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Université Chouaïb Doukkali

Faculté des Sciences

MOHAMMED MOUÇOUF

Cours d’Algèbre 2

Année 2023-2024
Chapitre 1
Espaces Vectoriels

Dans tous ce chapitre et dans les suivants, K désignera un corps commutatif


quelconque (le plus souvent K = R ou C).

1.1 Généralités
Définition 1. On appelle espace vectoriel sur K (ev sur K) ou K-espace vectoriel
(K-ev) un ensemble non vide E muni
d’une loi interne + ∶ E × E Ð→ E
(u, v) z→ u + v
et d’une loi externe ⋅ ∶ K × E Ð→ E
(α, u) z→ α.u = αu
telles que :
1) (E, +) est un groupe commutatif :
(i) ∀u, v, w ∈ E ∶ u + (v + w) = (u + v) + w = u + v + w (sans parenthèses),
(ii) ∃0E ∈ E, ∀u ∈ E ∶ 0E + u = u + 0E = u,
(iii) ∀u ∈ E, ∃ − u ∈ E ∶
u + (−u) = (−u) + u = 0E ,
(iv) ∀u, v ∈ E ∶ u + v = v + u.
2)∀(u, v) ∈ E 2 , ∀(α, β) ∈ K 2 :

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a) α(u + v) = αu + αv. c) (αβ)u = α(βu) = αβu (sans parenthèses).


b) (α + β)u = αu + βu. d) 1u = u.

Les éléments de K sont appelés des scalaires, ceux de E sont appelés des
vecteurs et on les note parfois par Ð

u (une lettre surmentée d’une flèche).

Exemples 1.
1) R est un R-ev.
2) C est un C-ev et un R-ev.
3) On muni K n des deux lois suivantes :

(x1 , . . . , xn ) + (y1 , . . . , yn ) = (x1 + y1 , . . . , xn + yn )

et
α(x1 , . . . , xn ) = (αx1 , . . . , αxn )

(K n , +, .) est alors un K-ev.


4) Généralement, Si E1 , E2 , . . . , En sont des espaces vectoriels sur K, on peut mu-
nir E1 × E2 × ⋯ × En d’une structure naturelle de K-espace vectoriel, en définissant
ainsi les opérations :

∀(x1 , . . . , xn ), (y1 , . . . , yn ) ∈ E1 × E2 × ⋯ × En ∶

(x1 , . . . , xn ) + (y1 , . . . , yn ) = (x1 + y1 , . . . , xn + yn )

∀(x1 , . . . , xn ) ∈ E1 × E2 × ⋯ × En et ∀λ ∈ K ∶

λ(x1 , . . . , xn ) = (λx1 , . . . , λxn )

5) L’ensemble Mn (K) des matrices carrées d’ordre n à coefficients dans K est un


K-espace vectoriel. Les lois sont définies par :

(ai,j )1≤i,j≤n + (bi,j )1≤i,j≤n = (ai,j + bi,j )1≤i,j≤n et λ(ai,j )1≤i,j≤n = (λai,j )1≤i,j≤n

6) L’ensemble K[X] des polynômes à coefficients dans K est un K-ev.


7) Soit A un ensemble et E un K-ev. On désigne alors par F (A, E) l’ensemble de

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toutes les applications de A dans E.


F (A, E) peut être muni des lois + et . défini par :

f + g ∶ x z→ f (x) + g(x)

αf ∶ x z→ αf (x)

On vérifie facilement que (F (A, E), +, .) est alors un K-ev.


Cas particuliers :
a) A = N, E = R et K = R : dans ce cas F (A, E) est l’ensemble des suites réelles
qui est donc un R-ev.
b) A = I un intervalle de R, E = R et K = R : F (A, E) est l’ensemble des fonctions
numériques définies sur I qui est donc un R-ev.

Proposition 2. Soient E un K-ev et u, v ∈ E, α, β ∈ K. Alors on a :


1) α(u − v) = αu − αv.
2) α0E = 0E .
3) α(−v) = −αv et donc (−1)v = −v.
4) (α − β)u = αu − βu.
5) (−β)u = −βu.
6)0K u = 0E
7) αu = 0E ⇒ α = 0K ou u = 0E .
On notra par la suite (s’il n’y a pas de confusion à craindre) 0 les éléments 0K et
0E .

Démonstration. 1) On a α(u) = α(u −v +v) = α(u −v)+αv donc α(u −v) = αu −αv.
2) On fait u = v dans 1). 3) On fait u = 0E dans 1). 4) On a αu = (α − β + β)u =
(α − β)u + βu donc (α − β)u = αu − βu. 5) On fait α = 0 dans 4). 6) On fait α = β
dans 4). 7) Si α ≠ 0K alors α est inversible dans K. On a alors

αu = 0E Ô⇒ α−1 (αu) = α−1 0E = 0E Ô⇒ (α−1 αu) = 0E Ô⇒ (1u) = 0E Ô⇒ u = 0E

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1.2 Sous-espaces vectoriels


Définition 3. Soient (E, +, .) un K-ev et F une partie de E. On dit que F est un
sous-espace vectoriel de E (F est un sev de E) si (F, +, .) est aussi un K-ev

Proposition 4. Soient E un K-ev et F une partie de E. F est un sev de E si et


seulement si :
1) F ≠ ∅,
2) ∀(u, v) ∈ F 2 ∶ u + v ∈ F (on dit que F est stable par la loi interne),
3) ∀α ∈ K, ∀u ∈ F ∶ αu ∈ F (on dit que F est stable par la loi externe).

Démonstration. Il est clair que si F est un sev de E alors les conditions 1),2) et 3)
sont vérifiées. Inversement, on a −1 ∈ K, donc, d’après 3), −u = (−1)u ∈ F ∀u ∈ F .
Comme F est stable par la loi +, alors (F, +) est un sous-groupe de (E, +). Puisque
on a 3) alors F est un espace vectoriel.

Proposition 5. Soient E un K-ev et F une partie de E. F est un sev de E si et


seulement si :
1) F ≠ ∅,
2) ∀(u, v) ∈ F 2 , ∀(α, β) ∈ K 2 , on a αu + βv ∈ F .

Démonstration. Supposons que F est un sev de E. Soient α, β ∈ K et u, v ∈ F .


d’après 3) de la proposition 4, on a αu ∈ F et βv ∈ F et d’après 2) de la même
proposition, on a αu + βv ∈ F . Inversement, prenant α = β = 1 dans 2), alors u ∈ F
et v ∈ F entrainent que u + v ∈ F . Prenant ensuite β = 0 dans 2), alors α ∈ K et
u ∈ F entrainent que αu ∈ F .

Proposition 6. Soit F une partie d’un K-ev E. Alors :




⎪ F ≠∅
F est un sev de E ⇔ ⎨

⎪ 2
⎩ ∀(u, v) ∈ F , ∀α ∈ K ∶ αu + v ∈ F
Démonstration. Facile.

Remarques 7.
1) Soient E un K-ev et F une partie non vide de E. F est un sev de E veut dire
que F est un K-ev pour les lois induites par celles de E :

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+ ∶ E × E Ð→ E et . ∶ K × E Ð→ E
(u, v) z→ u + v (α, u) z→ αu.
2) Pour montrer qu’un ensemble E est un espace vectoriel il suffit de montrer que
E est un sev d’un autre ev bien connu.
3) Un sous espace vectoriel contient toujours le vecteur nul. Donc pour montrer
que F est une partie non vide de E, on se contente de vérifier que le vecteur nul
0 de E est dans F . En effet, si 0 ∈/ F alors F n’est pas un sev de E ; et si 0 ∈ F
alors F est non vide.
4) Si F est un sev de E et si E est un sev de G alors F est un sev de G.

Exemples 2.
1) Si E est un K-ev alors {0} et E sont des sev de E. On les appelle les deux
sous-espaces vectoriels triviaux.
2) Soit Kn [X] = {P ∈ K[X]/deg(P ) ⩽ n} (on convient que −∞ < n). Alors Kn [X]
est un sev de K[X].
Si n ⩽ m alors Kn [X] est un sev de Km [X].
3) E = R2 est un R-ev, F1 = {0} × R et F2 = R × {0} sont des sev de E.
4) soit I un intervalle de R. L’ensemble des fonctions numériques définies et déri-
vables sur I est un sev de l’ensemble des fonctions numériques définies et continues
sur I et ce dernier est un sev de l’ensemble des fonctions numériques définies sur
I.

Proposition 8. Soient E un K-ev, (Fi )i∈I une famille de sev de E, alors F = ⋂ Fi


i∈I
est un sev de E.

Démonstration. On a ∀i ∈ I, 0 ∈ Fi , alors 0 ∈ F , donc F ≠ ∅. Soient α ∈ K, u, v ∈ F .


On a u, v ∈ Fi , donc αu + v ∈ Fi et ceci pour tout i ∈ I. Alors αu + v ∈ F . Par suite
F est un sev de E.

Remarque 9. La réunion de deux sev de E n’est pas en générale un sev de E.

Exemples 3.
1) On sait que F = R2 × {0} et G = R × {0} × R sont des sev de R3 .
On a u ∈ F ⋂ G ⇐⇒ ∃x, x′ , y, z ∈ R ∶ u = (x, y, 0) = (x′ , 0, z) ⇐⇒ x = x′ et y = z = 0

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donc F ∩ G = {(x, 0, 0)/x ∈ R} = R × {0} × {0}.


2) F = {(x, y) ∈ R2 /x + y = 0} et G = {(x, y) ∈ R2 /2x + y = 0} sont deux sous espaces
vectoriels de R2 . On a (1, −1) ∈ F et (1, −2) ∈ G mais (1, −1) + (1, −2) = (2, −3) ∈/ F
et ∈/ G, donc (1, −1) + (1, −2) ∈/ F ∪ G, alors F ∪ G n’est pas un sous espace vectoriel
de R2 .

1.3 Familles génératrices.


Définition 10. Soient u1 , . . . , un une famille finie de vecteurs d’un K-ev E. Un
vecteur u ∈ E est dit combinaison linéaire des vecteurs u1 , . . . , un s’il existe des
scalaires α1 , . . . , αn ∈ K, tel que
n
u = α1 u 1 + ⋯ + αn u n = ∑ αi u i
i=1

Exemples 4.
1) Tout polynôme P ∈ Kn [X] est combinaison linéaire des vecteurs 1, X, X 2 , . . . , X n .
2) Dans le C-ev C2 , tout vecteur (z, z ′ ) est combinaison linéaire des vecteurs (1, 0)
et (0, 1) :
(z, z ′ ) = z(1, 0) + z ′ (0, 1).

3) Dans le R-ev C2 , tout vecteur (z, z ′ ) est combinaison linéaire des vecteurs
(1, 0), (0, 1), (i, 0) et (0, i). Si z = x + iy, x, y ∈ R et z ′ = x′ + iy ′ , x′ , y ′ ∈ R,
alors on a :
(z, z ′ ) = x(1, 0) + x′ (0, 1) + y(i, 0) + y ′ (0, i).

Théorème 11. Soit {u1 , . . . , un } une famille finie de vecteurs d’un K-ev E. Alors :
1) L’ensemble F des combinaisons linéaires des vecteurs u1 , . . . , un est un sev de
E.
2) F est le plus petit ( au sens de l’inclusion) sev de E contenant u1 , . . . , un .

Démonstration.
1) On a 0 = 0u1 +⋯+0un ∈ F , donc F ≠ ∅. Soient α ∈ K, u, v ∈ F . alors ∃α1 , . . . , αn ∈
K et ∃β1 , . . . , βn ∈ K tels que u = α1 u1 + ⋯ + αn un et v = β1 u1 + ⋯ + βn un . On a alors

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αu+v = (αα1 u1 +⋯+ααn un )+β1 u1 +⋯+βn un = (αα1 +β1 )u1 +⋯+(ααn +βn )un ∈ F ,
par suite F est un sev de E.
2) Soit G un sev de E qui contient la famille {u1 , . . . , un }. Puisque G est un sev
de E alors α1 u1 + ⋯ + αn un ∈ G et ceci ∀α1 , . . . , αn ∈ K, donc F ⊆ G.

Définition 12. Soient E un K-ev et A = {u1 , . . . , un } une famille finie de vecteurs


de E. On appelle sev engendré par A l’ensemble F = {α1 u1 + ⋯ + αn un /α1 , . . . , αn ∈
K} des combinaisons linéaires des vecteurs u1 , . . . , un (c’est à dire des éléments de
A).
On dit aussi que A engendre F (ou une famille génératrice de F ).

Notation . On note
F = sev⟨u1 , . . . , un ⟩ = sev⟨A⟩
ou
F = vect⟨u1 , . . . , un ⟩ = vect⟨A⟩

Remarque 13. Par convention on pose sev⟨∅⟩ = {0}.

Exemples 5.
1) K n = sev⟨(1, 0, . . . , 0), . . . , (0, . . . , 0, 1)⟩.
2) Kn [X] = sev⟨1, X, X 2 , . . . , X n ⟩.
3) Dans R3 , soient v1 = (2, 1, 0), v2 = (0, −1, 0), v3 = (2, −1, 0) et soit F = sev⟨v1 , v2 , v3 ⟩.
On montre que F = sev⟨v1 , v2 ⟩ = sev⟨v1 , v3 ⟩ = sev⟨v2 , v3 ⟩, et donc un ev peut avoir
plusieurs familles génératrices. D’une façcon générale, le sev nul {0} possède exac-
tement deux familles génératrices ∅ et {0}, et n’importe quel autre sev possède une
infinité de familles génératrices. Par exemple, considérons le R-ev R (chaque réel
est à la fois scalaire et vecteur). On a α = α.1, donc R = sev⟨1⟩. En général, si d
est un réel non nul, alors on a α = αd .d, et donc R = sev⟨d⟩.
4) Soit u, v ∈ E, alors sev⟨u⟩ = {αu/α ∈ K} = Ku et sev⟨u, v⟩ = {αu + βv/α, β ∈
K} = Ku + Kv.

Théorème 14. Soit A une partie quelconque d’un K-ev E. L’ensemble

H = {α1 u1 + ⋯ + αn un /n ∈ N∗ , α1 , . . . , αn ∈ K, u1 , . . . , un ∈ A}

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des combinaisons linéaires finies d’éléments de A est un sev de E. H est le plus


petit sev (pour l’inclusion) de E contenant A. H est aussi noté H = sev⟨A⟩.

Démonstration. La preuve est analogue à celle du Théorème 11

Exercice 1. Montrer que la famille {1, X, X 2 , . . .} engendre le K-ev K[X].

Proposition 15. Soient E un K-ev et A, B, F des parties de E, alors :


1) F = sev⟨F ⟩ ⇔ F est un sev de E.
2) A ⊆ B ⇒ sev⟨A⟩ ⊆ sev⟨B⟩.
3) Si F est un sev de E, alors : A ⊆ F ⇒ sev⟨A⟩ ⊆ F .
4) sev⟨v1 , . . . , vn ⟩ ne change pas si :
(i) on change l’ordre de deux vecteurs vi et vj .
(ii) on remplace un vecteur vi par un autre vecteur de la forme αvi + ∑j≠i αj vj avec
α ≠ 0.

1.4 Famille liées, famille libres.


Définition 16. Soient E un K-ev et {u1 , . . . , un } une famille finie de vecteurs de
E.
1) On dit que {u1, . . . , un } est une famille liée si :
il existe α1 , . . . , αn ∈ K, non tous nuls, tels que α1 u1 + ⋯ + αn un = 0.
Les vecteurs u1 , . . . , un sont dits linéairement dépendants.
2) On dit que {u1 , . . . , un } est une famille libre si elle n’est pas liée. Ce qui revient
à dire que :
α1 u1 + ⋯ + αn un = 0 ⇒ α1 = ⋯ = αn = 0.

Les vecteurs u1 , . . . , un sont dits linéairement indépendants.

Remarques 17.
1) Une famille est libre ssi elle n’est pas liée. Par conséquent, une famille quel-
conque est ou bien libre ou bien liée.
2) {u} est libre ssi u ≠ 0.
3) Toute sous-famille d’une famille libre est libre.

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4) Toute famille contenant une famille liée est une famille liée. En particulier :
- Une famille qui contient un vecteur nul est une famille liée.
- Une famille qui contient deux vecteurs égaux est une famille liée.
5) La notion de “libre” ou “liée” ne dépends pas de l’ordre dont ses éléments sont
disposés.
6) Une famille A est liée ssi il existe u ∈ A tel que u ∈ sev⟨A/{u}⟩ ; c’est à dire, u
est une combinaison linéaire des autres vecteurs de A.
7) Une famille A est libre ssi u ∈/ sev⟨A/{u}⟩ pour tout u ∈ A ; c’est à dire, aucun
vecteur de A n’est combinaison linéaire des autres vecteurs de A.

Exemples 6.
1) E = R2 : {(1, 0), (0, 1)} et {(1, −1), (1, 1)} sont des familles libres.
2) E = R2 : {(1, −1), (1, 1), (3, −1)} est une famille liée puisque (3, −1) = 2(1, −1) +
(1, 1).
3) E = R2 [X] : {1, X, X 2 } et {2 + 3X, 3X + X 2 , X 2 } sont des familles libres.

Définition 18. Soit A une partie quelconque d’un K-ev E.


1) On dit que A est liée s’il existe une famille finie d’éléménts de A qui est liée.
2) On dit que A est libre si elle n’est pas liée. Ce qui revient à dire que toute
sous-famille finie de A est libre.

Exercice 2. Montrer que la famille A = {1, X, X 2 , . . .} du K-ev K[X] est libre.

1.5 Somme de sous-espaces vectoriels


Dans cette section nous allons nous intéresser au plus petit sous-espace vectoriel
contenant deux sous-espaces vectoriels donnés.

Définition 19. Soient F et G deux sev d’un K-ev E. On note F + G l’ensemble


{u + v/u ∈ F et v ∈ G}. F + G est appelé la somme de F et G.

Remarque 20. F + G = {w ∈ E/∃u ∈ F, ∃v ∈ G, w = u + v}

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Proposition 21. La somme F + G de deux sev F et G d’un K-ev E est un un sev


de E. De plus F + G est le plus petit sev de E (au sens de l’inclusion) contenant
F et G.

Démonstration. On a 0 ∈ F ⋂ G, donc 0 = 0 + 0 ∈ F + G. Alors F + G ≠ ∅. Soient


α ∈ K, u, v ∈ F et w, z ∈ G. On a α(u + w) + (v + z) = (αu + v) + (αw + z). Comme
αu, v ∈ F et αw, z ∈ G, on a αu+v ∈ F et αw +z ∈ G. Donc α(u+w)+(v +z) ∈ F +G.
Par suite, F + G est un sev de E.
D’autre part, on a ∀u ∈ F : u = u + 0 ∈ F + G, donc F ⊆ F + G. de la même façon
on a G ⊆ F + G. Soit H un sev tel que F ⊆ H et G ⊆ H. De plus si u ∈ F et v ∈ G,
alors u + v ∈ H et ceci montre bien que F + G ⊆ H et donc F + G est le plus petit
sev de E (au sens de l’inclusion) contenant F et G.

Exercice 3. Soient F, G et H des sev d’un K-ev E. Alors :


1) F + G = G + F .
2) F ⊆ F + G.
3) F ⊆ G ⇒ F + H ⊆ G + H.
4) (F ⊆ H et G ⊆ H) ⇔ F + G ⊆ H.
5) F + F = F .
6) F + {0} = F .
7) F + E = E.
8) (F + G) + H = F + (G + H) (on peut donc ne pas utiliser les parenthèses).

Proposition 22. Soient A et B deux parties d’un K-ev E. Alors

sev⟨A ∪ B⟩ = sev⟨A⟩ + sev⟨B⟩.

Consequences :
a) sev⟨u1 , . . . , um ⟩ = sev⟨u1⟩ + ⋯ + sev⟨um ⟩ = Ku1 + ⋯ + Kum
b) Si A est une famille génératrice de F1 et B est une famille génératrice de F2 ,
alors A ⋃ B est une famille génératrice de F1 + F2 .

Définition 23. Soient F et G deux sev d’un K-ev E. On dit que la somme F + G
est directe si tout élément de F + G s’écrit d’une manière unique sous la forme
u + v avec u ∈ F et v ∈ G. Dans ce cas F + G est noté F ⊕ G.

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Plus généralement, on a la définition suivante

Définition 24. Soient F1 , . . . , Fn des sev de E. On dit que la somme F1 + ⋯ + Fn


est directe si tout élément de F1 +⋯+Fn s’écrit d’une manière unique sous la forme
u1 + ⋯ + un avec u1 ∈ F1 , . . . , un ∈ Fn . Dans ce cas F1 + ⋯ + Fn est noté F1 ⊕ ⋯ ⊕ Fn .

Proposition 25. Soient F et G deux sev d’un K-ev E. Les propositions suivantes
sont équivalentes :
1. La somme F + G est directe.
2. F ⋂ G = {0}.
3. ∀u ∈ F , ∀v ∈ G : u + v = 0 Ô⇒ u = v = 0.

Démonstration.
1. Ô⇒ 2. : Soit u ∈ F ⋂ G. On a u = u + 0 ∈ F + G et u = 0 + u ∈ F + G, donc u = 0
et 0 = u, c’est-à-dire, u = 0. Alors F ⋂ G = {0}.
2. Ô⇒ 3. : Soient u ∈ F et v ∈ G. Supposons que u + v = 0. Alors u = −v ∈ G, donc
u ∈ F ⋂ G, Il est clair que nous avons aussi v = 0.
3. Ô⇒ 1. : Soient u, w ∈ F et v, z ∈ G. Supposons que u + v = w + z. On a dans ce
cas (u − w) + (v − z) = 0. Comme u − w ∈ F et v − z ∈ G, alors u − w = 0 et v − z = 0,
et donc u = w et v = z.

Exercice 4. Soient F1 , . . . , Fn des sev de E. Montrer que les conditions suivantes


sont équivalentes :
1. La somme F1 + ⋯ + Fn est directe.
2. ∀p ∈ {2, . . . , n}, (F1 + ⋯ + Fp−1 ) ⋂ Fp = {0}.
3. ∀u1 ∈ F1 , . . . , ∀un ∈ Fn : u1 + ⋯ + un = 0 Ô⇒ u1 = ⋯ = un = 0.

Définition 26. Deux sev F et G d’un K-ev E sont dit supplémentaires dans
E si F ⋂ G = {0} (i.e la somme F + G est directe) et E = F + G.
On écrit alors E = F ⊕ G et on dit que E est la somme directe de F et G. F
(resp.G) est dit un supplémentaire de G (resp.F ) dans E.

Exemples 7.
1) On a E = E ⊕ {0}.
2) Soient K = R, E = R2 , F = R × {0}, G = {0} × R. On a E = F ⊕ G. En effet,

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∀(x, y) ∈ E on a (x, y) = (x, 0) + (0, y) ∈ F + G. Donc E ⊆ F + G, et puisqu’on a


déjà F + G ⊆ E, on conclut que E = F + G. D’autre part, si (x, y) ∈ F ⋂ G, alors
y = 0 puisque (x, y) ∈ F et x = 0 puisque (x, y) ∈ G. Donc (x, y) = (0, 0), d’où
F ⋂ G = {(0, 0)}. En conclusion, E = F ⊕ G.

Remarque 27. Un sev F de E peut avoir plusieurs supplémentaires dans E.

Proposition 28. Soient F et G deux sev d’un espace vectoriel E. Alors E est
somme directe de F et G ssi tout éléments de E se décompose d’une façon unique
en somme d’un éléments de F et d’un élément de G. càd :
E = F ⊕ G ⇔ ∀w ∈ E, il existe et unique (u, v) ∈ F × G tel que w = u + v.

Démonstration. Il suffit d’appliquer la proposition 25.

Exemple 1. Soient K = R, E = F (R, R) le R-ev des applications de R dans R.


Soit F = {f ∈ E/f paire } et G = {f ∈ E/f impaire }.
On a F et G sont des sev de E. En effet, l’application nulle 0 ∶ x → 0 est à la fois
paire et impaire, donc F ≠ ∅ et G ≠ ∅. De plus, la somme de deux applications
paires (resp. impaires) est une application paire (resp. impaire), et si on multiplie
une application paire (resp. impaire) par un réel quelconque on obtient une appli-
cation paire (resp. impaire).
Soit f ∈ F ∩ G, alors f (x) = f (−x) = −f (x), donc f (x) = 0 pour tout x ∈ R, c’est-
ç-dire, f = 0. Par suite F ⋂ G = {0}.
f (x)+f (−x)
D’autre part, Soit f ∈ E. Il est facile de vérifier que l’application g(x) = 2
f (x)−f (−x)
est paire et que l’application h(x) = 2 est impaire. Comme f = g + h, alors
E = F +G. Ce qui fait que E = F ⊕G. En conclusion, toute application de R dans R
s’écrit de manière unique comme somme de deux applications l’une paire et l’autre
impaire.

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1.6 Espaces vectoriels de dimensions finies

1.6.1 Généralités
Définition 29. On dit qu’un K-ev E est de dimension finie s’il admet au moins
une famille génératrice finie.
c’est à dire : ∃(u1 , . . . , un ) ∈ E n tel que E = sev⟨u1 , . . . , un ⟩. Dans le cas contraire,
on dit que E est de dimension infinie.

Exemples 8.
1) K = sev⟨1⟩ est de dimension finie.
2) Kn = sev⟨e1 , . . . , en ⟩ est de dimension finie, où e1 = (1, 0, . . . , 0), e2 = (0, 1, 0, . . . , 0), . . . , en =
(0, . . . , 0, 1). En particulier, Rn et Cn sont des espaces vectoriels de dimensions fi-
nies.
3) {0} = sev⟨∅⟩ = sev⟨0⟩ est de dimension finie.
4) Kn [X] = sev⟨1, X, . . . , X n ⟩ est de dimension finie.

Exercice 5. Montrer que K[X] est un K-ev de dimension infinie.

1.6.2 Bases
Définition 30. On dit qu’une famille finie B = (u1 , . . . , un ) d’éléments d’un K-ev
E est une base de E si B est une famille libre et génératrice de E.

Remarque 31. Soient (u1 , . . . , un ) une base de E et α1 , . . . , αn une famille de


scalaires non nuls. Alors (α1 u1 , . . . , αn un ) est aussi une base de E.

Exemples 9.
1) {∅} est, par convention, une base de {0}.
2) E = K n , soient e1 = (1, 0, . . . , 0), e2 = (0, 1, 0, . . . , 0), . . . , en = (0, . . . , 0, 1). Alors
(e1 , . . . , en ) est une base du K-ev E, appelée base canonique (ou standard) de E.
3) (1, X, . . . , X n ) est une base de Kn [X], appelée base canonique de Kn [X].
4) Si E et F sont deux K-ev de bases respectives (u1 , . . . , un ) et (v1 , . . . , vm ), alors
((u1 , 0F ), . . . , (un , 0F ), (0E , v1 ), . . . , (0E , vm )) est une base du K-ev E × F .

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Proposition 32. Soit B = (u1 , . . . , un ) une famille finie d’un K-ev E. Alors les
propriétés suivantes sont équivalentes :
1. B est une base de E.
2. ∀u ∈ E, u s’écrit de manière unique sous la forme : u = α1 u1 +⋯+αn un , α1 , . . . , αn ∈
K.

Démonstration.
1. Ô⇒ 2. : Soit u ∈ E. Comme B est une famille génératrice de E, ∃α1 , . . . , αn ∈ K
tels que u = α1 u1 + ⋯ + αn un .
Supposons que u = α1 u1 + ⋯ + αn un et u = β1 u1 + ⋯ + βn un avec α1 , . . . , αn ∈ K et
β1 , . . . , βn ∈ K. On a u − u = (α1 − β1 )u1 + ⋯ + (αn − βn )un = 0, comme B est une
famille libre, on a α1 − β1 = 0, . . . , αn − βn = 0, donc α1 = β1 , . . . , αn = βn .
2. Ô⇒ 1. : Il est clair que 2. entraine que B est une famille génératrice de E. Soient
α1 , . . . , αn ∈ K et supposons que α1 u1 + ⋯ + αn un = 0. Comme 0 = 0u1 + ⋯ + 0un ,
on a nécessairement α1 = 0, . . . , αn = 0. Ceci entraine que B est une famille libre et
donc c’est une base de E.

Définition 33. Soit B = (u1 , . . . , un ) une base d’un K-ev E et soit u un vecteur de
E. Les scalaires α1 , . . . , αn tels que u = α1 u1 +⋯+αn un sont appelés les coordonnées
(ou les composantes) de u dans la base B. αi s’appelle la ième coordonnée (ou
composante) de u dans la base B.

Notation . On utilise les notations u = (α1 , . . . , αn )B et uB = (α1 , . . . , αn ) pour


dire que u = α1 u1 + ⋯ + αn un .

Remarques 34.
1. Si B = (u1 , . . . , un ) est une base de E, alors en changeant l’ordre des vecteurs ui
on aura une autre base de E. C’est pour cette raison qu’on note souvent les bases
avec des parenthèses et non avec des accolades.
Par exemple : B1 = ((1, 0), (0, 1)) et B2 = ((0, 1), (1, 0)) sont deux bases du K-ev
K 2 , et on a (x, y) = (x, y)B1 = (y, x)B2 .
2. Ce sont les coordonnées des vecteurs qui dépendent des bases et pas les vecteurs.

Proposition 35. Soient E un K-ev et B = (v1 , . . . , vn ) une famille de vecteurs de


E. Alors B est une base de E si et seulement si E = sev⟨v1 ⟩ ⊕ ⋯ ⊕ sev⟨vn ⟩

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Démonstration.
Ô⇒) Supposons que B est une base de E. On évidemment sev⟨v1 ⟩+⋯+sev⟨vn ⟩ ⊆ E.
Inversement, Soit u ∈ E. Alors ∃α1 , . . . , αn ∈ K tels que u = α1 u1 + ⋯ + αn un ∈
sev⟨v1 ⟩ + ⋯ + sev⟨vn ⟩. Donc E ⊆ sev⟨v1 ⟩ + ⋯ + sev⟨vn ⟩. Par suite E = sev⟨v1 ⟩ + ⋯ +
sev⟨vn ⟩.
Soient u1 = α1 v1 ∈ sev⟨v1 ⟩, . . . , un = αn v1 ∈ sev⟨v1 ⟩. Si u1 +⋯+un = 0, alors α1 v1 +⋯+
αn vn = 0 et comme B est une base, on aura α1 = ⋯ = αn = 0 et donc u1 = ⋯ = un = 0.
Par suite E = sev⟨v1 ⟩ ⊕ ⋯ ⊕ sev⟨vn ⟩.
⇐Ô) Facile.

Lemme 36. Soit (v1 , . . . , vm ) une famille d’un K-ev E et soit (u1 , . . . , un ) une
famille génératrice de E. Si m > n alors (v1 , . . . , vm ) est liée.

Démonstration. La démonstration se fait par récurrence sur le cardinal n de la


famille génératrice de l’espace vectoriel. Supposons que n = 1. Soient w, z deux
vecteurs de E. On a w = αu1 et z = βu1. Si α = 0 alors la famille {w, z} est liée. Si
α ≠ 0, alors de l’égalité βw − αz = 0 on en déduit que la famille {w, z} est liée.
On suppose la propriété vrai pour n − 1. Soit (u1 , . . . , un ) une famille génératrice
de E et soit (v1 , . . . , vm ) une famille de E , avec m > n. Puisque

E = sev⟨u1 ⟩ + sev⟨u2 , . . . , un ⟩,

alors
vi = αi u1 + wi , 1 ≤ i ≤ m.

avec α1 , . . . , αm ∈ K et w1 , . . . , wm ∈ F = sev⟨u2 , . . . , un ⟩.
Si αi = 0, 1 ≤ i ≤ m, alors vi ∈ F, 1 ≤ i ≤ m. Or F est engendré par n − 1
éléments et m > n − 1, alors d’aprés l’hypothèse de récurrence, on a (v1 , . . . , vm )
est une famille liée.
Supposons que αj ≠ 0 pour un certain j. Dans ce cas on a

αj vi − αi vj = αj αi u1 + αj wi − αi αj u1 − αi wj = αj wi − αi wj ∈ F,

Donc ∀i ∈ J = {1, . . . , j − 1, j + 1, . . . , m} on a αj vi − αi vj ∈ F . Comme J est de


cardinal m − 1 et m − 1 > n − 1, alors d’aprés l’hypothèse de récurrence, on a

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{αj vi − αi vj /i ∈ J} est une famille liée. Donc il existe des scalaires λi non tous nuls
tels que
∑ λi (αj vi − αi vj ) = 0,
i∈J

alors
∑ λi αj vi − (∑ λi αi )vj = 0
i∈J i∈J

Comme les scalaires λi αj ne sont pas tous nuls, alors la famille {v1 , . . . , vm } est
liée.

Théorème 37. Soit E un K-ev de dimension finie. Alors :


1. De toute famille génératrice de E on peut extraire une base de E.
2. E admet au moins une base.
3. Toutes les bases de E ont le même cardinal.

Démonstration.
1. Soit G = {v1 , . . . , vm } une famille génératrice de E. Si la famille G est libre alors
elle forme une base de G. Si G est liée, ∃vi ∈ G tel que vi ∈ sev⟨Gi ⟩ où Gi = G ∖{vi },
et dans ce cas on a E = sev⟨G⟩ = sev⟨Gi ⟩. Si la famille Gi est libre alors elle forme
une base de E. Si Gi est liée, ∃vj ∈ Gi tel que vj ∈ sev⟨Gij ⟩ où Gij = Gi ∖ {vj },
et dans ce cas on a E = sev⟨Gij ⟩. On itère le procédé jusqu’à obtenir une famille
génératrice de E qui libre et donc une base de E.
2. C’est une conséquence immédiate de 1..
3. Soit B et B ′ deux bases de E. On a B est une famille génératrice de E et B ′ est
une famille libre, donc d’après le lemme 36 on a card(B’) ≤ card(B). De la même
façon on a card(B) ≤ card(B’). En conclusion, card(B’) = card(B).

Remarque 38. Un espace vectoriel peut avoir plusièures bases. Dans un es-
pace vectoriel infini de dimension finie, seul le sous-espace vectoriel nul admet
un nombre fini de bases (une seule).

Définition 39. On appelle dimension de E, et on note dimK (E) ou dim(E), le


cardinal d’une base de E.

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Exemples 10.
1) dim({0}) = 0 (∅ est une base de {0}).
2) dim(K) = 1 et dim(K n ) = n.
3) dim(Kn [X]) = n + 1 ((1, X, X 2 , . . . , X n ) est une base de Kn [X]).
4) dimC (C) = 1 et dimR (C) = 2 (car (1, i) est une base du R-espace vectoriel C).
5) Les sous-espaces vectoriels de dimension 1 sont appelés droites vectorielles et
les sous-espaces vectoriels de dimension 2 sont appelés plans vectorielles.
6) Les sous-espaces vectoriels de dimension n − 1 d’un ev de dimension n sont
appelés hyperplans vectoriels.

Théorème 40. (Théorème de la base incomplète) Soient E un K-ev de dimension


finie, B une base de E et L = {v1 , . . . , vm } une famille libre. Alors il existe H ⊆ B∖L
tel que L ⋃ H est une base de E.

Démonstration. Si B ⊆ sev⟨L⟩ alors L est une famille géneratrice de E et donc une


base de E. Si B ⊈ sev⟨L⟩, alors ∃u ∈ B tel que u ∈/ sev⟨L⟩, et comme L est libre
alors L′ = L ⋃{u} est aussi libre. On itère le procédé jusqu’à obtenir une famille
H ⊆ B ∖ L tel que L ⋃ H est une base de E.

Nous avons le corollaire suivant dit aussi Théorème de la base incomplète.

Corollaire 41. Toute famille libre d’un K-ev de dimension finie E peut être com-
plétée en une base de E.

Démonstration. Ce résultat se déduit du théorème précédent et de l’existence d’une


base de E.

Corollaire 42. Soient E un K-ev de dimension finie et F un sev de E. Alors


1) F est de dimension finie et on’a dim(F ) ⩽ dim(E).
2) dim(F ) = dim(E) ⇔ F = E.

Démonstration.
1. Supposons par l’absurde que F soit de dimension infinie. Soit L1 est une famille
libre de F . Alors L1 est aussi une famille libre de E et donc card(L1 ) ≤ dim(E).
Si F = sev⟨L1 ⟩ alors L1 serait une famille génératrice de F qui est libre, elle serait

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donc une base de F et ce dernier serait de dimension finie, ce qui est absurde.
Si F ≠ sev⟨L⟩, alors ∃u ∈ F tel que u /∈ sev⟨L⟩, et comme L est libre alors L2 =
L1 ⋃{u} est aussi libre. Il est clair que card(L1 ) < card(L2 ) ≤ dim(E). On peut
ainsi construire une suite infinie strictement croissante d’entiers naturels card(Ln )
qui majorée. Absurde. Par suite F est de dimension finie.
Soit B ′ une base de F et soit B une base de E. Puisque B ′ est libre et B est une
famille génératrice de E alors card(B ′ ) ≤ card(B). Donc dim(F ) ≤ dim(E).
2. On a évidemment F = E Ô⇒ dim(F ) = dim(E).
Réciproquement, Supposons que dim(F ) = dim(E) et soit B ′ une base de F .
Supposons par l’absurde que B ′ n’est pas une base de E. Puisque B ′ est libre
alors, d’après le théorème de la base incomplète, on peut compéter B ′ en une base
de E. Dans ce cas on aura dim(E) > card(B ′ ) et donc dim(E) > dim(F ). Absurde.

Une autre démonstration : On a B ′ est libre donc d’après le théorème de la base


incomplète il existe une base B de E telle que B ′ ⊆ B. Puisque dim(F ) = dim(E)
alors card(B ′ ) = card(B) et donc B ′ = B. Par suite F = E.

Corollaire 43. Soit E un K-ev de dimension finie. Tout sev de E admet au moins
un supplémentaire.

Démonstration. Soit F un sev de E et soit B une base de F . Pour avoir un supplé-


mentaire de F il suffit de compléter B par une famille de vecteurs C pour obtenir
une base de E. Le sous-espace vectoriel G = sev⟨C⟩ est un supplémentaire de F
(C est une base de G).

Proposition 44. Soient E un K-ev de dimension finie n et A une partie de E.


Alors :
1. A est une famille libre ⇒ card(A) ⩽ n.
2. A engendre E ⇒ card(A) ⩾ n.
3. (A est une famille libre et card(A) = n) ⇔ A est une base de E.
4. (A engendre E et card(A) = n) ⇔ A est une base de E.

Démonstration.
1. et 3. Découlent du théorème de la base incomplète.

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2. et 4. Découlent du fait que toute famille génératrice de E contient une base de


E.

Remarques 45. Les contraposées des implications et équivalences de la proposi-


tion précédente s’écrivent :
1) Si A contient au moins n + 1 éléments alors A est liée.
2) Si A contient au plus n − 1 éléments alors A n’est pas une famille génératrice
de E.
3) A n’est pas une base de E ⇐⇒ A n’est pas libre ou card(A) ≠ n
⇐⇒ A n’engendre pas E ou card(A) ≠ n.

Corollaire 46. Soient E un K-ev de dimension finie n et A une partie finie de


E telle que card(A) = n. Alors les propriétés suivantes sont équivalentes :
1. A est une famille libre.
2. A est une famille génératrice de E.
3. A est une base de E.

Théorème 47. (Formule de Grassmann) Soient E un K-ev de dimension finie et


F, G deux sev de E. Alors :

dim(F + G) = dim(F ) + dim(G) − dim(F ∩ G).

Démonstration. Soit L = {u1 , . . . , un } une base de F ⋂ G. On a L est une famille


libre de F et aussi une famille libre de G, donc on peut la compléter en une base
{u1 , . . . , un , v1 , . . . , vm } de F et en une base {u1 , . . . , un , f1 , . . . , fk } de G. Alors la
famille B = {u1, . . . , un , v1 , . . . , vm , f1 , . . . , fk } est une base de F + G. En effet, Soit
u ∈ F + G, alors

∃α1 , . . . , αn , β1 , . . . , βm , γ1 , . . . , γn , λ1 , . . . , λk ∈ K

tels que

u = (α1 u1 + ⋯ + αn un + β1 v1 + ⋯ + βm vm ) + (γ1 u1 + ⋯ + γn un + λ1 f1 + ⋯ + λk fk )
= (α1 + γ1 )u1 + ⋯ + (αn + γn )un + β1 v1 + ⋯ + βm vm + λ1 f1 + ⋯ + λk fk

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et donc B est une famille génératrice de F + G.


Montrons que B est une famille libre. Remarquons d’abord que les sommes

(F ∩ G) + sev⟨v1 , . . . , vm ⟩

et
(F ∩ G) + sev⟨f1 , . . . , fk ⟩

sont directes.
Supposons maintenant que

α1 u1 + ⋯ + αn un + β1 v1 + ⋯ + βm vm + λ1 f1 + ⋯ + λk fk = 0. (1.1)

On a alors

F ∋ β1 v1 + ⋯ + βm vm = −(α1 u1 + ⋯ + αn un + λ1 f1 + ⋯ + λk fk ) ∈ G

Alors β1 v1 + ⋯ + βm vm ∈ F ∩ G et β1 v1 + ⋯ + βm vm ∈ sev⟨v1 , . . . , vm ⟩, donc β1 v1 + ⋯ +


βm vm = 0, D’où β1 = ⋯ = βm = 0. De la même façon on montre que λ1 = ⋯ = λk = 0.
De l’égalité (1.1) on déduit que α1 u1 + ⋯ + αn un = 0 et donc α1 = ⋯ = αn = 0. En
conclusion, B est libre et donc c’est une base de F + G.
Donc dim(F + G) = n + m + k = (n + m) + (n + k) − n = dim(F ) + dim(G) − dim(F ∩
G).

Corollaire 48. Soit E un K-ev de dimension finie et soit F un sev de E. Tout


les supplémentaires de F ont pour dimension dim(E) − dim(F ).

Démonstration. Soit G un supplémentaire de F , c’est-à-dire, E = F + G et F ∩


G = {0}. On a dim(E) = dim(F + G) = dim(F ) + dim(G) − dim(F ∩ G). Donc
dim(E) = dim(F ) + dim(G) et par suite dim(G) = dim(E) − dim(E).

Corollaire 49. Soient E un K-ev de dimension finie et E et G deux sev de E.


Alors les propriétés suivantes sont équivalentes :
1) E = F ⊕ G.
2) dim(E) = dim(F ) + dim(G) = dim(F + G).
3) dim(E) = dim(F ) + dim(G) et F ∩ G = 0.
4) dim(E) = dim(F ) + dim(G) et F + G = E.

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Démonstration. La démonstration découle facilement de la formule de Grassmann.

1.7 Rang d’une famille de vecteurs


Définition 50. Soit A une partie d’un K-ev E de dimension finie. On appelle
rang de A, et on note rg(A), l’entier naturel : rg(A) = dim(sev⟨A⟩).

Proposition 51. Soient A et A′ deux parties d’un K-ev E de dimension finie.


Alors :
1. rg(A) ⩽ card(A).
2. A ⊆ A′ ⇒ rg(A) ⩽ rg(A′ ).
3. max(rg(A), rg(A′ )) ⩽ rg(A ∪ A′ ) ⩽ rg(A) + rg(A′ ).
4. rg(A) = max{rg(A′ )/A′ ⊆ A, A′ libre}.

Démonstration. Posons F = sev⟨A⟩ et F ′ = sev⟨A′ ⟩.


1. On a A est une famille génératrice de F , donc rg(A) = dim(F ) ⩽ card(A).
2. Si A ⊆ A′ , alors F ⊆ F ′ et donc dim(F ) ⩽ dim(F ′ ), par suite rg(A) ⩽ rg(A′ ).
3. On a A ⊆ A ∪ A′ et A′ ⊆ A ∪ A′ , donc rg(A) ⩽ rg(A ∪ A′ ) et rg(A′ ) ⩽ rg(A ∪ A′ ),
alors max(rg(A), rg(A′ )) ⩽ rg(A ∪ A′ ). D’autre part, on a A ∪ A′ est une famille
génératrice de F + F ′ . Donc rg(A ∪ A′ ) = dim(F + F ′ ). Or d’après la formule de
Grassmann, on a

dim(F +F ′ ) = dim(F )+dim(F ′ )−dim(F ∪F ′ ) ≤ dim(F )+dim(F ′ ) = rg(A)+rg(A′ ).

Par suite rg(A ∪ A′ ) ⩽ rg(A) + rg(A′ ).


4. Si A′ est libre alors c’est une base de F ′ et donc rg(A′ ) = card(A′ ). D’autre
part, puisque A engendre F , alors A contient une base B de F , et on a donc
rg(A) = dim(F ) = card(B) = rg(B). Si A′ est une partie de A qui est libre, alors
card(A′ ) ≤ card(B) et donc rg(A′ ) ≤ rg(B). Par suite rg(A′ ) ≤ rg(A) et ceci pour
toute partie libre A′ de A. D’où le résultat.
Une autre démonstration : Si A′ est libre et A′ ⊆ A, alors A′ est une famille libre
de F , donc rg(A′ ) ≤ dim(F ) = rg(A). On a de plus A est une famille génératrice de

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F , donc A contient une base B de F . On a donc B ⊆ A et rg(B) = dim(F ) = rg(A).


D’où le résultat.

Proposition 52. Soit A une partie d’un K-ev E de dimension finie. Alors :
1. A est une famille génératrice de E ⇔ rg(A) = dim E.
2. A est une famille libre de E ⇔ rg(A) = card(A)
3. A est une base de E ⇔ rg(A) = card(A) = dim E.

Démonstration. Posons F = sev⟨A⟩.


1. on a

A est une famille génératrice de E ⇔ F = E


⇔ dim(F ) = dim(E)
⇔ rg(A) = dim(E)

2. On a

A est une famille libre ⇔ A est une base de F


⇔ dim(F ) = card(A)
⇔ rg(A) = card(A)

3. Se déduit immédiatement de 1. et 2..

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