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SECHERESSE
P
our les villes d'Afrique tropicale, la Pour caractériser ce risque de pénurie
maîtrise de l'eau représente un en eau potable, la démarche retenue re-
enjeu capital en termes de dévelop- pose sur I'établissement d'un bilan entre
pement durable. En zone sahélienne, où les disponibilités et les besoins, bilan
le climat se caractérise par une impor- qui s'appuie sur une étude diagnos-
tante variabilité des précipitations, la tique, destinée à évaluer la situation ac-
possibilité de résoudre ce problème est tuelle, et sur une étude prédictive pour
Nadia BECHLER-CARMAUX essentiellement liée à la disponibilité en appréhender I'évolution de la situation à
Michel MlEllON eau [l]. La situation à Niamey, capitale court et moyen termes (1 O et 20 ans).
du Niger, en est un bon exemple. L'ali-
mentation en eau de la ville est principa-
Université Louis-Pasteur, lement assurée par des prélèvements
dans le fleuve Niger. Or, la détériora- Disponibilitésen eau potable :l'offre
Centre d'études et de recherches
écogéographiques,
3, rue de l'Argonne, tion climatique enregistrée depuis la fin
67083 Strasbourg, France. des années 60 dans l'ensemble du bas- Actuellement, l'alimentation en eau de
sin du Fleuve a pour conséquence une Niamey est assurée à 88 % par le
diminution significative des quantités fleuve Niger et à 12 % par les nappes
Mathieu lAMOTTE
I
Institut de recherche .
d'eau disponibles, surtout en période phréatiques [3]. Dans le premier cas,
d'étiage [2]. Cette modification du la distribution de l'eau est assurée par
contexte hydrologique et donc de la res- le réseau d'adduction et, dans le se-
source en eau, associée à une forte cond cas, par des puits et des forages.
pour le déyeloppement, croissance démographique responsable Ces derniers sont particulièrement nom-
Universidade de SGo Paulo,
lnstitudo de Geociencias/DGG, d'une augmentation des besoins, se tra- breux dans les quartiers périphériques
CP 11348, 05422-970 São Paulo, duit régulièrement par des problèmes de la ville où le réseau d'adduction est
Brésil. d'alimentation en fin de saison sèche. inexistant.
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c.\ A . ' i
I -
Références
mentation en eau de Niamey justifie que
l'on s'intéresse à la sécheresse observée
depuis 1969. En effet, elle a entrainé
des modifications sensibles du régime hy-
. Retenue &eau de &,,de[
La persistance de la sécheresse depuis
drologique du fleuve. Une comparaison la fin des années 60 et l'observation
entre les périodes 1929-1968 et 1969- d'un étiage nul en juin 1985 ont amené
1. Neuvy G.L'homme ef /e'au dans le do- 1994 montre une diminution de 34 % les pouvoirs publics à proposer des so-
maine fropicol. Paris : Masson, 1991 ; pour le module annuel et de plus de lutions pour assurer les besoins en eau
227 p. 70 % pour les débits journaliers moyens de la population [6]. De 1985 à 1987,
minimums [4]. La période des basses des ouvrages provisoires de retenue
2. Sircoulon J. Évolution des climats et des
ressources en eau. A h Contemp 1992 ; eaux (débits inférieurs à 200 m3/s) s'al- des eaux ont été mis en place dans le lit
161 :57-76. longe de facon significative en passant du fleuve, détruits chaque année par
d'une cinquantaine de jours avant 1969 l'arrivée des crues. En 1988, la déci-
3. Collignon B. Impact des activités hu-
à plus d e 100 jours après cette date sion a été rise de construire un ou-
maines sur les ressources en eau souterraine
en Afrique sahélienne et soudanienne. Es-
paces tropicaux 1994 ;13 : 235-49.
(figure 71. Les impacts de la sécheresse
sont également visibles sur le tarissement
L
vrage dura le en amont d e l a ville,
entre les stations de pompage de Gou-
et' plus particulièrement, sur les volumes del et de Yantala. Achevée en 1989, la
4. Bechler N, Lamotte M, Mietton M. Les
étiages du fleuve Niger : risque de pénurie
dynamiques dont la moyenne varie du retenue d'eau de Goudel est un bar-
en eau pour l'agglomération de Niamey. simple au double [figure 2). L'analyse fré- rage déversoir à deux seuils qui permet
Sustainabilify of water resources under in- quentielle des débits minimums journa- d e concentrer les eaux durant les
creasing uncertainty, proceedings of 'Rabat liers [fableau /) montre que le temps de étiages. Sa capacité maximale est esti-
symposkm SI, airil' 1997. ~ÃHS 1997 ; retour des débits inférieurs à 10 m3/s, mée à 4,36 millions de mètres cubes
240 :67-74.
considérés comme critiques en termes pour une capacité utile de 3 millions de
5. Zinzindohoue M. Colloque sur la révision d'alimentation en eau pour la ville [5], mètres cubes [7]. La ville de Niamey
des normes hydrologiques suite aux inci- passe de 5 ans (1 929-1968) à 2 ans dispose donc d'une réserve en eau de
dences ¿e la sécheresse, communication II.
(1 969-1994). Pour la période 1969- 3 millions de mètres cubes pour assurer
Ouagadougou : CIEH, 1986 : 1-8.
1994, 16années présentent des débits l'alimentation des habitants en cas
6. Billon B. Le Niger à Niamey. Décrue et journaliers inférieurs à 1O m3/s, dont 13 d'étiages très faibles du fleuve.
étiage 1985. Cah ORSTOM, Hydrologie avec des débits inférieurs à 5 m3/s. Une
1985;21 :3-22.
interruption historique de I'écoulement est Contraintes techniques I
I
3m-m .
moire de DEA. Montréal : Université
Québec, 1993;141p. --:-
I
2O00
I - 1929 --- 1971
1O. Kehren S. L'agglomération ¿e Niamey
(Niger). Contribution à une meilleure
connaissance des disponibilités et ¿es be- 1500
soins en eau. Mémoire de maîtrise. Stras-
bourg : Université de Strasbourg-I, 1995 ; 1O00
138 p.
282 ~
Sécheresse n"4, vol. lo, décembre 7 999
I santé (OMS) (figure 5). La situation ac-
Volume dynamique (IO6 m3) tuelle s'est réellement détériorée par rap-
2 O00 port à ce qui a été observé en 1985 et
1800 1986 [11 I 121. L'origine de cette pollu-
A
tion est multiple, réseau d'égout em-
bryonnaire, azote du sol et fertilisants se
combinant pour expliquar les fort taux
de nitrates mesurés [9]. A cette pollution
chimique se surimpose une pollution mi-
crobiologique résultant d'une contami-
nation fécale directe. Une étude réalisée
en 1996 [13] montre que les deux tiers
des 55 sites testés présentent une eau
non potable selon les normes AFNOR et
que l'eau de 9 % d'entre eux est im-
O' , I I I
I
I propre à la consommation même après
.
1
Id50 , 1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1d90
traitement. Ce bilan très préoccupant
montre le caractère irréaliste d'une ex-
Figure 2. Volumes dynamiques du Niger à Niamey (I950-1990). ploitation immédiate des ressources sou-
terraines locales.
1 Kouara
Kano
S. N.N.O. S.S.E.
I '
IV Continental terminal A
Sables . 0Formation sableuse àfragments de cuirasse
M Alluvions grossières Cuirasse 40 m
E d Formation à oolithes ferrugineuses
Socle
LIE4 Formation limoneuse
O Altérites
Références
T>
2,o
Cette situation se dégradera rapidement
avec la croissance démographique et
1.5-- les projets d'extension du réseau d'ad-
duction d'eau. II semble donc impératif
1,o -- de mettre en place une politique de ges-
tion réaliste de l'eau, fondée en particu-
0,s --
0.0; I I
3
!
5
7
: 7
9 1,
11 73
lier sur une diversification des res-
sources.
Cette diversification pourrait a priori re-
Jours
Doser sur une meilleure exploitation des