Vous êtes sur la page 1sur 2

ence Poivey, la singulière du Medef

SUCCÈS Présidente de la Fédération de la plasturgie, cette autodidacte est entrée au Medef


avec Pierre Gattaz. Elle avait dirigé pendant 25 ans une PME en Haute-Loire.

de Guigné, Anne

Présidente de la fédération de la plasturgie, cette autodidacte est entrée au Medef avec


Pierre Gattaz. Elle avait dirigé pendant 25 ans une PME en Haute-Loire.

Rendez-vous est pris dans un café en face de l'École militaire, dans le 7ème arrondissement de
Paris. Florence Poivey n'habite pas dans le coin, mais à deux pas se trouve le Medef où elle
officie comme responsable Education, formation et insertion. Cette femme élégante semble
façonnée pour les beaux quartiers de Paris. Elle s'est pourtant construite loin d'eux. Née à
Bâle, aujourd'hui lyonnaise, où son mari dirige une entreprise, elle a été à la tête, pendant 25
ans, d'une PME de transformation de matière plastique, Union Plastic, en Haute-Loire.
L'année dernière, au moment de sa cession, l'entreprise comptait plus de 200 salariés, contre
douze à son arrivée. Présidente de la fédération de la plasturgie depuis trois ans, la chef
d'entreprise de 62 ans a rejoint Pierre Gattaz lors de la dernière campagne du Medef début
2013.

A son arrivée avenue Bosquet, Florence Poivey a surpris. « Son style coloré de grande
bourgeoise » , selon un collègue, dénote dans les couloirs. Elle termine ses textos par des «
très merveilleuse journée! » et livre sans ambages sa recette du succès : « plus on est
authentique et libre, plus ça fonctionne de façon magique » . La réussite d'Union Plastic, elle
l'attribue ainsi à « la chance extraordinaire d'être autodidacte. Quand on ne sait rien, on est
obligée de faire confiance. On crée un monde d'autonomie. » On ne saisit pas tout de suite
que ces douces formules sont au service d'une conviction très bien charpentée: l'entreprise est
avant tout une affaire humaine et la réussite ne peut passer qu'à travers l'engagement de
chacun. Ce credo a aussi été façonné par son histoire particulière. « Mes proches sont partis
très jeunes et je reste dans l'idée que chaque jour est un cadeau » , avance-t-elle. Elle a perdu
son père petite fille et a été élevée à côté de Lausanne par une mère « f ormidablement
courageuse. À une époque où c'était très rare et très compliqué, elle a travaillé pour nous
élever, tout en trouvant le temps de faire du catéchisme, de se faire élire dans une commune
... » .

Sa maturité (le bac suisse) en poche, elle s'inscrit en prépa à Paris, mais au bout de deux
semaines, quitte les bancs du lycée pour partir voyager. Six ans de pérégrinations qui lui
permettront de découvrir l'Australie, les États-Unis et le Moyen-Orient où elle prend fait et
cause pour les chrétiens d'Orient. Elle passe notamment plusieurs années à Riyad (Arabie
Saoudite), où elle assiste des avocats qui participent au projet de construction de l'université.
De retour en France, en 1979, elle cherche à « s'ancrer » et se dit que la politique pourrait être
un bon terreau. Lors d'une soirée d'un club centriste, elle rencontre son premier mari, Jacques
Barrot. L'homme politique l'entraîne en Haute-Loire où grandissent leurs trois enfants, Jean-
Noël, Hélène et Marie (aujourd'hui 33, 32 et 27 ans). C'est aussi Jacques Barrot qui lui
suggère de prendre la direction d'Union plastic, dont son père était actionnaire.

« Intelligence humaine exceptionnelle »


Avant d'accepter le défi, elle demande à son frère, architecte, de venir régulièrement l'épauler.
Ils vont faire équipe, jusqu'au décès de ce dernier en 1997. « Au début, quand elle est arrivée
dans l'entreprise, il y avait tellement de choses à faire qu'elle ne savait pas par quoi
commencer. Elle s'est simplement fixée deux obligations : dire bonjour à tout le monde et
avoir chaque jour une conversation personnelle avec un salarié » , raconte sa dernière fille,
Marie. Fabrice Bourdier, son bras droit à Union plastic pendant quinze ans, loue « une très
très grande capacité à savoir s'entourer, à déléguer, donner confiance, une confiance qui ne
rejaillit non pas seulement sur les cadres dirigeants mais sur l'ensemble des salariés, tout en
restant extrêmement exigeante » . Pour entraîner ses équipes, dont plusieurs handicapés
psychomoteurs, cette grande sportive enchaîne les défis avec les salariés : marathon de New
York, ascension du Mont-Blanc, du Kilimandjaro, projet humanitaire au Sénégal... Avec
toujours en toile de fond l'idée que « tous les salariés puissent partager cette chance de
pouvoir s'étonner de soi-même, comme je l'ai été quand Union Plastic a commencé à décoller
».

Une recette gagnante qui l'a fait remarquer des édiles des syndicats patronaux. « C'est une
femme de terrain. Elle s'est faite toute seule par son talent, son énergie, son esprit positif. Elle
est toujours en mode solution, avec une foi constante dans une bonne étoile » , s'enthousiasme
Pierre Gattaz, intarissable sur sa recrue. Il lui a confié le soin de mener deux négociations au
nom du patronat, dont celle sur la formation. Pas très à l'aise au départ sur les aspects
techniques, Florence Poivey a dû imposer son style sur ses dossiers, quitte parfois à étonner
des interlocuteurs plus habitués au rapport de force. Antoine Foucher, directeur adjoint en
charge du social au Medef, a participé aux négociations à ses côtés. Il lui voit « trois grandes
qualités : une très forte exigence de vision, une intelligence humaine exceptionnelle, qui lui
permet de comprendre la vérité des gens, et le courage de s'attaquer aux intérêts particuliers
pour pousser une réforme à laquelle elle croit . » « En négociation, on a réussi à faire
avancer des choses qui n'auraient pas marché si elle n'avait pas été là. L'humain, ça fait
beaucoup dans les fins de négo, abonde un chef de négociation côté syndical . Elle a une
grande capacité à apaiser les tensions » .

Vous aimerez peut-être aussi