Vous êtes sur la page 1sur 80

Mémoire présenté pour obtenir le diplôme de

MASTER 2 RECHERCHE
Mention
DROIT FRANÇAIS - DROIT ALLEMAND

Spécialité
DROIT INTERNATIONAL ET EUROPEEN

Cohabilité par
UNIVERSITE PARIS NANTERRE - UNIVERSITÄT POTSDAM

Présenté par
Romane BILLARD

Promouvoir la féminisation du sport :


Les mesures de types paritaires et promotionnelles des
femmes pour lutter contre les stéréotypes de genre dans
le monde sportif

Directrice de mémoire Responsable droit étranger


Madame Véronique Champeil-Desplats Madame Stéphanie Rohlfing-Dijoux
Remerciements
Je souhaite avant tout remercier ma directrice de mémoire, Madame Véronique Champeil-
Desplats, pour le temps qu’elle a consacré à me lire, à m’apporter les conseils
méthodologiques ainsi que les pistes de réflexion indispensables à la conduite de cette
recherche. L’idée du sujet de mémoire qui est la sienne, dont le domaine juridique m’était
jusque-là inconnu, m’a particulièrement plu et stimulé.

Je suis également reconnaissante envers les autres élèves du M2BDE, qui ont écrit leur
mémoire sous la direction de Madame Champeil-Desplats, pour avoir pris le temps de
discuter de mon sujet et partagé leurs connaissances à ce propos. Chacun de ces échanges m’a
aidé à faire avancer mon analyse.

Merci également à l’Université Paris Nanterre qui offre une base de données en ligne très
riche. Celle-ci m’a permis de faire des recherches variées dans de nombreux domaines, aussi
bien le droit et le sport que la sociologie et l’histoire.

Enfin, un grand merci à Arthur Champavere, élève-avocat au Barreau de Paris, qui m’a
encouragé et motivé tout au long de la réalisation de ce mémoire. Sa passion pour le sport et
sa curiosité pour l’angle par lequel ce mémoire a été abordé sont les éléments moteurs de mon
travail. Il m’a également été d’une aide précieuse en acceptant de relire ce mémoire. Je
remercie également Alexandre Foliot et Cosima Schramm qui m’ont tous les deux
grandement aidée en relisant la partie en allemand.

2
Liste des abréviations

CE Conseil d’État

CGEGS Commissariat général à l’éducation générale et sportive

CIO Comité international olympique

CJUE ou CJCE Cour de Justice de l’Union européenne (anciennement la Cour de


Justice des Communautés européennes)

CNO Comité national olympique

CNOSF Comité national olympique et sportif français

DFB Deutscher Fussball-Bund (Fédération allemande de football)

DSB ou DOSB Deutscher Olympischer Sportbund (Confédération olympique et


sportive allemande)

FFF Fédération française de football

FIFA Fédération internationale de football association

FSI Fédération sportive internationale

JO Jeux olympiques

ONU Organisation des Nations unies

RDA République démocratique allemande

RFA République fédérale d’Allemagne

UNESCO United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization


(Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la
culture)

3
Sommaire

INTRODUCTION

I- Etat des lieux de la pratique sportive : des inégalités criantes


A) Une conquête progressive des femmes dans leur accès à la pratique sportive
B) Des revenus salariaux, une participation aux JO et une médiatisation moindres
C) Des inégalités entretenues par le poids des stéréotypes

II- Promouvoir la féminisation de la pratique sportive


A) Le cadre légal et réglementaire
1- La prise de conscience collective en Europe depuis les années 1980
2- L'exemple européen suivi par la France et l'Allemagne
3- Des avancées notables depuis 2012 en France
4- Une interprétation stricte du principe d'égalité et du principe de non-discrimmination ?
5- Perspectives d'évolution : entre espoirs et inquiétudes

B) Des actions accessoires nécessaires pour soutenir la féminisation du milieu sportif


1- Les initiatives menées par les institutions
a- En France
b- En Allemagne
2- Les initiatives menées par les associations
a- En France
b- En Allemagne
3- Les initiatives menées par les médias en France
4- Les initiatives menées par les villes
a- En France
b- En Allemagne

III- Promouvoir la féminisation des postes à responsabilité au sein des instances sportives
A) Etat des lieux : un "plafond de verre" omniprésent dans les instances sportives
nationales et internationales

4
1- A l'échelle internationale : le CIO et les FSI
2- A l'échelle nationale : le CNOSF, le DOSB et les fédérations sportives nationales

B) Le cadre légal et réglementaire


1- Les mesures prises par les organes internationaux
2- Le cadre légal et réglementaire en France
a- Les lois de promotion : l'ouverture vers une proportionnalité
b- De la proportionnalité aux quotas
c- Des résultats mitigés : trois pas en avant, deux pas en arrière
3- Le cadre légal et réglementaire en Allemagne

CONCLUSION

5
Introduction

« Une olympiade femelle serait impratique, inintéressante, inesthétique et incorrecte.


Le véritable héros olympique est, à mes yeux, l'adulte mâle individuel. Les Jeux olympiques
doivent être réservés aux hommes, le rôle des femmes devrait être avant tout de couronner les
vainqueurs ». Voici donc l’opinion de Pierre de Coubertin qu’il partagea lors des Jeux
olympiques de 1912 à Stockholm. Les femmes n’auraient, selon lui, rien à faire dans une
compétition sportive si ce n’est un rôle purement décoratif, comme au Tour de France en
quelque sorte. Et la vision qu’ont les hommes des femmes et du sport n’est pas moins
machiste au XXIème siècle : le pilote automobile britannique Jenson Button a déclaré, à la
suite de la victoire de Danica Patrick, première femme pilote à avoir gagné une course en
Indycar (équivalent de la Formule 1 américaine): « Une fille avec des gros seins ne serait pas
à son aise dans le cockpit. La concentration des mécaniciens en prendrait en coup… Vous
imaginez l’effet sur le gars qui devra l’attacher ?».

Les femmes ont depuis toujours été victimes de stéréotypes les laissant apparaitre plus faibles
que les hommes, les écartant de toute activité manuelle nécessitant de la force et bien entendu
de toute activité sportive. Pourtant, il n’est plus à prouver que le sexe et les caractéristiques
physiques ne déterminent pas si l’un est plus fort que l’autre. Ainsi, se produit en 1973 un
moment décisif pour le machisme et le sport féminin. L’ancien n°1 mondial de tennis Bobby
Riggs met au défi la meilleure joueuse du moment, Billie Jean King, de le battre, ce qu’elle
fit.1

Les femmes ont autant leur place que les hommes dans le sport et ce qui paraissait
inimaginable il y a quelques années est arrivé. A titre d’exemple, Amélie Mauresmo, ancienne
numéro un mondiale de tennis, première et seule française à avoir obtenu cette place, ayant
dirigé l’équipe féminine de tennis de 2012 à 2016 et entrainé de 2014 à 2016 le britannique
Andy Murray, a été nommée capitaine de l’équipe de France de Coupe Davis pour l’année
2019, une première dans l’histoire de ce tournoi.

Toutefois, l’exemple d’Amélie Mauresmo ne reste qu’une exception dans le monde sportif.
Les femmes demeurent victimes de discriminations telles que l’accès inégal aux pratiques
sportives, la faible médiatisation de leurs exploits et la sexualisation de l’image des sportives,
et font face à un « plafond de verre » qu’on retrouve en matière sportive quand il s’agit
d’occuper des places importantes dans les instances dirigeantes 2 . Cette problématique
nécessite l’intervention de l’Etat, à travers la mise en place de politiques publiques et du
pouvoir législatif afin de promouvoir les femmes aussi bien dans la pratique du sport que dans
l’accès aux postes à responsabilité au sein des institutions sportives. C’est ainsi que l’explique
Catherine Louveau3, « le projet de la « féminisation » du monde sportif, et en particulier des

1
Cette histoire fait l’objet d’une adaptation cinématographique, Battle of the Sexes, sortie le 22 novembre 2017.
2
Sugier A., Femmes voilées aux Jeux olympiques, Paris, Jourdan éditeur, 2012, p.13
3
Sociologue, Professeure émérite Univerité Paris Sud

6
fonctions dirigeantes, se pose dès les années 1980, alors que le Conseil de l’Europe mène une
réflexion approfondie sur la question de l’égalité entre hommes et femmes dans la prise de
décision ».4

Cette problématique est d’autant plus importante que la définition du sport est large. Elle
comprend aussi bien la pratique de loisir que la haute compétition ; le jeu que la
performance.5 Le sport apparaît donc comme un terrain vaste, doté d’enjeux forts s’agissant
de l’égalité entre les hommes et les femmes.6

La France et l’Allemagne sont des pays exemplaires dans de nombreux domaines tels que
l’éducation, le système de santé, l’emploi, mais qu’en est-il à l’échelle de l’égalité entre les
hommes et les femmes et plus particulièrement en ce qui concerne le monde sportif ?

Avant de se plonger dans le constat de la situation des femmes dans le milieu sportif et les
mesures mises en place par la France et l’Allemagne pour les promouvoir dans ce domaine, il
convient de revenir sur l’histoire du sport en France et en Allemagne. C’est cette Histoire
même qui est à l’origine des discriminations plus ou moins nombreuses que subissent les
femmes dans ces deux pays. Le sport a connu diverses transformations que l’on retrouve à des
degrés divers dans chaque nation européenne, au sein desquelles des spécificités propres
existent. Pour ces deux pays, tout commence à la fin du XIXème siècle avec l’essor du sport
de compétition et l’apparition de nouvelles rencontres internationales, notamment les Jeux
olympiques (JO) tels qu’on les connaît aujourd’hui, remis au goût du jour par Pierre de
Coubertin le 23 juin 1894 lors du Congrès international de Paris (à l’origine du mouvement
olympique) et les premiers Jeux à Athènes en 18967. La fin de la Seconde Guerre mondiale
est marquée par un intérêt grandissant pour l’activité sportive dans laquelle les pouvoirs
publics s’investissent de plus en plus. Ainsi, les autorités étatiques nationales interviennent
aux cotés des associations pour renforcer l’emprise des règles de droit public sur le sport.
C’est au sein d’une communauté sportive de plus en plus organisée que le Comité
international olympique (CIO) joue un rôle prédominant : il exerce un pouvoir supranational,
tant normatif (charte olympique) que juridictionnel (arbitre en dernier ressort de toutes les
questions concernant les Jeux et le mouvement olympique), qui s’impose en particulier aux
comités nationaux olympiques (CNO) mais aussi aux fédérations sportives internationales
(FSI). Les statuts des CNO doivent être approuvés par la CIO et conformes à la Charte
olympique. A leur tour, ces organismes agissent sur l’organisation sportive à l’échelle de
chaque Etat. Contrairement au CNO français, qui a vocation à représenter l’ensemble des
sports nationaux, le CNO allemand dispose de prérogatives exclusivement olympiques.8

4
Louveau C., « Dans le sport, des principes aux faits… », Travail, genre et sociétés 2015/2 (n°34), p.181-186
5
Tétart P., Histoire du sport en France - De la libération à nos jours, tome 2, Paris, Vuibert, 2007, 523 pages
6
Louveau C., « Dabs le sport, des principes aux faits… », Travail, genre et sociétés 2015/2 (n°34), p.181-186
7
Riordan J., Krüger A., Terret T., Histoire du sport en Europe, Paris, L’Harmattan, 2004, 270 pages
8
Miège C., Les institutions sportives, Collection Que Sais-je ?, Paris, Presses universitaires de France, 1997
(2ème édition), 128 pages

7
a- Aperçu de l’histoire du sport en France9

Le sport se développe en France à partir du début du XXème siècle, développement


encouragé par la loi du 1er juillet 1901 facilitant la multiplication des associations sportives
ainsi que l’octroi des congés payés en 1936 ouvrant la voie à l’augmentation du temps libre et
des loisirs. Ainsi, la pratique sportive hors structure associative gagne du terrain ; les
fédérations n’ont plus le monopole de la pratique sportive.

Le sport devient une considération étatique par sa mise sous tutelle sous la direction du
Commissariat Général à l’Education Générale et Sportive (CGEGS) pendant le Régime de
Vichy. Il s’agit d’un premier exemple de ce qui pourrait s’apparenter à une politique publique
du sport, alors que l’Etat n’intervenait que très timidement dans ce domaine jusque là. Pour
autant, le sport est loin d’être une priorité de l’Etat. Le budget consacré à la jeunesse et aux
sports est quasi insignifiant. On observe une pénurie de professeurs et de maitres en éducation
sportive scolaire ainsi qu’un sous-équipement sportif. Il faut attendre la Vème République
pour que l’Etat s’engage réellement dans ce domaine avec la mise en place d’un haut-
commissariat à la jeunesse et aux sports. En matière de jeunesse, le haut-commissaire
Maurice Herzog, engage une politique volontariste, s’appuyant notamment sur la mise en
place de commissions chargées de réfléchir à la question sportive et de définir les principes de
l’action publique. C’est à cette occasion que la question des sports féminins est envisagée et
étudiée.

L’Etat mène une action dans le domaine de l’équipement et utilise également la télévision
française comme vecteur du développement de la pratique sportive, par la programmation
d’émissions ou de films de propagande. Le haut-commissaire Herzog considère que « le sport
relève d’un service public » dont l’Etat doit faciliter et contrôler le développement. Il
s’efforce également de restaurer au sein des fédérations sportives des règles plus
respectueuses des principes fondamentaux de la démocratie ; en particulier l’égalité. L’Etat
exige une règlementation unifiée des associations sportives, orchestre la politique
d’équipement, normalise et règlemente l’accès aux carrières sportives. La politique
volontariste menée dans ce domaine permet au haut-commissariat d’être élevé au rang de
ministère à partir du 8 janvier 1966. Ainsi, le sport est institutionnalisé et trouve une place
dans l’appareil d’Etat alors que depuis l’entre-deux-guerres, il avait toujours été tenu en
tutelle par d’autres ministères et concurrencé par les fédérations. On parle alors de
sportivisation. Cependant, jusque dans les années 60, les femmes ne sont que très peu
présentes dans le champ sportif français.

Sous la présidence de Pompidou, on observe un « émiettement du pouvoir sportif », c’est-à-


dire que celui-ci est partagé entre l’Etat, les collectivités territoriales et les instances fédérales,
ayant pour cause la diversification des sports et des institutions. L’Etat se désengage
légèrement du sport, et essentiellement du point de vue financier. Tant bien que mal, un

9
Tétart P., Histoire du sport en France - De la libération à nos jours, tome 2, Paris, Vuibert, 2007, 523 pages ;
Miège C., Les institutions sportives, Collection Que Sais-je ?, Paris, Presses universitaires de France, 1997
(2ème édition), 128 pages

8
Comité national olympique et sportif français (CNOSF) est créé en février 1972 et
doublement légitimé, reconnu à la fois par le CIO et la loi du 29 octobre 1975 comme le
représentant officiel et exclusif de l’ensemble du mouvement sportif français auprès des
pouvoirs publics.

Le mouvement sportif français est déjà bien institutionnalisé, et ce sur un axe double :
verticalement, par le biais des fédérations et des groupements qui leurs sont affiliés (comités
régionaux et départementaux, associations) et horizontalement, par l’intermédiaire du CNOSF
et de ses représentations régionales et départementales.

Par ailleurs, le Conseil d’Etat se fait juge de la légalité des décisions prises par les fédérations
sportives délégataires, considérées comme des « actes administratifs » depuis l’entrée en
vigueur des lois du 29 octobre 1975 et du 16 juillet 1984 reconnaissant aux fédérations une
mission de service public10.

Les années 1980 marquent un tournant tant dans la vie publique que dans le champ sportif
français. Par les lois du 2 mars 1982, des 7 janvier et 22 juillet 1983, l’Etat transfert certaines
compétences aux collectivités territoriales. On parle de décentralisation administrative.
L’action publique prend alors une nouvelle forme qui n’est pas sans conséquences sur les
politiques publiques et, nous concernant, les politiques publiques en matière sportive.

Aujourd’hui, les politiques du sport ne relèvent pas seulement de l’administration sportive,


qu’elle soit nationale ou locale. Elles sont également en synchronie avec d’autres actions
publiques interministérielles relevant, par exemple, de l’aménagement du territoire, de la
protection de l’environnement, du tourisme ou de la sécurité.

b- Aperçu de l’histoire du sport en Allemagne11

En Allemagne, l’histoire du sport ne peut être détachée de l’héritage de la gymnastique de


Jahn (au service de la régénération nationale à la suite de l’occupation napoléonienne), des
conséquences du contrôle des Nazis sur le système sportif et de celles de la division du pays
en deux entités étatiques distinctes et de la réunification qui a suivi.

Il est important de rappeler la spécificité de l’Allemagne par rapport à la France quant aux
partages des compétences : l’Allemagne est depuis des siècles un Etat fédéral (hormis pendant
la période nazie) et chaque Etat fédéré possède une autonomie en ce qui concerne la sphère
culturelle, dont le sport. Le gouvernement central n’est, quant à lui, responsable que de la
représentation nationale relative au sport. Cette division des responsabilités entre l’Etat
10
Arrêt CE du 22 novembre 1974, Fédération des industries françaises d’articles de sports (les fédérations
sportives agréées relevant de la compétence du juge judiciaire, arrêt CE du 16 novembre 1988, Mme Pascau
contre Fédération française d’aérobic-stretching)
11
Riordan J., Krüger A., Terret T., Histoire du sport en Europe, Paris, L’Harmattan, 2004, 270 pages ; Miège C.,
Les institutions sportives, Collection Que Sais-je ?, Paris, Presses universitaires de France, 1997 (2ème édition),
128 pages

9
central et les gouvernements de chaque Land (région) remonte au début du XXème siècle :
par un accord obtenu en 1914, l’Etat central est responsable du sport de haut niveau ; les
gouvernements fédérés exclusivement des clubs de base.

Au XIXème siècle, le sport est en plein essor en Allemagne. Le système allemand du sport et
de l’éducation sportive est l’un des plus importants d’Europe en nombre de membres. C’est
une conséquence de l’occupation napoléonienne jusqu’en 1815 et de la réaction à cette
occupation : le nationalisme allemand et le souhait de lever une armée de guérilla contre
Napoléon. Se développent alors les sociétés de Turnen. Il s’agit d’une gymnastique inventée
par Friedrich Ludwig Jahn prenant la forme d’une préparation au combat. Ces sociétés, qui
réunissaient des étudiants des lycées et des universités, sont interdites lors du Congrès de
Vienne en 1819. A partir de 1848, elles ne peuvent exister que sous la forme d’associations à
buts non lucratifs et constituent alors les prémices du mouvement sportif en Allemagne.

Après la Première Guerre mondiale, le sport connaît une remarquable expansion. Les
fédérations du sport bourgeois s’associent et pèsent face au gouvernement afin que des efforts
soient fournis en faveur des activités sportives.

Sous le régime nazi, le mouvement sportif est contrôlé et organisé afin de diffuser l’idéal
aryen et de faire la démonstration de la supériorité de la race allemande. Des moyens sont
donnés pour une seule fédération par discipline, le tout chapeauté par un dirigeant membre du
Parti. Toutes les sections jeunes des associations sportives sont tenues d’adhérer aux
Jeunesses hitlériennes. Les Jeux olympiques de Berlin organisés en 1936 sont le symbole de
cet engagement pour le sport : 3 700 000 spectateurs assistent aux Jeux et ces derniers
connaissent un énorme succès en termes de propagande.

Pendant la Seconde guerre mondiale, l’Allemagne promeut très activement la mise en place
de fédérations sportives européennes et de championnats européens.

Après 1945, la République fédérale d’Allemagne (RFA) lutte pour reconstruire le sport ouest-
allemand. Une structure nationale est finalement créée en 1950 : der Deutsche Sportbund
(DSB), l’équivalent de notre CNOSF. Cette institution est devenue une institution entièrement
indépendante à compter de 1949 : der Deutsche Olympische Sportbund (DOSB), responsable
de la représentation aux Jeux olympiques. Du coté est, en République démocratique
allemande (RDA), une fédération allemande gymnique et sportive (der Deutsche Turn- und
Sportbund) est également créée en 1950.

Lors de la Réunification, le sport est le grand oublié des politiques publiques et de la


législation. Le Traité de Réunification entre les deux Allemagne ne mentionne le sport que
dans un seul article (Artikel 39 des Einigungsvertrags vom 31. August 1990, BGB l. 1990 II S.
889). Alors que la RDA possédait plusieurs lois relatives au sport, il n’en existait pas en RFA.
Il n’y en aura donc pas non plus en Allemagne réunifiée car on maintient le système de
l’ancienne RFA, dont le système sportif. Au niveau régional, seuls 3 des 11 « anciens »
Länder de la RFA ainsi que la totalité des 5 « nouveaux » (anciennement ceux de la RDA)

10
disposent de lois spécifiques sur le sport. Autre spécificité de l’Allemagne par rapport à la
France, il n’existe pas de Ministère chargé spécifiquement du sport, mais il s’agit d’une
administration gouvernementale rattachée au Ministère de l’Intérieur. L’Etat allemand a une
tout autre conception de l’organisation du sport : les organismes sportifs sont totalement
indépendants de l’Etat, laissant place à plus d’initiatives privées, tandis qu’en France, l’Etat
exerce une tutelle sur les fédérations, tout en leur consentant des prérogatives plus ou moins
étendues. En Allemagne, le sport se veut libre et indépendant. L’acteur principal est la DOSB
; l’Etat n’intervient qu’indirectement sur les institutions sportives. La promotion du sport
incombe aux Länder en conformité avec le principe de compétence dans les domaines de
l’éducation et de la culture reconnu par la Loi fondamentale (das Grundgesetz) de la
République allemande. Il existe ainsi dans la plupart des Länder une commission consultative
du sport ou une conférence sportive avec rôle consultatif.

c- Le poids des organisations supranationales12

Face à la construction européenne et avec la prévalence du droit international et européen sur


le droit national, les politiques nationales ne peuvent ignorer le cadre européen et international
établi en matière sportive.

A l’échelle européenne, le pouvoir supra-étatique s’immisce dans le sport au sein du Conseil


de l’Europe dès 1975 avec la création de la Conférence des ministres européens responsables
du sport qui se réunit tous les trois ans, puis en 1977 avec la mise en place d’un Comité
directeur pour le développement du sport (devenu en 2007 l’Accord partiel élargi pour le
sport), la rédaction de la Charte européenne du Sport en 1975 et d’un Code d’éthique sportive
en 1992. Le Comité des ministres du Conseil de l’Europe adopte, en outre, le 24 septembre
1992 la recommandation n° R (92) 13 REV établissant un cadre européen commun pour le
développement du sport en Europe ayant les droits de l’homme pour fondements et en 2015 la
recommandation CM/Rec (2015) 2 sur l’approche intégrée de l’égalité entre les femmes et les
hommes dans le sport. Toutefois, il ne s’agit ici que de droit souple, les recommandations
n’étant pas contraignantes pour les États membres.

Depuis les deux dernières décennies, le sport fait l’objet d’une gestion de plus en plus
pragmatique et doit se plier aux contraintes dictées par le Conseil de l’Europe et l’Union
européenne. Cette dernière s’intéresse elle aussi au sport, qu’elle prend en compte en tant
qu’activité économique, comme l’a rappelé fermement la Cour de Justice de l’Union
européenne (CJCE, aujourd’hui Cour de Justice de l’Union européenne) en 1995 avec l’arrêt
Bosman. Ainsi, le Parlement européen a adopté plusieurs résolutions significatives : par
exemple, la résolution 2002/2280 (INI) sur les femmes et le sport en 2002.

12
Tétart P., Histoire du sport en France - De la libération à nos jours, tome 2, Paris, Vuibert, 2007, 523 pages ;
Buy F., Marmayou J-M., Poracchia D., Rizzo F., Droit du sport, Issy-les-Moulineaux, L.G.D.J, 2015, 752
pages ; Miège C., Les institutions sportives, Collection Que Sais-je ?, Paris, Presses universitaires de France,
1997 (2ème édition), 128 pages ; Latty F., Le comité international olympique et le droit international, Paris,
Montchrestien, 2001, 235 pages

11
A l’échelle internationale, il existe une dynamique menée par les Nations Unies sur
l’organisation du sport, l’accès des femmes aux pratiques sportives et sur la place des femmes
dans le sport. Tout d’abord, l’ONU utilise le sport pour lutter contre les discriminations telles
que l’illustrent la Déclaration internationale contre l’apartheid dans les sports en 1977 et la
Convention internationale contre l’apartheid dans les sports en 1985. Concernant les
discriminations sexistes plus particulièrement, l’ONU accorde aux femmes, au sein de la
Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard
des femmes, adoptée le 18 décembre 1979, « les mêmes possibilités de participer activement
aux sports et à l’éducation physique »13. Aussi, au terme de la 4ème conférence mondiale sur
la femme organisée en 1996 à Pékin sous l’égide de l’ONU, un document a été adopté
évoquant, entre autres, la nécessité d’améliorer la situation de la femme dans le sport. Par
ailleurs, l’ONU vise à promouvoir le sport comme outil de développement et de paix grâce à
la résolution « pour l’édification d’un monde pacifique et meilleur grâce au sport et à l’idéal
olympique » en 1994 et à la création du Bureau des Nations unies pour le sport au service du
développement et de la paix (United Nations Office on Sport for Development and Peace,
UNOSDP) en 2001. Le sport est en effet considéré depuis longtemps par l’ONU comme un
instrument puissant permettant d’atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement,
adoptés en 2000. L’un des objectifs est justement de promouvoir l’égalité des sexes et
l’autonomisation des femmes.

C’est ainsi que l’ONU a en quelque sorte érigé le sport en tant que « droit de l’homme ». La
Charte olympique dispose dans son quatrième principe fondamental : « La pratique du sport
est un droit de l’homme. Chaque individu doit avoir la possibilité de faire du sport sans
discrimination d’aucune sorte et dans l’esprit olympique, qui exige la compréhension
mutuelle, l’esprit d’amitié, de solidarité et de fair-play ». La Charte internationale de
l’éducation physique et du sport adoptée par l’UNESCO le 21 novembre 1978 prévoit à son
article premier que « la pratique de l’éducation physique et du sport est un droit fondamental
pour tous ». L’UNESCO a décidé d’inscrire le sport à son programme afin d’en renforcer et
d’en garantir la dimension éducative dès 1952. L’UNESCO, par la Déclaration de Punta del
Este, adoptée par la Troisième Conférence internationale des ministres et hauts fonctionnaires
responsables de l’éducation physique et du sport (MINEPS) en 1999, insiste sur le rôle
humaniste que peut remplir le CIO en matière de promotion des femmes : « 5. Les ministres
(…) invitent instamment les Etats membres et les organismes sportifs à entreprendre des
actions pour améliorer la participation des jeunes filles et des femmes à l’éducation physique
et au sport ». Enfin, la Conférence générale de l’UNESCO a adopté plusieurs résolutions
traitant de l’idéal olympique, encourageant la coopération entre le Mouvement olympique et
incitant les Etats membres à appliquer la Charte olympique. C’est à l’occasion de la
Conférence générale qui s’est tenue à Paris en novembre 2015 que les Etats membres de
l’UNESCO ont adopté une version révisée de la Charte internationale de l’éducation
physique, de l’activité physique et du sport, afin d’assurer un meilleur accès de tous au sport,
sans aucune discrimination, et de favoriser l’égalité des sexes.

13
Article 10g de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard
des femmes

12
***
Voici donc les racines de ce qui fonde aujourd’hui le mouvement sportif français et le
mouvement sportif allemand. Difficile pour les femmes de se faire une place au sein de ces
systèmes complexes et fortement masculinisés. Pourtant, c’est ce qu’elles ont réussi à faire au
cours des deux derniers siècles. Néanmoins, nous sommes encore loin d’une égalité parfaite
tant dans la pratique du sport que dans la représentation au sein des instances dirigeantes.

Les mesures de types paritaires et promotionnelles des femmes pour lutter


contre les stéréotypes de genre dans le monde sportif en France et en
Allemagne sont-elles satisfaisantes ?

Afin de répondre à cette problématique, nous traiterons tout d’abord des inégalités fortes qui
règnent entre les hommes et les femmes dans la pratique sportive (I), puis nous nous
intéresserons aux mesures mises en place pour favoriser l’accès des femmes à la pratique
sportive (II) et enfin à celles pour encourager l’accès des femmes aux postes à responsabilité
au sein des instances sportives (III).

13
I – État des lieux de la pratique sportive :
des inégalités criantes
Selon une étude réalisée par l’Union Sport et Cycle, sur les 30 millions de français de plus de
18 ans qui pratiquent régulièrement une activité physique ou sportive (au moins une fois par
semaine), près de la moitié (14,5 millions) sont des femmes.14

Bien qu’elles aient longtemps été distancées par les hommes en matière de pratique sportive,
les femmes ont aujourd’hui quasiment rattrapé leur retard. Selon la même étude de l’Union
Sport et Cycle, le nombre de nouvelles licences sportives féminines attribuées entre 2007 et
2015 a progressé de 20%, soit un million de nouveaux titres.

Les activités les plus répandues sont les mêmes, peu importe le sexe, mais certaines
disciplines restent fortement genrées. Ceci est le résultat de la lente émancipation de la femme
et bien d’autres inégalités sont à déplorer lorsqu’on s’intéresse à la question de l’accès des
femmes aux pratiques sportives.

Si l’on dresse l’état des lieux de la pratique sportive actuelle, le tableau est bien noir lorsqu’on
regarde de plus près ce qu’il en est pour les femmes. Elles, qui ont mis du temps à être
acceptées comme sportives (A), sont encore aujourd’hui confrontées à des inégalités
salariales, des inégalités dans leur participation aux Jeux olympiques et une plus faible
médiatisation (B).

Ces inégalités sont entretenues par le poids des stéréotypes qui pèsent sur les femmes ; des
stéréotypes de genres qui ont ralenti la femme dans de nombreux domaines, le sport n’y
faisant pas exception. Pourtant, elles sont autant leur place que les hommes dans le sport,
multipliant victoires et succès auprès du public et revendiquent ainsi les mêmes droits que les
hommes (C).

14
https://www.unionsportcycle.com/sports-loisirs/le-sport-et-les-francais

14
A) Une conquête progressive des femmes dans leur accès à la
pratique sportive

En France, les femmes ont mis du temps à se lancer dans la pratique du sport. Sous
l’Occupation, elles contribuent pourtant largement à la vie de la Nation et semblent avoir
acquis plus de reconnaissance, au même niveau que les hommes. Mais après la Libération,
elles sont à nouveau oubliées et réduites aux fonctions domestiques. Il faut attendre les années
soixante pour que les femmes affirment leur émancipation.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : en 1949, les femmes ne représentent que 4,3% des 1,8
millions de licenciés, toutes fédérations confondues. Les seuls sportifs dont on vante les
exploits sont des hommes et les seuls évènements retransmis à la télévision sont masculins.
En 1956, la sélection française aux JO de Melbourne compte seulement 18 femmes pour 140
sélectionnés (soit moins de 15% de la délégation). Pourtant, en 1947, c’est une femme,
Micheline Ostermeyer, qui donne à la France son premier titre olympique de l’Après-guerre,
dans l’épreuve de disque, une épreuve qui plus est profondément connotée comme masculine.
Ostermeyer ne reçoit pas les mêmes félicitations que celles réservées aux champions
masculins et reste encore aujourd’hui la seule médaillée olympique française à ne pas avoir
été nommée dans l’ordre de la légion d’honneur. En 1963, hormis en ski, gymnastique,
natation et sports équestres, aucune fédération olympique ne comprend plus d’un tiers de
femmes licenciées.

Jusque dans les années 60, le traitement de l’image et le choix des sujets convergent vers un
renforcement manifeste des stéréotypes. Partout on nuance le portrait de la sportive par
d’autres images la représentant dans des situations ou postures plus « conformes » aux
standards de la féminité traditionnelle (en robe, avec une attitude discrète). Les éditeurs font
le choix d’images où la sportive apparaît comme pratiquant une activité jugée
traditionnellement comme idéalement féminine (gymnastique, danse, patinage) et d’images
véhiculant une valorisation grossière du charme des sportives (parties du corps dévoilées). A
partir des années 60, les sportives bénéficient d’une médiatisation grandissante et d’un degré
de reconnaissance accru. Certains « bastions masculins » s’effondrent, comme la Fédération
française de cyclisme qui s’ouvre aux femmes en 1959. La participation des femmes à la
pratique sportive commence lentement à augmenter.15

L’essor du sport féminin en France tient à trois facteurs. Tout d’abord, la transformation des
modes de vie stimulée par la forte croissance économique du pays, ensuite la transformation
de l’institution scolaire avec davantage de mixité et la « sportivisation » de l’éducation
physique et enfin la mouvance féministe de la fin des années 1960.

Toutefois, cette conquête des femmes dans leur accès à la pratique sportive est limitée. Les
femmes sont moins impliquées que les hommes dans les pratiques fédérales compétitives et

15
Tétart P., Histoire du sport en France - De la libération à nos jours, tome 2, Paris, Vuibert, 2007, p. 295

15
l’augmentation de la pratique sportive féminine se fait principalement au profit d’activités
jugées socialement et historiquement comme « féminines » (gymnastique, sports équestres,
danse, natation, basket). Les sports aux connotations masculines, comme le football, le rugby,
le cyclisme, l’haltérophilie ou la boxe demeurent fermés aux femmes. La Fédération française
de football (FFF) elle l’une des premières fédérations à admettre les femmes et ce seulement
en 1970, pour mieux « dynamiser » le football masculin. Encore aujourd’hui, le football est,
en France, le sport le plus masculin sur les terrains : seules 159 128 femmes sont inscrites à la
FFF pour environ 2 millions d’hommes.16

En Allemagne, les choses sont tout à fait différentes.17 Les allemandes se sont ouvertes au
sport très tôt et ont été acceptées comme membres de plein droit. Dès le début du XXème
siècle, alors que le CIO, en vue des JO de 1914, décide que les médailles offertes aux
vainqueurs auront le même poids pour un homme et pour une femme, l’Allemagne se
conforme à cette décision tandis que la France la conteste fortement. L’équipe allemande fera
même d’importants efforts pour remporter des médailles dans les épreuves féminines. Les
femmes allemandes sont ainsi totalement intégrées dans les sports masculins. Elles ont des
hommes comme entraineurs et sont traitées comme des athlètes masculins juniors. Autre
symbole de cette précocité des sportives allemandes : les allemandes sont les meilleures lors
des compétitions sportives internationales organisées dans les années 20 et 30. Aux
Championnats du monde d’athlétisme de 1930, elles gagnent avec 57 points devant la
Pologne (26 points) et la Grande-Bretagne (19 points). Elles renouvellent la victoire en 1934
et s’imposent également aux Jeux de Berlin en 1936. Cela continue après la Seconde Guerre
mondiale. La RDA fait du sport un programme de propagande d’Etat. Il est nécessaire d’avoir
les meilleurs athlètes et les femmes sont prises en considération autant que les hommes. A
titre d’exemple, depuis les Championnats d’Europe d’athlétisme d’Athènes en 1969, deux
athlètes, un homme et une femme, sont choisis comme délégués de l’équipe pour la
représenter au comité national. Ce principe sera repris par d’autres disciplines ensuite. Les JO
de Munich en 1972 marquent le temps du « miracle des femmes allemandes »
(Frauleinwunder). Les femmes remportent plus de médailles que les hommes dans la plupart
des disciplines majeures, comme l’athlétisme. Aux JO de Montréal en 1976, la RDA récolte
90 médailles, dont 18 par ses nageuses. On assiste à une nouvelle génération d’athlètes à la
musculature impressionnante et pour le moins « virile ». S’en suit un phénomène de
virilisation des femmes qui aide à détruire le mythe du sport féminin en Allemagne. Ce succès
se poursuit au XXIème siècle : à l’occasion des JO de Sydney de 2000, les sportives
allemandes ont emporté la 8ème place dans le classement des meilleures nations (les sportifs
allemands ont, quant à eux, atteint la 9ème place). Lors de JO d’hiver en 2002, les allemandes
ont remporté la première place parmi les 25 meilleurs nations ; l’équipe masculine la
troisième place.18

16
« Effort », Glamour, juillet-aout 2018,
17
Riordan J., Krüger A., Terret T., Histoire du sport en Europe, Paris, L’Harmattan, 2004, 270 pages
18
ALLEMAGNE, Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend, Aktuelle Zahlen zu Frauen im
Sport und in Sportorganisationen (« Chiffres actuels concernant les femmes dans le sport et dans les
organisations sportives »), 2004

16
Que ce soit en France ou en Allemagne, on assiste à une augmentation progressive du nombre
de femmes pratiquant une activité physique régulière et du nombre de femmes licenciées à
partir du début du XXème siècle. Mais pour la France, c’est réellement à partir des années
1960 que les femmes accèderont à la pratique du sport.

Ces dernières années, le phénomène s’est considérablement accéléré. En 2014 en France, plus
d’un tiers des licences (37,3%) a été délivré à des femmes, comme le souligne le Comité des
« 11 tricolores » dans son rapport rendu en mars 2016.19 La croissance de la part des licences
délivrées à des femmes, observable depuis le début des années 1960, reflète l’évolution de la
société où la question de la parité femme-homme progresse dans tous les domaines. En
Allemagne, la DSB connait une augmentation de ses membres qui est à 90% féminine.20 Le
plus haut taux de croissance du nombre de licenciés dans les fédérations sportives allemandes
jamais connu depuis soixante-dix ans est de 7,22%. Cette tendance a débuté en 1997 et se
poursuit aujourd’hui.

Toutefois, ces chiffres sont à nuancer. Tout d’abord, il convient d’observer qu’il existe un
écart entre le pourcentage de femmes pratiquantes et le pourcentage de femmes licenciées par
rapport à celui des hommes. En janvier 2014, la moitié des pratiquants de France sont des
femmes, mais ces dernières ne représentent qu’un tiers des licenciés et ne récupèrent que 3 %
des 273 millions investis par les 100 meilleurs sponsors.

Par ailleurs, ce sont les fédérations multisports qui délivrent une majorité de licences aux
femmes. En 2014, elles délivrent 52,1% de licences aux femmes, tandis que pour les
fédérations unisport, cette proportion est d’environ 30%. Sept fédérations délivrent plus de 80
% de leurs licences à des femmes. Il s’agit de trois fédérations unisport olympiques
(équitation, sports de glace et gymnastique), de deux fédérations unisport non olympiques
(danse et twirling bâton) et de deux fédérations multisports (Fédération française d’éducation
physique et de gymnastique volontaire et la Fédération française pour l’entrainement
physique dans le monde moderne). C’est l’illustration que le sport est encore un milieu
fortement genré en France en 2014. Néanmoins, on observe une forte progression entre 2001
et 2013 du taux de féminisation dans quelques fédérations jusque-là extrêmement
masculinisées : les fédérations françaises d’haltérophilie (+15,2 points), de ski (+11,4 points),
de full contact (+10 points) et de boxe (+9,7 points).

L’évolution de la part des femmes parmi le nombre de pratiquant en Allemagne est


sensiblement la même.21 En 2002, 9,3 millions de femmes sont membres de la Fédération
allemande de sport (39%). Cette part a presque quadruplé par rapport à 1950 où elles ne
représentaient que 10%. Entre 1990 et 2000, on compte 1,7 millions de femmes parmi les

19
FRANCE, Comité des 11 tricolores, Rapport sur la féminisation du sport, mars 2016
20
ALLEMAGNE, Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend, Aktuelle Zahlen zu Frauen im
Sport und in Sportorganisationen (« Chiffres actuels concernant les femmes dans le sport et dans les
organisations sportives »), 2004
21
ALLEMAGNE, Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend, Frauen in Deutschland - von
der Frauen- zur Gleichstellungspolitik (« Les femmes en Allemagne - d’une politique des femmes à une
politique d’égalité entre les hommes et les femmes »), 2004

17
nouveaux membres de la Fédération allemande de sport contre 1,3 millions d’hommes. C’est
ainsi 25% de la population féminine allemande qui est présente dans les fédérations sportives
allemandes. Aussi bien qu’en France, les sports dans lesquelles les femmes sont le plus
présentes sont aussi les activités connotées comme « féminines ». Il s’agit de la gymnastique,
l’équitation, la danse, le volleyball et la natation. On compte environ 70% de femmes au sein
de la fédération allemande de gymnastique, 65% pour la fédération allemande de danse,
52,3% pour la fédération allemande de volleyball. Dans de nombreuses autres fédérations, la
parité est pratiquement atteinte. Enfin, l’intérêt des allemandes pour le football a
considérablement augmenté depuis les dernières années. En 2002, la part des femmes
licenciées de la Fédération allemande de football est de 14%, beaucoup plus qu’il y a dix ans,
et ne cesse d’augmenter depuis. La victoire des joueuses allemandes lors de la Coupe du
monde féminine de football en 2003 y est surement pour beaucoup car elle a permis de
montrer que les femmes pouvaient être de grandes joueuses de football. L’Allemagne se
classe dans le trio de tête des meilleures sélections de football féminin : médaille d’or aux
Jeux olympiques en 2016, double championne du monde (2003 et 2007) et octuple
championne d’Europe (dont la dernière édition en 2013).22 Les Bleues ne sont pas très loin
derrière, occupant en 2014 la troisième place du classement réalisé par la FIFA.

Dans le cadre de la présente étude, il est pertinent de s’attarder sur la spécificité de la


représentation féminine dans la pratique du sport à haut niveau. Le Sénat, dans un rapport
d’information23 déposé le 21 juin 2011 par Madame Michèle André au nom de la délégation
aux droits des femmes24, constate les fortes inégalités qui règnent entre les femmes et les
hommes dans la pratique du sport à haut niveau.

Tout d’abord, le rapport signale la situation minoritaire d’arbitres et juges féminins. La liste
transmise par le ministère français des sports des arbitres et des juges de haut niveau ne
comporte que 14,61% de femmes pour la période 2010-2011, la parité n’étant atteinte que
dans deux fédérations : le ski nautique et le triathlon. En Allemagne, on peut mentionner
l’exemple de Bibiana Steinhaus, arbitre allemande officiant dans le Championnat
d'Allemagne de football féminin depuis 1999 et arbitre internationale depuis 2005. Elle a
arbitré trois matches du Championnat d'Europe de football féminin en 2009. Elle fait partie
des seize arbitres retenues pour la Coupe du monde de football féminin de 2011 en
Allemagne. Elle est également la première arbitre féminine allemande à avoir officié lors d'un
match homme en division 2 allemande. Bibiana Steinhaus est sélectionnée, pour la saison
2017-2018, pour être l'une des 24 arbitres du championnat d’Allemagne de première division,
devenant ainsi la première femme à arbitrer un match dans un championnat professionnel

22
Magoutier L., « Infographie - L’incroyable ascension du football féminin en France », La Croix, 18 juillet
2017
23 Les commissions permanentes du Sénat, outre leur rôle dans l'examen des projets et propositions de loi, ont la
charge, sur les questions relevant de leur compétence, d'assurer l'information des sénateurs et de les assister dans
leur mission de contrôle du gouvernement. A cette fin, elles peuvent constituer des missions d'information et
publie un rapport sur la question concernée.
24
FRANCE, Sénat, Rapport d’information n° 650 (2010-2011) de Madame Michèle André, fait au nom de la
délégation aux droits des femmes, 21 juin 2011

18
européen. 25 L’Allemagne se distingue une fois de plus de la France par sa précocité dans
l’acceptation des femmes, mais nous sommes encore loin d’une parité exemplaire.

En outre, parmi les sportifs de haut niveau, les femmes sont moitié moins nombreuses que les
hommes. En 2011, elles ne représentent que 36,5 % des sportifs de haut niveau inscrits sur la
liste ministérielle. En outre, ce chiffre cache d’autres disparités : seules trois fédérations sur
cinquante-huit comportent au moins 50 % de femmes parmi leurs sportifs de haut niveau, et
dans une vingtaine de fédérations, cette proportion s’établirait entre 40 et 50 %. S’agissant de
leur répartition par fédération, celle-ci reflète globalement plus ou moins la situation des
licenciées, à deux réserves près. La première concerne certains sports où la pratique est
largement masculine en termes de licences. Les femmes y sont sensiblement plus nombreuses
dans le haut niveau que dans la population des licenciés. A l’inverse, en gymnastique, où les
femmes représentent 78,4 % des licenciées, hommes et femmes sont presque à parité pour le
haut niveau (52,08 % de femmes). La deuxième concerne la situation particulière de
l’équitation : la fédération compte 80,6 % de femmes licenciées mais seulement 25 % de
femmes évoluent au haut niveau.

On observe donc une progression notable de la part des femmes dans l’ensemble des
personnes pratiquant une activité physique régulière et des licenciés aussi bien en France
qu’en Allemagne. Mais cette part reste encore inférieure à celle des hommes et ce n’est pas la
seule inégalité à noter entre les femmes et les hommes dans le milieu sportif.

25
« Effort », Glamour, juillet-aout 2018

19
B) Des revenus salariaux, une participation aux JO et une
médiatisation moindres

Désormais, l’égalité de traitement entre les sexes prévaut dans les primes versées à l’occasion
de victoires remportées dans les grandes compétitions. Il n’y a plus de différences entre les
récompenses attribuées aux athlètes masculins et celles attribuées aux athlètes féminins
participant aux grandes compétition sportives. Par exemple, en 2011, les primes versées aux
athlètes lors des grandes compétitions internationales, indépendamment du genre de l’athlète,
sont de : 50 000 € pour une médaille d’or, 20 000 € pour une médaille en argent et 13 000 €
pour une médaille de bronze. Cette égalité de traitement s’étend également au handisport.

En revanche, à l’instar du marché du travail en général, de très fortes disparités existent entre
les hommes et les femmes dans les salaires versés aux sportifs professionnels et dans les
dividendes qu’ils peuvent tirer de l’exploitation de leur image. Les femmes gagnent moins,
pour la même discipline, au même niveau.

En 2011, la ministre des sports française dévoile, dans un rapport 26 présenté au Sénat les
chiffres suivants : dans le basketball, les hommes perçoivent en moyenne 9 760 € net par mois
alors que les femmes ont un salaire moyen de 3 600 € ; dans le handball, les hommes ont un
revenu moyen de 5 200 € et les femmes de 2 300 €.

Lors de la Coupe du monde au Brésil en 2014, les joueurs ont touché un bonus d’une valeur
de 486 millions d’euros au total. A l’issue de la Coupe du monde féminine en 2015, les
joueuses ont touché 40 fois moins.27

Les moindres revenus que les sportives de haut niveau tirent au cours de leur carrière ont des
conséquences en matière de retraites, celle-ci s’arrêtant tôt (vers 35 ans). Lors de ses vœux au
monde sportif du 17 janvier 2011, le président de la République a reconnu la réalité de ce
problème et a souhaité la mise en place d’un régime de retraite spécifique pour les sportifs de
haut niveau.28

L’écart salarial peut s’expliquer par la maternité spécifique de la sportive de haut niveau. En
effet, celle-ci se caractérise par une interruption plus longue (alors qu’en moyenne en France,
le congé maternité dure 16 semaines, la sportive de haut niveau doit souvent interrompre son
activité pendant environ un an), l’absence de garantie de l’ensemble des revenus pendant le
congé maternité29 et le problème de la garde des enfants car les absences sont irrégulières et
nombreuses. Par ailleurs, l’absence de considération de la maternité des sportives leur porte

26
op. cit.
27
« Effort », Glamour, juillet-aout 2018
28
FRANCE, Sénat, Rapport d’information n° 650 (2010-2011) de Madame Michèle André, fait au nom de la
délégation aux droits des femmes, 21 juin 2011
29
En France, la seule disposition à ce sujet est l’article R221-8 du Code du sport29 qui ne prend pas en compte
l'intégralité des revenus : rien n'est prévu pour les aides, les primes des clubs ni pour les contrats avec les
sponsors

20
préjudice sur l’évolution de leur carrière. Par exemple, à l’occasion du dernier Roland Garros,
le retour de grossesse de Serena Williams n’a pas été pris en considération ce qui s’est
répercuté sur son classement (elle s’est retrouvée hors du classement des têtes de série). L’US
Open a, pour sa part, décidé en 2018 d’en tenir compte.

Dans ce domaine, la France et l’Allemagne ont encore beaucoup d’efforts à faire et peuvent
prendre exemple sur deux pays : la Norvège et la Nouvelle-Zélande. La fédération de football
en Norvège a instauré la parité salariale depuis 2017 30 et la Nouvelle-Zélande a annoncé
qu’elle allait rémunérer de la même façon les hommes et les femmes jouant en équipe
nationale (mêmes primes de match, mêmes montants pour les droits à l’image).31

Au problème de l’écart de rémunération des sportifs entre les hommes et les femmes s’ajoute
celui de la moindre participation des femmes aux Jeux olympiques. Sur la question de
l’éventuelle participation des femmes aux Jeux olympiques, le point de vue du baron de
Coubertin n’a jamais varié : « Impratique, inintéressante, inesthétique, et nous ne craignons
pas d’ajouter : incorrecte. Telle serait, à notre avis, une demi-olympiade féminine. Ce n’est
pas là notre conception des Jeux olympiques dans lesquels nous estimons qu’on a cherché et
qu’on doit continuer à chercher la réalisation de la formule que voici : l’exaltation solennelle
et périodique de l’athlétisme mâle avec l’internationalisme pour base, la loyauté pour moyen,
l’art pour cadre et l’applaudissement féminin pour récompense ».32 Il faut attendre les JO de
Londres en 2012 pour que le nombre de sports figurant au programme des compétitions
féminines soit le même - à une exception près, le canoë - que celui du programme masculin.33
Pour autant, il n’y a toujours pas le même nombre d’épreuves ni de médailles distribuées pour
les hommes et les femmes.

La faible participation aux JO est dénoncée dès 1992 par le « Comité Atlanta + » lors des JO
de Barcelone, déplorant l’absence de femmes dans trente-cinq des délégations présentes.34 Le
« Comité Atlanta + », pendant de la Ligue du Droit international des Femmes, lutte contre les
discriminations dans le sport et notamment pour inciter à augmenter le nombre de femmes
participant aux JO.

Le CIO a pris des sanctions contre l’Afrique du Sud pour l’apartheid mais il ne prend aucune
sanction contre les pays qui pratiquent la ségrégation contre les femmes.35

Seule la Résolution 4/7/96 du Parlement européen vient consacrer ce qui a longtemps été
demandé par les membres du « Comité Atlanta + », condamnant l’interdiction qui était faite
aux femmes par certains gouvernements de participer aux JO.36

30
Sturmberg J., « Equal Pay im Sport - Kampf um gleiche Bezahlung », Deutschlandfunk, 21 octobre 2017
31
« Effort », Glamour, juillet-aout 2018
32
Sugier A., Femmes voilées aux Jeux olympiques, Paris, Jourdan éditeur, 2012, p. 35.
33
Sugier A., Femmes voilées aux Jeux olympiques, Paris, Jourdan éditeur, 2012, p. 38.
34
FRANCE, Sénat, Rapport d’information n° 650 (2010-2011) de Madame Michèle André, fait au nom de la
délégation aux droits des femmes, 21 juin 2011
35
Sugier A., Femmes voilées aux Jeux olympiques, Paris, Jourdan éditeur, 2012, p. 69 à 71.
36
Sugier A., Femmes voilées aux Jeux olympiques, Paris, Jourdan éditeur, 2012, p. 81.

21
Notons tout de même une légère amélioration depuis le début des années 2000. A l’occasion
des JO de Sydney en 2000, 40% des participants sont des femmes. Cette part a augmenté lors
de l’organisation des JO à Athènes en 2004.37

La promotion du sport féminin passe également par les médias. Mais le sport féminin,
longtemps sous-estimé, fait l’objet d’un traitement médiatique moindre que celui pour les
hommes.

Dans le rapport transmis au Sénat en 201138, une illustration de la moindre médiatisation des
sportives, même quand elles gagnent, est donnée : au cours de la même compétition en
septembre 2010, Teddy Riner et Lucie Decosse ont tous les deux été sacrés champions du
monde. Pour autant, les retombées dans la presse de leur victoire respective sont bien
différentes : une recherche rapide sur une base de presse pour tout le mois de septembre fait
apparaitre 606 articles dans lesquels Teddy Riner est mentionné contre 156 pour Lucie
Decosse, soit environ quatre fois moins.

A la télévision, les retransmissions du sport féminin sont aussi très faibles. En janvier 2014,
sur 21 événements sportifs majeurs obligatoirement diffusés en clair en application de la
directive européenne « Télévision sans frontière » (TSF), 5 seulement concernent les filles,
dont une soumise à condition d’aller en demi-finale et finale de Fed Cup (tennis). La directive
TSF est appliquée en France mais ignore totalement le football féminin. Les Bleues ont
disputé leur première Coupe du Monde en 2003 mais l’évènement n’a pas été retransmis
contrairement au basket-ball et au handball, dont les finales des championnats du Monde et
d’Europe sont obligatoirement diffusées en clair.

Pour autant, en France, la loi pour l’égalité réelle entre les hommes et les femmes de 201439
vient modifier cette TSF en y introduisant un événement mixte supplémentaire (la natation) et
surtout trois autres relatifs au football féminin : finales du Mondial et de l’Euro, ainsi que la
Coupe de France. La question de la médiatisation du sport féminin est particulièrement
d’actualité puisque la France accueillera la 8ème Coupe du monde féminine de football en
juin 2019, pour laquelle TF1 a acheté les droits de retransmission.40

En septembre 2017, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a rendu un rapport relatif à la


diffusion de la pratique féminine sportive à la télévision dont les chiffres sont évocateurs.
Dans ce rapport, propre aux diffusions en France, le CSA démontre l’augmentation du poids
des retransmissions sportives féminines et l’amélioration de la visibilité du sport féminin
depuis les cinq dernières années.

37
ALLEMAGNE, Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend, Aktuelle Zahlen zu Frauen im
Sport und in Sportorganisationen (« Chiffres actuels concernant les femmes dans le sport et dans les
organisations sportives »), 2004
38
op. cit.
39
Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, JORF n°0179 du 5 août
2014
40
Charrier P., « La médiatisation du football féminin est-elle en progression ? », La Croix, 18 juillet 2017

22
En 2012, la part consacrée au sport féminin dans le volume horaire total de diffusion de
retransmissions sportives à la télévision était de l’ordre de 7% (le chiffre est estimé sur le
fondement d’une analyse qui ne prenait pas en compte l’année complète mais un échantillon
de quelques semaines). Cette part atteint 14% en 2014. En 2016, cette part était comprise
entre 16 et 20%, cette fois-ci en prenant en compte une année complète de retransmissions
sportives, analyse portant sur l’ensemble des chaînes gratuites ayant diffusé des
retransmissions sportives (TF1, France 2, France 3, M6, C8, W9, TMC, France 4, CStar,
France Ô, L’Equipe, Numéro 23) et un large échantillon des principales chaînes payantes
consacrées en partie ou intégralement au sport (Canal+, Canal+ Sport, Golf +, beIN SPORTS
1, beIN SPORTS 2, beIN SPORTS 3, Eurosport, Equidia).

En termes de volume horaire, les compétitions féminines de tennis (1 039 heures), de football
(443 heures), de ski (360 heures) et de biathlon (268 heures) sont les plus représentées en
2016 en télévision gratuite et sur l’échantillon de chaînes payantes retenues. En comparaison,
les compétitions sportives masculines faisant le plus l’objet de retransmissions sont le football
(4173 heures), les sports mécaniques (2396 heures), le tennis (2149 heures) et le rugby (1663
heures).

Le rapport démontre un engouement réel et croissant pour la pratique féminine par le succès
d’audience de certaines compétitions sportives, ce qui pousse d’autant plus les chaînes de
télévision à les exposer. A titre d’exemple, lors des Jeux olympiques de Rio en 2016, 5,6
millions de téléspectateurs en moyenne étaient devant leur téléviseur lors de la retransmission
de la finale de Judo « Femmes +78 kg ».41 Plus récemment, la demi-finale de la Coupe du
monde féminine de rugby Angleterre-France a été suivie en moyenne par 3 millions de
téléspectateurs sur France 2, un record d’audience pour le rugby féminin.42 Sur la période
2011-2015, 4 des 10 meilleures audiences des chaînes de la TNT gratuite (hors chaînes dites «
historiques », lesquelles concentrent traditionnellement les plus fortes audiences) sont des
compétitions sportives féminines.

41
Médiamétrie, Médiamat national quotidien
42
L’Equipe, Audiences : 3 millions devant Angleterre-France sur France 2, 23 août 2017
https://www.lequipe.fr/Medias/Actualites/Audiences-3-millions-devant-angleterre-france-sur-france-2/827771

23
Cependant, le CSA signale un déséquilibre encore trop important de la présence des femmes
dans les programmes sportifs. A l’aide d’un baromètre de la diversité, outil de mesure dont le
Conseil s’est doté en 2009 et permettant une évaluation objective de la perception de la
diversité de la société française à la télévision, il constate que pour l’année 2016, les femmes
prenant la parole dans les programmes de sport, qu’elles soient présentatrices,
commentatrices, joueuses interviewées sur le bord du terrain, supportrices ou médecins
interrogées sur une thématique sportive etc., sont seulement représentées à hauteur de 17 %
(vs. 83 % pour les hommes). Cette observation a été menée sur l’ensemble des programmes
diffusés du 9 au 15 mai et du 5 au 11 septembre 2016 sur 18 chaînes (TF1, les cinq chaînes du
groupe France Télévisions, Canal+, M6, C8, W9, TMC, NT1, NRJ12, BFMTV, Cnews,
Cstar, Gulli, Numéro 23) et tient compte de toutes les personnes qui se sont exprimées à
l’antenne. Aussi, sur la base des données transmises par les chaînes de télévision au Conseil
(en application de la délibération n° 2015-2 relative au respect des droits des femmes, adoptée
le 4 février 2015) et portant sur l’exercice 2016, il apparaît que le taux de femmes
présentatrices de programmes de sport - retransmissions sportives ou magazines consacrés au
sport - s’élève à 44 % (vs. 56 % pour les hommes) tandis que le taux de femmes journalistes
et/ou chroniqueuses et celui des femmes autres intervenantes des émissions de plateaux
tombent respectivement à 13 % (vs. 87 % pour les hommes) et 1 % (vs. 99 % pour les
hommes).

L’exposition médiatique a des conséquences dans deux domaines. D’une part, il existe une
corrélation positive entre médiatisation et pratique sportive. L’exposition du sport à la
télévision contribue au développement de la pratique. Ainsi, la forte exposition des JO a eu un
effet positif sur la pratique de certaines disciplines habituellement peu diffusées et de
certaines disciplines habituellement masculines, tel que le football. La pratique féminine du
football est un bon exemple de l’effet d’entraînement réciproque qui peut exister entre la

24
médiatisation télévisuelle d’un sport et le développement de sa pratique. C’est le cas qu’utilise
le CSA dans son rapport. 43 Le CSA explique que depuis la Coupe du monde 2011, la
médiatisation des compétitions internationales féminines de football s’est intensifiée de
manière continue, portée notamment par les bonnes performances de l’équipe de France, qui
se sont par la suite traduites par des succès d’audience. En parallèle de ces performances
sportives et télévisuelles, le nombre de licenciées de football a augmenté très fortement depuis
la saison 2010-2011 (+ 90 %).

D’autre part, compte tenu de leur moindre médiatisation, les championnes sont moins bien
placées que les champions dans l’exploitation commerciale de leur image qui est susceptible,
dans le cas des sportifs les plus emblématiques, de générer des revenus considérables.44

Pour autant, en Allemagne, le football féminin fait exception.45 Avec la retransmission de la


Coupe du monde féminine de football en 2003, les joueuses allemandes ont relégué les autres
programmes au second rang lors de la diffusion des matchs. Le public donne une attention
toute particulière aux joueuses : ainsi, Birgit Prinz a été sacrée « joueuses mondiale de
l’année » lors du Gala de la FIFA ; 1500 journalistes spécialistes du sport ont également élu
l’équipe féminine nationale allemande de football « équipe de l’année ».

43
FRANCE, Conseil supérieur de l’audiovisuel, Rapport sur la diffusion de la pratique féminine sportive à la
télévision, septembre 2017
44
FRANCE, Sénat, Rapport d’information n° 650 (2010-2011) de Madame Michèle André, fait au nom de la
délégation aux droits des femmes, 21 juin 2011
45
ALLEMAGNE, Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend, Aktuelle Zahlen zu Frauen im
Sport und in Sportorganisationen (« Chiffres actuels concernant les femmes dans le sport et dans les
organisations sportives »), 2004

25
C) Des inégalités entretenues par le poids des stéréotypes

Les stéréotypes sexués qui renvoient à une répartition des tâches, des rôles et des attitudes
entre les femmes et les hommes dans la société sont particulièrement visibles dans le domaine
du sport. On le voit au sein des institutions sportives, caractérisées par une hiérarchisation
entre les sexes.

Ils sont la conséquence d’un préjugé dominant selon lequel les femmes seraient inférieures
aux hommes sur le plan physique. Exemple criant de ce stéréotype de genre : l’exemple du
Tour de France. Créé en 1903, il s’agit d’une épreuve exclusivement masculine. En 1984,
l’idée d’un Tour de France féminin est lancée par les responsables du Tour. Cet événement
sportif, réservé aux femmes, conforte les stéréotypes et l’éternelle croyance de la faiblesse des
femmes avec des étapes moins longues que celles du Tour masculin. L’idée n’est pas un
succès et disparaît. En 1991, elle revient avec la création du « Tour cycliste féminin ».46

La domination masculine, s’exerce partout, aussi bien dans la société que dans le monde
professionnel. Et pourtant, aucun sport n’est, en soi, interdit aux femmes pour des raisons
physiques et musculaires ; l’avantage biologique pouvant aussi parfois se trouver du coté des
femmes.

Ces stéréotypes de genre contribuent à masculiniser ou à féminiser certains sports et à les


catégoriser. Ainsi, les femmes qui se lancent dans des sports considérés comme « masculins »
s'exposent à être considérées comme « masculines ». Les sportives sont jugées « trop »
grandes, « trop » fortes, « trop » musclées, « trop » performantes. Les femmes trop
performantes ont vite fait d'être soupçonnées sur leur identité sexuelle. Elles en viennent
même à être interrogées sur leur identité sexuelle avec le recours aux tests de féminité. Ces
pressions directes exercées sur les filles et les femmes contribuent à une intériorisation des
préjugées de genre, susceptible de peser sur la pratique sportive des femmes.

Les connotations sexuelles rattachées aux sports fortement « genrés » ne manquent pas d’être
rappelées et amplifiées dans les discours médiatiques, la publicité, les commentaires, les
reportages et les photographies.47 Sur internet et les réseaux sociaux, on ne compte plus le
nombre de commentaires machistes et paternalistes que les sportives essuient. Par exemple,
en mai 2017, l’ex tennisman John McEnroe déclarait : « Si Serena Williams jouait sur le
circuit masculin, elle serait aux alentours de la 700ème place ». Sur des sites comme
« Ailleurs sur le web », on retrouve l’article « Les 10 championnes les plus sexy des Jeux de
Rio ».48

46
Exemple criant des stéréotypes de genre et de l’érotisation de la femme (Tétart P., Histoire du sport en France
- De la libération à nos jours, tome 2, Paris, Vuibert, 2007, p.304-305)
47
Annexe 1 : exemples de campagne d’affichage pour « promouvoir » l’adhésion des femmes dans certains
sports.
48
Ferré, J-L., « Comment mettre hors jeu le sexisme dans le sport », La Croix, 22 janvier 2018

26
La performance féminine est souvent accompagnée d’un jugement sur la beauté de la
championne ou, au contraire, sur les signes d’un éloignement de la norme. La championne
française de tennis, Amélie Mauresmo, en est une illustration. En 1999, l'Agence Reuters,
commentant la performance sportive d'Amélie Mauresmo à l'Australian Open Tennis, se
demandait « Who is this guy ? ».49 Amélie Mauresmo continue d’être une cible privilégiée des
médias à la suite de l’annonce de son homosexualité.

La présentation des sportives par les médias ou les agences de publicité insiste plus sur leur
apparence ou leur vie personnelle que sur leurs performances. Cela mène à une sexualisation
de l’image des sportives. Dans la publicité, les sportives sont souvent dénudées. « Poser nue
pour être vue » ? C’est en tout cas la conclusion que nous pouvons faire aujourd’hui en
regardant les publicités dans lesquelles les sportives apparaissent. Cela laisse à croire que les
campagnes d’affichages soi-disant destinées à promouvoir l’adhésion des femmes dans tel ou
tel sport sont davantage faites pour attirer les hommes.50 Par ailleurs, les femmes ne sont que
minoritaires dans le spectre de la publicité sportive. Une étude51 réalisée en 2006 à partir
d'une analyse des publicités publiées dans une série de grands magasines sur une période de
dix ans a montré que, seuls ou en groupes, les hommes couvrent près des deux-tiers des
publicités portant sur un produit ou un service sportif.

Pourtant, bien que les femmes continuent de souffrir du préjugé selon lequel elles seraient
biologiquement inférieures aux hommes car plus faibles physiquement, elles font la
démonstration qu’elles peuvent être tout aussi fortes voire plus fortes que les hommes,
notamment dans des sports longtemps considérés comme des sports exclusivement masculins
: le football et le sport automobile.

Les joueuses de football de France et d’Allemagne sont parmi les trois meilleures au monde.
Elles ont favorisé un réel engouement des femmes pour le football et des hommes pour le
football féminin. Selon Havas Sports & Entertainment, il y aurait en France environ 14
millions de françaises fans de football, sur un total de 32 millions (soit 43%). Devant le match
OL-PSG, premier match de foot féminin diffusé en prime time sur une chaine française le 1er
juin 2017, on compte 2,7 millions de spectateurs. 52 En sport automobile, Ana Carrasco
devient la première femme à s’imposer en Championnat du monde dans la course du
Supersport 300 le 17 septembre 2017, devant des hommes.53

Il est cependant encore difficile dans certaines disciplines d’admettre les femmes au même
niveau que les hommes. Pour reprendre l’exemple du cyclisme, la Course by Le Tour de

49
T. Miller, Sportsex, cité in Sports et publicité
50
Annexe 1
51
Sports et publicité imprimées dans les magasines en France : une communication masculine dominante et
stéréotypée ?, Stéphane Héas, Dominique Bodin, Luc Robène, Dominique Meunier et Jens Blumrodt, in Etude
de communication n° 29 (2006)
52
« Effort », Glamour, juillet-aout 2018
53
L’Equipe, « Supersport 300 : Ana Carrasco devient la première femme à s’imposer en Championnat du
monde », L’Equipe, 17 septembre 2017

27
France offre deux étapes aux cyclistes féminines qui n’ont pas le droit de concourir pour le
Tour de France.

Les sportives n’hésitent plus à « pousser leur coup de gueule ». La championne du monde
2011 de snowboard freeride Anne-Flore Marxer (de nationalité française et suisse) dénonçait
en janvier 2018 dans le journal L’Equipe l’inégalité de traitement sportif et financier entre les
hommes et femmes et « la sexualisation des femmes dans le sport », notamment à travers la
publication répétée d’images mettant en avant la plastique des championnes plus que leurs
performances.54

54
Ferré, J-L., « Comment mettre hors jeu le sexisme dans le sport », La Croix, 22 janvier 2018

28
II- Promouvoir la féminisation de la
pratique sportive

Après avoir établi le constat que les femmes sont victimes, un peu plus en France qu’en
Allemagne, de discriminations en matière sportive, nous allons aborder le cœur du problème,
à savoir les mesures prises en France et en Allemagne afin de promouvoir la féminisation de
la pratique sportive.

Ces deux pays ont établi un cadre réglementaire qui aide à favoriser les femmes dans leur
accès à la pratique du sport (A). Mais l’Etat ainsi que le pouvoir législatif ne sont pas les seuls
acteurs dans ce domaine. D’autres acteurs sont à l’initiative de mesures pour promouvoir la
féminisation de la pratique sportive (B).

A) Le cadre légal et réglementaire

Le cadre légal et réglementaire a été mis en place à partir des années 1980 grâce à une prise
de conscience collective à l’échelle européenne et internationale (1), exemple suivi par la
France et l’Allemagne (2). Des avancées sont tout particulièrement visibles depuis 2012 en
France (3).

Nous nous interrogerons notamment sur le respect plus ou moins strict du principe d’égalité et
du principe de non-discrimination (4) et étudierons enfin les perspectives d’évolution de la
législation pour promouvoir la féminisation de la pratique sportive (5).

1- La prise de conscience collective en Europe depuis les années 1980

Les pays européens se rendent compte de la nécessité de mettre en place des mesures pour
favoriser le développement de la pratique du sport chez les femmes et combattre les
discriminations à raison du sexe à partir des années 80. Tout commence avec le séminaire du
Conseil de l’Europe « Pour une plus grande participation des femmes au sport » en 1980 à
Dublin et la rédaction de résolutions à l’intention des ministres des Sports. Toujours sous
l’égide du Conseil de l’Europe, dix-huit pays européens se rencontrent en 1989 sur le thème
« Femmes et sport, l’accès aux responsabilités » et produisent une fois encore des
recommandations à l’intention des ministres européens. Mais ces recommandations ne sont
pas contraignantes ; libre aux Etats de les suivre ou non.

A l’échelle internationale, le CIO lance de grandes politiques pour rénover le sport. En 1981,
pour la première fois, deux femmes deviennent membres du CIO. Depuis 1991, le CIO
impose que toute nouvelle épreuve inscrite au programme des Jeux comporte des épreuves

29
féminines, induisant une augmentation notable de la proportion d’athlètes féminines
participant aux Jeux.55 En 1994, la Charte olympique est amendée pour favoriser l’égalité des
chances des hommes et des femmes. A partir de 1996, le CIO organise des conférences
mondiales sur les femmes et le sport qui ont lieu tous les quatre ans. Enfin, il fixe des
objectifs en termes de participation féminine aux JO (bien que l’augmentation constatée du
nombre de femmes participant aux JO tient aussi à la multiplication du nombre d’épreuves
ouvertes aux femmes). Par ailleurs, le CIO abandonne le test ADN dit « de féminité » en
1999, politique visant à réduire les discriminations envers les femmes.

Le tournant est pris en 1994 lors du Congrès de Brighton, conférence internationale sur les
femmes et le sport organisée du 5 au 8 mai 1994 à Brighton (Royaume-Uni) par le British
Sports Council avec l’appui du Comité interministériel olympique. Ce congrès marque le
point de départ d’une mobilisation internationale pour le développement du sport féminin
(mais la France n’y est pas officiellement représentée). La conférence se conclue par la
Déclaration de Brighton sur les femmes et le sport56, adoptée par 280 délégués venus de 82
pays représentant des gouvernements, des ONG, des comités nationaux olympiques et des
fédérations sportives. La Déclaration poursuit différents objectifs, parmi lesquels : veiller à
ce que toutes les femmes puissent accéder à des activités sportives ; assurer aux femmes un
environnement sûr pour la pratique du sport ; encourager la participation des femmes dans le
sport et assurer une meilleure représentation de celles-ci à tous les niveaux et dans tous les
rôles du sport. Cependant, la Déclaration est quelque peu ambigüe et est appliquée avec un
relativisme culturel, notamment dans les pays musulmans.57

En juin 2014, un groupe de travail international sur les femmes et le sport organise une
conférence sur les femmes et le sport à Helsinki, avec le soutien du CIO et différentes
organisations nationales et internationales du monde sportif, afin d’effectuer une mise à jour
de cette Déclaration. Depuis 1994, la déclaration de Brighton n’avait pas fait l’objet d’une
mise à jour. Désormais, cette déclaration devient la déclaration Brighton + Helsinki 2014 sur
les femmes et le sport. Celle-ci est notamment signée par l’Allemagne et par la France.

2- L’exemple européen suivi par la France et l’Allemagne

Les pouvoirs publics français ont également pris conscience à la fin des années 1990 de la
nécessité de mieux ancrer la promotion de l'égalité entre les genres dans les institutions et les
politiques publiques. C’est ainsi que la création de l'Observatoire de la parité en 1995, suivie
en 1999 de la création des délégations parlementaires aux droits des femmes et à l'égalité des
chances entre les hommes et les femmes et les premières lois sur la parité sont révélatrices de
ce nouvel état d’esprit.
Une politique volontariste dans ce domaine est menée par deux ministres. Première actrice
principale pour la promotion des femmes dans le sport, Edwige Avice est nommée en 1981
ministre déléguée à la Jeunesse et aux Sports auprès du Ministre du Temps Libre, André

55
FRANCE, Comité des 11 tricolores, Rapport sur la féminisation du sport, mars 2016
56
Déclaration de Brighton sur les femmes et le sport du 8 mai 1994
57
Sugier A., Femmes voilées aux Jeux olympiques, Paris, Jourdan éditeur, 2012, p. 59 et suivantes

30
Henry. Elle occupe seule, de mars 1983 à juillet 1984, la fonction de ministre délégué au
Temps Libre, à la Jeunesse et aux Sports. En 1984, la loi n°84-610 du 16 juillet 1984 relative
à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, dite Loi Avice, est
promulguée. Deuxième actrice importante de ce changement, Marie-George Buffet est
nommée ministre de la Jeunesse et des Sports en 1997. Elle engage une réforme législative
portant sur quatre axes majeurs, dont la promotion de la démocratisation avec la parité entre
les sexes. Cette réforme aboutit à la loi du 6 juillet 200058 portant modification de la loi
Avice. Cette loi renforce les exigences auxquelles sont soumises les associations sportives.
L’accès des femmes à tous les niveaux de responsabilités devient l’un des critères sur lesquels
repose la décision d’agrément.59 Toujours sous l’impulsion de la ministre, sont organisées en
1999 les premières Assises nationales « femmes et sports ». Elles regroupent près de 500
participants et aboutissent à des conclusions dont découlent plusieurs mesures significatives,
parmi lesquelles60 :
- la suppression par la Commission nationale du sport de haut niveau (CNSHN) de la
distinction entre les pratiques féminines et masculines en vue de la reconnaissance du
caractère de haut niveau d'une discipline sportive ;
- l'ouverture d'une ligne spécifique de crédits « femmes & sport » en 1999 dans le cadre
des conventions d'objectifs passées entre le ministère de la Jeunesse et des Sports et
les fédérations sportives.

Dans le rapport d’information présenté au Sénat en juin 2011 61 , sont présentés d’autres
exemples de la politique et des efforts menés en faveur des femmes au tout début du XXIème
siècle. Par exemple :
- de 2002 à 2004, la France a présidé le réseau européen « Femmes et Sports »,
partenariat entre le ministère de la Santé, de la Jeunesse et des Sports et le CNOSF ;
- en 2003, le ministère de la Santé, de la Jeunesse et des Sports a participé, avec
l’ensemble des autres ministères, à l’élaboration de la Charte « Pour l'égalité des
hommes et des femmes, la France s'engage », afin que cette préoccupation soit
intégrée dans les politiques publiques aux échelons national, régional et local ;
- en 2004, un groupe de travail, présidé par Mme Brigitte Deydier, alors vice-présidente
de la Fédération française de judo, a été mis en place autour des questions de l'accès
des femmes aux fonctions dirigeantes et de la pratique des jeunes filles et des femmes
dans les quartiers urbains sensibles ;
- depuis 2005, le ministère de la Santé et des Sports et le CNOSF organisent les
« concours Femmes et sport » dont l'objectif est de promouvoir l'image, la place et le
rôle des femmes dans les pratiques physiques et sportives. Entre 2005 et 2009,
2 780 projets ont été reçus, 500 récompensés, dont 350 en faveur des jeunes filles et
des femmes dans les quartiers ;

58
Loi n°2000-627 du 6 juillet 2000 modifiant la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l’organisation et à la
promotion des activités physiques et sportives
59
Tétart P., Histoire du sport en France - De la libération à nos jours, tome 2, Paris, Vuibert, 2007, 523 pages
60
FRANCE, Sénat, Rapport d’information n° 650 (2010-2011) de Madame Michèle André, fait au nom de la
délégation aux droits des femmes, 21 juin 2011
61
op. cit.

31
- En 2006, afin de renforcer l'impact des mesures prises en faveur de la pratique
sportive féminine et de l'accès des femmes aux fonctions de dirigeantes, le ministère a
créé le Pôle ressource national « sport famille et pratiques féminines » - aujourd'hui
Pôle ressource national « sport égalité mixités citoyenneté » - implanté au CREPS
PACA - site d'Aix-en-Provence. Il apporte entre autres un soutien aux actions menées
dans chaque région par le ou la correspondant(e) Femmes et Sport ;
- Enfin, dans le prolongement des préconisations du rapport « Deydier » et des constats
réalisés depuis, le ministère des Sports a décidé de mettre en place, en 2011, avec
l'appui du pôle ressources national « sport, éducation, mixités, citoyenneté » (SEMC),
un groupe de travail national destiné à réfléchir et à proposer des actions concrètes et
des outils pour agir sur la place des femmes dans le sport.

La question de la représentation du sport féminin dans les médias est une thématique prise en
compte par les pouvoirs publics au même titre que la place des femmes au sein des instances
sportives et plus largement les conditions de la pratique du sport par les femmes. Cette
question est suivie avec attention par le CSA depuis sa création en 1989.62

Les résultats de la politique menée en France s’évaluent au sein des fédérations sportives
nationales. Certaines fédérations sportives se sont ouvertes aux femmes, alors qu’elles étaient
jusque-là exclusivement masculines : les fédérations d’haltérophilie en 1984, de rugby en
1989, de boxe en 1997. Pour autant, le nombre de licenciées féminines reste bien inférieur à
celui des licenciés masculins. Entre 2007 et 2015, le nombre de licences sportives féminines a
progressé de 20 %, soit de plus d’un million, contre une croissance de seulement 10 % pour
les licences masculines, soit de 900 000.63

Le processus de féminisation du sport est engagé en profondeur en parallèle d’autres


initiatives en faveur des femmes, qu’elles soient politiques (loi de juillet 1999 sur la parité) ou
économiques (loi sur la parité salariale de mars 2006). Toutefois, l’évolution du sport féminin
reste lente jusqu’en 2012, bien que le mouvement olympique et le ministère en charge des
Sports affichent le développement du sport féminin comme l’une de leur priorité. Ainsi, en
2006 seules quatre fédérations pionnières ont élaboré de leur propre initiative un « plan de
féminisation ».

Du coté allemand, la situation est un petit moins claire qu’en France. Il n’existe pas de lois
nationales relatives au sport en Allemagne. Chaque Land assure la promotion du sport, en
conformité avec le principe de compétence dans les domaines de l’éducation et de la culture
reconnu par la Loi fondamentale de la République allemande, et est libre d’édicter des lois
spécifiques sur le sport. Par ailleurs, il n’existe pas en Allemagne de ministère chargé du
sport, mais une administration gouvernementale rattachée au Ministère de l’Intérieur ainsi que
des commissions consultatives du sport ou conférences sportives avec rôle consultatif dans
chaque Land. Ainsi, les organismes sportifs sont totalement indépendants de l’Etat ce qui

62
FRANCE, Conseil supérieur de l’audiovisuel, Rapport sur la diffusion de la pratique féminine sportive à la
télévision, septembre 2017
63
FRANCE, Centre de Droit et d’Economie du Sport, Panorama du sport féminin et Enjeux stratégiques, 2017.

32
laisse place à plus d’initiatives privées. Nous étudierons les initiatives privées dans la
deuxième sous-partie.

Il est difficile de s’y retrouver et d’étudier toutes les mesures prises en faveur des femmes
dans les quelques 91 000 associations sportives qui existent en Allemagne et qui regroupent
environ 23,81 millions de membres.64 Ce que l’on sait, c’est que l’Allemagne fait face aux
mêmes problèmes que la France en matière de développement du sport féminin : la pratique
sportive se développe mais ce développement se limite à certains sports uniquement, les
sportives sont moins rémunérées que les hommes et elles sont moins médiatisées.

La problématique du genre dans le contexte sportif se pose depuis les années 1990. La
première conférence sur les femmes et le sport de toute la République fédérale d’Allemagne
s’est tenue à Münster en 1990.65 En 1991, une commission pour « l’étude des femmes dans le
sport » (Kommission « Frauenforschung in der Sportwissenschaft ») a été créée par
l’Association allemande des sciences du sport (« Die Deutsche Vereinigung für
Sportwissenschaft » DVS). Il a été décidé en 2004 que la dénomination « étude des femmes »
n’était plus adéquate et celle-ci a été remplacé par « recherche sur l’égalité des sexes »
(« Geschlechterforschung ») devenant ainsi la commission de la recherche sur l’égalité des
sexes dans le sport.

3- Des avancées notables depuis 2012 en France

La pratique sportive chez les françaises ne cesse de se développer, signe que ce qui a été mis
en place depuis les années 1980 a eu des conséquences positives sur la féminisation de la
pratique sportive. Entre 2008 et 2012, le nombre de licences délivrées à des femmes progresse
de 13,43 % quand la progression chez les hommes n’est que de 5,81%.66 Malgré tout, cela ne
signifie pas que le nombre de licences délivrées aux femmes est supérieur à celui des licences
délivrées aux hommes sur cette période. Cela signifie seulement que de plus en plus de
licences sportives sont délivrées aux femmes et cette croissance est plus importante que chez
les hommes.

Les progrès en faveur des femmes se font encore plus visibles à partir de 2012 grâce aux
démarches des institutions et de l’Etat qui se font plus nombreuses et à de nouvelles lois plus
spécifiques à la problématique des femmes dans le sport.

Tout d’abord, la promotion de la pratique sportive chez les femmes est une priorité affichée
du ministère chargé des sports et des institutions. Le comité interministériel pour l’Égalité
entre les femmes et les hommes, présidé par le Premier ministre, se réunit en 2012 autour de
conférences dites « conférences pour l’Egalité » qui ont lieu tous les trois ans dorénavant. La

64
https://www.make-it-in-germany.com/fr/professionnels-qualifies/decouvrir-lallemagne/portrait-de-
lallemagne/loisirs-et-sport
65
https://www.sportwissenschaft.de/die-dvs/struktur-und-
gremien/kommissionen/geschichte/geschlechterforschung-ueber-die-kommission/
66
Les chiffres clés de la féminisation du sport en France, Ministère des sports, 2013

33
dernière fois que le comité s’était réuni était en 2000. Lors de ces conférences, le comité
élabore un plan d’actions pour mettre en œuvre l’égalité réelle entre les femmes et les
hommes, qui se décline sous la forme de feuilles de route ministérielles adoptées par chaque
ministère et mises à jour annuellement. Dans sa feuille de route pour l’année 2015 67 , le
ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports fait le bilan de ce qui a été mis en place en
2014 et prévoit un programme d’actions pour l’année 2015. Le ministère demande depuis
2014 à chaque fédération sportive de présenter un plan de féminisation, intégré dans une
convention d’objectifs, structuré autour de cinq axes identifiés, à savoir les instances
dirigeantes fédérales et déconcentrées, le développement de la pratique pour le plus grand
nombre, notamment en faveur des femmes qui résident dans les quartiers de la géographie
prioritaire, le sport de haut niveau, les fonctions d’arbitrage et de jugement technique et
l’encadrement technique, qu’il soit bénévole ou rémunéré. Au 31 octobre 2014, 74 plans de
féminisation ont été réceptionnés. En 2014, trois mesures principales concernant la
féminisation de la pratique sportive ont été réalisées. Il s’agit de :

i- La mesure 10 « Promouvoir la parité dans les fédérations/Améliorer la place des


femmes dans l’encadrement sportif (DTN et DTN adjointes »

La première action en faveur de cette mesure a été la mise en œuvre des dispositions du
projet de loi sur l’égalité entre les femmes et les hommes sur la parité. Il s’agissait à
cette époque d’un projet de loi, concrétisé avec l’adoption de la loi du 4 août 2014 pour
l’égalité réelle entre les femmes et les hommes. Cette loi impose une représentation
minimale de 40% de chacun des deux sexes pour les fédérations qui délivrent plus de
25% de leurs licences à l’un des deux sexes (d’ici 2021) et une représentation minimale
de 25% de chacun des deux sexes pour les autres fédérations (d’ici 2017).

La deuxième action pour améliorer la place des femmes dans l’encadrement technique
des fédérations sportives a été de nommer un cadre technique interfédéral, Marie-
Françoise Potereau, et de la missionner pour près de la moitié de ses missions à la
coordination et l’animation d’un réseau des cadres féminins du ministère des sports. Des
réunions interrégionales sont organisées depuis juin 2014 pour engager les cadres
féminins du ministère à postuler sur les fonctions d’encadrement des directions
techniques nationales.

ii- La mesure 11 « Accompagner la mise en œuvre et la promotion des plans de


féminisations des fédérations sportives »

La première action en ce sens a été la réalisation d’un panorama comparatif des plans de
féminisation afin de les faire connaître et de partager aux acteurs locaux les différentes
méthodologies développées.

67
FRANCE, Comité interministériel des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes,
Feuille de route du ministère de la ville, de la jeunesse et des sports, 4 février 2015

34
iii- La mesure 12 « Promouvoir l’égalité femmes-hommes et notamment l’accès à
la pratique sportive pour les femmes les plus vulnérables au travers des actions du
CNDS »

Trois actions ont été menées en cette faveur.

La première étant de mobiliser le Centre national pour le développement du sport


(CNDS) au profit d’action pour le développement de la pratique féminine du sport. En
2013, 6,8 millions d’euros ont été consacrés en faveur du développement de la pratique
féminine du sport, soit 6% de la part territorial du CNDS.

La deuxième est une mesure de soutien financier à la production d’images sur le sport
féminin visant à être diffusées par les médias . En 2014, ce sont 17 projets (sur 20
retenus) qui ont fait l’objet d’un soutien financier au titre de la médiatisation d’épreuves
sportives féminines.

La troisième vise à promouvoir une journée « 24h du sport féminin » dans les clubs et
fédérations partenaires, à l’occasion de la Journée Internationale des Droits des
Femmes. Cette journée, organisée le 1er février 2014, a permis de diffuser 101 heures
de programmes sportifs féminins auprès de 198 pays, permettant à 240 millions de
foyers de visionner des manifestations sportives féminines.

iv- La mesure 13 « Accompagner les efforts du CSA pour une meilleure


représentation et une meilleure image du sport »

Parmi les priorités ministérielles affichées pour l’année 2015 dans la feuille de route et
qui concernent le volet « sport », on retrouve deux mesures, la première tenant à la
promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes et notamment l’accès à la
pratique sportive pour les femmes les plus vulnérables, la deuxième visant à
accompagner les efforts du CSA pour une meilleure représentation et une meilleure
image du sport.

Mis à part les démarches de l’Etat et des institutions, de nouvelles lois propres à la
question des femmes et du sport favorisent la féminisation de la pratique sportive
féminine, la plus importante étant celle pour l’égalité réelle entre les femmes et les
hommes de 2014. Elle a entrainé la multiplication des démarches par les fédérations
sportives pour féminiser le sport, puisque le plan de féminisation est devenu une
condition de la convention d’objectifs liant l’Etat aux fédérations sportives. Cette
tendance a débuté entre 2013 et 2014 ; elle concerne 87 fédérations en 2016. Les plans
de féminisations ont un effet notable, générant des « bonnes pratiques » exposées lors
des journées « Partageons nos Elles ». A l’initiative du ministère des Sports, ces
journées constituent des moments d’échange, de mutualisation d’expériences qui ont
fédéré un nombre croissant d’acteurs. La loi de 2014 révise également la TSF et
favorise l’exposition médiatique des femmes dans le sport. Elle vient au soutien de la

35
charte pour améliorer l’image des femmes dans les médias, signée le 13 octobre 2010
entre les représentants des médias et Nadine Morano, visant à améliorer l’image des
femmes dans les médias et à favoriser leur présence dans les médias, avec un volet
relatif aux émissions et aux retransmissions sportives. L’article 56 de la loi de 2014,
portant sur le respect des Droits des femmes dans le domaine de la communication
audiovisuelle, en terme notamment d’exposition et d’image, a connu une application
concrète dans le sport avec l’opération des « 24 heures du sport féminin », devenu les
« 4 Saisons du sport féminin ». A l’initiative du CSA, ces actions ont favorisé
favorablement l’exposition médiatique des femmes dans le sport passant de 7 % en
2012 à environ 16 à 20 % en 2018. Toutefois, parmi les 28 évènements sportifs
retransmis à la télévision, seuls 5 sont mixtes et à peine 5 exclusivement féminins.

Le résultat est flagrant : pour la première fois entre 2015 et 2016, l’augmentation des licences
féminines est supérieure à celle des licences masculines et en 2015, sur les 16 millions de
licenciés à des fédérations unisport olympiques, non olympiques et multisports, 37,5 %
étaient des femmes.68

Enfin, deux récentes lois sont votées en 2017, s’inscrivant dans la continuité de tous les
efforts réalisés en matière de féminisation de la pratique sportive.

Il s’agit en premier lieu de la loi relative à l'éthique et à la régulation du sport professionnel69


visant à préserver l'éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport
professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs. Le titre IV de cette loi entend
promouvoir le développement et la médiatisation du sport féminin en instituant une
Conférence permanente du sport féminin (article L.142-1 du Code du sport).

En deuxième lieu, la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté,


vise à combattre les discriminations et propose toute une série de mesures en faveur de
l'égalité réelle entre les femmes et les hommes (nouveaux articles L.100-1 et L.100-2 du Code
du sport). L’article 202 de cette loi complète les articles L.100-1 et L.100-2 du code du sport
pour mettre l'accent sur la pratique sportive féminine. L'article L.100-1 précise désormais
« l'égal accès des hommes et des femmes aux activités sportives, sous toutes leurs formes, est
d'intérêt général ». Par ailleurs l'article L.100-2 est doté d'un alinéa 2 précisant que l'État, les
collectivités territoriales et leurs groupements, les associations, les fédérations sportives, les
entreprises et leurs institutions sociales « veillent à assurer un égal accès aux pratiques
sportives sur l'ensemble du territoire ». Néanmoins, il s’agit ici de l’égalité entre les
différentes parties du territoire français et non de l’égalité des sexes. Car effectivement, les
inégalités d'accès à la pratique du sport sont aussi très fortes selon les territoires. Il est donc

68
Ministère chargé des sports, Répartition des licences masculines et féminines par fédération française agréée
(hors ATP) en 2015 (http://www.sports.gouv.fr/organisation/publication-chiffres-cles/Statistiques/Donnees-
detaillees/article/article- Donnees-detaillees-2015).
69
Loi n° 2017-261 du 1er mars 2017 visant à préserver l'éthique du sport, à renforcer la régulation et la
transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs, JORF n°0052 du 2 mars 2017, texte
n° 1

36
important d’orienter les politiques relatives au développement du sport dans une logique
d'égalité entre les hommes et les femmes mais aussi entre les territoires.

4- Une interprétation stricte du principe d’égalité et du principe de non -


discrimination ?

Les principes d’égalité et de non-discrimination sont des principes fondateurs sur lesquels se
fonde la démocratie. Le principe d’égalité, que l’on retrouve aux articles premier et six de la
Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, dans le préambule de 1946 et à
l’article premier de la Constitution française70, est l’un des trois à figurer dans la devise de la
République. Ce principe, à valeur constitutionnelle, impose de traiter de la même manière des
personnes placées dans une même situation. Pour autant, il n’exclut pas des différences de
traitement, à condition qu’elles soient justifiées (par une différence de situation ou par un
motif d’intérêt général en rapport avec l’objet de la loi qui les établit), objectivement fondées,
proportionnées à la cause qui les justifie et étrangères à toute discrimination. Le principe
d’égalité se retrouve dans différentes lois françaises. Ainsi, dès 1972, le principe d’égalité de
rémunération entre les femmes et les hommes est inscrit dans la loi. On compte également la
loi « Roudy » sur l’égalité professionnelle en 1983, précisée et complétée par la loi
« Génisson » en 2001, la loi de 2006 relative à l’égalité salariale entre les femmes et les
hommes, la loi de 2007 tendant à promouvoir l'égal accès des femmes et des hommes aux
mandats électoraux et fonctions électives, la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 de
modernisation des institutions de la Ve République, ou encore la loi du 27 janvier 2011
relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils
d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle.

Mais il faut attendre l’année 2012 pour qu’un réel changement se produise en matière
d’égalité entre les hommes et les femmes. Le 18 décembre 2012, le décret n° 2012-1408 du
18 décembre 2012, relatif à la mise en œuvre des obligations des entreprises pour l’égalité
professionnelle entre les femmes et les hommes, renforce le dispositif de pénalité qui pèse sur
les entreprises ne respectant pas leurs obligations en matière d’égalité professionnelle. Il
renforce les exigences applicables aux entreprises en augmentant le nombre de thèmes à
traiter dans la négociation ou dans les plans d’action et rend en particulier obligatoire celui de
la rémunération.

En outre, la loi n°2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à


l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la
lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction
publique, contient des dispositions relatives à l’égalité professionnelle entre les hommes et les
femmes, notamment l’instauration d’objectifs chiffrés à 40% de chaque sexe dans les
nominations aux emplois supérieurs, au sein des conseils d’administration et de surveillance
ou les organes équivalents des établissements publics, des conseils supérieurs, des
commissions administratives paritaires, des jurys et des comités de sélection d’ici 2018.

70
Annexe 2

37
Le plus importante de toutes les lois, en ce qui concerne l’égalité dans le domaine du sport,
est celle du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, visant à
combattre les inégalités entre hommes et femmes dans les sphères privées, professionnelle et
publique. Le chapitre III de cette loi traite exclusivement de dispositions relatives à l’égal
accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sportives. L’article
63 de la loi porte modification des articles L.131-8 et L.131-11 du Code du sport. Il est rédigé
ainsi :

« I.-L'article L. 131-8 du code du sport est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I.-» ;

2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :


« II.-Les statuts mentionnés au I du présent article favorisent la parité dans les
instances dirigeantes de la fédération, dans les conditions prévues au présent II.
« 1. Lorsque la proportion de licenciés de chacun des deux sexes est supérieure ou
égale à 25 %, les statuts prévoient les conditions dans lesquelles est garantie dans les
instances dirigeantes une proportion minimale de 40 % des sièges pour les personnes
de chaque sexe.
« Par dérogation au premier alinéa du présent 1, les statuts peuvent prévoir, pour le
premier renouvellement des instances dirigeantes suivant la promulgation de la loi n°
2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, que la
proportion de membres au sein des instances dirigeantes du sexe le moins représenté
parmi les licenciés est au moins égale à sa proportion parmi les licenciés.
« 2. Lorsque la proportion de licenciés d'un des deux sexes est inférieure à 25 %, les
statuts prévoient les conditions dans lesquelles est garantie dans les instances
dirigeantes de la fédération une proportion minimale de sièges pour les personnes de
chaque sexe pouvant prendre en compte la répartition par sexe des licenciés, sans
pouvoir être inférieure à 25 %.
« 3. La proportion de licenciés de chacun des deux sexes est appréciée sans
considération d'âge ni de toute autre condition d'éligibilité aux instances dirigeantes. »

II.-A la première phrase de l'article L. 131-11 du même code, après le mot : « alinéa »,
est insérée la référence : « du I ». »

Cette disposition permet ainsi de forcer les fédérations à avoir au sein de leurs instances
dirigeantes une proportion plus ou moins équitable entre les hommes et les femmes sans pour
autant les contraindre à la stricte parité.

Cette disposition s’inscrit dans la continuité de l’alinéa 4 de l’article L.100-1 du Code du


sport qui dispose « L’égal accès des hommes et des femmes aux activités sportives, sous
toutes leurs formes, est d’intérêt général ».

38
Ce principe est également inscrit dans la Charte olympique qui assigne pour mission et pour
rôle au CIO « d’encourager et soutenir la promotion des femmes dans le sport » dans le but
de « mettre en œuvre le principe de l’égalité entre hommes et femmes ».71

Le principe de non-discrimination, quant à lui, vient au soutien du principe d’égalité. Il s’agit


d’un droit qui propose des solutions lorsque l’égalité seule n’y parvient pas. Certes, la loi
promeut l’égalité mais de cette égalité formelle ne nait pas toujours une égalité réelle du fait
de pratiques discriminatoires qui portent atteinte au principe d’égalité.

En ce qui concerne la féminisation de la pratique sportive, ce principe s’illustre dans le refus


de toute discrimination fondée sur le sexe. Il est mentionné dans deux des sept principes
fondamentaux de l’Olympisme : dans le principe 4 qui revendique pour tout individu la
possibilité de faire du sport sans discrimination d’aucune sorte, et surtout le principe 6 qui
assure la jouissance des droits et libertés reconnus par la Charte « sans discrimination
d’aucune sorte, notamment en raison de la race, la couleur, le sexe, (…) ou toute autre
situation ».

Ces deux principes apparaissent comme ancrés dans les valeurs fondamentales de la
République française, valeurs également portées par les mouvements sportifs nationaux et
internationaux.

Et pourtant, ils ne sont pas strictement respectés par les instances sportives.

Un premier exemple apparait, pour ce qui est de l’interprétation relative du principe d’égalité
par les organisations sportives, dans l’organisation des JO. On y retrouve des disparités dans
le nombre d’épreuves masculines et féminines, ce qui conditionnent à la fois le nombre de
médailles (les femmes participent à moins d’épreuves et ont donc moins de possibilités de
remporter une médaille), le nombre d’athlètes de l’un et de l’autre sexe qui participent aux
Jeux (moins d’épreuves réservées aux femmes donc moins de sportives présentent aux Jeux)
et la composition des comités d’organisation des Jeux (les membres du mouvement sportif ont
la majorité des voix pour élire les membres du bureau ; or moins il y a de femmes membres
du mouvement sportif et olympique, moins de femmes seront élues au bureau).

Un deuxième exemple est donné par une atteinte au principe de libre accès de tous aux
compétitions sportives sanctionnée par le Conseil d’Etat, principe qui découle directement de
ceux d’égalité et de non-discrimination.72 Par un arrêt rendu le 27 juin 198673, le Conseil
d’Etat a annulé la disposition du règlement de la Fédération française des sports de glace qui
avait interdit aux femmes la possibilité de participer aux compétitions officielles de hockey
sur glace en raison du faible nombre d’équipes féminines. Aussi au nom de l’atteinte au
principe de libre accès de tous aux compétitions sportives, le Conseil d’Etat a annulé le refus

71
Règle 2 §7 de la Charte olympique
72
Buy F., Marmayou J-M., Poracchia D., Rizzo F., Droit du sport, Issy-les-Moulineaux, L.G.D.J, 2015, 752
pages
73
CE, 27 juin 1986 n°73596, Epoux Lezzerio, Lebon, p.734

39
de la Fédération française de cyclisme d’homologuer un record féminin de demi-fond,
invoquant « le manque d’intérêt actuellement constaté des licenciés amateurs pour cette
épreuve et l’absence d’homologation par l’Union cycliste internationale d’un record mondial
féminin dans cette discipline ». Le Conseil d’Etat a considéré que « de tels motifs ne sont pas
de nature à justifier légalement l’exclusion de principe de toute possibilité d’homologation
d’un record national féminin dans ladite discipline »74.

La jurisprudence du Conseil d’Etat a été suivie par le droit communautaire grâce à la directive
2004/113 du 13 décembre 200475 « mettant en œuvre le principe de l’égalité de traitement
entre les femmes et les hommes dans l’accès des biens et services et la fourniture des biens et
services ». Cette directive considère que certaines différences de traitement peuvent être
acceptées mais seulement si elles sont justifiées par un but légitime ; la liberté d’association et
l’organisation d’activités sportives constituant justement des buts légitimes. La directive a été
transposée dans le Code pénal par une loi n°2008-496 du 27 mai 200876.

En revanche, les associations sportives disposent encore d’une grande liberté de


discrimination basée sur le sexe puisqu’elles ne sont pas tenues par les sujétions de service
public qui pèsent sur les fédérations sportives agréées et délégataires77.

La délégation aux droits des femmes adopte en 2011 l’ensemble du rapport d’information78 et
les vingt-quatre recommandations qu’il comporte, et notamment les trois dernières qui
intéressent le respect du principe d’égalité et du principe de non-discrimination :

Recommandation 22.- Au nom du cinquième principe formulé par la Charte olympique,


relatif au refus de toute forme de discrimination fondée sur le sexe, ne plus cautionner
l'organisation de Jeux séparés pour les femmes car ceux-ci aboutissent à une véritable
ségrégation dans le sport, et veiller à la mixité des délégations nationales participant
aux Jeux olympiques.

Recommandation 23.- Inciter le Mouvement olympique à harmoniser le nombre


d'épreuves masculines et d'épreuves féminines de façon à assurer un équilibre dans le
nombre des médailles auxquelles peuvent prétendre les championnes et les champions ;

Recommandation 24.- Inviter le président du Comité international olympique à


remettre lui-même la médaille d'or à la marathonienne comme il le fait déjà,
traditionnellement, pour le vainqueur du Marathon, de façon à manifester, par ce geste

74
CE, 4 février 1994, n°109537, Raguenau, D. 1995, somm. p. 65
75
Directive 2004/113/CE du Conseil, du 13 décembre 2004, mettant en œuvre le principe de l’égalité de
traitement entre les femmes et les hommes dans l’accès à des biens et services et la fourniture de biens et
services
76
Article 225-3-4° du Code pénal
77
Lois du 29 octobre 1975 et du 16 juillet 1984, mettant en place les mécanismes de l’agrément et de la
délégation ministérielle accordés aux groupements sportifs, dont la mission de service public a été préalablement
reconnue.
78
Op. cit.

40
d'une forte portée symbolique, l'attachement du Mouvement olympique à l'égalité entre
les femmes et les hommes.

L’adoption de recommandations visant à garantir l’égalité et lutter contre les discriminations


est manifeste de l’interprétation très relative qui est faite de ces principes.

5- Perspectives d’évolution : entre espoirs et inquiétudes

La pratique sportive féminine est depuis les dernières années en très nette augmentation, bien
qu’encore un peu loin d’être la même que celle des hommes. Les prochaines années
s’annoncent déterminantes quant à l’évolution de la pratique du sport par les femmes.

De nombreux projets laissent entrevoir de l’espoir pour que la pratique du sport continue de
séduire de plus en plus de femmes, qu’elle leur soit tout autant accessible que pour les
hommes et que les sportives aient le droit au même traitement que les sportifs,
médiatiquement parlant.

On note tout d’abord, à l’échelle internationale, l’évolution du programme des JO en faveur


de la mixité.79 Aux JO d’hiver de 2018, deux nouvelles épreuves mixtes font leur apparition :
l’épreuve par équipes en ski alpin et le curling double mixte. L’équilibre des épreuves non-
mixtes, quant à lui, est presque respecté, avec 50 épreuves masculines contre 44 féminines. Il
s’agit d’un record salué par le CIO, au même titre que le fait qu’un nombre identique
d’épreuves masculines et féminines soit disputé le dernier jour des Jeux. Les JO d’été de
Tokyo en 2020 verront aussi leur nombre d’épreuves mixtes doublé (il passera de 9 à 18 entre
Rio 2016 et Tokyo 2020, avec par exemple le relais mixte 4x100 m en natation). Le CIO
souligne la plus grande participation féminine : 44% de participantes à Londres en 2012,
45% de femmes pour les Jeux de Rio.

Le Président de la République française annonce dès 2017, dans un discours prononcé le 27


novembre, l’égalité femme – homme comme « grande cause du quinquennat », qui impose la
nécessité de « changer en profondeur les mentalités », de « diffuser la culture de l’égalité »
dans une société « malade du sexisme ».

La question de l’égalité homme-femme dans le domaine du sport est centrale et d’autant plus
importante qu’elle concerne directement la France, dont la capitale a été choisie pour
organiser les JO en 2024. Dans un projet de loi relatif à l’organisation des Jeux Olympiques et
Paralympiques de 2024, les statuts du CNOSF sont modifiés afin d’assurer notamment une
représentation équilibrée entre les femmes et les hommes. De plus, le plan « Héritage Paris
2024 » dresse 24 mesures qui doivent constituer une part majeure de l’héritage durable de
Paris 2024, au service des Françaises et des Français.

79
Deborde J., « Jeux olympiques de Pyeongchang : vers un peu plus de mixité », Libération, 9 février 2018

41
Cependant, ces espoirs se transforment en inquiétudes et ce pour la simple raison que
l’élément central du processus de féminisation est abandonné en 2018. En effet, les plans de
féminisation, conclus avec le ministère en charge des sports au sein de conventions d’objectifs
pluri-annuelles, ne sont désormais plus imposés aux fédérations, à qui il est alors donné toute
latitude dans le choix des actions présentées. Ce choix d’action porte sur « toute action
permettant de soutenir le développement de la pratique sportive ». Le terme « féminisation »
a définitivement disparu. Les plans de féminisation constituaient un moyen de pression non
négligeable pour inciter bon nombre de fédérations à s’engager sur des axes jugés prioritaires,
en échange de financement de l’Etat.

Enfin, un autre élément vient noircir le tableau des années à venir pour le sport féminin : bien
que le fonds médiatisation du CNDS, pour partie en faveur de l’exposition médiatique du
sport féminin, ait été reconduit, le ministère des Sports et le CNDS font face à des réductions
budgétaires et semblent placer le sport féminin comme variable d’ajustement. Ce fonds de
soutien à la production d’images sportives créé en 2014 était doté jusqu’alors de 500 000
euros par année.80

80
FRANCE, Comité interministériel des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes,
Feuille de route du ministère de la ville, de la jeunesse et des sports, 4 février 2015

42
B) Des actions accessoires nécessaires pour soutenir la
féminisation du milieu sportif

Etablir un cadre légal et réglementaire ne suffit pas à assurer la féminisation de la pratique


sportive. Celle-ci doit être soutenue par des initiatives privées, qu’elles viennent d’institutions
(1), d’associations (2), des médias (3) ou encore des villes (4).

1- Les initiatives menées par les institutions

a- En France

L’administration s’engage dans une démarche de prévention et de lutte contre toutes les
formes de discriminations, notamment le sexisme. Cette démarche s’inscrit notamment dans
le cadre des plans de mobilisation et de lutte contre toutes les violences faites aux femmes
(dont le 5ème plan a été renouvelé pour les années 2017 à 2019)81 et dans le cadre du plan «
Citoyens du Sport » impulsé par le ministère chargé des Sports en 2015. Ainsi que le rappelle
le Comité des 11 tricolores dans son rapport rendu en mars 2016 sur la féminisation du sport,
plusieurs outils ont été mis en place afin de renforcer l’information et la sensibilisation des
acteurs du sport vis-à-vis des comportements à caractère sexiste et leurs conséquences :

« • une fiche du guide juridique 2015 relatif à la prévention et la lutte contre les
incivilités, les violences dans le sport est spécialement consacrée aux conséquences
juridiques des comportements sexistes ;
• une fiche de sensibilisation, notamment sur les comportements à caractère sexiste,
téléchargeable, depuis décembre 2015, dans la rubrique « éthique » du site internet
du ministère ;
• un guide à l’usage d’organismes de formation proposant des diplômes « jeunesse et
sports » a été conçu en 2014 sur la problématique du sexisme ;
• des infographies réalisées et diffusées sur les réseaux sociaux à l’occasion de la
journée internationale des droits des femmes ;
• une campagne « #CoupDeSifflet contre le sexisme » est lancée en mars 2016 à la
suite de celle initiée, en mai 2015, pour lutter contre l’homophobie. Destinée à la
fois aux acteurs du sport, qu’ils soient pratiquants, dirigeants ou supporters, et au
grand public, cette campagne, travaillée en collaboration avec l’association
Femix’Sports, se décline par des outils de sensibilisation et d’information autour
d’un #CoupdeSifflet contre le sexisme dans le sport. »

A titre informatif, le Comité des « 11 tricolores », mis en place par François Hollande, réunit
depuis juin 2015 des personnalités qualifiées, chargées d’impulser et de soutenir des actions
autour de thématiques variées en lien avec l’EURO 2016 et les politiques publiques
prioritaires, parmi lesquelles la féminisation. Christine Kelly, journaliste et instigatrice des
81
FRANCE, Gouvernement, 5ème plan de mobilisation et de lutte contre toutes les violences faites aux femmes,
2017-2019, 2017

43
24h du sport au féminin, est en charge de la question de la féminisation et de la mixité. Le
secrétariat général du comité a été confié à Thierry Maudet, inspecteur général de la jeunesse
et des sports.

Autre exemple de campagne de communication, la campagne lancée par la ministre des


Sports Laura Flessel en mars 2018 baptisée « EX AEQUO, parfois l’égalité est une victoire »
pour lutter contre les discriminations dans le sport. 82 Cette campagne de communication
rappelle que les actes et paroles discriminants sont contraires aux valeurs du sport. Parmi les
ambassadeurs de cette campagne, on retrouve de grands noms du sport tel que Ilyes El
Bekkaoui, membre du corps arbitral, ou encore Antoine Griezmann, Marie-Amélie Le Fur,
Frédéric Michalak, Sarah Ourahmoune, Souleymane Cissokho, Laura Georges, Florent
Manaudou, Estelle Mossely, Emmeline Ndongue et Cyril Moré. « À l’image des relayeurs de
la flamme olympique, soyez porteurs, dans vos clubs, sur les terrains de sport, dans votre vie
de tous les jours, de cette lutte afin que le sport soit ouvert à toutes et à tous. Enfin, pour
conclure, je ferai mienne cette phrase de Nelson Mandela : « Le sport peut faire naître
l’espoir là où régnait le désespoir » ! ». Tel est le message positif et fédérateur que souhaite
faire passer la ministre Laura Flessel aux acteurs du sport (pratiquants, dirigeants, supporters)
et au grand public autour de l’égalité et du vivre-ensemble dans le sport. De nombreux
partenaires soutiennent cette action : EDF, ELLE, France Télévisions, la SNCF,
DECATHLON, mais aussi les associations de lutte contre les discriminations comme : le
Comité Paralympique et Sportif Français ; Fédération française d’handisport ; DILCRAH ;
LICRA ; SOS HOMOPHOBIE ; La Ligue des Droits de l’Homme ; FEMIX SPORTS ;
Institut National du supportérisme ; FSGL ; Les Gay Games 2018. Quatre problématiques
sont notamment abordées : l’homophobie, le racisme, le sexisme et la stigmatisation du
handicap. La campagne se décline depuis le 16 mars par des outils de sensibilisation et
d’information sur différents médias (presse, télévision et Internet) et par un réseau
d’affichages sur près de 700 points en France et en Outre-Mer.

Egalement en partenariat avec le ministère des Sports, mais aussi le ministère chargé des
droits des femmes et le CNOSF, le CSA a lancé en 2016 l’opération des 4 saisons du sport
féminin.83 Lors de cette opération, le CSA incite les chaines de télévision et stations de radio à
consacrer une partie de leur programmation à la médiatisation de la pratique sportive féminine
lors d’un week-end. Cette opération a pour objectif de donner un nouvel élan à la féminisation
du sport, d’ancrer le sport féminin dans les usages et enfin d’encourager la diversité des sports
retransmis sur les antennes, la médiatisation apparaissant comme la clé de voûte du
développement du sport féminin. Afin que les enjeux liés au sport féminin puissent être
abordés tout au long de l’année, l’opération se décline en quatre temps forts, pilotés
respectivement par chaque partenaire. A chaque saison correspond une thématique. Pour
l’année 2016 : la médiatisation du sport féminin (pilotée par le CSA), la réflexion autour du
sport féminin (pilotée par le ministère des sports), la pratique du sport féminin (pilotée par
CNOSF) et la fête du sport féminin (pilotée par le ministère chargé de l’égalité entre les

82
http://www.sports.gouv.fr/exaequo
83
FRANCE, Conseil supérieur de l’audiovisuel, Rapport sur la diffusion de la pratique féminine sportive à la
télévision, septembre 2017

44
hommes et les femmes). Le grand nombre de chaînes de télévision et de stations de radios
impliquées dans l’opération contribue à la prise de conscience du grand public des réalités de
la pratique sportive féminine du sport dans le pays. En 2018, c’est la Conférence permanente
sur le sport féminin, à laquelle contribue activement le CSA, qui prend le relais des 4 saisons
du sport féminin. Son groupe de travail « Médiatisation du sport féminin » lance en
partenariat étroit avec le CSA l’opération Sport féminin toujours, mettant en lumière la
pratique sportive féminine mais apportant également un éclairage sur les enjeux centraux
d’économie et de gouvernance déjà au cœur des 4 saisons du sport féminin.

Ce sont autant d’outils qui participent à la volonté du ministère d’indiquer à l’ensemble des
acteurs que les comportements à caractère sexiste n’ont pas leur place dans le sport mais
également d’affirmer l’engagement des acteurs du sport à dénoncer de tels agissements,
comme l’explique le Comité des 11 tricolores dans son rapport. Ce travail de sensibilisation
se fait en lien étroit avec le mouvement sportif et les associations spécialisées sur cette
problématique.

Sans oublier les actions volontaires mises en place par les fédérations, puisque désormais les
plans de féminisation ne sont plus imposés au sein des conventions d’objectifs. Même avant
que les plans de féminisation ne soient plus imposés aux fédérations, celles-ci ont « innové »
afin d’attirer plus de femmes.84 Dès 2006, quatre fédérations se sont engagées volontairement
dans la définition d’un plan de féminisation : handball, basket-ball, cyclisme et football,
suivies au cours de l’olympiade 2009-2012 par les fédérations d’aviron, de hockey sur glace,
de montagne et d’escalade, de boxe, de triathlon et de tennis. La Fédération française de
football (FFF) qui ne compte en 2011 que 2,7 % de femmes parmi ses licenciés a elle aussi
« innové » afin de s’ouvrir davantage aux femmes. Dès 2009, la FFF a créé une commission
de féminisation avec un double objectif : « plus de filles derrières les ballons, [et] plus de
femmes aux responsabilités au sein des fédérations ». La Fédération française d’éducation
physique et de gymnastique volontaire, très majoritairement féminine dans le recrutement de
ses licenciées, a essayé de procéder à un rééquilibrage de son recrutement et de son
encadrement. Une application stricte de la loi du 6 juillet 2000 et du décret du 7 janvier 2004
garantissant, par sexe, une proportionnalité entre le nombre de licenciés et le nombre de
sièges dans les instances de direction, aurait abouti à ce que la fédération ne compte qu'un
seul homme au sein de son comité-directeur. Considérant qu'un homme isolé ne pouvait à lui
seul représenter les aspirations des hommes, et recherchant un meilleur équilibre entre les
sexes au sein des instances de direction, la présidente de la fédération a souhaité, par
dérogation à la règle de proportionnalité, que le comité-directeur comporte 20 % du sexe le
moins représenté - le sexe masculin en l'occurrence - par référence au quota de 20 %
recommandé par le CIO.

b- En Allemagne

84
FRANCE, Sénat, Rapport d’information n° 650 (2010-2011) de Madame Michèle André, fait au nom de la
délégation aux droits des femmes, 21 juin 2011

45
En Allemagne, l’acteur institutionnel principal est la Confédération olympique et sportive
allemande (die Deutsche Olympische Sportbund, DOSB). Le DOSB est depuis 2006 le
représentant officiel du mouvement olympique en Allemagne, l’équivalent du CNOSF en
France. Le DOSB est composé d’environ 91 000 associations sportives, se déclinant en seize
fédérations régionales qui correspondent aux Länder.

Le DOSB organise chaque année une Assemblée générale des femmes (die Frauen-
Vollversammlung). 85 Il s’agit d’une conférence autonome, tel qu’énoncé à l’article 25 des
statuts du DOSB, disposant du droit de faire des propositions lors de l’Assemblée des
membres du DOSB (article 12, alinéa 4 des statuts du DOSB). Elle est composée de membres
des différentes organisations du DOSB. Toutefois, les décisions prises lors de cette
conférence ne sont que des recommandations à l’égard des organes du DOSB. La treizième
Assemblée générale des femmes a lieu les 22 et 23 septembre 2018 à Düsseldorf.

2- Les initiatives menées par des associations

a- En France

Les associations aussi se mobilisent pour aider à la féminisation de la pratique sportive.

Le collectif « Egal Sport » mène de nombreuses actions en ce sens. Il regroupe des bénévoles
engagés dans la promotion de l’égalité des femmes et des hommes dans le sport. Il incite les
institutions et les médias à valoriser les actions positives en faveur de la place des femmes
dans le sport et à dénoncer les comportements discriminatoires. Partage d’informations,
mutualisation d’expériences, participation active aux évènements majeurs et expertises de
spécialistes sont au cœur de leur action. Par exemple, le colloque « Plus de femmes pour plus
de sport », à l’initiative du Conseil National des Femmes Françaises, de Femmes 3000, en
partenariat avec Egal Sport et le Laboratoire de l’Egalité et sous le haut patronage du
ministère des Sports, s’est tenu le 24 janvier 2018 à la Maison des Femmes à Paris, et a réuni
plus de 400 participants.

Le collectif « Rénovons le sport français », associé depuis mars 2018 à la démarche de


concertation menée par le ministère des Sports et CNOSF sur « la co-conception d’un
nouveau modèle de gouvernance des sports en France » a rendu un rapport sur la contribution
à la réforme en cours de la gouvernance du sport français et à la préparation du projet de loi
« Sport et société » le 29 juin 2018. Parmi les dix recommandations les plus importantes du
rapport, deux sont en faveur des femmes. La recommandation n°23, qui sera détaillée dans la
troisième partie de ce mémoire, vise à « assortir les quotas de femmes pour 2021 dans les
instances dirigeantes des fédérations d’un mécanisme de sanction en cas de non-conformité et
remettre l’accent dans les conventions d’objectifs sur les plans de féminisation des
fédérations ». La recommandation n°27 prévoit une « statut identique pour toutes les joueuses
d’un même championnat » et place « le championnat élite femmes sous l'égide des instances

85
https://gleichstellung.dosb.de/ueber-uns/frauen-vollversammlung/

46
qui gèrent les championnats pro masculins, dans une logique d’harmonisation et de
reconnaissance ». Il apparait nécessaire à l’association que les sportives puissent penser à leur
double projet et vivre sereinement leur pratique de haut niveau. L’association insiste sur le
fait que les joueuses mettent très souvent « beaucoup d'énergie à réaliser des objectifs élevés
dans des situations parfois très inconfortables par rapport à leurs homologues masculins (au
même niveau, dans un même sport). Les conditions de travail sont extrêmement hétérogènes
et inégales (exemple du football en 1ère division), avec des conséquences parfois très néfastes
sur la crédibilité d'ensemble du projet féminin. Permettre aux compétitrices d'avoir un statut
pro ou semi-pro, ou encore obtenir le même statut pour toutes celles qui pratiquent dans le
même championnat) serait une importante avancée ».

b- En Allemagne

Il est difficile d’envisager les efforts de féminisation des associations en Allemagne sans
confondre le travail des associations sportives dans ce domaine. Effectivement en Allemagne,
la majorité des gourpements sportifs sont des associations. Ainsi, nous étudions d’ores et déjà
les initiatives de ces associations dans l’ensemble du ce travail de recherche. Mais il est
intéressant de se pencher sur un exemple d’initiative mise en place par une association qui ne
se veut pas une association de pratique de sport mais une association de recherche sur le sport.

Cet exemple est celui de la commission de la recherche sur la recherche sur le genre dans le
sport (Kommission « Geschlechterforschung in der Sportwissenschaft ») sous l’égide de
l’Association allemande des sciences du sport (Die Deutsche Vereinigung für
Sportwissenschaft) qui travaille sur les problématiques liant les femmes et le sport.

La 25ème réunion annuelle de cette commission se tiendra du 15 au 17 novembre 2018 à


Wuppertal. Les travaux porteront notamment sur les thèmes du genre et de l’inclusion et il
sera entre autres discuté des questions suivantes :
- Quelles sont les opportunités offertes par les réflexions sur le genre dans les approches
différentielles telles que l’inclusion, l’intersectionnalité ou la diversité ?
- Comment évaluer la visibilité et la pertinence des études de genre dans les sciences du sport
à l’heure actuelle ?
- Quels sont les défis futurs dans les différents contextes sportifs (école, club, sport de
compétition, etc) ?

Certes, aucune mesure concrète n’est prise en faveur des femmes mais le travail de la
commission permet de connaître les nouveaux besoins et les adptations nécessaires auxquelles
les fédérations sportives devront trouver des solutions réelles.

47
3- Les initiatives menées par les médias en France

Les médias cherchent désormais à valoriser la retransmission du sport féminin. De nombreux


efforts sont faits, notamment grâce au CSA dont les pouvoirs ont été élargis par la loi de 2014
pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, afin qu’il vérifie que chacune des
chaines de télévision respecte l’équité dans les images.

Cet exemple s’inscrit dans la lignée de la volonté gouvernementale d’intégrer les évènements
de football et de rugby féminins dans la liste française des rendez-vous sportifs considérés
d'intérêt public – et donc obligatoirement diffusés en clair sur des chaînes publiques.
Aujourd’hui, ce sont cinq évènements mixtes et cinq évènements exclusivement féminins,
parmi les 28 évènements listés86, qui sont obligatoirement retransmis en clair à la télévision,
incorporant enfin les footballeuses et les rugbywomen.

Autre média prenant partie pour les femmes et le sport, le magazine trimestriel Les Sportives
propose un regard neuf sur le sport féminin.87

4- Les initiatives menées par les villes

a- En France

Les collectivités locales, et en particulier les communes, ont leur mot à dire en ce qui
concerne les politiques sportives. En effet, ces dernières sont définies par le conseil
municipal.88 Voici quelques exemples d’initiatives prises par les villes ou pour les villes.89

Le président du Tango Bourges Basket a organisé à Bourges les premiers États généraux du
sport féminin en équipe les 16 et 17 mai 2013, réunissant pouvoirs publics, collectivités
territoriales, experts, responsables de fédérations sportives, sportifs et sportives de haut
niveau, entreprises et journalistes.

La ville de Strasbourg donne aux clubs « un peu plus de subventions quand, entre 12 et 16
ans, ils ont davantage de filles et arrivent à les garder » et insiste sur « l’égalité de traitement
sur les créneaux d’entraînement », ce qui peut signifier aussi l’ouverture de créneaux
spécifiques pour que les femmes qui ont des contraintes familiales puissent s’entraîner.

86
Décret n°2004-1392 du 22 décembre 2004 pris pour l'application de l'article 20-2 de la loi n° 86-1067 du 30
septembre 1986 relative à la liberté de communication
87
Ferré, J-L., « Comment mettre hors jeu le sexisme dans le sport », La Croix, 22 janvier 2018
88
Gatsi J., Le droit du sport, Collection Que sais-je ?, Paris, Presses universitaires de France, 2007 (2ème
édition), 128 pages
89
J.N., « Développement du sport féminin : les collectivités ont aussi un rôle à jouer », MaireInfo, édition du 26
janvier 2018

48
À Poissy, le maire Karl Olive a mis en place deux heures hebdomadaires de sport sur le temps
de travail pour tous les agents municipaux qui le souhaitent, un dispositif utilisé à 55 % par
des femmes.

Enfin, la ville de Paris a organisé, le 24 janvier 2018, un colloque dans le cadre du Tour de
France de l’égalité, une initiative lancée le 4 octobre 2017 sous l’égide du Premier ministre et
du secrétariat d’État à l’Égalité entre les femmes et les hommes. La journée s’articule autour
de plusieurs tables rondes, dont une portant sur le rôle des collectivités et du secteur public.

Combattre les préjugés et les inégalités dans le sport passe par un « travail de terrain », dans
les gymnases, les écoles, les quartiers, et bien sûr auprès des clubs. Les mairies ont intérêt à
intervenir dès l’école primaire avec, par exemple, des actions de sensibilisation dans les cours
de récréation et des formations spécifiques pour apprendre aux personnels à « déconstruire »
ces stéréotypes et ces préjugés.

b- En Allemagne

La mairie du quartier Treptow-Köpenick à Berlin a lancé en 2014 le projet « les femmes dans
le sport » (« Frauen im Sport »)90, afin d’encourager les jeunes filles et les femmes dans leur
travail au sein de comité et leur place dans les fonctions dirigeantes des associations sportives.
Les objectifs poursuivis sont les suivants :
- que les jeunes filles, les jeunes garçons, les femmes et les hommes participent de
manière égale aux offres sportives et au sein des associations sportives elles-mêmes ;
- une conception égalitaire sexes dans les offres sportives, au-delà des visions
stéréotypées des sexes ;
- l’augmentation de la part de filles et de femmes dans les positions dirigeantes et
comités directeurs des associations sportives ;
- des structures de direction et d’organisation égalitaires et participatives au sein des
associations sportives ;
- la structuration regardante de l’égalité des sexes des ministères et responsabilités ;
- une distribution équitable entre les sexes des ressources à l’intérieur du quartier
Treptow-Köpenick et des associations sportives.

La pratique sportive en France et en Allemagne n’a jamais été aussi proche de la parité
qu’aujourd’hui, grâce à l’intervention de l’Etat, de l’administration et d’autres acteurs publics
et privés. Mais il reste encore quelques efforts à faire, notamment sur le plan du sport à haut
niveau.

Qu’en est-il de l’accès aux postes à responsabilité au sein des instances sportives ?

90
ALLEMAGNE, Bezirksamt Treptow-Köpenick, Frauen im Sport, 2010

49
III- Promouvoir la féminisation des postes
à responsabilité au sein des instances
sportives

« Les femmes sont de plus en plus nombreuses à pratiquer des activités physiques et sportives,
mais elles sont insuffisamment présentes dans les instances dirigeantes du sport ». C’est le
constat que dresse Jean-François Lamour, alors ministre de la Jeunesse, des Sports et de la
Vie Associative, dans son discours du 23 avril 2014 pour l’ouverture de la 6ème conférence
européenne « femmes et sport ».

La parité dans les instances de décision sportives est, aux cotés des questions sur la
démocratisation des pratiques sportives, un sujet largement discuté depuis les vingt dernières
années.

Pour exemple, parmi les 96 membres actifs du CIO en 2018, on ne compte que 29 femmes ; et
parmi les membres de la commission exécutive, seulement 4 femmes pour 13 hommes. Et
depuis sa création en 1894, aucun des présidents du CIO n’a été une femme.

Assurer un égal accès des femmes et des hommes aux postes à responsabilité, tel est le défi de
la société contemporaine, autant dans le milieu sportif que dans le monde professionnel en
général.

Pourtant, en France comme en Allemagne, les femmes font face à un « plafond de verre »
omniprésent aussi bien dans les instances sportives nationales qu’internationales (A) face
auquel l’Etat et le législateur tentent tant bien que mal de remédier (B).

A) État des lieux : un « plafond de verre » omniprésent dans


les instances sportives nationales et internationales

Les instances dirigeantes, qu’elles soient politiques, économiques ou sportives, internationales


ou nationales, sont aujourd’hui encore très masculinisées. L’accès aux responsabilités
électives est limité pour les femmes : c’est le phénomène que l’on décrit par l’expression
« plafond de verre ».

Le système sportif lui-même est dominé par les hommes et reproduit la dissymétrie de la
division sexuelle du monde du travail. Bien que les femmes soient plus présentes qu’autrefois
dans les fonctions dirigeantes, elles sont encore cantonnées dans des registres fonctionnels
parce qu’on leur attribue généralement des qualités qui ne sont pas celles de l’exercice du

50
pouvoir 91 et qu’il est difficile de faire changer les mentalités d’une société qui a pendant
longtemps intériorisé le principe de domination des hommes, même à compétences égales. On
remarque que ce « plafond de verre » existe à l’échelle internationale (1) et à l’échelle des
Etats (2).

1- A l’échelle internationale : le CIO et les fédérations sportives internationales

Le mouvement olympique international accuse d’un retard en ce qui concerne la part de


femmes dirigeantes et administratrices en son sein, au regard de son histoire. Certes des
progrès ont été constatés au niveau de la participation des femmes à la pratique sportive et aux
Jeux, mais le pourcentage de femmes dirigeantes et administratrices au CIO et dans les
fédérations sportives internationales reste assez faible. En 1997, le CIO avait pris pour
décision d’atteindre la part ridicule de 10 % de femmes aux postes au sein des comités
nationaux et des fédérations sportives d’ici 2000, puis 20% d’ici 2005.92 Mais cela est loin
d’avoir été atteint. Ainsi, aux Jeux de Londres en 2012, le comité d’organisation des Jeux ne
compte qu’une seule femme parmi les 19 membres. En 2013, le CIO comporte 102 membres
actifs dont seulement 18,6 % de femmes.93 En 2018, on compte 96 membres actifs parmi
lesquels 30,2 % de femmes, pourcentage que l’on retrouve presque au sein de la commission
exécutive du CIO (4 femmes sur 17 membres, soit 23,5 %). Il semblerait que quelques
progrès se fassent sentir. Mais c’est l’exception qui confirme la règle. En effet, parmi les
membres de la commission exécutive pour l’organisation des JO de Tokyo en 2020, on ne
compte que 7 femmes sur les 38 membres.94

2- A l’échelle nationale : le CNOSF, le DOSB et les fédérations sportives


nationales

A l’échelle des États, le constat est sensiblement le même, bien que quelques différences
soient visibles entre la France et l’Allemagne.

En France, la direction du ministère de la Jeunesse et des Sport en France est symboliquement


la plus féminisée depuis les trente-cinq dernières années. Pour autant, cela ne concerne que
dix femmes depuis 1958 sur les trente-deux ministres qui se sont succédés à la tête du
ministère en charge des Sports tandis qu’au niveau des instances sportives, plus on monte
dans la hiérarchie des postes de décision, plus la part de femmes diminue.

C’est le triste constat que fait le Sénat dans son rapport de 2011 qui se réfère à une enquête
réalisée en 2003 par Caroline Chimot (ancienne membre de l’équipe de France de
gymnastique rythmique). D’après cette enquête, les femmes ne représentent en 2003 que 3 %
des présidents de comités régionaux, départementaux et de fédérations, 13,7 % des membres

91
Tétart P., Histoire du sport en France - De la libération à nos jours, tome 2, Paris, Vuibert, 2007, 523 pages
92
FRANCE, Sénat, Rapport d’information n° 650 (2010-2011) de Madame Michèle André, fait au nom de la
délégation aux droits des femmes, 21 juin 2011
93
Louveau C., « Dans le sport, des principes aux faits… », Travail, genre et sociétés 2015/2 (n°34), .181-186
94
https://tokyo2020.org/fr/organising-committee/structure/officer/

51
de bureaux, 3,5 % des présidents de fédérations, 3 % des directeurs techniques nationaux
(DTN). Seules quatre fédérations sportives étaient, par ailleurs, présidées par des femmes. En
2008, ce sont 12,3% de femmes occupant des postes à responsabilité au sein des fédérations
sportives. En 2009, on observe une relative progression de la féminisation des instances
dirigeantes des fédérations, puisque 9,4 % (11 femmes sur 117) des présidents de fédérations
sportives sont des femmes alors qu'elles n'en représentaient que 6,3 % aux élections de 2005
(6 femmes sur 117). Le nombre de femmes élues aux comités directeurs des fédérations a
connu également une progression de 30 % entre les deux olympiades. Les femmes
représentent désormais 24,6 % des élus dans les comités directeurs des fédérations sportives
et 21 % des élus aux bureaux.

Le rapport fait ensuite état de la situation en 2010 : sur plus de cent fédérations sportives,
onze femmes seulement sont à la tête d’une fédération sportive (et seulement une à la tête
d’une fédération sportive olympique) et elles ne représentent que 15 % des cadres des
fédérations. Elles sont cependant plus nombreuses aux postes de trésorières (où l'on trouve
sept femmes, soit 23,3 %) et de secrétaires générales (cinq femmes, soit 16,6 %). Le rapport
met en évidence le fait que les femmes sont très peu nombreuses dans les fonctions de
conseillers techniques chargés de la préparation et de l’entrainement des sportifs de haut
niveau (directeurs techniques nationaux, entraîneurs nationaux), ce qui ne facilite pas la prise
en compte des spécificités de l’entraînement féminin. Elles ne constituent que 15,5 % des
conseillers techniques régionaux, 18,3 % des conseillers techniques nationaux, 11,1 % des
entraîneurs nationaux et 5 % des DTN (seulement trois femmes sur les cinquante-huit postes
de directeurs techniques nationaux). Les directeurs techniques nationaux sont chargés
d’élaborer et de mettre en place une politique sportive pour l’ensemble d’une fédération, pour
le sport de haut niveau, mais aussi pour le sport de masse, tandis que les entraîneurs nationaux
sont plus particulièrement chargés de l’encadrement et de la préparation des sportifs de haut
niveau.

La faiblesse de ces chiffres est l’illustration de l’existence d’un phénomène de « plafond de


verre » qui freine l’accès des femmes aux responsabilités les plus recherchées et les plus en
vue. En outre, elle traduit un décalage significatif entre la féminisation du sport de haut
niveau et la féminisation de son encadrement. Le Sénat déplore la faible proportion des
femmes parmi les conseillers techniques, alors qu’elles représentent en 2011 36 % de
l’effectif des sportifs de haut niveau (selon la composition de la liste ministérielle des sportifs
de haut niveau), et déclare que « cette situation n’est pas de nature à garantir aux sportives la
meilleure qualité d’entraînement possible ».

Bien que le nombre de femmes au sein des bureaux des fédérations sportives ait augmenté de
9,8% entre 2009 et 2013, pour atteindre un taux de féminisation de 22,8% en 201395, la Cour
des comptes, dans un rapport « Sport pour tous et sport de haut niveau » publié en janvier
2013, note que « la féminisation des instances dirigeantes est encore trop lente ». En 2013, on
compte 23% de femmes dans les bureaux directeurs des fédérations sportives mais seulement

95
FRANCE, Comité des 11 tricolores, Rapport sur la féminisation du sport, mars 2016

52
12% de femmes parmi les président-e-s de ces fédérations (élu-e-s) et 11% parmi les cadres
techniques du plus haut niveau (nommé-e-s).96 A titre indicatif, le comité directeur joue un
rôle-clé au sein de la fédération sportive puisqu’il contribue à élire le président de la
fédération en question, d’où l’importance d’atteindre la parité au sein des comités directeurs.
De plus, l’augmentation du nombre de femmes dans les bureaux des fédérations sportives
n’est significatif qu’au sein des familles unisport non olympique et multisport ; pour les
fédérations unisport olympiques il n’y a pas eu d’évolution (72 en 2009 et 71 en 2013).97

En 2011, le CNOSF compte 17,8% de femmes parmi les élus du conseil d’administration
(onze femmes, dont une est élue au bureau exécutif), alors qu'elles ne représentaient que
8,8 % en 2005 (quatre élues). Mais pour son mandat 2013-2017, le conseil d’administration
du CNOSF affiche 14 % de femmes.98

Depuis ces dernières années en France, les avancées restent encore très relatives. Les
exemples de femmes occupant des postes à responsabilité dans le milieu sportif se font rares.
En mars 2013, Isabelle Lamour est élue présidente de la Fédération française d’escrime. C’est
alors la seule femme en France à diriger une fédération olympique parmi les 31 fédérations
françaises de sports qui participent aux JO. En mai 2013, elle est élue membre du conseil
d'administration du Comité national olympique et sportif français. En mai 2017, elle est
candidate pour devenir la présidente du CNOSF mais c'est Denis Masseglia qui est réélu pour
un troisième mandat. Béatrice Barbusse, première femme en France présidente d’un club
professionnel masculin (l’US Ivry de handball de 2007 à 2012), est depuis septembre 2013
membre du conseil d’administration de la Fédération française de handball et préside depuis
mars 2015 le CNDS (centre national pour le développement du sport). En décembre 2016,
Brigitte Linder a été réélue pour un troisième mandat à la tête de la Fédération nationale du
sport en milieu rural. En 2018, on compte seulement une dizaine de présidentes sur 115
fédérations sportives.99 Elles sont donc en quelque sorte « les exceptions qui confirment la
règle ».

Pour ce qui est de l’Allemagne, les choses sont un peu différentes. Les femmes sont
reconnues très tôt par leurs pairs et accèdent à de hauts postes à responsabilité dès les années
soixante. A titre d’exemples, Liesel Westermann, championne de disque, est choisie comme
déléguée pour le sport auprès du Parti libéral allemand et est élue membre d’un Parlement de
région; Ingrid Micker-Becker, sauteuse en longueur et championne de pentathlon, devient
membre d’un Parlement pour le Parti conservateur et jeune ministre dans un gouvernement
régional. Heide Rosenthal, pentathlonienne et sauteuse en longueur, devient vice-présidente
de la fédération d’athlétisme.100

96
Louveau C., « Dans le sport, des principes aux faits… », Travail, genre et sociétés 2015/2 (n°34), .181-186
97
FRANCE, Comité des 11 tricolores, Rapport sur la féminisation du sport, mars 2016
98
FRANCE, Sénat, Rapport d’information n° 650 (2010-2011) de Madame Michèle André, fait au nom de la
délégation aux droits des femmes, 21 juin 2011
99
Ferré, J-L., « Comment mettre hors jeu le sexisme dans le sport », La Croix, 22 janvier 2018
100
Riordan J., Krüger A., Terret T., Histoire du sport en Europe, Paris, L’Harmattan, 2004, 270 pages

53
Le DOSB multiplie les efforts pour promouvoir les femmes au sein de ses instances. Il met en
place dès 1989 un plan de soutien aux femmes pour son comité directeur et ses autres
comités. En 1994, le DOSB modifie ses statuts afin de renforcer la promotion des femmes et
en 1996, le Bundestag (Parlement fédéral d’Allemagne) demande au DOSB que la part des
femmes au sein de ses comités directeurs soit proportionnelle à la part des femmes membres
du DOSB. Le DOSB transpose cette demande par une décision prise le 7 mars 2003 mettant
en œuvre la stratégie du Gender Mainstreaming (l’intégration du genre).

Pour autant, « l’égalité des sexes » est loin d’être atteinte en Allemagne. Le Ministère fédéral
de la Famille, des Personnes âgées, de la Femme et de la Jeunesse l’a relevé dans deux
rapports faits en 2004. Même dans des fédérations atteignant presque 40% de membres
féminins, à peine 25% des postes à responsabilité au sein de ces fédérations sont occupés par
des femmes ; et, parmi les présidents, tout juste 9%.101 En 2004, les femmes représentent 18%
des membres du comité directeur du DOSB, 22% au sein des comités directeur des
fédérations sportives régionales affiliées au DOSB et 10% des comités directeurs des
fédérations centrales affiliées au DOSB. Sur les 55 fédérations centrales affiliées au DOSB,
seulement 7 comptent une majorité de membres de sexe féminin.102 Parmi tous les comités
directeurs des fédérations centrales, 45% de ces comités n’incluent aucune femme. Seules une
fédération régionale et 4 fédérations centrales sont dirigées par une présidente.

Nouvelle exception qui confirme la règle, la DFB (die Deutsche Fussballbund, fédération
fédérale allemande de football), fédération pourtant connue pour être fortement masculinisée,
a une femme pour vice-présidente de la fédération de football féminin, Hannelore
Ratzeburg.103 Symboliquement en 2018, également dans le monde du football, le ministère
fédéral allemand de la coopération économique et du développement ainsi que la DFB élisent
un homme, Gerald Asamoah, et une femme, Nia Künzer, comme ambassadeurs du football
pour le développement.104

101
ALLEMAGNE, Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend, Frauen in Deutschland - von
der Frauen- zur Gleichstellungspolitik (« Les femmes en Allemagne - d’une politique des femmes à une
politique d’égalité entre les hommes et les femmes »), 2004
102
ALLEMAGNE, Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend, Frauen in den Gremien des
Sports, 2004
103
Sinram J.,« Die Chefin der Männer », Deutschlandfunk, 30 juin 2018
104
« Asamoah und Künzer neue Botschafter « Fussball für Entwicklung » », DFB, 27 mars 2018

54
B) Le cadre légal et réglementaire

Face à la féminisation grandissante de la pratique sportive et aux mesures mises en place pour
permettre aux femmes d’accéder aux postes à responsabilité dans tous les domaines, les
instances internationales sportives (1) tout comme les Etats à leur échelle (2 et 3) prennent
conscience de la nécessité de mettre en place un cadre légal et réglementaire pour corriger ces
chiffres préoccupants.

1- Les mesures prises par les organes internationaux

A l’instar de la féminisation de la pratique sportive, le tournant est pris à la fin des années
1990 lors de la Conférence de Brighton en mai 1994. L’un des objectifs de la Déclaration
signée à la fin de la conférence est « d’assurer une meilleure représentation des femmes à
tous les niveaux et dans tous les rôles du sport » et l’une des premières résolutions de la
Déclaration vise à « l’augmentation du nombre des femmes à des postes d’entraîneurs, de
conseillers et de responsabilité dans le sport ».105 Pour parvenir à cet objectif, le CIO propose
dès 1996 des engagements chiffrés : « réserver d’ici l’an 2000 au moins 10 % des postes pour
les femmes au sein des structures ayant pouvoir de décision ».

Lors de la deuxième conférence mondiale sur la Femme et le Sport qui s’est tenue à Paris en
2000, plusieurs résolutions sont prises, dont la suivante s’adressant au CIO, aux
gouvernements et aux organisations internationales : « Atteindre l’objectif de 20 % de
représentation féminine aux postes de responsabilité d’ici 2005. » Il est également demandé
au CIO, aux fédérations internationales de sports et aux CNO « de se fixer des échéances
propres en ce qui concerne la représentation future au sein de leurs instances dirigeantes
jusqu’en 2020 ». Toutes ces résolutions, même chiffrées, ont une fonction incitative car elles
ne sont pas accompagnées de menaces de sanctions.

La conférence mondiale sur la Femme et le Sport qui s’est tenue en février 2012 à Los
Angeles aboutit sur la Déclaration de Los Angeles dont l’un des objectifs vise à assurer la
« promotion de la participation des femmes à la pratique, à la gestion et à l’administration du
sport » afin de « servir l’objectif plus large qui consiste à soutenir l’action internationale en
faveur de l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des jeunes filles ».

Enfin, la Déclaration Brighton + Helsinki 2014 sur les femmes et le sport de juin 2014 est
manifeste de l’importance prise par les femmes dans le monde du sport, aussi bien sur le
terrain qu’au sein des instances. La Déclaration pose des principes permettant une meilleure
participation des femmes et valorise leur pleine participation dans tous les aspects du sport.

105
Louveau C., « Dans le sport, des principes aux faits… », Travail, genre et sociétés 2015/2 (n°34), .181-186

55
2- Le cadre légal et réglementaire en France

a- Les lois de promotion : l’ouverture vers une proportionnalité

Outre favoriser l’accès de toutes les femmes à tous les sports, le ministère en charge des
sports mène une politique voulant faire progresser la féminisation des instances dirigeantes
dès la fin des années 1990.

La loi n°84-610 du 16 juillet 1984 relative à l’organisation et à la promotion des activités


physiques et sportives, voulue par Edwige Avice, énonce que pour obtenir l’agrément de
l’Etat, l’association sportive doit notamment « assurer l’égal accès des femmes et des hommes
aux instances dirigeantes ».106

A la suite de la nomination de Marie-George Buffet à la tête du ministère de la Jeunesse et des


Sports en 1997, une réforme législative est engagée pour poursuivre l’objectif de promotion et
de démocratisation concernant la parité entre les sexes. Exemple dans le domaine de
l’éducation, la circulaire Jospin du 6 mars 2000107 demande à chaque ministère de mettre en
place un plan pluriannuel d’amélioration de l’accès des femmes aux postes d’encadrement
supérieur. Dans le milieu sportif, cette réforme aboutit à la loi du 6 juillet 2000108. L’article 5
de cette loi précise que l'agrément des fédérations sportives est dorénavant subordonné à la
présence dans leurs statuts de dispositions garantissant notamment l'égal accès des femmes et
des hommes à ses instances dirigeantes. Cette disposition a été codifiée dans l’article L.121-4
du Code des sports. L’article 8 de cette même loi renforce les exigences auxquelles sont
soumises les associations sportives : « L’agrément de l’État aux fédérations est fondé sur
l'existence de dispositions statutaires garantissant le fonctionnement démocratique de
l'association, la transparence de sa gestion et l’égal accès des femmes et des hommes à ses
instances dirigeantes ». L’accès des femmes à tous les niveaux de responsabilités devient
ainsi l’un des critères sur lesquels repose la décision d’agrément.109

Le décret d’application n°2002-488 du 9 avril 2002 relatif à l’agrément des groupements


sportifs fait entrer pour la première fois l’idée d’une proportionnalité de fait entre le
pourcentage de femmes parmi les licenciés et leur représentation au comité directeur. Il
dispose « les statuts doivent prévoir que la composition du conseil d’administration doit
refléter la composition de l’assemblée générale ».

106
Louveau C., « Dans le sport, des principes aux faits… », Travail, genre et sociétés 2015/2 (n°34), .181-186
107
Circulaire du 6 mars 2000 relative à la préparation des plans pluriannuels d'amélioration de l'accès des
femmes aux emplois et postes d'encadrement supérieur de la fonction publique de l’Etat, JORF n°56 du 7 mars
2000 page 3538, texte n° 4
108
Loi n°2000-627 du 6 juillet 2000 modifiant la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l’organisation et à la
promotion des activités physiques et sportives
109
Tétart P., Histoire du sport en France - De la libération à nos jours, tome 2, Paris, Vuibert, 2007, 523 pages

56
Depuis 2004, un mouvement a été amorcé, notamment sous l'impulsion des préconisations du
rapport Deydier 110 et de la loi n° 2000-627 du 6 juillet 2000 qui a permis l'accession de
femmes aux plus hautes instances de la gouvernance du sport. Le décret n°2004-22 du 7
janvier 2004 pris pour l'application de l'article 16 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 et
relatif à l'agrément des fédérations sportives, aux dispositions obligatoires des statuts des
fédérations sportives agréées et à leur règlement disciplinaire type, renforce le principe de
proportionnalité entre le pourcentage de femmes parmi les licenciés et leur représentation au
comité directeur. Il donne naissance à l'article R.121-3 du Code du sport qui prévoit que la
représentation des femmes est garantie au sein de la ou des instances dirigeantes en leur
attribuant un nombre de sièges en proportion du nombre de licenciées éligibles.111

Ainsi, le Code du Sport oblige lui aussi les fédérations sportives à assurer dans leurs sphères
dirigeantes une représentation proportionnelle au nombre de licenciées majeures et éligibles.

A la suite de la révision constitutionnelle de 2008 instaurant une parité entre les hommes et
les femmes dans le monde professionnel, d’autres lois découlent et ont un impact sur le milieu
du sport. On peut citer par exemple la loi n°2011-103 du 27 janvier 2011 relative à la
représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et
de surveillance et à l’égalité professionnelle (loi dite « loi Copé-Zimmermann »). En 2009, les
élections des instances dirigeantes des fédérations agréées se réfèrent pour la première fois à
ces dispositions, permettant une progression de la féminisation. Mais l’obligation de
proportionnalité est loin d’être respectée dans les instances dirigeantes : en 2013, on compte
26,5 % de femmes dans les comités directeurs des fédérations et 22,8 % parmi les élus aux
bureaux des fédérations ; seules trente-huit fédérations assurent une représentativité des
femmes à ces deux niveaux d'instances dirigeantes, soit 36 % des fédérations contre 23 % en
2009. Pour l’olympiade 2013-2016, les femmes représentent 12,5 % des présidents (soit
quatorze femmes pour dix en 2009), selon les chiffres clés de la féminisation du sport en
France, 2012-2013, ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports. 112 Par ailleurs, si,
depuis 2004, la prise de conscience collective et les mesures incitatives ont quelque peu
amélioré la place des femmes dans le mouvement sportif, il n'en reste pas moins que « dans
les comités directeurs des associations, elles occupent souvent des postes en retrait -
secrétaire, trésorière - où elles ne risquent pas de faire d'ombre à quiconque ! », comme le
reconnaît la présidente de la fédération française de gymnastique volontaire de l’époque,
Françoise Sauvageot.113

110
Rapport remis en avril 2004 par Brigitte Deydier, présidente du groupe de travail « Femmes et Sports »
chargé par le Ministère des sports et le Ministère de la parité et de l'égalité professionnelle de mettre en place un
programme d'actions spécifiques destiné à améliorer la place des femmes et à renforcer leur rôle dans l'activité
sportive
111
FRANCE, Sénat, Rapport d’information n° 650 (2010-2011) de Madame Michèle André, fait au nom de la
délégation aux droits des femmes, 21 juin 2011
112
Louveau C., « Dans le sport, des principes aux faits… », Travail, genre et sociétés 2015/2 (n°34), .181-186
113
FRANCE, Sénat, Rapport d’information n° 650 (2010-2011) de Madame Michèle André, fait au nom de la
délégation aux droits des femmes, 21 juin 2011

57
De plus, une application stricte de la loi du 6 juillet 2000 et du décret d’application du 7
janvier 2004 ne présente que peu d’efficacité dans le cas des fédérations très masculinisées ou
très féminisées.

En effet, le principe de proportionnalité est efficace s’il existe une réelle mixité dans
l’ensemble des fédérations, ce qui n’est pas le cas. En 2011, le rapport présenté au Sénat fait
état des données suivantes : les femmes licenciées ne représentent que 2,7 % de la fédération
de football, 3,3 % de la fédération de l'aéromodélisme, 4,1 % de la fédération du rugby et
5,4 % de celle du motocyclisme.

Cette absence de mixité véritable dans les instances dirigeantes des fédérations soulève un
problème dont seule une présidente de fédération féminisée semble avoir pris conscience,
comme le relève, à juste titre, la délégation aux droits des femmes dans son rapport au Sénat
de 2011. Il s’agit de la présidente de la fédération française de gymnastique volontaire,
Françoise Sauvageot. Cette dernière est la seule à s’être opposée au principe de
proportionnalité entre le pourcentage de femmes parmi les licenciés et leur représentation au
comité directeur car elle considère que cette règle maintiendrait le statu quo dans sa
fédération composée à 94% de femmes parmi ses licenciés.114 L’application de ce principe ne
permettrait de nommer que très peu d’hommes au comité directeur (seulement un). Et ce
problème est valable aussi à l’inverse, avec la fédération de rugby par exemple. Le Conseil
d’Etat est amené à statuer sur cette question suite à la demande d’abrogation de la règle de
proportionnalité formulée par Françoise Sauvageot. Le Conseil d’Etat considère, dans une
décision 2e / 7e SSR du 10 octobre 2013, que le principe d’égalité, principe constitutionnel,
« interdit de faire prévaloir la considération du sexe sur celle des capacités et de l’utilité
commune ». Françoise Sauvageot a pu négocier avec le ministère une adaptation de la règle
afin d'obtenir que 20 % du genre le moins représenté siège au conseil d'administration, soit
cinq hommes sur vingt- trois.

La proportionnalité constitue jusqu’en 2014 le droit existant. Mais la nécessité de fixer des
quotas apparait évidente dès 2000. Le texte « rapport et propositions pour une réforme des
statuts des fédérations sportives » du député François Asensi, remis à Lionel Jospin et Marie-
George Buffet, avril 2000 indique ainsi :
« Les quotas de candidatures féminines semblent le moyen le plus sûr de tendre vers un
rééquilibrage. Leur efficacité est conditionnée par la pratique des investitures mise en
œuvre par les fédérations [...] Votre rapporteur propose donc l'instauration de minima en
faveur des femmes sur des listes constituées et d'un scrutin à la proportionnelle. Ainsi, il
semble nécessaire d’avoir un minimum de cinq femmes dans un Comité directeur de trente
personnes pour un sport comptant moins de 10 % de femmes licenciées. Dans un tel cas,
parmi les douze premiers candidats d’une liste, il faudra retrouver un minimum de trois
femmes. La parité devra être effective à partir de 40% de licenciées, avec trois candidates

114
Louveau C., « Dans le sport, des principes aux faits… », Travail, genre et sociétés 2015/2 (n°34), .181-186

58
parmi les six premières de chaque liste et ainsi de suite par tranche de six (six femmes dans
les douze premières, neuf dans les dix-huit) [...] ».115

Dans son rapport au Sénat en 2011116, la délégation aux droits des femmes exprime également
sa conviction de « la nécessité d’imposer des règles fixes qui garantissent un certain nombre
de postes aux femmes au sein des instances de direction du Mouvement olympique ». Pour
cela, la délégation « invite le CIO à veiller à ce que tous les comités nationaux olympiques et
toutes les fédérations internationales olympiques réservent au moins 20 % des sièges à des
femmes dans leurs structures décisionnelles ».

La délégation « recommande d'assurer une représentation plus équilibrée des hommes et des
femmes au sein des instances dirigeantes des fédérations et des associations sportives en
précisant que l'obligation pour la composition du conseil d'administration de refléter la
répartition des licenciés entre les deux sexes ne doit pas conduire à attribuer moins de 20 %
des sièges au sexe le moins représenté ».

Najat Vallaud-Belkacem, alors ministre des droits des femmes, a précisé en mai 2013, à
l’occasion des premiers états généraux du sport féminin en équipe organisés par la ville de
Bourges et son équipe féminine de basketball, les mesures envisagées par le gouvernement
pour améliorer cette situation117 : « Nous voulons que tous les sports se donnent les moyens
d'attirer autant de filles que de garçons » explique la ministre. « Et pour ce faire, une
représentation équilibrée dans les instances de gouvernance est un levier important. A priori,
la 'deadline' finale qui nous semble être la bonne est celles Jeux olympiques 2020. Mais nous
espérons quand même que certaines fédérations n'attendront pas pour s'y mettre. » La
ministre envisage des « sanctions » car l’objectif de proportionnalité est loin d’être respecté
par toutes les fédérations (seules les fédérations de gymnastique et de natation donnent
l’exemple en matière de parité). Certes les lois et décrets conditionnent les subventions, voire
les agréments118, de l’État à cette « garantie » réglementée de « l’égal accès des femmes et des
hommes aux instances dirigeantes », mais aucune sanction n’est infligée à une fédération
sportive, encore moins aux structures sportives nationales et internationales.

b- De la proportionnalité aux quotas

La loi n° 2014-873 du 4 août 2014 « pour l’égalité réelle des femmes et des hommes »,
déposée par Najat Vallaud-Belkacem, crée une véritable rupture avec le principe de
proportionnalité en imposant des quotas pour la composition des comité directeurs des
fédérations sportives, avec un seuil plancher. Elle impose également la quasi-parité du

115
Louveau C., « Dans le sport, des principes aux faits… », Travail, genre et sociétés 2015/2 (n°34), .181-186
116
op. cit
117
Pécout A., « Comment féminiser le sport français », Le Monde, 17 mai 2013
118
Les fédérations reçoivent de l’Etat un agrément qui leur permet de participer à l’exécution des missions de
service public de promotion et de développement du sport. Cet agrément, qui leur confère notamment la
possibilité de percevoir des aides publiques, les soumet également à des obligations statutaires et réglementaires.
Elles sont ainsi tenues d’adopter dans leurs statuts des dispositions obligatoires en matière de fonctionnement
démocratique, de transparence de gestion et de parité hommes-femmes au sein des instances dirigeantes.

59
nombre de dirigeants dans toute fédération où les femmes représentent un quart des licenciés ;
en dessous de ce taux, les instances dirigeantes devront en accueillir 25%. Cette loi, qui vaut
pour tous les secteurs de la société et non pour le sport uniquement, connait un accueil
favorable de la part des députés avec 359 voix pour et seulement 24 contre (174 abstentions).

Cette loi vient modifier l’article L. 131-8 du Code du Sport qui dispose dorénavant :

« 1. Lorsque la proportion de licenciés de chacun des deux sexes est supérieure ou


égale à 25 %, les statuts prévoient [...] une proportion minimale de 40 % des sièges
pour les personnes de chaque sexe. »
« 2. Lorsque la proportion de licenciés d'un des deux sexes est inférieure à 25 %, les
statuts prévoient [...] une proportion minimale de sièges pour les personnes de chaque
sexe pouvant prendre en compte la répartition par sexe des licenciés, sans pouvoir être
inférieure à 25 %. »

Le but de cette loi est d’arriver à enclencher un processus dont la date limite est fixée à
l’Olympiade 2020. Les moyens mis en œuvre pour atteindre cet objectif se manifestent par les
plans de féminisation, demandés dès mars 2013 par la ministre des sports à toutes les
fédérations sportives dans le cadre des conventions d’objectifs pluriannuelles négociées pour
la période 2014-2017. Ils sont ventilés autour de cinq axes, dont les deux principaux visent à
la parité dans les instances dirigeantes des clubs et des fédérations d’une part, à un
rééquilibrage de la représentation féminine sportive dans les médias d’autre part. La loi met
enfin un place un mécanisme de sanction basé sur l’éventualité d’un retrait d’agrément en cas
d’absence de plan de féminisation, entraînant une suppression des subventions ce qui retirerait
de facto le droit à la fédération sportive d’organiser des compétitions nationales et d’engager
des équipes de France. Les fédérations sont ainsi obligées d’énoncer clairement les mesures
qu’elles comptent mettre en place afin de promouvoir les femmes à la tête des instances
dirigeantes et augmenter le nombre de cadres techniques féminins.

La loi de 2014 a été un catalyseur. Les plans de féminisation ont généré de « bonnes
pratiques ». L’analyse de ces plans établis pour la période 2014-2017 par les fédérations
sportive, détaillée dans la feuille de route du Ministère la Ville, de la Jeunesse et des sports du
4 février 2015, permet de montrer que 80% d’entre elles ont investi l’axe de la féminisation
des instances fédérales et déconcentrées. Sur cette période, 29% des instances
départementales et 24,7% des instances régionales sont composées de femmes. Il existe donc
une volonté du mouvement sportif pour féminiser ses instances dirigeantes. La feuille de route
retrace les mesures listées dans les plans de féminisation et réalisées en 2014. La première, la
mesure 10 « promouvoir la parité dans les fédérations / améliorer la place des femmes dans
l’encadrement sportif (DTN et DTN adjointes) » a été réalisée au moyen de deux actions qui
sont la mise en œuvre des dispositions du projet de loi sur l’égalité entre les femmes et les
hommes sur la parité et l’amélioration de la place des femmes dans l’encadrement technique
des fédérations sportives. Un bilan des candidatures aux postes de DTN a été réalisé à l’issue
de la période 2013-2014. Sur les 24 appels à candidatures lancés, 14 candidatures féminines

60
ont été recensées, 7 femmes ont été nommées (soit 29,2% des postes pourvus).119 Ces plans de
féminisation ont ainsi eu un effet notable sur le taux de recrutements féminins parmi les DTN
qui est passé de 5 à 15% entre 2009 et 2017.

Le Ministère fixe comme l’une de ses priorités pour l’année 2015 de prendre des mesures
relatives aux parcours professionnels et, pour se faire, de notamment contribuer à la création
de l’obligation de représentation équilibrée dans les fédérations sportives issue de la loi du 4
août 2014.

Selon l’étude menée par l’association Egal Sport sur la féminisation des instances dirigeantes,
étude reprise dans le rapport de l’association « Rénovons le sport français » sur la
Contribution à la réforme en cours de la gouvernance du sport français et à la préparation du
projet de loi « Sport et société » du 29 juin 2018, les effectifs dirigeants féminins pour les
fédérations olympiques auraient progressé de 12,5% et de 12% en ce qui concerne les
effectifs dirigeants féminins pour les fédérations unisports non olympiques entre 2014 et
2018. En outre, seules quatre fédérations avaient élaboré de leur propre initiative un plan de
féminisation en 2006 ; en 2016 ce sont 87 fédérations qui sont concernées.

Cette loi sur la parité n’en demeure pas moins très critiquée. Certains y voient une «
discrimination positive » cachée. C’est le cas de la philosophe et féministe Élisabeth
Badinter, qui dénonce « le mépris que la loi paritaire affiche pour la notion historique de
mérite républicain ». Elle reproche que des dirigeants, en l’occurence des dirigeantes, soient
choisies en vertu de leur sexe et non pour leur compétence. D’autres voient dans cette forme
de discrimination positive en faveur des femmes le maintien de celles-ci dans leur statut
d’infériorité et de victimes.120

c- Des résultats mitigés : trois pas en avant, deux pas en arrière

La loi du 4 août 2014 a véritablement accéléré le processus de féminisation des instances


dirigeantes des institutions sportives. A cette dynamique se sont ajoutés plusieurs éléments
récents : le plan Héritage Paris 2024, soutenu par le Centre national pour le développement du
sport (CNDS), intègre une mesure encourageant les autorités concernées à « atteindre
progressivement la parité au sein des instances dirigeantes des fédérations sportives et de
leurs organes territoriaux » et à « lancer un plan de féminisation des organes régionaux et
départementaux du CNOSF ». En outre, la loi olympique relative à l’organisation des Jeux
Olympiques et Paralympiques de 2024, dispose que les statuts du CNOSF devront comporter
« des dispositions visant à assurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes et
à favoriser la parité au sein de l’ensemble de ses organes ». L’Etat ainsi que les associations
encouragent à ne pas relâcher les efforts car la situation reste insatisfaisante et que la parité est
loin d’être atteinte. Le Comité interministériel aux Droits des femmes et à l’égalité entre les
femmes et les hommes propose une mesure permettant de promouvoir l’accès aux pratiques et

119
FRANCE, Comité des 11 tricolores, Rapport sur la féminisation du sport, mars 2016
120
Serve P., « Parité et féminisation du sport : Au bonheur des dames ? », Foot d’Elles, 20 janvier 2014

61
responsabilités culturelles et sportives, présentée dans son dossier de presse du 8 mars
2018.121 Il s’agit de « porter à 40 % la proportion de femmes à la tête des fédérations et des
associations sportives. ». Le collectif « Rénovons le sport français », dans son rapport sur la
Contribution à la réforme en cours de la gouvernance du sport français et à la préparation du
projet de loi « Sport et société » du 29 juin 2018, invite à ce que le non-respect des
dispositions législatives introduites par la loi du 4 août 2014 fasse l’objet de sanctions
effectives pour les fédérations concernées. Le collectif rappelle également que, même si les
femmes sont désormais plus présentes qu’auparavant dans les instances dirigeantes, elles le
sont rarement dans les postes aux plus hautes responsabilités mais davantage dans un rôle
« d’ajointes » : ainsi on compte 17% de trésorières parmi les fédérations olympiques mais
45,5% de trésorières adjointes, ou encore 26% de secrétaires générales mais 66% de
secrétaires générales adjointes.

Par ailleurs, depuis 2018, les plans de féminisation qui figuraient auparavant dans les
conventions d’objectifs adressées aux fédérations sportives par le ministère en charge des
sports ne sont plus obligatoires. Or l’association constate dans son rapport que la situation
reste décevante : « parmi les DTN, sur les 386 nominations opérées jusqu’à présent, seules 25
l’ont été au bénéfice d’une femme ; le taux de féminisation des CTS, qui avait gagné 5 points
entre 2003 et 2006, stagne depuis 12 ans autour de 16-18% et l’évolution est très lente en 20
ans pour les entraîneures nationales (8% en 1998 ; 12,4% en 2016) ».

Le collectif propose des recommandations à ce sujet, dont la recommandation 23 visant à


« assortir les dispositions législatives relatives aux quotas de femmes pour 2021 dans les
instances dirigeantes des fédérations d’un mécanisme de sanction financière en cas de non-
conformité (qui ne doit pas pénaliser les conventions d’objectifs) et prévoir qu’au sein de ces
instances, il y ait aussi un objectif minimal de femmes aux plus hautes responsabilités (cercle
des vice-présidents, secrétaires généraux et trésoriers notamment), le tout préparé par une
démarche permettant de faire éclore des candidatures de femmes ; remettre l’accent dans les
conventions d’objectifs sur les plans de féminisation des fédérations et porter une attention
encore accrue à la nomination de femmes aux postes de DTN. ». On constate aussi moins
d’investissement en faveur des femmes : en 2016, ce sont 19,83 millions d’euros qui avaient
été alloués, dans la part territoriale des dépenses du CNDS, à des actions en faveur des
femmes. Ils ne le sont plus à partir de 2018.

3- Le cadre légal et réglementaire en Allemagne

Jusque dans les années 2000, il n’existe aucun cadre législatif au niveau fédéral pour la
promotion des femmes dans le sport, car ces lois sont du ressort de chaque Land.

Le Parlement allemand (der Deutsche Bundestag) s’est intéressé en premier à la


problématique des discriminations envers les femmes lors des Jeux Olympiques de 1996 et de

121
FRANCE, Comité interministériel aux droits des femmes et à l’égalité entre les femmes et les hommes,
Dossier de presse, 8 mars 2018

62
2000 et a incité le CIO, dès le début des années 2000, à mettre en place un mécanisme de
quota pour atteindre 20% de femmes au sein de son comité directeur d’ici 2005. 122 Le
président du CIO a invité les CNO à réaliser cet objectif à plusieurs reprises.

Le Ministère fédéral allemand de la Famille, des Personnes Âgées, des Femmes et de la


Jeunesse constate dans différents rapports rendus en 2004 que les femmes sont sous-
représentées dans les instances dirigeantes des clubs de sport, quand bien même elles
représentent la majorité des adhérents à ce club. 123 Un projet de recherche mène à la
conclusion suivante : afin de promouvoir les femmes au sein des instances dirigeantes des
fédérations sportives, rien ne sert de mettre en place des services administratifs, des quotas ou
encore des programmes d’actions spécifiques aux femmes. Il faut créer des structures
associatives modernes avec services autonomes. Le Ministère lance à cette fin le projet
« Femmes au sommet » (« Frauen an der Spitze »), en coopération avec le DOSB, dont le but
est de faire augmenter la part de femmes au sein des comités directeurs.

Pourtant, selon les dispositions de l’article 3, alinéa 2 de la Loi fondamentale allemande, le


cadre législatif doit être amélioré afin de garantir l’égalité entre les hommes et les femmes, ce
dont le gouvernement fédéral allemand se porte garant en ayant adopté diverses lois qui
s’appliquent aussi bien aux services publics qu’au domaine privé. Citons, entre autres, la loi
sur l’égalité (das Bundesgleichstellungsgesetz), la loi sur la protection des salariés (das
Beschäftigtenschutzgesetz), la loi sur les relations entre employeurs et employés (das
Betriebsverfassungsgesetz) et le droit de la promotion de l’emploi (das
Arbeitsförderungsrecht). Mais celle qui ouvre la voie au progrès, notamment dans le milieu
sportif, est la loi sur l’égalité (das Gesetz für die Gleichstellung von Frauen und Männern in
der Bundesverwaltung und in den Unternehmen und Gerichten des Bundes), entrée en vigueur
le 5 décembre 2001, remplaçant la loi pour la promotion des femmes de 1994. Elle permet des
améliorations conséquentes en termes d’égalité entre les hommes et les femmes. Dès 2002, la
part de femmes aux postes de responsables de service est de 12%. La loi est révisée et donne
lieu à une nouvelle version entrée en vigueur le 24 avril 2015. Elle prévoit notamment :
- des quotas au cas par cas ;
- des droits plus étendus pour les délégués à l’égalité, notamment un droit de recours ;
- l’interdiction stricte des discriminations indirectes.

Des rapports sur l’égalité sont régulièrement communiqués au Parlement allemand afin de de
faire le point sur les progrès.

L’année 2015 offre un véritable changement dans le cadre législatif allemand pour la
représentation des femmes dans les instances dirigeantes car, en plus de la révision de la loi

122
ALLEMAGNE, Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend, Frauen in den Gremien des
Sports, 2004
123
ALLEMAGNE, Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend, Frauen in Deutschland - von
der Frauen- zur Gleichstellungspolitik (« Les femmes en Allemagne - d’une politique des femmes à une
politique d’égalité entre les hommes et les femmes »), 2004

63
sur l’égalité, une autre loi est modifiée pour mieux refléter les exigences en termes de quota
pour chacun des deux sexes et les objectifs fixés principalement dans le secteur privé.

Il s’agit de la loi sur la coopération du gouvernement fédéral pour une représentation adéquate
au sein des instances, entrée en vigueur le 24 juin 1994 puis modifiée le 24 avril 2015. Cette
loi a pour objectif l’augmentation de la part des femmes dans les postes à responsabilité au
sein de la fonction publique, sous le contrôle du gouvernement fédéral. Ainsi, depuis 2016, un
quota de 30% de chacun des deux sexes doit être respecté par les conseils d’administration au
sein desquels le gouvernement fédéral occupe au moins trois des sièges. Cette loi établit le
principe de la « double- nomination » (article 4 alinéa 1 de la loi) : si la répartition des sièges
ne permet pas une représentation d’au moins 30% de chaque sexe, les nouveaux sièges au sein
de ces conseils doivent être occupés de façon paritaire par un homme et une femme.

Enfin, une dernière loi intéresse notre étude sur la promotion des femmes au sein des
instances dirigeantes. Il s’agit de la loi pour la participation égalitaire des femmes et des
hommes dans les instances dirigeantes du secteur privé et de la fonction publique, dont le
projet est examiné une première fois en février 2015, mais n’a été adopté qu’à la fin de
l’année. Cette loi vise à augmenter le nombre de femmes au sein des comités directeurs
économiques et administratifs. Elle impose également des quotas, ne visant pas les femmes
exclusivement mais les deux sexes. La loi impose à partir de 2016, pour les conseils
d’administration des entreprises cotées en bourse et soumises à cette obligation de
participation paritaire, un quota minimum de chacun des deux sexes de 30%. Ces entreprises
sont désormais obligées de fixer des objectifs pour accroitre la part de femmes au sein des
conseils d’administration, comités directeurs, et de tous les autres niveaux élevés de
management.

Certes l’Allemagne n’adopte que tardivement des lois au vaste domaine d’application
permettant aux femmes d’être mieux représentées au sein des instances dirigeantes, mais ce
nouveau cadre législatif est rapidement respecté. Ainsi, le DOSB respecte le quota minimum
de 30% des deux sexes au sein de chacun de ses comités, comme l’explique la Vice-
présidente du DOSB, Petra Tzschoppe en décembre 2017.

Ce sujet reste très discuté en Allemagne, car de nombreux progrès sont attendus. La sortie du
film « Battle of sexes » fin 2017 permet de relancer les débats autour de cette problématique
de l’égalité des sexes dans le sport et dans la société en général. La Présidente du Conseil
national des femmes allemandes, Mona Küppers, dit être stupéfaite du fait que les choses ont
très peu changé entre 1973 et aujourd’hui ; les femmes doivent toujours se battre pour obtenir
le même salaire à travail égal et compétences égales.

***

Etonnament en apparence, la féminisation du sport a suivi la féminisation du monde du travail


depuis les années 1960. Le sport, considéré comme un loisir à moins d’être sportif

64
professionnel, sous-entend également d’avoir le temps de le pratiquer. Or, les femmes sont
devenues pleinement actrices de la vie politique et économique. Elles occupent désormais les
mêmes postes que les hommes et ne sont plus cantonnées à un rôle purement domestique ou
éducatif. Elles devraient donc avoir moins de temps à consacrer au sport. Mais c’est pourtant
l’effet inverse que l’on observe : une corrélation positive entre activité économique et
pratique du sport, signe d’une interraction des différentes activités au sein de la sphère
sociale.

Si l’on s’attache à une vue d’ensemble, les femmes ont considérablement gagné du terrain
pour ce qui est de la pratique du sport et de leur représentation au sein des instances
dirigeantes. On observe aussi bien un bouleversement quantitatif, avec une augmentation
considérable de la participation des femmes à la pratique sportive, qu’un bouleversement
institutionnel et symbolique, avec la multiplication des politiques de réduction des inégalités
dans tous les domaines, le domaine sportif n’y faisant pas exception.

Cependant, si l’on regarde dans le détails, de nombreuses inégalités subsistent : des inégalités
entre la France et l’Allemagne et des inégalités entre les hommes et les femmes, et notamment
une « survalorisation de la masculinité » comme le dit Philippe Tétart, autant dans la pratique
que dans la médiatisation du sport. Ainsi, l’engagement des femmes dans des activités
« masculines », telle que le body-building, est à considérer autant comme une libération, une
émancipation, qu’une soumission aux nouveaux canons de la beauté.

Enfin, d’autres problèmes se posent et peuvent concerner le milieu sportif outre l’inégalité
entre les hommes et les femmes, à savoir des discriminations basées sur la couleur de peau ou
bien des discriminations basées sur l’orientation sexuelle. Par exemple, en 2017, l’écart de
salaire, à poste égal, entre une femme noire et une femme blanche est de 17% selon
l’association américaine National Law Center. La natation synchronisée reste la seule épreuve
olympique réservée aux femmes alors que seuls les Gay Games ont ouvert cette discipline aux
hommes.

65
Bibliographie

Ouvrages généraux

Buy F., Marmayou J-M., Poracchia D., Rizzo F., Droit du sport, Issy-les-Moulineaux,
L.G.D.J, 2015, 752 pages

Gatsi J., Le droit du sport, Collection Que sais-je ?, Paris, Presses universitaires de France,
2007 (2ème édition), 128 pages

Latty F., Le comité international olympique et le droit international, Paris, Montchrestien,


2001, 235 pages

Miège C., Les institutions sportives, Collection Que Sais-je ?, Paris, Presses universitaires de
France, 1997 (2ème édition), 128 pages

Riordan J., Krüger A., Terret T., Histoire du sport en Europe, Paris, L’Harmattan, 2004, 270
pages

Sugier A., Femmes voilées aux Jeux olympiques, Paris, Jourdan éditeur, 2012, 316 pages

Tétart P., Histoire du sport en France - De la libération à nos jours, tome 2, Paris, Vuibert,
2007, 523 pages

Articles de doctrine
Dohle M., Vowe G., Mediatisierung des Sports. Mediatisierung des Fussballs ?!, Die
Fussball-WM 2014 in Medien und Politik, 2017, 277 S.

Giess-Stüber P., Frauen- und Geschlechterforschung im Sport. Forschungsfelder,


Entwicklungen und Perspektiven, 1er janvier 2009

Louveau C., « Dans le sport, des principes aux faits… », Travail, genre et sociétés 2015/2
(n°34), .181-186

Textes officiels
 Textes législatifs

66
Textes internationaux

Déclaration de Brighton sur les femmes et le sport du 8 mai 1994

Résolutions adoptées lors de la deuxième Conférence mondiale du CIO sur la Femme et le


Sport, Paris, 8 mars 2000

Déclaration de Los Angeles sur la femme et le sport du 18 février 2012

Déclaration de Brighton + Helsinki 2014 sur les femmes et le sport du 14 juin 2014

Charte olympique du 2 aout 2015

Texte européen

Directive 2004/113/CE du Conseil, du 13 décembre 2004, mettant en œuvre le principe de


l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l’accès à des biens et services et
la fourniture de biens et services

Textes nationaux

Loi n°84-610 du 16 juillet 1984 relative à l’organisation et à la promotion des activités


physiques et sportives (Loi Avice), JORF du 17 juillet 1984 page 2288

Circulaire du 6 mars 2000 relative à la préparation des plans pluriannuels d'amélioration de


l'accès des femmes aux emplois et postes d'encadrement supérieur de la fonction publique de
l’Etat, JORF n°56 du 7 mars 2000 page 3538, texte n° 4

Loi n°2000-627 du 6 juillet 2000 modifiant la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à
l’organisation et à la promotion des activités physiques et sportives

Décret d’application n° 2002-488 du 9 avril 2002 pris pour l'application de l'article 8 de la loi
n° 84-610 du 16 juillet 1984 modifiée et relatif à l'agrément des groupements sportifs, JORF
n° 85 du 11 avril 2002 page 6415, texte n° 42

Décret n°2004-1392 du 22 décembre 2004 pris pour l'application de l'article 20-2 de la loi n°
86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

Loi n° 2011-103 du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des
hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle,
JORF n°0023 du 28 janvier 2011 page 1680, texte n° 2

67
Loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des
conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les
discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, JORF n°0062
du 13 mars 2012 page 4498, texte n° 4

Décret n° 2012-1408 du 18 décembre 2012 relatif à la mise en oeuvre des obligations des
entreprises pour l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, JORF n°0295 du
19 décembre 2012 page 20052, texte n° 29

Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, JORF
n°0179 du 5 août 2014

Loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté, JORF n°0024 du 28


janvier 2017, texte n° 1

Loi n° 2017-261 du 1er mars 2017 visant à préserver l'éthique du sport, à renforcer la
régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs,
JORF n°0052 du 2 mars 2017, texte n° 1

 Publications officielles

ALLEMAGNE, Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend, Frauen in den
Gremien des Sports, 2004

ALLEMAGNE, Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend, Aktuelle


Zahlen zu Frauen im Sport und in Sportorganisationen (« Chiffres actuels concernant les
femmes dans le sport et dans les organisations sportives »), 2004

ALLEMAGNE, Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend, Frauen in


Deutschland - von der Frauen- zur Gleichstellungspolitik (« Les femmes en Allemagne -
d’une politique des femmes à une politique d’égalité entre les hommes et les femmes »), 2004

ALLEMAGNE, Bezirksamt Treptow-Köpenick, Frauen im Sport, 2010

FRANCE, Sénat, Rapport d’information n° 650 (2010-2011) de Madame Michèle André, fait
au nom de la délégation aux droits des femmes, 21 juin 2011

FRANCE, Cour des comptes, Sport pour tous et sport de haut niveau, janvier 2013

FRANCE, Comité interministériel des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et
les hommes, Feuille de route du ministère de la ville, de la jeunesse et des sports, 4 février
2015

FRANCE, Comité des 11 tricolores, Rapport sur la féminisation du sport, mars 2016

68
FRANCE, Ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, Panorama sur les plans de
féminisation des fédérations sportives, 2016

FRANCE, Conseil supérieur de l’audiovisuel, Rapport sur la diffusion de la pratique féminine


sportive à la télévision, septembre 2017

FRANCE, Ministère des Sports et le CNDS, Héritage Paris 2024, 2017

FRANCE, Gouvernement, 5ème plan de mobilisation et de lutte contre toutes les violences
faites aux femmes, 2017-2019, 2017

FRANCE, Centre de Droit et d’Economie du Sport, Panorama du sport féminin et Enjeux


stratégiques, 2017.

FRANCE, Comité interministériel aux droits des femmes et à l’égalité entre les femmes et les
hommes, Dossier de presse, 8 mars 2018

FRANCE, Association « Rénovons le sport français », Rapport sur la Contribution à la


réforme en cours de la gouvernance du sport français et à la préparation du projet de loi
« Sport et société », 29 juin 2018

Décisions
CE, 27 juin 1986 n°73596, Epoux Lezzerio, Lebon, p.734

CE, 4 février 1994, n°109537, Raguenau, D. 1995, somm. p. 65

CE 2e / 7e SSR, 10 octobre 2013, n° 369533

Articles de presse
« Asamoah und Künzer neue Botschafter « Fussball für Entwicklung » », DFB, 27 mars 2018

« Effort », Glamour, juillet-aout 2018

Anselmetti L., « L’interminable combat de la féminisation du sport », Le Monde, 11 février


2017

Charrier P., « La médiatisation du football féminin est-elle en progression ? », La Croix, 18

69
juillet 2017

Deborde J., « Jeux olympiques de Pyeongchang : vers un peu plus de mixité », Libération, 9
février 2018

Ferré, J-L., « Comment mettre hors jeu le sexisme dans le sport », La Croix, 22 janvier 2018

J.N., « Développement du sport féminin : les collectivités ont aussi un rôle à jouer »,
MaireInfo, édition du 26 janvier 2018

L’Equipe, « Supersport 300 : Ana Carrasco devient la première femme à s’imposer en


Championnat du monde », L’Equipe, 17 septembre 2017

Magoutier L., « Infographie - L’incroyable ascension du football féminin en France », La


Croix, 18 juillet 2017

Pécout A., « Comment féminiser le sport français », Le Monde, 17 mai 2013

Serve P., « Parité et féminisation du sport : Au bonheur des dames ? », Foot d’Elles, 20
janvier 2014

Sinram J.,« Die Chefin der Männer », Deutschlandfunk, 30 juin 2018

Sturmberg J., « Equal Pay im Sport - Kampf um gleiche Bezahlung », Deutschlandfunk, 21


octobre 2017

Pages internet
http://www.sports.gouv.fr/exaequo (page consultée le 13 juillet 2018)

https://www.unionsportcycle.com/sports-loisirs/le-sport-et-les-francais (page consultée le 13


juillet 2018)

https://www.make-it-in-germany.com/fr/professionnels-qualifies/decouvrir-
lallemagne/portrait-de-lallemagne/loisirs-et-sport (page consultée le 2 septembre 2018)

http://www.sports.gouv.fr/organisation/publication-chiffres-cles/Statistiques/Donnees-
detaillees/article/article- Donnees-detaillees-2015 (page consultée le 3 septembre 2018)

https://gleichstellung.dosb.de/ueber-uns/frauen-vollversammlung/ (page consultée le 7 aout


2018)

70
https://tokyo2020.org/fr/organising-committee/structure/officer/ (page consultée le 21 aout
2018)

http://www.egalsport.com/actualités/ (page consultée le 13 juillet 2018)

http://les-sportives-mag.fr/plus-de-femmes-pour-plus-de-sport-on-fait-comment (page
consultée le 13 juillet 2018)

https://www.sportwissenschaft.de/die-dvs/struktur-und-
gremien/kommissionen/geschichte/geschlechterforschung-ueber-die-kommission/ (page
consultée le 20 juillet 2018)

https://www.dosb.de/sonderseiten/news/news-detail/news/dosb-deutscher-frauenrat-und-
deutscher-tennis-bund-diskutieren-ueber-gleichstellung-in-sport-und-
ges/?no_cache=1&tx_news_pi1%5Bcontroller%5D=News&tx_news_pi1%5Baction%5D=det
ail&cHash=8a7c3e389ccbf9d45af4960c780d0466 (page consultée le 22 juillet 2018)

https://search.dfb.de/search/news?q=gleichberechtigung&relevant_source_ids=19%2C14
(page consultée le 3 aout 2018)

http://www.sports.gouv.fr/pratiques-sportives/le-sport-pour-tous/Sport-au-feminin-
11071/Les-plans-de-feminisation-des-federations-sportives/ (page consultée le 13 juillet
2018)

http://www.editions-legislatives.fr/content/loi-égalité-et-citoyenneté-le-développement-du-
sport-féminin-se-poursuit (page consultée le 20 juillet 2018)

https://www.gouvernement.fr/un-comite-interministeriel-pour-l-egalite-reelle-entre-les-
femmes-et-les-hommes (page consultée le 22 juillet 2018)

71
Table des matières
Remerciements .................................................................................................................................2
Liste des abréviations .....................................................................................................................3
Introduction .......................................................................................................................................6
I- Etat des lieux de la pratique sportive : des inégalités criantes ................................. 14
A) Une conquête progressive des femmes dans leur accès à la pratique sportive
.................................................................................................................................................... 15
B) Des revenus salariaux, une participation aux JO et une médiatisation
moindres ................................................................................................................................ 20
C) Des inégalités entretenues par le poids des stéréotypes ....................................... 26
II- Promouvoir la féminisation de la pratique sportive ................................................... 29
A) Le cadre légal et réglementaire....................................................................................... 29
1- La prise de conscience collective en Europe depuis les années 1980 ............ 29
2- L'exemple européen suivi par la France et l'Allemagne ..................................... 30
3- Des avancées notables depuis 2012 en France ...................................................... 33
4- Une interprétation stricte du principe d'égalité et du principe de non-
discrimmination ? ............................................................................................................... 37
5- Perspectives d'évolution : entre espoirs et inquiétudes ..................................... 41
B) Des actions accessoires nécessaires pour soutenir la féminisation du milieu
sportif ...................................................................................................................................... 43
1- Les initiatives menées par les institutions .............................................................. 43
a- En France .......................................................................................................................... 43
b- En Allemagne .................................................................................................................. 45
2- Les initiatives menées par les associations ............................................................. 46
a- En France .......................................................................................................................... 46
b- En Allemagne .................................................................................................................. 47
3- Les initiatives menées par les médias en France................................................... 48
4- Les initiatives menées par les villes .......................................................................... 48
a- En France .......................................................................................................................... 48
b- En Allemagne ................................................................................................................ 49
III- Promouvoir la féminisation des postes à responsabilité au sein des instances
sportives ................................................................................................................................. 50

72
A) Etat des lieux : un "plafond de verre" omniprésent dans les instances
sportives nationales et internationales ...................................................................... 50
1- A l'échelle internationale : le CIO et les FSI .............................................................. 51
2- A l'échelle nationale : le CNOSF, le DOSB et les fédérations sportives
nationales............................................................................................................................... 51
B) Le cadre légal et réglementaire...................................................................................... 55
1- Les mesures prises par les organes internationaux ............................................. 55
2- Le cadre légal et réglementaire en France ............................................................... 56
a- Les lois de promotion : l'ouverture vers une proportionnalité .................... 56
b- De la proportionnalité aux quotas .......................................................................... 59
c- Des résultats mitigés : trois pas en avant, deux pas en arrière ..................... 61
3- Le cadre légal et réglementaire en Allemagne ....................................................... 62
Conclusion ........................................................................................................................................ 64
Bibliographie .................................................................................................................................66

 Ouvrages généraux .......................................................................................................... 66


 Articles de doctrine.......................................................................................................... 66
 Textes officiels ................................................................................................................... 66
 Décisions.............................................................................................................................. 69
 Articles de presse ............................................................................................................. 69
 Pages internet .................................................................................................................... 70
Glossaire ........................................................................................................................................... 74
Annexe 1 ........................................................................................................................................... 78
Annexe 2 ........................................................................................................................................... 79

73
Glossaire

Féminisation

La notion de « féminisation » peut être entendue de différentes manières selon le contexte de


son utilisation. L’idée commune à toutes les utilisations de la notion est qu’elle désigne un
processus. La sociologue Claude Zaidman distingue trois usages de ce terme : la féminisation
comme dynamique d’égalisation pour rattraper un retard historique, la féminisation d’un
secteur ou d’une profession toute entière, investie en force par les femmes et désertée par les
hommes, et inversement, la féminisation lorsque des femmes viennent investir en petit
nombre un secteur jusque-là monopole masculin. Le premier usage évoque l’idée d’une
marche vers l’égalité, égalité en droits et en nombre, mais aussi l’évolution sociale et
économique favorisant le « rattrapage » d’un retard historique. Le deuxième usage courant de
la notion de féminisation renvoie à l’idée d’une transformation des caractéristiques d’une
profession ou d’un secteur d’activité par l’entrée massive des femmes. Il s’agit d’une logique
de domination quantitative. Enfin, le troisième phénomène souligné par l’utilisation de la
notion de féminisation est l’accès des femmes à des professions, des carrières qui leur étaient
jusque-là interdites par la coutume ou la loi. Nous venons de montrer comment des métiers
« féminins » sont bien souvent des métiers autrefois « masculins ». Ces deux derniers usages
rejoignent la définition donnée par le dictionnaire Larousse qui entend le terme
« féminisation » comme l’augmentation de la proportion des femmes dans une profession, une
organisation, etc. Dans le cadre de notre étude, la féminisation est entendue sous deux des
trois sens qui lui sont donnés : il s’agit tout autant d’une marche vers l’égalité que de l’accès
des femmes à un milieu essentiellement masculin.

Promouvoir

L’un des sens donnés à ce verbe et qui intéresse notre étude est le « fait de mettre quelque
chose en avant, de préconiser quelque chose en essayant de le faire adopter, d’en favoriser le
développement », tel que le définit le dictionnaire Larousse. Pourtant, ce sens est donné
lorsque le complément d’objet est un être inanimé. Or ici, il s’agit de promouvoir la
féminisation du sport, c’est-à-dire promouvoir les femmes dans leur accès à la pratique du
sport et dans leur accès aux postes à responsabilité au sein des instances sportives. Le terme
« promouvoir » est accompagné d’un complément d’objet désignant une personne, et non un
être inanimé. On peut alors nuancer l’usage de ce terme par un autre sens commun qui lui est
donné, i.e le fait de « faire accéder quelqu’un à une fonction ou à un grade supérieurs, l’élever
à une dignité ». Mais ce sens est très réducteur si on l’emploie pour les femmes. Les femmes
seraient ainsi « élevées à une dignité » ; on leur permettrait d’accéder à une « fonction
supérieure ». Ce n’est pas le sens que je souhaite donner lorsque j’emploie le terme
« promouvoir ». Il faut revenir à l’idée de « favoriser le développement » dans l’objectif
d’atteindre une certaine égalité en ce qui concerne la pratique sportive et les postes à
responsabilité au sein des instances sportives.

74
Égalité et principe de non-discrimination

Principe à valeur constitutionnelle, l’égalité est un droit fondamental, pilier de la démocratie


et de République française. Ce principe est énoncé aux articles 1er et 6 de la Déclaration des
droits de l’Homme et du citoyen de 1789 et à l’article 1er de la Constitution française : la
République « assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de
race ou de religion ». Le principe d’égalité ne vise plus seulement les droits civils et
politiques mais s’est étendu aux droits économiques, sociaux et culturels. Il impose ainsi de
traiter de la même manière des personnes placées dans une même situation. Cependant, il
n’exclut pas des différences de traitement, « à condition qu’elles soient justifiées par une
différence de situation ou par un motif d’intérêt général en rapport avec l’objet de la loi qui
les établit - elles doivent être objectivement fondées -, que ces différences de traitement soient
proportionnées à la cause qui les justifie et que, bien entendu, elles soient étrangères à toute
discrimination » tel que l’explique Jean-Marc Sauvé, ancien Vice-président du Conseil d’Etat.
Pour autant, cela ne vient pas jusqu’à consacrer un droit à la différence. Le principe d’égalité
est ainsi étroitement lié au principe de non-discrimination, droit qui s’est développé au
tournant des années 2000, sous l’impulsion également du droit de l’Union européenne et de
l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’Homme. L’égalité réelle peinant à
naître de l’égalité juridique, il est devenu nécessaire « de trouver les voies et moyens de lutter
efficacement contre les pratiques discriminatoires qui portent atteinte au principe d’égalité et,
par là même, à la cohésion sociale », comme le soulignait l’exposé des motifs du projet de la
loi instituant la première autorité de lutte contre les discriminations, la HALDE. C’est
pourquoi la promotion de l’égalité passe nécessairement par une lutte contre les
discriminations, notamment les discriminations fondées sur le sexe. C’est ce qui intéresse
notre recherche sur la féminisation du sport étant donné que pour promouvoir la féminisation
du sport, il faut lutter contre les stéréotypes sexués et les discriminations envers les femmes,
jusqu’à même introduire une « discrimination positive » envers les femmes qui se traduit par
exemple par l’imposition de quotas au sein des comités directeurs des institutions sportives.

Plans de féminisation

Dans le cadre de conventions d’objectifs négociées pour une période de trois ans entre l’État
et les fédérations sportives, les fédérations sportives prennent de façon volontaire ou
obligatoire des mesures pour promouvoir la féminisation concernant la pratique sportive,
l’encadrement, la formation et l’arbitrage au sein la fédération en question. Ces mesures sont
réunies dans un « plan de féminisation ». Les plans de féminisation sont devenus obligatoires
en 2013 manifestant ainsi la volonté du ministère de s’engager en matière de promotion et de
développement du sport féminin, mais ne le sont plus depuis 2018.
Les fédérations sportives sont l’un des acteurs majeurs de la concrétisation des actions en
faveur de l’égalité, notamment l’égalité des sexes. Le ministère en charge des sports réalise un
panorama des plans de féminisation à l’issu de chaque période afin de dresser un état des

75
lieux et de mettre en évidence les partenaires et les thématiques clés au développement de
projets relatifs au sport féminin et à l’égalité entre les femmes et les hommes.
Ces plans de féminisation, lorsqu’ils sont devenus obligatoires au sein des conventions
d’objectifs, ont été l’élément majeur permettant de faire progresser plus rapidement le sport
féminin en conditionnant l’octroi de l’agrément de l’État (et ainsi des subventions) à la
nécessité de la mise en œuvre de ces plans.

Proportionnalité

Entendu au sens scientifique du terme, ce principe décrit un caractère de grandeurs, de


quantités, qui sont ou restent proportionnelles entre elles. Dans un contexte plutôt juridique ou
sociologique, il s’agit du rapport établi entre deux choses selon une proportion équitable. Le
principe de proportionnalité est évoqué dans notre étude dans le cadre de la représentation
féminine au sein des comités directeurs des fédérations sportives. Ainsi, conformément à ce
principe, la part de femmes au sein du comité directeur d’une fédération doit être
proportionnelle à la part de femmes licenciées de la fédération. C’est le principe appliqué
comme toute première mesure pour promouvoir la féminisation des postes à responsabilité au
sein des institutions sportives avant l’entrée en vigueur de la loi pour l’égalité réelle entre les
hommes et les femmes en 2014. Ce principe a permis une augmentation de la part de femmes
au sein des comités directeurs des fédérations sportives mais son effet reste toutefois à
relativiser. En effet, au sein des fédérations très masculinisées ou très féminisées,
l’application du principe de proportionnalité ne présente aucun intérêt car il y aurait soit
exclusivement des hommes, soit exclusivement des femmes. Et ce n’est pas là l’objectif
recherché par la mise en oeuvre de ce principe, qui vise à tendre vers l’égalité. C’est pourquoi
le principe de proportionnalité a été mis de coté au profit de la mise en place de quotas.

Quotas

Un quota est un contingent, un pourcentage déterminé, imposé ou autorisé. La question


d’imposer des quotas en faveur des femmes s’est posée lorsque la mise en oeuvre du principe
de proportionnalité ne s’est pas révélée aussi efficace que prévu. L’imposition de quotas est
une mesure contraignante qui vise le même objectif, à savoir la réduction des inégalités et
favoriser la parité. Les quotas permettent de corriger la sous-représentation des femmes aux
postes à responsabilité et de briser de « plafond de verre » qui existe dans le milieu sportif, à
l’instar du monde du travail.
La particularité de cette mesure est qu’elle tente de régler une discrimination avec une autre
discrimination, plus communément appelée « discrimination positive ». En instituant des
inégalités afin de promouvoir l’égalité, on parvient à une parité forcée relative, dans la mesure
où la parité n’est pas réellement atteinte. Le problème posé par l’imposition de quotas est que
cette mesure risque de dévaloriser les nominations de femmes aux postes à responsabilité.
Elles auraient été choisies non pas pour leurs compétences mais pour atteindre la part
obligatoire. Et cela peut a contrario empêcher des hommes compétents d’accéder aux postes à

76
responsabilité et de les contraindre à laisser leur place à des femmes prises à raison de leur
sexe et non de leurs compétences.

77
Annexe 1

Exemples de campagne d’affichage pour « promouvoir » l’adhésion des femmes dans certains
sports :

78
Annexe 2

Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789

Art. 1er. Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions
sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune.

Art. 6. La Loi est l'expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir
personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous,
soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont
également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans
autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents.

Préambule de 1946
« Au lendemain de la victoire remportée par les peuples libres sur les régimes qui ont tenté
d'asservir et de dégrader la personne humaine, le Peuple français proclame à nouveau que tout
être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance, possède des droits
inaliénables et sacrés. Il réaffirme solennellement les droits et libertés de l'homme et du
citoyen consacrés par la Déclaration des droits de 1789 et les principes fondamentaux
reconnus par les lois de la République.
Il proclame, en outre, comme particulièrement nécessaires à notre temps, les principes
politiques, économiques et sociaux ci-après :
La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme.
Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d'asile sur les
territoires de la République.
Chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi. Nul ne peut être lésé, dans son
travail ou son emploi, en raison de ses origines, de ses opinions ou de ses croyances.
Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l'action syndicale et adhérer au
syndicat de son choix.
Le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent.
Tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des
conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises.
Tout bien, toute entreprise, dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public
national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité.
La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement.
Elle garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de
la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son

79
âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de
travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence.
La Nation proclame la solidarité et l'égalité de tous les Français devant les charges qui
résultent des calamités nationales.
La Nation garantit l'égal accès de l'enfant et de l'adulte à l'instruction, à la formation
professionnelle et à la culture. L'organisation de l'enseignement public gratuit et laïque à tous
les degrés est un devoir de l'État.
La République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit public
international. Elle n'entreprendra aucune guerre dans des vues de conquête et n'emploiera
jamais ses forces contre la liberté d'aucun peuple.
Sous réserve de réciprocité, la France consent aux limitations de souveraineté nécessaires à
l'organisation et à la défense de la paix.
La France forme avec les peuples d'outre-mer une Union fondée sur l'égalité des droits et des
devoirs, sans distinction de race ni de religion.
L'Union française est composée de nations et de peuples qui mettent en commun ou
coordonnent leurs ressources et leurs efforts pour développer leurs civilisations respectives,
accroître leur bien-être et assurer leur sécurité.
Fidèle à sa mission traditionnelle, la France entend conduire les peuples dont elle a pris la
charge à la liberté de s'administrer eux-mêmes et de gérer démocratiquement leurs propres
affaires ; écartant tout système de colonisation fondé sur l'arbitraire, elle garantit à tous l'égal
accès aux fonctions publiques et l'exercice individuel ou collectif des droits et libertés
proclamés ou confirmés ci-dessus. »

Constitution de la Vème République de 1958

Article 1

La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité
devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle
respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée.

La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions
électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales.

80

Vous aimerez peut-être aussi