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2023 14:55
URI : https://id.erudit.org/iderudit/042124ar
DOI : https://doi.org/10.7202/042124ar
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Faculté de droit de l’Université Laval
ISSN
0007-974X (imprimé)
1918-8218 (numérique)
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Tous droits réservés © Faculté de droit de l’Université Laval, 1976 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des
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( j l l l e s LÊTOURNEAU
Antoine MANGANAS **
Page
Introduction 742
1. Sports qui excluent et sports qui ont la violence comme but 751
a) Sports qui excluent la violence 751
b) Sports qui ont la violence comme but 752
Conclusion 774
* Avocat. B.A., LL.L., LL.M. (Londres), Ph.D. (Londres), Professeur de droit criminel à la
Faculté de droit de l'Université Laval.
** LL.L., D.E.S. (Paris), membre du Barreau d'Athènes, étudiant au doctorat à la Faculté de
droit de l'Université Laval.
Introduction
1. H. A. HARRIS, Greek athletes and dthletics, London, Hutchinsnn of London, n,64, p. 100.
2. Ibid., p. 103.
3. C. A. GÖNNET, article, in » La Revue Mensuelle des Sports; ,uillet t930, ,eproduit in
• Racing• • Revue Mensuelle ees Sports; juin n975, p. 12.
A.MÊTN > URNESU Source de la violencc sportive 743
devant les caméras? Pourquoi les policiers prennent-ils toutes les précau-
tions imaginables avant un défilé et y renoncent-ils si vite quand une
équipe de hockey prend ostensiblement les mesures qu'il faut pour
diminuer physiquement ses adversaires? La rentabilité du spectacle
n'excuse aucun de ces silences > ''
13. G. STEFANI et G. LEVASSEUR, Droit pénal général et criminologie. Précis Dalloz, Paris,
Dalloz, 1957, p. 3.
14. R. VOUIN et J. LÊAUTÉ, Droit pénal et procédure pénale, Paris, P.U.F., 1969, p. 7. MM.
Stefani et Levasseur, supra, note 13, p. 3, parlant aussi de l'évolution de la réaction sociale
contre le phénomène criminel, énoncent qu'elle varie selon la race, la religion, la latitude, le
système social, mais qu'on y trouve toujours certaines constantes.
15. P. BOUZAT et J. PINATEL, Traité de droit pénal et de criminologie, tome I, Paris, Dalloz,
1970, p. 135.
9' vi^v?^?«^ u Source de la violence sportive 747
A. MANGANAS
mais l'accessoire; les champions ne sont pas des animateurs mais des
vedettes. Personne ne les initie à un rôle social. Hors des cercles
pédagogiques, on n'observe jamais une incitation sérieuse à tirer du sport
un style de vie, une culture esthétique, dramatique, sociale, humaine
18. Vers une civilisation nd loisir, Paris, Éd. dd ueuil, ,962, p. 76, in } . .ONSTANT, . .roit
pénal et sport », [1967-68] Revue de droit pénal et de criminologie (Belge), en° spécial)i 277,
aux pp. 280-281.
19. J. LOUP, supra, note 16, p. 6.
20. Voir l'article81(2)duCode criminel canadien,S.R.C. 1970,c. 34.
G M/Mriiaf^ Source de llaiolence sportive 747
22. P. GARRAUD, • Les sports et le droit pénal», [1924] Revue internationale de droit pénal, pp.
212-213. P. Garraud distingue 3 catégories de sports: 1° les sports qui n'impliquent pas
l'idée d'une lutte directe contre l'adversaire (courses, sauts, etc.) ; 2° les exercices de lutte
directe par la seule adresse (escrime au fleuret, tennis, etc.) ; 3° les sports de lutte violente.
23. R. JOYAL-POUPART, La responsabilité civile en matière de sports au Québec et en France,
Montréal, P.U.M., 1975, p. 28.
?' \^r^ùv Source de la violence eportive 751
A . MANOANAS
27. H. A. HARRIS, Greek athletes and athletics, London, Hutchinson of London, 1964, p. 97.
Le pancrace consistait en un mélange de boxe et de lutte. Il était de loi le sport le plus
violent de la Grèce antique.
28. Code crimine/canadien, S.R.C. 1970, c. 34, art. 81(2).
29. The New Encyclopaedia Britannica, tome 3, Londres, William Benton and Helen
Hemingway Benton, 15« éd., 1974, p. 91 et s.
30. Voir dans l'article de J. Constant, supra note 18, l'évolution de la législation belge quant à
la boxe.
MANTTNA^ 1 1
Source de la violence sportive 753
31. In H. A. HARRIS, Greek athletes and athletics, London, Hutchinson of London, 1964, p.
99.
32. Alpha encyclopédie, tome 3, Paris, Grange eatelière, 1968, p. 913.
33. The New Encyclopaedia Britannica, supra, notn 29, p. 91 et 1e
34. J. LOUP,supra, note 16, p. 143.
35. In J. CONSTANT, supra, note 18, p. 279.
36. In 3. LOUP, supra, note 16, p. 154.
37. Alpha encyclopédie, supra, note 32, p. 913.
754 Les Cahiers de Droit (19976 n c. de D. 741
mise hors la loi» 38. Certains estiment même que ce sport est en
régression. Ils expliquent ce phénomène par « llélévation du niveau de
vie qui incite de moins en moins les jeunes à pratiquer ce sport ingrat,
exigeant et non dépourvu de dangers », qui « [...] risque de saper tout
autant les facultés physiques que les facultés cérébrales [...] »".
Si les deux positions sont un peu exagérées, il reste tout au moins
que la boxe est un sport essentiellement violent dans sa réglementation
même et par conséquent dangereux. Il est de notoriété publique que
des combats se sont déjà soldés par la mort violente du vaincu. De fait,
l'unique but de ce sport est de mettre l'adversaire hors de combat au
moyen de coups portés contre lui, bref, de prôner impunément
l'accomplissement de voies de fait avec lésions corporelles. Bien plus,
le fait de blesser est récompensé dans la mesure où l'adversaire qui
inflige des coups qui ne contreviennent pas aux règlements est déclaré
vainqueur40. En somme, une conclusion s'impose: la société tolère,*
autorise, demande, encourage et réclame la tenue et la présentation
commerciale de ce sport de combat, comme pour la lutte.
Toutefois, face au danger et aux abus qui peuvent en découler, il
faut au moins une réglementation stricte et bien appliquée, doublée
d'une autodiscipline marquée de la part des participants afin d'éviter
de franchir le point du non-retour. Une telle conclusion, il va sans dire,
n'entraîne pas nécessairement, comme nous aurons l'occasion de le
voir dans un autre article à paraître, une mise à l'écart du droit pénal.
Certains sports de contact peuvent se rapprocher de la catégorie
des sports qui permettent la violence surtout lorsque l'on consulte les
règlements qui les gouvernent. C'est ainsi, par exemple, que l'on
trouve à propos du hockey sur glace une règle à l'effet que « [...] la
cible de la mise en échec devrait être la poitrine du porteur du
disque»41. Cependant, si le hockey, comme la crosse et le rugby,
présente une certaine rudesse, on ne peut pas dire qu'il a la violence
comme but en soi.
42. Selon Time, l'Association du hockey amateur des États-Unis a eu 10298 équipes
enregistrées pour l'année 1975. Anonyme, « Rush to the rink », Time, 24 février 1975, p. 46.
43. Anonyme, • Courage and Fear in a Vortex of Violence », Time, 24 février 1975, p. 42.
44. W. MCMURTRY, supra, note 5, p. 22.
45. J. SÉGUIN, Le Football, Montréal, Les éditions de l'homme, 1973, p. 70.
46. Ibid., pp. 14, 15 et 16.
756 Les Cahiers de Droit (19976 nc.deD. 741
51. AMERICAN PSYCHIATRIC ASSOCIATION, Clinical Aspects of the Violent Individual, Task
Force Report 8, juillet 1974, à la p. 33.
52. Voir supra, « Sports qui tolèrent la violence comme moyen de parvenir à un but ».
758 Les Cahiers de Droit (1976) 17 c. de D. 741
nous est possible d'identifier les causes qui contribuent à faire des
sports de cette catégorie, dont le but doit être la recherche d'un
équilibre entre les facultés physiques, mentales et psychiques, un
champ d'affrontements et de batailles. D'ores et déjà, l'on peut
mentionner comme facteurs déterminants de cette transformation
l'incitation à la violence, certains facteurs psychologiques tels la
frustration, le stress du jeu, la volonté de vaincre poussée à son
extrême. On peut citer également le développement du professionna-
lisme avec ses exigences particulières pour préserver le statut du
professionnel et le facteur économique ou la rentabilité du «sport-
spectacle». Enfin, il faut ajouter la tolérance en général.
Celle-ci, comme source de violence, se rencontre à divers niveaux
tels ceux des participants, des dirigeants, des officiels, du public en
général, et des autorités policières et judiciaires. L'influence d'un
niveau sur l'autre est une vérité acceptée. L'opinion publique par
exemple pourra influencer l'attitude des tribunaux et l'attitude des
tribunaux, celle des joueurs. La forme que prend la tolérance varie
aussi selon les niveaux. Par exemple, celle des dirigeants et des
entraîneurs se concrétise par l'acceptation des incidents violents et par
l'absence de réaction ou de réaction défavorable face à leur perpétra-
tion quasi quotidienne ". Leur mutisme et leur passivité deviennent, à
tout le moins, des bouillons de culture de la violence. Dans certains
cas, ils s'apparentent véritablement à de l'incitation à la violence. Il en
va de même de la tolérance du public en général. Une des personnes
convoquées pour servir de juré dans le procès criminel du joueur de
hockey Forbes, accusé de lésions corporelles graves, aurait candide-
ment déclaré en rapport avec l'actuelle violence entre les joueurs : a It's
the players' prerogative. If they want to smash each other's brain,
that's all right with me»54. La culpabilité du public est plus grande et
plus marquée puisqu'il est celui qui alimente de ses deniers les
53. Le directeur général et vice-président des Sabres de Buffalo, Punch lmlack, disait : > Les
gens prennent ça trop au sérieux. Depuis que je suis avec les Sabres, je n'ai jamais assisté à
des actes de violence excessive». Le Soleil, 7 novembre 1975, à la p. B-2.
Un journaliste, à propos du président de la Ligue nationale de hockey, écrivait : > Campbell
has been making conciliatory noises for years in 1955 when Maurice Richard stick-whipped
a rival and then hit a linesman twice in the face, in 1956 when Doug Harvey hacked Red
Sullivan in the stomach with his stick and ruptures Sullivan's spleen [...] And on and on into
the 1970s, the i golden age • of hockey, when there have been attacks on the rinks that
would not be tolerated in the parking lots. Like the night, Vic Hadfield, then of the
Rangers, swung at Linesman Alan Glaspell or the time Atlanta's Dan Bouchard assaulted
Referee Dave Newell [...] • Ray Kennedy, • Wanted : an end to mayhem •, Sports Illustrated,
17 novembre 1975, à la p. 20.
54. Ray KENNEDY,! Wanted: an end to mayhem», loc. cit., p. 21.
A M^NGANAsU Source de la violence sportive 759
61. Art. 309 et s., pour les coups et blessures volontaires, et 320, pour coups et blessures
involontaires, du Code pénal français. L'article 320 stipule : t S'il est résulté du défaut
d'adresse ou de précaution des blessures, coups ou maladies entraînant une incapacité
f totale i de travail personnel pendant plus de • trois mois », le coupable sera puni d'un
emprisonnement de 15 jours à un an et d'une amende de 500 F. à 15000 F. ou de l'une de
ces deux peines seulement >.
62. Cass. (Ch. crim.) 21 octobre 1965, D. 1966.J.26. Il est à noter que l'offense de coups et
blessures volontaires qui résultent en une incapacité totale de travail de plus de 8 jours
comporte des peines maximales de 5 ans d'emprisonnement et une amende pouvant
totaliser 10000 F.F.
63. Trib. corr. de Marmande, 5 octobre 1961, Gaz. Pal. 1961.2.327.
64. Cass. crim. 24 janvier 1956, D. 1956.J. 197; l'accusé avait blessé deux adversaires dans deux
phases successives. Dans le premier cas, alors que le gardien de but avait immobilisé le
ballon, il donna un coup de pied sur ce ballon et atteignit le gardien au visage, lui fracturant
le nez. Dans le deuxième cas, à l'occasion d'une mêlée, il frappa d'un coup de pied un joueur
au ventre, lui perforant l'intestin.
762 Les Cahiers de Droit (1976) 17 C. de D. 741
66. (1971)2C.C.C.(2d)442.
67. (1971) 1 C.C.C.(2d)333.
68. Voir supra, note 66.
69. Voir supra, note 67.
70. Voir supra, note 66.
71. Voir supra, note 67.
764 Les Cahiers de Droit (1976) 17 C. de D. 741
72. (1971)2C.C.C.(2d)442.
73. Ibid., à la p. 447.
74. Ibid., p. 446.
A.MTNGANA£U Source de la violence sportive 765
fait dans l'intention de blesser, ainsi que celle d'avoir troublé la paix en
se battant80. Mais en Ontario, des accusations de complicité pour
commettre des voies de fait ont aussi été portées contre un entraîneur
et un directeur-gérant81. Plus récemment, à l'occasion d'une partie de
hockey entre Philadelphie et Toronto, certains joueurs se sont vus
accusé de possession d'une arme offensive dans un dessein dangereux
pour la paix publique ou en vue de commettre une infraction
contrairement à l'article 83 du Code criminel. L'article 2 du Code
criminel définit comme une arme offensive : a) toute chose destinée à
être employée comme une arme, ou b) toute chose qu'une personne
emploie ou entend employer comme une arme, qu'elle soit ou non
destinée à servir d'arme. Un bâton de hockey entre dans la catégorie
de l'article 2 (b). Dans l'affaire Forbes, bien que les poursuites pour
assaut grave aient été abandonnées par suite du désaccord du jury, le
procureur de la poursuite insista sur le fait que « le premier procès
servirait d'avertissement à la Ligue nationale de hockey et aux autres
sports professionnels en rappelant que les joueurs ne doivent pas se
croire au-dessus des lois au cours des rencontres sportives »82.
80. Ibid.
81. Ibid.
82. Anonyme, • L'affaire Dave Forbess on abandonne les poursuiies ! !» ,e Jour, 12 août 1975,
p. 12.
83. Trib. corr. de Marmande, 5 octobre 1961, Gaz. Pal. 1961.2.327.
84. J. Low, supra, note 16, p. 193.
G . LËTvr RNEA U
A. MANGANAS
Source de la violencc sportive 767
Nous estimons que les règles sportives devraient aussi être établies de
façon à exclure toute violence et toute brutalité. Leur objectif principal
devrait être la sécurité des participants89.
Une caractéristique des règles sportives ne doit pas nous échapper
cependant. Vu qu'elles ne revêtent pas de caractère légal et qu'elles ne
présentent pas quant à leur rédaction les exigences d'un Code pénal ou
d'un Code civil, il est possible qu'il existe des situations non prévues ou
réglées de façon inadéquate par les règles sportives, et, conséquem-
ment, des situations créées ou provoquées par la structure actuelle des
règles du jeu. Les règles du jeu ont donc une valeur relative quant à
leur capacité de régir les incidents sportifs, ce qui laisse place à
l'intervention du droit commun.
La question de savoir si les règles du jeu sont une cause ou source
de la violence sportive a fait l'objet d'une controverse. Certains
estimaient en 1930 que aies sports sont des exercices qui présente-
raient des risques sérieux s'ils n'étaient pas réglementés, mais les
efforts de leurs dirigeants ont abouti à la suppression presque totale de
ces risques » " . C'est ainsii par exemple, qu'il fut affirmé en France que
« le code de rugby contient un certain nombre de prescriptions dont le
but immédiat est d'empêcher la brutalité, et dont l'observation stricte
mettrait fin aux accidents » 8 \ Dans le même sens et pour la boxe, J.
Loup estime que « tout est prévu par les règlements [[..] pour éviter le
danger » ".
Nombreux sont ceux qui soutiennent, au contraire, que les règles
du jeu sont souvent cause de violence. Ils se basent principalement sur
deux arguments : 1° la violence est souvent permise dans le contexte
des règles du jeu ; 2° les punitions imposées pour actions violentes ou
brutales sont parfois ridicules et privées de toute exemplarité.
Alors que J. Loup trouvait que les règles du rugby strictement
observées excluent toute violence, un tribunal français était d'avis que
t [...] le Code de rugby à 13 (chapitre XII) indique comment le placage
doit être s efficace s et « spectaculaire » (sic) ; que le « placage ee
planche», c'est-à-dire en percutant l'adversaire la tête en avant, tel
85. Cet objectif a maintenant été reconnu au Québec par le législateur provincial. Voir l'article
36 du projet de loi n° 2 sur les loisirs et les sports, maintenant en première lecture, infra.
86. J. LOUP, supra, note 16, p. 72.
87. Note sous l'arrêt Agen. 12 avril 1962, D. 1962.J.589; J. Loup estime que • les règles de ce
sport ont été édictées avec la préoccupation dominante d'éviter tous les dangers que sa
pratique pourrait faire courir à ses adeptes >. Note sous l'arrêt Bordeaux 14 avril 1931, D.P.
2.45.
88. J. LOUP, supra, note 16, p. 185.
768 Les Cahiers de Droit (1976) 17 C. de D. 747
93. Statuts d'une commission de discipline de Ligue et/ou d'association régionale de football -
soccer. Région de Québec (Association de football - soccer. Région de Québec), 1974,
(partie I).
94. Ibid., 4* partie, article 1, loi 5-6.
770 Les Cahiers de Droit (1976) 17 C. de D. 747
95. Ibid., 4« partie, article 1, loi 12. — Voir aussi dans le même sens: G. CARON et P.
SCHWINTE, • L'arbitrage au footballl» Mulhouse, Éditions Salvator, 19771 pp. 1187188.
96. Ibid., 4' partie, article 2.
97. J: W. MEAGHER, La stratégie au hockey, Montréal, Les ééitions de l'homme, ,973, p. 36.
98. Règles du C.A.H.A. (Canadian Amateur Hockey Association), art. 59 ( 0 (1973-74).
G. LÊTOURNEAU
A. MANGANAS
Source de la violence sportive 777
105. Voir aussi en rapport avec l'application de règles plus sévères W. MCMURTRY, supra, note
S, à la p. 28. L'auteur rapporte que, dans des écoles publiques d'Ontario, une règle
imposant des sanctions plus sévères à l'occasion de bagarres fut introduite. Pendant 3
saisons totalisant 2 100 parties, il n'y eut qu'un seul incident.
106. Ces résultats sont extraits d'un document préparé par l'Association Sportive universitaire
du Québec et déposé devant le Comité d'étude sur la violence au hockey institué par le
Gouvernement du Québec.
774 Les Cahiers de Droit (1976) 17 C. de D. 741
Conclusion
La tolérance de l'ensemble des autorités judiciaires ainsi que
l'incapacité ou le refus du droit sportif d'intervenir de façon adéquate
pour régler les incidents sportifs ont contribué à l'éclosion de la
violence sportive.
Il est vrai que les sports ont un caractère licite, sont reconnus par
la loi, et de plus comportent certains risques acceptés par les
participants. On ne devrait pas cependant en déduire que le droit
criminel doit céder sa place au droit sportif pour régler les incidents
violents d'une certaine gravité. Si l'admission d'un régime d'exception
pour le sport vis-à-vis du droit pénal peut justifier une certaine
flexibilité pour régler les cas qui ne présentent pas les caractéristiques
d'une infraction grave et qui se situent dans le contexte du déroule-
ment normal d'une rencontre sportive, par contre ce régime peut
soulever de sérieuses difficultés lorsqu'il laisse impunis des actes d'une
gravité marquée. Le principe de l'égalité devant la loi est sérieusement
dilué lorsque l'on traite différemment une bagarre dans la rue ou dans
un bar et une bagarre sur le terrain de jeu. De plus, d'autres individus
ou groupes d'individus, agissant dans d'autres contextes sociaux où
des raisons d'opportunité ou de politique criminelle ont amené le
législateur à créer des infractions spécifiques, peuvent exiger eux aussi
l'immunité face au droit pénal.
Il ne fait aucun doute que des conditions particulières existent
pour certains sports, comme la vitesse d'action et l'abondance des
contacts physiques. Ceci veut dire que le droit criminel ne doit pas
intervenir au moindre incident et ne doit pas appliquer ses critères
avec la même sévérité. Car autrement le sport perdrait automatique-
ment son caractère d'activité de détente et deviendrait un supplice et
un stress insupportables pour les participants. Mais de là à constituer
un régime d'exception total pour les incidents sportifs, il y a toute une
différence.
Nos recommandations vont vers une intervention plus sévère du
droit criminel. Entre les deux positions extrêmes, celle de ceux qui
veulent que le droit criminel reste complètement en dehors du domaine
des sports et celle de ceux qui disent que le sportif répond comme
quiconque des coups et blessures résultant de sa conduite délibérée ou
de sa simple négligence, il existe la voie moyenne, c'est-à-dire celle qui
admet l'intervention du droit pénal comme ultime recours lorsque
certaines conditions de gravité sont réunies. Ces conditions seront
précisées dans une étude subséquente. Afin de freiner la tendance
actuelle vers la pratique et la recrudescence de la violence sportive, les
autorités judiciaires doivent faire preuve d'une sévérité exemplaire.
A M^GANASV Source de la violence sportive 775
110. [1971JR.L.21.
111. Ibid., à la p. 26. Pour un exemple de sanctions disciplinaires contre les joueurs qui désirent
recourir aux tribunaux, voir l'article 10 (g) (h) des règles de la C.A.H.A.
112. D.S., note sous l'arrêt Paris, 13« Ch.corr. 2 décembre 1967, J.C.P. 1968.11.15408.