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Le Management Interculturel en Afrique
Le Management Interculturel en Afrique
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Du même auteur :
• Manager dans la diversité culturelle, Editions d’Organisa- 9.16
0.17
tion, 2002.
• Développer les RH à l’international. Pour une géopolitique
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LE MANAGEMENT
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INTERCULTUREL
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EN AFRIQUE
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La Renaissance
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Benoît THERY
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© Éditions EMS, 2020
www.editions-ems.fr
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Tous droits réservés
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ISBN : 978-2-37687-354-9
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(versions numériques)
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In memoriam
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Al-Hassan ibn Muhammad al-Wazzan al-Fassi
(Johannes Leo Africanus),
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surnommé « Léon l’Africain »,
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diplomate du sultan du Maroc auprès de l’empire Songhaï au Sahel,
0.21
négociateur entre les dynasties rivales des Wattassides et des Saadiens
au Maroc,
9.16
musulman baptisé de la main et du nom d’un pape en la basilique
0.17
latin et ottoman,
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INTRODUCTION. LA DÉMARCHE DE L’OUVRAGE ......................... 10
0.21
PARTIE 1. FONDEMENTS CULTURELS DANS L’HISTOIRE ET
LES VALEURS DE L’AFRIQUE ......................................................... 13 9.16
0.17
Chapitre 1
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Chapitre 2
Les mythes et les sources de l’histoire de l’Afrique .............................. 25
:211
Chapitre 3
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Chapitre 4
Les prises et emprises extérieures ........................................................ 54
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1. Les primo-colonisations portugaise et hollandaise ............................. 54
0025
2. L’esclavage et la saignée des traites négrières arabe et occidentale ... 57
3. La Conférence de Berlin (1884-1885) et le choc des colonisations
7:17
modernes....................................................................................................64
0.21
Chapitre 5
Les indépendances................................................................................. 73 9.16
0.17
Chapitre 6
418:
Chapitre 7
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Chapitre 8
Différentes familles culturelles ........................................................... 115
1. Les grands groupes ethnolinguistiques pour un ensemble de plus
de 2 000 langues ...................................................................................... 115
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2. Un tour d’Afrique en huit sous-régions culturelles ............................ 120
0025
Chapitre 9
7:17
Des modèles sociétaux et de management endogènes à l’Afrique ..... 123
0.21
1. Le lignage ................................................................................................. 123
2. Les systèmes de parenté, de filiation et de mariage ............................ 125 9.16
0.17
Chapitre 10
888
Chapitre 11
Les modèles du management interculturel confrontés à l’Afrique .... 145
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Chapitre 12
Adapter son management dans les entreprises et les organisations
en Afrique ............................................................................................ 158
1. L’adaptation managériale au contexte africain ................................... 158
2. Stratégie pour la conduite de grands projets en Afrique .................. 166
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INTRODUCTION
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LA DÉMARCHE DE L’OUVRAGE
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0.21
L’Afrique décolle : elle a connu depuis le début du millénaire un taux de
croissance moyen de l’ordre de 5 % par an (qui a baissé dans les années 2015- 9.16
0.17
2018 avec la chute des cours des matières premières). Elle est par ailleurs le
seul continent qui reste en forte croissance démographique, ce qui est à la
6:16
attirent la convoitise des pays développés et émergents. Elle est par ailleurs
entrée de plain-pied dans la révolution technologique du numérique. Pour
888
mutation. C’est donc l’objet de cet ouvrage que de proposer à ceux qui tra-
vaillent avec ce continent des clés de compréhension et d’adaptation pour
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L’approche de l’auteur développée ici correspond à son expérience pro-
0025
fessionnelle et personnelle de l’Afrique. Appartenant à une génération
« postcoloniale » (et né de parents qui étaient partisans de la décolonisa-
7:17
tion), formé à la rude école professionnelle de la première génération de
l’Algérie indépendante, sa démarche a toujours été profondément respec-
0.21
tueuse de l’autonomie africaine. Il s’efforce ainsi d’avoir lui aussi un regard
indépendant, qui n’est ni oublieux des traumatismes de la colonisation, ni
nostalgique de la « Françafrique », ni pour autant complaisant à l’égard de 9.16
la gouvernance économique, politique et sociale de l’Afrique d’aujourd’hui,
0.17
des dirigeants d’organisations des analyses et des propositions pour les pro-
blèmes opérationnels qu’ils ont à traiter.
:211
Enfin, il s’est efforcé de cerner les réalités par des contacts de terrain.
Au-delà des propos politiques et diplomatiques des ministres et des ambas-
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cussions nées des amitiés nouées autour d’un verre. Ou bien, assis sur un
tronc d’arbre dans une clairière de la forêt équatoriale pour prendre notes
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sur ses genoux des explications d’un paysan sur son champ de manioc, il en
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PARTIE
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FONDEMENTS CULTURELS
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DANS L’HISTOIRE ET
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LES VALEURS DE L’AFRIQUE
0.21
9.16
0.17
(chapitre 6).
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CHAPITRE 1
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DÉFINITIONS LIÉES À L’APPROCHE GÉOGRAPHIQUE
7:17
ET CULTURELLE DE L’AFRIQUE
0.21
9.16
1. De quelle(s) Afrique(s) parle-t-on ? 0.17
Il s’agit d’un continent de 30 millions de km2, d’environ 1,2 milliard
d’habitants (dont 1 milliard en Afrique subsaharienne) et donc d’une den-
6:16
sont plus influencées par les cultures asiatiques de type arabe, indien ou
malais).
:211
insulaire ;
• les échanges politiques, religieux et commerciaux de toutes natures
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1. Pays observateur en 2012, pays associé en 2015, la République d’Haïti n’a jamais ob-
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tenu, comme elle le souhaitait, le statut d’État membre de l’Union Africaine pour la
simple raison que l’Acte constitutif de l’UA prévoit que les membres doivent être des
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2. Les organisations sous-régionales en Afrique
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Carte de l’Afrique distinguant les 5 sous-régions selon l’ONU
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Libye, Maroc, Mauritanie et Tunisie. Il faut y ajouter l’Egypte et le Soudan
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qui ne font pas partie de l’UMA, mais les 7 pays sont membres de la Ligue
arabe.
7:17
Dans la pratique, l’UMA ne fonctionne guère en raison des tensions
0.21
entre le Maroc et l’Algérie concernant le Sahara occidental : la RASD théo-
rique (République arabe sahraouie démocratique), soutenue par l’Algérie et
reconnue par l’UA, mais administrée par le Maroc qui la considère comme 9.16
partie intégrante de son territoire national (ses « Provinces du Sud ») en
0.17
Niger, Sénégal et Togo. Ces pays ont une monnaie commune : le franc
CFA (Communauté financière africaine) d’Afrique de l’Ouest, qui a une
:211
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sur le plan économique, l’arrimage du franc cfA à l’euro par une
parité fixe en fait une monnaie forte : pour les 14 pays concernés (8
0025
en Afrique de l’ouest et 6 en Afrique centrale), ceci a des avantages
(moindre coût à l’importation) et des inconvénients (plus de difficultés
à l’exportation).
7:17
D’autre part, l’une des critiques du franc cfA, notamment par l’an-
0.21
cien ministre et économiste togolais Kako nubukpo, est qu’il tendrait
à maintenir des taux d’intérêt plus élevés en zone franc, et donc des
difficultés de financement des entreprises et de l’économie en général. 9.16
0.17
un certain nombre d’économistes africains préfèrent donc le risque de
l’inflation pour permettre une croissance plus forte avec l’abandon du
6:16
franc cfA.
8565
République » (française).
En réalité, cette décision paraît être le fruit d’un accord bien dosé :
– le nigeria, le géant de l’Afrique de l’ouest, qui promeut l’Eco, la
future monnaie des 15 pays de la cEDEAo, à la place de sa mon-
naie nationale, le naira, lequel subit une très forte inflation depuis
longtemps, accepterait une parité fixe de l’Eco avec l’euro. ce
faisant, il choisirait de casser son inflation, tout en obtenant que
la future monnaie commune ouest-africaine soit déconnectée du
Trésor français ;
– la france accepte en effet de ne plus exiger le dépôt auprès de la
Banque de france de 50 % des réserves monétaires des 8 pays de
l’actuelle uEMoA et de se retirer des instances de gouvernance du
franc cfA d’Afrique de l’ouest, lequel est appelé à se transformer
9719
en Eco ;
– les 8 états de l’uEMoA obtiennent cependant le maintien d’une
0025
garantie française à leur égard : la france pourra les couvrir en dis-
ponibilités en euros par une ligne de crédit accordée à la Banque
7:17
centrale des états de l’Afrique de l’ouest (BcEAo), la banque de
l’uEMoA. Pour le président ouattara, cette garantie évite la spé-
0.21
culation et la fuite des capitaux de l’uEMoA en attendant la mise
en place de l’Eco ;
9.16
– en effet, la ministre des finances du nigeria a reconnu que la mise
0.17
Reste qu’il faille encore que le nigeria confirme ces orientations pour
0773
ces 6 pays ont également une monnaie commune, le franc CFA d’Afrique
centrale, distinct de celui de l’Afrique de l’Ouest, mais qui a la même
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Par ailleurs, 5 pays sont membres de l’East African Community (EAC) :
Burundi, Kenya, Ouganda, Rwanda6 et Tanzanie : l’EAC est considé-
0025
rée comme le pilier de l’Afrique de l’Est si on la distingue de la Corne de
l’Afrique : Djibouti, Ethiopie, Erythrée et Somalie.
7:17
Enfin, il faut noter qu’il existe sur la partie Est de l’Afrique un « Marché
0.21
commun de l’Afrique orientale et australe », le COMESA (Common Market
for Eastern and Southern Africa), qui comprend 21 pays allant de l’Afrique
australe et l’océan Indien à l’Afrique du Nord en passant par l’Afrique 9.16
orientale et la République démocratique du Congo.
0.17
(estimations de 2017) :
8565
plés d’Afrique.
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3. Quatre pays membres de la CEEAC sont aussi membres d’autres organisations sous-
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5. Le Soudan est considéré par l’ONU comme faisant partie de l’Afrique du Nord.
6. Le Kenya et l’Ouganda sont à la fois membres de l’IGAD et de l’EAC ; le Burundi et le
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0025
3. Définitions de concepts liés aux cultures africaines
7:17
3.1. Race
0.21
L’Afrique étant souvent caractérisée comme une région « noire » et ayant
9.16
parfois été traitée avec « racisme », il peut être utile au préalable de revenir
sur le terme de « race ». Celui-ci a été banni du vocabulaire des sciences
0.17
humaines pour diverses raisons.
• Une raison biologique : au début du XXIe siècle, les techniques de
6:16
séquençage de l’ADN ont montré que les génotypes humains sont com-
8565
celle existant dans les espèces animales, y compris chez les primates
supérieurs. Par conséquent, s’il existe des races identifiées dans les es-
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dans un groupe social déterminé (par exemple, dans son milieu profession-
nel proche) … Les réactions spontanées à la vue du « Blanc », favorables
0025
(par sens de l’hospitalité ou par simple déférence) ou défavorables (par ap-
pât du gain escompté ou même par hostilité), sont immédiates, sans parler
7:17
de la curiosité d’une ribambelle d’enfants, rieurs ou quémandeurs, suivant
un Européen dans un quartier ou un village qui n’y est pas accoutumé ...
0.21
9.16
3.2. Ethnie 0.17
Ethnie : « groupement humain qui possède une structure familiale, éco-
nomique et sociale homogène, et dont l’unité repose sur une communauté
6:16
À l’inverse, les ethnies issues d’un même groupe plus large parlent des
langues apparentées et constituent ensemble un groupe ethnolinguistique.
0773
langue, une même religion, un même totem (s’il y a lieu, l’animal consi-
nitra
Pour lui, les ethnies peuvent aussi se différencier (et se regrouper) par
grand secteur d’activité traditionnelle : agriculteurs, éleveurs, commer-
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18 janvier 2016.
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22 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
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J.-L. Amselle et E. M’Bokolo attirent donc d’abord notre attention, dans
0025
leurs études très précises en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale, sur la
complexité des groupes humains. Par exemple, il y a des interpénétrations
7:17
géographiques entre les ethnies sur un même territoire. Et il n’y a pas tou-
jours équivalence entre une langue et une ethnie : certains groupes qui se
0.21
reconnaissent explicitement une identité, une dénomination, une culture,
une organisation politique et sociale, des rites religieux et des traditions
en commun peuvent cependant parler des langues différenciées selon leur 9.16
0.17
localisation, par exemple les Bamilékés du Cameroun. Dans ce dernier cas,
il est possible que la diversité linguistique soit due à une organisation po-
6:16
niale, mais surtout dans la période des indépendances, d’affirmer une unité
nationale pour éviter de revenir aux conflits ethniques des siècles précé-
:211
dents et pour consolider des États dont les frontières tracées par le colonisa-
teur ne correspondaient pas forcément aux réalités sociologiques.
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surtout les parents cultivés pouvaient trouver plus efficace, sur les plans so-
cial et scolaire, d’éduquer eux-mêmes leurs enfants dans cette langue offi-
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Quelques définitions
0025
Esclavage et traite :
7:17
– Esclave : personne qui ne jouit pas de la liberté civique, qui est
sous la dépendance totale d’un maître ou d’un état.
0.21
– Esclavage : organisation sociale fondée sur l’existence d’une classe
9.16
d’esclaves (l’esclavage africain existait – existe encore au soudan,
en Mauritanie, au Tchad – indépendamment de la traite étrangère).
0.17
9719
aboutit à l’universel. Si le point de départ, c’est l’homme noir, l’aboutis-
sement, c’est l’homme tout court. »
0025
On traitera au chapitre 4 des questions de l’esclavage et de la colonisa-
7:17
tion en Afrique et on présentera le panafricanisme au chapitre 5.
0.21
9.16
Le visible et l’invisible 0.17
Le « visible » et « l’invisible », ou encore « l’Afrique du jour » et
« l’Afrique de la nuit » sont des expressions courantes pour désigner
6:16
– guérisseur : personne qui prétend guérir les malades par des pro-
cédés magiques ou empiriques, en dehors de l’exercice légal de
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la médecine.
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traditions secrètes.
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CHAPITRE 2
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LES MYTHES ET LES SOURCES DE L’HISTOIRE DE L’AFRIQUE
7:17
0.21
Il est tentant en introduction de revenir sur le discours de Nicolas
Sarkozy, alors président de la République française (sur l’inspiration de « sa
plume » Henri Guaino), à l’Université Cheikh Anta Diop à Dakar le 26 juil- 9.16
let 2007 : « Le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez
0.17
progrès ».
Quelle que soit l’interprétation qu’en aient faite ses auditeurs, elle a été
888
1. DIOP Cheikh Anta, Nations nègres et culture : De l’antiquité nègre égyptienne aux pro-
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grand succès en Afrique de l’Ouest, mais aussi chez les intellectuels noirs
américains à la recherche de leur propre reconnaissance sociale (on est à
0025
l’époque des combats de Martin Luther King aux États-Unis). Aujourd’hui
7:17
encore, des anciens ministres sénégalais, qui étaient vers 1960 les étudiants
de « Cheikh Anta », en parlent avec une vénération et un enthousiasme
0.21
non dissimulés. En revanche, Diop n’a jamais convaincu son Président de
l’époque, Léopold Senghor, pourtant « chantre de la négritude », avec qui
il entretenait des relations exécrables et auquel Diop reprochait la position : 9.16
« l’émotion est africaine et la raison hellène ».
0.17
notamment sur les royaumes nubiens (Soudan actuel) et plus tard éthio-
piens, et qu’elle a toujours connu une part de peuplement noir venu du Sud
8565
par la vallée du Nil et par ses relations répétées avec les royaumes nubiens.
« Eleveurs, marchands et soldats, les Nubiens d’Egypte furent partie pre-
888
foncés déterminant une peau ou des cheveux noirs) dans des tombeaux ou
momies de l’Egypte antique ne prouvent rien quant à l’origine négroïde des
:211
Egyptiens … mais simplement qu’il y avait des Noirs parmi les Egyptiens,
nitra
Outre son livre fondateur Nations nègres et culture, qui affirme la négrité
de l’Egypte antique et le « complot occidental masquant cette vérité », Diop
a développé sa théorie dans une série d’ouvrages qui en ont fait un intellec-
tuel de grande influence, en particulier dans sa génération :
• Unité culturelle de l’Afrique noire (1959) développe l’idée que le sys-
tème du matriarcat est fondamentalement « nègre » (ceci est davantage
admis, au moins pour l’Afrique) ;
• Afrique noire précoloniale (1960) veut faire la liaison entre l’Egypte
antique et les royaumes africains : on peut reconnaître que cette in-
fluence existait au moins en Nubie et dans la région de la mer Rouge ;
• Antériorité des civilisations nègres (1967) affirme la primauté du
fait nègre dans le processus d’hominisation, l’histoire du peuplement et
9719
l’histoire de la civilisation mondiale ;
0025
• Parenté génétique de l’égyptien pharaonique et des langues négro-
africaines (1977), qu’il applique surtout au Wolof (première langue afri-
7:17
caine du Sénégal), a ouvert un champ de recherches pour ses disciples,
cherchant à démontrer l’origine égyptienne d’autres langues africaines
0.21
(notamment de langues bantoues).
9.16
Pour Cheikh Anta Diop, il n’existe que deux origines humaines : le
Nègre, agriculteur, de système matriarcal et d’organisation sociale perfec-
0.17
tionnée, avec une religion monothéiste fondée sur le dieu Amon (le dieu de
Thèbes, l’une des principales divinités égyptiennes antiques), et par ailleurs
6:16
et Blancs ».
3. En recevant Donald Trump sous les ors de la Cité interdite de Pékin en novembre 2017.
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2001.
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9719
pour faire de l’égyptien une sorte de langue panafricaine. On s’évertue,
souvent au mépris de la plus élémentaire méthode scientifique, à lui trouver
0025
des apparentements dans chaque langue d’Afrique noire. Les résultats ne
sont guère convaincants ».
7:17
Cheikh Anta Diop semble ainsi avoir fait preuve davantage de génie
0.21
politique, dans le contexte des indépendances et du panafricanisme, que de
génie scientifique.
9.16
0.17
Mis à part les textes de l’Egypte antique, décryptés par une véritable dis-
8565
Mamadou Fall (déjà cité), les connaissances des Grecs et des Romains sur
l’Afrique se résumaient au triangle du géographe grec Strabon (né vers
0773
60 avant J.-C., mort vers 20 après J.-C.) : ses deux côtés perpendiculaires
sont, d’Ouest en Est, la côte méditerranéenne et, du Nord au Sud, la vallée
:211
elles ont des limites : parmi les principaux auteurs, figurent Al Bakrî au
XIe siècle, géographe et historien andalou (1014-1094), qui aurait fait un
long périple à travers le Sahara pour rejoindre l’empire du Ghana ; Al Idrîssî
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mort au Caire en 1406, n’a pas lui-même visité l’Afrique subsaharienne,
mais en a recueilli des chroniques.
0025
Hassan Al Wazzan, diplomate et explorateur marocain né à Grenade,
7:17
dont la famille avait fui la « reconquista » catholique en 1492, est formé
à Fès à la mosquée universitaire al-Qarawiyyîn. Initié à la diplomatie par
0.21
son oncle, il est envoyé en mission au Sahel en 1512-1513. Au retour d’un
voyage à Istanbul et d’un pèlerinage à La Mecque en 1516-1517, il est captu-
9.16
ré à Djerba par des corsaires castillans et remis en trophée au Pape Léon X.
Devenu un captif privilégié par son statut de diplomate et de lettré, il est
0.17
baptisé en 1520 par le pape qui lui donne son nom, Léon (« Léon l’Africain »).
Il écrira, à la demande du pape, une Description de l’Afrique à partir de ses
6:16
Europe. Après le sac de Rome par les soldats impériaux de Charles Quint en
1527-1528, on perd la trace de Léon l’Africain (d’aucuns pensent qu’il aurait
418:
du Mali.
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où était sa capitale, pourtant décrite par les voyageurs arabes : une hypo-
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langue éthiopienne ancienne de la famille sémitique (encore utilisée au-
jourd’hui comme langue liturgique des Eglises monophysites6 d’Ethiopie et
0025
d’Erythrée). Au XVIe siècle, Gorgoryos, un prêtre éthiopien7, vient à Rome
et établit un dictionnaire et une grammaire du guèze et de l’amharique
7:17
(langue actuelle d’Ethiopie).
Mis à part l’arabe et l’amharique, la seule langue africaine de l’histoire
0.21
contemporaine disposant d’une écriture propre résulte de l’expérience du
9.16
roi bamoum (ou bamoun) Njoya au Cameroun au début du XXe siècle.
Formée au départ de 510 signes, l’écriture fut simplifiée à plusieurs reprises
0.17
pour aboutir à 70 caractères phonétiques et 10 caractères à la fois syllabiques
et numériques. Le roi la fit enseigner, mais avec la colonisation française, les
6:16
relater des expéditions navales de l’Empire du Milieu sur les côtes africaines
de l’océan Indien.
418:
est donc considérée en Afrique comme une source importante, mais qui
pouvait être déformée selon les siècles et les lieux. Elle demande alors une
nitra
6. Rappelons que la doctrine monophysite soutient que Jésus-Christ n’a qu’« une seule
nature » (monos physis), c’est-à-dire divine, alors que le Credo enseigne qu’il a deux
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africaine de la mer Rouge (Egypte, Ethiopie, Erythrée, mais devenu très minoritaire
au Soudan) est toujours monophysite. Il y est resté sous la juridiction du patriarche
d’Alexandrie jusqu’à la fin du XXe siècle.
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africains ».
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LEs MyThEs ET LEs souRcEs DE L’hIsToIRE DE L’AfRIquE 31
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le papier, elles manqueront un jour dans les archives universelles de
l’humanité. » Et d’ajouter cette formule célèbre : « En Afrique, quand
0025
un vieillard meurt, c’est une bibliothèque qui brûle. »
7:17
L’une des plus célèbres traditions orales considérée comme historique est
0.21
la Charte du Mandé.
La Charte du Mandé (Manden ou Mandingue, vaste groupe ethnolin-
guistique d’Afrique de l’Ouest) aurait été établie en 1212 et proclamée en 9.16
0.17
1222 par Soundiata Keita, fondateur de l’empire du Mali. Cette Charte a
été transmise oralement, de siècle en siècle, par les confréries de chasseurs
6:16
orale, qui avait été initié « maître-chasseur » dans la confrérie des chasseurs
du Mandé. Elle reste la référence majeure des sinbo, grands maîtres chas-
888
seurs du Manden.
418:
l’homme.
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La Charte du Mandé
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Manden kalikan
1. Les chasseurs déclarent :
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Mais une vie n’est pas plus « ancienne », plus respectable qu’une
autre vie,
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sa famille.
0025
4. Les chasseurs déclarent :
que chacun veille sur le pays de ses pères.
7:17
Par pays ou patrie, faso,
Il faut entendre aussi et surtout les hommes ;
0.21
car « tout pays, toute terre qui verrait les hommes disparaître de sa
surface
Deviendrait aussitôt nostalgique. » 9.16
0.17
son semblable
Pour allez le vendre ;
nitra
9719
Dire ce qu’il a envie de dire
Et faire ce qu’il a envie de faire ;
0025
si une seule de ces choses venait à manquer à l’âme humaine,
Elle en souffrirait
Et s’étiolerait sûrement. »
7:17
En conséquence, les chasseurs déclarent :
0.21
chacun dispose désormais de sa personne,
chacun est libre de ses actes,
9.16
chacun dispose désormais des fruits de son travail.
Tel est le serment du Manden
0.17
à l’adresse des oreilles du monde tout entier. (...)
6:16
8565
888
418:
0773
:211
nitra
G Ke
:ENC
x.com
larvo
.scho
www
9719
CHAPITRE 3
0025
UN PANORAMA DES RACINES CULTURELLES DE L’AFRIQUE
7:17
DANS SON HISTOIRE PRÉCOLONIALE
0.21
Cette histoire a parfois été embellie (ou du moins adoucie) dans l’ensei-
gnement scolaire qui en est donné dans certains pays africains, pouvant 9.16
0.17
avoir tendance à présenter une Afrique précoloniale heureuse, voire idéale.
Malheureusement, son histoire semble avoir été aussi heurtée que celle des
6:16
autres continents, qui ont tous connu leur lot de guerres et de trahisons. Par
exemple, beaucoup de royaumes ou de chefs africains ont aussi contribué à
8565
Pour Mamadou Fall (déjà cité), les anciens pouvoirs africains avaient des
:211
• le territoire sous contrôle direct, par les facteurs matériels cités ci-
dessus ;
• au-delà, un système de tribus vassales, avec des allégeances va-
riables.
Catarina Madeira-Santos (Institut des Mondes africains, à l’Ecole des
Hautes Etudes en Sciences Sociales de Paris) estime que beaucoup de
royaumes africains étaient souvent assez fictifs et propose plusieurs critères
de réalité :
• y avait-il une emprise sur l’intérieur du territoire ?
• y avait-il un service public ?
• y avait-il une fiscalité ?
9719
• y avait-il une armée de métier ?
Les hypothèses de François-Xavier Fauvelle1 rejoignent ces doutes : les
0025
capitales contrôlaient-elles réellement un territoire ou étaient-elles seule-
ment des centres commerciaux ? Etaient-ce des royaumes intégrés ou des
7:17
« royaumes courtiers » ? Souvent les capitales étaient situées en des lieux
0.21
peu productifs, mais au point de rupture de géographies différentes (par
exemple, entre terres agricoles et terrains arides ou inhospitaliers).
Ainsi, au Nord du Sahara, Marrakech est à la rupture d’une plaine 9.16
0.17
agricole, au départ peu fertile mais devenue productive par le labeur des
paysans, et des chaines enneigées du Haut Atlas, qui surplombent de leur
6:16
blancheur les remparts roses et les palmiers verts de la ville. C’était un lieu
improbable pour une capitale d’empire à sa fondation en 1062 : pourtant,
8565
dès le Moyen Âge, elle est devenue un grand centre de commerce et d’arti-
sanat ; elle compte aujourd’hui près d’un million d’habitants.
888
ou « la ville aux 333 saints » : elle est déjà en zone désertique, à la limite du
0773
Sahel. La ville est accessible du Nord par les caravanes sahariennes et par le
Sud par sa proximité immédiate du fleuve Niger.
:211
Royaumes et
Périodes (siècles) Localisation (dans les pays actuels)
empires
:ENC
africains ».
www
36 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
Royaumes et
Périodes (siècles) Localisation (dans les pays actuels)
empires
ghana IVe – XIIIe Mauritanie, Mali
Mali XIII – XV
e e
Mauritanie, sénégal, guinée, Mali
Mauritanie, sénégal, guinée, Mali,
songhaï XVe – XVIe
niger
région du Lac Tchad (Tchad, nigeria,
Kanem – Bornou VIIIe – XIXe
niger, cameroun)
congo (RDc), congo (Rc), Angola,
Kongo XIVe – XIXe
gabon
Zimbabwe XIIIe – XIVe Zimbabwe, Mozambique
Rwanda XVIII – XX
e e
Rwanda
9719
Zoulou XVIII – XIX
e e
République d’Afrique du sud
0025
7:17
2. Les royaumes de Méroé et d’Aksoum
0.21
9.16
2.1. Le royaume de Méroé 0.17
Apparu au IVe siècle avant J.-C. en Nubie avec des pyramides (nécro-
poles toujours visibles), entre la 5e et la 6e cataracte du Nil, il dura jusqu’au
6:16
le Nil) : il est probable que la royauté était itinérante entre ces villes.
888
romaine. Peu avant l’an zéro de notre ère, le royaume tenta de s’agrandir
au Nord vers l’Egypte en reprenant des territoires aux Romains, mais ces
0773
sont les obélisques monolithes qui constituent les vestiges les plus emblé-
matiques de la ville antique d’Aksum. La plupart de ces grandes stèles […]
x.com
9719
Cette proximité du royaume d’Aksoum avec la péninsule arabique est
également importante dans la tradition religieuse musulmane : quand
0025
Mohammed connaissait des difficultés importantes à La Mecque pour faire
accepter le message de l’islam, quelques années avant d’être lui-même forcé
7:17
de partir en exil à Médine (l’hégire en 622), il conseilla vers 615 à ses com-
pagnons de trouver refuge à la cour du roi d’Aksoum, car le Négus chrétien
0.21
était réputé tolérant. Soixante-dix des premiers musulmans traversèrent la
mer Rouge et se placèrent effectivement sous sa protection.
Le royaume d’Aksoum s’éteint à la fin du Ier millénaire. 9.16
0.17
6:16
avec ses villes romaines remarquables de Volubilis (au Maroc actuel, près de
Meknès), de Tipaza (près d’Alger) et de Timgad (dans les Aurès), de Sbeïtla
nitra
(sa chute est généralement datée en 476), l’empire grec d’Orient résistera en-
core pied à pied pendant un millénaire aux Arabes, puis aux Turcs, jusqu’à
.scho
0145
Cette proximité du royaume d’Aksoum avec la péninsule arabique est
également importante dans la tradition religieuse musulmane : quand
0026
Mohammed connaissait des difficultés importantes à La Mecque pour faire
accepter le message de l’islam, quelques années avant d’être lui-même forcé
7:17
de partir en exil à Médine (l’hégire en 622), il conseilla vers 615 à ses com-
pagnons de trouver refuge à la cour du roi d’Aksoum, car le Négus chrétien
0.21
était réputé tolérant. Soixante-dix des premiers musulmans traversèrent la
mer Rouge et se placèrent effectivement sous sa protection.
Le royaume d’Aksoum s’éteint à la fin du Ier millénaire. 9.16
0.17
6:16
avec ses villes romaines remarquables de Volubilis (au Maroc actuel, près de
Meknès), de Tipaza (près d’Alger) et de Timgad (dans les Aurès), de Sbeïtla
nitra
(sa chute est généralement datée en 476), l’empire grec d’Orient résistera en-
core pied à pied pendant un millénaire aux Arabes, puis aux Turcs, jusqu’à
.scho
0145
Baker, Omar, Uthman (assassiné en 656), puis Ali, le gendre du prophète
(assassiné en 661). Commence alors la conquête arabo-musulmane de
0026
l’Afrique du Nord3.
7:17
Dès 640, sous Omar, les Arabes, conduits par le général Amr Ibn al-Âs,
franchissent l’isthme de Suez et pénètrent dans l’Afrique byzantine de l’em-
0.21
pire romain d’Orient, alors déclinant en Afrique. Avec 4 000 hommes, le
sort de l’Egypte est réglé en une bataille. En 641, Amr construit la première
mosquée d’Afrique sur le site de Fustât (qui deviendra plus tard Le Caire). 9.16
En 642, les Byzantins sont contraints d’évacuer Alexandrie (qu’ils repren-
0.17
de la Libye) : ils lancent des raids jusqu’au Fezzan (Sud libyen), et vers l’Ouest
où ils prennent Tripoli en 643. Mais Omar ordonne à Amr de s’arrêter là.
8565
Damas en 661.
Tout change en 665 quand le général arabe Oqba Ibn Nafi organise une
G Ke
SNED, 1978.
www
un PAnoRAMA DEs RAcInEs cuLTuRELLEs DE L’AfRIquE 39
Mais sur le chemin du retour, il est arrêté dans les Aurès en 683 par une
puissante coalition berbère et byzantine : le prince berbère Kosaïla le tue
près de Biskra (Algérie), puis entre victorieux à Kaïrouan et repousse les
Arabes jusqu’en Libye. En 686, le Calife Abd el Malik envoie une nouvelle
armée arabe à Kaïrouan prendre une revanche contre Kosaïla : les troupes
berbères et byzantines sont battues et Kosaïla tué.
Mais une reine berbère, « la Kahina », issue d’une tribu nomade juive
devenue chrétienne, reprend la direction d’un ensemble de tribus dans les
Aurès : elle écrase l’armée arabe aux confins des actuelles Algérie et Tunisie
et la rejette en Libye. Elle étend son royaume, mais, pour décourager l’enva-
hisseur arabe, elle pratique une politique de la terre brulée, qui lui aliène
des sédentaires et cultivateurs. Ainsi, le nouveau gouverneur arabe Hassan,
également pourvu d’une nouvelle armée par Abd el Malik, réussit à vaincre
0145
la Kahina à l’issue d’un combat acharné (en 693 ou 702 selon les sources) et
envoie sa tête en trophée au Calife …
0026
Hassan prend par ailleurs brièvement Carthage aux Byzantins en
7:17
695, bientôt reprise par une flotte envoyée par l’empereur Leontios de
Constantinople, mais Hassan la reprendra à son tour en 698 et jette alors
0.21
les bases d’un nouveau port, qui sera Tunis …
9.16
Vers l’an 700, les Arabes ont largement pris le contrôle de l’Afrique du
Nord et fondé Kaïrouan et Tunis en une soixantaine d’années … Ils y ont
0.17
été aidés par la division des Berbères et par leur conversion progressive à
l’islam, mais aussi par la faiblesse des Byzantins grecs, qui avaient pris trop
6:16
à l’Ouest du Nil (dans les régions des actuels Darfour et Kordofan).4 Ils
s’installent sur le Nil dans la région de l’actuel Khartoum et plus au Nord
nitra
nés par les Nubiens en contrepartie de produits agricoles et textiles par les
Arabes d’Egypte. Le royaume de Makouria gagne en puissance au IXe siècle,
notamment avec le roi Georgios 1er. Il repose sur une alliance étroite de la
royauté et de l’Eglise copte, sous la tutelle d’Alexandrie. Ceci n’empêche pas
des musulmans de s’établir en Nubie.
Le royaume de Makouria commence à décliner au XIIIe siècle par des
conflits de succession internes et d’autres avec les sultans mamelouks
d’Egypte (royaume musulman issu de soldats esclaves) et aussi du fait de
l’islamisation progressive de la population nubienne. La monarchie chré-
tienne résiste jusqu’à la fin du XVe siècle. Maîtres de l’Egypte en 1517, les
Ottomans turcs annexent le Nord de la Nubie au XVIe siècle.
0145
4. Les interactions entre royaumes du Maghreb et du Sahel
0026
Dans l’histoire tourmentée du Maghreb, soumis à de multiples royaumes
aux géographies variables, jusqu’à la domination turque en Algérie et en
7:17
Tunisie à partir du XVIe siècle, le Maroc fait figure d’un État stable dans
0.21
ses frontières, même s’il entreprit des conquêtes extérieures provisoires.
L’une des raisons en tient sans doute à sa géographie, protégée comme
9.16
une sorte de forteresse naturelle, à l’Ouest par l’Atlantique, au Nord par la
Méditerranée et la chaine du Rif, à l’Est par les chaines obliques du Moyen
0.17
Atlas et du Haut Atlas, et au Sud par la chaine de l’Anti-Atlas et le Sahara.
6:16
certains détails diffèrent selon les sources), afin d’expliquer ensuite l’inter-
prétation des relations culturelles avec le Maroc qui en est faite, un millé-
nitra
Lemtouna, les Messouffa et les Goddala) qui contrôlait les routes commer-
6. DELAFOSSE Maurice, Haut Sénégal – Niger (Soudan français). Le Pays, les Peuples,
les Langues, l’Histoire, les Civilisations, Tome II – l’Histoire. Chapitre II – L’empire du
.scho
0145
rer dans une presqu’île (ou un cordon lagunaire) près de l’embouchure du
fleuve Sénégal (que d’aucuns pensent être le site initial de Saint Louis) pour
0026
y fonder un monastère (ribat).
Des berbères Lemtouna, souvent nobles, y vinrent alors en masse s’y
7:17
faire instruire et s’appelèrent Al Murabittun (« ceux du monastère ») ou
« les Almoravides ». Ils étaient environ 2 000 en 1042 quand le réformateur
0.21
Abdallah quitta les rives du Sénégal, revint prendre le commandement de la
9.16
confédération Lemtouna et devint le chef incontesté de tous les Zenaga du
Sahara occidental. Les Almoravides s’emparèrent de Sijilmassa (aujourd’hui
0.17
Rissani, au Sud-Est du Maroc) sous la conduite de Yahia et d’Abdallah, puis
revinrent au Sahara.
6:16
du Maroc).
Abdallah ben Yassine mourut alors au combat en 1058 ou 1059 et
:211
tué entre les fleuves Sénégal et Niger et pour partie en Mauritanie actuelle) ;
mais quand il voulut retourner au Maroc, Youssef le fit habilement écarter
:ENC
0145
Cinq siècles plus tard, en 1591, les Saadiens (autre dynastie marocaine) et
leurs mercenaires (pour la plupart espagnols) ont conquis l’empire songhaï
0026
(qui occupait une géographie assez proche de l’empire du Ghana, mais in-
cluant une large part du Sénégal actuel, avec pour capitale Gao au Mali). Ils
7:17
lui ont exigé un butin très important en or et en esclaves, rapporté jusqu’à
Marrakech au sultan Ahmed el Mansour.
0.21
Mais cet épisode plus douloureux des relations entre le Maroc et le Sahel
9.16
n’est guère évoqué aujourd’hui au Sénégal … On préfère expliquer qu’il y a
une continuité des rapports entre les deux pays et que ces liens de « paren-
0.17
té » se traduisent aujourd’hui par des liens commerciaux : les Sénégalais ai-
ment les produits marocains, surtout les vêtements, les cuirs (les babouches
6:16
0145
Almohades : conquête de 1130 baker ben omar tente une
à 1160 par Abd el Moumen conquête de l’empire du ghana
0026
(inspiré par le prédicateur de (mort de l’empereur Bassi en
1147- 1062, auquel succède son
Tinmal, Mohamed Ibn Toumert)
1269
7:17
qui prend Marrakech en 1147 ; neveu Tankâminîn).
suivi par yacoub el Mansour
0.21
(1184-1199).
Empire du Mali ou du Manden
9.16
Mérinides : issus de la tribu
(à dominante malinké) : fondé
berbère Zenata, conquête de
par soundiata Keita (1230-
0.17
fès en 1248 (et fondation de la XIIIe - 1255) aux Mali, sénégal,
« nouvelle » fès el Jedid) puis de XVe
1265- guinée et sud de la Mauritanie
6:16
nie actuelle).
Mecque par Le caire.
418:
Marrakech.
Alaouites : Moulay Rachid, puis
:ENC
Indépendance : Mohamed V,
tion du Mali » entre le sénégal
1956 hassan II et Mohamed VI à
et le Mali actuel.
Rabat.
.scho
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44 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0145
0026
7:17
0.21
9.16
0.17
6:16
8565
888
en hommage à l’ancien empire sahélien. Mais ce n’est pas anodin, car cet
ancien royaume sahélien aussi « exporte de l’or vers les pays d’islam et
G Ke
prélève un droit sur les charges de sel et de cuivre qui entrent sans son
pays »7.
:ENC
Kumbi Saleh était sans doute composé de deux villes : la capitale royale
de l’empire, de construction traditionnelle, et à quelque distance une ville
x.com
Son apogée fut vers l’an 1 000 avec le souverain Khaya Maghan Cisse,
et son déclin avec l’invasion almoravide au XIe siècle par Aboubaker Ben
Omar, qui impose l’islam au souverain Tankâminîn.
L’empire est connu par les récits d’Al Bakri (XIe siècle) et Al Idrissi
(XIIe siècle).
0145
0026
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9.16
0.17
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8565
888
418:
dans la capitale, selon Ibn Battûta, qui prétend y être allé lui-même en 1352
ou 1353.
:ENC
mandingues les plus connus de l’époque. Ils sont musulmans, mais la majo-
rité du peuple est restée fidèle aux religions traditionnelles et les empereurs
.scho
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46 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0145
5.3. L’empire Songhaï
0026
Empire Songhaï
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nitra
0145
6. Les royaumes du Kanem – Bornou
0026
Le royaume du Kanem était depuis le VIIIe siècle un État pastoral au
Nord du Lac Tchad, contrôlé par les Zaghawa (de langue nilo-saharienne).
7:17
Il était gouverné depuis 1085 environ, avec le roi Oumé Ibn Selma, par la
dynastie musulmane Saifawa (ou Sayfuwa) : elle introduit l’islam dans le
0.21
Kanem au XIe siècle, selon Al Bakrî. À cette époque, l’influence des Saifawa
s’étend du Fezzan (Sud de la Libye) jusqu’au pays haoussa (Nord du Nigeria).
Le Kanem était spécialisé dans le commerce des esclaves : il entretenait 9.16
0.17
des liens étroits avec l’Egypte d’où il importait des chevaux, qui lui ser-
vaient à razzier les esclaves, qu’il exportait ensuite en Afrique du Nord. Les
6:16
esclaves étaient prélevés au Sud du lac Tchad, où les habitants n’étaient pas
musulmans.
8565
l’État. Au XVe siècle, la capitale est fixée à Gazargamo (dans l’État de Yobé
de l’actuel Nigeria), une grande cité dans une vallée fertile, au débouché
des routes commerciales transsahariennes venant de Tripoli : elle restera la
:211
0145
pour essayer de rallier des partisans qui connaissent l’histoire célèbre de
cet empire, qu’on pourrait qualifier de guerrier, islamiste et esclavagiste.
0026
Néanmoins, cette revendication ne fait pas l’unanimité des spécialistes, qui
7:17
estiment que Boko Haram a d’autres références.
0.21
7. Les royaumes bantous d’Afrique centrale, orientale et
9.16
australe 0.17
appellation provient de la rivière Bénoué, qui indique leur origine dans les
8565
locales, dont les captifs étaient réduits en esclavage pour travailler la terre.
x.com
Le royaume établit une armée centralisée, un système de tribut sur les chef-
feries et une monnaie de coquillages.11
Les Portugais établissent un premier contact en 1483. Ils reviennent en
1485 avec des artisans et des missionnaires et échangent des cadeaux avec
le roi Nzinga Nkuwu, qui sera baptisé Joâo Ier. Son fils Alfonso Ier encourage
le christianisme, les échanges commerciaux se développent avec le Portugal
et les échanges diplomatiques avec des pays européens. Son propre fils
Henrique part faire des études à Lisbonne et à Rome et il deviendra en 1518
le premier évêque catholique subsaharien.
Mais Alfonso s’oppose en 1526 au Portugal sur l’esclavage12, que les
Portugais voudraient exporter pour leur toute nouvelle colonie du Brésil,
et les relations se distendent. Cependant, son successeur Alvaro Ier, menacé
0145
par les Yaka, un peuple de razzieurs nomades qui prennent Mbanza Kongo
en 1568, demande l’aide du Portugal, qui le rétablit au pouvoir en 1571.
0026
Les Portugais créent en 1576 le port de Luanda, juste au Sud du royaume
7:17
du Kongo. À partir de Luanda, ils fondent leur propre colonie, qui devien-
dra l’Angola, et le Kongo tend à devenir de fait un protectorat portugais,
0.21
malgré la résistance de la reine Ana Nzinga (1626-1648). En 1665, les colons
d’Angola veulent s’emparer des mines de cuivre du Kongo et tuent le roi
Antonio Ier. Cependant, le Kongo reste formellement indépendant jusqu’au 9.16
XIXe siècle et échappe aux Portugais à la Conférence de Berlin (1884-1885).
0.17
6:16
Le royaume du Rwanda :
8565
artisans twa (qui seraient d’origine pygmée). Les chefs de clan peuvent être
0773
hutus ou tutsis, mais le clan dominant est dirigé par un Tutsi, considéré
comme roi et assorti d’une cour. Tous parlent kinyarwanda (une langue
:211
et les armées tutsies étendent leur royaume dans toutes les régions et im-
posent aux Hutus un tribut en nature et en corvées en échanges de terres.13
x.com
11. ILIFFE John, Les Africains. Histoire d’un continent, Flammarion, 2009.
larvo
12. John ILIFFE écrit qu’en réalité, Alfonso Ier avait voulu limiter le trafic d’esclaves parce
qu’il échappait à son propre contrôle.
.scho
13. ILIFFE John, Les Africains. Histoire d’un continent, Flammarion, 2009.
www
50 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
mais ils le perdent au profit des Belges par le traité de Versailles (1919). Le
gouvernement belge s’appuie alors sur les autorités et les aristocrates tutsis
du royaume.
On considère souvent aujourd’hui que les colonisateurs allemands, puis
belges, auraient mal compris les structures claniques et privilégié une inter-
prétation ethnique des classes « socioprofessionnelles » de la population. De
fait, les Belges auraient pratiqué une discrimination en favorisant l’accès
des Tutsis à l’éducation et à la fonction publique, accroissant l’antagonisme
avec les Hutus qui existait déjà avant le protectorat.14
Des révoltes hutues contre les Tutsis éclatent en 1959 et, les Tutsis étant
minoritaires, ils sont poursuivis et massacrés, et le gouvernement royal
quitte le pays en 1960 pour l’Ouganda, avec plus de 200 000 Tutsis en exil.
0145
En 1962, la Belgique accorde l’indépendance au Rwanda sous forme d’une
République, alors dominée par les Hutus majoritaires.
0026
L’histoire se répètera à maintes reprises. Les Tutsis exilés veulent reve-
7:17
nir au pays, mais leurs tentatives de retour par la force échouent (malgré
la création en 1987 du « Front patriotique rwandais » – FPR, soutenu par
0.21
l’Ouganda). En dépit de la démocratisation du pays (sous la pression des
partis hutus d’opposition et des bailleurs de la coopération internationale),
ces tentatives de retour entrainent de nouveaux massacres de Tutsis et donc 9.16
de nouveaux exils en 1967, 1973, 1990, 1991, 1992 et 1993, jusqu’au génocide
0.17
de 1994 (au moins 800 000 morts, tutsis et hutus modérés), qui sera arrêté
6:16
tique sous diverses formes, mais d’abord sous l’influence islamique du Sud
de la péninsule arabique (Yémen et Oman) et du golfe Persique (la région
0773
perse de Chiraz). Cela va donner sur les côtes de l’Afrique orientale la « civi-
lisation swahilie ». Le swahili est une langue de structure bantoue, mais
:211
14. Voir VANSINA Jan, Le Rwanda ancien : le royaume Nyiginya, Karthala, 2001.
15. Le mot swahili le plus connu en Europe est « safari » : il vient de l’arabe « safar » qui
.scho
signifie « voyage ».
www
un PAnoRAMA DEs RAcInEs cuLTuRELLEs DE L’AfRIquE 51
0145
même l’Indonésie et la Chine.
0026
On appelait la côte de l’Afrique orientale la
« côte des Zanj » pour désigner la population
7:17
bantouphone. Mais le nom est surtout célèbre
par la révolte de grande ampleur des esclaves
0.21
Zanj dans l’empire abbasside dans la seconde
moitié du IXe siècle, où ils étaient utilisés no-
9.16
Auteur Vincnet G [CC BY-SA
(https://creativecommons.org/ tamment pour mettre en valeur agricole les 0.17
licenses/by-sa/2.5)] marais du Sud de l’Irak.
Sur ce qui est aujourd’hui la côte kenyane, il s’agit de cités-États patri-
6:16
tuelle), il s’agit d’États hiérarchisés, dominés d’abord par Kilwa, puis par
Zanzibar.
888
bois précieux.
Les cités swahilies connaissent un nouvel essor commercial à partir
G Ke
des Ming.
x.com
larvo
16. Voir FAUVELLE François-Xavier (dir.), De l’Acacus au Zimbabwe. 20 000 avant notre
.scho
0145
des Britanniques, qui ont aboli l’esclavage en 1834 et qui contrôlent l’océan
Indien, la traite disparait progressivement, jusqu’à ce que les Britanniques
0026
imposent leur protectorat à Zanzibar en 1890.17
7:17
7.3. L’Afrique australe
0.21
Les royaumes de Mapungubwé, du Grand Zimbabwe et du
Monomotapa :18
Le royaume de Mapungubwé (« la colline aux chacals ») apparaît 9.16
0.17
fin du XIIIe siècle entre les fleuves Limpopo et Zambèze, avec pour capitale
Grand Zimbabwe (qui signifie « maison de pierre »). Il était établi sur le pla-
418:
Les Shonas y construisirent des villes de pierre remarquables, avec des rem-
parts et des tours. Une centaine de sites monumentaux fortifiés avec des
:211
textiles, puis le commerce des esclaves avec les États swahilis de Zanzibar
et de Kilwa.
:ENC
18. Voir ILIFFE John, Les Africains. Histoire d’un continent, Flammarion, 2009.
19. FAUVELLE François-Xavier, Le rhinocéros d’or. Histoires du Moyen Âge africain,
.scho
0145
ruse en 1838. Dans la bataille de Blood River qui s’ensuit avec les Boers de
Pretorius, 3 000 Zoulous sont tués.
0026
Puis, dans la bataille des Boers, cette fois avec les Anglais en 1842,
7:17
Mpande, le demi-frère de Dingane, s’allie aux Anglais vainqueurs.
Son fils Cetshwayo lui succède en 1872 : refusant un ultimatum anglais en
0.21
1878, il est battu dans la bataille qui s’ensuit en 1879. Mais le 1er juin 1879, les
9.16
Zoulous ont tué le prince impérial Napoléon-Eugène, fils de Napoléon III,
qui s’était engagé dans l’armée britannique … Cetshwayo est exilé au Cap,
0.17
mais obtient en 1882 de la reine Victoria d’être réinvesti roi des Zoulous.
6:16
Son fils Solomon crée le mouvement Inkatha Ya Kwa Zulu en 1923. Plus
tard, le prince Mangosuthu Buthelezi fonde le Inkhata Freedom Party en
888
0026
LES PRISES ET EMPRISES EXTÉRIEURES
7:17
0.21
Après un panorama historique des acteurs africains, on aborde ici le
rôle des acteurs extérieurs qui vont chercher à s’approprier l’Afrique ou les
Africains. Par les « prises et emprises extérieures » sur l’Afrique, on veut 9.16
parler ici, non plus des États africains historiques, mais de trois grands
0.17
mouvements distincts, d’origine non africaine, mais qui vont avoir un im-
6:16
mitants.
:ENC
0145
Des forteresses sont bâties sur le fleuve, en points d’appui pour coloniser
l’intérieur du pays.
0026
À cette époque ancienne, la première colonisation est masculine, car
l’environnement sanitaire paraît trop difficile pour les familles portugaises.
7:17
Ce sont donc des militaires, des administrateurs, des commerçants et des
0.21
missionnaires. Du fait de l’expatriation masculine, les Portugais prennent
femme en Afrique (à une échelle qui restera unique pour les Européens) et
9.16
une élite métisse se développe. 0.17
Ces femmes africaines, les Donas, sont souvent privilégiées1 : quand
leur mari meurt (maladies tropicales et paludisme aidant), elles dirigent les
6:16
faire valoir le droit latin de succession par la lignée masculine (qui pourrait
privilégier un fils aîné resté au Portugal). Le métissage peut aussi provenir
888
0145
et même à des royaumes africains locaux dans les provinces éloignées.
0026
1.2. La colonisation hollandaise en Afrique du Sud
7:17
En 1652, 90 Hollandais démarrent l’aventure des Boers en débarquant
au cap de Bonne-Espérance pour le compte de la Compagnie néerlandaise
0.21
des Indes orientales2.
9.16
La région était alors occupée par des peuples « autochtones » d’Afrique
australe, car les Bantous, agriculteurs venus du Nord et arrivés dans la
0.17
région vers l’an 500, trouvaient cette terre inhospitalière avec ses pluies
froides d’hiver (où la température peut tomber à 0°). Il restait donc surtout
6:16
Néanmoins, ils étaient déjà plus ou moins métissés avec des peuples ban-
tous, notamment avec les Xhosa.
888
installèrent de très grandes fermes, dont les limites repoussaient les terres
0773
vaient recourir aux tribus locales avec lesquelles ils étaient en conflit et qui
n’avaient pas d’expérience agricole. Les Hollandais étaient particulièrement
G Ke
durs avec leurs esclaves qui, importés hors du continent, leur coûtaient cher
et qu’ils voulaient rentabiliser au maximum.
:ENC
Dans les années 1700, les Européens les plus pauvres tentèrent leur
chance comme pionniers en se déplaçant vers le Nord dans des chariots
x.com
tirés par des bœufs : ce furent les « Trekboers » (« paysans voyageurs »).
Accompagnés par des hommes armés à cheval, les « commandos », ils vo-
larvo
2. Voir ILIFFE John, Les Africains. Histoire d’un continent, Flammarion, 2009.
www
LEs PRIsEs ET EMPRIsEs EXTéRIEuREs 57
tion des San, dont ils tuaient le gibier, mais ces derniers réussirent à stopper
leur progression, malgré de nombreuses pertes humaines de 1770 à 1800.
D’autres Trekboers, progressant vers l’Ouest, se heurtèrent aux Xhosa et
leur livrèrent quatre guerres de 1779 à 1803.
Ces rudes pionniers se construisirent une nouvelle identité tribale
d’« Afrikaners », tandis que leurs cousins hollandais urbanisés se virent
évincer du Cap par les Britanniques en 1806. Cela eut pour conséquences
d’introduire dans la Province l’anglais comme langue légale, l’église an-
glicane comme confession officielle et surtout l’abolition de l’esclavage
par les Britanniques en 1834. Cela suscita une nouvelle vague de pion-
niers hollandais partant vers le Nord. Il restait alors à ces successeurs, les
« Voortrekkers » (« ceux qui vont de l’avant »), le plus difficile à faire : en
0145
remontant jusqu’au Natal, affronter les armées organisées des Zoulous …
0026
2. L’esclavage et la saignée des traites négrières arabe et
occidentale
7:17
0.21
L’aperçu historique précédent montre que l’esclavage a toujours existé
de façon multiforme en Afrique (comme d’ailleurs dans différentes régions
9.16
du monde à différentes époques). Pour simplifier, on peut distinguer trois
types d’esclavage africain : l’esclavage interne à l’Afrique, la traite dite « ara-
0.17
bo-islamique » et la traite « atlantique ».
6:16
condamne l’esclavage en 1222 au Mali, mais ce n’est pas pour autant qu’il
418:
0145
Dahomey (XVIIe au XIXe siècles, au Bénin actuel), État militariste connu
pour son fameux corps d’amazones, « tous les esclaves capturés apparte-
0026
naient au roi et ils étaient traités avec une extrême cruauté ».4 Ils étaient par
centaines les premières victimes des sacrifices humains lors des « coutumes
7:17
annuelles » et a fortiori lors des « grandes coutumes » pour les funérailles
d’un souverain.
0.21
Le royaume voisin d’Ashanti (État akan du XVIIe au XXe siècles, avec
9.16
pour capitale Kumasi au Ghana actuel), également très militariste, exigeait
1 000 esclaves par an des peuples tributaires non akans.
0.17
tion » vers les pays arabes ou l’Amérique, notamment celle pratiquée par
les royaumes du Kanem-Bornou pour la traite « islamique » et celle des
8565
Mais de ce fait, les corporations d’artisans investies par les esclaves se sont
trouvées socialement dévalorisées : elles sont passées d’un statut de maîtres
nitra
africains qui étaient (sont encore pour une part) divisés en castes, en parti-
culier les Toucouleurs (Peuls métissés) : castes nobles, castes de métiers et
:ENC
castes de captifs.
De plus, l’abolition de la traite atlantique, la plus « industrielle », a
x.com
18 janvier 2016.
www
LEs PRIsEs ET EMPRIsEs EXTéRIEuREs 59
0145
africains, ou par des razzias, quelquefois directement par les trafiquants
arabes, ou sous-traitées à des tribus africaines.
0026
La traite avait ensuite deux voies : terrestre par le Sahara ou maritime
par l’océan Indien (notamment par Zanzibar) et la mer Rouge. Par la voie
7:17
saharienne, les esclaves étaient attachés à pied à la queue des dromadaires
et beaucoup mouraient d’épuisement et/ou de soif conjugués.
0.21
Pour la voie maritime, Zanzibar était une possession omanaise qui
devint un grand marché aux esclaves (en plus de ceux employés dans les 9.16
plantations de l’île), d’où ils étaient redistribués dans les navires des ache-
0.17
teurs. Cette activité était devenue telle pour le royaume d’Oman qu’en 1861
6:16
pour être serviteur dans une maison où il y avait des femmes) : leur prix de
vente était beaucoup plus élevé que celui des esclaves « mâles », utilisés pour
:211
(les premiers prétendant n’en être pas les acteurs, et les seconds n’en être
pas les responsables …). Des lieux spécialisés pour la castration existaient,
x.com
notamment dans le pays galla (au Sud de l’Ethiopie), d’où les esclaves repar-
taient par le port de Tadjourah (aujourd’hui en République de Djibouti),
larvo
0145
Dans la pratique, la traite arabe se poursuivit jusqu’au début du XXe siècle
à un moindre degré, notamment par la voie saharienne. Marrakech était un
0026
important marché aux esclaves (en grande majorité subsahariens) jusqu’à
ce que les autorités du Protectorat français ne le ferment en 1920 et l’in-
7:17
terdisent réglementairement au Maroc à partir de 1922. Antoine de Saint-
0.21
Exupéry témoigne encore en 1927 de l’esclavage noir à Tarfaya, au Sud du
Maroc.
La traite « arabe » aurait représenté environ 15 millions de personnes 9.16
0.17
déportées. Tidiane N’Diaye la chiffre même à 17 millions.
Bien que moins « industrielle » que la traite atlantique, elle a représenté
6:16
davantage de victimes car elle s’est étalée sur une période beaucoup plus
8565
mique » soit peu évoquée en Afrique, en tout cas beaucoup moins que la
418:
pays arabes comme les pays africains sont membres du « Groupe des 77 aux
Nations unies », où s’exprime une autre solidarité, celle des pays « en déve-
nitra
loppement ».
G Ke
Les Portugais en furent les initiateurs dès le XVe siècle. Leurs premières
tentatives allèrent du Nord vers le Sud le long de la côte atlantique. Ils com-
x.com
mencèrent des échanges avec les Maures, qui étaient depuis longtemps
spécialistes de la traite « arabe » transsaharienne. Plus au Sud, ils échan-
larvo
gèrent avec les aristocrates wolofs (au Sénégal actuel), à raison en moyenne
de 10 esclaves contre un cheval ! Ils poursuivirent au Kongo, jusqu’à leur
.scho
différend avec le roi Alfonso. Enfin, au XVIe siècle, les Portugais engagent
www
LEs PRIsEs ET EMPRIsEs EXTéRIEuREs 61
0145
ment) d’une certaine « complémentarité », mais elle était réduite dans la
mesure où, pour l’essentiel, les espaces géographiques et temporels n’étaient
0026
pas les mêmes (la traite « arabe » étant surtout à l’Est du continent et la
traite « atlantique » surtout à l’Ouest, et la traite occidentale ayant été beau-
7:17
coup moins longue).
0.21
La traite atlantique a représenté environ 11 millions de déportés, selon
des estimations relativement convergentes, comme par exemple la suivante :
XVII : 1601-1700
e
1 252 800
XVIIIe : 1701-1800 6 096 200
888
La traite était abolie (par les Français d’abord en 1794, puis, après son
:ENC
8. ELTIS D., The volume and structure of the transatlantic slave trade: a reassessment,
.scho
0145
naire du XIXe siècle au Sierra Leone auprès de 177 esclaves sur l’origine de
leur asservissement : 34 % déclarèrent avoir été capturés dans des guerres
0026
locales, 30 % « kidnappés », 11 % condamnés à l’esclavage par une décision
de justice de leur État ou chefferie, 7 % vendus pour payer leurs dettes …
7:17
Sur l’ensemble, 30 % avaient d’abord été esclaves d’Africains et non capturés
pour « l’exportation ».
0.21
L’organisation de la traite atlantique se faisait par deux moyens : soit, de
9.16
façon « industrielle », les autorités africaines permettaient aux compagnies
européennes d’utiliser des ports où les esclaves étaient amenés, détenus,
0.17
vendus puis embarqués. Soit les navires européens faisaient du cabotage
pour recueillir des groupes d’esclaves amenés sur la côte par des trafiquants
6:16
et ceci souvent au détriment des peuples qui n’avaient pas d’État pour les
protéger des razzias.
888
Quant aux destinations, les principales étaient les îles Caraïbes (au sens
418:
• 4 millions au Brésil ;
nitra
0145
arabe et atlantique et les facteurs successifs de mortalité. Il faut y ajouter
le déficit correspondant de naissances en Afrique, évidemment non mesu-
0026
rable génération après génération.
On estime par exemple que de 1650 à 1750, la traite a fait baisser la popu-
7:17
lation en Afrique subsaharienne d’environ 100 millions à 95 millions d’ha-
0.21
bitants, alors que la croissance naturelle aurait pu l’amener aux environs
de 150 millions en 1750. Pour l’Afrique occidentale, cette perte était plus
marquée, puisque cette période correspond à la concentration de la traite
9.16
atlantique. L’Angola en particulier a été la grande victime démographique,
0.17
dingue.
0773
giste notoire » selon Tidiane N’Diaye), qui vendit des milliers d’esclaves aux
grandes fermes du Sénégal et de Gambie qui développaient l’arachide. De
:ENC
même, le pays mossi (au Burkina Faso actuel) s’enrichit d’esclaves vendus
au Sud au royaume ashanti (Ghana), et le royaume bamoum (au Cameroun)
x.com
0145
Vingt ans plus tôt, Faidherbe avait fait des avancées au Sénégal, où des
0026
marins de Dieppe avaient fondé Saint Louis dès 1659. En 1883, des mili-
taires français poussèrent jusqu’au fleuve Niger à Bamako. En 1882, un sou-
7:17
verain établi sur le fleuve Congo cédait ses droits héréditaires à l’explora-
teur français Savorgnan de Brazza, mais le roi Léopold II de Belgique avait
0.21
utilisé sa fortune personnelle depuis 1876 pour fonder des comptoirs sur le
bas Congo. Les Français avaient établi un protectorat sur la Tunisie en 1881,
après avoir déjà conquis l’Algérie. Bismarck, profitant d’une querelle entre 9.16
les rivaux français et anglais, avait autorisé en 1884 la création de protecto-
0.17
tout cela …
La conférence de Berlin (novembre 1884 – février 1885), où Bismarck
8565
11. Cette section s’appuie notamment de façon synthétique sur ILIFFE John, Les Africains.
.scho
0145
farouchement jusqu’en 1898. Ils partent ensuite à la conquête du Tchad,
acquise en 1900.
0026
Plus à l’Est, le Mahdi soudanais s’était soulevé contre la domination
égyptienne en 1881 et avait fondé un régime théocratique en prenant
7:17
Khartoum en 1884. En 1898, les Anglais le soumettent à Omdurman (en
face de Khartoum) et contrôlent le Soudan. Ils auront un protectorat sur
0.21
l’Egypte de 1914 à 1922, mais maintiendront leur influence jusqu’en 1956.
9.16
Les Italiens colonisent l’Erythrée en 1889, mais se cassent les dents en 1896
sur l’empire chrétien d’Ethiopie de Ménélik à la bataille d’Adoua. Avec la
0.17
Libye et une partie de la Somalie, ils se contenteront de pays quasi-déser-
tiques.
6:16
le plus dur à faire : la seconde guerre des Boers (1899-1902), qui leur fut
extrêmement couteuse en soldats et en finances, pour s’assurer le contrôle
nitra
1919, les Diolas du Sénégal (en Casamance) dans les années 1920, la révolte
www
66 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0145
Portugal (avec la politique de « luso-tropicalisme », alliée à la tradition ma-
trilinéaire des pays colonisés).
0026
L’administration directe fut notamment pratiquée par la France et la
Belgique : les royaumes et chefferies traditionnelles étaient ignorés, la hié-
7:17
rarchie coloniale s’imposait avec ses administrateurs européens et des chefs
de canton qui étaient souvent choisis parmi les Africains, notamment les
0.21
anciens soldats qui avaient participé à la Première Guerre mondiale aux
9.16
côtés des Français. Les chefs de canton eux-mêmes supervisaient les chefs
de village.
0.17
fut d’abord testée sur l’ancien Califat de Sokoto au Nord du Nigeria, qui
avait été érigé au XIXe siècle par un prédicateur peul soufi (de la confrérie
8565
Qadiriyya), Ousmane dan Fodio. Le califat s’appuyait sur des émirs qui di-
rigeaient les provinces. Les Britanniques abolirent le califat, mais gardèrent
888
pouvoirs exécutifs et judiciaires ; il levait des impôts, dont une part devait
0773
confédération ashanti fut même restaurée en 1935. Cela fut aussi testé avec
le royaume du Buganda (Ouganda), mais cela s’avérait plus difficile dans
:ENC
0145
Portugal a maintenu ses colonies africaines plus tardivement que les autres
puissances, mais n’explique pas pourquoi la décolonisation portugaise s’est
0026
faite par des conflits militaires sanglants avec les mouvements indépendan-
tistes des pays africains concernés …
7:17
Le développement économique supposait en priorité des construc-
0.21
tions et les moyens de faire circuler, d’importer ou d’exporter les équipe-
ments, minerais, produits agricoles et marchandises ; le chemin de fer et
9.16
la construction d’autres infrastructures et bâtiments furent donc souvent
l’une des priorités coloniales. Avec les difficultés de transport des équipe-
0.17
ments, qui requéraient des porteurs avant la construction des routes et des
chemins de fer, tout cela se traduisit par l’instauration du travail forcé. Les
6:16
Français exigeaient des hommes 12 jours de travail non payé par an, les
8565
Britanniques jusqu’à deux mois par an, et les Belges 40 heures par mois
au Congo. En Afrique équatoriale, où l’environnement physique était plus
888
critiqué que ce chemin de fer fut accusé de sortir les richesses minérales
du Congo sans développer ses peuples. La construction du chemin de fer
0773
Nairobi – Mombasa au Kenya se fit aussi dans des conditions très sévères.
:211
Le travail forcé imposé par les Allemands en Namibie fut l’une des raisons
de la révolte des Herero en 1904. La répression allemande, menée avec des
G Ke
0145
maladies (dont certaines importées d’Europe contre lesquelles les Africains
n’étaient pas immunisés) entraînent une crise démographique. Même si elle
0026
est mal cernée statistiquement, il y a eu une baisse de population en Afrique
équatoriale.
7:17
Le développement social est apparu dans un second temps : l’éduca-
0.21
tion, même inégale et partielle, et la santé apportent des progrès : la morta-
lité recule, mais pas la natalité, et la démographie s’emballe !
Les missionnaires chrétiens furent les pionniers de l’éducation de type 9.16
0.17
européen. L’association du christianisme et de l’éducation entraîna simul-
tanément une forte conversion chrétienne des jeunes. Les progrès du chris-
6:16
des femmes.
888
Mais dans les colonies françaises, les autorités étant anticléricales, elles
refusèrent l’assistance missionnaire et l’éducation primaire prit du retard :
418:
cèrent dans la médecine préventive dans les années 1930. Les vaccinations
collectives permirent de faire cesser la variole, qui tuait en masse. L’hygiène
:ENC
Entre les deux guerres, la population totale de l’Afrique crût à une vi-
tesse elle-même croissante. Au moment de la Seconde Guerre mondiale, elle
larvo
0145
dique et du champ politique.
sur le plan juridique, le concept de crime contre l’humanité s’appa-
0026
rente à un crime de masse, c’est-à-dire un crime (meurtre, torture, viol,
disparition forcée, esclavage, apartheid, déportation, détention arbi-
7:17
traire …) commis sur ordre (en principe d’un état) contre une popula-
tion civile (nation, communauté ethnique, politique ou religieuse, voire
0.21
collectivité locale …). ceci englobe donc le génocide, mais avec une
qualification plus large des crimes visés. Par ailleurs, ces crimes sont
imprescriptibles et peuvent même être jugés rétroactivement à la loi. 9.16
0.17
créée en 1945 par le statut du Tribunal de nuremberg, cette incri-
mination a été progressivement précisée et s’inspire de l’article 7 du
6:16
nale. Il n’est pas douteux que, selon cette définition, des crimes contre
l’humanité aient été commis par différents colonisateurs européens en
888
ces pratiques ont par ailleurs été reprises par un certain nombre
d’états africains indépendants dans des guerres civiles ou la répres-
0773
de 1989 à 2019.
G Ke
0145
teur …
0026
Il faut y ajouter les infrastructures apportées par la colonisation :
écoles, lycées et universités ; hôpitaux et centres de santé ; aménage-
7:17
ment urbain ; routes, voies ferrées, ports et aéroports ; réseaux d’eau
potable, d’assainissement, d’électricité et de télécommunications ; bar-
0.21
rages et bassins agricoles irrigués ; usines et autres entreprises dont
certaines tournent toujours soixante ans plus tard …
Plus encore (car il s’agit d’une dimension culturelle très importante), 9.16
0.17
la majorité de ces états ont adopté la langue du colonisateur comme
langue officielle (pour les raisons majeures qu’elle sert de langue
6:16
Les pays indépendants n’ont pas rejeté les religions importées par les
colonisateurs européens : sauf dans les pays qui étaient déjà musul-
0773
Enfin, ils n’ont pas rejeté non plus à leur indépendance l’aide publique
des ex-puissances coloniales, qui a souvent décru très progressivement,
nitra
« Les peuples d’Afrique ont vécu une terrible violence du fait colonial
avec des morts, des expropriations, des privations de liberté et sur-
.scho
0145
pitaux censées extirper des aspects positifs d’une horreur. Je partage
l’avis de l’historienne sylvie Thénault qui juge “indécent” de mettre sur
0026
une même balance, d’un côté, les massacres, exécutions sommaires et
tortures, et, de l’autre, des routes jugées comme un bilan positif d’un
7:17
asservissement abominable des peuples d’Afrique ...
Aimé césaire disait donc : “On me lance à la tête des faits, des statis-
0.21
tiques, des kilométrages de routes, de canaux, de chemin de fer. Moi,
9.16
je parle de milliers d’hommes sacrifiés au Congo-Océan. Je parle de
ceux qui, à l’heure où j’écris, sont en train de creuser à la main le port
0.17
d’Abidjan. Je parle de millions d’hommes arrachés à leurs dieux, à leur
terre, à leurs habitudes, à leur vie, à la vie, à la danse, à la sagesse. Je
6:16
barbarie intolérable …
418:
3 octobre 2019.
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72 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0145
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:ENC
x.com
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CHAPITRE 5
0026
LES INDÉPENDANCES
7:17
0.21
Dans une large mesure, le système colonial portait ses propres contradic-
tions en lui-même. Sa mission « civilisatrice » prônait la démocratie, mais
la colonisation n’était pas démocratique. Elle impliquait l’éducation, mais 9.16
celle-ci permettait de voir l’écart entre les valeurs promues et celles appli-
0.17
ron 70 ans.
418:
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CHAPITRE 5
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LES INDÉPENDANCES
7:17
0.21
Dans une large mesure, le système colonial portait ses propres contradic-
tions en lui-même. Sa mission « civilisatrice » prônait la démocratie, mais
la colonisation n’était pas démocratique. Elle impliquait l’éducation, mais 9.16
celle-ci permettait de voir l’écart entre les valeurs promues et celles appli-
0.17
ron 70 ans.
672:
0856
0347
enfants pour leurs vieux parents. Le taux de natalité a même augmenté car
les antibiotiques réduisent les facteurs de stérilité. Ceci entraîne la crois-
0026
sance démographique la plus rapide que le monde ait jamais connue. Ce
sera aussi un facteur d’indépendance ...
7:17
Globalement, les leaders intellectuels africains poussent à l’indépen-
dance et sont pressés de prendre le pouvoir. De leur côté, les gouverne-
0.21
ments européens commencent à trouver que la colonisation devient trop
9.16
lourde : il y a trop de populations à administrer et à soigner, trop d’écoles
à ouvrir sans cesse ; la population qui est en retard de développement, per-
0.17
çue à charge, devient beaucoup plus importante que celle de la métropole
européenne. En 1900, la population des pays colonisateurs était comparable
6:16
à celle des pays africains colonisés ; en 1960, elle n’en est plus que la moitié
environ (l’Allemagne, fort peuplée, ayant par ailleurs quitté la scène afri-
8565
niste (on est alors en pleine période de « guerre froide ») ? Dans quelles
conditions les entreprises européennes pourront-elles rester ou commercer
G Ke
en Afrique ? Par suite, les indépendances font dans la plupart des cas l’objet
de négociations avec les futurs dirigeants africains, sauf quand les pays eu-
:ENC
ropéens n’y sont pas encore prêts (Portugal) ou quand il s’agit d’une colonie
de peuplement (Algérie, Rhodésie du Sud).
x.com
0347
Mozambique) et 1975 (Angola).
Mais néanmoins le processus a parfois entraîné des conflits sanglants
0026
avec les mouvements d’indépendance (liés dans certains cas au bloc socia-
liste) :
7:17
• à Madagascar, avec le Parti Nationaliste Malgache (PANAMA) et
la Jeunesse Nationaliste (JINA), qui entrent en lutte armée pour l’indé-
0.21
pendance en mars 1947 : il y aura des dizaines de milliers de victimes ;
9.16
• en Algérie, avec le Front de Libération Nationale (FLN), par une
guerre cruelle de 1954 à 1962, qui fut très meurtrière ;
0.17
des émeutes éclatent à Douala et dans les grandes villes en mai 1955,
suivies de la création de maquis pour l’indépendance en fin 1956 : une
8565
l’armée française2 ;
• en Guinée Bissau, avec le Parti Africain pour l’Indépendance de
672:
16 ans qui aurait fait un million de morts jusqu’en 1992. Elle sera sui-
vie d’une longue période de conflits et de déplacements de populations
:ENC
0347
nomiques qui émergent assez rapidement, elle a aussi connu des difficultés
et des crises.
0026
La volonté d’unité dans des frontières souvent artificielles, avec le souci
7:17
au départ d’éviter les oppositions ethniques, entraîne parfois l’instauration
de partis uniques et de pouvoirs autoritaires. Mais la paysannerie reste pour
0.21
partie sous contrôle des chefferies traditionnelles.
9.16
Le contexte de la « guerre froide » tend à situer les pays du côté occi-
dental (par exemple : Sénégal, Côte d’Ivoire, Kenya …) ou du côté sovié-
0.17
tique (par exemple : la Guinée de Sékou Touré de 1958 à 1984, le Ghana de
Nkrumah de 1960 à 1966, l’Ethiopie sous Mengistu de 1975 à 1991, le Bénin
6:16
1975 …).
Des coopérations différentes se nouent ainsi, privilégiant soit l’ancien
888
ration soviétique, de l’Europe de l’Est ou cubaine, soit encore les deux types
de coopérations à la fois (cas de l’Algérie par exemple).
:211
Par ailleurs des crises très graves surgissent dans certains pays, notam-
ment des guerres sécessionnistes :
nitra
0347
Liberia (1989-1997 et 1999-2003) pour des raisons ethniques et une autre en
Sierra Leone (1991-2002) pour le contrôle des zones diamantifères.
0026
7:17
2. Le projet panafricain
0.21
Le panafricanisme est né notamment de Kwame Nkrumah (1909-1972),
philosophe marxiste et homme politique ghanéen. Après des études aux
USA et à Londres, il rentre en politique en Côte d’Or et y fonde en 1949 9.16
0.17
le Convention People’s Party (CPP). Emprisonné par les Britanniques, il
gagne les élections législatives internes en 1956, obtient l’indépendance en
6:16
Sankara (1983-1987), qui a changé le nom de la Haute Volta, sera aussi l’un
des leaders du panafricanisme. L’OUA deviendra, par la Déclaration de
.scho
0347
(Tanzanie).
L’Union Africaine a perdu le caractère un peu révolutionnaire de ses
0026
fondateurs. Bien que lourde comme toute organisation internationale sou-
mise à des influences contradictoires et qui privilégie le consensus, elle est
7:17
aujourd’hui perçue comme une institution politiquement équilibrée et in-
fluente. Elle a souvent un rôle de médiation dans la résolution des conflits et
0.21
tend au respect des règles de droit et de démocratie, notamment le respect
9.16
des résultats des élections par ses États membres.
De plus, les chefs d’États africains ont signé en 2018 l’accord de création
0.17
chés. La ZLECA sera cependant longue à mettre en œuvre car elle suppose
de nombreux accords sur les règles douanières, les normes commerciales,
672:
L’objet n’est pas ici de citer ces affaires en détails (pour peu que ces
.scho
0347
Mitterrand. Emmanuel Macron semble le premier Président français à vou-
loir rompre clairement avec ce système.
0026
Celui-ci a prodigieusement agacé les Ministères français de la
Coopération et des Affaires étrangères (le premier ayant été fondu ensuite
7:17
dans le second) qui se sentaient doublés par une diplomatie parallèle faite
d’intermédiaires quelquefois douteux, voire même parfois par des merce-
0.21
naires, mais pilotés (ou tolérés selon les cas) par l’Elysée et son conseiller
aux affaires africaines.
Sur le plan politique, cela a abouti à maintenir, par des manœuvres élec- 9.16
0.17
torales ou des interventions militaires ponctuelles, des dirigeants africains
corrompus ou dictatoriaux, mais considérés comme des appuis fidèles de la
6:16
les Britanniques ou les Américains, ont pu être aussi d’une ambiguïté grave
dans des pays extérieurs à la colonisation française. Par exemple, le sou-
:ENC
2016.
4. Lire notamment : VERSCHAVE François-Xavier, La Françafrique : le plus long scandale
.scho
0347
aux Chefs d’États africains réunis à La Baule par François Mitterrand en
1990 ne l’a pas empêché d’influencer par des voies parallèles les pays fran-
0026
cophones du continent (notamment par l’entremise de Jean-Christophe
Mitterrand, surnommé « Papa m’a dit ») et d’y conduire un grand nombre
7:17
d’interventions militaires (souvent très ponctuelles).
0.21
Il importe de saisir l’impact négatif de cette politique à de nombreux
égards dans la perception des populations africaines qui ont eu le sentiment
d’une protection de Chefs d’État autoritaires, corrompus ou dictatoriaux, 9.16
0.17
d’un manque de transparence dans l’attribution des grands marchés aux
groupes français, et d’un post-colonialisme par les interventions politiques
6:16
ou militaires.
De fait, la « Françafrique » n’existe plus guère aujourd’hui pour deux
8565
raisons principales :
888
et parfois chez les populations des rumeurs incontrôlées. On le voit bien par
exemple en 2019 dans les réactions négatives à l’opération « antiterroriste »
:ENC
0347
fois meurtrière par les batailles de conquêtes. Elle en est sortie vaincue
et donc humiliée. Elle a connu le travail forcé, une forme de servage :
0026
même s’il n’était que sur des périodes limitées et espacées, beaucoup en
sont morts d’épuisement, de maladies ou d’accidents dans les grands
7:17
travaux. D’autres sont morts en Europe sur les champs de bataille de la
0.21
Première Guerre mondiale. Cette génération a souffert aussi des mala-
dies importées par les Européens ;
9.16
• la seconde génération a connu une période moins défavorable, avec
le développement des infrastructures, de la santé et de l’éducation et de
0.17
nouveaux types d’emplois, publics ou privés. Mais elle a intégré les souf-
frances de ses parents et elle a été déséquilibrée, voire écartelée, entre
6:16
guerre d’indépendance.
0856
plorer pour travailler au contact d’autres cultures, Editions Charles Léopold Mayer, 2014.
www
82 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0347
ethniques traditionnelles (notamment entre pasteurs nomades et agricul-
teurs sédentaires) pour créer des situations de guerre civile et de chaos. La
0026
force française, bien qu’elle soutienne les forces malienne et burkinabé et la
force africaine conjointe du G5 Sahel en cours de mise en place, est régu-
7:17
lièrement conspuée dans des manifestations à Bamako ou à Ouagadougou,
0.21
qui semblent la considérer comme une force coloniale ...
Il est vrai qu’il y a eu des précédents très fâcheux, comme indiqué à pro-
pos de la « Françafrique », notamment à la demande du président camerou- 9.16
0.17
nais Ahidjo dans les années 1960. Mais cet épisode brutal de coopération
militaire postcoloniale, qui violait les droits de l’homme, ne semble pas du
6:16
une « guerre perdue », dans laquelle la France est souvent mal perçue pour
sa collaboration, voire son sauvetage, au profit d’un gouvernement corrom-
672:
sur des populations civiles, abandon de zones critiques par les officiers et
des zones rurales par les fonctionnaires maliens. On pourrait y ajouter la
:211
d’aboutir tant que n’auront pas été réglés les véritables problèmes de l’État
malien, qui tiennent à son mode de gestion prédateur de l’accès à la terre et
x.com
aux ressources naturelles ». La France y est piégée dans une situation inso-
luble : elle ne veut ni ne peut être « néocoloniale » en décidant à la place des
larvo
Lattès, 2020.
www
LEs InDéPEnDAncEs 83
autorités maliennes, mais elle est accusée de l’être parce que de facto elle
leur permet de se maintenir au pouvoir.
Ainsi, cette sensibilité soupçonneuse à l’égard d’un néocolonialisme
présumé demande, aujourd’hui encore, bien des qualités diplomatiques aux
intervenants européens en Afrique.
0347
0026
7:17
0.21
9.16
0.17
6:16
8565
888
672:
0856
:211
nitra
G Ke
:ENC
x.com
larvo
.scho
www
0347
CHAPITRE 6
0026
LES ÉVOLUTIONS RELIGIEUSES
7:17
0.21
L’Afrique n’a pas abandonné ses religions traditionnelles. Mais, ayant
très largement adopté des religions monothéistes, elle les accompagne géné-
ralement de croyances ou au moins de cultes traditionnels, surtout avec le 9.16
0.17
christianisme, qui est plutôt moins exclusif que l’islam.
6:16
on peut s’adresser à eux par des rites adaptés, et ils peuvent même revenir
0856
(l’eau, la forêt ou la savane, la fertilité des champs ou des femmes …), aux-
quelles on peut s’adresser par l’intercession des ancêtres.
nitra
dont l’homme n’est pas le centre comme dans la pensée occidentale. Les
ancêtres et les esprits qui peuplent les forêts et les bois sacrés forment un
:ENC
forêts sacrés, qui sont strictement protégés ou interdits d’accès aux non-
initiés, des écologistes s’efforcent aujourd’hui de s’inspirer de cette sagesse
larvo
sible et l’invisible : par exemple, pour les Fon (Bénin, Nigeria), le python est
www
LEs éVoLuTIons RELIgIEusEs 85
un animal sacré qu’il ne faut pas tuer, mais parfois au contraire entretenir
rituellement, comme les pythons sacrés de Ouidah (Bénin).
Le poète sénégalais Birago Diop exprime bien cette présence des morts
et des autres esprits dans un poème intitulé « le Souffle des Ancêtres » dans
le recueil Leurres et lueurs1, qui commence ainsi :
« Ecoute plus souvent
Les choses que les êtres,
La voix du feu s’entend,
Entends la voix de l’eau.
Ecoute dans le vent
Le buisson en sanglot :
0347
C’est le souffle des ancêtres.
0026
Ceux qui sont morts ne sont jamais partis :
Ils sont dans l’ombre qui s’éclaire
7:17
Et dans l’ombre qui s’épaissit.
0.21
Les morts ne sont pas sous la terre :
Ils sont dans l’arbre qui frémit,
Ils sont dans le bois qui gémit, 9.16
0.17
Ils sont dans l’eau qui coule,
Ils sont dans la case,
6:16
est l’intermédiaire essentiel entre les dieux et les hommes, par l’entremise
des prêtres.
G Ke
Mami Wata est une déesse populaire de la mer, parfois décrite sous
forme de sirène ou de très belle femme, vénérée et crainte, que l’on retrouve
:ENC
d’intercéder auprès d’elle pour s’enrichir ou trouver l’amour, alors que les
.scho
pêcheurs et les baigneurs craignent qu’elle ne vous engloutisse sous ses flots
dangereux.
Dans les croyances traditionnelles, la religion vaudou s’accompagne
d’une sorcellerie et, en contrepartie, d’une médecine traditionnelle. On dis-
tinguerait ainsi trois types de rituels : la « magie noire » (sorcellerie mal-
veillante, avec par exemple les « poupées vaudou » pour piquer à distance
sa victime), la « magie blanche » (médecine traditionnelle ou guérison de
la « magie noire ») et la « magie rouge » (supposée favoriser l’amour). On
reviendra dans un chapitre ultérieur sur ces fonctions de sorcier et de gué-
risseur.
Le syncrétisme des religions traditionnelles avec les religions mono-
théistes est très fréquent, surtout avec le christianisme en Afrique centrale
0347
(l’islam étant en principe farouchement opposé à ce qu’il considère être
de l’idolâtrie). Dans un pays comme le Bénin, on pourrait avoir à la fois
0026
une majorité de chrétiens (53 %) et une majorité d’adeptes du vaudou s’il en
existait une statistique crédible, mais le total dépasserait les 100 % s’il fallait
7:17
les distinguer ...
0.21
Les « marabouts » que l’on trouve en Afrique de l’Ouest sont en prin-
cipe des théologiens de l’islam auxquels on vient demander des conseils
religieux. Mais ces derniers vont bien au-delà des préceptes de l’islam et 9.16
0.17
concernent la vie familiale et amoureuse, les études et les succès aux exa-
mens, la santé et les remèdes à la sorcellerie … S’adaptant à leurs « clients »,
6:16
les marabouts enrobent dans les principes de l’islam et dans les pages du
Coran des talismans et autres objets pieux ou « magiques », ce en quoi ils
8565
nier est très différent du christianisme antique et, du côté protestant, il fait
l’objet actuellement d’une diversification déconcertante.
nitra
2.1. Le judaïsme
G Ke
tion du Temple de Jérusalem par les Romains en l’an 70, qui entraîna une
vaste dispersion des juifs. La plupart empruntèrent alors les voies de l’em-
x.com
sait de juifs ayant acquis une langue berbère (car, en principe, le judaïsme
www
LEs éVoLuTIons RELIgIEusEs 87
0347
France au moment des indépendances d’Afrique du Nord. Il en fut de même
pour les Falashas d’Ethiopie : Israël organisa deux vagues de « retour » vers
0026
la Terre sainte : les opérations Moïse en 1984 pour 16 000 juifs éthiopiens
et Salomon en 1991 pour 14 000 autres. Il reste toujours des Falashas en
7:17
Ethiopie, qui souvent aspirent au départ en Israël.
0.21
2.2. Le christianisme antique
Il s’est développé dans les premiers siècles de notre ère dans sa compo- 9.16
0.17
sante latine (celle gouvernée par le pape de Rome) au Maghreb, où il a qua-
siment disparu, et dans sa composante monophysite, en Egypte, au Soudan,
6:16
Tertullien (né vers 150, mort vers 220), originaire d’une famille berbère
païenne, vivait à Carthage : il est le premier théologien latin à développer le
672:
concept de Trinité.
0856
2. Les Eglises copte et arménienne sont les deux plus importantes Eglises monophysites.
www
88 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0347
le descendant de l’union du roi Salomon et de la reine de Saba, donc héritier
d’Israël et élu de Dieu, comme le christianisme est issu du judaïsme.
0026
Grand protecteur et donateur de l’Eglise, le souverain a donné son nom
au site extraordinaire de Lalibela où sont creusées dans le roc douze églises
7:17
« rupestres » entourées de leur place sur le pourtour, chacune d’entre elles
étant ensuite évidée artistiquement pour accueillir les fidèles à l’intérieur.
0.21
Marque à la fois d’un royaume florissant et d’une foi populaire enraci-
9.16
née, ce site est évidemment inscrit aujourd’hui au patrimoine mondial
de l’UNESCO. L’expansion du royaume chrétien fut poursuivie par le roi
0.17
Amda Seyon (1314-1344), aux dépens des sultanats musulmans de la région,
parfois soutenus par des armées venues de la péninsule arabique.3
6:16
4. Les écoles juridiques du sunnisme se distinguent surtout par les sources de l’islam
qu’elles estiment légitimes : ainsi, les écoles malékite et hanéfite sont considérées comme
plus ouvertes, car elles reconnaissent comme sources (dans l’ordre hiérarchique) le
larvo
Coran, les Hadith (la vie et l’enseignement du Prophète tels que rapportés par ses com-
pagnons), le consensus des savants musulmans et, si besoin, l’opinion personnelle, pour
.scho
juger des situations non codifiées, par le « raisonnement analogique » (comment aurait
www
LEs éVoLuTIons RELIgIEusEs 89
0347
confréries sont conservatrices et soutiennent le pouvoir en place.
0026
Les médias jouent le jeu des confréries : les magnats de la presse
financent des mosquées et les prêcheurs sont invités par les télévi-
7:17
sions et les radios. Les chancelleries occidentales adoubent aussi les
confréries car elles les voient comme un rempart contre le djihadisme.
0.21
seuls les salafistes d’Ibadou Jaamatou Rahmane (« association des
serviteurs de Dieu ») critiquent de front les confréries parce qu’elles
9.16
produisent des intermédiaires indus entre Dieu et l’homme (les mara-
bouts) et, selon eux, une forme d’idolâtrie par le culte rendu à leurs
0.17
mausolées.
6:16
semghun (dans le sud algérien, non loin de figuig au Maroc), qui lui
nitra
réagi le Prophète dans cette situation). L’école shaféite, dont le cœur doctrinal est l’Uni-
G Ke
versité Al-Azhar du Caire, ne reconnait pas l’opinion personnelle et est donc considérée
comme moins ouverte.
Le soufisme est la tendance mystique de l’islam, qui se pratique généralement dans le
:ENC
cadre de confréries, lesquelles organisent souvent des rites annuels religieux et festifs.
5. Voir THERY Benoît, « Les enjeux interculturels des investissements du Maroc en
Afrique de l’Ouest », in Actes du colloque « Voix africaines, voies émergentes », Université
x.com
Paris-Diderot, 22-24 mai 2018, à paraître chez les Archives contemporaines, coll.
« InterCulturel », 1er semestre 2020.
6. SECK Adourahmane, « L’islam au Sénégal : actualité et devenir », conférence à l’Ecole
larvo
0347
l’ouest), des hanbalites (en Algérie et en Arabie saoudite) ou des
hanéfites (Egypte) ; elle s’est même ouverte aux shiites.
0026
Pour la Tijaniya, la voie la plus directe à Dieu est donc le wird tijani,
qui préconise l’invocation continuelle de Dieu, la bénédiction de son
7:17
prophète, la récitation du coran, l’accomplissement en groupe des
cinq prières … cette doctrine très simple devint vite populaire auprès
0.21
des populations berbères, puis africaines, auxquelles elle promet le
9.16
pardon des péchés, la clémence divine et une place au paradis.
Les 21 compagnons d’Ahmed Al Tijani et ses 43 successeurs diffusent
0.17
0347
Mecque ou, pour certains, le remplacer. à fès, Ahmed al-Tijani, repré-
sentant le Prophète, offre au pèlerin son intercession auprès de Dieu.
0026
on prie selon le rite tijane et l’on fait des vœux. La ziyara (pèlerinage)
implique également des dons, faits à la zaouïa de fès. Le pèlerin de
7:17
retour de fès est entouré d’une aura de prestige et supposé porteur de
la baraka (bénédiction divine).
0.21
Des agences de voyages se sont spécialisées dans l’organisation de
9.16
« ziyara tout compris » à partir de Dakar, développant un important
tourisme religieux : on fait escale à casablanca et à Rabat pour visiter
0.17
des mausolées de marabouts tijanes, mais aussi pour faire du tou-
risme et des achats. Le commerce féminin représente une composante
6:16
8. LANZA Nazarena, « Pèleriner, faire du commerce et visiter les lieux saints : le tourisme
.scho
0347
gènes : évangélistes, pentecôtistes … ou les églises africaines indépendantes,
prophétiques, voire sectaires ou commerciales, s’appuyant souvent sur des
0026
moyens médiatiques. Ces Eglises se caractérisent par des pasteurs charis-
matiques, des rites très extériorisés et des contributions financières élevées
7:17
et prélevées sur les revenus des fidèles (la dîme par exemple).
0.21
Les adeptes des églises évangélistes seraient 165 millions en Afrique et
l’« Eglise de Pentecôte ghanéenne » aurait 28 filiales africaines ... Les dif-
9.16
férentes « Eglises indépendantes » seraient environ 12 000 en Afrique, la
plupart totalement inconnues hors du continent ... Ces églises traduisent
0.17
surtout un malaise social en ville et répondent à un besoin de réconfort par
de nouvelles communautés avec de nouvelles motivations rituelles.
6:16
0347
ADAPTER
0026
SON MANAGEMENT
7:17
EN AFRIQUE
0.21
9.16
0.17
0026
LES ENJEUX ÉCONOMIQUES, POLITIQUES ET SOCIAUX
7:17
D’AUJOURD’HUI
0.21
En introduction de cette seconde partie, on consacre un chapitre impor-
tant au contexte économique, politique et social actuel de l’Afrique, tant il 9.16
paraît nécessaire de situer le contexte global dans lequel peut s’exercer un
0.17
management interculturel.
6:16
8565
Selon la Banque mondiale2, les transferts des migrants vers leur pays
d’origine représentent 46 milliards $ en 2018 (soit une hausse de près de
10 % par rapport à 2017) pour la seule Afrique subsaharienne et 71 milliards
pour l’ensemble de l’Afrique. Le Nigeria arrive en tête avec 24,3 milliards de
dollars reçus en 2018. Ces transferts représentent en moyenne 2,5 % du PIB
en Afrique subsaharienne : ce sont les Comores qui viennent en tête avec un
taux de 19,1 % de leur PIB.
Ces tendances correspondent à la volonté de certains pays africains de
cesser l’aide publique extérieure et de stimuler l’investissement privé : le
président kenyan Uhuru Kenyatta déclare : « Nous ne voulons plus d’APD,
nous voulons des investissements ». Le président du Ghana, Nana Akufo-
Addo, invite à cesser de croire à « l’histoire du Père Noël qui va venir pour
0347
développer le continent » et prône un Ghana affranchi de l’aide internatio-
nale : « Ghana beyond aid ».3 Dans le même sens, l’ancien ministre français
0026
des Affaires étrangères Hubert Védrine dit : « Les Africains n’ont pas besoin
d’aide, mais de partenariat ». Mais en même temps au Ghana, qui connaît
7:17
en 2019 la plus forte croissance de la sous-région (voir la carte ci-après),
le Rapporteur spécial des Nations unies sur l’extrême pauvreté déclare :
0.21
« L’inégalité est plus grande que jamais au Ghana ».
9.16
Les pays émergents externes (Chine, Inde, Brésil, Turquie) et internes
(Afrique du Sud, Egypte, Maroc) s’ajoutent aux investisseurs européens et
0.17
les pays africains font jouer la concurrence des offres.4 La Chine est devenue
de loin le premier partenaire extérieur de l’Afrique.
6:16
8565
devenue plus forte que celle de l’Asie, qui avait la réputation de tirer l’éco-
nomie mondiale, mais en réalité c’est surtout la croissance chinoise qui tire
:211
celle de l’Afrique.
nitra
les investissements étrangers vers les pays africains pétroliers et miniers ont
baissé. Mais, le Ghana, l’Ethiopie, la Côte d’Ivoire, le Sénégal, la Tanzanie
x.com
0347
0026
7:17
0.21
9.16
0.17
6:16
8565
888
Jacquemot établit des profils types d’économies africaines5, qu’on peut syn-
thétiser par le tableau page suivante.
:ENC
x.com
larvo
.scho
5. JACQUEMOT Pierre, L’Afrique des possibles. Les défis de l’émergence, Karthala, 2016.
www
LEs EnJEuX éconoMIquEs, PoLITIquEs ET socIAuX 97
Gamme de PIB/
Type d’économie Pays-types
tête (en US $)
Burundi, comores, Erythrée, Mali,
Economies à faible revenu,
Madagascar, niger, Rép. centrafri-
à dominante primaire et 300 – 500 $
caine (RcA), Rép. démocratique du
vulnérables
congo (RDc)
Economies à revenu inter- cameroun, côte d’Ivoire, ghana,
800 – 1 200 $
médiaire, en transition Kenya, ouganda
Afrique du sud, Botswana, Mau-
Economies diversifiées 3 500 – 5 000 $
rice, namibie
Economies rentières (expor- Angola, gabon, guinée équato-
Plus de 5 000 $
tations minérales) riale, nigeria, Zambie
0347
NB important : les PIB par tête sont exprimés ici en dollars nominaux,
0026
c’est-à-dire au taux de change officiel avec le dollar US. Selon le coût de la
vie des pays, les PIB par tête réels (c’est-à-dire à parité de pouvoir d’achat –
7:17
PPA, soit le PIB nominal pondéré par l’indice du coût de la vie) sont dans
la plupart des pays africains nettement plus élevés, parce que le coût de la
0.21
vie y est généralement moindre qu’aux USA. Par exemple, le Botswana et
9.16
la Namibie, classés ici dans le groupe de 3 500 à 5 000 $, bénéficient respec-
tivement en 2018, selon la Banque mondiale, d’un PIB par tête réel (PPA)
0.17
de 18 583 $ et 11 135 $ … Mais cela n’enlève pas au tableau son intérêt de
typologie des économies.
6:16
Il faut par ailleurs examiner la situation des inégalités car, dans la caté-
8565
gorie de pays la plus riche, l’Equato – Guinéen (PIB PPA moyen de 23 473 $
en 2018) peut être, en bas de l’échelle sociale, aussi pauvre que le Malien
888
moyen (PIB PPA de 2 313 $ en 2018), alors que le premier pays paraît 10 fois
672:
plus riche que le second … Le coefficient de Gini mesure l’inégalité des reve-
nus dans un pays, avec une valeur 0 signifiant l’égalité parfaite et 100 l’iné-
0856
En 2050, (il) pourrait égaler sans doute celui de l’Union européenne, tandis
que sa population comptera 2 milliards d’habitants. »6
larvo
2018.
www
98 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
PIB en milliards de
2010 2020 2030 2050 2050/2010
dollars
Afrique 2 712 4 625 7 601 19 287 711 %
Asie émergente 16 801 30 360 46 380 80 011 476 %
Amérique latine 5 294 7 295 9 575 14 647 277 %
Europe de l’Est 4 738 6 634 8 247 10 942 231 %
états-unis 13 365 16 170 19 091 25 432 190 %
0347
union européenne (à 27) 13 637 15 675 17 671 21 911 161 %
Monde 64 788 90 372 119 423 185 487 286 %
0026
7:17
Pour les auteurs, « la croissance africaine, en réalité, repose avant tout
sur la demande d’un marché intérieur africain qui grandit, du fait de la
0.21
démographie, de l’urbanisation et d’une classe moyenne qui monte en puis-
sance … et sur un intérêt grandissant d’acteurs internationaux variés pour
investir en Afrique, voire s’y délocaliser ». 9.16
0.17
Il y a « un besoin d’investissements absolument massifs dans des infras-
tructures de tous types. Besoin de créer des centaines de millions d’emplois
6:16
pour donner un avenir stable aux générations qui vont arriver sur le marché
8565
du travail ».
« Il faut tout faire pour faciliter la vie et les parcours des entrepreneurs,
888
car ce seront eux qui feront cette croissance. Or leurs difficultés opération-
nelles sont immenses … carences de l’alimentation électrique, manque de
672:
investissements
G Ke
0347
Severino et Hajdenberg (déjà cités) estiment que « 72 % des jeunes
Africains son attirés par l’entrepreneuriat ». Ils caractérisent « l’émergence
0026
des entrepreneurs africains » dans les nombreux cas de PME modernes
qu’ils ont étudiées ou soutenues dans différents pays du continent. « Une
7:17
nouvelle classe d’entrepreneurs africains apporte des réponses durables à
des besoins en saisissant les opportunités que constituent les lacunes d’une
0.21
économie africaine encore défaillante … Ils sont souvent très qualifiés et
9.16
toujours très structurés. La grande majorité a fait des études supérieures,
le plus souvent à l’étranger … Certains ont passé 10, 15 ou 20 ans dans les
0.17
pays industrialisés avant de revenir « au pays » et, dotés d’un peu de capital
et de beaucoup d’audace et de savoir-faire, ils ont créé ou repris une entre-
6:16
prise. »
8565
« Ce sont des personnes à bien des égards en rupture avec leur société :
ils osent avec une audace impressionnante au sein de sociétés qui ont long-
888
leur conscience sociale est souvent aiguë. Ils connaissent l’importance cru-
ciale de la redistribution. Ils savent que la fidélisation de leurs employés …
:ENC
santes. »
www
100 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
« Ils recherchent, pour la plupart d’entre eux, les niches, dans tous les
secteurs, que ne veulent ou ne peuvent pas occuper les grandes entreprises
internationales. Ils cherchent à produire pour ces dernières comme sous-
traitants. Ils se spécialisent au départ dans les domaines qui demandent le
moins de capital. »
« Ils se battent pour la qualité : c’est la seule manière de se différencier du
secteur informel et d’avoir des prix supérieurs, rendus nécessaires par leurs
coûts. Leurs processus internes sont structurés et leur gestion moderne. Ils
adoptent des approches innovantes. »
0347
accessibles à des entreprises de taille moyenne, sachant par ailleurs que
certaines entreprises africaines sont déjà des multinationales de grande
0026
ampleur.
7:17
Les télécommunications
0.21
Le secteur le plus connu est celui des nouvelles technologies qui s’est
développé de façon spectaculaire en Afrique, en particulier dans la télépho-
nie mobile (taux d’équipement à 80 %) et le commerce en ligne. Les trans- 9.16
ferts d’argent et la banque sur téléphone portable sont apparus d’abord en
0.17
Dans ce cas, l’innovation est venue d’Afrique. Orange s’est servi de son
expérience africaine pour lancer le « mobile banking » en France selon un
8565
même manière avec pour clients les opérateurs de téléphonie mobile, les
banques et assurances, les administrations, les délégations de services de
larvo
0347
de conscience que l’agroalimentaire représente aujourd’hui une immense
opportunité … l’Afrique subsaharienne comporterait aujourd’hui environ
0026
200 millions d’hectares de terres cultivées et la même superficie … de terres
non cultivées à potentiel agro-écologique ».
7:17
On peut aussi investir dans la logistique agricole pour transporter, stoc-
0.21
ker et conserver les produits, en amenant l’électricité et la chaîne du froid,
car il y a une énorme déperdition des produits frais (parfois estimée à 50 %
9.16
de la production de lait, de fruits et légumes ou de poissons).
Par ailleurs, le secteur agro-industriel s’est développé par la demande
0.17
des classes moyennes, par exemple pour les produits laitiers comme le lait
6:16
La santé
888
les soins, voire les médicaments, à l’hôpital public. Enfin, la fuite des cer-
veaux touche particulièrement le secteur médical : ainsi, 15 % des médecins
.scho
0347
caments génériques, dont une entreprise leader au Ghana qui produit
30 médicaments de base (antibiotiques, antipaludéens, antirétroviraux …).
0026
Néanmoins, ces entreprises produisent généralement sous licence, car peu
d’industries pharmaceutiques africaines ont les moyens de développer des
7:17
brevets, qui demandent des recherches et des procédures de tests très coû-
0.21
teuses.
9.16
Le développement urbain
Il y a 500 millions d’urbains en Afrique et il y en aura 1,2 milliard en
0.17
Pour Jean-Michel Debrat (déjà cité), il faut donc « projeter l’avenir ur-
0856
et ferroviaires), mais il reste aussi beaucoup à faire sur les moyens de trans-
port, leur qualité et leur sécurité. C’est un secteur porteur pour des entre-
.scho
0347
peu courantes en Afrique en raison du déficit des systèmes de formation
professionnelle (chaudronniers, tuyauteurs, soudeurs de spécialités, calo-
0026
rifugeurs, monteurs d’installations mécaniques, hydrauliques, électriques,
électromécaniques et électroniques, etc.).
7:17
Corrélativement, les industries de matériaux de construction sont égale-
ment en plein essor : outre le cas exceptionnel du Nigérian Aliko Dangoté,
0.21
« l’homme le plus riche d’Afrique », pour le secteur du ciment, il y a place
9.16
pour de nombreuses PME d’extraction, de traitement et de livraison de
sable, gravier, argile et des produits intermédiaires (briques, carreaux, pa-
0.17
vés, tuiles …) ou de menuiserie (portes, fenêtres), ou encore de climatisa-
tion. De plus, un sous-secteur de l’isolation est à développer pour économi-
6:16
L’énergie
L’Afrique est le continent qui émet le moins de gaz à effet de serre, mais
888
qui subit le plus le réchauffement climatique ... Elle a un très beau potentiel
672:
« Comme elle l’a fait dans le cas de la téléphonie mobile, l’Afrique pour-
rait sauter l’étape de l’électrification par réseau centralisé alimenté par des
.scho
0347
Le secteur privé de formation commence à prendre la relève, parfois
avec des équipements miniaturisés pour réduire les coûts et avec des stages
0026
obligatoires pour faire acquérir aux jeunes une pratique professionnelle
concrète en entreprise, bien qu’en général le système de formation en alter-
7:17
nance ne soit pas légalement prévu.
Il en va de même pour l’enseignement supérieur privé qui se développe
0.21
rapidement et qui privilégie des filières professionnelles pratiques : com-
merciales, de gestion et même industrielles, médicales et pharmaceutiques,
et bien sûr informatiques. Au Kenya, en Ouganda et en Tanzanie, il existe 9.16
0.17
davantage d’instituts supérieurs privés que publics. Nombre de ces établis-
sements recherchent des partenariats universitaires internationaux et des
6:16
financements extérieurs qui leur permettent d’offrir des bourses à une par-
tie au moins de leurs étudiants.
8565
Le tourisme
888
ment faible en Afrique », et le secteur est encore peu tenu par des Africains,
sauf au Kenya à 64 %. Le groupe Azalaï Hôtels, parti du Mali, est pourtant
0856
0347
La corruption est profondément enracinée dans beaucoup de pays en
Afrique. Elle s’explique par différentes raisons. D’abord, l’obligation sociale
0026
de redistribuer ses revenus à sa famille, à son clan, à son village d’origine.
7:17
Ensuite, le fait que beaucoup de fonctionnaires sont mal payés et/ou payés
en retard. Celui qui a un poste de responsabilité ou d’autorité, à n’importe
0.21
quel niveau, essaiera donc d’en profiter.
9.16
Le cas le plus connu est celui du policier à la circulation qui, sous divers
prétextes, justifiés ou non, arrête des automobilistes pour en tirer un billet :
0.17
les chauffeurs de taxi en sont particulièrement victimes. Mais l’officier de
police qui fait payer la signature d’un procès verbal, et a fortiori le commis-
6:16
Dans certains pays, la délivrance d’un acte administratif gratuit est « factu-
888
0347
Les responsables en haut de l’échelle en sont les plus grands bénéficiaires,
alors que, proportionnellement à leurs revenus, les citoyens pauvres sont les
0026
principales victimes de cette « TVA des services publics » (comme on dit
parfois, bien qu’elle n’aille pas dans les caisses de l’État), ou bien les plus
7:17
pauvres sont tout simplement exclus des services publics. Selon le rapport
de Transparency International pour 2018, « un Africain sur quatre paie des
0.21
“pots de vin” pour avoir accès à des services publics ». La corruption enri-
chit les riches et appauvrit les pauvres : elle est profondément anti-sociale.
L’Afrique centrale, avec ses coutumes de gestion rentière, est particuliè- 9.16
0.17
rement réputée dans ce domaine … Et les opérations anti-corruption ou
« mains propres », déclenchées à grand renfort de publicité, n’ont souvent
6:16
exemple, au Cameroun).
888
contextes d’insécurité où, les services publics devenant plus difficiles à as-
surer, ils sont donc sans doute plus monnayables9 ; et l’aide internationale y
0856
est davantage sollicitée, alors qu’elle a davantage peur d’y être mal utilisée…
:211
tion de la corruption », qui fait autorité et qui est appliqué à 180 pays.
Il va de 0 à 100, 100 étant un pays non corrompu et 0 un pays extrê-
G Ke
8. Le Conseil français des Investisseurs en Afrique (CIAN) a publié un célèbre Guide pra-
larvo
0347
soudan : 13.
0026
Le Rwanda, le Cap Vert et le Botswana ont engagé avec succès des poli-
7:17
tiques fermes contre la corruption. Le Sénégal et la Côte d’Ivoire sont parmi
les pays en net progrès.
0.21
Pour Severino et Hajdenberg (déjà cités), « l’environnement … des af-
faires est encore perçu comme très défavorable. La corruption est un im-
portant poste de charges. Les entreprises en Afrique dépenseraient 1,5 % de 9.16
0.17
leurs ventes en pots de vin pour faire avancer les choses et 3 % de la valeur
des contrats lorsqu’elles traitent avec le gouvernement ».
6:16
globalement, il y a par exemple une nette différence entre les pays d’Afrique
de l’Ouest et ceux d’Afrique centrale, en particulier pour le déroulement
672:
politique est généralement assurée par des élections régulières, sauf au Togo
qui connaît une dynastie présidentielle héréditaire.
:211
quand des dynasties familiales ne s’y sont pas établies (Gabon, Guinée
équatoriale et jusque récemment République Démocratique du Congo) ou
G Ke
quand les résultats des élections n’y sont pas manipulés (RDC).
:ENC
des hydrocarbures (au 165e rang sur 180 pays de l’indice de perception de la
corruption) ; cependant, le nouveau président João Lourenço (depuis sep-
tembre 2017) semble vouloir s’attaquer sérieusement au problème.
larvo
0485
soudan : 13.
0026
Le Rwanda, le Cap Vert et le Botswana ont engagé avec succès des poli-
7:17
tiques fermes contre la corruption. Le Sénégal et la Côte d’Ivoire sont parmi
les pays en net progrès.
0.21
Pour Severino et Hajdenberg (déjà cités), « l’environnement … des af-
faires est encore perçu comme très défavorable. La corruption est un im-
portant poste de charges. Les entreprises en Afrique dépenseraient 1,5 % de 9.16
0.17
leurs ventes en pots de vin pour faire avancer les choses et 3 % de la valeur
des contrats lorsqu’elles traitent avec le gouvernement ».
6:16
globalement, il y a par exemple une nette différence entre les pays d’Afrique
de l’Ouest et ceux d’Afrique centrale, en particulier pour le déroulement
672:
politique est généralement assurée par des élections régulières, sauf au Togo
qui connaît une dynastie présidentielle héréditaire.
:211
quand des dynasties familiales ne s’y sont pas établies (Gabon, Guinée
équatoriale et jusque récemment République Démocratique du Congo) ou
G Ke
quand les résultats des élections n’y sont pas manipulés (RDC).
:ENC
des hydrocarbures (au 165e rang sur 180 pays de l’indice de perception de la
corruption) ; cependant, le nouveau président João Lourenço (depuis sep-
tembre 2017) semble vouloir s’attaquer sérieusement au problème.
larvo
s’accrochent à la rente qu’ils peuvent en tirer, puis ensuite par la crainte, s’ils
se retirent du pouvoir, de poursuites judiciaires ...
Le prix Mo Ibrahim (du nom du milliardaire anglo-soudanais du sec-
teur des télécommunications, qui l’a créé) récompense (très généreusement)
le président africain qui aura quitté régulièrement le pouvoir au terme de
son mandat et après avoir pratiqué une bonne gouvernance, et l’encourage
à poursuivre d’autres actions pour un développement durable en Afrique.
0485
de sécurité et d’état de droit (indépendance de la justice, corruption,
conflits armés…), 26 critères de développement humain (éducation,
0026
santé, services sociaux…), 29 critères d’opportunités économiques du-
rables (solidité des banques, transparence des entreprises publiques,
soutien du secteur agricole, état des infrastructures …) et 19 critères
7:17
de participation et droits humains (liberté d’expression, égalité entre
0.21
les sexes, élections libres et transparentes …).
cet indice, même s’il n’est peut-être pas parfait, est le plus connu pour
l’évaluation de la politique globale des états africains. Il est pris en 9.16
compte par les entreprises internationales pour une décision d’inves-
0.17
tissement en Afrique.
6:16
En 2018, ce sont trois petits pays insulaires qui sont en tête du clas-
sement de 54 pays : Ile Maurice (79,5 points sur 100), seychelles et
8565
– congo : 43e, Angola : 45e, Tchad : 46e, RDc : 47e et soudan : 49e
rangs ;
:ENC
– Libye, sud-soudan et somalie (13,6 points sur 100) aux 52e, 53e
et 54e rangs.
x.com
larvo
0485
sant, de deux typologies développées par Pierre Jacquemot10 sur la situation
politique des États africains, avec quelques exemples dans chaque catégorie
0026
(en essayant d’actualiser un peu les données au regard des évènements plus
récents) :
7:17
• les démocraties matures : Sénégal, Ghana, Maurice, Seychelles, Cap
0.21
Vert (Tunisie en cours de consolidation en 2019 ?) ;
• les « démocratures » (régimes autoritaires, mais performants) :
Rwanda, Botswana, Ethiopie ; 9.16
0.17
• les démocraties molles (institutions démocratiques, mais peu per-
formantes ou détournées) et souvent États en cours de fragilisation :
6:16
Faso et dans une moindre mesure (en 2019) au Niger, notamment avec les
mouvements « Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans » (GSIM) et
x.com
10. JACQUEMOT Pierre, L’Afrique des possibles. Les défis de l’émergence, Karthala, 2016.
11. Lire MICHAILOV Serge, L’Africanistan. L’Afrique en crise va-t-elle se retrouver dans
.scho
0485
l’interdisent pas dans leur législation nationale et la pratiquent ... Dans de
nombreux pays de la région (notamment en Egypte, en Ethiopie, en Guinée
0026
équatoriale, au Kenya, au Mali, en Mauritanie, au Nigeria, dans les deux
républiques du Congo, au Soudan, au Zimbabwe …), « la pratique de la
7:17
torture en détention pour extorquer des “aveux” est profondément ancrée
dans la culture des forces de sécurité ».13
0.21
Par ailleurs, il reste une dizaine de pays en Afrique qui appliquent encore
9.16
la peine capitale : le Botswana, l’Egypte, l’Ethiopie, la Guinée Equatoriale,
la Libye, le Nigeria, l’Ouganda, la Somalie, le Soudan, le Soudan du Sud
0.17
et le Zimbabwe. Elle reste légale dans d’autres pays, mais qui pratiquent
un moratoire de fait, par exemple le Cameroun (cela ne l’empêche pas de
6:16
Tant que la société civile ne se mêle pas trop de politique, il faut lui re-
connaître un grand développement en Afrique, qui peut prendre des formes
0856
très diverses :
• les associations de développement communautaire, très nom-
:211
12. Article 5 de la Déclaration universelle des droits de l’homme : « Nul ne sera soumis à la
larvo
2014.
www
LEs EnJEuX éconoMIquEs, PoLITIquEs ET socIAuX 111
0485
exemple) les persécutent si elles critiquent le gouvernement ou s’opposent
à ses exactions (entrainant nombre de militants en exil) ; la Mauritanie
0026
persécute les militants anti-esclavagistes (alors que l’esclavage y a été en
principe aboli récemment) ; mais un dialogue, parfois tendu, existe dans
7:17
la plupart des pays, par exemple avec les ministères de la Justice.
0.21
Les femmes africaines sont souvent très actives et engagées dans la vie
associative et communautaire, qu’elles contribuent largement à animer.
9.16
0.17
4. Des défis démographiques considérables
6:16
population (2,4 % en 2016) baisse, tandis que celui du PIB est devenu plus
672:
14. Voir notamment JACQUEMOT Pierre, L’Afrique des possibles. Les défis de l’émergence,
.scho
Karthala, 2016.
www
112 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0485
vers l’Afrique du Sud, mais ceci tend à diminuer en raison du ralentisse-
ment économique de cette dernière, ce qui crée des problèmes sociaux de
concurrence pour l’emploi et des manifestations xénophobes dans la « na-
0026
tion arc-en-ciel ». Il y a aussi des migrations de l’Afrique de l’Ouest vers
l’Afrique du Nord, notamment vers le Maroc qui a assoupli sa politique
7:17
d’accueil des subsahariens.15
0.21
9.16
5. Des défis sociaux 0.17
Le taux de pauvreté baisse un peu, mais les inégalités augmentent dans
beaucoup de pays. Entre la majorité de pauvres (qu’ils soient ou non consi-
6:16
100 millions pour l’ONU selon les définitions (en moyenne : familles de
672:
face, des quartiers résidentiels ou protégés : les « gate communities »). Pour
Severino et Hajdenberg, la montée en puissance de la classe moyenne en
:211
septembre 2012.
www
LEs EnJEuX éconoMIquEs, PoLITIquEs ET socIAuX 113
0485
les pays francophones, la sécurité sociale existe sur le modèle français, mais
elle ne concerne que les emplois formels (15 % des travailleurs) et même
0026
dans ce cas elle est souvent défaillante. Ainsi, globalement, « près de 90 %
de la population africaine ne bénéficient d’aucune assurance-maladie ».17 Et
7:17
la prévalence du HIV-SIDA dans la population de référence (15-49 ans) est
encore de 3,9 % en 2018 en Afrique, alors que la moyenne mondiale est de
0.21
0,8 % selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Cependant, l’espé-
rance de vie africaine a fait des progrès spectaculaires et est maintenant de
9.16
l’ordre de 60 ans. 0.17
mels ;
• développer la protection sociale ;
x.com
17. JACQUEMOT Pierre, L’Afrique des possibles. Les défis de l’émergence, Karthala, 2016.
www
114 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0485
• la croissance par les matières premières exportées (minérales, éner-
gétiques, agricoles), mais cette politique de rente par les ressources na-
0026
turelles entraîne une dépendance vis-à-vis de l’extérieur et souvent un
accaparement par la classe dirigeante africaine ;
7:17
• les investissements étrangers (chinois, européens, indiens, arabes,
0.21
américains, …) permettent des transferts technologiques, mais ces pou-
voirs de décision restent extérieurs et ce type d’investissements n’est pas
9.16
suffisamment créateur d’emplois ;
• pour eux, la seule voie de croissance crédible reste celle du sec-
0.17
internationaux.
0856
:211
nitra
G Ke
:ENC
x.com
larvo
.scho
www
0485
CHAPITRE 8
0026
DIFFÉRENTES FAMILLES CULTURELLES
7:17
0.21
On a vu que l’Afrique offre une multitude d’opportunités économiques,
par ses besoins criants et par sa très forte croissance démographique, mais
aussi par son entrepreneuriat et par ses innovations. C’est donc une « terre 9.16
d’opportunités ».
0.17
muns au continent.
888
672:
2 000 à 2 400 (et à 4 000 si l’on distingue les dialectes). Les langues sont
le facteur le plus évident d’identité comme de différenciation culturelle, et
nitra
assez différents issus d’une même langue. Par exemple, les Bamilékés au
Cameroun parlent 11 dialectes et utilisent en commun une langue bami-
x.com
0485
2. les langues nilo-sahariennes, plus dispersées entre le Nil et le
Niger, dans les déserts et savanes de l’Afrique orientale et centrale ;
0026
3. les langues nigéro-congolaises, ainsi divisées en deux sous-
groupes : celles du bassin du Niger (Afrique de l’Ouest) et celles du
7:17
bassin du Congo (Afrique centrale) : les secondes se sont étendues
avec l’expansion bantoue dans toute l’Afrique subéquatoriale ;
0.21
4. les langues khoisan de groupes très anciens et aujourd’hui très mi-
9.16
noritaires de l’Afrique australe (en Namibie notamment) ;
5. les langues austronésiennes, ce sont des langues asiatico-océa-
0.17
0485
0026
7:17
0.21
9.16
0.17
6:16
8565
888
672:
0856
(Par Mark Dingemanse (original PNG version); Doodledoo (French translation) – Translation of
File: African language families_en.svg. [Familles des langues d’Afrique.svg], CC BY-SA 2.5,
:211
https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=4275652)
nitra
reconnu (sauf par les « afro-centristes ») : en gras, les langues africaines les
plus parlées (par plus de 10 millions de locuteurs) et en italiques les langues
larvo
0485
somali, afar, issa somalie, Djibouti
couchitique
0026
oromo, galla Ethiopie
tchadique haoussa, mandara nigeria, Tchad, cameroun
7:17
omotique wolaytta, seze Ethiopie
0.21
2. Langues nilo-sahariennes : surtout Afrique orientale et centrale
shilluk, dinka, nuer, nubien soudan du sud, soudan
9.16
nilotique ou soudanais
turkana, luo, kalenjin, Kenya, ouganda, Tanza-
oriental
masai nie
0.17
RDc
toubou, zaghawa, bideyat Libye, Tchad, soudan,
8565
saharien
kanuri niger, nigeria, cameroun
saharien songhaï songhaï, zarma Mali, niger
888
Leone
0485
Eswatini (ex-swaziland), Afrique du
swati 1,5 M
sud
0026
makoua Mozambique 4M
7:17
nyanja (ou chichewa) Malawi 9,5 M
shona Zimbabwe, Mozambique, Zambie 10 M
0.21
bemba Zambie 3M
9.16
Zambie, Zimbabwe, Botswana,
lozi 0,75 M
namibie
0.17
tonga Zambie, Zimbabwe, Mozambique 1,5 M
mbundu Angola 3M
6:16
umbundu Angola 4M
8565
sukuma Tanzanie 3M
kikuyu Kenya 6M
888
luganda ouganda 8M
672:
kinyarwanda Rwanda 15 M
0856
kirundi Burundi 12 M
lingala RDc, congo, centrafrique 36 M
:211
ghomala)
douala cameroun 2M
:ENC
0485
quelles langues parle un Africain (la plupart d’entre eux connaissent
plusieurs langues) et quel niveau linguistique il a dans l’usage de
0026
chaque langue ! Par conséquent, le tableau suivant ne peut être qu’ap-
proximatif (lire M pour million de locuteurs) :
7:17
– arabe : environ 200 M en Afrique du nord, soudan et Mauritanie ;
0.21
– swahili : de 100 M à 150 M en Afrique de l’Est ;
– lingala : environ 36 M dans les deux « congo » et en centrafrique ;
– haoussa : environ 30 M au nigeria, niger, Togo ; 9.16
0.17
arabe (UMA). Ces pays sont musulmans à plus de 90 %, avec des mino-
www
DIfféREnTEs fAMILLEs cuLTuRELLEs 121
0485
• Une côte d’Afrique de l’Ouest mixte : cette zone, plus humide
et forestière, est dotée de richesses naturelles importantes, minérales
0026
et agricoles. Elle regrouperait Gambie, Guinée Bissau, Guinée, Sierra
Leone, Liberia, Côte d’Ivoire, Ghana, Togo, Bénin et Nigeria. C’est une
7:17
sous-région de mixité : des pays qui se répartissent entre christianisme
0.21
et islam (à l’exception de la Gambie et de la Guinée, très majoritairement
musulmanes) ; entre francophones et anglophones (à l’exception de la
9.16
Guinée Bissau lusophone) ; entre pays de dynamisme économique (no-
tamment la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Nigeria) et d’autres très pauvres
0.17
par suite de périodes de mauvaise gouvernance et de conflits.
6:16
mis sur l’exploitation de ressources naturelles rentières néglige une économie diversifiée
et équilibrée, crée une fragilité liée aux fluctuations des cours des matières premières,
.scho
0485
et francophone, et riche. Les Seychelles sont complètement métissées,
catholiques, anglophones et francophones, et ont le plus haut niveau de
0026
vie d’Afrique (30 503 $ PPA par tête en 2018).
• L’Afrique orientale chrétienne, anglophone et swahilie regroupe le
7:17
Kenya, la Tanzanie, l’Ouganda, le Rwanda et le Burundi et les Comores.
0.21
On peut y rattacher le Soudan du Sud par son peuplement chrétien et
nilotique, proche du Kenya. L’ensemble est à nette majorité chrétienne,
9.16
sauf les Comores qui sont musulmanes. Les langues véhiculaires se par-
tagent entre l’anglais et le swahili, sauf au Soudan du Sud qui utilise
0.17
l’arabe soudanais, et au Burundi et aux Comores le français et le swahili.
Le Kenya et le Rwanda sont économiquement fort dynamiques.
6:16
ethniques récurrents chez le géant éthiopien, tandis que Djibouti est une
place-forte concédée sur le détroit de Mandeb (qui ferme la mer Rouge
G Ke
0026
DES MODÈLES SOCIÉTAUX ET DE MANAGEMENT
7:17
ENDOGÈNES À L’AFRIQUE
0.21
Dans ce chapitre, on montre comment les modèles sociétaux tradition-
nels en Afrique imprègnent toujours ceux hérités de la colonisation et offi- 9.16
0.17
ciellement adoptés sur le plan institutionnel par les États africains indé-
pendants, de même qu’ils imprègnent aussi le management des entreprises.
6:16
8565
1. Le lignage
888
requêtes aux ancêtres pour la fertilité des femmes ou des terres, ou pour la
paix.
:211
de son travail et de ses produits (contrôle des greniers) ; sur les échanges
matrimoniaux (le mariage et la dot), les relations avec les autres lignages, les
G Ke
rites et les interdits. Il y a une prestation de travail accomplie par les cadets
pour les anciens et une redistribution des anciens aux cadets.
:ENC
Colin, 2013.
www
124 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0485
Dans les sociétés de castes, le mariage est fortement contrôlé par les pa-
rents et grands-parents, de façon à éviter les mésalliances avec une caste
0026
inférieure ou servile.
7:17
De fortes obligations de solidarité sont liées au lignage. La modernisa-
tion du droit foncier et du droit civil, l’abolition de l’esclavage africain, le
0.21
travail rémunéré des femmes ou celui des cadets qui peuvent payer leur dot
indépendamment de leurs parents, tout ceci affaiblit le système tradition-
nel, même si on s’efforce d’en sauver les apparences. 9.16
0.17
Ainsi, en ville, le contrôle du lignage s’affaiblit loin de la communauté
villageoise (sauf pour les cérémonies de deuil, qui sont une obligation so-
6:16
ciale très forte et très ritualisée et qui exige de revenir « au village »). Mais
8565
les quartiers, les confréries religieuses chez les musulmans, les Eglises ou
paroisses chez les chrétiens et surtout aujourd’hui les « églises du réveil »,
672:
entre eux sur un critère de confiance et, étant généralement pauvres, ils
adoptent des règles de gestion collective très rigoureuses afin d’éviter que
larvo
celles avec une fonction bancaire (ou éventuellement les deux à la fois).
www
DEs MoDèLEs socIéTAuX ET DE MAnAgEMEnT EnDogènEs 125
0485
ce qui signifie que le débiteur devient souvent un « oublié de la justice » qui
peut moisir des années en prison sans jugement, jusqu’à ce que la famille
0026
ou une association des droits de l’homme trouve finalement les moyens de
payer un avocat pour mettre en place une procédure judiciaire.
7:17
0.21
2. Les systèmes de parenté, de filiation et de mariage
9.16
On distingue les sociétés matrilinéaires et patrilinéaires. Le système
matrilinéaire était le plus fréquent en Afrique, mais l’islam a poussé cer-
0.17
Ce système permet parfois une plus grande liberté sexuelle, car l’identité
du père peut (selon les ethnies) importer beaucoup moins, alors que la mère
:211
en témoigner). La mère élève ses enfants, même s’ils sont de pères diffé-
rents. Ainsi, pour désigner des frères ou sœurs, il est souvent nécessaire de
G Ke
préciser s’ils sont de « même père » et par ailleurs, dans les familles polyga-
miques, s’ils sont de « même mère » – ou non. Le système matrilinéaire est
:ENC
très fréquent en Afrique, surtout centrale, mais il reste présent aussi dans
des ethnies d’Afrique de l’Ouest et même, en limite de l’Afrique du Nord
x.com
et de l’Afrique de l’Ouest, chez les Touareg qui, bien que musulmans, sont
matrilinéaires et monogames.
larvo
0485
La polygamie est traditionnellement fréquente en Afrique, même si elle
n’est pas généralisée dans toutes les ethnies et si elle se raréfie fortement
0026
avec la vie moderne (ce qui n’empêche pas d’avoir des maîtresses …). Elle
s’explique par plusieurs facteurs, dont au moins les cinq suivants :
7:17
• la mortalité masculine : traditionnellement, et en particulier dans
0.21
les sociétés d’éleveurs nomades ou de commerçants transsahariens,
la mortalité masculine était aggravée par les risques de voyages ou de
9.16
rezzous, et de façon plus générale par les conflits guerriers. Ceci créait
donc un déséquilibre entre le nombre d’hommes et de femmes ;
0.17
et du Sud), les hommes jeunes étaient entraînés dans le métier des armes
avant d’avoir le droit de se marier : cela retardait donc l’âge du mariage
8565
prenne sa veuve pour épouse, même si ce frère est déjà marié par ail-
leurs. En fait, le lévirat aurait surtout pour fonction de poursuivre la
:211
• l’impact de la dot : la dot est très coûteuse pour le fiancé (en pro-
portion de la pauvreté ou de la richesse des familles concernées) : elle
G Ke
représente plusieurs années de travail. Sauf s’il est entièrement doté par
ses parents, cela suppose que le fiancé ait acquis les moyens de la payer
:ENC
comme nubiles autour de 15 ans : la différence d’âges entre les époux est
donc souvent très importante (ce qui ne provoque pas du tout la même
larvo
0485
n’avait jamais été appliquée... En Guinée comme dans beaucoup de pays
francophones, lors du premier mariage de l’homme, les époux doivent
0026
choisir d’un commun accord le mariage monogamique ou le mariage poly-
gamique : celui-ci est donc soumis à l’acceptation de la première épouse.
7:17
Mais un certain nombre de pays stipulent que si l’option n’a pas été
0.21
précisée par les époux au premier mariage, celui-ci est réputé polyga-
mique, ce qui est parfois interprété comme une validation de la polygamie
de fait. Lors du premier mariage de l’époux, beaucoup de jeunes femmes 9.16
0.17
acceptent le mariage polygamique, parfois parce qu’elles interprètent cette
possibilité comme la règle de l’islam (quand les époux sont musulmans),
6:16
mais plus souvent parce que la femme y voit une assurance contre le di-
vorce. En effet, dans le mariage monogamique, elle craint d’être aban-
8565
qui est souvent celle qui régente toute la famille, y compris les coépouses
672:
et leurs enfants.
0856
C’est une forme de liberté, car j’ai du temps pour moi quand mon mari est
chez la première épouse2 ».
Ces systèmes familiaux sont parfois difficiles à saisir pour les Européens.
Une source de confusion courante est l’emploi des termes de parenté : non
seulement « frère » ou « sœur » ne signifie pas nécessairement de « même
père, même mère », mais il est fréquent que les termes de parenté soient aus-
si utilisés « au figuré » pour désigner d’autres relations de proximité. Celui
qui est appelé « frère » ou « sœur » peut être en fait un(e) cousin(e), un(e)
ami(e), quelqu’un originaire du même village ; l’« oncle » ou la « tante » peut
être un(e) proche plus âgé(e), ou un(e) ami(e) de ses parents, ou quelqu’un
de protecteur, avec souvent une nuance de respect. Il est donc parfois néces-
saire de se faire préciser de quelle relation il s’agit précisément.
0485
Enfin, il peut être utile de rappeler (par exemple, à l’attention des ex-
patriés européens) que l’homosexualité n’est pas la bienvenue en Afrique,
0026
pour des raisons religieuses mais surtout parce qu’elle est contradictoire
avec la fécondité, une valeur fondamentale très recherchée des Africains.
7:17
Si l’homosexualité a en général été dépénalisée dans les pays européens (en
France en 1982, où elle était jusqu’alors un délit passible de prison), les pays
0.21
africains n’ont pas nécessairement changé leur législation depuis leur indé-
pendance. Un seul pays (l’Afrique du Sud) admet le mariage homosexuel et
40 % des pays africains répriment pénalement l’homosexualité, dont quatre 9.16
0.17
d’entre eux par la peine de mort (Mauritanie, Soudan, Somalie, et dans cer-
tains États du Nord du Nigeria).
6:16
11 mai 2018.
www
DEs MoDèLEs socIéTAuX ET DE MAnAgEMEnT EnDogènEs 129
qui réunit dans son Conseil de chefferie les anciens les plus influents, ceux
qui l’ont désigné parmi eux.
La chefferie a été la structure politique de base dans les anciens États afri-
cains organisés en royaumes ou en empires. Par exemple, chez les Mossis
(Burkina Faso actuel), le Mogho Naba (« chef du monde ») à Ouagadougou
régnait sur 300 Nabas, chefs de villages. Chez les Ashanti (Ghana), le roi a
toujours une influence politique, de même que la « reine-mère » (ce qui ne
signifie pas qu’elle soit plus âgée), celle qui est désignée par le roi dans sa
famille maternelle et qui a son tour désignera le successeur du roi.
La chefferie reste un poste recherché, y compris par des managers mo-
dernes, car elle confère un statut influent et est également source de revenus
(cadeaux, dîmes, royalties) : « les besoins du chef sont quasiment illimités
0485
car il a une importante obligation de redistribution3 ». Pierre Jacquemot
explique ainsi « l’hybridation » de bien des États africains : ils ont à la fois
0026
les structures de l’État moderne selon le modèle européen issu de la coloni-
sation (président élu, parlement élu, système judiciaire en principe indépen-
7:17
dant), mais sont en même temps, à des degrés divers selon les pays, inspirés
ou imprégnés des systèmes politiques traditionnels.
0.21
C’est ce que P. Jacquemot (ancien ambassadeur en Afrique de l’Est, en
9.16
Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale) appelle le « système social néo-
patrimonial étatisé » : « le système social étatisé africain, extension du sys-
0.17
en biens d’ostentation. »
• « L’État africain reste encore viscéralement un instrument de domi-
:211
2013.
www
130 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0485
méprisant ... (Cela) explique la corruption par une approche dépassion-
née, dénuée de connotation éthique. »
0026
• « Dans un contexte de rareté dramatique des ressources et de dys-
7:17
fonctionnement des services de l’État, la maintenance nécessaire du
réseau de relations sociales … l’emporte sur toute autre considération,
0.21
fût-elle morale … Dès qu’un individu accède à un poste de pouvoir, il est
assailli de demandes de ses proches qui jugeraient scandaleux qu’il ne
contribue pas à leur entretien. » 9.16
0.17
L’analyse est anthropologique, mais les conclusions en sont sévères. Elles
viennent d’un fin connaisseur, qui a été conseiller de présidents africains.
6:16
Il est très bien placé cependant pour savoir qu’on ne peut pas confondre le
Sénégal d’Abdou Diouf et la République démocratique du Congo de Joseph
8565
rappelle aussi dans ses typologies d’États africains. Il est donc difficile de
672:
on s’appuiera d’abord ici sur les travaux d’Evalde MUTABAZI, qui a fait
une large enquête par 1 226 interviews dans 56 entreprises dans 5 pays eu-
x.com
4. MUTABAZI Evalde, « Face à la diversité des cultures et des modes de gestion : le modèle
.scho
0485
Selon E. Mutabazi, les 3 périodes historiques de l’Afrique expliquent ce
0026
fonds commun :
• la période précoloniale a constitué un riche héritage de valeurs et
7:17
de croyances : certaines se sont partagées en Afrique du fait de la mobi-
lité historique de beaucoup de peuples : Peuls, Bantous … ;
0.21
• la période coloniale : la colonisation a apporté une organisation
9.16
administrative contraignante (l’impôt, le travail forcé, le management
bureaucratique ou taylorien), mais son empreinte, plus ou moins forte
0.17
selon les pays, reste très présente dans les institutions de l’État, le droit et
les langues officielles, devenues véhiculaires ;
6:16
tion avec ses proches : « sans ta famille, tu n’es rien ». Et, de façon naturelle,
on va entreprendre d’abord avec sa famille sur le plan professionnel ou éco-
x.com
relations avec eux, mais aussi avec leurs amis. Contrairement aux stéréo-
types et aux conflits claniques, que l’on observe en effet suite à l’ambiguïté
.scho
actuelle des modèles de référence en Afrique, disposer d’un très bon réseau
www
132 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0485
on récolte son champ ou on construit sa maison avec sa famille et
ses voisins, à charge de réciprocité ; l’assurance, la sécurité sociale,
0026
c’est la famille ou le cercle proche, et il faut que les services circulent
entre alliés.
7:17
3. La circulation des informations ou l’exercice de l’horizontalité :
0.21
l’échange est l’essentiel : le temps n’est jamais perdu avec autrui.
4. La circulation du pouvoir ou l’exercice de la verticalité : certains
dirigeants se cramponnent au pouvoir, mais son fondement, c’est 9.16
0.17
que le pouvoir se partage : le chef doit travailler dans l’intérêt géné-
ral et consulter son conseil ; sa position se fonde sur son expérience
6:16
de son clan : ceci produit la circulation de connaissent dans leur clan et entre clans
l’information. alliés.
:ENC
0485
« donne le pouvoir pour qu’il te soit rendu ». Il faut y voir aussi le souci de
la concertation, signifiant : « fais parler les membres de ton conseil pour en
0026
tirer ensuite la conclusion ». On est là dans la logique du chef traditionnel
qui exerce un pouvoir relativement consensuel, qui pourrait se rapprocher
7:17
d’un « management participatif ».
0.21
On peut aussi rapprocher le « modèle circulatoire du management » de
l’analyse de Pierre Jacquemot, qui privilégie l’« économie politique ». Le
contre-don n’a pas forcément la même valeur marchande, ni la même forme 9.16
0.17
que le don initial : « le lien remplace le bien ». C’est une économie « affec-
tive » qui double l’économie marchande. C’est souvent aussi une économie
6:16
circulatoire a été ignoré dans son esprit d’origine, voire combattu, dans
les entreprises et les administrations publiques, alors qu’il reste encore au-
:211
jourd’hui très actif dans la vie quotidienne au village et dans les villes.
Il adopte alors un point de vue « interculturel » portant sur la rencontre
nitra
0485
4.2. Chercher à intégrer les modèles culturels et managériaux africains et occi-
dentaux
0026
Fond culturel et managérial africain
7:17
Modèles occidentaux importés
commun
0.21
La relation prime sur la rationalité : La rationalité prime sur la relation : « cha-
l’homme est intégré dans la société, la cun à son poste », segmentation du travail
9.16
relation humaine est primordiale pour les et du temps pour la productivité.
affaires.
0.17
Le profit social prime sur le profit maté- Le profit matériel prime sur le profit so-
riel : cial :
6:16
l’argent »,
– il y a une hiérarchie des liens : divinité –
ancêtre – ancien – adulte – enfant. – l’individu doit « réussir sa vie » (réussite
888
matérielle personnelle).
672:
nité.
:ENC
succès sans rechercher une certaine synthèse, si possible une « vision com-
mune », ou au moins une conciliation, entre ces deux systèmes de valeurs.
larvo
.scho
www
0485
CHAPITRE 10
0026
L’IMPACT DE LA SPIRITUALITÉ ET DES TRADITIONS SECRÈTES
7:17
0.21
Un autre auteur africain, Emmanuel Kamdem, qui analyse le manage-
ment des entreprises camerounaises,1 insiste sur sa dimension spirituelle :
de nombreuses réunions importantes sont encadrées par des prières. De 9.16
0.17
plus, « l’angoisse existentielle observée dans les sociétés africaines depuis
les années 1980 » explique l’essor des pratiques initiatiques, de la sorcellerie
6:16
l’islam est souvent fortement intégrée, avec des rites plus extériorisés qu’en
Europe ou au Moyen Orient. Chez les chrétiens, on peut par exemple voir
:ENC
tambours ou mêmes danses dans les messes dominicales. Chez les musul-
mans, il s’agit souvent de confréries soufies, avec des rassemblements pério-
x.com
diques et pèlerinages de grande ampleur, qui peuvent être très actives dans
la vie sociale, par exemple au Sénégal.
larvo
0485
96 % des sénégalais sont musulmans, et l’Islam y est très marqué par
la tendance soufie, c’est-à-dire la pratique mystique et initiatique de la
0026
religion, qui est organisée et se manifeste par les grandes confréries.
celles-ci sont au sénégal au nombre de quatre : les Tijanes (estimés à
7:17
49 % de la population), les Mourides (31 %), la qadiriyya (8 %) et les
Layènes (environ 1 %). Les confréries sont particulièrement puissantes,
0.21
y compris par leur influence politique et économique. Par ailleurs, les
9.16
chrétiens (surtout catholiques) sont très minoritaires (environ 4 %), mais
néanmoins actifs et reconnus par la société. Il n’y a guère de tension
0.17
entre ces religions au sénégal.
Mais s’il y a officiellement 96 % de musulmans et 4 % de chrétiens au
6:16
sénégal, cela ne signifie pas qu’il n’y ait pas d’attachement à des reli-
8565
est, nous l’avons adopté tels que nous sommes ». c’est ce registre que
refuse maintenant le mouvement rigoriste « Ibadou Rahmane » (« les
G Ke
2011.
www
L’IMPAcT DE LA sPIRITuALITé ET DEs TRADITIons sEcRèTEs 137
0485
Les morts rassemblent longuement les familles élargies, avec une partie
de rites chrétiens ou musulmans, et une autre partie de rites traditionnels,
0026
en particulier lors du retour pour l’enterrement « au village » des ancêtres.
Certains employeurs disent : « un deuil familial, c’est 10 jours de congé
7:17
pour le salarié ».
Dans une première période, c’est une succession de réunions funéraires
0.21
dans la famille, de messes ou de prières pour les morts. Puis c’est la « levée
9.16
du corps » et, si la mort a eu lieu en ville, le retour au village des ancêtres,
pour replacer le mort dans son lignage. Il s’y pratique alors des rites tra-
0.17
ditionnels. Sauf dans les pays islamisés de longue date comme le Sénégal,
où l’inhumation se fait sobrement selon le rite musulman, l’enterrement
6:16
niture qui l’a mal enterré (et ceci même dans l’esprit de chrétiens convain-
672:
Les rites commencent dans les pleurs, mais sont accompagnés de musiques
et de danses. Ils se poursuivent par de grands repas pour une assistance élar-
:211
où se font et se refont les alliances et les accords. Ils se terminent dans la joie
des retrouvailles et des échanges. On ne manque pas des funérailles : c’est un
G Ke
évènement social très important. Il est aussi très coûteux pour les familles,
qui sollicitent l’aide de leurs proches pour apporter des victuailles ou se coti-
:ENC
ser, et l’on fait appel à l’épargne des tontines en souscrivant des emprunts.
Chez les Bamilékés (Cameroun), l’obligation sociale d’organiser des
x.com
0485
grandes entreprises modernes ...
Les initiations3, pour revenir à des sujets plus classiques mais toujours
0026
actuels, peuvent être distinguées en deux catégories : celles du premier de-
gré, destinées à une classe d’âges, et celles du second degré, destinées à
7:17
acquérir une qualification spécifique. Le premier degré est l’initiation des
0.21
adolescents pour passer à l’âge adulte ; le second degré est celui auquel des
adultes peuvent postuler pour accéder à des fonctions particulières (guer-
9.16
riers, devins, chefs, prêtres, sorciers, guérisseurs, masques, ou métiers em-
preints de mysticisme tels que les forgerons …).
0.17
ou fermées.
0856
L’initiation réunit ceux qui savent et qui guident, et les impétrants qui
apprennent.
:211
très élevés qu’elles impliquent, mais restent malgré tout fréquentes, notam-
ment dans la bande sahélienne d’Est en Ouest de l’Afrique. En Guinée, le
larvo
taux d’excision était encore de 95 % chez les filles en 1996. Parfois attribuées
à une origine de l’Egypte antique, ces pratiques n’ont pas de justification
religieuse, contrairement à ce qui est quelquefois prétendu à propos de l’is-
lam. Elles sont dues à des traditions et croyances obscures mais enracinées,
partagées par les femmes comme par les hommes, auxquelles les organi-
sations non gouvernementales et les autorités sanitaires tentent souvent de
s’opposer, parfois avec l’aide des responsables religieux.
Le passage à l’âge adulte : ces initiations sont comparables dans di-
verses régions d’Afrique. Elles se caractérisent par le secret, l’indicible, les
épreuves, les masques, l’acquisition du savoir et la formation d’un réseau
pérenne d’alliés.
C’est d’abord une séparation de la mère pour acquérir une nouvelle iden-
0485
tité par des rites, dans lesquels le concept de fécondité est déterminant.
0026
Les initiés, réunis par classe d’âges avec d’autres qui resteront des com-
pagnons très proches, subissent des épreuves physiques qui vont les mar-
7:17
quer à vie pour les former à l’abnégation et à la solidarité devant la difficulté,
la privation ou la douleur (aujourd’hui, les circoncisions ont lieu souvent
0.21
dans le dispensaire du village). Il y a une panoplie de moyens pour soutenir
les impétrants : les tambours, les masques qui dansent ...
Le secret sur les rites d’initiation fait partie de l’initiation elle-même : il 9.16
0.17
doit être tu, mais il doit être su qu’il existe, même si le secret est parfois qu’il
n’y a pas de secret particulier … Le secret donne un pouvoir de solennité,
6:16
Les classes d’âge qui ont vécu ensemble une initiation ont noué des liens
extrêmement forts. Leurs membres se retrouvent régulièrement ensuite
888
toujours des moyens financiers élevés. Certaines sociétés sont fermées, mais
non pour autant secrètes. Si elles le sont, le viol du secret peut être puni par
:ENC
la pendaison.
x.com
Les initiations peuvent comporter des transes et des possessions par des
divinités. Des drogues peuvent aussi être administrées, y compris pour sup-
porter la douleur.
larvo
4. La sorcellerie
Pour Emmanuel Kamdem, la sorcellerie, étudiée notamment dans dif-
férents cas d’entreprises camerounaises, est un instrument de pouvoir, qui
vise à promouvoir les uns au détriment des autres.4 Ceci n’explique pas
toujours les faits relatés, mais en général ces derniers sont démesurément
grossis ou sur-interprétés par « un imaginaire collectif » acquis d’avance à
la sorcellerie : par exemple, des accidents incompréhensibles qui permettent
à un prétendu « initié » de prendre le poste des victimes décédées, ou une
maladie curieuse qui réduit à la modestie (voire à l’inhibition) un jeune
cadre jugé trop ambitieux.
Pour Kamdem, la sorcellerie est une « dimension oubliée dans l’analyse
0485
du pouvoir en contexte africain … (lequel connaît) un développement sur-
prenant des croyances et des pratiques de sorcellerie ». C’est « un univers
0026
invisible et caché » ayant « une influence considérable sur les comporte-
ments individuels et organisationnels … et sur les formes de pouvoir ».
7:17
Ainsi, le « ndimsi » (le « monde de derrière ») a un rôle important chez
les entrepreneurs d’Afrique centrale : « la sorcellerie est considérée, à tort
0.21
ou à raison, comme une dimension effective de la modernité en Afrique …
à caractère bienfaisant ou malfaisant, … un art de mettre en scène les rap-
ports sociaux dans les organisations, … une force dont la détention … 9.16
0.17
confère une capacité exceptionnelle à agir positivement ou négativement
sur son entourage, … un phénomène social total qui marque les compor-
6:16
visibles et invisibles ».
888
Mais quelquefois, ce peut être aussi le même praticien initié, selon que la
G Ke
0485
0026
Bien qu’Emmanuel Kamdem n’avance pas d’explications, on peut sup-
poser que dans ce premier cas, il s’agissait pour la maladie suspecte soit
7:17
d’un cancer foudroyant, soit d’un empoisonnement. Pour le conducteur
écrasé, on peut penser qu’il s’agit soit d’une maladresse, soit d’un sabotage
0.21
(boîte de vitesse du bulldozer mal enclenchée ou déréglée).
9.16
0.17
Cas 2 : « le jeune cadre ambitieux »
Dans une entreprise de services, un jeune cadre diplômé est recruté
6:16
lui trouve un remède efficace, mais lui glisse à l’oreille : « Vous parlez
beaucoup et vous gênez certains intérêts et certaines personnes : dans
la vie, apprenez à contrôler votre bouche ». Le cadre guéri revient
:211
et même inhibé.
G Ke
forces occultes qui les pétrifient, et non pas d’explications factuelles qu’ils
www
142 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
ne recherchent même pas, mais qu’une police scientifique bien formée au-
rait pu identifier.
Un autre exemple étudié par Emmanuel Kamdem5 relate l’installation
d’une usine agro-industrielle près d’un village proche de Douala, également
résumé ici.
0485
espèces sont très venimeuses. Le personnel attribue le phénomène à
la malédiction du village voisin, qui avait manifesté des réticences à
0026
l’implantation de l’usine.
Le chef d’entreprise part alors dans son village d’origine, à 200 km de
7:17
Douala, faire une offrande monétaire substantielle à sa famille pour
trouver les moyens de contrer cette « sorcellerie ». Mais, parallèle-
0.21
ment, il a pris des mesures d’hygiène et sécurité dans ses locaux et
fait désherber l’espace autour de l’usine. Les serpents disparaissent,
sans que l’on dise à quelles mesures, pratiques ou magiques, il faut 9.16
attribuer ce succès ...
0.17
6:16
pents ne trouvaient pas un abri commode et sec dans les nouveaux locaux
industriels, ou s’ils ne cherchaient pas de la nourriture dans les produits
888
Bien d’autres cas pourraient être cités dans un pays comme le Cameroun.
0856
de ses membres font alors un long voyage inconfortable pour aller se faire
« désenvouter » ou « blinder » par un « nganga » célèbre dans un village peu
:ENC
ou des maladies qui paraissent mal expliqués ou répétitifs et sont dès lors
soupçonnés de « magie », sans en chercher les causes réelles (ou alors les
larvo
causes réelles sont vues seulement comme les effets visibles d’une volonté
invisible). Et pour une autre moitié sur des actes de malveillance par empoi-
sonnement, harcèlement psychologique, ruse, sabotage ou prestidigitation
pour impressionner un public ou un adversaire qui est acquis d’avance à
l’idée de sorcellerie.
Un cas probable de prestidigitation est celui où un personnage menaçant
pétrifie de peur un adversaire en se transformant soudain en un serpent
agressif, un peu comme le prestidigitateur européen sort un lapin de son
chapeau vide … On peut supposer qu’il a su détourner une seconde l’atten-
tion de son interlocuteur et disparaître derrière un mur tout en ouvrant un
sac contenant un serpent : le reptile maltraité dans le sac et par sa chute se
montre alors menaçant.
0485
Ainsi, la croyance en la sorcellerie est très répandue, plus sans doute en
Afrique centrale qu’en Afrique de l’Ouest (mais elle est commune au Bénin
0026
par exemple), et peut-être davantage chez les chrétiens que chez les musul-
mans. Peu d’Africains osent dire que la sorcellerie, au sens « magique » ou
7:17
« surnaturel » du terme, repose sur la crédulité et n’existe que pour ceux qui
y croient.
0.21
Mais quand il insiste fortement sur la sorcellerie comme instrument
9.16
de pouvoir, Emmanuel Kamdem suggère, sans le dire explicitement, qu’il
existe des manipulateurs, dirigeants d’organisations diverses (économiques,
0.17
administratives ou politiques) qui entretiennent cette crédulité chez leur
personnel ou dans leur public, comme il y a aussi des « exécuteurs », des
6:16
fique !
888
aux personnes » est punie par le code pénal et les affaires de sorcellerie
sont souvent portées devant les tribunaux, en particulier dans les régions
0856
pas à l’éradiquer.
nitra
causes réelles sont vues seulement comme les effets visibles d’une volonté
invisible). Et pour une autre moitié sur des actes de malveillance par empoi-
sonnement, harcèlement psychologique, ruse, sabotage ou prestidigitation
pour impressionner un public ou un adversaire qui est acquis d’avance à
l’idée de sorcellerie.
Un cas probable de prestidigitation est celui où un personnage menaçant
pétrifie de peur un adversaire en se transformant soudain en un serpent
agressif, un peu comme le prestidigitateur européen sort un lapin de son
chapeau vide … On peut supposer qu’il a su détourner une seconde l’atten-
tion de son interlocuteur et disparaître derrière un mur tout en ouvrant un
sac contenant un serpent : le reptile maltraité dans le sac et par sa chute se
montre alors menaçant.
0745
Ainsi, la croyance en la sorcellerie est très répandue, plus sans doute en
Afrique centrale qu’en Afrique de l’Ouest (mais elle est commune au Bénin
0026
par exemple), et peut-être davantage chez les chrétiens que chez les musul-
mans. Peu d’Africains osent dire que la sorcellerie, au sens « magique » ou
7:17
« surnaturel » du terme, repose sur la crédulité et n’existe que pour ceux qui
y croient.
0.21
Mais quand il insiste fortement sur la sorcellerie comme instrument
9.16
de pouvoir, Emmanuel Kamdem suggère, sans le dire explicitement, qu’il
existe des manipulateurs, dirigeants d’organisations diverses (économiques,
0.17
administratives ou politiques) qui entretiennent cette crédulité chez leur
personnel ou dans leur public, comme il y a aussi des « exécuteurs », des
6:16
fique !
888
aux personnes » est punie par le code pénal et les affaires de sorcellerie
sont souvent portées devant les tribunaux, en particulier dans les régions
0773
pas à l’éradiquer.
nitra
5. Le guérisseur traditionnel
Le guérisseur traditionnel est d’abord un thérapeute qui s’inscrit dans
la relation intrinsèque entre l’homme et la nature. Selon Joseph Ki Zerbo6,
« le thérapeute d’antan, avant de couper des feuilles pour l’usage sanitaire,
se recueillait un moment devant l’arbre choisi et lui demandait pardon de
devoir le mutiler ».
Au Cameroun comme dans d’autres pays, l’univers malveillant du sor-
cier s’oppose à celui bienveillant du « nganga », le guérisseur, qui soigne sou-
vent par des contrepoisons. Eric de Rosny, prêtre jésuite initié « nganga »,
a fourni une autre part d’explication par une pratique de psychothérapie
(souvent collective) pour guérir des maladies d’origine psychosomatique.7
0745
Le nganga rassemble la nuit dans sa cour le malade et son entourage (fa-
mille et voisinage), autour d’un grand feu tandis que les tambours battent
0026
sans discontinuer. Dans l’atmosphère envoutante ainsi créée, où les défenses
sociales se relâchent, le nganga appelle soudain les proches à la confession
7:17
collective : pourquoi et comment ont-ils relégué, ostracisé, stigmatisé ou
martyrisé la victime ? Les aveux se libèrent, ainsi que les bonnes intentions
0.21
de réparation, le malade persécuté est réhabilité et retrouve confiance en lui
et en son entourage. Ainsi le nganga pratique-t-il, sans le savoir, un autre
type de psychanalyse de groupe, qui était en vogue en Europe à la fin du 9.16
0.17
XXe siècle.
Quant à Eric de Rosny, après avoir observé et pris notes de centaines de
6:16
telles nuits, il a acquis, à l’issue de cette initiation, la « double vue », qui n’est
peut-être qu’une exceptionnelle faculté d’introspection ou d’intuition fon-
8565
Saint Ignace, dont celui de la vue ?). Le lendemain de cette « vision », son
418:
maître « nganga » meurt, mais sa famille rassure Eric de Rosny : il est parti
en paix parce qu’il a trouvé en lui son successeur …
0773
Pour Emmanuel Kamdem, les « vrais » nganga étaient ceux formés par
une longue initiation, notamment à la pharmacopée naturelle, par une
:211
0026
LES MODÈLES DU MANAGEMENT INTERCULTUREL
7:17
CONFRONTÉS À L’AFRIQUE
0.21
9.16
1. Application des modèles interculturels classiques au
management africain
0.17
cultures) ?
418:
– Individualisme g. hofstede
2) Relation à la société
– sens communautaire f. Trompenaars
x.com
– Affirmation de soi et
3) Relation dans l’équipe compétition g. hofstede
– consensus ou facilitation
larvo
.scho
1. Voir THERY Benoît, Manager dans la diversité culturelle, Editions d’Organisation, 2002.
www
146 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0745
– universalisme
8) gestion de la règle f. Trompenaars
– Particularisme
0026
7:17
On rappelle ci-après les définitions de ces huit critères :
0.21
1) Relation hiérarchique
9.16
• Distance hiérarchique
Pratiquer ou accepter le pouvoir ou l’inégalité de la relation hiérar-
0.17
chique :
6:16
respect.
888
• Partenariat
418:
rarchiques ;
• éviter les marques extérieures du statut hiérarchique.
:211
2) Relation à la société
nitra
• Individualisme
G Ke
tion de poste, une évaluation, une gestion des carrières et une rémunération
individualisées ; séparer et préserver la vie privée par rapport à la vie pro-
x.com
fessionnelle.
• Sens communautaire
larvo
0745
et entretenir des relations conviviales et non conflictuelles, rechercher des
conditions de travail agréables.
0026
4) Gestion du temps
7:17
• Programmation (monochronisme selon E. T. Hall et M. R. Hall)
0.21
Planifier et organiser son temps de façon rigoureuse et séquentielle, ter-
miner ce qui est entrepris sans interruption intempestive et dans les délais
prévus, protéger son espace et son temps de travail de façon à ne pas être 9.16
0.17
dérangé ni interrompu.
6:16
sir, donner une réponse immédiate à une sollicitation, passer d’un dossier
à l’autre sans difficulté ou traiter plusieurs affaires dans le même laps de
888
5) Gestion de l’information
• Explicite et formelle (faible « référence au contexte », qui doit donc être
:211
0745
clan, famille, âge, sexe, provenance régionale, diplôme, religion, langue.
0026
7) Gestion du risque
7:17
• Prévention du risque (fort contrôle de l’incertitude selon Hostede)
Être réticent à la prise de risque ou prévenir les risques en les antici-
0.21
pant et en prenant des mesures ou procédures de prévention ou de sécurité.
Préférer un statut stable et sécurisant.
• Prise de risque (faible contrôle de l’incertitude) 9.16
0.17
Accepter ou être peu soucieux de prendre des risques, soit par confiance
6:16
en ses propres aptitudes, soit par le sentiment de n’être pas le maître de son
destin. Être ouvert à l’innovation et à l’entreprenariat.
8565
8) Gestion de la règle
888
• Universalisme
418:
Accepter que les lois et les règles soient faites pour être appliquées par
toutes les personnes concernées de la même façon. Être prêt à dénoncer
0773
• Particularisme
Adapter la règle selon les personnes concernées ou selon l’appréciation
nitra
0745
recherche de l’élégance … détente et de connivence)
Polychronisme, peu de Les rendez-vous peuvent
0026
programmation, flexibi- être pris à la dernière
4) gestion du temps
lité du temps, saisie de minute, les délais peuvent
7:17
l’opportunité être reportés
0.21
Implicite et informelle
Parfois manque de trans-
… mais communication
5) gestion de l’information parence et ruse ; goût
9.16
parfois très directe
du secret (« le visible et
l’invisible »)
0.17
appartenance de famille,
6) gestion du statut tance du protocole qui le
de clan, de réseau, d’eth-
met en scène
8565
modèles interculturels
:ENC
0745
joindront bientôt les proches collaborateurs du « chef », appelés à participer
à votre « audience ». Enfin, vous serez introduit à la table de réunion dans
0026
le vaste bureau du « chef ».
7:17
Mais l’autorité est tempérée par la consultation : le chef doit consulter
son « conseil des sages » (conseil d’administration, conseillers ou cadres
0.21
de niveau N-1). Il leur donne la parole successivement et en tirera ensuite
9.16
la conclusion. S’il n’est pas d’accord avec l’un de ses collaborateurs, il com-
mencera par lui dire : « tu as parfaitement raison », puis il développera
0.17
progressivement une argumentation contraire, au terme de laquelle chacun
aura compris qu’il avait parfaitement tort ; mais la face aura été sauvée pour
6:16
tous …
8565
sous différentes formes (la famille élargie, le village, le clan, l’ethnie), avec ses
avantages (assurance mutuelle, « tontines », logement …) et ses contraintes
0773
à paraître.
www
LEs MoDèLEs Du MAnAgEMEnT InTERcuLTuREL 151
0745
ment dans les structures traditionnelles ». L’esprit de solidarité met plutôt
en avant la responsabilité de la communauté à l’égard de chacun de ses
0026
membres.
Les motivations viennent donc des états affectifs positifs de l’entourage.
7:17
À cet égard, les rites, les cérémonies et les activités de loisirs (clubs de foot-
0.21
ball de l’entreprise ou autres …) servent au renforcement des liens sociaux.
Ainsi, « le rendement du travail improductif est élevé » car « le lien rem-
9.16
place le bien ».
Il y a peu de séparation de la vie professionnelle et de la vie privée : « une
0.17
Le capitalisme bamiléké :
888
Les Bamilékés sont l’une des ethnies les plus connues du cameroun,
vivant à l’origine dans les plateaux des régions ouest et nord ouest,
0773
0745
pour venir en aide à un frère dans le besoin. Et si le Bamiléké, aux
yeux de beaucoup, passe pour un élément dangereux, c’est qu’il repré-
0026
sente une force peu connue en Afrique noire : la force de l’argent ».
D’où vient cette force ? Emmanuel Kamdem l’explique notamment par
7:17
deux raisons. La première est la recherche « d’une position sociale,
elle-même sous-tendue par la production et l’accumulation des res-
0.21
sources humaines et matérielles (les femmes, les enfants, les terrains
à exploiter, les immeubles construits, etc). Le volume et la qualité des
ressources accumulées deviennent ainsi l’enjeu déterminant … pour 9.16
accéder à une position de notabilité plus élevée » dans le système
0.17
qui implique une réelle austérité personnelle (ne rien dépenser pour
soi et économiser) et à la solidarité des tontines pour emprunter afin
0773
d’investir en capital.
:211
faire les esprits des morts et de tenir sa position dans une société très
hiérarchisée. La réussite matérielle tient donc à la fois à des valeurs
G Ke
individualistes (il faut réussir par soi-même, car rares sont les héritiers),
communautaires (l’entraide est très forte dans la famille, la chefferie
:ENC
0745
liste ». Pour Serge Feyou de Happy, « l’entrepreneur est un véritable chef de
famille » : c’est du moins le rôle qui est attendu de lui. « Les organisations
0026
sont assimilées à une grande famille » : les salariés attendent de leur « pa-
tron » (de pater, le père) qu’ils s’occupent d’eux comme le chef de famille, y
7:17
compris parfois de leurs problèmes personnels.
0.21
Les relations entre les employeurs et les salariés sont fondées sur des
obligations mutuelles. L’employé doit une loyauté à l’égard de l’employeur.
9.16
La confiance est la base de la relation : les procédures de contrôle irritent
parce qu’elles semblent la mettre en cause.
0.17
du salarié fautif.
:211
2018.
www
154 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0745
d’une autre famille … c’est prendre le risque que lui-même partage
(l’information) avec l’ensemble de sa famille à lui. »
0026
« Travailler en famille comporte beaucoup d’avantages … : capacité à
7:17
construire des stratégies de long terme, engagement total de la famille
pour son entreprise, la bonne transmission des connaissances, des
0.21
expériences et des compétences, et enfin l’attachement à la qualité du
travail auquel le nom de la famille est lié. »
« En Afrique, l’entreprise familiale accorde souvent une prééminence 9.16
0.17
aux anciens, à qui l’on doit respect et subordination, et dont la mission
est de transmettre son expérience et ses compétences aux cadets. »
6:16
tantes : « le travail n’est pas une corvée » : il n’est pas aliéné, il n’est pas
séparé de la vie, mais il doit permettre des échanges et être si possible une
larvo
vailler, mais ils travaillent pour vivre : travailler dans la tranquillité, avoir
des relations sociales harmonieuses, préserver la qualité de la vie ».
L’humour est fortement valorisé : c’est à la fois une élégance de l’esprit et
un facteur de détente et de convivialité.
0745
n’ont pas d’agenda : ils réagissent à l’immédiat.
Le polychronisme est aussi dans le quotidien : un trajet en voiture pour
0026
une réunion professionnelle se traduira au passage par un arrêt dans une
boutique pour des courses familiales, au risque d’arriver en retard à la réu-
7:17
nion : toute opportunité est bonne à prendre. Mais attention : la ponctualité
est de rigueur dans les relations officielles.
0.21
Les interruptions pour répondre au téléphone, y compris à des appels
personnels, pendant un rendez-vous ou une réunion de travail peuvent pa- 9.16
raître exaspérantes pour des Européens. Le téléphone portable a rencontré
0.17
daire ».
:211
0745
Dans la pratique quotidienne, le manque de précisions concrètes peut
être déstabilisant pour le cadre européen en mission : la désignation des
0026
lieux de rendez-vous, par exemple, est fort aléatoire, ne serait-ce que par
défaut de l’affichage des rues et des numéros d’immeubles. Les points de
7:17
repère sont inattendus : « après telle station d’essence », dont vous n’avez
aucune idée d’où elle peut se trouver : mieux vaut avoir un chauffeur expé-
0.21
rimenté …
cieuses selon les proximités ethniques, les confréries, voire les sociétés se-
8565
crètes, et dans certains contextes les castes et les statuts de servilité …).
Un attribut statutaire reste la primauté de l’âge. Il est plus difficile aux
888
quart des jeunes Africains auraient peur de créer leur propre entreprise ou
leur propre emploi. La recherche d’un emploi stable et sûr reste néanmoins
.scho
0745
plique en fonction des personnes concernées. Au regard des règles et pro-
cédures, on ne traite pas de la même manière ses parents, ses « frères » du
0026
village ou d’ethnie, ses amis, ses voisins, ses connaissances de quartier… :
ils seront privilégiés.
7:17
Aussi, les Africains cherchent souvent à établir une relation personni-
0.21
fiée avec un fonctionnaire ou un responsable doté d’un certain pouvoir, au
besoin par l’introduction ou l’entremise d’un tiers (« je viens vous voir de la
9.16
part d’Untel », « je suis de la même ethnie que toi » …), de façon à obtenir
meilleur accueil ou faveur, ou à éviter d’avoir à payer le prix de la corrup-
0.17
tion…
6:16
En tout cela, il s’agit ici de tendances culturelles de fond, mais dans les
grandes villes et les grandes entreprises, une classe moyenne de cadres mo-
8565
0026
ADAPTER SON MANAGEMENT DANS LES ENTREPRISES ET
7:17
LES ORGANISATIONS EN AFRIQUE
0.21
On propose dans ce chapitre deux types de stratégies d’adaptation :
• l’adaptation managériale au contexte africain existant, avec deux 9.16
0.17
parties : une stratégie d’attitudes personnelles et une stratégie de mana-
gement (donc en particulier dans le champ des ressources humaines) ;
6:16
• respecter la « face » chez soi et chez les autres : l’élégance est impor-
tante pour soi et pour autrui, au triple sens de l’élégance vestimentaire
(point souvent sensible aux yeux des Africains), de l’élégance de la pa-
role (le discours et la politesse comptent beaucoup) et de l’élégance du
comportement (le contrôle de soi et l’attention à l’autre) ;
• cela n’empêche pas de passer, après un premier stade de présenta-
tions un peu formelles, à un style autant que possible simple et naturel.
À cet égard, les capacités d’humour, si l’on a cette aptitude, sont un atout
très important : les Africains aiment rire, apprécient les traits d’esprit
et l’humour crée un climat de détente, voire de complicité, dans la rela-
tion ;
• dans le même esprit, les négociations vont se dérouler en quatre
étapes : l’entrée en matière formelle, voire un peu solennelle ; l’établisse-
0745
ment de la relation personnelle comme indiqué précédemment ; la négo-
ciation elle-même ; puis l’expression de l’accord, qui peut demander un
0026
délai si des validations sont nécessaires à plus haut niveau. Il faudra donc
souvent s’y prendre à plusieurs reprises ;
7:17
• la conduite d’un projet plus complexe va demander un grand
0.21
nombre de consultations et de négociations, auxquelles il faut être pré-
paré : on présente ainsi dans la section suivante les difficultés rencon-
trées par un projet de coopération décentralisée au Mali. 9.16
0.17
La gestion des situations difficiles peut se prévenir de plusieurs façons :
• d’abord, il y a des comportements à bannir soi-même : arrogance1,
6:16
0745
En fait, il s’agit de sa propre maison, construite avec le financement de
l’entreprise, mais louée à l’entreprise par la dame prête-nom.
0026
Pendant ce temps, le Dg a refusé au personnel l’augmentation d’une
7:17
indemnité de logement qu’il demandait, en arguant des difficultés de
trésorerie de l’entreprise.
0.21
Le conseil d’administration, dont les membres bénéficient par ailleurs
9.16
de largesses de l’entreprise, oubliera sans doute de demander le rem-
boursement de son prêt au Dg.
0.17
6:16
tat est obtenu en entretenant une forme de complicité implicite avec son
418:
d’autres latitudes. Mais elle se réalise ici par la force de l’implicite. Il est pro-
bable que le faux bail ne sera jamais décelé : il faudrait que l’entreprise ait un
x.com
Commissaire aux comptes, que celui-ci soit assez curieux pour enquêter sur
toutes les caractéristiques du bail et qu’il ne soit pas lui-même en relation
larvo
cette affaire, il est probable que tous ces dirigeants se tiennent mutuelle-
ment par des intérêts croisés, au moins tant que l’entreprise ne connaîtra
pas de difficulté financière.
En conclusion, la diplomatie dans la relation d’affaires n’exclut pas la
prudence et la clarté des contrats …
0745
La solidarité communautaire entraîne une certaine préférence pour
recruter ou promouvoir des membres de sa famille, de son village, de son
0026
clan ou de son ethnie. Les entreprises internationales qui veulent privilé-
gier la compétence et la diversité et éviter de se retrouver à terme avec « un
7:17
État dans l’État » au sein de l’entreprise préfèrent un équilibre ethnique
et mettent en avant des critères de recrutement et de carrière strictement
0.21
professionnels.
9.16
Etude de cas au Sénégal : « le village dans l’entreprise »3
0.17
c’est l’expérience qu’a pu faire une importante filiale à Dakar d’un très
6:16
cette situation pourrait ne pas être aberrante dans une PME du secteur
informel, comme il en existe beaucoup au sénégal, constituée autour
0773
3. Voir THERY Benoît, « Recrutement et gestion des carrières au Sénégal. Intérêts com-
.scho
0745
préconisent de rechercher dans l’entreprise la représentation des équilibres
ethniques du pays : cette dernière approche est plus discutable, car elle re-
0026
vient à appliquer, autrement, un critère ethnique. L’approche la plus sûre
reste donc sans doute celle fondée sur la gestion des compétences, même
7:17
si elle n’est pas nécessairement facile à appliquer au quotidien : il n’est que
0.21
de voir les files d’attente des solliciteurs, internes ou externes à l’entreprise,
dans le couloir du bureau d’un DRH africain ...
Certaines multinationales cherchent à contourner ce type de difficulté 9.16
0.17
en affectant de préférence leurs managers africains dans un pays voisin
du leur, où ils seront à l’abri des sollicitations communautaires. Bien que
6:16
peut être un moyen de leur faire gagner aussi une expérience internationale
qui sera utile à leur carrière.
888
0745
les syndicats : tous estiment que le système de gestion des carrières
proposé est inacceptable, car il va remettre en cause la composition
0026
et le management tribaux de chaque direction, casser les équilibres
ethniques de l’entreprise et engendrer des conflits.
7:17
0.21
L’historique de l’affaire paraît assez explicable : la création de cette fi-
liale nationale, qui représente une partie importante des exportations du
Gabon, coïncide avec les débuts de l’indépendance. L’entreprise étant située 9.16
dans une région rurale et peu peuplée, elle a attiré des cadres, techniciens
0.17
férentes ethnies. La petite bourgade d’origine est devenue une ville impor-
tante du fait de l’implantation de l’entreprise, de ses personnels et de leurs
8565
nationaux et donc surtout assurées par des expatriés qui avaient aussi la
charge de former le personnel national (le Gabon ne pouvant alors être
:211
Il est probable que cette répartition ethnique ait paru alors une solution
G Ke
tricable …
.scho
www
164 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0745
Etude de cas au Mali : le projet d’électrification de Nioro du Sahel
0026
Les communes de Limours et les Molières en france et celle de nioro
au sud-ouest du Mali pratiquent une coopération décentralisée et
7:17
s’accordent sur un programme d’électrification de la ville de nioro,
avec l’aide de techniciens bénévoles d’EDf (fédérés par l’ong d’en-
0.21
treprise « Electriciens sans frontières »). Du matériel ancien mais en
bon état (un groupe électrogène de 400 000 watts) sera mis à disposi-
tion par EDf et les techniciens bénévoles viendront installer la centrale 9.16
0.17
électrique et le réseau de distribution. La contribution de la ville de
nioro sera la fourniture de main-d’œuvre peu qualifiée et des poteaux
6:16
4. HENRY Alain, « La générosité ne suffit pas : Nioro du Sahel, les raisons d’une discorde »,
.scho
Pis, selon les plans du comité de gestion mixte, des quartiers pauvres
d’anciens « captifs » (à statut social dévalorisé) seront traversés par
des câbles sans être desservis en électricité à court terme : ils ont ten-
dance à se révolter.
Par ailleurs, des habitants dont on présumait qu’ils seraient bénévoles
(comme les électriciens français) pour les travaux de mise en place de
leur réseau réclament un salaire … Enfin, le poids financier du person-
nel de maintenance qui sera nécessaire à l’avenir n’a pas été budgété,
que ce soit par une institution locale ou nationale.
L’équipe française qui effectue cette mission sur sa période de congés
(et qui est limitée par cette durée) pensait mener à bien cette phase de
réalisation permettant l’arrivée effective de l’électricité chez les utilisa-
teurs. Elle s’impatiente devant les multiples controverses qui surgissent
0745
à nioro, où les responsables demandent de commencer par s’asseoir
pour discuter. Les électriciens bénévoles sont alors confrontés à l’enjeu
0026
politique de leur projet de développement technique et de ses impacts
sociaux et financiers imprévus.
7:17
De multiples réunions et discussions n’aboutiront pas en temps utile
pour la réalisation matérielle de la phase prévue et les autorités lo-
0.21
cales de nioro décident de fermer provisoirement les premiers rac-
9.16
cordements effectués avant d’avoir résolu les problèmes posés. Les
bénévoles d’EDf en repartent avec une forte amertume et le sentiment
0.17
que leur « bonne volonté » n’a servi à rien…
6:16
l’éducation scolaire ;
• la transformation de la vie familiale : par exemple, les modes de
0773
public, etc.
:ENC
ont été largement escamotées par des techniciens français bénévoles qui
n’avaient pas toutes les compétences correspondantes.
larvo
Pour Alain Henry, « le projet, fondé sur une approche purement tech-
nique, a ignoré les aspects organisationnels du changement … ayant des
.scho
0745
particulier sur le plan sociologique, qu’elle s’applique à un contexte culturel
différent.
0026
7:17
2. Stratégie pour la conduite de grands projets en Afrique
0.21
2.1. Un contexte géopolitique et économique en évolution
La ruée sur les matières premières de nouvelles puissances émergentes, 9.16
0.17
l’Inde, le Brésil, la Turquie et surtout la Chine, avec notamment une forte
implantation chinoise dans différents secteurs (bâtiment et travaux publics,
6:16
grands chantiers (ceux-ci voyant parfois travailler sur le même site les sala-
riés africains 8 heures par jour et les travailleurs détachés chinois 13 heures
:211
par jour …). Un grand investisseur se doit de ne pas baisser les exigences
nitra
investissements envisagés.
www
ADAPTER son MAnAgEMEnT 167
0745
de protéger leur emploi national. Dans la négociation de grands projets, il
est fréquent que soient introduits des quotas d’étrangers en fonction de leur
0026
qualification et de leur durée d’expatriation prévue dans le pays.
7:17
Par ailleurs, il faut tenir compte, pour l’investissement et la gestion des
ressources humaines en Afrique, de contextes particuliers, comme par
0.21
exemple le « Black Economic Empowerment » en République d’Afrique du
Sud.
9.16
0.17
Empowerment »5
8565
2011.
www
168 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
Aussi un « Broad-Based BEE » (BEE à base élargie) a-t-il été lancé par
le gouvernement en 2003 en définissant des critères plus variés et
d’application plus étendue pour juger le BEE des entreprises. Le Black
Economic Empowerment a ainsi été précisé par une loi de janvier 2004
(Broad-Based BEE Act) qui vise à favoriser l’appropriation de l’écono-
mie par les populations « historiquement défavorisées » (comprendre :
du fait du régime de l’apartheid) par :
– le transfert de capitaux et de pouvoirs économiques ;
– la priorité au recrutement à qualifications égales ;
– le développement des ressources humaines ;
– la priorité des marchés aux entreprises noires.
0745
La loi dispose que ces orientations sont précisées secteur par sec-
teur par des chartes contractuelles entre branche professionnelle et
0026
état. sur cette base, les entreprises doivent établir des « scorecards »
(« tableaux de bord » ou « fiches d’objectifs ») leur attribuant des
7:17
points selon leur degré d’atteinte des objectifs fixés. ceux-ci doivent
répondre aux sept critères suivants fixés par la loi et répartis en quatre
0.21
catégories :
9.16
– « direct empowerment » : le transfert de capitaux (la « proprié-
té » : 20 % des points), financé essentiellement par les banques, et
0.17
points) ;
nitra
d’établir une fiche d’objectifs par entreprise pour enregistrer les résul-
tats obtenus. ce « scorecard » est pris en compte en particulier pour
larvo
nariat public-privé.
www
ADAPTER son MAnAgEMEnT 169
0745
Le BEE a pu ainsi apparaître comme une opportunité pour l’économie
0026
sud-africaine : il a permis en principe d’ouvrir l’économie à la majo-
rité, alors qu’elle risquait de se scléroser par son appartenance à une
minorité étroite. Avec sa dimension d’ « affirmative action » (AA), la
7:17
seconde phase du BEE a permis à une plus grande partie de la popu-
0.21
lation de bénéficier d’embauches, de formations et de promotions.
cela a pu favoriser l’émergence d’une classe moyenne noire.
cependant, la cosATu (confédération des syndicats sud-africains) 9.16
a émis à l’égard du BEE beaucoup de réserves, dont notamment les
0.17
deux suivantes :
6:16
prix modérés par une basse qualité : par conséquent, cela ne favo-
riserait pas la production et l’emploi sud-africains.
nitra
tement, les Blancs, souvent les mieux formés, se sont vus écarter de
l’emploi et ceci a poussé une partie de la population blanche (dont
:ENC
0745
Chiedza Madzima, le BEE « devra travailler davantage sur le développe-
ment des compétences afin d’être un jour plus inclusif ».
0026
Et dans une Afrique du Sud aujourd’hui en récession (ou du moins en
7:17
stagnation), selon l’agence nationale de statistiques, au dernier trimestre
2018, le chômage concernait 30,4 % de la communauté noire, alors que
0.21
seuls 7,6 % des travailleurs blancs ne trouvaient pas de travail.
porte :
• d’abord sur les emplois de construction d’usine ou d’installations
0773
pharmacie et cosmétique, …) ;
larvo
6. BARGELES Claire, « Afrique du Sud : un marché du travail encore très segmenté malgré
.scho
0745
pendant la période de démarrage nécessaire.
0026
Le recrutement sera souvent organisé en trois groupes :
• sur le marché de l’emploi local pour des travailleurs non qualifiés
7:17
afin de satisfaire l’environnement de l’entreprise : c’est souvent indispen-
sable sur le plan social et politique pour répondre à une attente d’emploi
0.21
très forte sur place et éviter des conflits ;
9.16
• sur le marché de l’emploi national pour les travailleurs qualifiés, les
techniciens et les cadres ;
0.17
d’importance.
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0745
et les Emirats du golfe qui veulent alimenter leur industrie en matières
premières, ainsi que les Russes qui maintiennent leur présence acquise
0026
sous le régime précédent de sékou Touré.
Bouygues a obtenu en 2017 d’Emirates global Aluminium un contrat
7:17
de construction d’infrastructures et d’exploitation minière de la bauxite
pour un volume d’investissement d’un milliard $ et un début d’exploi-
0.21
tation en novembre 2019. La raffinerie d’alumine de friguia a été
relancée en 2018, après 6 ans d’arrêt, par la société RusAL (russe)
avec 2 000 travailleurs guinéens. D’autres contrats ont été signés en 9.16
2017 et 2018 avec la société des Bauxites de guinée (sBg) pour la
0.17
elle est rarement qualifiée. Le code minier prévoit des quotas mini-
ma d’emploi guinéen dans les différentes phases d’exploration, de
construction et d’exploitation, selon les catégories de personnels et
selon le stade de maturation de l’exploitation. ces quotas sont en fait
très ambitieux par rapport à la situation actuelle du marché du travail
en guinée.
La majorité de la population adulte reste analphabète, a fortiori dans
les zones rurales d’implantation de ces projets. Dans le secteur indus-
triel, le système de formation professionnelle initiale est très limité aux
niveaux ouvrier qualifié et technicien, malgré les projets de nouveaux
instituts lancés ces dernières années avec des programmes de coopé-
ration internationale. Les établissements d’enseignement professionnel
en place ont souvent des équipements très anciens, hors service, obso-
0745
lètes ou ne pouvant fonctionner faute d’alimentation électrique, et des
formateurs aux qualifications dépassées.
0026
Par ailleurs, le hiatus entre l’idée qu’un travailleur guinéen a de ses
compétences et les exigences d’une entreprise internationale est sou-
7:17
vent très important. que faire alors pour le technicien de salle de
contrôle qui doit suivre sur des ordinateurs des centaines de para-
0.21
mètres physico-chimiques dans une raffinerie d’alumine ? qui fera les
centaines de milliers de points de soudage très techniques sur les rails
des nouvelles voies ferrées prévues pour évacuer les minerais vers un 9.16
0.17
port ?
Pourtant, l’exigence d’emploi national par les autorités du pays et plus
6:16
L’emploi expatrié doit être réduit au minimum possible, même s’il s’agit
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CONCLUSION
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LA « RENAISSANCE » DE L’AFRIQUE
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0.21
Cette conclusion est écrite à Youpwé, petit village sur l’embouchure du
fleuve Wouri, bordée des deux côtés par la mangrove et la forêt équatoriale, 9.16
et sur laquelle voguent silencieusement les pirogues de pêcheurs éwoudi,
0.17
inextricable, aux cours d’eau assombris par les végétaux qu’ils charrient.
L’Afrique des savanes sèches du Sahel ou l’« Afrique des grands lacs ».
x.com
L’Afrique des grands fleuves, du Nil, du Niger, du Congo, qui forment les
immenses bassins d’ensembles sous-régionaux. L’Afrique des savanes tor-
larvo
au sable chaud.
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176 LE MANAGEMENT INTERCULTUREL EN AFRIQUE
0745
Afrique du Sud, ou celle de Nelson Mandela (prix Nobel de la paix 1993) ;
0026
l’Afrique des dictateurs et celle du diplomate Kofi Annan, Secrétaire général
de l’ONU (prix Nobel de la paix 2001) ; l’Afrique des mutilations sexuelles
7:17
et des viols de guerre, et celle du Docteur Denis Mukwege, « l’homme qui
répare les femmes » (prix Nobel de la paix 2018) ; l’Afrique des conflits eth-
0.21
niques et celle d’Abiy Ahmed, Premier ministre éthiopien, réconciliateur
de l’Ethiopie et de l’Erythrée, pacificateur des Amhara et des Oromo (prix
Nobel de la paix 2019). 9.16
0.17
Il y a cinquante ans, le grand ethnologue Georges Balandier avait déjà
attiré l’attention sur l’ « Afrique ambiguë »1, alors que démarraient les nou-
6:16
villes. Les points de repère d’ensemble, les grands traits communs à l’Afrique
peuvent être confirmés par des modèles plus récents comme celui d’Evalde
888
lien entre les traditions de la « vieille Afrique » et les pratiques des sociétés
et entreprises modernes. Il apparaît ainsi un large fond culturel commun à
0773
guistiques en présence, surtout avec l’exode rural dans les grandes villes, le
G Ke
0745
qui s’enfonce trop souvent dans les artifices, la manipulation de la vie et la
dénatalité, voire la peur de l’étranger qui confine parfois à la paranoïa ...
0026
Evidemment, l’Afrique est bien « entrée dans l’histoire », non seulement
7:17
parce que son histoire ancienne est de mieux en mieux connue, non seu-
lement parce que ces soixante dernières années d’indépendance ont été
0.21
tumultueuses, mais aussi parce qu’elle est entrée dans l’innovation, numé-
rique ou artistique, et dans l’entrepreneuriat, allant de l’entreprise indi-
viduelle de survie au groupe multinational de ciment, de phosphates, de 9.16
0.17
banque, de transport aérien, d’hôtellerie, de télécommunications …
Un certain nombre de valeurs fondamentales soutiennent le continent :
6:16
assagir sa natalité …
Débarrassée des oripeaux du colonialisme et, de plus en plus, des dic-
0773
0026
7:17
Amnesty International, La torture en 2014. 30 ans d’engagements non tenus,
0.21
13 mai 2014.
9.16
AMSELLE Jean-Loup et M’BOKOLO Elikia, Au cœur de l’ethnie. Ethnie,
tribalisme et État en Afrique, Editions La Découverte, 1999.
0.17
La Découverte, 2012.
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0745
EL ADNANI Jillali, Entre Maghreb et Afrique subsaharienne. Les origines
de la Tijâniyya et de la Hamawiyya (1781-1809), Université Mohamed V,
0026
Rabat, 2016.
7:17
ELTIS D., “The volume and structure of the transatlantic slave trade: a reas-
sessment”, William and Mary Quaterly, 3rd series, 2001.
0.21
FALL Mamadou, « Les voies non coloniales du développement : le cas
9.16
de l’Afrique de l’Ouest », Conférences à l’Ecole des Hautes Etudes en
Sciences sociales, Paris, les 4 et 18 janvier 2016.
0.17
harienne, à paraître.
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EL ADNANI Jillali, Entre Maghreb et Afrique subsaharienne. Les origines
de la Tijâniyya et de la Hamawiyya (1781-1809), Université Mohamed V,
0026
Rabat, 2016.
7:17
ELTIS D., “The volume and structure of the transatlantic slave trade: a reas-
sessment”, William and Mary Quaterly, 3rd series, 2001.
0.21
FALL Mamadou, « Les voies non coloniales du développement : le cas
9.16
de l’Afrique de l’Ouest », Conférences à l’Ecole des Hautes Etudes en
Sciences sociales, Paris, les 4 et 18 janvier 2016.
0.17
harienne, à paraître.
G Ke
0858
mandations, CIAN, Conseil français des investisseurs en Afrique, 2013.
0026
JULIEN Charles-André, Histoire de l’Afrique du Nord : des origines à la
conquête arabe (tome 1) ; de la conquête arabe à 1830 (tome 2), SNED,
7:17
1978.
KAMDEM Emmanuel, Management et interculturalité en Afrique.
0.21
Expérience camerounaise, Les presses de l’Université Laval, L’Harmattan,
9.16
2015.
KAMDEM Emmanuel et TEDONGMO TEKO Henri, « L’emprise sorcel-
0.17
vembre 2014.
:211
0858
SAUQUET Michel et VIELAJUS Martin, L’intelligence interculturelle.
0026
15 thèmes à explorer pour travailler au contact d’autres cultures, Editions
Charles Léopold Mayer, 2014.
7:17
SECK Adourahmane, « L’islam au Sénégal : actualité et devenir », Conférence
à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, Paris, le 22 février 2018.
0.21
SEVERINO Jean-Michel et RAY Olivier, Le temps de l’Afrique, Odile Jacob,
2010. 9.16
0.17
SEVERINO Jean-Michel et HAJDENBERG Jérémy, Entreprenante Afrique,
Odile Jacob, 2018.
6:16
tion, 2002.
THERY Benoît, « Les enjeux interculturels des investissements du Maroc
888
2020.
:211
Folio, 2017.
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0026
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Cet ouvrage revient sur les éléments fon-
0.21
damentaux pour comprendre l’accompa-
gnement des entreprises de petite taille et
présente le contenu des principaux courants 9.16
théoriques traitant des liens possibles entre les
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Des méthodes pour plus de valeur(s) dans le management
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Coordonné par Olaf de Hemmer Gudme et
Hugues Poissonnier.
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Un nombre toujours croissant de dé-
0.21
marches, nées indépendamment ces dernières
années, visent à améliorer la performance
9.16
des entreprises par une approche « Valeur ».
Certaines ont révolutionné leur domaine
0.17
d’application.
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344 pages – 25 €
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