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François C.

Nadler

© Copyright 2020 – François C. Nadler.


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François C. Nadler
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francois@nadival.ch
www.nadival.ch

Editions Nadival
ISBN: 978-2-8399-2936-3

2
Deux études bibliques

3
François C. Nadler

Enquête en Eden
Introduction à Eden ................................................................... 8
Au commencement ..................................................................10
La scène du crime ....................................................................16
Ils étaient nus ...........................................................................20
Un discours déformé ................................................................28
L’ordre des choses ...................................................................34
Du libre arbitre.........................................................................36
Leçon de pédagogie .................................................................38
Des conséquences révélatrices ..................................................42
Poste à responsabilité ...............................................................48
Au menu du jour ......................................................................54
Caïn et Abel .............................................................................56
Le paradoxe des trois mondes ..................................................60
Première généalogie .................................................................64
Conclusion ...............................................................................66

4
Deux études bibliques

L'affaire Jonas
Introduction à Jonas .................................................................72
Le décor ...................................................................................74
Lève-toi ! .................................................................................78
La crainte des hommes .............................................................80
A toutes choses malheur est bon ...............................................84
Un voyage en enfer ..................................................................86
De Ninive à Jonas ....................................................................90
A Ninive la grande ...................................................................94
Sous le ricin .............................................................................96
Leçon de vie...........................................................................100
Conclusion ............................................................................. 104

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François C. Nadler

Enquête en Eden

François C. Nadler

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Deux études bibliques

7
François C. Nadler

Introduction à Eden
Les premiers chapitres de la Genèse contiennent une foule
d’informations à côtés desquelles nous serions tentés de passer
lors d’une lecture un peu trop rapide. Nous avons tous retenu les
enseignements sur le fruit défendu, l’intervention du serpent, la
chute d’Adam et Eve, la découverte de leur nudité, leur sortie
d’Eden puis le crime de Caïn tuant Abel.
Autours de ces événements, il y a pourtant tellement de
détails que nous manquons, faute d’une lecture et d’une
méditation profonde des textes. Quel était leur mode de nutrition ?
Comment comprendre cette nudité ? Quel était le rôle du fruit
défendu ? Comment situer Eden face au reste du monde ? Adam
et Eve étaient-ils les premiers humains ? Quelles étaient leurs
relations ? Nous allons nous intéresser entre autres à ces questions
en creusant les textes, en juxtaposant certains passages et
simplement en réfléchissant au sens des mots, à la logique dans la
lecture.
Pour éviter une lecture rendue fastidieuse par de trop
nombreuses références, les numéros de versets ne seront que
rarement cités, même s’ils proviennent de chapitres différents.
Nous compterons plutôt sur la lecture approfondie et attentive des
chapitres 1 à 6 :7, particulièrement les chapitres 1 à 4 de la Genèse.
Au besoin, reprenons la lecture de ces chapitres alors que nous
abordons certains thèmes. Les passages cités apparaîtront alors
clairement. Seuls les passages repris d’autres livres seront
indiqués. A noter que la Bible de référence de ce livre est la
Nouvelle Edition de Genève 1979.
Ne vous choquez pas si parfois le rôle de D.ieu est quelque
peu « humanisé ». Nous observons les événements de notre point

8
Deux études bibliques

de vue, c’est-à-dire humain, et les analysons selon ce principe.


Mais D.ieu reste D.ieu dans toute sa perfection et nous ne
manquerons pas de Lui restituer toutes ses qualités.

9
François C. Nadler

Au commencement
Voici la puissance de la Parole : dès les premiers versets,
nous rencontrons une foule d’informations qui – si nous passons à
côté – rendent la compréhension de toute la Bible plus
compliquée. Restituer ces éléments donne des clés de lecture pour
tout le plan de D.ieu.
Lorsque nous lisons les deux premiers versets de Genèse 1,
nous constatons qu’il y a une latence entre le premier verset et le
second. « Au commencement, Dieu créa les cieux et la terre. La
terre était informe et vide ; il y avait des ténèbres à la surface de
l’abîme, et l’Esprit de Dieu se mouvait au-dessus des eaux1 ».
Peut-il créer quelque chose de ténébreux, de vide, d’informe, de
chaotique ? Cela fait-il partie de Lui ? Tel que nous le connaissons
au travers de la lecture du reste de la Bible, la réponse est claire :
non ! Il est un D.ieu de lumière, un D.ieu qui comble, un D.ieu
d’ordre. Alors que s’est-il passé entre le moment où la terre et les
cieux ont été formés et le moment où D.ieu décide de s’occuper
de cette terre ?
« Au commencement, Dieu… ». Le cadre, c’est Lui, le
créateur, D.ieu en premier, D.ieu au commencement et il sera
D.ieu éternellement. Un autre personnage apparaît alors :
« La parole de l'Eternel me fut adressée, en ces mots : Fils
de l'homme, Prononce une complainte sur le roi de Tyr ! Tu lui
diras : Ainsi parle le Seigneur, l'Eternel : Tu mettais le sceau à la
perfection, Tu étais plein de sagesse, parfait en beauté. Tu étais
en Eden, le jardin de Dieu ; Tu étais couvert de toute espèce de
pierres précieuses, De sardoine, de topaze, de diamant, De

1
Genèse 1 :1-2

10
Deux études bibliques

chrysolithe, d'onyx, de jaspe, De saphir, d'escarboucle,


d'émeraude, et d'or ; Tes tambourins et tes flûtes étaient à ton
service, Préparés pour le jour où tu fus créé.
Tu étais un chérubin protecteur, aux ailes déployées ; Je
t'avais placé et tu étais sur la sainte montagne de Dieu ; Tu
marchais au milieu des pierres étincelantes. Tu as été intègre dans
tes voies, Depuis le jour où tu fus créé Jusqu'à celui où l'iniquité
a été trouvée chez toi. Par la grandeur de ton commerce Tu as été
rempli de violence, et tu as péché ; Je te précipite de la montagne
de Dieu, Et je te fais disparaître, chérubin protecteur, Du milieu
des pierres étincelantes.
Ton cœur s'est élevé à cause de ta beauté, Tu as corrompu
ta sagesse par ton éclat ; Je te jette par terre, Je te livre en
spectacle aux rois. Par la multitude de tes iniquités, Par l'injustice
de ton commerce, Tu as profané tes sanctuaires ; Je fais sortir du
milieu de toi un feu qui te dévore, Je te réduis en cendre sur la
terre, Aux yeux de tous ceux qui te regardent2 ».
Ce roi de Tyr portait un autre nom : Lucifer. Archange dans
le royaume de D.ieu, il brillait par sa beauté et était le premier des
anges, chef de la louange dans les Cieux.
« L'Eternel a brisé le bâton des méchants, La verge des
dominateurs. Celui qui dans sa fureur frappait les peuples, Par
des coups sans relâche, Celui qui dans sa colère subjuguait les
nations, Est poursuivi sans ménagement. Toute la terre jouit du
repos et de la paix ; On éclate en chants d'allégresse, Les cyprès
même, les cèdres du Liban, se réjouissent de ta chute : Depuis que
tu es tombé, personne ne monte pour nous abattre.

2
Ezéchiel 28 :11-18

11
François C. Nadler

Le séjour des morts s'émeut jusque dans ses profondeurs,


Pour t'accueillir à ton arrivée ; Il réveille devant toi les ombres,
tous les grands de la terre, Il fait lever de leurs trônes tous les rois
des nations. Tous prennent la parole Pour te dire : Toi aussi, tu es
sans force comme nous, Tu es devenu semblable à nous ! Ta
magnificence est descendue dans le séjour des morts, Avec le son
de tes luths ; Sous toi est une couche de vers, Et les vers sont ta
couverture. Te voilà tombé du ciel, Astre brillant, fils de l'aurore
! Tu es abattu à terre, Toi, le vainqueur des nations !
Tu disais en ton cœur : Je monterai au ciel, J'élèverai mon
trône au-dessus des étoiles de Dieu ; Je m'assiérai sur la
montagne de l'assemblée, A l'extrémité du septentrion ; Je
monterai sur le sommet des nues, Je serai semblable au Très-
Haut.
Mais tu as été précipité dans le séjour des morts, Dans les
profondeurs de la fosse. Ceux qui te voient fixent sur toi leurs
regards, Ils te considèrent attentivement : Est-ce là cet homme qui
faisait trembler la terre, Qui ébranlait les royaumes, Qui réduisait
le monde en désert, Qui ravageait les villes, Et ne relâchait point
ses prisonniers ?3 »
Lucifer s’est « pris la tête » comme on dit et voulut « élever
son trône ». Au passage, relevons que s’il veut élever son trône,
cela signifie qu’il en avait un ! Mais il veut s’élever au-dessus de
l’assemblée – terme annonciateur de la création de l’homme – et
veut se faire l’égal de D.ieu. C’est pourquoi il a été combattu par
l’archange Michael qui prendra sa place et Satan sera précipité sur
terre :

3
Esaïe 14 : 5-17

12
Deux études bibliques

« Et il y eut guerre dans le ciel. Michael et ses anges


combattirent contre le dragon. Et le dragon et ses anges
combattirent, mais ils ne furent pas les plus forts, et leur place ne
fut plus trouvée dans le ciel. Et il fut précipité, le grand dragon, le
serpent ancien, appelé le diable et Satan, celui qui séduit toute la
terre, il fut précipité sur la terre, et ses anges furent précipités
avec lui4. »
Yeshua5 dira « Je voyais Satan tomber du Ciel comme un
éclair6 » et tel que nous allons le voir, Il était présent dès la
création du monde. Lucifer a voulu s’élever, il a convoité la place
de D.ieu, il a voulu régner à Sa place ; D.ieu ordonne à son armée
sous les ordres de Michael de le combattre et il sera vaincu,
précipité sur terre sous le nom de Satan. Voilà l’origine du chaos,
des ténèbres, des abîmes dont parle Genèse 1 :2.
Entre le moment où D.ieu sépara les cieux et la terre et le
moment où Il donna la vie à – et sur – la terre elle-même, il y a un
combat qui séparera la lumière des ténèbres et « Dieu vit que la
lumière était bonne7 ». Ensuite seulement, D.ieu donne forme à la
terre et à tout ce qu’elle contient.
Nous ferons un saut à Genèse 1 :26 pour remarquer un
détail : « Puis Dieu dit : Faisons… » : Il est temps pour nous de
poser un constat : ce « Faisons » est au pluriel tout comme le nom
de D.ieu « Elohim » est pluriel. La Genèse commence par un
« Elohim » pluriel et fera mention au verset 2 que « l’Esprit se
mouvait au-dessus des eaux ». L’Esprit de Dieu est « Ruah » en

4
Apocalypse 12 :7-9
5
Yeshua = Jésus en hébreu, ce qui signifie « salut, sauveur »
6
Luc 10 :18
7
Genèse 1 :4

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François C. Nadler

hébreux et est féminin. Nous avons donc D.ieu « mâle » et Son


Esprit « femelle ». Ensuite le verbe « dire » de « Dieu dit »
indique qu’il y a une « parole ». Jean nous engeigne que « au
commencement était la Parole et la Parole était avec Dieu, et la
Parole était Dieu. Elle était au commencement avec Dieu. Toutes
choses ont été faites par elle, et rien de ce qui a été fait n’a été fait
sans elle8 ». Dans ces versets, Jean parle de Yeshua. Yeshua était
au commencement avec D.ieu et était D.ieu et toutes choses ont
été faites par Lui.
En résumé, ce « Elohim » pluriel est constitué de D.ieu
(mâle - Père), de Son esprit (Femelle - Mère) et de Yeshua (Fils).
Cette entité a ensemble et d’un commun accord, comme un seul
homme, créé la terre et tout ce qu’elle contient, de manière à
mettre de l’ordre dans le chaos, à amener la lumière dans les
ténèbres, à combler les abîmes, à donner la vie là où régnait la
mort.
Satan est cependant toujours sur terre et il faut que
quelqu’un gère toute cette création et qu’il la soumette, c’est-à-
dire qu’il amène toute chose à l’obéissance à D.ieu plutôt qu’à
Satan. C’est alors qu’Adam et Eve seront créés à l’image de
D.ieu : « Adama » en hébreux signifiant homme-femme en une
entité.
Adam est créé de peu inférieur à D.ieu : « Tu l'as fait de peu
inférieur à Dieu, Et tu l'as couronné de gloire et de
magnificence9 ». Il est couronné de gloire et de magnificence tel
que le fut autrefois Lucifer. Cette gloire « habillait » Adam ; c’est

8
Jean 1 :1-3
9
Psaume 8 :6

14
Deux études bibliques

pourquoi il est dit « ils étaient tous deux nus et n’en avaient point
honte10 ».
L’homme, fait à l’image de D.ieu, de peu inférieur à D.ieu,
supérieur aux anges, reçoit un corps humain, ce qu’aucune autre
entité céleste ne possède. Il a pour mission de régner sur la terre et
de « l’assujettir », de la « soumettre », de l’amener à l’obéissance
à D.ieu. Cela implique intrinsèquement que l’homme règne sur
Satan et doit l’amener à l’obéissance à D.ieu également : « Le
péché se couche à la porte et ses désirs se portent vers toi : mais
toi, domines sur lui11 ».
L’homme a été placé sur terre pour régner sur la création,
habillé de la gloire de D.ieu, et pour soumettre toutes choses au
Créateur. C’est là notre mission, encore et toujours, à condition
que nous nous soumettions également à notre Créateur plutôt que
d’écouter le menteur.

10
Genèse 2 :25
11
Genèse 4 :7

15
François C. Nadler

La scène du crime
Eden est un jardin que D.ieu plante du côté de l’Orient
traversé par un fleuve qui se divisait en quatre bras : Pischon,
Guihon, Hiddékel – le Tigre – et l’Euphrate. Il est immédiatement
précisé que ce jardin se trouve entre d’autres pays, notamment
Habila, Cusch – l’Ethiopie – et l’orient de l’Assyrie12.
Nos deux premiers constats sont que la terre n’est pas Eden
tel qu’il est parfois prétendu et que l’Eden est sur la terre
contrairement à ce qui est parfois enseigné lorsqu’on prétend que
l’être humain a été précipité sur terre après sa chute en Eden. Le
jardin se trouve sur la terre, entouré d’autres pays ayant d’ores et
déjà une identité.
Par ailleurs, lorsqu’Adam et Eve sont chassés d’Eden, ils
sortent dans une région fertile où ils pourront cultiver 13 – leur fils
Caïn est laboureur – et plus tard, Caïn sera chassé de cette région
en raison de son crime et devra se rendre parmi d’autres nations,
où la survie sera bien plus difficile que dans là où il se trouve avec
ses parents14. Nous reviendrons sur le sujet.
L’Eden est donc un réel « jardin » gigantesque planté en
orient dont l’accès devait certainement être sévèrement gardé pour
qu’Adam et Eve puissent s’y ébattre nus sans être dérangés dans
l’ordre impeccable qui y régnait. Plus tard, ils en seront exclus et
des anges en garderont l’entrée afin que nos deux acolytes ni
personne d’autre ne puissent y retourner et consommer de l’arbre
de vie.

12
Genèse 2 :10-14
13
Genèse 3 :24
14
Genèse 4 :11-16

16
Deux études bibliques

La région est déjà annonciatrice de la promesse de Canaan :


la région correspond à l’emplacement du pays promis à
Abraham15 et deviendra au fil des siècles le pays d’Israël. A noter
cette mention mystérieuse en Genèse 14 :10 disant c’était, jusqu’à
Tsoar, comme un jardin de l’Eternel, comme le pays d’Egypte.
Difficile de savoir ce qui est sous-entendu dans cette phrase. Nous
pouvons imaginer que la fertilité des lieux laissait penser au
souvenir d’un jardin d’Eden fertile sous la main de D.ieu, sans
toutefois être l’Eden proprement dit. Mais le doute existe.
Qu’est-il donc devenu de ce jardin ? A-t-il disparu ? Qu’en
est-il de l’arbre de la connaissance du bien et du mal ? De l’arbre
de vie ? N’étaient-ce que des symboles ? Ma foi quelque peu
infantile me laisse croire que ce jardin existe bel et bien. Ne
découvre-t-on pas encore aujourd’hui des régions inexplorées,
habitées de gens n’ayant eu encore aucun – ou que de rares –
contacts avec notre civilisation ? La dernière fois qu’il sera
mentionné sera lorsque Caïn s’éloigna de la face de l’Eternel pour
habiter dans la terre de Nod16.
Je retiens que l’accès à l’arbre de vie – et probablement le
jardin lui-même – est encore gardé par ces chérubins qui agitent
une épée flamboyante17, aveuglant qui tenterait de s’en approcher,
un peu comme l’éclat du soleil qui frise l’horizon nous empêchait
de distinguer notre route. Il est ainsi utopique de vouloir le
découvrir, notre vision comme notre chemin seront aveuglés et
détournés afin que nous ne puissions ne serait-ce que l’approcher.

15
voir Genèse 12 : 4-9 et 13 : 1-12
16
Genèse 4 :16
17
Genèse 3 :24

17
François C. Nadler

Même nos meilleurs satellites ne peuvent le localiser et le


masquent des cartes, telles certaines régions sensibles du globe.
Je retiens cependant le déluge survenant à l’époque de Noé
où tout a été détruit excepté les animaux et personnes qui se
trouvaient dans l’arche. Cela laisse suspecter que le jardin ait été
anéanti par les eaux. Cependant, à leur sortie de l’arche, seuls les
êtres vivants étant restés sur terre ont été détruits ; la colombe a
ramené un rameau, ce qui signifie que la végétation a survécu au
déluge. D.ieu aurait-il profité de l’occasion pour retirer les deux
arbres litigieux ? Le prophète Ezéchiel parle d’Eden : Tu seras
précipité avec les arbres d'Eden dans les profondeurs de la terre
et encore : tous les arbres d'Eden ont été consolés dans les
profondeurs de la terre, les plus beaux et les meilleurs du Liban,
tous ceux qui étaient arrosés par l'eau18. Une fois encore j’aime
laisser mon imagination jouer avec ces mots et penser à un jardin
sous-terrain, caché aux yeux du monde plutôt qu’un jardin
englouti comme dans un tombeau.
Impossible de savoir si ce jardin existe encore ou non.
Laissons donc nos doutes et croyances faire leur chemin et soyons
surpris le jour où toutes ces vérités nous serons révélées.
Voici donc notre scène. Un jardin où tout ce qui est sain
pousse sans que l’homme ne doive s’en inquiéter ni s’en occuper,
une région périphérique de ce jardin extrêmement fertile et riche
demandant tout de même un certain travail pour trier le grain de
l’ivraie, des ronces et des épines, puis des régions demandant plus
de travail pour maintenir des cultures productives et accéder aux
richesses du sol. Ces trois régions sont cependant entourées des
quatre bras du fleuve qui arrosent l’orient. Cela correspond au

18
Ezechiel 31 :16-18

18
Deux études bibliques

Moyen-Orient, la région où se trouve l’actuel Israël. C’est un beau


message d’espoir pour celles et ceux qui croient : D.ieu est fidèle
à Ses promesses de génération en génération, par-dessus les
siècles et millénaires.

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François C. Nadler

Ils étaient nus


Je me souviens d’une vision que j’ai reçue il y a des années
concernant le jugement dernier :
« Je fus transporté dans une salle gigantesque dont on ne
percevait que le sol. Un parterre de cristal bleuté et lumineux. Le
ciel était à la fois éblouissant et en même temps d’un bleu profond
qui s’évanouissait dans l’infini. Les sons parvenaient comme étant
proches et lointains en même temps. Une agréable résonance
trahissait l’immensité des lieux mais ne troublait en rien la
compréhension des murmures.
En regardant autour de moi, je perçus un nombre
incroyable de personnes, des millions ou des milliards. Pourtant,
nous n’étions pas serrés les uns aux autres. Au contraire, chacun
disposait de suffisamment d’espace pour se mouvoir. Les yeux ne
voyaient que les personnes de l’entourage immédiat tout en
percevant l’immensité de la foule.
Il régnait une ambiance partagée entre un sentiment
paisible et sécuritaire et des côtés d’angoisse face à ce qui nous
attendait. Mais aucun ne paniquait, personne ne criait ni ne
pleurait. La salle était tranquille et rassurante.
Je regardai alors plus attentivement les personnes. Je
remarquai qu’elles étaient nues. Je percevais sans aucune retenue
tout leur corps, leur intimité, leurs infirmités, les opérations subies
jusque dans les entrailles de leur corps. Pourtant, ce ne fut que
lorsque mon regard s’enfonça plus profondément dans ces êtres
que mon esprit fut troublé. En effet, je remarquai qu’en deçà du
corps physique, je voyais clairement leur esprit, leur âme, leur
cœur. Leurs pensées me parvenaient clairement, tous les mots,

20
Deux études bibliques

tous les actes, tous les événements de chaque vie étaient lisibles
comme un livre ouvert.
Mes yeux regardèrent alors vers moi-même et je constatai
que je faisais preuve de la même transparence, de la même nudité
à tous égards. Chacun pouvait voir ce que j’avais traversé dans
ma vie, tout le bien comme tout le mal que j’avais pu faire. Il y
avait en même temps un certain sentiment de honte ou plutôt de
regrets amers face à ces péchés et en même temps une paix car
nous partagions tous le même sort et en étions tous au même point
de notre vie.
Je fus alors propulsé sur le devant de la scène. Il y avait un
trône gigantesque sur lequel trônait un homme d’une lumière si
intense qu’il était impossible d’en voir le visage. Autour de lui se
tenaient des anges, debout, chacun avec une arme à la main, un
arc, une lance ou un épée. Ils étaient à la fois peu et nombreux.
Impossible de les dénombrer. Au pied du trône s’affairaient une
multitude de chérubins portant des piles de papier qu’ils
déposaient aux pieds du Roi.
Je vis alors ces hommes et ces femmes passer l’un après
l’autre devant le trône, leur vie défilant comme un film, chaque
détail, chaque mot, chaque pensée étaient mis à nu. Rien
n’échappait de toute leur vie. Au fur et à mesure que le film
avançait, les piles de papier grandissaient ou rétrécissaient. Puis
une main brandissant un sceptre sortait de la lumière et une voix
retentissait disant « coupable ! ». La personne s’effondrait sur
elle-même, comme si elle fondait, si elle se sublimait.
Dans certains cas, une chaire apparaissait avec un homme
debout derrière elle. Il consultait un livre et s’exprimait : « celui-
ci – celle-ci – elle est à moi, j’ai payé le prix ». Et la personne

21
François C. Nadler

était redressée par les chérubins, habillée d’une robe blanche,


puis elle fut conduite à l’écart. Je pouvais la voir partir et
s’évanouir dans le décor mais je ne pouvais pas voir où elle se
rendait.
Je tombai alors sur mes genoux, convaincu cette fois encore
que je me trouvai au jugement dernier, chacun passant devant le
trône de D.ieu, certains recevant la grâce du Salut en Yeshua
Ha’Massiah. »
Ce qui est intéressant à ce sujet est que le terme peau utilisé
dans la phrase « il leur fit des habits de peau » désigne en hébreu
autant la peau humaine qu’animale. L’interprétation de cette
phrase peut donc présenter un double sens : celui d’une peau
humaine jusque-là absente ou non visible ou des habits tirés de la
peau d’animaux. Ce qui pose question ici est l’absence de mention
d’abattage d’animaux, que ce soit à des fins sacrificielles – ce que
nous aurons pour la première fois avec Abel – ni pour la nourriture
ou la confection d’habits. De quelle peau s’agit-il alors ?
Pour qu’Adam et Eve puissent vivre nus, il devait régner un
climat fort agréable, suffisamment chaud pour qu’ils n’éprouvent
pas le froid, de jour comme de nuit et suffisamment ombragé et
agréablement venteux pour que la chaleur soit parfaitement
supportable. Conditions de vie de rêve ! Ce climat devait
certainement s’étendre aux régions avoisinantes à moins que nous
n’ayons à faire à un microclimat purement et simplement limité
au jardin de l’Eternel, ce qui est tout à fait plausible.
Ainsi, toute la région où se déroulent ces événements se
trouve dans ces conditions climatiques idéales pour les cultures et
pour la vie des hommes comme des animaux. Ceci est censé
garantir une richesse des diversités que seules des régions

22
Deux études bibliques

préservées savent offrir. L’abondance de nourriture permet aux


animaux d’être rassasiés sans obligatoirement se faire prédateur.
Toute l’herbe des champs et les fruits des arbres suffisent à nourrir
les occupants. Ainsi une vie paisible sans risque est possible pour
tout un chacun.
La nudité du couple m’a souvent posé question : Était-ce
une nudité au sens propre ou au sens figuré ? Certainement que –
comme tout ce que nous lisons dans la Bible – les deux sens y
trouvent leur place. Ils étaient nus et n’en avaient point honte.
Cette nudité était normale, comme nous pouvons encore le voir
dans certaines tribus isolées de l’Amazonie ou de l’Afrique par
exemple. C’est notre culture – depuis la chute – ainsi que les
conditions de vie qui ont modifié notre considération de la nudité
et nous a conduit à développer tout le domaine de l’habillement.
Dites-moi cependant ce qu’il y a de honteux dans la nudité
physique ? Quels sont nos arguments ? Ne sont-ce pas les
déviations de nos pensées, nos désirs malsains, notre imagination
tordue qui rendent la nudité honteuse ? Avez-vous déjà pris le
temps d’admirer ce chef-d’œuvre qu’est le corps humain ? Dans
son fonctionnement, dans ses performances, dans ses contours,
tout est grâce, richesse d’ingéniosité, de créativité et de suffisance.
Capacités d’adaptation, de transformation, de défense et de se
réduire aussi après la mort, il est un véhicule extraordinaire dont
les formes sont là pour satisfaire notre goût pour un art créatif dans
lequel D.ieu excelle. Le désir éprouvé par un mari pour son épouse
ou la femme pour son époux n’est-il pas merveilleux ?
Au-delà de la sexualité – ou de la sexualisation de la relation
– n’y a-t-il pas une beauté dans le plaisir que chaque partenaire
trouve à contempler sa moitié ? Combien d’hommes et de femmes

23
François C. Nadler

souhaiteraient entendre « tu es beau, mon mari, tu es belle, ma


femme ! ». Relisons le Cantique de Cantiques : c’est un hymne à
la beauté du corps ! Salomon écrira « Ta taille ressemble au
palmier, et tes seins à des grappes. Je me dis : Je monterai sur le
palmier, j'en saisirai les rameaux ! Que tes seins soient comme les
grappes de la vigne, le parfum de ton souffle comme celui des
pommes et ta bouche comme un vin excellent, qui coule aisément
pour mon bien-aimé, et glisse sur les lèvres de ceux qui
s'endorment ! Je suis à mon bien-aimé, et ses désirs se portent vers
moi19 ». Comment a-t-on pu perdre une telle capacité de
s’émerveiller devant la création divine faite à l’image de son
Créateur ?
Nous pourrions dès lors dire que la nudité de nos pensées
peut être source de honte nous poussant à développer une
protection de la source de ces pensées : la nudité physique. Ce sont
nos désirs déplacés, nos tentations malsaines, nos envies contre
nature qui déforment la nudité. Tel qu’avec l’éducation des
enfants, parfois il vaut mieux cacher l’objet de tentation plutôt que
devoir punir la chute à la tentation. Cela ne rend aucunement la
nudité elle-même honteuse.
La nudité est également celle de nos secrets les mieux
gardés : justement, ces désirs impropres, ces pensées déplacées, la
transparence de notre vie, de notre fonctionnement, de nos
émotions, des pensées de notre cœur. Ne rien cacher, vivre dans
l’authenticité, voilà le deuxième sens de cette nudité. Outre la
beauté du corps, le merveilleux de son fonctionnement, il y a la
pudeur de notre âme.

19
Cantique des Cantiques 7 :7-10

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Deux études bibliques

Adam et Eve étaient nus et n’en avaient point honte. Leur


nudité physique et métaphysique ne les gênait en rien. Ils étaient
tous deux à la même enseigne. Rien ne servait de vouloir cacher
les secrets de leur cœur, de leurs corps, tout était visible et c’était
normal. Voilà la vie à laquelle mon cœur aspire : une vie
communautaire où la nudité est normale, où personne n’éprouve
de honte à être authentique – être vrai – envers ses semblables.
Ce que ma vision m’a enseigné est qu’il est inutile de vouloir
cacher quoique ce soit. Tôt ou tard, tous sauront. Cela
m’encourage dès lors à être plus attentif à mes actes et à mes
pensées, de manière à rester autant que possible dans ce qui est
sain, ce qui est saint, sachant que ma nature humaine me pose des
limites sans lesquelles le venue de Yeshua aurait été vaine.
Habits de peau humaine, habits de peaux d’animaux,
finalement peu importe. C’est le sentiment de honte qui est au
centre du débat et c’est lui qu’il faut combattre. Eliminer ce qui
provoque la honte, émotion si destructrice qu’elle peut aller
jusqu’à l’aliénation de la beauté de la création, jusqu’à en renier
le bienfondé des intentions du Créateur. C’est malheureusement
ce qui se passe à notre époque. Sous le couvert de la coquetterie,
nous nous flanquons d’attributs sensés nous rendre beaux alors
que la beauté réside premièrement dans notre âme, notre cœur,
ensuite dans notre corps et enfin seulement dans notre apparence.
Le terme hébreu pour habit est ‘béged’. Ce terme est issu du
verbe ‘bagad’, qui signifie ‘tromper, trahir’. La source de notre
honte ne proviendrait-elle pas plutôt des efforts que nous mettons
à masquer notre nudité par la tromperie de nos habillements ?
Nous trahissons nos relations en masquant notre réalité par un
habit trompeur. Le sentiment de honte proviendrait alors de devoir

25
François C. Nadler

dévoiler ce que nous cherchons à masquer, trahissant ainsi notre


tromperie. De nos jours, la nudité est considérée comme une
atteinte à l’intégrité de la personne. Une femme nue – même
partiellement – sera accusée de provocation au voyeurisme tandis
que l’homme se verra flanqué du terme d’exhibitionniste. La
tromperie et la trahison ont été définies comme nouvelles normes.
Il n’y a aucun orgueil à se sentir beau, se sentir belle, nu
devant son miroir. Au contraire, c’est là une manière d’honorer
D.ieu pour la créature merveilleuse que nous sommes. « Je te loue
de ce que je suis une créature si merveilleuse. Tes œuvres sont
admirables, et mon âme le reconnaît bien. » dira David dans le
psaume 139 au verset 14. Certainement qu’il ne faisait pas
uniquement référence à un élément particulier de sa personne. Il y
voyait un tout, humain, psychique, spirituel, corporel et coquet.

26
Deux études bibliques

27
François C. Nadler

Un discours déformé
« Toute Ecriture est inspirée de Dieu, et utile pour
enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour instruire dans la
justice, afin que l'homme de Dieu soit accompli et propre à toute
bonne œuvre20. » nous dit Paul dans sa deuxième lettre à
Timothée. Nous pouvons nous appuyer sur cette affirmation
lorsque nous citons la Parole de D.ieu. Vraiment ? Satan aussi
utilise la Parole, mais pas dans le même objectif. Ce n’est pas pour
rien qu’on le surnomme « le malin ». Il sait utiliser la Bible, la
Parole de D.ieu, pour en déformer non seulement le message mais
également la finalité.
Ainsi, il viendra premièrement demander « Dieu a-t-il
réellement dit… ? ». Cette injonction cumulée à l’acquisition du
choix entre le bien et le mal donnera intrinsèquement la notion
d’interprétation de la Parole divine. « Que devons-nous
comprendre lorsque D.ieu dit ‘blanc’ ? ». Est-ce beige ou un léger
gris, ou encore un blanc bleuté, un rose pastel ? Est-ce réellement
‘blanc’ ? Ainsi présenté, le propos semble être clair. Cependant,
dans de très nombreux passages bibliques, cela ne paraît pas aussi
simple. D.ieu a-t-il réellement dit… les prémices des doutes quant
à la véracité de ce qui deviendra la Torah. L’interprétation, le
premier instrument que l’homme inventera pour se substituer à
l’ordre divin établi, pour justifier des actes en désaccord avec la
Parole Sainte.
« Vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin ? ». Ce
malin détournement du message ouvre la porte au dialogue et
donne à l’humain un pouvoir, celui de corriger ce que l’autre dit.
« Nous mangeons du fruit des arbres du jardin. Mais quant au

20
2 Timothée 3 :16-17

28
Deux études bibliques

fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit ‘vous n’en
toucherez pas de peur que vous ne mouriez’ ». Il y a déjà là une
déformation de ce que D.ieu dit : « mais tu ne mangeras pas de
l’arbre de la connaissance du bien et du mal car le jour où tu en
mangeras, tu mourras certainement21 ».
Eve parle de l’arbre qui est au milieu du jardin. Or il y en a
deux : l’arbre de vie et l’arbre de la connaissance du bien et du
mal. Elle a ensuite une compréhension déformée de
l’avertissement : tu mourras certainement devient soudainement
de crainte que vous ne mouriez. Satan va sauter sur l’occasion, son
but étant atteint : ouvrir le dialogue avec l’humain. Vous ne
mourrez pas, mais Dieu sait que le jour où vous en mangerez, vos
yeux s’ouvriront et que vous vous serez comme Dieu, connaissant
le bien et le mal.
Cette phrase contient beaucoup d’éléments. D’abord Satan
met en doute la mort promise, quelle qu’elle soit. Mort physique ?
Spirituelle ? Psychique ? Peu importe. Mort il y a, ne serait-ce
qu’au niveau relationnel, ce que nous verrons plus tard. Il va donc
gagner une manche prétendant qu’ils ne mourront pas
physiquement. Mais sans précision, Eve est dans le doute quant à
l’affirmation de son Créateur.
Ensuite la notion des yeux qui s’ouvrent. Jusque-là, ni Adam
ni Eve ne s’étaient posé la question de savoir s’ils connaissaient
toute la vérité. Ils jouissaient du jardin, d’une vie agréable,
pourquoi se poser des questions ? Satan insuffle la possibilité
qu’Adam et Eve ne soient pas finis, pas entiers¸ puisqu’il leur
manquerait quelque chose : ces yeux qui s’ouvrent en lieu et place

21
Genèse 2 :17

29
François C. Nadler

d’un potentiel aveuglement, d’une ignorance volontairement


induite.
Vous serez comme Dieu. Qui n’a pas rêvé – comme gamin –
être comme son papa ou sa maman ? Qui n’a prétendu ne vouloir
exercer le même métier ou avoir la même voiture ? Être comme
D.ieu, n’est-ce pas ce après quoi notre humanité court au travers
de la technologie et de la chimie ? Prolonger la vie, inventer de
nouvelles matières, atteindre les étoiles… Adam et Eve sont fait à
l’image de D.ieu. Mais ils ne peuvent pas être D.ieu. Il n’y a qu’un
D.ieu : YHVH Adonaï, Baruch HaShem, Elohinu Melech
Ha’olam, D.ieu le Roi de l’Univers. Ils ne peuvent pas non plus
être comme D.ieu car cela annulerait le rôle divin, la supériorité
du Créateur.
Connaître le bien et le mal, voilà comment exciter la
curiosité d’Adam et Eve : acquérir une nouvelle capacité,
découvrir de nouveaux horizons. Qui d’entre-nous n’aurait pas
accédé à la proposition ? Par ailleurs, cette curiosité va être
exacerbée par la connaissance d’une notion inconnue jusqu’alors :
le mal. Le bien, ils vivent dedans, ils y baignent tous les jours.
Mais le mal, c’est quoi ? C’est comment ? Quel goût cela a-t-il ?
De plus, acquérir une nouvelle capacité paraît comme un
jeu. Je vais pouvoir discerner le bien du mal. Comme c’est
excitant ! Voilà qui pimentera les journées ! Un peu comme dans
une chasse aux œufs, ils s’imaginent déjà parcourant Eden à la
recherche de ce mal encore inconnu jusqu’alors. Où se cache-t-il ?
Comment est-il ? Comment se manifeste-t-il ? A quoi sert-il ?
Cette dernière question est d’ailleurs une des motivations de
l’humanité face à la recherche : nous découvrons chaque jour de

30
Deux études bibliques

nouvelles substances et cherchons à quoi elles pourraient nous être


utile. Ce n’est fondamentalement pas mauvais…
Pourtant, pour ce couple, ça va l’être. Très vite ils en
découvrent les conséquences. Ils prennent conscience qu’ils sont
nus et ne savent discerner si c’est bien ou mal. Face au doute –
comme c’est bien souvent le cas pour nous également – ils vont
classer cette notion encore inconnue dans le potentiellement
mauvais. Maintenant que faire de cela ? Comment vivre avec ? Ils
sont nus, ils en éprouvent de la honte et tentent tant bien que mal
de le masquer au moyen de feuilles.
Comme nous l’avons vu plus haut, cette nudité n’a rien de
mal, tant que les pensées restent saines. Alors qu’est-ce qui a bien
pu provoquer la honte ? Là, ce sont les comportements des enfants
qui nous l’enseignent. Avez-vous déjà observé des enfants qui
jouent à papa-maman et se donnent un baiser sur la bouche ? La
première réaction est fréquemment un rougissement, comme s’ils
avaient passé outre un interdit. L’excitation de la découverte
stimule l’adrénaline et cette dernière agit sur l’organisme qui lui,
à son tour, va se manifester par des ressentis et des émotions.
Chatouillements au ventre, montée de la pression sanguine,
excitation du rythme cardiaque et une foule de pensées qui
traversent l’esprit, dont – justement – l’impression d’avoir osé
braver un interdit, d’avoir franchi une barrière invisible.
En ce qui concerne ces enfants, ils ne vont pas cacher leur
nudité mais ils vont garder ce secret rien que pour eux, comme un
trésor unique qu’ils partagent. C’est au moment où cela sera
découvert que la honte se manifestera, c’est là qu’ils rougiront le
plus ! N’en est-il pas ainsi ? Et qui a-t-il de honteux à s’être

31
François C. Nadler

embrassé ? Fondamentalement rien. Mais le fait d’avoir franchi


cette barrière nouvelle sera vécue comme une source de honte.
De plus, Adam et Eve bravant l’interdit, découvrent qu’ils
sont bel et bien encore en vie après avoir mangé le fruit défendu.
Ils sont toujours là, dans le jardin. Que penser alors de
l’affirmation du Créateur ? Haha, tu vois bien qu’on n’est pas
morts ! Ils ont l’impression d’avoir dénoncé un mensonge, d’avoir
découvert une vérité, d’avoir supplanté D.ieu face à son
affirmation. Ils se sentent alors comme D.ieu en ce qui concerne
la connaissance du bien et du mal. Ils ont franchi cette barrière
invisible dont ils doivent maintenant s’assurer d’en garder le
secret. Ils cachent alors l’objet de la découverte – la nudité – et ils
se cachent eux-mêmes devant l’Eternel…

32
Deux études bibliques

33
François C. Nadler

L’ordre des choses


Le fait qu’Ève ait répondu à la tentation en premier ne
signifie pas qu'elle soit moins bonne que l'homme. Au contraire
cela soulève des qualités qui sont propre à la femme. Dans sa
nature, elle est beaucoup plus encline à rechercher ce qui est bon
pour la famille. Sa sensibilité la conduit naturellement à
s'intéresser à ce qui pourrait faire du bien à ses proches, quitte à se
sacrifier pour essayer sa découverte.
Il n'est donc pas étonnant qu’elle ait écouté le serpent et ait
accédé à sa proposition. Elle témoigne d’une qualité propre à la
femme qui – même face à la douleur et à la mort – se montre bien
plus courageuse que l’homme. Certes, D.ieu a affirmé que s’ils
mangeaient du fruit de cet arbre certainement ils mourraient ; le
diable temporise l’affirmation divine par vous ne mourrez pas
mais vos yeux s’ouvriront. Eve réfléchit, elle pèse le pour et le
contre, elle constate que le fruit a du bon, qu’il pourrait être
précieux pour son couple et pour leur mission, elle décide alors
d’en manger pour voir ce qu’il apporte réellement et semble
convaincue.
Adam vaque à ses occupations – gérer le jardin – selon
l’ordre de D.ieu. Eve va le trouver et lui raconte son aventure. Bel
exemple d’un couple où l’on partage tout sans rien se cacher, pas
même une désobéissance grave. Adam connait également
l’interdiction divine. Mais il constate que sa femme est bel et bien
vivante à ses côtés. Plus rien ne le retient plus à goûter lui aussi au
fruit. Evènement excitant pour le couple qui découvre ensemble
une nouveauté, un fruit dont ils ignoraient le goût, la structure et
les effets. Dans son côté cartésien, il va vite analyser qu’ils ont

34
Deux études bibliques

commis une infraction à une règle importante : ne pas toucher à


cet arbre.
Certes, ils sont en vie, mais ils ont enfreint une règle.
Comment gérer cela ? Que dire à D.ieu ? Comment va-t-il réagir
lorsqu’il l’apprendra ? C’est là que les émotions entrent en jeu et
vont empoisonner leur vie. Coincés entre l’excitation de la
découverte et la peur de l’infraction commise, ils éprouvent alors
la honte, d’autant plus que D.ieu se promène dans le jardin et les
appelle. Que vont-ils faire ? Que vont-ils dire ? Quels sont
maintenant les risques réels ?
Leurs yeux se sont ouverts sur le bien et sur le mal. Ils sont
donc capables de reconnaître que ce qu’ils ont fait appartient au
mal, non pas d’avoir mangé un fruit, mais d’avoir enfreint une loi.
Le fruit lui-même est bon. Le serpent n’a pas menti. Mais ce
dernier a détourné leur attention. Il a axé leurs considérations sur
les avantages à manger le fruit en occultant les désavantages et
réelles conséquences de cet acte.
Maintenant, il va falloir assumer…

35
François C. Nadler

Du libre arbitre
Ne nous y trompons pas. D.ieu est D.ieu. Il sait très bien ce
qui s’est passé. Ce n’est pas pour rien que – juste à ce moment –
il se promène dans le jardin et appelle Adam. Lorsqu’un délit est
commis, il faut immédiatement y remédier et remettre de l’ordre.
Attendre ne ferait qu’aggraver la situation, donnant à Adam et Eve
l’impression que ce délit n’en est – en fait – pas un ou du moins
qu’il n’est pas aussi grave que ce que l’on en dit. Donc D.ieu agit.
D.ieu aurait très bien pu apparaître immédiatement entre le
serpent et Eve pour éviter le drame. Il aurait tout aussi bien pu
arracher le fruit des mains d’Eve et d’Adam. Il a cette toute
puissance de gérer parfaitement ce genre de situation. Pourquoi ne
l’a-t-il pas fait ? Pourquoi a-t-il laissé la situation
dégénérer jusqu’à la honte ? Nous pouvons poser la question plus
loin : pourquoi avoir placé ces arbres dans le jardin alors qu’Il
connaissait le risque qu’Adam et Eve y touchent ?
Pour que l’être humain soit à Son image, il était
indispensable qu’il jouisse de son libre arbitre, qui est la capacité
de décider par soi-même d’accéder à un choix ou non. S’il n’y a
pas de choix, il n’y a pas de libre arbitre. S’il n’y a pas de libre
arbitre, il n’y a que contrainte. Certes, l’histoire depuis que le
genre humain existe nous prouve qu’il aurait mieux fallu qu’il soit
régi par des règles génétiquement innées, comme pour les
animaux. Dans ce cas, il n’y a pas de choix possible. Leur vie
serait réglée par des réflexes innés, propre à leurs besoins et à leur
nature. Certainement que l’être humain en serait resté plus sage et
ses actes moins dévastateurs. En revanche, qu’en serait-il du
développement intellectuel et fonctionnel ?

36
Deux études bibliques

Sans le libre arbitre, l’humain fonctionnerait aujourd’hui


comme à sa création. Seul son organisme se serait adapté –
génération après génération – aux contraintes de son
environnement. Ceux qui habitent l’orient auraient une peau plus
foncée et plus épaisse, avec un système sudoripare très développé
pour lutter contre la chaleur ; ceux qui se trouveraient en occident
un peau plus claire et mince, mais une couche de graisse et une
pilosité qui s’épaississent proportionnellement à leur
rapprochement du pôle nord, les protégeant mieux du froid.
Cependant, son mode de nutrition, les outils utilisés et le type
d’habitations resteraient assez similaires à ceux qu’il a connu
depuis qu’il existe.
C’est parce qu’il est doué de choix que l’homme a
développé ses techniques de chasse, de préparation de la
nourriture, de construction de maisons, de moyens de transport.
Le libre arbitre est la base d’une intelligence inventive et créatrice,
à l’image de son Créateur. Voilà ce que D.ieu voulait. Un vis-à-
vis qui soit apte à discuter, à partager, à évoluer, à expérimenter,
au risque que – tels les enfants dans leurs phases d’apprentissage
– ils se blessent parfois. Par ailleurs, les termes hébreux utilisés
dans la phrase « faisons l’homme à notre image » devraient être
traduits par « faisons l’homme vis-à-vis-en-face-contre nous ».
Voilà la meilleure définition que l’on pourrait donner du terme
‘libre arbitre’.

37
François C. Nadler

Leçon de pédagogie
Je me souviens du jour où l’un de mes fils est rentré d’un
camp de ski organisé par la paroisse. A son retour, il me raconta
sa semaine en détail. Le plaisir qu’il y éprouva était communicatif.
Cependant, à plusieurs reprises, il évoqua ces moments où des
compagnons de chambrée allaient se cacher derrière une dune de
neige pour fumer des joints. Il ne me cacha pas d’être allé avec
eux. Après deux heures d’écoute, j’ai décidé de crever l’abcès :
« Et tu as également fumé avec eux ? ». Le rouge vif qui colora
son visage me fournit immédiatement la réponse. Honnête, il ne
me cacha pas avoir effectivement également fumé. Nous avons
alors établi ensemble un constat quant aux effets du chanvre et fixé
des limites quant à son éventuelle entrée dans notre maison, entrée
que je lui ai interdite, bien entendu.
Quelle aurait été la réaction de mon fils si je l’avais grondé,
sévèrement réprimandé, voire interdit de fréquenter ces camps à
l’avenir ? J’aurais purement et simplement rompu la
communication, en particulier cassé cette authenticité avec
laquelle il me partageait ses expériences. Pour moi, il était
primordial qu’il se sente aimé, compris, soutenu, quelle que soit
la situation, ce qui ne signifiait pas que j’acquiesce à ses
expériences. Nous pouvions au moins en parler sans dramatiser.
Quel bien ! Ma position pédagogique était inspirée de celle de
D.ieu envers Adam.
Ils entendirent la voix de l’Eternel D.ieu,
qui parcourait le jardin vers le soir […]
l’Eternel D.ieu appela l’homme, et lui dit : ‘Où es-tu ?’
D.ieu veut une démarche découlant du libre arbitre. Il est là,
il se promène, il appelle Adam, un peu comme dans une partie de

38
Deux études bibliques

cache-cache. Il aurait pu se diriger tout droit vers lui et entamer la


discussion. Mais non, il laisse la possibilité à l’homme de faire le
pas en l’invitant à la rencontre, au dialogue.
Adam répondra « j’ai entendu ta voix dans le jardin, et j’ai
eu peur, parce que je suis nu, et je me suis caché ». Comme si on
pouvait se cacher devant D.ieu… Voilà exactement la résultante
de la consommation du fruit défendu : la peur, la honte, la fuite.
Pourtant, Adam restera authentique devant D.ieu. La relation de
confiance existe encore malgré la désobéissance et les émotions
ressenties. D.ieu honore cette attitude ; nous le verrons plus tard
lorsque nous parlerons de Caïn et Abel. D.ieu ne formule aucun
reproche ; seulement deux questions : Qui t’a appris que tu es nu ?
et : Est-ce que tu as mangé de l’arbre dont je t’avais défendu de
manger ?
A ce stade, la culpabilité prendra le dessus et Adam tentera
de se décharger à la fois sur D.ieu et sur Eve : La femme que tu as
mise auprès de moi m’a donné de l’arbre et j’en ai mangé, laissant
le doute qu’il ait mangé du fruit sans savoir préalablement de quel
arbre il provenait. C’est la femme qui me l’a donné ; ce n’est pas
moi qui l’ai pris tente-il de s’excuser et encore c’est à cause de
cette femme que TU as placée à mes côtés. En d’autres termes, si
D.ieu n’avait pas créé Eve, le problème ne serait pas survenu.
D.ieu ne réagira cependant pas à l’invective.
A ce moment Il se tourne vers la femme : Pourquoi as-tu
fait cela ? Pour bien comprendre la question, il faut se rappeler
que D.ieu a confié la mission à Adam de régner sur Eden et tout
ce qu’il contient ; D.ieu a créé Eve telle une aide à ses côtés. En
termes de conditions de travail, il y a une différence hiérarchique
entre Adam et Eve. C’est Adam qui porte la responsabilité et non

39
François C. Nadler

Eve. Elle a pour mission de l’aider, non pas de prendre des


initiatives.
Cela n’a rien de misogyne, ce n’est pas un rabaissement à de
basses tâches pour Eve. Eve a été créée à partir d’une côte
d’Adam. Connaissez-vous le rôle des côtes ? Elles sont sensées
protéger nos organes vitaux. Une mission d’une importance
capitale ! Ainsi, sans Eve, Adam est vulnérable et sans Adam, le
rôle d’Eve n’a pas de sens. C’est donc une répartition équitable
des responsabilités. Adam ne peut pas assumer sa tâche sans l’aide
d’Eve et le rôle d’Eve est étroitement lié à la fonction d’Adam. Il
y a là une complémentarité exemplaire sans laquelle ni l’un ni
l’autre ne pourrait assumer ses tâches.
Pourquoi as-tu fait cela ? Notons qu’Eve ne répondra pas à
la question. Elle l’évitera en affirmant que le serpent l’a séduite et
qu’elle en a mangé. Notons encore que ni Eve ni Adam n’ont nié
avoir mangé du fruit. Ils ont cependant tous deux tenté de rejeter
la responsabilité sur l’autre. D.ieu aurait-il été plus clément s’ils
avaient purement et simplement avoué leur faute ? Pas sûr. Il est
conséquent avec Lui-même. Si vous en mangez, vous mourrez
certainement. Il ne peut pas revenir en arrière. Cette mort se
traduira par une exclusion du jardin d’Eden et une durée de vie
limitée dans le temps.
D.ieu prendra la peine de traduire en justice chaque
intervenant. Le serpent n’échappe pas à la sentence et chacun paie
pour sa part de responsabilité. Je peux volontiers imaginer D.ieu
prononcer ces conséquences calmement, sévèrement, mais sans
colère dans la voix. Un papa qui réprimande sainement ses
enfants, ses créatures, en leur assignant la punition dument
méritée. La colère aurait été mauvaise conseillère et aurait

40
Deux études bibliques

certainement conduit le serpent, Adam et Eve à une mort


immédiate. Cela s’est vu avec Sodome et Gomorrhe22 ou par
exemple avec Ananias et Saphira23.
Il est permis de supposer que l’Eternel prend sa part de
responsabilité : il a placé la tentation – les fruits de l’arbre – et le
tentateur – le serpent – au sein du même jardin qu’Adam et Eve.
Le risque de succomber à la tentation était très élevé pour ne pas
dire calculé.

22
Genèse 19 :24
23
Actes 5 :5

41
François C. Nadler

Des conséquences révélatrices


Le premier à se faire réprimander est le serpent. Il est pour
D.ieu un membre à part entière du bétail et des animaux des
champs. La précision qu’il marchera sur son ventre et mangera de
la poussière laisse supposer que cela n’a pas toujours été le cas. Il
se pourrait qu’autrefois, le serpent disposait de pattes l’aidant dans
ses déplacements.
Il y aura désormais une hostilité entre l’humain et le serpent,
pour toutes les générations à venir. Les humains lui écraseront la
tête et lui les blessera au talon. Je me suis tout de même demandé
comment un serpent pourrait mordre un talon s’il a la tête écrasée.
Mais ce n’est pas forcément dans cette logique que la phrase a été
écrite. Elle démontre une inimitié, une hostilité mutuelle. L’avenir
du serpent sera marqué par un combat incessant entre lui et les
humains.
Symboliquement, au fil du temps, le serpent a été associé au
diable, ce que la Bible ne dit pas explicitement. Il faisait partie du
monde animal et personne n’est surpris qu’il soit doué de parole
pour discuter avec Eve. Le seul autre passage qui présente un
dialogue entre un animal et un humain est l’histoire de l’ânesse de
Balaam24.
Ce qui me frappe en observant le monde de l’Eglise est
qu’on associe systématiquement ce genre d’événement à quelque
chose de diabolique. Dans certaines cultures, lors de rites
particuliers, ce sont les arbres qui parlent. Là encore, nous pensons
immédiatement à des esprits malins, du satanisme. Je laisse
volontiers la porte ouverte à ce que D.ieu utilise les moyens qu’Il

24
Nombres 22 :28

42
Deux études bibliques

choisit pour nous parler, que ce soit la Bible, un prédicateur, un


frère, un âne ou un arbre ! Personnellement, je refuse d’user de
mon libre arbitre et de ma pseudo connaissance du bien et du mal
pour dicter au D.ieu souverain quel chemin Il serait autorisé à
utiliser pour me parler.
Les conséquences subies par la femme se concentrent sur la
procréation. Souffrances dans les grossesses, douleurs de
l’enfantement, une participation au coût énorme que la création
d’une nouvelle vie demande. Une graine doit éclater pour laisser
la vie paraître. Le poussin et la tortue doivent crever la coquille de
l’œuf pour s’en extraire. Dès leur naissance, les espèces traversent
une période à hauts risques face à leurs prédateurs. Il en ira de
même pour l’enfant qui – livré à l’attention de ses parents – mettra
plus d’une fois sa vie en danger jusqu’à ce qu’il ait appris ce qu’il
convient de faire ou non.
Ce coût est certainement à l’image de ce qu’a du ressentir
D.ieu lors de la création du monde. Il a dû accoucher d’un projet
titanesque, prenant en compte l’équilibre de l’immensité de
l’univers jusqu’au fonctionnement de l’infiniment petit. Voulant
être comme D.ieu, à connaître le bien et le mal, la femme en fera
l’expérience de génération en génération, traversant bien des maux
pour donner naissance au très bon25.
Les désirs portés vers le mari restent difficiles à interpréter.
Le terme désir en hébreux peut désigner autant le désir sexuel que
le prédateur qui désire dévorer sa proie. Tel que ce fut le cas pour
Eve, ce désir peut également être celui de prendre la place de
l’homme ou de décider à sa place, soit prendre une place qui n’est
pas la sienne. Il est des situations où la femme doit décider, ce

25
Genèse 1 :31

43
François C. Nadler

n’est pas discutable. En revanche – et c’est valable pour l’homme


également – il arrive que la sagesse veuille que nous laissions
l’autre décider, par respect envers son libre arbitre, à des fins
pédagogiques ou simplement par bienveillance.
La domination dont il est question n’est surtout pas à
interpréter comme une supériorité de l’homme. Il s’agit de
fonctions, de domaine de compétences. Qui ne serait pas tenté de
décider pour son patron le montant de son propre salaire ou pour
le vendeur le prix de la marchandise vendue ? Lorsque je construis
une barrière autours de ma maison, j’ai des règles à respecter. Je
ne peux pas les décider à la place des autorités car ce n’est pas de
ma compétence. Ainsi, les désirs d’Eve se portent envers son mari
mais il n’est pas de sa compétence de décider ; c’est l’homme qui
domine, hébraïquement c’est lui qui gouverne ou qui a l’autorité.
Il est intéressant de comparer ce passage à Genèse 4 :7 :
« Certainement, si tu agis bien, tu relèveras ton visage. Et si tu
agis mal, le péché se couche à la porte et ses désirs se portent vers
toi : mais toi, domine sur lui. »
Les termes utilisés sont exactement les mêmes. Ainsi, les
désirs dont il est question ne concernent pas les désirs sain(t)s,
mais bien un péché –une désobéissance consciente et volontaire à
un commandement divin – qui portera à conséquence. Nous
sommes invités à le dominer, à savoir le gouverner, à prendre
autorité, à diriger, soit à prendre la bonne décision.
J’apprécie hautement lorsque – dans notre couple – nous
prenons les décisions ensemble. Chacun a ses désirs ; nous les
examinons, nous mesurons le pour et le contre et d’entente nous
gouvernons et prenons la décision qui s’impose. Le fait de

44
Deux études bibliques

partager nous aide à évaluer l’origine du désir et les conséquences


potentielles, ce que nous ne mesurerions pas obligatoirement si
nous devions prendre la décision seuls. La complémentarité dans
le couple est le but premier de la création d’Adam et Eve, ne
l’oublions pas.
L’homme aura aussi sa part de conséquences. Alors qu’il
vivait dans un jardin où il suffisait de lever la main pour être
rassasié, c’est dans l’effort et la douleur qu’il devra tirer la
nourriture de la terre. Il a choisi de s’octroyer le droit de choisir
entre le bien et le mal, cela deviendra son lot : il devra – à vie –
cultiver la terre et trier entre le bon grain, les épines et les ronces.
Voilà tout un symbole.
Qu’il est agréable de pouvoir jouir d’un weekend durant
lequel les seules préoccupations sont de se reposer et de se
nourrir : pas de travail, pas de décision, pas d’effort. Un weekend
à un agréable arrière-goût d’Eden. Le reste de la semaine,
l’homme va devoir commencer par évaluer et décider ce qu’il va
planter. Comme chaque jour, nos choix porteront à conséquence
et c’est à chaque instant que nous devons les mesurer. Tout ce que
nous plantons, demandera des soins et produira du fruit, bon ou
mauvais, parfois – pour ne pas dire souvent – mélangé à l’ivraie.
Non seulement l’homme va en souffrir mais la terre également.
Nous avons fait la géniale découverte du plastique mais
n’avons pas mesuré les problèmes liés à la pollution qu’il
engendre. Nous avons développé des énergies renouvelables sans
en mesurer les conséquences de l’élimination des déchets : que
faire des panneaux solaires lorsqu’ils ne fournissent plus
d’énergie ? Comment éliminer les éoliennes lorsqu’elles se
brisent ? Nous avons inventé de magnifiques véhicules pour nous

45
François C. Nadler

soutenir dans l’accomplissement de notre tâche mais avons oublié


les problèmes de pollution qu’ils entraînent. Qu’en ferons-nous
lorsqu’ils ne seront plus bons à rien ? Nous avons développé des
technologies de communication extraordinaires mais avons
provoqué un accroissement de la solitude. Toute notre vie est
remplie d’exemples flagrants de nos limites à faire des choix
conséquents entre le bien et le mal.
Le bilan de cette tentation de manger le fruit défendu est
désastreux, de génération en génération. On rampe à bouffer de la
poussière derrière le travail, on souffre pour enfanter la nouveauté,
on transpire et on s’écorche à la réaliser et on subit les
conséquences des domaines que l’on a omis de prendre en compte.
Nous sommes bien loin de la vie en Eden ! Pourtant, du travail, il
y en avait aussi !

46
Deux études bibliques

47
François C. Nadler

Poste à responsabilité
Détrompons-nous, la vie en Eden n’était pas de tout repos.
Du travail, il y en avait bien assez. Regardons ensemble le cahier
des charges d’Adam :
1. Soyez fécond, multipliez, remplissez la terre ;
2. Assujettissez-là ;
3. Dominez sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du
ciel, sur tout animal qui se meut sur la terre26 ;
4. Nommez tous le bétail, les oiseaux du ciel et tous les
animaux des champs.27
Voilà déjà un programme bien chargé.
Adam et Eve sont appelés à régner sur la terre. Le terme
régner signifie gouverner. Ce n’est pas un règne dans lequel le
Roi est assis sur son trône et donne des ordres. C’est un
engagement personnel, direct, impliquant toutes les qualités de
celui qui règne. Nous pouvons subdiviser ce règne en quatre
parties distinctes.
La première partie concerne la création du peuple de D.ieu.
Le travail d’Adam et Eve consiste à procréer de manière à remplir
la terre. Sachant qu’Eve n’éprouvait pas les douleurs de
l’enfantement en Eden, ce travail ne devait pas être désagréable.
D.ieu place la sexualité en première mission du jeune couple. La
procréation passe inexorablement par des relations sexuelles. Le
partage, le ressenti et le plaisir sont au premier plan dans la vie du
couple et sont parfaitement sain(t)s, naturels, normaux.

26
Genèse 1 :28
27
Genèse 2 :19-20

48
Deux études bibliques

Adam et Eve n’ont pas eu la chance de participer à des cours


d’éducation sexuelle ni à des cours de puériculture. Ils
découvraient ce domaine en même temps que leur corps, leurs
facultés, leur créativité, leurs ressentis, leurs émotions et leurs
désirs, un peu comme des enfants qui découvrent petit à petit la
vie, au gré de leurs expériences. La sexualité fut donc la première
de leurs activités et prend une place importante : multipliez et
remplissez la terre. Considérant qu’il faut neuf mois pour
concevoir un enfant et trois mois pour que le corps de la mère
récupère, ils avaient du pain sur la planche pour de longues
années !
Considérez ce qui rapproche deux êtres aujourd’hui encore.
Avant même d’envisager et de programmer une vie à deux avec
tout ce que cela implique, le couple va petit à petit découvrir son
intimité, l’échange de tendresse, de caresses et – souvent à notre
époque – avoir des relations sexuelles qu’ils soient mariés ou non.
La phase d’apprivoisement mutuel passe par le dialogue, la
tendresse, les caresses puis la sexualité. C’est ensuite seulement
que le couple envisage une vie commune, la planifie et enfin la
réalise.
Les conditions idéales du jardin d’Eden jouaient un rôle
important. Le couple vivait nu, au sein d’une nature majestueuse
et luxuriante, dans un climat fort agréable. Qui avait-il de plus
doux, de plus tendre, de plus délicieux que de se coucher dans
l’herbe grasse, de dialoguer, de se caresser mutuellement puis
d’exprimer cette affection par l’acte ultime : faire l’amour.
A priori, selon ce que la Parole nous enseigne, Adam et Eve
n’auront pourtant pas le temps de mener cette première mission à
bien en Eden. Pourtant, quel plan merveilleux était-ce ! Je l’avoue,

49
François C. Nadler

j’aurais volontiers été un de leurs descendants et j’aurais


hautement apprécié d’habiter ce magnifique jardin ! La naissance
de leurs premiers fils se fera hors d’Eden, nous y reviendrons.
La deuxième partie concerne l’assujettissement de la terre.
Adam et Eve sont en Eden. Pourtant l’ordre de D.ieu dépasse les
frontières du jardin et devra s’étendre à l’ensemble de la terre.
L’expérience du jardin leurs donne les éléments de base, agissant
comme un terrain d’exercice pour réaliser un exemple de ce qui
serait sensé devenir une norme.
Je doute fort qu’Adam et Eve aient eu conscience que la
terre était déjà habitée. Confinés dans leur petit coin de paradis,
vivant en autarcie, dans un univers idéalement parfait, la question
de savoir s’ils étaient seuls au monde ne se posait même pas,
d’autant plus que leurs journées devaient être bien remplies s’ils
voulaient assumer leur cahier des charges. Il semble que
l’assujettissement ne concernait que ce qui était le fruit d’Eden :
les enfants et petits-enfants issus de ce contexte et les animaux.
Nulle mention n’est faite quant à assujettir les autres nations.
Ces éléments devront pourtant être appliqués à l’ensemble
de la terre, car tel que nous l’avons vu, le jardin a ses limites. A
force de croître, de multiplier, de remplir la terre, le jardin se
serait trouvé tôt ou tard encombré. Deux choix se posaient alors :
agrandir le jardin ou peupler la terre hors des frontières d’Eden.
L’assujettir est déjà tout un programme : il s’agit de la
conduire à reconnaître la souveraineté de D.ieu, qu’elle se
soumette au Roi de l’Univers et de l’amener à respecter les règles
édictées depuis Eden, le Palais du Roi. C’est ce que nous faisons
– en principe – en qualité de parents avec nos enfants.

50
Deux études bibliques

Le troisième point parle de dominer le monde animal. En


Eden, les animaux se nourrissent de l’herbe des champs 28, nulle
trace d’hostilité ou de prédation. On ne parle même pas de sang.
La nourriture devait être si abondante qu’aucun instinct chasseur
ne s’était développé. L’homme est appelé à régner sur le monde
animal. Nous en connaissons quelque bribes : par exemple
l’éducation des chiens – comme gardiens de troupeaux, des
chevaux – pour le trait ou le transport, des bœufs tirant charrette
et charrue. Nous avons poussé ce règne à l’amusement en
éduquant des animaux réputés sauvages pour le cirque. Je ne
pense cependant pas que ce dernier point fasse partie du plan de
D.ieu : son respect pour Sa création dépasse de loin l’exploitation
de ses créatures.
Dans un autre livre, je parle de notre expérience familiale
avec la petite abeille29. Attirée par la nourriture, l’abeille tournait
au-dessus de nos assiettes. Alors que nous parlions de cette
autorité que nous avions sur le monde animal, je pris la parole et
ordonnai à l’abeille de sortir de la pièce, ce qu’elle fit
immédiatement et sans détours sous le regard amusé et réjoui de
mes enfants. Voilà de quoi il s’agit. Nous posons des limites
sécuritaires entre le monde animal et nous, nous amenons ce
monde animal à rester à sa place.
C’est ce qu’Adam et Eve auraient dû faire avec le serpent.
Tais-toi et retourne d’où tu viens ! Au lieu de cela, ils sont entrés
en discussion avec lui et se sont soumis à sa suggestion. Les rôles
ont été renversés, la mission a échoué.

28
Genèse 1 :30
29
François C. Nadler – L’Electron Libre – Page 101

51
François C. Nadler

Le dernier point est probablement le seul que nous


accomplissions réellement de nos jours encore. Nommer les
animaux. Il arrive encore que de nouvelles espèces soient
découvertes et c’est généralement l’explorateur qui donnera un
nom à l’animal.
Donner un nom – tel que nous le faisons avec nos enfants –
c’est valider l’existence, ou encore confirmer l’appartenance à un
milieu. On lui attribue le droit d’exister et de déterminer la famille
à laquelle il appartient. Recevoir un nom, c’est faire partie
intégrante du monde. C’est également un moyen de se souvenir de
l’existence de l’espèce. Parce que je lui ai donné un nom, ma
mémoire retient l’espèce comme faisant partie de mon univers.
Je n’ai pas fait de recherches dans ce domaine, mais il
semble que les termes hébreux désignant chaque animal
contiennent en eux-mêmes les caractéristiques propres à l’animal
concerné. Certainement qu’il serait intéressant – par curiosité
pourquoi pas – d’aller creuser ce vocabulaire.
Il est à noter que la sortie d’Eden ne signifiait aucunement
la rupture du contrat de travail ni l’abolition du cahier des
charges. La mission d’Adam et Eve restait la même, également
hors d’Eden. Malheureusement, à cette mission s’ajoutait le dur
labeur de la terre et des troupeaux. La Bible nous l’indique par la
première mention d’une généalogie au chapitre 5 de la Genèse.
Par ailleurs, Noé et ses fils recevront la même mission : Soyez
fécond et multipliez, répandez-vous sur la terre et multipliez sur
elle30.

30
Genèse 9 :7

52
Deux études bibliques

53
François C. Nadler

Au menu du jour
En Eden, nulle mention n’est faite de la consommation de
produits animaux. Voilà qui plaira aux végétaliens !
Voici, je vous donne toute herbe portant de la semence et
qui est à la surface de toute la terre, et tout arbre ayant en lui du
fruit d’arbre et portant de la semence : ce sera votre nourriture31.
Notons le détail : qui est à la surface de la terre. Les racines,
telles que les carottes, les pommes de terre ou le manioc ne
faisaient pas partie de leur alimentation puisqu’elles poussent sous
la terre.
Il est intéressant de constater que, pour ces aliments,
l’homme n’a qu’un maigre effort à produire : se baisser ou lever
le bras, cueillir et manger. Voilà le confort qui nous est offert en
Eden.
Ce n’est qu’après la chute que l’homme devra fournir un
effort considérable pour se nourrir :
C’est à force de peine que tu en tireras ta nourriture tous les
jours de ta vie, […] et tu mangeras de l’herbe des champs. C’est
à la sueur de ton visage que tu mangeras du pain32.
Deux détails retiennent mon attention : premièrement,
l’herbe des champs était jusqu’alors réservée aux animaux. La
chute de l’homme l’abaisse à devoir adopter certaines attitudes
animales. Alors qu’il est sensé dominer ce monde, il se rapproche
dangereusement d’en dépendre. Certains comportements de l’être
humain trahissent ce fait. Ne parle-t-on pas de comportements

31
Genèse 1 :29
32
Genèse 3 :17-19

54
Deux études bibliques

bestiaux dans certaines situations ? Je vous laisse y réfléchir et


trouver des exemples ; ils sont nombreux.
Deuxièmement c’est la première fois que l’on cite un
aliment cuit : le pain. C’est-à-dire qu’Adam doit maintenant non
seulement cueillir le fruit du sol, mais il doit également l’apprêter
afin qu’il soit consommable.
Nous pouvons supposer que les produits animaux font leur
apparition à leur sortie d’Eden. En effet, Abel était gardien de
troupeaux. A quoi servaient ces troupeaux ? Uniquement à
constituer une richesse ? Je ne le pense pas. Il se pourrait bien
qu’Abel en tirait également de la nourriture : du lait voire de la
viande. Ce qui me met la puce à l’oreille est que d’une part les
humains ont commencé à cuire les aliments – on l’a vu avec le
pain – mais également les traces des premières offrandes à
l’Eternel, généralement réalisée – selon les traditions en vigueur
hors d’Eden à cette époque – par la consumation de l’objet du
sacrifice.
Ainsi, le régime alimentaire d’Adam et Eve et de leurs
descendants a changé. D’une nourriture purement végétalienne, ils
sont devenus omnivores. L’apprêt de la nourriture représente un
travail supplémentaire qui prétérite à la mission première
d’Adam : son cahier des charges reçu en Eden.

55
François C. Nadler

Caïn et Abel
Adam et Eve garderont une relation étroite avec D.ieu. La
rupture ne concerne que leur présence en Eden, elle ne touche pas
leur relation avec D.ieu. C’est ainsi qu’à la naissance de Caïn, Eve
dira j’ai acquis un homme de par l’Eternel33 et non de par Adam.
C’est la première naissance qui répond à l’ordre de l’Eternel d’être
fécond, multiplier et remplir la terre. Plus tard naîtra Abel.
Pour la première fois, des offrandes sont faites à l’Eternel.
Ce sont les signes de reconnaissances pour les fruits récoltés dans
le travail de la terre et du gardiennage des troupeaux. Ce sera
également la première occasion de conflit ouvert, de concurrence
entre les deux frères. Celui-ci mènera au premier meurtre de
l’histoire biblique. Plus tard, nous aurons Ismaël et Isaac, Jacob et
Esaü, la fratrie de Joseph et j’en passe.
Nous ne disposons que de très peu d’éléments pour
comprendre ce qui se passe entre Caïn et Abel. Une différence
notée entre les deux sacrifices est qu’Abel offrira les prémices de
ses troupeaux, précision manquante à l’offrande de Caïn. Pour le
reste, nous ne pouvons que nous baser sur des suppositions.
Tel que nous l’avons vu et tel que toute la Bible nous
l’enseigne, l’attitude de cœur est un élément déterminant dans
notre relation à D.ieu. Or le texte nous enseigne
qu’immédiatement après la réaction de D.ieu aux offrandes, Caïn
fut très irrité et son visage abattu, ce qui le conduira à commettre
l’irréparable : un meurtre avec préméditation.
Tel qu’avec Adam lors de la consommation du fruit
défendu, la réaction de l’Eternel est pleine de compassion et de
33
Genèse 4:1

56
Deux études bibliques

pédagogie. Pourquoi es-tu irrité et pourquoi ton visage est-il


abattu ? Au sein du conflit, c’est avec Caïn que D.ieu ouvre le
dialogue. Par ailleurs, relevons au passage que la relation à D.ieu
semblait parfaitement normale, comme un héritage immédiat
d’Eden. Plutôt qu’une réprimande, Caïn reçoit une exhortation, un
moyen de sortir de ses pensées meurtrières : certainement, si tu
agis bien, tu relèveras la tête. Mais si tu agis mal, le péché se
couche à ta porte, et ses désirs se portent vers toi, mais toi, domine
sur lui34.
Le péché, c’est non seulement tuer Abel mais c’est
également de laisser libre cours aux émotions qui l’habitent :
colère d’avoir vu son offrande refusée, jalousie envers l’offrande
d’Abel, sentiment de rejet, de désaveu, sentiment de supériorité
puisque que l’Eternel aurait dû autant apprécier sinon préférer
l’offrande de l’aîné des frères. C’est également la première colère
qui se tourne autant envers l’humain qu’envers D.ieu : Eternel, de
quel droit refuses-tu mon offrande ? Ce salaud de frère va payer
pour cet affront !
Dans sa pédagogie, D.ieu donne la clé pour lutter contre le
péché : mais toi, domine sur lui. Ils ont appris la différence entre
le bien et le mal, à eux maintenant de dominer le mal pour faire
prévaloir le bien. Adam et Eve en avaient déjà fait l’expérience,
Caïn mesurera toute la difficulté qu’il y a à exercer le bien. Ne
sommes-nous pas tous plus facilement naturellement enclins à
faire le mal ? Le bien n’est-il pas régulièrement un choix difficile
à faire ?
Caïn restera dans sa colère. Plutôt que d’accepter de
travailler sur ses émotions, il les laissera prendre le dessus, soit

34
Genèse 4 :7

57
François C. Nadler

dominer selon le terme utilisé par D.ieu. Il découvrira que même


le meurtre ne suffit pas à calmer sa colère. Où est ton frère ?
Question à laquelle il répondra je ne sais pas, suis-je le gardien de
mon frère35 ? Nous pouvons sentir toute l’irritation pour ne pas
dire la haine qui habitent ces propos. Haine qui s’exprime envers
l’Eternel.
D.ieu ne peut pas laisser faire. Il respecte le choix du mal
fait par Caïn, mais il ne le tolère pas dans sa maison. Il chassera
donc Caïn de la région et l’enverra découvrir le monde, un monde
bien cruel : Voici, tu me chasse aujourd’hui de cette terre ; je serai
caché loin de ta face, je serai errant et vagabond sur la terre, et
quiconque me trouvera me tuera 36. A la haine s’ajoute la pitié de
soi et pire encore, des pensées suicidaires : Mon châtiment est trop
grand pour être supporté. En d’autres termes, mieux vaudrait pour
moi de mourir tout de suite. Pas la moindre ombre de repentance.
Malgré tout, D.ieu reste fidèle à Lui-même et interdira à
quiconque de le tuer. Réaction à double sens : protection de Caïn
et maintien de la vie en vue d’un cheminement de réflexion quant
aux actes commis pour un retour éventuel à la raison.
Caïn pourra néanmoins se forger une vie. Il se mariera et
donnera naissance à des fils et des filles. Une courte généalogie
laisse paraître Lémec. Son histoire – extrêmement courte – laisse
penser qu’il a assassiné Caïn et peut-être de ses descendants : j’ai
tué un homme pour ma blessure et un jeune homme pour ma
meurtrissure. Caïn sera vengé sept fois ce qui confirme la Parole

35
Genèse 4 :9
36
Genèse 4 :14

58
Deux études bibliques

de l’Eternel Si quelqu’un tuait Caïn, Caïn serait vengé sept fois.


Lémec continuera et Lémec soixante-dix-sept fois37.
Voilà comment une situation simple et peu grave peut
dégénérer alors que la colère et la haine sont entretenues de
génération en génération, ce que nous voyons malheureusement
dans certaines familles. L’augmentation de la vengeance – de sept
fois à soixante-dix-sept fois met l’accent sur l’empirement de la
situation au fil du temps. Une exhortation pour nous à régler nos
différents avant qu’ils ne prennent trop d’ampleur !

37
Genèse 4 :23-24

59
François C. Nadler

Le paradoxe des trois mondes


En lisant attentivement les premiers chapitres de la Genèse,
un paradoxe apparait quant à la création de l’humanité. Nous
pensons tous – selon ce qui nous a été enseigné – qu’Adam et Eve
sont les premiers humains et que de leur union naîtra l’ensemble
de l’humanité. Il y a toutefois un détail qui pourrait bien contredire
cette affirmation.
Adam et Eve sont placés dans le jardin d’Eden, le premier
« monde » qui nous est présenté. Comme nous l’avons vu, c’est
un endroit idyllique, à la végétation riche et luxuriante où
personne – ni humain ni animal – ne manque de quoi que ce soit.
Tout y pousse en abondance sans que l’homme ne doive y apporter
sa contribution grâce à un climat idéal.
Après avoir consommé le fruit de l’arbre de la connaissance
du bien et du mal, ils sont chassés d’Eden et devront cultiver la
terre, en particulier séparer les ronces et les racines des bons
grains. Ce deuxième « monde » peut être situé dans les alentours
immédiats d’Eden, soit toujours au bénéfice de l’irrigation du
Tigre et de l’Euphrate. Nous restons ainsi dans le même climat
avec une terre fertile où paissent les troupeaux. Seul le travail pour
obtenir sa nourriture et l’enfantement seront plus difficiles.
A cause de son crime, Caïn va être chassé de cette région.
C’est là qu’intervient le paradoxe. Il deviendra errant sur la terre
et rencontrera sa femme dans la terre de Nod38. Dans sa peur, il
dira à l’Eternel que quiconque me trouvera me tuera39. Au
chapitre 6, sont mentionnés les fils de D.ieu et les filles des

38
Genèse 4 :16-17
39
Genèse 4 :14

60
Deux études bibliques

hommes40. Voici notre troisième « monde », la terre sur laquelle


erre Caïn, une terre hostile mais habitée !
La science a démontré que la création de l’univers a
certainement pris des milliards d’années, l’évolution de la terre
plusieurs millions, tout comme celle des animaux. Quant à
l’humain, des traces ont été retrouvées, remontant à plusieurs
milliers d’années. Sans entrer dans le débat créationniste-
évolutionniste, je considère simplement que l’humain était présent
sur la terre et s’y est développé tel que le mentionne la Parole41.
Ce sont ces populations que Caïn va rencontrer dans son périple.
Mon hypothèse est que toute l’histoire d’Adam et Eve n’est
que la préfiguration de la création du peuple d’Israël plutôt que de
l’humanité. Tout le projet de D.ieu révélé dans la Bible tourne
autour de cela : D.ieu se choisit un peuple et ce peuple le sert et
l’adore comme seul et unique D.ieu. Une fois le monde créé, D.ieu
est satisfait et observe la vie qui prolifère à la surface de la terre,
mais Il n’a pas de relation avec ses créatures. Il se lance alors dans
le projet de créer un peuple sensé parfait – à son image – avec qui
il entretiendrait une relation d’amour.
Il choisit donc l’endroit idéal, y plante un jardin majestueux,
régit selon des règles uniques et y place Adam et Eve. Ils sont
appelés à croître et à se multiplier afin de former ce peuple
nouveau, ces fils de D.ieu comme les appelle Genèse 6:4. Par leur
désobéissance, Adam et Eve devront quitter le jardin mais
resteront à proximité, toujours avec le même cahier des charges :
remplissez la terre et assujettissez-là42.

40
Genèse 6 :2 + 4
41
Genèse 4:20-22
42
Genèse 1 :28

61
François C. Nadler

Malgré le développement désastreux de l’humanité, D.ieu


conservera son projet et choisira Noé pour survivre au déluge et
repeupler la terre. Plus tard, c’est à Abraham, à Isaac et à Jacob
qu’Il promettra un pays merveilleux dans lequel Il invitera Son
peuple à en prendre possession. L’humain ne se montrant pas à la
hauteur de Ses attentes, Il devra intervenir une fois encore en
envoyant Yeshua. Cette fois, Il étendra la promesse à l’ensemble
des nations, les invitant à rejoindre Son peuple43.
Adam et Eve ne sont ainsi pas à l’origine de l’humanité mais
ils sont les prémices du peuple d’Israël, nés dans un monde
protégé, ayant grandi dans un monde fertile, ayant finalement
étendu leurs territoires et ce faisant, rencontré ces autres
civilisations.

43
Romains 11 :11-27

62
Deux études bibliques

63
François C. Nadler

Première généalogie
Pour la première fois, la Bible nous livre une généalogie,
celle d’Adam et Eve. Il est tout de même surprenant que Caïn et
Abel en soient absents ; c’est comme si leur naissance comme leur
histoire fut une parenthèse dans le vécu du couple. Seul la mention
de Seth fera encore mention du drame car D.ieu m’a donné un
autre fils à la place d’Abel. Caïn – chassé du pays – disparaît de
la généalogie, comme s’il ne faisait plus partie de la famille.
La durée de vie de ces hommes est exceptionnelle et le
restera jusqu’à Noé. Voyons ce que cela donne :
Nom Premier né Décès
Adam A 130 ans A 930 ans
Seth A 105 ans A 912 ans
Enosh A 90 ans A 905 ans
Kénan A 70 ans A 910 ans
Mahalaleel A 65 ans A 895 ans
Jered A 162 ans A 962 ans
Hénoch A 65 ans A 365 ans
Metushelah A 187 ans A 969 ans
Lémec A 182 ans A 777 ans
Noé A 500 ans A 950 ans

L’histoire des descendants d’Adam durera plus de 1000 ans.


C’est à ce moment que D.ieu décide de réduire la durée de vie de
l’homme à 120 ans : Mon esprit ne restera pas à toujours dans
l’homme, car l’homme n’est que chair44. La corruption du genre

44
Genèse 6 :3

64
Deux études bibliques

humain avait atteint son paroxysme et l’Eternel préféra en limiter


les dégâts.
Seul Hénoch fait exception. Hénoch marcha avec D.ieu ;
puis il ne fut plus, parce que D.ieu le prit45. Remarque étonnante
qui laisse supposer que – tel qu’Elie – Hénoch fut enlevé au ciel
sans passer par le tombeau.
D’un couple qui était censé vivre dans un paradis est né tout
un peuple qui s’est mélangé aux nations. A la suite du choix de
posséder la connaissance du bien et du mal, la corruption atteint
ce peuple idéal rêvé de D.ieu. Il faudra attendre encore bien des
années pour que l’Eternel cherche à nouveau à mettre un terme à
la catastrophe en envoyant Yeshua parmi les nations. Une fois
encore, l’être humain choisira un chemin plutôt désastreux.

45
Genèse 5 :24

65
François C. Nadler

Conclusion
Faisons l’homme à notre image46. Voilà le projet
magnifique de D.ieu à la création du monde. Je n’ai jamais fait le
calcul, mais plusieurs fois, la Bible nous dit que l’Eternel se
repentit d’avoir fait l’homme [sur la terre]47. Le passage cité
ajoute qu’Il fut affligé en son cœur.
Cela aurait pu être une belle histoire. L’être humain qui se
multiplie et remplit la terre dans une relation tendre et affectueuse,
animé de l’Amour de D.ieu pour sa création, doué de sa même
créativité. Un monde où la nourriture aurait abondé, où l’eau aurait
coulé, où une harmonie parfaite aurait existé entre l’homme et la
création. Un peuple jouissant de son libre arbitre pour nommer les
animaux, les gérer et remplir un jardin de relations d’amour
respectueuses et aussi douces que le climat qui y régnait.
Sous l’impulsion du serpent – à noter qu’à nulle part il est
question du diable quoique nous puissions l’identifier à ses œuvres
– l’homme usera de son libre arbitre pour s’octroyer contre l’avis
du Créateur de la capacité de distinguer le bien du mal. Ce sera le
début de la fin, l’homme se montrant incapable de délibérément
choisir le bien plutôt que de succomber à la tentation du mal. Ce
mal ira de mal en pis au point que la durée de vie des humains sera
réduite à 120 ans.
Toute la Bible contient des témoignages de ces choix
désastreux avec – encore et toujours – cet espoir qu’ils puissent
conduire l’être humain à choisir la bonne voie lui permettant de
vivre en harmonie avec ses semblables. Quel magnifique exemple

46
Genèse 1 :26
47
Genèse 6 :6

66
Deux études bibliques

de persévérance ! Malgré tout, l’homme continue dans son


égarement. Au point qu’il n’y a pas si longtemps, la durée de vie
était même bien plus courte que 120 ans, la moyenne d’âge ne
dépassant que rarement 70 ans.
D.ieu mettra tout en œuvre pour maintenir une relation avec
ses créatures. Il y sacrifiera même une masse imposante
d’animaux qui seront sensés payer le prix de la désobéissance de
D.ieu les séparant de Sa présence. Il ira jusqu’à offrir l’ultime
sacrifice : Yeshua, son fils bien-aimé, en qui il a mis toute son
affection48. Ce fils nous montrera que, contre toute attente, il est
parfaitement possible de vivre sur cette terre avec le projet que
D.ieu nous a confié.
L’entêtement de l’humain se manifestera une fois encore. A
vouloir être comme D.ieu, il ne renverra qu’un piètre miroir de
cette image de l’Eternel cf 31, dénué de cette intelligence spirituelle
qui relie la créature à son Créateur. Pire, il transmettra à sa
progéniture son orgueil, sa convoitise, sa jalousie, bref toutes les
tristes caractéristiques de l’humain.
Pourtant, cet humain est également une créature
merveilleuse49, tel que David l’a affirmé à raison dans les
psaumes. Oui, l’homme est capable de bon, capable de bien,
capable de créativité, capable d’amour, capable de tendresse,
capable de respect. Il l’a prouvé à moultes reprises. Il se montre
juste incapable de persévérer dans cette voie, manquant de
consistance, de résistance, de pondération. Pourquoi ? Quel
dommage !

48
Matthieu 3 :17
49
Psaume 139 :14

67
François C. Nadler

Notre vie est parsemée d’embûches. Des cailloux jonchent


le sentier du bien et nous nous encoublons tous les trois pas. A
force, nous nous décourageons et abandonnons ce chemin difficile
pour préférer l’aisance de l’autoroute du mal. Nous voulons aller
trop vite, trop loin, à n’importe quel prix, alors que nous pourrions
nous contenter du peu mais bon qui se présenterait sur un chemin
plus tranquille.
Retenons que nous avons un exemple de choix en Yeshua.
Sachons imiter ses voies, cherchons à lui ressembler dans notre
manière de penser, de prier, d’aimer, de servir, de travailler, de
nous reposer. Et si nous nous encoublons sur un caillou, tant pis,
relevons-nous et poursuivons notre route, profondément ancrés
dans son exemple.
Espérons maintenant qu’avant le retour du Messie,
nombreux soient les hommes et les femmes qui choisiront de vivre
selon les préceptes de l’Eternel et réaliseront enfin que le choix du
bien est la seule issue viable pour l’humanité, quel que soit le
domaine.

68
Deux études bibliques

69
François C. Nadler

L’affaire Jonas

François C. Nadler

70
Deux études bibliques

71
François C. Nadler

Introduction à Jonas
Mais qu’est-ce qui a pris à notre bonhomme de partir pour
Tharsis alors que D.ieu l’envoie à Ninive ? N’aurait-il pas été plus
simple d’ignorer la prophétie, de se taire et de rester sur place ?
Un jour, alors que je faisais mon jogging, je longeais une
route de campagne. Une voiture arrivait à vive allure et dans un
contour, son conducteur en perdit la maîtrise. Elle fit un tonneau
et termina sa course dans un champ. Le conducteur sortit alors de
son véhicule et partit en courant, traversant le champ dans sa
longueur et s’engouffrant dans la forêt. Cet homme d’une trentaine
d’année était pourtant tout-à-fait en règle et n’avait consommé
aucun produit interdisant la conduite. Ce n’est que le lendemain
matin qu’il s’annonça à la police, incapable d’expliquer sa
réaction.
Alors que mon fils cadet avait 5 ans, il jouait à notre insu
avec des allumettes et le malheur arriva : la grange attenante à son
aire de jeu pris feu. Trois jours plus tard, nous retournâmes sur le
site et mon fils put enfin parler de ce qui était arrivé. Alors qu’il
commençait à pleuviner, je l’appelai pour que nous rentrions. Il
me répondit « oui » mais ne bougeat pas d’un centimètre. Je suis
alors allé vers lui et l’ai pris dans mes bras : il était comme figé
sur place, tétanisé par la peur post-traumatique. Ce n’est qu’une
fois dans mes bras que son corps s’est détendu.
Sous l’effet de la peur, nous pouvons avoir des réactions
aussi surprenantes qu’inattendues. C’est ce qui est arrivé à ce
conducteur, à mon fils et à Jonas. Cette réaction « s’explique » au
niveau psychologique mais n’excuse en rien notre prophète
d’avoir fui sa mission, surtout venant d’un D.ieu aussi bon et
compatissant que Lui.

72
Deux études bibliques

Nous allons faire un petit voyage 650 ans avant Jésus-Christ


pour découvrir que l’histoire de Jonas est extraordinairement riche
d’expérience et d’approfondissement dans notre relation avec
D.ieu et qu’elle est pourtant toujours d’actualité dans notre
cheminement avec le Seigneur.

73
François C. Nadler

Le décor
Ninive, capitale de l’Assyrie, se trouvait à un important
carrefour de routes commerciales traversant le fleuve du Tigre.
Elle occupait une position stratégique sur la grande route entre la
mer Méditerranée et le plateau iranien. Cela lui a apporté la
prospérité, de sorte qu’elle est devenue une des plus grande cité
de toute la région. Elle se trouvait à l’actuelle place qu’occupe
maintenant Mossoul en Irak50.
Qui dit carrefour commercial dit également carrefour
culturel et cultuel. L’influence des voyageurs colorera la culture
de Ninive et profitera également à son arrogance. Si de nos jours,
nous pourrions y voir un rôle touristique, certainement qu’à
l’époque la fréquentation par ces voyageurs a favorisé le
développement de certaines activités telles que les théâtres, les
jeux, la prostitution, les auberges où les boissons alcoolisées
coulaient à flot.
Ninive était également connue pour sa violence,
certainement favorisée par les chocs culturels. Voyons ce qu’en
dit le prophète Nahum :
« Malheur à la ville sanguinaire, pleine de mensonge, pleine
de violence, et qui ne cesse de se livrer à la rapine !... On entend
le bruit du fouet, le bruit des roues, le galop des chevaux, le
roulement des chars. Les cavaliers s'élancent, l'épée étincelle, la
lance brille... Une multitude de blessés !... Une foule de cadavres
!... Des morts à l'infini !... On tombe sur les morts !... C'est à cause
des nombreuses prostitutions de la prostituée, pleine d'attraits,

50
Wikipédia – Histoire de Ninive

74
Deux études bibliques

habile enchanteresse, qui vendait les nations par ses prostitutions


et les peuples par ses enchantements51 ».
Voilà qui nous donne déjà une première impression de
l’ambiance qui y régnait. Historiquement, Ninive était connue
pour ses actes barbares, sous forme de jeux où l’on faisait subir
d’atroces supplices aux victimes telles que peler un être humain
vivant, arracher des membres bout par bout et j’en passe. Le culte
principal était voué à la déesse Ishtar qui exigeait son lot de
sacrifices humains annuels, notamment chez les enfants.
De divinités différentes, régulièrement en guerre l’un contre
l’autre, l’Assyrie et Israël ne s’appréciaient guère et un juif à
Ninive n’était de loin pas le bienvenu à moins qu’il ne soit esclave.
Nous comprenons ainsi mieux les réticences de Jonas, d’autant
plus avec le message dont il était porteur !
On ne sait que peu de chose concernant Tharsis. De nos
jours encore, les historiens spéculent quant à sa localisation. Ce
que nous savons, c’est que le Roi Salomon se fournissait
régulièrement en or, en argent et autres métaux à Tharsis. A priori,
cette ville réunissant un ensemble de fonderies semblait bien plus
paisible que Ninive et entretenait de bonnes relations avec Israël.
Il est donc peu étonnant que Jonas ait préféré se rendre à
Tharsis pour fuir Ninive. Pourtant, sa fuite est difficilement
explicable. Pourquoi n’a-t-il pas simplement refusé la mission,
gardé le silence et n’est-il pas resté là où il se trouvait ? La réponse
se trouve certainement dans la peur…
Il sera également question du port de Japho – ou Jaffa – ville
qui se trouve plus au sud-est d’Israël et dont le nom signifie « être
51
Nahum 3 :1-4

75
François C. Nadler

beau », « s’embellir ». Nous verrons plus tard l’importance que


cela a.
Jonas, fils d’Amithaï, habitait Gath-Hépher52, une ville
frontière au nord d’Israël.
Il est intéressant de s’arrêter un instant sur les noms. Jonas
signifie « colombe », symbole de paix. Amithaï signifie
« véridique ». Jonas est donc une colombe de paix née de la vérité.
Gath-Hépher signifie « presse à raisin » ou « creuset ». Dans les
deux cas, nous avons à faire à la transformation, la purification
d’un matériau : le raisin en vin ou le métal qui est purifié de ses
scories. La colombe de paix et de vérité provient d’une étape de
purification, de transformation. Intéressant pour le rôle d’un
prophète !
Jonas était donc un hébreu qui connaissait la loi de Moïse et
vivait selon les coutumes juives. Dans ces coutumes, on fêtait
chaque année le souvenir de la libération de l’esclavage en Egypte
et les prodiges que D.ieu avait fait pour son peuple. Jonas
connaissait donc le Créateur puissant qu’était le D.ieu d’Israël. De
plus, être prophète implique qu’il entretenait une relation
d’intimité avec le Seigneur. Il était à l’écoute et ne manquait
jusqu’alors pas de transmettre ses oracles.

52
2 Rois 14 :25

76
Deux études bibliques

77
François C. Nadler

Lève-toi !
« Lève-toi, va à Ninive, la grande ville, et crie contre elle !
car sa méchanceté est montée jusqu'à moi53 ».
Lève-toi, du verbe « koum » en hébreux, signifie
« s’élever » à la fois dans un sens hostile et dans les sens « devenir
puissant », « venir sur le devant de la scène ». Mais il peut aussi
signifier « tenir » dans le sens de « supporter », « d’endurer »,
« d’être éprouvé ». En d’autres termes, D.ieu ordonne à Jonas de
devenir puissant, d’aller sur le devant de la scène pour adresser un
message hostile, dans une situation qu’il devra supporter, endurer
et qui constituera également une épreuve pour lui.
Le deuxième ordre sera « Crie ! » du verbe « Qara’ » en
hébreu. Ce verbe ne laisse aucune place à la timidité. « Crier »,
« émettre un son bruyant », « proclamer », « ordonner », « dire à
haute voix ». Voilà tant d’attribut de « qara’ ». Il ne s’agit donc
pas de parler à quelques personnes mais bien de parcourir les rues,
les avenues et proclamer à haute et intelligible voix le message
que D.ieu lui confie.
Le programme est très clair et Jonas l’a bien compris. Il va
au-devant d’une situation très inconfortable, en terre étrangère,
chez l’ennemi de toujours d’Israël (car l’Irak reste un ennemi
d’Israël aujourd’hui), auprès d’un peuple barbare aux coutumes
plutôt violentes, crier, proclamer à haute voix la parole de D.ieu.
Il n’y a pas de quoi se réjouir. Comment vont-ils l’accueillir ? Que
vont-ils dire de lui ? Que vont-ils lui faire ? Quelles tortures, quels
supplices l’attendent ? Reviendra-t-il vivant ? La peur s’installe

53
Jonas 1 :2

78
Deux études bibliques

chez Jonas. Plutôt mourir que d’aller là-bas ! Ou plutôt fuir ! Oui,
fuir…
Dans bien d’autres situations dans la Bible, nous trouvons
l’encouragement « ne crains rien » sous cette forme ou une autre.
Mais pour Jonas, cet encouragement manque. Il doit partir et ne
sait pas s’il reviendra. Il doit quitter la maison de son père pour se
rendre à l’étranger, au risque de se faire massacrer.
Aujourd’hui, nous regardons l’histoire de Jonas avec un
certain amusement, n’est-ce pas ? Ceci car nous connaissons son
aboutissement. Mais imaginez un instant que D.ieu nous dise
« Lève-toi, va à Bagdad, la grande ville en Irak, et crie contre elle
car la méchanceté des djihadistes est montée jusqu’à moi » …

79
François C. Nadler

La crainte des hommes


La réponse de Jonas à l’appel de D.ieu peut paraître
étonnante. C’est comme si, ayant été envoyé à Ninive, toute la
ville savait qu’il allait venir et qu’il se trouvait dès lors en danger.
La simple imagination de ce qu’il devait annoncer aux ninivites
suffisait à réveiller en lui une peur viscérale. Sa crainte de ce que
les hommes pourraient dire ou lui faire a surpassé sa crainte de
D.ieu.
N’en est-il pas de même pour nous ? Combien de fois avons-
nous masqué – voire renié – notre foi alors que nous nous
trouvions en présence de gens qui se moquaient des croyants ou
qui s’affirmaient athées ? Parfois même sommes-nous rentré dans
leur jeu par peur d’une discussion s’annonçant difficile. La crainte
des hommes nous conduit à des réactions aussi inattendues que
déplacées. Peur d’être ridicule, peur du jugement, peur des
moqueries, peur d’être exclu, les raisons sont multiples et se
cumulent.
Nous pouvons paraître de bons chrétiens qui se rendent
chaque dimanche à l’église, nous pouvons participer activement
aux activités de notre communauté, nous pouvons même assumer
une certaine responsabilité pour le bien de l’église, mais dès que
nous sortons de ce cadre, il ne reste plus rien de notre engagement,
de notre foi, de notre vie communautaire. Comme si nous menions
deux vies distinctes : l’une de croyant, l’autre de profane, voire
parfois de clairement païenne.
La réaction de Jonas dépasse largement ces craintes. Il va
carrément prendre la fuite comme si ses ennemis étaient déjà à ses
trousses. Au lieu de se rendre dans une ville ennemie, à annoncer
un message de destruction, il va opter pour le silence dans une

80
Deux études bibliques

ville amie, dans laquelle les juifs – bon clients – sont les
bienvenus.
Sur le bateau, il va même se coucher et s’endormir
profondément malgré la tempête. Sa peur dépasse le cadre même
de sa mission. C’est comme si – en l’envoyant à Ninive – D.ieu
avait juré sa propre destruction, comme s’Il le châtiait pour une
quelconque raison. « D.ieu m’en veut, Il veut me détruire, que me
vaut-il encore de vivre ? » aura-t-il pu penser.
« L'Eternel fit souffler sur la mer un vent impétueux, et il
s'éleva sur la mer une si grande tempête que le bateau menaçait
de faire naufrage. Les marins eurent peur ; ils implorèrent chacun
leur dieu, et ils jetèrent dans la mer les objets qui étaient sur le
bateau afin de l'alléger. Jonas était descendu au fond du bateau,
s'était couché et dormait profondément54 ».
Alors que nous participions à une croisière de plongée sous-
marine, nous avons été un jour surpris par une violente tempête.
Ce n’était pas la première fois que nous avions une mer houleuse
et les marins maîtrisaient le bateau. Mais cette fois-ci, c’était une
tempête d’une rare violence et c’est la première fois que nous
avons vu les marins avoir peur et que nous les avons entendu
prier !
Les marins sont habitués à la mer ; ils y passent leur vie. Une
tempête n’a donc rien d’inhabituel. Mais une tempête de cette
violence est rare et pour qu’ils aient peur, pour qu’ils jettent des
objets dont ils avaient besoin par-dessus bord, pour qu’ils
invoquent chacun leur dieu, il faut croire qu’elle était réellement
très menaçante et que leur vie était en danger.

54
Jonas 1 :4-5

81
François C. Nadler

Jonas aura certainement également eu peur. Cette peur


s’ajoute à celle engendrée par sa mission. Il fait certainement le
lien entre sa fuite et la tempête. « D.ieu a vraiment décidé d’en
finir avec moi ! » Il s’endort alors dans sa dépression, plonge déjà
dans la mort psychique alors qu’il est encore physiquement en vie.
Alors qu’il visait la paix de Tharsis, il s’enfonce dans les abîmes.
« Le capitaine s'approcha de lui et lui dit : ‘Pourquoi dors-
tu ? Lève-toi, fais appel à ton D.ieu ! Peut-être voudra-t-il penser
à nous et nous ne mourrons pas.’ Puis ils se dirent l'un à l'autre :
‘Venez, tirons au sort pour savoir qui nous attire ce malheur.’ Ils
tirèrent au sort, et le sort tomba sur Jonas55 ».
Pour les marins, la réaction de Jonas est inexplicable. Si eux
– habitués à la mer – ont peur, alors comment se fait-il que leur
passager, lui, dorme ? Chacun des marin fait ce qu’il peut pour
sauver leurs vies, y compris invoquer leurs dieux. Jonas semble
cependant totalement ignorer les événements. Le capitaine est en
colère. « Pendant que nous nous battons contre la tempête,
Monsieur dort ! ». Ce comportement leur paraît suspect, ils lui
demandent d’invoquer son D.ieu. Jonas fuyant justement ce D.ieu
montrera des signes de réticence. Il prendra surtout conscience que
tout ce qui arrive est lié à lui. Les marins décident de tirer au sort
et voir qui serait « coupable » d’une telle situation exceptionnelle
et le sort tombe évidemment sur Jonas !
« Alors ils lui dirent : ‘Dis-nous qui nous attire ce malheur.
Quelle est ton occupation et d'où viens-tu ? Quel est ton pays et
de quel peuple es-tu ?’ Il leur répondit : ‘Je suis hébreu et je crains
l'Eternel, le D.ieu du ciel, qui a fait la mer et la terre.’ Ces hommes
furent saisis d'une grande crainte et lui dirent : ‘Pourquoi as-tu

55
Jonas 1 :6-7

82
Deux études bibliques

fait cela ?’ Ils surent en effet qu'il fuyait loin de la présence de


l'Eternel parce qu'il le leur déclara. Ils lui dirent : ‘Que te ferons-
nous pour que la mer se calme envers nous ?’ En effet, la mer était
de plus en plus déchaînée. Il leur répondit : ‘Prenez-moi et jetez-
moi dans la mer, et la mer se calmera envers vous, car je sais que
c'est moi qui attire sur vous cette grande tempête’56 ».
Les marins commencent à s’intéresser à notre bonhomme.
Finalement, que fait-il à bord de ce bateau ? Qui est-il ? D’où
vient-il ? Pourquoi est-il là ? Ils le pressent de questions et la
réponse de Jonas pourrait paraître paradoxale :
« Je suis hébreu et je crains l'Eternel, le D.ieu du ciel, qui a fait
la mer et la terre57 ».
Pour un homme qui craint l’Eternel, ne devrait-il pas avoir
une réaction différente ? Pourquoi fuit-il si son D.ieu est si grand ?
Ils ne comprennent pas pourquoi il n’invoque pas ce D.ieu. Ils sont
saisis de crainte. Jonas leur raconte alors son histoire. Les marins
sont en colère : il met en danger tout un navire avec son équipage
pour sauver sa propre peau !
Jonas est acculé. Il ne peut plus échapper à l’Eternel. Il est
au bout de ses ressources. Il ne reste – selon lui – plus que la mort.
« Jetez-moi dans la mer ». Il se résigne, il abdique.

56
Jonas 1 :8-12
57
Jonas 1 :9

83
François C. Nadler

A toutes choses malheur est bon


« Ces hommes ramèrent pour gagner la terre ferme, mais ils
ne purent pas y arriver parce que la mer était toujours plus
déchaînée contre eux. Alors ils s'adressèrent à l'Eternel et dirent:
‘Eternel, ne nous fait pas mourir à cause de la vie de cet homme
et ne nous charge pas du sang innocent ! En effet toi, Eternel, tu
fais ce que tu veux.’ Puis ils prirent Jonas et le jetèrent dans la
mer. Et la fureur de la mer s'apaisa. Ces hommes furent saisis
d'une grande crainte de l'Eternel. Ils offrirent un sacrifice à
l'Eternel et firent des vœux58 ».
La première réaction des marins est un acte de compassion.
Ils savent maintenant que c’est à cause de Jonas que la mer est en
furie, mais malgré cela ils continuent à lutter pour sauver le bateau
en ramant vers le rivage. Cela ne suffit pourtant pas ; ils ne
peuvent pas atteindre la terre ferme.
Ces hommes qui invoquaient « chacun leur dieu »
s’adressent en chœur à l’Eternel, le D.ieu d’Israël. Ils ont pris
conscience de la réalité de ce D.ieu si puissant qu’il peut soulever
les mers. Ils se tournent alors vers Lui. Une fois qu’ils ont balancé
Jonas par-dessus bord, la mer se calme, preuve supplémentaire
que ce D.ieu-là est vivant. Ils sont saisis d’une grande crainte –
celle que Jonas prétendait avoir – et offrent un sacrifice, font des
vœux. En d’autres termes, nous dirons aujourd’hui qu’ils se sont
convertis.
D’une situation dramatique, D.ieu offre une possibilité de
salut à qui sait entendre et reconnaître Sa voix !

58
Jonas 1 :13-16

84
Deux études bibliques

Jonas est dans la mer déchaînée, il est maintenant seul pour


lutter pour sa survie. Il est « largué » dirons-nous. Dans sa
compassion, D.ieu fait « d’une pierre deux coups ». En calmant la
mer, il offre une possibilité de salut aux marins mais également à
Jonas. Ce dernier n’a plus à lutter contre les vagues, le vent et la
pluie, il se retrouve dans une mer calmée et voit le navire
s’éloigner. Il est seul. Confronté à lui-même, au milieu de la mer,
perdu, transi de froid. Jonas a encore bien des choses à
apprendre…

85
François C. Nadler

Un voyage en enfer
Non seulement Jonas s’est opposé à la volonté de D.ieu en
prenant la direction opposée de Ninive, mais en plus, il n’est plus
dans son élément. Il est largué dans sa pitié de soi, dans son état
dépressif, il se retrouve seul au monde pour faire un bilan sur ses
comportements. Seule l’eau le porte encore, pour le moment.
Dans sa déprime, Jonas ne se sera certainement pas encore
remis en question. Il se lamente sur son sort, conforté dans sa
vision de mort, l’envie de ne plus exister, de disparaître, de ne
servir à plus rien ni à personne. D.ieu constate son état et va jouer
une carte particulière : celle d’entrer dans son « jeu ». Jonas va
être avalé par un gros poisson…
Lorsque le poisson ouvre la gueule, Jonas pense
certainement « cette fois c’est la fin ». Il sent l’intérieur de sa
bouche rugueuse, les muqueuses qui se contractent et qui l’attirent
inexorablement vers l’intérieur. Une dernière glissade dans un
tube gélatineux qui se contracte à son passage, l’écrase, l’étouffe,
le pousse vers le bas, puis il arrive dans l’estomac.
Quelle puanteur ! Des restes de poissons et d’algues
mélangés aux sucs gastriques enveloppent Jonas d’une odeur
putride. Il peine à respirer dans cet univers serré où il fait nuit
noire ; il manque d’oxygène. Il sent contre son corps des poissons
encore frétillants se battre contre cet environnement hostile. Puis
ils se calment. La pression change régulièrement, tantôt ses
oreilles se dégagent, tantôt une pression insoutenable lui fait mal
aux tympans : le poisson a plongé dans les profondeur de la mer.
Soudain, une nouvelle vague d’eau mélangée aux planctons
et à une multitude de poissons lui arrive dessus. Une légère

86
Deux études bibliques

bouffée d’oxygène lui redonne espoir. Puis la nuit se refait


complète, les tympans cognent, les sucs gastriques commencent à
attaquer sa chair. Le poisson a replongé. De sa phase dépressive,
Jonas est arrivé en enfer, dans cette mort qu’il imaginait déjà
atteindre mais tout de même pas sous cette forme. Seul, détrempé,
puant, peinant à respirer comme à bouger. Il voit cette fois sa mort
arriver de façon concrète.
Son sommeil sur le bateau se transforme en un « sommeil
de mort ». Voilà le résultat de la désobéissance à D.ieu. Tout en
lui perd vie, tout perd son sens, sa vie devient puante, détestable,
compressive, étouffante, sans espoir. Sa vie est devenue un
véritable enfer. Voilà à quoi amène la crainte des hommes…
La crainte des hommes, c’est non seulement lorsque nous
renions notre Créateur, c’est également lorsque nous minimisons
sa Parole pour « arranger » une situation tendue :
• « Ce n’est qu’un petit péché, ce n’est pas bien grave ! »
• « Oui mais il faut adapter la Parole à notre époque ! ça a été
écrit à une période où tel problème n’existait pas et ou les
technologies n’apportaient pas de solution ».
• « D.ieu a écrit ‘blanc’ mais en fait ça veut dire ‘bleu’ ».
• « On n’est plus au temps des pharaons, il faut relativiser ! »
• « Oui c’est écrit ça, mais on ne peut tout de même pas le dire
ainsi, on va rectifier le tir ».
Rappelons-nous les paroles de Yeshua : « Ne croyez pas que
je sois venu pour abolir la loi ou les prophètes ; je suis venu non
pour abolir, mais pour accomplir. Car, je vous le dis en vérité,
tant que le ciel et la terre ne passeront point, il ne disparaîtra pas
de la loi un seul iota ou un seul trait de lettre, jusqu'à ce que tout
soit arrivé. Celui donc qui supprimera l'un de ces plus petits

87
François C. Nadler

commandements, et qui enseignera aux hommes à faire de même,


sera appelé le plus petit dans le royaume des cieux ; mais celui
qui les observera, et qui enseignera à les observer, celui-là sera
appelé grand dans le royaume des cieux. Car, je vous le dis, si
votre justice ne surpasse celle des scribes et des pharisiens, vous
n'entrerez point dans le royaume des cieux 59 ». « Celui qui
supprimera l’un de ces plus petits commandements… » Il n’y a
pas d’excuse au péché ; son salaire est la mort60.
Bref, les arguments sont très nombreux pour s’éloigner de
la Sainte Parole par seule crainte des autres, crainte de ce qu’ils
penseront, de ce qu’ils diront, de comment ils réagiront, même
s’ils sont engagés dans la foi !
Cette crainte des hommes nous emprisonne dans un univers
toxique, malsain, étouffant où la lumière peine à nous atteindre,
où l’oxygène manque pour nous maintenir en vie, cette « vie en
abondance » promise par Yeshua : « Je suis venu afin que les
brebis aient la vie et qu’elles l’aient en abondance »61.

59
Matthieu 5 :17-20
60
Romains 6 :23
61
Jean 10 :10

88
Deux études bibliques

89
François C. Nadler

De Ninive à Jonas
Dans son infinie grandeur, D.ieu n’est jamais à court de
ressources. Lorsqu’Il parle – même au travers d’une prophétie
annonçant un jugement sévère – c’est qu’Il a un plan de salut, un
espoir que l’homme se détourne de ses mauvaises voies. S’il
envoie ce message à Ninive, c’est dans l’espoir que la grande ville
se repente de ses péchés et qu’elle revienne à la sagesse car il est
écrit : « la crainte de l’Eternel est le début de la sagesse62 ».
En fuyant, Jonas a contrarié le plan de D.ieu. Mais ce dernier
sait utiliser l’occasion pour étendre son salut aux marins. Ne se
sont-ils pas convertis au Très-Haut lorsqu’ils ont vu la main de
D.ieu réveiller la tempête puis la calmer ? C’est au moment où ils
se sont adressés au seul vrai D.ieu que la tempête a cessé, pas
avant.
Maintenant, c’est le tour de Jonas. Dans le ventre du
poisson, il repense à son père et sa mère, il se remémore leur petite
ville si accueillante, la nourriture qui ne manquait pas, le bon lit
pour se reposer, la chaleur du soleil, les bienfaits d’un bol d’eau
pure. Il repense à la tempête et comment D.ieu l’a calmée. Il
repense à la Torah, comment Israël a été délivré d’Egypte, les
grandes victoires du peuple sur ses ennemis, la conquête de
Canaan, tous ces faits que le peuple se rappelle au travers des
diverses fêtes annuelles. Il repasse sa vie comme un film et prend
conscience de sa stupidité, de ce qu’il a perdu en fuyant de devant
la face de l’Eternel. Il reprend conscience que son D.ieu est LE
D.ieu de l’univers et que nul autre ne le surpasse.

62
Psaume 111 :10

90
Deux études bibliques

« Du ventre du poisson, Jonas pria l'Eternel, son D.ieu, en


disant : ‘Dans ma détresse j'ai fait appel à l'Eternel, et il m'a
répondu. Du milieu du séjour des morts j'ai appelé au secours, et
tu as entendu ma voix. Tu m'as jeté dans l'abîme, dans les
profondeurs de la mer, et les courants m'ont environné ; toutes tes
vagues et tous tes flots sont passés sur moi. Je disais : 'Je suis
chassé loin de ton regard', mais je verrai encore ton saint temple.’
L'eau m'a couvert jusqu'à m'enlever la vie. L'abîme m'a
enveloppé, les algues s'enroulaient autour de ma tête. Je suis
descendu jusqu'aux racines des montagnes. Les verrous de la terre
m'enfermaient pour toujours, mais tu m'as fait remonter vivant du
gouffre, Eternel, mon D.ieu !’ Quand mon âme était abattue en
moi, je me suis souvenu de l'Eternel, et ma prière est parvenue
jusqu'à toi, dans ton saint temple. Ceux qui s'attachent à des idoles
sans consistance éloignent d'eux la bonté. Quant à moi, je
t'offrirai des sacrifices avec un cri de reconnaissance,
j'accomplirai les vœux que j'ai faits. Le salut vient de l'Eternel63
».
Voilà une prière de foi. Jonas est encore dans le ventre du
poisson lorsqu’il prononce ces mots. Il voit la délivrance, il sait
que son D.ieu va le sortir de là. Il avance par la foi « mais tu m’as
fait remonter vivant du gouffre » dira-t-il depuis sa position
inconfortable, alors qu’il n’a pas encore été rejeté sur le rivage par
le poisson. Sa prière de foi est très enrichissante ; relisez le passage
biblique qui précède :
1. Jonas confesse son erreur ;
2. Il évoque la condition dans laquelle il se trouve ;
3. Il affirme ce que D.ieu est capable de faire ;

63
Jonas 2 :2-10

91
François C. Nadler

4. Il le loue et lui rend grâce ;


5. Il renouvelle son engagement à lui obéir, à accomplir ses
vœux.
La malédiction que devait prononcer Jonas contre Ninive
s’est retournée contre lui et il l’a compris, il l’a prise au sérieux, il
a expérimenté tout à nouveau la grâce du Seigneur. Le salut prévu
pour Ninive est également retourné vers lui. Jonas sait maintenant
que l’Eternel ne l’abandonnera pas et qu’il le sauvera.
Je noterai au passage l’enseignement qui est donné à toute
personne ayant un don de prophétie ou don de connaissance : nous
portons la responsabilité du message jusqu’au moment où nous
l’avons donné. Tant qu’il est dans notre cœur, il est sous notre
responsabilité mais une fois transmis, la responsabilité appartient
à ceux à qui il s’adresse et c’est alors à eux de l’assumer.
D.ieu entend la prière de Jonas et conduit le poisson à le
vomir sur terre ferme. On se retrouve au point de départ ou
presque.

92
Deux études bibliques

93
François C. Nadler

A Ninive la grande
Sur le rivage, Jonas est exténué. Tant de lutte depuis des
jours, la puanteur de ses habits, les algues qui enserrent son cou,
il prend le temps de se dégager, de se nettoyer, d’enlever tant bien
que mal cette odeur qui l’habille.
Alors l’Eternel répète son ordre, comme si nous étions
revenus quelques jours en arrière. « La parole de l'Eternel fut
adressée à Jonas une deuxième fois : ‘Lève-toi, va à Ninive, la
grande ville, et fais-y la proclamation que je t'ordonne64 ». Cette
fois, Jonas se lève et part pour Ninive. Difficile de savoir comment
il se sent. A la fois pétrifié à l’idée d’apporter son message aux
ninivites et en même temps « gonflé à bloc » par l’expérience qu’il
vient de vivre. Ce qui est certain – nous le verrons plus tard – c’est
que cette fois, il y a de la colère en lui.
Trois jours de marche pour parcourir la ville, à crier « dans
40 jours Ninive sera détruite !65 », là encore ce dut être très
fatigant. La ville est en pleine effervescence, se faire entendre ne
devait pas être facile. Pris dans leurs affaires, certaines personnes
ne l’écoutaient que d’une oreille. Pourtant son message parviendra
jusqu’aux oreilles du roi.
« Les habitants de Ninive crurent à D.ieu. Ils proclamèrent
un jeûne et s'habillèrent de sacs, depuis les plus grands jusqu'aux
plus petits. Le roi de Ninive apprit la nouvelle. Il se leva de son
trône, retira son manteau, se couvrit d'un sac et s'assit sur la
cendre. Et il fit faire dans Ninive cette proclamation : ‘Par ordre
du roi et de ses grands, que les hommes et les bêtes, les bœufs et

64
Jonas 3 :1
65
Jonas 3 :4

94
Deux études bibliques

les brebis ne goûtent de rien, ne mangent pas et ne boivent pas


d'eau ! Que les hommes et les bêtes soient couverts de sacs, qu'ils
crient à D.ieu avec force, et qu'ils renoncent tous à leur mauvaise
conduite et aux actes de violence dont leurs mains sont coupables
! Qui sait si D.ieu ne se ravisera pas et ne reviendra pas sur sa
décision, s'il ne renoncera pas à son ardente colère, de sorte que
nous ne mourions pas ?66 »
A l’époque de Jonas (environ 650 Avant J.-C.), on peut
penser que Nabuchodonosor II régnait sur l’Assyrie. Il avait déjà
mené des combats contre Israël et cherché à détruire ce peuple
mais ce dernier était toujours là et lui résistait. S’il est adorateur
d’Ishtar, il a conscience que le D.ieu des hébreux est bien puissant
pour le protéger des attaques que sa grande armée a livrées. Il
craint donc ce D.ieu et face à la menace d’une destruction totale,
il ordonne un jeûne non seulement aux Ninivites mais également
aux animaux !
D.ieu entendra leur prière et leur sera favorable, il renoncera
à exécuter son plan. Mais ce ne fut pas du goût de Jonas qui
recommença avec sa pitié de soi…

66
Jonas 3 :5-9

95
François C. Nadler

Sous le ricin
« Jonas le prit très mal et fut irrité. Il pria l'Eternel en
disant: ‘Ah! Eternel, n'est-ce pas ce que je disais quand j'étais
encore dans mon pays ? C'est ce que je voulais éviter en fuyant à
Tharsis. En effet, je savais que tu es un D.ieu de grâce et de
compassion, lent à la colère et riche en bonté, et qui regrette le
mal que tu envoies. Maintenant, Eternel, prends-moi donc la vie,
car mourir vaut mieux pour moi que vivre.’ L'Eternel répondit :
‘Fais-tu bien de t'irriter ?’67 »
J’admets que j’ai bien rigolé en relisant ce passage. Voilà
notre Jonas qui fait son enfant gâté ! Mais j’ai moins rigolé en
repensant au manque de respect qu’il avait manifesté envers
l’Eternel.
« Non mais Seigneur, tu vois le résultat maintenant ? Je
t’avais bien dit que ça ne servait à rien que j’aille à Ninive ! J’avais
raison d’aller à Tharsis ! Alors, j’ai risqué ma vie sur le bateau,
j’ai failli mourir dans le ventre d’un poisson et tout ça pour quoi ?
Pour que tu renonces ? Non, Seigneur, tu ne peux pas me faire ça
à moi ! »
Et D.ieu – toujours aussi pédagogue – de répondre : « fais-
tu bien de t’irriter ? » … Cela me rappelle le moment où Caïn était
fâché de ce que D.ieu détourne son regard de son offrande et
jalousa son frère au point de préméditer son meurtre. D.ieu
s’adressa alors à Caïn : « Et l'Eternel dit à Caïn : Pourquoi es-tu
irrité, et pourquoi ton visage est-il abattu ? Certainement, si tu
agis bien, tu relèveras ton visage, et si tu agis mal, le péché se
couche à la porte, et ses désirs se portent vers toi : mais toi,

67
Jonas 4 :1-4

96
Deux études bibliques

domine sur lui68 ». Le péché se couche à notre porte, nous avons à


dominer sur lui. Seule une repentance profonde et sincère, une
abnégation, nous permettra de le maîtriser.
Je me souviens d’un jour où mes enfants voulaient
absolument regarder un film annoncé à la télévision. Je leur ai dit
que j’étais d’accord à la condition qu’ils rangent leurs chambres
respectives. Les jeux continuèrent et rien ne se passa. Je leur
rappelai alors qu’il n’y aurait pas de film dans ces conditions.
Finalement, ils se sont exécutés et leurs chambres furent
impeccables. Mes enfants se sont installés confortablement sur le
divan, prêts à regarder leur film. A l’heure du film, nous avons
allumé la télévision et voilà que le film avait été remplacé par une
émission spéciale en raison d’un événement particulier ! Mes
enfants se sont alors mis en colère : « non mais tu ne peux pas nous
faire ça ! On voulait voir le film et maintenant il ne passe pas ! ».
A quoi j’ai répondu « vous avez maintenant une chambre bien
rangée, n’est-ce pas déjà une belle récompense ? » Je leur ai mis
ensuite un autre film.
Eh oui, tout ne se passe pas toujours comme nous
l’aimerions. Il y a parfois des circonstances que nous ne maîtrisons
pas, contre lesquelles nous ne pouvons rien faire. Notre chemin
avec D.ieu nous réserve bien des surprises et il nous appartient de
laisser la porte ouverte à ce que les événements ne prennent pas la
tournure que nous aurions imaginé.
D.ieu met alors en place une ultime leçon pour Jonas. Notre
bonhomme s’est construit une cabane pour avoir de l’ombre69. Il
s’assit ensuite pour voir ce qui allait arriver, certain que son « coup

68
Genèse 4 :6-7
69
Jonas 4 :5

97
François C. Nadler

de gueule » avait convaincu l’Eternel de revenir sur sa décision


d’épargner la ville. L’Eternel fit pousser un ricin. Quel miracle, en
un clin d’œil, voilà un petit arbre qui pousse de manière à faire de
l’ombre à Jonas ! En temps normal, il aurait fallu plusieurs années
à cette plante pour atteindre cette taille.
Il semble que Jonas ne s’en étonne même pas. Préoccupé par
son nombril, il apprécie simplement l’ombre offerte par le ricin.
Mais le lendemain matin, la plante a séché, rongée par un ver et
ne fournit plus l’ombre bienvenue70. D.ieu fait en plus lever un
vent si chaud que Jonas manque de s’évanouir. Il retourne alors
une fois encore dans la pitié de soi : « Il vaut mieux pour moi
mourir que vivre71 » et persistera dans sa colère.
Alors D.ieu d’enseigner à nouveau Jonas : « L'Eternel dit :
‘Tu as pitié de la plante qui ne t'a coûté aucune peine et que tu
n'as pas fait pousser, qui est née une nuit et qui a disparu l'autre
nuit, et moi, je n'aurais pas pitié de Ninive, la grande ville, dans
laquelle se trouvent plus de 120'000 êtres humains incapables de
distinguer leur droite de leur gauche et un grand nombre
d'animaux !72 ».
Jonas peine à dépasser sa propre vie, ses propres besoins, ses
propres envies, ses propres désirs. Il reste concentré sur lui-même,
égocentré disons-nous. S’il doit arriver quelque chose, ce doit être
pour lui ; les autres, on s’en fiche. Et s’ils devraient être détruits,
il ne voudrait perdre aucune miette du spectacle, comme une
« récompense » à son obéissance.

70
Jonas 4 :7
71
Jonas 4 :8
72
Jonas 4 :10-11

98
Deux études bibliques

99
François C. Nadler

Leçon de vie
Il y a une absence notable de compassion chez Jonas. Chez
Jonas seulement ? Ne sommes-nous pas nous-même sous un ricin
à réclamer tant de « bonnes choses » pour nous-mêmes, sans faire
fi des autres ? Nous voulons un bon travail, une belle maison, un
frigo bien rempli, des loisirs distrayants, des vacances au bord de
la mer et j’en passe. Et notre voisin ? Lui ? On s’en moque, ce
n’est pas notre problème, c’est sa vie à lui ! Qu’il se débrouille,
nous avons assez à faire avec notre propre vie !
Nous savons voir la paille dans l’œil de l’autre mais ne
voyons pas la poutre qui est dans le nôtre73. Nous observons les
déviances, les comportements abusifs, l’irrespect, la malhonnêteté
et nous attendons patiemment à l’ombre de notre ricin de voir
comment D.ieu va punir les personnes concernées. Pourquoi ne
nous levons-nous pas pour les inviter au changement ? Nous
constatons la misère, la difficulté à nouer les deux bouts, le combat
acharné pour ramener de quoi vivre chez tel voisin et nous restons
sous notre ricin à attendre de voir comment ils vont se casser la
figure…
Est-ce là la compassion que l’Eternel nous enseigne ? Peut-
être bien que notre message ne serait pas des mieux accueilli, mais
il annonce à la fois un jugement et un salut. Tant que D.ieu se tait,
c’est là que règne la mort. Voyez l’histoire de Noé : aucune parole
n’a été adressée à la terre. Le jugement de D.ieu était arrêté ; seul
Noé et les siens rentrèrent dans l’arche. Le reste de la terre fut noyé
sous les eaux. Regardez Sodome et Gomorrhe : aucune

73
Luc 6 :42

100
Deux études bibliques

exhortation à la repentance n’a été donné. Le feu du ciel est tombé


et la ville fut détruite.
Il en va de même pour nous. Tant que nous nous taisons, tant
que nous restons inactifs face à la souffrance, à l’injustice, à
l’immoralité, les conséquences seront « mortelles », sans espoir,
sans solution. Mais si nous ouvrons la bouche, si nous nous
sortons les mains des poches, si nous déboursons quelques francs,
alors la situation a une chance de changer.
Tant que D.ieu se tait, tant que nous nous taisons, la mort
frappera à la porte et avec elle la désolation, la déception, le doute,
la perte d’estime de soi. Et nous restons confortablement installés
dans nos fauteuils à contempler le désastre, ne manquant pas de
commenter les événements comme si nous avions la science
infuse.
Sortons de notre confort, osons prendre des risques, laissons
notre nombril à la maison et allons à la rencontre de l’autre. Alors
nous sèmerons la vie autour de nous, l’abondance, la joie, les rires,
la confiance, la foi, l’amour. Nous témoignerons ainsi que notre
D.ieu est un grand D.ieu, capable encore aujourd’hui d’accomplir
des miracles en faveur de celles et ceux qui se tournent vers Lui !
Le plus important est le message de salut véhiculé par ce
texte. Lorsque D.ieu parle, c’est qu’il existe un chemin de sortie,
une solution, une bénédiction :
« Si mon peuple sur qui est invoqué mon nom s'humilie, prie, et
cherche ma face, et s'il se détourne de ses mauvaises voies, je

101
François C. Nadler

l'exaucerai des cieux, je lui pardonnerai son péché, et je guérirai


son pays.74 ».
« Si mon peuple sur qui est invoqué mon nom » se réfère
aux personnes envers qui la Parole de D.ieu s’adresse, soit au
travers de la Bible, soit au travers d’une prophétie ou d’une parole
de connaissance, ce sont ces personnes qui sont concernées, ce
sont elles qui intéressent D.ieu dans le cas précis. C’est déjà une
bonne nouvelle en soi car c’est une preuve que D.ieu s’intéresse à
eux !
« S’humilie », c’est reconnaître sa faute, sa mauvaise voie,
ses mauvais choix, un style de vie en désaccord avec la volonté
divine, en désaccord avec sa Torah, ses commandements.
S’humilier revient à se rendre, à déposer les armes, à se soumettre.
« Prie » implique que l’on se tourne vers Lui, qu’on
s’adresse verbalement à Lui.
« Cherche ma face », c’est chercher Sa volonté, Ses voies,
comprendre ce qu’Il veut pour nous, de nous, par nous.
« Se détourne de ses mauvaises voies » est un changement
radical de comportement. Nous cessons ce qui était en désaccord
avec D.ieu pour entrer dans ce qu’Il attend de nous. Comment le
savoir ? En se souvenant du Psaume 111 :10 : « La crainte de
l’Eternel est le début de la sagesse ». Craindre D.ieu, c’est lâcher
ce qui nous sépare de Lui pour entrer dans ce qui L’honore.
A cela D.ieu répondra favorablement : Il nous exaucera des
cieux, il pardonnera nos fautes et guérira les domaines qui était
« malades » en raison de nos mauvais comportements, de nos

74
2 Chroniques 7 :14

102
Deux études bibliques

déviations. Il redressera ce qui était tordu, il redonnera vie à ce qui


était mort, il redonnera l’espoir là où il n’y en avait plus, il ouvrira
les portes qui semblaient fermées, bref, il répondra favorablement
à nos requêtes, en ce qui est bon pour nous et non pas forcement
en ce que nous verrions comme bon.
D.ieu est D.ieu, Il connait mieux que quiconque ce qui est
juste et bon. Accordons-Lui donc cette foi aveugle, dépourvue de
nombrilisme, clairement orientée vers l’avenir, oubliant ce qui est
derrière, pour aller de l’avant avec une confiance toute renouvelée.
Alors nous verrons notre pays guéri et trouverons le bonheur, la
plénitude, la paix et la sagesse.

103
François C. Nadler

Conclusion
Tout réveil passe par la crainte de D.ieu et la repentance.
C’est ainsi que nous pourrions résumer cette étude biblique.
Les marins se sont repentis d’adorer d’autres dieux et se sont
tournés vers D.ieu. Il les a sauvés d’une mort certaine et les a
conduits à bon port.
Les ninivites, sur ordre du roi, ont respecté un jeûne, se sont
repentis et se sont détournés de leurs mauvaises voies. La ville a
été sauvée de la destruction totale.
Jonas a reconnu son erreur au début de sa mission et s’est
repenti. Nous ne savons en revanche pas quelle a été son attitude
après que le ricin ait desséché. Cependant, dans le ventre du
poisson, il s’est humilié, il a reconnu que D.ieu était D.ieu et il a
été sauvé, vomi de l’enfer.
Cette repentance comporte toutefois des étapes :
« Si mon peuple sur qui est invoqué mon nom s'humilie, prie, et
cherche ma face et s'il se détourne de ses mauvaises voies 75 ».
Il ne suffit pas de dire « d’accord, j’ai eu tort ». Il y a le verbe
« s’humilier » qui englobe d’abord une reconnaissance de la faute,
une renonciation à celle-ci. Comme un ennemi qui s’avoue vaincu,
nous nous « rendons », nous « déposons les armes ». Prier, c’est
joindre l’amour à l’action. Il s’agit non seulement de changer en
théorie mais également dans nos actes, se détourner de nos
mauvaises voies dit le verset. Pour trouver le chemin, nous
cherchons la face de D.ieu, c’est-à-dire que nous cherchons ce qui

75
2 Chroniques 7 :14

104
Deux études bibliques

est juste et bon, ce qui est agréable à l’Eternel, ce qui est déjà tout
un programme.
« Ne vous conformez pas au monde actuel, mais soyez
transformés par le renouvellement de l'intelligence afin de
discerner quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et
parfait76 ».
Alors et alors seulement D.ieu répond :
« Je l'exaucerai des cieux, je lui pardonnerai son péché, et je
guérirai son pays.77 »
Nous exaucer signifie que D.ieu entend, prend au sérieux et
accepte notre prière, notre sincère repentir. Alors Il nous
pardonne, Il « efface » notre faute, comme si elle n’avait jamais
existé. Voilà la grandeur de la Grâce !
Le terme de « guérir son pays » n’a pas été pris par hasard.
Le mot hébreu utilisé, « erets », désigne bien la terre, la
possession, le pays. La repentance d’un seul homme peut
transformer toute une région. D.ieu bénit l’homme mais également
ses biens, sa terre, le fruit de son travail, ses relations, etc. Tout est
pris en compte.
Jonas, c’est le chemin de la mort à la vie, des ténèbres à la
lumière, de l’entêtement à l’obéissance, de la crainte des hommes
à la crainte de D.ieu. Puissions-nous toutes et tous vivre cette
sainte crainte de D.ieu afin que nous voyions Sa bénédiction sur
toute notre vie, sur tous nos biens, sur toutes nos activités.

76
Romains 12 :2
77
2 Chroniques 7 :14

105
François C. Nadler

Si Jonas, aussi caractériel qu’il soit, a pu servir le Seigneur,


alors chacun de nous, là où nous en sommes, avec nos défauts, nos
manquements, nos imperfections pouvons servir le Très-Haut. La
condition est de vivre dans la crainte de D.ieu, d’accueillir la
repentance comme chemin de salut et de marcher dans les voies
de celui qui nous a montré l’exemple de manière admirable :
Yeshua, le fils de D.ieu.
« La crainte de l’Eternel est le d début de la sagesse78 ».

78
Psaume 111 :10

106
Deux études bibliques

107
François C. Nadler

Du même auteur :

L’Esprit Suisse
Comment l'histoire d'un pays va
influencer le comportement de ses
habitants et la manière dont ils vivront
leur foi.

N° ISBN : 978 2 8399 2749 9

L’Electron Libre
Une réflexion autour de la pratique du
don de prophétie - une étude
pragmatique liée aux origines juives de
l'auteur.

N° ISBN : 978 2 8399 2928 8

Commandes à :
François C. Nadler
BP 730
CH-3979 Grône
+41 76 402 01 44
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