Vous êtes sur la page 1sur 13

CONNAISSANCES ET USAGES ETHNO-ZOOLOGIQUES

DE L’ÉLÉPHANT ET DU BUFFLE PAR LES


POPULATIONS RIVERAINES DU PARC W AU BÉNIN
(AFRIQUE DE L’OUEST)

LOUGBEGNON O. Toussaint
Ecole Nationale Supérieure des Sciences Techniques et Agronomiques,
Université d’Agriculture de Kétou (UAK), Benin.
Email : tlougbe@yahoo.fr

RÉSUMÉ
Cette étude ethno-zoologique a été conduite au niveau des populations
riveraines du Parc W pour analyser les catégories d’usage des organes de ces deux
espèces de grande faune (Syncerus caffer et Loxondonta africana). L’objectif est
donc de connaître l’importance de ces espèces pour les populations riveraines à
travers l’étude de la variabilité des connaissances selon les ethnies, le sexe et les
tranches d’âge. Ainsi grâce aux calculs de l’indice de connaissance global par groupe
ethnique et de l’estimation des proportions d’usage des organes, il a été possible
d’identifier le degré de connaissance des deux espèces et les formes d’utilisation de
leurs organes. Les résultats obtenus montrent que toutes les ethnies enquêtées ont
une connaissance médiocre des deux espèces. Les adultes utilisent mieux ces deux
espèces quelle que soit la catégorie d’usage considérée : 51,26 pour la catégorie
alimentaire, 36,70 pour les catégories médicinales et médico-magiques.

Mots clés : Ethnozoologie, usage, Loxondonta africana, Syncerus caffer, Parc du W.

ABSTRACT
Knowledge and ethno-zoological uses of elephant and buffalo by populations Park
W in Benin
Ethno-zoologic study was conducted in the local community around Park W in
Benin Republic in order to analyze the categories organ use of the two fauna species
(Syncerus Caffer et Loxondonta Africana). It aims to know the variability of ethno-
zoological knowledge of Loxondonta africana and Syncerus caffer according to
ethnic groups, sex and age. In them, global knowledge index for ethnic group and
the estimate of organs use proportions permitted to identify the knowledge degree of
the two species and the use forms of their organs. The results obtained show that all
ethnics group have poor knowledge of the two species. The adult uses these species
better some is the category considered. It is about food category (51, 26%),
medicinal (36,70%) and medico-magic (36,70%)

Key words: Ethnozoology, use, Syncerus caffer, Loxondonta africana, Parc W.

Revue de Géographie de l’Université de Ouagadougou, N°002 – Septembre 2013 143


INTRODUCTION
En Afrique, les populations locales sont extrêmement dépendantes des
produits issus de la forêt comme le gibier, les plantes alimentaires et
médicinales, les champignons, les chenilles, le miel et les épices pour leur
alimentation (Ekué et al., 2010). La médicine traditionnelle est un élément
important dans la tradition africaine, elle reste jusqu’ici la ressource
principale de la majeure partie de la population africaine dans le traitement
des maladies (Hamilton, 2004). La plupart des produits chimiques utilisés
dans la fabrication des médicaments provient des animaux et joue un rôle
important dans le processus curatif, rituel magique et pratiques religieuses des
peuples issus des cinq continents (Costa-Neto-Neto et Marques, 2000). De
surcroît, il est connu de tous que le commerce des produits pharmaceutiques
basés sur les animaux compte pour des milliards de dollars par an (Kunin et
Lawton, 1996). Ceci contribue à la destruction conduisant à la disparition des
espèces faunique et floristique qui peuplent la planète terre. Ainsi, le déclin
de la biodiversité animale prend des ampleurs inquiétantes face à la
démographie galopante et à la surexploitation des ressources biologiques pour
contribuer de manière instantanée, mais peu durable, à la satisfaction des
populations humaines (Gbankoto, 2011). Selon Siddikou (1998), les aires
protégées représentent dans la majorité des cas un espoir pour sauver un
échantillon représentatif de la diversité biologique de la terre face à une
surexploitation humaine de plus en plus pressante. Mais malheureusement,
ces aires sont de plus en plus sujettes à des actions anthropiques qui
hypothèquent leur fonctionnement et la réalisation des objectifs qui leur sont
assignés (Sinsin et al ; 2004). Une de ces actions est la chasse (ou le
braconnage) et, bien souvent cette activité se développe au sein des
populations locales riveraines des aires protégées dans la seule optique de
rechercher des organes ou sous produits de la faune pour satisfaire les besoins
médicinales ou ethnotérapeutiques. La présente étude s’intéresse à la
variabilité des connaissances et des usages du buffle et de l’éléphant qui sont
deux espèces de grande faune mammalienne très menacées au Bénin. Elle est
faite autour du Parc du W du Bénin au sein des populations riveraines de cette
réserve. De telles données sont indispensables pour savoir réellement les
formes de pression sur les taxons de faune et par conséquent, cela permettra
de mieux asseoir les bases de conservation durable pour les espèces de faune
étudiée.

Revue de Géographie de l’Université de Ouagadougou, N°002 – Septembre 2013 144


1. MATÉRIEL ET MÉTHODE D’ÉTUDE

1.1. Milieu d’étude


Situé dans le département de l’Alibori, le Parc du W du Bénin est une
réserve de biosphère d’une superficie de 563 280 hectares. Il est situé entre
11° et 12°30’ de latitude Nord et 2°20’ et 3°40’ de longitude Est (figure 1).
Elle est limitée au Nord par la Commune de Karimama, au Sud par la
commune de Banikoara, à l’Est par la rivière Alibori et les communes de
Kandi et de Malanville, à l’Ouest par la rivière Mékrou. Il s’étend sur une
superficie de 563 280 hectares.

Figure 1 : Localisation de la Réserve Transfrontalière de Biosphère du W au


Bénin

Revue de Géographie de l’Université de Ouagadougou, N°002 – Septembre 2013 145


La figure 2 montre le diagramme climatique de Kandi qui est dans un
secteur proche du Parc du W. De l’analyse de ce diagramme on note que
l’aire du Parc National du W du Bénin est caractérisée par un climat soudano-
sahélien sec de type continental. Les précipitations suivent un régime uni-
modal à deux saisons bien marquées (une saison sèche et une saison
pluvieuse) débutant le plus souvent dans les mois de mai/juin et sur une
période de six (6) mois environ. La hauteur des pluies au cours de cette
période est comprise entre 655,1 et 1379,6 mm avec un maximum en août. La
durée d’insolation maximale est observée en novembre (286,13 heures) et
celle minimale en août (187,55 heures). Sa durée annuelle est en moyenne de
3 000 heures.
Figure 2 : Diagramme climatique de Kandi (1981 – 2009)

L’humidité relative varie de 26 % en février à 86 % en juillet. De décembre à


avril, l’humidité relative moyenne est inférieure à 50 %, le pouvoir évaporant
de l’air est alors fort (Warigui, 2011).
Les sols sont de types ferrugineux tropicaux caractérisés par une forte
propension à l’érosion lorsque dénudés ou par le développement de processus
pédogénétiques majeurs comme le concrètionnement et le cuirassement des
sols. Dans les dépressions et les plaines d’inondation, dominent des sols
argileux à engorgement rapide après les premières pluies. Les milieux boisés
et les berges, sont caractérisés par des sols profonds sans concrétions et à
propriétés physico-chimiques moyennes (Godonou, 2012).
Sept grandes formations végétales sont rencontrées :
- les forêts ripicoles constituées d’arbres et d’arbustes de genre Cola sp,
Morellia senegalensis, Syzygium guineensis sur les berges de rivières ;
- les galeries forestières constituées d’arbres et d’arbustes compacts sur les
rives des rivières. Les espèces les plus rencontrées sont Khaya
senegalensis, Diospyros mespiliformis, Kigelia africana, Ficus

Revue de Géographie de l’Université de Ouagadougou, N°002 – Septembre 2013 146


gnaphalocarpa, Acacia sieberiana, Cola laurifolia, Pterocarpus
erinaceus ;
- les forêts claires qui sont des peuplements ouverts avec des arbres de
petites et moyennes tailles (8 à 16 m), dont les cimes sont plus ou moins
jointives (80 % du couvert). Dans la zone d’étude, on rencontre dans ces
forêts les essences telles que Parkia biglobosa, Adansonia digitata,
Bombax costatum ;
- les savanes boisées constituées d’arbres de densité importante (35 à 60
%) mais dont le couvert n’est pas continu. Leur hauteur est de 8 à 16 m.
La strate herbacée est abondante. Les feux de végétation le parcourent
pendant la saison sèche. Les espèces fréquemment rencontrées sont :
Daniellia oliveri, Anogeissus leiocarpa, Terminalia spp, Vitellaria
paradoxa, Isoberlinia doka, Isoberlinia tomentosa, Afzelia africana ;
- les savanes arborées dont le couvert des arbres est de 5 à 35 % ; leurs
hauteurs est généralement de 5 à 10 m. Les arbustes sont plus abondants
que dans la savane boisée, avec une couverture de 5 à 60 %. Le couvert
de graminée est généralement de 80 à 100 %. On y rencontre des
essences telles que : Isoberlinia doka, Anogeissus leiocarpus, Khaya
senegalensis, Vitellaria paradoxa ;
- les savanes arbustives dont le couvert des arbres n’excède pas 5 % ; celui
des arbustes est de 5 à 60 %. Les arbustes sont de petites tailles (3 à 5 m).
Le couvert des graminées varie du clairsemé (sur les bowé) à 100 %.
Elles sont constituées de Balanites aegyptiaca, Acacia sp. Dichrostachys
glomerata, Combretum ghasalense, Terminalia avicennioides,
Tamarindus indica, Detarium microcarpum et,
- les savanes herbeuses qui sont pratiquement constituées d’un tapis
graminéen avec des graminées telles que Andropogon gayanus,
Hyparrhenia welwichi, Pennisetum polystachyon, Pennicetum
pedicellatum et des ligneux comme Ficus glomosa, Tamarindus indica.
(Ballo, 2005).
Dans le Parc National W, on enregistre 52 espèces de mammifères
(hormis les petits rongeurs et chiroptères), 360 espèces d’oiseaux d’origine
africaine ou paléo-arctique, 150 espèces de reptiles et amphibiens, plus de
100 espèces de poissons et un nombre indéterminé d’invertébrés, d’insectes,
d’arachnides. Les espèces les plus rencontrées sont les primates tels que le
babouin doguera (Papio anubis) et le singe rouge (Erythrocebus patas). Outre
ces primates, on peut signaler quelques grands herbivores comme le buffle
(Syncerus caffer), et l’éléphant (Loxodonta africana) (ECOPAS, 2004).

Revue de Géographie de l’Université de Ouagadougou, N°002 – Septembre 2013 147


1.2. Méthode de collecte des données
Pour collecter ces données ethno-zoologiques, 158 personnes ont été
aléatoirement sélectionnées dans les communes de Kandi, Malanville et
Karimama. Ces enquêtés ont été individuellement interrogés. Les données
collectées concernent : (i) les catégories d’usage des deux espèces par ethnie,
sexe et catégorie d’âge, (ii) l’importance de l’utilisation de ces espèces. Des
scores d’utilisation attribués par chaque répondant selon chaque catégorie
d’usage ont été utilisés pour apprécier l’importance de l’utilisation de ces
espèces animales. La grille d’appréciation utilisée est: 0= organe sans usage ;
1= organe faiblement utilisé ; 3= organe fortement utilisé; 2 = organe
moyennement utilisé).

1.3. Analyse des données collectées


Pour apprécier le degré de connaissance des deux espèces de
mammifère choisies, l’Indice de connaissance global (ICG) est calculé.
L’Indice de connaissance global par groupe ethnique a été calculé grâce à la
formule de Assogbadjo et al., (2010). Cet indice s’écrit :
, avec ICG : Indice de Connaissance Global ;
Vm : Valeur d’usage moyenne des utilisateurs (Jeunes, Adultes, Vieillards) ;
N : Nombre total d’utilisation.
Les critères ci-après ont permis de déterminer le degré de connaissance
: ICG<10% =degré de connaissance médiocre ; 10≤ ICG < 20%=degré de
connaissance assez bon ; 20≤ ICG <30%=degré de connaissance moyen ;
30≤ ICG <40%=bon degré de connaissance ; 40 ≤ ICG≤ 50%=très
bon degré de connaissance. Les jeunes ici sont les riverains de moins de 20
ans. Les adultes sont ceux dont la tranche d’âge est située entre 21 ans et 50
ans. Les vieillards sont des personnes qui ont plus de 50 ans d’âge.
Les pourcentages des scores d’utilisation des organes sont également
calculés pour chaque forme d’usage et la comparaison s’est faite par tranche
d’âge, par ethnie et par sexe.

2. RÉSULTATS
2.1. Connaissances ethno-zoologiques de l’éléphant et du buffle
Les investigations ont révélé que la quasi-totalité des enquêtés ont une
connaissance de l’utilisation de deux espèces. Les deux espèces (Loxondonta
africana et Syncerus caffer) ont différentes nomenclatures suivant les ethnies
en présence dans le milieu. Le tableau I présente le nom local des espèces en
Mokolé, Dendi, Peulh et Gourmantché.

Revue de Géographie de l’Université de Ouagadougou, N°002 – Septembre 2013 148


Tableau I : Nom local des espèces Loxondonta africana et Syncerus caffer
selon les ethnies riveraines du Parc du W du Bénin.

Ethnies Mokolé Dendi Peulh Gourmantché


Espèces

Loxondonta africana Ifan Howbi Nadjébalia Omouan nouan

Syncerus caffer Djuwa Tchébéri Gniwa Oyan louoman


Source : Travaux de terrain, novembre 2012

2.2. Formes d’usage de l’éléphant et du buffle


2.2.1- Formes d’usage des espèces par tranche d’âge
Les figures 3 et 4 présentent les formes d'usage des deux espèces par
tranche d'âge. De l’analyse de ces figures, on remarque que toutes les classes
d’âge utilisent les deux espèces dans le domaine alimentaire (adultes :
51,26% ; vieillards : 36,07% ; et jeunes : 1,33%). Les adultes se révèlent la
tranche d’âge qui utilise plus ces espèces, ce qui s’explique par le fait que la
chasse de ces espèces animales nécessite des initiations, des efforts
considérables et des techniques dont les jeunes ne disposent toujours pas.
Pour les vieillards, on peut postuler que l’effet de l’âge et les maladies ont
inhibé la consommation de la viande de ces espèces.

Figure 3 : Formes d’usage du Loxondonta africana par tranche d’âge

Revue de Géographie de l’Université de Ouagadougou, N°002 – Septembre 2013 149


Figure 4 : Formes d’usage du Syncerus caffer par tranche d’âge

Pour ce qui est des usages médicinaux de Loxondonta africana et de


Syncerus caffer, les adultes viennent en tête avec respectivement 42,96 % et
33,54 %. Quant aux usages et médico-magiques, on a respectivement 42,96%
et 31,64 %. Cet état de chose explique l’importance qu’accordent les adultes à
toutes les formes d’usage des deux espèces.

2.2.2- Formes d’usage selon les ethnies enquêtées


Les figures 5 et 6 présentent les formes d’usage des espèces selon les
ethnies.
Figure 5 : Formes d’usage du Syncerus caffer selon les ethnies

Revue de Géographie de l’Université de Ouagadougou, N°002 – Septembre 2013 150


Figure 6 : Formes d’usage du Loxondonta africana selon les ethnies

L’analyse de ces figures révèle que les quatre groupes ethniques


utilisent les deux espèces dans l’alimentation. Quant aux usages médicinal et
médico-magique, les connaissances varient d’un groupe ethnique à un autre.
En ce qui concerne les domaines médicinal et médico-magique du Syncerus
caffer, les Gourmantché, détiennent plus de connaissances que les autres
ethnies. Ensuite viennent respectivement les Mokolé, Peulh et Dendi. Pour ce
qui est de l’usage médicinal du Loxondonta africana, les Mokolé ont un
niveau élevé de connaissance (61,2 %), ensuite viennent les Gourmantché
(59,17 %), les Peulh (55,08 %) et les Dendi (34,68 %). Quant à la catégorie
médico-magique, les Gourmantché viennent en tête avec 59,17 % suivis des
Mokolé (57,14 %), des Peulh (57,14 %) et les Dendi (34,68 %).

2.2.3- Formes d’usage des espèces par sexe des enquêtés


Les figures 7 et 8 présentent les catégories d’usage des espèces par
sexe. De l’analyse de ces figures, on constate que les hommes détiennent plus
de connaissances dans le domaine alimentaire de Syncerus caffer (85,44%) et
de Loxondonta africana (86,70%) que les femmes (3,16 %) pour Syncerus
caffer et 1,89% pour Loxondonta africana.
Pour l’usage médicinal de Syncerus caffer et Loxondonta africana, les
hommes viennent respectivement avec 60,92% et 1,26% pour les femmes et,
65,82% pour les hommes et 2,53% pour les femmes. Quant au volet médico-
magique de l’utilisation de Syncerus caffer et Loxondonta africana, les
hommes viennent respectivement avec 60,92 % et 67,08 % contre 1,26 % et
2,53 % pour les femmes.

Revue de Géographie de l’Université de Ouagadougou, N°002 – Septembre 2013 151


Figure 7 : Formes d’usage du Syncerus caffer par sexe

Figure 8 : Formes d’usage de Loxondonta africana par sexe

Les hommes détiennent plus de connaissances que les femmes sur les
trois formes d’utilisation des espèces ; ceci s’explique par le fait que les
femmes ne s’adonnent pas à la chasse, mais interviennent seulement
quelquefois dans l’utilisation des organes de ces espèces. Il est à noter que les
pesanteurs socioreligieuses n’autorisent pas pour autant les femmes à
s’impliquer dans ce domaine. Partant de ce fait, il faut aussi souligner que très
peu de femmes ont été interviewées car elles refusent pour la plupart de
répondre aux questions.

Revue de Géographie de l’Université de Ouagadougou, N°002 – Septembre 2013 152


2.3. Indice de connaissance global des espèces

Le tableau II montre la valeur d’usage moyenne (Vm) et l’Indice de


Connaissances Globales (ICG) des deux espèces par ethnie.

Tableau II: Indice de connaissances globales et valeur d’usage de Loxondonta


africana et Syncerus caffer par ethnie

Ethnie Loxondonta africana Syncerus Caffer


Vm ICG (%) Vm ICG (%)
Gourmantché 2,95 2,10 3,72 2,65
Mokolé 2,17 1,55 2,03 1,45
Dendi 2,85 2,03 2,91 2,07
Peulh 2,08 1,48 1,95 1,39

L’analyse de ce tableau révèle que la valeur d’usage moyenne de


Loxondonta africana et Syncerus caffer varie respectivement entre 2,08 et
2,95 ; 1,95 et 3,72. Quant à l’Indice de connaissance global, il varie entre
1,48 % et 2,10 % pour Loxondonta africana et entre 1,39% et 2,65% pour
Syncerus caffer. Ces valeurs indiquent que toutes les ethnies ont une
connaissance médiocre des espèces selon la grille d’interprétation
précédemment énoncée. Les Peulh ont donc enregistré l’indice de
connaissance global le plus petit car généralement ils s’intéressent très peu à
la chasse. Ils s’impliquent dans le pâturage du troupeau et la résolution des
problèmes qui se posent au niveau du cheptel avec une utilisation minime de
ces espèces ou une partie dans le domaine médicinal et médico-magique pour
des raisons ponctuelles. S’agissant des Gourmantché, ils ont aussi un degré de
connaissance médiocre mais plus amélioré que celui des autres ethnies. Ceci
s’explique par le fait que la majorité des Gourmantché enquêtés sont des
anciens braconniers et aussi des tradi-praticiens qui utilisent couramment des
parties d’animaux ou beaucoup de dépouilles. Par conséquent, les
Gourmantché utilisent Loxondonta africana et Syncerus caffer dans toutes les
catégories d’usage identifiées lors des investigations.

Revue de Géographie de l’Université de Ouagadougou, N°002 – Septembre 2013 153


CONCLUSION
Les ressources forestières permettent aux populations riveraines des
formations végétales de satisfaire leurs besoins vitaux. Les espèces
Loxondonta africana et Syncerus caffer sont utilisées par les populations
riveraines du Parc W à des fins alimentaire, médicinale, médico-magique. De
ce fait, elles tirent des revenus dans la vente des organes de ces espèces. Ces
revenus tiennent une place importante dans les ménages des différentes
catégories socioprofessionnelles impliquées dans cette étude. Ce même
constat a été fait par (UICN, 2011), qui affirme que de nombreux produits
sont prélevés sur des animaux en général et sur des éléphants en particulier à
des fins personnelles et commerciales. Les indices de connaissance calculés
indiquent que toutes les ethnies impliquées dans cette étude ont
statistiquement une connaissance médiocre des espèces concernées car les
valeurs varient entre 1,39 et 2,65. Ceci pourrait s’expliquer par la taille de
l’échantillon choisi ou du moins les informations reçues des personnes
interviewées.
Cette étude a permis d’identifier les formes d’utilisation des espèces
Loxondonta Africana et du Syncerus caffer par les populations riveraines du
parc W. Trois catégories d’usage ont été identifiées : alimentaire, médicinal et
médico-magique. Les hommes détiennent plus de connaissances en ce qui
concerne toutes les formes d’usage des espèces que les femmes. Ces
populations tirent de nombreux avantages économiques des organes de ces
espèces, ce qui leur permet de satisfaire leurs besoins fondamentaux mais
cette activité ne sécurise pas la vitalité des deux espèces car la forte demande
de leurs organes implique forcément un taux élevé de braconnage alors que
ces espèces sont déjà déclarées menacées au Bénin.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ASSOGBADJO (A. E), GLÈLÈ KAKAÏ (R.), ADJALLALA (H. F),
AZIHOU (F. A.), VODOUHÊ (G. F.), KYNDT (T.), CODJIA (J. T. C.),
2011. « Ethnic differences in use value and use patterns of the threatened
multipurpose scrambling shrub (Caesalpinia bonduc L.) » in Benin Journal of
Medicinal Plants Research N°5, pp. 1549-1557.
BALLO (M. C.), 2005. Contribution a l`étude éco-éthologique des
hippotragues (Hippotragus equinus) de la zone cynégétique de la Djona.
Mémoire de Maitrise. Département de Géographie et Aménagement du
territoire (DGAT), FLASH/UAC. 82 p.
COSTA-NETO-NETO (E. M.), & MARQUES (J. G. W.), 2000. «Faunistic
resources used as medicines by artisanal fishermen from Siribinha Beach,
State of Bahia, Brazil» in Journal of Ethnobiology N°20, pp. 93-109.

Revue de Géographie de l’Université de Ouagadougou, N°002 – Septembre 2013 154


ECOPAS, 2004. Plan d’aménagement et de gestion de la réserve
transfrontalière de la biosphère du W 2006-2010. Rapport provisoire,
volume III, 33 p + Annexe.
EKUÉ (M. R. M.), SINSIN (B), EYOG-MATIG (O), FINKELDEY (R),
2010. « Uses, traditional management, perception of variation and
preferences in ackee (Blighia sapida K.D. Koenig) fruit traits in Benin:
implications for domestication and conservation.» In J Ethnobiol Ethnomed
2010, pp. 6:12.
GBANKOTO (F. F.), 2011. Etude des paramètres écologiques et
considérations ethno-zoologiques de l`Orycteropus afer (Pallas 1766) dans la
réserve transfrontalière du W au Bénin .Mémoire de Maitrise
DGAT/FLASH/UAC 127 p.
GODONOU (K. J.), 2012. Caractérisation de l’habitat, utilisation
ethnobotanique et durabilité des modes d’exploitation du Cocholospermum
tinctorium A . Rich autour de la réserve transfrontalière de biosphère du W
au Bénin. Mémoire de Licence, UCA, Bénin, 98 p.
HAMILTON A. C., 2004. « Medicinal plants, conservation and livelihoods»
in Biodiversity and conservation. N°13, pp. 1477-1517.
KUNIN (W. E.) & LAWTON (J. H.), 1996. «Does biodiversity matter?
Evaluating the case for conserving species» In: Gaston K. J. (Ed),
Biodiversity: a biology of numbers and differences, Oxford: Blackwell
Science, pp. 283-308.
Union Mondiale pour la Conservation de la Nature –UICN, 2011. Rapport de
synthèse sur commerce de la viande d'éléphant en Afrique centrale. 62 p.
SIDIKOU (M.), 1998. Diversité biologique dans la zone cynégétique de la
Djona et évaluation communautaire de la faune par les populations locales
et le service forestier. Mémoire d’Ingénieur Agronome, FSA/UNB, Abomey-
Calavi, Bénin, 125 p.
SINSIN (B.), HOUINATO (M.), OTTAVIO (N.), EL HADJ (A.), TOBO
(T.), TAMOU (C.), AYEGNON (D.), MAMA (A.), 2004. Étude de la
biomasse dans le parc national du W. Rapport d`étape. ECOPAS-Benin, 36p.
WARIGUI (S. B.), 2011. Etude des paramètres écologiques et
considérations ethno-zoologiques de l`Orycteropus afer (Pallas 1766) dans
le Parc National du w au Benin. Mémoire de fin de cycle I, UCAO/Bénin,
93 p.

Revue de Géographie de l’Université de Ouagadougou, N°002 – Septembre 2013 155

Vous aimerez peut-être aussi