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VOYAGE
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-A U B R É· S 1-L.
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IMPRIME}.UE DE COSSON , RUE GARANCIERE .


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VOYAGE

AU BRÉSIL,
DANS LES ANNÉES 1815, 1816 ET 1817,

PAR S. A. S. MAXIMILIEN,
PRINCE DE WIED-NEUWIED;
/

TRADUIT DE L'ALLEMAND

PAR J. B. B. EYRIES .
• OVVRAGE ENRICHI n'vli SUPEI\BE ATLAS, COntPOSÉ DE 41 PLANCHB:S
0:.1\AVÉ ES EN TAILLE-DOUCE, ET DE Tl\OIS CARn:s. .
I

N.D.S•-Petropolis
Pensionnat

PA.RIS,
ARTHUS BERTRAND, LIBRAIRE"'
RUE HAUTEFEUILLE , N° 23.

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TABLE DES CHAPITRES

DU TOME TROISIEME".'

'1
(
r
' Pages.
CHAPITRE XV.

- ,VOYAGE DE SAN-PEDRO D'ALCANTARA A TRA-


VERS LES FORÊTS , A BARRA DA V AREDA
DANS LE SERT AM.
l
L'Estreito- d'Agoa. - Le Rio- Salgado. - Sequei:ro-
Grande. -J oaqufm-dos-San~os. -Riheirão-da-Issara ..
-La Sena-da-Çuçuaranna. -Traces des Indiens
Camacans. -João de 'oeos. -Séjolll' sur le Rio-da-
Cachoei:ra . .....,.Le Rio-do-Catolé. -Beruga. -Barra-
da-Vareda: ib.
, (, .•
CHAPITRE X"\\'I:

SÊJOUR A BARRA-DA-VAREDA ET VOYAGE


JUSQU'AUX CONFiNS l>E LA CAPITAINERIE
DE MINAS-GERAÊ.S. 68 .

Description du llays. -Angicos. - Vareda . ....,.Bétail


sauvage du Scrtam. -Les Vaqueiros. -Tamburil.
-l'lessacjuc, -Ilha. ·- Valo , clouane sur les limites
IJ TABLE DES CHAPITRES.
Pages.
· de Minas-Geraes. -Aspect .des Campos-Geraes, leur
1
des.crjJ>tiO~' f~i~~s r~If!;rquabl~s. - Cha,ssc de l'Éma _
ou Nandu et du Cériema. 6o

' ' CHAPITRE XVII. (

VOYAGE DES FRONTlf:RES DE MINAS-GERAES •·


A ARRAYAL DA CONQUISTA.

Va1·eda. - Occupations des vaque!ms. -Chasse du


jaguar. -Arrayal,4<tÇqngpistn. ' -::::t:xcursion éhez
les Camacam à Jiboya. - Observations sur cette
tribtr tles ' hahitan6· ind~genés.
.,. ...1
... l J ...t~1l. . ..
CHAPITRE XVIif~

VbYAG'E 1m CõNQ'tnsfr ABA1IIA F/fsJtÍõtfR:.::, ::: .


DANS' CE'l"l'Ê :;C.AYI'fAL'E~ - , . r.c ~- oJ · · · " ·" ; ?5
. t. .. J ~- ... "' ,. -ul>•~•''l ' s~ - r -
\Tallée pit.to' Çj<J(le-d~UrJI.ha. -Cachoeira . .::... Le e~lonel­
João Gon!}.ilicsr.~·ÇQsta . -Le Rio-clas-Contali>.'J..-...Le"··· ~'
, Rio Jiquiriça-Laje : aventure désagréahlc dans cet• .,
endroit. -Emprisonnerhcutà Nazareth-das-Farin as.
- I
-L'ile d'Itaparica:l..:l.V-iUe·de Bahia. ib,

'X.ix. \
.,.. \\ \ 1

t JJ:I APITRE'
~ :\.. . •rq .~} ,J. \, ~ • r '~ J

. 1\iETOUR EN EUROPE. 2!í..x


I •

Tra~e~sée ae Sa·n ~:s-ai<Yiclei- ~-Lisbonne.L Dépallil. pout' i


Falm.o th-._..,.... Y.:oN"age.d~t.qsl'tntériem d.e r~leterre.
..... D~pa.rt po.ur .Osten.d.eJ. I 'I·

~\\\
TABLE DES CHAPITR.ES. iij
Pages.
APPENDICE I.
O bservations sur quclques · accidens causés par la
morsure des serpens au Brésil.

11.
I
Notice sur la manicrc d'entreprenclre, dans Ie Brésil,
eles voyagcs relat i f.~ 1t l'h istoire naturelle. 285

III.

Vocabulaires des peuples <indigencs du Brésil dont íl


estfait mention dans cêtte relation de voyage. 3o5

VOCABULAIRE BOTOCOUDY. 3! r
DE LA LANGUE DES BOTOCOUDYS. 329
VOCABULAIRE MACHACALI. 339
- PATACHO. 34x
- MALALl. 344
- MACONI. 348
- DES CAMACANS CIVILISÉS DE BELJ.IWNTE,
NOMMÊS MENIENGS PAR LES PORTUGAIS. 35~
- DES CAMACANS OU MONGOYOS DE LA éAPI-
T AINERIE DE BAHIA. 355
NOTICE SUB LA PETITE CA.RTE JOINTE A LA
RELATION . 36r
CORRECTIONS ET ADDITIONS. 365

FIN DE LA .TABLE DU TOME ;,rROISIEME.


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/

VOYAGE

'AU BRÉSIL..

CHAPITRE XV.

VOYAGE DE SAN:-PEDRO D'ALCANTARA A TRAVERS


LES FORÊTS , A BARRA DA VAREDA DANS LE
SERTAM.

L'Estreito-d' Agoa ~ - Le Rio-Salgado. - Sequei't·o-Grande. -


Joaquim-dos-Santos. - Ribei~·ão-da-Issara. -La Serra-da'-
Çuçuaranna. - Traces eles Inrliens Camacans. -João de
Deos. -Séjom·snr le Hio-da-Cachoeira. -Le Rio-do-Catolé.
- Bel'llga. -Barra-da-Vareda.

LE 6 janvier 1817, mes mulets furent chargés


de bonne he'nre, et je donnai le signal du dé-
part. J' avais fait élargir le sentier _qui mE'me à
travers les plantations de San-Pedro au che-
min des forêts, c'est-à-dire que j'en avais fait
enlever le ;bois ;brulé'. Noti.s arrivâmes bientôt à
III. 1
2 VOYAGE
' la route , et nous la suiv1mes à 1'ombre des
arbres gigantesques jusqu'à un endroit nommé
Rancho-do-Veado. Quelqu~s-uns de nos mu-
lets de somme enfoncere1~t en passant sur un
pont pourri de vétusté ; gr~ces au. secours de
l'actif José Caetano, ils ne furent pas précipités
dans le lit du. ruisseau. Un autre obstacle nous
attendait à un lieu. marécageux et bourbeux
sur les bords· d'un torrent; nous v1nmes à bout
dele surmonter, et vers le soir nous campilm.es
pres de l'Estreito-d'Agoa , petit ruisseau dans
lequel u.n pont ruiné était aussi tombé. Nous
~Bun;~mes notre feu entre de' grànds ~rbres
pres du rnisseau; nos chasseurs arriverent suc-
cessiyement. Quelques- uns m' apporterent le
gavia,o do sertam (falcb nudicolli~,, Daudin),
o~seau de proi~ dont .j'ai cl.ejà pa:rlél};.et dmrt la
. 1smgu
voiX · l'' llnt ·e ntend re d e tous
1e-re se cl1' J ·l·es cotes
A ,

dans ces grands ' Bois. Son plumage filSt noir,


avec le reflet brill~~t de l'acier, le des\ ous du
.cQrp:.s est blánc .; .1a 1go1~ge \ -m:re_\, . am..:n
. . '·q ue
~ 1'"ll'IS
.
et I' a~il , sont d'tin .ro-u.ge \çarmin ·t res-vif.
Les oiseau.x (!_{Ué l'on a:vait 'tués n' étant pas
bons 1 ma:r.lger, c1uelques~u'ns ;de mes gens ·a:lle-
I;ent· 'à la ·pêche qui. fnt heurense.' Assis sur
une poutre du pont renversé ils jetaient leurs

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AU BRÉSIL. 3
hameçon~ à l'eau , lorsqu'ils aperçurent un ser-
pent àlanage qui dévorait une grosse grenouille; .
on le tua d'un coup de fusil : c'était une belle
espece de çouleuvnf. De larges bandes trans-
versales jaune pâle et brun rougeâtre alternent
successiv"ement tout le long de sem corps. Au..,.
cun des Brésiliens qui m' accompagnaient ne
connaissait ce reptile ( 1 ).
Le 7 on ouvrit un sentier avec la serpe ,
pour pouvoir passer le torrent à côté du pont.
Je pris les devans, et je trouvai dans la forêt,
encore mouillée pár la rosée abondante, plu-
sieurs inambous de l'espece du macuca ou ma-
cucara ( tinamus brasiliensis, Lat'ham ) , et
du chororào ( tinamus ;ar.iegatus) : ils s'in-
volerent avec grand bruit dans le plus épais
du bois, ou je n' en pus tuer aucun. No~s aper-
çumes sous de vieiHes souches un morceau de
terre, qu' un tatou geant
, . amasse,e en creu-
ava1t
sant son trou. Ce singuii~r animal, qui est
tres-grand et tn~s-fort, ayant coutume de fouil-
ler la terre entre les raoin·es les plus ,grosses

(1) Cette couleuvre est probablement le coluber Persicolor


de M . .Merrem. Voyez sou Essai dl.l Systeme des ampllibies,
p. g5 .
4 VOYAGE
des vieux arbres, pour y faire son tl~ou q_ui est
tres-profond, on ne peut pas y pénétrer aisé-
rnent ; nous n' en avons vu aucun durant notre
vóyage, quoique nous ayons fréquernment rcn-
contré leurs tanieres .
' d'Aetre eJ!lcore arretes
• I

N qus crmgmmes A Ar
a' un
second pont; hem:eusement il se trouva plus
solide, et ~os ani~aux chargés pureÍlt y passer
sans encombre. Nous arrivâmes ensuite sur les
bords du Rio-Salgado, d' ou nous n' eumes plus
qu'upe ·demi-legoa à parcourir póur attei]1drc '
notre campement : cette petit~ ',riviere, la1·ge en
I ce~ endroit de quarante ' à ci1~quante pas , se
jette à peu de distance dans l'Ilheos ou Rio-da-
Cachoe1ra , ~lle est de même re~plie de quar-
tiers de roc&.ers : ses eaux étaien~ fm·,t ba:sses ;
nous l ' avo~s passee ·· f , sur l·a
, a' gue, , et grnp-pes
rive opposée nous avo;ns aussitôt á'lllumé notre
feu. \ . l

, .Li'Ous avwns un pe
'lU • \ r d } ' '
e 01sn·, ne>;us\ nous
n~1~nes à chasser. ü,n · t~~-plusit urs ~inges rniri-
la:s ( 1), quelques rnacudas, un· rnutum (2), et
des capuei:ros (3). Tout ce gibier fut aussitôt

(l) A teles.
(2) Cmx alector.
(.~) Perdix cuianensis ..

\
AU BRÉSIL. 5
dépouillé, placé sur des grils faits avec eles hâ-
tons, et houcané.
On poussa une reconnaissance dans la soli- .
tude qui nous entourait: c' était une.forêt épaisse
et 11011 interrompue: Snr la rive orientale de la
riviere on trouva encore eles traces de la plan-
tation étahlie, il y a deux ans, par le capitam
Filisbertq Gomes-da-Silva lorsque l'on travaillailf
à la route. Des huissons couvraient déjà l'em-
placement qui avait été cultivé ~ on, ne l<:; re-
connaissait qu'à l'ahsel.1ce eles grancls ~rbres, 'et
aux cahanes en a·rgile qui avaient clans ce temps-
là servi aux ouvriers d' église et d'hahitation.
N os h etes cl e somme n J y trouverent
A • '
pas meme
A

de l'herbe à hrouter, parce que les plan,tes li-


gneuses étaient déjà devenues trop hautes et
trop fortes, preuve de Ià promptitucle incroya;-
hle avec laquelle , dans ces régions chaudes, la
végétation se développe.
Heureusem~nt toute trace de culture n'avait
pas disparu; on découvrit pres eles cahanes une
grande quantité de tou.ffes de piment. Leurs,
fruits astringens no,ns furent tres-agrêahles , car
dans ces forêts humides, oul'on se nour.rit prin.:
cipalement de poisson, cette êpice est exeel-
lente pour la digestion, et peut aussi passer pour·
6 VOYAGE
· un fébrifuge tres-salutaire. Quand on voyage
dans les bois antiqtH~s du Brésil, on porte or-
dinairement du piment desséché pour en faire
usage aux repas.
Les tapirs et les cabiais parcourent aujour-
d'hui ces plantations abandonnées; et mangent
lés restes eles plantes utiles , puisque l'homme
n'est pas en état dans ces déserts reculés d'en
faire usage.
Notre repas se composa de trois especes ·de
poissons, le pia ou, le piabanha et le tra1ra : ils
sont tres-comtnuns dans cette riviere. Le temps
nous favorisa; la nuit fut humide, mais chaude i
I J
I
ét;endus aupres d'un grand féu nous oubliâmes
toutes nos fatigues.
Le 8 janvier on chargea les m~llets de granel
matin, parce que je voulais fáire \1ne forte jom-
née. La route monte etdescend con{ nuellement;
de petites moí:rnagnes et Eles"'vallées se succe-
dent sans cesse.' Da.ns le canton noinmé Se-
I I ~
queira-Grande la forêt offre\une grandequan-
tité de vieux arbres tr~s-gros\~t tres-hauts ; on
y voit aussi le fromager ou barrigudo ( bombÇtx),
arbre singulier , et le J~amao-clo-mato , dont
j'ai parlé en décrivant' mon voyage sur le Bel-
mpnte, ils y sont tres-comnhms. On rencontre
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AU BB.É$f L.
dans les forêts de l'Amérique méridionale des
arbres immenses par leur dimensions en hau-
teur et en grosseur, qui présentent un aspect
singulier dans l'endroit otl ils sorteni de te rr~ .
A quatre €t c·nq ·pieds du sol, et souvent plus
haut, sortent des jets qui s'allongent de plus en
plus, et finissent par former des appendices
comprimés comme des ~planc esqui s'énfon-
cent obliquement dans la terre et y devien-
. nent les grosses . racines de ces arbres. Le mis-
sionn air~ Quandt a aussi trouvé ces arbres sin-
gulier:s à Surinam. 11 dit que les Indiens frap-
pent avec leurs haches sur ces racines quand ils
cherchent les· personn<:s qui se sont perdues
dans les forêts ( 1 ).
Les oiseaux qui dans ces solitudes profondes
animent les fo r êts sont prinGipalement les dif-
férentes especes de pie, le picucule ( dendroco-
laptes ) plusieurs especes de moucherolles ou
gobe-mouches, des fourmillers ( myotlzera) et

(1 ) Qu andt- Naahrichten 11on S urinam l)· 6o , avec


un e fig ure. Ou voit aussi, d ans l'Hiloire des guerres du
Brés il par Baerl, la figure d'uu arl>re semblable sur le
rremierplau de la planche 8.
Caspa ris Barlrei, Rerum per octennium in Brasiliá ges-
'tarum llisto1Ú! Amsterdam , 1647 - 1 voL iu-folio.
8 "VOYAGE ·
quelques especes de petits perroquets·, que les
Portugais nomm~nt parikitas,et qontles trou- ·
pes criardes volent avec rapidité entre ' les ci-
mes des arbr.es; enfin les ina~hous (tinamus) . .
Je n'ai rencontré nullepart autantde miril~is; ces ·
singes sautaient en troupe du faüe d'un arbr;e
à un autre, ou Lien gamhadaient le long de la
rou~e en s' écha.I?Pant. Peu accoutu~nés au voi-
, sinage de l'homme, ils' s'enfuient à son aspect ;
mais nos chasseurs n_e les perdaient 'pa·s de v~ e,
les ajustaient et leur tiraient dés coups de fusil.
Souyent ' c~s 9ros ·sii)ges hlessés restaient s~s-
Béiidus sur l ·e' s arb res, ou h" 1en ·s'1eten
' dment
. sur
.une g rosse hranche pour se 9acher. Leur chair
1

fait Pfesque la seúle nqurriture d11 voyagêur


dans fes forêts. • , · ,
Quelque~,: ui1s ·de ,me~ chas~eurs, t~~ars daJ?S
ces bois inunenses, \me racontl~ren\ qu'êiíls avaient
I ~ ~
vu un,e petite espece de s{nge noi'r que trous n' a...:.
vwns

pasencore rencont~e,I ,
et' c1u
, ''l
1 sn' ava1 \. nt pas
. ' .I ,., \ , ' ... \\.
pu attemdre. On m ava~_t., hle1a parle a llheo~ de
I. 1 d ~ . I I. . ., ; l
cet amma non enc01·e .ecnt, a~ns1 1 avm,s e
plus granel désir ·ele le con~aitre; \ c'est ce c!,~i
l • . 1\~
-arnva que c1ues JOUrs apres. .
• I ' 'I 1

. I . d . ( .
L a von u JUO tznamus noctzv.,{t-gzt~ , nomme
•I • • \\ ) ,

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sabele dans ce pays, s'éiait e nouv.eau fait
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AU :BRÉSIL. 9
·entendre . à nos' oreilles apros' un assez long
intervalle. En effet cetoiseau, qui se trouve par~
tout depuis Rio-de-Janeiro jusqu'auBelmonte,
paralt ne pas fréquenter le voisinage de Ía côte ,
maritime depuis ce fleuve jusqu'à llheos. '
Nous1rous trouvionssnr lai~outedeMinas, àla
hauteur de la partie du Rio-dos-llheos nommée ·
Porto-da-Canoa parce que l'on a remontejus-
que là en pirogue. La forêt dans laquelle nous
nous trouvions dans la soirée est de l'espece
que l'on nomme dans ce pays catinga . A me-
sure que l'on s'éloigne des plaines hasses e~
humides de . la côte maritime , le sol s' éleve '
insensiblement eli devient graduellemént plus
sec, les arbres sont moins hauts. Les mêmes
sortes CJUÍ dans les forêts vastes, humides et touf-._
fues de la côte, s' élancent à une hauteur con-
sidérable, restent ici'beaucoup plns basses. Ces
forêts seches ofli·ent aussi une quantité cl'arbres
d' e~peces particulieres. L e sol y est tapissé de
toufies .épaisses de bromelia, doiit l~s feuilles
armées de piquans sortt tres-incommudes pour
les c,hasseurs brésiliens qui voÍ1t toujours pieds
nus; le capin de sabelé, joli graminée dont les
,feuilles délicatement pinnées fournissent une
bonne nourriture aux mulets, n'est pas moins
10 ·VOYAGE
commtm ; malheureusement nous ne 1'-avons
pas trouvé en fleurs ( 1 ). Il couvre entihement
de ses tou:ffes d' un beau vert1'ancien cbemin et
les autres clairieres.
I
La route du _çatinga était incommod-e et em-
barrassée par toutes sortes de plantes: des so-
lanu~n tn~s-hauts et de dive~ses especes intéres-
. santes, plusieurs mimo.sa et le cançançao (j a-
tropha ur_ens) nous incommodaient beaucoup _
par leurs piqúans, et semblaient même vouloir
n ous dépouiller de nos vêtemens : nous étions
tous plus ou moins ênsangla~tés. Pour comble
'd'infortune nous rencontrions souvent des nids
d e marimbondos qui rendaient notre état en-
core plus pitoyable : l'espece qui est d'un noir
brun ' nou.s ~ attaqua surtout avec ta~t de furie
dans un certain endroit, que tous J~s animaux
s' emporterent,
' et que l es l wmmes,
"' p ques' 'aIa ·
fois parcinq ou six de ces insectes, firerlt encore
entendre des plainte~ lo1~g-temp'sapres. L·~~igure
et l es mams. gonfi' · ees , 1'~s gen0ux
\ d'ec. 1res,
. '
~
( J) Cette h erbe a d ~ s tiges hautes f.'un pied et d'e mi, ses
feui!les sont délicatement pinnées, ses stipules étroites,
I - ~
p resque linéaires . Je n'ai vu ni la fie\1-r \ :'ii la'Xg·raine: ses
Hmffes sern!es forment un tres-beau gazou. ~·
\\
I
AU BRÉSIL;
nous pa'rcourions par une chaleur accablante
ces bois e:x.trêmement touffus. V ers le soir UD!
nouvel inconvénie;nt se pt·ésenta pour nos ani-
maux :. eles rav~nes profoncles coupaient le ter-'
rain alternativement avec des hauteurs cÓnsi-·
dérables; on apercevait eles vallées sombres,
d'un aspect sauvage, ou régnait une fraicheur
perpétuelle : le long eles torrens limpides qui
se précipitaient par- dessus les rochers , crois-
saient eles fleurs magnifiques que l'homme n'est
jamais venu admirer dans ces lieux écartés ; les
pas solitairesduPatachos chasseur, du tapir, ou
du jaguar, interrompent seuls le sileiTce de ces
déserts inhabités. La chaleur avait dessécbé les
ruisseaux clans plusieurs vallées; il fallut clone,
malgré la lassitude de nos animaux , parcou-
rir encore une'. grande distance pour arriver à
1111 endroit ou nous aurions de l'eau pres de
notre camp. Enfin nous avons trouvé un clair
ruisseáu qui s'échappa:it à travers une forêt "--
sombre : on lui a donné ainsi qtl'~t .la vallée le
nom de Joaquim-dos-Santos, parcc qu'à l'é-
poque de l'établissement de la route un homme
de ce nom y avait construit une hutte pour
vendre eles provisions au.x travailleurs. Nou~
avons campé le long du ruisseau, et l'on a aus-
VOYAGE •
sitôt apprêté trois mirikis qui avaient été tués
dans la journée. La plante à·belle flenr rouge
qui se rapproche des bign\mia dont j'ai parlé'
dans ma relation du Belmonte. (1), ainsi qu'une
~autr:e à fleur orangé foncé, ornaient notré eamp;
des feuilles de palmier no.us ont servi à bâtir
' I
une cabane lé~ere pour nous préservér de la
rosée.
Pour nous remettre un peu de la longue mar~
che de la vei1le; nous n'avons, le g, parcquru
que trois legoas. Nous avons tràuvé dans les bois
une quantité de plantes ·intéressantes et d e
1fleurs magnifiques dont nous ::ivons enrichi nos
herbiers. Les troncs des arbres 1 étaient ·entré-
lacésde taquara à petites feuilles'qui formaientdes
tou~es épaisses. ~ue!ques pe,t~ts torrens .avaib~t .
encore une eau hmp1de et frmcbe : ~~e b1gnoma
à fleur écarlate fleurissait snr lerirs ives. Les
éminences et les vallées se succédaie~t cünti-
, nueUement. Sur led hahteurs les forêts, ~taient
I . l • ·~
des flltmgas; dans Ies ' enfonee ens elles of-
I

. d . ., , \ l
fira1e1i1t ,e ncore es arbres· tres-h .uts; eur, .fra1~
''
( 1) • M.le professeur Schraé!er1a reconnu ce b~e belle plante
11
pour fn genre nouveau ele la famiÍÍ e des Bign Ó'nes; mais le
frpit lu i a man~ué pour le détérmincr oomp,ete~1 ent. ' '
1 '\\I
1\
~\

\
l

.AU BRÉSIL.
Gheur .fait d'autant plus . de pl;l.isir, t{Ue sur les
collines le te.r rain est sec et échaqffé.
· Nos.chasseurs tu,e rent, sur le ~ord d'un ruis~
seau,daps unevalléeombragéede grands arbres,
plus~eu11s singes, entre autr.es le singe à poitri.ne
jàune .que nous a,v~ons déja vu sur le Rio-Bel-
monte: on reconnut, enl'examinant, qu'il avait
déjà été percé, depuis peu de temps, d'une fle-
che . de sauvage. . ' .
On' arrive dans ce' canton sur les1 b~rds du
carrego 'de Piabanha, gui ~st regardé COI'nme le
point extrême des e.xcl!:rsioris ,que les Patach0s
de la côte :foiit dans' l'intér{eur. '
.. · L e tenitoire des Indieiis Mongoyos ou €:a..:
macans.Commence_à ce carrego e~ s'étend dans .
le sertam. ·
Depuis cet endroit nous avons . trouyé fré- r
-quemment sur le eôté dé l'écorcq des arbr.es
excpysé au, nord le., plus grand .p apillon du Br.é:-
sil (phalcena agrippina) (1) qui a jusqu'à neuf
p,ouces et,de~ni de largeur (mesure ,de Franrie) :
il est çl'un ·gris blanchâ~re sale, av:ec ·quelque~
taêhe.snoires; il reste;, pendantla chaleur·du jour,

(1) Cramei·s Schmetterlingen> .t. I> pl. 87~ fig. a. -:v.J:erian,


inse~tes de Surinam, pl. 20. ,
)

VOYAGE
collé contre les arbres, et ne quitte cette posi-
tion qu'à la fra1cheur du. soir. Il fallait pour le
prendre s'en appro.clier avec la plus grande
précaution;.s:;ependant il s' envolait souvent. En-
fin j~ m'avisai d'un moyen plus sur; le jeune
Botocoudy Quêck s'avança tout doucement et
lui tira une fleclie à poinú~ obtuse : le papillon,
étourdi tomba aussitôt à terre ; Quêclt. avait
acquis un grand degré de dexté,r;ité dans cette
espece de chasse. • ·
Etànt parvenus à une cha~ne de montagnes .
(serra) sur lesquelles croissaient beaucoup de
· barrigudos et d~autres gros arbres, nous en
avons trouvé plusieurs renveesés dans le che-
"
min. Il fallut donc se frayer une route à tra-
vers la forêt; OJ?ératÍO:rl qui rlOUS pr~lf. beaucoup
.\
detemps. Dans les catingas, nous avo~s souvent
observé . des tiges cólossales de cao't;us tetra-
' . I
gones et pentagones : pous ~n avons v\1 entre
autres un qui s'élevait jusqtt'â cinquaÍ:tte et ·
soixante pieds, é:\U milieu des arh11es à feuili\s, ét'
qm• aivalt • .J d e a·1a~etre.
. denx p1eas \ ,, \-..v
. TV autrés ~es-.
peceí1;de Ge s~gulier végétal parviennent aussi à
. .
des ' c,:lnnenswns pr0 d'Igieuses
. dq.ns ~c~s regwns
' .
équatoriales : par exemple; le cactus b r'asiliensis
. \ ) .
, '

/ ~
~
I •
\\
\1.
\~\\
\ \
. (
•'
.( .
AU BRÊSIL 15
-~

tr~s-<?o,Inmuu dans ce pay.s, et que Pison a , dé-


crit evep~ésenté dans .son.li vre ( 1 ).
Parmiles~m1.imauxde ce tte régio~1 boisée, IfOUS
avons souyéilt rencontré, dansles lieux humides
couver'ts par les arbres, l'~tania oucrapaud cornu
(bujó eornl:da). Nous en avons eu plusi~ursirrdi­
vidus, e1icore 'ires-je,unes, qui se distinguaient,
p~r .la vivacité des couleurs -:vert clait: ·et 'bru-
nâtre de leur dos, rle ceux qui étaien~ . plus
âgJs (2). Onpritsur le tronc d'un arbre un léz~rd
pourvu sons le cou d\m.eigrande·pod1e orangée
qu'il gonfle .quand on s' app~och!'! de lui (5):

' (1) }:'~ge 1 ~JI·


(~) !VI. Tilesius a donné la Ílgure de c:e crapàud, dans l'e
JliJagazin der Gesellsàtafl ,;atwjbrschender Preunde zu
Berlin, 5• année (J8o8), pl. .IU. Elle est assez bonne ,
ma'is ine:i.actemeut ·c oloriée; car j·e n'a-i ' 1ni.s lFouvé à ce
·ireJ;~i'le les conleurs viole ~re et 'orange _vives que repr~-
sen te la. fig).lre·; c:e~t 'cepenBaht I·a' meH:leure Cle toutes celles
que je connais, car •ceUes .qulon eu a d·onuées aans les
ou;vrages d'hi'stoi·r e •naturelle soll!t de vúi'tables carica-
tur_es. ·M. 'Pilesius a pU:lHi!í •Ia sienu'e .'d'ap'res uu ~ femelle: lé
·.mâle a des couleurs tús-Bifféremes . ·
(5) C'eBt m1 a-u-o'lis que je 1·egarde comme un~ espece
nouvelle, ·et- qu~ f ai ·n ommé ano:lis gradilis. 11 a ··qnelque
ressemblance avec 1l'anofis à point' 1jlánc de Dauil\n, dout
cependau·~ il pdrait lft'fférer suffi.samnrent. ll a !e CQrps bres-
sye}te, l!;l !ête allongée, étrohe, presque en. forme de t rornp~ ;

r
VOYAGE \j

Nous avons au.ssi aperçu fréquemmént ut'l


crapau d rougeatre a dos marque' d' une cron:
A ' •

elle fait à peu pres le tiers de la longueur de son corps.,


à l'exception de la queue, qui a plus de deux fois la lon·
gueur (lu reste dn corps. La tê te resse~ble par sa forme à
celle du jacaré; au-dessous de la gorge s.e trouve ·un grand
~ ac membraneux de couleur orangée sur leque! ou vo!t
quelqnes raies de grosses écailles vert clair; le reste du corps
est c;uvert d'~cailles tres-fines qui imitent !e chagrin. Un
appendice meubraneux' pen élevé , se prolonge sur le dos
et la racine de la qt\eue; l'ouverture des oreilles est. nue;
toutes les parties supérieures de l'animal sont d' un brun
roug e~ tre foncé et marquées de petits poifts blancs disposés cn
I ligues transversales:on observe en quelques endroits d n corps
une iégere teiute verte. La descrip.tion que Daurlin a donnée
de son , anolis à points blancs est trop imparfaite . pour
pp~yoir décider quelque chose sur l'ideJ tité de ces deux
annnaux. , •I
. \
J'l,ti ~ronvé anl\forro-d'Arara, dans les fo,rôts dn Mncuri.,
, un autre serpent allongé, et à queue tres-longue: je l'ai ·
. I \ . ' I I
nommé anolis 'Piridis. Sa queue a plus de 'deux fois la
longueur dil reste de sou cprps, couvert com~·e celui de
de l'aulre de petites é~aillei. La c~uleur de l'au mal, qui
cba~ge suivant qu'il est dirféremment\ Jfecté, est 'agréable·
à la vue ; elle est ordinairem,ent d'uh beau vert\ ela ir ,
traversée, depuis la tête jusqu'a la queàe, de sept bapdes
tramversales plus foncées, qui\S~ouvent' paraissent tantôt
vert foncé, tant&t noirâtre~ ,,1tant<lt brun ~res .. Les c&tés
sont marqués de points blancs circulailies q11-.i,. lorsque !'a-
nimal est ag ité, deviennent bleu verdâtre. ~ a queue est
'11
\1
AU BRÊSIL. 17,
triple de couleur noire (1 ). On la clésigne dan~
cette partie du Brésil, de m~me que tons Ies
autres crapauds, par le nom commun de sapo
qui est Portugais. ·
Occupés de la contemplation eles riombreuses
curiosités nalurelles de ces forêts nous sommes
arrivés à un enclroit qüi nous a offert les pre-
mieres traces du séjour 'eles hommes clans ces
solitudes écartées. Des Camacans errans av.aient
CfU:elques semaines auparavant campé dans ce
lieu, oú ils avaient élevé plusieurs cabanes.
Elles étaient déforme c<:!.rrée et, formées de per-
ches attaehées en.semble.; eles morceaux d'é-
eorces' d'arbres posés négligemment compo-
saient 'Ia couverture : la terre tout à l'entour

' vert clair à la racine , .avec des raies transversales et des


taches de couleur plus foncée; vers Ia pointe elle est plus
brunâtre, avec des raies transversa!es noirâtres brunes.
Ccs rleux especes d' anolis viveu t dans les forêts sur les
arhres. Les Brésiliens leur donnent le nom· de caméléow
(camaleão J qui leu r convient assez, car la deruiere, au'moins,
chauge de conl!_lur.
(r) Bufo crucifer. C'est sans dou tele crapaud perlé (óufo
margaritifer) de Daudin. _(Histoire naturelle des rainettes ,
des grenouilles et des crapauds, p. 8g. T. XXXIU de
1' fiistoire naturelle.)
III.
VOYAGE .
I ,.-.
était janché13 de plumes de mutums·et de Ja-
cutingas qui avaient servi de naurritm'e aux
sauvé)ges. Naus avians trauvé leurs anciennes'
demeures ; mais nous ne' ptunes pas deviner
vers quel endrait eles bois ces chasseurs avaient
toutné leurs pas. Notre conducteur et son jeune
Camacan, qui connaissait bien ces farêts, no'us
assurerent qu'à riatr.e gauche ' par canséquent
an sud , naus a:vions passé une des aldéas de
ces Indiens les plus grandes ,et tres-peuplées.
· Brúlés du soleil et piqués par les arties et
le~ n~a~ilnb"ondos, nous. somme~'arrivésle s~ir, au
IRiheírao-da-Issara qm rou,le ~ur eles cailloux
ses eaux claires comme le cristal; mais qui en
ce .nwinent était peu considérable, et nous nous
sommes a rrêtés dans une solitude romantique
1

de cette vallée, sous de vieux \arhres. On


, \ r
ôta le bagage de dessus· les mulets ,I et an le
susi)endit ~ux .plantes sarmenteuses. Nous au-
. ' I \
· rions pas~é •une .bo'n ne )~uit à la belle .~toile ,
. I ' . . . ·J \ .
Sl ar••res n:nnmt Ull VlO. nt omge , ac~ompa-

gne, cl'üne Erorte pI me, t pas tire-


. :rie\nous eut ( , -çl e
notre profond sommeil. bans à;s cas-là ~' on
·,.

' cou~re le bagage ave c 4es \ cuirsi de ·breuf, et


on ~e' met ~' l' ab. n d''un manteau ~epms ' . ams1 . .
q ue d'u» 1)ara1)luie
.
~i I'on a eu l'aue;ntion
\ w'
de
\\

\ ~ I\
1\

\
\
AU BRii:SIL.
·, I

.'\ s'en pourvoir. Emporter. avec soi une tente ou-


une cabane est ~ tres-incommode, parce que leur
transport exige neaucoup de mulets ' et que ces
animaux étant ~n trop grand nomnre trouve-
raient difficile'ment à se nourrir dans les forêts ·
continues. au milieu desquelles on voyage. ·
L'homme qui se Clécide à entreprendre une
exc~rsion semblable doit jouir d'une santé
excellente, être capable de soutenir les fatigues
de tout ·genre,, être animé par un zele ardent
pour le ú1otif de son voyage , supporter tran-
qui!Íement et ga1men~ toutes les inc01nmodüé~,
s'accommoder aúx privations ~ et savoir pren-
dre du bon côté toutes les ' contrariétés qu'Il
éprouve. Nous contemplions avec un cahne
'pbilosophique les torrens de pluie qui fondaient
sur nous, et nous trouvions même suj'et - de
rire en voyant les groupes singuliers form~és paA
r
not~·e troupe pour se garantir cliacuh à sa ma-
niere , le mieux qu'i_l pouvait, eles inclémences
du temps. Nous nous consolion; mutuellement
avec r espnir que cette pluie fâcheuse ne tarde-
rait pas à passer; cependant nous ne pouvions
nous empêcher de réfléchir ·que nous serions
fort mal à l'aise si elle durait plusieurs jours;
car alors les hommes et' les animaU:x surtout

/ ··..
~"
;!'O VOYAGE_
tombent prompte_m~nt malades, ceüx -c1 ne
pouvant pas supporter l'humidité. Des troupés
entieres dt: vo_yagçurs ont ,pl:)nlu la vie de
cette maniere, en peu de temps, dans ces forêts
épaisses et bumides.
Enfin le jour parut :J et, que.l bonheur ! le so-:
leil dissipa les nuages' et rendit le courage à
toute nqtre troupe. file en avait besoin, car il
faijut_charger sur' nos mulets, affaiblis par le
1:nanque de nourriture , 1iotre bagage mouillé
et rendu
, plus lomd par l'humielité, puis con-
tinuer notre inarche pénible à travers les mon-
1 tagnes et lés vallées. ,Nous rétions si ava~cés
que nous aurions pu atteinclre en un·j0ur le
point auquel on passe pour la derniere fois. le
Rio-da-Cachoeira. Toutefois, pour ne pas trop
exiger ele 1:\0s mulets pesamment J, argés , nous
avons, partagé . notre journée en cle.u ~narches.
Le premiei! joàr, qui était le I() j~nvier, la
roúte était pass;blei~ent: dégagée d~ foúes
hroussailles; mais eles rplantes Basses, années ele
piquans, le jatropha urens, ' et surtoút une
espece de houx, de mê1J que des buissons ele
mimosa
.
et res mariinbond0s
I
' nous
\
incommo-
derent cme~lement. Les denúers.na us tourmen-
terent cependant moins que nous n,e devions
\ . ~
.AU BitÉSIL. 2-I

le craipdre, car nous aghnes hostileme.nt contr-e


eux, et nous détruis!mes plusieurs de lems nids.
Nous traversames un pays montueux , que I' on'
A '

app~lle Serra-da;.,.Çuçuaranna, parce qu'en


ouvrant la route on y tua I' animal de ce nom,
.qui est le cougouar ou jaguar rouge. Les mon-
tagnes de cette cha'lne ne sont pas tres-hautes,
mais elles sont âpres et arides, couvel'tes de
débris de rochers et de cailloux, au miiieu des-
que]s s'éleve une forêt touffue d'arbres de hau-
teur médiocre ou un catinga, dont le sol, dans
les endroits un peu dégagés , surtout ·sur le
chemin, est tapissé de capin de sabelé, belle graM
minée dont j'ai padé plus haut.
En marchant dans les touffes' serrées de cette
plante, nous avon(l clérangé le nid ,solitaire d' u~
macuca ( 1), qui poncl ses gros reufs à terre. On
.tróuve fréquemment ces nicls clans ces forêts,
et ils ont servi ele nourriture à plus d'un voya-
geur. La relation eles aventures tragiques de
madame Godin, qu' on lit da11s La Condàmine ,
not1s en fournit l'ln exe:mple frappant. Elle clut
, la conservaLion de ses jours à ces reufs qu'un
heureux hasard lui fit découvrir ? tandis que

(1) Tinamus .Brasiliensis ( La.tham ).


22 VOYAGE '
ses compagnons cl'infortl.ine expir~ient de fa-
tigue à ses côtés. ,
Le meilleur de mes mulets ,de somme tomba
malade sur une eles hauteurs de la Serra-da,-
Çuçuaranna' et resta en arriere ; il fallnt en
conséquence charger un eles mulets de selle .
.Nialgré tousles secours qu'on lui administra, le
mulet mqurut : sa p~rte nous fut tres- sensible.
Des oiseaux que nous avions long-temps
cherchés en vain , les rois eles vautours ( 1), se .
montrer~nt a l''mstant a
I ' ' nos yeux pI anant au
haut des airs ; leur od0rat subtilleur êiVait, indi-
, /qué tout de suite Ia Brésenc~ cl'un corps mort;
mais leur prudence les retenait à une distance
consiclérable . . Je fis inutilement cacher un
chasseur en arriere pour les iromper. Cepen-
dant, comme je désirais avoir un de ~es animaux
en ~ie , je passài la nuit dans le v~isi .a ge, prês
d'un torrent nommé João de Deos' ~ cl'apres
un Indien enterré ·~ur ~es hor:cls dans 1~ temps
ou l'on travaillait. à ]a }~te. Dn pla'ça s1\r son
"tomheau une croix c1ui s'v voit e ore. Un Bré-
~ J

silien ele la classe inférieure ne \ asse 'pas Y,o-


Iontiers la nuit dans un fie ou quelqn'un est
\

)
AU BRÉSIL.
enterré,
I
car la. peur eles revenans .
est enc0re
tres-forte chez lui: Da:qs ces' qas-l~ i1 núnanque
jamai~ de marm.ot~r qnelques prie;·es sut~ le cha-
pelet; mais quan d ,il' est 'ré uni à' ~' autres ·, il a
plus dt< courage, parce qu'íl croi~ que l'espri:t
sera effrayé du pqmbre. -
Laplace. que j'ava~s choisie pres de la croix
pour y plac~r nótre cam.p avait déjà été prise i
par un singe (l ), f{ui, en naus voyant,. se sauva
en faisant eles gambades. Nous trwuvâmes d'au.-:-
tres créatures viva~tes d.ans ce lieu: c'étaient
.d~ux petits colibris (2) qui n'avaient pas en€Ot'e
de plumes ; ils étaient clans un nid, : fixé al!l
f~uillage tendre d'un jeune arbre et construit en
coton rougeâtre jaune. Nous primes les p~tits
sons notre protection. l

A yant encare présent à notre souy~n~r les


to,rrens de pluie de la 1mit préqédente, on àbat-
tit U:n bignonia, on en enleva l':écorc.e , et o;n en
couvrit une cabane que nous construis!mes à lã
hàte avec eles perches. Les voyag.eurs se font
eles ranchos dans ces solitudes avec 'Ies feuilles
solides · eles palmiel:s , quand ils en pe_uvent'
trou ver; on fi,che quelques perches en terre, on
~

.
(1) Cehus :r:antltostemos.
(z) 1'roc/zilus ater. Voyez mon second . volume."

I l,

'\
VOYAGE
y en attache d'autres en travers, et on couvre
le tout de maniere qu'il en résulte un abri pen:-
ché obliquement. Si ces feuilles manquent ,
comme dans la plupart eles enclroits ou passe
notre route, par exemple à San-João-de-Deos,
on détache de grandes plaque_s el'écm·ce ~'ar­
bre e_t on en couvre la hutte : ceDe du pao
d'arco est la plus empioyée clans ces occasions.
Le 11 janvier les chasseurs qlú, avaient passé
lq imit pres da mulet mort arriverent, et me
raconterent qu'ils avaient inutilement essayé
de tuer un roi eles vautours et l'avaient tou-
<...
jours manqué ; · alors nous avons élécampé. La
· tr~pa '1e tarda pas à atteindre au Ribeúo-da-
Cajaseira, pui? au Ribeirão-das-Minhocas. Nous
avons trouvé sur ses bords, P?ur la1 ~remiere
fois, li'! beau corbeau à barbe bleue \ cor{ms
oyanopogon) (1),- que l'on appeUe gen.g-geng
dans lG sertam ele Bahia. Nous avons t~é plu-
sieurs de ces oíseaux ', car ils-ne sont pa ~ fa-
rouche~ : leur plumage est simplement noir et ·
blanc ; on les reconna!t à u.ne ta~he bleue à
~ôté dLf dessous du bec ; le 'àommet de ·la- tête
est orné d'une petite toutfe de plumes.

' ' \
(1) L'~caM. Azara, tom IIJ, p. 15~.

\
AU BHÉSIL .
Nous avons aussi tu~ dans cet endroit, pour
la premiere fois , le salmi ~oir ( sahztim preto)
dont j'ai déjà faít mention. Je fus tres-content
d'a~oir ce joli animal qui est une espece nouvelle,
et qui .se distingue par eles couleurs ü·es-tran-
chées (J.). Ces sahuis vivent en petites troupes
de qnatre à _douze individus , et courent sur
les cimes eles arbres. lls sont tres-nombreux
dans ies grandes forêts de ces cantons; mais il
para h qu'ils ne se répandent pas sur un espace
étenelu, car je ne les .ai pas trouvés dans el'au-
tres enelroits. Si l'on ,s'approche ele 1'arbre snr
lequel 'ils sont posés, ils pri:mnent I'alarme, se
cachent derriere les grosses branches, regardent
avec cnriosité en avançant la tête , et cherchent
à s'échapper. On les tue aisément, néanmoins
ils sont trop petiis pour qu' on les mange. On fai.t
quelquefois daiJ.S !e sertam eles honnets ele leur
peau, mais généralement on n'en tire aucun

(t) Hapale. chrysomelas. Longueur du corps, huit pou-


ces huit lignes; de la qw!ue, onze pouces onze ligues. Face
eutourée de longs poilsroux elo ré qui sont droits com me chez
le simi~ rosalia; le poil de l'avant-bras a a'ussi cette be.lle
coulenr. une raie roussàtreregne surlalongueur ele la moitié
de laqueue; le reste du corps est d'un no ir foncé.
VOYAGE
parti. Le genre des petits sahuis (1) est extrê-
mement nombreux da-':ls les forêts de l' Amé-
rique méridionale : on en connalt actuellement
plusieurs especes , et il est certain qu' en fai-
sant des rechcrches plus exactes clans ces forê_ts
on en découvrira ençore davantage .
. Nos chasseurs ne tuaient généralement que
de petits animaux, et surtout des singes. Nous
désirions vivement de rencoptrer un jaguar ,
ce vreu ne fut pas accompli ; cependant nous
apercevions souvent les traces récentes de cet
animal c.arnassier, etnous trouvions fréquemment
1
des arbres sur lesquels ils ávaient. aiguisé lems
1

griífes daDgereuses ', car le jaguar gratte à cet


efie\ l' écor9e des arbres. Nous ne fUmes pas
' plus heureux pour les pécaris don nous trou-
vions souvent les vestiges; nous ne \ pumes en
tuer un seul : les, coups de :fusil que, nous ti-
.
nonl5', l e b rmt
· que' Iai~ment
r· · nos m ul ets,
\ et qm·
r~teptissait au loin ddrrs cette ~orêt s_o~taire ,
joints aux cris des tropeiros, pülilvaient bi~n en
être la cause. Nos chiens boyai nt avec force
quand ils découvraient un animal, et quelque-

( 1) J acchus i ltapale et miçias. i

\
\
~' \\
'.'

AU BRÉSIL. 2']

fois i]s forçaieiit ainsi les teius, gros lézards ( 1 ),


~ se réfngier dans les c,reux des ~rbres; il au-
\rait faliu les en tirer avec la. hache , mais le
tep1ps nous mari.quait pour cette opération.
La forêt fut fortement mouiÜée 'par la plilie
durant une partie de la journée ; bien l~in de
nous mettre à l'abri, elle faisait retomber sur
nous les eaux du ciel. Il falla,it songer à se pro-
curer un abri pour la nuit qui menaçait de
· nous envoyer des ton:ens. Nous pdmes _donc
des feuilles de pattioba partout ou nous ,
en trou-'
vions, ·et chargés ·de ce fardeau salutaire nous

. (1) Les ouvrages d'histoire naturellé contienneut beau-


coup d'ineicac titudes sur le teiu. Par exemple on croyait,
d'apres les individus conservés dans l'esprit-de-vin, que ce
...
lézard à queue arrondie est no ir a vec des taches hleuâtres,
tani!is que ces ta~hes sont jaunâtres. ( Regne animal, par
M. Cuvie;, tom. IJ, p . 27, Etc.) Je n'ai pas non plus
observé que ce graud lézard plonge daus l'eau, quoirrue
M. de Huinbo ldt le dise. ( Relation du Voyage au nozweazt
Continent, tom H. p. So.) Seha a probablement reJHé-· '
senté cet animal sn'r la planche XCVI, 11gure 1 , 2 et 5 de
son premier volume; mais ces figures ne sont rien moins·
qu'exacles, parce que le fond djJla couleur doii être noi-
râtre, avec des taches jaune ' clair . ~ La premiere figure
de la planche XCIX offre des couleurs trop différente's
}lour Jlouvoir l'appliquer à eet animal.
28 VOYAGE
arrivâmes, avant le coucf1er du 'solei!", sur Ie
bord
. du Rio-da-Cachoeira. \

, Le Rio-dos-llheos ou da Cachoeira se passe


dans cet endroit pour la derniere fois : íl y fait
un ·coude, et coupe au sud la route, le long
de laquelle i:l coule ensui.te constamment
., jus-
qu'à la má. La route continue à se ·prolonger
droit à l' ouest, et toutes les rivieres qui la tra-
versent vont se jeter dans le Rio-Pardo. L e
Rio-da-Cacho{~'ira est tres-petit dan; cet endroit,
il était en c e monient ·si bas qu' on pouvait ai-
sément le passe~ à gué ; son li\ est rempli de
8.ébr~s de rochers et de pierres ; un peu 'plu~
1:
haut,il se partage en deux' et on arr~v:e aux
corr(\gos qm. ]m. cl onuent na1ssance.
. \ ~ous
!i:!:ci l:t '
na-
t

vons pas tarde à rehcontrer sur sa tive gauche


' ' •

quel1ués cabanes e'b, perches , et noas les avons


_couv~rtes avec les feuilles de pattiob~\ 4ont naus
nous étions munis. ,Nos gens .e urenfbie tôt un
granq plat ele poissons , ) notanlunen~ de p'aban-
. . \. ~ '
11as, fi,LU firent notre repas du so1r. '
, . \ bl \ i'. • , d
, M~~s ~u1ets etm:nt pa.ssa eme~: 1at1gues*'· u
voya&e a travers lés forets ~ clans lesqueUes ·ils
avaiept trouvé bien peu 'de fourrage vert, et
notre provisi,on de mais était :p~esqÜ~ entiere-
n~ent consommée. ÜI;t jugea done. qà'il serait
~

'\
'

\
\\ "
/
AU BRÉSIL.
nécessaire d'en aller chercher à un village de
Camacans situé dans la forêt, et que notre jeune
Inclien de cette nation connaissait. José Caetano
.otfrir de l'y accompagne':: , po,u~· prendre le
ma!s dont nÓus avions besoin, et inême, s'il était
possible , pour nous ame~~r c1es Indiens qui
nous suivraiedt et · nops aicleraient dans nos
chasses .
. L'aldéa des Camacans étant éloignée d'une
journée et demie de rout~' il fallait se résig~ler
~ passer quatre à cinq jours dans ce,àésert sóli-
taire . . Je fis' accompagner Caetano et le jeune
Camacim par Manoel ~ mon mulâtre , homme
robuste et hardi; tous trois bien armés, munis
de poudre et'de plomb ainsi que des vivres né-
oessaires : ils partirent le 12 janvier de granel
matin.
Nous sentions le besoin pressant d'avoir de
la.viande fraiche pour pouvoir en manger alter-
nativement avec le poissolil, dont l'v.sage trop
contÍJ1U donne la fievre. Pendant qu'l}ll~ pa'r tie
de mes gens jetaient l'hameçon, les autres par--
couraient les forêts v~isines' : ils y tuerent ur1e
· gr~nde quaritité de sahuis noirs et de gris ( 1) ; i '

( 1) Jacchus penicíllatus ( Geoffroy ), OuisÜti piuceau. (


3o VOY'AGE
mais ces petits. animaux , qui sont à peine .d e
la grosseur eles écureils, ne suffisaient pas pour
apaiser .la faim eles chassettrs. Ce cantou parut
peu abondant en gros gibier ~on à manger: .
en cinq jours nos chasseurs ne tuerent que trois
guaribas, ~ ·gigo (1), tlll jacupemba et quel-
ques autres oiseaux , indépendamment el'un
granel nombre de sahuis. Au bout de quelques
jours les poissons ne voulurent pas mordre à
l'hameç.on, de sorte que nous ffunes réduits à la
viande salée et à lat farinha. Les bêtes de somme
n' étaient pas mieux pourvues 'que les hommes,
~ar sur la terre, ombragée par ]a forêt touffue,
il ne rousse pas beaucoup d'her9e' ~t le long
de la route on ne trouvait que d.es arbustes
durs rt la plupart épineux. 11 n' était clone pas
surpqmant que ces animaux intelli:gens cher-
chassent sans cesse à retourner vers d,es pâtu-
rages dont le souyenir reste profondément
gravé dans leur tête'. N~re principale ir quié-
tude ~tait actuellement dausée p::l\r la crainte ele
. reh rousser' ·ch' emm.\,
1es vo~r . \ et nous
\ avw~s
. h e-
soin ~.e toute notre "vigilanc~ pour les en emp,ê-
cher. pn les avait en conséquente fàit avancer

~~----------------------_.--~-------
'\
(1) qr.llithri.-r: melanochiJ·.
AU BRÉSIL.

dans l'ancienne route .de la forêt, et eomme


elle est impraticable sur les côtés, tant le bois
y1est toufíu ~ ~o l'avait fermée derriere eux par
de longues perches et de jeunes arbres posés
transve.rsalement. Ils s'échapperent cependant,
sui vant leu r coutume, eles que la nuit fut ve-
nue; nous les entendimes pres de nous, trotter
à travers la riviere, sans pouvoit les distinguer
à cause de la grande obscurité : nous eúmes
beaucoup de peine à les ramener. Nous recon-
númes bientôt que tous nos effor!s n'abou-
tissaient à rien, car ·à peine les avions- nous
laissés qu'íls percerent .de nouveau 'I'épaisseur
1

du . bois , et coururent vers le , fleuve. Alors


nous púmes supposer qu'un autre motif se joi-
gnait à celui de chercher de meilléurs pàt~-
rages pour l es porter a' s.ec
', l1apper ; en conse-'
quence je dépêchai, au poinl du jour, deux
cha,sseurs en avant pour reconnaitr;e la 'l'oute ;
ils qécouvrirent les trac~s de deux gros jaguars
qui, pendant la nuit, avaient passé dans notre
voisinage : ils n'auraieri.t sans 'doute pas man-·
qué' s'ils 1'avaient p~' d' enleve r une couple de
mulets. D' apres cette ~venture , nous avops
·plus sQuvent battu ce cantou , et le soir nous
avons allumé de grauds feux sur le· chemin.
VOYAGE
Le temps de notre repos dans ce lieu écarté
fut utilement employé à parco!l-rir da ns tous les
sens les. forêts dont nous étions entourés. Notre
récolte en plantes curieuses fut tr~s abondante;
nous trouvâmes, entre autres , beaucoup de
fougeres intéressantes. Je me b~rnerai à citer·
une des plus belles, l' aspleníum 1'narginatum,
qui s'éleve à dix et douze pieds de hauLeur, ~
( trouvec
q~1e nous n ' avons , qu' une seulfi " pen-
e ·o1s
dant tout notre voyage; oti peut par consé-
quent le mettre au nombre des raretés de ce
canton.
, r Nous augmentâmes nÇ>tre collection d'oiseaux
dr plusi~urs especes nouvelles , - entre autres
le picucule roux ( 1), à bec tres-long courbé en
faux, et une autre espece voisine '<les picucules,
à plumage brun rougeâtre, qui .grimpe le long
des arbres, et tes frappe de son bclc en faisant
ei).tendre un cri', ,sin~ier ( 2 ). . .
I
--, . . I ~ ' \ '
(-I) Dendrocalaptes trvchil~ rostris u musée de Berlin.
(!!) Ce~ ois,eau appartient à une famille qui a dé I'affirfité
1

a.vec les picucules et lçs fauvettes. · 1\L Temminck leur a


don11é le nom d'anahates dans. la nouvelle édition de
sou l'llanuel d'Omitholug~e (tom. I, p. 52). Je désigne par 1

celui d' anahates leucophtalmuS l'espece dont je parle dans


l.e texte. Longueur du mâle, huit ponces d-eux lignes et
AU BHÉSIU. 33
Le qualrierne jour de notre station sur ' Ies
.bords de la riviere naus entenclirnes, le 16',
vers rnicli, un coup de fusil qui réveilla aussitôt
én nous I'espé~ance de voir revenir prompte-
'rnent Caetano et ses compagno:ris. Bientôt nous
entencltmes plusi(mrs voix retentir clans I'épais-
seur de la forêt, et nous aperçfimes de l'autre
côté du fleuve Manoel 3ftTCC deux Carnacans. Il
portait à la rnain un tres-beau faucon d'une
espece . nouvelle qu_e je ne connaissais pas en-
,core. José Caetano n'était pas reveriu avec eux,
parce que, conformément à_notre arrangeme:n:t,
il avait pás le parti de retourner de l'aldéa à
San;::Pedro-d'Alcanta~a avec son Camacan.
Manoel me racon ta qu'il avait trouvé un

demie, envergure onze pouces trois ligues. Tout le dessus


du c.orps est d'un roux foncé ou brun rougeâtre; -la cou-
leur dn cFoupion passe insensiblement an 'ro.ux clair ;
queue de la même couteur; la base des plnmes est brun
'·noirâtre : menton , gorge et dessous du cou , blanc
jaunàtre clair, qui tranche nettement av,_ec les couleu.rs du
çorps; la teinte blanchâtre passe· au jaunâtre sale en s'é-
loignant de la poitrine : ventre gris jaunâtre p.âle passant
à l'olive brunâtre sur les ..:ôtés; abdomen brunâtre jaune
tres-pâle; tectrices de l'aile intérieures, jaune roux clair
rougeâtre : front un peu plus iougeâtre ; iris gris peflé
pille ou blanc argentd.
~rr. 5
V9YAGE
petit villagé d'Indiens Carria,cans ~ qui' _vivaient
encore clans un 'é tat de . gross~€rete extrêrríe. n
n!y .avait ~ue cinq ho11rnne~ : l'un d?eux était
.tres:-malade d'u.ae blessure ~u' rrre<il.. Cés Canila-
cans viva,i:ent .presque uni<p;I-ement de la chasse ;
.ils ne cultivaient qu'un petit JiOiy.bre de pla.:ntes -
pour. leúrs· besoins tres-bor.nés ; ainsi nous Be
pumes ~albeureuseraent pas obtem:i:r dn mai:s
·pour· nos mulets. Dans queltif1Jes - üns ~e ces
·r'a ncha<ria,s 01ic villages de Ca1paéanst, on n~a pas·
encm:e vu .âe tblarws/ n·~;u,tres. al!!léas ,., situ~es
,ph:J.s pres <ih;t sertam, 1 téoohênt ásséz d~ coton.,.
]/
•ch'l'l\lanioc et <lle ma1s rp'OtÍI' f.1'tie l'o:n pU:isse se ·
I . - ,!1. · .,.., .
r,rocarer
~I ,.
ohezH~ux·.ee-s> clenrees..
'\ ,
-· . .
C.es Carnacans ,-6u ~es Mo:t'l!goJ®s, comt•n e les
. l I I ,
r1omm~IJ1 -les P ortuga!s , §Ont '..\])_ a,çe$. 1111. peu ·

.plus haut sur l'échelle de)a civili ~ Í9n q;ue lelfrs
_yoisins' l~s Bcl~~tll~l}ys~ ~-t'ies . P.at~ 1t:os. I)~_cal-
c ~

t,ÍVie~t générale6I·el'lf quelq•tles végétl u:Jt ·ütilés·,


j

~.~ t ont depuis Ún gq~:pcÍ hd~~h'nfi'd'a11:riées ·V.écu


' ~n paix 'áveÊ'le; c,?I~:t?-~r~treuró_fe.é~~ries.'\~es deu:x:
J?omm<ils de cette tr.ibl!t qtú: v~~1aient ' d'atr:ive•r à
, yotre · camp ét~ie:nt'. '13ie:O:' 6faits i '• ~obustes ~t
' rú.lsc:uléu,x' ;' e"ntierenient n~s ~ à~l'except~on du
tacanhoba ou 'gatne .de ·feuilles d:iss.a ra que le~
~ommes p~rtent à la ~aniere ..de~~Botocbudy~.
-;'
\ 1\
1\'
I
'\ )

\ \,
AU BRÉSit..
L·em;s ofeilles· et leurs Ievres n'éta;ient pas défi-
gurées. QU.elques.:uns lilissent leur chevelure
.crohre si longU.e, qu~el~e leu:r descend jusqu'aux
hanches ·et leur donne 'u n air farouche; d'au...
tres au contraíre la coupent en rond "~ la nu-'-
que :, cette mode est cependant peu cmumü.ne.
Leurs ares et leurs fleches êtaient façonnés
avec beaucoup de délicatesse: Je. çlonnerai par
ia suíte· de plns amples déta~ls sur ce peuple.
Vn des· deux· Camacans qui vinrent à ~otre
camp avait tué à coups de fleches un fancon
blanc dans ~oi1 nid, !).U haut d'un arb~e tâ~s­
êlevé , c;: t à une .<;listance à .laquelle nos 1neil..,-
leurs fusils ne toucheilt pas toujours le but. 'L e
plaisir que j'éprQuvai en obtenant ce bel oiseau
fut d'autant plus g1'a~d que ) nous l'avions
aperçu plusieurs fois plan::tnt au haut des airs
sans avoi1· jamais pu nous le procurer. Dans la
suíte de Dion. voyage il ne s'est plus offert à ma
vue (1).
Nos deux sauvages regarderent fixement' les
·étrangers sa.ns profére:c un ·seul mot, et s' assi-
rent aupres du feu. Quand ils se furent un peu

(1) C'est sans doute le petit aigle de la Guiane de Mau.-


duit (Falco guianensis) . Daudin, tom . li. p . 78.

36 VOYAGE"
reposés, je les 7n-vpyai à la chasse. Leur hábileté ~
cet exercice:, Í)OUr ainsi dire i:anée chez eu-x:, est
vraiment extra~rdinaire; ils revinrent le soir
1
avec deuxgrossinges (1) etuajacupemba. Tous
ces aÍlimaux avaient la poitrine tran'spercée
par la vig<;rureuse fleche des: Oamacans . .
~ "' - \, • I

. Le même soir nous fumes témoins d'une


'
d es scenes d e e~.asse
t. } . I l \- . ' ' J'
. es p tls amm.ees que · on

pnisse se figurer. Nous étl.ons . tons o c cupés


-c;lans UOS cahaJa€S d'une , mani.ere {!]_ifféreHtC ,
quand une nOJÚbreuse tr~mpe . de Ioutres parut
dans la ri'7€re, qui m'était pas tres-profonde:
'I
Ne se doutant pas de :aotre prêsenee dans ces
· lieúx, ces . animam.: timides':s' éta~ent" avahcé~
]U,squ . .Comme 1'eau e!a1t
. I ''a ce pomt. ' . ·trop basse
pour .qu'ils pussent s'y qach.€.r ,\1 ehacun · c0u-.
rtlt aux. armes. ,Malheureusement eles :Q.' étaient
p~ts en tr-es-bo \ état, et quelques {usils firent
lo,ng feu; quelcgies qoups ma1:querànt, et nõs
chiens refuserent d{..;1ttaque\ les lou~res . ·qui·
mo.rclaient
i
fortement'~
' ~, droite~et
\
à gaubhe.
.
De-
' . ' '\.
I ~ \

(r) Cebus xa1ítltostemos, Ce singe, dont j'a[ déjà..lit[t men·


ti ~n , a ensuite été représenté' dans l'ouvrag_e de MM. Geof-.
froy et Frédéric Cuvier sur les mammiferes> sous 1\l nom
de sa~ à grosse iête. I.
AU BRÉSIL.
sorte qu' elles échapperent à cette cÍ1aude \l L-
taque, à l'exception d'une seule que l\1anoel tua ,
d'un coup de serpe'lorsqu'elle ~oulut s'échap-
per par-dessus un rocher. Les loutres du Bré...;
sil ont .\:!-ne tres-belle fourrure. CflÚ n'est pas
aussi estiJllée dans ce pays que l'est chez nous
celle de la loutre d'Europe: elles sont tres-com-
munes dans l' Amérique méridionale, et y de~
viennent tres-grandes ; elles ont pu donner
lieu à la tradition des syrenes qui l_labitent
soit dans les mers, soit dans l~s riv-ieres.
Quandt (1) et d'autres écri :ains ontajouté foi
à f existence de ces êtres sing).l}Íers ; et LOl,lS les
jours eles feuilles p1,1bliques répetent en Europe
que clans telle qu telle contrée on a trouvé une
femme marine : tant la croyance aux procliges
même les plus absurcles est clifficile à déraciner
dans les pays qui se vantent le plus de lears
progre.s clans la civilisation.
Obligé de renoncer à toute espérance de
nous procurer du mais à l'aldéa eles Can"\acans,
je ne prévoyais pas. la possibilité de trouver-
un moyen de donner une meilleure nourri.-
ture à mes mulets ; en conséquenée je fis , le
11

(1) P. 106.
(

38 VOYAGE (

17 ~ Ie signal du départ . .Les deux simvàges,.


ne voulant p!ls nbus acéompag;ner plus loin ,
rétouvnêtent chez eu:x, apres avoir éc~1angé
contre oes OOtlt~aUX et, d'autres. bagatell'es leurs
ares et leurs fleches. La cnaleur était tres-forte,
les hauteurs convertes de catingas rlous paru..,
rent extrêmem.~nt arides ; l'eau était·tres-rare.
Ayant trouvé b'~auc6up de feuilles d'issara nous
les ~m'portâmes ajJ.n de nous en faire un abri
pour la nuit. Nous parcemrumes de-q.x legoas et
demie , et no11s nous arrêtâmes vers le soir
sur Ies borcls d\th eorrego 1limpide. Le lerÍ-
dfmain 18 nous nous reút-lmes~ en route _et
n~ms Hmes trais legoas de :plu,s. V ers le roi..
li~.m du jour, nous 'ahéign:lrries la valléé de Bu~
. - . , ' I . ,I •
qt:~.eirao; eHe est ombrage-e par de\hautes forets;
'" I .
, un petit ruisse~u pre:sque desséché\ la p!lreourt
e:t;t serpentant. Ses bords , de mêrllle que tout
I
Ie foncl de la ~allé~, étai~nt cou~ds de la:
mamere ., Ia p1us pittor:~
· . ' sque a~'€ fiougere ' 1 d e .r.ror-
' li y Cl'Ois,
\ s;lit.
• p 1us1eurs 1
mps d1verses.
1 I • '
1
espec~s
rl'an'emia et :notammel!; un p\ eris encore in-
.\ m ~·., "l
cqnnu (.1 ) , d ont Ies fieuiues sten es sont sa~
\ .
\1

' (1)
r
M. Schrader, p.rofesseur
.
à Gcettingen,·a1,\·noJ;mp.é celtç
r

p l \lntll intére Sb3n le pteris parado;-ca. '


/ Í\ \1
~
\,
""
\
I
AU BRÉSIL. 3g
·gittées; les fécondes, au contraíre, sont ·p~o­
fonqément et diversement découpées comme
plusieurs autres belles esp~es ~e cette famille
·i'ntéressante.
. .
Mon chien.
couchant fouilla. I
s0i-
gneusement c~s broMssailles et· I!le rapporta
soudainement un granel ma cuca qui n' était pas
du tout.blessé et ep1'il avait probablemerrt sur-
pris dans so'n riid. Nos chasseurs qui étaient
allés . en ·àvãnt joignirent à ~e gibier 'Ull se-
cond macuca, un gigo, et un sahelé. (1).
La pente douce que nous fúmes obligé:,; de
,gravir en sortant de la ,vallée du Buql~eirão fut
si pénible pomr quelques-uns de nos mulets,
épuisés de fatigue , qu'ils devinrent insensíbles
aux coups, et testerent beaucoup en arriere c\es
aut;es; ensuite ils furent couverts ele sueur,
,car la chaleur ét~át accablante et l'atmosphere
remplie ele matiere électrique qui che.r chait · à
se mettre en équilibre par une quantité d'éclairs:
le tonnerre se faisa~t fréquemment entendre, ' I

a' l'"mstant' ou' :nolils eta


, b' l'unes IJ.Otre cm;np .c;ntre
deux corregos ·Iimpides dont le canton a tiré
son nom de Duas Riachos. Nous v.oyions avec
inquiétuele la nuit s' approcher , parce que nous
. '
---~---~---~-.,.-------. -,
(1) Tinanws noctwa,gus.
\.,

VOYAGE

~tions obligés de la pa~ser sans aücun abri, et


que les coup~ de tonnerre,'répétés -sans cesse au-
dessus de h vallée', 110us faisaient c-r aindre
d'être assaillis par un orage. Nous cherchãmes i_
' en conséquence à nems arranger le mieux pos-
sible, avec des peaux cle breuf, une espéee de
cabane, qui cepenclant ne nous aurait pas beau-
CülJ.p protégés contre les torrens de pluie dont
sont accompagnés les qrages des tropiques.' Par
bonheur ilne plut pas, et les nú-ages se dissi-
perent.
Le bois que nous coupãm~s dans les envi-
' I rops de notre can'ip répandait une odcur de ca-
nelle
I
aromatique ; ce qui lui a~~ fait donner.
pa-r
le~ 'Brésiliens le nom de Canella. J e n' ai pu
m' en procurer ni les fleurs ni le . fruit , mais
c' ~st sans dou te cet arbre qu' Arru.da , a décrit
SOfS le :taom de linlzaria aromatica.
. ·' I
La distance de .notre cam_P, au Rio-=Catolé
' ' de quatre 1egoas
et~It ' J~ N ous~1es' avol'l.s
. \ parcou-
ru~s le 19. La route pa se 'par de nom&reuses
ha-p.teurs au milrie~1 d'une fG> -êt non inte~.:­
rompue ; nous_traversãm~ plusi:~\urs corregos :
beaucoup de végétauX! et d' oiseaux intéres-
sans s' offrirent à nos recherdu~s .. Vers le · sÓ'Ír •
nm;~s atteign[m~s un <mdroit situé sur. les bords

\
.-

ÁU BRÉSIL.
du Catolé dans un lieu ou i1-- ne croissait
·que eles broussailles. Quelques années aupa·ra_:
~- vant le capitam mor Antonio Dies de Miran da
' y avait fait établir une plantation par scs ne_:
gres , ensui:te elle avait été abandonnée, et
l'e~placement était de 1!-ouveau un .désert: Une
grande cabane en ;terr e · et .converte d' écorce
d'arbres, qui avait se'rvi de logement aux nc-
gres, était en tres-mauvais état ct remplie de
· fourmis , de chiques et de lézards ( 1) qui
avaie1it quatorze pouces ele longueur et même
dav.antage; malgré son 1uauvais état, elle nous
fournit un abri passable contre la pluie et le
soleil ; c'est pourq_uoi' malgt'é ses incOimno-
dités , nous nous y ·abandonnâmes au sommeil
apres.à voir f~it un repas frugal avec une c.er-
taine quantité-. ..de piabanhas, de guara'ib~s
et cl'autres poi~sons , pê~hés dans la pe tit~
riviere. ,J •
On compte .d e Catolé à; Beruga , premier
endroit o:U l'on. rencontre 'des halQ?.tations hu-
maines, à peu pres deux journées de route. Je
résolus d;y envoyer a l'avance_ queJq~lC~-U~lS de
mes gens avec les mulets qui ne por taient rien,
' -

( 1) Stellio torq uatus.


VOYAGE
pour nous y procurer . du ma'is, car nous ne
pouvions pas espérer de tirer notre bagage dei
' '
cette solitude inhospitaliere avant d'avoirrendu
les .forces à nos bêtes de somme par une nourr~­
iure plus substantielle. Pendantque j'attendais le
retour. de ces hommes, je fis fouiller les forêts
par les autres dans toutes les directions.
Divers oiseaux animaient les buissons ·dans
notre voisinage, notamment des troupes d' ana-
cans (psittacus severus, ~.) et de tiribas(psit-
tacus cruentatus) , ainsi que d' oise'aux plus
petits, entre autres de moucherolles, colon
1I qu suriri colon (1), de gros - becs bleus à
gorge blanche (2). , et. de P,~usi:eurs especes
ayant de l'affinité avec les picucules et les fau-
v,ettes, queM. Temminck, ainsi que je l'ai déjà
Git plushaut, a réunis en unnouveau genre sons.
le nom d'anaHatês. Ces oiseaux se distinguent
par leur voix COl,u p0 ée de plusieur\ tçms ires-
hauts ; ils sautent et grimpent sur les hranches.
lc •
d,es.arures, et sont dan un mouvewent conti-
i . I I \ · •

iluel. Je me borne~ai à faire ~ention de quel-


q~Ies especes nouvelles, ~ue j'ai trouvées dans

( 1) Le colon Azara. V oyoges, etc. ,' tom III. p. 1\.69.


(!l) Lo:r:ia grossa.

. "'
AU BRÉSIL.
ce~ endroit; l'anabates erytrophtalmus (1) J
le leuc;p htalmus' ratricapillus (2) à fr~nt
d'un beau noir, ]e macrourus (5), etc. Ils bâ.:.
. tissent, ~vec de petites branches -seches qui s' en-
t.recroisent les tines les autres, un nid pendant,

(') Longueur, sept pouces neuf ligues; en vergure éles ailes,


sept póuces huit ligues; iris .d'un rouge ~rdeut ; fron.t ·,
gorge et la plus ·g rande _partie du dessous dri cou, de même
que toule la queue, roux, les dernieres de couleur
moins viv.e et moins belle que le front et la g~rge. Tout
le reste dti corps gris brun olive passant un peu au rou'..:
geâtre sur la poitriue et sur le ventre; les ailes ont une forte
teiute de roux. Les doigts extérieurs ne sont que tres-peu
rtluu is.
(2) Illiger le nomme sylvia rubricata. Le front, une
. bande à travers les yeux et une autre depuis le dessous du
bec j usqu'an-dessous de l'reil sont d'un brun no ir. Une raie
entre le front et l'reil, une autre au-dessous de frei!, ~a
' gorge, les cbtés, ]e dessus du corps, le bas du dos ., · la
queue et toutes les parties inférieures sont roussâtres ; "
le ventre a une teinte oÜve brunâtve; q~eue d'u11 rouge .
clair, dos brun roux l'ot~cé, ailes de la même 'couleur mais
u·n peu plus foncées et bnrdées de jaune ,b runâtre.
(3) Sylvia striolata du musée ~eBerlin. Longueur, dix pou-
ces six ligues; envergure des ailes, huit pouces onze ligues ;
]a queue a plus de trois pouces trois ligues de longueur ;
J'oiseau la porte un peu étalée, ce qui le fait reconnaitre
de lo in;' !ltle est d'un jaunâtre clair et rousse. Toutcs ]es
_parties supérieures dn·corps sout rousses brunâtres 1 se rap-
~J.>rochant beaucoup du roux foncé. Les plumes du :Cront
VOYAGE
d e f•m:me smgu
. li'
·ere ; nous en ob servames
• plu-
sieurs dans notre voisinage , súspendus à de
vieux arbres isolés. ·Les buissons moins élevés
servaient d·asile ~u gros - bec bleu à gor ge
blanche , au tantagara à tê te rayée (1), et à
plusieurs petites especes de gros-becs , <Íe fau-
vettes et de moucherolles. Le merle du B'résil
( turdus brasiliensis) se tenait au TI1ilieu des
roseaux qui entouraient le rivage. Un' ois~au
non décrit, à voix f0rte à trois tons , était
de même cornmun dans cet endroit. Jl a . de
l'affinité avec les individus . de' la ·famille des
I/ f~uvettes qui ont un bec courbé et allongé (1).
.Jt; l'avais déjà trouvé sur lesbords du Rio-:poce,
mais ensuite je ne l'avais plus rencontré.

-" '
sont noires à leur exlrémité, rousses 'nans !e rest~ de leur
'
1oiTgueur, et l. es ruyaux
' sont d' un rougea.\fre p 1us VI. f :
deosus du_ cou un peu plus ela ir; les tuyau ~ sout jaune
. I
roussàtre clair, tont le de ant du l!OTps es t bruu rougeâtre
co~pé ~e ba;n.des jaune r~'ussâtre ~ bas .~u d os e, plumes
.(lu dessus de la q ueue rouge roussàtre \ le premier à raies
plus claires .
tt ) Tanagra silens , L.
( ~ 1) Ce~ oiseau parait appartenir au , nou v1ean genre op~- .
1 ' I
tio1:yftcltos de l\1. Temminck. Je , !ui doune le uom
I .
spéçifique de turdinuB, parce qu'il a des tratt.S de la grive

\
I
AU BRÉSIL. 45
-·· L e courlis vert ( 1) habite aussi par couples les
bords des· ,ruisseaux solitaires qui traversent ces
forêts: il se tient sur les vieilles souches aumilieu
de ·l'eau, et fait entendrc sa voix forte dont le -11

son est singulier _: les Brésiliens le nommen't


carauna, ainsi que je l'ai déjà dit plus ba,ut :
on le tua pres de notre demeure, et mon chien
alla le éhercher dans l'eau pour l'apporter à
terre. Ce chien tl'tmvait surtout de :Voccupation
avec l'aperea ou preias, petit quad~upede qui

d'Europe •. Mâle : longueur, sept pouces onze l igues; enver-


gure des ailes neuf pouces, toules les parties s'u'()érieures gris
brun clair; ~ordure des plumes uu peu plus pâle, sur~out à·
la Lêle et au-dessus du cou; raie au-dessus de l'reil, ~d e puis lé
bec jusque derriere la têle; gorge, dessous du · cou, l't poi-
trine blanchâtres; gorg!l non ta chée, dessous du cou ,
poitrine et vçnlre parseméa de taches gris brun isolées, un
\
peu anguleuses; plume; du milieu de 'Ja queue tachées
' \
de noir brunàtre sur les côtés, et" marqu ées auprés de
celles-ci de taches jaune rougeâ lre Jlâle, grandes plumes
de l'alle bordées de rougeil'tre pàle et de taches transversales
de même couleur.
On trouve au Brésil plusieurs autres oiseaux sembla-
bles qui formeut ·une famille ayant beau ~oup d'ana-
logie avec les f~ uv e lte_s, e.t se distinguant tous par une VQÍX.

forte, mais singuliere et peu mélpdieuse •


. (1) Tantálu~ Caremwtsis.
VOYAÇ-E
I

était tres-conmuin dans 1:es hroussànle's ~ pt<~s


de notre cabane; ~iF cherchait ' contipueHelhent.
1c.es animaux; on en ttià plusieurs; ili'âis nous
n'
autres ·Eu,ropéens nous aimions ·pas leur chair
:IÍro:p In.olle, Je trouvai 'dans :ce lieu jadis ,ctll-" ·
ti:é la cdnflriDatiôw9e Fassertion que 1es 1 gJ·an'-' '
des forêts de l'intérieur sont plus pauvres ·e n
animaux , d'espeçes différentes que. 1es· eante~s
cultivés . :: C<\if' ,p artout ou le tenrain ~st dépouilM;·
de bois , on , rencontre une plus gra,nde diyer"'
sité d'_animaux . .tes p;)_rties intérieures des gmn....
·:·eles forêts pnt aussi' l~urs . an~mauX: parti~t'l.liers ;
. ma1s . c'est sur la 1'ISiere . \ des ,ten; \ ,I.Hoi.res
• •
c ui ~IVei1
. ,
~1ue ~'on rencümtre dans 1es fmrêtsle plus granel
n0inhre de créatures divetses.
.f ) So 1Ns- cette latitude. austrále 1~ous étians ·a~t, 1
n:liJieu de I'été ; la chalear était tres-fort.e .
, 'l ' i

Lé ·2~ jan.yie,r; 1e thermometre d~ Réamnur,r·


entr~.· deu~ et .trdi~f heures de 1' apres \' idi , se
soutenait à I'ombre à 24 d'egrés et demi , <W.
. au so,'le1' l '11ll mont_
,'
a en' que1~chues mir
1 . . utes a' '5 ·' ~ d e--·
grés.j~ous etUÚ.eS des JOUl;~l encoré plus cha\],tds; "
cepe11dant je trouva.i rare~€nt)3o à egrés à l'dm-',
. 1en d emam
h re. ],_,e . 1'l ~e
''leva.
' ~~·\· plus1ef.\ "'rs orages; ~\
le. tovnerre gronda · avee vi~lence , il tomba
d es . -torrens,. d. e pl.me , . ma1s. '~ \f O\lS ll a.perl}n-
~ ' .•

\ \
/ ~ \
AtJ BRÉSit. 47
mes pas un seul éclair. Ce~ 'f~éqU.entes plnies
d'orage avaient graduellement gonflé ]a rivíere
à un tel point que les poissons deviní·ent tres~ '
rares ;l 'humidité rendit aussila chasse plus diffi-
cile. Nous éprouvâmes souvendadisette, etnous
furries réduits à apaiser notre faim ~vec de vieilie
vian~le saJée extrêmementcoriace. Nous éprou-
. . . . ,
vwns une viVe compasswn pour nos p<:!uvres
bêtes .de ·sonnrÍe, car elles 'trouvaient à peine
dans lés forêts asséz de folil.frage po'ur soutenir /
lenr 'vie , et se tenaient ordinairement autour
de.nos caba]:ld:'c~mme pour ~o~s demand~r de
la noúrriture. L t:}j>esoin devenait toujour:s plus
pres~ant~ mais l:a~cien proverbe, suivant lequel
plus' gr;md est le ' besoin ~ plus Ie secours est
proche, fut enco.r:e vérifié dans cette occasion.
Des- guaribas (;!.) s'étaient approchés de notre
demeure ; i1s se mirent soudainement à hur-
,ler de to.utes leurs forces. Aussitôt nous nous
levons de dessus ,nos siégys, et nous saisis~ons
nos arme,s. A~·· bo:ut d,e ~quelques heures nous
avions tué un ass·ez grand nombre, de, ces gros
singes pour sutfire 'à plusiem;s repas : sur cés

(}.) fr/ycetes ursinus.


VOYAGE
entrefaites , la pêdíe dans le fleuve avait éga~
lement été heureuse.
C'est ainsi que le temps passa promptement ~
dans cette s<9litude , au milieR des occupatians
~ .
·
' que nous do'nnait l'histoire natureHe. Enfin le
sixieíne joqr' au soir nous entendtmes les cris
de plusieurs de nos gens qui ven'aient de
Be-ruga; .quel plaisir naus ressent1més! .ils' naus
apportaient un,e bovne prov1sion de ma'is : on..
se hât~ d' en distribuer aux anim:aux affamés ,
et op: se réjauit de la: perspective consolante
que nous affrait le soulagem:~ de leur. faim
~xcessi
I
ve. ,
· ~ . .
D 6~s
I
arb res.:r:en.verse:>
. ' se .trouva1ent
ll, •
10rt
.l'. h eu-
. re~sEjmen~ en tra,ver~ du _Catolé. q\\Í va se jeter
dans le Rio-Pardo, de sorte qu'ils formaient _
presque un pant d'une rive à l'autre~ Ils nous
offraient le seul moye~ p~ssible de. pa.~ser la ri-
viere., car il étai~ p~abahle que le. c~:mrant
avait emporté les deux !l irogue~ .. gue I~\ capi~
' tani mor avait fait étabhr ·dans cet epdroit.
A pre~ .de longues recherc~es, ndu~ en décou-·
vnm~s une a mmtre enterr.ee
A ' • • / dans Ie sa ble SONS/
\ ,

d~s squches; mes gens se' mirent ~:lans l'eau


'jusqu'à la poitrine pour la reti;er; ils ·n'en pu--.
rent yenir ~ bout. On prit. ~lors le parti de
~ \
AU BRÉSIL .
transporter à l'autre riv~ le bagage qui ~on- .
sistait en plusieurs coffres tres-1ourds. Les tu.:..
{licns les porterent sur leur tête, et marche-
t'ent avec la plus grande dextérité sur ce- pont
chanc~lant et dangereux. Nous autres Euro-
péens, quo-icrue nous ue fussions pas cbargés ,
noÜs aVions de la peine à nous d êfendre du
v,e rtige en passant sur ces arbres assez minces ~
· et d'autant plus qu~ leurs tron~s arrondis et
lisses roulaient sans cesse sous nos pieds.
Apres une naa~che de trois quarts d'heure ~
nous a-rrivâmes sur le bord d'un to-rrent consi-
' '
dérable au-de]à duquel la route était couverie
de ·broussailles tou(Ju~ et impraticables. Nous
fil.mes en quelque sorte dédommagés de .cet in-
convénient par la rencontre de plusieurs objets
d'histoire uaturelle. Souvent nous apercevions
au milieu du chemin un paquet de IÍlüusse ou
de végétaux filamenteux réunis en une masse
pyramiclale dont la base était en bas, suspendue
par une mince plante sàrnienteuse à une h•·im-
che d'arbre courbée. Ces paquets étaient no.m-
breux, et se balancaie:Q.t - librement tout p-res
de nos têtes, de sorte .que nous les heurtions
souvent avec nos chapeaux. Ces objets vacill;ns
avaient déjà fix.é :rp.on atte11tion pai' letu· forme
III. 4
0o VOYAGE

singuliere; tout à coup j'en vis sortir un petit


oiseau, et je reconnus qu'ils étaientles nids aériens
·d'une espece de Iílüuchetolle ( 1). Ce p~tit oiseau
se construit un nid tres remarquable avec des
tiUandsia et d' autres plantes d01mant des fibres
qu'il mêle avec de la mousse; il le suspend
à une branche d'arbre par le moyen d'une plante
. ,grimpante -qui en tombe dans un endroit dé-
couve~t : Pentrée de ce rédnit vacillant esr en
·dessous à la base de ta pyramide, et il se trouve
devanl l'ouverture un appendice l'endant qui
la protége; les petits sont tres-bien garantis
de la chaleur ~ de l'humididé , de tous leurs
enr-:remis dans cette singuliere derneure.
Nous étions encore éloignés d'à peu pr~s une
tl'emi-legoa du lieu ou nous avions résolu de
ca~nper, qua:nd: nous ávm1s rencOI tré dans un
viçux rancho asse; .gt·and une cab~p.e cbuverte
I
( 1) Le petit oisea.u . q·u ~ ·e regarde com~e\ay~nt con-
strpit ce nid es t un mouclierÓlle que j'ai no ~ mé mus-
cicv-pa ·mastacáli's .' Couieur ellive ver~ât're, croupion jau'líe
' on pâle;
citf . plumes d e 1'occ1pt
. ' t ·].a une'!. 'la racwe,
. .
et gr\s
ja ~nâtre au sommet, de sort~ que lorsqu'elles sou tran-
quilles ou ne distingue pas la premiere couleur. Ailes et
qil•,tnte bruh n:oirâtre. L'ongü'eutr lbt;~le de l'oiseáu, q·l'latre
pouces'ttois qua·rta,
AU BRÉSIL. Õ.I
en éeorce d'arbre, quisubsistG depuis le temps
que la route a été établie. Qu.-qiqu.e •et endroi~
nous offrit un abri pour y passer la z:uit, nou
'C'
p.rererames
A de pousser notre C01frse 1usgu
• ''a lJ.:Q
co.r rego quj. porte le nqm de Bl!-queirqo; pare!:!
q;ue nous espérion~ y tro-q.~er de bqnne eau ;
elle y était mauvaise et peu ahoridante; le
sa;ir les grenouilles et les crapauds firent un bruit
assourdissant, et les moutisques npqs incom-
moderent pendant toute ~a nuit.
Le 27 la route fut encare plus remplie qu'à ·
l'ordinaire d'helic01Úa à feuilles hautes . et
roides, et d'arbrisseaux épineux. Les aiguillons
douloureux des marimbondos augmenterent
aussi les incori:tmodités de cette journée; mais 1
l'espoir de rencomrer les premieres demeures
humaines pous les fit supporter gatment ; ·et
nous travers:1mes av:ec célérité les montagnes
et les v<.~llées , parce qu'à chaque repas no~s
rétabHmes les forces de 11_0s mulets par une
abondante ration de maÚ.
AprÇs avoir parcouru à peu pres deux legoas
et demie, la tropa ar•·iva sur les bords·d'un
ruisseau pres duquel le·s habitans de Beruga
avaient depuis peu de temps établi une plan-
tation et abattu à cêt effet .les bois tO'IJt ~ l'en-
',

/
VOYAGE
tour ·: nous r cspirâmes un peu plus libreinent·
dans cet e .droit ; .car , quoiqu~ nous fussions
environn~s de forêts siJmbres tres-hautes , nous
apereevions cependant des cintea de montagnes
et nous nous regardions déjà comme délivrés
de la som:Ore captivité "des éternelles forêts pri-
mitives; mais il restait encore un espace fati-:-
gant dont ü· fallait sutmonter les difficultés~
La route était en plusieurs -e ndroits embarrassée
de roseaux taquaras qui, avec leurs branches
et le.urs feuilles finement découpées, avaient, en
se mêlant da?-s les buissons, lormé des especes
de pelotons; le roseau taquarassu dont j'ai déjà
patlé quelquefois s'éle:vait aussi en plusieurs en-
1. .

drpits de. cette route à trente et quari!-nte pieds


de hauteur, et composait des haies considéra-
hl~s que ieurs épines aurai~nt ren~ues impé-
r ' \
nétrables sans ·le,secovrs du façao <TIJi nous ai:-
daft à nous 'f byer un passage. Pourlcpmpenser
ies embarrás qu'ilnoJb causait, ce vég1tal nolis
fOl,irnissait fr·é-quemmén,t par 'ses grosses tiges
un,e boisson rafrakhissante, car la
' '· nature
.
dorme
\ '

' d'un cote f e qu: ' de


'li~ enI'eve
;

ab pndamment A,
1
l'ap.tre. -, · ~
· ·:Oé :pethes tr.o\~pes de gros;;:ID:ees vert jaune
\.
'\
'\

/
AU BRESIL. 53
à gorge noire ( 1) animaient c e hallier de grands
roseaux. La route passait ensuite par qes hau-
teurs qui sont convertes de catingas et dont
le sol est pierreux ; quoique la montée en soit
douce, le terrain s'éleve toujours insensihlement.
La plupart eles carregas que naus rencontriohs
étaient à sec; on voy<}it dans leurs lits des tas
• ,tr I ~ '

de cal,lloux roulés mêlés de beancoup de quartz


qui venaient eles montagnes primitives.
Nos chiens poursuivirent souvent eles cutias
ou agoutis sur ces hauteurs , mais nous ne fú-
mes pas assez heut~eux pour qu'ils en prissent
un seul. En général naus aperçúmes tres-peu
d' ammaux elans ce cantou. On n'y rencontrait
que eles niels elu petit moucherolle qui sont
tres-communs.
Naus trouvâmes sur les borcls el'un carrego
encore une vieille ~abane couvet•te d' é'c orce ;
1
une jolie plante basse àfleu~·s tubulées , et d'une
couleur orange tres-vive (~), qui croissait tout
aupres , attira fortement notre attention. Cette
plante commence en ceí endroit à se montrer

( 1) Loxia canademis.
(2) Je u'ai pas pu ohserver la fructillcation de cette
helle plante; ainsi je ne puis la déterrn iner positiv~ment.,
- mais je , cr ois q,u e c•est uu ruellia.
54 1'0YAGÊ
fréqué:rniÍlênt dans ·Ie chemin, à lhésute (plori
.
s'avance ·dans les hauteurs du sertam.
Une demie-legoa plus ]oin, nos oreilles fu-
rent soudainement frappées du cri d'un . coq;-
compagnon cónstant de l'homme, même dans
ces solitudes ecartées. Naus sorton~ de l'obscu-
·rité de la fotêt , et devant nous s' étend un
champ de mai:s et de manioc: L'::~zur du ciel se
rnontrait de nouveau à 'nousClans un espace con~
sidérable; au-delà des forêts naus apercevions
des cimes d~ 1nontagnes bleuâtres, dont l'as-
pect ét~it pour naus extraordináire et plein de
I charmes.
cyous nous trouvions sur le Beruga, petite
rivif re qui se jette à· peu -de distance ·dans le
Rio--Pardo. Trais familles de gens â.e couleur y
ont formé les premieres
.
un ·établissement
1
dans
c e sertali;l , à l'époque ou 1'on voula1~ y fond.er
une a~déa pour l commodité des voyageurs '
"lorsfiUe l"ón ouvrit la·u ute. Ces colon! Gmt déjâ
des plantations considérables ,' et sont \encor~
occ1,1pes à abattre du bois pour les agra:ndir. On
peut juger de la fertilité âe ce terrain par la
hau~eur et la force des tiges de mais , ~·ainsi que
par son _pro.duit ahondant. Le g-r ain n' était pas
enC<)re mur ; les IDananes plantées en g;and
~
AU BRÊSIL. 5-5
, nombre n'avaient pas non plus atteint leur point
de perfection : ainsi nous ne píllnes nous pro-
curer d'aptres provi~ions que de la farinha.
Trois petites maisons en terré et . couvel'te&
0'écorces rem.plies de carapatos ( aearus ), com~
posent jusqn'à présent l'aldea de Beruga. Quel. . .
ques Mongoyos ou Camacans , qui tr~vaillen.r
eomme journaliers , se S011lt établis avec leurs
femmes et le~rs enfans dans une petite·cabane
peu Jloígnée_ : ils étaient à p~u pres nus, et
avaient peint plusieurs parties de leur corps en
·rouge et en noir avec du rocou et du genipa;
ils portaient autour du cou des colliers .de
graines grosses et rondes d'une espece .d e grà...:,
· minée. Le gouvernement a norrimé un muU~re
chef des 'Camacans : il réside dans cet enQ..roitJ
les aldéas ou r~ncharias _de ces Indiens sont
sous ses ordres ; illes rassemble lo:rªqu'il s' agit
d'une expédition cqntre les tribqs de sa-llvag~§
ennemies, pf-r exemple les Botocoudys. Ü:tJ. çlit
que çlans ces - occasions ils .se sQnt. Í,Fes-.bie,:q
:rn:ontrés.
A yant passé vingt-deux jours à voyager au
milieu des forêts antiques, depuis. notre départ
de San-Pedro jusqu'à notre arrivée à Beruga,
sans voir uné seule habitation humaine , nous

•'
56 VOYAGE
éprouvions naturellerpent le. plus vif désír de
pouvoir dormir 2:!. f.abri de la pluie et de la rosée
sous un toit. Nous ne nous inquiét<imes ·clone
pas h~aucoup des, tourmens .q ue nous avions à
redouter des c~rapatos et eles moustiques qui
fourmill~ient dans ces misérahies demeures ,. et
nous y passâme~ le 28 à nous y reposer. Nou&
púmes nous y' procurer eles haricots noirs et
de la farinha ; ce n'étaieüt .p as des mets tres-
recherchés , mais des geps .qui ont souffert la
diseue pendam quelcpf~ temps sont habitués à.
la frugalité. Nos mulets et nos chevaux se re-
poserent.; ils' ne pureiJ.t trol].ve;r; de bons pâtu-
lrages, car tons les tcrrains dépouillés de forêts
I •
·étaient convl':rtis · en plantations :· c'est pour-
quo~, penclant la nuit; ces animaux ~'échappe-
, rent souvent p our alie r dans le.s ch~pn~s de ma!s.
· Mes gens 'employerent le ·jour <:16 repos à
chas~er et à pêclier; ils !!C pol'terél(t jusque
sur l~s bords du Rw-Pardo, et eí.1 rappo tereht
beaucoup de poissons! Le conquistador, au-
jourd'hui colonel João Gbnsalv~s da Costa, ·a
d d . . \ .. ' \ .. ,,
esce n n en pu·o~ue cette n vici'e Jnsqu a s~n
embouchure .à Palipe. Je p~rlerai J?lus tard de
cette expédition. ~
L~s {()~·ê u;; q·tai environnent ~ tous cô~és le.:o

.,
"
AU BRÊSIJ_...
pla:htations de : Bemga fournissent, ;.cmhme
celles . de Catolé, surtout au~ ámatetirs. d'oi-
seaux, 1.1U:e occupalion agréable et utile, car on
e:titend de tous côlés de singulieres voix d'habi-
tans des airs. On y observe plusieurs especes de
tangaras(tanagras), de gros-becs (loxia) (1), et
de manakins ( pipra ). Les ~reilles sont. frap-
pées de la voÍx perçante des perroquets, qui
se rassemblent dans les champs de mais, d.u sif-
,:flement doux ; mais aigre , du toucan à gorge
jaune (2), du cri à deux tons de l'avassari (5);
et du siffiement répéte du courouco11 (4 ) ...
Tout en jouiss<ínt à Beruga d'un repos bien
riécessaire' je réfléchissais que mon . voyag~ à
travers les forêts primitives n' ~tait ·: pas .ter-
miné; nous avions encore à parcourir pendant
~eux jours ces sol~tudes ombragées avant ~ d'ar­
river à Barra-da-Vared~, ou l' on entre dans lés
pat~ies dú sertam de la capitainerie de Bahia ,

'
'.
,. I• l
(I) Tanag,:a silens; t. Guianemis; t . Magna; t. Erasi-
lia; t. BrasÜiensis; t. Cayennensis; ct heaucou ll d':iutrcs.
Lo.d agros.s a; 1, Canadensis .
(2 ) Rarnp!tastos dicolorp,s.
(3~ Ff:.amphastos Aracari.
(4) Twgon.
68 VOYAGE
oú le pays est ouvert ou au moins entrece>upé
de forêts et d'e plaines ou de pâturages.
Je partis de Bevu'ga le 29 , et je suivis la
route qui ' à l'extrémité des plantations' s'en-
fonce tout de suite dans la forêt ne>n interrom-
pue; mais les arbres sont inédiocrement hat;Lts :
c'est un catinga ; elle .est encore passablement
toutfue et fermée , toutefois le chemin est moins
impraticable parce qu'il est plus fr-équenté.
Un Camacan avait tué, peu de temps aupa-
ravant, un jag~ar à_coup de fleche. J'en trou..--
vai .le squelette snr ie bord du chemin. On
rece>rmaissait au crP.ne que 1'~nimal' à l'rpoqne
I . . .
de s~ mort , changemt de dents : son squelette
aurait par cohséquent €té un mor<?eau tres-ín-
, I . pcmr un oab'met d' osteo
terespant ' l Og-Ie
. , SI. p l u:-
sieurs os n' eussent pas .déjà été enleViéS par des
bête~ oarnassieres. \
Q pand nous fu~es ar.r-ivés au Jiboya , :çuis...-
seau qui se j ette dans 1le Rio-Pardo à Reu de
distapce , nous étions_1s~ pres .de ce d~rnier
fleuv~ que nous eriten~ions)e br :t de ses eau~.
Le Jiboya coule sur un lih de gnanite si· 1isse
et si pblique, qu' on est q~H é <}'y f~ire passer,
ave c des précautions extrên1e!) , . les chevaux
et les inillets ferrés ' de crainte qu'ils 'ne tom-:

\\'~ ··'.
..
AU BRÉSIL.
n
hent-, ·y avait à la rive opposée une maison
ouve~rte, ~nais cou.verte en ·é corce, et tout au:-•
pres m1 coral ou pare ;pour les troupeaux de
-bes!tia~1X que fon espérait de. voir _,passer par .c€t
endroit lorsque la' ronte fút étaiblie.
Nous entrâmes alors dans la vallée du Rio~
Pardo , 1et. nous su{vh,nes sa rive se.ptei'1trionale
à. travers la forêt. A droite s' élevait un ·e&i.é
-de la vaUée eou.vert d'arbres ., qNi diminua-ient
de hauteur à mesure que' le terrain montait '
de sorte qu'au soname>t ils ne formaient plus
qtl.'un catimga. Les eaux du Ri0-Pardo, troubles
et de -eouleu.r grise, se précipiülie.nt en écu....,
mant à tmavers des débris de vochers. Nous
pomv.ions quelquefois apercevoir 1ihremepd'azur
-du cíel , ·et Jes hautes ·montagnes boisées qnai
-nous envíronnaient. Cette solitude a un cai·aG-
tere Ír•:nposa~t et terrib1e. 8e~Il silence n~.étai.t.
:interr:orp.pu que par 'le fracas_·de la riviére, Joi'S~
qu'il s'y mêlà le cri singulier d'une voiée lilO'Q1!..-
hreuse 1de gaviãos à eou r<il:tage ( 1) , qui .é tait
;répété da!!s la v-allée sauyage par un ,éclw tres-
f0rt. Nos chasseurs ne pouvaÍelílt pas espérer
cl' atteindre ~es oiseaux à I'élévatíon à lac1ue_lle

( 1) F a/co TlUdicollis .
.6o . V.O.YAGE
-ils se trouvaiént . .Un autre spectacle ~tttira leur
" • attentión. : une grande troupe de mirikis ( 1)
. santa de brimche e:q hranche -au- dessus de
nous ; on ex~mina ces singes pendant un cer-
tain temps , et · I'on en tua trois. Les limites
qu'on leur assigne ici se trouvent dans le voisi-
nage : ce sont les bords du Corrego-do-Mundo-
Novo, car·ils paraissent préférer les hautes fo-
rêts eles plaines aux pays élevé et secs cot-i.verls
de forêts basses.
Quêck a"iait pris plusieurs phalenes (2) d'une
belle espece, tres-commune dans ce canton.
I
Dans un endroit oi:L la route s'éloigne d'une
lcentrine de pas de la riviere, nos geps qui con-
. nais~ aient le pays pous, firent ~ntrer brusc.[Ue-
. menr. dans un /sentier à peine visible·, qui tra-
ve~s~it eles brouss~illes. touffues et .\desce~dait
;vers les bords du R1~-Parclo. Nous y.\trouvames·
· dem,: ?angars·cou , erts cl' éco~ce cl'arb. e; quoi.,.
··qu'il\' fussent un peú r 1uinés , ils nous promet- -
taient un abri suffisant contr~ l51 plui et la
rosée : 'o n' alluma aussitô : du ·eu ' et on fit
I

· rôiir les singes pour notre SIIl}lpeF. Nos mulrts


• • • • '!' • • \ . 1

' ( 1) .(l.telés lt.Jpo:r:anthus,


(2) f ltalaena agrippina.
AU BRÉSIL. 6r
étaient dans le 'vieux chemin, et on leur avait .
fermé le passage par eles .eerch.es posées en
travers. Le caractere Sí!UVag!'} de cette solitud~
donnait à notre camp un ,áspect passablement
pitlo t·esque. De petites lles, eles débris de ro-
cbers couverts de helles plantes qui excitaient
notre curiosité , divisaient les ea~x troubles et
· écuroeuses de la riviere~ On distinguait entre
autres une mag:q.ifigue plante 'haute et à fleurs
jatmes ; nous la prÚnes de loin pour un ~no­
théra : sur les bords pendaie.n t les sarmens fl{m-
ris du bignonia dont les couleurs sont si vives.
L'air de la nuit dans cette vallée fut tres-·
humide ; c'est pourq~oi nous en part1mes de
bonQ.e heure le 5o , et apres avoir traversé le
Çorrego-do-Mundo-Novo ~ nous gravlmes une
cha1ne de montagnes assez hau.tes , arron,dies
et convertes ç:le fragmens de rochers et de blocs
d~ granite, parroi lesqt1els on rencôntre su.r-
tout de tt'es-gros1morceaux clé quartz. Une forêt
épaisse • omb.rage les montagnes et les rocher~.
Cette cha1ne porte le noro ·de Serra-do-Mundc-.
No1-'o. La premiere mop.tagne est la plus haute;
quoiqu'elle s'éleve par eles pentes douces, il
faut cependant .u ne heure pour arriver au sorn,-
met. On voyage ensuite à travfirs eles hauteurS:
VOYAGE
et des vallées , et l'ón finit par desceiÍdre dans
une profondeur considérahle. Le Rio-'Pardo
murmure à gauche , au foncl d'une vallée, en
suivant la mêrne direction que la route. Les b_ois
qui couvrent ces rnontagnes sont rernplis de
diverses esp«kes de ,bignonia, qui offraient un
aspect extrêrnemen t agréable par la grànde va-
riété des couleurs; on y voyait tontes les nuan-
ces de blanc, de jaune, d'orange, de violet
et de rase. La. voix des sabelés (í) et des ara-
pongas (2) retel,ltissait dans les profondeurs de
la vallée cornme sur la çirne des rnontagnes ~ et
anirn~tit cette solitude.
'i Apres avoir franchi la Serra, nous <'>hser-
vârnes que les arbres devenaient toujours plus
bas; dans les fonds rnême ils n'avaient que qua-
rante à soixante pieds de hauteur : la forêt était-
rernplie de touffes de bromelia e~ ~e cactus ,
converte de tillandsia' et mêlée de 'beaucoup
de b()is qui ne parvie~l~ent ici qu'à une1t< ille in-
y
signifiante. Dn trou~e le pao de leité, pr<'>-
bablement urt figuíer, qu~ l'01i redoute à 'eause
de sqn sue 1aite.ux et corr sif. Jlarna,i.s jé n'ai
\ ~

(r) ':{'irtamus noctif.Jagus. · '


(i) froCllias rvudic{)llis, '
AU BRÉSIL.
pu renco'ntrer le _lait bienfaisant du palo de
vaca, décrit par M. de Humboldt ( ~); il aur.ait _
été pour.nous un grand soulagement dans notre
positio:n. Noqs renconttâmes aussi le bar.rigu-
do~ _qai ne croit ici qu'à une ·hautem; médio -
cre } plusieurs especes de mimosa ; de bigl1o-
nia, etc., entremêlées de fragmens de rochets
et de hlocs de granite. Tout ce que l'on aper-
çoit prouve que l'on est graduellement monté ,
à travers les ·forêts primitives, des. régions hn-
mides et ombragées des grands bois de la côte
à une .région plus haute et plus seche. J'oh-
servai entre autres uh bloc de granite isolé, qui
aYait vingt à trente pieds carrés : son .sm:nmet ,
couvert de terre , offrait de belles touffes de
hromelia et de palmiers .entrelacés les uns dans
les autres. Ce petit jardin àu milieu de la fo-
I'êt offrait un coup d' reil extrêmement pitto~
resque, et rappelait ces espaces isolés et tapis-
sé~ de :O.eurs qui ornent les vallées glacées _du
Mont-BlanG, et que l'on y désigne par le nom
de jardins ou €ourtiLs. La chaleur éLait tres-.
forte dans ces forêts basses, qui donnen~ pe'u
d' ombre, et qui sont par conséquent desséchée~

( 1) Yoyage au noupeau CoMinent, tom. II, p. 107-


64 VOYAGE
et brúlées par le soleil; tous 1es voyageurs eu~
rent bientôt le teint des Botocoudys ; cepen-
dant nous supportl1mes cet inconvénient sans
proférer une plainte, parce que nouS' nous trou-
vions comme daQs un monde nouveatl. De-·
puis que nous avions gravi ]a Serra, les for~ts
nous présentaient un caractere éLrariger ; des
voix d'oiseaux nouveaux frappaient nos oreilles;
les papillons qui vohigeaient autour de nous
ne nous étaient pas connus ; un grand nombre
de plantes, que noi1s n'avions jamais··ap~rçues,
réjouissaient nos regards ; tout ce qu'i nous
entourait annonçait une nature entierement dif-
férente de ce que nons avions observé jusqu~a­
lor~ , et la contemplation de ces objet~ divers,
qui promettaient à chaque pas un nouvel ac-
croissement à nos colleclions, nous remplissait
d'une .vive ~patience d'atteindre 1Je but de
notre ]Ournee. ·\
. t .
]~ous nous ap rochions du seconCI ~ndroit
ha~ité par des hommes =· on le nomme Barra-
. da-,J7areda; nous y entt evoyioi,ls avec\rlaisir
la ffn de notre voyage pénible à travers les fo-
rêts. Nous jetâmes un ·re ard e s..;rprise au-
1
tour _de nous quand, en sortant çles bois, nous
apep;úmes tout à coup, à côté d'une vallée ·en
\
AU BRÊSIL. 65

pente douée, une plàin~ ouver~~ tapissée d'herbe


et d' arbrisseaux ·, bornée au loin par des mcm-
tagnes boisées et arro~dies, et' en· quelques
endroits remplie de vastes plantaliqns. La joie
se manifesta vivement dans· notre troupe; on
se -félicitait~d' avóir surmon.té si heureusement
les fat~gues'du voyage à travers les forêts; notre
satisfaetion·- fut ·(!l"autant plus sincêre que les
habitans de Barra-da-V areda nous assun~~rent
que nous a·vio1as été extrêmement favorisés par
le bonheur, car i1 arrive rarement anx hommes \
et aux animaux de sortir sains et saufs de ces
' régi:ons quand le,o; ·pluies continues _o.n t com-
k

mencé. Nous regardions gati~ent les planta-


tions immenses et les montagnes moins hautes;
notre reil mesurait I'espace des forêts primitives.
- que nous avions laissées derriere nous, à pr~­
sent que nous · étion~ en sureté dans une ~on­
trée ou tout ·n~us p.romettait dcs .subsistances
abondantes et du repos pour les homrues edes
arii~aux. La tropa s' avança dans la ·plaine coa- ·
vertê d'une h.e rbe haute, ou divers oiseaux en-
tieiement nouveaux pour. nous, et t:épandus
dans les . bosqu~ts et sur les t~uf!'es : de mi~osa,
..de cassia, d' allamanda ,- dé .b~g~10Í1_i~~ ·~t\ d~~u-;
tres.especes d'arhres ou d'arh ri~seã ~ixY átiire1:er\ t . -· ·
I ··" • • .·• 4

IIT. ~
66 VOYAGE
· t out de suíte no~e curiosité. De jolis pigeong
à queue_ allongée cunéiforrme (1) . se prome:...
paie:nt par
couples· su:r le sól verdoyan~; le vira-
~osia, lorir>t d'un no ir hrillant, s'abattáit .p ar
trot~pes sur les buissons. On voyait s'envoler de
dessus l'herbe le tarin bleu d'acier (2) etle pins0n
à ventre rouge (3) . .De nombreux tr0u.peaux: -de
bceufs paiss.a ient dans ces pâturages sauvages.
. I
·Nous passâ:rnes . à GÔté de deux chétives ca-
" hanes fJ_Ue des hommes de' couleur· 0nt cons-

I
{1) Columha squaTNmosa. Histoirelnaturelle despigeons ,
- }
par l\'l. Temminck > pl. ·sg. La figure est tres-bonn e.
t;~) Flingilla nitens , L.
· {3) F1üzgilla p!:tea'ta\ .Mâle, lobgueur ci nq pbuces six ligues; ·
I : ' -
_e nvergure,des:aiJle_!!, s·e pt poucel! sept lignes. -Pluníage entie-
rement gds cend.ré > un peu teint de brunil.tre sur les
parties supérieures; :poitrine • ventre, crou~ion et déssous
. .. \ -
de la queue blanchâtres, plu~ foncis' sur les c&tés ; meu~

1 -
1
ton et gosier blanchâ tres; dessous du cou et
• .
1\a
ll de la poi-

t'rb~e gris cendré p.âle ~ ail s et que~e gr.is brun\ tre f~ncé;
sorpmét dela tête touvert de lumesétroltes, long~es, a ·peu
pr\:s d'uu aemi-pouce' a'Un rouge écarlate ardent' qui
os'll!~naeílt un -peu par-dessus l'e derri:/:re ' ~la tête et 'fo,rment
. ~me tou:ffe; elles sont ·eutourées\clile chaque c&té par une raie
, no.,ire qui dan~ réiat de rtlpllS .cache Ull pen les plume•
_;ro 1~es . .

\~
AU BRÉSIL.
truites dans cet endroit' et no-us arriy~mes à la '
helle fazenda de M. le capitam Ferreira Cam- ~ .. ":,~·/ ~
pos, qui est le propriétaire de la plup,art de ces
.....
..
'!..

métairi~s. Nous y f~unes reçus avec la plus < '

grande cordialité ., et nous fU:mes biéntôt remis


entierement ·des fatigues_de p.otre voyage dans
les forêts.
)}.

,,
68 VOYAGE

. ' .
""-"""""'lNV!r.~"'-""'~""""'~""""""""'""'-"lN'llt.IINlN!lNV\:IIV\I\Il.'\1\1\1~

CHAPITRE XVI.

SÉJOUR A BARRA-DA-VÂREDA ET VOYAGE JUSQU 'A UX ,


CONFINS DE LA CAPITAINERIE DE MINAS GERAES.

Descriptjon du pays. - Ángicos. -Vareda.-BÚail sauvage du


Sertam. -Les,Vaquelros. -Tamburil. -Ressaque. -Ilha.
-Valo, douane sur les limites de Minas-Gemes . -Aspect
des Campos-Geraes , leur description, objets remarquables .
- Chasse de,..l'Éma ou Nandu et du c :é ri;ma. '
IJ
I I'

La. vallée de Barra -da-V areda est formée


par çles cotéaux à pente douce. À sen e~tré­
mitq sud-est elle est coupée par le Rio-Pardo,
· qui reçoit en ·cet. ~,n clroit le ruissea~ de Va-
red~, circonstance ·dont elle tire \ ~on nom.
1 ·· c· 1
Ml .
. e cap1tam -F< errewa . ampos, ne' eB E, urope,

I'
~ , a fait abattre des b~t~ et .fonclé eles _r~anta­
twml cla~s lesquelles Il nltiVe le 1nam6~ , le
maJ~ , le cot0n , Je riz, caJé et. tou~es les
d ·ir
· · <:!~tr~~ pro uct~$l).J,'l~ \: u pay~~ On \p1ante
· d · peu cl e

.. ..
sucrl;)
. i·
t et
la pé'iite quanúté que l'on réc!)lte est
~ ...
-ptesfiUe toute employée en eau-de-,vie. On voit
\
'\ \ "
'il\
AU BRÉSIL . . 6g
encore à côté de>.ces:·plantations eles espac_'ts
considé'rables incmltes,
.... .
.couverts
'
de. ,hautes,her.-
··'

hes seches, et ou s' élevent c à et là eles buissm1s


et eles arbrisse~ux; . ils. p9rtent le c_aractere sau-
vage propre aux pays arides de lá zone torricle .
des deux hémispheres : aussi leur aspect ~ap­
pelle-t-il viv~ment le souvenir eles ~olitudes de
I'Afrique et ele finde ; qui sont encore plus.
désertes et moins .riches que f Amérique mé-
ridionale en grandes forêts. .
, Pour. féconder ces p~turages ·incultes, le
propriétaire a constamment besoih d'un norp.-
bre ~considérable de .negres. La riche~_se d'un
planteur brésilien -consiste dans ses esclaves -,
et J~s- ~orhmes qu'il , retire du produit de ses .
récoltes. scmt aussitôt employées à achete~ des
. \
negres. On l~s . trftite généralement assez JouJ
cement, et à BaiTa-da-Vareda ils sont tres-bíen
nourris. A la c?~ltmr du jour, ~ mi~i , on leur
portait de grands vases du meilleur lait.des
plantations dans lesqt;Lelles' ~ls travaillent, e~· OJ;a.
leur donnait en abondance. d' excellens méla,n-
cias .ou melons ' d'eau tres-rafratchissans. Dans
ce . pays les prop~iétaire~ qui possedent 'c ent
vingt esclav.es ét pllJS .demeurent 'ordinaire-
ment dans "eles niaisons en terre, ~t, comme le~
V'OYAGE
pauv:r.es gens , vivent dé farinha , de harÍce>ts
nói11s et de viande salée. Ils .s6ngm1i rai·ti!ment ·
à améliore.r leur manie're de v.ivre; une fortune·
consídérable ne ,rénd pas leu·r eXistence plus.
sensuelle.. ·'
l:.e produit que l'011 retiFe des plantation&
dans le sertam n',~gale pas , à beaucoup .pres ,
y
c~lui que·le betaii cl.9nne. lVlon g~néreux hôt:e,
par exemple' entret<mait sur les ·o'ampos- nou-
vellement cultivés de sa propriété des trou-
p_eal\~ CÇ>Jílsidéra~les çle hreufs- et de vaches et
heauaoup de C~t?vau,:x '; le~ pr.en?Íers somt gardés,
par de petits' garÇom! -!'ií?gres, 11et reviennent le-
1
s,o~r Ià la fazenda o:h on les fait entrer dans un
g.ra,n1d pafc pour: traíre les vaches. i'y vis pour
la p emiere fois U!ll exempt€' de l'~du:cat~on des.
hreu;fs dans le serta1n, dont je 'parltwai plús en
détail par la suite, .e t j'y tro:uvai ,l s hommes
d·estmes. , a\ Ia ganl!e :.Jl d;Y. LHt)taJ..
; 'I : .o n 1't?S,
- nomme
•. I .. ·, .· ,.
!Cl, raquel!.ros ' et C(ftm,pzstos dams lVlmas-Ge-
.. : il. s sQnt d:•e' Ia tete
:çaes ' I \a.ux p1e A
'J:
. d•& vetus t cUIF
.
de . ~:eJ;f. .C€'t; acecmt11ement ·para h singulier au
prenuer . eoup d.' re1·1 , malS . il est ,\ tres-
' b on et
\ 'l . '
tres-·Utl: e, parce <gill~ ces ' ·ens o:at so:uvent à \
~ ~ ~~ , j ' )
·comar apr.es 'le betai] qt.n s'eéh,app'e á 1irav.ers
• I \ , • •

les ~uissons épinelli.K et les foc~, bass~~ , o~ !bie:n


' \ '

'\\
11

\
AU BRÉSIL. ') 1
soQt ob1igés de l'y faire passer et de l'y rassem~
~ bler. Leur habillement se compose de sept
pieces (:r) : le ckapeo·est un petit chapeau ro·l\1~
·ave,c un p~rd éliiOi:t, CfÜl s'ela.11git et s'allonge
par derr.iêre po~\lr former une aile qui abáte le
cou ; le giha@ ou córset, qui est ouvert par de-
vant, et sons.léqu:el est le guarda pei"to, se :po111l€
. .
d evan:t Ia pmtrme : e ' est un. l arge
" morceau d éj1
çuir qui descend. j!Usqu'a:a has-"entre ; les.per-
neiras ou culo:ttes, au-elessous desquelles sont
les bottles. inunies. d'éperons. Un vêtemen.t de
ce genre dure long-temps , est fi·ais, léger , et
. défend des épines et d-es, hraiílches pointt~es.
Le vaqueiro, monté sur -un bon cheval J.í>Otirvu
d'une· granc!.e selle rembou:m~.e , tient à la
main une loiDgue perehe· elont l'extrémité est
pourv11e. €i' mie point~ ele fer é1noussée, av;ec la,
quelle il écarte Ol_l apat les breufs fu.rieux ;
souvent il ,a aussi tJn laeet (laço) pour prendr,e
les animaux faroueheª. Chaque fazenda à bé=.- _
tail a lilll p.ena:Qre suffisant de ces .gens : ce
SOnt toujoHrS eles negfeS , des mwâtres , des

( 1) Lc cu ir du 11eado mateiro ( gonazoupira d'Azaro) est le


\plus fort. On en fait ordi-nairement le corse~. Le f.leado
tingeiro ( gouazoubj,ra) donne des vêtemen-s plus légers.
. I
f

72 . VOYAGE -
blancs, et quelquefois des ·Indiens. Ils sont gé-
néral<drient bons chasseurs ·, et •exe~cés à ponr~
s.uivre et àcmnhattre, avec.de grosohieJils dressés
à cette tâche·, les jaguars et. les .ahrre~ aliimáu~ ,
du même genre, qui! ordinairemepC'·chóisisseiÍt
leur' demeure dans le ~ yoisinage · des grands·
t-roupeaux de· bé1ail. Le propriétúre de la 'fá-
zenda envoie; suiwant les besoins., ses vaque'iros
·dans les ,différentes divisions de sori.. dqmaine
ou sont les animaux ; ordinaiteHlentt il étab:l.it
en ccmséquence plusiem~s fazendas à bétail, ou
quçlquéS-uns.de ces . vaqueiros Habitent sêparés
de-l'univers entier; et .m(menL~ne véritanle 'vie .
1de.' solitair.es. . , · • · •.
1 1
1 Il y a encore à. la Barra-da-V a:r.eda que~ que!>

familles d'Incliens qui· travaillent m0yermant nn


salair~ ; .on les emp1oie surténW à 'abatL,re du
bois ou à .chassercdans les forêts : i1 . prénnent
dansJes plantati{!n:s ·d u propríJta·i re rc .qui leur

I
convient; M. Ferre!ra\ est trap bol'l pÓur les
en ep1pêcher. lls se cJuyrent de qúelqu ,s vê-
tcmens :i surtout de çhemises·, e ·leurs femm.es
portent des tabliers de bandelettes de·éoton ..La
plupart avaient été baptisês : q~elques- uns
avaíent ane croix rouge peinte en r9,cou sur lf
front ; leurs f~m~es avaient ~s d.emi-cercy
~

I " '
AU BRÉSIL.
noirs peints entre les seins' et d'autres raies de
la même couleur ·sur le corps et sur le visage.
lls prépat·ent !a cou!leur rouge en longs mor-
ceaux qui ressemblent aux tablettes d'encre de
·la Chine, et-les font en comprimant la mem-
~rane ,rouge du noyau. du rocou .
. Je.trouvai parmi ces Indiens un vieillard qui
avait les chev~ux gris, mais ]e corps -fort et
r.obuste ; il comprenait la .langue des Portl}-
gqis et vivait avec eux. Il avait jadis tué un de
ses compatriotes ~ui avait servi les Portugais,
lorsque ceux-ci cherchaient les Camacans dans
~es forêts; c'était à ' l'époque ou les premiers,
animés par un zele déplorable à contrainclre par
le fer et le feu les sauvages àembrasser le chris-
tianisme et à se faire:baptiser , envoyaient clans
les forêts des détachemens armés. Une de ces
troupes, conduite par un sauvage déserteul", s'a-
.vança dans ce canton; les Camacans s'enfui-
rent de tous l€s côtés : mais le vieillard dont je
iVÍens de parler, qui se. trouvait parrni ·eux, suivit
.'p.e,n dapt plusieurs jours à quelque distance , et
sans êt.re aperçu·, les Portugais lorsqú'ils re-
~ournaient chez .eux, et saisit l'occasion favo-
rable pour percer .d'une fleche l'Indien perfide.
Çe Tell brésilien fixa ensuit~ . avec plusieurs
VOYA:GE
fleches le corps du trá$tre, à la.tenre. AujeHil!refh:ui:
enço;·e: il .s'ene>rgueiJ,J}t de e,et1le prouesse . ..
, . M: Ferreira Çamp.os m'avait áccueilli de la
maniere _la p1us amíqale aMec üa.a ·nom1tease
·tropa et no11s avàit généreasenlelílt · df;>nné des
•provisions, dnla1t, rafmnclnssement, d une ra-
• • • A • ' ''·

rete extreme JUSCfU a ce .mom€nt, et u111.e. gra:n e


, • A • • '' • d • '

quaNtité à:e ma"is p0ur nes F.p.UI~ts . iNe~ií €o111:temi


de se CQBdlllire avec um désintiéues-s,emeu.t si
exeroplaiue_, .il mi~ un €mpressen!lel'H aim.ab~·
' .' . • ~ . .~ l(f
a me, montrer se s vastes plantatwBs; le. r1~ et 1~
le ma'is .souffrai~nt un peu de lr sécfu.e.resse. La-
1p__rovisiol!l de ma'is et d.e coton é{fui se trctn.wait S'lilr· ,
l la f~zenda était . ex!lirêmeQ1el!lt ' co:Nsidérabie. :u
y av;ait<entre autres quarre-:-vimgt-ónze aro:Oes
(2,26.5 1ivrés) de cotou emhlallé €bns Íile granclls
, r ·" ' , A -~ ,. ,. ··
saG:s earres de peau de hreuf, pretts etpe expe-
,r, , :o h' - .
o;.tleS a va- la.
I - . ,
Les peaux de breufs· si <wmmunes
r
drans l'e ser-
àu
J '

tam, sont ~ei n(Hnhre des·.o bjets de .prémiere


né?~!SSité._· On les déc~~pe én~J;rn:i€r.es ~\ ÓJ?. 'elil
fait des IWrdes, des ·'li(WUS, , et Oh 'S'en. Sert aussi
pol!lf co-uvrir les cha•ges' Jh;ls he~s àe sonune ,
L e '1!.y~i>eta
' iJ d. e ces. ~antons ~o:st
•.\.\ graj~
~~ .l etc'harnu,
\\
et d9>~me par eonséqu~ntt cl!e t'r!s:g~~~des peaux.
1

'Um( t-Fes-b:onne pea<l!l <xifitt:ev.'~· 8o·e.\à 10 f: ·4o.


. \,' \ .
-,,
'. '

'/. ~ ~,

\ '
AU BB.ÉSlL.
On ne tue Ies hreufs que rarement et ponr la
consommation du ménage; mais on envoie de
nombreux troupeaux de breufs , .ou boiadas,
pour les yendre à Bahia , ~ous la condt~ite de
quelques vac.[Ue'iros qui vo;nt 8 cheval. Un f{)rt
breufse vend ici jusqu'à 7000 reis (45f. 76c.);
à Bahia ilest pll}s cher. Les propriétaires voi-
sins font leur envoi en commun.
Je passai quelque temps dans ~et endroit,
taht pour m'instruire del'éducation desbestiaux
dans ces cantons que pour connaltre l'histoire
naturelle ~e ces régions élevées., qui ~ beau-
cmlp d' égards ressemble à celle de ]'intérieur
de Minas-Geriíes. Je trouvai parmi les mam-
miferes 1e moco; espece de cavia non encore
décrite ( 1), p~~it animal de la grosseur d'un la-
pin, qui habite clans les clébris de rochers eles
wontagne.s du Rio-Pardo, dans les environs Ju.
Belmonte, le long du Rio-San-Franó,sco, e~
dans des lieux semblables. Un Camacan que
j'avais envoyé à la chasse m'apporta quatre de
~es mocos clont la chair est bonne à manger.

(1) CaPia rupestris. J'en ai dQnné une courte notice dans


l' Isis (année 1~20' l cr çah~er ) ( en aliemand).
VOYAGE

Koster dit que le moco habite dans-le sertam


d'Açu, et qu~ c'est une espece de lapin.
Parmi les oiseaux il s'en trouvait beaucoup
de nouveaui pour nQus' ,et. tres-,intéressans
q~i n'habitent que' les montagnes de Minas-
Geraes, notamment plusieurs especes du genre
myothera d'Illiger; et de divers p.etits oiseaux
, de la famille eles granivores ; entre autres des
gros-becs (1), eles fringilles (2), eles bruans et
des bouvreuils (15). ,.
Nos çollections de botanique s'enrichirent de
plusi~urs especes de graminée~ , ·de belles fou-
/ geres, et de que~ques plantes àbelles fleurs parmi
. lesquelles je distinguai F allamanda catharticci.
à grandes. fleurs jaunes, (píi dans quelques en-,
drotts était .t~es·comnn~nef et ~orma;it des buis-
sons aa 1mheu eles débris de , rochers. Nous
avo~1s aussi trouvé une casse magniB ue qui 4&
. . l \ fli li ,\ .
une cnne comque tres~tou u~; e e etmt ornee
,
. d'~rre profusio.n c~e- loiig;úes girandoles d\ fleurs


'
I
' .
'

\ . ,,
\'
\
'

.
( 1) Lo.-r:ia torrida, L., lineola ou crispa_, qui n'a p'as de
.
I
tllniiJes fris ées sous ]e.ventre; le gros-bec bleu-de-ciel d'Azara·
(2) Fringilla niten: ; F. Pileata, le chingolo.
(5) E mberiz a brasiliensis. Pyr~hula mjsia. Yieillot.
. ' \
·~
..

AU BRÉSIL. 77 <

orange foncé assez semblables à celles du ma- ~


ronnierd'lnde (1). Ces arbres contribuaient in-
f:iniment à embellir eles pâturages et eles halliefs
qui étaient roussâtres et de couleur sombre . .
. L~ 5 février je pris congé de M. Fe'rrj:!!ra,
qui avait si généreusement exercê l'hospitalité :
env:ers nous , et je repartis de Barra-da-V areda . .
~ peu ele clistance ele la maison, l' on. entre clans
une forêt qui a trois 'legoas d' étenclue, et clont
le sol s'éleve insensiblement. Les montagn,es ele
ce pays haut sont cloucement arronclies, et' an-
nqncent le voisinage eles plaines ou vertes et des .
chatnes élevées q!li occupent une' grande partie . '
,)

du Brés~l. C'était pour nous un a;vantage bien


,sa\utaire _ele respirer l'air sec et sain ele ces ·
hautes régions., apres avoir si long-temps lutté
péniblement ç01itre la fievre dans·les forêts hu-
mides -de la côte.· L'.on n'a plus à reelouter clans
le sertam ce mal qui épuise Jes forces : les ri-
vieres y coulent avec rapidité sur eles rochers,
·sa11s se mê.Ier avec .les plantes' conrompues eles
marécages elont les émánations produisent elans

( 1) Cette belle casse forme une espece nouv~lle , à moins


qu'elle n'ait été décrite dans la monographie de ces plantes
publ iée à Montpellier.

'
~
VOYAGE

les forêts de la côte un air humide et peu sa-


lubre. Le lait même, cette production principale
des pays
-
de pâturages, o~casionne trop souvent
~

dans les cantons bas et humides des malaises et


la fievre; mais dans le páJs h aut il ne fait pas
_de mal, ét nourr_it un gl'and nombre cl'hommes,
dont le corps robuste et la bortne rnine prou-
vent que l~air y est sain , et cpie lêur maniere
de vivre est bonne. - ·
La forêt de Barra-da-V are da , de même que
toutes cel,les du pays haut, n'aepartient plus
à celles qui ont eles ·a rbres gigant~sques; elles
'I se rapprochent des catingas, ihais sont un . peu
pl~s élevées. Un grand nombre de beaux arbres
et 1:le plantés étaient en fleur, entre autres des
bi9nonia eles plus belles couleurs, un arbre de la
fawille des mauves avec des fleuns ~earlates ; il
formera un genre nouveau: une plante grim-
pante· de la diadJiphie à flears rouge de car-
mip clair_, une mu titude de coliBris (1) à
sorpmet d e l a tete - I ~t- a, gorge cl or~
" rouQe ~,
e, ep-

to"9.riúent ces fleurs en Hçmrdonnant. Plusieurs


en(.lroits de la forêt son couv rts de gr~nds _

·. (1) Trochilds mosq_uitus.

.-
AU IIRÉSIL. · 79
. <-1' . •,
:roseaax d·es Inarais , w. aatres sont entler_e -
ment nus parce que l'on y a brulé les ar~res .
.afin que le - sol prod.uish ~e l'herbe · pour le
hétail. Ces emplqcemeris ne tardent pas à être
revêtus cle hautes fgugeres ( pteris éaudata )
dont le feuillage, disposé horizontalemént, 'offre
un aspect singulier. En sortant de la forêt, on
arrive à de helles prairies verdoyantes , dont'
la c0uleur, malgré la sécheresse ~e la saisbn,
était aussi fra1ohe que celle des prairies
d'Europe. Les sombres forêts _·q ui entou..:-
rent cette verdure gaie en rehaussent agréable-
ment l'effet ·; une troupe ,.de jmne:b.s paissaie~t
au milieu de ces prairies avec leurs poulains.qui
'prirent la fuite à l'_aspec~ inattendu de notr~.
tropa.
On voyait sur les 1isieres 'du bois des arbres
-de vingt à' trente pieds, dont fes fleurs i~di­
quaient qu'ils appartenaient à la syngénésie. Les
espaces boisés alternaient avec les prãiries , au
fond desquelles s' étendaient de peti.ts " lacs.
Parmi les nouveaux objets qüi attirerent notré
attention eh cet endroit, je citerai les 'cactNs :
de tons les ·cÔtés _ils s'élevaient . isolément ,
quelquefois à une graH.de hauteur'; leur tige
anguleuse et épineuse est ligne-q~e à ~a partie
8o .VOYAGE'
inférieu.re; on y recoJ1na1tencore les.vestiges des
angles qui les distingu~nt dans leur jeLlne ~ge , ..
et on reconnatt plus distinctement les années de
leur croissance à leurs-branches étalées comme
des girandoles ·: dans ce . momeht elles étaient'
surclíargées de fruits, arrondis. ·Ce cactus p~­
• I
rah êtr~ hexagone ou octogone : il ·porte de· -
tres-grandes fleurs blanches à l'extrémité snpé- ,
rieure de ses rameaux. ·Ses fruits ·sont ·dévorés
avideme:nt par upe· espece de perroquet nm~
encore décrite : c'est la perruche à ventre oran-,
I, •

gé ( 1 ). La chair dil fruit du. ,cactus , qu'i est


d' un rouge
I de sang, . roug~t• 1e..,\'b ec . de 1'OiseaJl.

I Quelques cassiers tres...:'gros . à flems jaune's of-.
r. . I
1ra1ent , f rappant
un contraste tres- . avec 1a 'r.10rme
roide des cactus: '
' .. --------~,--~
----c~ · ~------~,~-~~~}~--------

(1) Psittacuscactorum.'rJongueur, neufp\ouxfá huit Úgues;


envefgure des a,iles , q inz~ pouces qne_Iqttes)'il\es i . qu~ue
all~l:j·gée et ~unetforme .; tolHes le.s ·paFtles supJn~ures d un
1
_ vert ·ri f, m~lé d'un peu de gr' bruu sur le sommet-lde la tête
et
et le cle'rriere du c0u; joues, méutol{ gorge 'd'un, 0 ris bru 7.
nâtr~ olive, qui passe davaU:tage à celte clerniere c-oul~ur eu.' se ·
rapplt'ochan.t de la poitrine; poitl'iue, c~ és et ventre. jus- •
. l . . \ ••
qu'a u croupi·on orauge vif; plumes rectrÍ€e!, un peu· bleu.
de' c:i d à la' poin te el -à la; ba~JJ'e\ intérieU<re; .qu.e ue, vert
. ela ir; plnmes .d u rniÍieu sales } toutes"jaunâ·tres à la barbtÍ
in térfeure. ' "
/

AU ·BRÉSIL .

. -flusieurs· objets intéressans ·se montrerent à


nos chasseurs dans ces prai1·ies nouvelles pour
nous. Le granel jabiru (1) volait entre les breufs
le long eles bords d'un étang : cet oiseau porte
ici' le nom de touyouyóu. On distingua~t par-
faitement quand i1 volait , sur son plumage
d'un blanc éclatant et sur son long cou, son
collier 1'\oir. Bientôt ies couricas (2) et les cigo-
gnes (5) -remplirent aussi les airs; on leur donife
également le nom de jabirus. Tous ces oiseaux
sont grands et ont eles plu~nes hlanche:s, voilà
pourquoi les Bré~iliens les confondent les uns
avec les autres , et comme on n' en tu e pas
ordinairement , des chasseurs expérimentés
ne savent même pas-les distinguer avec exac..,.
titude. La signification eles noms d'animaux.
donnés1 pár Marcgraf commence à être géné-
•ralem~nt employée au nord 'de Bahia. ·
Une voix· d'oiseau t1:es-forte excite à l'ins :
tant, .dans ces pacages eles forêts, I'attention

(1) Mycteria americana.


(2) Tantalus locula!or.
(5) Ciconia americana.
· III. 6
.. VOYAGE
des voyageurs qui marchent dans la plaine décou--
verte. Des curikakes innombrables (1) volent
en troupes, bariolées de blanc-et ·de noir , et
francpissant les montagnes basses et boisées, se .
portent vers l~s lacs , les étangs , les flaques
d' eaux et les pâturages, ou ils habitent cons-
tamment. Cet oiseau porte ici le nom ·soQ.s
lequel Pison le désigne dans son Histoire na-
turelle dú .Brésil. Il est reconnaissable, quand
il vole, à son cou blanc et à ses ailes noir
mélangé, ai.nsi qu'à 1sa voix forte , diversement
modulée et assez agréable. Quélquef'ois on
observe aussi dans cet endtÇ>it des volées de
I}
snatules (2) qui vont d'un étang à un autre''

(1) Tantalu,s a/bicollis. On a regardé 1généralement le


c~ricaca de Marcgraf commele.ta7btalus loc~lator de tinné,
jo,squ'à ce que 1\IL Lichtenstein ait,. rectifié' cette erreur par
so,n explication de !l'ouvrage de Marcgraf, faite d'apres les
I
d ~ssins originaux q n'il a · etrouvés. Malgré Lous mes effo:.;ts,_
je n'ai pu obtenir ce bel oiseau, il se montrait bhaque .jour
'
à nous en pet1tes ' l e\\'corps nol-
' . .avou
Lroupes, et para1ssa1t '
r1tlre ou .noir m élangé etle cou
I
noirâL~e. To~t ceei confirme
'

l',asserLion que ~e curikake dn s~rtam de Bahia et le cudcaci\


de Marcgraf ne sont que le même oiseau.
(!1) Platalea ajaa . ,

\
AU BRÉSlL. 83
et qui sont remarquables par leur heÚe couleur
de rose.
Tous ces oiseaux, extrêmement farouches,
s'envolent à la premiere vue de l'hon;une, puis
vont se poser de nou"Veau dans les herbages,
au milieu des breufs et des chevaux ; ils n'ont
r~en à y craindre ; le vaquei:ro , sans ce~se Em
mouvement sur son cheval, les dê range sou-
vent, mais ilne leur tire ' jamais de coups de
fusil. lls vivent familierement avec les qua-
drup~des qui paissent , et cherchent à leurs
côtés à tirer leur nourriture eles prairies et des
marais ; ils ne fuient que l'homme, qui , dans
toU:te la nature, se montre comme le tyran 'le
plus cruel pour trouhler leur paix et leur
harmome. . ' - '
·En avanç~nt alternativement entre le~ prai-
ries et des touffes de bois, on trouve }g pays
toujours plus olivert et plus uni. Les vastes pâ-
turages du plateau élevé sur lequel nous voya-
gioD:s en ce ,moment étaient échauffés . par le
soleil dll · midi , dont les rayous , réfléchis
par des pierres nombrenses, étaient d'au-
tant plus ardens. V ers le soir nous atteignimes
Anjicos , vieille maisqn en ruine qui avait été
bâtie dans les bois à peu de distance_ d'un lac.

··.
84 VÓYAGE
Le ~apita~ F errei:ra, propriétaire de c~ pA.th:..
rage, y avait demeuré autrefois.
c~ canton' est connu comme le dernier
. . '
~'
ou.
le· \

. p\ns oriental eiitve ee pays ct la côte ' ou se


trçmve ordinair"ement le serpent ~ schiilettés ,
~obra cascavella des Portugàis. On ne connaissàit
précédem~eilt, dans l'Amérique méridionale,
qu'une seule ,espece de cé ge:r;tre qlii appartient
à l'Amérique , et surtou~ à la moitié sep:ten-
trionale de ce continent. M. de Humboldt nous
en. a fait conna!tre deux nOUY()iles especes c~).
En allant de .~e ' cantou à·Mina_~ 1 Geraes et dans
pntérieur du Brésil , le serpent a, sonnettes de"-
, vientl de plus en plus conunuh ; oií eil ren-
c~ntl!e fréqueminent de tres-gros ' et sur~out
dans les cati~gas' ou bois peu élevés et dans les
bui;Sspns , pierréux des pniiries. Ce reptile pa-
. ressepx ne ,q mtte, , p~s son repan'e
' . pen 1 dant d es
!our:qée~ enti~r:s., 'le,t revient volontie;~ au , sé-
]OUr gu il a chms1. On rf marqua que de.s bceufs
d '~n ,.
nior dus\~ Johrn~
troupea~ . e~a1ent
. l'I. \V.ent
dans un certam heu, et mouràumt des stntes
de la, blessure ; cet evenement excita l atten-
I \ , / • , , • .\ • ' \:

. 1\ ·~~
\\
. . i
(1 ) C;·otaluS"loriflingii et C. aumanensis. Voyez Zo~logie.
ou An,atomie compatée, tom. II, p. 1 ,~
'\
',.
·A U B.R ÉSIL. 85
·. 1/
tioh ·= on examina Ia róute e1ue le troupeau
. ! ' \

ávait suivie; on trouvait ordinairement le ser:;""


peht >oi;lé tranquille~nent ; sm: lui-même , · et
on n'avait pas beaucoup de. peine à le tuer. La
morsure du serp; nt à sonnettes· _e t du' çuril-
cucu sont à peu pres également mortel;les . .On
trouve ces deux reptiles dans ce ~anton , de
même que le jiboya ( boa constrictor), mais on'
n'y connalt pas le sucuriub~; il est beaucoup
plus commun dans MinasfGeraes : je m'en,:mis
convaincu en voyant de tres-grandes .peaux de·
ces se.rpens qu'on eiLavait 'apportées ( 1 ). ·
Les bois l:l'Anjicos nouhissent une quantité
(
de diverses especes d~oiseaux, notamment, de
pé·rikitos et de loriots Í10irs. La maison en ruines
·dans laquelle n~us passâmes la nuit étáit rem-
plie d'hespéries extrêmement petites, qui volaient
f'
en si grand nomhre.que on ne pouvait sé, déro-
her à leur importunité: elles étaient ,poursuivies
par de grosses chauve - s,ouris, , qui de .même
to~rnaient
' ~
sans cesse ·autour de. nos
; . ' tê'
. tes.
"

ü) Le boa dont l\L d'Eschwége parle dans son Journai


'POn Brasilien, sous le nom de sucuriu, n'est aails douttt pas
l e boa constrictor, c'est le boa anacondo de Daudin.
M. ·d'Eschwége convient que l'on a beaucoup exagéré lo
q án~;er du serpent à sonuetles;
r

'-·

86 VOYAGE
En quittant Anjicos je parcot'lrus quatre legoas
avant d'att~indre Varechi, fázenda de bétail qui
appartient à M. F;.erre1ra. On rencontra d'abord
ele vastes pâtur~ges 'unis; leur surface était en:-
treçoupée de buissons, et dans ce moment cou-
yerte d'une herbe haute desséchée. L'reily cher-
·c hait vainement up point agréable sur leq~ef il
put S(t repo~er avec plaisir: :Oes arbrisseaux gris
· . et ve_"rt .foncé, et qes cactüs isolés s'élevant de
tous côtés eü girandoles, ne contribuaient nulle-
ment pa'I' leur aspect ·roi ele à dopner au paysage
un air animé. Nous parcouri01\ts eles prairies i~­
m~nses qui n'avaiynt ele bornes que l'horizon, et
daps lesquelles . paissaien~ .les ·chevaux et les
· ba,eüfs, tourmentés au milieu du jour par eles,
e·ssaims inhnmbrables de mouches à,.. aiguill~ms
( mutucas ) ; ou ·bien nous travei'SII!ms des bois
.' ' ét def pIames
pe}i. .e'1eve.S, . . cou~erles
· . 'i,une h·e' rb e
\~·
cor-rte et de bea'\lCoup de p1erres. Nous aper-
çurues pour la premier~ fois "cl·ans ces ~aines le
piq eles champs '{I) qJi1 n'habite que le~~haúte~
cha1nes de l'intérieur du ~résil, ,et occupe pres-
qule toute la largeur ele J'Amériqu méridionale;
' l . '\

. '\
· (\) Picus çampestris, le charpentic;r. des champs. V oyage
·.~ ~ '
d'A!zara, tom. lV, p. g. ·~ \ \ '
, I
i\
AU BRÉSIL,
c'est Azara qui.l'a ·d écrit Ie · premier parmi les
oiseaux du Paraguay. li se nourrit principale-. .
ment determites-et·de tourmis, qui sontextrême-
1nent nombreuses dans ces plaines. On y ren-
contre, clans les ·forêts et dans les pâtürages, de
grands terti·es coniques el'argile jaune qui ont
souvent cinq à six pieds de haut et qui sont l'ou-
vrage eles termites. Dans les terrains ouverts ou
campus, leur forme est ordinairement ·un peu
plus aplatie ( 1 ). Des nids semhlables, de forme
arrondie, et ele couleur brune nài1:e, sont sus-
pendas aux grosses branches des arbres, etchaque
tige ele cactus ensuppo~·te un o,u plnsieurs. L e pie
eles champs se pose sur ces nids e~ les· frappe de
a
son bec : il est tres-utile ce canton en détrui _-
sant les insectes nuisibles , qui en Brésil sont les
- plus grands fléaux de l'agriculture. Penda~ que
ces insectes destructeurs établi.ssent leu.r galerie·
sur la terre et au -dessous de s1:1 surface ; pendant
que du fond de la terre ils les condu~sent jusque
sur 'les parois eles ha~tations hurnaiaes, ils sont
dans ces lieux poursuivis par eles ennemis llOm-
breux. Les .tamanoirs ( 1 ), les pies, les'myothercs

(t) Yoye-r. Eschwége, Journal 11on Brasilien, p. 109.


(1) Myrmecop4a$q. ' ·
88 YOYAGE
ou faunniliers, et plusieurs autres animaux, ven-
gent les planteurs dant la récolte entiere est sau-
vent dévarée par ces petits ennemis devastateurs.
A la vérité ils n'accasionnent pas dans les pâtu..,
rages du sertam et dans l~s grandes plaines de
l'intérieur, nammées Campos Oeraes, d'aussi
grands dammages que dans les cantansl cultivés'
. puisque les habitans s'accupent principalement
d~élev,er du bétail. L' on y a bien plus à redauter
les sécheresses et le manque de p1uie; depuis
trois ans cansécutifs ces deux :fléaux avaient
causé eles dammages incalculables.
I Le sair j'arrivai, par une pluie d' orage tr~s­
fort~ , à la fazenda de Varecla, ou les vaqueiros
étaient occupés à traire les v~ches qu~ l'an venait
de f:1ire rentrer dans le coral. Tous les soirs an
ram~l).e du pâturage un . certai1~ n mbre de
'vacl1es; puis on fait boire les veaux 1ue I'on a
tenus attachés pendant -toute la joumée dans un
I

petit.enclos. · C"est un~ imp~rf~ction d'e l'édu-


catiqn du béiàil dans le sertam de Bàhia qui
n'a Bas lieu, clit-on, dans Minas Getaes. Dans
cette derniere province on t it sarl ~r les vaches
seules' et on mene les veaux dans un autre pâtu-
rage : le sair on rassemble taut le troupeau dans·
le coraL Le sain dubétail sauvage dans le ser~am
"
. AU BRÉSIL. 5g

est sous d'autres rapports bien en arriere ·de ce


qu'ilest dans Minas-Geraes, oule bétail est doux;
les fazendas sont entourées de fossés et de haies;
ainsi l'on n'a besoin que de jeter le lacet aux
carnes des vaches pour les prendre ; dans Je
sertam, au.contraire,, on les poursuit à cheval à
travers les prairies et les forêts, et l'on est .sou-
·yent obligé de se mettre en garde contre leurs
attaques avec des perches. Le bétail dans Minas-
Geraes est plus granel et dorme plus de lait, et
par conséquent plus de fromage pour .vendre ;
on n'y tue pas de veaux, mais pour opérer la
_séparation de ]a partie .caseuse, on se sert au
lieu de la fressure des veaux de celle des tapirs,
des grands tatous, des cerfs et des pécaris. Afin
que la race eles bestiqux ne s'abâtarclisse pas, on
y prencl toujours uil taureau d' une autr~ fazenda,
et on ne laissé porter les vaches . que dans leur
quatrieme année. Au Brésil on ne sait pas faire
le beurre; d'ailleurs Já chaleur 1'empêcherait
de ·se c()nserver, et le haut pri~ du sei le ren-
drait trop cher. Les regles de l'éducation clu bé-
tailles plus connues ne sont pas assez s{üvies
dans le sertam. Les vaqueiros, ou plutôt les cam·
pistas de Minas ont une heilogne bien plus facile
que ceux du sertam, et ne portent pas non pl~s
I

go. VOYAGE -
le v~tement de cüir qui est indispensable pour
ceux-c1.
La situation de Vareda au milieu de vastes
prairies unies , entourées de collines à pente
douce, et convertes de catingas, et ou en quel~ ·
ques endroits s'étendent les étangs fréquentés
par les jabirus, les touyouyous, les curicacas ~
et la spatule rose, n' esr pas désagréable; mais
ordinairement les vents y sont tres-incommodes .
.Dans toutes les plaines du sertam, plus on s'ap-
proche des 'ca~pos geraes de Minas, de Goyas
et de Pernambouc, plus I' a.i r est purifie fré- "
quemment par 1es vents, parI conser1uent,, d'es
qufon a passé-Barr-a:..da-Vareda, il n~y regne plus
de fievre, et le voyageur, accoutumé' à la cha- ··
leljlr, trouve que les vêtemens légers qui jusqu'à
pr~sent lui ont suffi ne le garantissent pas assez
d~ la fra:lcheur le matin et le sair, et.\même pen- ·
dai1lt .le jour ne sdnt pas assez chauds Aussi des
notre arrivée ~i V~reda avons-nous ~essenti des
' A
SJl:p.pt~mes
i , mais qm• d'1sp~rurent
de catarrue I •

--des1 que nou.s nous filmes accoutvmés graduelle-


mert à la température plus fraicÍle.
Le·8 }e poursuivis ma route à travers. des
prairies, márécagel1Ses remplies1cl' eau et de ro-
seapi peu élevés, dans lesq\Uels le , canard à
1\ \ ~ '
'
AU BRÉSIL.
'
crê te ( 1) fait son nid, puis des forêts basses, et
des pâturages secs et arides. Beaucoup d' objets
nouveaux en histoire haturelle se montrerent à
nous : je me contenterai ·de citer le criangu, es"7
pece nouvelle d' engouleverÍt (2), qui vole pen-
dant le jour, et se tient dans les pâtis entre les
chevaux ct les breufs.
A yant rencontré beauc6up de forêts et de
catingas durant cette joun1ée , nous vimes aussi'

.-
(r) Azara, P:oyage,'tom.IV;p . 55!.
(2) Caprimutgus diurnus 1 ois_eau court et gros avec une
grosse tête; longueur de la femelle, dix pou'ces deux ligues;
envergure des ailes, deux pieds trois pouces ; i ris bt·uu de
café; parties supérieures agréablemt;nt m élangées de gris bruu ,
de jaunâtre roux et de bruu noir ; ~randes taches bruunoir
à larges bordures janue roux, et parsemées de petits points
de même coulet!r sur la tête; plum,es ~capulaire.s tachée~
de m ême; les taches foucées out un eu.tourage jauue roux :
raie jauue clair presque iusensible al_t-dessus de l'reil;
menton jaune pâle, rayé transversalemeut de gris bruu ,
large tache transversale blanche sur la gorge; cinq pre-
miares plumes des remiges bt'un no ir, avec une baucle tra~s­
versale b!anche sur leur milieu ; queue matbrée de bruu
no ir et de jaune ela ir avec neuf et jusqu'à dix bà ndes . vans-
versales tàcbetées de brun noif'; dessous du cou e L haut de
la poitrine agréablemeut marbré; toutes les antres parties
inférieures blanches avec des ligues transversal es gris hrutl
pâle ; mí!ieu du ventre·, blauc nou tacheté.
gz VOYAGE
plus]eurs plantes intéressantes. Up granel nom-
'J)l~e'd'oiseaux chantans anima1ent de nouveau les
halliers, entre autres le sofré ( 1), espece de loriot
qué.nous n'avionspas encoreaperçu, au p;lumag~
.o rangê vif, mêlé de noir: le chant de ces oiseaux
est extrê:i:nement agréahle par la diversité et le
changement eles tons. ,Perchés en granel n~mbré
sur un arbre . dont le feuillage était touffu, Üs
offraient, .par le contraste ele leur coUleur av;ec
le vert, un coup cl' reil magnifigue.
Lá senhora Simoa, propriétaire cl'une fazenda
. à Tamburil, village çlans un ca~ton montagneux
1
ou nous arrivâmes le soir, nou's clonna l'hospi-
talité dans sa p1aison, située tres-~gréablement
dansI une forêt
.
boisée sur le Riacho-da-Ressaque.
On nous y regarda avec beaucoup, de curiosité,
' .' -, ~ .
paree qu on nous assura qu on n avaitras encore
vu d' Anglais ; mais nous ne manquâmes de rien,
I ' I 1)
et or nous logea avec quelques voyageurs bré-
silieps clans une gt ancle chambre ou nous sus-
. \ L
· pendtmes nos han'l.acs. <Qliland ia nuit cqmf'ença
tous les commensaux _de la mais~n se rassem-
blev.fnt, suivant l'usage de ce pays} pour chanter
lés litanies; car dans ces fazendas 0~1 habita~ions
J.

(1 ~ Oriolus Jamacaii, L.
,,
~
AU BRÉSIL g3
. .
solitáires il y ~ .ordina~r~ment une chambre ou
se trouve une caisse ou une armoire c1ui ren-
1
ferme quelque~ images de saints; les l~abitans
s'agenouillent devant"ces images pour faire l~urs
dévotions. Je n'ai ,pas entendu parle~ ici ·de
prêtres crui vont ele côté et d' autre avec tUl autel,
comme Koster en a trouvé dans le sertam de
. Séara (1 ).
Pour aller de Tamburil aux frontieres de
Minas-Geraes, on traverse un pays âpre, uni-
formément couvert de catingas, un peu monta-
gneux, ct entrecoupé de ravines. On suit le
cours du Riacho-de-R~ssaque en remontant par
une route qui est d' abord tres-agréable, ornée
d' arbrisseaux croissant à 1'ombre, et habités par
de jolis colibris. Le ruisseau fait plusieurs cas-
cades, et répand une frakheur. qui nous parut
délicieuse; car la \.chaleur était considérable· et
le chemin 'en partie tres-pénibl~ . pour nos bêtes
de somme. Là varié;té eles fle'ur;; qui nous en-
touraie:O:t comP.ensait, amplem~r:i.t l~s petites
fa~igues du voyage. Parmi les heaux végétaux
que je reneontrai je me bornerai à citer de
VOYAG:E:
superbescasses, çlont les grandes t0~1ffes de fleUrS
_ orangées répandaient une odeur balsamique(1)-;
de~ grenadiUes à fleurs violettes et rouges, mais
inodores, et une plante grimpante à fleurs d'un
rouge foncé (2), qui en s; entrelaçant dans le
sommet des arbrisseaux au-dessu,s de nos têtes
formait une 1 allée couverte. L~s huissons d~
mimosa afeuillage délicatement et finement dé- •
coupé étaient tres-incommodes dans les sentiers
en parti~ impraticables, en couvrant di leurs
branches·épineuses l'argile jaune ou rouge qu.i
fQrme ici la surface du sol et qui était dcsséchée
par le soleil. 1 - •

,, :qes que l'oh a. franchí les chaines de mon- .


tagnes qm. se ''I'event un11ormement
·.c ' I es unes au-
, ·'
dess,us des autres, et qui soilt entierement om-
bra~ées par _des catingas ou des carascos (3);
on t;raverse, en suivant le Ressaque )·de petites
~ .
I
' . I
(I) . Cett~ espece parart être le çassia moMis de\ V.ahl.
. ·. I '
(11) C'est probablement un,nouvel i,pomrea. . ·
(3) On appelle carascos les fo~êts
les 1\lt s basses sitdées suÍ·
les limites des grandes plaines arides F, unies norrlmées
campps geraes : elles ont dix. à douze pieds, de haute)lr, et
semblent composées à peu pres des 'mêmes especes d'arbres ;
1
I
on Prut les comparer aux: bocages de, cou dners . que l 'on
renc9n tre en plusieurs endroits d'AU~m~gne, et avec les-
\ '
/
AtJ BRÉS1L. g5
prair~es templies·d'herbes qui ressemblent aux.
~oseaux : partout de nouveaux oiseaux par
leur accens, et de nouveaux végétaux par les
·teintes ele leurs fleurs causent eles distractions
agréables. J'y rencontrai fréquemrilent le nicl
d'un oiseau non encore décrit (I}; ille com pose
d'un tres-grand nombre de petits mor<::eaux de
1
bois sec, l~ susp~nd._à un~ branche cl'arbre ; ~t
n'y laisse qu'une petite ou.verture ronde : toU,s
les ans il en :place un nouveau. au.-clessus de
r ancien; de sorte que j'ai trou.vé quelquefois
une suite de ces nicls qui avaient trois à quatre
pieds ele longueur et se halançaient à une bran-

quels elles bnt beaucoup de ressemhlance. Ces ' atbrissea ux


·ê'tan t tous mo: ts, il fnt impossible de déterminer à quelle
famille ils appartenaient;
(1) Anabates ruftfrons : c'est le sylvia rujijrorts du mu-
séum de Berlin. Longuenr, si·x ponces neuf ligues ; toutes
les parties supérieuree sont d;un gris brun, l éger et pâle,
passant un p eu au jaunâtre dans cerLains endroits; frollt et
sornmet de la tête garnis de plumes étroites et poinlues qn i
ne forment cependant pas une huppe; front, brun roux
foncé; raie gris blanc pá~e, presque iuseusible au-dessus
de l'reil; parties inférieu.res blanchátres et gds brunâtre pále;
gorge et milieu du ventre "tres-blancs; cro upio n et cô tés
p assaut a u jaune; ailes et parties supérieures un peu gris.
l)runátre olive.
', (
VOYAGE
che mince. E:r;t examinarit 1.m~ de cés demeures ·
aé'riennes , noús en avons trouvé lá partie infé-
rieure·hahitée par uné especé de rat (1), taridis
que l'oiseau occupaít (m~ore I~ pa.r tie supé-
•. .
neure.
• Dans ' les endroits ou I'enveloppe ' de gazon
p~rmettait à 'la ro~he de se montrer, je trorivai.
de la staurolite en cristaux simp!es, avec 'tm peu
d'amphihole dans du schiste mica,cé. Les catas-
cos·ou bois na:ins . dans lesquels noús voyagions
étaient, à·notre grande surprise·, entierenient
dépouillés de feuilles, cm~m1e les foi:êts d~Eu-
1
rope en liiver. A ,mon arrivée à Ressaque je ne
1
pus lohtenir aucune explication sati~faisante de
cc phénomene. Un planteur intelligent disait
•' \
que deux ou trois ans auparavant, dans le m~is .
d~ aoút, une gelée tn?s-forte avait tu é les arhr.es;
d~ au,tres personnes, au con.traire, pt:~tendaient -
qu'1 ne sécheresse\ extr'ême ' du ·sol je\J. était la
li
cau~e. r . "-' ,

R.es'saque e_st un pe~ii· ~ndro'it ?li trois far illes

( 2) , Mus pyrromuws.
·'' ' R at d es calmgas:
. \ ' I .
~~1eue lres- ougue;
· gross~ur d'un lérot'; corps gris bruqiÚre sal~,·, à peu pres de
la couleur du hamster; région v~isine d~ nez, ·grandes
oreill,es peu' velues, et cuisses, d~n,s le votsihage de la queue;
roug~ brun. · . \\ \ \

.
'
Ab ERÊSít.. 91
tl;honimes de couleur cultivent 1,:ni tei·ra~n situ~
· stu' ul.1e hauteur en pente douce, Et éntoutée de
carascos ; ils élevent aussi eles bestiaux. Les buis.;.
sons morts qui borneht l'horizon de tou's les
côtés domaent à ce CàJrtÕn 1;1'11 aspe~t d'une .
uniformité extrê:inement triste; lin ,agavé et
quelques orangers tépandent seulement un peu
de gahé aupres des caba:nes des habitans. Dan s
cette contrée cl'un a~pect hrorne
on ne voit
qu'un, tn~s"'petit nombre, d'anim:iux; le vir;;..:.
boste ( 1), au plmnage. violet no ir brillant êt à
gorge rouge, vivifiait seul ~I; quelque sorte les "
forêts de buissons desséchés. On nous fh l~ge~·
dans une des cabanes : elle était infestée pár
les marimbondos : ils s'occupàierrt ~. construire
leHrs·nids dans notre cbambre, p€rsonne n'était ·
en s~reté contre- leur aiguillon. Nos nmlets··
mêrne' qui paissáient à peu de distànee/ prirent r

la fui te ; ce ne fut qu' en fermant la. porte et


l es·· 1enetres
f!
A
que nous· parvmmes a nous Ju.eUrf'
A '

à_l'abri ele ces insectes• qui semhlaien,t vouloi1'


,nbus. I
disptiter notre logeme:ilt. Vers le soir il
s' éleva un orage' violent ; il toínha des torrens
.de p1i:ne . ;s J;
· accompagne, . une grc'1e epa1ss.
' . e. M es

(: 1) Tan~g1:a bonariensis.- .
in ..
!

\'
VOYAGE

gens, qui n'avaient jamais ~u un météore sein-


blabh;! le long de Ia oôte maritime, :ramasse11ent
par curiosité · ces grains tra:nsparens , et té-
nwignimmt hauten1ent leur surprise.
Une petite vallée nue, située entre des hau-
teurs convertes de carascos' mene à "la fazendà .
d'Ilha, qui est éloignée de quatre legoas : elle a
un aspect sauvage et peu agréable, car les bois
peu élevés qui l'entourent sont uniformes .et en
partie desséchés; partout se montrent des ' her~
hes hautes, seches ou mar~cageuses ' et l'on ne
·jouit d'aucune perspective. L~s mousses et les
,1 fougeres eroissent en plusieur 1s endroits. Heu-
re~sement pour _les voyageurs, le cana.rio ( 1)
J I . - .
et ~e pintasilgo T2 )", deux des ois~aux du Brésil
qui chantent le miem(~ leur donnent quelques
. 1
dIsfractwns.
• I_,e ·VIra. b os. te s' y mot!ltre
' en pe-
tit~s t~oupes; les plus :igés ·, qui on la poitrine
rót1Lge, se joig·n ent Iarement -aux ·~ l'utres. Un
'
autre ta:ngara , que I
1e

ne t\ouve d,e. 1t • nu}J_e
part (3)' se perche s~~s rieh dire sur les som-

(1) Emberiza brasiliensis,


Cr) Fringilla mag~llanica. ,
<f)Tanagra capístrata: Longueu~, ·six p~ces dix liglles ;

'
en vergure des aile's , neuf pouoes huitl'i;gnes: il i!~ssemble assez

I
- ~
I I·
AtJ BRESIL. 99
fuets ies pius hauts des buissons ; oh irouve
surtout ici beaucoup d' especes de moucherolles;
et les especes les plus grosses qui ont d ~ l'affi-
nité avec eux, que Buffon a nommées hécardes
et tyrans, et Azará suiriti. Les bécardes y
sont plus t'ares que dans les provintes plus
hasses (1).
Le terrain s'abaissé de plus ên -plus jusqu'à
llha, et les arbrisseaux diminuent aussi de hau~
teur dans la même proportion; jusqu'à ce que
I'on arrive à la vu.e des campos geraes, qui
se présentent comme ur~ monde nouveau. Des
plaines immenses entierement dénuées de fo...::.
rêts ; ou bien des collines à pentes douces qui
se prolongent en chames , et qui sont convertes
I

póur ia fôrme extéi:"ieureau bouvreuil: Wut de1a iílandilnile


inférieure noit; joues et moitié antéi'ieure du som mel gris-
bri.Jíl sal e ela ir ;' gosiet, dessous du cou , poitrine et haut d li-
ventre jaune rougeátte pále : loUtes les parties supérieures
gtis bleu tendté .
(1) L'on a généralemént tonfondu les dertx especes les
plus communes, et Sonuini même est tombé dans cet~e
erreur. Le lanius pitanga de IJ'i.nné et ]e l. sulphuratus se
ressemblent beancoup : ces tépétitions de formes chez les
ois~aux son t tres-fníqueutes au Bréstl, mais ]~s deux ois~au:i
differént tell'ement par le bec qu'on ne peut les confoudre•
tí;elui qui fait sans cesse eniendre ~e cri i beMis;i ou tictifli,
.100 VOYAGE
d'herbe seche' et h~ute et d'arbrisseaax épars'
se cléveioppent à pe,rte ele vue. Ces -campos, ~iui
s'étenclent jusqu' au Ricí-San-Fran~isco , jus,
q:U'à Pernambouc , à Goyas et au-delà , sont
coupés dans différentes directions pa·r desval-
lées ou naissent les riviere·s qui , de ce plateau
élevé, descendem vers la mer. :ba plus re-
marquable est le Rio-San-Francisco, il prend
sa source dans la Serra-da-Canastra, que l'on
peut regarder comme formant la lin~ite entre les
capitaineries 'de Minas-Geraes et ele Goyas.
Dans les vallées qui coupent c~tte cha1ne et' ce~
1 plateaux nus, les borcls eles riv~eres et eles ruis-
i
J>eau-x . ne
sont garms 1 • ;' des b
fiorets . o1s
. ISO
. I'es se
I .
trouvent aussi cachés dans ces eBfoncemens,
, I . . -

a ,le bec ~nince et allongé; l'autre, qui répete distinctemeu~


,gue~, guei, a un bec laige et conve:-e en desso s. Sonui-ni se
tr,!iJ mpe en disant que Ibnei-nei d' Azara pronon' e l1 Cayenne
l.e r1 o-t de tictivi; c'es't , co~n~e je l'ai déjà di , le cri dtt
pitan~;t. Cette errem· a auss~ ~té coth mise par ,VieiHot dans.
sm1 .Histoire natmoelte des oiseau:t: de l'AméTiqu1 sepfen-
trio;;zale, il prononce, tom. I, pag. 78, que le tictivi répete
o queJquefois guei, guei, tandis que c'es le cri de l'autre
esp€:ce.,
. I
le laniu$ sulphuratus ·de inné. 1'\.zara a au . con-
traire distingué avec beaucoup d'exactitude, d'apr~s leur
. f 1eur f orme, ces aeux ·otseq,u~
(;fi et
· .\\
tres-commuus au
\ ~­
~ ~.
(
AV BRÉSIL. 101

surtout én approchant d~s frontieres d~ Minas-:


Geraes ; ce ge~1re de forêts est tin des prin-
cipaux traits caractéristiques de ces régions_
découvertes. On s'imagine queiquefois av0ir de-
v:an~ soi une plaine , continue, et tout ·à coup
l'.on se trouve sur les bords cl'une vallée é;t roite,
profondément escarpée, I' on entend un ruis-
.seau murmurer au fond, 'et ,l'reil plonge sur
les cimes d.'une forêt d.ont les ar.bres embellis
par d.es fleurs variées garnissent ses rives .. Ih,,
clans la saiscm froide ~ le ciel .est CQI}Stamment
c0uvert et le vent cont~nnel ; . dans la saison
seche , la chaleur est d.' U:tl.C ,ardeur étquffante ,
• J ~ '

tbúte l'herbe est d.esséehée, .le sol brulant; I'eau


potable ma~qu~ eiltierement. Cette descrip-
tion prouve que ,les ca~pos geraes du Brésil · ' \

orien\al, quoique dépourvus . de forêts et gé-


nér.àlement unis, clifferent cependant des step- ~
pes de l'al!lcien et d.u nouveau monde, dmit
M. de Humboldt a fait une. peinture si beHe ·et
si fidele ( ~ ) : car. les llan~s 011 les steppes ;:tu.
'nord de fOréno<i[ue etles pampas de Buénos-,
A yres ne ressemblent pas aux canapos geraes, .
o
·'

( 1) .1.nsichten der N atur , p . 1. Tabteau.,; . de la N atu ;·" . ~


pól g. lo

,.,
../ti, .••
..
...
V9YAGE
et les steppes de l'ancien .monde en sont en..
core plus dissemblahles. Ces càmpos geraes ne
sont :pas p;:trfaitement ~nis ; leur surface offre
alternativement des hauteurs en pente douce.
et des plateaux, .aussi leur aspect ~st-il uni-
forme et inanimé'' su,rtout dans la saison seche,
Cependant ils ne I sont pas aussi nus que les
llanos et les. pampas' et moins encore que les
steppe; de l'artcien monde, ear partout ils sont
tapissés ,d'herhe qui soqv;ent s'é.leve assez hê_lut;,
de petits arbrisseatlX couvrent ordinairement
les pentes et quelquefois des plateaux eatiers;
~ :par .conséquent les :rayons du 1soleil n'y pro-
1
duisl:mt pas des effets aussi viorehs que dans les
llan~~s , et l'on n'y éprQuve 'pas non plus les
vents secs et étoutfans ni les 'to-urbillons de
1

sabl\~, qui sont' si mcómmodes pm:rr les voya-


gemls dan~ les llanos de l' Amêrique,,,·es déserts
de l' Afrique et d~ l'As.ie , e.t les st~pes de
l' Asie. . '1 1
" .. .j·
I . 1\
1
I
~n venant de la .cô't.e maHtinie on gravit
~ · d'a}itG)rdcepreiuierdegré des m01 tagnesdel'in.,.
t~rie ~~ du Brési~ , .qui n'es \ pas t .~s-~le,v: da~s
1

'-' la ntgwn qu~ 1'a1 parcourue , pmsqu 1l n y


'<i' tombe pas de J).ejge, et qqe l·a geléé et ]a grêle
•.. · , y' sop.t des phénom(mes fres-brres·,; ~~l' ailleurs
·.. . I \. ~ ..
. e- " • tJ ~~.;,.~ • t .. •• • ~-
-~.()" ...•
. 'o;.,b
I 4 r

·•
AU BRÉSIL.
/

~me grande partie des arbres y conservent leur


feuillage toute l' année ; mais un peu plus à
l'oue-st ce n'est plus de mêmé sur quelques points
élevés ; si l'on continue à voyager vers la
pa:rtie la plus haute des campos geraes, on ar-
rive à la ~ha~ne ·de montagnes qui s'étend snr
leur surface-, mais qui ne peuvent se comparer
à la Cordilliere des Andes de l' A.mérique espa-
gnole, et n' offrent ni CilÍmes convertes de :neiges
perpétuelles , ni volcans. M. d'Eschwége a
donné la description 'des hautes chatnes de MiJ- .I

nas-Geraes (1 ) , et M. de Humboldt a expliqué


la connexion des cha1nes de montagnes de
1'Amérique espagnole et de l'1\mérique portu-
gaise (2}. . .
. Les régions de 1'Amérique méridi.onale dé-
pourvues de bois nc se ressemblent que , par
la natqre animée , et se distinguent surtout
des steppes de l'ancien monde parcecqu:e l~urs .
divers peuples primitifs, au temps de la déc0U"
.verte par les Européen~, étaiel!t .au degré le.
plus bas de la civilisatim'l, rre ·vivant que de la

(1 ) Joumal ~em Bras{lieT,..


(2) royag,e au:r: régions équinor:ciales du ,nozweau conti- •
ne1~t,tom. li, pag. x55.

..
VOY.AGE

chasse, tandi~ que ceux de l'ancien IXJ,ond('}_


étaient rioiJilades, état qui n'a nullement existê
eu Amérique. .
Étant parti'" de la fazenda de· Ilha, j'a,rrivai
au bout d'tme legoa et demie de marche aú
quartel geral de V aldo sur les limites de laca,--,
pitainerie de Minas Ger~es; on traverse des·
plaines convertes de hautes herbes desséchées,
eí ou l'on aperçoit çà edà des -arhres isolés que
le vent tient trl~s.,..bas , et des bouquets de boi~
épars. Je vis plusieurs oisea{lx nouveaux, en-.
tre autres le rnoucherolle à longue queue four...,
chue (1), qu.i vole tres-mal à c~use de ses lon.,
I
gues ' réctnces treS;jln.commo des., et 'd'aut11es
o I o

especes du meme genre.


I A

J'atteignis Val<i> à, la lueur des éclairs : c'e~t


liDe chétive maison enterre, babitée par une
fourrier et d-eux·soldats que l'enseigne ~Qmman"''
dant 1u poste ~' Arrjlyal d? R~o-Pardo y;env.oie.
Ik sopt charges, pour prevenu: la contn~:bande; .
de vi~iter to}'l.s les voyage ·,rs q{Ii arrivelit' e' gu.i
'•
partent, et en ce móment de chan9er les espe~
1
çes es pagnoles contre les po~tugais~., opératiion
à laqr elle le gouvernement g3:gne, Quoique

( 1) fusçicapa tyrarmus , L.,


.o '
,AU BRÉSIL.
çette ni~ison né noqs rq.h pas même à,l'abri de
la plnie, je me décidai à y passer quelque temps,
afiri çle bien coima1tre les campos geraes.
On était à !la fin de la saison eles pluies lors-
que je m' établis dans cet endroit : la séche- -
cheressê était déj à assez considé,rable et accorrí..
pagnée de beaucoup de vent; on .éprouvait, ai-
ternativem'ent eles orages violens et de · _petites
ónGlées de piuie. La températur;e était ru<le ,
fi·oide· et désagréable pour nous, qui durant
notre séjolilr le long de la côte avion.s été accou-
tmmés à un climat tout différent. L e n1atin, par
ún teínps de· lt>rouillard, le th.ermometre de
Réaumur se tenaità I4 deg1·és; par un temps sec
acciompagné de qudques rayons Gl.e soleil, Óu
bien par nn temps · cou.vert et venteu.x, il se
tenait en hiv·e r .à 19 degrés et cl.eini. Cette teJ.n-
perature
1' ·et ' l'ab sence 'tota1e d e n.1oustJ.ques
. nous
rappelaie1:1t' vivement notre ·patrie. Elle nous
obligea enmê:n1e temps de changer de vêtemens.
Nous' reeomrâmes milssi que nous' poNvi0ns y
shpporter un fol't exercice, et en·conséquence ~

nolils entreprhnes des courses de t0us les côtés


dans ce pays solitaire et agreste .
. Nous trouvâ~T!.es sur la partie de ;ces campos
geraes q.ui confine avec le sertam de Bahia
\

VO:YAGE
des fazendas isolées et situées à. de gTan·d_es dis-
tances l~s unes des âl1l.tres; on y cultive le mais
et d'ál1l.~res végétaux ; mais l'éd,ncation du bé-
- tail fo~me toujours la branche principale d'in-
dustrie, q~oique le nombre des _bête·s à carnes
de ces .cant~ns "ne soit nullement comparable à
~elui qHi .se 1irouve dans les llanos ( 1 ). L~s V'a-
ohes ne do:nnen~ qu~ pel\1. de lait à cause de la'
sécheresse des pât:urages ., de SQ)rte que :nous
avio:ns beaucoup de peine.à nbus rrocurer pour
de fargent cett:e boisson· si ~gréable · pour un
AHemá:nd. On-éleve i.€i! un Wiind n linnbre ·d e.
;1 chevau11., et les ha'l\útans ne s0:f:tentde ehez eux
qu'à cheval: :i1 est tres-raFe de voir _quelqu'uR
1

alleri à pi~d. t.es vaqueiros 'SQI;lt gémérale-


merrt vêtus en cuir. Les femmes , I
p0rtent des
chapeaux de feutre :rwir , et sont aussi habi-
_tuée'f que .les lr.tommes ~ aller à eh~v~~· Poilr
ren1re les peaux ~e cerfs bien soUtpl~s , ·on les
frottie avec de la ce~vel'le de b_reuf qu nd elles
' ' taímees;
ont çte ~ d1e' l'A men~
' - Iessa'fl:v~ges ' . e sep-
tentrio:nale emploient le même )rocédé p0m
' I l -'~ .\ 0
pre ~arer es pealil:x llleS am~au;x. · n conv1ent
'· .

'' ' \ \\ ~-
( 1) Humboldt'. 17o!)'age au noupeau contlnw~t, tom. li,
chap 1 xvn. '. ' :~,
~' '
' il \

·~· '"'
-'

AU 1HlÉSIL.
d.ans le sertam que ' les peaux passées de cette
maniere sont tn3s-souples, mais oi1 prétend
qu' elles ne se soutiennent pas plus_d'un an, et po:u r
les rendre plus dlirables , on les frl9tte d' abo.vd
;~.veG du suif, 'et ensuite avec de la cervelle.
, Le commerce de Minas avec Bahia se fait
ici par difierentes routes. De grandes tropas· de
~oixante à qL~;atre-vingts mulets et même plus
wont et viennent sans cesse pour transporter
les marchandises , su1'tout le sel dont on man- ,
que· elans Minas. Qn (lécharge les mulets à
v alo pour subir· la visite, puis on suit orelinai-
. rement la route le Jol!g eln Rio-Gavião. La vu.e
d' une ele ces·tropas est [ntéressante. Sept mulets
- composent UI! lCJt qu'unhomme.conduit, charge
· et soigne. Le premiet âne de la tropa a uh har- .
nois batiolé et garni de nombreux grelots. Le
mattr·e de la tropa est en avant à cheval ayec
qlielques-uns de ses assnciés ou de ses 'aides;
tous ·sont arnités ele l01ilgHes épées .e t v.êtu.s de ·
bottes de cuir brl!l!nqui montent tres-haut. Leur
tête est converte d'mi chapeau ele {elil:tre g,ris
blàrrc . Ces tropas inter:rompeht quelquefQis
la triste unifonr.tirté de ces cam.pos.
On rencontre peu de créa'tqres humÇ~ines el~ms
cette région; en revanche ~a . grande qtlan~ité de
ro8 VúYAGE
. bêtes sauvages et de végétaux fait bien vite ou-
blier ses grossiers habitans. La nature de, ces.
campos gera~s differe tant de ~elle de Ja I~é­
gion inférieure de la côte maritimr, que le .Í1atu-;.
r"alist~ y trouve ~ s~o~cuper lon&-t~mps qúand ·
il y emploie le loisir n~cessaire. Plusieurs oh- ·
jets curieux étant épars ne se rencontraient
qu'áccidenteHement;
.
ainsi on ne peut les Írou- .
ver que peli à peu : quant _aux vaqueiros; hmnmes
agrestes' indolens et uniquement occu pés du
·~oin de leurs 'bestiaux', on ne peut attendre
I ' '
aucune mde de leur part. Ce n est qu a;.vec peme
• . I ;

1
qu'pn parvie~t en ~e,s payant bien à les fai~e
all~r à la chasse. Eloignés de toute, r>rétention ·au. .
r
tiwe d'hommes instruits ils regardent l'étude de
1

l'hiptoire naturelle et les . trav;flUX qui l'accom,..


pq~nent eomrde une occ-.'lpationnia~~ etpué~·ile.
Je m'ai ohtenu ici\qile ceque j~ me srlis procmé
I 1· ~\ •
' pan mes ' effot ts . et par la cpasse; c' ~st pour-

. q uoi' mes· cbasseurs e'taient


'\
·c~nstamme)\l t oc~
~
éupés. · · _
l.~e , nomhre des qua(hmpede,\ est ici nioins
co11sidérable que dans IJ~. forêts inférieures.
C~pendant on rencontre dans\Minas:';Geraes une .
esp1~ce de cerf que l'on ·nomme ve6~clo' cam-
·.,. ,' '\' \
.
.
''\i
X
AU BRÉSIL.
pàro (1); c'est probablement le ceif du Mexi-
que (2) des nat~ralistes ·, qui devient aussi gro.~
que notre chevreuil , dont le bois a trois ari-
douillers; qui a úne queue, et dont le pelage est
' r .. .•
bnm rouge. Ces animaux prêferent les plaines
imes aux forêts, et s'enfuient en faisant des b~n9-s
prodigieux quand ils aperçoivent un ennem!.
·n est difficile de les tuer, il faut"surtout faire
attention au côté d' oi.1 v~ent le yent si I'on veut
ies ~irer avec succes. On tire parti de la chait
et' de la peau de cet animal.
Si l'on 1 s'e!lfonce davantage dans le campo;,
jusqu'aux sources du Rio-SaB.-Francisco, l'on
1ifouve surtout dm;s I~ Serra-da~Canastra et dans
d'autres grandes 'forêts la grande e~pece de cerf ·
dont le bois a cinq dents et plus à cbaque cl~­
vision, et que l'·o n nomm~ ici veado gallzero
ou cucuapara; elle est vraiseinblablement iden-
tique avec la guazupucu .d'Azara. Le veado ma-
teiro et le c:ittingeiro (3) vivent d~ns les· fo1~êts ·

(1) Le guazati d'Azara. Le :rriataconi qu e M. de Hum-


boldt a vu dans les llanos de Calabozo appartient sans doutt
aussi à cette espece. Azara parle d'tme variété b!auche de,
ce cerf.
( 11)_ Cer~Jus me:r:icanus.
(5) Guazupita ou guazu bira .u' Azara .

o
VOYAGE ;. I
des vallées; on les chasse l'u.n i'autrê avec'tie&et
chiens, ej: 011 'e n tire le mêú:1e parti qué de!§
autres especes. On raconte que le grand ·ce11f,
. mais je n'ai pas été té.tnbin du fait, lorsqu'il a
été blessé, se pr~eipite sur les chasseurs ; c' est
ce que font souvent aussi les cerfs d'Europe ·
qnand ils sont en nít. Cependant ' on n'aecoiJcle
pas ici aux animanx; du Brésille degré d'intel-
ligence qui est attribué aux ee'rfs d'Eutope dans
un ouvrage publié récemment (I) ; on prétend
·que lorsqu'ils sont blessés ils saven:t trou;vér de~
herhes sa]utaires et les mette:nt sur leurs bles--
1; sures. Il est difficile .que nos. thasseurs d' Alie:_
m~tgne aient jamai~ ~bserv& . ·une i1gelligenêe si
mo~rquée ou ·un instinct si judi!i!ieux chez les
bê tes fauves .
1

. ' . L~ ~uara ou lobo (2) hab~te .aJ ec le·s êerts


Jes reg10ns ouvertes. Il paralt et~ COI1lrnutl .
suf toute la surface de 11Amérique 1néridiobale
- 1

dé:pouillée de forêts. \Cest :wourqu.oi ~l. Cuvier


. 1:\ comme
I' a r.e~ar d,e avec raiS0f1' \ ]e cam~ . mext-'
..
carzus. Cependant il sera~t pev -être plUs COii" - I

~ - . I • ',, \

(1) Voyez .Eschwége·, Joumal -Aon B1'asilien ; pag. :.oa


à la note. .~ 11
•\
(;z:) A.gua1,·a guazu d'Azara ,~ :1 ~~ •

\ \ I
' ' AU ;BRÉSIL: I 1"1

veNahlé de le nommer d'apres son habitude de


vivre dans les forêts qui le . caraçtérise parfai-
tement. On l'a aussi appelé ursus cancrivorus;
mais il n' a úén de CO!Jlmun avec les ours -: cette
clénominatiori convientau _contrair~ à plt;ts juste
titre au raton ( 1) de l' Amérique méridionale ;
dans le .voisinage ·de la côte orientale , il J1a-
bit@ les buissons de mangliers, et y est connu
sous le norh. de guassini ( 2 ). Le guara ou loup
rouge n' est pas rare à Valo' et plus C0mmun
encore quand on s'approche davantage de M~-
. nas. Tous les habitans m'ont u:rianimeme:nt a~­
smé qu'il n' aitaque jam~Ís .les aninaaux viy,ans.
j Les forêts et les bois, surtoutdans les-vallées.,
_s ont habitéés par le guariba no ir (3), qui est pro-
bablement le caraya d' A~ara. C' est une rareté
particuliere à c e cantou. Le m~He ale pelage Doi r
foncé, ~- poils tres-longs; la femelle au contraim
est gris jaunâtre pâle; différencé remarquable
qui se voit rarement parmi les singes. On - fait
vivêment la chasse au mâle à cause de· sa belle
i '

fourrure,.noire qui sert· de couverture pour Jes

(1) Lotar ou procyon.


( 2) l'rononcez gua:r:ifjim.
(5) ltlycetes.


l:i! VOYAGB
selle!), c;est pourqu~i la f~rp.elle es~beáúcbüp
_plus cpmmune. 'Cette espece para h se disting.u€i'
dÚ mycetes - belzebul surtout par la différenc~.
de couleur des deux sexes, çar chez toutes dé'ux
là fem,elle ·est d'un ncàr brun. Ces singes, ne vi-
vant que dans les catingas, ne peuvent pas être
considérés proprement .c mmnê animam;; des,
campos. En revanche ces p'laines ouvertes ré-:-
elament à bon droit le grand tamanoir ( l) o~
tmnandt~a bandeira, cavallo qes B~ésiliens, que.
ron y rencontre fréquemmertt. La grande quaiJ::-
tité denids de t~rmites, tellementrépanduspar-
tout en terLFes aplatis dans -le \, ~ampo qu'ils ne
, I
sont éloignés les uns des autres que · de dix à
vingt pas , offre une nourriture ãbondante _à
cet1 animal; il creuse avec ses ongles lon.gs ec
recourbés un trou dans ces nids; les petite~
ch ouettes s' en serv;ent ensmte . po ·1 y _d..epose:t;:
1
'
' I
lêurs ceufs. 1 \

]larmi les nouvelles productions d~~l nature


'
qu) JC . tli'o~vm. pour I.~ , premie-r_
\. ' e 10IS,
E • l'.tl{na
" ou:
na~ du, qm porte auss1 le nom de touyou (12 ), ne'
fut pas le moins intéressaJ,t. C \ grand oisea~ ~.

'I
( 1) My rmecophaga jub ata , I ..
(~) Rltea americana .


'-
AtJ BRÉSIL: u3
qui est l'autruche de Í'Ámériqü~, est ti:es-com-
mun dans les campos getaes,, ou on le chasse
rarément. Une femelle,ayeç quatorze petits qui
étaient é elos depuis· síx mqis ' vivait tranquil-
lement dans le voisinage de V alo. Pers~:m~e ·
· ne l'inquiétait: il ' fallait que des Eutopéens
avides arrivassent polir troubler son repos et
attenterà sâvie. Cetoiseau, étant défiant et tres-
fin, évente la présence .des chasseurúnême tres-
éloignés; il fàtrt · donc use r de bea ucoúp de
préeauticin pours'~nempat·er. Ala courseil fat~­
gue un cheval parce qu'il s'enfuitnon en suivant '
une ligne droite ; ma~s en faisant de nombreux
détours. Quand le nandu, avec sesquatorze pe~ \
tits qui avaient atteint' plu'S de la moitié de leur
grosseur, se 'montra pour la premiere fois~ apres
que · nous l'avions vainement attendu depuis
plusiéurs jours ' trais de wes 'ch~sseurs se ini..:.
rent at~ssitôt en embuscade et on póursu~vit les
nandus de leur côté ; mais les oiseaux fur~nt '
aussi fins qu:eux et ne se laisserent p1:1s trom..:
per. Le hasa:rd amena dans cet instant, un v,a-
que'iro à cheval et bien armé qui résol~J t 'aus-
sitôt d' attraper les nandus ; il commença par
suivre lentement la troupe, puis courut au grand
galo.p , et par diverses attaques il réussit à tuer
• ' ! \.

· UI. 8
'VQYAGJ);
...
un de§ petits t:;ll ~ilt1ti3rnt avec pl~o~nptÍt'qde à h~
çle sçm cqev<Ü·.· Up coup bie.n dirigé aveG çlu
gros p.lon~.b, abat\it le plus gro~ de çe& oiseat;t!Ç.
No'f!S re~10uvelâmes fréquemm~mt CliJttl~ esp.ec~
' de cha,sse, et -qn dç ~nes chass~unh vers I~qu.el_
OP.. avait faitallertrqis nªqçlus,, ep. tva u.n vieq11;:
c' é~"!it l-1P.e fGil!ell~ ; ç]Je !l!v~j.t quatr:e pieds ánq
po.~ces de longlJ.e-qr d~plli~ ]~ p'o~nte du bec iu&<-
·qu.,,~ ]', çxtreJAI~(j;
. ' . , d e l,a <J,uev.e~
. e li sept pH~
. ds d' e~. .
vergare; el~e pesai1 GÍJlq:t~aqte~si'lf l~vres ~t qe-
~ie. J~ trouvai cla11~ ~;!).· e~tomac. de petits.coç'o~
e.t d' ~utres fr~vts. tr-es-çl,lJ.rs, 1 e t t:o.utes sortes
11
(!.'~~rb~s, des re~te,s de ,ser;p,ens~ d,e sa,vtere1les, 1#-
g'a;u tres: insgctçs. La. cha.ix dq, llllJ.P.du a 1lcl). fq...,.
n~et u);l pçu d,és;;tgré~l~ , ~' tl,e" 1\e, i;im11g1e pl\s ~
6~ dit qu' elle engra:issç pç~uco-qp les cb.ie.us~
Qnt emplqie çl,~n~ . çe~ G:a;:Q\.9ns s.~ :g, at1. passé.e. ~t
1
teiyte .en.noi~ à .faiÇ,~ q~s ~vê,tres ~r· ~~~.q?ell~s·
on vmt . ep.c9r~ Pf. phç_e. dQs ~lUI;Ile ·• Qll fa?tt
de:r bourses ave,<; 1 lª)q:pgqe'l Beaq. d .' co;Q<; les
. re1~s coupés par ' lG rniJ.l,e~, s,erye~t d,e ~.. ~}llS· qy
de pttes, et ~ep .plm;g_ers, d, eyen a1l~·· . _
-ke ç~rÍG!U~ ( ~),, ~Jl~t:<t c(?,eap. ,e_~..-~romp,t ~ ·~~
=-~ . I

(r) Dicolop!ws eristatus', lilligÚ . 'Palam.J'dea éristata , L. r


Çafiama_, l.\farcgraf ~ paJ!'l. 8'1, Azara, para ~~ · ~oir! iilé'o/kV t@
- ~ .
\.'
'/
AU BRÉSIL. u5
càurse, est le compagnon constant du nandu
dans les camp9s §eraes. Nous entendions re-
tentir çl.e t?us les côtés sa ' voix sol'iore ; elle
çonsiste en plusieurs tons répétés à 'peu de'
tew.ps les iliÍs des autres, depuis le plus haut
jusqu'au plus bas. No:us:apero.evio:ns souvent eet
oiseau défiant se prornener par couples comme
les dindons , mais nous ne parvenions jamais à
le tuer. J;ava:is .vaineJnent essayé pendant long-
tcmps éette chasse au :fusil; enfiú un jour un
plantem; des environs, qui était monté snr une
jument gris pommelé ' tn~s-vive, m'ayant ~·en..:,
contré et ayant appris cqtnbien je désirais vive-
1i1ent d' obtenir un de ces oiseaux , me prornit
de me f~tire voir comment il fallait s'y prendre
pour les att:raper. Il trotta à travers fherbe se.-
che vers I'endroít oh l' pn en'liendait )~ voix des
ceriemas, et des qu'il les 'aperçut' il mit sa ju,-
inent au grand trot. Illes poursuivit ainsi sans
1
se 1at1gner
1'. • a' ttavers des coll"mes. en pen~e'
douce et devastes plaines, et_s'attacha surtqnt
à enipêcher l'oiseau, qui courait _avec vitcsse,
)

)eune individu, d'apres la cou'l eur qu'il donne à l'iris


au bec: car !e premier, cliez les vieux: oiseaux:, est touj otlt~
hlanc .de per! e, et le dernier toue-e de carmiu.
:h6 ·VOYAGE
. '

d' entrer dans .les bois. Restés dans nos mai--


sons, nons suivtmes·avec des t !'! gards impatiens
le vac1úei:ro trottant sans relâche, j usqn'à c e qn'ü
e t\t lass~ le ceriema. Alots l'oiseau se mit à
vdler à une distanee de trois eents · pas au-des~ ·
sus de la terre; ·.mais ses ailes faibles lui ·i·~fu~ .
sent bientôt leur service, et le p'has'Seur es~ ,
sur de sa proie ; l'oiseau se . juche sur un ar_..
hre peu élevé, ou bieli s.' étend à. terre; dans le:
premie r cas, on lui,tire un ,coup de fusil ,-daris.
le seeond on le prend tout vif.' Notre vaque'i:ro
y parvint, il descéndit de chttv~l , et à notre
1J
1 grande j.oie nous apporta ~ivant un beau
\ '·! } I
cenmna.
I '
. Çet oiseau intéressant ( 1) senll'>ble être pour
(
l'Ar~rique ée q~e le secrétaire (~') 'est pou~~
l' A fnque. Tons deux se resse1~bl~I~t ~eaucoup , ·.
par leur forme et par leu r mamere Cfe vivre. Le
' '
~er\t~ma se· d'1stm~
'· ue p~r ~ne touu:
1
1 m l
--~ p umes
d!.
etrmtes et allongees q)n reg11ent depms les na-
. ' o ' ' \ ' I d
riU((S 1usqu aux yeux; s0n eon est couv~;;rt ·e .
\...

.\

\
(r) On en trouve la mei!Íeure 1gure ifuns le tom. Xrii'.
des Annales du muséum d'histoire ,"eaturelle de Paris i c.e-
pendant elle n 'est pas extrêmement fidele.
I \
(il) Gypogeranus Q.fricanus..
I ~ '
AlJ BP..ÉSIL. ll7
longues et helles plumes qu'il redress~ à la IlJ.Çl-
niere du hérond'Europe_, sonbec est d'un roljge
de carmin. Ses ailes SQnt conrtes et faibles, mais
ses longues jambes sont d' autant mieux appro-
priées à la CQ~rse. Sa chair, dont le goút res-
semble à celle de la poule, est tres-recherchée;
mais ce n' cst pas ce c1uilnifait faire la chasse. Mes
I '
cbassenrs, c1ui poursuivaient cet oiseau avec une
ardeur particuliere , en trouv~rent à la fin de
février un nid sur un petit arbre .du campo. ll
était en petites branches d'arbres, et enduit en
terre. ll coritenait deux petits. V oulant pren-'-
dre le pere et la roere ' les chass~urs . se cache-
~ent dans I~ voisinage de l'arbre; mais les oi-
seaux défians ne se laisser~nt pas tr.omper.
Les campos du Brésil intérienr ont beau-
coup a'autres bea'ux qiseaux, entre autres le
granel toucan (1) , une grande quantité d'oi-
.seaux mouches , di verses especes ele tangaras,
et plusieurs ~utres encore ·inconnus eles natu-
ralistes , par exemple le piam piam ( 2 ), l'oiseau

~ ~) Ral!lpi'l(Lstqs to.co, L.
(2) Coruus cyan.oleucus. Longuen.r, treize pouces cinq
l.ignes; envergure des ailes, viugt-deux }Jouces quatre ligues.
Sur le fron.t, tou:ffe . de plumes étroi tes , longues d ~ n ~ uf
li~nes et de mie 1 recourbées llU arri ere 1 et ·bieu d.ist\nctes de
·-

VOYAGE
1nouéhe eoPBl~ (1), l'oiseau mo·uche à collier

toutes celles du som me~ ,de la i'ête. Tête~ et poitrine uoires;


- beaux refl'ets il'indigo ble'u pâle sur le haut du co:u et sur
les ci>lés : côtés d-u ba·s d-u cou, dos, bas du dos, ailes et
lnoitié supérieure de la .queue du plu.s beau hleu d'indigo ;
poitrine et tontes les panies infériem;es et extrémilés de l~
~ueue, ·blanc c(e neige.

(1) T1:oçhilas cqrl}utus, un des órnemens. de ce joli gem:e,


l.-ongqeur du mâl e, q,ualre JlOuces cinq li~nes; envergur~
~es ;~iles, quatre _pouces cinq à six !ignes; béc droit~ lo1r~ de
$ÍX ligue.& et de mie; queue longue ~ étroite, cuuéiforme •
il,C ll!Ilinée; Jes _deux plumes du rnil~eu ~lus longues de
1
j trois l1g~~s que les p}us voisines, ceÜ~s-ci plus longues d ~
1l~it l ligpes et demie que. lês ~uivanles. Somme~ de la tête
et fafe COUV€TIS de pJu!D ~S To ides d'un b,eau bleu foncé cba,
toyant, lo~gues d e qtiatre ligues 'au..,.d essus de chaque rei!,
jlt forman~ a\nsi de chaque côlé de la têle uue huppe poin-,
~ue ià rtflet violet, rouge de feu et yert; ns5e ~ u so.mmet
de 1~/ tête bl~n fon cé , à refl:et vert bleu, bleu ~ 'acier, azur.,
et oulre-mer
I
: mento11,
. (
·gosier, cô tés de la tête
, .
). usqu'aux

1ar-éilles, bleu _no ir fon e~ 1 m ~ i s cou_verts de p~u ;\es ~on cba-


toyantes, qm snr le mt!Jeu y u g oine~ont pres de, s1x pou ces
pe Jou gue11r, et y foFmenl un e barbe poü~tue \omban~
sur 'fes plumes .bl <m c ile Jait du bas du ) ou, dont~ cou-
,
leur reh ansse leur tei nte. Toul le dessous dn cou et toutes
ies- ~a rti es infér i e~nes etla qneue 1 blanc cl Xlait; côtés de Ia
poilflne ver! c'uiv l'é; ile rriere ·de la ,tête etloutes les parties
sup1·r iemes Cil'<un vert cqivré brillant ile~êmc que les
1
:recthces inté'ri eures et •extérieures, · et les ~le ux _longues ,
'Rlu1n_es du rJ:!iHe\l qe la ·queuç. 1!es deux h,1p~~s dtt deva~~
. 1 . ~ . ~ .
Ilg
1 v-ialet ( Ü, le mer'lé jaune fe:rilgdtre (!Z), cl;nt le
:ni>d ést artistel:hênt cdhsttuit en terr~, et q~e par
ao
C€1ié" taistl~ le's Bi'é silíens tróBJ.:ITienijo de barro'
l-a ftit:tgtlle à qttt:ue àcmniri.ée ndife (3') ~ et la

de ia tê te consistent chacune en six plumes plus grandes,


placé'es lés ünes devant les aú(res; !eur pointe est vert doré,
-le milieli ~loié, e·~ là rãcine 'rouge cuLvré. }'ai décrit ce
nóuvel oiseau iliouche un peu en cl'étail, pa.rce qtúl es1
tres-beau. ~

( 1) 'J'rocltilas pelasophoras. Longueur, quatre pouces clix'


ligues et demie~ ; en·v'ergure des ~iles, six pouces huit ligues;
bec tFeS-j')eU courbé ;• queue arrond>ie, à pJ.umes l'arges et
fortes; teutle pJtumage d'un beau vert d·o~é .b rHhrnt'; plumes
de la r1ueue à ex;Crémi~é blelt foncé· ,. ,à I'eflets vi·o-Iets : .gorge
' 'erte, à reflets de ~eintes d'íverses : d•essous· du cou ,· poitri.ué
et ventve sitp.lrieur vert, à reflets bleus· ;. Veütni' mêlé d'un~
peH de b1auchât!Íe; raie!!' à Feflets hleu fonoé clepuis !e coin
du b~c- j1usqu'à l'oreil!'e, et ensuité ju!lqu'à la nuq'ue. Der-
Fiere h'o·reiHe, huppe de ph1•a1es Iarges, ar·rond'ies, i'ert.nes,,
à· édats m'étalÍiiqu•es•,. à . reflets· bri'llans d'un· ro\lge violet:
elle es-t ~ntecrrompue à la·nuque; C1l0upion et dessous de 'la
~ue·ue··hlano. ,
(2) Tudllts·· fitf'úlas d'tí l\Íusée c.te ' B'etlin.
quatr~ pouces six: ligues ;
(5) Frmg'illa' Ol:nata . Longueur,
envérguré' des ailes, six: po.uces onze ligues et .demie. Sur
J'e s"Ommet de la tête, huppe de plumes étroites, hautes de
plus de huit ligues, un peu recourbées· en ar~iere : él!e's
s<int noires, de même 'que }e tour ·au bec, le · me1Úon, la
gorge, le nli'Jieu dn bas du cou, de la poitrine et · thí
7
J

129 VOYAGE
çhouette du campo(l) qui place,s.on nid à tmTe '
Çlans les cabanes des termites.. Le grand toucan,
dontles mineiros ~mploientsouvent le bec x;ouge
~t colossal pour se faire des poires à pol,ldre ,, ,
se trouve principalement dans les endroits. ou
il y a des plant[t~~ns. d;e goyávier~ .voisines des.
:Ql~isons ;. m9is il est ~re~ qifficilv à a,ttra.p<;r. ·
Je trouvai à Valo un sous.,-officier qui était
u» peu instruit et qui me donna beauooup de

~.

ventte. Côtés de la t~te et de la poitrine blancs; côtés da


LOU ~t de toutes les parties supérie~~~s , de même que le
I} ventre et le croupion, jaune ro.ugeâtre pâle ; derriere de.
' la t\~te et nuque gris blanchâtre; toutes les _parties supé-
rieu res g:r'is cendr.é; couvevtures des aile.s et de Ia queue
blanches, .Jes premihes mêlées de gris cen'd,ré clair : racines
de 111qu;1.trieme et de la cinquieme rectdce blanches, é:e qui
prod1uit tine tache blanche sur' l'aile : mo.itié\ upérieure de
~a q ueue blanche; les deux pennes d u milieu' nresq ue en ti e-.
retm mt gris br~n, les, autres avéc la moitié de,, l'extrémité
1

~1oirfs, et une petite Faie noire en des.sus. Fe~lle d'une


1
cou'1\mr un11orme
.c m êJ ee
,'' d e gHs,
I • . d e wunatre
-1\ '
et d e b run à tre ~
f'
elle a ·pas de huppe; queJ~ blan.c~e à 1<;~,. racine; ~
(1) Stri."C cunicularia, Peq,uen de MoJ.jna, Histoil:e nq.-
turelle du Chili, p. !2.43. Ul1Jcurea, Azad , Voyage~ , etc. '·
ll?m· III, pag. H5. Ces chouelles out trés:comm.unes dans.
le c1ampo geral : el!es nichent dans les terriers que les.
lalo9s et d'au\res anintaux on~ c,x~;usés dau'~ les n,ids d.es,
. f ourtn is. \ ~
'. . '\ \ ~~-

I
I·,

AU BRÉSI~. 1-2r
~ .
détails sur sa patrie. ·ll était un des de'u~
soldats qui avaient accompagné M. Mawe dan s
son, voyageJ à Tejuco. Bórné uniquement à sa
société, je passai 'h uit jours à.Valo par un ténps
.rude et désagréable, mais bientôt le ciel s' éclair-
cit, le thérmometre monta beauco~p f et la cha...·
leur dev}nt tr~s -forte. A midi le •t hermometre
' ,de RéaU:mur au soleil s'élevait ·en qúelques mi-
nutes à 3o degrés et demi, et à l'ombré, dans
une maison ouverte et exposée ' au vent , il se
· tenait à ·w de-grés. La chaleur ,était. d'autant
plqs accablante , q1:1e par l'-absence tqtale de
forêts et d' ar.bre~ on restait toute la journée sans
;mcun abri ·.au delrors contre les . rayons du
$dleil. En pe!u de jours l'herbe et les plantes
1 devinrent comme brúlées, et les. mt1lets furent
' .
au dépom;vu pour se nom:rir. Lesnandus, qui'par
le mauvais temps s'é_taien,t r; rement montrés ;
part~rent fréqueJ!lment. J'obtins ·ainsi uíi troi-
sieme individu de CeS gros ' OÍseat'lX. Il étàit sÍ
lolll:d qu'uH -hóqune ne pouvait pas ·le . porter,
On passa une j~urn,ée entiere à r accom:tnoder
po"~J.r .s~rvir de nourritU:re à. tout mon monde~
Nos excursions de botani<Jlile nous fournirent
aussi u'n butin -assez considérable. Nous trou-
-y~mes :plqsieurs :plantes nouvelles, entre atltres

r
VOYAG:t
de jõlis mimosa tres -. bas , orp.és -de tout~
fçs de fleurs blanches et roses, et _. un autre ·à
flears écarlates. Mais je .fas trompé dans Ihoii
esgérance de rencontrer le seul des arbres du '
Br~sil ·qiii ressemble au sapin d'Eurepe, l'3:rà-u~
caúa, que ron rencontre dans Mina~-Geraes
ei dans d'autres parties élevées de l'intérietH·
du p~ys (1). Les arbrisseaux fleuri& du Can:i·po
étaient remplis. d'une quantité inriombrahle
de colibris et cl'oiseaux mouches. On a Ctl:'i
que ces jolis oiseaux ne se nourriss~ient <'j1le
du ' -miei eles fleurs ,· mais on a t·rouvé diafus
\\

,1:leu r es toma:c etes


'l restes .d'"mseotes~~ .

.A~yant p<\ssé quelques temps stw l~f'ronti!eFes


~e ~inas-Ge raes· , une indispos~tion prod&ite
par le climat ., et quj, aueait p1<1 d.eveni!r plus
sériruse si je l'avais négli~ée, m' 0bligea de re-·
\'. . , , \ ~
no:ncer a mon prOJ•et de penetrer dau~ e:e1lte pré~
\

vinqe. Des 1i.ncomm0d~tés ÍIJl.lsignifiadtes, ·s u r-r


~crut les blessures,'etnrême les mabd.ie\\Ie pea>líl
\ l" h \ ],
Iilrennent a1sem.ent ~ta11s ce lt 'llmatl c al~O' u11
• ' .J. \
, , I' \\
1na·~vais eaFactere si 0 •t l es· néglige·. Plusieurs
ha'h~~tans ·de ce canten , qui onti tf. aiUé à: oavrir
J:a rFn1te à travers· les f0Fêts. d~puis: Hheas ,
' \
AU BRÉSIL. '
portent e~1eore des mat!ques ét des cicatric'es de
plaies ou. . de maladies de peaU: tenaces qui se
sont en .partie 'guéries lentement', quelques-uns
m~mes ónt d~s plaies qui restent ouvertes ·de-:
puis ':de~x ans. La mauvaise nouáiture, qui. ·s~
cotnpose' en partie de viande salée;ne· contri-
bue pas peu à âigrir la lymphe, .effet . qui se
manifeste par d.es ulceres malins '( 1 ). On dit
aussi que le mélapge des différentes race:S
~'hommes dans cette région ' ou la population
se com pose d'urie réunio~ de blancs, de rouges
et .de neg.res ' a engendré plnsieurs ~~ladies
nouveUes ·que 1'on. nl:l connaissait pas du tout
auparavant ( 2 ).
. Quoique plusieu.rs lnaladies rende~lt les pays··
. 'Chaucls dangereu~, surtout pour les ét~angers,
· ;cependant il en. est plusieurs particulieres aux
~ones tempérées etftoides' clont 011 y souffre
pe~~coup ' moins; notamment les maux ele poi-
trine, la goutte et a~tres semblables. Le Brésil~ .
~'étendant ac l'équateur jusqu'au 23me degré
i,le latitude méd:dionale , -a une température

'~1) Sou,tl.J ey, Historr ef BPaz#, to~ . . 1·, pag. ;38.; e ~


f .ison , De JIIorbis, .
,(:V Southey, j.>~• 3~7.

,.
tres-rliverse. La partie ,qui est d~c·rite dans l ~
relation d~ .~on voyage Femporte ·sur les 1}~­
tres pour les av.antages du climat et clu sol .
. · Elle peut généralelll€nt .pa~ser po.:ur f~rtile ,
car dans 1~ ·plupart d.es provinces la ehaleur et
l'humj_clité- sont réunies en prop1Drtion convena·
' ble. Jies pay~ h~ut~ souffreni ·:Seuls du man-
q!le d' eau dans la saison sêche , mais le& fort~s
rosees compensem JUSqu a un cert.alll pomt cette.
f • • ,, J •• ..

·privation, sans ·pourtaiJ.t que ·I'on. 'puiss_e é viter


dans ce~ contrées lçs .sécheress~s qui enlêvent
. une gr:ande partie clu bétail. J?)u rant cette moi::-
l/ ti é de l'année il ne tombe 'pas de pl ui e ? la '
terrt se fend par la chalem: ~t le dessjchem,ent ·:
·l'on1n'éprouve pa~ beaucoup "de ., sgulagement·
· l~ ll1atin et le.soir, parce que le 'changeinen~
.. "'
~
d n jou.r à la nuit e;t d:e la uuit au jorir, qui cheÍ
nou \5 est si agréanle' pa.r sa fratche~r,~ s'effectue
i~i ~!n trop pén · ~e ·temps , Ié. jour\,et h nui·t
étant d'une dm;ée ~presque ég~le ; on ~de. lon7
· . •.r ·1\ I I\
gue~ nults f:I-.;\1 oruu~mr('!men ·IJ ~.OJUllle:P.cent u.n
. . \ \\
peu apres. sept lteúre·s. . \- . . . \ · • ,
D!ans les pays bas et uims, le lof g de la eote
du'~résil, la . saison de -la •\ écheresse est plus
agr~able, pa.r ce que l'air;~ Ies !. eaux e1l les hautes
forêts rafra1chissent l'air, et d~.~~ les.~ois froicl's.
I • ,.r~. \\,~(
. I

\
I ~-

. /
AU BRÉSIL.

la températm•e continue à être tres-douce. , Il


, n'y gele pas : jamais je n'y ai vu le thennometre
de RéaumJr au-dessoÚs de 13 d:·grés, et dan~
la saison ·chaude je ne l'ai . jamais .observé à
l'ombre beaucoup au-dessus de . qo degrés. Ce
qui produit pour toute l'année une temp.é rature
égale et déliéieuse, _qui dans la. saison f~oide
ressemhle un peu à oelle de no~ plus beaux
printemps, et pendant laquelle on trouve des
fleurs 'et des fruits. ·
Ce r/est·pa~ dans la saison froide, mais .c'est
à l'epoque de la cbaleur et de la sécheresse la
plu& .forte, que ]es orages les plus' vi~lens arri-
vent; alors I~ terre·. ahérée est hutnectée et
ranimée par des pluie's extrêmement fécondes.
kpres quelques seniaines d'une alternative de,
· plui-es abondantes et de fortes ehaleurs, Ies
plantes. ·desséchées du campo ou deJa contrée
haute •et' ouverte se relevent à vue . d'ceil, et
inêrne dans les provinces infé1:ieures et boisées
une vie nouvelle et plus 'active se ·manifeste dáns
le regne végétal. ll; plel.{t ordinaire~ent peh:_
da:pt les moi~ de février, mars·,. av_ril ,et mai ;
on dorme le nom de saison froide aux mois de
jlilin, jui1let; aoút et septembre; c'est pendal}t
les mois d'octobre , de novembre , décembre

/
, VOYAGE.
et janvier cru e regrte'la p1us grande .chaleur. A ti
reste, .ces _saisons di:fferent suivant les ·di.versel'
provim:es , et suivartt ffdelles so:uit plus septe~
trionales ma pllis JlH~tidionales : on a vu danS"
certaines années la pluie tombet à péine pe:ri~
dant six, seN'laines de suite , quelquef0is il 'pleutr
beaucoup ~lus Iong- temps : .tcrutefois 'O:n se
trqmpe ·beauc<Jtlp en ~·s'imagiúant qu~ du~an~.
tput ce t~mps ]a pluie tombe tous les joms sálil&>
diséontin.uer.
ÜJ,á a gé_n éralement en Entope lime idée asse~
inexacte de ces pays'·lointains~ 10n peut surtt>ut
f I en rejeter la faute sur certains voyageurs ;,CJl:ll

'· ne se ·s ont pas bornés à parler dé c~ qu'ils ont


I l. ' . .. . d
-f vu , et sur es ecnv:ams qm op t , 'Onne !!Les < es"',
' .J. d
criPitions , de pays· dans lesquels ·iJ s n' ont ja:tnai$
1
l.n~s le_pled . .C~s tableaux ,.·tracés ,dan,s le c-abi-
net ,; cmuposés sut un sujet · ~hG':i, i avee le.s
traifs les plus in1i€r:essans .t~r~s d' auteurs. GOI1....
; ' JJ f: .. sans. aRe. ne·con-
nus, et arran.o:es
• • 1ll .
ae ': anta1s1e
I .I \
naisrán~e de1 .la mati~~~ , peúvl:!nt plaire pa~
l'ag1i· énàentdu style et'I ~'maNieJ:e atttaya~1:~ doJ.1lt:
ils ~ont préseiité,s , mais ils R7o.B t , ucun~ va•l,<mt
.mtritilseqlie
" ' . . ' \ \
; car Ils son:t remp1i~ . de Ja}ltes.:
.

I. • I I I·

Con1!f€llt é v~ter. ' les. ~·rreuys e.~ .Jes Íl1~e:factiwdes


1
.
f{llapd ·o.,i1 l;l'.a· pas ~u. pr€sen\ áuN:, yê.p:x.· 11.ebjet
~ \ '

1\ ~ . J~
\
\

.';~

\\
Aú :SRÊSIL. t21
dont on veut retraoer l'image ? On applique à
l',~~semble éles traits :qu~ ne conviennent qu~à
ses diverses par.ties. Comn~ent peut-:..on, pav
exemple, supposer 'que toutes les parties d\1;11
pays aussi g~ancl que le Brésil se ressemblent;
puisque chaque province ofli'e quelque particu-
larité ,g istincti ve ? C' est ainsi qu' on trouve dans
plus d'un livre q~'au ·Brésil qn rencontre par-
tout eles fougeres arborescentes; en g:énéral on
exagere ~rop la beauté clu pays ; 011 parle de
siJ?-ges qui ..caépiettent et' qui ricanne11t; d'oi~
. seat}:1i: chantan~ qui bab~ll~nt; d'orangers qui
croissent dans les' f0rêts; d'agavés qui polilssent
s:~,1r les arbres.; dé toutes sortes ' de prop:iétés
a)lsurdes qn1 di~tmglilien1J les serpems·; oír faii
des tahle~u~ exagérés eles forêts : e:n' effet il eSit
ral'e de r€ncontrer r:énr.lis t0us.les ohj:ets ~gréa""
' blé ~t i~1.téressams de la maniere que l'itnag:ihe'- i

qn ,3!.J:.rlieur. assis dans · s0111 faute n:il, ap-res ··avojv


el;J;l:J.l>l'UJ:l·~é ses· desc11iptions a'\].x · v.pyageup a.e-
c,~U:tt:ul)l;és à J,!ep:ré_sentei; rles, d'1oses tr.op' ero I ·I

. h~a,\l-· /

\
VOYAr7E

'""""~~""""~lNW""'"'~""""'~{,..~'\I""'"lNW '
i ~ t.

C.HAPITRE XVlt. ~
., '

,VOYAGE DES FRONTIERES DE MINAS-GERAES A r


ARRAYAL DA ÇONQUIST~. >

Vareda. ~ 0 'ccupations éles vaqttciros. - Chasse clu jaguar . .r:


' t ' j I

-Arrayal da Conquista . - E xcu rs~on cliez les Camacanú


J:~boya . - Qbserv<itions sur - çett~...l ttib~ 'dcs hab~ta~s
inçligimcs •.. . _ · I ·
1/

F(6UR . aller du lieu oii no tis 'étio;_s à Bahia'


il f~mt trayerser d'une extrérnité à· l'autre la .
C!l pi ta~nerie dont cet~e ville ' est le ,9hp~-: , lieú: ; .•
1
en, ~. ont-équence je . pris la même . ro~ te par la- ,
ql(e,lie " j~ét:tis ven~ , ., et je sui vis' Ie·s · rives du
- ' . 1
RibeiiTao-da-Ressaque \jusqu'' Vareda \ en · des..: ·
~ n·•t. L a ch ~l eur. . et~It
een1.JI.a. '~' . ace~ . _~~ ~ :r;wus .
\ blante,
recher"ch1ons . avec d'·a utant pl-us d' êmpress'\ ment
1
· r

I'Olljtbre q:ue nous procuraient , e v1eu;x: mi-·'


mo~a à tiges r,ameuses ' e't\ blanches , et aux '
'reui.lles d'un beau vert d~licaterpent,,découpées.'
Des casses1, à cinies arrondié~ et c~argées de
\) ~ \ .,,
I / .. '\ \
~. ,,
·~ \\
,, ~· \\
'r \~
AU -BRÉSIL.

fleurs d'un. jaune foncé, nous embaumaient par


leurs émanations suaves. Je trouvai dans le
Ressaque un jàcaré mort; la présence ·de ce
reptile dans cet endroit prouve qu'il remonte
guelquefois tre~-haut dans les petits ruisseaux.
Les riids de termites étaient ~xtrêmement nom-
breux dans tons les endroits couverts et boi-
~és; ils se forment graduell~Jlient par l'addition
su~cessive de nouvelles buttes de terre ou nids,
qui finissent par former tm -édifice , la pluie
et les météores de l'air les aplatissant et leur
donnant la .forme surbaissée .q ui leur est prb:.._
pre. On peut se faire -en quelqJJ.e sorte une
idée dé leur quantité prodigieuse·, en songeant
à l' étendue immense du Brésil intérieur , ai:Qsi
qu'au nombre de ces petits aniinaux qui occu-
pent une de ces demeures, et en faisant réflexion
que l;on ne peut pas faire vingt pas ·sans ren-
contrer une de ces constructions. Azara parle
àe ces termites sous Ie nom de czpiy ( 1 ) . '
Arrivés pour la seconde fois à la fazenda de ••
V areqa, nous nous sommes occupés pendant
quelque temps à la chasse des oiseaux de ma-
récages, que l' on trouve rarement réunis- dans

(1) Voyages, ele., tom. C pag. 1go.


o
III. 9.
x3o
'.)
VOYAÇ-E
i

les mu,sées d'histoire naturelle cl'Europe en aussi


grand nombre qu'ils le sont ici. I,es spatules
coulem d(;! ros~ ( ~), les jabirus, les to.uyouyous,
les curicaça,~ ~ 'les ceriemas' l~s· (!aroes et beau-'
coup d'autres encare ~ivent en tn~s-bonne in-
. ]]'.1gence ~ vqnt par troupes d' un et,ang
te ' a' un
autre, et c}:laque genre se montre, d,ans cette
n;énageeie. natu~elle, sous les t,raits car'i\ct~ris­
tiques et o.r\gi nel~ que l~ natun:! lui a imprimés·.
;N_os. p<frties çle clp7se n'étaient ja,tnais. };l.eure~1ses
qpand eUes a.vaien~ po.ur <:Jbj~t h;s ceriemas et
les
·
cuácacas;
.,
en · revanche\ ··J·'ahtins
I •
q.ue1J;rues
'1 ·
o.iseaux j ~1sqn'à préseJ;J.tinc_om1ús eles naturi!listes.
'On· trohve . d1,11{~ les catingas de ce canton
1APx espeees de p~rroquets; l'une~st le papa-
ga,r .v~rdaçl.~ir9 (2) que l'on reçherche, le p~,u~
pour l;.l f~ç~lit~ avee la•1nelle ~~ apprend à par-
... I er,
1 ' ·m ·. . " ' h ., . r ' l'
a. Sl at' et. a C anter; J ai '~Üllll~le .al!l- ,
~r~ pszttq.eus, VlfZaC'e!f:S (5). V~rs 1~ s.9u: \Otttes

.. d61uoc :se retirem· ~ e po~s~ nt ge ··gt i}ds cr:1s,

(1) P/atàlea ajaja, L.


(2) .l"sittacus amazonicus, ~atham e t Kulil.
' \ . ..,
• (3) !VI. !e docte ur Kuhl, à qu,i j'<1i communiqué la des~
·cription de ce nouvea,u perroquet , • I' a publiée daus sÓÍI
Cpnspectus psittaco,rum , , lla,g. 717. ,

Ji. ·
AU BRESIL. •'
I. .

4ans la partie la plus élev€e de ·la for~t qu'ils •


ont une f0is choisie pom y passer la nuit. Le
voyageur n'a qu'à les y attendre, ou. les y aller
cher<::her ' pour êtr.e sur de faire une bonne
chasse.
Le vaFI:Heau ele Cayer..Lpe ( l) e&t tF~s-c.ommun
dans toutes ies prairies de ce can~on; i1 est, comme
1
la plupart de& oise~llX , tr es-farouch~. à la vue ele
l'homme ;, mais gn, l'ape;çoit , qui se pPo~ene ·
tranquillemeBt à ~erre · entre les bceufs qui pais,
.sent, 't<mdis que l~ 'loriot ét le car;ü:::;J.r,a plane ( 2)
sont paisi:blemeht perchés sm ~e elosde ces qua:-
. elrupedes. La surfa'ce des e<;~qx €,tait a11i1ilil€e: par
eles canarels ~t des plongeons ele elivenses es,pec0s,
parm~ l€squelles ele,ux se disting~Jai'çnt parJeur
plumage à beau~ ref).ets; l'une e_st l'aréré (3)
l'àU!tre a la têt~ r.Jüire ' c'estie c_at).).ard cl:Oini-
nÍcilÍll (4).

(1) Vimellus cayennensis.


(2) Palco crutoplzagus ou degen'f!r.
(3) Atzas fliduata, L.
(4) Anas dprni,nicaná, 1.. 11 esv rres·Thieu repr.ésenté dans
Jes P lanches enlu._minées de Buffou,, n° 8o8 Pt~· I!J t~ ouv~
aussi au Sénégal en Afrique, d;'ol\ on eu (). euvoyé en
·.·
Franre des individus absolumeut semblabH~s à ceux du
Bré~il.

·•.
VOYAGE
Lanature, anitl1ée, toujours .b elle, toujours ac-
~tive et variée offre ici un contraste frappant avec
la grande masse des habitans qui sont aussi gros-
siers etaussi igBorans que lebétaüauqueljls don-
nentleurs soins assidus, ét qui est l'uníque objet
de leurs pensées. On peut effectivementqualifier
les vaquei:v~s d' lzommes de c uir, car de la tê te
aux pieds ils en sont r"evêtus. Leur chapeau rond
de cnir leu r ' sert en cas de besoin d' assiette et
de gobelet; leur vêtement, que ·souvent ils ne
quittent p~s pendant"'long t~mps, ga~antit leLir
·c orps des a•rbrisseaux épineu~ qui .re1úplissent
ies sólitudes ou ils sont oblig~s de passer u~e
I
grf\nde partie de leur e:iistence IDOJ!Otone pour
gar;cler :let bétail et le prendre de la maniere
q:uf j'ai ~déerite plus haut : elle met tre~­
-quyn1ment 1eur vie en danger. lllco urentl).10ins·
1
d e' pen , "l a' s' emparer cles cl1evamx:. : on ras-
semble leurs "'t ro 1pes et on les pou~se dans le
co1,I·al. eleve
• ' pres
\ I de la faze p.da et en, '
·~ure de
"' '

piqux tre~-:forts. Qu d ils y som ()ntr 's , on


ex::,tm~ne ceux qui sont Blessés, 01=1 appriv0ise
les p~uláips , ·e t 1e cot·al est pa: ;tagé en cleux
cop1partunens . ' ~- Ies chevaux d es
po,n-r se,parel'
ba;!ufs.· Quand on veut · pr~ndre un eles pre'-
mi1ers , le vaqueiro, le laço ou lacet à la )Jlain,
. ~
~
. .' .
N
I '·

- ·.
AU BRÉSIL •
. s'avanfe au milieu de I'espace et fait courir les
chevam; en ·cercle autour de lui; le lacet est'
«l . \
une ongue C@UlTOie pourvue a une extrem1te
f • ,

d;u~ anneati de'_fer pae lequ.el · on fàit passer


l'autre extrémité; on tient le nceud bien ouvert
de la lnai:n droite., et le reste de la courroie
roulé régulierement de la main gauche; le. va:_
que"iro le fait tourner constamment au-dessus
de sa tête, et l'habitude l'a rendu si habile à
·cet exercice , qu'au milieu , d'une soixantaine
de chevaux serrés les uns contrc Ie·s autres, il
jette le lacet à la tête de celui: qu'il a dési-
.
gné. Aussitôt que 1e cheval se sent saisi, il re·
~

cule pour se débarrasser dtt lacet , mais plu-


sieurs personnes tombentsnr lui, l'empoignent, .
le garrottent €t le uenversent. Souvent le che-
val aàêté se montre tres-indocíle, il se leve sur
ses pieds de- derriere, se remue dans tous les
sens, rue à droite et à gauche, etc.; le nceud ·
coulànt qu'il a au cou , et qui le serre tou-
joúrs d'avantage, l'empêche de faire une lon-
·gue résistânee. n al·rive ·même fréquemment
que dans ces accasions ces animamf. se font
~ eauc~:mp de mal; je vis une jurnent tomher
1110rte sur la place; mais la grande qua:ntité
de chevaux dont on peut disposeáend une perte
VOYAGE

semblable péü sensible. Des que le jeune che-


.' val indompté est pris , on lui met à l'instant
.. tilie selle sur le dos, on Iui passe uh lnots qans
lâ houchtJ et un jetme i1egre le Jhbnte , lui ',
donne de l'éperon et des coups de fouet; puis
on lui rend la liberte, ·et bn le. fait tourner en
rond, ou bien il ·se redresse et rue ; mais l~ ·
· vaqQe'iro reste immobile, etfatJiguel'animal jus-..
-Ciu'à ce qu'il soit couvert de sueur et cede 'en
trernblant à la force. Les vaqueiros attachent un
püfllt d'honneur à dompter ainsi les chevaux
:farouches_,etils y sontextrêBJ.~ib.enthabiles_: quel- .
'I . qurfois ils y perdent la vie, accident qui n' af-
fecte pas beaucoup le propriétaire-leur mahre;
car.· ce n'est qu'un negre de moios, clo~lt 011 ne
. ne fait pas beaucou.p plus de cas sue du bé~
tai~. Lcs botas ou bonles clont 0 i fait usage
-r ' ~
dap~ les parnpas ~e Buenos-Ayres e.Ldans toute
la contrée voisine ( 1) emt beaucoup c ·e rapport
avec I e I aço; .on s' en \~~rt dêI1 meme peur pren-
A

dr\~ le hétail et tons les 'animaux sauvag~s, el1es


ont-été aussi employées avecava tage contre eles
' 1 ' \ \

(1) ' On en trouve . ]a - descri-ptio~ qans f.Histoire natu-


ral4e• des quadiupedes du Pamgua - ~ par Azara , et dans
\ . I. \1,
v lu sieurs autres ouvrages.
~ . ~ s
I.

AU BRÉSIL.
troupes d;ennemis ; máis ori h e les ·ci:mnah pais
dans le sertam.
Si ~es occupations des vaqu~'iros sont p'énibié~
et fatigantes' ils passent en revanche le resté dê
leur te;n1:>s dans l'oisiveté en gardant leurs t'rbu:
paux; ils dorment ou ~e reposknt toui:e Ià
journJe,. ·Martger et dor:m:ir sont let{rs uniques ·
di$tractions. Leu r nourriture est su:bstan tielle;
ils vivént de lait que l'on emi)loie soit pour la
consommation des hommes et desanimaux, soit
pour la Jabr:lcation eles fromages, .e t que l'on
ne vend jamais ; ils mangent aussi de . la fa-
rinha et de la viande seche. Voici ~omme on
prépare cette viand~; on ne sale pas la chair du
breuf, on la couf>~. enpeúts morceauxquel'onfait ' ·~

sécher au soleil sur des cuirs; en deux jours elle


acquiert une si grande soliclité qu'c1le devient
dure et soriore comrne de la carne ; Gette op.é -
ra~i0n exigequelquessoinspohr qu-el'ai~et leso-
leil pénetrent également clans ·toutes les parties.
Le produit de 1'éducation du bétail tlans Ie ..
..
sertam est considérable )· pax:ce qúe 1'on a un
exoellent débouché dans la câpitale ; cé11te res- (
,., ,
source manque· aux autres cai}ton,s de 1mte-
.
neur , "l óu' 11on' e'l'eve auss1. une quantlte
d u Bres1 I.
considérable de bestiaux; ~'est pourquoi i~'y ·est .'
..
..
t36 VOYAGE

à Êeaucoup :ineilleú.r marché. Sur les bords · du


Rio-San~Franciscó on achete un tres _;- gros
breuf pour z,ooo reis ( 12 fr. 6o c.); à Báhia au
çontraire ce mêrne animal\se paie g,ooo à 11 ,ooo
·- · ~eis (56 fr. z5 c~ à 68 fr. 7S eJ. Les prop~ié­
l
taires de c'e&. fazendas à béta:il ont coutum<;d'en-
voyer une ou deux fois l'an eles troupeaux de
hreufs (boiadas) ou de chevaux (cavalerias) à
la capitale, ou ils sevenclent tres-promptement.'
ll estfacile ele calculer l'importance du produit
de ·~e cmpmerce.,Supposons qu'u.ne boiaclà ne
soit composée que de /cent 1 itinquante à cent ·
\
'/ soixante têtes de bétail; le prix moyen cl'un
hrepf étant de 10,ooo reis, le i·ésultat de la
vente clu troupeau sera ~ peu pres ele 1o,ooo à
12,poo francs. Les chevaux sont ~ proportion
plu\s chers, ca'r un mauvais cheval, d'lnt on s'est
beaucour. servi, coüte rarementmoin~de 16,ooo
à 18,ooo reis ( 1bo fr. à 112 fr. 5o.·c. ). Il"est
j I ~
cl'a11tant plus avantage'ux d'é\ever clU:bétail dans
- , , que cetI e b ranchll~'
cet\;e contree e c e ·eco no-
. 1 ' 1 · , fj ·
IDI(j rura e s exp mte a ~eu 1.!1 ~ Ifais.
.J o~n n 'a ·
cl'autre avance inclispensable que :T achat eles es-
c1ayes; Ia nournture• d u· b~ ~tail ne conte nen
1
A •

soup ce climat chal}cl ou I'on :jouit cl'un été con-


Ün~el. n est toute 1'a~ln~e '\~1 ,~tôrage ; les
''\.
. .
'" . ,
~
~

~

\
"
AU BRÉSIL.
sécgeresses coútinues peuvent seules lui causer
du tort. Au reste les profits de I'éducation de~
bestiaux pourraient être bien plus Ímpórtans
da1~s ce pays, si les habítans ne tenaient pas
obstinément à leurs anci~nnes habitudes-, s'ils
s'occupaien t d' amélío~·ations ou s'ils cherchaien t
à connahre celles qui ont été introduites dans
d'autres pays dep~is long-temps.
C'esí un coup d'~il Íntéressánt que célui de\
ces p~turages immenses couverts de breufs et
de chevaux entre lesqu,els se promenent tran-
quillement toutes ' sorJes de gros oiseaux. Les
taureaux, pleins du sentiment de leur force ,
exercent leur domination sur les tro~1peaux .
Chacu'n a son terrain qu'il défend en mugissant
la têtebaissée, et frappant la terre du pied ap-
pelle au combat son voisin qui est son rivaL
Qu~lquefois ces fiers animaux se rencontrent, se ,·
battent pendam des'-'h eures entierrs; le vaíncu
cede le champ au vainqueur. Le bétail dlil ser7
tam est de grosseur , inédiocre , charriu·et ro-
buste; les taureaux ont les cornes plus grosses
que ceu~ d'Europe et le flocon du bout de la
queue extrêmement touffu; leur, couleur est
bmn nqir ou gris jaunâtre sale. On éleve aussi
YOYAGE
dans le sertam eles cochons qui dorl;nent úne
grande quantité , de lard.
Une eles principales occupationsdesvaque'iros
est de protéger les troup~aux contre les bête~
féroces. On connalt dans Ges solitudes trais gros
animaux de l'espece clu chat qui attaquent les:.
breufs et les ehevaux; ce sotit le jaguar ou ja~
guareté (onça pintada), le jaguar noir (tigre)
et le cougouar ( onça çuçuaranna) ( 1 ). L e pre-
mier et le dernier,sont les plus communs ; ,il . y
a deux variétés du. premie r, ·comme chez ,la
P anthere et le léopard de l'antien
• \l
monde. La
J peau de l'une a de même des taches plus nom-
breÍis~s et plus. petites ; j'ai eu la. pea1,1 ele ,cha-
cunf de tes vaáétés, sans av0ir'vu les animaux .
.
vivans. t

. :qa~s · beaueoup de cantons dut. Brésil ón


non,nne canguaSS!U Ia variété la plu '\ grosse qui
se distingue par 11des taches plus g\nde~ et
tnoips nombreuses; da:l sle se '\am de Ba:hia, au
con~raire, on l'attribue à la plu s petite vari1té. Si
1

l'on ádopte l'avis eles naturaliste français(2)qui


- -, '~ ..
( 1) Felis onça , f. brasitiens{s, f cpncolor: ce dernier
paraif bien certainement être le gLlaZOLfara ' d'Azara.
(2 ~Dictionnaire des sciences natT{l'elles, ~~.~m. VIII ,
,pa,g. 2 25. ' \ ~

\
AU BRÉSIL. l3g
pensent que ie jaguar noir n'est qu'une variété
de l'once, il doit nécessairement appartenir à
la petite variété tachetée ou au canguassu du
sertam de Bahia ; car sur son pelage, d'un noir
foncé, on distingue des tachl's petites et nom-
breuses qüi sont encore plt,1s noires. J'ai vu de
grandes peaux d'un brun fo"ncé qui avaient de
petites taches arrQndies et pleines·; on me dit
qu'elles appartenaient à l'espece du jaguar noir :
ce qui me donne l1eu de pense; que ce gros chat
est d'une espece différente du jagpar tacheté.
Le cougouar, jaguar rouge, ou guazouara
d'Azara , est le moins dangereux· de ces ani-
maux, quoiqu'il atteigne à une grandeur con-
sidérable; il n'attaque que le jenne b~tail; tan-
dis que le jaguar tacheté ainsi quele jaguar noir
tuentlebreufle plus lourd et peuvent l'emport~r ~
dans leur gueule ~une tres-grande clistance. -Sou-
vent ils en égorgent plusieurs dans une nuit, leur
sucent le sang, et en dévorenVla chair plus tard.
On a l'habitude d' entretenir sur une fazenda
de bons chiens pour alJe r à la chasse de ces ani-:
maiu dangere·u x; on suit leurs traces san-
glantes qoancl , rassasiés de carnage·, ils se
sont enfoncés dans un hallier épineux ou rem-
pli de bromélia pour s'y reposer. Des que le
VOYAGE
jaguar aperçoit les chiens, il cherche à grimpe r
sur un arhre penché oblic1uement, alors on lui
tire des coups de fusil pour le faire tomber de
cette retraite peu sure ; mais la chasse n'est
pas toujours si facile ; les gros jagi.lars 'ne cé-
dent pas :ti pwmptement ·]a place aux chiens ;
souvent ils en tuent un ou éfeux , les emportent
et les dévorent. Il y avait dans le sertam, à peu
de distance de V alo, un gros jaguar tres-fa-
meux, qui ne fuyai~ jamais devant les chiens ..
Trais vaque'iros étant un jour allés dans la fo-
rêt pour chercher lçur bétail,l leurs chiens dé-
/ couvrirent en rôdant de côté et d'autre les tra-
ees Iencare fra1c
i•h es du 'Jaguar, et se muent.
. a'1e
poursuivre. Les vaqueiros manquaientde fusils,
armésseulement de leurs longues perches sem-
,. b1'ables ·a des lances, ils délibérere 1 s'il serait
rais~ nnable de pro fiter d'une occasion bien r are;
ils prirent ,ce~ part~ et marcherent ha~diment à ·
I'antmal qui se tenait debout ç\up. air Ihenaçant
au milieu des chiens egorgés. Le jaguat\ atta-
qua aussitôt, et blessa les uns apres les autres
les tro!s chasseurs; mais ils l frapp1erent à coups
r edoublés avec leurs perches, et lui donnerent
plusieurs coups de couteau. Un d'eux, moins cou-
rageux·, chercha à faire retrahe awes avoir été
\
AU BRÊSIL.
blessé. Le plus brave était déjà étendu à terre
sous les griffes de l'animal, alors le peureux re-
prit courage, l'animal fut attaqué ave.c une ardem'
nouvelle, et ~tué à force . de coups de perche .
.Les hommes, grievement blessés, eurent beau-
coup de peine le soir à regagner leqrs clemeures.
Jls ~ndiquerent le lieu" ou ils avaient si brave-
m~l1t cornbattu; OU y afia, et i' Ol!l y trouva le
jaguar étendu dans son sang et entouré de plu~
sieurs chiens morts. Cette aventure, générale-.
!llent connue cl~n~ cette partie clu set·tam , et
q~i m'a été racôntée par plusieurs l~ersonÍH!S di-
gnes de foi, pvouve q11e l'on avait tort d'accu-
ser de htcheté le jaguar ele l' Amér.iqne-méridio-
nale. Dâns les prerniers temps de la découverte,
oií les bêtes féroces étaient plus nombreuses
dams les cantons habi~és, on a. eu partout tles
ex~mples d'hommes attagués et égorgés par. les
jaguars, quoique ces sortes cl'a~cidens y fus-
sent beaucoup plus rares que ceux que l',on
raconte comme arrivés clans l'!nde et en Afr~­
que. Plusieurs a.uteurs J pat· exe~nple le ·jésuite
Eckart ·( 1 ). ont rapp0rté des faits semblab~es.

(1) V.oyages de que7ques missionnaires 1 etc. /. ~ecu7!His


par Mnrr 1,p. 542 ( en allemand ) .

.
'
•.
VOYAGE
Indépendamment des gmsses espece; '( du
genre chJlt·· CfUe je viens. de nommer, on en
trouve dan~ 1e sertam de;" Bahi~ plusieurs pe-
tites qui sont' d& même atré\ib~ement tachetées.
' J e nommerai entre antres ]e mbaràoay;t ( 1) ' ~~
.gato murisco . nmmné en, 'beau_cotlp d' endroits
hyra:ra (2;}, u:n autre à.pelage rc;uge :non tacheté
yraisem.kilablememt l'eyra ' d'Azaxa,, et eJttfin Q.n
quatri<hne d'une espeqe notJ.veUe auquel, à cause
'; ?e. sa longpe queue , j'ai' dom1é le mom de .fc.lis
ntacnoura (3) ..
'
La chasse des d•iffére-ns an~~nâux bons à man-
. .
~

1/ ger fournirait) aux v.aqnei:ros lé moyen deva-'.


I . . .. '
. rier agt:éa®lement len~ nourdture,_ si dans ·ces
coptrées I~ectllées la p~udre et'le p1mnÇ,n'étaiet~t
pa.1; si r:ares ni si chers; c'est pari liúnême eause
quf los .~hasseurs ·ne sont pas co1\~muns dans
ph,tsieúrs ·cantonp, et que les ha~it ~ s mangerü
) I . \
--~ \ --
( ,t ) Felis .parddtis. , \
(\2) Felis yaguamndi. • •\ ~
q3.) J'e.n ai_ communiqué uhe .desc r'ptien succi•ncte ' a·u
do~tenr. Schiutz ~'~.~ · Zuri,ch, q~~i dé~ ir~it , ,n ' faire us ag~ dans
sa \raduction du Regne animal' e M. Cuvier. Cet auimal
est à peu pres tacheLé c0mtn'e le\\ m'baracaya ou Je" cbibi7
·. gouf zou d' Azara·, ppi~ il est p.Ju~ peti~, pl!ls mince, et a
la 'ltueue beaucoup pllts longue. ~\>r ' ' .. ·
I • . ~ \ ' ..,

."
AU BRESIL ;
invariablen1ent_ de la farinha, eles haricots noirs
et de la yianqe de l;;reuf seche.
Le genre de vie u1!-iforme qui attache le va-
que'iro à ses bestiaux, avec .lesquels il prend
sa çroissance et vit sans interruption , fait de
ces hommes des êtres grossiers, ignorans, in-
différens à tout ce qui leur e~t étranger , qui ne
se livr:ent à aucurie réflexi\)n sur ell\x-mêmes, et
n'ont aucun{! idée du res~e du 1;110J1de qui les
entourt;. Les écoles, les établisse~ens d'inst.rnc-
tion pour le peuple sont de~ chese's entiere-
ment inconnues dap:> ce pé:!ys , et I'on n'a pas
· plus pou,rvu à la ~ultJ.lJ,'e spir\tuelle de ces hommes
qu'à I~ conservation de Ieur existence par lesse-
cours . d~. la médecine. ll re~te epcore infini-
Ipent à effeçtuer ~t ~ · dési_r;er pceur ce vaste
royamn,.e faipleu,'l~pt:peupl~ : san~deuteun gou-
vernement ~ctif et porté à fair.eJ l~ '!?iep, cl~ ses ! •

sujets fixera aveç le te:m,p~ s.Pil ªtt~ntiolil. sur c.et


objet, i~nppr~ant.
" .be
T
temps, qm• a' v, are~t~a.
-l . ' I Grs.e't,
aval:'t. ~U~CiJ.Ua
. e
•'
vent.eux et frais, subit un grand changement;
il devint extrêmement ehaud, to:ntefo}s Far.,.
d.eur de la temp.érature était un peu moclérée
par_le ven1i. Le 5 de mars, qui fut.un eles joqrs
les plus chauds ·, le ther~wme~re d'e ltéaumul'
VOYAGE
monta à midi jusqu'à 28 degrés et de1~i; le
soir il desçendit à 15 degrés, et une heure plus
tard, q"tJ.and la rosée tomba, il n' était plus qu'à
14 degrés. La rosée fut extraordinairement abon-
dante pendant la nuit, claire et sereine; elle
Jmme(~te s.eule la végétation langNissante par la
chaleur du jour.
N'ayant pu découvrir, malgré tous mes ef- ·
forts , beaucoup çle productions de la nature
que j'avais espéré trouver dans ~et e:ndr~it, je
décidai de quitter V areda et d' alie r à Arrayal
da Conquista. -Je m'éloignai flonc ~es campos
ou plaines ouvertes, je . traversai avec ma tropa
un lcanton sec couvert de catingas o~forêts h as-
ses,'t et je passai la nuit à Os Porcos , lieti dont
det,tx familles de gens de couleur composaient
toute· la population. Elles tirent 1eur, subsis-
tan,ce de la cuhure' ,des champs e,, de 1'édu-
catton du hétail; dans leur- solitude écartée
ell<:js ne savent ridn dQ. reste ~ du monde : notre
arrirvée' leur. causa une surprise extrêil':l,e~. Tout
le J!li1onde se rassembla, on no s regarda, d'un
1

air stupéfait, on alia même prier les voisins de


ve~ir pour examiner la g ande . cmiosité qui
·velfait d'arriver dans les cabanes. Ces hommes
tâtérent
I
nos cheveux,. noQ.s· demanderent si -

AU BRÊSIL.
pous savions lire , écrire et faiee nos prieres ;
si nous étions chrétieús , quelle langue' nous
parlions : ils ne nous laisserent de repos que
lorsque nous leur eúmes ·donné eles preuves de
nótre habileté en divers g~n:ues . La promptitudc
avec laquelle nous écri:vions, nos livres à estam-
pes , les couleurs ef les dessins, de même que
nos fusils à deux coups qué nous leur montr~ .....
mes , tous ces objets exCiterent chez eux un
granel étonnement ~; ils finirent par avouer que
notre position étáit bien préférable à la leur ,
paroe que nous étions en état de connahre le
monde; puis ils observerent aussitôt d'une voix
unanime qu'il y avait clans le monde eles hommes
singuliers qui ne 1:e.cloutaicnt pas de s'exposer
aux fatigues et aux périls de si longs voyages ,
pour trouver dans les pays lointains de petits
insectes que dans ces contrées on maudit, et
ele petites plantes qui ne sont recherchées que
par les vacl1es.
Je restai un jour à Porcos pour m'y procurer
une couple de beaux jabirus ou touyouyous;
mais quoique ces oiseaux se tinssent constamment
sur les bords d'un lac voisin , nous ne pumes
en tuer un seul, c ar' ils sont tres-défians et
tres-fins. Au reste j'eus la preuve que ces grands
Ill, 10

VOYAGE
oiseaux 'vivent attssi de proie, eri ayant vu U;n
qui poursuivaitau vol avec une ardeur singu-
.lie.re un oiseau aqu'atique. ~
J' a~rivai~en une joun?ée tres-comte à Arrayal
da Co~quista, chef-lieu·dece comárca. J~ ren-
contrai sur ma route des camons intéressans qu.i
étaient coHverts Ele tres-belles
' . forêts. De beaux
àrl;lres, de jolis arbrisseaux fleuris ornaient le
chemin de leurs :fle~rs extrêmement variéesj
quelqttes-unes exhálaient une odeur de jasmin
tres - agréable; Les édifices des cupim sont
répandus dans tOlilte l'éteru;l pe de ]a forêt. Qu:el-
1/ ques prairies ~·nto U!rées par IJes bois· interrom-
}Jai.ent agréablement l':uniformité de ces masses
· c'l 'arbres. Leur verdure vive, le;belles grarüi-
r .
fées et les plantes arunclinacées qui les com-
rosent, et q~i fix~I11i l'áltention du ·~~taniste :J
nous rappela1ei1t la frakheur ele . prames de la
iIzone tempereel:
, , - b' 1 -
Uil . auti·e o )Ct 11ie retraça en-
ic ore plus viveinen,t les tableaux antp.rilles et
f h armans d-es fiorer\ • d l .
f
,.
s . e ma patne ;,, eta~t un
cerf qui paissait au Ihilieu ~s herb'es hautes.
'
Accoutumes ' a' cl'ec1arer
1
a' l''·
1 tant Ia guerre a '
toute~ sortes d'animaux, mes c'1asseurs couverts
,'i;:o: par les 'buissons s'ava~cere.qtJ p0ur le surpre~-
<d.re ,; em lui tira des cou~s de f\t;tsil ; il prit la
' \'-.. •I

\
AU B..B.ÉSIL.
; '
fuite ; les c1Iiens le poursuivirent inútilement.
Il devint sans doute la proie d' u~ habitant de
Porcos qui avait é~é _témoin d,e n~tre ch~sse.
J e tvouvai su.r ane vieille so.u.che la b.elle coa-
, '
leuvre verte non 1}\dsible cple I'on no~me ici:
cobra f!erde j il :pe faut ·cependant pas Ia ç:on-
fondre ave c 1'esp'ece nuisible que l'on désigne
par le mê1ne poro dans d'aut:res endr9its.
" 'Le c~.pitam mor Antonio Dies de Miranda ,
commandant de ce comarca ~onsidér<);ble , était
à Arrqyal; il me reçut ~e la .maniere la .pias
l}ospitaliere et me logea dans sa IDflÍson q~i pour
le mom~nt n'était pa~ . habitée. · ·
Arrayal da Conquista, chef-lieq ~e ce co-
marca , .est à peu pres aussi important. qu'une
villa de la côte. On y co~pte une quaranta.in,e
,de maisons basses, et une égJise que l'qn ~tait
en t_r~in de );>âtir. Les habitans .sont pauvres;
c'es~ pourquoi les ricP,es propriétaires <}es envi;-
rons, la famille du colc;mel João Gons;ilyez ·da
Costa, celle du capitam mor ~irarda,et qu.eJ:-
ques autres Olilt entr,éprÍs ~~ COllS~fUCtÍqn ' d.e
l'égJise a leurs fr~is~ Indépendamment d.,e~ I:eso..
sources que la culture eles champs :fou,ruit
aux habitans pour ~ubsister, la vente d.u ~:otq:n
et le passage des troupeaux de bq:!ufs qui yo11t
. '

V,OYAGE
à Bahialeur procurem en'core des moyens. d'ex.is-
tence; les boi::tdas qui viennent du Rio-San-
Francisco passent aussi par ce Iieu ; quelquefois
on y voit arjiver dans une seinaine plusde mille
bceufs qui se ~ rendent. à la capita~e. Le bétail
maigrit ordinairement pendant la longue route
- qu'il ·a ·eu à parcourir jusqu'à Arrayal; on
l'y laisse .reposer pendant quelque te1~ps, ·et'on
l'envoie dans les pâtu!ages· pou.r s'y refaire.
·. Une · grànde partie eles habitans d'Arrayal
consiste en ouvriers et en jeunes gens oisifs
qui occasionnent beaucoup de désordres; puis~
' pas d é po1·1ee en Ice 1·Ieu.. La r.xamean•
, ' qu'il n' e.x1ste . '
1
ti~e et un penchant in;modéré pon~ les boissons
fortes sont les traits distinctifs du caractere
dE,! ces " hommes; il en résulte des disputes et
d~rs exces fréqnens qui font d'étester ce lieu
mal famé par les personnes les plq~ sages ét les
plus considéréest; elles vivent dans leurs fazen-
'
das eparses de coter <(t c1'~u1re. N ousI• avons ete
A r r'

sÓ,uvent incommodés\ par des ivrognes ,et nous


I ,\
avons eu q:w;lqúefois beaucoup d<l peine. à nous
I .j \'

d(,~bar;asser de ces hommes .qu · nous gênaient


·sfgulierement. Chacun, hl'apres un usage tres-
d<,tngereux de ce pays, por~aht un stylet.ou un
1

p~~ignard à la ceinture; i'l se\ ommet souvent des


. ·~ \ !

I
'
ÂU BRÊSIL.
(

. meurtres etd~s vaies de fait parmi 'ces hommes


grossiers et iÍ.mmQr~ux qu'a'ucuné surveillance
ne retient ; quelques · sernaines avant notre
arrivée , un ~1abitant en avait tué un autre
d'un coup de fusil. C'est pourguoi l'on nesau-
.rait trop reêommancler ~ux voyageurs de se-
concluíre avec .la plus grande prudense à Ar- )
h yal da Conq1Íista, pour se préserveJ:' eux et
leur monde ele clésagrémens tres-fàéheux.
Un natur~liste trouve toujours, parrni les
habitans, d~s chasseurs qu'il pent .e mployer à I ui
procurer eles objets d'histoire naturelle. J'ob-
tins entre autres ici le renard d:u ·Brésil qui la
nuit précéclente avait ti~acassé · les poules eles
habitans. Cet ani1nal est l'ago;uaracb:ay d' A-
: zara, espece gris jaunâtre ou blanc grisâtre sale
qui est répandue sur toute la &nrface de l'.A:mé- '
rique méridion~le; car vraisemblable1nent le
renarcl gris de Surinam, , et ~ut être même le
renard ele Virginie, sont de cette espece. Tout
le long de ' la côte 'or.i~Htale @11 donne généra-
"' . . I , ,
· lem.ent à c.e quadrupÇ(l.e le nom de cachorro
do mato; mais à Conquista on le confopdait
' ave c un autre amma . 11, et on I e nómma1t
. raposa.
En compar.ant attenlivement sa forme ,etla dis-
/ I '

tribution de ses 'couleurs avec celles du renard

I
./
/
i
I5o VOYAGE
I

'de Pennsylvanie (1), on trouve que ce's deux


quadrupedes se ressemblerit 'beaucoup, et l'on
se demande si 1'agouarachay ne doitpas être re-
garaé comine une variété proâu'ite par le dimat.
La situatidn ·ae 'Conquista n'est pa-s dés~gréa-
-ble; surtotit lórsque 'du fond d'un_e valiée en'-
tohrée de'collines à pente douce on porte ses
regards sur le·s flanés et le sommet de ces hau-
teurs coüvertês 'ae bois. Gest ~ur 'une de lem~s
pentes 'oínbragées par aes 'forêts sbmbres que
Cdnquista·forfue uh carré "allongé. L'église, bâ-
ti~ au côt~ shpérí.eur, -e~ 'OCciilre le 'mi1ieu. Des
f forêts épaisses qm·i;e-Jliphssent tout tfespace aú-'
tour dü carré h~:i cl.óil:hent "l'áppar~ríl~e d'·ui le
p1~airie tfün ·v·e rt éhi.ir, -et :reíideht la vue ·de· c~e
villilge fort'agtéa'bJe.
)tutrefois toilt ce cànte>h'n'était grt'une so-
litu~e éÓNverte de :boís. Un'coriquis adó r d-{est
' d'~re .un. aventu'F1er
a- ·t '
qu' 0h Iioimnmt . \
urr .
capit:am,
vin~ de Portugaf ya~Ú, \sa trO'!fp'e armê~ ~ ·et fit
la gperré aux :ha'bitans\~id~·gene·s du 1iéN·\ toire;
c'éü,liertt des Camacans qu.i; dit- •n, s\~tendaient
jusqu' au voisinage de·J?enlRlacerri:~nt actuel de
V1'll'ia d a cach óe1ra
. .. 'de p ~rag~açu,
~\ .)ou jusqu
. ' aüx

(1) Çanis gliseo argenteus, renarii \ tricolor. ,


\1
I
"'
'
.\\

,,,
AU BRÉSiL.
lieux occupés par la tribu·des .Cariri ou Kiriri.
1I s'empara du terrain, et fo:m€la -l'Art'ayal qu'on
désigna par le nom de Conquista. Enfin, apt•es
.a~ ir conélu ,ul'l aFI'angement av.ec ces sauvages ei
avoir commençé .à·forme r SOJ;l étahlissement, ·il
' n~q1arqua que ses soldats diminuaient , de i ou r
en jour ; ~ tini~ par apprend..r~ ,que les. Indie:es
les attirai€nt isolément df.n& les forêts so-qs un
prét~xte quelc.o nque , et les IJlet~aie.çt à mort.
Un soldat, qu'un .Ca~nac~n avaif ain~i cgndu~t
~ssez loin dans les bois pour c,rpire qu'il pou~
rait ";en,ir à .bou.t 9.~ Juj , fut a~sez fort J?OUr
tuer l'Indien d'un . ~oup ,de ço,ut~au, e.t de
retour à l' Arrayal révéla ,a~ cOim).land}lnt !,a
conduite perfid~ ?es é~~ac~}:fs,. Celui-ci, ap~e~
avoir ordon~& à so~ monde de te,nir les ari:nes
prêtes' inv~ta tous ies sauvages à une ,. fê te' . ~t
tandis ·que sans aueune ~éfi~n e ils se Üvt:ai~nt 1
de
·, à la joie , on ies'_ e~tour~ , tous l~s côtés ;
et OD en ~ua la plus g~ande partie. Depuis ' les
sauvages s'eilfond)rent dava:ntage dàns les bois·,
et l'Arrayal obtintle repos et la si~'reté. L'ac-
croissement' de la pópulation resserre toujours
ces sauvages de plus eh plus ; ils vi've'rit encore
rétmis dans de petites r;mcharios ou alcleas.,
en partie à -pei:p.e com'lu,es_··dans ~ les grandes
VOYAGE
forêts qui s' éte11de11t depuis \e Rio-Pa;·do, ]e
long du Rio-dos-Ilheos, juscp/au Fio:'das-Cori-
\
tas. Ils ne vo11t pas tout-'à-fait jusqu'à.la côte· de
I • .
1~ n~er, car eles hordes ele Patachos isolés eri·ent·
el~puis ce póint à peu·. pres jusqu'à là de-rniere
·ele ces rivieres. L'aldea'" eles Camacans ·Ia plus
vois~ne ele~ établissemens portugais cultive elu
mais, elu Goton ~t eles bananes : ~epe11dant'
ees hommes sont' encore elans un état com- ,
p~et ele 'grossiereté; la plupart vont tout Ú.us ;
e"'t lcur principale · occupation est la chass~.
Le gouvernement -a pla.cé pan~~ces villages des
'I di:reftel!lrs portúgai~ (pour ' civ~liser les ~au­
\rages; mais ç~ .moyen op~re bien- lentement
et peu efficac~me11t, les elirecteurs étant eux-
inêiJ,leS eles hon:1mes i11cultes, souvent eles sol-
dats ou d~s matelots , et peu propres,lpar consé- .
o
que1;1t à gagner la 1confiance. Les pauvres In-
elieJ:\S sont tyrannisés ; traités comm~\ eles es-
' . il} l . 1 . '
c 1.a~'fs, , ,envoyes ppur t ~va e, aux c lennns et
I

I ~ '
abattre du bo~s, ex1;édiés pour ,p,oqer eles mes-
sagf!s tr,e, s-1om,
. em;o"I''e~ po r, ser.\ Ir. contre 1es
,';rapouyas- ennemis; et cl'un autre c,ôté 011 ne les
pa~e p,as, ou bi~n 011 ne IeJ.r donne presque rien;
/ ~'1 n''est donc pas su ' ..rprenant q.u',etant. tOUJOUrs
. ·
. \ ~
AU 13RÉSIL. I 53
extrêrúement enclins à la liberté, ils soient tres-
mal disposés pour leurs oppresseurs.
Ayant vu, dans·mon voyage à travers Ies fo-
rêts vierges , eles· êaínacans ~xtr'êmement sau-
va@es' j' avais le 'clésir d.e visite r un' village de .
ces indiens qui est situé dans les forêts antiqu~s
de la Serra-do-Mondo-Novo , .et qui porte· le
nom de Jiboya. Le sent!er qui y mene est sau:..
vage_ et' inégal, entrecoupé sans interruption
de hauteurs médiocres et de petites vallées. Au
commencement de ce~te route le pays est eu-
core un peuhabité, I~. campagne est dégagée'
de bois et
cultivée ; mais hientôt 011 s' enfónce
dans les forêts qui fornient une solitude com-
plete. On y trouve, surtout sur leurs bo'i·ds exté-
rieurs, eles halliers touffus de roseaux taquõ;l-
rassu ·ou.no~s avons rencoritré pour la premieré
fois la pie-griecb.e. no ire et blanche ( 1 ). Un peu
• o (( I .

plus lom les gr::J,nels p.rbres sont entrelaces eles·


plantes grimpantes les phts singulieres. Sur les
vieilles souches en · putréfaction croissent eles
fougeres, des p0iv:res, .eles l:>egonia, d:es vaniHes:
eles cactus, et une ~ multitude d'autres plantes: ·
Le silence qui ' ~.:egne daús ces solitudes est

(r) Lahius pipatus, L.


\
VOYAGE
interromrm par la voix fo.rte des araras, du cou-
roucou ou d'~utres oiseaux. Dans ces lieux ou
l'ami et le scrutáteur de la nature .e st occupé à
chaque pas par odes objets intéressans et nou~
· veaux, nous étions obligés,de nous arrêter long-
temps, et <!e nous enfoncer dans l'épaisseur eles
·bois ,pour peni rsuiv:re l~s anima:illrx nouveaux e~
intéressans que nous venions d~apercevoir. Plu-
·sieurs beaux oiseaux s'offrirent à notre vue;
€J;:ttre autFes le m~makin va,r.ié à longue qneue ,(1)
était ,extrêmement commun; nous trouvâmes
aussi Ul'l tangara nouveau à.fropt jaune foncé (2).
. ,I
f-pres avoi:t parcouru un pays· qui présente
de nombreuses inégalités et qui offr..e à peine aa /
cayalier un ·sentier praticable, nous sommes
arüi_vés"' dans ·la vallée_ de Jiboya ,, entourée de
tout côtés dê haut,es forêts primi \res. C'est là

(;r) 'Pipra çaudata ~ La\ham.


( 2) Tanagra auricapiiLCf.. Long 1eur , six ouces dellx
lig~es et demie / eu vergure d(.is ailes, linit pouces ~~e ligues.
Sorpmet •de la ·tête jau;ne cit~on foncé; ~\~r. d clu :fron.t, côtés
du ,s ommet et voisiuag.e des yenx noirs ;:,région de l'oreille;
partie ~nfériem:e .des joues · el to · t I e dessus dn corps gris
oliye, un peu plus foucé sur le clo's ; ailes et queue noires;
Jarge raie blanche transversàle sur le milíeu de l'aile;
pe~nes de l'aile et de la queiÍe et les de\!x rectrices posté~
'\

)
I
AU 'BRÉSIL. t55
que sont bâties les petites cabanes. des Indiens
qui Gommenc<mtà plier sous la volÓnté de leurto
oppresseurs, et à ado_pter leuts mreurs et ' leurs
usages. Ces maisons. étaient .environnées d'un
bocage touffu _de b;naniers , derriere lesquels
les arbres gigantesques de la forêt, serrés les
UNS contre 'les autres, s~élevant'comme . ies oo-
'
i

-
lonnes d'un portique;et éntrelacés d'une multi--
tude de p1ant€s diverses, form€mt un mu.r. Du
fond de ces bois sombres on ente.ndatit fréquem-,-
ment sortir la voix agréable du pomba mar-
gosa, p,igeon ( 1) dont j'ai déjà parlé. ··
Les cahanes des lndiens sont' 'Construites en
bois et en terre, et convertes en éoarce d'arbres.
Leurs habitans sont les uns :un peu .babillés,
lf,!s autres encare e~tier€mentnus; ils cultivent
du ma·is, des banaJ].es, un peu de coton , et

rieures de couleur noire; toutes les parties inférieures de-


puis le bec, d'u~ j;une rougeàtre doux : cetle couleur
tranche bi'en a-vec·les plum·es noires du tõin de la bouche.
lia femelle n~a ipas !e· sommet de la tête jauue.
Ce tangara -pa_rait être l!'l lindo btun à huppe jaune'
~ ·Azara, tom . III , pa,g. 244 ; mais dans ce cas, l'écrivain
espagnol décrit""les couleurs de cet oiseau tres-superfi'r.ielle-
ment, et même avec _peu d'exactitude. '
( 1) ·Co>lumlm " loolitFi:r:.
·'
VOYAGE
heaucoup de patates ; cÓntens des production~
que leU:r accorde ]a nature, ils ont jusqtt'à PI~é-" '
s.e nt été trop paresseux pour prépa;·er de la
farinha. ·
M. le capitam mor Miranda, qui dans les
solitudes des montagnes voisines éleve heau-
coup de b~tail,. avait ·par hasard des affaires
dans cet end r01t '
. et s' y trouva en meme '
tentps
que moi, ce qui me procura le spectacle iqté-
ressa.ni d'ui.1~ danse de ces lndiens. Les boúnes
qualités ·de M. Miranda Je foÍ1t ·clíérir partout.
Un voyageur Í1e ' doit 'donc pas négliger de faire
• r \ '

ij sal connaissance; d' ailleurs il est le .premier per-


' I sopnage de ce comarca ..Je passaija nuit dans
sa compagnie à Jiboya , et le lendemain je re-
tournai avec lui à Arrayál. 1
Les Indiens Camacans different peu à l'exté-
ri~ur de·leurs freres de la côte orie\\tale: ils sont
'Í>~en faits, de• taille moyénne, robuste:;.s; ils oht les
q
•I \
épaules larges, et le~ trai.ts 1 visage ~ l~ur race
' pr0nonces.
_. h len ' ' o n les reco1
I nmt d e Io. n parce
A
1

que )l,l~me les homrnes laisse~1t tombe r !eurs


lqngs cheveux ~e 1ong d 1 dos (\I). Leur peÇtu a

(1). Plusieurs peuples d'Amérique, entre· autr~s les iudi-


g~nes d ~ la Guiane, pr,ntent Jes cheven~ lo'ngs en eigne de
' '\,
.. AU BllÉSIL .
une belle couleur brune souvent assez foncée,
souvent un peu jaunãtre ou roug( âtre. Ils vont
'génémlement nus~ et ne s'habillent que partiel-
·leinent. fDans le premier cás, les hommes.por-
te"nt le tacanhoba· comme les' Botocoqdys; les
Camacans nomment cet étui hyt·anayka. Ils
s'arrachent ~u bien se coupent les sourcils et
. tous les poils du corps ' et se pei:cent quel-
quefois · aux oreilles un trou de la dimension
d'_ún pois. Ils ont de temps en temps la fantaisie
de sê peindre le corps avec clu rocdu et du
genipa , et y joign()nt une autre cçuleur rouge
brune qu'ils nonnnent catua, et qu'ils tirei1t de
l'écorce d'un arbr,e que je ne connais pas. ·
J'avais vu sur les bords du Rio- Belmonte le
reste d'une t ribu d'Indiens qui se donnent à
eux-mêmes le nom de Camacans ; les Por-
tugais les désignent par cehii de Menian. ,
D'apres ce que 'j'ai appris ces Menians sontréel-
lement une branche eles Camacans, mais dégé-
nérée; ils ne sont plus de
race indienne pare,
la plupart ayant. les cheveux orépus eles n~~res

liberté : c'est pourquoi ils les coupent à 'leurs · esclaves'


et s' en font autant quand ils sont eu deuil.
1/oyez Barrim. .

..
I
t58 VOYAGE
-
·· ~t une Gouleur noirâtre, et même à.l'exceptíon
de deux vieillards ils ne saven1; p~us leur lan-
gue. Les exemples de leur langage, que je ci- .
terai par la 1suite, ne peuvent pas, par la même
raison? être regardés comme ceux' de leu r idiome
vér~table ; les différences qui se trouveront
entre cet idiome et celui eles vrais Cam~cans
ne devront pas induire ei1 erreur sur ce point ·
les philosophes qni s'occupent de l'étude des
langues, p~1isque l'expérience démontré .que
parmi les peuples indigenes de l'Amérique la
séparation de tribus, de fatyilles et de bordes
a souvent influé sur le langage, de ~orte que
lj
l'd1n trouve eles diversités et eles variations de
ditlecte chez les différentes branclies d'une na-
tiqn qui cl'ailleurs se ressemhlent compléte-·
mrnt. On trouvera aussi clans 'le,_ vocabulaire
,; d<:js Meniat).s plusieurs-expressions qu'ils ont em-
pPuntéês eles pe1\lples dont ils S~ITt veisÍns. .
Les CamacanS étaie11t autrefois
1
hn peuple
influiet, aQnÍ de la ~~~,erté , \b'e11iqtleU'Xt ,~qui clé-
fe,1dit pie<\, à pied s~R ter ri oire contre les
P9rtugai~. Des cléfaites considerables les co'n-
..
tn11gmrent en f'm '
a' r ncer ~
s en1~ navantage dans
1

' le5r forêts ; le temps a aus~i étendu gracluelle- ·


mrnt son' influence sur eux. Cependan:Lles traits
- - \ '
o

.
AU BRÉSIL. 159
distinctifs de leur caractere ne sont pas effacés;
ils sont toujours animés par l'amour de leur
pays et de la libérté; il est diffi.cile de les em-
mener loin du lieu ou ils sont nés; ils ne vien-
nent qu'ave'c répugnance éhez les Européens
dans les cantons cultivés, et préferent , comme
tous les sauvages, de retourner dans leurs fo-
rêts sombres. Rendus circonspects et défians
.par des exemples fréquens de mesures tyranni-
ques prises par les blancs , ils cacherent leurs
pelits enfans et leurs jeu.nes·gens dans les bois
lorsque nous leur rendimes visite. Ils se sont
habitués peu à peu. à des dem.eures · fixes, "aux
cabanes en bois , même à celles qui sorit
construite's en terre et convertes de pla-
ques d'écorce. I1s ne se çouchent pas dans des
hamacs comme les peuples de la Lingoa~ Géral
qui habitent le long .de la côte maritirrie ; ils
se font da11s leurs cabane's d7s lits ou carnas :
c e sont des perches posées sur quatre pieux;
ils les couvrent d' écorce battue ( estopa ).Les
enfans couchent ordinairement à terre avec les
• I
chiens.
Ces Camacans semblent à plusieurs égards
se rapprocher des Goaytacasés. lls fabriquen'
des pots ave c de I'argile grise, et ont en géné-
· VOYAGE
ral plus d'industrie que l~s peupl~s de la côte
orientale. N'ayant pas d'animaux domesti-
ques ( 1 ), ils savent par le:q.r adresse à la chasse
!se procurev la nourriture animale dont ils ont
bes()in; mais ils connaissent aussi fort ' bien
les avantageSrque leur garanti~ la culture des
plaB.tes utiles; ils cultivent aupre.s de leu~s ca-
banes des bananes , du mais ou du mani~c
dont ils mangent la racin~ rôtie , ·e t des pata-
tes. Ils récoltent aussi u~e petit~ q.uantité de
€Oton, et en font des cordons tres-artistement
façonn.és. Les femmes surtout l ~avent tord~e les
t/ tils ave c beaucoup de délicatesse et tresser de
j~lts cordo~s à quatre brins ; elles les emploient
à toutes -sortes d'usages) et surtout pour leurs
vêtemens
I
et pour leur ·narure;
r; ,
les
'
hommes en
or91ent leurs armes. Le couyhi 011 , tahii&r des
femmes, la prineipale partie-- de le,: r habille-
ment , consiste 1 en une cordelette qui est ·
f0r1née arti~ten~_eht 4e corflons minc~s; aux
' . , s0nt deux gros
extremlles " ' ds , et uJJ'autres
n~lfi.
. 1\ I \ ~'
~--,.~~--~----------------~------~----
(1) Les Camacans n'ont pas d'autre a· imal domestique
que les chiens qui lenr víenuen des Et ropéens, ce qui ·
prouve qu'aucun :reuple indigene Ide 1' Amérique n~a 1 élé
:raomad~ . Voyez à ce sujet le Yojage d~: M. de j-Iumholdt,
toni. li, p. 160.

f '·

AU BRÊSIL.:
) . .
c01·dons pendent en tn3s-grand nombre pour
forme r un ' tanlier ; l<;:)s fe;mm~s s'
attachen,t
"
cette cordelette autour des hanches ; cesr ta~
bliers com:pose:q;t ~eur unique v€temen,t quand
elles meJ.ie),:lt: Ul1€J vie. enc?re Ull_ pep, sau-
vage; auparavant elle~ nele CQ:tlnaissaient ~ême
pas; elles allaient ep,ti.er~ment nuet> , e,t ensuite
elJes se nouer~nt aut.olil!r'' çl.es hancqe~ ~q :rnor-,
,
ceau. d ' ece>rce d' arb\re~ o: n ne. peut Po/~' .adm.
. I-
rer assez 1'art av<;)<? l~quel cés peuples grossiçrs
savent fáçonner les cordpns de G,e.~ tabJiers;
pour l~s embellir qª:yal]!tag~ , iJ~ ~es teign~l}t pa~r
, i11tervaJle~ en rouge hrun .
aveç
.
1'~corç,e qe ca-
)

toua et laissent d.es . compartime;ns t9ut hlancs.


Un autre ouvragecle lamain desnymphes.des
fOI·êts est l'espece de sacs í'ai'ts' de.· cord01is de
C0t!im tFessés_, que9es l.ndiens suspend<mt pa.r tout
0u iJs v.ont <lJUancl: ils cplittent le.urs ~anaues; ils
sop~ 'compos.és de cordons noués ou ·erttrelacés ,. '
et sorutr teints plternativement e,n. jaunâtre ou en
hrun I'Olili_ av<:;C\ .la e~u}eur du. ' Cato~a; I~S l,es ·
attachent sur les épáules a:vec eles courvoies éga- ·
lement tressées. Q uand les h0mi-m:es vbnt à la
chasse , ik port,eFlt toujoars de .çes sortes €1~
~acs. '{ _.

que
J

· Les armes eles Camacans pPonvent les


III. 11

VOYAGE -.
_hommes de ·cette peuplade o:qt ph;ts d'industrie
innée que les autres trihus eles Tapouyas. Leur
are ( couang) est fort, de bois de brauna qui
est d'un br~,m· noir foncé, tres-bien poli, et
bien mieux :façonné que· ceux des autres peu-
plades. Ils .pratiquent sur toute la l~ngueur du
côté antérieur une rainure , qui est un peu
moins profonde que ce~e de l'arc eles Machã-
calis. Ces ares, dont la hauteur excede la taille
d'un homme , som tres-élastiques et · tres-vi-
gmir~ux. Les fleches ( hoay ) ·sónt surtout tra-
vaiNées avec · reeherche. · EHrs sont de· trois
'1 espec'es com h~~ cell~s des_. autres peuplades ,
mais, de mênie que celles eles Machacalis, elles
ont au- dessous Cle la pointe un long' appendice
de bois de brauna ; ·plus bas oommence la
hampe ~ui est en ros~au_; et au-tdessous ~es
plp:n1es ils placent ordmatrement (:!.eux. J?etites
toyffes de plume& bariolées. Pour garnir la par-
tii~ infériimr.e.· de la fleche ils ' pr.eNFJ.ent eles
plllllles d' araras ~.·ouges et bieues, chojs ·es avec
soin, posées et nouées ·avec pré};ision; les touf-
fei,'> sont alternativ~ment \ entrel>acées avec eles
cordons ·de cotou blanc·et rouge brun, ce qui
lerr do1~ne un coup d' mil t;es-élégant. ·
lls fçn1t aussi.des fleches de p"/-rure qui sont
..

AtJ BRÊSIL~
si minces, si déliées ., et tra~aillées avec tant de
d e'licatesse, qu' on ne peut s' empec • h e r dH
- etre
surpris que-<iles ouvrag€s semblables aient pu sor-
..
tir de mains si grossieres , aidées ele si mauvais
outils. Ces·fleches sont de bois de. brauna, ou
bien de bresillet, extrêmement lisse& ', palies et
luisantes , et ornées-de touffes ele cotou teintes
en rouge mêlées à d'autres qui sont blanches.
Ils façonnent ele la même man~ere de longs
r
bâtons lisses' que jadi_s 011 voyait quelquefqis
entre les mains de. lelil.rs chefs. Dans les occa-
' sions ·solennelles, notamment clans leuvs ·.d an- .
ses, leurs chefs ont sur la tête un bonnet de
plumes de perroquets, qui est tres~artis~ement
fait : ils l'ui donnent le nom de charo. Ils ·atta-
chent chaque·plume-en particulier à un réseau
de fil de 'cotou; le bonnet est ainsi sqrmonté
d'une .grosse touffe ele .pl'umes qui entourent la
tête comme une couronne. <?n prend à cet
effet les plumes de la queué clu juru.(I), ou de
quelque autre espece de perrbquet, et du mi-
. lieu desquelles s' élevent ordinairenient une paire
de grandes plumes de la queue de l'arara. La
touffe de plumes est verte et roug~ , et fait un
)
.
(r) Psittacus pulflerulen!ÜJ.

r
..

. V.OYA:GE

tres-joli coup cl;' reil. ·hes bonnets de pJum.es que


_porta.ieRt l~s tribus eles indigenes des bords
clu fleuve eles Amazones, l0rsque les Espagno]s
: et 1es Pm·tugais les visitei:€nt polltr ·la pnermieiJe
' f ois~ étaient faits cm;n,m'e ceux des Camâeans
que je viens Gl:e décrÍJre ; 0n en voi~ la preuve
.dans. ~a belle' collection cl'ornemens. err pl~ll'.mes
du úch.e mq.sému de Lisbonne. Barr.ere Éous
a.pp,t;e:qd q:ae les peuples de la;Guia,n e portaien~
auss~ eles bomilel:s semblables. ,
. , La dextér~té de ce ·peu.p1e. à t<t>us· les m.iivpges
l(1:K1auels le uend tn·es7 utile au~ il?e>·rt1n-gais, de-
• fiU' l!l:Be p>ar~1e·
• :·!ri.;-tus • s' est ;an peu:\\. ·1· , . ·on. 1es ~
Cl!Vlllsee·
1
e~lolp1 1.
<ne surtol!llt pomnr d'C'he~nc cu: 1·e te.[il1a!tru
• ,. c-ar ·I

~ ils aba.tl'lei~t les. f0rêts a.vec beaucoup cle-prm!líllp-


• r...,. • .. ~ .
•• ·A ()

;• -" 't • t;j!blitde, se: servant de la· ha,che d'u:r;te!• man~er.:e


trli~s~j'ldrCDÍte. lls sont. .ehass_eurs exR;~J?imentés,
et excell:eliLt à t]~:ev. ele l'auc, •eonu;ne·.j~·~n'; ai sou- /
· 'I!L ete 1lemom, e.', guel ques-m1m~ 1nam1' ent tves-
I , , • 1

' je1.o1le' fusii. Om les ,ba:ngej c1ml.eH·er., ent ele


. Ies. a\ttaC!{ues . ;'-(d'es B· otoeow<dys '\l
·repo;1usser. \ !l:F le 0

. lli.-o.- ,P ardo; le capt~am Pa.~lo Pi~to. , •qui a été


1
-l)]aoé~ à leur tête·, les fait wamh~\-
1 ~\
à. ees e:xmé,..
r __,
o ' clitiolns .. Ils craig1~.eat :l:es ~o.1i_QC0Hdys,, qui, ]í>eu
de temps avant mon séjour en ce 1ieu, avaient
tué 1Iue1'ques Camaeans su,r Ie :Rio-;,Pal;do; c'est
. .. ~
;

' . '

.
,

AU BRtSIL.
po.~'lirfjluoi ils examin'~fel]l.t avec beatiooup d'at~'
ten!IJÍ<J>n e.t :aveé un air de Pessentirnen.t l·e jeune
B.ot~oo>:udy Qu.êck qui .était a:vec nlC>i. Ün dit
au: resme qm'i"ls ;sont praves, -e-t ·Ol'lt 'S0t.went fa:it
pris0wnier.s ph1si:eurs de ces harhaPes.
Les ·Camacans accueill nt u·e5-bien 1es étran-;
·ger.l •q ui 'Vierment 1es voir amicaiement; le
capi11:am mor João da Sylva Santos étant arrivé
.
dans ' uné Ele ileurs alcl.éas ' y fut reou avec so-
. ' ·L·eur ·eu~
l enntte. L 'll ' ·en rouge
. ·b'at'b· OU!l'-'IC
f ·s''etatt . I
' I a t.el!e, 'l es pteels
A . (_;) "et ·l es avant-lvras;
L A-
sa tele etmt
' •

b o.rnee d~Rn 'beal!l bonl'l.et de plumes ·; il portaiÍ.t


sur' l'épaule an gros c01·don cle cotem teint el!l.
rouge, e~t !lrerminé !!Dar deux glaíl\lds .de dents
d'animallll'X et cl:e -sabdts d.e •tapir ·; •ses chev.ewx '
lon-gs ;floLtaien.t sür son -dos; ii":tena:~t ~la main
WJ1le longue ·h aguéUe de :b ois ·rGmge, ·sans <il.oute

de bves~hlet' 'lisse et 'délic~~erneú.-~ lfaçonnee ; ii -


',s'éta-i:t peint un -cn~issant n.oi·r au-àessns et a•t l-
dessot'ts de l' ccill.. I;:e caoui. h e manq't~a pas clans
eet1íe ooeasion; les GamacalÍ>1S danserent l)®JJ.'-
dant t<!ll>l'_lie tl a m1~t.
Inqépenâ.ninment.êles at''rnes et de divers on-
vrages, ces Indiens v:endent aux 'Européens eles ·
dhande1les ele ·cire qui répanelent une ç>deur .
agréaMe en hrí1lant ; ils fabriqtterrt c;~s chan.:.. (


'

VOYAGE
delles 1ires-ingénieusement; ils en font de longs
cordons , qu'ils réunissent ·ensuite en paquets
allongés et appliquent à I'extérieur de grandes
fe1-~ilfes. Le.s Camacans vendent encore .d~ miei,
qu'ils recueillent en grande quantité dans les
forêts . : cette substance est un des mets qu'ils
~iment 1e plus ; ils. ·sónt d' aill~urs tres.,.peu êlé-
licats pour leur nourriture. Je trouvai dans leurs
huttes âes p~eds de tapir en putréfaction com-
plete, et que pourtaílt ils mangeaient comme un
morceau tres-friand; en revanche ils ne . toucheni .
pas à,la chair du tatou nqir (tat~\u rverdadeiro),
que les Européens recherchent beaucoup.
I
, De même que chez la plupart de~ pe1:1ples,sau~
vages., les hommes t,raiteht leurs ·femmes ·avec
une certáine rudesse; cep.endant ils neles bat~
' . \ '

tent l?as. Une .Pa:tie des Camacans '\\~ui . a des


rapp~rts plus mtunes ave c les Port~g:!\.lS, pade..
déjà ~1n peu leur lahgue; leur idiome a quel .
que q:h10se de barbare, ·~\cause\,dü gran~'\ollil~
bre 4e sons ·du nez et ·du, g:osier·; ils. C01iljpent
brus1uem€mt ia f}.n des mots , arlent _bas,
et la. bouche à. moilié ouv,e}te. Qa&nd ils o:üt ·
. fait une bonne chasse, ou qu'ils ónt quelque
autre occasion de se diver~ir , ~ls ne '\nanquen~
pas
,
'/
.
.
.
der célél9rer une-fê.te ·accompagnée
. ,, \
de danses · '

..

.f{U BRÉSIL.

et de chants : ils se rassemblent en grand


p.ombre, et commencent par· cc:mper en trav~r~
le tronc d'un banigudo, arhre qui renferme
ur.e moelle t~ndre , et juteuse, .et le crelilsent ·en
'
y laissant cependant un fond . . Ils obtiennent .
ainsi un vaisse~u qui a deu.; pi.eds ,à deux pieds
et demi -çle hauteur , et le plaeent sur un e~­
droit u:ni entr~ leurs cabanes ou tout àupl'es.
- Fendant que les hommes travaillent à çet ou-
vrage; Jes· femmes s'occupent à· préparer du
,caouy avec .du manioc ou du majs. Elles mâ- 'J
chent les grains de .JIJ.a:is dQuz~ ~ sE!ize heures
d'avance, car c'est la suhlstance qu'elles préfe-

rent pour cette bóisson; cependant elles y em-
ploient aussi les patates, puis elles crachent dans
u,n vas~ les grai~s qu' elles ·ont mâché : ils y
fermentem dans l'eau chaude. Elles agitent en-
su.i te le. mélange dans un..., vase d'écor,ce, ou ~il
continue à fermenter: ; alors on fait du feti par-:-
dessous, apres que l'on a fixé sa .partie infé-
,rieure dans u:n~ trou. creus·é en t~rre. J
J
Cependant toute la société s'est parée con-
venablement pour la darÍse : ~es h01mnes s·e sont
barbouill~s de longues raies noires .; les fem-

I
~nes,
.
de cercles formés de demi-lunes concen- .
triques au-de&~us du sein , de ligues .sur le

...
\

'·'
)

..
;;r68 yOYAGE
visage, etc. Queigü.eS-uiis orment leur tête de
leurs bm:.mets de plumes, ·et se .fichent des plu-
mes bariÓlées daFis 'les ·oreilÍes. L'un d'éúx tient
·à lá 1ha[n :un instriilment fait de sabots de ta-!
pir, attachés en ·cl:eux -paqu<2ts à d:es éordóns ;
il.s le non1rnent ;herenehedieta-~· i1 'se·r t à rnat.....
-quer la mesure., et r.encl m.J. son tl'es-fort qua.J.'}d
'il est a:gité. Us ·se servent aussi quelquefGis d'un
plus petit inst:,rument dçnit le nom est lj;ek'kiekh:
il consiste en 'une calebasse Greusé avec '!in
man~he de bois ; eHe ~·e11fetme quélqaes petits
''
cailhrax ; et quancl OI<l la ·r~mue elJ~ fait aussi:
li ~;

·~entenclre tm. son.·.. Cet in.strume"ht a sans do1lrte • •


de J'~:ffinité avec'.f.e mari:teas,_, 1'ido1e-J_~mes1ique
des rü'Q.pin:ambas et d'autres peup~ecs incl:~geJ.ileS
d'tl ~3résil ·qJlli ·s'en, ·setvraient ·aüs'si da-ns ieúrs
. dans1es. Daiiis les premiers.témps, leslEs.pá'gRÜÍs
en únt ti'i!nilvé de semblables, dans l'~mérique
I• 1 .\
sep>tt(ntri0nale ·, p~~ ·e>xemple en Fl'9rid~ ( 1 ).
. A:l.ors la danse cbmmence ;::'q:uatre ~Qmf.nes
.I
se tepant rm ·peu penc : h~
.s s'avahcent,
1:\ et\ a' pás
~
-mesQlrés .déerive.nt un cercl.e eh se ;teJ.;Ia:nil les
' • \' \ J

I . > 1. •

I l\ .
, ., . • . I
~
t iJ P:ojez.B'aiírerre, Relation dq'la Guiane, etSoutlbey,
. History oj Bra,.zM, tom. I, pag. 6 ~5 : Je n'lti pas trouvé
' ' \,

. .
chez 1 !s Camacans 1es gre1ots de pieds donq!)lusiêurs peup'les
,\ '
<\u Br?si-1 et de la Guiane se servent da ns le 1rs danses.
.
• < ' ' f \1

\ \\

' ' -~
AU BB.ÉSIL.
. , Ies autres ;I wus repetc:ot
uns dernere , '
'
avec peu
de ínoclulation ho"i, hoi', ifté, hé, hê , et l'un
d'el!lx accompagne ~e cri clu .b rait de son. in-
strum.ent, qui est alt~rnativemep.t ..plus fo·r t et
pi{as dbux ~ sa fantaisie. Les femm:~s en ce mo-
ment se mettent de 'la patlie; elles se tiennent
.d:eux à doox, en s' appliquant·r éciproquement la
main garurcdre .sur le dós; puis hommes et fern-
mes tournent alte·rnativement sans di:scont-inuer
au ibruit de cette charmante musique , autour
du vase qui contien:tla liqu:éit.r eh€áe. Ils dan- ·
·s ent ailíl.si au müieu du ,jou<r dans.da saison. la
plas chaade de l'a~n'lé-e ,'·de sor'te que la sueur '.
leur ruissele tollt le 1ong du corps.~ Par inter-
valles on puise dans le vase avec l.fn coui , etJ
l'on boit iJ.'e caoui. Les .fennnes accompagnent le
chan~ avêc €les sons à ·demi-voix qui n' ont au-
c®.'Jile espete de modt1lation,. et marchent en
mênie temps ie haut ,dt;t corps et la tête pefi-
chés. rCes sauvages dansent. ainsi toute la nuit
safis se fatigue'!·., j;m.squ'à ce que le vase soit vide.
Ce'Mie danse paralt av,air quelque res~emblance ..
'avec ·ceNe des Goroados de Minas-Geraes (1 ).
Quelquefbis les-- danseurs se partagent ,e n

(1) Joumal ! JOn ]jrasilien, pag. 142.

/
170 VOYAGE
deux handes qui figurent l'tme vis-a-vis de
I'autre,, de sorte qu'une ligng recule toujot1rs
devant l'autr.e. Souvent dans ces occasions so-
lennelles, quand la nuit a ,eté e1pployée 3 dan-
ser, elle est suivie d~un autn; jeu. Les jeunes
gens, pour faire para de de leurs forces, cO'urent ·,
y
à la forêt, coupent un gros morceau cylin-
drique d'une branche de barrigudo qui est tre -
lourd tant qu'il y reste ·du sue , et .enfoncent
dans chaque division un bâton afin de pouvoir
la saisir plus aisément. Le plus . robuste <le la
bande prend c~ morceau de bois, 'Ie pose sur
son épaule, et ainsi chargé co uh chez lui. Tous
I
les ~utres le suivent et cherchent à lui enlever
.son farde,ilU; cette lutte dure itt~qu'à ce qu'ils
soient arrivés à l'endroit ou sont rassemblées les
J • 1- •
bell1~s qm leur. dom.1.ent .des marq~es de leur
. app~·obation. Quelquefois le morce u de bois
est s,i lourd·, que l un ou l'autre des dhampions
est blessé. AussitM qu\ls·sont parvenus au liut,
ils ont coutnme, quoi~ue J.)a\ gJ1és · de s~eur ,
de ~e précipiter dans le fleuve J.llOUr se rafra1--:
chir; mais on prétend que e pro •édé expéditif
est [réquemment suivi d'a 1 cidens graves, et
que plusieúrs sauvages e'n sont morts.
Quand un Camacan to~nhe. ,r:ó.al~de , 'on le
I

/
AU B'RÉSIL. l'Jl

laisse tranquille ; s'il peut encore ~narcher, il


se procure lui-même sa subsistance, autr(mient
il reste absolumeiit dépourV,u de tout :secours . .
Cett.e indifférence · p0ur les'· ínalades ·et les . in.-.
firmes se retrouve chez 'les lndiens de I:Oré-
noqti.e, comme on le voit dans les relations d,e
plusieurs voyageursl, ~t entre autres de Gumi-
la ( 1). Les Camacans ónt peu de inédican:tens ;'
ils emploient pour guérir le1 malade un ·moyen
pratiqué . par les Boggi:s ou , les Semmelis des
Arouaks et d'autres peupla'des de la Guiane (2),
· qui est de sou1illev sur .l!J!i de la fumée de ta-
ba c: pendantl'opération, le médecin marmotte
des paroles que mallieureusement persoúne ine
comprend. Si un · malade meurt , toute , la
troupe se réu'nit a:utour .de lui; et la tête .pen-
chée · au-dessus du corps, td>us, hommes et
femmes, poussent des""hurlemens horri:bles pen...
Q.ant des journées entieres. Cette ·douleur feihte
dure quelquefois ·tres-long-temps ; iis prennent
du repos par interyaÚe, et qualild a·a cmi.t que
les ,lameptations ·sônt ·finies , .elles .recomineli-
cent avec une nouvelle force. Le mort .I~este
,.

(1) Ilistoire de l'Orénoque, tom. I, 11ag. õ2 8.


(2) Quandt. Nac!trichten IJOn su ~ittam, pag . 6! .
,.

VOYAGE
que1qucfois etendu long-temps sans être en-
terré. On dit qu'ils rega.r dent les âmes des rnorts
oo1'lllme l~urs divinités, leur adressent des prie-
res , et leur :a:ttribuent les 'orages. lls ·croient
aussi que les âmes des morts, lorsqu'eHes n\mt
pas été bie.:t:t -tt:aitées pendànt leur vie, revien-
nent sous la forme de jaguars pour leur faire
du mal; voilà pourquoi ·ils mettent dans le
tombeau , au.pres du cadavre , un couri , un pa-
neUa o-q pot de terre pour cuire Jes alimens ,
un pen de caoui , .ainsi qille des arks et des
fleches. Tous ces objets so t placés sous le
'' mo f , ensuite i<ls re,1nplissent la fosse .de terre , ·
pui~ alhtment du feu par-dessus.
~'ajouterai à ce petit nombre de détai!l.s sur les
Camacans, tribu tres-remarquable, quelques
trairts que j'ai tirés de la Corografia'frasilica,
ouvrage peu connu en Europe. Les Mongoyoz,
dit l'alll!telill' de ce1 livre ·qui patait 11'avoir pas
con,n u le :aom de Cam\ cans liNe ce peuple se
donne a' l· m . mem~ , -avec
A • 1 1~LesqueIs on ·coRe'l nt un
trair de pai_x eu 18~6, ét ient -r 'un-is, dans une
denn-douzame de villages J;lel!l peuples dans l e
voisinl\ge et au norddu,Rio PaLipe(Rio -Pardo).
Ch~que famille vit isolément dans sa cabane ;
ils 9ttiti:vent différentes sortes de Ratates , des

·AU BRÉSIL.
coutges ·, eles ignames, des inelons .ci' eau, et
d' excelleitt manioc doux oa a!P>i ; iJ.s reÇueil-
. lent a111ssi beaucoup de miel. Ils enlevent tout
· ensemble les aheilles et la e,i re , et nettQ!)'ent
cette ma~se avec u,:t~e espece de van ; i1s met- ~~
1
te:at la CÍre et les abeilJes d:al',S une e:ertaine
quantité·d' eau, et o:Ptieililnent-ainsi uNe; boisson
enivra:nte qui les m.e t de b(')Ene hlll\llel;lr et
même les l'end quelqaefois fuFi(i!ux. Il:S pré-
parent aussi 1:1ne a'l!ltre boisson spiritueuse avee
eles· patates e!l des racines de maniC>.e bR0yées.
sur - les~:p~eH~s ils v.ersent de l'eatl et qllli Iae· tar-
dent pas à feyrne]tter.
A la Rftissa,.Rce·d'un enfaE.t, le 'Pere -lilíi:Í d0mre
Hn: no1;n ~ SaJl;}S autre cérémonie. Ils pieure1ijt
_1es, moJ·ts , et l!.ls entervent nus en les- plaçél!J.11t
!>? sur leur. séa.lílt (1 };. ils chanteJJllt et da.nsent au son
d'a:n i~s.tJ,?nme;tJ;t qu[ est a.]!:ssi si1n:pJe CJ!Ue. pelil so-
_1n ore et comsiste. en un e0Jrdón minc.e :ll.enda sar
un a:re· (2):. L es femmes porteJJllt eles :fra.Jilges

{ 1) (}a d!it qu'i1s 011t ab,and0nné cette ma;ni.e~e d'' enterrer.


(2) Je n 'a i pas trouvé chez Ies Camaeims 1'instrument
<lont Ja Corografia Brasilica fait ici mention ; peut-êlre
l'ont-ils emprunté des aldé_;~s ou villáges des negres voisins
rles Portugais , ce 1)eupie . en ayant un semblable <!ont il
joue fn!quemment.
de coton délicatement tressées qui leur tom-
bent par-devant jusqu'aux genoux. Les hotb.:tnes
cou-vrent leur nudité avec un értui ·de · feuilles
de palmi~r. entrelacées; du reste ;ien ne rev~t
leur corps bien proportionné . .Jls passent la
plus grande partie de leuFo temps à la chasse
dans les. forêts, ·ou ·à chercher des fruits·. La
fabrieation des pots dq terre est la . seule bran-
·che,d1industrie qu'ils cultivel).t. Ils font des.sohf-
fletS avec la peau des·. cerfs., et quand ils veu-
l~n~ dépouiller 1'animal , ils" conímen'cent par
le cou. Ils regardent le chie:~?; comme l'animal
domestique le pl~s utile;.c'esé·le seul qu'ils éle- ~
ver~t pon:r la chasse. Les outils de _f'e r, sont . ce
qu.'lils e:r;tvient.le plus aux Europ~,ens. Leurs re-
_!lledes c@nsistent en em:plâtú~s composés d'her-
·be~ machées; en décoc.tions et . en ~ains; ils les
connaissent soit par leur expénencê\, soit ·par la
connaissance qu'e leurs anc~tres l~u~ en ont
trar súilise. L'arc ~t les fleches sont le'ii.rs seules
arq1es tant pou~· la chasse q~e pour l~ \ aerre.
Le~ Mong0y,oz qu] ont embra~sé.· [I~~ r~ligion
c~rétienne leur préferen~ {e~ af\;nes à feu. ·

:1
· AU BRESIL.

CHAPiTRE XVIII .

. VOYAGE DE GONQ.UISTA A BAHIA ET SÉJOUR DANS


CETTE CAPlTALE.

V allée pittoresque d'Ur~ba. -Cachoeira. - Le colonel João


Gonçalves da Costa.,:_-;:-Le Rio-das-Contas. _:Le Rio-Jiquiriça-
Laje : aventure àesagréable dans cet endroit. - Emprison-
nementà Nazareth das FaFirihas . -L'ile d'Itaparica.-Ville
de Bahia.

'
PouR alie r d'.Arrayai da C0Nquista, à travers
le Sertam de Bahia, à la capitale de la capitai-
nerie, on peut choisir entré plusieurs routes. Le
grand chemin·de Minas-Nov:;ts et de Minas-
, Geraes à cette ville passe par Villa de Cayte, vil1a
do Rio das Contas ei Villa cla Cachoeira ·de
Paraguaçu. Un autre se rapproche davantage
de farrayal oit je me trouvais, et suit le cours
du Rio-Gaviao. On y arrive ·de l'arrayal en
deux jours, mais il occasiõnn.e un détour. La
route que les boiadas des environs de Con-
quista ont coutume ~e prendr~ pour 'gagner la
l .
capitale est la plus courte; ce ft;tt aussi celle
que je choisis; parce que peu .de voyageurs la
fréquentent, eti d'autant plus que des voleurs
avaient attaqué quelques ti·o.pas le long de
Gaviao.
· La route suivie par: les boiadas, .qui est as~ez
bÓnne dans la saisoU: seche' jU:sq?'à la 'fazenda
de Tamburil, été faite par le colonel João Gon-
' çalvez da Costa,-àses'frais, et jusqu'à présenúl
n'a, po1:1r cette. e1hreprise non plus qae p{mr
plusie~1rs autres également utiles et aUXlJUelles·
il a consacré ape partie de sa f~rtqne, reçu au-
'i curte m . d emmte . , d u gouvernement.
\
Quand on quitte I'ayrayal, on _entre dans
un <'I(anton b. 01se,
• ' des,ert,
' e'}eve,
' <&n' ·des. comnes
1~ •

entass.ées les une's ·clerriere les autres se sli!eée-


dén~.S)).J).S, imtel!:rup~ion etn'offve:pt à. 1\eil qu'uné
sg~1i~.~ de hauteurs. unifornies Gouver ,es de fo-
• pe.u e'lev.ees ; l i'ar.raya.l ~st ~>:Le
rçts f .J me1ne 1iout
\ A

entouré .de bois. ceuê vaste'\ olitude·~ à ron


:pe rencoútre atijoutd:hui~lu''tln tres-petit om-
bre· d'hommes., étart pelllp,lée, ~l n'y a qú'une
I>OÍXlfntaime d!attFtées, de ~h:tsieJ,rs hmdes de
Ca~a.eans ses habitans primítifs :·ils se S~:>Jílt t0us
retires dansles grandes-f0r€11s voisi:nes de la côte
mar~tirn.e, ou long-te:qJ.ps :encare \il~ jouiront

. I
..

AU BRÉSIL.

librement d'un territoire de chasse que personne


ne leur disputera: '
Dans les forêts désertes eles environs de Con-
quista · je ne trouvai d'occupation qn'à obser-
ver les diverses plantes dont les fleurs frap-
r
pent la plupart odorat du voyageur par la
suavité de leurs émanations, avant qu'il puisse
les apercevoir. ·Des fazendas ou habitations
isolées que l'on rencontre à trois' quatre' cinq
et iusq~'à six' lieues ele clistance les unes eles
autres' - interrompent rarement la' monotonie
ele cette route. Le premier jour je ~n'arrêtai
pour passer la nuit à la fazénda ele Priguiça ;
la maison, tres-jolie et bâtie en briques, se dis~ .
· tinguait
r
avantageusement

de toutes celles de
ce cantou, quoiqu'elle ne fut pas tres-grande.
A la brune on entendit retentir dans eles ml}.-
récages voisins la voix singuÍiere eles raine9 ele
ce pays, qui ressemble au bruit produit par les
coups de marteaú d'une réunion de ferblan-
tiers, ce qui lui a valu le nom de ferreiro;
mais rnous ne púmes prendre aucun de ces sin-
guliers amphibies. ·
Un "de mes gens, qui marchait derriere "la
tropa, avoit tué d'un coup ele bâton, sur une
branche basse cl'un arbre, ungrandengoulevent
III. 12
VOYAGE

dont j'ai parlé p~·écéderninel~t sous le nom de


caprimulgus cethrçreus. Cet pi~eau est com·
. '
inun ,dans les forêts; •il se nourrit principale-
ment .de papillons ; il po~rsuit les grandesl es-
peces , telles que I~ nestor et le . ménélas ,
l'emarquables par ieurs lnagnifiques couleurs
bleu;es, et le .la~rte tout blftnC. Ce singuli'er.
oiseau ·de crépusot}le, dont le gosier pr0digieu-
sement large est parfaitement disposé pom:
prendre ces insectes, n'avale pas leurs gran-;
eles ailes; on les voit partout éparses à terr~.
Je trouvai ~ussi dans ces forêts une autr~
11
espece d' engouleven t, . prob~hlement encoi·e
in,c\~mnue ; elle est fort belle, et se distingue
par son iri~ d' un o range vi f ( 1 ). - ·

( J) Caprimulgus ie~co.pterus ' es t le nom ..1ue .je donne ~


celte,: belle espece q;ue )e ne. trouve décrite dáJ1s aucuu ou-
vra~e d'hi)>toire naturellc. Fe~e)le: lougueur ;. onze pouc,t)~
six l,ignes; envergure éles a ~les, v~np-deux p dr ces six li~
gnes; i ris de eouleur ora1·1ge écla ta~h,· hec tres-large et de
la fo;me de celui du capriTJ wlgus g}an,~is ; tarse \ ourt ct'
nu, haut de quatro ligues au plus; aij es ~ tn>ites et lon-
·gueS''; quene composée de dix )J!umes p'a sablement égal es,
· Jes.denx ex tér ieures sont seulem\ nt un )leu plus courtes ;.
~
}Jlurrage au preJmer· aspect d' t1u'- 'ilq.tr
' I1nmatre
' assez "Jonc é ;
I les grandes lectrices postérieures fopnent ~!J ul ement une
loug'ue ta cli e b.lauchâtre naus cette partie; Vt:.n.Lre plus ela ir
' \ '

"'
..
'l .,
\~ '\\

·\
AU BRÉSIL. 79 1

Le second jour de notre voyage, apr~s être


partis de Priguiça nous aperçumes une tres-
grande quantité des deux beaux papill01is que
j'ai . cités plus haut. Les arbres éta1ent plus
élevés' plus touffus' plhs rapprochés que le
premier jour. Ces g~·ands papillons voltigeaient
en foule autour du sommet des arbres , ou ils
étaient att~rés par - ~ne i~finité de .fleurs blan-
ches et jaunes qui embaumaient; il ne fui donc

qúe les autres parties du corps, tirant inême sur le blauc;


tête uoir brun, petite tache blanche jaunàtre au-dessus de
chaque rei! et raie semblable jusqu'au hec; derriere de la
tête no ir brun a vec des ligues transversales jaune rougeâ-
tre pâle; nuque et dessus du cou pourvus,de raies hlan-
châtres ; dos noir brun avec des raies transversa!es minces
blauchâtres ou jaune rougeâtro; bas du dos plus noir
brun; épaules noir brun; tectrices du milie11 et postérieu-
res blancheS marbFées ae brun;-IIOir à Jeur extrêmité et à
leur barbe extérieure; queue no ir brun tres-foncé avec
~ept raies transversales marbrées plus -pâles; intérieur·des
ailes noir brun ; menton blanchâtre; plumes un Jleu jau-
nâtres et noirâtres à leu r ex.trémité J go~ier gris hrun mêlé
de jaunâtre; dessous qu coú et haut de la poürine sem-
blables, seuJement m élangés d' un peu plu~ de jaune rou-
g~âtre et marqués de grandes ta ches noires brunes; ventre
et farties inférieures gris blarichâ tre, marhrées; poitrine
et ventre rayés. Les couleurs du mâle sont plus claires ou
plus blanchâtres que celles de la femelle.
k .
tSo VOYAGE

pas possible d' e~1 prendre un seul ave c le filet.


Les ailes de ces insectes magnifiques, frappées
<iles rayons du soleil, reluisaient ·d'mi éclat in- '
1 Cümpar:able, SUl'tOUt' lorsqú' Orl les ápercevai't

d'tm endroit élevé. t.es ailes azurées du méné-


las offraient des reflets d'un violet superbe,
;celles du nestor ·e n présentaient de bleus de
di\\erses nuances. Le granel papillo!1 1aerte de
F abricius qui est d' un blanc bleuâtre, ·est aussi
tres- commun dans ces forêts et plus aisé à
prendre que le ménélas. Ü-';1 trouve au sud ces
deux ma~nifiques papill<;ms ~leus, même dans
IJ les environs de Rio-de-Janeiro. Ces beauxin-
1 .ronti
seetes r 1e prme1pa
. .·· l ornement _d es 10rets;
r •

Ón, peut aussi 1eur joindie,· le• papillon leilus


qui est noir avec eles raies d'un ver.t do~é; nous
1'a~i0~~s trou;é aboNd~minent à Vf,a-Nova de
Alme1da
I
et a Mucun. Il •y est tres-émmnun
)
dans les eantmts ouverts, même 'Rr~s de ·]a
nH~r. " \ 1 · ,~
J' ai dit d~ns la pre~· ere.p1a~t~~ de ma~elation
qu,e les pap1llons nymphales ~~~1ent tres-nom-
br.eux dans un certa in ca ton, 1r, ferai observe r
ele, plus' que les hélico~i ~~ forment en gcin'éral
la fa]nille de p~piUons ' la plus COJXllutme. dans
le pavs que j'ai parcouru. Ils vo1ti~ent partout
" \ <J

\1
AU BRÉSIL. 181

dans les forêts, notamment i' heliconius phyl-


lis, l'heliconius sara, l'lzeliconius egena,
ainsi que beaucoup d' espe€es voisines et de
variétés . . Dâns les prairies ouvertes et les pâ-
turages, un des papillons que/on voit le plu.s
fréquemment est le papilio plex1ppus de Fa-
bricius qui se trouve même dàns l' Amérique
septentrionale ; on rencontre dans toutes les '
grandes forêts v,ierges le papillon qui produit
sans do~te avec Sa trompe
'
"Ull hruit ·semblabile
. \
'
'à celui d'un batail de eloche (1), le climena(2)
cpli porte sUJr le dessous de ses a.iles le nom-
b~e 88. D'autres belJ~s especes, telles c1ue le
dima~ , le zacynthus , le polydamas , le
nzulizts·, le .dolicaon , etc., .s_?nt plus rares.
La chale~r étant extrême ce jour~là , nos
bêtes de somme épuisées chercherent r eau
avec un grand empresse~nent, . ce qui .faillit à
nous ncca~ioimer une perte . U n des 1nulets se
, jeta brusquement dans un Inarécage, de sorte
que l' eau entra dans les caísses , et gâta presque
entierement les objets qui s'y trouvaient. Le

(1) M. L angsdorf' m'avait dit qu'il se :u·o~wai't aussi ~


Sainte-Cabberine.
(~) Cramer, pl. XX IV : Iig . F • .

..
VOYAGE
voyageu:r est fréqqemmenf exposé à des acci-
dens de ce genre dans ces déserts, et perd sou-
vent par l'indocilité des mulets, par la négli-
gence des tropeiros, ou par les pluies, le fruit
de recherches assidues et de courses longues
et pénibles.
Ayant quitté la forêt, j' entrai dans un· ean- .
ton ou ,des co1lines hautes et doucement arron-
dies étoient convertes de brqussailles ,' ou bien
de vastes touffes de samambaya qui est une
espeçe dé fougere (p_tl!ris eaudata ). Elle cou-
vre ça' et I'a d''liDIDenses sur1aces
I J:>. cle terram,
.
lj
arflinairement l€s endroits nus dans les forêts,
p.bféiion\ ene peu cor.nmun .da.ns cette parti"e du
B~·ésil, et probablement dans toils les páys
cqauds, ·car sous ce climat les ~Jantes d'míe
mpme espece croissent plus rarewent rappr,o -
c~ées- Ies ' unes des autres el; réunies ensemble
9Ufe ~aJaS les _z~pei\tem~érées et f~oides ('1).
Ün1 dlt que les 1eunes pousslils de cetfe fougere
- \ ~

(t 1,' O n peut 1·u e a' .ce siljet


.V ~ d e FI um bolic t
daps sou ouvJage intitulé D e distrihutiotte geog rapllicá
1 '
pltmtarum > p. 5o. Les plantes qu•i vi•veut,en soci été clans
I .
Ie 'Brésil oriental sont le corwcarpus et l'av~cemzia ( man-
glier et paletuvicr )> plusieu rs especes de rhexia , quelques

I
AU-BRÉSIL. 183

font mourir le hétail qui en mange. On attri-


bue un effet semblable sur les cheva:ux à une
espece de bromélia qui croh ici.
Il n' avoit pas plu· depuis long-temps: ces
déserts pa·raissaient entieremeFJ.t desséchés ;
cette sécheresse occasionne la mort d' une
grande quant~té de bétaíl dans plusieurs can-
tons du sertam de Bahia, et cause ainsi des dom-
mages considérables; c' est poHrquoi l'on es1i :fi'ré-
quemme~t obligé de rassembler le bétail et de
le concluíre dans des enclroits plus hmnides.
Souvent on rnet le fe~ aux foageres dans les
lieux secs et élevés, afin de faire produire au
sol 1.2ar cet engrais un peu cl'herbe pour les
amm.aux.
Cependant la nature a répanclu dans ces dé-
serts aricles eles végétaux qui semblent suppor-
ter parfaitement la sécheresse; entre autres un
beau bignonia à grandes fleurs d'un jaune ci-
. tron vif qui s' éleve à une dizaine de piecls de
haut ~ et une casse à longues ét'4ffiÍÍ1es clroites

roseaux tres-hauts ( bambusa ), l'nba et le taquarassu, les


r,almiers nains de la côte' plusieurs foug eres' surtout le
pteris caudata, les cecropia, les big1tonia, et 11lusienrs
especes ·de graminées, etc.
VOYAGE ,

d'une coul<;ur oraüge brillante.; ils offrent tous


deux un aspect magnifique. Le dernier est un
arbre dont j'ai déjà p;rlé, _son feuillage d'un
vert . clair forme une _cime coniq:_ue p'arfaite de
laquellé . on voyaiÍ pendre en c~ moment les
longues gousses articul~es. Il s'éleve ici du
milieu des buissons une espece de palmier qui
n' acquier~ pas pl~s d'une trentaine de _pieds de
hauteur, et qui appartient à la forr_ne des co-
cotiers1, la seule de la famille d~s palmiers que
j'aie rencontrée dans (;e voyage: les feuilles
naissent sur quatre à cinq r.angs, et la grappe
11 porte des fruits de' la gros~eur d'un petit abri-
cbt l; 1"] s sont ' revetus ü]>une ch mr
A • ·Gr.angee ' .et
dou,cd.tre. Les araras les aiment beaucbup,
et ~risellt aisément avec leur bec la noix .qui
s'y .t~ouve. On donne à ce palmie~ · dans l~s
environs de Nazareth, le nom de copos de h-
i \' '
curi; il :1e faut ~ependant pas le c<;>~fondre
avee l'aricuri
.
dont j.'ai\ fait 1~ention
I
pl\'ls .haut,
.
et a}1quel il ~ssembl~ \ ' eaucoup, surto\\tpar
son fruit. ~ ·
Notre marche au mili~q.\ de hauteurs arides
altér,ait tellement les hommes . ' ' et les animaux,
<J:Ue les Ul1S et 'les autres COU_raien,t avidement
étançher leur soif ardente dans les ruiss_eaux

/ \
i
I
I'
AU BRÉSIL. 185

que nous rencontrions au fond des vallées;


leur eau était limpide et fraiche, quoique gé-
néralement celle ·que l'oi1 boit dans ce Sertarri.
soit extrêmement mauvaise. Malgré ce man-
que de bonne eau dans . ces cantons secs et
nus' le voy:igeur observe aisément qae les
fievres y sont heaucoup plus rares que dans
les grandes forêts voisines de la côte. Celles
cpli regnent dans les cantons que j'ai parcou-
rus se di~únguent de. ~elles des autres provin.:.
ces par un caractere p1us benin; c' est ainsi, ·
par exemple, q:ue le long du Rio-San-Francis~·
có, à l' époque ou le fleuve baisse, le pays est
affiigé d' épidémies qui enlevent beaucoup de
monde, et deviennent surtout tres-dangereu-
ses pour les étrangers ainsi crue pour les voya-
~

geu'rs qui ne sont pas accliruatés.


Vers le· soir j'arrivai à Taquara, vieille fa-
zenda abandonnée; il ne s'y trouvait que deux
misérahles cabanes en terre délabrées : elles
étaient . absolum.e nt entourées 'de quelques ar-
brisseaux, de grandes touffcs de shmambaya
desséchées, et en quelques endroits de buis-
sons épais d'une plante haute de c1uatre à cinq
pieds ; c' est une nouvelle espece de tagetes
c(lli répand tme odeur forte tres-agréahle. Il y

\
\
-
tS6 VOYAGE

avait dans cet endroit un coral à bétail dont


les boiadas se servent en passant pour y 'enfer-
.mer les bêtes peridant l'a m1it. Nous essayârn~s
de dormir· dans les. ca:banes, mais m1e q:aantité
prodigieuse de puces et de chiqu~·s couyrit en
.u:fl olin d' ~il ~ous nos vêtemens, ele so'rte
qu'il n0us parut plus prudent d' lça:h>liP up: b~­
vouac en . pleín a_ir. On. alluma le felil. pour
fair.e la ·cuisine, et on fouilla tous les huisso.ns
;v;oisins· p~;mr y cherchê. du. bois sec ; uü. de
mes ·gens y: déceuviit toUtt: p1'es . de _11ous ,. à
côté d'une des cpbanes, un s~rpenCà' sonn~ttes
( cobra oàscavela. ) : au,ssitôt' nous arl:ivâmes
t_pu,s ; I e· repti1e etait
' . cbuel 1e' 1ort
.c 'll· e-
-tra:nqu1

1

mert' et ne. semhlait nullement\s:.in,quiéter de


ce nom;hr,e inusité de spe,c tateur§, de sorte
· qu'flne nous fu~ pas diflic~e de 1' t tourdiv en
1

le. f~appant a:vec\ une petue ··baguefte, et; de


le wer. 1\ \\ :
Le reste de la soiré~ fu:t c~;p.sacré à 1'-examen
de ~1otre pr01e . qm· .fiufi\ ensmte . \d· ns-
. .m1se ' un
peL~.t baril . d' eau- de-vie que ,\é
transportais,.
tou~ ours ave~ ~oi pour ce,~usage'.. Not~e a~en­
tur<t prouve eVIdemment.lme:x:actltude ·et 1 exa-
gérrtion des Jdescriptions que l'on a f-aites du
serpent à sonnettes : car cet ani~nal, cómme

'/
\ -
\\' \
\
AJJ BRÉSIL.
Bartrâm l' a déjà observé, ne peut devenir
~angereur que ·lorsqu'on , s'est trop approché
, de lu! sans I' apercevoir et qüe par là on I' a
irrité et mis dans la nécessité de se ' défencl.re.
Parn~i les diverses especes de ces reptiles il est
difficile d'en trouver une qui soit d'un naturel
plus par~sseux que le serpent À sonnettes;
Da:udi:r;t I'a tres-bien décrit ;. il atteint à une lot!!-
guéur de cinq à nêuf pieds, et à une grosseur
proportionnée; sa couleur est tres- simple~ elle
est d'un gris bruii ,r>mêlée seulement de taches
l0sangées plus claires et 1plus,foncées.
Au point du jour la tropa itait chargée et
dela errmouvement. N ous traversames une vaste
,., A

solitvde ou l'on. r~ncontrait quelquefois Gles


bois
,
neu élévés et des
J.r '
~rairies. 'Des casses à
. r r·
fle~rs' d'un jaune v'i f, des bignonia, des mi-
'mosa ~t des pahniers licuris forment ici. le
forrd des bois, ce qui donne au paysage, malgré
~on <;arac~~r~ rude et sau:vage, un. ·aspect pitto-
resque. Des. vallées profondes eoúpent brusque-1
me:q.t c~s hauteurs dont les flan~s s~t escarf,lés.
Le (o:nd est ombragé par des forêts touffues; le
sol est uniforniéü:tenÍ d'un~ argiJe .l'Ollge foncé,
et ;partout em découvr.e 'les te1~tres jau!1âtres et
coniques des termites. Le pays est animé çà etlà
VOYAGE .

par le hétail~ qui, effar~:mché par l'apparition inat-


tendu€ eles voyageurs, les r~gardeavec surprise .
.On trouve fréquemment dans ce_s cantons la
perruche à ventre orangé (psittaous cactorum) '
et ·le petit pigeon à longue queue ( columba
squamosa). .
Enlraversant les bois peu élevés etles balliers
de ce l)ays on ne sàurait trop se garantir des
petites branclíes eles arbres qui sont eles deux
côtés de la route, car ·elles so~t littéralement
incrustées d'nne innombrable quantité de petits
carapathos ou acàricles qui les i·endent entiere-'
11 mel}t rouges. Si l' on' vient à toucher une de ce_ s
braJches, on 'ép'rouve bientôt úne démangaison
msupporta ble sur tout l e corps ;'\ces petlls . m-
'
1
. •

sect\~s' qui ne sont pas plus gros ~ue la pointe


cl'une épingle' se r~pandtmt partoutl et causent
d es doul_e urs s1. VliVes
. que 1'on ne pe~t
\\ etre
. en
repo,s .ni I~ jour ni)a nuit', jusqu'à ce que l'on '
.e n spit débarrassé. Pres&Iue to'Nte notre\~ompa-
CC • d . mal' twes-gemant;
\ ' A\ \
gme •
souHnt . e ce on ne\ con-
. nalt pas dê plus sur moyei de s'el~ débarrasser'
que ele se frotter tout le c01;~s av~une.infusien
de t~bac à fume·r. Cés insectes incommodes sont
un 1~~ plus gra:nds désagrémen's ~~€ ~~- voya-
geur eprotwe dans les pays seés de.~mténeur ele

I
AU' BR:f..:SIL. 18 '
~9
1'Amérique:
. ~néridionale, et ils reinplaG:ent à·
' .
cet égard les moustic1ues eles cantons;, boi~és et
humid~s. quelques-uns . atteignent à une gros-
sem· a:ssez considér:able, et occasionnent sou-
- r ~
vent des plaies dangereuses qu~nd elles·ne sont
pas traitées avec la prudence requise; ces ahimal-
cu.ks engendrent même eles maladies cutané~s
chez les hommes ma..lpropres. Au Paraguay cet
itisecte se nomme ~inolzuca (1), et à la Guiane
française tique (2 ). .
Nous v~mes sur les branches eles arbres des
' • I

tas de je'unés gr:illons, genrÇ:!_, qui au Brésii


. co~pt~ de nombreuses especes ; quelques-unes
sont tres-grandes' d'autres se font remarquer
par leurs belles couleurs. Je n'ai pas vu les
bandes nombr~uses de .cet insecte décrites par
Azara (3). Il para!t qu' eBes fréquentent dava.n-
tage les terrains unis, et ouverts. ·
Bientôt j'arrivai au petit arrayal9.'0s.:Possoes;
il me sernbla que le curé était un granel ama-
teur de liqueurs fortes, du moins à en juger par
son ,~tat d'ivres e complete. Ce lieu renferme

. (1) Azara, voyages t. 1. p. 208.


(~) Barrere; Relation de la Ji'ran~e equinoxiale.
(5) Voyages, p . 218 • .
VOYAGE

une douzaine de maisons et une ch:;tpellé bâtie


enterre.
A peu de distance com1nence Ie territoire
dl!l capitam mor Ant01;io D.ies de _Mirandà ;_ i.I

habite ordinairement la fa_zenda d'Uruba, oú


ii m'awit invité d'aller Ie voir. Le coionel João
Gonçaives da Costa son pere, ainsi que piusieur&
de ses fils possedent en commun un territoire
tres-étendu, ou ils entretienrte11t 'une quantité
tres-considérable de bétail sauvage. ' .
Le. chel\r;tin traversait ensu~te un pays sablon-
neux couvert d'arbrisseàux desséchés. JZy trou-
vai · trois esp"eces de cactus entie'l'ement no u-
I - '
vefles. l/une se distingue par ses pvm.sses tres-
~otoneuses; 'une autre par ses fNmrs d'un touge
vif réunies -en tête à l'extrémité1des branéhes,
comme da'ns no's chardo~s; ell~s . pn~ presq~e
la couleur d~ ~~lles du cactus fl'rJf;ellifoÍmis.
Ce canton offrkit peu de v~riété. te ~oi con-
• • J . .I . ~
s1s.ta1t presque partou)}en tu~e arg1 e ·p~ne rou-
gertre; le .coco de llcmi hl'i:imaJ.t se~ mais
rarement ce paysage ariéle et sa~vage. Les ara-
.ra9 si. remarqua bles par Ie \ r pl u -;age d'-un ~ouge
I

m~tgnifique étaient extrfmement communs ;, i1s


se perchaient souvent tres-pres denqU:sàl'ombre
suif les branches inférieures eles ~rands arbres.
AU BR.I!SIL.

La ~haleur était aGcablante ; aucun souffie ,


d' ai r ne la tempérait ~ et le sol argileux et aride
de même que le sable éclatant de bla_ncheur
réfléchissaient avec force les rayons du soleil.
Nous traversâmes plusie~1rs torrens dond' eaa·
était trouble et salée· ( agoa salobra); mais·
deux aullres limpides et frais nous fortifii~rent et
nous ranimere~Í, entre autres l'Uruba dont les
ondes ont la pareté du cristal; et qui ser-:-
pente à I'ombrê des bois entre des rives tapis-
sées d'herbes verdoyantes.
Le soir j'arrivai sur une hautf!ur considéra-
_ble ou no~s carnpâmes pres d'ull'"coral à bétail
à une demi-lieue de la fazenda d'U ruba. La
nuit fut tranquille et agréable.' La" lune par ;a
clarté douce diversifiait les tei~1tes de lumiere
des'" collines V0lsÍn!Ols .. N ous ·ne cessâmes pas \.
d' ei1tendre lll!le multitude de voix d'animáux, ear
les cavapathos ·Ne mms laissererrt pas fermer
r reil. Quand le jour parut mes yeux furent agréa- '
blement slilrpris par le. c0up d:reil enehanteur
d'une vallée profonde dans iaquelle est située
la fazenda d'Ur1,1b~. De hautes móntagnes con-
vertes de sombres forêts form.ent un vaste· en-
fo:ncement baigné pa,r le torrent d'Uruba ; du
fond de cet abime ,; éleve la fazenda dont Jes

·'
/
. VOYA.GE

toits' en ~ tuiles rouges offrent ;l!lll contraste pit-


toresque avec le fond de verdure:
Je fus aécueilli de - la maniere la plus' amicale
dans la maison du çapitam mor, qu0iqu:il fút ab-
sent .. Sa famill.e,
. '
qui ainsí que I ui ·est tres-consi- .
dérée dans le cantou, me combla de marques
d' attention. On poussa la politesse au poi:rit d'en-
v-oyer u'ne . quantité de provisions pour ·.ma
tropa,· sur la hauteur ou ~e trouvait· mon bi-
vouac; plusieurs esclaves des .deux· sexes ~n
étaient chargés, J' aurais volontiers' passé .plu-
sieurs jours d:ms ce~te mai(on, hospit!aliere, mais
CO!nme le chef de la famille édit ;J:?se~t~ et qu'un
plfs long séj our nem' aurait procur{_aucun avan- .
tage, je me décidai à continuer \mon voyage ce .
jo}1r même; et vers midi j'allai ,rejoip.dre mon
monde. En partant je reçus en pt~ésent quel--
ques_b eaux perroquets qu~. parI. \ tres-
ai!;l!lit ' b'1en,
Nou.sarrivâmes lesoirà la fazenda {leLadeira
• • ' d ans
qu,1 est s1tuee I
uN.e vali''ee tres-pr6hOI'l.
' ~1.' d e au
. I
mi,lien.d'un pay~ e~trê \: e~enlt montag~Je~x:; elle
apfart~en: auss1 a la f~mlle d 1 cap~tam moi·.
La, descente à travers la: forêtil monotone qui
corvre tout le voisinag~ \ ut tres-pénible ·pour '
nO§ mulets; e~ une pluie· a'b ondante qui. dura
toute l'apres-midi augmenta beaucoa p les dé-
~
AU BRÉSIL.

agrémens de ce voyage. Parvepus au .f<;m.d de


Ja vallée, de nouvelles scenes agrestes frappe-
rent nos regards. Devieux arbres tres-élevé set
couverts de lon~ues touffes pendantes de til-
'landsia nommé barba dopao par les PortugaisJ '
présentaient des forines extrêmement bizarres.
Les grands araras rouges étaient tres-commun~,
et si peu farm:lches à cause de la pluiP., qu'i]s
restaie~t perchés sur les a~bres 'au--dessous des-
quels passait notre bruyaiJ.te tropa. Nous v~mes
à Ladeira quelques méchantes cabanes con-
struites eri terre et en bois, et as~ez ~ástes, q~i
étaiêftt h:ibitées par des e'sclaves negres. tis ont·
soin du bétail des solitudes voisin~s. H l a au.ssi
,.dàns· cet end-roit des chmnps considérables oili.
I -
l'Ol'l cultive c:!Lu cotou.
A six lieues .de .c ette faz<ill'l.da 11e trou;v;e . c·ell~ "
de Càchoejra; ou de1ne.ure le colonel :To~@ Gon~..
çalves .d<il C<Y.sta, pere clu capitam mor. Je dési_:_
rais vivement de faire la connaissance de cet
homme qtti re 'premier a ouvert des routes pra-
ticables dans le Sertam, et cofnbattu les indi-
'
genes d'e tons IyS COtes, . pa,:Ge que J esperaiS
A , ., ' •

oht(}l1Íi', de hú· des ;renseig:n,emens authentiques


s~r ce ·pays. Je poursuivis ,d onc mon chemin .à
tr;lver.s'P,ne solittlde in!lpraticable ou .Jes monta~
Ill . 15
VOYAG-E

gnes,·enta,ssées s' élevaie11t les un~s aa-clessus eles


autr.es, offrant Une masse tínifbrme· de .fgrêts .
passes qne perçai~nt ç~ et là eles r0chers rabo-
tet~x· et de formes diverses; In~is en général ::tr;
rondis à lelir parti~ supérieure. Dans les endrdits
~ ~ • I • I

dégarnis,d' arbres on voyait-que le sol c,onsi~tait


~ú une argile jaune rouge. Le clte~lip_ était bprdé
de clla(_r,ue cqté de nois de mimosa 'é pineux' au
feuillage flnenaent déÇoupé, et mêlés de quelques
í:>James à .fleurs m~gnifiques', parmi lesquelles je
me. contenterai de citer uNe helle espece d'ipo-
·r ' ·~ . , ,.
.1f rea a grandes fleurs .d tm, rouge de f eu !'. q:ut
. e~ st nouvel~e. Les b~ocs de foclters de formçs
les
I
ü}us sing11>lieres.
'r , , , v
seu.vent
' "
\se1nblab:les à dés
\ ours ou ~ eles dGmjoNs, .et s~éhrm.caHt · isolê~ent
I ~ .•

,. .2r tvaver.s d:~s.bois, ·sont gén~ra~~ent. ~a:Oi'tés


~lans ces ~reg16>ns paT , le petrt
1 "' I·
CqVIa crte·~plus

, ·}wut s0~s Ie n0rnr 14~.:~. · moeo; ·on a1 .nF11


. ··t vrvement
·
·1.a c'hasse a' Gal!lse ttr
., J sa c ~ 'a1r . regant ~. .:e ·.
' .eomme
- ~avoureuse..' , .. f\
·. \ . · " ~ :
.Autrefois des hordes. enne1· '\·
Í'es de Camacans
((rtaien.t dans ces solittrd!~s; le •0yageur ne pou-
, 'l d • • enfi n
yalt•
_s' y' aventurer Iqwaq
'
, pe~.:1 ·e: sa v1e;
<~n ~es (orça·ele se re~~rerq~l'ans l~s forê'l!s pliits
~·appr0chées de la côte , . et ee flú là· q~l'en 1 ~'o7

l ~%
AU BRÉSIL. I

.I

- on conclut une paix définitive avec ces sau-


vages.
Ui1e cháleur insupportable régnait dans ces
forêts ariaés et entr~cqupées de rochers; on n' y
ressentait pas le ínoindre souffie · d; air., les
rayons du soleil étaient refléchis ~vec force de
tous les éôtés. L e sol même était brúlant, les
hommes et ~es animaux: haletaien~.l épuisement;
il n'y .avait que les araras qui semblaient se
plaire au milieu de cette température embrasée :
ils volai~nt de tous . côtés eü criant' tandis que
la plupart des autres oíseaux .se tenaient tr;n-
quilles sur u~e branche à 1'ombr~ pendant ia
grande ardeur du jour. Quant à nous, il nous
fut impossible de nous arrêt~r dan1i le moment
ou elle avait le plus d'in tensité' et no~s conti~
nuân:es ;à marcher jusqu'au soir. A!ors nous
nous· arrê.tâmes à une fazenda situf!e. dans ui:t
prolongement des val,Jées sauvages de ces mon-
tagnes. - . ·~
· ., ·
I L es negres·
' bA ' 1 . ,d
, ep atlssant eurs cases autour e
la demeure
. de M. le
r coldnel .João Goncalves
~

da Costa, à la fazençla de Cachoeira, ont formé


.un petit village. La situation n'en est pas·agréa-
ble, on n'y découvt'e qu'{me per~:pective triste
et inani:mée qm me rappelait Jes, descriptions
" '
! !')6 ' . NOYA<GiE

!Iue l' OJíl fait des páys~~ges d.:e' l'Afriqu~; Lf _pro'-


r •
priétáir~, donda maison avait été br.úlée depuis
pe1\de téHlps, ·de11reu~e prdi.Rait.e~ne:nt .dans une
fa~enda voisine.Jl se ·tro~vait par hasarcl. à ~~le
· de.' Ca~h0eir.a. , C' étaiv 'u:n ·v.ieiJiavd ,de ~ qliat:r.e7
. .. an~ , _. er.üe.óre p,ctl!'f et 1I'onust~
:Vlpgt-s;tx l
;.:['l...l'tfiU,-
.pçy.r~a~t. re n iviv~cité cl'esprit slil!t hea~coup ·.fie
j'eJ.Ine~ .genS!. OJ.t r.e.C,@'t:l.llaissai.t' sans :péin~ ,qu'il
la'':'aLt ~u d· ans ''q q ,_age moms aM<U=J.C~ etre ~our<:
' _]'A A ' ' ' A .J '

l de bea-ctÇoup .~e N~g}'le.ur, .de c.o,ur&ge .eLdé '1Jar-


d~e\)se. 11-me . ft'eçut de· la ~ualil:i,~r~·Ja p~~~· ;;t-m j;->
fale? et té~oigJlfl Sa jor@ (:!e. yoÍf UJâ. ~>H.f@,rr.éen.
~~ r,.o~lyyrsation n,~ ·p~ut 'liJU~êtte. ins"l;t!l.M~ti;vé' . e.~
A I"
Jl1.te.ressa:nte
• ' • •
pom.: tQU:S'
p::s -vqya,g;Ç:Iii.J's. ;n.
~- ~
·. age
"" l ~.
de s.t:;ize: a~íJ.s il suiv~e ~OJ.il ,pen:eb ~pJ qui le pGll"'ta.it
' à ·vi.Sher les"' pays ·lointatm.s. H fltban.do}'1u"~)e ·Por-
. al . . '; ' .\
·tug ,·. sa :pa!ne, et v.mt s eta!l1:t aq IIJ.Ilil!eu ,til;~s
.. '
't-pontagpes' sªu:vag~s du S€rtê.m'd~ ~ae,apitainJJ.r-i@
de Bahia, ,o;u!fn vastff champ de~~ravai:l.>potw
pluswurs. annees,. s,\ouvnt . <''!-. son ar d\\
e.u r. ll -e.0·~-
. h <A\ d
batt1t.ave.c .e aucoup , e reso utwn .\;~ . 1, 1· · ,·
.€-t~'t~e per·s e-

Néranc;.,e les ~atach.o~ qll.'il -~o~nmait Co4J.1r!tGlllos;


les C~maç~ns ··et !le~ B.~tl9'cmi~ys. lt l_JÇtre,ourut;
1

a"\!,e.c des dé.pel'lses cG>~sid~rahle's et les efrfe,rts.les


plu;; soutent.1~ ;, .ees fdrê Cs.' aq:tiq,aé~, I;J.avigua · ~e
premier sur plusi;~u.rs fleuves ~tels que 1e Rio- ·
' . ~

I ,
AlJ BRI!:SIL,

Paedo, le RiG-das-Contt.~s, le R~o-dos- Ilheos,


et une paetie du Rio-Grande de Behmonte,
tnmva }elilil'& emb0uchur.es dans la mer, et même
leurs communications entre eux. Sur le Rio-
PardO' i!l soutib'lt plusieurs conibats contre les
Botocoudys. Ces entrepdses lui fournirent fré-
quemment l'occasi01i de donnee des preuves
d\m caractere extrêmement décidé et d'une
geande présenee d'esprÍt. Un jour, par e·~emple,
accompagné d'un petit non1:bre d.é gens ai·mcs,
il s'approeha_tellementd'un graHd rancharia de
Botocoudys, qu'il ne lui était plns possible ele
retourner sur ses pasfalors il se cacba le plus
vite qu'il pt~t avec deux de ses gens, et fit re ti-
rer les autres. Ne pouvant espérer de rester
long-tem.ps dans cette position dangereuse sans
être aperçu, il se jeta hmsquement au milieu
des sauvages avec ses deux compagnons, et tira
deux coups de pistolet. Les Botocoudys ana-
qués< ainsi à l'improviste crurent avoir à faire à
une troupenomqreuse, et prirent la fuite enlui
laissantquelques prisonniers. Plus tard il a com-
:meneé à civiliser et à baptiser plusieurs Cama-
caos; puis il les a employés ávamageusement
daNs ses excursions contee les anLres sau vages.
n m'a assuré que réunis aux blancs ces hommes

''
VOYAGE
montrent toci)ours b<:;.aucoup de courage dans
Íes combats.
Quand il comm.ença son établissement dans
)
ces solitudes, les for~ts étaiem n:implies de bêtes
féroces. Dans Ie premier mois il tua vingt-quatre
jaguars, et'les autres mois un cert;in nombre
qui allait toujours en diminuant; de sorte
qu' enfin ü· put essayer d'y créer un coral pour
le bétail sauv~ge, ee qui eut d'abord été abso'"-
lument inexécutable à cause de ces animaux
dévastateurs. Ensuite il ouvrit dans les forêts
plusieurs- routes; celle qui1mene par Tamburil
I· aux frontieres de Minas-Geraes est I~ plus con-
I ~idérable. Elle lui a coúté beauc~úp de temps,

I ft a engé de tres-grosses aV(:lp.GeS que legou-


vernement ne lui a pas encore remboursées. On
l'a, pour le récompenser, élevé du rang de
n
~~apitam mor à celui de êolonel. passe la plus
grande partie de ses momens de loisir dans ces
diverses fazendas, qu il a établi de 'g:randes cul-
tores de coton et de mai:s ~ Il fournit cette der-
~
mere denree avec une generas1te et une preve-
\ • ' /o , '\ , , • f ,

nance extremes a tous 1es voya eurs. L''etranger


1
• '

qui parcourt ce sertam isolé et presque inha..:.


b~té n'oubliera jamais l'hospitalité qu'il a reçue
de la familledu colonel da Costa, notamment de
1 r ~ .

\\
AU ' BRÉSIL.

son f:tls le capitam .mor Miranda : la mémoire


de ces hommes de bien vit mêm~ dans les ré-
gions éloignées, ou la reconnaissance de ceux
qu'ils ont obligés leui fait un monument im:-
périssable.
Apres Cachoeira les monts continuent ti être
déserts et couverts de forêts monotones jusqu:'à
la vallée du Rio-das-Contas, oh l'on arrive en
une journée. La grande cbaleur rendit durarit
.cette route 'le manque d' eah tres-pénible. Lés' ~
torrens ont un gout salé, probablement parce
qu'ils ont traversé dans l'intérieur de la terre
eles coucbes de sei 'et de soufre; car ils sont
troubles et d'une couleur blancbâtre. Les ter-
tres eles termites •Ct les volées cl' araras sont les
seuls objets remarquables du regne animal que
I' on rencontre. En revanche je vis plusieurs vé-
gétàux intéressans; entre autres un arbuste haut
de qqatre à cinq_ pieds avec de grandes fleurs
tubulées jaunes, et en dedans tachetées envio- _
let; ses fenilles_sont larges et fort belles.
Accablés par la chaleur étoutfante et par le
temps orageux, nous n' en continuâmes pas moins
~1otr~ marche à travers eles torêts basses : la plu-
part eles r\ússeaux étdient clesséch~s; nous cher-
chions en vam un filet cl'eau pol.tr étancher
200 ' VOYAGE
notre soif. Eniiin, vers le soir, les montagnes
s'ouvrirent 1an peu, et nous laisserent aperce-
voir des terrains dont la disposition variée et Ja
verdure de teintes diversifiées nous annoncaientl
, '

le voisinage d'une grande riviere; effectivement


nous ne- tardàmes pas à nous trouver sur lês
b0-rds du Rio-c;las-Contas.
Ce fleuve, qlii porte d' abord l~ nom de Jus-
siappe, prend sa sour.ee dal).s le Comarca de Jaco-
bina, et reÇoit plUsieurs rivieres. Son.lí.t en ceten-
droit avait à peine soixante pas de large~r, mais
on dit qu'il s'agrandit bientôt, etque presde sort
embouchure· il est plus considérable (r). Nous
le pass~mes sans peine à gu.é sur_ nos ·chevaux;
on trouvé à sa rive septentrionale deux cabanes
dans lesqu:elles le propriétaire de ce c~ntOTJ, le

(.8) La Carograpltia Brasilica donne les détail~ suivans


~ur. ce fleuve : • " 11 prend sa source dans~\e Comarca da
Jacobina; il reçoit à sa rive s~ptentrionale le Rio-Preto,
le Rio-das-Pedras, le !\~ na ger , ]e Ribeira~ d'Area,, le
I '
Pires, l'Ago.a-Branca, l'Orioo. Guassu qui •tra, etsenb. de
~~andes forêts, ou l'on pourroit étaolir de nombreuses co-
Íonies; il reçoit à sa rive méridionale le Grougouugy, qui
~ui cede peu po'~tr ]e_volume des eaux, et dont le Rio-Sa-
vna est le principal aflluent; les Pataclios haJ!litent le pays
•1n'illarr.ose. A:u-dessous dn- confluent ,on ~rauve la• pla"nta-
,,

AU BRÉSIL. 201

colonel de·Sa a établi d€tt4 familles de ses neg~es


'qui tiennent une V€nda. Les voyageurs peuveRt
s'y "[ílrOCl!IFér du mais-, ae l;eau~de-vie et dura-
padoura. Le colonel habite d;ms une fazenda
impovtaB.tÍ~ située 'à cinq,lieues pitus bas sur Ia
riviere.
Les bords du Rio-das-Contas dans I'endroit
ou j·e' le· vis étaien't tres-p]ttoresques. Des mon-
tagnes de formes va:riées,et bien boisées s'élevent
des toutes parts; à 1eurs pieds croissent des bo..;
cages tou:ffus de grands arb.l'es. entremêlés de
prairies v~rdoyantes. Le rivage est ombragé p.ar
de vieux mimosa au. feuillage ·finement décoU:pé,
et l'on entend retentir du milieu de ces bois
épais la voix rauque etfG>Tte des araras. Cepays,
éncore tres~peu habité, passe pou1' tres~fiévr~u X';
cependant le vieux colonel da Costa m'a as-

~íon d·e Dos Funis, ou le fteuve, partagé et presque oaché


r entre des masses de rochers, coule avec une extrême rapi-
. nité. L'embouchure .du Rio-das-Contas ou de Contas est
située à peu pres à dix legoas au sud de P'onta-Mutta , et
autaut au nord d'I!heos. Les surnacas, qui sont des bâti-
mens à deux mâts ou de petits brigs, le remontent à quatr.e
legoas j-usqu'aux premieres chutes: 011 voit clans cet cndroit
une alàea tres-·pet~plée, avee nn ermitage." (Tom. H,
pag; 101 ).
202 VOYAGE
suré que ces épidémies sont causées non par le
climat, mais par la corruption d'une immense
quantité de capsules de cotonnier que 1'on a
l'habitude de jeter dans la riviere: Depuis que
l'on s:en est abstenu, les fievres sont .devenues
moins communes. Npus avons souvent P.ê ch<0·
dans les rivieres de oe cantom, telles .que l'Ilheos,
le Tahypé et d'autres, de peLites plantes aquati-
ques tres-délicates,. dont une, quiest un azzolla,
se ~ontre à la surface de l'eau, l'autre, <riÍ est
le potamogeton tr;nuifolius de MM. de Hum-·
. . '
boldt et Bonpland, s'enfonce un peu plus; o:q,
1 le trouvait mêlé avec une espece de caulinia.
Le pays arrosé par le Rio-das-Contas offre
plusieurs
1
objets remarquables en histoire natu-•
relle. Au déc~ du jour j'obseryai une grande
qlfantité de crapauds ( bufo agua, L. ) , quel-
ql: e~-uns de dimension colossale 1dont le dos
gris-jaunâtre étai~ couvert de taches irrégulieres .
d',tm brun noir (1); l'a voix du ferreirb~e faisait
entendre dans les mar1~s. L Js chasseurs {d u can-
1 ,.,__ , • I • . ,
top ·m ~.sureren~ tous· nam ement q 1e 1on
\' -

(1) Daudin donne une ass'cz bonne figure de cet animal

.
1

dans son Ifistoire naturelle des rainettes, des grenouilles et


des crapauds, pl. XXXVII •

..
AU BRÉSIL. 20~
'
y trouvait une espece de jacu (penelope ) que
l'on ne rencontre pas plus au sud ni plu~ pres
de la c·Ôte. Quoique je n'aie pas vu cet o;seau,
la description qu'on m'en a faite me donne lieu
de présumer que c'est le penelope cristata de
Linné.
Naus étant, pendant le crépuscule ' ·.appro_.
chés de nos mulets qui paissaient, naus avons
. vu voltiger autour d' eux une grande quantité de
gnosses chauves-souris qui faisaient beaucoup
de bruit en agitant leurs ailes. Nous 'ne púmes
à notre grand regret rien entreprendre contre ces
ennemis menaçans, parce que l' obscurité empê-
chait deleur tirer des coups de fusil. Naus con-
cevions de vives inquiémdes pom nos pauvres
animaux; elles n' étaient que trop fondées, car
au retour du jour naus trouvâmes que tous ·ré-
pandaient beaucoup de sang; bientôt naus r~­
connúmes qu·e quelques-uns en avaient tant
perdu qu'ils ne pourraient pas Iious servir pen..!.
dant cet_te journée. Ce vampire (phyllostomus)
fait avec ses dents un grand trou dans la
peau lles animau"-;, ouyre la vein.e et suce le
sang, qui continue à couler encore long-"temps
apres qu'il s'en est gorgé. Koster raconte que
dans quelques cantons on suspend sur l'animal

VOYA.GE

ún~ peau de chGllteLte potH' ~.e préserver dé ces


enil.enú.s dangereu:x. (1). Je ne pais d€terminef!
à cruelle espece appartÍennent les vampires qui
so:nt si nmn.hreux dans les elílvi~·ons de ee liel!l, ,
e~pen dal'l!t 1e '
' preslilime,., cl' apres
I
ce <JUe m ' ont cl'1t
les. habitans, que c e sont des j.a ndiras ou gaan-
diras Ç2).. ·
· Je vi& à mon départ de cet e:adroÍt 1me
. , d 'L
gra:n de quantlle ·:e J:Jea:ux p1geo:p-s sauvages que
• \

,j.e pris cfaborclt pg.ur eles pêÜts du cetlumh€L spe~


I ci0sa, mais bientôt je me convainquis qu'ils for-
i
'I
'J (r) ·JToyages pag. 292 et'suiv.
·· (2) Le ., guandira d•es canlons que j'ai' ·parco~tus me
P•fra·i't< êrre une; ' e&peGe , différe1111~e du\ vamp'ire erdina:.i·re
CJ,oltyllostomus spcctrum): je-Lui donne !e n0m d.e pliyllos-
1
tomus •
ma:r:imus. · Non. seulement• il est plus
I gros que l'e vam- •
. I
í> jre _no~me par: ~z~ra ohauve-souris troi s\i_eme o~1 cliauve-
sÇiur'IS Thl'une; ffi!J.IS 1! a une queue, cara~t\'r..e qu1• manque
er~bierementà ce \-le nier. Le guandi-Fa qttle Í ai vu ales· di-
1 ' 1 '
Plensio.ns suivantes: lot~,gueu r, ,f inq ponceg~ ~1e ligue·, y
cClmp.ris Ia q,ueue tres-fa-ih\~ qui est seu!ement indiquée dans
1
F~ memora~e des a:iles : ênvergure ·des ailes·, ~ ngt-d'eux
(. Ji?. uces dix l~·gnes', T1afÍteu~ d >!.'orei~! extérieure au•dessus
d1a la tê'te, ,huit ligues: hauteur de la ,membraue au-dessus
dJlll . \ I . I' d '
11C2l' en•tre q uatre et cmq ~grres. : ongueur ·\l J:lOUCe ,
I

c1nq ligues et demie .: long.Ueur du mél a tarse, onze ligues


el: demie. Uessus dn c·orps gris brnn foncé, quelquefois nu
1

p eu roBgeâtFe: . parties inf~l"iéures plns pâles.


1 li).
b

\ .
' '
'.

/' .
.AIU ··BR!ÉlSIL. '

~ient une es1~ece párticuliere que je I'l'avais pas


(:n1ço.r.e yue, et' dont la. ehair. avait três- bon
goút (1) .
.Je suivis 'pe:lldant • à peu pres une l ~goa_la
· vallée' oi.1 .coule la riviere, .ensuiteje tournai au
·nord pour franchir les nwntagn~s. Cette con-
ttée. eSt três-peu habit~e·. Partout le terraiin est
CDlil.yert ·d'tllle for~t épaisse; des },)Pomelia et des
taquarássu ' tres-hauts rendent les endroits les
plus toüffus impénétrab]es. 'Ün trouve abon-
clamrp.ent da:nscette solitúde l'àcahé d~za,.ra, ou
corbeau à barbe bleue (cor:vus cyanopogon);
les habitans 1ui donnent le nom de geng-geng.
Un de mes •g ens, qui m.archait piedums pres
d'es mulets, aperçut assez à temps pour pouvoit' " .

la ;Pller' d.'un. c;(!)up de h.â:t.on une·vipere r'otilé~


Sl:'lir eUe-Inême Hans de la ·feui'llée seche prês de
la route. Au premier 'co~p· d'reil ell<;! parut par
sa .co.u'leur et sa figure .av~ir la plus granHe res-:-

/ )

, • (1) Colum'ha leucopt;mL paralt ph,ts gra"llde que le


·tr.ócíliis (colwnbaspeciosa); Forme svel.le; .bec :Qoirâtre•; pierl~
ro'ugeâtres·; plumag~ gri~ · c.endré; plumes du cou ma!quées
.d-'une lign~ arquée ·' étroite, noi-r âtre; eroup)on d'u11 bleu
cendré vi f; plul\les d-u IlJ.'~tpiex rat)1g. <le J'aile e.t · cp u-
vertures ·d!ls , tectrices blan~))es ,, ce q~i liÍ.pune à l'aile
dans . cette partie une . -~arge b.ordu~e de oe~te coul.eur. ·
'2o6 VOYAGE

s.emblance avec le jararacca; mais apres ·favoir


examinée avec plus d'attention, je recónnus crue
é'était une espece bien distincte (1). _. ·
- r

J e passai lfl nuitf ·a u líivouac dans une petite•


prairie entourée de fo~êts, e~ norrim~e .Cabeça
do boi (tê te d~ 'b reuf ). J'y remar~1uai pres d~
~ous une àristoloche à tres-gra~1des fleurs j~u-:nes
d'une forme singuliere. M. de Humboldt fait
mention d'une espece de ce ·genre dont les fleurs
sont d'un~ telle dimension que les petits garçons
,\

-
. {1) ee serpent venirneu;J!l appartient au geJn:e cophias
/

établi par Merrem: c'est une espece non eucore décrite que "
j ~ nomme c.ophias holo.ferileus à cau~s~ de sou bel éclat"' ve-
louté. Par sa forme et sa .couleur il ressemble beaucoup ~u
j/1raracca (copltias atro:t:) avec leque! ou Ie onfond commu·
némeut au-Brésil; mais en Ie cousidérant attentivement on
rr marque des diffé,reuces. Tête plate et tres-saillayte à la
1\aissance des mâclHlires, ce qui !'ui donue resque l'appa-
rence d'un fer qe "flech~ ; ces .é1e,ux partie~ s.a lllan tes sout
~larquées d'une raie 'long~ udinal~ claire sur u,n, fond plus
I , \' '\
foncé; ces raies naissent au-dessus des yeux. Pa.rtie snpé-
1 '
r jeure•du corps d'uu brun c fé fone qui chatoie comme
de beau velours, et marquée ·d~ taches plns ela ire.& de forme
allongée·, rangées sur plusi~urs •Jignes sur le dos"'~vec leurs
p,ointes opposées·; lo'llguenr ,. vingt-deux po.uces six ligues ,
· y compris troís po~1ces cinq ligues et demie pour'l_a queue;
quarante-six paires de plaques caudaleg,.
t

1,;.

(;-. AV .. BRÉSIL. 2.07


•.•.

s"en couvrent la tê te CQlnme d'uil bonnct '( 1:). J e


·fus obligé pour avqir de I'eau à boire d'en en-
voy~r chercherpar plusieurs de me~ g~ns; apres
avoir rô.dé" ti;es-lo_ng-te~ps ils trouverent enfin
une flaque d' eau a&sez elaire sur vnrrocher dans. . I

le fond de la f01:êt; ils réunirent aussi dans des


vases celle qBi s' était rassemblée entre ia tige
et les feuilles roides et creuses des bromelia. Ce
fut avec ce seccmrs que nous p~es désaltérer '
les hommes, les chiens et les perroquets. Quánt":_
à nos ·pauvres bêtes de somme; c1ui ne pure)Jt
pas gravir sur le rocher oú, était la :fia que d' eau,
élles furent obligées de, se pas'ser de boire jus-
qu'au lertdemain. Afin de soulagér·leiir tour-
ment le plus tôt possible; je partis de tres-bonne
heure et je traversai de no11veau devastes forêtís
dont les ~rbres augmentaie~lt p~og·ressiv:em~n.t .... ' . ti
de hauteur à mesure que 1'on s'approcbait d~
la côte. ~
....
'
Parmi p1usieurs·végétauxnouveaux je rel~ar-
q.uai. trais especes de houx, à bel,les feuilles lui-
....
santes en partie fort g:I:andes. Les troupeaux de
...
"t
bétaii que I'on me1,1e vendre à" B~1Iia défon-
~;\


(1j AnsichtenrferNatur,p. 277· Tableau:r: de La Nature,
t. li. p. l€>5 . ::.'f, ":

... ..
...
-~

·.
VOYAGE
eent tellement cette route par les temps hur
mides, que les.animaux courept le risque de s'y
... '•, casser les j-ªmbes; ·de plus , le~ montagfies qui
sont tres-eséarpées apportent 'aussi de grands
obsta eles à leur -marche, surtout lorsque Ie ter-
rain gras et argileux est mouillé et deviént glis-
~ant . Une de ces montagnes fut extrêmement
péni:ble à esealader; il faut une heure entiere
pouT parvenir à son somm.et. J'y vis des barri-
gudo .dont le tronc était monstrueux. Leurs
g~andes fleurs à cinq pétales bl anchâtr~s et al-
longés eouvraient

la terre M
\1
mt à l'entour. Uy
•• a·plusieu.rs, especes de ces bombax qui se dis-
tinguent pror'nptement à la forme de leurs feuilles;
lqs unes les ont lobées, celle dont je viens de
prrier les a entieres.
Je vis sur _l'écorce des arbres eaucoup de
1~zai·ds. C'est une espece dont la \~elle couleur
verte est chatoyap.te; ils n' étaient pas farouches,
.. mais ils gonflaient la poche de leur C0'\1 aassitôt
. I ' '
qu'on s'approchait d\eux. Cette própd~ té le~r
a valu le nom de papo ento ~ue les Portuga~s
l~ur ont donné (I). \
• ''A.

(1) Agama catenata, espece nouvel)e et nou décrite :


,' .~~ lo jJg u-eu r .du c~rps, trois po uces ciuq li gues et de.rr!Íe; que-ue,

.• f'·

. ~
AU BRÉSIL. 209

L~ lendemain je traversai un pays montueux.


en partie couvert de hautes forêts; nous n'y
trouvâmes que de l'eau trou.Ble et rnauvaise à
boire. On apercevait fréquemrnent dans les bois
l'iniliuzeiro, arbre qui porte l'imbu, fruit jaune
et arrondi de la grosseur d'une prune, et d'un
goflt aroma tique,extrêmernent agréable ( 1 ). ...
.
:Les fazendas ou l'on peut passer la nu.it sont
extrêmement rares dans ce cantou. J e vis beau-
'

six pouces onze ligues; quelques individus sont plus grands.


Couleur, vert d'herbe clair; extr~mité du muse_au et raies
transversales de la tête , jaune vert, entourés de noir; le
reste du dessas de la tête gris brun, avec de"'S raies plus fon-
cées . .,Le long du dos regue une , pe~ite çrête membraneuse,
dentelée, bordée d 'une chaíne de taches gr..is hrun foucé à
bords noirâ tres, et entourée d'une ligue d'uu vert vif ;
taches du d9s un peu verdâtres 18ans le milieu, souvent
plus rapprochées les unes des autres, ·soüvent plus lózan-
gées; petit appendice noir en dehors de la ligue verte,
et eusuite de chaque côté du dos une large raie droite
vert bleuâtre pâle qui se , prolónge· un peu au-d~Ià de
la racine de la queue, puis disparalt, termiuée du côté
vert de !'animal par une raie de petils points noirs tres-
rapprochés; petites taches noirâtres isoit!es, éparses sur le
fond vert. Partie iuférieure blanche, marq uée au-dessous
des yetlX et de chaque côté du cou d'une raie noir brun,
et tachetée de petits poiu ts et de tach'es no ir brun Íiolées.
(1 ) Spondias · t!"bemsa (Arruda). V. Voyage de Kostél'.
IH. 14
210 VOYAGE

coup de champs jad!s cultivés et aujourd'hui


abandonnés en partie. Le ·bugairwill'ea bra-
siHensis y éiàit tn~s-commun;Jes grandes 1 bra-
~ées de -ce joh arbrisseau lé ftmt paraitre tout
rouge; ·au-dessus ·. <ile leurs touffes s'élevaiem
des cassia aveç: leurs belles fleurs o range vif;
ces deu~ arbres ornent singulierement un
1 paysa.ge. "
-. Noris trouvâmes en cet ehdroit de mêrne que
dans 'plusieurs fazendas du Sertam un hangar
particulier ouvert sur les côtés, ·et couvert d'un
. l es v0yageurs y entr~pt et s' y mettent pen·
tmt;
I - dant la nilit à I'abri-des \ njures de l'air1 La
1
maison du propriétaire de la f~enda de Sai"\_t á
Agnes était dans les ~nvirons, de notre hanga1';
<ies pl'antations et des 'forêts, l'entouraient' de
' '
to~s -côtés .. On m~ ~on~ra un~ pea~ .de jag1aar
nmr (folzs braszlwnszs) tue tlepms peu de
temps dans le's bois voisins. Elle était g{gantes..:
,
q~e; .elle.
.
avait sÍx\ pieHs de longdeur indépen-
. ~ .
damment de la qu~u:e; nr ne. vou1u\ pas me la
.... ééder, parce que lê Pottugais les emploient à
faire des housses de cHev~ux. '
Plusi~u;s tropas ?e \finas 0u du Sertam qui
·s'étaient']1l1acées ainsi que 'l!lous sous le hangar,
emportaient beaucoup de\j eun:es perfbqu:ets; on

..
A:U BRÉSIL. 21[

leúr àpprenaii a
parler po:ur les vendre à
Bahia.
Il faisait dair de Íu.ne, le tenips . ~tait tres~
beau; j'·e n profi.tai p0ur envoyer mes gens à la.
~hasse des gremouilles fe.rreiros qui remplis-
. saient les mar ais voisins. llS iarmerent d'un
tison ardent, puis revinrent .avec plusieurs de
ces animaux. Le ferreiro est une espece <le
raine nouvelle, qui ...n'a pas encere -été dé,
truite ( 1). Il n~est pas tres-gro,s ; la fon:e de sa
voix en. parait d' autant: plus ·étonnante. " ·Ün
~ "' " \'

tr9uva aussi l.Jn.e awre petite r~tine :qt~.i. ·.~si


agréabl!'!ntent 1bariolée. (2).. c.

(-1) Je J'ai nommée Hyla faver ." (-on;gueur, :t,.roi•s IJOU~e~


neuf ligues ; pates tres-gran!ies; ·do.igts .g ros; pau me~ ar-
roudies et fortes; demi-memb~anes nata to ires aux pates anlé-
~íeures :' co~ps j11l1 nâtre sa.le ;' r aí~ nóiràt~e q ui-~'éteu·d dep·t~is
!!e bout àu mu'seau ]usqu~entre 1-esc-Ui:sses .postérieures; i:ui's;es
et jamh11s maf\)U, ~~S deJJaUdi\S lr~HISVCTS<\Jés grisâ~Í-~s :p ~Jt;~ ·
lig~es uoírâtres fi nes, et eu partie é,l-evé s ·sur);a p p rtio~ ~nt~
:r) cure Çlu cdrps ; }Jean lisse, rev êtue de points sa ill.ans
comme l•e chagriu snr le ventre qui est hlallChâtre ';'· cjüêF- .
ques individus ét.a ient de c~uleur .~.E! e, ma ih s~~~!le
dífférence, paraissaíeut appartenir à la mêmc espece.
(2) ' Hyia aurata, esp ~~e non a' cr'ite : Jou'g uenr, nu pol.1 ée
une ligue:; <;olilem:,·vert d'olive b'ruuâtre rol1céí, q~1elquefÓis
brun d'olive' j ligue ja~ue ou jaune ao ré a!1'ant trausversà!..
lement d'un ceil à l'a.utre: ligu.e sernhlalJ!e à ia nuq~1e, un

\
212 VOY.AGÉ

,Ap1·es quê no11s e-lunes quitté Santa--Agnes ;


notre voyage devint plus- agréable. Le pays
prend un caractere plus romantique; les forêts
sont ·plus ha'utes et plus touffues , . par consé-
qt1ent donnent plus d'ombre et d~ .fr.a1cheur.
Nous troúvion$ fréquemment de 'tres- bonne
eau. La -route descendant toujo-qrs davantage
011 s'apercevait de plus en plus quel'on s'appro-
chait de la côte maritime.
Bientôt nous sommes arrivés à la 'vallée bai-
gnéepar le Jiquiriça, riviere qui:u'est .pas consi~i:::.
dérable, mais qui se précip~~e en é'cumant par ; ~ ..
dessus des rochers pittoresques à t:ravers des bois. ·r
~ombres. Des fazendas isolées av-ec leurs toits ~
rouges se montraient de temps en temps au ;;'
F iiieu de .petites praities.situées sur le pencha'Ht _,.
ites moll"tagnes; elles rappelaient
. I Ie. tableau
pffert par les Alpes) .européennes. Ces petites
habitations ch;;nnpêtres augmentent en nombre
~ mesure que l'on \ descend Ie long de la ri-
iV.,Iere.
f
, ''\1 I· ·. \ ~-•
l\'N
1
J I,

peu interr ompue d~ns le milieu, et se P!olonge~nt jusqu'à


l'extrémité du corps; de. chaque côté r~gue une ligue sem- ·
blable; q uelques taches jaunes ou jaune dor.é sur . le hant
,de·s épaulea e~- dçs cui&ses. _,.. '!

'' .
AU BRESIL. :u3

.Le soir je trouvai à la fazenda d' Areiro plu-


sieurs familles .réunies, entre autres les jeunes
negres du voisinage. C'était un dimanche , tout
ce monde cherchait à s'amuser en dansant au ·
son de la viola e~ en sélivrant à tOli.tes sortes de
jeux. A nutre arrivée chaclm quitta son diver-
tissement et accourut pour nous regarder; nous
fUmes accablés de questions. Co~e dans la
plupart des cantons du Sertam il n'y a pas d' é-
glise, les habitans qui demeurent à peu de dis-
tance les uns des autres se réunissent po.~r en-
tendre le servic~ divin en commun, et passent.
le reste de la journée às' égayer.
No~s marchions toujours le long àu torrent
qui devenait à chaque pas plus fort et plus fou-
gueux; on apercevait à travers les arbres an-
tiqués de ces forêts ses eaux blanches d'écume
et bruyantes; elles sont fréquemment augmen-
tées par celles de plusieurs ruisseaux dont le lit
ne consiste qu' en roches prirnitives entierement
nues; ont court souvent le risque , en les passatÍt
à gué, d' être renversé avec son cheval. L'argile
grasse et jaune rougeâtre qui forme le terrain de
la plus grande partie de ce chemin est tellement
délayée par fabondance des pluies, que les
routes n'ont pas du tout de fond; les boaiadas
VOYAGE

aggravent cet inconvénient quand elles y pas-


sent, car elles y font des trous profonds. Les col-
lines et les hauleurs qui se succedent constam-
ment augmentent la fatigue de la marche pour
les animaux pesamment chargés, de sorte que
1'on ne peut voyager que tr'es-lentement.
Je·découvrais sans cesse un plus grand nom-
bre d'habitations isolées qui offra!ent des points
de vue tres-pittoresques, surtout à cette époque,
ou par l'effet de la grande humidité jointe à la
cbalem la végétation s' était developpée avec
une richesse et une perfecti.on merveilleuses. Je
vis dans quelques endroits beaucoup de salive~
tres-fortes rassemblées en tas; les lndieos les
I ~

r éunissent ainsi pour en former ensuite des ra-


deaux que l'on fait flotter sur le fleuve jusqu'à
1a me r. Le povoaçao de Jiquirica, situé à son
~mbouchure , est babité cn granlie partio par
pes lndiens qui font le commerce de vinhatico
1
ft d;autres bois utiles; ils les .abatt~nt dans le~
o A l ' • 0
I ) f!: à,· d
~orets, es equarnsse ,t, pms teu r 10n t \\escen r e
l,e fleuve. Dans les hautes éa\lx, il.leur faut trais
jours polir faire arriver\le ra '~au à sa destina-

t.wn; quan' d, ·l·es eau~ sont
\ basses, l'operatton
' .
exige le double. de ce temps. Chaque piece de
~ois]eurestpayée 6, ooo à 8,ooo.reis (57 f, 5o c.
AU BRÉSIL. ;2I5

à 5o f. ) pour la peine de I'abattre et de la con-


duire. Ils se placent à moitié vêtus ou même en-
tierement nus sur le radeau, et en dirigent la
marche avec une longtle perche, pendant qu'il
gli~se par- dessus Ies rochers dont Ie Iit du
fleuve est hérissé com me par échelons. Ce travail
serait souvent dangereux pour eux, s'ils n' é-
taient pas des nageurs habiles et e1.péri;rnentés.
Un grand nombre de ces Indiens étoient
réunis à Bom-Jesus, fazenda entierement envi-
ronnée d'une forêt épaisse: j'y arrivai un di- ,
manche s.oir et j'y passai la nuit. lls se divertis-
saient à la maniere portugaise en jouant de la
viola. Naus avions envoyé notre baga·ge et fait
allumer du feu sous un hangar ou ils a:ccou-
rurent quand ils nous·virent arriver.
li tomba pendant cette nu_it des torrens de
pluie qui, à úotre grand regret, gâterent encore
davantage les routes, et nous enleverent ·aínsi
l'espérance de pouvoir connohre les curiosités
de ces forêts ; ce fut une grande contrariété,
car la voi1. de plusieurs oiseaux. intéressans,
entre autres c.elle du juru (psittacu;; pulveru-
lentus) nous inspiraient un vif désir de pénétrer
dans ces solitudes. Nous attendions le jour ~vec
impatience, nous flattant d' un changemen t de
216 VOYAGE

temps conforme à nos souhaits,- l'ls ne furent


pas réalisés. Toutefois, comme je ne pouvais
- pas me -résoudre à rester dans la vallée étroite
de Bom-Jésus, je donnai, malgré la pluie, le
signal du départ. Alors nouvel empêchemenL
L e petit ruisseau de Bom-Jésus, qui se joint
dans cét éndroit au Jiquiriça, avait brusque-
n~ent grossi à un tel point, pe_ndant la nuit, qu'il
menaçait d'inonder notre camp. li n' étoit plus
possilile de le passer à gué avec nos chevaux. li
fallutdonc, rnalgré les torrens de pluie qui fon-
daient sur nous, perdre ~eaucoup de temps à
débarrasser les mulets de 1eur charge , puis à
'faire passer toute la tropa sur un j angade
de quatre troncs d'arbres. Durant cette opé-
ration extrêmement .d,~~a_gréab'e, notre bagage
fut entierem~nt eHiôínpli~tement mouillé , et
paus fumes . obiigés .. de garderl sur le corps
pendant torite la journé~ nos habits trempés
]j, I
~ eau. , ~ ,

Les orages ·des P~,\~, éqlilatoriaux gf _nflent si


fromptement les riv1eres, ans la smson des
fluies, que pendant la nuit op. est toutà coup
:,1tteint par leurs eaux débordées; mais ils ren-
~rent en aussi peu de temps dans leurs limites
qrdinaires. Notre· :marehe par une pluie vio-

\
~. \
AU BRÉSIL. 2'17

lente qui éút été insupportable poíu1 des hommes


, délicats, n'e nous gênait pas moins , quoique
endurcis à l,a fatigue ; · cependant nous trou-
vâmes encore ample matiere à nous occuper:
L e hois touffu que nous traversions étoit dev~nu
si sombre par le temps couvert et pluvieux, ,
que nous nous imaginions déjà· être pres de la
soinée. Ces forêts víerges des tropiques sont
magnif.iques, lorsqne par ud J~eau . jour les
rayons du soleil qui dardent dans leur épaisseur
rehaussent la heaQ.té de leur verdure sombre ;
mais lorsque leur obscurité 'est augmentée par
la teinte remhrunie d'un temps de pluie, lêur
aspect est encore intéressant. Des milliers d'êtres
organisés, quel'on n'aváit pas encore observés,
se réveillent alors : des troupes inpombrables
de grenouilles font entendre leur voix dans les
flaques .d ' eau et' dans les marécages ;iRond~s,
sur les tiges des bromelias ,. sur les· brancl~es
des arbres, sur la surface de la terre; les sou-·
che~ ,étendu~s à terre; e.t qui moisissent de vé-
tusté, ont leur intérieur creusé.par:l'cffet' d'une
décompos~tion lente, . et pab{té par une infinité
de plantes et d'insectes ; on y entend aussi re 7
tentir la voix forte d'une raine dont le son
frappe de surprise I'ét;anger qui ne sait d'Ôll
218 VOYAGE ·

elle vient ( 1 ). Le& reptiles ranimés par la ehaleúf


secondée de l'huniidité, acqu1erent toute I' acti-
vité compatible avec leur nature. Les pen·o-
quets, notaiJ.nment les juros, volent en criant de
cote .e t d' autre, pour temr
A f • en mouvement l eurs I

.ailes hu,mectéds par la pluie. Epuisées par la cha-


leur du jour précédent, les feu1lles eles '"égétaux
et les fleurs vivement colorées d'une multitude
de plantes grasses déploient toute leur richesse,
et semblept acquérir une . :nouvelle existence.
Les dracontium, les pothos, les bromélia , les .
.eactus, les epidendrum, les:heliconia, les piper
"i!"."'d'autres d' ru1e
et une 1:nnmte '1 texture
' ch arn_ue,
~tÚ poussent de compagnie ave~ les fougeres
srr 1es arbres couverts de mousse, relevent. leur
tfte, et u~. gran.d nombr;e remRlissent la soli-
tytde eles émanations .Ies plus suaves. Rafra:lclfis
-e,t ranimés, , tous ces ornemens du egne végétal
pianni lesquels il faut ranger aussi l .es palmiers;
sr~tout les_cocdtiers' principale pam~e de. ces
Í<,)nê,ts vierges, pren \ent uh degré d\
vigueur
p,lus marqué, lorsqu'âpres la pluie les rayon$ du
sç>leilleur font sentir leu infl \ nce salutaire.
\
(r) Je u'ai pas vu ' celte grande raine à voix si forte;
c',e st peut-'être le bufo agua ele Linné.

\,
I

'\'\
AU BRÉSIL.

Da'ns la soirée ·de cette · journée pluvieuse,


nous nous sommes embarqués à Corta-Mao,
petit povoaçao d'une cent~ine de maisons , et
nous a-vons ~raversé le 'Jiquiriça qui 'était extrê....
mement gontlé et rapide .. Nous avons ensuite
passé . une nuit désagréable dans un atelier à
farinha qui était ouvert de tous les côtés. Le
lendemain matin nous noús sommes remis e n. ·
route, et nous avons fait une légoa en arriere
pour arriver au povoaçao ou au petit arrayal
de L~je, ou nous attendait une sdme extraordi-
naire et extrêmement désagréable. Nous mar-
chions tranquillement dans . un chemin tres-
resserré des deux côtés en allant vers Laje, sitl'lé
dans une valiée, lorsque tout à coup je vis Ie
chemin barré par un granel nombre d'hommes.
Ils étoient à peu pres soixante-dix, munis les
uns d' armes de toutes les sortes, les autrés
simplement de bâtons; ils se précipiterent dé
tous les côtés sur nous , de sorte·qu'il fut tres-
difficile de s' oppos~r att mouvement de cette
troupe de blancs' de mulâtres et de negres qui
ressemblaient à des bandits. Plusieurs prirent
mon cheval par la bride en me criant que j'é-
tais prisonnier, et que je n' échapperais pas au
sort que j' avais si bien mérité·. On me 'traitait
220 . VOYAGE

d' angiais ( inglez) ; quelques.:..uns semblaient


concevoir de si grandes inquiétudes sur notre
com.pte qu'ils tenaient ·leur fusil bandé en nous
couchant en joue. On mit tóut de suite la main
sur nos fusils de chasse , nos serpes, nos pis-
tolets; on ar racha même des mains de Quêck,
mon petit Botocoudy, son are et ses fleches.
Quelques-uns de mes gens qui refuserent de
livrer leurs armes furent presque maltraités.
' Mais quand nous eúmes été désarmés , le cou:..
rage de cette canaille prit un degré d' audace
incomparable .. En effet soi;x,,a nte-dix hoiilll!es
armés qui viel!lnent à bout ' de six personnes
désarmées, c' est vraiment une prouesse mer-
1 -
v~ille,use. Pour nous tirer de cette bagarre à
lafluelle je ne comprenais rien, et connahre la
cause d'un traitement si étrange, lje ·demandai
à f ette bande de-furieux si elle avait un chef,
comment il s' appelait, et ou il était? On me
. répondii tres-lacloniquement que le~ capitaine
I h I . , . .I l d '
B~rt o omeo, qu1 etait e coinman ant, ne tar-
I

d~rait pas à venir, ~t me r~~drait la justice


q1i m' étâit due. Effectivementi e vil' ,s' avancer
un homme de mauvaise tiline, sale; déguenillé,
1
et couvert .de sueur, qui tenait son fusil à la
m1lin.·Son zele ardent ne lui avait. pas pe1:mis
. "
AU BRÉSIL. 221

de nous atteHdre à la tête de .sa compagn~e , i1


était accouru au-devant de nous, mais il avait
manqué sa proie. L'apparition de ce chef mit
heureusement une fin ' aux disputes qui s' é-
taient élevées sur la possession de nos personnes
' .au milieu de cette troupe de forcenés; les c ris
et les vociférations de cette multitude ·bruyante
firent tout à coup place à un silence qui fut I
tres-agréable à nos oreilles. _ ,
Craignant de ne pas obéir assez ponctuelle-
ment aux ordres séveres de son ·supérieur le
capitam mor deNazareth, le capitaine Bartho-
lomeo nous fit enleve r toute espece cl' arme,
même nos canifs et nos couteaux. Ensuite je fus
m.ené avec mes gens dans une maison ouverte
. , sur l a routc; une trempe d'h ommes armes
sltuee ,
fut placée dans notre chambre, et ~1e autre·à
la porte.'Le,s portes et les f~nêtres ne furent pas
fermées pendal}t le jonr, ni même pendant la,
nuit quoique . tres-froide. On laissa entrer in-
différemment des matelots ivres, des l)egres
esclaves' des mulâtres'
( . aes blancs et tous les
oisifs qui voulurent nous voir; ils s' établirent
sans façon pour tout le temps qu'ils eurent la
fant;;tisie de rester, s'assirent sur nos banes en
n,ous poussa;lt' se mirent à faire à voix haute
222 VOYkGE
.J
des obs~rvations politiques sur notre compte, et
ne no~11 ~aisserent pas un moment de repos.
J'appris alors qu' on me pr~nait pour un Anglais
ou ponr un .Am.éricain, ~t que j' étais arrêté par
une suite nécessaire des mt:;sur~s de .s ureté aux-
quel1es faisait recourir la révolutioR qui avait
éclaté à Pernambouc. ·
Cet événement consterna plusieúrs des Por-
tugais que j'avais avec moi; ils prirent. de mau-
vaises impressions sur mon compte et s'imagi-
nerent que je les a-váis tro~pés. ~Ion _passe-port,
qui certainement m'aurait ét,é utile dans tout
:;tutre cas ' ne me servait à .rieh dans cette cir-
constance. v·wgt _personnes ava1en1_
1 ( · heau avan-
cerr la tê te ei~. même temps, pou.r i e lire; aÚcune
' n' en eomprenait le contémi, et l~ comman'clant
de la -bande m.0ins que les autres. Ç'est ce que
prouva1t . surtout
, l a quaJ'1ficatiOn
' . d'p..ng
A.,\_ 1a1s
. qu' on
IRe donná dans I~ ra:éport, quoique)e passe-
pbrt éndhÇât expres~é~ent ·'qu.e féfui.s Alle-
íuand:
-l
ll est -.du, reste,I três-vtaisemblab\lé
, ~
. qu'e
él.wr,ts Laje personne ·nel Sí:mpçú: . ail qu'il y e1:i t
9u Fonde. d' autres pays -que ·Ie Portugal et 1; Á~...
gleiterre.
r On dréssa enshi\e
., un invéntaite . de ,
tout mon _ilagage, ét je ·remis les defs de tous
1ne~ coffrés. Quel'ques-uns de mesga~·des, po11s-
AU BRÉSIL.

Sés par un amour désordonné du butin, irJsis-


taient pour que l'on ouvdt et que l' on visidt
tous mes effets ; cependant le capitaine Bartho-
}omeo pensait trop équitablement pour le per-
mettre. A midi les prisonniers obtiorent un peu
de poisson salé ; mais ils eurent l' occasion
d' exercer leur patience en écoutant toutes sortes
de propos offe~sans jusqu' au moment ou la nuit
- vint mettre un terme à cette position insupor~
table. Elle ne nous procura pourtant pas beau-
-coup de·repos, car les importuns ne nous quit-
t~rei1t pas.
J'avais formé le projet de me reposer dans
le voisinage de Laje, pour parcourir les forêts
· des environs. Mes bêtes de somme tres-fatiguées
avaient ·aussi hesoin de passer quelques jours
tranquillement; mais de grand matin on no~s
appela pour nous faire mettre en route. On
nous doruia pour déjeuner un peu de mauvais
poisson salé; ensuite 0n fit avance11: nó-s mulets~
les pauvres bêtes avaientété oubliées daFis letu.:..
i!nulte; on les avait laissées toute la nuit sans
leat dorme r à mange'r, elles tõmbaient d~épui"'
sement. N'importe, il fallut partir. Une tren-
taine de cavaliers et de fantassins armés de
fu.sils et de pistolets ·chargés nous furent donnés.
VOYAGE
/
pour ncius garder; ils avaient coÍ1stamment l' ceil
ohvert sur le moindre de mes gens. La marche
était ouverte par un nouvea1;.1 conm;andant; mes
bêtes de somme la fermaient. Nous traversâ-
mes ainsi de jolis ~antons bien boisés. Achaque
fazenda que nous r1mcontrions, les hâbitans
accour~tient en f0ule pour nous regarder, mon-
traient .du doigt les criminels, et . répétaient
constamment les noms cf Inglezes ou de Per-
nambucanos. Le soir on fit halte ,dans une fa-
zenda isolée ou I'on nous s11rveilla tres-séve,re-
ment; il s' y trouvait à peine eles provisions
suffisantes p0ur notre t1;0~e ; mes mulets sur-
tout y souffr~rent beaucoup de la djsette. Enfin
m~.
- I
de mes chevaux se trouva si 'fatigué qu'il
' , '
fallut le Iaisser en arriere. . ·
' \ I

Le second jol'lr de notre voyage 'comme pri-


so~miers, nous pardmes, encare ·de- " on niatin,
et apres ávoiv parcouru qu~lques légoas, nous 1
rencontrâmes ·totit à coup -qn détach'e nent ·de
tr~nte sol_~ats ·ele mili€,e rangés - en pàr~cle, et
,corro.andés par le ca~itaine a Costa Faria:
.A,ors l'affair~ prit une tfurnu "e J!llus sérieuse'
aux yeux clu peuple. Pe'ili.çlant la marche mes
gep~ fur~nt insultés ~e ,toutes,les ll).aniere~ paF
1

le~ soldats : on leur montrai.t les armes c\largées


. .. ~

'\
\

.AU BllÉSIL.
en lem~ dis'ant : « Voilà pour toi, coqui~ d' An- ; '
glais. >> On frappait les clíeva:ux; on ne savait
de €p.i.oi s' aviser pour n.ous tourmenter. '
Le·soir nous arrivâmes par un d ·temin dé-
• " ' ·· I '

foneé ati. povoaçao. d~Alâ.e~ , situé 111res de ia


c0j:e; il resseínhle à áne villa 7 Il expétiie ~ Ba-
hia -de petits navires chargés.
de productions
I
du
voisinage. Une legpa ·plus loin, nous-parvimnes
à Nazareth, lieu <Je 'n otre déstination. On nous
:fit traverser le ·J ag@aripe au .milieu d'une foule
'irrcr~yab1e; on plaça -des· gárdés pou.r: veiller
à ·notre .h>agage , et pour úmir un' peu .daits '
· I'ordre ·t01!11t le IRónd.e qu.i se pressait pciur nous
voir. L e capitam me merta devant mon j'uge le ....
capitam mer. J:l faisajt déjà sombrequan~ j'en..:.
trai dans sa n-iaison ;- il ne parut' pâs tqut de
suite; on' éclaira la chambre, puis on m' appela ..
Un· pau.vre accusé, mené devant une c~ur cri-
minelle, ne peu,t pas être regardé avéc plus de
curi~sité que je le fu.s à ce tri:blilnal.: Quant au,
·cap1t:am mor, :i:l m'h(!)l'lOFa ~à peine d'rutn coup
d' reil. ll entetadit fro:i:dement lh es plaintes sur
'le traitement injuste et indigne qúe j' avais
éprouvé ; ensúite il éxpédia d' autres erimineis " -
placés dans . la même catégorie ou j' étais
cm~p1~is . M~ patience éMit :~ bout je .ne pus ·
III. .15I

... J
226 . VOYAGE

retenir fum1 indig1,1atio,_1f et m~ col~re. E1~fin le


capit~m 'mor, apre~ ~v0ir l_o!~g-t~mps ·consiçlé1~é
inon p'ass.eB9rt, ~ne dÇclara d'u;!, .air; ftoid e.t
ha·mam que cett~ piec.~ , qu9,iq1;1,e ~onÇ,u.e en
t~rm~s treq-ftlVor.ables wour. w,~i; n'·étai1i poul;':-
tant pas s_~ffi~ant~, qu,'il . <~.U<~.it sur:le-ç_ha-wp
~lyoyér: SJ),:P. 1)4I;JpPrt au gou:veri'):eu_r de_B1!hi:;t '
et q,v' en .ª~T~~d~nt la, :ré,pQns.e j_e re;;tey.ais. .eris.9.n-
Il~er.· Le1; ç~qq, hbXPJJJes q-ui n '::u,:~o:J1?.Pag:t1aiept
~n::~1~t app.el~~ ~t i~te•'rogéª' ~Ür le:q~ nom çt
lep.r l~~u ªe, nai~~fll1~~ ~.JeHsl!!it~ , e.nfêpjn~~ gVf~
:q1o~ .<;lan§ l'. étage·sPpé•ri@y.r d!'\\ mle,glli{I,llil~.,
P'!aispn
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~~fuserp,.~~t~:t il fai§:;tit F!lJit l€!r~Çf:!ii.Jw 11ou:? c~n:-
9t~i~i .9-qn§ ce,~te . pr~spn; c:tr àutrel~~p.t la, po:;-
P.;tl}aç~ BOHl' .âlJJa~t~ peP,t;,-~tre jg. Ç, df!s pi~rrQs ,
- ~e- ~;nút~fn I11Qf s~eff~~ça. $1' a!U \lrs·.cle,qil;n,i-
nqe!: 1e dés_~gFément .d~ nQtnt pb.s.\ú~:m autant
qJ.l~ ~~s. , ip.§~rJI~ ~Ql'J.§ ·1~ lui. p.eJ]ne.t.t~iei1t, atten-
t~qp .P9'!Wl'ÀaÇP!leJi~ j~ llui a$Ir_·ss.e ~1:'.\.CQF~ vdlon~i€:rs
I' ~~pre!!;ipn E}~ ma · epNJ.·. ~&a~1~~:·' D~& .qu' OJ
· J1pli!s.~~!il't appr!=rr.isibBV ';; Çl~. ~fÚS _e_t d' e.au. daus' ·
IJJ~!P~ '{IO!J.V,~U~ I?~i~on -1\, en, ~nua les. p!D.rtes ;
~f:$ ~-QQats fir~m la g~rde ., autoUiJ,' de ,la maison .
l ,Jn;sepl demes . g~ns euda permission de sortir
splils lil.onrie escorte ptmr aHerc . ~~.Ji).e;ter l ~s vi;vres

/ '\
AU B:B.ÉSIL. 22'V

dont nous avions besoin. Je passai de cette naa·


niere trois jours, au, bout desquels Je gouver-
neur de' -Bahia envoya I? ordre de me mettre en
liberté.
Cet événement désagréable me causa q.ne
grande perte de temps et ceHe de plusi~urs ..
objets intér-essans qui se gliterent, parce que
notre marche forcée ne laissa pas le loisir né-
cessaire·de f~ire séeherJes c'noses qui avaien.t (hé r
mouillées .' J'aurais de bon creur abandonné à
l'instant le territoire de N:azareth, que cet inci-
.dent me rencla:it odie~.x; mais le n1anque de
navires en ldestination pour Bahia me tetmt
encore huit jours dans ce lieu, et me força en
quelque sorte de Vétudier.
N azareth, ,sunnommé das farinhas, est nn
povoaçao qui mérite hien le ti~re de. villa ·: les
rues en sol!l.'t assez régulieres; quelques M:timens
sont remarquables. En y comprênant les hâbita-
tions isolées dans le voisinage qui appartiennênt
à cette paroisse, orr y compte p~e~ de 8,~oo
âmes. n y a deux êglis~s; la principale est
~rande et bien bâtie. Nazareth das farinhas
v I ·
est situé spr les deux rives du Jagoaripe. Des
collines verdoyantes, eouvertes en pa:rtie de
champs cultivés et de maisons, donnent aux
V9YAGE
bo.rds de cetté riviet·e m1 ·a~péct riant. Partout
0~1 a:perçóit les cÓcotiers ~t les palriJiers_:d~ndé
élever dàns les airs leurs tiges élancées. La
principale ·-r~ssource de ce li~u est le connV:ei'€e
ave,c 'Bahia. TG:us Jes -dimanches ei tous les lun-
.,. dis uh cert~ih Hombre de ba1~cos" ou ·Çle lanchas ·
ch.a1;g~s . ~lu produit des, planta:tim:r~ pa~~ent
pó~_i- cette · cap\tale:. Ges :p.;yir.es descendelílt 'lá
~~·iv.'i(we áv;@c ·le iJ.:_eflu~., ,traverrs1mt à la .'\lü~lê la '
]ta,:i:e d~. Toas,les Sl}ints, ~t ~rriv:el'lt en ..singt-
• I "

quatr.e hemes à' la ville. L'es _carg:aisons CONsis;-


. . tC11t'.pr~ncipaJ~meJÜ en fa·~~inna ; .~cepel1ldairt OU .
ep ·r e.co ' . Ite b eaucolilp
. ·' a' ·N a:~at·eth· qu"a
mo1ns.
'parave~las . et _dans d:'aut~'€s -endr;,S!its situés ]!>lus
ru. sud ; o'n expé~~e ·at.[~SÍ à h;t\ capital e des. ba.:..
jl~aiJ:1C~ , fl!'!_S ~bcõt1?rs , q~es n;~~gt,tes et dtvers
fruits·,
r ~
du lã:nd, de I' eau-&.:vie~
~ ~ .. ·.tu s1..l'~re,, etc.
·'lffi>utes···ces ;demrées so11t ,.na_tpr Ilement~ plus.
• \a
l. ,
f~1etes 1e1
• •
que ,, a:p.s 1es 1·Ie.ux,
· p1u~' . mer.1c ' · 1·Ipna~x
1-. ·
'ft plu~ ·C'1mgl,'l,e~
. ' .de Ia ca:R.tta . J.e; ca, I'a 'l/Íne ./ al - .
. l

. .f[tHiir:~ de, f~,F.itih.a ~ ~ va~L ~a'une , })~taque et·


\4
'fernie .~ dem:, p~l.taQ!jliLes (. 3 \à l'ranes ) , t~ndis
JP/ic~ ,el:Je ee>:[ty~, six ã llli:t p:~aqu~~ :.Q? eiilvo~e .
i~urtOlilt
I).. . ,. • r: x. det rr·
beauG/_- OUl) ~· -u ;ts, , à» la.._ ,caplta!e:-v
ma.J.~'
~

\~~1, né sait pas si ,hien 1d y cu.ltiv~r. Le ,cO<il?ti,~r


rtJe lnapg,~Üer Cl;OÍS~~llt ;,tF.~S~]~{,el\~p.;)es . ~Qrf1~, 1

.
~.

\•\\
I. ~

\ -~
' \\
~ \
A U BRÉSIL. 229

du Jagoafipe, et y deviennent tr:es-hauts; cepen-


dant ils ne donnent qU.e eles fruits petit et mé-
diocres, atrlieu qu'à Bahia l'on brúle l'écorce
· des árbres' plus pres' ·de terre, et l'on obtient
par ce ·moyen des fruits plus grOs et •d\m gotlt
plus arom,atique·. Le fruit du dendéseiro, grand
et beau palmier d' Afrique, cuhivé dans ce can-
tou ét nommé coco-dende, ~' emploie pour en
exprimer une hüile qui a la couleur orangé'e, et
dont·on fait usage à table: Plusieurs fruits d'Eu.-.
rope · réussissent 1;neme tres-bien, notamment
les raisin s.. et les figues ; niais ces ·dernie.í-s sont
recherchés s} aviclement 'p ar les oiseaux que l' on
est obligé· de les envelopp~r cbacun séparément "
d.ans -d'l!l pa:rier. Les ponimiers, les poiriers,
les cerisiers et les. pruniers se cultivent aussi avec
succes; toutefois 011 dit qu'un cer.tain insecte ne
tarde pas à,d.étruire pr<1rnptement ces arbres.
Je partis sans regret de Nazareth, Oll j'avais
passé toute ' la semaine ele·, Pâques cômme, pri-
sonnier ,'.et je m' aeheminai plein ·d.' espéranc~_,
f'
vers Bahia, ou· av~is le p_rojet ele in' embaHpler
pour l'Europe. Je commençai le sair à descen-
clre le Jagoaripe. ~a journé.e avait été belle et
sereine, çe qui nous promettait une heureuse
navigation . Les petits navires .qui vont &Bahía

ó '
23o · VOYAGE

sont pontés; .il~ ont une chambre qui peut ~em­


tenir WJ.e vin.gtaiile !ie persoU:nes; ils ont ti-ois
m.1ts; les deux postéri~urs sont pe~chés oblique-
ment en atriere. Le capit::tine ( J!Le.~tre) a ses
eselaves qui lui servent de matelots ; mais,
comme ·ils -ne travaiileht qu' avec répugnance ,
011 ne peut pas attendre d'eux béauc~;mp .de se-
çours dans un cas de danger. '
Les bords .d u Jagoaripe·sont ·pittoresques;
des bocáges .verdoyans et eles ·collines s' y succe-
dent alternativement ; par~out on aperçoit 9-es
·fazendas ornées de joiis :b~is de cocotiers. Les ·
i[
}1>ropriétaires sont généralenwnt qes potiers ; on
:l fabi'iqll_e aussi beaucoup d~ tüiles : les pro-
~luits de ce-tte inp.ustrie sont ex~pédiés à la capi-
tale: L' argile que ces potíers enlploient est grise;
.I les v:aissea~x cleviennênt rouges ten passa'nt au
t;eu ; 011 leur 1 dorme . de phis ii\térieurement
t~ne coú.verte rpuge. On brúle pri:nci·palei;n~nt
C~~l1S·C~S ~OUI'S d~ b61,S de ,angJier·(:~,~, quÍ•C011•
~tpbue , d1t-on, a cloü 1er twe couleur·~çmge aux
vaisseaux . Le~ pêcheur~ s' ô:p~oserent el' abord à
qé que I' on coupât ces a'I bres, prétendant qu'ils
q'ttiraieút 'le ·poisson et Ie~ cvabes, et facilitaie:ri.t

( 1) Colio r:a Jplls P. l al•icellll ia. \


/

.'
AU BRÉSIL.
lems opérations., On dit mêú1e qu•11s ont porté
leurs plaintes jusqu'à Rio de Janeiro, et qu' elles
n'y ont pas été accueillies.
V ers minuit nous Iaissâmes tomber l' ancr~
devànt Villa de Jag6aripe. Au point du jour
nous jouânes du coup d'reil de cette•petite ville,
agréablement située à la rive inéridionale du
fleuve sur une·pointe de terre que forme son
con.fl'uent avec le Caypa; le pr~mier reçoit ele
plus le Cupioba, le Tej1;1.ca, le Mara<:ujipí'nho,
l' Aldea et Ie lVIucujo.
Jag:oaripe est le chef-lieu d'un com'a rca;
c' est là c1ue elevt·ait résieler le capitam mor, ,qui.
fait sa demeure à NazaretlÍ. Cette viUa est ~sse'z
considérable , cependant mal peuplée, peu ani-
mée et bienmoins commerçante que Nazareth:
elle expédie ele la pote'rie à B;ahia. On y voitune
grande église et pres la rive -du fleuve la Carl'iara
da casa, ·qui est la plus vaste que' j 'aie rencontréc
~lans mon v~yage. ·
Aú point clu jout· nous par~tmes, et au hout
d'une Iég:oa nous . pa:rV!n:mcs à 1' er~1hónchurc clu
fleuve en vue ele la grande lle cl'ft'aparica, ou
Taparica, qui est située dans)e goffe du la baie ele
Tous les Saints, et n' est séparée du continent,
à sa 'côte ·occidentale, c1ue par un canal étroit.
VOYAGE
Les na vires qui viennent du ·J ~g0aripe pren-
nent ·cette ronte, qui ·est' tres-súre pour, aller
à Bahia; ils navigu~nt entre l'lle et -la ter·re_
fen~e, ; ,m,ais de mêm.e: que dans tout c e voyage
par eau il faút faire attentio~ aux heures des
marées. •
. ~otre voy_age -te long de l'lle Tapar{qa
fut ~res-agréable et favorisé par un vent fra~s.
On ape1:c~;vait pres du fleuye , ,de même que
dans _Ie lointain, .eles ,coteaux .verdoyans, des
collines pittoresq~es, des forêts de cocotiers, de
joliesf.azendq.s: L.~ surface du,1fleuve était animée
par des parque~ et des pirogJies de pêcheurs qui
a~aient. des voiles .d'une blancheur éclataH.te .
.. ' • h

. Noqs achelâm~s une q-qantité ~pe poissons-ex-;:


cehei_Is aux . pêcl~eu~s qui" passaj nt le long de .
. n9tr.e na vire, et hous Hmes un él.h1er excellent:
Bientôt apres Ja force du r'eflu:x: nd s fit ?onner
1

suf un bane de sable; ce ne . futBu' avec de


grap.ds . effo~ts et à l' a~de du~ flux qu'e ~o~-s p:u:-
1

lllt!S no~s degager ~t J'gus refue.t tre a fl~.; ma1s

une I'~tlale f~t t~Ut a CQi)\ p~n~ lei' le ~avire' SÚI'


A

lp f ote, e~ dech~t·~ notre \\eil,le f e v01le . .Ne~h~


moms nous arnvames Iheureusement .
vers m1ch
à-lfl pointe septent rion,ale de l'He ' sur laquelle
1
es t btttic "Villa de ,, Ita1Jar!ca. ,N ous
\
vJ laissân'les

I
AU BRÉSIL .

.tomber l' ancre pour . ~ttendre le relüur du


jusant.
I
L'He d'ltaparica a d 1.1 nord au sud une
étendue de se'pt legoas : elle est fertile et assez
peuplée. Elle est itivisée en trois paroisses;
mais il ne s'y trouve qu'un seul povoaçao ou
une v!lla. Tout I e reste de la ·populati'<m.'· est
disséminé' dans l'!ntérieur ou le long éles côtes.
La plupart eles habitans sont eles pêcheurs.
La villa renferme q1~elcrues bâtimens bien
construits, eles magasins pour la pêche de lá
baleine ~t quelc1ues églises. Les marchés sont
bien approvisio:o.nés de toutes sortes de pois-
sons· et de lfruits. On culLive dans l'tle eles
orangers, eles bananiers, des manguiers , eles
cocotiers, eles jaquiers, eles vignes, etc., qm \
porten~ du fruit deux fois par an. .
La pêche de la baleine est souvent tres-
abondante dans les eaux du Brésil : la plupart
des clôtures des jardins et des cours de l'He sont
faites en c,ô tes 'ele baleine's.
On ·exporte d'Itaparica ·un peu d' eau-de-vie
de sucre; on y fabrique eles cordes de piaçaba,
qui.-sont, dit-on, tres-durables: On fait de
semblables cordages à Amboinc et dans d' autres
Hcs de l'Arehipel orienlal eles Tndes avec lcs
VOYAGE
longs filamens q;ui croissent à la base eles pé-
tioles eles p:;~.lmiers ( 1).
De la ·p ointe ~eptentí·ionale de' l'ile d'ltaparica, ·•
sur laql!lelle la ville ·est hâtie, on . jouit d'une
helle vue d'u bràs de mer entouré de monta-
gnes de formes div.erses, et couyert de navir~s
à voiles blan:ches que l' on a 'áu norel. Cette
baie, fameuse da:as I' histoire eles premiers teinps
du Brésil, a six Jegoás et demie du nord
au sud, et plus ele huit de i' est à l'ouest. EHc
est d.ans toute l' étenduc de sa circ·onférence
abritée •par eles montagnes.·\ Au novel et à peu
t! 4e distanc~ ele son entrée, est située la ville 'cJe
S1an-Salvador, que l' on a coutume de dé~igner
slimplem(mt
I '
I'ar le nom, de Cidade ou B,abia.
I

:r)ans le, nord-ouest ele la baie se trülllVe I' em-


houchure clu .Paraguacu nommé orelinairement
I · • \l
Peruaçu; ~ dllpit legoas en le r~móntant on
v~ncontre· v.illa11 ele Cflchoci~a de Paraguaçu,
qu1'" est apres
' l a' cap1ta
\·· I e I a,' ville ·Ia us consi-
.
, },: \ I ,

dérable et la plus .fL ·issante de ces cantons.


Fjlle est grande, bie1{ .,P upteà et fait uh granel
. . \\
cpmmerce avec Bahia ;t\toutes, les tropas qui

( t ) La ·Bil!ardier e, fJoyogc h la r~cherc4c de La Pe;Jrouse,


t. I, p. 5o4. '%

.I
AU BRÉSIL. 235

viennent de Tintérieur s' y arrêtent, puis s'-y


embarc_[11ent pour la capitale avec le-úrs bes-
. tiaux et leurs marchandises. Toutes les semai-
nes il en part plusieHrs bafcos destinés p<>mr
Bahia.
Autrefois ce canton était habité par les
Kiriris ou Cariris, ti'ihg. des Tapou.yas. Le
P. Louis Vincent Mariani a publié la gram-
maire de cette peuplade (1). Aujourd'hui ces
Indiens sont entiereiÍtent civilisés ; ce qui en
reste est connu sous le noin de Cariris da Pedra
. Branca ; ils sont tous .soldats. Quand leu r com-
mandant reçoit ordre de partir pour une expé-
dition ils emmenent avec eux leurs femmes et .·
Íeurs enfans ; le soir on campe. La cab~ne du
comma~1dant est placée en avant eles autres: ils
r
se rassemblent pour venir dire ave Mária, puis
on leur ind~qu.e ce qu'ils ont à faire.' On dit que
ces militaires indiens,- qui tiennent opiniâtré-
J_n ent à leurs usages 3 mangent beaucoup, et ne
font guere ele besogne, . et par conséqu.ent

'
( 1) Arte de grammatica da lingua brasilica da naçam
.
f( iriri, composta pela_P. Luis Vim:encia Mariani da cam-

panlti~ de .Tesp, missiarwrio- nas aldeas da dita rwÇau;


L isbo~ , 1 r, 99·
I

236 VOYAGE
causent à l'État ~plus de ·dépense. qu?ils·· ne Iui
ren.d ent de services.
Les premiers écrivains qm ont parlé du
Brésil nous ont donné beaucoup de détails sur
· l'histoire _du Reconcav~, ou de la baie de Tmas
, les Saints. Elle fut surtout fameuse par les
guerres· des _Portugais avec diverses· nations
sauvage&. Ce ne fnt qu'apres des etforts COJ?.ti_:
nués pendant, une longue suíte d' années, avec
de grands dangers et par des sa~rifices imiom-
, brables, -qu'ils réussirent à détruire chez ces
·-". \ )

hordes barbares la coutuiueJcrue1le de maüge1'


lep prisonniers. Dans de:; temps e_lus ·reculés,
plusieurs natiop.s se disputaien+-. ce pays_. .On dit
que les Tapouyas habite~ent. d~ns i' origine les
borcls de la baie; ils en furent chassés par les
Toupinaes ei les Toupinambas, qu· vinrent eles
bqrds d rio Sàn Fran~isco~ Cenx-c\ étaient en
pqsse~sion de ce~ - b~aux c~ntons, 1~'\sque les
P9rtugais aborderén~,~es _qotes du nouvéau
).
monde. Christovai Jaques cléc uvrit la t aie de
Tous] es Saints ím I 5 I 6. ~nsuit(% les Portugais y
.
fopnerent tm établiss~ment, firent la guerre
'
anx indjgencs, et' tes jésuites par~inrent ~~ ga:..
. ' gnf!r les sauvages, à les çléshahitt1e'' ele mangm·
_)

· AUI 'BRÉSIL.

de"la chair huma~ne, et enfin à les .civiliser en-


tierement.
Notre.bitimentresta ,devant Villa de ltaparica
jusqu' au' soi~·; nous lev<~mes : l' âncre- quand le
jusant cómmença à se, f~ire sentir, et nous tra-
versâmes la baie ,.dont la largeur entre cet en-
droi~ ·et Bahia est de cinq legoas. Un vent fort
s'·étoit élevé, et agitait beatw0up lamer, _d e s.0r~e ·
que la traversée dans notre petit nàvire fut; dés-
agréable et fatigante ; -mais noqs arriyâmes sans
accid~nt à Bahia vers minuit. '
. ' '
Cida~e de _San-'Salvador da Bahiade Todos
os Santos est l'ancienne capitale du Brésil; elle
a été pendant deux cents ans la résidence du c~­
pitaine génér~l~~ cepays. Elle est située sur le
• 1
penchant d'uml mo_~tagne escarpée et le l~ng
de la baie: la pat·tie· la plus considérable est ·
sur la hau.teur; le .veste, habi~é pri,nCipalement
par les marchands, est sur le borà de la me r.
Cett~ ,ville a une legoa d' étendu.e d~ nord ~u
sud ; elle! est bwti~ .~ssez irrégúlierement, quoi- ,
qu'il s'y tri:mve un grand , riombre d'édifices
,vastes. '. La. ~ue de Bahia prise de la mer êst
. belle ;·- d~s a~bre.s_ ver~oyans, q_~i sont génér~le- .
:rheN.t des oranáers·, s' éle;vent eRtre ses maisons·
disposées en a1nphithéâtre. Quoique le partie
VOYAGE

supérieure de la ville soit la plus importante,


les rues n:y soht pas pavées; on t voit dé
grands jardins .et ~ême des cnamps -qui sépa-
rent les h_abitatioms ;- mais la·belle végétati0n et,
une perspeétiiv,e magnifique font·oÜblier les ·in-
convér9-ens que eo:q renCO'l).tte. Plusieurs petites
vallées Y' sont parsem~~s de ·jardins et de planta-
''
tions, l\1es·gens y firent desvexeursibn~, y .tue- et
rent plusieuFS ani.'m.au~ mtéressans, par ex:emple· 1
le. petit sahui: ã touffes' de• poi'Is blancs. - ~'ux
oreilles ( 1) , que Rous. n; avicms pas rencontré' ·
plus au, sud-. Ils tr0ÍzlveT~I'1t aus~i elans de
vümx
· eaü1ees
'.l'e ' de' B- aUla-urie
~~ - •lb e1·1t'e· cn·o;uette f,.\2 ')
I . ,

(1) Ouistiti sünia jacchus , ,r.. , o~ ja~~h~s 11ulgçr~s ,


Ge,offroy. ,, 1
· (;2) Cet <>.ise.au esl éelui q•ue lVIarcg.raf a décri.r sous·Je no'tn l
de tuidara ( P,· 2oS ). On ne l'<~c ~ega.rdé <];ue{co!D.me u.n;e V;~­
riéfé de l'effraje d'Europe , et dont la différen. c~ légere- é~ai~
prqduite par le clima\ . Cel!!J du Brésil ressemble à la nôtre'
pa~ la plupart des car'acterÍls; cepeud'ant ses pie~~ ses d'oigts
et ~es• ongfes s·em~l·eni" êiEe/~lus"J:on~s-'~ t p•lusJor~~ ;· le pl;u,.. ·'
mage e~t plus cla1~; 1es par,ti s Inf.e\ Jen.res, au l'~en d'être
ja~nâtre pâle com me cl~ez la.n&tre, ' sqht blanches, uu peu
nu<,tncées de jaune dans quelqu~ endro!ts ; on'y observe d~e
mê ,rn~ de petits p~ints;so'lés ~.I JsJoucés. ·L,a face·a ~eu d·e la
cg~ lenr-lHune qü1 entoure les yellK , e.~ les plun!es rectrices'
oª t, indépendammep t des ~aies trarts r~rs,ales , plua foncées,
eles taçhes marbrées plus marquées; 'taild~s que chez .l'effraie

' .
AU BRÉSIL.

qui ressemble -heaucóup à notre effraie ( 1 ).


Le comte dos Ar.cos, gouverneur général, a
depu~s p~u d~ teiJ,lp~ fait faire m,1e r.oute large
et comm,qÇI.e qq\ !riont~ de,}a viJle basse à son
p<:)lâ:is. Com:w~ il' Iíl'y a pas de v,oitures dans.
cett~ ville, 01.1 se sert, p0m:, monter et descendre
les nte!?. esc~r.pées . sa1.1s s'échauffer, d''Un _ca-
deiJ:a ; c' est une espece de chaise à porteur,
q\Ú consiste en un siége surmonté d'un balda-
quÍn et entolil,ré de _ridea}1x : il est porté par
dep.x negres. H ser.ait impossible, faute de
ce secom::s, dê fàir.e un pas dans la ville, soit
quand le temps est beau ét le soleil tres-ardent,
soit quand il a plu, etrque les rues non pavées
' sont impraticables.
La vilie haute est rernplie d' églises, clont quel-
ques-únes sont for:t helles, et de couvens. On y
distingue aussi la cita-delle et le palais du gou-
verneur , qui est assez gran:d ; enfin la place

d'Europ~ ces par;ie~ sont presq~'~ rousses, non tachetées, et. .


s·e ulemenÚraversées var· d·es raies plus foncées. Pennmú a
déjà obs~rvé, daus sa Zoologie arcÚque, que sa chon_etle
blanche a Je dessous du , corps entierement blanc, ce qui
s'accorde parfaitement avec mes observatious sur la chonette
du Br:ésil.
(r ) Stri:t:fiammea; L.
VOYAGE.

d'àrmes. C'est dans eette partie de ,la ville qu.e


se trouvent les tribunailx et: les adminislrations;
il. Yi!!.l un collége ou ron enseigne le l~tin et. !e
grec ,'la·philosophie, la rhétorique, les mathé.,
matÍql}.eS eté., et une bibliothequede sept mille
r volumes que le comte dos Arcos a ,heaucoup·
en.richie ; elle COntient mê:me' piusÍéurs Ol,lVra-
. ges no~veáux ·relatifs aux sciences. Cette bi-
bliotheque est placée dans l' ancien collége des

. . jésuites: rtne grande perte a résulté de ce qu' om.·
ll'a pas e~ assez de SOÍn des papiers de cet ·Or...l .
dre ; ils ont pour la plupart été ·dispersés.
· Les services de,M. le coJite dos Arcos .s ont
tP·\~P connus p~ur qu:' on puisse les~ p~sser sous
si~ence (1). Durant le te~ps qu.(il a été gouver-
.· nttur de cette province ~ il n' a ~jien ·négligé de
ce-qui pouvait Iui .être avantageux.i connaissant
• la lángue et les instituti0ns des pa -~ itrange11s ,
1
in1struit par sesl voyages dans les' ,diftereutes
1
parties du Brésil, ce\ ministre actif e~ éclairé ,
a eemsaçré tout so.n temp~· à introdt~'re ' des
aníéliÔrations. ll honore et p~ tége les sêiences
et les arts ; il a mis un } le cop.stant et .infati-.
\.

(1) Peu de 'temps apres mon· arri vée à , Bahia, Ie ret


nomma le .comle elos Arcos ministre de la rnar~ne .
I .. ~ .

·J

.
AU BRÉSIL.

gable à les soutenir et à les elicourager. ll


traite les étrangers avec distincti,on : ils peu-
vent avec corlfiance compter sur son appui : ·
il a fondé une imprimerie et une verrerie : la
ville lui doit une promenade publique et 'divers ·
autres embellissemens : il a établi une' loterie
pour le profit de la bibliotheque; le reveriu en
c;lSt destiné ~ cheter des livres : il a fait plan-
ter dans le passeo publico le véritable quin-
quina·du Pérou. Plusieurs plantes d'Europe et
d' autres régions fixent ici I' attention du bota-
niste, entre autres le saule pleureur, qui est
tres..!.beau et tres- fort. Au cont le quin-
quina de Santa- Fé' de Bogota ne parah passe
plaire dans cette contrée, probablement parce
qu' elle 11:e convient pas à la: nature de cet ar~re.
On voit dans cette promenade un ·obélisque
qui a été érigé pour conserver la mémoire du '
·séj our du roi dans cette ville. .
La vué dont on jouit dans la partie l~aute de
la ville est magnifique. La baie étend au loin
sa surface paisible et unie; on voit des navires
mouillés le long du rivage ; d' autres s' appro-
chent avec leurs voiles gonflées par un vent'
favorahie, ou pien précipitent leur marche
vers·l'Océan, en tira~t des cou.ps de canon pou.r
IU. . 16 .
VOYAGE

salwi!r la place. On découvre clans le lointain


l'lle d'ltaparica; et un an:.tphithéàtre de rp:on-
tagnes pitt0resques ~ermine I 'horizoft de tONs
, côtés ,, en oft."ra~t~.ti d es sc€nes·€hannantes. indé-
' .
peNdamment des proine:nades publiques, on a
pourvu. dans ta ville 'hraute aux plaisirs des ha-
bir:ans par la éonstruction d'une s~lle de spec-
tade; mais elle est d'ml góut un eu antique,
plus pêtite que c~He Cfe Rio de Janeirõ, ét
gâté~ par de petits obélisques ' placés sur Je
.toit.
Oh: l~ahia trent~-síx ~gÚses et ún
gr*nd dé couvens, d' ou I' on peut ~e
fáire une idée de la quantité qecclésiastiques
1

et de moines qui se t.rou~ent dans cette ville.


, ' . I
D:ms quelques eouvens de femmes, les reli-
' . . ' \'
gittuses font dl'l tres-belles fleurs, avec des
phunes des oise~px du _yays, si re~arquables
paf la diversité e't la yariété ~ de leurs~· Ouleurs.
Él~es présentent ces bq;uquets aux étrang\ r'S qui
vienmmt voir le monaste e. ~ , '
~l.a partie basse de la y~Ile H' a que (ruelques
ru<fS le long du tivage ,tr~'s-rétréci ;. elle ren~
1ertne
i? )esL . I " . ;]~ ' .
.~c~Gubques, es· magas1•1~ tlesnego€Ians,

un~ bourse .
dont 0n es~ ve~:leva..hle~ au~ conílt6' dos
\
I
\\\~,
I \\

I
AU BRÉSIL.
Arc(i)s, l' arsenal et les chantiers. Dans ce. 1no-
'1nent on y aéhevaii urie frégate. Les bâtimens
que I' on construit à Bahia sont tres-renommés,
les forêts d.u Brésil étant re;nplies de bofs ex-
cellens pour la marine. .
Le commerce de Bàhia est tres-act:_if; cêtte

ville sert d' entrepôt aux productions du Sertam
qu' elle expédie dans les diverses parties dl!
monde; on y trouve des navires de toutes les
nations. Des paquebots eRtretienrreD:t une com~
munication constante avec le Portugal et Bio
de·Janei.r0; car ces bàtime:ns, qui sont tres-fins_ ·
voiliêrs, effectue:nt la traversée dans un temps
tres-court. Les hai>üa:ns des côtes v0isines
amenent tC>US' }es Jí>roduits de }eurs pla1J!tatÍO:i1J'S '
dans cette capitale , et les y éGhangent contr'e
des :fllarchandises' de diff~rens pays. Ce négoee
continuei et tres-animé a pi'bmptelnént fait de
Bahia une vi~e importante ; elle I'emportera de
be~ucorip sur Rio de Janeiro. On: peut s'e faire
Ullé idée de la rapidité des progres de Cétte

ville, en fais~nt réflexiem qu' en I 58 I elle né


coinptoit pãs plus de 8,ooo nabitans ' et que
toute l' enc·einte de Ia· baíe . n' en contenait
.
pas plus de 2,ooo, parmi lesquels· il ne faut
j

~·44
compten.dre' nÍ les ·negr·es nÍ les lpdiens (I).
Aüjourd'hui la populaLion de Bahia s'éleve à
pl~s de- wo,ooo c1mes . .
L'in,térieur de cette grande ville ri.' offve pas
o.n coup d' reil agréable ; on n' y remarque ni
propreté , ni ordre ; ni gout; l' architecture est
. m.assiv~ Les jésuites· faisoient venir . d'Europe
les pie~~es toutes taillées pnur leur' église 'etleur
couvent: Les maisons ne sont pas toutes bâties
.dans un goút uniforme : les únes sont hautes,
assez semblables à- celles d'Elllrope et omées d~
úakorts; ' le~ aiJ.tre~ sont basses, et assez chéti ves;
mais toutés ont des fenêtres ~trées. Dmant la
1/
sai~on 'seche, la chaleur .e st ins~pportable,
prircipalement dans la ville b~sse, et tou.tes
sortes d'ode111rs désagréabU~s la rendent
. I
eflcore
.
pl~s incommode. 'Une foule toujours én . mou~
.'Vel1t1ent et formée principalenil ent cf~onirnes de
c eo~leur a~gl!tlente cet"in<Jonvénient.J?es negres .
.réu,nis au nombd:~ d~ dou~~ , ving ' et plus , ·
I
pottr·porter des choses ll:res~pesantes, nr. ·rehent
~

en ·.pnal).t
. ou' en c11antan
,, , afid \ %
1

n ' ·e conser er un
pas égal :· tout~s les matchafldik s sont trans- .
poiJtées. ele cette 1naniere'\du pdrt à la ville; .,
. . I ~
. ~.

(r) Sou~hey, -H~story of Brazil, 'tom. I, p: .3Li. '


' ' \ ~
-' / ' \
AU BRÉSIL.
d' autre~ c0lportent toutes. sortes d'objets d'un
lieu à un autre en criant pour faire conna!tre
ce qu'ils ont à vendre; de chaque cô~é des rues
ori v~it les feux que les négre_sses tierment con-
'stamment atlumés, po~r faire cuire et rÇ>tir les
mets qu' elles ·yendent; à leurs compatriotes_, ·et
qui n' ont rien de bien appétissant. "
Les mreurs .et les usages des habitans ressem-
blent absoÍume~t à:ceux eles Portugais d'.Eu-
. rope ; on r dit que dans les hautes d~sses il
regne un luxe effréné. Les étrangel~S appar ....
tenai1s
'
au:x: nations 'â1aritimes et commercantes
',
sont ici tres-n0mbreux ; íl y a surtout beaucoup
(:l' Anglais, et actpellen1ent aussi passableli1ent
de. Français : . on ren,contre au con~raire bien
moins d:Allemands et de Hollandais .
. Durant le jour J on ne .voit point de femme~
dans les rues; ce n'est qu'~ux approches de .la
nuit que le b~au monde s0rt des maisons po~r
jo~ir de la fraicheur de la soirée; alors on en-
tend les chants ét le sonde la guitare. Parmi ·
Íes divertissemens orqinaires du ' ,peupl.e dans ,
les rues de Bahia, il -· faut compter les proces-
sions et les cérémmÍies religieuses qui ont lit:!u
fréquemment, par une suite. de l'incroyable
quantité de jours de fêtes: Les rues' sont bien
. \
VOYAGE
balayées; on les jonche çle S<J.ble blanc et de
Jkars ; 011- illurnin~ les f.enêtre.s,1 ~t les prm~e.s­
sioqs, écJ.airées par un gt&nd nombre de cierg~s
qqe h~s fid_ele.s tienJ1€;J1t à },i:!. rnai:o.,. HJ.arcehent au
sop. des doches et ~1.1. bruit d.es feu.x d' artífice
I
\.
vers l' égli&e ornée ,PQlJr les re€~Yoir. L~s e;nterte-
mens se fon1; de même le sQir à l~ hJ.~~r des
-
torc4~s ~t des flambeaq;x; on a .encore conservé
]a funeste h.ab~t:uQ.~ cl' eQt.evrer le.s :rnorts dans
Jes églises. A pres q~ le déflmt a reçu Ja Péné-
diction et de nqmbr.epses aspçr~ÍQ!!.S d' f)RI.,l-bé-
:
nite ~ on le descencl çlaps Ie ~Feau, .Jes prêtres
11
se retirei! t, et les n<~gre~ ache'ven t de çoüvrir le'
ce1\c ueil qe ,ten·e. Apres de.u;x. i;lll~_d'ipt,çp·up­
tion1. j'entepdis de ~ouveau 1~ ..~on d~s orgqe.s
. \
d:u,Js les églises, et le bruit çles c)Q.dH~s.
re~~ Anglais ' le 'co~trébanqieri Liniley ~t
Al'\cl-re Grant, ont decnt as§~~ ex::J;q;1;~ro,ent; Rw
de Janeiro et B,al~ia. On pe!lt ;>!lr~~.~t p' apr~~
' leurs relatiqns se faire une idée dçs ce~ ~m<;>~1Íe~
rellgie~ses usitées dani) ce pay_$. Majs €~{ deu;x
ca~itales ~ prenant tous 1.§ ans dj; ?~_<;roi~?s~e~ne;Js
cor,ts.i~érables, e~ ~~isa~1\tes p,r ogres d.ans l~
carrtere de la ClVlhSatWÍl ~" OH n~ trt)UVlí) .plu,s
. \ '
à présent autan\ d' abus 1 d' usa~·e,;; ,ridic11les ,
ni fle coutmnes gothiques t >t Pf!\ eP,. h::,rmonie

~\
\,
'

\'
AU BRÉSIL;

avec l'espFÍt du temps, que CeS . voyagem:s en


ont observés. Par exemple, il n' existe piu:s
ancune différence entre l'hàbillem~nt des habi-
tans des villes de ce pays et celui des' Euro-
pé~ns ; le luxe et 1'élégance regnent partout à
un \iJ.aut degré.
Grant dê figure d' ailleurs, dans sa Description
...
of Bras!l, une -q'ttantité de noms ,. et ·commet
toutes s0rtes de bévues en parlant de ce qui se
rapporte à l'histoire naturelle.
Une garnison assez nombreuse veille à la
défense de la v1.lle de Bahia : il s'y trouve
quatre régimens de troupes de 1igne et autanr
de miliee , ·parmi lesquels on en remaTque un
de negres et un de mulâtres. Le gouverneur
s' est trouvé plusieurs fois dans · la . nécessit'é
\
d' employer ces · troupes el'hommes de cm:rleur
pour réprimer les révoites de negres •esclaves ;
em.· ees demiers c0mposent la plus g·rande
partie de la pop1J1llation de. eette capitale. Les
troubles de Pen."..•amhl'me', qui éclat\hent à l' é-_
poqu.e de mon séjour à Bahia, avaient exigé
l'envoi de toutes les' tPoupes disponibles. Des
bâtimens · de guerre chargés de soldat>S et . de
nmmitions de guerre arriverent de R:i:o de
Janeiro ici; ceux. de Ià rade de Bahia se joi...:
VOYAGE
g_nirent a eux, el ils allerent bloquer le port
d'Olinda ou Pernambouc.
On eut aussi l' occasion à Bahia de donner
.eles éioges àla conduite d-u cmute d'.Arcos.
Gr~ce à_la promptitude et à la sagesse eles me-
sures qu'il _prit, il conserva cette belle pro_-
vince au roi, et parvint à étouffer l' esprit d'in-
Surrection que quelcrues hommes, dondes mau-
vaises intentions étaient co_n nues, cherchaient
à exciter pour le:ur intérêt personnel. Ces fac-
tieux avaient su attirer dans leur parti plusieurs
prêtres qui, profitant de l'ascendant que la
1 • re~igion leur donnait sur 1' esprit grossier des

' Brésiliens , pouvaient devenir tres-:-dangereux


.po1ur la tranqui]~ité publiq,u e. Martims,, Ribeira
et lVIendosa, chefs du complot , . .furent fusillés
.p~liquement à Bahia : des pr:ptres · m~me ,
furem punis du même supplice. ':Les habitans
de Bahia ont da1~s cette occasion fait, preuve de
fidélité et d'attacbement à lçur roi; Finsurrec-
/
tic~n fut universe1lem1 nt dé'sapprouvée · si Ie
d~nger fút devenu plus pressa t, cette fidélité
se fut manifestée plus o-uver~ement par ·des
ac:tions.
Plusieurs forts mettentBabia àl'abrid'une aua-
q1~e : l'entrée- d~ la baie de Tons les Saints est
\
AU 13RÉSIL.

d.~fendue sur le riva.ge par le fort de San-An-


tonio da Barra; la citadelle est sitgée clans lá
ville haute ; un autre fort a été construit dans lê
port devant la ville ; il a plusíéurs batteries dé
canon de gros calibre; on les tire en certaines
occasions, surtout les jours de gran9-e fête;
et pour ren_dre le salut aux vaisseatix qui
arnvent.
· Mon séjour dans' I'ancienne capital e du Brésil
futd'unecourtedurée; jen'euspasmêmeletemps
de 'visiter les établissemens scientifiques de la
ville, G{uóiqu'ils ne· soient ~ncore qu' en petit
nom'bre. lo:d.épendamment de la bibliotheque
publique à I'accroissement de laquelle Ie comte
do.s Arcos a pourvi1 _a vec tant de zel~, et-qui
deviendra tres-iniporta11te pour Fépa11dre les
lumieres daHS ces contrées' (i)U trouve à Bahia
d' autres collections.du même gen!'e qui rênfer-
ment cl:es ouvrages anciehs et moden1es tres-
préci.eüx'. Plusieurs convens·, p.ar exemple,
~elui ,d~s fraliciscains, possedent cl'anciens ma-
~mscrits tres-curieux sur le Brésil. li ,se tr'ouve
aussi dans .cette ville plusieurs savans , tels que ..
M. Antonio ·Gomes, ·çorrespondánt du comte
d'Hoffinannsegg de Berlii~, M. Paiva, M. B1var
et d' autres, qüi se livrent à 1' étude des sciences,
-\
:.~.5o VOYAGE

notamment de l'histoire naturelle. Je suis redc-


vahle.à la bÓnté du premier, qui a une belle
bihliotheque , de quelqnes écrits intéressans
sÚr le Brésil, et à l'obligeante communic,ation
des autres de diverses observations sur le cli-
mat de la ville et des environs de San-Sal-
vador.
Je fus tres-bien accueilli dans cette ville chez
plusieurs persom;tes instruites. M. le comte
dos Aecos effaça par sa conduite affectneuse,
et par l'intérêt qu'il me montra pour l'événe-
ment désagréable qui m' était arriv1 à N azareth ,
1 tons Jes souvenirs pénihles de cette journée si

tristement perclue, à laquelle le soulevement de


Pernambouc ' avait donné Jieu. Je dois aussi
par~er avec Feconnaissance de l'accueil que je
reçus de M. le colonel Cunningham, oonsul
anglais, et de sa famille: ils s'empi esserent de
me combler de marques de bonté. J' aurais bien ,
volontiers profité plus long-temps de tant de
' hienveillance, mais je qésirais rop vivemtnt de
revoir ma patrie pour ne pas profiter d'une oc-
\
casion favorable qui se p~ 'sentait. Elle me fit
hâtcr mon départ pour l'Europe.
AU BRÉSIL.

CHAPI'Í.llE XIX.

\ ' '
RETOUR EN EUHOPE.

Trjlvers.é!i de San- Salvador à Lisbonne. -Départ pour Faf-


mouth. - Voyage dans l'intériem de l'Angleterre.- Dép;rt
pour -Ostende.

4 P Lrinc~sa Carlota; Mtiment de l'Inde.,


C0l)1.llHJ.B.dé pa.r le Gapitaine Béthencourt, étoit~
en a.llant ele Calcu.tta en E;urope, entré à Bahia
afin d'y prenclre des provis~ons frakhe!i l le
gouvçrnement l'av:;~.it JUÍs en réquisition pour
pcrrter à J>er_p.aJ.Ilp~uç eles J'llu.nitions de guerr~,
Cette mission remplie ce vaisseau reyint ~ Bahia.
Il était cpmmqd~ e,t sur; ' je résolus de ne pas
laisser échapper- cette' occas~~n e~cellen.te, e~ ~~
IlJ'emh~rquer ppqr Lisbonne,
A'yan.t pri~ s:;opgé d~ mes com1-ais~ances ~ j~
rp~ ~ rendis 4' bord le io ~ai au soir ; av~nt la
n-lJ.i~ Je capi~ajn,é Bétlwnc.Qurt fit lever l'ancr~.
L<=; vent était f.worable pour nous pousser hor.s
VOYAGE

de la baie ; on mit toutes les voiles dehors ;


noÍ1s ne tardâmes pas à perdre la yilie de vue.
Cep~ndant le v:ent ay..ant 'diminué :~ et ne souf-
flant plus que -faiblement, nous apêrcevions
en~ore la cÔLe le l i et le 12. Le thennom(hre
se tenaít ~ ~nidi, au solei!, à .24 degrés et demi
d~ Réaunmr; à 23 à l'ombre, et à g heures
du soir à 2 1 degr'és.
' Dans la nuit du 12, ie -ye;1f frakhit de nou-
veau;, de sorte que le I3 ·al'l matin la ~ôte av~it
entierement disparu .. A notre grande satisfac-
. ..; .. ' . . ,I v ,.~ ~1 ' , •
twn fe temps co~t11nua1t a et'f'e beau , ú n eta'l!t
I/
'n~ t~op chau~ ni trop _fr~is. A _ m idi thermo- Ie
metre ' se tenait toujours à 26
i• ' . ·' '.\
e"-f 28 âegrés. .
D,éjà nous étions ~ntrés 'd'~ns le vent alisé; . il
. so;liffia presq;ue continuel:l~ment 1 d~ l' est sud-est:
p6(ndant toute notre traversée, av~c des deg1:"és
d6,~ :force difféf·e~s ; ·la mer avait pFjs une bell,e
c9uleur bleu foBcé.
'L e 1 5 ~1ous étions \à1\ peu• ~~es
1\'\ à la ~ute~r
\ ' . '
. de
·
..
f embeuchure du Rio-~\n-Franeisco. lil s ape'r~ ·
l
-·ÇuJmes quelques petit:s ~~~aux q' tempête isolés,
I • \ '

' et1 fréqÚ:e:rnn~ent un oisêa\I blarlt avec les ailes


fl(~ires, il ressemblait -tú5· fbrt de bassan. Ordi-
., . \\ .
rt~t'irenJ.ent on éprouvait ,u n peu dê\calp1e apre~
1
' 'd'1 ·dans -ces ·par ages c1e i'O cl!san ' ~; mms ·. abx
illll

'\
- ~ % •.

\~ ~-\\ .

\
'
\\

·- . \
. \ \\
~ \\

'
AU BRÉSIL.
ápproches de la nuit, le vent .fratchissait de.
nouveau.
Le 17_ le vent f11t tres-fort, on douhla le
cap Saint-Augustin. Le même jour on avait
laissé en arriere Pernambouc, ce qui fit g~and
plaisiv à-tout le monde, parce que I' on avait
crqint d' être arrêté pãr eles vaissea"ux de guerre .
portugais qui ci~oisaient devant ·cette ville; et
qui auraielit pu nous mettre une seconde fois
eil- réquisition. Le vent étant devenu un peü
moins favorable, on. fut obligé de se diriger sur
l':tle Fernando de No;onha. :ijous éprouvâmes
de violemtes ra-ffales et de forts grains de pluie,
conséqu~nces ordinaires du voisinag~ d~ terre. '
On vit dans ces par ages beaucoup cl' oiseaux de
mer, et des ti-Cmpes nombreuses de poissons
volans.
Le 20 nous avioBs p~ssé Fernando de N;o-''
ronha. Le. vent fut de nouveau favoraible et le
temps serein. Enfin un beau c.l air de lune ajou-
tait à l'agrément de n'otr.e navigation. Je re···:
grettai be~ucoup de n' avoir pas vu · cette lle.
On dit qu' elle ·a trois legoas de long. On y en- .·
voie une garnison de Pernambouc; elle ·~ert de : ,
lieu de bannissement a~ des criminels condamnés
e~ Portugal à' ceúe peine. Les hab~~anf> ct~l- ·
VOYACE,

tivent beaucoup de:manioc , et font rme pêche


ah?ndante le long eles côtes.
Un degré considérable de chaleur, car à 9
heures du soir le thermometre se soutenai:t
entre 21 et 22 degrés, eles torrens de· pluie et
eles cahnes rtous anrroncerent l'approche de
l'équateur; effectivement, nous le coupâmes ·
dans la nuit du 22 · au 23 mai. Nous nous re-
trouvions a:insi dans Fhémisphere septentrional;
cette idée remplit d'une joie manifeste toutes
les personnes qui se trouvaient à hotel du vais-
seau, et qJii avaient été si lo11g-temps séparées
1
li de leur patrie. •

Les calmes et les gra:ndes pluie_!) se succé-


derent encore alteríiativemen1i pendant huit
jours; la chaleur était tres-forte. Quelquefois
la pluie tombait avec tant de vi~~ence qu'elle
pénétrait en plusieurs enclroits du vaisseau.
Quand nous nous trouvâmes dans le parallele
J
clep Hes du Cap-VerD, la cb ~leur dim' ~ua tre$-
sensiblement, puisqut' midi' le thermm:netre
au soleil ne marquait ·pas plus ' e 23 à 24 de-
grfs ; le vent était géneralem pt tres-fort: il
nous poussait. trop a' 1'~st,\ ·et 1a1Sa1t
1" • •
trop pen-
cher le bâtiment sur le côlé, de sorte que les
lames couvraient une grande 'partie du'' pont.
'
AU BI\ÉSIL.

Le temps orageux et désagréable qui régna


constamment sous le paraUele ' des ile's du Cap-
Vert était quelquef9is interrompu le soir pár
des intervalles phts trarrquilles, et nóus_jouis- ~
sions d'un b€au clair de lu:ne. Alots assis sm·
l'atriM·e du hâtinient f1ous pouvions considérer
à l'ai:se la be1Jié êó'l'lSteNation de là cl'oix dans
l'hémisphere austral: eHe resplendissait ele l'éclat
le plus IDI'iHa•J,.n .
Le 4 jui'.fl, 1€ temfls étaiÍt couvert, som.bt•e,
nuageux, et le vellt iml)étmeux; nous apet-
ç1unes un p,~ti.me:rrt à· irois m~ts qui venait di-
rectertleílt sur Iious. N0Ll:S appréhendions ,déjà
que ce ne frô:t uh corsaire, lorsqu'il arbora le
pavillcm des Pays-l&as.
L€ g jll1in nou-s coupâmes ·Ie tropique du
Cancer. Peu de temps aupatavant nous avrons
observé d:es gôemob:s flottans ,·,~ft•. d~s. paille-en:-
culs; les Portagais donnent à ces oiseauxle nom
de f'al:llbo de junco. Les goen~ons, devenaient de
plüs· én pfus collinnuns, ce qui a fait nornmer
par les Fortugais cette partie de l'Océan atlan-
tiqrte niar. de 8-(jlrgmrsso,. •·
La chaleNr à :ir~idi ét~it de 22 degrés, le
ternps conbinaait à êt~e êouvert; nbus l'le cessions
pas.de 1~êcher 'lll~e qt;rantité de goen1ons. Noqs
VOYAGE
trouvâmes dans , ces plantes marines un petit
crabe et plusieurs especes de petits poissons ,
notam:ment des syngnathes nommés vuJgaire-
' ment aiguilles de mer. Les pailles-el'l.-culs nous .
avaierit aécompagnés à peu pres du 8 au I 2 de
juin, par conséquent jusqu' au parallele de l':tle-
Palma; ils se tenaient toujours à une tn!.s-grande
hauteur; on ne put en tuer aucun.
Le I 4 le temps fut tres-beau ; nous et1mes. le
· div.ertissement de la pêche. Une troupe de do-
- rades vsuivait le bâtirnent depuis la veille, elle
I'entourait de tous côtés. Qp. réussit à prendre
li un de ces poissons magnifiqÚes; il est impossi-
b~e ge se figurer rien de pllis brill~nt : la teinte ,
.générale de son corps est d'un ,;bleu argenté ta-
c1,1eté de jaune avec un reflet çloré; ~~ ventre
e~t argenté; les nageõires sont d' un jaune vif à
base brune, ou bien dorées sm· un membrane .
d'lun bleu céles.t e éclatant; des points de couleur
I I
Ol(~tl'em~:. rehaussent le f~nd d'un V~r~ ~O~é ; r
m ~ eme I ms des yeux~st d Iil bleu dore ~ Il de-
.1
v1ent .
1aune quan d I~e poiss@n
. À aIors
est mort;
toutes ses belles couleúrs dispâ aissent. Sa chair '
' \ d p1··
savoureuse nous fiIt tres-gi:an . l1ar-
a1s1r; on
pona un autre de ces be~ux poiss0níS. Le vaisseau
.
était aussi envirõnné d'aicacores et,d'une autre

"
1
~ '

\\ \~\~"
.1\U BRÉSit.;

oesp~ce de poisson nommé judeas pa.r les 'Por-


tugais; mais on ne pnt en prendre aucun.
Le 1 5 juin no'us étions au..:.delà de la me'l' de
Sargasso ; nous n'aperceviü"ns plus de goemems
flottans. Nous éprcmvions souvent des calmes;
le soir la chaleur était ordinairement de 18 de-
' .
grés; le. :r8 ~ous nous trouviori.s.à peu pres par
le parallele ·de Gibraltar. Les mollusques se
montr.~ient en grand nombre à la surface pai-
sible de la nÍer' notamment la physalide' la
m~duse e~ un€ beroe, de même que des honites
~t l'oiseau. de tempête. -
L é I g le vent qui fraichit nous perrnit de
nous dií·ig€r sur les Açores et sur la·côte de
Por1iu,gal; il devint plU:s .fort le 20; les lames ve-
naietit défe:vIe r sur le pón t ; I'aflres-m:idi .UJJ. g-r.ain
a.ccompagné de raffales nous força de serrer la
plup:wt des voiles. Le 2 I le temps ét~it couvért
et ~uenaçant; le vent souf:Hait· ~n mug:issant, la
ph,l ie tomhait à totrens; l'€au coulait le long du
pont; les lames , écumantes frappaient le vais~
seau avec tant de violence·que ses fl:ancs étaieJílt
continuellement ébranl~s.. :Nous aperç-Luues m1
bhiment qui de même que nous s' efforçait avec
peu de .voiles de hraver la• furie , des vents et
des flot~. V ers midi lli vent, ,qui jusqu'aloi·s·avait
I II. 17
''

VOYAG-E
. )

souffié .du nor-d ~vec 'Ia, plus ,g ra-nde impétuo~


sité, santa brusquement au nord-ouest; ce chan-
gement suhi:t faillit à cas~er rtos mâts, el nou
jeta dans mie ebnfusion affre:use. Tout le monde
«<:o111:rur sljlr ;le-pont, et chacun mit la main à l'ou-
vrage pom amener les voiies ; ' tâche difficile à
cause ' de la pluie . violente qui aécompagnait
cette tempête. L'aumônier du bâtiment, qui
était pn Maratte de Goa,-le chirurgien et les pas-
sagers payerent de leur personne ~n cette oc-
casion. A pres bien eles ~ffori~ op parVin·t à·éch-a p-
per au danger. · d ·' • . ~ ..
1/ Le vaisseau fut obligé de';! se dirige r au súcl-
oyest., ce qut• etalt:
f , • pou:r 1m· une _wu~se r
1:m.lte.
q~pendant la violence ·1e la 'tempête- s'apaisa
H1~ pea ; 1nais la n1er restffi,.t trest grQsse ; le vent .
C~),Iitinuai: à. souffiet: gr~n.~ frais.,\ ~~ therm~­
illi'e tre se~~~n_a11.a1ors a nnd1 a 17 clegres, et lesou·
à ' I 5. Le lend en:l.ainI
le temps fut moins ' .
mal!l.vais
et la temr)érature phi\s chaucle. Le surJ:enclemain
I ~ \~ . • \\

l':Ümosphere fut -somij e et {>luvieuse, ' e~ 'le vent


I \ ' . \ \
fort. Le vaisseau filait sept 111~uds ave c les rris
I. d
PfiS :ms. ses ·b asses V(Jll~S;
. ·~ 1'l e, 1~ 1t extremement
I • • I

plencue 1~ , sur Ie cote, ppslt~pn a laque11e contn-


A , .\ . ' ' .
buaient beaucoup ses mâls ·faits er\_bois clu Bré-
sil tres- sólicle mais tres-lou:ht. ~
\
ç '\.

I
Au---:BB.ÊSIL.
Naus pouvions attribuer ee temps désagréa..::
ble et ·variable au .Voisinage des lles• Açores.
Naus vtmes plusieurs bâtimens qui 'luttaient
aussi contve Ja tourrnente. Naus observâmes que '·
la température de la pluie était~ plus chaude que
celle du vent; le thermometre exposé à son
souffie ne se tenait c1u'à 15 degrés, tandis que
lorsqu'on I' en garaJ1tissait il s'élevait à 16; il
resta aú même point jusque dans la nuit.
A midi naus naus trouv<imes à l'entrée du
can~l CIUÍ sé pare F ayal ele Flores. N ous pensions
\
d' ~pn~s notre calcul être au norcl de la premiere
.qé ces-lles; ·lorsqueie s'oir, les Iiuages épais qui
.
couvra1ent I.a surface
' de 1a mer s''etant un peu
· écm~tés, no~s a·perçumes, à un~ distance de cinq
l~go!'ls., uh. haut promontoire de file Cl'"e Fayal.
On •distinguait en avant de 'eette ·côte rocail-
l<mse et escarpée une peti,t.~ tl~ de r0Ghe qui fit
reconnáhre que c'étaitle cap "no.~l:né Punta
das Capelltn!zas .
Le capitaine Bétihenc0urt dirigea alors sa ro'Ute
un peu plus au nord, 'et s'éloigna de l'lle' qui
était sa patrie et qu'il n'~vait pas revue depuis
·plusieqi·s années. J'auraiseu, jel'avou·e, bien du
plaisir à connahre Fayal; mais i! fallut se résigner .
à n'y pas descendre. ·
_)
I
Nous naviguions ·avec un vent bon frais. Vers
minuit on aperçut tout à coup une goelette
que l'on reconnut pour un corsaire améric-ein.
L' alarme fut générille; o:n vira prml?-pteJnent ele
bord, et comme on semblait être emlormi à
hord de la. goelette, nous e-lunes le bonheur
d' échapper encore à ce daNger. An point du
jour .on avait entiim~ment perdu de vue ce bâ...:
timent.
Le 24 le tel!nps fut sombre et orageux ; la
mer tres-grosse venait sans cesse fi-apper aveG
violence '
contre le M.timent
-
c1ui
\1
filaithuitnreuds.
11 Bientôt
I
n0us fúmesi
aru nord

de l'lle Graciosa.
Nous v~mes pl].1siei:trs navires; nousJes évitâmes
tons avec un soin extrê:nJ.e, 'c ar un granel
no mbre de corsaires crQisent 1ordinairement
1

daf1s ces parages. lls guettent av:'demei~t les


hâfim.ens portuga~s ~enant de l'Iil'~e avec dé
riches cargaison·s, Iet qui .dans leur trav~rsée póuÍ:
gaf1er l'Europ~ prell!nent cqpnaissanc\\cles Ües
. A~0res. ; d' ai.Uenrs les~ routes de b~aucoup de
vai.sseaux se croisent l:Ians le Vioisinage ~de cet
1 v
.ar<:h'1pel . ers m1'd'1 nous ~ unes .~'p.asser pres d e
1
A '

nous une grande voile, qui tenaiit encore à ·sa


vergue' ce qui nous fit supposér ql!-e peut-:;-être
uJ. bâtiment avait péri dans\ la toun.n ente qu~
. . ' \
\
AU BRÉS'I L. 2.6 t

'
no us avwns eprouvee. ' · L a mer etall
' . d' un gns
.
plornhé, les lames en se brisant la couvraie:nt
d' mae écume blanche. L k vent qui soufflait grand
frais nous était favorable ; 'la pluie t:ombait sans
/

discominuer; mais nous marchions avec rapi-


dité.
Le 25 nous avions passé les Açores; le vent,
toujours 1lres-fort, nous poussait vers la côte de
·Portugal; il va·riait fréquemment et dom1ait
-beaúcoup·à faire aux matélots. N0s vigies sur le
grand mât signalerent plusieurs voiles que ill.ous
évitâ1nes p'arce que nGrus n' a~i0ns pas de canons. ·
L'espac~ · !!pxi: nous séparait du continent euro-
. pfen n' était pas considérable J •mais à cfu~e des
-c~rs..aires présentait p1us de dangers que la dis- ·
tá-~1ce iínmense que nous avions déjà parcourue.
On observait attentivement tous les navires.
Chaque jour on en voyait 'un -grand nmllbre ,
à l'ins·~ant on primait une direction ·différente,
Ceue manretivre :nous avait co:mplétement
rét1ssi. Le 28 dans· la matinée bp eut'coünais-
sance ·à l'horiz,on, d'un · bâtinient ·qui sem:Olait
süivre la même route q~e nous. Le p~lote de.Za
Carlota; qüi avaitcléjà étérfaitprisonnier par les
, .co~saires, 'observa de mê_m e que le capi;taine et
.i outl'équipage ce vaisseau avec la plus grande
VOYAGE
attention; car ils préteúdaiént tou.s dístinguer
dans sa ~nanceuvre des signes fâcheux pour nóus ~
BieatÔ'~ :iJ. ne fut plus possible d'eÍl douter. Le
na vire courut d·r oit à ndus, et mit toutes .ses
v.oiles ,dehors pour nous atteiindre. Vers midi.,
on le reconnut pour une goelette- américaine; il
était par conséquent tres-vraise:r:nhl:;ible que'-
nous allions avoir affaire à un corsaire·. Dans ce
moment il tira un coup de canon pour indiquer
que nous devions I' attendre, et híssa le pavíllon
portmgai:s. La confusion fút au cornhle, chaoun
descendit darts la chamhre po'ur eacher eé qu'j~
11
po~sédait. On perça dés trous. dans le b.:himent
l)OUr y méttre ce que I' on avait de .plus prê-
cie·rx, qu:oique l'on ne dut ·g uere espérer de
rien dérober aux regards .avides lde pirates al-
tér~s de hutin. Sur ces entrefaites.., ~e dmer fut
ser•1vi; mais il fut bien vite expédié . Ces m:ots
. I
«La goelette V.a , nous ~ accoster )) rlilssemble-
. I ' 'd I l
ren,t ' ~e,ut e ~on ~' :sr-r e ~ont.
N os~ y~ux se
pprta:1ent a:vec mql.!l.lettiMe et iiru:ts le pl~~~p·and
site,nce ve:vs· le bâtiment qui arnvait sur nous à
tou,.tes v01•'l es. ll ava:tt
. d e'h Qll~C he s s canons; tout
f \

l'équipage sur le pe'nt nous considérait -attenti-


verr-ent, et ·d áns l e nomb're ,on d'1stmgualt
1 ' ~ . . d es
'
ne~res et des· m u1·atres , ' ce qm \·. al:J.gmentmt
· 1102

:1

1\
A U Bli.ÉS1L.

"oupçons, D~ns le moment ou nous altendions


avec une anxiété clifficile à dépeinare la déci-
' de notre sort, le ·comínand!fnt de la goel~tte
'-sio,n
prit le porte-voix, ct nous demanda. qui nous
étions et d'oil naus venions. Naus répondtmes,
bien inquiets de ce que f Oll alláit llOUS répJiquer,
lor~que dans le moment, quelle satisfaction in-
attendue ! nos mateÍots postés dans la .h une re-
connurent que le l?rétendu corsaire était u~1
bâtirr-tent de guer.re portugais. La joie se répah-
dit à notre bord, et l'on se félicita récipro-
quement. La goelette senommait la Constancia.
L'officier qui la commandait nous ordonna
de l'attendre, ajoutant qu'il allait nous envoyer
un canot. Le lieutenant qui le nwniait confirma
noscappréhensions sur le peu de sureté de ces
parages.. La Constancia étaireffectivement une
belle goelette américaine , de dix-huit canons
que le g0uv_e rnement portugais avait açhe.tée et
armée. Elle avait quitté Lisbonne depuis huit
jours pour croiser dans ces parages êoutre les
corsaires qui les infestaient. Quatre ;mois aupa -
ravant, tme frégate portugaise en avait pris m1 .
Un de ces pirates avait poursui vi et attaqtié un
gros .navire portugais c1ui revenait ele l'Incle; .irl
n'a.v.ait pu. le prendre parce que le clernier, qui

' .
VOYAGE
}Jortait vin~t .canons, s' était .défendu brave-
ment.'
Jqyeux de voir s' éclaircir d'une maniere aussi
favorable un fait.quinous avait donné tant d'in-
quiétudes ,. la, Carlota remit toutes ses voiles
dehors; lct . Con8taricia en fit autant,, et apres
av~ir hissé son . canot à bord, elle nous passa'
sous .le vent avec. la vitesse d'une fleche én nous
souhaitant un bon voyage. NousTúmes bientôt
sépa~és , ear les deux bâtimens eouraient l'uu
à l'est, l'autre au s1;1.d. Le te~ps, par grains et
par raffales, que les Portugªi& nomment agoa-
~eíro, nous servait à souhait; en quelques heures
no ps.elime~>perdu de vue la Constancia. Le len-
1

demain :nous vimes :b.eaucoup de navires que


no;f s évitions toujours. Le 5o juin des goemons
il.oftans et 'd'autres. índices nous annoncerent
le yoisinage.des côtes d'Europe. Unàfle ces goe-
m ons r essemble à un large ruban; Ies naviga-
te9rs .·portugais lui oht donné le no~ de Cu-
1 ·\

rio~. ' \· , · ~
..,<\. deux heures ap:residi Ie cri de cc ter r e ·!
terre ! )) se fit enténdre du haut\ du grand mat
et ~1ous remplit d'allégresse. Bientôt nous aper-
cill:nes
~ '
dans un lointain brumeux . le cap . da
Roca sur la côte de Portugal;) sa pointe se mon~
AU BRESIL: 265
~l d
tralt

a' nos yeux comme une ue o1,1cement ar-
roridie; la côte n~ tarda pas à •se développer
plus distinctement à nos regards , malgré les
nuages qui obscurcissaient un peu la beauté de
la perspective. Des bâtimens de différentes na-
tions paraissaient au loin; plusieurs bateaux
pêcheurs s'étant approchés, on leur fit enten-
dre en hissant un pavillon que nous désirions
un pil0te. Yera·le soir unmuleta, bateau pêcheur
d'une construction singuliere, ayant le pavillon
eles pilotes, nou;5 accosta. 11 nous apportait une
§Tande quandté d' excellent poisson, et amenait
un pilote de Cascaes qui monta tóut de suite à
bord. Le jour était trop avancé pour que l'on
pút entrer dans le Tage; on louvoya jusqu'au
lendemain. matin., -
Le I crjuillet au point du jour nolis étions tous
sur le pont, pou.r saluer les côtes d'Europe.'
Par malheur le , temps n' était pas assez beau
pour ·c1ue nous pussións hién distinguer Ia' terre.
Notre route se dirigéait vers l'embouchure clu
Tage, formée au norcl pat; le Cabo ela Roca, au
sudpar le cap cl'~spichel; ce·dernier, qui s'a-
vance ·beaucoup en mer, est ~oins élc:;vé ·que
l'autre. La mer avait la même çouleur d'un vert
clair qu e lc long eles côtes du Brésil. A g heures
266 VOYAGE
la Carlo~a passa la barre; la me r y' brisé ave c;
viol~nce à droite et à gauche sur des ro_chers .
Des muletas, des hareiros et cl'autres ,bateaux
pêcheurs de forme bizarre et des navires espa-
·gnols se croisaient dans tousles sens et faisaient
-route avec nous.
Sur ces entrefaites le brouillard s' était,dissipé.
Nuns apercevions les deux rives du fleuve qui
s'élevaie:nt en pentes doUC€S; elles étaient
convertes de villages, de maisons de cam-
pagne, d' églises-. Wialgré sa largeur on distin-
guait la couleur blanche des maisons, et les
11 champs déjà dépouillés de moissons. Nous
Iaissâmes· à droite le fort de Torre de Bujio, et
à {;auche 1e fort Saint-J~1lien. Le Tage se ré-
trécissait U-\1 peu plus. Nous passâmes devant
\ -dGUX frégates françaises qui étaie J.t m.ouillées et.
qu'une bombarde portugaise visita) .
Vers midi la Carlota laissa tomber l'ancre à
la rive septentfioi1ale du T~ge, deva~ Belem ,
c1ui
.
fait le co~nmenc\\ '\ ment \.l1e
\>L,
la ville de
\
Lis-•
bopne. L es maisons c ·ntinueut ensuite sans.
int 1erruption jusqu'; cette capitaT~. L' apres-mid~
no r s SU]A
I I .. d \ , o1l ne put qmt-
)llllCS a VlSlte ~ sante;
.
ter le bâliment qu'apres que tous les passe-ports
eur~nt été rig.OlllPensementcx'am~és . Deux vais-.

/
AU BRÉSIL.

seaux de ligne crui étaient à l'ancre pres de la


ville, et qui devaient sous peu de jours aller
prendre à Livouruel'archiduchesse Léopoldine
d'Autriche pour la concluíre à Rio de Janeiro,
envoyerent à notre bord un officier avec un dé-
tachementafia d'y choisir un certainnombre de
nos matelots·, parcequ'ils manquaientdemonde.
Nous fumes bientôt, fau.te de vent, obligés de /
motUller de nouveau. Des le soir et penclant la
nuit un granCI. nombre de soldats s' <ftablirent
sur notre b0rd' pour veiller sur les matelo Ls; ils
tiraient à balle sur tous les bateaux qui s' appro-
chaient.
Le 2 juillet nous nous remtmes en r0ute pemt
LisbÓnne. L'aspect de cette grande ville est
magnifique ;· elle s' étencl le long d!! Tag~ sur -
des collines qui s' élevent par une pente douce.
On aperçoit au milieu ele' ses maisons blanches,
eouvertes de tuiles rougeâtres , de grands édi-
fices et eles palais considérables-, entre autres
celui d' Ajuda qui n' est pas encare achevé, eles
églises cl'une masse imposante, etc. Entre les bâ-
timens s' élevent des bocages toujours verts de
lauriers, d'orangers, de citronniers, mêlés de
cypres et ele pins; leur teinte somhre forme le
contraste le plus' agréable avec le vert c1air eles
268 VOYAGE
oliviers. On remarque surtout au milieú cte ceSI
touffes d' arbres le j ardin ue la reine. M~is toute
·cette . perspective a quelque chose· de sé vere ,
cl'inanimé, de nu; on y cherche vainemeilt
de ]a verclure frakhe; les yeux sont frappés
seulement de la coulem brulée du sol, de la
blancheur eles maisons , et de la teinte rembru-
nie eles groupes a'arbres.
V ers midi nous laissâmes tomber l'ancre de-
vant le quai clu sucl ( Sodré ) et la statue du roi
Jean I•'", que l' on désigne orclinairement par le
nom ele Memoria; nous ~ étions\ /.
entre deux
grands na vires à trois mâts, revenus comme
n'ous de voyages lointains.
Le vue du fleuve en c~t endroit est tn~s-belle.
~';! CÔt~ de terre il ressemble à ~1e mer, Cal'
.ses rives ;xtrêmement basses sont si écartées
\

qp'on ne les aperçoit p~s. Des bâtimens de


toutes les grandeurs, chargés de production~
descantons voisii1s, se crois 1 nt à chaq~e iBstant;
l~ Jleuve offre ainsi 1:\ 1 tabl'e, u mouva~ qui est
df plu~ granel intérêt. Lc the mometre à b9rd
d\-1 vaisseau se tenait à idi à ~,g degrés; mais
la chaleur était beaucoup plus fortedans les rues.
li faisait un temps superbe.
Lisbo,nne vnc du Tage .plaH peaucoup plus à
. AU BRÉSIL;
l' reil que lorsque l' on a pénétré dans son inté-
rieur. Le sol en est· montueux-, inégal; · les
maisons sont .éparses et mal entretenues, les
rues sales. Elle eccupe ;une 'étenelue considé-
rablé le long de la rive septentrionale elu Tage. ·
Ce n' est que sur le bord ele cé fle~ve que I'on
trouve réellement une ville réguliere avec ele
·longues rues, elont quelquês-unes ·sont larges:
Dans les parties hautes de la vilJe ies maisons /

sont.séparées les unes des autres par 'eles jardins


et même par el~s champs. La plÜpart des rues
sont étroites, malpropres, et par conséq.uent
. '
exhalent une odeur extrêmement elésagréahle
elans les grandes chaleurs. T_,es maisorís sont en
pie1;re, généralement à plnsieurs étages; toutes
ont eles palcons el'ou l' on jot1ii ele la vue du fleuve
et du beau pays qu'il baigrie. Le IlOilLhre eles
églises .et eles convens est prodigieux, et I'on
rencon~Te eles 111oii1es de toutes les cciuleurs·.
Cette capitale a plusieurs ,éciifices pu- J

blics. Op reiC\ílarque enp:e autres !'arsenal avec


les chantiers' la maison' eles I neles avec la
'
douarie ( aifandega) et la bóurse qui sont réu-'
nies dans un même bâtiment, pres de la belle:
et grande place du Con~merce (pr.az·a do Com•
mercio)' ou,l'on a érigé la statue de Jean 1"'',
270 VOY A.'GE
Lisbonne a un Opéra et deux autres sallés de
spectacle. Les quais, notamment le quai Sod..ré,
devant lequel mouillent les gros bâtimens de
l'Inde, sont ~res-fréquentés; le soir surtout ils
servent de promenade aux habitans qui vien-
nent y respirer le frais: On dit qu'auparavant
I'affluence des_prom~neurs et des négocians était
beaucoup plus- considérable daus cette partie de
la ville située pres du fieuve, qu' elle ne Yest
aujourd:hui , le commerce ayant infiniment
perdu de son importanc~. Les Portugais accu-
sent le g€mvernement britannique de cette dé-
l) ca denee d e leur prospente; , ' )I et vm'l'a pourcp3-01.
1es AngIa1s . ne sont pas, mmes . ' genf)ra
' ' 1ement. L e
1

c:ommerce est plus considérab]e ·avec les Indes


9rientales. qu' avec lc Brésil; les1Anglais ont ab.,.
splument ruiné celui-ci.
Le Portugal est à plusieurs éga ~s beaucoup
en arriere des a utres pays de l'Eur{_)pe .. La ca-
1
I\ritale ri1ême manque de 1 plusieurs\\établisse-
~lens utiles que l'on ~puve,~ans pres\t~e toutes
.
Iys petltes ~ CIV
vill es d es et'ats '"'dl'V:
1ses e :C.urope.
'fout y est cher, les \ o'itures ( seiclzas) et les
aub erges . y sont extr~mement mauva1ses. L e·
A \ • •

petitnombre de celles que tienne~lt · des êtran-


gers vaut un peu mieux. L.es rues ·ne sont pas
\

I \
AU BR.ÉSIL. 27 {.
éclairées pendant la nuit : fes gí·ands chemins
nc sont pas bien entretenus ; la poste aux
lettres pour Madrid ne va qu'à cheval: il n'y
a pas de gardes qui pendant l.a nuit veilfent à
Ja sureté des rtleS; mais actuelJement 011 ren-
COntre partout aes' postes militaires, surtout
depuis le soulevement qU.i a eu lieu assez ré-
cemment.
Cette capitale d'un pays méridional frappe
par plusieurs parlicularités un habitant du not'd
de l'Europe. L'eau qu'am(me des mont<~gnes
de Cintra, éloignées de. quatre legoas, un bel
aquéduc en pierres de taille, est portée dans
toute la ville par des homi:nes qui la vendent
en petits barüs. Ces porteurs d' eau, qui appar-
tiennent à la classe du peuple la plus grossiere;
sont en bandes nombreuses à toutes les _fon-
taines. Tous les matins au point du jour on
promene dans les rues eles vaches et des che-
vres avec une sonnette au cou; on les trait
devant les pm~tes des personnes c{ui veuient
acheter du lait. On rencontre dans les rues
une foule de jardiniers, de paysans, de meu-
niers, qui conduisent des troupes de. nrulets et
d'ânes chargés de fruits, d'herbes ' potageres,
de légumes, de farine , etc. , qu'ils vendent à
VOYAGE
tout venant. On apporte surtout dans cette v~lle
une grande quantité de fruits.

L
On voit à Lisbonne. .
plusieurs grands jardins ou
de beaux arbres touffus attirendes promeneurs ..
Mais les Portugais sont aussi en arriere des
autres natiqns qans l'art des jar<ilins: On trouve
.encare vartout des ~rbres t;illés ~ dans ;l'ancie:Ú
gout franç.ais, et défigurés par lés formes bizar-
res et ridicules qu' on leur fait prendre. , Le
jardin de la reine est à Belem, parti e inférieure
de la, ville, tout,. aupres de Ja mé~agerie, au-
jourd'hui complétement vide: il consiste en un
hosquet composé de grands 'Arbres de diffé;en.:..
t~s especes, entre autres 4e peupliers argentés,
de lauriers, de caroubiers et d' au-tres, propres.
aux climats mér'idionaux; ils for nent des allées
' : j

entourées de haies taillées au ciseau : une mul-


ti~ude d' oiseaux animent ce boca~ e par leurs
chants. Le jardin public (passeo plliblico), situé
au milieu de la ,f vil~~, est sur le w'ême plan:
Ctjtte promenade quo· gue p •\i te fait g ·a d plai-
sir par la frakheur w' elle l~pand au\ cen~re
des rues échauffées Far le. s(i)leiL Parmi les
arbres d~ ce pa~s on ohs;rve avec_ plais~r des
g~iniers tres-~eaux. ' , _ ,
~e })alais d u roi, édifice q' une' gt;,.ande"Nr mé-
. \

1
AU BRÉSíL.
diocre, est à peu de distance de la ,promenacle
publique. On en construit à· B~lem un ::j.utre
nommé palatio da ajuda, mais il y a encore
beaucoup à faire pour le finir. Les etrangers
voient avec plus d'int~rêt le cabinet d'h~stoire
natuielle qui n'en ~st pa1; éloigné, · il e~t cwn-
tigu au jardl.n de botanl.que. On dl.t que le
premier ·était beaúcoup pliis riche ; cepe'ndant
il renferme encore beautoup de chosés cú-
1

rieuses venues des possessions portugaises d.ans


l~s différentes p~rties du 'monde. Nàpoléon, qui
déclarait dr. bortne .prise iou.s les ohjets sur les-
quels il pouvait méttre la mairi, s'est acc1uis
un renom impérissable chez les Portugais par
i
le pillage de ce cahiüet : car a été le premier
des ·conquérans qui n'ait p~s épargné m~me les
établissemens r~latifs aux sciences chezles diffé- .
rens peuples qu'i:h.dépoH.illait. ll .y avait autre-
fois ~ans ces salles ,Úne collection considérable
cl'animaux du l3résiL A présent on Re l'y ·voit
plus : elle est à Paris. Toutes les autres nations
ont au moins obtenu par le traité ·de paix de
.J8I5 une grande partie des curiosités qui leur
.
ava1ent , , enlevees:
ete , .l es p ortuga1s
. n ' ont pas
été si heureux, ils pleurent enqore leur perte;
elle serait facile à réparer, si .un ordr€1 du roi
' .
m. ~
\

274 : VOYAGE
. úBarg~ait des ~aturaliste~ de pàrcou~ir. les diffé:·
~·entes · proviilces du Brési:l, et de prép~rer !es_
objets remúqua'bles pol!u' le ml!lséum de 'Lis...,
bonne. Cependant il possede ençore plusieurs
mor~eaux tres-remarquables' entre autres U:né.
c0lle~tion d' atmes, cle :r,neubles et de parures
. ~ . / ' ~ 1'. '
en plmnes de différens peuples .du Br.ésil, sur-
top.t de ceax du Maragnop. : Íe~ .corileurs de
ce.s or:nemens sont ·magnifiques , p1,1isqu'ils.
so:ID.t fait~ de plumes d; araras' d' aranÍ~os; ele
toRcans, de guarubas et d' autres be~urx oiseaux. '
I l y a au.ss1· parmi· ' 1 , a·e €e caulpet
· · I es ratetes 1..·

~eux lamentins qui ont de six à sept pieds de


~émg. • . · \\ --,. ·
I Le jardin de llot~nique ne . vaut guere· la
. d"etre crte
. ' : il. c~ns1ste
'' · ~nI carre,s
' . '
tem~ e~to~r~s
. halCS bas~es et tailJees au CISéá~ f et OU veg~­
H nt à demi sauvages qúel'[ues plantes com-
··
• I \
' f!U~es. Deux ·petiifies : serr es son,t à pen pnbs
}'ides,; ~Ii .. aperçoi~ à . ~ô~é d~s g ~'n~e_s ~e
factu:s t11es..:.forts, et\\ n1dra onh1er ( 'dracrena
'flraco ) dont les fruits étaient- ~Úrs. L'é tu de. de
. '\ ~. '
f
· a nature ne para1ssant :pas avcn'r
I ,
beaücoup da-
r

·itnateu.rs en Porwgal, et même ~~es produciions


1

ij ndig€ne~ du pays étant, ~~ ·gr{·n ~,e partie e~a-


. ~ '

~ '\
A U .:B<RE&IL.

minées par eles rlatttralistes étra•ngers , on ne


, doit pàs être tres-shl.rpris que la recherche eles
objets d'histoire naturelle des colonies . de ce
royaume s·oit négligée. •·
Le speGtacle dos chos€s défeotueuse·s qui 01~t
encore hesoin d'être· améliorées et perfection-
nées, e:q Portugal, est compe'nsé par l'aspect eles
beautés natl:lr€J.les de c~tte contrée, sl:li'to:ut au
prilitemps; nocais à l' époqtie ou je m' y trou vais'
l'ardeur de I'été avait dépouillé la campa~ne de
tous ses attraits. J e désirais dono d'autant pllils
'\lÍvement d€ regagner un pays plus septentrio-
nal, et d' y chercher clans , son climat pl,us tem-
péré un moyen súr de me rem€ttre eles fatigues
de mon long voyage.
Les paqNebots allglais, dont plusieurs partenti
.
de Falm<imth dans les premiers jours de chaque '~

mois , .s ont un eles établissemens les plu.s


agréabl~s pour les étrang~rs. Toutes les se-
maines Lishonne ;présente une oopas[on sem-
'
blable de passe r. en Angleterre. J'en pro fitai' .
· et je m'embarquai sur le paquebot le Duc de
Kent, command~ par le capitaine Li wrence.
Le 12 juillet à midi nous ·párt!mes par un.
. vent frais ;, llOlilS eumes bientÔt descendu le.

\
VOYAGE
Tage; une foi? ·en me r~ nous p~rd~tilles de vl,ié ,
lé Portugal lé Jllêmé jour. Le lendemàin .lé
vent fra!chit, Ia mer {ut-tln peu agitée. Quel"-
ques passag!i)rseurent lemal de mer. :Malgré des.
. )

, vents assez souvent contraireset des calmes ·que


nous eumes f~tsqu'à la haut~ur du ç,ap~Finister.e . '
sur la cô.te d'Espagne, nousarriv~mes'beureusé~
ment à Falmoàth au bopt ·de dix jours.·Eespa-
quebots anglais: méritentrlés éloges since~és des
voyageurs : ils sont' tres-propres et Ú'es-com-
m:ode.s ; on y est .hien servi, la nourriture y-'
; '.\ ' .
est honne; les matelots _som de hraves gens;
En .temps de - guerre un~ de ces hâtimens,
I • • • - . ,
peur lesquels on cho;~.s1t to~Jours des l;>tigs.
die guerre ,tres-legers , ·tres-sp
I 1 '\ I ~' 'l"d
n es·, et filPS
ve>iliei!S, autant qu'i1 est poss:iiDI~ , est mon1ié
d,e huit can~lls et de tre~te-un~hommes; .en·
t•,~mps de paix 1' équipage n' est que ' de vingt-rin ·
I \ .
hommes.- , '\ , ~'~ , '
• :llet a' 1li1"d"1 nous\
_ L e 2 :t ]Un '\\ eumes co )(I atssance
A \ • '

des ..tles •Sl . .


or mgues' \\e,t\nous \1
' Cmes rowe "\ pot1r·
e,ntt;er ~ans la Ma~che.\V~rs })~ ~oir le càp ~~­
z\lrd s'ele;va, du sem ~~\~ Qcean. Quelle JOle
j"éprouv~i, apre~ un inter'vaUe dç .deux ans et
·•
vmgt-neul ['"Jüurs, d~ me re;trq\ ~.
ver ·au meme A

. ',\
~
-
•'
\\

,,
AU BR.ÉSIL.

point oú j 'étais alors. La nuit arriva au moment


oit nous veniG>i:J.s de nous . engag~r dans la
. Manche. Nous aperçúmes avec plais~r plu7'
sieurs phares briller su'bitement ~ la côte ·~
d' Angleterre. ·Le lendemain matin, étant mçm.,-
tés sur le pont, · nous t'econn}nnes. que ·nous
étions mouillés trG~nquillement dans le port de
Falmouth. .
C'est •une jo1ie pet~te ville ~fembqn<ehur.e du
. ' .
.Fal; le pqrt>, qui est entierement entouré par
les terres, es1l beau, et súr. De·t<Du~~s parts o~ vo1t ,
' ·Jes .€ampagmes,couvertes de verdt,lre _et de belles
l)raiáes; de grands arbres s' élevent pres. de lFt
. 'ville, 'l .: ") ,. :

Ayant débaFqué et fait vise r no~ p>asseports"


IQOUS restân1.es encore q:u~lques _jours· à Fal-

mouth , ou nous f..imes l'eçu,s~c-d~ la 1~aniere


la plus amicale dans la maison de M, Lawren.ce
notre cap1taine. ~e pq.re_QJJ.rus ·les .en~irons €le
la ville _que je trouvai tres-rians; pn. jQuit sur.,-
tout d'une belle. vue quand ' on g11imp.e au
fort Pendenis. '
-Je. partis ~our Londres le, 24 juillet: Ce
voyage fRt tres.:..~gréable. , Les grandes routys
sont on ne peut mieux entretenp·es dans ce beau
• et ric.h e pays ;- I' établtssemem de la posw aux

. I
VO'YAGE

ohevauiK.' y a une perfeot:W>m qillé i'o:Q. rie tr0u:ve


- dans-au.cl!tn at}!tme ,é.tat. Les eheva.l!lK sont tr.es-
'heap.x, •tr-e§-bens , <>t(f)uts de •tace choisie. L'on
• ; l I~ J f\ •
est ·sel'vi, a chal\fl!le -r~Hl,ts ; .a.V.ee .une promwt1.tude
a

qui 1'l.e ~aisse ri0n:à désir.cir. . - '


Vaspect.ele Ila pr:o'\ljinc.e de C<">moua~lles, dans
hque:lle Falmguth •est sitlllé, .p1a1t moins à 1'rei.l
que celui des autres comtés que l'on :liua.v-(ú·se
·da:t:ls ·€e ·~oya1gé ;: ~'JJie 'r el;tf(in•rie' • beauenup de
ihrP.yeF@s .ou · pais~erítdes hreufs et~d(t.S '\TIQ.llt€ms. ;
beauoolil.p çl€ pra~ri:es .n:~:ár-écag~usés .De.].!nplies .de
~o:hos -et dle :vosea,ux,· ~Illa.is a'lilssi •plms:irelilirs-cmatOJlls
J . " ' ·.>.
''r~a'ns. ~É'll~ esvsur-tout.c@Imlle •pa:r~es mn~i~s;Idffi;lt
plnsieurs voyageurs ont donné la_ description.
'i1e -éátaclieue âp:r:e quiifldi'ilf~e ·lfi.Ji te:n:ain .p eu
f€11tlile; et .que <Y(i)J~ 11-.:r:@_~lVe dans plusi~urs parties
1
·cl1il..tc;~llnotiá~~l!es.; gispawait.dans 1le .lilevpn.shiRe;
tãl@r..s 1lê · ~0,yà:géur éll€'rtrencontrek iús .que des
·c~tn1ons :i!l' nn€:-fdrthlitéJra~i~sante;:Jt!l~tprairiG!s et
llc,~s booa~és·~dêêla<>~llils áob.e ·.ve1:d:mire, Qles pâtu-
'" '
·~~ges· ' : "7' r.s
poul~ r d·e1,..,""h~ , \d, e ;t..
~ au.x, - C. \M
~reiUJtS · ·
, ~..e mou~

t9ns, s' éten~ent ~e t us côt~s su: ~~s~ol~in~s


ltlj:>ucement apl'om:hes J :ri ut.es't CtJhi:v;e.e! a::m.uue.
1
·JNulle •pa·Ft ·g:p llle voit <l!m c0ÍIÍI',lÍJ.Ui ,Qu :Jinclahe
' ' .
"P<itl'tout •l!lffi . '\iilla-ge-s >trés~p:vopres :. qu ··de jolies
- I '
-fermes; Cles -viH!es, dont les lnai,ort'5 tb ieu bâties
I
//
~:U B_RÉSIL.

et bien tenues annoncent un bien-être que u'of-


frent pas _si fréquémment d'autres pays. Dans
plu.sieurs _endroits la campagne ressemble à un
pare na turel ; ailleurs l'art en a cr,é~, et l' reil dé-
.couvre sur de vastes pr.airies, arro§ées par des
rivieres limpides, <iles bocages de chêne~, et
aupres la maison du propriétaire, vaste bâti-
ment plein de gout.
On çompfe quatre-vingt-quatre milles ar1glais
de Falmouth à Exeter, une d es plus jolies villes
dé l' Angleterre. Elle·est régulierement bâtie et
située sur la petite riviere d'Ex; sa pe>pulation
est de 1 8; ooo âm~. Ses, environs dans cette
belle saison ressemblaient à un jardin dont la
vue cause au voyageur une distraction agréa-
ble.
Je passai par Salisbury. Je traversai le Will-
shire, le Ham pshire et d' autres provinces, par-
courant sans cess~ des pays charmans. La dis-
tance d'Exeter à Londres est de cent soixante-
seize milles anglais. J e ne m' arrêtai que peu de
jours dans cette grande capitale. Je partis pour
Douvres, ou je m' embarquai pour Ostende. Ma
traversée :fut heureuse. Nous quittâmes .la
côte d<-A ngleterre l' apres-midi; avant minuit
nous éti~ns le long de ·la cÓte de ;Flandre. Au
28o VOYAGE AU BRÉSIL.

point du jour nous entr~nies dans le port. J e


pr{s- aussitôt ma route par Gand, Bruxelles e~
Louvain, ·pour Aix-la-Chapelle. Ce fut dans
cette \t_Ílle que je commençai à entendre de nou,-
veau parler allemand. Bientôt j'arrivai dan&

/
I

ma pattie, sur les bords du Rhin,

\Í '
I

t
APPENDieE I.

APPENDICE

I.
Q)Jservat!op.s sur quelques accidens causés p;J.r la morsme
dcs serpens au Brésil.

ENTRE plusieurs accidens dont j'ai ététémoin;


je me contenterai d'en citer un seul. Un Chinois,
qui habitait pres de Caravellas dans une fazenda
Otl je me trouvais, fut mordu par un serpent.
Comme il était déjà tard et que je n'avais au-
cun •autre moyen à ma disposition, je serrai le
pied au-dessus de la plaie, sur laquelle on
voyait deux gouttes de sang tres-petites; je la
scarifiai~ puis la suçai long-temps, car personne
n' osait le faire, Ensuite je brulai la plaie avec de.
la poudre de chasse, puis j'J' appliquai des
compresses de 'se et j 'en .fis prendre aussi inté-
rieurement avec de I' eau-de-vie.
Le malade , de même que tous ceux qui ont
été mordus par des serpens, ressentait de fortes
dot~leurs dans le pied ; il craignait beaucoup
pour sa vie, surtout parce que plnsieurs vieillards
APPENDICE .J. I

s.e mo:ntraient méQQn\e,ns <;le Ja ,g~aniere pontil


avait été traité ; ils lui donnerent une infusion
de plantes que je J?e .vi.s ,pas. Le lendemain ma-
tin les doulem:s disparNr~nt; adieu les inquié-
tudes; malheure1fsement on ne put pas bien
déterminer .I' esp~ce · du serpent , parce qu'il
" '•
n' avait pas été t~:1é.~ · .
lVI. Sellow .me fit p~rt:, d:un accident plus
grave. Le jeune Poury que M . Freyreiss àvait
' e F:"
ach ete' a..,arl-; .J ·1·
'':t.nfi r.. '\ I'a ch asse,m.ord u
·Is,,.tut,.e.tanta·
'
. ma. I-ti~d .P,ÇtJ" ,:t :i,l)e :v,ipere, au mois .cl~o.ctobr..e .I'S 1119.'
La jambe éta]t J1ll peu enllée. -:lor~qu:'il revi.nt·à
a .Ia Jllaison, (Ur}e .demi....heu.r.e' .a.pres; 011 ,serra
. ·-le Jpied, OJ(l . scarifia :la plaie "e t Qtl la suça à
· plt:fSie.urs 1reprises; FOmme; <?:n n~avait pas ~'au-
tre s'u doúfique, pn .dbnna de ·.J'~au-de-vie au
}malaçle; on_h,d~~a ·~.aJble~sure plu$rerrs -fois {:l.vec
·.me la po}l~r.e ,a \!Ire.r , ,pUis on le cou't)pa dans un
J1a1nac, et çm:sàupoudia Ia -pl~ie de-pou:dre cle
.. cm;1ttha.rid~.... iLe ·~ied \ gonfll\ prédigie~·Isement.
Un1 mineiro qui ,se .t f. tivait\ ~à- apporra· deux
rac.ines dont il vanta le .vertus; ~?une étaà spbn-
gie,usce et .insipide, c_e qui . a fit r\ jeter; on -fit au
.. cor~traire une for.te . inft;~,si~D; de ·l'ctutr~ qui était
;lire:1>...,amere et cparaissait être.. ceÍle <l,e l'arisü;lo-
. clzia ring.ens. n est diffió]e de d~cicler .si l'dva-
APPENDICE I.

cuation qui suivit provenait de l'infusion, de


I'eau-de-vie, ou,ale ·l amorsure. 1La nuit fut assez
' tranqaill.e; ·le 1ende:inain le pied et la jambe
.-.étaient gonflés d.u .double de lemr grosseur .or-
. dinaire. Le maláde éprouvait un tel degré d'ir-
ritation qu'au.moinc;lre .b ruit il se mettait àcr.ier
J •

et à pleur€r. 1L e · mineiro ayant .assuré qu'un


malade.dans:cet.état ne pouvait regarder aucune
-fernme , le jeune Indien, .-entendant parler une
;fi.He .qui se Jt:cnu.vait là, 1ui dit : cc Maria, cala
a boca)). r( Mar.ie, ta"is.,.t<Ji. ~
,Comme le sang sortait.de .la rboucbe , ,_OJl ne
d~nn.a, plus de mé.dicamens, on appliqua sur le
:"Pied des feuilles proba.blemeni de plumeria
obovata; le malade avoua qu'il en éprouvait un
grand soulagement. tGln répand~t dans la plaie
de la ;racine cl.e ,cette plante réduite en poudre;
Je m.alade ne tarda pas à guéx:ir. . '
Dans un petit yoyage que M. Sello:w fi.t aux
' e.nviuo.ns de Rio-de-.J amiiro, irl tr'ouya "QlYilegre
, qui, aya:ot: été mordu par m1 se,rpen:t, était
-~tencl.u à terre., et paraiss.ait être ex:tr~nement
. mal:, it~;v~ait le :viSJ:~ge_ ti ré, il respirait avec .~io-
lence, et rendait le .SíJ.Dg par la .bouche, le ·nez
-et les oreilles. On lui donna la graisse d'im gros
teiu ou lézard ( lacerta tegztixin ). C'est -un mé-
.. APPENDICE I.

dicament qui se rencontre toujours dans 1a


m~ison des paysans du Brésil. Auparavant on
lui avait fait prendreintérieurement et extérieu- '
rement une infusion d'rme espece de verveine
nommée verbena virgata par IVI. Sellow; on'
dit que c'est un puissant sudorifique. Quoique
IVI. Sellow n' ait pas pu attendre la fin de la
cure' ce que r on vient de raconter suffit pour
donner une idée de la maniere dont les habi-
tans de la campagne au·Brésil traitent ces sortes
de maladies. C'est tout comme €hez nous: cha~
cm1 conna~t un remede qui ~~t beaucoup meil-
-leur que celui des autres; ensuite on recoin-
m~ande de plus un certain nombr.e de pater ,
d' ave Mariq, etc;
1
,
Un ,chien mordu d'un,: serpep.t éprouva un
accident tout différent, ce qui é ait du peut-
• a' 1'espece
etre ' de l' amma. I. C' eta1
' . un d e Ines
chiens de fi:hasse1, il fut mordu a}l C(i)U par une
I
vipere, dans les halliers sab1onneux I~ long de
la 'côte. Le cou s'e~fl~ aussi'tôt, de m ême que
la tete) et ces d eux part1es
A • d'e mrent
• • s1'~mons-
tr~Leuses que·I'on pouvait~peine l;listinguer I' reil.
A,l bout de t ois jours,1 pendant lesquels on fut
obligé de lui 'faíre avaler · de , la m;mrritliLre li-
qu,i de,, l'enflure disparut ainsi qu\ la .tnaladie;
APPENDICE li. 285
cependant Ia peau du cou resta toujours lâche
et pendante. Au contrairé la chienne dbnt j'ai
parlé précédemment dans ma relation fut
:rhordue à l'épaule pres de Villa-Viçoza ; son
corps ei1fla··beaucoup, · et apres qu'elle eut hurlé
pendant toute la miit, elle mourut le lendemain
à dix heures dn matin.

11.

Notice sur la maniere d'entreprendre, dans le Brésil, des


voyages relatifs à l'histoire natureUe.

J'EsPÊRE que les naturaliste~ auront la bonté


d' accueillir favorablement les résultats de l'ex-
périence cl'un voyageur relativement ~la nia-
niere la-plus convenable de former eles collec:-
ti:ons dans les climats équinoxiaux; ils pourront,
par c e que ie dirai, juger des obstacles que
l'on y rencontre dans I'exécution de ces sortes
de projets. Quoique toutes les eontrées de la
zone torride se ressemblent assez générafement
à cet égard , toutefois chacune se distingue
cl'une autre par quelque particularité; c'est
pourquoi j e trailerai spécialement du Brésil ;
m:lis les conseils que je donnerai pourront, avec
286 APPENDICE
(
II.

quelques modifications, être ruis à prefit dans


toutes Ies -régions des tropiques.
Le Brésil, pays immense, généráletnent
montagileux ou montueux, encore peu cultivé,
présente au naruraliste de grandes ·difficultés ,
car on n'y a nulleme'nt songé à la commodité
de ceux qui le parcourent. En Europe un
voyage est une affaire de plaisir et de-distrac-
tion, car on s'y est occupé de tout ce qui peut
être utile ou agréable au voyageur ; on y trouve
facileínent à satisfàire à tous les besoins que
l'on peut éprouver dans u:r;.te position sem-
1
.f} blable.
Le Brésil au contraíre a été jusgu'à présent
au degré le plus bas de la ci~ilisation. 11 n'y
a qu'un petit nombre de routes,,, et pas un seul
grand chemin : le voyageur ne peut même trou-
ver, qu' en tres-peu
' d' en d. · pour s,y
r01ts un \~1101t
mettre a a n, es ponts pour passer les nvle-
'l'b ' d .. ,
1

re~ et les ruissdux ,, mêm1 les prov~~sions les


plus strictement néc~ssaire • li est · souvent
obligé de se pourvoi~ êle bea coup de choses
1

aufquelles ilne peut song r s'il nfest pas instruit


paf 1'expenence.
,. On ne conna1t
\ ~ pas au B'il res
le moyen si facile et si commode de transporter
def marchandises par des rouliers. On n~y em-
APPEN'DÍ€E li . .

ploíe que des mulets, dont le caractere rétif


augmente souvént les embarras du transport ;·
'leur·charge n'est pas f<:>rte, et ils coútent beau-·
coup. Il est vrai que dans certains càntons tres-
montagneux l'usage des hêtes de somme est
três-avaritageux, néanmoíns ce moyen. de n·ans-
port ne peut se cmnparer au roulage tei qu'il'
existe .en Europe ;·mais jusqu'a présent il est le
seul praticahle, puísque dans ce pays il riy a
pas de grandes toutes. ,
Si l'ori veut parcourit l'intérieur du Brés'Ü,
il faut d'abord se procurer de bons mulets. Ils
sont à: h as prix à MiHas-Geraes, à Saint..:.. ·
Paul, à Wo-Grande, et au contraíre tres-chers
dans d'autres provinces (I). A Rio-Janeiro on
peut acheter à un min~iro tolite sa tr0u17e de
mulets pour vingt-trois à vingt·cinq niille reis
la piece ( I 5o fr. ) . Dans la capitainerie de ;Bahia
em les achete à villa da Cachoeira de Peruacu., Les
étrangers n'entendent rien au traitement de
ces ~nimaux; ils ne savent ni les panscr ni les
soigner quand ils sont malades. C' est pourquoi
il est bon de prendre à son service un tropeiro

(1) JToyez Eschwége, Jou nzal pon Brasilien, tom. I,


pag. 76.
APPENDICE II •.
.ou arne:tro. Ce sont des gens qui des leur jeu·
nesse ont fait métier de transporter des marchan~
dises avec leurs mulets. Sept animaux chargés
' -forment ce que I'on appelle un lot; ce :nombre
ex~ge un tropeiro. Habitués à tout ce qui con-
cerne les co-urses_dans l'int€r.ieur, ces hommes
connaissent pa<rfaitement les moindres dét~ils
de leur besogne'; ils sont endurcis à la fatigue et
.)

sobres comme -tous les Brési!iens, dornü:mt sur


la terre nue qua~d l'occasion l'exige, marchent
à côté de leu.rs mulets ou bie1:t en montertt un
dela troupe, suivant 1'a:ccor\~ que l'on a eon--
ij êlu avec eux. Si l'on a eu le honhem· de ren-
"co*rer un bon tropeiro, on est venu â hout du
poih:t le plus in1portant de son atfaire:; on peut
I . , - •
espprer que le voyage réussira. Tous les matinfl
1
il ct,1arge les mulets-, le soir il les décharge, ,et
aprfs qu'ils ont pâturé pendantla\~"Qit:, 'illes
rass1emble le lénclemain matin lorsq.u' on V€U.t
pa~·fir. Il est souvlifnt ovbligé de c9~ri~. 'a,r.res c~s
annnaux pour les ret[\~uver ~ mms 1l \ eonnmt
''h' leurs traces et l'éuR
' SI Jten_
\\ . d . \\ ''I
- , •\mant~, e VIVre~ qu
I

I . 1
.finif par Ie~ .découvrir._ .
1
La mamere dont on ó~arge es mulets au
Brésil étant ingénieuse et sitnp!e, f<Rérite qu'on
en fassé mention. U n bon ·mulet\~orte huit
- , \ ~

~ \.~
'\ ~\
J~·pírENOICE ·n.
/
arrobes . . ou deux cenis livres, quelqueÍo'is . on
\

pousse là charge jusqu' à douze afrof:ies. On n:iet


d'abórd stir lê dos du rnulet u:n bât· ou ccm-
'gal!Ú; il _esi en bois, ét a a'11-x deu~ botlts de sa
partiê' supéri'éi.lre um fort i·'e bord vet'tical ;' Ôn y
suspend de'"" chaque côté les caiss·es~ Afin de di-
minu:er lã pressio'n de ce bât', à'rlle' double in~
iéx\ieurémê:fit d'une·helibe' seche quhde longu~s
feuilles étroites et qtl:i est étalée' tres-tmiformé..:.
ment; dn inet par-dessus ce paquet d'herbes ou
calpin un coU:ssin d1esteira ou natte de ro'-
seau, ét oii le récouvre d'upe toile ·de coton'. Le
M:t'ainsi rembou~ré est .gan~i p'al<dessus â'une ' \
peau d'e breii:f coupée carrén'lent; s·a surface su-
périeu~e est percée ele de~x tro~s pour donner
p'assage ~ux prolon1gemens d!u hat auxCfuels sont
·. süspe'n'dus les coffres. Ón attach~ â.evant ce Mt
ur:ie large cóurr0ie , et !Ierriêre unillü'n'ge : ~es ·
eleux pie~é~ sont indisp~nsables qua'n d 011 monte
ou que l'~n elescerrd les 1non•tagn'es; Une hande
âe peau ·de bceuf: b :ue·, ser;ée fortement et at-l
'taf:hée à un'lacet, fait le toU:r el~1 bât et le tient
solidement fixé. L'animal n'a· pour bricle qu'un
licçm ou cabresto ele peau ele breu:f crue, ou de
crins de d í'eval tres-forteri).ent tressés, qui passe
d~rriêre lês oreitles et laissé à la bo~che de Jl'a~
Ul. 19 ·.... -
APPENDICE li.

nimal toute 1\berté pouír pâturer et pour boire.'


La courroie qui tient au lic<i.ltt et à~ec laquelle
on 1'áttache, des que le mulet est chargé, est-
n.ouée a11 bât; les choses ainsi arrangées on
lai.sse les anilhaux tnarcher librement les uns
derriere les•aut.res.
La charge consiste en deux co:ffres de gran-
deur égale; one:i). suspend Ull de chaque "cÔté Ju
bât; il·faut qu'ilsn~ soient ni Ú·opgran.ds ~i trop
pi'Jtits. La lolilgueur <;onvenable est de virlgt
pouces du Rhin; on les fait en bois de cachet
qui est léget~; ils ont un cou:vercle qui débord~~
• ' \1 ' • •
et sont revetus de; peau de 'bireuf avec le poil en
'&ehors. A chacune de leurs extré1:n.jtés il ya: u~e
ppigrrée e:n fel' ; on fait passe r par-desscms 'de~x
€1ourr6ies de peau de' bomf, qu1 1~e croiselilt pemr
les lil!lÍeux tenir, et on fait eRti·el , dans chaque
p,oignéc nne a:nse en peau. de b~uf qui sert
à les suspe~adre t aax prolongem,ens \du bât.

:1
I ' I '
: Quand le trope!ro.'veut ( harger, ~ prend le
cp!fre su.r ~~n ~~aule,et I'~~'tà~he au. h~t.; et a
so1n que I e<!J_mhbre de,Ja 'eha' ge smt b~en eta-
., __ 1 de c;naque
~~· t que ·I''a,\'' m. nal ne s01t
cote; áfi~l . pas
1' - A ,
/

1
gêné; si les cof.f.i:es n',on ~ pas cbacun un poids
·égal, OJ!l met' sur le-plus léger m:~autres ob~ets'
J)!Our l0 rendre plns loard.l,a charge bien posée
~ . \ '
APPENDICE II.
)
. 2:91

et bien..assurée, on la couvre d'une grande peau


.de 1 bceuf sckhe, av,ec le poil en d~hors, que
l'on assujettit avec une longue courroie de peau
de bceuf; cet usage lui a fait donner le nom de
sobre-corga. A ~ne ex~trémité elle a,un crochet
, en fer, avec lequel on tire à soi l'autre:·bout
· pourvu d'une grosse cheville de bois, jusqu'à
' '
. ce .que -la counroie ~0it assez serrée p~ur que la
pomte du crochet y entre pour la temr ferme,
et. on lui fait faire plusiears toms. Afin d'em-
pêcher que l~r charge ne glisse .pas en avant oJ
en arriere sur ]e b&t, on y fait passe r aux deu~
houts encore une courroie crui assujettit davan- '
tage ~es oaisses. L'animal ainsi ohargé au JW~int
convenable, on le laisse aller liBrernent, ·et
pahre jusqu'à ce que toute la troupe étant
prête em puisse se mettre ~:n mouvement. A la
finde la journée, on donne aux mulets, .apres
les avoir débarrassés de leur charge, une ra-
tion de ,mais : elle est mis~, comme pour les
clievaux de cavaleri~ en campagne, dans un
petit sac· qu' on leur sp.spend au cou, ou étalée
sur des .peaux de b~uf. Cette nour~iture est
tres-substantielle et surtout nécessaire dans l~s
v?vages.fatigans.
. Les . coffres que l'on emploie ·pour charger
..

·\.. \
APP.ENDICE 11.

a:in§i 1es mruets ne se trouvent jusqu'à présent


' .
que dans certaines villes, te1les que Rio-de-J a-
neiro, Villa-Rica et Bahia : ils sont assez bien
faits, mais tres-chers. Dans toutes les petites
villes et 1es 'bourgades de l'intérieur_ du 'Brésil
et même de la côte , on n' a pas 1'occasion de se .
"pracurer·de ces· coffres qui ·soien~ bons et durà-
bles' puisqu'il n'y a pas de menuisier~' et que
·~'oi.t ' y Fencontre aa l)hts des c~1arpentie~s. Les
·coffres qu.'ils font sont trop massifs et trop
lourdsjles diverses.parties ne tienneÍ1t ensemble
.qae par d~fs clous; ils 'n e ~t!:uvent nuHerbent
lj Se~v]r pour ies V~yages! H est clone indÍspensable
dé ~e po~rvoir dans les granqes viUes â~s cof-
fr~s dont on a besoin. , · '~ · · '·
Afin de pouvoir, au milie'u~ d' n pays étran- .
gei, conserver les objets d'histoii e nat~relle , .
daps ces coffres, il faut les arrang~r; en dedans
d'tme maniere p~·rticuliere. On y disp'ose plu-
sie1urs fon'ds min'ces eh bois \de. cacheil l'ún au-
u 1' "1 \\, ~ .$ , '} • .. d . ' ' . 11 '
ue~st~s au~re; 1 -~ s~nt s~pares I'\ar es mte~~va es
de dm1enswns megales ·afin q e .1'on 'pmsse y
pIa1cer d es morceaux, d ~ '?fosseulrs \) ·'J"f
.~C '
11erentes, .
'
on fait fixer aux quátre;cóins de petits tasseau<x
ii '
debout sur lesquels posent les' fo:d\ s. Dans 'le's
co1'fres destinés 'aux mammiferes -~t aax oiseaúx, ·
'' l \
..
APPENDICE H.

ces fonds restent nus, mais dans cetix Otl l'on


compte placel' eles insecte~, on les cou~re d'une .
~ouche ·de pitta épaisse de ·cinq à six: lignes, qui
remplace parfaitement le iiége . d'Europe . . .. et,qui
mêmevaut peut-êtremieux que ce1;te substance:
C'est la moelle des hampes flm·ales deZ~ agavef ~E.-'
: ti.da, plante tres~cor~'lqmne a,uBrésil.. Cependant
OH ne la ·trouve. pas dans toutes s.es. parties. Les
environs de Rio-d~-Janeiro et el'autres cal'1.tons.
e_ri fournissent une quantité suffis~Nte. Ccpnme
.]es mor.ceaux ,d e cette .moelle n,,,ont pas b eau-
I '
coup de largeur, G>nla fi;xe en petites plaques sur
la planche: .
. On se 'sert, pour empaqueter les objets el'his-
toire naturelle, ele cotQn qui est à tres--bon
marché partout, et surtout dans les endr its
éloignés de h côte . L'an~obe de vingt-cinq
livres ne m'a couté que deux à trois pataques'
ma. à peu pres sept françs, le long de la ·côte
que j'ai. parcoume. Il est plus cher elans le voi-
sinage eles grapdes villes, oit les négo,ó ;ns le
recherchent. Même elans le Sert'aín ele . Bahia
il valait 4, ooo reis ( 25 francs) <;!t à Bahia 8, 000
1

et jusq,u'à 10,-ooo reis I'arrobe. Lê' coton bien


batltu et bien éplüché ~st;>ans contredit la meil-
leure; chose que l'on puisse employer pour ~m;-.
'
f

APPENDICE II.
paqueter ·h~s objet; d'histoire ·naturelle; il les
garantit même . de l'lnimidité. Le voyageur·
pôuvant toujours savoir d'avance, avec une es-
pece de certit1;1de, s'il doit passer dans~des oan-
tons ou il ne trnuvera pas cette substance si
nécessaire, il en met alors une provision suffi-
sante dans ses coffres vides.
Si 1' 011 ·veut recueillir. des mammift3res et
des oiseaux, on. envoie e11 avant ses chasseurs
bie11 munis de plomb de toutes les.dimensio11~,
et on leur do11ne ordre de ·tirer sans distinction
sur tóut ce qu'ilsvoient. On fait de petites jour-·
1t née1s, poúr a.r river de bo~ne heure à l'e11dro~t
ou ,l 'on a for~11é le dessein de s'arrêter, et avoir
le }emps· de . préparer les animaux que ,l'on a.
tuê . On .s'i11forme aussitôt quels !.~mt les meii-
leurs chasseurs du lieu, on les fa~ vehir, 011
' ( ·~· .
conclut u11 accord avec eux, on leur dónne de
lll P(oudre et du p,~omb que I'011 a eu la précau-
,t'ÍOf! d' apporter d'Eurdpe ; ca · bien qu~çlans les
graindes villes du Brési .ces ·rn:'mitions neàman-
quent pas ·et soient de B nne ~ualité.; I1 faut
1es-payer extremement c'he ; on ea
A ! ~ , ( •
trouve'aussi,
IA • \. ., ' ,. , • •
de rpeme qt1e de la grosse ,dragee, dansl mteneur
du pays, mais elles y soi;tlpauvaise~. On donn~
a t1.xl chf'lsséurs les inslructions :héce~ satr:es sur la


APPENDICE ]I.

marrtere ele t~·aiter les animaux_ qu'ils tue : ils


chassent
. avec assieluité; on les paie à raison ele
/

trois cent vingt reis ou eleux tfrancs par jour.


On fait préparer·à l'in"Stant les peaux eles arlÍ-
maux quiont été tués; mais, sans 'y mettre ele
fil ·ele fer, et ~pn~s avoir pla~é les ailes dans
leur position, et bien rangé·en orelre toutés les
plumes, on pose les oiseaux sur une .planclte;
~:P. cas de hesoin, le fond de la caísse en peu t·
ser~vir. Cette planche est cou,verte de coton; les
animaux restent ~insi ·quelq~es jours exposé~ a;u
soleil. ~i l'on veut aller plus loin avant que les.
peaux soient complétemen:t seches' il suffit ele
les envelopper ele coton afin qu' elles se main-
tiennent dans la position. ou onles a mis~. Ont
attaché à chacune une étiquette sur laquelle ~n
écrit le nom ele r ·especé à 'Iaquel\e appartieht
I' oiseau; il est par conséquent ~til e el' avoir une
qua11tité ele ces étiquettes prêtes el'avance.
Je n'ai pas besoin de dire qu'il faut ·el'abQrel
frotter les peaux el'unbónsavon arsénical, comrue /
le meilleur moyen ele les conserver. Lé soleil au
Brésil seche avec 1;me promptituele extraoreli-.
. naire, surtout·dans la saison chauele , .toutes les
peaux el'animaux ; il ne faut que peu ele j ours .
APPENDICE
• .i • • ,.....
11- •

·à c s !J.e,s p.lus -gran~s qqaqwp,edes pour de-


yenir: d~res comriJ,s d-q boi_?. ·
. ll ~n pst autrement qans ~~ Femps de~ p,lt;t~es .
La gran~e htJ.mÍ~·ité ~e l'aiF s'pp,pp13e alor~ , à. ée
que rie~1 puisse séd~er, -e1t co}llme il e~t en
1nême temp~ tr~s -~baud, 1es piecls des gr;mds
·oise~ux ~ not~~meqt ?es ois~;:~ux dt; pro~e, 4es
hérons et des gros gallinacées, se ·gâtent sou-
v~nt en deux qu ~rpis j~oqrs 'jusqq' aq talon .
Pour parer à cet inconvénient, ;M. f~eyreiss,
qdi a 15eaucoup d1 ha~ileté et cl'expérience pour
préparertous fes objets tfbi~t~~ce naturelle, avait
.mventé
, ' \
une bo1te en fer-blanc, dans la que le .
I
. L., -
11
les 1oiseaux placés convenablement ~ur le cotol1
sont I suspenaus au-dessus cl'un.., feu doux: . on la
Ije~putne de temps eu te~ps p ur e1npêcher
mlHs
.. -
ne
'
soient

brúlés,
~ •
et-y les·sécher
. 4ée-ale)'neut
v

~~ COtJ.Me~t1!_re de la, bolie reste.· Jl p~u ou7
'h . d" , .
v,er~e, a fim que l . um;~ Ite pmsse ,s ,rvaporer.
;, .
En un jour ou deu'1( l,les peaux sont .. suffis'am-
\ .
me~Th .se~hes. Sotw:ent dette m~thoq<: fait perqre
aux plus beaux oiseaux\ ne ~~ tie d~ l~~ viv~­
c\té de ~~Hrs ?ouJ~urs, la gra~se de~ oiset;tux
8:9;l(aÜgqes fo,n d quelgue,fi ·~ é,~ ~-~ - ~épand sur
lr§ p~N,me~;' ~e)ile!I;J.qant
, ' I \ fh .. f J I
'bn n,e~\
connalt
' l ~..
pas jns,-
';1

~\}'~ pr9;sel.lt d~. ín~'lle,ur J110,ye!l que le voya- .


'\
APP.ENDICE II. :297
geur puisse employer pour préserver de· la
corruptilln des ohjets intéressans dans des fo-
rê.ts souvent touffues et humide~ , ou le solei~
:pe pé:net11e ja~ais, et oú l'011 est ' obiigé de
coucher e11 pl<ún,,air. · .
Mais i~ est ·b,ien Blus i11comrp.0de et p1~s pé-=. '
-~ibk ~~ .recu~illir des reptiles. Ce ~' ~st 'cfue
.é\a,:p.s p~t~ d'e11dmi~s que ~· 011 peut trouver de
l'e'a,u-de-v~~ pqr~ et forte ; dans tous les
iieux habités 011 en re11contre de mauvaisé : Le
tafia ou l'eau-de -~ie ,de sucre ordinaire (agqa
ç.rçl,e11:tq de cqnna) est tres-{a~ble; eUe a besoin
~· êtrç souve.:qt re!flouvelée da!ls les -bo.caux oú
t l'on~net 1es l;eptiles;"sans cette préoaution, ils' ne
'I
se ' conserveraient pa,s. I/eau-d~-vie 'fórte .q,u
J?t;ésil ( cachassa) est beaucoup plus utile dans
G<:;s cas-là. ,Cep~ndant la prilicipale difficulté
yient dq. manque de vaissea'\lx convenables., ~t
souvent il p.'"y a pas moye~1 d'y remédier. On
ne trouve 'jamais da11s l'intérieur du pays de's
l
~,Gmte:blles> 9~ des B.acoJ;J,s qvec un col l::W.t p(;ltí.
\ar.ge; o:n n~ peut d·©nc fa.i re entrer que des ser-
pen.s ,minçes dans les bouteilJes. En o;utre.'le
transp.ort' des ·V<Üs§eaux de. verre _est ti·es-chan-
~eux.; 1}.11 nmlet dans un moment çle pétulance
j.ettg ~~charge 'à terre, et toute la collection
APPENDICE IL
de reptiles est perdue. Il aiTive encore ·que
1'eau-de-vie_ pénetre dans d'autr'es objets, et
les gâte. Des vaisseaax enterre bie·n verni:s dans
l'intérieur-ne valent rien pour cette opération ;
ils ne tiennent pas long-temps l'eau-de'-vie;
leur emploi · m' a fa1t perdre plu~iei:11rs euriqsi-
tés. D'ailleurs on n~ peut_se procuret de -ces
vaisseaux que dan~ les villes; ils ne ·sont pas'
_ moins fragiles que .ceux de verre, ét sont plus
lou~ds. .
Je me suis touj.Ólilrs tres-b1en trouvé d'avoir
mis l~s petits ·auimaux dans eles bouteilles que
·11 je plaçais séparé~1ent dans çfes coffres remplis
de coton. -Poi1r le-s gros reptiles, -' j?avais un
1

pe1 t haril excellent ~ · fabt·íqué ên Emrope ; il


fais:fit la moitié de la charge,d'un .r:rmlet. Il était
en hois de chêne .qui maihel'l.r~u~e~ent fut
bientôt percé pa,r les vers. :fe rei-~'lJdiai passa..:. ·
blen:lent à cet incdnvérJient,
. I
en fá.isant enduire ·
le haril cl'u.ne forte oquc1H~ ~ de g11md~o~~· , et .
l'on passa par-dessus u e en eloppe de' toile à
voil_r : il avait à sa pariie supé"'eure unt grÓs
bonclon qui, entouré de li ge, s:adaptait par-
I · l
faitE;m<:Jnt àl' ouverture : cefle-ci était si large que
I'on pouv~it av.ec la main attéindre ju~,qu'au fônq
du haril. Il était rempli d'eau-de-vie 'tres-forte.
' ' \

1/

'.
APPENDICE li. 299

et contenai:t plusieurs reptil~S· ; avant de les y


plonger, je les-faisais couvrir de coton. Pour.
~e suspendre au bât du mulet, on l'avait 'comme
emma~lloté de cm1rr9ies de cuir de bceuf qui à •
chaque extrémité · formaient une ganse Il est
bon d'observer qp.e toutes les fois qu' on en a
l' ocçasion, il - faut tâcher de se débarrasser
de la collection d'amphibies, et de l'envóyer à
sá desti'nation , ce qui offre souvent .beaucoup.
de diffi.cultés. En voyageant 'le long des côtes
on a l'avantage de trouver des navires dont oli
peut profiter pour faire passer les obje~s · re-
cueillis dans ún en'droit que l' ~n choisit pour
être le dépôt commun. Dans l'intérieur, ces
occasions d' expédier sont plus rares ; alors on
prend plusieurs mulets pour les cbarger dé ce
que r 011 . rassemble; ' et il faut fréquemment
renouveler l'eal,l-cle-vie, ce qai coute fort cl~er.'
Il n'est possible 'd'empailler parmi les reptlles'
que quelques lézards et quelques tortues' : en-
core faut-il y procéder avec beaucoup ele pré-·
cautions; car autrerrient il en résulte trop faci-
' .
lem<::nt eles erreurs et de fausses descriptions ,
dans les systemes d'histoire natúrelle.
Pour faire a'u Brésil ele bons b arils, il futrt -
' prendre du bois de virihatico ; ·mais il ~' est pas
3oo .A,PPENDICE H.

p
aisé d!e rencontrer un tonnelier habite. Le natu-
-' ' • •

raliste doit toujours décrire les reptiles quaJ1d


-~)s vienl\lent d' être tu és, parce que ~ dans ces cli-
rrí?ts ardens l' eatt-de-vie fait épro.uv.er eles alté-
rations ~ux couleurs ~e 'ces a,I\.imaux áv~c 11~e
promptitude incroyáble. . .
On peu~ - appliquer en ~én~ral aux poissons
le.!? a vis qui précede.nt; ils sont ordinaite.r.nent
~rop gros poJ.lr qlle fon p,uisse les mettre .dans
~ f eau-de-vie, ~I fa~t donc se born~r à les rem-
bou.rre~; leur couleur ne se conserve pas. On
,n~ peut pas se se1:vir de sav;~~ el'arsenio pour ,
lj {es poissons ni pou~· les repdles, noUs l' avons
' :r~~pplacé
c. r. .
avantageusement . par du - tabac en
:p.oudve.
, p 'uanel on veut rassemhler eles \insectes il faut
fai~·e UJ,le gránde provi~ion d' a~guilles 'gui. ne
eloivent pas être tçmtes d'acier., J arce que la
1
r9t~ille l e d,,etrmt . 1en peu' d e temps. 0· n peut au
lie-r1 de liége faire 1 usage ele pitta. Les insectes
, l : el I , \
qm~ l on vwnt e peroe.r sml.t '"!lVtes prm~p ement

par la ~haleUF ~u Ü~).l; \'G.n . re~ourre de cotou


l~s grosses araignées, €ette mé~hoele est aussi
tre~-bonn~ p~_ur les granel\ pa_pillons; 1,nais elle /
exi.pe' plus ele précaution et d'habit~ele. Les in-
sectes tués depuis p.eu ele temps, ou 1:nême ceux
. . "

. ·~
APPENDICE Il.

qui sonf déjà secs, sont sujets, au Brésil, à être


aua·qués p~r une quantité innombrable ele tres-
petites fmÍrmis qui les dévorent en peu el~
temps; ,~fies pénetrent mêmé dans les caisses
fermées qui ne joigne~t pas 'bien '·exactement.
Le Ü1eilleur. moyen ele se préserv~r ele ces en.,-
nemis est de répandre du tabac en :po~dre suv
les inseotes; on l' enleve e1~suite tres- aisé1ne~1t
en .souffbnt elessus. Pour prenelr~ les i:9-sectes
au vol, il faut absol"llment avoir des filets adap-
tés. a1,1 ~out ele longs hâtons, plusieur& papillons
, ' l ' • I
vol·a nt tres-.o aut et tres-vlte ..
Quant aux vers et aux mollusques, j 'ai , · en
plcine mer, mis dans l'esprit ele v'iri eles phy~a;­
licles et ~les Inécl11ses quif s'y sont ass~z. hien.
conservées, surtout les· dernieres. Les 'tenta-
. '
cules de la physalide s'y sorit consum:ées; 'la
v~ssie seule n~éprouva l;~s qe chang~Ínent. Faire
úrtecollection dthous.ces animàÍn; est.tme en-
treprise mêl1e de heau.coup ele difficulté~ eÚre,s - ,
dispenclieuse ; on üe peut jamais la renclre com-
plc:~t~. Les· ohjets qu'iÍs est hon dans c~ ~as de _
porter d'Europe au Bré&il · ~e hornent , à, eles
couteaax ,·des' ciseaux et d~ autres'
instrumens.
;
cl.e
bonnequalité, et ·à une'bonne recette pour faíre
3o2 APPENDICE U.
·,lu sa~on ar;senical qui se prépare à Bahia et ·à
·Rio-de-Janeiro. ·
Pour faire des collections de végétaux, on
ne peut pas employer avantageusemént le papier
de maculature Üon collé; il est trop mou et $e
te
,seehe di:fficilenYent une fo!,s cru'il a é m~uillé.
L~~ plantes des pays çhauds sont généralement
lplús s~cculentes que celles des climat~ tempérés;
par conséqHent il n' est gU:ere possible de sécher .
lentement, . c0míne chez nops, les pla'qtes à
l'a..ir, parce .qu'ellesse pourrissent. Onne peut se
servir dans ces contrées c1ueí de papier ~ort et '
, collé' que l'on me~ tous les jours devant le feu,
p~lÍs on y place. les plantes qué.\_nd j l est enco~e
chaud,' opération tres-embarrassante à cause
de la chaleur et de la fumée. f
Quand les plantes stmt seches ;. on peut les
mettre aans du papier non collé ' 'puis les en-
vqyer. On . plonge les plante~' súcc1.~ientes pen- ,
dant huit à dix ,.~inutes dans 1'eau bouillante,
d6~r ·,mamere
., - ~- ' ~ . .
pourtant;\\que ra: vapeur n ·~tte1gne .
:p~s les fleurs ; ensuite on presse les feuilles a.
l'~•rdinaire J et elle~ per'd nt,]eu\· sue. Apres de
. longues pluies, il, est n~cessair~ d' exposer au
1
s9leille~ - objets reCMeillis, de Írot ·~:r ,la_il.ÚtlÍteur
c1ui
,
se manifeste à la surf~ce des \
·Filantes,
r
et

\ ~-
\*
~
APPENDICE H. ' 3o3

_de pr'ésentel: de nouveau au soleilles parties net-


.
toyées.. )

Les coll~çtions de Ininéralogie sont les plus


faciles à se procurer et à cónserve.r; mais leur
ttansport e·st sujet à de g~andes difficuhés. On
ne tarde pas· à rassembler assez de minéra11x
. pour fairé la. charge d'un mulet, et r(im aug-
men:te ainsí considérablement le nombre des
hommes ~t des animaux dont on á besoin ,' cé
qui occasionne 'de grm{cles clépense~. Souvent ü .
n;est ' pas pess·ible ·de se procure r de nouveaux
anima!J.x, et d'ailleurs il faD;t toujours supr,o.ser
d~ava!Íce qu'il pourra s'en échapper, qHelqtl.es-
uns. J'avais formé ·dans les forêts une -collec-
tipn des différentes ro~hes cpae j'y rencontrais,
je fus ~ obligé ele jeter ces é~hantillons/, parce·
c1u'ü ne s'o:f.Ii·it pl~s· d1occasio~ cl'acheter , des ..
mulets. '
On ne peut ·renfenner qu~ . peu de choses
dans les petite.s caísses; d'un autre côté les
grands coffr'es sont t~;mt aussi incom1~0<;les ; car
leur largeur l~s rend áu~si en:lbarrassans ~dans
les sentiers étroits des forêts, que leur ,pesan-
teur sur le dos dn mul,et. Je croyais·avoir mis '
· mes coffres pa:rfait~ment
. . à l'abri de l'humidité
) .
'de la pluie en les faisant doubler de fer blanc 1
.,----.
3o4. APPENDICE II.
,,
dans l'intérieur, mais ils dev:inrent si pesans
qu'il fallut·bientôt renoncer à ce n:ú;>yen. Si le~
pluies ne durent pas trop long--temps, la p~àu
ele breu'f éteriaue sur les coffres les en préserve
snffisamment. On fait .bi€n dans les temps de
1
pluie con.tinue ~e suspendre Je voyage ; ,q uand
il n'y a pas d'habitátion humaine dans le voisi-
l'lage , on se construit une cabáne ou flU moins
UÍl abri ( rancho). Les forêts offrent des maté-
riaux suffisáns aux tropas, et I' on se sert à cet
effet, al.nsi qu' on I'a vu dans la relation de mon'
vdyage, soit eles grandes feuiÍles des palmiers,
.11 ou 1 de Fécorcê de diffé11ens arbres ~ tels que les
bi~nonia, les lecythis, etc. Durant ces périddes
de pluíes constantes oú \approcne' autapt qu'il
est possible, les .,co:ffres Jes uns des autres, em
place au-dessou~ des morceaux d~ ~ois, afin
qu'iils ne soient,· pas en contact avec '1a terre
molu illée' e~ 011 ,l~s couvre ,eles peàux':de breuf
1
qi.1i, 011t servi pou.r les .charges des muJ•ets.
,• F.n fim 1e
. . reeommand11 a~x voyageurs
\ 1-.\ •
lf\\I vou-
1
dront parc~;mrir le , Bresil de emettre à des
na~ires súrs les objets cl'~' stoire naturelle re;l...:
ferimés d:ms des caísses bien ç.onçlitionnées et
bien fermées; ils doivent, s'ils le p~uvent, les
partager elil plusieurs envois' ,afin,,que si:un na-

' l
3o5

v,~rtl v,~entà .périr, 1iGRif n,e s.oit pas perdu. Lors-


que les caísses sont fermées, on les fait revêtir
d_e peau çle b.reuf avee le poil en dehors. Ces
pe~P~ sont ~ t:r~s.~bon m.ªx:ché au·Urésil; on les
l11i~~e'tremper clap.s l'ea:u, et quand elles ont été
r:mJ.qJli~s on le~s étend sil.r la caísse avec des
p~tit& elous , puis on les :l:he solidement par de
plu_~ gNs çlQus. La peau en séchant 'devient
gJtr~ t;f>.mme du bois, et protég.e lfl. caísse oontre
to1is le_s eqru::rni.s. .e~térieu~s, ~1,1rtout 0ontre l'hu-
midité de I'air de la roer qui procduit facilement
de 1ª moisissur.e sur les ohjets d'histoir.e natu-
r.el:le.

Vocabulaires des peuples· indig.enes d-q Brésil dont il est fait


. menticm dans cette re1ation tfe voyage.

!/JI.OM;J.V,I:E <J11Í c.h€rcP.e à qéço-q:yrir l'origine


t:t l'h~sto~re prim~tiye .,.Çl~s peup]es i1:1CI:ige.Íle& du
l3r~~il orieiJ.t;;V, I). e ;tro-q.ve, ;:t~n,si que j e I' ;;~i dit
pl!-l_s haut, ni 4iéroglyphes :qi l:).UCUl:_l g~nre de
lJl.OnUrp.!')nS gui p:uissep.t Iui servir de f}1.__p,our le
g:uid~r dans sa xn.a rche , puisq1,1e d.ans ces fo-
rêts ~íerges l' espece hUII}.aine ne s' est pas encore
~levée au-dessus de l'état de grossiereté q~i
III. 20 ·
3o6 APP.ENDICE UI.
', .. . ... . : ' ~
partóut a marque' SOU eXIstenee priiDltlVe. Il ne
reste donc, pour entreprendre des recherches de
cette nature, d' autres ressources que I'examen
atiten.tif et la comparaison ~oignée des langues ,
le premier produit brut"de la raison humaine.
Leur connaissance répandra sur l'espace im-
mense des temps anciens une faible .lueur pour
se guider dans le sentier i si difficile à trouver, et
à I'aide de laquelle, dans le_s temps modernes,
des savanf? distingués ont tâché de parvenir à
des découvertes importantes. S'ü est extrême~
ment difficile" \d~acquérir une idée · exacte des
lapgues •et des idiomes innombrables que I'on
'p~rle dans 1un pays aussi vaste C[!le Ie 13résil,
du moins on est récompensé de cette peine '
puisque c' est le seul moY.en dq pouvoir juger
de !'origine et de l'affinité de Pf uples épars ,
sé,pa~és et quelquefois transportés à de grandes
dist~nces les uns I
des autres. La dissemblance
t9t~le des Jangues párlées Pf des pe~pl~s sou...
vent co:ritigus les uns' 1~ux au res est réellement
ur objet du plus hauv i'ntérêt ~our l'hodlme qui
r~fléchit , et à cet ég~ d aucuné partie du

r,
~onde n' égale l'Amériq~e. On ·a comp~é dans
Nouveau-1Vlonde quinze eenfs à deúx m.ille
l,ngages ~t idiomes différe.ns. Les rechêrches
APPENDICE III.
)
de Sevérin Vater sur ce point, dans le Mith'Ji-
daÍes( j; ), sont e;:trêm"emen,t précieuses. 11 pense
que leu~ nombre ~'éleve au plus à cinq cents,
et que celles de l' Amérique septentriqnale dif-
ferent de celles de la méridionale. Un long
séjour ' dans ces pays peut seul conduire à
'la .notion préeise de ees langu~s. Le voya-
geur qui ne v:oit ces peuplades qu' en passant,
1
n'a. l'occasion que d' être frappé de la pauvreté
de ·leurs idiome~, et de lem' affinité plus ou
líllOÍns grande entre eux. iene puis pa~· consé-
quent promettre dé fournir eles secours con- .
sidérables pour 'connaitrc' la :grammaire de cés
lai1gu~s; ·ét ·je doi~> m€ borner à elonne:r ·eles
·fragmens ele vÔcabu1-aires qui poprront néan-
:rn;oins servir à juger ele le.).1rs Fapports plus. ou
-m0i:ns grands e:ntre elles.· ,
La ·langue qui pa~a!t la plus éteNÇ.Ue dans
,,l' airrériqúe'-mérielionale Üt celle, des peuples
,Toupis ou la Lingoa Gé\·al, a iaquelle appartient
.áussi ce1le' des'Guarany~. Elle·est eoi:mue dep~is
Jong~terrips~ plusieurs éérivains en ayant parlé,
ét Jean de Léry ainsi ·que Marcgraf en 'ayant
publié ele~ ·exémples nom.breux: qui ·(servent·à
3o8 ,APPENDICE UI.

.éclaircir ce sujet; je la passecai don.c ~ous si-


Jence et je me bornerai à offrit· ~ eles vocabu-
Jaires des di:verses tribus de Tapbuy;as avec les-
quelles j~ai eu eles papports; mi verra que le
langage qu'ils párlent differe t,ótalement de
cem( de leurs voisiNs immédiats avec l~squels
ils sont toujouts en ~uerr.e . La_peuplade eles
Kariris ou Kiriris, qui est aujo~rd'hui civilisée
.J et habite dans lef! envirõns de Bahia, sé di~­
tingue aussi par un ianiga·g e particülie·r ;--j'ai dit
plus haut que le jésuite Mamiani en avait donné
-une grammaire imprimé'e à Li~bonne en 16gg;
~ ainsi; quoique .j 'aie aHssi vu cellte tribu, je h'en
pmÜerai pàs, pou.1· éviter les répétitions. Une
pautie eles langues eles Tapoúyas ,different beaú:-
cot~p entre elles, et c~pendant on y trouv.e un
I ' \ j
granel nombre de noms e~ de mots que q1t1el~
1
·qtres-unes ônt' ·de con:nnuns; pa1· exempI e·cem ' I ..
de ·.t'oupan . ou toupa qni sert ã désigrie'r fêtre
)'I .. ,.
supt.reme.
_A. . ;
!1 " , . 1 •. , .

PeRr présenter 'aU lecteur de.s voc'abt au:es de


toutes les ·p euplades d'I'il.,diens 1q e J'ai visitée&,
j 'a'íais desse in d! extr:aire llle:l~ ouv1~fge~de M: d?Es-
chwége snr le Brésil ceui'Bes ~ourys, des Uo.-
roados et eles Coropos, parce que le nombre de
moJts de c>es ·trois tribus que·fai rass:emblés est
I . . \ .

/
" \

APPENDlCÉ IH. 3og


. . ., . " ' .
un pen nunce ;. mais J ai pe;nse ensl}Ite que 1e
.
devais m'éB ahstenir et ne publier que ee ~ue
j'ai recueilli moi-même.
To:us les indigEmes da Brésil n' ont pas l;;~
n11.ême prononciatioB. Les uns pr0noncenda fi~1 ·
des mots à la maniere des Allemands, d'autres
~omme Jes Français. Une tribu p.arle du nez,
une :aútre du gosier, une troisieme du nez et
du gosier à la .fois; ohez ~ne quatrieme ces sons
manquent entier.ement. La plupart des mo1is de
djverses laJ!lgues·des Tapouyas sont riches ·en
voyelles; leurs .termi~1aisons' se prononci.mt ·en .
part:ie eomme en français, en partie comme·en
aUemand.
~es voc~lmlaires qu~ je dom~e des Botocou~
dys sont les plus nombreux, parce que le jeune
Quêck m'a fourni la.possibilité deles étendre;
mais je n'ai pu obtenir de lui des renseignemens
satisfaisans sur la structu,re mê:~pe de la lan~·ue.
Le voyageur' qui veat .noter les mots· des idio-
mes ~run peuple doit les faire .prononcer par u:ri
individu qui appàrt~enne· à ce peupl_e ; car s'il
les recoit
,
d'une tierce
' personne' qui ·soit d'une
àutre nation, .il.., l~s écrira inexactement; c'est
une observation que mon expér:ience m'a mis à
portée de faire. Les mots botoeoudys que j'~-
APPENDICE IH .
.crivais d'apres la prononciatiori des Pórtugais;
étai~nt incorrects, parce que cette :ffi.atiori fait
e;p.te?dre à la fin des mots tu1 son qui se rap-;-
. proehe de l'i; par exemple le mot kera~'gcat
qui en botocoudy signifie téte; est toujours
prononcé kerengcatipar les _Pórtugais' duBrésü;
et un Europé~r{l'écr..irait de c~tte maniere. C'est
sans do~te poUPguoi l'on voit Íes mots de la
langue du inême peuple ~critS avec des varia-
.tÍons par les voyagenrs qui en ,ont p~blié der
vocabulaires ~ elles doivent naturellement être
tres:graNde~ cl~ez cles ho~,I~e$ de nati<;>~s diffé-
//1 re~ues -; 1'I s s.,accor
l, d. ent neanrnoms
' . slilr 1es ob.Jet,s
• pr:lincipaux, et smg.s ce -point de vue les si:rt;1ples
l.is~;es
I
de iuots sont. utiles
• .;
;il· .. savant
,. \f
qui s'occupe
· .
de l'étude des langues. · ' -I
• ~ouve~t- ~ est difficile de 'faire , { fpéter _Plu-
síe.n rs fms- a d!es sauvages: le nom, des dwers
objets, ce ·qui e~t eepem~l~nt absolu~nep.t né-
cessaire si Fon v~utrendre ayec exac\\'tude des
I, ,. 11 • S '
so~1s barbares. J]s s 1magment qu ()ll veut se mo-
- '·
qu,er d' eux, et alen:s il \~v a pl ·s moyen~de les
· ' l' dx
arrtener a ce que 0n \~s1re, .meme ,, · ~ • ep. Ieur
1

fai sant les plus belles proin~sses. . · .. ·


' J' aura1s
. pu donner .des ph rases\ \\ . ~nheres
. \ de
1

q~elql).esAmes des langues du Br( sil'; mais elles


1
/. \ '
APPENDICE III. 3r I

ieraient moins authentiques que de simples


m~ts, . la même expression ayant souvent plu~
sieurs sign.ifications; d' ailleurs on peut bien
deviner le sens de la phrase, mais non pa~ celui
de ses divers~s parties, qua,nd on n' a passé · que
peu de temps parmi ces hommes.

VOCABULÁIRE BOTo'COUDY.

Obse.r-vations. Le son nasal est fréquent dans


la langué ~s Botocoudys; elle n'a pas de so~.
guttural; elle . abonde en voyelles; rsouvent' le
son de's différentes consonnes est tres-confus et
ne se distingue pas, ce qui Ia rend ,qüelquefois
inintelligible, mais pou rtant elle l'est moins que
d'autres lang'!les des Tapouyas.
N précédé d'une voyelle ale son nasal comme
.
en francais .
R ne se prononce que du bout de la langue;
souvent cette lettre a Ie ~on d'une l.
f

G se fait sentir à lk fin des mots.



·Quand au cominence};llent d'un mot m1e
consonne est précédée d'une autre comme nn,
mn' mb' np' ncl' etc.' la premiere ne se pro-
nonce presque pas ; on a eles exemples fréquens
312 APPENDlCE III.

de ·ces mots dam les langues d' Amé'rique, par


exemple mbaya, mbotébi, ndait!l, mbata-
éaya, etc.
Si l'on -remarqu.e quelque différence entre'la
máruere d0nt les mots SOllt écf'its- i:J.aJ1S }e COUrS
de l' ouvrage et aans le voca'l::iulaire, c'est cette
derniere qu'ü faut préférer. '

A.
FRANÇAIS. BOTOCOUDY-
Acheter. Com'pra. (M6t JlDip.-d.;Portiignls.)
Agouti: . Maniakenoung. '
Aiguiser.. . Ampe et.
Aile .. . ,Bacan-gnimaak,
1
Allufner. . 1 • · Noumprouck._
Amil ·Niangcorock.
Ana1an (espece de petroquet). llatarat.:cou'dji.
Anal!as. • . . , Manan. ' I
Anh,ima (oiseau) .. Ohi.
~
Appeler. . . . . Kilia-kilit.
Araif>uée. . . . . :Angcori.
i• · I
Arar1 (espece de perro"q uet) . • Hatarat.
Arbre.
• I Tchoo!l<;
Are. . . . .· .~ eem.
Argilt,). • . Naak.
Asseofr (s') . • N:rfP·
Avare. . . King.
- (tJ·ê8). • King-gi~aram .
Aveu?le (l'ceil es~)· Ketom-entja.gemeng.
~
A'P-PENlD1tCE .JI!l.

B.

Bâiller .. Mp~h~ck.

Bander l'arc. • Neem-gita-merong-ong.


Bâ rbe. ·. Giakiiot.
Bâton. Tchoon.
/
·: Battre. Hang. '
Battre des mains. Po ampani.
Beau. Ae-reha.
Beaucoup. Gikaram. OurouhOJ!·
Bec . . Iioun.
- (lop.g). Iiom;t oron,.
I
Bég~yer. Te-çmg;-ton-ton.
Blanc. Niom.
Blanc (un). · Pa-i.
Blanche (une). Pa-i, iokounang.
Breuf. Bocling-gipak.iou.
- (c orne de). ., Kran-tiouem.
!'
Boire. loop·on-iop.
Bois', arbre. • r Tchoon.
Bois qui brule. . · '17choon-kerong.
Bon. ,• : Ae-reha.
' .
Botocoudy. E.ngerêck-moung.
Bouche. Gnima ou Kigaak.
- (plaque de). Gnima to.
Bouillir. ·~
Hê-mot ou ê-met.
Boyau. ' : Couang'-oron.
Bras. Keiporock.
APPENDICE IH.
Brave. Ia;iiam-gicara m.
Broche. Tchog.n merap.
Bruler (se). . Iiot.
Bnin. . Npourouck.ou npxouck..

c.
Cabiai. . •Niimpon.
Cadavre. Couem.
Calebasse. Amiakn'on.
Canard musqué. Catapmou:rg. '
Canot. Pirogue. '
Tiongcat.
Capoue;e ( espece de 11érdrix). · Hiltarat.
Cela est bon. . . ' Ae-reha .
Ce!a n'est pas bon. Ton-tbn.
.\
Celai bout'. . Hê-mot-ou ae-mot.
Cé1 j fait maI. Hê-ingeroung.
Cen/lre. . T.iaco.
Cedi. , Po-çling. ·,
-(bois de). Kran-tiouem.
Cerveau, , M~niac~ . . ~.
Chajr. • , • Bacan-gnick. \
t, ' . . .
Char ter. • \I • ' (')ng-ong.
I
Chafogne. ÜUV<J-!D• · .·~
Nio-~~a.
1
Cha~ ;ser.

-1e loin. · ., Nio-kna\aú10rong.


11
Cha;ud . . • • Ki!Ütia. 1\ ·
~ \ .
Cha•rve .. ram-niom.
•' .-
Chauve-soui·is. . I · Niakenat. ·
Cheval. . Bacal niatngcorock, ou pomo-
kenam.
~
APP.F!NDICE III.
Cheveux. Kéran-ka.
- rotíges. Kéran-npou1rouck.
- noirs .. Kéran-ka-him.
-blonds. Kéran-ka-hiom.
- ( coup.er les). Kéran-mang.
Cheville du pied. Po-nimh-nong.
Chien. Engcong.
Chou-palmiste. Pontiack-ata.
Chouette. Hou-knoung.
Cil. Ketom-ha·.
Cire. Pokékat.
Ciseaux. Keprotam.
Clair. ,. Amtchiou.
Clignoter. · Merêh.
Cochon. Courack-gipakiou.
Coco. Pontiac.
- (autre C$pece de). Ororo.
Creur. Hatoung.
Colibri. Mo\·ocknioung. .
Collicr , chapelet. ~o-it OIL pouit.

Combat singulier au bâton. Gia.caououa.


Construire (une cabane). Kjem-tarat.
Corde da I' are. Neem-gita. .
Corne. Kran-tiouem.
Cóte. Tal.
Cotou. Angnovang.
Cou .. Kgipouck;
Coude. ~ingcreniot-nom.
Cou i ( écale de calehasse ). Pock-ndjouvin.
Cougouar. . "Kouparack-nimpol•rouck.
~·(;) AP.PElNDICE IH.
Coup. N:oup-m,aoun.
Couper. Nout-n,ah.
Courir. Emfl!lrock.'
- tres-vite. Emporock-oufouhou.
- tres-loin. Emporock-morong.
Couteau. Karacké.
' '
Cracher. .Noupiou. '
Crâne. . . Kéran-ho~r;.
Creuser la terre. Naak-ntchack.
Cr.ier. Ong-mérong,
Crochu. Ntang.
Croltre. Maknot-knot. ( "

Cru. Tiip,
Cuisse. Mekn; djopo~k.

'i -·
D.
Danser. ~tack. )

Déc~rer. Noung-niop g.
Dég?utter. Magnan-knin
Dent. Kiibun. ~
-era~ aux). .- Eíiot.•in-ingero~mg.
Dér<,>her. Ming-kack.
\'
Des~ ous. Paouf n·
Dial,>le. i
Iantchong.
~
~
Doi~~t. Po.
- p,ouce. ~o-ê-racR.)
-ind~. P -iopou.
- 9u milieu: Po-coupa niem.
. 'i\ -
- annulaire "Po-coupa-courouck.
I
-crtit). Po-coudji on po-crtiuck.
. \
\
APPENDICE III.
Donncr. Oup.
Dormir. Koukjoun.
·Dos . . [, Houkniak .
Doux. Coui.
Droit. Tah-toh.
Dur .. Merong.

E.
Eau .. Magnan. ,
- chautle. .·' Magr~an· igitia •

- froide. Magnan niimtia)>..


- (va ohercher 'de l'j. Magnan ah . .
Eau-ne-vie. .. Ma~an-corock ..

Echanger. .Qup.
Eclair. Tarou~te~méran,

Ecoí:ce. Tchoon-cat.
É.cume. · K0rop.
"Enfant.. 'Coúroucli.-nín.
Engoulevent: ~Umpantip~n . .
Enfuir (s'): . Amack.
Entel'l'er un niort. Me,ra11,1.
En -avant marche. :(Y.[ouli!g'rnérong.
E~velopper. Nm~rat.

E paute. Coron.
Epine. .T açan.
Ess~yer. Noumaoun._,
Eteind1·e. ,I, •Noucou.
Eterhuer. Nakguing.
lxS APP:ENDICE III.:
Etoile. Niore-at.
Eveiller .! . Mêrat.
Excrément. Gniin-kou.

F;
Faible. Engeniock.
Faim. Tou.
Fat.igué. Nümpérong.
Femme. Iokounang.
F eu. I. Ghompeck.
- (appareil pour faire du). 'Nom-nam.
Feuille. liam.
Filie. Ioknang ou iokounang.
Flairer. Co ui.
I
Fleche. Ouagike.

- barbelée. • Ouagikê-ni~erang.
- pour les petits oiseaux. 6uagikê-ba.Càn-n~umock.
- à pointe de roseau. Ouagike-com.
- (tirer une) •. Ouagike-~oung-griug.
- (tuer d'un coup de). Ouagike-nottta.
Flute. Tuyau. " Ou-ah.
Forêt. ' .
Fort. Force.
. '/. .
• J

F9sse pour une sépulture.


.. ,.
Tchoon-ouroühóu.
Mêrong.
Mak-mah.•
'l.

\
F <,mille~< la terre. Naak-aourit.
·'I
Fouler. . . T ang\ .
F purmi .• P elick_~!ileck-ne ck.
F purmilier (grand). Couian.'
":"' (petit). , . Couian-coudji.
F ·ere.· Kgiparack.
APPENDICE III.
Frissonner. Aé-ra.
Froid. Ampourou .
Front. Can.
Fumée. ,) Tchoon-gikaka.
F usil. . Pou)lg>
- à deu:x: coups . Poung-ourouhou .

G.
Gaine pour couvrir sa nudité. Gio.ucan . .
~
Généreux. Kan.
Gen:ou. Nakerinjam.
Glousse (le h:occo ). .. Contchang-he-hing.
Grand . Gip~kiou.
' (
Gras de jambe. Maak-agnik .
• ,f} \<

Gratter. Démanger. Kiagentj ep.


Grenouille. Crapaud. Nouang.
Grognement d'un chien. Mporompong. (
Greis (il est) . Ae-réék.
Grossesse. ,Coua~g-a,-rack . .
Guariba (siúge) . ,Coupjlik •
Guêpe. .Pangnoniou.
Guerre. Combat.. '' . Kiakiiem ozt jiakiiam.
·'
H.
Hache. . Carapock ou carapo.
Hameçon. .Moutpng.
Hanche .. . K ~;!protan .
Haricot noir. Erà,him.
..
Haut. Qron.
Homme . . Ou~ha.
Humide. Kniat.

I.
Iapou. ( oise~u) · lkeraioum o.u ~il!k~r.l!i:,o,um •.
-(Touffe deplurries jaunes ou Noucangean ou. iarekéioun- . 1

queue d'). ioka.


Il. Elle. Ce. Hê ouê
11 pleure. . . • : , Iilê-pouck;
Il adé1·obéets'estenfui; jel'ai vu. Niingkêck-kigick-pi:p .

.J. '
' \l
Jacaré ( espece de CJi_ocodile). Acha
J acfntingua ( oÍseau ).· Po-coli~g.
Jagra~ . . . . . . Ko~para~k-gipakiorL
-l~olr .. ·Koupar~q}-him. ·
Jan1be . . , ~aak. i-
Jarretiere. ·Merouckr:Ügr\im:
Jau.ne. ,. ·Nniack. · .'1' ·
- 1i'ceuf. . Nnapk ou ~p.iàck.
Je ; 'moi .. . ,.;.:Kgi<Ík-ou-kigick\ .
Jol~ . . Ae,.~~ha.. \
.. \\ .'
Jolfe. ~ N,Jlm~ong. . .

L~ T ~n-ton.
\,

Lai'f:· ·.
Po-clmg-p.eri'ck . .
\ o \\

Laif- .
La!fcer une pierr.e. Caratoung-angc-gJJikg.
' \
/
APPENDICE III.
Limguc. Kjitiock.
Urge (il est). Ae-rack.
Laver. Kiioum.
Lécher. Noumcrang.
Léger. Mah.
Lent .. Negnock.
L.imaçon. Gnocouack.
'Loin. '. Amorong.
Long . . Oron.
Loucher. IUtom-ioiack.
Lourcl. Mokarang.
Lune. Tarou.
- (pleine) . .. Tarou-;gipa:k,iou. ,.
- ( croissant). Tarou-car;~pock-coudji.

- ( quartier). Tarou-carapock.
- (nouvelle). , Tarou-him.

M·.
Machacáli (peuple} 1\lavçmg.
Mâcher. . . Miah.
· Macouca ( oiseau ). . An,gcovock.
Maigre. Knian.
Mai"n .. Po.
Mais .. ladniroun.
r"

MaisQn· Kjiêm.
Mala de .. Maourt·maoún. ·
• I

o
Mangér. ~oung'co1lt.
Marcher. .. Moung.
Marier (se). Kjiem-ah.
Màringoui~. Peutang.
III. ,. .21
APPENDICE UI.-
·, \
Mau vais. Ton-ton.
Membre viril. Kíouck
Mentir. •' lapaouin.
Menton. Kngip-mah.
Mer. Magnau-ê-rack.
Mere. Kiopou .
Miei. Mah-ra.
Mince. Nu in.
Miriki (singe ). Keupo.
Monter. Grimper. Moukiop. ·
Mordre. ~orop.
Mou. Gneuiock. ·
Monette. Naak-naak.
Mourir. l{!ouem.
I
1/ Mounto~ng (~ise_au ). · Contcha11g.
Mu/)t. Ong-nouck:
\,
M~eau . Kigin-gnoren~-

N.

.,
Nag;er. Kiioum.
I I
Narine. Kigin-mah.
Ne~re. I· Engora.
'
Ne7;. . . K'igÍJ?.
-11ecourbé. . \. KigiJ7n'aug.
- ~roit. I\
. • \h -to
!('Igm-ta ' h,
Bacan.trem.
.\ o
Niq.
I\
Noir·. Him.
I
N01,ubril. Gnick-na-gniok.
~NoT1. Amnoup ou amnouck .

I
\

,,
APPENDICE III.
Noyau . . liam.
N'uée. Nuagc. Tarou-niom.
Nuit. 'fârou-t~-tou.

o.
OEil.. . Ketom.
- (ouvrir 11). Ketom-aman g.
OEuf. . . . Bacan-nirigcou.
Oiseaú (grand). Bacan-ê-rack.
- (petit). Bacan-coudji.
Ongle . . Po-crang-kenat.
Oreille . . · Kniaknon.
- (lobe de 1'). Nou-mê.
- (ti'OU de 1'). Kniaknot•mah.
Orteil. Po.
Ortie. Giakou-tack-tack.
Os. Kiiêck.
- (m,oelle des). K.iiêck-iotom.
- de la jambe. Ketom-io-iêck.
Oui . . . H e-é.

P.

Paca (animal). Acoron.


Papaye .. Pattaring-gip~kiou.

Papillon. Klakou-kêck-kêck.
Paresseux. Camnouck.
Paresseux (animal) .. Ih o.
Parler. . ·. Ong.
. MÔung-magnan~mah .
1
Passer à gué.
APPENDICE III.
. r
Pat31cho ou Coutacho (peuple). Nampourouck ou naknpou-
rouck.
Patate. . Gnounana.
Paupiere. Kétem-kat.
.. Peau.
- blanche ..
Cat.
Cat-niom.
-brune. Cat-nprouck:
- no1re. ,· Cat-him.
Peau d'un animal. Bacan-,cat.
Pecari (animai) . . Courack.-nigmantiocou-niom.
Pêcher .. Impock-avouck.
Peindre. Barbouiller . Novoung.
Per e. Kgikan.
Petit .. Coll;dji ou pmack.".
li
Peu . . Amnoup.
Plc (oiseau). Aeng-aing.
1
P jgeon .. •Koouei±t. ·
P jed. . . Po.
- ; malade. · Maak-git ia"gikaram.
. \
- ,. (plante du ). P o-pmm. ~
P ierre. Rocher. Caratoung.
I
Pfm'en~. . I· Toum-ihâk óu tchoon-j eck.
P jquer . . Noungcoro. '
P!ein. ~ M~ .
Pleurer. _Se lamenter. ~ Pouc~.
Ptei:t1·s. -'.. . 1 • Ketom-magnan.
\~
Pfonger .. . . \ Moukarack ..•
Pfuie. . ~agnan-ipo.
P~ ume. , Gni-;maali.:(
Ppintu. Me1;êp.
Ppisson. Impock\ /

..

•,

APP,ENDICE III. 325


- (amfs de). Impock -giping.

- (tuer des poisscms à coups de Impock atê.
fleche).
Poitrine. Mim.
- (mal de). Mim ingêrotmg.
Porc-épic. Acoro-io.
Pot . Nat-neck.
Pot qui bout. Nat-neck ê-mot ou i-mot.
Poudre à tirer. Pou~g-gningcou .
Poule. Capouca.
Pousser. Noutick.
Pres .. Nahrang.
Prêtre. Pai:-toupan.
Profond. Me~t.
li
Propre. , Kouring.
Prunclle. Ketqm-him,
Pucr. Ónvam .

Q.
Queuc d'un oiseau. Ioka.'
- d'un ,cluadrupMc: . Iiou·ck.

R.
, Racine. Kigita11g. ,
Rassasjer. Couang-gipakioll-gik.aram.
Remuer .. ~couroug.

RÜ'e .. Hâng.
Riviere. Tai:ack.
- ttes-haute. Tai:ack-ngimpouug.

...
\\'.
$•· -
...
• ·<'
APPENDICE III.
Riviere est prpfonde. . Tal ack-motgikaram.
- est tres-basse, . Ta!ack-motgika1·am •
:Jliz. , . . . lakpenim.
'Rose;m. Com.
Rõtir. O'p.
R o,~e. Tjongkran.
Rougir. Hê-rang.
~ngissernent du jaguar . . H;ou.
Rugit (le jagu ~r). . . Couparack-hê-hou.

s.
Sable. o'
. Gnoumiang.
.sac • • ,,
Tang•.
Saignée ( apres que l:e l!lalade a \\
lj
été1frappé ave c la pl.a ptc gia1cou
M1t a_ck) ·Kiakatong. --
Sale. . . Tou-ton • .
Salive. Qni-ma kpiot.
Sang. Comtjack.
Sarigue. Ntjountjot\.~
Sat1ter. Nah.ang. \
Sé9her •.
:~;~:::~. ~,.
. I
'
Sentier.
I
Chemin .•
1\
Se~pent. . . .. . . ~ Engearang. ·
..,.... (grand) cl'eau. . \\ Ketom~~niop .
., - - ,(le plus. grand)'de terre: Couong-cp~ong-gipakfou.
- (morsure de). ' • \ nca1·ang-corop. I
Si~1er.
s~~ge.
Ouab.
· Hierang.
~
I
ji;ÇJ~re, Conang-c~ ah .

I
AP11ENDICE III. '312.7
Srem. Kgi-couta.
Sair . . Tarou-te-motmg.
Soleil. I . Tarou-di-po.
- (lever (!U ). Tarou-te- ning.
-(à midi). Tarou-niep.

\
- ( couci}er du). Tarou-te-moung.
Sornmeil. Po-cling-coudji.
Souffief. Noup~aoun.
Soupir-er. Nohon.
Sourcil. '·- Kan-ka.
Sucer. Kiaka-êck.
Suer. Suem·. Coucang~eiou.

T.
Tabac à fumer. Gnin-riang.
Tapir. Hokhmeren,g.
'f atou. Kountchoun~ :
- (graml). Kountchoung-cocan.
'ferre. Pays. Naak. ·
Téte. *" Kérang-cat.
-(mal de). Kérang-ingêroung.
- (faire signe dela). Can-apmah.
Tirer. Nountchorot.
.'
·~,
- un coup de fusil. P oung-apoung,
Tondre . .
Tomber. Gnarack. • .
~onnerre. Ta1·ou-te-couong.
\ rchc .. Karantam:.
I
I
1•tue. ~ )_; . C~rotjock . '•.
\ ' .
-. Ouhoum .

~
APPENDICE IIL
Trace. Vestige. Po-niei)· •
Tranchant. , Merêp ..
- (le couteau est). Carack-e-gikarammerêp.
Tumeur. Bosse. . Gniong.

u.
Un . . Mokenam.
Urine. . Niim-kiang.

v.
Vaisseau e~ roseau pou'r l'eau . Kack-rock.
Variole .. ; Nnikhmang-kouék.
Vautour-ouroubou. Ampeou.
. \I .
Veine. Pomm".gmt.
1
1 Ventr Tarou-te-kouho~J.
- fo rt. ., Tarou-te-kouhou-pmimong.
1

- (~as de). Ta:ou -te-kouhou-amnoup•'


Ventre .. ·couang. j-.·
- (n1al de). Gouang-ingeroung·. ·
1
Verrfe .. Ki-ang.
Vide. Mah.
Vider Ull animal. Cl:onang-avo.
:Vien~ . \.. Ning. 1
.,. \
Vieuf. 'i' Malm!'~m. '
Villafe. Kjiem-.o n ·ouhou.
Vise!!. \ }'agiutchi:
~ \
Voh .. .Piep.
Volef ... ' Moung. ~
Vrai. Vénté. Iapaouin-am~oup, c. à
n'y a pas de menson
~

. ,,
APPENDICE IH.

J' AI en partie écrit ce vocabulaire botocoudy


lorsque j' étc:is sur les bords du Rio-Grande de
Belmonte: je l'ai augment~ à mesure que le
jeune Quêck a fait des prbgres dans la langue
allemande. J' ai ensuite eu l' occasion de faire exa-
miner ce botocoudy par M. Gcetling, savant
doué d'une pénétration singuliere pour l' étude
approfondie des langues. Cet homme docte a
bien voulu me communiquer le résultat de ses
recherches sur la langue des Botocoudys. Il
n' est pas douteux que lorsqúe Quêck posséd,era
encor,e mi~ux: l' allemand , ilné ~oit p~ssi.IDle de
faire des. additic;ms importantes à cet essai; mais
tel qu'il est en ce moment, il suffira pour don-
ner une idée' exacte de la langue de ces sau-
vages; c' est pourquoi je le publie textuellement
tel queM. Gcetling me I' a remis.

D~ LA LANGUE . DES BOTOOOUDYs:

CETTE langue est par elle-m.êmé tres-simple;


ori reconna!t dalis sa formation l' enfance de la
raison .bumaine . . Cependant il n' est pas sans
in.téfêt d' exposer ces formes de langages , aussi
bien qu'ilest possible, d'apreslesmatériaux peu
33o APPENDICE III.

:nombreux qU:e l' o:n a la faciliié de. se procure r,


parce que la maniere dont les mots sont formés
et composés · dGmne lieu de tire r des condu...
sions s1:1r les idées des sauvages et sur le1:1r in-·
telligence·. Ces formes de langage se renccmtrent
en bea1:1coup de pornts .avec la maniere de, voir
·des p~uples !es plus civilisés, la natum humaine
se retrouvant toujours même · dans ·son état le
plus grossier.
Ea .Iangue des Botocõudys est tres:-riche en
ononwtapées, c' est-à-djre e:n' mots qui. imite~t
un ~ son propre à une chose ;~ .\ en ~mployant ie
~ '
.Y ·s0n 01J: le mouvement de la chose que J on veut
1

: désigner. Voilà··pourquoi h racine~est souvent


redpublée , ce qui. arrive aussi êhez l~s autrés
nat~ons quand eTI<is form~ll.t ·des ~hots semb~a._
b1e~. Ainsí le .Botocoudy nomme 'al'le _mouette
naqk -nack; un p1c, . eng-eng, pom:.' 1nd"1quer. Ie
. ' . I ' I .
cn de €es mseaux 1; par a meme rms€>n une es-
A • "

' d' e>rtle


pecr . se nomme
' \ gzaco·
. u r tae k-'-tack. ~· un
'. . \\ \ \. l' k
pap,i llon, kiacou keck-~~ck; u~ ferurm1· p zc
:necf-neck; le plus gr.andserpe~\terrestr~ en-
' ear a·n g etJu?ng-couc.m!}.gi~akiou,,ces red~uble­
'.
1
mens·se-retrmwent aussi,dans ten-t:on, 'lnauvais,
' '• ~
dans maozm--m~wun, rnalade ; aú ·co:rúràire
nol1l(P·maoztn signifie coup~ G ·est ~~nsi €p:te par~
I
APPENDICE III. 33 1

ler s'exp'rime par ong' chanier par ong-ong'


fusil par poung; tirer un coup de fusil par
poung-e-poung, imitation du bruit. Ces mots
coi:nposés sont formés comme ~o~<PJ~~oç ou ?Top<Pu~tz,
en grec du redoublement de ?TJ~; car c' est pro-
' ou comme nos mots enfan-
prement ?To~?TI1~foç
tins de pa-pa, ma-man, ban-bon. 1ls sont
communs à tous les peuples, quoique moins
- nombreux que chez les Botocoudys. Tous les
redoublemens des langu~s anciennes appartien-
nent à cette catégorie.
· Dans leurs substantifs et leurs adjectifs, les
Botocoudys ne conna!ssent pas la dis.tinction des
gen.res; il:ous ces m'ots sont pa:r conséq:uent neu-
t:fes , de même que dans chaque langue, même
les plus riches' Jes noms de's choses sont les
plus anciens et ainsi -les moin.s susceptibles de
-flexion. Mais . il est t:res-remarquable , que ces
sauvages coimaissent deux ·cas, ce qui leur
. dom1e les moyens de représenter le rapport 'du
sujet à l'objet, ils ont un cas subjectif, en pre-
nant ici ce. m.ot dans le sens de dérro:ininat:eur
ou cas direct , et un . c as o,b j ectif. L e premie r
n' a pas _de càractere .e xtérieur , et Ie second ne
s' empl0ie qtte daNs le rapprochement de deux
~ubstar:tiHs, desquels le second est _alors objet.
APPENDICE UI.

Ce rapport, qui leur tient lieu de _génitif, de


datif et d' accusàtif, se produ.it ·par la syllabe té
ou ti, ou dé, qui est mise devant le second.mot.
D' ailleurs le sauvage n' est pas strictement as-
treint à 1' observation de cette I oi, et dans la vi-
vacité du discours, il pe~t y manquer; tandis
que dans la composition des substantifs qui
doivent exprimer une force cachée, ou quelque
chose de divin , par une sorte de respect timide
ce te n' est jamais oublié. C' est ce que l' on re-
connalt surtout dans le mot de tarou. Ce mo"~{,
extrê~Inent r~marquable , h~ 1 désigne origi:-
naire:peni que la I une , vraisemblablement aussi
le soleil, puis par un rapproche:ri:ten.t d'idées
tres-naturel, il signifie aussi le temps. La lune
a sanr doute eu plus d'importance aux yeux du
I .
Botoqoudy pour l'idée du t~mps, parf e qu'e1le
I ui dpnnait nn moyen plus facile d' avoir un
I
signe 1extériear préCi~ pour le diviser; c' est pro-
bable:pent par cett~ rai~on que le soleil a reçu
seulerpeut le nom de tareu-ti-'p,o,. Po sigh ifie
pze . ' .Ia d'enommat1on
. d.; ainsi r • .\ du ~><R .~
),\ 1eil'eqmvaut
à cell,e :de coureur dans 'M1 ciel. 'Elle répond
- entiel1ement à celles d'u'71'€pu.vv (qui marche .~n
haut (lans le ciel) et ÃJ~tdbd.ç, q-ui se háte dans
sa carriere lumineuse ) ' qui désigna. d' bord I e
APPENDICE III. 333
soleil puis l' année chez les Grecs. Il .est évident
_ que tarou eSt aussi le nom du_ soleil, puisque ·
tarou-te-:ning signifie lever du solei!; et taroú ,
te moung, coucher du solei!. Ning venir , et
mol!-ng s'en aller, sont .des ·verbes dont les in-;-
finitifs. sont ici employés cmnme substantif~-;
mais dans ce cas te peut être omis' con~me dai\s
tarou- niep , midi, de niep s' asseoir, párce
qu'alors le soleii parait fixénent assis. La Jiai..:.
son de l'idée du temps avec le mot tarou 's ert à
expliquer les mots de tarou-te- tou, la nuit
( mot à mot le temps ou l' on n' a pas à manger)
dénominati~n à laqnelle le g.rand appétit des
Botocoudys fournit une interprét:;~.tion facile.
·Tou signifie faim; tarou te cou_ong, le ton-
nerre' proprement quand il rugit' car couong
doitimiter ~e bruit du tonnerre; tarou-te-meran,
l' éclair, proprement quand il faut remuer les . '
paupieres , mer.ah signifiant clignoter : tarou
.te couhou , le vent, c'est-à-dire quand il mu:g,it;
couhou imite Ie mugissement du vent.'
\

Ce te se trouve aussi dai':ls d' autres coinposí--


tions demots, par exemple dans po-t~ingeroung
(mal au pied); ~ais lorsque dans ces composi-
tions le mot qui précede se termine par úne
consonne , on laisse le té <le côté : maak ingé-

r
34 . APPENDICE III.

rpung(mál à la jambe); keran ingéroung (mal


àla tête). Dans la jonction avecl'adjectif, ce tene
se rencontre jam~is. Ainsi l' on dit tarou him
( nouvelle lu~1e) ~ him signifie noir; kétom him '
( la p.çunelle de l' mil ), pare~ que tous les Bo-
tocouÇI.y.s ont les yeux J!OÍr~ : tarou niom ( ciel
couvert ) ; nuages, niom signifie blanc.
Les Botocoudys forment le pluriel en ajou-
tant le mot rouhou ou Óurouhou (plusieurs,
beaucoup ) ; par exémple : poung ouroiihou,
( deux fusils , un fusil à deÚ.x coups , en général
beaucoup de fusils); ~clzoon o,ur()uhou ( plu-
sieurs arbres ) , forêt; kjiem o'Urouhoze ( plu-
sieur1s maisons'), village. · ~
Les diminutifs sont formés par l' addition du ·
mot rJin ( petit) ' qui est Ul} adje~tif abrégé;
ainsi kr?uck .nin ( petit enfant, ~etit! garçon ).
magrang:;nzn ( une goutte, pet1te ea~ ). .
U~1e regle rigoureuse, c'ést que l'adi,ectifne
soit. fas placé deva~ t le substantif auquel il ~e
rapJ?.,I,)rte ,, il doit le suivrt ; p:ü1, exemple\1 ua!
hah ou vahah oron ( homme g os et gramd ),
\ '
ouahaha I .
pmack ( petit 11 nme J~ Les degnés •
' de cqmp~raisonde l'adjectif s?nt produits de la
manieré ~uivante : 1° le comparatif par I'addi-
tion ~'ouro uh (ou ow:ouhou, I~ même mot qui

" .
APPENDICE III. 335

forme le pluriel ) ; par exemple : ,am ourouh


( plus aigu, c' est- à- dire froid ); ampe ot sigliifie
aiguiser; 2° le superlatifpar l'addition de l'ad-
verbe jikaram, ( tres ) par exemple : couang
mah j ikaram ( tres- affamé .); proprement , le
ventre est tres-vide. • ' '
Le pronom substantif kjick ( je) est toujours
placé devant; par exemple : kjick ioop ( je
bois ) ; kjick piep ( je l'ai vu ). De tous les pro-
noms possessifs, les Botocoudys semblent ne
connahre que kjaçk ( mon ) ; par exemple :
kjick kjouck magnan- ioop ( je bois mon eau ).
Cependant il paralt que le pronom possessif ne
differ~ pas beaucoup du substantif pronominal
de la premiere personne; car Quêck dit : kjick
maalc (ma jambe) aussi bien q.ue kjouck maak.
La variation de I' ou en i dans kjick et kjouck
ne doit pas surprendre; on dit de même kouem
( mort ) et ouamm ( charogne ).
Les verbes sont tous à l'infinitif et au parti-
cipe, et leur forme ne parah pas différer de
celle des substantifs. n. est tn~s-remarguable
qu'une grande quantité de ces mots commen-
cent par une n qui para1(être mobile, eu finis-
sent par un p. Cette patticularité a peut-être
une cause : du reste. I' n parah surtout destinée
336 . APPENDICE III.

à marquer l'in finitif; j'en citerai plus ras quel-


ques exemples. La troisieme personne du vÚbe
. est f~rmée d'une maniere qui est fondée sur
I' essence ,de la la.1i1gue et l' origine du verbe. Le
verbe substantif étre con~iste proprement dans
le mot het ( lui, elle, cé ) ; Jnais il est ordinai- j

rement abrégé par he; et · même simplement


~
par e, et alors il précede
~
le verbe, par exemple :
lzé mot, cela bout ; hé moung, il est parti; het
nohoun, il soupire ; he ni~g, il vi.ent; e reha
ou e rehâ, c' est bon.Ce mot hé ést répété, d' a-
pres le mode botocoudy, dans,he e e ou hé e qui
11 signifie oui, c' est-à-dire cela esi ainsi ; hé kjoum
mr~~ng, il nage bien. Dans le mot.,..ampe ot,
aig~li~er, on croit reconna,h re une terminaison
parficuliere qui s' est conservée qans la syllabe
~t ; car amp signifi~ par lui~mêm~, aigu, de
là a,mp ourauh, fr01d ; peut-etre cette syllabe
ot provient-elle du verbe substantíf het ; il
1 • I \
semhle qu'il en est de même du mót~-ot , se
c •\
h r~'ler. ette mamere \\~
A \ \.\ •
~ · e co~;poser ai·~ l d
· es
v-erhes avec le verbe .su stant1:t\ est tres-natu- ,
:rellr ; par exemple : il bo\ , se d~tómpose aisé-
ment en il est huvant; seWement ce qui chez
nous para1t propre aux verb~s intransitifs ~' étend
chez les Botocoudys à tous les v:erbes.
I . \

/
APPENDICE IU.

Pour faire connaitre la maniere simple dont


les-Botocoudys expriment leurs idées, il suffira
de citer les exemples suivans :
Ils trouvent le miei produit par les aheilles
sauvages dans des trous de grands arbres , en
eonséquence ils nomment cette substance mah-
ra ou malz reha, c' est-à-dire un trou doux, ou
un bon trou.
La principale o~cupation des hommes est la
chasse, njokna; c' est pourquoi, leur dos n' ayant • I

pas été courbé par l'exercice d'un métier, ils


désignent Je travail par ioprqck; le's' femmes n' al-
lant pas à la chasse sont obligées de rester à la
maison; ainsi la femme est nommée ioknang,
mot qui a vraisemblablement de f affinité avec
njokna, car n para!t marquer l'indicatif; ainsi
nozmgering, tire r , se rapproche d-' angering,
lancer, et ioop de njoop, boire; ,n g ou nck est
sans doute une contraction d' amnoup ou d' anz-
nouck ( rien ) ; dans la composition des mots,
c' est ordinairement nouck, ·comme cam nouck
fainéant.
L'index se nomme po iopou; iopou d'iop, ,
boi re, et primitivement su'c er; ainsi po iopou,
le doigt avec lequel on suce; c' est effectivemen~:·
le plus commode pour cette opération; par un~..
III. 22
·3 38 APPENDIGE fll.
raison semhlable l'inde:Jt se :Qomme e1:1 grec
/l.uutvoç;
_ Le feu se nomme tchoomp~ck. En réfl€ehis-. ·
·sant à la 1n~niere· dont les Botecoudys produi- "
·sênt du feu, qui e.st de frotter avec :vivacité
deux morceaux de bois l'un cmÍtre l~autre, l'é-
. tymologie de ce m~t, dérivé de tchoon, arbre,
et d' eopeck, Se IlílOUV(i)~r avec VÍtesse, est évi-
de:nte._ ·
L'idée de vérité et de bonté morale est ex-
primée eiD.~z ces sauvages d''une maniere. tres-
claire, c' est-à- dire nég'at:isvement. Ainsi njin-
, I '
1/ k~ck . est un voleur; un fripon; njinkêok am-
l . h h ' ' \ d' h
no~f',l:ln rave . om:m~, c e~t~a · 1'r~ pn 0mme
qm r est pas fnpon ; zapaouzn designe i e men--
so:n~e, et iapaouin amnoup la v~·r~té. · ·

. 1 \
\'

\
\

~~
~I
~

'
·z \ '
APPENDICE _lli;

VOCA:B-ULAIRE :MACHACALL
r

Cette langue a le son nazal; elle manque 'de


son guttural; e1le a comnie celle des Botocoudys
beaucoup de mots et de syllahes qui se pro-
noncent d'une maniere singuliere dans le palais.·.

Arbre. • , .Abaai'.
Are . . . Tsayê. ,
I\.
Aller ( alloris ). . Niamamou,
Beau. Epal .
Bla11c (un). Creban .
Bois ... Ke.
Botocoudy. , . ,ldf!OI-\SSaÍn,
Bras. . . . Nipnql
·canot. Pi1:ogue. .Abas<;oi' •.
Chair. . ·. Tiptingin.
~
Chien. 'I'chouckchaouam . ,
Di cu. Toupa.
Doigt. Egnipketakam, ou nibcou·

Eau • . .. toung.
Counaam.
Bclair. Teinjanam .
Epine. ' . Minniam.
Femme. . AÚtiom, ou Etiatoun.
Feu .. Kecham. '
Frere. Idnoi'.
F u ~il. BibGOL )
34o APPENPJCE III.
Hache. Piim.
Herbe. Chioui.
Homme. " Idpin.
Jacaré. Maal.
1\;la,~n. A~nibk~ilip..
Maison •. Beêr,
Manger. Tigman.
Montagne. Agnina.
Nêgre. TapagnÓn.
Oeil•• .
~ Ideal.
O eu f. Niptim.
or~ '
Tagniba.
Pied. Idpata. ·
Poisson. Maam .'
. I I
Poitl:ine. Itkema'~ilm·

ifFouleC . ~Tsoucacacan .
Riviere .. . !taco!.
Sang. . . ldkt\ng,
Sinpe 1 Kechniong.
,, I
Tapir. Tcliaa. , \
Tato~. .r . Co!m. ~
Tonn,evre. Tê tina. ~
Vent~·e. Inion.

\.
Visagp.
APPENDICE III.

VOCABUÍ..AIRE 'PATACHO.·

·Cette langue a beau~oup_ de .rn:ots dont Íe


son est confus, et ·qui se prononcent en partie
dans le palais ; les sons intermédiaires entre
~, u et eu sont fréquens :

Ami. Camarade. I tioi.


Arbre. Mniómiplicato .
Are . . Poltáng. '
Breu f. . ' louctan.
Bon .. Noníalson.
Bras . . Agnipcaton.
Briller. Nion'gnitcliingo. . ·
Calebasse. Càui. ·. "'''.' . · Totsà. ·
Canot. Pirogue. . . ' Mibcoi:.
1
C' est bon. . . • · . · Nomã!sóm.
Ce n'est pas bo1t.' . · Mayóghéná.
Chair.
,,' Ounlim. j ••

Chanter. Sóuuíniàta.
Cheveu. Epotói'. · ·
Cheval.. Amachep . ,
Chien . . Kokê'.
Cochon. Cheum .
I
Corne. Niotchokap'tchol.
Cou .. ·' M à!.
I!;
Courir. Tópak aóuti:hi.'-
Court. Nionham-.k:etoin.
.
Couteau.
APPENDICE lU;
Amanal.
Cuisse. Tchakapk~ton..
Di eu. Niamissoum.
Doigt. Gnipketô.
Dormir. . So11mal mohon. ,
Enfant.. Tchaouaoum.
Ennemi. Se battre<. Nienai:kikepa.
Ei;>ine. Mihiam.
Fils .. Nioaactchoun.
Filie. Nactamanian . .
Fleche. Pohoi..
Foie .. A:klopkanai:~
Frêre. Éketanríol..
Froid. N ouptchaaptangmang.,
\\ ' .
Fusil. KehelüJui • . \
1/ Granf. Nioketoi:nê.
Gras .. ; Tomai:som.
Grenouille. , Maouâ.
I ·. \ ..._

Hachç. 1 Cacliou.. I
Hameçon. Koutiam.
Homr,ne. Nionnactü~. ·~
Jamb,e. . Patê. . \
Lit. _Miptchap.
Long. '· Miptei:.
Mai:s. .,1:Patchom.
Mala1e .. . ' • t~ktchoP,.e{am.
Mangrr .. . Qknikena~g.
Mani?c·, · C.~f-om. '
Mêre .. \ Ateu~ ,
Mont~ gne . Eugn~topn ê. . "f

:Mordre· • KaiU1gtchahi1"
. \
'· Al?PÊNDICE III. 343.
Mourir. •, Noltchoon.
Negre. T~meningna .
I '-
Nez. lnsicap.
Non . .. ' Tapetapocpai
Nuit. . Temeniei·petan.
OEil.. Angoua.
OEuf. Petetiêng.
Ongle. / . Nion-menán.
Oui. Ílan.
Paca. Tchapa.
Paresseux. Nok,tiokpetam. ~

Paressenx (animal). Gneoul.


,.,
.Patiencc Niaisto. '
Peind·re. N o!tanatchê.
Petit. Kenetketo.
Picr1·e. ' Mica!.
Plume. ·Potoltap.
Poisson. Mahain.
Poitrine. ~Ek.êp
Pouce. ~ Niip-keto.
Poule. Tchouctacáeo.
Puer.
"
. Niounghachingoua.
Riviere. Kekatê.
,,
Rouge. Eoato. \

Sang. ·' Enghêm.


Sceur. Ehê.
Soleil. Mayon.
SoufÍler. ·Êkepoho ..
Tapir. . ·. Amakhi.
Terre. Pays. ' •Aham.
Tête • . • · AtJ?atoL

/
344 -4-PPENDICE UI.
Un. Seul. Apetniêeam.
Ventre. E tê.
Viens. . Nanê.
Vieux. . ·-' Hitap.
ViÍlage (beauGoup de monde). Canau-patachi .:
Vomir. Tchaha.

VOCABULAIRE MALALL"

Cette langue a le S'on nisal et gutturai ; Ia


plupart des mots se prononcent d'une maniere
confuse, ce qui les rend tre~dif!ciles à éGrire.'

i net'. I Ali.ehegé •
ATbre. .. Me.
Are . . Soi:hé.
Barbe. Esekeu ..
I
Beau. Épol.
Béaucqup . . Akgnonak. ·~
Bceuf. . . Tapiet. .
f
:Bois . . . í. Me.
Botocoudy. . \. Epcoseck (g1~ande o ~ille).
l3ouch1~ - ., •
1~1etoco~ , ·.
Eras. . . Ni:em. \
C'estbpn. , É~o:i. '\ \
Ce n'e~t pas bon •• Ia1\mingbo~,
Chair. . 1qunie. .,
Chale~tr . Ei é.
Chantp- . · . Niamekae.
'\.,

/
APPENDIGE III.
Chat. . Iongaet.
Chemin. . . Paao.
Chemise. Aguohicke.
Cheveu. ' Aeu .
Chien . . . '. Voco.
Ciel. . • · Iainepêoi:mé. ·
Cochon. . .. · Iaoue~.
Corne. Manai:tke.
Cou.·. Aieroio.
Couteau. 1Iaak.
Cuisse. Ekemnen.
Dent. Aio.
Dessus. ··Ia-memaouen. ·
Dieu.' . ·.Amieto.
Doigt. Aniemko.
Donne. ~aposnom.

Dormir.. Nieirtâhono.
Eau . . · Keché.
Enfant. .• Ako .. ·
Epine. ·Mimiam. ·
Femme., · Aiente. ·
Feu .. · Ceuia.
Filie .. . Ekokalia.
Fils. . Hako,
Fleche. . Po'i.
Fo.urmillier. . Bakéé•
Froid. . Kapêgnomingming. ·
Front. .Haké.
Fusil. .Poo:
Rache. .Pé.
Haut. , :;· Amsettoi:.
346. APPENDICE III. .
Herbe. Achena. "
l'Iier. Hahem.
H oeco. Iahais.
· Homme. Atenpiep.
Jacaré. . Aé.
Jacutinga. Pigna.
Jaguar. lo .
Je. Moi. Peu .
Laid. ' (
Evouout·n.
Lait. . Poio •
Long. E ch cem.
Lune. . .. Aié. .
Main. . Aiimké.
M:l!s. Manaia. , 1
Maison. . Ieo . .
11
M:mger 1. P omamemneng.
Manioc .. Couniê.
Mere. . A~é . .
Mordre. .. . N~am.anoma .
\
Mourir. . Hepo.ho.
. Kepnê.

Moustique.
Nêgre . . Tapagnon . .
Nez. i:. , Aseié.
Noir. .,,.. .. .Elheemtom.
Non. . A'tepomnock. ·
Nuit. .Apt m . . ~·
OEil. . Keto.
OEuf. Souckakakier.
Oiseau. J>oignan,
O r. .Toioa.. '
Oreille. . .: . Aiepco:
APPENDICE III. 347
Os. Akem.
Oui~ Hoó.
Pere. Tanatemon.
P.etit. Agna. ,
Pi~d . Apao.
Pierre. Haak.
Pluie. Chaab.
Plume. .) . Peué .
Poisson. Maop.
Poitrine. Aniokhe.
Poule. Soucaca.
Bacine. Mimimiaê.-
Bouge. Pocata. ·
Sable. · Natho. -
Sang. Akemje·,
Serpent. · I(,hekheein,
Singe. Kouchnio. ·
Soleil. . · Rapem.'
Tapir. . ~; Amajeu .
Tatou. . · Couib.
Terre. .! ' · Am.
- Tête . Akeu.
Tomber. · Orna.
Tonnerre · Scapé.
Un. ,((
Aposé.
Vent. · Acokhé.
Ventre · Aigno.
Viens. I o.
Visage . Tíeto!,
r . I
Vite Alo!hruriol.
APP-ENDICE III.

VOCABULAÍRE MACONI:·
Aller. Iamon.
Arbre. Abooi: . .
Are Paniaw.
Aujourd'hui . Ohnan.
llanane Atem ta..
llarbe. Aguedhurn.

Beau, joli E;poi:nan .
Eeaucoup . . Agnquni!Ú;un.
Eouche lnicoi".
Breuf.
I
' M analtt. . \\\I.
Bois . . Cou.,
I
Bras . . Agnim .
Broche Mouchi.
Calebasre . . Counata.
\
C'est b~1n. EpÓL \
Chair.
Chalellll .
Tioungin.
Abcoi'can.
t
Chanten . . Niamoung!,.êtê.
Chat. \ Kpuma~ n.ang.
Chemin. . . ~ataan . .~.
Chemisq. . . ~~upickchai'.
Cheval Cmhato.
·' ! •

Cheveu End.·\en.
Chien. . Po~o .
Ciel .., . Beco!.
Cochon .. Tiaketin.
~
APPENDI~E llr'~_ ' 34g
Creur. .' . Inkikha.
C orne . E.cm~ :
Couteau. Patital.
Cuisse. . . lnca~jh~.
Dents. E tio i:.
Dessus . 1Pavipa~.
Dieu. , To'hpa.
Doigt. . . ApnÍJ'C.~ut?·
Donne Apo~én?Ih :
(

Dormh· NiampnJiloq.
Eau ·. . C?unaa~1,
Eclair. Agna!Ua':ll.
:Enfant ldcouto.
Epine. Bimniam.
Femme Ati.
F eu Coen.
F)let . Maplj.epê.
Filie . At inang.
Fi!s lncoí.Jto.
Fleche Paan.
F ounnillier. Potoignan.
'
•Froid. Khaam. (.

Front. lncui.
Fusil . Bibcoi:.
,Hache. Biim.
Hameçon. Cagn~gnam,
Hal.lt . Ecouptan.
Herbe. Cheui.
H oeco. Tchajijé.
Homme Icubt<,t n.
Jacaré Maai'. ;
,,

APPENDICE Ill. 35r


· P'ied .. lngpata.
Pierrc. ·' .Comtal.
Pluic. , . Taeng. ·
·Plume . . Potegnemang· ou angemang.
Poisson .. Maam.
Poitrine. Inkematan. ·
Poule. Tioucacan.
Radne. Agnibtcha ten.
Roúge-:- ' Oupkênghehêng.
Ruisseau. Ecoi'nan
Sable. . · Avoon. ·
Saint. Toupa. ·
Saóg. Inkeu. ·
Serpent. Cagna .
Singe. · Kegno.
Solei!. A h caal
Tapir. Tf~ . .
Tato,u . . · Coim.'
Tcrrc. Aam.
Tête . . Epotol.
Tombe'r. · Omnan.
Tonnerrc. Ouptatina.
Un. E pokhenan.
Vent. Thiai!I·
Ventre. Agniohn.
' Viens. Aboui.
Vieux. Idkatoen.
' I
Visage. IncaaL
Vite. Moa'khikhman.
APPENDICE III.

VOCABULAIRE DES CAMACANS CIVILISÉS DE


BELMONTE,1 NOMMÉS MENIENGS PAR LES
PORTUGAIS.

Cette Iangue a beaucoup de sons de la gorge


et du palais.

Agouti. Oncho.
Aller vi te. N'I.
Allons. Niamou.
Arbre. Hi.
Are. Houan.
l Aujourd'hui
I .
. ·lnou.
Banane .. Incron.
Barb~ . Ioghé.
Beau . lngoté.
Blanc ( un ). Pai.
Bois. Hinta .
Bouc~e . lniat ago.
Bras. Jgbia.
Ce n' ~st pas bon. Saou. \
Chair. Kiona.\\
\
Chalepr. nioungg· u.
Cbat. Ià tan.
ChemÍn Clla.
Chev11u. Iningé.
Chien. Jaké.
Cochon. Coui a . .
\\
.-
1

APPENDICE III. 353


Creur. Nixech;i.
Cow. . -I~kio .
Couteau. Keaio.
Ctiisse. Achi.
Dents. lo.
Dormir. loundeun:·
Eau . . Sin.
Enfimt. Canaiou.
Epine. Incha. -
Etoile. Pinia.
Femme .•_ Achoun.
F eu. Iaroti.
Fils. Camaio.
Fleche. liaH1.
(
Forêt .. Aneo.
Fourmillier ( grand ). Tamandõua :
F~·ere.
Gens. Hommes.
. ,,
., ..
_Ato .
Toúii.
Haut. Inché .
.,
Hcrbe. Asso.
Homme. Cahé.
1\,:
Jacaré. Ou é.
Jaguar. _ .Koú'Jüamou.
Laid. ~· Saciu .
Lait . .
. ri
:Aniou·.
.
~

. r::)
Long. Incbé.
I 1.'
'Lune . k
Main. 'Inêrou .
Mais .. Kcho.
Maison. "Touvoua':
· Mange~. Ioucoúa .
III. 25
,. 354 APPENDICE III.
Manioc. Kaiou.
Mordrc . . lmbro.
Mort. Cha-ouia .
Mourir. louni.
Negre. . .· Coata .
·Nez, ~
lnchivo:
Noir. Couata.
Nuit.. Outa. -;;
OEil.. Imgouto. ·
O'E;uf. Sacré.
''
Oiseau. Sata.
Oreille. Incoga .
Ou i. In ou .
Petit. lntan.
Pluie: Si. ,,I.
I/ Plume , ..
( , Inghé.
p. I H a.
OISSlon ..
Poule. Sacha.
·Racif e. Kí,aii.
Rivi~re. Sin. I
·Sablf .
San1.. •
. '~, Ae.
lsg.
. ~ ."·.·\\
Sari?ue.. f. Canché. ~--
Sei. . .' }. ,·
1
• Chouki.
. \
Serllênt. , •' ' •• . ~· ,T 1.. \
Singe. Caoun.'
Solei!~ ~
" ·\~
Ch' ..
10!1 •
Tapir. • \Eré.
Tatpu. ,_ . Pâ.
1
··~
E.
\
f .. ...
I
Terre·
Têtf. Inro.

~\
y

\
I "
APP~NDICE IH. 355
'figelle . ( especc d'assiette ). ·· . . E.n an.
Un . . Veto . .
V:ent. Ioua.
Ventre. Ioundon .,
ViGllS. Ni.
Vicux. Choeo.
,/

VOCABULAIRE DES CAMACA.NS OU MONGOYOS DE


LA CAPITAINERIE DE BAHIA.

Langue singuliere qui a un gran·d nombre de


mots l<ings et b~rba~ef et beal.iconp de . s~ms
gutturaux; ces· pal\ticularités la distinguent , de
toutes les pré·céder.ites. La_fi.n des mots ~e pro.,..
nonce d'une maniêre bizar.re et fort br.e ve:
quelquefois ~n e:ó.tei,td en même temps. de.s sons
du nez , dU: palais , et du gosier. b' e se pto'-
'· nonce o~dinair.ement ttes-bref : les mois . se -
t~rminént or-dinairement~ ~n a et · en 'o, ces
voyellessont <?9.!-l:Pé.e,s brusq~el?e?<d~r1~ le ~is­
cours; on. d,ir.a]t .que celui €{Ui parle . ce~se
tout à ççmp sàn dis_?oti.rs.

. Ago~1ti. I;Iol}ioq . •
Air . . 4-rikhoro.
Aller. J\>):a11. •
Aller chercher. Ibanê.
Arara . T choka.

.J
....

.356 .APPENDICE III .


Arbre. llaououe .
Are. Couan.
Beau. Cho-ho.
Bcaucoup. Eouhiêjliê.
Blanc! 1nkohêro.
Blanc (un). , ' · Hoa-1
Blessure. Andeul~ui.
Bceuf. llerêvo.
Bois . . -Hoinda.
Bon ..
•· I(oi:ki. ·
Botoque. Í>iapê.
!Jotçcçmd:y .. . Ko.uahiKokhi ê . .
Bouche .r· 'H:êrêko.
Bras . . Nikhoua .
Broch~ ·' ' Óhinàio.!.
llí'rliier . . . Oundsedo .
. ,: I l .· .. r·n· r
C 1d~;tl't ' M-álsõh ~:) . .f:·'.,íf ; Dea.
1 ;:;,.

f;alel!1\'ss.d , .a .r ·• r.r :.m '.'; Í\\erêk.hka~

Cochort Koua~hirokhda.
1

Cou / Ninkhedio.
Couch~r. Koi'noui'.
\
I

(
APP'ENÓICE IH.
Cougonor Iak.é-ko',tra .
Cour.ir .1 Niani.
Cquteau.
Croitre
.. I\ediaa~o.
l(na~ch~hané .
· Danser Eco\n .
Dents. pio.
,Dessus Hoekhoa.
' ' )
Doigt ( premier) l:p.hi.n d\o.
- ( Second) . Ndiakhhia .
. - ('I'roisiem.e ) N:diqenp.
- ( Quatrieme.) N:diqégra.
·nanne N:ekl;io.
D"onner Ad'kho.
Dormir H a'k.egnéhodqkJljw.
Eau . .. S.a.
Eclair . T~abokhko.
. Enfant Koi'nin. ·
Epine . Hohi é.
'Etoíle .. Heo. .(
Fenl.me Krokhediora .
Fcu . Diakhké .
Feuílle . E •·é.•
~ Filet. Honerakhi;ahka.
Filie . K iaKhk.rara .
Fils . ..( ' Kediêgrê.
Fleche H o ai'.
- à pointe de roseau (ta boca .) Knêniêouê .
- barbelée- (periaq ue )'. Hoahiê-hiê •.
- pour Ies pctits oisc.aux (viro ta ): Houagre.
.Fieur. Houanh inclo .
Forêt. D ok h odie.
'J

,,
358 .APPENDICE .III.
FÓurmillier ( grand) . Pera.
- (Petlt) Fedara.
Frêrc. Kiakhkoadan.
F~oid. Chahadio'in.
Front. •' o
A~e.
Fruit. Kerênê.
Fusil. Kiako.
Grand. Iro-oro.
H ache. Iakédokhko.
Hameçon. 1 Kedia·halé.
Ha~che Kadse.
Haricot Kegnê.
Haut. Hoi'nia.
Herbe. Kai'. ··!
jj(Ioco Chakhéda .
I
, · Hiiem tt.
Hom~e ...
Ile. .' Kahoi'.
Jacupc;mba Cháheiv
Jawtipga. Cbanenseu. I
Jaguar laké deré . I 11
~(Noir) Iaké-hia. ·
- ( Pf tit) Ko'uikhoua .
\
\,
Jambe "\ Takhketsé.
~e, m 1oi. . Ekhlth~\
Jeune. . \ p :enên 1\~ .
Joue . . D'ahia . -'\
Jour. A·ri. · '
.,~ .
.La ver , llakegnêMroakhka .
I
Langup :Qiakh~ré. . \
• Lumitl<,re. lk.hké.
~.
Lune. Hêclia .
\
'/ ~.

\
\
\
APPENDICE III . 35g
:ttlain. Ninkré.
Manger Nioukoua.
Mensonge Nekhionên.
Menton Nikhkaran.
M:ct- Sonhia.
Montague. Kere.
Mort. Endiene.
Mourir Endiênê.
Mulâtre. Kadiakhka. .,.,-;
. Nager. Sandeda .
Negre. Khohada.
Nez. Nihieko. J

Noir. Koakhéda.
Non. :_ Mochi.
Nuit. Houerakhk.a.
OEil .. Kedo.
Oiseau. Chaua.
Oreille. Nikhko.
Ou i. Koki.
Paca. Cavi.

-
Papillon. Chakréré.
Parler.' Chakréré. )

Pecari.
Peindre.
- Koua-hia ..
Indêrê.
Pere .. Keanda.
Petit. Krahad<l.
Pied. Ouadê.
Pierrc. Kea.
Pluie. Tsorakhka.
Poisson. Houa .
Poitrine. Kniokhéni.
36o APPENDICE m.·
Pont. Hondia.
Pouce. Nédé.
Racine. Kasé. -
Rine Hatchhoho.
Riviere. Kedokhhia.
Rouge. Cohira.
, Ruissea·u. Sanhoa .
Sable. Aedêengaranê.
Sang. Kedio.
Sei. ·. Echké.
S erpent corai! . Didéra.
-Iiboya. Kta-hiê.
_,J ararao.c a. Dha-hiê.
Singe. Caoun.
Sceur. Ikhedora~
Solei!. Hioscu ..
I
Souffieí. Chki.
Talon. Hoak. I.
Tapir. Herê.
Tatou. ,Pal'\ka-'hi~.
I
Ten·e. Sol. E.
Tête . flerp .
Tomber . Koghc rakhka.
Tonn erre. 1SankoJ·a:i.
Toussen. Cogher~.

Trou. ~'eko. . '


~ .~
Tuer . Hénd ek hcdaoL• .
Vent. Hedjek!.ké .
Ventre . .. Kniooptekh .
Vieux. Stabié.
Volcr . Hohi nd okh.
APPENDICE IV.

NOTlCE SUl\. LA PETITE CARTE JOilYfE A


Lf\. llELATION .

CETTE c~rte nwntre mon voyage à travers les


g'randes forêts pour gagner le Sertam, au milieu
dnquel je passai ensuite pour aller à Bahia; elle
commence au sud m; Rio de Sa~ta-Cruz et in-
dique avec assez <}'e:x.actirude la cÔle jusqu'au
~o-Itahype; c'est-à-dire que j'ai cherché à
rectifier d'aprt~s mon expórience tous les poinrs
marquês sur les cartes de Faden et d'ArrovY-
smith, les meilleures que jeconnusse à.l'époque
de mon voyage. J'ai pu m'occuperde cette rec-
tification , parce que 1 dans mes différentes
courses, je notais toujours soigneusement le
nombre de légoas dont un lieu était éloigné
d'un autre. Il était plus difficile de cléterminer
exáctement les points cl~s canto,ns ele l'intérieur,
n'ayant ni le tenJ,ps ~li les instrumens néces...:.
saires pol\r eles ebser-vations astronomiques; je
me ·consolais de cet inconvénient par les pro-
roesses que me firent le ministre comte de ~arca
et plus tard le comte dos Arcos de.me commu-
_niquer une carlc de ccs pays; la mort du premie r
36"1. !A.PPENDICE IV.

fit évanouir mon espoir à-cet égard. J ' ai par


co~1séquent pris pour ·base· princ~pale la ·carte
d' Arrowsmith ; mais on ne doit . compter que
sur la route que j'ai parcourue, et qui est mar-
quée par une Í:igne, c~r je ne puis· n.;ulement
juger de Ia justesse de la position de . tous les ·
autre~ points s~tués dé chaque oôté~ _et je. croi
même pouvoir les regarder en général com;rne
mál placés'.
Le cou.rs du Rio_-Rardo ést marqué surcette~·
carte d'une maniere tin péu différei:J.te de celle
que présente l'31utre carte; dans \Celle-ci je n'ái
pas eu de point•de; contact avec ~on cours dans .
l'intéi.1:iem ·du pays. Il a faliu ensuite le'!;haBger;
ayant atteint les bords de cette riviere ·sur la
route du liealienant..:colohel Jfilisbe1·to ·Gori-les ·
da Syfva, et l'ayant côt@yée .jusCfil'à\~árra d~ :
Vareqa oi1 je Ia· quittai. Valo sur les Hmites 'de
Minas Geraes est lC: p~int de l'intérieur Je plus
étoiàné de la ~ôie o'f"je .sÓis alie ; Ü est ~ I S
1

Jégoas de· distance de _l'a11~ 1 ayal ~o Rio-P~h·do .


l • l
h at1 sur a nve te ce eu V' , mar ue' sous son
fl \ \ '
·a a, ·
A •

, · 1 1 · ·
1 ·. : d ·
venta ,1 e nom sur · a carte e,, a en, et es1gne ~,
sur C€)lle d' Arrowsmiih par la dénominati01~·
cf Extrema: ·Ce point esnitssi indiqu~ sur 'ma
. carte ~ mais ·ArrÓwsmith s'étant trompé sur sa.
- . ·. . \ . .

-~-
APPENDICE IV. 363
..
position, il fimt aussi que sur lllfl
carte ellc soit
chr4ngée.
Le chemin ouvert par M. Filisberto da Sylya
à travers les forêts suit assez exactement là rive
droite de l'Ilheos ou Rio da Cacho.e'ira·: bientôt
cependant·il s'en éloigne et va joindre.le Rio-
Pardo, ce qlii indiqu~ naturellement un change-
ment ·de ·cours d~ cette derniere .r;iviere. On
m'avait promis, à Bahia une carte exacte et spé- .
ciale de cette r~ute; je ne I' ai pas encor~ re-
çue. Yai d'apres mori experience maPqu~ les
ruisseaux , les torrens, les rivieres, les monta-
gnes les plus remarquables, les lieU:x ou ·rwus
avons campé pendant la nuit, et tous les autres
.roints dignes d'attention ;- on pourra par con-
séquen~ sui~re tres-exactement le journal de ma
marche dans les forêts. Mon voyage de Vareda
à Bahia passe as~ez , pres eles bords .cl.u Rio dos
Tiheos et forme un a~gle ·Úes-aigu avec son
co~rs, puiscp~e la .clistance de Barra da V ~reda
à Arrayal da Conquista, ou la ligne qui coupe
tranvers;Jement les deux routes, n'est que de
deux journées de route.
• · Sur la route ele Bol.lf Jesus à Corta Mao, j' ai
oublié quelques petites riv~~res qui sont à ·peu
,• pres de la force du Jiqtú,~i'ça au clernier ele oes
364 _ APPENDICE IY..

endroits; mais je ne p1;1.is déterminer si ces ri-


vieres n'étaient pas des sinuosités du Jiqüir1.ça :
De m~e entre Laje et Adea, mon emprison-
nement ·m'a empêché de do~ner I'atteri.tion
convenable à la p.osition et à la na!ure des lierix.
Le ruisseaú d~ Bom Je.s us, tout pres de la fa-
zeúda de ce nmn, a .é.té laissé entierement de
cÇ>té à cause de son volume peu considérable.
La côte depuis l'embouchure 'd e l'Itahype jus-
qu'à.eelle dp. Reconcav~, ou à I'entrée de la baie
de Tous-les-Saints, est tres-inexacte sur la. carte
, d'Arrowsmith; et par c9nséquentsur la .m ienne,
. p,ilrce q:ue je n'ai pas fait ce . voyage. li faut
sur cei,~ p~ints oonsulter ]a Corogràfia- B.ras{-•
lica, tom. H. p. i~5, ~te. .
La l;imite de la capitainerie de Bahia est noíée
•par une li_?ne ponctuée. l
I ~
.APPENDICE IV. 365

CORRECTIONS ET ADDITIONS.

P. 18. l. 5 . .Adra os olhos: il f~ut lir~ abraos olhos.


44· I. 2. Effacez ou apres le mot uassu.
61. l. 8. Sal!, ia Splendens. M. N ees von Esenbeck; profcs- .
scu.r de botanique caractérise aiusi cette belle plante :
« Salvia; calycibus campanulatis, trilobis, c·oloiY;,tis, ver-
" ticillz's ·trifloris subnudis, .foliis dell'oidibis ctcwninatis,
serratis. "
lbid. L 19. Oiseau-mouche à gorge bleue. Cct oiseau, cpe
j'ai rencontré ']e long de la cóte orientale du Brc.~ iJ,
semble différer un peu de cclui qui a ét~ figuré par ·
Aud~bert et Vieillot; cependant je dotjte que l'on
doive le considérer COI,llme une e~pecf! distincte , lcs
dissemblances n'étant peut-être qu'un cffêt de l'âge;
néanmoins j'ai toÚjours trou'vé le mâ:le,marqué de la
même maniere. Son collier n1 est pas d'un brun rougc,
plumes sont hlançhes . à pointc verte, ce qt!Í !ui
donne une collerette de cette coule~r.
67. ·1. 17. On a eu heau conigcr les c.lpreuvcs, les impri-
meurs se sont ·phstinés à estropier le nqm de M. de
Humholdt; ils ont persisté à mettre Humbold; mais
il ó'est pas de lecteur ,qui ne reconnaissc Ie nom de
l'illustre savant cité fréquemment dans lc cours du
voyage. r
6g. I. 7. Le perroquet à front rouge ( púttaous clqfresnia-
nus ) de Le Vaillimt est un bel oiseau, LTcs-docilc. Lc
nom ele camatoenga vic,nt de la Jingoa géral ou languc
366 '
APPENDICE Iy.
toupinamba dans . laquelle ce perroquet .est appelé
aiouru am'atounga ..
./
P . go" I. I5. Les homs · des savans allemands jouerit de ma).,
heur; une syllabe s~perflu'e ~, malgré les corrections·,
été conservée à la fin de celui de M. Freyreiss; c' est'"
ainsi qu'il faut lil·e.
lbid. . I. dé\-niere. · Le perroquet que je ·rega1:de comme Ie
psittacus ma.lra11uanna de 1inné,me semble êtl'(i une
espece réellement différente. MM. Temninck e~ Kuhl
'ont nommé· psittacus .Illigeri. Azará qui le premier
a décrit cet oiseau lui· a donné le nom de ~zamcana
fardé. (Voyage. tom IV. p. 55. ) On peut consultcr 1t
ce sujet lc Conspectus psiltacorzmt d'e M. Kuhl dans
les f7 erlwndlungen du kaiserlichen Léopold. Caro!.
·Academie~z, tem. 10.• p. 19. 'n faut\ clone substituer le'
nom spécifique d'Ílligeri à celui de Makavuanna.
8g. 1 I. ·s. C'est biim réellement le papili~ idoncreus âe F'\-
bricius que j'ai vu dans cet endrc.it; car I; descriptiou
dtmnée par t:e sava:nt entomolàgiste Iui ~onvient parfai-

t
tement; il en est de même de la figtue de~Seba, tom. IV.
p. I. 3I. fig. 3. et4. . ·
g5. I. 1?. L e coco pe Guri ri, don t il est c1uesEiou dans cet
endroit et ailleui s, a été r:ommé Jlar .M. Nees vou
\
Esenheck _Allagop~era ;pumila, ct caractérise de la.ma-
1

niere suivante: Spadi:c sànplex,}f.,ores mascul:~tfre­


minei quincunci<ttin~ pos\'ti. Ma~i calix trip/'&uus,
corolla Lripetala, filamento quat1.1ordecim basi CO/l-
nata; ; antherm liber-m~ j/:ehzina ·; ~alix .
. . \ '
e; coroUa
'
maris, an_1pliores, stigma cuneifomie triftcfum, drupa
mo~o,sp.e;·n~a ( classis Linnéan~. ·m,oJ~reiia monadel·
i,hia; .família naturalis; cicadere, ) M. Martius, pro-
APPENDICE IV.
fcsseur de botanique , i~sérera dans sol:! ouvrage sm·
Jes palmiers, qui doit.bientôt paraitre, la description
de celui-ci faite par M. Nees von Esenbeck d'apri!s
r échantillon que j'ai apporté.
'
p. 1 o4. l. 7 L(:l cobra coral ou comes, dont je parle en cet en-
. droit '· est un élaRs, çt non, comme je !'avais d'abord
·supposé, le colu~er folvius de Linné ( Mer-rem. Ver-
suclt eines Systems tjerAmphibiett, p. 144i et le tom. X,
p. 103, eles Verhandlungen der kaiserl. Leop. Caro!.
Academien, dans leque! j'ai donné une figure de ce
.beau reptile•)
108. I. 3. ,et note. Suivant M. Temninck, l'hirundo collm'is
est un cypselus. (Manuel d' ohtithologie,'nouvelle édi-
tion, premie~e paJ·tie,' p. 3g. ) Je n'avais pas sépar ~
cet oiseau 4'ls hirondelles , p<!rce qu'il a trois doigts
en avant et t;n en arriere ; l'himndo ftelasgia présente
absolument la même forme. L'nirunclo collaris habite
. clans les rochers autour ele Rio de J-aneiro et ailleurs,
-. même dans des endroits entierement plats, pourvu
qu'il s trouve des rochers dans les environs; par
exemple pres des lacs de.Marica, de Sagoarema, etc.
Comme objet ·a-vec contraste cette grande hirontlelle;
je rençontrai p1·es c,le Rio de Janeiro une autre espece
plus petite; je pense qu'elle n'a pas été décrite, et je
vais en co~séquence en dire quelques mots : hiru~zdo
minuta: long,ueur, quatre pouces trois lignes; enver-
gure eles ailes 1 huit ·pouccs quatre ~ignes; bec noi"r ;
pieds brun -fon.cé ( doigt du milieu plus long de pres
de deux lignes que les autres; talon nu; toutes les par-
. . '
ties supérieures ·noires, bleu d'acier , chatoyantes;
.
qneue peu fourcliue et plumes rcctriccs non cha-
368 A'PPENDICE IV .
I
' toyantes; venti'e, gorge et poi~rine tou't blancs; plm:iles
rectrices de la qucue irlféricure bnmi ~tres no ires, scm-
vent chatoyantcs ou vcrdâti·es·.: l~ arbe antéi·ielll;e tles•
niles hoi'Clée d'un peu de blahc; les jeúnes ont du
'!Jlanc au front et au bas tlu ·dl!ls. (Cet oiseau, niche fn\-
qu etn;neht clans· lcs hât,iinen $-~le la vi'lle .....
p. _I Y 2. I. 12. /'Ferva mo'im dó Se1•iarn·. -6:anella áXillaris,jlo1·i-
f;us ax ill'm 1iúr.is ·n'utantiõzis, ·cleciin'dris. M. N ecs vou
Esonbeck , qui a~insi.Mfin ice~ arhretaromatique, en
doit donnei' une desâiptinn eompletc -dan.sles Mémoi'-
r·es de l'académie impériale Léopolfio C'ardline.
· 12q. I. 3. Deux Andromedes .fl~ctéscelttes : M. Schradêr a
<~onnó sm' tes pl•afi~es cjbel'ques dêtaH.s dâns l:' excellpnt
journal inlitulé GreuingiSclíe g'eiíehr:te Anzeigen,
no 72' p. 7<!ig. \'
I ' (
· 1:!6. I. llÍ;. Nigaud gris brwi. Cet !liseau'in e semhlCJ, malgré
~\lelques tlifferences, êÍJre Ie' petiifó•~ de C:::_yenn e de
p uflbn ;; ·~cstsurtoutp'aT Ià gross'eu•i· ét' l ~ l:õuleur qu'il
s'I éloigni:! ele céiui-ci. Búffon
.,
ne él.omie à sou oiscau
11u'un pied et deíni oú· d~-hul.t .potle• ae··lo'ngueur;
. .1 l
j;àntlis que celui quej'ai observe est lmi'g-tl ~ vingt-lmit .
;( p'~ uces; de plus, i! n?\)s't pas nÓil;âtre , et ~sa ccmlemt
. t .
gris hrun. ·La dHféreuc·e c etdimênsion:-vient peut-
\ '
'
~~st
'(:tré de CC '
qué Buffon n:?a ,llll::SÚrê·qi:i'un oiseau·em-
~laillé, otí s·~ peau•i I; d;ssem:O{ànbe de
1
c~ulet\~~· est
1~as mni ·pius assei considév'al>Ie pour, séparer ces cleux
~iseau~:Celiü que j ·~ài- vu vÍv·à t hâhl:te <\US les environs
' ,<.lu po1't ~ICJ Rio de J aneiro; i~ , ~ir o:rt le vdifi quiUer fu .
. -nier en ti·o'upes nombreuses' se'fornier ~m· deux lignes
c,lisposées cil an•g}e cmntirtd ·ceiréFa -es 1 ~fuês, ct dcs oies
~ailv::tges, puís rasant' la ilirface âe l'cau, voler avec
1\
APPENDICE lV.
ta !'apidité de la fleche vers le lieu ou il va passer Ta
·nuit.
p. 126. l. 14. Et un autre ois11au qui ressemble beaucoup à
notre cormoran. Ce cormoran est surement l'oiseau
· 1~présenté par Bufl'on dans les planches enluminées
974· Etant jeune son plumage re~semble beaucoup
·l l 0

à éelui du carbograculus ou cormoran nigaud d'Eu-


rope; M. Temninck les regarde même comme ne fai-
5ant qu'une seule espece; mais voici quelyyes pctites
différences qu'il est bon de noter. L'oiseau d'Europe
a l'iris gris bl'Un; cclui de l' oiseau du Brésil est à tous
Ies âges d'un beau JJleu; la longueur clu pr~micr est de
vingt-trois à vingt-quatre pouces: cclle du plus grand
in<lividu de l'autre que j'aie .mesu1·é cst de vingt-six:
pouces huit ligues. Lc plumage de celui-ci ue m'a pas
offert de variétés. Les différences que je viens de re-
Aever me font supposer que l'espece de l'Amérique mé-
t·idionale peut être séparée de l~ n6tre. '
13o. 1. 12. Le lacerta ameiva de Dandin. C'est le [acerta
litterata des nouveaux ouvrages d'histoire naturelle .
M. Kuhl a donné une clescription de cc lé21ard, p. 116
'de se5 Beytrage . zur Zoologie. 1Le léza1·d du ·Brésil
dont il est question ici et dans d'autres endroits ·de
mon voyage, m'a offert beaucoup de variations dans
sa couleur. Des individus jeunes avaíent la partie an-
térieure du dos mârquée quelquefois de _points ph1s
foncés ; chez les vieux , au contraíre, elle était d'un
ver.t clair sans aucune• tache; les ' côtés du cou soli.t
. marqués de deux longues raies brunes noires et paral-
leles; les côtés du corps son t vert I;>leu sur les bords
. du ventre, et omés de tjlche~:·perpe~dicülãires atT01l·
lH, ' - 24
\

APPENDICE IV.
die~, jaunes, entourées de nau•. Tel est le c:iracter€
constant de ce lézard que j'ai rencontré fi·équemment.
Les figures de Seba, pl. go. et 88, citées parM. Kuh1, si
~lles app;rtiennentà cet an~mal, sout inexactçs. Sloane
paraH avoir représent.é no.tre lézard .pl. .273. tig. 3.
• • ' I

p.' 134, I. 4.Ce genre de quadrupedes n'e.·âste pa:s, com7Jze


) r (" dans le N~ufleáu-Mende.
on lê f sait, l •

. L; OJ?Ínion suivant lllquellt; les antílopes simt des


animaux:étrangers au Nouv.eau-Monde a étécombattüe
dans ces der_niers temps par ,M- Leach et M. Blaín-
ville; toutefois naus ne I'abandonne1:o~s que lorscrue
l'on aura prouvt\ d'une ma~iere satisfaisante l'exis-
tencc eles véritables antílopes en Amérique . .
136. D~s aigrettes blanches. Deux esp\~ces d~hévon com-
plétement blanches habitent le Brésil, le granel ·et
.f
e petit. Azara nouime I e premier petitl héran blanc à
_ fantea~I ( Voyages tom. iV. p. 200 ), et-le secontl
prand héron blanc ( ibid. p., 201 )• .te preinier res-
~emble bcaucoup à la garzetta ou gal·se,t;te .d 'Europc,
-f!epepdant c'est un oiseaJl différent; ,Ie lsec·o nd est ,
l'arclea leuce du musée de :Be1~in. ,\ . ~ , •
l:bid. I. 19 . . Les orange ·s sauvages. dont il ·est question ici
pnt poussé par h~sard dans c~tte forêt ; ils. doivent.
{eur origine à Úne fazentla ~ui s~ treuvait a tre:oís
dans ce lieu ; on en v'o it encare le ruines. ·
, . ~ . X\ ·'
\57'· I. 8. Arbí·e haut de huit à Hix pieds ~ui pa1'ut être le
bonnetza . C' est 1e , z"stn·oonua
. pa lustrzs, ., . J'+::uctzcosa
' 'i')ue
,,
Sciuader, l. o.·p. 710. On ti-du;ve r,éunie à cette plante .
pne autre qui lui ressemble, et q~ti estle kzeseria stricta
I
fle M. N ees von Esenbeck. · V oici ses caracteres :
Çorolla peiztapetala, petctlis integÚ's. '"Calix qulizque-
\\
4-PPE'ND:ICE 'IV.
:parlitus bracteatus, antherce ereatce liberte, germen
~r·lloculare, septis sz'mpliCibus, loculis inonospermis.
(Polyandria pel,y.ginia de Linne. Eamilia mat-u.ra:lis i
guttiferarum.. )
'f· .r!b·· l. 1'1 ••\Une beBe espêce~.' e!',olvulus.,Schrader I!à non,u née

·evolvulus fJhylicoide5 ; j . c. p. 707 . r


lbid . lbid. Un.e,casse à íl:eur j~une, ,C'est la cassia unijlora.
Ibid. 12. Une asclepi'adl!a :nonvel•le. EehiMs, l'ariegata de
Schradcr. 1. c. p. 709.
Ibid. I. 13. Une .andromeda .à fleUl•s ·roüges. Ancb·onzeda ca-
. ·cztzea de Schra:cler, ~. -c. 7o.g.
1~S . l. J.5. Huitriers d~ ·B-I'ésil. J'a:i fréquemment obser.vé
sur les côtes du .BTésil cet oiseau précédemment in-
connu des naturalistes, et je l'ai désigné r>ar le n.om
de /lcema~opus br;asiliensis. 11 est plus p etjt que l'cs-
' M. T em-
pece d'Eumpe, mais il ale bec plus long.
ninck, à qui j'ai communiqué cet oiseau, I'a nommé
hamzatopus palliatus dans la nouvelle édition de SOil
Manuel d' ornitlwlogie.
~-5g. I. 29. Au lieu dejaçao il faut lire façao.
.16o. I. 3. Stac!l:)'tarphzta crassifoli.a. De Schrader, l. c. p. 709.
1 91. I. 2. Ciéome arborescent. Cleome arbonea àe Schrader,
I. c. P· 707·
1.92 . I. 20. Ardea nicticorax. Lebihoreau du Brésii effre tous
Ies caracteres de celui d'Euro.pe; Ies.pieds, le bec ,
l'ir.is ont la même couleur.. Les .dimensions pr:ésentcnt
seules une petite différencc, le hihorcau d'Europe a
vingt pouce.s ele longueur, celui du Brésil a Yingt-
.quatre pouces dix ligues. La différence des mesurcs ne
sulftt pas Pfn r faire deu)': e~peces ele ccs deux. 0 1-
APPENOICE IV.·
~eaux; surt,q ut le billorcau se" trouv_.1 nt anssí dan!f
l'Amérique s.ententriona)e.
·p. ,.236: I. r8. ;·l!e .croton. ;voisin des tridesmy&_est le croton grià-
phalo'ides de Schrader; I. c p ., 708.
"·. 241(. uánin'ga ,: espece .rémarquable de goue~ à. haute tige ;
" . .
M. Nees vonEsenpe€kl'a nommée caladium lliziferum.
.,_~ (: >.Oaulescens, erectum, foiiis sagittatí's~ 'lo bis acutis, spa-
·. dice ,spathqm_cucZfl/atam ovato-lanceolatam cequante,
f·.;
.
caule attenuato. ,
'

-. . C'est·l'aninga de Pison; Bras. p. I03. -Cette.p1ante


parait différer du 1caladium arborescens ~é Vantenat.
243, ,I. ·i 4-·Une nouvel1e espellC de sophora à fleurs jaunes ,
sophorá li~toralis, Schrader, I. c. p. 709.
" !!.55.' I. 7· Unéespecénouvelle depicfortlielle: jel'ai nommée
_,_ picus melanopterus. Ázara a décritcet ois!')au·soúsle·nom
..1 de clzarpentier noir et hlanc ('Voyages, f:__IV p. 11 ) ,

· màis }a description.Íncomplete' CSf SÍ\ C'ourte qu'il est


nécess':lire d'y ajouter'l)eaucoup·de choses pour qu'elle
soit intelligible. '· ~ · ·· Jl ·
1. 18. Cul'ica, dont l'e nom se-prononce 'koui•ifké, n' est pas,
de l'avis ·unanime des naturaliste.s, le psitta\ :us ochroce-
Lin~é '= ' c'est le cestiv~~.
phalus âe
. " psittacus
Conspectus psittac'orum) ;. mais il faut' observer à ce
( Kuhl,
.

- que 1es cl escnp


sujet ' "t'1ons d. e· ·.~.>ln:Q.~
~- '~ . sont trop \\vagues,
.
. ' ~ t ' 1\ \ .
et peuvent ·par conseque~1 s app 1qf er aux eu ~ oi- d~ •

seaux. Le psitt':lcus cestivu~, ( Levai! ant, pl.. 110 9~e .


val'Íe pas dans sa patrie, je.~•. 'ai pas non plus trot; vé
·I aU ffi~Ígnon antél-Í~Ul' de ses' ailes les plumeSl'OUges
que -l'en y·vqit chez Íe"psittacus ochroce) hàlits. li con-

'
vient clone desubstitucr, dans le ff~ssag~ de tf a relatioa
. . \
\

,,
'
APPENDICE
\
I'V.
ê oncé1;.Ôatit ce penoquet, le nom spécifique. d' cestivus
,;à eelui d'ochrocephalus. ,·
'P·.3g'I. 1: I·'Í-· La vipêre verte. ·Cophias i>iliheatus; ·espece fort
belle; Í:touvelle et non·encore déor~te. L'inclivitlu que je
jJOSsêde a ·vingt-deuil:' •poucés huit ligiles· de long, y
, , , I
compris' lf\ queue dont làloiigueur-est de trois pouces
trois ligues; ce qui fait un septieme à peu'prês de la
'' longueur de l'alii'm~I. Plaques a:bdominales ,. 210; pla-
ques ·eaudales ; 66 pair.es ·; forme' svelte; t~te cordifol'IDe
a::Vec <leux ~randes plaques ''br~nb:tres au~dessus _de
·' i'reil, couvertesd'ailieurs ; de uiême 'quele ·coqis, de
petites êcai1lcs 'étroites; Íülongé'és Jpointues , carinées·':
le long des plaques· al)domhialcs s' étcnd une ligue
d'écailles 'rhombo!dales e't plu;•_lirandes, qui sont pres-
que lisses, et n'offrent un petit C:fifoncement-qu'à leur
pai-tíc' sLrpérieure ; 'anus símple > couvert . d'une
plaque entierc, de~Í"CÍl'cul'ai;·ec; queue terminée par
_ une. pointe cornée; ·roúge :brun ·, ' longue d'unclignc.
Toutes l~s 'jJahies supérieui·es d'uri vert.ela ir .,. ble~âtre,
marquées de ·chacr,ue côté d'une 'ligue ja\.nie de paílle
;' r pâ:le, qui·est fermée pa•f la rangée des grande1s écailles
· d'abord dÚ ventt;C j Je long
'
d'u dos regnént d:e\i X rangée
~ '

de petites· taches alternat.i vement jaunes , roussâtres


sou\l'ent d1spbsées par·: paires , q.ui sont tpujoÚrs b or-
dées de noi;: depuis l'reil, qui est fendu pérpendicu-
•.t ll\irement; s'.é tend Ie long clu 'côté de la tête une raie
' jaune ., . ro,u's~éâtre, entou~ée et tachetée de npir : deux
l' '
handes semblahles ·sur . le derriére de la t,ête; bo1·çl
.. des .mâcheires iamis cl..e .taches-d' un j aune vercl.âtre vif,
-et dont-les contonrs s,~nt n0i!·s ; dessous de la tête et
go&ier'ju-u ne.cluir vif; dessons du cou jaunc .v.crt clair ;. ,
APPE:NDICE IV.
· ventre et côtés inférieurs ife Ja qu.eue lilanc jaunfttre ,.
un peu hleu verdâtre à la n~issanc~· tJ.~.s 1plaques vertí.-
tête et d·essus de la partie antérieure. du corp$
,,cales~

m,árqw~s de peiuts·noirs tres-fins et mar.b tés, sur le fondl


V!JJ't'; ,une ~aÍ(:' blepf!tre·pâle se pi'el~nge, surJa queue~
Ce serpj'!~Jt s,e nomme :;tu. J;lr~~il co4ra vende ou curu-
T.IJI. cucu-de; :Patripa. '" I ·· ,.. ,,,. c.. ··
'

I.,6 .. d.e1a;n0te. Mi9os, espccç: d~ ·singe ·P,PDid:é<;~te, je l'ai


nomll'\ée Gfibus. rpbustus; 'lvt. J(:uhJ !!ú ·ll donné une des-
g.riptiQn sup<liqctc. Ç~eytrage, zu.r.Zo<;Jlj:!gie -,-1n. 35. ) .
. ~ Ibid.. ] .. 9.· Çattos pintqdps-( felis tigrina)., ce chat fprme une·
espcce neuvell'e que j'ai nomméçfilz's .mqcl]qura; j'en·
ai dimné une desc1·iption. succ~ncte dans la ·traductiolh
en allemand; du ~egne animal. \ile J.Vl,, Cu v-ier par ·
M. Schintz ~
.,,, !9·r ~ · I3. L'oitiçp., Arr~da ~ décrit cet arbre so~ le nom de- ·
f.~eragin~ umbro.s issima. ( Voyage de Koste.~ , appen- ·
'fhce, , p.4.gg, , t'p~p.•.IL .p..-5o7.#·1 • 1 ,
3-8. f.- 6. Ji.boy~ ;.(boa constricto.v). L'buvrag~~ ~p ;Seba offrc·
,fl~sie~m ~gures d,u boa constm·c~w: !Jll~ ,e~·~ ttes-fecon­
.) naJssab]e
r , ases t'a.clies
,. -aiiongées,.arrondies et \festonnées-
~

, ~ r el)'tc.émité. 'l'<i>mf I ,,pl: {!6 ,\ fig. fj : ç,Le§ .fig,- 1 . de b


pl. 53 et 1 . de lil ' ~I. 62, paraiss.e nt en ·ótre•"d·es varié:..
tés: ) ~om. !!;~r
I I n · ·- ~" .
- , F - '1o -~. ( ~. anetes p1•\ 1 OG , ot)d
4 ~ o8 , '.e\:
~g, 3. ~ · · \ ) , r ,''
. . \ -
4-7. ~· 3. Pe~ite esp.ece de pénéleqe. 9utpa aCt avo ir beau~ .
roup· d"·m · " avec .l e parraqua.
C!.IJi!tde \ J-. e' soupçonne 'a pre-
'
j •~fent qÍi'e l'ar~cuang pe?-t aussi:1 ~tire ~dilfé~eU:t du pha-
·;•ianus sarrulus de ·M. de Humboldt; cepe'ndant je les-
1'cgarde comine ·Ídentiques, mais , je ctois qu'il doi fi
.ptre sép.a~é du parrakua on parakoua . NouSJIVOns tu.ê·
'
APPENDíCE ~V .
,1 U ij grand' nombre de ·ces oíseaux; nous n'avons jamaid
' t rouvé qu'ils variassent pour la couleur; ils avaient
-~eon.stammen.t• ~e ventre blanc; je pense donc que
M. ll'en;mínck se trompe lorsqul:il dít que ce péné-
" ·,.. l'ope à v'ent re·bianc ·es t un petit d{t panaqua.
p. :82. :i;'e garup.u et le méro, deux poissons de mer. Je n'ai
\ · pas iécrít ccs poís~ons, n'ayarit pas pÚ en déterminer
:.Je geme ni l'espece' parce' quej ~ n~ le~ ~i vus que
saÚs~ dessi chés et mutilés. L~ ga.rupu de Port o-Seguro
. est un grand pQisson vora.ée' 'Iong de cínq à six em-
. pa.ns; Í'a.vant
f
d~ corps large, ~v'~c une g~oss: tête et de
I • -

gros . yeux et un os maxíllaire;


~ , .~ on corps. se rétrécit vers.
1!-l . ~ue~e, et se tcrrpiq ~ par .~p.e ,P,ageoir~ aUo~,g[e et
.\ '
fourchue . Toutes Jes éca.if!es du co.rps sont d'un beau
.. rouge t enc).re, }>lancJ:!es ~ leur naissance, l).epuis 11! cou
. jq.squ'à
J' I.
la que,ue , s'étencl ,une lar~e bande jaun e
e
I •

·au-djlSSOUS ·.d l3 Iaque1le se t ttouven trois lo'rigues raies


.IJ 1 jal):t;tes Mlié.es.i Ia raie jaune 'd u ~ilieu >du elos est
.mar.quée d e taches ·jatmes irrégülieres, allongées; le
.•vimtre' ·e st blanc. J•e ·ri'a~ jamais vu l e m éro·; in ais c'est
f. ·vraisembl a'lilement le poisson qu e Marcgraf décrit sous
. ae n0m, p. •16g. '
• r , "11

: · lll0'8. 'i·.· g. he grand càrao ( numenfu's suaraunà) et non ca-

o'.Y' ..-, .; · •muiza~ com;ne ce nom' ~st écl-it par u~e falité d'impres.
J• ,. ·.• síon'. C'est le carau cFAiara . ( J7oyages tom. IV. p. 223.)
· :'" • J e I e re ganrerais .conl'túe 1' ardecÍ s.çolopacea de
'Linné ou !c courliri ou courlan de Buffon , si I'on n e
'dorlnàit pas à cel~i~'ci un on gle dentelé au doigt du
milieu 1 o,ngle qui manque à mon oiseau du Brésíl.
- M. Lichtertstcin !'a 1-ei:Gnnu avcc rais.lhi pótn· le gua-
APPENDICE IV.
t•auna -de , ~arcgraf ( numenius giga!l' dw mus~e d'l!'
Berlin~ ) · ·::ljff'7·~~f~~·. ,
p, 111. 1. 23 . Hirendelle de mer à ..!J-ecj:a:une(sternaflavirostris) ..
Elle parait être le stema cayenn,ensis qui se trouve non-
seulement à la Guiane, mais aussi sur les côt'es du Bré-
sil. Je I' ai ohservée au sud jusqu'à Espírito-Santo,.
peut être va-t-elle pl?-.s loin. Elle habite le long des-
côtes mari~imes et sur les·lacs; et même plus au nord
dans l'lntérieur cfes grandes forêts, su: les ba:ncs de
sable des rivieres sou avec'sa voix forte elle ~st le pre-
nrier oíseaú quí saiue l'arri~ée du jour. Les vieux oi-
seaux onf le hec et les píed·s jaune_ citron ; chez les-
jeunes, ces derníeres partles sont nofrâtrcs.
t1g.l. 7·. Ungamha (sarigue). 11 est C{}lestion·dr didelphis:
canc1'iílorus ou marsupialis. · '
l:ll.l J.. I. pécarí ( dicotyles labiatus' Cuvíer )- an. a mis eri
doute.si les deux especes de pécari décrifes·par .Azara
étaient réellement distinctes ;· M. Liehtenstein a aussi
éleyé cette questiori dans ses échiÍol·cisseipens des des-
, eriptions de Maragraf. Les deu>Ct anim ,x cités par
Azara, le tagnicati et le taytetu, existel'!t bien dis-
tinctement; je lei vois cités dans tous les ou:vrages H!-
latffs l• l'Am.érique. Au Paraguay i•ls,portentles noms·
que leur donne Azara; d'ans la pa1:tie du Brésil oriental
\
que j'ai parcourue, les P~riugais )es nomment porco
1

. de queixada branca, ou porco do mh to vercktdeiro, et


caytetu; les Botocoudys les\ désignent p·ar les dénomi-
nations de Kouréck et de Hd~ouêng. Marcgrafn'a f,ait
mentioo que d'une espece de ,taytetu on caytetti ,
sous le nom de taiaçu caais-oura. Néamnoins il est cer-
taín que ces deull; especes de pécaris sont 1·épandues

\\
APPENDiCE iV . .
dans ia plus grap.de par_tie de l'Amérique méridionale;
suivant le témc:>ignage ·du missionnaire Eckart, ils-vi-
veht sur les bords du Maragnon, ou la plus petite
'espece s~ nomme cahucuma, etc. La plupart des rela-
tions d_e I'Amérique méridionale parlent de deux es-
pêces de p~caris : la corografia hrasilica en nomme
trois; mais ce livi·e ne fait pas autorité en histoíre
, naturelle, et l'on peut .aisément dans ces animaux
1
_ fr~ndre des différe'nces d' âge pour des différences
, spécifiques1
p. ~36; I,. 6. La chasse naus occupait tous les jours dans les_
env{·:ms du quartel. Quoique l'ile Cachocirinha soit
petite, nous y avons trouvé beaucoup .d'oiscaux. Les
·huisso.ns tout pres des bâtimens étaient fréquentés par
des .troupes nombreuses de pigeons pomb.a de Spelho,
colomba de Geoffroi et de Temninck) ; cette espece
mange les ·graines qui, o11t été semées .. li en est
de même du j.u ruti ( aolumha, jamaicensis) , du caça-
roba ( co_lumba rufina) , du rolla ( colu77Jbf1: minu,ta );, et
d'autl•es espeecs.,.de ces jolis oiseaux qui s'approchent
m.oins des·Iieux habltés. Le péga ( oriolus cayennensis}
faisait entenelre sa voix d'ànsles bois. Les arbres,frui-
tiers étaient surtout fréque~téi' par• une . quantité
d'iapous ( cassz;cus cr:istatus ) et ele guaches ( cassicus
hremorrhou~· ); l'iapoui ( pei·sicus cassinus) se juchait , '
sur les branches mortes les plus hautes des arbres eles
forê.ts~ poli: sécher au solei! ses plumes mouillées par la
rosée de la nuit. Des troupes innombrables de colibris
voltigeaient autour des fleurs eles omnge~·s et des pa-
payers, -notamment les trochilus so, auritus, fim:!l--
sineus, ate1·, viridissimus, et surtout le saphfrinus, de
..
APPENDICE I\1..
m'ême ~JIC beaucoup d'autres. nans Ies parties les plus
i:ha.tHÍes'dllSfe~·éts, oh entendait lê cri aes pen:oquets, tels
que 'l es psittacus seperus, gz~iannensis, ~rftlirogaster ,
I
'sqúarAosus, nienstruus, dufl'esniarius; et la P'etite perru-
, cb'e "~rte et bl~ue ( ~sitt;;_cus p.dsserínu~ de Linné) venait
'e n volt\es nornbreuscs 'jusque dans· ]e viíisinage des
rnaisons. Les buissons et les touffes. éphiss~s d.e roseaux:
.qirí e!lvh'onna,ient ··ri'! e 1
étàient ; ha'liiÍ é's' ·p~i· lle grand
batara cl'.Azara ( P'oyages tom. III. p. ·4 19) ! je n'ai pas
retrouvé cet oiseau ailleurs. Il vit.caahd ;d~i.'l.s les bo-
. · cáge;•les :plus touffus 'e t Ie8 pl11s·· óhlbràgés; qtiel~h~fd~
il s'a"ance pour se pevcher sur ·l.!ne bra~.é11e et faire
·éntendr~ sa voix singulihe.
1'· 144, 1. 7· Le driba: arbriss~au qui ressen\ bie' à l'osiet . C'est
l~ S'eúastiana ripan"a de Schraeler, L •c. p. 7 P3.
iM:l. 1} 16.-.Arbrisse·au àbouqu ets de 'flems ll'lanclies quiex-
~lent une odeur el'rei'lle't extrêrn~mcnt su~e. Ocotea
a,nt;ustifol ia. Sohrader, I. c. p. +; 1".'
. l ~ ' \-
Iúiq. •1. 'I ; .-l':.J•ne auti-e1J'larlte tlteS·j'oilrc qu'i paditi àvbir ele l'afii-
, ' ' • • L I
JJ,ité a·véc ~ e s s·caibieuses : schultesz~ capitátq. Schrader,
l ,.c. p. 708. . \
164. •I. •u ';' OnJs'ap'efçoi~ aisément qo''au lieu ·de )'e fis une

'•
>pjonienacle sdu áut ," il faut !ire au saut. ·La corogrqfia
:r~:~~i~a d~cr:ta:nsi cen~ ch~1te . .~\Ri~ ~e~~orl~ , e~
ai· :r uc\)-upa:nt 'la cha1ne 'eles lllO!)ts :A.ymores, s ouvre uu
G h ·pfissagc ·ent~e 1iléux mon tagn~ ele h~üteur ?négale, ct
'élpnt celle du norcV·nommée onte de San Bruno_ est
~~~· I .
d' ' 1~ p'IiJs · elevé~; Pd!~till se précipi'te " Miis"'f:un~. abl~e
·q·ui a .p lus de 6ent pi~els'de 'profon'd eur. La v~peuff[uê ··
P\·oe}uit .~ ·ejaillisscment çl~ •l'ehu occasionne .un
h uQgc continu él; le fracas s'~nte~d<quelquefeis à qua-
APPENDICE IV :
.tue Jeg0a~ !le &ista*e.' La ·~lern,iet·e partie de cette dcs- ·
criptluJl' m~ senib)e ün .peu' exãgérée.
.p. I 70 . .): I 1fLPetreÇl uolubili's . .Schrader' a·rio"mJn é·cette ·pla-n te
'1 ipetreq. denticulaia:, J1 '!C ! 'J>· 712. · i . · · · · \

·•204. I.' i6,.,Le·ha!lb.uzardl(folno halicetus) du Brésilsemble étre


uen rtout s,erriblabl'e à 'cel~i 'd 'Europe.' Unefeinclle, qu'un
. •:de.'me~ c;1iasseurúua sur les J5ords d-u Rio ele Belmontc,
,.J' ,.,., p.vait ;i.ngt-déux p~uces deux ligues de Jon~.'
1
' ·33'2!",'1. dernieue. ' L'é cbc'o . de Pú;çab~. ' Nc " pouvant donner
• · ! · f éomm~ '•eti aYaut été tém~in ac~ 'd étails' sú~ r origine
'' ~·· ' des lóngt1es fi'l5res de· eet arbre , je vais au moins rap-
porter·ce ·qt;e M:. •Fwyreiss. Ú:t'cn a dit d'apr'es le t·écit
des lndiens. Ils préteúdent que ci's filalncn·s !Ja]ssei:l t
' ;
dans Ie·voisinage dt;~ pétiolcs ;eles feufllc~ ct du ,eypathp
. de la fructificàtiol;)-. ; à chaqtJC pousse i-ls s'allongent, et
quelquefois finissent par s'étendrc de lá ci}ne;dc l'arbre
jusqu'lt tene; les lndiqn-s s'en aident q~tel<=f~tfois .l?our
y grimper. l
afin d'~ller cneilüt·le fruit. Les corclcs que
., ~ . l "X 1
.
I'onfabriq\te avcc ces fila!'nens sont_l:res-:durables; tou s..
• .I } ) ~ • ..;

les batimens qui ;naviguent)e Iong de cette partie de


la côte en font usage;
. . '
cctte fabricatiou cst tres-~wo-
(

fitable. Un escl hvi: ·qÜi s'occupe de ·recueilli{· ccs' Ela-


meus ~ag~e par i~?r ' douze à' quatorze vint~'ns (I fr •.
2S c: à Ifr. 3o c.)' '
33.8. ). 3. Posoqueria hayt de six à huit pieds·. Po~oquerz"a re-
.v oluta de s'chrad~r. ( Goe'ttingische gelehrt en Anzez'tJ·en, .
.. ,., :No 7 ~ du r;' mai r82,r , p. r4: )
3.4o. l. I I.
I
Calceolaria. t'Fhxsidfuin
l! :g
''' ! ''''
prncwnúens '
de Schracler?.
·I: c. 'P'· 7I4. 1

1bid. l.~r''i.Guphea.Cz;pheafructiculosa de Schmd.;l.c. p.71 S,


375. I. 2r..Uneplantéremarqnableque jcn'a·v·ais pasencore

',
3So . AP:PENDÍCE'. IV.
rencontrée et que je n'ai pas non 'plus 1·evue. ivema-
tanthus corticola. Schrader, l. c. p. 718:
L e piau , le piabanlza, le tra"ira, Ie piau est Ie salmo·
fi·idérici qui se trouve aussi à Surinam ; le p.i abanha
se reconnait à une tac·h e rouge carmin derri~re la na-
geoire pectorale , et le. trai:ra est probablement -le
tarcira do Rio de 1\farcgraf ( p. !57 ). Un accident
désagréable par leque! une partie de mes papiers fut
mouillée, m'a fait perdre beaucoup de descriptions
de poissons de·s l"ivieres du Brésil. Aiusi je ne.puis pas
déterminer ni décrire un grand nombre de ceux
dont je parle. Toutefois j' espere être en état à l'avenir
T. III. de remplir cette lacune.
p. 12. l. 3. P!'ànte lt fiem d'un roüge foncé , vo\sine-
des Bignonia. Neowedia speciosa. Schrad~r , l. c .
j p. 706.
32. I. 6. Un grand nombre de fougeres interessantes. J'ai
rapporté de mon voyage plu; de cent especes de fou-
geres ; M. Schrader cn a niconnu à pdu rê_s la moitié
pour entierem;nt nouvelles.
38. f· 22. Un pteris-inconnu. M. Schrader I'a D(!mmé pteris
1
paradoxa. Cette plante se distingue prinaipalement
parce que les feuilles stériles sont tantôt partagées eu
.
cmq l ob es In
. égaux , tantôt sag1~tees
1 '
en 1ano,
\\ e ; Ies
feuilles ·qui portent la fr~çiificati~n sónt au contraíre
pinnatifidcs à découpure \Iinéair.
(
e} ; les ·inférieures
\
.bifidcs ou trifidcs , les autres cntieres,
I
53. l. tg . Une jolic plante basse à fleurs tubulées et d'une
couleur d'orgnge tl'l':s - vive, synandra amoona ·, de
Schra(ler, . l. c. p. 715.

,' \
I
I
APPENDICE IV. 381
p. S7 . 1. ~I. Au li'eu de ta:zagra cuyemzemis, il faut !ire tll-
. na::,ara flcwa.
']6. I. derniere: Fleurs orange foncé, assez semblables à ce!les
du maronnier d'Inde. Cassia excelsa de Schrader,
l.c.p.717·
?8. I. 16•.Arbre d~ la famille des mauves à fleursécarlates .
Schouwia semiserrata de Schracler, I. c. p. ' 717.
Ibid. 1. 18. Plantes armenteuse de Ia diadelphie à fleurs

.
carmin clair. Clitoriacoccinea
. . de·Schrader, I. c. p . 717.
Bo. note. Psittacus cactorum. M. Kuhl a, par mégarde; dans
son Conspl!ctus. psittacorum, p .. 82, placé cet oiseau
-parmi les perroquets à queue courte , tandis qu'il a
une longue queue cunéiforme.
91. I. 4· Le criangu, nouvclle especc d'cn goulevent. C'est
le nacunda d'Azara. ~Voyages, t. q., p. 119.)
94· I. 1. Belles casses dont les touffes de fleurs orangées ré-
pandaient l'odeur la plus suave. Bactrylobium fin·u-
gineum. ~chrader , I. c. p. ']13. .
Ibid. I. 4· Plante grimpante à fleurs d'un rouge foncé ip'om::Ca
sidrefolia. Scht·ader, I. ·c. p. 719·
117 . l. derniere. Oiseau mo'uclte comu. Pendant que cette
dernierepartie d.e ma relation était sons presse, M;Tem-
ninck. a fait dessiner ce colibri dans son Nouv eau
Recuezl de planches coloriées d'oiseaux, et I' a nommé
trochilus bilophus. C'estmoi qui !ui ai donné un indí-
vidu de cette beiJe cspêce, qúe j'ai le-premiertrouvé
dans lcs Campos geraes. \
1 ~0. I. 1. Clwuette d~ Camp~. Moliua, dans sa description,
ne parle pas eles taches sombrcs qne j'ai rcmarquées
lllll Yentre des oiscaux çle cettc espcce, que j'ai
APPENDICE IV.
·trouvés ãu B1isi.J. ·Peut.:être a-t•il _oub!ié, tlans sa eles~
cription tres-succincte, ele faire mention tle ce caractere.
Il est certain que la chouette que j'ai! trouvé•e est J'u-
rucurea d'Azara.

p. 1.22 . I. 2. Un autre ~imosa avec des touffes d'étamin~s écar-


lates. M. Nees von Esenbeck. a nommé ~étte plhnte
acácia asplenioides : iizermis, foli'is bipin~zatis ~ partia-
lzous bi-trijugis, r2, t'S jugis, sessilz'bus, petiolo communi
hirsuto, ·spicis globosis, p edunculatis , terminabilus ,
cdrymbosis.
1 SS. 1. 2S. Nouvelle esp ece de tagetes qui exhale une odeur
- · ' agréablc. Tagetes fflandu!je1'a. Schrank, pl,a_nt. rar.
hort.i monach., 11 ° 54. C'cst péu t-êtrc lcmÇme que le
tagetes minuta , clu ·moins Ia fig~rc. que 'D illenius a
donnéc de cette plante , ef q,ue Linné a cltée, lui
convicni asscz . Schtacler', I. c. p.
1
714·. . .
r8 ·7· ~ · r6. Casses 11 flc'urs d\m jaunc vif. Cassia speciosa.
Schrader, L t:. p-. 71~!.

t ·r r. NG'u vclle espcce d;ipomcea à /gran,cles flcurs cl' un


l'Ouge de feu. Convolvulus igne,.s. Schrader,, I. c. p. 716.
rgg . f··r8 . .U.n arbuste de·cruatií'é' à cinq pi eds de haut ave c de
g1;a ndcs fleu-rs-t"iib, <1é'es jauncs, et en dedans tachetees
d e·violet. M. 'Nees won Esenbétk la décrit airlsi: /lolo-
l·'êgmia ~iscida. Cdlyx dtbulosus }t-,tri'lobus, zJtere ziz-
. ' ~ ~ .
fb·o fissus. C orolla in:funaibulijàrmz'~ , làn"bo quz'nque-

~ . . . . ' ~ . \\ '
.(ido, subcequalz. Iiectarzum-Bynooas.zcunz , magnum ,
discifi:mne. Rzulim,entumjilci)nenti quinti. Capsula ói-
locularis. ( Cla.ssis dit;lynamict' angiospermia :Lzimcei:
jàmilia naturalis hi[Jnoniacearum. Locus prope spa-
tlwdeam ~ t crescentiam. )
\\
AP.PEND-ICE lV. 383
p. 2ó 2.. I.~· Un uzolh. C',.c st ('azo llu niagellanie<tde Villden,ow ~
Schradcr ; I. ç. p. 71S.
202. 11. Potamogeton tenuifolius .deHumboldt !!tllonpla~;~,d.

Schracler a nommé cette plante. (rajas tene1•a, L c.


P· 7~'?· I I •. 1

lbid. 1. t3.Nouvell_e cspece ele caulinia.Pcrsoon _I ui avait.clonné


le nom spécifique ele fluvialis, ·M. Nces vou Esen-
beck I' a nommée caulinia tenel(a : foliis oppositis linéa-
l;ibus, arsutf' serratis , jlexilibus , caule trli:hotonzo .
::w5. I. 12 . L'acahé d'Azara ( cmvus cyanopogon,) M. Tem-
ninck, dans son bel ouv1:agc intitule : Now,eau Re-
cuei! de planches coloriees tl' oiseaux, ouvrage ,que tous
lcs amateurs de l'ornithologic ont accueilli avec c;u-
pressement, a clonné, pl. 58, une figure de l'acahé
d'apres laquelle ou ne peut passe faire une idée cxacte
de cct oiseau·: cn e(fct ses parties supérieures ne sont
pas absolument hlcues comme la fignre les présente ,
clles sont noirt.trcs; la queue surtout est noir~ ,.le haut
{lu cou ct la qucuc sont bleuâtre blanc pále , pas-
sant sou.vent lau violet. Au contraíre h belle couleur
bleue qui orne cette cinquante-huitiême planche ap-
partient entierement au pian1piam bleu à r1ueue blan-
che, dont j'ai fait mention t. 3, p. 1 t6 de ma Relation.
Il cst possible qu'en enluminaut cette plauche on se
soit Jaisse iuduire en crreur par la dcscription d'A-
zara; car jc dois observei: que ce naturaliste, d'ailleurs
si scrupulcux, indique peu exactement ou du moins
trop sommairement lcs _,c ouieurs; il appelle souve1~t
la coHleur plombée ou cenclre blcu de ciel, ou cnfin
noirc a-vec un teiute noiráhe à peihc perceptihÍe ,
bleu célestc ou bleu.
i

384 APPENDICE 'IV•


p. :106. I. 7.Aristolocbe à tres-§ande fleur de forme alngulilii·ê.
Aristoloclda marsupiiflora. Scluader, I. c. p:, 719.
207. J. 22. Diverses espêces -de boux. Celastrus ilicifàlia.

Sclu:ader, L c. p. 7.19 et 720. Celastrus quadra1ígulatà.


l. c. p. 716,

FIN..

.
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\\
\,

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