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VÉCU

COLLECTION

LA GUÉRISON
Walter
DU GUÉRISSEUR

Walter Vappiani

r INCLUS ÉVANGILE SELON MARC

H I S T O I R E V R A I E
Walter r La guérison du guérisseur
VÉCU
COLLECTION

LA GUÉRISON
Walter
DU GUÉRISSEUR

Walter Vappiani

r INCLUS
ÉVANGILE
SELON MARC

BLF Europe • Rue de Maubeuge


59164 Marpent • France
Walter – La guérison du guérisseur • Walter Vappiani

© 2010 BLF Europe • Rue de Maubeuge • 59164 Marpent • France


info@blfeurope.com • www.blfeurope.com
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés.

Assistante d’édition : Martine Cacard. Merci pour ton formidable travail !


Couverture et mise en page : BLF Europe • www.blfeurope.com
Impression nº 91488 • IMEAF • 26160 La Bégude de Mazenc

Sauf mention contraire, les citations bibliques sont tirées


de la Bible du Semeur • © 2000 Société Biblique Internationale.
Avec permission.

ISBN 978-2-910246-73-0
Dépôt légal 3e trimestre 2010

Index Dewey (CDD) : 248.24


Mots-clés : 1. Vie chrétienne. Conversion.
2. Occultisme.
La collection « Vécu »

La collection « Vécu » des Éditions BLF vous propose


l’histoire plus ou moins extraordinaire d’hommes et de
femmes qui ne sont pas des célébrités. Pourtant, leur vie
est remarquable. Parce qu’elle a été marquée, transfor-
mée par une rencontre.
Ce ne sont pas des écrivains. La plupart prennent la
plume pour la première fois. Leur vécu est livré brut, sans
commentaire, sans sermon ni prêchi-prêcha. Les faits tels
qu’ils les ont vécus. Avec leurs émotions, leurs questions,
leurs interrogations, leurs failles, leurs hésitations…

r r r

Assurément, à la lecture du récit de Walter, vous allez


vous poser des questions :
– Mais quelle rencontre a-t-il faite ?
– Quelle expérience a donc transformé sa vie ?
Vous pourrez poursuivre votre découverte, notam-
ment par la lecture de l’Évangile selon Marc. Encore une
fois : brut, sans commentaire, tel que vous pourriez le lire
dans une Bible.
Bonne lecture !
A L A I N S TA M P,
PRÉSIDENT DE BLF EUROPE

5
r
CHAPITRE 1
Une jeunesse fougueuse

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale,


mon père quitte l’Italie pour chercher fortune en
France. Ma mère le rejoint, sitôt ses 21 ans atteints.
Je viens au monde, un jour de 1954, dernier d’une
fratrie de trois garçons. Toute ma jeunesse se dé-
roule à Neufchef, en Moselle, où mes parents s’ins-
tallent en 1956.
Mon père trouve un emploi dans la sidérurgie,
omniprésente en Moselle. D’abord affecté au lami-
noir, à un poste très pénible, il accède ensuite à un
emploi plus agréable de conducteur de locomotive.
Il travaille fréquemment douze heures par jour, ce
qui le rend peu disponible pour développer une re-
lation avec ses fils. Venu sans un sou d’Italie, seul à
rapporter un salaire, il doit faire vivre sa famille. Cela
suffit à donner le sentiment du devoir accompli. Tant
que je suis tout petit, il prend encore le temps de
jouer un peu avec moi, mais avec le temps, nos rela-
tions se distendent. Je l’aime, mais je ne partage plus
grand-chose avec lui.

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Walter r La guérison du guérisseur

Brune et jolie, ma mère est une femme très af-


fable et sociable, dynamique et positive. Malgré les
difficultés, elle sait rendre notre vie de famille cha-
leureuse et agréable. Elle considère ses trois garçons
comme la prunelle de ses yeux. Tout au long de ma
vie, j’ai senti la chaleur de son amour inconditionnel
qui m’a construit et permis d’aimer la vie.
J’ai peu de souvenirs de ma petite enfance, mais,
dans ma mémoire, sont gravés ces moments mer-
veilleux quand, le soir venu, ma maman me borde.
Elle prend toujours le temps de me cajoler quelques
minutes pour ensuite prier avec moi le Notre Père en
italien. C’est si bon ! Je ne sais pas si c’est mon en-
fance qui me prédispose à croire en Dieu et à aimer
les autres ou si cette prédisposition est innée, mais
je perçois une grande sensibilité au fond de mon
cœur et une intense envie de faire le bien.
Le rythme suit l’école publique la semaine et
l’église catholique le dimanche. Studieux, j’apprends
consciencieusement, y compris le catéchisme. J’en
acquiers des bribes de culture chrétienne mais sans
y trouver un intérêt particulier. Les prêtres qui ensei-
gnent les cours de religion ne croient ni aux miracles
ni au surnaturel, enlevant ainsi une grande partie de
leur crédibilité aux histoires bibliques. Cela n’aide pas
à croire en Dieu. Leur enseignement tient plutôt de
la morale ; ils mettent l’accent sur le comportement.
Ce sont des éducateurs hors pair avec de bonnes va-
leurs humaines et sociales. Déjà pas si mal ! Mais rien
à voir avec les aspirations profondes de mon cœur !

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Une jeunesse fougueuse

De tout cela, reste ce que ma mère a planté dans


mon cœur. Tout petit, j’ai vécu des moments d’une
rare intensité de joie et de paix. Et ce souvenir me
transporte. Quant à mon père, modèle de moralité
et d’honnêteté, par sa manière de vivre, il m’a trans-
mis ses valeurs. Ainsi, mes premières années pas-
sent-elles agréables et sans histoires. Petit dernier,
je fais le bonheur de mes parents. En bonne santé,
brillant à l’école, vif et bavard, je ne garde de cette
période que des souvenirs heureux.
L’adolescence s’avère plus difficile. Comme tous
ceux de mon âge, je dois faire face aux bouleverse-
ments de mon corps et de mon esprit. Qu’il est dif-
ficile de gérer la violence des émotions amoureuses
et des pulsions sexuelles. Plus encore, c’est la soif de
liberté et d’accomplissement. Je suis impatient d’en
découdre avec la vie.
Au fond de moi, une fougue et une puissance in-
térieure me poussent dans toutes les directions. Le
rugby me défoule. Je pratique aussi le karaté pour
me défendre. Je voudrais tout découvrir, tout es-
sayer !
Le dimanche entre copains, nous prenons tou-
jours la direction de l’église mais bifurquons pour
nous retrouver au café. Finalement, nous passons
la matinée à jouer au baby-foot et au flipper. Et si
on nous questionne sur ce qu’a dit le curé, nous ré-
pondons évasivement avec un sourire : « Il a parlé de

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Walter r La guérison du guérisseur

Dieu et… il est plutôt pour ! » La plupart de mes amis


ne croient plus. La page de la religion catholique est
définitivement tournée.
Et le lycée, quelle plaie ! Avec ses contraintes
scolaires qui mettent constamment sous pression.
Suivre une filière technique, quelle déception ! Ma
passion, ce sont les sciences humaines, ce qui traite
de l’homme avec son relationnel, ses questions exis-
tentielles.
J’ai soif de connaissance et je dévore des tonnes
de livres ! Avec une préférence très nette pour la psy-
chologie, la philosophie et l’ésotérisme 1. Tout com-
mence au Prisunic. Alors que je flâne dans le rayon
des soldes, je tombe sur un livre dont le titre évo-
cateur m’arrête pile : Vivre pleinement sa vie. Vivre
pleinement ma vie ! Voilà justement ce à quoi j’as-
pire ! Alors que pour nous, enfants et adolescents,
tout ce qui a autorité – parents, profs, curés – dé-
cide de ce que nous devons croire ou penser, voilà
un livre qui affirme : « Prends ta vie en main » ! Ce
parfum de liberté… Un vrai délice ! Quel pied ! J’ai 14
ans et Mai 68 bat son plein !
Captivant ! J’enchaîne avec Freud, Young, Reich.
Ils abordent les sujets importants pour ma généra-
tion : la psychologie et la sexualité. Je pénètre pro-
gressivement dans le fonctionnement de l’homme
et les mécanismes de ses passions. Le petit plus qui
me manquait me vient surtout par un livre sur le

1
Ésotérisme : 1. Partie de certaines philosophies dont la pratique
devait rester inconnue des profanes […]. 3. Synonyme de
occultisme. www.larousse.fr © Éditions Larousse 2009.

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Une jeunesse fougueuse

bouddhisme tibétain : Le troisième œil. Il y est ques-


tion d’une dimension spirituelle de l’être humain et
des mystères de la vérité invisible. Cette vérité se ca-
cherait derrière les apparences du monde matériel
qui sont illusion – « Maya » comme le bouddhisme
l’appelle.
Même si la religion de mon enfance ne m’ap-
porte plus rien, je m’oppose souvent à mes copains
qui la rejettent : « Moi, je crois en Dieu ! Je ne sais
ni qui il est ni comment il est, mais je le découvri-
rai ! » Certains scientifiques prétendent que nous
sommes le « fruit du hasard et de la nécessité ». J’ai,
au contraire, au fond de moi l’intuition de l’éternité.
Oui, la vie a un sens !
Porté par l’enthousiasme de mon jeune âge,
j’entreprends alors une recherche de la vérité sur la
vie et sur Dieu. C’est vital pour moi de la trouver. Car
si Dieu n’existe pas, le monde est uniquement maté-
riel et la discussion est close. Mais s’il existe, que de
perspectives et d’espérances à découvrir ! J’ai besoin
de savoir pourquoi j’ai été créé, j’ai besoin de trouver
ma place et mon rôle dans l’univers. Savoir cela me
permettra, c’est certain, de revenir porteur de solu-
tions aux souffrances et aux errances de l’humanité.
Seize ans. En pleine quête spirituelle. En pleine
soif d’accomplissement. Les anciennes convictions
religieuses se désagrègent progressivement. L’es-
prit bouillonne. Je ne peux plus me contenter de ce
qu’on m’a enseigné. J’ai besoin de forger mes propres
convictions et de découvrir par moi-même la réalité
et les mystères du monde spirituel !

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Walter r La guérison du guérisseur

Les religions et philosophies orientales ainsi que


l’ésotérisme proposent de nouvelles conceptions
du divin, de la nature de l’homme, de la vie et de
la mort. Celles-ci s’imposent imperceptiblement à
moi et façonnent ma pensée : je ne conçois plus Dieu
comme une personne qui sépare le bien du mal,
mais comme une force créatrice, une conscience
cosmique. Une conscience pour laquelle le bien et le
mal n’existent pas en tant que tels, mais sont comme
le yin et le yang : deux facettes d’une même unité.
Les contours du divin sont flous mais, par igno-
rance et par commodité, je continue à l’appeler
« Dieu ».
Cette liberté de croyance nouvelle me plaît : elle
m’affranchit de mes tabous et m’autorise à tout ex-
périmenter pour augmenter ma connaissance.
Toutes ces choses me travaillent intérieurement :
je vais bientôt devoir choisir entre ce que je dé-
couvre et la foi de mon enfance. Les derniers verrous
sautent quand je commence à désacraliser Jésus, à
le considérer comme un homme ordinaire. J’arrive
à la conclusion qu’il est appelé « fils de Dieu » parce
qu’il avait compris et assimilé la nature de Dieu ! Je
considère que c’est une filiation par la connaissance,
par l’éveil spirituel. Qu’il est ce que l’ésotérisme
nomme « un initié », comme le Bouddha et bien
d’autres ! Cette conclusion combine et harmonise
mes croyances, ce qui m’apaise. Je crois avoir tout
compris : une voie royale s’ouvre devant moi. Jésus
étant lui-même un initié, plus rien ne s’oppose à ma
découverte du monde invisible.

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Une jeunesse fougueuse

Tout ce temps passé à lire et à méditer ne


m’empêche pas d’avoir une vie sociale soutenue.
Au contraire, mon charisme m’ouvre la sympathie
des autres. Ils me perçoivent souvent avec un petit
plus indéfinissable et cela suscite de nombreuses
réactions de bienveillance à mon égard. Même le
surveillant général du lycée, plutôt froid et avare
de compliments, me dit un jour : « Vappiani, un peu
moins de charme et un peu plus d’efficacité ! » En ef-
fet, j’adore passer des heures à discuter et à refaire
le monde avec les gars et les filles de mon âge.
Mon oreille est attentive et mon cœur sensible
aux malheurs des uns et des autres. Il m’arrive de
prodiguer des conseils souvent appréciés. Je me
trouve des qualités de thérapeute et j’aimerais de-
venir psychologue. Mais le décès de mon père, juste
après le bac, et la tristesse que cela engendre, me
contraignent à gagner ma vie plus rapidement que je
ne l’aurais souhaité.
Après un bref passage d’un an comme techni-
cien en sidérurgie, je pars au service militaire. Nous
sommes en juin 1974 : j’ai 20 ans.

13
r
CHAPITRE 2
Un messager inattendu

Enfin libre !
Me voilà dégagé des obligations militaires, mais
pas assagi pour autant, loin de là ! J’ai toujours be-
soin de bouger et de découvrir le monde. Au grand
désespoir de ma famille, je décide de tenter l’aven-
ture : je ne reprends pas mon emploi.
Finalement, je trouve une activité profession-
nelle qui correspond bien à ma nature indépendante
et à ma personnalité de bohème : commerçant sur
les marchés.
C’est formidable ! Je peux vendre ma marchan-
dise, pour l’essentiel des vêtements, dans n’importe
quelle ville de France. Bien sûr, les aléas du com-
merce ne manquent pas, avec leur lot de difficul-
tés financières, mais ce qui m’émerveille, c’est cet
intense sentiment de liberté et d’aventure. J’aime
cette ambiance de foire, cosmopolite et vivante,
pleine d’éclats de voix et d’odeurs délicieuses. Quel
plaisir ! J’adore discuter, marchander et plaisanter
avec les clientes.

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Walter r La guérison du guérisseur

Côté organisation, ce n’est pas mal non plus !


J’ai acheté une grande camionnette en Allemagne.
La double cabine sert de camping-car, certains jours,
tandis que la partie arrière séparée, abrite la mar-
chandise et le matériel nécessaires à mon commerce.
Avec Thierry, un ami au style de vie semblable,
nous établissons notre base à Grenoble. Cette région
est vraiment belle. C’est un bonheur de circuler et de
travailler dans cet environnement de montagnes. De
plus, les marchés sont nombreux, prospères et nous
ne sommes qu’à une centaine de kilomètres de Lyon,
où réside notre fournisseur et ami, Jean-Paul.

L’hypnotiseur
Quelques mois passent. Un hiver assez rigou-
reux nous met sur la touche. Nous sommes alors
contraints d’interrompre notre activité plusieurs se-
maines. Je profite de cette disponibilité pour voyager
un peu. Comme je manque de soleil et de repos, je
projette de rendre visite à un ami qui effectue son
service civil en Tunisie.
Je prépare mon départ quand survient une chose
très étrange que je n’avais jamais expérimentée à ce
jour : une vision. Je me vois, voyageant dans ce qui
me semble être un train (au vu des sièges caracté-
ristiques), assis à côté d’un homme qui me dit : « Je
suis hypnotiseur ». Et la vision s’arrête là ! La scène
semble si réelle par ses détails qu’elle me donne
l’impression d’avoir regardé un film. Une bouffée
d’émotion m’envahit tandis que je suis gagné par la
conviction que cette vision va se réaliser. Au point
16
Un messager inattendu

d’annoncer à mes proches : « Je vais peut-être ren-


contrer un hypnotiseur ! »
Mon séjour sur place est très agréable et m’ap-
porte toute satisfaction. Il me donne aussi l’occasion
de vivre une curieuse aventure ! À Tunis, je fais la
connaissance de Francis, jeune routard français qui,
en dépit d’apparences avenantes, cherche à me voler
l’argent de mon billet de retour. Rien dans son com-
portement ne laisse supposer de telles intentions.
Pourtant, après quelques heures passées avec lui, je
ressens au creux de l’estomac un malaise tel que, n’y
tenant plus, je lui dis :
– Je ne peux pas, je ne dois pas rester avec toi.
Surpris et curieux de cette situation peu ordi-
naire, il bafouille :
– Mais… comment tu sais ?
Et là, dans la confusion, il vient de se trahir !
Je prends conscience, qu’au fond de moi, quelque
chose s’est animé : une sorte de système d’alarme.
Un sixième sens vient de se manifester pour m’infor-
mer d’un danger que je ne soupçonnais pas !
Le lendemain, c’est le retour en bateau. L’aube se
lève et la journée s’annonce très belle. La page de ma
mésaventure avec Francis est tournée et mes pen-
sées se portent vers l’avenir. Je contemple pendant
de longues minutes le sillage du bateau qui s’éloigne
du port, et les mille reflets du soleil levant sur la mer.
Plein de cette vision féerique, je pars prendre un bon
petit-déjeuner au bar. Je m’installe ensuite confor-
tablement au salon. Il y a là plusieurs rangées de

17
Walter r La guérison du guérisseur

sièges… semblables à ceux que l’on trouve dans les


trains. Quelques-uns seulement sont occupés.
Un vieux monsieur s’installe à côté de moi, me
salue et entame la conversation. Il est italien et fort
aimable. Il parle aussi très bien le français. Après
quelques banalités d’usage, il se fait plus sérieux et
intéressé : « Je suis hypnotiseur. Enfin, je l’étais, je
faisais même des spectacles d’hypnose. Mais main-
tenant que je suis vieux, je garde mes forces pour
soigner, par magnétisme, mon petit-fils handicapé. »
Et il ajoute avec enthousiasme : « Je dois vous le dire,
vous avez les pouvoirs de faire ces choses, recher-
chez-les » !
Je suis surpris, sans vraiment l’être ! Il y avait en
moi, depuis plusieurs années, quelque chose de par-
ticulier. Le sentiment d’être différent me poussait à
chercher qui j’étais réellement. C’était presque dou-
loureux, et voilà qu’enfin quelqu’un apportait un dé-
but de réponse !
À n’en plus douter, des pouvoirs parapsychiques
m’habitent. Le moment est venu pour qu’ils se mani-
festent. Preuve en est dans le merveilleux du dérou-
lement de ce voyage. En effet, en moins d’un mois,
quatre manifestations du surnaturel ont surgi ! Tout
d’abord, la vision d’une rencontre, puis cette protec-
tion toute particulière pour que je ne manque pas ce
rendez-vous, ensuite, l’accomplissement de la vision
et enfin, ce messager qui annonce mes pouvoirs.
Quel bonheur ! Dieu conduit certainement mes pas
et m’appelle à travailler pour lui. Le voici enfin à
l’œuvre ! Ma vie ne sera plus jamais la même, main-

18
Un messager inattendu

tenant des preuves matérielles de son existence se


sont manifestées.
La discussion se poursuit mais je comprends vite
que ce n’est pas ce monsieur qui m’emmènera plus
loin. Manifestement, dans le plan divin, il n’est qu’un
messager, laissant à un autre le soin de m’initier.
Que faire pour connaître et maîtriser ces pou-
voirs ?
Peu après mon retour, plein de fougue et de
confiance, je décide de rendre visite à un guérisseur
installé à Ars-sur-Moselle, à vingt kilomètres de chez
moi. Reçu dans son cabinet, je m’attends à une dé-
claration du même genre que celle qui m’a été faite
sur le bateau. Mais alors là ! Pas du tout ! Il n’a rien
remarqué de spécial chez moi. Quand je lui exprime
le souhait de devenir guérisseur, il ajoute : « Eh bien,
il faut manger des pommes » !
Quelle terrible déception ! Mais une fois la sur-
prise passée, je me raisonne : Ne précipite pas les
choses, sois patient et attends ! Mes lectures ésoté-
riques m’avaient appris que « Quand l’élève est prêt,
le maître arrive tout seul ».

Rencontre avec le guérisseur


Quelques mois plus tard, je me trouve à Gre-
noble, dans un restaurant tenu par des amis. Une
conversation à une table voisine relance aussitôt
mon enthousiasme. Un homme raconte comment
sa belle-sœur, souffrante depuis plusieurs années,
se sent nettement mieux depuis qu’elle consulte un

19
Walter r La guérison du guérisseur

guérisseur. Intéressé, j’engage illico la conversation


pour en savoir un peu plus. Mais manifestement,
l’homme ne connaît rien de ce guérisseur, ni son
nom ni son adresse, excepté la ville où il exerce : Le
Teil, à côté de Montélimar.
Je me sens immédiatement interpellé. Cette
conversation n’est certainement pas le fruit du ha-
sard ; elle fait partie du grand jeu de piste qui doit
m’amener à prendre possession de mes pouvoirs.
Une petite corde s’est mise à vibrer, et je sais ce qu’il
reste à faire : tout mettre en œuvre pour retrouver
ce guérisseur !
L’annuaire téléphonique ne livre aucune trace
de cet homme. À l’évidence, la meilleure solution est
d’aller sur place. Avec la liberté que me donne mon
commerce, je pars rapidement à sa recherche.
Le Teil est une petite ville. Tout le monde doit se
connaître et notamment quelqu’un d’aussi atypique
et particulier qu’un guérisseur ! Je suppose qu’à La
Poste, je pourrai glaner quelques informations :
– Désolée, je ne vois pas de qui il s’agit ! répond
l’employée.
Ma déception est de courte durée car une dame
derrière moi m’interpelle à voix basse :
– Je sais de qui vous parlez mais c’est un mon-
sieur très discret. Il ne veut pas que ça se sache.
Elle hésite un peu, puis accepte quand même
de donner son nom et son adresse. Quelle surprise !
Les guérisseurs ne se cachent d’habitude pas… Au

20
Un messager inattendu

contraire ! Un malaise m’envahit : Comment va-t-il


me recevoir ?
Devant sa porte, une certaine appréhension
me gagne et je dois me faire violence pour trouver
le courage d’appuyer sur la sonnette. Un monsieur
d’une soixantaine d’années ouvre et me dévisage
longuement :
– Que voulez-vous ? me demande-t-il.
Je lui explique :
– J’ai entendu parler de vous, et moi aussi, je
voudrais devenir guérisseur.
Satisfait et inquiet en même temps, je suis sus-
pendu à ses lèvres. La tension est palpable…

21
r
CHAPITRE 3
La voie royale

Après quelques secondes qui me paraissent in-


terminables, sa réponse tombe : « Vous avez bien fait
de venir ! » Ouf, je respire, mon cœur peut battre à
nouveau !
Une fois dans le salon, il lance à son épouse : « Tu
te rends compte chérie, ce monsieur veut devenir
guérisseur ! Peux-tu nous préparer un petit café ? Il
faut qu’on parle sérieusement ».
Tiens, c’est étrange, il semble satisfait. Plus tard,
j’apprendrai qu’il avait été coopté par un guérisseur
appartenant à une société secrète : il devait donc, à
son tour, transmettre son savoir à trois autres per-
sonnes. Pour lui, cette venue accomplissait le plan
divin le concernant.
Le salon est tout à fait ordinaire dans son ameu-
blement et sa décoration, mais l’atmosphère qui y
règne est tout de même spéciale, surprenante. L’air
semble chargé d’électricité, d’un je-ne-sais-quoi qui
hérisse le poil. Tout devient plus clair quand M. A. ex-

23
Walter r La guérison du guérisseur

plique que c’est dans cette pièce qu’il pratique habi-


tuellement ses guérisons.
De taille moyenne, costaud, les cheveux gris,
et les yeux très sombres, M. A est souriant, mais
ne semble pas de caractère facile. Par contre, son
épouse, une petite dame brune d’une certaine cor-
pulence, est d’une extrême amabilité.
Nos tasses de café fument, et nous conversons.
Il me questionne un peu sur ma vie, sur ma profes-
sion. Suivent quelques banalités puis nous passons
aux choses sérieuses : « De toute façon, dit-il, les
pouvoirs, je ne peux pas vous les donner, mais on va
vite savoir si vous les avez ». Il ajoute, en souriant :
« ça m’étonnerait que vous ne les ayez pas, avec ce
que j’ai ressenti en vous voyant ! »
Délicieuses paroles ! Justement celles que j’at-
tendais et qui m’apaisent.
Il commence par la radiesthésie.

La radiesthésie
– Vous devez savoir, explique-t-il, que la radies-
thésie est une méthode de divination par laquelle
certaines personnes sensibles aux oscillations d’un
pendule ou d’une baguette, découvrent la présence
de sources, de gisements ou de maladies. Je suis
moi-même radiesthésiste, et je vais vous montrer
comment je procède pour savoir de quoi souffrent
les personnes qui viennent me consulter. Nous allons
d’abord commencer par vous !

24
La voie royale

Il s’installe en face de moi et étale sur la table


une planche anatomique représentant les diffé-
rentes parties du corps humain. Le pendule dans la
main droite et sa main gauche posée sur la mienne,
il commence la démonstration. Il fait lentement
circuler le pendule au-dessus de chaque organe et
semble attendre une réaction. Le pendule tourne
énergiquement, et presque toujours dans le même
sens. Il s’arrête pourtant deux ou trois fois et se met
à tourner dans l’autre sens. M. A finit par fournir son
diagnostic :
– Vous êtes jeune et en bonne santé, je n’ai rien
trouvé chez vous, excepté ces petites taches que
vous avez au fond des yeux.
Ça alors ! Moi seul connais ce détail ! Pas même
mes parents ou mon médecin ne sont au courant !
Il ajoute :
– À vous maintenant. Nous allons inverser les
rôles : je suis le malade, et vous le guérisseur. Allez-y,
essayez ! J’ai une faiblesse au niveau de ma santé : à
vous de la trouver.
Il met le pendule dans ma main et je le fais circu-
ler à mon tour. Bizarre : il ne bouge absolument pas.
Puis, je le passe au-dessus du cœur de mon « pa-
tient ». Sans prévenir, le pendule se met à trembler
énergiquement. Avec un énorme sourire, M. A. me
dit :
– Bravo ! Dans le mille ! Le cœur, c’est en effet
mon problème depuis de nombreuses années !

25
Walter r La guérison du guérisseur

Quelle aventure incroyable ! C’est ahurissant !


En un éclair, je me rends compte de ce qui vient de
se passer, et des possibilités extraordinaires qui s’of-
frent à moi : je peux deviner les maladies ! Ouah !
Je viens de caresser le surnaturel et de faire mon
premier pas d’initié dans le monde invisible.
M. A. reprend :
– Entraînez-vous et affinez la relation ! Le pen-
dule devient une partie de vous-même qui vous li-
vrera beaucoup de secrets, mais il faut le connaître
et l’apprivoiser. Demandez-lui de tourner dans le
sens des aiguilles d’une montre pour dire « Oui », et
dans le sens inverse pour dire « Non ». C’est parce
que vous n’avez rien convenu avec lui qu’il est resté
immobile dans votre main.
Voilà un mystère qui m’intrigue :
– J’aimerais comprendre. Quel est le principe qui
régit le pendule ?
Il tente une explication en me parlant de radia-
tions, de subconscient et d’inconscient collectif. Mais
comme je semble perplexe, il finit par m’avouer :
– Personne ne le sait vraiment ! C’est ça le pou-
voir de la radiesthésie ! Un don de Dieu !
Je me familiariserai par la suite avec tous ces
phénomènes paranormaux. J’en déduirai que la ra-
diesthésie est une communication spirite qui ne dé-
clare pas son nom.
Je viens d’être confronté à une expérience vrai-
ment étonnante et qui mérite réflexion. Je suis im-
patient de la tester sur d’autres afin de vérifier sa vé-

26
La voie royale

racité et son efficacité. Dès le lendemain, je sollicite


quelques amis disposés à me consacrer quelques mi-
nutes, et me mets à exercer mes nouveaux talents.
Plein de petits secrets médicaux se dévoilent, ce qui
surprend tout le monde, moi le premier !
Il en est ainsi de Véronique : d’abord incrédule,
puis voyant que je commence à cerner son pro-
blème, elle prend les devants et m’avoue avoir subi
une réduction mammaire.
Eh oui ! Je m’habitue à connaître l’intimité de
mes futurs patients !
Après quelques jours, une première déduction
se dégage : ce phénomène est réel et donne de bons
résultats. Le pendule répond aux questions que je
pose sur l’état de santé de mes amis et, parfois, sur
la cause du problème. Il n’agit pas d’une manière
neutre, comme le ferait un instrument de mesure
qui capterait une radiation. Mais plutôt comme un
oracle, une intelligence qui répondrait à mes de-
mandes. Et ses révélations sont avérées sur des faits
dont je n’ai aucune connaissance.
Mais ce n’est pas une science éprouvée. La perti-
nence des réponses dépend beaucoup de mon degré
de sérieux et de concentration. Et lorsque l’exercice
dure un certain temps, il me rend surexcité, vidé psy-
chiquement et je n’arrive plus à rien.
Depuis que j’ai rencontré l’hypnotiseur, je vis des
réalités complètement nouvelles. Il ne s’est guère
écoulé plus de six mois, mais ces réalités ont déjà for-
tement bouleversé toute ma logique. J’avais certes
déjà beaucoup lu sur le paranormal et l’ésotérisme,
27
Walter r La guérison du guérisseur

mais jusqu’à cette année 1976, tout cela relevait, à


mes yeux, du domaine de l’imagination. Je n’aurais
jamais cru pouvoir dépasser les lois et les limites du
monde matériel.
Et je ne suis pas encore au bout de mes sur-
prises !

Le magnétisme
À notre troisième rendez-vous, M. A. dit :
– Vous maîtrisez maintenant à peu près la radies-
thésie, nous allons donc passer à l’étape suivante et
voir si vous avez du magnétisme. Vous achèterez un
steak ou une escalope que vous couperez en deux.
Rentré chez vous, vous ne toucherez pas au premier
morceau : il servira de témoin. L’autre, vous le ma-
gnétiserez plusieurs jours comme je vous ai expliqué,
et nous verrons le résultat.
Je respecte scrupuleusement les consignes de
M. A. Après avoir passé mes mains au-dessus de la
viande quelques minutes, plusieurs fois par jour pen-
dant une semaine, elle est devenue dure comme du
bois. Elle s’est momifiée, alors que l’autre morceau
commence à se décomposer.
Mon fluide a stoppé ce processus et je peux dire,
en plaisantant, que ce fut ma première guérison ; et
il ne s’agissait que d’une escalope !
Dès le lendemain, je ne résiste pas à la tenta-
tion d’essayer le magnétisme sur mes proches et sur
moi-même. C’est passionnant d’avoir ce pouvoir de
guérison et de se sentir capable de mettre la maladie

28
La voie royale

en échec. Tout le monde ne guérit pas, mais j’obtiens


des résultats très satisfaisants.
Une de mes premières guérisons concluantes est
celle de Pierre, un jeune homme qui souffrait d’une
mononucléose. Il me téléphone quelques jours plus
tard pour m’informer qu’il est guéri.
J’ai moi-même un petit kyste sur le lobe de
l’oreille droite. Une fois magnétisé, il commence à se
résorber et disparaît complètement au bout de deux
mois.
Envoûté par mes nouvelles activités de radies-
thésiste et de magnétiseur, je me donne sans comp-
ter. Je veux absolument connaître tous les aspects et
sonder toutes les possibilités de ces étonnants pou-
voirs.
Pour compléter la formation, M. A. me pré-
sente un de ses collègues, M. D. Celui-ci est voyant
et exerce non loin du Vieux-Port de Marseille. Feru
de parapsychologie, M. D. organise des séminaires
de formation, uniquement par amour de l’art, sans
demander aucune participation financière.
Son cabinet fait forte impression. Une ambiance
feutrée, une lumière tamisée, une grosse boule de
cristal sur son bureau en rotin, etc. Difficile de res-
ter de marbre dans cet environnement ! Toute cette
mise en scène soignée sert à créer une atmosphère
étrange et surnaturelle qui provoque chez le patient,
le plus souvent une patiente, une forte émotion qu’il
utilise pour pratiquer sa voyance.

29
Walter r La guérison du guérisseur

En effet, les phénomènes paranormaux, ou en-


core médiumniques, se nourrissent de l’énergie psy-
chique du praticien, considérablement augmentée
par l’énergie émotionnelle des patients. Surtout s’ils
sont impressionnés ou… effrayés.
Nous sommes quatre à participer, à raison de
deux fois par mois pendant six mois, à des séances
portant chaque fois sur une autre spécialité. Celles
que M. D. préfère, et pour lesquelles il est le plus
doué, sont sans conteste la voyance 2 et le spiri-
tisme 3, qu’il pratique en professionnel. Il nous ini-
tie aussi à la télépathie 4, à l’hypnose 5 et à diverses
autres méthodes de divination.
Chose étonnante, chacun de nous réussit, avec
plus ou moins de succès, dans toutes les disciplines.
C’est comme si tous ces pouvoirs, en apparence dif-
férents, s’alimentaient à la même source.

2
Voyance ou clairvoyance : Forme de perception extrasensorielle
d’objets ou d’événements. www.larousse.fr © Éditions Larousse
2009.
3
Spiritisme : Doctrine fondée sur l’existence, les manifestations
et les enseignements des esprits, le plus souvent des esprits
humains désincarnés. (Un humain incarné est employé comme
médium entre le monde des humains et le monde des esprits
lors des séances spirites.) www.larousse.fr © Éditions Larousse
2009.
4
Télépathie : Transmission de pensées ou d’impressions
quelconques d’une personne à une autre en dehors de toute
communication par les voies sensorielles connues. www.
larousse.fr © Éditions Larousse 2009.
5
Hypnose : État de conscience particulier, entre la veille et le
sommeil, provoqué par la suggestion. www.larousse.fr
© Éditions Larousse 2009.

30
La voie royale

Toutes ces pratiques ne m’intéressent cependant


pas. Encore moins cette répugnante magie noire. Un
jour, sur un marché, un commerçant que je connais-
sais évoquait ses pratiques de sorcellerie. Je lui avais
répondu : « Ce que tu fais est mal ! Tu n’as pas le droit
d’utiliser tes pouvoirs pour nuire aux autres ! » Ce qui
m’attire et me passionne, c’est de faire le bien et de
progresser dans les pouvoirs de guérison.

La fin du pendule et le début du


troisième œil
Avec le temps et une pratique intensive, je
constate une évolution étonnante du pouvoir de la
radiesthésie. Le pendule, précis et fiable pendant
plus de huit mois, devient subitement inefficace. Il
oscille toujours, mais n’a plus aucun discernement.
À la même période, je m’aperçois que je n’ai plus
besoin de lui pour percevoir les maladies. L’image de
l’organe malade jaillit directement dans mes pen-
sées. Une espèce de portail ou de raccourci surnatu-
rel s’est ouvert entre les autres et moi. Je vois main-
tenant le corps entier en transparence, rayonner
d’énergies, de formes et de couleurs.
Les parties malades se distinguent des parties
saines par une intensité plus soutenue ainsi que par
la densité et les formes que prennent les flux d’éner-
gie. Quant aux comportements de la personna-
lité (émotions, traits du caractère, comportements
sexuels, etc.), ils se repèrent aux couleurs, que j’ap-

31
Walter r La guérison du guérisseur

prends progressivement et comparativement à in-


terpréter.
Quelle n’est pas ma surprise lorsque je réalise
que ce que je vois n’est autre que l’aura, découverte
quelques années auparavant dans mes lectures sur le
bouddhisme tibétain ! Dans cette religion, les moines
et les lamas vouent leur vie à rechercher et à déve-
lopper certains pouvoirs spirituels pour atteindre
la connaissance de la vérité. L’un d’entre eux est le
pouvoir du troisième œil qui permet de voir, au-delà
du corps physique, le rayonnement lumineux et co-
loré du corps spirituel – ou corps astral. Ne serait-ce
pas une nouvelle analogie avec la culture chrétienne,
entre l’aura et l’auréole entourant la tête des saints ?
Il y aurait là comme un nouvel aspect de l’harmonie
entre les religions.
Ce que je perçois dans l’aura est tout entier di-
rigé vers la guérison de mes patients. Toutes les in-
formations reçues sont programmées pour me ren-
seigner sur leurs problèmes.
Honnêtement, cette évolution du pouvoir me
convient bien car je me suis parfois trouvé dans des
situations ridicules avec le pendule. J’apprécie de
pouvoir établir un diagnostic simplement en regar-
dant la personne (ou sa photo), par la seule puis-
sance de l’esprit. Cela fait beaucoup plus sérieux,
puissant et professionnel !
Je suis en même temps surpris et ravi d’être pas-
sé de la radiesthésie communément pratiquée dans
notre culture, au troisième œil tibétain ! Ceci prou-

32
La voie royale

vant d’ailleurs que sous des appellations différentes,


il s’agit du même pouvoir.
Tout cela est enthousiasmant et grandement
satisfaisant. Je ne me sens cependant pas vraiment
maître de ces pouvoirs. Ils sont apparus successive-
ment et évoluent sans que je sache comment. Mais
puisqu’ils vont dans le sens souhaité, cette évolution
doit être une récompense d’en haut ?
Malheureusement, je suis sujet à des fatigues et
à des maux de tête qui gagnent en intensité, au fur
et à mesure de mes progrès. Je paie de mon énergie
vitale le droit de percer les secrets.

33
r
CHAPITRE 4
Une nouvelle direction

En 1978, je me sens enfin prêt à mettre mon art


au service des malades, en devenant professionnel.
Même si je me plais à Grenoble, mon chez-moi est en
Moselle. Pour des raisons affectives et des questions
de commodités, je choisis de m’installer à Hayange,
petite ville à quelques kilomètres du domicile fami-
lial.
Je renoue joyeusement avec mes anciennes
connaissances. Nous nous retrouvons régulièrement
entre copains de jeunesse dans les cafés et d’autres
lieux de loisir, où je leur présente mes nouveaux ta-
lents.
Par curiosité ou par provocation, ils m’appor-
tent des photos de leurs proches et me demandent
de faire des diagnostics. Je m’y prête volontiers. Et
même si le vocabulaire n’a rien de médical, mes des-
criptions correspondent bien à la réalité. Une fois
passé ce test, convaincus que je ne suis pas un char-
latan, ils louent ces dons et participent largement à
répandre ma réputation.

35
Walter r La guérison du guérisseur

Au rez-de-chaussée d’un immeuble bien situé,


j’ai loué un appartement fonctionnel qui se prête
bien à mon activité. Après une publicité dans un
journal gratuit, je commence à recevoir mes pre-
miers clients. Jusqu’à ce jour, je n’ai jamais demandé
de contribution à personne, suivant ma devise : « J’ai
reçu gratuitement, je donne gratuitement ». Mais ce
cabinet est ouvert, il faut bien intégrer la notion de
rémunération. Je décide donc de m’en remettre à
l’appréciation de mes patients.
J’identifie leur problème grâce à leur aura.
Comme elle rayonne et déborde largement les li-
mites du corps, je ne suis pas obligé de demander à
ma clientèle de se déshabiller, ce qui arrange beau-
coup de monde ! C’est souvent instantané. Il faut
parfois quelques minutes pour briser la glace et éta-
blir le contact.
Puis je les magnétise : sans aucun attouchement,
les mains à plus de vingt centimètres. Les patients
ressentent des picotements accompagnés d’une va-
gue de chaleur, sensation qui peut fortement varier
d’un individu à l’autre.
Durant cette période, j’apprends avec surprise
que je ne suis pas le premier guérisseur dans la fa-
mille. Une vieille tante avait confié à ma mère en va-
cances en Italie, que mon arrière grand-père l’avait
aussi été. Voilà donc pourquoi des pouvoirs existent
en moi avant même de les avoir désirés et recher-
chés : j’ai bénéficié de son héritage spirituel ! Je ne
sais pas pourquoi, mais le fait est là : toutes mes

36
Une nouvelle direction

connaissances présentant des pouvoirs importants


ont, sans exception, un antécédent familial.
Cette première installation à Hayange est très
formatrice mais dure moins d’un an.
Sur les marchés, je traitais des gens plus jeunes,
avec des problèmes divers. J’avais plus de chance de
guérir un herpès chez un jeune patient, que l’arth-
rose avancée d’une personne de 80 ans. Ici, beau-
coup de mes clients sont des personnes âgées ou des
cas très difficiles. À l’exception de certaines guérisons
concluantes, j’ai beau donner le maximum, je me
sens souvent limité et impuissant. Plus je m’épuise à
bien faire, plus la frustration augmente.
J’ai plusieurs fois l’impression de ne pas être à
ma place, ou alors de ne pas être prêt !
Ce malaise atteint son paroxysme quand le père
d’un ami, magnétisé pour des douleurs à la nuque,
décède brutalement. C’est complètement déstabili-
sant : mes pouvoirs sont-ils en cause dans ce drame ?
Le doute. L’angoisse. Impossible de continuer les
consultations.
Il me faut à tout prix une direction ! Je me sens
désemparé. Comment les forces supérieures qui
ont, jusqu’à présent, veillé sur moi, ont-elles permis
que je me retrouve dans cette situation, alors que
j’ai fidèlement suivi leurs directives ? C’est l’angoisse,
mais il faut espérer, attendre un signe de leur part.
Aussi, quand une amie me propose de rencon-
trer sa maman qui est voyante et tire les cartes, j’ac-

37
Walter r La guérison du guérisseur

cepte bien volontiers. Serait-elle le messager tant at-


tendu ?
Elle n’exerce pas en professionnelle mais veut
bien me rendre ce service. C’est une dame très gen-
tille, mais terriblement tourmentée. Ses pouvoirs de
divination la perturbent énormément. Elle me confie
que le plus pénible pour elle, ce sont tous ces visages
de personnes décédées, qu’elle voit dans les reflets
des vitrines, qui la hantent et qu’elle cherche à fuir.
Je vois bien qu’elle aimerait que je lui apporte une
solution, mais que puis-je pour elle ? Rien.
Sa séance de voyance débute :
– Comme c’est facile avec vous, me dit-elle. On
voit que vous êtes de la partie, tout est si clair. Vous
allez partir dans des îles où les habitants ne sont pas
noirs mais bruns. C’est une communauté qui res-
semble à un hôpital, avec beaucoup de sang, mais ça
n’en est pas un.
Puis elle ajoute :
– Allez-y, vous serez bien reçu, ils vous atten-
dent.
– Mais où sont ces îles ?
– Votre père vous le dira ! se contente-t-elle de
me répondre.
Bizarre… Mon père est mort depuis plus de
quatre ans.
Notre entretien s’arrête là mais j’ai la réponse
que j’attendais : les puissances spirituelles viennent
de me confier une nouvelle feuille de route. Elles me
confirment par là dans ma mission et m’offrent en-

38
Une nouvelle direction

core plus de pouvoir. Je suis donc bien dans leur vo-


lonté et dégagé de toute responsabilité dans le décès
de mon patient.
Décidé à reprendre mon voyage initiatique, je
ferme mon cabinet.
Mais auparavant, prenons un peu de recul. Je
retrouve, à Lyon, Jean-Paul, cet ami très cher qui
m’avait si souvent hébergé et aidé dans mes pérégri-
nations. Un soir, revenant de courses, il me dit :
– Regarde ce que je t’ai trouvé ! Un livre sur les
guérisseurs philippins, avec photos et adresses.
Il est si compréhensif et attentionné que je m’ex-
clame en plaisantant :
– Jean-Paul, t’es un père pour moi !
Aussitôt, me revient en mémoire la parole de
la voyante à propos de mon père ! Je me plonge im-
médiatement dans la lecture, à la découverte de ces
guérisseurs qui prétendent pratiquer « des opéra-
tions à mains nues ». Leurs étranges exploits large-
ment relayés par les médias provoquaient alors une
vive polémique et un réel engouement de la part
du public. Mais la critique assassine d’un prestidigi-
tateur français et sa simulation d’une opération sur
toutes les chaînes de télévision avaient fini par les
discréditer.
Quand à moi, je suis convaincu : c’est bien dans
ces îles que mon destin m’attend. J’ai 26 ans.

39
Walter r La guérison du guérisseur

Les Philippines
Comment entrer en contact avec ces guéris-
seurs ? Parmi la quinzaine que le livre répertorie,
mon choix se porte tout naturellement vers celui
qui présente un air de famille avec moi. Il est sur-
nommé « Le troisième œil » pour son pouvoir de
clairvoyance. Nul doute, c’est un signe et ce point
commun m’ouvrira peut-être sa porte.
Je lui envoie une longue lettre détaillant mes
motivations et mon désir de le rencontrer. Trois mois
passent. Toujours pas de réponse. Si je veux que
quelque chose bouge, je dois me rendre sur place.
Mais sans emploi et sans argent, impossible de fi-
nancer ce voyage. Tiens, pourquoi ne pas solliciter
l’aide de personnes que je connais ? Une quarantaine
de personnes écoutent la description de mes projets
et ont la gentillesse de m’avancer cent francs cha-
cune. Les fonds réunis, je prends mon billet d’avion
pour Manille.
Après vingt heures de vol, j’arrive le soir, fatigué.
Parti de Paris en boots en plein hiver, je me retrouve
seul à l’autre bout du monde, dans une mégalopole
asiatique, grouillante, surchauffée et polluée. Fran-
chement, je me sens mal, j’ai la trouille et je me de-
mande ce que je fais là !
Le temps de m’installer dans un hôtel et je pars
aussitôt, à la recherche du destinataire de ma lettre.
Aucune trace ! Il n’habite plus à cette adresse et per-
sonne ne sait où le trouver. Manifestement, le livre
date de quelques années, et les informations aussi.

40
Une nouvelle direction

Déçu et trop fatigué pour réfléchir, je remets


toute analyse de la situation au lendemain, à tête
reposée.
Je parcours le livre et découvre qu’une grande
partie des guérisseurs habite en province, notam-
ment à Baguio. C’est une ville de moyenne montagne
située à environ deux cent cinquante kilomètres au
nord de la capitale. Plusieurs d’entre eux doivent s’y
trouver et, notamment, le médiatique Tony Agpaoa.
C’est là-bas qu’il faut se rendre.
Je quitte Manille avec un grand soulagement.
Quel plaisir de traverser en bus, ces campagnes ver-
doyantes, de contempler la beauté de ces paysages
exotiques et d’échanger des sourires avec ces gens
humbles et sympathiques !
Juste avant d’arriver à destination, mon regard
s’arrête, fasciné, sur une tête de lion de la taille d’une
maison, sculptée dans le rocher. Je me sens peu à
peu revivre après le stress de la capitale ! Et quel
contraste d’ambiance quand le bus atteint Baguio !
La ville jouit d’un climat plus frais et plus agréable.
Elle est fleurie, aérée et très accueillante ; je m’y sens
bien. Les gens sont aussi pauvres qu’à Manille mais
ils ont l’air plus détendus, plus heureux.
Après une nuit réparatrice dans un hôtel, je
commence mes recherches à l’aide d’un plan de la
ville. M. Agpaoa est propriétaire d’un hôtel de luxe,
non loin du centre-ville. Renseignements pris auprès
de l’un de ses employés, il n’opère « à mains nues »
que deux jours par semaine et demande cent dol-
lars par personne, seulement pour regarder ! Je n’ose

41
Walter r La guérison du guérisseur

pas imaginer combien il exige pour soigner une per-


sonne !
Ce n’est ni dans mes moyens, ni dans mes prin-
cipes. Ce don de guérison, il l’a reçu gratuitement, il
doit le donner gratuitement, afin de le rendre acces-
sible à tous ! C’est pour moi le sceau de l’honnêteté
et de la droiture, la signature de Dieu. Je ne peux pas
me confier en quelqu’un qui aime à ce point l’argent :
je le raye de ma liste.
Les touristes en quête de guérison sont une
manne pour l’économie locale. Certains petits ma-
lins se prétendent faussement guérisseurs. Ils sont
souvent en cheville avec des chauffeurs de taxi qui,
moyennant finance, leur rabattent les clients.
Et bien entendu, c’est ce qui m’arrive le lende-
main matin. Dans une technique d’approche parfaite
et bien rôdée, un chauffeur de taxi athlétique gare
son véhicule juste devant moi.
– De quel pays venez-vous ? me demande-t-il en
anglais.
– De France.
– Ça alors, ma nièce est mariée à un Français !
Que faites-vous à Baguio ?
– Je cherche des guérisseurs !
– J’en connais un formidable ! Si vous voulez, je
peux vous y emmener, ce n’est qu’à trois kilomètres.
C’est ainsi que je me retrouve dans une petite
maison où une dame m’accueille en me proposant
un café. Alors que je suis dans la salle d’attente, une
cliente, apparemment américaine, sort du cabinet

42
Une nouvelle direction

en tenant à la main un morceau de déchet organique


(ce qui semble être de l’œsophage de poulet, ou une
grosse veine) en proclamant : « Il a sorti ça de mon
corps ! »
Le tout entre quatre yeux, sans témoins, sans
personne pour vérifier ce qui s’était passé réelle-
ment. Je suis déjà refroidi à 90 % mais je me prête
quand même à l’expérience. C’est mon tour. À peine
entré, il ne s’écoule pas cinq minutes que je lui dis :
« Stop ! Arrêtez ! Vous n’êtes pas guérisseur ».
Retrouvant le chauffeur de taxi, je lui explique
que ce monsieur est un charlatan. Pour lui prouver
que je sais de quoi je parle, je lui fais remarquer qu’il
a des douleurs musculaires au niveau des pectoraux.
À mon contact, il grimace. Surpris, il avoue qu’effec-
tivement, il a pris des coups à cet endroit quelques
jours auparavant.
Je rentre à l’hôtel effondré. Comment ai-je pu
être assez bête pour croire en tout ça et faire des mil-
liers de kilomètres pour rien ? Manifestement, c’est
une arnaque pour touristes.
Le soir, je suis déconfit et je m’endors triste à
mourir, désespéré et mûr pour rentrer. Mais c’est
sans compter sur celui qui veille sur moi et je suis
loin d’imaginer ce qui m’attend…

43
Walter r La guérison du guérisseur

Walter Vappiani
UN GUÉRISSEUR LIBÉRÉ DE SES
POUVOIRS… ET FIER DE L’ÊTRE !
HALLUCINANT. IL DÉSIRAIT FAIRE LE

VÉCU
COLLECTION
BIEN AUTOUR DE LUI : POURQUOI
EN VIENDRA-T-IL À SOUHAITER ÊTRE
DÉBARRASSÉ DE SES POUVOIRS
EXCEPTIONNELS ?
Suivez l’histoire vraie de Walter
Vappiani, ancien guérisseur et
magnétiseur professionnel. L’auteur
décrit avec honnêteté son aventure
intérieure. Chemins d’exaltation et
d’angoisse, de puissance et de doute.
Prémonitions, coïncidences
Aujourd’hui, troublantes : il se sent guidé par un
Walter est esprit supérieur. Mais l’archange qui
marié, père de l’attire jusque dans un village reculé
trois enfants
et agent des Philippines, qui est-il vraiment ?
immobilier. Et cette force qui l’a toujours guidé,
est-elle si bienveillante ?
D’interrogations en malaises, Walter
va découvrir les dangers d’un monde
qui n’est pas ce qu’il prétend être…
9 782910 246730
ISBN 978-2-910246-73-0

H I S T O I R E V R A I E

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