d’instruction amplifie le
multipartenariat sexuel car, au fur et à mesure que les jeunes évoluent dans leurs études, ce
comportement devient plus récurrent. Cette hypothèse n’est vérifiée qu’en 2011. Il s’agit là
d’un comportement contradictoire parce que les personnes les plus instruites ont normalement
un meilleur accès à l’information et à une prise de conscience des risques associés à la
sexualité.

 L’état matrimonial influence l’engagement des jeunes dans le multipartenariat


sexuel. L’hypothèse émise stipule que cette pratique toucherait davantage les célibataires que
les individus en union. Les analyses ont permis de confirmer cette hypothèse en 1998 et 2011.
Par contre, en 2005, aucune différence significative n’est observable selon la situation
matrimoniale. Une relation inverse a été observée par Talnan et al (2004) notamment parmi les
garçons où l’acquisition de partenaires multiples est plutôt répandue chez les jeunes ayant déjà
contracté une union.

Au terme de ce chapitre, il ressort que la structure familiale influence le multipartenariat sexuel.


Toutefois, il semblerait que les ménages monogames ne soient pas plus protecteurs que la
monoparentalité comme on l’avait supposé. Par ailleurs, l’analyse compréhensive des
comportements sexuels des jeunes, conduite sous la forme d'une enquête qualitative, montre
que la désarticulation de la socialisation, les chocs émotionnels vécus par les individus ainsi
que les difficultés socio-économiques peuvent constituer des facteurs de risque à l’exposition
aux relations sexuelles multiples. En somme, l’adoption de ce comportement est probablement
le fruit de décisions individuelles influencées surtout par l’environnement familial et le contexte
socio-économique. Tous ces facteurs s’imbriquent les uns aux autres faisant du multipartenariat
une réalité sociale tout aussi complexe que l’on doit appréhender à travers une approche mixte.

179
CHAPITRE 6. Tendances de la non utilisation du
préservatif parmi les jeunes : une Analyse des sources du
changement et des déterminants57

Pendant longtemps, dans de nombreux pays africains, la prévention sexuelle du VIH/Sida a été
envisagée principalement sous l’angle de la stratégie « ABC » (Abstinence, Be faithfull, use
Condom). Sous l’impulsion du programme gouvernemental américain, PEPFAR, avec l’appui
de l’Eglise, dans les messages de prévention diffusés par les programmes nationaux de lutte
contre le Sida (PNLS), on fait du préservatif le dernier recours dans le cadre du modèle ABC.
En se basant particulièrement sur l’abstinence, ces messages insistent sur les valeurs morales
de normalisation des comportements (Delaunay, 1999b). Comme le soulignent Larmarange et
Dabis (2017), il s’agit là plus d’enjeux moraux et non de santé publique. Si l’abstinence peut
être envisagée comme une stratégie à court terme dans certaines circonstances individuelles,
elle ne saurait être un moyen de prévention à moyen voire à long terme pour la très grande
majorité de la population en âge d’activité sexuelle et reproductive. Ce choix n’est donc ni
adapté au contexte épidémiologique des pays africains ni aux réalités du vécu quotidien de la
sexualité des jeunes. Ces programmes ne facilitent guère l’accès à la prévention des jeunes
célibataires (Kalambayi, 2007 ; Desgrées dû Lou et Ferry, 2006). En prônant la primauté de
l’abstinence chez les jeunes jusqu’au mariage, cette stratégie semble « oublier que le mariage
lui-même suit de nos jours plusieurs trajectoires avant sa concrétisation et que l’une des
stratégies est bien les relations préconjugales sexualisées » (Kalambayi, 2007, p.26).

L’augmentation de la sexualité prénuptiale dans la quasi-totalité des pays d’Afrique


subsaharienne a été mise en évidence dans les chapitres précédents. Désormais l’entrée en vie
conjugale des jeunes ne précède pas forcément l’entrée en vie sexuelle. C’est également le
constat fait par Biddlecom et al. (2008), à partir des études d’envergure nationales réalisées en
2004, qui révèlent que la proportion des jeunes femmes ayant des relations sexuelles avant le
mariage augmente considérablement après 14 ans. Au moins un tiers des femmes de 19 ans ont
eu des relations sexuelles avant le mariage : 34% au Burkina Faso, 35% au Malawi, 42% au
Ghana et 52% en Ouganda. Cette croissance des relations sexuelles prémaritales est une
conséquence inévitable des mariages tardifs. En effet, le recul de l’âge au premier mariage,

57
Une partie de ce chapitre a fait l’objet d’une communication orale intitulé « Sexualité prémaritale et utilisation
de préservatif parmi les jeunes en Côte d’Ivoire » à la 7ème Conférence Africaine sur la Population à Johannesburg,
Afrique du Sud, 30 novembre au 4 décembre 2015.

180
quasi généralisé pour les deux sexes, combiné au maintien de la précocité de l’initiation sexuelle
entraîne un allongement de la période d’exposition à la sexualité prémaritale, synonyme de
risques de grossesses non désirées et d’infection à VIH/Sida et autres IST (Antoine, 2002 ;
Beninguisse, 2007). Le risque est d’autant plus élevé que les jeunes ont des partenaires sexuels
instables et plus âgés (Kuate-Defo, 1998) mais également des partenaires dans leur propre
génération c’est-à-dire dans la même tranche d’âge.

Dans le même temps, l’utilisation du préservatif est faible et irrégulière dans ce contexte de
sexualité extraconjugale. En Afrique subsaharienne où la transmission du VIH est
principalement sexuelle, l’utilisation des préservatifs s’avère un moyen de protection efficace.
Effectivement, l’utilisation correcte des préservatifs à chaque rapport sexuel compte parmi les
principaux moyens de prévention de l’infection à VIH/Sida. C’est un outil efficace, peu cher et
largement disponible. Même si le taux d’utilisation des préservatifs aux derniers rapports
sexuels s’est amélioré dans certains pays comme le Cameroun, la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso
et le Sénégal (Rwenge, 2013), il reste néanmoins faible au regard des niveaux de prévalence du
VIH/Sida notamment dans les deux premiers pays (respectivement 4,3% et 3,7% selon les EDS
2011 du Cameroun et de la Côte d’Ivoire).

Dans la littérature, on explique l’amélioration de l’usage du préservatif chez les jeunes par une
perception plus accrue du risque, une meilleure connaissance des moyens de transmission du
VIH, un accroissement de l’accès et de l’utilisation des services de prévention, une plus grande
acceptabilité des préservatifs, etc. (Meekers et Klein, 2002). Cependant, l’analyse des tendances
révèle une stagnation des pratiques préventives en Côte d’Ivoire entre 2005 et 2012. Cette
situation amène à s’interroger sur les sources et les facteurs explicatifs de ces variations. Très
peu de travaux ont abordé les sources des variations observées dans le non usage de préservatif.

Par ailleurs, au nombre des déterminants des comportements sexuels mis en exergue dans la
littérature l’une retiendra notre attention dans ce chapitre. Il s’agit de l’approche dite de «
l’adaptation rationnelle », selon laquelle les jeunes notamment les filles s’engagent dans une
relation sexuelle dans le but d’obtenir de l’argent, des cadeaux ou diverses autres gratifications
en vue de subvenir à leurs besoins (Diop, 1995 ; Calvès, 1999).

Ce chapitre se propose donc de décrire les sources du changement et d’identifier les


déterminants de la non utilisation de préservatifs chez les jeunes célibataires en Côte d’Ivoire.

181
6.1 Aperçu sur les travaux empiriques : les obstacles à l’utilisation du préservatif

Chaque jour, dans le monde, il y a des milliers de personnes nouvellement infectées par le VIH,
la majorité d’entre elles par les rapports sexuels non protégés. Les préservatifs (masculins et
féminins) s’ils sont utilisés correctement et de façon systématique, peuvent réduire ce risque de
transmission par voie sexuelle de 80 à 90% (ICASO, 2007). Mais en Afrique subsaharienne,
leur utilisation se heurte à de nombreux obstacles tant au niveau individuel, communautaire
qu’institutionnel.

Du point de vue individuel, les facteurs religieux influencent l’usage ou non du préservatif
surtout chez les populations africaines. Les religions chrétiennes et musulmanes véhiculent le
modèle traditionnel de la sexualité c’est-à-dire elles prônent la chasteté jusqu’au mariage, la
fidélité dans le mariage et la fécondité. Ce sont autant de choses qui sont incompatibles au port
du préservatif. Pour les adeptes de ces religions, l’usage du préservatif serait donc synonyme
de vagabondage sexuel. Toutefois, comme le mentionne Rwenge (2010), le catholicisme et
l’islam ont des attitudes plus rigoristes vis-à-vis du préservatif alors que le protestantisme est
plus modéré. En effet, les deux premières religions s’y opposent formellement tandis que la
dernière l’encourage dans le but d’éviter le VIH/Sida. Pour Hugon (2007), l’Eglise catholique
est davantage populationniste et réticente aux préservatifs. Dans une étude réalisée en Tanzanie,
Katikiro et Njau (2012) arrivent à la conclusion que les jeunes de 15-24 ans qui affirment que
leur religion interdit l’utilisation du préservatif sont plus susceptibles (odds 5,08) d’avoir des
relations sexuelles non protégées. Inversement, Talnan et al. (2004) ont observé, dans une étude
portant sur les jeunes adolescents en milieu urbain ivoirien, que l’appartenance à la religion
chrétienne réduit le risque d’avoir une vie sexuelle sans utilisation du préservatif.

De plus, les croyances personnelles c’est-à-dire les perceptions au sujet du Sida et du préservatif
sont également un obstacle à la protection des rapports sexuels. En Afrique, on observe une
persistance des idées erronées qui circulent sur cette maladie. Dans ces circonstances, le recours
systématique au préservatif lors des rapports sexuels à risque reste faible puisque de
nombreuses personnes nient tout simplement l’existence du Sida. Certains africains disent
même que le Sida, syndrome d’immunodéficience acquise, ne serait qu’un « Syndrome
Imaginaire pour Décourager les Amoureux ». Selon Monga (2009), il s’agirait d’un nihilisme
qui conduit à des rapports sexuels non protégés. Des travaux menés dans sept localités en
République Démocratique Congo semblent montrer qu’une part importante des jeunes (17,2%
de garçons et 25,0% des filles) ne sont pas favorables à l’utilisation du préservatif du fait de

182
certaines informations erronées telles que la diminution du plaisir, le risque de stérilité, etc.
(Ministère de la Promotion de la Femme et de l’Integration au Développement et UNICEF,
2007).

Une autre raison qui pourrait expliquer la faible utilisation du préservatif par les populations
africaines et notamment par les jeunes serait qu’il réduirait les sensations de plaisir retiré de
l’acte sexuel (Deniaud, 1993 ; Kobelembi, 2005). Une relation statistiquement significative a
été trouvée entre la non utilisation des préservatifs et la croyance que ceux-ci réduisent le plaisir
sexuel. Ainsi, les jeunes ayant une telle conception du préservatif couraient 15 fois plus de
risque de ne pas y recourir (p <0,001) par rapport aux autres (Katikiro et Njau, 2012).
Nombreuses sont les femmes rwandaises qui pensent que l’usage de préservatif lors des
rapports sexuels diminue le plaisir. En effet, dans ce pays, faire l’amour va de pair avec des
mouvements réciproques de liquides alors que le préservatif constitue un blocage des flux
corporels c’est-à-dire des sécrétions masculines et féminines (Vangroenweghe, 2000). Le
constat est même, au Nigéria, dans une enquête menée auprès de 412 chauffeurs de camion
longue distance. Ces derniers ont déclaré ne pas utiliser le préservatif parce qu’il réduit leur
satisfaction sexuelle (Sunmola, 2005).

Souvent utilisé au début d’une relation amoureuse, le préservatif est très vite abandonné lorsque
celle-ci s’installe dans la durée. Manuel (2005), dans une étude effectuée auprès des jeunes
étudiants à Maputo (Mozambique), révèle que l’un des principaux obstacles à l’utilisation des
préservatifs est la croyance des jeunes qu’ils ne doivent pas utiliser des préservatifs dans les
relations stables fondées sur l’amour et la confiance. En fait, ces sentiments donnent une idée
d’immunité à l’infection. C’est également cette notion de confiance qui a été la raison la plus
fréquemment citée par les femmes interrogées en milieu urbain au Cameroun, au Kenya, au
Rwanda et au Zimbabwe pour expliquer la non utilisation de préservatif au dernier rapport
sexuel avec leur partenaire régulier non marital (Agha, 2002). Par ailleurs, certains jeunes sont
gênés à l’idée de se procurer des préservatifs là où ils risquent d’être reconnus ou encore ils en
ont une aversion. De plus, la consommation d’alcool ou de drogues avant les rapports sexuels
compromettent l’utilisation du préservatif (Sarkar, 2008).

Au niveau de la société, les rapports de genre ainsi que l’attitude de la communauté constituent
un frein à l’usage des préservatifs. En Afrique subsaharienne, la sexualité est contrôlée par les
hommes. Ainsi, les femmes sont en position d’infériorité dans la plupart des relations
hétérosexuelles ((Vangroenweghe, 2000). En effet, dans plusieurs cultures, les femmes n’ont

183
ni le pouvoir ni le moyen d’insister sur l’utilisation du préservatif, que ce soit au sein d’une
union ou à l’extérieur du mariage. Parfois, le seul fait de suggérer son usage est perçu comme
une accusation d’infidélité du partenaire ou la reconnaissance d’adultère par la femme elle-
même (ICASO, 2007). Le préservatif renvoie à la méfiance, laquelle méfiance est, à son tour,
un facteur de l’érosion de la confiance entre les partenaires et même de cause de rupture d’union
(Kobelembi, 2005). L’amélioration de l’équilibre de pouvoir dans les relations hétérosexuelles
passe par l’autonomisation des femmes c’est-à-dire l’éducation et l’emploi. Ainsi, des travaux
de Maticka-Tyndale (2012) ont montré que l’utilisation du préservatif augmente chez les
femmes ayant un niveau d’étude supérieur à Madagascar, en Angola et en Afrique du Sud.

Par ailleurs, l’usage du préservatif peut s’accroître avec un meilleur statut économique de la
femme. En s’appuyant sur les données spécifiques du Botswana, Greig et Koopman (2001), à
partir de modèles de régression, ont montré que le pouvoir de négociation des femmes et
l'indépendance économique étaient les facteurs les plus fortement liés à l'utilisation du
préservatif. L'indépendance économique est le facteur le plus fortement associé à un pouvoir
de négociation. En d’autres termes, les femmes les plus autonomes économiquement ont une
plus grande probabilité de négocier le port de préservatif lors de leurs rapports sexuels. Pour
Vangroenweghe (2000), le caractère féminin de la pauvreté, le manque d’emplois rétribués pour
les femmes et le besoin d’aide financière de la part des hommes sont autant de facteurs qui
compromettent l’utilisation du préservatif.

L’attitude désapprobatrice d’une communauté à l’égard du préservatif peut entraver son usage.
Ainsi, à partir d’une étude qualitative réalisée dans l’ouest du Kenya notamment en milieu rural,
on note que la grande majorité des membres de cette communauté était opposée fermement à
l’utilisation du préservatif. Ils préconisaient même des punitions telles des corrections ou
l’expulsion à l’encontre de ceux qui en feraient usage. En outre, il ressort des différences
d’attitude suivant le sexe, les femmes étant en général les plus opposées à l’utilisation du
préservatif (Tavrow et al., 2012).

Les possibilités d’accès aux informations et aux moyens de prévention qu’offre le cadre
politique peuvent favoriser un meilleur recours aux préservatifs. En Afrique, il se pose un
problème de disponibilité des préservatifs surtout en milieu rural. Ceux-ci seraient disponibles
dans un rayon de trente minutes et seulement pour une minorité (Vangroenweghe, 2000).

La disponibilité permanente des préservatifs devrait être la règle dans les points de prestation
de service sanitaire (public et privé) ainsi que chez les distributeurs indépendants. Mais en Côte

184
d’Ivoire, ce n’est pas le cas puisqu’on note des insuffisances notables en matière de disponibilité
de préservatif. En effet, l’enquête nationale sur la disponibilité, la qualité et l’utilisation des
services de santé de la mère et de l’enfant réalisé en 2013 et 2014 a mis en évidence un véritable
problème de disponibilité de stocks des moyens de contraception (préservatif masculin et
féminin y compris) aussi bien en milieu rural qu’urbain. Il est apparu au moment de l’enquête,
qu’aucune structure exerçant dans le milieu rural n’avait en stock tous les moyens de
contraception.

La non disponibilité de préservatif a été citée par 10% des femmes de Butare (Rwanda) qui n’en
ont pas fait usage (Agha, 2002). En outre, l’étude réalisée par Gilmour et ses collègues (2000)
dans le Kwa Zulu Natal, région de forte prévalence du VIH/Sida, a montré que le préservatif
était disponible seulement dans 55% des structures privées et dans 10% des points de vente non
sanitaires. Basée sur une triangulation des méthodes de collecte de données, l’étude menée par
Sandøy et al. (2012) sur la disponibilité et l’utilisation des préservatifs dans trois districts situés
dans trois pays (Kenya, Tanzanie et Zambie) a montré qu’il y a encore des lacunes importantes
dans la disponibilité des préservatifs dans des endroits où les gens rencontrent de nouveaux
partenaires sexuels. Les auteurs soulignent que les efforts doivent être faits pour améliorer
l’accessibilité et la disponibilité des préservatifs dans les endroits à haut risque d’infection.
Toutefois, même lorsqu’ils sont disponibles, leur utilisation est irrégulière et n’est pas
universelle (Pempelani, 2005).

6.2 Hypothèses, données et variables

Hypothèses de recherche

Hypothèse 1 : Les changements observés dans la non utilisation de préservatif chez les jeunes
sont dus à un effet de performance.

Hypothèse 2 : Les jeunes qui vivent dans des conditions difficiles ont une plus grande
probabilité à avoir des rapports non protégés que ceux qui vivent dans des conditions plus
aisées.

Hypothèse 3 : Les rapports inégalitaires entre sexe en Afrique dans les négociations sur les
modalités de déroulement de l’acte sexuel font que les jeunes garçons auront plus tendance à
utiliser les préservatifs que les filles.

Hypothèse 4 : Les jeunes du groupe d’âge 20-24 ans sont plus enclins à avoir des rapports
sexuels non protégés que les adolescents de 15-19 ans.

185
Données et variables

Les données utilisées dans cette section proviennent de trois sources en l’occurrence l’enquête
démographique et de santé de 1998, l’enquête sur les indicateurs du Sida de 2005 et l’enquête
démographique et de santé et à indicateurs multiples de 2011-2012. Les échantillons de ces
enquêtes sont constitués de femmes de 15-49 ans et d’hommes de 15-59 ans (soit
respectivement 3926 individus en 1998, 9686 en 2005 et 15 195 en 2011/12)58. Pour mesurer
le non usage de préservatif parmi les jeunes, les individus âgés de plus de 24 ans sont exclus de
l’échantillon d’analyse.

Au final, notre échantillon est constitué de jeunes de 15 à 24 ans ayant déjà eu leur première
expérience sexuelle (Figure 6.1). Afin de ne pas surestimer la non utilisation de préservatif,
l’analyse va se limiter uniquement aux célibataires c’est-à-dire aux jeunes n’ayant jamais été
mariés. Ainsi, nous excluons d’une part, les veufs/divorcés dont les proportions sont
négligeables dans cette tranche d’âge et d’autre part les mariés/en couple parce qu’ils sont,
généralement, peu nombreux à utiliser le préservatif (Annexe 18).

Figure 6.1 : Constitution de l’échantillon d’analyse


L’échantillon de
L’échantillon initial célibataires
moins les jeunes moins les
mariés, en couple, jeunes n’ayant
divorcés, veufs. jamais eu de
rapports
sexuels

Echantillon initial des jeunes de 15- Echantillon de célibataires de 15-24 Echantillon de célibataires 15-24
24 ans ans ans entrés en sexualité

1770 4136 5795 1207 2979 4005 790 1980 2569

EDS 98 EIS 2005 EDS 2011 EDS 98 EIS 2005 EDS 2011 EDS 98 EIS 2005 EDS 2011

58
Pour les détails sur la taille de l’échantion, se référer au tableau 3.3 : Effectifs des ménages et individus enquêtés

186
La première raison pour laquelle, les personnes en union sont exclues de l’échantion d’analyse
est qu’en Afrique, la vie de couple rime avec procréation donc le préservatif59 est considéré
comme un obstacle dans l’atteinte de cet objectif (Tableau 6.1). En sus, le port du préservatif
au sein d’un couple peut être source d’accusation, de suspicion et de rejet de l’un des partenaires
comme l’explique Desgrées du Loû (1998, p.719) « …il existe aussi dans les familles africaines
le risque pour une femme de se voir rejeter par son mari lorsqu’elle réclame l’utilisation du
préservatif, ou encore celui de ne plus avoir d’enfants ». Dans ce type de société pronataliste,
la procréation est à la base même de la stabilité du couple. D’ailleurs, la valeur d’un individu
ne se mesure pas par ses richesses matérielles mais par sa performance génésique (Wakam,
1994). En général, les femmes ou le couple ont recours aux méthodes de contraception
modernes lorsque le nombre d’enfants désirés est atteint, autrement dit pour limiter les
naissances (Evina, 2005). Parmi les raisons qui expliquent la faible prévalence contraceptive
chez les femmes en union figurent les facteurs sociaux, culturels ou politiques : attachement à
une forte fécondité, opposition à la planification familiale de la part du couple ou des
communautés religieuse et sociale, manque de volonté politique qui entraîne un accès limité à
l’information et aux services de planification familiale.

La seconde raison est que le taux de non réponse de la variable « non utilisation de préservatif »
étant supérieur à 10% en 2005 et 2012, nous avons été amené à faire une correction en
appliquant une technique d’imputation multiple. Toutefois, en limitant l’échantillon d’analyse
aux célibataires, on ne note pas de différence entre les bases imputées et non imputées parce
que le taux de non réponse de cette variable devient très faible (Annexe 17).

Tableau 6.1: Utilisation actuelle de la contraception

Femmes en union
toutes méthodes Préservatif chez Préservatif chez les
Périodes confondues toutes les femmes femmes en union

EDS 2011-12 18,2 5,0 1,8


EDS 1998-99 15,0 4,4 1,8
EDS 1994 11,4 1,9 0,7
Source : statcompiler

59
Les autres moyens contraceptifs sont également faiblement utilisés. Il s’agit plus de méthodes d’espacement des naissances
et rarement des méthodes d’arrêt. Les méthodes contraceptives telles que l’implant et le stérilet ne sont pas courantes
puisqu’elles protègent les femmes sur une longue durée.

187
6.3 Méthodes d’analyse

L’étude a mobilisé différentes méthodes d’analyse. Ainsi, la statistique descriptive est utilisée
pour mesurer l’ampleur et les tendances dans le temps de la non utilisation de préservatif. Une
analyse des sources du changement est faite, à partir de la méthode de décomposition, pour
rendre compte de l’origine des évolutions observées entre 1998 et 2011. En d’autres termes, les
changements enregistrés au cours de ces périodes sont-ils le fait d’une modification de la
structure de la population ou d’un réel changement de comportement. Enfin la régression
logistique binaire a permis d’identifier les facteurs déterminants du non usage du préservatif.
Notons que ces différentes méthodes seront explicitées par la suite.

6.4 Résultats

6.4.1 Analyse descriptive

La distribution des jeunes célibataires ayant entamé leur vie sexuelle selon certaines
caractéristiques socio-démographiques est présentée au tableau 6.2. Cette analyse univariée
permet de mesurer les changements temporels dans la composition des échantillons des jeunes
selon chaque variable de l’étude. En plus, des tests d’égalité de proportions ont permis de mettre
en évidence les éventuelles similitudes ou différences dans les proportions de trois sous
populations de l’étude (Annexes 21, 22 et 23).

188
Tableau 6.2 : Caractéristiques de l’échantillon de jeunes célibataires ayant eu leur première
expérience sexuelle

Variables EDS 1998 EIS 2005 EDS 2011


% N =696 % N=2051 % N=2555
Sexe ==2047
Masculin 29,4 204 54,9 1126 37,9 969
Féminin 70,6 492 45,1 925 62,1 1586
Groupe d’âge
15-19 57,0 397 48,2 989 48,0 1226
20-24 43,0 299 51,8 1062 52,0 1329
Niveau d’instruction
Aucun 32,1 224 27,8 571 26,4 676
Primaire 34,5 240 26,8 549 26,0 663
Secondaire ou plus 33,3 232 45,4 932 47,6 1216
Religion
Musulman 26,9 187 29,0 593 32,8 837
Catholique 31,4 218 25,8 528 23,4 598
Protestante 20,8 145 12,4 254 22,7 581
animiste/sans rel 20,9 146 32,9 673 21,1 538
Exposition aux médias
Pas exposé 12,1 84 8,9 182 13,1 333
Exposé 87,9 611 91,1 1863 86,9 2218
Connaissance complète du Sida
Non - - 83,1 1704 85,4 2181
Oui - - 16,9 347 14,6 374
Non utilisation du préservatif
Oui 66,0 458 52,1 899 52,9 1152
Non 34,0 236 47,9 825 47,1 1024
Niveau de vie
Pauvres 32,5 226 23,4 479 22,0 563
Classe intermédiaire 30,7 213 40,5 830 40,3 1031
Nantis 36,9 256 36,2 742 37,6 961
Milieu de résidence
Abidjan 37,7 262 39,9 819 28,9 738
Autres villes 17,5 122 11,3 232 35,4 904
Rural 44,8 312 48,7 1000 35,7 912

Comme on peut le voir, l’échantillon de jeunes célibataires ayant déjà eu leur première
expérience sexuelle a augmenté entre 1998 et 2011 passant de 696 à 2555. En outre, on note
qu’il n’y a pas une grande différence entre la structure des échantillons de 2005 et 2011, à
l’exception du sexe et du milieu de résidence. Alors que les garçons sont faiblement représentés
en 2011 (environ 38%), leur proportion était de 54,9% en 2005 (p=0,000). Au niveau du milieu
de résidence, les jeunes d’Abidjan qui étaient majoritaires (environ 40%) en 2005, sont moins
représentés en 2011 (28,9%). De même, en 2005, on note également une sous-représentation
des jeunes des autres villes et surreprésentation du milieu rural par rapport à 2011 (Annexe 25).

En revanche pour la période 1998-2005, la distribution des jeunes selon les variables est
différente d’une enquête à une autre surtout au niveau du sexe, du groupe d’âge et de la non
utilisation de préservatif comme le suggère les résultats du test d’égalité de proportions (Annexe

189
21). C’est également le même constat qui est fait pour la période 1998-2011. En effet, on
observe des changements significatifs dans la structure des échantillons de plusieurs variables
(Annexe 22). En somme, les différences majeures constatées dans la distribution des
échantillons d’une enquête à une autre peuvent entraîner un biais dans les tendances observées
au niveau bivarié. Toutefois, l’analyse multivariée a l’avantage de faire disparaître l’effet de
structure en contrôlant par des variables comme l’âge, le sexe, etc.

Au niveau bivarié, les résultats de la figure 6.1 montrent que plus de la moitié des jeunes de 15-
24 ans n’ont pas fait usage du préservatif au cours de leur dernier rapport sexuel prémarital.
Alors qu’en 1998, environ 7 jeunes sur 10 sont concernés (66%), en 2005 et 2011, ils
représentaient un peu plus d’un jeune sur deux (respectivement 52% et environ 53%). De
manière générale, ces résultats montrent une baisse de ce comportement entre 1998-2005 puis
entre 1998-2011 mais une constance entre 2005-2011 (p-value= 0,310) (Annexe 30).

A l’aide de la statistique de Khi-deux, il ressort que le sexe est significativement associé à la


non utilisation de préservatif quelle que soit la période d’enquête (au seuil de 1%). Ainsi, la
proportion de jeunes filles n’ayant pas utilisé de préservatif est beaucoup plus élevée que chez
les garçons pour les trois périodes d’étude. Toutefois, c’est en 1998 qu’on observe le plus grand
écart de proportions entre les deux sexes, soit près de 28 points (Figure 6.2).

Figure 6.2 : Non utilisation de préservatif au dernier rapport sexuel par sexe

80 74,2
70 60,9 66
58,8 52,9
60
52,1
50 46,3 46,4
39,7 EDS 1998
(%)

40
EIS 2005
30 EDS 2011
20

10

0
Garçons Filles Ensemble

Notes : Les différences sont significatives entre filles et garçons au seuil de 1%

190
 Lien entre le milieu de résidence et le non usage de préservatif

Le non recours au préservatif est influencé par le milieu de résidence. Que ce soit en 1998, 2005
ou 2011, la proportion de jeunes n’ayant pas utilisé de préservatif au dernier rapport sexuel
prémarital est plus élevée en milieu rural qu’en milieu urbain avec respectivement 74,2% ;
59,6% et 67,2% contre 62,8% ; 50,8% et 45% dans les autres villes. Abidjan, la capitale se
distingue avec un meilleur niveau d’utilisation de préservatif. Les fortes variations de ce
comportement suivant le milieu pourraient être liées non seulement à la disponibilité de ce
produit mais aussi à des pesanteurs culturelles plus prégnantes dans les campagnes. De grandes
inégalités en matière de sources d’approvisionnement de contraceptifs 60 existent entre les milieux
rural et urbain.

Dans l’ensemble, entre 1998 et 2011, la baisse de la prévalence de la non utilisation de


préservatif est progressive dans les autres villes mais à Abidjan et en milieu rural, c’est plutôt
une tendance à la hausse qui a été observée au cours de la période 2005-2011. Aussi, remarque-
t-on que les derniers rapports sexuels non protégés sont plus répandus parmi les filles que les
garçons dans tous les milieux de résidence.

 Niveau de vie et le non usage de préservatif

La non utilisation du préservatif au dernier rapport sexuel semble dépendre aussi du niveau de
vie des jeunes. Autrement dit, les conditions de vie des ménages dans lesquels vivent les jeunes
peuvent déterminer l’utilisation ou non du préservatif lors des rapports sexuels. Quelle que soit
la période considérée, la proportion des jeunes qui n’ont pas utilisé le préservatif au dernier
rapport sexuel baisse à mesure que le niveau de vie de leur ménage s’améliore. Dans les
ménages pauvres, la non utilisation du préservatif au dernier rapport sexuel passe de 75,4% en
1998 à 67,4% en 2011 alors que ces proportions sont respectivement d’environ 53% à 39,1%
chez les jeunes issus des ménages riches. Par ailleurs, dans les ménages riches, on constate qu’il
y a une baisse continue entre 1998 et 2011 de la proportion des jeunes qui n’ont pas utilisé le
préservatif lors de dernier rapport sexuel. Cependant, entre 2005 et 2011, la proportion de
jeunes ayant adopté ce comportement à risque a connu une augmentation dans les ménages
pauvres et les ménages de niveau de vie moyen.

60Les endroits où les jeunes se procurent des préservatifs en Côte d’Ivoire (hôpital public/privé, clinique mobile, clinique de
planification familiale, boutique, pharmacie, etc.) varient selon qu’ils résident en ville ou à la campagne.

191
 Age et non usage de préservatif

Le test du khi-deux indique une association (significative à 5% et 10%) entre le non recours au
préservatif et l’âge, en 1998 et 2011. En Côte d’Ivoire, de nombreuses campagnes de
sensibilisation sur le VIH/Sida ciblent les jeunes de 15-24 ans, identifiés comme un groupe
ayant des comportements à risque. Dans cette tranche d’âge, la proportion d’individus n’ayant
pas utilisé de préservatif lors du dernier rapport reste élevée malgré une tendance à la baisse
entre 1998 et 2011. En effet, en 1998, l’adoption de ce comportement sexuel à risque était
estimée à 70,1% chez les 15-19 ans contre 60,9% chez les 20-24 ans. En revanche, en 2011, ces
proportions sont estimées respectivement à 51 % et 54,7%.

Qu’en est-il du non recours au préservatif dans toutes les générations ?

En s’intéressant à toutes les générations de célibataires sexuellement actifs, on remarque que la


non utilisation de préservatif est plus fréquente chez les personnes les plus âgées. Ainsi, en
2011, les proportions de jeunes de 15-19 ans et 20-24 ans qui ont déclaré n’avoir pas utilisé de
préservatif à leur dernier rapport sexuel étaient respectivement de 51% et environ 55% contre
90% chez les 45-49 ans. Cette différence pourrait s’expliquer par le fait que les adultes changent
difficilement de comportements sexuels. En sus, la comparaison des résultats des trois enquêtes
selon le sexe montre plus les femmes avancent en âge, moins elles sont nombreuses à recourir
au préservatif. Par exemple, en 1998 et 2005, toutes les femmes célibataires de plus de 40 ans
ont déclaré des derniers rapports sexuels non protégés (Tableau 6.3).

Tableau 6.3 : Non utilisation de préservatif au dernier rapport sexuel par groupe d’âge

Groupe
d’âges 1998 2005 2011
Femmes Hommes Ensemble Femmes Hommes Ensemble Femmes Hommes Ensemble

15-19 78,5 44,3 70,1 57,6 43,7 51,8 57,0 36,0 51,0
20-24 67,7 48,6 60,9 60,2 48,1 52,3 65,6 41,6 54,7
25-29 77,8 53,1 66,9 70,7 46,2 53,7 61,0 41,7 52,0
30-34 87,9 42,1 71,2 62,3 52,9 56,5 80,4 39,7 59,6
35-39 88,2 55,6 76,9 100,0 66,7 77,5 67,6 56,0 62,9
40-44 100,0 71,4 80,0 100,0 73,7 80,0 77,8 30,8 50,0
45-49 100,0 71,4 75,0 100,0 60,0 73,3 80,0 100,0 90,0
Ensemble 76,0 49,0 67,1 61,5 47,7 53,5 62,4 40,5 53,5

192
 Religion et non utilisation de préservatif

La religion est une variable culturelle qui influence les comportements des individus en matière
de fécondité ou de sexualité. Un autre résultat assez attendu est le lien significatif entre le non
usage de préservatif et la religion. En effet, l’utilisation ou non du préservatif peut être
influencée par des pesanteurs culturelles ou des us et coutumes. Les résultats montrent que les
jeunes adeptes des religions musulmanes et animistes ou ceux n’appartenant à aucune religion
ont été plus nombreux à ne pas recourir au préservatif lors de leurs derniers rapports sexuels
entre 1998 et 2005. Par contre, en 2011, la tendance est quelque peu différente dans la mesure
où les jeunes protestants occupent la première position suivis des partisans des religions
traditionnelles ou autres. De manière générale, quelle que soit la religion, les jeunes de sexe
masculin ont été plus enclins à se protéger lors du dernier rapport sexuel que les homologues
de sexe féminin (Tableau 6.4).

 Niveau d’instruction et non utilisation de préservatif

Le niveau d’instruction est une variable très discriminante du non usage de préservatif aux
derniers rapports sexuels chez les jeunes célibataires. En outre, il est négativement associé à
l’adoption de ce comportement à risque. Plus le niveau d’instruction des jeunes augmente,
moins ils sont nombreux à ne pas recourir aux préservatifs. Ainsi, en 2011, la proportion de
jeunes n’ayant pas utilisé de préservatif lors du dernier rapport sexuel passe de 72% chez ceux
qui sont sans instruction à 57% pour le niveau primaire et 41% pour le niveau secondaire ou
plus. Cette même tendance est observée pour les deux périodes antérieures. Toutefois, il est à
noter que la proportion de jeunes n’ayant pas utilisé de préservatif a connu une légère
augmentation entre 2005 et 2011 notamment chez les personnes ayant un niveau d’instruction
primaire et secondaire ou plus (Tableau 6.4).

 Exposition aux médias et non utilisation de préservatif

Dans le cadre des campagnes de sensibilisation, les médias constituent un puissant moyen pour
atteindre les populations. L’exposition à ces médias (Télévision, radio et presse écrite) permet
d’avoir accès à une information des plus variées. Tout comme l’éducation, l’exposition aux
médias, à travers les campagnes et messages de sensibilisation, pourrait permettre une meilleure
connaissance du VIH/Sida et par ricochet une meilleure connaissance de moyens de prévention
contre ce fléau. Les analyses indiquent que les jeunes exposés aux médias ont eu tendance à
plus utiliser le préservatif lors des derniers rapports. Ainsi, en 1998, la proportion de jeunes

193
n’ayant pas eu recours au préservatif lors du dernier rapport sexuel est plus élevée chez ceux
qui n’ont pas été exposés aux médias que chez les autres (81,9% contre 63,9% ; p=0,000). Cette
même tendance est constatée non seulement en 2005 mais aussi en 2011. Par ailleurs, il ressort
qu’ils soient exposés ou non aux médias, la non utilisation du préservatif lors du dernier rapport
sexuel demeure, en général, plus élevée chez les jeunes de sexe féminin que chez leurs pairs de
sexe masculin (Tableau 6.4).

 Connaissance complète du Sida et non utilisation de préservatif

L’usage du préservatif chez les jeunes peut être influencé en amont par une meilleure
connaissance du VIH/Sida, de son mode de transmission, de ses conséquences et des moyens
de prévention. Ainsi, une parfaite connaissance de cette maladie pourrait permettre l’adoption
de comportements sexuels plus responsables et donc favoriser l’atteinte de l’objectif « zéro
nouvelle infection » de l’ONUSIDA. Les jeunes qui ont une meilleure connaissance du
VIH/Sida, ont plus utilisé le préservatif au dernier rapport contrairement aux autres. En effet,
en 2005 et 2011, la non utilisation du préservatif chez les jeunes ayant une connaissance
complète est estimé à 38,4% et 46% contre respectivement 55,1% et 54,1% chez leurs
congénères n’ayant pas ce niveau de connaissance. Lorsqu’on s’intéresse aux jeunes ayant une
connaissance complète suivant le sexe, il ressort qu’en 2005, les filles (37,6 %) et les garçons
(39,3 %) sont indifféremment touchés par la non utilisation du préservatif au dernier rapport
sexuel. En revanche, en 2011, les jeunes filles (52,7%) ont été plus nombreuses que les jeunes
garçons (31,4%) à adopter ce comportement sexuel à risque malgré la bonne connaissance
qu’elles ont du Sida (Tableau 6.4).

194
Tableau 6.4 : Prévalence (en %) de la non utilisation de préservatif aux derniers rapports sexuels
selon les variables explicatives
Variables
explicatives EDS 1998 EIS 2005 EDS-MICS 2011
N =694 N =1724 N =2179
Garçons Filles Ensemble Garçons Filles Ensemble Garçons Filles Ensemble
Milieu de *** *** ***
Abidjan
résidence 40,5 65,1 58,2 36,7 50,9 43,4 27,8 55,9 45,8
Urbain 37,9 70,7 62,8 44,3 57,4 50,8 30,9 52,8 45,0
Rural 53,5 84,2 74,2 54,5 65,8 59,6 56,4 74,4 67,2

Niveau de vie *** *** ***


Pauvre 48,6 87,7 75,4 58,6 74,7 66,2 56,7 74,5 67,4
Moyen 59,7 77,5 72,3 46,7 59,0 52,1 43,5 67,0 58,1
Riche 34,2 60,3 52,9 38,1 48,8 43,3 24,6 47,3 39,1

Groupe ** ns *
d’âge ans
15-19 44,3 78,5 70,1 43,7 57,7 51,9 36,4 57,0 51,0
20-24 ans 48,6 67,7 60,9 48,1 60,5 52,4 41,6 65,6 54,7

Religion *** *** ***


Musulmane 58,2 79,3 71,8 51,0 70,6 60,1 35,5 58,4 49,0
Catholique 39,1 62,4 55,0 35,6 49,8 42,9 35,4 54,5 48,0
Protestante 29,7 75,9 64,1 43,9 58,7 51,4 34,3 65,5 59,1
Animiste/sans 58,1 82,1 76,9 51,2 56,1 53,2 50,0 67,4 58,2
religion
Niveau *** *** ***
d’instruction
Aucun 68,0 85,4 81,4 65,4 79,1 73,6 55,5 78,3 72,1
Primaire 50,0 76,7 69,6 55,5 57,8 56,7 46,5 63,3 57,4
Secondaire ou 31,1 58,2 47,6 34,8 38,7 36,2 31,8 48,0 40,9
plus
Exposition *** *** ***
Pas
aux exposé
médias 63,6 84,7 81,9 90,7 90,5 90,5 59,7 78,7 74,1
Exposé 45,6 72,3 63,9 44,0 53,8 48,3 37,8 57,7 49,8

Connaissance *** ***


Non
complète - - - 47,8 64,0 55,1 40,8 62,5 54,1
Oui - - - 39,3 37,6 38,4 31,4 52,7 46,0

Note : Seuil de signification : *** p< 1% ; ** p<5 % ; * p<10 % ; ns

Faible niveau d’utilisation du préservatif à l’échelle régionale malgré la forte prévalence


du VIH/Sida

Dans toutes les régions de Côte d’Ivoire, la prévalence du VIH/Sida dépasse 1% dans la
population générale adulte confirmant le contexte d’épidémie généralisée. En 2011, les niveaux
de prévalence les plus importants sont observés dans la ville d’Abidjan, au Centre-Nord et Sud-
Ouest (avec San Pedro, la deuxième ville portuaire). Ces chiffres indiquent que toutes les
couches de la population sont menacées mais certaines le sont davantage que d’autres
notamment les jeunes de 15-24 ans. Malgré cette forte prévalence du VIH, l’utilisation du
préservatif n’est pas régulière chez les jeunes.

195
Figure 6.3 : Prévalence du VIH/Sida et niveau de non utilisation du préservatif parmi les jeunes

Les résultats montrent que la région de résidence est significativement associée à la non
utilisation de préservatif. Ainsi, en 2005, au dernier rapport sexuel, plus de huit jeunes
célibataires de 15-24 ans sur dix ont déclaré n’avoir pas utilisé de préservatif dans les régions
du Nord-Ouest (78%), Ouest (83%) et Nord (85%). En 2011, ce comportement a été adopté par

196
plus de six jeunes sur dix dans de nombreuses régions (Sud-Ouest, Nord-Ouest, Ouest, Centre).
La situation est d’autant plus inquiétante dans certaines régions comme le Sud-Ouest et l’Ouest
qui affichent une prévalence élevée et un faible niveau d’utilisation du préservatif (Figure 6.2
et 6.3).
Figure 6.4 : Prévalence du VIH/Sida et niveau de non utilisation du préservatif parmi les jeunes

197
Au total, l’analyse descriptive, première étape vers une analyse explicative du non recours au
préservatif, a permis d’évaluer l’ampleur du phénomène et de mettre en exergue les relations
qui existeraient avec les variables indépendantes. Mais avant l’étape explicative, nous tenterons
de montrer si les changements observés dans la non utilisation de préservatif proviennent des
différences de structures indiquées plus haut ou d’un véritable changement de comportement.

6.4.2 Tendances du non recours au préservatif parmi les jeunes célibataires : Quelles sont
les sources du changement des comportements en Côte d’Ivoire ?

En l’absence de remède, l’abstinence et le port systématique de préservatif pendant les rapports


sexuels constituent, chez les jeunes non mariés, les seuls moyens de prévention contre cette
pandémie. Mais avec l’augmentation de la sexualité prémaritale, l’utilisation du préservatif
s’avère le moyen de protection le plus efficace contre les IST et le VIH/Sida. Même si les
changements de comportements sont lents notamment en Afrique subsaharienne, où
l’analphabétisme associé aux pesanteurs culturelles demeure important, on note des progrès
dans l’adoption de pratiques préventives contre le Sida. Ainsi, par rapport aux générations plus
âgées, les jeunes africains utilisent davantage le préservatif pour se protéger. A partir des
données des EDS des pays africains francophones, Rwenge (2012) a montré que les taux
d’utilisation de préservatif aux derniers rapports sexuels ont progressé au fil du temps.

En Côte d’Ivoire, entre 1998 à 2011, une baisse puis une stabilité de la non utilisation de
préservatifs sont constatées parmi les jeunes mais des différences existent suivant le milieu de
résidence et la catégorie socio-économique. Mais alors quelles sont les sources à l’origine des
changements dans cette évolution ? Est-ce que ces tendances sont-elles dues au changement
dans la structure des échantillons des différentes enquêtes ? Ou encore sont-elles dues aux
performances réalisées en matière de politique de lutte contre le Sida ?

6.4.2.1 Présentation de la méthode de décomposition

La décomposition vise à estimer la contribution relative de deux ou plusieurs composants dans


un changement social donné (Eloundou-Enyegue et Giroux, 2010 ; Powers et al., 2011).
Utilisée dans de nombreuses disciplines dont la démographie, elle permet d’analyser, par
exemple, les tendances observées dans la non utilisation de préservatif parmi les adolescents et
jeunes. L’utilisation de cette méthode nécessite que le phénomène à étudier soit quantitatif
(susceptible d’être mesuré par une moyenne, un taux, un ratio, etc.), agrégé et graduel

198
(Eloundou-Enyegue et Giroux, 2010). L’objectif de la méthode de décomposition est de trouver
les sources plutôt que les causes profondes du changement d’un phénomène. En d’autres
termes, il s’agira d’établir d’où provient le changement et non de déterminer « ce qui l’a causé ».
En pratique, cette méthode doit répondre à la question « comment » et non « pourquoi » ou
encore « qu’est ce qui » a occasionné le changement (Beninguisse et al., 2013).
La décomposition de base considère deux sources de changement (composition et
comportement ou performance). Sa formulation mathématique s’obtient en exprimant la
performance nationale comme une moyenne pondérée des performances des groupes :
[1] 𝒀𝒕 = ∑ 𝒘𝒋𝒕 ∗ 𝒚𝒋𝒕
Où Y est la moyenne nationale pour la variable substantive (la non utilisation de préservatif), y est la
valeur de variable substantive pour le groupe j’en année t (la non utilisation du préservatif chez les

jeunes issus des ménages pauvres) et Wjt est la proportion de jeunes appartenant au groupe j au moment

t.

A partir de cette formule, le changement national peut être décomposé de la manière suivante :
[2] ∆𝑌 = ∑ 𝑦̅𝑗 ∗ ∆𝑤𝑗 + ∑ 𝑤
̅𝑗 ∗ ∆𝑦𝑗

Changement total = Effet de décomposition (A) + Effet de comportement (B)

Où les variables barres sont des moyennes entre les deux points temporels
Exemple 𝑦̅𝑗 = [𝑦𝑗(𝑡+1) + 𝑦𝑗(𝑡) ] /2

La décomposition [2] exprime donc la variation totale due au changement de « composition »


et celui imputable à la « performance/comportement » au sein des différentes classes socio-
économiques. Aussi, il est possible d’étendre cette formulation en notant que la performance
d’un groupe donné (j) peut s’exprimer comme une fonction d’une autre ou de plusieurs autres
variables. Si nous prenons le cas d’une relation linéaire, par exemple.
[3] 𝑦𝑗 = 𝛼 + 𝛽𝑋𝑗 + 𝜇𝑗

où α représente la performance de base lorsque x=0 [dans notre cas le taux de scolarisation de
base], β est l’augmentation du taux de scolarisation associé à un accroissement unitaire de la
variable X, et μj l’erreur (qui peut aussi s’interpréter comme la surperformance/sous
performance relative du groupe, ou comme l’effet résiduel des facteurs autres que x, qui ne sont
pas considérés dans l’analyse).

Dans ce cas, le changement dans la valeur de yj entre deux périodes s’obtient ainsi :
[4] ∆𝑦𝑗 = ∆𝛼 + 𝛽̅ ∆𝑥𝑗 + 𝑥̅𝑗 ∆𝛽 + ∆𝜇𝑗

199
Si les définitions des catégories de x ne changent pas entre les périodes 1 et 2, le deuxième
terme de cette équation est 0, et x est égal à x. L’équation se réduit donc à :
[5] ∆𝑦𝑗 = ∆𝛼 + 𝑋𝑗 ∆𝛽 + ∆𝜇𝑗

En insérant [5] dans [2], nous obtenons :


[6] ∆𝑌 = [∑ 𝑦̅𝑗 ∗ ∆𝑤𝑗 ] + [∑ 𝑤̅𝑗 ∗ ∆𝛼] + [∑ 𝑤𝑗 ∗ 𝑥∆𝛽] + [∑ 𝑤𝑗 ∗ ∆𝜇𝑗 ]

A
B1 B2 B3

Changement
total dans la non Effet de
utilisation de Effet de comportement
composition
préservatif

Cette nouvelle décomposition dite avancée, plus fine, inclut une désagrégation de l’effet de
comportement/performance, et comprend désormais trois sous-composantes, notamment l’effet
de base (B1), l’effet de la différentiation (B2), et l’effet résiduel des autres variables non
considérées (B3). Ces différents effets peuvent être négatifs ou positifs. Un effet positif signifie
que la contribution de la catégorie concernée va dans le sens du changement (positif ou négatif)
de la non utilisation de préservatif observé au niveau national. Un effet négatif traduit le
contraire. En outre, les différents effets en pourcentage peuvent être supérieurs à 100, mais leur
somme est toujours égale à 100. En outre, des pourcentages trop élevés révèlent des
changements insignifiants.
Dans cette analyse, trois variables de classification sont retenues : le niveau de vie, le milieu de
résidence et le niveau d’instruction.

6.4.2.2 Résultats de la décomposition simple

Les résultats de la décomposition simple mettent en exergue la prépondérance de l’effet de


performance ou de comportement des catégories socio-économiques et du milieu de résidence
sur les tendances de la non utilisation de préservatif au cours du dernier rapport sexuel des
jeunes célibataires. En d’autres termes, entre 1998-2011, les changements de comportement des
jeunes sont la principale source des variations enregistrées dans la prévalence de la non
utilisation de préservatif (Tableau 6.5).

200
Plus précisément, la prévalence de la non utilisation du préservatif a connu une baisse d’environ
14% entre 1998-2005, comme le montrent les valeurs négatives de la variation totale.
Globalement, les changements observés résultent essentiellement d’un effet de performance.
Toutefois, il existe quelques spécificités selon les variables de classification. Concernant le
milieu de résidence, il ressort que l’amélioration constatée dans la baisse de la non utilisation
du préservatif chez les jeunes est due à un effet de comportement (101,94%). Ce sont les jeunes
vivant dans les autres villes et ceux d’Abidjan qui ont le plus contribué au changement observé
dans cette baisse (Annexe 25).

S’agissant du niveau de vie, les jeunes résidant dans les ménages pauvres et riches ont
davantage contribué au changement survenu dans le taux de non utilisation de préservatif
(respectivement 65% et 27%). Quant au niveau d’instruction, il suggère qu’une part non
négligeable du changement (environ 23%) est liée à la distribution de l’échantillon. En effet, la
diminution de la proportion de jeunes n’ayant aucun niveau d’instruction et ceux de niveau
primaire (passant de 32,2% à 27,8% et de 34,5% à 26,8% respectivement) qui a engendré la
baisse du non recours au préservatif (Annexe 20).

Concernant la période 1998-2011, le changement global en matière de non utilisation de


préservatif chez les célibataires de 15-24 ans est négatif (traduisant une baisse) quelle que soit
la variable de classification. Cette baisse relative au changement de comportement provient des
jeunes résidant en milieu rural (71,1%), de niveau primaire (71,9%) et issus des ménages
pauvres (73,5%) (Annexe 25).

Pour la troisième période (2005-2011), quelle que soit la variable considérée, les effets de
performance sont supérieurs à 100% (respectivement 264%, 143% et 147% pour le milieu de
résidence, le niveau de vie et le niveau d’instruction). C’est dire que les variations observées au
cours de cette période de référence sont insignifiantes.

En somme, il ressort de la décomposition simple que les tendances observées dans la non
utilisation de préservatif résultent d’un réel changement de comportements des jeunes. Pour la
suite, nous expliquerons ce changement en décomposant dans l’effet de performance la part
imputable à la performance de base, celle provenant à l’effet de différentiation de l’utilisation
de préservatif selon les catégories de populations définies ou celle qui est due aux facteurs
résiduels.

201
Tableau 6.5 : Paramètres de la décomposition simple

Variables Décomposition simple


1998-2005 1998-2011 2005-2011
Composition Performan Changement Compositi Performan Changement Composition Performan Changement
ce total on ce total ce total
Milieu de -1,94 101,94 -14,03 10,46 89,54 -13,02 -164,32 264,32 1,01
résidence
Niveau de vie 5,06 94,94 -13,97 6,11 93,89 -13,17 -43,21 143,21 0,80

Niveau 22,90 77,10 -13,98 27,84 72,16 -12,65 -47,04 147,04 1,34
d’instruction

6.4.2.3 Résultats de la décomposition avancée de l’effet de performance

L’analyse de la dynamique de la non utilisation de préservatif permet de distinguer les


périodes 1998-2005 et 1998-2011 de celle de 2005-2011.

Il ressort des résultats de la décomposition avancée que le changement observé et imputable à


l’effet de performance, au niveau de la première période (1998-2005 et 1998-2011), provient
de la performance de base. Autrement dit, la variation de la non utilisation de préservatif au
cours de ces deux périodes d’observation s’explique par un mouvement d’ensemble dans toutes
les catégories sociales de jeunes. En effet, la contribution de l’effet de base dans la baisse de ce
comportement sexuel à risque varie de 63,7% à 99,1% pour la période 1998-2005 et de 84,6%
à 116% entre 1998-2011 (Tableau 6.6). C’est donc le résultat des politiques mises en place en
matière de prévention et de lutte contre le Sida qui est à l’origine des changements des tendances
du non usage du préservatif. Plus concrètement, il pourrait s’agir du maintien de la lutte contre
le Sida dans l’agenda politique du gouvernement ivoirien, de l’amélioration de l’accessibilité
géographique et financière des préservatifs,61de l’intervention plus coordonnée des partenaires
au développement (partenaires techniques et financiers), etc. Suite à la crise militaro-politique
ayant occasionné une situation d’urgence humanitaire dans les zones CNO, ces partenaires ont
augmenté leur financement dans la lutte contre le Sida permettant d’accroître les actions de
prévention (campagne de sensibilisation, de dépistage de masse, etc.). En somme, la
performance des politiques de prévention du VIH/Sida est la principale source des changements
des niveaux du non recours au préservatif.

61
Le marketing social des préservatifs, une des interventions majeures de prévention, a permis de rendre disponible
et accessible le préservatif « Prudence » sur des points de ventes de natures diverses (grande surfaces, tabliers,
stations services, etc.).

202
Pour la seconde période (2005-2011), alors que la performance de base est en grande partie
responsable de la stagnation de la prévalence de la non utilisation de préservatif concernant le
niveau de vie, pour le milieu de résidence et le niveau d’instruction, c’est l’effet de
différenciation qui en est la cause. C’est dire que pour ces deux variables, les différences de
comportements spécifiques sont à l’origine du changement observé. Ainsi, la constance
enregistrée est due à une augmentation du non usage de préservatif aussi bien chez les jeunes
résidant dans les autres villes (contribution de 1004%) que parmi les plus instruits (contribution
de 227%) (Annexe 25). Toutefois, les jeunes n’ayant aucune instruction et ceux de niveau
primaire ont des comportements qui ont contribué à faire baisser la prévalence des rapports
sexuels non protégés (respectivement -107% et -20%). Par ailleurs, le contexte a contribué à
retarder la hausse de la non utilisation du préservatif avec un effet de base de -118% et environ
-135% pour respectivement le milieu de résidence et le niveau d’instruction.

Aussi, notons que les facteurs résiduels sont importants pour le milieu de résidence et le niveau
de vie (respectivement 106,3% et 66,5%), témoignant de la non prise en compte d’une grande
contribution d’autres variables explicatives dans l’analyse (Tableau 6.6).

Tableau 6.6 : Paramètres de la décomposition avancée du non usage de préservatif

Effet de performance
1998-2005
Variables Base Différentiation Résidus
Milieu de résidence 99,06 -0,77 3,64
Niveau de vie 91,63 1,55 1,75
Niveau d’instruction 63,65 14,08 -0,63
1998-2011
Milieu de résidence 116,01 -22,18 -4,28
Niveau de vie 69,12 24,22 0,56
Niveau d’instruction 84,61 -11,43 -1,02
2005-2011
Milieu de résidence -118,25 276,32 106,25
Niveau de vie 461,17 -384,49 66,53
Niveau d’instruction -134,77 277,13 4,67

En définitive, cette section a permis d’examiner les sources des changements dans l’évolution
du non recours au préservatif. La décomposition simple révèle la prépondérance du changement
de comportement dans les tendances de la non utilisation de préservatif. Quant à la
décomposition avancée, elle indique que c’est la performance de base, liée à l’efficacité des
programmes nationaux de lutte contre le Sida, qui est l’origine de l’amélioration des pratiques
préventives au cours des périodes (1998-2005 et 1998-2011). Pour la période la plus récente

203
(2005-2011), à l’exception du niveau de vie, les changements différentiels contribuent
fortement à la constance dans le non usage de préservatif. Ainsi, notre hypothèse 1 se trouve en
partie vérifiée.

Si cette méthode a permis de comprendre la source du changement social, elle demeure une
solution partielle, qui n’offre qu’un début d’explication au phénomène étudié. Cette analyse
n’est donc pas suffisante pour comprendre les facteurs associés au non recours du préservatif.
En effet, l’adoption de ce comportement sexuel à risque peut être corrélée aux caractéristiques
du ménage et des jeunes qu’il s’agit de contrôler d’où l’emploi des modèles multivariés.

6.4.3 Analyse multivariée : à la recherche des déterminants du non usage de préservatif

Dans cette partie, l’objectif est d’identifier les facteurs explicatifs de la non utilisation du
préservatif chez les jeunes. Trois modélisations économétriques sont réalisées avec les bases de
données de 1998, 2005 et 2011. Toutefois, l’analyse est faite sans la variable connaissance
complète. Comme nous l’avons signifié dans le chapitre 3, les informations permettant la
construction de la variable connaissance complète ne sont pas disponibles dans la base de 1998.
En plus, cette variable est fortement corrélée avec le niveau d’instruction. La relation entre ces
deux variables est très significative au seuil de 1% (en 2005 et 2011).

6.4.3.1 Présentation du modèle

Contrairement aux variables continues, pour lesquelles l’estimation se fait par les moindres
carrés ordinaires (MCO), les variables qualitatives, qui ne prennent qu’un nombre fini de
valeurs, exigent un traitement particulier. De ce fait, elles ne peuvent être traitées de la même
manière que les variables quantitatives au risque d’avoir des estimateurs biaisés et non
convergents.

Dans notre cas, la variable à expliquer c’est-à-dire la non utilisation de préservatif au dernier
rapport sexuel prémarital est une variable qualitative dichotomique qui prend la valeur 1, si
l’individu n’a pas eu recours au préservatif, et 0 sinon. Les variables explicatives, matérialisées
par le vecteur X, peuvent être qualitatives ou quantitatives. Ne pouvant pas trouver directement
la distribution de probabilité suivie par les données, le modèle se propose de lier la variable
dépendante aux variables explicatives au travers d’une variable latente inobservable, dont Y est
supposée être la manifestation. Le modèle est spécifié comme suit :

204
1 𝑠𝑖 𝑌𝑖∗ > 𝛿
La variable à modéliser 𝑌𝑖 = { avec 𝑌𝑖∗ = 𝑋𝑖 𝛽 + 𝟄𝑖 où les 𝟄𝑖 sont indépendantes
0 𝑆𝑖𝑛𝑜𝑛
et identiquement distribuées, suivant une loi centrée.

On évalue P (𝑌𝑖 = 1) = 1 − 𝐹(𝛿 − 𝑋𝑖 𝛽). On choisit la fonction logistique. Elle est telle que la
densité est symétrique. La relation précédente devient : 𝑃(𝑌𝑖 = 1) = 𝐹(𝑋𝑖 𝛽 − 𝛿)

En supposant que δ = 0, 𝑃(𝑌𝑖 = 1) = 𝐹(𝑋𝑖 𝛽 ) avec

𝑒𝑥
𝐹(𝑥) = 𝑥
𝑒 +1

6.4.3.2 Résultats de la modélisation économétrique

Pour déterminer les variables à inclure dans les modèles logistiques complets, il existe
généralement deux principales alternatives : d’une part, retenir uniquement les variables
explicatives qui se sont avérées statistiquement associées à la variable dépendante
(Rakotomalala, 2009 ; Kalambayi, 2012) et d’autre part conserver l’ensemble des variables
explicatives y compris celles qui sont non significatives s’il est avéré de façon empirique
qu’elles expliquent le phénomène étudié. C’est cette deuxième option que nous avons choisie.
Par exemple, dans notre cas, l’âge est significatif seulement à 10% en 2011 et non significatif
en 2005 mais cette variable est incluse dans les analyses parce que les comportements sexuels
des individus sont susceptibles de varier selon l’âge.

 Choix du modèle

La modélisation d’une variable dichotomique peut être faite à l’aide d’un modèle logit ou
probit. Ces deux modèles permettent de modéliser les interactions existantes entre une variable
dépendante dichotomique yi et un vecteur de variables aléatoires X= (xi,………..,xk), à la seule
différence, le logit utilise une fonction logistique, et le probit, une fonction probit. L’un de ces
deux modèles rendrait plus vraisemblables les résultats de la modélisation. De ce fait, il est
nécessaire de choisir le meilleur modèle. Dans ce travail, nous optons plutôt pour une
modélisation logistique car des auteurs (Amemiya, 1981 ; Hurlin, 2003 ; Cadoret et al., 2004)
ont montré que les modèles probit et logit donnent des coefficients sensiblement égaux à
facteurs multiplicateurs près. En plus, le logit est plus simple d’interprétation et très utilisé en
épidémiologie.

205
Pour attester ce choix, nous aurons recours au test de Hausman. Lorsque la probabilité de ce
test est inférieure au seuil de 5%, le modèle logit est privilégié, dans le cas contraire, on optera
pour le modèle probit. Les résultats obtenus (Annexes 26, 27 et 28) permettent d’accepter
l’hypothèse selon laquelle le modèle logit est plus efficace aussi bien en 1998 qu’en 2005 et
2011.

 Significativité et qualité d’ajustement des modèles

Les modèles sont globalement significatifs (Chi2>Pr=0,000), ce qui veut dire qu’au moins une
des variables indépendantes influence la non utilisation du préservatif au dernier rapport.

Une fois les modèles estimés, il est important de savoir ou de tester dans quelle mesure ceux-ci
sont adéquats aux données. Pour cela, nous utilisons le test de Hosmer-Lemeshow. Ce test
permet de comparer les fréquences observées et prédites à l'aide d'une statistique de Khi deux.
Sous l'hypothèse nulle (H0) de ce test, les deux proportions sont égales et par conséquent, le
modèle est bien calibré. Au regard des résultats, on peut conclure que les trois modèles sont
bien calibrés. En effet, sur la base des statistiques du chi2 calculée, il n’y a pas assez d’évidence
pour rejeter l’hypothèse nulle d’un bon ajustement des modèles estimés. Ainsi, on accepte
l’hypothèse de bon ajustement H0. Les p-value sont de 0,319 ; 0,865 et 0,884 respectivement en
1998, 2005 et 2011.

Un autre diagnostic consiste à tester la classification des données prédites et à vérifier


l'adéquation des modèles avec les données. Pour ce faire, nous recourons au R2 de count62 qui
donne le taux de bons classements. Ainsi, cette statistique vaut 71,1% en 1998 ; 66,2% en
2005 et 66,3% en 2012. Autrement dit, dans au moins 66% des cas, les modèles des trois
périodes d’étude prédisent bien la non utilisation de préservatif au dernier rapport sexuel
prémarital. C’est dire que nous avons une classification de probabilité de réponse de bonne
qualité.

 Evaluation du pouvoir discriminant des modèles

La courbe ROC (Receiver Operating Characteristic) indique la capacité d’un modèle à


discriminer les observations. Dans notre cas, les aires sous les courbes ROC pour les périodes
1998 à 2011 valent respectivement 0,743 ; 0,711 et 0,723 (Figure 6.5). On peut donc conclure

62
Une valeur élevée de cette statistique indique que, globalement, la classification effectuée est bonne.

206
que les modèles estimés ont un pouvoir discriminant acceptable (Annexe 31). En d’autres
termes, les modèles spécifiés prédisent bien la probabilité de ne pas utiliser de préservatif.

Figure 6.5 : Courbes ROC des modèles de 1998, 2005 et 2011


1.00
0.75
Sensitivity

0.50
0.25
0.00

0.00 0.25 0.50 0.75 1.00


1 - Specificity
Area under ROC curve = 0.7435

 Interprétation des résultats

Les résultats de l’estimation sont présentés aux tableaux 6.7 à 6.9. Il ressort des analyses que
six facteurs déterminent la non-utilisation des préservatifs aux derniers rapports sexuels chez
les jeunes célibataires sexuellement actifs à savoir : le niveau de vie du ménage, le milieu de
résidence, la religion, le niveau d’instruction, le groupe d’âge et le sexe des jeunes, au seuil de
5%.

207
Le niveau de vie apparaît comme un facteur discriminant de la non utilisation de préservatif en
1998 et 2011. Si la relation est inexistante en 2005, on note que le fait de vivre dans un ménage
à condition de vie élevé fait baisser la propension de ne pas faire usage du préservatif au dernier
rapport sexuel. Ainsi, par rapport aux jeunes des ménages riches, ceux des ménages pauvres
ont 1,8 fois plus de risque de ne pas se protéger lors de ce rapport sexuel, aussi bien en 1998
qu’en 2011. Par ailleurs, on note qu’il n’y a pas de différence de comportement entre les jeunes
des ménages pauvres et de ceux de la classe moyenne.

Ces résultats vont dans le sens de la théorie de l’adaptation rationnelle selon laquelle du fait de
leur pauvreté, certains jeunes peuvent s’engager dans des relations sexuelles en vue de résoudre
un problème d’ordre économique ou social. Dans ces conditions, l’usage du préservatif pendant
les rapports sexuels devient hypothétique puisqu’il sera fonction du gré de celui qui a le pouvoir
économique. C’est également ce que confirment Moloua et al., (2004 p.243) lorsqu’ils
écrivent : « la dépendance économique enlève aux jeunes qui en sont victimes le pouvoir
d’exercer un contrôle sur les modalités du déroulement de l’acte sexuel. Ils peuvent ainsi être
contraints à avoir des rapports sexuels non protégés, selon la volonté du partenaire qui exerce
sa domination ». D’autres travaux comme ceux de Talnan et al, (2004) corroborent la thèse
selon laquelle les individus menacés par la précarité sont vulnérables lors des rapports sexuels
et sont susceptibles de ne pas utiliser le préservatif. Pour Desgrées du Loû, (2000) l’échange
des rapports sexuels contre un soutien matériel ou financier réduit la marge de manœuvre pour
exiger l’utilisation de préservatif. Même lorsque les jeunes ont des doutes sur la sexualité de
leur partenaire (le plus souvent plus âgé), il leur est difficile d’imposer des rapports protégés.

En revanche, Rwenge (2003), en étudiant la relation entre pauvreté et comportements sexuels


à risque chez les jeunes de Bamenda (Cameroun), est parvenu à une conclusion quelque peu
différente. Il avait trouvé que le fait de vivre dans un ménage pauvre était positivement associé
à la probabilité d’être sexuellement actifs, d'avoir plus d'un partenaire sexuel et d'avoir eu des
relations sexuelles occasionnelles. Par contre, il a montré que la pauvreté n’était pas associée à
la probabilité de non utilisation de préservatif.

Le milieu de résidence au moment de l’enquête influence les comportements des individus. En


effet, le changement de résidence peut entraîner une modification des acquis du milieu de
socialisation d’où l’intérêt de sa prise en compte dans cette analyse. Ici, on note qu’il
détermine le non recours au préservatif au dernier rapport sexuel des jeunes célibataires en 2005

208
et 2011. En 1998, la relation n’est pas significative. C’est dire que les jeunes de la capitale, des
autres villes et du milieu rural sont indifféremment touchés par cette pratique à risque. Cela
pourrait s’expliquer par le fait qu’au cours de cette période, toutes les localités étaient logées à
la même enseigne en matière d’offre et de disponibilité de contraceptifs y compris les
préservatifs. Avec l’amélioration de l’accessibilité géographique et financière dans le recours
aux préservatifs, les écarts vont se creuser entre milieu urbain et rural.

En 2005 et 2011, on constate que l’urbanisation contribue à faire baisser la propension du non
usage de préservatif (les effets marginaux). Ainsi, en 2005, comparativement aux jeunes
d’Abidjan, ceux du milieu rural ont 1,7 fois plus de risque de ne pas utiliser le préservatif. La
situation s’est légèrement améliorée en 2011 au profit du milieu rural. Ainsi, au seuil de 5%,
les ruraux courent 1,5 fois plus de risque de ne pas se protéger lors des relations sexuelles (odds
ratio=0,649). Ces résultats mettent en exergue le fait que le réseau de distribution des
préservatifs est certes bien implanté dans les villes mais reste peu efficace en milieu rural. En
Côte d’Ivoire, le programme de Marketing Social mis en œuvre par l’AIMAS, diffuse près de
trente millions de préservatifs par an mais il se concentre essentiellement sur les villes d’où la
sollicitation du pays à l’aide du fonds mondial pour permettre l’extension de la promotion de
l’utilisation du préservatif au milieu rural63.

Le sexe a une influence sur la non utilisation de préservatif lors du dernier rapport sexuel
prémarital. Ainsi, les individus de sexe masculin ont une propension plus faible à ne pas faire
usage du préservatif (comme le montre le signe négatif de l’effet marginal dans les trois
modèles). Autrement dit, les jeunes filles sont plus enclines à adopter ce comportement sexuel
à risque que les garçons. En effet, aux derniers rapports sexuels, elles ont respectivement 3,4 ;
1,4 et 2,6 fois plus de risque de ne pas utiliser de préservatif que les garçons en 1998, 2005 et
2011. Ce résultat va dans le sens attendu. Les rapports de genre sont à prendre en compte dans
le domaine de la sexualité. Au sein d’une relation, les rapports de pouvoir placent les individus
de sexe féminin en situation de plus grande vulnérabilité. Selon plusieurs auteurs (Desgrées du
Loû, 2000 ; Talnan et al., 2004), c’est leur dépendance économique qui compromettrait leur
aptitude à exiger des rapports sexuels protégés. Refuser des relations sexuelles non protégées
peut fréquemment entraîner des situations de conflits voire de séparation.

63
Formulaire de la Côte d’Ivoire 2002, Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme

209
Le groupe d’âge a un pouvoir de prédiction sur la probabilité de ne pas faire usage du préservatif
uniquement en 2011. Il ressort qu’être un jeune de la tranche d’âge 20-24 ans accroît la
propension de ne pas utiliser les préservatifs. Ainsi, ces derniers ont 1,5 fois de risque d’adopter
ce comportement à risque que leurs cadets c’est-à-dire les adolescents (15-19 ans). Cela pourrait
s’expliquer par le fait que plus l’âge augmente, les jeunes acquièrent d’importantes expériences
sexuelles, plus la crainte de s’infecter disparaît dans le temps. Une sorte de sentiment
d’invincibilité s’empare d’eux au fil des relations amoureuses.

En matière de comportement sexuel, le niveau d’instruction apparaît comme une variable très
discriminante. En effet, l’augmentation de l’instruction s’accompagne de changement de
comportement dans divers domaines dont la sexualité. Mieux, plus le niveau d’instruction
s’élève, plus la propension à ne pas utiliser les préservatifs lors des rapports sexuels baisse.
Ainsi, en 1998, les résultats économétriques indiquent que par rapport aux jeunes de niveau
secondaire ou plus, le risque de ne pas utiliser de préservatif est respectivement 2,6 et 1,7 fois
plus important chez les jeunes n’ayant aucun niveau et primaire. C’est cette même tendance qui
est observée quelle que soit la période d’observation (odds ratio=3,2 et 1,9 en 2005 et odds =2,6
et 1,5 en 2011).

La religion est un facteur du non recours au préservatif chez les jeunes célibataires en 2005 et
2011. Comme on s’y attendait, l’adoption de ce comportement à risque est plus fréquente parmi
les jeunes de confession musulmane. En 2005, ils avaient 1,5 fois plus de risque de ne pas
utiliser les préservatifs que les catholiques. Par contre, il n’existe pas de différence significative
entre les jeunes protestants, animistes/sans religion et les musulmans. En 2011, la situation est
quelque peu différente. On note que les jeunes protestants et adeptes d’une religion
traditionnelle ou ceux n’appartenant pas à une confession religieuse couraient plus de risque
d’avoir un dernier rapport sexuel non protégé comparativement à leurs homologues musulmans.
Cela pourrait s’expliquer par la non observation des recommandations faites par les leaders
religieux.

L’exposition aux médias est un facteur discriminant de la non utilisation du préservatif


seulement en 2005. En d’autres termes, le fait d’écouter la radio, lire les journaux/magazines
ou regarder la télévision diminue les risques d’avoir des relations sexuelles sans préservatif.
Ainsi, les jeunes qui ne sont pas exposés à ces médias, en 2005, ont une propension 4,4 fois
plus importante de ne pas faire usage du préservatif par rapport à ceux qui ont eu accès à ces
médias. Ces résultats mettent en évidence l’impact des médias dans les campagnes de

210
sensibilisation et de prévention. En Côte d’Ivoire, des émissions, des spots publicitaires chocs
(avant les programmes de grande audience), des téléfilms (par exemple la série ivoirienne culte
« Sida dans la cité ») diffusés par les médias ont probablement améliorés les pratiques
préventives de la population notamment juvénile. Toutefois, les médias peuvent avoir une
double influence c’est-à-dire d’une part, contribuer à accroître les connaissances sur le Sida et
favoriser l’utilisation des préservatifs et d’autre part, jouer un rôle négatif. En effet, l’exposition
à certains messages télévisuels ou virtuels pervers comme ceux transmis par les films à
caractère sexuel voire pornographiques peut amener à adopter des comportements sexuels à
risque comme le non recours de préservatifs (Kobelembi, 2005 ; Rwenge 2012).

Tableau 6.7: Estimation du modèle logit du non recours au préservatif en 1998

Variables Odds Ratio P>z Effets marginaux


Niveau de vie
Pauvre MR
Moyen 1,038 0,884 0,008
Riche 0,552 0,017 -0,131
Milieu de résidence
Abidjan 0,701 0,119 -0,077
Autres villes 0,696 0,168 -0,080
Rural MR
Sexe
Garçon 0,294 0,000 -0,278
Fille MR
Groupe d’âge
15-19 ans 1,125 0,515 0,025
20-24 ans
Niveau d'Instruction
Aucun 2,574 0,000 0,188
Primaire 1,662 0,016 0,106
Secondaire ou plus MR
Religion
Musulman MR
Catholique 0,675 0,110 -0,086
Protestant 0,778 0,362 -0,055
Animiste/sans religion 1,077 0,791 0,016
Exposition aux médias
Pas exposé 1,203 0,577 0,039
Exposé MR
Constant 3,278 0,001 -

211
Tableau 6.8 : Estimation du modèle logit du non recours au préservatif en 2005

Variables Odds Ratio P>z Effets marginaux


Niveau de vie
Pauvre MR
Moyen 0,771 0,085 -0,065
Riche 0,834 0,287 -0,045
Milieu de résidence
Abidjan 0,588 0,000 -0,132
Autres villes 0,667 0,026 -0,101
Rural MR
Sexe
Garçon 0,724 0,041 -0,080
Fille MR
Groupe d’âge
15-19 ans 0,812 0,183 -0,052
20-24 ans MR
Niveau d'Instruction
Aucun 3,370 0,000 0,284
Primaire 1,958 0,000 0,163
Secondaire ou plus MR
Religion
Musulman MR
Catholique 0,648 0,048 -0,108
Protestant 0,853 0,533 -0,040
Animiste/sans religion 0,796 0,301 -0,057
Exposition aux médias
Pas exposé 4,389 0,000 0,313
Exposé MR
Constant 1,501 0.048

212
Tableau 6.9 : Estimation du modèle logit du non recours au préservatif en 2011

Variables Odds Ratio P>z Effets marginaux


Niveau de vie
Pauvre MR
Moyen 1,015 0,917 0,004
Riche 0,555 0,000 -0,146
Milieu de résidence
Abidjan 0,649 0,002 -0,108
Autres villes 0,615 0,000 -0,121
Rural MR
Sexe
Garçon 0,385 0,000 -0,234
Fille MR
Groupe d’âge
15-19 ans 0,662 0,001 -0,102
20-24 ans MR
Niveau d'Instruction
Aucun 2,645 0,000 0,230
Primaire 1,465 0,001 0,094
Secondaire ou plus MR
Religion
Musulman MR
Catholique 1,245 0,095 0,054
Protestant 1,473 0,004 0,095
Animiste/sans religion 1,686 0,000 0,127
Exposition aux médias
Pas exposé 1,253 0,174 0,056
Exposé MR
Constant 1,816 0,002 -

Conclusion du chapitre 6
Le préservatif joue un rôle de protection indéniable dans la transmission sexuelle du VIH/Sida.
Ainsi, son utilisation contribue au recul de cette épidémie comme ce fut le cas dans les pays de
forte prévalence notamment en Afrique du sud, au Zimbabwe et en Ouganda (Denis, 2006 ;
Halperin, 2011). A l’échelle mondiale, on note une tendance à la hausse de l'usage du préservatif
ces vingt dernières années même si des différences subsistent selon les contextes. Si en Europe
et en Amérique Latine, l'usage d'un préservatif lors du dernier rapport sexuel chez les jeunes
âgés de 15 à 24 ans atteint plus de 80%, dans certains pays d'Afrique de l'Ouest, il est moins de
30% (ONUSIDA, 2015). Ce faible niveau d'utilisation du préservatif explique la difficulté à
contrôler l'épidémie en Afrique.

213
En Côte d’Ivoire, la proportion de jeunes célibataires n’ayant pas fait usage du préservatif lors
du dernier rapport sexuel reste élevée. L’amélioration des taux d’utilisation du préservatif, passe
par une compréhension des facteurs qui font blocage et annihilent tous les efforts consentis dans
la lutte contre cette pandémie. S’inscrivant dans cette perspective, ce chapitre traite d’une part,
les sources du changement observé dans la non utilisation du préservatif et d’autre part, les
déterminants.
Les résultats obtenus soulignent une baisse et une situation quasi stationnaire de la non
utilisation du préservatif chez les jeunes âgés de 15-24 ans entre 1998-2011. Ces tendances
enregistrées seraient donc dues à un réel changement de comportement des jeunes. La
décomposition avancée a révélé des changements de comportement d’ensemble mais aussi un
effet de différenciation des groupes de jeunes, notamment les plus instruits et ceux vivant dans
les autres villes.

En sus, l’analyse des déterminants a montré que les facteurs contextuels et individuels
influencent le non recours au préservatif au dernier rapport sexuel prénuptial. Par ailleurs, cette
recherche révèle qu’il y a toujours un problème d’acceptabilité d’une utilisation systématique
du préservatif au sein de la population juvénile africaine. Alors que dans les générations les
plus anciennes l’aspect contraceptif associé obligatoirement à l’action de prévention du
préservatif soit un amalgame qui dérange profondément (Maman, 1994) et réduit son utilisation,
chez les jeunes, on note plutôt un climat d’insouciance et un manque de conscience du risque.
Comme le souligne Sidaction, avec les traitements antiretroviraux, on ne meurt plus du Sida
comme par le passé, du coup les jeunes s’en méfient moins et adoptent des comportements qui
les exposent au risque de contamination. Par exemple, en France, le nombre de découvertes de
séropositivité chez les jeunes de 15-24 ans est en nette augmentation depuis 200764. En effet,
cette génération n’a pas connu les années sombres où le système de santé à l’échelle mondiale
était impuissant face à cette épidémie et les malades plongés dans un tourbillon morbide et
mortel. Si l’on veut interrompre la propagation du VIH/Sida, il faut développer des stratégies
de lutte mettant davantage l’accent sur les jeunes (UNICEF et al.,2002). Pour Baya et Meda
(2001), les chances de succès de la lutte contre cette pandémie semblent être plus grandes dans
cette sous population, contrairement aux adultes dont les comportements sexuels déjà acquis
sont plus difficiles à changer.

64
http://presse.Sidaction.org/communique/62460/Sondage-Ifop-jeunes-l-information-prevention-du-Sida

214
Conclusion générale

Depuis la CIPD, la sexualité des adolescents et des jeunes n’a cessé de susciter l’attention de la
communauté internationale, des Etats et des chercheurs. Cet intérêt se trouve renforcer avec la
propagation de VIH/Sida. Dans les pays où la maladie s’est généralisée, le moteur de la
diffusion épidémique est souvent les jeunes. Ils n’ont jamais été autant au cœur de la pandémie
du VIH, en Afrique subsaharienne, où en majorité, les nouvelles infections se produisent dans
cette tranche d’âge. Outre les infections sexuellement transmissibles, les jeunes s’exposent à
des grossesses non prévues et à des avortements réalisés le plus souvent dans des conditions
non sécurisées. Dans de nombreux pays, la santé sexuelle et reproductive des adolescents et des
jeunes est au centre des politiques gouvernementales, en raison de leur importante contribution
à la dynamique démographique du continent africain, de leur vulnérabilité particulière aux
risques sexuels face au VIH/Sida65, leur rôle moteur dans le changement de comportement
(parce qu’ils sont plus réceptifs aux changements que les adultes, notamment à travers
l’Information Education Communication), et enfin parce que les progrès observés dans leurs
comportements peuvent être un moyen d’évaluation des programmes de prévention du
VIH/Sida.

Les travaux antérieurs portant sur l’Afrique subsaharienne mettent en évidence une
augmentation de la sexualité prémaritale, une sexualité de plus en plus précoce, un recours
fréquent au multipartenariat et aux partenaires occasionnels et une faible protection des rapports
sexuels. Dans la littérature, les auteurs s’accordent globalement sur deux principales approches
explicatives qui sous-tendent les comportements sexuels à risque des jeunes : l’adaptation
rationnelle et la désorganisation sociale. Ainsi, les jeunes s'engageraient dans la sexualité pour
atteindre des objectifs bien précis, notamment économique ou social, d’une part, et de l’autre
leur comportement serait le résultat de l'affaiblissement des structures traditionnelles et du
relâchement du contrôle des aînés sur les cadets. Notre recherche se veut une contribution à
l’amélioration des connaissances sur la sexualité à risque des jeunes au temps du Sida. Avant
de reprendre les principaux résultats de ce travail et les enjeux qu’il soulève, il est important de
revenir sur les limites et les apports.

65
Ce risque est étroitement lié à l’âge des premières relations sexuelles. Plus il est précoce plus l’entrée dans
l’univers sexuel risque de se faire sans préservatif, la plupart ignorant encore comment se protéger. Cette période
est également marquée par un changement fréquent de partenaires.

215
Limites de l’étude

Comme toute recherche, ce travail comporte des limites qu’il faut considérer dans
l’interprétation ou la comparaison des résultats avec d’autres études. La première est inhérente
à la nature transversale des données quantitatives sur lesquelles se base notre recherche. A
l’instar de cette thèse, la très grande majorité des travaux menés sur la santé sexuelle et
reproductive des jeunes, en Afrique subsaharienne, reposent sur les EDS, les EIS et les enquêtes
CAP, nombreuses et facilement accessibles. Bien que les données de ces enquêtes rendent
possible l’étude des comportements sexuels, elles restent partielles du fait de leur caractère
transversal.
Par exemple, si on peut étudier le comportement sexuel prémarital « chez les jeunes
célibataires », il est impossible de l’appréhender chez ceux qui sont en union au moment de
l’enquête (Beninguisse, 2007). Le caractère transversal créé donc un effet de sélection au niveau
de l’échantillon. De même, les variables explicatives66enregistrées au moment des enquêtes ont
dû probablement changer depuis l’occurrence du premier ou dernier rapport sexuel, que l’on
veut analyser. Il est donc préférable d’être prudent dans leurs interprétations ou comparaisons
avec d’autres études.

La seconde limite réside dans la fiabilité des données sur la sexualité, sujet encore tabou en
Afrique. A la différence de la plupart des interactions sociales, il est impossible d’observer
directement les comportements sexuels, alors comment peut-on les appréhender lors des
opérations de collectes des données ? Comment juger de la sincérité des informations collectées
sur la sexualité des jeunes quand on ne peut pas observer les déclarations mais plutôt les
comportements ? Les auteurs sont unanimes (Giami, 2004 ; Jaspard, 2005 ; Bozon, 2015) sur
le fait que la comparabilité des données des enquêtes sur la sexualité reste limitée et délicate,
en raison d’une certaine suspicion à l’encontre de la fiabilité des réponses. Il est difficile de
contourner le problème de déclarations normatives, d’autant plus qu’en fonction du modèle
culturel de la société, l’individu aura tendance à produire une image de sa vie sexuelle proche
de ce qu’il pense être la norme sociale.

66
Les caractéristiques individuelles (la religion, le niveau d’instruction, l’état matrimonial le et celles du ménage
(le milieu de résidence et le niveau de vie) peuvent fortement variées dans le temps. Il est donc difficile d’expliquer
le calendrier précoce de l’initiation sexuelle intervenue des années auparavant par des variables explicatives
mesurées par exemple en 2017.

216
La troisième limite est liée à l’absence de certaines variables. Des questions plus précises sur
le contexte d’entrée en sexualité et l’environnement familial auraient permis de conduire des
analyses plus fines. Les enquêtes quantitatives utilisées ne couvrent pas les volets extrafamilial
et psychosocial qui occupent un pan important dans l’explication des comportements à risque.
Par exemple, la décision de recourir ou non au préservatif peut être influencée par des facteurs
psychologiques comme l’estime de soi, la recherche d’un statut valorisant, l’importance
accordée à l’opinion d’autrui, le désir réel de maternité pour s’affirmer, etc. Des travaux ont
montré qu’une faible estime de soi est liée à des comportements sexuels à risque, vu que
l’attitude de ces jeunes va davantage dépendre de l'approbation de leurs partenaires et donc
incapables d’affirmer leurs propres volontés.

La quatrième limite est relative à des problèmes d’ordre méthodologique. La mesure de la


typologie des ménages construite à partir du lien de parenté avec le chef ne permet pas d’en
saisir tous les mécanismes car comme l’ont souligné Tichit et Robette (2008), les EDS ne
collectent que des données rudimentaires sur les liens familiaux. Elles ont plutôt été conçues
pour l’étude de la fécondité, la mortalité infantile et leur suivi mais elles demeurent limitées
dans l’exploitation secondaire d’autres thématiques. Prenons le cas des ménages
monoparentaux constitués d’un chef de ménage, de ses enfants et éventuellement des personnes
apparentées ou non. La monoparentalité est une caractéristique des ménages dirigés par des
femmes. Dans sa construction, on n’intègre pas l’état matrimonial alors que certaines de ces
femmes chefs de ménages sont mariées, en couples, divorcées, célibataires, traduisant ainsi des
situations plurielles dans la catégorisation de famille monoparentale. Au-delà de l’autonomie
résidentielle, est-ce qu’elles ont une autonomie financière et un pouvoir de décision ? En réalité,
certains de ces ménages ne sont que des ménages polygames sans corésidence ou de ménages
« bureaugamiques »67, de décohabitation professionnelle, etc. Des entretiens méritent d’être
conduits en vue de qualifier la réalité autour de cette configuration familiale.

En dépit de ces quelques limites, cette recherche apporte d’importantes contributions qui
méritent d’être relevées.

67
Ce terme renvoie au deuxième bureau ou maîtresse des hommes en milieu urbain africain. C’est une forme de
polygamie où l’épouse ne connaît pas l’existence du second ménage de son mari. Pour plus d’information sur le
sujet, on peut lire Mbambi, 2005.

217
Combinaison de sources de données

Trois sources de données ont été mobilisées dans le cadre de cette thèse. Les données des
EDS/EIS à notre disposition ont permis d’étudier les comportements sexuels à risque
notamment la multiplicité des partenaires sexuels et la non utilisation du préservatif. Mais pour
comprendre en profondeur la dynamique entre ces comportements et les mutations sociales,
économiques en Côte d’Ivoire, les EDS ne semblent pas adéquates. Des auteurs recommandent
de recourir aux enquêtes de type biographique spécialement conçu à dessein qui restitueront
intégralement le contexte familial, culturel, économique.

Nous avons donc réalisé une enquête quantitative, d’envergure nationale, auprès des jeunes du
milieu rural. En dehors des enquêtes réalisées dans le cadre des vastes programmes
internationaux, la majorité des études se focalise sur les grandes villes ivoiriennes ou sur des
populations spécifiques (jeunes scolarisés, les jeunes filles, etc.) pour analyser le comportement
sexuel et reproductif des jeunes, d’où le choix du milieu rural. Même si on a atteint une taille
d’échantillon suffisante, les informations recueillies restent limitées pour comprendre le
contexte de la sexualité des jeunes. La principale contrainte étant que l’enquête était
commanditée et financée par un tiers donc il nous était impossible d’utiliser notre questionnaire
initial.

Et enfin, des entretiens qualitatifs ont été réalisés dans la ville d’Abidjan auprès de jeunes
multipartenaires pour rendre compte des facteurs sociologiques pouvant expliquer ce
comportement à risque. Il s’agit là de dépasser l’aspect quantitatif et de s’intéresser au vécu et
aux significations que les individus donnent à leur pratique. Ces entretiens ont permis
d’approfondir la compréhension des résultats établis à partir des données quantitatives.

Mais quel est l’intérêt d’associer toutes ces sources de données ? La sexualité est un phénomène
complexe et multidimensionnel qu’il faut appréhender dans une perspective pluridisciplinaire.
Si le quantitatif a permis d’avoir le niveau, les tendances et les déterminants des comportements
sexuels à risque des jeunes, le qualitatif a tenté de mobiliser les trajectoires familiales,
affectives, sexuelles et sociales. C’est donc cette triangulation des approches quantitative et
qualitative que notre travail a essayé modestement de mettre en avant.

Utilisation adéquate d’un ensemble de méthodes statistiques

Dans la littérature, la régression logistique est le modèle multivarié couramment utilisé pour
identifier les facteurs associés aux comportements sexuels à risque. Toutefois, ce modèle

218
s’avère inapproprié lorsque les échantillons sont déséquilibrés comme c’est souvent le cas avec
le multipartenariat sexuel des jeunes de 15-24 ans. Par exemple, au Burkina Faso, 94% des
garçons et 99,1% des filles ne sont pas multipartenaires.68 Du coup, les modélisations logit
faites par les auteurs sous-évaluent la probabilité des événements rares (Rwenge, 2013 ; Talnan
et al., 2004 ). L’une des contributions de cette thèse est qu’elle utilise un ensemble de modèles
binaires (Régression logistique, Relogit, Probit) adaptés aux données disponibles, pour chaque
phénomène, dans le but d’augmenter la validité des résultats obtenus et la robustesse des
coefficients estimés.

Principaux résultats : des comportements sexuels à risque toujours présents parmi les
jeunes

Calendrier d’entrée dans la vie sexuelle : quand la précocité rime avec l’absence de protection

Longtemps régies par un modèle traditionnel d’entrée dans la vie sexuelle prônant un mariage
précoce des filles, interprété comme moyen de régulation de la sexualité, les sociétés africaines
font face à des mutations économiques et sociales. Conséquence de l'érosion des valeurs
traditionnelles ou de l’augmentation de la scolarisation, l’activité sexuelle prénuptiale s’inscrit
dans une rupture complète avec les traditions passées. Ces évolutions sociales ont littéralement
affaibli tout contrôle social sur la sexualité des jeunes. Ils entrent désormais plus tôt en sexualité
sans être mariés, confirmant le recul de l’âge au premier mariage conjugué au maintien de la
précocité du premier rapport. L’allongement de la période de célibat signifie pour ces jeunes
plus d’opportunités de vie amoureuse prémaritale et d’expériences plus diversifiées
qu’autrefois (Adjamagbo et al., 2013). Dans ces relations sexuelles hors mariage, les jeunes y
voient une sorte de stratégies ayant diverses finalités (matrimoniale, financière, matérielle, etc.).

Nos analyses indiquent que les rapports sexuels avant le mariage sont devenus une chose
courante en milieu rural ivoirien et que le calendrier des débuts est beaucoup plus précoce chez
les garçons. Dans les discours normatifs, sans cesse, martelé par les programmes de prévention
du VIH/Sida chez les jeunes figure le report des premières relations sexuelles. L’une de nos
questions de recherche pourrait apporter des éléments de réponses : les jeunes entrant plus tôt
en sexualité, ont-ils, toutes choses égales par ailleurs, une plus grande propension à avoir des
rapports sexuels non protégés, par rapport à ceux qui y entrent plus tardivement ?

68
L’EDS 2010 du Burkina Faso donne le pourcentage d’adolescents et de jeunes ayant des rapports sexuels avec
au moins deux personnes : garçons (15-19 ans : 2%, 20-24 ans : 11,5% et 15-24 ans : 6%) et filles (15-19 ans :
0,9%, 20-24 ans : 0,9% et 15-24 ans : 0,9%).

219
Les résultats ont révélé que les jeunes qui s’initient précocement à la sexualité ont une plus
grande probabilité de ne pas utiliser de préservatif au moment de cette occurrence. Ces résultats
rejoignent ceux trouvés, en Afrique du Sud, par Pettifor et al. (2010) à la différence que les
premiers rapports sexuels ont été catégorisés selon qu’ils aient été forcés ou non. Il ressort que
les femmes qui n’ont pas été forcées et qui ont eu des premiers rapports précoces sont plus
susceptibles de n’avoir utilisé le préservatif que celles non forcées dont les premiers rapports
sont survenus plus tardivement. Ainsi, une entrée en sexualité plus tardive permettrait aux
jeunes d’acquérir au préalable la maturité physique et sociale pour se protéger contre les risques
d’infection à VIH.

Usage des préservatifs : progrès et stagnation

En Afrique, les rapports sexuels des jeunes célibataires sont peu protégés. Cependant, des
données récentes témoignent de l’amélioration de leurs comportements préventifs (Rwenge,
2013). En effet, l’augmentation de l'utilisation du préservatif est observée dans le monde entier,
surtout chez les jeunes et les professionnelles du sexe. L’Afrique n’est pas en reste de cette
dynamique.

Les analyses ont mis en lumière le fait qu’en Côte d’Ivoire la proportion des jeunes ayant eu un
dernier rapport sexuel prénuptial non protégé a sensiblement baissé entre 1998 et 2005 mais
elle est restée constante entre 2005 et 2011. L’explication viendrait d’une part, de l’engagement
du gouvernement ivoirien dans la lutte contre le Sida à travers la création d’un ministère ayant
permis de planifier, orienter et coordonner les programmes et aussi de mobiliser les fonds, et
d’autre part, l’appui de nombreuses ONG nationales et internationales dans les activités de
prévention. Mais les crises militaro-politiques successives ont compromis les progrès réalisés.
Ce travail s’est fixé pour objectif de comprendre si la dynamique dans le non usage du
préservatif est à mettre à l’actif des changements dans la taille ou la structure des échantillons
des différentes enquêtes ou dans les comportements. La méthode de décomposition, technique
permettant d’analyser les changements sociaux, a révélé que les évolutions observées dans les
prévalences de la non utilisation de préservatif au dernier rapport sexuel sont le fait d’un réel
changement de comportement des jeunes attribuable vraisemblablement au succès des
politiques de prévention. Si cette méthode permet de connaître la source du changement, elle
n’offre qu’un début d’explication d’où la nécessité d’identifier les facteurs pouvant influencer
significativement le non usage de préservatif. Il s’agit notamment des facteurs individuels (le

220
sexe, l’âge, le niveau d’instruction, l’exposition aux médias, la religion) et contextuels (le
milieu de résidence et le niveau de vie).

Niveau de vie et rapport sexuel non protégé

L’analyse a aussi permis de confirmer l’idée selon laquelle des conditions économiques de vie
difficile peuvent conduire les jeunes à une sexualité à risque. Ce lien a été empiriquement établi
dans de nombreuses recherches. D’après les tenants de cette thèse, les jeunes des ménages
pauvres s’adonnent à la sexualité dans le but de se procurer des cadeaux ou de l’argent pour
subvenir à leurs besoins. A l’opposé, le dernier rapport sexuel prénuptial est protégé lorsque les
conditions de vie sont meilleures.

La longue crise qu’a connu le pays a aggravé la situation de pauvreté surtout parmi les jeunes.
Selon l’enquête sur le niveau de vie des ménages de 2015, 51,4% des jeunes de moins de 25
ans sont pauvres et ils sont les plus pauvres quel que soit le milieu de résidence : 26,4% à
Abidjan, 48,6% dans les autres villes et 62,6% en milieu rural (INS, 2015). Ce contexte de
pauvreté marqué par un chômage élevé rend les jeunes notamment les filles économiquement
vulnérables face à une demande de rapport non protégé d’un partenaire. Ces résultats invitent à
approfondir la question en recourant à d’autres indicateurs de mesure de la pauvreté afin de
considérer son rôle dans l’adoption des comportements sexuels à risque. La pauvreté favorise-
t-elle des comportements sexuels à risque « circonstanciels », qui se modifient lorsque les
conditions de vie s’améliorent ? ou encore est-ce que la pauvreté conduirait à une forme de
prostitution « déguisée »69 ?

Comprendre les inégalités de genre et la sexualité à risque

Des comportements différenciés, selon le sexe dans le non recours au préservatif, ont été mis
en exergue dans ce travail. Pour rendre compte de ces disparités dans les pratiques de
prévention, on les a questionnées du point de vue des rôles sociaux de genre qui structurent la
société. La sexualité, étant universellement sous le contrôle des traditions et des cultures, les
relations sexuelles sont soumises aux rapports de genre (Desgrées du Loû et Ferry, 2006). En

69
L’enquête sur les comportements sexuels et prévalence des IST parmi les professionnelles du sexe (PS)
participant au projet d’assistance aux populations hautement vulnérables (PAPO-HV) au CAMES Gagnoa, en
2009, a mis à jour une catégorie de population surtout des élèves qu’on n’avait pas voulu considérer comme PS.
Des filles de milieu modeste avec le plus souvent trois partenaires stables, l’un chargé de financer les études,
l’autre pour l’habillement et tout ce qui s’y réfère, et l’autre encore le véritable amoureux. Dans les trois cas, elles
n’échangeaient pas systématiquement leur rapport sexuel contre de l’argent mais elles ont développé une véritable
stratégie de survie pour faire face à la pauvreté. Le tout c’est que les copains ne se rencontrent jamais (ENSEA,
FHI, IMT, 2009).

221
Afrique, ces relations entre les sexes sont marquées, par un déséquilibre des pouvoirs. La sous-
scolarisation et l’analphabétisme disqualifient les femmes dans l’insertion des secteurs
modernes de l’économie. Le système social place les femmes dans une position de dépendance
vis-à-vis de leurs partenaires masculins.

La sexualité est l’un des domaines où ces inégalités de genre sont fortement ancrées. En effet,
dans les relations entre partenaires célibataires et voire dans les couples, les femmes subissent
le diktat des hommes. Ne disposent pas de revenus, les femmes dépendent économiquement de
leur partenaire, il leur est donc difficile de négocier efficacement les modalités des relations
dans lesquelles elles s’engagent. En d’autres termes, la négociation autour de l’utilisation du
préservatif tourne à l’avantage des hommes à cause de leur dépendance économique. De plus,
les visées matrimoniales de la sexualité prénuptiale font que les jeunes filles, en général, sont
moins en position de négocier des rapports sexuels à moindre risque. La soumission sexuelle,
dont elles font l’objet dans le cadre d’une relation amoureuse, aggravée par la crainte d’une
rupture réduit leur capacité à exiger le préservatif. Les données disponibles ne nous permettent
pas d’expliciter le fait que le dernier rapport prénuptial des garçons soit mieux protégé que celui
des filles. Mais, on est tenté de se demander si cette situation n’est pas voulue ou recherchée
par les filles, elles-mêmes, pour consolider une relation à travers la survenue d’une grossesse.

Perspectives

En définitive, la sexualité des jeunes intervient aujourd’hui dans un contexte social, économique
et épidémiologique différent. Notre recherche s’est portée sur les comportements sexuels à
risque parmi les jeunes parce que la Côte d’Ivoire est l’un des pays les plus touchés par le
VIH/Sida en Afrique de l’ouest. De plus, les changements observés dans les comportements
des jeunes sont l’un des premiers signes de succès des programmes de prévention comme ce
fut le cas en Ouganda.
Ces comportements sexuels résultent d’un ensemble complexe de facteurs individuels,
familiaux et extra-familiaux qui s’imbriquent et qu’on ne peut pas séparer du contexte dans
lequel ils se produisent. Leur compréhension suggère la prise en compte de tous les éléments
qui investissent le champ des rapports hétérosexuels notamment les contraintes économiques,
les constructions sociales de genre avec les inégalités de pouvoirs et la violence qu’elles
supposent, la disponibilité du préservatif, etc. (Yakam, 2007). Mais étudier l’activité sexuelle
des jeunes sous l’angle des prises de risques, en l’occurrence le risque de contamination par le
VIH ne doit pas faire occulter les différentes fonctions et symboliques que remplit la sexualité

222
au plan social et culturel70 (Jaspard, 2005). Il est donc nécessaire pour les futures recherches de
disposer de données de type biographiques pour appréhender la sexualité des jeunes dans sa
globalité.

Le dernier point que nous relevons est que les données quantitatives collectées lors de ces vastes
programmes internationaux ne portent que sur les jeunes âgés d’au moins 15 ans. La trop grande
volonté de standardisation des indicateurs dans le but de rendre les données comparables dans
toutes les régions fait que les tranches d’âge des enquêtés varient de 15-49 ans pour les femmes
et 15-59 ans pour les hommes. Et pourtant, avant d’atteindre 15 ans exact, 20,8% des filles et
14,1% des garçons (EDS-MICS 2011) ont déjà eu leurs premiers rapports sexuels. Il apparaît
essentiel de combler le manque d’informations sur la santé sexuelle des pré-adolescents.

70
Si les données le permettent comme l’enquête réalisée à Kinshasa par Kalambayi (2007). Les données
biographiques et transversales lui ont permis d’analyser l’ensemble du contexte de la sexualité au-delà donc des
risques d’infection à VIH.

223
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252
Annexes

Annexe 1 : Age médian au premier mariage, âge médian au premier rapport sexuel et durée de la
sexualité prénuptiale chez les hommes

Pays Année Age médian au Age médian au premier Durée de la sexualité


d'enquête premier mariage rapport sexuel prénuptiale
30-34 ans 45-49 ans 30-34 ans 45-49 ans 30-34 ans 45-49 ans
A B C D A-C B-D
Afrique subsaharienne
Bénin 2011-12 25,1 26,4 18,4 19,7 6,7 6,7
Cameroun 2011 25,8 25,7 18,4 18,9 7,4 6,8
Cote d'Ivoire 2011-12 25,6 25,5 18,7 19,1 6,9 6,4
Gabon 2012 27,4 27,4 17,3 17,8 10,1 9,6
Kenya 2014 25,1 25,8 17,4 17,6 7,7 8,2
Madagascar 2008-09 22,3 23,8 18,0 18,3 4,3 5,5
Ouganda 2011 22,2 23,0 18,5 18,5 3,7 4,5
Amérique latine
Bolivie 2008 23,3 23,5 17,1 17,7 6,2 5,8
Brésil 1996 23,7 24,3 16,4 17,3 7,3 7,0
Colombie 2015 24,8 24,6 16,1 16,5 8,7 8,1
Guatemala 2014/15 22,5 22,6 17,3 17,4 5,2 5,2

Annexe 2 : Pays engagés dans les enquêtes Connaissances, Attitudes, Croyances et Pratiques et
Relations entre Partenaires en Afrique subsaharienne
Pays Types d’enquêtes
Botswana CACP
Burundi CACP
Cameroun CACP
République Centrafricaine CACP
Tchad CACP
Congo CACP
Côte d’Ivoire CACP/RP
Ethiopie CACP
Guinée-Bissau CACP
Kenya CACP
Lesotho CACP/RP
Mali CACP
Maurice CACP
Niger CACP
Nigeria CACP/RP
Rwanda CACP
Sénégal RP
Tanzanie CACP/RP
Togo CACP
Ouganda CACP/RP
Zambie CACP
Source : Caraël, 1995, pp.28-29

253
Annexe 3 : Formule de l’indice de Whipple
12

 P(5i)
i 5
Iw=5* 59

 P(5 j )
J  23

Annexe 4 : Résultat de l’indice de Whipple

Année Hommes Femmes Ensemble


1998 1,02 1,18 1,14
2005 1,10 1,29 1,20
2011 1,05 1,11 1,09

Annexe 5 : Méthodes de calcul de l’indice de Myers


On le calcule suivant plusieurs étapes :

Etape1 : On fait les sommes Su des effectifs des personnes de 10 ans et plus dont les âges se terminent
respectivement par chacun des chiffres de 0 à 9 (u=0…9).
Soit P (10d+u) l’effectif des personnes dont l’âge a pour chiffre des dizaines d et pour chiffre des unités u :
9
Su=  P(10d+u)
d=1
9
Etape 2 : On calcule la somme S’u pour les 20 ans et plus : Su=  P(10d+u)
d 2
Etape 3 : Les effectifs de Myers sont les quantités Tu définies par : Tu= (u +1)*Su+ (9-u)*Su'
9
Etape 4 : On calcule l’effectif total T définit par: T= T
u=0
u

9
Tu
Etape 5 : L’indice de Myers (IM) vaut dans ce cas : IM=  100* T -10
u=0

254
Annexe 6 : Indice de Myers
Chiffre 1998 2005 2012
terminal Hommes Femmes Ensemble Hommes Femmes Ensemble Hommes Femmes Ensemble
0 0,9 1,4 1,3 0,6 2,1 1,4 0,6 0,7 0,7
1 -3,4 -2,6 -2,8 -2,0 -2,2 -2,1 -1,0 -1,8 -1,5
2 -1,0 -2,1 -1,9 -0,7 -0,7 -0,7 0,6 -0,3 0,0
3 -0,7 -1,0 -0,9 -1,6 -1,0 -1,3 -1,1 -1,7 -1,5
4 0,4 -2,9 -2,2 -1,4 -3,3 -2,4 -2,2 -1,9 -2,0
5 -0,3 2,6 1,9 2,5 4,1 3,3 1,2 1,9 1,6
6 1,1 1,4 1,3 1,2 -1,4 -0,2 -0,5 0,5 0,2
7 0,1 1,7 1,3 0,1 0,9 0,5 0,7 0,6 0,6
8 0,3 1,2 1,0 1,0 1,5 1,3 1,3 1,9 1,7
9 2,7 0,5 1,0 0,2 0,1 0,1 0,2 0,2 0,2
Indice de
11,0 17,4 15,6 11,2 17,4 13,4 9,3 11,4 10,0
Myers

Annexe 7 : Répartition des jeunes suivant l’âge et le sexe

20

15
(%)

10

0
15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
Age

Hommes Femmes Ensemble

Source : Waapp

Annexe 8 : Répartition en (%) des jeunes par sexe selon l’âge au premier rapport sexuel
Age Masculin Féminin Ensemble
8 0,0 0,1 0,0
9 0,3 0,0 0,2
10 0,8 0,9 0,8
11 1,4 0,1 0,8
12 2,7 1,7 2,3
13 4,6 3,0 3,9
14 11,6 14,4 12,8
15 19,6 16,7 18,3
16 12,8 23,3 17,4
17 16,7 18,9 17,7
18 12,6 14,3 13,3
19 7,5 5,2 6,5
20 7,0 1,1 4,4
21 0,8 0,4 0,6
22 0,5 0,0 0,3
23 0,7 0,0 0,4
24 0,4 0,0 0,2

255
Annexe 9 : Répartition en (%) des jeunes selon la différence d’age et le sexe

Différence d’âge entre partenaires Garçons Filles Ensemble


Même âge 18,7 1,9 11,3
Partenaire plus jeune de 1 à 2 ans 61,6 2,2 35,6
Partenaire plus âgé de 1 à 4 ans 16,2 51,2 31,5
Partenaires plus âgé 5 à 9 ans 3,0 36,7 17,8
Partenaires âgés de plus de 10 ans 0,5 8,0 3,8

Annexe 10 : Répartition en (%) des jeunes selon la durée de la relation et le sexe

Durée dans la relation Masculin féminin p-value


Jour 8,9 8,7 ***
Moins d'un mois 15,8 6,9 ***
1-6 mois 32,1 26,5 ***
Plus de 6 43,2 57,9 ***

Annexe 11 : Répartition des jeunes (en %) selon le calendrier de l’initiation sexuelle par sexe

70,0
62,8
58,9
60,0 56,5

50,0
43,6
41,1
40,0 37,2

30,0

20,0

10,0

0,0
Garçons Filles Ensemble

Précoce Tardif

256
Annexe 12 : Répartition (en %) des enquêtés par typologie des ménages et niveau de vie
Variables
EDS 1998 EIS2005 EDS 2012
Pauvre Moyen Riche Pauvre Moyen Riche Pauvre Moyen Riche
Monogame 38,5 29,6 31,9 26,7 40,8 32,5 29,0 38,2 32,9
Monoparental 43,2 37,3 19,6 28,3 40,9 30,8 24,9 45,0 30,2

Polygame 48,2 38,5 13,3 31,6 45,1 23,3 37,4 39,6 23,0

Non familial/isolé 47,2 36,1 16,8 23,3 50,7 26,0 28,6 50,9 20,5

Ensemble 42,0 33,2 24,9 27,0 43,1 30,0 29,0 41,2 29,8
2
Note : khi signif 1%

Annexe 13 : Modèle final avec firthlogit et relogit en 1998


Variables Firthlogit Relogit
Coefficient p-value Coefficient p-value
Typologie des ménages (Ref. Monogame)
Monoparental -0,425 0,000 -0,425 0,077
Polygame -0,279 0,000 -0,279 0,446
Non familial/isolé -0,188 0,000 -0,188 0,527
Niveau de vie des ménages (Ref. Moyen)
Pauvre 0,100 0,000 0,100 0,689
Riche -0,080 0,000 -0,080 0,758
Milieu de résidence (Ref. Rural)
Urbain 0,398 0,000 0,398 0,108
Sexe (Ref. Féminin)
Masculin 2,008 0,000 2,008 0,000
Groupe d’âges (Ref. 20-24 ans)
15-19 ans 0,015 0,000 0,015 0,940
Niveau d’instruction (Ref. Aucun)
Primaire 0,446 0,000 0,446 0,070
Secondaire ou plus -0,033 0,000 -0,033 0,905
Etat matrimonial (Célibataire)
En union/marié -1,084 0,000 -1,084 0,000
Religion (Ref. Chrétien)
Musulman -0,602 0,000 -0,602 0,011
Animiste/sans religion -0,317 0,000 -0,317 0,227
Constante -1,998 0,000 -1,998 0,000

257
Annexe 14 : Modèle final avec firthlogit et relogit en 2005
Variables Firthlogit Relogit
Coefficient p-value Coefficient p-value
Typologie des ménages (Ref. Monogame)
Monoparental 0,272 0,000 0,272 0,168
Polygame -0,027 0,000 -0,027 0,917
Non familial/isolé 0,101 0,000 0,101 0,678
Niveau de vie des ménages (Ref. Moyen)
Pauvre 0,073 0,000 0,073 0,714
Riche -0,152 0,000 -0,152 0,468
Milieu de résidence (Ref. Rural)
Urbain 0,207 0,000 0,207 0,258
Sexe (Ref. Féminin)
Masculin 1,674 0,000 1,674 0,000
Groupe d’âges (Ref. 20-24 ans)
15-19 ans -0,091 0,000 -0,091 0,605
Niveau d’instruction (Ref. Aucun)
Primaire 0,151 0,000 0,151 0,554
Secondaire ou plus 0,590 0,000 0,590 0,020
Etat matrimonial (Célibataire)
En union/marié -0,290 0,000 -0,290 0,230
Religion (Ref. Chrétien)
Musulman -0,396 0,000 -0,396 0,058
Animiste/sans religion 0,070 0,000 0,070 0,764
Constante -3,021 0,000 -3,021 0,000
Annexe 15 : Modèle final avec firthlogit et relogit en 2011
Variables Firthlogit Relogit
Coefficient p-value Coefficient p-value
Typologie des ménages (Ref. Monogame)
Monoparental -0,411 0,000 -0,411 0,029
Polygame 0,170 0,000 0,170 0,469
Non familial/isolé 0,066 0,000 0,066 0,703
Niveau de vie des ménages (Ref. Moyen)
Pauvre -0,057 0,000 -0,057 0,755
Riche 0,095 0,000 0,095 0,549
Milieu de résidence (Ref. Rural)
Urbain 0,282 0,000 0,282 0,086
Sexe (Ref. Féminin)
Masculin 1,880 0,000 1,880 0,000
Groupe d’âges (Ref. 20-24 ans)
15-19 ans -0,239 0,000 -0,239 0,072
Niveau d’instruction (Ref. Aucun)
Primaire 0,668 0,000 0,668 0,000
Secondaire ou plus 0,699 0,000 0,699 0,000
Etat matrimonial (Célibataire)
En union/marié -0,652 0,000 -0,652 0,001
Religion (Ref. Chrétien)
Musulman -0,513 0,000 -0,513 0,001
Animiste/sans religion -0,004 0,000 -0,004 0,981
Constante -2,893 0,000 -2,893 0,000

258
Annexe 16 : guide d’entretien adresse aux personnes ayant de multiples partenaires

Le guide adressé aux personnes ayant de multiples partenaires adoptera deux approches :
- Biographique
- Phénoménologique

SECTION 1 : PROFIL DU MENAGE / DE LA FAMILLE DES PERSONNES AYANT


DES PARTENAIRES SEXUELS MULTIPLES
Objectif : L’objectif général de cette section est de décrire l’environnement des ménages où
vivent / ont vécu les personnes ayant des partenaires sexuels multiples.
Résultat attendu : faire des monographies détaillées (idéal-type) mettant en exergue les
similitudes et les différences des ménages où vivent / ont vécu des personnes ayant des
partenaires sexuels multiples.

1- Environnement global du ménage ou de la famille

a) Parlez-moi du lieu où vous vivez /avez-vous vécu ? [Saisir le champ géographique


(quartier précaire ou résidentiel), environnement global du ménage (Présence des
grands parents, oncles, tantes, etc. dans le ménage, avoir vécu l’enfance avec les
parents biologiques, avoir vécu l’adolescence avec les parents biologiques/tuteurs, le
parcourt social (les 12 premières années de vie)]

b) Que pensez-vous du milieu familial dans lequel vous avez grandi en comparaison avec
les autres enfants issus d’autres milieux familiaux dans le même quartier ou la même
commune ? Pourquoi (Saisir la perception de l’acteur par rapport aux autres enfants
de son environnement social)

c) Dites-nous qu’est que les autres enfants de votre milieu social pensaient de vous ?
Quelle était leur réaction vis-à-vis de vous ? Pourquoi ? (Saisir ces rapports aux autres
enfants)

d) Parlez-moi des orientations culturelles et religieuses dans la famille ou dans le ménage


où vous vivez /avez-vous vécu ? [Saisir l’encrage culturel (détermination ethnique (les
grands ères), religieuse)]

2- Statut relationnel de l’acteur social dans le ménage/famille ou dans


l’environnement global

259
e) Que pensez-vous des normes/règles en vigueur dans la famille ou dans le ménage où
vous vivez /avez-vous vécu ? Pourquoi ? (Saisir la nature relationnelle entre l’acteur
et ces parents)

f) Pouvez-vous nous donner des exemples d’interdits dans la famille ou dans le ménage
où vous vivez /avez-vous vécu ? Quelles étaient la réaction de vos parents lorsque
quelqu’un enfreignait une règle ou un interdit ? Habituellement, quelle était vos
réactions face à ces interdits ? Pourquoi ? (Saisir le niveau du contrôle parental dans
l’éducation de l’acteur)

g) Quelles étaient/sont les sujets de discussions fréquemment abordés avec vos parents ?
Pourquoi ? Lesquels des sujets étaient/sont des tabous et n’étaient/sont jamais abordés
avec vos parents ? Pourquoi ? (Saisir le niveau de discussion sur les questions
d’abstinence sexuelles avec les parents ou des conséquences des rapports sexuels hors
mariage)

h) En comparaison des autres milieux familiaux/ménages que vous avez côtoyés dans votre
environnement, que pensez vous de l’éducation reçue de vos parents ? Pourquoi ?
(Saisir les faiblesses des parents au niveau de l’éducation de l’acteur)

i) Comment vous vous sentiez-vous émotionnellement dans cet environnement par rapport
aux autres ? Pourquoi ? (Appréhender des sentiments d’infériorité, d’impuissance, de
discrimination, de méfiance vécu par l’acteur par rapport aux autres membres du
ménage ou des autres enfants de son environnement)

j) En dehors de votre ménage/famille, quelles étaient/sont vos fréquentations ? Pourquoi ?


(Saisir l’appartenance à des groupes de pairs)

k) Quels étaient les lieux les plus fréquentés de votre groupe de pair ? Pourquoi ? Quelles
étaient/sont les habitudes ou les activités de vos fréquentations ? Quelle était votre
position dans l’hiérarchie du groupe ? [Saisir l’impact de leurs fréquentations,
l’influence (des copains ou copines) des groupes sur l’acteur]

3- Statut socio-économique du ménage/famille

l) Parlé moi de la situation économique de vos parents dans la famille ou dans le ménage
où vous vivez /avez-vous vécu ? (Saisir le statut économique des parents)

m) Comment les dépenses liées à l’alimentation sont/étaient organisées ? Quels est/était la


fréquence des repas ?

n) Parlé moi un peu de comment s’organise/s’organisait la rentrée scolaire ?

260
o) Au niveau de l’achat de vos fournitures scolaires, comment cela se déroule/déroulait-
il ?

p) Au niveau de vos dépenses d’habillement, comment cela est/était organisé ? A quel


niveau vos parents interviennent/intervenait ?

q) Parlé moi un peu de votre argent de poche, comment vous obtenez/obteniez cela ?

r) Parler moi de vos moments de loisir ? A quel niveau vos parents


interviennent/intervenait ?

SECTION II : LA DIMENSION IDEOLOGIQUE DES PERSONNES AYANT DES


PARTENAIRES SEXUELS MULTIPLES.

a) Parler des situations ou des événements difficile ou dramatique qui vous ont marqué
dans la famille ou dans le ménage où vous vivez /avez-vous vécu ?

b) Pouvez-vous nous décrire comment cela s’est produit ?

c) Qu’est-ce que vous en pensez ? Pourquoi ? (Saisir les représentations sociales, les
croyances et les idéologiques qui légitiment ces pratiques sociales)

d) Comment vous expliquez cette réalité ? (Saisir les représentations sociales, les
croyances et les idéologiques qui légitiment ces pratiques sociales)

Annexe 17 : Taux de non réponse (en %) de la non utilisation de préservatif chez les célibataires
de 15-24 ans
Taux de non réponse de la non EDS 1998 EIS 2005 EDS 2011
utilisation de préservatif
0,3 0,4 3,8

Annexe 18 : Prévalence en (%) de la non utilisation de préservatif selon l’état matrimonial

EDS 1998 EIS 2005 EDS 2011


Célibataire 66,0 52,1 52,9
Marié ou en couple 95,4 89,9 92,0
Ensemble 79,2 65,9 68,9

261
Annexe 19 : Répartition des régions selon la prévalence du VIH et la non utilsation de préservatif

Régions Prévalence du VIH (%) Non utilisation du préservatif au


dernier rapport sexuel prémarital (%)
EIS 2005 EDS-MICS 2011 EIS 2005 EDS-MICS 2011
Centre 4,8 3,0 39,9 62,9
Centre-Est 5,8 4,0 39,4 45,3
Centre-Nord 3,6 4,4 61,0 51,6
Centre-Ouest 3,7 2,2 51,2 54,5
Nord 3,2 2,5 85,2 30,0
Nord-est 3,3 2,3 57,7 46,2
Nord-Ouest 1,7 2,3 78,3 63,6
Ouest 3,5 3,6 83,0 62,2
Sud sans Abidjan 5,5 3,5 51,6 56,1
Sud-ouest 4,2 4,3 61,2 65,4
Ville d'Abidjan 6,1 5,1 40,0 45,7

Annexe 20 : Proportion des jeunes selon les variables de classification et prévalence de la non
utilisation de préservatif
Variables 1998 2005 2011
% prévalence % prévalence % prévalence
Milieu de résidence
Abidjan 37,7 58,2 39,9 43,4 28,9 45,8
Urbain 17,5 62,8 11,3 50,8 35,4 45,0
Rural 44,8 74,2 48,8 59,6 35,7 67,2
Niveau de vie
Pauvre 32,5 75,4 23,3 66,2 22,0 67,4
Moyen 30,7 72,3 40,5 52,1 40,4 58,1
Riche 36,8 52,9 36,2 43,3 37,6 39,1
Niveau d’instruction
Aucun 32,2 81,4 27,8 73,6 26,4 72,1
Primaire 34,5 69,6 26,8 56,7 26,0 57,4
Secondaire ou plus 33,3 47,6 45,4 36,2 47,6 40,9

262
Annexe 21 : Test d’égalité de proportion 1998-2005

Variables Proportion_1 Proportion_2 Différence Z-stat p-value


Sexe
Masculin 0,294 0,549 -0,255 -6,704 0,000
Féminin 0,706 0,451 0,255 9,169 0,000
Groupe d’âge
15-19 0,570 0,482 0,088 2,963 0,002
20-24 0,430 0,518 -0,088 -2,688 0,004
Niveau d’instruction
Aucun 0,321 0,278 0,043 1,202 0,115
Primaire 0,345 0,268 0,077 2,190 0,014
Secondaire ou plus 0,333 0,454 -0,121 -3,331 0,000
Religion
Musulman 0,269 0,290 -0,021 -0,555 0,290
Catholique 0,314 0,258 0,056 1,559 0,060
Protestante 0,208 0,124 0,084 2,233 0,013
animiste/sans rel 0,209 0,329 -0,120 -2,848 0,002
Exposition aux médias
Pas exposé 0,121 0,089 0,032 0,812 0,208
Exposé 0,879 0,911 -0,032 -2,320 0,010
Non utilisation du préservatif
Oui 0,660 0,521 0,139 4,888 0,000
Non 0,340 0,479 -0,139 -3,786 0,000
Niveau de vie
Pauvres 0,325 0,234 0,091 2,561 0,005
Classe
intermédiaire 0,307 0,405 -0,098 -2,622 0,004
Nantis 0,369 0,362 0,007 0,201 0,420
Milieu de résidence
Abidjan 0,377 0,399 -0,022 -0,634 0,263
Autres villes 0,175 0,113 0,062 1,626 0,052
Rural 0,448 0,487 -0,039 -1,204 0,114

263
Annexe 22 : Test d’égalité de proportion 1998-2011
Variables Proportion_1 Proportion_2 Différence Z-stat p-value
Sexe
Masculin 0,294 0,379 -0,085 -2,293 0,011
Féminin 0,706 0,621 0,085 3,434 0,000
Groupe d’âge
15-19 0,570 0,480 0,090 3,117 0,001
20-24 0,430 0,520 -0,090 -2,812 0,002
Niveau d’instruction
Aucun 0,321 0,264 0,057 1,650 0,049
Primaire 0,345 0,260 0,085 2,506 0,006
Secondaire ou plus 0,333 0,476 -0,143 -4,010 0,000
Religion
Musulman 0,269 0,328 -0,059 -1,567 0,059
Catholique 0,314 0,234 0,080 2,319 0,010
Protestante 0,208 0,227 -0,019 -0,492 0,312
animiste/sans rel 0,209 0,211 -0,002 -0,053 0,479
Exposition aux médias
Pas exposé 0,121 0,131 -0,010 -0,244 0,403
Exposé 0,879 0,869 0,010 0,653 0,257
Non utilisation du préservatif
Oui 0,660 0,529 0,131 4,785 0,000
Non 0,340 0,471 -0,131 -3,649 0,000
Niveau de vie
Pauvres 0,325 0,220 0,105 3,079 0,001
Classe
intermédiaire 0,307 0,403 -0,096 -2,619 0,004
Nantis 0,369 0,376 -0,007 -0,206 0,419
Milieu de résidence
Abidjan 0,377 0,289 0,088 2,641 0,004
Autres villes 0,175 0,354 -0,179 -3,939 0,000
Rural 0,448 0,357 0,091 2,858 0,002

264
Annexe 23 : Test d’égalité de proportion 2005-2011
Variables Proportion_1 Proportion_2 Différence Z-stat p-value
Sexe
Masculin 0,549 0,379 0,170 7,773 0,000
Féminin 0,451 0,621 -0,170 -8,275 0,000
Groupe d’âge
15-19 0,482 0,480 0,002 0,094 0,463
20-24 0,518 0,520 -0,002 -0,097 0,461
Niveau d’instruction
Aucun 0,278 0,264 0,014 0,555 0,290
Primaire 0,268 0,260 0,008 0,315 0,377
Secondaire ou plus 0,454 0,476 -0,022 -1,013 0,156
Religion
Musulman 0,290 0,328 -0,038 -1,528 0,063
Catholique 0,258 0,234 0,024 0,934 0,175
Protestante 0,124 0,227 -0,103 -3,452 0,000
animiste/sans rel 0,329 0,211 0,118 4,561 0,000
Exposition aux médias
Pas exposé 0,089 0,131 -0,042 -1,422 0,078
Exposé 0,911 0,869 0,042 4,241 0,000
Connaissance complète du Sida
Oui 0,831 0,854 -0,023 -1,960 0,025
Non 0,169 0,146 0,023 0,848 0,198
Non utilisation du préservatif
Oui 0,521 0,529 -0,008 -0,360 0,359
Non 0,479 0,471 0,008 0,342 0,366
Niveau de vie
Pauvres 0,234 0,220 0,014 0,538 0,295
Classe
intermédiaire 0,405 0,403 0,002 0,087 0,465
Nantis 0,362 0,376 -0,014 -0,593 0,276
Milieu de résidence
Abidjan 0,399 0,289 0,110 4,553 0,000
Autres villes 0,113 0,354 -0,241 -7,114 0,000
Rural 0,487 0,357 0,130 5,743 0,000

265
Annexe 24 : Principaux avantages de la méthode de décomposition

Forces Faiblesses
Simplicité.
Elle est simple à la fois dans son explication et son application. Elle
identifie les sources proches du changement sans en révéler les causes
profondes et son application ne requiert ni analyses statistiques
sophistiquées, ni connaissances mathématiques approfondies, ni
logiciels de pointe, l’essentiel des analyses pouvant se faire avec un
tableur comme Excel.

Flexibilité.
La formulation de base peut supporter des élaborations plus
complexes en fonction des besoins des utilisateurs.

Facilité d’interprétation.  Elle étudie les sources du


Contrairement à certaines statistiques issues de l’analyse de régression changement et non la cause
(intercept, logit, rapport de côtes), les résultats d’une analyse de
décomposition sont exprimés dans un langage accessible aux non-  Elle est une solution partielle,
statisticiens. Ils mesurent simplement le pourcentage d’un changement qui n’offre qu’un début
social attribuable à une évolution de la composition de la d’explication.
population nationale, ou alors du comportement moyen des membres
de cette population.  Elle néglige l’hétérogénéité au
sein du groupe
Compatibilité.
La méthode est compatible avec d’autres méthodes, notamment
lesrégressions classiques, les analyses multi-niveaux, la
standardisation, les projections démographiques ou même certaines
analyses qualitatives. Elle peut permettre d’agréger les résultats des
micro-régressions et se combiner aux analyses multi-niveaux. Cette
compatibilité de la décomposition avec d’autres méthodes permet de
trianguler des méthodes diverses,
aidant ainsi le chercheur à accroître ses chances de cerner la vérité.

Source : Beninguisse et al., 2013 in Tabutin et Masquelier (dir), pp247-248

Annexe 25 : Contribution en (%) dans la variation totale de la non protection des rapports sexuels
Variables 1998-2005 1998-2011 2005-2011
Milieu de résidence
Abidjan 32,96 66,88 -402,09
Autres villes 37,41 -37,95 1004,10
Rural 29,63 71,07 -502,01
Niveau d’instruction
Aucun 41,12 56,74 -106,80
Primaire 63,05 71,86 -20,34
Secondaire ou plus -4,18 -28,60 227,13
Niveau de vie
Pauvre 65,01 73,50 -74,36
Moyen 7,84 -9,69 295,64
Riche 27,15 36,20 -121,28

266
Annexe 26 : Résultat du test de hausman en 1998

(b) (B) (b-B) sqrt(diag(V_b-V_B))


M1 M2 Difference S.E.

Moyen 0,038 0,013 0,025 0,208


Riche -0,595 -0,370 -0,225 0,201
Abidjan -0,355 -0,211 -0,144 0,183
Autres villes -0,362 -0,209 -0,153 0,211
Garçons -1,225 -0,740 -0,484 0,156
15-19 ans 0,117 0,081 0,037 0,145
Aucun 0,945 0,559 0,386 0,210
Primaire 0,508 0,318 0,190 0,168
Catholique -0,393 -0,244 -0,149 0,197
Protestant -0,251 -0,147 -0,104 0,220
Animiste 0,074 0,036 0,039 0,229
Pas exposé 0,185 0,126 0,059 0,272

b = consistent under Ho and Ha; obtained from logit


B= inconsistent under Ha, efficient under Ho; obtained from probit

Test: Ho: difference in coefficients not systematic

chi2(12) = (b-B)'[(V_b-V_B)^(-1)](b-B)
= 22.70
Prob>chi2 = 0.0304

Annexe 27 : Résultat du test de hausman en 2005

(b) (B) (b-B) sqrt(diag(V_b-V_B))


M1 M2 Difference S.E.

Moyen -0,261 -0,161 -0,099 0,120


Riche -0,182 -0,111 -0,071 0,135
Abidjan -0,532 -0,329 -0,203 0,106
Autres villes -0,405 -0,251 -0,154 0,144
Garçons -0,323 -0,202 -0,122 0,088
15-19 ans -0,209 -0,131 -0,078 0,087
Aucun 1,215 0,750 0,465 0,114
Primaire 0,672 0,417 0,255 0,099
Catholique -0,434 -0,271 -0,163 0,119
Protestant -0,159 -0,095 -0,063 0,142
Animiste -0,228 -0,139 -0,089 0,112
Pas exposé 1,479 0,841 0,638 0,253

b = consistent under Ho and Ha; obtained from logit


B= inconsistent under Ha, efficient under Ho; obtained from probit

Test: Ho: difference in coefficients not systematic

chi2(12) = (b-B)'[(V_b-V_B)^(-1)](b-B)
= 46.46
Prob>chi2 = 0.0000

267
Annexe 28 : Résultat du test de hausman en 2011

(b) (B) (b-B) sqrt(diag(V_b-V_B))


M1 M2 Difference S.E.
Moyen 0,015 0,006 0,009 0,113
Riche -0,589 -0,364 -0,225 0,125
Abidjan -0,432 -0,263 -0,169 0,112
Autres villes -0,485 -0,292 -0,193 0,103
Garçons -0,953 -0,581 -0,373 0,083
15-19 ans -0,412 -0,251 -0,161 0,077
Aucun 0,973 0,596 0,376 0,107
Primaire 0,382 0,238 0,144 0,091
Catholique 0,219 0,135 0,084 0,104
Protestant 0,387 0,233 0,155 0,108
Animiste 0,522 0,310 0,212 0,110
Pas exposé 0,226 0,123 0,103 0,134

b = consistent under Ho and Ha; obtained from logit


inconsistent under Ha, efficient under Ho; obtained from
B= probit

Test: Ho: difference in coefficients not systematic

chi2(12) = (b-B)'[(V_b-V_B)^(-1)](b-B)
= 64.69
Prob>chi2 = 0.0000

Annexe 29 : Test de Hosmer-Lemeshow

EDS 1998 EIS 2005 EDS 2011


number of observations= 789 1679 2184
number of groups = 9 10 10
Hosmer-Lemeshow chi2(7)= 10,84 8,87 7,99
Prob > chi2 = 0,1457 0,3533 0,4349

Annexe 30 : Test d’égalité de proportion


Périodes d’enquête Proportion_1 Proportion_2 Différence Z-stat P-value
1998-2005 0,660 0,521 0,139 6,230 0,000
1998-2011 0,660 0,529 0,131 6,056 0,000
2005-2011 0,521 0,529 -0,008 -0,497 0,310

268
Annexe 31 : Grille d’évaluation de la surface sous la courbe ROC
On retiendra que si l’aire sous la courbe ROC vaut :

- 0,5, il n’y a aucune discrimination ;

- ]0,5 ; 0,7[, discrimination faible ;


- [0,7 ; 0,8[, discrimination acceptable
- [0,8 ; 0,9[, discrimination excellente
- [0,9 ; 1], discrimination parfaite.
Source : Foucher, 2010

Annexe 32 : Estimation après imputation


Variables EIS 2005 EDS 2011
Odds Ratio P>z Odds Ratio P>z
Niveau de vie
Pauvre 0,995 0,975 1,274 0,191
Moyen MR
Riche 0,616 0,000 1,051 0,781
Milieu de résidence
Abidjan 0,686 0,022 0,652 0,030
Autres villes 0,637 0,002 0,767 0,182
Rural MR
Sexe
Garçon 0,482 0,000 0,832 0,203
Fille MR
Groupe d’âge
15-19 ans 0,719 0,003 0,817 0,153
20-24 ans MR
Niveau d'Instruction
Aucun 2,793 0,000 2,806 0,000
Primaire 1,409 0,012 1,654 0,003
Secondaire ou plus MR
Religion
Musulman MR
Catholique 1,212 0,196 0,608 0,014
Protestant 1,550 0,004 0,790 0,301
Animiste/sans religion 1,545 0,006 0,762 0,172
Exposition aux médias
Pas exposé 1,278 0,205 4,570 0,000
Exposé MR
Constant 2,067 0,000 1,657 0,054

269
Annexe 33 : Evolution de la pauvreté entre 2002 et 2015 selon les régions
Régions 2002 2008 2015
Ville d’Abidjan 14,9 21,0 22,7
Sud-ouest 41,3 45,5 39,1
Sud 30,3 44,6 49,3
Ouest 64,4 63,2 49,9
Nord-ouest 51,9 57,9 61,5
Nord-est 56,6 54,7 54,3
Nord 40,3 77,3 60,8
Centre ouest 50,3 62,9 54,1
Centre-nord 32,0 57,0 55,3
Centre est 44,9 53,7 48,7
Centre 41,4 56,0 54,4

Annexe 34 : Codes structurels pour l’analyse rapide


Code structurel 1: Env2VieMenag
Code structurel 2: PercepMilieu2vie
Code structurel 3: PercepDesAutrEnfant
Code structurel 4: OrientCultRéliMenag
Code structurel 5: NormRèglVigMenag
Code structurel 6: ExemplInterdMenag
Code structurel 7: Suj2DiscuAvecParen
Code structurel 8: PercEducRecuMenag
Code structurel 9: TypFreq
Code structurel 10: Lieufreq
Code structurel 11: SituaEconomMenag
Code structurel 12: OrgDépens2Consom
Code structurel 13: MoyObtenAgenPoch
Code structurel 14: PositParenMom2Loisir
Code structurel 15: ChocSocioVecu
Code structurel 16 : PercChocSocio

270
Annexe 35 : Enquête sur le contexte de la sexualité des jeunes

ENQUETE SUR LE CONTEXTE DE LA SEXUALITE DES JEUNES EN COTE D’IVOIRE

Toute réponse que vous nous communiquerez restera strictement confidentielle et ne pourrait être
utilisée qu’à des fins scientifiques pour améliorer la santé des jeunes voire de toute la population.
Nous comptons sur votre disponibilité pour la réussite de cette enquête

Région ? [__|__] Département [__|__]__] Sous-préfecture [__|__]__]__] DR [__|__]__]__]

Questions

Q101. Sexe (Encercler) 1 Masculin 2 Q102 Quel âge aviez-vous à votre dernier anniversaire ?
Féminin
[ __|__]

Q103. Quel est votre niveau d’instruction (Encercler) Q104. Quel est votre ethnie ou nationalité (pour les
personnes étrangères) ?
1. Aucun 2. Primaire 3. Secondaire ou plus

Q105. Quelle est votre situation matrimoniale ? (Encercler) Q106. A quel âge aviez-vous été marié ou mis en couple
?
1. célibataire-Q107 2. Marié/ concubinage/ en
couple
3. Séparé/divorcé/veuf

Q 107. Quel âge aviez-vous quand vous avez eu, pour la Q108. Quel était l’âge de la personne avec laquelle vous
première fois, des rapports sexuels ? avez eu votre premier rapport sexuel ? (Insister pour
avoir une estimation de l’âge)
Age en années |__|__|
Age en années |__|__|
95 : Première fois en commençant à vivre avec mon
(premier) mari/partenaire/concubin
98 : Ne sait pas
99 : N’a jamais eu de rapport sexuel (si 99 Fin
questionnaire)
Q109. Combien de temps a duré la relation avec ce premier Q110. Un préservatif a-t-il été utilisé lors de ce premier
partenaire sexuel ? (Encercler) rapport sexuel ?

1. Un jour 2. Moins d’un mois 1 oui 2 non


3. 1 à 6 mois 4. Plus de 6 mois

Merci pour votre participation

271
Annexe 36 : Répartition en (%) des enquêtés par groupe d’âges quinquennaux

1998
30,0
25,0
20,0
(%)

15,0
10,0
5,0
0,0
15-19 20-24 25-29 30-34 35-39 40-44 45-49
Age

2005
25,0
20,0
15,0
(%)

10,0
5,0
0,0
15-19 20-24 25-29 30-34 35-39 40-44 45-49
Age

2011
25,0
20,0
15,0
(%)

10,0
5,0
0,0
15-19 20-24 25-29 30-34 35-39 40-44 45-49
Age

272
Liste des tableaux
Tableau 2.1 : Ages médians au premier rapport sexuel des hommes et des femmes, de quelques pays,
selon le groupe d'âges à l'enquête .......................................................................................................... 46

Tableau 2.2 : Age médian au premier rapport sexuel par sexe dans quelques pays d’Amérique latine et
Caraïbes ................................................................................................................................................. 48

Tableau 2.3 : Age médian au premier rapport sexuel par sexe dans des pays d’Afrique subsaharienne
............................................................................................................................................................... 49

Tableau 2.4 : Age médian au premier mariage, âge médian au premier rapport sexuel et durée de la
sexualité prénuptiale chez les femmes .................................................................................................. 52

Tableau 2.5: Taux de grossesse, de natalité et d’avortement chez les adolescentes dans cinq pays
développés (pour 1000 adolescentes entre 15 et 19 ans) ....................................................................... 53

Tableau 2.6 : Age médian à la première naissance, Age médian au premier mariage et écarts d’âge entre
ces deux occurrences ............................................................................................................................. 56

Tableau 2.7 : Population des 15-24 ans par région, en 2015 ................................................................. 68

Tableau 2.8 : Niveau d’instruction de la population de 15-24 ans (%) ................................................. 69

Tableau 2.9 : Positionnement des jeunes par rapport à la situation dans l’emploi ................................ 70

Tableau 3.1 : Quelques études réalisées sur les comportements sexuels en Côte d’Ivoire ................... 76

Tableau 3.2 : questions relatives aux comportements sexuels à risque ................................................. 79

Tableau 3.3 : Effectifs des ménages et individus enquêtés ................................................................... 80

Tableau 3.4 : Couverture des échantillons ............................................................................................ 80

Tableau 3.5 : Sous échantillon 15-24 ans .............................................................................................. 83

Tableau 3.6 : Régions et Districts couverts par l'étude ......................................................................... 99

Tableau 3.7 : Répartition de l’échantillon par zone............................................................................. 100

Tableau 3.8 : Caractéristiques socio-démographiques des enquêtés ................................................... 103

Tableau 4.1 : Répartition des jeunes selon des caractéristiques socio démographiques par sexe ....... 119

Tableau 4.2 : Répartition en (%) des jeunes par sexe selon le calendrier, l’âge et le niveau d’instruction
............................................................................................................................................................. 125

Tableau 4.3 : Répartition en (%) des jeunes par sexe selon le calendrier et la durée de la relation .... 128

Tableau 4.4 : Répartition en (%) des jeunes par sexe selon l’écart d’âge entre partenaire ................. 130

273
Tableau 4.5 : Répartition en (%) des jeunes par sexe et l’utilisation ou non du préservatif selon quelques
variables .............................................................................................................................................. 133

Tableau 4.6 : Estimation des interactions entre le calendrier précoce et le non usage de préservatif . 137

Tableau 4.7 : Estimation d’un calendrier sexuel précoce non protégé ................................................ 138

Tableau 5.1: Répartition des jeunes de 15-24 ans par sexe selon le nombre de partenaires sexuels au
cours des douze derniers mois dans les trois enquêtes ........................................................................ 148

Tableau 5.2 : Répartition des jeunes selon la typologie et le sexe de leur chef de ménage ................ 153

Tableau 5.3 : Test de proportion.......................................................................................................... 154

Tableau 5.4 : Analyse différentielle du multipartenariat sexuel selon les caractéristiques socio-
démographiques................................................................................................................................... 158

Tableau 5.5 : Significativité globale de l’estimation des modèles Relogit.......................................... 159

Tableau 5.6 : Facteurs associés à la pratique de multipartenariat sexuel chez les jeunes (EDS 1998) 163

Tableau 5.7 : Facteurs associés à la pratique de multipartenariat sexuel chez les jeunes (EIS 2005) . 164

Tableau 5.8 : Facteurs associés à la pratique de multipartenariat sexuel chez les jeunes (EDS 2011) 165

Tableau 5.9 : répartition des enquêtés selon les caractéristiques socio-démographiques ................... 167

Tableau 6.1: Utilisation actuelle de la contraception .......................................................................... 187

Tableau 6.2 : Caractéristiques de l’échantillon de jeunes célibataires ayant eu leur première expérience
sexuelle ................................................................................................................................................ 189

Tableau 6.3 : Non utilisation de préservatif au dernier rapport sexuel par groupe d’âge .................... 192

Tableau 6.4 : Prévalence (en %) de la non utilisation de préservatif aux derniers rapports sexuels selon
les variables explicatives ..................................................................................................................... 195

Tableau 6.5 : Paramètres de la décomposition simple......................................................................... 202

Tableau 6.6 : Paramètres de la décomposition avancée du non usage de préservatif ......................... 203

Tableau 6.7: Estimation du modèle logit du non recours au préservatif en 1998 ............................... 211

Tableau 6.8 : Estimation du modèle logit du non recours au préservatif en 2005 .............................. 212

Tableau 6.9 : Estimation du modèle logit du non recours au préservatif en 2011 .............................. 213

274
Liste des figures
Figure 2.1 : Age aux premiers rapports sexuels par sexe et par génération en France .......................... 47

Figure 2.2 : Evolution de l’âge médian au premier mariage des femmes dans certains pays d’Afrique de
l’ouest. ................................................................................................................................................... 51

Figure 2.3 : Pourcentage de naissances prémaritales chez les femmes de 15-49 .................................. 54

Figure 2.4 : Evolution du taux de pauvreté en Côte d’Ivoire entre 1985 et 2015 ................................. 60

Figure 2.5 : La Côte d’Ivoire après le 19 septembre 2002 .................................................................... 62

Figure 2.6 : Taux de prévalence du VIH par sexe et âge en 2005 et en 2011/12 .................................. 66

Figure 3.1 : Répartition des enquêtés par âge........................................................................................ 84

Figure 3.2 : Degré d’attraction ou répulsion des chiffres terminaux (Indice de Myers) ....................... 86

Figure 4.1: Evolution de l’âge au premier rapport sexuel ................................................................... 114

Figure 4.2 : Répartition (en %) des jeunes selon qu’ils aient eu ou non leurs premiers rapports sexuels
............................................................................................................................................................. 122

Figure 4.3 : Répartition des célibataires ayant déjà eu leurs premiers rapports sexuels ..................... 124

Figure 4.4 : Répartition (en %) des jeunes selon la durée de leur première expérience sexuelle ........ 126

Figure 4.5 : Répartition (en %) des jeunes par la durée de leur première expérience sexuelle et le sexe
............................................................................................................................................................. 127

Figure 4.6 : Répartition des jeunes sexuellement actifs selon l’écart d’âge du partenaire .................. 129

Figure 4.7 : Répartition en (%) des jeunes par sexe ou groupe d’âge selon l’utilisation ou non du
préservatif ............................................................................................................................................ 131

Figure 5.1 : Nombre moyen de partenaire selon le sexe ..................................................................... 153

Figure 5.2 : Répartition en (%) des jeunes ayant eu au moins deux partenaires sexuels au cours des douze
derniers mois ....................................................................................................................................... 155

Figure 6.1 : Constitution de l’échantillon d’analyse............................................................................ 186

Figure 6.2 : Non utilisation de préservatif au dernier rapport sexuel par sexe .................................... 190

Figure 6.3 : Prévalence du VIH/Sida et niveau de non utilisation du préservatif parmi les jeunes..... 196

Figure 6.4 : Prévalence du VIH/Sida et niveau de non utilisation du préservatif parmi les jeunes..... 197

Figure 6.5 : Courbes ROC des modèles de 1998, 2005 et 2011 .......................................................... 207

275
Table des matières

Dédicaces ................................................................................................................................................ ii

Remerciements ....................................................................................................................................... iii

Précisions pour la lecture ........................................................................................................................ v

Résumé ................................................................................................................................................... vi

Sigles et abréviations ............................................................................................................................ viii

Sommaire ................................................................................................................................................ x

Introduction générale............................................................................................................................... 1

CHAPITRE 1. Sexualité prénuptiale et comportements sexuels à risque chez les jeunes : état de la
question et approches théoriques ............................................................................................................. 8
1.1. Définition des objets d’étude ........................................................................................................ 9
1.1.1. Adolescent ou jeune : Quel concept retenir dans cette recherche ?....................................... 9
1.1.2. Qu’entend-t-on par sexualité prénuptiale et comportements sexuels à risque ? .................. 12
1.2. Conséquences négatives de la sexualité prémaritale des adolescents et jeunes ........................ 13
1.2.1. Les grossesses prénuptiales : le plus souvent précoces et/ou non désirées ......................... 14
1.2.2. Avortements aux âges jeunes : risques sanitaires et conséquences sociales........................ 15
1.2.3 Comportements sexuels à risque des jeunes et facteurs associés ......................................... 17
1.2.3.1. Conditions de vie précaires comme facteur de risque ...................................................... 20
1.2.3.2. Déficit de connaissance sur les IST/VIH/Sida ................................................................. 22
1.2.3.3. Consommation des substances désinhibantes................................................................... 23
1.3. Quelques approches explicatives des comportements sexuels des jeunes .................................. 24
1.3.1. Approche socioculturelle ..................................................................................................... 24
1.3.1.1. L’héritage culturel ............................................................................................................ 24
1.3.1.2. L’appartenance ethnique ou groupe culturel .................................................................... 25
1.3.1.3. La religion ........................................................................................................................ 27
1.3.2. Théorie de la désorganisation sociale : urbanisation, scolarisation et mass médias
conduisant à la mutation des mœurs sexuelles .............................................................................. 29
1.3.3. Approche économique ......................................................................................................... 31
1.3.3.1. Activités sexuelles des jeunes comme moyen d’amélioration des conditions économiques
....................................................................................................................................................... 32
1.3.3.2. Activité sexuelle des jeunes comme stratégie d’ascension sociale .................................. 35
1.3.4. Approche institutionnelle .................................................................................................... 35
1.3.5. Approche genre ................................................................................................................... 37
1.3.5.1. Le faible pouvoir de décision des femmes en matière de sexualité .................................. 38
1.3.5.2. La forte dépendance économique ..................................................................................... 39
1.3.5.3. Le multipartenariat sexuel et rapport de genre ................................................................. 40
1.3.6. Approche systémique .......................................................................................................... 40
Conclusion du chapitre 1 ............................................................................................................... 42

276
CHAPITRE 2. Tendances générales des comportements sexuels et contexte de l’étude...................... 44
2.1. Comportements sexuels des adolescents et des jeunes dans le monde : entre évolution, baisse et
contraste ............................................................................................................................................ 45
2.1.1. Calendrier de l’initiation sexuelle : une tendance générale au recul ................................... 45
2.1.2. Entrée en union de plus en plus tardive ............................................................................... 49
2.1.3. Développement de la sexualité prémaritale ......................................................................... 51
2.1.4. Fécondité prémaritale renforcée par une fécondité précoce ................................................ 53
2.1.5. Sexualité de plus en plus à risque : relations sexuelles instables et partenaires multiples .. 56
2.1.6. Utilisation du préservatif lors des rapports sexuels chez les jeunes : un faible recours en
Afrique........................................................................................................................................... 57
2.2. Côte d’Ivoire : un bref aperçu du contexte................................................................................ 59
2.2.1. Contexte économique et comportements sexuels : quand la pauvreté favorise la prise de
risque ............................................................................................................................................. 59
2.2.2. Crises militaro-politiques, déplacement de populations et comportements sexuels à risque
....................................................................................................................................................... 61
2.2.3. VIH/Sida : une analyse de la situation épidémiologique ..................................................... 63
2.2.3.1. Progression et stabilité de l’épidémie ............................................................................... 63
2.2.3.2. Populations les plus à risque............................................................................................. 64
2.2.3.3. Féminisation du VIH/Sida ................................................................................................ 65
2.2.3.4. Infections Sexuellement Transmissibles (IST) chez les jeunes ........................................ 66
2.2.4. Profil socio-démographique des jeunes en Côte d’Ivoire .................................................... 67
2.2.4.1. Les jeunes dans la population ivoirienne .......................................................................... 67
2.2.4.2. Education et niveau d’instruction des jeunes ................................................................... 68
2.2.4.3. Les jeunes et le marché du travail .................................................................................... 69
2.2.4.4. La question de l’égalité des sexes..................................................................................... 70
Conclusion du chapitre 2 ............................................................................................................... 72

CHAPITRE 3. Données et approches méthodologiques ....................................................................... 73


3.1 Données disponibles sur la sexualité et les comportements sexuels en Côte d’Ivoire ................ 74
3.2 Source de données ....................................................................................................................... 76
3.2.1 Présentation des données quantitatives................................................................................. 77
3.2.1.1 Les enquêtes démographiques et de santé (EDS) et l’enquête sur les indicateurs du Sida
(EIS) .............................................................................................................................................. 77
3.2.1.2 Questionnaires ................................................................................................................... 78
3.2.1.3 Echantillons des EDS/EIS ................................................................................................. 79
3.2.1.4 Couverture de l’échantillon ............................................................................................... 80
3.2.2 Evaluation de la qualité des données EDS/EIS ........................................................................ 81
3.2.2.1 Examen des taux de non-réponse ...................................................................................... 81
3.2.2.2 Evaluation de la qualité des données sur l’âge .................................................................. 83
3.2.2.3 Analyse de la structure par âge .......................................................................................... 84
3.2.2.4 Evaluation de la qualité des déclarations sur l’âge aux premiers rapports sexuels ........... 87
3.2.2.5 Erreurs de mesure : les données collectées sur la sexualité sont-elles fiables ? ................ 88
3.3 Limites des données de l’étude .................................................................................................... 89
3.4 Concepts, indicateurs et variables d’analyse .............................................................................. 89
3.4.1 Comportements sexuels à risque : terminologie et définitions ............................................. 89

277
3.4.2 Variables dépendantes .......................................................................................................... 90
3.4.3 Variables explicatives ........................................................................................................... 91
3.4.4 Indicateurs et mesure ............................................................................................................ 92
3.5 Enquête sur le contexte de la sexualité dans le cadre du West Africa Agricultural Productivity
Program (WAAPP) ............................................................................................................................ 97
3.5.1 Déroulement de l’enquête..................................................................................................... 98
3.5.2 Zone d’enquête ..................................................................................................................... 99
3.5.3 Méthodologie de collecte ..................................................................................................... 99
3.5.3.1 Plan de sondage : méthode de détermination de la taille de l’échantillon des producteurs99
3.5.3.2 Echantillonnage ............................................................................................................... 100
3.5.4 Apurement des données ...................................................................................................... 101
3.5.5 Difficultés rencontrées........................................................................................................ 101
3.6 Brève description des méthodes d’analyse ................................................................................ 102
3.7 Présentation des données qualitatives....................................................................................... 102
3.7.1 Espace géographique et social de l’étude ........................................................................... 103
3.7.2 Sélection des participants ................................................................................................... 103
3.7.3 Déroulement de la collecte des données ............................................................................. 104
3.7.4 Outil de collecte de données ............................................................................................... 104
3.7.5 Méthode d’échantillonnage ................................................................................................ 105
3.7.6 Traitement des données ...................................................................................................... 105
3.7.7 Approche méthodologique utilisée : la bio-phénoménologie ............................................. 106
Conclusion du chapitre 3 ............................................................................................................. 107

CHAPITRE 4. Calendrier de l’initiation sexuelle des jeunes : quels effets sur l’utilisation de préservatif
............................................................................................................................................................. 108
4.1 Calendrier des débuts sexuels vu sous l’angle du genre ........................................................... 110
4.2 Relation entre la précocité de l’entrée en sexualité et les autres comportements sexuels à
risque : considérations empiriques ................................................................................................. 111
4.3 Données ..................................................................................................................................... 112
4.3.1 Définitions des concepts clés.............................................................................................. 113
4.3.2 Variables de l’analyse......................................................................................................... 114
4.3.3 Hypothèses de travail ......................................................................................................... 115
4.3.4 Méthodes d’analyse ............................................................................................................ 116
4.4 Résultats .................................................................................................................................... 117
4.4.1 Caractéristiques socio-démographiques des enquêtés ........................................................ 117
4.4.2 Initiation sexuelle préconjugale des jeunes ........................................................................ 119
4.4.3 Entrée en vie sexuelle plus précoce chez les garçons ......................................................... 123
4.4.4 Durée de la relation sexuelle avec le premier partenaire .................................................... 126
4.4.5 Ecart d’âge entre partenaires au premier rapport sexuel .................................................... 128
4.4.6 Utilisation de préservatif au moment du premier rapport sexuel ....................................... 130
4.4.7 Résultats de la modélisation ............................................................................................... 134
Conclusion du chapitre 4 ............................................................................................................. 138

CHAPITRE 5. Structure familiale et multipartenariat sexuel chez les jeunes : de l’approche quantitative
à l’approche bio-phénoménologique................................................................................................... 141

278
5.1 Analyse quantitative du multipartenariat chez les jeunes en Côte d’Ivoire .............................. 142
5.1.1 La structure familiale et son influence sur les comportements sexuels des jeunes en
Afrique : l’apport de quelques études empiriques....................................................................... 142
5.1.2 Données .............................................................................................................................. 145
5.1.3 Variables d’analyse et hypothèses ...................................................................................... 146
5.1.4 Méthodes d’analyse statistique ........................................................................................... 147
5.1.4.1 Analyse descriptive bivariée............................................................................................ 147
5.1.4.2 Analyse multivariée explicative ...................................................................................... 148
5.1.5 Résultats ............................................................................................................................. 151
5.1.5.1 Les jeunes et leurs ménages de résidence : une prééminence de la monogamie et un recul
de la polygamie ........................................................................................................................... 151
5.1.5.2 Nombre de partenaires sexuels parmi les jeunes ............................................................. 153
5.1.5.3 Association entre le multipartenariat sexuel et les variables indépendantes ................... 154
5.1.5.4 Facteurs explicatifs du multipartenariat sexuel chez les jeunes ...................................... 158
5.2 Approche sociologique des facteurs associés au multipartenariat sexuel des jeunes ............... 166
5.2.1 Résultats et interprétation ................................................................................................... 167
5.2.2.1 Caractéristiques socio-démographiques des enquêtés ..................................................... 167
Conclusion du chapitre 5 ............................................................................................................. 177

CHAPITRE 6. Tendances de la non utilisation du préservatif parmi les jeunes : une Analyse des sources
du changement et des déterminants ..................................................................................................... 180
6.1 Aperçu sur les travaux empiriques : les obstacles à l’utilisation du préservatif ....................... 182
6.2 Hypothèses, données et variables .............................................................................................. 185
6.3 Méthodes d’analyse ................................................................................................................... 188
6.4 Résultats .................................................................................................................................... 188
6.4.1 Analyse descriptive ............................................................................................................ 188
6.4.2 Tendances du non recours au préservatif parmi les jeunes célibataires : Quelles sont les
sources du changement des comportements en Côte d’Ivoire ? .................................................. 198
6.4.2.1 Présentation de la méthode de décomposition ................................................................. 198
6.4.2.2 Résultats de la décomposition simple.............................................................................. 200
6.4.2.3 Résultats de la décomposition avancée de l’effet de performance .................................. 202
6.4.3 Analyse multivariée : à la recherche des déterminants du non usage de préservatif ........ 204
6.4.3.1 Présentation du modèle.................................................................................................... 204
6.4.3.2 Résultats de la modélisation économétrique ................................................................... 205
Conclusion du chapitre 6 ............................................................................................................. 213

Conclusion générale ............................................................................................................................ 215

Bibliographie ....................................................................................................................................... 224

Annexes ............................................................................................................................................... 253

Liste des tableaux ................................................................................................................................ 273

Liste des figures................................................................................................................................... 275

Table des matières ............................................................................................................................... 276

279
Comportements sexuels à risque au temps du VIH/Sida : le cas des jeunes
en Côte d’Ivoire

Résumé
Un grand nombre des nouvelles infections à VIH se produit chez les jeunes de 15 à 24
ans. C’est également dans cette tranche d’âge que réside l’espoir d’inverser le cours de cette
épidémie. Cette thèse se propose de questionner les comportements sexuels à risque parmi les
jeunes, en Côte d’Ivoire, dans un contexte social et économique en pleine mutation. Les
résultats mettent au jour une non observance des normes traditionnelles en matière de sexualité
en Afrique. Les rapports sexuels prônés, autrefois, exclusivement dans le cadre du mariage,
notamment chez les filles tendent à s’estomper avec une augmentation de la sexualité
prémaritale. De plus, le calendrier de l’initiation sexuelle prémaritale conditionne le recours ou
non au préservatif. Ainsi, les jeunes qui commencent leur vie sexuelle de façon précoce sont
plus enclins à ne pas recourir au préservatif au moment de cette occurrence. En s’intéressant au
multipartenariat sexuel, les résultats montrent que l’adoption d’un tel comportement émane de
décisions individuelles influencées surtout par l’environnement familial et le contexte socio-
économique. L’analyse compréhensive met en lumière des aspects insuffisamment pris en
compte dans les enquêtes quantitatives standardisées. Il ressort en autres que la désarticulation
de la socialisation ou la rupture des liens sociaux et affectifs sont influents sur le recours aux
partenaires multiples. Enfin, on note que les pratiques préventives chez les jeunes ont connu
des progrès notables entre 1998 et 2005 avant de se stabiliser entre 2005 et 2012.
Mots-clés : VIH/Sida, sexualité prémaritale, comportement sexuel à risque, calendrier
d’initiation sexuelle, multipartenariat, préservatif, jeunes, Côte d'Ivoire.

Sexual risk behaviour in the time of AIDS : the case of young people in Ivory Coast

Ecole doctorale de Géographie de Paris, 191, Saint Jacques 75005 Paris


Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Centre de Recherche de l'Institut de Démographie de l'Université Paris 1
(CRIDUP)
Centre PMF 18ème étage, 90 rue de Tolbiac 75013 Paris

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