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UNIVERSITE OMAR BONGO

------------------
FACULTE DE DROIT
ET DES SCIENCES ECONOMIQUES
-----------------------
DEPARTEMENT DE DROIT
………………………..
UNITE DE FORMATION DOCTORALE DROIT PRIVE FONDAMENTAL,
HISTOIRE DU DROIT ET SCIENCES CRIMINELLES

CENTRE D'ETUDES ET DE RECHERCHES EN DROIT


ET INSTITUTIONS POLITIQUES (CERDIP)

LES REMEDES A L’INEXECUTION DU CONTRAT.


ETUDE COMPARATIVE DROIT DE L’ESPACE OHADA
ET DROIT FRANCAIS

THESE
En vue de l’obtention du Doctorat en Droit Privé présentée et soutenue
publiquement le ________octobre 2023
Par
Jean de Dieu Willy ALLOGO MVE
Master en Droit Privé Fondamental

Directeur de Thèse : Co-directeur de Thèse :


M. Jean-Claude JAMES, M. François-Xavier LUCAS,
Maître de Conférences Agrégé à l’Université Omar BONGO Professeur à l’Université de Paris 1 Sorbonne

Jury :

M. Charles MBA OWONO


Agrégé des Facultés de Droit, Professeur Titulaire, Université Omar BONGO, Président

M. Etienne NSIE
Maître de Conférences Agrégé, Université Omar BONGO, Rapporteur

M. Alain KENMOGNE SIMO


Agrégé des Facultés de Droit, Professeur Titulaire, Université de Yaoundé 2, Rapporteur

Mme Yvette Rachel KALIEU ELONGO


Agrégé des Facultés de Droit, Professeur Titulaire, Université de DSCHANG, Examinateur

M. Jean Claude JAMES


Maître de Conférences Agrégé, Université Omar BONGO, Directeur de Thèse

M. François- Xavier LUCAS


Agrégé des Facultés de Droit, Professeur à l’Université de Paris 1 Sorbonne, Codirecteur
AVERTISSEMENT

L’Université Omar BONGO n’entend donner aucune approbation ni


improbation aux opinions contenues dans cette thèse. Ces opinions doivent
être considérées comme propres à leur auteur.

i
DEDICACE

A mes défunts parents MVE ALLOGO Jean Jacques & OYANE MBA Candide

A ma fiancée ANDEME ZUE Jolie Dorice

A mon oncle EYEGHE ATOUGHE Célestin

A mes enfants Josué & Rebecca

ii
REMERCIEMENTS

Puissent Messieurs les Professeurs Jean-Claude JAMES et François-Xavier


LUCAS trouver ici l’expression de ma gratitude la plus profonde pour leur
grande disponibilité et leurs conseils avisés.

Merci aux enseignants-chercheurs, doctorants et employés du CERDIP qui


ont apporté un soutien, direct ou indirect, à ce travail.

Mes remerciements vont également à mes parents. A mon oncle EYEGHE


ATOUGHE Célestin, à son épouse NDZONG MEFOUMANE Angèle et à ma
tante OKOME MENVIE Micheline pour m’avoir soutenu et encadré sur tous
les plans, après le décès de mes parents. C’est grâce à vous que je soutiens
aujourd’hui une thèse de Doctorat.

Je voudrais aussi témoigner toute ma reconnaissance à Mesdames OKOME


MINTSA et Hasna AVOMO pour leur aide dans l’acquisition de la
documentation ayant permis la réalisation de ce travail.

Un grand merci à la Communauté Missionnaire Chrétienne Internationale du


Gabon (CMCI-GABON) pour les prières des frères et leur soutien multiforme.
Un merci particulier aux pasteurs Calvin EKOH ELLA pour ses
encouragements et Cyr NANG ESSANGUI pour ses relectures minutieuses
dans une matière qui lui est étrangère.

iii
PRINCIPALES ABREVIATIONS

A.F.D.I Annuaire française de droit international


A.J.P Afrique juridique et politique
al. Alinéa
Arch. phil. Droit Archives de philosophie du droit
Art. Article
AUDCG Acte uniforme sur le droit commercial général
AUDSCGIE Acte uniforme sur le droit des sociétés commerciales et
groupement d’intérêt économique
AUPC Acte uniforme portant organisation des procédures
collectives d’apurement du passif
Ass. plén Assemblée plénière
B.A.M Bibliothèque Africaine et Malgache
BGB Code civil allemand
BJE Bulletin Joly Entreprises en difficulté ;
BJS Bulletin Joly Société
Bull Bulletin des arrêts de la cour de cassation
Bull. civ Bulletin des arrêts de droit civil
C. civ Code civil
C. com Code de commerce
C. consom. Code de consommation
CCJA Cour commune de justice et d’arbitrage
C.S. Sén. Cour suprême du Sénégal
C.trav.Gab Code du travail gabonais
C.trav.Burk. Code du travail Burkinabè
Cass. Cour de cassation française
Cass. Gab. Cour de cassation gabonaise
CERDIP Centre de recherche en droit et sciences politiques
Cf. Confère
ch Chambre
Civ. Chambre civile
Civ. 1ère Première chambre civile de la Cour de cassation
Civ. 2ème Deuxième chambre civile de la Cour de cassation

iv
Civ. 3ème Troisième chambre civile de la Cour de cassation
COCC Code des obligations civiles et commerciales du Sénégal
Com. Chambre commerciale
Comm. Commentaire
CVIM Convention de Vienne sur la vente Internationale de
Marchandises
D. Dalloz
dir. sous la direction de
doct. Doctrine
Dr. et patr droit et patrimoine
éd. Edition
Fasc Fascicule
Gaz. Pal. Gazette du palais
Ibid. cité ci-dessus
in tiré de
JC Com JurisClasseur Commercial
JCC JurisClasseur Contrats
LEDC L'essentiel droit des contrats
LDA Revue Lamy Droit des affaires
LPA Les petites affiches
n° Numéro
Obs Observation
op. cit. Référence déjà citée
OHADA Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit
des Affaires
p. page
PDEC Principes du droit européen des contrats
PUF Presse Universitaire de France
PUFR Presses Universitaires François-Rabelais
RDAA Revue du Droit des Affaires en Afrique
RDC Revue de droit des contrats
Rec. Recueil de jurisprudence européenne
Rev. Sociétés : Revue de droit des sociétés
Rev. Proc. Coll Revue du droit des procédures collectives
R.C.J.B Revue critique de jurisprudence belge

v
R.I.D.C. Revue internationale de droit comparé
RTD.civ Revue trimestrielle de droit civil
RTD. Com Revue trimestrielle de droit commercial
RTSJ Revue Trimestrielle de Sciences Juridiques
Revue sénégalaise de droit des affaires
R.S.D.A
S. Suivant(e)s
t. Tome
Th. Thèse de Doctorat
v Voir
vol. Volume

vi
RESUME

Cette thèse traite des remèdes à l’inexécution du contrat, en faisant une


étude comparative entre le droit de l’espace OHADA et le droit français. En
effet, en vertu du principe de la force obligatoire, les engagements contractuels
doivent être exécutés trait pour trait, c’est-à-dire en temps et en heure. La
partie qui manque cette exigence se trouve dans une situation d’inexécution.
Dès lors, le droit met à la disposition des contractants une palette de mesures
permettant de réagir contre cette défaillance contractuelle. L’étude des droits
de l’espace OHADA et du droit français montre que la réaction à l’inexécution
contractuelle dans les deux systèmes est gouvernée par la philosophie de favor
contractus. Il s’agit de sauvegarder le contrat coute que vaille, nonobstant le
manquement du débiteur à ses obligations. Pour parvenir à cette sauvegarde,
les mécanismes mis à la disposition des parties doivent tenir compte de l’état
de solvabilité du débiteur. Les remèdes à l’inexécution contractuelle varient
ainsi selon que le débiteur est in bonis ou selon qu’il fait l’objet d’une
procédure collective d’apurement du passif.

Mots clés : Contrat, inexécution, remèdes, solvabilité du débiteur,


soumission du débiteur à une procédure collective d’apurement du passif.

vii
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE ....................................................................... 1
Première partie : ........................................................................................ 18
LES REMEDES INHERENTS AU DROIT DES CONTRATS .......................... 18
Titre 1 : Le débiteur incité à s’exécuter ...................................................... 20
Chapitre 1 : Le recours aux mécanismes contractuels non comminatoires . 22
Chapitre 2 : Le recours aux mécanismes contractuels comminatoires ........ 68
Titre 2 : Le débiteur contraint de s’exécuter ............................................. 112
Chapitre 1 : L’exécution forcée en nature ................................................. 114
Chapitre 2 : L’exécution par équivalent .................................................... 145
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE ................................................ 167
Deuxième partie : ..................................................................................... 170
LES REMEDES AMENAGES PAR LE DROIT DES ENTREPRISES EN
DIFFICULTE............................................................................................ 170
Titre 1 : ................................................................................................... 174
L’allégement des obligations contractuelles du débiteur ........................... 174
Chapitre 1 : La neutralisation des effets traditionnels du contrat inéxécuté
............................................................................................................... 176
Chapitre 2 : L'aménagement de la créance contractuelle .......................... 203
Titre 2 : ................................................................................................... 241
La redéfinition du sort du contrat ............................................................ 241
Chapitre 1 : Le maintien forcé des contrats en cours ............................... 243
Chapitre 2 : La transmission de la charge du contrat à un tiers ............... 262
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE ............................................... 296
CONCLUSION GENERALE....................................................................... 297

viii
INTRODUCTION GENERALE

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
1
1. Contexte et définition du sujet. Le contrat est, à n’en point
douter, la relation juridique la plus fréquente entre les individus. En effet,
charnière juridique de la vie en société, le contrat est l’instrument par lequel
se réalisent les échanges économiques1. Conçu en droit commun de l’OHADA
comme « une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s’obligent
envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque
chose »2, la définition du contrat a évolué en France avec la réforme du code
civil de 2016. En effet, le nouvel article 1101 du code civil français définit
désormais le contrat comme « un accord de volonté entre deux ou plusieurs
personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre les obligations ». La
doctrine reste partagée sur la portée de cette nouvelle définition.

2. Pour certains auteurs, cette nouvelle définition n’apporte aucun


bouleversement pratique à la notion de contrat3. Le législateur français aurait
selon eux, manqué aux attentes de la doctrine au regard des évolutions
modernes de la science juridique4. Alors que pour d’autres, cette nouvelle
définition issue de la réforme du code civil de 20165 apporterait d’importants
changements6. Elle aurait le mérite d’élargir la conception du contrat7,
favorisant sa distinction d’autres accords qui ne produisent pas d’effets de
droit8. Ainsi, là où le droit commun de l’OHADA le conçoit comme une
convention ayant plus spécifiquement pour effet de créer les obligations, le

1 B. FAGES, Droit des obligations, 8ème éd., LGDJ, Paris 2018, p.39
2 CCA, art. 1101 ; R.G.O, art. 21
3 F. CHENEDE, Le nouveau droit des obligations et des contrats, 2 ème éd., D., Paris 2019-

2020, p.21
4 S. LEQUETTE, « La notion de contrat. Réflexion à la lumière de la réforme du droit commun

des contrats », RTD Civ. 2018, p.541 ; F. TERRE, Y. LEQUETTE, Ph. SIMLER, F. CHENEDE,
Droit civil. Les obligations, 13ème éd., D. Paris 2022, p.66, n°79.
5 Ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du

régime général et de la preuve des obligations.


6 Y. BUFFELAN-LANORE, V. LARRIBAU-TERNEYRE, Droit civil. Les obligations, 18 ème éd.,

Sirey, Paris 2022, p.272, n°825.


7 S. PORCHY-SIMON, Droit des obligations, 15 ème éd., Hypercours Dalloz, Paris 2022, p.25 ;

S. HARIZ, La rupture du contrat, Th., université de Toulon 2016, p.1


8 R. CABRILLAC, Droit des obligations, 15 ème éd., D. Paris 2022, p.20

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
1
droit français envisage le contrat comme pouvant aussi modifier, transmettre
ou éteindre des obligations.

3. Toutefois, le contrat demeure dans les deux systèmes, un accord


de volonté qui agit sur les obligations. En tant qu’acte de prévision, son
efficacité réside dans sa capacité à donner satisfaction aux parties, en
aboutissant à une exécution conforme à ce qui a été convenu. C’est ainsi que
la règle pacta sunt servanda exige des parties une exécution fidèle du contrat9.
Toutefois, il arrive souvent qu’en raison des circonstances, une partie ne soit
pas en mesure d’exécuter totalement ou en partie ses obligations
contractuelles. On parle alors d’inexécution.

4. La notion d’inexécution. Les législateurs de l’OHADA10 et français


ne définissent pas la notion d’inexécution. Elle peut être définie comme le
« non-accomplissement d’une obligation qui, peut-être total ou partiel, résulter
d’une omission ou d’une initiative, être dû à une faute de la part du débiteur
(inexécution fautive) ou à une cause étrangère (inexécution fortuite)11 ». D'après
J-L CONSTANTINESCO, « l’inexécution est une notion légale, elle comprend
toute exécution qui ne couvre pas complètement, et dans toutes ses modalités,
l’obligation contractuelle assumée. En d’autres termes, par inexécution, on doit
comprendre tout écart séparant la satisfaction procurée de la satisfaction
promise »12. C’est cette conception unitaire qui est retenue dans les deux
systèmes juridiques. Il y a donc inexécution à chaque fois que le débiteur

9 F. CHABAS, Obligations : théorie générale, in Leçons de droit civil, t.2, Vol.1, 9ème éd.,
Montchrestien, Paris, 1998, pp. 237-238
10 Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires, constitue un cadre

d’harmonisation, mieux encore, d’uniformisation du droit des affaires dans 17 pays de


l’Afrique Sub-Saharienne, dont le but est de garantir la sécurité juridique et judiciaire aux
opérateurs économiques en leur offrant un espace économique sur lequel s’applique un droit
des affaires commun et dont l’interprétation ultime est confiée à une seule juridiction (La Cour
commune de justice et d’arbitrage).
11 G. CORNU, Vocabulaire juridique, 12 ème éd., PUF, Paris, 2018.
12 J-L. CONSTANTINESCO, Inexécution et faute contractuelle en droit comparé. W

KOHLHAMMER, Verlag (Stuttgart) et libraire encyclopédique ( Bruxel ), 1960, p. 91


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
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n’exécute pas correctement ses obligations contractuelles, y compris s’il
s’exécute partiellement ou tardivement13.

5. À l'inverse, en droit allemand, l'inexécution (Vertragsverletzung) ne


concernait, jusqu'à la réforme du droit des obligations opérée en 2002, que le
cas de l'impossibilité, du retard, ou de la « violation positive du contrat »14. En
revanche, la livraison de marchandises défectueuses n'était pas considérée
comme une inexécution et les moyens du demandeur étaient régis par des
dispositions spécifiques à la garantie15. Depuis la réforme16, le droit allemand
ne consacre plus qu'un concept unique d'inexécution (Pflichtverletzung)17. Telle
est également la solution des textes européens, notamment les principes
Lando du droit européen des contrats (PDEC) où la notion désigne « le fait de
manquer à exécuter une obligation issue du contrat, qu'il bénéficie ou non d'une
exonération, et s'applique aussi à une exécution tardive ou défectueuse et au
refus d'une collaboration qui permette au contrat de produire son plein effet »18

6. De même, en droit international du commerce, la notion de


contravention au contrat utilisée par la convention de Vienne sur la vente
internationale de marchandises (CVIM) s'entend aussi de façon large, incluant
toutes inexécutions au contrat ou à la convention. Une exécution empêchée
par la force majeure est considérée comme une inexécution19. C’est enfin dans
cette même logique que s’inscrivent les principes UNIDROIT, dont l’article
7.1.1 s’est largement inspiré de la CVIM. Ainsi, une inexécution contractuelle
peut être totale ou partielle, volontaire ou résulter d’une circonstance
extérieure à la volonté du débiteur. Dès lors, deux voies s’ouvrent au
créancier : soit anéantir le contrat, soit remédier à la défaillance du débiteur

13 R. CABRILLAC, Droit européen comparé des contrats, 2 ème éd., LGDJ, Paris, 2016, p.141,
n°226 ; P. ANCEL, Droit des obligations, 3ème éd., D., Paris, 2022, p.281
14 S. LEGAC-PECH, « Vers un droit des remèdes », LPA 4 déc. 2007, n°242, p.7
15 BGB, Art. 459 s.
16 Le code civil allemand a connu une importante réforme le 1 er janvier 2002, qui a redessiné

le droit allemand des obligations.


17 BGB, Art.280 al. 1.
18 PDEC, Art. 1 :301 (4).
19 CVIM, art. 45-62 ; 61-65 et 75-80

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
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en trouvant les moyens d’obtenir l’exécution de ses obligations. C’est la
deuxième hypothèse qui retiendra notre attention dans le cadre de cette étude,
ce qui justifie le choix porté sur la notion de « remède ».

7. Remède ou sanction ? Le terme « remède » fut introduit en droit


des contrats dans le système de la Common Law20. En droit français, si le
projet du 25 février 2015 en faisait référence21, l’ordonnance du 10 février
201622 lui a préféré le terme de « sanction »23. La notion de remède n’apparait
donc pas dans le texte français. En droit de l’espace OHADA, le législateur
semble avoir fait le choix de la neutralité. En effet, l’AUDCG n’utilise ni le
terme « remède » ni celui de « sanction ». Le même constat peut être fait pour
le code sénégalais des obligations civiles et commerciales24 (COCC) et le code
malien des obligations25 (RGO). Ce silence du droit de l’espace OHADA
pourrait traduire le désintérêt du législateur africain pour ce débat
terminologique.

8. Or, le choix entre ces deux notions n’est pas anodin, il donne une
certaine direction quant à la philosophie devant gouverner la riposte du
créancier face à la défaillance de son débiteur. À cette fin, le choix de la
terminologie doit être opéré selon que l’on cherche à punir le débiteur
défaillant, à satisfaire un créancier déçu ou à agir sur le contrat. Poursuit-on
la sauvegarde du contrat ou sa liquidation ?26 Dès lors, l’emploi des notions de
sanction ou remède comme synonymes ne semble pas approprié27, car ces
deux notions induisent des conséquences différentes.

20 S. LEGAC-PECH, op. cit., p.10 ; M.H NGUYEN, Vente internationale et droit vietnamien
de la vente, PUFR, Tours 2010, p.281
21 L’article 1217 in fine du projet disposait que « ‘’les remèdes’’ qui ne sont pas incompatibles

peuvent être cumulés »


22 L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du

régime général et de la preuve des obligations


23 M. MEKKI, « Le juge et les remèdes à l’inexécution du contrat », RDC Juin 2016 - n° 02 -

page 400.
24 Loi sénégalaise n° 63-62 du 10 Juillet 1963, Art. 97 et s.
25 Loi n°87-31/AN-RM du 29 Août 1987 portant Régime Général des Obligations, Art. 104 et

s.
26 S. LE GAC-PECH, « La direction de la sanction », LPA, n°48 du 9 mars 2009, p.3
27 S. LE GAC-PECH, op. cit, p.1

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
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9. La notion de « remède » n’est pas propre au droit, d’où la difficulté
de lui donner une définition juridique. En Français courant, elle désigne « ce
qui est employé pour atténuer ou guérir une souffrance morale, un mal, pour
résoudre une difficulté »28. D’après une certaine doctrine, « le remède suppose
la mise en œuvre de mécanismes permettant de préserver le lien contractuel en
corrigeant ses défauts »29. Il s’agit de l’ensemble des moyens mis en œuvre pour
corriger le manquement d’une partie à ses obligations en préservant le lien
contractuel. Une autre doctrine la définit comme « l’ensemble des
conséquences de l’inexécution envisagées du point de vue du créancier lésé. En
d’autres termes, il s’agit de l’ensemble des moyens tendant à assurer la
satisfaction du créancier en cas de refus d’exécution ou d’exécution défectueuse
du contrat »30. La notion de remède met donc en exergue la survivance de la
relation contractuelle. Elle vise le sauvetage du contrat et s’inscrit ainsi dans
la philosophie du favor contractus31. C’est dans cette logique que la résolution
(ou résiliation) du contrat, ne peut pas être considérée comme un « remède »
à la défaillance du débiteur, car elle traduit plutôt l’échec de la relation
contractuelle.

10. Quant à la notion de « sanction », le Petit Robert la définit comme


« une mesure répressive attachée à un ordre non exécuté, une défense
transgressée »32. Elle serait « un mal infligé à l’auteur d’un acte troublant l’ordre
social par le garant de cet ordre »33. La notion de sanction met ainsi en exergue
la répression du cocontractant défaillant, lequel doit être puni pour ne pas
avoir honoré son engagement. Ici, ce n’est plus la survivance du lien
contractuel qui préoccupe, la rupture de ce dernier est supposée déjà

28 A. REY (dir.), Le petit Robert, éd. 2017, p. 2181.


29 M. MEKKI, op.cit., p.400
30 S. LEGAC-PECH, « Vers un droit des remèdes », LPA 4 déc.2007, n°242, p.7
31 E. MONTCHO AG BASSA, « Le favor contractus et le droit OHADA », RTSJ, Juillet -

Décembre 2012 n° 0003, p.42 et s.


32 A. REY op.cit.
33 M. MORZANO, Le dictionnaire de la violence, 1 ère éd., Puf, Paris 2011, p.1013

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
5
consommée. Il s’agit plutôt de faire subir au contractant les conséquences de
son inexécution.

11. La philosophie moderne de l’inexécution contractuelle tend moins à


sanctionner le débiteur défaillant qu’à satisfaire les attentes légitimes des
parties contractantes, spécialement celles du créancier34. Il s'agit de relancer
la dynamique contractuelle par une adaptation du contrat aux circonstances
menaçant son exécution35. On assiste alors à l’émergence d’un nouvel ordre
contractuel dominé par les exigences de coopération36 et d’utilité du contrat.
Cette vision de la relation contractuelle avait déjà été défendue jadis par Emile
DURKHEIM37 et René DEMOGUE38. Ces auteurs présentent le contrat non plus
comme une rencontre de deux volontés antagonistes, mais comme une petite
société où chacun des contractants doit travailler dans un but commun.

12. Du fait de la conception très rigide qu’il avait de la force obligatoire


du contrat, le code civil français de 1804 considérait tout défaut d’exécution
comme une faute qu’il fallait sanctionner de la même façon que l’on
sanctionne la violation d’une loi. Dès lors, les moyens de riposte mis à la
disposition du créancier étaient emprunts d’une forte charge
sanctionnatrice39. C’est dans cette vision sanctionnatrice que s’était inscrite la
jurisprudence classique. On se souvient à cet effet de l’interdiction formelle
faite aux juges de modifier le contrat pour imprévision, condamnant ainsi le
débiteur à s’exécuter à sa ruine40, ou de la démolition et reconstruction d’un
édifice ordonnée par la cour de cassation française pour un défaut de

34 R. CABRILLAC, Droit européen comparé des contrats, op. cit., p.141, n°227
35 E. MONTCHO AG BASSA, « Le favor contractus et le droit OHADA », RTSJ, Juillet -
Décembre 2012 n° 0003, p.45
36 J.C. JAMES, « L’OHADA et la construction d’un espace francophone », in Mélanges en

l’honneur du Doyen Bernard GROSS, Presses Universitaires de Nancy, 2009, p.570


37 E. DURKHEIM, De la division du travail social, PUF, Paris, 1998
38 R. DEMOGUE, Traité des obligations en général, t. 6. Paris, 1911
39 C. RIGALLE-DUMETZ, La résolution partielle du contrat, D., Paris, 2003, p.103
40 Arrêt canal de CRAPONE, Cass., civ., 3 mars 1876, GACIV, 12ème éd., 2008, p.183 ;

D.1876.1.193, note GIBOULO


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
6
conformité de 0,3341 centimètre et même de 0,5 centimètre42 par rapport aux
prévisions contractuelles. Une conception aussi rigide de la force obligatoire
du contrat n’apparait plus en adéquation avec la réalité économique des
relations contractuelles modernes, on assiste alors à un affaiblissement43 de
ce principe issu de la vision contractuelle du code civil ancien44.

13. Dans le même sens, le professeur ANCEL invite à une redéfinition


de la force obligatoire du contrat laquelle selon lui, « ne doit pas être considérée
comme dogme, comme une fin en soi. Ce n’est qu’un moyen, un instrument en
vue d’atteindre un certain équilibre social »45. Cette évolution implique un recul
de la conception moraliste du contrat, défendue par le législateur français de
1804 vers une conception économique. Ceci induit un changement au niveau
de l’orientation de la riposte à une inexécution contractuelle. La vision
sanctionnatrice des moyens de riposte cède peu à peu la place à une vision
« remédiale ».

14. Le contentieux de l’inexécution est ainsi révélateur d’une approche


plus sociologique du contrat en droits OHADA et français. Les parties
contractantes sont invitées à adapter le calendrier et les prévisions
contractuelles selon les besoins, ou le cours des événements et à adopter des
comportements en fonction des circonstances46. Ceci implique une restriction
des intérêts personnels au profit des intérêts profitables à toutes les parties.
Telle est l’orientation imposée par le choix de la terminologie de « remède »
dans le cadre de cette étude.

41 Cass. civ. 3e, 11 mai 2005, n° 03-21.136 : Bull. civ. III, n°103
42 Cass. civ. 3e, 20 mars 2002, n° 00-16.015, D. 2002, p. 2075, note C. Caron, p. 2507, obs.
B. MALLET-BRICOUT; RTD civ. 2002, p. 333, obs. T. Revet
43 C. MONKAM, « Réflexion sur le fondement de l’affaiblissement de la force obligatoire du

contrat en droit OHADA », Rev. dr. unif., Vol. 24, 2019, p.581
44 Le code civil « ancien » désigne le code civil français applicable dans certaines anciennes

colonies françaises.
45 P. ANCEL, « La force obligatoire. Jusqu’où faut-il la défendre ? » in La nouvelle crise du

contrat, sous la dir. De C. JAMIN et D. MAZEAUD, D.2003, p.164-165


46 M. MANDARD, « Théorie du contrat relationnel et gouvernance des relations interentreprises.

Autour de Ian MacNeil », in Annales des Mines – Gérer et comprendre, vol. 109, n°3, 2012, pp.
13-22
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
7
15. Ce choix vise à démontrer que la conception moraliste qui a jadis
gouverné la théorie du contrat en France et dans les systèmes fortement
influencés par le droit français, comme le système de l’OHADA, et qui imposait
une riposte violente contre une inexécution contractuelle, a connu un recul
considérable au profit d’une conception plus économique et plus flexible. On
assite donc à un certain protectionnisme du contrat qui garantit l’efficacité de
ce lien juridique. La force obligatoire et d’autres principes fondamentaux sont
malmenés en vue de mieux permettre au contrat de réaliser l’opération
économique qui le sous-tend. La démonstration que nous envisageons dans le
cadre de cette thèse se fera à travers une approche comparative des deux
systèmes juridiques qu’il convient de présenter.

16. Présentation des droits OHADA et français des contrats. Les


règles régissant le contrat dans les deux systèmes ne sont pas exclusivement
issues du droit commun47, mais aussi du droit spécial à l’intérieur duquel il
faut inclure le droit communautaire48. En effet, résultat d’une longue évolution
menée par la jurisprudence et la doctrine, le droit français des contrats a
connu une cure de jouvence avec l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016
portant réforme du droit des contrats et du régime général de la preuve des
obligations. Cette réforme met fin à 212 ans d’application des règles du Code
civil de 1804, assez peu retouchées durant tout ce temps49. Il s’agit pour les
auteurs de cette réforme de moderniser le droit des contrats en l’adaptant aux
exigences actuelles50.

17. Toutefois, réforme et innovation ne sont pas à confondre. A plusieurs


égards, le droit spécial avait déjà fait évoluer la conception du contrat
devançant ainsi le droit commun qui, en 2016, n’a fait que consacrer plusieurs

47 Code civil de 2016 en France et le code civil ancien dans sa version d’avant 1960 dans la
majorité des Etat membre de l’OHADA.
48 Droit CEMAC et UEMOA pour l’OHADA et droit de l’union européenne pour la France
49 D. MAINGUY (dir.), Le nouveau droit français des contrats, du régime général et de la preuve

des obligations (après l’ordonnance du 10 février 2016), UMR-CNRS 5815 « Dynamiques du


droit », Montpelier 2016, p.7
50 Rapport remis au Président de la République, J. O. France, 11 février 2016, texte 25.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
8
de ces évolutions qui traduisent une vision plus flexible du contrat et exigent
une coopération entre les parties. Cette influence du droit spécial sur le droit
commun a été beaucoup plus menée par le droit de la consommation, le droit
de la distribution et le droit des entreprises en difficulté51. Ces droits spéciaux
réservent au contrat un traitement qui déroge à plusieurs principes de droit
commun. Le droit des entreprises en difficulté, par exemple, fait primer
l’intérêt économique du débiteur sur les principes de liberté contractuelle et
de force obligatoire, en imposant une modification du contrat en cas de
difficulté d’exécution. Cette vision du contrat comme une valeur plutôt qu’un
lien d’obligation entre deux individus a pu influencer la consécration en droit
commun de la théorie de l’imprévision52.

18. Parallèlement, les pays de l’OHADA restent pour la plupart régis par
le code civil français de 1804 appelé code civil ancien. En effet, au sortir des
indépendances, les premières constitutions de certaines anciennes colonies
prévoyaient que le droit français devait rester en vigueur dans ces nouveaux
Etats dans les domaines où ceux-ci ne s’étaient pas encore dotés de leur
propre législation. C’est ce que disposait par exemple l’article 83 de la
constitution gabonaise du 14 novembre 1960. Sur ce fondement, le code civil
français (dans sa version d’avant 1960) reste en vigueur jusqu’à ce jour dans
la majorité des anciennes colonies françaises membres de l’OHADA, à
l’exception du Mali et du Sénégal. Dès lors, le droit commun des contrats dans
l’espace OHADA est constitué de ces trois textes à savoir : le code civil ancien,
le COCC et le RGO.

51N. BORGA, « L'influence du droit des entreprises en difficulté sur le droit des obligations :
Droit dérogatoire puis droit précurseur », in F. MACORIG-VENIER (dir.), Le droit des
entreprises en difficulté après 30 ans. Droit dérogatoire, précurseur ou révélateur ? Toulouse,
Presses de l’Université Toulouse 1 Capitole, coll. Actes de colloques de l’IFR, 2017, p. 205 ;
Ph. ROUSSEL GALL, « Brèves observations sur la réforme du droit des contrats et les
procédures collectives », DPDE, mars 2016, p.2

52N. BORGA, « L'influence du droit des entreprises en difficulté sur le droit des obligations :
Droit dérogatoire puis droit précurseur », op. cit., p. 199
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
9
19. Par ailleurs, pour s’arrimer aux exigences de la vie économique
moderne, les Etats membres de l’OHADA ont entrepris depuis 2002
d’harmoniser le droit des contrats en vue de parvenir à un droit commun.
Cette entreprise, qui peine à aboutir, aurait pu permettre de remédier à la
difficulté liée à l’absence d’un régime général des contrats en droit de l’OHADA.
Toutefois, à côté du droit commun régi par les trois textes sus cités, les Etats
de l’OHADA ont développé un droit spécial des contrats qui se trouve éparpillé
dans divers Actes uniformes53, dont le principal est l’AUDCG54. Or, ces
différents textes, contrairement à l’ordonnance française sus citée, édictent
un droit des contrats spéciaux. Ces contrats spéciaux régis par les Actes
uniformes peuvent être classés en trois catégories55 : les contrats
structurels56, les contrats d’intermédiaires et les opérations contractuelles
ponctuelles57. Mais, dans le cadre de cette étude, l’accent sera souvent
beaucoup plus mis sur la vente commerciale. Un examen minutieux du régime
juridique de ce contrat spécial permet de dégager une théorie générale du
contrat et surtout, une théorie générale des remèdes à l’inexécution du
contrat, objet de la présente thèse. Celle-ci n’a pas la prétention d’être
pionnière d’une telle entreprise, car plusieurs études pertinentes ont déjà été
menées sur la question, aussi bien en droit OHADA qu’en droit français, dont
certaines méritent d’être exposées.

20. Revue de littérature. L’inexécution du contrat a fait l’objet de


plusieurs études tant en droit français qu’en droit OHADA. Mais, les études
portant sur les « remèdes à l’inexécution » sont très rares en droit OHADA.

53 Les Actes uniformes sont des actes pris pour l’adoption de règles commune à tous les Etats-
Parties au traité relatif à l’harmonisation en Afrique du droit des affaires. Ils tirent leur valeur
juridique du Traité qui lui-même tire sa valeur juridique des constitutions des Etats-Parties
et doivent de ce fait être en tout point conforme à ces textes. Une fois adoptés par le Conseil
des ministres, les Actes uniformes sont directement applicables dans tous les Etats membres
où ils se placent au-dessus des lois et règlements.
54 L’Acte uniforme sur le droit commercial général du 15 décembre 2010.
55 J. MESTRE, « Regards contractuels sur l’OHADA », Actes du colloque sur la sécurisation

des investissements des entreprises en Afrique francophone : le Droit OHADA, organisé par
le Centre de droit économique de l’Université Paul-Cézanne d’Aix-en-Provence, le 20 mars
2009 ; Rev. LAMY droit civil, n°67, Janvier 2010, p.72.
56 Vente du fonds de commerce, location gérance du fonds de commerce et le bail commercial.
57 La vente commerciale et Le transport des marchandises par route.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
10
Dans une étude consacrée au contentieux de la vente commerciale, le
professeur Grégoire JIOGUE aborde la notion de « remèdes » à l’inexécution
du contrat de vente58. Il les classe ainsi en deux catégories, d’une part, les
remèdes en cas d’inexécution des obligations du vendeur. Au nombre de ceux-
ci, il y’a l’exception d’inexécution, le remplacement de la marchandise, la mise
en conformité, la réfaction du prix et le refus de prendre livraison. D’autre
part, l’auteur examine les remèdes en cas d’inexécution des obligations de
l’acheteur. Il s’agit de l’exception d’inexécution et l’octroi d’un délai
supplémentaire pour le paiement du prix. Tous ces mécanismes visent à
corriger la défaillance d’un cocontractant en préservant la relation
contractuelle. C’est d’ailleurs pour cette raison que, lorsqu’il doit traiter de la
résolution du contrat, l’auteur utilise le terme « sanction »59.

21. D’autres auteurs ont mené des études sur les remèdes à
l’inexécution du contrat de vente en droit OHADA sans pour autant les
nommer comme tels. Ces auteurs ont préféré le terme « sanction ». Ainsi, dans
son article consacré à « la sanction de l’inexécution de la vente commerciale en
droit uniforme africain », le Professeur NSIE étudie les mêmes remèdes cités
supra, mais sous le vocable de « sanctions favorisant le maintien du contrat »60.
Il démontre ainsi que le droit OHADA, en ce qu’il poursuit un but économique,
milite pour le maintien du contrat à chaque fois qu’en dépit de la défaillance
d’une partie, il conserve une utilité économique61, c'est-à-dire à chaque fois
que l’opération économique qu’il sous-tend est viable. C’est aussi ce que
démontre le professeur Jean-Claude JAMES dans son étude consacrée à la
vente commerciale OHADA62.

58 G. JIOGUE, « La vente commerciale en droit uniforme OHADA », in encyclopédie OHADA,


pp.2104-2135 ;
59 G. JIOGUE, op. cit, p. 2126, n°91 et s.
60 E. NSIE « La sanction de l’inexécution de la vente commerciale en droit uniforme africain »,

AJP, Rev. CERDIP, Vol.2, n°1 Janvier – Juin 2003, p.19


61 E. NSIE, op.cit, p.5, n°3
62 J.C. JAMES, « La vente commerciale OHADA, précurseur d’un droit harmonisé des

contrats ? », actes du colloque international de Libreville sur « Les pratiques contractuelles


d’affaires et les processus d’harmonisation dans les espaces régionaux » du 26 au 28 octobre
2011, publication de l’ERSUMA, 1ère éd., juin 2012, p.44, n°50 et s
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
11
22. L’auteur démontre que le législateur de l’OHADA privilégie, en cas
d’inexécution du contrat, les mécanismes qui permettent de corriger cette
inexécution en préservant le lien contractuel. C’est cette philosophie qu’Éric
MONTCHO AGBASSA examine sous le vocable de Favor contractus63. Il
soutient à son tour que le droit OHADA de la vente commerciale ne conçoit
pas le contrat comme « une rencontre de deux volontés antagonistes qui tentent
de l’emporter l’une sur l’autre », il s’inscrit plutôt dans la philosophie du favor
contractus, qui est « l’ensemble de solutions permettant de sauver le contrat
utile ». C’est d’ailleurs cette notion de favor contractus qui, comme le
démontrent les professeurs DARANKOUM64 et Marcel FONTAINE65, gouverne
l’Avant-projet d’Acte uniforme sur le droit des contrats. Le droit OHADA
appréhende ainsi le contrat dans sa dimension économique.

23. Par ailleurs, DOGUE Karel66 montre dans sa thèse que l’Afrique étant
plus collectiviste qu’individualiste, le contrat doit être traité en considérant
ses conséquences sur la collectivité et non ce qu’il produit entre les seuls
contractants. C’est donc dire que le traitement de l’inexécution du contrat doit
tenir compte des conséquences qu’aura une disparition du contrat sur la
communauté toute entière.

24. Dans une étude plus récente, consacrée aux « mécanismes de


justice privée dans la vente commerciale OHADA », le professeur Komi WOLOU
fait lui aussi un examen des remèdes à l’inexécution du contrat, mais en
focalisant son étude sur les remèdes de justice privée, c'est-à-dire ceux dont
« la mise en œuvre est abandonnée, dans le cadre d’un contrat

63 E. MONTCHO AG BASSA, « Le favor contractus et le droit OHADA » op. cit., p.42 et s


64 E. S. DARANKOUM, « La protection du contrat dans l’avant-projet d’Acte uniforme OHADA
sur le droit des contrats : conclusion, exécution et remèdes en cas d’inexécution » in Rev. dr.
unif. 2008
65 M. FONTAINE, « L’avant-projet d’Acte uniforme OHADA sur le droit des contrats : vue

d’ensemble », Rapport présenté au Colloque sur “L’harmonisation du droit OHADA des


contrats” tenu à Ouagadougou (Burkina Faso) du 15 au 17 novembre 2007, Rev. dr. unif.
2008, p. 203 et s
66 K. DOGUE, Jalons pour un cadre de référence OHADA en droit des contrats, Université de

Montréal, juillet 2013


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
12
synallagmatique, à la seule volonté du créancier sans recours préalable au juge
ni à l’accord de l’autre partie »67. Il en est ainsi, selon l’auteur, de la résolution
unilatérale, du droit de rétention, du laissé pour compte et de la réfaction
unilatérale du contrat. Tous ces mécanismes auraient en commun « une
décision unilatérale immédiatement exécutée par la partie qui en prend
l’initiative ». L’auteur démontre dans son étude que le législateur de l’OHADA
accorde une faveur particulière à ces mécanismes, tout en appelant à la
responsabilité des parties dans leur mise en œuvre. Toutes ces études font
une analyse du régime juridique des remèdes à l’inexécution du contrat en
droit OHADA.

25. En droit français, dans un ouvrage récent consacré au droit des


contrats, Dimitri HOUTCIEFF68 fait observer que le code civil dans sa version
de 1804 ne donnait pas une vision claire du régime de l’inexécution du
contrat. L’ordonnance du 10 février 2016 est venue palier cette insuffisance
en consacrant une section à « l’inexécution du contrat ». Le nouveau code civil
propose une vision plus claire des conséquences de l’inexécution. A cet effet,
l’article 1217 dudit code prévoit désormais cinq (5) conséquences à savoir :
l’exception d’inexécution, l’exécution forcée en nature, la réduction du prix, la
résolution du contrat et les dommages intérêts. L’auteur regrette par ailleurs
l’abandon du terme « remède » qui avait été suggéré par une doctrine69,
craignant sans doute qu’il lui soit reproché d’avoir rendu un trop vibrant
hommage au droit anglais70. Ensuite, l’auteur mène une étude pertinente du
régime juridique de chaque « sanction » désormais prévue par le nouveau droit
français. Il les présente en deux groupes, « les sanctions tendant à l’exécution
du contrat » d’un côté et celles tendant à son anéantissement de l’autre côté.

67 K. WOLOU, « Les mécanismes de justice privée dans la vente commerciale OHADA », in,
Mélanges en l’honneur du professeur F.M. SAWADOGO, Les horizons du droit OHADA, 2018,
p.571 et s.
68 D. HOUTCIEFF, Droit des contrats, à jour de l’ordonnance n°2016-131 portant réforme du

droit des contrats, 2ème éd., Larcier


69 D. TALLON, « L’inexécution du contrat : pour une autre présentation », RTD Civ., 1994, p.22
70 D. HOUTCIEFF, op. cit., p.483

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
13
Enfin, dans son étude, l’auteur relève une déjudiciarisation des sanctions de
l’inexécution du contrat.

26. De son côté, MUSTAPHA MEKKI71 observe qu’au stade de


l’inexécution et de ses remèdes, les contractants se voient accorder un rôle
plus important, le contrat étant plus que jamais la chose des parties. Le droit
français, selon l’auteur, a une double perception de l’inexécution. Tout
d’abord, elle constitue un état contre lequel on va tenter d’apporter des
remèdes plus que des sanctions. L’évolution de la jurisprudence est en ce sens
et l’ordonnance du 10 février 2016 est dans cet esprit. Ensuite, elle est perçue
comme un risque qu’il faut gérer. Les auteurs de l’ordonnance ont fait le choix
de ne plus réduire la réaction à l’inexécution du contrat à une sanction mais
encouragent aussi la mise en œuvre d’un ensemble de remèdes.

27. Abondant dans le même sens, Yves FOUCHET72 souligne que l’une
des grandes avancées de la réforme du droit français des contrats réside dans
la mise à la disposition du créancier de l’obligation non ou mal exécutée une
boite à outil lui permettant de choisir le « remède » qu’il estime être le plus
efficace pour remédier à sa situation. Dans ce sens, des pouvoirs unilatéraux
lui sont conférés dans un souci d’efficacité économique et de rapidité, pour
débloquer certaines situations sans avoir recours au juge. Ces idées de
déjudiciarisation et d’unilatéralisme qui apparaissent dans l’analyse des
remèdes à l’inexécution du contrat en droit français sont partagées par
d’autres auteurs tels que Philippe DUPICHOT73, Hélène BOUCARD74 et
Saïdanis HARIZ75.

71 M. MEKKI, « Le juge et les remèdes à l’inexécution du contrat » RDC n° 02 – juin 2016, p.


400
72 Y. FOUCHET, « Le projet d’ordonnance portant réforme du droit des contrats : réponse de la

CCI Paris Ile-de-France à la consultation ouverte par la chancellerie », 7 mai 2015 (Rapport)
73 PH. DUPICHOT, « Regards (bienveillants) sur le projet de réforme du droit des contrats »,

Droit et Patrimoine n°247, mai 2015, p. 32 et s


74 H. BOCARD, « le nouveau régime de l’inexécution du contrat » in La réforme du droit des

obligations en France, 5ème journées franco-allemandes, Droit comparé et européen Volume


20, p.153 et s
75 S. HARIZ, La rupture du contrat, Th. Université de TOULLON 2016.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
14
28. Par ailleurs, dans une thèse consacrée aux « remèdes à l’inexécution
du contrat », Paul GROSSER76 fait une étude des différents remèdes en
élaborant une classification fondée sur la nature et la fonction précise de
chacun d’entre eux. Il démontre ainsi que les remèdes à l’inexécution du
contrat sont orientés vers deux objectifs essentiels. Certains ont pour fonction
de régler le sort du contrat inexécuté, c'est-à-dire de remédier au déséquilibre
créé par cette inexécution. D’autres permettent de régler le sort du débiteur
défaillant, c'est-à-dire de déterminer les conséquences de sa défaillance. De
son côté, Catherine POPINEAU-DEHAULLON77 focalise son étude sur les
remèdes de justice privée en comparant leur régime en droit français à celui
des autres systèmes en l’occurrence la common law et le droit allemand.

29. Objectifs de la recherche. Tous les auteurs cités ci-dessus ont


centré leurs travaux sur un examen du régime juridique des différents
remèdes à l’inexécution du contrat. L’analyse que nous nous proposons de
faire aura pour finalité de voir l’importance que les systèmes juridiques objet
de notre étude, accordent au lien contractuel ; comment le protègent-ils ? En
plus, au moment où le droit OHADA cherche à se doter d’un Acte uniforme
portant régime général des obligations dans les Etats membres, l’étude
comparative que nous envisageons doit nous permettre à terme de formuler
certaines propositions pouvant aider à la rédaction du futur Acte uniforme.

30. Intérêt et question de recherche. Ce que les parties recherchent


en contractant, c’est l’exécution du contrat. De ce fait, le meilleur service que
le législateur puisse leur rendre, c’est de mettre en place un dispositif
permettant de parvenir à cette exécution même lorsque le débiteur est
défaillant78. Mais il arrive que l’exécution du contrat ne soit plus appropriée
pour la préservation des intérêts des parties, on procède donc à la résolution

76 P. GROSSER, Les remèdes à l’inexécution du contrat : essai de classification, sous la


direction de Jacques GHESTIN, Paris 1, 2000.
77 C. POPINEAU-DEHAULLON, Les remèdes de justice privée à l’inexécution du contrat. Etude

comparative, LGDJ, Paris, 2008.


78 B. FAGES, Droit des obligations, 8 ème éd., LGDJ, paris, 2018, p.245, n°283

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
15
du contrat. Il y’a donc en cas d’inexécution du contrat, des systèmes
juridiques qui, sur le fondement de la force obligatoire des conventions,
recherchent à tout prix à parvenir à l’exécution du contrat. Alors que d’autres,
se fondant sur la recherche d’un certain équilibre contractuel, font de
l’inexécution un motif suffisant pour faire disparaitre le contrat. Au plan
théorique, il sera question de voir la conception du contrat dans les deux
systèmes juridiques, l’importance qu’ils accordent au lien contractuel.

31. De plus, comme indiqué plus haut, l’avant-projet d’Acte uniforme


OHADA sur le droit des contrats a été abandonné pour diverses raisons. La
principale critique faite à ce texte largement inspiré des Principes d’UNIDROIT
est qu’il s’écarte trop de la tradition juridique française. Or, la France s’est en
2016, dotée d’un nouveau droit des contrats fortement influencé par des
modèles étrangers, dont ces Principes d’UNIDROIT. Une étude comparative
entre le droit de l’OHADA et le droit français sera l’occasion de voir si ce souci
de rester encré dans la tradition juridique française, telle qu’elle résulte des
codes civils en vigueur dans les Etats membres, conserve son intérêt après la
réforme du droit français des contrats.

32. Enfin, face à de nombreux échanges commerciaux entre la France


et les Etats membres de l’OHADA, qui nécessitent la conclusion de contrats,
le contractant français a besoin de mieux comprendre le système juridique du
pays du cocontractant et vice-versa, afin de prévoir les différentes
conséquences, notamment en cas d'inexécution du contrat.

33. Au regard de ce qui précède, il convient de s’interroger sur les


alternatives offertes par les deux systèmes juridiques aux contractants pour
contourner la résolution d’un contrat inexécuté. En d’autres termes, le
créancier d’une obligation contractuelle peut-il trouver dans les systèmes
juridiques OHADA et français de quoi l’assurer qu’il obtiendra du débiteur la
prestation promise ? Quels sont les mécanismes mis à la disposition des
parties dans les deux systèmes juridiques pour éviter la résolution d’un

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
16
contrat inexécuté ? Ces mécanismes assurent-ils au contrat une protection
suffisante contre toute forme de rupture pour inexécution ?

34. Hypothèse et annonce du plan. La réaction contre l’inexécution


contractuelle dépend de la situation économique et financière du débiteur. Les
remèdes varient selon que ce dernier est in bonis, c’est-à-dire qu’il est solvable,
capable de s’exécuter ou selon qu’il fait l’objet d’une procédure collective. Dans
les deux cas, le but est de sauvegarder coûte que vaille le contrat en raison de
son utilité économique ou sociale pour les parties. Ce qui conduit à se défaire
de l’idée originelle de sanction du débiteur dont l’intérêt doit aussi être pris en
compte par le créancier.

35. Ainsi, en droit de l’OHADA comme en France, la résolution du


contrat n’est pas inéluctable en cas d’inexécution. Les contractants disposent
de plusieurs alternatives dont la mise en œuvre varie selon la situation du
débiteur. Certains sont mis à la disposition du créancier pour riposter contre
l’inexécution de son débiteur lorsque celui-ci est in bonis. En revanche,
lorsque le débiteur connait des difficultés pouvant justifier l’ouverture d’une
procédure collective, d’autres remèdes sont mis à la disposition de ce dernier,
en vue de préserver son activité et de lui permettre d’honorer ses engagements
contractuels. Nous avons donc des remèdes permettant au créancier de réagir
contre son débiteur in bonis, et les remèdes permettant au débiteur en
difficulté d’organiser au mieux le respect de ses engagements contractuels.

36. Aussi convient-ils d’examiner d’une part les remèdes inhérents au


droit des contrats (première partie), et d’autre part, ceux aménagés par le
droit des entreprises en difficulté (deuxième partie).

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
17
Première partie :
LES REMEDES INHERENTS AU DROIT DES
CONTRATS

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
18
37. Influencé par le code civil de 1804, le droit OHADA des contrats met
à la disposition du créancier, à quelques exceptions près, les mêmes moyens
de riposte que le droit français lorsque le débiteur est in bonis. Mais, ces
moyens sont-ils suffisants pour garantir l’efficacité d’un contrat lorsque l’une
des parties peine à honorer ses engagements ?

38. En effet, l’efficacité du contrat passe par son exécution effective.


Cette exécution peut s’obtenir de deux façons. Elle peut d’abord être
volontaire, c’est-à-dire que le cocontractant défaillant se ressaisit et décide
d’exécuter ses engagements contractuels. Les moyens mis à la disposition des
contractants pour agir contre une inexécution contractuelle dans les deux
systèmes juridiques accordent une place prioritaire à cette voie, car elle
permet la poursuite des bonnes relations d’affaires entre les contractants.
Toutefois, il arrive qu’en dépit des dispositions prises pour inciter le débiteur
à s’exécuter volontairement, ce dernier ne parvient pas à exécuter le contrat.
Dès lors, les droits OHADA et français offrent au créancier une palette de
mesures contraignantes qu’il peut mettre en œuvre pour obtenir de son
débiteur le respect de ses engagements contractuels.

39. Au regard de ce qui précède, il apparaît que l’inexécution du contrat


peut être surmontée d’abord en incitant le débiteur à s’exécuter (Titre 1),
lorsque les moyens d’incitation n’ont pas pu aboutir à une exécution
volontaire, le débiteur peut ensuite être contraint à s’exécuter (Titre 2).

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
19
Titre 1 : Le débiteur incité à s’exécuter

Titre 1 :
Le débiteur incité à s’exécuter

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
20
40. L’exécution volontaire est le moyen par excellence de la réalisation
des engagements contractuels. Elle devrait en principe être spontanée, c’est-
à dire que le débiteur s’exécute, parce que le contrat lui est profitable79. Mais
dans la pratique, l’exécution volontaire n’est pas toujours spontanée.
D’ailleurs, l’inexécution est ici entendue comme l’échec de l’exécution
spontanée. Lorsque le débiteur ne s’est pas exécuté volontairement, et que sa
défaillance n’est pas irrémédiable, les droits OHADA et français mettent à la
disposition du créancier une série de mécanismes permettant d’inciter ce
dernier à s’exécuter.

41. Le débiteur peut d’abord être incité par des moyens non
comminatoires80 (chapitre 1). Dans ce cas, le créancier sera invité à être
solidaire de son cocontractant en coopérant avec lui pour sauver le contrat.
Par ailleurs, lorsque les moyens pacifiques n’ont pas pu amener le débiteur à
s’exécuter, une certaine pression peut être exercée sur lui pour le pousser à
une exécution volontaire résignée. Ces moyens fondés sur la menace sont dits
« comminatoires » (chapitre 2).

79 P. PUIG, « Les techniques de préservation de l'exécution en nature », RDC 2005, n°1, p.85
80 L’expression « comminatoire » est empruntée à certains auteurs tels : Ch. MBA OWONO
« L’exception d’inexécution dans la vente commerciale en droit uniforme OHADA », Revue du
CERDIP, vol.2, n°2, juillet-décembre 2006 ; P. PUIG, « Les techniques de préservation de
l'exécution en nature », op.cit., p.90
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
21
Chapitre 1 : Le recours aux mécanismes contractuels
non comminatoires

42. Il s’agit des moyens qui n’impliquent pas le recours à la menace,


mais qui visent au contraire à préserver les bons rapports entre les
cocontractants nonobstant la défaillance du débiteur. Pour ce faire, les deux
parties sont amenées à collaborer pour assurer la préservation du lien
contractuel. Du point de vue du créancier, il est invité à faire preuve de
solidarité, de tolérance à l’égard de son débiteur (Section 1). Du point de vue
du débiteur, l’indulgence du créancier devrait l’inciter à corriger sa défaillance
(Section 2).

Section 1 : La tolérance du créancier à l’égard du débiteur


défaillant

43. En cas d’inexécution contractuelle, la bonne foi impose au créancier


de ne pas employer les moyens qui peuvent entrainer la rupture du contrat,
si celui-ci peut encore être sauvé. Il doit se montrer tolérant. Cette tolérance
peut consister à concéder au débiteur un report de l’échéance contractuelle
(paragraphe 1) ou à accepter une exécution défectueuse en contrepartie d’une
compensation financière (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Le report de l’échéance contractuelle

44. Le principe de la force obligatoire exige que le contrat soit respecté


à la lettre81 tant par les parties que par le juge. Ce respect à la lettre du contrat
implique, entre autres, que les obligations des parties soient exécutées à la
date prévue82. De ce fait, le non-respect de la date prévue constitue, en
principe, une inexécution pouvant donner lieu à une rupture du contrat.
Toutefois, dans le but de permettre à la relation contractuelle de se poursuivre

81 B. FAGES, Droit des obligations, 8ème éd., L.G.D.J, Paris, 2018, p.227, n°257
82 A. BENABENT, Droit civil. Obligations, 18ème éd., Montchrestien Paris, 2019, p.270, n°323
et s.
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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nonobstant le non-respect par le débiteur de l’échéance convenue, les droits
français et de l’OHADA permettent d’accorder au cocontractant défaillant une
seconde chance pour s’exécuter. Celle-ci va consister en un report de
l’échéance de son exécution, en vue de lui donner plus temps. Ce temps peut
lui être octroyé dans le cadre d’un délai supplémentaire (A), ou d’une mise en
demeure (B).

A/ L’octroi d’un délai supplémentaire au débiteur

45. Le principe d’accorder au débiteur un délai supplémentaire pour


s’exécuter tire son origine du droit allemand, à travers le mécanisme de
Nachfrist83. Il a ensuite été repris par le droit du commerce international
notamment la convention de Vienne sur la vente internationale de
marchandises84 et les principes d’UNIDROIT relatifs aux contrats de
commerce international85. Ce mécanisme constitue une manifestation du
devoir de coopération et témoigne de la détermination des contractants à
s’engager dans une œuvre plus ou moins commune86 qu’est le contrat. En
France comme en droit de l’OHADA, il peut être judiciaire ou extrajudiciaire.

46. Le délai judiciaire. Il n’appartient en principe pas au juge de


modifier les termes d’un contrat librement conclu par les parties, le principe
de la force obligatoire des contrats le lui interdit87. Pourtant, les droits OHADA
et français lui reconnaissent le pouvoir de faire preuve d’indulgence envers un
débiteur qui, à l’échéance, ne parvient pas à exécuter ses obligations, en lui
accordant un délai supplémentaire. Encore appelé délai de grâce, ce délai
judiciaire est défini comme « le délai supplémentaire raisonnable que le juge

83 E.S. DARANKOUM, « La pérennité du lien contractuel dans la vente commerciale OHADA :


analyse et rédaction des clauses », Penant 2005, vol. 115, n°853, p.500
84 CVIM, Art. 47
85 UNIDROIT, Art. 7.1.5
86 F. DIESSE, « Le devoir de coopération comme principe directeur du contrat », Arch. phil. droit

n°43 1999, p. 265


87 F. TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil. Les obligations, 10 ème éd., D., Paris,

2009, p.1193
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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23
peut, par un adoucissement de la rigueur du terme, accorder au débiteur pour
s’exécuter, compte tenu de sa situation économique et de sa position
personnelle »88. C’est une faculté exceptionnelle qui permet à l’autorité
judiciaire de modifier l’échéance d’une obligation déjà exigible sans le
consentement du créancier89. Cette mesure exceptionnelle tient à l’échec le
caractère contraignant de l’obligation90 et permet au juge saisi d’une demande
en résolution du contrat par un créancier victime d’une inexécution, d’opérer
un maintien forcé dudit contrat.

47. En droit commun de l’OHADA, l’article 1244 du code civil ancien


dispose en son alinéa 2 que les juges peuvent, compte tenu des circonstances
que traverse le débiteur, lui accorder un délai supplémentaire n’excédant pas
un an, pour le paiement de sa créance. Ce principe est repris par le code
malien des obligations, dont l'article 198 précise les conditions d'octroi de ce
délai à savoir : la bonne foi du débiteur et sa situation économique. On en
déduit que pour bénéficier d’un délai de grâce, le débiteur ne doit pas s’être
volontairement mis dans l’incapacité d’exécuter l’obligation, son inexécution
ne doit pas être volontaire. En plus, il doit se trouver dans une situation
économique difficile91. L’appréciation des difficultés du débiteur relève de la
compétence exclusive du juge qui en apprécie souverainement la nature et la
gravité92.

48. En France, à l’instar du droit de l’OHADA, l’article 1343-5 du


code civil reconnait aussi au juge le pouvoir d’accorder au débiteur un délai
de grâce pour s’exécuter. Mais, contrairement au droit africain, le droit

88 G. CORNU, Vocabulaire juridique, 12ème éd., PUF, Paris 2018, p.687


89 Ch. MBA OWONO, « L’appropriation par le droit OHADA des évolutions du droit français en

matière de délai de grâce », Rev. CERDIP, vol.3, n°1 et 2, Janvier-Décembre 2008, p.24 ; J.
FRANCOIS, Traité de droit civil, t.4. Les obligations, régime générale, 4 ème éd., économica,
Paris, 2017, p.345, n°355.
90 J. FRANCOIS, op. cit. p.345
91 TPI Lomé, ch. Com et civ, jugement n°1183 du 21 mai 2010, LASMOTHEY D.K. Prosper

c/Succession AKAKPO, Ohadata J-11-91.


92 TPI Lomé, ch., civ. et com., jugement n°2915/09 du 06 octobre 2009, JUADJOVI Alexandre

c/AMAIZO-FUMEY virginie, Ohadata J-11-07, Obs. J. ISSA SAYEGH.


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
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français prévoit une durée beaucoup longue (2 ans), ce qui donne plus de
chance au débiteur de parvenir à l’exécution effective de ses obligations.

49. Dans les deux systèmes juridiques, le pouvoir du juge en matière


d’octroi des délais de grâce ne concerne que l’obligation de paiement d’une
somme d’argent, sauf lorsque ce paiement porte sur une dette fiscale93 ou une
dette d’aliment94. En droit spécial, le législateur de l’OHADA exclut cette
faculté lorsqu’il s’agit des dettes d’aliments ou des dettes cambiaires95.
Toutefois, on pourrait étendre ce délai à des obligations autres que de somme
d’argent. Le juge peut par exemple accorder un délai supplémentaire à un
entrepreneur qui n’a pas pu livrer l’ouvrage à la date convenue avec son
cocontractant.

50. Le délai extrajudiciaire. A côté du délai de grâce accordé par le


juge et qui s’impose au créancier, le droit spécial des contrats reconnait à ce
dernier le pouvoir d’accorder à son débiteur qui en a besoin, un temps
supplémentaire pour honorer son engagement contractuel. En droit OHADA,
l’AUDCG le prévoit tant pour le vendeur96 que pour l’acheteur97. Il en résulte
que, le créancier d’une obligation non exécutée peut impartir à son débiteur
un délai supplémentaire pour lui permettre de corriger son inexécution. Ce
délai est une faculté, une faveur accordée au débiteur défaillant par son
créancier, pour lui permettre de se rattraper en exécutant son obligation. Il
s’inscrit dans la volonté de pérenniser le contrat, puisqu’il donne au débiteur
une seconde chance pour rattraper sa défaillance,98 évitant ainsi le recours
par le créancier à la résolution du contrat.

93 COCC, art. 173, al.2


94 C.civ. art. 1345-5 al.6
95 AUPSRVE, art. 39 al.2.
96 AUDCG, Art. 283
97 AUDCG, Art. 286
98 E.S. DARANKOUM, op.cit.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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25
51. L’octroi d’un délai supplémentaire au débiteur constitue une
manifestation de la collaboration du créancier99. En effet, la bonne foi est un
principe fondamental qui irrigue l’ensemble du droit des contrats tant dans
l’espace OHADA qu’en France. Ce principe implique un devoir de coopération
entre les parties en vertu duquel, chaque contractant doit œuvrer à la
réalisation de l’objet du contrat100. En droit français, l’article L.216-2 du code
de la consommation dispose qu’en cas de manquement du professionnel à son
obligation de livraison du bien ou de fourniture du service à l’échéance, le
consommateur peut résoudre le contrat, « si, après avoir enjoint, selon les
mêmes modalités, le professionnel d'effectuer la livraison ou de fournir le service
dans un délai supplémentaire raisonnable, ce dernier ne s'est pas exécuté dans
ce délai ». Il résulte de ce texte que, le consommateur est tenu de concéder à
son cocontractant professionnel, un délai supplémentaire avant de décider de
résoudre le contrat. Aussi, l’article 8 :106 des PEDC dispose-t-il que, « dans
tous les cas d'inexécution, le créancier peut notifier au débiteur qu'il lui impartit
un délai supplémentaire pour l'exécution ».

52. Par ailleurs, la rédaction de ces textes en des termes potestatifs


montre que, l’octroi de ce délai supplémentaire n’est pas une obligation, mais
une faveur. C’est ce caractère facultatif que consacre aussi la CVIM101. Ainsi,
aucun juge ne peut condamner un créancier d’avoir mis en œuvre une
sanction à l’inexécution du contrat, sans au préalable accorder à son débiteur
un délai supplémentaire. Aussi, parce qu’il vise à sauver le contrat, le délai
supplémentaire ne sera-t-il octroyé que si l’inexécution ne présente pas un
caractère grave, c’est-à-dire qu’elle ne rend pas la prestation inutile et ne
cause aucun dommage au créancier. En somme, le contrat doit conserver son
utilité économique. A contrario, si l’inexécution rend la prestation inutile,
l’octroi d’un délai supplémentaire devient sans intérêt et le créancier peut
procéder à la rupture du contrat.

99 S. EBERHARD, Les sanctions de l’inexécution du contrat et les principes UNIDROIT,


CEDIDAC, Lausanne 2005, p.112
100 B. FAGES, Droit des obligations, op.cit., p.243, n°281
101 CVIM, Arts. 47 et 63

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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53. Durée du délai supplémentaire. La question qui se pose est de
savoir si le Juge peut revoir à la hausse un délai supplémentaire dont le
débiteur estime la durée insuffisante pour lui permettre de s’exécuter. En droit
français, la réponse est affirmative. En effet, le caractère raisonnable exigé du
délai supplémentaire prévu dans le code de la consommation ouvre la voie à
une révision judiciaire. En cas de litige, c’est au juge qu’il appartient de
déterminer si le délai accordé par le créancier était raisonnable ou pas, au
regard des circonstances. En droit commercial de l’OHADA, si cette révision
allait de soi sous l’égide de l’ancien AUDCG, l’admission d’une révision
judiciaire par une certaine doctrine102 ne semble plus justifiée après la révision
de cet Acte uniforme. En fait, dans ses articles 251 et 257, l’ancien AUDCG
disposait que le délai supplémentaire devait être « raisonnable ». Dès lors, le
juge ne devait intervenir qu’a posteriori, pour apprécier le caractère
raisonnable du délai octroyé au débiteur. Or, l’exigence du caractère
raisonnable ayant été supprimée par le nouvel AUDCG, l’intervention du juge
pour proroger un délai jugé trop court ne semble plus se justifier.

54. En somme, dans les deux systèmes, le droit n’impose pas au


créancier une durée précise du délai supplémentaire. Celui-ci donne à son
débiteur une durée qui correspond au temps pendant lequel il peut supporter
l’inexécution103. Toutefois, les parties peuvent convenir dans leur contrat de la
durée du délai supplémentaire en cas de défaillance de l’une d’entre elles. Le
délai ainsi convenu ne pouvant jamais être remis en cause par le juge,
puisqu’il résulte d’une manifestation de la volonté librement exprimée par les
parties. De plus, l’exigence du délai supplémentaire n’étant pas d’ordre public,
les contractants peuvent l’écarter et prévoir qu’en cas d’inexécution, le

102 G. JIOGUE, « La vente commerciale en droit uniforme OHADA », in encyclopédie OHADA,


p.2135 ; E. NSIE « La sanction de l’inexécution de la vente commerciale en droit uniforme
africain », AJP, Rev. CERDIP, Vol.2, n°1 Janvier – Juin 2003, p.19
103 E. NSIE « La sanction de l’inexécution de la vente commerciale », op. cit. p. 19

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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créancier de l’obligation inexécutée mettra en œuvre de manière automatique,
l’un des remèdes de son choix.

55. Effets du délai supplémentaire. Le délai supplémentaire a pour


principal effet de différer l’exigibilité de l’obligation104. Le débiteur jouit alors
d’une sorte d’immunité pendant le temps supplémentaire qui lui est accordé.
Ainsi, l’octroi d’un délai supplémentaire au débiteur limite le créancier dans
sa marge de manœuvre105. En effet, le délai supplémentaire dépouille le
créancier de toute voie d’exécution et suspend toute poursuite à l’encontre du
débiteur. Cette immunité se justifie par le fait que ce mécanisme constitue
une seconde chance accordée au débiteur pour s’exécuter, il ne pourra donc
parvenir à cette exécution recherchée, s’il doit en même temps faire l’objet de
poursuites, ou s’il doit être privé de certains de ses biens à cause d’une saisie.
Dès lors, pour lui permettre de mieux organiser l’exécution de ses obligations,
une trêve est concédée au débiteur, laquelle le met à l’abri de toute poursuite
et prive le créancier de mettre en œuvre l’un des moyens qui sont mis à sa
disposition en cas d’inexécution du contrat. Il constitue donc une suspension
du contrat « par faveur »106 qui permet d’éviter la résolution du contrat.

B/ L’exigence d’une mise en demeure

56. Définition. « La mise en demeure est une interpellation claire et non


équivoque, par laquelle un créancier rappelle à son débiteur en termes
énergiques, la nécessité d'exécuter en nature son obligation »107. Le professeur
P. VAN OMMESLAGHE la définit comme une sommation adressée par le
créancier à son débiteur en défaut de paiement, afin qu’il exécute ses

104 E. NSIE, Op. Cit., p.17


105 S. EBERHARD, Les sanctions de l’inexécution du contrat et les principes UNIDROIT,
CEDIDAC, Lausanne 2005, p.166
106 J. CARBONNIER, Droit civil : les obligations, t.4, 22 ème éd., PUF, Paris, 2000, p.355.
107 P. WERY, « La mise en demeure en matière d'obligations contractuelles », In Les obligations

contractuelles Editions du Jeune Barreau de Bruxelles (2000). p.288

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
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obligations108. Elle vise à convoquer la diligence du débiteur en l’invitant à
s’exécuter, afin d’éviter la rupture du contrat109. La mise en demeure offre
ainsi à ce dernier, une seconde chance de s’exécuter avant que les sanctions
ne soient prises à son encontre. Elle fait alors office d’avertissement110 et
permet de prévenir l’inexécution contractuelle.

57. En effet, comme le délai supplémentaire, la mise en demeure


accorde au débiteur défaillant un sursis pour qu’il s’exécute. Il s’agit d’un
avertissement que le créancier lui adresse, en indiquant les mesures que ce
dernier compte employer,111 si l’exécution n’est pas effective à l’issue du délai
accordé. Ces mécanismes constituent une manifestation de la bonne foi du
créancier et expriment sa volonté de voir perdurer la relation contractuelle.
Pour le professeur JOBIN, « la mise en demeure n’est pas une simple formalité ;
elle joue un rôle précis. Le but de ce délai raisonnable est d’accorder au débiteur
la possibilité réelle de payer, c’est-à-dire le temps minimum nécessaire pour
trouver des fonds et les remettre au prêteur »112. Elle permet donc d’éviter qu’un
contrat qui n’est pas exécuté à l’échéance soit résolu. Ce mode de rappel à
l’ordre du cocontractant défaillant est admis tant en droit de l’OHADA qu’en
droit français.

58. En droit commun de l’OHADA, le code civil ancien ne formule pas


une exigence générale d’une mise en demeure. Ce mécanisme n’y est évoqué
de manière incidente qu’en matière de dommages et intérêts résultant d’une
inexécution contractuelle113 et des risques de la chose que le débiteur doit

108 P. VAN OMMESLAGHE, « Les obligations- examen de jurisprudence (1968-1973), R.C.J.B,


1975, p.687.
109 K. WOLOU, « Les mécanismes de justices de privée dans la vente commerciale OHADA », in

Mélanges SAWADOGO, les horizons du droit OHADA, 2018, p.573


110
P. ANCEL, Droit des obligations, op. cit., p.282
111 J-F. HAMELIN, « L'exercice des nouveaux pouvoirs unilatéraux du contractant », RDC

septembre 2018, n°3, p.514


112 P-G JOBIN, « L’abus de droit contractuel depuis 1980 », in congrès annuel du Barreau du

Québec, 1990, Montréal, service de formation permanente, Barreau du Québec, 1990, pp.
127-137.
113 C.civ. ancien, art. 1146

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
29
livrer114. En droit spécial des contrats, il est traité de manière éclatée dans
certains Actes uniformes, principalement celui relatif au droit commercial
général. En effet, on retrouve dans l’AUDCG, des références au mécanisme de
mise en demeure115. Mais, toutes les dispositions y relatives présentent ce
mécanisme uniquement comme une condition préalable à la résolution du
contrat ou à l’allocation des dommages intérêts. Le législateur OHADA l’exclut
lorsqu’il s’agit des autres remèdes et sanctions à l’inexécution du contrat.
Cette conception très étroite d’un mécanisme dont l’importance ne fait plus
aucun doute n’est pas conforme aux évolutions modernes du droit.

59. En France, l’exigence d’une mise en demeure a longtemps été


ignorée par l’ancien droit116 et le code civil de 1804 ne lui consacrait qu’une
application limitée117. A ce jour, ce mécanisme demeure absent de certains
systèmes de droit. C’est ainsi qu’en droit du commerce international, la CVIM
et les principes d’UNIDROIT ont refusé de la consacrer118, car il constituerait
une perte de temps dans les relations d’affaires. En revanche, depuis la
réforme de 2016, la mise en demeure est devenue en France un préalable à la
mise en œuvre de la quasi-totalité des remèdes à l’inexécution du contrat119.
Ceci témoigne de la volonté du législateur de donner une seconde chance au
débiteur défaillant avant de le « sanctionner ».

60. Alors que le code civil de 1804 la traitait de façon éparpillée dans
différentes dispositions sans en présenter un régime juridique clair,
l’ordonnance de 2016 a élaboré une sorte de théorie générale de la mise en
demeure que l’on retrouve aux articles 1344 et suivants. Aussi, si elle
apparaissait jadis comme une formalité préalable à l’exercice d’une action en

114 C.civ. ancien, art. 1302


115 AUDCG, art. 111 et art. 291
116 F. NAMMOUR, R. CABRILLAC, S. CABRILLAC, H. LECUYER, Droit des obligations : droit

français – droit libanais – perspectives européennes et internationales, Bruylant, Bruxelles


2006, p.228.
117 V. NICOLAS, Droit des obligations. Le contrat, Ellipses, coll. 100% Droit, Paris 2017, p.322
118 C. P. WILSON, « Les remèdes à l'inexécution contractuelle dans la réforme du droit des

contrats en France : regard d'un juriste chilien », RDC 2015, n°03, p.706
119 B. FAGES, Droit des obligations, 8 ème éd., LGDJ, Paris 2018, p.247

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
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justice ou à l’invocation d’une clause sanctionnant une inexécution
contractuelle, la montée de l’unilatéralisme que consacre le nouveau droit
français des contrats fait d’elle aujourd’hui, une exigence préalable à l’exercice
d’un pouvoir unilatéral120.

61. Fonctions de la mise en demeure. En principe, la seule


survenance du terme devait suffire au créancier pour tirer les conséquences
de la défaillance de son débiteur121 et donc éventuellement procéder à la
résolution du contrat. C’est cette idée que traduit l’adage dies interpellat pro
homine. Mais, en France et dans l’espace OHADA, l’arrivée du terme ne suffit
pas à caractériser la défaillance du débiteur. Le créancier est supposé lui
concéder un délai supplémentaire tacite tant qu’il ne lui réclame pas
l’exécution122. La mise en demeure a ainsi traditionnellement pour fonction de
constater la défaillance du débiteur123. Elle joue un rôle de rappel à l’ordre et
constitue une invitation à exécuter. Elle permet d’éviter la résolution du
contrat lorsque l’inexécution résulte d’une négligence ou d’une omission du
débiteur. C’est un moyen pour le créancier de rappeler à ce dernier qu’il doit
s’exécuter.

62. La question s’est souvent posée de savoir si dans l’interpellation


qu’il adresse à son débiteur au moyen de la mise en demeure, le créancier doit
lui accorder un délai pour s’exécuter ou devrait-il le considérer
immédiatement en demeure ? La doctrine a longtemps été divisée sur cette
question. Pour certains, le créancier n’a aucune obligation de concéder à son
débiteur un délai supplémentaire dans la mise en demeure. Selon cette
doctrine, « la mise en demeure est immédiatement acquise au créancier. Il ne
s'agit pas d'accorder au débiteur, à partir de la sommation, ce qu'on appelle un

120 J-F HAMELIN, « L’exercice des nouveaux pouvoirs unilatéraux du contractant », RDC, n°03,
p.514
121 R. LIBCHABER, « Demeure et mise en demeure en droit français », in M. FONTAINE (dir.)

et G. VINEY (dir.), Les sanctions de l'inexécution des obligations contractuelles. Etudes de


droit comparé, Bruylant Bruxelles 2001, p.114
122 J.L AUBERT, E. SAVAUX, J. FLOUR, L. ANDREU, V. FORTI, Droit civil. Les obligations :

Le rapport d’obligation, 10ème éd., Sirey, Paris, 2022, p.284


123 Ibid.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
31
délai moral »124. Cette conception classique est bien-sûr dépassée. Même si le
législateur ne le mentionne pas clairement, la mise en demeure doit laisser au
débiteur un délai raisonnable pour se corriger. C’est en cela qu’elle constitue
un remède à l’inexécution du contrat au même titre que le délai
supplémentaire. Le Professeur P. VAN OMMESLAGHE écrit à ce propos que,
la mise en demeure n’a de raison d’être que si elle laisse au débiteur une
seconde chance pour s’exécuter125.

63. La forme de la mise en demeure. En France comme dans l’espace


OHADA, la forme de la mise en demeure est laissée à la discrétion des parties.
Il y a ainsi une tendance à la simplification de la mise en demeure. Cette
simplification participe à l’efficacité de ce mécanisme et en fait, comme nous
l’avons déjà souligné plus haut, un moyen efficace de pacifier la relation
contractuelle, en prévenant toute forme d’inexécution. Aux termes de l’article
1344 du code civil français, « le débiteur est mis en demeure de payer soit par
une sommation ou un acte portant interpellation suffisante, soit, si le contrat le
prévoit, par la seule exigibilité de l'obligation ». Dans le même sens, l’article 263
du COCC dispose en son alinéa 2 que la mise en demeure est faite par lettre
recommandée avec accusé de réception ou par tout autre moyen écrit.

64. Une souplesse mitigée en droit spécial. Dans l’espace OHADA,


l’article 133, alinéa 2 de l’AUDCG dispose que « […] la mise en demeure est
faite par acte d’huissier ou notifiée par tout moyen permettant d’établir sa
réception effective par le destinataire ». Ce texte prévoit que le débiteur puisse
être mis en demeure soit par signification d’huissier de justice soit par tout
moyen laissant traces écrites et permettant d’établir la réception effective de
ladite mise en demeure par le destinataire. Le législateur de l’OHADA n’édicte
donc pas de forme particulière de mise en demeure. Il ne détermine pas un

P. WÉRY in « La mise en demeure en matière d'obligations contractuelles », op.cit., p.311


124

125P. V. OMMESLAGHE, Traité de droit civil belge, t.2, Les obligations, Bruylant, Bruxelles
2013, p.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
32
mode qui serait de principe. Le créancier est libre de choisir la forme selon
laquelle il met son débiteur en demeure, à condition que ses intentions soient
clairement exprimées et qu’il puisse se constituer une preuve que sa mise en
demeure a bien été reçue par le débiteur. C’est ce qui résulte d’un arrêt rendu
par la Cour d’appel de Ouagadougou le 19 octobre 2007126. Dans cette espèce,
la cour affirme que la mise en demeure « résulte indubitablement de toute
manifestation de volonté réclamant le paiement adressé au débiteur et reçue
par ce dernier », indépendamment de l’intitulé qui a été donnée à cette lettre
d’interpellation.

65. Le droit spécial français ne semble pas consacrer une telle liberté.
En effet, il résulte de l’examen des dispositions du code de commerce127 et du
code de la consommation128 que la mise en demeure doit à peine de nullité, se
faire par acte extra judiciaire ou par lettre recommandée avec demande d’avis
de réception. Ainsi, contrairement à son homologue de l’OHADA, le législateur
français ne semble pas admettre la possibilité d’une mise en demeure par tout
autre écrit.

Paragraphe 2 : La compensation financière d’une prestation


imparfaitement exécutée

66. Lorsque le débiteur n’a exécuté qu’une partie de ses obligations ou


lorsqu’il s’est exécuté tardivement, le créancier peut accepter cette exécution
imparfaite ou tardive moyennant une compensation financière. Ceci permettra
d’éviter la résolution d’un contrat qui, malgré la défaillance du débiteur, peut
conserver une utilité pour les parties. C’est dans ce sens que s’inscrivent la
réduction du prix (A) et les intérêts moratoires (B).

126 CA Ouagadougou, ch. Com., arrêt n°139 du 19 octobre 2007, Fadoul Technibois
c/SONABHY, Ohadata J-10-220.
127 C. com, art. L.145-17 et L.145-47
128 C.consom., art. R.622-2 3°

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
33
A/ La réduction du prix

67. Présentation. Dans un contrat synallagmatique, les prestations que


s’offrent les parties doivent être proportionnelles. Ainsi, le vendeur doit livrer
une chose dont la valeur est proportionnelle au prix que l’acheteur doit payer.
A défaut, ce dernier peut solliciter la résolution du contrat. Mais, pour assurer
la poursuite des contrats qui conservent une utilité pour l’une des parties129
sinon pour les deux, les contractants peuvent recourir au mécanisme de
réduction du prix. Il s’agit d’un moyen permettant à un cocontractant victime
d’une exécution imparfaite, d’accepter celle-ci en réduisant le prix qu’il aurait
dû payer. Il n’est pas nécessaire que cette exécution imparfaite soit imputable
au débiteur130. La réduction du prix est possible même lorsque l’exécution
imparfaite résulte d’un événement qui présente les caractères de la force
majeure131. Elle permet au créancier de répondre à l’inexécution de son
débiteur en modifiant l’équilibre initialement convenu132.

68. Généralisation du remède. Dans l’espace OHADA, le code civil


ancien n’évoque la réduction du prix que dans certaines dispositions relatives
à des contrats spéciaux, telles que la garantie de contenance dans la vente
immobilière133 ou l'action estimatoire de la garantie des vices cachés134. C’est
cette même solution que l’on retrouve dans le code civil français avant la
réforme de 2016. Ces textes ne font pas de la réduction prix un remède
général, applicable à tous les contrats synallagmatiques. Il pouvait néanmoins
être étendu dans le contrat d’entreprise lorsque la prestation accomplie était

129 E. NSIE, « La sanction de l’inexécution de la vente commerciale en droit uniforme africain »,


op.cit p.23
130 D. MAZEAUD, « Propos conclusifs », in, « Le prix dans les contrats après la réforme », RDC

2017, n°03, p.577


131 F. TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, F. CHENEDE, Droit civil. Les obligations, 12 ème

éd., D., Paris, 2019, p.843


132 G. CHANTEPIE, « Réduction du prix et résolution par notification », in M. LATINA (dir.), La

réforme du droit des contrats en pratique, D., Paris, 2017, p.84


133 C. civ., ancien, art. 1619
134 C. civ., ancien, art. 1644

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
34
défectueuse.135 Cette conception de remède de droit spécial est aussi celle que
retient le code sénégalais des obligations civiles et commerciales. L’article 267
de ce texte prévoit en son alinéa 3 que, les parties peuvent contourner la
nullité de la vente en optant plutôt pour une réduction du prix, lorsque la
chose, objet de la vente, a partiellement péri. C’est enfin en vertu de cette
conception de remède de droit spécial de la vente que l’AUDCG n’aborde ce
mécanisme que dans ces dispositions relatives à la vente commerciale136.

69. Toutefois, avant la réforme du code civil français en 2016, le droit


commun des contrats, applicable dans certains pays de l’espace OHADA,
admettait déjà l’idée d’une généralisation de la réduction du prix à tout contrat
synallagmatique. L’article 105 du code malien des obligations issu d’une loi
de 1987 disposait déjà que, dans les contrats synallagmatiques, lorsque l’une
des parties manque à ses obligations en refusant de les exécuter en tout ou
en partie, l’autre partie peut, entre autres, réduire ses propres obligations.
Ainsi, si l’obligation de la victime de l’inexécution consiste au paiement d’un
prix, il peut, au lieu de procéder à la rupture du contrat, accepter l’exécution
partielle offerte par son débiteur en réduisant le prix qu’il devait payer.

70. La réduction du prix est un mécanisme de rééquilibrage du contrat


imparfaitement exécuté137. Il trouve son fondement dans la lutte contre le
déséquilibre contractuel et répond au besoin de souplesse de la pratique
contractuelle moderne. Elle est un remède original, propre au droit
commercial, et qui a été généralisé en France par la réforme du droit des
contrats intervenue en 2016138. Elle permet de sanctionner le cocontractant
défaillant sans anéantir le contrat139. Il s’agit d’un remède admis tant en droit
français qu’en droit de l’OHADA. Aux termes de l’article 1223 du code civil

135 F. COLLART DUTILLEUL, P. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 11ème éd.,


D., Paris 2019, p711
136 AUDCG, art. 288
137 P. GROSSER, « La réduction du prix comme remède général à l'exécution imparfaite du

contrat », AJ Contrat, 2014, p.219


138 V. NICOLAS, Droit des obligations. Le contrat, op. cit., p.320, n°859
139 D. HOUTCIEFF, Droit des contrats, 2 ème éd. Larcier, Bruxelles, 2016, p.491, n°956

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
35
français, « le créancier peut, après mise en demeure, accepter une exécution
imparfaite du contrat et obtenir une réduction proportionnelle du prix ». Dans le
même sens, l’article 288 de l’AUDCG dispose que « en cas de défaut de
conformité des marchandises, que le prix ait été ou non déjà payé, l’acheteur
peut réduire le prix du montant de la différence entre la valeur que des
marchandises conformes auraient eu au moment de la livraison et la valeur que
les marchandises effectivement livrées avaient à ce moment ». L’admission de
ce remède dans les deux systèmes juridiques met en exergue la prise en
compte de l’utile et du juste dans les contrats140.

71. Conditions et mise en œuvre. La réduction du prix n’est possible


que si la prestation offerte par le débiteur est contraire aux prévisions
contractuelles, même si la non-conformité observée ne constitue pas un
manquement essentiel au contrat141. En d’autres termes, ce remède n’a de
sens que si malgré la défaillance du débiteur, le contrat peut encore avoir pour
le créancier, l’utilité qu’il en attendait. Il suffit qu’il y ait une différence entre
la prestation convenue et celle qui est offerte lors de l’exécution du contrat.
C’est cette idée que consacre le droit français en utilisant le terme « exécution
imparfaite ». En droit spécial de l’OHADA, le législateur a fait le choix de limiter
la réduction du prix à la seule inexécution de l’obligation de livraison. Une
telle limitation est à regretter, car en droit commun de la vente, l’acheteur
bénéficie de l’action quantis minoris142 ou action estimatoire. Celle-ci lui
permet sur le fondement de l’article 1644 du code civil ancien repris par le
nouveau code civil français, d’imposer au vendeur une réduction du prix
proportionnelle correspondant à la diminution de la jouissance du bien qu’il
a subie du fait du vice caché de la chose.

72. Un unilatéralisme discuté en droit français. Dans sa mise en


œuvre, les deux législateurs font de la réduction du prix un remède unilatéral

140 J. GHESTIN, « L’utile et le juste dans les contrats », D., vol.1, 1982, chron.1, p.1
141 F. CHENEDE, « La réduction du prix », RDC 2017, n°03, p.571
142 C. PIZARRO WILSON, « Les remèdes à l'inexécution contractuelle dans la réforme du droit

des contrats en France : regard d'un juriste chilien », RDC, n°03, septembre 2015, p.706
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
36
entre les mains du créancier. Toutefois, la rédaction initiale des articles 1217
et 1223 du code civil français jetait un doute sur ce caractère unilatéral143. En
effet, l’article 1217 disposait que la partie envers laquelle l’engagement n’a pas
été exécuté ou l’a été imparfaitement peut, entre autres, « solliciter la réduction
du prix ». En utilisant ainsi le terme « solliciter », le législateur français laissait
entendre que le créancier doit demander cette réduction à quelqu’un, et ce ne
peut être que soit le juge, soit le cocontractant défaillant144. Dans les deux
cas, cette sollicitation enlevait au remède son caractère unilatéral. C’est cette
ambiguïté145 que la loi de ratification a voulu corriger en remplaçant le terme
« solliciter » par celui d’« obtenir ». Mais, cette modification n’a pas réussi à
dissiper l’ambigüité. En effet, si le créancier doit « obtenir » la réduction du
prix, cela suppose que la mise en œuvre de ce remède n’est pas entièrement
laissée à sa discrétion. La personne de qui il doit l’obtenir peut décider de ne
pas la lui accorder.

73. De plus, la nouvelle rédaction de l’article 1223 alinéa 1 in fine semble


subordonner la mise en œuvre de la réduction du prix à l’acceptation du
débiteur146, ce qui n’est pas de nature à lever les ambigüités de la rédaction
initiale, mais semble plutôt éloigner l’idée du caractère unilatéral de ce
remède147. Mais, malgré cette ambigüité, la doctrine majoritaire admet qu’il
s’agit là d’une erreur rédactionnelle, la réduction du prix en droit français
reste un remède unilatéral148, et cela ressortirait nettement des travaux
préparatoires de l’ordonnance de 2016149.

143 G. CHANTEPIE, « Réduction du prix et résolution par notification », op.cit, p.89


144 A. TADROS, « La ratification de l'ordonnance de réforme du droit des contrats : quelques
incidences sur la pratique des affaires », Rec. D., 2018 p.1162
145 P. GROSSER, « La réduction du prix comme remède général à l'exécution imparfaite du

contrat », op.cit, p.220.


146 D. HOUTCIEFF, « L'étendue des nouveaux pouvoirs unilatéraux du contractant », RDC

2018, n°03, p.505.


147 O. SABARD, « Modification de l'article 1223 du Code civil par la loi de ratification », LEDC

mai 2018, n°05, p.5.


148 P. LEMAY, « La réduction du prix du contrat en cas d’exécution imparfaite : un pas en avant

deux pas en arrière ? », Rec. D., 2018, p.567 ; H. BARBIER, « L'exécution et la sortie du
contrat », RDC Juin 2018, n° Hors-série, p.40
149 H. BARBIER, op.cit., p.40

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
37
74. Un unilatéralisme affirmé en droit de l’OHADA. En droit de
l’OHADA, le caractère unilatéral de la réduction du prix est clairement affirmé
par le législateur africain. En effet, il résulte de l’article 288 de l’AUDCG qu’« en
cas de défaut de conformité des marchandises, que le prix ait été ou non déjà
payé, l’acheteur peut réduire le prix du montant de la différence entre la valeur
que des marchandises conformes auraient eue au moment de la livraison et la
valeur que les marchandises effectivement livrées avaient à ce moment ».
Contrairement au droit français, ce texte ne souffre d’aucune ambiguïté, la
décision de réduire le prix est laissée à la discrétion du créancier de l’obligation
mal exécutée150. C’est aussi ce caractère unilatéral que consacre le code civil
ancien, dont l’article 1644 dispose que, « dans le cas des articles 1641 et 1643,
l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de
garder la chose et de se faire rendre une partie du prix, telle qu'elle sera arbitrée
par experts ».

75. Toutefois, il aurait fallu distinguer selon que le prix ait déjà été payé
ou pas151. Lorsque le prix n’a pas encore été payé, l’unilatéralisme se justifie,
le créancier peut alors imposer au débiteur une réduction du prix
proportionnelle au manquement observé. Il revient à ce dernier, en cas de
contestation de la somme réduite, de saisir le juge. Par ailleurs,
l’unilatéralisme ne semble pas se justifier lorsque le prix avait déjà été payé.
Car, la réduction du prix implique dans cette hypothèse que le débiteur
restitue une partie des sommes perçues. Cette restitution nécessite qu’il
consente à la mesure de réduction du prix. De ce fait, en cas de payement du
prix, la réduction du prix sera soit conventionnelle, c’est-à-dire qu’elle
résultera d’un accord entre le créancier et son débiteur qui accepte de
rétrocéder une partie du prix qu’il a perçue, soit judiciaire, si les parties ne
parviennent pas à un accord. Le juge va devoir intervenir pour imposer une
réduction proportionnelle du prix.

150 G. JIOGUE, « La vente commerciale en droit uniforme OHADA », op.cit, p.2134


151 V. NICOLAS, Droit des obligations. Le contrat, op.cit., p.320, n°858
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
38
76. Enfin, en droit français, lorsque le prix avait déjà été payé, la
réduction du prix est subordonnée à une mise en demeure préalable adressée
au débiteur. Certainement, l’objet de cette mise en demeure consiste à
demander au débiteur de restituer une partie du prix qui lui a été payé. Alors
qu’une simple notification suffit lorsque le prix n’avait pas encore été payé,
pourvu que cette notification se fasse dans les meilleurs délais. En droit de
l’OHADA, aucune formalité de mise en œuvre de la réduction du prix n’est
précisée. Il est souhaitable que le législateur africain aborde cette question de
façon distincte selon que le prix ait déjà été payé ou pas, et prévoir soit un
accord, soit une intervention préalable du juge dans le premier cas, ce qui
serait plus réaliste.

B/ Les intérêts moratoires

77. Une consécration unanime des intérêts légaux. Les droits


français et OHADA distinguent les intérêts dus en raison du simple retard
d'exécution des intérêts qui compensent un préjudice distinct du retard. Les
premiers sont appelés « intérêts moratoires » et les seconds sont des intérêts
compensatoires. En effet, l’inexécution contractuelle implique tout
manquement par une partie à l’une quelconque de ses obligations, y compris
l’exécution défectueuse, tardive ou partielle. Les intérêts moratoires
permettent au créancier d’une somme d’argent, d’en accepter un paiement
tardif moyennant une indemnisation. Ils ont pour objet de compenser de
manière forfaitaire la perte due au fait que le créancier n’a pas pu investir la
somme attendue sur un marché financier ou dans son projet152. Il faut pour
ce faire, que le retard soit injustifié. Ce mécanisme favorise ainsi la poursuite
d’un contrat dont le créancier aurait pu invoquer l’inexécution, le débiteur
n’ayant pas exécuté au temps convenu.

S. EBERHARD, Les sanctions de l’inexécution du contrat et les principes UNIDROIT,


152

CEDIDAC, Lausanne 2005, p.207


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
39
78. En droit français, ce moyen est prévu aux articles 1231-6 et 1231-
7 du code civil, ainsi qu’à l’article L. 441-6, alinéa 12 du code de commerce. Il
constitue un remède à une exécution tardive. Il s’agit des pénalités infligées à
une partie qui n’exécute pas son obligation contractuelle dans les délais
impartis. Ces pénalités ont pour but d’inciter les parties à exécuter leurs
obligations en temps et en heure. En droit de l’OHADA, l’octroi des intérêts
moratoires au créancier victime d’un retard dans l’exécution de son obligation
est un mécanisme bien connu en droit commun des contrats, où il trouve son
fondement aux articles 1153 du code civil ancien, 138 du code malien des
obligations et 8 alinéa 2 du COCC. Le droit spécial le reprend à l’article 291
de l’AUDCG qui dispose que, « tout retard dans le paiement du prix oblige au
paiement des intérêts calculés au taux de l’intérêt légal et ce, sans préjudice
des dommages-intérêts éventuellement dus pour autre cause ».

79. Il est admis dans les deux systèmes juridiques que, dès lors que
le débiteur a été mis en demeure ou à partir du moment où il existe un retard
d'exécution, la somme convenue comme obligation principale produira des
intérêts, et ces intérêts constitueront l'indemnisation du créancier pour le
dommage que le retard de son débiteur lui cause. Le créancier n’a pas besoin
d’apporter la preuve d’un préjudice particulier153. Le simple retard suffit à
donner droit aux dommages et intérêts moratoires. En fait, l'existence du
préjudice résultant du retard est irréfragablement présumée et son
indemnisation est acquise automatiquement sans que le créancier ait à
présenter la moindre demande sur ce point154. Par ailleurs, les intérêts
moratoires lient le juge. Celui-ci ne peut ni refuser de les ordonner au motif
qu’il n’y aurait aucune preuve d’un préjudice, ni porter une appréciation sur
le montant de l’indemnisation en révisant soit à la hausse, soit à la baisse, le
taux de l’intérêt légal.

153 A. SERIAUX, Manuel de droit des obligations, 2ème éd., PUF, Paris, 2014, p.82
154Cass. Soc. 19 mars 1987, no 84-43.567, Bull. civ. V, n° 173

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
40
80. L’admission des intérêts moratoires conventionnels. En
France, les parties peuvent insérer dans leur contrat, une clause soumettant
le contractant qui s’exécute hors délais au paiement d’une pénalité155. Ainsi,
outre les intérêts moratoires légaux, les parties peuvent prévoir des intérêts
moratoires conventionnels. La jurisprudence a d’ailleurs admis de façon
constante, que le taux d’intérêt légal n’était pas d’ordre public, les parties sont
libres de prévoir un taux d’intérêt conventionnel pour l’indemnisation de tout
retard156. Toutefois, lorsqu’il est prévu par les parties, le taux d’intérêt
s’analyse comme une clause pénale et le juge a donc le pouvoir de le réviser,
s’il le trouve très excessif. En l’absence d’une position claire du juge de l’espace
OHADA sur cette question, la solution française pourra bien être transposée
en droit OHADA, les dispositions de l’article 291 n’étant pas d’ordre public.

Section 2 : La correction de l’inexécution du débiteur

81. Dans les deux systèmes juridiques, le débiteur dispose d’un droit à
la correction. Il s’agit d’une seconde chance qui lui est donnée pour se corriger.
Les moyens de correction varient selon qu’il a offert une exécution défectueuse
(Paragraphe 2) ou que son inexécution résulte des circonstances
imprévisibles (paragraphe 1).

Paragraphe 1 : La correction d’une inexécution imprévisible

82. L’inexécution du contrat n’est pas toujours le résultat d’une


préméditation du débiteur afin de nuire à son cocontractant. Elle peut être le

155F. TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, F. CHENEDE, op. cit., p.937, n°872.


156Com. 15 mars 1971, n° 68-12.172, Bull. civ. IV, n° 79. Com. 17 mars 1981, n° 79, 13.733,
Bull. civ. IV, n° 142. Com. 14 oct. 1981, n° 80-12.488, Bull. civ. IV, n° 358. Com. 9 nov. 1982,
n° 80-16.473, Bull. civ. IV, n° 341. Com. 11 juill. 1984, n° 82-16.387, Bull. civ. IV, n° 229.
Civ. 1re, 20 oct. 1987, n° 86-10.923 , Bull. civ. I, n° 273. Com. 11 juin 1991, n° 89-11.727,
Bull. civ. IV, n° 216

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
41
fait d’une évolution des circonstances qui rendent moins attractif ou réalisable
ce qui l’était au moment de la conclusion du contrat157. Dans cette hypothèse,
l’inexécution ne résulte pas d’une faute ou d’une négligence du cocontractant
défaillant. C’est dans ce cadre que s’inscrivent l’imprévision et la force
majeure. Dans la première situation, le contrat pourra être sauvé au moyen
d’une modification (A). Alors qu’en cas de force majeure, contrairement à la
solution classique qui consistait à anéantir le contrat de manière définitive et
irrévocable158, les évolutions modernes du droit optent pour une mise en veille
de la force obligatoire pendant la durée du cas de force majeur si celui-ci est
temporaire. Le contrat sera donc suspendu (B) au lieu d’être résolu.

A/ La modification du contrat pour imprévision

83. Définition. Théorie prétorienne élaborée par le conseil d’Etat


français159, l’imprévision est le pouvoir reconnu au juge de modifier le contrat
à la demande d’une des parties lorsque, par suite d’un événement extérieur,
étranger à la volonté des contractants et imprévisible lors de la conclusion,
l’exécution de celui-ci devient non pas impossible, mais tellement onéreuse
pour le cocontractant qu’elle risque de le ruiner160. Elle s’applique à un contrat
dont l'exécution est échelonnée dans le temps ou du moins différée, qui voit
son équilibre profondément bouleversé par suite d'un changement
imprévisible des circonstances qui avaient présidé à sa conclusion, de sorte
que son exécution devient excessivement difficile pour la partie au détriment
de laquelle s'opère ce déséquilibre161. La théorie de l'imprévision repose sur
l'idée selon laquelle l'essentiel est que le contrat soit exécuté162, bien que ce

157 V. NICOLAS, Droit des obligations. Le contrat, op.cit., p.288, n°775.


158 V. NICOLAS, op.cit., p.303, n°811.
159 C'est pendant le déroulement de la première guerre mondiale que le Conseil d'État français

avait accepté de faire jouer la théorie de l'imprévision pour permettre l'exécution de contrats
dont les évènements rendaient la poursuite très difficile : ce fut le célèbre arrêt CE,30 mars
1916, n°59928, Compagnie générale d’éclairage de Bordeaux ; M. Long, P. Wiel, G. Braibant,
P. Devolvé et B. Genevois, GAJA, 21ème éd., 2017.
160 G. CORNU, Vocabulaire juridique, éd., 2018, PUF, Paris 20181 p.1128

161 P. ANCEL, « Imprévision », Rep.civ., Mai 2017, p.5


162 R. NOGUELLOU, « Table ronde : Les remèdes jurisprudentiels » RDC 2010, n°1, p.494.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
42
ne soit pas selon les termes initiaux. En effet, aux XIIe et XIIIe siècles,
s’inspirant de la doctrine de l’aequitas163 de Saint-Thomas- d’Aquin, le droit
canonique a repris l’idée de l’intervention correctrice du juge pour
imprévision164. Si cette évolution a finalement été admise en droit français (1),
sa consécration est envisageable en droit de l’OHADA malgré le silence du
droit positif (2).

1/ Une évolution consacrée en droit français

84. Une consécration jadis refusée. En France, depuis le célébrissime


arrêt « Canal de Craponne »165 les hauts magistrats ont toujours, sur le
fondement de l’ancien article 1134 du code civil français, rejeté l’idée d’une
modification du contrat pour imprévision, consacrant ainsi le principe de
l’intangibilité des conventions. Dans cette espèce, Craponne s’était obligé,
dans un acte daté du 15 juin 1567, à construire un canal destiné à arroser
les champs des habitants de la commune de la Pélissanne. En contrepartie,
les habitants devaient lui verser une redevance de vingt florins pour chaque
carteirade, le tout payable sur trois ans et, en outre, trois sols par carteirade
pour chaque arrosage. L’engagement des parties était perpétuel. Trois siècles
plus tard, la dépréciation monétaire avait rendu cette redevance complètement
dérisoire et inadaptée aux frais exposés par Craponne pour l’entretien du
canal. La redevance initialement fixée ne permettant plus de couvrir les frais
d’entretien du canal, le successeur de Craponne, le marquis de Gallifet, a
décidé de saisir les tribunaux, afin de faire revaloriser la redevance.

85. Au fond, les juges ont fait droit à sa demande, au motif que celle-ci
était conforme à l’équité. La Cour de cassation a infirmé cet arrêt. Après avoir

163 Saint-THOMAS-D’AQUIN écrit dans Somme Théologique que « celui qui promet une chose,
s’il a l’intention de faire ce qu’il promet, ne ment pas parce qu’il ne parle pas contre sa pensée ;
mais, s’il ne fait pas ce qu’il a promis, alors il paraît commettre une infidélité, par cela même
qu’il change de dessein. Cependant, il peut être excusable si les conditions de la personne sont
changées ».
164 A. PARENT, L’imprévision en droit comparé : une analyse normative économique, Th.,

Université McGill, Montréal, 2014, p.16


165 Cass., civ., 3 mars 1876, GACIV, 12 ème éd., 2008, p.183 ; D.1876.1.193, note GIBOULO.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
43
précisé que la règle de la force obligatoire du contrat édictée à l’article 1134
alinéa 1er « est générale, absolue et régit les contrats dont l’exécution s’étend à
des époques successives de même qu’à ceux de toute autre nature », elle a
décidé que « dans aucun cas, il n’appartient aux tribunaux, quelque équitable
que puisse leur paraître la décision, de prendre en considération le temps et les
circonstances pour modifier les conventions des parties et substituer des
clauses nouvelles à celles qui ont été librement acceptées par les contractants
». Ce refus d’admettre la modification du contrat pour imprévision était un
marqueur fort du droit français des contrats, excepté en droit administratif166.

86. En effet, depuis l’adoption du code civil en 1804, le principe pacta


sunt servanda et l’article 1134 qui le sous-tendait ont longtemps été des icônes
du droit français des contrats. Or, en tant que « pari sur l’avenir »167, le contrat
doit permettre d’appréhender l’imprévisible. Pour qu’il en soit ainsi, il était
nécessaire d’abandonner cette vision rigide et immuable qu’a souvent imposée
la jurisprudence française et mettre en évidence une vision plus souple
impliquant son adaptabilité aux circonstances. Car, la modification judiciaire
du contrat pour imprévision est un moyen de sauver le contrat, de dissuader
la partie pour qui il est devenu très onéreux de le rompre168.

87. Une révision du contrat admise en droit comparé. L’examen des


projets d’harmonisation européenne du droit des contrats donnait déjà des
indices d’une possible admission de la théorie de l’imprévision en France. En
effet, même si les principes UNIDROIT et les principes Lando affirment que les
parties sont tenues d’exécuter leurs obligations quand bien même une telle
exécution serait devenue onéreuse, ces textes retiennent une exception
importante : le hardship169 et le changement de circonstances170 qui sont une

166 C. BLOCH, A. CERATI-GAUTHIER, V. PERRUCHOT-TRIBOULET, L’influence de la


réforme du droit des obligations sur le droit des affaires, D., Paris, 2018, p.12, n°19
167 P. MOISAN, « Technique contractuelle et gestion des risques dans les contrats

internationaux : les cas de force majeure et d’imprévision », Les cahiers de droit, vol. 35, n°2,
1994, p.286
168 J.P. TOSI, Le droit des obligations au Sénégal, B.A.M, t.34, 1981, p.148
169 Princ. UNIDROIT, art. 6.2.1 et s
170 PDEC, art. 6.111

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
44
manifestation de la théorie de l’imprévision. Le débiteur invoquera ainsi le cas
de hardship lorsque surviennent des évènements qui altèrent
fondamentalement l’équilibre des prestations contractuelles171. Dès lors, le
refus de la théorie de l’imprévision en droit français contrastait avec la
tendance moderne qui était d’admettre la révision du contrat fondée sur la
clause rebus sic stantibus172.

88. L’Italie a été, en 1942, l’un des premiers pays à incorporer dans sa
législation une solution au problème d’imprévision173. En Italie, l’article 1467
du code civil de 1942 disposait déjà que « dans les contrats dont l’exécution est
continue ou périodique ou dont l’exécution est différée, si la prestation des
parties est devenue excessivement onéreuse par l’effet d’événements
extraordinaires et imprévisibles, la partie qui est débitrice de cette prestation
peut demander la résolution du contrat avec les effets établis par l’article 1458 ».
L’alinéa 3 de ce texte ajoute que : « la partie à l’encontre de laquelle est
demandée la résolution du contrat peut l’éviter en offrant de modifier selon
l’équité les termes du contrat ». De même, en droit allemand, la théorie Wegfall
der Geschtiftsgrundlage174 permet la révision du contrat lorsque son
fondement vient à disparaitre175. En droit anglo-américain, la partie lésée
dispose, sur le fondement des mécanismes de commercial impractibility et
frustration of purpose, soit du droit de rompre le contrat ou de le renégocier
lorsqu’une situation en bouleverse l’économie ou anéantit son but, soit d’en
obtenir la résolution en cas de changement de circonstances176.

171S. EBERHARD, Les sanctions de l’inexécution du contrat et les principes UNIDROIT, op.cit,
p.117
172 C’est une doctrine selon laquelle, les éléments d’un contrat ou d’un traité ne restent

applicables que pour autant que les circonstances essentielles qui ont justifiées la conclusion
de cet acte demeurent en l’état et que leur changement n’altère pas radicalement les
obligations initialement acceptées.
173 A. PARENT, L’imprévision en droit comparé : une analyse normative économique, Thèse,

université de McGill, Montréal, 2014, p.79


174 Que l'on pourrait traduire en français comme « la perturbation du fondement contractuel »
175 L.M. MARTINEZ VELENCOSO, « La doctrina de la base del negocio en el Derecho alemán:

antecedentes y nueva regulación en el 313 BGB », Revista Crítica de Derecho Inmobiliario,


681, 2004, p. 292
176 C. BLOCH, A. CERATI-GAUTHIER, V. PERRUCHOT-TRIBOULET, op. cit., p.12

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
45
89. S’inscrivant dans cette même logique, l’article 84 des principes
latinoaméricains du droit des contrats disposent que « si, après sa conclusion,
l’exécution du contrat devient excessivement onéreuse ou si son utilité diminue
de manière significative, du fait de changements de circonstances dont
l’avènement et la portée ne pouvaient être raisonnablement prévues et dont le
risque n’a pas été assumé par la partie lésée, celle-ci pourra demander à ce que
le contrat soit renégocié ». Au regard de ce qui précède, il apparait clairement
que la modification du contrat pour imprévision est un principe fortement
ancré dans les droits modernes et continuer à l’ignorer, c’est se mettre en
marge de ces évolutions modernes du droit.

90. Une admission limitée en France. Au regard de ces évolutions


modernes, et dans un contexte de compétition législative, le droit français ne
pouvait pas rester campé dans sa philosophie d’intangibilité absolue du
contrat. Aussi, la jurisprudence française avait-elle amorcé l’idée de révision
du contrat d’abord sur le fondement du devoir d’exécution de bonne foi177. En
effet, un contractant s’était ainsi vu condamné à verser des dommages et
intérêts à son partenaire auquel il avait refusé la révision d’un contrat le
menant à la ruine178. Ensuite, sur le fondement de l’obligation de loyauté179.
Ce ’’revirement’’ de la jurisprudence Canal de Craponne amorcé par la cour de
cassation fut entériné par le législateur lors de la réforme du code civil
intervenue en 2016180. Il résulte désormais du premier alinéa de l’article 1195
du code civil français que, « si un changement de circonstances imprévisible
lors de la conclusion du contrat rend l'exécution excessivement onéreuse pour
une partie qui n'avait pas accepté d'en assumer le risque, celle-ci peut demander

177 R. CABRILLAC, Droit européen des contrats, 2 ème éd., LGDJ, Paris 2016, p.118, n°182
178 Arrêt Huard, Cass., Com., 3 nov. 1992, bull.civ. n°338, JCP 1993.II.22164, note
G.VIRASSAMI, RTD civ. 1993.124, obs. J. MESTRE
179 Arrêt Chevassus-Marche, Cass. com., 24 nov. 1998, n° 96-18357, Bull. civ. IV, n° 277 ;

RTD civ. 1999, 98, obs. Mestre J. ; RTD civ. 1999, 646, obs. Gautier P.- Y. ; JCP G 1999, I,
143, obs. Jamin C.; Cass. 1re civ.,16 mars 2004, n° 01-15804 : Bull. civ. I, n° 86 ; RLDC
2004/6, n° 222, p. 5, note Houtcieff D. ; D. 2004, p. 1754, note sous arr. Mazeaud D. ; JCP
E 2004, 737, note Renard-Pamyen O. ; RTD civ. 2004,
290, obs. Mestre J. et Fages B.
180 A. FORTUNATO, « Les circonstances de la révision du contrat », LPA. Janvier 2018, n°009,

p.6
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
46
une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses
obligations durant la renégociation. En cas de refus ou d'échec de la
renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date
et aux conditions qu'elles déterminent, ou demander d'un commun accord au
juge de procéder à son adaptation. A défaut d'accord dans un délai raisonnable,
le juge peut, à la demande d'une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la
date et aux conditions qu'il fixe ». Si ce texte a le mérite de consacrer
définitivement le principe de la révision du contrat pour imprévision, sa portée
demeure limitée.

91. La première limite qu’on peut y relever est l’imprécision des


conditions d’admission de la révision. En effet, la théorie de l’imprévision n’est
admise que si trois conditions cumulatives sont réunies : un changement de
circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat, le caractère
excessivement onéreux de l’exécution, l’absence d’acceptation de ces risques
par la partie affectée. Par leur extrême généralité, ces conditions laissent une
très large marge de manœuvre au juge, qui devra en apprécier l’existence, ce
qui rend incertaine l’issue d’une demande de révision181. Il résulte de la
seconde condition que, le simple déséquilibre occasionné par un changement
de circonstance ne suffit pas pour admettre la révision du contrat, c’est aussi
ce qui ressort de l’alinéa premier de l’article 6 :111 des PDEC aux termes
duquel : « une partie est tenue de remplir ses obligations, quand bien même
l'exécution en serait devenue plus onéreuse, soit que le coût de l'exécution ait
augmenté, soit que la valeur de la contre-prestation ait diminué ». Même si les
conditions d’exécution du contrat deviennent plus difficiles et plus onéreuses
que ce que les parties avaient espéré, le débiteur est tenu d’exécuter sa
prestation, quitte à dépenser un peu plus que ce pourquoi il s’était engagé.

92. La théorie de l’imprévision ne vise donc pas à garantir un équilibre


absolu entre les prestations des parties, mais à empêcher qu’une exécution

181F. TERRE, Ph. SIMLER, Y. LEQUETTE, F. CHENEDE, Droit civil : Les obligations, 12ème
éd., D., Paris, 2019, p.717

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
47
excessivement onéreuse ruine l’une d’entre elles. Mais, à partir de quel seuil
l’exécution peut-elle être qualifiée « d’excessivement onéreuse » ?
L’appréciation sera faite au cas par cas, en tenant compte de la situation
économique du débiteur. Pour qu’il y ait onérosité extrême, il faut que le
contrat soit gravement déficitaire en raison de la hausse du coût d’une
prestation, ou de la diminution de la valeur de la contrepartie182. Une chose
est claire, c’est que tout changement de circonstances qui entraine un
déséquilibre n’implique pas forcément une modification du contrat.

93. En outre, même lorsque l’inexécution serait qualifiée


« d’excessivement onéreuse », l’article 1195 précise que l’ouverture des
négociations n’a pas un effet suspensif sur l’exécution du contrat. Le débiteur
doit continuer à s’exécuter pendant la période de négociation et même après
la négociation en cas d’échec de celle-ci183. Ceci parait très risqué, car le
débiteur pourrait se ruiner avant même d’être parvenu à un accord avec son
cocontractant. Pour remédier à cela, les contractants peuvent profiter du
caractère supplétif de cette disposition pour aménager les conditions de mise
en œuvre de la théorie de l’imprévision. Ils peuvent ainsi prévoir que
l’ouverture des négociations aura un effet suspensif sur l’exécution du
débiteur, ce qui sera de nature à mieux préserver les droits de la partie en
détresse.

94. Toutefois, l’innovation de l’ordonnance sur l’admission de


l’imprévision est modeste. L’alinéa 2 de l’article 1195 donne au juge un pouvoir
d’adaptation du contrat, mais seulement après le refus ou l’échec d’une
renégociation par les parties, et si une demande d’un commun accord au juge
de procéder à l’adaptation du contrat n’est pas possible184. Tout en cédant à
la tendance moderne qui consiste à admettre l’imprévision, le législateur

182 Ibid.
183 L. ANDREU, N. THOMASSIN, Cours de droit des obligations, 4ème éd., Gualino, Paris,
2019, p.240, n°611
184 H. LE NABASQUE, « L'imprévision et les cessions de droits sociaux », BJS sept. 2016, n°

09, p.538
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
48
français a tenu à rester fidèle à l’idée que le contrat est la chose des parties185.
Il a donc opté pour une consécration a minima de la théorie de l’imprévision
en privilégiant plutôt la renégociation du contrat entre les parties186 dont seul
l’échec peut conduire à une modification du contrat par le juge.

2/ Une évolution envisageable en droit de l’OHADA

95. Le silence du droit positif. En droit de l’OHADA, ni le code civil


ancien, ni le COCC, ni le code malien des obligations, ni même les Actes
uniformes ne consacrent la possibilité d’une révision du contrat pour
imprévision. Dans leurs droits communs internes, les Etats membres de
l’OHADA sont restés fidèles à la tradition française issue de la jurisprudence
Canal de Craponne. L’article 97 du COCC dispose à cet effet que, « le contrat
ne peut être révisé ou résilié que du consentement mutuel des parties ou pour
les causes prévues par la loi ». Dans une région du monde en proie à des crises
politiques et économiques, le rejet de la théorie de l’imprévision constitue un
facteur de haut risque pour la sauvegarde des relations contractuelles et la
protection des investissements. Or, le droit OHADA vise à séduire les
investisseurs étrangers en leur offrant un cadre juridique suffisamment
protecteur de leurs capitaux187. Dans ce contexte, la révision judiciaire du
contrat pour imprévision pourrait constituer un moyen de sauver le contrat,
en dissuadant la partie pour qui il est devenu trop onéreux de recourir à sa
résolution unilatérale188.

96. Lors des consultations préliminaires à la rédaction de son avant-


projet d’Acte uniforme sur le droit des contrats, le professeur Marcel
FONTAINE indique d’ailleurs que les trois quarts de ses interlocuteurs se sont

185 J. CARTWRIGHT, « Un regard anglais sur les forces et faiblesses du droit français des
contrats », RDC 2015, n°3, p.691 ; L. AYNES, A. BENABENT, « Force majeure et révision pour
imprévision », RDC mars 2021, n°01, p.157.
186 N. MOLFESSIS, « Le rôle du juge en cas d’imprévision dans la réforme du droit des

contrats », La semaine juridique - édition générale - n° 52 - 21 décembre 2015, p.2391


187 Préambule du traité de l’OHADA alinéa 6.
188 J-P. TOSI, Le droit des obligations au Sénégal, B.A.M, t.34, 1981, p.148, n°411.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
49
déclarés favorables à l’admission de la révision du contrat pour imprévision,
évoquant à cet effet les mauvais souvenirs laissés par la dévaluation du Franc
CFA189. En effet, la dévaluation du franc CFA a laissé des traces profondes et
exposé les limites d’un droit contractuel africain qui ignorait la possibilité de
renégocier les contrats pourtant affectés par la conjoncture190. L’admission de
la théorie de l’imprévision en droit OHADA s’avère donc être un impératif au
regard du contexte social, politique et économique.

97. L’existence des palliatifs. Le silence du droit positif OHADA ne


prive pas totalement les contractants des moyens de réagir face à une
circonstance imprévisible. En effet, il existe des palliatifs pouvant permettre
dans l’espace OHADA, de parvenir aux solutions recherchées par la
consécration de la théorie de l’imprévision. D’abord, en vertu du principe de
la liberté contractuelle, les praticiens du droit ont créé des clauses qui
permettent de se prémunir contre les risques d‘imprévision191. Il en va ainsi
de la clause de renégociation, les clauses d’adaptation du prix et les clauses
de hardship ou de sauvegarde. Toutes ces clauses permettent aux parties de
prévoir une échappatoire à un changement futur des circonstances
économiques qui prévalaient au moment de la formation du contrat192,
rendant l’exécution du contrat extrêmement onéreuse pour l’une d’elles. Ces
clauses peuvent toutefois s’avérer dangereuses dans l’hypothèse où leur
rédaction ne délimiterait pas clairement leur champ d’application.

98. Ensuite, le droit OHADA connait la notion de bonne foi. Aux termes
de l’article 237 in fine de l’AUDCG, « les parties sont tenues de se conformer

189 M. FONTAINE, « Note explicative à l’avant-projet d’acte uniforme sur le droit des contrat »,
Rev. dr. unif. 2008, p.579, n°40
190 E. S. DARANKOUM, « La protection du contrat dans l’avant-projet d’Acte
uniforme OHADA sur le droit des contrats : conclusion, exécution et remèdes en cas
d’inexécution », Rapport présenté au Colloque sur “L’harmonisation du droit OHADA des
contrats” tenu à Ouagadougou (Burkina Faso) du 15 au 17 novembre 2007, p.240
191 N. DISSAUX, « Renégocier le contrat en cours d'exécution : les apports du nouveau droit des

contrats », Gaz. Pal. 18 mai 2018, n°hors-serie 2 – p. 24


192 D.N.D BADAWE KALNIGA, « Le contrat déséquilibré par l’imprévision à l’aune de l’avant-

projet de texte uniforme portant droit général des obligations », International Multilingual
Journal of Science and Technology, Vol. 6 Issue 7, July – 2021, p.3691
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
50
aux exigences de la bonne foi. Elles ne peuvent exclure cette obligation, ni en
limiter la portée ». Sur le fondement de cette notion de bonne foi et du devoir
de loyauté qu’elle implique, la partie victime d’un changement de circonstance
est fondée à solliciter de l’autre, la renégociation du contrat193. La
jurisprudence française a pu ainsi considérer que le refus de renégociation
par le contractant profitant de la modification des circonstances économiques
était contraire à la bonne foi194. Le juge africain peut s’inspirer de cette
jurisprudence pour modifier le contrat en cas d’échec de la renégociation de
celui-ci.

99. Enfin, il est reconnu au juge le pouvoir d’interpréter le contrat, dans


cette logique, il doit faire ressortir l’intention des parties195, selon le
sens qu’une personne raisonnable, de même qualité que l’autre partie, placée
dans la même situation, aurait déduit de son comportement196. Partant de ce
postulat, il est clair qu’en contractant, les parties n’ont pas prévu se mettre
dans une situation où l’exécution devient tellement onéreuse voire même
désastreuse pour le débiteur. Dès lors, en vertu de son pouvoir
d’interprétation et du devoir de respecter la volonté des parties, le juge peut
être fondé à modifier le contrat en ramenant les obligations des parties à des
proportions raisonnables197. C’est dans ce sens que Bartole soutenait qu’il
faut supposer dans chaque contrat la clause rebus sis stantibus, c’est-à-dire
supposer que les parties n’ont entendu maintenir le contrat que si les
circonstances initiales ne changent pas198.

100. Une consécration à parfaire. La nécessité de consacrer la théorie


de l’imprévision en droit OHADA a été entendue par les rédacteurs des avant-

193 PH. STOFFEL-MUNCK, « Quand le devoir de renégocier impose de faire des contre-
propositions acceptables », RDC 2018, n° 1, p.21
194 Cf. Arrêt HOLDER de la chambre commerciale de la cour de cassation du 15 mars 2017 ,

n°15-16406, F–D ; Cass. Com., 3 nov. 1992, JCP 1993, éd. G. II , 22164, note VIRASSAMY;
RTD civ. , 1993, 124, obs. J. MESTRE; Cass. Com, 24 nov. 1998, JCP 1999, éd. G. II,
12210, note Y. PICOD; RTD civ., 1999, 98, obs. J. MESTRE
195 V. VIGNEAU, « Le juge et l’équilibre du contrat », LPA., Mars 2018, n°065, p.4
196 AUDCG, Art. 238
197 G. RIPERT, La règle morale dans les obligations civiles, 4 ème éd., L.G.D.J, Paris, p.144
198 Ibid.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
51
projets d’Actes uniformes sur le droit des contrats qui la consacrent
respectivement à l’article 162 pour le projet de la fondation pour le droit
continental et l’article 6/24, pour l’avant-projet Fontaine. Cette théorie est
admise dans les deux textes sous l’appellation de « bouleversement des
circonstances » défini comme, la survenance d’un événement qui altère
fondamentalement l’équilibre des prestations, soit que le coût de l’exécution
des obligations ait augmenté, soit que la valeur de la contre-prestation ait
diminué. Pour être caractérisé, le bouleversement des circonstances exige la
réunion de quatre conditions.

101. D’abord, l’évènement doit être connu par la partie lésée après la
conclusion du contrat, ce qui implique en second lieu que pendant les
négociations précontractuelles, elle n’ait pas pu raisonnablement prendre un
tel évènement en considération. Ensuite, il doit s’agir d’un événement
échappant au contrôle de la partie lésée, ce qui s’apparente au caractère
insurmontable et enfin, le risque de cet événement doit ne pas avoir été
assumé par la partie victime de la circonstance survenue. En fait, il est
possible qu’une partie accepte lors de la conclusion du contrat, d’assumer les
risques inhérents à la survenance d’une circonstance imprévisible. Une telle
clause neutralise l’invocation de la théorie de l’imprévision199. Il est à noter que
le législateur OHADA fait le choix de ne pas utiliser l’expression « exécution
extrêmement onéreuse » du droit français, et ce choix nous semble judicieux
en raison du caractère très imprécis de cette expression. Une fois ces
conditions réunies, le cocontractant lésé peut solliciter de son partenaire,
l’ouverture d’une renégociation de leur contrat, en vue de l’adapter à la
situation créée par l’évènement imprévisible.

102. Aux termes des articles 162, alinéa 1 du projet d’acte uniforme,
6/24 alinéa 1 de l’avant-projet Fontaine, « en cas de bouleversement des
circonstances, la partie lésée peut demander l’ouverture de renégociations. La

199R. AKONO ADAM, « réflexions sur la théorie de l’imprévision en droit OHADA des contrats »,
Penant, n°910, janvier – mars 2020, p.103

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
52
demande doit être faite sans retard injustifié, et être motivée ». Il y a ainsi une
similarité entre ces textes et l’article 1195 du code civil français. Le contrat
sera donc préservé nonobstant les difficultés survenues, si les parties
parviennent elles-mêmes à un accord. Dans le cas contraire, comme en
France, l’avant-projet OHADA prévoit le recours au juge, mais avec moins de
précision que le code civil issu de la réforme de 2016. Par ailleurs, comme en
droit français, l’avant-projet OHADA ne fait pas de l’ouverture des
négociations une condition de suspension de l’exécution du contrat. Sur ce
point, le législateur de l’OHADA est invité à se démarquer de son homologue
français en réécrivant ce texte. Il peut soit admettre que dans le souci de
préserver les intérêts du cocontractant victime, son exécution sera suspendue
en attendant l’issue de la renégociation, soit que l’exécution du contrat se
poursuit, mais en précisant le temps de la renégociation.

103. En cas d’échec de la renégociation amiable, l’avant-projet OHADA


limite les pouvoirs du juge soit à la rupture du contrat, ou à son adaptation,
évitant ainsi l’usage du terme « révision », qui est d’ailleurs au cœur de la
théorie de l’imprévision200. Alors qu’en France, l’article 1195 reconnait au juge
trois possibilités. En effet, en dehors du pouvoir de résolution et celui
d’adaptation du contrat, le code civil issu de la réforme reconnait clairement
au juge le pouvoir de réviser le contrat. Cette révision constitue une justice
particulière pour le débiteur201.

B/ La suspension du contrat en cas de force majeure

104. Il peut sembler surprenant d’aborder la force majeure au rang


des remèdes à l’inexécution du contrat. Car, traditionnellement, la force
majeure rend impossible toute exécution du contrat même ultérieure de

200 M.-P. SARR, « Plaidoyer pour la consécration légale de la théorie de l'imprévision dans le
futur Acte uniforme relatif au droit des obligations de l'OHADA », LPA 7 juill. 2020, n°135, p. 6
201 G. RIPERT, La règle morale dans les obligations civiles, op. cit., p.155, n°88

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
53
manière définitive et irrévocable202. Mais, cette conception classique a évolué.
Dans le souci de sauvegarder le contrat, la survenance d’un cas de force
majeure n’entraine plus ipso facto la rupture du contrat. La suspension du
contrat devient un effet de la force majeure, lorsqu’elle est temporaire203. On
assiste à une dualité de régime de la force majeure différemment admise dans
les deux systèmes juridiques. Les droits OHADA et français diffèrent tant sur
la définition (1) que sur le régime juridique applicable (2).

1/ Définition de la force majeure

105. A l’impossible nul n’étant tenu, lorsque l'objet du contrat devient


impossible à exécuter, les droits français et OHADA permettent aux parties de
se libérer de leurs engagements en invoquant le principe de la force majeure.
La force majeure permet ainsi au cocontractant qui en subit les conséquences
de s’exonérer de sa responsabilité contractuelle. Elle est l'une des rares
notions juridiques à avoir un très fort pouvoir évocateur auprès des juristes
et des non-juristes, puisqu'elle permet d'exonérer le défendeur de toute
responsabilité204. Ce principe est l’un des plus discutés en droit, et cette vive
discussion justifie le fait que la notion ne soit pas appréhendée de façon
identique dans les deux systèmes.

106. En droit commun de l’OHADA, le code civil ancien consacre la


force majeure sans en définir un régime juridique spécifique. L’article 1148 de
ce texte dispose en effet qu’« il n'y a lieu à aucuns dommages et intérêts lorsque,
par suite d'une force majeure ou d'un cas fortuit, le débiteur a été empêché de
donner ou de faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit ». Ce
texte ne donne ni définition ni éléments constitutifs de la force majeur qu’il
assimile d’ailleurs au cas fortuit. Il faut recourir au droit de la vente

202 V. NICOLAS, Droit des obligations. Le contrat, op. cit. p.303, n°811.
203 J. GHESTIN, « L'exception d'inexécution », Rapport français in M. FONTAINE (dir.) et G.
VINEY (dir.), Les sanctions de l'inexécution des obligations contractuelles. Etudes de droit
comparé, op. cit., p.24, n°22.
204 F. GRÉAU, « Force majeure », in, Rep. Dr. Civ., juin 2017, pp. 1-11

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
54
commerciale pour donner à la force majeure un régime juridique en droit de
l’OHADA.

107. Aux termes de l’article 294 de l’AUDCG « constitue un cas de force


majeure tout empêchement indépendant de la volonté et que l’on ne peut
raisonnablement prévoir dans sa survenance ou dans ses conséquences ». Il
résulte de ce texte que pour qu’il y ait force majeure en droit OHADA, il faut
un empêchement involontaire, lequel doit avoir été imprévisible au moment
de la conclusion du contrat. L’usage du terme empêchement constitue une
maladresse du législateur OHADA205, car trop générique et pouvant aussi
renvoyer au cas fortuit ou au fait d’un tiers. La formulation du législateur
OHADA peut ainsi laisser croire que tout empêchement indépendant de la
volonté du débiteur constitue une cause d’exonération de ce dernier, ce qui
n’est pas le cas. Sur le critère d’imprévisibilité, la CCJA a approuvé une cour
d’appel qui a rejeté l’invocation de la force majeure par le débiteur, au motif
que le retard qui lui était reproché avait été consommé avant même la
survenance de l’évènement supposé constituer un cas de force majeur, ce qui
rend impossible la caractérisation du critère d’imprévisibilité206.

108. Par ailleurs, l’évènement constitutif de force majeure doit être


irrésistible, et dû à une cause étrangère. L’irrésistibilité s’apprécie en référence
aux diligences et forces normales d’une personne placée dans des conditions
normales207. L’irrésistibilité est donc appréciée au cas par cas en fonction de
la situation particulière du débiteur. Dans un arrêt rendu le 23 décembre
2021, la CCJA avait jugé que la pandémie de Covid19 ne constituait pas en
soi un cas de force majeure, l’irrésistibilité devant s’apprécier en fonction des

205 A. NDORDJI, Théorie des risques et transfert de propriété. Comparaison des droits
français, de l’OHADA et du commerce international, Th., Université de Poitiers ; Université du
Tchad, 2018, p.22.
206 CCJA, 2e ch., 23 juin 2016, n° 124/2016, Sté SAGA France c/ Sté SOPAM SA, L’Essentiel

droits africains des affaires, n°1 Janvier 2017, p.3.


207 R. MASAMBA MAKELA, Op.Cit

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
55
difficultés du débiteur, lesquelles doivent avoir pour cause exclusive cette
pandémie208.

109. Cette définition du législateur OHADA est une inspiration


maladroite209 de la CVIM210. Les dispositions relatives à la force majeure
n’étant pas d’ordre publique, les parties peuvent donner elles-mêmes à cette
notion, une définition adaptée à leur contrat. Elles peuvent ainsi déterminer
les évènements qui peuvent être qualifiés de force majeure.

110. En France, la définition de la force majeure a varié dans le temps.


Trois caractères étaient traditionnellement retenus : imprévisibilité,
irrésistibilité, extériorité. Puis, la Cour de cassation avait amorcé une
distinction entre la matière contractuelle, dans laquelle le critère
d’irrésistibilité pouvait suffire, et la matière délictuelle, pour laquelle elle
maintenait l’exigence des trois éléments. A plusieurs reprises, l’assemblée
plénière211 donna, ou tenta de donner, une définition unique de la force
majeure, valable quelle que soit la matière considérée en retenant deux
critères : un événement imprévisible et irrésistible212. Elle semble ainsi
abandonner le critère d’extériorité, autrefois évoqué. C’est cette évolution que
consacre la réforme du code civile intervenue en 2016.

111. En effet, l’article 1218 du nouveau code civil français dispose


désormais qu’« il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un
événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être

208 CCJA, 2ème Ch., n°219/2021 du 23 décembre 2021, publié dans LegiAfrica n°2-23 février
2022
209 A. NDORDJI. Op.cit., p.23.
210 79.1 de la CVIM dispose que, « une partie n’est pas responsable de l’inexécution de l’une

quelconque de ses obligations si elle prouve que cette inexécution est due à un empêchement
indépendant de sa volonté et que l’on ne pouvait raisonnablement attendre d’elle qu’elle le
prenne en considération au moment de la conclusion du contrat, qu’elle le prévienne ou le
surmonte ou qu’elle en prévienne ou surmonte les conséquences ».
211 Cass., ass. plén., 14 avr. 2006, n° 04-18.902, JCP 2006. II 10087, note P. GROSSER ; RTD

civ. 2006. 775, obs. P. JOURDAIN


212 Civ. 2e, 11 janv. 2001, n° 99-10.417, P II, n° 9; D. 2001. IR 433 ; LPA 2 oct. 2001, note S.

SZAMES ; RTD civ. 2001. 375, obs. P. JOURDAIN – Cass., ass. plén., 14 avr. 2006, n° 04-
18.902 , 02-11.168 (2 esp).
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
56
raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne
peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son
obligation par le débiteur ». Il résulte de ce texte que la force majeure n’est
admise que pour un évènement échappant au contrôle du débiteur et non du
créancier213. Le critère d’irrésistibilité a pour conséquence d’empêcher le
créancier d’invoquer celle-ci afin d’obtenir la résolution ou la suspension du
contrat, lorsqu’il est empêché de jouir de la prestation du débiteur par un
coup du sort214. Cette précision est importante et la cour de cessation
française a eu l’occasion récemment de rappeler que « le créancier qui n’a pu
profiter de la prestation à laquelle il avait droit ne peut obtenir la résolution du
contrat en invoquant la force majeure »215. Le législateur français a ainsi repris
la définition prétorienne de la force majeure en matière contractuelle,
délaissant le traditionnel critère d’extériorité216, pour ne retenir que ceux
d’imprévisibilité et d’irrésistibilité. Cette définition donnée par le législateur
français est plus précise et permet de faire ressortir les éléments classiques
de constitution de la force majeure.

2/ Le régime de la force majeure

112. Par l’invocation de la force majeure, le débiteur vise deux


conséquences. Il cherche d’abord à se libérer de la dette qu’il ne peut plus
honorer217, échappant ainsi à toute responsabilité et à toute pénalité. Ensuite,
il peut vouloir obtenir la suspension ou la résolution de plein droit du contrat,
selon que l’empêchement est ou non définitif218.

213 L. TRANCHANT, « La force majeure ne peut être invoquée par le créancier de l'obligation »,
LEDIU févr. 2021, n°02, p.3.
214 L. AYNES, A. BENABENT, « Force majeure et révision pour imprévision », RDC mars 2021,

n°01, p.157.
215 Cass. 1re civ., 25 nov. 2020, n°19-21060, Sté Chaîne thermale du soleil c/ M. et Mme H.,

FS-PBI ; D. HOUTCIEFF, « Force majeure : n'avoir plus d'intérêt à la prestation ne dispense


pas d'exécuter », Gaz. Pal. 13 avril 2021, n°14, p.30
216 Rapport au président de la république relatif à l’ordonnance du 10 février 2016, p.17
217 C. civ., art. 1351.
218 C. civ., art. 1218 al.2

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
57
113. En droit de la vente commerciale OHADA, l’article 294 énonce
qu’« une partie n’est pas responsable de l’inexécution de l’une quelconque de
ses obligations si elle prouve que cette inexécution est due à un empêchement
indépendant de sa volonté, tel que notamment le fait d’un tiers ou un cas de
force majeure ». Ce texte reprend la solution du droit commun résultant de
l’article 1148 du code civil ancien. Une telle rédaction implique qu’en droit
OHADA, la force majeure n’ait pour conséquence que l’exonération du
débiteur. De sorte que, le contrat sera résolu de plein droit à chaque fois que
la force majeure sera caractérisée. Une résolution aussi hâtive du contrat
constitue une perte de ressources et ne participe pas à la protection des
investissements visée par le droit OHADA. Cette position ne participe pas non
plus à la protection du lien contractuel et est contraire à la philosophie de
favor contractus qui innerve le droit moderne de l’inexécution contractuelle.

114. En effet, en droit contemporain, la force majeure n’entraine plus


ipso facto l’exonération totale du débiteur, il faut tenir compte du caractère
permanent ou non du fait constitutif de force majeure. C’est ainsi qu’en droit
français, l’alinéa 2 de l’article 1218 du code civil dispose que : « Si
l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue, à moins
que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si
l'empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont
libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et
1351-1 ». Ainsi, contrairement à son homologue africain, le législateur français
détermine les effets de la force majeure selon la gravité de l’empêchement.

115. Lorsque l’empêchement est définitif, le débiteur est libéré de toute


responsabilité et le contrat sera résolu. Par contre, dans le cas d’un
empêchement temporaire, le débiteur ne sera pas fondé à résoudre le contrat,
mais à suspendre son exécution pendant la durée de l’évènement. Cette
possibilité de suspendre le contrat permet de réagir à la défaillance du
débiteur, en préservant le lien contractuel. Notons que l’empêchement sera
souvent définitif soit parce qu’il anéantit toutes les chances de poursuite du

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
58
contrat, soit parce que, en fonction de son objet, le contrat devait être exécuté
à la date butoir, de sorte que, tout retard rendra la prestation inutile.

Paragraphe 2 : La correction d’une inexécution fautive

116. Lorsqu’il s’est exécuté, mais de manière imparfaite, le


cocontractant défaillant a droit à une seconde chance pour sauver le contrat.
Il peut sauvegarder le contrat soit en procédant au remplacement de son objet
(A), soit en y apportant les réparations nécessaires (B).

A/ Le remplacement de l’objet du contrat

117. Délimitation. La conception du remplacement en droit spécial


se démarque de celle prévue par le droit commun219. En droit commun de la
vente, il consiste en une possibilité offerte à l’acheteur de s’approvisionner
chez un autre fournisseur, aux frais du vendeur défaillant, en cas
d’inexécution par ce dernier de son obligation de délivrance. En droit spécial,
le remplacement est un usage dont les origines remontent au droit romain220
et qui consiste à substituer les marchandises non conformes par celles qui
répondent aux prévisions contractuelles. C’est dans ce sens que nous
aborderons le remplacement ici.

118. Fondement. S’inspirant de la convention de vienne, en son


article 46 alinéa 2, l’article 283 de l’AUDCG dispose que, « si l’acheteur invoque
dans les délais fixés aux articles 258 et 259 du présent Acte uniforme un défaut
de conformité des marchandises livrées, le vendeur a la faculté d’imposer, à ses
frais exclusifs et sans délai, à l’acheteur le remplacement des marchandises
défectueuses par des marchandises conformes ». Il s’agit d’une faculté donnée
au vendeur qui, en violation de son obligation de conformité a livré une

219G. JIOGUE, « La vente commerciale en droit uniforme OHADA »,op. cit., p.2133
220E. MONTCHO AGBASSA, « Le favor contractus et le droit OHADA », Revue Togolaise de
Sciences Juridiques (RTSJ), Juillet - Décembre 2012, N°0003, p. 51

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
59
marchandise défectueuse, de la remplacer par celle qui sera conforme aux
attentes de son acheteur. Il est question ici de donner au débiteur défaillant
la possibilité de se corriger en procédant à l’exécution en nature du contrat.

119. En France, l’article L. 217-9 du code de la consommation dispose


qu’« en cas de défaut de conformité, l'acheteur choisit entre la réparation et le
remplacement du bien ». Comme son homologue de l’OHADA, le législateur
français écarte la résolution et opte pour la poursuite de la relation
contractuelle, en cas de défaut de conformité. Le remplacement est ainsi
imposé au créancier, de l’obligation de livraison mal exécutée, comme une
alternative à la rupture du contrat. Abondant dans le même sens, l’Article 8 :
104 des PDEC dispose que, « la partie dont l'offre d'exécution n'est pas acceptée
par le co-contractant pour défaut de conformité au contrat peut faire une offre
nouvelle et conforme si la date de l'exécution n'est pas arrivée, ou si le retard
n'est pas tel qu'il constituerait une inexécution essentielle ». Le droit européen
des contrats reconnait ainsi au cocontractant qui a violé son obligation de
conformité de se racheter en offrant une chose conforme.

120. En droit international, l’article 7.2.3 des principes d’UNIDROIT


dispose que « le droit à l’exécution comprend, le cas échéant, le droit à la
réparation ou au remplacement de l’objet ». Il s’agit donc d’un remède à
l’inexécution de l’obligation de livraison, que le vendeur peut unilatéralement
imposer à son acquéreur sans que celui-ci puisse le refuser. De même, en
vertu du droit à l’exécution corrective221 dont il dispose, le créancier peut aussi
exiger de son cocontractant défaillant le remplacement de l’objet du contrat
défectueux par un objet conforme aux prévisions contractuelles. Ce
mécanisme est un corolaire du droit à l’exécution nature, et une certaine
doctrine belge y voit un prolongement de l’obligation de délivrance222.

221 H. KOTZ, B. FAUVARQUE-COSSON, Droit européen des contrats, Sirey, Paris 2020,
p.266, n°326
222 P. WERY, « Réflexions comparatives sur la réparation et le remplacement de la chose vendue

affectée d’un défaut de conformité ou d’un vice caché », Mélanges offerts à Marcel Fontaine,
Bruxelles, Larcier, 2003, p. 569
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
60
121. Efficacité du remplacement. La livraison d’une chose non
conforme constitue en principe une inexécution qui devrait donner lieu à la
rupture du contrat par l’autre partie. Mais, dans le souci de sauvegarder la
relation contractuelle, les droits OHADA et français mettent à la disposition
du créancier, une alternative autre que la résolution du contrat, c’est le
remplacement. En imposant à l’acheteur d’accepter le remplacement que
propose le vendeur, les deux systèmes juridiques marquent leur attachement
à l’exécution en nature du contrat et la préservation des relations
contractuelles. Toutefois, pour valablement s’imposer au créancier, le
remplacement doit se faire sans délai223, c’est-à-dire dans l’intervalle de temps
imparti au débiteur pour exécuter son contrat. Lorsqu’il doit intervenir après
le délai d’exécution, le remplacement nécessite le consentement du créancier.
C’est ce qui résulte de l’article 283 de l’AUDCG aux termes duquel, « l’acheteur
peut convenir avec le vendeur d’un délai supplémentaire pour le remplacement,
aux frais exclusifs du vendeur, des marchandises défectueuses par des
marchandises conformes ». L’usage de la forme potestative montre qu’après le
délai d’exécution convenu dans le contrat, le créancier, en l’occurrence
l’acheteur, peut refuser le remplacement de la marchandise en refusant tout
simplement d’octroyer à son vendeur un délai supplémentaire. En France, le
vendeur peut refuser de de remplacer la marchandise si ce choix entraîne un
coût manifestement excessif, compte tenu de la valeur du bien ou de
l’importance du défaut224. L’appréciation du caractère disproportionné du
choix relève de l’appréciation souveraine du juge225 en cas de contentieux.

122. L’efficacité de ce remède réside dans le fait qu’il permet une


exécution en nature du contrat226. Dans l’ancien Acte uniforme, le
remplacement n’était possible que si le défaut de conformité constituait un

223 J.C. JAMES, « La vente commerciale OHADA, précurseur d’un droit harmonisé des
contrats ? », op.cit., p.45, n°54
224 F. COLLART DUTILLEUL, Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 11 ème, D.

Paris 2019, p.226, n°333


225 Cass. civ. 1re, 9 décembre 2015, nº 14-25910, Bull. civ. I ; JCP G 2016, nº173, chron. G.

PAISANT.
226 C. AUBERT DE VINCELLES, J. ROCHFELD, L’acquis communautaire. Les sanctions de

l’inexécution du contrat, Economica, Paris, 2006, p.17, n°27


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
61
manquement essentiel au contrat. Le nouvel AUDCG a supprimé cette
exigence ouvrant ainsi au remplacement, tout défaut de conformité aussi
minime soit-il. Le législateur de l’OHADA s’est ainsi démarqué de la convention
de vienne. Cette ouverture ne se justifie pas, car le remplacement devrait
intervenir que si la chose livrée est impropre à l’usage souhaitée par
l’acquéreur, c’est à dire lorsque le défaut prive substantiellement le créancier
de ce qu'il était en droit d'attendre du contrat, ou encore lorsque cette
défaillance a été intentionnellement occasionnée par le débiteur. En fait, le
remplacement impliquant des couts supplémentaires pour le débiteur, il serait
déloyal d’exiger de lui le remplacement d’une chose qui, quoique défectueuse,
conserve son utilité pour le créancier, car pouvant tout de même servir à
l’usage voulu par ce dernier. Pour éviter l’usage abusif de cette faculté, les
parties devraient prévoir dans leur contrat, une clause de remplacement, en
précisant elles-mêmes les caractères du défaut qui devra donner lieu au
remplacement.

123. Une différence d’approche. Le droit OHADA et le droit français


n’abordent pas cette question sous un même angle. En effet, en droit OHADA,
ce remède est mis à la disposition du vendeur, alors qu’en droit français, c’est
l’acheteur qui en profite. Par ailleurs, en droit OHADA, le débiteur peut
imposer le remplacement à son créancier, lequel ne saurait le refuser, sauf à
démontrer que le contrat a perdu son utilité. En droit français par contre,
l’acheteur ne peut pas imposer au vendeur une marchandise de remplacement
si la réparation de la marchandise défectueuse est possible et moins onéreuse.
Le texte cité supra dispose à cet effet que, « (…) le vendeur peut ne pas procéder
selon le choix de l'acheteur si ce choix entraîne un coût manifestement
disproportionné au regard de l'autre modalité, compte tenu de la valeur du bien
ou de l'importance du défaut (…) ».

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
62
124. Un remède controversé. L’admission d’une possibilité de
remplacement de la marchandise défectueuse n’a jamais fait l’unanimité,227
tant dans la doctrine qu’en jurisprudence. En effet, selon la position
dominante, on ne peut pas reconnaitre au débiteur défaillant un droit
d’imposer au créancier le remplacement de la chose défectueuse. Car, il
s’agirait soit d’une novation par changement d’objet soit de la résolution du
premier contrat suivie de la conclusion d’un nouveau contrat228. Dans un cas
comme dans un autre, il faudra nécessairement l’accord du créancier. Dans
le même sens, la jurisprudence française a souvent refusé au vendeur la
possibilité de contourner la demande en résolution de l’acheteur, en offrant le
remplacement de la chose défectueuse229.

125. Toutefois, le remplacement ne saurait se confondre à la novation.


En effet, la novation emporte extinction d’une obligation qui est substituée par
une autre obligation nouvellement créée230. Or, en matière de remplacement,
il n’y a pas substitution d’obligation, l’obligation de livraison d’une chose
conforme qui pèse sur le vendeur demeure. Par le remplacement de la chose
non conforme, c’est cette même obligation qu’exécute le vendeur. En plus, il
n'y a novation que si les parties ont eu la volonté commune d'éteindre une
obligation pour lui en substituer une autre, nouvelle231, de sorte qu’en droit
commun de l’OHADA, l’article 1273 du code civil ancien précise que la
novation ne se présume pas. Dès lors l’assimilation du remplacement à la
novation n’a donc pas lieu d’être.

227 E. DEGRAVE, « La vente d’une chose non conforme », in Annales de droit de Louvain, vol.
65, 2005, n°1-2
228 Ibid.

229 Cass., civ. 1ère, 11 juin 1980, Bull. civ., I, n°185 ; Cass. Civ. 1ère, 5 mai 1982, Bull. civ.,

1982, I, n°163.
230 C.civ. art. 1329 al. 1 er
231
Ph. SIMLER, « Régime général des obligations. – Opérations sur obligations. – Novation. –
Modes particuliers – Novation par changement de l'obligation », JurisClasseur Notarial
Répertoire V° Contrats et obligations, Fasc. 100, n°1.
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
63
B/ La réparation du défaut de la commande livrée

126. Dans le contrat de vente, l’obligation principale du vendeur est


de livrer une chose conforme aux prévisions contractuelles232. Le défaut de
conformité s’entend donc de toute différence entre la quantité, la qualité, le
type, ainsi que l’emballage et même le conditionnement de la marchandise, et
ce qui a été initialement convenu par les parties dans le contrat233. Par ailleurs,
si les parties ont elles-mêmes déterminé les principales caractéristiques de
l’objet du contrat, le débiteur manque à son obligation de conformité, en ne
livrant pas une chose présentant ces caractéristiques. Dans l’hypothèse où les
parties n’ont pas donné de précisions sur les caractéristiques essentielles de
l’objet du contrat, l’article 35.2 de la CVIM dispose, en ce qui concerne la vente
internationale que les marchandises doivent être propres à remplir l’usage
auquel elles servent habituellement. Ainsi, avant toute mise en œuvre des
remèdes plus contraignants, la CVIM privilégie la possibilité de réparation de
la prestation de la partie fautive234.

127. Un remède imposé au créancier en droit de l’OHADA. Moins


radicale que le remplacement, la réparation permet la mise en conformité du
bien objet du contrat. Aux termes de l’article 257 de l’AUDCG « en cas de
livraison anticipée, le vendeur peut, jusqu’à la date prévue pour la livraison, soit
imposer la livraison de nouvelles marchandises conformes, soit effectuer la
réparation du défaut de conformité des marchandises livrées, dès lors que
l’exercice de ce droit ne cause à l’acheteur ni dommage, ni frais ». En effet, dans
un contrat de vente, lorsque le vendeur a livré à l’acheteur un bien qui ne
correspond pas à ses attentes, plutôt que de refuser le bien et rompre le
contrat, ou de demander le remplacement dudit bien, le vendeur peut procéder

232 C. SAMSON, « La Convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de
marchandises : Étude comparative des dispositions de la Convention et des règles de droit
québécois en la matière », Les Cahiers de droit, n°23, 1982, p. 945.
233 Art. 35 CVIM

234 J. BALMACEDA, La vente de marchandises dans les systèmes de droit civil et de common

law : Une étude des droits anglais, français et chilien, Th. Paris1 Panthéon Sorbonne 2017,
p. 311
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
64
à la correction du défaut, en apportant à la chose livrée, les soins visant à la
rendre conforme aux prévisions initiales.

128. En droit de l’OHADA, le choix du cocontractant défaillant de


réparer son défaut s’impose au créancier qui ne saurait le refuser. Cette
position se justifie par le fait que, la réparation ne fait perdre au créancier ni
temps ni argent. Pour se rassurer qu’il en soit ainsi, ce moyen de correction
n’est admis que dans l’hypothèse d’une exécution anticipée du contrat235.
Peut-on alors conclure que le droit à la réparation doit être écarté en dehors
de toute exécution anticipée ? Loin de là, le débiteur peut procéder à la
réparation de la chose défectueuse, même lorsque la livraison est effectuée le
jour prévu dans le contrat ou même après l’échéance du contrat. L’article 284
prévoit dans ce sens que si le débiteur manque à son obligation de conformité
après le délai supplémentaire qui lui a été imparti, il peut toujours procéder à
la réparation du défaut constaté. Dans ce cas, il aura besoin de l’accord du
créancier, lequel peut, soit refuser d’attendre davantage et procéder ainsi à la
résolution du contrat, soit accepter et exiger des dommages et intérêts pour le
retard que ces réparations lui feront subir.

129. La réparation est un moyen de pérenniser la relation


contractuelle, nonobstant la défaillance d’une des parties. Si le code civil
français connaît bien le mécanisme de réparation, il ne s’agit pour autant pas
de la réparation dans le sens abordé ici. La réparation du code civil consiste
en une compensation pécuniaire du préjudice causé alors qu’ici, il s’agit d’une
réparation qui s’effectue en nature. La réparation est le remède adapté lorsque
l’inexécution ne porte pas sur un élément essentiel du contrat236. Car, comme
indiqué plus haut, le remplacement est un moyen très radical et qui emporte
des couts supplémentaires pour le débiteur. Il serait donc déloyal de lui
demander de remplacer le bien, alors que le défaut constaté sur le bien livré

235 J.C. JAMES, « La vente commerciale OHADA, précurseur d’un droit harmonisé des
contrats ? », op. cit., p.45, n°55
236 E. NSIE, « La sanction de l’inexécution de la vente commerciale en droit uniforme africain »,

AJP., Rev.CERDIP, Vol.2, n°1, Janvier-Juin 2003, p.12, n°15

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
65
ou sur le service effectué peut être simplement corrigé. La réparation constitue
en effet l’exécution en nature de l’obligation de garantie.

130. Un remède controversé en droit français. La réparation divise


la doctrine en droit français, du fait de l’interprétation de l’article 1644 du
code civil. En effet, il résulte de ce texte qu’en cas de violation par le vendeur
de son obligation de garantie, « l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se
faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du
prix ». Certains auteurs ont pu ainsi déduire de ce texte que le législateur
français n’admet ni le remplacement, ni la réparation de la chose livrée non
conforme. Selon eux, « l’acheteur ne dispose que du choix entre la résolution et
la diminution du prix », il ne peut réclamer la réparation que si cette hypothèse
avait été stipulée dans le contrat. Cette interprétation limitée serait l’œuvre de
François Laurent qui en aurait été le pionnier. Selon lui, le créancier ne peut
avoir d’autres droits que ceux que lui confère la loi237. Cette interprétation est
bien sûr aujourd’hui dépassée, car elle est contraire aux intérêts des
contractants. En effet, ce que les parties recherchent en contractant, c’est
l’exécution effective par chacune d’elles de sa prestation. De ce fait, sauf à être
de mauvaise foi, le créancier aura plus intérêt à ce que le défaut soit réparé
lorsque cela est possible, plutôt qu’à la résolution du contrat. L’article 1644
du code civil français ne saurait donc en aucun cas faire obstacle à la
réparation de la chose vendue au profit de la résolution du contrat ou de la
réduction du prix238.

237 F. LAURENT, Principes de droit civil, t. 24, 4e éd., Bruxelles, Bruylant, Paris, Marescq,
1887, p. 287, no 291
238 J. GHESTIN et B. DESCHE, La vente, Paris, L.G.D.J., 1990, p. 805, n°745.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
66
Conclusion du chapitre 1

131. Le contrat n’est plus une rencontre des intérêts égoïstes.


Désormais, chaque partie doit veiller sur les intérêts de l’autre, en vue de
garantir la poursuite de la relation contractuelle. Partant de cette logique, les
droits OHADA et français imposent au créancier de l’obligation inexécutée des
devoirs comportementaux au nombre desquels, son indulgence vis-à-vis du
débiteur et sa coopération pour aider ce dernier à surmonter ses difficultés
d’exécution de manière pacifique. Dans la mesure où cette passivité n’a pas
abouti à l’exécution conforme du contrat, un second niveau d’intervention du
créancier est requis toujours dans le but de parvenir à une exécution
volontaire. Il pourra ainsi faire pression au débiteur par des mécanismes
comminatoires dans le but de le dissuader à persister dans l’inexécution de
son engagement contractuel.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
67
Chapitre 2 : Le recours aux mécanismes contractuels
comminatoires

132. Les mécanismes comminatoires sont les moyens de dissuasion


que le créancier prévoit de mettre en œuvre pour pousser son débiteur à
s’exécuter. Il s’agit des moyens contraignants auxquels le créancier risque de
recourir, si le débiteur ne fait pas ce qui est attendu de lui239. Il pourra alors
s’abstenir d’exécuter (Section 1), ou menacer le débiteur d’une sanction
(Section 2).

Section 1 : L’abstention du créancier

133. Le créancier peut bloquer l’exécution du contrat soit par une


suspension de l’exécution de ses obligations, lorsqu’il doit s’exécuter avant
l’autre partie et qu’il n’est pas certaine qu’après s’être exécuté, il recevra la
contrepartie attendue : c’est l’exception d’inexécution (paragraphe 1).
Lorsqu’il s’est déjà exécuté, et que son cocontractant ne fournit pas la
contrepartie de sa prestation, le créancier peut priver le débiteur de la
possession d’un bien, en exerçant un droit d’exclusivité sur l’objet du contrat
(paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L’exception d’inexécution

134. Définition. Dans un contrat synallagmatique, les obligations des


parties doivent en principe s’exécuter simultanément, trait pour trait240. Par
conséquent, si l’une d’entre elles ne s’exécute pas, l’engagement de l’autre
devient sans cause241, elle peut être dispensée de s’exécuter. C’est ce
mécanisme qui est appelé exception d’inexécution ou encore exceptio non

239 G. CORNU, op. cit.


240 F. TERRE, PH. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil : les obligations, 10ème éd., D., Paris
2009, p.643, n°630
241 F. TERRE, PH. SIMLER, Y. LEQUETTE, op.cit., p.646, n°635

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
68
adimpleti contractus. Il s’agit d’un moyen d’inciter la partie défaillante à
exécuter ses obligations242. Certains auteurs l’analysent comme une
application de la théorie de la cause243. D’autres pensent plutôt que c’est parce
que les obligations sont réciproques qu’elles doivent s’exécuter « donnant-
donnant »244 . Il est donc inutile de recourir à la théorie de la cause pour
expliquer le mécanisme de l’exception d’inexécution245.

135. Moyen de pression utilisé par une partie pour contraindre son
cocontractant à l’exécution du contrat246, l’exception d’inexécution est connue
des deux systèmes juridiques. Toutefois, si son admission est unanime dans
les deux systèmes, son régime juridique diffère aussi bien au niveau de sa
consécration (A) qu’au niveau de sa mise en œuvre (B).

A/ La consécration de l’exception d’inexécution

136. La consécration de l’exception d’inexécution en droit de l’OHADA


et en droit français fait ressortir des divergences tant sur sa configuration (1)
que sur les conditions qui justifient sa mise en œuvre (2).

1/ Une configuration différente

137. Conception dualiste. Avant la réforme de 2016, l’exception


d’inexécution n’existait pas dans le code civil français en tant que principe
général247. Celui-ci consacrait seulement quelques applications de ce remède
dans certains contrats comme la vente (art.1612), l’échange (art. 1704) et le

242 M. FABRE-MAGNAN, Les obligations, PUF, Paris, 2004, p.555


243 F. TERRE PH. SIMLER Y. LEQUETTE, Droit civil : les obligations, op. cit, p.646
244 J.P. TOSI, Le droit des obligations au Sénégal, op.cit., p.151 ; J. GHESTIN, « L’exception

d’inexécution. Rapport français », op. cit, p.3 et s. ; R. CASSIN, De l’exception tirée de


l’inexécution dans les rapports synallagmatiques (exceptio non adimpleti contractus) et de ses
relation avec le droit de rétention, la compensation et la résolution, Sirey, Paris, 1914, p739
245 M. FABRE-MAGNAN, Les obligations, op. cit., p.556
246 C. MBA OWONO, « L’exception d’inexécution dans la vente commerciale en droit uniforme

africain », revue du CERDIP, vol 2, n°2, juillet – décembre 2006, p. 4


247 C. POPINEAU-DEHAULLON, Les remèdes de justice privée à l’inexécution du contrat.

Etude comparative, op. cit., p.84, n°144.


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
69
dépôt (art. 1948)248. La généralisation de ce remède en France à l’ensemble
des contrats synallagmatiques a été l’œuvre de la jurisprudence249 et de la
doctrine250, dont les solutions ont été consacrées par le législateur lors de la
réforme de 2016. Le nouveau code civil dispose désormais qu’« une partie peut
refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre
n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave ». Ce texte
marque ainsi la consécration par le législateur français, de l’exception
d’inexécution dans sa forme défensive251.

138. Toutefois, l’ordonnance de 2016 ne s’est pas contentée d’une


consécration de l’exception d’inexécution telle que déjà connue par la
jurisprudence. Elle innove en instituant à côté de l’exception d’inexécution
défensive, une exception préventive ou pour risque d’inexécution. Aux termes
de l’article 1220 du code civil français, « une partie peut suspendre l'exécution
de son obligation dès lors qu'il est manifeste que son cocontractant ne
s'exécutera pas à l'échéance et que les conséquences de cette inexécution sont
suffisamment graves pour elle. Cette suspension doit être notifiée dans les
meilleurs délais ». Il s'agit d'une faculté de suspension par anticipation de sa
prestation par le créancier avant toute inexécution, qui permet de limiter le
préjudice résultant d'une inexécution contractuelle, et qui constitue un moyen
de pression efficace pour inciter le débiteur à s'exécuter252. Cependant, cette
modalité d’exception d’inexécution n’est pas une création de l’ordonnance de
2016. Avant la réforme de 2016, la doctrine voyait déjà en l’article 1653 du

248 F. TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, op. cit., p.645


249 Cass., Soc., 31 mai 1956, Bull civ., IV, n°503 ; Cass., com., 19 décembre 1962, Publié au
bulletin
250 R. CASSIN, De l’exception tirée de l'inexécution dans les rapports synallagmatiques

(exceptio non adimpleti contractus) et de ses relations avec le droit de rétention, la


compensation et la résolution, th. Paris, 1914, p. 739 ; R. SALEILLES « Les théories
allemandes sur !'exception du refus de paiement pour inexécution », Annales de droit
commercial, 1892, p. 287 ; B. VINCENDEAU, « L’évolution de l’exception d’inexécution : vers
la consécration d’un droit de réserve d’exécution », LPA, 9 Septembre 2019, n°180, p.6
251 A. REYGROBELLET, « L’exception d’inexécution préventive », BJS, septembre 2016, p. 544
252 D. HOUTCIEFF, « L'étendue des nouveaux pouvoirs unilatéraux du contractant », RDC

2018, n°03, p.505.


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
70
code civil253, une application de ce remède254. Il existe donc en droit français,
une dualité de régime de l’exception d’inexécution, ce qui ne semble pas être
le cas en droit de l’OHADA.

139. En droit OHADA de la vente commerciale, aux termes des articles


282 et 285 de l’AUDCG, une partie au contrat de vente peut suspendre
l’exécution de son obligation s’il apparait certain que l’autre n’exécutera pas
les siennes. Ces textes semblent limiter le jeu de l’exception d’inexécution au
seul risque d’inexécution, consacrant ainsi uniquement l’exception
d’inexécution anticipée255. C’est du moins, l’interprétation que retiennent
certains auteurs pour qui, la fonction principale de ce remède en droit OHADA
de la vente serait d’anticiper une éventuelle inexécution256. Mais, le législateur
de l’OHADA a-t-il volontairement décidé de mettre de côté l’exception
d’inexécution défensive pour ne consacrer que l’exception d’inexécution
préventive ? Ou peut-il plutôt s’agir d’une omission de sa part ?

140. Selon un auteur, une lecture attentive des dispositions de


l’AUDCG ferait ressortir l’existence d’une dualité de régime de l’exception
d’inexécution257. On pourrait donc trouver dans ces textes, des fondements
pour invoquer l’exception pour inexécution effective258. Toutefois, certains
textes visés par l’auteur pour justifier l’existence d’une exception d’inexécution
défensive ayant été supprimés lors de la révision de l’AUDCG259, le législateur
de l’OHADA semble avoir fait le choix de faire de l’exception d’inexécution un

253 Ce texte dispose que : « Si l'acheteur est troublé ou a juste sujet de craindre d'être troublé par
une action, soit hypothécaire, soit en revendication, il peut suspendre le paiement du prix jusqu'à
ce que le vendeur ait fait cesser le trouble, si mieux n'aime celui-ci donner caution, ou à moins
qu'il n'ait été stipulé que, nonobstant le trouble, l'acheteur paiera ».
254 A. PINNA, « L’exception pour risque d’inexécution », RTDciv. Janvier/Mars 2003, p.35
255 S. BEBOHI EBONGO, « Les remèdes à l’inexécution », AJ contrat 2020 p.368
256 E. NSIE « La sanction de l’inexécution de la vente commerciale », revue du CERDIP, vol 2,

n°1, janvier – juin 2003, p. 19 ; J.C. JAMES, « La vente commerciale OHADA, précurseur d’un
droit harmonisé des contrats ? », op.cit., p.43, n°48
257 C. MBA OWONO, « L’exception d’inexécution dans la vente commerciale en droit uniforme

africain », op. cit., p. 8


258 Ibid.

259 C’est le cas des deux premiers alinéas de l’ancien article 238 de l’AUDCG

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
71
remède essentiellement préventif. L’exception d’inexécution défensive n’est
donc pas clairement consacrée en droit spécial de l’OHADA. Son admission y
demeure incertaine. Toutefois, l’examen de la jurisprudence française
antérieure à 2016260 montre qu’en pratique, l’exception d’inexécution est un
remède généralisé tant en droit commun qu’en droit spécial des contrats. Cette
jurisprudence qui se fonde sur l’article 1134 du code civil ancien est
transposable en droit de l’OHADA.

141. En droit commun malien et sénégalais, c’est plutôt l’exception


défensive que les deux législateurs ont consacrée. Le RGO et COCC disposent
en leurs articles 104 de manière identique que « dans les contrats
synallagmatiques, chacun des contractants peut refuser de remplir son
obligation tant que l'autre n'exécute pas la sienne ». Contrairement au code civil
ancien, ces textes consacrent l'exception d'inexécution défensive et la
généralise comme en France, à tous les contrats synallagmatiques. C’est aussi
ce qu’illustre la jurisprudence de ces Etats261. On peut donc être tenté de
conclure que l’exception d’inexécution défensive serait un remède de droit
commun dans l’espace OHADA alors que sa variante préventive ne serait
qu’un remède réservé au droit spécial de la vente. Mais une telle conclusion
serait très hâtive sans une étude minutieuse de la jurisprudence de la CCJA
en la matière. Pour l’heure, les arrêts de la cour qui sont accessible ne
permettent pas de prendre position, car ne traitant presque pas de la question.

142. Pour trancher la question de l’admission ou pas des deux


variantes de l’exception d’inexécution en droit de l’OHADA, les deux avant-
projets prévoient la consécration d’une dualité de régime à l’exception
d’inexécution. L’article 198 de l’avant-projet de la fondation pour le droit
continental consacre avec plus de clarté l’exception pour inexécution avérée.
Ce texte se démarque de l’article 7/4 de l’avant-projet Fontaine. Il ne se borne

260 Cass. Com., 10 déc. 1979, pourvoi n°78-11956, Bull. civ. des arrêts Cour de Cassation
Com. n° 327 ; Cass. Com., 19 déc. 1962, pourvoi n°JURITEXT000006962736 disponible sur
Juricaf ; Cass. Civ 1ère , 1967-03-13 Bulletin 1967 I N.95 P.69
261 Sénégal, Cour de cassation, 06 juillet 2005, arrêt n°99, disponible sur Juricaf ; Mali, Cour

suprême, 09 juillet 2012 arrêt n°186, disponible sur Juricaf.


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
72
pas à consacrer ce remède, il apporte des réponses à certaines interrogations
que suscite le régime prévu par le droit français. La première interrogation
concerne la mise en œuvre du remède en cas de force majeur. Suivant la voie
de la doctrine262, et de la jurisprudence263, l’alinéa 2 précise à ce sujet que la
force majeure ne fait pas obstacle à la mise en œuvre de l’exception
d’inexécution si l’inexécution n’est pas irrémédiable. Cette solution peut se
justifier, car l’exception d’inexécution vise à faire pression au débiteur pour le
pousser à s’exécuter. Or, si l’inexécution est irrémédiable, cette pression n’a
plus aucun d’intérêt.

143. En plus, l’alinéa 3 de cet avant-projet prévoit des obstacles à la


mise en œuvre de l’exception d’inexécution parmi lesquels, le fait du créancier.
Le créancier ne peut donc pas invoquer l’exception d’inexécution si
l’inexécution est due à son fait ou à un fait dont il assume les risques. Enfin,
l’alinéa 4 du même texte offre au débiteur les moyens de se défendre. Il peut
ainsi prouver en justice que l’exception d’inexécution ne se justifie pas, peut
être en raison du caractère minime du manquement qui lui est reproché ou
encore en démontrant qu’il a correctement exécuté son obligation.

144. Par ailleurs, en son article 199, l’avant-projet OHADA consacre


l’exception pour risque d’inexécution, en ajoutant parmi les faits caractérisant
une défaillance future, « la manière dont le débiteur s’apprête à exécuter ou
exécute le contrat ». Cette condition existait déjà dans l’ancien AUDCG avant
la modification intervenue en 2010. Il aurait été nécessaire de faire montre de
précision à ce niveau, comme ce fut le cas pour l’exception d’inexécution
défensive. Les rédacteurs de ce texte pourraient par exemple préciser que,
pour contourner cette exception pour risque d’inexécution, le débiteur peut
offrir au créancier des garanties d’une inexécution future, offre que le
créancier ne saura refuser.

262 M. FABRE-MAGNAN, Les obligations, op.cit., p.556


263 Cass. Com., 19 déc. 1962, pourvoi n°JURITEXT000006962736 disponible sur Juricaf.
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
73
2/ Une appréciation différente de certaines conditions

145. Le caractère essentiel de l’obligation inexécutée. Une


obligation est dite essentielle lorsque sans elle, le contrat ne peut subsister264.
Elle participe ainsi de l’essence même du contrat, de sorte qu’elle ne peut être
réduite à néant ou ne pas être exécutée265. Selon le professeur Philippe Jestaz,
« il y’a dans chaque contrat de par son économie propre, une obligation qui en
constitue la pièce essentielle »266. Alors que le droit français admet le jeu de
l’exception d’inexécution pour toutes les obligations du contrat, le droit de la
vente commerciale OHADA exige que l’obligation inexécutée soit une
obligation essentielle. En effet, dans la vente commerciale, trois obligations
principales pèsent sur le vendeur à savoir : l’obligation de livraison,
l’obligation de conformité et l’obligation de garantie. L’article 282 de l’AUDCG
n’ouvre le bénéfice de l’exception d’inexécution à l’acheteur que si le vendeur
ne parait pas en mesure d’exécuter l’intégralité de son obligation de livraison.
Ce qui signifie qu’en cas d’inexécution des obligations de conformité et de
garantie, le jeu de ce remède serait exclu. Parallèlement, le vendeur ne peut
opposer l’exception d’inexécution à son acheteur que si celui-ci ne parait pas
à mesure de payer l’intégralité du prix. L’obligation de prendre livraison y est
donc exclue.

146. Au regard de ce qui précède, dans la vente commerciale OHADA


l’exception d’inexécution n’est admise que pour les obligations essentielles du
contrat. Cette solution ne se justifie pas pour l’exception d’inexécution
défensive, car elle est de nature à faire perdre à ce remède sa fonction
comminatoire. En effet, le but de l’exception d’inexécution est de persuader le
débiteur à exécuter correctement ses obligations. Le bénéfice de ce remède

264 C. DESLAURIERS-GOULET, « L’obligation essentielle dans le contrat », Les cahiers de droit,


vol.55, n°4 de décembre 2014, p.927
265 S. GHOZLAN, « La notion d’obligation essentielle dans le cadre du contrôle des clauses

abusives : étude des systèmes juridiques français et québécois », Revue Juridique Thémis de
l’Université de Montréal (RJTUM), 2015 49-2, p.407
266 PH. JESTAZ, « L’obligation et la sanction. A la recherche de l’obligation fondamentale », in

Mélanges offerts à Pierre Raynaud, D., Paris, 1985, p.279

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
74
devra être étendu à toutes les obligations sans tenir compte de leur caractère
essentiel. C’est dans cette logique que s’inscrivent les droit sénégalais et
malien. Les articles 104 des deux textes ne font aucune distinction sur la
nature des obligations. Toute obligation du contrat non exécutée justifie la
suspension par l’autre partie de la contrepartie qui était due. En droit
commun, il suffit donc que les obligations soient unies par un lien de
connexité juridique267.

147. Par contre, en ce qui concerne l’exception d’inexécution


préventive, l’exigence d’une inexécution essentielle peut se justifier. En effet,
compte tenu du caractère risqué de ce mécanisme268, il faut éviter que la
menace d'inexécution d'une obligation accessoire par l'un des contractants
serve de prétexte à l'autre pour refuser d'accomplir son obligation principale.

148. Une inexécution suffisamment grave. En droit français, qu’elle


soit préventive ou défensive, l’exception d’inexécution est subordonnée à
l’existence d’une « inexécution suffisamment grave »269. En effet, une partie ne
peut exercer son pouvoir de suspendre provisoirement l’exécution de sa
prestation contractuelle que si les conséquences de l’inexécution future de son
cocontractant sont suffisamment graves pour elle270. Le renvoi à une
inexécution « suffisamment grave » peut laisser entendre une faute du débiteur

267 J. GHESTIN, « L’exception d’inexécution. Rapport français », op. cit., p.5 ; Ch. MBA OWONO
« L’exception d’inexécution dans la vente commerciale en droit uniforme africain », op. cit, p.22 ;
E. NSIE, « La sanction de l’inexécution de la vente commerciale » op. cit, p.15
268 Il s’agit pour le créancier de suspendre l’exécution de son obligation alors même que

l’inexécution du débiteur n’est pas encore évérée.


269 La question est de savoir si la gravité de l’inexécution doit se mesurer par rapport à la

nature de l’obligation inexécutée, ou par rapport aux conséquences de celle-ci sur l’économie
du contrat. Dans le premier cas, le législateur français soumettrait ce remède à l’inexécution
d’une obligation essentielle et rejoindrait ainsi la position de son homologue OHADA. Cette
interprétation ne nous parait pas appropriée. La gravité de l’inexécution ne peut pas être
appréciée par rapport à la nature de l’obligation inexécutée, car l’inexécution d’une obligation
dite accessoire peut avoir des conséquences graves sur le contrat, au point d’altérer
suffisamment l’économie générale de celui-ci. C’est donc l’impact de l’inexécution sur l’utilité
économique du contrat qui détermine son niveau de gravité.
270 J. HEINICH, « Le contrôle des nouveaux pouvoirs unilatéraux du contractant », RDC 2018,

n°03, p.521 ; O. SABARD, « Les sanctions de l'inexécution du contrat : exception


d'inexécution/exécution forcée », LEDC mars 2016, n°03, p.7
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
75
ayant causé un dommage sérieux au créancier. Or, tel ne parait pas être le
cas. Par « suffisamment grave », le législateur semble plutôt faire référence à
une inexécution altérant l’utilité du contrat. Le locataire ne peut par exemple
pas refuser de payer le loyer si le défaut d’entretien du local par le créancier
n’empêche pas la jouissance du bien loué271. C’est ainsi que la cour de
cassation française avait admis que, « n'est pas fondé à suspendre le paiement
des loyers le locataire qui invoque une ventilation défectueuse des lieux loués,
équipés de ventilateurs il est vrai non agréés, sans apporter la preuve de leur
caractère dangereux, ni même d'une imperfection rendant impossible l'usage
normal des locaux »272. Cette exigence d’une inexécution suffisamment grave
est partagée par le droit de l’OHADA.

149. En effet, même si l’expression « suffisamment grave » n’apparait


pas dans l’AUDCG, les hypothèses de suspension du contrat énumérées par
ce texte renvoient à une défaillance du débiteur qui risque d’avoir des
conséquences graves sur l’économie du contrat. Aux termes de l’article 282
l’exception d’inexécution sera invoquée par l’acheteur si les capacités de
fabrication du vendeur sont insuffisantes ou si ses moyens de production ne
sont pas adaptés à la commande passée par l’acheteur. C’est le cas par
exemple, lorsque le vendeur ne dispose de la technologie ou des machines
nécessaires à la production d’un bien. Cette absence de machines ou de
technologie est une preuve irréversible que la chose commandée ne pourra
pas être livrée. Il en va de même pour un acheteur qui est en cessation de
paiement, cet état démontre à suffisance que le prix de la marchandise
commandée ne sera pas payé. Il s’agit donc dans ces différents cas, des
manifestations d’une inexécution suffisamment grave.

150. En droit commun sénégalais, l’alinéa 3 de l’article 104 du COCC


dispose que « l'exception d'inexécution suppose, d'après la nature et

271CA Montpellier, civ. 5ème, 08 novembre 2022, n° 20/00725 inédit, disponible sur
Doctrinaplus

272 Cass.civ.1ère, 26 mai 1961, Bull civ I n°264.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
76
l'importance de l'obligation méconnue, un manquement suffisamment grave
pour justifier le refus d'exécuter l'obligation corrélative ». Cette disposition est
reprise par le RGO malien. C’est dire qu’en droit de l’espace OHADA,
l’exception d’inexécution n’est admise tant en droit commun qu’en droit
spécial de la vente commerciale que si l’inexécution est suffisamment grave.
Une fois de plus, la bonne foi et la loyauté du créancier sont ici convoquées.
L’idée est de ne pas perturber l’exécution du contrat pour une défaillance
minime du débiteur273.

151. Toutefois, cette exigence d’une inexécution suffisamment grave


admise dans les deux systèmes ne semble pas justifiée pour l’exception
d’inexécution défensive. En effet, les engagements contractuels doivent être
exécutés tels qu’ils ont été conclus. De ce fait, si l’une des parties n’est pas en
mesure d’exécuter fidèlement ses obligations, l’autre doit pouvoir réagir en
conséquence quelle que soit la nature de l’obligation inexécutée et son
incidence sur l’utilité du contrat. De plus, si l’inexécution est déjà
suffisamment grave, l’exception d’inexécution ne se justifie plus, le créancier
aura plutôt intérêt à résoudre le contrat. Par contre, lorsqu’il s’agit de prévenir
un risque d’inexécution comme c’est le cas dans les articles 282 et 285 de
l’AUDCG, le critère de gravité retrouve tout son intérêt.

152. L’étendu de l’inexécution. Dans la vente commerciale OHADA,


l’exception d’inexécution n’est recevable que si l’une des parties au contrat
n’est pas en mesure d’exécution l’intégralité de son obligation. Aux termes des
articles 282 et 285 de l’AUDCG, l’exception d’inexécution est ouverte à
l’acheteur si le vendeur ne peut pas exécuter l’intégralité de son obligation de
livraison. Le vendeur ne peut, quant à lui, l’invoquer que si l’acheteur est
incapable de payer l’intégralité du prix. A contrario, en cas d’exécution
partielle, le créancier n’est pas admis à l’invoquer. Cette solution du droit
OHADA de la vente commerciale s’inspire des principes UNIDROIT, dont

273 Ch. MBA OWONO « L’exception d’inexécution dans la vente commerciale en droit uniforme
africain », op. cit, p.13
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
77
l’article 7.1.3 dispose qu’« une partie tenue d’exécuter sa prestation en même
temps que l’autre partie peut en suspendre l’exécution tant que celle-ci n’a pas
offert d’exécuter la sienne ». Ce texte n’envisage l’exception d’inexécution que
dans l’hypothèse où le débiteur n’a même pas offert un début d’exécution.

153. De son côté, le droit français ne connait pas la restriction relative


au caractère total ou partiel de l’inexécution. En effet, l’exception
d’inexécution est ouverte au créancier en droit français, que l’inexécution soit
partielle ou totale. Il suffit que cette inexécution présente une certaine
gravité274. La cour de cassation française a ainsi affirmé que « l’inexécution par
l’une des parties de quelques-uns de ses engagements n’affranchit pas
nécessairement l’autre de toutes ses obligations ; Il appartient au juge de
décider d’après les circonstances si cette inexécution est suffisamment grave
pour entraîner pareil résultat »275. Toutefois, il convient de préciser que, si
l’inexécution est partielle, le créancier ne saurait suspendre l’exécution de la
totalité de son obligation, sauf à prouver que le contrat ne pouvait trouver son
utilité que dans une exécution totale des obligations des parties.

154. En effet, l’exception d’inexécution étant une sorte de légitime


défense contractuelle, il faut que la réaction du créancier soit proportionnelle
à la défaillance du débiteur. C’est cette philosophie qu’adopte le droit
québécois276. De ce fait, si le débiteur a exécuté une partie seulement de son
obligation, le créancier qui veut faire jouer l’exception d’inexécution devra
suspendre la partie de son obligation correspondant à l’inexécution du
débiteur277. Ainsi, dans un contrat de vente, l’acheteur ne pourra pas retenir
la totalité du prix si le vendeur a livré une partie de la marchandise. En vertu

274 B. FAGES, Droit des obligations, 8ème éd., LGDJ, Paris, 2018, p.250
275 Chambre sociale de la Cour de cassation, 21 octobre 1954, Bull civ IV, n°613.
276L’article 1591 du code civil québécois dispose que : « Lorsque les obligations résultant d’un

contrat synallagmatique sont exigibles et que l’une des parties n’exécute pas substantiellement
la sienne ou n’offre pas de l’exécuter, l’autre partie peut, dans une mesure correspondante,
refuser d’exécuter son obligation corrélative, à moins qu’il ne résulte de la loi, de la volonté des
parties ou des usages qu’elle soit tenue d’exécuter la première ».
277 M. MEKKI, « Les remèdes à l'inexécution dans le projet d'ordonnance portant réforme du

droit des obligations », Gaz. Pal. 30 avril 2015, n° 222b4, p. 39

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
78
du principe de bonne foi, l’acheteur devra payer le prix proportionnel à la
quantité ou la qualité de marchandise qui lui a été livrée.

155. La position adoptée par le droit OHADA dans la vente


commerciale fragilise l’efficacité de ce remède dont la fonction comminatoire
doit être mise en exergue. Une limitation de l’exception d’inexécution à la seule
inexécution totale avait d’ailleurs été déconseillé en France par une certaine
doctrine278. En effet, pour être un véritable moyen de pression, l’exception
d’inexécution doit être admise que l’inexécution soit partielle ou totale279. En
plus, ce qu’attend le créancier c’est l’exécution totale par le débiteur de son
obligation, ce sera donc aller à l’encontre de cette attente que de l’obliger à
s’exécuter, alors qu’il n’a reçu qu’une partie de ce qui lui a été promis280. De
plus, une exécution partielle est tout de même considérée comme une
inexécution, et en vertu du principe pacta sunt servanda, le débiteur n’exécute
le contrat que lorsqu’il a exécuté la totalité de son obligation. De ce fait, le
créancier est en droit de refuser d’exécuter sa prestation si le débiteur n’a
exécuté qu’une partie seulement de son obligation. Il devrait aussi en être
ainsi lorsque le débiteur a mal exécuté son obligation en offrant une prestation
ou une chose non conforme au contrat. Il faut toutefois que l’excipens s’assure
que sa réaction ne sera pas démesurée par rapport à la défaillance du
débiteur281.

B/ La mise en œuvre de l’exception d’inexécution

156. La nécessité d’une autorisation judiciaire préalable. La mise


en œuvre de l’exception d’inexécution dans la vente commerciale OHADA est
subordonnée à une autorisation préalable du juge. En effet, il ressort des

278 T. GENICON, « Observations de Thomas Genicon », LPA 12 févr. 2009, n°31, p.81
279 M. FABRE-MAGNAN, Les obligations, op.cit p.556
280 S. BOZZO HAURI, «La “excepción de contrato no cumplido adecuada o regularmente” y su

régimen en el derecho civil español», Revista de Derecho de la Pontificia Universidad Católica


de Valparaíso XLII (Valparaíso, Chile, 2014, 1er Semestre) [pp. 83 - 119]
281 J.P. TOSI, Le droit des obligations au Sénégal, op.cit., p.151

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
79
articles 282 et 285 de l’Acte uniforme qu’en cas d’inexécution par une partie,
l’autre « peut obtenir de la juridiction compétente, statuant à bref délai,
l’autorisation de différer l’exécution de ses obligations ». Ce texte conditionne
l’exception d’inexécution à une autorisation préalable du juge. Il en fait donc
un remède judiciaire. Le droit commercial de l’OHADA se démarque ainsi des
textes qui ont souvent été sa source d’inspiration comme les principes
UNIDROIT et le code civil français. Cette intervention préalable du juge peut
être analysée comme un moyen de protéger le contrat contre les suspensions
abusives. Toutefois, cette idée de protection du contrat se heurte à un autre
impératif que vise le droit OHADA à savoir celui de l’efficacité, qui est d’ailleurs
le gage de son attractivité282.

157. En fait, si le souci de protéger les investissements semble bien


s’arrimer avec une protection accrue de l’engagement contractuel, il n’en
demeure pas moins que la prépondérance du juge qu’implique une telle
protection n’est pas de nature à rendre le droit OHADA efficace, encore moins
attractif. Car, le droit régit les affaires, et dans ce milieu, rapidité et efficacité
sont les maitres mots. Or, cet impératif de célérité ne sera pas atteint si la
partie qui souhaite suspendre l’exécution de ses obligations, en réponse à
l’inexécution de son cocontractant, doit attendre une autorisation du juge.
Entre le moment où le juge est saisi et celui où il rendra sa décision, le
créancier devra exécuter ses obligations, ce qui n’est pas de nature à préserver
ses intérêts. De plus, s’il est vrai que l’unilatéralisme expose la partie en état
de dépendance, intellectuelle ou économique, aux abus d’un partenaire mal
intentionné, on ne saurait nier le fait que l’action en justice a un coût que le
contractant victime de l’inexécution pourrait ne pas avoir les moyens
d’assumer283.

282 E. KAGISYE, « Environnement juridique des affaires en Afrique : Système juridique et


judiciaire de l’OHADA », hal-01495642, 2017, p.4 et s. ; L. SAVADOGO, « Le traité relatif à
l’harmonisation du droit des affaires en Afrique », in A.F.D.I, vol.40, 1994, p.823 et s.
283 M. MEKKI, « Le juge et les remèdes à l'inexécution du contrat », RDC 2016, n° 113f6, p. 400

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
80
158. En droit commun de l’OHADA, le code civil ancien et les codes
malien et sénégalais ne s’inscrivent pas dans la logique de la vente
commerciale. L’exception d’inexécution y est traitée comme un remède
unilatéral entre les mains du créancier. Celui-ci n’a pas besoin d’une
autorisation judiciaire préalable. Le juge n’intervient qu’a posteriori pour
contrôler à la demande du débiteur, le bienfondé de la suspension par le
créancier de l’exécution de ses obligations284. C’est cette position que l’on
retrouve aussi dans le code civil français.

159. En droit français, le code civil de 1804 accordait au juge un rôle


prépondérant dans la mise en œuvre des remèdes à l’inexécution du
contrat285. Il intervenait en amont de la mise en œuvre des principaux
mécanismes de riposte du créancier. Avec la réforme de 2016, on assiste à un
déplacement de l’intervention du juge. Le rôle de ce dernier n’est pas méconnu,
mais son intervention préalable n’est plus requise pour mettre en œuvre les
remèdes à l’inexécution en l’occurrence l’exception d’inexécution286. En effet,
les articles 1219 et 1220 font de l’exception d’inexécution un remède unilatéral
entre les mains du créancier. Ce dernier se fait justice à ses risques et
périls287. Le juge n’intervient qu’en aval, si le débiteur estime la suspension
par le créancier de l’exécution de son obligation injustifiée. Il opérera ainsi un
contrôle a posteriori des conditions de mise en œuvre de ce mécanisme. Ce
caractère unilatéral fonde l’efficacité de ce mécanisme et renforce sa fonction
comminatoire. Alors qu’on assiste à un renforcement du rôle du juge dans
l’esprit de la réforme en général, le droit français, contrairement au droit
OHADA, fait de l’exception d’inexécution un remède unilatéral.

284 Cour suprême du Mali, ch. Com., arrêt n°32 du 13 Septembre 2004, inédit. Dans cette
espèce, la cour suprême a jugé bienfondé l’exception d’inexécution soulevée par le créancier
dès lors que le débiteur n’a offert qu’une exécution partielle de son obligation contractuelle.
285 C. WITZ, « Le juge et la révision du contrat : vision du droit français », LPA, 30 mars 2018 -

n° 065, p.10 ; S. CHASTAGNIER, « Exception d'inexécution et autorisation judiciaire », Gaz.


Pal. 20 mars 2018, n°11, p.81 ; M. MEKKI, « Le juge et les remèdes à l'inexécution du contrat »,
op. cit., p.400 ; M. BOURASSIN, « L'emprise inéluctable des juges sur le nouveau droit des
contrats », LPA 30 déc. 2016, n°261, p.9.
286 M. MEKKI, op. cit., p.402.
287 P. VOIRIN, G. GOUBEAUX, Droit civil : Personnes, Famille, Personnes protégées, Biens,

Obligations, Sûretés, t.1, 31ème éd., LGDJ, Paris, p.420


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
81
160. L’insuffisance des modalités pratiques de mise en œuvre.
Quelles formalités doivent être accomplies pour mettre en œuvre l’exception
d’inexécution et dans quels délais doivent-elles l’être ? Les deux systèmes
objet de notre étude n’apportent pas de réponse satisfaisante à cette
interrogation. D’ailleurs, la question ne semble même pas avoir déjà été
abordée en droit de l’OHADA. Les modalités pratiques de mise en œuvre de
l’exception d’inexécution sont à la fois formelles et temporelles.

161. Les modalités formelles. Elles renvoient aux actes devant être
accomplis pour se prévaloir efficacement de l’exception d’inexécution. En droit
français, le code civil conditionne la mise en œuvre de l’exception pour risque
d’inexécution à une notification. En effet, aux termes de l’article 1220 de ce
texte, la partie qui pressent une inexécution future de son cocontractant est
admise à suspendre l’exécution de son obligation à condition de notifier cette
suspension à l’autre partie. La notification peut être entendue comme étant
l’acte par lequel une personne porte une information à la connaissance de
l’autre288. Absente de l’ancien droit français des contrats en vigueur avant la
réforme de 2016, cette exigence formelle est désormais admise en France
comme modalité de mise en œuvre de l’exception d’inexécution préventive.
Toutefois, le législateur français ne précise pas la forme que doit revêtir ladite
notification. On pourrait distinguer selon que le contrat est civil ou
commercial. Dans le premier cas, la notification pourrait se faire par lettre
recommandée ou exploit d’Huissier et dans le second cas, on pourrait
l’admettre par tout acte laissant trace écrite.

162. Par contre, l’AUDCG qui fait de l’exception d’inexécution un


remède principalement défensif ne l’a pas assorti de cette exigence formelle.
Cette absence de notification peut se justifier par le fait que la mise en œuvre

288J.F HAMELIN, « L’exercice des nouveaux pouvoirs unilatéraux du contractant », RDC 2018,
n°115h8, p.514

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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82
de l’exception pour risque d’inexécution dans la vente commerciale OHADA
est soumise à une autorisation préalable du Juge.

163. Par ailleurs, en France, en lieu et place de la notification, on


aurait pu exiger du créancier une mise en demeure. Celle-ci a l’avantage
d’intervenir avant que la décision ne soit prise. Elle constitue un avertissement
qui aurait donné au débiteur la possibilité d’offrir des garanties d’une
exécution future et de préserver ainsi la relation contractuelle. De même en
droit commerciale de l’OHADA, l’intervention préalable du juge pourrait être
remplacée par une mise en demeure préalable. Ainsi, deux modalités formelles
pourraient être exigées pour la mise en œuvre de l’exception d’inexécution à
savoir : la notification pour l’exception d’inexécution avérée et la mise en
demeure pour l’exception d’inexécution préventive. Cette mise en demeure qui
devrait se substituer au contrôle a priori du Juge.

164. Les modalités temporelles. Elles s’entendent des délais dans


lesquelles le créancier doit agir. A ce niveau, les droits de l’OHADA et français
ont fait le choix de la souplesse en n’imposant pas de délais précis. En droit
commun de l’OHADA, le code civil ancien et les code malien et sénégalais sont
muets sur cette question. En France, le code civil utilise des termes neutres
tels « meilleurs délais ou délais raisonnables ». Ainsi, l’article 1220 de ce texte
précise que la suspension anticipée des obligations doit être notifiée au
débiteur « dans les meilleures délais ». L’idée ici est de montrer que, la
notification doit intervenir rapidement289.

165. Par ailleurs, dans la vente commerciale OHADA, le juge saisit est
tenu de se prononcer dans les brefs délais. Compte tenu de la lenteur des
systèmes judiciaires africains290, il aurait peut-être été mieux de donner un
délai précis ou encore, de prévoir que si au bout d’un délai, le juge n’a pas

289Ibid.
290 P. MEYER, « La sécurité juridique et judiciaire dans l’espace OHADA », Penant n°855,
p.151 ; J.B DE GAUDUSSON, « La justice en Afrique : nouveaux défis, nouveaux acteurs », in
Afrique contemporaine, n°250, 2014, p.13 et s.
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
83
statué, la suspension du contrat sera effective. Quoi qu’il en soit, et comme
déjà indiqué plus haut, l’intervention préalable du juge pour la mise en œuvre
de l’exception d’inexécution dans la vente commerciale OHADA est un facteur
d’affaiblissement de ce remède.

Paragraphe 2 : L’exercice d’un droit d’exclusivité sur


l’objet du contrat

166. Les biens du débiteur constituant le gage commun de ses


créanciers291, la propriété peut être utilisée comme garantie d’exécution d’une
obligation. Le cocontractant victime de l’inexécution peut alors priver son
débiteur de la jouissance de son bien jusqu’à ce qu’il exécute son obligation.
Il s’agit d’un moyen de pression souvent efficace qui se manifeste soit par la
stipulation d’une clause de réserve de propriété (A) soit la mise en œuvre d’un
droit de rétention (B).

A/ La réserve de propriété

167. Définition. La réserve de propriété est une stipulation


contractuelle par laquelle, un vendeur qui a consenti à son acheteur un crédit
se réserve le droit de reprendre la chose vendue si le prix ne lui est pas payé
à l’échéance. En effet, le vendeur, qui a des raisons de croire que l’acheteur
ne payera pas l’intégralité du prix, peut ainsi se prémunir contre toute perte
en se réservant le droit de récupérer son bien. L’efficacité d’une telle clause (2)
est subordonnée au respect de certaines condition de validité (1).

1/ Conditions de validité de la clause de réserve de propriété

168. L’exigence d’un écrit. La clause de réserve de propriété ne


résulte pas d’un simple accord entre les contractants. Elle obéit à un

291 CCA, art. 2285


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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84
formalisme dont le but est de protéger le consentement de ces derniers292. Dans
les deux systèmes juridiques, la réserve de propriété doit être convenue par
écrit. En droit de l’OHADA, l’AUS293 précise en ce sens que, cette clause doit
être portée à la connaissance de l’acheteur au plus tard au moment de la
livraison294.

169. En France, Si une telle précision est absente de l’article 2368 du


code civil français, qui se limite à prévoir que « la réserve de propriété est
convenue par écrit », le législateur français n’a toutefois pas prévu que la clause
devait être stipulée à tout moment. Comme l’AUS, le code de commerce
français dispose en son article L.624-16 que, la clause doit avoir été convenue
entre les parties au plus tard au moment de la livraison. Or, une stipulation
de la clause au moment de la livraison parait tardive. Chaque partie doit
exprimer son consentement sur toutes les obligations au moment de la
formation du contrat et non lors de son exécution. Les législateurs français et
OHADA pourraient à ce niveau, s’inspirer du droit allemand. En effet, la
jurisprudence allemande rendue en application de l’article 449 du Code civil
allemand exige que la clause soit portée à la connaissance de l'acheteur avant
la livraison de la marchandise, sous peine de nullité295. Elle doit donc figurer
dans le contrat de vente. Si celui-ci est conclu verbalement, la clause de
réserve de propriété devra être stipulée dans un des documents accompagnant
la vente. Elle peut ainsi l’être dans un bon de commande ou dans les
conditions générales de vente. Aussi, les articles 73 de l’AUS et L.624-16 du
code de commerce ajoutent-ils que, la réserve de propriété peut être convenue
dans un écrit régissant un ensemble d’opérations présentes ou à venir entre
les parties. Ceci signifie que la clause de réserve de propriété peut être stipulée

292 J.C. JAMES, « Sûretés-propriétés et procédures collectives en droit uniforme africain », in


Mélange en l’honneur du Professeur FILIGA Michel SAWADOGO, Les horizons du droit
OHADA 2018, p.33
293 Acte uniforme OHADA portant organisation des sûretés du 15 décembre 2010.
294 Art. 73 de l’AUS, pour le droit OHADA

295 KUTSCHER-PUIS, « Le régime de la clause de réserve de propriété en droit allemand », in

lettre d’information, disponible en ligne sur https://kutscher-puis.com

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
85
dans une convention cadre, de sorte qu’il ne soit plus nécessaire de la prévoir
dans chaque contrat d’application296.

170. Par ailleurs, la clause de réserve de propriété doit être acceptée


par l’acheteur. Cette acceptation peut être expresse ou tacite. L’acheteur
accepte expressément la clause en signant un contrat ou un document qui la
comporte. A défaut de cette signature, il est supposé avoir tacitement accepté
ladite clause lorsqu’il commence l’exécution du contrat qui la comporte sans
aucune réserve. A défaut de preuve d’acceptation de la clause par l’acheteur,
celle-ci lui sera inopposable. L’exigence d’un écrit a donc une valeur
probatoire.

171. En effet, l’écrit permet de se rassurer que l’acheteur a accepté la


clause. Elle doit de ce fait être rédigée en de termes clairs et stipuler que le
transfert de propriété des biens livrés n’aura lieu qu’à compter de la réception
du paiement du prix, et que si l’acheteur ne paye pas à l’échéance, le vendeur
peut réclamer la restitution des biens. En outre, pour être opposable aux tiers,
l’Acte uniforme OHADA portant organisation des sûretés exige que la clause
de réserve de propriété fasse l’objet d’une publicité. Cette exigence de publicité
permet de tenir les tiers au courant de l’existence de la réserve de propriété.
Le droit français ignore une telle exigence. La clause est opposable aux tiers
dès lors que son existence peut être prouvée. L’écrit n’est donc pas exigé
simplement pour des raisons de preuve, il est une condition d’opposabilité de
la clause en France297.

172. Le sort de la clause en cas d’extinction de la dette. En France,


à la suite d’un arrêt rendu par la deuxième chambre civile de la cour de
cassation en 2014298, la question s’est posée de savoir si la clause de réserve

296 Ibid.
297 E. GARAUD, « Vente avec réserve de propriété », JC Com., 29 Avril 2016, Fasc. 291, p.2
298 Cass. Civ. 2ème, 27 février 2014, n°13-10891, Bull. civ. II, n°59 ; Gaz. Pal. 20 mars 2014,

p.22, obs. M. Dumont-Lefrand ; RDC 2014 p.393, obs J. Klein ; RTD civ. 2014 p.370, obs. H.
Barbier

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
86
de propriété subsiste en cas d’extinction de la dette299. En effet, l’acquéreur
d’un véhicule avait vu sa dette effacée dans le cadre d’une procédure de
rétablissement personnel300. Cette vente ayant été conclue sous réserve de
propriété et le prix n’ayant pas été payé, le vendeur avait demandé et obtenu
la restitution du véhicule. La cour de cassation décide que l’extinction de la
créance résultant de l’effacement des dettes n’équivaut pas à un paiement du
prix, par conséquent, le transfert de propriété ne pouvait intervenir au profit
de l’acquéreur.

173. Cette solution de la jurisprudence française peut se justifier et


participe à protection des intérêts du créancier réservataire, renforçant ainsi
l’efficacité du mécanisme. En effet, la clause de réserve de propriété permet
au réservataire d’éviter de subir les dommages d’une éventuelle inexécution
de son débiteur. De sorte que si ce dernier ne se trouve pas en mesure de
payer le prix, le réservataire récupère son bien qu’il peut revendre. Dès lors,
l’extinction de la créance ne devrait pas ipso facto mettre fin à la réserve de
propriété, il faut que cette extinction résulte soit du paiement du prix, ou de
la compensation des deux dettes.

2/ L’efficacité de la clause de réserve de propriété

174. Le droit de revendication du bien. L’efficacité de la réserve de


propriété réside d’abord dans le fait qu’elle confère au créancier réservataire
le droit de revendiquer son bien en cas d’inexécution du débiteur. La
revendication est l'action par laquelle une personne fait valoir son droit de
propriété sur un bien en vue d’en obtenir la restitution. Cette action a pour
objet la reconnaissance du droit de propriété du propriétaire et la restitution
de son bien. En France, en cas de revente du bien par un débiteur in bonis, la

299 K. LAFAURIE, « Retour et projection sur le sort de clause de réserve de propriété en cas
d’effacement de la dette », Droit & patrimoine Magazine n°290 – avril 2019
300 La procédure de rétablissement personnel consiste à effacer les dettes d’une personne

surendettée lorsque sa situation financière est tellement dégradée qu’aucune mesure de


traitement du surendettement n’est possible

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
87
revendication n’est possible que si le bien existait en nature au jour de la
revente301. Cette solution protège le vendeur contre une utilisation du bien par
le sous-acquéreur qu'il ne pouvait prévoir initialement302.

175. En droit de l’OHADA, l’article 78 de l’AUS dispose que « lorsque le


bien est vendu ou détruit, le droit de propriété se reporte, selon le cas, sur
la créance du débiteur à l’égard du sous-acquéreur ou sur l’indemnité
d’assurance subrogée au bien ». Ce texte ne subordonne pas la revendication
à l’existence du bien en nature. On peut donc en déduire que celle-ci est
possible dans tous les cas. Lorsque le bien existe encore en nature, le
créancier peut recourir à la procédure d’injonction de restituer instituée par
l’article 19 de l’AUPSRVE303 aux termes duquel, « celui qui se prétend créancier
d’une obligation de délivrance ou de restitution d’un bien meuble corporel
déterminé, peut demander au président de la juridiction compétente d’ordonner
cette délivrance ou restitution en vue de rentrer en possession de son bien ». Ce
texte permet au créancier réservataire d’obtenir l’exécution forcée de
l’obligation de restitution dans la mesure où le débiteur ne s’exécute pas
volontairement304.

B/ Le droit de rétention

176. Une nature juridique controversée en droit français. Pour


inciter son débiteur à s’exécuter, le créancier peut retenir un bien lui
appartenant. Il suspend ainsi l’exécution de son obligation de restitution du

301 Cass. com., 8 mars 1988 : RTD com. 1989, p. 113, obs. B. BOULOC. ; Cass. com., 20 juin
1989 : D. 1989, p. 431, note F. PEROCHON ; Banque, 1989, p. 460, obs. J.-L. RIVES-LANGE
; RTD.com. 1989, p. 745, obs. A. MARTIN-SERF ; JCP E 1990, II, 15668, n° 14, obs. M.
CABRILLAC.
302 P. CROCQ, « Clause de réserve de propriété », JCC-Distribution, Fasc. 2860, 1er Août

2022, n°69.
303 Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des

voies d’exécution adopté le 10 avril 1998 et paru au JO OHADA n°6 du 1er juillet 1998.
304 Y. R. KALIEU ELONGO, « Propriété retenue ou cédée à titre de garantie », in P.G POUGOUE

(dir), Encyclopédie OHADA, Lamy 2011, p.1445


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
88
bien jusqu’à l’exécution de ses obligations par le débiteur305. Ce mécanisme
connu dans les deux systèmes est appelé « droit de rétention ». Il s’agit d’une
« faculté accordée à un créancier de conserver par devers lui la chose qui
appartient à son débiteur, et d’en refuser la restitution jusqu’au paiement
complet de sa créance »306. La nature juridique du droit de rétention a
longtemps divisé la doctrine tant en droit OHADA qu’en droit français.

177. En France, certains auteurs y voyaient un droit réel307 alors


d'autres la considéraient comme un simple droit personnel308, car il ne
conférait à son titulaire ni droit de suite, ni droit de préférence. Une partie de
la doctrine le qualifiait de sûreté309, alors l’autre n’y voyait qu’une simple
garantie310. Pour un troisième courant doctrinal, le débat sur la nature du droit
de rétention était vain, et aucune nature ne pouvait être choisi au détriment
de l’autre, car selon ces auteurs, il n’y aurait pas qu’une seule forme de droit
de rétention, la nature juridique de ce mécanisme serait fonction du lien de
connexité qui en est le support311. Aujourd’hui, l'ordonnance du 23 mars
2006312 a mis fin à cette controverse en conférant à la réserve de propriété une
place dans le Code civil au sein du nouveau Livre IV, parmi les autres sûretés.

305 C. POMPINEAU-DEHAULLON, Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative,


op. cit., p.103, n°172.
306 J-C. JAMES, « Le droit de rétention en droit uniforme africain », AJP, Rev. CERDIP, vol.1,

n°2, Juillet-Décembre 2002, p.1


307 R. RODIERE, note sous Cass. civ. 1re, 22 mai 1962, D. 1965. 58 ; P.-Y. GAUTIER, obs.

Cass. civ 1ère, 7 janvier 1992, Rev. trim. dr. civ. 1992. 586 ; J. MESTRE, E. PUTMAN, M.
BILLIAU, Droit commun des sûretés réelles, L.G.D.J. 1996, nos 56 s. ; ou encore, Un droit
réel inachevé, J. et L. MAZEAUD, V. RENOUIL ET F. CHABAS, Leçons de droit civil, Sûretés
et publicité foncière, Montchrestien, 6e éd. 1988, n° 129.
308 N. CATALA-FRANJOU, « De la nature juridique du droit de rétention », Rev. trim. dr. civ.

1967. n° 9, selon laquelle le droit de rétention ne serait que « l'accessoire d'une créance et de
la modalité d'une dette » ; M. CABRILLAC et C. MOULY, Droit des sûretés, Litec, 4e éd. 1997,
n°539 ; P. CROCQ, obs. Rev. trim. dr. civ. 1995. 931 (à propos des arrêts des cours d'appel
de Pau, 11 octobre 1994, J.C.P. 1995 éd. G, IV. 1567 ; et d'Aix-en-Provence, 2 mars 1995 ;
J.C.P. 1995, éd. G, IV. 1977) et obs. à propos de l'arrêt, Rev. trim. dr. civ. 1997. 707.
309 Ph. DELEBECQUE et Ph. SIMLER, Les sûretés, la publicité foncière, Dalloz, 2e éd. 1995,

n° 480 ; Ph. DELEBECQUE, J.C.P. 1995, éd. G, I. 3889, obs. à propos de Aix-en-Provence, 2
mars 1995 ; J.C.P. 1995, éd. G, IV. 1977.
310 L. AYNES, Les sûretés, La publicité foncière, Cujas, 8e éd. 1997, n° 452

311 L. AYNES, P. CROCQ, Le droit des sûretés, 10 ème éd., L.G.D.J, Paris, p.271

312 Ord. n° 2006-346 du 23 mars 2006 relative aux sûretés.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
89
178. En droit de l’OHADA, avant l’adoption de l’acte uniforme de
l’OHADA portant organisation des sûretés, la doctrine africaine était elle aussi
partagée sur la nature juridique du droit de rétention. Pour certains, le droit
de rétention ne serait pas une sûreté comme les autres, car il n’entraîne ni
droit de préférence ni droit de suite313. Pour d’autres, le droit de rétention est
sans aucun doute une sûreté et ne saurait être considéré comme une simple
exception d’inexécution ou une saisie-arrêt improvisée ou une compensation.
Ses conditions d’exercice, son assiette et sa réalisation en font une sûreté
active et achevée assimilée à un gage314. Aujourd’hui, avec l’adoption de l’AUS,
le débat sur la nature juridique du droit de rétention a été définitivement
tranché par le législateur OHADA. Il a ainsi décidé d’en faire une véritable
sûreté dont les conditions de mise en œuvre sont presqu’identiques à celles
prévues en droit français (1), et son efficacité est reconnue dans les deux
systèmes (2).

1/ Des conditions presqu’identiques

179. En France et dans l’espace OHADA, l’exercice du droit retentions


est subordonnée à trois conditions préalables. Certaines de ces conditions
sont relatives à la créance, d’autres à la rétention du bien et les dernières au
lien de connexité entre la créance et le bien retenu.

180. Une créance certaine, liquide et exigible. Aux termes de


l’article 68 de l’AUS, « le droit de rétention ne peut s’exercer que si la créance
du rétenteur est certaine, liquide et exigible ». Il résulte de ce texte que, pour
retenir valablement la chose, le cocontractant rétenteur doit justifier d’une

313 J.-R. GOMEZ, « Analyse critique de l’avant-projet d’acte uniforme portant organisation des
sûretés dans les Etats membres de l’OHADA », Penant, n° 825, septembre-décembre 1997, p
262.
314 J. ISSA-SAYEGH, « Présentation du projet d’acte uniforme de l’OHADA portant organisation

des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, du droit des sûretés et des
procédures collectives d’apurement du passif », Penant, n° 827, mai-aout 1998, p 212.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
90
créance certaine liquide et exigible. La créance est dite certaine lorsqu’elle ne
souffre d’aucune contestation. Dès lors, le cocontractant qui souhaite retenir
le bien de l’autre partie doit justifier d’un titre de créance à l’encontre de cette
dernière315. Elle est liquide lorsque son montant est connu316. La jurisprudence
africaine admet que cette liquidité puisse être déterminée à partir du chiffre
d’affaires dégagé sur l’exercice comptable317. Par ailleurs, la créance est
exigible, lorsque la date de son payement est déjà arrivée et que le débiteur ne
peut se prévaloir d’aucun délai de paiement.

181. En droit français, l’exigence d’une créance certaine liquide et


exigible n’apparait pas clairement à la lecture des dispositions de l’article 2286
du code civil. Toutefois la jurisprudence affirme l’exigence de ces trois
conditions. Il a ainsi été jugé que, le droit de rétention ne peut être admis si
l’on n’est pas certain de l’existence d’une créance entre le poursuivant et le
poursuivi318. Aussi est-elle dépourvue de toute certitude, la créance d’un
garagiste qui ne s’est pas entendu avec son client sur le prix des réparations
à effectuer sur un véhicule319. Ainsi, contrairement au droit de l’OHADA, il
n’est pas nécessaire que la créance soit liquide au moment où le créancier
oppose son droit de rétention, la liquidité de créance est plutôt exigée au
moment où le débiteur agit en justice pour réclamer sa chose. Il est même
admis que le juge puisse alors liquider la créance320. Par contre, comme en
droit OHADA, l’exigibilité de la créance demeure une condition de mise en
œuvre du droit de rétention en France. En effet, le créancier ferait montre de
mauvaise foi s’il retient la chose du débiteur alors qu’il n’a qu’une créance à
terme. Aussi, en raison de son but qui est de contraindre le débiteur à payer

315 CA Abidjan, n°1164, 24-10-2003, K. A. J. C/ Mlle K. F. : www.OHADA.com, Ohadata J-


03-337
316 CCJA, n° 21, 17-6-2004 : SDV-CÔTE D’Ivoire c/ Société RIAL TRADING

317 CCJA, n°007, 24-4-2003 op. cit.

318 Cass. 1re civ., 3 mai 1966 : D. 1966, 649, note J. Mazeaud ; Marie-Pierre Dumont-Lefrand,

« les conditions d'exercice du droit de rétention », Gaz. Pal. 13 juin 2013, n°164
319 Cass. Civ. 3-5-1966 : D. 1966.649 note Mazeaud ; Cass. com. 14-6-1988 : Bull. civ. IV. p.

138.
320 L. AYNES, P. CROCQ, Le droit des sûretés, 10 ème éd., L.G.D.J, Paris, P.242, n°441

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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91
ce qu’il doit, le droit de retentions ne peut logiquement se justifier que si la
créance est déjà exigible.

182. La détention du bien. Le créancier ne peut retenir qu’un bien


qu’il détient. Il doit s’agir d’une détention matérielle. A cet effet, la mainmise
physique du créancier sur le bien de son débiteur constitue la condition
essentielle de l’exercice du droit de rétention. D’où, en droit OHADA, le droit
de rétention n’est admis que pour les biens corporels321. Toutefois, une partie
de la doctrine milite pour son extension à certains biens incorporels « sur
lesquels un créancier peut être investi d’un pouvoir juridique comparable à une
détention physique »322. C’est le cas notamment lorsque le créancier exerce une
certaine emprise sur une créance de son débiteur.

183. En droit français, si le principe de la détention matériel est


acquis, une partie de la doctrine voit en l’article 2363 du code civil, une
évolution vers la reconnaissance d’un droit de rétention sur des biens
incorporels. Aux termes de ce texte, « après notification, seul le créancier nanti
reçoit valablement paiement de la créance donnée en nantissement tant en
capital qu'en intérêts ». Le législateur français confèrerait ainsi au créancier un
droit de rétention sur la créance puisqu’en notifiant le nantissement il a le
pouvoir de bloquer à son seul profit le paiement de celle-ci323. D’autant plus
que, l’article 2364 lui donne la possibilité, soit de compenser ce paiement avec
la créance garantie restant due si celle-ci est déjà échue, soit, dans le cas
contraire, de conserver les sommes payées au titre de la créance nantie,
comme garantie sur un compte ouvert à cette fin. Par ailleurs, la détention
doit être légitime, c’est à dire que, le bien détenu doit avoir volontairement été
remis au rétenteur par le débiteur lui-même. Le rétenteur doit en outre être

321 A. HOUEDJISSIN, « Le droit de rétention dans l’acte uniforme portant sûretés », p.7
disponible sur http://afrilex.u-bordeaux.fr/le-droit-de-retention-dans-lacte-uniforme
portant-suretes
322 J-C. JAMES, « Le droit de rétention en droit uniforme africain », AJP, Rev. CERDIP, vol.1,

n°2, Juillet-Décembre 2002, p.12


323 L. AYNES, P. CROCQ, Le droit des sûretés, op . cit., p.260

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
92
de bonne foi dans sa rétention. En droit du transport par exemple, le
transporteur ne doit pas avoir usé des manœuvres dolosives pour retrouver la
détention des marchandises déjà livrer au destinataire324.

184. Un lien de connexité entre la créance et le bien retenu. Pour


qu’il y ait droit de rétention, il faut un lien de connexité entre la créance et le
bien retenu. Cette exigence de connexité est partagée par les deux systèmes.
En droit français, la connexité peut être matérielle, juridique ou même
conventionnelle. Il y a connexité matérielle, lorsque la créance qui fonde le
droit de rétention a pris naissance à l’occasion de la chose retenue. Par contre,
la connexité est dite juridique lorsque la créance et la détention se rattachent
à un même rapport juridique (contrat ou quasi-contrat) alors même que ce
rapport, n’aurait pas eu pour objet essentiel la création du droit de rétention325.
Enfin, la doctrine retient que la connexité peut être conventionnelle, lorsqu’un
débiteur remet un bien à son créancier afin de garantir le paiement de sa dette
sans pour autant donner ce bien en gage326.

185. En droit de l’OHADA, le législateur n’apporte pas de précision sur


la nature de la connexité. L’article 69 de l’AUS institue plutôt une présomption
de connexité dans trois hypothèses. La connexité est d’abord, présumée «
lorsque la chose retenue a été remise jusqu’au complet paiement de la créance
du rétenteur ». Autrement dit, le législateur OHADA considère qu’il y a
connexité, lorsque la chose retenue a été remise en gage pour le paiement de
la créance du rétenteur. Ici, il n’est pas exigé que la créance soit née de la
chose retenue, il suffit que celle-ci est servie de gage pour en garantir le
paiement. Ensuite, « lorsque la créance impayée résulte du contrat qui oblige le
rétenteur à livrer la chose retenue », il s’agit dans ce cas d’une connexité
juridique. Enfin, il y aura connexité, toutes les fois que « la créance impayée

324 V. E. BOKALLI, D.C. SOSSA, Droit des contrats de transport de marchandises par route,
Bruylant, Bruxelles, 2006, p.62, n°222
325 ibid.

326 Cass. com., 22 mars 2005, no 02-12881, JCP G 2005.I.135, no 17, obs. Ph. Delebecque

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
93
est née à l’occasion de la détention de la chose retenue ». Dans ce dernier cas,
il s’agit de la connexité matérielle.

186. En somme, les législateurs OHADA et français sont unanimes à


quelques exceptions près, sur les conditions préalables à l’invocation du droit
de rétention. Cette unanimité n’a rien de surprenant, car il s’agit en général
des conditions classiques à l’exception de la connexité conventionnelle qui
demeure discutée.

2/ Une efficacité reconnue

187. Un moyen d’incitation différent de l’exception d’inexécution.


Le droit de rétention est un moyen d’incitation à l’exécution donc l’efficacité
ne souffre d’aucune contestation. Cette efficacité réside d’abord dans son
caractère unilatéral. En effet, le droit de rétention permet au créancier de
suspendre l’exécution de son obligation de restitution du bien sans un recours
préalable au Juge. Ce mécanisme très proche de l’exception d’inexécution s’en
distingue tout de même à plusieurs égards. D’abord, au niveau de leurs
fondements, l’exception d’inexécution est fondée sur le lien d’interdépendance
existant entre les obligations issues d’un même rapport synallagmatique, alors
que le droit de rétention quant à lui, est fondé sur un lien de connexité existant
entre une créance et la détention d’une chose327.

188. Ensuite, au niveau de leur mise en œuvre, l’exception


d’inexécution n’est admise dans les deux systèmes que pour les inexécutions
suffisamment graves, lorsque le droit de rétention peut être invoqué quelle que
soit la gravité du manquement328. En effet, en tant que légitime défense
contractuelle, l’exception d’inexécution obéit à une exigence de

327 C. PONPINAU DEHOULON, Les remèdes de justices privée à l’inexécution du contrat.


Etude comparative, LGDJ, Paris 2008, p.1041, n°172
328
A. SIDIBE, Recherche sur l’équilibre dans l’exécution du contrat de transport de
marchandises par route : étude comparée droits OHADA et français, Th. Paris 1 Panthéon
Sorbonne, 2019, p.219
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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proportionnalité, alors que le créancier est admis à retenir un bien de son
débiteur qui a une valeur supérieure au montant de sa créance. C’est
d’ailleurs ce qui en fait un véritable moyen de pression. Le débiteur sera obligé
de s’exécuter pour récupérer son bien. Par exemple, en droit OHADA du
transport de marchandise par route, le transporteur est autorisé à retenir la
marchandise tant qu’il n’a pas reçu le paiement qui lui est dû329 au titre des
frais de transport. En droit français, il peut même retenir la marchandise pour
des impayés antérieurs330. Toutefois ce droit de rétention doit être exercé avec
prudence. Cette prudence consiste pour le transport à vérifier que la
marchandise appartient au débiteur des frais de transport, qu’elle n’a pas
encore été transférer à un tiers par l’effet d’un transfert de clause de réserve
de propriété331.

Section 2 : La menace du créancier

189. Le débiteur peut se résoudre à exécuter le contrat parce qu’il


craint que lui soit infligées des sanctions plus lourdes. L’exécution n’est pour
autant pas forcée, elle est dite résignée. Cette exécution volontaire résignée
peut s’obtenir soit au moyen de la stipulation d’une clause pénale (paragraphe
1), soit par la condamnation au paiement de dommages et intérêts punitifs
(Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La clause pénale

190. Définition. La jurisprudence française définit la clause pénale


comme étant « la clause d'un contrat par laquelle les parties évaluent
forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution de

329 V. E. BOKALLI, D. C. SOSSA, OHADA, Droit des contrats de transport de marchandises


par route, Bruylant, Bruxelles, 2006, p.62, n°220 ; A. SIDIBE, op. cit., p.219
330 C. com., art. L.133-7
331 CA Poitiers, 1ère ch., 20 janvier 2017, n°15/03024

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
95
l'obligation contractée »332. Il s’agit d’une stipulation contractuelle par laquelle
les parties fixent d’avance, le montant des dommages et intérêts qu’une partie
devra payer à l’autre en cas d’inexécution333. Elle consiste à adresser des
menaces pécuniaires sur le patrimoine d’un débiteur qui tente de s'échapper
à ses obligations334. Mesure d’intimidation, la clause pénale vise à frapper le
portefeuille du débiteur en vue de forcer sa volonté335. Elle a pour but de
pousser le débiteur à exécuter336. Ce remède est admis dans les deux systèmes
(A), mais son efficacité relative (B).

A/ L’admission de la clause pénale

191. Débat doctrinal sur la nature de la clause. En France, avant la


réforme de 2016, le Code civil traitait les clauses pénales, d’abord, de manière
générale à l’article 1152, puis de façon plus spécifique aux articles 1226 et
suivants. L’un des débats que suscitaient ces dispositions portait sur la nature
de cette clause. En effet, parce qu’elle emprunte ses caractères à d’autres
mécanismes, la doctrine française a longtemps été divergente sur la nature de
la clause pénale. Certains auteurs la concevaient comme une peine privée
contractuelle337. Les partisans de cette doctrine soutenaient d’une part, que la
fonction principale de la clause pénale consiste à contraindre le débiteur à
satisfaire à ses obligations. Elle se caractérise par sa fonction comminatoire,

332 Cass., civ. 1re, 10 octobre 1995, n° 93-16.869: Bull. civ. I, n° 347, D. 1996. 486 ; JCP G
1996, II, 22580, note G. PAISANT ; D. 1996, jurispr. p. 486, note B. FILLION-DUFOULEUR ;
D. 1996, somm. p. 116, obs. PH. DELEBECQUE ; Cass., civ. 3e, 26 janvier 2011, Bull. civ.
III, n° 12, JCP 2011, n° 19, 566, n° 16, obs. GROSSER, CCC 2011, comm. 87, obs.
LEVENEUR, RDC 20113, p. 817, obs. LAITHIER; Cass. com. 14 juin 2016 n° 15-12734.
333 J-S BORGHETTI, « La qualification de clause pénale », RDC 2008, n°04, p.1158
334 O. MOURAD KHALAK, « L’efficacité De L’astreinte Et De La Clause Pénale Dans Le

Contentieux Contractuel: Mythe Ou Réalité? », Journal of Law , Vol.15, p.378


335 J. CARBONNIER, Droit civil, Les biens, Les obligations, vol. II, 1re éd, Guadriage, 2004,

p. 1918
336 R. CABRILLAC, Droit européen comparé des contrats, 2 ème éd., LGDJ, Paris 2016, p.173,

n°281.
337 D. MAZEAUD, La notion de clause pénale, LGDJ, coll. « bibliothèque de droit privé », 1992,

n°495, p. 287 et s.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
96
laquelle résultait clairement de l’ancien article 1226. Ainsi, l’inexécution de
l’obligation contractuelle suffisait à la mettre en œuvre, sans qu’il soit besoin
de rechercher l’existence d’un préjudice.

192. Toutefois, cette thèse n’avait pas rencontré l’assentiment des


auteurs tels que DEMOLOMBE, JOSSERAND ou encore Philippe LE
TOURNEAU, pour qui, au regard de l’ancien article 1229 du code civil qui
disposait que, « la clause pénale est la compensation des dommages et intérêts
que le créancier souffre de l’inexécution de l’obligation principale », cette clause
ne serait en réalité qu’une clause de dommages-intérêts. Sa fonction serait
donc indemnitaire. C’est aussi cette fonction indemnitaire qui est consacrée
dans d’autres systèmes tels qu’en droit belge338 et dans le système de la
Common Law339.

193. Le recul de la fonction comminatoire. Sans reprendre les


anciens textes cités ci-dessus, l’ordonnance du 10 février 2016 simplifie et
synthétise dans l’article 1231-5 du nouveau code civil, l’essentiel de ces
dispositions relatives aux clauses pénales. Il résulte de l’alinéa premier de ce
nouveau texte que, « lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de
l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut
être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre ». Il se déduit de ces
dispositions un abandon implicite de la fonction comminatoire au profit de la
thèse indemnitaire. Le législateur français s’est surement laissé influencer par
son homologue de la Common law qui adopte une vision purement réparatrice
de la clause pénale, déclarant ainsi nulle toute clause qui vise à réprimer le
comportement du cocontractant coupable d’inexécution340.

338 CH. BIQUET-MATHIEU, « Les clauses pénales – Rapport belge », in, Journées trilatérales
Espagne – Québec – Belgique « Questions choisies de droit privé » Barcelone 28 et 29 octobre
2010, p.3
339 L. USUNIER, « L'insaisissable clause pénale », RDC 2014, n°03, p.520

340 C. POPINEAU DEHAULLON, Les remèdes de justice privée à l’inexécution du contrat :

étude comparative, L.G.D.J, Paris 2008, p.32, n°53 ; L. USUNIER, « L'insaisissable clause
pénale », RDC 2014, n°03, p.520

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
97
194. En droit spécial de l’OHADA, les actes uniformes ne comportent
aucune disposition exposant un régime général de la clause pénale. Ce silence
a pour conséquence l’application du droit commun en la matière. Selon
l’article 1226 du code civil ancien, « la clause pénale est celle par laquelle une
personne, pour assurer l'exécution d'une convention, s'engage à quelque chose
en cas d'inexécution ». Ce texte, consacre le caractère comminatoire de la
clause, et l’article 1229 du même code quant à lui, met en exergue son
caractère indemnitaire. Le droit commun de l’OHADA reconnait donc à la
clause pénale une nature hybride341. Par ailleurs, dans les Etats qui se sont
dotés d’une législation propre en matière de droit des contrats, on observe une
préférence pour la fonction indemnitaire. C’est ce qui ressort des codes civils
malien342 et sénégalais343, qui la confondent d’ailleurs à une clause limitative
de responsabilité

195. Les conditions de mise en œuvre de la clause pénale. La mise


en œuvre de la clause pénale suppose d’abord un manquement du débiteur à
son obligation344. En effet, en tant qu’instrument de garantie de l’exécution
d’une obligation, la mise en œuvre de la clause pénale suppose l’inexécution
par le débiteur de l’obligation ainsi garantie. Cette inexécution doit néanmoins
avoir été clairement définie par les parties. Il peut s’agir d’un retard
d’exécution, d’une exécution défectueuse ou d’une absence d’exécution.
Autrement dit, il n’est pas nécessaire que l’inexécution revête une certaine
gravité. Toutefois, l’alinéa 3 de l’article 1231-5 du code civil français précise
qu’en cas d’exécution partielle, « la pénalité convenue peut être diminuée par le
juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré
au créancier ». C’est aussi ce qui ressort de l’article 156 alinéa 2 du code
malien des obligations qui dispose qu’ « en cas d’exécution partielle, le juge
pourra diminuer le montant des dommages-intérêts prévus ».

341 F. PASQUALINI, « La révision des clauses pénales », Defrénois 30 juin 1995, n°12, p.760
342 C. civ. Mali, Art. 135
343 COCC, Art. 155

344 F. TERRE, PH. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil : Les obligations, 10ème éd., D., Paris

2009, p.635, n°624

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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196. En plus, la pénalité est due sans que le créancier ait besoin de
justifier d’un préjudice345, la constatation de la défaillance du débiteur suffit
à faire jouer la clause. La question se pose alors de savoir si l’inexécution doit
nécessairement être fautive. En d’autres termes, la clause pénale survit-elle
en cas d’inexécution non imputable au débiteur ? Le législateur français est
resté silencieux sur la question. En droit commun de l’OHADA, l’article 1227
du code civil ancien dispose que « la nullité de l'obligation principale entraîne
celle de la clause pénale ». Ce texte est repris par le code malien des
obligations346. En droit sénégalais, si le COCC n’e comporte pas de disposition
similaire, on peut déduire cette même position de l’article 156 de ce texte qui
dispose que, « lorsque l'obligation assortie d'une clause pénale est indivisible ou
solidaire, la clause pénale est elle-même indivisible ou solidaire ». Il résulte de
ce texte que la clause pénale en droit de l’OHADA obéit à la règle selon laquelle
l’accessoire suis le principal. On en déduit que si l’inexécution de l’obligation
garantie est « excusable », le créancier ne saurait faire jouer la clause pénale.

B/ L’efficacité relative de la clause pénale

197. L’efficacité de la clause pénale se trouve limitée du fait que, bien


qu’elle ait conservé la fonction comminatoire qui garantissait son efficacité (1),
il est reconnu au juge le pouvoir de réviser la pénalité convenue par les parties
(2).

1/ La fonction comminatoire : gage de l’efficacité de la clause pénale

198. La fonction comminatoire de la clause pénale. L’efficacité de


la clause pénale en tant que moyen de garantir l’exécution du contrat se
mesure par sa capacité de dissuasion. Elle doit constituer une menace

345 S. CARVAL, « Paiement de la clause pénale en l'absence de preuve du préjudice », RDC


2007, n°03, p.749.
346 RGO, art. 137 al. 2

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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suffisante pour dissuader le débiteur de manquer à ses obligations
contractuelles347. En effet, pour jouer pleinement son rôle d’instrument de
prévention de l’inexécution du contrat348, la clause pénale doit alourdir
sensiblement le montant prévisible de la réparation. Elle vise à décourager
l’inexécution. Pour ce faire, il faut que le montant qu’elle prévoit soit
suffisamment élevé. En effet, une clause pénale dont le montant est supérieur
au préjudice ou à l’avantage que le créancier devait tirer du contrat dissuadera
le cocontractant à manquer à ses obligations puisque, par hypothèse, il y a
plus de chances qu'il ne retire aucun profit de son manquement349. C’est ce
caractère comminatoire qui permet de distinguer la clause pénale de la clause
de dédit350.

199. Pour être un véritable instrument de prévention de l’inexécution


contractuelle, la clause pénale doit mettre le débiteur dans une situation où
l’inexécution du contrat lui sera plus couteuse que s’il accomplit correctement
sa prestation. Pour cela, une redéfinition de ce mécanisme s’impose tant en
droit français que dans l’espace OHADA. En effet, au regard de l’importance
qui est accordée à l’exécution en nature, les deux systèmes juridiques
devraient renforcer le caractère comminatoire de la clause pénale en faisant
d’elle un véritable moyen de contrainte à l’exécution du contrat. Pour se faire,
le droit latino-américain pourrait constituer une source d’inspiration.

200. Aux termes de l’article 11 des principes Latino-américains du


droit des contrats, « la clause pénale assure la fidèle et opportune réalisation
du contrat et peut estimer les préjudices de manière anticipée ». Il résulte
clairement de ce texte que pour le législateur latino-américain, la clause
pénale vise à garantir l’exécution en nature du contrat. Elle constitue un

347 J. SAINTE-ROSE, « Clause pénale et clause indemnitaire », LPA 25 sept. 2006, n°191, p.6
348 J-B. SEUBE, « Clause pénale et clause d'indemnisation forfaitaire », RDC 2008, n°04,
p.1257.
349 Y.M. LAITHIER, D. MAZEAUD, « La nature de la sanction : satisfaction du bénéficiaire par

des dommages-intérêts ou primauté de l'exécution forcée en nature ? », RDC 2012, n°2 – p. 686.
350 La clause de dédit confère aux parties la faculté unilatérale de se soustraire à l’exécution

du contrat, moyennant le paiement d’une compensation

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
100
moyen de pression à la disposition du créancier pour dissuader le débiteur à
s’exécuter. Abondant dans ce sens, l’article 790 du code civil argentin la définit
comme une clause par laquelle une personne, pour assurer l’exécution d’une
obligation, impose à l’autre une pénalité ou une amende en cas de retard ou
de non-exécution de ladite obligation351. Contrairement aux droits français et
OHADA ces textes font de la clause pénale un mécanisme exclusivement
comminatoire ce qui en garantit l’efficacité. Toutefois, ce caractère
comminatoire n’est d’aucune efficacité si le juge a la latitude de réduire la
clause qu’il juge excessive.

2/ La révisabilité de la clause pénale : une limite à son efficacité

201. Le déclin de l’intangibilité de la clause pénale. A l’origine, la


jurisprudence française se montrait intransigeante envers l’idée de réviser les
clauses pénales excessives352. Le code civil de 1804 dans son article 1152
d’avant 1975, consacrait le principe de l’intangibilité de la clause pénale et
n’admettait que celle-ci soit réviser par le juge que dans l’hypothèse d’une
exécution partielle353. Cette vision était plus respectueuse du sacro-saint
principe de l’autonomie de la volonté des parties contractantes et garantissait
la force obligation du contrat354. Toutefois, la méfiance de la doctrine355 et de
la jurisprudence356 à l'égard des clauses pénales a permis de reconnaitre au
juge le pouvoir de la modérer, remettant ainsi en cause son intangibilité et par
ricochet, son efficacité.

351 Le texte dans la version originelle dispose que, « La cláusula penal es aquella por la cual
una persona, para asegurar el cumplimiento de una obligación, se sujeta a una pena o multa
en caso de retardar o de no ejecutar la obligación ».
352 Cass., 23 mai 1940, D.S., 1940, pp. 161 et 162 et obs. ; Cass. com., 4 juillet 1972, D.S.,

1972, p. 732 et note Ph. MALAURIE.


353 J. THILMANY, « Fonctions et révisibilité des clauses pénales en droit comparé », RIDC, Vol.

32 N°1, Janvier-mars 1980, p.21


354 Ibid.

355 G. CORNU, « Chronique de jurisprudence sur les contrats spéciaux », RTD.civ., 1971, p.170 ;

J.L. VALDE, « La réduction de la clause pénale excessive », Gaz. Pal., 1976, doct., p.450
356 V. arrêts sus cités (note 331)

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
101
202. En effet, quoique la jurisprudence française ait été, le plus
souvent favorable au principe de l'intangibilité des clauses pénales, les
nombreux abus auxquels avait donné lieu le système de l'irréductibilité de
celles-ci en matière de crédit-bail et de vente à tempérament, incitèrent le
législateur français à réformer le régime de ce mécanisme357. L’article 1er de la
loi du 9 juillet 1975, a ajouté à l’article 1152, un nouvel alinéa qui dispose
que, « néanmoins, le juge peut modérer ou augmenter la peine qui avait été
convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation
contraire sera réputée non écrite ». Il pose ainsi le principe du contrôle des
clauses pénales et le revêt d’un caractère d’ordre public. Malgré l’affirmation
selon laquelle cette réforme ne visait pas en principe à réduire la clause en un
simple « rôle dérisoire d’épouvantail pour débiteur ignare »358, il n’en demeure
pas moins que cette réforme a considérablement affaibli le caractère
comminatoire de la clause pénale en la rendant moins dissuasive.

203. La principale limite de ce texte réside dans la très grande liberté


qu’il accorde au juge dans son pouvoir modérateur de la clause. En effet, il
avait été reproché à ce texte de se borner à reconnaitre au juge le pouvoir de
modérer une clause pénale qu’il juge « manifestement excessive », sans fixer le
standard à partir duquel ce caractère « manifestement excessive » devra être
défini359. Pour échapper au pouvoir de révision du juge, certains créanciers
essayent souvent d’obtenir la requalification de la clause pénale en clause de
dédit, car la jurisprudence française s’est souvent montrée réticente à l’idée
de réviser cette dernière, parce qu'elle a en principe pour raison d'être, la
liberté accordée à un contractant de ne pas ou de ne plus exécuter un contrat
valablement formé, qu'elle autorise donc son inexécution et emporte par
conséquent son anéantissement360.

357 J. THILMANY, Op. cit., p.29


358 J. THILMANY, Op. Cit., p.30
359 T. GENICON, « Ce que les régimes comparés de la clause pénale et de la clause de dédit

nous disent de la force obligatoire du contrat », RDC 2015, n° 112a4, p. 449 ; E. HUBY, « La
clause pénale qui porte une atteinte excessive au droit absolu de demander le partage doit être
réputée non écrite », Gaz. Pal. 25 oct. 2016, n°37, p.78
360 D. MAZEAUD, « Clause pénale », RDC 2004, n°04, p.930

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
102
204. Aujourd’hui encore, au moment où la force obligatoire du contrat
est de plus en plus en déclin, cet affaiblissement du pouvoir dissuasif de la
clause se fait encore ressentir. Ceci conduit le professeur Thomas GENICON
à fustiger « la lâcheté » du système français en la matière. En effet, selon
l’auteur, dans un souci de franchise, le législateur français devra faire le choix
soit de suivre la voie du système anglais en décrétant l’illicéité des clauses
pénales, soit d’accepter la figure et la logique de ces clauses, qui est d’être
excessive en vue de dissuader le débiteur et favoriser ainsi l’exécution du
contrat. Ce choix doit être clair, car « rien n’est pire qu’un droit qui ment »361.

205. En droit de l’OHADA, les codes malien et sénégalais ont adhéré à


l’esprit de la réforme française en prévoyant respectivement aux articles 136
alinéa 3 et 154 alinéa 3 le pouvoir modérateur du juge sur les clauses pénales
jugées excessives. En droit spécial, la jurisprudence a fait une transposition
de la réforme de 1975, admettant ainsi la possibilité pour le juge de modérer
la clause pénale quoique le code civil normalement en vigueur dans la plupart
des Etats membres ne consacre pas une telle possibilité. Par conséquent,
comme c’est le cas en France, le pouvoir dissuasif de la clause se trouve affaibli
en droit OHADA. Il n’est donc pas rare de voir les contractants braver les
clauses pénales en violant leurs obligations contractuelles.

206. Dans un arrêt rendu le 28 mai 2020, la CCJA avait même estimé
qu’une clause pénale pouvait constituer une source d’enrichissement sans
cause362. En l’espèce, se fondant sur une clause pénale contenue à l’article 15
du contrat et qui prévoyait qu’en cas de résiliation anticipée, la partie qui en
prend l’initiative doit payer à l’autre la somme correspondant aux loyers de la
période restant à courir, le Tribunal de commerce de Niamey avait condamné
la requérante à payer diverses sommes. Or, selon elle, une telle clause est
abusive et encourt la nullité dans la mesure où elle est contraire à la règle en

361 T. GENICON, op. cit., p. 449.


362 CCJA, 1re ch., 28 mai 2020, n° 170/2020, S. SA c. Sieur H. A.),

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
103
la matière qui consiste, en pareille hypothèse, à prévoir une indemnité
forfaitaire. Pour faire droit à sa demande, la cour conclut à la violation de
l’article 1229 du Code civil ancien. Elle infirme alors le jugement querellé au
motif que, « le tribunal n’a pas tiré les conséquences du déficit d’encadrement
de la clause litigieuse, susceptible d’en faire une source d’enrichissement sans
cause ». Or, la clause ne peut être une source d’enrichissement sans cause et
donc abusive que si le créancier la cumule avec l’exécution effective du
contrat. Aux termes de l’alinéa 2 de l’article 1229, le créancier « ne peut
demander en même temps le principal et la peine, à moins qu'elle n'ait été
stipulée pour le simple retard ». Dans le cas d’espèce, il ne résulte pas des faits
que le débiteur ait exécuté son obligation. Par conséquent, le caractère
d’enrichissement sans cause que le juge attribue à cette clause ne se justifie
pas.

207. En définitive, que l’on soit en droit de l’OHADA ou en droit


français, on observe un recul de la fonction comminatoire de la clause pénale,
ce qui réduit son efficacité. Il serait judicieux de fixer au juge les standards à
partir desquels une clause pourra être jugée « manifestement excessive ». Pour
ce faire, il ne devra pas tenir compte uniquement de la valeur du préjudice
subi par le créancier, mais aussi et surtout la plus ou moins grande difficulté
qu'aura ce dernier, de se procurer ailleurs l'avantage promis363. Il devra aussi
et surtout tenir compte de la bonne ou mauvaise foi du cocontractant
défaillant. La clause pénale doit à tout prix décourager les violations efficaces
du contrat.

363 Y.M. LAITHIER, D. MAZEAUD, op. cit., p.687

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
104
Paragraphe 2 : Les dommages et intérêts punitifs

208. La plus haute mission de la justice, selon Ihering, est de


proportionner la réparation à la gravité de la négligence364. En matière
contractuelle, il y a des inexécutions qui résultent d’une négligence manifeste
du débiteur et que les dommages et intérêts compensatoires ne peuvent pas
permettre de sanctionner encore moins de prévenir. C’est en cela que se trouve
l’intérêt des dommages et intérêts punitifs. Il s’agit d’une sanction civile
punitive, infligée à l’auteur d’une violation grave des engagements
contractuels. Ainsi, en plus des dommages et intérêts destinés à compenser
les préjudices de la victime, les dommages punitifs lui seront octroyés pour
sanctionner le cocontractant fautif365. Puisant leur origine en droit romain avec
le délit prétorien de metus, les dommages-intérêts punitifs sont aujourd’hui
une institution spécifique à la common law366. Ils permettent non seulement
de sanctionner l’auteur d’une conduite malveillante, opprimante ou abusive,
mais aussi de dissuader les tiers d’agir de la même façon367. Ce mécanisme est
encore à ce jour ignoré en France et en droit OHADA (A), alors qu’il peut
s’avérer efficace (B).

A/ Un mécanisme non consacré

209. Un mécanisme incompatible à la réparation intégrale. Le droit


français de la responsabilité civile contractuelle repose sur le principe de la
réparation intégrale. En vertu de ce principe, les dommages et intérêts doivent
consister à réparer le préjudice de la victime et rien que son préjudice. Selon
la cour de cassation française, « les dommages et intérêts alloués à une victime

364 R. VON IHERING, De la faute en droit privé, t. 2, traduit par O. De Meulanaere,


Paris, Librairie Maresq, 1880
365 R. CABRILLAC, op.cit., p.168, n°273

366 Ils reçoivent une première application en Angleterre, dans l’arrêt Wilkes v. Wood de 1763.

Leur vocation selon cet arrêt est de « châtier les individus dont il apparaissait qu’ils avaient
violé la loi civile avec une intention méchantenou malicieuse ».
367 M. SAMSON, « Les dommages punitifs en droit québécois : tradition, évolution et… révolution

? », revue de droit de l’université de Sherbrooke (RDUS), vol.42, n°1-2, 2012, p. 161

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
105
doivent réparer le préjudice subi sans qu’il en résulte pour elle ni perte ni
profit »368. Il n’est donc pas question d’aller au-delà du préjudice subi par la
victime. En matière contractuelle, les dommages et intérêts doivent se limiter
à rétablir le créancier de l’obligation inexécutée dans la position où il se
trouvait avant la conclusion du contrat, mais aussi de réparer le préjudice
moral et ou matériel qu’il aurait subi du fait de la défaillance de son débiteur.
Ce principe de la réparation intégrale fortement ancré dans le droit français
de la responsabilité est incompatible à l’admission des dommages et intérêts
punitifs369.

210. En droit commun de l’OHADA, en vertu de ce principe de la


réparation intégrale, les dommages et intérêts semblent comme en France, se
limiter à une fonction indemnitaire. Les règles de responsabilité sont
élaborées sous le prisme du comportement de la victime, c’est d’ailleurs là la
principale limite du système de réparation institué par le législateur de
l’OHADA. Comme en droit français, en matière de responsabilité civile,
l’attention est portée sur le comportement de la victime et non sur l’auteur de
la faute. Le code civil français se rassure ainsi que seul le préjudice de la
victime soit réparé à sa juste valeur alors qu’en droit spécial de l’OHADA, l’
AUDCG veille à ne réparer que le dommage que cette dernière n’aurait pas pu
éviter. Aux termes de l’article 293 de l’AUDCG, « la partie qui invoque une
inexécution des obligations du contrat doit prendre toutes mesures
raisonnables, eu égard aux circonstances, pour limiter sa perte, ou préserver
son gain. Si elle néglige de le faire, la partie en défaut peut demander une
réduction des dommages intérêts égale au montant de la perte qui aurait pu être
évitée et du gain qui aurait pu être réalisé ». Il s’agit pour le droit OHADA de
sanctionner le créancier qui par sa négligence n’aurait pas pris les dispositions
qu’il fallait pour préserver ses intérêts face à un débiteur défaillant. C’est dans
ce me ordre d’idée que la consécration des dommages et intérêts punitifs

Cass., Civ. 2, 23 janv. 2003, Bull. n°20


368

369R. SAINT-ESTEBEN, « Pour ou contre les dommages et intérêts punitifs », LPA 20 janv.
2005, n°14, p.53.
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
106
s’inscrit. Il s’agit de sanctionner le débiteur qui a fait preuve de négligence, de
mauvaise foi, en organisant volontairement la violation de ses engagements
contractuels.

211. La dualité des responsabilités. L’ignorance des dommages et


intérêts punitifs dans les deux systèmes se justifie encore par l’existence de
deux types de responsabilités : la responsabilité civile, qui consiste à réparer
le préjudice subi par la victime et la responsabilité pénale qui consiste à punir
l’auteur d’une infraction370. En effet, les dommages et intérêts punitifs
conduiraient à une confusion entre le rôle du droit de la responsabilité civile
et le rôle du droit pénal. Leur rejet se justifie donc par le fait que, c’est à la
responsabilité pénale seule qu’il appartient d'infliger des peines et de prévenir
la réalisation des infractions371, là n’est pas le rôle de la responsabilité civile.
Cet argument pour pertinent soit-il, n’est pas irréfutable. En effet, la
distinction entre la responsabilité civile et celle pénale est illusoire, on observe
régulièrement des chevauchements entre ces deux types de responsabilités.

B/ Un mécanisme efficace

212. Un moyen efficace de prévention de l’inexécution. Plusieurs


arguments plaident en faveur de la consécration des dommages et intérêts
punitifs en France. Ces arguments portent essentiellement sur leur rôle de
prévention372. En effet, l’intérêt de ce mécanisme réside non pas tant dans la
punition de la partie défaillante, mais surtout dans la dissuasion à une
violation volontaire des engagements contractuels373. Les dommages et
intérêts punitifs apparaissent ainsi comme un remède préventif à l’inexécution

370 C. JAUFFRET-SPINOSI, « Les dommages-intérêts punitifs dans les systèmes de droit


étrangers », LPA 20 nov. 2002, n°232, p.8.
371 Ibid.

372 J. MARTINS-COSTA, M. SOUZA PARGENDLER, « Us et abus de la fonction punitive

(dommages-intérêts punitifs et le droit brésilien) », R.I.D.C. 2006, n°4, p.1150


373 S. PICASSO, « L'introduction des dommages-intérêts punitifs en droit des contrats - Rapport

argentin », RDC 2010, n°03, p.1107


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
107
du contrat, un moyen de garantir, de sécuriser les engagements
contractuels374. Leur consécration dans les deux systèmes permettra de se
prémunir contre les violations lucratives du contrat375.

213. Une consécration amorcée en France. Après avoir longtemps


manifesté une hostilité à leur égard, le droit français semble amorcer la
consécration des dommages et intérêts punitifs376 dont le bienfondé a été
démontré par une partie de la doctrine377. Cette doctrine a été suivie par un
arrêt rendu par la cour d’appel de Paris le 27 mars 2007378 et la
reconnaissance par la cour de cassation d’une décision ayant admis les
dommages et intérêts punitifs379. Par ailleurs, le projet de réforme du droit de
la responsabilité en France prévoit la consécration de ce mécanisme en son
article 1371 aux termes duquel : « l’auteur de la faute manifestement
délibérée, et notamment d’une faute lucrative, peut être condamné, outre les
dommages-intérêts compensatoires, à des dommages-intérêts punitifs dont le
juge à la faculté de faire bénéficier pour une part le Trésor public. La décision
du juge d’octroyer de tels dommages-intérêts doit être spécialement motivée et
leur montant distingué de celui des autres dommages-intérêts ». Ce texte
envisage la consécration des dommages et intérêts punitifs pour des fautes
lucratives et volontaires.

214. Ainsi, en matière contractuelle, l’auteur d’une inexécution


volontaire et de laquelle il a tiré un profit devrait, si ce texte est adopté, se voir

374 P. JOURDAIN, « Les dommages-intérêts alloues par le juge. Rapport français », in M.


FONTAINE (dir) et G. VINEY (dir.), Les sanctions à l’inexécution du contrat. Etude
comparative, op. cit., p.289
375 G. VINEY, « Quelques propositions de réforme du droit de la responsabilité civile », Rec. D.

2009, p.2944.
376 L. ARCHAMBAULT, A. CHAUVEAU, « Vers la généralisation de l'acceptation des dommages

et intérêts punitifs en France et en Europe ? », Gaz. Pal. 31 juill. 2018, n°28, p.14 ; M.
TESCARO, « À propos des dommages-intérêts punitifs : la Cour de cassation italienne vient-elle
de suivre l'exemple français ? », RDC 2018, n°04, p.632
377 S. CARVAL, « Vers l'introduction en droit français des dommages-intérêts punitifs ? », RDC

2006, n°03, p.822 ; J. HUILLIER, « Propriété intellectuelle : des dommages-intérêts punitifs


pas si punitifs », Gaz. Pal. 7 juill. 2009, n°188, p.2
378 CA Paris, 27 mars 2007, n° 05/19892, BJS sept. 2007, n°09, p.1002, note F.-X. LUCAS
379 Cass. Civ. 1ère, 10 déc. 2010, RTD civ. 2011.124, obs. B. FAGES.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
108
infliger une pénalité distincte des dommages et intérêts compensatoire.
Comme déjà indiqué plus haut, la consécration de ce mécanisme a un intérêt
sur plan de la prévention de l’inexécution contractuelle. Il a un effet dissuasif
et permet de compenser les limites engendrées par la révisabilité de la clause
pénale comme cela a été observé par une certaine doctrine380. Dès lors, malgré
la réticence d’une frange de la doctrine381, les dommages-intérêts punitifs
semblent être en voie de consécration en droit français.

215. Une consécration envisageable en droit spécial OHADA. En


droit de l’OHADA, si aucune étude n’a encore été consacrée à la question,
l’admission d’un tel mécanisme semble s’arrimer à la philosophie
protectionniste de l’AUDCG. Les dommages et intérêts s’inscriraient bien dans
la même logique que la limitation du dommage. En effet, si on sanctionne le
créancier qui est resté passif fasse à une inexécution qu’il aurait pu éviter, ou
dont il aurait pu limiter les conséquences, il apparait logique de sanctionner
aussi le débiteur qui, pouvant prendre les mesures pour exécuter le contrat
est resté passif, causant ainsi volontairement sa défaillance parce qu’il avait
plus intérêt à ne pas exécuter qu’à accomplir ce pour quoi il s’était engagé. Il
serait donc judicieux que dans le cadre d’un éventuel acte uniforme sur le
droit des contrats, une disposition similaire à l’article 1371 du projet français
soit insérée.

380 Ph. PIERRE, « L'introduction des dommages et intérêts punitifs en droit des contrats -
Rapport français », RDC n°3, p.1117
381 R. MESA, « La consécration d'une responsabilité civile punitive : une solution au problème

des fautes lucratives ? », Gaz. Pal. 21 nov. 2009, n°325, p.15 ;


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
109
Conclusion du chapitre 2

216. L’exécution volontaire du contrat recherchée par les parties doit


en principe être spontanée. Dans le cas contraire, les droits français et des
Etats membres de l’OHADA tentent de persuader le débiteur que le contrat a
encore un intérêt pour lui et exigent ainsi du créancier de faire preuve
d’empathie à son égard. Toutefois, il arrive que le débiteur s’obstine et refuse
volontairement de s’exécuter. Dans ce cas, il peut être contraint par des
mécanismes comminatoires à préférer l’exécution volontaire que d’assumer
les conséquences d’une inexécution. Sur ce point, l’efficacité des moyens
prévus dans les deux systèmes est relative.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
110
Conclusion du titre 1

217. En cas d’inexécution contractuelle, les droits OHADA et français


disposent de mécanisme relativement efficace pour inciter le débiteur à
exécuter volontairement le contrat. Cette exécution volontaire peut être
obtenue par les moyens pacifiques ou par les mécanismes comminatoires.
Dans ce dernier cas, l’exécution volontaire est dite résignée car le débiteur
s’exécute parce qu’il craint de subir les conséquences plus lourdes que ladite
exécution. Ces mesures sont gouvernées par la philosophie de la favor
contractus, qui incite les parties à coopérer pour sauvegarder au maximum le
contrat et matérialiser les engagements qui en résultent. Cette efficacité
reconnue aux mécanismes incitatifs contraste avec les moyens d’exécution
forcée qui se montrent limités et parfois confus.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
111
Titre 2 : Le débiteur contraint de s’exécuter

Titre 2 :
Le débiteur contraint de s’exécuter

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
112
218. « L’obligation juridique peut trouver son achèvement dans une
exécution forcée »382. La notion d’exécution forcée est polysémique. Elle renvoie
à la fois à l’exécution des décisions de justice et autres titres exécutoires et à
l’exécution du contrat. Dans cette étude, l’exécution forcée envisagée est celle
du contrat. Il est vrai que l’action en exécution forcée du contrat va aboutir à
une décision que le créancier va devoir imposer à son cocontractant. Toutefois,
exécuter une décision qui condamne à l’exécution d’un contrat n’équivaut pas
à l’exécution du contrat lui-même383.

219. En effet, le propre du contrat est d’être exécuté volontairement.


Pourtant, il n’est pas rare qu’une partie contractante refuse d’accomplir
volontairement la prestation promise. Dans ce cas, la partie adverse va devoir
recourir à la contrainte pour obtenir l’exécution du contrat. L’exécution du
contrat est dite forcée lorsqu’elle est ordonnée par un juge. Son intervention
consistera soit à exiger à la partie défaillante d’accomplir la prestation
promise : c’est l’exécution forcée en nature (chapitre 1), soit à la contraindre
à verser au créancier victime de l’inexécution une compensation financière
équivalente à la prestation qu’il attendait, on parle alors d’exécution par
équivalent (chapitre 2).

382 J. CABONNIER, Flexible droit, Pour une sociologie du droit sans rigueur, Paris, LGDJ, 10è
éd. 2001, p. 325-326
383 A. D. WANDJI KAMGA, Le droit à l’exécution forcée réflexion à partir des systèmes

juridiques camerounais et français, Th. Yaoundé II et Limoges, 2019, p.6


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
113
Chapitre 1 : L’exécution forcée en nature

220. L’exécution en nature du contrat est l’accomplissement par le


débiteur de la prestation promise. En effet, en vertu du principe de la liberté
contractuelle, chacun est libre de contracter ou pas. Toutefois, dès que
l’engagement de contracter est pris, l’on n’est pas libre de ne pas l’exécuter :
c’est le principe de la force obligatoire du contrat. Ce principe fonde le droit
du créancier à recourir à une exécution forcée en nature, c’est-à-dire le droit
d’employer la force publique pour contraindre le cocontractant à accomplir ce
pour quoi il s’est contractuellement engagé. L’existence d’un droit à l’exécution
forcée en nature a fait l’objet de vifs débats en doctrine384. Mais, ce débat
semble aujourd’hui s’estomper. L’exécution forcée en nature est admise dans
les deux systèmes comme principe (Section 1) et sa mise en œuvre (section
2) témoigne de la primauté qui lui est accordée.

Section 1 : Le principe de l’exécution forcée en nature

221. L’exécution forcée en nature est admise comme principe dans les
deux systèmes. Ces fondements (paragraphe 1) et son domaine (paragraphe
2) permettent d’en faire un mécanisme prioritaire dans la riposte du créancier
contre l’inexécution de son débiteur.

384 Cf., 384 Y-M. LAITHIER, Les sanctions à l’inexécution du contrat. Etude comparative, op.
cit., p.37 et s. ; M. MEKKI, « Fiche pratique : l'exécution forcée « en nature », sauf si… », Gaz.
Pal. 5 juill. 2016, n°25, p.15 ; J. LE BOURG, « Article 1221 : l'exécution forcée en nature des
obligations », RDC 2015, n°3, p.782 ; Y. M. LAITHIER, D. MAZEAUD, « La nature de la
sanction : satisfaction du bénéficiaire par les dommages-intérêts ou primauté de l’exécution
forcée en nature ? » RDC 2012, n°2,
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
114
Paragraphe 1 : Les fondements du principe

222. Le principe de l’exécution forcée en nature est un corollaire du


principe de la force obligatoire du contrat (A) et de l’éthique contractuelle385
(B) que partagent les deux systèmes.

A/ La force obligatoire du contrat

223. D’après la philosophie dominante dans les systèmes juridiques


de l’OHADA et français, les parties sont libres de contracter ou pas, mais dès
qu’elles décident de se lier par un engagement contractuel, elles sont tenues
de respecter les droits et obligations auxquelles elles ont librement consenti386.
La force obligatoire du contrat est ainsi un principe fortement ancré en droit
de l’OHADA et en droit français. Il constitue l’un des principes fondamentaux
du droit des contrats dans les deux systèmes juridiques. Il impose que le
contrat soit respecté à la lettre, dans l’intégralité de son contenu387.

224. En droit commun de l’OHADA, l’article 1134 du code civil ancien


dispose que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui
les ont faites ». Ce texte est repris par les articles 77 du RGO et 96 du COCC.
Le principe de la force obligatoire du contrat est donc bien connu du droit de
l’OHADA. Il est la consécration du principe du respect de la parole donnée qui
est chère à nombre de traditions africaines388. L’engagement contractuel doit
être exécuté quoi qu’il en coute389. Dès lors, en cas d’inexécution, l’exécution
forcée en nature apparait comme un remède prioritaire, parce qu’il permet au
créancier d’obtenir exactement la prestation attendue du contrat.

385 Cf. N. Ch. LECLERCQ, L’éthique dans les contrats In : Variations sur l’éthique : Hommage
à Jacques Dabin, Presses de l’Université Saint-Louis, Bruxelles,1994, n°50 et s.
386 L. AYNES « À propos de la force obligatoire du contrat », RDC déc. 2003, n°1, p. 323
387 B. FAGES, Droit des obligations, op. cit., p.257
388 K. O. COFFI DOGUE, Jalons pour un cadre de référence OHADA en droit des contrats,

th., Université de Montréal, 2013, p.296


389 F. CHABAS, Leçons de droit civil, t.2, vol.1, Obligations, théorie générale, 9 ème éd.,

Montchrestien, Paris, 1998, p.845.


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
115
225. Le recours à la force en cas d’inexécution d’une obligation
contractuelle trouve son fondement dans l’ancien droit romain avec la loi des
XII Tables390. Sur la base de ce texte, l’exécution forcée d’une obligation se
poursuivait sur la personne même du débiteur391. Le créancier était autorisé
à se faire justice en le détenant pendant plusieurs jours après lesquels si la
dette n’était pas payée par les parents ou amis du prisonnier, celui-ci était
réduit en esclave et adjugé à son créancier pour être vendu au marché des
esclaves, lui et sa famille, jusqu’au paiement intégral de sa dette392. Une telle
mesure témoignait du caractère sacré de l’engagement contractuel et donnait
au principe de la force obligatoire tout son sens.

226. Tirant des conséquences de ce principe, l’article 1184 du code civil


ancien dispose en son alinéa 2 que dans le cas où l'une des parties ne
satisferait pas à son engagement, « le contrat n'est point résolu de plein droit.
La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix de forcer
l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander
la résolution avec dommages-intérêts ». Ce texte confère au créancier d’une
obligation inexécutée un véritable droit à l’exécution forcée en nature393.

227. En droit spécial OHADA, On retrouve dans l’AUPSRVE, les


fondements pour le recours à une exécution forcée en nature. Aux termes de
l’article 28 de ce texte, « à défaut d’exécution volontaire, tout créancier peut,
quelle que soit la nature de sa créance, dans les conditions prévues par le
présent acte uniforme, contraindre son débiteur défaillant à exécuter ses
obligations à son égard ou pratiquer une mesure conservatoire pour assurer la
sauvegarde de ses droits ». Tout créancier d’une obligation inexécutée est donc

390 La loi des XII Tables qui date de 450 avant Jésus-Christ, est le premier grand texte
juridique de l’histoire romaine
391 Ch. HUGON, « Regard sur le droit des voies d’exécution », RDC, 2005, n°1, p.183 et s.
392 P.G. POUGOUE (dir), Encyclopédie du droit OHADA, op.cit., p. 2057
393M. MEKKI, « Fiche pratique : l'exécution forcée « en nature », sauf si… », Gaz. Pal. 5 juill.

2016, n°25, p.15 ; J. LE BOURG, « Article 1221 : l'exécution forcée en nature des obligations »,
RDC 2015, n°3, p.782
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
116
fondé à en réclamer l’exécution forcée, quelle que soit la nature de ladite
obligation. En parlant de « contraindre son débiteur à exécuter ses obligations »,
le législateur entend faire référence à l’accomplissement de la prestation due,
ce qui renvoie à l’exécution forcée en nature. Car, lorsque l’exécution forcée
est effectuée par équivalent, on ne contraint pas le débiteur à exécuter son
obligation, mais à payer une compensation financière.

228. En France, le principe de la force obligatoire est posé à l’article


1103 du code civil en des termes presqu’identiques aux dispositions du code
civil ancien. Ce texte dispose que « les contrats légalement formés tiennent lieu
de loi à ceux qui les ont faits ». Le législateur français a fait le choix de
remplacer le terme ‘’convention’’ par celui plus explicite de ‘’contrat’’. Hormis
cette différence terminologique, l’article 1103 du code civil français est resté
dans la même philosophie que le code civil ancien. Plus encore, la position de
ce texte qui vient désormais au troisième rang des dispositions liminaires
traduit une certaine promotion du principe de la force obligatoire en France394.
Toutefois, il ne s’agirait qu’une promotion formelle, le principe de la force
obligatoire a subi plusieurs atteintes en droit français395 plus qu’en droit de
l’OHADA396.

229. Cependant, ces atteintes à la force obligatoire n’excluent pas la


primauté de l’exécution forcée en nature parmi les moyens de riposte dont
dispose le créancier face à un débiteur récalcitrant. En France comme dans
l’OHADA, les engagements doivent être respectés au besoin par la force397. Le
principe de la force obligatoire trouve donc sa source non seulement dans
l’autonomie de la volonté des parties, mais aussi dans la prise en compte de
l’intérêt du cocontractant398. La promesse oblige, non tant parce qu'elle a été

394 Ph. MALINVAUD, M. MEKKI, J-B. SEUBE, Droit des obligations, 15ème éd., LexisNexis,
Paris 2019, p.417.
395 A. BENABENT, Droit des Obligations, op. cit., p.46, n°37 ; H. LECUYER, « Redéfinir la force

obligatoire du contrat ? », LPA 6 mai 1998, n°54, p.44


396 Cf., C. MONKAM, « Réflexion sur le fondement de l’affaiblissement de la force obligatoire du

contrat en droit OHADA », op. cit., p. 581 et s


397 B. FAGES, Droit des obligations, op. cit., p.199
398 L. AYNES, « À propos de la force obligatoire du contrat », RDC 2003, n°3, p.323

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
117
voulue, que parce qu'elle constitue un signe sur lequel autrui a pu compter399.
La doctrine française dans sa majorité estime que « le droit à l'exécution est
l'effet le plus direct du principe de la force obligatoire du contrat »400.

B/ L’éthique contractuelle

230. La bonne foi et ses corollaires comme fondement du principe


de l’exécution forcée en nature. L’éthique se définit comme un « ensemble
de principes moraux qui sont à la base de la conduite de quelqu’un »401. Elle
trouve sa concrétisation en matière contractuelle402 dans l’exigence de bonne
foi et ses corolaires qui sont : la loyauté et coopération. En effet, le droit
français a hérité du droit romain l’essentiel des figures et concepts fondateurs
du droit des contrats403. Toutefois, le droit romain ne connaissait pas le
principe du respect de la parole donnée et par ricochet celui de l’exécution
forcée en nature404. La philosophie du droit français des contrats fut l’œuvre
du droit canonique et de l’école du droit matériel405. Cette influence du droit
canonique donnera au contrat en France, une valeur plus moraliste
qu’économique406.

231. Fortement influencé par les canonistes, le droit français fait du


respect de la parole donnée un des principes sacrosaints en matière
contractuelle. En effet, au début du moyen âge, les canonistes estimaient que
celui qui ne respectait pas son engagement contractuel violait sa parole, et

399 Ibid.
400 G. VINEY, « Exécution de l'obligation, faculté de remplacement et réparation en nature en
droit français », in M. FONTAINE et G. VINEY (dir.), Les sanctions de l'inexécution des
obligations contractuelles, op. cit. p.182, n°16.
401 Grand dictionnaire Encyclopédique Larousse
402 N-Ch LECLERCQ, « L’éthique dans les contrats », in H. ACKERMANS (dir.), Variations sur

l’éthique : Hommage à Jacques DABIN, Nouvelle édition, Presse de l’université Saint-Louis,


Bruxelles, 1994
403 L. ANDREU, N. THOMASSIN, Cours de droit des obligations, op. cit., p.74, n°148.
404 Y-M. LAITHIER, Les sanctions à l’inexécution du contrat. Etude comparative, op. cit., p.40
405 L. ANDREU, N. THOMASSIN, op. cit., p.74
406 F. CHABAS, Leçon de droit civil, op. cit., p.23

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
118
compromettait de ce fait le salut de son âme407. Pour Saint Thomas d’Aquin,
« au nom de la fidélité, on doit payer ce qu’on a promis »408. Pour le libéralisme
économique, les parties doivent absolument honorer leurs engagements
contractuels en vue de satisfaire la prévisibilité des relations contractuelles,
base des échanges économiques. Il en résulte qu’en France, le contrat est
« autre chose qu’un instrument de création de richesses409 ». Le droit français
des contrats est ainsi animé par « des valeurs morales, éthiques, familiales et
sociales qui impriment sa richesse et sa spécificité »410. La philosophie du droit
français des contrats peut, selon un auteur, se résumer en un triptyque de
commandements : « Libre de contracter, tu seras » ; « ta parole tu respecteras » ;
« de bonne foi tu te comporteras »411. La parole contractuelle est sacrée et elle
doit être honorée à tout prix. Le principe de l’exécution forcée en nature est
ainsi le prolongement naturel du principe de pacta sunt servanda412.

232. Même s’il s’en écarte à certains égards, le droit de l’OHADA est
philosophiquement, organiquement et techniquement calqué sur le modèle
français413. On y retrouve comme en France, une vision moraliste du contrat.
En droit commercial OHADA par exemple, l’article 237 de l’AUDCG affirme la
prééminence de l’exigence de bonne foi. Celle-ci est reprise en droit commun
par les articles 1134 alinéa 3 du code civil ancien, 77 alinéa 3 du RGO. Dans
le sillage de la réception de ce principe de bonne foi, le droit de l’OHADA

407 R. CABRILLAC, Droit européen comparé des contrats, op. cit., p.113, n°171
408 SAINT THOMAS D’AQUIN, Somme théologique, t.6, Librairie de Louis Vivès, 1861, IIa-
IIae, Question 88, « le vœu », art.3
409 Y. M. LAITHIER, D. MAZEAUD, « La nature de la sanction : satisfaction du bénéficiaire par

les dommages-intérêts ou primauté de l’exécution forcée en nature ? » op. cit., n°2,


410 M. GRIMALDI, A. VITA, « Réponse de la fondation pour le droit continental », RDC 2011,

p.136, n°2
411 Ph. DUPICHOT « Les principes directeurs du droit français des contrats », RDC 2013, p.387,

n°3.
412 Y. M. LAITHIER, D. MAZEAUD, op. cit., p.681.
413 J.C. JAMES, « L’OHADA et la construction d’un espace juridique francophone », in X.

HENRY (dir.), Mélanges el l’honneur du Doyen Bernard Gross, Presses universitaires de


Nancy, 2009, p.569
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
119
confirme la primauté de l’exécution en nature du contrat tant qu’il conserve
une utilité pour les parties414.

233. Le principe de l’exécution forcée en nature n’a pas toujours fait


l’unanimité de la doctrine. Cette controverse est née de l’interprétation de
l’article 1142 du code civil ancien. En effet, en affirmant, d'une formule
générale, que « toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en
dommages-intérêts, en cas d'inexécution de la part du débiteur », ce texte a été
présenté par une partie de la doctrine comme l'adversaire contemporain de
l'article 1134 et d'un éventuel droit à l'exécution en nature415. Aujourd’hui, la
consécration de l’exécution forcée en nature comme principe a été entérinée
par le code civil français depuis la réforme de 2016.

234. En effet, aux termes de l’article 1217 du code civil français, La


partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été
imparfaitement, peut entres autres, « poursuivre l'exécution forcée en nature de
l'obligation ». S’il est admis que ce texte n’instaure aucune hiérarchie entre les
différents les différents remèdes416, on peut tout de même y voir la
manifestation de la philosophie protectionniste du contrat. Les remèdes sont
listés par ordre de gravité. D’abord le créancier victime d’une inexécution peut
bloquer sa prestation pour contraindre le débiteur à s’exécuter. Dans le cas
contraire, il peut procéder à l’exécution forcée du contrat et ce n’est qu’en
dernier lieu qu’il pourra se contenter d’une exécution par équivalent.

235. Les droits OHADA et français se démarquent ainsi des droits de


la Common Law, où le devoir d’exécuter son obligation contractuelle se
transforme plutôt en un devoir de payer une somme d’argent que le créancier

414 G. GALPA, Les nouvelles frontières du droit des contrats, in Le contrat au début du XXIe
siècle, Etudes offertes à J. GHESTIN, LDGDJ 2001, p.6 ; E. NSIE, « La sanction de
l’inexécution de la vente commerciale », op. cit., p.5
415 N. MOLFESSI, « Force obligatoire et exécution : un droit à l'exécution en nature ? », RDC

2005, n°1, p.37.


416 B. FAGES, Droit des obligations, op. cit. p.286

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
120
peut utiliser s’il le souhaite, à faire exécuter l’obligation par un tiers417. Le
droit anglais part du principe qu’il y a dans chaque contrat une obligation de
garantie en vertu de laquelle le débiteur qui n’exécute pas son obligation
contractuelle doit indemniser son créancier418. Or, en vertu du principe de
« pacta sunt servanda », les droits de l’OHADA et français font de l’exécution
forcée en nature un remède de principe, alors que la common law en fait une
exception419.

Paragraphe 2 : Le domaine de l’exécution forcée en


nature

236. La primauté de l’exécution forcée en nature se manifeste par


l’extension de son domaine. En effet, alors qu’elle était jadis limitée aux seules
obligations de donner et exclue pour les obligations de faire et de ne pas faire
(A), le principe de l’exécution forcée en nature est désormais étendu à toutes
les obligations (B).

A/ Un domaine jadis limité

237. En droit commun de l’OHADA, l’article 1142 du code civil ancien


qui pose le principe de l’exécution forcée en nature semble l’écarter pour les
obligations de faire et de ne pas faire. Ce texte dispose en effet que, « toute
obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts ». En
effet, quoiqu'elle constitue une valeur sociale primordiale, la force obligatoire
du contrat devrait fléchir face à la liberté individuelle du débiteur420, ce qui

417 J. CARTWRIGHT, « Un regard anglais sur les forces et faiblesses du droit français des
contrats », RDC 2015, n°03, p.691 ; B. FAUVARQUE-COSSON, « Regards comparatistes sur
l'exécution forcée en nature », RDC 2006, n°02, p.529.
418 R. CABRILLAC, Droit européen comparé des contrats, op. cit, p.151
419 S. PICASSO, « L'exécution forcée des obligations contractuelles - Brève étude comparative

des droits français et argentin », RDC 2015, n°03 – p. 700


420 N. BALAT, Les grands articles du code civil, 4 ème éd., D., Paris 2022, p.180.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
121
exclut d'exposer ce dernier à une contrainte corporelle421. Cette exclusion se
justifiait par l’impossibilité que l’on rencontre d’obliger quelqu’un à faire ce
qu’il ne voulait pas faire sans recourir aux travaux forcés422. Sur ce
fondement, la cour d’appel de Paris avait jugé qu’il était impossible d’obliger
un peintre à livrer sous astreinte, un portrait qui lui avait été demandé423.

238. Une telle limitation a longtemps été critiquée par la doctrine qui
militait pour l’extension de l’exécution forcée en nature à toutes les obligations
contractuelles. Certains auteurs affirmèrent ainsi que cette disposition était
contraire au vrai principe qui est celui de la primauté de l’exécution en nature
sur l’exécution par équivalent424. Cette critique a été suivie par la
jurisprudence, la cour de cassation française avait alors entrepris une
réécriture de l’article 1142425 opérant ainsi un véritable renversement de
principe426.

239. Prenant acte de ces évolutions jurisprudentielles, l’ordonnance


de 2016 a changé les termes du débat en France, en supprimant la distinction
classique obligation de donner, obligation de faire, obligation de ne pas faire.
Ainsi, l’article 1221 du code civil français pose désormais le principe de
l’exécution en nature sans distinction de la nature des obligations. L’exécution
forcée en nature est donc désormais possible pour toutes obligations, excepté
celles qui ont un caractère personnel.

421 D. MAZEAUD, « L'exécution forcée en nature dans la réforme du droit des contrats », Recueil
Dalloz 2016 p.2477
422 Y. BUFFELAN-LANORE, V. LARRIBAU-TERNEYRE, Droit civil : Les obligations, 18ème éd.,

D., Paris, 2022, p.138


423 CA Paris, 2 déc.1897, DP 1898.2.465, note Planiol.
424 Y.M. LAITHIER, Etude comparative des sanctions de l’inexécution du contrat, LGDJ, Paris

2007, p.51
425 D. MAZEAUD, op.cit., p. 2478
426 Y.M. LAITHIER, « La prétendue primauté de l’exécution en nature », RDC, n°1, p.161 ; D.

MAINGUY, « L’exécution forcée des obligations du contrat », in D. MAINGUY (Dir.), Le nouveau


droit français des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, (après
l’ordonnance du 10 février 2016), Dynamiques du droit, collection Teutates consommation et
du marché, p.184

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
122
B/ Un domaine désormais étendu

240. A l’examen des articles 1221 et 1341 du nouveau code civil


français, le créancier d’une obligation non exécutée dispose désormais d’un
droit à l’exécution en nature, qui lui permet de forcer son débiteur à accomplir
sa prestation quelle que soit la nature de son obligation427. Cette
généralisation de l’exécution forcée en nature s’inscrit dans la philosophie de
favor contractus. L’exécution forcée en nature est le remède qui répond le
mieux aux attentes du créancier. Car, ce que les parties recherchent en
contractant, c’est l’exécution effective de leurs prestations réciproque. Dès
lors, le meilleur service que le droit puisse leur rendre est de contraindre le
débiteur à s’exécuter dans les termes de son engagement. L’exécution forcée
en nature est ainsi « l’hommage le plus accompli que l’on ait pu rendre au
principe sacrosaint de la force obligatoire du contrat »428. Elle repose sur l’idée
selon laquelle, «la parole contractuellement donnée a une valeur telle qu'elle n'a
pas de prix ; elle ne peut donc pas être « rachetée » moyennant des dommages-
intérêts »429.

241. Les évolutions jurisprudentielles opérées en France en matière


d’extension de l’exécution forcée en nature à toutes les obligations
contractuelles sont parfaitement transposables en droit de l’OHADA, d’autant
plus que l’article 1142 du code civil ancien est une disposition « quasiment
tombée en désuétude »430. D’ailleurs, la vision du contrat véhiculée par le code
civil ancien interdisait dès l’origine de voir en cet article 1142 un obstacle

427 Y. M LAITHIER, « Les sanctions de l'inexécution du contrat », RDC, avril 2016, n° Hors-
série, p. 39 ; H. BARBIER, « L'exécution et la sortie du contrat », op.cit., p.41
428 Y. M LAITHIER, « La prétendue primauté de l’exécution en nature », op cit ; N. MOLFESSIE,

« Force obligatoire et exécution : un droit à l’exécution en nature ? », RDC, n°1, p.37


429 D. MAZEAUD, « L'exécution forcée en nature dans la réforme du droit des contrats », op. cit.

430 Y.M. LAITHIER, Etude comparative des sanctions de l’inexécution du contrat ? op. cit.,

p.52.
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
123
absolu à la condamnation à exécuter en nature toute obligation de faire ou de
ne pas faire431.

242. Une extension excessive. Si la génération de l’exécution forcée


en nature à toutes les obligations contractuelles est à saluer, elle parait tout
de même excessive. En effet, alors que l’exécution forcée semble bien s’arrimer
aux obligations de donner et de faire, on s’interroge sur comment ou par quel
moyen pourra-t-on forcer le débiteur à exécuter en nature une obligation de
ne pas faire sans porter atteinte à sa liberté individuelle. Cela semble
difficilement envisageable pour les obligations de ne pas faire, sauf dans
certaines hypothèses spécifiquement visées par le code civil français comme,
la faculté reconnue au créancier de détruire ce qui a été fait en violation d’une
obligation432, ou la substitution du créancier au tiers de mauvaise foi en cas
de violation d’un pacte de préférence433.

Section 2 : La mise en œuvre de l’exécution forcée en


nature

243. « Une idée sans exécution est un songe »434. Appliquée à l’exécution
forcée en nature, cette pensée de Voltaire traduit l’idée selon laquelle
consacrer l’exécution forcée en nature au rang de principe sans en améliorer
les modalités de sa mise en œuvre serait une œuvre vaine. Les droits français
et de l’OHADA se sont attelée à améliorer la mise en œuvre de l’exécution
forcée en nature. Il en résulte une diversité de modalités de mise en œuvre
(paragraphe 1) qui se trouvent à quelques égards limitées (paragraphe 2).

431 G. VINEY, « Exécution de l'obligation, faculté de remplacement et réparation en nature en


droit français », in M. FONTAINE et G. VINEY (dir.), Les sanctions de l'inexécution des
obligations contractuelles, op. cit. p.172
432Civ., Art. 1222

433 Civ., Art. 1123 ; Cass., ch. mixte, 26 mai 2006, n° 03-19.376 , D. 2006. 1861 , note P.-Y.

Gautier , 1864, note D. Mainguy , et 2638, obs. B. Fauvarque-Cosson ; AJDI 2006. 667 ; Rev.
sociétés 2006. 808, note J.-F. Barbièri ; RTD civ. 2006. 550, obs. J. Mestre et B. Fages ;
Defrénois 2006. 1206, obs. E. Savaux ; JCP 2006. II. 10142, obs. L. Leveneur ; RDC 2006.
1080, obs. D. Mazeaud.
434 VOLTAIRE, Mémoires, Le Livre de Poche, 1998, Seuil, 1er janvier 1993 citant le Duc de

SAINT-SIMON

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
124
Paragraphe 1 : Les modalités de mise en œuvre de
l’exécution forcée en nature

244. Le créancier peut obtenir l’exécution forcée en nature soit en


exerçant une pression directement sur le débiteur ou en obtenant l’exécution
par un tiers, mais aux frais du débiteur. Il existe donc deux modalités
d’exécution forcée en nature, l’exécution forcée directe (A) et l’exécution forcée
indirecte (B).

A/ L’exécution forcée directe

245. La contrainte exercée sur le débiteur. L’article 1221 du code


civil français dispose que : « Le créancier d’une obligation peut, après mise en
demeure, en poursuivre l’exécution en nature sauf si cette exécution est
impossible ou s’il existe une disproportion manifeste entre son coût pour le
débiteur et son intérêt pour le créancier ». Il résulte de ce texte qu’en cas
d’inexécution des obligations contractuelles, le créancier peut agir en justice
pour contraindre son débiteur à accomplir ce à quoi il s’était engagé. C’est
cette contrainte judiciaire qui donne à l’exécution son caractère forcé.
Toutefois, la saisine du juge ne suffit pas à garantir l’efficacité de ce remède,
cette garantie ne peut résulter que de la mise en œuvre effective de la décision
que rendra le juge435.

246. En droit spécial OHADA, pour les obligations de délivrance ou de


restitution d’un bien meuble corporel, l’article 19 du même texte dispose que
« celui qui se prétend créancier d’une obligation de délivrance ou de restitution
d’un bien meuble corporel déterminé, peut demander au président de la
juridiction compétente d’ordonner cette délivrance ou restitution ». Ainsi,
l’inexécution d’une obligation de délivrance ou de restitution donne lieu en
droit OHADA à une exécution forcée en nature. Dans un contrat de vente,

435T.H THAI Exécution en nature du contrat - Etude comparative du droit français et du


droit vietnamien, Thèse, Université Jean Moulin (Lyon 3), 2014, p.337

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
125
l’acheteur qui a payé le prix est donc fondé à obtenir du juge la délivrance
forcée de la marchandise achetée.

247. L’astreinte comme moyen d’exécution forcée en nature. Face


à un débiteur récalcitrant qui, malgré sa condamnation refuserait toujours de
s’exécuter, le juge dispose d’un premier moyen de contrainte : l’astreinte. En
France, aux termes de l’article L. 131-1 du code des procédures civiles
d’exécution, « tout juge peut, même d'office, ordonner une astreinte pour assurer
l'exécution de sa décision ». L’astreinte peut être définie comme une
condamnation au paiement d’une somme d’argent par jour de retard, que le
juge menace une partie de devoir payer au cas où elle n’exécuterait pas
volontairement une décision la condamnant436.

248. Ce mécanisme est bien connu des droits de l’OHADA. Au Sénégal,


l’article 196 du COCC dispose que « l'exécution de toute obligation peut être
obtenue par une astreinte prononcée par le juge compétent pour constater
l'existence de l'obligation ». Au Gabon, on le retrouve à l’articles 573 du code
de procédure civile et la cour de cassation gabonaise a eu l’occasion de
préciser son régime en indiquant qu’en dehors des décisions de justice,
l’astreinte est aussi un moyen d’exécution forcée des obligations
contractuelles437. Au Cameroun, une cour d’appel avait par exemple usé de
l’astreinte pour contraindre une partie à exécuter son obligation de restitution
d’un titre foncier438. L’étude de ce mécanisme relevant du domaine des voies
d’exécution, nous nous abstiendrons d’en faire un examen détaillé. Il convient
simplement de retenir qu’en cas de refus d’exécuter une décision de justice le
condamnant à accomplir sa prestation contractuelle, le juge peut infliger au

436 S. V. PETNGA NKWENGOUA, « Ombre et lumière autour de l’astreinte et sa liquidation :


réflexion à partir de l’arrêt CCJA n°094/2016 du 26 mai 2016 », p.4, Ohadata D-16-08 ; J.
FRANCOIS, Traité de droit civil, t.4, 4ème éd., Economica, Paris, 2017, p.335, n°348 ; O.
MOURAD KHALAK, « L’efficacité De L’astreinte Et De La Clause Pénale Dans
Le Contentieux Contractuel : Mythe Ou Réalité ? », Journal of Law, Vol.15, n°2, p.378 et s.
437 Cass. Ch. Réunies, 07 avril 2005, AXA-ASSURANCE c/ CLINIQUE PEDIATRIQUE DE

BATTERIE IV, inédit.


438 CA, Littoral, 18 août 2008, n°149, Affaire société NINA c/ SCB Cameroun et autres, inédit.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
126
cocontractant récalcitrant une amande dont le montant ira croissant avec le
temps. L’intérêt de ce moyen de pression réside dans son adaptabilité aux
obligations de faire et de ne pas faire439. En effet, l’astreinte permet de
contraindre le débiteur d’une obligation de faire ou de ne pas à s’exécuter sans
qu’il soit nécessaire de recourir à la contrainte physique. Selon le Doyen
Carbonnier, il s’agit de frapper le portefeuille pour contraindre la volonté440.

249. Les saisies. En plus de l’astreinte, le juge peut ordonner d’autres


moyens de contrainte, en l’occurrence, les saisies. Une saisie est une mesure
prise à l’égard du débiteur en vue d’assurer l’effectivité des droits du
créancier441. Ainsi, lorsque le contrat porte sur un bien meuble corporel qui
devait être livré ou restitué, la saisie-appréhension de la chose entre les mains
du débiteur ou d’un tiers détenteur permet au créancier d’obtenir la livraison
ou la restitution forcée dudit bien. Aux termes de l’article L.222-1 du code des
procédures civiles d’exécution français, « l'huissier de justice chargé de
l'exécution fait appréhender les meubles que le débiteur est tenu de livrer ou de
restituer au créancier en vertu d'un titre exécutoire, sauf si le débiteur s'offre à
en effectuer le transport à ses frais ». En droit spécial de l’OHADA, la saisie
appréhension est régie par les articles 219 et suivant de l’AUPSRVE. Il s’agit
là encore d’un mécanisme d’exécution forcée en nature d’une obligation de
livraison ou de restitution. En un mot, le juge dispose de plus d’une corde à
son arc pour contrainte la partie récalcitrante à offrir à l’autre la prestation
qu’elle attend du contrat. Toutefois, ces multiples moyens de contrainte
peuvent s’avérer inefficaces pour l’exécution forcée de certaines obligations.
Dans ce cas, le législateur français prévoit un moyen d’exécution forcée
indirecte.

439 S. V. PETNGA NKWENGOUA, op.cit., p.4.


440J. CARBONNIER, Droit civil, Les biens, Les obligations, v. II, 1re éd, Guadriage, 2004, p.
1918.
441 Ph. THERY, Saisie(s), in L. CADIET (dir.), Dictionnaire de la justice, PUF 2004, p. 1194 et

s.
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
127
250. Exécution forcée en nature des clauses de préemption. Par
ailleurs, on retrouve les illustrations de l’exécution forcée en nature des
obligations de faire dans le régime des clauses de préemption résultant du
droit OHADA des sociétés commerciales. Il s’agit d’une convention par
laquelle, un associé restreint volontairement la libre cessibilité de ses droits
sociaux, en s’obligeant en cas de cession de ses titres, à les proposer en
premier à ses cosignataires. Il conclut donc avec eux un pacte de préférence.
La question se pose ici de savoir si le bénéficiaire du pacte peut obliger le
promettant à l’exécution forcée de son engagement. En France, avant la
réforme de 2016, la réponse était négative. Le pacte de préférence étant
assimilé à une obligation de faire, la cours de cassation jugeait, sur le
fondement de l’ancien article 1142 du code civil français, que sa violation ne
pouvait donner lieu qu’à des dommages et intérêts442. Avec la généralisation
de l’exécution forcée en nature à toutes les obligations, cette position a été
renversée443. L’article 1123 autorise désormais la substitution du bénéficiaire
du pacte au tiers de mauvaise foi.

251. En droit OHADA des sociétés commerciales, aux termes de


l’article 771-3 de l’AUSCGIE, « dans le cas où une clause de préemption est
stipulée dans les statuts, toute cession d’actions réalisée en violation du droit
de préemption est nulle. Dans le cas où une clause de préemption est stipulée
dans les conventions de l’article 2-1 ci-dessus, toute cession d’actions réalisée
en violation du droit de préemption est nulle dès lors qu’il est démontré que l’un
des bénéficiaires en avait connaissance ou ne pouvait en ignorer l’existence ». Il

442 Cass. com. 7 mars 1989, JCP 89, II, 21316, note Reinhard ; Revue des sociétés, 1989,
p.478, note L. Faugerolas.
443 Cass., mixte, 26 mai 2006, « si le bénéficiaire d'un pacte de préférence est en droit d'exiger

l'annulation du contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d'obtenir sa


substitution à l'acquéreur, c'est à la condition que ce tiers ait eu connaissance, lorsqu'il a
contracté, de l'existence du pacte de préférence et de l'intention du bénéficiaire de s'en prévaloir
; D.2006, p. 1861, note P.-Y. Gautier et note D. Mainguy ; JCP G 2006, II, 10142, note L.
Leveneur; JCP N 2006, 1256, note B. Thullier ; Defrénois 2006, p. 1206, obs. E. Savaux ;
Contrats, conc. consom. 2006, comm. 153, note L. Leveneur ; LPA 11 janv. 2007, p. 13, note
A. Paulin ; RDC 2006, p. 1131, obs. F. Collart. Dutilleul ; RTD civ. 2006, p. 550, obs. J. Mestre
et B. Fages ; Bull. Joly 2006, p. 1072, note H. Le Nabasque

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
128
est vrai que ce texte ne se prononce pas sur la possibilité d’une substitution
du bénéficiaire du pacte au tiers, mais en admettant déjà la nullité de la
cession intervenue en violation du pacte, le législateur OHADA, comme son
homologue français, reconnait au bénéficiaire de façon implicite, le droit de se
substituer au tiers.

252. En droit commun, poursuivant le renversement de l’article 1142


du code civil ancien, la jurisprudence admet désormais la substitution du
créancier au tiers de mauvaise foi444. Cette jurisprudence française est
transposable en droit de l’OHADA et peut permettre en droit des sociétés
commerciales, de donner à l’article 771-3 de l’AUDSCGIE cité ci-dessus une
interprétation extensive en permettant la substitution du bénéficiaire de la
clause au tiers lorsque celle-ci a été stipulée dans les statuts.

B/ L’exécution forcée indirecte

253. Lorsque malgré la pression exercée sur lui, le débiteur récidive


dans son refus d’accomplir sa prestation, ou lorsque, eu égard à la nature de
l’obligation en cause, le débiteur ne saurait être contraint à s’exécuter, deux
alternatives s’offrent au créancier : exécuter lui-même l’obligation ou la faire
exécuter par un tiers au frais du débiteur. Il obtiendra ainsi, non plus la
condamnation du débiteur à exécuter son obligation, mais la réalisation de la
prestation, ou la destruction de ce qui a été fait en violation de celle-ci, par un
tiers au frais du débiteur445.

254. La faculté de substitution. Aux termes de l’article 1222 du code


civil français, « après mise en demeure, le créancier peut aussi, dans un délai
et à un coût raisonnable, faire exécuter lui-même l'obligation […] ». Le créancier

444Cass. civ. 3e, 14 février 2007, pourvoi n°05-21814, Bull. civ. III, n°25
445F. TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, F. CHENEDE, Droit civil : Les obligations, 12ème
éd., D., Paris, 2019, p.838, n°781

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
129
d’une obligation non ou mal exécution peut ainsi non exécuter lui-même
l’obligation s’il dispose des compétences requises, ou dans le cas contraire,
solliciter un tiers qui exécutera la prestation aux frais du débiteur défaillant.
En droit commun de l’OHADA, le code civil ancien connait ce mécanisme, qu’il
régit à l’article 1144 aux termes duquel, le créancier peut « être autorisé à faire
exécuter lui-même l’obligation aux dépens du débiteur ». La différence majeure
des deux textes réside dans le caractère unilatéral que consacre le droit
français446, alors qu’en droit de commun de l’OHADA, ce mécanisme est
assujetti à une autorisation préalable du juge. Cette déjudiciarisation du
remplacement en France s’inscrit dans la philosophie générale de la réforme
de 2016 et rend ce remède plus efficace.

255. Dans un contrat de vente, l’acheteur sera amené à aller se


procurer le bien non livré chez un autre fournisseur au frais du vendeur
défaillant. Pour ce faire, il doit se rassurer d’avoir au préalable accordé une
dernière chance au débiteur de s’exécuter au moyen d’une mise en demeure.
A partir de cette exigence de mise en demeure préalable, on peut déduire que
le créancier ne saura refuser une demande de délais supplémentaire de son
débiteur pour accomplir lui-même la prestation, sauf à démontrer que ce délai
rendrait cette prestation inutile. En plus, le débiteur ne doit pas être amené à
payer un montant excessivement supérieur à celui qu’il aurait payé s’il
exécutait lui-même447. Il s’agit là d’une exigence de loyauté et de bonne foi. Le
créancier ne doit pas abuser de son droit, en profitant de cette faculté de
substitution pour réaliser des travaux dont le coût sera exorbitant, par rapport
au cout convenu initialement dans le contrat448. Par ailleurs, le caractère
unilatéral de ce remède semble difficile à prospérer en pratique. En effet, le
contractant qui a refusé d’exécuter sa prestation peut aussi bien refuser de

446 D. MAZEAUD, « Présentation de la réforme du droit des contrats », Gaz. Pal. 23 févr. 2016,
n°08, p.15 ; PH. SIMLER, « CONTRAT. – Inexécution du contrat. – Exécution forcée en nature »,
JurisClasseur Civil, Fasc. Unique, Septembre 2021, p.28
447 PH. SIMLER, « CONTRAT. – Inexécution du contrat. – Exécution forcée en nature »,

JurisClasseur Civil, Fasc. Unique, Septembre 2021, p.28


448 F. TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, F. CHENEDE, Droit civil : Les obligations, Op. Cit.,

p.839, n°782.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
130
payer les frais relatifs à l’exécution de cette obligation par un tiers ou par le
créancier lui-même. Il nous semble donc que si en théorie la substitution est
un moyen unilatéral, en pratique, le créancier pourra avoir intérêt à d’abord
rechercher la condamnation du débiteur à avancer les sommes requises,
comme c’est le cas lorsqu’il s’agit de détruire l’ouvrage accomplit au mépris
d’une obligation de ne pas faire.

256. La destruction de ce qui a été fait en violation d’une


obligation. En droit commun de l’OHADA, aux termes de l’article 1143 du
code civil ancien, « le créancier a le droit de demander que ce qui aurait été fait
par contravention à l'engagement soit détruit ; et il peut se faire autoriser à le
détruire aux dépens du débiteur, sans préjudice des dommages et intérêts, s'il
y a lieu ». Ce principe est repris en droit français par l’article 1222 du code
civil. Il résulte de ces textes qu’en France comme dans l’OHADA, lorsqu’en
violation d’une obligation de ne pas faire, le débiteur décide d’accomplir la
prestation interdite, l’exécution forcée en nature consistera à rétablir les
parties dans la situation quo ante, en détruisant l’ouvrage réalisée ou en
annulant l’acte accompli. Dans ce cas, et en vertu du caractère irréversible de
cette mesure, le créancier devra au préalable obtenir l’autorisation du juge.
Par ailleurs, lorsque cette destruction a nécessité une dépense financière, au
lieu de demander au créancier de solliciter le remboursement auprès du
débiteur, il aurait été mieux de prévoir que la décision qui autorise la
destruction mettra les frais de celle-ci à la charge du débiteur.

257. En somme, en France comme dans les Etats membres de


l’OHADA, le créancier jouit d’un véritable droit à l’exécution forcée en nature.
Les deux systèmes juridiques tranchent ainsi définitivement le débat suscité
par les différentes interprétations de l’article 1142 du code civil ancien et
réaffirment la primauté accordée à l’exécution forcée en nature par rapport à
l’exécution par équivalent. Mieux encore, alors que leur exécution forcée en
nature fût jadis impossible, on retrouve aujourd’hui dans les deux systèmes
juridiques les moyens de réaliser l’exécution forcée en nature des obligations

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
131
de faire et de ne pas faire. Les premières donnant lieu au mécanisme de
substitution alors que les secondes entrainent la destruction manu militari de
ce qui a été accompli au mépris de l’interdiction qui était faite au débiteur.

Paragraphe 2 : Les obstacles à la mise en œuvre de


l’exécution forcée en nature

258. En France, il résulte de l’article 1221 que : « le créancier d'une


obligation peut, après mise en demeure, en poursuivre l'exécution en nature sauf
si cette exécution est impossible ou s'il existe une disproportion manifeste entre
son coût pour le débiteur et son intérêt pour le créancier ». Si la faculté d’exiger
l’exécution forcée en nature est un droit reconnu au créancier dans les deux
systèmes, ce droit a tout de même des limites, il cède devant la réalité des
faits. Certaines de ces limites sont bien connues et ne souffrent d’aucune
contestation (A), alors que d’autres sont plus récentes et suscitent encore des
débats (B).

A/ Les limites classiques

259. A l’impossible nul n’est tenu ! Ce principe très logique constitue


la principale limite du recours à l’exécution forcée en nature dans les deux
systèmes juridiques. Cette impossibilité peut être matérielle, personnelle ou
juridique. En France comme dans l’OHADA, la primauté de l’exécution forcée
en nature se heurte d’abord à l’impossibilité pour le débiteur d’accomplir la
prestation promise449. Cette impossibilité est dite matérielle lorsque
l’exécution en nature devient physiquement impossible. Il en va ainsi lorsque
la prestation promise ne peut pas être exécutée indépendamment du bon ou
du mauvais vouloir du débiteur, parce que la chose objet du contrat a disparu
ou bien elle n’est plus sous le contrôle du débiteur. Toutefois, cette

449 P. SIMLER, « CONTRAT. – Inexécution du contrat. – Exécution forcée en nature »,


JurisClasseur Civil, Fasc. Unique, Septembre 2021, p.5
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
132
impossibilité matérielle ne doit pas être confondue à l’impossibilité résultant
d’un cas de force majeur.

260. La disparition de la chose ou la perte de contrôle sur celle-ci.


Le débiteur ne peut être contraint d’exécuter en nature une obligation qui
nécessite la délivrance d’une chose si celle-ci a péri ou s’il en a perdu le
contrôle. En France, la jurisprudence admet que l’exécution forcée en nature
est matériellement impossible lorsque les meubles d'époque dont la restitution
était réclamée ont été détruits450. Elle l'est également si le modèle de véhicule
que le vendeur est tenu de livrer n’est plus fabriqué451. Dans ce second cas,
l’impossibilité matérielle n’est pas absolue, mais relative. En effet, le débiteur
ne se trouve pas dans une véritable impossibilité de livrer le modèle de
véhicule qui lui a été commandé, il lui suffit de relancer cette chaine de
production. Or, relancer toute une chaine de production seulement pour un
véhicule aura pour le débiteur, un cout de loin supérieur à l’avantage que le
créancier doit en tirer. Cette seconde forme d’impossibilité s’apparente donc à
la limite tenant au cout exorbitant que nous examinerons dans la suite.

261. En matière d’obligations de ne pas faire, cette limite trouve son


application lorsque la violation devient impossible à réparer. Par exemple, la
violation d'une clause de confidentialité ne peut matériellement plus donner
lieu à une exécution forcée en nature : la divulgation de l'information ne
pouvant être effacée452.

262. En droit de l’OHADA, cette limite peut se déduire de certaines


dispositions des actes uniformes, en l’occurrence l’article 36 alinéa 2 de
l’AUPSRVE. Il résulte de ce texte que, « l’acte de saisie rend indisponible les
biens qui en sont l’objet ». Ainsi, l’exécution forcée en nature est impossible en
droit spécial de l’OHADA lorsque le bien que le débiteur est tenu de délivrer

450 Civ.1re, 9 déc. 1986, no 85-15.160, Bull. civ. I, no 291 ; JCP 1987, IV, 60
451 Com. 5 oct. 1993, no 90 21.146, Bull. civ. IV, no 313; RTD com. 1994. 343, obs. Bouloc.
452 V. FORTI, « l’exécution en nature », RDC., Octobre 2016, p.62 ;

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
133
ou de restituer a déjà fait l’objet d’une saisie. Dans ce cas, quelle que soit la
bonne volonté du débiteur, il lui est matériellement impossible d’accorder à
son créancier la satisfaction qu’il attendait du contrat. Il devra donc se
contenter d’une compensation financière. En droit commun sénégalais,
l’article 536 du COCC dispose que concernant l’exécution en nature d’une
obligation de restitution que « si l'emprunteur est dans l'impossibilité de
restituer, il est tenu de payer la valeur de la chose prêtée, au jour du paiement ».
Ainsi, en cas d’impossibilité d’exécuter en nature l’obligation de restitution, le
créancier devra se contenter d’une exécution par équivalent.

263. Impossibilité morale ou personnelle. Nul ne peut être


physiquement contraint d’accomplir une prestation contractuelle, il en va du
respect de sa liberté individuelle. Cette position traditionnelle du droit civil est
admise dans les deux systèmes. En effet, il est impossible d’exiger l’exécution
forcée si cela implique une participation personnelle du débiteur453. Cette
difficulté surgit face à l’inexécution d’une obligation qui a un caractère
personnel. Le droit se trouve ainsi face à la difficulté de concilier le principe
moral du respect de la parole donnée avec le principe constitutionnel du
respect de la liberté individuelle. C’est sur la base de cette impossibilité que
jadis l’exécution forcée en nature était jugée impossible pour les obligations
de faire. Mais, il ne suffit plus que l’obligation ait un caractère personnel pour
que l’exécution forcée en nature soit jugée impossible, il faut surtout qu’il
s’agisse d’une prestation qui ne peut être déléguée, et qui exige un talent
artistique particulier ou une relation personnelle et confidentielle454. C’est le
cas lorsque la prestation dépend des qualités personnelles du débiteur qui ne
peuvent pas s'exprimer sous la contrainte. La cour d’appel de Paris avait ainsi
jugé que, le principe de la liberté de l'art exclut toute exécution forcée en
nature à l'encontre d'un peintre455. Par contre, il est possible d’obtenir

453 J-B. SEUBE, « L'impossibilité d'exécuter en nature l'obligation de faire » RDC 2009, n°02,
p.613
454 S. EBERHARD, Les sanctions de l’inexécution du contrat et les principes UNIDROIT, op.

cit., p.121
455 CA Paris, 2 déc. 1897, DP 1898, 2, p. 465, note Planiol ; S. 1900, 2, p. 201, note Wahl

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
134
l’exécution forcée en nature d’une prestation personnelle à chaque fois que
celle-ci peut correctement être fournie par un autre spécialiste de la branche.
Dans ce cas, il s’agira d’une exécution forcée indirecte, au moyen d’une
substitution du débiteur par un tiers.

264. Impossibilité juridique. L’exécution forcée en nature sera refusée


au créancier si une telle mesure est contraire à une disposition légale. Il peut
ainsi s’agir de préserver des prérogatives que le droit reconnait au débiteur.
Ainsi, en droit spécial de l’OHADA, l’exécution forcée en nature est impossible
à l’encontre des personnes morales de droit public, car celles jouissent d’une
immunité d’exécution456. L’article 30 de l’AUPSRVE dispose à cet effet que
« l’exécution forcée et les mesures conservatoires ne sont pas applicables aux
personnes qui bénéficient d’une immunité d’exécution ». L’exécution forcée en
nature se trouve donc paralysée face à immunité d’exécution. En plus,
l’impossibilité est dite juridique lorsque la mesure d’exécution forcée en nature
sera susceptible de remettre en cause les droits d’un tiers de bonne foi. En
France, la cour de cassation avait ainsi refusé d’ordonner l’exécution forcée
d’un contrat de bail, au motif que le local qui en était l’objet avait déjà été loué
à un tiers457. L’impossibilité juridique vise ainsi à protéger les droits du
débiteur ou ceux d’un tiers de bonne foi.

B/ Les limites contemporaines

265. L’affaiblissement de la force obligatoire du contrat a entrainé


l’émergence de nouvelles limites à l’exécution forcée en nature du contrat. La
première et la plus controversée de limites est le cout disproportionnel pour le
débiteur et la seconde pas encore très vulgarisée est la faute du créancier.

456 CCJA, 7 juillet 2005, n°043/2005, 7-7-2005 : A. Y. et autres c/ Sté TOGO TELECOM,
recuiel de jurisprudence de la CCJA, n°6, juin-décembre 2005, p25 ; Le juris-ohada
n°1/2006, p.8. obs. F.M SAWADOGO, ohadata D-07-16 ; ohadata J-06-32
457 Civ. 1re, 27 nov. 2008, no 07-11.282, Bull. civ. I, n°269 ; AJDI 2009. 218, obs. F. de La

Vaissière

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
135
266. Le cout disproportionnel pour le débiteur. Même si le contrat
est un « pari sur l’avenir », les parties ne peuvent pas totalement se mettre à
l’abri de la survenance de circonstances inattendues, susceptibles de
bouleverser leurs prévisions en entraînant une disproportion inattendue des
prestations réciproques458. En France, l’article 1221 écarte l’exécution forcée
en nature lorsque son cout est manifestement excessif. Cette limite est inédite
et constitue ainsi l’une des principales innovations de la réforme de 2016 et
que le législateur OHADA ignore. En effet, le caractère inédit de cette limite
tient à ce qu’elle bouleverse toute la philosophie classique du contrat en droit
français en cédant à l’influence étrangère. En effet, le contrat est dominé en
France par des considérations morales. « On lie les bœufs par les cornes, et les
hommes par les paroles », disait Loysel dans ses Institutes coutumières de 1607
pour illustrer le caractère sacré de l’engagement contractuel. En France,
l’engagement contractuel est sacré et doit être respecté, d’où la primauté de
l’exécution forcée en nature par rapport à l’exécution par équivalent. Or, en
admettant que le débiteur puisse se soustraire à l’exécution en nature de son
obligation parce que celle-ci serait devenue excessivement onéreuse au regard
de l’avantage que le créancier peut en tirer, le législateur français fait primer
des considérations d’ordre économique sur les valeurs morales.

267. Cette limite divise la doctrine. Pour les détracteurs de cette


innovation, elle bouleverserait « les grands équilibres du droit des contrats » en
faisant en sorte que « le contrat ne soit pas trop obligatoire »459. Aussi, elle
adresserait « un message dangereux aux créanciers qui pourraient être tentés
de ne pas exécuter convenablement leurs obligations pariant sur le coût
manifestement déraisonnable de l’exécution forcée, spécialement dans le
domaine de la construction immobilière »460. L’admission du coût

458 J.-L. PIOTRAUT, « L'impossibilité d'exécuter un contrat », LPA 20 mai 1994, n°60
459 T. GENICON, « contre l’introduction du coût manifestement déraisonnable comme exception
à l’exécution forcée en nature : in Réforme du droit des contrats, le débat » , Dr. Et patr. n°240,
oct. 2014, p.63s.
460 M. MEKKI, « Les remèdes à l'inexécution dans le projet d'ordonnance portant réforme du

droit des obligations », Gaz. Pal. n°120 du 30 avril 2015, p.37

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
136
disproportionné comme limite à l’exécution forcée en nature est contradictoire
à l’affirmation de l’exécution en nature comme principe et constitue une
transposition en droit français de la théorie de la violation efficace admise en
droit de la Common law et, que le législateur français a d’ailleurs explicitement
refusé de consacrer.

268. Par ailleurs, selon le Rapport remis au Président de la


République, cette nouvelle exception à l’exécution forcée en nature « vise à
éviter certaines décisions jurisprudentielles très contestées : lorsque l'exécution
forcée en nature est extrêmement onéreuse pour le débiteur sans que le
créancier y ait vraiment intérêt ». Ces abus ont souvent été pratiqués en droit
de la construction où l’exécution forcée en nature a souvent fait l’objet
d’applications excessives. On se souviendra dans ce sens de la démolition
reconstruction d’un édifice ordonnée par la cour de cassation, en raison d’une
différence de 0,33 mètres par rapport aux stipulations contractuelles461.

269. Pour la doctrine favorable à cette innovation, elle traduirait l’idée


du solidarisme contractuel c’est-à-dire la prise en compte de l’intérêt de
chaque contractant. Car, comme l’écrivait René DEMOGUE, le contrat est
comme « une petite société où chacun doit travailler dans un but commun qui
est la somme des buts individuels poursuivis, absolument comme la société
civile ou commerciale »462. Il soutient ainsi l’idée selon laquelle, le contrat est
fondamentalement un acte de coopération et non un acte conflictuel où
chaque partie cherche à dévorer l’autre. La prise en compte du coût que
l’exécution forcée en nature aura pour le débiteur recadre ainsi les excès du
libéralisme contractuel, en instituant entre les parties, un véritable devoir de
coopération. En effet, les tenants du libéralisme contractuel, estimaient que
la satisfaction attendue par l’une des parties dépendait de l’appauvrissement

461 Cass.civ. 3e, 11 mai 2005, n°03-21.136: Bull. civ. III, n°103, mieux, ou pire, pour 0,5
centimètres : Cass. civ. 3e, 20 mars 2002, n° 00-16.015, D. 2002, p. 2075, note C. CARON,
p. 2507, obs. B. MALLET-BRICOUT; RTD civ. 2002, p. 333, obs. T. REVET
462 R. DEMOGUE, Traité des obligations en général, T. VI, Gallica, Paris, 1932, n°3, p.9.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
137
corrélatif de l’autre, faisant ainsi croire que le contrat était « fondamentalement
conflictuel, qu’il réalise la rencontre de deux égoïsmes rivaux »463.

270. Grâce à cette nouvelle exception à l’exécution forcée en nature, le


cocontractant défaillant peut bénéficier d’un traitement plus juste. C’est du
moins ce qu’annonce certains arrêts rendus après la réforme, où le juge exerce
un véritable contrôle de proportionnalité entre le cout de l’exécution forcée en
nature pour le débiteur et l’intérêt du créancier. La cour de cassation avait
ainsi approuvé une cour d’appel qui avait refusé d’ordonner la destruction
totale d’un immeuble et à sa reconstruction pour réparer le défaut de
conformité au motif que, les demandeurs n’apportaient pas la preuve d’avoir
explorer en vain d’autres pistes de solutions préconisées par l’expert,
notamment, l’aménagement du trottoir, sous réserve d’obtenir l’autorisation
de la commune, et l’abaissement du plancher du local commercial464.

271. Pour se prémunir contre l’invocation abusive de cette nouvelle


limite, le texte précise que seul un débiteur de bonne foi peut s’en prévaloir.
Cette notion de débiteur de bonne foi a suscité quelques interrogations. La
doctrine s’est ainsi demandé si le débiteur de bonne foi est celui qui n’a pas
cherché à se placer artificiellement sous la protection de l’article 1221 in fine,
ou plutôt celui qui a tout fait pour exécuter au mieux le contrat mais n’y est
pas parvenu465. Tenant compte de l’esprit du législateur de 2016, c’est la
première conception qui mériterait d’être retenue, car il ne s’agit pas tant
d’éviter qu’un débiteur négligent ou peu coopératif bénéficie de l’exception de
disproportion de l’article 1221, mais plutôt qu’un débiteur malveillant
instrumentalise ce texte pour volontairement faire des économies en exécutant
à l’à-peu-près466.

463 F. DIESSE, « Le devoir de coopération comme principe directeur du contrat », Arch. phil.
droit, 1999, p.260
464 Cass. civ. 3ème, 21 juin 2018 n°17-15.897 Publié au bulletin ; CA Aix-en-Provence, 3e

chambre a, 12 janvier 2017, n° 15/12182.


465 H. BARBIER, « L'exécution et la sortie du contrat », op. cit., p.41
466 Ibid.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
138
272. En droit de l’OHADA, on ne retrouve pas dans les actes uniformes
OHADA, une disposition similaire à l’article 1221 du code civil français, et le
code civil ancien applicable dans la majorité des Etats membres de l’OHADA
ne connait pas la notion de cout disproportionné comme limite à l’exécution
forcée en nature. Il nous semble d’ailleurs superflu de consacrer une telle
limite, car un certain nombre de standards reconnus par le législateur africain
peuvent permettre de parvenir au même résultat.

273. D’abord, le cout disproportionné peut être analysé comme un


moyen de prévenir les abus du droit à l’exécution en nature467. En effet, s’il
est reconnu au créancier le droit d’exiger l’exécution en nature de la prestation
qui lui est due, il doit exercer ce droit en s’abstenant de tout abus. Or, cette
notion d’abus de droit est bien connue du législateur OHADA en matière des
droits des associés, en l’occurrence le droit de vote. En contrepartie de son
apport, l’associé bénéficie entre autres d’un droit de vote, qui lui permet de
participer à la prise de décision au sein de l’entreprise. Chaque associé a, dans
l’exercice de son droit de vote, la liberté de « voter dans le but d’exaucer ses
intérêts personnels, quelles que soient les répercussions sur la société et les
autres associés468 », personne ne peut le lui reprocher. Toutefois, dans le libre
exercice de ce droit de vote, l’associé doit s’abstenir de tout abus.

274. Selon SALEILLES, il y a abus de droit, lorsque l’effet d’un acte ne


peut être que de nuire à autrui, sans intérêt appréciable et légitime pour celui
qui l’accomplit469. Le législateur de l’OHADA frappe de nullité toute décision
collective constitutive d’un abus. Il peut s’agir d’un abus de majorité470 ou
d’un abus de minorité471. Ce principe peut être généralisé au-delà de la société

467 D. MAZEAUD, « Présentation de la réforme du droit des contrats », Gaz. Pal. 23 févr. 2016,
n°08, p.15
468K. AGUEMON, Réflexion sur l’abus en droit des sociétés dans l’espace OHADA : contribution

du droit français, sous la direction de - M. Franck MARMOZ. - Lyon : Université Jean Moulin
(Lyon 3), 2013. Disponible sur : www.theses.fr/2013LYO30038 p.126, n°133
469 R. SALEILLES, « Rapport présenté à la première sous-commission de la commission de

révision du Code civil », Bulletin de la société d’études législatives, 1905, t. IV, p. 322.
470 AUDSCGIE Art.130.
471 AUDSCGIE Art.131.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
139
commerciale. En vertu de ce principe d’abus de droit, le juge africain est fondé
à refuser de prononcer une exécution forcée en nature si une telle mesure ne
consiste pour le créancier qu’à nuire en son contractant sans qu’il ait un
véritable intérêt à refuser une compensation financière.

275. Par ailleurs, outre l’interdiction de l’abus de droit, le résultat


recherché par l’admission du cout disproportionné peut être atteint en se
fondant sur la notion de bonne foi, elle aussi bien connue du législateur
OHADA. Elle exige le respect de l’esprit du contrat au lieu de se borner à sa
lettre. Ceci implique une collaboration, voir une entraide entre les
contractants en vue de parvenir à la réalisation de l’objet du contrat. La bonne
foi a ainsi pour corollaire la loyauté. Le devoir de loyauté fait partie de l’ADN
des africains, plusieurs coutumes et règles africaines le rappellent en
abondance472.

276. La faute du créancier : une limite ignorée ou oubliée ? En


matière de limites à l’exécution forcée en nature, la faute du créancier ne fait
pas l’objet d’une consécration expresse des législateurs OHADA et français.
S’agit-il d’une omission ou d’une volonté manifeste de ne pas tenir compte du
comportement du créancier lorsqu’il s’agit d’ordonner l’exécution en nature ?
Quoi qu’il en soit, le fait fautif du créancier doit soit dispenser totalement le
débiteur de toute exécution, soit priver le créancier de son droit de recourir à
l’exécution forcée en nature, et de se contenter uniquement d’une
compensation financière. En effet, il est généralement admis en droit que « nul
ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes ». En vertu de ce principe, le
créancier ne peut pas obliger son débiteur à exécuter en nature sa prestation
si l’inexécution de celle-ci a été occasionnée par sa faute473. Il s’agit d’un

472 K. O. COFFI DOGUE, Jalons pour un cadre de référence OHADA en droit des contrats,
Th., Université de Montréal, 2013, p.297
473 P. GROSSER, « L'exécution forcée en nature », AJ Contrats d'affaires - Concurrence -

Distribution 2016 p.119


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
140
principe de justice dont les origines remontent au droit romain au moyen de
la mora creditoris.474.

277. En droit contemporain, les droit Allemand et Anglais ont repris et


modernisé la mora creditoris du droit romain. Ainsi, le paragraphe 254 du BGB
dispose que « si lors de la réalisation du dommage il y a eu, du chef de la partie
lésée, une faute qui ait coopéré au dommage, l’existence de l’obligation à
réparation comme l’étendu de la réparation à fournir dépendent des
circonstances et, en particulier, du point de savoir dans quelle mesure le
dommage aura été causé d’une façon prépondérante par l’une ou l’autre des
parties ». Le droit anglais connait lui aussi des moyens similaires avec la
mitigation of damages et l’estopel. Il est vrai que ces mécanismes ne visent pas
l’exécution forcée en nature, mais plutôt la réparation, mais il s’agit d’une
prise en compte du rôle joué par le créancier, qui influe sur le degré de
responsabilité du débiteur. Cette même philosophie peut être reprise par les
juges OHADA et français pour décider d’ordonner ou pas l’exécution forcée en
nature de l’obligation.

278. Dans un arrêt rendu par première chambre civile de la cour de


cassation française le 2 octobre 2013, la jurisprudence a donné une esquisse
de la consécration de la faute du créancier comme limite à l’exécution forcée
en nature. En l’espèce, souhaitant réhabiliter un logement, un individu avait
eu recours aux services d’une entreprise pour faire installer une chaudière
qu’il avait acquise trois années auparavant et qu’il avait stockée sans
utilisation pendant ce temps. Après l’installation de ladite chaudière par
l’entreprise, le client observa des dysfonctionnements et intenta une action
contre cette dernière en sollicitant, d’une part, le remplacement de la

474 Il s’agissait en droit romain de la situation dans laquelle se trouvait le créancier lorsque
l’inexécution de l’obligation était due à son fait. Deux conditions devaient ainsi être réunies :
il fallait d’une part que le débiteur ait fait une offre d’exécution, et d’autre part que cette
exécution ait été rendu impossible à cause d’une circonstance propre au créancier.; Cf. C.
ROBIN, « La mora creditoris », RTD civ. 1998, p.607

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
141
chaudière défectueuse par un matériel en parfait état de fonctionnement,
d’autre part, le paiement de diverses sommes en réparation de son préjudice.
Les juges du fond avaient établi que l’entrepreneur avait, en effet, manqué à
son obligation de respecter les règles de l’art dans l’installation de la chaudière
et notamment à son obligation de procéder à un rinçage initial de l’appareil.

279. Mais, à la suite d’une expertise, ils avaient relevé que les
dysfonctionnements trouvaient en réalité leur origine à la fois dans le défaut
d’installation et à la fois dans le fait que la chaudière avait été stockée par le
client pendant plusieurs années avant d’être mise en service. Le client avait
donc participé à la survenance des difficultés de fonctionnement dont il se
plaignait. Pour tenir compte de cette faute du créancier, les juges du fond
refusèrent de faire droit à la demande de remplacement de la chaudière par
un nouveau matériel. C’est cette orientation que suivit la cour de cassation au
motif que « la cour d’appel ayant relevé, à la suite de l’expert judiciaire, que la
chaudière était ancienne, qu’elle avait été stockée pendant plusieurs années
avant d’être installée, et que [le client], qui l’avait laissée sans entretien pendant
des années, avait contribué aux dysfonctionnements litigieux, a souverainement
estimé que ces circonstances ne justifiaient pas la mesure sollicitée par [le
client]. ». Bien qu’isolée, cet arrêt sonne le glas d’une consécration de la faute
du créancier comme limite à l’exécution forcée en nature.

280. Selon le professeur Thomas GENICON, il y a un temps pour


l’exécution en nature, lorsque par son fait, le créancier a laissé passer ce
temps, même s’il se corrige après, le débiteur ne devrait plus être contraint à
accomplir sa prestation. « On ne saurait exiger de lui qu’il tienne en permanence
la prestation à disposition alors qu’il peut avoir mieux à faire ailleurs, avec
d’autres partenaires »475. L’auteur soutient ainsi que le comportement
blâmable du créancier devrait être analysé en une forme de renoncement à
son droit à l’exécution en nature.

T. GENICON, « La faute du créancier comme nouvelle limite à l'exécution forcée en nature ? »


475

RDC 2014, n°02, p.171


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
142
281. En droit OHADA, le législateur admet déjà comme on le verra plus
loin, que le débiteur soit exonéré d’une partie de sa responsabilité
contractuelle s’il est avéré que le créancier a commis une faute de négligence.
Ce même principe devrait s’appliquer lorsqu’il s’agit d’ordonner l’exécuter en
nature. Ainsi, le créancier devra se contenter d’une exécution par équivalent
ou simplement être privé d’exécution si par sa faute il a mis son débiteur dans
l’impossibilité d’accomplir la prestation qui lui était due. Les principes
UNIDROIT et la CVIM consacre eux aussi l’idée de prise en compte du rôle de
du créancier de l’obligation inexécutée. Il résulte ainsi de l’article 7.1.2 du
premier texte qu’« une partie ne peut se prévaloir de l’inexécution par l’autre
partie dans la mesure où l’inexécution est due à un acte ou une omission de sa
propre part ou encore à un évènement dont elle a assumé le risque ». Il est
souhaitable que ces textes soient applicables tant à l’exécution forcée en
nature qu’à la réparation.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
143
Conclusion du chapitre 1

282. Le principe de la force obligatoire du contrat et la philosophie du


contrat que partagent les droits de l’OHADA et français permettent à
l’exécution forcée en nature de s’affirmer comme principe dans les deux
systèmes juridiques. Ainsi, lorsque le débiteur ne s’est pas volontairement
exécuté, contrairement aux droits de la Common Law, les droits OHADA et
français privilégient l’exécution forcée en nature lorsque celle-ci est possible
et qu’elle ne se heurte pas à la liberté individuelle du débiteur. Une application
radicale de ce principe avait donné lieu à plusieurs abus, d’où les
encadrements apportés par les deux systèmes juridiques. L’exécution forcée
en nature s’avère ainsi être le moyen contraignant par excellence pour assurer
l’exécution du contrat face à un débiteur récalcitrant. Les deux systèmes
multiplient les mécanismes de mise en œuvre de ce remède en vue de
permettre son adoption à toutes sortes d’obligations inexécutées. Toutes fois,
il demeure les hypothèses où ce remède n'est pas adapté. Le contractant
victime de l’inexécution cherchera refuge vers l’exécution forcée par
équivalent, c’est-à-dire la condamnation du débiteur à lui verser des
dommages et intérêts en lieu et place de l’exécution en nature qu’il n’a pas pu
obtenir.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
144
Chapitre 2 : L’exécution par équivalent

283. Lorsque l’exécution forcée en nature n’est pas possible, le


créancier doit se contenter d’une exécution indirecte de ses obligations476.
L’exécution est dite indirecte parce que ce dernier recevra quelque chose
d’autre que ce qui était prévu au contrat. Dans l’exécution des obligations non
pécuniaires, il attendait une prestation matérielle, mais va devoir se satisfaire
d’une somme d’argent en guise de dommages-intérêts.

284. Les dommages-intérêts désignent la « somme d’argent due à un


créancier par le débiteur pour la réparation du dommage causé par
l’inexécution, la mauvaise exécution ou l’exécution tardive de son obligation »477.
La question s’est posée de savoir si ces dommages-intérêts contractuels
constituent comme tout dommage-intérêt en matière civil, une simple
réparation du préjudice causé au créancier par l’inexécution du débiteur ou
au contraire une compensation financière de la prestation attendue du
contrat478. Dans le premier cas, il s’agirait d’une responsabilité civil
contractuelle dont le régime devrait être calqué sur celui de la responsabilité
civile délictuelle. Dans le second cas, on parlerait plutôt d’exécution forcée par
équivalent qui serait une alternative à l’exécution forcée en nature. C’est ce
second aspect qui doit retenir l’attention dans une étude portant sur les
remèdes à l’inexécution du contrat.

285. Il s’agit de voir si au-delà des controverses doctrinales et des


hésitations de la jurisprudence, il n’est pas admis en France et dans l’OHADA,
à côté de l’exécution forcée en nature, une exécution forcée par équivalent.
Dans l’affirmative, quel pourrait être son régime juridique ? Il convient donc
d’examiner en premier lieu la question de l’admission d’une exécution par

476 J. CARBONNIER, Droit civil : les obligations, op.cit., p.291


477 G. CORNU, op. cit., p.806
478
Ph. REMY, « La “responsabilité contractuelle” : histoire d’un faux concept », RTD civ. 1997.
323, n°41 ; Ph. LE TOURNEAU, Droit de la responsabilité et des contrats, 11 ème éd., D.,
Paris 2017, p.321, n°3213.46
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
145
équivalent (section 1), avant de faire ressortir son régime juridique (section
2).

Section 1 : L’admission de l’exécution par équivalent

286. Les dommages-intérêts que le juge alloue à la victime d’une


exécution contractuelle doivent-ils placer cette dernière dans la situation qui
aurait été la sienne si le contrat avait été correctement exécuté ou simplement
lui offrir une réparation du préjudice qu’elle a subi du fait de l’inexécution ?
C’est en ces termes que se pose le débat que suscite l’existence ou pas d’une
exécution par équivalent comme alternative de l’exécution forcée en nature.
La controverse se situe en réalité sur la fonction des dommages-intérêts en
matière contractuelle. Jusqu’à ce jour, la doctrine reste divisée sur la
question, ce qui fait de l’exécution par équivalent un mécanisme controversé
(paragraphe 1). Toutefois, au-delà de cette controverse, il est possible
d’entrevoir en droit de l’OHADA et en droit français l’existence de ce remède
(paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Un mécanisme controversé

287. L’existence ou pas d’une exécution par équivalent comme remède


à l’inexécution contractuelle dépend de la fonction reconnue aux dommages-
intérêts contractuels. A ce niveau deux thèses s’affrontent : la thèse de la
réparation (A) et la thèse de la compensation (B).

A/ La thèse de la réparation

288. Défavorable à l’existence d’une exécution forcée par équivalent,


ces auteurs soutiennent d’abord que l’expression « exécution par équivalent »
est contradictoire. En effet, il n’y aurait dans cette expression qu’une
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
146
contradiction, dès lors que l’équivalent « n’assure aucune exécution », mais
tout différemment une réparation479. D’après cette doctrine, il n’y a d’exécution
qu’en nature, soit le contrat est exécuté en nature, soit il ne l’est pas. L’action
en dommages et intérêts conduirait simplement à exécuter une obligation de
réparer les conséquences de l’inexécution à laquelle tout contractant est tenu
du seul fait qu’il a conclu un contrat480.

289. En plus, exécuter le contrat sous une forme différente n'est pas
l'objet des dommages-intérêts contractuels, ceux-ci tendraient plutôt à effacer
le tort causé à la partie insatisfaite, à réparer le dommage qui lui a été causé
du fait de l’inexécution de son débiteur481. Les dommages-intérêts semblent
donc s’intéresser au sort du créancier et non à celui du contrat482. Ce n’est pas
l’inexécution en elle-même qui justifie l’octroi des dommages-intérêts
contractuels, mais le préjudice que cette inexécution a causé à la victime. A
plusieurs reprises, la jurisprudence s’est prononcée dans ce sens, en décidant
que l’inexécution d’une obligation contractuelle ne suffit pas à fonder l’octroi
d’une réparation483. A titre illustratif, dans un arrêt rendu en 2003, la troisième
chambre civile de la cour de cassation française avait jugé que les « dommages
et intérêts ne peuvent être alloués que si le juge, au moment où il statue,
constate qu’il est résulté un préjudice de la faute contractuelle »484.

290. De plus, l’exécution ne saurait se confondre à la réparation, une


différence fondamentale existe entre ces deux notions. En effet, tandis que la

479 F. ZENATI-CASTAING et T. REVET, Cours de droit civil, Contrats, Théorie générale –


Quasi-contrats, PUF, 2014, n° 173
480 Ibid.
481 Chr. LARROUMET, « Pour la responsabilité contractuelle », in Le droit privé français à la

fin du XXe siècle, Mélanges Catala P., Litec, 2001, p. 543.


482 Z. JACQUEMIN, Payer, réparer, punir. Étude des fonctions de la responsabilité

contractuelle en droit français, allemand et anglais, Th., Paris II, 2015, p.86
483 Cass. Soc. 4 déc. 2002, Bull. civ. V, n°368, RDC 2003. 54, obs. Ph. STOFFEL-MUNCK,

RTD civ. 2003. 711, obs. P. JOURDAIN ; Civ. 1re, 9 juill. 2003, RTD civ. 2003. 709, obs.
MESTRE et B. FAGES, JCP 2003. 1. 163, n°4, obs. G. VINEY ; Civ. 3e, 3 déc. 2003, JCP 2003.
1. 163, n°2, obs. G. VINEY, CCC 2004. 38, note L. LEVENEUR, RDC 2004. 280, obs. D.
MAZEAUD, RTD civ. 2004. 295, obs. P. JOURDAIN ; Civ. 2e, 11 sept. 2008, RDC 2009. 77,
obs. O. DESHAYES ; Civ. 1re, 22 nov. 2017, CCC 2018, n° 23, note L. LEVENEUR.
484 Cass. 3e civ., 3 déc. 2003 : Rapport annuel 2004, p. 365

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
147
première (exécution) consiste à fournir à la victime de l’inexécution la
prestation promise, la seconde vise seulement à compenser le dommage
résultant de la défaillance du débiteur. L'exécution ne se conçoit donc qu'en
nature, et les dommages-intérêts ne peuvent être assimilés à un mode de
paiement de l'obligation méconnue485. Ainsi, qu’ils soient alloués à la suite
d’une inexécution ou d’un délit, la fonction des dommages-intérêts ne peut
être autre que celle de réparation.

291. Cette thèse trouve bien ses illustrations en droits positifs de


l’OHADA et français. En effet, dans les deux systèmes juridiques la réparation
apparait comme la fonction principalement reconnue aux dommages-intérêts.
Aux termes de l’article 1217 du code civil français on trouve une énumération
des moyens dont dispose le créancier en cas d’inexécution de son
cocontractant parmi lesquels : la « réparation des conséquences de
l'inexécution ». La victime de l’inexécution peut ainsi solliciter des dommages-
intérêts dont la fonction sera non pas de lui fournir l’équivalence de la
prestation qu’elle était en droit d’attendre de son partenaire, mais plutôt de
réparer le préjudice qu’elle subit du fait de cette inexécution. La sous-section
5 du chapitre 4 du code civil portant sur les effets du contrat est d’ailleurs
intitulée « la réparation du préjudice résultant de l'inexécution du contrat ». Et,
cette idée de réparation se retrouve bien au cœur des articles 1231 et suivant
du même code civil.

292. En droit de la vente commerciale OHADA, l’article 284, de


l’AUDCG prévoit que si le débiteur s’exécute après le délai supplémentaire qui
lui a été accordé, le créancier peut accepter cette exécution tardive et
demander les dommages-intérêts. Même si le législateur OHADA ne le dit pas
clairement, ces dommages-intérêts constituent la réparation d’un préjudice
que le retard aurait causé au créancier. Il en va de même des dommages
intérêts qui sont dus à la suite d’une résolution contractuelle. Ces exemples

485P. JOURDAIN, « Réflexion sur la notion de responsabilité contractuelle », in Les


métamorphoses de la responsabilité, Journées SAVATIER, PUF, 1998, p. 65
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
148
attestent que, la fonction de réparation est belle et bien reconnue aux
dommages-intérêts dans les deux systèmes.

B/ La thèse de la compensation

293. L’inexistence d’une responsabilité contractuelle. Pour le


juriste du XXIe siècle, l’expression « responsabilité contractuelle » coule de
source et constitue l’une des bases classiques du droit des obligations.
Pourtant, elle était inconnue à l’époque de l’adoption du Code civil français486.
SAINCTELETTE réfutait d’ailleurs l’idée même de responsabilité
contractuelle487 quand GRANDMOULIN voyait dans celle-ci une simple
responsabilité délictuelle appliquée à l’inexécution contractuelle488. Une partie
non négligeable de la doctrine voit donc dans la responsabilité contractuelle
« un faux concept »489, « impensable pour qui lit le code civil et suit son plan »490
et milite pour son abandon pure et simple491.

294. En effet, les tenants de ce courant doctrinal soutiennent que les


dommages intérêts alloués en cas d’inexécution du contrat ne sont ni plus ni
moins qu’une forme d’exécution par équivalent492. Ils contestent que ces
dommages intérêts puissent remplir une autre fonction que celle de
paiement493. Il y aurait ainsi une incompatibilité entre le contrat et la notion

486 D. GARDNER, B. MOORE, « La responsabilité contractuelle dans la tourmente », Les


Cahiers de droit, vol.48, n°4, 2007, p.544.
487 Ch. SAINCTELETTE, De la responsabilité et de la garantie, Bruxelles, Bruylant 1884,

p.176
488 J. GRANMOULIN, De l’unité de la responsabilité ou nature délictuelle de la responsabilité

pour violation des obligations contractuelles, th., Rennes, 1892


489 B. HAFTEL, La responsabilité contractuelle, RDC déc. 2017, n°04, p. 143

490 Ph. REMY, « Critique du système français de responsabilité civile », Droit et cultures 1996,

p.41.
491 D. GARDNER, B. MOORE, op. cit., p.545
492 Ph REMY, op. cit., n°41

493 Y-M. LAITHIER, Etude comparative des sanctions à l’inexécution du contrat, Op. Cit.,

p.119, n°85

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
149
de réparation. Il n’existe pas de « responsabilité contractuelle ». Il n’y a de
responsabilité que délictuelle494.

295. Au demeurant, les dommages-intérêts contractuels n'ont pas


pour objet la réparation d'un préjudice, mais seulement d'assurer l'exécution
par un équivalent monétaire de l'obligation transgressée. En effet, le contrat
est un acte de prévision par lequel les parties prévoient leur avenir pour le
meilleur (l’exécution) et pour le pire (l’inexécution). Elles n’ont pas besoin de
recourir à la responsabilité pour sanctionner leur comportement et réparer
leurs faiblesses. Le principe de la force obligatoire du contrat met à la charge
du débiteur une obligation d’exécuter par équivalent lorsque l’exécution en
nature n’est plus possible ou lorsqu’elle ne présente plus aucun intérêt pour
le créancier.

296. Cette thèse a reçu le soutien d’une certaine jurisprudence. Dans


un arrêt rendu le 4 décembre 2002, la chambre sociale de la cour de cassation
française avait jugé au visa des articles 1142 et 1147 que « les dommages-
intérêts alloués au créancier au titre de l'inexécution de l'obligation ou d'un
retard dans son exécution, constituent une modalité d'exécution de l'obligation
de faire ou de ne pas faire »495. Cet arrêt a été vu comme « un soutien de poids
lourd » à la thèse favorable à l’exécution par équivalent496. Mieux encore, la
troisième chambre civile de la cour de cassation avait désavoué une cour
d’appel au motif qu'en statuant comme elle l’avait fait, celle-ci n’avait pas
replacé les maîtres de l'ouvrage dans la situation où ils se seraient trouvés si
l'immeuble avait été livré sans vices, violant ainsi les dispositions de l’article
1149 du code civil ancien497.

494 Y.-M. LAITHIER, Etude comparative des sanctions de l’inexécution du contrat, op. cit.,
p.120
495 Cass. Soc. 4 déc. 2002, AGS de Paris et autre c/ Marquis et autres, Bull. civ. IV, n° 368 ;

Rev. contrats 2003.54, obs. Ph. STOFFEL-MUNCK.


496 P. JOURDAIN, « Les dommages-intérêts contractuels ne seraient qu'une modalité

d'exécution de l'obligation inexécutée », RTD Civ. 2003 p.711


497 Cass. 3e civ., 27 mars 2012, RDC n°3, p.773, obs. Th. GENICON

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
150
297. L’incompatibilité du contrat et de la réparation. Chaque
contrat fait naitre entre les parties des obligations spécifiques, qui constituent
les avantages que les contractants se promettent. En cas d’inexécution, le
créancier ne peut réclamer que ce qui lui est dû, c’est-à-dire cet avantage
spécifique qu’il attendait du contrat498. Dès lors, le contrat ne peut avoir pour
seule alternative à la résolution que son exécution qui peut être obtenue soit
en nature, soit par équivalent. Ainsi, les dommages-intérêts contractuels ne
peuvent constituer qu’un mode d’exécution du contrat par équivalent499.

298. On déduit de cette thèse que, lorsque l’obligation contractuelle


n’est pas exécutée en nature, qu’elle ne peut plus l’être ou qu’une telle
exécution ne présente plus d’intérêt pour le créancier, cette obligation subsiste
tout de même, mais sous la forme de dommages-intérêts. De sorte qu’à côté
de son droit à une exécution forcée en nature, le créancier disposerait d’un
droit à l’exécution forcée par équivalent qui résulterait dans les deux systèmes
juridiques, des articles 1134 du code civil ancien et 1103 du code civil
français. Les dommages-intérêts contractuels ne sauraient ainsi être
confondus avec une dette de réparation500. En effet, l’obligation de réparer
procède d’un délit ou d’un quasi-délit, alors que le principe de la force
obligatoire des conventions exige que du contrat ne puisse procéder qu’une
obligation d’exécuter501.

Paragraphe 2 : Une consécration implicite

299. À mi-chemin entre les deux thèses divergentes sus exposées, l’on
retrouve un troisième courant doctrinal plus modéré qui soutient que
l’inexécution du débiteur fait naitre deux intérêts à protéger. L’examen de cette

498 P. DELEBECQUE, « L’évolution de la responsabilité en France », Europa e diritto privato


1999, p.392
499 Y.-M. LAITHIER, Etude comparative des sanctions de l’inexécution du contrat, op. cit.,

p.119, n°86
500 P. REMY-CORLAY, « Exécution et réparation : deux concepts ? », RDC janv. 2005, n°1, p.13
501 Y.-M. LAITHIER, op.cit, p.120

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
151
dualité des intérêts protégés (A) permet de voir en l’intérêt positif, une
reconnaissance implicite de l’exécution par équivalent dans les deux systèmes
juridiques (B).

A/ La dualité des intérêts protégés

300. Selon une doctrine ancienne, les dommages intérêts ont pour
fonction principale de protéger les intérêts de la victime d’une inexécution502.
L’auteur avait ainsi distingué deux types d’intérêts : intérêt négatif et intérêt
positif. Le premier consiste à replacer la victime dans la situation où elle aurait
été si le contrat n’avait pas été conclu, c’est-à-dire rembourser à la victime les
dommages qu’elle a subi du fait de la conclusion du contrat. C’est cet intérêt
que protège la réparation. Alors que, l’intérêt positif vise à placer la victime
dans la situation où elle aurait été si le contrat avait été correctement exécuté,
lui reverser les bénéfices qu’elle aurait obtenus du fait d’une exécution
correcte du contrat. C’est l’intérêt du créancier à l’exécution effective du
contrat503. Il est garanti au moyen de l’exécution par équivalent. Partant de
cette dualité d’intérêts, un auteur a pu développer la thèse de la dualité de
fonctions des dommages-intérêts en matière contractuelle504. Cette thèse
semble mieux rendre compte de la conception des dommages-intérêts
contractuels en droits de l’OHADA et français.

301. En effet, les dommages-intérêts contractuels tels qu’ils existent


dans les deux systèmes juridiques ne sont pas univoques. Ils peuvent d’abord
avoir pour fonction de compenser la prestation inexécutée. Dans ce sens, ils
constituent le prolongement pécuniaire de l’obligation qui n’a pas été exécutée

502 R.VON JHERING De la culpa in contrahendo 1860, in. Des dommages-intérêts dans les
conventions nulles ou restées imparfaites, Trad. De Meulenaere O., Marescq, Paris, 189
503 Y-M. LAITHIER, op cit., p.160, n°110
504 Ph. BRUN, « La réparation du dommage », in : B. DUBUISSON, P. JOURDAIN (dir.), Le

dommage et sa réparation dans la responsabilité contractuelle et extracontractuelle, Etudes


de droit comparé, Bruylant, Bruxelles, 2015, p. 129.
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
152
en nature505. Ils sont alors une exécution par équivalent du contrat. Toutefois,
telle ne saurait être l’unique fonction des dommages-intérêts alloués en
matière contractuel. Ils ont aussi pour but d’indemniser la victime de
l’inexécution pour le préjudice qu’elle a pu subir. Ils ne constituent plus alors
une exécution du contrat, mais plutôt un moyen de réparer les conséquences
dommageables de l’inexécution : c’est la responsabilité contractuelle.

302. Une dualité admise en droit allemand. L’une des innovations


de la réforme du droit allemand des obligations réside dans l’admission de la
distinction entre les « dommages-intérêts en lieu et place de la prestation »
(Schadensersatz statt der Leistung) et les « dommages-intérêts en marge de la
prestation » (Schadensersatz neben der Leistung). Les premiers interviennent
comme remède principal à l’inexécution, pour remplacer la prestation qui n’a
pas ou ne pourra plus être fournie. Ils constituent ainsi une exécution par
équivalent du contrat. Les seconds quant à eux, visent à corriger les effets
néfastes d’un retard ou de la violation d’une obligation accessoire506. Ils
représentent alors l’engagement de la responsabilité civil contractuelle du
cocontractant défaillant.

B/ L’intérêt positif : une reconnaissance de l’exécution


par équivalent

303. La thèse de la dualité de fonctions semble mieux rendre compte


de la conception des dommages-intérêts contractuels en droits de l’OHADA et
français. En effet, les dommages-intérêts contractuels tels qu’ils existent dans
ces deux systèmes juridiques n’induisent pas une réalité unique. Cette dualité
de fonctions est admise en France et dans l’espace OHADA, même si en réalité
la fonction réparatrice y est prépondérante507.

505 L. ANDREU, N. THOMASSIN, Cours de droit des obligations, op. cit., p.346
506 Z. JACQUEMIN, Payer, réparer, punir. Étude des fonctions de la responsabilité
contractuelle en droit français, allemand et anglais, Th., Paris II, 2015, p.49
507 L. ANDREU, N. THOMASSIN, op. cit., p.347

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
153
304. Il ressort de l’article 1217 du code civil français qu’en cas
d’inexécution contractuelle, la partie qui subit cette inexécution peut, entre
autres, « demander réparation des conséquences de l'inexécution ». Il s’agit
d’une réparation des conséquences issues de l’inexécution. Or, la réparation
renvoie à un dédommagement. Il est question de dédommager le créancier des
préjudices que lui a causé l’inexécution de son cocontractant, ce qui suppose
l’engagement de la responsabilité contractuelle de ce dernier. Par contre, en
ce qui concerne leur évaluation, l’article 1231-2 du code civil français dispose
que « les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte
qu'il a faite et du gain dont il a été privé ». Le but est de replacer le créancier
dans la situation qui aurait été la sienne si le contrat avait été exécuté, ce qui
correspond non pas à la réparation d’un préjudice, mais plutôt à une
exécution par équivalent du contrat. Il y a donc en droit français, un double
emploi de la notion de dommages-intérêts.

305. En droit de l’OHADA, l’article 1142 du code civil ancien qui


dispose que « toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages
et intérêts, en cas d'inexécution de la part du débiteur » ne semble pas faire
référence à la réparation d’un préjudice, mais plutôt à l’exécution par
équivalent des obligations dont il est impossible d’exiger l’exécution forcée en
nature. Par contre, les dommages-intérêts invoqués dans l’article 1143 in fine
du même code ne poursuivent pas ce but d’exécuter le contrat, mais plutôt de
réparer un préjudice causé. En droit spécial de l’OHADA, on retrouve aussi
dans l’AUDCG, un double emploi des dommages intérêts en matière de vente
commerciale. En effet, à la lecture des articles 281 et suivants, les dommages
intérêts peuvent être alloués à titre principale, ou en complément d’un autre
remède. Or, lorsqu’ils sont alloués à titre principal, les dommages intérêts ne
constituent pas une réparation d’un dommage, mais l’équivalent de la
prestation que le créancier n’a pas pu obtenir en nature508.

508F. TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, F. CHENEDE, Droit civil. Les obligations, op. cit.,
p.888
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
154
306. Au regard des analyses qui précèdent, il ne fait aucun doute que
les dommages et intérêts alloués en cas d’inexécution du contrat sont de deux
natures509. Certains réparent le préjudice causé par l’inexécution. C’est le cas
lorsque le contrat a été résilié ou lorsque les dommages intérêts accompagnent
un autre remède. D’autres viennent apporter au contractant victime de
l’inexécution, la satisfaction qu’il attendait du contrat : c’est l’exécution par
équivalent.

307. Par ailleurs, ces deux fonctions peuvent souvent être


complémentaires. En effet, même dans le cas de l’exécution par équivalent, les
dommages-intérêts compensateurs peuvent s’ajouter à la valeur de la
prestation que le créancier attendait lorsque l’inexécution a causé un
dommage à ce dernier, ce qui est d’ailleurs souvent le cas. Tout compte fait,
l’exécution par équivalent est bien une réalité distincte dans les systèmes
juridiques français et de l’OHADA, où elle pallie à l’impossibilité d’une
exécution forcée en nature. Il convient dès lors d’esquisser son régime
juridique.

Section 2 : Le régime juridique de l’exécution par


équivalent

308. Dès lors qu’elle se distingue de la responsabilité contractuelle, la


mise œuvre de l’exécution forcée par équivalent requière des conditions
spécifiques (paragraphe 1), mais aussi une clarification sur le dommage
réparable (paragraphe 2).

509G. VINEY, Traité de droit civil : Introduction à la responsabilité, 3ème éd., LGDJ, Paris,
2008. p. 422 et s
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
155
Paragraphe 1 : La mise en œuvre de l’exécution par
équivalent

309. La condamnation du débiteur à exécuter le contrat par équivalent


suppose qu’il ait été préalablement mis en demeure de s’exécuter. Mais, la
mise en demeure ayant déjà fait l’objet d’une étude dans les chapitres
précédents, il sera superflu d’y revenir ici. A côté de cette mise en demeure,
l’exécution forcé par équivalent suppose l’existence d’un contrat inexécuté (A).
Il n’est par ailleurs pas nécessaire de rechercher la faute du débiteur et encore
moins le préjudice subi par le créancier. L’inexécution du contrat suffit à elle
seule pour donner droit à une exécution par équivalent (B).

A/ L’existence d’un contrat inexécuté

310. Un contrat valide. En l’absence d’un contrat, les dommages-


intérêts alloués au créancier constituent une responsabilité civile délictuelle
et non une exécution par équivalent. La condamnation du cocontractant à
offrir au créancier une exécution par équivalent suppose l’existence d’un
contrat valide. Dans un système consensualiste comme celui de de la France
et de l’OHADA, il se pose parfois le problème de la preuve de l’existence d’un
contrat entre les parties510. Par conséquent, fassent à certaines transactions,
on hésite à admettre l’exécution forcée par équivalent, préférant ainsi recourir
à la responsabilité extracontractuelle511. Par ailleurs, l’exigence d’un contrat
valide se justifie par le fait que, l’exécution par équivalent repose sur le respect
de la force obligatoire du contrat. Or, le contrat n’a force obligatoire que parce
qu’il a été légalement formé c’est -à dire qu’il doit exister selon la loi. Cette
condition pose le problème de la nature de la responsabilité encourue en cas
de rupture abusive des pourparlers et en cas de disparition rétroactive du
contrat.

510 F. CHABAS, Obligations : théorie générale, op. cit., p.390


511 L. ANDREU, N. THOMASSIN, op. cit., p.491
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
156
311. En effet, les dommages intérêts alloués en cas de rupture
abusives des pourparlers et ceux octroyés en cas de nullité ou de résolution
du contrat, relèvent de la responsabilité civile et ne constituent pas une
exécution par équivalent, mais plutôt une sanction infligée à un cocontractant
qui cause à son partenaire un dommage. Car, dans le premier cas, le contrat
n’ayant pas encore été conclu, toute violation des règles gouvernant les
pourparlers ne peut relever que de la responsabilité délictuelle, sur le
fondement de l’article 1382 du code civil ancien512. Il en va de même des
dommages intérêts alloués à la suite de la disparition du contrat soit par
nullité, soit par résolution. La responsabilité précontractuelle et post-
contractuelle est donc de nature délictuelle. Car, « avant le contrat ce n’est pas
le contrat et après le contrat, ce n’est plus le contrat »513.

312. Un contrat inexécuté. Le manquement contractuel est le fait


générateur de l’exécution forcée par équivalent. Qu’il soit partiel ou total, tout
manquement aux obligations contractuelles peut donner lieu à une exécution
forcée par équivalent. Lorsque l’inexécution est partielle, l’évaluation des
dommages-intérêts compensateurs se fera en fonction de l’avantage dont le
créancier a été privé.

B/ L’inexécution du contrat : une condition suffisante

313. L’exécution par équivalent du contrat constitue une


manifestation de la force obligatoire du contrat. Dès lors, il n’est pas
nécessaire que le créancier apporte la preuve d’une faute, la violation de
l’obligation contractuelle suffit à octroyer au créancier qui la sollicite, une
exécution par équivalent de la prestation qu’il attendait du contrat514. Il peut

512 Cass. Com., 26 novembre 2003, Bull. 2003, IV, n°186, p.206 ; RTD civ.,2004, p.80 ; A.-S.
DUPRE-DALLEMAGNE, « Nouvelle précision sur le régime applicable à la rupture unilatérale
des pourparlers », Rec. D., 2004, p.869.
513 J. JULIEN, Droit des obligations, 4ème éd., Bruylant, Bruxelles 2019, p.212
514 P. LE TOURNEAU, L. CADIET, Droit de la responsabilité et des contrats, Paris, Dalloz,

2002, n°809
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
157
s’agir d’une absence d’exécution, ou d’une exécution imparfaite. Pourvu que
celle-ci ne résulte pas d’un cas de force majeur. Un arrêt a ainsi pu préciser
que « toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et
intérêts, en cas d’inexécution de la part du débiteur, peu important que cette
inexécution n’ait pas été fautive »515. En droit spécial de l’OHADA, l’AUDCG
précise que, l’inexécution reste imputable au débiteur, même lorsqu’elle
résulte du fait d’un tiers à qui l’exécution a été confiée516.

314. La caractérisation de l’inexécution dépend selon qu’il s’agit d’une


obligation de moyen ou de résultat. C’est d’ailleurs à ce niveau que cette
distinction décriée par une certaine doctrine, trouve son intérêt. Face à une
obligation de résultat, l’inexécution du contrat est caractérisée dès lors que le
résultat escompté n’a pas été atteint. Les choses ne sont par ailleurs pas aussi
simples s’il s’agit d’une obligation de moyen. A ce niveau, le contrat sera
inexécuté s’il est avéré que le débiteur n’a pas fait tout ce qu’il pouvait ou
devait faire pour parvenir au résultat attendu par son cocontractant.

315. Par ailleurs, l’exécution par équivalent n’est pas subordonnée à


l’existence d’un préjudice. Le créancier a droit à l’octroi des dommages-
intérêts compensatoires sans qu’il soit nécessaire d’apporter la preuve d’un
préjudice. Cette solution est bien admise en jurisprudence et transposable end
droit de l’OHADA. En effet, la troisième Chambre civile de la Cour de cassation
française affirma, dans un arrêt du 30 janvier 2002, que « l’indemnisation du
bailleur en raison de l’inexécution par le preneur des réparations locatives
prévues au bail n’est subordonnée ni à l’exécution de ces réparations ni à la
justification d’un préjudice »517. Dans le même sens, la première chambre civile
rappelle, conformément à l’article 1145 du code civil ancien, que « si

515 Com. 30 juin 1992, n°90-20.991, P IV, n°258 ; D. 1994. 454, note A. BENABENT
516AUDCG, Art.295
517 Civ. 3e, 30 janv. 2002, no 00-15.784, P III, n°17 ; D. 2002.2288, note J.-L. ELHOUEISS ;

D. 2003. Somm. 458, obs. D. MAZEAUD ; LPA 18 nov. 2002. obs. Ph. STOFFEL-MUNCK, 1re
esp
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
158
l’obligation est de ne pas faire, celui qui y contrevient doit des dommages et
intérêts par le seul fait de la contravention »518

Paragraphe 2 : Le dommage réparable

316. Alors qu’en matière délictuelle, le principe est que le débiteur doit
réparer l’intégralité du dommage qu’a subi la victime, en matière
contractuelle, l’évaluation des sommes à allouer à la victime de l’inexécution
repose sur deux standards différemment appréciés dans les deux systèmes à
savoir : la prévisibilité du dommage (A) et l’obligation de limiter le dommage
(B).

A/ La prévisibilité du dommage

317. Aux termes des articles 1231-3 du code civil français et 1150 du
code civil ancien, « le débiteur n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont
été prévus ou qui pouvaient être prévus lors de la conclusion du contrat, sauf
lorsque l'inexécution est due à une faute lourde ou dolosive ». Il résulte de ces
textes que, les indemnités dues par le débiteur en cas d’inexécution
contractuelle sont limitées aux préjudices qui ont été prévus ou qu'on a pu
prévoir lors de la conclusion du contrat. Cette limitation s’explique par la
théorie des attentes légitimes et ne concerne que les dommages et intérêts qui
ont pour fonction l’exécution par équivalent du contrat. Il reste que ces textes
ne sont pas précis sur le principe qu’ils posent.

318. La doctrine s’est posée la question de savoir sur quoi s’applique


la prévisibilité : est-ce la quotité, c’est-à-dire le montant du dommage, qui doit
être prévisible, ou seulement sa cause, autrement dit sa nature ?519 C’est à la

518 Civ. 1re, 14 oct. 2010, no 09-69.928, P I, n°197 ; D. 2011. 472, obs. S. AMRANI MEKKI et
B. FAUVARQUE-COSSON ; RTD civ. 2010. 781, obs. B. FAGES
519 F. TERRE, PH. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil. Les obligations, 11e éd., Paris, Dalloz,

2013, n°564
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
159
jurisprudence qu’était revenue de répondre à cette question. La Cour de
cassation rappelle ainsi de manière constante que l’article 1150 du code civil
ancien « ne fait aucune allusion à la prévision de la cause du dommage » et que
ce texte ne vise non plus à « mettre à la charge du débiteur de bonne foi des
dommages et intérêts dont la quotité dépasserait ses prévisions »520. Le
dommage est dit prévisible lorsqu’il constitue « une suite immédiate et directe
de l’inexécution du contrat »521.

319. En effet, l’exécution par équivalent doit s’arrimer aux prévisions


contractuelles. D’où, seules les conséquences prévues ou prévisibles de
l’inexécution pourront être mises à la charge du débiteur, car ce sont les seuls
risques contractuels qu’il avait acceptés. L’équivalent ne peut pas dépasser le
promis. C’est une solution classique, qui constitue une différence majeure
avec la responsabilité civile, où la réparation est intégrale522.

320. En droit international de la vente de marchandises, l’article 74 de


la CVIM, dispose que les « dommages-intérêts ne peuvent être supérieurs à la
perte subie et au gain manqué que la partie en défaut avait prévue ou aurait dû
prévoir au moment de la conclusion du contrat, en considérant les faits dont elle
avait connaissance ou aurait dû avoir connaissance, comme étant des
conséquences possibles de la contravention au contrat ». Abondant dans le
même sens, l’article 7.4.4 des principes UNIDROIT dispose que, « le débiteur
est tenu du seul préjudice qu’il a prévu, ou qu’il aurait pu raisonnablement
prévoir, au moment de la conclusion du contrat comme une conséquence
probable de l’inexécution ». Le principe de prévisibilité est un corollaire à
l’autonomie de la volonté. En fait, lors de l’inexécution du contrat, tous les
bénéfices dont le créancier se trouve privé ne relèvent pas du domaine
contractuel, et en vertu du principe de l’autonomie de la volonté, le débiteur
ne doit pas être accablé par la réparation d’un préjudice qu’il n’avait pu

520 Com., 27 juil. 1924, S., 1925, 1, p. 321, note R. LESCOT


521 Cass. Com, 11 mars 2020, n°18-22.472, inédit.
522 D. HOUTCIEF, « Responsabilité contractuelle : le dommage n'est indemnisé que pour autant

qu'il est prévisible », Gaz. Pal. 15 sept. 2020, n° 31, p.29

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
160
imaginer lors de la conclusion du contrat et pour lequel il n’a pas pu
s’assurer523.

B/ La limitation du dommage

321. Origine et débats. Le devoir de minimiser le dommage (Mitigation


of damage) est née de la jurisprudence anglaise, à une époque où les
tribunaux renforçaient progressivement leur contrôle sur l’allocation de
dommages-intérêts dus en cas d’inexécution contractuelle524. Il a été très vite
critiqué par une partie de la doctrine. Ses détracteurs soutiennent d’une part
qu’une telle exigence diminue la protection des attentes légitimes des
contractants525. D’autre part, elle contredirait la protection de l’intérêt
positif526. Car, il serait contradictoire de vouloir mettre le créancier dans la
situation qui aurait été la sienne si le contrat avait été exécuté en lui exigeant
en même temps de minimiser son dommage527. Toutefois, si une
incompatibilité peut exister entre le devoir de limiter le dommage et l’essence
du contrat en tant qu’acte de prévision fixant d’avance son contenu
obligationnel528, il n’en résulte pas ipso facto une incompatibilité entre la
minimisation du damage et la protection de l’intérêt positif que poursuit
l’exécution forcée par équivalent.

322. Fondement en droit OHADA et français. En France, si dès


1804, Domat estimait déjà que l’on devait prendre en considération le fait que
la victime a eu ou n’a pas eu la possibilité de minimiser la perte qui résultait

523 Commentaire officiel de l’article 7.4.4 des principes UNIDROIT, 1994.


524 A. MICHAUD, « Mitigation of damage in the context of remedies for breach of contract »,
R.G.D., 1984, p295 et s.
525 M.G. BRIDGE, « Mitigation of damages in contract and the meaning of avoidable loss »,

(1989) 105 LQR 398, p.405


526 P.S. ATIYAH, An introductionto the law of contract, 5 ème éd., Oxford, Clarendon press,

1995, p.458
527 Ibid.
528 Y.-M. LAITHIER, Etude comparative des sanctions à l’inexécution du contrat. Op. cit.,

p.437
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
161
du dommage qu’elle a subi529, à ce jour, le devoir de minimiser le dommage
n’a pas expressément été consacré dans le code civil français. La
jurisprudence semble même le rejeter. En effet, dans un arrêt rendu en 2003,
la 2ème chambre civile de la cour de cassation affirme que, la victime de
l’inexécution contractuelle « n’est pas tenue de limiter son préjudice dans
l’intérêt du responsable »530. En droit commun de l’OHADA, on observe le
même silence dans le code civil ancien et les codes sénégalais et malien.
Toutefois, cette absence de consécration expresse ne prive pas le devoir de
minimiser le dommage de tout fondement.

323. En droit commun. On peut retrouver dans les principes du droit


commun des contrats admis dans les deux systèmes, les fondements pouvant
permettre de sanctionner un créancier qui a manqué de limiter le dommage
auquel le débiteur l’a exposé. Le devoir de limiter le dommage est dictée par le
bon sens531. Il est une règle de conduite imposée à la victime et fait partie de
« l’éthique contractuelle ». Il peut trouver sa justification dans le devoir de
loyauté auquel les contractants sont tenus532. En effet, la philosophie moderne
du droit des contrats fait peser sur les parties au contrat un devoir général de
loyauté résultant de l’exigence de bonne foi. Les contractants sont ainsi tenus
d’exécuter fidèlement leurs engagements contractuels. Pour ce faire, le devoir
de coopération exige de faciliter au partenaire l’exécution de ses obligations533.
Dès lors l’obligation de minimiser le dommage trouve parfaitement sa place en
droit commun des contrats dans l’espace OHADA et en France.

324. En droit spécial. Inspiré de l’article 77 de la CVIM, l’AUDCG


consacre l’obligation pour la victime d’une inexécution de minimiser son
dommage. Aux termes de l’article 293 de ce texte, « la partie qui invoque une

529 S. REIFEGERSTE, Pour une obligation de minimiser le dommage, Presses universitaires


d’Aix-Marseille, 2002, p.85
530 Cass.civ. 2ème, 23 juin. 2003, JCP 2004.I.19, obs. G. VINEY

531 S. REIFEGERSTE, op. cit., p.109


532 Y.-M. LAITHIER, op. cit., p.446
533 Y. PICOD, « L’obligation de coopération dans l’exécution du contrat », J.C.P, 1998. I. 3318 ;

D. MAZEAUD, « Loyauté, solidarité, fraternité : la nouvelle devise contractuelle ? », in Mélanges


F. TERRE, 1999, p. 603
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
162
inexécution des obligations du contrat doit prendre toutes mesures
raisonnables, eu égard aux circonstances, pour limiter sa perte, ou préserver
son gain ». Ainsi, dans un contrat de vente, le vendeur doit revendre sa
marchandise à un tiers si l’acheteur ne prend pas livraison et l’acheteur est
autorisé à se procurer ailleurs la marchandise non livrée à un prix
raisonnable534. En droit spécial français, le devoir de minimiser le dommage
est connu en matière d’assurances maritimes. L’article L.172-23 du code des
assurances dispose que « l’assuré doit contribuer au sauvetage des objets
assurés et prendre toutes les mesures conservatoires de ses droits contre les
tiers responsables. Il est responsable envers l’assureur du dommage causé par
l’inexécution de cette obligation résultant de sa faute ou de sa négligence ». Le
devoir de limitation du dommage traduit la collaboration entre les
contractants.

325. En effet, réfutant toute idée d’individualisme, les solidaristes


soutiennent que, dans une relation contractuelle, chacune des parties œuvre
à la satisfaction des attentes légitimes de l’autre. De sorte que, dans la phase
d’exécution du contrat, la responsabilité des parties ne doit pas être perçue
sous le prisme d’une logique d’accusation et de défense535 qui caractérise les
solitudes contractuelles. Elle doit plutôt conduire chaque contractant à
collaborer à la réalisation de l’objet du contrat536. Ils affirment
ainsi, l’existence d’un lien de solidarité entre les cocontractants, en ce sens
que les parties qui s’engagent acceptent d’œuvrer à la réalisation des attentes
légitimes de chacune d’entre elles537. Cette fraternité contractuelle cadre bien
avec la culture africaine où la solidarité gouverne les rapports sociaux.

326. Les effets de la limitation du dommage. L’exécution par le


créancier de son devoir de limiter le dommage suppose pour lui d’engager des

534 N. E. C. BADJI, « La vente commerciale en droit OHADA : une originalité au profit du


développement économique », RDAA, septembre 2017, p.11
535 G. TABI TABI, « ajustement nécessaire du volontarisme contractuel : du volontarisme au

solidarisme ? », (2014) 44 R.D.U.S, p.78


536 Ibid.

537 R. DEMOGUE, Traité des obligations en général, t. 6, Paris, Rousseau, 1931, n° 3, p. 9.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
163
dépenses supplémentaires qui dépassent son obligation initiale. Les frais
exposés à cet effet sont entièrement à la charge du débiteur à qui l’inexécution
est imputable538. Le créancier doit pour à cet effet se rassurer que les
démarches entreprises pour la limitation de son dommage soient
raisonnables. Le débiteur ne sera pas tenu de rembourser le créancier s’il
apporte la preuve que les dépenses effectuées par ce dernier étaient excessives
au regard de l’ampleur du préjudice prévisible539.

538 Y.-M. LAITHIER, op. cit., p.459.


539 G.H. TREITEL, The law of contract, 11ème éd., Sweet &Maxwell, London, 2003, p.978
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
164
Conclusion du chapitre 2

327. Au-delà des controverses qui l’entourent, l’exécution forcée par


équivalent trouve sa place en droit positif OHADA et français. En effet, bien
que la fonction indemnitaire des dommages-intérêts contractuels soit la plus
privilégiée, les droits positifs français et de l’OHADA n’ont pas cédé à la thèse
radicale qui exclue leur fonction compensatoire. Lorsqu’il n’a pas obtenu
l’exécution volontaire de son débiteur et que l’exécution forcée en nature est
impossible, le créancier peut obtenir du juge l’exécution par équivalent de son
obligation. Ce remède a l’avantage de transcender les obstacles à l’exécution
forcée et de s’adapter à toutes sortes d’obligations. Il assure l’efficacité du
contrat et témoigne de la volonté d’éluder autant que possible la résolution du
contrat. A ce sujet, on assiste à une convergence de solutions en France et
dans l’OHADA. Il ne pouvait d’ailleurs pas en être autrement, car à ce niveau
le droit de l’espace OHADA n’a pas beaucoup évolué et la réforme du code civil
en France, n’a presque pas abordé l’exécution du contrat dans ce sens.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
165
Conclusion du titre 2

328. Lorsque le créancier n’a pas pu obtenir pacifiquement l’exécution


du contrat, la seule alternative qui lui reste est le recours à la force publique
au moyen de l’exécution forcée du contrat. Cette exécution forcée peut
s’obtenir soit en nature soit par équivalent. L’exécution forcée en nature ne
jouit plus de la même force qu’on lui connaissait jadis. Cet affaiblissement est
la conséquence directe du recul du principe de la farce obligatoire du contrat
face aux considérations économiques et la protection de la liberté individuelle
des contractants. Toutefois, elle demeure une solution privilégiée dans les
deux systèmes juridiques.

329. S’agissant de l’exécution forcée par équivalent, les deux systèmes


juridiques ne la consacrent pas légalement comme un remède à part entière,
ils l’enfuient dans la notion de « dommages intérêts » où elle se confond avec
la responsabilité contractuelle. Mais, quoiqu’enfuit dans le terme générique de
« dommages-intérêts », l’exécution forcée en nature se démarque de la
réparation et obéit à un régime juridique propre. Elle constitue une alternative
à l’impossibilité d’obtenir l’exécution forcée en nature et obéit à un régime
juridique distinct de celui de la responsabilité contractuelle.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
166
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE

330. Le principe pacta sunt servanda est un pilier fondamental du


droit des contrats dans l’espace OHADA et en France. Sa vigueur se manifeste
dans le traitement de l’inexécution contractuelle. En effet, malgré le
manquement du débiteur à ses obligations, les deux systèmes juridiques
militent pour un maintien du contrat coute que vaille. On assiste alors à une
dédramatisation de l’inexécution contractuelle. La réaction à l’inexécution du
débiteur n’a pas une connotation punitive. Les droits de l’OHADA et français
sont ainsi parcourus par un mouvement protectionniste du contrat. En cas
d’inexécution du débiteur, le créancier est encouragé à recourir aux
mécanismes salvateurs de l’opération contractuelle.

331. C’est cette idée qui transparait à l’analyse des remèdes à


l’inexécution du contrat préconisés lorsque le débiteur est in bonis. On observe
ainsi une primauté des moyens d’incitation à une exécution volontaire du
contrat sur ceux impliquant l’usage de la force. D’abord, il faut convaincre le
débiteur que le contrat conserve un intérêt pour lui, en lui donnant plus de
temps que prévu. Si cette magnanimité du créancier n’est pas parvenue à
persuader le débiteur d’honorer ses engagements, le créancier dispose des
armes de dissuasion dont il peut recourir. Par ailleurs, lorsque ces moyens
pacifiques n’ont donné aucun résultat satisfaisant, le créancier doit recourir
à l’usage de la force publique et imposer à son débiteur une exécution forcée.

332. Deux voies d’exécution forcée sont ouvertes au créancier :


l’exécution forcée en nature et l’exécution forcée par équivalent. Or, cette
notion d’exécution par équivalent n’est pas clairement consacrée dans les
deux systèmes. Toutefois, l’étude de la fonction des dommages-intérêts
contractuels permet d’en déceler l’existence en France et en droit de

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
167
l’OHADA.540 L’exécution forcée par équivalent coexiste avec l’exécution forcée
en nature en tant que remède à l’inexécution du contrat et obéit à un régime
juridique où la trilogie « faute-dommage-lien de causalité » est inopérante.

333. Concernant l’exécution forcée en nature, sa consécration en tant


que principe a été l’une des évolutions notables de la réforme du code civil
français. En effet, avec cette réforme, l’exécution forcée en nature est reconnue
en France comme un droit appartenant à tout créancier sans distinction. En
droit commun de l’OHADA, bien que la lettre de l’article 1142 du code civil
ancien n’y invite expressément pas, la jurisprudence541 offre depuis longtemps
de nombreux exemples d’application de ce droit à l’exécution en nature,
consacré par la Cour de cassation. Sur la base de ces évolutions
jurisprudentielles qui sont transposable en droit de l’OHADA, le principe de
l’exécution forcée en nature y est admis. En érigeant ainsi l'exécution forcée
en principe, les doits OHADA et français rejettent la solution admise en
common law, consistant à ne l'accorder que lorsque les dommages et intérêts
ne constituent pas une solution adéquate.

334. Toutefois, le droit français apporte à ce remède une nouvelle


limite : « le cout disproportionné ». La consécration d'une telle limite avait pu
surprendre et fait l’objet de nombreuses critiques. Car, elle semble rompre
avec une jurisprudence bien établie de la Cour de cassation, et notamment de
la troisième chambre civile en matière de construction542. Pourtant, l’examen
du droit positif français montre que « le cout disproportionné » était déjà connu
du législateur en tant que limite à l’exécution en nature. L'article L. 211-9 du
code de la consommation relatif à la garantie de conformité disposait déjà que,
le vendeur n'est pas lié par le choix de l'acheteur entre les deux modalités de

540 S. BEBOHI EBONGO, « Les remèdes à l'inexécution », op. cit., p.368


541 Civ. 1re, 16 janv. 2007, n°06-13.983, obs. M. MEKKI; D. 2007, RTD civ. 2007. 342, obs. J.
MESTRE et B. FAGES.
542 Civ. 3e, 16 juin 2015, n° 14-14.612 , inédit, JCP 2015. 1261, n° 9, obs. P. Grosser. Civ.

3e, 11 mai 2005, n° 03-21.136 , Bull. civ. III, n° 103 ; JCP 2005. II. 10152, note S.
Bernheim-Desvaux ; 15 févr. 1978, n° 76-13.532, Bull. civ. III, n° 85 ; 18 juin 1975, n° 74-
10.297, Bull. civ. III, n° 208 ;. Civ. 3e, 3 avr. 1996, n° 94-14.485 , Bull. civ. III, n° 91 ; RDI
1996. 427, obs. F. Collart Dutilleul et J. Derruppé
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
168
mise en œuvre de son droit d'exiger la conformité du bien au contrat
(réparation et remplacement) lorsque ce choix entraînerait un coût
manifestement disproportionné par rapport à l'autre modalité.

335. Tous ces moyens de parvenir à l’exécution effective du contrat


supposent que le débiteur soit encore en mesure d’accomplir sa prestation ou
qu’il soit financièrement apte à payer une compensation financière. Or, tel
n’est toujours pas le cas, l’inexécution peut résulter de la faillite du débiteur.
Dès lors, les remèdes classiques examinés ci-dessus deviennent inadaptés, le
débiteur n’étant pas solvable. Cette situation d’insolvabilité exige de recourir
aux mécanismes propres au droit de la faillite, notamment le droit des
entreprises en difficulté, en vue d’assurer la survie des contrats.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
169
Deuxième partie :
LES REMEDES AMENAGES PAR LE DROIT
DES ENTREPRISES EN DIFFICULTE

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
170
336. La cessation des paiements543 met le débiteur dans l’impossibilité
d’exécuter ses engagements contractuels. Dès lors, ses cocontractants
devraient être fondés à rompre toute relation contractuelle avec lui. C’est cette
réaction que prévoyait le droit de la faillite. La procédure qui était mise en
place pour traiter les difficultés du débiteur visait à punir ce dernier544. Tel
n’est plus le cas en droit moderne.

337. En France, le droit de la « faillite » est devenu « droit des


entreprises en difficulté » avec l’adoption des lois du 1er mars 1984 et 25
janvier 1985545. Ces textes n’ont pas opéré un simple changement
terminologique de la discipline, mais un véritable changement de philosophie.
On est passé d’un droit visant à sanctionner le failli que l’on considérait
comme un usurpateur de crédit546, à un droit destiné à prévenir et à traiter
les difficultés du débiteur547, donc à « remédier » à sa situation. Le terme
« remède » objet de la présente étude trouve bien son application dans la
philosophie moderne gouvernant le traitement des difficultés du débiteur.

338. Le droit français des entreprises en difficulté a, depuis 2005,


connu de nombreuses réformes, dont celles de 2008, 2014 et bien sûr tout
récemment en 2021, avec l’ordonnance n° 2021-1193 du 15 septembre
2021548, qui transpose en droit français, la directive (UE) 2019/1023 du 20
juin 2019 dite « restructuration et insolvabilité ». Ces évolutions récentes ont
permis de moderniser ce droit, en améliorant les moyens de prévention, la
préparation du plan et l’efficacité des procédures, avec l’introduction de

543 Situation dans laquelle une entreprise est dans l’impossibilité de faire face à son passif
exigible avec son actif disponible.
544 Ph. PETEL, Procédures collectives, Cours Dalloz, 11 ème éd., 2023, p.2

545 F. MACORIG-VENIER, « Rapport introductif : les sources du droit des entreprises en

difficulté », in Le droit des entreprises en difficulté après 30 ans : Droit précurseur ou


révélateur ? Presse de l’université de Toulouse 1 Capitole, 2017, p.11
546 Ph. PETEL, Procédures collectives, op. cit., p.2

547 D. ROBINE, P. LE CANNU, Droit des entreprises en difficultés, 9 ème éd., D., Paris, 2022,

p.1
548 JO 16 sept. 2021, texte n° 21 ; JCP E 2021, act. 647 ; JCP E 2021, act. 672

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
171
nouveaux mécanismes tels que les classes de créanciers549. Cette
effervescence du droit français des entreprises en difficulté montre que, « tout
comme la médecine des hommes s’améliore et se complexifie, la médecine des
entreprises elle aussi progresse »550.

339. En revanche, le terme « procédures collectives » utilisé en droit de


l’OHADA est un mécanisme qui intervient à la phase de traitement de la
défaillance du débiteur551. Il ne rend pas compte de tout le processus visant à
remédier aux difficultés que ce dernier traverse, car n'intégrant en principe
pas les moyens préventifs. Un auteur africain les définit d’ailleurs comme « des
procédures faisant intervenir la justice lorsque le commerçant n’est plus en
mesure de payer ses dettes »552. Or, en matière de traitement des difficultés
d’exécution des contrats, les règles mises en place par le droit des entreprises
en difficulté n’interviennent pas seulement quand le débiteur ne peut plus
s’exécuter. La spécificité de ce droit en matière de traitement des difficultés
d’exécution du débiteur réside dans sa démarche avant-gardiste. Il met en
place un certain nombre de mécanismes destinés à anticiper l’inexécution
contractuelle du débiteur afin de mieux la surmonter.

340. L’objet du droit moderne des entreprises en difficulté est entre


autres, la protection de l’activité du débiteur laquelle est garante du
désintéressement de ses créanciers. Pour ce faire, une attention particulière
est accordée aux engagements contractuels. Les contrats doivent être
protégés, leur résolution doit être empêchée pour garantir la poursuite de
l’activité du débiteur. Le droit des entreprises en difficulté dispose ainsi des
mécanismes qui lui permettent d’atteindre cet objectif de maintien des
engagements contractuels du débiteur. Certains de ces mécanismes visent à

549 N. BORGA, Th. MASTRULLO, « Actualité du droit des entreprises en difficulté », La semaine
juridique - entreprise et affaires - n° 49 - 8 décembre 2022, p. 5
550 Ph. ROUSSEL GALLE, « Le droit des entreprises en difficulté à l’aune des crises », Rev.

Proc. Coll. n° 2 - mars-avril 2022, p.2


551 D. ROBINE, P. LE CANNU, op. cit., p.2

552 F.M. SAWADOGO, Droit des entreprises en difficulté, Bruylant, Bruxelles, 2002, p.2

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
172
alléger les obligations du débiteur afin de lui permettre de s’exécuter malgré
les difficultés qu’il traverse (Titre 1) alors que d’autres ont pour objet de
redéfinir le sort du contrat inexécuté ou menacé d’inexécution (titre 2).

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
173
Titre 1 :
L’allégement des obligations contractuelles
du débiteur

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
174
341. L’inexécution des contrats d’un débiteur en difficulté peut être
éludée ou surmontée au moyen d’une restructuration de ses obligations. Il
s’agit d’alléger le débiteur du poids de sa dette en vue de lui permettre de
mieux organiser ses ressources et d’honorer ses engagements contractuels.
L’allègement des obligations contractuelles implique ainsi une reconfiguration
du passif du débiteur en vue de le rendre plus facile à apurer. Cette
reconfiguration affecte positivement les contrats, en ce sens que la nature des
obligations peut changer, ou encore les modalités d’exécution du contrat et
l’échéance de cette exécution peuvent être modifiés. Ce qui est de nature à
préserver le lien contractuel, à favoriser l’exécution du contrat en évitant à
tout prix sa résolution. Deux voies permettent d’atteindre cet allègement :
d’une part, la neutralisation des effets traditionnels du contrat inexécuté
(chapitre 1), et d’autre part, l'aménagement de la créance contractuelle
(chapitre 2).

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
175
Chapitre 1 : La neutralisation des effets traditionnels
du contrat inéxécuté

342. En vertu du principe de la force obligatoire, le débiteur est tenu


d’exécuter sa prestation. S’il ne le fait pas, il peut y être contraint par l’autorité
publique, qui veille au respect des engagements contractuels comme à
l’observation de la loi553. Dans le souci d’alléger le débiteur du poids de sa
dette, le droit des entreprises en difficulté évince ou du moins atténue ce
principe de la force obligatoire du contrat en paralysant non seulement le droit
du créancier d’obtenir l’exécution de la créance contractuelle (section 1), mais
aussi celui de rompre le contrat inexécuté (section 2).

Section 1 : La paralysie du droit à l’exécution de la créance


contractuelle

343. Le droit du créancier d’obtenir l’exécution de ses obligations est


paralysé d’une part, par la suspension des poursuites individuelles
(paragraphe 1) qu’impose l’ouverture de la procédure collectives et d’autre
part, par l’interdiction qui est faite au débiteur de payer les créances
antérieures déjà échues (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La suspension des poursuites individuelles

344. L’organisation de l’exécution des engagements contractuels du


débiteur en difficulté exige un traitement collectif de ses créanciers554. Ce
traitement collectif a pour but de protéger les intérêts de tous ces derniers
contre l’action individuelle de l’un d’entre eux, qui compromettrait l’exécution
de plusieurs autres contrats. Pour ce faire, le droit des entreprises en difficulté

553 J-L. AUBERT, E. SAVAUX, J. FLOUR, Droit civil. Les obligations : L’acte juridique, 17ème
éd., Sirey, Paris 2022, p.849.
554 M. JEANTIN, P. LE CORNU, Droit commercial. Entreprises en difficultés, D., 7ème éd.,

Paris 2006, p.116

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
176
interrompt les actions en justice qui sont en cours contre le débiteur et interdit
aux cocontractants d’initier toute autre action visant à obtenir l’exécution de
leurs créances contractuelles. Cette mesure vise à garantir l’égalité de tous les
créanciers en évitant que le paiement soit « le prix de la course »555, c’est-à-dire
que les cocontractants les plus diligents voient leurs contrats exécutés au
détriment des autres créanciers. La suspension des poursuites individuelles
constitue ainsi un moyen d’empêcher le recouvrement forcé de la créance
contractuelle (A). Elle jouit d’un domaine assez étendu, ayant été généralisé
dans les deux systèmes juridiques (B).

A/ Un moyen d’empêcher le recouvrement forcé de la créance


contractuelle

345. Au travers de multiples procédures telles que l’injonction de


payer, de délivrer ou de restituer, les droits de l’OHADA et français
reconnaissent au créancier un droit à l’exécution forcée556 de sa créance
contractuelle. Le droit des entreprises en difficulté opère par le biais de la
suspension des poursuites individuelles, une paralysie de ce droit à
l’exécution forcée de la créance. Grâce à cette mesure, l’entreprise bénéficie
d’un moratoire destiné à soulager sa trésorerie et à faciliter la préparation de
l’exécution de tous ses contrats dans le cadre d’un concordat en droit de
l’OHADA ou d’un plan de sauvegarde ou de redressement en France.

346. L’intérêt de la suspension des poursuites individuelles est


d’empêcher le créancier de poursuivre l’exécution de sa créance. On assiste
ainsi à un sacrifice des droits du créancier au profit du redressement de
l’entreprise. En effet, il est évident qu’aucune entreprise ne peut être redressée

Ph. PETEL, Procédures collectives, Cours Dalloz, 11 ème éd., 2023, p.108, n°184
555

M. SAMB, « Etude sur les difficultés de recouvrement des créances dans l’espace UEMOA :
556

Cas du Benin, Burkina-Faso, Mali et Sénégal », Rev. ERSUMA, n°1, juin 2012, p.279
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
177
sans sacrifice des créanciers557. La suspension des poursuites individuelles
est donc une technique juridique développée par le droit des entreprises en
difficulté au service de la préservation de l’activité de l’entreprise et par
ricochet des contrats sans lesquels la poursuite de cette activité ne peut être
envisagée.

347. Ce mécanisme propre au droit des entreprises en difficulté permet


de sauvegarder les relations contractuelles du débiteur tout en accordant à ce
dernier un répit558 pour lui permettre de mieux organiser sa solvabilité. En
effet, la suspension ou l’interdiction des poursuites individuelles opère en
faveur du débiteur, une suspension de l’exécution de ses obligations échues
et met le cocontractant dans l’impossibilité d’en poursuivre l’exécution
forcée559. La mesure accorde ainsi au débiteur plus de temps pour exécuter
en reportant l’exigibilité de la créance contractuelle560. En droit de l’OHADA
comme en France, l’efficacité de cette mesure réside dans le fait qu’elle
bénéficie d’un domaine assez étendu, au point où elle est devenue une règle
classique caractéristique des procédures collectives561.

B/ Une mesure généralisée dans les deux systèmes juridiques

348. Les procédures concernées. D’après le professeur SAWADOGO,


la suspension des poursuites est le but principalement visé par le débiteur qui
sollicite une renégociation de ses contrats sous protection judiciaire562. Ainsi,
selon une certaine doctrine africaine, le débiteur africain préférerait les

557 C. SAINT-ALARY-HOUIN, droit des entreprises en difficulté, Montchrestien, 4ème éd.,


Paris 2001, p.45.
558 A. TOH, La prévention des difficultés des entreprises : étude comparée de droit français et

droit OHADA, Th., Université de Bordeaux, 2015, p. 259, n°525


559 B. MAFEUGUEMDJO, Étude comparée en droit OHADA et français de la protection du

créancier chirographaire d'une société en difficulté, Th., Nantes 2019, p.116


560 D. LEGEAIS, Droit commercial et des affaires, op. cit., p.633

561 F.M. SAWADOGO, op. cit., p.206, n°209.

562 F. M. SAWADOGO, in OHADA. Traité et Actes uniformes commentés et annotés, note sous

Art.8, de l’AUPCAP, Juriscope 2002, p.1156

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
178
procédures où la suspension des poursuites est prévue563. Aussi observe-t-on
une généralisation de la mesure de suspension ou d’interdiction des
poursuites individuelles dans les deux systèmes juridiques. La suspension des
poursuites individuelles s’applique à toutes les procédures564 qu’elles soient
préventives ou curatives. L’application de la règle aux procédures préventives
permet d’anticiper l’inexécution du contrat. En effet, le débiteur n’étant pas
encore en cessation de paiement, il peut toujours honorer ses engagements
contractuels. Mais, compte tenu des difficultés auxquelles il fait face, une
exécution peut ruiner ses ressources et entrainer sa faillite. D’où, l’ouverture
d’une procédure préventive lui permet de renégocier par anticipation les
conditions d’exécution de ses obligations, mais surtout de bénéficier d’une
suspension momentanée de l’exécution.

349. En droit de l’OHADA565 comme en France566, le débiteur peut


pendant la phase de conciliation, bénéficier de l’interdiction ou de la
suspension des poursuites individuelles alors qu’il n’est pas encore parvenu
à un accord avec ses principaux contractants567. Toutefois, cette suspension
ne concerne que les actions initiées par un créancier appelé à la conciliation.
En France, elle ne vise que les actions en justice et les poursuites individuelles
ayant pour objet d'obtenir le paiement des créances incluses dans l'accord
amiable568. C’est en principe une question de logique, il s’agit à juste titre
d’éviter qu’un partenaire contractuel qui a accepté de renégocier avec le
débiteur perturbe le déroulement de ces renégociations en engageant une
procédure d’exécution contre ce dernier. Celui-ci jouit donc d’une sorte
d’immunité d’exécution des contrats en cours de renégociation, de sorte que,
le créancier dont les obligations arrivent à échéance pendant cette période

563 ISSA-SAYEGH J., POUGOUE P-G. et SAWADOGO F. M. (coord.), OHADA, Traité et actes
uniformes commentés et annotés, éd. 2015, 2016, Juriscope, p. 1114.
564 D. ROBINE, P. LE CANNU, Droit des entreprises en difficultés, op. cit., p.435, n°622

565 AUPC, art. 5-7

566 C. com., art. L. 611-10-1

567 J. M. KLA, « La procédure de conciliation : une solution de choix contre les difficultés des

entreprises dues à la COVID-19 », ohadata, D-20-29, p.6


568 C. com., art. L. 611-10-1

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
179
devra attendre la fin de la procédure de conciliation pour en réclamer
l’exécution. La suspension ou l’interdiction des poursuites peut ensuite être
prononcée pendant l’exécution de l’accord de conciliation homologué569 et à
l’ouverture du règlement préventif570.

350. Les actions suspendues. En France, la règle ne concernait à


l’origine que les actions visant le paiement d’une somme d’argent. Elle a par
la suite été progressivement étendue, d’abord aux actions en résolution des
contrats pour non-paiement de somme d'argent571. Ensuite, la suspension a
été élargie par la loi de sauvegarde en restreignant le champ du privilège des
créanciers postérieurs et de leur droit de poursuite individuel aux seules
créances utiles572. La suspension jouit désormais d’un domaine élargi. Sont
interdites, toutes les actions tendant à la condamnation du débiteur au
paiement d’une somme d’argent et celles tendant à la résolution d’un contrat
pour défaut de paiement du prix573. Peu importe l’objet de l’action, dès lors
qu’elle doit à terme entrainer le versement d’une somme d’argent, elle tombe
sous le coup de l’interdiction574.

351. S’agissant des actions en résolution du contrat, l’évolution du


droit de l’OHADA est notable. En effet, dans l’ancien AUPC, l’alinéa 3 de
l’article 75 excluait ces actions du champ de la suspension des poursuites. Le
cocontractant pouvait donc poursuivre la résolution du contrat dès lors que
l’inexécution du débiteur était avérée, nonobstant son admission au
redressement judicaire. Cette solution était défavorable à la poursuite des
contrats, aussi la réforme de 2015 l’a-t-elle supprimée, assurant ainsi au

569 AUPC, Art. 5-12


570 AUPC, Art. 9
571 La loi du 25 janvier 1985

572 J. VALLANSAN, « Sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires. – situation des

créanciers. – arrêt des poursuites individuelles », op. cit., n°4


573 D. ROBINE, P. LE CANNU, op. cit., p.436, n°624

574 P.-M. LE CORRE, E. LE CORRE-BROLY, Droit du commerce et des affaires. Droit des

entreprises en difficulté, 2ème éd., Sirey, Paris, 2006, p.333


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
180
contrat une meilleure protection contre toute rupture nonobstant
l’inexécution du débiteur.

352. De plus, le cocontractant ne peut mettre en œuvre aucune voie


d’exécution jusqu’à l’adoption du plan en France ou du concordat en droit de
l’OHADA. Dès lors, malgré l’inexécution du débiteur, le cocontractant ne peut
ni poursuivre l’exécution forcée de son obligation, surtout si celle-ci consiste
au paiement d’une somme d’argent, ni demander la résolution judiciaire du
contrat575. Le contrat se trouve ainsi maintenu de façon autoritaire pour les
besoins de sauvegarde de l’activité du débiteur.

353. En revanche, les actions ayant un autre fondement que le


paiement d’une somme d’argent ne sont pas concernées par la mesure de
suspension ou d’interdiction de poursuites individuelles. La question se pose
alors de savoir si les cocontractants peuvent poursuivre l’exécution en nature
de leurs obligations de donner. La réponse devrait être négative, dans la
mesure où une telle exécution pourra priver le débiteur d’un bien nécessaire
à sa sauvegarde, alors que l’ouverture de la procédure opère en principe un
gel du patrimoine du débiteur. Par contre, l’action tendant à l’exécution en
nature d’une obligation de faire devrait être admise. Ces obligations ne
tombent sous le coup de la suspension que si et seulement si leur exécution
en nature est impossible576 ou pourra entraver le déroulement de la procédure.
La cour de cassation française avait ainsi condamné un bailleur en liquidation
judiciaire à effectuer les travaux qui lui incombaient en vue de garantir au
locataire la bonne jouissance du bien loué577.

354. En plus, les cocontractants peuvent poursuivre ou initier les


actions tendant à la constatation de l’acquissions d’une clause résolutoire qui
a produit ses effets avant le jugement d’ouverture578. De même, les poursuites

575 B. MAFEUGUEMDJO, Étude comparée en droit OHADA et français de la protection du


créancier chirographaire d'une société en difficulté, op. cit., p.238
576 Cass.com., 9 juillet 1996, RTD com. 1997, 684.

577 Com. 29 avr. 2002, n°99-16.602, Bull. civ. IV n°75 D. 2002.

578 Cass. com. 17 mai 1994, n°91-21.609 : JCP E 1994. I. 394, §4, obs. Ph. PETEL

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
181
tendant à la reconnaissance d’un droit ou d’une créance contestée ne sont pas
concernées par la règle. Ces poursuites ne pourront aboutir qu’à la
reconnaissance des droits des créanciers. Enfin, la règles de suspension des
poursuites ne s’applique pas aux actions cambiaires dirigées contre les
signataires d'effets de commerce autres que le bénéficiaire de la suspension
des poursuites individuelles579.

355. Les personnes et les créances concernées. Dans les deux


systèmes juridiques, la règle de la suspension des poursuites individuelles
s’applique à tous les créanciers antérieurs, que leurs créances soient garanties
ou pas580. L’ouverture de la procédure collective entraine ainsi la suspension
ou l’interdiction de toute poursuite initiée par tout créancier à l’exception de
ceux dont la créance est payable à l’échéance581. En France, la procédure dite
de suspension provisoire des poursuites instituée par la loi n° 67-563 du 13
juillet 1967582 était sélective, et ne concernait que les entreprises qui
connaissaient des difficultés sérieuses, mais qui n’étaient pas encore en
cessation des paiements583. Pour bénéficier de la mesure de suspension des
poursuites, l’entreprise devait remplir trois conditions.

356. D’abord, elle devait connaitre une situation financière difficile,


mais non irrémédiablement compromise. Ensuite, l’entreprise devait avoir une
importance particulière pour l’économie nationale, de sorte que sa disparition
pouvait troubler l’ordre public économique national ou régional. Enfin, cette
mesure de suspension des poursuites ne devait pas porter atteinte aux
intérêts des créanciers. La loi du 25 janvier 1985584 a gardé ce principe en
changeant son appellation. Il ne s’agissait plus de suspension des poursuites,

579 Arrêt n° 061/2013, Pourvoi n° 097/2010/PC du 18-10-2010 : Société Générale de Banque


en Côte d'Ivoire dite SGBCI c/ La Compagnie Africaine de Transit dite CATRANS, Ohadata J-
15-62
580 580 Ph. PETEL, Procédures collectives, op. cit., p.108

581 C.com, Art. L.622-17

582L'article 35, alinéa 1er

583 F.M. SAWADOGO, OHADA Droit des entreprises en difficulté, op. cit., p.9, n°16.

584 L’article 47

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
182
mais d’arrêt des poursuites individuelles585. Mieux encore, la seule condition
exigée désormais pour l’application de la règle est l’antériorité de la créance.
Tous les cocontractants antérieurs au jugement d’ouverture voient l’exécution
de leurs obligations échues paralysée dès l’ouverture de la procédure
collective.

357. En droit de l’OHADA, dans l’ancien AUPC, la suspension ou


l’interdiction des poursuites ne concernait que les créances et les contrats
expressément désignés par le débiteur dans son projet de concordat
préventif586. C’est ce que la CCJA rappelle dans un arrêt rendu le 02 avril
2015587. Dans cette espèce, les hauts magistrats africains ont censuré un arrêt
de la cour d’appel d’Abidjan dans lequel, cette cour avait décidé que
« nonobstant la non insertion de la créance de la SGBCI dans la requête, la
suspension des poursuites lui est opposable et qu’elle ne peut valablement
inscrire sa garantie après la publication de l’ordonnance ». Les hauts
magistrats africains sous le visa de l’ancien article 9 de l’AUPC censurent cette
décision des juges d’appel aux motifs que la suspension des poursuites
individuelles ne concerne que le recouvrement des créances expressément
visées par le débiteur dans sa requête, seule l’homologation du concordat
préventif rend celle-ci obligatoire pour tous les créanciers antérieurs à la
décision de règlement préventif.

358. Ainsi, sous l’égide de l’ancien texte, le débiteur devait donc faire
preuve de vigilance lors de l’élaboration de son projet de concordat préventif,
en veillant à préciser les créances et les contrats dont la renégociation est
souhaitée. Cette mesure qui était favorable aux créanciers pouvait paralyser
le redressement du débiteur en ce que tous les cocontractants non désignés

585 J. VALLANSAN, « Sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires. – situation des


créanciers. – arrêt des poursuites individuelles », JurisClasseur Commercial, Fasc. 2355 du 15
Octobre 2021, n°2
586 AUPC, art. 9 Ancien

587 Arrêt n° 014/2015, Pourvoi n° 070/2011/PC du 23/08/2011, Affaire : Société Générale

de Banques en Côte d'Ivoire (SGBCI) c/ Société Civile Immobilière Rue des Pêcheurs, Ohadata
J-16-14

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
183
dans le projet de concordat conservaient leur droit à l’exécution de leurs
créances. Pour y remédier, la réforme de l’AUPC intervenue en 2015 a
généralisé la mesure de suspension à tous les cocontractants et créanciers
antérieurs au jugement d’ouverture588. Le nouvel article 9 alinéa 1 de l’AUPC
n’oblige plus le débiteur à indiquer dans sa requête d’ouverture du règlement
préventif les créances pour lesquelles il demande la suspension des poursuites
individuelles589.

Paragraphe 2 : L’interdiction de payer les créances


antérieures

359. A côté de la suspension des poursuites individuelles, l’ouverture


d’une procédure collective interdit au débiteur de payer les créances
antérieures échues. Il convient d’examiner l’intérêt de cette mesure (A), avant
d’en exposer le régime juridique (B).

A/ L’intérêt de la mesure d’interdiction de paiement des


créances antérieures

360. Un obstacle au recouvrement amiable de la créance. La mesure


d’interdiction de paiement complète celle de la suspension des poursuites
individuelles en évitant que le créancier, qui ne peut obtenir du juge le
paiement de sa créance, se tourne vers le débiteur pour obtenir un paiement
amiable. Cette mesure fait obstacle au recouvrement amiable des créances
antérieures échues.

361. En effet, le débiteur qui fait l’objet d’une procédure collective peut
être tenté de vouloir désintéresser volontairement certains créanciers au

588 M. NGOM, « La situation du propriétaire dans le droit OHADA des procédures collectives
d’apurement du passif », R.S.D.A 2011, p. 34 ; ohadata D-12-54, p.10
589 CA com. Abidjan, 1re ch., 27 févr. 2020, n° 87/2020, note R. AKONO ADAM, in l’essentiel

droits africains des affaires, n°10 Novembre 2020, p.3

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
184
détriment d’autres. Un tel paiement est contraire à la discipline qu’impose
l’ouverture d’une procédure collective590 et pourrait compromettre le
redressement de l’entreprise voire même l’apurement de son passif. Aussi, le
droit des entreprises en difficulté applicable dans l’espace OHADA et en
France pose-t-il à côté de la suspension des poursuites individuelles, le
principe de l’interdiction pour le débiteur de payer les créances antérieures
échues. Le créancier voit ainsi son droit d’obtenir le paiement de sa créance
totalement paralysé. Non seulement il ne peut pas saisir le juge pour en
obtenir l’exécution forcée, mais aussi, les deux législateurs intiment l’ordre au
débiteur de ne procéder à aucun paiement volontaire. Le créancier ne peut
donc obtenir le paiement ni par le juge, ni en dehors du juge.

362. Une sauvegarde des intérêts du débiteur. L’interdiction des


paiements vise à préserver les liquidités et biens de l’entreprise qui peuvent
être nécessaires à son redressement591. La règle a aussi le mérite de faire
respecter le principe de l’égalité entre les créanciers. Elle permet la
préservation des engagements contractuels du débiteur dans la mesure où,
comme l’interdiction des poursuites individuelles, elle opère une suspension
de l’exécution du contrat en faveur de ce dernier pendant la recherche d’une
solution de redressement ou d’apurement du passif. Celui-ci dispose alors
d’un temps supplémentaire pour organiser son exécution. En vertu de la
polysémie du terme « paiement » en droit, l’interdiction des paiements
concerne non seulement le versement d’une somme d’argent, mais aussi
l’exécution de toute autre obligation n’impliquant pas le paiement d’une
somme d’argent592. La bonne ou la mauvaise foi de l’accipiens est
inopérante593.

590 D. ROBINE, P. LE CANNU, op. cit. p.412


591 D. LEGEAIS, Droit commercial et des affaires, op. cit., p.650
592 F.M. SAWADOGO, OHADA droit des entreprises en difficulté, op. cit., p.230 ; D. ROBINE,

P. LE CANNU, op. cit. p.412


593 D. ROBINE, P. LE CANNU, op. cit. p.412

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
185
B/ Le régime juridique de la mesure d’interdiction de
paiement des créances antérieures

363. Le régime de l’interdiction n’est pas le même dans les deux


systèmes juridiques. Alors qu’en droit français, le paiement des créances
antérieures est clairement interdit, en droit de l’OHADA, l’AUPC ne semble pas
adopter la même solution en optant plutôt pour l’inopposabilité.

364. En France, le jugement d’ouverture emporte de plein droit


interdiction pour le débiteur de payer toute créance née avant son rendu594.
Cette règle vaut aussi bien pour la procédure de sauvegarde595 que pour le
redressement judiciaire596 et la liquidation judiciaire597. Cette interdiction
s’applique au débiteur lui-même et au mandataire judiciaire. Elle concerne
toutes les créances ayant leur origine antérieurement au jugement
d’ouverture598 et s’étend même aux créances postérieures non privilégiées599.

365. En droit bancaire, la question de l’interdiction de paiement de


créances antérieures s’est posée récemment devant la cour de cassation
française600 notamment à partir de la technique de contrepassation. En effet,
la contrepassation est une écriture par laquelle le banquier escompteur débite
le compte courant de son client remettant de l'effet de commerce escompté
dont le montant avait été inscrit au crédit de ce compte, à la suite du non-
paiement de cet effet601. Dans son arrêt rendu le 2 mars 2022, la chambre
commerciale de la cour de cassation française devait répondre pour la

594 C. com, art. L.622-7- I, al. 1er


595 C. com, art. L.622-7-I

596 C. com, art. L.631-14-I

597 C. com., art. L.641-3

598 Ph. PETEL, Procédures collectives, op. cit., p.97

599 D. ROBINE, P. LE CANNU, Droit des entreprises en difficultés, op. cit., p.411, n°589

600 Cass. com., 2 mars 2022, n° 20-20.181, FS-D : JurisData n° 2022-003080 ; Act. proc. coll.

2022, alerte 87
601 J. ISSA-SAYEGH, « Lettre de change. Paiement », JurisClasseur Droit bancaire et financier,

Fasc. 441, n°66


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
186
première fois602 à la question de savoir si lorsque le paiement initial est
antérieur à l’ouverture de la procédure collective mais que la contrepassation
lui est postérieure, celle-ci viole la règle de l’interdiction du paiement des
créances antérieures. A cette question, la cour répond par la négative après
avoir admis que la contrepassation n’est pas un paiement603, mais la fin d’une
simple tolérance.

366. Pour veiller au respect de l’interdiction, le paiement effectué en


violation de cette règle est nul, d’une nullité absolue604 que le créancier
bénéficiaire ait eu connaissance ou pas de l’ouverture d’une procédure
collective à l’endroit du débiteur. A cette sanction civile s’ajoute une sanction
pénale dans la mesure où le paiement irrégulier s’est effectué pendant la
période d’observation605. Toutefois, cette règle n’est pas absolue, certains
paiements échappent à la règle de l’interdiction606. Le débiteur peut ainsi
procéder au paiement des créances salariales et de toute autre créance ayant
un caractère alimentaire. Il est aussi admis à payer par compensation des
dettes connexes.

367. En revanche, en droit de l’OHADA, l’ouverture d’une procédure


collective ne semble pas interdire de manière absolu le paiement des créances
antérieures. Au contraire, l’article 68 de l’AUPC semble autoriser le débiteur à
payer, mais par les procédés normaux. Il résulte de ce texte que, « sont
inopposables de droit à la masse des créanciers s’ils sont faits pendant la
période suspecte […] tout paiement de dettes échues, fait autrement qu’en
espèces, effet de commerce, virement, prélèvement, carte de paiement ou de
crédit ou compensation légale, judiciaire ou conventionnelle de dettes ayant un

602 Th. BONNEAU, « Contrepassation et interdiction du paiement des créances antérieures »,


Actualité des Procédures Collectives Civiles et Commerciales, n°07, 1 er avril 2022, p.2
603 Th. BONNEAU, Droit bancaire, 14e éd., LGDJ, Paris, 2021, n° 590
604 C. com, art. L.622-7-II ; A. MARTIN-SERF, « Interdiction de paiement des créanciers

antérieurs. Sanction. Nullité absolue. Mise en œuvre », RTD Com. 2001 p.513
605 P.-M. LE CORRE, E. LE CORRE-BROLY, Droit du commerce et des affaires. Droit des

entreprises en difficulté, 2ème éd., Sirey, Paris, 2006, p. 345


606 F. MACORIG-VENIER, « Entreprise en difficulté : situation des créanciers », Répertoire des

sociétés, mars 2013, n°196


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
187
lien de connexité entre elles ou tout autre mode normal de paiement ou
communément admis dans les relations d’affaires du secteur d’activité du
débiteur ». L’interdiction ne concerne que les paiements anormaux des dettes
échues effectués pendant la période suspecte, c’est-à-dire la période allant de
la date de la cessation des paiements à celle de la décision d’ouverture du
redressement judiciaire ou de la liquidation des biens607.

368. Contrairement à son homologue français, le législateur de


l’OHADA admet que le débiteur en cessation des paiements puisse payer ses
créances antérieures à condition que le paiement se fasse en espèce, par la
monnaie électronique, par virement ou par compensation d’une dette
connexe608. L’article 69 du même texte précise que ces paiements ne peuvent
éventuellement être déclarés inopposables à la masse que si la mauvaise foi
du créancier est manifeste et s’il en résulte un préjudice pour la masse. Cette
position du législateur de l’OHADA favorise l’usage arbitraire des ressources
du débiteur qui sont disponibles. Dès l’ouverture de la procédure collective,
celui-ci peut être tenté de désintéresser ou du moins exécuter arbitrairement
certaines de ses obligations contractuelles antérieurement échues au
détriment d’autres. Cette situation est contraire à l’esprit du droit des
entreprises en difficulté qui milite pour un traitement égalitaire de toutes les
créances du débiteur quelle que soit leur nature privilégié ou pas et quel que
soit le moment de leur naissance.

369. Par ailleurs, en n’interdisant pas au débiteur de payer les


créances antérieures, le droit de l’OHADA fragilise l’anticipation de
l’inexécution des créances non échues au jour du jugement d’ouverture de la
procédure. En effet, le paiement des créances échues pourrait vider les
ressources de l’entreprise et aggraver ses difficultés de sorte qu’elle se
retrouvera dans l’impossibilité de payer les autres créances à leurs échéances
respectives. Cette solution défavorise les créanciers de la masse et ne participe

607 AUPC art. 67


608 608 F.M. SAWADOGO, OHADA droit des entreprises en difficulté, op. cit., p.230

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
188
pas à l’effort général de préservation des ressources disponibles en vue du
désintéressement du maximum des créanciers.

Section 2 : La paralysie du droit de rompre le contrat

370. L’ouverture d’une procédure collective ne doit pas être un alibi


pour le cocontractant de rompre le contrat qui le lie au débiteur. Pour garantir
le maintien de toutes les relations contractuelles en cours au jour de
l’ouverture de la procédure collective, les droits de l’OHADA et français
paralysent le droit du créancier à rompre le contrat lorsque son débiteur ne
peut pas s’exécuter. Pour y parvenir, le jugement d’ouverture rend inefficace
toutes clauses entravant la poursuite du contrat (paragraphe 1) et empêche
le créancier d’obtenir du juge la rupture du contrat ou de le faire de manière
unilatérale (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L’inefficacité des clauses entravant la


poursuite du contrat

371. Deux types de clauses sont susceptibles d’entraver la poursuite


du contrat lors de l’ouverture d’une procédure collective et sont ainsi rendues
inefficaces à savoir : la clause résolutoire (A) et la clause d’indivisibilité (B).

A/ L’inefficacité de la clause résolutoire

372. La clause résolutoire est une stipulation contractuelle par


laquelle, les parties déterminent d’avance les évènements susceptibles
d’entrainer la résolution d’un contrat609. Elle revêt un caractère d'automaticité
en ce sens que, lorsque les conditions de son application sont remplies, le

609 C. POPINEAU-DEHAULLON, Les remèdes de justice privée à l’inexécution du contrat :


étude comparative, op.cit., p.66, n°108 ; Y-M. LAITHIER, Etude comparative des sanctions
de l’inexécution du contrat, op.cit., p.228, n°158

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
189
contrat est résilié de plein droit. Elle permet au créancier d’obtenir la
résolution du contrat quel que soit le niveau de gravité de l’inexécution610 du
débiteur et ce, sans un recours préalable au juge. A côté du régime général
de l’inefficacité de la clause résolutoire, on observe un régime dérogatoire de
ladite clause par certains contrats.

373. Le régime général de l’inefficacité de la clause résolutoire. La


clause résolutoire a pour but d’entrainer une résolution automatique du
contrat dès que ses conditions de mise en œuvre sont réunies. En France,
pour être valide, la clause doit être rédigée en des termes claires et précis611.
Elle doit indiquer de manière précise les manquements susceptibles
d’entrainer la résolution du contrat, mais aussi la volonté non équivoque des
parties de mettre fin au contrat en cas de leur survenance. En droit de
OHADA, le législateur n’a pas posé des règles spécifiques déterminant le
régime juridique de la clause résolutoire. Toutefois, la possibilité pour les
parties de prévoir les causes de résolution de leur contrat n’est pas ignorée du
législateur africain. L’AUDCG prévoit la possibilité pour les parties à un
contrat de bail d’y insérer une clause résolutoire612. Donc, même s’il n’en
détermine pas le régime, le législateur OHADA reconnait la validité des clause
résolutoires.

374. Lors de l’ouverture d’une procédure collective, pour échapper au


droit d’option du syndic ou de l’administrateur, le partenaire contractuel du
débiteur en difficulté peut vouloir se prévaloir d’une clause résolutoire insérée
dans le contrat pour se décharger de ses engagements613. Une telle attitude est
contraire au principe de maintien forcé des contrats en cours et peut
compromettre le redressement d’une entreprise encore viable. D’où, quoique

610 C. POPINEAU-DEHAULLON, Les remèdes de justice privée à l’inexécution du contrat.


Etude comparative, op.cit, p.67, n°109
611 C. civ., Art. 1225.

612 AUDCG, Art. 133 al. 4

613 M.H. MONSERIE-BON, Les contrats dans le redressement et la liquidation judiciaires des

entreprises, op.cit., p.38

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
190
valides, ces clauses sont neutralisées par les règles du droit des procédures
collectives.

375. La neutralisation de la clause résolutoire. En France avant


1967, cette faculté de faire jouer une clause résolutoire était admise sur le
fondement des règles de droit commun614. Sous l’égide de la loi de 1967615, la
cour de cassation française, dans un arrêt beaucoup critiqué616 avait opéré un
renversement de principe, rendant inopérante toute clause résolutoire dès lors
que le débiteur fait l’objet d’une procédure collective. C’est cette position que
consacre désormais les articles L.622-13 et L.641-11-1 du code du commerce,
qui disposent qu’aucune résolution ou résiliation du contrat ne peut résulter
du seul fait de l’ouverture d’une procédure de sauvegarde ou de liquidation
judiciaire. Le législateur français assure ainsi une protection maximale au
contrat interdisant qu’il soit remis en cause ni par le jeu d’une clause
résolutoire ni par une disposition légale.

376. En droit OHADA, l’article 107 de l’AUPC abonde dans le même


sens que le législateur français en paralysant toute résolution du contrat
ayant pour seul fondement l’ouverture d’une procédure de redressement
judiciaire ou de liquidation des biens. Mais, il se pose là encore le problème
du domaine d’application. Comme déjà indiqué plus haut, l’article 107 de
l’AUPC ne s’applique qu’au débiteur déjà en cessation de paiements. La
neutralisation des clauses résolutoires n’intervient donc que lorsque le
débiteur est déjà en cessation de paiements. Ceci limite le processus de
sauvegarde de l’entreprise du débiteur, et menace ses rapports contractuels.
En effet, l’éviction du principe de neutralisation des clauses résolutoires de la
phase préventive des difficultés du débiteur laisse à ses cocontractants la

614 G. RIPERT, R. ROBLOT, Traité de droit des affaires, tom 4, 18ème éd., L.G.D.J, Paris, 2018,
p.557, n°679
615 Loi n° 67-563 du 13 juillet 1967 sur le règlement judiciaire, la liquidation des biens, la

faillite personnelle et les banqueroutes


616 Cass. Com., 17 mars 1975 : D. 1975, 553, note DERRIDA ; RTD com. 1975, 638, obs.

Houin et LE GALL ; Rec.gén. des lois 1976, 39, obs VASSEUR.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
191
possibilité de faire jouer ces clauses pendant la conciliation ou la négociation
d’un concordat préventif. Cela est de nature à précipiter la faillite du débiteur
et entrainer par ricochet l’inexécution de ses contrats. Il serait judicieux
d’élargir le champ d’application de cet article 107 aux procédures préventives.

377. La neutralisation des clauses résolutoires est une dérogation des


règles des procédures collectives au droit commun et même à la volonté des
parties qui se justifie par la préservation de l’intérêt supérieur que constitue
la sauvegarde de l’entreprise. En effet, si après l’ouverture d’une procédure
collective, l’on admet le jeu des clauses résolutoires, plusieurs contrats
disparaitraient automatiquement, ce qui serait compromettant pour la survie
du débiteur617 et par ricochet entrainerait l’inexécution de plusieurs contrats.
L’inefficacité des causes de résiliation des contrats en cours est donc
nécessaire pour donner au débiteur ou à son représentant, la possibilité de
demander la continuation du contrat. Toutefois, cette inefficacité est limitée
et ne vaut pas pour tous les contrats.

378. La relativisation de la neutralisation des clauses résolutoires.


Le principe de la neutralisation des clauses résolutoires n’est pas absolu618.
En effet, l’ouverture d’une procédure collective ne rend pas inopérante toutes
les clauses résolutoires insérées dans le contrat. Le principe de neutralisation
des clauses résolutoires posé par les législateurs OHADA et français ne vise
que les clauses résolutoires fondées sur l’ouverture d’une procédure collective
à l’endroit du débiteur. Cela suppose que, la clause dans sa rédaction vise
clairement la cessation des paiements du débiteur ou l’ouverture à son
encontre d’une procédure collective. Aussi, tout dépend du moment où le
cocontractant choisi de se prévaloir de la clause. En effet, si les conditions
prévues par la clause résolutoire se trouvent acquises avant le jugement
d'ouverture, la résolution est acquise à cet instant. Tout dépend donc du

617G. RIPERT, R. ROBLOT, Traité de droit des affaires, op.cit. p.558


618F. KENDERIAN, « Bail commercial et acquisition de la clause résolutoire pour inexécution
d'une obligation antérieure autre que de somme d'argent », Gaz. Pal. 10 janv. 2017, n°02, p.64

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
192
contenu de la clause et des conditions que celle-ci fixe pour la résolution du
contrat.

379. En vertu du caractère d’ordre public du principe de la


continuation de plein droit des contrats en cours, les parties ne peuvent pas
prévoir une clause résolutoire ayant pour élément déclencheur l’ouverture
d’une procédure collective à l’endroit du débiteur. Sont donc inefficaces et
doivent être déclarées nulles, les clauses contractuelles dont l'objet ou l'effet
est d'entraîner la résolution ou résiliation d'un contrat en cas d'ouverture
d'une procédure collective619.

380. La particularité du contrat de bail. Les deux législateurs


précisent que le principe de l’inefficacité des clauses résolutoires qu’ils posent
ne s’applique pas au contrat de travail et au contrat de bail. S’agissant du
contrat de bail, il est en effet un élément fondamental dans la poursuite de
l’activité et la compétitivité de l’entreprise. La question de son sort lors de
l’ouverture d’une procédure collective représente donc un enjeu majeur620. En
effet, les règles applicables en matière de bail combinent plusieurs objectifs. Il
s’agit entre autres de conserver au débiteur les locaux où il exerce son activité
et donc de se situer dans la perspective de la continuation de l’activité. Et si
l’on se place dans une perspective liquidative, il n’est pas inutile non plus de
conserver le bail à usage professionnel qui peut être l’élément d’actif le plus
intéressant à liquider621.

381. L’examen du contrat de bail dans les deux systèmes, en cas


d’ouverture d’une procédure collective conduit à deux observations. D’abord,
les deux législateurs ne s’intéressent qu’à la situation où c’est le preneur qui
est en faillite. On assiste ainsi à une protection du preneur en difficulté,

619 J. VALLANSAN, « Sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires. – Continuation des


contrats en cours. – Généralités », JurisClasseur Commercial, Fasc. 2335, p.14
620 A. DIOH, « Le bail à usage professionnel à l’épreuve de la procédure collective du bailleur

en droit OHADA », Rev.ERSUMA, N° 2 - Mars 2013, p.129


621 P. LE CANNU, Droit commercial, Entreprises en difficultés, Précis Dalloz, 7 e éd., 2007, n°

726

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
193
lorsque la situation du bailleur en difficulté ne semble pas avoir retenu
l’attention des deux législateurs. Or, ce cas mérite qu’on s’y intéresse, car la
faillite du bailleur fait naitre une confrontation entre l’impératif de protection
de son entreprise et celui de la protection du preneur comme le commande la
philosophie du contrat de bail qui est par essence protecteur du preneur ou
de son fonds de commerce622.

382. En effet, en cas de faillite du bailleur, on peut s’interroger si le


locataire peut se prévaloir de l’article 133 de l’AUDCG qui permet à l’une des
parties de demander la résiliation du bail en cas de non-respect par l’autre
partie de ses obligations. Dans l’affirmative, la situation du bailleur en faillite
sera fragilisée vu qu’il perdra des loyers qui auraient pu participer au
redressement de sa situation ou l’apurement de son passif. Par contre, si l’on
répond par la négative, le locataire devra-t-il continuer à occuper un local dont
la jouissance est perturbée parce que le bailleur ne peut plus exécuter son
obligation d’effectuer des réparations importantes ? Il semble urgent pour les
deux législateurs de clarifier le régime applicable à la faillite du bailleur. L’une
des solutions pourrait être de contraindre le locataire à effectuer des
réparations qui incombent en principe au bailleur et compenser les couts par
les loyers.

383. Dans le cas de la faillite du preneur, le sort de la clause résolutoire


dépend de la nature du bail conclu. La jurisprudence française considère que
l’article L. 622-13, alinéa 1, du Code de commerce prévoyant la résiliation de
plein droit du contrat après une mise en demeure restée sans réponse de la
part des organes de la procédure, ne concerne pas le bail commercial, lequel
est régi en ce domaine par l’article L. 622-14 du Code de commerce623. En
effet, dans un bail commercial, la clause résolutoire n’est acquise que si le

622 A. DIOH, op.cit.


623 H. VERCKEN, « La résiliation du bail commercial à l’initiative du bailleur en procédure
collective », Rev. Lamy droit des affaires, n ° 4 8, avril 2010, p.18 ;

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
194
bailleur a obtenu une décision passée en force de chose jugée624 la constatant
avant le jugement d’ouverture de la procédure collective.

384. En revanche, pour les autres baux, le bailleur est dans une
situation privilégiée puisqu'il lui suffit de délivrer un commandement de payer
visant la clause résolutoire, puis, au cas où ce commandement demeure
infructueux, à faire constater la résiliation déjà acquise. C’est dans ce sens
que s’inscrit un arrêt de la troisième chambre civile de la cour de cassation
française rendu le 28 janvier 2004625. Dans cet arrêt, la cour n'accorde aucune
importance au fait que la mise en œuvre de la clause résolutoire ait été
préalablement constatée par une décision passée en force de chose jugée. Il
suffit que les conditions de mise en œuvre de la clause stipulées par les parties
dans le contrat soient réunies pour que ladite clause soit acquise. Cette
solution est mieux garante de l’efficacité de la clause et met en exergue la
primauté de l’autonomie de la volonté en ne faisant pas (comme c’est le cas en
matière commerciale) de la décision du juge, une condition d’efficacité de la
clause626.

385. Ensuite, on peut observer que le contrat de bail jouit d’une


protection plus accrue en France que dans l’espace OHADA. En effet, si dans
les deux systèmes, l’éviction de la résiliation du bail du fait de l’ouverture
d’une procédure collective n’est pas absolue, la rupture du contrat de bail est
plus facilitée en droit OHADA qu’en France. L’article 97 de l’AUPC laisse la
possibilité au bailleur de solliciter la résiliation du bail pour les causes
antérieures à l’ouverture de la procédure collective, mais son action n’est
recevable que si elle est introduite dans un délai de trente (30) jours suivant
la deuxième insertion du jugement d’ouverture dans le journal d’annonce
légale de l’Etat concerné. Et lorsque la résiliation est sollicitée pour les causes

624 J-B. SEUBE, « Le jeu de la clause résolutoire du bail en cas de procédure collective du
preneur », RDC 2004, n°3, p.711 ; Cass. civ. 3, 27 juin 2006, n° 05-14.329, Société Sun Hôtel,
F-D ( N° Lexbase : A1144DQG).
625 Cass. civ. 3e, 28 janvier 2004, pourvoi n° 01-00.893

626 J-B. SEUBE, op. cit.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
195
postérieures, l’action est recevable dans un délai de 15 jours. Or en France,
l’article L.622-14 du code de commerce reconnait certes aussi au bailleur un
droit de résiliation, mais cette résiliation ne peut avoir pour motif que le défaut
de paiement des loyers et charges afférentes à une occupation postérieure au
jugement d’ouverture, et le bailleur dispose d’un délai de trois (3) mois pour
agir. Ce délai est donc manifestement plus long que celui accordé en droit
OHADA ce qui donne plus de chance au bailleur de voir son action prospérer.
Toutefois, le législateur français précise que si avant l’écoulement de ce délai,
les loyers sont réglés par le débiteur ou son représentant, il n’y a plus lieu de
prononcer la résiliation du contrat.

B/ L’inefficacité de la clause d’indivisibilité

386. L’indivision intervient dans un ensemble contractuel, c’est-à-dire


une combinaison complexe de plusieurs contrats ayant des objets et parfois
même des contractants différents, mais s’inscrivant dans une même opération
économique627. Elle désigne la qualité de ce qui ne peut être dissocier et se
décline en deux formes. D’abord, l’indivisibilité peut être objective, c’est-à-dire
celle qui tient à la nature de l’objet de l’obligation. Il s’agit d’une indivisibilité
naturelle628, l’obligation est indivisible parce que son objet ne peut être
susceptible de division629. Ensuite, elle peut être subjective, c’est le cas
lorsqu’elle résulte d’une stipulation contractuelle et s’applique à une
obligation dont l’objet n’est pas indivisible par nature630. La clause
d’indivisibilité empêche que soient diviser les stipulations d’un contrat. Elle
les rend dépendantes, de sorte qu’il n’est pas possible de considérer une
clause sans considérer le contrat dans son ensemble. Il y a donc indivisibilité
conventionnelle dès lors que deux ou plusieurs contrats sont déclarés

627 B. FAGES, Droit des obligations, op. cit., p.207, n°226


628 Y. BUFFELAN-LANORE, V. LARIBAU-TERNEYRE, Droit civil. Les obligations, 15ème éd.
Sirey, Paris 2017, p541, n°1690 et s.
629 F. TERRE, Ph. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil. Les obligations, op. cit., p. 1254
630 J. FRANCOIS, Traité de droit civil, op. cit., p.321

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
196
interdépendants par la volonté des parties631. Dans cette hypothèse, ce n’est
pas l’obligation en elle-même qui est indivisible, mais la prestation qu’elle
sous-tend632.

387. La doctrine s’est interrogée sur le fondement de l’indivisibilité en


droit des obligations. Pour un premier courant, l’indivisibilité serait fondée sur
la notion de cause du contrat633, et une partie de la jurisprudence est allée
dans ce sens634. Pour un second courant, c’est plutôt l’économie du contrat
qui serait en réalité l’instrument et la source de reconnaissance de
l’indivisibilité des contrats635. Ces deux thèses sont exactes et
complémentaires selon que l'on se réfère à l'indivisibilité subjective ou à
l'indivisibilité objective.

388. L’indivisibilité a pour conséquence de lier le sort de plusieurs


contrats entre eux. Ainsi, la résolution d’un contrat entraine la résolution des
autres contrats de l’ensemble contractuel. C'est particulièrement le cas dans
le domaine du crédit, lorsque l'emprunteur démontre qu'il a souscrit le prêt
dans le seul but d'acquérir un bien précis, la résolution du contrat de vente
entraine la nullité du prêt636. Lorsque le débiteur fait l’objet d’une procédure
collective, la clause d’indivisibilité fait obstacle au droit d’option du
mandataire, lequel ne pourra pas choisir dans un ensemble contractuel de
poursuivre un contrat sans en poursuivre d’autres. Or, tous les contrats de
l’ensemble ne sont pas forcément nécessaires à la poursuite de l’activité du
débiteur ou à l’apurement de son passif.

631 Cass. Civ. 1, 13 nov. 2008, n° 06-12.920.


632 L. ANDREU, « L’obligation à prestation indivisible dans le nouveau droit des obligations »,
in L. ANDREU, V. FORTI (dir.), Le nouveau régime général des obligations, D., Paris 2016,
p.66 et s.
633 L-F. PIGNARRE, « Ensembles contractuels indivisibles : la cause… en question », RLDC

2011, n°4114
634 Cass. Civ. 1ère, 28 oct. 2010, n°09-68.014 ; Cass. Civ. 1ère, 13 juin 2006, n°04-15.456, Bull.

civ. I, n°306 ; D., 2007.277, note J. GHESTIN ; RDC 2007.256, note D. MAZEAUD ; RTD com.
2006.293, obs. F. POLLAUD-DULIAN.
635 S. PIMONT, L'économie du contrat, Th. Université de Poitier 2002, p. 228
636 Cass. Civ. 1, 10 septembre 2015, n° 14-13658

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
197
389. Dès lors, en droit de l’OHADA637 et en droit français638, le
jugement d’ouverture entraine de plein droit neutralisation de toute clause
d’indivisibilité. Il s’agit d’éviter que la résolution d’un contrat accessoire jugé
non nécessaire à la poursuite de l’activité du débiteur entraine la résolution
ou du moins la neutralisation des contrats utiles faisant partie du même
ensemble contractuel. La neutralisation de la clause d’indivisibilité permet
ainsi au débiteur de se libérer d’un contrat compris dans un ensemble
contractuel sans que cela affecte la continuité des autres contrats. Toutefois,
pour tomber sous le coup de l’inefficacité, la clause d’indivisibilité doit
expressément viser l’ouverture d’une procédure collective.

Paragraphe 2 : L’éviction de la rupture judiciaire ou


unilatérale du contrat

390. Outre la résolution fondée sur une clause contractuelle, le


créancier dispose en droit commun des contrats de la possibilité d’obtenir une
résolution judiciaire ou de rompre le contrat de façon unilatérale et à ses
risques et périls. L’ouverture d’une procédure collective emporte une
impossibilité de solliciter aussi bien la résolution judicaire (A) que la résolution
unilatérale du contrat (B).

A/ L’impossibilité de solliciter la résolution judiciaire du


contrat

391. La résolution est la disparition rétroactive du contrat. Elle est


contraire au principe de la force obligatoire du contrat posé en droit de
l’OHADA par l’article 1134 du code civil ancien et en droit français par les
articles 1193 et 1194 du code civil issu de la réforme de 2016. En vertu de ce
principe, une fois conclu, le contrat doit être exécuté. En droit de l’OHADA, le
contrat a à l’égard des parties, la même force qu’une loi à l’égard des citoyens.

637 AUPC, art. 107


638 C. com, art. L.641-11-1, I
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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198
Ainsi, c’est parce qu’elle serait contraire à ce principe de force obligatoire que
la résolution du contrat est principalement judiciaire639.

392. En droit des procédures collectives, du fait de la suspension des


poursuites individuelles640, le créancier est déchu de son droit de demander
au juge la résolution du contrat pour l’inexécution du débiteur en difficulté641.
En France642 et droit de l’OHADA643, le jugement d’ouverture interrompt ou
interdit toute action en justice tendant à la résolution d’un contrat pour défaut
de paiement d’une somme d’argent. Il résulte de ce texte que la résolution
judiciaire n’est évincée par le droit des procédures collectives que si elle est
fondée sur le paiement d’une somme d’argent, lorsque la créance relative à ce
paiement est née avant le jugement d’ouverture644.

393. A contrario, ce texte ne joue pas si l’action en résolution est


exercée pour une autre cause que le non-paiement du prix. La jurisprudence
française déclare ainsi recevable l’action en résolution fondée sur l’inexécution
d’une obligation de faire645. Une telle solution peut s’avérer contraire à
l’objectif visant à ne pas alourdir davantage le passif du débiteur. En effet, le
plus souvent, la résolution du contrat s’accompagne d’une condamnation au
paiement des dommages-intérêts, laquelle peut être une charge
supplémentaire pour le débiteur en difficulté. Pour éviter un tel écueil, la
résolution judicaire du contrat pour inexécution d’une obligation de faire ne
devrait être rejetée que si celle-ci implique une condamnation du débiteur au
paiement des dommages-intérêts.

639 Y.- M. LAITHIER, Etude comparative des sanctions à l’inexécution du contrat, op. cit.,
p.225, n°155 et s.
640 Supra n°343 et s.
641
M.H. MONSERIE, Les contrats dans le redressement et la liquidation judiciaires des
entreprises, op.cit., p.78
642 C. com, art. L.622-21, I, 2°
643 AUPC, art. 75, al. 1 2°
644 S. Th. S. KARFO, Paiement des créanciers, sauvetage de l’entreprise : Étude comparative

des législations OHADA et française de sauvegarde judiciaire des entreprises en difficulté, Th.,
Université de Toulouse 1 – Capitole, 2014, p.143
645 Cass. Com., 26 oct. 1999, n°96-21745, Bull. civ. IV, n°190

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
199
394. L’éviction de la résolution judiciaire s’étend sur le même champ
que l’interdiction ou la suspension des poursuites individuelles. On en déduit
que même en phase de prévention, la résolution judicaire d’un contrat faisant
l’objet d’une renégociation n’est pas envisageable. Par ailleurs, les créanciers
non concernés par les renégociations contractuelles conservent leur droit de
demander la résolution de leurs contrats quelle que soit la nature de
l’obligation inexécutée.

395. La résolution judiciaire emporte pour conséquence la restitution


des prestations réciproquement reçues par les parties. Le rejet de cette
sanction en cas d’ouverture d’une procédure collective peut se justifier par le
souci de préserver l’égalité entre différents créanciers. En effet, le droit des
procédures collectives impose une discipline collective646 entre les créanciers.
Celle-ci interdit que pendant le déroulement de la procédure, l’actif du
débiteur serve à certains créanciers au détriment d’autres. Or, si la résolution
était admise, la restitution par le débiteur des prestations reçues violerait cette
discipline collective.

B/ L’impossibilité de rompre unilatéralement le contrat

396. En France comme en droit de l’OHADA, il est reconnu à chaque


contractant le pourvoir de rompre le contrat de façon unilatérale. Aux termes
l’alinéa 2 de l’article 281 de l’AUDCG et de l’article 1226 du code civil français,
lorsqu’il fait face à une inexécution grave, le créancier d’une obligation
inexécutée peut résoudre le contrat de façon unilatérale, en adressant une
simple notification à son cocontractant. Ce principe de résolution unilatérale
est battu en brèche par le droit des entreprises en difficulté. En effet, la
résolution unilatérale est écartée dès l’ouverture de la procédure collective du
fait que les contrats sont placés sous la protection du syndic ou de

646F. PEROCHON, « La discipline collective », in P.- M. LE CORRE (dir.), Les grands concepts
du droit des entreprises en difficulté, op. cit., p.4
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
200
l’administrateur judiciaire qui seul dispose du pouvoir de les rompre ou de les
poursuivre. Aussi, la résolution unilatérale ne se conçoit que dans l’hypothèse
où l’inexécution du débiteur a privé le contrat de tout intérêt économique647.
Or, en cas d’ouverture d’une procédure collective, tous les contrats du
débiteur ne sont pas dépourvus de tout intérêt économique, c’est d’ailleurs la
raison d’être de l’option du syndic, qui consiste à déterminer les contrats qui
conservent un intérêt économique et ordonner leur poursuite.

397. Par contre, dès que l’option a été faite de continuer un contrat, la
protection octroyée par le droit des procédures collectives est levée et les
parties peuvent se prévaloir de leurs prérogatives respectives. Ainsi, le
principe de l’éviction de la résolution unilatérale est levé sur les contrats dont
la poursuite a été décidée par le débiteur ou son représentant. Dès lors, en
cas d’inexécution d’une particulière gravité, le cocontractant peut « à ses
risques et périls », faire le choix de rompre unilatéralement le contrat. C’est
dire que, comme la neutralisation des clauses résolutoires, l’éviction de la
résolution unilatérale n’est pas non plus un principe absolu.

647D. MAZEAUD, « L'unilatéralisme en matière de résolution du contrat, nouvel épisode »,


Recueil Dalloz 2001 p.3239.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
201
Conclusion du chapitre 1

398. La recherche de l’exécution par le débiteur de ses engagements


contractuels nécessite que soit prise en compte sa situation économique et
financière difficile. Les droits de l’OHADA et français organisent à cet effet
l’allègement de ses obligations contractuelles en restreignant certains droits
des créanciers. Ces derniers verront ainsi certaines de leurs prérogatives
suspendues durant toute la procédure tandis que d’autres seront purement
et simplement anéanties de manière autoritaire.

399. Par ailleurs, à côté de l’atteinte portée aux droits du créancier,


l’ouverture d’une procédure collective emporte un réaménagement des
obligations contractuelles elles-mêmes dans le souci d’alléger le débiteur et de
parvenir à leur adaptation aux capacités financières de ce dernier.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
202
Chapitre 2 : L'aménagement de la créance
contractuelle

400. L’aménagement de la créance contractuelle vise à adapter celle-ci


à la situation du débiteur en vue de favoriser son apurement. Ainsi, dès
l’ouverture d’une procédure collective, plutôt que d’anéantir le contrat
inexécuté, le droit des entreprises en difficulté milite pour un maintien de
celui-ci en l’arrimant aux capacités du débiteur en difficulté. Cette adaptation
peut être obtenue soit par une renégociation de la créance contractuelle entre
les parties (section 1), soit par une atteinte autoritaire portée par
l’impérialisme du droit des procédures collectives sur la substance de celle-ci
(section 2).

Section 1 : La renégociation de la créance contractuelle

401. Le principe de la force obligatoire du contrat interdit que le contrat


fasse l’objet d’une modification unilatérale. Malgré son caractère dérogatoire,
le droit des entreprises en difficulté se soumet à plusieurs égards à ce principe
en ne permettant pas une atteinte à certains droits du créancier sans son
accord. Le débiteur en difficulté d’exécution de ses engagements contractuels
et qui souhaite un allègement de ses obligations contractuelles doit ainsi
renégocier le contrat avec son créancier. Les droits OHADA et français des
entreprises en difficulté aménagent un cadre permettant d’inciter le créancier
à renégocier (paragraphe 1) en vue de parvenir aux mesures d’allègement
consensuelles (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L’incitation du créancier à renégocier le


contrat

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
203
402. « Re-négocier, ce n’est pas tout à fait négocier, même si c’est encore
négocier 648». Renégocier implique une répétition. L’objet de la négociation
porte ici sur un contrat d’ores et déjà conclu. En droit des entreprises en
difficultés, le débiteur qui traverse les difficultés susceptibles de perturber
l’exécution de ses engagements contractuels peut solliciter la renégociation de
ses contrats. Cette renégociation a pour but de réaménager le contrat en vue
de garantir son exécution649. Pour susciter l’adhésion des créanciers à cette
procédure, les deux législateurs aménagent un cadre attractif à cet effet (A),
et concèdent au créancier négociant une priorité de paiement (B).

A/ L’aménagement d’un cadre de renégociation attractif

403. La renégociation préventive peut se faire dans un cadre amiable


ou dans un cadre judiciaire.

404. La renégociation amiable. La renégociation amiable intervient


dans le cadre d’un mandat ad hoc ou d’une conciliation. Il s’agit des
procédures dont le déroulement et l’issue dépendent de la volonté des parties.
Elles consistent à faciliter le sauvetage d’une entreprise en difficulté en dehors
de toute décision de justice650. Ces renégociations sont gouvernées par le
principe de la liberté contractuelle651. En effet, les créanciers appelés à
renégocier ne sont pas obligés de concéder au débiteur des modifications ou
des allègements contractuels. La cour de cassation française a eu l’occasion
de rappeler que les créanciers étaient parfaitement libres de refuser les
propositions de réaménagement de leurs droits qui leur sont faites dans le
cadre d'une procédure amiable, et n'engagent pas leur responsabilité en

648
N. DISSAUX, « Renégocier le contrat en cours d'exécution : les apports du nouveau droit des
contrats », Gaz. Pal, n°hors-serie 2, p.24
649 J.-E. KUNTZ, V. NURIT, « Une alternative au plan de sauvegarde : la négociation

aboutissant à la disparition des difficultés du débiteur ou les vertus de l'article L. 622-12 du


Code de commerce », BJE juill. 2013, n°4, p.1
650 D. LEGEAIS, Droit commercial et des affaires, 27 ème éd., SIREY 2021, p. 608, n°1054.

651 F. PEROCHON, Entreprises en difficulté, LGDJ, 10e éd., 2014, n° 215

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
204
exerçant cette liberté de ne pas contracter, même si tous les autres créanciers
ont accepté les propositions du débiteur652.

405. Cette liberté accordée aux créanciers est un facteur


d’encouragement à la renégociation. Les cocontractants de l’entreprise en
difficulté préféreront souvent renégocier leurs contrats dans ce cadre et
parvenir à des aménagements consentis de leurs créances. En réalité, la
liberté des cocontractants n’est que théorique. En effet, le sceptre de
l’ouverture d’une procédure collective et les conséquences de celle-ci sur leurs
prérogatives contractuelles est un argument suffisant pour convaincre ces
derniers d’accepter les aménagements de leurs créances contractuelles à l’abri
de toute impérialisme du droit des procédures collectives qui entrainera une
restriction de leurs droits.

406. En revanche, ces renégociations amiables sont marquées du


sceau de la confidentialité. Les discussions et les informations doivent être
gardées secrètes entre les créanciers appelés à la renégociation et le débiteur.
Ils sont donc tous tenus par un « droit à l’oubli »653. L’intérêt est de ne pas
ruiner la crédibilité du débiteur et inquiéter ses autres partenaires
contractuels. Il s’agit de le protéger « de l’aggravation de sa situation par, au
mieux la méfiance, au pire la panique que pourrait produire la divulgation de
ses difficultés aux partenaires économiques qui sont les siens »654. En effet, le
débiteur aura souvent intérêt à appeler à la renégociation les cocontractants
dont l’échéance des créances est proche. Or, si les autres sont tenus informés
des difficultés, ils pourront être amenés à suspendre de manière préventive
l’exécution de leurs engagements en mettant en œuvre l’exception pour risque

652 Cass. Com. 22 sept. 2015, n°14-17.377 B : D. 2016 Pan.1894, obs. F.X. LUCAS, Rev.
Sociétés 2015.761, obs. Ph. ROUSSEL-GALLE ; RTD com. 2016.189, ob. F. MACORIG-
VENIER ; Gaz. Pal. 19 janvier 2016, p.57 ; CA Orléans, ch. com., 22 fév. 2007, n° 07/00236,
Sté. DHL Danzas Air et Océan France c/ Sté. Outidor.
653 F.-X. LUCAS, « Confidentialité du plan de sauvegarde ou de redressement : la radiation des

mentions au RCS », LEDEN 15 janv. 2012, n°1, p. 1


654 F. REILLE, « L’instauration d’une conciliation à la française en droit des entreprises en

difficultés OHADA », in LPA, 03 mars 2016, n°49, p.17

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
205
d’inexécution655. Mieux encore, ceux-ci n’étant pas concernés par la
suspension des poursuites individuelles, ils pourront mettre en œuvre des
voies d’exécution qui pourront aggraver les difficultés et rendre la
renégociation amiable inutile. La confidentialité permet ainsi de maintenir les
contrats du débiteur qui ne sont pas concernés par la renégociation, lesquels
se poursuivent normalement malgré le risque d’inexécution qui plane sur le
débiteur.

407. Le droit OHADA est muet sur la sanction encourue par un


créancier qui aurait divulgué une information en violation de l’obligation de
confidentialité. Il faut sans doute recourir au régime de responsabilité de droit
commun prévu par l’article1382 du code civil ancien. Ceci implique d’apporter
la preuve que la divulgation de l’information a causé un dommage au débiteur.
C’est dans ce sens que semble s’inscrire la jurisprudence française. Pour le
juge français, la confidentialité ne signifie pas que les parties sont soumises
au secret professionnel pénalement sanctionné. Il s’agit plutôt d’une
confidentialité civile puisqu’elle peut être levée par le débiteur656. Par ailleurs,
dans une jurisprudence récente, la cour de cassation française avait jugé que
l’obligation de confidentialité peut être neutralisée lorsque la situation du
débiteur est d’un intérêt général657.

408. La procédure de renégociation est encadrée dans un délai précis.


Cet encadrement de la durée de la renégociation amiable permet de dissuader
les parties à perdre de temps et favorise de ce fait, les chances de succès du
traitement amiable des difficultés du débiteur. En France, initialement limitée
à trois mois, la durée de la renégociable amiable est désormais fixée à quatre
mois658, prorogeable d’un mois au plus. En droit OHADA, l’article 5-3 de

655 Cf, supra n°137


656 CA Paris, 14ème Ch. B, 2 avril 1999, Bull. Info. Cour de cassation, 2000, n°121.
http ://www.senat.fr
657 Cass. com., 13 févr. 2019, no 17‐18.049, commenté par F. MARMOZ, in Revue Lamy droit

des affaires, Nº 147, 1er avril 2019


658 C. com., art. L. 611-6, al. 2

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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206
l’AUPC fixe cette durée à trois mois, prorogeable d’un mois au plus. Les parties
à une renégociation amiable disposent donc de plus de temps en France que
dans l’espace OHADA pour parvenir à un accord. Compte tenu des lourdeurs
administratives et judiciaires fréquentes dans les sociétés africaines, et du
faible développement de la technologie il serait plus réaliste de revoir le délai
imparti aux parties en l’amenant pourquoi pas à cinq ou six mois. Ceci
donnera plus de chances aux parties de négocier sereinement et de parvenir
à un accord dans les délais.

409. Ainsi, les parties sont tenues de parvenir à un accord dans un


délai maximum de cinq mois en France et quatre mois dans l’espace OHADA.
Le rapport au Président de la République française relatif à l’ordonnance du
18 décembre 2008 précise à ce sujet que : « l'article 3 clarifie les règles
applicables à la durée de cette procédure, afin d'éviter que celle-ci ne se prolonge
à l'excès alors qu'une procédure collective serait plus adaptée (art. L. 611-6) »659.

410. La renégociation sous protection judiciaire. La renégociation


dite judiciaire ici est celle qui s’effectue dans la cadre de la procédure de
sauvegarde en France et du règlement préventif en droit OHADA. Ces
procédures constituent dans chaque système, la dernière tentative
d’anticipation de la faillite du débiteur660 après l’alerte, le mandat ad hoc et la
conciliation. Les restructurations des contrats prévues par le projet de plan
de sauvegarde en France et le projet de concordat préventif en droit OHADA
se présentent sous la forme d'un ou plusieurs projets de modifications des
contrats destinés à être purement et simplement annexés au jugement
arrêtant le plan de sauvegarde ou de redressement661.

659 Rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance no 2008-1345 du 18


décembre 2008 portant réforme du droit des entreprises en difficulté, JO du 19 décembre
2008, texte n° 28, p. 19457
660 A. TOH, La prévention des difficultés des entreprises : étude comparée de droit français et

droit OHADA, op. cit., p.235


661 G. PODEUR, op cit. p.3

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
207
411. En France, le plan de sauvegarde constitue un cadre de
renégociation préventive des engagements contractuels. En effet, avant
d'arrêter les mesures concernant le règlement du passif, les créanciers font
l'objet d'une consultation individuelle sur les délais d’exécution et les remises
qu'ils sont disposés à consentir662 en vue de donner un répit au débiteur,
pouvant lui permettre de mieux exécuter ses engagements à l’échéance. Cette
consultation des créanciers et cocontractants du débiteur revêt un caractère
obligatoire. Il s’agit d’une opportunité donnée à un débiteur qui n’est pas
encore dans l’incapacité d’exécuter ses engagements contractuels, mais qui
connait des difficultés susceptibles de le rendre insolvable663, d’anticiper son
insolvabilité en sollicitant l’indulgence de ses cocontractants.

412. Deux conditions sont ainsi requises pour entamer ces


renégociations avec les partenaires contractuels : d’abord, le débiteur ne doit
pas être en cessation paiement, ensuite, il ne doit pas être capable de
surmonter les difficultés qu’il traverse. Ramenée en matière contractuelle,
cette première condition signifie que le contrat dont la renégociation est
sollicitée ne doit pas déjà être à son échéance, d’où le caractère préventif de la
renégociation. Le débiteur ne doit pas déjà avoir failli à son obligation
contractuelle. La seconde condition quant à elle, renvoie au fait qu’il doit être
certain que sans une renégociation sous protection judiciaire, le contrat ne
pourra pas être exécuté à terme. Dès que ces deux conditions sont réunies, il
est impératif de solliciter à temps l’ouverture d’une procédure de sauvegarde.
Le législateur français encourage ainsi le débiteur à « prendre [ses] difficultés
à bras le corps quand il est encore temps »664.

413. En droit OHADA, le législateur offre aussi au débiteur la


possibilité de solliciter une renégociation préventive de certains de ses
contrats en se plaçant sous une protection judiciaire. Cette renégociation

662 C. com., Art. L. 626-5


663 C.com., Art. L.620-1
664 D. PERBEN, Projet de loi de sauvegarde des entreprises, n° 1596, 12 mai 2004 sur le site

internet www.assemblée-nationale.fr.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
208
s’effectue dans le cadre d’un concordat préventif. Aux termes de l’article 6
alinéa 1er de l’AUPC, « le règlement préventif est ouvert au débiteur qui, sans
être en état de cessation des paiements, justifie de difficultés financières ou
économiques sérieuses ». Il résulte de ce texte que, comme en droit français,
l’ouverture d’une renégociation préventive ne profite qu’au débiteur qui n’est
pas encore en cessation des paiements. Cette précision que n’apportait pas
l’ancien AUPC est salutaire. En effet, le règlement préventif étant une
procédure volontaire, laissée à l’entière discrétion du débiteur665, il y a un
grand risque de voir ce dernier saisir le juge très tardivement666 si aucune
limite ne lui est fixée. La précision apportée par le nouvel article 6 de l’AUPC
contraint le débiteur à agir à temps au risque de se retrouver en cessation des
paiements et perdre le bénéfice d’une renégociation de ses contrats sous
protection judiciaire. Toutefois, bien qu’il faille éviter d’agir tardivement au
risque de laisser la situation se dégrader, le débiteur devrait aussi s’abstenir
d’une saisine très précoce du tribunal qui lui confèrerait indûment des
aménagements contractuels et des reports d’obligations667.

414. Une fois les conditions de l’article 6 de l’AUPC réunies, le débiteur


saisit le tribunal compétent pour demander l’ouverture d’un règlement
préventif. Dans sa requête, il doit proposer un projet de concordat
préventif668exposant les mesures envisagées en vue du redressement de son
entreprise. Ces mesures proposées dans le projet de concordat constituent
ainsi la base de renégociation avec ses partenaires contractuels669. D’où elles
doivent être suffisamment incitatifs pour motiver ces derniers à accepter de
renégocier.

665 Comme pour la procédure de conciliation, aux termes de l’article 6 alinéa 2 de l’AUPC, le
débiteur détient l’exclusivité de l’ouverture de la procédure de règlement préventif.
666 A. TOH, La prévention des difficultés des entreprises : étude comparée de droit français et

droit OHADA, op. cit.. p.239


667 C. NDONGO, Le nouveau visage de la prévention en droit OHADA, thèse de doctorat,

université de Paris 1 Sorbonne, 2017, p.50


668 AUPC, Art. 6-1 13°

669 C. NDONGO, op. cit, p.64

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
209
B/ L’octroi d’une priorité de paiement au créancier
négociant

415. Le succès de la renégociation des contrats en cours est


subordonné à l’adhésion des cocontractants visés. Car, comme cela a déjà été
dit, la procédure de renégociation repose sur le principe de liberté
contractuelle. Autant le débiteur est libre de choisir parmi ses partenaires,
contractuels ceux avec qui il souhaite renégocier, autant ces derniers sont
libres d’accepter ou pas cette renégociation. Pour garantir leur participation à
la renégociation, les droits OHADA et français prévoient en leur faveur, une
priorité de paiement appelée le privilège de new money, mais qui semble limité.

416. Le privilège de new money. L’issue de la renégociation dépend


de la participation des partenaires contractuels du débiteur et surtout de leur
capacité à consentir des sacrifices pour aider le débiteur à se redresser. Pour
ce faire, les législateurs OHADA et français mettent à leur profit une série
d’avantages destinés non seulement à les encourager à accepter de renégocier,
mais surtout à consentir des sacrifices dans le but de remédier au risque
d’insolvabilité du débiteur. C’est dans ce sens que s’inscrit le privilège de New
money. En effet, pour encourager les partenaires contractuels du débiteur à
accepter de renégocier, mais surtout à parvenir à un accord salvateur pour ce
dernier, les droits OHADA et français confèrent une priorité de paiement à
ceux d’entre eux qui auront consenti un nouvel apport en trésorerie, en cas
d’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation. Cette mesure
qui résulte des articles L.611-11 du code de commerce et l’article 5-11 de
l’AUPC est l’une des expressions majeures de l’incitation des créanciers à
consentir des efforts lors du règlement à l’amiable des difficultés d’une
entreprise.

417. En fait, le privilège de new money ou privilège de l’« argent frais »


désigne tout droit de priorité de paiement institué par le législateur afin
d’inciter les créanciers à financer la restructuration de l’entreprise en

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
210
difficulté. Il constitue une évolution incontestable au regard de la législation
antérieure, dans laquelle aucun avantage n’était octroyé aux créanciers qui
consentaient de nouveaux concours dans le cadre du règlement amiable. Cette
priorité de paiement encourage les partenaires contractuels à financer la
restructuration de l’entreprise de leur débiteur, car ils sont certains d’être
payés. Les deux législateurs tiennent ainsi, en quelque sorte à récompenser le
risque de participation des partenaires contractuels du débiteur, mais aussi
et surtout leur effort considérable et les sacrifices consentis pour le cas où les
difficultés de l’entreprise s’aggraveraient nonobstant ces efforts.

418. Toutefois, pour bénéficier de ce privilège, la contribution du


créancier doit obéir à certaines conditions. D’abord, ce privilège ne prend pas
en compte tous les types d’apports, y sont exclus les apports consentis par les
associés dans le cadre d’une augmentation du capital670. Cette exclusion peut
se justifier, car le rôle des associés et actionnaires est de venir en aide à leur
entreprise en cas de difficultés. Ils n’ont donc pas besoin d’être incités.
Ensuite, en droit OHADA, pour que les créanciers puissent bénéficier du
privilège, l’apport doit avoir été consenti dans le cadre d’un accord homologué.
Le bénéficiaire du privilège de new money doit donc d’abord se rassurer que
son apport a été consenti dans le cadre d’un accord homologué. Par contre en
France, il n’est plus nécessaire que l’apport soit consenti uniquement dans
l’accord homologué671, mais il suffit qu’il le soit pendant la recherche de
l’accord672.

419. En droit OHADA, les partenaires contractuels du débiteur qui


bénéficient du privilège de new money seront réglés avant tous les autres
créanciers, c’est-à-dire avant les créanciers des procédures judiciaires et
même ceux bénéficiant du super privilège de salaire et des frais de justice673.

670 C. com, Art. L.611-11 al.1 in fine


671 A. AB-DER-HALDEN et PH. ROUSSEL GALLE, « La conciliation améliorée » op.cit, p.5,
n°17
672 M. KOEHL, op cit, p.88

673 AUPC, Art. 166 et 167

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
211
Ils se placeront au-dessus de tous les créanciers titulaires de sûretés
spéciales. Ainsi, cette mesure est donc particulièrement attractive et efficace
pour les créanciers étant donné qu’elle leur confère un rang très favorable et
leur garantie un paiement à l’ouverture d’une procédure collective. Ce
classement prévu en droit OHADA, est plus intéressant que celui du droit
français, puisque pour le législateur français, les méritants de ce privilège ne
peuvent en aucun cas surclasser le créancier de salaire et de frais de justice674.

420. Par ailleurs en France, il est désormais interdit d’imposer des


remises ou des délais aux créanciers titulaires du privilège d’argent frais sans
leur consentement express675. Cette interdiction, qui jadis ne concernait que
les créances salariales superprivilégiées et privilégiées et les très petites
créances, permet donc aux apporteurs d’argent frais d’être payés hors plan.
Le législateur français tranche ainsi le débat doctrinal sur la soumission au
plan des créanciers titulaire d’un super privilège676.

421. Un privilège limité. Le privilège de new money constitue une


incitation indéniable à la participation active des créanciers à la renégociation
préventive. Toutefois, le caractère limité des bénéficiaires en entrave
l’efficacité. En effet, en France comme dans l’OHADA, le bénéfice du privilège
de new money est actuellement limité aux apports en trésorerie et aux
nouveaux biens et services. Or, il serait préférable que ce privilège concerne
également l’octroi significatif de délais et remises. En effet, rien ne peut
valablement expliquer l’exclusion des partenaires contractuels qui ont accepté
d’accorder un long délai ou une remise conséquente au débiteur, ayant
favorisé son redressement. À ce titre, le privilège ne porterait que sur une
fraction de l’étalement de la dette. Ce serait alors le signe d’un geste positif en

674 C. com., Art. L.622-17 et L.641-13


675 C. com., Art. L. 626-20, I, 3° ; A. AB-DER-HALDEN et PH. ROUSSEL GALLE, « La
conciliation améliorée » op.cit, p.5, n°18.
676 F. PEROCHON et F.-X. LUCAS, « Argent frais : paiement hors plan ou selon le plan ? -

Controverse entre François-Xavier Lucas et Françoise Pérochon », BJE 01 sept. 2012, n° 5, p.


341.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
212
direction des créanciers pour qu’ils participent activement aux négociations
en consentant des efforts certains677.

Paragraphe 2 : Les mesures d’allègement issues des


renégociations

422. Dans le souci de lui permettre de surmonter les difficultés qu’il


traverse, le débiteur peut bénéficier d’un répit au moyen des délais de
paiement (A) ou d’une réduction de sa dette au moyen des remises consentis
par ses créanciers (B).

A/ Les délais de paiement

423. Le délai judiciaire. Appelé délai de grâce, c’est le délai que le juge
impose au créancier dont la créance est échue pour permettre au débiteur de
surmonter les difficultés qu’il traverse. Autrement dit, le délai de grâce
correspond à un report ou un échelonnement du paiement des sommes dues,
accordé par un juge. En matière contractuelle, il s’agit d’un report de la date
d’exécution du contrat. Ce report permet ainsi au débiteur de mieux organiser
l’exécution des obligations contractuelles concernées. Il est d’ordre public et
ne peut donc être dérogé par une clause contractuelle. L’octroi des délais de
grâce est un mécanisme très efficace dans la phase de prévention des
difficultés du débiteur, en ce qu’il met les biens et le patrimoine de ce dernier
à l’abri de la « vindicte » de ses créanciers678. Il permet au cocontractant
défaillant d’échapper à la mesure d’exécution forcée ou à la rupture de la
relation contractuelle.

424. Dans la prévention des difficultés du débiteur, le délai de grâce


peut permettre de sauver une conciliation qui tourne mal. Car, en imposant

677M. KOEHL, op. cit, p.92


678S. HADDAD, « De ces délais de grâce accordés de si bonne grâce par nos juges », ohadata
D-11-94, p.1.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
213
des délais au créancier qui menace l'issue d’une renégociation amiable, « on
éloigne le spectre de la cessation des paiements le temps, soit d'achever la
conciliation, soit de solliciter l'ouverture d'une sauvegarde qui mette le débiteur
à l'abri des poursuites »679.

425. En France, aux termes de l’article L.611-7, « au cours de la


procédure, le débiteur mis en demeure ou poursuivi par un créancier peut
demander au juge qui a ouvert celle-ci de faire application de l'article 1343-5 du
code civil ». Ce texte donne la possibilité au juge au cours des renégociations
amiables, de faire application de l’article 1343-5 qui lui confère le pouvoir de
« reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des
sommes dues ». Ainsi, pour permettre au débiteur de surmonter ses difficultés,
le juge peut suspendre l’exigibilité de certaines de ses créances pour une durée
maximum de 2 ans.

426. En droit OHADA, l’article 5-7 de l’AUPC pose le même principe à


la différence que le législateur africain ne précise pas comme son homologue
français, la durée de la suspension. Celle-ci est confondue à la durée de la
période de conciliation, c’est-à-dire quatre mois au maximum. Mais qu’en est-
il lorsque les délais de grâce sont accordés dans le cadre d’un règlement
préventif ? Il est clair que la durée de quatre mois n’est plus appropriée.
Compte tenu du silence de l’AUPC, le juge pourrait s’appuyer sur l’article 39
de l’AUPSRVE680 aux termes duquel, « compte tenu de la situation du débiteur
et en considération des besoins du créancier, la juridiction compétente peut,
sauf pour les dettes d’aliments et les dettes cambiaires, reporter ou échelonner
le paiement des sommes dues dans la limite d’une année ». On en déduit un
double régime en matière de durée du délai de grâce en droit OHADA des
procédures collectives. Lorsqu’il est accordé au débiteur en conciliation, le
délai supplémentaire ne peut excéder la durée de cette procédure c’est-à-dire

679 F.X LUCAS, « Délais de grâce et conciliation », LEDEN oct. 2009, n°6, p.1
680 F.M. SAWADOGO, OHADA Droit des entreprises en difficultés, op. cit., p.46

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
214
quatre mois. Par contre, en dehors de la procédure de conciliation, la
suspension de l’exigibilité de la créance peut durer jusqu’à un an maximum.

427. Dans la phase préventive des difficultés du débiteur, l’octroi des


délais de grâce est subordonné à certaines conditions qu’il convient de
préciser. D’abord, le refus de participation à une conciliation ou même le refus
de concéder au débiteur un délai de paiement ne suffit pas pour que le juge
impose les délais de grâce. Ne peut se voir imposer un délai de grâce que le
cocontractant qui a refusé d’accorder volontairement ce délai au débiteur et
qui décide de poursuivre l’exécution de son contrat pendant que le débiteur
se trouve encore en négociation préventive avec les autres partenaires. Le délai
de grâce est donc un moyen de défense que l'on ne peut opposer qu’à un
créancier ou un cocontractant poursuivant, de sorte que celui qui n'agit pas
ne risque pas de se voir imposer des délais681.

428. Aussi, le juge de peut imposer de délais aux créanciers que si les
renégociations en cours entre le débiteur et ses autres créanciers sont
susceptibles de donner lieu à un accord salutaire. En effet, le délai de grâce
ne doit pas être un moyen pour le débiteur de retarder une cessation de
paiements probable. C’est dans ce sens qu’une cour d’appel française avait
débouté un débiteur de sa demande de délais de grâce au motif qu’aucune
conciliation dans les délais légaux n’était en l’espèce possible et qu’en réalité
la demande de délais avait pour seul objectif de différer une éventuelle
cessation des paiements, et non de permettre un accord avec les autres
créanciers, ce qui ne correspondait pas au but visé par l’article L. 611-7682. A
côté de ce délai imposé par le juge aux créanciers récalcitrants, le législateur
peut aussi imposer des délais aux créanciers appelé moratoire légal.

681F.X. LUCAS, op. cit


682CA Aix-en-Provence, 3-1, 18 mars 2021, n°20/06472 ; Paul Minet, « Finalité des délais de
grâce de l'article L. 611-7, alinéa 5, du Code de commerce », LEDEN avril 2021, n°04, p.2

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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215
429. Le moratoire légal. C’est un délai de paiement accordé par le
législateur aux débiteurs en temps de guerre ou en cas d’une crise de grande
envergure683. Il a une portée générale et s’applique à tous les créanciers qui
remplissent les conditions fixées par le législateur. Ainsi, pour faire face aux
conséquences de la crise sanitaire sur le paiement des loyers et charges
locatives, plusieurs Etats ont adopté en faveur des locataires, un moratoire
sur le paiement des loyers. Au Gabon par exemple, le décret
n°00107/PR/MEF du 10 avril 2020 portant interdiction générale d’expulsion
des locataires pendant la durée de l’état d’urgence lié au COVID-19, fait
interdiction à tout bailleur, d’expulser son locataire qui se trouve dans
l’incapacité de payer son loyer pendant la période de crise sanitaire. Cette
mesure qui concernait à la fois les commerçants et les non-commerçants était
un moyen pour le gouvernement d’accorder aux locataires un délai pour payer
leurs loyers. L’article 3 de ce texte précise en son alinéa 2 que le locataire qui
se trouve dans l’incapacité de payer son loyer dispose d’un délai qui s’étend
jusqu’à la fin de la période de crise pour s’acquitter de sa dette. Les locataires
ont ainsi bénéficié d’une période d’immunité conférée par la loi, pendant
laquelle, le paiement des loyers ne pouvait pas leur être exigé.

430. En France, ce moratoire fut accordé aux locataires par la loi


n°2020-1379 du 14 novembre 2020 en son article 14. Ces textes ont pu mettre
les locataires à l’abri de toute sanction pour non-paiement de leurs loyers. A
la différence du texte gabonais qui avait une portée universelle, s’appliquant
à tout type de loyers, le législateur français n’a entendu accorder cette
immunité qu’aux seuls loyers commerciaux. Il s’agissait là d’une intervention
de l’Etat en faveur des locataires en difficulté pour prévenir leur faillite.

683 F.M. SAWADOGO, Droit des entreprises en difficulté, op. cit., p.46

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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216
B/ Les remises de dettes

431. En France, le code civil de 1804 ne donnait pas de définition légale


à la notion de remise. Cette lacune a été aujourd’hui comblée par la réforme
de 2016. L’article 1350 du code civil français la définit désormais comme un
« contrat par lequel le créancier libère le débiteur de son obligation ». Par contre,
dans l’espace OHADA, le code des obligations civiles et commerciales du
Sénégal définissait déjà implicitement la remise comme, l’acte par lequel le
créancier renonce volontairement à son droit et libère ainsi le débiteur de son
obligation684.

432. Contrairement au délai de paiement qui en retarde l’exécution, la


remise de dette dispense le débiteur de l’exécution de son engagement
contractuel. Elle constitue un acte juridique extinctif685 de la créance sans
paiement du débiteur. Malgré la prépondérance de la volonté du créancier, la
remise de dette demeure un acte bilatéral. Le créancier peut revenir sur son
engagement en l’absence d’acceptation du débiteur686. La dispense accordée
au débiteur peut être partielle, c’est-à-dire ne concerner qu’une partie
seulement de la dette, ou totale lorsque c’est l’entièreté de la dette qui a été
remise. Cette mesure a pour objet de diminuer le passif du débiteur pour
mieux l’apurer. En matière contractuelle, certaines obligations se verront ainsi
éteintes soit entièrement, soit partiellement sans une exécution effective du
débiteur. Ce droit de « ne pas payer ses dettes »687 trouve un écho très
favorable en droit des procédures collectives.

433. En effet, la remise de dette participe, avec les délais de paiement,


à la réalisation des accords de conciliation et des plans qui doivent permettre

684 COCC., Art.210


685 N. PICOD, La remise de la dette en droit privé, D., Paris 2013, p.18
686 N. PICOD, op. cit., p. 19, n°26
687 T. GENICON, « George RIPERT, le droit de ne pas payer ses dettes », in, « les grands textes

du droit », 3ème Séance, conférence organisée par la Revue de droit d’ASSAS, le 5 novembre
2019.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
217
au débiteur d’exécuter ses engagements contractuels en cours dans des
conditions compatibles avec ses ressources et ainsi de maintenir son
activité688. Le régime de la remise de dette varie selon la nature publique ou
privée de celle-ci.

434. Les remises des dettes privées. À l’origine, le droit des


procédures collectives s’inspirait du mécanisme de la remise de dette consacré
dans le code civil, en mettant l’accent sur le caractère volontaire de ce
mécanisme. Aujourd’hui, à côté des remises volontaires, il existe des remises
forcées. En effet, lorsqu’elle intervient dans le cadre d’une procédure de
conciliation, l’accord étant purement contractuel, il n’y a aucune contrainte à
exercer sur le créancier pour qu’il accorde des remises. Cette solution est
partagée par les deux législateurs. En droit OHADA, le caractère volontaire
des remises de créances s’applique même lors du règlement préventif. En effet,
il ressort des dispositions de l’article 15 de l’AUPC que « lorsque la situation du
débiteur le justifie, [la juridiction compétente] homologue le concordat préventif,
en constatant les délais et remises consentis par les créanciers ». En matière
de règlement préventif, le juge doit donc se borner à constater les remises
consenties au débiteur par certains de ses créanciers. Il n’a pas le pouvoir de
les imposer.

435. En France, la situation est différente. Dans la procédure de


sauvegarde ou de redressement judiciaire, les remises de dettes vont
intervenir lors de la négociation et de l’adoption du plan. Or, la loi de
sauvegarde institue deux procédures de consultation des créanciers qui vont
coexister dans certaines procédures pour lesquelles les classes des parties
affectées seront constituées. Aux termes de l’article L.626-18 du code de
commerce, lorsque la consultation des créanciers est individuelle, « le tribunal

688 M.-H. MONSERIE-BON, « L’effacement des dettes dans le droit des entreprises en
difficulté », Droit et Patrimoine, Nº 184, 1er septembre 2009, p.3

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
218
donne acte des délais et remises acceptés par les créanciers dans les conditions
prévues au deuxième alinéa de l'article L. 626-5 et à l'article L. 626-6 ». On
retrouve dans ce texte, le caractère volontaire, consenti, des remises accordées
au débiteur.

436. En revanche, la création des comités de créanciers par la loi de


sauvegarde a profondément malmené le caractère volontaire des remises689.
En effet, ces comités étaient appelés à se prononcer sur le plan et la loi de la
majorité permettait d’imposer des remises de dettes à des créanciers qui n’y
avaient pas consenti personnellement690. Avec la réforme de 2021691, ces
comités ont été remplacés par les « classes des parties affectées » pour les
procédures ouvertes à compter du 1er octobre 2021. Cette notion de classe de
parties affectées est une émanation du droit américain de la faillite qui réparti
les créanciers du débiteur en classes. En effet, alors que les comités de
créanciers regroupent les créanciers du débiteur en difficulté en fonction de
leur qualité692, les classes des parties les regroupent en fonction des risques
qu’ils prennent et de leurs intérêts similaires.

437. Aux termes des articles L.626-30 et L.626-30-2 du code de


commerce, le vote de chaque classe est exprimé par ses membres en fonction
du nombre de voix correspondant à leurs créances ou à leurs droits affectés.
Ce vote se fait à la majorité des deux tiers des voix détenues par les membres
votants. L’admission du mécanisme de « cross class cram down » en droit
français permet, comme avec les comités de créanciers, d’imposer aux classes
de parties affectées dissidentes des remises incluses dans un plan qu’elles ont
refusé de voter.

689 M.-H. MONSERIE-BON, op. cit. p.3


690 C. SAINT-ALARY-HOUIN, Droit des entreprises en difficulté, Montchrestien, 2006, nº 858
; F. PEROCHON et R. BONHOMME, Entreprises en difficulté - Instruments de crédit et de
paiement, LGDJ, Paris 2006, nº 342.
691 Ordonnance n°2021-1193 du 15 septembre 2021 portant réforme du livre VI du code de

commerce ; Décret n°2021-1218 du 23 septembre 2021.


692 M-H. MONSERIE-BON, « Transposition de la directive n° 2019/1023 : une première

évaluation », BJE, n°04, juillet 2022, p.34


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
219
438. La remise des dettes publiques. L’inexécution par une entreprise
de ses contrats va inévitablement entrainer la liquidation de celle-ci. Or, la
disparition d'une entreprise n’est pas l’affaire des seuls associés et créanciers
de cette dernière. Elle entraine des conséquences économiques et sociales
dans un Etat et porte atteinte tant à l'ordre public économique qu’à l'ordre
public social par la disparition des emplois qu'elle provoque. Elle trouble aussi
même l'ordre public en général, quand l'on sait les problèmes psychologiques
et sociaux qu'engendre le chômage693. Dans ce contexte, le droit des
procédures collectives ne saurait rester un droit essentiellement protecteur
d'intérêts privés et particuliers, et l'Etat, garant de la paix sociale et de l'intérêt
économique général ne saurait rester indifférent à ces désastres et à leur
inévitable cortège de malheurs.

439. Les interventions de l’État dans la prévention et le traitement des


difficultés des entreprises s’imposent pour soutenir l’économie. D’ailleurs,
l’Etat se trouve souvent être un des cocontractants du débiteur en difficulté,
son intervention pour répondre au besoin de financement de ce dernier
constitue ainsi un recours nécessaire pour surmonter les difficultés
d’exécution et pour convaincre aussi les acteurs privés de faire les efforts
nécessaires à la sauvegarde de l’entreprise694. Cette intervention se fait par
l’octroi d’un financement appelé « aide d’Etat695 ». Ainsi, pour soutenir une

693 M-J. CAMPANA, G. TEBOUL, « Les aides d'Etat aux entreprises en difficulté », P.A,
Nov.2003, n°233, p. 5
694 J. ROUSSELET, « Les règles applicables en matière d’aides publiques allouées à des

entreprises en difficulté », BJE, Mai – Juin 2018, p.229.


695
L’aide d’Etat peut être définie comme une aide accordée à une entreprise, par l’État au
moyen de ressources publiques, qui procure un avantage sélectif, et affecte ou est susceptible
d’affecter les échanges entre États membres et la concurrence695. Les règles y relatives ne sont
pas propres au droit des procédures collectives, mais relèvent surtout du droit de la
concurrence. En droit de la concurrence les aides d’Etat sont définies comme « les aides
accordées par les États ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui
faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou
certaines productions », (Cf. Art.2 Règlement n°1/99/UEAC-CM-639 du 25 juin 1999 portant
réglementation des pratiques commerciales anticoncurrentielles, modifié par le Règlement
n°12/05/UEAC-CM-639 du 25 juin 2005 et l’article 107 du Traité sur le fonctionnement de
l'union européenne).

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
220
entreprise en difficulté, les pouvoirs publics peuvent décider de renoncer au
recouvrement de leurs créances auprès de celle-ci. En fait, le passif de
l’entreprise concerne aussi ses dettes fiscales et sociales. Lorsque celle-ci
traverse des difficultés, pour éviter qu’elle ne tombe en faillite, l’Etat peut opter
de pas poursuivre le recouvrement de ses créances fiscales, de les
rééchelonnées ou encore d’accorder à cette entreprise une remise.

440. En France, avant la loi de 2005, il était interdit aux créanciers


publics (administrations financières, organismes sociaux) de consentir des
remises de dettes pour favoriser le sauvetage de l’entreprise. Or, dans
certaines procédures, ils se trouvaient être des créanciers les plus important,
de sorte que seule la remise de leurs créances étaient susceptibles de
permettre l’allégement du passif du débiteur et donc son sauvetage. Dès lors,
la loi de sauvegarde a consacré le principe de remise des créances publiques
en l’assortissant de certaines conditions.

441. Aux termes de l’article D. 626-10-1° du Code de commerce, les


remises des dettes publiques sont cantonnées pour les impôts indirects « aux
pénalités, intérêts de retard, intérêts moratoires, amendes fiscales ou
douanières, majorations, frais de poursuite, quel que soit l’impôt ou le produit
divers du budget de l’Etat auquel ces pénalités ou frais s’appliquent », alors que
pour les autres impôts, cotisations ou contributions, le principal peut être
remis. En plus, ces remises doivent se réaliser dans « des conditions similaires
à celles que lui octroierait, dans des conditions normales de marché, un
opérateur économique privé placé dans la même situation ». Toutefois, la remise
de dette publique obéit au régime des aides d’Etat qu’il conviendra d’examiner
dans le cadre des interventions de l’Etat en faveur des entreprises en
difficultés.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
221
Section 2 : L’atteinte à la substance de la créance
contractuelle

442. Dans le souci d’alléger le passif du débiteur, le droit des


entreprises en difficulté modifie la substance de ses obligations contractuelles.
Certaines créances sont ainsi neutralisées du fait de leur irrégularité
(paragraphe 1), tandis que d’autres font l’objet d’une reconfiguration
(paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La neutralisation des créances irrégulières

443. Dès l’ouverture de la procédure collective, les créanciers sont


invités à déclarer leurs créances afin de situer les organes de la procédure sur
la portée du passif du débiteur. Cette déclaration doit se faire dans les délais
et selon la procédure indiquée par le législateur. L’inobservation des règles
relatives à la déclaration des créances a pour conséquence de priver certains
créanciers du droit de se prévaloir de leurs créances en évinçant celles-ci de
la procédure. C’est dans cette logique que s’inscrivent les inopposabilités et
nullités de la période suspecte (A) et la forclusion pour production tardive (B).

A/ Les inopposabilités et nullités de la période suspecte

444. Pendant la période suspecte, le débiteur aux abois peut être tenté
de dissiper son actif ou d'avantager indûment certains de ses créanciers. Dans
un souci d’équité, les droits de l’OHADA et français neutralisent ces
« expédients de dernière minute »696 et libèrent le débiteur du poids de ces
créances irrégulières. En effet, du jour de la cessation des paiements à celui
de l’ouverture de la procédure collective, les actes accomplis par le débiteur
ou avec ce dernier sont présumés frauduleux. En droit de l’OHADA, les articles

696A. MARTIN-SERF, « Entreprise en difficulté : nullités de la période suspecte », Rep. com.,


octobre 2017, n°2
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
222
68 et 69 de l’AUPC frappent ces actes d’inopposabilité, alors qu’en France, la
sanction encourue est la nullité.

445. La question s’est posée en doctrine de savoir si l’inopposabilité


était une sanction suffisante contre ces actes frauduleux. Pour certains
auteurs, la réponse est positive, car, l’inopposabilité suffirait à supprimer les
effets nuisibles de l’acte et constituerait la sanction adéquate697 dans la
mesure où la sanction ne devrait pas dépasser le but de la règle qu'elle
garantit698. Pour une autre doctrine, l’inopposabilité serait une sanction
insuffisante pour atténuer les effets d’un acte frauduleux699. En effet, l’atteinte
des actes à exécution successive et des actes constitutifs de droit réel sur la
chose d'autrui présente des particularités au niveau des dommages qu'ils sont
susceptibles de causer au droit des créanciers, d'où l'intérêt de la nullité en
lieu et place de la simple inopposabilité de ces actes aux créanciers700. La
nullité est ainsi apparue comme la sanction la mieux adaptée701. Face à ce
débat doctrinal, le législateur de l’OHADA et son homologue français ont choisi
des positions différentes.

446. Contrairement au droit français qui sanctionne par la nullité l’acte


suspect, le droit de l’OHADA prévoit l’inopposabilité de celui-ci à la masse des
créanciers702. Face à la suspicion de fraude des actes accomplis pendant la
période suspecte, le droit français se montre plus radical que le droit de
l’OHADA. En effet, les conséquences de la nullité apparaissent plus
dramatiques pour le créancier ou le tiers que l’inopposabilité. Car, l'acte nul,
non seulement est rétroactivement effacé, mais aussi ne produira plus jamais

697 J. VIDAL, Essai d’une théorie général de la fraude en droit français, le principe « fraus
omnia corrumpit », Université de Toulouse, 1956, p.308
698 D. BASTIAN, Essai d’une théorie générale de l’inopposabilité, Sirey, Paris 1929, p. 442

699 L. SAUTONIE LAGUIONIE, La fraude paulienne, Th., Université de Montesquieu-Bordeaux

IV, 2006, p.511


700 Ibid.
701
A. MARTIN-SERF, « Entreprise en difficulté : nullités de la période suspecte », op. cit. n°2
702 D. OWONA-ATANGANA, Le sort des créanciers d’un débiteur en difficultés en droit OHADA

à la lumière du droit français : l’égalité en question, Th., Paris I Panthéon-Sorbonne, 2021,


p.349
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
223
d'effet dans l'avenir puisque, la nullité délie le débiteur qui, après la clôture
de la procédure collective ou s'il redevient un jour in bonis, ne sera tenu
d'aucune obligation à l'égard de son cocontractant703. L’acte nulle est
définitivement anéanti erga omnes704. En revanche, du fait de l’inopposabilité,
la créance est ignorée de la procédure et donc du débiteur705, mais demeure
valable entre les parties706. L'inopposabilité consiste en l’inefficience d'un acte
à l'égard non seulement de la masse, mais aussi du débiteur qui est autorisé
à méconnaître l'existence dudit acte et d'en ignorer les effets707.

447. La nullité est la sanction la plus adaptée à l’objectif d’alléger le


débiteur du poids de sa dette. Car, elle aboutit à remettre en cause les
prestations réciproques fournies par le débiteur et son cocontractant, pour
revenir au statu quo ante708, alors que l’inopposabilité ne s’attaque pas à l’acte,
mais uniquement à ses effets à l’endroit de la masse709. Toutefois, les
difficultés de mise en œuvre de cette sanction peuvent apparaitre face à
l’impossibilité pour le débiteur de restituer certaines prestations. En effet, en
cas d'annulation d'un contrat à exécution successive, la remise des parties au
statu quo ante voudrait que les prestations réciproques soient restituées. Par
exemple, le locataire débiteur devrait restituer la jouissance de l'immeuble, et
l'employeur débiteur devrait restituer le travail effectué par le salarié. Or, de
telles restitutions ne sont pas possibles, les créanciers de ces obligations ne
pourront prétendre qu’au versement des indemnités compensatrices. La
rétroactivité est alors tempérée par l’octroi de ces indemnités compensatrices
fixées par le tribunal qui prononce la nullité710.

703
A. MARTIN-SERF, op. cit., n°62
704 Com 3 fév. 1998, D. 1999 jurisprudence p. 185 note A. BENABENT, JCP éd. G 1998 I 141
n°9 obs. R. CABRILLAC
705 P.M. LE CORRE, La réforme du droit des entreprises en difficulté, D. 2009, p. n° 237.3,

p. 136
706 C. NDONGO, Le nouveau visage de la prévention en droit OHADA, Th. Paris 1 Panthéon

Sorbonne, 2017, p.83


707 B. MAFEUGUEMDJO, Étude comparée en droit OHADA et français de la protection du

créancier chirographaire d'une société en difficulté, op. cit. p.72


708
A. MARTIN-SERF, op. cit., n°65
709 Ibid.
710
Ibid.
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
224
448. Dans tous les cas, qu’elle soit traduite par l’inopposabilité ou par
la nullité, la neutralisation de l’acte accompli pendant la période suspecte a
un double effet. D’une part, elle libère le débiteur des obligations issues de ses
transactions avec certains créanciers ou avec les tiers, lesquels ne pourront
plus s’en prévaloir. D’autre part, elle permet de rétablir l’égalité injustement
rompue entre les créanciers711 ce qui constitue une protection pour les
engagements contractuels qui auraient pu être marginalisés.

B/ La forclusion pour production tardive

449. La neutralisation ne concerne pas que les actes accomplis


pendant la période suspecte, elle affecte aussi les actes accomplis après
l’ouverture de la procédure, mais hors des délais impartis. En effet, dès le
jugement d’ouverture, les créanciers antérieurs dont la créance est née
régulièrement doivent la déclarer au mandataire judiciaire en France et au
Syndic en droit de l’OHADA. Cette production des créances se déroule dans
un laps de temps limité712. En droit de l’OHADA, dès le jugement d’ouverture,
les créanciers disposent de soixante (60) jours pour produire leur créances et
Quatre-vingt-dix (90) jours pour les créanciers domicilié hors du territoire
national où la procédure collective est ouverte713. En France, le délai de
production des créances est de deux (2) mois et quatre mois pour les
créanciers domiciliés hors de la France métropolitaine714. Le créancier qui n’a
pas déclaré sa créance dans ces délais impartis est forclos et ne pourra donc
pas être admis dans la répartition des dividendes715.

711 F.M. SAWADOGO, op. cit. p.220


712
F.M. SAWADOGO, op. cit. p.210
713 AUPC, art. 78
714 C. com. art.R.622-24
715
A. AKUE MICKALA, La situation de la caution en droit des procédures collectives au
regard de la règle de l’accessoire : Etude comparative droit français/droit OHADA, Th.
Université de Toulon ; Université Omar Bongo (Libreville), 2019, p.57 ; Ph. PETEL,
Procédures collectives, op. cit., p.167, n°283
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
225
450. En France, jusqu’à la réforme de 2005, le créancier forclos voyait
sa créance définitivement éteinte s’il n’était pas relevé de forclusion716.
Désormais, la créance n’est plus définitivement éteinte, elle est inopposable
non seulement au débiteur717, mais aussi à toute la procédure718. En droit de
l’OHADA, la créance irrégulièrement déclarée est inopposable à la fois au
débiteur et à la masse719. Ainsi, dans les deux systèmes juridiques, la
forclusion libère le débiteur des créances irrégulièrement déclarées, le
créancier ne pourra plus s’en prévaloir même après le vote du concordat en
droit OHADA et après l’adoption du plan en droit français. L’exécution du plan
libère le débiteur du passif non déclaré720.

451. Pour atténuer le sort du créancier, son droit de contrainte à


l’égard de la caution demeure donc intact721. En effet, avant les récentes
réformes intervenues dans les deux systèmes juridiques, l’extinction définitive
de la créance irrégulièrement déclarée profitait aussi bien au débiteur qu’à la
caution722. Cette solution a beaucoup évolué en faveur des créanciers, lesquels
conservent le droit de poursuivre l’exécution de leurs créances sur les cautions
in bonis723. Cette solution plus équilibrée cadre avec la philosophie du droit
des entreprises en difficulté qui est un droit des compromis. Le débiteur est
soulagé du poids de sa dette en vue de favoriser son redressement et le
créancier de son coté, peut obtenir le paiement de sa créance auprès de la
caution.

716
Ph. PETEL, op. cit., p. 168, n°284
717 C. com. art. L. 622-26, al. 2
718 Cass. com, 3 nov. 2010, n°09-70.312 ; D. 2010, Act. 26.45, obs. A. LIENHARD ; Gaz. Pal.,

8 janv. 2011, p.18, note, E. LE CORRE-BROLY.


719 AUPC, art. 83
720 Ph. PETEL, op. cit. p.169
721 A. AKUE MICKALA, La situation de la caution en droit des procédures collectives au regard

de la règle de l’accessoire : Etude comparative droit français/droit OHADA, Th. Université de


Toulon ; Université Omar Bongo (Libreville), 2019, p.59
722 Ibid.
723
A. AKUE MICKALA, op.cit., p.77
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
226
Paragraphe 2 : La reconfiguration de la créance
contractuelle

452. L’allègement de la créance contractuelle du débiteur passe aussi


par la reconfiguration de celle-ci. Il s’agit de donner à la créance une forme la
rendant plus facile à apurer. Elle peut ainsi être convertie en titre du capital
(A), ou subir une réduction à travers le mécanisme de l’arrêt du cours des
intérêts (B).

A/ La conversion de la créance en capital

453. L’anticipation de la faillite du débiteur passe par la


restructuration de son capital, laquelle peut s’avérer décisive pour sauver
l’entreprise en difficulté. Pour ce faire, à côté de la cession de droits sociaux
et de l'augmentation forcée du capital, la conversion de créances en titres qui
avait malheureusement été ignorée par la loi française du 26 juillet 2005724,
peut être une solution pour restructurer la dette du débiteur en passant outre
l'opposition de ses associés725.

454. Inspirée du debt to equity swap du droit anglo-saxon, cette


technique de restructuration des sociétés permet de diminuer la dette de
l'entreprise en encourageant les créanciers à convertir leurs créances en droits
sociaux726. Ainsi, le créancier peut, au lieu de risquer de perdre sa créance en
cas d’ouverture d’une procédure de liquidation, estimer opportun de convertir
celle-ci en actions du capital de l’entreprise débitrice727. L’examen des
modalités de ce mécanisme (1) est nécessaire avant de voir quel est son intérêt
dans la sauvegarde des contrats de l’entreprise débiteur (2).

724G. TEBOUL, « La préservation des créances et le sort des contrats », LPA n°125, 23 juin
2006, p.13
725 S. FARHI, « La conversion de créances en titres de capital lors d'une procédure collective »,

RPC., n° 1, Janvier 2019, étude 3, p.1.


726 S. FARHI, op cit. p.6
727 B. Y. MEUKE, « conversion de créances en titre du capital : quid du droit OHADA ? »,

Ohadata D-11-87, p.1


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
227
1/ Modalités de conversion de créance en capital

455. Il existe deux moyens de parvenir à la conversion des créances en


capitaux de l’entreprise débitrice. Le premier moyen consiste à procéder par
voie de négociation et obtenir ainsi une conversion consensuelle. Lorsque le
consensus n’est pas possible, l’intérêt supérieur de sauvegarde de l’entreprise
peut permettre d’imposer cette conversion aux créanciers.

456. La conversion consensuelle. Elle est le fruit d’une négociation.


Le débiteur doit rechercher le consentement du créancier. En effet, connue
des deux systèmes, la conversion des créances en titres n'est pas une
nouveauté en droit des procédures collectives. Les praticiens de la faillite
négocient depuis longtemps de telles conversions pour diminuer l'endettement
des entreprises728. Ces conversions sont ainsi proposées aux créanciers lors
de l'élaboration d'un plan de sauvegarde en France et d’un projet de concordat
de redressement en droit OHADA. Pour ce faire, les créanciers sont consultés
individuellement.

457. En droit OHADA, absent de l’AUPC de 1998, la possibilité de


convertir les créances en des parts du capital de l’entreprise avait été admise
en droit des sociétés lors de la réforme de l’AUDSCGIE intervenue en 2014.
L’article 562 de ce texte disposait déjà que, lors de l’augmentation du capital,
« les actions nouvelles sont libérées, soit en espèces, soit par compensation avec
des créances certaines, liquides et exigibles sur la société (…) ». Le droit OHADA
admettait donc déjà que les créanciers de l’entreprise au lieu de se faire payer,
acceptent de devenir associés de l’entreprise à condition qu’une telle mesure
ne soit pas interdite par les statuts729. Toutefois, la condition de l’exigibilité de
la créance faisait obstacle à l’application de la mesure dans la phase

Ibid
728

F. ANOUKAHA, A. CISSE, N. DIOUF, J. NGUEBOU TOUKAM, P.G. POUGOUE et M.


729

SAMB, OHADA Sociétés Commerciales et GIE, Bruylant, Bruxelles 2002, p.54, n°82
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
228
préventive de traitement des difficultés du débiteur. Car, lors des
renégociations préventives, le débiteur n’a pas encore failli à ses obligations,
la date n’exigibilité n’étant pas encore arrivée.

458. A la suite du droit des sociétés, le législateur OHADA a admis la


mesure de conversion des créances en capital dans son droit de la faillite lors
de la réforme de l’AUPC en 2015. Le nouvel article 119‐3 de l’AUPC dispose
ainsi que « le projet de concordat de redressement judiciaire peut comporter des
propositions de conversions de créances en titres donnant ou pouvant donner
accès au capital social de l’entreprise débitrice. Ces conversions ne peuvent en
aucun cas être imposées aux créanciers. Le syndic recueille par écrit l’accord
individuel de chaque créancier dont la créance est admise et qui accepte une
telle conversion ». Il résulte de ce texte qu’en droit OHADA des procédures
collectives, la conversion des créances en capital est une mesure
exclusivement consensuelle. L’exigence d’un écrit laisse comprendre que
l’accord du créancier doit être explicite, il ne saurait être déduit de son
attitude. Ainsi, comme en France, le silence du créancier doit valoir refus de
convertir sa créance en capital. Cette exigence d’un accord expresse se justifie
par le fait que, la mesure de conversion des créances en capital est un véritable
risque que prend le créancier, et cela ne saurait lui être imposé. Le
consentement personnel de chaque créancier est ainsi sollicité pendant les
négociations concordataires730.

459. La recherche du consentement des associés de l’entreprise


débitrice. La conversion des créances en capital est un mode d’augmentation
du capital. Sa réalisation n’est possible que si le capital de l’entreprise peut
être augmenté. Or, en France comme dans l’OHADA, l’augmentation du
capital n’est pas une décision que peuvent prendre de façon unilatérale les
dirigeants sociaux. Elle résulte d’une consultation des associés, lesquels
doivent consentir731 à une telle augmentation qui implique l’acception des

AUPC, Art. 122 et s.


730

F. ANOUKAHA, A. CISSE, N. DIOUF, J. NGUEBOU TOUKAM, P.G. POUGOUE et M.


731

SAMB, OHADA Sociétés Commerciales et GIE, op.cit., p.63, n°96


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
229
nouveaux associés et surtout une modification des statuts. En droit OHADA
des sociétés, l’article 67 de l’AUDSCGIE précise ainsi que la modification du
capital de la société s’effectue dans les mêmes conditions que la modification
des statuts. Or, les statuts représentent le contrat de société, en vertu du
principe de la force obligatoire du contrat, leur modification ne saurait se faire
sans le consentement des associés. Les deux législateurs prévoient ainsi que
l’augmentation du capital sociale relève de la compétence de l’assemblée
générale extraordinaire732.

460. La conversion imposée. S’inspirant du droit anglo-saxon, la loi


de Sauvegarde a instauré, en complément de la consultation individuelle des
créanciers, un cadre de consultation collective par la création des comités de
créanciers733. Le nouvel article L. 626-30-2 du Code de commerce prévoit
désormais que, cette consultation a lieu dans le cadre des classes de parties
affectées. Ainsi, des plans prévoyant des remises de dettes ou des conversions
de créances en titres donnant ou pouvant donner accès au capital peuvent
être proposés. Ils sont soumis au vote des créanciers réunis en classes et
adoptés à la majorité des deux tiers du montant des créances détenues par
les membres ayant exprimé leur vote734. Les créanciers minoritaires au sein
des classes se verront alors imposer des conversions de créances en titres
donnant ou pouvant donner accès au capital, lorsque le débiteur est une
société par actions dont tous les actionnaires ne supportent les pertes qu'à
concurrence de leurs apports735. Le droit français admet donc que soit
imposée à certains créanciers la conversion de leurs créances en capitaux.
Ces créanciers minoritaires se verront ainsi contraints de prendre des parts
dans une entreprise contre leur gré.

732 Cf. AUDSCGIE, art. 564 et C.com, Art. L.225-129


733 S. PELLETIER, C. VERROUST-VALLIOT, « Comités de créanciers : la loi de la majorité
peut-elle vraiment imposer des conversions forcées de créances aux minoritaires ? », R.P.C., n°
3, Mai 2017, étude 10, p.2, n°7
734 C. com., art. L. 626-30-2, al. 4
735 C. Com., L.626-30-2

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
230
461. Une violation de certains principes fondamentaux. La
conversion forcée des créances en capitaux se heurte à certains principes
fondamentaux tant du droit des contrats que du droit des sociétés. D’abord,
sur le plan du droit des contrats, cette mesure constitue une atteinte au
principe de la liberté contractuelle qui résulte de l'article 4 de la Déclaration
des Droits de l'Homme et du Citoyen, et repris en France par l’article 1102 du
Code civil. Ce texte dispose que « chacun est libre de contracter ou de ne pas
contracter, de choisir son cocontractant et de déterminer le contenu et la forme
du contrat dans les limites fixées par la loi ». Or, en imposant à un créancier
par le jeu de la majorité, la conversion de sa créance en capital, alors qu’il
avait déjà exprimé sa volonté de ne pas adhérer au contrat de société, on
assiste à une violation de ce principe de liberté contractuelle protégé par le
conseil constitutionnel français736.

462. Ensuite, la conversion forcée des créances en capitaux constitue


une remise en cause de l’affectio societatis comme élément constitutif
indispensable de la société commerciale. En effet, l’affectio societatis se définit
comme la volonté de chaque associé de contribuer à la réalisation de l'objet
social737. Or, dans le cadre de la conversion forcée des créances en capitaux,
les créanciers minoritaires qui subissent le vote de la majorité ont au contraire
manifesté leur volonté de ne pas contribuer à la réalisation de l’objet de
l’entreprise, ils se verront donc contraints, malgré cette volonté contraire, de
prendre des parts dans une société à laquelle ils n’ont jamais voulu adhérer.
Mais, cette remise en cause de l’affectio societatis est salutaire en ce qu’elle
permet de préserver un intérêt supérieur : la survie de l’entreprise, qui
implique la sauvegarde des emplois et l’exécution des engagements
contractuels.

463. En droit OHADA des procédures collectives, le législateur ne


semble pas laisser la possibilité d’imposer à un créancier la conversion de sa

736Cons. const., 13 juin 2013, n° 2013-672 DC : JurisData n° 2013-023077


737P. MERLE, A. FAUCHON, Droit commercial : sociétés commerciales, 20ème éd., D. 2017,
p.74
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
231
créance en part du capital de l’entreprise débitrice. L’article 119-3 de l’AUPC
dispose ainsi de manière formelle que les conversions de créances en capital
« ne peuvent en aucun cas être imposé aux créanciers », le syndic sera ainsi
chargé de requérir le consentement individuel de chaque créancier. La
solution se justifie par l’absence de consécration des comités de créanciers en
droit OHADA de la faillite. On assiste ainsi à une meilleure protection de la
volonté du créancier, mais une telle protection peut limiter les efforts
consentis pour redresser une entreprise en difficulté. Aussi, le cocontractant
dont la créance n’a pas été régler pourra poursuivre la résolution de son
contrat ce qui, dans la phase préventive des difficultés de l’entreprise, peut
précipiter celle-ci dans une situation de cessation des paiements. Mais qu’à
cela ne tienne, le syndic et les dirigeants de l’entreprise devront se montrer
convaincants, en démontrant l'existence d'une perspective de retour à
meilleure fortune pour ceux qui accepteront de prendre une participation en
capital738. Il s’agira de donner au créancier dont la conversion de la créance
est sollicitée, la preuve qu’il y a des fortes chances que l’entreprise soit
redressée.

464. Conditions de la conversion forcée des créances. Compte tenu


du caractère délicat de la mesure de conversion des créances en capitaux, les
législateurs OHADA et français l’ont subordonnée à des conditions précises.
En France, cette mesure de conversion forcée des créances en capitaux est
soumise à des conditions qui la restreignent à certaines entreprises. D’abord,
elle n'est possible que dans des sociétés par actions ou sociétés par actions
simplifiées. En effet, aux termes de l’article 1836 alinéa 2 du code civil
français, « en aucun cas, les engagements d'un associé ne peuvent être
augmentés sans le consentement de celui-ci ». Or, l’admission de la conversion
des créances en capitaux dans les sociétés de personnes aurait impliqué
l’engagement de la responsabilité de l’associé converti au-delà du montant de
sa créance originelle. Ensuite, il faut que les classes des parties affectées aient

738 R. DAMMANN, G. PODEUR, « La conversion de créances en capital dans les entreprises en


difficultés », BJS déc. 2009, n°12 - p. 1929
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
232
été constitués, ce qui implique aux termes des articles L.626-29 et R. 626-52
du code de commerce, que les comptes de la société aient été certifiés par un
commissaire aux comptes ou établis par un expert-comptable, et, en principe,
qu'elle emploie plus de 250 salariés et réalise un chiffre d'affaires supérieur à
20 millions d'euros, ou qu’elle atteigne 40 millions d’euro de chiffre d’affaires
net. Toutefois, le juge commissaire, saisi par l'administrateur judiciaire ou par
la société, peut autoriser la constitution des classes en-deçà de ces seuils739.

465. En outre, la mesure ne s’applique pas à tous les créanciers. Avant


la réforme de 2021 seuls étaient concernés, les créanciers membres du comité
des établissements de crédit et assimilés, du comité des principaux
fournisseurs, ou de l'assemblée générale unique des obligataires. Après la
réforme, la conversion forcée des créances en titres du capital s’applique
désormais aux classes de parties affectées. A contrario, les créanciers hors
classes740 restent quant à eux régis par les règles « classiques » : en cas de
refus des propositions faites par le débiteur, il ne peut leur être imposé autre
chose qu'un rééchelonnement de leur dette sur la durée du plan, à savoir dix
ans au maximum741. Enfin, la conversion ne pourra être imposée à l'ensemble
des créanciers membres des classes que si le projet de plan qui la prévoit a
recueilli la majorité des suffrages au sein de chaque classe de partie affectées.

466. Par ailleurs, les créanciers minoritaires jouissent d’une protection


de la part du tribunal, qui n’est pas lié par les décisions des classes. Aux
termes de l’article L.626-31, le juge est tenu de vérifier « que les intérêts de
tous les créanciers sont suffisamment protégés ». Il veillera ainsi à ce que les
créanciers majoritaires ne profitent pas de la situation pour imposer aux
créanciers minoritaires un traitement plus défavorable que le leur, ou un
traitement identique au leur alors qu'ils sont objectivement dans une situation
différente742.

739 R. DAMMANN, G. PODEUR, op. cit. p.1930


740 Notamment ceux bénéficiant d'une fiducie sûreté selon l’article L.626-30 dernier alinéa
741 Ibid.
742 Ibid.
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
233
467. En droit OHADA, contrairement au droit français, on assiste à une
généralisation de la mesure à toute forme d’entreprise. En effet, ni l’article
119-3 de l’AUPC, ni l’article 562 de l’AUDSCGIE ne circonscrit la mesure à
une catégorie de société ou d’associé précise. N’importe quel associé dans
n’importe quel type de société peut donc convenir avec le débiteur de la
conversion de sa créance en titre du capital de l’entreprise. Toutefois, en droit
OHADA des sociétés commerciales, toutes les créances ne peuvent pas faire
l’objet d’une conversion en capital. L’article 562 alinéa 2 de l’AUDSCGIE
précise que la créance dont la conversion est envisagée doit être certaine,
liquide et exigible. Ces conditions n’ont pas été reprises par législateur africain
lorsque la conversion doit intervenir dans le cadre d’une procédure collective.

468. En effet, la condition d’exigibilité de la créance aurait rendu la


mesure inapplicable dans la phase préventive des difficultés de l’entreprise,
comme c’est le cas en France. En ne reprenant pas cette exigence à l’article
119-3 de l’AUPC, le législateur OHADA laisse la possibilité d’appliquer la
mesure dans la phase de conciliation ou de règlement préventif. En fait,
pendant les renégociations préventives, le débiteur peut proposer à certains
de ses créanciers, la conversion de leurs créances en des parts sociales dans
son entreprise. Ceci permettra de garantir la survie de l’entreprise et par
ricochet l’exécution de tous les contrats en cours. La conversion des créances
en capitaux peut ainsi être un remède préventif à l’inexécution des contrats
d’une entreprise admis dans les deux systèmes.

2/ Intérêt de la conversion de créance en capital

469. La conversion des créances en titre du capital comporte un double


intérêt. Pour le créancier, elle peut s’analyser comme une exécution par
équivalent de l’obligation. En effet, l’opération permet à celui-ci de recevoir les
titres du capital de l’entreprise d’une valeur égale à celle de la créance qui lui

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
234
était due par le débiteur en difficulté. Du point de vue du débiteur, ce
mécanisme lui permet de se libérer d’une dette sans avoir à puiser dans ses
ressources. La créance est payée sans que ce paiement affecte les ressources
de l’entreprise. La conversion de créances en titres de capital permet, au même
titre qu’un abandon de créances, « d’effacer la dette » en contrepartie de titres
de capital743, ce qui constitue pour l’entreprise débitrice, d’un point de vue
financier tout comme opérationnel, un réel avantage.

470. Le mécanisme de conversion des créances en capitaux est un


véritable pari gagnant-gagnant. En effet, du point de vue du débiteur, la
conversion lui permet de se libérer de sa dette envers le créancier converti
sans pour autant puiser dans sa trésorerie. Pour y parvenir, il devra
convaincre ses créanciers à investir dans l’entreprise au moyen de la
conversion de leurs créances en capitaux, en démontrant non seulement
l'absolue nécessité d'une restructuration de la dette, mais aussi et surtout
l'existence d'une perspective de retour à meilleure fortune pour ceux qui
accepteront de prendre une participation en capital. En outre, lorsque le
débiteur exerce son activité sous la forme d’une société, il aura besoin
d’obtenir l’adhésion de ses partenaires d’affaires (associés ou actionnaires) au
projet d’augmentation du capital qu’implique l’admission des nouveaux
capitaux.

471. Du point de vue du créancier, il s’agit d’une véritable profession


de foi744 en un éventuel redressement de la situation du débiteur. Ainsi,
devenu un des propriétaires de l’entreprise, le créancier converti gagnera plus
que le montant de sa créance si l’entreprise redevient in bonis. La mesure est
surtout salutaire pour les créanciers chirographaires qui n’ont que très peu
de chance d’être payés en cas de cession ou de liquidation de l’entreprise. Par
la conversion de leurs créances en capital, ils assurent ainsi une protection

743 A. PIETRANCOSTA, S. VERMEILLE, « Le droit des procédures collectives à l’épreuve de


l’analyse économique du droit Perspectives d’avenir ? » RTDF N° 1 – 2010, p.5, n°32
744 S. FARHI, « La conversion de créances en titres de capital lors d'une procédure collective »,

op. cit, p.6


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
235
minimale de leurs droits en cas de redressement de l’entreprise. Dans le cas
contraire, leurs pertes seront énormes surtout si la société est à responsabilité
illimitée. Même dans les sociétés à responsabilité limitée, la conversion des
créances en capitaux n’est pas sans risque pour le créancier converti. En effet,
du fait de sa nouvelle situation et de son intérêt qu’il a à préserver, le
créancier-actionnaire pourra être tenté de prendre une part active à la gestion
de l’entreprise. En cas d’ouverture d’une procédure collective, ce dernier
pourra voir sa responsabilité être engagée pour insuffisance d’actifs si son
comportement caractérise une direction de fait745.

472. Compte tenu du caractère risqué de l’opération, le créancier doit


volontairement y consentir et ce consentement doit être clairement exprimé,
son silence valant refus. Avant de consentir à la conversion de sa créance, le
créancier pourra solliciter une expertise indépendante pour se convaincre de
l'absence d'état de cessation des paiements de la société. Car, il pourrait aussi
s'exposer à une action en responsabilité pour soutien abusif si, par la
conversion de sa créance, il a permis à l'entreprise de poursuivre
artificiellement son activité, alors qu'elle était déjà dans une situation
irrémédiablement compromise et qu'il en avait connaissance. La solution la
plus sûre pour lui consistera donc à procéder à la conversion de sa créance
en capital dans le cadre d'une procédure de conciliation aboutissant à un
accord homologué par le tribunal. L’avantage sera qu'en cas d'ouverture d'une
procédure collective par la suite, la date de cessation des paiements ne pourra
être fixée à une date antérieure à celle du jugement d'homologation746.

745 R. DAMMANN, G. PODEUR, « La conversion de créances en capital dans les entreprises en


difficultés », BJS déc. 2009, n°12 - page 1129.
746 C. Com, art.631-8

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
236
B/ La réduction de la créance contractuelle à travers le
mécanisme de l’arrêt du cours des intérêts

473. Certaines obligations sont productives d’intérêts légaux ou


conventionnels, lesquels peuvent eux-mêmes produire des intérêts par une
demande judiciaire ou par une convention spéciale. Ces intérêts font partie
de la créance que le créancier est en droit d’exiger de son débiteur.
Lorsqu’ils sont conventionnels, ces intérêts jouissent de la force obligatoire
de la convention à laquelle ils sont greffés et devraient donc s’imposer au
débiteur. Or, dans le souci de ne pas alourdir davantage sa dette, le droit
des procédures collectives décharge le débiteur en difficulté du poids des
intérêts à échoir au jour du jugement d’ouverture.

474. En droit de l’OHADA 747 comme en France 748, la décision


d’ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, de tous
intérêts et majorations de retard de toutes les créances, qu’elles soient ou
non garanties par une sûreté. Le débiteur ne pourra plus se prévaloir des
intérêts à échoir au jour du jugement d’ouverture. Ces intérêts sont
définitivement neutralisés. La terminologie utilisée par les deux
législateurs : "arrêt du cours des intérêts" et pas "suspension" ne laisse pas
de doute sur le fait que la procédure collective emporte irrévocablement
perte du droit aux intérêts à échoir, quelle que soit l’issue de la procédure.
Le cours des intérêts arrêté durant la période d'observation, ne reprend
pas en phase d'exécution du plan 749 , il ne reprend pas non plus après la
procédure, quand bien même le débiteur serait redevenu in bonis 750. Cette
mesure vise à faciliter le redressement de l'entreprise s'il est possible, en
évitant d’alourdir sa dette au profit de certains créanciers. Elle opère une

747 AUPC, art. 77


748 C. com, art. L.622-28 al. 1er
749
Cass com 10 décembre 2002 n°99-20478
750Cass. com., 5 févr. 2020, n° 18-19.044, F-D : JurisData n° 2020-001610 ; Cass.
soc. 10 déc.1996 n° 95-40.487 D ; Cass. com. 7 fév.1989 n° 87-14.003 P : Bull. civ. IV n° 50 ;
Cass. com. 10 déc. 2002 n° 2063 F-D : RJDA 6/03 n° 615.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
237
diminution de la dette du débiteur vis-à-vis de son créancier en modifiant
de manière autoritaire les termes du contrat.

475. L’arrêt du cours des intérêts s’applique à tous les contrats sans
qu’il soit nécessaire de rechercher si le contrat est en cours ou pas à la
date du jugement d’ouverture de la procédure 751. Seuls
les intérêts résultant d'un contrat de prêt conclu pour une durée égale ou
supérieure à un an ou d'un contrat assorti d'un paiement différé d'un an
ou plus échappent à la règle de l'arrêt du cours des intérêts. La
jurisprudence précise à ce sujet que dès lors qu'une convention de compte
courant ne précise ni la durée pendant laquelle la mise à disposition des
fonds est accordée, ni les modalités de son remboursement, les modalités
de remboursement de ce compte courant par la société, accordées lors de
la cession de ses titres, ne confèrent pas au compte courant la qualité de
prêt à plus d'un an 752.

476. L’arrêt du cours des intérêts ne concerne pas les procédures


préventives. En effet, le débiteur n’étant pas encore en cessation des
paiements, il ne peut bénéficier que de la suspension des poursuites, mais les
intérêts attachés à sa créance continuent de courir753. La mesure ne vise pas
les clauses pénales, qui ne sont en principe pas des intérêts au sens propre
du terme754. En revanche, le cours des intérêts n’est arrêté qu’à l’égard de la
masse. Ces intérêts continuent de courir à l’égard des codébiteurs et des
cautions personnes morales à qui ces intérêts peuvent être réclamés755.

751 D. ROBINE, M. JEANTIN, P. LE CANNU, Droit des entreprises en difficultés, 9ème éd., D.,
Paris 2022, p.450 ; Cass. Com, 16 avril 1991, n°89-19.868 : Bull. civ IV, n°143 ; RD bancaire
1991, 156, obs. M-J CAMPANA et J-M CALANDINI.
752 Cass. com., 23 avril 2013, n° 12-14.283, F-P+B
753 F.M. SAWADOGO, op. cit., p. 64
754
D. ROBINE, M. JEANTIN, P. LE CANNU, op. cit, p.450
755
F.M. SAWADOGO, op. cit., p.204
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
238
Conclusion du chapitre 2

477. Tous les droits du créancier ne subissent pas le diktat du droit


des entreprises en difficulté. Il y a des prérogatives sur lesquelles
l’impérialisme de ce droit ne peut pas agir. Ces prérogatives ne peuvent pas
être modifiées sans le consentement du créancier. Dès lors, le droit des
entreprises en difficulté encourage le cocontractant du débiteur à accepter de
renégocier certaines de ses prérogatives contractuelles en vue d’alléger le
débiteur et lui permettre de pouvoir s’exécuter avec les moyens dont il dispose.
A l’issue de ces renégociations, le créancier est encouragé à consentir des
aménagements de certains de ses droits en contrepartie d’un traitement de
faveur, notamment d’une priorité de paiement.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
239
Conclusion du titre 1

478. Malgré les difficultés auxquelles le débiteur fait face, l’ouverture


d’une procédure collective ne le dispense pas de l’exécution de ses obligations
contractuelles. Au contraire, le droit des entreprises en difficulté encourage le
débiteur qui fait l’objet d’une procédure collective à continuer à honorer ses
engagements contractuels. Mais, pour tenir compte de sa situation
économique et financière difficile, les droits OHADA et français entreprennent
une modification du contrat qui vise à tailler celui-ci à la mesure de ses
capacités d’exécution. Deux voies sont alors explorées. Dans un premier
temps, le droit des entreprises en difficulté va imposer son diktat au créancier
en neutralisant de manière autoritaire, certains de ses droits. Dans un second
temps, pour les droits imperméables à l’impérialisme des procédures
collectives, les deux systèmes encouragent le créancier à accepter de
renégocier avec son débiteur. Toutefois, pour être efficace, la renégociation des
obligations contractuelles doit être envisagée à temps. En effet, plus les
discussions entre le débiteur et ses cocontractants s’organisent tôt, au
moment de la survenance des premières difficultés, plus les parties se placent
en situation de concevoir des solutions pouvant permettre d’éviter la
défaillance contractuelle. Ainsi, les mécanismes de traitement préventif des
difficultés du débiteur constituent-ils des moyens de préserver les contrats en
évitant à tout prix que ceux-ci soient résolus.

479. En cas d’échec des renégociations ou de dégradation suffisante de


la situation du débiteur, le droit des entreprises en difficulté surmonte
l’inexécution contractuelle en redéfinissant le sort du contrat.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
240
Titre 2 :
La redéfinition du sort du contrat

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
241
480. La défaillance du débiteur devrait en principe libérer ses
cocontractants de toutes leurs obligations contractuelles et entrainer la
rupture des contrats inexécutés. Or, une telle solution compromettrait aussi
bien la situation du débiteur que celle des créanciers. En effet, le redressement
du débiteur et l’apurement de son passif nécessitent que se poursuive son
activité. Cette poursuite n’est possible que si les contrats qui font vivre
l’entreprise sont maintenus. Pour ce faire, le droit des entreprises en difficulté
s’attèle à redéfinir le sort du contrat inexécuté. Cette redéfinition implique que
soient évincés certains principes fondamentaux du droit des contrats. On
assistera ainsi à un maintien forcé du contrat (chapitre 1) ou à la
transmission de celui-ci à un tiers capable d’assurer son exécution (chapitre
2).

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
242
Chapitre 1 : Le maintien forcé des contrats en cours

481. En tant que principales richesses de l'entreprise756, les contrats


qui lient celle-ci à ses fournisseurs, ses distributeurs, ses clients, son
banquier etc. participent de son devenir. En cas d’ouverture d’une procédure
collective, toute l’attention doit être portée à sauver les contrats utiles à sa
survie, quitte à le maintenir contre le gré du cocontractant. Le maintien du
contrat sera donc forcé, car il se fera au détriment de ce dernier757 qui aura
souvent intérêt à mettre fin au contrat en vue de se tourner rapidement vers
d’autres partenaires. Or, le débiteur aura quant à lui, intérêt à poursuivre la
relation contractuelle pour espérer améliorer sa situation758. Dès lors, l’ordre
public économique va primer sur la volonté du cocontractant. Pour ce faire,
les droits OHADA et français posent le principe de la continuation des contrats
en cours d’exécution (section 1) et emménage en faveur de ces contrats
continués un régime juridique favorisant leur exécution (section 2).

Section 1 : La continuation des contrats en cours

482. Pour permettre au débiteur d’honorer tous ses engagements


contractuels, il est indispensable que son activité se poursuive et le contrat
constitue un élément essentiel à cette poursuite de l’exploitation. Ainsi, pour
éviter que sa défaillance ne serve d’alibi à ses partenaires contractuels pour
cesser ou s’abstenir d’exécuter leurs obligations, les droits OHADA et français
ont posé le principe de la continuation de plein droit des contrats en cours. Le
contrat en cours est souvent confondu au contrat à exécution successive. Or,
un contrat à exécution successive n’est pas forcément en cours759 au jour de

756 J. P. GASTAUD, « Continuation des contrats en cours et sort du bail dans le redressement
et la liquidation judiciaires », LPA 8 juill. 1996, n°82, p.29.
757 Y. GUYON, Droit des affaires, Tome 2, Entreprises en difficultés : redressement judiciaire

– faillite, 8ème éd., Economica, Paris 2001, p.231, n°1206.


758 D. ROBINE, P. LE CANNU, Droit des entreprises en difficultés, op. cit., p.460

759 B. SOINNE, Traité des procédures collectives, 2 ème éd., Litec, Paris, 1995, p.998, n°1328.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
243
l’ouverture d’une procédure collective, il peut déjà avoir fini de produire ses
effets760.

483. Les contrats en cours renvoient à « l'ensemble des contrats formés


ou existant avant le jugement d'ouverture mais dont l'exécution est en cours,
voire même pas encore commencée et non terminée au jour du jugement
d'ouverture »761. Un contrat est donc dit en cours lorsqu’il a été formé avant le
jugement d’ouverture et qu’il n’a pas épuisé ses effets au moment où ce
jugement est rendu762. Par ailleurs, la continuation des contrats en cours
pouvant alourdir le passif du débiteur et compromettre l’exécution des
contrats les plus importants, il convient de faire un tri763 entre les contrats
dont la continuation est nécessaire au redressement du débiteur ou à
l’apurement de son passif et ceux qui ne sont pas indispensables. Il se pose
donc la question du domaine de la continuation qu’il convient d’examiner
(paragraphe 1), avant de voir le pouvoir discrétionnaire du syndic en la
matière (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Le domaine de la continuation des contrats en


cours

484. Dans un souci de préservation de l’activité du débiteur, les droits


OHADA et français ont une conception large des contrats concernés par la
poursuite (A), mais divergent quant à leur appréciation du moment de la mise
en œuvre de ce principe (B).

760 F.M. SAWADOGO, Droit des entreprises en difficulté, op. cit. p.180
761 T. MONTERAN, « L'influence du redressement judiciaire sur la poursuite et la fin des
contrats », Gaz. Pal. 30 sept. 2003, n°273, p.2
762 E. LE CORRE-BROLY, « Le droit commun de la continuation des contrats en cours », Gaz.

Pal. 15 oct. 2019, n°35, p.74


763 Ph. PETEL, Procédures collectives, op. cit., p.187

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
244
A/ Une conception large des contrats concernés par la
poursuite

485. Le principe de la continuité des contrats en cours s’étend tant aux


contrats intuitu personae qu’à ceux qui ne sont parfois pas directement liés à
l’activité du débiteur. Il s’applique donc en principe à tous les contrats du
débiteur en cours au jour du jugement d’ouverture764.

486. Les contrats intuitu personae. Inspiré par l’ancienne loi


française de 1967 qui prévoyait une rupture automatique des contrats intuitu
personae765, l’ancien AUPC excluait du champ de la continuation de plein
droit, les contrats conclus en considération de la personne. Il laissait à chaque
Etat partie la latitude d’ajouter à cette liste des exceptions, les contrats de son
choix. Cette position était contraire à la volonté du législateur OHADA qui est
de limiter au maximum les cas dans lesquels la continuation des contrats en
cours ne serait pas possible766. D’où, l’exclusion des contrats conclus intuitu
personae a été beaucoup critiquée par la doctrine767.

487. En effet, il était reproché à cette exception de compromettre le


redressement de l’entreprise768, car elle exclut de ce processus un groupe de
contrats dont la continuation pouvait être aussi utile que celle des autres
contrats769. Ces critiques ont emporté l’adhésion du législateur de l’OHADA,
qui a choisi de suivre le pas de son homologue français. Le nouvel article 107

764 D. ROBINE, P. LE CANNU, Droit des entreprises en difficultés, op. cit., p.463
765 B. SOINNE, Traité des procédures collectives, op. cit., p.1001, n°1329 ; Ph. PETEL,
Procédures collectives, op. cit., p.188
766 A.S. ALGADI, L. ELKOUBI, « La résolution de plein droit des contrats en droit OHADA des

procédures collectives », R.C.D.A, n°8, 2012, p.25.


767 F.M. SAWADOGO, Le droit des entreprises en difficulté, op cit. p.182 ; A.S. ALGADI, L.

ELKOUBI, op. cit., p.25 et s.


768 M.H. MONSERIE, Les contrats dans le redressement et la liquidation judiciaires des

entreprises, op.cit., p.174


769 F.M. SAWADOGO, Le droit des entreprises en difficulté, op cit. p.182 ; A.S. ALGADI, L.

ELKOUBI, « La résolution de plein droit des contrats en droit OHADA des procédures
collectives », op., cit. p.27.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
245
de l’AUPC révisé dispose que « nonobstant toute disposition légale ou toute
clause contractuelle ou indivisibilité, aucune résiliation ou résolution d’un
contrat en cours ne peut résulter du seul fait de l’ouverture du redressement
judiciaire ou de la liquidation des biens ». L’exclusion des contrats intuitu
personae a été abandonnée. Il en est de même pour le pouvoir souverain
reconnu à chaque Etat membre de soustraire à ce principe les contrats de son
choix.

488. En France, la nature du contrat est sans influence sur le fait qu'il
puisse être continué ou pas. Le principe de la continuation des contrats en
cours s’applique à tout type de contrat. La question s’est posée de savoir si les
contrats administratifs770 pouvaient être soumis à la règle de la continuation
de plein droit. La jurisprudence répond à cette question par l’affirmative771.
Les contrats administratifs sont donc soumis en France au principe de
continuation772. La question ne s’étant jamais clairement posée en droit
OHADA, les juristes africains peuvent s’inspirer de cette solution dégagée par
les juges français.

489. L’extension au-delà des contrats nécessaires à la poursuite de


l’activité. En principe, le choix de poursuivre de plein droit une relation
contractuelle ne se justifie que dans la mesure où le contrat en cours se définit
comme une valeur jugée nécessaire à la poursuite de l'activité du débiteur773.
Le sort du contrat est alors fonction de son utilité. C’est ce qui justifie le droit
d’option du syndic. Ainsi, lorsque le législateur pose le principe de la
continuation des contrats en cours, il ne fait aucun doute qu’il vise non
seulement les contrats en vigueur, mais aussi et surtout ceux qui sont
nécessaires à la poursuite de l’activité du débiteur, les contrats de son
commerce. Or, une telle conception semble limitée. En effet, plusieurs

770 D. ROBINE, P. LE CANNU, Droit des entreprises en difficultés, op. cit., p.465
771 Cass. com., 16 juin 2004, n° 01-13.781 : JurisData n° 2004-024218 ; Rev. proc. coll. 2004,
p. 224, n° 4, obs. Ph. Roussel Galle
772 B. SOINNE, Traité des procédures collectives, op. cit., p.1095, n°1427

773 D. LEGEAIS, Droit commercial et des affaires, 29 ème éd., Sirey, Paris 2023, p.644

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
246
contrats n’ayant pas de lien direct avec l’activité du débiteur peuvent s’avérer
utiles à son redressement. La règle de la continuation des contrats en cours
peut être étendue aux contrats qui ne relèvent pas de l’activité du débiteur774,
lorsque leur rupture peut compromettre son redressement. Il en est ainsi en
cas d’ouverture d’une procédure collective à l’endroit d’une entreprise
individuelle ou d’une société à responsabilité illimitée. Dans ce cas, en vertu
de la règle de l’unité du patrimoine, les biens personnels de l’entrepreneur ou
des associés sont soumis à la procédure.

490. Dès lors, le principe de la continuation des contrats en cours ne


devrait pas se limiter aux contrats conclus pour l’exploitation de l’entreprise,
il pourrait s’étendre aux contrats étrangers à l’entreprise, mais dont la
poursuite peut permettre de remédier aux difficultés du débiteur775. Le
principe de la continuation des contrats en cours a donc un domaine très
étendu, il revient au Syndic de faire montre de vigilance dans l’exercice de son
droit d’option.

B/ Une appréciation divergente des procédures concernées

491. Alors qu’en droit de l’OHADA la continuité des contrats en cours


est limitée au débiteur en cessation des paiements, en droit français, elle est
étendue au débiteur in bonis. Aux termes de l’article 107 de l’AUPC, « aucune
résiliation ou résolution d’un contrat en cours ne peut résulter du seul fait de
l’ouverture du redressement judiciaire ou de la liquidation des biens ». Il ressort
de ce texte que l’AUPC a entendu limiter le principe de la continuation de plein
droit des contrats en cours aux seules entreprises faisant l’objet soit d’un
redressement judiciaire, soit d’une liquidation des biens. Ainsi, en droit de

774 E. LE CORRE-BROLY, « Le droit commun de la continuation des contrats en cours », Op.


Cit. p.75
775 T. MONTERAN, « L'influence du redressement judiciaire sur la poursuite et la fin des

contrats », op.cit ; J. VALLANSAN, « Sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires. –


Continuation des contrats en cours. – Généralités », JurisClasseur Commercial, Fasc. 2335, p.3

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
247
l’OHADA, seuls les débiteurs en cessation de paiements peuvent se prévaloir
de ce principe, la conciliation et le règlement préventif y sont donc exclus.
Cette limitation peut se justifier par le souci de faire prévaloir la force
obligatoire du contrat.

492. En effet, le principe de la continuation de plein droit des contrats


en cours constitue une entorse très grave au principe sacrosaint de la force
obligatoire du contrat. Une telle entorse ne devrait se justifier que par le souci
de préserver l’ordre public économique menacé par la disparition d’une
entreprise. Or, dans la phase préventive, l’entreprise n’est pas menacée de
disparition. Elle connait des difficultés, mais qui ne l’empêchent pas de
continuer à honorer ses engagements contractuels. La mise en œuvre du
régime exorbitant que constitue le principe de la continuation de plein de droit
ne se justifie donc pas. Il s’agit là encore d’une limitation qui met à mal la
philosophie de redressement des entreprises en difficultés.

493. Pour rendre la continuation des contrats en cours plus efficace


dans la recherche du redressement de la situation du débiteur, il est
important d’appliquer le principe dans la phase préventive des difficultés du
débiteur776. Ainsi, le principe de continuation pourrait être imposé dès
l’ouverture de la conciliation et empêcher les créanciers qui n’ont pas été
appelés ou ceux qui ont refusé de participer à la renégociation d’invoquer
l’exception d’inexécution ou de se prévaloir d’une clause résolutoire contenue
dans le contrat, ce qui sera de nature à aggraver les difficultés du débiteur et
donc à le rendre insolvable.

494. En revanche, en droit français le principe de la continuation de


plein droit des contrats en cours dispose d’un champ plus étendu777. Aux
termes des articles L.622 et L.641-11-1 du code de commerce, la continuation
de plein droit des contrats en cours est applicable que le débiteur soit en

776 W.D. KABRE, « Le dérèglement de la force obligatoire du contrat par les procédures
collectives en droit OHADA », in mélange SAWADOGO, 2018, p.593
777 D. ROBINE, P. LE CANNU, Droit des entreprises en difficultés, op. cit. p.461

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
248
cessation des paiements ou pas. Dans la phase préventive des difficultés du
débiteur, la continuation de plein droit des contrats en cours s’applique
uniquement à la sauvegarde selon l’article L.622 du code de commerce. Le
débiteur ne peut donc pas s’en prévaloir pendant la conciliation. Comme déjà
indiqué plus haut, une telle limitation est regrettable, l’extension du principe
à la phase de conciliation aurait pu mettre le débiteur à l’abri des exceptions
d’inexécution préventives que pourraient vouloir invoquer certains de ses
créanciers. On aurait ainsi pu étendre ce principe, mais sans le généraliser à
tous les contrats. Le conciliateur aurait ainsi pu avoir le pouvoir de faire
poursuivre certains contrats nonobstant la défaillance du débiteur. En plus
de la phase préventive, le législateur français étend le principe de la
continuation des contrats en cours dans la phase de traitement des difficultés
du débiteur, notamment lorsqu’il se trouve en redressement778 ou en
liquidation judiciaire779.

495. Au regard de ce qui précède, le champ d’application du principe


de la continuation des contrats en cours est plus étendu en France qu’en droit
de l’OHADA. Cette limitation du droit OHADA qui parait à première vue
favorable aux contractants peut constituer un frein au processus de sauvetage
des contrats du débiteur en difficulté. En effet, le salut du contrat passe par
la restauration du débiteur dans une santé financière normale. Or, cette
restauration peut nécessiter que certains contrats fassent l’objet d’un
maintien forcé malgré la défaillance du débiteur. En n’admettant le principe
de la continuation des contrats en cours que dans la phase préventive, tout le
processus préventif visant à éviter la cessation de paiement du débiteur et
donc l’inexécution de ses engagements contractuels se trouve fragilisé.

778 C. Com, Art. L.631-14


779 C. Com, Art. L.641-11-1

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
249
Paragraphe 2 : La limitation de la continuation des contrats
en cours par le droit d’option

496. Le principe de la continuation des contrats en cours n’est pas


absolu. Dès l’ouverture d’une procédure collective, les contrats peuvent être
continués ou rompus selon des règles dérogatoires au droit commun des
contrats, notamment malgré leur inexécution ou malgré l'absence
d'inexécution. Les règles du droit des procédures collectives aménagent ainsi
un droit d’option qui limite le principe de continuation des contrats en cours,
car en vertu de ce droit d’option, tous les contrats ne seront pas poursuivis,
ce qui constitue une limite à l’effort de sauvegarde des contrats. Il convient de
déterminer le titulaire de ce droit d’option (A) avant d’en exposer les modalités
d’exercice (B).

A/ Le titulaire du droit d’option

497. En droit de l’OHADA comme en France, le droit d’option


appartient exclusivement au mandataire judiciaire. Il s’agit du syndic en droit
de l’OHADA et de l’administrateur judiciaire (en cas de redressement) ou du
liquidateur (en cas de liquidation). Le mandataire a ainsi l’exclusivité du droit
d’option entre les différents contrats en cours liant le débiteur. En tant que
pivot du mécanisme de la continuation des contrats en cours, il a la faculté
d'exiger leur continuation au mépris des dispositions légales contraires et des
stipulations des parties780. Toutefois, pendant la période d’observation ou en
redressement judiciaire, le débiteur n’étant pas totalement dessaisi, il peut
exercer l’option à condition de requérir l’avis du mandataire781. La
jurisprudence retient à cet effet que la poursuite ou la résiliation du contrat
par le débiteur sans l’avis du mandataire n’engage pas la procédure. Une telle

780 J. VALLANSAN, « Sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires. – Continuation des


contrats en cours. – Généralités », JurisClasseur Commercial, Fasc. 2335, p.3
781 CA Versailles, 28 nov. 1996, D. 1997, p.508, note F. PEROCHON.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
250
décision est nulle et le contrat poursuivi par le débiteur peut être résilié par le
mandataire782.

498. L’administrateur exerce son option en toute liberté. Il dispose d’un


pouvoir discrétionnaire qu’il doit toutefois manier dans l’intérêt de l’entreprise.
Ainsi, l’option de poursuivre ou pas le contrat est gouvernée par deux
postulats : l’importance dudit contrat dans le redressement du débiteur ou
dans l’apurement de son passif et les capacités d’exécution de l’entreprise. En
effet, pour ordonner la poursuite d’un contrat, celui-ci doit être important
pour la poursuite de l’activité du débiteur et l’administrateur doit se rassurer
que l’entreprise dispose des ressources pour accomplir sa prestation.

499. Cette hégémonie de l’administrateur sur les contrats du débiteur


est une violation du principe de la force obligatoire. Toutefois, il s’agit d’une
violation salutaire, car elle assure la poursuite des contrats utiles en mettant
le débiteur à l’abri de toute résolution. Certains contrats seront sacrifiés pour
permettre au débiteur de mieux exécuter ceux qui apparaissent être les plus
importants pour sa survie ou pour l’apurement de son passif. On peut
toutefois se demander si le juge peut remettre en cause la décision du syndic
ou de l’administrateur ; si les cocontractants dont les contrats ont été jugées
inutiles peuvent contester le choix du syndic lorsqu’ils le jugent arbitraire. En
l’état actuel du droit, le pouvoir du Syndic ou de l’administrateur est absolu,
aucun recours n’est prévu contre sa décision. Il aurait fallu laisser la
possibilité au contractant dont le contrat n’a pas été continué de saisir le juge
s’il peut prouver que ce choix du Syndic ou de l’administrateur est arbitraire,
que son contrat est essentiel pour la survie de l’entreprise.

Cass. Com, 5 février 2020, n°18-21.529, LEDEN, mars 2020, n°113d9, p.5, obs. P.
782

RUBELLIN
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
251
B/ Les modalités d’exercice de l’option

500. Le droit d’option n’est enfermé dans aucune condition de forme


ou de délai. Sur le plan de la forme, l’option du Syndic ou l’administrateur
peut être clairement exprimée ou déduite de son attitude. Ainsi, le fait
d’accomplir la prestation attendue du débiteur vaut décision implicite de
poursuivre le contrat. Par ailleurs, la décision de l’administrateur ou Syndic
n’est enfermée dans aucun délai précis. La décision de continuer ou de
renoncer à un contrat peut intervenir à tout moment de la procédure. En
attendant que le débiteur ou son représentant manifeste son choix, le
cocontractant doit poursuivre l’exécution de ses obligations783.

501. Toutefois, les deux systèmes juridiques donnent la possibilité au


cocontractant impatient de mettre le mandataire en demeure de se prononcer
sur le sort du contrat. En France, aux termes de l’article L. 622-13 du code de
commerce, l’administrateur doit répondre dans un délai d’un mois, que le juge
commissaire peut proroger d’un mois de plus. En droit OHADA par contre, si
le délai de réponse reste le même, aucune possibilité de prorogation de ce délai
n’est prévue par le législateur africain. L’article 108 dispose plutôt que faute
de réponse dans les trente jours, le juge commissaire constate la résiliation
du contrat en cause. Quel sera alors le sort des créances issues de l’exécution
du cocontractant pendant le délai de réflexion du mandataire ?

502. En France, il faut distinguer selon que le débiteur se trouve dans


une procédure de sauvegarde ou dans une procédure de redressement
judiciaire. Dans la sauvegarde, ces créances ne jouissent d’aucun privilège.
Aux termes de l’article L.622-13 du code commerce, si le cocontractant s’est
exécuté sans obtenir la contrepartie de sa prestation, il déclare sa créance au
passif du débiteur. Alors que dans le redressement judiciaire, le débiteur ou
son représentant doit payer au comptant sauf s’il obtient du cocontractant un

783
D. ROBINE, P. LE CANNU, Droit des entreprises en difficultés, op. cit., p.471,
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
252
délai de paiement784. Ces créances doivent donc être payées à leur échéance.
Cette position privilégiée est de nature en encourager le cocontractant à
exécuter ses prestations nonobstant la situation du débiteur.

503. En droit OHADA, aucune précision ne semble être apportée par le


législateur sur la place des créances issue des prestations exécutées par le
cocontractant pendant la période de réflexion du débiteur ou de son
représentant. Les articles 166 et 167 de l’AUPC n’en font même pas mention
dans le classement qu’ils proposent. Il serait mieux que le législateur OHADA
apporte des précisions sur ce point. Il peut suivre la position de son homologue
français en posant le principe de leur paiement à échéance, et les dispenser
de tout concours avec les autres créanciers.

504. Par ailleurs, en France, dans l’ancienne loi de 1967, l’article 38


permettait au Syndic de décider de la poursuite des contrats en cours en
fournissant au cocontractant la prestation due. Ce texte était muet sur le sort
des arriérés des créances dues au cocontractant avant l’ouverture de la
procédure. Ainsi, certains cocontractants cherchaient à subordonner la
continuation de leurs contrats au règlement préalable de l’intégralité de leurs
arriérés de créances. Ces prétentions étaient rejetées par la cour de cassation.
Allant dans le sens de la jurisprudence, le législateur de 1985 a retenu qu’une
fois l’option du syndic exprimée en faveur de la poursuite d’un contrat, « le
cocontractant doit remplir ses obligations malgré le défaut d’exécution par le
débiteur d’engagements antérieurs au jugement d’ouverture ».

Section 2 : Le régime juridique du contrat continué

505. L’option pour la continuation d’un contrat emporte application


des règles du droit commun des contrats dans les relations des parties. Celles-
ci sont donc tenues de respecter les dispositions contractuelles pour l’avenir

784 C. Com., art. L.631-14, al. 1er

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
253
(paragraphe 1). A défaut, la partie défaillante devra assumer les conséquences
de son inexécution (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Le respect du contrat pour l’avenir

506. Pour garantir le respect scrupuleux des obligations issues du


contrat dont la continuation a été décidée, les droits de l’OHADA et français
aménagent des moyens favorisant l’exécution dudit contrat tant par le
débiteur (A) que par le cocontractant (B).

A/ Les moyens favorisant l’exécution du contrat par le


débiteur

507. La purge des inexécutions antérieures. Les cocontractants du


débiteur dont les contrats ont été continués ne peuvent pas se prévaloir des
inexécutions antérieures dont ils ont été victimes785. On dit que l’option du
mandataire judiciaire de poursuivre ces contrats a « purgé » ceux-ci des
inexécutions passées786. Aux termes des articles L. 622-13-I du code de
commerce et 108 de l’AUPC, « le cocontractant doit remplir ses obligations
malgré le défaut d'exécution par le débiteur d'engagements antérieurs au
jugement d'ouverture ». Aucune sanction ni remède ne peut être opposé au
débiteur du fait des inexécutions antérieures au jugement d’ouverture de la
procédure collective787. Le créancier ne dispose que de la possibilité de
déclarer les créances issues de ces inexécutions au passif du débiteur.
L’impérialisme du droit des procédures collectives et la nécessité de résoudre

785 P. LE CANNU, D. ROBINE, Droit des entreprises en difficulté, 9ème éd., D., Paris, 2022,
p.46
786 Ibid.

787 D. OWONA-ATANGANA, Le sort des créanciers d’un débiteur en difficultés en droit OHADA

à la lumière du droit français : l’égalité en question, Th., Université Panthéon-Sorbonne - Paris


I, 2021, p.327

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
254
les difficultés du débiteur imposent de « passer l’éponge »788 sur les
manquements du débiteur antérieurs au jugement d’ouverture. Le contrat est
ainsi maintenu malgré la défaillance du débiteur.

508. La nullité des clauses pouvant entraver l’exécution du


contrat. Les contrats dont la continuation est décidée par le mandataire
judiciaire se poursuivre selon régime de droit commun. Pour garantir leur
exécution par le débiteur, la jurisprudence frappe de nullité toutes les clauses
qui modifient les conditions de poursuite du contrat en diminuant les droits
ou en aggravant les obligations de ce dernier789. C’est le cas par exemple des
clauses d’augmentation du passif de l’entreprise en difficulté790. En France,
cette règle est étendue aux procédures préventives791. La désignation d’un
mandataire ou l’ouverture d’une conciliation ne peut ainsi par l’effet d’une
clause contractuelle, entrainer une diminution des droits ou une
augmentation des obligations du débiteur. En droit de l’OHADA, même si la
règle n’est pas clairement posée durant la phase préventive de traitement des
difficultés du débiteur, elle peut trouver application sur le fondement du
principe de loyauté792 qui doit gouverner les négociations entre le débiteur en
difficulté et ses principaux créanciers.

509. Par ailleurs, une clause peut avoir un effet aggravant sur la
situation du débiteur alors même qu’elle ne vise pas expressément l’ouverture
d’une procédure collective. Dans ce cas, ladite clause n’est pas frappée de

788 Ibid.
789 Cass. Com. 28 mai 1996, n°93-16.125 ; JCP E 1996. 584 §3, obs. Ph. PETEL ; Cass. Com.,
14 janvier 2014, n°12-22909, AJCA 2014.34, obs. X. DELPECH ; Gaz. Pal. 1er juillet 2014,
n°182, p.23, note F. KENDERIAN ; D. 2014. 2142, n°5, obs. P.M. LE CORRE ; D. 2016. 1899,
obs. F.X. LUCAS.
790 D. VOINOT, « Les clauses d’augmentation du passif de l’entreprise en difficulté », BJE 2017-

2, p.143 et s.
791 C. com., art. L.611-16 al.1

792 Cf. V. DJOMOU DJEMO, Le devoir de loyauté dans la gestion des difficultés des

entreprises, Th., Yaoundé II, 2019, p.105 et s.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
255
nullité, mais leur mise en œuvre est neutralisée793. Le sort de la clause ne
dépend donc pas de la manière dont elle est rédigée, l’impérialisme du droit
des procédures collectives prime sur la technique contractuelle794.

B/ Les moyens favorisant l’exécution du contrat par le


cocontractant

510. L’exigence du paiement au comptant. Pour encourager le


cocontractant à exécuter le contrat continué, les créances issues de son
exécution bénéficie d’un traitement privilégié. En France, une différence est
faite entre la phase de sauvegarde et la phase de liquidation ou de
redressement. En effet, depuis l’ordonnance de 2014, il a été supprimé de
l’article L. 622-13, II, l’exigence selon laquelle le paiement devait se faire au
comptant pendant la phase de sauvegarde795. L’obligation de payer au
comptant ne pèse désormais sur le débiteur ou son représentant que lorsqu’il
est en redressement judiciaire ou en liquidation. Cette différence s’explique
par le fait qu’en redressement ou liquidation judiciaire, le débiteur a cessé ses
paiements et donc la continuation du contrat présente un risque accru pour
le partenaire contractuel, de sorte qu’il est normal que ce dernier soit payé au
comptant.

511. Ce risque n’existe en revanche pas en sauvegarde, procédure


supposant l’absence de cessation des paiements du débiteur796.. Toutefois,
malgré cette exigence de paiement au comptant, le droit français laisse la
possibilité au débiteur dont les ressources ne permettent pas de payer au
comptant d’obtenir tout de même la poursuite du contrat en sollicitant de son

793 E. LOGEAIS, « Les droits de propriété intellectuelle dans le bain des procédures collectives :
relevé au fil de l’eau », propr. Intell. Juillet 2011, n°40, p.339
794 Ibid.

795 M-H. MONSERIE-BON, « Continuation des contrats », Rep. Dr.Com., Janvier 2023, n°121

796 E. LE CORRE-BROLY, « Le droit commun de la continuation des contrats en cours », op. cit,

p.80

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
256
cocontractant un délai de paiement. Cette mesure favorise la poursuite des
relations contractuelles qui auraient en principe été résolues. Car, le
cocontractant aura plus intérêt à accorder les délais de paiement qu’à rompre
le contrat et déclarer sa créance dans le passif.

512. En droit de l’OHADA, l’AUPC n’a pas clarifié le mode de paiement


des créances issues de l’exécution par le cocontractant de ses engagements
contractuels à la suite de l’exercice par le syndic de son droit d’option. Dans
l’ancien AUPC, l’alinéa 2 de l’article 108 disposait que, « si le contrat est
synallagmatique, et si le syndic n’a pas fourni la prestation promise, l’autre
partie peut soulever l’exception d’inexécution ». En offrant ainsi au
cocontractant la possibilité de soulever une exception d’inexécution, le
législateur OHADA contraignait le syndic à payer au comptant. Car, le
cocontractant n’était pas tenu d’exécuter tant qu’il n’avait pas reçu ou n'était
pas rassurer de recevoir la contrepartie de sa prestation.

513. Cette exigence d’un paiement au comptant a essuyé beaucoup de


critiques. D’aucun estimaient ainsi qu’elle constituait un frein au
redressement de l’entreprise797. C’est surement fort de ces critiques que le
législateur africain a fait le choix de supprimer ce droit à la suspension du
contrat qui était reconnu au cocontractant lorsqu’il n'a pas reçu la
contrepartie de sa prestation. L’article 108 du nouvel AUPC, se borne à
disposer que lorsque le syndic a opté pour la poursuite d’un contrat, « il doit
fournir la prestation promise au cocontractant ». Mais comment doit-il la
fournir, au comptant ou à crédit ? Le législateur africain a fait le choix de
rester muet sur cette question798. La suppression de la possibilité pour le
cocontractant de mettre en l’œuvre l’exception d’inexécution peut laisser
conclure en l’absence d’une obligation de payer au comptant. Le débiteur n’est
donc pas obligé de payer au comptant si les ressources de l’entreprise ne le

797 F-M. SAWADOGO, Droit des entreprises en difficulté, op. cit., p.184, n°192.
798 Th. S. KARFO, Paiement des créanciers, sauvetage de l’entreprise : étude comparative des
législations OHADA et français de sauvetage judiciaire des entreprises en difficulté, Th.
Toulouse 1 – Capitole, 2015, p.155

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
257
lui permettent pas, et ce défaut de paiement au comptant ne devrait non plus
être une cause de résiliation du contrat, le cocontractant ayant la possibilité
de déclarer sa créance laquelle bénéficiera d’une priorité de paiement.

Paragraphe 2 : Les conséquences de l’inexécution du


contrat continué

514. Le souci de sauvegarder le contrat réapparait lorsqu’après


l’exercice de l’option, le débiteur ou son représentant se trouve dans
l’impossibilité d’exécuter le contrat continué. En principe, une telle
inexécution donne lieu à la résolution de plein droit du contrat. Mais, dans les
deux systèmes juridiques, cette résolution peut être éviter (A) en vue de
permettre la poursuite du contrat. Par ailleurs, cette inexécution confère au
cocontractant un droit aux dommages intérêts (B).

A/ La résolution de plein droit du contrat inexécuté

515. L’inexécution du contrat continué par le cocontractant ouvre au


mandataire le droit de faire usage des remèdes étudier dans la première partie
de la présente étude. Il peut ainsi procéder à l’exécution forcée en nature ou
par équivalent de ses obligations. Par ailleurs, lorsque c’est le mandataire qui
a failli à ses obligations, le contrat est en principe résilié de plein droit. Aux
termes de l’article 109 de l’AUPC, le juge-commissaire constate la résiliation
de plein droit du contrat « si le syndic, après avoir exigé la poursuite du contrat,
ne fournit pas la prestation promise au cocontractant ou en cas de défaut de
paiement d’une échéance s’il s’agit d’un contrat à exécution ou paiement
échelonnés dans le temps ». Il ressort de ce texte que la conséquence normale
de l’inexécution par le syndic d’un contrat continué est la résiliation de celui-
ci. C’est aussi cette solution que partage le législateur français799. Ainsi, dans

799 C. com, art. L.641-11-1, III 2°


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
258
les deux systèmes juridiques, la décision de poursuivre le contrat oblige le
débiteur ou son représentant à offrir au cocontractant la contrepartie
attendue, faute de quoi, le contrat est résolu de plein de droit.

516. Toutefois, la résolution du contrat peut être éludée avec le


consentement du cocontractant. En effet, les deux législateurs donnent la
possibilité au débiteur ou à son représentant qui fait face à des difficultés
d’exécution de solliciter du cocontractant un délai supplémentaire. Dès lors,
ce dernier dispose de deux alternatives : soit octroyer au débiteur un temps
supplémentaire, soit résilier le contrat. La résiliation peut apparaitre dans
cette hypothèse comme une solution salutaire pour le cocontractant qui peut
ainsi se libérer d’un contrat qu’il a été obligé de poursuivre et obtenir ailleurs
la satisfaction que le débiteur en difficulté n’a pas pu lui offrir. Par ailleurs,
pour obtenir de lui un délai supplémentaire, le débiteur ou son représentant
peut offrir au cocontractant des garanties d’exécution.

B/ L’octroi des dommages-intérêts au cocontractant


victime de l’inexécution

517. En France, aux termes de l’article L.622-13, II du code de


commerce, l'administrateur engage sa responsabilité s'il décide de poursuivre
un contrat sans s’être au préalable rassuré qu’il aura assez de ressources pour
verser au cocontractant la contrepartie de sa prestation. Le législateur fait en
effet peser sur l’administrateur, une obligation de se rassure avant d’exercer
son option, qu’il pourra exécuter ses obligations contractuelles à l’endroit du
cocontractant. Les dommages et intérêts viennent donc sanctionner un droit
d’option exercé avec négligence. Pour ce faire, cette responsabilité doit en
principe être personnelle à l’administrateur de sorte que, c’est du patrimoine
de ce dernier que devrait procéder les sommes à reverser au cocontractant.
Ainsi, le débiteur qui été condamné à payer au cocontractant des dommages
et intérêts pour exercice abusive du droit d’option peut exercer une action
récursoire contre l’administrateur. Par ailleurs, la jurisprudence retient la

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
259
responsabilité de l’administrateur lorsque ce dernier renonce à poursuivre un
contrat d'une importance primordiale pour la continuité de l'exploitation de
l'entreprise800.

518. Dans l’espace OHADA, ce droit aux dommages et intérêt est aussi
reconnu au cocontractant. En effet, l’article 109 de l’AUPC dispose que la
résiliation d’un contrat préalablement continué peut donner lieu à des
dommages et intérêts en faveur du cocontractant. Cette mesure unanimement
admise en France et en droit OHADA vise à protéger le cocontractant contre
tout abus du syndic dans l’exercice de son droit d’option. Toutefois, cette
protection nous semble beaucoup limitée. D’abord, les deux législateurs font
de la créance résultant de ces dommages intérêts, une créance de la masse
sans pour autant en préciser le rang. Doit-on aligner ces dommages intérêts
au rang des créances chirographaires ? La réponse doit être négative, si le
cocontractant a exécuté un contrat poursuivi sans recevoir la contrepartie, les
dommages et intérêts résultant de ce préjudice doivent se greffer à la créance
principale et se hisser au premier rang des créances privilégiées. Cette
solution sera de nature à encourager les cocontractants d’un débiteur en
redressement judiciaire ou en liquidation des biens à exécuter sereinement
leurs contrats après l’exercice de l’option, en sachant qu’en cas de défaillance
de ce dernier, ils seront prioritairement payés.

519. En outre, le législateur OHADA limite l’exercice du droit aux


dommages intérêt dans un délai de trente jours. Le cocontractant d’une
inexécution d’un contrat poursuivi par le Syndic doit ainsi produire dans le
passif du débiteur, la créance résultant des dommages intérêts qui lui sont
dus dans un délai de trente jours, faute de quoi il sera frappé de forclusion.
En ne fixant aucun délai, le droit français semble plus favorable au
cocontractant qui devra donc produire sa créance dans un délai raisonnable
laissé à la discrétion du juge.

800 Com. 9 juin 1998, D. 1998. Somm. 329, obs. A. Honorat.


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
260
Conclusion du chapitre 1

520. Le succès de la procédure collective exige que soit gelé le


patrimoine du débiteur. A cet effet, le principe de maintient forcé des contrats
en cours devient incontournable pour la poursuite de cet objectif. Le droit des
procédures collectives organise ainsi le maintien des contrats contre la volonté
des cocontractants. Le succès d’une telle entreprise nécessite un
infléchissement de certains principes directeurs du contrat. La force du
contrat est ainsi limitée pour mieux garantir sa sauvegarde. Toutefois, le
maintien forcé du contrat n’a aucun intérêt s’il est avéré que le débiteur ne
sera jamais solvable. Dans cette hypothèse, plutôt que de forcer son maintien,
le droit des procédures collectives assure la survie du contrat en le transférant
à un tiers plus solvable.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
261
Chapitre 2 : La transmission de la charge du contrat à
un tiers

521. L’ouverture d’une procédure collective conduit très souvent à


envisager la cession des éléments de l’entreprise parmi lesquels les contrats
qui en sont les piliers801. La cession des contrats constitue un moyen de
perpétuer le lien contractuel qui est alors transmis d’un partenaire devenu
peu crédible à un nouveau plus apte à assurer son exécution. En effet, prévue
en droit français des contrats par l’article 1216 du code civil, la cession du
contrat est une convention par laquelle une partie au contrat appelée cédant,
transfère à un tiers dénommé cessionnaire les effets de droit résultant d’un
contrat qui la lie à un cocontractant appelé cédé802. Elle consiste dans le
remplacement d’une partie par un tiers, au cours de l’exécution d’un
contrat803. Elle constitue à la fois une cession de créances et de dette au point
où certains auteurs la considèrent comme un jumelage de ces deux
opérations804. L’utilité de ce mécanisme n’est plus à démontrer. Il constitue
un véritable remède à l’inexécution du contrat en permettant à celui-ci de
survivre lorsque l’une des parties n’a plus les moyens de l’exécuter, ou n’en a
plus l’intérêt.

522. En droit des procédures collectives, la cession du contrat permet


de sauver les contrats que le débiteur ne peut plus exécuter en transférant les
obligations y afférentes à un tiers. C’est donc une opération de gagnant-
gagnant. Le débiteur se libère d’un contrat devenu un fardeau et le
cocontractant voit son contrat se poursuivre avec un partenaire plus solvable.
Cette opération s’effectue principalement dans le cadre d’une cession
d’entreprise (section 1). Mais, il n’en demeure pas moins qu’en dehors de

801 A. AZIBER SEÏD « Cession judiciaire et principes contractuels en droit OHADA », in: Revue
internationale de droit comparé. Vol. 60 N°1,2008. pp. 45-60
802 L. ANDREU, N. THOMASSIN, Cours de droit des obligations, 4 ème éd. 2019-2020, Gualino,

Paris 2019, p.304, n°805


803 L. AYNÈS, « La cession de contrat », Droit et Patrimoine, Nº 260, 1er juillet 2016, p.1
804 F. TERRE, Ph. SIMLER, Y. LEQUETTE, F. CHENEDE, Droit civil : les obligations, 12ème

éd., Dalloz, Paris 2019, p.1689, n°1620.


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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262
toute cession d’entreprise, la cession isolée de certains contrats du débiteur
en difficulté reste possible (Section 2).

Section 1 : La transmission de la charge du contrat dans


le cadre d’une cession d’entreprise

523. La notion d’entreprise. En droit français, la notion d’entreprise


n’est pas clairement définie. Cette absence de définition peut se justifier par
le fait que la notion d’entreprise est plus économique et sociale que
juridique805. Aussi, devient-il difficile au droit d’y apporter une définition.
L’examen de la doctrine relative à la définition de l’entreprise, fait ressortir
deux courants : le courant des matérialistes qui voient en l’entreprise un objet
de droit et celui des personnalistes qui y voient un sujet de droit806. C’est le
premier courant qui mérite de retenir notre attention dans les analyses qui
suivent, car il met l’accent sur l’activité. Pour les tenants de cette thèse,
l’entreprise n’est qu’un ensemble de biens affectés à une production, faisant
partie du patrimoine d’une personne physique ou morale, privée ou publique,
qui y applique son droit de propriété. Ce courant retient donc une conception
patrimoniale de l’entreprise et dénie à celle-ci la personnalité morale807. Les
économistes s’opposent à cette thèse et considèrent que « l’entreprise constitue
une organisation de moyens matériels et humains exerçant une activité de
production, de transformation, de distribution de biens ou de services »808.

524. En droit de l’OHADA, l’AUPC définit l’entreprise comme toute


personne physique ou morale soumise aux dispositions dudit Acte uniforme

805 F. DERRIDA, P. GODE, J. P. SORTAIS, avec la collaboration de A. HONORAT,


Redressement et liquidation judiciaire des entreprises, cinq années d’application de
la loi du 25 janvier 1985, 3e éd., Dalloz, 1991, n°4.
806M. F. KOUROUMA, Le procédé de passerelle entre la conciliation et la sauvegarde –
Approche comparative droit français/droit OHADA. Droit. Université de Toulon, 2018, p.396
807V. J. PAILLUSSEAU, « Qu’est-ce que l’entreprise », in L’entreprise : nouveaux
apports, éd., Economica, Paris, 1987, n°6-n°9.
808 M. F. KOUROUMA, op. cit. p.396
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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263
conformément à son article 1‐1809. On peut déduire de ce texte que l’entreprise
est une personne physique ou morale exerçant une activité professionnelle
indépendante, civile, commerciale, artisanale ou agricole810.

525. La cession des contrats incluse dans la cession de l’entreprise en


difficulté soulève deux questions principales : celle de la place accordée aux
contrats pendant l’opération de cession d’entreprise (paragraphe 1) et celle du
régime de cette cession des contrats (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La place des contrats dans la cession


d’entreprise

526. Que doit contenir le plan de cession ? Que cède-t-on ? Par rapport
à l’objet de notre étude, il s’agit d’examiner la place accordée aux contrats
dans le plan de cession de l’entreprise. A ce niveau, les législations OHADA et
française divergent. En effet, alors qu’elle est une condition de validité du plan
de cession en France (A), la cession des contrats ne jouit en droit OHADA que
d’une consécration très limitée (B).

A/ La cession des contrats : une condition d’effectivité


du plan de cession d’entreprise en France

527. La cession d'entreprise se distingue de la cession de fonds de


commerce notamment par la transmission des contrats, qui représentent un
élément important de l'entreprise commerciale cédée811. En France, l’ancien
article 83 de la loi de 1985 ne citait pas les contrats parmi les éléments
essentiels que devait contenir l’offre de cession. La cession des contrats avait

809 AUPC, art. 1-3


810 AUPC, art. 1-1
811 J.- J. FRAIMOUT, op. cit., p.4
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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264
ainsi une place limitée dans la cession de l’entreprise812. Cette limitation avait
été corrigée par les réformes de 1994 et 2005. Aujourd’hui, le contrat occupe
une place centrale dans la cession d’entreprise.

528. En effet, aux termes de l’article L.642-2 II, l’offre de reprise faite
par le candidat repreneur de l’entreprise doit être écrite et contenir entre
autres, les contrats que celui-ci souhaite poursuivre. Aussi, l’article L.642-7
ajout-il que « le tribunal détermine les contrats de crédit-bail, de location ou de
fourniture de biens ou services nécessaires au maintien de l'activité au vu des
observations des cocontractants du débiteur transmises au liquidateur ou à
l'administrateur lorsqu'il en a été désigné. Le jugement qui arrête le plan
emporte cession de ces contrats, même lorsque la cession est précédée de la
location-gérance prévue à l'article L. 642-13. Ces contrats doivent être exécutés
aux conditions en vigueur au jour de l'ouverture de la procédure, nonobstant
toute clause contraire ». Il résulte de ces deux textes que le législateur français
fait de la poursuite des contrats, une condition de validité de la cession
d’entreprise813. Parmi les contrats à céder, certains sont choisis par le
repreneur (1) et d’autres lui sont imposés par le tribunal (2).

1/ Les contacts choisis par le repreneur

529. Le repreneur de l’entreprise n’est pas obligé de poursuivre tous


les contrats. Dans le plan qu’il propose, il doit clairement indiquer les contrats
qu’il souhaite poursuivre. Toutefois, il ne peut s’agir que des contrats
préalablement poursuivis, donc des contrats qui sont en cours, mais aussi qui
sont transmissibles.

812 M.H. MONSERIE, Les contrats dans le redressement et la liquidation judiciaires des
entreprises, op.cit., p.281 et s
813 J.- J. FRAIMOUT op. cit., p.2

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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265
530. Les contrats en cours. Il n’est pas possible au juge de faire
revivre un contrat éteint814. Ainsi, pour faire l’objet d’une cession, le contrat
doit être en cours. La notion de contrat en cours a déjà fait l’objet d’une
analyse précédente815, mais dans le cadre de la cession de l’entreprise, elle
soulève des questions qu’il nous convient de mettre en exergue ici. En effet,
sont transmissibles les contrats en cours au jour du jugement d'ouverture et
ceux conclus pendant la période d'observation et qui sont en cours lorsque le
plan de cession est arrêté. Dès lors, quid des contrats en formation et des
contrats conclus intuitu personae ?

531. Le cas des avants contrats. Ce sont des accords préparatoires


qui ponctuent les négociations contractuelles816. Ils prennent généralement la
forme d’un pacte de préférence ou d’une promesse unilatérale de contrat. Le
pacte de préférence est une convention par laquelle une personne s’oblige
envers une autre à lui accorder une préférence dans l’éventualité où il
déciderait de conclure un contrat déterminé817. Il peut se décliner en deux
variantes : d’une part l’octroi d’une simple priorité et d’autre part
l’organisation d’un véritable mécanisme de préemption, qui donnerait à son
bénéficiaire un droit de préemption de nature conventionnelle. Le promettant
a ainsi l’obligation de proposer la conclusion du contrat au bénéficiaire du
pacte avant de s’adresser à un tiers. Quant à la promesse unilatérale de
contrat, elle est l’acte par lequel une partie s’engage à conclure avec une autre
un contrat dont les termes sont déjà clairement définis. La matérialisation du
contrat requiert juste l’acceptation du bénéficiaire de l’engagement.

532. En droit commun des contrats, le pacte est en principe


transmissible, sauf si les parties lui ont conféré un caractère personnel. C’est
ce qui résulte d’un arrêt rendu par la cour de cassation française le 24 février

814 B. SOINNE, Traité des procédures collectives, op. cit., p.996


815 Supra, n°482
816 B. FAGES, op.cit., p.68
817 B. FAGES, op cit ; p.69
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
266
1987818. Dans cette affaire, des cohéritiers avaient conclu entre eux un pacte
de préférence sur les immeubles laissés par leurs parents, aux termes duquel
« en cas de vente ou location, chacune des parties aura un droit de préférence
à prix égal ; en conséquence, celui qui voudra vendre ou louer devra notifier à
ses copartageants le prix de la vente ou de la location, lesdits copartageants
ayant un délai de huit jours pour faire connaître leur décision ». Un des
cohéritiers étant décédé, l’un des autres survivants décide de procéder à la
vente de son lot en proposant cette vente uniquement au cohéritier survivant
et non à la fille du cohéritier décédé. Cette dernière, estimant que la vente
envisagée ne lui avait pas été notifiée, au mépris du pacte de préférence dont
elle était fondée à se prévaloir en sa qualité d'héritière de son père, a assigné
les acquéreurs, le notaire rédacteur de l'acte et la compagnie d'assurances de
ce dernier en résolution de ladite vente. Approuvant la cour d’appel qui l’a
débouté de sa demande, la cour de cassation affirme que « si le pacte de
préférence est en principe transmissible aux héritiers des parties, il en est
différemment lorsque les circonstances révèlent une intention contraire, même
tacite, des parties de ne conférer à cette obligation qu'un caractère strictement
personnel ». Ainsi, dès lors qu’un pacte de préférence ne revêt pas un caractère
strictement personnel il peut être cédé. Mais cette solution de droit commun
est-elle transposable en matière de procédures collectives ?

533. La réponse à cette question est négative. En effet, dans un arrêt


rendu le 15 janvier 2013819, la cour d'appel de Paris avait considéré au sujet
d’une clause de préemption dont se prévalait le bénéficiaire pour s’opposer à
la cession d’un bail que « le caractère d'ordre public de la cession judiciaire des
contrats nécessaires à la poursuite de l'activité du débiteur, posé par l'article L.
642-7 du Code de commerce, conduit à réputer non écrites les clauses de
préemption et toute autre clause restrictive de cession ». De cette interprétation,
il résulte que le bénéficiaire d’un pacte ou d’une promesse de contrat ne peut

818 Cass. 1ère Civ., 24 février 1987, n°85-16279, Bull. Civ. I, n°75 ; RTD civ. 1987.739, obs. J.
MESTRE.
819 CA Paris, Pôle 5, 8ème ch., 15 janvier 2013, n° 12/17592, Hebdo édition affaires n°333 du

4 avril 2013 : Baux commerciaux, Comm. F. KENDERIAN ;


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
267
pas s’en prévaloir pour s’opposer à une cession de contrat intervenue lors
d’une cession d’entreprise820.

534. Notion de contrat nécessaire au maintien de l'activité. En


France, la cession des contrats est conditionnée par l’utilité que celui-ci a pour
l’entreprise821. On assiste ainsi à une prévalence de l’intérêt de l’entreprise au
détriment de l’aspect volontaire du contrat822. Les juges du fond apprécient
souverainement le caractère nécessaire de chaque contrat pour déterminer
son sort. Mais en pratique, ils vont s’appuyer sur les déclarations du
repreneur823 qui, comme nous l’avons déjà indiqué824, intègre dans son offre
de reprise, les contrats qui lui paraissent indispensables, mais aussi sur les
arguments du cocontractant, qui peut démontrer le caractère nécessaire de
son contrat pour demander sa session825. C’est pourquoi, à côté des contrats
que le cessionnaire va librement choisir de reprendre dans son offre, le
législateur donne au tribunal le pouvoir d’imposer la cession de certains
contrats compte tenu de leur utilité pour la poursuite de l’entreprise.

2/ Les contrats imposés par le tribunal

535. Tous les contrats ne sont pas indispensables au maintien de


l'activité de l'entreprise cédée. En effet, l'article L. 642-7 du code de commerce
vise seulement certains types de contrat dont le tribunal peut imposer la
transmission compte tenu de leur incontestable utilité dans la poursuite de
l’activité du débiteur cédé. Il résulte de ce texte que, le tribunal détermine les

Cass.Com, 13 février 2007, n°05-17296, SARL L'Oxer de Deauville, Bull. Joly Stés. 1er mai
820

2007

821 A.S. ALGADI, Contrat et droit OHADA des procédures collectives : étude à la lumière du
droit français, op. cit. p.297
822 A. S. ALGADI, « Cession judiciaire et principes contractuels en droit OHADA », R.I.D.C., Vol.

60 N°1,2008. pp. 45-60.


823 C. SAINT-ALARARY-HOUIN, M.H. MONSERIE-BON, C. HOUIN-BRESSAND, Droit des

entreprises en difficulté, 13ème éd., L.G.D.J, Paris, 2022, p. 890


824 Supra, n°527
825 C. SAINT-ALARARY-HOUIN, Droit des entreprises en difficulté, op. cit., p.826, n°1257

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
268
contrats de crédit-bail, de location ou de fourniture de biens ou services
nécessaires au maintien de l'activité et le jugement qui arrête le plan emporte
cession de ces contrats. Le législateur dresse ainsi une liste limitative visant
expressément les contrats de crédit-bail, de location ou de fourniture de biens
ou services dès lors qu'ils sont nécessaires au maintien de l'activité.
L’attention particulière portée sur ces trois types de contrats se justifie par
leur importance.

536. Pour le crédit-bail, son maintien est nécessaire à la poursuite de


l'activité lorsqu'il porte sur le matériel professionnel utilisé par l'entreprise
pour les besoins de son activité principale826. Par ailleurs, l’article L.642-7 vise
les contrats de location et non le louage, ce qui a pour conséquence de
n'englober que le louage de choses, meubles ou immeubles. Le louage
d'ouvrage n’y est pas expressément visé. Mais, la doctrine827 estime qu’il n'y a
aucune raison de l'exclure lorsqu'il est nécessaire au maintien de l'activité,
dès lors qu'il peut être assimilé à une des formes du contrat de fournitures de
services. Toutefois, ces contrats ne jouissent pas d’une cession de plein droit.
Le législateur précise que leur cession n’intervient que si à partir des
informations recueillies par le tribunal, il s’avère, que la poursuite de l’activité
de l’entreprise ne pourra pas être possible sans eux. Par conséquent, s’ils
s’avèrent inutiles le tribunal ne pourra pas imposer leur cession.

537. Par ailleurs, la liste égrenée par l’article L.642-7 n’est pas
exhaustive. Le pouvoir du tribunal s’étend en principe à tout contrat qu’il juge
utile pour la survie de l’entreprise. D’ailleurs la notion de contrat de fourniture
de biens ou de services a elle-même été jugée très accueillante828. Elle peut
ainsi inclure plusieurs sortes de contrats. Aussi, en fixant le critère de
« nécessaire à la poursuite de l’activité », le législateur laisse au juge une large
marge de manœuvre. Le juge a ainsi le pouvoir d’imposer la cession de tout

826 J.-J. FRAIMOUT, op cit, p.12


827 Ibidem.
828 A. COURET, « La cession de l'entreprise dans le cadre d'une procédure collective », BJS

mars 1986, n°3, p.289


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
269
contrat qu’il juge nécessaire à la poursuite de l’activité de l’entreprise cédée.
Le caractère nécessaire du contrat doit être apprécié relativement à l'activité
professionnelle du cédant, ce qui exclut les contrats à finalité personnelle ;
mais il ne suffit pas que le contrat dont la cession est ordonnée soit lié à
l'activité professionnelle du cédant, il doit encore être lié à l'activité principale
et non pas simplement secondaire de l'entreprise. S'agissant d'une personne
morale, le contrat doit être nécessaire à la réalisation de l'objet social829. C'est
ainsi que la cession d'un contrat d'entretien d'ascenseurs n'a pas été jugée
nécessaire à la poursuite de l'exploitation d'une résidence pour personnes
âgées.830

538. Les contrats ainsi choisis doivent clairement figurer dans le


jugement qui arrête le plan de cession. C’est ainsi que la cour d’appel de
Grenoble avait invalidé un jugement ordonnant la cession des contrats au
motif que le contrat de crédit-bail cédé n’y était pas clairement identifié831. Le
tribunal est donc seule habilité à imposer aux cocontractants la cession de
leurs contrats. Par conséquent, la poursuite volontaire par le cessionnaire
d’un contrat dont la cession n’a pas été imposée par le tribunal ne constitue
pas une cession de contrat, mais plutôt la conclusion d’un nouveau contrat
ayant les mêmes termes que le précédent832.

539. En outre, le contrat cédé s’impose au cessionnaire dans ces


termes initiaux. On assiste ainsi à un regain de la force obligatoire du contrat
cédé qui contraste avec la violation du principe de la relativité du contrat. En
effet, le cessionnaire se trouve contraint d’exécuter à la lettre un contrat dont
il n’avait pas négocié les termes. Toutefois, pour ce qui est du contrat de bail,
le juge peut autoriser le cessionnaire à modifier ce contrat, notamment en

829 J.-J. FRAIMOUT, op cit, p.6


830 CA Paris, 15 févr. 1996 : JurisData n° 1996-020986
831 CA Grenoble, 26 nov. 1997 : JurisData n° 1997-046314
832 Cass. 1re civ. 4 juin 2009, n° 08-14.481, FS-P+B : JurisData n° 2009-048456 ; Bull. civ.

I, n° 113
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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270
admettant la déspécialisation du bail833. Aussi, le tribunal peut octroyer de
délais supplémentaires au cessionnaire en vue de lui permettre d’assurer une
meilleure exécution du contrat concerné.

B/ La cession des contrats : un élément marginalisé dans


la cession d’entreprise en droit de l’OHADA

540. L’intérêt que le législateur africain accorde aux contrats lors de la


cession d’entreprise est très limité. En effet, sans totalement s’en
désintéresser, le droit OHADA aménage expressément la cession de certains
contrats spécifiques (1) et reste muet sur les autres contrats. Ce silence a pu
être interprété comme signifiant qu’en dehors des contrats dont la cession est
expressément aménagée, d’autres contrats ne peuvent pas faire l’objet d’une
cession834. Une telle conclusion ne parait pas convaincante. Malgré
l’insuffisance rédactionnelle des textes de l’OHADA, il est possible d’envisager
la cession d’autres contrats que ceux expressément visés par le législateur (2).

1/ La cession aménagée de certains contrats

541. Le législateur OHADA n’aménage que la cession de deux types de


contrats, le bail et le contrat de travail.

542. La cession du bail. Lors de l’ouverture d’une procédure collective,


le contrat de bail jouit d’une protection spécifique. L’on a ainsi pu observer
qu’en l’absence d’une indication particulière du législateur africain, le contrat
de bail jouit d’une continuation de plein droit tant que le syndic n’a pas décidé

833 I. ROHART-MESSAGER, « Plan de cession et autorisation pour le repreneur d’exercer des


activités connexes ou complémentaires à celle prévue dans le bail », BJE., Septembre-Octobre
2014, p. 339
834 Y. B. MARE, « La protection des intérêts catégoriels en cas de cession d’une entreprise en

difficulté », horizon du droit n°32, janvier 2022, p.72


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
271
de sa rupture835. Aux termes de l’article 97 alinéa 3 de l’AUPC, « le syndic, en
cas de liquidation des biens, ou le débiteur assisté du syndic, en cas de
redressement judiciaire, peut continuer le bail ou le céder aux conditions
éventuellement prévues au contrat conclu avec le bailleur et avec tous les droits
et obligations qui s’y rattachent ». Il en ressort que le syndic peut décider de
façon unilatérale de céder le bail dont la continuation a été préalablement
décidé. On est ainsi tenté de penser que comme son homologue français, le
législateur OHADA organise une cession forcée du bail, dérogeant ainsi à la
philosophie générale qui est de n’admettre que la cession conventionnelle.
Loin s’en faut, une analyse plus attentive de ce texte permet très vite de
réaliser qu’il ne s’agit nullement là d’une cession autoritaire que le syndic
imposerait au bailleur, le législateur africain est en principe resté fidèle à sa
philosophie de faire de la cession un acte conventionnelle.

543. En effet ce texte précise que la cession du bail décidée par le


Syndic doit être conforme aux règles convenues entre le débiteur et le bailleur.
Ainsi, la cession du bail n’est possible que si le bailleur y a consenti836. Ce
consentement peut être donné dès la conclusion du contrat de bail, par
l’insertion d’une clause de cession. A contrario, la cession du bail sera
impossible si le contrat prévoit une clause d’incessibilité837. A défaut d’une
telle clause, le syndic qui souhaite céder le bail doit requérir le consentement
du bailleur. En France par contre, la cession du bail est forcée et la
jurisprudence prive d’effet toute clause qui subordonne la cession du bail à
l’accord préalable du bailleur838.

835 F.M. SAWADOGO, op cit., p.186, n°194; B.Y. MEUKE, «Brèves observations sur le sort du
bail commercial dans les procédures collectives de l’OHADA», Ohadata D-08-15, p.2.
836 J.C. GNINTEDEM, « Le bail commercial à l’aune du droit OHADA des entreprises en

difficulté », Revue de droit uniforme, UNIDROIT, NS vol.14/2009, p.199


837 Y. B. MARE, « La protection des intérêts catégoriels en cas de cession d’une entreprise en

difficulté », horizon du droit n°32, janvier 2022 ? pp.66-95.


838 Cass. Com., 6 déc.1994 : Bull. Civ. IV, n°368 ; D. 1997. Somm. . Obs. F. DERRIDA.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
272
544. La cession du contrat de travail. Le critère déterminant de la
cession d’entreprise est la présence de salariés repris839, au point qu’un
auteur parle, d’«une cellule économique vivante, au sein de laquelle sont réunis
le travail et les moyens au service de l’activité »840. Comme tous les autres
contrats, les contrats de travail en droit OHADA des procédures collectives
sont soumis au principe de continuation des contrats en cours, préalable
incontournable à toute cession. En effet, le contrat ne peut être cédé que s’il
a préalablement fait l’objet d’une continuation, c’est-à-dire qu’il est en cours
au moment de la cession. L’article 107 alinéa 2 de l’AUPC exclu les contrats
de travail du droit d’option du syndic, leur continuation n’est donc pas
subordonnée à la manifestation de la volonté de ce dernier841. Ils sont
continués de plein droit842 et font donc l’objet d’une transmission automatique
au repreneur dès lors qu’ils sont en cours. Un auteur affirme à cet effet à juste
titre que les contrats de travail transmis lors de la cession d’une entreprise
sont « ceux qui sont en cours au moment où prend effet le transfert c’est-à-dire
ceux des salariés inscrits à l’effectif de cette date et appartenant à l’activité
transférée »843. Dès lors, certaines catégories de contrats de travail suscitent
des interrogations. D’abord qu’en est-il du contrat du salarié en essai ?

545. En effet, l’on sait que l’essai est une période qui précède la
conclusion d’un contrat de travail définitif. Il s’agit d’une phase pendant
laquelle le salarié et l’employeur s’observent mutuellement. Elle permet au
premier d’apprécier les conditions de travail et le traitement que lui réserve
l’employeur avant de s’engager définitivement. Au second, cette phase
d’observation permet d’évaluer les compétences du salarié avant de l’engager

839 Paris, 14 déc., 1993, D. 1996, somm. 5, obs. F. DERRIDA ; Chambéry, ch. civ., 1995, Rev.
proc. coll. 1996, n°37, p. 157, obs. SOINNE ; Paris, 7 juill. 1995, Dr. sociétés 1995, n°240, obs.
Y. CHAPUT.
840 VALLENS, cité par P.-M. Le Corre, in Droit et pratique des procédures collectives 2017/2018,

9e éd., Dalloz action, p. 1643.


841 R. TSOUKA, La situation des salariés à l’épreuve des procédures collectives : Etude

comparative droit OHADA et droit français, Th. Université Omar BONGO, 2018, p.83
842 F.M. SAWADOGO, op cit., p.187, n°195.
843 V. STULZ, Transfert d’entreprise : les enjeux sociaux, éd. EFE 2004, p.67 et ss.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
273
définitivement844. Pendant cette période, le salarié doit jouir du même
traitement que s’il avait déjà été définitivement embauché845. Partant de ce
principe, le salarié en essaie jouit-il de la transmission automatique de son
contrat en cas de cession de son entreprise ? L’engagement à l’essai est-il un
contrat de travail en cours ? En fait, quoique garantissant au salarié un
traitement identique à celui des salariés définitivement embauchés, l’essai
peut être rompu à tout moment et la partie qui prend l’initiative de cette
rupture n’a pas à justifier d’un motif légitime et sérieux846. Dès lors, le syndic
doit pourvoir mettre fin au contrat du salarié engagé à l’essai. La
jurisprudence gabonaise estime qu’une telle rupture de la période d’essai ne
peut pas être assimilée à un licenciement847.

546. Le second type de contrat de travail qui mérite de retenir notre


attention c’est le contrat d’intérim. Il s’agit d’un contrat par lequel une société
appelée société d’intérim met à la disposition d’une autre société dite société
utilisatrice temporaire, un travailleur remplaçant appelé intérimaire848. La
question se pose de savoir en cas de cession de l’entreprise utilisatrice, les
salariés qui y sont à disposition jouissent-ils du transfert automatique de
leurs contrats de travail ? La réponse est négative. En effet, le salarié mis à
disposition n’a pas de relation juridique avec l’entreprise utilisatrice. C’est ce
qui ressort de deux arrêts rendus par la cour de cassation gabonaise. Les
hauts magistrats gabonais soutiennent que dans un contrat de mise à
disposition, l’entreprise de mise à disposition est seule responsable de la
situation du salarié mis à disposition de sort qu’il n’existe aucun lien de
subordination entre celui-ci et l’entreprise utilisatrice849.

844 C. Trav. Gab., Art. 45


845 C. Trav. Gab., Art. 47
846 C. Trav. Burk., Art.44
847 CA. Libreville, 27 juin 2000. Inédit.
848 C. Trav. Gab., Art.29
849 Cass. Gab, 15 déc. 2011, arrêt n°08/2011-2012 et arrêt n°17/2011-2012 du 23 février

2012, publiés au Bull. Cass., n°01-Oct. – Nov. – Déc. 2012, n° 15 et 16.


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
274
547. Il en résulte que la situation du salarié mis à disposition dépend
du sort du contrat liant les deux entreprises, lequel ne jouit pas de la
dérogation prévue par l’article 107 de l’AUPC. Le syndic exerce donc son droit
d’option sur ce contrat. S’il décide de poursuivre le contrat de mise à
disposition existant entre l’entreprise en faillite et l’entreprise de mise à
disposition, en cas de cession de la première, les salariés mis à disposition
verront leurs contrats automatiquement transférés au repreneur, lequel
devient leur nouvel employeur. L’article 95 du code gabonais du travail
dispose à cet effet que « lorsqu’il survient une modification dans la situation
juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, absorption,
transformation de fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de
travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur
et le personnel de l'entreprise ». Le repreneur devra donc exécuter ces contrats
selon les termes convenus avec l’entreprise cédée. C’est cette même solution
que retient le législateur français à l’article L.1224-1 de son code du travail.
Cette solution n’est pas applicable en cas de changement de gérance, lequel
selon une jurisprudence sénégalaise, ne peut être analysé en une modification
de la situation juridique de l’employeur850.

548. En droit burkinabè, la situation du salarié transféré est plus


précaire. L’article 92 du code burkinabè du travail dispose en effet que, le
nouvel employeur n’est pas soumis à l’obligation de respecter les engagements
de l’ancien employeur à l’égard des salariés cédés si la modification de la
situation de ce dernier est due à l’ouverture d’une procédure de redressement
judiciaire ou de liquidation des biens. Ce texte semble donc conféré au
cessionnaire le droit de renégocier les contrats de travail transférés en les
adaptant à sa situation. Cette solution est plus défavorable au salarié851 que
celle prévue dans d’autres systèmes africains comme le Gabon852 ou le

850 C.S Sén. Ch.Soc. 28 déc. 2016, arrêt n°58 disponible sur Juriscaf,
https://juriscaf.org/arret/SENEGAL-COURSUPREM - 2016 1228-58.
851 Y. B. MARE, op. cit, p.17
852 C. Trav. Gab., Art.95

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
275
Sénégal853. Mais c’est cette position du législateur burkinabè qui est plus en
phase avec la position du droit OHADA. Aux termes de l’article 161 alinéa 2
de l’AUPC, en cas de cession globale des actifs d’une entreprise en liquidation,
« les offres peuvent contenir ou ne pas contenir un engagement de maintenir tout
ou partie des emplois. Il en est tenu compte dans le choix de l’offre qui paraît
être la plus sérieuse ». Ainsi contrairement au droit français, le droit OHADA
n’accorde pas de priorité au maintien des emplois lors de la cession de
l’entreprise en difficulté.

549. En définitive, si la cession des contrats de travail est automatique,


cette automaticité ne profite pas au salarié encore à l’essai, du fait du principe
de la liberté de rupture de l’engagement à l’essai. Le contrat de travail assorti
d’une période d’essai n’est donc pas un contrat de travail en cours échappant
au droit d’option du syndic. Il en va de même pour les salariés intérimaires.
Leur situation dépend de l’option du syndic par rapport au contrat de mise à
disposition existant entre l'entreprise débitrice et l’entreprise de mise à
disposition.

2/ L’extension de la cession aux autres contrats

550. Malgré le caractère lacunaire des dispositions de l’acte uniforme


sur ce point, il est nécessaire de généraliser la cession des contrats, en
procédant à une relecture de certaines dispositions de l’AUPC.

551. La nécessité d’une cession généralisée des contrats en droit


OHADA. Aux termes de l’article 131 alinéa 3 de l’AUPC, « la cession
d’entreprise ou d’établissement est toute cession de biens susceptibles
d’exploitation autonome permettant d’assurer le maintien d’une activité
économique, des emplois qui y sont attachés et d’apurer le passif ». Il résulte de
ce texte que comme son homologue français, le législateur OHADA fait de la

853 C.Trav. Sén. Art. L.66


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
276
poursuite de l’activité économique du débiteur l’un des objectifs de la cession
de son entreprise. Or, cette poursuite est impossible sans la cession des
contrats qui en sont les piliers854.

552. Ainsi, malgré le silence du législateur africain, la cession des


contrats en droit OHADA des procédures collectives ne saurait se limiter aux
seuls contrats du travail et le bail expressément aménagé par l’AUPC. La
cession d’une entreprise entraine inexorablement la cession de certains de ses
contrats intrinsèquement liés à l’activité du débiteur dont le maintien est
poursuivi. Car, céder l’entreprise sans céder les contrats qui assurent le
fonctionnement de celle-ci revient à céder une coquille vide855, ce qui n’est pas
envisageable. Le professeur Yves GUYON affirme d’ailleurs que la cession des
actifs d’une entreprise est presque sans intérêt en l’absence d’une
transmission complémentaire des contrats qui permettent de les exploiter856.
Dès lors, le silence du législateur OHADA constitue beaucoup plus une
insuffisance rédactionnelle857 qu’un déni de la cession des contrats autres que
le bail et le contrat de travail.

553. Une nécessaire relecture des dispositions de l’AUPC. En


prévoyant la possibilité de céder une partie ou la totalité de l’entreprise
débitrice, le législateur OHADA n’a pas comme son homologue français, prévu
la possibilité d’une cession généralisée des contrats qui accompagnent
l’activité de l’entreprise cédée. D’après une certaine doctrine, cela signifierait
une impossibilité de la cession des contrats autres que le bail et le contrat de
travail, de sorte qu’en droit OHADA, le cessionnaire serait tenu après
l’opération de reprise de l’entreprise, de construire lui-même de nouvelles

854 A. AZIBER SEÏD, « Cession judiciaire et principes contractuels en droit OHADA », in: R.I.D.C,
Vol. 60 n°1,2008. pp. 45-60
855 Y. B. MARE, op. cit, p.7
856 Y. GUYON, Droit des entreprises en difficultés : redressement judiciaire-faillite, op.cit.,

p.330, n°1290
857 M.F KOUROUMA, « la cession judiciaire de l’entreprise en difficulté en Afrique ( droit de

l’OHADA) et en France : étude comparée de l’offre de reprise au regard des réformes


intervenues », Université de Toulon, UFR Droit p.2
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
277
relations d’affaires, c’est-à-dire de négocier et conclure des nouveaux contrats
qui devraient permettre l’exploitation de l’activité poursuivie858. Comme déjà
indiqué, cette interprétation ne semble pas plausible. En effet, la cession
d’entreprise n’est pas envisageable sans une cession de contrats qui en
constitue les nerfs. En prévoyant donc la possibilité d’une cession
d’entreprise, le législateur africain a admis de manière implicite la cession des
contrats. Il faut pour ce faire, relire autrement certaines dispositions de
l’AUPC.

554. D’abord, il faut comprendre que contrairement à son homologue


français, la cession d’entreprise envisagée par le législateur OHADA est une
cession conventionnelle, qui s’opère dans le cadre d’un concordat. Or, aux
termes de l’article 27 de l’AUPC, le projet de concordat doit préciser les
mesures et conditions envisagées pour le redressement de l’entreprise,
notamment : « les modalités de continuation de l’entreprise, telles que la
demande ou l’octroi de délais et de remises ; la cession partielle d’actif avec
indication précise des biens à céder ; la cession ou la location‐gérance d’une
branche d’activité formant un fonds de commerce ; la cession ou la location‐
gérance de la totalité ou d’une partie de l’entreprise, sans que ces modalités
soient limitatives et exclusives les unes des autres ». En énumérant les
mesures envisageables pour la continuation de l’entreprise, ce texte quoiqu’en
ne faisant nullement référence aux contrats, précise que les mesures citées ne
sont pas limitatives. Rien n’empêche donc au syndic et aux créanciers, lors de
l’élaboration du concordat, d’y insérer les contrats qui doivent être cédés avec
l’entreprise. Le silence du législateur peut ainsi être analysé comme une liberté
laissée aux parties d’organiser à leur guise la cession de l’entreprise débitrice
en déterminant elles-mêmes les éléments à céder et leur modalité de cession.

555. En plus, en définissant la cession d’entreprise comme « toute


cession de biens susceptibles d’exploitation autonome permettant d’assurer le

858 Y. B. MARE, op. cit, p.8


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
278
maintien d’une activité économique, des emplois qui y sont attachés et d’apurer
le passif » l’alinéa 3 de l’article 131 de l’AUPC n’exclut pas la cession des
contrats. En effet, le contrat est la première richesse d’une entreprise, et donc
son premier bien. La notion de biens ici envisagée ne peut donc pas être
analysée comme excluant les contrats de l’entreprise. Toutefois, il est
souhaitable que le législateur OHADA procède à une consécration claire de la
cession des contrats de l’entreprise en difficulté en suivant le modèle de son
homologue français. Il peut par exemple réécrire l’alinéa 2 de l’article 27 de
l’AUPC ainsi qu’il suit : « le projet de concordat (…) doit également préciser les
mesures et conditions envisagées pour son redressement, notamment : (…) les
modalités de continuation de l’entreprise, telles que la demande ou l’octroi de
délais et de remises ; la cession partielle d’actif avec indication précise des biens
[et des contrats] à céder ; la cession ou la location‐gérance d’une branche
d’activité formant un fonds de commerce ; la cession ou la location‐gérance de
la totalité ou d’une partie de l’entreprise, sans que ces modalités soient
limitatives et exclusives les unes des autres (…) ».

556. Aussi, l’alinéa 4 de l’article 131 du même texte pourrait-il être


réaménagé de la manière suivante : « lorsque la cession totale ou partielle
d’actif ou d’entreprise ou d’établissement est envisagée dans le concordat de
redressement judiciaire, le syndic doit établir un état descriptif des biens
meubles et immeubles dont la cession est envisagée, la liste des [contrats] et
des emplois qui y sont attachés, les sûretés réelles dont ils sont affectés et la
quote‐part de chaque bien dans le prix de cession ». Cette rédaction permettra
de résoudre le problème de la consécration de la cession des contrats en droit
OHADA des procédures collectives, qui n’est pas clairement tranchée à ce jour.
Mais aussi, cela assurera une meilleure sécurité aux contractants du débiteur
en faillite en les assurant qu’en cas de cession de l’entreprise, ils ont des
chances de voir survivre leurs contrats qui seront transmis à un partenaire
plus solvable.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
279
557. En somme, les droits OHADA et français n’accordent pas une
même attention aux contrats lors de la cession de l’entreprise. Cette différence
d’attention se justifie par les objectifs poursuivis par chaque législateur en
ordonnant la cession de l’entreprise. Ces objectifs sont perceptibles au regard
des règles régissant l’adoption du plan de cession.

Paragraphe 2 : Le régime de la cession des contrats au


sein de la cession d’entreprise

558. Comment sont cédés les contrats dans le cadre d’une cession
d’entreprise ? En droit commun, la cession des contrats est un acte
consensuel nécessitant une triple manifestation de volonté, le cédant, le cédé
et le cessionnaire devant consentir à l’acte. En droit des procédures collectives,
une telle recherche des volontés est-elle exigée ? En effet, en fonction des
objectifs divergents qu’ils poursuivent, les deux systèmes ne règles pas de
façon identique la question du mode de cession des contrats. En droit français,
le plan de cession dans lequel sont contenus les contrats est imposé par le
tribunal, la cession des contrats y est donc dite judiciaire ou forcée (A), alors
qu’en droit OHADA, le projet de concordat qui en constitue le cadre est voté
par les créanciers, ce qui en fait un acte conventionnel (B).

A/ Une cession judiciaire en France

559. Le caractère autoritaire de la cession des contrats en France


permet un maintien forcé de la relation contractuelle, le débiteur étant
contraint d’accepter le changement de partenaire contractuel. On assiste ainsi
à un sacrifice de la volonté des cocontractants859 lors de la cession d’une

859 J.- J. FRAIMOUT « Sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires. – plan de cession.


– cession des contrats », op. cit., p.6
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
280
entreprise. Leur volonté est ainsi évincée au profit de celle du tribunal. Mais,
depuis la loi de sauvegarde, la volonté du cessionnaire est respectée.

560. L’éviction de la volonté des cocontractants. La cession forcée


des contrats en cas d’ouverture d’une procédure collective en droit français
fait prévaloir la valeur patrimoniale de cet acte juridique, que le législateur
conçoit comme élément de l'actif de l'entreprise cédée sur le rapport personnel
d'obligation860. On assiste donc à une instrumentalisation du contrat à des
fins économiques, entrainant le sacrifice des volontés individuelles sur l’autel
d’un intérêt supérieur861 : le sauvetage de l’entreprise et des emplois qui en
sont attachés. Ainsi, la cession du contrat en cas d’ouverture d’une procédure
collective déroge aux règles de droit commun862 en revêtant un caractère
autoritaire. L’ouverture d’une procédure collective entraine ainsi une cession
forcée des contrats, laquelle résulte de la seule volonté du tribunal et s’impose
aux cocontractants863.

561. Aux termes de l’article L.642-7 du code commerce, « le tribunal


détermine les contrats de crédit-bail, de location ou de fourniture de biens ou
services nécessaires au maintien de l'activité au vu des observations des
cocontractants du débiteur transmises au liquidateur ou à l'administrateur
lorsqu'il en a été désigné. Le jugement qui arrête le plan emporte cession de ces
contrats, même lorsque la cession est précédée de la location-gérance prévue à
l'article L. 642-13 ». Contrairement au processus prévu en droit OHADA, en
France, le tribunal détermine souverainement les contrats qu’il juge
nécessaire à la poursuite de l’activité de l’entreprise cédée et impose leur
cession aux cocontractants. Cette cession forcée des contrats a pour but

860 V. D. MARTIN, « La sécurité contractuelle à l'épreuve du redressement judiciaire », JCP


n°1986, p. 180 s. – J. MESTRE « L'évolution du contrat en droit privé français, dans L'évolution
contemporaine du droit des contrats, Journées Savatier », PUF, 1986, p. 419
861 J.- J. FRAIMOUT « Sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires. – plan de cession.

– cession des contrats », op. cit., p.3


862 L’article 1216 du code civil français exige un triple consentement : le consentement du

cédant, celui du cédé et celui du cessionnaire.


863 E. ANDRE, Les actifs incorporels de l’entreprise en difficulté, Thèse Lyon, Dalloz, 2020,

p.319
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
281
d'empêcher la résiliation des contrats de crédit-bail, de location ou de
fourniture de biens et de services, laquelle pourrait compromettre la survie de
de l’entreprise. La décision du tribunal rend ainsi inopérante toute disposition
contractuelle qui ferait obstacle à la cession du contrat, et ce même lorsqu'une
telle disposition est insérée dans l'acte de cession de l'actif objet du contrat864.

562. En plus, pour garantir ce caractère autoritaire de la cession, toute


modification substantielle ultérieure du plan ne peut être décidée que par le
tribunal à la seule demande du cessionnaire.865 S’il semble logique d’exclure
le cédant, car l’entreprise ayant été cédée, il n’a en principe plus aucun intérêt
à solliciter une modification du plan de cession, l’exclusion des contractants
dont les contrats ont été cédés peut par contre, être pénalisante pour eux. En
effet, après la cession, certains contractants peuvent avoir un intérêt à ce que
les conditions dans lesquelles leurs contrats ont été cédés soient revues afin
d’en assurer une meilleure exécution. Par exemple, les salariés dont les
contrats ont été cédés au nouvel employeur peuvent avoir intérêt à ce que
leurs conditions soient revues. Mais le législateur français semble exclure
cette possibilité dans le souci d’imposer le plan de cession et garantir son
exécution.

563. Toujours dans le même ordre d’idée, les recours contre la décision
du tribunal arrêtant le plan de cession sont très limités. Aux termes de l’article
L.661-6 du code de commerce, l’appel « sans limite866 » de ces décisions n’est
ouvert qu’au débiteur et au ministère public. Pour le cessionnaire et le
cocontractant donc le contrat a été cédé, leur appel est limité. Pour le premier,
il ne peut faire appel du jugement arrêtant le plan de cession que si celui-ci
lui impose des charges supplémentaires à celles auxquelles il a lui-même
souscrit lors de la négociation du plan. Alors que pour le cocontractant, son
appel ne peut porter que sur la partie du jugement qui emporte cession de son

864 Cass. 3e civ., 7 déc. 2011, n° 10-30.695, FS-P+B.


865 C. com, Art. L.642-6 al.1
866 A. JACQUEMONT, N. BORGA, Th. MASTRULLO, op. cit, p.538.
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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282
contrat867. Par ailleurs, n’étant pas mentionné sur la liste des personnes
pouvant faire appel, les candidats repreneurs évincés ne peuvent donc en
aucun cas faire appel du jugement arrêtant le plan868.

564. Pour tempérer le caractère forcé de la cession des contrats


imposée aux cocontractants de l’entreprise cédée, le droit français leur
reconnait la possibilité d’émettre leurs avis et observations à propos de
l’opération de cession. Les cocontractants concernés par la cession forcée
pourront ainsi se prévaloir de leur droit d'être convoqués à l'audience quinze
jours à l'avance, conformément à l'article R. 642-7 du code de commerce. La
méconnaissance de cette disposition reprise de la loi ancienne, considérée
comme une application du principe du contradictoire, entraine la nullité du
jugement869.

565. La non éviction de la volonté du cessionnaire. Sous l’égide de


la loi du 25 janvier 1985, la procédure de cession des contrats autorisait une
ignorance totale de la volonté du cessionnaire870. La loi de sauvegarde a
considérablement amélioré la situation du cessionnaire sur ce point. En effet,
en faisant de la mention des contrats l'un des éléments de l'offre du
cessionnaire871, le législateur interdit au tribunal d’imposer à ce dernier la
cession des contrats qu’il n’a pas souhaité reprendre dans son offre de de
reprise872. Il s’agit là d’un tempérament au caractère forcé de la cession des
contrats en France. La décision du juge s’impose aux cocontractants de
l’entreprise cédée et non au cessionnaire dont la volonté exprimée dans son
offre doit être respectée.

867 C.com. L.661-6 III


868 Cass. Com, 15 déc. 2009, D.2010.
869 , Cass. com., 28 mars 1995, SCI PMF – Complexe hôtelier Cristal c/ Sauvan ès qual. : Bull.
civ. IV, n° 109 ; D. 1995, inf. rap. p. 208
870 M.H. MONSERIE, Les contrats dans le redressement et la liquidation judiciaires des

entreprises, op.cit., p.292


871 C. com., Art. L. 642-2, II.
872 Cass.com., 15 déc. 2009, n° 08-21.235, F-P+B ; Rev. proc. coll. 2010, comm. 60, obs. F.

PEROCHON et P. ROUSSEL GALLE,


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
283
B/ Une cession conventionnelle en droit OHADA

566. Contrairement au droit français, en droit OHADA, le choix de


l’offre de cession à retenir incombe au débiteur et à ses créanciers. Ceci fait
de la cession en droit OHADA un acte consensuel. Ce caractère consensuel
limite les chances de sauvegarde des contrats du débiteur en difficulté. Le
cocontractant cédé pouvant paralyser l’opération lorsque son consentement
n’a pas été obtenu.

567. La recherche du consentement du cédé. Alors qu’en France, les


cocontractants de l’entreprise en difficulté voient leurs contrats cédés sans
leur consentement873, en droit OHADA, leur consentement est requis. En effet,
le législateur exige que les cocontractants du débiteur dont les contrats
doivent être cédés soient consultés. Cette consultation est faite à deux
niveaux. En premier lieu, La consultation du cédé est faite au moyen de la
convocation individuelle prévue à l’article 122 de l’AUPC874. Elle résulte
ensuite du vote du concordat par le cédé, concordat dans lequel est envisagée
la cession de son contrat. Cette consultation est toutefois limitée, car le cédé
est consulté dans un cadre global, alors que la particularité de son
engagement pourrait nécessiter qu’il émette un avis singulier875. Aussi, aux
termes de l’article 125 alinéa 5 de l’AUPC, le vote du concordat se fait à la
majorité. Cette règle de la majorité a pour conséquence de rendre la cession
des contrats forcée pour les cocontractants minoritaires.

568. En France, alors que la cession y est autoritaire, on assise quand


même à une consultation du cédé mieux aménagée qu’en droit OHADA. En
effet, aux termes de l’article R.642-7 sus cité, les cocontractants dont la
cession est envisagée doivent être convoqué à l’audience au moins quinze
jours avant la date de la tenue de celle-ci. Cette convocation permet de

873 Ils sont certes consultés, mais leur avis n’a pas d’incidence sur l’issue de la cession.
874 A.S ALGADI, Contrat et droit OHADA des procédures collectives : étude à la lumière du
droit français, op cit. p.292
875 Ibid.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
284
respecter le principe du contradictoire en recueillant les observations des
cocontractants. La jurisprudence sanctionne de nullité le jugement qui arrête
le plan sans une convocation préalable des cocontractants876. Toutefois, même
si cette convocation revêt un caractère impératif, elle n’a pas d’incidence sur
la validité de la cession877. La solution jurisprudentielle française
susmentionnée peut être transposable en droit OHADA, compte tenu du
caractère conventionnel de la cession, tout concordat adopté sans
consultation des cocontractants dont les contrats sont cédés devrait être
déclaré nul pour défaut de consentement des cédés.

569. La recherche du consentement du cessionnaire. Pour le


cessionnaire, il ne fait aucun doute que son consentement est recherché et il
ne saurait se voir imposer la cession des contrats. En effet, la cession
intervient à la suite d’une offre de reprise déposée par le cessionnaire. Ainsi,
ce dernier dépose librement son offre d’acquisition de l’entreprise en indiquant
les contrats qu’il souhaite reprendre. Dès lors, il va sans dire qu’avant de
déposer son offre, un repreneur sérieux étudiera minutieusement les
engagements auxquels il sera tenu en reprenant les contrats de l’entreprise878.
En France, le cessionnaire ne peut se voir imposer des obligations auxquelles
il n’a pas souscrit879. Cette solution est parfaitement transposable en droit
OHADA où la cession se veut consensuelle.

876 Cass. com., 28 mars 1995, SCI PMF Complexe hôtelier Cristal c/ Sauvan ès qual. : Bull.
civ. IV, n° 109. Dans cette décision, la cour de cassation, tout en rejetant le pourvoi du
cocontractant, a écarté le motif de l'arrêt déféré, selon lequel le défaut de convocation n'est
pas sanctionné par la nullité du jugement
877 A.S ALGADI, op. cit., p.293
878 Ibid, p.294
879 C. com. Art. L.661-6 III.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
285
Section 2 : La transmission de la charge du contrat sans
cession d’entreprise

570. La cession d’entreprise n’est pas le seul cadre dans lequel les
contrats d’une entreprise en difficulté peuvent faire l’objet d’une transmission
à un tiers pour garantir leur exécution. Dans les deux systèmes juridiques, le
droit des entreprises en difficulté prévoit la possibilité d’une cession isolée du
bail commercial (paragraphe 1). En dehors de cette seule hypothèse de
cession isolée de contrat expressément prévue par le droit des procédures
collectives880, on peut trouver dans d’autres textes, des hypothèses d’une
transmission de la charge du contrat d’une entreprise en difficulté en dehors
de toute cession d’entreprise (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La cession isolée du bail commercial

571. Le bail est le seul contrat dont la cession est envisagée en dehors
de toute cession d’entreprise ou d’actifs. Cette attention particulière accordée
au bail se justifie par son caractère patrimonial (A). Le bail est cédé non plus
de manière autoritaire, mais conformément à la volonté des parties (B).

B/ Une cession justifiée par la patrimonialisation du bail

572. Le contrat de bail n’est pas un contrat comme les autres881. En


effet, contrairement aux autres contacts de l’entreprise, le contrat de bail est
une valeur économique dont le débiteur en difficulté pourra obtenir une
contrepartie financière en le cédant à un nouveau commerçant882. Le contrat

880
E. ANDRE, Les actifs incorporels de l’entreprise en difficulté, op. cit., p.324
881 F. KENDERIAN « Bail commercial et réforme de la loi de sauvegarde des entreprises : le bail
n'est vraiment plus un contrat comme les autres », RTD Com. 2009 p.281
882 X. DELPECH, Fonds de commerce, 19 ème éd., Delmas, 2020-2021, n°036.42

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
286
de bail est ainsi considéré comme un élément de l’actif du débiteur en
difficulté. Il est en pratique, souvent le seul bien de valeur qui reste à une
entreprise en liquidation judiciaire. Cette conception patrimoniale du contrat
de bail participe à sa préservation en cas d’ouverture d’une procédure
collective à l’endroit du locataire. Il jouit ainsi d’une autonomie qui lui permet
de subsister à la cessation d’activité du débiteur en difficulté. En effet, le bail
est un contrat indispensable à la poursuite de l’activité du débiteur, il devrait
donc en principe disparaitre avec la cessation de toute activité qu’induit la
liquidation des biens. Or, tel n’est pas le cas en France et en droit de l’OHADA,
on assiste à une autonomie du bail commercial qui est ici considéré à la fois
comme un contrat et actif de l’entreprise.

573. Cette double nature reconnue au bail commercial favorise sa


préservation, même pendant la liquidation judiciaire de l’entreprise. Le droit
des procédures collectives accorde ainsi au contrat de bail une place
particulière et cherche coute que vaille à assurer sa préservation. La cession
isolée du contrat de bail en liquidation judiciaire traduit ainsi la conception
particulière que le droit des procédure collectives a de ce contrat. Il n’est pas
seulement considéré comme un engagement de volontés, mais aussi comme
une valeur économique883. Toutefois, contrairement au droit français, le droit
OHADA offre à cette cession isolée un champ d’application plus large.

574. En effet aux termes de l’article L.641-12 du code de commerce,


« le liquidateur peut céder le bail dans les conditions prévues au contrat conclu
avec le bailleur avec tous les droits et obligations qui s'y rattachent ». Le code
de commerce limite ainsi la cession isolée du bail à la seule procédure de
liquidation judiciaire. Or, en droit de l’OHADA, il résulte de l’article 75 alinéa
3 de l’AUPC que « le syndic, en cas de liquidation des biens, ou le débiteur
assisté du syndic, en cas de redressement judiciaire, peut continuer le bail ou

883J.P. GASTAUD, « Rapport de synthèse », in continuation des contrats en cours et sens du


bail dans le redressement et la liquidation judiciaire, colloque organisé par le CRAJEFE, 27
avril 1996, Nice LPA, 8 juillet 10996, p.29

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
287
le céder aux conditions éventuellement prévues au contrat conclu avec le bailleur
et avec tous les droits et obligations qui s’y rattachent ». Ce texte prévoit ainsi
la possibilité d’opérer une cession isolée du contrat de bail aussi bien en
redressement judiciaire que pendant la liquidation des biens. Cette cession
jouit donc d’un champ d’application plus vaste en droit de l’OHADA qu’en
France. Toutefois, la cession du contrat de bail commercial se conçoit mal en
redressement judiciaire. En effet, pendant la phase de redressement, l’activité
de l’entreprise doit se poursuivre. Pour ce faire, elle a besoin d’une situation
géographique précise, d’une adresse connue par les clients et les partenaires.
Or, une cession du bail implique un changement d’adresse ce qui peut
entrainer une perte de la clientèle.

B/ Une cession conforme à la volonté des parties

575. En droit de l’OHADA, aux termes de l’article 97 alinéa 3 de l’AUPC,


« le syndic, en cas de liquidation des biens, ou le débiteur assisté du syndic, en
cas de redressement judiciaire, peut continuer le bail ou le céder aux conditions
éventuellement prévues au contrat conclu avec le bailleur et avec tous les droits
et obligations qui s’y rattachent ». Ce texte prévoit la possibilité pour le syndic
ou le liquidateur de céder le contrat de bail en dehors de toute cession
d’entreprise. Ce contrat est ici traité comme un bien de l’entreprise. En France,
l’article L.641-12 al. 5 dispose dans le même sens que le législateur de
l’OHADA que : « le liquidateur peut céder le bail dans les conditions prévues au
contrat conclu avec le bailleur avec tous les droits et obligations qui s'y
rattachent ». Ce texte s’inscrit dans la même logique que l’AUPC, en prévoyant
une cession du bail qui n’est plus envisagée dans le cadre d’une cession
d’entreprise, mais de manière isolée. C’est le seul cas de cession isolée prévu
par le droit des entreprises en difficulté884. Les deux textes diffèrent tout de
même sur leur champ d’application. En effet, en droit de l’OHADA, la cession
isolée du bail commercial semble envisageable aussi bien en liquidation des

884 Ibid
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
288
biens qu’en redressement judiciaire, alors qu’en France, cette cession n’est
envisagée qu’en cas de liquidation judiciaire.

576. Contrairement à la cession intervenue dans le cadre d’une cession


d’entreprise, la cession isolée du bail prévue par les deux législateurs obéit
aux règles de droit commun, c’est-à-dire qu’elle se fait conformément à la
volonté des parties. Lorsque cette volonté s’est exprimée lors de la conclusion
du contrat au moyen du clause, la cession se fait conformément à la
stipulation des parties. Par ailleurs, si aucune clause n’a été prévu, la cession
devrait se faire conformément aux règles de droit commun, le locataire en
difficulté ou son représentant qui souhaite céder le bail doit ainsi obtenir
l’accord de son bailleur.

577. En outre, le mandataire judiciaire doit demander l’autorisation du


juge commissaire avant de procéder à la cession isolée du bail885. Par ailleurs,
la question s’est posée de savoir si malgré l'autorisation du juge-commissaire,
la clause d'agrément insérée dans le contrat doit recevoir application886. La
jurisprudence répond par l’affirmative. En effet, lorsque la cession isolée du
bail commercial dans le cadre d’une liquidation judiciaire comporte une clause
d’agrément, le respect de cette clause s’impose aux parties887.

Paragraphe 2 : Les autres hypothèses de transfert de la


charge du contrat à un tiers

578. En dehors de la cession isolée du bail expressément consacrée,


on peut trouver dans les deux systèmes juridiques, d’autres hypothèse de
transmission de la charge du contrat à un tiers sans qu’il y ait cession
d’entreprise. En droit bancaire, en cas de difficulté d’un établissement de

885 Com. 9 mai 2007, no 06-10.064, D. 2008. AJ 1508, obs. A. Lienhard


886 M.-P. DUMONT-LEFRAND, « Bail commercial – Contrat de bail commercial », Rép. drt com.,
Février 2023, n°332
887 Com. 14 oct. 1997, Dalloz Affaires 1997. 1469 ; CA Versailles, 2 févr. 1995, AJPI 1995.

588 ; CA Dijon, 4 nov. 1999, Loyers et copr. 2000, no 114


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
289
crédit, les textes prévoient un mécanisme de prise en charge de la créance des
épargnants par un organisme (A). A côté du droit bancaire, il est possible de
voir en filigrane de la cession isolée d’actifs d’une entreprise en difficulté, une
cession isolée de certains contrats (B).

A/ Le transfert de la charge du contrat des épargnants à


un organisme

579. Il n’est pas rare de voir un établissement de crédit faire faillite888


et disparaitre du marché financier. Au Gabon par exemple, on se souvient
encore de la liquidation de la Banque de l’Habitat du Gabon (BHG) et celle
encore en cours de la Post Banque. La question se pose de savoir en cas
d’insuffisance des actifs d’une banque lors de sa liquidation, que deviennent
les dépôts de ses clients ? En principe, en cas d’insuffisance d’actifs lors de la
liquidation d’une entreprise, il y a clôture pour insuffisance d’actifs, et les
créanciers qui n’ont pas pu être payés perdent leurs créances si la
responsabilité personnelle des dirigeants sociaux ne peut pas être engagée.
En droit bancaire, une telle solution signifie la perte des dépôts889 des clients,
la banque ne pouvant pas s’acquitter de son obligation de restitution des fonds
déposés par ces derniers890. Pour se prémunir contre un tel risque et protéger
les créanciers de l’établissement de crédit, il a été créé dans les deux systèmes
juridiques, un organisme chargé d’exécuter l’obligation de restitution des
fonds qui pèse sur le banquier.

888T. BONNEAU, V. JAMET, « Difficultés des entreprises réglementées – Établissements de


crédit, entreprises d'investissement, établissements de paiement et entreprises d’assurance. –
Procédures administratives et judiciaires », JurisClasseur Droit bancaire et financier, Fasc.
190, du 14 Mai 2021, n°1
889 Les dépôts sont « les fonds recueillis par un Etablissement de Crédit ou un Système
Financier Décentralisé auprès de sa clientèle ou de ses membres avec le droit d’en disposer
dans le cadre de son activité, à charge pour lui de les restituer » (art. 1er des statuts du FGDR-
UMOA)
890 J.-F. RIFFARD, « Synthèse - Services bancaires : dépôt et renseignements » JurisClasseur

Droit bancaire et financier, 1er janvier 2022, n°8


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
290
580. Dans l’espace OHADA, les législateurs communautaires
CEMAC891 et UEMOA892 ont créé chacun un fonds de garantie de dépôts893. Il
s’agit d’un établissement public à vocation sous-régionale doté de la
personnalité morale et jouissant d'une autonomie financière. Ces fonds ont
pour objet de protéger les déposants contre l’insolvabilité d’un établissement
de crédit en procédant à leur indemnisation en cas de liquidation de
l’établissement de crédit débiteur894. Il s’opère ainsi, en cas de faillite d’une
banque, un transfert de la charge de la créance contractuelle à l’organisme en
question à qui il reviendra désormais de l’exécuter. Ce fut le cas en 2020 avec
l’indemnisation par le FOGADAC des clients de la banque d’habitat du Gabon
après la liquidation de celle-ci. Le même processus serait aussi en cours pour
l’indemnisation des clients de la post banque. Cette solution que l’on retrouve
aussi en droit français avec la création par la loi du 25 juin 1999 relative à
l’épargne et la sécurité financière d’un fonds de garantie universel pré-financé
afin de disposer de moyens suffisants pour faire face aux défaillances des
établissements de crédit est un véritable moyen de contourner l’inexécution
par la banque de son obligation de restitution.

581. Toutefois, la prise en charge de la créance contractuelle par les


fonds de garantie des dépôts est limitée au regard du plafonnement de
l’indemnisation qui est fixé dans la zone CEMAC à cinq millions (5.000.000).
Le fonds ne vise donc manifestement que les petits déposants, il ne protège
pas les investisseurs dont les dépôts excèdent généralement le plafond fixé. Le
plafonnement de l’indemnité au moyen d’un règlement cristallise la mesure et
oblige les Etats à l’appliquer de manière uniforme. Il aurait peut-être valu

891 Règlement n°01/09/CEMAC/UMAC/COBAC portant création du fonds de garantie des


dépôts en Afrique centrale
892 Décision n°088-03-2014 du 21 mars 20014 portant création du fonds de garantie des

dépôts dans l’union monétaire ouest africaines, modifiée par la Décision n°301-09-2018 du
11 septembre 2018.
893 Le Fonds de Garantie des Dépôts en Afrique Centrale, en abrégé FOGADAC pour la CEMAC

et le Fonds de Garantie des Dépôts et de Résolution dans l’Union Monétaire Ouest Africaine
(FGDR-UMOA) pour l’UEMOA.
894 Pour la CEMAC, article 2 de la décision n°0l/11-FGD-CD portant règlement intérieur du

fonds garantie des dépôts en Afrique centrale ; pour l’UEMOA, Statut du FGDR-UEMOA,
art. 5 et art.6
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
291
mieux laisser chaque Etat en fonction de ses réalités économiques, définir le
seuil d’indemnisation.

B/ Le transfert de la charge du contrat en cas de cession


isolée d’actifs

582. La cession isolée d’actifs est une opération qui permet de réaliser
les actifs d’une entreprise en difficulté sans considération de l’ensemble dont
ils faisaient partie. Il s’agit d’une vente en détail des biens de l’entreprise que
certains qualifient de « dépeçage »895 de l’entreprise en difficulté. En droit de
l’OHADA, cette opération peut être envisagée à toutes les étapes de la
procédure, du règlement préventif896 à la liquidation des biens897, en passant
par le redressement judiciaire898. Elle jouit ainsi d’un champ plus étendu alors
qu’en France, le code de commerce n’envisage la cession isolée des actifs de
l’entreprise en difficulté qu’en liquidation899. Elle intervient lorsque
l’entreprise n’a pas pu être cédée faute d’acquéreur ou lorsque l’acquéreur
d’une entreprise n’a pas inclus certains biens dans son offre d’acquisition.

583. Bien que la cession d’actifs ne vise pas expressément la


transmission des contrats à un tiers, il y a tout de même des actifs dont la
cession ne saurait être envisagée sans une transmission des contrats qui y
sont greffés. Aux termes de l’article 40 du code CIMA, « en cas de décès de
l'assuré ou d'aliénation de la chose assurée, l'assurance continue de plein droit
au profit de l'héritier ou de l'acquéreur, à charge pour celui-ci d'exécuter toutes
les obligations dont l'assuré était tenu vis-à-vis de l'assureur en vertu du
contrat ». Il résulte de ce texte que la cession d’un bien assurée implique
cession du contrat d’assurance. La charge de ce contrat est ainsi transférée à

895 A. LIENHARD, Procédures collectives, 7ème éd., DELMAS, Paris 2017-2018, p.512
896 AUPC, art. 7
897 AUPC, art. 147
898 AUPC, art. 131 al.2
899 C. com. art. L.642- 18 et s
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
292
l’acquéreur qui est désormais tenu de l’exécuter dans les termes initiaux. En
France, au visa de l’article L.121-10 du code des assurances, la jurisprudence
a admis qu’en cas de cession d’un fonds de commerce ordonnée lors d’une
procédure de redressement judiciaire, le contrat d’assurance se transmet avec
les biens qui en constituent le support900.

584. En effet, s’il est de principe que la cession d’un fonds commerce
n’entraine pas de plein droit cession des contrats901, il n’en demeure pas
moins que certains contrats jouissent d’une transmission légale en cas de
cession d’un fonds de commerce, c’est le cas du contrat de travail. Aux termes
des articles 95 du code de travail gabonais et L.1221-1 du code du travail
français, « lorsqu'il survient une modification dans la situation juridique de
l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, absorption,
transformation de fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de
travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur
et le personnel de l'entreprise ». Il résulte de ces textes qu’en droit gabonais
comme en droit français, le contrat de travail se transmet de plein droit à
l'acquéreur du fonds de commerce qui est ainsi tenu de reprendre les salariés
travaillant dans le fonds dans les mêmes conditions que celles déterminées
avec le vendeur902. Outre ces transmissions légales, les parties peuvent, lors
de la cession d’un fonds de commerce, convenir que certains contrats utiles à
l’exploitation du fonds feront l’objet d’une transmission à l’acquéreur. A défaut
d’un tel accord, les contrats sont résiliés903.

900 Cass. Civ. 2ème, 24 oct. 2019, n°18-15994, P.B


901 M. BEATRIZ SALGADO, « Cession amiable du fonds de commerce – Obligations diverses
de l'acquéreur » JurisClasseur Entreprise individuelle - Encyclopédies - Fasc. 1990, 16 octobre
2017, n°57 ; Cass. com., 19 oct. 2022, n° 21-16.169, F-B : JurisData n° 2022-017025
902 Cass. soc., 23 févr. 1977 : Bull. civ. 1977, V, n° 133 ; Cass. soc., 12 mars 2008, n° 06-

45.147, Sté Eiffage construction Rhône Alpes c/ Carvalho : JurisData n° 2008-043131 ; JCP
E 2008, 1598
903 Cass. com., 24 juin 1997, n° 94-16.929 : RJDA 1997, n° 1334 ; Cass. com., 3 oct. 2006,

n° 04-30.820 : Jurisdata n° 2006-035334


Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
293
Conclusion du chapitre 2

585. Lorsque les difficultés du débiteur deviennent insolubles, la survie


du contrat est assurée au moyen de sa cession à un tiers solvable. Le tiers
cessionnaire est ainsi tenu d’exécuter le contrat dans ses termes initiaux.
Dans les deux systèmes, le cadre de cette cession est varié. Elle peut intervenir
lors de la cession de l’entreprise ou de manière isolée. Toutefois, les systèmes
OHADA et français n’assignent pas à ce mécanisme les mêmes objectifs. Cette
différence d’objectifs déteint sur le degré de protection accordé au contrat. En
effet, parce qu’il vise prioritairement la sauvegarde de l’activité du débiteur et
des emplois904, le droit français lors de la cession d’entreprise, aménage un
régime juridique assez claire de sauvegarde des contrats nécessaire à cette
activité. En revanche, en droit OHADA, le sort des contrats n’est pas
clairement réglé par le législateur lors de la cession d’entreprise. Cette absence
d’un régime juridique claire affaiblit les efforts de sauvegarde du lien
contractuel en cas de faillite du débiteur.

904R. GRAU, « Regard sur le droit des entreprises en difficulté à la lumière de la réforme du 15
septembre 2021 », Rev. Proc. Coll – n° 1 - janvier-février 2022, p.1
Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
294
Conclusion du titre 2

586. La faillite du débiteur n’entraine pas ipso facto sa libération des


engagements contractuels auxquels il est lié. Les deux systèmes évitent ainsi
de sacrifier le contrat sur l’autel de l’ouverture d’une procédure collective à
l’endroit du débiteur. En effet, quoiqu’à des degrés différents le droit des
procédures collectives applicable dans les deux systèmes juridiques organise
la sauvegarde du contrat d’abord en forçant la poursuite des contrats dont
l’utilité reste avérée, parfois au mépris de certains principes fondamentaux du
contrat. Ensuite la sauvegarde est assurée par biais de leur transmission à
un tiers capable d’assurer leur exécution. Dans ce dernier cas, contrairement
à ce qui semble ressortir des dispositions de l’AUPC et du code de commerce
français, la cession d’entreprise et la cession d’actifs ne sont pas les seuls
cadres de transmission des contrats d’un débiteur faisant l’objet d’une
procédure collective, on retrouve dans d’autres textes, des hypothèses de prise
en en charge de la créance contractuelle par un tiers.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
295
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE

587. Le droit des procédures collectives assure au contrat une


protection plus dynamique, car il appréhende l’inexécution contractuelle
avant même sa survenance en organisant une réadaptation anticipée de celui-
ci dès l’apparition des premières difficultés. Ainsi, on n’attend pas que le
débiteur manque à ses obligations contractuelles pour agir, on anticipe ces
difficultés en vue d’éluder l’inexécution de ses engagements. Lorsque ce
dispositif préventif s’est avéré insuffisant pour empêcher la faillite du débiteur,
le droit des procédures collectives fait montre d’une très grande magnanimité
dont l’objet n’est pas le même dans les deux systèmes. En droit OHADA, il
s’agit principalement d’aider ce dernier à apurer son passif, alors qu’en
France, le législateur privilégie la préservation de son activité et des emplois
qui y sont attachés. Ceci implique par conséquent une protection à des degrés
différents des contrats par lesquels il est lié.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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296
CONCLUSION GENERALE

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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588. L’étude comparative des remèdes à l’inexécution du contrat révèle
que les droits OHADA et français ont, mais à des degrés différents, adhéré à
la philosophie de favor contractus qui privilégie les solutions visant la
poursuite du lien contractuel plutôt que celles entrainant sa rupture en cas
d’inexécution. Ainsi, pour obtenir du débiteur l’exécution volontaire de ses
engagements contractuels, les deux systèmes mettent à la disposition du
créancier une palette de moyens pacifiques visant à l’inciter à accomplir
volontairement sa prestation contractuelle. Cette vision de la relation
contractuelle partagée par les deux systèmes implique une coopération entre
les parties contractantes, laquelle repose sur un principe de solidarité, qui
commande de faire la promotion de normes cohésives, c’est-à-dire qui favorise
le partenariat et une répartition réajustable des droits et obligations de chaque
partie selon l’équité. La résistance du débiteur, malgré l’utilisation de ces
moyens incitatifs par le créancier, l’expose à la mise en œuvre de mesures
coercitives. Le créancier peut ainsi forcer l’exécution du contrat soit en
obligeant le débiteur à accomplir sa prestation, soit en exécutant lui-même le
contrat ou en le faisant exécuter par un tiers, mais au frais du débiteur.

589. Toutefois, toutes ces mesures classiques consacrées dans les


deux systèmes sont limitées en ce qu’ils supposent que le débiteur soit
solvable. Elles sont inopérantes fasse à un débiteur qui rencontre des
difficultés le plaçant sous la protection du droit des entreprises en difficulté.
En effet, dans les deux systèmes, la procédure collective ouverte à l’encontre
du cocontractant défaillant permet à ce dernier de paralyser l’exécution forcée
au profit du créancier, au moyen du principe de l’arrêt des poursuites
individuelles. Ce principe s’oppose à ce que le cocontractant placé en
procédure collective soit contraint au paiement d’une somme d’argent due
antérieurement au jugement d’ouverture. Il semble donc à première vue que
le droit des entreprises en difficulté s’inscrit en marge du favor contractus.
Pourtant, l’examen du sort du contrat lorsque le débiteur fait l’objet d’une
procédure collective permet d’affirmer que le contrat est plus protégé par les

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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mécanismes du droit des procédures collectives que par les remèdes
classiques.

590. En effet, le droit des entreprises en difficulté fait preuve de plus


de dynamisme que les moyens classiques du fait que, la démarche de
traitement de l’inexécution contractuelle y est d’abord préventive. Ce droit
anticipe l’inexécution contractuelle dès l’apparition des premières difficultés
du débiteur, avant même que celui-ci n’ait faillit à ses engagements
contractuels. Les mécanismes de traitement préventif des difficultés du
débiteur permettent ainsi d’éluder toute inexécution contractuelle. Par
ailleurs, lorsque la faillite du débiteur n’a pas pu être évitée, la défaillance
contractuelle qui en résulte n’est pas irrémédiable. Malgré la faillite du
débiteur, le droit des entreprises en difficulté offre à ce dernier des moyens lui
permettant de préserver les contrats qui conservent une utilité. C’est ainsi que
le créancier est privé de son droit de rompre le contrat nonobstant
l’inexécution du débiteur. Aussi, lorsque l’inexécution du débiteur est
irrémédiable, ou lorsque le contrat a perdu toute utilité pour lui, la protection
de celui-ci reste tout de même assurée par le mécanisme de la cession à un
tiers plus solvable.

591. L’examen du droit des entreprises en difficulté dans les deux


systèmes démontre que la protection du contrat n’y est pas assurée avec la
même rigueur en cas d’ouverture d’une procédure collective. Cette différence
de traitement se justifie par une différence d’objectifs visés par les deux
systèmes juridiques. En droit OHADA, les règles régissant le traitement de la
faillite du débiteur visent prioritairement l’apurement du passif de ce dernier.
Tout est donc fait pour satisfaire au mieux les intérêts du créancier. Or, ce
dernier peut ne plus avoir intérêt à poursuivre la relation contractuelle avec
un débiteur dont l’insolvabilité est irrémédiable. C’est pourquoi, le droit
OHADA n’autorise la cession du contrat qu’avec le consentement du créancier,
ce qui affaiblit l’efficacité du mécanisme. En France par contre, le traitement
de la faillite du débiteur est gouverné par le souci de sauver son activité et les

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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emplois qui y sont attachés. Un tel objectif nécessite donc une protection
accrue des contrats sans lesquels la poursuite de l’exploitation n’est pas
possible. C’est pourquoi, contrairement à son homologue africain, le
législateur français ne requiert pas l’accord du créancier pour céder les
contrats à un tiers plus solvable. Il organise une cession forcée des contrats
lors de la cession de l’entreprise.

592. En définitive, dans les deux systèmes, on assiste à une


objectivation du contrat lorsque le débiteur est in bonis. On ne s’intéresse pas
à sa situation, mais plutôt à l’acte contractuel qu’il faut à tout prix préserver.
Par contre, en cas de faillite du débiteur, on assiste à une subjectivation du
contrat, l’attention n’est plus portée sur l’acte contractuel, mais sur la
personne du cocontractant défaillant. Cette étude a permis de comparer les
expériences législatives des droits français et OHADA tant de droit positif que
prospectifs, en matière de réaction à une inexécution contractuelle. L’analyse
des textes, des doctrines et des jurisprudences dans les deux systèmes permet
de contribuer à l’amélioration tant des textes de lois de l’espace OHADA que
ceux de droit français sur certains aspects des remèdes à l’inexécution du
contrat.

593. En fait, la principale faiblesse du droit des contrats dans l’espace


OHADA réside dans la vétusté des textes de droit commun applicables. En
effet, le code civil ancien qui y est applicable est à plusieurs égards en
déphasage avec les évolutions modernes du droit et des relations
contractuelles. On retrouve certes dans les actes uniformes certaines
solutions modernes, mais ces actes uniformes ne régissent que les contrats
d’affaires. Tous les remèdes examinés s’inspirant des actes uniformes ne sont
donc valables que pour autant que le contrat inexécuté est un contrat
d’affaires. Compte tenu du très peu de probabilité à voir aboutir l’adoption
d’un acte uniforme sur le droit des contrats, il est peut-être déjà temps plus
d’un demi-siècle après leurs indépendances, que les Etats membres de
l’OHADA se dotent de leurs codes des obligations. L’élaboration de ces textes

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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pourra s’inspirer des avant projets d’Actes uniformes et des solutions du
nouveau code civil français qui sont transposables dans le contexte africain.

594. En guise de perspective d’amélioration du droit OHADA, il est


souhaitable que la réponse à une inexécution contractuelle non volontaire soit
clarifiée. Il s’agit principalement pour le législateur OHADA, de clarifier le
régime de la force majeure et de consacrer la théorie de l’imprévision sans
toutefois s’inscrire dans les hésitations du législateur français. Aussi,
l’exécution forcée en nature ne jouit pas d’une consécration claire. Cette
clarification nous parait nécessaire pour montrer les différents moyens
d’exécution forcée en nature des obligations de faire. A ce sujet, les deux avant
projets peuvent constituer une bonne source d’inspiration du fait des
solutions modernes qu’ils proposent. Enfin, concernant le traitement de
l’inexécution en cas d’ouverture d’une procédure collective, le législateur
OHADA gagnerait à clarifier le régime de la cession des contrats lors de la
cession d’entreprise, laquelle mérite d’être consacrée en lieu et place du terme
moins approprié de cession d’actifs. Dans cette perspective, il peut aussi
s’avérer opportun de consacrer la possibilité d’une cession des contrats à titre
de prévention de la faillite du débiteur appelée « prepack cession ».

595. Concernant le droit français, la principale proposition réside dans


la nécessité de consacrer clairement l’exécution par équivalent comme remède
à l’inexécution du contrat, en la distinguant du terme très générique de
dommages intérêts. Aussi, il parait nécessaire de renforcer les mécanismes
comminatoires par la consécration des dommages intérêts punitifs. Cette
consécration permettra d’éviter les « violations efficaces » du contrat.

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BIBLIOGRAPHIE

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Commercial, Fasc. 2355 du 15 Octobre 2021, n°2
230. « Sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires. – Continuation des
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IV/ THESES
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droit de l’OHADA, Thèse de doctorat, Universités de DOUALA et PARIS-
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4. KOUROUMA (M.F) Le procédé de passerelle entre la conciliation et la
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5. KARFO (STF), Paiement des créanciers, sauvetage de l’entreprise :
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Toulouse 1 - Capitole, 2014,
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la protection du créancier chirographaire d'une société en difficulté, Th.,
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11. SIDIBE (A), Recherche sur l’équilibre dans l’exécution du contrat de
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Bordeaux, 2015.
13. TSOUKA (R), La situation des salariés à l’épreuve des procédures
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Université Omar BONGO, 2018
14. WANDJI KAMGA (A.D), Le droit à l’exécution forcée réflexion à partir
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2/ En droit français et droits étrangers

15. BALMACEDA (J), La vente de marchandises dans les systèmes de droit


civil et de common law : Une étude des droits anglais, français et chilien,
Th. Paris1 Panthéon Sorbonne 2017
16. CASSIN (R), De l’exception tirée de l'inexécution dans les rapports
synallagmatiques (exceptio non adimpleti contractus) et de ses relations
avec le droit de rétention, la compensation et la résolution, th. Paris,
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17. GIAOUI (F.S), Indemnisation du préjudice économique en cas
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application aux avant-contrats, atteintes à la réputation commerciale et
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I, 2018
18. GROSSER (P), Les remèdes à l’inexécution du contrat : essai de
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19. HARIZ (S), La rupture du contrat, Th. Université de TOULLON 2016.
20. JACQUEMIN (Z), Payer, réparer, punir. Étude des fonctions de la
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21. KOEHL (M), La négociation en droit des entreprises en difficulté, Thèse,
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22. NICOLAS – BELIZON (D), Le contrôle de la gestion des sociétés
commerciales : approche systémique, thèse de doctorat, Université
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23. PARENT (A), L’imprévision en droit comparé : une analyse normative
économique, Th., Université McGill, Montréal, 2014,
24. PIMONT (S), L'économie du contrat, Th. Université de Poitier 2002,
25. SAUTONIE LAGUIONIE (L), La fraude paulienne, Université de
Montesquieu-Bordeaux IV, 2006
26. THAI (T.H), Exécution en nature du contrat - Etude comparative du
droit français et du droit vietnamien, Thèse, Université Jean Moulin
(Lyon 3), 2014,
27. VIDAL (J), Essai d’une théorie général de la fraude en droit français, le
principe « fraus omnia corrumpit », Université de Toulouse, 1956
28. VIGNERON (L), Conditions de financement de la PME et relations
bancaires, Th., Université de Lille 2, novembre 2008,

V/ DICTIONNAIRES ET ENCYCLOPEDIES

1. BITSAMANA (H.A), Dictionnaire de droit OHADA, Ohadata D-05-33,


2. CORNU (G), Vocabulaire juridique, 12ème éd., PUF, Paris, 2018
3. MORZANO (M), Le dictionnaire de la violence, 1ère éd., Puf, Paris 2011
4. POUGOUE (P.G), Encyclopédie OHADA, Lamy 2011
5. REY (A) (dir.), Le petit Robert, éd. 2017,
6. CADIET (L) (dir.), Dictionnaire de la justice, PUF 2004,

Index alphabétique

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
330
Les chiffres renvoient aux numéros des paragraphes.

Aide d’Etat, 97 s.
Astreinte, 242, 243

Bonne foi, 42, 50, 97, 229 s.

Cession des contrats, 524 et s. ; 537 s.

- Cession judiciaire, 556 s.


- Cession conventionnelle, 563 s.

Clause pénale

- Définition, 190
- Débat doctrinal, 191, 192, 193, 198
- Fonction comminatoire, 193, 194
- Conditions, 195, 196
- Efficacité, 199, 200
- Révisabilité, 201 s.

Clause résolutoire, 371 s.

Clause de préemption, 251

Conciliation, 403 s.

Concordat

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
331
- Préventif, 409, 412, 433,
- De redressement, 454, 551

Contrat
- Définition, 1
- Avant contrat, 571
- Force obligatoire, 12, 13, 44, 223 s.
- Cession forcée,
- En cours, 482, 529

Conversion de créance en capital, 451 s.

- Modalités, 453 s.
- Conditions, 462 s.
- Intérêt, 466 s.

Coût disproportionné, 226, 272 s., 334

Délais de paiement
- Judiciaires, 422 s.
- Légaux, 428, 429

Défaut de conformité, 70, 118 s.

Délai supplémentaire, 45

- Judiciaire, 46 s.
- Extrajudiciaire, 50 s.
- Durée, 53 s.
- Effets, 55

Dommages-intérêts

- Définition, 284
- Punitif, 208 s.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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332
- Réparation, 288 s.
- Compensation, 293 s.
- Intérêts protégés, 300 s.

Droit de rétention

- Nature juridique, 176 s.


- Conditions de mise en œuvre, 179 s.
- Efficacité, 178 s.

Droit d’option, 373,

- Titulaires du droit d’option, 494 s.


- Modalités d’exercice, 497, s

Exception d’inexécution

- Définition, 134
- Conception dualiste, 137 s.
- Condition, 145 s.
- Mise en œuvre, 156 s.
Exécution Volontaire, 40

Exécution Forcée

- En nature, 220 s.
- Par équivalent, 283 s.

Faculté de substitution, 254 s.

Faute du créancier, 276 s.

Force majeure, 104 s.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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333
I

Imprévision

- Définition, 83
- Evolution 84 s.

Inexécution, 4 s.

Intérêts moratoires, 77 s.

Mise en demeure, 56 s.

Meilleurs délais, 164

Notification, 161

Paiements

- Au comptant, 507 s.
- Interdiction, 358 s.

R
Réduction du prix
- Présentation, 67
- Conditions, 71
- Unilatéralisme, 72 s.
Remède, 7 s.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
334
Remises de dette, 430 s.
Remplacement,
- Définition, 117
- Fondement, 118 s.
- Efficacité, 121 s.

Réparation, 126 s.

Réserve de propriété

- Définition, 167
- Conditions, 168 et s
- Efficacité, 174 s

Saisie, 249 s.

Suspension des poursuites, 343 s.

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
335
TABLE DES MATIERES

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
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336
AVERTISSEMENT .............................................................................................. i
DEDICACE ..................................................................................................... ii
REMERCIEMENTS ........................................................................................... iii
PRINCIPALES ABREVIATIONS ............................................................................. iv
RESUME ..................................................................................................... vii
SOMMAIRE ...............................................................................................viii
INTRODUCTION GENERALE ....................................................................... 1
Première partie : ........................................................................................ 18
LES REMEDES INHERENTS AU DROIT DES CONTRATS .......................... 18
Titre 1 : Le débiteur incité à s’exécuter ...................................................... 20
Chapitre 1 : Le recours aux mécanismes contractuels non comminatoires . 22
Section 1 : La tolérance du créancier à l’égard du débiteur défaillant ......... 22
Paragraphe 1 : Le report de l’échéance contractuelle .................................. 22
A/ L’octroi d’un délai supplémentaire au débiteur ..................................... 23
B/ L’exigence d’une mise en demeure ........................................................ 28
Paragraphe 2 : La compensation financière d’une prestation imparfaitement
exécutée .................................................................................................... 33
A/ La réduction du prix ............................................................................. 34
B/ Les intérêts moratoires ......................................................................... 39
Section 2 : La correction de l’inexécution du débiteur ................................ 41
Paragraphe 1 : La correction d’une inexécution imprévisible ...................... 41
A/ La modification du contrat pour imprévision ........................................ 42
1/ Une évolution consacrée en droit français ............................................. 43
2/ Une évolution envisageable en droit de l’OHADA ................................... 49
B/ La suspension du contrat en cas de force majeure ................................ 53
1/ Définition de la force majeure ............................................................... 54
2/ Le régime de la force majeure ............................................................... 57

Les remèdes à l’inexécution du contrat. Etude comparative droit de l’espace OHADA et droit français, Thèse
UOB-FDSE, 2023
337
Paragraphe 2 : La correction d’une inexécution fautive .............................. 59
A/ Le remplacement de l’objet du contrat .................................................. 59
B/ La réparation du défaut de la commande livrée .................................... 64
Conclusion du chapitre 1 .......................................................................... 67
Chapitre 2 : Le recours aux mécanismes contractuels comminatoires ........ 68
Section 1 : L’abstention du créancier ......................................................... 68
Paragraphe 1 : L’exception d’inexécution ................................................... 68
A/ La consécration de l’exception d’inexécution ......................................... 69
1/ Une configuration différente ................................................................. 69
2/ Une appréciation différente de certaines conditions .............................. 74
B/ La mise en œuvre de l’exception d’inexécution ...................................... 79
Paragraphe 2 : L’exercice d’un droit d’exclusivité sur l’objet du contrat ...... 84
A/ La réserve de propriété ......................................................................... 84
1/ Conditions de validité de la clause de réserve de propriété .................... 84
2/ L’efficacité de la clause de réserve de propriété ..................................... 87
B/ Le droit de rétention ............................................................................. 88
1/ Des conditions presqu’identiques.......................................................... 90
2/ Une efficacité reconnue ........................................................................ 94
Section 2 : La menace du créancier ........................................................... 95
Paragraphe 1 : La clause pénale ................................................................ 95
A/ L’admission de la clause pénale ............................................................ 96
B/ L’efficacité relative de la clause pénale .................................................. 99
1/ La fonction comminatoire : gage de l’efficacité de la clause pénale ......... 99
2/ La révisabilité de la clause pénale : une limite à son efficacité ............. 101
Paragraphe 2 : Les dommages et intérêts punitifs .................................... 105
A/ Un mécanisme non consacré .............................................................. 105
B/ Un mécanisme efficace ....................................................................... 107
Conclusion du chapitre 2 ........................................................................ 110
Conclusion du titre 1............................................................................... 111
Titre 2 : Le débiteur contraint de s’exécuter ............................................. 112
Chapitre 1 : L’exécution forcée en nature ................................................. 114
Section 1 : Le principe de l’exécution forcée en nature ............................. 114
Paragraphe 1 : Les fondements du principe ............................................. 115

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338
A/ La force obligatoire du contrat ............................................................ 115
B/ L’éthique contractuelle ....................................................................... 118
Paragraphe 2 : Le domaine de l’exécution forcée en nature ...................... 121
A/ Un domaine jadis limité ...................................................................... 121
B/ Un domaine désormais étendu ........................................................... 123
Section 2 : La mise en œuvre de l’exécution forcée en nature ................... 124
Paragraphe 1 : Les modalités de mise en œuvre de l’exécution forcée en
nature ..................................................................................................... 125
A/ L’exécution forcée directe ................................................................... 125
B/ L’exécution forcée indirecte ................................................................ 129
Paragraphe 2 : Les obstacles à la mise en œuvre de l’exécution forcée en
nature ..................................................................................................... 132
A/ Les limites classiques ......................................................................... 132
B/ Les limites contemporaines ................................................................ 135
Conclusion du chapitre 1 ........................................................................ 144
Chapitre 2 : L’exécution par équivalent .................................................... 145
Section 1 : L’admission de l’exécution par équivalent ............................... 146
Paragraphe 1 : Un mécanisme controversé .............................................. 146
A/ La thèse de la réparation .................................................................... 146
B/ La thèse de la compensation .............................................................. 149
Paragraphe 2 : Une consécration implicite ............................................... 151
A/ La dualité des intérêts protégés .......................................................... 152
B/ L’intérêt positif : une reconnaissance de l’exécution par équivalent ..... 153
Section 2 : Le régime juridique de l’exécution par équivalent .................... 155
Paragraphe 1 : La mise en œuvre de l’exécution par équivalent ................ 156
A/ L’existence d’un contrat inexécuté ...................................................... 156
B/ L’inexécution du contrat : une condition suffisante ............................ 157
Paragraphe 2 : Le dommage réparable ..................................................... 159
A/ La prévisibilité du dommage ............................................................... 159
B/ La limitation du dommage .................................................................. 161
Conclusion du chapitre 2 ........................................................................ 165
Conclusion du titre 2............................................................................... 166
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE ................................................ 167
Deuxième partie : ..................................................................................... 170

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339
LES REMEDES AMENAGES PAR LE DROIT DES ENTREPRISES EN
DIFFICULTE............................................................................................ 170
Titre 1 : ................................................................................................... 174
L’allégement des obligations contractuelles du débiteur ........................... 174
Chapitre 1 : La neutralisation des effets traditionnels du contrat inéxécuté
............................................................................................................... 176
Section 1 : La paralysie du droit à l’exécution de la créance contractuelle 176
Paragraphe 1 : La suspension des poursuites individuelles ...................... 176
A/ Un moyen d’empêcher le recouvrement forcé de la créance contractuelle
............................................................................................................... 177
B/ Une mesure généralisée dans les deux systèmes juridiques ................ 178
Paragraphe 2 : L’interdiction de payer les créances antérieures................ 184
A/ L’intérêt de la mesure d’interdiction de paiement des créances antérieures
............................................................................................................... 184
B/ Le régime juridique de la mesure d’interdiction de paiement des créances
antérieures .............................................................................................. 186
Section 2 : La paralysie du droit de rompre le contrat .............................. 189
Paragraphe 1 : L’inefficacité des clauses entravant la poursuite du contrat
............................................................................................................... 189
A/ L’inefficacité de la clause résolutoire ................................................... 189
B/ L’inefficacité de la clause d’indivisibilité .............................................. 196
Paragraphe 2 : L’éviction de la rupture judiciaire ou unilatérale du contrat
............................................................................................................... 198
A/ L’impossibilité de solliciter la résolution judiciaire du contrat ............. 198
B/ L’impossibilité de rompre unilatéralement le contrat ........................... 200
Chapitre 2 : L'aménagement de la créance contractuelle .......................... 203
Section 1 : La renégociation de la créance contractuelle ........................... 203
Paragraphe 1 : L’incitation du créancier à renégocier le contrat ............... 203
A/ L’aménagement d’un cadre de renégociation attractif .......................... 204
B/ L’octroi d’une priorité de paiement au créancier négociant .................. 210
Paragraphe 2 : Les mesures d’allègement issues des renégociations ......... 213
A/ Les délais de paiement ....................................................................... 213
B/ Les remises de dettes ......................................................................... 217
Section 2 : L’atteinte à la substance de la créance contractuelle............... 222
Paragraphe 1 : La neutralisation des créances irrégulières ....................... 222

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A/ Les inopposabilités et nullités de la période suspecte .......................... 222
B/ La forclusion pour production tardive ................................................. 225
Paragraphe 2 : La reconfiguration de la créance contractuelle .................. 227
A/ La conversion de la créance en capital ................................................ 227
1/ Modalités de conversion de créance en capital .................................... 228
2/ Intérêt de la conversion de créance en capital ..................................... 234
B/ La réduction de la créance contractuelle à travers le mécanisme de l’arrêt
du cours des intérêts ............................................................................... 237
Conclusion du chapitre 2 ........................................................................ 239
Conclusion du titre 1............................................................................... 240
Titre 2 : ................................................................................................... 241
La redéfinition du sort du contrat ............................................................ 241
Chapitre 1 : Le maintien forcé des contrats en cours ............................... 243
Section 1 : La continuation des contrats en cours .................................... 243
Paragraphe 1 : Le domaine de la continuation des contrats en cours ....... 244
A/ Une conception large des contrats concernés par la poursuite ............ 245
B/ Une appréciation divergente des procédures concernées ..................... 247
Paragraphe 2 : La limitation de la continuation des contrats en cours par le
droit d’option ........................................................................................... 250
A/ Le titulaire du droit d’option ............................................................... 250
B/ Les modalités d’exercice de l’option .................................................... 252
Section 2 : Le régime juridique du contrat continué ................................. 253
Paragraphe 1 : Le respect du contrat pour l’avenir ................................... 254
A/ Les moyens favorisant l’exécution du contrat par le débiteur .............. 254
B/ Les moyens favorisant l’exécution du contrat par le cocontractant ...... 256
Paragraphe 2 : Les conséquences de l’inexécution du contrat continué .... 258
A/ La résolution de plein droit du contrat inexécuté ................................ 258
B/ L’octroi des dommages-intérêts au cocontractant victime de l’inexécution
............................................................................................................... 259
Conclusion du chapitre 1 ........................................................................ 261
Chapitre 2 : La transmission de la charge du contrat à un tiers ............... 262
Section 1 : La transmission de la charge du contrat dans le cadre d’une
cession d’entreprise ................................................................................. 263
Paragraphe 1 : La place des contrats dans la cession d’entreprise ............ 264

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A/ La cession des contrats : une condition d’effectivité du plan de cession
d’entreprise en France ............................................................................. 264
1/ Les contacts choisis par le repreneur .................................................. 265
2/ Les contrats imposés par le tribunal ................................................... 268
B/ La cession des contrats : un élément marginalisé dans la cession
d’entreprise en droit de l’OHADA ............................................................. 271
1/ La cession aménagée de certains contrats ........................................... 271
2/ L’extension de la cession aux autres contrats ..................................... 276
Paragraphe 2 : Le régime de la cession des contrats au sein de la cession
d’entreprise ............................................................................................. 280
A/ Une cession judiciaire en France ........................................................ 280
B/ Une cession conventionnelle en droit OHADA ..................................... 284
Section 2 : La transmission de la charge du contrat sans cession d’entreprise
............................................................................................................... 286
Paragraphe 1 : La cession isolée du bail commercial ................................ 286
B/ Une cession justifiée par la patrimonialisation du bail ........................ 286
B/ Une cession conforme à la volonté des parties .................................... 288
Paragraphe 2 : Les autres hypothèses de transfert de la charge du contrat à
un tiers ................................................................................................... 289
A/ Le transfert de la charge du contrat des épargnants à un organisme... 290
B/ Le transfert de la charge du contrat en cas de cession isolée d’actifs ... 292
Conclusion du chapitre 2 ........................................................................ 294
Conclusion du titre 2............................................................................... 295
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE ............................................... 296
CONCLUSION GENERALE....................................................................... 297
BIBLIOGRAPHIE ..................................................................................... 302
TABLE DES MATIERES ........................................................................... 336

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